N° 1370

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 7 mai 2025.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES,
DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE
DE LA RÉPUBLIQUE, SUR LA PROPOSITION DE LOI,


visant à créer une croix de la valeur des sapeurs-pompiers volontaires et professionnels (n° 255)

PAR M. StÉphane Viry

Député

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SOMMAIRE

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Pages

Introduction........................................................... 5

COMMENTAIRE DES ARTICLES

Article 1er Création d’une croix de la valeur pour les sapeurspompiers professionnels et volontaires

Article 2 Compensation des charges pour l’État

COMPTE RENDU DES DÉBATS

PERSONNES ENTENDUES

 


Mesdames, Messieurs

 

Les sapeurs-pompiers sont des figures familières dans nos territoires, urbains comme ruraux. Ils font preuve d’un engagement sans faille et d’une disponibilité totale. Ils accomplissent chaque jour des actes de bravoure. Leurs missions sont de plus en plus diverses, comme en témoignent évidemment leur engagement contre les feux de forêt, le secours à la population en cas d’inondation et plus généralement en cas de catastrophe naturelle mais aussi leur action quotidienne pour porter assistance et prodiguer des soins d’urgence aux personnes victimes d’accidents, etc.

Le nombre de sapeurs-pompiers professionnels et volontaires est stable depuis plusieurs années en France, où l’on compte environ 42 000 à 43 000 sapeurs-pompiers professionnels et 198 000 sapeurs-pompiers volontaires. Néanmoins, il est important de maintenir l’attractivité des fonctions pour les sapeurs-pompiers professionnels et de l’engagement pour les sapeurs‑pompiers volontaires. Il est tout aussi capital de faire naître des vocations afin de préparer l’avenir et de renforcer les moyens de la sécurité civile, notamment pour faire face à l’augmentation des catastrophes naturelles.

Des efforts ont déjà été consentis, au cours des dernières années, afin de renforcer l’attractivité du métier et de l’engagement bénévole. D’autres mesures annoncées devraient bientôt entrer en vigueur. Les décorations officielles constituent l’un des moyens de témoigner de la reconnaissance de la nation envers les sapeurs‑pompiers tant professionnels que volontaires. Il n’existe actuellement que deux décorations spécifiquement décernées aux sapeurs‑pompiers : la médaille d’ancienneté qui récompense l’engagement dans les fonctions à partir de dix années et la médaille d’honneur pour services exceptionnels qui récompense ceux qui se sont particulièrement distingués dans l’exercice de leurs fonctions. Les sapeurs‑pompiers et la fédération nationale qui les représente ont fait le constat que ces deux décorations, et notamment la médaille d’honneur pour services exceptionnels, ne permettaient pas de reconnaître suffisamment le courage dont font preuve nombre de sapeurs‑pompiers au quotidien sur le terrain. Ce constat a été relayé auprès des parlementaires.

La présente proposition de loi en est la traduction. Elle vise à créer une croix de la valeur des sapeurs‑pompiers volontaires et professionnels destinée à récompenser la bravoure et l’engagement exceptionnels de ces derniers lorsqu’ils interviennent. Cette croix, à l’instar de la croix de la valeur militaire récompenserait les actes de courage de nos sapeurs‑pompiers qui portent assistance à la population tous les jours sans mettre nécessairement leur vie en danger. Elle serait décernée sans condition d’ancienneté. Elle témoignerait de la reconnaissance pleine et entière de la nation et de la prise de conscience du rôle essentiel des sapeurs‑pompiers et des risques que ceux-ci prennent pour la protection et le bénéfice de tous.


COMMENTAIRE DES ARTICLES

Adopté par la Commission avec modifications

 

  1.   Le droit existant
    1.   Les différentes médailles récompensant l’engagement des sapeurs‑pompiers professionnels et volontaires

Les sapeurs-pompiers professionnels actuellement en emploi sont des fonctionnaires territoriaux, recrutés sur concours, puis affectés dans un service d’incendie et de secours en fonction des besoins des services. Ils sont assistés par les sapeurs-pompiers volontaires chargés par la loi de missions de sécurité civile de toute nature. Les sapeurs-pompiers volontaires effectuent les mêmes missions que les sapeurs-pompiers professionnels.

D’après les chiffres communiqués en septembre 2024 par la Fédération nationale des sapeurs-pompiers pour le Beauvau de la sécurité civile, la France comptait à cette date 43 000 sapeurs-pompiers professionnels (SPP) et 198 800 sapeurs-pompiers volontaires (SPV). Ces chiffres sont relativement stables depuis quelques années. En effet, la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion de crise (DGSCGC) indiquait, dans le cadre de la mission d’information parlementaire sur les capacités d’anticipation et d’adaptation de notre modèle de protection et de sécurité civiles que, en 2022, la France comptait 42 967 sapeurs-pompiers professionnels et 198 790 sapeurs-pompiers volontaires ([1]). Les effectifs étaient en 2020 de 41 796 SPP et 197 101 SPV.

À ces effectifs, s’ajoutent 11 500 sapeurs-pompiers composant la brigade des sapeurs‑pompiers de Paris (BSPP), placée sous l’autorité du préfet de police, et le bataillon des marins-pompiers de Marseille (BMPM). Ces derniers sont demeurés des militaires dépendant du ministère des armées.

La loi n° 2021‑1520 du 25 novembre 2021 visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels, dite loi « Matras », a renforcé le statut des sapeurs‑pompiers volontaires et l’attractivité de cette fonction. Elle a permis une meilleure reconnaissance des droits des sapeurs-pompiers volontaires et professionnels, en renforçant leur droit à la protection sociale (bénéfice de la prestation de fidélisation et de reconnaissance notamment), et a instauré un dispositif d’indemnisation pour les victimes d’accidents ou de maladies liées à leur service.

L’engagement des sapeurs-pompiers professionnels et volontaires qui sont désormais dans leur très grande majorité des sapeurs-pompiers civils est récompensé par différentes décorations. Les premières décorations réservées spécifiquement aux sapeurs‑pompiers tant professionnels que volontaires ont été créées il y a plus d’un siècle. La loi du 16 février 1900 crée la médaille d’Argent, accompagnée d’un diplôme, attribuée aux sapeurs‑pompiers après trente années de services ou en raison d’un acte exceptionnel de courage.

La médaille d’honneur pour services exceptionnels (MHSE), dite également médaille avec rosette pour services exceptionnels, a été instituée par le décret du 14 mars 1922. Elle était alors matérialisée par l’ajout d’une rosette sur le ruban de la médaille d’Argent. Elle est décernée pour récompenser les sapeurs‑pompiers qui se sont particulièrement distingués dans l’exercice de leurs fonctions, indépendamment de leur ancienneté.

La médaille d’Argent, devenue médaille d’ancienneté et la médaille d’honneur pour services exceptionnels, ou médaille avec rosette, qui récompensent d’une part l’engagement sur le long terme des sapeurs‑pompiers et d’autre part un investissement remarquable des sapeurs‑pompiers dans leur fonction ont été regroupés dans les textes législatifs et réglementaires sous la dénomination de médaille d’honneur.

La médaille d’ancienneté a été modifiée avec la création de plusieurs échelons en fonction de l’ancienneté par la loi du 12 décembre 1934 établissant de nouvelles règles pour l’attribution de la médaille d’honneur spéciale des sapeurs-pompiers communaux et créant de nouveaux échelons de cette médaille. Elle est remise par le préfet de département sur proposition des services d’incendie et de secours.

La MHSE a été modifiée à plusieurs reprises également. Un arrêté du 4 mars 1981 la distingue de la médaille d’ancienneté en créant un insigne et un ruban spécifique. Depuis 2017, elle est décernée, sur proposition de l’autorité hiérarchique, par le ministre de l’intérieur.

Les dispositions concernant les caractéristiques de la médaille d’honneur ont été regroupées au sein du décret n° 90‑850 du 25 septembre 1990 portant dispositions communes à l’ensemble des sapeurs‑pompiers professionnels (les décorations pouvant aussi être remises aux sapeurs‑pompiers non professionnels).

Le décret n° 20171155 du 10 juillet 2017 relatif à la médaille d’honneur des sapeurspompiers a modifié les échelons de la médaille d’ancienneté. Celle-ci comprend désormais quatre échelons récompensant les sapeurs-pompiers professionnels et les sapeurs-pompiers volontaires qui ont constamment fait preuve de dévouement dans l’exercice de leurs fonctions ou qui s’y sont particulièrement distingués.

Sont pris en compte pour l’attribution de la médaille d’ancienneté des sapeurs-pompiers :

1° Les services accomplis en qualité de sapeur-pompier professionnel, sapeur-pompier volontaire, sapeur-pompier de Paris, marin-pompier de Marseille et militaire des formations militaires de la sécurité civile ;

2° Les services accomplis au titre du service national actif ou du service civique ;

3° Les services militaires accomplis sous les drapeaux en période de guerre.

La médaille d’honneur pour services exceptionnels est accordée, quelle que soit l’ancienneté et à titre exceptionnel, à tout sapeur-pompier professionnel ou sapeur-pompier volontaire qui s’est particulièrement distingué dans l’exercice de ses fonctions. Le décret n° 2017‑1155 du 10 juillet 2017 précité a également modifié les échelons de la MHSE.

Les diffÉrents Échelons de la mÉdaille d’anciennetÉ et de la mÉdaille d’honneur pour services exceptionnels suite À l’entrÉe en vigueur du dÉcret n° 2017‑1155 du 10 juillet 2017

Médaille d’ancienneté

MSHE (Médaille avec rosette pour services exceptionnels)

La  médaille de Bronze pour dix ans de services

La médaille d’Argent avec rosette

La médaille d’Argent, décernée après vingt années de services

La médaille de Vermeil, qui peut être décerné aux titulaires de l’échelon Argent depuis cinq ans au moins

La médaille d’Or, décernée après trente années de services

La médaille d’Or, qui peut être décernée aux titulaires de la médaille de Vermeil avec rosette depuis cinq ans au moins.

La médaille d’Or peut être décernée sans condition d’ancienneté aux personnels tués dans l’exercice de leurs fonctions.

La médaille Grand’Or, décernée après quarante années de services

 

La MHSE et la médaille d’ancienneté sont situées aux 30ème et 31ème rangs dans le tableau des ordres et décorations de la Grande Chancellerie.

La direction des sapeurs-pompiers (DSP), au sein de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion de crise (DGSCGC), a indiqué à votre rapporteur que 800 à 1 000 médailles d’honneur pour services exceptionnels étaient remises, par promotion, SPV et SPP confondus. Chaque année comptant deux promotions, c’est donc 1 600 à 2 000 médailles qui sont remises par an. Le MSHE peut récompenser les SP pour leur engagement particulièrement important sur le terrain comme pour le temps qu’ils consacrent à la gestion des services locaux d’incendie et de secours et à la direction des opérations de secours. C’est la raison pour laquelle les sapeurs‑pompiers travaillant dans l’administration de ces établissements peuvent être récompensés pour leurs services. 

Chaque SDIS fait remonter à la Chancellerie de la DGSCGC les dossiers des personnes proposées pour recevoir la médaille avec rosette. La proposition est désormais faite par le directeur départemental, autorité hiérarchique du sapeur‑pompier proposé, accompagné d’un avis du préfet de département. Il n’y a pas de contingentement national et la très grande majorité des dossiers est acceptée. S’il y a insuffisamment de sapeurs‑pompiers décorés parmi les sapeurs‑pompiers professionnels du rang comme a pu le regretter votre rapporteur et comme cela a été confirmé par la DSP ([2]), celle-ci souligne que ce sont les directeurs des services d’incendie et de secours qui sont en charge de proposer les dossiers à la Chancellerie.

La Fédération nationale des sapeurs‑pompiers décerne également une médaille fédérale (appelée médaille de la reconnaissance fédérale) récompensant l’engagement des SPP et SPV, notamment dans la vie associative de la Fédération. Il s’agit d’une décoration associative, qui ne s’inscrit pas dans le tableau des ordres nationaux et décoration de la Grande Chancellerie.

  1.   Les décorations non spécifiques aux sapeurs-pompiers

Les sapeurs-pompiers peuvent recevoir d’autres décorations officielles qui ne sont pas spécifiques à leur profession. Ils peuvent se voir décerner la légion d’honneur et l’une des distinctions de l’ordre national du mérite.

Deux autres décorations en particulier peuvent concerner les sapeurs‑pompiers tant professionnels que volontaires :

La médaille de la sécurité intérieure est décernée et retirée par le ministre de l’intérieur.

Il existe deux promotions annuelles, (aux 1er janvier et 14 juillet) et trois échelons (bronze, argent et or). Des nominations exceptionnelles en cours d’année sont possibles. Au-delà des deux promotions annuelles, le ministre de l’intérieur se réserve la possibilité de créer des agrafes spécifiques dans le cadre d’événements exceptionnels afin de récompenser des sapeurs-pompiers intervenus sur différents théâtres d’opérations (intervention en cas de catastrophes naturelles, de feux de forêts importants, etc.).

Le secrétariat général du ministère de l’intérieur a indiqué à votre rapporteur que, en 2024, deux promotions ont été réunies en une qui a été décorée en octobre de cette même année (avec un contingent total de 12 000 médailles). Sur l’ensemble des personnes décorées, 1 100 à 1 200 étaient des sapeurs-pompiers civils (soit environ 9 à 10 %) ([3]).

Au niveau de la DGSCGC, chaque promotion permet de décerner 245 médailles aux personnels dépendant de la direction générale (sur l’ensemble du contingent de MSI). D’après les informations communiquées à votre rapporteur, sur les deux promotions annuelles, 80 % des médailles sont décernées à des sapeurs‑pompiers (agrafe « sapeur‑pompier ») et 20 % à des personnels autres œuvrant pour la sécurité civile. Entre une et cinq médailles par promotion sont décernées à des directeurs des SDIS qui font partie des personnels de la DGSCGC.

En ce qui concerne les sapeurs‑pompiers, la médaille d’honneur pour acte de courage et de dévouement peut également être attribuée collectivement aux unités d’intervention et de secours avec, pour les personnels en service au moment des faits récompensés, le droit de porter une fourragère tricolore.

  1.   Les modifications proposées

L’article 1er de la proposition propose d’introduire une nouvelle décoration appelée « croix de la valeur des sapeurs-pompiers » destinée à récompenser la bravoure et l’engagement opérationnel exceptionnel des sapeurs‑pompiers en intervention. Cette croix pourrait être remise tant aux sapeurs‑pompiers professionnels que volontaires, indépendamment de leur ancienneté, afin de récompenser leur engagement en temps et les actes de courage qu’ils accomplissent sur le terrain.

Elle permettrait d’améliorer la reconnaissance de l’action des sapeurs‑pompiers, en particulier des SPV, qui sans toujours exercer des responsabilités au sein des services d’incendie et de secours constituent un élément essentiel du dispositif de sécurité civile. Certaines médailles existantes, notamment la médaille d’honneur pour acte de courage et de dévouement impliquent une mise en danger de sa propre vie pour sauver d’autres personnes.

La croix de la valeur récompenserait les sapeurs‑pompiers pour leur engagement et les actions accomplies sur le terrain sans nécessairement qu’ils aient mis en danger leur vie. Elle serait spécifique aux sapeurs‑pompiers. Elle constituerait un pendant à la croix de la valeur militaire et la croix du combattant et autres décorations remises aux militaires. 

L’article 1er renvoie à un acte réglementaire pris par le ministre de l’intérieur le soin de déterminer plus précisément les critères d’attribution de la décoration.

Tant la Fédération nationale des sapeurs‑pompiers que l’Association nationale des directeurs et directeurs-adjoints de services d’incendie et de secours ont apporté leur soutien à cette initiative, soulignant l’importance de reconnaître officiellement l’engagement en temps, physique et en terme de responsabilités des sapeurs-pompiers professionnels et volontaires. La reconnaissance de la Nation est particulièrement importante pour les sapeurs‑pompiers volontaires qui ont de plus en plus d’obligations (notamment en terme de formations) et peuvent être sollicités à tout instant alors même qu’ils s’engagent volontairement.

L’acceptation des termes utilisés pour la médaille d’honneur pour services exceptionnels décernée aux sapeurs-pompiers qui se sont « particulièrement distingués dans l’exercice de leurs fonctions » ne permet pas suffisamment de récompenser les SPP ou SPV pour des actes courageux accomplis sur le terrain, en opération ou plus généralement pour le temps qu’ils ont consacré à des missions difficiles, temps pris souvent sur leur temps personnel lorsqu’il s’agit de sapeurs‑pompiers volontaires et donc parfois sur leur temps de congés, selon les représentants de la Fédération nationale et de l’Association nationale auditionnés. C’est également l’avis de votre rapporteur.

De plus, les sapeurs‑pompiers volontaires exercent cette activité en moyenne onze ans et neuf mois ([4]), soit une durée supérieure à dix ans mais qui est parfois trop juste pour qu’ils fassent partie des promotions décorées par la première médaille d’ancienneté. Décerner la croix de la valeur aux sapeurs‑pompiers volontaires qui s’engagent pendant moins dix ans ou environ dix ans permettrait de reconnaître et récompenser les actes de courage excédant le service normal.

La médaille de la sécurité intérieure pourrait davantage remplir cette fonction, c’est-à-dire reconnaître l’investissement des SPP ou SPV sur le terrain et leur courage, mais cette décoration est contingentée. Dans les faits, les sapeurs-pompiers ne représentent pas le contingent le plus décoré.

La création d’une telle décoration constituerait un élément de plus pour améliorer le management dans les services d’incendie et de secours, élément dont pourraient se servir les directeurs départementaux pour récompenser les sapeurs‑pompiers et les inciter à maintenir leur engagement et leur disponibilité.

  1.   La position de la Commission

La commission a adopté deux amendements à l’article 1er.

L’amendement CL7 de M. Antoine Villedieu (Rassemblement national), adopté avec l’avis favorable de votre rapporteur, introduit la possibilité que la croix de la valeur puisse être décernée à titre posthume aux sapeurs‑pompiers volontaires et professionnels. Cet ajout permet de garantir une reconnaissance de la nation aux sapeurs‑pompiers défunts et à leurs familles.

L’amendement CL8 de votre rapporteur est un amendement rédactionnel qui modifie le second alinéa.

 

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Adopté par la Commission sans modification

 

L’article 2 de la présente proposition de loi tire les conséquences des dispositions de l’article 40 de la Constitution.

Il permet la compensation des dépenses supplémentaires induites par la proposition de loi par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs.

 

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COMPTE RENDU DES DÉBATS

Lors de sa réunion du mercredi 7 mai 2025, la Commission examine, selon la procédure de législation en commission, la proposition de loi visant à créer une croix de la valeur des sapeurs-pompiers volontaires et professionnels (n° 255) (M. Stéphane Viry, rapporteur).

Lien vidéo : https://assnat.fr/RtKPSy

M. Stéphane Viry, rapporteur. Cette proposition de loi, à la valeur symbolique mais civique, est née d’un constat simple, partagé avec les sapeurs-pompiers des Vosges et la fédération nationale qui les représente : malgré leur engagement quotidien au service de nos concitoyens, malgré les risques qu’ils encourent et le dévouement dont ils font preuve, les sapeurs-pompiers ne bénéficient toujours pas d’une distinction professionnelle spécifique valorisant pleinement leur bravoure et leur abnégation. C’est à cette carence que le texte entend remédier.

La France compte près de 250 000 sapeurs-pompiers, dont environ 43 000 professionnels et 198 000 volontaires. Ces femmes et ces hommes constituent l’un des piliers de notre modèle de sécurité civile, reconnu à l’échelle européenne pour son efficience et sa résilience. Ils sont la première ligne de défense en temps de paix, dans notre quotidien comme en cas de crise. Chaque jour, ils répondent présent, avec courage et détermination, pour protéger nos concitoyens et sauvegarder nos biens.

Or, contrairement à d’autres corps civils et militaires, ces serviteurs de la République ne voient leur bravoure, leurs sacrifices et leur dévouement exemplaire valorisés par aucun ordre national. Cette situation paradoxale mérite d’être corrigée, non pour les faire bénéficier de privilèges ou de distinctions ostentatoires, mais parce que la nation doit manifester sa reconnaissance envers ceux qui, quotidiennement, risquent leur vie pour protéger la nôtre. À l’heure où la société s’interroge sur le sens de l’engagement et où les vocations se font parfois rares, il nous appartient, en tant que représentants de la nation, de réaffirmer que nous accordons toute notre attention à l’engagement des sapeurs-pompiers, qu’ils soient professionnels ou volontaires.

Leur courage – c’est un constat largement partagé – n’est pas suffisamment reconnu et valorisé par la nation, particulièrement lorsqu’ils accomplissent des actes exceptionnels sur le terrain sans mettre leur vie en danger. Cette carence a dû être comblée par la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France (FNSPF), qui a créé une distinction associative spécifique, la médaille de la reconnaissance fédérale, laquelle n’a toutefois pas de statut réglementaire.

Il existe certes plusieurs décorations officielles destinées aux sapeurs-pompiers, notamment des médailles d’honneur, créées il y a plus d’un siècle, mais leur examen attentif révèle des lacunes que la proposition de loi vise à combler. La médaille d’honneur récompensant l’ancienneté, d’abord, ne peut être décernée qu’après dix ans d’engagement. La durée moyenne d’activité d’un sapeur-pompier volontaire étant d’environ onze ans, nombre d’entre eux achèvent donc leur mission sans pouvoir prétendre à cette marque de reconnaissance. Ne serait-il pas légitime, pourtant, de pouvoir distinguer un engagement remarquable avant son terme ?

Chaque année, 1 600 à 2 000 sapeurs-pompiers se voient par ailleurs remettre la médaille d’honneur pour services exceptionnels, dite aussi médaille avec rosette. L’analyse de la distribution montre toutefois que cette distinction valorise davantage l’implication dans l’organisation des services et des opérations que les actes courageux sur le terrain, si bien qu’elle n’est décernée qu’à une minorité de sapeurs-pompiers professionnels du rang.

En outre, ces médailles occupent respectivement les trentième et trente et unième places dans le tableau des ordres et décorations de la Grande Chancellerie, soit un rang protocolaire inférieur à des décorations plus récentes, comme la médaille des réservistes volontaires de défense et de sécurité intérieure.

Les sapeurs-pompiers peuvent certes recevoir d’autres décorations non spécifiques à leur corps, comme la médaille d’honneur pour acte de courage et de dévouement, mais celle-ci n’est remise que dans des cas respectant des critères très restrictifs, incluant la mise en danger avérée de la vie du récipiendaire. Un sapeur-pompier réalisant une opération complexe, psychologiquement ou physiquement éprouvante et sortant du cadre de ses missions habituelles, peut ainsi se voir refuser cette médaille au motif que sa vie n’a pas été directement menacée. Quant à la médaille de la sécurité intérieure, créée en 2012, elle récompense, comme son nom l’indique, l’ensemble des acteurs de la sécurité intérieure : sur les 12 000 médailles remises en 2024, seules 1 100 à 1 200 l’ont été à des sapeurs-pompiers. Ses critères d’attribution correspondent d’ailleurs davantage aux missions de sécurité intérieure stricto sensu qu’à celles des sapeurs-pompiers.

La présente proposition de loi vise donc à créer une nouvelle décoration spécifique, dénommée « croix de la valeur », destinée aux sapeurs-pompiers et qui serait un pendant à la croix de la valeur militaire. Cette distinction témoignerait de la reconnaissance des Français et de la République envers les sapeurs-pompiers et permettrait de reconnaître les risques qu’ils prennent en accomplissant leurs missions, tout en valorisant symboliquement le temps qu’ils consacrent à cette activité essentielle pour notre cohésion nationale. Contrairement aux médailles existantes, cette croix ne serait pas conditionnée à l’ancienneté. À la différence de la médaille d’honneur pour acte de courage et de dévouement, elle récompenserait les actions particulièrement notoires et courageuses, même si ceux qui les ont accomplies n’ont pas explicitement risqué leur vie.

Cette proposition n’amoindrirait en rien la valeur des décorations existantes et ne créerait évidemment aucune charge publique supplémentaire. Elle comblerait simplement une carence et offrirait une flexibilité accrue, en permettant une attribution locale, au plus près des centres de secours, dans une logique de proximité avec le terrain. Pour l’Association nationale des directeurs et directeurs adjoints des services d’incendie et de secours (ANDSIS), qui s’est montrée favorable à cette initiative, cette distinction constituerait un outil supplémentaire pour valoriser l’action des sapeurs-pompiers au niveau local et un outil de management additionnel pour fidéliser leurs troupes. Il reviendrait naturellement au pouvoir réglementaire de fixer les conditions d’attribution précises d’une telle décoration, les règles de promotion qui s’y appliqueraient et sa place dans l’ordre protocolaire.

À l’heure où notre sécurité civile est confrontée à des défis majeurs, où les catastrophes naturelles se multiplient sous l’effet du dérèglement climatique, où l’engagement citoyen constitue plus que jamais un pilier de notre résilience collective, ce geste symbolique envers les sapeurs-pompiers dépasse largement le cadre d’une simple décoration honorifique. Je ne peux d’ailleurs m’abstenir de rappeler que les sapeurs-pompiers attendent toujours le décret d’application de la bonification de leur retraite, dont le ministre de l’intérieur avait promis la parution en début d’année 2025 devant nos collègues sénateurs.

Il s’agit de réaffirmer la reconnaissance de la nation envers ceux qui, chaque jour, par tous les temps et dans les circonstances les plus périlleuses, incarnent les valeurs d’abnégation qui fondent notre pacte républicain. C’est pourquoi je vous invite à adopter ce texte, afin de rendre aux sapeurs-pompiers l’hommage qu’ils méritent et à valoriser leur engagement au service de l’intérêt général.

M. le président Florent Boudié. Je précise que la journée réservée aux textes du groupe LIOT aura lieu le 15 mai et que ses membres ont demandé que les deux propositions de loi débattues ce matin soient examinées selon la procédure de législation en commission (Plec).

Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Antoine Villedieu (RN). Les sapeurs-pompiers, qu’ils soient professionnels ou volontaires, occupent une place essentielle dans notre dispositif de sécurité civile. Leur engagement quotidien, au cœur de l’action et souvent au péril de leur vie, mérite plus qu’une gratitude silencieuse : il appelle à une reconnaissance à la hauteur de leur courage.

À ce jour, leur dévouement n’est reconnu que par des médailles d’ancienneté, classées parmi les plus basses distinctions nationales. Rien, dans notre système honorifique, ne souligne la valeur intrinsèque de leur action, leur héroïsme face au danger, ni les sacrifices qu’ils consentent parfois au détriment de leur vie personnelle et familiale. En 2019, une médaille a pourtant été créée pour récompenser l’engagement des réservistes de défense et de sécurité intérieure ; elle occupe une place honorable dans le tableau des décorations. Alors que les femmes et les hommes du feu ne disposent toujours pas, malgré leur rôle déterminant, d’un insigne propre pour saluer leur engagement opérationnel exceptionnel, ce précédent crée un déséquilibre.

Le texte vise donc à instituer une croix de la valeur des sapeurs-pompiers, qui reconnaîtrait la bravoure, la ténacité, les actions décisives sur le terrain et les blessures parfois endurées en intervention. Elle constituerait un marqueur fort de reconnaissance, un levier de fierté et un encouragement dans les moments de doute. Cette distinction trouverait naturellement sa place entre la croix du combattant et la médaille de la reconnaissance française, ce qui représenterait une avancée majeure. Nous saluons également le caractère universel de cette décoration, qui concernerait tous les sapeurs-pompiers, volontaires comme professionnels, unis par une même exigence de courage, de compétence et de dévouement.

C’est donc avec conviction que le groupe Rassemblement national soutient cette proposition, qui vise à combler un vide symbolique et à rendre justice à ceux qui, chaque jour, agissent sans attendre d’autre récompense que le sentiment du devoir accompli.

Mme Emmanuelle Hoffman (EPR). Valoriser l’engagement exceptionnel des sapeurs-pompiers est bien plus qu’un simple geste symbolique : c’est un acte de justice et de reconnaissance envers celles et ceux qui incarnent chaque jour le courage, la solidarité et l’altruisme au service de tous. Les sapeurs-pompiers, qu’ils soient professionnels ou volontaires, sont les premiers à intervenir lors de situations d’urgence – incendies, accidents, catastrophes naturelles, crise sanitaire. Leur mission consiste à protéger les personnes, les biens et l’environnement, souvent au péril de leur vie. Ils sont formés pour faire face au danger, agissent avec sang-froid dans des contextes extrêmes et montrent un dévouement sans faille qui en fait de véritables héros du quotidien. Leur engagement contribue à la sécurité et à la cohésion de la société, et mérite d’être reconnu à sa juste valeur.

Dans ce contexte, il est essentiel de rappeler que la reconnaissance ne se limite pas à la dimension matérielle : elle passe aussi par une valorisation symbolique, qui témoigne du respect et de la gratitude de la nation. Créer une croix de la valeur pour les sapeurs-pompiers, c’est adresser un message clair et fort : leur engagement exceptionnel ne doit jamais être banalisé ni oublié. C’est aussi un encouragement à chacun d’entre eux, un soutien moral dans les moments de doute et un hommage à celles et ceux qui ont parfois sacrifié leur intégrité physique, voire leur vie, pour sauver autrui.

Permettez-moi, à ce titre, de saluer le travail exceptionnel des sapeurs-pompiers de Paris, dont le siège se trouve dans ma circonscription du 17e arrondissement. Leur mobilisation récente lors de l’incendie du centre de tri des déchets du boulevard de Douaumont, qui a nécessité l’engagement de près de 200 pompiers et de 60 engins, illustre une fois de plus leur professionnalisme et leur efficacité, au service des Parisiens et de la nation tout entière. Leur action exemplaire nous honore et mérite notre reconnaissance. J’ai aussi une pensée émue pour leur intervention exceptionnelle lors de l’incendie de Notre-Dame.

C’est pourquoi, au nom de mon groupe, j’apporte un soutien résolu à cette proposition de loi. Valoriser l’engagement des sapeurs-pompiers, c’est renforcer le lien de confiance entre la République et celles et ceux qui la servent avec honneur.

M. Laurent Alexandre (LFI-NFP). Le changement climatique entraîne une accélération des phénomènes naturels extrêmes – mégafeux, tempêtes –, à l’image du terrible orage de grêle ou des fortes inondations qui ont touché ma circonscription l’année dernière. Chaque fois, les forces de sécurité civile, dont les sapeurs-pompiers, sont en première ligne pour secourir les citoyens. Je les remercie chaleureusement pour leur engagement.

Le texte propose de créer une croix de la valeur pour les sapeurs-pompiers volontaires et professionnels, afin de récompenser leur engagement continu et de longue date au service de la nation. Cette médaille serait aussi une source d’encouragement dans les moments de doute, une incitation à persévérer et un hommage pour service rendu. Cette reconnaissance est la bienvenue et nous la voterons.

Je tiens toutefois à alerter sur la crise profonde que traverse le corps des sapeurs‑pompiers et qui se traduit notamment par la baisse des effectifs professionnels et par la hausse dramatique des suicides. Si la nation doit reconnaissance à ses pompiers, elle se doit aussi de tout faire pour leur faciliter la tâche. Or, cette année, les crédits consacrés à la sécurité civile baissent de 5,68 % et le budget Bayrou prive les collectivités, qui financent très majoritairement ces missions, de 5,6 milliards d’euros. Pour faire face à la hausse de leur activité, les Sdis – services départementaux d’incendie et de secours – auraient pourtant besoin de voir leurs moyens augmenter. Il faudrait aussi renforcer, plutôt que de les menacer, les organes d’anticipation des risques que sont Météo-France, l’Entente Valabre ou l’ONF – Office national des forêts –, que certains ici voudraient supprimer alors que leur rôle est essentiel pour soutenir les sapeurs-pompiers dans leurs missions. Ceux qui prétendent soutenir les pompiers tout en défendant ces coupes à la tronçonneuse mériteraient la médaille de l’incohérence.

Je rappelle également qu’un soldat du rang au premier échelon touche à peine le Smic et que les volontaires atteignent difficilement un taux horaire net supérieur au salaire minimum. Les pompiers ne bénéficient pas non plus d’une véritable médecine du travail alors même que, face aux mégafeux et à l’augmentation du risque en milieu industriel, leur santé est plus que jamais menacée. Un seul chiffre suffit à l’illustrer : la prévalence du cancer chez les pompiers de 35 à 39 ans est supérieure de 323 % à celle observée dans la population générale.

Il est urgent d’agir pour remédier à ces problèmes. C’est pourquoi nous avions proposé, par amendement, des mesures urgentes et réclamées par les pompiers eux-mêmes, pour améliorer leurs conditions de travail et leur rémunération, mais aussi pour prendre enfin en compte leur santé en créant une fiche de suivi sanitaire et individuel éditée et remplie après chaque intervention à risque, qui aurait pu être complétée par une banque de données visant à assurer le suivi épidémiologique des pompiers. Ces amendements ont malheureusement été jugés irrecevables. C’est une occasion manquée.

Toutefois, en votant cette proposition de loi, nous soutenons une initiative qui apporte une juste reconnaissance de la nation aux pompiers de notre pays. Nous continuerons néanmoins d’être force de proposition pour améliorer concrètement les conditions d’exercice de leur indispensable mission au service des Français.

M. Hervé Saulignac (SOC). Ce texte mérite évidemment d’être considéré avec bienveillance. Au-delà de son caractère transpartisan, il rappelle en effet la reconnaissance de la nation rassemblée à l’égard d’un corps qui le mérite amplement. Alors qu’ils sont parfois critiques à l’endroit des services publics, 95 % des Français ont une bonne image des sapeurs‑pompiers, qui incarnent les valeurs universelles de dévouement, de courage, de devoir, d’humilité, et bien d’autres. Par conséquent, il est légitime que cette reconnaissance se traduise par la remise d’une croix de la valeur qui ne distingue pas simplement l’ancienneté, mais bien la bravoure et l’engagement opérationnel de ces femmes et de ces hommes.

Les sapeurs-pompiers, qu’ils soient volontaires ou professionnels, consacrent leur temps et leur énergie et, malheureusement, donnent parfois leur vie pour protéger et sauver. Je crains que leur engagement soit mis à l’épreuve de manière croissante dans les décennies à venir. Par conséquent, tous les signes témoignant de notre attachement à leur égard sont les bienvenus.

Je ne doute pas que nous saurons trouver une unité pour saluer ce modèle de service public inédit et voter ce texte, mais je fais aussi le vœu que nous soyons au rendez-vous dans quelques mois, quand il s’agira de remettre à plat le financement des Sdis, de revoir la répartition de la TSCA,  la taxe spéciale sur les conventions d’assurance, ou de reconsidérer les critères de classement des services d’incendie et de secours en différentes catégories, qui sont parfois tout à fait contestables – sans parler du statut des pompiers volontaires, qui doit être préservé. Je serai toujours très honoré de participer à des cérémonies de décoration de ces femmes et de ces hommes qui œuvrent pour notre sécurité, mais je le serai plus encore quand nous aurons traité ces grands sujets : ce serait le meilleur témoignage de notre reconnaissance à leur égard.

Naturellement, notre groupe soutiendra cette proposition de loi.

Mme Émilie Bonnivard (DR). La France compte 247 000 sapeurs-pompiers, dont 197 000 volontaires et 50 000 professionnels, qui réalisent chaque année plus de 4,7 millions d’interventions, soit une toutes les sept secondes, le plus souvent pour des opérations de secours à la personne, mais aussi en réponse à des incidents majeurs, de graves accidents routiers, des inondations, ou encore des catastrophes industrielles. Les pompiers interviennent donc dans des contextes de risques particulièrement élevés, sans parler des répercussions physiques et psychiques qu’eux-mêmes et leurs familles peuvent subir. Ce sont des héros du quotidien, des exemples d’engagement et de valeur morale. Comme les militaires, ils sont susceptibles de risquer chaque jour leur vie en intervention, même si leur grand professionnalisme et leur expertise leur permettent de s’en préserver au maximum.

J’ai une pensée pour Robert Sandraz, pompier volontaire dans ma circonscription, qui est décédé alors qu’il essayait de sauver une famille, ainsi que pour Marine Godard, jeune sapeur-pompier volontaire à Saint-François-Longchamp, actuellement traitée en centre de rééducation après avoir été grièvement blessée lors d’une explosion. Plus généralement, je tiens à saluer l’implication de tous les sapeurs-pompiers de Savoie.

Cet engagement, pourtant vital, n’est reconnu qu’en fin de carrière, par une médaille d’ancienneté peu valorisée dans l’ordre protocolaire des distinctions. Si des médailles existent pour récompenser l’engagement des sapeurs-pompiers, elles ne leur sont en effet pas propres. La proposition de notre collègue Viry, que je salue, vise à créer une croix de la valeur afin de pallier cette absence de reconnaissance à part entière. L’objectif est de récompenser l’engagement opérationnel exceptionnel des pompiers, leur bravoure, leur disponibilité et leur sacrifice personnel par une décoration spécifique et valorisante, à l’image de celles qui existent pour d’autres corps, comme ceux des militaires et des gendarmes. Cette croix permettra d’honorer les actes héroïques accomplis en situation exceptionnelle.

Elle sera un vecteur de reconnaissance morale, un symbole puissant d’appartenance à un corps reconnu par la nation, elle incitera à l’engagement et favorisera la fidélisation des sapeurs-pompiers. Alors qu’on perd chaque année 5 000 pompiers volontaires, tout ce qui concourt à valoriser leur engagement et à offrir une reconnaissance aux familles qui les soutiennent est important, même si une distinction de ce type ne sera jamais l’alpha et l’oméga de leur démarche.

Notre groupe votera évidemment pour cette proposition de loi.

Mme Sandra Regol (EcoS). Tout le monde aime les pompiers, qui sauvent des vies, soutiennent les territoires et font énormément pour la communauté. Seulement, dès qu’il s’agit de témoigner de cette reconnaissance, les choses deviennent beaucoup plus difficiles. Les pompiers ont ainsi été les grands oubliés de la Lopmi – loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur – qui, alors qu’elle était censée les prendre en considération, ne les mentionne que dans ses annexes. Malgré le lancement du Beauvau de la sécurité civile, censé permettre de débloquer enfin les budgets votés mais non concrétisés, on reste encore loin d’une reconnaissance réelle de la nation, malgré des améliorations notables dans leur quotidien.

Alors que le travail des pompiers est rendu plus difficile par le réchauffement climatique et la multiplication des catastrophes naturelles, et malgré les heures cumulées – certains professionnels exercent sous le statut de pompier volontaire pour pouvoir travailler davantage – ils sont toujours présents sur le terrain pour faire face aux plus grands feux, aux plus grands cyclones, aux plus grandes inondations. Les remercier, c’est certes les valoriser – les médailles, c’est important –, mais ce n’est qu’un outil parmi d’autres, même si les journées de niche parlementaires ne nous permettent malheureusement pas d’aller beaucoup plus loin. Cette reconnaissance pourrait également inciter les pompiers à s’engager plus longtemps, en leur montrant qu’ils comptent pour la nation.

Les médailles déjà existantes ne couvrent pas toutes les situations. Rien ne permet par exemple de récompenser, ni même simplement de remercier, les pompiers qui se sont fortement mobilisés à Mayotte. Nous ne devrions pas avoir à traiter de telles questions, qui relèvent du domaine réglementaire. Seulement, comme personne ne fait rien, et surtout pas ce gouvernement, qui n’avance décidément pas beaucoup – même si le ministre Buffet a annoncé vouloir se saisir de la question, nous sommes toujours dans l’attente –, vous avez pris les choses en main, ce dont je vous remercie.

Au-delà des oubliés de la Lopmi, je veux aussi évoquer les oubliés du Beauvau, c’est-à-dire toutes celles et ceux qui travaillent autour des pompiers, notamment les associations de la protection civile, et qui restent désespérément ignorées, loi après loi.

Merci, donc, monsieur le rapporteur, de tenter de corriger cette situation. J’espère que nous pourrons nous retrouver lorsqu’il s’agira de poursuivre cet effort. En attendant, nous voterons ce texte.

M. le président Florent Boudié. En tant qu’ancien rapporteur de la Lopmi, je rappelle tout de même que ce texte fut le premier, depuis vingt ans, à traiter de la sécurité civile, et pas uniquement dans ses annexes : il lui consacrait des articles spécifiques, comme à l’ensemble des forces du ministère de l’intérieur. Pour ce qui est de la programmation budgétaire, même s’il est vrai qu’elle a été très légèrement érodée dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2025, les crédits alloués à la suite des mégafeux survenus en Gironde à l’été 2022 s’établissaient à 1,5 milliard d’euros.

Mme Blandine Brocard (Dem). Au-delà des mots, des symboles et des décorations, cette proposition de loi affirme une chose fondamentale : la reconnaissance envers ces femmes et ces hommes qui, chaque jour, se lèvent avec pour seul objectif de protéger nos vies, nos familles et nos territoires, parfois au péril de leur propre vie. Les sapeurs-pompiers, qu’ils soient volontaires ou professionnels, font partie de ces visages familiers de la République que l’on croise sans toujours les voir, dans la rue, après un accident, dans le feu de l’action, là où souvent, leur présence est la seule chose qui nous sépare de l’irréparable, dans le silence des drames et l’urgence des catastrophes.

Ces femmes et ces hommes incarnent des valeurs fondamentales : le dévouement, la bravoure, le sacrifice, mais surtout cette solidarité sans laquelle notre société serait bien plus fragile. Ils sont là, toujours, en première ligne, lorsqu’un incendie éclate, lorsqu’un accident se produit, lorsqu’une inondation menace ou lorsqu’un drame humain frappe un foyer. Ils sont là inlassablement, souvent les premiers à répondre, à intervenir, à risquer leur vie, avec une constance et une humilité qui forcent notre respect et notre admiration.

Certes, il existe déjà des décorations, des médailles, des honneurs pour saluer cet engagement, mais la croix de la valeur qui nous est proposée va plus loin. Elle ne se substitue pas à ce qui existe déjà, mais elle complète, elle précise, elle honore autrement. Elle distingue quelque chose d’essentiel : l’exceptionnel dans l’ordinaire, l’acte au-delà du devoir, parfois le sacrifice suprême. Cette croix de la valeur permet d’honorer à leur juste mesure ces femmes et ces hommes, non pas simplement parce qu’ils sont pompiers, mais parce qu’ils ont, à un instant donné, fait preuve d’un courage, d’une bravoure, d’une fraternité exceptionnels.

Depuis plusieurs années, à chaque Sainte-Barbe, dans chaque caserne, je pose aux sapeurs-pompiers la même question, à laquelle ils sont bien en peine de répondre : « Êtes-vous fous ? » À une époque où l’individualisme semble prendre toujours plus de place, où les liens sociaux se distendent, où chacun semble céder au repli personnel, il y a en effet quelque chose d’incompréhensible – de fou – à donner son temps, son énergie, parfois même sa vie pour des inconnus, sans attendre quoi que ce soit en retour. Cet engagement sans faille est précieux, et même vital, car il donne corps à cette fraternité qui est la base même de notre République.

Soutenir cette proposition de loi, c’est réaffirmer que la République sait reconnaître ceux qui la servent, sait reconnaître que le don de soi, le courage, l’abnégation méritent d’être honorés. C’est une manière de dire à ces femmes et à ces hommes : « Vous n’êtes pas seuls. Nous vous remercions et nous vous rendons hommage. Que la nation soit sans réserve à vos côtés, vous qui êtes inconditionnellement aux côtés de nos concitoyens. »

Conscient que les sapeurs-pompiers ont aussi d’autres attentes légitimes auxquelles il nous faudra répondre, notre groupe, fidèle à ses valeurs de reconnaissance, de solidarité et d’engagement républicain, soutiendra cette proposition de loi avec conviction.

M. Jean Moulliere (HOR). Les sapeurs-pompiers contribuent à des missions majeures pour la sûreté de chacun. Qu’ils soient professionnels ou volontaires, ils conduisent des opérations multiples : secours à la personne, lutte contre les incendies, interventions après un accident de circulation, protection de l’environnement. Ils adaptent leurs compétences et domaines d’action aux spécificités locales et aux besoins de chaque région.

Ces missions variées ont un seul objectif : protéger les populations. À travers l’engagement de plus de 150 000 sapeurs-pompiers, c’est le modèle de la sécurité civile de notre pays qui est en action. Selon les chiffres partagés par les sapeurs-pompiers de France, ces derniers ont réalisé en 2021 plus de 4,6 millions d’interventions, soit 13 000 sorties quotidiennes – une intervention toutes les sept secondes. Les moyens humains déployés pour garantir la conduite d’autant d’interventions témoignent d’un engagement remarquable. En moyenne, 14 000 sapeurs-pompiers sont de garde en journée et 11 000 la nuit. Chaque jour, 19 300 d’entre eux sont d’astreinte pour renforcer les effectifs mobilisés. Ils sont encore plus nombreux la nuit : 31 700 pompiers sont prêts à être appelés. Leur dévouement et leur efficacité sont tels qu’en moyenne, il s’écoule moins de quinze minutes entre l’appel au secours et leur arrivée sur les lieux. Cette implication est d’autant plus louable qu’environ 80 % des sapeurs-pompiers sont bénévoles. Sans eux, c’est toute l’architecture de notre modèle de sécurité civile, dont ils constituent le socle, qui serait bouleversée.

Pourtant, à ce jour, l’investissement des sapeurs-pompiers n’est pas récompensé par une médaille spécifique. Pourquoi ne pas prévoir de récompense pour ces femmes et ces hommes qui s’engagent quotidiennement pour la sûreté et la protection de leurs concitoyens, souvent au péril de leur vie ? C’est d’autant plus nécessaire que les médailles accordées aux citoyens en récompense de leur engagement au service de la collectivité ne sont pas des récompenses individuelles : avec elles, c’est l’ensemble de la nation qui peut témoigner de sa reconnaissance pour les actes de bravoure réalisés par les sapeurs-pompiers lors d’interventions particulièrement complexes.

Aussi, l’initiative du groupe LIOT est bienvenue et recevra le soutien de notre groupe.

M. Yannick Favennec-Bécot (LIOT). Les députés de notre groupe font partie de ceux qui, depuis de nombreuses années, plaident pour une meilleure reconnaissance des sapeurs-pompiers, ces hommes et ces femmes qui œuvrent au quotidien pour la sécurité de nos concitoyens. C’est d’ailleurs le sens du combat que nous avions mené, avec d’autres, pour la valorisation des points de retraite des pompiers volontaires, qui a été inscrite dans la loi mais reste toujours suspendue à la publication des décrets d’application.

Pour toutes ces raisons, nous avons choisi d’inscrire ce texte à l’ordre du jour de notre journée de niche parlementaire. Je salue le rapporteur pour cette initiative et pour le travail conduit au cours des nombreuses auditions organisées. Ce texte permettra à notre nation d’exprimer sa reconnaissance pleine et entière à l’égard des 43 000 sapeurs-pompiers professionnels et des près de 199 000 sapeurs-pompiers volontaires qui assurent au quotidien la protection de la population, la sécurité des territoires et la gestion des crises – je le mesure chaque jour dans mon département de la Mayenne.

La création d’une croix de la valeur dédiée au corps des sapeurs-pompiers doit aussi traduire l’attachement de tous les citoyens à l’égard de ceux qui constituent un maillon indispensable de notre modèle de sécurité civile. Rappelons que les sapeurs-pompiers exercent leurs missions dans un cadre de plus en plus contraint : face à la multiplication des interventions, ils sont plus que jamais confrontés au risque. On dénombrait près de 5 millions d’intervention en 2021, soit une hausse de 30 % par rapport à 2002. Dans le même temps, les sapeurs-pompiers sont confrontés aux risques liés au changement climatique, à l’intensification des feux de forêt, mais également à des agressions inacceptables.

La loi Matras du 25 novembre 2021 avait permis de renouveler notre modèle de sécurité civile en prévoyant des mesures symboliques, notamment la création d’une mention « mort pour la République », mais sans aborder la question des décorations. En l’état, il n’existe pas de croix dédiée à ce corps, à l’image de la croix du combattant ou de celle de la valeur militaire. Notre groupe souhaite pallier cette lacune. Cette croix permettra de récompenser la bravoure et l’engagement exceptionnel des sapeurs-pompiers. Elle a bien entendu une portée symbolique forte : c’est une manière de dire et de redire aux sapeurs-pompiers que nous avons conscience de leur engagement au plus près de nos concitoyens et que nous leur en sommes infiniment reconnaissants. La FNSPF y est pleinement favorable : lors de son audition, son représentant a indiqué que les décorations actuelles, en raison de leurs critères d’attribution, ne permettent pas de récompenser certains actes courageux ou la participation à certaines missions.

Cette croix permettra de récompenser le temps consacré à des missions difficiles – je rappelle que les sapeurs-pompiers volontaires s’engagent sur leur temps personnel, voire pendant leurs congés. Encore récemment, les sapeurs-pompiers ont été mobilisés pour aider la population en Nouvelle-Calédonie ou à Mayotte. Leur engagement doit être récompensé à sa juste valeur. C’est naturellement avec enthousiasme que notre groupe votera ce texte, dont nous espérons qu’il sera adopté à l’unanimité.

Mme Émeline K/Bidi (GDR). Merci de nous permettre de parler des sapeurs-pompiers et de leur témoigner la reconnaissance qu’ils méritent et qui doit s’exprimer plus concrètement que, par exemple, les applaudissements adressés aux soignants pendant le covid. Ce texte nous permet surtout de nous saisir de la question et d’affirmer clairement qu’une médaille, c’est bien, mais qu’il y a beaucoup d’autres choses à améliorer.

Je viens d’un département, La Réunion, où les sapeurs-pompiers jouent un rôle social essentiel, qui va donc bien au-delà de la sécurité. Ils sont énormément sollicités, comme ce fut le cas encore dernièrement à la suite des cyclones Chido à Mayotte et Garance à La Réunion. Outre leur mission de sauvetage, ils ont participé à la reconstruction, ce dont nous leur en sommes très reconnaissants.

Je connais des sapeurs-pompiers contraints d’acheter eux-mêmes leur tenue lorsqu’elle est déchirée ; qui ne peuvent intervenir car leurs véhicules sont hors d’usage ; qui réclament la révision du tableau des maladies professionnelles dans la mesure où ils sont trois fois plus exposés au risque de cancer ; qui ne comprennent pas que l’on fasse appel à toujours plus de volontaires quand le corps des pompiers professionnels, lui, n’augmente que très peu ; qui demandent la concrétisation de la promesse de revalorisation de leur retraite ainsi que l’augmentation de leur salaire et de leurs moyens.

La création de cette médaille consacrera la reconnaissance réelle de la nation pour le travail qu’ils accomplissent – et Dieu sait que ces hommes et ces femmes qui s’engagent au péril de leur vie pour sauver les autres en ont besoin. Le groupe GDR y est donc bien évidemment favorable, mais je tenais à profiter de ce moment pour rappeler qu’il faudra faire plus. D’autres l’ont dit, il y a des départements où le manque de moyens est criant et nous ne pourrons nous contenter de cette distinction si nous voulons véritablement faire progresser notre sécurité civile.

Mme Sophie Ricourt Vaginay (UDR). Le groupe UDR tient à manifester son indéfectible appui à cette proposition de loi. Loin d’être un simple ornement symbolique, elle s’impose comme un acte fort de reconnaissance républicaine. Elle rend justice à l’engagement héroïque de ces femmes et de ces hommes qui, chaque jour, affrontent le péril pour préserver nos vies. Jusqu’ici, leur courage n’était salué que par des médailles d’ancienneté, reléguées aux marges du protocole. Une telle discrétion était indigne du rôle essentiel qu’ils tiennent, au cœur de notre modèle de sécurité civile. Leur donner accès à la croix de la valeur réparerait cette omission, en consacrant la bravoure, l’abnégation et la fidélité sans faille de ces serviteurs de l’ombre.

Sans peser sur les finances publiques, dans la mesure où elle n’ouvre droit ni à une pension, ni à une indemnité, cette distinction aura, pour ceux qui la recevront, la valeur inestimable de la reconnaissance. En ces temps où l’élan du volontariat faiblit et où l’esprit d’engagement vacille, elle pourrait devenir un puissant ferment de mobilisation citoyenne. C’est donc avec conviction et esprit de justice que mon groupe apportera son suffrage à cette initiative.

M. le président Florent Boudié. Nous en venons à une intervention à titre individuel.

M. Philippe Gosselin (DR). L’examen de cette proposition de loi est l’occasion de saluer unanimement le travail et l’engagement des sapeurs-pompiers : je crois qu’il s’agit de la volonté du rapporteur et que c’est ce qui ressort de nos débats. Je pense bien sûr aux sapeurs‑pompiers professionnels, dont le métier n’est pas comme les autres puisqu’au service de la société, au service de ceux qui sont à sauver, à encadrer et à soutenir. N’oublions pas en effet qu’ils n’interviennent pas que lors des feux et que leur première activité est de secourir les personnes. Et je pense aux près de 200 000 pompiers volontaires, qui permettent de compléter un maillage territorial assez exceptionnel et que beaucoup de pays nous envient.

Ce maillage peut néanmoins s’essouffler, la question du financement étant prégnante. Nombre de conseils départementaux et de Sdis ont besoin de moyens pour moderniser ou construire des centres de secours, et les agglomérations sont parfois appelées au secours pour apporter une obole supplémentaire. Ce point ne doit pas être éludé.

J’ajoute que l’attente est forte et ancienne s’agissant de la publication du décret relatif à l’octroi, sous certaines conditions, d’un trimestre supplémentaire en vue de la retraite.

Nous le rappelons lors de la fête de la Sainte-Barbe, il est évident que les sapeurs-pompiers ne travaillent pas pour une distinction, ni pour une reconnaissance : leur geste est bien plus altruiste. Ce texte est néanmoins l’occasion de joindre les actes à la parole et de les assurer de la reconnaissance de la nation, au travers de cette croix de la valeur. Je tenais à y apporter tout mon soutien.

M. Stéphane Viry, rapporteur. Je vous remercie sincèrement pour votre soutien unanime et pour vos propos. Vous avez, les uns et les autres, rendu hommage et exprimé une reconnaissance forte à l’égard du corps des sapeurs-pompiers. Vous avez évoqué leur efficacité, la diversité de leurs interventions et leur réalité.

Vous l’avez compris, cette proposition de loi, si elle vise à créer une distinction spécifique et symbolique, est avant tout un texte d’appel. Depuis quelques années, nous réfléchissons à un véhicule législatif adapté pour consolider, renforcer, mieux reconnaître et moderniser le corps des sapeurs-pompiers. Certes, la loi Matras a conforté leur statut, mais le Beauvau de la sécurité civile, qui est en cours, illustre bien les préoccupations touchant aux conditions d’exercice des missions, aux conditions de travail ou encore à la santé de ces professionnels. Je serais donc très heureux que cette proposition de loi, au-delà de la nécessaire reconnaissance symbolique, permette d’enclencher ou de consolider une démarche de fond.

Je crois que vous en avez pris la mesure : à l’instar de nos militaires, nos sapeurs-pompiers sont dans l’attente d’une reconnaissance particulière. Quand on porte un uniforme, qu’on a le sens de l’engagement et qu’on est fier d’appartenir à un corps, arborer une médaille peut être quelque chose de profondément symbolique. Comme la poignée de main du chef ou de l’officier quand on rentre de mission, il s’agit d’un élément éminemment important, en matière de management, mais pas seulement.

Je le répète, la croix de la valeur compléterait les distinctions existantes : elle ne bouleverserait pas l’ordonnancement des différentes décorations que la nation accorde. Je vous remercie de votre soutien et de votre confiance.

Article 1er : Création d’une croix de la valeur pour les sapeurs-pompiers professionnels et volontaires

Amendement CL7 de M. Antoine Villedieu

M. Antoine Villedieu (RN). Il est des engagements qui transcendent le simple exercice d’une fonction. Celui des sapeurs-pompiers, qu’ils soient militaires, professionnels ou volontaires, relève de cette catégorie d’engagements silencieux et absolus qui, parfois, conduisent jusqu’au sacrifice ultime. C’est pourquoi nous proposons d’ajouter la possibilité d’attribuer la croix de la valeur à titre posthume, alors que ce geste est actuellement laissé à l’interprétation du pouvoir réglementaire. Sur un plan strictement normatif, cette précision vise à sécuriser l’application du dispositif et à assurer son uniformité. Elle permettrait d’inclure sans ambiguïté, parmi les bénéficiaires, ces hommes et ces femmes tombés dans l’exercice de leur mission. Une telle mesure serait cohérente avec la finalité même de la décoration : distinguer ceux dont le courage ne laisse parfois d’autre trace que le souvenir.

En tant qu’ancien sapeur-pompier de Paris affecté à la 10e compagnie d’incendie, j’ai une pensée émue pour nos deux camarades tombés lors d’un incendie rue Riquet, le 16 novembre 2007 : Ludovic Martin et Matthieu Mercier, qui avaient 21 et 23 ans. Ces deux dernières années, onze sapeurs-pompiers ont perdu la vie en service. Cet amendement vise à ne pas oublier ceux qui sont allés au bout de la devise « sauver ou périr ».

M. Stéphane Viry, rapporteur. Je partage naturellement votre souhait. La reconnaissance de la nation doit pouvoir être accordée à titre posthume pour les défunts et leurs familles. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CL8 de M. Stéphane Viry, rapporteur.

Elle adopte l’article 1er modifié.

Article 2 : Compensation des charges pour l’État

La commission adopte l’article 2 non modifié.

La commission adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée. (Applaudissements.)

M. Stéphane Viry, rapporteur. Je vous remercie d’avoir compris le sens de cette proposition de loi. Je forme désormais le vœu qu’elle soit adoptée dans l’hémicycle.

 

En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République vous demande d’adopter la proposition de loi visant à créer une croix de la valeur des sapeurs-pompiers volontaires et professionnels (n° 255) dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.


   PERSONNES ENTENDUES

   Lieutenant-colonel Nicolas Galand, secrétaire général

   Contrôleur général Éric Flores, vice-président chargé du positionnement des sapeurs-pompiers de France

   Mme Tiphaine Pinault, directrice des sapeurs-pompiers

   M. Franck Vinesse, sous-directeur de la doctrine et des ressources humaines

   M. le commandant Florian Lointier, chancelier au cabinet du DGSCGC

   M. le colonel Rémi Capart, directeur adjoint de cabinet et conseiller social

   M. Bertrand Ducros, directeur adjoint du cabinet

   Mme Claire Gonzague, chef de cabinet du secrétaire général

   Contrôleur général Stéphane Beaudoux, directeur départemental des services d’incendie et de secours du Doubs

   Colonel Thierry Dedieu, directeur départemental des services d’incendie et de secours de la Manche

 

 

 

CONTRIBUTION ÉCRITE

   Général François Lecointre, grand chancelier

 

 


([1]) Assemblée nationale, rapport d’information n° 2435, sur les capacités d’anticipation et d’adaptation de notre modèle de protection et de sécurité civiles, 3 avril 2024.

([2]) Ainsi, selon les informations communiquées par la Direction des sapeurs‑pompiers, la promotion récompensée en janvier 2023 de la médaille d’honneur pour services exceptionnels était composée à 70 % d’officiers, 23 % de sous-officiers et 7 % d’hommes du rang.

([3]) Arrêté du 2 octobre 2024 fixant le contingent relatif à la médaille de la sécurité intérieure au titre de l'année 2024.

([4]) D’après l’édition 2023 des statistiques des services d’incendie et de secours - DGSCGC