N° 1595
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 18 juin 2025.
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LA PROPOSITION de loi pour la relance d’une politique nataliste,
Par M. Bartolomé LENOIR,
Député.
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Voir le numéro : 1412.
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SOMMAIRE
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Pages
Article 1er Rétablissement de l’universalité des allocations familiales
Article 2 Mise en place des allocations familiales dès le premier enfant
Article 3 Rehaussement du plafonnement du quotient familial
Article 4 Gage de recevabilité
ANNEXE N°1 : LISTE DES PERSONNES entendues PAR Le RAPPORTEUR
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Le préambule de la Constitution de 1946, auquel notre Constitution proclame son attachement, dispose que « la Nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement ».
La politique familiale découle de ce principe. En vertu de cet engagement qui a désormais valeur constitutionnelle, l’État a, depuis près de cent ans, entrepris de compenser pour les familles la charge que représente l’éducation d’un enfant, selon une logique horizontale visant à garantir un même niveau de vie aux foyers, avec ou sans enfant.
Ce principe est également aux fondements de notre sécurité sociale, dont la branche famille constituait un pilier majeur lorsqu’elle a vu le jour en 1945. Aux débuts de la IVe République, 40 % des dépenses de la sécurité sociale étaient ainsi consacrées à la branche famille.
Il existait alors un consensus politique fort autour de cette politique familiale, conçue comme un investissement au bénéfice de la Nation tout entière. Ce consensus a été préservé, tant bien que mal, jusqu’au quinquennat du président François Hollande (2012-2017), lequel a porté un coup sans précédent à la politique familiale, entre autres en mettant fin à l’universalité des allocations familiales, désormais placées sous conditions de ressources.
À la même époque, le quotient familial, qui permet de tenir compte de la charge de famille dans le calcul de l’impôt sur le revenu, subissait deux abaissements successifs de son plafonnement, portant une entorse manifeste à l’article 13 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen – également de valeur constitutionnelle – en vertu duquel « la contribution commune doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés ».
L’on admettait ainsi que la politique familiale fût fondue dans une politique sociale, au risque de disparaître. Et l’on estimait que cela n’aurait d’ailleurs aucun impact sur la natalité des Français, ces mesures ne touchant « que les riches ».
Dix ans plus tard, le constat est tout autre : la natalité de la France s’effondre à des niveaux jamais vus depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, alors que la France ne comptait que 40 millions d’habitants. Contrairement à ce qui était affirmé il y a dix ans, les coups de rabot sur la politique familiale n’ont pas concerné « que les riches » ; ils ont massivement percuté les classes moyennes, qui sont aujourd’hui celles qui ont le moins d’enfants. Sans pour autant aider davantage les familles pauvres.
Face à cette situation, le fatalisme n’est pas de mise. Il faut restaurer la liberté de choix des Françaises et des Français qui souhaitent avoir des enfants, au bénéfice de toute la communauté nationale. Il est donc de la responsabilité de la représentation nationale de redonner à la France une vraie politique familiale, conforme à sa vocation initiale, et qui serait de nature à créer le choc de confiance dont les familles françaises ont besoin.
En 2024, la France a enregistré 663 000 naissances, soit 2,2 % de moins qu’en 2023, et 21,5 % de moins qu’en 2010. Cela représente 180 000 naissances en moins chaque année, soit pratiquement l’équivalent de la population de Lille.
Les chiffres disponibles pour le début de l’année 2025 font apparaître une poursuite de cette baisse ([1]). Au cours des cinq derniers mois pour lesquels les statistiques sont disponibles, le nombre de décès a même été supérieur au nombre de naissances enregistrées, rendant très probable l’apparition prochaine d’un déficit naturel. En 2024, le solde naturel ([2]) a été à peine positif (+ 17 000). Si les projections de l’Institut national d’études démographiques (Ined) tablent sur l’apparition d’un déficit naturel en 2027, elles sont fondées sur l’hypothèse d’une stabilité de l’indice de fécondité qui ne semble pas se vérifier.
nombre de naissances, de décès et solde naturel depuis 1965
En effet, le nombre de femmes en âge de procréer étant globalement stable, il apparaît que la baisse de la natalité résulte essentiellement d’une chute rapide de l’indice de fécondité. Alors que la France faisait figure d’exception en Europe, avec un indice dépassant les deux enfants par femme au début des années 2010, celui-ci n’a cessé de se rétracter depuis, pour atteindre 1,62 enfant par femme, son niveau le plus bas depuis 1919.
Le graphique ci-après montre que la baisse de l’indice de fécondité des femmes s’est accélérée depuis 2014 – année de l’entrée en vigueur de l’abaissement du plafonnement du quotient familial. Passé le léger rebond de 2021, lié à l’effet de compensation de l’épidémie de covid-19, la baisse de l’indice de fécondité a connu une nouvelle accélération depuis 2022.
évolution du nombre de naissances et de femmes en âge de procréer et indicateur conjoncturel de fécondité depuis 1995
Si la fécondité baisse globalement en France, indépendamment des zones géographiques et des milieux sociaux, les données disponibles ([3]) font apparaître une baisse plus prononcée encore parmi les classes moyennes. Ainsi, le taux de fécondité des premier à deuxième déciles de la population en termes de niveau de vie, de même que celui des cinquième à dixième déciles, demeure globalement supérieur à 1,7 enfant par femme, quand il est inférieur ou égal à 1,5 enfant pour les femmes situées entre le deuxième et le cinquième décile.
La chute de la natalité a un impact grave pour la Nation, avec des conséquences qui sont d’ores et déjà visibles et qui ne feront que s’amplifier au cours des prochaines années et décennies. Au-delà de l’aporie dans laquelle elle place notre système de retraites par répartition, fondé sur un équilibre entre le nombre d’actifs et le nombre de retraités, cette baisse drastique des naissances sert d’argument à une rétraction inquiétante des services publics, singulièrement dans les zones rurales, qui sont les plus touchées. Les fermetures de classes, puis d’écoles, n’en sont que les premiers signes.
Alors que de plus en plus de pays font de la relance d’une politique nataliste une priorité sur le plan politique, illustrant bien l’importance des enjeux sous‑jacents ([4]), le monde politique français semble persister dans un certain déni. Après avoir longtemps estimé que la baisse de la fécondité n’était que conjoncturelle, les instituts ([5]) ont fini par admettre que la tendance risquait de se poursuivre. Cependant, comme l’a souligné l’Union nationale des associations familiales (Unaf) lors de son audition, « la problématique démographique n’est pas assez mise en avant par le monde politique. Par exemple, pour les retraites, on pense qu’on ne peut pas agir, alors qu’en réalité, on peut agir. »
Il importe d’examiner de plus près les ressorts de la baisse actuelle de la fécondité des femmes pour déterminer si elle résulte d’une évolution sociétale consciente et volontaire, ou de contraintes – infertilité, difficultés économiques et sociales, etc. – faisant obstacle à un désir d’enfant.
L’analyse du désir d’enfant permet de renseigner sur le caractère plus ou moins volontaire de la baisse du taux de fécondité des femmes. Lors de leur audition, Mme Anne Solaz et M. Milan Bouchet-Valat, chercheurs à l’Ined, ont fait état des résultats d’une enquête réalisée en 2024, et dont les résultats devraient être prochainement publiés.
Cette enquête porte sur le nombre idéal d’enfants que les femmes souhaiteraient avoir à différents âges de la vie. En 1998, ce nombre se situait en moyenne autour de 2,7 enfants par femme, quel que soit l’âge de la vie. En 2024, il avoisine plutôt les 2,3 enfants par femme. On observe ainsi indéniablement une diminution du désir d’enfant. Cependant, il est également manifeste que le désir d’enfant demeure très nettement supérieur au taux de fécondité, lequel s’établit à 1,62 enfant par femme en 2024, ce qui suggère l’existence de contraintes extérieures qui viennent faire obstacle à ce désir.
Les données de cette enquête permettent cependant de mettre en évidence la montée en charge d’un phénomène « no kids », avec de plus en plus de femmes qui ne veulent pas du tout avoir d’enfant, à l’image de Mme Bettina Zourli, que le rapporteur a auditionnée. Si seules 2 % des femmes de 18 à 49 ans étaient concernées en 2006, elles sont 13 % à l’être en 2024, et même 20 % s’agissant des 18‑24 ans.
Les ressorts de cette baisse du désir d’enfant sont complexes et difficiles à analyser. Parmi les causes fréquemment identifiées apparaissent l’aspiration des femmes à ne pas se sacrifier, et à ne pas sacrifier leur carrière professionnelle, ou encore une anxiété en lien avec la situation géopolitique ou la crise climatique.
Cependant, pris isolément, aucun de ces facteurs ne semble pouvoir, à lui seul, expliquer la baisse du taux de fécondité à laquelle la France est confrontée. Les chercheurs précités de l’Ined ont ainsi souligné, lors de leur audition, que les deux seuls facteurs qui ressortaient un peu dans les enquêtes menées, l’inquiétude pour les générations futures et le changement climatique, ne semblaient pouvoir expliquer la perte que de 0,1 point de fécondité au plus.
Dans ce contexte, il importe de se demander si une baisse de la fertilité des couples contribue à expliquer l’écart entre le désir d’enfants et l’indice de fécondité. La prise de conscience récente sur l’endométriose – une maladie répandue et avec un impact très important sur la fertilité – suggère que ce facteur n’est pas anecdotique.
La diminution de la fertilité des couples est en effet largement documentée. Elle résulte en grande partie du recul de l’âge auquel les femmes ont leur premier enfant, dans un contexte où la fertilité des femmes diminue dès l’âge de 30 ans. L’âge moyen des mères à l’accouchement est ainsi passé de 29 ans en 2000 à 31 ans aujourd’hui. L’âge des pères influe également, bien que leur fertilité se réduise plus lentement, à partir de 35 ans.
La réduction de la fertilité résulte aussi de paramètres comportementaux et surtout environnementaux plus ou moins bien identifiés, et dont les effets croisés et cumulés sont encore l’objet de recherches. Ils engendrent une baisse de la qualité du sperme des hommes, très visible sur quelques décennies ; ainsi la concentration moyenne des spermatozoïdes dans le sperme a diminué de plus de 50 % entre 1973 et 2011.
Au total, d’après les données de l’enquête nationale périnatale ([6]), entre 15 et 25 % des couples seraient concernés par des problèmes de fertilité, un chiffre qui tomberait toutefois à 10 % après deux années de tentatives. L’impact des problèmes de fertilité ne doit donc pas être négligé lorsqu’on interroge la baisse de la fécondité, même si les démographes tendent à considérer que ce paramètre demeure résiduel.
L’écart important entre le désir d’enfants et l’indice de fécondité illustre une perte de liberté des couples, qui ne peuvent pas avoir autant d’enfants qu’ils le souhaiteraient.
Ce phénomène est particulièrement exacerbé en zone rurale. D’après une enquête réalisée par l’Union départementale des associations familiales (Udaf), ce sont près de la moitié des familles creusoises (48 %) qui ont moins d’enfants que ce qu’elles souhaiteraient dans l’idéal.
Les familles sont en effet aujourd’hui exposées à des contraintes financières et logistiques majeures, qui tendent à s’accentuer. L’éducation d’un enfant induit, pour les familles, une charge supplémentaire estimée à 30 % du coût d’entretien d’un adulte pour un enfant de moins de 14 ans, et à 50 % au-delà ([7]).
Pour subvenir à ces charges importantes, les familles sont de moins en moins soutenues. Outre la suppression de l’universalité des allocations familiales et la baisse du quotient familial, on peut citer plusieurs autres mesures qui, depuis le milieu des années 2010, sont venues dégrader la situation relative des familles :
– réforme du congé parental, qui a abouti à « économiser » plus d’un milliard d’euros au détriment des parents, en particulier des plus modestes ;
– réformes du complément de libre accueil du mode de garde et de la prestation d’accueil du jeune enfant, qui ont abouti à en réduire le bénéfice ;
– suppression de la taxe d’habitation, qui tenait compte de la charge de famille, et hausse des impôts indirects, qui n’en tiennent pas compte.
Dans ce contexte, les familles font face à des difficultés très importantes pour trouver et financer un mode de garde pour leur enfant, ou encore accéder à un logement de taille et de localisation adaptées. Ces contraintes apparaissent particulièrement importantes pour les plus jeunes, dont la situation socioprofessionnelle est plus fragile, et qui peuvent ainsi être conduits à repousser l’arrivée d’un enfant, voire à y renoncer.
Au-delà des questions strictement matérielles, le rapporteur tient à souligner la dimension profondément symbolique et psychologique des coups qui ont été portés à la politique familiale depuis une dizaine d’années. À l’heure actuelle, la plupart des familles ne se sentent pas soutenues par l’État et par la communauté nationale. Un sondage de l’Institut français d’opinion publique (Ifop) réalisé en janvier 2025 ([8]) met en évidence cette perte de confiance totale dans la capacité de l’État à soutenir les familles : 41 % des femmes se disent découragées à avoir des enfants par le discours des autorités publiques (contre 21 % qui se disent encouragées) et 47 % des femmes se disent découragées par l’action de l’État (20 % se disent encouragées).
Le rapporteur estime que l’inquiétude pour l’avenir et pour les générations futures exprimé par les jeunes générations doit être rapportée à cette perte de confiance dans le collectif. Comme l’a souligné la journaliste Aziliz Le Corre lors de son audition, « la natalité augmente quand la confiance dans le collectif augmente. Si on n’a personne à nos côtés, cela pose beaucoup de difficultés dans la vie de tous les jours. »
L’atteinte à la politique familiale a ainsi eu des effets qui vont bien au-delà de l’atteinte financière pour les familles concernées. Elle a donné à l’ensemble des familles le sentiment que le soutien de l’État n’était plus une donnée certaine et pérenne.
Il importe de restaurer la confiance des familles en donnant le signal d’un réinvestissement dans la politique familiale, après de trop longues années où la branche famille a constitué la variable d’ajustement des comptes sociaux.
Le rapporteur estime que cette relance d’une politique familiale favorable à la natalité obéit à un double impératif.
C’est d’abord un impératif de liberté individuelle. Il faut rendre aux individus la liberté d’avoir un ou plusieurs enfants s’ils le souhaitent, de la même manière qu’on leur garantit la liberté de ne pas en avoir. Il appartient donc à l’État de créer les conditions permettant aux individus de satisfaire à leur désir d’enfant.
Cela permettra, de manière incidente, de répondre à un impératif collectif, pour assurer l’avenir de la Nation. De ce point de vue, la politique familiale doit être considérée comme un investissement en capital humain, qui engendre des avantages pour toute la collectivité. C’était la philosophie initiale de cette politique, et les raisons qui ont présidé à sa mise en place au milieu du XXe siècle sont d’autant plus valables aujourd’hui. La politique familiale peut aussi être vue comme un outil de prévention du point de vue de la collectivité, en ce qu’elle vise à permettre à la famille d’assumer ses responsabilités en vue du bien commun.
La présente proposition de loi vise à poser les premières briques de cette relance de la politique familiale en proposant trois mesures prioritaires, destinées à répondre à l’enjeu financier auquel sont confrontées de nombreuses familles et à marquer, symboliquement, un réinvestissement, qui soit de nature à regagner la confiance des familles.
L’article 1er rétablit l’universalité des allocations familiales. Le montant versé dépendra donc désormais uniquement du nombre d’enfants à charge, et plus du niveau de ressources du foyer. Il s’agit de redonner aux allocations familiales leur fonction de redistribution horizontale, entre familles avec enfants et familles sans enfant.
Cette mesure profitera en particulier aux classes moyennes, qui ont été très largement affectées par la modulation introduite en juillet 2015. Le premier palier de revenus, au-delà duquel les allocations étaient divisées par deux, a en effet été établi à 5 595 euros de revenus par mois pour un couple avec deux enfants, soit des revenus de moins de 2 800 euros par mois. Or, l’Observatoire des inégalités estime qu’en 2021, le niveau de vie mensuel des classes moyennes était situé entre 3 800 et 7 000 euros pour un couple avec deux enfants ([9]).
Au-delà de l’aspect symbolique et du gain financier induit pour les bénéficiaires, le rétablissement de l’universalité aura aussi un impact très favorable en termes de lisibilité et de prévisibilité de cette politique publique pour les familles qui n’auront plus à se préoccuper d’éventuels effets de seuil.
Elle engendrera un choc de simplification pour les caisses d’allocations familiales, pour qui la modulation a induit une grande complexité et des coûts de gestion considérables.
L’article 2 ouvre le droit aux allocations familiales dès le premier enfant. Cette mesure vise à réparer une anomalie historique, qui a conduit à ne prévoir des allocations familiales qu’à partir du deuxième enfant, dans le but d’encourager les familles nombreuses. Le rapporteur estime que toutes les familles doivent être soutenues.
En outre, à l’heure actuelle, plus du tiers des familles comptent un seul enfant ([10]). Il apparaît anormal de tenir autant de familles à l’écart du bénéfice de ces allocations. Par ailleurs, dans un contexte où de plus en plus de femmes n’ont pas du tout d’enfant ou disent ne pas en vouloir, l’enjeu semble être d’inciter au premier enfant, plus encore que d’inciter au deuxième.
Cette ouverture des allocations familiales au premier enfant bénéficiera en particulier aux plus jeunes foyers, qui sont souvent aussi les plus précaires. Elle est tournée vers les classes populaires, qui ont plus souvent un seul enfant que les autres.
L’article 3 rehausse le plafond du quotient familial de 1 791 à 2 841 euros. Il s’agit de lui permettre de retrouver son niveau d’avant la réforme de 2013, majoré de l’inflation. Cette mesure vise à rétablir l’égalité de tous les citoyens devant les charges publiques, qui est mise à mal lorsque le taux d’imposition ne tient pas pleinement compte de la situation du foyer. Il semble normal que les citoyens soient imposés en fonction de leur niveau de vie réel, dont on sait qu’il est fortement impacté par la présence, ou non, d’enfants.
Elle vise également à diminuer la pression sur les classes moyennes qui ont également été très concernées par l’abaissement du plafond du quotient familial en 2014, puisqu’on était au maximum de l’impact de l’abaissement du plafond (soit une augmentation d’impôt de 500 euros par demi-part fiscale) pour un couple avec des revenus de 2 800 euros par mois.
Le rapporteur a conscience que ces mesures devront être complétées par d’autres, visant notamment à permettre une meilleure articulation entre la vie professionnelle et l’éducation des enfants (réforme du congé parental, développement de modes de garde abordables pour les parents). Cette proposition de loi constitue ainsi la première pierre d’un édifice qui aura vocation à être complété par la suite.
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Article 1er
Rétablissement de l’universalité des allocations familiales
Adopté sans modification
L’article 1er rétablit l’universalité des allocations familiales, revenant sur la réforme votée en 2014 qui avait conduit à instaurer une modulation de ces allocations en fonction des revenus du foyer.
Les allocations familiales sont d’abord apparues à la fin du XIXe siècle et au début du XXe sous la forme de sursalaires versés par les entreprises et par l’État à leurs employés pour compenser leurs charges liées à l’éducation de leurs enfants. Une loi du 11 mars 1932 ([11]) a ainsi rendu obligatoire l’adhésion des entreprises à des caisses de compensation destinées à verser ces indemnités. Un décret-loi du 12 novembre 1938 ([12]), dit « décret-loi Daladier », a ensuite rendu ces allocations indépendantes des entreprises et des salaires.
Avec la création de la sécurité sociale, en 1945, et de sa branche famille, les allocations familiales ont été généralisées à l’ensemble de la population. La philosophie d’une nécessaire compensation des charges liées à l’enfant est maintenue ; elle se traduit dans le principe de l’universalité des allocations familiales : celles-ci doivent profiter à toutes les familles, indépendamment de leur situation ; elles ne dépendent que du nombre d’enfants élevés. Les allocations familiales sont ainsi versées à toutes les familles à partir du deuxième enfant.
Pendant le demi-siècle qui suit, le principe d’universalité fait l’objet d’un consensus assez fort au sein de la classe politique, et n’est pas remis en question, même si, par la création d’autres prestations placées sous conditions de ressources, la politique familiale prend, dès les années 1970, un tournant plus social.
En 1997, le Premier ministre Lionel Jospin annonce que les allocations familiales seront placées sous condition de ressources à compter du 1er janvier 1998. Cependant, l’universalité est rétablie dès le 30 septembre 1998, du fait, notamment, de l’hostilité à cette mesure du Parti communiste, lequel estime qu’elle porte atteinte à un contrat pluridécennal entre les Français.
L’universalité des allocations familiales a été remise en cause par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 ([13]), par voie d’amendement parlementaire.
Dans sa rédaction issue de cette loi, le troisième alinéa de l’article L. 521-1 du code de la sécurité sociale dispose ainsi désormais que le montant des allocations familiales varie « en fonction des ressources du ménage ou de la personne qui a la charge des enfants, selon un barème défini par décret ».
Le dernier alinéa de l’article L. 521-1 prévoit cependant la mise en place d’un complément dégressif lorsque les ressources d’un foyer sont situées juste au‑dessus d’un plafond, de façon à lisser les effets de seuil.
Ce barème a été dernièrement établi par un arrêté du 20 décembre 2024 ([14]). Le principe posé en 2015 reste valable : au-delà du premier plafond de ressources, le montant de l’allocation est divisé par deux ; et au-delà du second plafond, par quatre.
Montant des allocations familiales en fonction des ressources
Source : www.service-public.fr
La réforme de 2014 a visé un objectif quasi exclusif d’économies : en 2015, la modulation des allocations aurait ainsi permis d’économiser 290 millions d’euros auprès des familles de la deuxième tranche de revenus et 460 millions d’euros auprès des familles de la troisième tranche de revenus ([15]), faisant environ 10 % de perdants.
Le présent article vise à revenir sur la réforme votée en 2014 en rétablissant l’universalité des allocations familiales. À cette fin :
– le 1° supprime le troisième alinéa de l’article L. 521-1 du code de la sécurité sociale, qui prévoit une modulation du montant des allocations familiales en fonction du revenu du foyer ;
– le 1° supprime également le dernier alinéa du même article, qui instaure un complément dégressif destiné à lisser les effets de seuil liés à la modulation ;
– le 2° supprime le second alinéa de l’article L. 755-12, relatif au versement des allocations familiales dans les départements d’outre-mer. La suppression de cet alinéa aboutit à rendre l’article L. 521-1 précité pleinement applicable dans ces départements.
Cette dernière mesure se comprend à la lecture de l’article 2 de la présente proposition de loi, qui ouvre le droit aux allocations familiales dès le premier enfant partout en France. À l’heure actuelle, ce droit n’est reconnu que dans les départements d’outre-mer ; le vote de l’article 2 aura donc pour effet d’aligner le droit de la métropole sur celui de l’outre-mer, ce qui rendra superflue la dérogation prévue à l’article L. 755-12.
La dérogation portée par l’article L. 755-12 concerne aussi le principe de la modulation des allocations, qui n’est actuellement pas applicable lorsqu’elles sont versées pour un seul enfant outre-mer. Dans la mesure où le présent article supprime la modulation des allocations partout en France, cette seconde dérogation devient également sans objet.
La commission a adopté cet article sans modification.
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Article 2
Mise en place des allocations familiales dès le premier enfant
Adopté sans modification
L’article 2 ouvre droit aux allocations familiales dès le premier enfant pour prendre en compte la situation des familles avec un seul enfant et pour apporter une aide aux jeunes parents qui souhaitent avoir leur premier enfant.
Le décret-loi Daladier du 12 novembre 1938 ([16]), à l’origine des allocations familiales, prévoyait déjà que ces allocations ne seraient versées qu’à partir du deuxième enfant, dans un souci d’encourager les familles nombreuses, à une époque où la natalité avait baissé.
Ce principe a été maintenu lors de la création de la sécurité sociale, en 1945, et depuis lors. Ainsi, le premier alinéa de l’article L. 521-1 du code de la sécurité sociale dispose que « les allocations familiales sont dues à partir du deuxième enfant à charge ».
Ce principe apparaît peu compatible avec le format actuel des familles françaises, qui sont, pour plus d’un tiers, des foyers avec un seul enfant. Il aboutit à priver une grande partie des familles françaises d’un droit aux allocations familiales destiné à couvrir les charges liées aux enfants auxquelles elles sont également confrontées.
Sur le plan incitatif, ce principe apparaît en outre décalé par rapport aux enjeux de natalité actuels. Comme cela a été expliqué en avant-propos, une proportion croissante de femmes demeure sans enfant ; sans nier la liberté de chacune de ne pas vouloir en avoir, il s’agit de faire en sorte que celles qui le souhaiteraient en aient la capacité. Il y a donc bien un enjeu à aider les familles à avoir leur premier enfant.
Le présent article modifie le premier alinéa de l’article L. 521-1 précité afin de prévoir que les allocations familiales seront désormais dues dès le premier enfant.
La commission a adopté cet article sans modification.
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Article 3
Rehaussement du plafonnement du quotient familial
Supprimé par la commission
L’article 3 vise à rehausser le plafonnement du quotient familial pour lui permettre de retrouver son niveau d’avant 2013, majoré de l’inflation. Ce plafond passerait ainsi de 1 791 à 2 841 euros par demi-part fiscale.
La mise en place d’un quotient familial pour l’application du barème de l’impôt sur le revenu remonte à la loi de finances pour 1946. Il vise à rendre l’impôt sur le revenu aussi neutre que possible par rapport aux capacités de consommation des foyers, en tenant compte de leurs charges inégales.
Reposant initialement sur la prise en compte de demi-parts fiscales supplémentaires pour chaque enfant à charge, le quotient familial est réformé à plusieurs reprises. En 1980, des demi-parts supplémentaires sont accordées à partir du troisième enfant.
Puis un premier plafonnement est mis en place à compter de 1982 ; il vient limiter l’économie d’impôt que les familles peuvent tirer des demi-parts fiscales supplémentaires liées aux enfants. Ce plafonnement est à nouveau abaissé en 1998 sous le gouvernement de Lionel Jospin ; il s’établit alors à 2 336 euros par demi‑part fiscale. Il est encore abaissé à 2 000 euros en 2013, puis à 1 500 euros en 2014, sous le quinquennat de François Hollande.
Ce plafond a été, depuis, actualisé chaque année en loi de finances pour tenir compte de l’inflation. Dans sa rédaction issue de la loi de finances pour 2025, l’article 197 du code général des impôts prévoit ainsi que « la réduction d’impôt résultant de l’application du quotient familial ne peut excéder 1 791 euros par demi-part ».
Le présent article vise à substituer, à l’article 197 du code général des impôts précité, le montant « 2 841 euros » au montant « 1 791 euros ». Concrètement, il s’agit de rehausser le plafonnement du quotient familial pour qu’il retrouve son niveau d’avant la réforme de 2013, ajusté de l’inflation calculée à 21,7 % sur cette période.
La commission a adopté les amendements de suppression de l’article 3 présentés respectivement par Mme Fanny Dombre Coste et plusieurs de ses collègues du groupe Socialistes et apparentés, M. Yannick Monnet et Mme Karine Lebon (groupe Gauche démocrate et républicaine) ainsi que Mme Zahia Hamdane et ses collègues du groupe La France insoumise, malgré l’avis défavorable du rapporteur.
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Article 3 bis (nouveau)
Rapport sur l’évolution de l’écart entre le désir d’enfant et la fécondité réelle constatée
Introduit en commission
L’article 3 bis résulte de l’adoption d’un amendement de M. Thibault Bazin avec l’avis favorable du rapporteur. Il prévoit la remise au Parlement, tous les deux ans, d’un rapport du Gouvernement analysant l’évolution de l’écart entre le désir d’enfant et la fécondité réelle, de façon à évaluer l’impact des mesures portées par la présente proposition de loi.
En décembre 2023, à la question « Quel est le nombre idéal d’enfants que nous aimeriez personnellement avoir ou auriez aimé avoir ? », la population française répond en moyenne : « 2,3 enfants » ([17]). Pourtant, l’indice conjoncturel de fécondité des femmes ne cesse de décroître : il s’est établi à 1,68 enfant par femme en 2023, puis 1,62 enfant en 2024. Cet écart important suggère une perte de liberté des personnes en âge de concevoir, lesquelles ne peuvent pas avoir autant d’enfants qu’elles le souhaiteraient.
Les enquêtes réalisées, notamment par l’Union nationale des associations familiales, illustrent le caractère plurifactoriel de cette perte de liberté. Cependant, les deux premiers motifs cités ([18]) sont une inquiétude globale sur l’avenir (30 % des familles répondantes) et le coût de l’enfant (28 % des familles). Les difficultés à concevoir concernent 22 % des couples interrogés.
Ces réponses suggèrent qu’un réinvestissement dans la politique familiale serait de nature, en accroissant les ressources des familles et en faisant la démonstration d’un soutien fort de la communauté nationale, à réduire l’écart entre le désir d’enfant et l’indice conjoncturel de fécondité.
Tel est le postulat sur lequel se fonde la présente proposition de loi, explicitement mue par la volonté de redonner la liberté aux personnes qui le souhaitent d’avoir des enfants ou d’en avoir plus. Pour ce faire, elle propose trois mesures visant à mieux soutenir financièrement les familles et à marquer symboliquement un réinvestissement de la Nation dans la politique familiale.
L’efficacité des mesures portées par la présente proposition de loi pourra être évaluée en analysant l’évolution de l’écart entre le désir d’enfant et l’indice conjoncturel de fécondité.
Le présent article, qui résulte de l’adoption d’un amendement de M. Thibault Bazin (groupe Droite Républicaine) avec l’avis favorable du rapporteur, vise ainsi à systématiser, tous les deux ans, la remise au Parlement, par le Gouvernement, de rapports étudiant l’évolution de cet écart et en approfondissant les causes.
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Adopté sans modification
La présente proposition de loi comporte des mesures qui induiront une charge pour les organismes de sécurité sociale. C’est le cas du rétablissement de l’universalité des allocations familiales, ainsi que de leur versement dès le premier enfant.
Par ailleurs, en rehaussant le plafonnement du quotient familial, elle induit une perte de recettes pour l’État, puisque certaines familles verront leur impôt diminuer.
Il importe donc de gager les charges et pertes de recettes induites par la proposition de loi. Tel est l’objet du présent article.
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Lors de sa réunion du mercredi 18 juin 2025, la commission examine la proposition de loi pour la relance d’une politique nataliste (n° 1412) (M. Bartolomé Lenoir, rapporteur ([19]).
M. le président Frédéric Valletoux. Avant de céder la parole à M. Lenoir, rapporteur, je rappelle que cette proposition de loi fait partie des textes inscrits à l’ordre du jour de la niche parlementaire du groupe UDR, le 26 juin prochain.
M. Bartolomé Lenoir, rapporteur. Notre République a donné valeur constitutionnelle au préambule de la Constitution de 1946, qui dispose que « la nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement ». C’est ce principe qui fonde la politique familiale française. Il ne s’agit pas de charité : si la nation choisit de soutenir les familles, c’est dans son intérêt bien compris, considérant que les parents éduquent leurs enfants au bénéfice de la communauté nationale dans son ensemble. Les enfants, c’est l’avenir de la nation.
Partant de ce constat, la politique familiale telle qu’elle a été voulue par l’ensemble des partis politiques en 1945 répond à une logique de redistribution horizontale pour tenir compte de la perte de niveau de vie liée aux enfants. Il y a longtemps eu un consensus politique autour de la vocation de la politique familiale, préservée jusqu’au début des années 2010 avec une vraie efficacité.
En 2010, la France faisait figure d’exception en Europe, avec un indice de fécondité supérieur à deux enfants par femme, donc proche du taux de renouvellement des générations. Une rupture majeure a eu lieu lors du quinquennat de François Hollande, entre 2012 et 2017, lorsque le renforcement de la politique sociale a servi de prétexte pour abîmer la politique familiale, sans pour autant améliorer la situation des familles pauvres. Par exemple, nous n’avons pas ouvert droit aux allocations familiales dès le premier enfant, ce qui aurait été une véritable mesure sociale, car nous savons que les foyers qui attendent leur premier enfant ou qui élèvent un enfant unique font parmi des plus précaires.
Au lieu de quoi, nous avons fait des économies sur le dos des familles. En 2013, nous avons abaissé le plafond du quotient familial de 2 336 à 2 000 euros, en promettant qu’on s’en tiendrait là, de sorte de ne toucher que les familles les plus aisées. Mais comme cette mesure rapportait beaucoup et que les familles ne protestaient pas, nous sommes allés encore plus loin en 2014. Le plafond du quotient familial a ainsi été réduit à 1 500 euros. Qu’importe si les classes moyennes étaient massivement touchées : après tout, elles percevaient les allocations familiales et c’était bien suffisant.
Sauf qu’en 2015, nous avons décidé de mettre fin à un principe fondamental de la politique familiale : l’universalité des allocations familiales. Désormais, elles seraient modulées en fonction du revenu. De nouveau, on a promis que la mesure ne toucherait que les riches mais, en réalité, elle a massivement percuté les classes moyennes. Avec un salaire de 2 700 euros par mois avec deux enfants, on voyait ses revenus divisés par deux. Soyons honnêtes, quand on a un tel niveau de salaire avec deux enfants, on n’est pas à plaindre, mais on n’est pas riche non plus.
Nous avons donc été confrontés à trois mensonges lors du quinquennat de François Hollande. Premièrement, on nous a assuré que les coups portés à la politique familiale ne concerneraient que les riches ; nous venons de voir combien c’était faux. Deuxièmement, on a prétendu qu’il s’agissait d’aider davantage les familles pauvres ; les études ont montré que ce soutien n’avait augmenté que de 0,2 %, autant dire presque pas. Troisièmement, on a dit que ces atteintes à la politique familiale n’auraient aucun impact sur la natalité. En l’occurrence, les données dont nous disposons sont d’une clarté limpide : nous assistons à une chute rapide de l’indice de fécondité précisément à partir de 2014.
Cette dégringolade se poursuit jusqu’à aujourd’hui, avec un taux de fécondité s’établissant à 1,62 enfant par femme en 2024, le plus faible depuis la fin de la première guerre mondiale. Le chiffre est incroyable : la natalité a chuté de 21 % depuis 2010, c’est‑à‑dire en très peu de temps.
Dans le cadre de mon rapport et grâce aux auditions que j’ai organisées, j’ai approfondi les causes possibles de cette chute de la natalité. Nous assistons d’abord à la montée en puissance d’un mouvement « No kids », animé par des femmes qui revendiquent leur liberté de ne pas avoir d’enfants. De fait, les femmes sont libres de vouloir moins d’enfants, ou de ne pas en vouloir du tout ; c’est leur droit le plus strict. Ce qui me gêne, c’est l’écart très important entre le désir d’enfant, qui s’établit en moyenne à 2,3 enfants par femme, et l’indice de fécondité qui s’élève à 1,62. Cela montre une perte de liberté pour les couples, qui ne peuvent plus avoir autant d’enfants qu’ils le souhaitent.
C’est là que les enjeux financiers liés à la politique de natalité prennent toute leur importance. Nous savons les difficultés considérables auxquelles sont confrontées les familles, particulièrement les plus pauvres et de la classe moyenne, pour loger, habiller, nourrir, faire garder et éduquer leurs enfants. Dans la Creuse, d’où je viens, c’est la moitié des familles – 48 % – qui n’ont pas autant d’enfants qu’elles le voudraient.
J’observe au passage que la chute de la natalité sert de prétexte à la rétractation du service public, qui est particulièrement importante et impressionnante en milieu rural. C’est dur pour les familles aujourd’hui, leurs difficultés étant renforcées par le sentiment de ne plus être portées par le collectif.
Les mesures du quinquennat Hollande ont sapé la confiance dans la politique familiale, qui paraît instable, complexe, incertaine. J’y insiste : le facteur majeur de la dénatalité, c’est la perte de confiance des familles. C’est sur ce point que nous devons agir. Aux côtés de la liberté de ne pas avoir d’enfants, qui est bien protégée, nous devons garantir celle d’en avoir pour les couples qui le souhaitent, et ce au bénéfice de toute la communauté nationale.
Ma proposition de loi comprend trois mesures qui auront un impact financier pour les familles et qui revêtent une portée symbolique très importante, afin de justement créer un choc de confiance.
La première est le rétablissement de l’universalité des allocations familiales pour revenir à la logique initiale de la politique familiale, mais aussi pour simplifier – nous y reviendrons –, tant la gestion des allocations, avec la modulation, est devenue d’une complexité sans nom pour les caisses.
La deuxième est l’ouverture des allocations dès le premier enfant pour tenir compte des évolutions de la société, pour aider les jeunes foyers, qui sont les plus précaires, à avoir leur premier enfant et pour mieux soutenir les familles pauvres, qui sont les plus représentées parmi celles n’ayant qu’un enfant.
La troisième est le rétablissement du plafonnement du quotient familial à son niveau de 2012, afin d’alléger la pression pesant sur les classes moyennes, qui sont celles qui ont le moins d’enfants.
Il faudra aller beaucoup plus loin, concernant le mode de garde ou la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle, mais je vous encourage à poser cette première pierre afin de marquer le réinvestissement de la nation dans sa politique familiale.
M. le président Frédéric Valletoux. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.
Mme Angélique Ranc (RN). Le groupe Rassemblement National se réjouit de cette nouvelle proposition de loi visant à relancer une politique nataliste, tout comme nous avions soutenu les deux derniers textes relatifs à la politique familiale. Je réitère l’engagement de notre parti en faveur de la natalité à l’heure où, beaucoup l’ont dit, les familles peinent à se rapprocher du nombre idéal d’enfants souhaités et où le déclin démographique nous frappe de plein fouet.
À la différence des textes précédents, celui-ci a la bonne idée d’élargir le champ d’action législatif. Il ne se contente pas d’ouvrir les allocations familiales dès le premier enfant : il renforce leur universalité en supprimant la modulation et la majoration selon les ressources du foyer et il relève le quotient familial afin de revenir au niveau antérieur à la baisse arbitraire décidée par François Hollande en 2013.
Dans cet esprit constructif, je me permettrai simplement d’évoquer quelques pistes pour l’avenir, qui pourront utilement accompagner la relance de la natalité : doubler l’allocation de soutien pour les parents français isolés, instaurer un prêt public à taux zéro pour les jeunes couples, ou encore instituer une part fiscale complète dès le deuxième enfant, contre une demi-part actuellement.
Précisons qu’une telle politique forcera l’État à engager de nouvelles dépenses. Il sera donc nécessaire de trouver comment équilibrer les finances publiques. Cela ne pourra se faire que par des mesures de bon sens, attendues par les Français. Je pense bien sûr aux mesures pour renforcer la lutte contre la fraude, à la suppression des allocations pour les parents de mineurs criminels ou délinquants récidivistes – parents qui sont coupables de défaillance –, ou encore au fait de réserver les allocations aux familles de nationalité française ou, à défaut, à celles qui cotisent.
Tôt ou tard, ces mesures que nous avons déjà défendues par le passé devront être de nouveau soumises au vote si nous voulons instaurer un système pérenne et équitable. Pour l’heure, le Rassemblement national soutient pleinement ce texte de l’UDR. Cette proposition de loi de bon sens répond à une attente légitime des Français.
Mme Joséphine Missoffe (EPR). L’état de notre démographie nous alerte tous. Il envoie des signaux, dit quelque chose de la situation des parents et des familles du pays. Il nous indique combien le choix de la parentalité est devenu difficile et nous interpelle sur la précarité des familles. Dans ce contexte, notre modèle de sécurité sociale constitue une réponse et une béquille. Le groupe Ensemble pour la République y est profondément attaché et les allocations familiales en sont un instrument indispensable. Grâce à leur fonctionnement actuel, ces dernières sécurisent les familles selon leurs besoins et réalités, afin de pérenniser un système juste et efficace et leur ouverture dès le premier enfant approfondirait cette ambition de toujours mieux soutenir les familles et celles en devenir.
Cependant, nous considérons que le contexte budgétaire actuel ne permet pas d’engager une telle réforme sans mener une réflexion plus profonde sur les équilibres financiers de la sécurité sociale. Si, comme je l’ai dit, l’état de notre démographie nous indique quelque chose, nous ne pouvons pas lui faire dire tout ce que nous voulons. La standardisation des allocations familiales et la revalorisation du quotient familial risquent d’aggraver l’état de nos finances publiques aux dépens des ménages les plus modestes et ce sans produire d’effets réels sur la natalité.
Nous demeurons convaincus qu’une politique familiale et nataliste puissante ne se limite pas à des prestations. Pour que les potentiels parents deviennent des parents heureux, nous devons surtout rendre leur quotidien plus serein, en développant une société qui donne plus de visibilité, plus de stabilité, plus de place et plus de temps.
M. Louis Boyard (LFI-NFP). Le système d’allocations familiales français est daté. Fruit d’une vision nataliste de la société, il repose sur le versement des allocations à compter du deuxième enfant seulement, alors même que l’arrivée du premier constitue pour un couple un véritable bouleversement, y compris financier.
Le désir d’enfant a évolué. Notre politique familiale repose encore sur une incitation à concevoir au moins deux enfants, alors que de nombreux couples renoncent ou retardent l’arrivée du premier, faute de moyens pour l’accueillir dans de bonnes conditions : logement suffisamment grand, salaire suffisamment stable et décent, mode d’accueil permettant le maintien dans l’emploi, temps non travaillé pour prendre soin de l’enfant, etc.
Nous partageons l’objectif de mieux soutenir le pouvoir d’achat des familles, mais notre motivation n’est pas liée à une volonté de relancer la natalité en France. Nous voulons surtout donner à nos concitoyennes et concitoyens la possibilité de faire des enfants sans craindre de ne pas avoir les moyens de leur offrir tout ce dont ils ont besoin. Ainsi, La France insoumise défend de longue date le versement des allocations familiales dès le premier enfant. De même, nous sommes pour la suppression de leur modulation en fonction du revenu des ménages.
L’instauration de la modulation sous couvert de justice sociale a été conduite dans une volonté de restreindre le soutien fourni par la branche famille, ou du moins de limiter la progression des dépenses. Le principe d’universalité des allocations familiales est au cœur du projet de société que nous défendons. Elles doivent bénéficier à toutes et tous, sans aucune distinction, notamment de nationalité.
S’agissant de la volonté de revaloriser le quotient familial, rappelons que cette proposition est profondément inégalitaire, car celui-ci ne bénéficie pas aux familles les plus modestes. La direction générale du Trésor indique que le montant des prestations versées au titre d’un enfant aux familles les plus modestes est équivalent à l’avantage fiscal perçu par les familles les plus aisées grâce au quotient familial. Vous proposez donc ici un dispositif à destination des plus riches. À La France insoumise, nous proposons de le remplacer par un crédit d’impôt par enfant, ouvert à toutes les familles.
Pour terminer, vous devez cesser d’invoquer la relance de la natalité comme solution à tous les problèmes de la société. Les ventres des femmes ne sont pas des machines à produire des bébés pour rééquilibrer les comptes sociaux. Si la réforme de 2015 doit être critiquée, elle n’est pas la cause de la baisse de la natalité, qu’on constate tendanciellement depuis 1970 et partout dans le monde.
Mme Fanny Dombre Coste (SOC). Cette proposition de loi prétend enrayer la baisse de la natalité. Si celle-ci est un véritable enjeu, la réponse proposée est à la fois inefficace et socialement injuste.
Le constat est documenté : le nombre de naissances a diminué de 21 % depuis 2010 – et non depuis 2014 – et le taux de fécondité est historiquement bas. Les causes, connues, sont beaucoup plus complexes que ce qui a été dit : inquiétude face à l’avenir, notamment face au changement climatique, difficultés économiques et précarité, modes de garde insuffisants, difficultés d’accès au logement. Aucune n’est sérieusement traitée par votre texte.
D’après un sondage réalisé pour Les Échos et l’Institut Montaigne, 57 % des femmes citent le pouvoir d’achat pour expliquer leur renoncement à avoir des enfants et 53 % invoquent leur inquiétude face à l’avenir. Les mesures que vous proposez n’apportent rien à celles et ceux qui en ont besoin.
L’article 2 prévoit le versement des allocations familiales dès le premier enfant. Nous soutenons cette mesure, que nous avons défendue lors de la niche parlementaire du groupe GDR. Toutefois, elle ne suffit pas à rendre acceptable le texte profondément inégalitaire et idéologique dans lequel elle est noyée.
Une politique nataliste qui instrumentalise le corps des femmes au nom d’un redressement démographique est une régression. Comme le rappelait la Fédération nationale des centres d’information sur les droits des femmes et des familles, cette logique est profondément opposée à l’autonomie des femmes. Il faut des politiques ambitieuses pour soutenir les familles, mais certainement pas des injonctions à procréer soutenues par des logiques conservatrices. C’est pourquoi le groupe Socialistes et apparentés ne participera pas au vote.
Pour conclure, je reprendrai les mots d’Anne-Cécile Mailfert, présidente de la Fondation des femmes : « Laissez nos utérus en paix ! »
Mme Josiane Corneloup (DR). Le groupe Droite Républicaine est attaché à la politique familiale. Nous défendons depuis de nombreuses années le versement des allocations familiales dès le premier enfant, le rétablissement de leur universalité et la revalorisation du quotient familial.
La proposition de loi du groupe UDR apporte une réponse pragmatique à un défi démographique majeur. Les chiffres sont sans appel : 818 000 naissances en 2014, 742 000 en 2020, 677 000 en 2023 et seulement 663 000 en 2024. Cette baisse constante fragilise notre modèle social, notre vitalité économique et la capacité des services publics à répondre aux besoins de la population.
Notre politique familiale doit être relancée, avec ambition. L’universalité des allocations, mise à mal durant le quinquennat de François Hollande, doit être pleinement rétablie. Le système actuel est devenu inégalitaire, complexe et source d’incompréhension pour de nombreuses familles.
Les allocations familiales ne sont versées qu’à partir du deuxième enfant, réduisant ainsi leur portée pour de nombreuses familles. La plupart des pays européens ont fait le choix inverse : l’Allemagne, la Belgique, le Royaume-Uni ou encore la Suède versent des aides dès le premier enfant. À cela s’ajoute un barème national complexe et peu lisible, qui réduit la lisibilité et l’efficacité de notre politique familiale.
Toutefois, nous restons vigilants et attentifs au coût d’une telle réforme, qui doit adopter une approche budgétairement responsable. La Cour des comptes a estimé à 6,3 milliards d’euros le montant des versements indus en 2024 ; une meilleure allocation des ressources est donc possible. Afin d’envoyer un signal politique clair au Gouvernement, nous avons déposé un amendement visant à réécrire l’article 1er. Il réaffirme la volonté du Parlement de rétablir l’universalité des allocations familiales, d’ouvrir leurs versements dès le premier enfant à charge et de revaloriser le quotient familial, afin d’adapter la politique familiale aux réalités sociales et fiscales de notre temps.
Le groupe Droite Républicaine votera pour ce texte, sous réserve de l’adoption de son amendement de réécriture de l’article 1er en faveur d’une politique familiale plus lisible.
M. Benjamin Lucas-Lundy (EcoS). Tartuffe Ciotti ! Tartuffe Le Pen ! Vous faites de grands discours, la main sur le cœur, sur l’importance de la famille, vous qui avez passé des mois à combattre le mariage pour tous et l’adoption pour les couples de même sexe ; vous qui n’avez rien fait pour lutter contre les perturbateurs endocriniens, qui sont une entrave majeure à la fertilité, notamment des plus jeunes ; vous qui défendez en ce moment même une proposition de loi visant à interdire certains mariages qui vous dérangent, par obsession raciste et xénophobe ; vous qui vous opposez systématiquement aux mesures du Nouveau Front populaire visant à améliorer le pouvoir d’achat des classes moyennes et populaires ; vous qui vous opposez à la régulation de l’installation des médecins, quand on sait à quel point il est difficile de trouver un rendez-vous chez un pédiatre !
Votre hypocrisie saute aux yeux et ne dupe personne. D’ailleurs, vous ne voulez pas réellement voir adopter ce texte puisqu’il figure à la toute fin de votre niche parlementaire !
Si nous pouvons souscrire aux objectifs de l’article 1er et de l’article 2, notre vision des droits des femmes est radicalement différente de la vôtre, qui est digne des talibans et de Viktor Orbán. Nous, nous préférons la liberté, la possibilité pour les femmes de conquérir leur émancipation et de décider elles-mêmes ce qu’elles font de leur corps ; nous avons soutenu l’inscription du droit à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) dans la Constitution.
M. le président Frédéric Valletoux. Je vous invite à faire preuve de tempérance dans vos propos. La comparaison avec les talibans était malencontreuse : peut-être pouvez‑vous la retirer ?
M. Benjamin Lucas-Lundy (EcoS). Je l’assume pleinement : M. Ciotti et Mme Le Pen appartiennent à ce courant mondial qui remet en cause les droits des femmes. Nous avons vu certains votes lors de l’inscription du droit à l’IVG dans la Constitution.
Faire des enfants, c’est se projeter dans l’avenir. Or le dérèglement climatique et la société rance en cours de construction, faite de discriminations et de tensions, sont des obstacles et une source d’angoisse pour nombre de familles. Nous voulons un peu moins de Retailleau et de Le Pen et un peu plus d’égalité, de justice sociale et de protection contre les désordres du climat, pour envisager un futur plus désirable.
Mme Nathalie Colin-Oesterlé (HOR). Cette proposition de loi ne répond que très partiellement aux défis de la politique familiale : elle ne traite ni de l’accompagnement des familles monoparentales, ni de l’accès aux modes de garde, ni des congés parentaux.
La natalité et le bien-être des familles dépendent de nombreux facteurs : accès au logement, à un emploi, aux transports et aux soins. Il est illusoire de penser qu’une simple réforme des allocations familiales, aussi coûteuse soit-elle, suffira à résoudre l’ensemble de ces problèmes.
Si nous en comprenons l’objectif, verser les allocations familiales dès le premier enfant représenterait une dépense publique massive, estimée à 5 milliards d’euros par an selon les données relatives aux familles concernées. Ce montant n’est ni financé ni compensé par des économies réalisées sur d’autres dispositifs ; dans un contexte de contraintes budgétaires majeures et de maîtrise de la dépense publique, une telle mesure n’est pas soutenable.
Le rétablissement de l’universalité des allocations familiales, supprimant toute condition de ressources, viendrait alourdir la facture de près de 800 millions d’euros supplémentaires par an. Là encore, aucun financement n’est prévu pour compenser cet élargissement, alors que le Gouvernement cherche à réaliser 40 milliards d’économies.
L’article 3 prévoit d’augmenter le plafond de la réduction d’impôt liée au quotient familial, pour revenir à son niveau d’avant 2013, ajusté en fonction de l’inflation. Cette mesure représenterait un coût supplémentaire pour les finances publiques d’environ 1 milliard d’euros par an et profiterait en priorité aux ménages les plus aisés, sans effets démontrés sur la natalité. Ce choix soulève des interrogations sur le ciblage des aides et de la justice sociale, alors que d’autres dispositifs seraient plus efficaces pour aider les familles les plus vulnérables.
La politique familiale ne peut se réduire à la matière fiscale : il est essentiel de poursuivre une réflexion d’ensemble qui intègre l’accompagnement des familles monoparentales, la valorisation des congés parentaux, l’accès aux services de garde et le soutien à la parentalité. C’est par une action globale, ciblée et responsable que nous pourrons répondre efficacement aux défis démographiques et sociaux de notre pays.
Pour toutes ces raisons, le groupe Horizons°&°Indépendants votera contre cette proposition de loi, qui entraînerait une dépense massive, peu ciblée et sans effets démontrés sur la natalité.
M. Yannick Monnet (GDR). Cette proposition de loi partage l’objectif d’Emmanuel Macron de réarmer démographiquement notre pays. Mais s’il est vrai que les allocations familiales ont été créées pour encourager un regain de natalité, l’époque a changé et cantonner les allocations familiales à leur éventuelle portée nataliste est trompeur et réducteur.
Comme l’a rappelé la Cour des comptes, les allocations familiales doivent s’entendre comme une juste compensation partielle du coût de l’enfant, assise sur le principe selon lequel il est légitime que le coût financier relatif à l’entretien et à l’éducation des enfants soit partagé entre les familles elles-mêmes et la solidarité nationale, dans la mesure où les enfants participent pleinement l’avenir de notre société.
C’est pourquoi nous soutenons l’article 1er, qui renoue avec l’universalité des allocations familiales : elles sont versées quelles que soient les ressources du foyer et de façon progressive selon la composition familiale.
Nous soutenons aussi l’article 2, qui ouvre le droit aux allocations familiales dès le premier enfant. Les députés communistes et des territoires dits d’outre-mer ont toujours soutenu cette disposition, qui participe à l’universalité des allocations ; nous l’avons fait adopter dans le cadre de notre niche parlementaire. Cette disposition s’impose d’autant que les familles avec un enfant unique sont de plus en plus nombreuses et que la pauvreté infantile avoisine les 20 %, soit un enfant sur cinq.
Notre point de désaccord porte sur l’article 3, parce qu’il ne nous semble pas opportun d’augmenter le plafond du quotient ouvrant droit à une réduction d’impôt. Le quotient familial est une composante logique de l’impôt progressif, qui garantit que le poids de l’impôt est équitablement réparti entre des familles de tailles différentes, en partant du principe qu’avec un même niveau de revenus, une famille avec enfants a moins de capacité contributive qu’un couple sans enfant.
Pour être le plus juste possible, c’est-à-dire distributif, ce plafond doit donc correspondent au coût moyen d’un enfant. Or la Cour des comptes, dans son rapport publié en 2023 intitulé « La prise en compte de la famille dans la fiscalité », notait que le plafond actuel du quotient favorise les familles les plus aisées. Le rehausser encore ne profitera mécaniquement qu’à celles-ci et accentuera le déséquilibre. C’est pourquoi nous souhaitons la suppression de cet article.
Mme Anne Bergantz (Dem). Le groupe Les Démocrates est engagé de longue date en faveur d’une politique familiale ambitieuse et responsable. Il se réjouit donc de voir le soutien public au premier enfant être à nouveau examiné dans notre commission, après la proposition de loi de notre collègue Édouard Bénard, du groupe GDR, en mai dernier, et celle que j’ai eu l’honneur de défendre, visant à simplifier et à réorienter la politique familiale vers le premier enfant.
Cependant, le présent texte fait l’impasse sur un aspect fondamental de toute politique sociale : l’exigence de crédibilité. S’il prétend relancer la natalité par des mesures spectaculaires – suppression des modulations des allocations familiales, ouverture de ce droit dès le premier enfant et réforme du quotient familial –, à y regarder de plus près, il défend une ambition qui ne tient pas face à une réalité implacable : l’absence totale de financement.
Le surcoût annuel des mesures proposées est évalué à plus de 5 milliards d’euros, une somme colossale dans un contexte de forte tension sur les finances publiques. Le texte n’envisage pourtant de le compenser que par un gage symbolique sur le tabac – ce n’est guère sérieux. L’opposition a le devoir d’élaborer des propositions financièrement soutenables, comme nous avions tenté de le faire à l’occasion de la niche parlementaire de notre groupe.
Par ailleurs, il n’existe pas de lien évident entre ces mesures fiscales et une hausse du taux de natalité, que vous appelez de vos vœux. Les travaux scientifiques le montrent, les facteurs décisifs sont autres : le soutien à la petite enfance, l’accès au logement ou la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale – autant de leviers absents du texte.
Nous saluons donc votre intention, que nous partageons en partie, mais pas votre approche. Nous ne pourrons voter ce texte ; il y va de notre crédibilité collective en tant que parlementaires, mais aussi de notre responsabilité vis-à-vis du grave déficit de nos comptes sociaux.
M. le président Frédéric Valletoux. Nous en venons aux interventions des autres députés.
M. Thibault Bazin, rapporteur général. J’ai été heurté par certains propos caricaturaux. Nous parlons très rarement de politique familiale dans notre commission, alors que c’est un enjeu majeur pour l’avenir du système de protection sociale et de la nation.
Nous fêterons bientôt les 80 ans de la sécurité sociale, dont la branche famille repose sur la promesse d’une solidarité intergénérationnelle, assortie d’un principe d’universalité : toutes les familles souhaitant accueillir des enfants sont soutenues, afin qu’elles ne soient pas financièrement pénalisées par ce choix. Or l’effectivité du principe d’universalité a été amoindrie.
On peut opter pour une approche globale incluant des éléments fiscaux et sociaux – je souscris aux différents propos rappelant les éléments susceptibles d’apporter des solutions aux familles –, mais on ne peut minorer la question du pouvoir d’achat. Une étude de l’Union nationale des associations familiales (Unaf) de 2023 montre que des personnes ayant un désir d’enfant y renoncent ou le reportent parce qu’elles craignent de perdre des ressources.
Outre ces éléments économiques et financiers, nous devons, comme commissaires aux affaires sociales et comme représentants nationaux, faire preuve de considération pour les familles, qui ont disparu du discours politique. Loin d’être polémique, ce sujet doit tous nous rassembler. En rétablissant l’universalité originelle, en adoptant une approche globale, nous enverrions un message aux nouvelles générations qui ont peur de l’avenir.
M. Fabien Di Filippo (DR). Ce débat portant sur notre capacité à encourager la natalité est très important, même si certains cherchent à le caricaturer. Je regrette que plusieurs de mes amendements aient été considérés comme des cavaliers législatifs ; ils portaient notamment sur le mode de garde, qui est un enjeu majeur pour certains foyers.
Permettez-moi ensuite de répondre aux accusations portées par l’extrême gauche. Il y a peu, une mère famille me disait : « Le problème avec les féministes TikTok » – je pense qu’elle parlait de personnes comme M. Lucas-Lundy ou Mme Dombre Coste –, « c’est que pour eux, le droit des femmes c’est toujours le droit de ne pas avoir d’enfant et jamais le droit d’en avoir et de pouvoir les élever dans de bonnes conditions ».
Parler de talibans ou d’utérus à laisser tranquilles dès qu’une politique nataliste est évoquée me semble être le summum du ridicule et de la pauvreté intellectuelle. Vous êtes vraiment devenus une caricature idéologique de vous-mêmes, à gauche !
Ce 18 juin est l’occasion de nous remémorer que, pour le général, chaque nation est mortelle si l’on n’y prend pas garde. Voilà qui nous renvoie à nos responsabilités et qui traduit une vision de long terme de ce qu’est la France, de ce que sont les familles françaises et des aspirations de nos compatriotes à fonder une famille tout en vivant bien. Voilà ce qui nous oblige aujourd’hui, plutôt que des combats d’arrière-garde purement idéologiques visant avant tout à promouvoir les droits d’un individu nombriliste replié sur lui-même qui entraîne notre pays vers l’abîme.
M. le rapporteur. Permettez-moi de revenir sur trois principaux points.
Premièrement, l’absence d’effet de la réforme de François Hollande. Les courbes de la natalité montrent bien qu’en 2014, la baisse est très nette. De plus, toutes les auditions, notamment celle des représentants de l’Unaf, nous ont permis de confirmer l’impact réel de cette réforme sur la confiance des Français dans la politique familiale ; l’aspect financier n’est pas le seul. Cette réforme a bien constitué une rupture historique, qui a créé une perte de confiance évidente. Nous devons réparer cette erreur.
Deuxièmement, le coût des mesures figurant dans ce texte. Parce que nous devons en effet être raisonnables, le groupe UDR prévoit des économies pour le financer. Ce coût permettra aux Français d’avoir autant d’enfants qu’ils le souhaitent, ce qui est peut-être la liberté la plus fondamentale.
Troisièmement, les femmes font exactement ce qu’elles veulent – je n’ai jamais dit le contraire. L’objectif de ce texte consiste à leur rendre la liberté de faire autant d’enfants qu’elles le souhaitent et aucunement de les empêcher de ne pas en avoir. Nous avons auditionné, avec beaucoup de respect, des représentants du mouvement « No kids ».
Enfin, je ne répondrai pas aux insultes qui ont été proférées à mon encontre.
Article 1er : Rétablissement de l’universalité des allocations familiales
Amendement AS9 de Mme Josiane Corneloup
Mme Josiane Corneloup (DR). Le nombre de naissances en France est en constante diminution, ce qui a des incidences importantes sur nos comptes sociaux. Nous souscrivons aux objectifs de cette proposition de loi, mais nous souhaitons réécrire l’article 1er pour réaffirmer le caractère universel des allocations familiales qui seraient versées à partir du premier enfant à charge, et pour revaloriser le quotient familial. Il s’agit d’un amendement d’appel à l’intention du Gouvernement.
M. le rapporteur. Nous sommes d’accord sur le fond, mais voter l’article 1er tel qu’il est rédigé me paraît plus pertinent et de nature à envoyer un message plus fort encore au Gouvernement.
Par ailleurs, lors des journées de niche en séance publique, il arrive que des textes soient retirés ou que des changements d’ordre du jour interviennent ; il n’est pas du tout certain que ce texte ne soit pas examiné à cette occasion.
Avis défavorable.
M. Louis Boyard (LFI-NFP). L’exposé sommaire de cet amendement est nataliste et fait écho aux propos du rapporteur prétendant que la réforme de 2015 a fait baisser la natalité. Celle-ci est structurellement en baisse en France depuis 1970 et le même constat est fait partout en Europe, en Amérique du Nord et même dans les pays d’Asie de l’Est. Ces derniers ont instauré des politiques censées relancer la natalité, qui n’ont pas fonctionné. Monsieur le rapporteur, pouvez-vous nous citer un seul exemple de politique nataliste qui aurait porté ses fruits ? Ne parlez pas de la Hongrie : non seulement elle est revenue sur de nombreux droits des femmes, mais son indice conjoncturel de fécondité est en baisse.
Trois rapports de l’ONU, publiés en 2020, 2022 et 2024, indiquent que la population mondiale entrera en récession en 2080. Ce moment historique pour l’humanité du point de vue anthropologique fait pourtant l’objet d’un déni persistant dans le débat sur la natalité. Et si le XXIe siècle se caractérisait par une natalité en déclin ?
Je vous appelle à sortir du déni et à cesser d’envisager des politiques natalistes pour rééquilibrer les comptes sociaux. Ce faisant, vous vous inscrivez dans un mouvement mondial qui, sous prétexte de relancer la natalité, s’attaque aux droits des femmes. On le voit en Hongrie, en Pologne et aux États-Unis : sans relance de la natalité, les producteurs et les consommateurs seront en nombre insuffisants pour alimenter la croissance économique, mettant en danger le système dans son ensemble – ce qui serait une bonne chose, de notre point de vue.
M. le rapporteur général. La baisse généralisée de la natalité dans toutes les sociétés occidentalisées est factuelle. Mais au-delà du constat, nous sommes là pour mener des politiques publiques et atteindre des objectifs politiques.
Les causes de la baisse de la natalité en France sont multiples et ne se limitent pas aux mesures prises durant le mandat de François Hollande. Différents éléments doivent être pris en considération et adaptés aux attentes sociétales : les modes de garde, la conciliation entre la vie familiale et la vie professionnelle, etc. Par conséquent, la réponse à apporter est complexe.
Outre la dimension économique, ce sujet concerne l’avenir de la nation, mais aussi celui de notre système de protection sociale, puisqu’il repose sur une solidarité intergénérationnelle. Des études, réalisées par l’Unaf auprès de plusieurs milliers de femmes, montrent que le désir d’enfant n’a pas diminué depuis dix ans ; il s’établit à 2,3 enfants par femme. Afin de répondre aux femmes ayant ce désir d’enfant, nous devons nous interroger sur la manière de traiter les différentes causes qui en repoussent la concrétisation, notamment les conditions de logement.
Cet amendement se veut pragmatique, pour éviter de voter des mesures qui ne seront pas suivies d’effets. J’étais très sensible aux textes défendus par le groupe GDR, votés il y a quelques jours, mais le Gouvernement n’envisage pas d’introduire les mesures correspondantes dans les documents budgétaires. Cet amendement permettrait de commencer à tracer le chemin nécessaire pour concrétiser ce choix politique.
Mme Marie-Charlotte Garin (EcoS). Si nous voulions avoir une approche féministe de la natalité, nous parlerions plutôt d’aide à la parentalité, c’est-à-dire la capacité des personnes qui le souhaitent à être parents. Pour lutter contre les inégalités, commençons par nous occuper de celles qui persistent au travail et intéressons-nous à l’implication des pères, en votant par exemple un congé parental ambitieux.
Je vous invite à avoir des considérations systémiques lorsque nous débattons des questions de société. Plutôt que de nous pencher sur la seule natalité, intéresserons-nous à la parentalité, et en amont, à la fertilité. Nous serons alors confrontés aux problèmes de santé environnementale : nous devons cesser de voter des lois qui empoisonnent le corps des femmes et des hommes, comme en atteste la qualité déclinante des ovocytes et des spermatozoïdes.
Aussi longtemps que vous prendrez les choses par le petit bout de la lorgnette, vous ne parviendrez pas à instaurer des politiques publiques vraiment efficaces. Occupez-vous de l’infertilité, de la parentalité et de l’égalité femmes-hommes au travail, plutôt que de la seule natalité !
M. le rapporteur. À la fin de mon propos liminaire, j’ai bien précisé que ce texte était une première pierre, consistant à rétablir le soutien historique aux familles françaises ; nous devons aller plus loin.
Monsieur Boyard, vous avez raison de rappeler que l’érosion de la natalité est un phénomène mondial. Lors de leur audition, les représentants de l’Institut national d’études démographiques (Ined) ont indiqué que le nombre d’enfants souhaités par les jeunes de 18 à 24 ans connaît une baisse notable et que 20 % ne souhaitent pas en avoir.
Par ailleurs, vous m’avez demandé un exemple de politique nataliste efficace : la courbe des naissances en France avant 2010 est d’une remarquable constance. Pour réparer l’erreur commise par la suite, nous devons rétablir la politique familiale qui a permis à la France de résister à cette érosion, et restaurer la confiance des parents dans la communauté nationale.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte ensuite l’article 1er non modifié.
Après l’article 1er
Amendement AS2 de Mme Justine Gruet
Mme Justine Gruet (DR). Il peut sembler paradoxal, quand on demande le rétablissement de l’universalité des allocations et leur versement dès le premier enfant, de vouloir introduire une restriction liée aux revenus. Accueillir un enfant est choix individuel, mais aussi un choix de famille et un choix de société. La volonté d’avoir des enfants ne doit pas être soumise à la possibilité de percevoir des allocations familiales ; l’État doit accompagner les parents ayant un ou deux enfants, notamment si leurs moyens sont insuffisants.
L’arrivée d’un troisième enfant provoque des changements dans la vie de la famille et demande de faire des investissements, non seulement dans les premières années de sa vie, mais aussi à plus long terme.
Cet amendement vise à demander un rapport, qui évaluerait l’opportunité d’établir un seuil de revenus minimum pour bénéficier des allocations familiales à partir du troisième enfant. Ce seuil, fixé par décret, permettrait de s’assurer qu’au moins un des deux parents dispose d’un revenu suffisant. Les familles nombreuses sont formidables, mais les parents doivent être capables de les assumer financièrement. Il s’agit de redonner du sens aux allocations familiales, qui ne doivent pas être une source de revenus, mais un accompagnement de la cellule familiale.
M. le rapporteur. J’aurais pu être favorable à votre amendement s’il se contentait de demander un rapport sur l’impact de la modulation.
Fixer un seuil de revenu minimal pour percevoir les allocations familiales à partir du troisième enfant me semble risqué : si un parent de quatre enfants perd brutalement son emploi, il perdra en outre le bénéfice des allocations familiales.
Je comprends votre intention, mais ce n’est pas la bonne façon de faire. Nous devons absolument soutenir les familles nombreuses.
Avis défavorable.
M. Louis Boyard (LFI-NFP). Vous soutenez le retour à l’universalité mais vous demandez une exception : c’est contradictoire ! Nous nous y opposerons.
Monsieur le rapporteur, j’ai regardé le graphique. On ne peut évaluer les conséquences d’une politique familiale sur une période de vingt ans. L’indice conjoncturel de fécondité baisse depuis 1970. En réalité, il diminue depuis qu’on a commencé à pratiquer l’agriculture. Aujourd’hui, notre espèce entre dans un nouvel âge : la dénatalité. Et ce n’est pas une mauvaise chose.
Vous avez raison, monsieur Bazin, nous avons un projet politique. Au XXIe siècle, tout va changer. L’ONU prévoit une récession du nombre de consommateurs et de producteurs à partir de 2080. Chers amis libéraux, cela rendra la croissance économique compliquée à obtenir. J’en suis très heureux : je ne supporte pas le capitalisme. Supposez que la natalité ne se relance jamais : tout votre logiciel s’effondrera. Voilà pourquoi je parle de déni. Vous ne pouvez pas croire que la France va relancer la natalité par une politique familiale alors que tous les pays qui ont essayé ont échoué.
M. le rapporteur. On voit clairement sur la courbe que la baisse entamée en 2014 est inédite. Vous pouvez souhaiter une diminution progressive, mais on observe là une chute, évidemment liée à la fin des allocations.
Madame Gruet, il serait paradoxal de prévoir une exception à l’universalité.
La commission rejette l’amendement.
Article 2 : Mise en place des allocations familiales dès le premier enfant
Amendement AS11 de Mme Justine Gruet
Mme Justine Gruet (DR). L’universalité est légitime pour les deux premiers enfants. Elle exprime la solidarité de la nation. À partir de trois enfants, il est irresponsable de compter sur les seules allocations familiales pour financer leur éducation et leur épanouissement. Je ne défends pas la suppression des allocations à partir du troisième enfant, Mais il faut un minimum de revenus. Nous devons garder les allocations familiales pour donner un coup de pouce aux parents et les responsabiliser. C’est notre rôle d’élus de l’assumer.
M. le rapporteur. Une telle mesure contreviendrait au principe d’universalité. Avis défavorable.
M. Benjamin Lucas-Lundy (EcoS). Selon notre collègue, on devrait juger ceux qui veulent avoir plusieurs enfants alors qu’ils sont en situation de précarité. C’est grave ! Surtout de la part de ceux qui défendent la famille et ses valeurs.
Je pense à ma grand-mère. Sa famille de neuf enfants vivait à la ferme et seul le papa travaillait, mais ils ont été heureux toute leur vie, malgré la pauvreté – les allocations familiales les auraient aidés, si elles avaient existé avant 1945.
Votre discours stigmatise les plus précaires et fait du droit à avoir des enfants un privilège : c’est délirant et contraire à ce que nous devrions toutes et tous défendre.
M. Yannick Monnet (GDR). On ferait des enfants pour toucher les « allocs » : c’est un vieux discours. Quand on compare le coût de l’éducation d’un enfant et le montant des allocations, on comprend que c’est un mythe, qu’aucune étude sérieuse n’a jamais étayé. Il vient de la droite réactionnaire – je ne vous accuse pas d’en faire partie.
Mme Justine Gruet (DR). Ne travestissez pas mes propos.
Entre 2019 et 2023, le coût des allocations familiales et de rentrée scolaire et des prestations d’accueil du jeune enfant a augmenté de 1,5 milliard d’euros, tandis que la natalité a baissé de 10 points. Donc les personnes qui ont des moyens mais pas l’aide des allocations ne font plus d’enfants ; celles qui ont moins de moyens mais sont aidées en font. Je ne parle pas de la quantité : chaque enfant a sa place et doit être bien accompagné.
Dans le cas de votre grand-mère, le père avait un revenu. Je ne veux pas supprimer les allocations à partir du troisième enfant mais il faut un revenu, qu’au moins un des deux parents gagne le Smic. Vous méconnaissez la surcote à partir de trois enfants.
Ce point de vue ne fait pas l’unanimité dans ma famille politique ; je le défends à titre personnel. On peut mieux valoriser le premier et le deuxième enfant dans toutes les familles pour aider à concrétiser le désir d’enfant, et responsabiliser sur les engagements qu’implique un plus grand nombre d’enfants. Il faut aider les familles nombreuses quand elles connaissent la précarité mais l’État ne doit pas seul s’en préoccuper.
Mme Joséphine Missoffe (EPR). Infirmière puéricultrice, je me suis occupée d’un centre de protection maternelle et infantile. Pour certaines familles, les allocations familiales constituent une aide réelle.
Toutes les familles de trois enfants et plus ne sont pas riches. Nous soutenons la différenciation car elle permet à des familles précaires d’avoir plus de deux enfants. Certaines en ont cinq et l’État les soutient : c’est formidable.
M. Louis Boyard (LFI-NFP). Vous dites, madame Gruet, que les familles riches font moins d’enfants : c’est faux. La courbe illustrant la fécondité des femmes selon le niveau de vie est en U : l’indice est plus élevé chez les plus précaires et les plus aisés.
Pourquoi défendez-vous l’universalité ? La réforme de 2015 a tapé les plus aisés, je n’y reviens pas. Lorsqu’on défend cette position, on ne peut pas refuser d’aider une famille qui a trois enfants et des revenus faibles. Et que ferez-vous pour le troisième enfant qui n’était pas prévu ? Ça arrive ! Pas grand-chose ne va dans tout ça.
Monsieur le rapporteur, la baisse qui a débuté en 2014 n’est pas inédite : regardez celle qui a eu lieu entre 1965 et 1976, sur une même durée. Faut-il en conclure que M. Pompidou a fait chuter l’indice conjoncturel de fécondité ? Le phénomène s’observe aussi en Irlande, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni : c’est une corrélation.
Soutenir les politiques de relance de la natalité, c’est être à côté, l’expérience l’a montré. La population va entrer en récession. Le groupe Horizons vient de lancer une mission d’information sur les causes et les conséquences de la baisse de la natalité en France : j’espère qu’elle va le démontrer. Si nous n’en prenons pas acte, nous ne serons pas prêts pour la suite.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS13 de Mme Angélique Ranc
Mme Angélique Ranc (RN). L’amendement vise à réserver les allocations familiales aux familles dont l’un des deux parents au moins est de nationalité française.
Je pense ne pas avoir besoin de défendre davantage cet amendement qui reçoit toujours son lot de critiques caricaturales.
M. le rapporteur. Comme souvent, le dispositif de la France est le plus ouvert et le plus généreux pour les étrangers. De plus, on vérifie peu le respect des conditions, minimes. Il n’est pas normal de financer ce système tout en faisant des économies sur le dos des familles françaises.
Je suis favorable à cet amendement.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). L’extrême droite veut appliquer la préférence nationale aux allocations familiales. Résumons.
Les parents étrangers ne toucheront pas d’allocations familiales : leurs enfants, y compris s’ils sont français, seront moins bien soignés, auront moins à manger et vivront dans un logement moins bien chauffé que ceux de leurs voisins de palier, alors qu’ils paient les mêmes cotisations. Vous voulez qu’ils paient mais qu’ils ne reçoivent rien. Vous appelez cela la préférence nationale mais, techniquement, c’est du vol.
Dans vos mythes qui confinent au délire, les allocations familiales inciteraient à venir en France. Imaginons un village syrien. Tout le monde a fait français LV1. Les gens vont sur le site service-public.fr, sélectionnent le formulaire F13213, qui les renvoie sur mes‑droits‑sociaux.gouv.fr. Là, il faut gérer les cookies, sinon ça ne marche pas. Puis ils sélectionnent une des cinquante-huit prestations possibles pour lancer le simulateur, avant de remplir très précisément toutes cases correspondant à leur situation familiale exacte, en fonction du barème. Un discours aussi erroné prêterait à rire si vous ne le teniez pas sérieusement.
« Cette mesure permettra de renouer avec l’objectif initial de la politique familiale française », écrivez-vous dans l’exposé sommaire. Or ledit objectif est historiquement défini par l’article 1er de l’ordonnance du 4 octobre 1945 : « garantir les travailleurs et leurs familles contre les risques de toute nature [et] couvrir les charges [...] de famille qu’ils supportent ». La nationalité était un critère sous Vichy, elle ne l’est plus depuis 1945 – restons-en là.
M. Benjamin Lucas-Lundy (EcoS). Vous voulez priver des enfants – dont certains sont français, mais peu importe – de l’assistance nécessaire à des conditions de vie dignes. C’est d’une violence inouïe ! Vous l’annoncez avec détachement – on va étaler notre xénophobie par amendement, nourrir le racisme d’atmosphère qui met la société sous tension et enfoncer un coin de plus dans le socle de la fraternité républicaine. Imaginez-vous que les gens regardent nos débats et cherchent dans des manuels de droit social comparé s’ils ont intérêt à aller en France ou ailleurs pour avoir des enfants ? Vous vivez dans vos obsessions fantasmatiques et c’est affligeant.
Défendre le retour à une législation en vigueur sous Vichy un 18 juin, c’est cocasse.
M. Yannick Monnet (GDR). Monsieur le rapporteur, vous avez émis un avis favorable. Donc, vous considérez qu’on peut apporter un soutien à la parentalité à certains Français – je parle des enfants – et pas à d’autres. C’est curieux.
M. Théo Bernhardt (RN). À entendre les propos caricaturaux que les collègues d’extrême gauche nous prêtent, je ne regrette pas d’être venu !
Monsieur Lucas-Lundy, vous avez affirmé que ce texte étant le dernier de notre niche, nous n’y accorderions pas d’importance. Les deux dernières propositions de loi de la vôtre visaient respectivement à sauvegarder les emplois industriels et à protéger les travailleurs du nettoyage. Considérez-vous que c’est sans importance ?
Vous critiquez beaucoup mais vous n’avez déposé aucun amendement : vous êtes incapable de quelque proposition que ce soit sur ce texte. Votre amalgame avec les talibans est gravissime. En attendant, nous, on ne soutient pas le Hamas !
Mme Angélique Ranc (RN). Moduler le niveau des prestations sociales en fonction de la nationalité ne serait pas nouveau en Europe. En Autriche, leur montant dépend du niveau de maîtrise de la langue nationale. Appliquée en France, une telle mesure en priverait de nombreux bénéficiaires. La Grèce impose douze ans de résidence pour bénéficier des allocations familiales si l’on n’est pas ressortissant d’un pays membre de l’Union européenne ; en Hongrie, on ne peut prétendre aux primes fiscales liées à la famille.
Certains m’objectent que les étrangers parfois cotisent en France. Je ne l’ignore pas. À ces contradicteurs, qui par sectarisme ne voteront pas non plus mon prochain amendement, je réponds que ce critère est purement économique et technique : cotiser ne garantit nullement un engagement profond et durable à la nation.
Mme Fanny Dombre Coste (SOC). Quand on soutient l’universalité des allocations familiales, il est contradictoire de vouloir exclure de leur bénéfice les enfants français nés de parents étrangers.
Comment expliquerez-vous aux familles qui viennent en France travailler dans les filières qui ont besoin d’eux, donc aux personnes qui viennent participer à la richesse de notre pays, qu’ils seront privés de ce soutien ?
Nous sommes opposés à cet amendement, et pas seulement en raison du racisme assumé qui le fonde.
M. le rapporteur général. Monsieur Boyard, vous refusez la marchandisation du corps des femmes et vous vous opposez à la gestation pour autrui. Cette cohérence, dont tout le monde ne fait pas preuve, suscite mon respect.
Sur la condition de nationalité, il faut être précis. Pour bénéficier des allocations, il faut plus de trois mois de séjour régulier. Une famille qui a des enfants à charge ne doit pas vivre moins bien qu’une autre sans enfants : c’est la promesse républicaine, que tient la branche famille.
Par ailleurs, nous avons des conventions bilatérales de protection sociale : les Français qui résident à l’étranger ne perçoivent pas les allocations familiales mais ils bénéficient d’un soutien dans le pays où ils vivent. L’adoption de votre amendement pourrait remettre en cause ces conventions, donc pénaliser ces familles.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS12 de Mme Angélique Ranc
Mme Angélique Ranc (RN). Cet amendement de repli vise à réserver le bénéfice des allocations familiales aux familles dont l’un des parents au moins paie la contribution sociale généralisée (CSG). Le même amendement, présenté dans l’hémicycle, a provoqué des interventions mensongères, certains affirmant par exemple que son adoption priverait d’allocations les personnes en situation de handicap.
Des exceptions sont prévues, notamment pour les ressortissants des États de l’Union européenne dont l’activité donne lieu à des prélèvements équivalents au titre de la protection sociale. Le dispositif protège également les familles dont l’un des deux parents au moins est de nationalité française, ce qui inclut les personnes en situation de handicap.
Enfin, le décret d’application précisera les cas d’exemption légitimes que nous aurions oubliés.
Rien ne vous empêchait de déposer un sous-amendement pour intégrer les éléments manquants. Vous l’auriez fait, si votre objection était de bonne foi.
M. le rapporteur. Votre proposition est cohérente avec la logique contributive de la sécurité sociale. On ne peut pas continuer à réduire la voilure pour des familles aux revenus très modestes tout en finançant sans conditions ceux qui ne participent pas à l’effort collectif.
J’émets un avis favorable.
M. Louis Boyard (LFI-NFP). C’est pitoyable. Une maman étudiante, au revenu de solidarité active ou au chômage avec de faibles indemnités, ne paie pas la CSG. Si votre amendement était adopté, elle n’aurait pas droit aux allocations familiales.
Au Rassemblement national, vous réfléchissez avant d’écrire ? Vous vous êtes déjà humiliés en défendant la préférence nationale. On voit que c’est Bardella qui vous dirige – amateurs !
La commission rejette l’amendement.
Puis elle adopte l’article 2 non modifié.
Après l’article 2
Amendement AS15 de M. Thibault Bazin
M. le rapporteur général. Il faut simplifier notre système de prestations. L’amendement vise à obtenir un rapport, idéalement avant l’examen du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale, sur l’opportunité de fusionner toutes les prestations sociales. Il faudra distinguer celles qui relèvent de la politique sociale, qui vise à soutenir les familles en difficulté, de celles qui servent la politique familiale, qui doit selon nous être universelle. Une prestation unique permettra de limiter les démarches, coûteuses en temps et en énergie.
Dans le cadre du Printemps social de l’évaluation, nous avons attaqué le directeur général de la Caisse nationale des allocations familiales sur le fait que, pour la troisième fois, la Cour des comptes avait refusé de certifier les comptes de la branche famille. Il nous a répondu que nous avions tellement complexifié le système que le nombre d’indus était normal. Pour limiter les risques, il faut avancer sur la simplification.
M. le rapporteur. Les auditions ont révélé qu’il était essentiel, pour redonner confiance dans la politique familiale, de rendre plus lisibles les aides qui en relèvent. La fusion est nécessaire. Ce rapport pourrait nous y faire tendre.
J’y suis favorable.
La commission rejette l’amendement.
Article 3 : Rehaussement du plafonnement du quotient familial
Amendements de suppression AS1 de Mme Fanny Dombre Coste, AS10 de M. Yannick Monnet et AS16 de Mme Zahia Hamdane
Mme Fanny Dombre Coste (SOC). Mon amendement tend à supprimer l’article 3. La mesure prévue est inefficace, injuste et coûteuse. Les simulations réalisées sur Leximpact montrent que seuls les ménages situés dans les neuvième et dixième déciles, soit les 20 % les plus aisés, y gagneraient. Ces ménages perçoivent entre 4,5 et 6 Smic par mois. Selon nous, ils n’ont pas besoin d’un tel cadeau fiscal.
Mme Zahia Hamdane (LFI-NFP). Le quotient familial est un dispositif profondément injuste ; il a été créé en 1945, dans un autre contexte. Aujourd’hui, il profite essentiellement aux foyers les plus riches. Les familles modestes, qui ne sont pas imposables, n’en tirent aucun bénéfice ; pour les autres, même plafonné, l’avantage reste très inégalement réparti. L’article 3 prévoit de relever le plafond de 1 791 à 2 841 euros, ce qui représenterait quelque 3 milliards de manque à gagner pour les finances publiques. Or les deux tiers de cette somme iraient directement aux 20 % les plus riches. C’est une politique familiale à l’envers : pendant que des millions de familles peinent à boucler leurs fins de mois, on donne plus à ceux qui ont déjà tout.
Nous, à La France insoumise, défendons une autre solution : l’instauration d’un crédit d’impôt par enfant. C’est une vraie mesure de justice sociale, simple et lisible. Toutes les familles y auraient droit, même les plus précaires.
La proposition qui nous occupe ne vient pas de nulle part. Elle est défendue par l’extrême droite, comme d’habitude au service des plus riches : le discours nataliste cache un choix de classe. Revaloriser le quotient familial, ce n’est pas soutenir les familles, c’est creuser les inégalités. Nous demandons donc la suppression de cet article.
M. le rapporteur. À quel moment est-on riche ? Prenons l’exemple d’un couple parisien dont chaque membre gagne 2 800 euros par mois. S’ils ont deux ou trois enfants, il leur faut un grand logement, donc ils paient un loyer élevé. Les transports sont chers. Ils ont des frais de garde : avec de tels revenus, on n’a pas d’aides, ça coûte très cher. Sont-ils riches ? Pour moi, ils appartiennent à la classe moyenne. Beaucoup de personnes dans cette situation sont en grande difficulté.
Le texte ne supprime pas le plafond, il ne le porte pas à un montant exorbitant, il le hausse un peu, pour que les classes moyennes ne soient pas fracassées. Monsieur Boyard l’a souligné, c’est chez elles que la natalité a fortement baissé. C’est une mesure en leur faveur.
M. Benjamin Lucas-Lundy (EcoS). Nous soutiendrons les amendements de suppression. L’article 3 parachève le texte, qui illustre bien l’alliance entre Mme Le Pen et M. Ciotti.
On part d’angoisses fondées et d’injustices réelles. Au lieu de chercher des solutions, avec le souci de l’efficacité et de la justice, en suivant la boussole républicaine, vous revenez à vos obsessions. Vous avez défendu la préférence nationale, avec un dispositif qui créerait une discrimination. Vous avez tenu des discours réactionnaires sur la fonction des femmes dans la société et leur liberté, en citant vos sources d’inspiration : la Hongrie de M. Orbán et l’Italie de Mme Meloni, qui connaissent un régime d’extrême droite. Vous finissez en faisant le choix de l’injustice sociale, des privilèges et des riches. On voit comment l’extrême droite fait son beurre sur les souffrances des Français, comment elle détourne les colères pour répandre ses obsessions et créer un climat de tension, sans jamais remettre en cause les inégalités qui fracturent la société.
M. le rapporteur. La mesure s’appliquera aux couples gagnant deux fois 2 800 euros par mois. Député des Yvelines, vous n’êtes pas sans savoir le coût exorbitant du logement dans ce département. Diriez-vous que les couples concernés sont immensément riches ? La classe moyenne est percutée. C’est très difficile pour elle. Allez voir les gens dans votre circonscription, vous verrez que c’est la vérité.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 3 est supprimé et l’amendement AS7 de Mme Sylvie Bonnet tombe.
Article 3 bis (nouveau) : Rapport sur l’évolution de l’écart entre le désir d’enfant et la fécondité réelle constatée
Amendement AS14 de M. Thibault Bazin
M. le rapporteur général. Nous proposons que soit remis au Parlement un rapport qui étudie les effets de la proposition de loi sur l’écart entre le désir d’enfant et la fécondité.
Une étude récente réalisée par le conseil de la famille du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA) montre que les couples qui ont des enfants auraient aimé en avoir un de plus. Le fait est que le désir d’enfant ne se concrétise pas toujours, pour des raisons qui peuvent être en partie financières mais qui tiennent également aux politiques publiques en matière de garde d’enfants, de congé parental...
M. le rapporteur. Il serait en effet intéressant de mesurer l’impact des mesures que nous proposons, mais je ne suis pas certain qu’un rapport soit nécessaire, compte tenu des données produites par l’Institut national de la statistique et des études économiques ou l’Ined.
Je m’en remets donc à la sagesse de la commission.
M. le rapporteur général. Je sais, pour m’intéresser de longue date à la politique familiale, que les données qualitatives manquent pour comprendre les aspirations des familles, qui sont diverses, et les raisons pour lesquelles le désir d’enfant ne se concrétise pas toujours. C’est en tout cas le besoin exprimé par le HCFEA, qui travaille à l’élaboration d’un questionnaire qualitatif.
M. le rapporteur. En définitive, je suis favorable à l’amendement.
La commission adopte l’amendement. L’article 3 bis est ainsi rédigé.
Article 4 : Gage de recevabilité
La commission adopte l’article 4 non modifié.
Puis elle adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.
*
* *
En conséquence, la commission des affaires sociales demande à l’Assemblée nationale d’adopter la présente proposition de loi dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.
– Texte adopté par la commission : https://assnat.fr/QlWeGz
– Texte comparatif : https://assnat.fr/P36lCk
–– 1 ––
ANNEXE N°1 :
LISTE DES PERSONNES entendues PAR Le RAPPORTEUR
(Par ordre chronologique)
Mme Aziliz Le Corre, journaliste
Union nationale des associations familiales (Unaf) – M. Bernard Tranchand, président, M. Jean-Philippe Vallat, directeur des politiques familiales et des services aux familles, et Mme Claire Ménard, chargée des relations parlementaires
Mme Bettina Zourli, autrice
Institut national d’études démographiques (Ined) – Mme Anne Solaz, directrice de recherche, et M. Milan Bouchet-Valat, chargé de recherche
* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.
–– 1 ––
ANNEXE N°2 :
TEXTES SUSCEPTIBLES D’ÊTRE ABROGÉS OU MODIFIÉS À L’OCCASION DE L’EXAMEN DE LA PROPOSITION DE LOI
Proposition de loi |
Dispositions en vigueur modifiées |
|
Article |
Codes et lois |
Numéro d’article |
1er |
Code de la sécurité sociale |
L. 521-1 |
1er |
Code de la sécurité sociale |
L. 555-12 |
2 |
Code de la sécurité sociale |
L. 521-1 |
3 |
Code général des impôts |
197 |
([1]) Voir Insee : « Naissances mensuelles depuis janvier 2024 », chiffres détaillées, 28 mai 2025.
([2]) Différence entre le nombre de naissances et le nombre de décès sur une année.
([3]) Bilan démographique 2024, Insee, janvier 2025.
([4]) Par exemple, le 4 juin 2025, le Premier ministre japonais Shigeru Ishiba a qualifié la situation de la natalité japonaise d’« urgence silencieuse », soulignant que si la tendance se poursuivait, elle risquait de fragiliser socialement et économiquement le pays ; il a annoncé un plan de soutien à la parentalité pour contrer cette évolution.
([5]) Insee et Ined.
([6]) Enquête nationale périnatale 2021, Santé publique France.
([7]) « Mesurer le coût de l’enfant : deux approches à partir des enquêtes Budget de familles », Drees, juin 2015.
([8]) Sondage Ifop pour Hexagone réalisé du 2 au 8 janvier 2025 auprès d’un échantillon de 2 000 femmes représentatives de la population féminine de 18 à 45 ans.
([9]) « Pauvres, moyens ou riches ? Les revenus par type de ménage », données de l’Observatoire des inégalités, 26 septembre 2024.
([10]) « Les familles en 2020 », Insee, 2021.
([11]) Loi du 11 mars 1932 modifiant les titres III et V du livre Ier du code du travail et l’article 2101 du code civil.
([12]) Décret-loi du 12 novembre 1938 relatif aux allocations familiales.
([13]) Loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 de financement de la sécurité sociale pour 2015.
([14]) Arrêté du 20 décembre 2024 relatif aux plafonds de ressources de certaines prestations familiales.
([15]) Selon les estimations faites par le rapport (n° 3168) de la mission d’information de l’Assemblée nationale sur l’adaptation de la politique familiale française aux défis du XXIe siècle, déposé le 1er juillet 2020.
([16]) Décret-loi du 12 novembre 1938 relatif aux allocations familiales.
([17]) Sondage Verian effectué pour l’Unaf du 21 au 28 novembre 2023 auprès d’un échantillon national de 1 000 personnes représentatif de l’ensemble de la population française âgée de 18 ans et plus.
([18]) Cf. enquête OpinionWay « Désir d’enfant » réalisée par l’Unaf en 2023.