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N° 1473

______

 

ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 28 mai 2025.

 

 

 

RAPPORT

 

 

 

FAIT

 

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LA PROPOSITION de loi visant à accorder le versement des allocations familiales dès le premier enfant,

 

 

 

 

Par M. Édouard BÉNARD,

 

 

Député.

 

——

 

 

 

 

 

Voir le numéro : 1342.


– 1 –

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION

1. Les allocations familiales, un soutien universel aux familles historiquement dès l’arrivée du premier enfant

2. Une situation démographique nouvelle

a. Une baisse de la natalité depuis 2010, en dépit d’un désir d’enfants stable

b. Une augmentation du nombre de familles avec un seul enfant

3. Des prestations familiales qui ne répondent plus totalement aux enjeux contemporains

a. Un accent porté sur les familles nombreuses

b. Des prestations familiales ouvertes dès le premier enfant sous conditions de ressources

c. Un décrochage des prestations familiales par rapport à l’inflation

4. La nécessité d’ouvrir les allocations familiales dès le premier enfant

Commentaire des articles

Article 1er Ouvrir le bénéfice des allocations familiales dès le premier enfant

Article 1er bis (nouveau) Rapport détaillant les pistes de réforme des allocations familiales

Article 2 Gage financier

travaux de la commission

ANNEXE  1 : LISTE DES PERSONNES entendues PAR Le RAPPORTEUR

ANNEXE  2 : TABLEAU DU MONTANT DES ALLOCATIONS FAMILIALES

ANNEXE n° 3 : TEXTES SUSCEPTIBLES D’ÊTRE ABROGÉS OU MODIFIÉS À L’OCCASION DE L’EXAMEN DE LA PROPOSITION DE LOI

 


– 1 –

   INTRODUCTION

« Quand le troisième enfant a longtemps été vu en tant que frontière compliquée à traverser, le grand saut dans l’existence résulte maintenant surtout de l’arrivée du premier. » ([1])

Si l’arrivée d’un enfant dans une famille n’a pas de prix, elle implique néanmoins des nombreux coûts financiers liés aux besoins alimentaires et vestimentaires ou aux modes de garde de l’enfant, ainsi qu’une évolution sensible de la vie personnelle, sociale et professionnelle des parents. Afin de leur apporter le soutien nécessaire, la politique familiale a eu très tôt à cœur de compenser ces charges associées à l’entretien et à l’éducation d’un enfant.

1.   Les allocations familiales, un soutien universel aux familles historiquement dès l’arrivée du premier enfant

● Les allocations familiales constituent la plus ancienne des prestations familiales. Dans un objectif nataliste dicté par un contexte de rivalité démographique avec la Prusse lors de la guerre de 1870, puis avec l’Allemagne lors de la Première Guerre mondiale, des employeurs volontiers paternalistes versaient de leur propre initiative, dès la fin du XIXe siècle, des « sursalaires » à leurs salariés afin de compenser les coûts entraînés par l’arrivée d’un enfant. Dans un double souci « de venir en aide aux travailleurs en charge de famille et d’encourager la natalité française », la loi du 11 mars 1932 a généralisé à tous les salariés ces suppléments de rémunération en prévoyant à son article 2 que « les allocations familiales sont dues pour tout enfant » ([2]).

Si la politique familiale a d’abord pour vocation de compenser la charge financière représentée par l’arrivée d’un enfant au sein du foyer, les allocations familiales, à partir de 1939, ne sont versées qu’à partir du deuxième enfant à charge afin d’encourager les Français, dans le cadre d’une politique nataliste, à fonder des familles nombreuses ([3]). La loi n° 46‑1835 du 22 août 1946 fixant le régime des prestations familiales confirme ensuite cette restriction du bénéfice des allocations familiales à compter du deuxième enfant à charge ([4]).

En conséquence, le versement des allocations familiales dès le premier enfant, que prévoit la présente proposition de loi, constitue ce que Julien Damon qualifie de « retour aux sources » de la politique familiale ([5]).

● L’universalité des allocations familiales a, par la suite, été lourdement remise en cause avec, sur le fondement de la loi n° 2014‑1554 de financement de la sécurité sociale pour 2015 ([6]), la modulation de leur montant en fonction des revenus de la famille.

Depuis leur création en effet, le montant des allocations familiales était identique pour tous les bénéficiaires, quel que soit le niveau de leurs ressources. Or, à partir du 1er juillet 2015, la détermination de ce montant tient compte des revenus du ménage. Ainsi, les allocations familiales continuent d’être perçues pour la totalité de leur montant antérieur lorsque les revenus n’excèdent pas un premier plafond, puis ce montant est divisé par deux lorsque les revenus se situent entre le premier et le second plafond et, enfin, divisé par quatre pour les revenus dépassant le second plafond.

En 2020, la modulation du montant des allocations familiales a concerné 11 % de ménages sur les 4,9 millions de foyers bénéficiaires, dont 255 000 foyers qui ont reçu un montant minoré à 50 % et 270 000 foyers qui ont reçu celui minoré à 25 % ([7]). Si une mission d’information de l’Assemblée nationale conduite en 2020 rappelle que la modulation a généré une économie de 750 millions d’euros par an, dont 290 millions d’euros au titre de la deuxième tranche de revenus et 460 millions au titre de la troisième tranche ([8]), la direction de la sécurité sociale estime que cette modulation représenterait en 2025 un rendement de l’ordre d’un milliard d’euros, dont 400 millions au titre de la deuxième tranche et 600 millions au titre de la troisième tranche.

Outre la remise en cause, que votre rapporteur regrette, de la redistribution horizontale qui prévalait depuis la création des allocations familiales, cette modulation n’a permis qu’une hausse marginale de revenu disponible, de l’ordre de 0,2 %, pour les ménages appartenant aux deuxième et troisième déciles de l’échelle des revenus ([9]). Ainsi, le gain acquis grâce à cette réforme n’a pas été redéployé vers les foyers les plus précaires ou vers d’autres prestations familiales. Il a obéi, au détriment de toutes les familles, à une logique de restriction budgétaire.

2.   Une situation démographique nouvelle

a. Une baisse de la natalité depuis 2010, en dépit d’un désir d’enfants stable

● En 2024, le nombre de naissances s’élève à 663 000, soit 2,2 % de moins qu’en 2023 et 21,5 % de moins qu’en 2010, année du dernier pic de natalité. L’indicateur conjoncturel de fécondité s’établit, quant à lui, à 1,62 enfant par femme ([10]), soit son niveau le plus bas depuis 1919, quand il atteignait 2,03 en 2010. Si le nombre de naissances tend à reculer à compter de 2010, cette baisse s’accélère depuis 2022.

Plusieurs facteurs ([11]) peuvent expliquer la diminution de la fécondité des femmes :

– en premier lieu, les contraintes économiques auxquelles sont exposés les couples. Si les dépenses que nécessite un enfant peuvent être estimées à 30 % du coût d’entretien d’un adulte pour un enfant de moins de 14 ans et à 50 % pour un enfant de plus de 14 ans ([12]), les familles d’un ou de deux enfants ont en moyenne un niveau de vie inférieur à celui d’un ménage sans enfant. Pour un couple sans enfant au revenu disponible moyen de 50 050 euros, le niveau de vie moyen des individus du ménage s’élève à 33 360 euros ; pour un couple avec enfants et avec un revenu moyen disponible de 60 950 euros, le niveau de vie moyen des individus du ménage atteint 27 280 euros ([13]). Ainsi les familles perdent-elles en moyenne entre 2 % et 11 % de leur niveau de vie entre l’année précédant la naissance d’un enfant et l’année suivant cette naissance ([14]). À ce titre, la question de l’accession à un logement, qui a été évoquée par toutes les personnes auditionnées par le rapporteur, est primordiale ;

– en deuxième lieu, la double difficulté de trouver un mode de garde et de le trouver à un coût qui ne soit pas exorbitant. Cette problématique est essentielle dans la conciliation entre vie professionnelle et vie personnelle des jeunes parents, et tout particulièrement pour les femmes qui obèrent davantage leur vie professionnelle pour s’occuper de leurs enfants. Selon une étude de l’Insee, les mères gagnent 11 % de moins que les pères à 25 ans, mais 25 % de moins à 45 ans, alors que l’écart de salaire entre les sexes chez les salariés sans enfant se maintient autour de 7 % à tout âge. L’écart de salaire entre les pères et les mères est de 23 % tous âges confondus ([15]) ;

– en dernier lieu, une évolution des préférences individuelles et des normes sociétales, telles que l’allongement des études, une meilleure insertion professionnelle des femmes ou encore le report de la mise en couple, qui conduisent à retarder l’âge de la première grossesse d’une part, et à désirer moins d’enfants, voire à ne pas en souhaiter d’autre part.

● Or, le désir d’enfants ne diminue pas. À cet égard, une enquête diligentée par l’Union nationale des associations familiales en 2023 montre qu’il serait stable dans le temps et qu’il s’élèverait à 2,27 enfants par couple ([16]), bien loin de l’indice de fécondité des femmes de 1,62. Si les démographes peuvent pointer certaines limites méthodologiques de cette enquête, l’existence d’un écart entre la proportion de personnes qui déclarent ne pas vouloir d’enfants (4 %) et la proportion de personnes demeurées sans enfant (15 %) est démontrée par d’autres travaux ([17]).

Or, même lorsque le désir d’enfants se concrétise, de nombreux parents soulignent un manque d’accompagnement, notamment pour l’arrivée du premier enfant. Selon la Fédération nationale des familles de France, quatre familles sur dix se sont senties délaissées au moment de la naissance du premier enfant.

b. Une augmentation du nombre de familles avec un seul enfant

● De manière tendancielle, les familles accueillent en moyenne de moins en moins d’enfants. En effet, depuis 1975, la part des familles comptant un ou deux enfants a particulièrement progressé (+ 29 %), les familles de deux enfants représentant, en 2020, 38,8 % des familles contre 32,1 % en 1975. À l’inverse, la part des foyers comptant quatre enfants et plus a fortement régressé avec une diminution de près de moitié entre 1975 et 2020 ([18]).

Désormais, plus d’un tiers des familles comptent un seul enfant ([19]). En 2024, en appliquant la même proportion que celle de 2022 pour les nouveau-nés premier enfant (42,7 %), c’est pour 283 000 naissances qu’il s’agirait du premier enfant.

● En outre, les familles monoparentales, définies par le Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge comme « un parent isolé et un ou plusieurs enfants célibataire » ([20]), représentent une part toujours plus considérable. Si, en 1970, elles comptaient seulement pour 10 % des familles, cette proportion s’élève en 2020 à 24,7 %, avec une forte accélération depuis les années 1990. Ainsi, la part des enfants mineurs vivant dans une famille monoparentale a doublé entre 1990 et 2018, passant de 1,5 à 3 millions d’enfants ([21]). Or, les familles monoparentales sont nettement plus souvent des familles à enfant unique.

Répartition des familles selon le nombre d’enfants au domicile en 2020

Source : Insee, « Les familles en 2020 », 13 septembre 2021.

À ce titre, repenser les conditions d’attribution des allocations familiales, aujourd’hui versées seulement à partir du deuxième enfant, semble nécessaire à votre rapporteur afin, d’une part, de mieux accompagner l’arrivée du premier enfant et, d’autre part, de tenir compte de la réduction des fratries.

3.   Des prestations familiales qui ne répondent plus totalement aux enjeux contemporains

Prestation familiale la plus importante symboliquement et politiquement, les allocations familiales ne constituent pas pour autant la seule composante de la politique familiale. Elles s’articulent avec d’autres prestations pour certaines en faveur des familles nombreuses et pour d’autres accessibles dès le premier enfant sous condition de ressources.

a.   Un accent porté sur les familles nombreuses

● Dès les années 1930, les allocations familiales se sont inscrites dans une politique familiale tournée vers un objectif nataliste pour inciter la naissance, non d’un deuxième, mais d’un troisième enfant. Sans revenir sur les différentes réformes sur le barème des allocations familiales, leur taux a le plus souvent été dans le sens d’une revalorisation pour les troisièmes enfants et suivants.

Encore aujourd’hui, les modalités de calcul du montant des allocations familiales sont beaucoup plus favorables aux familles nombreuses comptant au moins trois enfants à charge. En effet, les enfants sont pris en compte avec une pondération plus forte dans le barème des allocations familiales à partir du troisième (41 % contre 32 % pour le deuxième enfant à charge) et la majoration pour âge à partir de 14 ans s’applique uniquement pour les familles d’au moins trois enfants à charge ([22]). Enfin, l’allocation forfaitaire, qui a bénéficié en 2021 à 100 000 familles pour un coût estimé à 100 millions d’euros ([23]), est versée jusqu’au mois précédent le vingt-et-unième anniversaire de l’aîné d’une fratrie de trois enfants afin de lisser la sortie des allocations familiales.

● Les familles nombreuses peuvent également bénéficier, sous conditions de ressources, d’une prestation qui leur est dédiée : le complément familial.

Le complément familial

Créé par la loi n° 77‑765 du 12 juillet 1977, le complément familial est attribué aux familles métropolitaines ayant à leur charge au moins trois enfants âgés de 3 à 20 ans pour participer au financement de l’entretien de l’enfant (1). Il est versé sous condition de ressources et suivant des plafonds de revenus qui tiennent comptent de la situation familiale (couple avec un ou deux revenus professionnels ou parent isolé et nombre d’enfants). Le montant du complément familial est modulé en fonction des revenus de la famille et il a été majoré de 50 % entre 2014 et 2018. Au 1er avril 2025, il s’élève, selon le nombre d’enfants et le niveau de revenus, soit à 196,59 euros, soit à 294,91 euros par mois.

En 2021, cette prestation est versée à 873 000 familles pour un coût total de 2 milliards d’euros (2).

(1) Articles L. 522‑1 à L. 522‑3 du code de la sécurité sociale.

(2) Cour des comptes, rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, Chapitre XIII : « Les aides aux familles nombreuses : des dépenses stabilisées, une cohérence à améliorer », mai 2024.

● Hors du champ des prestations familiales, il s’ajoute, pour les familles d’au moins trois enfants, un calcul favorable du quotient familial : alors que les deux premiers enfants accordent au foyer une demi-part fiscale, tous les enfants suivants correspondent à une part entière.

b.   Des prestations familiales ouvertes dès le premier enfant sous conditions de ressources

● Plusieurs prestations familiales peuvent être versées, sous condition de ressources, dès l’arrivée du premier enfant. Parmi elles, la prestation d’accueil du jeune enfant (Paje) qui regroupe diverses prestations :

– la prime de naissance ou la prime d’adoption versée pour subvenir aux premières dépenses liées à la naissance ou à l’arrivée d’un enfant ;

– l’allocation de base versée, uniquement pour un seul enfant jusqu’à ses trois ans, pour faire face aux dépenses liées à son entretien et à son éducation ;

– le complément de libre choix du mode de garde (CMG) pour les enfants de moins de six ans gardés soit à domicile, soit en micro-crèche, soit par un assistant maternel, dont le montant est modulé en fonction de l’âge de l’enfant ;

– la prestation partagée d’éducation de l’enfant (PreParE) versée jusqu’aux trois ans de l’enfant lorsque l’un de ses parents a cessé ou réduit son activité professionnelle pour demeurer à ses côtés.

Ces diverses prestations qui ont pour finalité d’aider à financer tantôt le mode de garde, tantôt l’entretien de l’enfant ne sont versées que durant ses premières années. Au-delà des 3 ans de l’enfant, sauf s’il est gardé, plus aucune prestation familiale ([24]) n’est allouée aux familles avec un seul enfant, hormis l’allocation de rentrée scolaire versée une fois par an à partir de 6 ans ([25]). En revanche, le montant de certaines prestations sociales est majoré dès le premier enfant bien que leur finalité ne soit pas de participer au coût de son entretien ([26]).

● Ainsi, renforcer le ciblage de la politique familiale autour du premier enfant devient une nécessité. Si votre rapporteur ne remet absolument pas en question le bien-fondé des prestations familiales tournées vers les familles nombreuses, eu égard au niveau de vie qui diminue significativement avec la taille de la fratrie à partir de trois enfants et à un risque accru de pauvreté pour les familles de quatre enfants et plus (43 % d’entre elles sont pauvres contre 24 % pour les familles de trois enfants et 16 % pour les familles d’un ou deux enfants) ([27]), il n’en demeure pas point que la prise en compte de l’entretien du premier enfant doit être améliorée.

c.   Un décrochage des prestations familiales par rapport à l’inflation

● À l’instar de nombreux dispositifs sociaux, les prestations familiales sont revalorisées le 1er avril de chaque année en fonction de l’inflation([28]). Or, depuis 2016, le montant de base mensuelle des allocations familiales (BMAF), qui sert de base de calcul à toutes les prestations familiales, est révisé au vu de l’inflation constatée sur les douze derniers mois, et non plus en fonction de l’inflation prévisionnelle. En outre, la Cour des comptes souligne que, entre 2016 et 2019, l’indexation de la base mensuelle des allocations familiales n’a été que partielle puisqu’elle n’a augmenté que de 1,7 % alors que l’inflation s’est élevée à 4,3 %, générant ainsi une économie estimée à 800 millions d’euros en 2019 ([29]).

Cette indexation sur l’inflation constatée sur les douze derniers mois entraîne un décrochage de l’ensemble des prestations familiales par rapport au coût de la vie. Le Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge estime ainsi que, pour une famille bénéficiant de prestations égales à 100 % de la base mensuelle des allocations familiales (soit 474,37 euros depuis le 1er avril 2025), la perte cumulée de pouvoir d’achat entre avril 2021 et mars 2025 atteint 490 euros ([30]). Une indexation des prestations familiales sur les prix aurait amené un surcoût estimé à 3 milliards d’euros ([31]).

Évolution de l’inflation et du montant
de la base mensuelle des allocations familiales

Source : Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge, « Retour sur l’évolution du pouvoir d’achat des prestations familiales et de solidarité », mars 2025.

● Parallèlement, la pauvreté infantile ne cesse d’augmenter. Pour l’année 2021, le taux de pauvreté des mineurs s’élève à 20,6 % contre 14,5 % pour l’ensemble de la population ([32]) et contre 19,6 % en 2010 ([33]). Ce taux est nettement plus élevé pour les enfants issus de familles monoparentales, qui représentent un quart des familles ; il atteint 46 % pour les enfants vivant avec une mère isolée et 22 % pour les enfants vivant avec un père isolé ([34]). De manière générale, depuis 2004, le taux de pauvreté monétaire des enfants tend à augmenter plus rapidement que celui de l’ensemble de la population ([35]).

4.   La nécessité d’ouvrir les allocations familiales dès le premier enfant

● Au regard du constat dressé ci-avant, votre rapporteur estime impératif et urgent d’ouvrir le bénéfice des allocations familiales dès le premier enfant.

Loin de répondre à un objectif nataliste, votre rapporteur souhaite mieux accompagner les personnes qui ont un désir d’enfant mais qui, en raison de contraintes économiques, renoncent à le concrétiser ou en retardent la concrétisation. À ce titre, il semble à votre rapporteur important de rappeler que la politique familiale ne doit pas être une politique nataliste mais une politique pour aider et soutenir les familles dans un contexte où le taux de fécondité baisse, mais pas le désir d’enfant.

N’ayant obtenu aucune réponse aux questions qu’il a posées à la direction générale de la cohésion sociale, il est difficile pour votre rapporteur d’estimer les effets de la présente proposition de loi sur la pauvreté infantile. En revanche, il serait possible d’agir sur l’âge moyen des mères au moment de l’accouchement, qui s’élève en 2024 à 31,1 ans. En effet, selon la Caisse nationale des allocations familiales, les allocations familiales agissent davantage sur la temporalité de l’arrivée du premier enfant que sur le désir d’enfants. Or, d’après l’Union nationale des associations familiales, 20 % des personnes ayant eu des enfants auraient souhaité les avoir plus tôt, contre 9 % il y a dix ans. En conséquence, accorder les allocations familiales dès le premier enfant pourrait contribuer à avancer l’âge de la première maternité dans un pays où l’infertilité s’accentue avec l’âge de la mère et touche un couple sur quatre ([36]).

Outre un meilleur accompagnement dès le premier enfant, la présente proposition de loi a pour mérite de réinscrire la politique familiale dans une logique de redistribution horizontale – des ménages sans enfants vers les familles – et de réaffirmer le caractère universel des allocations familiales. Verser les allocations familiales dès le premier enfant permettrait ainsi, non de prendre en charge, mais de prendre en compte toutes les familles, quel que soit le nombre d’enfants qui les compose. Par ailleurs, cette proposition de loi soutiendrait les familles non seulement lorsqu’elles n’ont qu’un enfant, mais également lorsque seul le dernier enfant de la fratrie demeure à charge.

De plus, une telle ouverture permettrait de remédier à certaines limites du système des prestations familiales à l’instar de l’absence de prestation financière entre les trois et les six ans du premier enfant pour les familles précaires ou, pour l’allocation de soutien familial destinée aux familles monoparentales accordée en cas de montant trop faible de pension alimentaire ou en cas de non versement de celle-ci, de l’arrêt de son versement lorsque le parent isolé se remet en couple ainsi que de son taux de non-recours important.

● Pleinement conscient que les enjeux budgétaires peuvent constituer un frein à l’adoption de la présente proposition de loi, votre rapporteur souhaite néanmoins rappeler que :

– la branche famille de la sécurité sociale présente pour l’année 2024 un résultat excédentaire s’élevant à 1,1 milliard d’euros ([37]) ;

– la branche famille prend en charge depuis 2023, au moyen d’un transfert à la branche Maladie d’un montant de 2,1 milliards d’euros, le financement des indemnités journalières dues pour le congé maternité après la naissance de l’enfant ([38]) ;

– la réduction de 1,8 point du taux de cotisations d’allocations familiales pour les salariés dont la rémunération annuelle n’excède pas 3,5 Smic a représenté 9,46 milliards d’euros en 2023 ([39]).


– 1 –

   Commentaire des articles

Adopté par la commission avec modificiations

Cet article modifie l’article L. 521‑1 du code de la sécurité sociale pour que les allocations familiales soient versées dès le premier enfant à charge au lieu du deuxième.

Il prévoit également que la Caisse nationale des allocations familiales tient compte, dans son rapport annuel, des effets de l’attribution des allocations familiales dès le premier enfant à charge sur la précarité familiale.

  1.   Le droit Existant

Instaurées dès 1938 ([40]), les allocations familles constituent, comme toute prestation familiale, une « aide aux familles pour l’entretien des enfants et la conciliation des vies familiale et professionnelle des parents » ([41]).

● En application de l’article L. 5211 du code de la sécurité sociale, les allocations familiales « sont dues à partir du deuxième enfant à charge », sur simple déclaration de naissance auprès de la caisse d’allocations familiales ou de la mutualité sociale agricole compétente. Elles sont versées à partir du mois qui suit la naissance du deuxième enfant et jusqu’à ses 20 ans.

Les allocations familiales sont versées à la personne qui assume de manière effective et permanente l’entretien de l’enfant. En cas de garde alternée, les parents peuvent désigner un allocataire unique ou bénéficier, en cas de désaccord ou à leur demande, de la moitié chacun des allocations familiales.

Par ailleurs, l’article L. 512‑1 du code de la sécurité sociale ouvre le bénéfice de ces allocations aux personnes de nationalité française ainsi qu’aux ressortissants étrangers séjournant en France à titre régulier et principal – soit, depuis le 1er janvier 2025, plus de neuf mois par an.

● Le montant d’allocations familiales versé à chaque famille varie selon plusieurs paramètres :

– le nombre d’enfants à charge : le montant des allocations familiales augmente avec le nombre d’enfants et il s’y ajoute, à partir du troisième enfant, une majoration par enfant supplémentaire ([42]) ;

– l’âge des enfants à charge : du fait des surcoûts liés à l’entretien d’un adolescent, l’article L. 521‑3 du code de la sécurité sociale prévoit un montant majoré de l’allocation versée à partir de 14 ans. Cette majoration ne s’applique néanmoins pas aux familles de deux enfants dont seul l’aîné a plus de 14 ans ([43]) ;

– les ressources du foyer : longtemps identique quel que soit le niveau de ressources des ménages, le montant des allocations familiales est modulé, depuis le 1er janvier 2015 ([44]), en fonction des revenus des familles, selon trois tranches. Ces plafonds, fixés par l’article D. 521‑3 du code de la sécurité sociale, correspondent au revenu net catégoriel de l’avant-dernière année avant le versement des allocations et sont revalorisés au 1er avril de chaque année selon l’évolution moyenne annuelle des prix à la consommation hors tabac. La modulation des allocations familiales consiste à ne verser, selon la tranche de revenus considérée, que 50 % ou 25 % de leur montant aux familles les plus aisés.

En outre, deux mécanismes de « lissage » des allocations familiales viennent en affecter leur montant :

– d’une part, une allocation forfaitaire versée pendant une durée d’un an aux familles d’au moins trois enfants à charge qui perdent le bénéfice d’une partie des allocations familiales lorsqu’un des enfants atteint l’âge de 20 ans, sous réserve qu’il vive toujours au foyer familial et qu’il ne perçoive pas de revenus professionnels supérieurs à un montant déterminé par voie règlementaire ([45]). De la même manière que l’allocation familiale de base, cette allocation forfaitaire est modulée en fonction des ressources de la famille ;

– d’autre part, le complément dégressif instauré en 2015, en même temps que la modulation, afin de limiter la perte de ressources des foyers dépassant très légèrement le seuil de revenus déclenchant la réduction du montant de base des allocations familiales ([46]). Ce complément dégressif s’applique aux allocations familiales de base, à la majoration pour âge ainsi qu’à l’allocation forfaitaire.

Le montant des allocations familiales et de ses composantes est calculé en appliquant à la base mensuelle des allocations familiales (BMAF) un pourcentage déterminé réglementairement ([47]).

Barème des allocations familiales
en pourcentage de la base mensuelle des allocations familiales

Nombre d’enfants à charge

Tranche 1

Tranche 2

Tranche 3

Deux enfants à charge

32 %

16 %

8 %

Trois enfants à charge

73 %

36,5 %

18,25 %

Par enfant supplémentaire

41 %

20,5 %

10,25 %

Majoration pour les enfants de plus de 14 ans

16 %

8 %

4 %

Allocation forfaitaire

20,234 %

10,117 %

5,059 %

Valeur de la base mensuelle des allocations familiales au 1er avril 2025 : 474,37 euros.

Le présent rapport comprend, en annexe, un tableau des montants des allocations familiales, en vigueur au 1er avril 2025, en fonction du nombre d’enfants à charge et des revenus du ménage.

● Compte tenu de leurs spécificités, les départements et les régions d’outre-mer ainsi que Saint-Martin et Saint-Barthélemy connaissent un régime dérogatoire ouvrant droit aux allocations familiales dès le premier enfant ([48]). En effet, le niveau de vie des habitants des territoires ultra-marins est globalement inférieur à la moyenne nationale. Le taux de chômage y est plus élevé et la grande pauvreté, caractérisée par la combinaison de faibles revenus – inférieurs à 50 % du niveau de vie médian de la population – et par des privations matérielles et sociales sévères, y est cinq à quinze fois plus fréquente ([49]). Par ailleurs, l’octroi de mer, qui s’applique notamment sur les produits de première nécessité des enfants en bas âge, pèse sur le budget des familles.

De ce fait, le système de prestations familiales a été adapté à ces spécificités, auxquelles s’ajoutent une proportion nettement plus importante des familles avec un seul enfant et des familles monoparentales. Les allocations familles sont ainsi versées dès le premier enfant pour un montant, au 1er avril 2025, de 27,89 euros ([50]) par mois sans modulation en fonction des ressources, celle-ci s’appliquant ensuite à partir du deuxième enfant ([51]). En outre, une première majoration pour âge est appliquée dès l’âge de 11 ans, puis une seconde à partir de 16 ans ([52]).

● En 2021, les allocations familiales ont été versées à 5,021 millions de ménages ([53]), représentant 11,65 millions d’enfants bénéficiaires ([54]). Deux tiers des familles allocataires sont composées de deux enfants.

Répartition des foyers bénéficiaires des allocations familiales en 2021
selon le nombre d’enfants par foyer

Note : Le pourcentage inscrit pour les familles métropolitaines de 1 enfant correspond aux cas où l’un des deux parents ne relève pas du régime général (MSA, RATP, SNCF). Les enfants sont alors comptés comme ½.

Source : Direction de la sécurité sociale, dossier statistique des prestations familiales – édition 2023, décembre 2023.

Selon les données de la Caisse nationale des allocations familiales, la répartition par tranches de revenus est la suivante :

– 4,15 millions de familles appartiennent à la première tranche, pour un montant moyen d’allocation familiale de 256 euros par mois ;

– 262 000 familles appartiennent à la deuxième tranche, pour un montant moyen d’allocations familiales de 109 euros par mois ;

– 271 000 familles appartiennent à la troisième tranche, pour un montant moyen d’allocations familiales de 56 euros par mois.

Pour l’année 2025, le total des dépenses d’allocations familiales est estimé à 14,04 milliards d’euros ([55]).

  1.   Le Droit proposÉ

● L’article 1er modifie le premier alinéa de l’article L. 521‑1 du code de la sécurité sociale pour restaurer la pleine universalité des allocations familiales. Le bénéfice des allocations familiales s’en trouve ouvert, non plus à compter du deuxième, mais du premier enfant à charge.

Seraient ainsi concernés par cette mesure :

– le premier enfant des familles non éligibles aux prestations familiales versées sous condition de ressources ;

– le premier enfant des familles éligibles aux prestations familiales versées sous condition de ressources mais pour lesquelles le versement de l’allocation de base de la prestation d’accueil du jeune enfant s’arrête à ses trois ans ;

– le dernier enfant à charge d’une fratrie d’au moins deux enfants.

● D’après la direction de la sécurité sociale, l’octroi des allocations familiales dès le premier enfant est estimé, en l’absence de toute modulation en fonction des revenus du ménage, à 2,8 milliards d’euros ([56]) pour un montant d’allocations familiales de 70 euros par mois.

● Dans l’hypothèse d’une allocation familiale de 75 euros par mois pour un premier enfant, le coût de cette réforme est estimé à 3,58 milliards d’euros par la cellule LexImpact de l’Assemblée nationale ([57]). Les dépenses totales d’allocations familiales s’élèveraient alors à 17,62 milliards d’euros, contre 14,04 milliards d’euros prévus pour l’année 2025 ([58]).

Dans cette hypothèse, la part des bénéficiaires des allocations familiales augmenterait de 16,06 % à 28,01 % des ménages. Le montant des allocations familiales pour un enfant s’élèverait :

– à 75 euros pour la première tranche, soit 16 % de la base mensuelle des allocations familiales ;

– à 38 euros pour la deuxième tranche, soit 0,8 % de la base mensuelle des allocations familiales ;

– à 19 euros pour la troisième tranche, soit 0,4 % de la base mensuelle des allocations familiales.

Impact budgétaire annuel de l’ouverture des allocations familiales
dès le premier enfant

 

Droit actuellement en vigueur

Estimation du coût de la proposition de loi (a)

Dépenses totales d’allocations familiales

Montant moyen par ménage d’allocations familiales

Dépenses totales d’allocations familiales

Montant moyen par ménage d’allocations familiales

1er décile

3,03 Md €

1 000 €

3,38 Md €

1 100 €

2e décile

2,75 Md €

910 €

3,18 Md €

1 000 €

3e décile

1,6 Md €

530 €

2 Md €

660 €

4e décile

1,38 Md €

450 €

1,69 Md €

550 €

5e décile

1,27 Md €

420 €

1,71 Md €

560 €

6e décile

1,03 Md €

340 €

1,43 Md €

470 €

7e décile

1 Md €

330 €

1,4 Md €

460 €

8e décile

980 M €

320 €

1,36 Md €

450 €

9e décile

648 M €

210 €

960 M €

310 €

10e décile

318 M €

100 €

476 M €

150 €

(a) Estimations de la cellule LexImpact de l’Assemblée nationale.

 En matière de redistribution, les travaux du rapporteur montrent que cette réforme sera particulièrement bénéfique pour les classes moyennes, avec 130 euros supplémentaires en moyenne par mois pour les cinquième à septième déciles, contre 100 euros et 90 euros respectivement pour les premier et deuxième déciles.

 Pour les personnes bénéficiant de prestations sociales, une hausse du montant des allocations familiales conduirait néanmoins, d’après la direction de la sécurité sociale et la Caisse nationale des allocations familiales, à une diminution de la prime d’activité ([59]) et du revenu de solidarité active ([60]), sans pour autant générer une baisse du niveau de vie.

  1.   Les modifications apportées par la commission

Suivant l’avis du rapporteur, la commission a adopté cet article modifié par l’amendement AS5 rectifié de Mme Sylvie Dezarnaud et de plusieurs de ses collègues du groupe Droite Républicaine.

Le II de l’article 1er prévoit ainsi que la Caisse nationale des allocations familiales rend compte, dans le rapport annuel d’activité de la branche famille de la sécurité sociale, des effets de l’attribution des allocations familiales dès le premier enfant à charge sur la précarité familiale, dans la rédaction rectifiée en commission avec l’avis favorable du rapporteur.

*

*     *

Introduit par la commission

Cet article demande au Gouvernement la remise d’un rapport au Parlement détaillant les pistes de réformes des allocations familiales.

Le présent article est issu d’un amendement AS1 de M. Jérôme Guedj et plusieurs de ses collègues du groupe Socialistes et apparentés, adopté avec l’avis favorable du rapporteur.

Il prévoit, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi, la remise par le Gouvernement d’un rapport détaillant les hypothèses d’une réforme des allocations familiales afin d’en garantir un accès universel, sans générer une diminution de leur montant.

Le rapport étudiera également l’opportunité de financer une telle réforme :

– d’une part, par l’abrogation de la réduction appliquée sur les cotisations d’allocations familiales sur les salaires les plus élevés prévue à l’article L. 241‑6‑1 du code de la sécurité sociale ;

– d’autre part, par une réforme du quotient familial.

*

*     *

Adopté par la commission sans modification

Cet article compense la charge pour les organismes de sécurité sociale de l’ouverture des allocations familiales dès le premier enfant à charge.

Le I de l’article 1er de la présente proposition de loi, qui modifie l’article L. 521–1 du code de la sécurité sociale, est de nature à augmenter la charge supportée par les organismes de sécurité sociale.

En conséquence, l’article 2 compense cette charge par la majoration, à due concurrence, de l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

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*     *


– 1 –

   travaux de la commission

Lors de sa première réunion du mercredi 28 mai 2025, la commission examine la proposition de loi visant à accorder le versement des allocations familiales dès le premier enfant (n° 1342) (M. Édouard Bénard, rapporteur) ([61]).

M. Édouard Bénard, rapporteur. Je suis heureux de vous présenter cette proposition de loi, cosignée par mes collègues du groupe Gauche démocrate et républicaine, qui est inscrite à l’ordre du jour de la journée qui nous sera réservée, le 5 juin.

L’an dernier, à l’occasion de la journée réservée à mon groupe, j’avais présenté une proposition de loi visant à réduire la précarité sociale et monétaire des familles monoparentales. Ce texte, qui avait été adopté en commission, prévoyait déjà de faire bénéficier ces familles des allocations familiales dès le premier enfant. C’est donc en toute cohérence que je vous présente aujourd’hui une proposition de loi visant à accorder le versement des allocations familiales dès le premier enfant pour toutes les familles.

La politique familiale, et en particulier les allocations familiales, sont primordiales dans la vie de nos concitoyens. Notre proposition de loi constitue une première étape vers une réforme des allocations familiales destinée à assurer une meilleure prise en compte de la nouvelle composition des foyers.

À l’heure actuelle, les allocations familiales ne sont versées qu’à partir du deuxième enfant à charge, sauf dans les départements d’outre-mer, ainsi qu’à Saint-Barthélemy et à Saint‑Martin, où elles sont accordées dès le premier enfant.

De manière tendancielle, les familles accueillent de moins en moins d’enfants. Depuis 1975, la part des familles comptant un ou deux enfants a progressé de plus de 29 % tandis que la proportion de familles comptant quatre enfants et plus a pratiquement diminué de moitié. Désormais, plus d’un tiers des familles – 36,5 % en 2020 – comptent un enfant unique. Sur les 663 000 enfants nés en 2024, 283 000 étaient des premiers-nés, soit 42,5 % du total.

Il n’existe pas de lien direct entre le système des allocations familiales et la situation démographique. Néanmoins, nous ne pouvons que constater un hiatus entre la réduction de la taille des fratries et le principe du versement des allocations familiales à partir du deuxième enfant à charge, alors que toute naissance – la première, comme les suivantes – s’accompagne de nombreuses dépenses. Entre l’année qui précède la naissance d’un enfant et celle qui la suit, le niveau des familles recule en moyenne de 2 à 11 %, selon l’Institut national de la statistique et des études économiques. Le problème du logement a été évoqué dans toutes les auditions que j’ai menées.

Verser les allocations familiales dès le premier enfant permettrait de mieux accompagner les familles composées d’un enfant unique, mais aussi celles au sein desquelles le dernier enfant de la fratrie est encore à charge. En effet, le bénéfice des allocations familiales s’arrête lorsque l’avant-dernier enfant de la famille atteint l’âge de 20 ans. Or à cet âge-là, les coûts liés à l’éducation d’un enfant peuvent être élevés, particulièrement s’il s’engage dans des études supérieures.

Notre politique familiale, qui reste encore largement tournée vers la naissance du troisième enfant, est en décalage avec l’évolution démographique des familles. Dans ce contexte, notre proposition de loi nourrit une triple ambition : elle vise à mieux accompagner toutes les familles, quel que soit le nombre d’enfants qui les compose, à réaffirmer l’universalité des allocations familiales et à ouvrir le débat sur une réforme de l’architecture globale de nos politiques familiales.

Nous connaissons une situation démographique inédite. La natalité a atteint son niveau le plus bas depuis un siècle : le taux de fécondité est ainsi descendu à 1,62 enfant par femme. Pourtant, le désir d’enfant ne diminue pas. Une enquête réalisée par l’Union nationale des associations familiales en 2023 révèle que ce désir est stable et qu’il s’élèverait à 2,27 enfants par femme. L’écart entre l’envie et la réalité dit quelque chose de notre responsabilité sociale. C’est l’élément sur lequel nous devons agir.

Accorder le bénéfice des allocations familiales dès le premier enfant permettrait de mieux accompagner les personnes qui souhaitent avoir un ou plusieurs enfants, mais qui, en raison de contraintes économiques, renoncent à ce projet ou en retardent la concrétisation. Lorsque je l’ai auditionnée, la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) m’a indiqué que les allocations familiales agissent davantage sur la temporalité de l’arrivée du premier enfant que sur le désir d’enfant. Or avancer la première maternité est essentiel, à la fois pour laisser la possibilité à ceux qui le souhaitent d’avoir d’autres enfants et pour lutter contre l’infertilité, qui touche un couple sur quatre et s’accentue avec l’âge des parents.

Si elle n’a pas de prix, l’arrivée d’un enfant dans une famille engendre des coûts substantiels pour les jeunes parents. La direction générale de la cohésion sociale n’a pas souhaité m’indiquer quels effets notre proposition pourrait avoir sur la pauvreté infantile. Cela étant, depuis 2016, nous assistons à un décrochage des prestations familiales par rapport au coût de la vie, que le Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge a estimé à 490 euros pour la période courant d’avril 2021 à mars 2025.

Accorder les allocations familiales dès le premier enfant permettrait d’aider financièrement les familles comptant un seul enfant, qui sont éligibles aux autres prestations familiales mais qui n’en perçoivent aucune lorsque leur enfant a entre 3 et 6 ans. En effet, l’allocation de base de la prestation d’accueil du jeune enfant (Paje) n’est versée que jusqu’aux 3 ans de l’enfant et l’allocation de rentrée scolaire ne l’est qu’une fois par an, à partir de l’âge de 6 ans.

J’en viens à notre seconde ambition. Entre 1932 et 1939, les allocations familiales étaient versées dès le premier enfant. Revenir à ce principe permettrait de réaffirmer l’universalité de ces allocations, à laquelle le groupe Gauche démocrate et républicaine est profondément attaché. Une telle mesure aurait le mérite de réinscrire la politique familiale dans une logique de redistribution horizontale, c’est-à-dire de solidarité des ménages sans enfant à l’égard de ceux qui en ont un, et de remédier au sentiment d’exclusion que ressentent certaines familles qui contribuent à la politique familiale sans pouvoir en bénéficier.

Si nous adoptions cette proposition de loi, nous prendrions en compte – et non en charge – toutes les familles, quel que soit le nombre d’enfants qui les compose, et chaque enfant serait pleinement considéré en tant que tel, indépendamment de son rang dans la fratrie.

Le texte est volontairement court, qui ne porte que sur le nombre d’enfants à partir duquel sont accordées les allocations familiales. Il ne constitue qu’une étape dans le débat relatif à la réforme des allocations familiales. Pour cette raison, je serai favorable aux amendements demandant un rapport sur ce sujet.

Si le versement des allocations familiales dès le premier enfant peut faire consensus, je suis bien conscient que le coût budgétaire de la mesure peut susciter l’opposition de certains d’entre vous.

L’investissement dans la famille doit être une priorité. En 2024, la branche famille de la sécurité sociale a présenté un résultat excédentaire de 1,1 milliard d’euros. Grâce à un transfert à la branche maladie d’un montant de 2,1 milliards, elle finance, depuis 2023, les indemnités journalières dues au titre du congé maternité après la naissance de l’enfant. En outre, la réduction de 1,8 point du taux de cotisation d’allocations familiales appliquée aux salariés dont la rémunération annuelle n’excède pas 3,5 Smic a représenté 9,46 milliards en 2023. Autrement dit, on a pas mal coupé : il convient désormais de réparer.

Lors de l’examen de la proposition de loi visant à simplifier et réorienter la politique familiale vers le premier enfant, présentée par Mme Bergantz lors de la journée réservée au groupe Les Démocrates, vous avez adopté à l’unanimité un amendement qui dispose que « la nation réaffirme le caractère universel des allocations familiales » et « se fixe pour objectif d’ouvrir le bénéfice des allocations familiales dès le premier enfant ». Aujourd’hui, faisons mieux que de nous fixer un objectif : adoptons cette proposition de loi.

M. Nicolas Turquois, président. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

Mme Angélique Ranc (RN). Nous ne pouvons que nous réjouir de ce texte qui vise à mettre fin à une injustice sociale subie par les ménages.

Alors que le nombre de familles composées d’un enfant unique est en constante augmentation et que le déclin démographique nous touche de plein fouet, il semble évident qu’il faut ouvrir les allocations familiales dès le premier enfant. Cependant, ne soyons pas dupes : cette mesure ne suffira pas à relancer la démographie ni à rendre justice aux familles françaises.

Certains points, qui auraient mérité de figurer dans la proposition de loi, en sont cruellement absents. Il s’agit, d’abord, du relèvement du plafond du quotient familial, qui a été arbitrairement ramené à 2 000 euros par le gouvernement de François Hollande en 2013. Ensuite, nous avons besoin de mesures sociales, car la précarité financière n’est pas la seule responsable du déclin démographique. Il faut ainsi faciliter l’accès au logement des jeunes ménages, développer des solutions de garde des enfants sur l’ensemble du territoire national ou encore réfléchir à des mécanismes permettant aux mères de concilier leurs aspirations professionnelles et familiales.

Ces dispositifs nécessitent des moyens financiers et humains qui manquent à notre société, alors que celle-ci est de plus en plus précaire. Un rééquilibrage doit être opéré au moyen d’une juste redistribution des richesses. Le groupe Rassemblement National propose depuis longtemps de réserver les allocations familiales aux ménages dont au moins l’un des deux parents est de nationalité française – ainsi, dans cette période d’incertitude budgétaire, bénéficieraient-elles avant tout à nos compatriotes.

Enfin, il est primordial de renforcer la lutte contre la fraude aux prestations familiales. Les dispositions actuelles ne semblent pas dissuader les fraudeurs de passer à l’action, puisque la fraude – détectée – a augmenté de 20 % par rapport à l’année précédente. Contrairement à ce que certains souhaitent nous faire croire, ces chiffres ne sont pas l’expression d’un fantasme. Ils devraient nous pousser à prendre la mesure de ce fléau et à lutter contre la montée en puissance de la fraude organisée.

Beaucoup de travail reste à faire, mais ce n’est qu’à ces conditions que nous pourrons enfin répondre aux aspirations des Français.

Mme Joséphine Missoffe (EPR). Les allocations de la Cnaf sont au cœur de notre modèle de sécurité sociale et de notre politique familiale. Elles apportent aux parents sérénité et sécurité. Elles s’inscrivent dans le cadre d’une justice sociale qui protège toutes les familles selon leurs besoins.

Voilà le troisième texte relatif à cette question que nous examinons depuis que j’ai rejoint la commission, en octobre. Nous sommes tous convaincus de la nécessité de rendre la parentalité possible pour tous les Français, indépendamment de leurs revenus, de leur situation conjugale ou du nombre d’enfants qui composent la famille.

Cette proposition de loi repose sur l’objectif partagé de mieux soutenir les familles déjà constituées tout comme les familles en devenir. Elle prend acte du nombre croissant de familles composées d’un enfant unique et vise à faire bénéficier davantage de ménages de la solidarité nationale. Toutefois, de nombreuses études laissent penser que le texte aura peu d’effets incitatifs et ne suffira pas pour revigorer la natalité.

Le groupe Ensemble pour la République salue la volonté exprimée dans ce texte et en partage l’ambition générale. Néanmoins, nous ne pouvons ignorer que l’impact financier d’une telle mesure s’élèverait d’emblée à plusieurs milliards d’euros, ce qui est loin d’être neutre dans le contexte budgétaire actuel.

Si les allocations familiales sont un réel vecteur d’égalité, nous restons convaincus qu’une politique familiale et nataliste puissante ne se limite pas aux prestations sociales. Notre groupe appelle à porter un regard critique et réformateur sur le système dans son ensemble, afin de le rendre plus simple et plus efficace. Pour que la parentalité redevienne une source d’épanouissement pour tous les parents, notre politique familiale se doit d’être ambitieuse et globale, dans l’esprit des 1 000 premiers jours et du service public de la petite enfance.

M. Louis Boyard (LFI-NFP). Pour réagir à ce qui a été dit par le Rassemblement national, il faut arrêter d’envisager la politique familiale sous un angle nataliste. Les ventres des femmes ne sont pas des outils pouvant être utilisés pour rééquilibrer les comptes sociaux. Vos propos témoignent de la faiblesse de votre programme économique.

Vous parlez de relancer la démographie, mais pouvez-vous me donner un seul exemple de politique familiale qui y soit parvenue ? Vous allez sans doute me citer la Hongrie, alors que ce pays n’a pas réussi à revenir à un indice conjoncturel de fécondité supérieur à 2 enfants par femme et que les progrès obtenus ont été acquis au prix de reculs dans le domaine des droits des femmes, notamment en matière d’interruption volontaire de grossesse. Toutes les actions en faveur des femmes y ont disparu ; ces dernières ont été noyées dans une politique familiale nataliste. Vous devriez plutôt parler du cœur du sujet, à savoir des moyens à employer pour faire progresser la justice et sortir les gens de la précarité.

Nous avons déjà débattu du versement des allocations familiales dès le premier enfant, notamment lors de la niche du groupe Les Démocrates. Afin que cette mesure s’applique à budget constant, vous aviez proposé de retirer des droits aux familles plus nombreuses : c’est une solution que la gauche ne peut pas accepter. J’aimerais que l’on discute, lors du prochain bureau de la commission, de la constitution d’un groupe de travail relatif à l’application de ce texte et à l’identification d’un gage. En effet, si l’on veut que la gauche et le centre – l’extrême droite, pour sa part, n’y comprend rien – réussissent à tomber d’accord, il va falloir que nous nous entendions sur un gage : c’est l’unique moyen d’aboutir.

M. Jérôme Guedj (SOC). Je remercie nos collègues du groupe GDR de nous permettre de prolonger le débat sur la politique familiale et la manière de la faire renouer avec ses objectifs originels, question qui passe trop souvent sous les radars. Nous sommes face à un enjeu de justice sociale. Lorsque nous évoquons le versement des allocations familiales dès le premier enfant, nous pensons tous aux familles monoparentales et en particulier à la figure de la maman solo, dont les ressources la rendent parfois inéligible à l’allocation de soutien familial.

Le fait d’accorder le bénéfice des allocations familiales – prestation théoriquement universelle – à partir du deuxième enfant et de laisser le soin aux prestations sous conditions de ressources de compenser le coût du premier enfant constitue une anomalie qui mine la logique de l’universalité. Cela appelle la mise en œuvre d’un dispositif simple et lisible.

Vous avez fait référence, monsieur le rapporteur, à l’amendement que nous avions introduit dans la proposition de loi de Mme Bergantz. Ce débat, conduit par strates successives, montre que l’Assemblée nationale est prête à faire avancer la logique de l’universalité.

Cette dernière doit s’accompagner d’une logique d’égalité. Les dispositifs de la politique sociale s’appliquent souvent dans des conditions moins favorables dans les départements et les régions d’outre-mer. En l’occurrence, c’est l’inverse, puisque ces territoires bénéficient du versement des allocations familiales dès le premier enfant. Pour une fois, nous pourrions réaliser un nivellement par le haut en étendant ce principe à la métropole – étant précisé que les montants seraient évidemment différents.

J’en viens, enfin, à la question financière. Pierre Moscovici a évoqué, tout à l’heure, lors de son audition, le montant des exonérations de cotisations sociales sur les salaires compris entre 2,5 et 3,5 Smic. Si nous supprimions ce « bandeau famille », comme le recommandent la Cour des comptes, le rapport Bozio-Wasmer et le rapport d’information sur les exonérations de cotisations sociales que j’ai présenté en 2023 avec Marc Ferracci, nous dégagerions les ressources nécessaires pour financer cette mesure.

M. Thibault Bazin (DR). En 1946, dans une France à reconstruire, la nation proclamait le principe fondateur de l’universalité des allocations familiales et le traduisait en actes. Elle reconnaissait ainsi que la famille n’est pas seulement une affaire privée mais un pilier de l’avenir national. Ce principe, marque de fabrique de l’État-providence, a été brisé en 2015, lorsque le versement de ces allocations a été soumis à des conditions de ressources. Depuis, l’universalité n’est plus que de façade dans la mesure où le montant versé à certaines familles est devenu symbolique.

Notre politique familiale est un peu schizophrène : on réduit le quotient familial et la Paje tout en appelant – du moins est-ce le cas de certains – à un réarmement démographique. Résultat : le taux de fécondité est tombé à 1,62 enfant par femme, soit son plus bas niveau depuis la Seconde Guerre mondiale, et, surtout, l’écart se creuse entre le désir d’enfant, qui est stable, à 2,27 enfants, et la réalité. La frustration de fécondité qui en découle traduit un échec collectif.

La conjoncture économique participe à la dégradation de la situation des familles, qui sont inquiètes pour leur avenir, mais ne saurait toutefois être rendue seule responsable de l’inaction des gouvernements successifs.

On pourrait considérer que votre texte va dans le bon sens, car 3,6 millions de familles sont à l’heure actuelle privées des bénéfices de notre politique familiale. Toutefois, pour être pleinement efficace, le versement des allocations familiales dès le premier enfant devrait s’inscrire dans le cadre d’une réforme plus large, que nos amendements auraient détaillée s’ils n’avaient pas été jugés irrecevables. Nous prônons un retour intégral à l’universalité, une revalorisation des prestations et la création d’une aide sociale unique qui valorise le travail et soutient les familles durablement. Nous souhaitons également que les fondements de l’aide aux familles, le soutien aux acteurs de l’effort démographique et la différenciation entre politique de soutien familial et redistribution sociale soient préservés.

Enfin, la branche famille n’a pas vocation à éponger les dérives budgétaires des autres branches. En outre, il serait possible de procéder à une meilleure allocation des ressources en son sein. La Cour des comptes vient d’évaluer à 6,3 milliards d’euros le montant des versements indus par la Cnaf. Je forme le vœu que, dans le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), le Gouvernement garantisse que ces excédents serviront à reconstruire une politique familiale pleinement universaliste – compte tenu des montants en jeu, ce véhicule législatif paraît en effet le plus adapté.

Mme Lisa Belluco (EcoS). Intégrées au régime général de la sécurité sociale dès sa création, en 1945, les allocations familiales ont été conçues pour soutenir la natalité et aider les familles à assumer la charge effective de leurs enfants. Malheureusement, elles ne sont plus adaptées aux enjeux de l’époque. Si le nombre moyen désiré d’enfants, qui est de l’ordre de 2,39 enfants par foyer, reste inchangé, le taux de fécondité n’est plus que de 1,68 enfant par femme. Autrement dit, malgré ce qu’il reste de nos politiques natalistes, les parents n’ont pas autant d’enfants qu’ils et elles le souhaitent.

Pour avoir des enfants, encore faut-il pouvoir donner la vie. Or la réautorisation de pesticides interdits, la pollution de l’eau et la contamination aux polluants éternels polluent aussi nos corps. Des milliers de femmes et d’hommes ne peuvent plus avoir d’enfants ou rencontrent d’importants problèmes de fertilité ; nous savons que les pollutions environnementales en sont la cause première.

Pour avoir des enfants, il faut également disposer de temps pour prendre soin d’eux. Pour cela, il faudrait allonger la durée des congés parentaux et permettre aux parents de confier, de temps en temps, leurs enfants aux grands-parents, ce qui suppose de ne pas reculer encore l’âge de la retraite.

Pour avoir des enfants, il faut enfin avoir les moyens de s’en occuper. Il nous faudrait un véritable service public de la petite enfance – dont nous attendons le déploiement –et le versement des allocations dès le premier enfant, en particulier pour les familles monoparentales, qui sont très exposées à la précarité – près de 40 % d’entre elles vivent sous le seuil de pauvreté, alors que la moyenne est de 14 %.

Cette proposition de loi s’attaque à ce dernier problème. En ouvrant le droit aux allocations familiales dès le premier enfant, votre texte supprime simplement une anomalie. Au nom de quoi, en effet, faudrait-il attendre le deuxième enfant pour percevoir des allocations familiales alors qu’on est confronté à une marche financière dès le premier enfant ? Au nom de quoi priver du bénéfice de ces allocations les 47 % de familles qui n’ont qu’un enfant ?

Le groupe Écologiste et Social soutiendra ce texte, qui est inspiré par un principe de justice sociale et qui va dans le sens d’une parentalité choisie plutôt qu’imposée par des politiques natalistes.

Mme Perrine Goulet (Dem). Alors que la France connaît un déclin de sa natalité sans précédent, il nous revient de trouver des solutions pour répondre à cette crise sociétale. Seules 663 000 naissances ont été enregistrées en 2024, soit 21,5 % de moins qu’en 2010. L’indicateur conjoncturel de fécondité s’établit à 1,62 enfant par femme alors que le seuil de renouvellement des générations est fixé à 2,05 enfants par femme.

Cela étant, l’intervention publique n’est pas toujours efficace en matière de relance de la natalité. En effet, la décision d’avoir un enfant relève de l’intimité profonde et dépend de nombreux facteurs, tels que la situation personnelle, l’emploi, le logement, la fertilité, etc. J’ai eu l’occasion de le rappeler, il y a quelques semaines, à l’occasion de la séance thématique de contrôle du groupe Les Démocrates consacrée aux évolutions démographiques et aux enjeux de notre politique familiale.

Pour relancer la natalité, il est nécessaire d’organiser l’accueil de la petite enfance et de faire en sorte que les femmes puissent facilement mener une activité professionnelle. Votre texte, monsieur le rapporteur, ne traite pas de ces deux sujets essentiels.

Conscients de l’enjeu démographique, nous avions inscrit, lors de la journée réservée à notre groupe, une proposition de loi, défendue par Anne Bergantz, qui visait à attribuer les allocations familiales dès le premier enfant en les conditionnant à un véritable mécanisme de financement. Le texte prévoyait d’instaurer une allocation d’environ 70 euros par enfant, quel que soit son rang, en la réservant aux enfants à naître afin de ne pas pénaliser les familles actuelles.

Si nous partageons pleinement votre objectif, nous sommes nettement plus réservés sur les moyens que vous proposez pour l’atteindre. Lors de l’examen de la proposition de loi d’Anne Bergantz, la commission avait unanimement soutenu le principe de l’universalité. Des textes reviennent régulièrement sur ce sujet. Il est maintenant temps que nous définissions ensemble les moyens de mieux prendre en compte l’évolution des familles tout en garantissant la soutenabilité financière du dispositif.

Compte tenu du coût de votre dispositif, estimé à 3 milliards d’euros, et de l’impossibilité d’amender le texte, en raison des règles de recevabilité financière, nous ne pourrons malheureusement pas soutenir cette initiative, même si nous pensons, comme vous, que les allocations familiales doivent être versées dès le premier enfant, car les familles ont changé.

M. Paul Christophe (HOR). Nous sommes tous préoccupés par le décrochage démographique de notre pays et les fragilités nouvelles que rencontrent les familles. La natalité baisse et la politique familiale peine à se réinventer.

Nous comprenons donc l’ambition de votre proposition de loi, monsieur le rapporteur, qui vise à reconnaître chaque enfant, dès le premier, dans notre système d’allocations, mais nous devons aussi regarder les choses avec lucidité. L’extension du versement des allocations familiales au premier enfant représenterait, à elle seule, un coût annuel de 5 milliards d’euros. Dans un contexte où la dépense publique atteint ses limites, une telle mesure, sans financement identifié, n’est pas soutenable. Vous ne proposez pas, en effet, de faire évoluer d’autres prestations ni d’opérer un ciblage accru : autrement dit, votre texte ne prévoit aucune compensation.

Surtout, la proposition de loi ne répond que partiellement aux vrais défis de la politique familiale : elle ne dit rien du soutien aux familles, en particulier monoparentales – même si je sais que le sujet vous préoccupe –, de l’accès aux modes de garde, des congés parentaux, du logement, de la santé ni de l’emploi. Or ces leviers sont déterminants dans le choix de fonder une famille et permettent aux parents d’exercer leurs responsabilités dans la dignité.

La politique familiale nécessite bien plus qu’une mesure isolée, aussi généreuse soit-elle dans son intention. Elle mérite une stratégie globale, ciblée, juste et lisible. C’est la raison pour laquelle nous avons utilisé notre droit de tirage annuel pour créer une mission d’information sur la baisse de la natalité afin de définir un objectif partagé et soutenable.

Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe Horizons & Indépendants, qui partage l’ambition d’un soutien renforcé aux familles, ne pourra pas se prononcer en faveur de votre texte en l’état mais appelle au débat sur cette question.

Mme Émeline K/Bidi (GDR). Sans surprise, nous soutiendrons le texte de notre collègue Édouard Bénard.

Bien évidemment, on ne fait pas d’enfant pour percevoir des allocations. Il faut ne pas en avoir pour penser qu’avec un montant maximal de 151 euros pour deux enfants de moins de 14 ans, on peut les nourrir, les vêtir, les loger, leur payer une éducation et des loisirs adaptés. Néanmoins, pour beaucoup de familles qui peinent à joindre les deux bouts, dans le contexte que l’on connaît, les allocations familiales sont primordiales.

Ces dernières représentent un pan de notre politique familiale mais n’exercent plus d’effets depuis longtemps sur la natalité. Il n’est que de constater qu’en France, une famille sur quatre est monoparentale – la proportion ne cesse d’augmenter. Ces foyers sont souvent composés d’une femme et d’un enfant et sont plus exposés que les autres à la précarité. Une étude de 2019 montrait que cinq ans après l’arrivée d’un enfant, le revenu salarial des femmes avait diminué de 25 %.

Les femmes assument encore la grande majorité des tâches domestiques. Elles sont en première ligne pour les soins et emmènent souvent les enfants aux visites médicales. Cette charge supplémentaire a des incidences sur la vie professionnelle et le déroulement de la carrière.

La pauvreté infantile est également un phénomène de plus en plus prégnant dans notre société.

Proposer le versement des allocations familiales dès le premier enfant traduit un changement de vision. C’est un moyen d’aider les femmes et les familles monoparentales, de sortir de la précarité infantile et de faire un pas vers la nouvelle société qui est la nôtre. Ceux qui s’opposent à ce texte au motif qu’il ne s’inscrit pas dans le cadre d’une stratégie globale et qu’il ne traite pas de la question des moyens ne proposent aucune autre solution.

M. Olivier Fayssat (UDR). Nous voterons cette proposition de loi, même si nous nourrissons un certain nombre de regrets. Comme M. Bazin, nous regrettons que l’on ait perdu de vue le principe d’universalité et que les allocations familiales restent soumises à des conditions de ressources. À l’instar d’Angélique Ranc, nous souhaitons revenir au quotient familial tel qu’il existait avant l’élection de François Hollande et estimons nécessaire d’exiger que l’un des deux parents, au moins, ait la nationalité française. Nous proposerons d’ailleurs un texte en ce sens lors de la niche du groupe UDR, fin juin.

M. Nicolas Turquois, président. Nous en venons aux questions des autres députés.

Mme Ersilia Soudais (LFI-NFP). Jusqu’en 2015, le montant des allocations était indépendant du revenu et ne variait que selon le nombre d’enfants à charge. Puis, sous l’impulsion de François Hollande, le montant des allocations a été divisé par deux pour les foyers gagnant entre 6 000 et 8 000 euros nets par mois – ce qui correspond à la tranche 2 – et par quatre au-delà de ce seuil – qui marque l’entrée dans la tranche 3.

L’argument de la justice sociale – les familles les plus modestes ont davantage besoin d’être aidées que les familles les plus riches – aurait pu être recevable, mais cette mesure n’a servi, en réalité, qu’à réaliser des économies, à hauteur de 800 millions d’euros, et non à accroître la redistribution en faveur des ménages modestes.

Le principe d’universalité est inhérent à une sécurité sociale forte. Il implique que chacun cotise en fonction de ses revenus et perçoive des prestations à raison de ses besoins. Ne pensez-vous pas qu’il faudrait revenir sur la modulation des allocations en fonction du revenu et que la justice sociale passe plutôt, entre autres, par l’abolition du quotient familial ?

M. le rapporteur. Nous regrettons la remise en cause de la redistribution horizontale qui prévalait depuis la création des allocations familiales. La modulation des allocations en fonction des ressources n’a permis qu’une hausse marginale, de l’ordre de 0,2 %, du revenu disponible des ménages appartenant aux deuxième et troisième déciles. Le gain engendré par la réforme n’a pas été redéployé vers les familles les plus précaires ni en direction d’autres prestations familiales. Il a été fait le choix de suivre une logique de restriction budgétaire, au détriment de toutes les familles.

Nous n’avons pas évoqué ce sujet dans notre proposition de loi car nous pensons qu’il aurait davantage sa place dans une grande loi sur la famille qui questionnerait l’architecture globale des politiques familiales et qui pourrait également traiter de l’accompagnement des modes de garde.

Comme l’a indiqué M. Guedj, le versement des allocations familiales dès le premier enfant pourrait être financé par la suppression des exonérations de cotisations sociales. Nous sommes favorables à la constitution du groupe de travail proposé par M. Boyard pour identifier des gages financiers.

Madame Goulet, le coût de la proposition de loi de Mme Bergantz est comparable à celui du présent texte si l’on prend en considération les effets de seuil induits par la complexité de nos mécanismes sociaux et fiscaux.

Enfin, le texte propose une mesure de réparation et d’égalité territoriale, puisque le versement des allocations familiales dès le premier enfant existe déjà dans les territoires ultramarins.

Article 1er : Ouvrir le bénéfice des allocations familiales dès le premier enfant

Amendement AS17 de Mme Angélique Ranc

Mme Angélique Ranc (RN). L’amendement vise à réserver les allocations familiales aux familles dont au moins l’un des parents est de nationalité française. Au-delà de la question de la nationalité, il s’agit de poser un principe de réciprocité. Les aides financées par la solidarité nationale doivent profiter en priorité à ceux qui y contribuent de manière durable. Dans un contexte de contrainte budgétaire et de crise de confiance dans l’action publique, il est légitime de recentrer notre politique familiale sur les citoyens français. Ceux‑ci attendent de la justice sociale, laquelle passe par la réciprocité entre les droits et les devoirs. Ceux qui participent à l’effort collectif, qui cotisent et qui s’inscrivent dans la durée en France doivent être prioritaires.

M. le rapporteur. Outre le fait que je suis fondamentalement opposé à votre proposition, je dois vous rappeler plusieurs éléments. Dans sa décision du 11 avril 2024 relative à la proposition de loi visant à réformer l’accès aux prestations sociales des étrangers, le Conseil constitutionnel a déclaré que « les étrangers jouissent des droits à la protection sociale, dès lors qu’ils résident de manière stable et régulière sur le territoire français ». De plus, l’article L. 512-1 du code de la sécurité sociale prévoit que le bénéfice des prestations familiales est ouvert aux personnes de nationalité française et aux personnes étrangères résidant en France ayant à leur charge un ou plusieurs enfants résidant en France. Enfin, le même code précise que les personnes étrangères bénéficiant des prestations familiales doivent séjourner régulièrement et principalement en France, soit pendant plus de neuf mois au cours de l’année civile de versement desdites prestations.

Avis défavorable.

Mme Ersilia Soudais (LFI-NFP). Le Rassemblement national est extrêmement prévisible. Nous avions vu cet amendement raciste arriver à des kilomètres. Le lien entre racisme et allocations familiales est d’ailleurs un vrai sujet. Il faudrait lutter contre le racisme qui sévit dans nos caisses d’allocations familiales (CAF). Une travailleuse sociale de 43 ans, qui travaille en Seine-Saint-Denis, rencontre régulièrement des personnes de toutes origines pour les aider à faire valoir leurs droits. Elle s’assure qu’elles soient bien reçues dans le service public français. Son constat est alarmant : la majorité de ces personnes affirment avoir été victimes ou témoins de propos racistes dans une CAF, par exemple : « Rappelez quand vous aurez quelqu’un pour traduire ou bien quand vous saurez parler français » ou encore : « Avec son nom arabe compliqué, ça va être encore un dossier complexe » ; dernier exemple, à propos de voyageurs : « Ceux-là, on ne pourra rien en faire, c’est encore une plaie à gérer. » Il n’y a pas assez de garde-fous pour empêcher ces pratiques racistes, qui sont aggravées par la précarité du personnel et le manque de moyens. Il faudrait plutôt s’attaquer à cela que d’opposer les gens les uns aux autres.

Mme Perrine Goulet (Dem). L’amendement laisse penser que tous les étrangers viennent en France pour les allocations familiales. Mais voyez ces aides-soignantes qui se rendent dans notre pays pour travailler, qui cotisent et apportent de la richesse. À cause de votre amendement, elles ne pourraient pas bénéficier d’une aide pour leurs enfants, alors même qu’elles accompagnent nos anciens dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, dans un contexte marqué par la pénurie de ces professionnels. Il serait dérangeant et inconstitutionnel de faire venir et cotiser des gens sans leur donner le droit aux allocations familiales. Nous voterons contre cet amendement.

M. Jérôme Guedj (SOC). Tout ceci est en effet affreusement prévisible. Il y a une contradiction majeure à défendre le principe d’universalité des allocations familiales tout en prônant ce qui n’est rien d’autre que la préférence nationale. Qui plus est, votre amendement introduirait une rupture d’égalité majeure. En effet, le financement de la branche famille repose sur tous les salariés, qui versent des cotisations, et sur toutes les personnes assujetties à la contribution sociale généralisée (CSG) au titre des revenus du travail, du capital et de remplacement. Or vous instituez une logique de fléchage : je travaille, je cotise, j’ai la nationalité française, je perçois. Allez donc au bout de la logique ! Dites : je ne travaille pas, je ne cotise pas, je n’ai pas la nationalité française, je ne perçois pas. C’est le contraire même de la logique d’universalité. En outre, toutes les études attestent que les étrangers vivant sur le territoire national cotisent plus qu’ils ne reçoivent du système de protection sociale.

Pour finir, il n’est nul besoin de jeter l’opprobre sur les agents des caisses de sécurité sociale pour dénoncer les soubassements racistes du Rassemblement national. Le racisme existe malheureusement dans tous les compartiments de la société, dans tous les milieux sociaux et tous les groupes politiques. Laisser entendre qu’il y a un racisme systémique dans les caisses d’allocations familiales, c’est le pire moyen de combattre cette discrimination.

M. Michel Lauzzana (EPR). Ce n’est pas à la politique familiale de régler les problèmes d’immigration. Elle ne résume pas non plus toute la politique nataliste. D’autres encore veulent en faire un outil pour améliorer le niveau de vie. Il faut être prudent. Dès 2017, notre ministre, Mme Buzyn, avait tenu à augmenter le complément de mode de garde pour aider les familles monoparentales. Toutefois, je ne suis pas sûr que la politique familiale puisse résoudre tous les problèmes de société. Sous la présidence de François Hollande, il avait été fait le choix de l’équité, par la modulation du montant des allocations familiales en fonction des ressources. M. Moscovici, premier président de la Cour des comptes, vient de nous expliquer que nous avions un gros problème d’économies. Il va nous falloir réfléchir à de nouvelles ressources ou à de moindres dépenses.

M. Hendrik Davi (EcoS). Cet amendement démontre une nouvelle fois l’obsession du Rassemblement national pour l’immigration, dont il fait à tort la cause de tous les problèmes de la société française. Notre système de protection sociale est fondé sur l’universalité, selon un principe qui devrait vous plaire : on travaille, on cotise, ce qui nous ouvre des droits au chômage, aux allocations familiales, à la retraite et aux soins.

La proposition de loi va dans le bon sens, en ouvrant les droits dès le premier enfant. Il n’y a pas de raison, en effet, que les familles composées d’un enfant aient moins de droits que celles qui en comptent deux. Cette mesure permettrait aussi de résoudre d’autres problèmes, y compris celui des retraites, puisqu’une partie des familles veulent des enfants mais ne peuvent concrétiser ce désir, notamment parce qu’elles n’ont pas les moyens de les faire garder. À partir du moment où l’on fiscalise la sécurité sociale et où l’on décide de financer la protection sociale par l’impôt plutôt que par la cotisation, on ouvre la voie à ce type de rupture avec l’universalisme. Dès lors que l’on travaille, on cotise, ce qui ouvre des droits aussi bien aux Français qu’aux étrangers, lesquels contribuent à la richesse de notre pays.

M. Thibault Bazin, rapporteur général. C’est un débat qui demande de la nuance car le système des allocations familiales est d’une réelle complexité. Il faut considérer le cas des réfugiés, des ressortissants de l’Algérie, pays qui bénéficie de dispositions particulières, de ceux de l’Espace économique européen et de la Suisse, qui bénéficient également d’un dispositif spécifique. Cela représente l’essentiel des personnes qui, sans avoir la nationalité française, bénéficient des allocations familiales.

À l’heure actuelle, une personne en situation irrégulière n’a pas droit aux allocations familiales. Quand les personnes ont cotisé, il est normal qu’elles puissent prétendre à un certain nombre de prestations mais qu’en est-il lorsqu’elles n’ont jamais cotisé ? Faut-il avoir travaillé pour bénéficier des allocations ? Ce qui est sûr, c’est qu’à partir du moment où l’on cotise, on a accès à des droits. Il faut aussi tenir compte des phénomènes d’attractivité. La question est encore plus complexe si l’on prend en compte les détachés.

M. Louis Boyard (LFI-NFP). L’amendement vise à ajouter l’alinéa suivant : « Le présent article s’applique aux familles dont au moins l’un des deux parents est de nationalité française. » En réalité, les allocations sont versées pour les enfants ; ce sont donc eux que vous allez sanctionner, alors qu’ils ne sont pas responsables de la situation. Il y a là une dimension morale que l’on doit prendre en compte : on ne peut pas légiférer aussi simplement.

Par ailleurs, j’aimerais dire à nos collègues de la droite, d’Horizons et du MoDem qu’il faut qu’ils arrêtent de voir la politique familiale à travers un prisme nataliste. La France est l’un des pays d’Europe qui a le taux de natalité le plus élevé. Un rapport de l’ONU de 2024 montre que l’humanité va entrer en récession démographique à partir des années 2080. C’est un fait anthropologique majeur. Cette phase de l’histoire de notre espèce est notamment liée à la place des femmes dans la société, à la baisse de la fertilité, à la précarité. C’est plutôt une bonne chose quand on voit les effets du dérèglement climatique.

Si vous pensez que la politique familiale sera capable d’inverser une tendance anthropologique, vous vous mettez le doigt dans l’œil. L’un des objectifs de la branche famille est d’accroître la natalité. Non seulement on voit que ça ne fonctionne pas – il suffit d’observer la situation dans les pays d’extrême droite volontaristes, où cette politique a eu pour seul effet de faire reculer les droits des femmes – mais, surtout, on passe à côté du vrai débat, qui devrait se concentrer sur la justice et l’égalité. Cessez de parler de politique nataliste : c’est un contresens historique et anthropologique.

M. Olivier Fayssat (UDR). Madame Soudais, le fait d’assimiler, comme vous l’avez fait, racisme et nationalité, est insensé. Il n’y a pas de critère de race, d’ethnie ou d’origine dans la nationalité française. Il serait vain d’essayer de vous convaincre mais il est un peu irritant, à la longue, d’entendre ce genre de propos.

Mme Joëlle Mélin (RN). Il y a deux problèmes. Premièrement, le revenu global des familles est trop bas, aussi bien en Europe que sur le continent africain. Les femmes sont parfois obligées de travailler dans des conditions difficiles parce que le salaire de leur époux ou de leur conjoint est insuffisant. Les salaires européens ont été tirés vers le bas, ce qui a causé nombre de difficultés, dont la baisse de la natalité, particulièrement dans notre pays. Pour régler cela, on est entraîné dans une spirale vicieuse.

Deuxièmement, d’une manière ou d’une autre, il y a toujours une réciprocité des droits pour les ressortissants européens, le règlement (CE) n° 883/2004 prévoyant que l’on transporte d’un pays à l’autre la totalité de ses droits sociaux – tout a été prévu en matière de couverture sociale, jusqu’aux modes de garde des enfants. Il en résulte que tous les Européens sont couverts. Tous ceux qui travaillent dans notre pays et qui cotisent ont bien évidemment droit aux mêmes prestations que les cotisants de nationalité française. Pour le reste, se pose le problème de la qualité contributive ou non contributive d’une allocation.

M. Paul Christophe (HOR). Monsieur Boyard, je ne voudrais pas que vous interprétiez mal mes propos : ce que j’ai dit, c’est qu’il nous faut considérer l’ensemble des éléments – parmi lesquels les modes de garde et les prestations familiales – qui permettraient d’accompagner une famille désireuse d’avoir un enfant – il ne s’agit pas d’imposer quoi que ce soit, ce qui serait absurde et constituerait un contresens historique, pour reprendre votre expression.

Quant à l’amendement, vous ne serez pas surpris d’apprendre que nous nous y opposerons. Je rejoins les propos de Perrine Goulet. Si l’on demande aux personnes que nous avons besoin d’accueillir, notamment pour travailler dans nos hôpitaux, de laisser leur famille à la porte, nous aurons du mal à être attractifs. C’est une erreur de proposer cet amendement, qui revient souvent, année après année, notamment lors de l’examen des PLFSS ; j’aimerais que le sujet soit clos une fois pour toutes.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS16 de Mme Sylvie Dezarnaud

M. le rapporteur. Cet amendement a pour objet d’intégrer dans le rapport annuel de la Cnaf les conséquences de l’ouverture des allocations familiales dès le premier enfant sur la réduction de la pauvreté infantile. L’un des objectifs de la proposition de loi est précisément de diminuer cette forme de pauvreté, alors que celle-ci est en expansion. J’en profite pour réaffirmer qu’il ne s’agit pas d’une proposition de loi nataliste ou de réarmement démographique mais d’un texte d’équilibre destiné à soutenir toutes les familles, en particulier les enfants.

En 2021, le taux de pauvreté des mineurs s’élevait à 20,6 % contre 14,5 % pour l’ensemble de la population ; le pourcentage atteignait 46 % pour les enfants vivant avec une mère isolée et 22 % pour ceux qui vivent avec un père isolé. Disposer de données annuelles sur ce sujet serait en effet utile.

Avis favorable.

M. le rapporteur général. Le terme de « pauvreté infantile » me pose problème ; sans doute serait-il plus juste de parler de « précarité familiale ». La délégation aux droits des enfants a d’ailleurs produit un rapport sur ce sujet. Serait-il possible de rectifier l’amendement en ce sens, monsieur le rapporteur ?

M. Louis Boyard (LFI-NFP). Je ne comprends pas trop l’amendement. En gros, on se demande si l’attribution des allocations familiales dès le premier enfant va réduire la pauvreté des familles. Je n’ai pas besoin d’un rapport pour comprendre que ce sera le cas. On peut le voter, monsieur Bazin, mais ensuite, il ne faudra pas nous reprocher de demander des rapports trop bavards...

Par ailleurs, je voudrais dire à nos collègues du Rassemblement national que les femmes n’ont pas commencé à travailler à partir de 1950. En réalité, elles ont toujours travaillé mais elles le faisaient, autrefois, dans un milieu intrafamilial sans percevoir de rémunération. Cela commence en fait aux alentours de 1850 et ce n’était pas pour aider leur famille : les fabriques avaient besoin d’elles pour se relancer, étant donné qu’elles les payaient deux fois moins que les hommes. Par ailleurs, le fait que les femmes travaillent est une bonne chose puisque cela leur permet de toucher un salaire et d’être autonomes.

Mme Angélique Ranc (RN). Monsieur Boyard, c’est la mère de trois enfants qui a arrêté de travailler pendant plus de cinq ans pour s’en occuper qui vous parle. Beaucoup de femmes aimeraient travailler, sauf que, face au coût du carburant pour aller au travail, de la garde des enfants, du périscolaire et de la cantine, elles n’ont parfois pas d’autre choix que de rester à la maison.

M. Nicolas Turquois, président. Je rappelle la rectification qui a été apportée à l’amendement : le terme « pauvreté infantile » a été remplacé par celui de « précarité familiale ».

La commission adopte l’amendement rectifié.

Puis elle adopte l’article 1er modifié.

Article 1er bis (nouveau) : Rapport détaillant les pistes de réforme des allocations familiales

Amendements AS5 de M. Thibault Bazin, AS1 de M. Jérôme Guedj et AS13 de M. Louis Boyard (discussion commune)

M. le rapporteur général. Lors de l’examen de la proposition de loi de Mme Bergantz visant à simplifier et réorienter la politique familiale vers le premier enfant, notre commission avait voté un amendement demandant un rapport. Par notre amendement, nous demandons au Gouvernement un rapport plus complet, qui devra « détailler les pistes de réforme des allocations familiales, en distinguant celles relevant de la politique familiale de celles, éventuellement complémentaires, relevant de la politique sociale ». Nous souhaitons également qu’il « évalue le coût et les modalités d’une revalorisation des allocations familiales pour que celles-ci soient réellement universelles et versées pour chaque enfant ». Il devra en outre « étudier le coût et les modalités de mesures sociales de compensation de ce que pourraient perdre certaines familles relativement à la revalorisation suscitée ». Enfin, il étudiera « l’opportunité de financer ces scénarios par une réforme du quotient familial, sans que celle‑ci entraîne sa diminution ni son plafonnement ».

M. Jérôme Guedj (SOC). Tout le monde s’accorde à dire qu’avec cette proposition de loi, on met le pied dans la porte mais qu’il conviendrait de questionner les outils de la politique familiale. En particulier, il faut réexaminer ce qui est soumis à des conditions de ressources et ce qui relève de l’universalité. C’est la raison pour laquelle nous proposons, par notre amendement, une demande de rapport relative aux pistes de réforme des allocations familiales, qui permettrait de faire le point sur un certain nombre de questions, y compris sur les décisions prises récemment. À titre personnel, j’ai toujours été opposé à la modulation des allocations familiales en fonction des revenus du ménage, au nom du principe d’universalité et pour ne pas donner un argument à ceux qui veulent transformer la sécurité sociale, qui est un outil d’égalité, en un outil d’équité. Certains expliquent de la même façon que l’on pourrait rembourser les soins de ville ou les médicaments en fonction des revenus du patient. Ce serait une atteinte au principe d’universalité qui ferait courir le risque d’une remise en cause du consentement à la cotisation et à l’impôt pour financer notre système de sécurité sociale.

Il faut aussi aborder ces sujets pour tordre le cou à certaines idées reçues. Les allocations familiales sont universalisées depuis une loi adoptée en 1975 sous le gouvernement de Jacques Chirac, entrée en vigueur le 1er janvier 1978, en vertu de laquelle le bénéfice des allocations familiales n’est plus conditionné à l’exercice d’une activité salariée. Le fait de résider en France de manière stable et régulière suffit. C’était là l’accomplissement de l’ambition originelle d’universalité. Il a fallu attendre 1999 pour que l’assurance maladie soit à son tour universalisée, c’est-à-dire déconnectée de l’activité professionnelle. Ce sont donc des prestations non contributives, pour partie, ce qui explique qu’elles soient financées, pour partie, par la CSG. De grâce, ne réintroduisez pas l’idée selon laquelle il faut travailler et cotiser pour bénéficier des allocations familiales alors qu’il suffit de résider sur le territoire national et d’acquitter la CSG, quel que soit son niveau de revenu.

M. Louis Boyard (LFI-NFP). La demande de rapport que nous formulons par notre amendement est très politique. Monsieur Bazin, vous évoquez des mesures de compensation, ce qui signifie que certains subiront peut-être une baisse de revenus. Nous craignons que l’on ne revienne à l’euro constant, ce qui explique que nous ne voterons pas l’amendement. Monsieur Guedj, il y a quelque chose d’assez contradictoire dans votre demande. En effet, vous visez l’universalité de l’accès aux allocations familiales sans diminution de leur montant, tout en demandant leur progressivité en fonction de l’âge des enfants et des revenus. Il n’est pas exact de dire que les allocations familiales sont universelles, puisqu’en 2015, sous la présidence de M. Hollande, une réforme, qui était surtout une mesure d’économies, a été votée. Lorsqu’on prétend défendre une sécurité sociale universelle, il faut assurer une véritable égalité ; je n’imagine pas un remboursement des médicaments variable en fonction des revenus. On devrait revenir à une véritable universalité et supprimer les dispositions adoptées en 2015.

M. le rapporteur. Comme je l’ai dit dans mon propos liminaire, la proposition de loi constitue une étape dans le débat sur les allocations familiales. Un rapport pourrait utilement éclairer la représentation nationale sur les enjeux et les propositions de réforme. L’amendement de M. Guedj évoque deux pistes de financement : une abrogation de la réduction appliquée sur les cotisations d’allocations familiales patronales pour certains niveaux de salaires et une réforme du quotient familial, alors que les deux autres amendements mentionnent uniquement cette dernière.

En conséquence, je donne un avis favorable sur l’amendement AS1 de M. Guedj. Je demande le retrait des amendements AS5 et AS13 ; à défaut, je m’en remettrais à la sagesse de la commission.

M. le rapporteur général. Je n’ai fait que reprendre l’esprit de l’amendement qui avait été adopté par notre commission sur la proposition de loi d’Anne Bergantz. Par cohérence, je le maintiens.

La commission rejette l’amendement AS5.

Puis elle adopte l’amendement AS1.

En conséquence, l’article 1er bis est ainsi rédigé et l’amendement AS13 tombe.

Article 2 : Gage financier

La commission adopte l’article 2 non modifié.

Titre

Amendement AS4 de M. Thibault Bazin

M. le rapporteur général. Les amendements que j’avais déposés pour rétablir l’universalité des allocations familiales ayant été jugés irrecevables, je retire celui‑ci, par cohérence.

L’amendement est retiré.

 

La commission adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

*

*     *

En conséquence, la commission des affaires sociales demande à l’Assemblée nationale d’adopter la proposition de loi figurant dans le document annexé au présent rapport.

– Texte adopté par la commission : https://assnat.fr/1IcoEx

– Texte comparatif : https://assnat.fr/jiv9nm

 


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   ANNEXE N° 1 :
LISTE DES PERSONNES entendues PAR Le RAPPORTEUR

(Par ordre chronologique)

       Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf)  Mme Gaëlle Choquer-Marchand, directrice générale déléguée chargée des politiques familiales et sociales, et Mme Klara Le Corre, chargée des relations institutionnelles

       Union nationale des associations familiales (Unaf) – M. Bernard Tranchand, président, Mme Guillemette Leneveu, directrice générale, et Mme Claire Ménard, chargée des relations parlementaires

       Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA)  Mme Hélène Périvier, présidente

       Direction de la sécurité sociale (DSS)  Mme Marion Muscat, sous‑directrice de l’accès aux soins, des prestations familiales et des accidents du travail

       Table ronde réunissant des associations familiales

– Fédération nationale des familles de France  M. Fouzi El Mazzouz, chargé de mission Éducation, et Mme Émilie Souplet, présidente du pôle Éducation

 Fédération syndicale des familles monoparentales (FSFM)  Mme Josette Elombo, présidente, et Mme Véronique Obé, chargée de mission


– 1 –

   ANNEXE N° 2 :
TABLEAU DU MONTANT DES ALLOCATIONS FAMILIALES

Source : site internet des allocations familiales.


– 1 –

   ANNEXE n° 3 :
TEXTES SUSCEPTIBLES D’ÊTRE ABROGÉS OU MODIFIÉS
À L’OCCASION DE L’EXAMEN DE LA PROPOSITION DE LOI

Proposition de loi

Dispositions en vigueur modifiées

Article

Codes et lois

Numéro d’article

1er

Code de la sécurité sociale

L. 521‑1

 


([1]) Julien Damon, Les batailles de la natalité, 2024.

([2]) Loi du 11 mars 1932 modifiant les titres III et V du livre Ier du code du travail et l’article 2101 du code civil.

([3]) Décret-loi du 29 juillet 1939 relatif à la famille et à la natalité française.

([4]) Article 9 de ladite loi.

([5]) Julien Damon, op. cit.

([6]) Résultant de l’adoption d’un amendement déposé en séance publique par la rapporteure de la branche famille du projet de loi de financement de la sécurité sociale, Mme Marie-Françoise Clergeau, et par l’ensemble du groupe socialiste.

([7]) Direction de la sécurité sociale.

([8]) Rapport n° 3168 de M. Stéphane Viry, président, et Mme Nathalie Élimas, rapporteure, fait en conclusion des travaux de la mission d’information créée par la Conférence des présidents de l’Assemblée nationale sur l’adaptation de la politique familiale aux défis de la société du XXIe siècle, 2020.

([9]) Insee, « France, portrait social », 2016.

([10]) Insee, « Bilan démographique 2024 », 14 janvier 2025.

([11]) Note pour le débat en séance publique du 27 mars 2025 sur le thème : « Dans un contexte d’évolution démographique, quels enjeux pour notre politique familiale ? ».

([12]) Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), « Mesurer le coût de l’enfant : deux approches à partir des enquêtes Budget de familles », juin 2015.

([13]) Insee, « Niveau de vie et pauvreté selon la configuration familiale », 2021.

([14]) Insee, « L’effet d’une naissance sur le niveau de vie des ménages », 2011.

([15]) Insee, « Entreprises, enfants : quels rôles dans les inégalités salariales entre femmes et hommes ? », 2019.

([16]) Union nationale des associations familiales, « L’idéal personnel moyen du nombre d’enfants en France », 2023.

([17]) Institut national d’études démographiques, « Étude des relations familiales et intergénérationnelles », 2005.

([18]) Direction de la sécurité sociale.

([19]) Insee, « Les familles en 2020 », 13 septembre 2021.

([20]) Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge, « Panorama des familles d’aujourd’hui », 2021.

([21]) Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge, op.cit.

([22]) Article R. 521‑1 du code de la sécurité sociale.

([23]) Cour des comptes, rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, chapitre XIII : « Les aides aux familles nombreuses : des dépenses stabilisées, une cohérence à améliorer », mai 2024.

([24]) Compte non tenu des prestations familiales pour les enfants en situation de handicap : allocation journalière de présence parentale, allocation d’éducation de l’enfant handicapé.

([25]) Article L. 543‑1 et R. 543‑2 du code de la sécurité sociale.

([26]) C’est le cas notamment de la prime d’activité, du revenu de solidarité active et des allocations personnalisées au logement.

([27]) Insee, « Les familles en 2020 », 13 septembre 2021.

([28]) Article L. 551‑1 du code de la sécurité sociale.

([29]) Cour des comptes, rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, Chapitre XIII : « Les aides aux familles nombreuses : des dépenses stabilisées, une cohérence à améliorer », mai 2024.

([30]) Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge, « Retour sur l’évolution du pouvoir d’achat des prestations familiales et de solidarité », mars 2025.

([31]) Ibid.

([32]) Insee, « Les revenus et le patrimoine des ménages », Niveau de vie et pauvreté des enfants, octobre 2024.

([33]) Insee, « Les niveaux de vie en 2010 », septembre 2012.

([34]) Insee, « Les familles en 2020 », 13 septembre 2021.

([35]) Annexe au projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale de l’année 2023, rapport d’évaluation des politiques de sécurité sociale « Famille ».

([36]) Samir Hamamah, Salomé Berlioux, Rapport sur les causes d’infertilité. Vers une stratégie nationale de lutte contre l’infertilité, février 2022.

([37]) Article 1er du projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale de l’année 2024.

([38]) Annexe au projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale de l’année 2023, rapport d’évaluation des politiques de sécurité sociale « Famille ».

([39]) Annexe au projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale de l’année 2023, présentation et évaluation des mesures d’exonération de cotisations.

([40]) Décret-loi du 12 novembre 1938 relatif aux aides sociales.

([41]) Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), Minima sociaux et prestations socialesMénages aux revenus modestes et redistribution, octobre 2024.

([42]) Articles L. 521‑1 et D. 521‑1 du code de la sécurité sociale.

([43]) Article R. 521‑1 du code de la sécurité sociale.

([44]) Article 85 de la loi n° 2014‑1554 du 22 décembre 2014 de financement de la sécurité sociale pour 2015.

([45]) Articles L. 521‑1 et D. 521‑1 du code de la sécurité sociale.

([46]) Articles L. 521‑1 et D. 521‑1 du code de la sécurité sociale.

([47]) Article D. 521‑1 du code de la sécurité sociale.

([48]) Article L. 755‑11 du code de la sécurité sociale.

([49]) Insee, « La grande pauvreté bien plus fréquente et beaucoup plus intense dans les DOM », 2022.

([50]) Site internet des allocations familiales.

([51]) À l’exception de Mayotte où il n’y a aucune modulation en fonction des revenus, quel que soit le nombre d’enfants à charge et où des dispositions spécifiques réduisent le montant des allocations familiales à partir du troisième enfant.

([52]) Article D. 755‑5 du code de la sécurité sociale.

([53]) Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), édition 2023, décembre 2023.

([54]) Direction de la sécurité sociale, Dossier statistique des prestations familiales – édition 2023, décembre 2023.

([55]) Rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale – Résultats 2023 – Prévisions 2024 et 2025, octobre 2024.

([56]) Le coût net de cette réforme, compte tenu de versements moindres en revenu de solidarité active et en prime d’activité, s’élève à 1,8 milliard d’euros.

([57]) Cellule mise en œuvre par la direction du contrôle et de l’évaluation.

([58]) Rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale – Résultats 2023 – Prévisions 2024 et 2025, octobre 2024.

([59]) Le montant de la prime d’activité correspond à la somme d’un montant forfaitaire, majoré selon les situations, d’une fraction des revenus professionnels du foyer (61 % à date) et de bonifications individuelles, retranchées des ressources prises en compte par le foyer – dont les allocations familiales.

([60]) Le montant du revenu de solidarité active est calculé sur la base de la différence entre le montant forfaitaire, qui varie avec la situation du foyer, et l’ensemble des ressources perçues au cours des trois derniers mois – dont les allocations familiales.

([61]) https://assnat.fr/hNSGjT