N° 2537

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 18 décembre 2019.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES (1)

sur la conformité au principe de subsidiarité
de la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil
modifiant le règlement (UE) n° 1306/2013
en ce qui concerne la discipline financière à partir de l’exercice 2021
et le règlement (UE) n° 1307/2013
en ce qui concerne la flexibilité entre piliers pour l’année civile 2020
(COM(2019) 580 final)

ET PRÉSENTÉ

par M. André Chassaigne

Député

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(1)    La composition de la commission figure au verso de la présente page.


 

La Commission des affaires européennes est composée de : Mme Sabine THILLAYE, présidente ; MM. Pieyre-Alexandre ANGLADE, Jean-Louis BOURLANGES, Bernard DEFLESSELLES, Mme Liliana TANGUY, viceprésidents ; M. André CHASSAIGNE, Mme Marietta KARAMANLI, M.  Christophe NAEGELEN, Mme Danièle OBONO, secrétaires ; MM. Damien ABAD, Patrice ANATO, Mme Aude BONO-VANDORME, MM. Éric BOTHOREL, Vincent BRU, Mmes Fannette CHARVIER, Yolaine de COURSON, Typhanie DEGOIS, Marguerite DEPREZ-AUDEBERT, M. Benjamin DIRX, Mmes Coralie DUBOST, Françoise DUMAS, Frédérique DUMAS, MM. Pierre-Henri DUMONT, Alexandre FRESCHI, Bruno FUCHS, Mmes Valérie GOMEZBASSAC, Carole GRANDJEAN, Christine HENNION, MM. Michel HERBILLON, Alexandre HOLROYD, Mme Caroline JANVIER, MM. Christophe JERRETIE, Jérôme LAMBERT, Mmes Constance Le GRIP, Nicole Le PEIH, MM. Jean-Claude LECLABART, David LORION, Ludovic MENDES, Thierry MICHELS, Xavier PALUSZKIEWICZ, Damien PICHEREAU, JeanPierre PONT, Joaquim PUEYO, Didier QUENTIN, Mme Maina SAGE, MM. Benoit SIMIAN, Éric STRAUMANN, Mme Michèle TABAROT.

 


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SOMMAIRE

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 Pages

Introduction

I. Une proposition de règlement qui acte les distorsions de concurrence dans la mise en œuvre des systèmes de contrôle des aides de la politique agricole commune

A. Le système intégré de gestion et de contrôle (SIGC) prévoit une gestion partagée avec les États membres

B. loin d’être bien rodé, ce système repose à l’excès sur les États membres, ce qui entraîne d’importantes difficultés de gestion sans perspective de simplification

1. Un système régulièrement mis en défaut et accroissant potentiellement les distorsions de concurrence dans l’application des contrôles

2. La présente proposition de règlement européenne devrait harmoniser les contrôles, notamment dans le cadre d’un possible réexamen du soutien couplé facultatif

II. Une proposition de règlement qui introduit les plans stratégiques nationaux avant même l’adoption de la politique agricole commune post-2020

A. Le projet de la commission européenne pour la pac post-2020 fait peser le risque d’une renationalisation partielle

B. Une période de transition qui introduirait le concept de « plans stratégiques »

Conclusion

TRAVAUX DE LA COMMISSION

Proposition de rÉsolution europÉenne initiale

Annexes

Annexe n°1 : Lettre de Mme la Présidente de la commission des Affaires européennes au Ministre de l’agriculture et de l’alimentation

Annexe n° 2 : Note du rapporteur au Ministre de l’agriculture et de l’alimentation

Annexe n° 3 : Réponse du Ministère de l’agriculture et de l’alimentation à la note du rapporteur


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   Introduction

 

 

Mesdames, Messieurs,

Les discussions autour de la future politique agricole commune (PAC) prennent un retard tel que la Commission européenne a été contrainte de proposer deux règlements européens ([1]) qui doivent permettre « d’assurer la sécurité et la continuité du soutien aux agriculteurs européens » ([2]). Ces propositions de règlements sont rendues nécessaires par le fait que les règlements européens encadrant la PAC 2014-2020 ([3]) ne seront plus opérationnels pour l’année civile 2021, ce qui peut conduire à mettre à mal la continuité des paiements des aides du premier comme du second pilier de la PAC.

Votre Rapporteur ne conteste pas la nécessité d’une transition harmonieuse vers la nouvelle PAC. Toutefois, il alerte sur l’incertitude qui pèse sur les agriculteurs et l’avenir des exploitations, qui dépendent de la pérennité des aides de la PAC. Alors que la Commission européenne a proposé une réduction du budget de la PAC, l’incertitude sur la forme que prendra la nouvelle PAC est un facteur supplémentaire de risque de déstabilisation économique des exploitations.

En outre, votre Rapporteur considère, dans la lignée de la résolution européenne adoptée par l’Assemblée nationale en août 2018 ([4]), que le règlement COM(2019) 580 final ici examiné pose d’ores et déjà les bases d’une renationalisation partielle de la PAC et acte des éléments fondateurs de la nouvelle PAC proposée par la Commission européenne et qui apparaissent non conformes au principe de subsidiarité.

Cette proposition de règlement européen a pour objet principal de prévoir des règles transitoires de flexibilité entre les deux piliers de la PAC pour l’année 2021.

En particulier, deux éléments paraissent mériter d’être contestés à ce titre :

– d’abord, la proposition de règlement européen maintient le cadre actuel de contrôle des aides qui s’appuie sur « les systèmes bien rodés déjà mis en place par les États membres » ([5]), ce qui pourrait amplifier les distorsions de concurrence dans la gestion des contrôles entre les États membres ;

– ensuite, la proposition de règlement européen indique que les nouvelles dotations financières pour 2021 « doivent être réaffectées aux dotations du plan stratégique relevant de la PAC pour la période 2022-2025 », sans que le système des plans stratégiques n’ait encore été adopté.

Le présent rapport d’information s’inscrit dans le cadre des prérogatives conférées à l’Assemblée nationale par l’article 88-6 de la Constitution. Le respect du principe de subsidiarité est en outre une obligation prévue par l’article 5 du Traité sur l’Union européenne. Son contrôle par les parlements nationaux est pour sa part prévu à l’article 6 du protocole n° 2 qui lui est annexé.

Ce contrôle doit intervenir dans un délai de huit semaines à compter de la publication du texte dans la totalité des langues de l’Union. En l’espèce, l’échéance est fixée au 7 janvier 2020. Si un nombre suffisant de parlements nationaux émet un avis motivé constatant une atteinte au principe de subsidiarité, alors la Commission européenne est obligée de procéder à un réexamen du texte. Le minimum est d’un tiers mais les obligations de réexamen sont renforcées pour les propositions d’actes législatifs qui font l’objet d’un avis motivé de la part de la moitié au moins des parlements nationaux.

En l’espèce, votre Rapporteur considère que la Commission européenne délègue un volume trop important de compétences, en particulier en matière de contrôle, aux États membres (I) et acte des dispositions qui se basent sur son projet de PAC post-2020 qui n’est toujours pas adopté et que l’Assemblée nationale a déjà jugé contraire au principe de subsidiarité en août 2018 (II).

 


I.   Une proposition de règlement qui acte les distorsions de concurrence dans la mise en œuvre des systèmes de contrôle des aides de la politique agricole commune  

A.   Le système intégré de gestion et de contrôle (SIGC) prévoit une gestion partagée avec les États membres

Le système intégré de gestion et de contrôle (SIGC) permet de contrôler les aides du premier pilier de la PAC (paiements directs du Fonds européen agricole de garantie, FEAGA) et les aides surfaciques du second pilier (Fonds européen agricole de développement rural, FEADER).

L’objectif du SIGC est de détecter d’éventuelles irrégularités et de s’assurer de la conformité des aides versées. Il permet également de récupérer les montants indûment versés et d’aider les agriculteurs à présenter des demandes correctes.

Si le SIGC fournit effectivement plusieurs « bases de données numériques et interconnectées » ([6]), ce sont les États membres, au travers d’organismes payeurs agréés, qui mettent effectivement en œuvre les contrôles administratifs.

En France, l’Agence de service et de paiements (ASP) du Ministère de l’agriculture et de l’alimentation est agréée en tant qu’organisme payeur pour les dépenses du FEAGA et du FEADER. Toutefois, les tâches d’instruction et de contrôle des demandes d’aides sont déléguées aux directions départementales des territoires et de la mer (DDT[M]).

En ce qui concerne le FEADER, les régions sont devenues autorités de gestion pour l’ensemble des aides, mais l’État reste le garant de la définition du cadre national pour une partie importante des aides des régions. L’État assure également une grande partie du cofinancement des programmes de développement rural régionaux (PDRR).

B.   loin d’être bien rodé, ce système repose à l’excès sur les États membres, ce qui entraîne d’importantes difficultés de gestion sans perspective de simplification

1.   Un système régulièrement mis en défaut et accroissant potentiellement les distorsions de concurrence dans l’application des contrôles

La présente proposition de règlement européen pérennise le système du SIGC qui est qualifié par sa fiche financière législative de « bien ro » tel que mis en place par les États membres. La proposition mentionne également des « faibles taux d’erreur » ces dernières années.

Or, le rapport de la Cour des comptes de juin 2018 chiffrait les refus d’apurement des aides européennes de la PAC pour la France à 2,35 milliards d’euros entre 2007 et 2016 ([7]). Ainsi, même en France, ce système n’offre pas, selon vos Rapporteurs, une « assurance raisonnable », contrairement à ce qu’indique la présente proposition de règlement européen.

En outre, la Cour des comptes européenne avait montré dès 2013 ([8]) que les informations fournies à la Commission européenne par les États membres en matière de dépenses agricoles n’étaient « pas fiables », et qu’en conséquence « les organismes de certification ne fournissent pas une assurance suffisante quant au caractère approprié des contrôles sur place ni quant à la fiabilité des rapports statistiques ».

Enfin, le SIGC exclut de son champ de compétence les aides « non surfaciques » du second pilier (investissement, installation, actions forestières, indemnisations de prédation), ce qui en réduit la portée générale.

2.   La présente proposition de règlement européenne devrait harmoniser les contrôles, notamment dans le cadre d’un possible réexamen du soutien couplé facultatif

La présente proposition prolonge la flexibilité budgétaire entre les deux piliers de la PAC et offre aux États membres la possibilité de réexaminer, jusqu’à fin 2019, le pourcentage de leur plafond national applicable aux paiements directs qu’ils souhaitent allouer au soutien couplé facultatif (SCF).

S’il est effectivement nécessaire de prolonger cette possibilité au regard de l’impact possible du transfert entre piliers jusqu’à la fin de l’année 2019 sur le plafond national, votre Rapporteur considère que ce possible réexamen du SCF et la perspective d’étendre la flexibilité entre les piliers rendent absolument indispensables l’harmonisation des contrôles et l’introduction d’une véritable gestion européenne uniforme, ce qui n’est pas aujourd’hui le cas.

En outre, aucune perspective de simplification du système n’est envisagée, ce qui pose un problème de « partage des responsabilités entre les acteurs de la chaîne de paiement » ([9]), rendant donc extrêmement complexe le suivi des contrôles.

Le principe de subsidiarité est ici en cause, notamment parce qu’il est probable que ces contrôles seraient effectués plus uniformément par des autorités européennes que par les États membres. La possible délégation des contrôles à des échelons administratifs inférieurs aggraverait encore la situation de distorsion de concurrence dans leur mise en œuvre, pouvant conduire au constat d’une rigueur à géométrie variable. A minima, un protocole uniformisé de contrôle devrait être mis en place pour garantir leur harmonisation.

Aujourd’hui, seul le « registre parcellaire graphique » (RPG), partie intégrante du SIGC, est commun à tous les États membres en matière de contrôle. Le RPG comporte les informations nécessaires au paiement des aides directes du premier pilier et des mesures de développement rural du FEADER accordées sur la base du nombre d’hectare ou d’animaux détenus. Le RPG est composé de plusieurs éléments :

– un « système d’identification des parcelles agricoles » (SIPA) ;

– la demande d’aide géo-spatiale, permettant aux agriculteurs d’indiquer les surfaces pour lesquelles une demande d’aide est formulée ;

– une base de données informatisée des animaux ;

– un système de contrôle intégré pour une vérification systématique des demandes d’aides.

La partie « contrôle » du SIGC est donc largement dévolue aux États membres, dans le cadre de la nomenclature établie par les outils du RPG. Alors que la présente proposition étend le principe de flexibilité entre piliers pour 2021 et qu’aucune perspective de réforme et de simplification de ce système n’est prévue, votre Rapporteur considère que le « statu quo » prévu par cette proposition en matière de contrôle est incompatible avec le principe de subsidiarité.

En se défaussant d’une partie de ses responsabilités, en laissant aux États membres des marges de manœuvre démesurée et en n’offrant pas de cadre harmonisé et contraignant pour les contrôles, l’Union européenne contrevient au principe de subsidiarité.

 


II.   Une proposition de règlement qui introduit les plans stratégiques nationaux avant même l’adoption de la politique agricole commune post-2020

A.   Le projet de la commission européenne pour la pac post-2020 fait peser le risque d’une renationalisation partielle

Le 1er juin 2018, la Commission européenne a publié une proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant des règles régissant l'aide aux plans stratégiques devant être établis par les États membres dans le cadre de la politique agricole commune (PAC) ([10]) et financés par le Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et par le Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER).

Cette proposition de règlement européen a suscité l’opposition et l’inquiétude de nombreux États membres. Elle viserait ainsi à satisfaire l’exigence de simplification en déléguant une part accrue des responsabilités aux États membres et en prévoyant d’augmenter leur capacité à adapter ces aides à leurs réalités locales, au travers de « plans stratégiques » que ces derniers définiraient et que la Commission contrôlerait.

L’objectif général est de centrer les aides de la PAC non plus sur « les règles et la conformité », mais sur les « résultats et la performance ». Ainsi, « le fait de passer d’une approche universelle à une approche sur mesure rapprochera la politique de ceux qui en assument la mise en œuvre sur le terrain » ([11]). La Commission ne précise pas encore pour autant les objectifs communs que l’Union européenne pourrait définir, en se limitant à de vagues concepts. Elle n’a fait aucune proposition en ce qui concerne les indicateurs de performance et les outils d’évaluation des résultats. Le rapport d’information sur une agriculture durable pour l’Union européenne, présenté en mai 2018 ([12]), avait montré à quel point cette évaluation de la performance et des résultats dans l’agriculture était complexe à mettre en œuvre.

Or, les Rapporteurs MM. Alexandre Freschi et André Chassaigne avaient considéré, dans leur rapport d’information et leurs résolutions européennes de juillet et août 2018 ([13]), que cet objectif remettait en cause le caractère intégré de la PAC. Celle-ci deviendrait une simple politique coordonnée au niveau de l’Union, voire à terme quasiment nationalisée.

B.   Une période de transition qui introduirait le concept de « plans stratégiques »

Alors que les débats européens sont encore en cours et que le principe des « plans nationaux » reste contesté, la Commission européenne indique, dans la présente proposition de règlement européen, que si les nouvelles dotations pour 2021 étaient inutilisées, elles devraient être « réaffectées aux dotations du plan stratégique relevant de la PAC pour la période 2022-2025 » ([14]). Or, votre Rapporteur considère qu’il n’est pas possible de se baser sur des plans stratégiques encore totalement hypothétiques.

Cette proposition montre que la Commission européenne ne prévoit pas une véritable période de transition vers la nouvelle PAC et se base sur des éléments encore en discussion. Cette absence de vision stratégique, même à court terme, peut être interprétée comme une forme d’aveu de la part de la Commission européenne de son incapacité à piloter véritablement la PAC. 

Face au blocage de son projet au Conseil et plutôt qu’une transition au « coup par coup », conduisant à une grande incertitude pour les agriculteurs européens, il apparaît indispensable que la Commission européenne allonge la période de transition à au moins deux ans (2021 et 2022), avec des règles claires, afin de laisser le temps aux institutions européennes d’adopter la prochaine PAC.


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   Conclusion

Votre Rapporteur considère indispensable que l’Assemblée nationale se saisisse de la présente proposition de règlement européen, dans la lignée du vote de la résolution européenne d’août 2018. Il faut en effet être extrêmement attentif à ce que la flexibilité entre piliers et l’ajout de nouvelles dotations pour 2021 ne se fasse pas sans contrôles réels et n’introduise pas de distorsions potentielles de concurrence.

L’exigence de continuité des aides aux agriculteurs ne peut se faire au détriment d’une bonne répartition des compétences entre les États membres et l’Union européenne et ne doit pas être l’occasion pour la Commission européenne d’introduire d’ores et déjà les « plans stratégiques », sans que les débats européens n’aient abouti.

En effet, votre Rapporteur considère que la PAC post-2020 telle que proposée par la Commission européenne serait également contraire au principe de subsidiarité, en ce qu’elle induirait une renationalisation partielle de la politique agricole.

Ainsi, afin de respecter le principe de subsidiarité qui implique que l’Union assure pleinement les compétences qui sont mieux réalisées à son échelle, votre Rapporteur demande que :

– l’Union européenne assure a minima une véritable uniformité des contrôles des aides de la PAC ;

– la Commission européenne retire, jusqu’à leur éventuelle adoption, toute mention des « plans stratégiques », qui ne sont aujourd’hui qu’à l’état de propositions ;

L’attention portée à chaque proposition de règlement européen, même celles visant à instaurer un régime transitoire, paraît indispensable pour que l’Union européenne ne se défausse pas de ses responsabilités.

 

 


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   TRAVAUX DE LA COMMISSION

 


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   Présentation du rapport d’information et
examen de la proposition de résolution européenne portant avis motivé sur la conformité
au principe de subsidiarité de la proposition de règlement européen sur la flexibilité entre
les piliers de la politique agricole commune pour 2020

Mercredi 11 décembre 2019

M. André Chassaigne, rapporteur. Madame la Présidente, chers collègues, je vous présente aujourd’hui une proposition de résolution européenne portant avis de non conformité au principe de subsidiarité d’une proposition de règlement européen. Il s’agit du texte COM(2019) 580 final qui a notamment pour objectif de pérenniser pour l’année 2021 la flexibilité entre les deux piliers de la politique agricole commune (PAC).

Il s’agit d’un texte technique, dont l’objectif fondamental ne pose évidemment aucun problème. Ce texte vise à opérer une transition vers la nouvelle PAC pour laquelle les discussions s’éternisent. Toutefois, ce texte me paraît mériter l’attention et l’action de notre commission au titre des prérogatives qui lui sont conférées par l’article 88-6 de la Constitution, pour deux motifs que je vais détailler très rapidement.

D’abord, je veux attirer l’attention sur le fait que, si ce texte pérennise la flexibilité des aides, il considère également que le système intégré de gestion et de contrôle (SIGC), mis en place au niveau européen, offre, je cite, des « garanties suffisantes ». Ce SIGC se base largement sur les États membres pour effectuer les contrôles et la proposition de texte européen considère tout cela comme, je cite, « bien rodé ». Or il n’en est rien !

Je m’inscris en cela dans la logique que nous avions développée, avec mon collègue Alexandre Freschi, dans la dernière résolution européenne que nous avions soumise à notre commission en juillet 2018. Par cette résolution, nous considérions que le projet de nouvelle PAC était contraire au principe de subsidiarité parce qu’il déléguerait de trop nombreuses compétences aux États membres. L’Union doit agir lorsque son action est plus efficace que celle des États !

Ici, c’est la même chose : cette proposition de texte confirme expressément le SIGC qui, en se basant à l’excès sur les États membres, fait courir des risques de contrôles à géométrie variable. Et c’est déjà le cas : la Cour des comptes a montré que 2,35 milliards d’euros de dépenses agricoles entre 2007 et 2016 n’avaient pas été utilisés dans les règles par la France. Surtout, la Cour des comptes européenne a clairement établi dès 2013 que les informations fournies à la Commission européenne par les États membres n’étaient, je cite, « pas fiables ». Nous ne pouvons plus laisser perdurer ce système injuste et faillible que la Commission européenne considère comme « bien rodé ».

Ensuite, il y a un second motif d’action selon moi. Dans cette proposition, la Commission européenne mentionne très directement son projet de plans stratégiques nationaux que notre commission avait déjà contesté en juillet 2018 et qui avait fait l’unanimité contre lui lors de notre réunion avec nos collègues du Sénat et du Parlement européen en octobre dernier. En effet, ces plans constitueraient une renationalisation partielle de la PAC, pouvant également entraîner de graves distorsions de concurrence, d’autant plus dans le contexte que je viens de décrire, où l’octroi des aides est aussi mal contrôlé.

Dans la présente proposition de texte, la Commission européenne explicite ainsi que les nouvelles dotations prévues pour 2021, et qui seraient non-utilisées, pourraient être, je cite, « réaffectées aux dotations du plan stratégique relevant de la PAC pour la période 2022-2025 ». Or, rien n’est acté ! La Commission développe des projets qui se basent directement sur un élément en cours de discussion et qui est loin de susciter le consensus. Ainsi, il me paraît indispensable de rappeler à la Commission européenne notre opposition aux plans stratégiques nationaux, et surtout qu’elle ne peut pas introduire avant son adoption l’idée de ces plans stratégiques.

Pour ces deux raisons, mes chers collègues, je pense que notre commission devrait déclarer ce texte non-conforme au principe de subsidiarité, notamment pour continuer à faire entendre la voix des parlements nationaux dans la réforme de la PAC et envoyer un message clair à la Commission européenne.

Je pense que la Commission européenne devrait prévoir une véritable période de transition ‑ qui s’annonce longue ‑ avec des règles claires et des perspectives d’amélioration et de simplification du système de contrôle des aides, qui doit être le même pour tous.

M. Alexandre Freschi. Cela fait en effet vingt mois que nous travaillons sur cette question avec André Chassaigne. L’analyse de ce rapport d’information fait cependant appel à quelques observations : je pense notamment aux défaillances citées dans le rapport, par référence à une analyse de la Cour de comptes de 2018 qui portait sur l’exercice de financement de la PAC 2015-2016 et qui pointait les défaillances du SIGC. La Cour des comptes chiffrait alors les refus d’apurement des aides de la PAC à 2,35 milliards d’euros entre 2007 et 2016. Si ce constat mérite d’être souligné, il convient de noter que ces défaillances ont depuis été résorbées. Dès lors, je vous propose d’aborder plus en profondeur ce sujet lorsque nous discuterons de la proposition de résolution.

Les retards de paiement des aides du premier pilier et de l’indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN) ont été complètement résorbés en 2018, avec un paiement du solde de la campagne 2018 au 15 décembre 2018. Pour l’année 2019, les avances au titre des aides directes de la PAC et de l’indemnité compensatoire de handicaps naturels ont été versées le 16 octobre 2019. Au regard de ces éléments, je demande, au nom de mon groupe, que l’examen de la proposition de résolution européenne soit reporté.

Par ailleurs, la proposition de règlement de la Commission objet du rapport d’information avait un objectif simple : pérenniser pour l’année 2021 la flexibilité entre les deux piliers de la PAC, afin d’opérer une transition efficace vers la nouvelle PAC. André Chassaigne y a perçu une contrariété au principe de subsidiarité. Les arguments invoqués dans le rapport d’information nécessitent d’être approfondis. Il soutient que les plans stratégiques nationaux mèneraient à une trop faible implication de l’Union. Or de nouveaux éléments techniques montrent qu’il s’agit d’avantage d’une nouvelle dénomination attribuée au cadre national de programmation existant que d’un réel changement qui mènerait à la renationalisation partielle évoquée dans le rapport.

Je tiens à souligner la grande qualité du travail d’André Chassaigne, qui pousse notre commission à se questionner sur cet enjeu primordial qu’est la PAC. Je demande malgré tout que l’examen de la proposition de résolution européenne soit reporté à la semaine prochaine, afin que nous puissions approfondir ce sujet.

 

L’exposé du rapporteur a été suivi d’un débat.

 

M. Jean-Louis Bourlanges. Ce rapport d’un très grand intérêt pose un problème fondamental, que l’on retrouve à tous les niveaux de la mise en œuvre de la politique européenne : les États appliquent de manière extrêmement différente les principes communs. Ces différences peuvent occasionner des distorsions de concurrence considérables.

Je suis très sensible à l’argumentation développée par le rapporteur, mais la question posée l’est aussi au Gouvernement. Je ne souhaite pas un report de l’examen de ce texte qui ne serait qu’une manœuvre dilatoire, mais, avant de me prononcer, je souhaiterais connaître la position du Gouvernement. C’est un sujet sur lequel le ministre de l’agriculture devrait venir s’exprimer devant nous. Comment le gouvernement et l’administration française perçoivent-ils les problèmes légitimement soulevés par André Chassaigne ?

On devrait approfondir la question, également pour se demander ce que l’on veut modifier. On voit bien que le système n’est pas satisfaisant. C’était déjà le cas tout à l’heure au sujet de l’indépendance de l’expertise : nous avons bien vu que les instances européennes étaient entièrement dépendantes des moyens des États et que ceux-ci abordaient ces questions avec des moyens et des doctrines extrêmement hétérogènes, sources de distorsions de concurrence.

Nous devrions entendre le ministre et le questionner de façon précise sur les raisons pour lesquelles il serait amené à cautionner ce règlement et à ne pas porter le fer là où il doit être porté.

Mme la Présidente Sabine Thillaye. Nous devons entendre le ministre de l’agriculture le 14 janvier.

M. Jean-Louis Bourlanges. Nous serons hors délais pour l’examen de la proposition de résolution !

Mme la Présidente Sabine Thillaye. Si le rapporteur est d’accord pour repousser l’examen de la proposition de résolution à la semaine prochaine, nous resterons dans les délais de la subsidiarité. Nous ne pouvons pas la repousser au-delà de cette date, car elle doit également être examinée par la commission des affaires économiques avant l’interruption de nos travaux.

M. Jean-Louis Bourlanges. Le ministre est à la disposition de la représentation nationale. Nous avons un problème important, des délais contraignants, le ministre peut venir sans attendre le 14 janvier.

Mme la Présidente Sabine Thillaye. Nous auditionnerons la semaine prochaine la secrétaire d’État aux affaires européennes, elle pourra peut-être nous éclairer sur cette question.

M. André Chassaigne, rapporteur. Je suis tout à fait favorable à ce que l’on reporte l’examen de la proposition de résolution à la semaine prochaine, mais il faut prendre garde au problème du délai. Si la proposition de résolution n’est pas votée la semaine prochaine à la fois par notre commission et par la commission des affaires économiques, la procédure tombera à l’eau.

Je voudrais citer quelques avis qui ont alimenté ma réflexion.

Irène Tolleret, membre du groupe Renew Europe au Parlement européen, a exprimé, avec plusieurs de ses collègues, des réserves à la suite de la présentation des deux propositions de règlements, en estimant qu’il vaudrait mieux planifier deux années de transition au lieu d’une. Je la cite : « Un an, ce n’est pas réaliste, je ne vois pas comment la nouvelle PAC serait mise en application en 2022. Prenons le temps de nous organiser, il faut que les États membres puissent travailler sur la nouvelle PAC et s’approprier la réforme. » C’est un point que je reprends : il faut demander à la Commission européenne de se donner le temps au lieu d’approuver ce règlement dans la rapidité. Elle ajoutait : « Il faut se donner du temps, pour ne pas générer de stress et de retards de paiement pour les agriculteurs. »

Je rapporte aussi les propos tenus par Phil Hogan, alors Commissaire européen à l’agriculture, lors de la réunion du Conseil Agriculture du 18 novembre dernier, à propos de ces propositions de règlement : « Je ne vois pas comment cela pourrait relever l’ambition environnementale de la PAC. »

Enfin, Alexandre Freschi a souligné que la France avait résorbé ses défaillances. Mon objectif n’était pas de mettre en cause la France, qui fait très bien son travail, mais je suis très dubitatif sur le fait que ces défaillances n’existent pas dans d’autres pays de l’Union européenne. Si nous laissons passer ce texte, pour la prochaine PAC, non seulement nous ne reviendrons pas en arrière, mais, dans le cadre d’une forme de renationalisation, les distorsions de concurrence seront aggravées.

Je vous cite un article lu dans l’Auvergne agricole : « Treize pays auraient accordé des dérogations pour l’utilisation des néonicotinoïdes, alors que les planteurs allemands doivent utiliser des produits plus chers et moins efficaces, avec des pertes de rendement et au bout du compte une érosion des marges. » Avec les planteurs de betterave allemands, on a bien un exemple de distorsion de concurrence du fait de dérogations accordées de façon abusive au détriment des productions des États européens plus stricts en termes de protection environnementale.

M. Alexandre Holroyd. Je remercie le rapporteur pour ce rapport remarquable. Sa conclusion principale me paraît essentielle : il y a une impérieuse nécessité d’assurer une transition harmonieuse avec la prochaine PAC et d’éliminer les incertitudes. À la suite des commentaires de Jean-Louis Bourlanges, je fais deux suggestions.

Je suis conscient de la contrainte de délai, mais s’il y a consensus pour examiner la proposition de résolution en début de semaine prochaine, nous pourrions aboutir à des conclusions avec lesquelles nous serions tous à l’aise tout en restant dans les délais.

Ma deuxième suggestion est liée au problème d’agenda qui a conduit à reporter l’audition du ministre de l’agriculture après l’examen de la proposition de résolution. Je souhaiterais que notre Présidente puisse, au nom de la commission, écrire au ministre de l’agriculture pour lui demander des explications précises par écrit d’ici mardi prochain, si nous ne pouvons l’entendre d’ici là. Cela nous permettrait d’examiner la proposition de résolution en toute connaissance de cause.

M. André Chassaigne, rapporteur. Je précise que mon objectif n’est évidemment pas d’affaiblir la position de la France, mais de faire en sorte que sa parole soit partagée par les députés, les sénateurs, les représentants au Parlement européen et le gouvernement. Je préfère que nous trouvions un texte qui nous rassemble plutôt que d’essuyer un refus sur la proposition de résolution que je vous ai soumise, ce qui serait contreproductif.

M. Alexandre Freschi. Je remercie le rapporteur d’accepter que nous puissions travailler de manière collégiale et efficace sur cette proposition de résolution européenne, d’autant plus que, jusqu’à présent, nous avons toujours travaillé dans le consensus sur cette question qui est à la fois politique et stratégique.

En réaction aux propos d’Irène Tolleret, il est vrai qu’un an, c’est court pour mettre en œuvre un dispositif aussi complexe que la PAC, mais nous avons aussi besoin de réduire le temps d’attente pour les agriculteurs et d’avoir un vrai cadre stratégique pour l’agriculture et l’alimentation au niveau européen.

Mme la Présidente Sabine Thillaye. Merci à notre rapporteur d’avoir réalisé une veille attentive sur les textes qui nous sont soumis. Je le fais également de mon côté, mais je vous invite tous, en fonction de vos spécialités, à signaler les textes dont nous devrions nous préoccuper plus spécialement.

Pour résumer nos échanges, je propose que nous examinions la proposition de résolution le mardi 17 décembre à 17 heures, quinze minutes avant l’audition d’Amélie de Montchalin. Je demanderai au Président Roland Lescure de bien vouloir l’inscrire à l’ordre du jour de la commission des affaires économiques le mercredi 18 décembre. Le 14 janvier, nous pourrons poser les questions qui nous préoccupent à Didier Guillaume.

M. Jean-Louis Bourlanges. Je suis tout à fait d’accord avec ces conclusions. Je crois qu’il faut prendre en compte ce que vient de proposer M. Holroyd, et que Mme de Montchalin a tout à fait les compétences pour nous répondre. Je suggère donc que Mme la Présidente fasse cette lettre en notre nom à M. Guillaume, et qu’elle soit également communiquée à Mme de Montchalin. Elle pourra ainsi nous apporter des éléments substantiels d’information lors de cette réunion. Puisque M. Guillaume ne peut pas venir avant le 14 janvier, il faut profiter du fait que la compétence de Mme de Montchalin porte sur l’ensemble des sujets européens. Je suis sûr qu’elle abordera le sujet au fond lorsqu’elle viendra la semaine prochaine.

Mme la Présidente Sabine Thillaye. J’adresserai, par conséquent, un courrier au ministre de l’Agriculture, afin qu’il nous fasse part de la position du Gouvernement sur cette proposition de résolution avant l’examen du texte.

 


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   SUITE DE LA Présentation du rapport d’information et
examen de la proposition de résolution européenne portant avis motivé sur la conformité
au principe de subsidiarité de la proposition de règlement européen sur la flexibilité entre
les piliers de la politique agricole commune pour 2020

Mardi 17 décembre 2019

Mme la Présidente Sabine Thillaye. À la suite de notre discussion de la semaine dernière, j’ai adressé au ministre de l’agriculture une lettre lui demandant des éléments d’information en réponse aux interrogations de notre rapporteur. Ces éléments vous ont été distribués.

Je donne la parole aux représentants des groupes pour leurs explications de vote sur la proposition de résolution européenne.

M. Alexandre Freschi. Étant contraint par le temps, je renvoie aux éléments que j’ai indiqués la semaine dernière à la lecture de la proposition de résolution européenne de M. Chassaigne. En particulier, avec le recul, je ne pense pas que l’on puisse parler de renationalisation de la PAC, comme le fait M. Chassaigne, à propos des plans stratégiques nationaux. Au nom de la République en marche, j’invite mes collègues à voter contre la proposition de résolution.

M. Jean-Louis Bourlanges. Sur quoi notre vote porte-t-il ? Sur la proposition de M. Chassaigne qui se termine par « estime que le texte proposé est contraire au principe de subsidiarité » ?

Il est extrêmement gênant d’avoir à se prononcer pour ou contre sans avoir les réponses à l’excellent mémo que la Présidente a envoyé au ministre. En quoi sommes-nous tenus par des délais ? Que se passe-t-il si nous ne nous prononçons pas aujourd’hui ?

Mme la Présidente Sabine Thillaye. Aujourd’hui est le dernier délai pour nous prononcer, puisque nous sommes soumis à un délai de huit semaines. La réponse du ministre nous est parvenue aujourd’hui, a été distribuée au début de la réunion et se trouvera en annexe du rapport d’information.

M. André Chassaigne, rapporteur. Je réponds tout d’abord à Alexandre Freschi. Le rapport que j’ai signé se situe dans la droite ligne du travail que nous avons réalisé ensemble. Il n’y a pas de changement d’orientation par rapport aux analyses que nous avions faites des évolutions de la politique agricole commune, ni par rapport à la proposition de résolution que nous avons déjà votée.

Mon rapport et la proposition de résolution sont également dans la droite ligne des réflexions que nous avons menées lors de notre réunion du 30 octobre avec les sénateurs et les membres du Parlement européen, et des orientations que nous souhaitions donner à la position de la France dans les réflexions sur l’évolution de la PAC. S’il y a changement d’orientation, il ne vient pas de moi.

Pour ce qui concerne les questions soulevées dans mon rapport et dans la note adressée au gouvernement, les réponses qui nous sont parvenues aujourd’hui ne contiennent pas d’éléments venant contredire ce que j’ai pu écrire. Le Gouvernement ne répond pas sur le système intégré de gestion et de contrôle, ce qui signifie qu’il n’est pour le moment pas prévu de le faire évoluer. Nous considérions unanimement – du moins jusqu’à la semaine dernière – qu’il fallait être extrêmement attentifs aux contrôles. S’ils ne sont pas unifiés au niveau européen, si l’on fait trop de subsidiarité, il y un risque de distorsion de concurrence. Je me suis appuyé sur des exemples précis. Il est clairement question dans la proposition de règlement de maintenir les contrôles au niveau actuel.

Or il va y avoir les plans stratégiques, qui vont donner plus d’indépendance aux États pour mettre en œuvre les grandes orientations européennes. Il existe un risque réel d’aboutir à une politique européenne à géométrie variable, d’autant plus que ces plans stratégiques n’ont pas encore été définis. En citant la Cour des comptes dans mon précédent rapport, je ne mettais pas en cause la politique mise en œuvre par la France ; je voulais souligner les conséquences négatives d’un excès de subsidiarité. C’était le reflet d’une forme d’inquiétude.

Que la résolution soit votée ou non, ce rapport aura permis à notre commission d’exercer sa mission de contrôle de la politique gouvernementale, de faire preuve de vigilance et d’attirer l’attention du gouvernement sur les risques découlant d’une amplification de la subsidiarité concernant la politique agricole commune.

M. Jean-Louis Bourlanges. Je suis très sensible à l’argumentation d’André Chassaigne, mais, n’ayant pu que parcourir la réponse du ministre, je ne suis pas en mesure de me prononcer clairement. Je me réfugierai dans une abstention de prudence.

Je souhaite que nous ayons ce débat avec le ministre, même si c’est hors délai pour la proposition de résolution.

La réponse du ministre dit qu’il n’y a pas de changement par rapport à l’existant, mais nous voyons bien que nous sommes sur une dérive de renationalisation partielle qui nous inquiète. Nous ne pouvons pas aborder ce grand débat en deux minutes, donc je m’abstiendrai, mais je souhaite qu’il soit au cœur de nos discussions avec M. Guillaume lorsqu’il nous fera l’honneur de venir parmi nous.

Mme la Présidente Sabine Thillaye. Nous allons mettre aux voix la proposition de résolution, mais, compte tenu du travail du rapporteur, rien ne nous empêche d’autoriser la publication du rapport quel que soit le résultat du vote sur la proposition de résolution. Nous pourrons poursuivre nos échanges sur la réforme de la PAC lors de l’audition de Didier Guillaume, qui aura finalement lieu le 11 février.

M. Bernard Deflesselles. Je partage l’avis de Jean-Louis Bourlanges, sur la forme comme sur le fond.

Sur la forme, nous découvrons la réponse du ministre, il est compliqué de se prononcer sur une question de cette importance. Je m’abstiendrai.

Dans la réponse du gouvernement, il est indiqué que « le gouvernement considère que ces deux projets de règlements relatifs à la période de transition sont absolument nécessaires à la bonne gestion de la PAC », afin d’assurer la continuité des financements et d’éviter une « année blanche » pour les agriculteurs en 2021. Y a-t-il vraiment un risque sur ces deux sujets ?

M. André Chassaigne, rapporteur. Il y a effectivement urgence. Non seulement la proposition de résolution ne s’oppose pas à une décision rapide pour éviter une année blanche et faire le lien entre la PAC actuelle et la prochaine, mais elle souligne qu’une année ne suffira pas. Tout le monde le sait, cela a notamment été souligné au Parlement européen, il faudra sans doute deux ans.

J’ai réagi dès que j’ai pris connaissance de la proposition de règlement, nous n’avons pas perdu de temps, mais le délai qui nous est imparti pour l’examen de la subsidiarité est vraiment trop bref. Il est rare que nous ayons le temps de faire un travail de fond sur les textes qui nous sont transmis.

M. Bernard Deflesselles. Ma remarque ne visait pas le travail de notre commission, mais les délais qui nous sont imposés par l’Union et par le Gouvernement.

Mme la Présidente Sabine Thillaye. Le problème a déjà été signalé à la Commission et débattu à la Conférence des organes spécialisés dans les affaires communautaires (COSAC). Un délai de huit semaines pour le contrôle de subsidiarité est insuffisant, même si la Commission européenne a d’ores et déjà accepté de prolonger ce délai à dix semaines pour la période des fêtes de fin d’année.

J’attire par ailleurs votre attention sur le fait que la commission était convoquée à 17 heures pour débattre de ce texte avant l’audition d’Amélie de Montchalin.

La commission a rejeté la proposition de résolution européenne.

La commission a autorisé la publication du rapport d’information.


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   Proposition de rÉsolution europÉenne initiale

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88-6 de la Constitution,

Vu l’article 151-9 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Vu l’article 4 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) ;

Vu l’article 3 du protocole n° 1 sur le rôle des parlements nationaux annexé au traité sur l’Union européenne et au traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

Vu le protocole n° 2 sur l’application des principes de subsidiarité et de proportionnalité annexé au traité sur l’Union européenne et au TFUE ;

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) n°1306/2013 en ce qui concerne la discipline financière à partir de l’exercice 2021 et le règlement (UE) n°1307/2013 en ce qui concerne la flexibilité entre piliers pour l’année civile 2020 ;

Considérant que le principe de subsidiarité implique que l’Union européenne assume l’ensemble de ses prérogatives et s’oppose à une délégation excessive de compétences aux États membres lorsque celles-ci sont plus efficacement mises en œuvre au niveau de l’Union ;

 Considérant que la proposition de règlement européen implique le prolongement du système de transfert financier entre piliers et la création de nouvelles dotations en confirmant le système de gestion et de contrôle des aides de la politique agricole commune (PAC) ;

 Considérant que le  système intégré de gestion et de contrôle des aides de la PAC repose à l’excès sur les États membres dans sa mise en œuvre ;

Considérant que le statu quo en matière de contrôles prévu par la proposition de règlement européen visée peut entrainer des distorsions de concurrence dans leur mise en œuvre ;

 Considérant que le système intégré de gestion et de contrôle n’est pas bien rodé et ne fournit pas une assurance raisonnable, contrairement à ce qu’indique la fiche financière législative de la proposition de règlement européen visée ;

 Considérant que ce système est à l’origine d’un contrôle lacunaire et inéquitable ;

  Considérant que la présente proposition de règlement européen ne présente pas des garanties suffisantes pour assurer un contrôle efficace et uniforme à l’échelle de l’Union ;

 Considérant qu’il est indispensable de créer un cadre harmonisé de contrôle à l’échelle européenne afin de respecter le principe de subsidiarité ;

 Considérant que la Commission européenne ne peut pas proposer d’allouer la dotation supplémentaire pour 2021 aux futurs plans stratégiques entre 2022 et 2025, dans la mesure où ces plans n’ont pas été acceptés par les institutions européennes et qu’ils constituent une renationalisation partielle de la PAC ;

 Estime que le texte proposé est contraire au principe de subsidiarité.

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

   Annexes


   Annexe n°1 : Lettre de Mme la Présidente de la commission des Affaires européennes au Ministre de l’agriculture et de l’alimentation

 

 


   Annexe n° 2 : Note du rapporteur au Ministre de l’agriculture et de l’alimentation

I. Contexte

La commission des Affaires européennes examine, dans le cadre des prérogatives conférées par l’article 88-6 de la Constitution et à l’initiative du rapporteur M. André Chassaigne, la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) n° 1306/2013 en ce qui concerne la discipline financière à partir de l’exercice 2021 et le règlement (UE) n° 1307/2013 en ce qui concerne la flexibilité entre piliers pour l’année civile 2020 (COM[2019] 580 final).

Les premières discussions en commission ont mis en lumière, à la demande de l’ensemble des groupes politiques présents, la nécessité d’un approfondissement du contrôle de la conformité de ce projet de texte européen au principe de subsidiarité. Dans ce cadre, le présent courrier vise à recueillir vos appréciations sur les divers points soulevés, avant que la commission ne se prononce.

Les travaux du rapporteur ont mis en avant deux difficultés concernant ce texte, dont l’objectif principal de transition en douceur vers la nouvelle politique agricole commune (PAC) ne pose évidemment pas problème.

 

II. Les risques de distorsions de concurrence dans la mise en œuvre du système intégré de gestion et de contrôle

La première difficulté a trait au fait que ce projet de texte pérennise le cadre actuel de contrôle des aides, appelé système intégré de contrôle et de gestion (SIGC). Celui-ci s’appuie fortement dans son application sur les États membres. Ce système est vivement critiqué par la Cour des comptes européenne dans son rapport spécial n° 18/2013, en ce qui concerne en particulier les informations fournies par les États membres à la Commission européenne que la Cour considère « non fiables ».

À ce titre, il paraît très étonnant que la présente proposition de règlement européen qualifie ce système de « bien rodé » dans sa fiche financière législative. La Cour des comptes, dans son rapport de juin 2018, avait également pointé que les refus d’apurement des aides de la PAC s’élevaient à 2,35 milliards d’euros. Nous avons bien entendu noté les améliorations de ce système en France ayant permis un retour à la normale des paiements, mais cela ne répond pas entièrement aux exigences de restructuration globale de la chaîne de paiement. Il apparaît en effet qu’en reposant aussi fortement sur les États membres, le SIGC porte un risque réel de distorsion de concurrence dans la mise en œuvre des contrôles des aides agricoles.

Deux questions se posent sur ce premier point. D’abord, quelles sont les initiatives concrètes prises par votre ministère pour remédier aux difficultés structurelles dans les contrôles tels que relevées par la Cour des comptes ? Ensuite, quelles sont les positions défendues par la France au Conseil en ce qui concerne l’harmonisation des contrôles opérés dans le cadre du SIGC, afin de limiter les distorsions prévisibles de concurrence ?

 

III. La mention de la notion de plans stratégiques nationaux

Le rapporteur a également soulevé un second point relatif à la mention, dans la proposition de règlement européen examinée, des plans stratégiques nationaux. En effet, la Commission européenne indique que les nouvelles dotations prévues pour 2021 et qui seraient non-utilisées pourraient être « réaffectées aux dotations du plan stratégique relevant de la PAC pour la période 2022-2025 ». Or, l’Assemblée nationale s’est plusieurs fois prononcée en opposition à ces plans stratégiques, tant dans sa résolution européenne n° 170 d’août 2018 que lors de la réunion des députés, sénateurs et parlementaires européens du 30 octobre dernier. Ces plans stratégiques portent en effet le risque d’une renationalisation partielle de la PAC et la Commission européenne ne nous paraît pas avoir fourni les garanties suffisantes que ces nouvelles règles ne créeraient pas d’importantes distorsions de concurrence.

Ainsi, alors que ces plans stratégiques suscitent certaines oppositions et qu’ils n’ont pas encore été définitivement actés, le gouvernement juge-t-il opportun que la proposition de règlement européen fasse d’ores et déjà référence à ces plans avant même l’adoption de la réforme de la PAC ?

 

IV. L’organisation d’une véritable période de transition vers la nouvelle politique agricole commune

Enfin, notre commission souhaiterait disposer de vos éclaircissements en ce qui concerne la période de transition vers la nouvelle PAC organisée par la présente proposition de règlement, ainsi que celle établissant des dispositions transitoires relatives au soutien du Fonds européen agricole pour le développement rural et du Fonds européen agricole de garantie en 2021, et modifiant les règlements (UE) nº 228/2013, (UE) nº 229/2013 et (UE) nº 1308/2013 en ce qui concerne les ressources et leur répartition pour l’exercice 2021 et les règlements (UE) nº 1305/2013, (UE) nº 1306/2013 et (UE) nº 1307/2013 en ce qui concerne leurs ressources et leur application en 2021 (COM[2019] 581 final).

En effet, il apparaît qu’une période de transition sur la seule année 2021 ne permet pas de garantir une sécurité optimale aux agriculteurs européens et qu’elle ne laisse pas un temps suffisant aux États membres pour s’approprier la réforme de la PAC. Ainsi le rapporteur souhaiterait-il connaître, dans ce cadre, les positions défendues par la France pour assurer une période de transition suffisante.


   Annexe n° 3 : Réponse du Ministère de l’agriculture et de l’alimentation à la note du rapporteur

I)                    Présentation des propositions de la Commission visant à encadrer la transition entre les deux programmations de la PAC

 

1)      Règlement « flexibilité »

La Commission a publié le 31 octobre un projet de règlement dit « flexibilité » relatif à la discipline financière et aux transferts entre piliers, pour gérer la campagne PAC 2020 qui sera payée sur le budget 2021 à partir du 16 octobre 2020 dont la Commission.

Ce projet de règlement est un règlement d’ajustement technique dont l’objectif est d’assurer la continuité des soutiens pour l’année 2020, en complément des dispositions introduites par le règlement 2019/288 publié en février 2019 (notamment concernant les transferts entre piliers).

Ainsi, il fait l’objet d’une procédure d’adoption accélérée. Au Conseil, le règlement a été adopté sans modification au CSA du 25 novembre. Au Parlement, il sera adopté sans modification lors de la session plénière des 16 au 19 décembre. Le texte devrait être définitivement adopté au mois de janvier dans les deux institutions européennes.

2)      Règlement « transition »

Le projet de règlement de transition prolonge quasiment à l’identique les règles de la PAC actuelle d’un an uniquement sur l’année 2021. La Commission souhaite le voir adopter au plus tard à l’été 2020, à la suite de l’accord sur le CFP, de façon à ce que les EM puissent effectuer les notifications nécessaires à la suite de son adoption. Cette stabilité réglementaire est souhaitée par les États membres afin d’éviter de nouveaux développements informatiques conséquents pour un an alors que l’ensemble des organismes payeurs seront mobilisés pour préparer les ajustements majeurs de la future programmation.

Les principales propositions de la Commission relatives à la transition sont les suivantes :

L’État membre aura le choix de prolonger chacun de ses programmes, soit pour la France chacun des 27 programmes de développement rural et de ses 2 programmes nationaux.

La possibilité de prolonger les programmes de développement rural jusqu’au 31 décembre 2021 a vocation à répondre aux besoins de financement des États membres, en cas de manque de ressources financières sur l’actuelle programmation budgétaire. La prolongation du PDR sur 2021 permet de bénéficier de la première tranche annuelle de la future programmation budgétaire Feader 2021-2027 pour financer les nouveaux engagements en 2021, conformes au cadre réglementaire européen pour 2014-2020 et au programme approuvé.

L’évaluation des besoins doit être effectuée par les États membres au regard de la disponibilité de crédits Feader 2014-2020 ainsi que d’une estimation des besoins visant à garantir une continuité des programmes.

La date de fin d’éligibilité des dépenses, ainsi que la date limite de paiement aux bénéficiaires par l’OP est prolongée d’un an, au 31 décembre 2024.

Pour les PDR prolongés, les nouveaux engagements en 2021 pourront concerner tous les dispositifs actuellement prévus dans les PDR, selon les mêmes modalités que la réglementation actuelle, notamment en ce qui concerne les taux de co-financement.

Toutes les mesures, qu’elles soient surfaciques ou non surfaciques et qui « courent » au-delà du 1er janvier 2024 (ou au 1er janvier 2025 en cas d’extension des programmes) devront être « reprogrammées » dans les plans stratégiques, compte tenu de la règle de dégagement d’office (N+3) et faire l’objet d’un suivi (indicateurs de réalisations et de résultats…). Elles devront se conformer aux nouvelles règles en vigueur des règlements plans stratégiques et horizontal (nouveaux taux de cofinancement, système intégré de gestion et de contrôle, période de paiement) et seront ainsi admissibles aux nouveaux financements Feader de la période 2022-2027.

La Commission propose que les nouveaux engagements agro-environnementaux pris à partir de 2021 soient souscrits sur une durée réduite de 1 à 3 ans maximum dans les PDR. En cas de prolongation après un premier engagement, la durée doit être d’un an maximum. Les taux de cofinancement restent inchangés.

II)                  Analyse des critiques soulevées par le rapporteur

1)      Fonctionnement du système intégré de gestion et de contrôle (SIGC)

Quelles sont les initiatives concrètes prises par le ministère de l’agriculture et de l’alimentation pour remédier aux difficultés structurelles dans les contrôles tels que relevées par la Cour des comptes ?

Le SIGC, défini dans l'actuelle PAC aux articles 67 à 78 du règlement (UE) n° 1306/2013, comprend des éléments tels que l'identification des parcelles agricoles, des droits à paiement et des animaux, qui servent de base au calcul d'une partie des aides de la PAC. Il doit également permettre de tracer l'identité des bénéficiaires, les demandes d'aides, les paiements et les contrôles. Pour chacun des éléments composant le système intégré, des règles et des standards de qualité sont définis à l'échelle de l'UE. Ce cadre commun vise à maximiser la garantie que des aides de la PAC ne soient pas versées indûment du fait de systèmes de gestion ou de contrôle défaillants. Ainsi, en donnant un cadre très précis à l'ensemble des États membres, le SIGC contribue à diminuer le risque de distorsions entre les États membres dans l'application qu'ils font des différentes mesures.

Le rapporteur fait référence à un rapport de la Cour des comptes portant sur les campagnes antérieures à 2017 alors que l’État français était en cours de déploiement du plan d’action FEAGA visant à réviser profondément le SIGC afin d’en améliorer la robustesse et l’efficacité.

Les décisions européennes relatives aux refus d'apurement de conformité ont conduit à des dépenses de près de 125,30 M€ en 2019. Ce montant est en forte baisse par rapport aux années précédentes : pour mémoire, il s'établissait à 178 M€ en 2018, 720 M€ en 2017, 710,80 M€ en 2016 et 812,40 M€ en 2015.

Cette baisse traduit l'effort important réalisé par le ministère de l'agriculture et de l'alimentation pour maîtriser les risques de refus d'apurement. La qualité de ce travail et de ce système est aujourd’hui reconnue par la Commission européenne.

Quelles sont les positions défendues par la France au Conseil en ce qui concerne l’harmonisation des contrôles opérés dans le cadre du SIGC, afin de limiter les distorsions prévisibles de concurrence ?

La France défend le maintien d’un socle de règles communes afin d’assurer un traitement uniforme des aides aux agriculteurs dans les différents pays de l’Union européenne et d’éviter des distorsions de concurrence entre les agriculteurs et les filières des différents États membres. Il n’y a pas de remise en cause du SIGC au niveau européen dont les exigences de base sont définies dans le règlement horizontal.

Ce point ne relève d’ailleurs pas du périmètre du règlement de transition.

2)      Préparation des futurs plans stratégiques nationaux

Alors que ces plans stratégiques suscitent certaines oppositions et qu’ils n’ont pas encore été définitivement actés, le gouvernement juge-t-il opportun que la proposition de règlement européen fasse d’ores et déjà référence à ces plans avant même l’adoption de la réforme de la PAC ?

La France, comme les autres États membres, soutient le principe du passage d’une logique de conformité fondée sur la vérification de règles individuelles à une logique de performance dans le cadre de la future PAC basée sur le suivi d’indicateurs de réalisation et de résultats de la politique.

Toutefois, en pratique il faudra éviter l’écueil d’un alourdissement de la charge administrative des États membres dans la gestion de la nouvelle PAC et s’assurer que la politique sera réellement plus lisible pour les bénéficiaires et la société dans son ensemble. La France estime que les nouveaux plans stratégiques nationaux permettront aux États membres de mobiliser les outils d’accompagnement les plus adéquats en fonction des besoins des filières agricoles et agroalimentaires, des territoires et des agriculteurs. Le futur plan national permettra également de mieux articuler les outils d’accompagnement sur les 2 piliers de la PAC, en les mettant en cohérence.

Compte tenu de l’importance du chantier à conduire, la France prépare dès à présent la déclinaison opérationnelle de la future PAC, en associant les différentes parties prenantes à l’analyse des besoins, à l’évaluation de la PAC actuelle et à l’élaboration du futur plan stratégique national.

3)      Gestion de la transition entre les 2 programmations

Enfin, notre commission souhaiterait disposer de vos éclaircissements en ce qui concerne la période de transition vers la nouvelle PAC organisée par la présente proposition de règlement, ainsi que celle établissant des dispositions transitoires en 2021. En effet, il apparaît qu’une période de transition sur la seule année 2021 ne permet pas de garantir une sécurité optimale aux agriculteurs européens et qu’elle ne laisse pas un temps suffisant aux États membres pour s’approprier la réforme de la PAC. Ainsi le rapporteur souhaiterait-il connaître, dans ce cadre, les positions défendues par la France pour assurer une période de transition suffisante.

La Commission a proposé deux projets de règlement :

Ces 2 projets de règlements proposés par la Commission sont indispensables :

 

Compte tenu de l’importance du travail préparatoire à conduire pour construire le futur plan stratégique national, la France estime qu’une année de transition au minimum est nécessaire entre l’ancienne et la nouvelle PAC.

Ce projet de règlement de transition va faire l’objet de discussions approfondies au Parlement et au Conseil tout au long du premier semestre 2020. La durée de transition nécessaire dépendra également du calendrier des négociations européennes sur la définition du cadre financier pluriannuel et des règlements de la future PAC.

En conclusion, le Gouvernement considère que ces deux projets de règlements relatifs à la période de transition sont absolument nécessaires à la bonne gestion de la PAC. Ils ne soulèvent pas de difficultés fondamentales et ne créent pas de distorsion de concurrence entre les États membres.

 

 


([1]) COM(2019) 580 final et COM(2019) 581 final.

([2]) COM(2019) 580 final (p. 1).

([3]) Règlements européens n° 1306/2013 et n° 1307/2013.

([4]) Résolution européenne portant avis motivé sur la conformité au principe de subsidiarité de la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant des règles régissant l’aide aux plans stratégiques devant être établis par les États membres dans le cadre de la politique agricole commune (COM[2018] 392 final), adoptée par l’Assemblée nationale le 25 août 2018.

([5]) COM(2019) 580 final (p. 9).

([6]) https://ec.europa.eu/info/food-farming-fisheries/key-policies/common-agricultural-policy/income-support/controls-and-transparency/managing-payments_fr#rules 

([7]) Cour des comptes, « Les chaînes de paiement des aides agricoles (2014-2017). Une gestion défaillante, une réforme à mener », communication à la commission des finances du Sénat, juin 2018.

([8]) Cour des comptes européenne, rapport spécial n° 18/2013, « La fiabilité des résultats des contrôles opérés par les États membres sur les dépenses agricoles », 2013.

([9]) Cour des comptes, op. cit. (p. 21).

([10]) COM(2018) 392 final.

([11]) Communication de la Commission européenne du 1er juin 2018 intitulée « Budget de l’UE : la politique agricole commune après 2020 ».

([12]) Rapport d’information de MM. Alexandre Freschi et André Chassaigne sur une agriculture durable pour l’Union européenne, 31 mai 2018.

([13]) http://www.assemblee-nationale.fr/15/europe/rap-info/i1210.asp  

([14]) COM(2019) 580 final (p. 9).