N° 2143

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 26 novembre 2025.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES (1)
SUR LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE (N° 2002),
DE MME JULIE LAERNOES ET PLUSIEURS DE SES COLLÈGUES,


visant à réaffirmer l’ambition climatique de la France
au niveau européen,

 

 

 

 

 

PAR MME Julie LAERNOES,

Députée

 

 

 

 

 

 

  1.    La composition de la commission figure au verso de la présente page.

La Commission des affaires européennes est composée de : M. Pieyre-Alexandre ANGLADE, président ; Mme Manon BOUQUIN, M. Laurent MAZAURY, Mme Nathalie OZIOL, vice-présidents ; MM. Benoît BITEAU, Maxime MICHELET, Mme Liliana TANGUY secrétaires ; MM. Gabriel AMARD, Philippe BALLARD, Michel BARNIER, Guillaume BIGOT, Mmes Céline CALVEZ, Colette CAPDEVIELLE, Sophia CHIKIROU, Nathalie COGGIA, Nathalie COLIN-OESTERLÉ, MM. Stéphane DELAUTRETTE, Jocelyn DESSIGNY, Julien DIVE, Nicolas DRAGON, Denis FÉGNIÉR, Michel HERBILLON, Mme Mathilde HIGNET, M. Sébastien HUYGHE, Mmes Sylvie JOSSERAND, Chantal JOURDAN, Marietta KARAMANLI, M. Bastien LACHAUD, Mmes Julie LAERNOES, Constance LE GRIP, Nicole LE PEIH, MM. Pascal LECAMP, Matthieu MARCHIO, Patrice MARTIN, Emmanuel MAUREL, Mmes Yaël MENACHÉ, Danièle OBONO, MM. Frédéric PETIT, Stéphane RAMBAUD, Mme Isabelle RAUCH, MM. Fabrice ROUSSEL, Alexandre SABATOU, Charles SITZENSTUHL, Mmes Michèle TABAROT, Sophie TAILLÉ-POLIAN, Sabine THILLAYE, Anne-Cécile VIOLLAND, Estelle YOUSSOUFFA.


SOMMAIRE

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 Pages

introduction

I. La mise en œuvre de l’accord de paris au niveau européen s’articule autour de la loi européenne pour le climat dont l’objectif intermédiaire pour 2040 a récemment été négocié

A. Le Pacte vert et la loi européenne pour le climat ont rehaussé l’objectif européen de réduction des gaz à effet de serre pour viser la neutralité carbone en 2050

1. Le Pacte vert a rehaussé l’ambition climatique européenne pour tenir compte de l’ambition fixée par l’accord de Paris

a. Les objectifs antérieurs

b. Le contenu du Pacte vert

2. Le règlement 2021/1119, aussi connu comme « la loi européenne sur le climat », a rendu juridiquement contraignants les objectifs de décarbonation du Pacte vert

B. Sa mise en œuvre repose sur trois piliers principaux : une répartition de l’effort entre les États membres, le marché carbone, les absorptions des puits

1. Le règlement sur la répartition de l’effort entre États membres (effort sharing regulation ESR)

2. Le principe du marché carbone : SEQE1 et SEQE2

a. Le SEQE1

b. Le SEQE2

3. Les puits carbones

a. Les puits naturels

b. Les puits artificiels

C. La trajectoire climatique intègre désormais un objectif intermédiaire de baisse des émissions pour 2040

1. Les jalons de la procédure législative ordinaire de révision du règlement 2021/1119

a. L’étude d’impact et la proposition de la Commission européenne

b. L’orientation générale adoptée par le Conseil

c. La position du Parlement européen

d. Le trilogue à venir

2. Sur le fond : un objectif facialement maintenu de 90 % avec de nombreuses flexibilités qui amoindrissent l’effort domestique sur le territoire de l’UE

a. Les flexibilités

i. Les crédits carbones internationaux jusqu’à 5 %, réduisant l’objectif de réduction GES à 85 % en domestique

ii. Le frein d’urgence sur les puits naturels

b. Le report d’un an de l’entrée en vigueur du SEQE2

II. l’essoufflement de l’élan international autour du climat se ressent dans la politique climatique européenne et fait craindre un non-respect des objectifs fixés

A. La COP30 s’est avérée décevante, reflétant le marasme actuel dans lequel est plongée la diplomatie climatique internationale

1. Dans le cadre de la COP30, l’UE s’est dotée d’un objectif moins ambitieux, une fourchette, envoyant le signal d’une fragilité sur les politiques climatiques à l’endroit des autres États parties

2. Les négociations climatiques à Belém se sont avérées décevantes, ne parvenant pas à un accord sur un plan de sortie des énergies fossiles ni sur la préservation des forêts

B. L’avenir de la politique climatique dans l’Union et en France

1. Au niveau européen, la neutralité carbone en 2050 suppose de renforcer grandement les efforts dans un moment où la tendance est plutôt au recul des ambitions

a. Les objectifs de décarbonation secteur par secteur

i. Les réductions du secteur ESR

ii. Les réductions des secteurs couverts par le SEQE1 et les réductions moindres attendues des secteurs du SEQE2 du fait du décalage de son entrée en vigueur

iii. La surévaluation des capacités d’absorption des puits carbones

b. Le recul des ambitions écologiques dans les réglementations et le maintien d’objectifs ambitieux fait peser le risque d’une contradiction dans les termes

2. Les recommandations : enrayer le backlash écologique pour assurer l’atteinte des objectifs environnementaux tout en étant attentif à leur acceptabilité sociale

EXAMEN EN COMMISSION

PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE initiale

amendements examinés par la commission

Proposition de résolution europÉenne adoptÉe par la commission

Liste des personnes auditionnées par la rapporteure

 


   introduction

   

  Mesdames, Messieurs,

Après de multiples rebondissements et d’âpres négociations, le 4 novembre dernier, le Conseil de l’Union européenne, dans sa formation réunissant les ministres de l’environnement des 27 États membres, s’est accordé sur l’avenir de la politique climatique européenne.

D’une part, les ministres ont approuvé à la majorité qualifiée l’objectif intermédiaire de – 90 % de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) pour 2040, objectif toutefois affaibli par l’octroi de flexibilités (crédits carbones internationaux à hauteur de 5 % notamment) et le report d’un an de l’entrée en vigueur du second marché carbone destiné à la petite industrie, au routier et au bâtiment (SEQE‑2).

D’autre part, les ministres ont approuvé à l’unanimité la fourchette de réduction GES comprise entre 66,25 % et 72,5 % pour l’ensemble des États membres à l’horizon 2035, par rapport au niveau de 1990. Cette fourchette est moins exigeante que l’affichage d’un chiffre unique et, dans les faits, seule sa borne haute – 72,5 % – permettrait pour l’UE de rester sur la trajectoire amenant à une réduction de 90 % en 2040 puis de 100 % en 2050 (neutralité carbone). Elle a cependant permis à l’UE de se rendre à la COP30 avec une position de négociation unifiée. À ce titre, il convient de relever le rôle particulier joué par la France dans la défense de ces différentes concessions qui affaiblissent l’ambition, alors même que les prises de position de l’exécutif dans les instances européennes n’ont pas fait l’objet d’une information approfondie du Parlement français.

La part de l’Union dans les émissions mondiales est passée de 15,2 % en 1990 à 6,0 % en 2023 ([1]). Ce chiffre témoigne à la fois du fait que la politique de décarbonation de l’UE porte ses fruits mais laisse à voir, en creux, l’image d’émissions de GES qui, à l’échelle globale, continuent de croître. Surtout, cette baisse relative ne dit rien des émissions importées ni de la responsabilité historique du continent.

Entre février 2023 et janvier 2024, la température moyenne mondiale a dépassé pour la première fois le seuil de + 1,5 °C par rapport à la période 1850‑1900, atteignant + 1,52 °C, notamment sous l’effet du phénomène El Niño.

« Limiter le réchauffement planétaire sous 1,5 °C n’est désormais plus atteignable », soulignait en juin dernier un consortium international de chercheurs, comprenant notamment en France des scientifiques de Météo-France, du CEA, du CNRS et de Mercator Ocean International. Un niveau record de 55 milliards de tonnes d’équivalent CO2 a été émis en 2024, alors que le budget carbone restant permettant d’avoir une chance sur deux de limiter le réchauffement à 1,5 °C n’est plus que de 130 milliards de tonnes d’équivalent CO2 – un peu moins de trois ans au rythme actuel d’émissions.

La seizième édition du rapport sur l’écart des émissions, publié en novembre 2025 ([2]), révèle que les projections du réchauffement climatique au cours de ce siècle, basées sur la mise en œuvre complète des contributions déterminées au niveau national (CDN), sont maintenant de 2,3 à 2,5 °C, tandis que celles basées sur les politiques actuelles sont de 2,8 °C. Cela se compare à 2,6‑2,8 °C et 3,1 °C dans le rapport de l’année dernière.

Le rapport note encore que : « Les États restent loin de respecter l’objectif de l’Accord de Paris de limiter le réchauffement à bien en dessous de 2 °C, tout en poursuivant les efforts pour rester en dessous de 1,5 °C (…). Compte tenu de l’ampleur des réductions nécessaires, du peu de temps disponible pour les livrer et d’un climat politique difficile, un dépassement plus élevé de 1,5 °C se produira, très probablement au cours de la prochaine décennie. »

Le rapport constate que ce dépassement doit être limité par des réductions plus rapides et plus importantes des émissions de gaz à effet de serre afin de minimiser les risques et les dommages climatiques d’ici 2100.

Chaque fraction de degré évitée signifie des pertes plus faibles pour les personnes et les écosystèmes.

Dans ce contexte, la présente proposition de résolution européenne entend rappeler l’importance pour la France de soutenir une action climatique européenne résolue et ambitieuse, à rebours de l’atonie et du marasme actuels.


I.   La mise en œuvre de l’accord de paris au niveau européen s’articule autour de la loi européenne pour le climat dont l’objectif intermédiaire pour 2040 a récemment été négocié

A.   Le Pacte vert et la loi européenne pour le climat ont rehaussé l’objectif européen de réduction des gaz à effet de serre pour viser la neutralité carbone en 2050

1.   Le Pacte vert a rehaussé l’ambition climatique européenne pour tenir compte de l’ambition fixée par l’accord de Paris

a.   Les objectifs antérieurs

L’objectif de – 55 % en 2030 et celui de la neutralité carbone en 2050 ont remplacé les objectifs précédemment en vigueur : – 40 % en 2030 et de – 80 % à – 95 % en 2050, qui avaient été décidés au Conseil européen d’octobre 2014 ([3]).

Entre-temps, la conclusion de l’accord de Paris le 12 décembre 2015 et son entrée en vigueur le 4 novembre 2016 ont conduit la Commission à revoir son ambition à la hausse pour contenir l’augmentation des températures mondiales par rapport à l’ère préindustrielle sous 2 °C et au plus près de 1,5 °C.

Elle s’est notamment appuyée sur le rapport spécial du GIEC sur les conséquences d’un réchauffement planétaire de 1,5 °C ([4]), élaboré à la demande des parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques lors de la Conférence de Paris. Ce rapport affirmait que :

« Dans les trajectoires qui limitent le réchauffement planétaire à 1,5 °C sans dépassement ou avec un dépassement minime, les émissions anthropiques mondiales nettes de CO₂ diminuent d’environ 45 % depuis les niveaux de 2010 jusqu’en 2030 (intervalle interquartile : 40‑60 %), devenant égales à zéro vers 2050 (intervalle interquartile : 2045‑2055). Pour limiter le réchauffement planétaire à moins de 2 °C, les émissions de CO₂ devraient diminuer d’environ 25 % d’ici à 2030 dans la plupart des trajectoires (intervalle interquartile : 10‑30 %) et devenir nulles vers 2070 (intervalle interquartile : 2065‑2080). Dans les trajectoires qui limitent le réchauffement planétaire à 1,5 °C, les émissions de gaz autres que le CO₂ font l’objet de fortes réductions, d’ampleurs équivalentes à celles figurant dans les trajectoires qui limitent le réchauffement à 2 °C (degré de confiance élevé). »

b.   Le contenu du Pacte vert

Le Pacte vert constitue un ensemble de textes adoptés à l’échelon européen pour accélérer la transition écologique des États membres en ligne avec l’accord de Paris. Il a été annoncé par la communication 2019 (640) de la Commission européenne publiée le 11 décembre 2019 et intitulée « Le Pacte vert pour l’Europe » ([5]).

Cette communication constituait une première feuille de route visant à mettre en œuvre les objectifs de développement durable fixés par le programme des Nations unies, dans laquelle la Commission affirmait sa volonté de faire de l’Europe le premier continent neutre en carbone à l’horizon 2050. L’objectif intermédiaire de 55 % de réduction des gaz à effet de serre en 2030 par rapport aux niveaux de 1990 était déjà mentionné mais n’était pas encore arrêté.

Source : graphique extrait de la communication 2019 (640) du 11 décembre 2019.

À la suite de la communication du 11 décembre 2019, dans laquelle l’objectif pour 2030 était encore incertain – soit – 50 % soit – la communication 2020 (562) du 17 septembre 2020 ([6]) retient de manière définitive le chiffre de – 55 % en s’appuyant sur l’étude d’impact (impact assessment report) en deux parties ([7]) publiée le même jour.

Le Pacte vert est donc un cadre général au sein duquel s’inscrivent les différentes réglementations sectorielles adoptées ultérieurement et devant concourir à l’atteinte de la neutralité carbone.

L’annexe ([8]) de la communication du 11 décembre 2019 prévoyait déjà un calendrier indicatif des différents projets de règlements et de directives qui ont été adoptés par la suite, parmi lesquels : la stratégie agricole « de la ferme à la fourchette », la stratégie européenne pour la biodiversité, la stratégie industrielle européenne ou encore le plan d’action en faveur de l’économie circulaire.

2.   Le règlement 2021/1119, aussi connu comme « la loi européenne sur le climat », a rendu juridiquement contraignants les objectifs de décarbonation du Pacte vert

La cible de ‑ 55 %, ainsi que celle visant la neutralité carbone en 2050, ont été rendues juridiquement contraignantes par l’adoption du règlement 2021/1119 du 30 juin 2021 établissant le cadre requis pour parvenir à la neutralité climatique ([9]), également connu comme « la loi européenne sur le climat ».

Le Paquet « Fit for 55 » a ensuite consisté en un ensemble de propositions législatives visant à mettre en œuvre de manière opérationnelle la loi européenne sur le climat.


Le paquet « Fit for 55 »

Le paquet Fit for 55 (ajustement à l’objectif 55) comprend un ensemble de propositions législatives et initiatives interdépendantes ([10]) concernant :

• la révision du système d’échange de quotas d’émission (SEQE) de l’UE, y compris son extension au transport maritime, la révision des règles relatives aux émissions de l’aviation et la mise en place d’un système distinct d’échange de quotas d’émission pour le transport routier et les bâtiments ;

• la révision du règlement sur la répartition de l’effort en ce qui concerne les objectifs de réduction des États membres dans les secteurs ne relevant pas du SEQE de l’UE ;

• la révision du règlement relatif à la prise en compte des émissions et des absorptions de gaz à effet de serre résultant de l’utilisation des terres, du changement d’affectation des terres et de la foresterie (UTCATF) ;

• la révision de la directive sur les énergies renouvelables ;

• la refonte de la directive sur l’efficacité énergétique ;

• la révision de la directive sur le déploiement d’une infrastructure pour carburants alternatifs ;

• la modification du règlement établissant des normes d’émission de CO₂ pour les voitures et les camionnettes ;

• la révision de la directive sur la taxation de l’énergie ;

• le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières ;

• l’initiative ReFuelEU Aviation pour l’utilisation de carburants durables dans l’aviation ;

• l’initiative FuelEU Maritime, pour un espace maritime européen vert ;

• le fonds social pour le climat.

De nouvelles propositions ont été présentées, le 15 décembre 2021, pour compléter ou renforcer les mesures contenues dans le paquet « Fit for 55 » :

• la révision de la directive sur la performance énergétique des bâtiments ;

• le nouveau cadre européen pour décarboner les marchés du gaz, promouvoir l’hydrogène et réduire les émissions de méthane.


Source : EEA, extrait de la première partie de l’étude d’impact précitée.

B.   Sa mise en œuvre repose sur trois piliers principaux : une répartition de l’effort entre les États membres, le marché carbone, les absorptions des puits

1.   Le règlement sur la répartition de l’effort entre États membres (effort sharing regulation – ESR)

La déclinaison de l’effort par pays est prévue par le règlement 2023/857, l’effort à fournir étant fonction du ratio PIB/habitant, pour tenir compte du fait que les pays les plus riches de l’Union ont des marges d’adaptation supérieures et sont également les plus émetteurs en valeur absolue.

Ce règlement sur la répartition de l’effort couvrait initialement les secteurs non soumis au système d’échange de quotas d’émission (SEQE) – transports intérieurs, bâtiments, agriculture, petite industrie, déchets.

Les cibles de réduction des gaz à effet de serre font l’objet d’une déclinaison par pays sous la forme d’un règlement pour la répartition de l’effort.

Le règlement 2018/842 relatif aux réductions annuelles contraignantes des émissions de gaz à effet de serre par les États membres de 2021 à 2030 contribuant à l’action pour le climat afin de respecter les engagements pris dans le cadre de l’accord de Paris ([11]) a été adopté le 19 juin 2018, avant d’être modifié en 2023.

Il prévoyait que chaque État membre contribue de manière différenciée à la réduction de 40 % des émissions de gaz à effet de serre. Le détail des objectifs assignés à chaque pays était présenté dans l’annexe I.

Ce règlement 2018/842 avait fait l’objet d’une étude d’impact ([12]) qui, si elle ne donnait pas explicitement la méthode de calcul de la répartition de l’effort par pays, précisait tout de même que :

« La pente de la fonction est plus forte pour les États membres dont le PIB/habitant est inférieur à la moyenne de l’UE, ce qui entraîne une diminution plus rapide de l’ambition pour les pays à faibles niveaux de revenus. La pente pour les États membres à revenus plus élevés est moins forte et conduit donc à des augmentations moins rapides de l’ambition pour les États membres aux revenus les plus élevés, ce qui limite déjà en partie les impacts économiques et reconnaît des capacités différentes pour tous ces pays. Les objectifs de 2020 pour la Grèce, la Lettonie et la Slovénie ont été ajustés en fonction des préoccupations spécifiques des États membres. »

Source : Commission européenne.

En abscisse est renseigné le PIB / habitant et en ordonnée, la cible du taux d’effort associée au niveau de PIB / habitant. Ainsi, la méthode retenue par la Commission conduit les États membres les plus pauvres à avoir des cibles plus légères (voire théoriquement positives), tandis que les États membres les plus riches se voient attribuer les cibles les plus ambitieuses, avec une relative indifférence quant à leurs spécificités nationales (aplatissement de la courbe).

La révision à la hausse des objectifs climatiques par la communication 2020 (562), puis par le règlement 2021/1119, a conduit la Commission à proposer une révision du règlement 2018/842 via le règlement 2023/857, adopté le 19 avril 2023 ([13]). De nouvelles cibles par pays sont définies, comme l’illustre l’infographie ci-dessous :

Effort Sharing Regulation

Source : Commission européenne.

2.   Le principe du marché carbone : SEQE‑1 et SEQE‑2

La décarbonation des secteurs hors-ESR est pensée via les marchés carbones, dont le principe repose sur l’internalisation, par les industries concernées, de l’externalité négative liée au carbone émis, via l’affectation d’une valeur économique à ce carbone aux moyens de quotas.

a.   Le SEQE‑1

Le premier système d’échange de quotas d’émissions est entré en vigueur en 2005 à la suite du protocole de Kyoto. Juridiquement, ce « marché carbone » a été institué par une directive de 2003 ([14]).

Le champ du SEQE‑1 a été élargi à l’aérien en 2012 ([15]) puis au maritime en 2024 ([16]).

Le SEQE repose sur une double logique :

  1.   L’émission de quotas carbone (EU allowances – EUA) donnant droit à l’émission d’une tonne de CO2 eq par la voie :
  1.                 d’une mise aux enchères via la bourse européenne de l’énergie ([17]) ;
  2.              de l’émission de quotas gratuits – étant étendu que ces émissions sont pensées comme temporaires et doivent permettre d’accompagner les secteurs industriels dans leur décarbonation.
  1.   L’échange de ces quotas entre entreprises couvertes par le SEQE selon le libre jeu de l’offre et de la demande et de leurs « besoins de polluer ».

Le montant total des quotas est plafonné. Des calculs distincts du plafond s’appliquent i) aux émissions provenant de la production d’électricité et de chaleur, de la production industrielle et, à partir de 2024, du transport maritime, et ii) aux émissions de l’aviation relevant du SEQE de l’UE (émissions domestiques) ([18]).

Malgré l’existence de ces deux plafonds, l’ensemble des secteurs couverts par le SEQE‑1 sont soumis à un même rythme de réduction du nombre de quotas en circulation : réduction de 1,74 % par an jusqu’en 2020, de 2,2 % à partir de 2021, puis de 4,3 % sur la période 2024‑2027, et de 4,4 % à partir de 2028 ([19]).

b.   Le SEQE‑2

La directive 2003/87/CE créant le SEQE a été révisée par la directive 2023/959 du 10 mai 2023 pour créer un nouveau système d’échange de quotas d’émission distinct du premier. Ce SEQE‑2 sera mis en œuvre au 1er janvier 2028, du fait du report d’un an qui a récemment été décidé (voir plus bas) afin de couvrir les émissions de CO2 des secteurs du transport routier, du bâtiment, de la construction et de la petite industrie.

Bien qu’il s’agisse d’un système de plafonnement et d’échange comme le SEQE‑1, la logique d’adjudication des quotas diffère dans la mesure où ce ne sont pas les consommateurs finaux mais les fournisseurs de gaz et carburants qui seront soumis au SEQE‑2 et tenus de surveiller et de déclarer les quantités de carburants qu’ils mettent à la consommation. Le Citepa présente un calendrier indicatif des échéances réglementaires pour les fournisseurs d’énergie ([20]).

En effet, là où les acteurs inclus dans le SEQE‑1 sont en nombre restreint – les principales entreprises émettrices –, le SEQE‑2 entend couvrir les émissions liées à l’utilisation de carburants pour le secteur routier et pour le chauffage des bâtiments notamment, ce qui concerne indirectement des millions de consommateurs. Une approche indirecte – via les fournisseurs de carburants – a donc été retenue par la Commission.

Les entités relevant du SEQE‑2 doivent détenir une autorisation d’émettre des gaz à effet de serre (GES) à compter du 1er janvier 2027 ainsi qu’un plan de surveillance approuvé en vue de la surveillance et de la déclaration de leurs émissions annuelles. L’obligation de restituer des quotas débutera en 2028.

La mise en place du SEQE‑2 augmentera le prix des énergies fossiles pour les ménages et entreprises consommant des carburants routiers et des combustibles dans les secteurs visés, ce qui en fait un objet sensible politiquement et qui a justifié son report d’un an décidé par le Conseil environnement du 4 novembre dernier, sur demande de la Pologne.

Comme l’a noté l’Institut Jacques Delors : « Le SEQE‑2 en l’état pose des risques de choc de prix et de volatilité des prix ([21]). Les mécanismes prévus pour stabiliser sont insuffisants. La Commission a annoncé qu’elle allait présenter des propositions de mesures pour mieux contrôler les prix : réserves de stabilité du marché et injonction de quotas depuis cette réserve en cas de seuil franchi, ainsi qu’un plafond souple à 45 euros la tonne ; la France propose une trajectoire d’augmentation graduelle et prévisible du prix du quota dans le SEQE‑2 pour que le signal prix efficace. »

Le Fonds social pour le climat, créé en même temps que le SEQE‑2 est censé éviter une pression excessive et inéquitable de la hausse des prix des carburants sur les ménages les plus précaires, mais la question de son dimensionnement pour faire face à cette hausse des prix demeure.

À ce stade, la directive de 2023 créant le SEQE‑2 n’a pas encore été transposée en France, alors que cela aurait dû être fait avant le 30 juin 2024. La France fait partie des trois seuls pays, avec la Hongrie et l’Estonie, à n’avoir pas encore transposé le texte, ce que votre rapporteure déplore.

En outre, la création du SEQE‑2 pose la question d’une redéfinition du périmètre du règlement ESR afin que les secteurs du routier et du bâtiment ne tombent pas sous le coup de deux réglementations distinctes.

Comme précise l’Institut Jacques Delors : « Une réforme de l’ESR devrait survenir en 2028. Il se pourrait qu’elle soit mise à l’agenda en 2026 dans le cadre d’un paquet climat et devra notamment regarder cette question. Maintenant à noter qu’avec le report du SEQE‑2, la question devient plus saillante pour le post 2030. »

3.   Les puits carbones

Le troisième volet déployé pour atteindre la neutralité carbone à horizon 2050 est celui des puits carbones. Ces puits peuvent être naturels (forêts, règlement LULUCF) ou artificiels (technologies de captage CO2).

a.   Les puits naturels

S’agissant des puits naturels, l’Union européenne s’est fixé des objectifs ambitieux dans le cadre de son Pacte vert, visant 310 Mt CO2 absorbées en 2030 et 400 Mt à l’horizon 2050. Le secteur UTCATF (utilisation des terres, changement d’affectation des terres et foresterie) dans l’UE absorbe actuellement (2023) environ – 198 millions de tonnes d’équivalent CO2 (ce qui correspond à environ 6 % des émissions totales de gaz à effet de serre de l’UE). L’objectif repose très largement sur les pays ayant de grandes forêts : – 43 Mt d’ici 2030 pour l’Espagne, – 47 Mt pour la Suède, – 38 Mt pour la Pologne, – 34 Mt pour la France.

En France, le secteur UTCATF constitue actuellement un puits net de carbone, bien que celui-ci tende à diminuer ces dernières années. L’IGN dénombre en France 11,3 milliards d’arbres recensables en 2023, soit un stock de 1 300 millions de tonnes de carbone (les forêts étant le 2e plus grand puits de carbone à l’échelle planétaire) ([22]). Les absorptions sont passées d’environ – 45 millions de tonnes d’équivalent CO2 au milieu des années 2000 à – 30,7 millions de tonnes en 2019, permettant de compenser près de 7 % des émissions nationales des autres secteurs.

Extrait du projet de SNBC 3, d’après une modélisation de la DGEC.

b.   Les puits artificiels

S’agissant des puits artificiels, votre rapporteure souhaite alerter sur les effets pervers d’un recours massif aux technologies de captage et de stockage du carbone (CCUS) ([23]). Alors que l’État les présente comme une composante clé de la transition écologique, ces technologies restent très énergivores, coûteuses et encore loin d’être prêtes pour un déploiement à grande échelle. Lors des auditions, il a été indiqué que leur coût marginal se situe entre 300 et 500 dollars par tonne de CO₂ évitée, bien au-delà des solutions de réduction directe des émissions.

Les orientations de la SNBC 3 à horizon 2030 prévoient un volume capté de l’ordre de 6,6 Mt de CO2 en 2030. À horizon 2050, l’état des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France, publié début juillet 2024, présente un intervalle des volumes potentiellement captables en 2050. Dans l’industrie, cet intervalle se situe entre 23Mt CO2e et 30Mt CO2e (hors Direct Air Capture ‑ DAC et procédés ne relevant pas de l’industrie manufacturière). Hors du périmètre de l’industrie, la question du volume potentiellement mobilisable par capture directe du carbone atmosphérique (DAC) se posera. Le DAC, associé au stockage en couches géologiques profondes du carbone capté, pourrait éliminer quelques Mt CO₂ supplémentaires, tout en restant un pari technologique risqué, fortement consommateur d’énergie et de foncier. Il peut aussi permettre de réutiliser le carbone capté, selon la même logique que le CCU.

Extrait du projet de SNBC 3, d’après le document « État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France » du ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, juillet 2024.

Un tel pari technologique comporte en outre un risque majeur : en cherchant à rentabiliser des infrastructures lourdes, ces technologies, peuvent artificiellement maintenir des industries polluantes dans le but de rentabiliser l’infrastructure de captage et les importants investissements consentis pour la développer, au lieu de favoriser leur transformation. Ces technologies ne sauraient donc constituer un pilier de la stratégie climatique, mais seulement un recours limité aux secteurs réellement difficiles à décarboner.

Sur ce point, la DGEC estime que le calibrage des projets est pensé pour que les solutions s’appliquent spécifiquement aux industriels existants, sans stimulation de nouveaux projets industriels qui ne seraient pas soutenables.

Le Citepa a, en outre, noté que ces technologies sont plus désignées pour certains autres pays disposant encore de centrales à charbon (Angleterre) ou d’industries lourdes en grand nombre (Allemagne), ce qui n’est pas le cas en France où les cas d’application de ces technologies sont circonscrits.

C.   La trajectoire climatique intègre désormais un objectif intermédiaire de baisse des émissions pour 2040

1.   Les jalons de la procédure législative ordinaire de révision du règlement 2021/1119

a.   L’étude d’impact et la proposition de la Commission européenne

La proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil (2025) 524 visait à donner une cible climatique à l’Union européenne pour 2040. D’un point de vue juridique, elle modifie le règlement 2021/1119 (loi européenne sur le climat) qui établit le cadre requis pour parvenir à la neutralité climatique.

Le chiffre de 90 % a été établi en ligne avec l’étude d’impact réalisée par les services de la Commission (staff working document (2024) 63 final) ([24]).

Ce document estime qu’à politique inchangée, l’Union européenne atteindrait déjà 88 % de réduction GES en 2040 par rapport à 1990. Il considère qu’une cible de réduction « d’au moins 90 % et jusqu’à 95 % » correspondrait à la fourchette recommandée par Conseil consultatif scientifique européen sur le changement climatique.

Il est à noter que les trois scénarios envisagés (S1 : politique inchangée ; S2 : réduction de 85‑90 % ; S3 : réduction de 90‑95 %) mènent tous les trois à la neutralité carbone en 2050. Cependant, ils modulent le rythme des efforts à consentir avant et après 2040 et tablent sur des niveaux d’implémentation différents des politiques publiques concourant à la transition écologique.

Le scénario S1 repose sur les mesures du Paquet Fit for 55 à politique inchangée, le scénario S2 fait l’hypothèse d’une réduction accrue des émissions non-CO2 du secteur agricole et d’une plus grande absorption CO2 du secteur UTCATF (utilisation des terres, changement d’affectation des terres et foresterie). Le scénario S3 s’appuie sur « un secteur de la gestion du carbone pleinement développé d’ici 2040, avec une capture CO2 couvrant toutes les émissions industrielles, ainsi qu’une production et une consommation de carburants synthétiques plus élevées que dans le scénario S2 afin de décarboner davantage le mix énergétique. »

La Commission a finalement opté, dans sa proposition de règlement, pour le chiffre de 90 %, entre les scénarios S2 et S3. En ce sens, elle a adopté une communication ([25]) en février 2024, conformément à l’article 4 § 3 du règlement 2021/1119, visant un objectif de réduction nette de 90 % des émissions de GES pour 2040, sur la base des réductions d’émissions recommandées par le Conseil scientifique consultatif européen sur le changement climatique.

Par ailleurs, il convient de noter que l’étude d’impact envisageait un quatrième scénario, plus ambitieux, reposant sur des changements non du côté de l’offre mais du côté de la demande, via des hypothèses de changement des modes de vie et l’introduction de mesures de sobriété.

Comme le note l’étude d’impact de la Commission :

« LIFE évalue l’impact d’un changement des modes de consommation vers des alternatives plus durables conduisant à une utilisation plus efficace des ressources naturelles. Par exemple, les consommateurs utilisent les produits plus longtemps, réparent davantage de biens, se tournent vers une “ économie du partage ” et des produits en tant que service, réduisent leur consommation d’énergie en contrôlant les réglages de température du chauffage et de la climatisation, et adoptent des modes de mobilité plus durables, notamment la mobilité partagée et les modes de transport actifs tels que l’utilisation accrue du vélo. En ce qui concerne le système alimentaire, LIFE part du principe que les consommateurs adoptent progressivement des régimes alimentaires plus sains et plus durables, tandis que la production suit les objectifs de la stratégie “ De la ferme à la table ” et de la stratégie en faveur de la biodiversité, en particulier en réduisant les excédents de nutriments et les engrais nécessaires pour rétablir la santé de la nature et de la biodiversité et en réduisant le gaspillage alimentaire. L’analyse ne formule aucune hypothèse sur les facteurs à l’origine de ces changements dans les modes de consommation, qui peuvent résulter de tendances sociétales, de l’évolution des normes et des préférences sociales, d’actions volontaires ou de politiques incitatives. »

La différence entre les émissions dans le scénario LIFE et celles dans le scénario S3 résulte d’un système alimentaire plus durable et d’une utilisation des terres associée, qui réduisent les émissions nettes du secteur foncier d’environ 100 MtCO2‑eq, combinant une réduction des émissions de l’agriculture d’environ 60 MtCO2‑eq et des absorptions supplémentaires significatives du secteur LULUCF d’environ 40 MtC02‑eq en 2040. Cela réduit le besoin de capture du carbone et d’éliminations industrielles du carbone. Parallèlement, une économie circulaire renforcée et une mobilité plus durable contribuent à limiter les émissions dans le secteur de l’énergie et de l’industrie, qui se situent entre S2 et S3.

b.   L’orientation générale adoptée par le Conseil

Comme l’a souligné la représentation permanente de l’Union européenne, la négociation s’est avérée beaucoup plus complexe que de se mettre d’accord sur un unique chiffre.

Pour votre rapporteure et plusieurs acteurs auditionnés, cette complexité tient principalement aux positions défendues par certains États membres sur la méthode et le calendrier d’adoption de l’objectif de 2040. En effet, alors qu’une large majorité de pays soutenait la proposition de la présidence danoise d’arrêter dès septembre l’objectif de – 90 % à la majorité qualifiée afin de permettre à l’Union de transmettre un CDN clair, lisible et ambitieux avant la COP30, la France, aux côtés de plusieurs États du groupe de Visegrád, a choisi de s’écarter de cette approche. Cette position a contribué à renverser la dynamique d’adoption prévue et à renvoyer les décisions clés au Conseil européen d’octobre puis au Conseil des ministres de novembre.

Votre rapporteure regrette à ce titre la position défendue par la France qui, alors qu’elle disposait d’un rôle de bascule déterminant, a retardé l’élaboration de la position européenne sur le climat et affaibli la capacité de l’Union à présenter à l’ONU un objectif clair et conforme aux recommandations scientifiques en amont de la COP30.

Le Haut Conseil pour le Climat a également dénoncé, dans une communication dédiée, la position de la France visant à renverser le processus d’adoption du nouvel objectif, estimant qu’elle affaiblissait la dynamique européenne et compromettait la capacité de l’Union à se doter d’une trajectoire compatible avec l’Accord de Paris.

Cette situation est d’autant plus regrettable qu’elle a accru l’incertitude institutionnelle, ouvert la voie à une possible remise en cause de l’ambition climatique européenne par les gouvernements les plus hostiles à l’action climatique et fragilisé la crédibilité de l’Union dans un moment décisif.

En effet, derrière l’objectif 2040, c’est l’avenir de la politique climatique européenne et le calibrage des efforts qui étaient en discussion.

Le sommet européen des chefs d’États du 23 octobre a servi à donner des orientations stratégiques sur les conditions facilitantes et les flexibilités possibles hors de la loi climat. L’organisation d’un sommet en amont de la réunion des ministres de l’environnement le 4 novembre devrait permettre de mettre la lumière sur ce moment politique, tout en affichant les efforts dans la recherche d’un consensus.

Le Conseil environnement du 4 novembre s’est achevé dans la nuit après d’âpres négociations. Une douzaine d’États membres souhaitaient un meilleur équilibre géographique dans l’accès aux financements, notamment par le fonds d’innovation. La Pologne avait, quant à elle, conditionné sa non-objection à la CDN négociée en amont de la COP30 à un report du SEQE‑2.

La présidence danoise s’est félicitée d’avoir obtenu le soutien de 21 États membres représentant 80 % de la population européenne. Les « pays de Visegrád » (la Hongrie, la Pologne, la Slovaquie et la République tchèque) se sont opposés au texte. Tandis que la Belgique et la Bulgarie se sont abstenues.

Il a également fallu faire droit à deux demandes italiennes :

● Ajouter une couche supplémentaire de crédits internationaux au-delà de 5 % qui soient mobilisables non au niveau européen comme la première tranche mais directement par les États membres. Une mention d’une flexibilité de 5 % des crédits nationaux a été ajoutée, mais dans la clause de révision.

● Automobile : l’Italie voulait des garanties claires sur le rôle des biocarburants dans le post‑2035. Le compromis retenu indique que le rôle des carburants bas-carbone sera pris en compte sans préempter les négociations entourant la révision à venir du règlement sur les émissions des véhicules.

L’accord sur la cible 2040 réaffirme la volonté des États de voir la Commission présenter rapidement une révision des normes d’émissions de CO₂ des voitures – elle est pour l’instant à l’agenda de l’exécutif le 10 décembre. Il indique aussi qu’elle devra tenir compte du rôle des carburants sans carbone, à faible teneur en carbone et renouvelables dans la décarbonation des transports au-delà de 2030.

Par ailleurs, dans la négociation, plusieurs concessions ont été demandées et obtenues par la France :

– (Considérant 5) ([26]) Principe de neutralité technologique introduit dans la loi Climat ce qui supprime toute hiérarchie entre les énergies qui permettent d’atteindre la neutralité climatique.

Sur ce point, votre rapporteure alerte sur les risques que cette approche fait peser sur le développement des énergies renouvelables, qui doivent pourtant demeurer un pilier prioritaire de la transition. Un point également souligné par le Haut Conseil pour le climat lors de son audition :

– (Considérant 5b) MACF : « mise en œuvre et extension efficaces du MACF aux biens en aval, introduction de mesures anti-contournement et d’actions visant à lutter contre la fuite de carbone liée aux exportations » ;

– Considérant 8 : « La Commission devrait évaluer comment la législation de l’Union en la matière devrait être modifiée afin d’atteindre l’objectif climatique fixé pour 2040, en tenant également compte de la diminution de la capacité des puits naturels ».

c.   La position du Parlement européen

Le vote tenu le 13 novembre a confirmé le texte précédemment approuvé par la commission parlementaire ENVI le 10 novembre. La majorité constituée par EPP/Renew/S&D/Greens a permis l’adoption, sans l’extrême droite qui avait appelé à la suppression de la cible climatique et sans une partie du PPE.

La position du Parlement est alignée avec celle du Conseil, à ces différences près :

– ajout de précisions sur l’intégrité et la qualité des crédits carbones internationaux ([27]) ;

– les 5 % de crédits internationaux additionnels ne peuvent pas compenser les émissions à réaliser par les secteurs couverts par le SEQE‑1 (position alignée sur celle de la Commission).

d.   Le trilogue à venir

Un trilogue prévu le 9 décembre. La représentation permanente française de l’Union européenne note que l’exclusion des crédits internationaux de l’ETS est un point dur pour l’Italie dans les négociations, ce qui fait peser un léger doute quant au texte final sur ce point.

L’ajout de mentions sur l’intégrité des crédits internationaux ne devrait en revanche souffrir d’aucune difficulté.

2.   Sur le fond : un objectif facialement maintenu de 90 % avec de nombreuses flexibilités qui amoindrissent l’effort domestique sur le territoire de l’UE

a.   Les flexibilités

i.   Les crédits carbones internationaux jusqu’à 5 %, réduisant l’objectif de réduction GES à 85 % en domestique

L’orientation générale prévoit que de tels crédits ([28]) pourront être utilisés à hauteur de 5 % du niveau d’émissions nettes de l’Union de 1990 (contre 3 % dans la proposition initiale de la Commission), sans obligation pour les États d’y recourir. Il s’agit du plafond que défendait l’Italie, mais aussi la France qui en avait fait une ligne rouge. Par conséquent, la cible domestique de réduction des émissions (sur le territoire de l’UE) « correspond à 85 % », indique l’accord entre les États.

Comme le voulait Rome, ces crédits pourraient être comptabilisés à partir de 2031, soit cinq ans plus tôt que ce qu’envisageait l’exécutif européen. Jusqu’en 2035, ce serait toutefois dans le cadre d’une « période pilote » visant à « mettre en place un marché international des crédits de haute qualité et d’une grande intégrité. »

Une autre idée italienne a été partiellement reprise. Lors du réexamen de la loi climat prévu tous les cinq ans, la Commission devra évaluer la possibilité d’autoriser les États à utiliser encore davantage de crédits internationaux, à hauteur de maximum 5 % de leurs futurs objectifs nationaux de réduction des émissions qui seront fixés dans le règlement sur le partage de l’effort climatique (ESR).

L’orientation générale prévoit par ailleurs une potentielle révision de l’objectif 2040 en tant que tel tous les cinq ans, la possibilité d’ajuster la cible en cas de sous-performance des puits de carbone naturels, ainsi qu’une évaluation bisannuelle de la mise en œuvre de l’objectif – ces deux derniers points émanant de propositions françaises.

La DGEC voit d’un bon œil cette flexibilité, estimant que les risques de double compte seront neutralisés par la tenue de registres internationaux, que l’intégrité des crédits sera assurée et que l’UE affirmera pleinement son soft power législatif en se positionnant comme l’un des principaux acheteurs de crédits et en fixant elle-même les standards de qualité.

Votre rapporteure tient à souligner le caractère étonnant de la volte-face française. Opposé de longue date à ces crédits, le gouvernement a changé de position en l’espace de quelques semaines.

Enfin, se posera la question du financement de ces crédits. L’une des pistes envisagées passe par les revenus du MACF qui pourraient être utilisés à cette fin. L’achat se fera au niveau européen et représentera un coût de plusieurs milliards d’euros.

Votre rapporteure déplore cette concession ardemment défendue par la France. Il y a de grandes chances que ces crédits carbones jouent un rôle adverse dans les pays en développement où ils seront vendus, l’UE acquérant l’effort de réduction d’émission le plus abordable au détriment des pays hôtes qui n’auront plus le levier de ces projets pour leurs propres NDC. Plusieurs auditionnés ont par ailleurs alerté sur les coûts potentiellement très élevés de ce mécanisme – estimés entre 6 et 10 milliards d’euros selon le Réseau Action Climat – ainsi que sur l’absence de garanties quant à l’intégrité environnementale de ces crédits internationaux.

Votre rapporteure souligne enfin le positionnement singulier de la France dans la défense de ces flexibilités, adopté pour faciliter l’accord européen, alors même que le Parlement français n’a pas été pleinement associé ni informé des prises de position de l’exécutif dans les négociations.

ii.   Le frein d’urgence sur les puits naturels

La France a obtenu que ce dispositif de frein d’urgence soit retenu pour revoir l’objectif climatique 2040 à la baisse dans une mesure pouvant aller jusqu’à 3 % en cas de sous-performance des puits carbones naturels et artificiels. Ce frein d’urgence a vocation à être proportionnel à la sous-performance des puits.

b.   Le report d’un an de l’entrée en vigueur du SEQE‑2

Outre les flexibilités incluses dans le texte relatif à la cible 2040, le Conseil a également inscrit dans sa position le report à 2028, soit un an plus tard, de la mise en œuvre du marché du carbone pour la route et le bâtiment.

À noter que, si la France n’a pas transposé le SEQE‑2, elle ne faisait pas partie de la dizaine d’États membres, emmenés par la Pologne, qui demandaient un report du SEQE‑2 dans les négociations.

La DGEC note qu’il s’agit d’une concession faite dans le cadre de la négociation. Le Fonds social pour le climat devrait tout de même entrer en vigueur dès 2026 avec le surplus des revenus SEQE‑1, sans que sa mise en œuvre ne soit stoppée par le report du SEQE‑2.

Toutefois, la France est à ce jour le seul État membre à n’avoir transmis aucune proposition de Plan social pour le climat à la Commission européenne avant l’échéance du 30 juin 2025, alors même que ce plan conditionne l’accès à environ 1,2 milliard d’euros annuels entre 2026 et 2032 du Fonds social pour le climat et suppose un cofinancement national. Comme plusieurs acteurs auditionnés, votre rapporteure déplore qu’aucun travail préparatoire ni concertation n’ont été engagés, contrairement à plus de la moitié des États membres. Cette carence prive la France de financements européens majeurs et retarde la mise en place d’un dispositif essentiel pour soutenir les ménages les plus exposés aux coûts de l’énergie et accompagner les investissements structurels nécessaires, notamment en matière de rénovation énergétique performante.

II.   l’essoufflement de l’élan international autour du climat se ressent dans la politique climatique européenne et fait craindre un non-respect des objectifs fixés

A.   La COP30 s’est avérée décevante, reflétant le marasme actuel dans lequel est plongée la diplomatie climatique internationale

1.   Dans le cadre de la COP30, l’UE s’est dotée d’un objectif moins ambitieux, une fourchette, envoyant le signal d’une fragilité sur les politiques climatiques à l’endroit des autres États parties

Le Conseil environnement du 4 novembre a permis, outre l’accord à la majorité qualifiée sur la cible climatique européenne pour 2040, l’accord à l’unanimité sur une fourchette de réductions de l’UE pour 2035, en amont de la COP30 à Belém.

Si la DG CLIMA a noté, lors de son audition, que l’accord à l’unanimité avait été de nature à conforter la position européenne en amont des négociations brésiliennes, le Réseau action climat n’a pas manqué de rappeler que la fourchette de réduction – comprise entre 66,25 % et 72,5 % par rapport à 1990 – n’est pas satisfaisante. « Seul son plafond est aligné avec l’objectif de ‑ 90 % pour 2040. Elle laisse la latitude aux pays européens de faire 6 points de moins, ce qui est totalement en dessous du consensus scientifique, de l’Accord de Paris. » Pour le Haut Conseil pour le climat, la borne basse de cette fourchette traduirait même un ralentissement de la trajectoire actuelle, en contradiction avec les exigences de l’Accord de Paris.

Votre rapporteur tient enfin à souligner une nouvelle fois que l’obtention tardive de cette fourchette, ainsi que la difficulté à sécuriser un objectif clair de – 90 % en 2040, sont en partie liées aux positions défendues par la France, qui a contribué à renverser et retarder le processus d’adoption initial, et s’est retrouvée alignée avec plusieurs pays du groupe de Visegrád. Ce positionnement a significativement retardé la conclusion d’un accord européen et, par conséquent, l’adoption du nouveau CDN de l’Union en amont de la COP30.

2.   Les négociations climatiques à Belém se sont avérées décevantes, ne parvenant pas à un accord sur un plan de sortie des énergies fossiles ni sur la préservation des forêts

Le paquet politique de Belém ([29]), comprenant l’ensemble des décisions adoptées par les négociateurs à l’issue de la plénière, s’avère d’une ambition moindre que celle défendue par l’Union européenne.

Ces priorités ont été rappelées par la direction générale de l’énergie et du climat lors de son audition :

– Avoir un mécanisme qui permette de faire progresser les CDN et ne pas attendre 5 ans pour reconnaître qu’elles ne sont pas suffisamment ambitieuses pour respecter l’accord de Paris ;

– Avoir une feuille de route et un processus de sortie des fossiles : 82 pays ont signalé leur accord mais il s’agit d’un point dur de la négociation du fait de l’opposition de certains pays comme l’Arabie saoudite ;

– Tripler les financements de l’adaptation après le doublement obtenu à Glasgow : l’UE est devenue le principal financeur depuis le retrait des États-Unis.

D’une part, le texte phare ([30]) ne reprend pas l’idée d’une feuille de route sur la transition vers l’abandon des combustibles fossiles, lancée à l’ouverture de la conférence par le président brésilien, contrairement à ce qu’auraient voulu quelque 80 pays incluant la Colombie, les États insulaires les plus vulnérables et l’UE.

Cette dernière, focalisée sur l’atténuation climatique, avait fait de cette initiative l’une de ses priorités, en proposant notamment sa propre version ([31]) à inclure dans l’accord final. Une quarantaine de pays, dont la France, l’Allemagne, l’Espagne et le Royaume-Uni, avaient également envoyé une lettre ([32]) à la présidence, le 21 novembre, pour exprimer leurs préoccupations face au manque d’ambition de l’avant-projet de texte en la matière.

Le texte finalement adopté ne comporte aucune mention explicite aux énergies fossiles. Les parties s’engagent cependant à accélérer la mise en œuvre de l’accord de Paris « pour maintenir l’objectif de 1,5 °C », en tenant compte du « consensus des Émirats arabes unis », conclu à la COP28, qui appelle à « opérer une transition vers la sortie des combustibles fossiles dans les systèmes énergétiques ».

D’autre part, la COP s’avère décevante sur la question des forêts. Le Brésil en avait fait une importante priorité politique, en choisissant d’implanter symboliquement « sa » COP aux portes de l’Amazonie. Le mot n’apparaît pourtant pas, ou quasi, dans les multiples décisions adoptées. Quant au fonds pour les forêts tropicales éternelles (TFFF), auquel l’Allemagne a finalement promis 1 milliard d’euros dans la dernière ligne droite de la COP, en plus des pays ayant déjà annoncé une contribution, le fonds n’a engrangé « que » 6,5 milliards de dollars, sur les 25 milliards d’argent public attendus pour lancer le mécanisme. Et aucune contribution privée n’a été annoncée, rendant très lointain l’objectif d’engranger 100 milliards de dollars de fonds privés.

B.   L’avenir de la politique climatique dans l’Union et en France

1.   Au niveau européen, la neutralité carbone en 2050 suppose de renforcer grandement les efforts dans un moment où la tendance est plutôt au recul des ambitions

Le rapport Delivering the european green deal ([33]) publié par le centre d’études de la Commission permet de faire un point d’étape sur la mise en œuvre des mesures de décarbonation prévues dans le cadre du Pacte vert.

Ce rapport intermédiaire conclut que, sur les 154 cibles identifiées, des progrès ont été accomplis pour 96 objectifs (62 % du total), dont 32 (21 %) sont en passe d’être atteints. Pour 64 objectifs (41 %), le rythme devrait être accéléré pour réaliser les ambitions. Pour 15 objectifs (10 %), la tendance est soit inversée, soit stagnante.

Lorsque l’on se concentre sur les 87 cibles légalement contraignantes pour les États membres, seuls 13 d’entre elles (15 %) progressent à la vitesse nécessaire pour réaliser les ambitions du Pacte vert.

Source : rapport du JRC – delivering the EU Green deal.

 

En ce qui concerne l’objectif de – 55 % d’émission de GES pour 2030, objectif légalement contraignant depuis l’adoption de la loi européenne sur le climat, le rapport note que les plans nationaux énergie-climat (PNEC) remis à la Commission par les États membres présentent des ambitions accrues dans le cadre du règlement relatif à la répartition de l’effort. Toutefois, leur ambition est encore insuffisante d’après le JRC et les mesures existantes ne permettraient qu’une réduction de 51 % des gaz à effet de serre à horizon 2030.

« L’objectif de réduction des émissions nettes d’au moins 55 % par rapport à 1990 pour l’ensemble de l’économie est inscrit dans la loi sur le climat, mais il existe un risque de ne pas atteindre cet objectif. D’après l’analyse des données et des tendances, le rythme de réduction des émissions de GES de l’UE devrait augmenter considérablement au cours de la décennie actuelle par rapport aux décennies précédentes pour atteindre l’objectif de réduction nette de 55 %. »

Lors de son audition, la DG CLIMA a rappelé l’importance du règlement sur la gouvernance de l’Union de l’énergie et de l’action pour le climat qui constitue l’infrastructure de suivi des émissions de GES et la base légale pour les PNEC fournissant notamment les données permettant au JRC de mesurer précisément les progrès dans la réalisation du Pacte vert.

La DG CLIMA note encore que si l’ensemble des États membres appliquait leur PNEC, la législation climatique européenne serait « on track », avec une réduction de GES de 54 %, proche de la cible de 55 % ([34]).

Il est important de relever que l’atteinte du chiffre de – 54 % nécessite l’implémentation des mesures existantes et de mesures supplémentaires. La seule continuation des mesures existantes mènerait à une réduction de – 51 % comme cela a été estimé par le JRC.

Le règlement sur la gouvernance union de l’énergie doit être révisé au quatrième trimestre 2026 pour simplifier les obligations de reportage et en faire des vrais plans d’investissements plus lisibles pour afficher clairement le niveau d’ambition à l’attention des financeurs.

a.   Les objectifs de décarbonation secteur par secteur

Comme le note la Commission européenne dans son rapport d’étape sur l’action climatique (climate action progress report), publié en novembre 2025 ([35]) :

« Trois politiques principales doivent permettre à l’UE d’atteindre son objectif de réduction des émissions de 55 % d’ici 2030 :

• Le système d’échange de quotas d’émission de l’UE (SEQE) vise à réduire les émissions de 62 % par rapport aux niveaux de 2005 ;

• Le règlement sur le partage de l’effort (ESR) fixe un objectif de réduction de 40 % par rapport aux niveaux de 2005 ;

• Le règlement sur l’utilisation des terres, le changement d’affectation des terres et la foresterie (LULUCF) prévoit un enlèvement net supplémentaire de 42 MtCO2‑eq par rapport à la moyenne de 2016‑2018. Toutefois, la loi européenne sur le climat fixe une contribution maximale à l’objectif 2030 de l’UE pour l’ensemble de l’économie de 225 MtCO2‑eq pour les absorptions terrestres.

D’autres politiques soutiennent également la neutralité climatique et les objectifs intermédiaires :

• Le système d’échange de quotas d’émission pour les bâtiments et les transports (ETS2) vise à réduire les émissions de 42 % par rapport aux niveaux de 2005 ;

• Les politiques visant à réduire les émissions d’hydrofluorocarbures (HFC) d’environ 95 % par rapport aux niveaux de 2015 ;

• L’objectif d’une capacité d’injection et de stockage géologique de CO2 d’au moins 50 millions de tonnes par an d’ici 2030.

Source : rapport d’étape sur l’action climatique – Commission européenne.

 

i.   Les réductions du secteur ESR

La communication (2025) 274 du 27 mai 2025 d’évaluation des plans nationaux énergie-climat ([36]) affirme que :

« Dans le cadre de l’ESR, les émissions provenant des transports intérieurs, des bâtiments, de l’agriculture, de la petite industrie et des déchets doivent être réduites de 40 % d’ici à 2030 par rapport à 2005.

Sur la base des projections disponibles, les émissions devraient diminuer d’environ 38 % en 2030 par rapport aux niveaux de 2005, soit environ 2 points de pourcentage de moins que l’objectif de l’UE. Grâce à des mesures supplémentaires ou renforcées, il s’agit d’une amélioration substantielle par rapport à l’écart de plus de 6 points de pourcentage constaté sur la base de l’évaluation des projets de plans nationaux énergie-climat l’échelle de l’UE. 12 États membres prévoient d’atteindre leurs objectifs ESR pour 2030 grâce aux politiques et mesures existantes et supplémentaires (contre 8 dans les projets de plans), tandis que 6 autres prévoient d’atteindre leurs objectifs en utilisant les marges de manœuvre nationales disponibles. 5 États membres prévoient un écart par rapport à leurs objectifs pour 2030. »

En particulier, s’agissant de la France, le plan national énergie-climat prévoit une réduction des émissions ESR de 46,4 % d’ici à 2030 (par rapport à 2005), légèrement en deçà de l’objectif fixé par la législation européenne (– 47,5 %).

Source : annexe à la communication du 27 mai 2025 d’évaluation des PNEC ([37]).

ii.   Les réductions des secteurs couverts par le SEQE‑1 et les réductions moindres attendues des secteurs du SEQE‑2 du fait du décalage de son entrée en vigueur

Comme le fait observer le Citepa : « on ne peut pas dire que le mécanisme de marché carbone est efficace et que le report d’un an n’aura pas de conséquences sur la trajectoire de réduction des émissions GES ».

Sur 20 ans, les secteurs couverts par le SEQE‑1 ont réduit fortement leurs émissions dans le contexte d’une économie qui a cru en termes de PIB. Le SEQE‑1 est le premier contributeur à l’effort réalisé sur l’effort historique.

iii.   La surévaluation des capacités d’absorption des puits carbones

L’article 4.2 du règlement LULUCF ([38]) dispose que : « L’objectif de l’Union pour 2030 en ce qui concerne les absorptions nettes de gaz à effet de serre est de 310 millions de tonnes équivalent CO2, ce qui correspond à la somme des valeurs des émissions et absorptions nettes de gaz à effet de serre par les États membres en 2030 indiquées dans la colonne D de l’annexe II bis, et se fonde sur la moyenne de ses données d’inventaire des gaz à effet de serre pour les années 2016, 2017 et 2018, communiquées en 2020. »

En l’état, même avec les mesures supplémentaires, l’UE manquerait – de beaucoup – son objectif de 310 Mt : elle serait à – 233 Mt dans le scénario de l’agence européenne de l’environnement avec mesures supplémentaires et à – 183 Mt dans le scénario à politique constante.

Source : projections de l’agence européenne de l’environnement pour les puits naturels (secteur UTCATF).

Cette surestimation est reconnue par la Commission elle-même dans sa communication d’évaluation des PNEC, précitée :

« En ce qui concerne le secteur des terres, les projections fournies par les États membres montrent que l’UE n’est pas en bonne voie pour atteindre son objectif pour 2030, qui est d’augmenter les absorptions nettes de 42 MtCO2eq d’ici à 2030. Ces dernières années, le secteur des terres a stocké de moins en moins de carbone provenant de l’atmosphère. L’analyse agrégée montre que le puits de carbone ne devrait pas s’améliorer par rapport aux niveaux actuels. En réalité, l’UE affiche un déficit d’environ 45 à 60 MtCO2eq par rapport à l’objectif de 2030. Néanmoins, plusieurs États membres ont revu leur ambition à la hausse et trouvé des moyens plus concrets d’atteindre leur objectif pour 2030, en mettant en place de nouvelles politiques dans le secteur des terres.

Neuf États membres (contre cinq dans les projets de plans) prévoient désormais d’atteindre leurs objectifs UTCATF. Parmi eux, le Danemark a récemment mis en place d’importantes réformes, notamment la tarification des émissions de l’agriculture et l’utilisation des recettes ainsi générées pour financer la transition du secteur des terres. Plusieurs États membres reconnaissent également dans leur plan définitif la nécessité d’investir dans l’amélioration des processus de surveillance, de déclaration et de vérification dans le secteur des terres afin de garantir une meilleure qualité des données en vue d’une élaboration efficace et efficiente des politiques dans ce secteur. Toutefois, la plupart des plans ne détaillent pas suffisamment les mesures nécessaires pour atteindre les objectifs et ne quantifient pas leurs incidences. Une utilisation globalement plus efficiente de la biomasse (pour les produits énergétiques, les denrées alimentaires et aliments pour animaux, et les bioproduits) en vue de la fabrication de bioproduits à plus forte valeur ajoutée serait essentielle pour le secteur des terres »

Les puits artificiels sont aussi probablement surestimés :

« Les plans définitifs réduisent l’écart par rapport à l’objectif de 50 millions de tonnes de CO2 par an d’ici à 2030 fixé par le règlement pour une industrie « zéro net ». D’après les informations disponibles, les États membres prévoient de capter un volume annuel de 42,4 MtCO2 en 2030, dont 14,9 MtCO2 à partir de sources biogéniques. Selon eux, la capacité d’injection devrait se situer entre 27,1 et 45,1 Mt CO2 par an en 2030. »

Les technologies de capture pourront certes être développées à la marge pour les émissions « hard to abate », pour lesquelles aucune alternative n’existe. Cependant votre rapporteure estime que le risque est grand d’une sur-utilisation de ces technologies aux fins de poursuivre des pratiques dommageables.

b.   Le recul des ambitions écologiques dans les réglementations et le maintien d’objectifs ambitieux fait peser le risque d’une contradiction dans les termes

Votre rapporteure déplore plusieurs reculs concrets de l’ambition climatique européenne ces derniers mois :

– Report d’un an de l’entrée en vigueur du SEQE‑2 ;

 Report d’un an du MACF et limitations aux plus gros importateurs de biens ;

– Allègement du devoir de vigilance dans le cadre de la CS3D ;

– Allègement des obligations de reportage dans le cadre de la CSRD ;

– Report de deux ans de l’entrée en vigueur du règlement visant à lutter contre la déforestation importée.

Le fait de relâcher le cadre réglementaire sans relâcher les objectifs fait peser le risque d’une contradiction dans les termes.

Étant entendu que les réductions de GES faciles (les « low raining fruits ») ont déjà été réalisées et que les réductions restantes seront les plus dures à atteindre, car touchant aux modes de vie, aux structures des chaînes de production et de consommation, aux modèles d’affaires des grandes entreprises, au secteur des énergies fossiles, etc.

Trois secteurs devront nécessairement être mis à contribution dans des proportions supérieures à ce qu’il leur est demandé à ce stade : l’agriculture, le bâtiment et les transports. Or ces secteurs sont soumis à une grande inertie des pratiques difficilement modulables sur le court ou moyen terme.

2.   Les recommandations : enrayer le backlash écologique pour assurer l’atteinte des objectifs environnementaux tout en étant attentif à leur acceptabilité sociale

Dans sa contribution écrite, le Réseau action climat estime que les objectifs sont atteignables mais à condition de stopper les reculs sur le Green Deal, d’une part, et d’adopter des mesures supplémentaires ambitieuses, d’autre part.

Adopter des mesures supplémentaires :

– Débloquer des investissements massifs pour financer les transformations. I4CE estime qu’il manque environ 400 mds d’euros pour déployer le Fit for 55 d’ici 2030. Le budget européen / les financements vers la transition écologique doivent être renforcés, notamment dans le prochain cadre financier pluriannuel européen pour 2028-2034 est en train d’être négocié ;

– Intégrer des politiques de sobriété dans la législation européenne (Plans nationaux énergie climat, règlement sur la gouvernance) : pour réduire de manière plus ambitieuse la demande en produits à forte intensité en matériaux, en énergie et en gaz à effet de serre. Cela permettrait d’obtenir des co-bénéfices plus importants par rapport à une approche axée principalement sur le verdissement de l’offre ;

– Verdir la politique agricole commune qui constitue en majorité des subventions néfastes pour la biodiversité (En France, le rapport des inspections des Finances et de l’Écologie sur le financement de la biodiversité a estimé que 6,5 milliards d’euros (soit 64 % des financements du Plan Stratégique National de la PAC) constituaient une subvention dommageable pour la biodiversité). Réorienter les aides vers des activités moins polluantes (agroécologie vs élevage) ;

– Adopter des plans et des calendriers clairs pour supprimer les subventions néfastes aux énergies fossiles dans toute l’UE. Subventions sont restées stables à 50 milliards d’euros par an, et ont même augmenté ces dernières années, ce qui sape l’incitation à réduire la consommation d’énergies fossiles et diminue le budget public disponible pour soutenir l’action climatique. Pour cela, il faut notamment faire aboutir la révision de la directive sur la taxation de l’énergie pour mettre fin aux avantages fiscaux pour les carburants fossiles des secteurs du maritime et de l’aviation ;

– Renforcer et protéger nos puits naturels alors que les forêts européennes perdent en capacité d’absorption.


D’un point de vue pragmatique, l’institut Jacques Delors estime, en outre, que la situation politique actuelle délicate pour les politiques climatiques amènera peut-être des choix difficiles et supposera de choisir de placer son capital politique pour sauvegarder les réglementations les plus importantes, quitte à renoncer sur certains autres points.

Enfin, de manière plus générale, votre rapporteure tient à tirer les conséquences de ce cycle de négociations sur la cible 2040 et à souligner la trop faible prise en compte du Parlement français dans les positions de négociation arrêtées par le gouvernement sans consultation aucune. L’absence d’un mandat parlementaire – comme cela peut exister dans d’autres pays tels que la Suède – ou, à tout le moins, une consultation en amont et aval de chaque rendez-vous européen d’importance est dommageable pour la légitimité des orientations prises et fragilise, par là même, le poids des négociateurs français face à leurs homologues européens ayant reçu l’onction de leur représentation nationale.


   EXAMEN EN COMMISSION

La commission s’est réunie le mercredi 26 novembre 2025, sous la présidence de M. Pieyre-Alexandre Anglade, Président, pour examiner la présente proposition de résolution européenne.

M. le Président Pieyre-Alexandre Anglade. Nous allons examiner, dans le cadre d’une discussion générale commune, deux propositions de résolution européenne dont l’objet est assez proche : la PPRE de Madame Julie Laernoes visant à réaffirmer l’ambition climatique de la France au niveau européen et celle, déposée par Madame Sophie Taillé-Polian, visant à garantir l’intégrité de l’information sur le changement climatique face à la désinformation climatique et aux ingérences étrangères.

Je me réjouis que notre commission puisse se saisir de ces sujets extrêmement importants. Dix ans après les accords de Paris, plusieurs signaux d’alerte demeurent extrêmement inquiétants, notamment l’absence des États-Unis à la COP30, les faibles engagements chinois, l’impossibilité d’inscrire une trajectoire claire de sortie des énergies fossiles ou encore le financement très insuffisant du fonds pour les forêts tropicales. Face aux limites du multilatéralisme climatique, l’Union européenne doit nous permettre de continuer d’agir à grande échelle et d’avancer. Le Conseil européen du 23 octobre a remis la politique climatique en bonne place – peut-être pas au premier plan, mais en bonne place – et un accord récent entre le Conseil et le Parlement a fixé un objectif de réduction de 90 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2040, pour viser la neutralité carbone en 2050.

Dans cette dynamique, notre pays a joué ces dernières années un rôle moteur et je souhaiterais qu’il puisse continuer à le faire. La France a été au rendez-vous ces dernières années de la réforme du marché carbone, du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, de la structuration du pacte vert, mais aussi des normes ambitieuses sur l’air, la biodiversité ou la décarbonation industrielle. Nous devons continuer dans ce sens.

Bien sûr, nos politiques européennes sur tous ces sujets peuvent être améliorées, elles doivent l’être, mais n’oublions pas qu’elles reposent sur une architecture solide et fortement partagée entre les États membres : marché carbone efficace, protection de nos puits naturels et soutien à l’innovation indispensable à la décarbonation des secteurs les plus émetteurs. Ce leadership européen honore évidemment les institutions européennes, les États membres, mais nous oblige aussi à poursuivre sur ce chemin. Je me réjouis donc que cette ambition figure à notre ordre du jour et que nous puissions en débattre.

Mme Julie Laernoes, rapporteure. Je tiens d’abord à remercier le président Anglade d’avoir permis d’inscrire ces deux PPRE à l’ordre du jour.

La proposition de résolution que je présente vise à réaffirmer l’ambition de la France au niveau européen. Je dis « réaffirmer » parce que nous observons partout autour de nous la facilité du renoncement plutôt que le courage de l’action. Permettez-moi de brosser deux tableaux.

Celui de l’international, d’abord. Début novembre, le rapport du programme des Nations unies pour l’environnement sur l’écart entre les besoins et les perspectives en matière de réduction des émissions (Emission Gap Report, en anglais), a constaté que les projections relatives au réchauffement planétaire pour ce siècle, fondées sur la mise en œuvre intégrale des contributions déterminées au niveau national (CDN), sont désormais de 2,3 à 2,5 °C, tandis que celles fondées sur les politiques actuelles sont de 2,8 °C. Pour rappel, l’accord de Paris, adopté en 2015, prévoyait de limiter le réchauffement climatique à 2 °C à l’échelle mondiale en visant, de préférence, 1,5 °C, par rapport à l’ère préindustrielle. Que 2015 semble loin !

Dix ans plus tard, les dirigeants et négociateurs du monde entier se retrouvaient à Belém, au Brésil, pour la COP30, qui s’est achevée vendredi dernier. Pour quels effets ? Vous le savez : les États-Unis de Donald Trump n’étaient pas présents ; la contribution déterminée au niveau national de la Chine était peu ambitieuse ; et le principal texte adopté ne comporte aucune mention explicite des énergies fossiles ni d’un plan de sortie en bon ordre. Quant au fonds nouvellement créé pour les forêts tropicales, il n’a réuni que 6 milliards de dollars d’argent public sur les 25 milliards attendus. Dans le même temps, la production mondiale de charbon continue d’augmenter : elle est passée de 3,9 milliards de tonnes en 2020 à 4,8 milliards de tonnes en 2024. La Chine continue d’ouvrir des centrales thermiques. Dix ans après l’accord de Paris, notre ambition semble bien loin.

Le tableau européen, à présent. Au niveau européen nous voyons que nos efforts ne sont pas vains et que la politique climatique peut et doit être une politique de prospérité. La part de l’Union européenne dans les émissions mondiales de gaz à effet de serre est passée de 15,2 % en 1990 à 6 % en 2023. Mais aux partisans de l’inaction, qui considèrent que la mission est accomplie et que l’Union n’a plus rien à faire, je rappellerai simplement ceci : ces 6 % font encore de l’Union le quatrième émetteur mondial de gaz à effet de serre. Et je ne parle même pas de la responsabilité historique des pays européens dans les émissions globales. L’Europe a là une responsabilité majeure.

Le Conseil environnement du 4 novembre dernier avait deux objectifs. D’une part, doter l’Union d’un objectif intermédiaire de réduction des gaz à effet de serre pour 2040 : entre l’objectif de – 55 % pour 2030 et celui de neutralité climatique en 2050. D’autre part, doter l’Union d’une contribution déterminée au niveau national en amont de la COP30, fondée sur l’agrégation des contributions des États membres et permettant de confirmer le leadership européen.

Quels en ont été les résultats ? L’Union s’est bien dotée d’un objectif de – 90 % pour 2040, comme recommandé par l’étude d’impact de la Commission. Mais cette adoption a tout d’une victoire à la Pyrrhus, compte tenu des concessions faites. Et l’Union s’est bien dotée d’une contribution en amont de la COP, mais elle n’a pas été capable de se mettre d’accord sur autre chose qu’une fourchette : réduire les émissions de 66,25 % à 72,5 % d’ici 2035, par rapport à 1990.

La direction générale du climat de la Commission, que nous avons auditionnée, considérait positif qu’un accord à l’unanimité ait pu être trouvé. C’est voir le verre à moitié plein. Ce n’est pas voir que cette fourchette est apparue comme un signal de faiblesse aux yeux des autres délégations de la COP, alors que nous avions précisément besoin de force. Le Haut Conseil pour le climat nous a confirmé que la fourchette basse constituerait en réalité un recul au regard des objectifs attendus pour 2040 et pour la neutralité carbone en 2050.

Permettez-moi maintenant de revenir sur l’objectif 2040. Au-delà du chiffre de 90 %, c’est la projection de notre politique climatique européenne qui se joue pour les prochaines années. Certes, le chiffre de 90 % proposé par la Commission a été conservé lors du Conseil environnement du 4 novembre, puis dans le texte du Parlement européen adopté le 13 novembre. Mais les flexibilités et les circonvolutions sont nombreuses. D’abord, le texte autorise l’achat de crédits carbone internationaux à hauteur de 5 % du total de l’objectif. Cela réduit mécaniquement l’effort domestique sur le sol européen à 85 %.

Les risques sont par ailleurs importants : ces crédits pourraient avoir un rôle prédateur dans les pays en développement où ils seront mis en vente, en privant ces pays des projets de décarbonation les plus accessibles, dont l’Union s’attribuerait le bénéfice. Et à quel prix ? Le Réseau Action Climat mentionne une fourchette allant de 6 à 10 milliards d’euros, autant de moyens qui n’iront pas à la décarbonation de nos industries européennes, mais dans des projets internationaux présentant, outre le risque de prédation, un risque de double compte et un risque de défaut d’intégrité des projets.

Prédation, double compte, défaut d’intégrité, la Commission européenne est bien consciente de ces risques. Au niveau national, la DGEC croit que cela placera l’Europe en situation de 1re acheteur mondial des crédits internationaux et permettra de renforcer son rôle de faiseur de règles en imposant des standards hauts, mais les risques demeurent.

Je tiens à souligner une incohérence importante relevée lors des auditions : le revirement de la position française sur le sujet des crédits carbone internationaux. La France était opposée de longue date à ces crédits carbone internationaux mais a changé de position de manière surprenante, s’alignant notamment sur la position de l’Italie.

La Commission n’en prévoyait que 3 % et la France a pesé pour atteindre 5 %. Ces 5 % pourraient ne pas être totalement employés. La Commission a rappelé qu’il s’agissait d’un maximum et que les achats de crédits pourraient être inférieurs à ce plafond. Néanmoins, la Commission a dans le même temps autorisé l’expérimentation de leur achat dès 2031, alors que la date initialement prévue était de 2036.

Le signal envoyé est clair : l’opportunité est ouverte à un moindre effort sur le sol européen. Il est difficile de croire que les pays européens moins-disants ne feront pas tout pour s’en saisir.

Ensuite, un frein d’urgence sur les puits carbones naturels a été adopté. De manière générale, il prévoit la possibilité d’une réduction de l’objectif de 90 % jusqu’à 3 % en cas de sous-performance des puits carbone naturels. Comprenez : de moindre absorption de nos forêts, de nos prairies, de nos zones humides.

Ce frein était une demande française. Quelles sont les chances de sa mise en œuvre selon le Haut conseil sur le climat ? Élevées. Pourquoi ? Parce que les performances de nos puits carbone sont notablement surévaluées d’après l’Agence européenne de l’environnement, qui prévoit des réductions de 233 millions de tonnes à l’horizon 2030, quand l’objectif fixé par la Commission européenne est de 310 millions de tonnes.

Voici pour les flexibilités. Cela correspond donc à 5 % et 3 %, soit 8 %. Soit un objectif de réduction des émissions sur le sol européen qui serait en fait de 82 %. Mais, en effet, c’est moins vendeur.

Enfin, mentionnons le report d’un an du marché carbone, ETS2, pour le bâtiment, le routier et la petite industrie. Son entrée en vigueur n’est plus attendue avant janvier 2028. Cette concession a été faite dans le cadre des négociations au Conseil afin d’assurer le vote favorable de la Pologne, qui menaçait de faire veto quant au vote concernant la contribution déterminée au niveau national à adopter avant la COP, pour laquelle l’unanimité était requise. Je rappelle que la France est le seul État membre, avec la Hongrie et l’Estonie, à n’avoir pas encore transposé la directive de 2023, prévoyant la création de ce second marché carbone. Cela aurait dû être fait avant le 30 juin 2024.

Voici, à grands traits, les principaux apports des négociations climatiques au Conseil. L’équilibre du texte final qui sera probablement adopté lors du trilogue du 9 décembre prochain ne devrait pas en être fondamentalement changé.

Mes chers collègues, j’ai débuté mon propos en vous parlant d’une ambition climatique à réaffirmer. Quand je vois les derniers déroulements européens, l’impuissance de la communauté internationale, l’exaspérant pouvoir des industries fossiles et agrochimiques dans les négociations climatiques, il me semble que ces mots sont nécessaires.

La situation de backlash écologique que nous traversons est notable depuis le début du second mandat de la présidente de la Commission Ursula von der Leyen : report d’un an du mécanisme d’ajustement du carbone aux frontières et l’imitation aux plus gros importateurs de biens, allègement du devoir de vigilance dans le cadre de la directive sur le devoir de vigilance en matière de durabilité (CS3D), allègement des obligations de reportage dans le cadre de la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) et report de 2 ans de l’entrée en vigueur du règlement visant à lutter contre la déforestation importée.

Dans ce contexte, avoir obtenu un accord sur le chiffre de 90 % pour 2040 est déjà en soi un signal d’espoir. Mais il faut lire entre les lignes, il faut voir les flexibilités dont je viens de vous faire état. Nous l’avons vu avec la COP30, notre salut ne viendra pas de la scène internationale. Ces grands-messes sont nécessaires mais leur force et leur faiblesse se confondent : en voulant mettre tout le monde d’accord, elles aboutissent à des copies souvent insuffisantes. Le cru 2025 ne fait pas exception.

L’Union a cependant une voie de passage pour réaffirmer son leadership climatique. Une voie de passage vers la souveraineté énergétique pour se passer définitivement de la dépendance au gaz russe et réduire celle au pétrole des États-Unis et du Moyen-Orient. Une voie de passage pour l’électrification du parc automobile, pour la rénovation thermique des bâtiments, le déploiement des énergies renouvelables, la restauration des espaces naturels, des zones humides et des forêts. Une voie de passage vers une sobriété structurelle qui ne soit plus celle des « petits gestes » réclamés de manière culpabilisante à nos concitoyens, mais celle d’une modification de nos chaînes de production et de distribution, d’une préférence européenne et verte, d’une mise à contribution de ceux – entreprises et particuliers – qui polluent le plus. Ce chemin n’est pas celui de la facilité, mais il est le seul soutenable pour l’Europe.

La crise climatique ne nous demandera pas notre avis. Elle n’attendra pas que l’Union se mette d’accord à 27 ou se perde dans les concessions, flexibilités et autres circonvolutions. Le mot crise vient du grec krisis. Il signifie « séparation », au sens de capacité à « discerner », à faire preuve de discernement dans les moments aigus. Nous y sommes, nous sommes dans l’un de ces moments.

La France n’a pas une place comme les autres au sein de l’Union. Elle est l’un des pays fondateurs, et que nous le souhaitions ou non, elle a une voix qui pèse plus que les autres. Ce texte n’a donc pas d’autre ambition que de dire qu’il nous faut être plus à la hauteur de la crise.

 

L’exposé de la rapporteure a été suivi d’un débat.

Mme Céline Calvez (EPR). Dans un contexte marqué par la prolifération des fausses informations et la multiplication des ingérences étrangères, la fiabilité de l’information scientifique sur le climat est devenue un impératif démocratique.

Les cas de désinformation climatique se multiplient en raison de la défiance à l’égard des médias traditionnels, de l’irruption des médias sociaux, de leur logique algorithmique, et de la montée d’un discours climatosceptique d’extrême droite. Lutter contre la désinformation climatique n’est pas restreindre le débat public mais le permettre. Certes, la réalité scientifique est complexe, la controverse fait partie intégrante de la démarche scientifique et du progrès vers la connaissance, mais une fois que ces connaissances sont établies et reconnues, elles ne sauraient être niées ou occultées.

L’absence de référence à ces connaissances biaise le débat et fausse notre capacité collective à répondre aux défis actuels. Sans constat commun et partagé : pas de progrès collectif. Lors du sommet Choose Europe for Science en mai dernier, le Président de la République a déclaré que la lutte contre la désinformation en matière de sciences, de climat et de santé fait partie des dix chantiers du siècle afin d’assurer l’autonomie stratégique européenne. La France a toujours été à l’avant-garde de ces sujets.

L’Union européenne a engagé de nombreuses démarches : le règlement sur les services numériques et son code de bonne conduite, le European Media Freedom Act, et le bouclier démocratique européen – une stratégie sur cinq ans pour lutter contre les ingérences. Vous avez aussi mentionné que l’intégrité de l’information sur le changement climatique a été pour la première fois inscrite dans l’agenda d’action de la COP30.

Cette bonne dynamique est à conforter. L’Europe doit montrer la voie. Le groupe Ensemble pour la République est évidemment favorable à ce que la France continue à être le fer de lance. Nous soutenons la proposition de résolution européenne présentée par Mme Sophie Taillé-Polian, parce que la France pourra réaffirmer son engagement pour la science et contre les obscurantismes.

S’agissant de la proposition de résolution visant à réaffirmer l’ambition climatique de la France au niveau européen, nous partageons l’objectif. Nous constatons que le texte, dans l’état actuel, réitère largement les engagements déjà actés. Nous aurons l’occasion de détailler notre pensée lors de la discussion des amendements.

Mme Sophie Taillé-Polian, rapporteure. Je partage avec vous et nombre d’autres collègues l’impératif démocratique. Je voudrais préciser que le débat concernant les solutions est indispensable si nous voulons que la société tout entière se mobilise pour faire face au réchauffement climatique.

Il faut que nous nous accordions, suite à un débat contradictoire, sur les solutions. Pour cela nous avons besoin de nous ancrer solidement sur le consensus scientifique.

La France a signé le texte de l’initiative de Belém. Il faut désormais qu’elle entraîne les autres pays européens, l’Union européenne et les pays des autres continents en ce sens – voilà tout le sens de cette résolution.

Il faut maintenant que cette initiative soit déclinée sous la forme de feuilles de route nationales précises. Je vous rejoins sur le fait que nous attendons en France un texte suite aux États généraux de l’information, qui nous permettrait d’avancer concrètement pour une presse indépendante, libre et pluraliste.

Mme Julie Laernoes, rapporteure. Le calendrier des auditions s’est déroulé dans un contexte international et européen mouvant, notamment autour de la COP. Certaines auditions ont eu lieu avant le 13 novembre, soit avant la confirmation par les eurodéputés en plénière des objectifs de baisse des émissions convenus par les États membres.

Lors des auditions de Valérie Masson-Delmotte et du Haut conseil pour le climat, l’objectif intermédiaire de 2035 a été présenté comme un recul. À cet égard, je présenterai dans un instant plusieurs amendements tendant à assurer la cohérence de la proposition de résolution européenne.

De plus, nous avons constaté que l’information sur le positionnement de la France dans les négociations était peu transparente. Face à ce défaut constaté, je porte également un amendement visant à garantir un mandat clair pour nos ministres et notre exécutif, qui soit validé par la représentation nationale. Cet aspect est d’autant plus important, que la France dispose d’un pouvoir majeur dans les négociations et dans l’atteinte de ces objectifs. Par exemple, son poids n’est pas comparable à celui d’autres pays, tels que les Pays-Bas, qui disposent d’une influence plus limitée pour emporter une décision.

Enfin, je me réjouis de la configuration de l’arc républicain dans laquelle nous débattons aujourd’hui et note que l’extrême droite n’est pas présente aujourd’hui pour parler de climat.

Mme Nathalie Oziol (LFI-NFP). Un réchauffement du monde d’au moins 2,5 °C d’ici 2100, c’est l’alerte du programme des Nations unies pour l’environnement dans un rapport publié le 4 novembre.

Nous sommes bien loin de l’objectif fixé en 2015 avec l’accord de Paris, qui prévoyait de contenir le réchauffement en dessous de 2 °C voire 1,5 °C. L’année 2024 a été la plus chaude jamais enregistrée à l’échelle planétaire, dépassant le seuil de 1,5 °C de réchauffement.

Une étude publiée par Oxfam International en octobre 2025 appelle à une action collective urgente et met en évidence les liens entre inégalités et changements climatiques, du fait des dynamiques engendrées par les systèmes économiques capitalistes. Ce rapport souligne que depuis l’accord de Paris en 2015, les 1 % les plus riches de la population mondiale ont consommé plus du double du budget carbone de l’ensemble de la moitié la plus pauvre de l’humanité. À ce jour, une personne appartenant aux 0,1 % les plus riches émet plus de 800 kg de CO2 par jour tandis qu’une personne appartenant aux 50 % les plus pauvres émet en moyenne 2 kilos de CO₂ par jour.

Le budget proposé par le gouvernement sacrifie l’écologie sur l’autel de l’austérité budgétaire imposée par la Commission européenne. La hausse revendiquée par le gouvernement de 1,3 milliard d’euros sur l’écologie par rapport à 2025 est absolument insuffisante et ne compense ni les effets de l’inflation ni les coupes budgétaires des années précédentes, avec 14 milliards envolés entre 2023 et 2024. Le fonds vert, qui soutient les collectivités locales dans le financement des projets d’adaptation aux changements climatiques, de rénovation énergétique et d’amélioration du cadre de vie, comme la qualité de l’air, est lui, divisé quasiment par deux dans le PLF 2026.

Concernant l’importance de garantir l’intégrité de l’information sur le changement climatique face à la désinformation, il est aussi nécessaire de souligner les liens existants entre les discours ouvertement hostiles contre les efforts globaux de lutte contre le changement climatique et les intérêts économiques des classes les plus puissantes. Pendant la COP29, par exemple, plus de 1 600 lobbyistes du charbon, du pétrole et du gaz ont eu accès à la conférence. En France, rappelons la condamnation de la chaîne d’extrême droite du milliardaire Vincent Bolloré, CNEWS, à 20 000 euros d’amende pour des informations sur le climat par l’Arcom, puis par le Conseil d’État.

Je note à mon tour l’absence des députés du Rassemblement national à cette réunion consacrée au sujet de l’écologie et de la bonne information sur le changement climatique.

Mme Sophie Taillé-Polian, rapporteure. Je tiens à vous remercier et souhaite abonder dans votre sens sur la question des lobbies. Nous les avons déjà observés à l’œuvre sur tant de sujets. J’évoquais tout à l’heure l’exemple du tabac, mais il en existe bien d’autres. Il est essentiel de minimiser le plus possible leur poids dans la fabrique de l’opinion publique afin de garantir un débat démocratique de qualité.

M. Stéphane Delautrette (SOC). Les phénomènes météorologiques extrêmes gagnent en nombre et en intensité sous l’effet du dérèglement climatique. Nous enregistrons déjà des températures supérieures de 1,5 °C par rapport à la période préindustrielle.

Pour que citoyens et décideurs politiques du monde entier puissent engager les actions nécessaires, il est essentiel que tous aient accès à des informations précises, cohérentes, fiables et transparentes sur les causes et les conséquences du changement climatique, mais surtout sur les solutions disponibles pour y remédier. Or, aujourd’hui, ce n’est clairement pas le cas partout. La montée dans le monde du populisme d’extrême droite porteur d’un discours ouvertement climatosceptique, la persistance d’intérêts économiques contraires à l’intérêt général, une couverture médiatique limitée et intermittente des enjeux environnementaux, ainsi que la concentration des médias largement dénoncée dans notre assemblée expliquent en grande partie cette recrudescence de la désinformation climatique. Cette dernière est d’ailleurs largement documentée par l’Observatoire européen des médias numériques. Cette propagation de la désinformation climatique alimente la défiance envers les politiques publiques de protection de l’environnement, de santé publique et d’adaptation au dérèglement climatique.

Face à ce constat, j’ai déposé, il y a un an, une proposition de loi transpartisane sur le sujet. Je remercie notre collègue Sophie Taillé-Polian de prolonger ce travail en lui donnant une dimension européenne.

Notre groupe soutiendra également la deuxième proposition de résolution présentée par notre collègue Julie Laernoes. La position de la France ces dernières semaines est plus que préoccupante : en reportant au mois de novembre les discussions sur l’objectif 2040, main dans la main avec les États d’Europe centrale, elle a affaibli la dynamique climatique européenne et la prive d’un mandat clair et ambitieux à la COP30.

Mme Sophie Taillé-Polian, rapporteure. Je remercie notre collègue Delautrette pour son soutien et son engagement sur ce sujet, à travers sa proposition de loi transpartisane visant à garantir le droit d’accès du public aux informations relatives aux enjeux environnementaux et de durabilité. J’espère que cette proposition pourra bientôt être discutée dans notre hémicycle.

M. Benoît Biteau (EcoS). Je tiens à saluer le travail capital de notre rapporteure Sophie Taillé-Polian, qui met en lumière un enjeu démocratique majeur : la désinformation climatique. Face à l’urgence du dérèglement climatique, l’espace public est de plus en plus vulnérable aux manipulations, aux fake news et aux stratégies d’influence qui entravent l’action collective.

Lors de la COP30, une avancée majeure a été réalisée avec l’adoption de la déclaration sur l’intégrité de l’information en matière de changement climatique. Cette déclaration appelle à lutter contre les contenus mensongers diffusés en ligne et à mettre fin aux attaques visant des journalistes, scientifiques et chercheurs diffusant des données vérifiées. À cet instant, j’ai une pensée pour mes amies Morgan Large et Inès Léraud, qui ont été victimes d’intimidations et de menaces de mort.

Il est urgent que la France traduise cet engagement en acte et que le plus grand nombre de pays en fasse autant. La présente proposition de résolution européenne nous invite à agir dans ce sens.

Au niveau européen, les nouvelles ne sont pas rassurantes, puisque certains règlements en vigueur, comme celui visant à protéger les utilisateurs en ligne et à rendre les grandes plateformes responsables de ce qu’elles diffusent, ne sont pas appliqués correctement laissant un boulevard à la désinformation. Face à la désinformation et à la mésinformation présente sur un certain nombre de chaînes de télévision de notre pays, il est urgent de soutenir cette proposition de résolution européenne.

En ce qui concerne le rapport de ma collègue Julie Laernoes, effectivement, ce qui s’est passé à la COP30 à Belém est particulièrement inquiétant. Cela est d’autant plus préoccupant que la France, joue un rôle déterminant dans les négociations. Nous devons nous interroger : comment la France peut-elle, d’une main, signer l’accord de Paris et, de l’autre, promouvoir des dérogations qui en vident la substance, tout en réduisant dans nos propres budgets les moyens consacrés à la transition écologique ?

Ce texte est d’autant plus indispensable aujourd’hui qu’il réaffirme l’exigence d’un objectif européen de réduction d’au moins 90 % des émissions d’ici 2040. À nos amis du Rassemblement national, qui ont l’habitude de dire que la France ne pèse rien, j’ai envie de rappeler une citation de Gandhi, qui disait que montrer l’exemple n’est pas une façon de convaincre, c’est la seule.

Mme Julie Laernoes, rapporteure. Je remercie mes collègues Benoît Biteau et Stéphane Delautrette dont le soutien ne me surprend pas. Pourquoi avoir présenté une PPRE sur l’objectif des 90 % ? Je l’ai déjà expliqué : les auditions menées ont permis de rappeler un certain nombre de faits, d’entendre des ONG et des scientifiques spécialisés dans le climat, et de mettre en exergue l’impérieuse nécessité d’accélérer notre action en faveur du climat.

La représentation nationale doit pouvoir affirmer de manière claire et nette sa volonté de porter des objectifs climatiques ambitieux, pas uniquement pour 2050, mais également des objectifs intermédiaires pour 2035 et 2040.

Mme Anne-Cécile Violland, (HOR). Ces deux propositions de résolution abordent deux enjeux majeurs, le niveau d’ambition climatique de la France au niveau européen et la lutte contre la désinformation climatique. Ces deux questions sont évidemment intimement liées, car aucune stratégie de transition écologique ne peut réussir sans informations fiables ni sans une trajectoire européenne claire et crédible.

Mon groupe Horizons et indépendants partage pleinement le constat de l’urgence à agir. Les dérèglements climatiques s’accélèrent, l’Europe se réchauffe deux fois plus vite que la moyenne, et nos territoires en ressentent déjà les effets. Nous reconnaissons également le rôle central de la France dans la négociation européenne et dans la construction d’une stratégie climatique ambitieuse, cohérente avec l’objectif d’obtenir une neutralité carbone en 2050.

Dix ans après l’accord de Paris sur le climat, la France est restée un fer de lance en matière d’ambition climatique en n’opposant pas économie et écologie, mais en recherchant un consensus pour permettre le développement économique et l’innovation tout en tenant compte des impératifs environnementaux. À l’échelle européenne, la France tente de convaincre ses partenaires européens de l’importance de ces enjeux. C’est pourquoi, pour nous, cette PPRE adopte une vision déséquilibrée de la réalité des négociations européennes et des enjeux industriels associés.

Elle tend à minorer des acquis récents. La France a soutenu la sortie des énergies fossiles comme une ligne rouge dans la position européenne défendue à la COP30. Certes, l’issue a été décevante. Toutefois, l’Union européenne a transmis une contribution climatique ambitieuse pour 2035.

Le Conseil a su trouver un compromis acceptable alliant ambition et flexibilité pour préserver nos capacités industrielles et sociales dans la transition écologique. Une ambition climatique crédible doit conjuguer volontarisme et pragmatisme, objectifs climatiques et souveraineté industrielle, transition écologique et protection des travailleurs. Or, la PPRE propose une trajectoire unilatérale ne tenant pas suffisamment compte des équilibres européens ni de la nécessité de préserver la compétitivité de nos filières stratégiques.

Aussi, s’il s’accorde sur les constats établis, le groupe Horizons ne votera pas cette PPRE qu’il juge insuffisamment équilibrée.

À l’inverse, la PPRE de Mme Taillé-Polian représente pour notre groupe un levier essentiel. Nous faisons face à une double menace, celle du réchauffement climatique tangible et documenté et celle de la désinformation massive, souvent instrumentalisée par des acteurs étrangers ou extrémistes, qui fragilisent l’adhésion citoyenne et minent nos démocraties.

Nous sommes convaincus que si l’Europe doit poursuivre et renforcer la vision ambitieuse de sa politique climatique, celle-ci doit rester sincère, réaliste et compatible avec notre souveraineté économique. Nous sommes entièrement convaincus qu’aucun cap climatique ne saurait être atteint sans une protection robuste de l’information, sans un espace public fondé sur la science, la vérité et la transparence. Le groupe Horizon votera donc en faveur de cette seconde PPRE.

Mme Julie Laernoes, rapporteure. Je regrette le choix du groupe Horizons. J’ai tenu à rappeler dans cette proposition de résolution les faits, les revirements de positions ainsi que le rôle joué par la France dans le retard pour l’adoption de l’objectif de 90 %. La présidence danoise avait mis cet objectif sur la table des négociations, dès le mois de février.

La France a choisi de reporter ces discussions et de s’allier au groupe de Visegrad, composé de la Pologne, la Hongrie, la République tchèque et la Slovaquie, qui a contesté la méthode utilisée par la présidence danoise. La France s’est donc objectivement alliée avec les États membres de l’Union européenne n’étant pas les fers de lance en matière d’action climatique pour retarder l’adoption de cet objectif. Je vous l’ai déjà expliqué, ce fut le fruit de longues discussions avec Mme Valérie Masson-Delmotte, mais aussi avec le Haut conseil pour le climat, ainsi qu’avec le Centre interprofessionnel technique d’études de la pollution atmosphérique (Citepa) : la question des flexibilités et des crédits carbone minorent l’effort que l’Europe doit faire en matière d’ambition climatique.

Concernant le revirement de la France, il m’a paru important que la représentation nationale, qui n’a pas été concertée sur les objectifs climatiques, puisse réaffirmer une position ferme en la matière.

Mme Nicole Le Peih, députée (EPR). Votre rapport met en évidence la divergence d’appréciation entre, d’une part, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique, qui estime disposer d’un arsenal juridique suffisant, et d’autre part, les ONG, ainsi que le Haut Conseil pour le climat, qui considèrent que ces outils ne permettent pas de répondre pleinement aux nouvelles formes de désinformations en matière de changement climatique. En droit français, il n’existe aucun régime spécifique consacré à la désinformation climatique. La réponse ne peut s’appuyer que sur des instruments juridiques généraux, notamment sur la loi de 2018.

Pensez-vous qu’il faille renforcer les compétences et les pouvoirs de sanction de l’Arcom en la matière ? Faut-il plutôt créer un cadre plus contraignant pour les médias et les plateformes au niveau européen ? Comment éviter qu’un cadre plus contraint ne crée le risque d’une forme de sur-régulation ?

M. Gabriel Amard (LFI-NFP). Mesdames les rapporteures, alors que se tenait la COP30, le Parlement européen a voté le paquet législatif dit « Omnibus 1 », visant à éradiquer plusieurs mesures du Pacte vert de 2019, feuille de route pourtant déjà largement insuffisante pour vivre avec le dérèglement climatique. Difficile de parler d’ambition climatique et d’intégrité de l’information sur le changement climatique à l’échelle européenne lorsque Strasbourg et Bruxelles détricotent leurs obligations climatiques et affaiblissent l’obligation du devoir de vigilance !

C’est faire preuve de cécité en matière environnementale et de droits humains pour mieux continuer comme avant en toute impunité, au nom de la compétitivité ! À ce titre, comme ma collègue Nathalie Oziol, je regrette que l’on ne fasse pas le lien entre capitalisme et destruction de la biodiversité.

Lors des auditions, le Gouvernement et les administrations centrales, notamment la Direction générale de l’énergie et du climat, ont-ils pris des engagements pour défendre des politiques climatiques ambitieuses à l’échelle nationale et européenne, ou la poursuite de leurs politiques écocidaires semble-t-elle s’être confirmée ? Qu’en est-il de leur engagement vis-à-vis de l’initiative mondiale relative à l’intégrité de l’information sur le changement climatique ?

Mme Liliana Tanguy (EPR). Je souhaite revenir sur un aspect de votre rapport concernant les campagnes de désinformation climatiques, nouveau terrain d’intervention pour des acteurs étrangers ou nationaux cherchant à freiner l’adhésion citoyenne aux politiques de transition écologique. Quelle articulation peut-on faire entre le service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères (Viginum), en France, et des initiatives européennes telles que le bouclier démocratique européen ou l’Observatoire européen des médias numériques ? Comment peut-on assurer concrètement une protection efficace et coordonnée de l’information scientifique, notamment face aux tentatives d’ingérence et de manipulation de l’opinion ?

M. Benoît Biteau (EcoS). Concernant le rapport de Julie Laernoes, je ne peux qu’exprimer ma surprise lorsque notre collègue oppose encore compétitivité et lutte contre le dérèglement climatique. Ce qui menace véritablement la souveraineté alimentaire aujourd’hui, ce qui menace la productivité de la ferme Europe, c’est bien le dérèglement climatique ! On ne peut pas parler de compétitivité tant que cette question-là n’a pas été prise à bras-le-corps, tant que nos politiques publiques ne sont pas construites pour accompagner les agriculteurs dans une transition agro-écologique nécessaire pour conserver une souveraineté alimentaire, mais aussi pour préserver la compétitivité ! Il n’existe plus d’opposition aujourd’hui entre lutte contre le dérèglement climatique et compétitivité en agriculture.

Je souhaitais donc manifester mon étonnement quant à la position de vote exprimée par le groupe Horizons.

 

Mme Sophie Taillé-Polian, rapporteure. Pour vous répondre, les ONG comme Science Feedback et Data for good ont pris la main précisément parce que la puissance publique ne met pas en œuvre des mesures suffisantes.

En raison de l’absence de moyens indiquée par l’Arcom, cette institution est dans l’incapacité de mettre en œuvre des outils pour surveiller sur long terme, en tirer des enseignements et ensuite entrer dans le dialogue avec les éditeurs. L’Arcom n’agit que sur saisine et sur des séquences limitées.

Devant les capacités d’action limitées de l’Arcom, les ONG comblent une lacune. Par exemple, RSF a mis en place un outil sur la question du pluralisme qui vient de sortir aujourd’hui. Il en est de même sur la question environnementale avec l’ONG Quota Climat qui s’appuie sur des acteurs spécialisés disposant d’un réseau étoffé. Nous en sommes réduits à nous appuyer sur la base d’un travail citoyen et cela me pose un problème.

Pour répondre également à Mme Tanguy, rejoindre l’initiative de Belém doit aussi conduire à la mise en œuvre d’une feuille de route concrète avec des moyens qui correspondent.

Mme Julie Laernoes, rapporteure. Je voudrais répondre à notre collègue Gabriel Amard concernant la DGEC. Celle-ci n’a pas donné plus d’explications même s’il faut reconnaître que cela relève en l’occurrence de la ministre que nous n’avons pas pu auditionner puisqu’elle se trouvait à Belém. Au demeurant, l’objet de la proposition de résolution se situe plus sur le positionnement de la France au niveau européen que sur un strict plan national. Il y a des reculs qui sont notables. Le report de l’ETS 2 par exemple et le fait que le gouvernement n’ait pas engagé de dialogue avec la représentation nationale sur ce sujet. Nous partageons vos regrets sur les reculs français au niveau européen.


M. le Président Pieyre-Alexandre Anglade. Nous en venons maintenant à l’examen de la proposition de résolution européenne de Mme Julie Laernoes et plusieurs de ses collègues visant à réaffirmer l’ambition climatique de la France au niveau européen (n° 2002).

Amendement n° 1 de la rapporteure

Mme Julie Laernoes, rapporteure. Un certain nombre d’amendements constituent des actualisations à suites de la COP et des discussions au niveau européen.

Le premier amendement vise à prendre acte des conclusions de la COP30 et du fait qu’il n’a pas été possible d’acter un accord sur la sortie des énergies fossiles.

L’amendement n° 1 est adopté.

Amendement n° 2 de la rapporteure

Mme Julie Laernoes, rapporteure. Il s’agit d’actualiser le texte de la PPRE par rapport aux négociations européennes qui ont eu lieu depuis son dépôt.

L’amendement n° 2 est adopté.

Amendement n° 3 de la rapporteure

Mme Julie Laernoes, rapporteure. Cet amendement tient compte des dernières avancées dans les négociations et invite le gouvernement à porter une position ambitieuse lors du trilogue à venir.

L’amendement n° 3 est adopté.

Amendement n° 4 de la rapporteure

Mme Julie Laernoes, rapporteure. Cet amendement vise à tenir compte des remarques qui ont été formulées lors des auditions concernant l’adoption de la contribution déterminée au niveau national de l’Union sous la forme d’une fourchette. Cette fourchette constitue un recul vis-à-vis des objectifs climatiques. Le Haut conseil pour le climat nous a indiqué que seule la borne haute de la fourchette pourrait en réalité permettre d’atteindre la neutralité climatique en 2050.

L’amendement n° 4 est adopté.

Amendement n° 5 de la rapporteure

Mme Julie Laernoes, rapporteure. Cet amendement vise à éviter un nouvel affaissement de l’ambition climatique lors du prochain trilogue à venir.

L’amendement n° 5 est adopté.

Amendement n° 6 de la rapporteure

Mme Julie Laernoes, rapporteure. Je vous ai fait état des discussions sur l’élargissement de la place des crédits carbone internationaux dans l’objectif 2040. La question de l’intégrité et de la double comptabilité est ici posée. Par exemple, l’achat d’un crédit carbone au Brésil sur la forêt amazonienne qui donnerait lieu à l’évacuation des populations autochtones et ne respecterait pas les droits humains ne devrait pas être considéré comme intègre.

L’amendement n° 6 est adopté.

Amendement n° 7 de la rapporteure

Mme Julie Laernoes, rapporteure. Il s’agit d’un amendement visant à nous placer sur la borne haute de la fourchette de la contribution déterminée au niveau national pour 2035.

L’amendement n° 7 est adopté.

Amendement n° 8 de la rapporteure

Mme Julie Laernoes, rapporteure. L’amendement vise à inviter le gouvernement à remettre à la Commission européenne un plan social pour le climat dans le cadre de la mise en place de l’ETS 2. Alors qu’elle avait jusqu’à juin 2025 pour ce faire, la France est le seul État membre à ne pas avoir soumis de Plan social pour le climat, qui doit préciser l’usage qu’elle fera des crédits reçus au titre du Fonds social pour le climat. Même si l’entrée en application de l’ETS 2 a été reportée d’un an, le Fonds social pour le climat s’appliquera bien dès 2026 grâce au surplus des revenus de l’ETS 1. En ne présentant pas de plan, la France s’expose ainsi à perdre environ 1,2 Md€ qui lui serait versé entre 2026 et 2032, alors que ces crédits sont essentiels pour amortir le coût de la transition pour les plus démunis.

L’amendement n° 8 est adopté.

Amendement n° 9 de la rapporteure

Mme Julie Laernoes, rapporteure. Plusieurs pays climatosceptiques, notamment les États-Unis, refusent qu’il y ait des discussions sur le climat et l’environnement dans le cadre du G7. Au contraire, l’amendement appelle le gouvernement à saisir l’opportunité de la présidence française du G7 en 2026 pour que la France joue un rôle moteur dans la réaffirmation des ambitions climatiques.

L’amendement n° 9 est adopté.

Amendement n° 10 de la rapporteure

Mme Julie Laernoes, rapporteure. Cet amendement appelle à renforcer l’association du Parlement français à la définition des positions nationales au niveau européen. Il fait écho, Monsieur le président, aux travaux que nous avons pu mener ensemble sur l’avenir de l’Europe et la nécessité d’assurer la solidité des positions défendues par le gouvernement français dans les négociations européennes – nous l’avons vu récemment, la France a parfois opéré des revirements qui n’ont pas été compris. Le gouvernement pourra porter avec d’autant plus de force les positions françaises s’il peut s’appuyer sur l’approbation de son Parlement national. Cela conférerait également une place et une envergure accrues à la commission des affaires européennes.

M. le président Pieyre-Alexandre Anglade. Je soutiens pleinement cet amendement.

L’amendement n° 10 est adopté.

L’article unique ainsi modifié est adopté.

La proposition de résolution européenne ainsi modifiée est adoptée.

 

 

 


   PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE initiale

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88‑4 de la Constitution,

Vu l’article 151‑5 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Vu l’Accord de Paris adopté le 12 décembre 2015, afin de limiter l’élévation de la température à 1,5° C par rapport aux niveaux préindustriels,

Vu le règlement (UE) n° 2021/1119 établissant le cadre requis pour parvenir à la neutralité climatique et modifiant les règlements (CE) n° 401/2009 et (UE) n° 2018/1999 (« loi européenne sur le climat »), et en particulier le paragraphe 3 de son article 4,

Vu la proposition de la Commission européenne du 2 juillet 2025 établissant un objectif de réduction nette des émissions de gaz à effet de serre d’au moins 90 % d’ici 2040 par rapport à 1990,

Vu l’état des connaissances scientifiques sur le changement climatique recensées par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat,

Vu le franchissement, entre juillet 2023 et juin 2024, du seuil de limitation à 1,5° C de température moyenne mondiale au‑dessus des niveaux préindustriels, fixé par l’Accord de Paris,

Considérant que le changement climatique constitue l’une des plus graves menaces pour la civilisation humaine et la nature ;

Considérant l’accélération des catastrophes climatiques partout dans le monde ;

Considérant que l’Union européenne se réchauffe deux fois plus vite que la moyenne mondiale, exposant ses populations, son agriculture et ses infrastructures à des risques accrus ;

Considérant la signature par la France de l’Accord de Paris et le rôle de leader de la France en matière de changement climatique en tant qu’hôte de la COP21 ;

Considérant les alertes répétées des scientifiques du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, qui soulignent que le franchissement du seuil de limitation à 1,5° C à ce rythme d’action rend désormais hors d’atteinte l’objectif de contenir durablement le réchauffement climatique ;

Considérant l’avis consultation de la Cour internationale de justice du 23 juillet 2025 ;

Considérant les recommandations du Conseil scientifique consultatif européen sur le climat, appelant à une réduction des émissions domestiques de 90 à 95 % d’ici 2040 pour garantir la trajectoire de neutralité climatique en 2050 ;

Considérant la tenue de la conférence de Belém de 2025 sur les changements climatiques ;

Considérant les obligations internationales découlant de l’Accord de Paris et la nécessité pour l’Union européenne de présenter, à la COP30, une contribution déterminée au niveau nationale de l’Union européenne crédible et cohérente avec la trajectoire de neutralité climatique ;

Considérant la transition énergétique et climatique comme une opportunité industrielle et économique majeure, en matière d’innovation, de compétitivité et d’emplois ;

Considérant les reculs et les remises en cause des mesures essentielles du pacte vert et du paquet climat « Ajustement à l’objectif 55 », qui menacent la cohérence des engagements climatiques de l’Union européenne et compromettent l’atteinte des objectifs de 2030 et de la neutralité climatique en 2050 ;

Considérant les constats la Commission européenne sur les retards persistants de la France dans le développement des énergies renouvelables et l’insuffisance de certaines mesures prévues dans le Plan national intégré énergie‑climat ;

Considérant les arrêts du Conseil d’État, dont notamment ceux dits « Commune de Grande‑Synthe » ou « l’Affaire du Siècle » de 2021, qui obligent la France à respecter ses engagements climatiques et à mettre en œuvre des politiques conformes à ses trajectoires de réduction des émissions de gaz à effet de serre ;

Invite le Conseil européen à soutenir sans délai l’objectif de réduction nette d’au moins 90 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2040 par rapport à 1990 ;

Invite le Conseil européen à présenter une contribution déterminée au niveau national pour l’Union européenne post‑2030 pour la COP30, cohérente avec les objectifs de neutralité carbone en 2050 et de réduction d’au moins 90 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2040 par rapport à 1990 ;

Invite le Gouvernement de la République française :

– à soutenir sans réserve au niveau européen la révision de la loi européenne sur le climat pour inscrire l’objectif de réduction nette d’au moins 90 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2040 par rapport à 1990, tel que proposé par la Commission européenne, et à s’opposer à toute tentative d’affaiblissement de cet objectif ;

– à veiller à ce que les flexibilités prévues par la Commission européenne dans cette révision de la loi européenne sur le climat, notamment en matière de crédits carbone externes, ne viennent pas compromettre l’ambition réelle des réductions domestiques ;

– à contribuer activement à l’adoption par l’Union européenne d’une contribution déterminée au niveau européen pour 2035, cohérente et crédible avec l’objectif de réduction nette d’au moins 90 % des émissions de gaz à effet de serre en 2040, en vue de la COP30 ;

– à accroître la position et la crédibilité des engagements européens dans le cadre des négociations internationales ;

– à porter dans les négociations européennes la nécessité d’un mécanisme robuste de suivi, d’évaluation et de transparence sur l’accomplissement de la trajectoire climatique, incluant un rapport annuel de la Commission européenne au Parlement ;

– à affirmer et protéger sans faille, au sein des institutions européennes, les politiques sectorielles du pacte vert et du Paquet climat « Ajustement à l’objectif 55 » – en particulier la fin programmée de la vente des véhicules thermiques en 2035 – afin de garantir l’atteinte des objectifs climatiques de 2030 et la neutralité climatique en 2050 ;

– à renforcer sans délai la mise en œuvre nationale de la Stratégie nationale bas‑carbone et du Plan national intégré énergie‑climat, notamment par l’accélération du développement des énergies renouvelables, un programme massif et socialement juste de rénovation énergétique des bâtiments, la décarbonation des transports, incluant un soutien accru au ferroviaire, aux mobilités actives et à l’électrification ainsi que par la planification industrielle pour accompagner les secteurs stratégiques dans la transition.

 


   amendements examinés par la commission

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

26 NOVEMBRE 2025


proposition de résolution européenne visant à réaffirmer l’ambition climatique de la France au niveau européen (N° 2002)

 

AMENDEMENT

No 1

 

présenté par

Mme Julie LAERNOES, rapporteure

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ARTICLE UNIQUE

À l’alinéa 16, après les mots « changements climatiques », insérer les mots :

« et prenant acte de ses conclusions, qui n’ont pas permis d’aboutir à un accord clair sur la sortie des énergies fossiles ni sur un relèvement collectif des ambitions climatiques »

EXPOSÉ SOMMAIRE

 

Cet amendement vise à apporter une précision pour tenir compte des conclusions de la COP30 qui s’est tenue à Belém du 10 au 21 novembre et qui, de l’opinion générale des représentants français qui y ont pris part, s’est avérée décevante, ne parvenant qu’à un accord a minima sans feuille de route claire pour sortir des énergies fossiles du fait du blocage des pays producteurs de pétrole et en l’absence des États-Unis – du fait du retrait décidé par Donald Trump au début de son second mandat.

 

Cet amendement a été adopté.

 


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

26 NOVEMBRE 2025


proposition de résolution européenne visant à réaffirmer l’ambition climatique de la France au niveau européen (N° 2002)

 

AMENDEMENT

No 2

 

présenté par

Mme Julie LAERNOES, rapporteure

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ARTICLE UNIQUE

 

Après l’alinéa 21, insérer trois alinéas ainsi rédigés :

« Considérant les conclusions de la réunion du Conseil européen du 23 octobre 2025 ;

Considérant l’orientation générale du Conseil Environnement du 4 novembre 2025, tendant à s’accorder sur un objectif climatique intermédiaire pour 2040 ;

Considérant le vote par le Parlement européen, le 13 novembre 2025, sur l’orientation générale arrêtée par le Conseil Environnement du 4 novembre 2025 ; »

EXPOSÉ SOMMAIRE

 

Cet amendement vise à tenir compte des derniers développements intervenus dans la procédure législative ordinaire au niveau européen, qui n’avaient pas encore eu lieu lors de la rédaction du texte initial de la proposition de résolution européenne.

Pour rappel, l’objectif intermédiaire de 2040 prend la forme d’une révision du règlement 2021/1119 établissant le cadre requis pour parvenir à la neutralité climatique, aussi connu sous le nom de « loi européenne sur le climat ».

 

 

Cet amendement a été adopté.

 


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

26 NOVEMBRE 2025


proposition de résolution européenne visant à réaffirmer l’ambition climatique de la France au niveau européen (N° 2002)

 

AMENDEMENT

No 3

 

présenté par

Mme Julie LAERNOES, rapporteure

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ARTICLE UNIQUE

L’alinéa 22 est ainsi rédigé :

« Invite la Commission, le Conseil et le Parlement européen à aboutir à un accord ambitieux pour l’adoption rapide de l’objectif de réduction nette d’au moins 90 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2040 par rapport à 1990, lors de la session de négociation interinstitutionnelle européenne prévue le 9 décembre 2025 sur la révision de la loi européenne sur le climat ; »

EXPOSÉ SOMMAIRE

Cet amendement vise à tenir compte des derniers développements du calendrier législatif européen et appelle à un accord définitif dans les négociations interinstitutionnelles (trilogue) qui soit plus ambitieux que l’état actuel du texte tel que négocié à l’issue de la première lecture au Conseil et au Parlement européen.

 

 

Cet amendement a été adopté.

 


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

26 NOVEMBRE 2025


proposition de résolution européenne visant à réaffirmer l’ambition climatique de la France au niveau européen (N° 2002)

 

AMENDEMENT

No 4

 

présenté par

Mme Julie LAERNOES, rapporteure

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ARTICLE UNIQUE

L’alinéa 23 est ainsi rédigé :

« Invite le Conseil à réviser la contribution déterminée au niveau national pour l’Union européenne post‑2030, afin d’aboutir à un objectif pour 2035 d’au moins 72,5 % de réduction des émissions de gaz à effet de serre, cohérent avec les objectifs de neutralité carbone en 2050 et de réduction d’au moins 90 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2040 par rapport à 1990 ; »

EXPOSÉ SOMMAIRE

 

Cet amendement vise à tenir compte de l’adoption, par le Conseil d’un objectif 2035 en amont de la COP30 sous la forme d’une fourchette allant de 66,25 % à 72,5 % de réduction GES par rapport au niveau de 1990, dont seule la fourchette haute permettrait de rester sur la trajectoire pour 2040 et de viser la neutralité pour 2050. 

Cette fourchette est donc trop large et insatisfaisante, justifiant de ne retenir que le chiffre de 72,5 %.

 

 

Cet amendement a été adopté.

 


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

26 NOVEMBRE 2025


proposition de résolution européenne visant à réaffirmer l’ambition climatique de la France au niveau européen (N° 2002)

 

AMENDEMENT

No 5

 

présenté par

Mme Julie LAERNOES, rapporteure

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ARTICLE UNIQUE

L’alinéa 25 est ainsi rédigé :

« – à soutenir sans réserve au niveau européen la révision de la loi européenne sur le climat pour inscrire l’objectif de réduction nette d’au moins 90 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2040 par rapport à 1990, et à s’opposer à toute nouvelle tentative d’affaiblissement de cet objectif dans le cadre des négociations interinstitutionnelles entre la Commission, le Conseil et le Parlement européen, prévues le 9 décembre 2025 ; »

EXPOSÉ SOMMAIRE

Cet amendement vise à éviter tout nouvel affaiblissement de l’ambition climatique lors du trilogue à venir.

 

 

Cet amendement a été adopté.

 

 


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

26 NOVEMBRE 2025


proposition de résolution européenne visant à réaffirmer l’ambition climatique de la France au niveau européen (N° 2002)

 

AMENDEMENT

No 6

 

présenté par

Mme Julie LAERNOES, rapporteure

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ARTICLE UNIQUE

À l’alinéa 26, après les mots « réductions domestiques », insérer les mots : 

« et à garantir que tout mécanisme de crédits respecte les plus hauts standards d’intégrité environnementale et sociale »

EXPOSÉ SOMMAIRE


Compte tenu de la décision du Conseil de porter le taux de crédits carbones internationaux pouvant être achetés pour remplir l’objectif 2040 à 5 % (au lieu de 3% dans la proposition initiale de la Commission) et alors même que la France était opposée de longue date à l’introduction de ce mécanisme, cet amendement vise, à tout le moins, à assurer que ces crédits carbones internationaux respectent les plus hauts standards d’intégrité environnementale et sociétale, pour être sûr que les réductions de gaz à effet de serre qu’ils financent hors-UE soient effectives, n’empiètent pas sur les politiques climatiques des pays tiers et ne soient pas comptées deux fois.

 

 

Cet amendement a été adopté.

 

 


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

26 NOVEMBRE 2025


proposition de résolution européenne visant à réaffirmer l’ambition climatique de la France au niveau européen (N° 2002)

 

AMENDEMENT

No 7

 

présenté par

Mme Julie LAERNOES, rapporteure

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ARTICLE UNIQUE

L’alinéa 27 est ainsi rédigé :

« – à soutenir activement au niveau européen la révision de la contribution déterminée au niveau national de l’UE post-2030, afin d’adopter un objectif de réduction d’au moins 72,5 % en 2035 des émissions de gaz à effet de serre, cohérent et crédible avec l’objectif de réduction nette d’au moins 90 % des émissions de gaz à effet de serre en 2040 ; »

EXPOSÉ SOMMAIRE

 

Comme l’amendement n°4 de votre rapporteure, cet amendement vise à soutenir une révision de la contribution déterminée au niveau national (CDN) de l’Union européenne pour adopter un objectif fixe de 72,5 % au lieu de la fourchette sur laquelle s’est accordé le Conseil le 4 novembre dernier (66,25 % - 72,5 %). Un objectif fixe sur la base de la fourchette haute assurerait le suivi de la trajectoire climatique européenne et redonnerait à l’Union une position de force dans les négociations climatiques internationales.

 

 

Cet amendement a été adopté.


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

26 NOVEMBRE 2025


proposition de résolution européenne visant à réaffirmer l’ambition climatique de la France au niveau européen (N° 2002)

 

AMENDEMENT

No 8

 

présenté par

Mme Julie LAERNOES, rapporteure

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ARTICLE UNIQUE

Après l’alinéa 29, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« – à remettre sans délai à la Commission européenne un Plan social pour le climat, condition indispensable à l’accès aux financements du Fonds social pour le climat, et garantissant un accompagnement financier, social et territorial des ménages et des petites entreprises face à la mise en place du second système d’échange de quotas d’émission (SEQE-2), afin de prévenir toute hausse nette des inégalités ou de la précarité énergétique ; »

EXPOSÉ SOMMAIRE

Cet amendement invite le gouvernement français à remettre à la Commission le plan social pour le climat sans lequel les fonds du Fonds social pour le climat ne pourront pas être décaissés.

Pour rappel, le Fonds social pour le climat est pensé comme une manière d’assurer l’équité de la transition énergétique en parallèle de l’entrée en vigueur de l’ETS2. Il cible les ménages vulnérables, les petites entreprises et les usagers des transports. Une partie du fonds sera financée par la mise aux enchères des quotas provenant de l’ETS2 (jusqu’à 65 milliards d’euros) et 23 milliards supplémentaires seront couverts par les ressources nationales des États, pour un montant total du FSC estimé à 86,7 Mds.

 

 

Cet amendement a été adopté.

 


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

26 NOVEMBRE 2025


proposition de résolution européenne visant à réaffirmer l’ambition climatique de la France au niveau européen (N° 2002)

 

AMENDEMENT

No 9

 

présenté par

Mme Julie LAERNOES, rapporteure

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ARTICLE UNIQUE

Après l’alinéa 30, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« à jouer un rôle moteur dans le renforcement des engagements climatiques internationaux lors de la présidence française du G7 en 2026 ; »

EXPOSÉ SOMMAIRE

Cet amendement vise à saisir l’opportunité de la présidence française du G7 en 2026 pour que l’inscription des thématiques environnementales figure en bonne place à l’ordre du jour.

Une réunion des ministres de l’environnement pourrait par exemple se tenir après les mid-terms américains qui auront lieu en novembre 2026 et qui pourraient avoir une influence substantielle sur l’avenir de la position américaine en matière climatique.

 

Cet amendement a été adopté.

 

 


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

26 NOVEMBRE 2025


proposition de résolution européenne visant à réaffirmer l’ambition climatique de la France au niveau européen (N° 2002)

 

AMENDEMENT

No 10

 

présenté par

Mme Julie LAERNOES, rapporteure

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ARTICLE UNIQUE

Après l’alinéa 30, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« – à renforcer l’association du Parlement français à la définition des positions nationales en amont des négociations climatiques européennes, en instaurant un mécanisme régulier de consultation préalable et de retour d’information, afin de garantir la légitimité démocratique des orientations prises et de renforcer le poids des négociateurs français face à leurs homologues ; »

EXPOSÉ SOMMAIRE

Cet amendement vise à renforcer l’association du Parlement français dans le cadre des négociations européenne, sur le modèle de la Suède dont le gouvernement est mandaté, ce qui a deux effets bénéfiques.

D’une part, cela assure un meilleur contrôle de la représentation nationale sur des positions qui peuvent parfois être délicates et sensibles.

D’autre part, cela renforcer ces positions qui pourraient être tenues avec d’autant plus d’aplomb par nos négociateurs qu’elles auraient reçu au préalable l’onction parlementaire.

Les négociations de l’objectif 2040 nous ont donné un exemple regrettable du défaut de ce mécanisme. Le Parlement n’a pas été consulté par le gouvernement sur la question des crédits carbones internationaux. Si leur utilisation est bien prévue par l’article 6.2 de l’accord de Paris, la France était traditionnellement opposée à leur emploi dans le cadre de la politique climatique européenne, privilégiant une position ambitieuse de réduction nette des émissions sur le sol européen.

Le changement de position est intervenu dans le cadre du Conseil du 4 novembre, sans consultation aucune du Parlement et – à ce stade – sans qu’une audition de la ministre de l’environnement Monique Barbut ne soit à l’ordre du jour pour éclaircir ce point.

Cet amendement a été adopté.


   Proposition de résolution europÉenne adoptÉe par la commission

 

Article unique

 

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88‑4 de la Constitution,

Vu l’article 151‑5 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Vu l’Accord de Paris adopté le 12 décembre 2015, afin de limiter l’élévation de la température à 1,5 ° C par rapport aux niveaux préindustriels,

Vu le règlement (UE) n° 2021/1119 établissant le cadre requis pour parvenir à la neutralité climatique et modifiant les règlements (CE) n° 401/2009 et (UE) n° 2018/1999 (« loi européenne sur le climat »), et en particulier le paragraphe 3 de son article 4,

Vu la proposition de la Commission européenne du 2 juillet 2025 établissant un objectif de réduction nette des émissions de gaz à effet de serre d’au moins 90 % d’ici 2040 par rapport à 1990,

Vu l’état des connaissances scientifiques sur le changement climatique recensées par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat,

Vu le franchissement, entre juillet 2023 et juin 2024, du seuil de limitation à 1,5 ° C de température moyenne mondiale au‑dessus des niveaux préindustriels, fixé par l’Accord de Paris,

Considérant que le changement climatique constitue l’une des plus graves menaces pour la civilisation humaine et la nature ;

Considérant l’accélération des catastrophes climatiques partout dans le monde ; 

Considérant que l’Union européenne se réchauffe deux fois plus vite que la moyenne mondiale, exposant ses populations, son agriculture et ses infrastructures à des risques accrus ; 

Considérant la signature par la France de l’Accord de Paris et le rôle de leader de la France en matière de changement climatique en tant qu’hôte de la COP21 ;

Considérant les alertes répétées des scientifiques du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, qui soulignent que le franchissement du seuil de limitation à 1,5 ° C à ce rythme d’action rend désormais hors d’atteinte l’objectif de contenir durablement le réchauffement climatique ; 

Considérant l’avis consultation de la Cour internationale de justice du 23 juillet 2025 ; 

Considérant les recommandations du Conseil scientifique consultatif européen sur le climat, appelant à une réduction des émissions domestiques de 90 à 95 % d’ici 2040 pour garantir la trajectoire de neutralité climatique en 2050 ; 

Considérant la tenue de la conférence de Belém de 2025 sur les changements climatiques et prenant acte de ses conclusions, qui nont pas permis daboutir à un accord clair sur la sortie des énergies fossiles, ni sur un relèvement collectif des ambitions climatiques ;

Considérant les obligations internationales découlant de l’Accord de Paris et la nécessité pour l’Union européenne de présenter, à la COP30, une contribution déterminée au niveau nationale de l’Union européenne crédible et cohérente avec la trajectoire de neutralité climatique ;

Considérant la transition énergétique et climatique comme une opportunité industrielle et économique majeure, en matière d’innovation, de compétitivité et d’emplois ;

Considérant les reculs et les remises en cause des mesures essentielles du pacte vert et du paquet climat « Ajustement à l’objectif 55 », qui menacent la cohérence des engagements climatiques de l’Union européenne et compromettent l’atteinte des objectifs de 2030 et de la neutralité climatique en 2050 ; 

Considérant les constats la Commission européenne sur les retards persistants de la France dans le développement des énergies renouvelables et l’insuffisance de certaines mesures prévues dans le Plan national intégré énergie‑climat ;
Considérant les arrêts du Conseil d’État, dont notamment ceux dits « Commune de Grande‑Synthe » ou « l’Affaire du Siècle » de 2021, qui obligent la France à respecter ses engagements climatiques et à mettre en œuvre des politiques conformes à ses trajectoires de réduction des émissions de gaz à effet de serre ;

Considérant les conclusions du Conseil européen du 23 octobre 2025 ;

Considérant l’orientation générale du Conseil Environnement du 4 novembre 2025, tendant à s’accorder sur un objectif climatique intermédiaire pour 2040 ;

Considérant l’adoption par le Parlement européen, le 13 novembre 2025, de l’orientation générale du Conseil Environnement du 4 novembre 2025 ; 

Invite la Commission, le Conseil et le Parlement européen à aboutir à un accord ambitieux pour l’adoption rapide de l’objectif de réduction nette d’au moins 90 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2040 par rapport à 1990, lors de la session de négociation interinstitutionnelle européenne prévue le 9 décembre 2025 sur la révision de la loi européenne sur le climat ;

Invite le Conseil à réviser la contribution déterminée au niveau national pour l’Union européenne post‑2030, afin d’aboutir à un objectif pour 2035 d’au moins 72,5 % de réduction des émissions de gaz à effet de serre, cohérent avec les objectifs de neutralité carbone en 2050 et de réduction d’au moins 90 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2040 par rapport à 1990 ;

Invite le Gouvernement de la République française : 

– à soutenir sans réserve au niveau européen la révision de la loi européenne sur le climat pour inscrire l’objectif de réduction nette d’au moins 90 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2040 par rapport à 1990, et à s’opposer à toute nouvelle tentative d’affaiblissement de cet objectif dans le cadre des négociations interinstitutionnelles entre la Commission, le Conseil et le Parlement européen, prévues le 9 décembre 2025 ;
 – à veiller à ce que les flexibilités prévues par la Commission européenne dans cette révision de la loi européenne sur le climat, notamment en matière de crédits carbone externes, ne viennent pas compromettre l’ambition réelle des réductions domestiques et à garantir que tout mécanisme de crédits respecte les plus hauts standards d’intégrité environnementale et sociale ;

– à soutenir activement au niveau européen la révision de la contribution déterminée au niveau national de l’UE post-2030, afin d’adopter un objectif de réduction d’au moins 72,5 % en 2035 des émissions de gaz à effet de serre, cohérent et crédible avec l’objectif de réduction nette d’au moins 90 % des émissions de gaz à effet de serre en 2040 ;

– à accroître la position et la crédibilité des engagements européens dans le cadre des négociations internationales ;

– à porter dans les négociations européennes la nécessité d’un mécanisme robuste de suivi, d’évaluation et de transparence sur l’accomplissement de la trajectoire climatique, incluant un rapport annuel de la commission européenne au Parlement ;

– à remettre sans délai à la Commission européenne un Plan social pour le climat, condition indispensable à l’accès aux financements du Fonds social pour le climat, et garantissant un accompagnement financier, social et territorial des ménages et des petites entreprises face à la mise en place du second système d’échange de quotas d’émission (SEQE-2), afin de prévenir toute hausse nette des inégalités ou de la précarité énergétique ;

– à affirmer et protéger sans faille, au sein des institutions européennes, les politiques sectorielles du Pacte vert et du paquet climat « Ajustement à l’objectif 55 » – en particulier la fin programmée de la vente des véhicules thermiques en 2035 – afin de garantir l’atteinte des objectifs climatiques de 2030 et la neutralité climatique en 2050 ;

– à jouer un rôle moteur dans le renforcement des engagements climatiques internationaux lors de la présidence française du G7 en 2026 ;


– à renforcer l’association du Parlement français à la définition des positions nationales en amont des négociations climatiques européennes, en instaurant un mécanisme régulier de consultation préalable et de retour d’information, afin de garantir la légitimité démocratique des orientations prises et de renforcer le poids des négociateurs français face à leurs homologues ;

– à renforcer sans délai la mise en œuvre nationale de la Stratégie nationale bas‑carbone et du Plan national intégré énergie‑climat, notamment par l’accélération du développement des énergies renouvelables, un programme massif et socialement juste de rénovation énergétique des bâtiments, la décarbonation des transports, incluant un soutien accru au secteur ferroviaire, aux mobilités actives et à l’électrification ainsi que par la planification industrielle pour accompagner les secteurs stratégiques dans la transition.

 


   Liste des personnes auditionnées par la rapporteure

– M. Jean-François Soussana, président du Haut Conseil pour le Climat

– Mme Valérie Masson-Delmotte, climatologue, directrice de recherche au commissariat à l’énergie atomique

– M. Jacques Wang, conseiller climat à la Représentation française de l’Union européenne

– Mme Diane Simiu, directrice du climat, de l'efficacité énergétique et de l'air à la Direction générale de l’énergie et du climat

– Mme Cécile Hanoune, cheffe d’unité à la DG CLIMA

– M. Phuc-Vinh Nguyen, responsable du secteur énergie à l’Institut Jacques Delors

– M. Jérôme Boutang, directeur général du Citepa

– M. Olivier Guérin, représentant de Reclaim finance

– Mme Caroline François-Marsal, responsable Europe du Réseau action climat

– M. Stéphane Bourgeois, représentant de Negawatt

 

Contributions écrites :

– Réseau action climat 

– Reclaim Finance 

–  Negawatt


([1]) https://www.europarl.europa.eu/topics/fr/article/20180703STO07123/le-changement-climatique-en-europe-faits-et-chiffres .

([2])https://wedocs.unep.org/handle/20.500.11822/48854;jsessionid=AF247B2EE3AFED1D53A37672A535AD7A .

([3]) https://www.consilium.europa.eu/media/24561/145397.pdf .

([4]) https://www.ipcc.ch/site/assets/uploads/sites/2/2019/09/SR15_Summary_Volume_french.pdf .

([5]) https://eur-lex.europa.eu/resource.html?uri=cellar:b828d165-1c22-11ea-8c1f-01aa75ed71a1.0022.02/DOC_1&format=PDF .

([6]) https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:52020DC0562 .

([7]) Partie 1/2 :

https://eur-lex.europa.eu/resource.html?uri=cellar:749e04bb-f8c5-11ea-991b-01aa75ed71a1.0001.02/DOC_1&format=PDF .

Partie 2/2 :

https://eur-lex.europa.eu/resource.html?uri=cellar:749e04bb-f8c5-11ea-991b-01aa75ed71a1.0001.02/DOC_2&format=PDF .

([8]) https://eur-lex.europa.eu/resource.html?uri=cellar:b828d165-1c22-11ea-8c1f-01aa75ed71a1.0022.02/DOC_2&format=PDF .

([9]) https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32021R1119 .

([10]) Nous reprenons cette présentation de l’exposé des motifs de la résolution européenne du Sénat sur le Paquet « Fit for 55 », adoptée le 5 avril 2022.

([11]) https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32018R0842&from=fr .

([12]) https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/PDF/?uri=CELEX:52016SC0247 .

([13]) https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32023R0857 .

([14]) Directive 2003/87/CE du 13 octobre 2003.

([15]) Directive 2008/101/CE du 19 novembre 2008.

([16]) Directive 2023/959/CE du 10 mai 2023.

([17]) European Energy Exchange ‑ https://www.eex.com/en/markets/environmental-markets/eu-ets-auctions .

([18]) Le SEQE de l’UE réglemente les émissions du secteur de l’aviation depuis 2012. Légalement, le système couvre tous les vols sortants et tous les vols entrants en provenance et à destination de l’EEE. En 2013, l’UE a toutefois limité les obligations du SEQE en ce qui concerne le secteur de l’aviation aux vols intra-EEE afin de favoriser l’élaboration, par l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), d’un mécanisme de marché mondial visant à réduire les émissions du secteur de l’aviation. La limitation du champ d’application de la directive SEQE a été étendue à trois reprises depuis lors, et la révision de 2023 de la directive SEQE souligne qu’il devrait s’agir de la dernière dérogation temporaire au SEQE de l’UE.

([19]) Pour plus de détails, voir le rapport 2024 sur le marché carbone : https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:52024DC0538 .

([20]) https://www.citepa.org/formation/eu-ets-2-declaration-des-emissions-des-entites-reglementees/ .

([21]) La mise en place du SEQE‑2 sur la base d’un prix carbone de 60 € / tCO2 se traduirait par une hausse de +15 c€ / litre sur l’essence (+8 % vs 2023) et +17 c€ / litre sur le diesel (+10 % vs 2023) hors TVA avec un impact social et économique fort auprès des ménages et des entreprises.

([22]) IGN, « La forêt française continue à gagner du terrain mais subit lourdement les effets du changement climatique », 10 octobre 2024.

https://www.ign.fr/mag/la-foret-francaise-continue-gagner-du-terrain-mais-subit-lourdement-les-effets-du-changement-climatique .

([23]) Pour rappel, une fois capté à l’issue d’un processus industriel, le carbone peut être stocké dans le sous-sol (Carbon Capture and Storage) ou bien réutilisé (Carbon Capture and Use). Cette deuxième option permet notamment de produire des carburants synthétiques pour le maritime et l’aviation. Ces technologies nécessitent des réseaux de transport du carbone ainsi que des infrastructures de stockage.

 

Les technologies d’absorption (émissions négatives) envisagées dans la SNBC sont les suivantes :

-          les technologies de capture et de stockage du carbone d'origine biogénique, (Bioenergy with Carbon Capture and Storage – BECCS), qui proviennent du secteur industriel et permettent de capter des émissions puis de les stocker dans des couches géologiques profondes ;

-          les technologies de capture directe de CO2 dans l'air (Direct Air Capture ‑ DAC) et de stockage, qui retirent du CO2 de l'atmosphère pour le stocker également en couche géologique.

([24]) https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/PDF/?uri=CELEX:52024SC0063 .

([25]) https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:52024DC0063 .

([26]) « Further, it is essential to ensure fair competition with international partners, and to make effective use of all EU economic instruments to deter and counter unfair trade practices, decarbonise the energy system with a technologically neutral approach that includes all zero and low carbon energy solutions (including renewables, nuclear, energy efficiency, storage, CCS, CCU, carbon removals, geothermal and hydro-energy, sustainable bioenergy and all other current and future net-zero energy technologies) ».

([27]) Le texte adopté par le Parlement ajoute, en gras, plusieurs mentions quant aux crédits carbones internationaux :

« ensure that they are based on credible and transformative activities in partner countries whose climate targets and policies are compatible with the targets of the Paris Agreement and are subject to robust safeguards ensuring integrity, avoidance of double counting, additionality, permanence, transparent governance, strong monitoring, reporting and verification methodologies, as well as economic, social and environmental cobenefits and human rights safeguards, safeguards to prevent the funding of projects contrary to the strategic interests of the Union, and high ambition for the share of proceeds for adaptation, the share of mitigation benefits with concerned countries and overall mitigation of global emissions. When establishing the criteria the Commission shall consider setting stricter criteria than those laid down under Article 6.4 of the Paris Agreement]. »

([28]) les crédits carbones internationaux reposent sur l’article 6.4 de l’accord de Paris – https://unfccc.int/sites/default/files/french_paris_agreement.pdf .

([29]) https://unfccc.int/cop30/belem-political-package .

([30]) https://unfccc.int/sites/default/files/resource/cma2025_L24_adv.pdf .

([31]) https://www.contexte.com/medias/pdf/medias-documents/2025/11/cop30-roadmap-proposal-eu-fgpw.pdf .

([32]) https://www.contexte.com/medias/pdf/medias-documents/2025/11/letter-for-the-presidency-cop30-packagedocx.pdf .

([33]) https://publications.jrc.ec.europa.eu/repository/handle/JRC140372 .

([34]) https://eur-lex.europa.eu/resource.html?uri=cellar:61de6ed0-3b8d-11f0-8a44-01aa75ed71a1.0015.02/DOC_1&format=PDF .

([35]) https://op.europa.eu/en/publication-detail/-/publication/2d756cf5-c4f4-11f0-8da2-01aa75ed71a1/language-en .

([36]) https://commission.europa.eu/document/download/97168210-2a5c-4d1a-9ed8-6a063e011537_en?filename=COM_2025_274_1_EN_ACT_part1_v6.pdf .

([37]) https://commission.europa.eu/document/download/b7ea20cf-c9a3-4068-b333-fcaf9a2aef7c_en?filename=COM_2025_274_1_EN_annexe_autre_acte_part1_v2.pdf .

([38]) https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:02018R0841-20230511 .