N° 1337

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 18 octobre 2018

RAPPORT D’INFORMATION

FAIT

 

AU NOM DE LA DÉLÉGATION AUX DROITS DES FEMMES
ET À L’ÉGALITÉ DES CHANCES ENTRE LES HOMMES ET LES FEMMES (1),

sur les femmes et les forces armées,

PAR

Mme Bérangère Couillard et Mme Bénédicte Taurine,

Députées.

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(1) La composition de la Délégation figure au verso de la présente page.

 


La Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes est composée de : Mme Marie-Pierre Rixain, présidente ; Mme Marie‑Noëlle Battistel, Mme Valérie Boyer, M. Pierre Cabaré, Mme Fiona Lazaar, vice-présidents ; Mme Isabelle Florennes, Mme Sophie Panonacle, secrétaires ; Mme Emmanuelle Anthoine ; Mme Sophie Auconie ; M. Erwan Balanant ; Mme Valérie Beauvais ; Mme Huguette Bello ; Mme Céline Calvez ; M. Luc Carvounas ; Mme Annie Chapelier ; M. Guillaume Chiche ; Mme Bérangère Couillard ; Mme Virginie Duby-Muller ; Mme Pascale Fontenel-Personne ; Mme Laurence Gayte ; Mme Annie Genevard ; M. Guillaume Gouffier-Cha ; Mme Nadia Hai ; Mme Sonia Krimi ; M. Mustapha Laabid ; Mme Nicole Le Peih ; Mme Jacqueline Maquet ; Mme Cécile Muschotti ; M. Mickaël Nogal ; Mme Josy Poueyto ; Mme Isabelle Rauch ; Mme Laëtitia Romeiro Dias ; Mme Bénédicte Taurine ; Mme Laurence Trastour‑Isnart ; M. Stéphane Viry.

 

 

 

 


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SOMMAIRE

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Pages

Synthèse des propositions

Axe 1 : renforcer les outils de lutte contre les violences, harcèlements et discriminations à caractère sexiste et sexuel au sein des forces armées

Axe 2 : accentuer l’effort en matière de recrutement, de formation initiale et de formation continue

Axe 3 : mieux accompagner les militaires tout au long de leur carrière

Axe 4 : Améliorer la communication en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes dans les forces armées et dans la société

introduction

I. Les femmes restent minoritaires dans les forces armées françaises malgré des efforts récents

A. Un taux global de féminisation encore faible et très variable

1. Des situations différentes dans chaque force armée

2. Une situation variable selon les corps et les spécialités

3. Un taux de féminisation plus élevé que dans la plupart des armées

B. Une féminisation tardive et persistance de certains retards

1. Une ouverture tardive des armées aux femmes

2. Une féminisation progressivement étendue à tous les secteurs d’activité

3. La persistance de freins opérationnels

C. le déploiement d’une politique d’égalité entre les femmes et les hommes

1. Les politiques ministérielles volontaristes depuis 2012

2. Un réseau de référents égalité femmes/hommes dans les armées

D. Un effort dans la lutte et la prévention contre les discriminations et le harcèlement

1. La plateforme « Stop Discri » au sein de la gendarmerie et les actions de prévention

2. La cellule Thémis

II. Poursuivre les efforts et engager une politique volontariste d’égalité

A. Des formations initiales et continues encore trop peu ouvertes aux femmes

1. Le recrutement et les écoles de formation initiale

2. Un accompagnement insuffisant durant le déroulement de carrière

a. Un moindre accès à la formation continue pour les femmes militaires

b. Une promotion interne encore insuffisante malgré des efforts

c. Le cas particulier de l’école de guerre

B. L’accompagnement de carrière

1. Équilibre vie professionnelle/vie privée

2. Une meilleure prise en compte de la parentalité

3. Être attentif au respect et à l’égalité dans tous les temps de la vie militaire

C. prendre part à une dynamique générale en faveur de l’égalité femmes/hommes

1. Un réseau égalité à renforcer

2. Un effort global de communication et d’image des métiers militaires

3. Un effort interministériel à faire en amont

TRAVAUX DE LA DÉLÉGATION

annexe 1 : Liste des personnes auditionnÉes par lA dÉlÉgation et par les RAPPORTEUREs

I. Audition de LA MINISTRE DES ARMÉES du 19 septembre 2018

II. Personnes entendues par la Délégation

III. Personnes entendues par les rapporteures

ANNEXE 2 : DÉplacements effectuÉs par les rapporteures


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   Synthèse des propositions

Axe 1 : renforcer les outils de lutte contre les violences, harcèlements et discriminations à caractère sexiste et sexuel au sein des forces armées

Recommandation n° 1 : intégrer dans le bilan annuel de la cellule Thémis un suivi statistique des cas faisant l’objet d’un signalement au procureur de la République.

Recommandation n° 2 : décliner les actions de communication Thémis dans l’ensemble des forces armées en prenant en compte les spécificités de chaque structure.

Recommandation n° 3 : accentuer la stratégie de prévention des comportements inappropriés des militaires de sexe masculin à l’égard de leurs collègues de sexe féminin.

Axe 2 : accentuer l’effort en matière de recrutement, de formation initiale et de formation continue

Recommandation n° 4 : favoriser l’accès des femmes militaires à la formation continue.

Recommandation n° 5 : encourager et favoriser la promotion interne des femmes militaires en leur permettant notamment de mieux accéder à des postes d’encadrement.

Recommandation n° 6 : revoir les modalités d’accès à l’école de guerre et neutraliser systématiquement les périodes de congé maternité, de congé paternité et de congé parental dans les conditions d’inscription.

Axe 3 : mieux accompagner les militaires tout au long de leur carrière

Recommandation n° 7 : mener une réflexion sur les possibilités d’assouplissement organisationnel permettant de faciliter la vie des personnels tout en respectant les principes du statut militaire français.

Recommandation n° 8 : envisager que des réservistes remplacent les personnes en position de congé parental.

Recommandation n° 9 : développer les partenariats avec des crèches avec une large amplitude horaire d’ouverture et compatible avec les horaires atypiques des militaires.

Recommandation n° 10 : permettre à tous les personnels faisant usage de l’article 12 de la LPM de présenter toute épreuve interne aux forces armées visant à l’obtention d’une qualification professionnelle.

Axe 4 : Améliorer la communication en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes dans les forces armées et dans la société

Recommandation n° 11 : prévoir l’évaluation du déploiement du réseau de référents égalité femmes-hommes dans les armées, directions et services, les bases de défense et les centres ministériels de gestion.

Recommandation n° 12 : s’assurer de la présence de référents égalité/mixité dans l’ensemble des forces armées et structures composant le ministère des Armées et garantir la bonne coordination entre ces référents.

Recommandation n°13 : intégrer la promotion de l’égalité dans les chartes utilisées par chaque force armée.

Recommandation n° 14 : garantir la coordination la plus efficace possible entre le réseau de référents égalité et le travail de la cellule Thémis.

Recommandation n° 15: lancer une campagne montrant l’engagement des armées contre les discriminations.

Recommandation n° 16 : améliorer la communication du ministère des Armées pour garantir la mixité sur l’ensemble des supports visuels et pour renverser les stéréotypes sexistes associés à certains métiers militaires.

Recommandation n° 17 : garantir un accueil similaire et des informations non stéréotypées aux femmes et aux hommes dans les centres de recrutement des forces armées françaises et veiller à la présence de femmes militaires dans ces entités.

Recommandation n° 18 : développer les figures féminines pouvant servir de rôles modèles et permettre ainsi, par une féminisation de l’image de l’armée, aux jeunes femmes de se projeter dans des fonctions militaires, y compris au plus haut niveau de commandement.

 


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   introduction

 

Comme le relevait la ministre des Armées, « pour affronter des menaces plus nombreuses et plus variées, les armées ne peuvent aujourd’hui se permettre de se passer de la moitié des talents de l’humanité ». « Univers masculin par excellence » ([1]), le monde militaire s’est tardivement ouvert aux femmes avec une accélération nette à la fin des années 1990. Si des progrès ont été accomplis, beaucoup reste à faire pour dépasser des clichés historiquement ancrés.

La Délégation a souhaité disposer d’un état des lieux approfondi de la situation des femmes dans les différentes forces armées et a confié la présente mission d’information à vos Rapporteures en mai 2018.

Vos Rapporteures ont souhaité élargir le champ de leurs travaux à l’ensemble des personnels sous statut militaire. Il convient en effet de distinguer les forces armées, qui englobent toutes les unités comprenant des personnels militaires – et notamment la gendarmerie –, des armées au sens strict (terre, air, marine nationale). Par ailleurs, existent de nombreuses autres entités militaires, qu’il s’agisse par exemple de la direction générale à l’armement, du service de santé des armées ou du service du commissariat central des armées.

En termes de méthode, elles ont procédé à des auditions et les entités interrogées ont toutes transmis des éléments de réponse écrits, données précieuses pour l’élaboration du rapport. Elles se sont également rendues sur le terrain, au plus près des forces, auprès d’unités opérationnelles, d’unités spécialisées, d’unités de soutien ou dans des structures de formation initiale et continue. Il leur apparaissait en effet indispensable de donner à une approche générale objective une résonnance concrète, nourrie d’expériences personnelles.

Au‑delà d’un bilan statistique et d’une analyse des mesures engagées essentiellement au cours des dernières années, vos Rapporteures ont cherché à identifier les obstacles juridiques, opérationnels mais aussi culturels qui expliquent que les forces armées ne comprennent, en moyenne, que 15,5 % de femmes en 2017.

De façon générale, vos Rapporteures veulent saluer la détermination et le sens du devoir dont ont fait preuve tous les personnels qu’elles ont rencontré. Elles tiennent aussi à relever que les enjeux d’égalité et de mixité sont aujourd’hui bien identifiés à tous les niveaux de la hiérarchie militaire. S’il convient de poursuivre les efforts engagés et de leur donner une nouvelle ampleur, elles sont convaincues que la volonté politique et l’implication sans faille du commandement permettront d’agir rapidement et efficacement en la matière.

Elles formulent pour cela 18 recommandations qui s’articulent autour de quatre axes d’amélioration :

       renforcer les outils de lutte contre les violences, harcèlements et discriminations à caractère sexiste et sexuel au sein des forces armées, avec une attention forte aux dispositifs de prévention ;

       accentuer l’effort en matière de recrutement, de formation initiale et de formation continue, trois étapes de carrière qui restent encore trop souvent défavorables aux femmes ;

       mieux accompagner les militaires tout au long de leur carrière en prenant notamment mieux en compte les impératifs de la parentalité ;

       intégrer les actions des forces armées dans une politique plus générale pour favoriser l’égalité entre les femmes et les hommes. Il faut agir au sein du monde militaire mais ces avancées ne seront pleinement efficaces que si, en parallèle, nous parvenons à faire progresser notre société sur ces questions.

 


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I.   Les femmes restent minoritaires dans les forces armées françaises malgré des efforts récents

Le taux de féminisation des forces armées françaises apparaît encore globalement peu élevé même si cette situation varie fortement selon les entités et les postes. Cette faiblesse s’explique par une ouverture tardive des forces aux femmes et une levée progressive de tous les obstacles réglementaires mais qui n’empêchent pas la persistance de certains freins. Face à ce constat, les forces armées ont commencé à déployer une politique d’égalité entre les femmes et les hommes.

A.   Un taux global de féminisation encore faible et très variable

Au 30 septembre 2017, les armées françaises comptaient 31 412 femmes militaires, soit 15,5 % de leurs effectifs. Ce chiffre est en légère augmentation, puisqu’en 2007 les femmes représentaient 14,3 % des militaires. En revanche, le personnel civil des armées est plus féminisé : en 2017, les femmes représentaient environ 38,11 % des effectifs civils du ministère des Armées. La tendance est cependant inverse à celle constatée pour les militaires puisque les femmes civiles représentaient 39,5 % de ces effectifs civils en 2007. La situation apparaît cependant très différente selon la force armée, le corps ou les fonctions considérés.

1.   Des situations différentes dans chaque force armée

Comme le présente le graphique ci‑après, le taux de féminisation varie fortement selon l’entité considérée.

Taux de féminisation par force armée

(en % de l’effectif total)

Source : direction des ressources humaines du ministère des Armées.

Ces écarts sont conformes à ceux qui peuvent être constatés dans des domaines civils correspondants : le service de santé est féminisé à hauteur de 59,7 %, légèrement plus que dans l’ensemble des métiers médicaux et paramédicaux en France ([2]). À l’inverse, pour les métiers à dominante scientifique et technique, les taux sont proches de ceux constatés dans les principales écoles d’ingénieurs et dans le monde scientifique ([3]).

La dynamique est également très différente selon la force considérée, comme le détaille le graphique suivant.

Évolution du taux de féminisation par force armée

(en % de l’effectif total)

Source : direction des ressources humaines du ministère des Armées.

La proportion de femmes militaires a diminué de 0,7 point en dix ans dans l’armée de terre ; elle a en revanche a progressé de 2,1 points dans la marine et de 12,3 points au sein du service de santé des armées.

Le taux de féminisation des formations militaires de la sécurité civile ([4])  s’établit quant à lui à 12 % en 2017, hors unités médicales, sensiblement plus féminisées. Ce taux est globalement constant sur la décennie, même en léger retrait puisqu’il était de 14 % en 2010, avec des effectifs équivalents.

2.   Une situation variable selon les corps et les spécialités

Le graphique ci‑après présente le taux de féminisation des différents corps (militaires du rang, sous-officiers et officiers) au sein de chaque force armée.

Taux de féminisation par corps

(en % de l’effectif total)

Source : direction des ressources humaines du ministère des Armées.

Sauf dans l’armée de terre, le taux de féminisation décroît lorsque le grade augmente : l’armée de l’air est la plus représentative de ce phénomène : le taux de féminisation des militaires du rang y est plus de deux fois plus élevé que celui des officiers. Ce phénomène s’accentue pour les officiers généraux qui ne comptent que 7,2 % de femmes, tous services confondus. Cette situation peut s’expliquer par l’ouverture relativement tardive des écoles d’officiers aux femmes, la fin des quotas appliqués aux candidates dans les concours d’entrée date en effet de 1998 (cf. infra).

Cette répartition explique en partie que les femmes militaires aient en moyenne un salaire inférieur à celui des hommes. Comme le relève le général de corps d’armée Hervé Wattecamps, directeur des ressources humaines de l’armée de terre, « à grade, ancienneté et taux d’activité égaux, les salaires entre hommes et femmes sont rigoureusement identiques […]. La répartition démographique par grades induit [cependant] mécaniquement un salaire plus faible chez les femmes [… Toutefois], la tendance est logiquement à une réduction de cet écart du fait de la progression de la génération montante » ([5]). Ces écarts ont toutefois tendance à baisser, passant de 5,75 % en 2016 à 3 % aujourd’hui. Pour les officiers, la différence de rémunération est passée de 19,6 % en 2016 à 17 % aujourd’hui.

Les écarts selon les corps se combinent à des différences fortes selon les spécialités et les secteurs d’activité. Vos Rapporteures relèvent que les femmes restent encore plus souvent cantonnées à des fonctions support comme le montre le graphique ci‑après.

Taux de féminisation par domaine

Pour les emplois relevant de la compétence de l’état-major des armées

(en % de l’effectif total du domaine)

Source : état-major des armées.

Au sein des services relevant du chef d’état-major des armées, les métiers de soutien commun (ressources humaines, administrations financières, restauration, …) et de soutien spécialisé (santé, information et communication, essence,…) sont trois à quatre fois plus féminisés que les forces opérationnelles où le taux de féminisation reste inférieur à la moyenne globale des armées. Cette répartition se retrouve de façon plus générale puisque, toutes armées confondues, dans les forces opérationnelles, on ne compte que 13 % de femmes ; le taux atteint en revanche 71 % dans le soutien administratif.

Cependant, un rééquilibrage semble s’opérer : au sein de l’armée de l’air, le taux de féminisation dans des postes opérationnels a progressé de 30 % entre 2007 et 2017 alors que le taux de féminisation n’a progressé que 10 % dans l’ensemble de l’armée de l’air. Il convient toutefois de noter que ces progrès sont liés au fait que les femmes étaient presque totalement absentes des emplois opérationnels en 2007 ; toute affectation d’une femme militaire contribue donc à améliorer rapidement les taux.

Au sein des unités opérationnelles, on constate également des écarts importants selon les spécialités : les femmes sont souvent moins représentées dans les corps spécialisés. Elles ne représentent que 2 % des effectifs des unités de montage de la gendarmerie nationale, 1 % des effectifs dans l’infanterie de l’armée de terre, 6 % des fusiliers-commandos de l’armée de l’air, … Cette situation s’explique en partie par l’ouverture très tardive de certaines spécialités aux femmes. La gendarmerie mobile ne compte par exemple que 3,91 % de femmes, les femmes sous-officiers n’ayant pu rejoindre ces unités qu’à partir de février 2015. De même, ce n’est qu’en 2017 que quatre femmes ont pu embarquer dans un sous-marin nucléaire.

Vos Rapporteures se réjouissent de la levée de toutes les restrictions d’emploi. Pourtant, la division genrée du travail au sein des armées peut illustrer le maintien de certains freins à la féminisation. Il convient désormais de mieux faire connaître ces métiers et d’informer toutes les femmes militaires de ces possibilités. Cet effort de pédagogie doit se faire dès le recrutement et, pour la progression interne de carrière, s’accompagner d’outils permettant aux candidates de se préparer dans les meilleures conditions aux tests de sélection lorsque les spécialités les requièrent.

3.   Un taux de féminisation plus élevé que dans la plupart des armées

Si le taux de féminisation des armées françaises apparaît perfectible, il reste élevé en comparaison de celui de la plupart des autres armées. La France est aujourd’hui la quatrième armée la plus féminisée au monde, derrière Israël, les États-Unis et la Hongrie mais devant la plupart de ses partenaires internationaux, comme le montre le graphique ci-après.

Taux de féminisation des armées dans le monde (FIN 2014)

(en % des effectifs totaux)

Source : Rapport d’information n° 373 du Sénat de Mmes Corinne Bouchoux, Hélène Conway-Mouret, Brigitte Gonthier‑Maurin, Chantal Jouanno, Françoise Laborde et Vivette Lopez, fait au nom de la délégation aux droits des femmes, 16 mars 2015.

En outre la féminisation des armées françaises a été plutôt tardive, comme l’illustre le tableau ci-suivant.

OUVERTURE DES FORCES ARMÉES AUX FEMMES

Pays

Ouverture des forces armées aux femmes

Ouverture aux femmes de l’ensemble des postes au sein des forces armées

Allemagne

1975

2000

Belgique

1975

1981

Canada

1951

2000

Espagne

1988

1999

États-Unis

1976

2015

France

1972

2015

Hongrie

1996

1996

Pologne

1988

2003

Portugal

1992

2009

Source : “An Analysis of Annual National Reports to the NATO Committee on Gender Perspective from 1999-2013 : Policies, Recruitment, Retention & Operations”, United Nations Security Council Resolution 1325 on Women, Peace & Security Reload

Tous les pays n’ont p ;as levé l’ensemble des restrictions d’emploi des femmes militaires. Ainsi, même si des réflexions récentes ont été menées par le ministère de la défense pour diminuer ces restrictions, les femmes elles restent exclues d’un nombre significatif de postes au sein des armées au Royaume-Uni. Par exemple, en 2015, seules 70 % des fonctions seraient ouvertes aux femmes dans l’armée de terre britannique ([6]). Le Royaume‑Uni s’est toutefois fixé comme objectif d’atteindre un taux de féminisation de 15 % d’ici 2020.

La féminisation des armées semble être une préoccupation partagée parmi plusieurs de nos partenaires internationaux. En Allemagne, différentes actions sont menées par l’équipe « Égalité des chances » de la Bundeswehr, prenant la forme de monitoring, de formation du commandement, d’amélioration de la représentation des femmes dans l’armée,… L’Espagne tente d’accentuer ses politiques en faveur de la conciliation entre vie privée et vie professionnelle afin de redynamiser une féminisation stabilisée autour de 12 % depuis une dizaine d’années.

Une forte hétérogénéité dans la répartition des femmes au sein des différents services des armées se retrouve, comme en France, chez la plupart de nos partenaires internationaux. En Allemagne, par exemple, le taux de féminisation de l’armée de terre est de 9 %, tandis que celui du service de santé est de 44,3 %. Il en va de même au Royaume-Uni où les services de santé sont globalement féminisés à hauteur de 43 %.

En revanche, certaines armées, comme celles du Canada, connaissent une répartition des femmes plus homogène : la féminisation de l’armée de terre atteint 12 % quand le taux moyen pour toutes les armées canadiennes s’établit à 14 %.

Les armées françaises se distinguent en revanche par la proportion de femmes atteignant le grade d’officier général : parmi les forces armées des pays membres de l’OTAN, la féminisation à ces grades (ou équivalents) n’était en 2015 que de 0,6 % ([7]). En France, en 2018, les femmes représentent 7,2 % de l’effectif total des officiers généraux.

Vos Rapporteures sont convaincues que la féminisation des forces armées françaises, si elle est le résultat d’une nécessité opérationnelle, traduit également une véritable volonté politique, se retrouvant dans la féminisation des officiers généraux qui, si elle est amenée à se poursuivre dans les années à venir, est d’ores et déjà significativement plus élevée que dans le reste des pays de l’OTAN.

B.   Une féminisation tardive et persistance de certains retards

Les forces armées françaises ne se sont ouvertes aux femmes qu’à partir du XXe siècle, en raison notamment du besoin de main-d’œuvre lors des deux conflits mondiaux. Ce mouvement s’est intensifié à partir des années 1970, en parallèle du développement des courants féministes dans l’ensemble de la société, permettant de parvenir à une ouverture totale des métiers militaires aux femmes à la fin des années 1990. La professionnalisation des forces armées a permis de faire encore progresser cette féminisation, mais certains freins opérationnels limitent toutefois encore aujourd’hui l’accès des femmes à certaines spécialités.

1.   Une ouverture tardive des armées aux femmes

Au cours du XXe siècle, les conflits mondiaux conduisent les forces armées françaises à s’ouvrir aux femmes, tout en les cantonnant d’abord à des fonctions spécifiques. En 1914, le service de santé des armées recrute les premières femmes, notamment des infirmières de la Croix-Rouge. En 1916, est créé le corps des infirmières temporaires, engagées pour la durée de la guerre afin de répondre aux besoins médicaux sur les champs de bataille.

Au-delà du domaine médical, c’est avec la Seconde Guerre mondiale que les femmes intègrent les forces armées. En 1938, est instauré un engagement militaire féminin à titre auxiliaire, sous statut civil et pour des tâches de soutien uniquement ([8]).

La place des femmes s’étend avec la création de plusieurs corps ou bataillons, consacrant ainsi leur rôle au sein des forces armées. L’armée de l’air crée dès 1941 un corps des volontaires féminines ; l’armée de terre crée en 1944 le corps des auxiliaires féminines, tandis que la marine développe des sections féminines de la flotte. En 1946 est également créé le corps des convoyeuses de l’air, qui deviendront ensuite infirmières pilotes, parachutistes et secouristes de l’air.

En 1940, la création du corps féminin rattaché aux Forces françaises libres permet aux femmes d’accéder à des fonctions militaires sous statut militaire au sein d’un corps spécifique, c’est-à-dire non mixte. On estime que durant le conflit ce sont environ 1 160 femmes qui se sont engagées dans les Forces françaises libres. Les femmes ont également joué un rôle important dans la Résistance ; elles représentaient environ 15 % des effectifs et environ 15 % des déportés pour faits de résistance ([9]).

Le décret du 15 octobre 1951 ([10]) crée un statut interarmées pour le personnel des cadres militaires féminins. Il reconnaît aux femmes l’état militaire, assorti de l’obligation de servir en tout lieu et en tout temps, mais ce statut est distinct et différent de celui des corps militaires masculins, écartant de fait toute assimilation de grade : les militaires féminins ne servent que sous contrat.

Si la Seconde Guerre mondiale a été un élément déclencheur de l’intégration des femmes dans les forces armées françaises, cette évolution n’avait néanmoins rien de massif et les femmes n’étaient encore que quelques milliers ([11])  à s’engager en tant que militaires avec un statut limité et moins favorable que celui des hommes militaires. En réalité, après la guerre, comme le rappelle Michelle Perrot, « les femmes sont renvoyées, au nom même de leur civisme, à la sphère privée, proclamée la clef des reconstructions et des redressements nationaux » ([12]).

Il faudra attendre les années 1970 pour que l’égalité entre les femmes et les hommes au sein des forces armées progresse réellement. À la même époque, en parallèle du développement des courants féministes, émergent une parole et une reconnaissance du rôle militaire des femmes, en particulier dans la Résistance, mais également lors de la guerre d’Indochine.

En 1971 est créé le service national volontaire ouvert aux jeunes filles. Le volontariat service long leur est également ouvert, avec les mêmes possibilités d’emploi, de formation et d’avancement que pour les hommes. Elles sont toutefois orientées prioritairement vers des emplois administratifs, techniques ou médicaux ([13]).

La loi du 13 juillet 1972 ([14]) pose enfin les fondements d’une égalité de droit entre les femmes et les hommes militaires et institue les bases juridiques de la féminisation des forces armées françaises. Les femmes militaires ont désormais les mêmes droits et les mêmes devoirs que les hommes ; tous sont régis par le même statut général des militaires. Toutefois, d’importantes restrictions demeurent et une logique de statuts parallèles persiste : certains corps restent fermés aux femmes, notamment ceux des officiers des armes et des sous‑officiers de carrière ([15]) et la plupart des corps comportent des quotas maximaux limitant la place des femmes. Maintenant un recrutement et une carrière différents pour les hommes et les femmes militaires, le décret du 23 mars 1973 ([16]) ouvre toutefois aux femmes la possibilité d’accès à tous les grades jusqu’au premier grade d’officier général. À partir de 1975 et de la loi portant statut général des militaires ([17]), la distinction juridique entre les femmes et les hommes militaires s’estompe et il est mis fin par le décret du 18 février 1977 aux anciens corps féminins spécifiques ([18]).

L’ouverture aux femmes des écoles d’officiers s’est elle aussi faite de manière progressive : l’école polytechnique en 1970, l’école de l’air et l’école militaire de l’air en 1976, l’école spéciale militaire de Saint-Cyr (dans la limite de 5 % des recrutements annuels) en 1983 et l’école navale (avec un quota de 10 % par an) en 1992.

Permettant l’accès à davantage de postes et à un déroulé de carrière plus cohérent et plus diversifié, ces évolutions conduisent à une importante hausse du nombre de femmes militaires qui passent de 10 000 en 1972 à 18 000 à 1987.

2.   Une féminisation progressivement étendue à tous les secteurs d’activité

Au sein des différentes forces armées, la plupart des métiers et fonctions s’ouvrent progressivement aux femmes. En 1986, pour la première fois, une femme est pilote d’hélicoptère. En 1987, le premier officier féminin intègre l’école de guerre navale. En 1993, quatre femmes sont recrutées comme élèves officiers du personnel navigant avec pour spécialité pilote de transport. En 1994, une première femme devient chef de corps dans l’armée de l’air. Les restrictions pour la spécialité de pilote de chasse, non accessible aux femmes jusqu’alors, sont levées en 1995 par le chef d’état-major de l’armée de l’air et la première femme pilote de chasse est désignée en 1999. En 1998, pour la première fois, une femme atteint le garde de général dans l’armée de l’air.

Les années 1990 marquent une impulsion décisive dans la féminisation des forces armées qui s’accélère alors sensiblement.

La professionnalisation des armées, enclenchée par la suspension du service militaire en 1997 ([19]), conduit à un nécessaire élargissement du vivier de recrutement, favorisant ainsi l’accroissement du nombre de personnels féminins. En outre, la féminisation est favorisée par de nouveaux types de conflits élargissant le spectre des compétences utiles au sein des armées. Le décret du 16 février 1998 supprime les quotas de recrutement qui limitaient le pourcentage de femmes dans les différents corps d’armée ([20]). Dans une logique d’ouverture totale, l’exclusion des militaires féminins ne peut désormais se faire qu’à titre exceptionnel lorsque des performances physiques spécifiques sont exigées.

Alors que le taux de féminisation était de 7 % entre 1992 et 1998, il passe à 12,7 % à la fin de l’année 2003 : sur 350 000 militaires de carrière, sous contrat et volontaires, plus de 44 000 sont des femmes. La part des femmes dans les recrutements directs, encore supérieure, atteint 24 % en 2002 (officiers 26 %, sous‑officiers 26,7 %, militaires du rang 16,6 %, volontaires 31,4 %).

Les limitations quantitatives aux carrières militaires des femmes ont donc été totalement levées à la fin des années 1990 et seules quelques rares limitations qualitatives demeurent, en termes notamment d’accès aux métiers les plus physiques. Ces restrictions vont progressivement disparaître : en 2001, la filière des fusiliers‑commandos s’ouvre elle aussi aux femmes et en 2018 les premières femmes embarquent à bord d’un sous‑marin nucléaire lanceur d’engins. Excepté la Légion étrangère, il ne demeure aucune interdiction d’accès des femmes à l’ensemble des corps militaires : aucun poste opérationnel n’est aujourd’hui fermé aux femmes. Seuls les sous-marins nucléaires d’attaque, trop exigus pour y installer des quartiers mixtes, n’ont pas encore concrètement ouvert leurs portes aux femmes, mais cela sera fait dès la mise en place de la nouvelle génération de ces sous-marins, comme l’a d’ailleurs rappelé Mme Florence Parly, ministre des Armées, lors de son audition par la Délégation ([21]).

3.   La persistance de freins opérationnels

Comme cela a pu être évoqué au cours des auditions conduites par vos Rapporteures, certaines spécialités militaires nécessitent des capacités spécifiques, notamment au plan physique. La performance physique, notamment sur les terrains de combat, demeure en effet un critère de l’excellence militaire et elle est souvent une condition de l’efficacité de certaines opérations. Or, des différences physiologiques existent entre les femmes et les hommes.

Il existe des différences physiologiques entre les femmes et les hommes qui peuvent avoir des répercussions sur certaines aptitudes physiques précises, en particulier pour le port des charges lourdes. Toutefois, il faut considérer que les écarts de performance sont très variables et que des entraînements adaptés permettent de compenser des lacunes ([22]).

Statistiquement, ces plus faibles aptitudes physiques en moyenne peuvent mettre les femmes en situation défavorable, comparativement aux hommes, pour effectuer certaines tâches militaires telles que le transport de charges lourdes. Or, cette contrainte du port de charges lourdes, notamment pour le transport des équipements, est aujourd’hui encore inévitable pour de nombreux personnels militaires de terrain. Ces équipements, par exemple ceux de protection balistique, ne peuvent à ce stade pas voir leur poids proportionné à la masse des individus porteurs, mais dépendent bien d’impératifs techniques et stratégiques déterminés par chaque type de mission. Cet impératif a d’ailleurs été rappelé à vos Rapporteures lors de la visite du groupement blindé de la gendarmerie mobile, les personnels féminins indiquant ne pas pouvoir manipuler seules des éléments de protection balistique des véhicules. Les évolutions techniques remettent toutefois partiellement en cause cette situation. Le poids moyen des protections balistiques individuelles des gendarmes mobiles est ainsi récemment passé de 15 à 9 kilogrammes.

Le transport de charges lourdes concerne en tout état de cause un nombre limité de métiers et fonctions militaires, en particulier les unités combattantes de l’armée de terre. Cela participe sans doute à la moindre féminisation de ces unités, au sein desquelles on constate même actuellement une diminution de la part du personnel féminin. Le niveau particulièrement élevé des prérequis physiques explique également qu’aucune femme n’ait, à ce jour, intégré les commandos de la marine ni la force d’intervention du groupe d'intervention de la gendarmerie nationale (GIGN). Comme l’a relevé l’amiral Prazuck, chef d’état‑major de la marine et ancien commandant de commandos marine, lors de son audition, il est primordial que tous les personnels de ces unités soient soumis aux mêmes tests physiques, sans distinction de sexe. C’est la condition de l’homogénéité, de la cohésion et de l’employabilité opérationnelle du groupe.

Au-delà de cette problématique spécifique, la question des différences physiologiques se retrouve dans quelques rares autres cas, en particulier lorsque les femmes sont en état de grossesse. Dans ce cas, par exemple, les femmes pilotes de chasse ne peuvent pas voler, en raison de l’impact physique causé par la pression du vol à haute vitesse. Dans la marine, les femmes enceintes ne peuvent pas non plus embarquer, car les bateaux ne sont pas équipés pour les prendre en charge en cas de grossesse problématique. Pour des raisons de protection de la femme enceinte et d’efficacité opérationnelle, ces quelques restrictions ne semblent pas disproportionnées à vos Rapporteures.

Par ailleurs, certains freins peuvent provenir de la nécessité de mettre en place, dans les casernements militaires, permanents ou temporaires, des commodités spécifiques pour les femmes : sanitaires ou dortoirs par exemple. Lors de certaines opérations extérieures, ces considérations pratiques peuvent parfois poser de réelles difficultés opérationnelles.

Les freins opérationnels pouvant restreindre l’accès des femmes à certains métiers ou fonctions militaires semblent finalement assez peu nombreux aujourd’hui. S’ils sont encore importants dans les métiers les plus physiques, en particulier au sein des unités combattantes terrestres et des forces spéciales, mais ils n’ont qu’un impact très faible dans la majeure partie des emplois au sein des forces armées. La diversification et la technicisation des compétences utiles militairement aujourd’hui contribuent par ailleurs à réduire encore davantage ces freins opérationnels.

En outre, l’évolution des mentalités a également permis de lever les freins culturels qui pouvaient exister et faire obstacle à la présence des femmes dans certaines spécialités militaires perçues par le passé comme nécessairement masculines. Y compris dans les unités les plus spécialisées, comme le GIGN, les personnels sont aujourd’hui convaincus de la nécessité de l’ouverture à la mixité.

Ces freins ne doivent cependant pas être ignorés, ni banalisés. Certains se résorberont automatiquement en raison des progrès techniques et technologiques à venir. D’autres pourront néanmoins perdurer et il conviendra de demeurer vigilant à ce que, lorsqu’une tâche militaire implique une performance physique particulière pouvant engendrer une différence d’efficacité entre femmes et hommes, soient mis en œuvre des barèmes de sélection et des protocoles d’entraînement transparents et adaptés. Ce qui compte au premier plan c’est la capacité du personnel, qu’il soit féminin ou masculin, à réaliser les tâches liées au poste de combat occupé et l’impératif d’égalité ne saurait faire disparaître celui de l’efficacité opérationnelle.


C.   le déploiement d’une politique d’égalité entre les femmes et les hommes

Compte tenu de la persistance d’un taux de féminisation faible au sein des armées, le ministère a mis en place une politique volontariste d’égalité et déployé des outils de lutte contre les discriminations et le harcèlement.

1.   Les politiques ministérielles volontaristes depuis 2012

Le ministère de la Défense a engagé dès 2012 une politique en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes. À ce titre, il a appliqué le corpus juridique et les nouveaux outils créés pour faire progresser l’égalité entre les femmes et les hommes aux forces armées.

Ainsi, le ministère de la Défense s’est-il efforcé de respecter le dispositif instauré par la loi du 12 mars 2012 ([23]) qui instaure un principe de nominations équilibrées dans les emplois dirigeants et supérieurs de la fonction publique. Le taux de 20 % pour 2013 et 2014 ainsi que le taux de 30 % fixé pour 2015 ont été dépassés (32 % en 2015). En 2017, la loi Sauvadet qui prévoyait que 40 % des primo-nominations fussent réservées à des femmes a été appliquée : le taux de primo-nominations de poste de haut encadrement s’élève à 42 % de femmes pour le ministère des Armées en 2017.

Dès 2012, un haut fonctionnaire à l’égalité des droits femmes-hommes (HFED) a été nommé. En 2016, le directeur des ressources humaines du ministère de la Défense a été nommé HFED ([24]). Le nouveau positionnement du HFED au plus près de la conception et de la mise en œuvre des processus RH, ainsi que le renforcement de la fonction par la nomination d’un chargé de mission auprès du HFED traduisent la volonté du ministère d’approfondir son action.

Par ailleurs, la ministre des armées, Mme Florence Parly, a décidé de lancer « l’acte II de la mixité dans les armées » en dévoilant au printemps 2019 un plan mixité. La responsabilité en a été confiée à l’amirale de Mazieux qui devra, en lien avec les états-majors et les directions de service, faire des propositions très concrètes qui devront faire l’objet d’un suivi attentif.Depuis 2012 le ministère s’est attaché à présenter une feuille de route pour formaliser ses actions.

Le premier rapport de situation comparée (RSC) a été publié en juillet 2014 sur la base d’un accord ministériel signé par l’ensemble des organisations syndicales et, en 2015, le RSC a été étendu au personnel militaire ; il s’enrichit chaque année de nouveaux indicateurs qui permettent d’avoir une meilleure connaissance de la situation des agents. En 2017, le RSC présentait des indicateurs par exemple sur les congés de paternité.

En décembre 2015, le ministre a signé avec les représentants du personnel civil un protocole d’accord transposant au ministère de la Défense le protocole du 8 mars 2013 relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique.

Créé par arrêté du 9 septembre 2013, un observatoire de la parité a été mis en place en décembre 2013. Présidé par le ministre de la Défense, cet observatoire a pour mission de proposer des orientations à partir de l’exploitation de données statistiques ou d’études spécifiques et de coordonner les actions menées au sein du ministère. Il permet aux employeurs et aux gestionnaires de travailler conjointement et d’élaborer des dispositifs destinés à corriger les déséquilibres entre les parcours professionnels des femmes et des hommes. À cette fin, il constitue des groupes de réflexion sur des thèmes approuvés par le ministre.

Dans le cadre de l’observatoire de la parité, une consultation en ligne concernant la perception de l’égalité femmes-hommes a été conduite auprès du personnel du ministère en février 2018. Elle indique que 72 % des répondants perçoivent une certaine équité et que 83 % estiment que la direction du ministère est engagée pour l’égalité femmes-hommes ; 66 % des répondants considèrent que l’action prioritaire du ministère doit être la réduction des comportements sexistes puis l’amélioration de l’équilibre entre vie professionnelle et personnelle (50 %).

Un réseau associatif de femmes, civiles et militaires s’est constitué en 2016 ([25]). M. Jean‑Yves Le Drian, alors ministre, a souhaité que cette communauté active, lieu d’expression et de partage soit le reflet de la diversité des femmes de la défense et s’est engagé à soutenir les initiatives allant dans ce sens. Ce réseau est ouvert à toutes et à tous afin de bénéficier des atouts liés à la mixité (le réseau compte 10 % d’hommes). Le réseau souhaite établir des relations avec les autres réseaux de femmes et des échanges ont déjà permis de participer à des évènements organisés par le réseau « Femmes de l’Intérieur ». Les objectifs généraux sont : offrir plus de visibilité pour les femmes de la défense en interne et à l’extérieur du ministère ; apporter une aide concrète aux femmes de la défense (coaching, tutorat, mentorat pour permettre aux adhérentes de s’entraider en assurant un partage entre les plus expérimentées et les débutantes).

2.   Un réseau de référents égalité femmes/hommes dans les armées

Pour renforcer la dynamique ministérielle de l’égalité entre les femmes et les hommes, le ministère a annoncé dans sa feuille de route en 2016, la création d’un réseau de référents égalité femmes-hommes dans les armées, directions et services, les bases de défense et les centres ministériels de gestion. Ce réseau de correspondants constitue un maillage territorial. Chaque référent devient l’expert de son entité pour communiquer au HFED les évolutions relatives à l’égalité femmes-hommes dans sa sphère de compétence. L’idée est de fluidifier la circulation de l’information et de créer un lien de proximité avec les formations et organismes ministériels. Le référent est habilité et mandaté par chaque entité pour recueillir et fournir des données et des informations afin de conduire les missions que le ministre a confiées à l’observatoire de la parité.

● L’armée de terre a joué un rôle précurseur en la matière puisque dès 2002, un réseau de référents mixité a été mis en place au sein de chaque entité administrative par décision du chef d’état-major de l’armée de terre. Cette décision faisait suite à la diffusion d’un rapport interne du général Meunier sur la mixité au sein des armées. Ce réseau est piloté par l’inspection de l’armée de terre (IAT) qui dispose d’une cellule mixité au niveau central. Elle s’appuie sur un réseau de correspondants régionaux et locaux, placés au sein des différentes formations de l’armée de terre, ce qui permet d’informer au plus tôt les plus hautes instances de l’armée de terre des manquements constatés.

Le référent mixité a pour mission ([26]) :

– d’informer et de conseiller les femmes/hommes confrontés à des problèmes liés à la mixité ;

– d’appuyer le commandement lorsque des comportements inadaptés, des atteintes ou des agressions caractérisées lui ont été rapportés ;

– d’écouter et d’orienter le cas échéant la victime, en liaison avec l’assistante sociale, le président de catégorie ([27]), le médecin…

L’effort des référents mixité porte actuellement sur l’éducation des jeunes et la prévention des comportements discriminatoires.

Ce réseau a également pour but de conduire la mise en place d’un réseau de référents égalité professionnelle femmes/hommes dont la vocation est de conduire le plan ministériel pour l’égalité professionnelle.

● En 2009, la gendarmerie nationale a, quant à elle, mis en place des référents mixité dans les écoles de formation initiale. En 2012, dans le cadre du plan d’action égalité femmes/hommes du ministère de l’Intérieur, un référent égalité a été nommé dans chaque secteur dont la gendarmerie.

En 2016, la gendarmerie nationale s’est dotée d’un référent national « égalité et diversité » (RNED) placé auprès du directeur des personnels militaires (DPM). Le RNED est chargé de veiller à l’application de la politique d’égalité professionnelle et de diversité et de suivre l’ensemble des sujets relatifs à ces domaines et à la lutte contre les discriminations (plan d’action gendarmerie, actions menées par le ministère de l’intérieur et projets interministériels) ([28]) . Il coordonne les actions à conduire dans le cadre de la candidature au double label « égalité professionnelle & diversité ». Il est également chargé d’animer le réseau « égalité & diversité « de proximité (RED) de la direction générale de la gendarmerie nationale.

La gendarmerie dispose aujourd’hui d’un réseau de 175 référents locaux dits « référents égalité & diversité » de proximité (RED). Les RED ont pour mission de participer à la promotion de l’égalité professionnelle, de la diversité et de la lutte contre les discriminations en :

– réalisant des actions de sensibilisation au profit du personnel civil et militaire de la gendarmerie (lutte contre les stéréotypes, connaissance des dispositions légales, information sur les dispositifs mis en place par la gendarmerie en matière de lutte contre le harcèlement, les violences et les discriminations) ;

– appuyant le commandement dans la mise en œuvre de la politique d’égalité professionnelle et de diversité.

Lorsqu’une situation de harcèlement, violences ou discriminations est portée à sa connaissance par une victime présumée ou témoin, il doit :

– accueillir et informer le témoin ou la victime des dispositifs existants susceptibles de répondre à sa situation ;

– alerter obligatoirement le commandement (lanceur d’alerte) ;

– éclairer le commandement sur les dispositions légales ;

– intervenir dans toute unité concernée par une information collective sur la lutte contre les stéréotypes et les discriminations au titre des obligations légales de l’employeur en matière d’identification, de traitement et de prévention des discriminations.

Lorsqu’un RED a connaissance d’agissements discriminatoires, sexistes ou sexuels, il ne doit en aucun cas se substituer au commandement ou aux unités d’enquête tout particulièrement si la situation relève d’une infraction pénale.

● La direction générale de l’armement (DGA) a de son côté, nommé sa correspondante « labellisation diversité et égalité femmes-hommes » pour la DGA le 11 mai 2018. Il s’agit de Mme Sylvie Naud, attachée principale d’administration de l’État.

L’armée de l’air et la marine n’ont pas mis en place de réseau de référents égalité mais considèrent que les informations remontent à travers leur réseau.

D.   Un effort dans la lutte et la prévention contre les discriminations et le harcèlement

Ainsi que l’ont montré les différents travaux de la Délégation, il est primordial que la parole des victimes de discriminations ou de violences se libère et, surtout, soit entendue. Durant leurs travaux, vos Rapporteures ont été particulièrement attentives à cet enjeu.

La commission de la défense nationale et des forces armées a d’ailleurs décidé de constituer une mission d’information portant spécifiquement sur les dispositifs de lutte contre les discriminations au sein des forces armées ([29]) ; ses travaux ayant commencé en même temps que ceux de vos Rapporteures, il leur a semblé nécessaire de rappeler les axes directeurs des actions engagées en la matière mais sans prétendre traiter cette thématique de façon exhaustive.

1.   La plateforme « Stop Discri » au sein de la gendarmerie et les actions de prévention

● La plateforme de signalements « Stop Discri » a été déployé au sein de la gendarmerie nationale le 3 mars 2014. Elle permet à tout personnel de la gendarmerie, civil ou militaire, victime ou témoin de harcèlements, discrimination ou violence (physique, verbale, sexiste…) de signaler ces mêmes faits directement à l’inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN) pour assurer leur prise en compte et leur traitement.

Dirigée par un colonel de gendarmerie, la cellule d’écoute « Stop Discri » s’inscrit dans la démarche globale de prévention des risques psycho-sociaux, offrant à tout personnel militaire et civil de la gendarmerie en état de souffrance ou de détresse un moyen supplémentaire d’attirer l’attention sur sa situation.

L’évaluation des situations dénoncées est opérée de manière collégiale et réactive. Le traitement du signalement peut se limiter à un simple échange téléphonique, le personnel auteur du signalement ne recherchant dans ce cas de figure qu’un avis ou des conseils. Une stricte confidentialité est respectée.

La suite donnée peut revêtir la forme d’une enquête administrative prise en compte par l’inspection générale de la gendarmerie nationale ou confiée à un échelon local de la chaîne de commandement sous contrôle de l’IGGN. L’analyse des éléments d’enquête est effectuée en toute indépendance et vise à traiter la situation dénoncée de manière globale : matérialité des faits, responsabilités éventuelles, y compris de la chaîne hiérarchique lorsqu’elle aurait pu agir en amont.

L’activité de la cellule est peu à peu montée en puissance comme le montre le tableau suivant.

Répartition des signalements faits auprès de la cellule STOP DISCRI

 

Total signalements

STOP DISCRI

Nombre de signalements émis par des femmes

Pourcentage

2014

89

29

32,6%

2015

121

57

47%

2016

151

35

23%

2017

129

47

36,4%

Source : direction générale de la gendarmerie nationale.

● L’IGGN effectue des actions de prévention en intervenant dans les stages de préparation à l’emploi de tout niveau pour sensibiliser toutes les strates de la hiérarchie sur leur rôle en matière de lutte contre les discriminations, les harcèlements et les violences. Un séminaire rassemblant les correspondants de l’IGGN est organisé annuellement.

Des actions de formation sont également menées par le référent national égalité et diversité ainsi que par les référents locaux égalité et diversité dans les unités, écoles de formation initiale et continue, en métropole et outre-mer. Un court-métrage à vocation pédagogique est en cours de réalisation. Il sera diffusé au sein de la gendarmerie nationale et plus particulièrement dans les écoles de formation. Les actions de sensibilisation à la lutte contre les stéréotypes et les discriminations réalisées par les référents égalité diversité incluent une information sur le harcèlement et les agissements sexistes, sexuels et discriminatoires. L’ensemble de la chaîne de commandement est par ailleurs régulièrement sensibilisée par les autorités à l’importance de la prévention en la matière.

Un dépliant relatif à la lutte contre les discriminations a été conçu par la gendarmerie en 2016. Il a été transmis à tous les personnels avec le bulletin de salaire du mois de mai 2016. Il définit les notions de harcèlement, discriminations et violences, les sanctions encourues par les auteurs et énumère les bons réflexes et les points de contact pour effectuer un signalement ou rechercher des conseils.

La lutte contre toute forme de discriminations (qu’elle qu’en soit la forme) est inscrite dans les textes fondamentaux : code de la défense, charte du gendarme, code de déontologie. L’évaluation et la prise en compte des situations de harcèlement et de discriminations a été formalisée par une circulaire interne ([30]). Elle a été mise à jour en juillet 2017 pour intégrer deux nouvelles catégories (harcèlement moral au travail et harcèlement, discriminations et violences).

Par ailleurs, il existe un plan d’action égalité professionnelle en gendarmerie nationale depuis 2014 dont l’axe 3 porte sur la prévention et la lutte contre toutes les formes de discriminations.

2.   La cellule Thémis

Afin de combattre efficacement les cas de harcèlement, discrimination et violences sexuels (HDVS) le ministre de la Défense a lancé le 15 avril 2014 un plan d’action qui comprend quatre axes complémentaires : l’accompagnement des victimes, la prévention, la transparence et la clarification disciplinaire. Ce plan concerne les agents civils et militaires du ministère de la Défense.

Une des mesures phares de ce plan a été la création en avril 2014 d’une structure spécialisée, la cellule Thémis, rattachée au contrôle général des armées (CGA) dans le cadre de sa mission de sauvegarde du droit des personnes et placée sous l’autorité du ministre. Ce positionnement assure à la cellule Thémis une totale indépendance vis-à-vis des hiérarchies militaires et civiles. Elle est actuellement dirigée par le contrôleur général des armées, Christian Giner, assisté de trois rapporteurs dont une femme, chargés de suivre les différentes affaires.

● La cellule Thémis est spécifiquement dédiée à la lutte contre les harcèlements, discriminations et violences sexuels soit par la prise en charge des victimes présumées, soit par le suivi des réponses apportées par le commandement aux situations connues de HDVS (harcèlement, discrimination et violences sexuels). Elle est aussi devenue un interlocuteur privilégié du commandement qui n’hésite pas à la saisir lorsqu’il est confronté à de telles situations et qu’il souhaite disposer de conseils pour y apporter les réponses les plus adaptées.

La cellule est saisie à la suite des signalements opérés par les victimes et parfois par les témoins ou lanceurs d’alerte (téléphone, messagerie) mais elle peut également s’autosaisir à partir de messages dans le cadre de la procédure « Évènements graves », dont une catégorie correspond aux cas de HDVS.

L’article 40 du code de procédure pénale

En application de l’article 40 du code de procédure pénale, tout agent public qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit, est tenu d'en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs.

L’article L. 211-1 du code de justice militaire dispose que, pour des faits commis sur le territoire national, les « règles relatives à la mise en mouvement de l'action publique […] sont celles prévues par le code de procédure pénale ». L’article 40 du code de procédure pénale est donc pleinement applicable aux militaires pour des faits commis sur le territoire national.

 

 

 

Vos Rapporteures estiment qu’il serait utile de disposer d’un suivi statistique complémentaire sur les cas signalés à la cellule Thémis en identifiant chaque année ceux qui ont abouti à un signalement auprès du procureur de la République.

Recommandation n°1 : intégrer dans le bilan annuel de la cellule Thémis un suivi statistique des cas faisant l’objet d’un signalement au procureur de la République.

Dans son fonctionnement, la cellule oriente son action selon deux axes :

– premièrement, vers les victimes présumées en :

– deuxièmement, vers les hiérarchies militaires et civiles en :

Enfin, elle élabore des statistiques qui doivent permettre de mieux connaître la réalité des HDVS au sein du ministère de la Défense et de prendre les mesures adaptées pour les réduire.

La cellule Thémis accompagne la victime tout au long de la procédure judiciaire. À ce titre, elle explique les différentes phases de la procédure pénale, depuis la plainte jusqu’au procès. Elle informe la victime de la possibilité, d’obtenir la protection juridique de l’État. Elle veille également à la protection physique de l’intéressé(e) en s’assurant, en tant que de besoin, de l’éloignement de l’agresseur présumé (déplacement d’office, mutation).

La protection fonctionnelle

Tout agent public bénéficie de la protection fonctionnelle s’il est victime d’une infraction à l’occasion ou en raison de ses fonctions. L’administration doit le protéger, lui apporter une assistance juridique et réparer les préjudices qu’il a subis. La demande de protection doit être formulée par écrit auprès de l’administration employeur à la date des faits en cause.

L’article L. 4123‑10 du code de la défense dispose que ce dispositif est applicable aux militaires précisant qu’ils sont protégés « contre les atteintes volontaires à l’intégrité de la personne, les menaces, violences, harcèlements moral ou sexuel, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils peuvent être l’objet ».

La cellule s’appuie sur des réseaux et structures existants, internes et externes à la défense :

– le collège des inspecteurs généraux, les états-majors et les directions de services (cabinets, inspections, directions des ressources humaines, cellules d’aide aux blessés), la direction des affaires juridiques, la DICOD (délégation à l’information et à la communication de la défense), le réseau des psychologues d’« Écoute Défense », le réseau des assistants de service sociale, la sous-direction des pensions, etc. ;

– la MIPROF (mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains) et les associations agréées comme le Collectif féministe contre le viol (CFCV).

Le graphique suivant détaille la répartition les faits tels qu’ils sont décrits à la cellule Thémis par les victimes présumées pour l’année 2015.

Nature des signalements effectués auprès de la cellule Thémis en 2015

Source : cellule Thémis.

La grande majorité des signalements après de la cellule Thémis (près de 90 %) est le fait de femmes qui sont plutôt jeunes. Ils concernent davantage les militaires que les civils mais dans des proportions quasi identiques à leur répartition dans le ministère (77 % de militaires et 23 % de civils).

Une remontée plus fiable et harmonisée des données a montré également que si toutes les catégories de militaires sont concernées par les violences sexuelles, les militaires du rang, c’est-à-dire les premiers grades militaires, le sont plus particulièrement : ils représentent 80 % des victimes et 60 % des auteurs alors qu’ils ne représentent que 40 % des effectifs.

Lors de son audition, le chef de la cellule Thémis a indiqué qu’en 2014, on recense 73 cas sur une période de six mois, en 2015 on recense 86 cas, en 2016 et 2017 on recense entre 70 et 80 cas. Depuis 2014, 368 dossiers ont été traités (dont 10 % de viols), la part la plus importante relevant du harcèlement. Les atteintes à la vie privée augmentent, notamment en raison de la captation d’images.

Pour l’année 2018, la ministre des Armées auditionnée par la Délégation le 19 septembre 2018, a indiqué que la cellule Thémis avait ouvert 36 nouveaux dossiers ([31]).

● Depuis la décision prise par le ministre en 2016, la cellule Thémis participe directement à la prévention des faits de HDVS en réalisant des conférences sur la lutte contre les infractions sexuelles au sein du ministère de la défense. Elle concourt à la réalisation du plan de formation mis en œuvre en 2017‑2018 en s’appuyant notamment sur des formateurs-relais (160 personnes en 2018).

La montée en puissance de la cellule Thémis s’est accompagnée d’actions de communications :

– un onglet « Thémis » a été créé sur les pages d’accueil des sites interne et Internet du ministère pour garantir visibilité et accessibilité ;

– une affiche « stop au harcèlement sexuel » ainsi que les principaux documents relatifs à Thémis ont été mis en ligne sur ces sites ;

– une plaquette Thémis a été diffusée avec le bulletin de salaire ou solde du mois de mai 2015 à tous les agents du ministère, civils comme militaires ;

– les numéros d’avril et mai 2015 de la revue Armées d’aujourd’hui ont consacré trois pages à la cellule Thémis ;

– le chef de la cellule a participé à deux points de presse DICOD qui ont conduit à de nombreux articles dans la presse ;

– la réalisation d’un vade-mecum sur les bonnes pratiques en matière de lutte contre les violences.

Vos Rapporteures saluent ces initiatives et estiment qu’elles pourraient utilement être déclinées dans chaque entité de façon à prendre en compte leurs spécificités opérationnelles et répondre le plus efficacement possible à leurs problématiques propres. Elles relèvent par ailleurs que ces actions mériteraient d’être étendues à l’ensemble des structures à caractère militaire et notamment aux lycées militaires. Ces derniers n’entraient pas directement dans le champ de leur mission ; vos Rapporteures estiment néanmoins utile d’y déployer des actions de communication pour prévenir des comportements sexistes ou des actes de harcèlement voire de violences.

Recommandation n°2 : décliner les actions de communication Thémis dans l’ensemble des forces armées en prenant en compte les spécificités de chaque structure.

Pour le chef de la cellule Thémis, même si des progrès restent à faire, la cellule Thémis témoigne d’une prise de conscience réelle et d’une amélioration de l’approche et du traitement des cas de HDVS au sein des armées, les enquêtes étant menées le plus souvent sans complaisance. Il convient aussi de remarquer qu’avant même tout signalement à Thémis, la hiérarchie militaire qui est garante de l’excellence comportementale des militaires peut prendre des mesures disciplinaires.

Vos Rapporteures se félicitent de la mise en place et de la dynamique de cette cellule mais voudraient rappeler qu’il ne faut pas seulement « protéger » les effectifs féminins au sein des armées, mais aussi prévenir les comportements inappropriés des collègues masculins.

Recommandation n° 3 : accentuer la stratégie de prévention des comportements inappropriés des militaires de sexe masculin à l’égard de leurs collègues de sexe féminin.


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II.   Poursuivre les efforts et engager une politique volontariste d’égalité

Les forces armées ont peu à peu pris conscience des enjeux liés à la féminisation et, partant, ont commencé à déployer des politiques d’égalité. Cet effort doit aujourd’hui être amplifié et se traduire concrètement à toutes les étapes de la carrière. Il importe par ailleurs que les initiatives s’intègrent dans une démarche plus générale en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes.

A.   Des formations initiales et continues encore trop peu ouvertes aux femmes

La progressive féminisation des forces armées suppose un effort en matière de recrutement et formation initiale mais aussi de veiller à maintenir, voire d’encourager, la féminisation tout au long des carrières. La question de la fidélisation apparaît en effet un enjeu commun à tous les métiers militaires mais de façon encore plus conséquente pour les femmes, accentuant encore les besoins en matière de promotion interne et de formation continue.

1.   Le recrutement et les écoles de formation initiale

En matière de recrutement, toutes les personnes auditionnées par vos Rapporteures ont fait valoir que les forces armées rencontraient les mêmes problèmes d’attractivité que les métiers scientifiques où les femmes sont sous‑représentées. Lors de son audition par la Délégation, la directrice des ressources humaines du ministère des Armées, rappelait par ailleurs que les forces armées recrutent par « métier » et « selon des compétences », en ne s’interrogeant pas forcément si « on veut une femme ou un homme » ([32]). Par ailleurs, le recrutement se fait, pour les sous-officiers et les officiers, par concours et donc de façon anonyme.

S’il n’existe donc aucune discrimination a priori à l’encontre des femmes, on constate une situation très déséquilibrée selon les services et les métiers considérés. La directrice des ressources humaines considère donc indispensable d’améliorer l’information et de bien rappeler aux femmes que « seule leur volonté et leur compétence comptent ». Elle a fait état d’une expérimentation conduite par les armées autrichiennes qui a conduit à la réalisation et la diffusion d’objets publicitaires de couleur rose et spécifiquement destinés aux femmes. Elle s’est interrogée sur la pertinence d’une telle démarche et sur sa compatibilité avec la lutte contre les stéréotypes. Elle a marqué sa réserve envers toute action ciblée spécifiquement pour les femmes mais a estimé indispensable « d’être très clair dans la communication sur les métiers » (cf. infra) pour indiquer que « le sexe n’est nullement un élément discriminant » ([33]).

Cette orientation se retrouve dans la formation initiale. Suivant l’ouverture des forces armées, les écoles de formation initiale ont progressivement ouvert leurs concours aux femmes.

● L’exemple des écoles d’officiers est particulièrement révélateur d’une dynamique d’ensemble. Si les premières avancées ont eu lieu dans les années 1970 avec l’ouverture de l’école interarmées des personnels militaires féminins à Caen en 1971 ou avec l’entrée des huit premières femmes à l’école polytechnique en 1972, il faut attendre 1998 pour que disparaissent les quotas dans toutes les écoles. Jusqu’à cette date, le nombre de places ouvertes aux femmes était en effet contingenté et dans des volumes particulièrement réduits : si le concours de l’école de l’air a été ouvert aux femmes en 1976 et celui de l’école spéciale militaire de Saint‑Cyr en 1983, seul 5 % des places leur étaient ouvertes. L’école navale ne s’ouvre aux femmes qu’en 1992 avec un quota de 10 %.

Depuis la disparition des quotas pour les écoles d’officiers, des progrès ont été faits même si les taux de féminisation apparaissent encore à la fois globalement insuffisants et surtout très variables selon l’entité considérée. Les graphiques ci-après présentent les taux de féminisation au concours externe de quatre écoles d’officiers en détaillant le taux de féminisation des inscrits et des admis.

Taux de féminisation au concours externe d’entrée d’écoles d’officiers

(en % des inscrits ou des admis)

École spéciale militaire de Saint-Cyr

École navale

École de l’air

École des officiers de la gendarmerie nationale

En ligne continue : taux de féminisation des admis

En ligne pointillée : taux de féminisation des inscrits

Source : direction des ressources humaines du ministère des Armées.

Vos Rapporteures relèvent tout d’abord la très grande hétérogénéité entre les quatre écoles. L’école de l’air et l’école des officiers de la gendarmerie nationale (EOGN) semblent proportionnellement attirer plus les femmes avec un taux de féminisation aussi bien pour les inscrits que les admis nettement plus élevé qu’à l’école navale ou à l’école spéciale militaire de Saint‑Cyr. L’école de l’air et l’EOGN se distinguent aussi par des taux de féminisation à l’admission parfois meilleurs qu’à l’inscription alors que le taux de féminisation des admis est toujours nettement plus faible à Saint-Cyr et à l’école navale. À l’école de l’air comme à l’EOGN, les taux de féminisation au concours sont supérieurs – à l’exception des années 2006 à 2008 pour l’admission à l’école de l’air – au taux moyen de féminisation de la force considérée. En revanche, pour Saint‑Cyr et pour l’école navale, les taux de féminisation au concours d’entrée restent inférieurs au taux moyen de féminisation des deux armées.

Outre sa faiblesse, vos Rapporteures s’inquiètent également de la stagnation du taux de féminisation au concours d’entrée. Même dans des écoles où le taux de féminisation est historiquement haut comme les écoles du service de santé des armées ou celles du commissariat, on constate une relative stagnation des taux de féminisation. Les fortes variations constatées pour le commissariat s’expliquent en partie par la restructuration de cette entité qui est désormais interarmes. Comme pour les autres forces, on constate toujours que le taux de féminisation des admis est nettement inférieur au taux de féminisation des inscrits au concours.

Taux de féminisation aux concours d’entrée du service de santé des armées (médecin) et aux concours du commissariat des armées

(en % des inscrits ou des admis)

Source : direction des ressources humaines du ministère des Armées.

Il convient par ailleurs d’analyser ces données en valeur absolue. Comme le signalait la ministre des Armées, « les effectifs ont atteint 16 filles à l’école spéciale militaire de Saint-Cyr en 2018, 16 à l’école de l’air et 16 à l’école navale en 2017 », soit encore de « tout petits nombres » et cela constitue « un sujet de préoccupation qui renvoie à des considérations qui dépassent très largement les difficultés propres aux armées ». Sur la base de ce constat, il importe donc de « faire en sorte que le taux de féminisation à la sortie des grandes écoles progresse en faveur des femmes. C’est une condition nécessaire pour qu’à terme [les forces armées disposent de] davantage d’officiers généraux féminins » ([34]).

● La féminisation des écoles de sous-officiers augmente elle aussi de façon progressive. Le tableau suivant détaille par exemple l’évolution du nombre de femmes candidates et admises au concours de sous-officier de la gendarmerie.

Nombre de femmes inscrits et admises au concours
de sous-officier de la gendarmerie

 

 

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Externe

Candidates

3 750

8 210

8 579

6 937

9 279

9 389

Admissibles

1 293

1 632

1 315

1 432

2 570

3 537

Admises

288

404

318

390

723

984

Interne

Candidates

1 225

2 685

2 208

1 766

2 053

1 924

Admissibles

671

794

709

787

1 103

1 067

Admises

196

254

152

223

344

323

Source : direction générale de la gendarmerie nationale.

À l’exception de l’année 2014, on constate une hausse constante du nombre de candidates et d’admises ; en cinq ans, il y a presque 3,5 fois plus d’admises au concours externe et deux fois plus au concours interne.

Au 28 juin 2018, les femmes représentaient 20,5 % des élèves gendarmes et près de 30 % des personnels suivant la formation de gendarme adjoint volontaire, des taux supérieurs au taux moyen de féminisation de la gendarmerie, montrant bien une dynamique – certes lente mais constante – vers plus de féminisation.

Les statistiques d’accès aux écoles de sous-officiers de l’armée de l’air montrent la généralisation de cette tendance à la hausse du taux de féminisation dans les formations initiales.

Taux de féminisation de l’école de formation des sous-officiers de l’armée de l’air de Rochefort

(en % des effectifs)

 

2014

2015

2016

2017

2018 (1)

Formation militaire initiale

17,40 %

14,50 %

16,50 %

17,90 %

18,90 %

Formation initiale de spécialité « sol »

10,80 %

9,00 %

6,70 %

5,20 %

10,60 %

Formation initiale de spécialité « aéronautique »

6,80 %

5,40 %

7,50 %

9,90 %

9,60 %

Au 30 juin 2018

Source : état-major de l’armée de l’air.

Le taux de féminisation en formation militaire initiale des élèves sous‑officiers issus du civil est en légère augmentation sur la période, passant de 17,4 % à 18,9 %, exception faite de l’année 2015. Pour les spécialités de mécanique aéronautique, le taux de féminisation est en augmentation constante puisque celui-ci est passé de 6,8 % en 2014 à un peu moins de 10 % en 2018. L’école d’enseignement technique de l’armée de l’air de Saintes accueille pour sa part des élèves techniciens femmes depuis 1999. Sur les dix dernières années, le taux de féminisation est passé de 12 % à 17 % en 2017 et devrait atteindre 20 % en 2018.

2.   Un accompagnement insuffisant durant le déroulement de carrière

Le recrutement et la formation initiale prennent encore insuffisamment en compte l’enjeu de la féminisation ; cette situation se retrouve durant le déroulement des carrières, les femmes militaires accédant moins aux formations continues et bénéficiant moins des promotions internes.

a.   Un moindre accès à la formation continue pour les femmes militaires

Comme le montre le tableau ci-après, les femmes accèdent proportionnellement moins que les hommes aux formations continues.

Répartition des militaires ayant bénéficié
d’au moins une formation continue en 2017

 

Nombre de personnes ayant bénéficié d’au moins une formation continue

Effectifs totaux

% de personnes ayant suivi une formation continue

TERRE

13 233

125 950

10,51 %

femmes

378

11 553

3,27 %

hommes

12 855

114 397

11,24 %

MARINE

8 483

40 548

20,92 %

femmes

752

5 103

14,74 %

hommes

7 731

35 445

21,81 %

AIR

6 343

50 117

12,66%

femmes

840

9 243

9,09 %

hommes

5 503

40 874

13,46 %

SSA

5 952

12 212

48,74 %

femmes

3 132

4 566

68,59 %

hommes

2 820

7 646

36,88 %

Source : direction des ressources humaines du ministère des Armées.

Dans l’armée de terre, alors que les femmes représentent un peu plus de 10 % de l’ensemble des effectifs, elles représentent moins de 3 % des militaires ayant suivi une formation continue en 2017. Au total, 11 % des militaires masculins de l’armée de terre ont suivi une formation continue en 2017 ; ce taux est de moins de 3,3 % pour les femmes. L’écart est moins important pour l’armée de l’air, même s’il reste encore défavorable aux femmes. En 2017, 14,75 % des femmes militaires de l’armée de l’air ont suivi une formation continue, soit un taux légèrement supérieur au taux moyen de féminisation qui s’établit, pour la même année à 14, 4 %. Il reste en revanche inférieur au taux d’accès des hommes à cette formation continue qui s’établit à près de 22 %. La répartition n’est différente qu’au sein du service de santé des armées où les femmes accèdent proportionnellement plus que les hommes à la formation continue. Il convient par ailleurs de relever que plus le taux moyen d’accès à la formation continue est élevé, moins l’écart est défavorable aux femmes. Autrement dit, plus l’accès à la formation continue est difficile, plus il apparaît réservé prioritairement aux hommes.

Vos Rapporteures estiment pourtant indispensable d’assurer un égal accès des femmes et des hommes à la formation continue, préalable souvent indispensable à une évolution de carrière.

Recommandation n° 4 : favoriser l’accès des femmes militaires à la formation continue.

b.   Une promotion interne encore insuffisante malgré des efforts

Le besoin de formation est d’autant plus important que, comme le montre le graphique ci‑après, le taux de femmes admises dans les écoles d’officier par la voie interne n’évolue pas significativement sur la dernière décennie, avec même une baisse nette pendant deux ans du taux de féminisation des inscrits.

Taux de féminisation des candidats inscrits et admis aux concours internes d’officiers des armées

(en % des effectifs)

Statistiques couvrant le concours interne de l’armée de l’air, de l’armée de terre, de la marine, du SSA et du commissariat.

Source : direction des ressources humaines du ministère des Armées.

Plus que l’évolution, il est frappant de constater une certaine stagnation de ces taux et le fait que le taux moyen de féminisation des admis reste très inférieur au taux moyen de féminisation dans les armées. À l’exception de l’année 2006, les femmes représentent en effet moins de 12 % des effectifs admis. Pour mémoire, en 2017, le taux moyen de féminisation des armées atteignait 15,5 %.

Les femmes semblent de façon plus générale occuper, en proportion pour chaque corps, souvent les postes les moins élevés dans la hiérarchie. Le tableau suivant détaille par exemple le taux de féminisation de chaque grade de sous‑officier dans plusieurs forces armées ; il montre bien que ce taux baisse au fur et à mesure que l’on progresse dans la hiérarchie.

Taux de féminisation par grade en 2017

 

Effectifs

Taux de féminisation

général/amiral

49

7,8 %

colonel/capitaine de vaisseau

216

7,8 %

lieutenant-colonel/capitaine de frégate

390

7,2 %

commandant/capitaine de corvette

1 010

18,2 %

capitaine/lieutenant de vaisseau

1 766

16,5 %

lieutenant/enseigne de vaisseau de 1re classe

777

18,2 %

sous-lieutenant / enseigne de vaisseau de 2e classe

247

19,4 %

aspirant

439

27,4 %

élève officier

131

31,6 %

Périmètre : personnels militaires du ministère des Armées (hors gendarmerie).

Source : direction des ressources humaines du ministère des Armées.

Il convient toutefois de noter que cette situation devrait évoluer favorablement compte tenu du taux de féminisation plus important pour les élèves officiers, à condition que ces femmes ne quittent pas les forces armées avant d’accéder aux grades supérieurs.

Pour les sous-officiers, la situation varie beaucoup selon les forces considérées. Au sein de l’armée de terre, le taux de féminisation atteint 14,9 % pour le grade d’adjudant mais n’est que de 11,7 % pour le grade d’adjudant-chef et de 12,6 % pour le grade de major. Dans l’armée de l’air, les hommes et les femmes sont généralement promus au grade supérieur avec une ancienneté équivalente. Pour l’accès au grade d’adjudant-chef et de major, les femmes sont néanmoins promues, en moyenne, respectivement 9 mois et 10 mois plus tôt que les hommes.

En 2017 dans la gendarmerie on constate que le ratio entre les promouvables et les promues au grade terminal des sous-officiers (soit le grade de major) s’établit à 2,8 % alors qu’il est de 9,8 % pour les hommes. Pour les officiers, ces taux sont plus variables : en 2017, 25 % des femmes promouvables au grade de colonelle ont ainsi été promues alors que ce taux est de 11,6 % pour les hommes. Il convient toutefois de préciser ces données en valeur absolue : seules deux femmes ont été promues colonelles contre 71 hommes.

De façon plus globale, les femmes semblent accéder généralement à des postes à responsabilité plus jeunes que les hommes. Le tableau suivant récapitule pour chaque force armée l’âge moyen d’accès au commandement d’une unité élémentaire ou d’une formation administrative.

Âge moyen d’accÈs aux RESPONSABILITÉS en 2016

 

Commandant d’unité élémentaire (2)

Commandant de formation administrative (2)

 

Ensemble

Femmes

Ensemble

Femmes

Terre

36 ans 10 mois

34 ans

45 ans 6 mois

42 ans 11 mois

Marine

36 ans

34 ans

43 ans

39 ans

Air

42 ans 1 mois

40 ans 6 mois

47 ans

-

Gendarmerie (1)

42 ans 11 mois

36 ans 9 mois

46 ans 1 mois

46 ans 7 mois

Champ : officiers des forces armées en situation de commandement.

(1) Changement de logiciel, données non comparables à celles de l’année 2015.

(2) Niveaux 2 et 3 pour la marine.

Source : réponses des armées à un questionnaire du Haut Comité.

Il ressort de ces données qu’en général les femmes militaires effectuent une carrière plus courte que les hommes, bénéficient moins d’une formation continue, accèdent moins souvent aux postes d’officier par la voie des concours internes mais obtiennent un peu plus tôt – pour celles qui ont atteint le grade requis – un commandement d’unité élémentaire.

Vos Rapporteures considèrent indispensable de faire en matière de promotion interne le même effort qu’en ce qui concerne le recrutement initial, à savoir d’accompagner mieux les femmes militaires en leur permettant de préparer dans de bonnes conditions les concours ou de passer les qualifications qui leur permettront de progresser et d’accéder à de nouvelles responsabilités.

Recommandation n° 5 : encourager et favoriser la promotion interne des femmes militaires en leur permettant notamment de mieux accéder à des postes d’encadrement.

c.   Le cas particulier de l’école de guerre

L’école de guerre demeure un passage obligé pour les officiers aspirant à exercer les plus hautes responsabilités. L’accès à cette formation exigeante se fait par un concours dont le contenu et les modalités d’organisation apparaissent encore préjudiciables aux femmes.

Le graphique ci‑après présente le taux de féminisation au concours de l’école de guerre pour les armées.

Taux de fÉminisation au concours de l’École de guerre

(en % des inscrits ou des admis)

Périmètre : personnels militaires du ministère des Armées.

Source : direction des ressources humaines du ministère des Armées.

Si la dynamique est légèrement à la hausse, les taux restent particulièrement bas. La dynamique apparaît plus favorable au sein de la gendarmerie, comme le montre le tableau suivant.

Résultat du concours de l’école de guerre pour les officiÈres de gendarmerie

(en effectifs)

 

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Candidates

3

4

2

1

2

5

9

12

14

30

24

Admissibles

1

0

1

0

0

1

2

3

4

8

19

Admises

1

0

1

0

0

1

1

0

1

0

10

Source : direction générale de la gendarmerie nationale.

Les personnes auditionnées par vos Rapporteures ont relevé le caractère insuffisant de cette situation. Ils ont identifié plusieurs pistes de progrès :

       à l’instar de la gendarmerie, les périodes de maternité ou de congé parental doivent être « neutralisées » pour les femmes qui présentent le concours. Pour s’inscrire, il faut en effet respecter un double critère d’âge et de grade. La période visée étant particulièrement restrictive, elle pénalise directement les femmes du fait de leur grossesse par exemple. En neutralisant également les périodes de congé parental, voire le congé paternité, vos Rapporteures considèrent que les forces armées enverraient aussi un signal très positif qui pourrait inciter les hommes à demander davantage le bénéfice de cette disposition ;

       la préparation du concours demande un investissement particulièrement lourd et qui pèse très directement sur la vie privée. Il a été constaté que cet effort décourage plus fortement les femmes qui donnent en général plutôt la priorité à leur vie de famille. Les personnes auditionnées ont considéré qu’un étalement des épreuves dans le temps, voire leur remplacement par une sélection sur dossier, serait bénéfique à tous et éviterait de devoir faire des arbitrages entre vie privée et carrière professionnelle.

Recommandation n° 6 : revoir les modalités d’accès à l’école de guerre et neutraliser systématiquement les périodes de congé maternité, de congé paternité et de congé parental dans les conditions d’inscription.

B.   L’accompagnement de carrière

1.   Équilibre vie professionnelle/vie privée

Les militaires comme tous les autres actifs sont confrontés à la problématique de l’équilibre à trouver entre une vie professionnelle contraignante et une vie familiale et privée satisfaisante. Mais la mobilité par ordre est une spécificité et une caractéristique de l’état militaire et a des conséquences directes sur sa vie de famille.

Le chef d’état-major de la marine, l’amiral Prazuck rappelait lors de son audition par vos Rapporteures qu’être marin, c’est naviguer, c’est-à-dire « partir loin, longtemps, en moyenne pour 100 jours de navigation ». Cette contrainte est forte, surtout pour des populations jeunes. La moyenne d’âge sur les bateaux est de 30 ans (29 ans dans les sous-marins lanceurs d’engins).

La ministre des armées, Mme Florence Parly a également rappelé que le principe de disponibilité dans les armées ne permet pas l’instauration pour les personnels militaires d’un travail à temps partiel ([35]). En effet, aux termes de l’article L.4121-5 du code de la défense, la disponibilité des militaires doit être constante et absolue, conformément aux règles d’emploi. Les dispositions prévues ne laissent place à aucune ambiguïté : « les militaires peuvent être appelés à servir en tout temps et en tout lieu ».

En dépit de ces contraintes fortes et consciente de l’enjeu de fidélisation des personnels des armées, la ministre a assuré vouloir placer l’humain au centre de son action. C’est pourquoi elle a lancé en concertation avec la communauté militaire, le plan « Famille 2018-2022 », doté de 300 millions d’euros, pour accompagner les familles et améliorer les conditions de vie des militaires. L’un des axes majeurs concerne précisément la question de la mobilité.

Pour mieux vivre la mobilité, le plan prévoit d’alléger au maximum les contraintes du déménagement pour le militaire et sa famille en offrant à compter de 2019, une solution facilitée : pas d’avance de frais et exonérant le militaire de la recherche d’un déménageur et de l’essentiel des formalités administratives.

Mais l’idée principale est surtout de donner aux militaires une meilleure visibilité sur leur mobilité afin de pouvoir s’organiser en anticipant la mutation et la durée d’affectation. L’objectif est d’éditer les ordres de mutation cinq mois avant la date d’affectation pour la quasi-totalité des personnels et de suivre annuellement cette cible. Il s’agit aussi d’informer systématiquement le personnel sur la durée prévisible d’affectation. Comme l’a relevé la ministre cet objectif a été atteint à 80 % en 2018 : deux armées sur trois étant même au-delà de l’objectif affiché.

Par ailleurs, dans le cadre du dialogue de gestion, les gestionnaires poursuivront l’individualisation des parcours professionnels pour rendre plus soutenable dans la durée la bi-activité des couples et les militaires en situation de monoparentalité. Il s’agit aussi de permettre aux militaires séparés ayant un ou plusieurs enfants d’exercer leur droit de visite dans de meilleures conditions. Une adaptation éventuelle de la durée des commandements, un accompagnement pour un retour dans les forces ou en état-major après un congé ou une longue absence (congés maternité, congés parentaux successifs), une attention sur la mobilité avec un effort de mutation dans un même périmètre géographique qu’un ex-conjoint, sont des exemples d’aménagement déjà pratiqués au cas par cas.

Dans le cadre d’un dialogue avec le militaire, les gestionnaires adapteront dans la limite des besoins de l’institution, les postes tenus et les affectations pour tenir compte des situations particulières.

Tous les représentants des forces armées auditionnées par vos Rapporteures ont indiqué que ces problématiques étaient désormais prises en compte par les gestionnaires qui s’efforcent d’avoir une approche aussi individualisée que possible.

Lors de leurs déplacements auprès des forces armées, vos Rapporteures ont constaté que ces questions d’articulation entre vie personnelle et vie professionnelle restent un sujet souvent problématique pour les personnels. En raison d’un déséquilibre persistant dans le partage des tâches domestiques et familiales, qui se retrouve dans l’ensemble de la société, les femmes militaires ont régulièrement témoigné de ces difficultés et de l’impact qu’elles avaient sur leur vie professionnelle et finalement sur leur engagement militaire. À l’occasion d’une table ronde organisée à la base aérienne 123 d’Orléans, plusieurs personnels féminins, de tous grades et de tous métiers, ont rappelé qu’au cours de leurs carrières respectives le développement de leur vie familiale avait pu les conduire à faire des choix favorisant leur vie privée. Le plus souvent, il s’agissait de renoncer à certaines opérations extérieures ou autres missions, afin de passer davantage de temps auprès de leurs familles. Pour permettre une vie de famille tout en permettant aux femmes de mener une carrière aussi épanouie que celle des hommes, vos Rapporteures soulignent que les forces armées doivent aujourd’hui renforcer leurs efforts organisationnels. Plusieurs militaires ont par exemple proposé que l’armée assouplisse l’organisation du temps de travail, par exemple en développant le télétravail ou le temps partiel, afin de permettre à tous les militaires de mieux articuler leur vie personnelle et leur vie professionnelle. Évidemment l’impératif de cohésion et d’opérationnalité des unités demeure une priorité et de tels aménagements ne pourraient se faire que dans certaines situations. De telles évolutions pourraient toutefois être utiles pour faciliter la vie des femmes et des hommes militaires, mais aussi pour garantir à l’armée une meilleure fidélisation de ses personnels.

Recommandation n° 7 : mener une réflexion sur les possibilités d’assouplissement organisationnel permettant de faciliter la vie des personnels tout en respectant les principes du statut militaire français.

Il est également apparu lors des déplacements sur le terrain de vos Rapporteures que les grossesses des femmes militaires n’étaient pas toujours bien acceptées par leurs collègues. La féminisation des forces armées ne saurait se faire dans de bonnes conditions tant que demeure de tels préjugés qui sont en réalité bien souvent de fausses difficultés. En effet, lors d’un arrêt maladie ou d’une projection en opérations extérieures, les personnels ne sont pas remplacés non plus et chaque unité a l’habitude de se réorganiser temporairement pour gérer ces situations. Les congés maternité ne sont donc qu’une situation supplémentaire à prendre en compte, mais elles ne sont en rien une difficulté insurmontable pour l’efficacité des forces armées.

Au-delà même de ces difficultés qui se posent d’un point de vue organisationnel, sur le terrain vos Rapporteures ont également pu noter, à plusieurs reprises, que la maternité demeurait une question angoissante pour les jeunes femmes engagées dans les forces armées. La grossesse est en effet perçue comme un sujet d’inquiétude qui risquerait de nuire à leur carrière et à leurs équipes sur le terrain, car une femme enceinte n’est pas remplacée pendant son absence. Une véritable pression psychologique semble ainsi peser sur ces jeunes femmes qui ne doivent pas « tomber enceinte » au risque de mettre en péril le travail de leurs équipes ; la perspective d’une grossesse devient alors un élément culpabilisant qui ne permet pas à ces femmes de s’épanouir, d’égal à égal avec un homme, dans leur environnement professionnel. Vos Rapporteures soulignent fermement qu’une telle pression est intolérable et qu’il convient de remédier au plus vite à cette mauvaise appréhension des grossesses des personnels féminins au sein des forces armées.

Parallèlement à ces actions, le plan prévoit d’augmenter l’offre de logements dans les zones de tension locative forte en métropole (plus 660 logements d’ici 2020) et dans les outre- mer tout en facilitant l’accession à la propriété. Pour lutter contre le « célibat géographique » qui concerne par exemple 10 % des marins, l’amiral Prazuck a annoncé la mise en place d’une liaison aérienne Brest-Toulon.

Le plan a aussi pour ambition d’accompagner la mobilité des membres de la famille (conjoints, enfants). Concrètement, il est prévu d’étendre les prestations offertes par l’agence de reconversion de la défense et de bien informer les familles sur ces prestations. Afin notamment de limiter l’impact de la perte d’emploi et de l’inactivité non choisie d’un conjoint de militaire ou de civil du ministère des Armées à l’occasion d’un recrutement, d’une affectation ou d’une mobilité, Défense Mobilité étoffera les mesures actuellement contenues dans son offre de services. Cette mesure vise à développer l’accompagnement vers l’emploi des conjoints en leur faisant bénéficier si besoin, de prestations complémentaires à l’offre de Pôle emploi (bilans de compétences, orientations, validation des acquis de l’expérience, voire formations professionnelles). Il s’agit aussi de proposer systématiquement aux conjoints des postes d’agents non-titulaires ou de vacataires ouverts au sein de la fonction publique et en particulier au ministère des Armées.

Le plan vise également à négocier avec les autres ministères des dispositions permettant de mieux prendre en compte la mobilité subie par les conjoints de militaires employés dans la fonction publique (conclusion de protocoles avec les ministères). Par exemple, dans l’éducation nationale, Mme Parly a annoncé avoir travaillé avec M. Blanquer pour permettre un examen bienveillant des processus de mutation pour un conjoint de militaire.

Pour faciliter la scolarité des enfants, il sera demandé aux ministères de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, de prévoir la possibilité d’inscrire un enfant sur des formations post‑bac sur le lieu d’arrivée de la famille en cas de mutation l’année du baccalauréat.

Enfin, il est prévu de mieux communiquer sur les offres de scolarité offertes par le ministère des Armées et de rendre prioritaire l’accès des familles dans l’ensemble des hôpitaux de service social des armées.

2.   Une meilleure prise en compte de la parentalité

L’évaporation des talents dans les différentes armées constitue un enjeu majeur de gestion des ressources humaines comme ont pu le constater vos Rapporteures au cours des auditions. Ce phénomène semble encore plus marqué pour les femmes tandis que la maternité peut apparaître comme un frein à la progression des carrières des femmes.

Comme le montre le tableau ci-dessous pour l’armée de terre, les femmes militaires quittent en moyenne les armées plus tôt que les hommes, sauf lorsqu’il s’agit de carrières courtes comme celles des militaires du rang ou des volontaires. Pour les personnels de carrière, l’écart est significatif et surtout il est constant sur les cinq dernières années, voire s’aggrave. En effet, pour les femmes sous-officiers, l’âge moyen du départ s’établissait à 40 ans en 2014 contre 36 ans en 2017.

Âge moyen au départ des militaires de l’armée de terre en 2017

 

hommes

femmes

officiers

47

39

sous-officiers

40

36

militaires du rang

27

28

volontaires

21

25

Source : armée de terre.

● Dès lors, l’aide à la parentalité devient un objectif important pour les responsables tant administratifs que politiques.

Le congé parental

Conformément aux dispositions prévues par le code de la défense, le congé parental (majoritairement pris par les femmes) est attribué à la demande du militaire pour une durée maximale de 3 ans par période de 6 mois renouvelables. Le militaire est alors placé en position de non-activité. À l’expiration de son congé, le militaire est réintégré de plein droit, au besoin en surnombre dans son corps d’origine. Dans la gendarmerie nationale, la mise en place de la feuille de route du directeur général a instauré un entretien avant et au retour du congé parental ([36]), afin de disposer d’un suivi plus complet de la situation du militaire concerné.

Selon le bilan social des armées, en 2017, 244 personnels étaient en position de congé parental : 214 femmes et seulement 30 hommes.

Le congé parental reste un dispositif trop peu utilisé, notamment par les hommes. Pour éviter que la prise de ce congé ne pèse sur les unités et ainsi lever un frein, vos Rapporteures proposent de faciliter le recours à des réservistes pour compenser pareille absence.

Recommandation n°8 : envisager que des réservistes remplacent les personnes en position de congé parental.

Sur le plan ministériel, la sous-direction de l’action sociale (SDAS), consciente de la pénurie de berceaux, a consenti depuis 2010 un effort important en matière d’aide à la parentalité, présentée comme une priorité ministérielle. Cette politique volontariste s’est traduite par :

– la construction de crèches ;

– la réservation de berceaux auprès de prestataires externes ;

– la réservation de berceaux gérés par les sections interministérielles d’action sociale, ces dernières étant une déclinaison au niveau local du comité interministériel d’action sociale des administrations de l’État (CIAS) ;

– les prestations de garde d’enfants : dans la gendarmerie par exemple, une prestation de garde d’enfants en horaires atypiques et une prestation d’aide à l’accueil périscolaire des enfants de 6 à 11 ans ;

– le CESU (chèque emploi service qui permet de simplifier l’embauche d’un salarié à domicile), garde d’enfants de 0 à 6 ans, prestations financières compensant les frais de garde d’enfants pendant le temps de travail.

Le plan famille initié par la ministre des Armées entend poursuivre cette politique menée en matière de garde d’enfants. Une augmentation de 20 % du nombre de crèches pour atteindre la cible de 2 556 berceaux disponibles en 2022 est prévue. Cet objectif sera atteint d’une part en augmentant les réservations de berceaux auprès de prestataires externes (mairies, conseils généraux, associations), et d’autre part grâce à l’ouverture de nouvelles crèches.

Si vos Rapporteures se réjouissent de cet effort, elles relèvent que trop peu de ces structures peuvent prendre en compte les horaires atypiques de militaire. Cette spécificité devrait pourtant faire l’objet d’une attention particulière.

Recommandation n° 9 : développer les partenariats avec des crèches avec une large amplitude horaire d’ouverture et compatible avec les horaires atypiques des militaires.

● Par ailleurs conformément aux objectifs visés dans le plan Famille, d’autres pistes sont explorées comme le recours aux assistantes maternelles, offrant une plus grande souplesse. Il s’agit d’encourager l’exercice de cette activité professionnelle par la mise en place d’un accompagnement des conjoints des ressortissants civils et militaires, avec l’appui de l’agence de reconversion de la défense et l’octroi d’une aide financière, à condition que les conjoints assurent la garde d’au moins un enfant de la communauté militaire (cette aide pourrait être majorée en cas de prise en charge d’un enfant en horaires atypiques).

Le plan Famille a aussi pour ambition de faciliter la vie du conjoint supportant seul les charges de la famille pendant une absence opérationnelle en élargissant et en simplifiant l’offre de prestations sociales et facilitant les démarches administratives. Il est également prévu de faciliter l’information et l’intégration des familles par la création de cellules d’information et d’accompagnement des familles complétées par un portail e-social regroupant les offres de soutien et d’accompagnement social.

● En outre, un dispositif particulier a été mis en place dans le cadre de la loi de programmation militaire (LPM) 2019-2025 qui va permettre, lors d’un congé pris pour convenance personnelle afin d’élever un enfant de moins de huit ans, d’exercer une activité de réserviste. En effet, si le congé parental ne peut excéder trois ans, le congé pour convenances personnelles pour élever un enfant de moins de huit ans est accordé pour une durée de deux ans renouvelable dans la limite totale de dix ans ([37]). Il peut donc durer dix ans. Il n’ouvre ni droit à l’avancement, ni droit à la retraite, ce qui est particulièrement désincitatif. Au bout de dix ans, revenir dans son grade précédent s’avère particulièrement difficile. De plus, l’armée est privée pendant dix ans des compétences des personnels qu’elle a formés.

Ainsi, selon l’étude d’impact du projet de loi, « pour les militaires bénéficiaires d’un congé parental de longue durée, le dispositif actuel présente […] deux difficultés. D’une part, lorsque les intéressés disposent de compétences rares, leur absence durable est préjudiciable au service. D’autre part, les bénéficiaires du congé ont tendance à ne pas réintégrer ensuite les armées, souvent faute d’avoir pu maintenir les compétences » ([38]).

Le dispositif instauré par l’article 12 de la loi de programmation militaire ([39]) permet donc d’offrir une situation de longue durée (10 ans) pendant laquelle les obligations de disponibilités statutaires ne s’appliquent pas sans pour autant priver l’armée des compétences militaires des personnels qu’elle a formés et sans priver ceux-ci de tout droit à l’avancement et à la retraite comme l’a rappelé la ministre des Armées.

Article 12 de la loi de programmation militaire 2019-2025

I.-La quatrième partie du code de la défense est ainsi modifiée :

1° L’article L. 4138-16 est complété par un alinéa ainsi rédigé : « Le militaire placé en congé pour convenances personnelles pour élever un enfant de moins de huit ans peut demander à souscrire un engagement à servir dans la réserve opérationnelle. Dans cette position, il recouvre ses droits à l’avancement au prorata du nombre de jours d’activité accomplis sous contrat d’engagement à servir dans la réserve. Les conditions d’application du présent alinéa sont déterminées par décret en Conseil d’État. » ;

2° Le 1° du III de l’article L. 4211-1 est complété par un c ainsi rédigé :

« c) Les militaires mentionnés au dernier alinéa de l’article L. 4138-16, dans les conditions fixées par décret en Conseil d’État ; »

3° L’article L. 4221-6 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour les militaires mentionnés au dernier alinéa de l’article L. 4138-16, la durée des activités à accomplir au titre de l’engagement dans la réserve opérationnelle est déterminée dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. »

II.-Le i de l’article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les services accomplis dans la réserve opérationnelle durant un congé pour convenances personnelles pour élever un enfant de moins huit ans sont pris en compte. »

Vos Rapporteures jugent cette mesure bienvenue. Il conviendra d’en assurer un suivi très attentif, notamment pour en vérifier l’efficacité. Elles estiment par ailleurs qu’il faut permettre aux personnels de passer toutes les qualifications professionnelles durant cette période. Aujourd’hui la poursuite de carrière est toujours liée à l’obtention de certificats ou de qualifications. Ne peuvent présenter les épreuves en vue de leur obtention que les personnels en activité, ce qui écarte de fait toutes les personnes en congé parental.

Recommandation n° 10 : permettre à tous les personnels faisant usage de l’article 12 de la LPM de présenter toute épreuve interne aux forces armées visant à l’obtention d’une qualification professionnelle.

● Enfin, le plan d’action en faveur de l’égalité pour 2018 annoncé par la ministre en mars 2018, prévoit la promotion du télétravail pour le personnel civil, ce qui devrait contribuer à faciliter la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale.

Il sera intéressant de suivre dans l’avenir si ces nouveaux dispositifs atteignent les objectifs fixés en matière d’égalité entre les femmes et les hommes au sein des armées.

3.   Être attentif au respect et à l’égalité dans tous les temps de la vie militaire

Compte tenu de leurs missions, les militaires sont amenés à se côtoyer durant les heures de service mais aussi de façon plus large hors du service. Pour nombre d’entre eux, les missions opérationnelles imposent une vie en casernement. Les règles applicables à la vie en collectivité sont strictes et ont été déclinées dans l’ensemble des forces.

Comme l’a rappelé la ministre lors de son audition, les « consignes comportementales sont des consignes générales. Elles ne sont pas simplement applicables pendant les activités opérationnelles. Il est donc important que le commandement exerce son rôle dans tous les temps de la vie du militaire, qu’il soit en activité ou qu’il soit en garnison » ([40]).

Vos Rapporteures estiment primordial que tous les échelons de commandement veillent avec la plus grande attention à l’application de ces règles comportementales. Lors de leurs auditions et lors de leurs déplacements, elles ont pu mesurer que le commandement avait pris la pleine mesure de ces enjeux. Cette exigence d’exemplarité et de respect de chaque individu doit désormais être connue et partagée par tous.

C.   prendre part à une dynamique générale en faveur de l’égalité femmes/hommes

Le développement d’un réseau de référents sur ces questions d’égalité et de mixité ainsi que de formations sur ces enjeux et les problématiques de violences et harcèlement sexistes et sexuels sont des étapes aujourd’hui nécessaires et qui demandent une bonne articulation entre l’ensemble des composantes des forces armées. Si la place des femmes au sein des forces armées françaises est aujourd’hui reconnue et la mixité considérée comme un véritable avantage, des efforts restent toutefois à fournir pour permettre l’égalité des femmes et des hommes tout au long de leur carrière militaire. Le développement d’un réseau de référents sur ces questions d’égalité et de mixité ainsi que de formations sur ces enjeux et les problématiques de violences et harcèlement sexistes et sexuels sont des étapes aujourd’hui nécessaires et qui demandent une bonne articulation entre l’ensemble des composantes des forces armées. Par ailleurs, l’image des armées souffre encore aujourd’hui de stéréotypes sexistes qui pourraient utilement être combattus par une communication ciblée et, de manière plus large, par la lutte contre les stéréotypes dès le plus jeune âge.

1.   Un réseau égalité à renforcer

Le ministère des Armées a annoncé, dans sa feuille de route en 2016, la création d’un réseau de référents égalité femmes-hommes dans les armées, directions et services, les bases de défense et les centres ministériels de gestion (cf. supra).

Les référents, mixité et/ou égalité, sont des relais d’information qui ont en charge le suivi des indicateurs et permettent de faire remonter les difficultés ou les sujets liés aux enjeux d’égalité entre les femmes et les hommes. Ils garantissent aussi que la volonté ministérielle pour une politique publique en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes trouve des traductions concrètes et devienne une réalité dans l’ensemble du monde de la défense. Ils peuvent également jouer le rôle d’animateurs de réseau, de pilotes d’actions de formation, de conseillers auprès des services ou encore d’organisateurs d’événements de sensibilisation par exemple.

Compte tenu de l’engagement du ministère des Armées, vos Rapporteures considèrent qu’il serait opportun de prévoir aujourd’hui une évaluation du déploiement de ce dispositif.

Recommandation n° 11 : prévoir l’évaluation du déploiement du réseau de référents égalité femmes-hommes dans les armées, directions et services, les bases de défense et les centres ministériels de gestion.

Vos Rapporteures soulignent l’importance cruciale du déploiement d’un tel réseau de référents sur les problématiques d’égalité et de mixité. Les métiers militaires et la double structure civile et militaire du ministère des Armées se caractérisent par de nombreuses spécificités qui doivent intégrer pleinement ces enjeux tout en conservant l’efficacité opérationnelle nécessaire à l’accomplissement de leurs missions. Pour tenir compte au mieux de ces spécificités, la création d’un réseau dédié et spécialisé garantirait la poursuite de ce double objectif. De plus, ce réseau doit se déployer dans l’ensemble des composantes du ministère des Armées, aussi bien les forces armées que les différentes structures de soutien opérationnel. Il est donc nécessaire de prévoir des chefs de file par structure et de garantir les échanges entre ceux-ci afin de permettre le partage de bonnes pratiques, d’une part, et la vigilance coordonnée sur les problématiques pouvant se développer, d’autre part.

L’articulation interarmées de ces réseaux de référents égalité/mixité est une condition nécessaire de leur efficacité. Les différentes armées, les services de soutien ainsi que les services ministériels doivent être en permanence en relation pour échanger sur ces sujets et partager les informations. Cette coopération est d’autant plus importante que chacune des spécialités militaires n’est pas féminisée dans les mêmes proportions et n’est pas confrontée aux mêmes difficultés opérationnelles. Le retour d’expérience et le partage des bonnes pratiques permettraient aux référents de mieux calibrer leurs actions et faciliteraient également l’utilisation supports d’information communs. Le fonctionnement intégré de ces réseaux garantirait ainsi la diffusion dans tous les corps de l’armée de la volonté politique et institutionnelle de faire progresser l’égalité entre les femmes et les hommes.

Recommandation n° 12 : s’assurer de la présence de référents égalité/mixité dans l’ensemble des forces armées et structures composant le ministère des Armées et garantir la bonne coordination entre ces référents.

Recommandation n°13 : intégrer la promotion de l’égalité dans les chartes utilisées par chaque force armée.

Par ailleurs, selon vos Rapporteures, il semblerait pertinent d’assurer la bonne articulation de ce réseau avec la cellule Thémis, STOP DISCRI au sein de la gendarmerie et les formations d’ores et déjà dispensées sur les problématiques de lutte contre le harcèlement, les discriminations et les violences à caractère sexiste ou sexuel.

Lors de leurs déplacements sur le terrain auprès des forces armées, vos Rapporteures ont pu constater que la cellule Thémis semble aujourd’hui bien connue des personnels militaires. Il semble toutefois que la diffusion des informations concernant cette cellule et les problématiques de harcèlement et de violences sexistes et sexuelles soient prioritairement dirigées vers les femmes qui sont les principales victimes de ce type d’agissements. Toutefois, vos Rapporteures considèrent que l’enjeu des formations et de l’information sur ces problématiques est également de sensibiliser tous les personnels, y compris les personnels masculins qui sont les principaux auteurs de ce type d’agissements. Tous les personnels, féminins et masculins, doivent impérativement être formés et informés sur ces problématiques.

Le développement de réseaux de référents égalité permettra de multiplier les actions de formation et d’accentuer la diffusion d’informations sur les sujets d’égalité et de mixité, ainsi que sur les problématiques de violences sexistes ou sexuelles. Dans cet objectif, il semble pertinent de mettre à disposition des référents qui seront implantés dans chaque armée les supports d’information déjà produits et utilisés par Thémis, qui sont actuellement en cours de mise à jour comme cela a été dit par contrôleur général des armées Christian Giner, responsable de cette cellule.

Recommandation n° 14 : garantir la coordination la plus efficace possible entre le réseau de référents égalité et le travail de la cellule Thémis.

2.   Un effort global de communication et d’image des métiers militaires

Le monde militaire et certains métiers, notamment dans les unités combattantes, sont souvent caractérisés par une image très masculine, voire viriliste. L’héritage historique est ici très lourd dans la mesure où les femmes ont longtemps été exclues de la quasi-totalité des métiers militaires qui ont donc construit leurs codes et leurs usages sur un modèle strictement masculin. Les métiers des armes ont longtemps été présentés et sont parfois aujourd’hui encore vus comme des métiers virils destinés à des hommes physiquement puissants.

Lors de son audition par la Délégation, la directrice des ressources humaines du ministère des Armées, Mme Anne Sophie Avé, a d’ailleurs souligné la nécessité de mieux communiquer pour montrer que toutes les carrières sont ouvertes aux femmes ([41]). Encore ancrées dans l’imaginaire français, ces images genrées associées aux différents métiers militaires participent en effet à leur degré d’attractivité aux yeux des femmes et des hommes. Elle a rappelé qu’il s’agissait là d’un enjeu important pour le ministère, car mieux communiquer sur la mixité de tous les métiers militaires permettrait de rassurer les femmes qui souhaiteraient s’y engager, voire de créer de nouvelles vocations.

Certains efforts ont été engagés, notamment dans les campagnes de recrutement où les affiches et fascicules mettent en avant des photos avec des hommes et des femmes militaires. De récents documents, comme le plan stratégique Mercator de la marine, sont particulièrement vigilants quant à cette problématique. Toutefois de nombreux supports visuels mettent encore en avant plus d’hommes militaires que de femmes. Vos Rapporteures relèvent en effet la faible place laissée aux photos de femmes militaires sur les sites internet des différentes forces armées où les différents métiers sont bien plus souvent illustrés par la photo d’un homme en uniforme que par celle d’une femme.

Il conviendrait par ailleurs de mieux faire connaître et de mieux communiquer sur les actions des forces armées contre les discriminations. Pourrait par exemple être lancée une campagne montrant que « les armées s’engagent contre les discriminations ».

Recommandation n° 15: lancer une campagne montrant l’engagement des armées contre les discriminations.

Il semblerait pertinent d’accroître les efforts en matière de parité dans les supports de communication du ministère des armées, en particulier tous les documents d’information liés au recrutement. Par ailleurs une grande campagne nationale de communication pourrait être organisée afin de renverser les stéréotypes masculins associés à de nombreux métiers militaires.

Recommandation n° 16 : améliorer la communication du ministère des Armées pour garantir la mixité sur l’ensemble des supports visuels et pour renverser les stéréotypes sexistes associés à certains métiers militaires.

En outre, vos Rapporteures tiennent à souligner qu’au sein de plusieurs centres de recrutement dans lesquels elles se sont rendues il ne semblait pas évident pour une femme de se projeter dans les métiers militaires, car l’ensemble des personnels en uniforme présents étaient des hommes et la majeure partie des supports d’information représentaient également des hommes. Elles considèrent qu’il serait pertinent de s’assurer que les centres de recrutement des forces armées permettent à tout candidat de se projeter dans les métiers auxquels il aspire, qu’il soit une femme ou un homme. En outre, il convient de veiller à ce que les recruteurs ne présentent pas les métiers et les spécialisations militaires de manière genrée, décourageant ainsi les femmes de se diriger vers certaines spécialités.

Recommandation n° 17 : garantir un accueil similaire et des informations non stéréotypées aux femmes et aux hommes dans les centres de recrutement des forces armées françaises et veiller à la présence de femmes militaires dans ces entités.

Les forces armées comptent aujourd’hui nombre de femmes ayant connu une carrière militaire de très haut niveau. Lors du déplacement à l’école de Maistrance à Brest, vos Rapporteures ont entendu plusieurs témoignages de jeunes filles élèves qui mettaient en avant des femmes militaires ayant inspiré leur volonté d’engagement. Lors de son audition, la directrice des ressources humaines du ministère des Armées a également mentionné l’importance de ce type de figures militaires féminines qui deviennent des modèles pour les jeunes femmes en leur permettant de se projeter dans les plus hautes fonctions de commandement ([42]). Ces rôles modèles changent également l’image de l’armée et ils doivent être développés, notamment au sein des différents états‑majors.

Recommandation n° 19 : développer les figures féminines pouvant servir de rôles modèles et permettre ainsi, par une féminisation de l’image de l’armée, aux jeunes femmes de se projeter dans des fonctions militaires, y compris au plus haut niveau de commandement.

3.   Un effort interministériel à faire en amont

L’image masculine du monde militaire s’inscrit de manière plus large dans les stéréotypes de genre aujourd’hui encore très présents dans notre société. Le niveau de mixité et d’égalité au sein des forces armées n’est souvent que le reflet des mêmes disparités dans le monde civil, car certains métiers sont encore vus comme des métiers d’hommes et d’autres des métiers de femmes.

En outre, une grande partie du recrutement de l’armée se fait parmi les élèves en filières scientifiques où les garçons sont le plus souvent majoritaires. « On observe principalement deux croyances largement partagées sur ces questions de genre et mathématiques : la première est la croyance selon laquelle les mathématiques ou plus largement les sciences ne sont pas une discipline accessible aux femmes et qu’il n’est pas ‟féminin ˮde faire des mathématiques et la seconde est de croire qu’en général, les femmes ont une moindre aisance et un plus faible niveau en mathématiques ou en sciences, comparé aux hommes » ([43]). Ces stéréotypes influencent l’orientation des filles et des garçons qui peuvent ainsi être conduits à se penser naturellement plus doués pour un domaine que pour un autre en raison de leur genre. Ils jouent un également un rôle sur les conseils donnés aux enfants au cours de leur scolarité, que ce soit au sein de la famille ou de l’institution scolaire.

Dès le plus jeune âge se joue ainsi une grande partie des inégalités que l’on retrouve ensuite dans l’ensemble de la société et plus particulièrement dans le monde professionnel et de façon encore plus manifeste dans le monde militaire. Ce constat a d’ailleurs régulièrement été fait au cours des nombreuses auditions conduites par vos Rapporteures. Il est primordial d’agir au sein des forces armées pour lutter contre ces inégalités et contre les stéréotypes ; ces actions doivent cependant s’intégrer dans un effort social plus général en la matière. Pour être efficace et provoquer un réel changement, il faut bien agir sur ces deux niveaux (au sein des forces et dans la société) de façon déterminée et coordonnée.

 

 


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   TRAVAUX DE LA DÉLÉGATION

Lors de sa réunion du 17 octobre 2018, sous la présidence de M. Pierre Cabaré, vice‑président, la Délégation a adopté le présent rapport et les recommandations présentées supra (pages 5 et 6).

La vidéo de cette réunion est accessible en ligne sur le portail vidéo de l’Assemblée nationale à l’adresse suivante : http://assnat.fr/WVJxqv.


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   annexe 1 : Liste des personnes auditionnÉes par lA dÉlÉgation et par les RAPPORTEUREs

I.   Audition de LA MINISTRE DES ARMÉES du 19 septembre 2018

La Délégation procède à l’audition de Mme Florence Parly, ministre des Armées, lors de sa séance du 19 septembre 2018.

Mme la présidente Marie-Pierre Rixain. Madame la ministre, nous avons confié une mission d’information sur les femmes et les forces armées à nos collègues Bérangère Couillard et Bénédicte Taurine qui devraient nous présenter leurs conclusions dans le courant du mois d’octobre. Il nous a semblé indispensable de vous entendre sur ce sujet et c’est avec plaisir que nous vous accueillons au sein de la délégation aux droits des femmes, sachant votre mobilisation sur cette question.

Avant d’en venir à cette thématique, je souhaite vous faire partager la stupéfaction qui a été la mienne en entendant les propos tenus la semaine dernière par Bertrand de Rochambeau, président du syndicat national des gynécologues, sur l’interruption volontaire de grossesse – le syndicat a indiqué depuis que le docteur de Rochambeau s’était exprimé en son nom propre.

Je ne peux que condamner avec la plus grande fermeté ces déclarations, contraires à la lettre et à l’esprit de la loi. Le droit des femmes à disposer librement de leur corps est un droit fondamental, que rien ni personne ne saurait remettre en cause. Au sein de la Délégation, nous avons toujours rappelé que l’avortement était une question de choix : le choix de poursuivre ou non une grossesse, le choix d’un lieu, le choix, nous l’oublions trop souvent, d’une méthode. Cette liberté de choix est garantie par la loi, et aucun praticien, quel qu’il soit, ne saurait la remettre en cause.

Je me propose donc de publier un communiqué au nom de la Délégation pour rappeler ces principes fondateurs. Je constate que cette proposition recueille votre assentiment à toutes et tous. Je vous en remercie.

Madame la ministre, je veux vous remercier très chaleureusement de votre participation à cette réunion sur les femmes et les forces armées, un sujet qui vous tient particulièrement à cœur et pour lequel vous êtes personnellement très impliquée. Je pense au plan « Famille », mais aussi à vos déclarations en matière de lutte contre le harcèlement. Vous avez très justement dénoncé le caractère intolérable des comportements sexistes et fait part de votre souhait de les sanctionner, de façon à y mettre un terme. Vous reviendrez très certainement sur ces différentes initiatives dans votre propos liminaire et plus généralement sur la dynamique que vous souhaitez impulser au sein de votre ministère.

L’armée est avant tout une question d’engagement, nous l’avons compris lors des auditions menées par la Délégation et par nos rapporteures. C’est une volonté personnelle qui se transforme en force collective, des valeurs qui transcendent l’individu au service de la Nation. Il s’agit d’une détermination altruiste qui mérite notre profonde admiration. Chaque jour, des femmes et des hommes font le vœu de protéger le territoire français et leurs concitoyens en s’astreignant aux contraintes que l’on connaît, afin de garantir une vie paisible à leurs pairs. Mais l’esprit de corps qui lie les militaires ne saurait se réduire à un entre-soi, dont les valeurs résisteraient à celles de la société. À ce titre, la féminisation des effectifs a été un axe essentiel de la modernisation des forces armées françaises.

La France peut se féliciter d’avoir l’une des armées les plus féminisées au monde. Des femmes valeureuses se sont engagées depuis les derniers conflits mondiaux sur les fronts de guerre, ébranlant ainsi les représentations culturelles et l’assignation des femmes à certains rôles sociaux. Mais la féminisation de l’armée relève encore trop souvent d’exploits individuels et les femmes sont, pour la plupart, encore cantonnées aux fonctions supports ou aux fonctions médicales.

Au-delà des problématiques de recrutement, lequel tend actuellement à une diversification croissante, c’est l’essence même de ce que l’armée doit être qu’il faut travailler. Comme l’a montré Emmanuelle Prévot, maître de conférences à l’école de l’air, les femmes sont encore perçues comme des intruses dans un monde d’hommes. Il est temps de dénouer le lien qui, depuis des centaines d’années, s’est créé entre guerre, virilité et hommes. Sans cet effort, la féminisation de l’armée sera toujours ressentie comme une tentative de déstabilisation de l’identité masculine, ce qui empêchera les femmes d’évoluer dans cet environnement.

Quelles sont donc les actions à mettre en place pour que les femmes n’aient plus à s’adapter à un monde qui les considère encore comme des intruses ? Comment développer une culture militaire qui accueillerait les femmes au même titre que les hommes ? Avant de vous donner la parole, madame la ministre, je propose aux rapporteures Bérangère Couillard et Bénédicte Taurine, d’introduire nos échanges.

Mme Bérengère Couillard, co-rapporteure. Madame la ministre, c’est avec beaucoup de plaisir que nous vous accueillons au sein de la délégation aux droits des femmes pour cette audition. Avec Bénédicte Taurine, nous travaillons sur cette mission d’information passionnante depuis plusieurs mois ; nous avons rencontré de nombreux professionnels des forces armées et recueilli beaucoup d’informations. Je suis curieuse de vous entendre sur les actions que le ministère compte engager pour accroître la présence des femmes au sein des forces armées, notamment sur le plan mixité, dont vous avez tracé les grandes lignes lors des  dernières questions au gouvernement. 

Mme Bénédicte Taurine, co-rapporteure. Madame la ministre, je vous remercie sincèrement pour votre présence car il est très important pour nous, dans le cadre de cette mission, de pouvoir vous rencontrer.

Mme Florence Parly, ministre des Armées. Madame la présidente, mesdames les rapporteures, mesdames les députées, monsieur le député, je vous remercie pour cette invitation. Je commencerai par un truisme : c’est une femme qui s’adresse à vous, une femme ministre des Armées, évoluant dans ce qui est, vous l’avez justement rappelé, l’univers masculin par excellence.

Avant les années 2000, l’idée même que ce poste éminemment régalien puisse être occupé par une femme aurait paru totalement saugrenue. J’ai la chance de ne pas être la première – d’autres avant moi ont défriché le terrain – et je n’ai pas été confrontée aux sourires qui se sont peut-être dessinés sur certains visages à l’époque. Les choses ont changé : au ministère, que je sois une femme n’a au fond rien que de très normal ; nous entretenons des rapports extrêmement professionnels, qui renvoient au second plan cette dimension néanmoins très évidente.

Le monde change, nos armées aussi. Elles se sont ouvertes aux femmes, progressivement – peut-être trop lentement. Ce mouvement a commencé après la seconde guerre mondiale, puis il s’est accéléré au milieu des années 1970. C’est donc un mouvement récent.

Parce qu’elles doivent attirer des profils divers, parce que nous devons affronter des menaces plus nombreuses et plus variées, les armées ne peuvent se permettre de se passer de la moitié des talents de l’humanité.

Je ne suis pas venue aujourd’hui vous dire que tout va bien – ce n’est pas le cas. Si nous pouvons nous satisfaire de certaines avancées, il reste encore beaucoup à faire et je compte sur les représentants de la Nation pour jouer le rôle de vigie et être, comme dans le cadre de la discussion sur la loi de programmation militaire, les nécessaires aiguillons de notre action dans ce domaine.

Je commencerai par casser quelques clichés qui ont la vie dure. Le premier est celui selon lequel les armées seraient exclusivement masculines. Avec un taux de 15,47 % de femmes, certes encore trop bas, l’armée française est la quatrième armée la plus féminisée au monde. Ce taux est très hétérogène ; il varie selon les secteurs, et d’une armée à l’autre. Dans l’armée de terre, il est de 10 %. Il s’élève à 60 % dans le service de santé des armées, à l’image de ce qui se passe dans le monde civil, où la profession médicale est désormais largement féminisée.

À ma grande satisfaction, il n’existe plus aucun poste opérationnel qui soit fermé aux femmes. L’actualité récente l’a montré, avec le retour de la mission du sous-marin nucléaire lanceur d’engins, dernier bastion réservé aux hommes. J’ai rencontré les quatre premières femmes officiers qui y ont embarqué et recueilli leurs commentaires sur les difficultés qu’elles ont pu rencontrer – à vrai dire, peu nombreuses –, entendu la très grande fierté qu’elles ont ressentie à conduire cette mission, ainsi que celle de l’équipage et du chef d’état‑major de la marine, qui vous en aura certainement parlé si vous l’avez auditionné.

La présence de femmes à bord des sous-marins était la dernière frontière symbolique, elle est partiellement tombée : l’exiguïté des sous-marins nucléaires d’attaque d’ancienne génération ne permettait pas les aménagements d’espaces de vie indispensables à l’accueil des femmes, mais la nouvelle génération qui arrivera prochainement dans les forces sera d’emblée adaptée à la présence d’un équipage féminin.

Un autre des présupposés auquel je voudrais tordre le cou est que rien ne serait fait pour la mixité dans les armées. Il est important de lutter contre cette idée qui conduit un certain nombre de jeunes filles ou de jeunes femmes à pratiquer l’autocensure : « ce n’est pas pour moi, on ne fera rien pour moi, donc je n’y vais pas ». Au contraire, elles doivent avoir la conviction que des progrès sont réalisés pour faciliter leur accueil et leur insertion. L’appropriation de ce thème de la nécessaire mixité dans les armées est un signal clair. La direction dans laquelle nous devons aller, et vite, ne fait plus débat. Nous devons permettre aux femmes de réussir et de gravir tous les échelons, car nous avons vraiment besoin d’elles : il serait tout de même paradoxal que les armées soit le seul domaine de la société dans lequel la contribution des femmes ne soit pas tangible !

Cette démarche, engagée il y a quelque temps, continue de monter en puissance. Nous devons désormais accélérer. Un haut fonctionnaire à l’égalité des droits a été nommé et présente les résultats annuels devant l’observatoire de la parité que je préside. Un dispositif statistique permet de suivre avec précision la question de l’égalité professionnelle et le ministère a été l’un des premiers à avoir créé une feuille de route qui apporte une connaissance précise de la place des femmes dans l’institution.

Dès mon arrivée, j’ai souhaité prendre le taureau par les cornes. Ceux d’entre vous qui ont participé au débat sur la loi de programmation militaire le savent, je souhaite placer l’humain au cœur de nos armées. La question des conditions de vie, celles de la conciliation entre la vie familiale et l’engagement militaire, de l’égalité des chances et des droits sont pour moi des priorités. J’ai lancé un plan « Famille » pour faciliter la conciliation entre les conditions de vie et d’engagement des militaires et de leurs familles. Évidemment, je n’ai pas laissé de côté la question des femmes qui servent sous l’uniforme. Ce plan est très largement mis en œuvre : je m’étais engagée à ce que 70 % des mesures fassent l’objet d’autorisations de programme en 2018 ; ce sera le cas.

Ce plan prévoit par exemple d’augmenter l’offre de garde pour les enfants de militaires en augmentant de 20 % le nombre de places en crèche d’ici 2022 et en favorisant l’exercice du métier d’assistante maternelle au sein des familles de militaires. Il prévoit aussi l’élargissement du dispositif de la prestation de soutien en cas d’absence prolongée du domicile (PSAD), de participation à une opération extérieure ou à une opération sentinelle sur le territoire national. Ce sont les premières étapes ; je pense que nous devons aller plus loin.

C’est la raison pour laquelle nous avons tenu à faire figurer, à l’article 12 de la loi de programmation militaire, une disposition importante. Celle-ci permet à tout militaire qui prend un congé pour convenance personnelle afin d’élever un enfant de moins de 8 ans, de continuer à servir comme réserviste. C’est le moyen de conserver le lien avec l’armée, de maintenir les compétences et de garantir la poursuite de l’avancement, en fonction du nombre de jours réalisés dans la réserve. Cette mesure permettra d’atténuer les répercussions de l’arrivée d’un enfant sur le déroulement d’une carrière.

L’avancement est un sujet évidemment majeur. Je le dis souvent sous forme de boutade, je souhaite qu’un jour – le plus tôt sera le mieux –, le féminin de général ne désigne plus l’épouse d’un général. Chacun doit avoir toutes ses chances, y compris d’accéder aux plus hautes responsabilités, en fonction de ses talents, de ses mérites et sans aucune discrimination.

Il faut que des femmes figurent parmi les officiers généraux. Ce sera d’abord le signe que la politique que nous avons engagée a réussi. Cela montrera qu’il est possible aux femmes d’accéder par leur mérite aux plus hautes responsabilités. Enfin, et nous sommes nombreux dans cette salle à partager ce point de vue, ces femmes deviendront les modèles dont nos armées ont besoin. Certaines femmes sont devenues chercheuses parce qu’elles se sont identifiées à Marie Curie, beaucoup de femmes se sont engagés dans la vie publique – j’en fais partie – inspirées par l’exemple de Simone Veil. Nous avons tous besoin d’identifications positives qui nous permettent de déterminer nos aspirations profondes. Les jeunes filles, les jeunes femmes ont besoin de modèles qui leur montrent qu’il est possible de gravir les échelons dans l’armée. De leur côté, les hommes, du moins ceux qui ont encore des doutes sur la capacité des femmes à exercer ces responsabilités, ont besoin de vérifier de façon très concrète qu’une femme est capable de commander, de trancher, de diriger. Les femmes sont des combattants comme les autres, elles font preuve du même engagement et du même courage. La mission, que l’on soit civil de la défense ou militaire, militaire du rang, sous‑officier ou officier doit se conjuguer au féminin.

Nos objectifs doivent être réalistes et en même temps ambitieux. Je me suis fixé un objectif que je crois raisonnable, même si tout le monde ne partage pas l’adjectif « raisonnable » : en 2025, au terme de la loi de programmation militaire, le taux de femmes parmi les officiers généraux devra être de 10 %. Ce taux reste inférieur au taux moyen de femmes dans les armées. L’objectif est que la répartition hommes/femmes soit homogène à tous les niveaux de la hiérarchie et que la part des femmes progresse.

Il est certain que l’attrait d’une carrière dans les armées est mis à mal lorsqu’une jeune femme ou une jeune fille, par différents canaux – les médias, son environnement amical ou familial – entend que le choix de s’engager, de faire des études pour accéder à des responsabilités suppose d’être bizutée, d’être ostracisée et de faire l’objet de « l’indifférence courtoise ». C’est aussi cela qu’il faut combattre à la racine, faute de quoi nous ne parviendrons pas à constituer les viviers dont nous avons grandement besoin pour élever le taux de femmes dans les armées, y compris parmi les plus hauts gradés.

C’est la raison pour laquelle je considère que le sexisme n’a pas sa place dans les armées. Quelqu’un qui pense que les femmes n’ont rien à faire dans les armées n’a tout simplement rien à faire dans les armées. Je ne cesse de le répéter et je crois être entendue, notamment au niveau du commandement : c’est la tolérance zéro qui doit prévaloir.

Nous mènerons donc une guerre systématique aux attaques sexistes. L’indifférence courtoise n’a rien de courtois, aucune brimade n’est acceptable, et, pour être triviale, il n’est pas de main baladeuse qui ne soit « pas bien méchante ». Toute agression, toute attaque doit être dénoncée, sanctionnée, punie.

L’excellence comportementale est l’un des ciments de nos armées et l’on ne peut laisser quelques brebis galeuses salir la réputation de l’institution militaire en son entier. Nous avons donc lancé, avec Geneviève Darrieussecq, un plan d’excellence comportementale pour les lycées militaires et les états-majors ont fait passer des consignes claires. La cellule Thémis accomplit un travail remarquable en soutien du commandement, puisqu’elle permet d’enquêter sur les actes de harcèlement, de violence et de discrimination et d’accompagner les victimes. Fonctionnant hors hiérarchie, elle a trouvé sa place dans nos armées.

Si je dresse rapidement un premier bilan, je crois pouvoir dire que nous agissons, que les armées s’ouvrent à la mixité, que nous menons le combat pour l’égalité femmes‑hommes et que nous combattons le harcèlement, les discriminations et les violences sexuelles.

Est-ce assez ? Je ne le crois pas. Après cette première période que je qualifierai de « pionnière », nous devons ouvrir l’acte II de la mixité dans les armées. C’est la raison pour laquelle j’ai décidé de lancer un plan mixité qui devrait voir le jour au printemps 2019. Je souhaite ce plan aussi large et ambitieux que possible. Il n’exclura, par définition, aucune piste. J’en ai confié la responsabilité à l’amirale de Mazieux, qui devra, en lien avec les armées, les états-majors et les directions des services, faire des propositions très concrètes. J’ai dévoilé quelques axes de ce plan lors de dernières questions au Gouvernement. Nous devrons notamment centrer la réflexion sur nos processus de gestion des ressources humaines afin de promouvoir le recrutement des femmes et de lutter contre l’évaporation des talents. Je souhaite également que l’on réfléchisse plus avant à de meilleurs équilibres encore entre l’engagement militaire et la vie familiale. J’ai rappelé les dispositions de la loi de programmation militaire qui sont une première étape. Il est sans doute possible d’imaginer des solutions complémentaires qui permettent d’aller plus loin.

Soyez convaincus que nous n’avons pas d’a priori et qu’aucune porte ne sera fermée par principe pour l’élaboration de ce plan mixité. Je sais pouvoir compter sur vous, vos propositions et votre intérêt constant pour la promotion de l’égalité femmes-hommes au sein de nos armées.

Mme la présidente Marie-Pierre Rixain. Merci, madame la ministre. Nous partageons votre engagement, votre motivation et nous saluons les résultats concrets que nous observons d’ores et déjà au sein de nos forces armées. Quoi qu’il arrive, la délégation aux droits des femmes sera à vos côtés pour promouvoir l’égalité entre les femmes et les hommes dans les forces armées, et protéger celles ou ceux qui en auraient besoin.

Mme Bénédicte Taurine, corapporteure. Je voudrais aborder la thématique de la parentalité, qui a été évoquée de nombreuses fois au cours de nos auditions, et plus précisément la question des crèches.

Je voudrais savoir – comme l’a indiqué l’amiral Prazuck – s’il est possible de discuter avec les municipalités pour mettre en place des crèches pour les familles de militaires. Quels crédits pensez-vous obtenir pour assurer ces places ? Pouvez-vous nous en dire un peu plus ce sujet ?

Mme Florence Parly, ministre des Armées. La question des places en crèche est un sujet de préoccupation assez général pour l’ensemble des parents de jeunes enfants, militaires ou non. Le ministère des Armées possède un certain nombre de crèches « en propre ». Nous allons les développer, mais nous allons également procéder à des réservations de berceaux dans des crèches mises en places et gérées par les collectivités territoriales.

C’est en combinant ces outils que nous nous sommes fixé comme objectif de disposer au total, toutes formes de crèches confondues, de 2 550 places en crèches en 2022. Aujourd’hui, on dispose de 1 600 places – j’arrondis le chiffre – en crèches ministérielles, et avec les réservations dans les crèches ou structures d’accueil externes, d’un peu plus de 2 100 places. L’objectif est donc d’en ajouter 400 d’ici 2022.

Mais il ne faut pas oublier tout le dispositif des assistantes maternelles, qui constituent une alternative à la garde d’enfants en crèche. Et nous pensons pouvoir faciliter l’accès d’un certain nombre de conjoint(e)s de militaires à la profession d’assistant(e)s maternel(le)s, afin de renforcer, sur un bassin géographique de proximité, les possibilités de garde des jeunes enfants.

Nous avons enfin réfléchi à des modes de compensation des coûts induits par la garde d’enfants par des tiers. Nous avons ainsi prévu une prestation spéciale de soutien pour les gardes d’enfants en cas d’horaires atypiques – et parfois très atypiques, s’agissant des militaires. En 2017, les parents de plus de 750 enfants ont bénéficié du versement de ce type de prestations. Il en va de même pour l’accueil périscolaire des enfants qui peut donner lieu à une compensation monétaire.

Ce sont là quelques exemples, au-delà des investissements que nous allons réaliser, soit sous forme de constructions, soit sous forme de réservations auprès des collectivités territoriales, d’outils destinés à faciliter la garde des enfants.

Mme Bérengère Couillard, corapporteure. Madame la ministre, je souhaiterais vous interroger sur l’objectif ambitieux que vous vous êtes fixé qui est d’avoir 10 % d’officiers généraux femmes. La question revient souvent parce qu’en fonction des interlocuteurs, le sujet peut être assez sensible. Ne craignez-vous pas que cet objectif soit perçu comme de la discrimination positive et que les femmes qui seront promues ne soient pas respectées dans leur exercice de commandement ?

Je voudrais savoir comment vous allez procéder. En effet, l’objectif est ambitieux, et lorsqu’on poursuit des objectifs ambitieux en matière de parité et d’égal accès des femmes au commandement, on risque de promouvoir des femmes plutôt que des hommes, à compétences égales.

Mme Florence Parly, ministre des Armées. Je me suis censurée moi-même en disant que cet objectif de 10 % était à l’horizon de 2025. En réalité, il est à l’horizon 2022, ce qui est plus ambitieux. Et nous voulons doubler ce taux d’ici 2025.

Je serai très claire sur le seul mode de fonctionnement qui prévaut dans les armées : c’est la promotion au mérite, en fonction des compétences et des talents. Ces critères doivent continuer de s’appliquer. Je n’ai aucun état d’âme à ce propos.

Et je n’ai aucun état d’âme et aucun doute non plus que sur le fait que, dès lors que nous aurons été capables d’accroître le vivier des femmes qui peuvent être promues, celles-ci rempliront tous les critères pour l’être. Pour moi, la question n’est pas la discrimination positive, mais la constitution d’un vivier suffisamment significatif.

Il faut revenir à l’histoire, qui est celle d’une ouverture très tardive des écoles d’officiers aux femmes. De mémoire, l’armée de l’air a commencé à s’ouvrir aux femmes en 1967 et l’école navale au début des années 1990. C’est donc très récent. Comme il faut plus de vingt ans pour accéder au grade de colonel ou de capitaine de vaisseau, et environ trente ans pour accéder au grade de général – ou équivalent – vous comprendrez que les viviers soient extrêmement restreints.

Par ailleurs, et c’est notre deuxième sujet de préoccupation, nous devons nous assurer que dans les promotions qui rentrent dans les écoles d’officiers, la part des filles s’élève. Or nous sommes encore sur de trop petits nombres, avec des évolutions erratiques d’une année sur l’autre. La tendance est plutôt à l’amélioration, mais il y a des années moins bonnes que d’autres.

L’école de l’air est en avance sur les deux autres écoles d’officiers, et a beaucoup progressé au cours des trois dernières années : il y avait presque 15 % de filles dans cette école en 2015, il y en a quasiment 25 % en 2017. Les effectifs à l’école navale évoluent, avec une très bonne année en 2015, une beaucoup moins bonne en 2016 ; cela recommence à progresser, mais encore trop faiblement en 2017. Il en va de même à Saint-Cyr : presque 8 % de filles en 2015, presque 9 % en 2016 ; en 2017 je ne vais même pas citer le taux ; en revanche, en 2018, nous avons atteint et dépassé les 10 % et je pense que c’est probablement une des premières fois.

Mais enfin, en valeur absolue, les effectifs ont atteint 16 filles à l’école spéciale militaire de Saint-Cyr en 2018, 16 à l’école de l’air et 16 à l’école navale en 2017. On est encore sur de tout petits nombres. C’est un sujet de préoccupation qui renvoie à des considérations qui dépassent très largement les difficultés propres aux armées.

Si l’on regarde dans le détail les résultats à l’entrée de Saint-Cyr cette année, on retrouve malheureusement une tendance qui existe dans toutes les grandes écoles scientifiques, à savoir que la part des filles qui réussissent le concours d’entrée via la section scientifique est très faible. En effet, en général, il y a peu de filles dans les classes préparatoires scientifiques. D’une certaine manière, ces résultats sont aussi le reflet d’une situation générale qui concerne aussi bien le monde civil que le monde militaire.

Notre objectif est donc de faire en sorte que le taux de féminisation à la sortie des grandes écoles progresse en faveur des femmes. C’est une condition nécessaire pour qu’à terme nous ayons davantage d’officiers généraux féminins.

Mme Bérengère Couillard, corapporteure. Je voudrais rebondir sur ce que vous venez de dire. Pour accroître le vivier des femmes, il est indispensable de les attirer dans les écoles qui forment nos militaires. Va-t-on revoir la méthode de communication pour le recrutement ? Des tentatives, parfois heureuses, parfois moins, ont eu lieu en la matière. L’objectif du ministère est-il d’arriver à communiquer autrement ? Très souvent, les différents professionnels que nous avons auditionnés ont répondu qu’ils ne communiquaient pas de façon différente à l’égard des jeunes femmes ou des jeunes hommes, et que cela pouvait expliquer qu’il était difficile d’attirer les jeunes femmes au sein des écoles.

Mme Florence Parly, ministre des Armées. Je pense que des progrès ont été réalisés en termes de communication et quels que soient les grades. J’imagine que vous avez vu les grandes campagnes de recrutement s’étaler sur les murs des villes ou dans les métros.

Les armées veillent, et je veille tout particulièrement, à ce que les représentations visuelles des métiers, des situations en opération, en responsabilité opérationnelle, ne soient pas toutes incarnées par des hommes. Je n’ai pas fait de statistiques, mais je pense que vous y avez-vous prêté attention : ces affiches publicitaires présentent de façon, sinon égale, du moins diversifiée, des hommes et des femmes, afin précisément de montrer aux jeunes femmes que ces métiers leur sont ouverts.

C’est tout particulièrement important dans l’armée de terre puisque, comme je vous l’ai indiqué, le pourcentage de femmes n’y est que de 10 %.

C’est aussi important parce qu’il faut rassurer les parents. En effet, il faut que ceux-ci se sentent sécurisés et convaincus que c’est un environnement professionnel accueillant pour les jeunes.

Je crois que chaque armée fait des efforts pour s’adresser aux garçons comme aux filles, de manière adaptée en fonction des spécificités propres à l’armée de terre, à la marine ou à l’armée de l’air.

S’agissant des écoles d’officiers, il est probable que des efforts peuvent encore être accomplis. Cela fait partie des axes d’effort que nous avons envisagés avec l’amirale de Mazieux : comment améliorer la communication, comment mieux valoriser encore ces figures, je n’ose pas dire ces « héroïnes » ? Hier, un colloque a d’ailleurs été organisé par un réseau de femmes visant à la mixité dans les armées sur le thème des héroïnes.

Il faut que nous puissions mettre en avant des exemples, des figures emblématiques qui permettent aux jeunes filles ou aux jeunes femmes de se retrouver, et de s’identifier à elles. Or ce n’est pas encore tout à fait le cas. Il y a certainement encore matière à progresser. Mais je suis certaine que dans quelques mois, lorsque ce plan sera élaboré, nous pourrons venir vous présenter des propositions.

Mme la présidente Marie-Pierre Rixain. Je vous poserai trois questions : les deux premières sont dans le cœur de notre sujet ; la troisième est un peu plus éloignée mais elle me semble importante.

Mes deux premières questions portent sur le recrutement des jeunes femmes et sur la façon de constituer le vivier dont vous parlez. Le problème n’est d’ailleurs pas propre aux armées : on le retrouve dans la diplomatie, dans d’autres ministères, voire à l’Assemblée nationale.

On évoquait à l’instant les modèles. Ne pourriez-vous pas créer un lien avec le ministère de l’éducation nationale de façon à présenter aux jeunes gens, dans les livres d’histoire notamment, des modèles de femmes militaires ? La Seconde Guerre mondiale est à l’ordre du jour des programmes du secondaire, et on pourrait imaginer la mise en place de partenariats dans le cadre de l’éducation nationale pour valoriser le rôle des femmes durant ce conflit.

Deuxièmement, avez-vous eu écho d’hommes qui auraient été mécontents à la suite de la nomination d’une femme à un poste de commandement ? Pour quelle raison ? La compétence des femmes est-elle parfois remise en question ? Ou alors, puisque la règle d’or dans les armées est la compétence, lorsqu’une femme est nommée à un poste de commandement, la décision est-elle incontestable et ne souffre-t-elle d’aucun soupçon d’incompétence de la part de ses collègues hommes ?

Troisièmement, nous parlons beaucoup du recrutement et de la féminisation des forces armées, mais qu’en est-il, une fois que ces femmes sont recrutées, notamment lorsque certaines d’entre elles se rendent sur des théâtres de guerre en opérations extérieures ? Nous savons qu’il existe des programmes d’accompagnement, par exemple en cas de stress post‑traumatique. Y-a-t-il des accompagnements propres pour les femmes ? Y-a-t-il des prises en charge spécifiques pour les femmes qui se rendent sur les théâtres de guerre et pourraient, en raison de leur genre, avoir été soumises à des traumatismes différents de ceux de leurs collègues masculins ?

Mme Florence Parly, ministre des Armées. Premièrement, je trouve excellente votre suggestion consistant à promouvoir des modèles d’excellence et d’exemplarité de femmes militaires. D’ores et déjà, nous avons inclus dans le programme de la journée défense et citoyenneté (JDC) un module traitant des questions d’égalité hommes-femmes.

Avant même la mise en place du service national universel, nous avons la chance de disposer de cette JDC que suivent chaque année 800 000 jeunes. C’est une opportunité que nous ne manquons pas de saisir pour aborder la thématique plus générale de l’égalité femmes‑hommes. Je ne doute pas que dans le cadre du futur service national universel nous pourrons développer cette action. Mais ce n’est pas exclusif de la suggestion que vous nous faites, que je retiens, et dont je m’entretiendrai avec Jean‑Michel Blanquer.

Deuxièmement, vous avez évoqué les éventuelles réticences des hommes et leurs possibles critiques sur le thème du favoritisme ou de la discrimination positive. J’ai moi‑même posé la question aux quatre femmes officiers qui rentraient de mission dans un sous-marin nucléaire lanceur d’engins. Elles m’ont répondu qu’elles se trouvaient dans une situation particulière, à savoir qu’elles étaient officiers. Ce qui comptait d’abord et avant tout, c’est qu’elles étaient en position de commandement. Elles ont avoué que parfois, certains avaient pu se demander si elles avaient fait le même parcours, aussi exigeant, aussi sélectif que celui des hommes. Il est évident que le parcours de ces femmes était tout aussi exigeant, et qu’il n’y avait pas de sujet. Mais il est exact que ces questions ont pu être posées par certains – je ne parle pas d’une majorité.

Je ne me fais que l’écho de ce qu’elles m’ont dit. Et je crois important, précisément pour couper court à d’éventuelles suspicions, de s’en tenir à ce principe cardinal que je rappelais tout à l’heure, à savoir que la promotion, l’avancement, l’accès aux responsabilités doivent rester fondés sur les talents et les compétences.

Il a été très intéressant de pousser l’échange avec ces quatre militaires, dans la mesure où certaines ont dit que cette expérience avait été extraordinairement enrichissante de par l’environnement et de par son caractère singulier, mais que professionnellement parlant, elles avaient déjà fait la même chose sur d’autres types de bâtiment et qu’elles aspiraient à étendre leur périmètre de compétences, pas nécessairement dans un sous-marin, mais ailleurs dans la marine. Il est important de remarquer qu’elles avaient réalisé cette mission dans un SNLE parce qu’elles étaient extrêmement compétentes dans leur domaine, et non pour des raisons d’affichage. Et c’est parce qu’elles continuent d’avoir l’ambition de progresser dans la carrière qu’elles pourront poursuivre leur carrière à bord d’un sous‑marin ou en rejoignant un bâtiment de surface.

Troisièmement, opérations extérieures (OPEX) ou pas, le réseau « Écoute Défense » est à la disposition de tout le monde, de tous les blessés psychologiques, indépendamment de leur genre. Naturellement, en cas d’écoute individualisée, la personnalité est prise en compte et le fait qu’il s’agisse d’un homme ou d’une femme fait partie des éléments pris en compte.

Je ne suis pas certaine que le dispositif soit différent pour les OPEX. Mais je peux dire que le ministère des Armées a renforcé sa vigilance pour faciliter la réinsertion après des opérations extérieures. Nous avons donc multiplié les « sas avant retour », qui assurent la transition entre un théâtre d’opérations et le retour dans la famille. Cela s’adresse aux hommes comme aux femmes ; je peux dire que le dispositif est extrêmement apprécié par les militaires qui rentrent comme par les familles qui les retrouvent.

Mme la présidente Marie-Pierre Rixain. Merci vivement, madame la ministre, pour ces éclaircissements. Je pense qu’il était important d’entendre de votre part que les femmes qui occupent aujourd’hui des postes de commandement dans l’armée les occupent parce qu’elles sont compétentes, afin qu’il n’y ait absolument aucun soupçon à leur égard.

Mme Céline Muschotti. Je pense, madame la ministre, qu’auditionnée dans le cadre des travaux de la mission d’information sur les femmes et les forces armées conduite par mes collègues Bérangère Couillard et Bénédicte Taurine, vous aurez à cœur de nous éclairer sur la question du rapprochement familial dans nos armées.

Les modalités de rapprochement de deux conjoints officiant sous nos drapeaux sont théoriquement assez simples, même si les unions pourraient être considérées plus rapidement pour pouvoir procéder à des mutations, avec la mise en place, au 1er janvier de l’année prochaine, du prélèvement à la source. En effet, les PACS ne sont pris en compte qu’à l’année n+1, pour une éventuelle mutation à l’année n+2. Or une déclaration fiscale commune pour justifier du PACS est obligatoire. Cette obligation vaut d’ailleurs pour l’ensemble des fonctionnaires, civils comme militaires.

Si les directions des ressources humaines des armées n’ont pas pour politique de laisser les couples séparés, les besoins des services peuvent l’emporter sur une éventuelle mutation pour rapprochement familial. En effet, l’article L. 4121-5 du code de la défense précise que les militaires peuvent être appelés à servir en tout temps et en tout lieu, que les mutations doivent être compatibles avec le bon fonctionnement du service et que la liberté de résidence peut être limitée et la liberté de circulation restreinte.

La rigueur, la logique de ces dispositions dissuadent évidemment nos militaires d’exercer un recours administratif à l’encontre d’une décision de refus de mutation pour motif familial. Cependant, la nécessité de veiller à l’équilibre des relations familiales de nos militaires doit nous amener à réfléchir à un meilleur rapprochement des couples. Quel bilan pouvez-vous tirer de la politique récente en la matière au sein de nos armées ?

Madame la ministre, quelles sont les pistes pour améliorer, d’après vous, le sort de nos militaires qui donnent leur vie à la Nation, mais la partagent avec leur conjoint ou avec leur partenaire ?

M. Guillaume Gouffier-Cha. Madame la ministre, préalablement à mes questions, je tiens à saluer votre engagement et votre exigence, et à travers vous, l’engagement et l’exigence de nos armées.

On le sait, nos armées sont un modèle, l’institution dans laquelle les Français ont le plus confiance – à plus de 80 %. Cela devrait nous inspirer, notamment du côté politique. Cette confiance n’est pas liée seulement au port de l’uniforme, mais aussi à une certaine exigence vis-vis de certaines valeurs. S’agissant de l’égalité hommes-femmes, nos armées ont compris, et avant tout le monde, qu’il y avait un mouvement, un changement, et qu’il fallait s’y adapter.

J’ai été très frappé par la phrase que vous avez prononcée au tout début : « Est-ce que tout va bien ? Non, tout ne va pas bien ». Si seulement on pouvait l’entendre dans tous les domaines, nous pourrions avancer plus rapidement ! Aujourd’hui, nos armées ne font pas l’autruche, elles regardent les choses telles qu’elles sont. Cela explique le propos que vous avez tenu il y a quelques minutes : au-delà des discours, il y a les outils qui sont mis en place et qui, en outre, sont évalués en permanence. C’est important à souligner. Cela doit nous inspirer.

Ma question portera sur trois dispositifs.

Tout d’abord le dispositif Thémis : je me suis demandé pourquoi nous n’avions pas un tel dispositif à l’Assemblée nationale ; nous avons échangé régulièrement à ce sujet avec la présidente de la Délégation et je ne doute pas que nous parviendrons à faire bouger les lignes. Comment le dispositif Thémis fonctionne-t-il et quelle évaluation en faites-vous après ses premières années ? En effet, ce dispositif n’a pas été mis en place l’année passée, avec les mouvements que nous connaissions, mais il y a déjà trois ou quatre ans.

Deuxièmement, s’agissant de l’affaire des lycées militaires, des mesures avaient été annoncées avant l’été. Pouvez-vous nous dire où nous en sommes aujourd’hui, et notamment après la dernière rentrée ?

Troisièmement, en ce qui concerne le lien armée-Nation, j’aimerais savoir s’il y a un suivi qui est fait du recrutement au sein de nos réserves, c’est-à-dire si nous observons une augmentation du recrutement des femmes au sein de nos réserves, lesquelles sont si importantes pour le lien armée-Nation.

Mme Laurence Trastour-Isnart. Madame la ministre, je voudrais revenir sur deux sujets : celui de la garde des enfants et celui du congé pour convenance personnelle, lorsqu’il est pris pour élever un enfant de moins de huit ans. Avant tout chose, je tiens cependant à saluer l’action que vous avez conduite pour les femmes au sein de nos armées. J’ai senti, dans vos propos, votre implication et votre envie d’avancer.

Concernant la garde des enfants et les crèches, c’est un domaine dans lequel je travaille depuis vingt ans. Créer des crèches est important, mais vous avez parlé tout à l’heure des horaires atypiques de beaucoup des personnels du ministère. Or les tests de structures de la petite enfance qui ouvrent à des horaires atypiques, dans les hôpitaux, ou dans les aéroports, montrent souvent que cela ne fonctionne pas. Les structures de la petite enfance avec des horaires à spectre large, voire ouvertes la nuit, sont en général largement déficitaires car il n’y a que deux ou trois enfants qui y restent la nuit.

Par ailleurs, vous avez parlé tout à l’heure des assistants et des assistantes maternels. Étant donné la charge de travail de nos militaires, cela me paraît être une solution qui est plus adaptée et plus humaine, même pour des personnes qui peuvent s’absenter plus longtemps. Qu’une personne puisse avoir la charge de l’enfant est aussi rassurant pour celui‑ci, notamment s’il est encore en bas âge.

Concernant le congé pour convenances personnelles, vous avez dit tout à l’heure que c’était un début. Eh bien, je trouve que ce début est déjà une très bonne chose. Je pense cependant qu’une femme militaire qui souhaite avoir un, deux, voire trois enfants est en droit, comme toute autre femme, de réaliser ce souhait, mais aussi de pouvoir demander un temps partiel et d’avoir un poste adapté au sein de nos armées. Or elles sont obligées, à l’heure actuelle, de demander ce congé pour convenances personnelles et de rester réservistes – ce qui n’est pas forcément la même chose qu’être opérationnel, y compris pour l’évolution correcte de la carrière, quoique cela constitue déjà un plus. À mon avis, ce n’est cependant pas suffisant et on devrait pouvoir avoir un poste adapté lorsqu’on a un enfant de moins de huit ans, de manière à pouvoir ensuite rebondir et continuer sa carrière, sans même l’avoir interrompue.

Mme Florence Parly, ministre des Armées. En réponse à la question de la mobilité et des rapprochements de conjoints, je dirai que la très grande mobilité géographique des militaires est une des caractéristiques de la vie militaire et qu’elle emporte un certain nombre de conséquences lourdes à gérer pour les familles.

La première conséquence est le fait qu’il y a souvent trop peu de visibilité sur ces mobilités. C’est par là que nous avons commencé, dans le cadre du plan « Famille », c’est‑à‑dire en essayant d’éclairer le plus tôt possible une famille sur une éventuelle mobilité géographique. Nous nous sommes fixé comme objectif pour les mutations qui sont intervenues tout récemment, avec prise d’effet au mois de septembre, que 80 % des notifications de décisions de mutation soient faites cinq mois à l’avance, de façon à permettre aux familles d’avoir plus de temps pour trouver un logement, procéder aux inscriptions des enfants à l’école,… bref, leur laisser le temps de s’organiser. Je suis assez fière de pouvoir vous dire que nous avons presque atteint notre objectif, ou plutôt que nous ne l’avons manqué que de très peu : deux armées sur trois sont au‑delà de 80 % et la dernière a fait d’énormes efforts, de sorte que je crois qu’on doit pouvoir les féliciter de ce qui a été réalisé en l’espace de quelques mois.

La deuxième étape consiste à prendre en compte une autre dimension, à savoir le fait qu’au sein d’un couple, en général l’un et l’autre travaillent. Lorsque l’un des membres du couple est militaire et l’autre non, il faut donc essayer de tenir compte de la nécessité de faciliter le retour à l’emploi de celui ou celle qui va devoir renoncer à son emploi, du fait de la mobilité géographique de son conjoint. Et c’est la raison pour laquelle nous avons demandé que l’agence de reconversion pour la défense puisse aussi être ouverte aux conjoints de militaires. Cette agence reclasse déjà 10 000 personnes chaque année puisque vous savez qu’il y a un flux d’entrées et de sorties très important parmi les militaires.

Il y a un autre axe sur lequel nous avons travaillé, avec Jean‑Michel Blanquer. Lorsque le conjoint ou la conjointe relève du ministère de l’éducation nationale et qu’une mobilité est induite par la mobilité d’un conjoint ou d’une conjointe militaire, nous avons mis au point un processus permettant l’examen « bienveillant », ou, en tout cas, un examen dans un délai qui permette, dans la mesure du possible, de traiter les dossiers avec pragmatisme et de trouver des solutions intelligentes. Cela se fait dans le respect des règles de mutations géographiques qui sont propres au personnel de l’éducation nationale et qui doivent évidemment être appliquées, sans quoi des contestations pourraient intervenir.

Enfin, il existe le cas de figure où, au sein d’un couple, les deux conjoints sont militaires : là, il revient aux directions des ressources humaines des armées de prendre en compte ces situations et de les traiter au mieux.

Je suis certaine qu’on va pouvoir – et qu’on va devoir – progresser, parce que les armées sont à l’image de la société française et changent avec elle. Ce qui est frappant, c’est de voir le taux de couples bi-actifs qui n’a cessé de s’élever ; au fond, il est assez comparable à celui qu’on trouve dans la population civile. Mais il n’y a pas que des enseignants, ou que des conjoints militaires, donc il va nous falloir essayer de systématiser notre approche pour faciliter le retour à l’emploi de ceux qui ne sont pas mutés au premier chef.

J’en viens au temps partiel dans les armées. Vous avez rappelé l’article du code de la défense qui indique que les militaires peuvent être appelés à servir en tout temps et en tout lieu. Il pose ainsi le principe de disponibilité, principe qui ne souffre pas de limite.

C’est pourquoi, lorsque l’on est militaire, et que l’on est assujetti au statut militaire, il n’est pas possible de voir organiser un temps partiel. Autrement dit, le temps partiel n’est pas un droit, parce que le droit qui s’applique est celui du code de la défense et du statut militaire. Évidemment, on n’est pas obligé de ne s’en tenir qu’au droit et à la règle ; on peut aussi essayer d’imaginer des solutions pragmatiques qui tiennent compte des situations auxquelles les individus et les familles sont confrontés. C’est l’objet du plan « Famille » que d’essayer, de manière assez pragmatique, de résoudre les situations de vie. C’est pourquoi j’ai beaucoup insisté, au moment où nous l’avons annoncé il y a un an, sur le fait que les priorités de l’année 2017 qui étaient apparues aux différentes associations et aux différents relais avec lesquels nous avons travaillé pouvaient tout à fait évoluer avec le temps.

Le plan est maintenant inscrit dans la durée, puisque la loi de programmation militaire lui alloue 500 millions d’euros sur la durée de la programmation. Il est important qu’on puisse s’adapter sans cesse aux besoins qui s’expriment dans la communauté militaire. Donc je réponds que, sur le principe, le temps partiel n’est pas possible, parce que le statut militaire est unique. C’est ce qui fait sa force, donc il faut le préserver. Mais je crois qu’il ne faut pas non plus s’interdire de réfléchir à des solutions pragmatiques ; je suis très attachée à maintenir le dialogue sur ce sujet avec les différentes structures et organisations, notamment avec le conseil supérieur de la fonction militaire, avec lequel nous avons bâti le plan « Famille » et auquel je demande sans cesse de réfléchir aux évolutions qui lui paraîtraient souhaitables. En effet le plan doit être très évolutif, son seul objectif étant de répondre aux besoins des militaires établis.

La troisième question portait sur la cellule Thémis. Cette cellule a été créée, de façon pionnière, dès 2014, au sein du ministère de la Défense. C’est un dispositif assez unique et complet de lutte contre le harcèlement, les discriminations et les violences sexuelles ou d’origine sexiste. Son action concerne l’ensemble des personnels et comprend différents axes : un axe lié à la prévention prévoit le déploiement d’un plan de formation autour d’un tronc commun et s’adresse de façon très large à l’ensemble des personnels du ministère ; un deuxième axe consiste à traiter les cas connus du dispositif de signalement grâce à des cellules d’écoute et de traitement des personnes qui s’estiment victimes d’actes de harcèlement ou de discrimination. J’insiste sur le fait que ce dispositif situé hors hiérarchie fait remonter très rapidement et directement, y compris jusqu’à mon cabinet, les différents cas. Nous suivons de manière très précise chacun des cas, comme nous suivons les statistiques relatives à la réalisation des enquêtes de commandement que cette cellule diligente.

Nous appliquons le principe que je rappelais tout à l’heure, c’est-à-dire, d’une part, la prise en charge des victimes et, d’autre part, la sanction des auteurs – le tout s’inscrivant dans un contexte de tolérance zéro.

Quand on regarde l’activité de cette cellule depuis sa création, on constate qu’elle est assez stable jusqu’à présent. Il y a eu, suivant les années, entre 70 et 85 cas traités. Cette année, au premier semestre, les derniers chiffres montrent qu’il y avait 36 nouveaux dossiers ouverts, ce qui nous place dans l’ordre de grandeur des années précédentes. Il est intéressant de noter que la grande majorité des signalements sont faits par les femmes, environ 90 %, et que le harcèlement sexuel est l’infraction la plus déclarée.

Les atteintes à la vie privée font également partie des cas de signalement et renvoient à un phénomène malheureusement on ne peut plus courant, à savoir la captation et la diffusion d’images sans consentement. C’est l’un des motifs de saisine de la cellule Thémis qui va croissant.

J’ai eu l’occasion de dire précédemment que des sanctions sont prises – chaque fois que c’est approprié naturellement. Je voudrais saluer le fait que ces sanctions peuvent donner lieu par ailleurs à des poursuites judiciaires lorsque les faits le justifient. Je n’ai pas les chiffres sous les yeux, mais j’ai constaté que mon invitation en ce sens avait été suivie d’effets.

En ce qui concerne les réserves, chaque année, nous publions un bilan social qui est une mine d’informations et dont je vous recommande chaleureusement la lecture. Il fournit beaucoup de statistiques sur le nombre d’hommes et de femmes, par catégories d’emplois et de grades, en fonction des armes et des services, ainsi que des informations qui sont liées aux rémunérations… Il ne me semble avoir vu, dans la partie qui est dédiée à la réserve, de répartition statistique des réservistes entre hommes et femmes. Cela peut pourtant constituer une donnée intéressante. La preuve en est que vous avez posé la question. Je m’engage donc à ce que, dans le bilan qui sera fourni en 2018, nous nous attachions à fournir cette information qui nous donnera aussi un bon indicateur des évolutions de tendances affectant la réserve.

Mme Bérangère Couillard, corapporteure. Lorsqu’il y a des cas de harcèlement déclaré, il est souvent préconisé que, le temps de l’enquête, l’une des deux personnes impliquées soit mutée temporairement. Or, dans la majorité des cas, c’est souvent la victime qui fait l’objet de cette mutation temporaire. C’est donc double peine pour elle, parce que, non contente d’avoir – sûrement – été harcelée, elle se retrouve mutée. Je voulais donc savoir s’il y avait une volonté de pratiquer un peu autrement, lorsqu’il y a des cas de harcèlement déclarés.

Mme Bénédicte Taurine, corapporteure. Je voudrais revenir sur la cellule Thémis. S’agissant des agressions sexuelles, l’ouvrage La Guerre invisible, dont nous avons auditionné les auteures Julia Pascual et Leila Minano, a mis en évidence que ces agressions se passent notamment dans les moments de décontraction. Est-ce qu’il y a des mesures plus particulières qui peuvent être mises en œuvre pour lutter contre ces dérives qui s’observent en dehors du « temps de travail » ?

Je m’intéresse également à la problématique des violences sexuelles au sein des armées dans le cadre des opérations extérieures. Il y a parfois, dans les médias, des remontées d’informations sur des exactions qui seraient commises sur les femmes des populations civiles. Est-ce que vous pouvez me dire s’il existe des mesures qui permettent de prévenir ces violences potentielles de la part de nos forces armées sur des populations ? Que peut-on faire en termes de prévention ?

Mme Florence Parly, ministre des Armées. Lorsqu’un cas de harcèlement est signalé, ce n’est effectivement pas à la personne victime de subir, si je puis dire, cette double peine ; elle doit peser sur les fautifs – ou plutôt sur les fautifs présumés, compte tenu de la présomption d’innocence. La cellule Thémis, lorsqu’elle est saisie, s’efforce d’abord d’apporter tout l’accompagnement nécessaire à la victime et, par ailleurs, de prescrire l’éloignement de la personne qui est potentiellement l’auteur de ces actes. Voilà pour le principe.

Cela dit, votre question nécessiterait probablement une analyse plus circonstanciée des différents cas. Quoi qu’il en soit, je ne souhaite pas que ce soit la victime présumée qui subisse d’abord toutes les conséquences de la révélation de ce harcèlement. Il est déjà suffisamment difficile d’obtenir des victimes qu’elles déclarent les faits, même si nous vivons une période où la tendance à la déclaration va peut-être augmenter, parce qu’il y a une sorte de libération de la parole qui se produit.

Sur les circonstances dans lesquelles des actes répréhensibles peuvent avoir lieu, je ne doute pas qu’en effet, les temps « de vie » ou « de décontraction », pour reprendre une expression que vous avez utilisée, puissent être des moments pendant lesquels ces comportements peuvent avoir lieu. Nos consignes comportementales sont des consignes générales. Elles ne sont pas simplement applicables pendant les activités opérationnelles. Il est donc important que le commandement exerce son rôle dans tous les temps de la vie du militaire, qu’il soit en activité ou qu’il soit en garnison.

Je voudrais insister sur le fait que cela fait longtemps maintenant que nos soldats sont formés à la question très délicate que vous avez soulevée, à savoir celle du comportement à adopter vis-à-vis des populations civiles lorsqu’on est en opération. Des modules de formations spécifiques sont prévus. Ces formations portent d’ailleurs plus généralement, au‑delà de cette question spécifique, sur les droits de l’Homme. Elles sont obligatoires : lorsque l’on part en opérations extérieures, on a forcément suivi ce type de formation.

Par ailleurs, la cellule Thémis est également compétente pour tous les actes qui pourraient avoir été commis sur un théâtre extérieur. Il n’y a pas d’exclusion de périmètre qui pèserait sur la cellule Thémis. J’ajoute que, si les présumées victimes civiles s’identifient et se déclarent, la cellule Thémis pourrait également répondre à une telle saisine.

Mme la présidente Marie-Pierre Rixain. Madame la ministre, je vous remercie. Nous venons d’avoir des échanges passionnants qui montrent combien, tant du côté de l’exécutif que du législatif, nous sommes mobilisés sur ces sujets. C’est particulièrement important si nous voulons que nos armées gardent leur rang en Europe et au-delà.

Mme Florence Parly, ministre des armées. Je voulais terminer en soulignant l’engagement de nos chefs d’état-major sur les questions que je viens d’évoquer. Pour les avoir auditionnés, vous avez certainement mesuré combien elles sont essentielles à leurs yeux. Il me semble que c’est là un gage de réussite pour l’avenir.


II.   Personnes entendues par la Délégation

● Jeudi 5 juillet 2018 

– Mme Anne-Sophie Avé, directrice des ressources humaines du ministère des Armées, accompagnée de la capitaine de vaisseau Anne de Mazieux, chargée de mission « Mixité ».

● Jeudi 12 juillet 2018

– Mme le médecin en chef Chantal Roche, présidente de l’association « Avec les femmes de la défense » ;

– Mme le général de division Isabelle Guion de Meritens, vice-présidente de l’association « les femmes de l’intérieur ».

 

Les vidéos de ces auditions sont disponibles en ligne sur le site de la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes de l’Assemblée nationale, aux adresses suivantes : http://assnat.fr/CqAhbC et http://assnat.fr/TVvR3d.

III.   Personnes entendues par les rapporteures

● Jeudi 28 juin 2018

Armée de terre

– M. le général de corps d’armée Hervé Wattecamps, directeur des ressources humaines de l’armée de terre (DRHAT) ;

– M. le lieutenant-colonel David Pawlowski, assistant militaire du DRHAT ;

– M. le lieutenant-colonel Jobic Le Gouvello de La Porte, officier chargé des relations parlementaires de l’état-major de l’armée de terre.

● Mardi 3 juillet 2018

Armée de l’air

– M. le général Rony Lobjoit, directeur des ressources humaines de l’armée de l’air

– M. le lieutenant-colonel Marc d’Oria, assistant militaire du directeur des ressources humaines de l’armée de l’air.

Direction générale de la gendarmerie nationale

– M. le général de division Thierry Thomas, sous-directeur de la politique des ressources humaines ;

– Mme la lieutenante-colonelle Valérie Florent, référente égalité professionnelle et diversité ;

– Mme la cheffe d’escadron Sylvie Clément, référente égalité professionnelle et diversité.

● Mercredi 4 juillet 2018

État-major des armées

 M. le général de brigade Vincent Séverin, représentant le sous‑chef d’état‑major « Performance ».

Direction générale de l’armement

– Mme l’ingénieure générale de l’armement Florence Plessix, sous‑directrice de la politique et adjointe spécialisée Écoles et formations internationales.

Journalistes

– Mme Leïla Milano et Mme Julia Pascal, auteures de La guerre invisible, révélations sur les violences sexuelles dans l’armée française.

Direction centrale du commissariat des armées

– M. le commissaire général Stéphane Piat, directeur central ;

– Mme la commissaire principale Cécilia Caron.

Service de santé des armées

– Mme le médecin général des armées Maryline Gygax Genero, directrice centrale ;

– M. le médecin général Serge Cueff, sous-directeur « Ressources humaines ».

● Mercredi 12 septembre 2018

Marine nationale

– M. l’amiral Christophe Prazuck, chef d’état-major de la marine nationale ;

– M. le capitaine de vaisseau Antoine Vibert ;

– Mme l’enseigne de vaisseau Émilie Lahaye.

● Mardi 25 septembre 2018

Cellule Thémis

– M. le contrôleur général des armées Christian Giner, chef de la cellule Thémis.

● Mercredi 26 septembre 2018

IHEDN et école de guerre

– M. le général de corps d’armée Patrick Destremau, directeur de l’institut des hautes études de défense nationale et directeur de l’enseignement militaire supérieur.

 

Contribution écrite adressée par M. Jacques Witkowski, préfet, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises du ministère de l’Intérieur.

 


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   ANNEXE 2 : DÉplacements effectuÉs par les rapporteures

I.   Déplacement dans les Yvelines le 24 septembre 2018

● Région de gendarmerie d’Île-de-France

 M. le lieutenant-colonel Olivier Dubois, chef du bureau de l’accompagnement du personnel ;

 Mme la lieutenante Marie-Ange Détey, cheffe de la section protection fonctionnelle et du contentieux, chargée de projet égalité professionnelle et diversité.

● Groupement de gendarmerie départementale des Yvelines (GGD78)

 M. le colonel Loïc Baras, commandant le groupement de gendarmerie départementale des Yvelines ;

 M. le lieutenant-colonel Rémy Moulinier, commandant en second le groupement de gendarmerie départementale des Yvelines ;

 M. le capitaine Benjamin Delauche, chef du Groupe soutien ressources humaines GGD78 ;

 M. l’adjudant-chef Jean-Marc Girard, conseiller concertation du groupement de gendarmerie départementale des Yvelines ;

 Mme l’adjudante-cheffe Rachel Guérin, commandant la brigade de proximité de Guerville ;

 Mme la maréchale des logis cheffe Myriam Gimer, cheffe du service d’administration des personnels ;

 Mme la maréchale des logis cheffe Marie Maubey, adjointe du service logistiques finances ;

 Mme la gendarme Dany Martin, brigade de proximité de Septeuil ;

 Mme la maréchale des logis Mélanie Lequertier, services logistiques finances ;

 Mme la brigadière Laurène Hilaric, peloton d’autoroute de Saint-Arnoult.

● Groupement blindé de gendarmerie mobile (GBGM)

 M. le lieutenant-colonel Laurent Vanlantin, chef d’état-major du groupement blindé de gendarmerie mobile ;

 M. le chef d’escadron Alexandre Pascal, commandant l’escadron de gendarmerie mobile 11/1 ;

 M. l’adjudant-chef Patrice Tamburini, cellule prestations relations extérieures ;

 Mme la gendarme Cassandra Langlois, peloton d’intervention de l’escadron de gendarmerie mobile 11/1 ;

 M. le gendarme Manuel Bogat, 3e peloton de l’escadron de gendarmerie mobile 11/1 ;

 Mme la gendarme Sabrine El Kadiri-Boutchich, 2e peloton de l’escadron de gendarmerie mobile 11/1 ;

 Mme la gendarme Aurélie Cointot, 3e peloton de l’escadron de gendarmerie mobile 11/1.

● Groupe d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN)

 M. le général de brigade Laurent Phelip, commandant le GIGN et des personnels du GIGN.

II.   Déplacement à Brest les 1er et 2 octobre 2018

● Forces sous-marines

 M. le vice-amiral d’Escadre Bernard-Antoine Morio de l’Isle, commandant la force océanique stratégique (ALFOST) ;

 femmes membres des forces sous-marines, premières sous-marinières membres d’équipages de SNLE.

● Forces de surface

 M. le capitaine de vaisseau Romuald Bomont, commandant la force d’action navale de Brest ;

 M. le capitaine de vaisseau Jean-Marc Bordier, commandant la frégate européenne multi-missions (FREMM) Aquitaine ;

 Mme la maître principale Sabine Gaudron, cheffe de secteur systèmes d’information et de commandement, membre de l’équipage de l’Aquitaine ;

 Mme la quartier‑maître Nadia Chovet, membre de l’équipage de l'Aquitaine ;

 M. le premier maître Olivier Veri, membre de l’équipage de l'Aquitaine ;

 Mme la lieutenant de vaisseau Laura Serhal, cheffe de service lutte au‑dessus de la surface, membre de l’équipage de la frégate de lutte anti-sous-marine La Motte-Picquet ;

 Mme Charlotte Lafond, infirmière en soins généraux de premier grade membre de l’équipage de La Motte-Picquet ;

 Mme la maître Pauline Renard, spécialité navigation, représentante du personnel féminin, membre de l’équipage du chasseur de mines Pégase ;

 Mme la second maître Rachel Bodier, secrétaire du bord, gestionnaire de ressources humaines, membre de l’équipage du chasseur de mines l’Aigle ;

 Mme la second maître Ava Goujas, officière cheffe de quart navigation, membre de l’équipage du bâtiment remorqueur de sonars Altaïr ;

 Mme la second-maître Fanette Rullière, mécanicienne d’armes, membre de l’équipage du bâtiment d’expérimentations et de mesures Dupuy de Lôme ;

 Mme Fanny Soulier, infirmière en soins généraux de premier grade, membre de l’équipage du bâtiment hydro-océanographique Beautemps-Beaupré.

● Centre d’instruction navale

 Mme la capitaine de corvette Christelle Arinjaka, directrice adjointe de l’école de Maistrance ;

 Mme la second maître Rybicki, cadre de contact de l’école de Maistrance ;

 Mme la second maître Lossouarn, cadre de contact du lycée naval ;

 Mme la second maître Cornille, monitrice d’éducation physique et sportive à l’école de maistrance ;

 Mme Carole Thiroux, élève à l’école de Maistrance, spécialité navigation ;

 Mme Morgane Cam, élève à l’école de Maistrance, spécialité ressources humaines ;

 Mme Kivanui Arai, élève à l’école de Maistrance, spécialité ressources humaines ;

 Mme Julie Daniel, élève à l’école de Maistrance, spécialité détection.

III.   Déplacement à Orléans le 9 octobre 2018

 M. le lieutenant-colonel, commandant en second la Base Aérienne 123 « Commandant Charles Paoli » Orléans-Bricy ;

 Mme la lieutenante-colonelle, commandant l’escadron de soutien technique aéronautique A400M, présidente des officiers ;

 Mme la sergent-cheffe, membre de l’escadron de soutien des matériels d’environnement, cheffe de la section appui aux opérations ;

 Mme la caporale, agente d’opérations « dispatcher » au centre de soutien et d’administration des systèmes missions A400M ;

 Mme la capitaine, pilote, membre du centre d’instruction des équipages de transport ;

 Mme l’adjudante, interprétatrice linguiste arabe, membre de l’escadron électronique sol ;

 Mme la caporale-cheffe, secrétaire, membre de l’escadron de soutien et de ravitaillement technique ;

 Mme la caporale-cheffe, agente de prévention du péril animalier, membre de l’escadron de soutien circulation aérienne ;

 Mme l’ouvrière d’État, préventionniste, responsable sécurité routière, membre du bureau maîtrise des risques ;

 Mme la lieutenante, cheffe adjointe de l’escadron de soutien et de sécurité incendie ;

 Mme l’adjudante-cheffe, secrétaire au commando parachutiste de l’air n° 10, ancienne présidente des sous-officiers ;

 Mme la caporale-cheffe, gestionnaire des habilitations au bureau sécurité base, présidente des militaires du rang ;

 Mme la caporale-cheffe, logisticienne à l’escadron de transport 03.061 Poitou ;

 Mme l’aviatrice, équipière maître-chien en devenir, membre de l’escadron de protection ;

 Mme la secrétaire administrative de classe normale, bureau appui au commandant, cellule ressources humaines

 Mme la secrétaire administrative de classe supérieure, bureau interface des soutiens/maîtrise de l’activité, cellule pilotage performance et contrôle interne.

IV.   Déplacement à Angers le 10 octobre 2018

 M. le colonel, commandant le 6e régiment du génie ;

 M. le lieutenant-colonel, commandant en second ;

 M. le capitaine, commandant d’unité d’une compagnie de réserve ;

 M. le capitaine, commandant d’unité de la 22e compagnie ;

 Mme la lieutenante, adjointe du référent ressources humaines ;

 M. le lieutenant, chef de section Génie combat ;

 Mme l’adjudante-cheffe, chancelier ;

 Mme l’adjudante-cheffe, cheffe de groupe d’échelon et référente mixité ;

 Mme l’adjudante, responsable de la gestion logistique ;

 Mme la sergente, cheffe de groupe d’échelon ;

 Mme la caporale-cheffe, cheffe de la cellule secourisme ;

 Mme la caporale, radio tireur ;

 Mme la secrétaire du chef de corps.

 

 


([1]) Audition du 19 septembre 2018 – voir la vidéo.

([2]) Les femmes représentent 46 % des médecins. Elles sont majoritaires parmi les médecins de moins de 60 ans (52 %) ; in DREES, Études et Résultats, n° 1011, mai 2017.

([3]) Sur la place des femmes dans les secteurs scientifiques, on se reportera à C. Calvez et S. Viry, Rapport d’information n° 1016 sur les femmes et les sciences, fait au nom de la Délégation, 31 mai 2018.

([4]) La direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises compte près de 13 000 emplois de statut militaire, affectés à la brigade des sapeurs‑pompiers de Paris, au bataillon des marins‑pompiers de Marseille ou au sein des formations militaires de la sécurité civile (FORMISC).

([5]) Réponses écrites de l’armée de terre au questionnaire adressé par les Rapporteures.

([6]) Maryvonne Blondin, Les femmes dans les forces armées : promouvoir l’égalité, mettre fin aux violences fondées sur le genre, Rapport de la commission sur l’égalité et la non-discrimination, Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, 21 juin 2016.

([7]) Maryvonne Blondin, Les femmes dans les forces armées…, op. cit.

([8]) Loi du 11 juillet 1938 portant sur l’organisation de la Nation.

([9]) Les femmes dans la Résistance, Chemins de Mémoire - Ministère de la Défense.

([10]) Décret n° 51-1197 du 15 octobre 1951 portant statut du personnel des cadres militaires féminins.

([11]) « De quelques centaines en 1940, les effectifs militaires féminins en Indochine sont de l’ordre de 2 000, pour atteindre 6 000 à la fin de la guerre d’Algérie, dont plus d’un millier sur place en Afrique du Nord » : Élodie Jauneau, La féminisation de l’armée française pendant les guerres (1938-1962) : enjeux et réalités d’un processus irréversible, thèse de doctorat d’histoire sous la direction de Gabrielle Houbre, 2011, université Paris Diderot.

([12]) Michelle Perrot, « Sur le front des sexes : un combat douteux », Vingtième Siècle. Revue d’histoire, n° 3, juillet 1984.

([13]) La féminisation des armées, Établissement de communication et de production audiovisuelle de la Défense, Pôle des archives, mars 2010.

([14]) Loi n° 72-662 du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires.

([15]) Ils seront respectivement ouverts aux femmes en 1984 et 1975.

([16]) Décret du 23 mars 1973 portant statut particulier des corps féminins des armées.

([17]) Loi n° 75-1000 du 30 octobre 1975 portant statut général des militaires et édictant des dispositions concernant les militaires de carrière ou servant en vertu d’un contrat.

([18]) Décret du 18 février 1977 relatif aux dispositions statutaires applicables aux corps des officiers féminins des armées.

([19]) Loi n° 97-1019 du 28 octobre 1997 portant réforme du service national.

([20]) Décret n° 98-86 du 16 février 1998 modifiant divers décrets portant statuts particuliers de certains corps d'officiers et de sous-officiers et officiers mariniers des armées, de la gendarmerie et de la délégation générale pour l'armement.

([21]) Audition du 19 septembre 2018 – voir la vidéo de cette audition.

([22]) Nathalie Koulmann et Alexandra Malgoyre, « Les différences physiologiques homme-femme : quel impact sur l’aptitude physique au combat ? », Les Cahiers de la Revue Défense Nationale, actes du colloque « Femmes militaires et maintenant ? » organisé le 8 mars 2017 par l’Institut de recherche stratégique de l’École militaire.

([23]) Loi n° 2012‑347 du 12 mars 2012 relative à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique.

([24]) Audition du 5 juillet 2018 – revoir la vidéo.

([25]) Le réseau « Avec les femmes de la défense » est actuellement présidé par Mme le médecin en chef, Mme Dominique Roche, auditionnée le 12 juillet 2018 avec Mme le général de division Isabelle Guion de Méritens, vice-présidente de l’association « Les femmes de l’Intérieur » - revoir la vidéo.

([26])  Directive n° 544/DEF/IAT du 2 juin 2016.

([27]) Élu par ses pairs pour un « mandat » de deux ans renouvelable une fois, le président de catégorie est alors l’interlocuteur privilégié du chef de corps. Il assure un rôle de représentation et de conseil pour la catégorie concernée (officiers, sous-officiers, militaires du rang). Un président de catégorie est nécessairement élu dans chaque formation militaire de plus de 50 personnes

([28]) Circulaire n° 6988 du 1er février 2018.

([29]) La mission d’information a été constituée le 16 mai 2018 et MM. Bastien Lachaud et Christophe Lejeune en ont été désignés co-rapporteurs.

([30]) Circulaire n° 33000/GEND/DOE/SDAO/GEND du 12 décembre 2012.

([31]) Audition du 19 septembre 2018 – voir la vidéo.

([32]) Audition du 5 juillet 2018 – voir la vidéo de cette audition.

([33]) Ibid.

([34]) Audition du 19 septembre 2018 – voir la vidéo.

([35]) Audition du 19 septembre 2018 – voir la vidéo.

([36]) Note express n° 49 802 du 15 juillet 2014 relative à l’accompagnement du congé parental.

([37]) Article L. 9 du code des pensions civiles et militaires.

([38]) Étude d’impact du projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense.

([39]) Loi n° 2018‑607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense.

([40]) Audition du 19 septembre 2018 – voir la vidéo.

([41]) Audition du 5 juillet 2018 – voir la vidéo de cette audition.  

([42]) Audition du 5 juillet 2018 – voir la vidéo de cette audition.  

([43]) Rapport d’information n° 1016 de Mme Céline Calvez et M. Stéphane Viry sur les femmes et les sciences, 31 mai 2018.