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N° 2136

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 26 novembre 2025.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE, SUR LA PROPOSITION DE LOI, adoptée par le Sénat, après engagement de la procédure accélérée, élargissant la possibilité pour les collectivités territoriales et leurs groupements d’avoir recours au modèle de la société portuaire pour l’exploitation de leurs ports (n° 1605).

PAR Mme Liliana TANGUY

Députée

 

 

 

 

 

 

 

Voir les numéros :

 Sénat : 319, 721, 722 et T.A. 148 (2024-2025).

 Assemblée nationale : 1605.

 


SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION

COMMENTAIRE de l’article unique

Article unique Recours des collectivités territoriales au modèle de la société portuaire

EXAMEN EN COMMISSION

liste des personnes auditionnées

liste des contributions écrites reçues

 

 


   INTRODUCTION

Issu de la loi du 5 janvier 2006 relative à la sécurité et au développement des transports ([1]), le modèle des sociétés portuaires permet aux collectivités et à leurs groupements de prendre des participations dans des sociétés dont l’activité principale est l’exploitation des ports, en même temps que d’autres personnes publiques comme les chambres de commerce et d’industrie (CCI), dans un mode de quasi‑régie, permettant notamment la concession de l’exploitation sans publicité ni mise en concurrence.

Le nombre de ports susceptibles d’être exploités selon cette modalité est toutefois limité, puisque cette possibilité n’est ouverte, selon la loi, qu’aux 18 ports pour lesquels la compétence de l’État s’agissant de l’exploitation a été transférée aux régions ou aux départements par la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales ([2]).

Les autres ports dont l’exploitation a été décentralisée par la loi de décentralisation de 1983 ([3]) ou par la loi de décentralisation de 2004 ne peuvent donc pas être gérés selon ce mode d’exploitation. Il existe plus de 600 ([4]) ports décentralisés, majoritairement des ports de plaisance, mais aussi d’importants ports de pêche ou de commerce.

Le statut de société portuaire, qui permet aux collectivités territoriales de prendre des participations aux côtés des CCI dans l’exploitation des ports, a pourtant l’avantage de mutualiser les risques d’exploitation et de fluidifier le renouvellement des contrats de concession. Ce mode de gestion permet de conjuguer les capacités d’investissement des collectivités territoriales et des CCI pour favoriser les investissements à long terme dans l’exploitation portuaire. Il combine l’agilité de gestion d’une société et la vision de long terme d’actionnaires publics.

Le recours à ce statut serait opportun pour l’exploitation de plusieurs ports auxquels il n’est actuellement pas ouvert.

La proposition de loi élargissant la possibilité pour les collectivités territoriales et leurs groupements d’avoir recours au modèle de la société portuaire pour l’exploitation de leurs ports, déposée par la sénatrice Nadège Havet et des sénateurs Michel Canévet et Yves Bleunven, est donc utile. Elle a été adoptée le 18 juin 2025 par le Sénat, après avoir été adoptée à l’unanimité par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, modifiée par un amendement.

La rapporteure propose l’adoption de cette proposition de loi, telle que rédigée par le Sénat, sans modification. Elle souligne que la différence de traitement par le droit en vigueur entre les 18 ports anciennement d’intérêt général et les autres ports décentralisés n’a plus de justification. La société portuaire est un outil souple et utile pour le développement et la gestion des ports maritimes en France.

 

 


   COMMENTAIRE de l’article unique

Adopté par la commission sans modification

 

Cet article élargit la possibilité pour les collectivités territoriales et leurs groupements de recourir au statut de société portuaire pour l’exploitation commerciale des ports, en permettant le recours à ce statut pour l’ensemble des ports ressortissant de leur compétence.

Ce mode d’exploitation n’est aujourd’hui ouvert qu’aux 18 ports non autonomes transférés par l’État aux collectivités territoriales par la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales ([5]).

  1.   L’ÉTAT du droit
    1.   Plusieurs régimes résultant des différentes vagues de décentralisation

● Le système portuaire français a évolué au cours du temps, au gré notamment des vagues de décentralisation. Il en résulte plusieurs régimes portuaires.

Avant 1983, tous les ports maritimes étaient de la compétence de l’État. La loi du 22 juillet 1983 complétant la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l’État ([6]) a transféré aux départements 304 ports maritimes de commerce et de pêche et 228 ports de plaisance aux communes.

La loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale ([7]), a rendu les communautés d’agglomération, les communautés de communes et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre compétents de plein droit, en vertu des articles L. 5216-5 et L. 5214-16 du code général des collectivités territoriales (CGCT) en matière de développement économique. Cette évolution a notamment impliqué qu’elles exercent, en lieu et place de leurs communes membres, la compétence pour créer, aménager, entretenir et gérer les zones d’activité portuaire sous réserve que ces zones présentent un intérêt communautaire.

L’article 104 de la loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité ([8]) prévoyait une expérimentation, qui devait être engagée dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la loi, consistant à transférer de l’État aux régions qui en faisaient la demande, ses compétences pour aménager, entretenir et exploiter les ports d’intérêt national.

La loi de décentralisation de 2004 ([9]) a abrogé cette dernière disposition et a entraîné la décentralisation des dix-sept ports d’intérêt national métropolitains et d’un port ultramarin, principalement aux régions, en leur transférant à la fois la propriété et la compétence d’aménagement, de gestion et d’entretien de ces ports.

La loi du 4 juillet 2008 portant réforme portuaire ([10]) a créé le statut de Grand port maritime (GPM) dans lequel ont basculé les onze ports maritimes relevant de l’État, à l’exception de celui de Saint-Pierre-et-Miquelon qui a conservé son statut de port d’intérêt national.

La loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République ([11]), dite « loi NOTRe » a ensuite prévu la possibilité d’un transfert des ports départementaux aux collectivités ou groupements candidats à 1er janvier 2017.

Enfin, l’ordonnance du 19 mai 2021 relative à la fusion du port autonome de Paris et des grands ports maritimes du Havre et de Rouen ([12]) a créé la nouvelle catégorie d’établissement public du grand port fluvio-maritime.

● Les régimes de gestion des ports maritimes résultant des évolutions décrites sont listés à l’article L. 5311-1 du code des transports.

Ainsi, actuellement, le grand port fluvio-maritime HAROPA PORT, les cinq grands ports maritimes de métropole ([13]), les quatre grands ports maritimes utramarins ([14]) et le port d’intérêt national de Saint-Pierre-et-Miquelon sont de la compétence de l’État.

Plus de 600 ports sont décentralisés : environ 470 ports de plaisance sont sous l’autorité des communes et de leurs groupements ; environ 100 ports de pêche et halles à marée sont sous l’autorité des départements et des régions ; environ 50 ports de commerce relèvent de l’autorité portuaire des régions et des départements ([15]).

L’exemple du département du Finistère

Le département du Finistère compte 96 ports de commerce, de pêche ou de plaisance.

Avant la loi 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République dite « loi NOTRe », le département avait la compétence sur 15 ports ayant une activité de pêche, de commerce ou de desserte des îles.

La loi NOTRe a transféré à la région Bretagne

– les ports de desserte des îles de Roscoff Vieux Port, Batz, Molène, Ouessant, Audierne‑Sainte Evette, Le Conquet et Sein ;

– les ports à dominante commerciale de Roscoff-Bloscon et Concarneau.

Le département a conclu un accord portuaire avec la région Bretagne pour créer un syndicat mixte permettant la gestion mutualisée de 7 ports de pêche à l’échelle de la Cornouaille, la compétence portuaire lui étant transférée par le département et la région : Douarnenez, Audierne, Saint-Guénolé-Penmarc’h, Le Guilvinec, Lesconil, Loctudy, Concarneau.

● Le code des transports détermine le régime des ports maritimes relevant des collectivités ou de leurs établissements :

– la région est compétente pour créer, aménager et exploiter les ports maritimes de commerce et pour aménager et exploiter les ports maritimes de pêche qui lui sont transférés, aux termes de l’article L. 5314-1 du code des transports ;

– le département est compétent pour créer, aménager et exploiter les ports maritimes de pêche et pour aménager et exploiter les ports maritimes de commerce qui lui sont transférés, aux termes de l’article L. 5314-2 du code des transports ;

– les communes ou leurs groupements sont compétents pour créer, aménager et exploiter les ports maritimes de plaisance ; ils sont également compétents pour aménager et exploiter les ports maritimes de commerce et de pêche qui leur sont transférés, selon l’article L. 5314-4 du même code.

L’État conserve toutefois un pouvoir discrétionnaire pour désigner les collectivités territoriales bénéficiaires du transfert de compétences. Pour chaque port transféré, une convention conclue entre l’État et la collectivité ou le groupement intéressé ou, à défaut, un arrêté du ministre chargé des ports, dresse un diagnostic de l’état du port, définit les modalités du transfert et fixe sa date d’entrée en vigueur, aux termes de l’article 30 de la loi du 13 août 2004 précitée.

  1.   Les modalités de gestion des ports

● Pour la gestion des ports décentralisés, les collectivités territoriales peuvent avoir recours à plusieurs modèles.

La gestion directe, en régie, prévue par les articles L. 1412-1, L. 1412-2, L. 2221-1 et suivants du CGCT est un mode de gestion de plus en plus rare en raison du peu d’espace qu’il laisse à l’association de tiers à la gouvernance portuaire et de l’exposition au risque d’exploitation de la collectivité.

Les collectivités peuvent choisir de gérer de façon indirecte les équipements portuaires.

Elles peuvent avoir recours à une concession ou à une délégation de service public en confiant à un exploitant tiers la gestion du port. Historiquement, les CCI se sont vu confier une part importante des contrats de concession.

La gestion indirecte peut également intervenir via la création d’une structure dédiée à l’exploitation portuaire. Cette modalité de gestion permet une externalisation mesurée tout en association des tiers intéressés à la gestion des infrastructures portuaires. L’autorité portuaire peut ainsi choisir de recourir à un établissement public doté de la personnalité morale, à une société d’économie mixte (SEM) ou à une société publique locale (SPL), en fonction de la souplesse de gestion qu’elle souhaite permettre.

La société publique locale (SPL), régie par les articles L. 1531-1 et suivants du CGCT, peut être créée par des collectivités territoriales ou des groupements de collectivités, dans le cadre de leurs compétences. Ils en détiennent la totalité du capital. Ces sociétés sont compétentes pour la réalisation d’opérations d’aménagement, d’opérations de construction ou pour exploiter des services publics à caractère industriel ou commercial.

Le recours à la SPL a l’avantage de permettre aux collectivités qui y ont recours de concéder l’exploitation de services publics industriels ou commerciaux sans publicité ni mise en concurrence, conformément aux articles L. 3211-1 et suivants du code de la commande publique relatifs aux contrats de quasi-régie. Pour bénéficier de cette facilité procédurale, trois conditions cumulatives doivent être satisfaites :

– la collectivité ou le groupement doit exercer sur le concessionnaire un contrôle analogue à celui qu’il exerce sur ses propres services ;

– la personne morale contrôlée réalise plus de 80 % de son activité dans le cadre des tâches qui lui sont confiées par la collectivité qui la contrôle ;

– la personne morale contrôlée ne comporte pas de participation directe de capitaux privés au capital, à l’exception des formes de participation de capitaux privés, sans capacité de contrôle ou de blocage requises par la loi, qui ne permettent pas d’exercer une influence décisive sur cette personne.

Ces conditions procèdent du droit dérivé de l’Union européenne. L’article L. 3111-1 du code de la commande publique reprend la rédaction de l’article 17 de la directive du 26 février 2014 sur l’attribution de contrats de concession ([16]). Le considérant 46 de cette même directive précise la portée de l’article 17 en restreignant la lecture littérale qui aurait pu être faite de ce seul article. En particulier, s’agissant de la place que peuvent occuper les opérateurs économiques privés dans le capital de la personne morale contrôlée, il est précisé que les participations directes dans le capital ne doivent pas être autorisées dans le régime de la quasi-gestion, à moins qu’il s’agisse de participations d’opérateurs économiques privés spécifiques rendues obligatoires par la loi.

Ce régime de quasi-régie a pour avantage de conserver une gestion publique de l’infrastructure, qui ne peut être garantie par la mise en concurrence et la publicité de l’octroi d’une concession.

Seules les collectivités et leurs groupements peuvent être actionnaires d’une SPL. Cette possibilité n’est pas ouverte aux établissements publics et aux organismes parapublics. En particulier, les chambres de commerce et d’industrie (CCI), actuellement gestionnaires de 116 ports, sous diverses formes ([17]), ne peuvent pas être actionnaires de SPL.

La société d’économie mixte (SEM), régie par les articles L. 1521-1 et suivants du CGCT, permet aux collectivités territoriales de s’associer à des personnes privées ou à d’autres personnes publiques pour des activités d’intérêt général, et notamment pour l’exploitation de services publics à caractère industriel ou commercial. Les CCI peuvent ainsi être actionnaires des SEM et pas des SPL. Plus de la moitié du capital des SEM doit être détenue par les collectivités territoriales ou leurs groupements. De plus, les actionnaires autres que les collectivités territoriales et leurs groupements doivent détenir au moins 15 % du capital.

En revanche, dès lors que les SEM, par construction, ont à leur capital des sociétés privées, le régime de quasi-régie ne leur est pas applicable. L’exigence légale d’un minimum de capitaux privés dans la SEM de 15 % ne permet pas de remplir la condition d’une adhésion obligatoire d’opérateurs économiques privés spécifiques car n’importe quel opérateur privé peut devenir actionnaire minoritaire d’une SEM ([18]).

  1.   Le régime des sociétés portuaires

● L’article 35 de la loi du 5 janvier 2006 relative à la sécurité et au développement des transports ([19]) a institué le régime de société portuaire qui permet aux collectivités territoriales et à leurs groupements de créer et de prendre des participations dans des sociétés afin d’assurer l’exploitation commerciale de ports lorsqu’au moins l’un d’entre eux se trouve dans leur ressort géographique. Ce régime a l’avantage de permettre aux collectivités de gagner en souplesse dans l’exploitation des ports et de permettre que les CCI, acteurs historiques de la gestion portuaire, puissent prendre des participations dans la société sans toutefois empêcher l’application du régime de quasi-régie qui permet de dispenser les collectivités de mise en concurrence et de publicité au moment de l’octroi de la concession.

Il n’est en revanche ouvert qu’aux 18 ports pour lesquels la compétence de l’État s’agissant de l’exploitation a été transférée aux régions ou aux départements par la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, selon le I de l’article 35 précité ([20]). Il s’agit des ports qui étaient précédemment classés comme port d’intérêt national, dont l’outillage public était concédé à des CCI et qui ont été transférés aux régions : les ports de Calais, Boulogne-sur-Mer, Dieppe, Caen-Ouistreham, Cherbourg, Saint-Malo, Brest, Le Fret, Roscanvel, Concarneau, Lorient, La Rochelle (le port de pêche), Bayonne, Port-la-Nouvelle, Sète, Toulon, Nice et Le Larivot en Guyane.

À ce jour, seules deux sociétés portuaires ont été créées :

– BrestPort, créée en 2021, est une société portuaire, société anonyme créée et détenue (50 %) par la Région Bretagne, la CCI Finistère (39 %) et Brest Métropole (11 %) ; sa mission est de gérer le port dans le cadre d’une concession de 40 ans accordée par la Région Bretagne, propriétaire et autorité concédante. Le recours au statut de société portuaire s’inscrit en cohérence avec le plan de développement de l’activité portuaire. BrestPort a ainsi pour objectif que l’activité portuaire passe de 2 500 à 6 000 emplois dans les quarante prochaines années ;

– Société portuaire Port de Bayonne, créée en 2024, est une société portuaire, société par actions simplifiées à capitaux publics, détenue par la Région Nouvelle-Aquitaine à 70,27 %, par la CCI Bayonne Pays Basque à 27,03 % et la CCI des Landes à hauteur de 2,70 %. La société portuaire a repris la concession en cours sous forme de quasi-régie jusqu’au 31 décembre 2024 et gère la prochaine concession pour une durée de quarante ans ;

Auditionné par votre rapporteure, le président du conseil départemental du Finistère, M. Maël de Calan, a souligné toute l’utilité qu’aurait le recours à une société portuaire pour la gestion des ports de Cornouaille, qui font actuellement l’objet d’une concession du syndicat mixte des ports de pêche-plaisance de Cornouaille à la CCI Finistère, cette concession prenant fin au 31 décembre 2025. Cette structure permettrait de développer les investissements de superstructures et d’infrastructures nécessaires au développement de ces ports.

D’autres ports s’intéressent de près au modèle de sociétés portuaire. C’est le cas du port de commerce de la rade de Toulon. Faisant l’objet d’une concession depuis 1956 à la CCI du Var jusqu’au 31 décembre 2025, le port de Toulon pourrait être prochainement exploité via une société portuaire. La loi le permet déjà, Toulon faisant partie des ports dont la propriété a été transférée par la loi du 13 août 2004. La CCI du Var a ainsi proposé à la métropole de Toulon la constitution d’une société portuaire, sur le modèle des sociétés de Brest et de Bayonne ([21]).

● Le II de l’article 35 de la loi du 5 janvier 2006 précitée précise les conditions dans lesquelles la cession ou l’apport des concessions portuaires à ces sociétés pourra être opéré. La collectivité territoriale propriétaire d’un des 18 ports susceptibles d’être gérés par une société portuaire peut, à la demande du concessionnaire, autoriser la cession ou l’apport de la concession à une société portuaire dont le capital initial est détenu entièrement par des personnes publiques, dont la chambre de commerce et d’industrie dans le ressort géographique du port. La collectivité ne pourra donc user de cette faculté de sa seule initiative et l’imposer à son co-contractant. Elle n’est en revanche pas dans l’obligation de faire droit à la demande du concessionnaire.

Dans le cas d’une cession ou d’un apport de concession à une société portuaire, un nouveau contrat de concession est établi entre la collectivité territoriale et la société portuaire, pour une durée d’au plus quarante ans.

● Le III du même article 35 est caduc car il soustrait les opérations applicables aux sociétés portuaires aux articles 38 et 40 de la loi du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et la transparence de la vie économique et des procédures publiques ([22]), dite « loi Sapin » qui ont été abrogées. L’article 38 concernait les exigences de publicité et de mise en concurrence encadrant les contrats de délégation de service public. L’article 40 concernait les motifs de la prolongation de la durée d’une concession.

En tout état de cause, l’exclusion des sociétés portuaires des règles qui étaient prévues par les articles 38 et 40 de la loi du 29 janvier 1993 serait contraire au droit de l’Union européenne dès lors que l’exploitation des ports non autonomes transférés par l’État aux collectivités est une concession au sens de la directive 2014/23/UE du 26 février 2014 sur l’attribution de contrats de concession et entrent par conséquent dans son champ d’application. Les dispositions du code de la commande publique, qui se sont substituées à celles de la loi Sapin, sont donc applicables aux sociétés portuaires.

● Le IV de l’article 35 précité fixe les règles de mobilité des agents publics des CCI et de transferts des contrats de travail en cas de transfert de concession.

S’agissant des agents publics affectés à la concession transférée, il dispose qu’ils sont mis à la disposition de la société portuaire pour une durée de dix ans dans des conditions fixées par convention entre l’ancien concessionnaire et la société portuaire. Chaque agent peut demander que le nouvel exploitant lui propose un contrat de travail. Au terme du délai de dix ans, la société portuaire doit proposer aux agents publics un contrat de travail. Ceux qui refusent le contrat proposé sont réintégrés dans les CCI concernés.

Enfin, le IV précise, par renvoi à l’article L. 122-12 du code du travail, aujourd’hui abrogé, que dans le cas d’un transfert de concession, les contrats de travail subsistent entre les salariés et le nouvel employeur.

  1.   le dispositif initial proposé
    1.   L’élargissement de la possibilité de recours aux sociétés portuaires

L’article unique de la proposition de loi permet d’abord à l’ensemble des collectivités territoriales, qui sont autorités portuaires, de recourir au modèle de société portuaire.

Le a) du du I apporte d’abord la précision rédactionnelle selon laquelle les collectivités territoriales peuvent non seulement prendre des participations dans des sociétés portuaires, mais également créer de telles sociétés.

Le b) supprime la restriction du recours aux sociétés portuaires aux seuls 18 ports non autonomes transférés par la loi de 2004. L’ensemble des ports décentralisés pourra ainsi bénéficier de ce statut.

Le c) précise que les chambres de commerce et d’industrie du ressort géographique de ces ports peuvent participer au capital de la société portuaire.

  1.   Des coordinations et actualisations

Le du I de l’article unique de la présente proposition de loi modifie le II de l’article 35 de la loi du 5 janvier 2006 précitée pour procéder à des coordinations tirant les conséquences de la modification du I de l’article 35 par le 1° du I de l’article unique de cette proposition de loi.

La première phrase du II est ainsi réécrite pour prévoir que lorsqu’une société portuaire est créée, la collectivité territoriale ou le groupement compétent peut convenir de la cession ou de l’apport de la concession à la société portuaire, si son capital initial est détenu entièrement par des personnes publiques. Dans son rapport ([23]), la sénatrice Nadège Havet justifie la suppression de la mention des CCI dans le II de l’article 35 par la précision apportée au I du même article 35, par le 1° du I de la proposition de loi, selon lequel les CCI peuvent participer au capital des sociétés portuaires. Les sénateurs n’ont donc pas souhaité exclure les CCI du champ des personnes publiques au sens du II de l’article 35.

Le du I de l’article unique dans sa version initiale a entendu actualiser les références de l’actuel III de l’article 35 précité aux dispositions de la loi Sapin car ces dispositions ont été abrogées. Il a donc substitué aux références des articles 38 et 40 de la loi Sapin les dispositions du code de la commande publique et du code général des collectivités territoriales relatives à la passation des contrats de concession et relatives aux délégations de service public. Toutefois, cette actualisation n’était pas opportune dès lors que les concessions de l’article 35 sont soumises à la directive 2014/23/UE du 26 février 2014 sur l’attribution de contrats de concession et entrent par conséquent dans le champ d’application du code de la commande publique.

Le du I procède à des améliorations rédactionnelles du IV de l’article 35 de la loi de 2006 et actualise la référence à l’article L. 122-12 du code du travail, abrogée par l’ordonnance du 12 mars 2007 relative au code du travail ([24]), en la remplaçant par une référence à l’article L. 1224-1 du code du travail qui a repris ses dispositions.

  1.   Les gages financiers

Les II et III de l’article unique de cette proposition de loi sont les gages financiers censés compenser une éventuelle charge que cette proposition de loi engendrerait, en raison de la faculté élargie attribuée aux collectivités territoriales d’investir dans des sociétés de gestion de ports.

Le II prévoit ainsi de compenser d’éventuelles charges pour les collectivités territoriales par une majoration de la dotation globale de fonctionnement (DGF). Le III compense pour l’État le manque à gagner engendré par la majoration de la DGF par une augmentation des droits sur le tabac.

  1.   L’examen au Sénat
    1.   les modifications apportées en commission

La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a adopté le texte à l’unanimité, en adoptant un amendement de la rapporteure.

Cet amendement, l’unique déposé en commission, avait pour objectif que le texte se conforme au droit de l’Union européenne en matière de procédure d’attribution des contrats de concession.

L’amendement a en effet modifié l’alinéa 7 de l’article afin que celui-ci abroge le III de l’article 35, prévoyant que les opérations relatives aux sociétés portuaires soient soustraites aux obligations en matière de passation des contrats de concession et de délégations de service public. L’article de la proposition de loi, dans son texte initial, se contentait de remplacer les articles abrogés de la loi Sapin par les sections du code de la commande publique et du code général des collectivités territoriales relatives à ces procédures.

Pour la même raison, la référence à l’article L. 3135-1 du code de la commande publique, qui porte sur les cas de modification des contrats de concession, a été supprimé par cet amendement.

  1.   les modifications apportées en séance

Après l’adoption d’un amendement du Gouvernement visant à supprimer les gages financiers, le texte a été adopté le 18 juin 2025 en séance publique.

Votre rapporteure est favorable à l’adoption sans modification du texte. Elle estime qu’il est utile de donner davantage de souplesse aux collectivités territoriales dans leur gestion en permettant que l’ensemble des ports décentralisés soient gérés par des sociétés portuaires. Il n’y a plus de justification à la différence de traitement par la loi entre les anciens ports d’intérêt national, qui peuvent être gérés par des sociétés portuaires et les ports décentralisés, qui ne le peuvent pas.

Ce statut de souplesse favorisera les investissements de long terme en alliant les capacités d’investissement de l’État et des collectivités territoriales, tout en permettant la gestion en quasi-régie.

  1.   les travaux de la commission

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale a adopté le texte sans modification.

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   EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa réunion du mercredi 26 novembre 2025, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a examiné, sur le rapport de Mme Liliana Tanguy, la proposition de loi élargissant la possibilité pour les collectivités territoriales et leurs groupements d’avoir recours au modèle de la société portuaire pour l’exploitation de leurs ports (n° 1605).

Mme la présidente Sandrine Le Feur. Je souhaite vous faire part d’une demande de mise au point que j’ai reçue du président du Parc national de forêts, à la suite de propos tenus par notre collègue Sébastien Humbert, également destinataire de ces précisions. M. Humbert a affirmé lors de nos débats sur le projet de loi de finances (PLF) pour 2026 : « Ce parc s’est […] prononcé en faveur de projets éoliens, totalement contraires à la protection de la faune et de la biodiversité. Nombre d’espèces, comme le milan royal ou la cigogne noire, sont décimées à cause de ces outils de production énergétique inutiles […] ». Le Parc national de forêts a fait savoir que, jusqu’à présent, tous les dossiers de projets éoliens portant sur son territoire, examinés au cas par cas, ont fait l’objet, après consultation du conseil scientifique, d’un avis conforme défavorable. Ces avis ont été suivis par les autorités administratives compétentes, ce qui a conduit au rejet – confirmé par tous les arrêts des cours administratives – des demandes d’autorisation environnementale. Les avis rendus ont été motivés par l’impératif de conservation de diverses espèces d’oiseaux et de chauves-souris protégées et des paysages ruraux.

Nous en venons à la proposition de loi élargissant la possibilité, pour les collectivités territoriales et leurs groupements d’avoir recours au modèle de la société portuaire pour l’exploitation de leurs ports, adoptée par le Sénat le 18 juin après engagement de la procédure accélérée. Je me réjouis que, malgré la période budgétaire chargée, le gouvernement ait trouvé un créneau – en l’occurrence, le 9 décembre – pour inscrire ce texte à l’ordre du jour, et ce pour au moins trois raisons : d’abord, parce qu’il donnera de la souplesse aux collectivités et permettra de parachever la décentralisation des ports en supprimant des restrictions qui n’ont plus lieu d’être ; ensuite, parce qu’il est très attendu dans certains territoires, notamment bretons, soucieux de soutenir leurs ports face aux évolutions économiques – le modèle de la société portuaire ayant déjà fait ses preuves ; enfin, parce qu’il concerne l’économie bleue, c’est-à-dire l’économie maritime et littorale, dont je tiens à souligner l’importance.

Mme Liliana Tanguy, rapporteure. Le système portuaire français, qu’il s’agisse des grands ports maritimes ou des ports décentralisés, des ports de commerce, de pêche ou de plaisance, est un atout formidable pour notre pays.

La répartition des compétences entre l’État, les régions, les départements et le bloc communal est le fruit des vagues successives de décentralisation. Les outils juridiques à la disposition des autorités portuaires se sont adaptés à ces nouvelles réalités, mais de manière imparfaite, comme en témoigne le fait que le modèle des sociétés portuaires ne concerne pas tous les ports. L’objet de la présente proposition de loi de nos collègues sénateurs Nadège Havet, Michel Canévet et Yves Bleunven est de mettre en cohérence le droit avec la réalité. L’ensemble des groupes du Sénat ont voté ce texte issu du terrain, efficace, pragmatique, qui vise un objectif de simplification.

Permettez-moi un bref rappel historique. En 1983, le législateur a donné compétence aux départements pour créer, aménager et exploiter 304 ports maritimes de commerce et de pêche, et a conféré la même compétence aux communes s’agissant de 228 ports de plaisance. La loi de décentralisation de 2004 a marqué une nouvelle étape majeure en transférant aux régions la propriété et la compétence concernant 17 ports d’intérêt national métropolitains et un port ultramarin. Puis la loi du 4 juillet 2008 portant réforme portuaire a créé le statut de grand port maritime qui s’est appliqué aux onze ports maritimes relevant de l’État. Enfin, la loi de 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite « loi NOTRe », a offert la possibilité aux départements de transférer la propriété et l’exploitation des ports relevant de leur compétence à d’autres collectivités ou groupements.

La France compte plus de 600 ports décentralisés, qui représentent 22 % du tonnage total de marchandises du pays, 600 millions d’euros de valeur ajoutée et 11 000 emplois directs – 27 000 en incluant les emplois indirects.

Les collectivités disposent de plusieurs outils pour assurer la gestion de leurs ports : la régie, dans le cas d’une gestion directe ; la concession, avec délégation à un tiers – historiquement, le réseau des chambres de commerce et d’industrie (CCI) est très mobilisé dans le cadre de ce mode de gestion ; la société publique locale (SPL), dont le capital n’est ouvert qu’aux collectivités territoriales et à leurs groupements, ce qui exclut les CCI ; enfin, la société d’économie mixte (SEM), à actionnariat majoritairement public, mais qui peut associer des acteurs privés qui détiennent au moins 15 % du capital.

La loi du 5 janvier 2006 relative à la sécurité et au développement des transports a créé le modèle des sociétés portuaires, qui constitue, pour les collectivités, un outil supplémentaire de gestion des ports. Il présente un double avantage : d’une part, il autorise les collectivités territoriales à s’associer avec des chambres de commerce et d’industrie ; d’autre part, il permet de bénéficier d’une certaine souplesse, propre au régime de la quasi-régie, en matière de mise en concurrence et de publicité des concessions. Toutefois, en 2006, le législateur avait réservé ce statut aux dix-huit ports dont la compétence avait été transférée aux régions en 2004 ; à l’époque, le besoin n’apparaissait pas de l’étendre aux autres ports décentralisés.

La présente proposition de loi part des réalités du terrain et d’un manque juridique injustifié : d’un côté, nos ports ont des besoins d’investissement massifs, de l’autre, il est complexe de conjuguer les capacités d’investissement des collectivités et celles des chambres de commerce et d’industrie. À cet égard, la société portuaire offre une souplesse bienvenue ; on comprend mal pourquoi ce statut ne serait pas ouvert à tous les ports décentralisés, d’autant que le transfert des contrats de travail, qui est prévu en cas de changement de concessionnaire, s’appliquera lors de la création de la société portuaire.

Il n’existe pour l’heure que deux sociétés portuaires : BrestPort, créée en 2021 et détenue à 50 % par la région Bretagne, à 39 % par la CCI du Finistère et à 11 % par Brest Métropole, et Port de Bayonne, créée en 2024 et détenue à 70 % par la région Nouvelle-Aquitaine, à un peu plus de 27 % par la CCI Bayonne Pays basque et à un peu moins de 2,7 % par la CCI des Landes.

D’autres ports pourraient avoir recours à ce modèle, comme ceux du pays de Cornouaille, qui viennent de se constituer en société publique locale. Seul le port de Concarneau est éligible au modèle de gestion en société portuaire, les six autres ports du pays de Cornouaille ne le pouvant pas juridiquement. Or une gestion unifiée par les collectivités et la CCI permettrait d’augmenter la capacité d’investissement dans les infrastructures – en particulier dans l’outillage de levage, le froid et la transition écologique.

C’est la raison pour laquelle l’article unique de la proposition de loi a pour objet de supprimer les dispositions qui réservent le recours au modèle de la société portuaire aux dix-huit ports transférés aux régions par la loi de 2004, cette restriction n’étant pas justifiée. J’ajoute qu’en l’absence d’investisseur privé – ce qui est le cas dans les deux sociétés portuaires existantes –, la société est éligible au modèle de la quasi-régie et n’est donc pas soumise aux obligations de publicité et de mise en concurrence lors du renouvellement des contrats de concession.

Cette proposition de loi nous offre l’occasion de voter une mesure utile, qui a fait ses preuves sur le terrain. Je plaide pour que nous l’adoptions sans modification. Un large vote en sa faveur constituerait un interlude de concorde parlementaire en cette période marquée par des débats parfois vifs.

Mme la présidente Sandrine Le Feur. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

Mme Béatrice Roullaud (RN). La présente proposition de loi vise à offrir aux collectivités territoriales un nouvel outil de gestion de leurs ports : la société portuaire. Il répond à une réelle attente des territoires et apporte une souplesse indispensable pour adapter la gouvernance portuaire aux réalités économiques.

Les auditions ont mis en exergue la grande complexité de la gestion portuaire. Il pourrait être utile que notre commission crée une mission flash ou une mission d’information sur la simplification législative dans ce domaine, tant les besoins et les attentes sont forts. Ce texte constitue un premier pas en ce sens. Le statut de la société portuaire offre en effet une plus grande sécurité que celui de la société publique locale, qui exclut toute participation d’acteurs privés, tels que les chambres de commerce et d’industrie – alors que ces dernières sont essentielles à l’exploitation des criées. Il est également plus souple que celui de la société d’économie mixte, qui est soumise à des obligations de mise en concurrence souvent incompatibles avec les activités portuaires, en particulier lorsque les filières sont fragilisées. Rappelons, à cet égard, que le secteur de la pêche en France traverse une période difficile : il est en décroissance, est déficitaire dans de nombreux ports et fait face à une concurrence internationale déloyale.

Dans ce contexte, la délégation de service public n’est plus adaptée. Le modèle fondé sur la prise en charge du risque par le concessionnaire ne fonctionne plus lorsque l’activité se contracte. Le statut proposé permettra aux collectivités de reprendre la main. Elles pourront investir dans la modernisation des infrastructures, soutenir l’activité des criées et assumer certaines dépenses qui pèsent actuellement, à titre exclusif, sur les pêcheurs. En offrant la possibilité à toutes les collectivités propriétaires d’un port de créer une société portuaire, la proposition de loi met à la disposition des territoires un outil souple, efficace et adapté, qui répond aux enjeux économiques, sociaux et maritimes.

Pour toutes ces raisons, notre groupe soutiendra ce texte.

Mme Sandrine Lalanne (EPR). La France est la deuxième nation maritime au monde, avec un littoral de plus de 20 000 kilomètres. Elle est aussi le deuxième fabricant mondial, et le premier en Europe, de bateaux de plaisance. Pourtant, les deux tiers des produits de la mer que nous consommons sont importés ; notre potentiel nous permettrait de prendre une plus grande part au commerce maritime. Ce paradoxe montre combien l’attractivité économique de certains territoires littoraux et leur capacité à s’appuyer sur des ports résilients sont importantes pour soutenir les économies de proximité.

Outre les 11 grands ports maritimes – qui sont des établissements publics de l’État –, plus de 600 ports décentralisés – 470 ports de plaisance, 100 ports de pêche et 50 ports de commerce – jouent un rôle économique majeur à l’échelle territoriale. Ils représentent 22 % du tonnage total de marchandises, 600 millions d’euros de valeur ajoutée et 11 000 emplois – 27 000 si l’on tient compte des emplois indirects.

Depuis la loi du 5 janvier 2006 relative à la sécurité et au développement des transports, les collectivités territoriales peuvent prendre des participations dans des sociétés portuaires. Toutefois, cette possibilité est réservée aux dix-sept ports métropolitains et au port ultramarin visés par la loi du 13 août 2004. La proposition de loi vise à ouvrir cette faculté à l’ensemble des collectivités territoriales et de leurs groupements qui détiennent des ports en pleine propriété.

Dans le modèle de la société portuaire, les collectivités concédantes renforcent leur implication dans la stratégie de développement de leurs ports en devenant concessionnaires. Cela permet d’allier l’expertise de la CCI, acteur parfois historique de la gouvernance des ports, à la puissance financière des collectivités pour préserver et accroître le volume de leurs investissements dans la transition écologique et technologique et améliorer leur compétitivité. Ce modèle offre de nombreux avantages : une gestion administrative simplifiée par rapport aux règles applicables aux SPL et aux SEM ; la possibilité d’engager un véritable plan de développement, l’actionnaire public étant en mesure de prendre des risques sur le long terme ; une capacité d’investissement renforcée ; la préservation des emplois, voire la création de nouveaux emplois ; enfin, plus généralement, une faculté d’adaptation aux enjeux actuels. L’évolution constatée dans les deux ports qui ont adopté la forme de la société portuaire – Bayonne et Brest – montre l’efficacité de ce modèle, qu’il n’est donc pas nécessaire de faire évoluer.

De nombreuses concessions arrivant bientôt à échéance, il importe d’adopter ce texte rapidement. Compte tenu du rapport de Mme la rapporteure, des auditions menées tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, et de l’adoption du texte à l’unanimité par les sénateurs, le groupe Ensemble pour la République votera la proposition de loi et souhaite son adoption conforme.

M. Thomas Portes (LFI-NFP). Nous nous opposons fermement à cette proposition de loi qui vise à élargir le recours au modèle de la société portuaire pour l’exploitation de plus de 500 ports secondaires de plaisance, de pêche et de commerce décentralisés relevant des collectivités territoriales.

En effet, le modèle de la société portuaire transforme la gestion d’un port en une société de droit privé, même si les capitaux sont publics. Au sein de La France insoumise, nous défendons une gestion entièrement publique et démocratique des ports car nous estimons que ce cadre est le seul à même de garantir l’aménagement durable, la sécurité maritime, mais aussi la protection de l’emploi.

Le texte qui nous est soumis soulève des questions importantes concernant la place accordée aux chambres de commerce et d’industrie dans la gouvernance portuaire. Inspiré par une logique de décentralisation, il promeut le recours aux sociétés portuaires, qui sont des structures de droit privé à capitaux publics. Celles-ci permettent aux collectivités de devenir actionnaires et concessionnaires de leurs ports, et aux CCI d’entrer dans leur capital. Si les CCI ont, certes, l’habitude de gérer les ports et les aéroports, leur implication rend le processus de décision publique plus opaque dans la mesure où leur gouvernance est dominée par des représentants d’entreprises susceptibles de privilégier la rentabilité au détriment de l’intérêt général.

Par ailleurs, si le texte impose un capital initial public, il ne prévoit aucune restriction quant à une future ouverture de ce capital à des acteurs privés. Cette faille est préoccupante. En effet, les ressources publiques des CCI ont diminué de plus de 66 % depuis 2013. En outre, le PLF pour 2026, qui n’a recueilli qu’une voix dans notre assemblée, prévoit une nouvelle réduction d’un tiers de leurs budgets. Cette situation pourrait les amener à se tourner vers des financements privés pour assurer leur survie économique, ce qui renforcerait le risque que la logique de la rentabilité prime l’intérêt général.

À ce jour, seules deux collectivités ont expérimenté le modèle de la société portuaire : BrestPort et le port de Bayonne. Cette expérience a mis en évidence plusieurs limites : le manque de transparence, des décisions dispersées et un affaiblissement du contrôle démocratique. En effet, transformer un port en société peut permettre de contourner l’appel d’offres public pour sa gestion. C’est ce qui a eu lieu à Bayonne, où la création de la société portuaire a été critiquée pour son opacité et les risques financiers liés à une concession de quarante ans, alors qu’auparavant le port était géré dans le cadre d’une délégation de service public renouvelée tous les quinze ans par appel d’offres.

Quitte à parler de l’exploitation des ports français, nous aurions préféré que cette proposition de loi s’intéresse à leur dimension écologique. Nos ports, qui traitent chaque année des centaines de millions de tonnes de marchandises, représentent une part significative des émissions de gaz à effet de serre. Certaines zones portuaires industrielles, comme celle de Fos-sur-Mer, émettent à elles seules près de 18 millions de tonnes de CO2. Il aurait été bien plus utile de se saisir de cet enjeu crucial pour garantir la décarbonation et la durabilité de nos ports.

Nous restons convaincus que la gestion portuaire doit rester sous un contrôle public fort afin de garantir l’aménagement durable du territoire, la sécurité maritime, la protection de l’emploi, ainsi que la décarbonation et le pilotage économique à long terme.

Pour toutes ces raisons, nous voterons contre la proposition de loi.

M. Fabrice Roussel (SOC). Dans notre économie, les ports occupent une place stratégique au point de vue logistique, industriel et social. Au total, l’économie maritime représente 1,5 % du PIB français. Cette contribution ne provient pas seulement du transport de marchandises, de la pêche ou encore de la plaisance, mais aussi de l’ensemble des activités paraportuaires : industrie, réparation navale, commerce logistique et services liés aux hinterlands. Les ports constituent également des leviers de réindustrialisation.

Dans le cadre de la stratégie nationale portuaire, la France s’est fixé l’objectif de doubler les emplois directs et indirects liés à l’activité portuaire d’ici à 2050 et de renforcer l’attractivité de ses plateformes. Dans certains bassins d’emploi côtiers, les activités maritimes représentent jusqu’à 10 % des emplois, ce qui illustre le rôle structurant des ports dans le développement territorial, industriel et commercial, ainsi que dans la compétitivité internationale de notre pays.

Les ports doivent relever plusieurs défis majeurs. L’avenir de la pêche constitue évidemment une question essentielle, mais les ports doivent faire face à d’autres enjeux structurants : la décarbonation des infrastructures et des activités, la transformation de la construction navale, le développement d’une plaisance durable et, plus généralement, le financement des investissements nécessaires pour accompagner ces transitions.

Dans ce contexte, le modèle de la société portuaire présente deux atouts essentiels : d’une part, il renforce l’implication des collectivités territoriales concédantes, qui deviennent pleinement actrices de la gouvernance portuaire en tant que concessionnaires, ce qui conduit à aligner stratégie locale, besoins économiques et développement portuaire ; d’autre part, la participation financière accrue des collectivités offre une base plus solide pour financer les investissements lourds que les CCI ne sont plus en mesure d’assumer seules. Ce modèle permet donc de sécuriser et d’accélérer les investissements indispensables aux ports français.

Néanmoins, la proposition de loi comporte aussi des risques. Si elle impose un capital initial entièrement public pour permettre le transfert des concessions, elle n’interdit pas pour autant l’ouverture progressive du capital à des acteurs privés, ce qui fait peser la menace d’une perte de contrôle public sur des infrastructures stratégiques. Alors qu’il est essentiel de préserver le maintien des droits sociaux des agents transférés, une telle évolution pourrait également raviver des tensions sociales et ouvrir la voie à des situations plus sensibles, telles que l’ingérence de puissances étrangères dans la gestion ou l’orientation de sites essentiels à notre souveraineté économique, énergétique et logistique.

Ce risque est renforcé par les difficultés financières des CCI qui pourraient être contraintes de se retirer du capital au profit d’acteurs privés, dont les intérêts économiques divergeraient de l’intérêt général que les ports sont censés servir. C’est pourquoi nous avons déposé trois amendements qui visent à éviter une telle dérive et à encadrer et réguler précisément toute cession de parts des investisseurs. Nous serons donc particulièrement attentifs à l’évolution du texte et à celle de nos infrastructures portuaires, qui demeurent des actifs stratégiques pour notre économie et notre sécurité maritime.

M. François-Xavier Ceccoli (DR). Notre groupe apportera un soutien sans équivoque à cette proposition de loi. Ce texte corrige une inégalité juridique qui bride depuis près de vingt ans la capacité d’action des collectivités littorales et fluviales. Alors que la France compte plus de 600 ports décentralisés, seuls 17 d’entre eux peuvent recourir, en métropole, au modèle de la société portuaire créé en 2006. Cela signifie que la quasi-totalité des ports de pêche, de commerce ou de plaisance, pourtant essentiels à l’économie locale, ne disposent pas de l’outil le plus efficace pour se moderniser, attirer des investissements ou conduire des projets industriels de long terme. Cette situation n’a plus de justification. Il convient désormais d’élargir l’accès à ce modèle, qui constitue l’un des leviers les plus performants pour développer les énergies marines, décarboner les chaînes logistiques, soutenir la souveraineté alimentaire ou accompagner les projets d’hydrogène. Les exemples de Brest, de Bayonne ou de Port-la-Nouvelle montrent à quel point la société portuaire accélère et sécurise les grands projets d’avenir.

Le texte que nous examinons répond à cette exigence d’efficacité. Il permet à toutes les collectivités propriétaires d’un port de créer une société portuaire au capital initial entièrement public, d’en transférer la constitution dans un cadre sécurisé et d’associer ensuite les chambres de commerce et d’industrie ou les acteurs économiques à une gouvernance modernisée. Il garantit également la continuité des droits des agents, ce qui est indispensable à la stabilité de ces projets.

Je voudrais souligner l’intérêt particulier que revêt un tel outil pour les territoires insulaires. En Corse, dont je suis l’un des représentants, la logistique maritime, la continuité territoriale et les investissements portuaires conditionnent chaque jour l’approvisionnement, la transition énergétique et le développement économique. Disposer d’un modèle de gouvernance plus agile, plus lisible et capable de porter des projets multiports constitue un véritable atout stratégique pour un territoire insulaire, qui dépend de ses infrastructures maritimes.

Enfin, l’urgence est réelle. Plusieurs concessions arriveront à échéance dès le 1er janvier 2026, notamment dans le Finistère. Un vote conforme est donc indispensable pour garantir la continuité de l’exploitation, la sécurité juridique des collectivités et la préservation des emplois.

Pour toutes ces raisons – équité, efficacité, transition écologique et urgence opérationnelle –, notre groupe votera la présente proposition de loi et souhaite son adoption conforme.

M. Benoît Blanchard (HOR). La proposition de loi que nous examinons concerne un sujet majeur pour nos territoires : l’avenir de nos ports décentralisés, maillons essentiels de notre économie maritime, côtière et touristique, qui représentent à eux seuls 22 % du tonnage national, 75 % du trafic roulier et 75 % du trafic de passagers. Leur vitalité, leur capacité d’investissement et la qualité de leur gestion sont des enjeux fondamentaux pour le développement local, l’emploi et l’attractivité.

Le texte a pour objet de mettre à la disposition de toutes les collectivités territoriales le modèle de la société portuaire, que la loi du 5 janvier 2006 réserve à un nombre très limité d’entre elles : seuls dix-huit ports sont en effet concernés par le dispositif ; les ports décentralisés, pourtant tout aussi stratégiques, en sont exclus. Cette situation n’est ni cohérente ni satisfaisante.

En rendant tous les ports – de commerce, de pêche ou de plaisance – éligibles à ce modèle, la proposition de loi permettra aux collectivités de bénéficier d’un outil juridique moderne, performant et déjà éprouvé, répondant ainsi à une demande de longue date des élus locaux. C’est aussi une réponse pragmatique à la diminution des capacités financières des CCI qui ne peuvent plus, seules, engager les investissements nécessaires à la modernisation des infrastructures portuaires. Les expériences des ports de Brest et de Bayonne démontrent la pertinence de ce modèle, qui concilie expertise publique et efficacité économique. Alors que de nombreux ports doivent engager des investissements lourds, il constitue un outil précieux pour préparer l’avenir.

Le travail conduit par le Sénat a permis de clarifier et d’ajuster le dispositif, et d’aboutir à un texte solide et opérationnel. Il nous revient de préserver cet équilibre en permettant une adoption conforme, afin que les collectivités bénéficient rapidement de ce modèle attendu.

Pour toutes ces raisons, et parce que la proposition de loi offre une réponse pertinente et utile à nos ports comme à nos territoires, notre groupe soutiendra l’adoption conforme de ce texte en commission.

Mme Liliana Tanguy, rapporteure. Vous avez raison, madame Roullaud, la gestion des ports est complexe. Votre proposition consistant à créer une mission d’information sur le sujet est une piste à creuser, même si nous pouvons déjà nous appuyer sur les travaux de contrôle de nos collègues sénateurs.

Madame Lalanne, cette proposition de loi est en effet essentielle. Elle offre davantage de liberté aux collectivités dans leur gestion et rétablit une égalité de traitement entre les ports français. Surtout, ce modèle permettra de réaliser des investissements portuaires souvent très lourds, en alliant les capacités financières des CCI à celles des collectivités, dans un contexte de forte contrainte budgétaire. Je me réjouis que plusieurs groupes soutiennent le texte.

Monsieur Portes, une société de droit privé peut, d’ores et déjà, assurer la gestion d’un port : je pense notamment aux SEM. L’objectif de la proposition de loi est avant tout de renforcer le poids des collectivités territoriales dans la gestion des ports et de leur apporter davantage de souplesse. Vous refusez la participation d’investisseurs privés tout en souhaitant l’application de procédures de mise en concurrence et de publicité ; pourtant, c’est bien la présence d’investisseurs privés dans les sociétés qui rend ces procédures obligatoires. C’est donc un mauvais procès qui est fait à ce texte, lequel ne renforce en rien la place du privé mais donne un poids accru aux collectivités et offre plus de souplesse de gestion.

Pour répondre à la question de nos collègues socialistes, les outils juridiques existants permettent déjà l’implication du secteur privé. Cette proposition de loi renforce le pouvoir de gestion des collectivités. S’agissant de la protection des activités stratégiques, le droit commun s’applique en la matière : les CCI doivent déjà solliciter l’autorisation de l’État en cas de cession de parts.

Mme la présidente Sandrine Le Feur. Nous en venons aux questions des autres députés – en l’occurrence, à celle de M. Nicolas Bonnet.

M. Nicolas Bonnet (EcoS). À ce jour, seuls dix-huit ports peuvent être exploités selon le modèle de la société portuaire, qui permet de sécuriser le financement, de moderniser les infrastructures portuaires, de conforter l’emploi maritime dans les territoires et de bénéficier des dérogations liées au contrat de quasi-régie. Les quelque 600 ports décentralisés français se trouvent exclus de ce dispositif vertueux qui offre la possibilité d’associer collectivités et CCI dans une gouvernance plus souple et plus robuste, de mutualiser les risques, de simplifier les relations entre concédant et concessionnaire ainsi que de faciliter les investissements de long terme. Ce mode de fonctionnement a pour but d’exploiter au mieux les atouts maritimes de la France. Le groupe Écologiste et social soutient l’objectif visé au moyen de cette proposition de loi.

Cependant, certaines réserves demeurent. Alors que les ports constituent un élément clé dans notre approche de la biodiversité marine, les CCI ne garantissent pas, à elles seules, une prise en compte suffisante des enjeux écologiques et sociaux. L’occupation du domaine public maritime – autrement dit des ports, des digues, des aménagements côtiers… – constitue l’une des pressions liées à l’exploitation humaine que subissent les océans. Face à ce risque, il est nécessaire que les ports engagent des démarches opérationnelles de protection de la faune, de la flore et de la qualité des eaux.

La stratégie nationale portuaire adoptée en 2021 fait de l’accélération de la transition écologique et énergétique des ports de commerce l’un de ses quatre axes majeurs. Elle mise sur l’écoconception, un levier essentiel pour réduire l’impact des infrastructures portuaires sur l’environnement et le climat. Ces bonnes pratiques doivent être encouragées et généralisées à tous nos ports français.

Afin de permettre une gestion efficace et adaptée aux risques, il est essentiel que le capital reste détenu à 100 % par des personnes publiques et que les investissements étrangers soient soumis à un contrôle approfondi.

Par ailleurs, il faut éviter de faire un cadeau empoisonné aux collectivités alors même qu’elles voient leurs dotations diminuer. Elles risquent en effet de devoir céder progressivement leurs parts, ce qui réduirait peu à peu leurs moyens d’action pour orienter le développement portuaire dans une démarche plus soucieuse des enjeux écologiques et sociaux.

C’est pourquoi nous soutiendrons tous les amendements qui visent à ajouter des garanties et des protections. Ainsi, la cession totale ou partielle des participations détenues par une CCI devrait faire l’objet d’une autorisation dans le cadre du contrôle des investissements étrangers pour éviter tout risque de prise de contrôle étrangère sur les infrastructures portuaires stratégiques.

Article unique : Recours des collectivités territoriales au modèle de la société portuaire

Amendements CD2, CD1 et CD3 de M. Fabrice Roussel (discussion commune)

M. Fabrice Roussel (SOC). Ces trois amendements visent à réguler et à encadrer précisément toute cession totale ou partielle des participations détenues par une chambre de commerce et d’industrie, une collectivité ou un groupement de collectivités.

L’article unique ne traite en effet que de l’entrée éventuelle d’une chambre de commerce et d’industrie au capital de la société portuaire ; il n’évoque absolument pas la sortie de ce capital. Nous souhaitons instaurer un contrôle plus fort, par le biais de l’autorisation préalable du ministre de l’économie, sur les investissements étrangers de sociétés privées dans ces activités stratégiques.

Mme Liliana Tanguy, rapporteure. Les enjeux soulevés par ces amendements sont essentiels. Toutefois, le principe de la préservation des intérêts fondamentaux de la nation et de la protection des secteurs stratégiques, qui fait consensus au sein de notre assemblée, est satisfait par le droit existant – il l’est même doublement. Par conséquent, vos amendements le sont aussi.

En effet, les cessions de titres des CCI sont déjà soumises au contrôle des investissements étrangers, qui est régi par l’article L. 151-3 du code monétaire et financier, auquel vos amendements font référence. Cet article impose l’autorisation préalable du ministre chargé de l’économie à l’égard des investissements étrangers dans des activités précisément identifiées, dont certaines peuvent concerner les activités portuaires, au moins indirectement. Il s’agit notamment des activités relatives à la sécurité de l’approvisionnement en énergie, à la continuité de l’approvisionnement en eau, à l’intégrité, la sécurité et la continuité de l’exploitation des réseaux et des services de transport, ainsi qu’à l’exploitation des établissements, installations et ouvrages d’importance vitale au sens du code de la défense.

Le ministre de l’économie doit autoriser au préalable les opérations consistant à prendre le contrôle d’un établissement français exerçant l’une de ces activités, à acquérir tout ou partie d’une branche d’activité d’une entité française, ou qui conduisent à dépasser le seuil de 25 % des droits de vote de la société, ou 10 % des droits de vote d’une société dont les titres sont admis à être négociés sur un marché réglementé.

Surtout, les chambres de commerce et d’industrie sont des établissements publics soumis à la tutelle de l’État, en particulier du ministre chargé de l’économie, en vertu de l’article L. 710-11 du code de commerce. À ce titre, les opérations de cession, de prise ou d’extension de participations financières dans des sociétés civiles et commerciales, des syndicats mixtes, des groupements d’intérêt public ou privé et dans toute personne de droit public sont soumises à l’approbation de l’État ; c’est le préfet qui doit l’autoriser. Cela inclut évidemment les sociétés portuaires.

Je vous invite donc à retirer ces amendements dont l’objectif me semble pleinement satisfait s’agissant des CCI.

Mme Sandrine Lalanne (EPR). Ces amendements sont en effet satisfaits puisque le préfet doit donner son autorisation au nom de l’État.

Il me paraît nécessaire d’établir une distinction entre les capitaux selon qu’ils sont, ou non, d’origine européenne. Dans un contexte de concurrence internationale intense, une réflexion est à l’œuvre en matière de rapprochement transfrontalier. Cela concerne, par exemple, des ports français et espagnols : le port de Bayonne travaille actuellement, en étroite coopération avec le port espagnol de Saint-Sébastien, à l’élaboration d’un protocole d’accord, ce qui pourrait ouvrir la porte, à terme, à l’entrée de capitaux espagnols en France, et réciproquement. La dimension transfrontalière va prendre une place importante dans le cadre des stratégies menées pour faire face à la concurrence internationale, en particulier sur le corridor Atlantique, où l’enjeu est considérable.

M. Fabrice Roussel (SOC). Je maintiens les amendements car il s’agit de protéger nos industries et nos actifs stratégiques.

Le code monétaire et financier ne vise pas explicitement les ports maritimes ; il serait utile d’apporter cette précision.

Enfin, le préfet peut prendre des décisions mais, sur les questions maritimes stratégiques, il n’a pas toujours connaissance de l’ensemble des enjeux. Mieux vaut donc consolider le texte par ces amendements.

La commission rejette successivement les amendements.

Elle adopte l’article unique non modifié.

L’ensemble de la proposition de loi est ainsi adopté.

Mme Liliana Tanguy, rapporteure. Je remercie la commission pour ce vote conforme. Il sera d’une grande utilité pour l’ensemble des infrastructures portuaires qui voient leur concession se terminer d’ici à la fin de l’année, tant dans le Finistère – je pense en particulier à ma circonscription – que dans d’autres territoires – par exemple, à Toulon, comme d’autres ports de la façade méditerranéenne.

 

 


   liste des personnes auditionnées

(par ordre chronologique)

 

Union des ports de France *

M. Jean-Frédéric Laurent, directeur général du GPM de Bordeaux

Direction générale des infrastructures, des transports et des mobilités (DGITM)

Mme Stéphanie Cubier, sous-directrice des ports

M. Raphaël Dufau, chef de bureau de la réglementation portuaire

M. Nicolas Bina, conseiller élu et communication

Mme Céline Thinselin, directrice générale de SEM Bretagne Armor Pêche, ancienne directrice de la préfiguration d’une exploitation consolidée des ports de pêche bretons à la région Bretagne

Conseil départemental du Finistère

M. Maël de Calan, président

Société portuaire Brest Bretagne – BrestPort

M. Christophe Chabert, président du directoire

 

 

 

 

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

 

 


   liste des contributions écrites reçues

 

Chambre de commerce et d’industrie (CCI) France

Fédération nationale des ports et docks (FNPD) – Confédération générale des travailleurs (CGT)

 


([1]) Article 35 de la loi n° 2006-10 du 5 janvier 2006 relative à la sécurité et au développement des transports.

([2]) Article 30 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.

([3]) Loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l’État.

([4]) Acteurs, réseau, et activités portuaires en France | Ministère de la Transition écologique, de la Biodiversité, de la Forêt, de la Mer et de la Pêche.

([5]) Loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.

([6]) Articles 5 et 6 de la loi n° 83-663 complétant la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l’État.

([7]) Loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale.

([8]) Article 104 de la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité.

([9]) Article 30 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.

([10]) Loi n° 2008-660 du 4 juillet 2008 portant réforme portuaire.

([11]) Loi n° 2015-991 du 7 août portant nouvelle organisation territoriale de la République.

([12]) Ordonnance n° 2021-614 du 19 mai 2021 relative à la fusion du port autonome de Paris et des grands ports maritimes du Havre et de Rouen.

([13]) Dunkerque, Nantes-Saint-Nazaire, La Rochelle, Bordeaux, Marseille.

([14]) Guadeloupe, Martinique, Guyane, La Réunion.

([15]) Contribution écrite de la direction générale des infrastructures, des transports et des mobilités (DGITM).

([16]) Directive 2014/23/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur l’attribution de contrats de concession.

([17]) Contribution écrite de CCI France.

([18]) « Les contrats conclus entre entités appartenant au secteur public », Les fiches techniques de la DAJ,

([19]) Loi n° 2006-10 du 5 janvier 2006 relative à la sécurité et au développement des transports.

([20]) Article 30 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.

([21]) Procès-verbal de l’Assemblée générale de la CCI du Var, Création de la Société Portuaire pour l’exploitation du port de commerce de la rade de Toulon, 13 mars 2025 (25D08. Créaotion société portuaire.pdf).

([22]) Loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et la transparence de la vie économique et des procédures publiques.

([23]) Mme Nadège Havet, Rapport N° 721 au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable sur la proposition de loi élargissant la possibilité pour les collectivités territoriales et leurs groupements d’avoir recours au modèle de la société portuaire pour l’exploitation de leurs ports, p. 18.

([24]) Ordonnance du n° 2007-329 du 12 mars 2007 relative au code du travail.