N° 3356

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 23 septembre 2020.

RAPPORT DINFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 145 du Règlement

PAR LA MISSION D’INFORMATION
sur la réhabilitation de l’étang de Berre

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ([1])
ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

ET PRÉSENTÉ PAR

MM. Pierre DHARRÉVILLE et Éric DIARD,
Présidents,

ET

M. Jean-Marc ZULESI,
Rapporteur,

Députés.

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La mission d’information sur la réhabilitation de l’étang de Berre est composée de : Mmes Sophie Auconie, Jennifer De Temmerman, MM. Pierre Dharréville, Éric Diard, François-Michel Lambert, Mmes Sandrine Le Feur, Monica Michel, MM. Jimmy Pahun, Alain Perea, Loïc Prud'homme, Martial Saddier, Mme Frédérique Tuffnell et M. Jean-Marc Zulesi.

 


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SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION

Première partie :  Létang de Berre, une lagune méditerranéenne dégradée et encore mal connue

I. Une lagune méditerranéenne encore mal connue

A. La plus grande des lagunes méditerranéennes françaises

B. Une lagune, trois espaces

1. Le grand étang

2. Létang de Bolmon

3. Le canal du Rove

C. Une lagune encore mal connue en dépit de nombreux travaux de recherche

II. Une lagune en mauvais état écologique

A. Lhéritage surpassé des pollutions industrielles

B. Un mauvais état écologique durable, marqué par des phénomènes de stratification des eaux et danoxie

1. La stratification des eaux de la lagune

2. Des situations régulières danoxie

3. La réduction de la vie dans létang

4. La situation particulièrement dégradée de létang de Bolmon et du canal du Rove

C. Le facteur principal : les rejets de lusine de SaintChamas

D. Une conjonction de facteurs complémentaires

III. Une amélioration tendancielle depuis plusieurs décennies

A. Les facteurs damélioration

1. Le contentieux européen des années 2000

2. La réduction progressive des rejets dans létang de Berre

B. Les indices de lamélioration de létat écologique

C. La malaïgue de 2018 et la remise en cause des progrès enregistrés

IV. La nécessité de préparer le long terme

A. Les difficultés à atteindre le bon état écologique des eaux

B. Les effets attendus du changement climatique

C. Une restauration à penser sur le long terme

Deuxième partie : Mobiliser tous les leviers disponibles pour réhabiliter létang de Berre

I. Limiter les rejets de la centrale hydroélectrique de SaintChamas

A. Les données du problème

B. Les nouvelles procédures en cours aux niveaux national et européen

C. le projet de dérivation des eaux du canal edf : une question encore en suspens

1. Les scenarii de la dérivation et de la restitution

2. Lenjeu de la préservation de la ressource en eau douce

D. La nécessité dun nouveau cadre réglementaire

1. La diminution des quotas de rejets

2. Laccroissement de la transparence quant aux conditions de rejets

3. La question du bassin de délimonage

E. Les STEP : un projet intéressant mais complexe À réaliser

II. Rouvrir le tunnel du Rove à la courantologie

A. La réouverture du tunnel, un état des lieux

1. Les arguments favorables à la réouverture à la courantologie

2. La proposition de séquençage et de redimensionnement du projet par le premier rapport du CGEDD

3. Les doutes émis par le second rapport du CGEDD

B. Rouvrir le tunnel à la courantologie

C. Engager une action spécifique pour réhabiliter létang de Bolmon

III. Continuer à réduire les apports en nutriments des bassins versants

A. Les efforts entrepris pour limiter les sources de pollution

B. Poursuivre les efforts de limitation des rejets

C. Engager des actions pour prévenir les écoulements par temps de pluie

IV. Développer les solutions fondées sur la nature

A. Encourager le développement de la filière conchylicole et mytilicole

B. Envisager la création dune filière de valorisation des algues

C. Mener une politique volontariste de réimplantation des zostères

D. Poursuivre la conversion de terrains sur le pourtour de létang

Troisième partie : La nécessité dune nouvelle gouvernance

I. Des retards imputables à la multiplicité des acteurs

A. Une panoplie dacteurs publics

1. Les acteurs relevant de lÉtat

2. Les acteurs locaux

B. Le cas exemplaire de léchec de la réouverture du tunnel du Rove

C. Les insuffisances du contrat détang

II. Une gouvernance à revoir

A. Une meilleure répartition des compétences

B. Envisager la création dun SAGE

C. Créer des instances de coordination et de planification associant la société civile

III. Des financements à mobiliser

A. Les financements innovants à léchelle nationale

B. Des financements européens à mobiliser davantage

Synthèse des propositions

EXAMEN du rapport en commission

AnnexeS

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Synthèse de la consultation publique


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   INTRODUCTION

« Au Sud de la plaine aride et désolée de la Crau, encerclée de collines aux silhouettes bizarrement découpées, sétend une immense nappe deau souvent agitée par de fortes vagues. Cest létang de Berre, sorte de mer intérieure déjà connue par les écrivains de lantiquité. » C’est ainsi que s’ouvrait l’article que Louis Germain consacrait à l’étang de Berre dans la revue des Annales de la Géographie en 1917 ([2]).

Cette description bucolique de l’étang de Berre ne correspond plus vraiment aux paysages que l’on découvre en gagnant ses rives. Ces dernières ont en effet connu un double mouvement d’urbanisation et d’industrialisation au cours du XXe siècle. Ce sont donc désormais des rives très anthropisées qui s’offrent aux regards. Lagune méditerranéenne située à moins de trente kilomètres de Marseille, l’étang de Berre abrite, sur ses berges, de nombreux sites industriels, et en particulier la raffinerie de Total située à La Mède. Il est également contigu de l’aéroport de Marseille-Provence. Sur ses rives, prennent place onze communes qui accueillent plus de 300 000 habitants. Pourtant, cette forte pression anthropique n’est pas la seule à s’exercer sur l’étang de Berre et elle n’est aujourd’hui certainement plus la pression principale. Avec les limitations imposées aux pollutions d’origine industrielle et la mise aux normes progressive des stations d’épuration du bassin versant, les rejets polluants au sein de l’étang de Berre ont très fortement diminué au cours des dernières décennies.

Le contraste est donc saisissant entre la qualité sanitaire des eaux de l’étang, qui est tout à fait satisfaisante et permet par exemple la baignade sans danger particulier, et l’absence de vie que connaît toute une partie de l’étang de Berre. Le bon état sanitaire cohabite ici avec le mauvais état écologique. L’étang de Berre connaît en effet des déséquilibres structurels qui empêchent son écosystème de se stabiliser. À chaque changement d’état, sous l’effet de tel ou tel facteur, ce sont la faune et la flore qui en subissent les conséquences. Le principal de ces facteurs, qui fait également la particularité de l’étang de Berre parmi les lagunes méditerranéennes, réside dans l’usine hydroélectrique de Saint-Chamas. Depuis 1966, elle turbine une partie des eaux détournées de la Durance dans l’étang de Berre. Voici le constat qui était dressé par l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (IFREMER) en 1985 : « La période encore actuelle se traduit, depuis 1966, par un bouleversement complet de léquilibre lentement réalisé au cours du siècle précédent. Il est manifeste que les rejets EDF deau douce sont trop importants pour pouvoir être assimilés par létang. Les biologistes déplorent en outre lirrégularité des débits plus que le volume global des apports liquides. Les fluctuations saisonnières ou mensuelles sont génératrices dune instabilité permanente des conditions de milieux qui soppose à linstallation et à la survivance des faunes benthiques. […] Bien évidemment, EDF ne saurait être considérée comme lunique responsable de la dégradation des conditions de vie de létang. En effet, cette détérioration résulte en grande partie de laggravation brutale de la pollution industrielle et urbaine liée à lexpansion économique de la région tout entière. » ([3])

Ce constat doit être nuancé dans la mesure où les débits en eau douce et en limons rejetés par la centrale EDF de Saint-Chamas font aujourd’hui l’objet de quotas qui ont contribué à les réduire fortement. L’instabilité de l’écosystème demeure toutefois, empêchant de pouvoir envisager d’atteindre à court terme un bon état écologique des eaux. La crise de malaïgue (littéralement « mauvaises eaux ») de 2018 a mis en exergue la fragilité de l’écosystème de l’étang de Berre. Du fait de températures élevées et d’une absence de vent, la masse d’eau a subi une crise d’anoxie caractérisée par une absence d’oxygène dans les eaux ayant entraîné la disparition d’une très grande partie de la faune et de la flore. Si cet événement est en partie exceptionnel, il n’en a pas moins remis en cause les progrès accomplis ces dernières années dans la reconquête de l’étang de Berre et a démontré que cette masse d’eau demeurait instable.

C’est pour prendre à bras-le-corps la question de la réhabilitation de l’étang de Berre que la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale a souhaité créer une mission d’information qui lui soit spécifiquement consacrée ([4]). Composée de seize députés, elle est coprésidée et rapportée par trois députés de sensibilité politique différente mais mobilisés pour la réhabilitation de l’étang de Berre.

Les rapports et les études ne manquent pas sur l’étang de Berre, mais on ne peut pas en dire autant des connaissances. En effet, des éléments fondamentaux de compréhension de la dynamique de l’étang sont encore méconnus et il n’existe aucun modèle de simulation qui permettrait d’en prévoir l’évolution et d’évaluer les différentes mesures envisagées pour sa réhabilitation. Certes, l’étang est de mieux en mieux connu, grâce notamment aux travaux des scientifiques et à l’action du GIPREB, le syndicat mixte regroupant les communes du pourtour de l’étang et dont la mission est de faire progresser la connaissance de ce dernier. Mais il demeure de nombreuses zones d’ombre qui permettent à chaque acteur de défendre des visions différentes et parfois antagonistes de l’avenir de l’étang.

C’est pourquoi la mission d’information a entendu auditionner et rencontrer l’ensemble des acteurs concernés, qu’ils soient scientifiques, institutionnels, professionnels ou associatifs. Elle a également effectué deux déplacements sur place, le premier afin de rencontrer les principaux acteurs et de présenter le cadre de ses travaux, le second afin de discuter des orientations et des propositions envisagées. Un déplacement à Bruxelles a également permis de rencontrer les services de la Commission européenne et la représentation permanente de la France auprès de l’Union européenne. Dans un contexte marqué par la négociation des priorités de la nouvelle Commission et par un contentieux européen naissant au sujet de l’étang de Berre, ce déplacement a permis de constater que la réhabilitation de l’étang ne devait pas être considérée comme un sujet uniquement local ou national, mais également dans ses dimensions européennes.

Surtout, la mission a souhaité permettre à tous les habitants des rives de l’étang de Berre de faire valoir leur point de vue au cours d’une consultation publique organisée sur la plateforme de l’Assemblée nationale entre les mois de janvier et de mars 2020. Plus d’un millier de personnes y a participé, permettant de collecter de riches enseignements. Cette consultation se composait de deux parties, la première consistant en un questionnaire sur la perception de l’état et de l’avenir de l’étang, quand la seconde prenait la forme d’une plateforme contributive ouverte offrant la possibilité de faire part de ses propres idées pour la réhabilitation de l’étang. Les résultats de cette consultation figurent en annexe au présent rapport. Ils sont par ailleurs rappelés dans les différentes parties de ce dernier. Au final, la mission d’information s’est largement appuyée sur ses résultats, dans la mesure où la plupart de ses propositions correspondent aux orientations que la consultation a permis de dégager.

À l’issue de ses travaux, la mission d’information formule vingt propositions. Ces dernières s’appuient sur un diagnostic aussi précis que possible de l’état écologique de l’étang de Berre (première partie). Elles portent tant sur les actions à mener pour poursuivre sa réhabilitation (deuxième partie) que sur la nécessité de créer une nouvelle gouvernance pour mener à bien ce projet (troisième partie).


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   Première partie :
L’étang de Berre, une lagune méditerranéenne dégradée et encore mal connue

Bien qu’étudiée depuis plusieurs siècles par des spécialistes de nombreuses disciplines scientifiques, l’étang de Berre constitue un milieu naturel encore relativement mal connu (I). Il existe un point d’accord, en revanche, pour constater qu’il se trouve en mauvais état écologique, au regard notamment des exigences européennes (II). Ceci ne doit pas masquer le fait que ce dernier s’améliore graduellement, notamment depuis le début des années 2000 (III), donnant ainsi la possibilité de préparer le long terme dans un contexte marqué par le changement climatique (IV).

I.   Une lagune méditerranéenne encore mal connue

L’étang de Berre constitue une lagune méditerranéenne très particulière, notamment par sa taille (A). Elle est de ce fait composée de plusieurs milieux (B) et demeure relativement mal connue (C).

A.   La plus grande des lagunes méditerranéennes françaises

L’étang de Berre est la plus grande lagune de France et l’une des plus grandes lagunes européennes, avec une surface de 15 500 hectares et une profondeur moyenne de 6,5 mètres, pouvant atteindre 9 mètres au centre de l’étang. La longueur totale de sa rive est de 72 kilomètres et sa largeur maximale est de 16,5 kilomètres, entre Martigues et Rognac.

Situation de l’étang de Berre

Source : Pôle lagunes.

L’étang de Berre est une lagune d’eau saumâtre (qualifiée d’« eaux de transitions » au titre de la directive-cadre sur l’eau ([5])). Elle a connu de nombreux changements de son état écologique au fil des siècles, depuis l’ouverture d’un chenal à Caronte à l’époque de la conquête romaine. Les deux phases les plus récentes ont résulté d’une part de l’agrandissement de l’isthme au tournant du XXe siècle, afin de permettre le passage de bateaux plus importants (premier canal de trois mètres de profondeur creusé en 1855-1863, approfondi à six mètres en 1874 et à neuf mètres en 1925). Il en est résulté une salinisation des eaux de l’étang. À l’inverse, l’ouverture de la centrale hydroélectrique d’EDF en 1966 a induit des rejets massifs d’eau douce dans l’étang, faisant fortement diminuer sa salinité et induisant une instabilité chronique de son état écologique (cf. infra).

S’il existe de nombreuses autres lagunes méditerranéennes sur les côtes françaises, celle de l’étang de Berre est néanmoins spécifique par plusieurs de ses caractéristiques.

En premier lieu, le temps de résidence moyen de l’eau y est particulièrement élevé, compte tenu du caractère relativement fermé de l’étang. Ainsi, ce dernier serait actuellement d’environ 187 jours, contre 53 jours pour l’étang de Thau ([6]). 0,7 % de l’eau de l’étang de Berre se renouvelle chaque jour, ce qui en fait la lagune française dont le taux de renouvellement est le plus faible. Ainsi, les polluants qui sont déversés dans l’étang y demeurent pendant une durée importante. Il s’agit en effet de la seule lagune méditerranéenne française qui soit séparée de la mer non pas par des cordons sableux, mais par de hautes collines (chaîne de l’Estaque, colline du Baou).

Un autre point de différence concerne l’urbanisation et l’industrialisation très importantes à proximité immédiate de l’étang. Ainsi, ce sont 300 000 personnes qui résident à sa proximité immédiate, et 600 000 si l’on prend en considération les bassins versants ([7]). Par ailleurs, l’étang de Berre reçoit les rejets d’eau douce en provenance de la centrale hydroélectrique de Saint-Chamas, ce qui constitue une caractéristique le plaçant à part des autres lagunes méditerranéennes (cf. infra).

B.   Une lagune, trois espaces

Ce que l’on regroupe globalement sous l’appellation d’« étang de Berre » recouvre en fait au moins trois espaces : l’étang de Berre proprement dit (ou « grand étang ») (1), l’étang de Bolmon (2) et le canal du Rove (3). Si l’attention est beaucoup focalisée sur le premier, la situation écologique des deux derniers mérite également que l’on s’y attache.

1.   Le grand étang

Le grand étang désigne uniquement l’étang principal, à l’exclusion de l’étang de Bolmon situé au sud-est de ce dernier. Il se subdivise lui-même en plusieurs sous-ensembles, notamment la baie de Saint-Chamas au nord-ouest et l’étang de Vaïne au nord-est. C’est dans ce grand étang que se déversent l’Arc et la Touloubre qui drainent leur bassin versant.

L’étang de Berre et l’étang de Bolmon

2.   L’étang de Bolmon

L’étang de Bolmon est un étang situé à l’est de l’étang de Berre d’une superficie de 578 hectares, pour une hauteur d’eau comprise entre 1,4 et 2,5 mètres. Il est la propriété du Conservatoire du littoral depuis 1994 ([8]) et sa gestion a été confiée à la métropole d’Aix-Marseille-Provence.

Cet étang est alimenté par la rivière de la Cadière qui représente 80 % de ses apports en eau. Il est séparé de l’étang de Berre par le cordon du Jaï, utilisé à usage de plage pendant l’été. La circulation de l’eau entre les deux étangs s’effectuait au moyen de trois « bourdigues », qui désignent des ouvertures pratiquées dans le cordon de séparation des deux étangs. Par ailleurs, l’étang de Bolmon est contigu du canal du Rove, avec lequel il communique au moyen de deux « fenêtres » ; les échanges semblent importants avec ce dernier.

Par conséquent, la salinité de l’étang de Bolmon est moins importante que celle de l’étang de Berre. Il ne connaît pas de stratification de ses eaux.

L’étang de Bolmon a été classé en site Natura 2000 pour la richesse de la faune et de sa flore (250 espèces d’oiseaux recensées), notamment dans les zones humides adjacentes.

Les activités sont nombreuses. Les bourdigues constituent des lieux de pêche, permettant la capture des poissons lors de leur passage. Par ailleurs, le lido dunaire du Jaï est devenu un lieu touristique important, notamment pendant la période estivale, pour des activités de baignade. La circulation automobile est interdite sur le cordon du Jaï depuis 2011. L’étang constitue également une réserve de chasse et abrite des activités pastorales.

3.   Le canal du Rove

Le canal du Rove est une voie navigable construite entre 1911 et 1926 pour relier le port de Marseille et l’étang de Berre, sur une longueur de 7 kilomètres. Il relève du domaine public fluvial artificiel de l’État et sa gestion a été confiée au Grand Port maritime de Marseille-Fos au titre du service annexe des voies navigables (SAVN).

Situation du canal et du tunnel du Rove

Une partie du canal du Rove est constituée du tunnel du Rove, réalisation architecturale de grande ampleur qui permettait la circulation des navires sous le massif de la Nerthe. Ce dernier s’est toutefois partiellement effondré en 1963, bloquant à la fois le passage des navires et la circulation des eaux. Le tunnel débouche, au nord, sur l’étang de Bolmon qu’il longe jusqu’à rejoindre l’étang de Berre.

Actuellement, le canal reçoit les eaux du bassin versant de Gignac ainsi que les rejets des stations d’épuration de Marignane et de Châteauneuf-les-Martigues. Comme indiqué, il peut communiquer avec l’étang de Bolmon par des « fenêtres », aussi appelées « bourdigues ».

C.   Une lagune encore mal connue en dépit de nombreux travaux de recherche

L’étang de Berre fait l’objet de travaux scientifiques depuis plus d’un siècle, qui ont permis de progresser dans la compréhension de son fonctionnement, sans toutefois permettre à ce jour de comprendre complètement l’ensemble des interactions qui s’y déroulent. On peut distinguer trois types de travaux.

Il s’agit en premier lieu des travaux scientifiques à proprement parler, qu’ils concernent la géographie physique de l’étang, sa courantologie, sa faune et sa flore, son peuplement, etc. Il existe ainsi une « bibliographie abondante » ([9]) en la matière, qui est principalement l’œuvre d’organismes scientifiques et universitaires et de fondations (comme la Tour du Valat), mais aussi d’autres acteurs institutionnels. En particulier, le GIPREB, syndicat mixte qui réunit notamment l’ensemble des communes riveraines de l’étang, s’est donné pour mission principale d’« améliorer la connaissance par les études et le suivi écologique de létang de Berre, des étangs périphériques directement en lien avec lui et de leurs rivages terrestres. » ([10]) Il coordonne ainsi, par l’intermédiaire de son comité scientifique, la production de nombreux travaux scientifiques. Il faut également citer les études conduites par EDF, au sein de son Laboratoire national hydraulique et environnement (LNHE) ([11]).

Par ailleurs, l’étang de Berre fait l’objet d’un suivi longitudinal de la part du GIPREB, que ce soit dans le cadre de son observatoire du milieu (stations de suivi de l’hydrologie, des nutriments, de la faune et de la flore, etc.) ou dans le cadre du suivi de la directive-cadre sur l’eau, pour le compte de l’agence de l’eau. EDF dispose également de mesures en continu à la sortie de l’usine de Saint‑Chamas et grâce à plusieurs bouées qui mesurent différents paramètres ([12]).

Enfin, de nombreux rapports administratifs ou de synthèse ont été réalisés ces dernières années afin de tenter de déterminer les actions à accomplir afin de restaurer la qualité écologique des eaux de l’étang. Le CGEDD s’est ainsi penché à deux reprises sur ce dernier ([13]). Par ailleurs, le conseil scientifique du comité de bassin a rendu un avis sur l’objectif de bonne qualité des eaux à échéance de 2027. Enfin, plus récemment, le tribunal administratif de Marseille a saisi un expert pour la réalisation d’un rapport sur l’état écologique de l’étang, dans le cadre de l’instruction du recours déposé par le GIPREB.

Cette profusion d’études n’a pas d’équivalent pour les milieux annexes à l’étang de Berre, en particulier pour l’étang de Bolmon ou pour le canal du Rove, dont l’état est très dégradé. Cette lacune est en particulier pointée dans le rapport du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) s’agissant de l’étang de Bolmon ([14]). Elle est notamment causée par l’absence de coordination scientifique et a pour conséquence une très mauvaise connaissance du fonctionnement de cet étang, alors que la réouverture envisagée du tunnel du Rove pourrait avoir un impact majeur sur ce dernier.

Par ailleurs, en dépit de cette profusion d’études, le fonctionnement exact du système que constitue l’étang de Berre demeure imparfaitement connu, ainsi que l’ont admis tous les interlocuteurs de la mission d’information. Tel est le cas, en particulier, s’agissant des interactions entre l’eau et les sédiments, ou des liens entre la courantologie et les phénomènes physico-chimiques. Par ailleurs, le cycle du phosphore est mal connu, alors qu’il est déterminant pour l’état de la masse d’eau, en tant que nutriment ([15]). En effet, le phosphore contenu dans les sédiments semble pouvoir être remobilisé par la masse d’eau, contribuant à son eutrophisation, sans que l’on en connaisse les circonstances et l’importance.

Enfin, les outils de simulation existants sont également lacunaires. Si EDF possède un certain nombre d’applications permettant de réaliser des projections, ces dernières ne permettent pas de simuler l’état de la masse à long terme, en prenant en compte les principaux facteurs qui en déterminent l’état ([16]). Il apparaît que si chaque interaction est, en règle générale connue de manière plus ou moins satisfaisante, c’est leur combinaison qui résiste, pour l’heure, à la modalisation. C’est d’ailleurs le constat qu’ont récemment fait tant le CGEDD ([17]) que le conseil scientifique du comité de bassin ([18]). Cette absence de modèle global nuit à la qualité des décisions susceptibles d’être prises dans le cadre de la réhabilitation de l’étang. Ainsi que le note le CGEDD, « en labsence de modèle prédictif intégrant lensemble des composantes et paramètres du milieu, tant physiques que biologiques, malgré les efforts développés par le LNHE dEDF et par le GIPREB, il nexiste pas doutil daide à la décision permettant de peser les coûts et avantages de chaque option. » ([19])

II.   Une lagune en mauvais état écologique

L’étang de Berre se trouve actuellement dans un mauvais état écologique. Ce dernier n’est pas tant dû aux pollutions industrielles, qui ont été surpassées (A), qu’à une stratification des eaux engendrant des situations d’anoxie (B) principalement causée par les rejets de l’usine hydroélectrique de Saint-Chamas (C), même si les facteurs à prendre en compte pour comprendre la situation sont beaucoup plus nombreux (D).

A.   L’héritage surpassé des pollutions industrielles

Avec le développement économique, industriel et urbain de ses rives, au cours du XXe siècle et spécialement depuis la seconde guerre mondiale, l’étang de Berre a fait l’objet de nombreuses pollutions qui ont affecté à la fois son état écologique et les activités susceptibles d’y être pratiquées.

Une première phase de pollution a été principalement dorigine industrielle et urbaine. En effet, les industries présentes sur le pourtour de l’étang (notamment pétrochimiques) y trouvaient un débouché commode pour leurs rejets polluants et les systèmes d’épuration collective des villes en plein développement sur le pourtour de l’étang rejetaient des nutriments (azote et phosphore notamment) en quantité très importante, faute d’équipement de traitement approprié. En conséquence, en 1957, la pêche est interdite dans l’étang de Berre, en contrepartie d’un dédommagement financier des pêcheurs par les compagnies pétrolières ([20]).

Cette pollution historique a aujourdhui complètement cessé mais elle est toujours présente dans les sédiments qui tapissent le fond de létang de Berre, recouverts par les dépôts de vase issus notamment des limons apportés par les rejets de l’usine hydroélectrique de Saint-Chamas. C’est ce que montrent les carottages réalisés dans le fonds de l’étang s’agissant de la présence de métaux lourds (notamment le mercure, le plomb ou le cadmium) qui sont présents à une profondeur comprise entre 15 et 30 centimètres. Néanmoins, cette pollution ayant cessé il y a de nombreuses années, la qualité sanitaire des eaux n’est plus en cause. Ainsi, l’étang a été rouvert à la baignade en 2004, après évaluation de la qualité sanitaire de ses eaux.

Toutefois, les métaux lourds demeurent présents dans les sédiments qui tapissent le fond de l’étang. Ils y demeureront sauf action humaine particulière (de dragage notamment), dans la mesure où les sédiments continuent de s’accumuler. Toutefois, les recherches récentes ont montré que ces métaux lourds pouvaient connaître des flux ascendants à l’occasion des situations d’anoxie. Ces phénomènes demeurent toutefois mal connus et ne remettent pas en cause la bonne qualité sanitaire des eaux de l’étang ([21]).

Si la pollution industrielle a cessé, l’écosystème de l’étang de Berre a connu un autre facteur de perturbation. Dans le cadre de l’équipement du territoire en unités de production hydroélectrique, un canal de dérivation d’une partie des eaux de la Durance a été créé au début des années 1960, conduisant à rejeter dimportantes quantités deau douce et de limons dans létang de Berre à la sortie de la centrale hydroélectrique de Saint-Chamas. Ces apports massifs ont profondément modifié l’écologie de l’étang en changeant la salinité de ses eaux, en augmentant leur vitesse de renouvellement, en accroissant leur turbidité et en rendant le milieu très instable, compte tenu de ces apports à la fois massifs et erratiques dans le temps. Se sont alors instaurés des mécanismes de stratification des eaux et d’anoxie très néfastes à la qualité écologique des eaux.

B.   Un mauvais état écologique durable, marqué par des phénomènes de stratification des eaux et d’anoxie

Aujourd’hui, le mauvais état écologique de l’étang de Berre n’est plus lié aux pollutions industrielles, mais à une combinaison de facteurs : les rejets de l’usine hydroélectrique de Saint-Chamas et les apports en nutriments d’origine anthropique (principalement l’azote et le phosphore). La combinaison de ces facteurs induit un double phénomène de stratification des eaux et d’anoxie.

1.   La stratification des eaux de la lagune

La stratification d’une masse d’eau désigne la juxtaposition d’eaux aux caractéristiques différentes qui ne se mélangent pas. En l’occurrence, dans le cas de l’étang de Berre, il s’agit d’une part d’eau de mer entrant par le canal de Caronte et d’autre part d’eau douce, dont la principale – mais pas unique – source résulte des rejets de la centrale de Saint-Chamas. Ainsi, l’eau de mer, plus dense, plonge dans le fond de l’étang après son entrée par le canal de Caronte, prenant la forme d’une « pastille » au centre de l’étang.

Entrées annuelles d’eau dans l’étang de Berre

Origine

Quantité annuelle moyenne
(en millions de m3 par an)

Eau salée

Canal de Caronte

1000 à 1400

Eau douce

Arc et Touloubre

180

Usine de Saint-Chamas

900

Apports directs, ruissellement, STEP et rejets directs

100 à 200

Source : A. Baguet et N. Forray, op. cit., p. 14.

Cette stratification n’est susceptible d’être « cassée » que par les épisodes de mistral suffisamment durables et puissants pour induire un brassage des eaux de la lagune, et un mélange entre les eaux de surface et les eaux plus profondes. Selon les informations recueillies par la mission d’information, les scientifiques n’ont pas noté de changement structurel, au cours de ces dernières années, dans le régime des vents à proximité de l’étang de Berre.

Si le mistral parvient à réoxygéner le fond de l’étang l’hiver, la vitesse de consommation de l’oxygène présent dans la lagune est trop rapide du printemps à l’automne au regard de la fréquence des épisodes de mistral. Par conséquent, la stratification des eaux devient durable. Couplée à l’accumulation des nutriments dans les eaux de l’étang, elle induit des situations d’anoxie.

2.   Des situations régulières d’anoxie

Conséquence de la stratification des eaux, les différentes masses deau ne se mélangent pas et bloquent ainsi la diffusion doxygène dans le fond de létang. Ce dernier demeure dans les couches supérieures, ce qui prive doxygène les couches inférieures de létang, phénomène connu sous le nom dhypoxie (faible teneur en oxygène) et danoxie (absence totale doxygène). En conséquence, c’est toute la vie marine qui est menacée lors de ces épisodes d’anoxie. Ainsi que le note le dernier rapport du CGEDD, « la vie biologique, hors bactéries, a disparu sur la moitié des fonds de létang » ([22]), du fait de la privation régulière d’oxygène qu’il y subit.

La stratification des eaux n’est pas la seule cause des anoxies. Elle se combine à des processus chimiques et biologiques qui augmentent la demande en oxygène et donc sa consommation. Ces derniers sont liés aux apports en nutriments (principalement l’azote et le phosphore) qui provoquent une eutrophisation du milieu ([23]). Ainsi riches en nutriments, les eaux de l’étang favorisent, sous l’effet de la photosynthèse, la prolifération d’algues et de plancton qui consomment l’intégralité de l’oxygène disponible et en privent tous les autres organismes vivants présents dans l’étang, en particulier dans les couches les plus profondes.

Ces anoxies ont une saisonnalité forte. Elles sont en effet favorisées par des températures élevées et par l’absence de mistral. Elles se produisent donc préférentiellement pendant la période estivale. Elles peuvent être accentuées en cas d’épisode de « malaïgue » – la mauvaise eau en occitan – qui est une conjonction d’absence de vent et de chaleurs caniculaires. Elle se caractérise par une coloration blanche des eaux due à une propagation d’algues. Le phénomène entraîne une chute du taux d’oxygène dans l’eau qui décime notamment les huîtres et les moules, ce qui a affecté les producteurs de l’étang de Thau à plusieurs reprises.

3.   La réduction de la vie dans l’étang

Conséquence de ces modifications structurelles du milieu, la faune comme la flore de l’étang se sont progressivement détériorées.

Ainsi, l’IFREMER notait en 1985 que la « diversité de la flore a considérablement diminué » ([24]). En particulier, les herbiers qui sont particulièrement importants pour l’oxygénation de la masse d’eau ont fortement régressé, disparaissant complètement des zones les plus profondes de l’étang. En 1917, Louis Germain écrivait : « Des herbiers très importants, descendant jusquaux fonds de 7 mètres, forment une large ceinture, interrompue seulement le long des rives sablonneuses. Ils couvrent également toute la surface des étangs de Bolmon, de Vaïne et de la baie de Saint-Chamas. Presque uniquement constitués par des Zostères (Zostera marina Linné), ces herbiers ont une certaine importance au point de vue biologique » ([25]). Ces herbiers ont progressivement régressé à trois mètres de profondeur dans les années 1940 et ne forment aujourd’hui plus que des taches éparses sur le pourtour de l’étang ([26]). « Véritables prairies sous-marines formant au lac une ceinture verte et luxuriante » d’une surface de 6 000 hectares au début du siècle ([27]), les zostères ne couvraient plus dans les années 2000 que quelques hectares.

Surface des herbiers de zostères en 1917

Source : L. Germain, Létang de Berre, Annales de Géographie, t. 26, n° 143, 1917, p. 339.

De nombreuses espèces de poissons sédentaires ou migratrices étaient décrites au début sur siècle : muge, bar, daurade et anguille notamment.

Par ailleurs, compte tenu du caractère erratique des rejets d’eau douce, il n’était pas possible d’atteindre « un état déquilibre permanent » s’agissant des peuplements benthiques ([28]), alors même que la cueillette des moules était décrite, au début du siècle comme « partout très active », occupant, en 1911, de 80 à 400 bateaux ([29]).

4.   La situation particulièrement dégradée de l’étang de Bolmon et du canal du Rove

L’étang de Bolmon connaît des difficultés particulières. Selon le rapport du CGEDD, « létang de Bolmon, milieu très fermé et à laval dun petit bassin versant de 100 000 habitants fonctionne comme une lagune épuratoire et accumule toxiques et nutriments. Il est particulièrement mal connu. » ([30]). Cette situation résulte notamment de l’urbanisation massive du bassin versant et de l’imperméabilisation des sols corrélative, qui favorise un ruissellement direct des eaux vers l’étang de Bolmon. Il faut toutefois noter les efforts importants de diminution des rejets dans l’étang (cf. infra). Il n’en demeure pas moins que le milieu demeure très eutrophisé. Le CGEDD note par ailleurs qu’une ancienne décharge communale, non réhabilitée à ce jour, se situe à proximité immédiate de l’étang, au nord de la Cadière ([31]).

En conséquence, les épisodes de crise écologique se succèdent. Ainsi, l’étang a connu une mortalité importante de ses poissons en 2006. Un épisode du même type est survenu en juin-juillet 2019, entraînant une mortalité massive des poissons de l’étang ([32]). La pêche a été interdite dans l’étang par arrêté préfectoral du 28 avril 2000.

Le canal du Rove est dans un état encore plus dégradé et connaît également un phénomène de stratification des eaux. Ainsi, la pêche y a été interdite par arrêté préfectoral en 2011, du fait d’une importante pollution aux polychlorobiphényles (PCB). Les vases, qui sont beaucoup moins épaisses que dans l’étang de Berre, sont contaminées notamment aux métaux lourds. Par ailleurs, des déchets, notamment plastiques, s’accumulent dans le tunnel obstrué et s’y dégradent. Enfin, la structure même du canal se détériore, faute d’entretien. Un éboulement majeur est survenu en décembre 2019, du fait de pluies abondantes, entraînant l’évacuation d’une habitation sur la commune de Marignane ([33]) ainsi que des travaux de confortement réalisés en urgence pour un montant de 4 à 5 millions d’euros ([34]). Le représentant du Grand port maritime de Marseille, gestionnaire du canal pour le compte de l’État, l’a qualifié de « cloaque » au vu de son état particulièrement dégradé ([35]).

Les pistes de réhabilitation de l’étang de Berre doivent donc impérativement prendre également en compte l’étang de Bolmon et le canal du Rove, dont l’état écologique se dégrade depuis trop longtemps.

C.   Le facteur principal : les rejets de l’usine de Saint‑Chamas

Compte tenu des manques dans la compréhension du fonctionnement de l’étang mentionnés précédemment, il n’est pas aisé de déterminer quels sont les facteurs conditionnant l’amélioration de son état. De surcroît, son fonctionnement a été décrit par plusieurs personnes auditionnées comme instable et aléatoire, compte tenu de la diversité des paramètres et des facteurs susceptibles d’intervenir ([36]). Il n’en demeure pas moins que les rejets d’eau douce et de limons de l’usine hydroélectrique de Saint-Chamas constituent un facteur de déstabilisation majeur de la masse d’eau.

L’entrée en service de la centrale de Saint-Chamas, en 1966, a pris place dans le cadre plus général de l’aménagement de la Durance engagé par la loi du 5 janvier 1955 ([37]). Son article premier fixait un triple but à ces aménagements : accroître la production d’hydroélectricité, notamment pour alimenter le sud-est de la France, réguler le débit de la Durance, en particulier durant ses crues, et sécuriser l’approvisionnement en eau potable de la vallée de la Durance. Ces objectifs figurent dans le cahier des charges de la concession dont bénéficie EDF jusqu’en 2051.

Pour EDF, qui en est le concessionnaire, la centrale de Saint-Chamas présente un caractère stratégique pour la production d’électricité. Cette dernière est en effet située en bout de chaîne du complexe énergétique Durance-Verdon, qui est composé de 13 barrages et de 22 centrales de production électrique. Sa particularité est notamment de pouvoir activer simultanément l’ensemble des centrales, permettant d’atteindre une puissance de 2000 MW en une dizaine de minutes. Cette puissance est notamment utilisée pendant les pics de consommation d’électricité, pour une production annuelle moyenne de 6 TWh/an soit environ 35 % de la production de la région PACA. La centrale de Saint-Chamas est la dernière de cette chaîne électrique, avec une puissance de 240 MW. Elle fonctionne en binôme avec la centrale de Salon-de-Provence. En effet, le canal EDF se divise en deux à Mallemort, une branche rejoignant la Durance quand l’autre dirige l’eau vers les centrales de Salon-de-Provence et de Saint-Chamas avant qu’elle soit rejetée dans l’étang de Berre.

Les aménagements hydroélectriques de la chaîne Durance-Verdon

Source : EDF.

Principaux ouvrages de production hydroélectrique
de la chaîne Durance-Verdon

Source : Rapport final du projet R2D2 2050, Risque, ressource en eau et gestion durable de la Durance en 2050, novembre 2014.

Toutefois, lentrée en service de lusine hydroélectrique de SaintChamas et les rejets induits deau douce et de limons dans létang de Berre ont considérablement modifié son écosystème, en modifiant nombre de ses paramètres.

S’agissant de la salinité, cette dernière était constante avant 1966 à environ 32 ‰. Après 1966, cette valeur variait fortement, entre 11 ‰ et 30 ‰, que ce soit dans le temps et dans l’espace. Ces rejets erratiques d’eau douce dans l’étang induisaient des variations fortes de la salinité de ce dernier.

Par ailleurs, alors qu’avant 1966, loxygénation de la masse deau était « excellente jusque dans les couches profondes » ([38]), des conditions anoxiques structurelles sont apparues à compter de cette date, dues notamment à l’augmentation de la stratification des eaux de l’étang.

Les apports en limons ont par ailleurs été massifs, de l’ordre de 460 000 m3 par an entre 1966 et 1980, via l’usine de Saint-Chamas. En conséquence, la turbidité des eaux a fortement augmenté tout en variant dans le temps, en fonction des rejets de l’usine. Par ailleurs, ces limons ont fortement alimenté l’étang de Berre en nutriments (notamment le phosphore et l’azote). Ainsi, alors qu’avant 1966, l’étang de Berre « pouvait être classé parmi les milieux modérément eutrophes » ([39]), l’eutrophisation de la masse d’eau est désormais l’une de ses caractéristiques principales.

Le constat est donc largement partagé. « Les conditions hydrologiques et hydrobiologiques de létang de Berre ont été brutalement modifiées par le rejet du canal de dérivation de la Durance » écrivait l’IFREMER en 1980 ([40]). Près de quarante ans plus tard, le rapport du CGEDD n’établissait pas un constat différent en soulignant que « les apports deau douce de la centrale hydroélectrique Électricité de France (EDF) de Saint-Chamas depuis 1965 font figure de cause majeure de la situation » ([41]). S’il s’agit là du facteur déterminant, ce dernier ne doit toutefois pas occulter les facteurs complémentaires.

D.   Une conjonction de facteurs complémentaires

Comme indiqué précédemment, les situations d’anoxie sont causées non seulement par la stratification des eaux, mais aussi par l’eutrophisation de la masse d’eau, c’est-à-dire par la présence surabondante de nutriments qui, couplés à de fortes chaleurs, provoquent des proliférations d’algues et de plancton, lesquels consomment l’intégralité de l’oxygène présent. Il est donc particulièrement important de réduire les apports en nutriments dans l’étang. Leur origine est différente selon que l’on considère les apports en azote ou en phosphore.

Apports moyens en azote 2014-2018

Source

Part dans les apports

Usine de Saint-Chamas

59 %

Arc

15 %

Touloubre

9 %

Ruissellement

8 %

Cadière

3 %

Stations d’épuration

3 %

Industriels

3 %

Source : GIPREB

Ainsi, s’agissant des apports en azote, ces derniers proviennent, pour près de 60 % des rejets de la centrale hydroélectrique de Saint-Chamas et pour 27 % des rivières du bassin versant. Il en est différemment des apports en phosphore qui ne sont causés que pour un gros tiers par l’usine de Saint-Chamas, à égalité avec les rivières du bassin versant.

Apports moyens en phosphore 2014-2018

Source

Part dans les apports

Usine de Saint-Chamas

37 %

Arc

22 %

Touloubre

12 %

Industriels

12 %

Ruissellement

8 %

Stations d’épuration

7 %

Cadière

2 %

Source : GIPREB

Toutefois, la présence de nutriments dans l’étang (et donc l’eutrophisation du milieu) n’est pas seulement le fait des apports qu’il reçoit. En effet, de grandes quantités de nutriments sont stockées dans les sédiments qui tapissent le fond de l’étang et qui sont susceptibles d’être réactivés. Ils contribuent alors à la consommation d’oxygène. La situation écologique de l’étang est donc également dépendante de son passé, les phénomènes d’anoxie découlant en partie de la remobilisation des nutriments déjà présents dans les sédiments.

Par conséquent, il est nécessaire, afin de faire régresser la situation d’anoxie dans laquelle se trouve régulièrement l’étang de Berre, d’agir sur l’ensemble de ces facteurs de rejets, mais également de mieux comprendre les mécanismes de remobilisation des nutriments déjà présents dans l’étang de Berre.

III.   Une amélioration tendancielle depuis plusieurs décennies

La déstabilisation de l’écosystème de l’étang de Berre a été profonde et durable. Il n’en demeure pas moins que, depuis plusieurs décennies, l’état écologique de la masse d’eau s’améliore progressivement. M. Jean Jalbert, directeur général de la Tour du Valat ([42]), qualifie ainsi l’étang de Berre de « grand malade convalescent » ([43]). Les causes de cette amélioration sont multiples mais elles reposent principalement sur la diminution des rejets d’eau douce de l’usine de Saint-Chamas dans les années 2000 (A). Ces progrès, s’ils sont réels et visibles (B), n’en demeurent pas moins fragiles, comme en témoigne l’épisode de malaïgue de 2018 (C).

A.   Les facteurs d’amélioration

Le principal facteur d’amélioration de l’état écologique de l’étang de Berre a résulté de la diminution des rejets d’eau douce, à la suite du contentieux européen des années 2000.

1.   Le contentieux européen des années 2000

Le contentieux entre l’Union européenne et la France a résulté d’un recours du 15 décembre 1997, déposé par la coordination des pêcheurs de l’étang de Berre qui soulignait le rôle des rejets d’eau douce et de limons provenant de la centrale EDF de Saint-Chamas dans la dégradation de l’étang. La Commission européenne ayant été saisie et n’ayant pas été convaincue par les réponses du Gouvernement français, elle a introduit un recours devant la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE).

Par son arrêt du 7 octobre 2004, la CJCE a condamné la France pour manquement aux obligations résultant de l’application de la Convention de Barcelone pour la protection de la Méditerranée du 16 février 1976. L’article 4 de la Convention impose en effet aux États parties de « prévenir, réduire, combattre et dans toute la mesure du possible éliminer la pollution dans la zone de la mer Méditerranée ». Cette obligation figure par ailleurs à l’article 8 de la Convention qui impose également la mise en œuvre d’un plan de réduction des polluants en vue de « la réduction et de lélimination progressive des substances dorigine tellurique qui sont toxiques, persistantes et susceptibles de bioaccumulation » ([44]).

Ceci concerne notamment les « substances exerçant une influence défavorable soit directement, soit indirectement sur la teneur en oxygène du milieu marin, spécialement celles qui peuvent être à lorigine de phénomènes deutrophisation » et les « substances qui, bien que non toxiques par nature, peuvent devenir nocives pour le milieu marin ou peuvent gêner toute utilisation légitime de la mer en raison des quantités rejetées » ([45]).

Sur le fondement des données scientifiques disponibles à l’époque, la CJCE a condamné la France pour absence de respect des conventions internationales précitées. Étaient en cause les rejets de la centrale dEDF dans létang en termes deau douce et de limons. La Cour a constaté que l’État n’avait pas pris toutes les mesures appropriées pour prévenir, réduire et combattre la dégradation du milieu aquatique marin et que les rejets de la centrale n’avaient pas fait l’objet d’autorisations adéquates.

Les rejets s’effectuaient alors dans le cadre des quotas instaurés en 1993 par le « Plan Barnier », du nom du ministre de l’environnement de l’époque. Les apports en eau douce étaient cantonnés à 2,1 milliards de mètres cubes par an et les rejets de limons à 200 000 tonnes par an. Il s’agissait déjà d’une limitation substantielle, dans la mesure où les rejets d’eau douce étaient auparavant en moyenne de 3,3 milliards de mètres cubes.

En conséquence, la France a annoncé, le 11 février 2005, de nouvelles modalités de rejets pour se conformer à la décision de la CJCE :

– surveillance de la salinité des rejets de l’usine, afin de lisser les rejets (seuil minimal de 15 g/l sur une moyenne hebdomadaire) sans diminuer le plafond annuel de rejet dans la phase d’expérimentation, qui serait donc maintenu à 2,1 milliards de mètres cubes ;

– limitation des rejets de limons à 60 000 t/an, hors dérivation pour l’écrêtement des crues ;

– instauration d’un suivi des substances rejetées.

Après échanges, la Commission européenne a décidé d’adresser, le 19 décembre 2005, une lettre de mise en demeure à la France, jugeant insuffisantes les nouvelles modalités de rejet proposées. Sous la menace dune astreinte financière, en 2006, la France a répondu à cette mise en demeure en prenant les mesures suivantes :

– réduction des rejets d’eau douce à 1,2 milliard de mètres cubes par an ;

– réduction des rejets de limons à 60 000 tonnes par an ;

– lissage des rejets sur une base hebdomadaire ;

– introduction d’un nouveau critère de salinité des eaux.

La limitation progressive des rejets annuels d’eau douce
et de limons dans l’étang de Berre

 

Situation historique

Plan Barnier
(1993)

Révision du plan Barnier (1999)

Situation actuelle (2006)

Eau douce

3,3 milliards de m3

2,1 milliards de m3

2,1 milliards de m3

1,2 milliard de m3

Limons

 

200 000 tonnes

100 000 tonnes

60 000 tonnes

Les règles régissant les rejets figurent désormais à l’article 2 du règlement d’eau des chutes de Salon et Saint-Chamas, qui est annexé à la convention de concession.

Article 2 du règlement d’eau fixant les modalités de rejet

« Le concessionnaire est autorisé à rejeter leau de la Durance via le canal usinier dans létang de Berre dans la limite dun volume maximal annuel deau douce de 1 200 millions de m3, y compris les rejets exceptionnels.

« Afin de permettre la présence et le développement, dans létang de Berre, despèces à affinité marine caractéristiques des milieux lagunaires salés, ces rejets deau douce sont régulés à un rythme hebdomadaire en vue de réduire les variations de salinité. Ils sont limités à 62,4 millions de m3 par semaine. À la suite de semaines où la totalité du quota optimal de 62,4 millions de m3 na pas été utilisée, il est permis dopérer un rattrapage quatre fois par an. Pour éviter de re-créer par un effet de cumul des apports deau douce trop massifs, ce rattrapage est limité à un quota maximal hebdomadaire de 82 millions de m3.

« Sous ces conditions, le concessionnaire devra moduler ces rejets deau afin de garantir que, sur lannée :

« - 95 % des mesures de salinité effectuées dans létang, selon le dispositif de suivi décrit à larticle 5, sont, en moyenne hebdomadaire, supérieures à 15 g/l et

« - 75 % des mesures de salinité effectuées dans létang, selon le dispositif de suivi décrit à larticle 5, sont, en moyenne hebdomadaire, supérieures à 20 g/l.

« Les périodes de rejets exceptionnels définis infra et les périodes de crue des affluents naturels de létang pourront justifier des objectifs moins stricts de salinité.

« Le tonnage maximal annuel de limons apportés à létang de Berre via le canal usinier concomitamment au rejet deau est limité à 60 000 tonnes.

« Les rejets sont qualifiés dexceptionnels sils sont effectués pour des raisons dintérêt général, ou répondent à des objectifs de sécurité publique (crues du Rhône et de la Durance - cf. consigne générale de sécurité pour la manœuvre des vannes dévacuation des crues du barrage de Mallemort, approuvée par le DRIRE-PACA le 31/08/2005) ou de sûreté du réseau électrique sur demande du gestionnaire du réseau de transport délectricité en cas de déséquilibre ou dincident sur les infrastructures. Dans le suivi des quotas hebdomadaires en vue de la régulation de rejets deau au rythme hebdomadaire et du quota annuel de rejet de limons, ces rejets exceptionnels ne sont pas comptabilisés dans les quotas mais font lobjet dun rapport. Ce rapport précisera les évènements et les mesures prises pour un retour rapide aux seuils de salinité sur la période sétendant jusquau retour à un état de létang satisfaisant les seuils de salinité. Le concessionnaire informe le plus rapidement possible lautorité de contrôle des périodes de rejet exceptionnel.

« La gestion des usines hydroélectriques est libre à concurrence de la valeur des quotas et du respect des seuils sus-mentionnés.

« Sont pris en compte dans cette autorisation de rejet, les objectifs de qualité pour les eaux douces fixés par les arrêtés pris en application du décret n° 2005-378 du 20 avril 2005 relatif au programme national dactions contre la pollution des milieux aquatiques par certaines substances dangereuses. La liste des substances pertinentes est annexée au présent règlement deau.

« Les décomptes sont réalisés annuellement du 1er novembre au 31 octobre de lannée suivante. »

Cette solution a été acceptée par la Commission européenne sous couvert d’un suivi par un comité d’expert et par la Commission pour une durée de quatre ans. Le contentieux relatif à la pollution de l’étang de Berre par les rejets d’eau douce et de limons provenant de la centrale hydroélectrique de Saint-Chamas a été classé le 20 novembre 2009 grâce à la limitation effective des rejets. En conséquence, l’eau excédentaire est désormais rejetée dans la Durance, pour un total d’environ deux milliards de mètres cubes.

Cette réduction des quotas de rejet n’est pas sans conséquence puisque les centrales de Salon-de-Provence et de Saint-Chamas ne fonctionnent désormais quà 30 % de leur potentiel, réduisant ainsi la production d’énergie renouvelable et entraînant un manque à gagner de 20 à 40 millions d’euros par an pour EDF ([46]). Par ailleurs, les contraintes liées au lissage des rejets en Durance et dans l’étang de Berre amenuisent la réactivité de la chaîne de production d’électricité.

2.   La réduction progressive des rejets dans l’étang de Berre

En application de ces quotas, les rejets deau douce et de limons dans létang de Berre ont été fortement restreints. Ces derniers sont calculés sur une année hydrologique, à savoir du 1er novembre au 31 octobre. Compte tenu des différentes contraintes pesant sur les rejets (notamment le lissage hebdomadaire, le taux de salinité et la nécessité de respecter des plafonds de rejet multiples), EDF n’est pas en mesure d’utiliser chaque année la totalité des quotas prévus au règlement d’eau.

Volumes annuels d’eau douce et de limons apportés
par l’usine EDF de Saint Chamas à l’étang de Berre

Années

Eau douce

(en millions de m3)

Limons

(en tonnes)

2005-2006

788,2

45 632

2006-2007

841,4

40 756

2007-2008

665,6

57 011

2008-2009

1 057,8

43 740

2009-2010

951,1

57 229

2010-2011

1 035,9

45 458

2011-2012

780,1

59 505

2012-2013

1 035

57 918,8

2013-2014

959,6

33 653,3

2014-2015

985,5

57 751,6

2015-2016

1 185,4

54 759,2

2016-2017

1036

34 070,3

2017-2018

1 198,2

49 782

2018-2019

840,2

30 019,3

Source : EDF.

Les rejets ont ainsi été en moyenne, depuis 2005, de 954 millions de mètres cubes d’eau douce et de 48 000 tonnes de limons par an.

B.   Les indices de l’amélioration de l’état écologique

Selon l’ensemble des acteurs auditionnés, l’état écologique de l’étang est en phase d’amélioration durable. Plusieurs mesures permettent de confirmer cette amélioration. Ainsi, il a été rappelé que la pollution chimique était désormais maîtrisée, même si elle demeure présente dans les sédiments de l’étang, à quelques dizaines de centimètres de profondeur. Les paramètres écologiques s’améliorent également. En témoigne notamment la progression des zostères, qui est l’un des principaux marqueurs du bon état écologique des eaux. Leur surface est passée de 1,2 hectares en 2009 à 18 hectares en 2017 ([47]).

Autre élément encourageant, les treize plages ouvertes de la lagune sont classées « eau de qualité bonne » et même « excellente » pour neuf d’entre elles. Un pavillon bleu a même été obtenu cette année par l’une des plages de l’étang. Dans quasiment toutes les plages, les taux d’entérocoques et d’Eschérichia Coli sont en dessous du seuil de détection, soit une eau qui peut être considérée comme d’excellente qualité. Ce suivi est certifié depuis 2013 par le label « Démarche qualité des eaux de baignade », qui valorise les efforts engagés pour assurer une bonne qualité des eaux de baignade.

Conséquence de cette double amélioration de l’état chimique et écologique des eaux, le nombre dactivités autorisées dans létang a progressé ces dernières années. Ainsi, la pêche dans l’étang a de nouveau été autorisée en 1994 ([48]) et de nombreuses plages ont été rouvertes à partir des années 2000. Cette évolution positive a été visible s’agissant de la production de moules. En 2008, compte tenu de l’amélioration des conditions sanitaires, l’étang de Berre a été classé en zone C pour les bivalves fouisseurs, permettant la récolte des naissains de moules. Puis, les coques et les palourdes s’étant développées à certains endroits de l’étang, la classification a été élevée au niveau B en janvier 2018, permettant le développement de la pêche professionnelle ([49]). Il faut noter les conséquences positives du développement de ces activités, à la fois d’un point de vue économique et social, mais aussi d’un point de vue environnemental, les moules et les palourdes contribuant à fixer des nutriments.

La pêche au sein de létang de Berre semble également connaître une dynamique positive. C’est ce qui ressort d’une étude menée à l’initiative du GIPREB en 2017 et 2018, dont les résultats ont été publiés en 2019 ([50]). Elle porte à la fois sur la pêche professionnelle et sur la pêche amateur et montre que cette activité se développe, avec 65 bateaux de pêche professionnelle recensés en 2018, contre 31 navires en 2005 et 50 en 2011. Sont principalement pêchées l’anguille, la daurade, le muge et la sole, chaque pêche ayant ses techniques et ses exigences propres. L’analyse des quantités pêchées montre une tendance plutôt à la hausse mais également une variabilité interannuelle forte qui induit une fragilité importante du secteur. La pêche amateur est également substantielle. Elle a été évaluée par l’étude précitée à un volume annuel compris entre 338 et 770 tonnes par an.

Type et quantités de poissons pêchés dans l’étang de Berre
(pêche professionnelle)

Unité : tonnes.

Source : GIPREB et IFREMER.

Toutefois, la pêche au sein de l’étang de Berre a pu être entravée, ces dernières années, par le développement de Mnemiopsis leidyi, une espèce de macroplancton qui a proliféré dans les eaux de l’étang de Berre à la suite d’une arrivée accidentelle dans des eaux de ballasts de navire. Ces organismes sont susceptibles de colmater les filets des pêcheurs et d’entraîner des pertes économiques pouvant aller jusqu’à 50 %. Par ailleurs, cette espèce serait susceptible de favoriser le maintien de condition hypoxiques au sein de la masse d’eau ([51]) et, en cas de forte prolifération, d’endommager les moteurs des bateaux de nautisme et de compromettre la baignade.

Ce sentiment d’amélioration est également majoritaire parmi les personnes ayant participé à la consultation publique, signe qu’il s’agit d’une perception partagée. L’augmentation de la fréquentation des plages de l’étang au cours des dernières années peut aussi témoigner de cette évolution des perceptions ([52]).

Réponses à la question : « Selon vous, la qualité des eaux de l’étang
s’est-elle améliorée ou dégradée au cours des dix dernières années ? »

Source : consultation en ligne. Cf. annexe.

C.   La malaïgue de 2018 et la remise en cause des progrès enregistrés

Toutefois, l’année 2018 a connu un important coup d’arrêt aux progrès enregistrés antérieurement. En effet, l’été 2018 a été marqué par un épisode de malaïgue. Ce phénomène, commun à de nombreuses lagunes méditerranéennes, résulte d’une absence de vent et de températures élevées. La masse d’eau devient alors anoxique (c’est-à-dire dépourvue d’oxygène), entraînant la disparition d’une grande partie de la faune et de la flore qui la peuplent.

La malaïgue de 2018 a été particulièrement forte sur l’étang de Berre ([53]). En effet, l’anoxie a concerné 93 % de la surface de l’étang, ce dernier étant privé d’oxygène à partir de 1,5 mètre de profondeur (cf. carte ci-dessous). Dans certaines parties de l’étang de Vaine, cette anoxie a concerné la totalité de la colonne d’eau, jusqu’à la surface ([54]). Elle a entraîné la mort de milliers de poissons, des invertébrés et des coquillages et la suspension de la pêche à la palourde en juillet 2018. Par ailleurs, la surface des herbiers a été réduite de 55 %, alors que ces derniers étaient en croissance depuis plusieurs années ([55]). Elle a été d’autant plus mal vécue qu’elle a pris place dans une phase de progression de la biodiversité au sein de l’étang depuis plusieurs années.

Surface de l’étang soumise à anoxie en août 2018

Source : GIPREB, Observatoire du milieu, Bilan annuel 2018, p. 59. La zone rouge correspond à la surface de l’étang concernée par l’anoxie.

Cet épisode démontre que l’état écologique de l’étang n’est pas stable. Il est susceptible de modifications brutales, sous l’effet des différents facteurs qui en déterminent l’état (mistral, rejets d’eau douce, crues des rivières…) et « qui sont autant dimpulsions violentes pour la plupart non « prévisibles », aléatoires, qui font de létang de Berre un système en transition permanente aux équilibres instables » ([56]).

Une controverse a éclaté au sujet de la responsabilité éventuelle des turbinages d’EDF dans la survenue et la durée de cette crise. En effet, EDF a rejeté de manière exceptionnelle (et hors quotas) 40 millions de mètres cubes d’eau et 2 800 tonnes de sédiments du fait de travaux du syndicat mixte d’aménagement de la vallée de la Durance pour le confortement de digues (qui nécessitaient un niveau plus bas de la rivière) et de la nécessité de faire baisser le niveau du barrage de Serre-Ponçon en raison d’une fonte tardive des neiges ([57]).

Pour l’Observatoire du milieu du GIPREB, cette malaïgue a été causée par un « effet cocktail » de plusieurs facteurs ([58]) : des turbinages importants de la centrale EDF qui ont accentué la stratification des eaux et les apports en nutriments, des conditions climatiques de chaleur et d’absence de vent, la présence importante de macro-organismes benthiques consommateurs d’oxygène et l’absence d’une masse critique de zostères permettant d’oxygéner l’étang. Pour le GIPREB, si les turbinages d’EDF qui sont intervenus à partir du 9 août à un moment où la malaïgue était déjà présente ne peuvent pas en être à l’origine, ils auraient contribué à la prolongation de la crise jusqu’en décembre 2018.

Pour EDF, la crise de malaïgue ne peut pas être imputée aux rejets de l’usine de Saint-Chamas ([59]). En effet, d’une part, certaines années ont connu un turbinage plus fort et n’ont pas suscité de malaïgue (par exemple l’année 2013), et d’autre part, des années avec un turbinage très faible ont connu une malaïgue (2006 par exemple). La crise s’expliquerait donc par les conditions climatiques exceptionnelles de 2018 : une année très chaude combinée à une absence de vent estival. Par ailleurs, de tels épisodes de malaïgue ont été décrits dès la fin du XIXe siècle, soit avant l’ouverture de la centrale de Saint-Chamas. Enfin, EDF note que les deux derniers épisodes de malaïgue (2006 et 2018) de l’étang de Berre coïncident avec ceux qu’a connu l’étang de Thau (qui n’est pas soumis à des rejets d’eau douce), ce qui confirmerait l’influence principale des conditions climatiques dans leur survenue.

Dans une note complémentaire à leur rapport principal, les inspecteurs du CGEDD concluaient au fait que la cause principale de l’épisode de malaïgue résultait de la concomitance entre l’absence de vent fort susceptible de brasser les eaux de l’étang, et de mettre un terme à la stratification, et des températures très élevées. Ils notaient par ailleurs que les rejets d’EDF étaient postérieurs au déclenchement de la crise, leur attribuant un rôle « marginal voire négligeable » ([60]). Les auteurs estimaient toutefois que l’absence d’information préalable ou postérieure de la part d’EDF concernant ses rejets exceptionnels était « un manquement quil conviendra de ne plus réitérer » ([61]).

La crise de malaïgue de l’année 2018 a donc montré la fragilité du rétablissement de l’étang de Berre, qui reste marqué par des « déséquilibres constants », susceptibles de modifier brutalement le fonctionnement de la masse d’eau ([62]).

IV.   La nécessité de préparer le long terme

Si, compte tenu de la situation écologique actuelle de l’étang de Berre et malgré les progrès enregistrés pendant ces dernières années, la probabilité d’atteindre le bon état écologique des eaux en 2027 est plus qu’incertaine (A), la situation de l’étang de Berre doit désormais être analysée dans un contexte marqué par le changement climatique (B) et en prenant en compte plusieurs échéances à venir (C).

A.   Les difficultés à atteindre le bon état écologique des eaux

Les principales règles applicables en matière de qualité des eaux découlent de la directive n° 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l’eau (dite directive cadre sur l’eau ou DCE). Cette directive fixe, dans son article 4, un objectif de « bon état des eaux de surface ». Elle prévoit que ce bon état soit atteint en 2015, sous réserve de facultés de reports jusquen 2027. À partir de cette date, les États dont certaines masses d’eau ne sont pas dans un bon état seront passibles d’actions en manquement. D’après les informations fournies par la direction de l’eau et de la biodiversité et par les services de la Commission européenne, de très nombreuses masses d’eau en Europe et en France seraient susceptibles d’être concernées, du fait de leur mauvais état écologique.

Le bon état d’une masse d’eau englobe son bon état :

–  chimique : la mesure porte sur la présence et la concentration dans l’eau et dans la matière vivante d’une liste de 41 substances polluantes fixée par la directive. Il suffit qu’une seule substance excède les seuils fixés pour que l’indicateur chimique soit mauvais ;

–  écologique : pour l’étang de Berre, les éléments de qualité suivis sont les phytoplanctons, les paramètres physico-chimiques d’appui (essentiellement les nutriments et la présence d’oxygène dissous), les macrophytes (espèces de référence et algues opportunistes) et la macrofaune benthique associée au substrat meuble. Pour chacun de ces éléments, la masse d’eau est classée en cinq catégories allant de très bon à mauvais. L’indicateur écologique prend la valeur de l’élément ayant obtenu le classement le plus mauvais.

Pour être considérée comme en bon état au regard de la directive, la masse deau doit être à la fois en bon état chimique et en bon état écologique.

Pour l’heure, l’objectif de bon état des eaux de l’étang de Berre en 2027 est l’objectif figurant dans le schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) 2016-2021.

Objectifs DCE pour la masse d’eau de l’étang de Berre

Source : SDAGE 2015-2021.

Il revient à l’IFREMER d’assurer le suivi des différents paramètres (chimiques comme écologiques) qui entrent dans le cadre de la DCE pour l’ensemble des lagunes méditerranéennes. Afin de déterminer si l’objectif de bon état de la masse d’eau pouvait être atteint en 2027, le préfet coordonnateur de bassin a saisi le conseil scientifique du comité de bassin d’une demande d’expertise en 2016. Dans son avis, ce dernier se montre réservé quant à la possibilité d’atteindre un bon état des eaux de l’étang en 2027 ([63]).

À l’heure actuelle, l’état écologique pour chaque masse d’eau est le suivant :

– le Grand étang est classé « médiocre » pour l’état écologique du compartiment macrophytes en 2018 ;

– l’étang de Vaïne est classé « médiocre » au regard des macrophytes du compartiment macrophyte et l’état physico-chimique (ces derniers ne peuvent pas dégrader la masse d’eau au-delà de l’état moyen) ;

– l’étang de Bolmon est classé « mauvais » pour tous les compartiments en 2015 et 2009, hormis un classement « médiocre » pour la macrofaune benthique. Les données des suivis plus récents ne sont pas encore disponibles.

Classement de l’État Écologique des masses d’eau de l’Étang de Berre au titre de la DCE

Lecture : rouge : mauvais ; orange : médiocre ; jaune : moyen ; vert : bon ; bleu : très bon.

 

Grand étang

Vaine

Bolmon

État écologique

2018

2018

2015

Phytoplancton

2018

2018

2015

Macrophytes

2018

2018

2009

Macrofaune benthique

2015

2009

2009

Physico-chimique

2018

2018

2015

État chimique

2018

 

 

Chimie eau

2018 résultats partiels*

 

 

Chimie matière vivante

2018

 

 

État DCE

2018

2018

2015

Source : GIPREB

Le principal facteur déclassant au titre de la DCE est constitué par les macrophytes, cest-à-dire les plantes aquatiques de grande taille. La principale espèce de référence en la matière est, pour l’étang de Berre, les zostères. Leur surface a été considérablement amoindrie à la suite de l’ouverture de l’usine de Saint-Chamas, privant ainsi l’étang d’une partie de son oxygène. Pour le comité de bassin, le rythme de croissance observé pour les zostères ne permettra pas d’atteindre l’objectif de 50 % de surfaces potentielles colonisées en 2027, ce qui serait nécessaire pour atteindre le bon état écologique. De surcroît, l’avis du conseil scientifique a été rendu avant la crise de 2018 qui a détruit une part conséquente des herbiers de zostères existants (entre 40 et 60 %).

Évolution des herbiers de zostère

2009

2014

2017

2019

Objectif DCE

1,4 ha

4,4 ha

17,9 ha

Entre 7,2 et 13 ha

1 500 ha

Source : GIPREB. L’objectif de 1500 hectares est mentionné dans l’avis précité du conseil scientifique du comité de bassin, p. 6.

Le CGEDD dresse un constat encore plus pessimiste, en soulignant qu’« à léchelle mondiale, très rares sont les masses deau anoxiques dont létat a pu être reconquis, moins dune quinzaine » ([64]). Au demeurant, le bon état pourrait également ne pas être atteint pour les rivières du bassin versant.

La notion d« objectifs environnementaux moins stricts »

Sur le fondement de la directive-cadre sur l’eau, il incombe aux États membres d’atteindre un bon état écologique pour l’ensemble de leurs masses d’eau au plus tard en 2027. Après 2027, ils pourront toutefois invoquer larticle 4.5 de la directive-cadre, qui autorise à viser la réalisation d’« objectifs environnementaux moins stricts ». Cette dérogation concerne les masses d’eau fortement touchées par l’activité humaine et pour lesquelles la réalisation des objectifs entraînerait un coût disproportionné. Pour bénéficier de cette dérogation, il est également nécessaire que l’activité humaine dégradant l’état de la masse d’eau ne puisse pas être assurée autrement, que l’état de la masse d’eau soit optimal indépendamment des dégradations engendrées par l’activité humaine et que l’état de la masse d’eau ne se dégrade plus.

La France devrait demander massivement le recours à cette dérogation à échéance 2027. Les différents acteurs – à l’exception du GIPREB – semblent s’accorder sur la difficulté à atteindre le bon état des eaux d’ici 2027 s’agissant de l’étang de Berre. Cette situation ne serait d’ailleurs pas unique en France, puisque seules 44 % des masses d’eau sont actuellement en bon état écologique (et 40 % en Europe) ([65]). Mais le rapporteur souligne que le recours à cette dérogation ne se justifie pas et que l’atteinte des objectifs écologiques fixés par la directive pour 2027 est primordial pour faire de l’étang une vitrine et un exemple de résilience écologique

Paragraphe 5 de l’article 4 de la directive 2000/60/CE
du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000

« 5. Les États membres peuvent viser à réaliser des objectifs environnementaux moins stricts que ceux fixés au paragraphe 1, pour certaines masses d’eau spécifiques, lorsque celles-ci sont tellement touchées par l’activité humaine, déterminée conformément à l’article 5, paragraphe 1, ou que leur condition naturelle est telle que la réalisation de ces objectifs serait impossible ou d’un coût disproportionné, et que toutes les conditions suivantes sont réunies :

« a) les besoins environnementaux et sociaux auxquels répond cette activité humaine ne peuvent être assurés par d’autres moyens constituant une option environnementale meilleure et dont le coût n’est pas disproportionné ;

« b) les États membres veillent à ce que :

« – les eaux de surface présentent un état écologique et chimique optimal compte tenu des incidences qui n’auraient raisonnablement pas pu être évitées à cause de la nature des activités humaines ou de la pollution,

« – les eaux souterraines présentent des modifications minimales par rapport à un bon état de ces eaux compte tenu des incidences qui n’auraient raisonnablement pas pu être évitées à cause de la nature des activités humaines ou de la pollution ;

« c) aucune autre détérioration de l’état des masses d’eau concernées ne se produit ;

« d) les objectifs environnementaux moins stricts sont explicitement indiqués et motivés dans le plan de gestion de district hydrographique requis aux termes de l’article 13 et ces objectifs sont revus tous les six ans. »

B.   Les effets attendus du changement climatique

Le changement climatique en cours aura des conséquences sur le régime des pluies et donc sur la quantité de ressource en eau disponible. À ce titre, la Méditerranée semble connaître un réchauffement supérieur à la moyenne planétaire ([66]). Un rapport élaboré par les 80 experts du Réseau d’experts méditerranéens sur le changement climatique et environnemental (MedEC) attendu pour l’année 2020 devrait préciser les connaissances scientifiques en la matière. Les résultats préliminaires indiquent qu’à l’horizon 2040, les températures régionales devraient avoir augmenté de 2,2 degrés, et la disponibilité en eau douce pourrait avoir diminué de 15 %.

Augmentation anticipée des températures
dans la zone Durance-Verdon d’ici 2040

Source : Rapport final du projet R2D2 2050, Risque, ressource en eau et gestion durable de la Durance en 2050, novembre 2014, p. 100.

Effets du changement climatique sur la région méditerranéenne

Source : MedEC, 2019.

S’agissant du bassin de la Durance-Verdon, une étude spécifique, baptisée R2D2 2050 a été publiée en 2014 ([67]). Elle ambitionne, grâce à une équipe pluridisciplinaire, de modéliser l’hydrologie et les usages de la ressource en eau à échéance 2050, dans le contexte du changement climatique. Ses principaux résultats sont les suivants ([68]) :

– une augmentation des températures moyennes de un à trois degrés ayant des conséquences sur l’hydrologie de montagne ;

– une évolution incertaine des précipitations ;

– une diminution de la ressource en eau durant la période estivale pouvant entraîner des difficultés à maintenir la cote touristique (c’est-à-dire la quantité d’eau, dans les rivières, de nature à permettre le maintien des activités touristiques) ;

– une diminution de la production hydroélectrique causée notamment par la réduction des apports en eau et par la satisfaction prioritaire des autres usages de l’eau.

Bassin versant de la Durance et du Verdon

Source : Rapport final du projet R2D2 2050, Risque, ressource en eau et gestion durable de la Durance en 2050, novembre 2014.

Au total, la région PACA serait moins touchée que d’autres régions françaises par les risques de diminution de la ressource en eau douce, compte tenu de la proximité du « château d’eau » que constituent les Alpes et des infrastructures anciennes de transport d’eau ([69]). Toutefois, une diminution des débits en eau est à anticiper. Elle pourrait être proche de 20 mètres cubes par seconde à Cadarache mais serait plus particulièrement gênante pour l’amont des bassins versants ([70]). Le Rhône pourrait, pour sa part, perdre de 5 à 30 % de son débit d’ici 2050 ([71]).

Ainsi, pour la Société du Canal de Provence, il n’existe pas de réel conflit d’usage de la ressource en eau en Provence, mais davantage un conflit d’usage entre les utilisations de cette dernière et la production hydroélectrique ([72]).

S’agissant plus précisément des conséquences du changement climatique sur létang de Berre, aucun des interlocuteurs de la mission d’information n’a fait état de la réalisation d’études particulières, que ce soit s’agissant des conséquences de l’augmentation des températures, de l’élévation du niveau de la mer ou de la réduction des précipitations. Compte tenu de la diminution des débits de la Durance prévue dans le cadre du projet R2D2 et du caractère prioritaire d’autres usages de l’eau (agriculture, eau potable…), il est probable que les quantités d’eau destinées à la production hydroélectrique soient conduites à diminuer. Par ailleurs, l’augmentation des températures et la diminution du vent pourraient favoriser l’augmentation des épisodes de malaïgue (cf. supra). Il sera enfin nécessaire de mesurer les effets de l’élévation du niveau des eaux sur les activités se situant sur le pourtour de l’étang et sur son écosystème même, les premières prévisions à ce sujet n’étant toutefois pas alarmantes ([73]). À l’échelle du bassin, les pourtours de l’étang de Berre sont vus comme une zone présentant plutôt moins de vulnérabilités face au changement climatique ([74]).

C.   Une restauration à penser sur le long terme

De nombreux facteurs incitent à penser la réhabilitation de l’étang de Berre sur le long terme. En premier lieu, l’évolution de telles masses d’eau ne peut être envisagée qu’à échéance d’une décennie, compte tenu de leur inertie et de l’action progressive sur les différents facteurs. Les actions menées par le passé, que ce soit concernant la diminution des rejets d’eau douce et celle des différents polluants, le démontrent : l’amélioration de l’état écologique de la masse d’eau a été réelle mais progressive. Par ailleurs, les concessions hydroélectriques ne peuvent être rentabilisées qu’à échéance de plusieurs décennies ([75]). Enfin, le changement climatique implique, comme évoqué, de penser l’avenir de l’étang de Berre sur la durée du XXIe siècle.

Plusieurs points d’étape doivent permettre d’ouvrir la voie à la réhabilitation de l’étang et peuvent fournir autant d’occasions de dresser un bilan des progrès accomplis et des efforts restant à engager.

Le congrès mondial pour la nature de lUnion internationale pour la conservation de la nature (UICN) qui doit se tenir à Marseille doit constituer un moment fort pour l’étang de Berre, qui se situe à proximité immédiate. Initialement prévu en juin 2020, il a été reporté en janvier 2021 du fait de l’épidémie que nous traversons. Parmi les axes retenus figurent notamment l’adaptation au changement climatique et la préservation de la ressource en eau douce ([76]). Les meilleurs experts de la planète en matière de biodiversité et de protection de la nature seront réunis à quelques kilomètres de l’étang de Berre. Ce doit être l’occasion d’apprendre des expériences menées ailleurs dans le monde et de recueillir des pistes innovantes pour la réhabilitation de l’étang. Il est également essentiel que l’étang de Berre serve de vitrine à ce changement et montre l’exemple d’une réhabilitation réussie, en matière de biodiversité et de solutions fondées sur la nature. À ce titre, les propositions contenues dans le présent rapport doivent servir de ligne de conduite et leur mise en œuvre doit être engagée avant l’ouverture du Congrès. 

Les Jeux olympiques de 2024 constitueront un autre point d’étape. Certaines de ses épreuves, notamment la voile, se dérouleront dans la rade de Marseille. Dans ce cadre, plusieurs des communes riveraines de l’étang ont plaidé pour que ce dernier puisse accueillir les bases d’entraînement des équipes nationales de voile. Ceci ne sera possible que si l’étang se trouve lui-même dans un bon état écologique et si sa gouvernance permet une gestion harmonieuse de la masse d’eau. Berre-L’étang ou Martigues ont ainsi été labellisées « Terres de jeux 2024 », ce qui leur permet de candidater à l’accueil des délégations sportives. Une accélération de la mise en œuvre des mesures de réhabilitation pourrait également permettre d’envisager l’organisation de certaines épreuves sur l’étang de Berre.

Bien entendu, léchéance de 2027 est également essentielle pour l’étang de Berre. Il s’agit en effet de la date limite à laquelle, sur le fondement de la directive-cadre sur l’eau, l’ensemble des masses d’eau doivent se trouver dans un bon état écologique. Cette échéance est cruciale et doit structurer les efforts à accomplir durant la décennie à venir. Quelle que soit la décision prise quant à l’atteinte des objectifs ou à une demande de dérogation, la date de 2027 est un point de passage essentiel.

Enfin, à plus long terme, certains élus du pourtour de l’étang de Berre, et en particulier le maire de Martigues M. Gaby Charroux, ont porté l’idée, depuis plusieurs années, d’une inscription de létang de Berre au patrimoine mondial de lhumanité de lUNESCO. L’étang de Berre constituerait un bien mixte, culturel et naturel, à l’image du Mont-Perdu dans les Pyrénées ([77]). Pour obtenir un tel classement, il est toutefois nécessaire de démontrer la valeur universelle du bien. Par ailleurs, il sera nécessaire que l’état écologique de l’étang soit irréprochable si un classement est envisagé sur des critères naturels. La première étape de la procédure de classement réside dans l’inscription du bien sur la liste indicative nationale. Or, si la rade de Marseille ou la Camargue figurent sur la liste indicative française, tel n’est pas encore le cas de l’étang de Berre ([78]). Ce classement a été plusieurs fois évoqué devant la mission d’information et a fait l’objet d’appréciations diverses. S’il est susceptible de donner une perspective motivante pour la réhabilitation de l’étang, de nombreuses difficultés demeurent à surmonter. Néanmoins, c’est bien au double titre de sa qualité naturelle et de son histoire humaine que ce classement est demandé : il s’agirait ainsi d’une reconnaissance de l’exemplarité de l’action entreprise à différents niveaux pour la réhabilitation de l’étang et qui montre déjà de nombreux résultats positifs. Cette démarche s’inscrirait ainsi dans une dynamique d’interactions vertueuses.

 


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   Deuxième partie : Mobiliser tous les leviers disponibles pour réhabiliter l’étang de Berre

Le dernier rapport du CGEDD se concentre sur la réalisation d’« actions sans regret », c’est-à-dire qui auront des effets positifs quels que soient les choix réalisés dans le futur ([79]). Il apparaît à la mission que cette piste n’est pas suffisamment ambitieuse au regard du temps déjà perdu pour la réhabilitation de l’étang de Berre. Ce sont à l’inverse tous les moyens d’action qui doivent être mis en œuvre, dans le cadre d’une stratégie d’ensemble, pour faire progresser la qualité des eaux de l’étang.

Les enjeux de la réhabilitation de l’étang sont non seulement environnementaux, mais également économiques et sociaux, dans la mesure où près de 80 % des répondants à la consultation organisée par la mission d’information souhaiteraient débuter de nouvelles activités en cas d’amélioration de la qualité de ses eaux ([80]). Sont notamment citées, la baignade, les activités nautiques, la pêche ou les promenades.

C’est donc bien l’ensemble des leviers qui doivent être mobilisés, depuis la limitation des rejets de l’usine hydroélectrique de Saint-Chamas (I) jusqu’aux solutions fondées sur la nature (IV), en passant par la réouverture à la courantologie du tunnel du Rove (II) et par la poursuite de la politique de réduction des rejets de nutriments (III).

I.   Limiter les rejets de la centrale hydroélectrique de Saint‑Chamas

La centrale hydroélectrique de Saint-Chamas se situe au carrefour des enjeux de l’étang de Berre, ainsi qu’en ont témoigné tant les auditions conduites par la mission d’information que les résultats de la consultation publique. Cette situation n’est pas récente puisqu’un référendum d’initiative locale organisé en 1991 avait recueilli 95 % de votes en faveur de la fermeture de la centrale ([81]).

A.   Les données du problème

Aujourd’hui, la centrale de Saint-Chamas est soumise aux limites prévues par le règlement d’eau de Salon-Saint-Chamas qui a permis de clôturer la procédure contentieuse européenne. En conséquence, ses rejets annuels moyens sont les suivants : 954 millions de mètres cubes d’eau et 48 000 tonnes de limons par an. Ces rejets sont calculés, en application du règlement d’eau, du 1er novembre au 31 octobre. Au cours de la dernière année complète (2018-2019), les rejets ont été de 840,2 millions de mètres cubes d’eau douce ([82]). Comme évoqué précédemment, ces rejets ont pour conséquence la stratification des eaux de l’étang et le développement des phénomènes d’anoxie.

D’un autre côté, la centrale de Saint-Chamas joue un rôle important dans l’approvisionnement électrique du sud-est de la France. En effet, elle fait figure de « péninsule électrique », disposant de peu de capacités de production d’électricité. Dès lors, la chaîne hydroélectrique Durance-Verdon qui peut être activée en dix minutes permet de sécuriser l’approvisionnement électrique de cette région en produisant 2 000 MW, soit l’équivalent de deux réacteurs nucléaires. EDF note que les quotas d’ores et déjà imposés réduisent la réactivité de la centrale, dans la mesure où l’eau non rejetée dans l’étang doit l’être dans la Durance, ce qui ne peut être réalisé que progressivement.

Par ailleurs, la centrale constitue une source d’énergie renouvelable de pointe. Constituant une source d’énergie pilotable, elle permet de faciliter l’intégration dans le réseau des autres énergies renouvelables (EnR) que sont le solaire et l’éolien. EDF évalue ainsi à 250 000 tonnes de CO2 les rejets supplémentaires de gaz à effet de serre induits par les quotas imposés à la centrale, qui ont abouti à réduire sa production de 600 GWh par an soit 10 % du potentiel total de la chaîne Durance-Verdon ([83]). Enfin, EDF souligne que c’est l’équilibre économique de la concession qui est en cause, dans la mesure où les quotas de 2005 induisent déjà une perte d’exploitation de six millions d’euros par an en moyenne. Il faut d’ailleurs noter que les quotas de la centrale de Saint‑Chamas ont également des conséquences pour le fonctionnement de la centrale de Saint-de-Provence située en amont sur le canal.

Par ailleurs, des analyses divergentes existent quant à l’impact écologique sur l’étang de Berre d’une diminution des rejets d’eau douce.

Pour EDF, outre les conséquences financières pour l’équilibre de la concession et la diminution de la production d’électricité renouvelable, la diminution des rejets serait également susceptible davoir des conséquences négatives sur lécosystème de létang de Berre ([84]). EDF souligne tout d’abord qu’il n’existe pas de modèle permettant de prédire l’évolution de l’écosystème en cas de changement important de circonstances. Il souligne par ailleurs les éléments suivants :

– la diminution des rejets conduirait à une augmentation de la salinité de l’eau en surface mais cette dernière demeurerait inférieure à la salinité de l’eau de mer entrant par le chenal de Caronte. En conséquence, la stratification haline perdurerait et continuerait à ne pouvoir être affaiblie que par l’action du vent ;

– l’augmentation du temps de résidence des eaux de l’étang augmenterait, ce qui favoriserait le stockage des polluants en provenance du bassin versant, notamment le phosphore. En revanche, les apports en azote diminueraient assez fortement mais EDF estime qu’il ne s’agit pas de l’élément limitant dans le cas de l’eutrophisation de l’étang de Berre ;

– les impacts seraient potentiellement importants pour la Basse-Durance, s’agissant notamment de la biodiversité, du fait de l’augmentation des rejets. En effet, la dérivation d’une partie de l’eau vers l’étang de Berre permet de réguler le débit de la Basse-Durance. Une augmentation aurait, selon EDF, des conséquences sur la biodiversité, les ouvrages d’art et les usages.

En conclusion, estime EDF, « les conséquences dune diminution de ces quotas pourraient être ambivalentes voire négatives sur létang de Berre. »

En revanche, selon lintégralité des autres acteurs rencontrés, les rejets deau douce de la centrale hydroélectrique de Saint-Chamas contribuent au mauvais état écologique de la lagune. De nombreux scientifiques auditionnés par la mission d’information ont développé cette analyse, tout en soulignant les limites, évoquées précédemment, des connaissances scientifiques actuelles quant au fonctionnement de l’écosystème de l’étang de Berre.

En effet, la diminution des rejets d’eau douce aurait pour conséquence l’augmentation de la salinité des eaux et donc une diminution de la stratification de la masse d’eau. S’il est vrai que la centrale de Saint-Chamas ne constitue pas la seule source d’eau douce de l’étang de Berre, elle en est la principale puisqu’environ 80 % de l’eau douce qui parvient à l’étang de Berre en provient. Toute diminution des rejets aurait donc des conséquences sur la diminution de la stratification de la masse d’eau ([85]). Ainsi, avec une stratification moins importante, le brassage de la colonne d’eau serait facilité et pourrait donc être réalisé par un vent moins fort. En conséquence, les épisodes de brassage augmenteraient, réduisant l’anoxie qui règne au fond de l’étang. Les études menées sur les conséquences de la diminution des rejets en 2006 semblent confirmer cette interprétation puisque cette diminution a été concomitante d’une élévation de la salinité dans la colonne d’eau et de la présence d’oxygène dans les couches les plus profondes de la masse d’eau ([86]).

Par ailleurs, en cas de diminution de la stratification de la colonne d’eau, la remobilisation du phosphore prisonnier dans les sédiments devrait être moins importante ([87]). Elle est en effet plus forte dans des conditions d’hypoxie ou d’anoxie. Une diminution des rejets entraînerait donc une diminution substantielle des apports en azote (la centrale étant leur source principale), mais aussi une baisse de la mobilisation du phosphore compris dans les sédiments. Il demeure toutefois des incertitudes scientifiques quant au volume et aux conditions de la remobilisation du phosphore emprisonné dans les sédiments. Il n’en est pas moins probable que la diminution de ces apports limite les arrivées d’azote et de phosphore et donc l’eutrophisation de la masse d’eau.

Enfin, la diminution des apports solides (limons) ferait diminuer la turbidité de la masse d’eau et serait donc susceptible d’améliorer la croissance et la diffusion des herbiers de zostères.

À l’inverse, les scientifiques consultés s’accordent également à estimer que la diminution des rejets entraînera une augmentation de la durée de résidence de l’eau et des nutriments, ce qui serait facteur de renforcement de l’eutrophisation. Toutefois, les effets de cette augmentation sur l’écosystème sont mal connus. Surtout, leur combinaison avec les autres effets attendus ne peut pas être aujourd’hui anticipée faute de modèle global et paramétré simulant le comportement de la masse d’eau.

Au final, l’avis des scientifiques rencontrés est qu’une diminution des rejets « aurait un effet bénéfique pour lécosystème qui serait immédiat » ([88]). Sur le moyen terme, les effets devraient également être positifs, une fois que l’azote et le phosphore surabondants auront pu être évacués ou consommés. De même, au cours de son audition du 18 février 2020, M. Jean Jalbert, directeur général de la Tour du Valat, a estimé que « dans ces volumes et dans cette qualité, les apports du canal [dEDF] constituaient un problème. » Pour le conseil scientifique du comité de bassin, la diminution des rejets en eau et en limon pourrait être de nature, à terme, à faire diminuer la quantité globale de nutriments présents dans l’étang et donc l’eutrophisation de la masse d’eau.

Il existe donc un large consensus quant aux effets bénéfiques potentiels d’une diminution des rejets de la centrale de Saint-Chamas dans l’étang de Berre.

B.   Les nouvelles procédures en cours aux niveaux national et européen

Le 3 juillet 2019, le GIPREB a annoncé son intention de déposer un nouveau recours devant les juridictions nationales et européennes contre lÉtat français pour inaction, les rejets de la centrale de Saint-Chamas dans l’étang étant toujours jugés excessifs. Ce recours fait suite à l’annonce, par les services de l’État, de la constitution d’un dossier visant à demander à la Commission européenne une dérogation pour la non-atteinte des objectifs de la directive-cadre sur l’eau en 2027 (procédure précédemment évoquée dite de « l’objectif moins strict » prévue à l’article 4, paragraphe 5, de la directive).

Saisi en référé, le tribunal administratif de Marseille a désigné un expert chargé d’effectuer différents prélèvements dans l’étang. Son rapport aurait été remis au tribunal administratif au cours du mois de janvier 2020. L’expert avait notamment pour mission de :

– constater durant la période estivale, et si nécessaire, au-delà, la pollution de l’étang de Berre, son eutrophisation et l’anoxie en résultant ;

– constater l’évolution des rejets en quantité et en qualité émanant de Salon et de Saint-Chamas tout au long de la période de référence ;

– constater, le cas échéant, la mort des poissons ;

– constater l’évolution des apports en limons ;

– constater l’évolution de la macrofaune benthique ;

– constater la qualité des eaux de l’étang, leur couleur et leur turbidité et les conséquences sur les herbiers.

Ce rapport n’étant pas public, il n’a pas été possible à la mission d’information de prendre connaissance de son contenu.

Par ailleurs, lassociation LÉtang Nouveau a également annoncé déposer une plainte devant la Commission européenne pour inaction de lÉtat à réduire les apports dans létang. Ce recours a été déposé le 13 mai 2019 par le cabinet d’avocats Dovislex de Padoue, qui était déjà intervenu au cours du précédent contentieux.

Malgré la clôture de la procédure européenne par une décision de la Commission de 2009 qui avait estimé que la France avait pris les mesures suffisantes pour se conformer à la décision de la Cour de justice du 7 octobre 2004 ([89]), la Commission demeure compétente pour s’assurer que la France se conforme bien à cet arrêt. C’est donc sur ce fondement qu’elle va instruire les plaintes reçues en 2019. Dans ce cadre, elle a saisi les autorités françaises afin de pouvoir disposer de leurs observations, en application de l’article 258 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) ([90]). Si, à l’issue de cette procédure, la Commission devait considérer que la France ne respecte pas la directive-cadre sur l’eau s’agissant de l’étang de Berre, elle pourrait saisir la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) en application de l’article 260, cette dernière étant compétente pour prononcer le paiement d’une somme forfaitaire ou d’une astreinte. Dans tous les cas, même en l’absence de saisine de la CJUE, la Commission a indiqué vouloir renforcer son suivi des mesures prises par la France pour l’amélioration de la qualité des eaux de l’étang de Berre.

Les fondements juridiques de l’action de la Commission européenne

Art. 258 TFUE

Si la Commission estime qu’un État membre a manqué à une des obligations qui lui incombent en vertu des traités, elle émet un avis motivé à ce sujet, après avoir mis cet État en mesure de présenter ses observations.

Si l’État en cause ne se conforme pas à cet avis dans le délai déterminé par la Commission, celle-ci peut saisir la Cour de justice de l’Union européenne.

Art. 260 TFUE

1. Si la Cour de justice de l’Union européenne reconnaît qu’un État membre a manqué à une des obligations qui lui incombent en vertu des traités, cet État est tenu de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt de la Cour.

2. Si la Commission estime que l’État membre concerné n’a pas pris les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt de la Cour, elle peut saisir la Cour, après avoir mis cet État en mesure de présenter ses observations. Elle indique le montant de la somme forfaitaire ou de l’astreinte à payer par l’État membre concerné qu’elle estime adapté aux circonstances.

Si la Cour reconnaît que l’État membre concerné ne s’est pas conformé à son arrêt, elle peut lui infliger le paiement d’une somme forfaitaire ou d’une astreinte.

Cette procédure est sans préjudice de l’article 259.

C.   le projet de dérivation des eaux du canal edf : une question encore en suspens

Une dérivation de l’eau douce actuellement déversée dans l’étang de Berre est parfois considérée comme l’une des solutions possibles au mauvais état écologique de l’étang (1). Cette dérivation aurait par ailleurs pour effet de valoriser la ressource en eau douce (2).

1.   Les scenarii de la dérivation et de la restitution

Pendant de nombreuses années, le GIPREB, soutenu notamment par le collectif d’associations « L’étang marin », a pris position pour une dérivation des eaux issues de la Durance à l’aval de l’usine hydroélectrique de Saint-Chamas. Ainsi, plutôt que d’être rejetées dans l’étang de Berre, ces eaux seraient conduites à nouveau vers le Rhône. Ce projet aurait le triple avantage de permettre de maximiser le potentiel de l’usine hydroélectrique de Saint-Chamas, dans le cadre de la valorisation des sources d’énergie renouvelables, de disposer d’une ressource accrue en eau douce et de stopper les rejets d’eau douce dans l’étang de Berre, ce qui serait susceptible de mettre fin à la stratification des eaux de l’étang, ou en tout cas de la faire fortement régresser. Par ailleurs, les apports, notamment en azote, seraient fortement réduits, puisque les rejets de la centrale représentent près de 60 % de ces derniers, contribuant ainsi à la réduction de l’eutrophisation du milieu. Enfin, dans un contexte où les limons transportés par le Rhône sont de moins en moins nombreux et où la Camargue se trouve en déficit hydrique de plus en plus important, les limons et l’eau du canal usinier pourraient être précieux pour ce territoire s’ils étaient dérivés vers le Rhône.

Toutefois, les effets d’une telle dérivation ne sont pas univoques. En effet, la fin des rejets d’eau douce dans l’étang aurait également pour conséquence d’augmenter le temps de résidence de l’eau dans ce dernier (aux environs de 220 jours ([91])), ce qui pourrait favoriser l’eutrophisation du milieu, les nutriments y étant plus systématiquement enfermés. Par ailleurs, l’étang deviendrait un milieu d’eau salé – et non plus saumâtre – avec des conséquences à prévoir pour la faune et pour la flore. La vitesse de la transition entre l’état actuel et l’état futur n’est pas connue. Enfin, il n’est pas certain que la dérivation des eaux mette totalement fin aux rejets d’eau douce dans l’étang de Berre. En effet, en période de crue de la Durance, il serait certainement nécessaire de pouvoir continuer à rejeter ponctuellement de l’eau dans l’étang ([92]).

Par ailleurs, le projet de dérivation aurait un coût économique non négligeable puisqu’il avait été estimé à environ un milliard d’euros en 2000, montant qui doit avoir substantiellement augmenté en vingt ans. Ainsi, le projet de dérivation a été pour l’instant écarté, le coût apparaissant comme le facteur de blocage principal. Néanmoins, au regard du plan d’investissement massif dans les infrastructures, le projet pourrait être réétudié.

Un projet similaire, présenté à la mission par Via Marina, consisterait à capter l’eau douce rejetée par la centrale de Saint-Chamas au moyen d’un pipeline, en vue de la rejeter dans le Golfe de Fos ou de l’acheminer en Espagne ou en Afrique du Nord, régions qui seront durement touchées par le changement climatique en cours ([93]). Pour ses concepteurs, le projet aurait pour avantage de restaurer la capacité de la centrale de Saint-Chamas (et donc d’engendrer des gains économiques), de contribuer à l’amélioration de la qualité des eaux de l’étang et de ne pas gâcher une précieuse ressource en eau douce. Toutefois, la réalisation de ce projet nécessiterait des investissements importants et incertains et le percement d’un tunnel en parallèle du canal de Caronte.

Il serait également utile d’étudier la possibilité d’installer des micro-centrales sur le cours des canaux existants, notamment ceux qui sont utilisés à des fins d’irrigation. EDF a indiqué à la mission ne pas avoir procédé à de telles évaluations.

Proposition n° 1 : Repenser et moderniser les aménagements hydroélectriques de la chaîne Durance-Verdon (étudier la possibilité d’aménager des micro-centrales sur les canaux existants et réactualiser l’étude sur le projet de dérivation des eaux rejetées par la centrale de Saint-Chamas).

En tout état de cause, le rapporteur tient à souligner que l’eau douce sera la ressource majeure du XXIe siècle et qu’il serait irresponsable de s’en priver. L’eau douce peut ainsi être récupérée pour des usages domestiques, pour la réduction du risque d’incendie ou pour l’agriculture. Elle permet d’allier écologie et économie dans une perspective de développement local. Ainsi, bien que l’usage adéquat de l’eau douce issue de la chaîne Durance-Verdon ne s’impose pas, à l’heure actuelle, comme une évidence, il demeure irresponsable de jeter de l’eau.

2.   L’enjeu de la préservation de la ressource en eau douce

Dans le contexte du changement climatique en cours, la ressource en eau douce est en effet destinée à devenir de plus en plus stratégique. Dans ces conditions, le fait de rejeter près d’un milliard de mètres cubes d’eau douce chaque année dans l’étang de Berre peut soulever des interrogations. La mission s’est donc efforcée d’analyser les conditions dans lesquelles cette eau douce pourrait être mieux utilisée. L’audition de la Société du Canal de Provence qui a la responsabilité de sécuriser l’approvisionnement en eau de la Provence a permis de mettre en lumière plusieurs éléments ([94]).

En premier lieu, l’étude R2D2 2050 estime qu’il est possible, y compris dans le contexte du changement climatique, de faire diminuer la sollicitation en eau douce par rapport à la situation présente ([95]). Ceci nécessite toutefois des efforts de modernisation des canaux afin de minimiser les fuites et déperditions. Pour ce faire, le rapport R2D2 2050 préconise trois pistes de travail principales afin d’optimiser la gestion de la ressource en eau douce ([96]) :

– la mise en place d’un programme de réduction des fuites d’eau. La Société du Canal de Provence a confirmé, au cours de son audition, la possibilité d’une telle modernisation ([97]) ;

– le déploiement d’infrastructures de réutilisation des eaux usées à usage agricole, ce qui suppose l’élaboration préalable de normes et de réglementations ;

– la modification de la taxation sur l’eau, instituant une tarification progressive à l’échelle des communes ou des intercommunalités, pour inciter à une plus grande responsabilité.

La modernisation des canaux doit constituer l’axe prioritaire, puisque l’économie en termes de ressource en eau pourrait approcher les 400 millions de mètres cubes par an ([98]).

Par ailleurs, les rejets dans l’étang de Berre sont sans commune mesure avec les prélèvements effectués par la Société du Canal de Provence dans le bassin de la Durance. En effet, alors que ces derniers s’élèvent à environ 250 millions de mètres cubes chaque année, les rejets dans l’étang de Berre sont quatre fois supérieurs. Par comparaison également, il existe une prise d’eau au-dessus de la centrale de Saint-Chamas afin de pourvoir à une partie de l’alimentation en eau du pourtour de l’étang. Cette dernière est de 10 millions de mètres cubes par an et correspond donc à environ 1 % de la quantité d’eau douce rejetée dans l’étang ([99]). Ces rejets représentent donc une énorme quantité d’eau douce qui ne pourrait pas être utilisée intégralement à des fins de consommation humaine ou d’irrigation. Se poserait par ailleurs la question de son stockage dans de grandes proportions.

L’intention initiale du projet de dérivation était l’alimentation en eau d’irrigation de la plaine de la Crau et de la Camargue, qui consomment 1,8 milliard de mètres cubes d’eau par an ([100]). D’après les informations recueillies par la mission d’information auprès de la Société du Canal de Provence, il ne serait pas nécessaire de procurer de l’eau supplémentaire à ces territoires, mais plutôt d’améliorer les infrastructures existantes et les techniques d’irrigation actuelles qui sont peu économes de la ressource en eau ([101]). Bien que conscient de la difficulté de réemployer des volumes d’eau aussi importants, le Rapporteur s’étonne cependant qu’une partie de cette eau ne puisse pas être plus largement réemployée, notamment pour l’alimentation en eau potable, l’agriculture, la protection des massifs forestiers et le renforcement des nappes phréatiques. En outre, la création d’un bassin de rétention pourrait servir des usages polyvalents, notamment pour l’industrie et la protection civile.

Doit également être écartée la piste consistant à faire de l’étang de Berre un lac deau douce qui est évoquée dans le dernier rapport du CGEDD. Elle était motivée par le caractère stratégique de la ressource en eau dans le cadre du changement climatique. Sa réalisation nécessiterait de doter le chenal de Caronte d’une écluse ([102]) pour restreindre les entrées d’eau de mer, dont le coût n’est pas estimé. Par ailleurs, cette modification induirait une modification très importante de l’écosystème de l’étang.

D.   La nécessité d’un nouveau cadre réglementaire

L’opportunité, pour améliorer la qualité de la masse d’eau, d’une nouvelle diminution des rejets de la centrale hydroélectrique de Saint-Chamas est l’un des points qui suscite le plus de débats. Il voit s’affronter deux positions adverses (1). Doivent également être soulevées les questions de la transparence des conditions de rejets (2) et du bassin de décantation de Cadarache (3).

1.   La diminution des quotas de rejets

Comme évoqué précédemment, les derniers quotas de rejets d’eau douce et de limons dans l’étang de Berre ont été fixés à la suite du contentieux européen de 2005. Ils figurent désormais au règlement d’eau de la concession hydroélectrique. Les rejets d’eau douce sont ainsi limités à 1 200 millions de mètres cubes par an, avec des mécanismes de lissage hebdomadaire. Pour ce qui concerne les limons, ils sont plafonnés à 60 000 tonnes par an. Par ailleurs, des seuils de salinité dans l’étang de Berre doivent être respectés. Incontestablement, la mise en œuvre de ces quotas ainsi que les autres actions menées à bien durant les deux dernières décennies ont permis une amélioration tendancielle de l’état écologique de l’étang.

Toutefois, nous sommes encore loin du bon état écologique, du fait notamment des multiples forçages que subit l’étang de Berre. Le principal d’entre eux, qui contribue fortement à son instabilité, réside dans les rejets d’eau douce par l’usine de Saint-Chamas. Cette position est à la fois celle des scientifiques rencontrés par la mission d’information, du GIPREB, des associations de préservation de l’environnement et des citoyens qui ont contribué à la consultation publique. Comme évoqué précédemment, seuls les experts d’EDF soutiennent toutefois la position inverse. Il semble donc y avoir un large accord scientifique et social pour une nouvelle diminution des rejets d’eau douce dans l’étang, bien que la diminution de la production d’hydroélectricité qui en résulte est un facteur regrettable.

Ainsi, l’association L’Étang Nouveau préconise une des quotas de rejets d’eau douce dans l’étang de Berre à 300 millions de mètres cubes par an. Compte tenu de l’amélioration de l’état écologique de l’étang au cours de ces dernières années, il semblerait que le GIPREB ait également réorienté son positionnement en faveur d’une diminution des quotas et donc d’une restitution de l’eau non turbinée à la Durance : il ne privilégie plus l’idée d’une dérivation, en tout cas à court terme, mais celle d’une nouvelle réduction de moitié des plafonds de rejet d’eau douce dans l’étang ([103]), pour un quota qui serait porté à 600 millions de mètres cubes ([104]).

Par ailleurs, la France est sous la menace du déclenchement d’une nouvelle procédure contentieuse européenne. Compte tenu du consensus scientifique quant au caractère bénéfique d’une nouvelle réduction des rejets pour l’amélioration de l’état écologique de l’étang de Berre, il est probable qu’une telle réduction soit imposée à la France. La France aurait donc tout intérêt à prendre les devants et à organiser elle-même, dans les meilleures conditions, cette réduction. Un choix doit toutefois être fait entre deux exigences contradictoires : la production d’électricité renouvelable et la restauration écologique de l’étang de Berre. La seule manière de concilier ces deux exigences serait, comme évoqué ultérieurement, d’étudier la transformation de tout ou partie de la chaîne en STEP. Des incertitudes techniques et économiques importantes subsistent toutefois à ce stade quant au caractère réalisable d’un tel projet.

Compte tenu de l’impact très probable des rejets de l’usine hydroélectrique de Saint-Chamas sur l’écosystème de l’étang de Berre et sur l’instabilité de la masse d’eau, la mission préconise de sengager dans une nouvelle phase de diminution des rejets. Ainsi, un objectif de diminution de plus ou moins 50 % des rejets d’eau douce et de limons pourrait par exemple être fixé. Il devrait être associé avec une démarche d’évaluation, de manière à mesurer aussi précisément que possible les effets de la diminution des rejets sur l’écosystème de l’étang. Cette diminution devrait donc faire l’objet d’un suivi scientifique exigeant. S’il s’avérait – ce qui est peu probable – qu’une diminution des rejets avait pour conséquence une dégradation de l’écosystème, il serait toujours temps de revenir sur cette orientation, une fois ce constat établi, et d’augmenter à nouveau les apports en eau douce et en limons.

Les conséquences d’une telle réduction des rejets doivent être analysées. Ainsi, en cas de diminution, à terme, de moitié des quotas de rejets d’eau douce, la perte de production serait d’environ 98 400 MWh (la moitié de la capacité de production théorique de 196 800 MWh). Toutefois, il faut prendre en compte que l’eau turbinée à Saint-Chamas l’est d’abord à la centrale de Salon-de-Provence avec laquelle elle fonctionne de manière synchrone et à laquelle elle est reliée par un canal usinier. Ainsi, en l’absence d’exutoire entre les deux usines (hormis quelques prélèvements d’eau pour les besoins de l’alimentation agricole), toute limitation de la capacité de production de la centrale de Saint-Chamas se traduit par une limitation de la même amplitude de celles de la centrale de Salon. Les capacités de production brutes des deux usines sont de 0,266 KWh par mètres cubes turbiné.

Elles sont donc aujourd’hui limitées à la production théorique de 319 200 MWh par an et une division par deux des quotas de rejets dans l’étang de Berre entraineraient une perte de capacité totale de production d’au moins 159 600 MWh par an. À titre de comparaison, la marche demeure toutefois moins haute que celles qui ont déjà été franchies, puisqu’il s’agirait de réduire les rejets de 600 millions de mètres cubes par an, alors qu’ils l’ont déjà été de plus de 2,1 milliards de mètres cubes par an. Par ailleurs, dans la perspective d’une diminution des rejets, une meilleure coordination devra être trouvée avec les gestionnaires de l’eau de la vallée de la Basse-Durance, qui recevrait ainsi une quantité d’eau un peu supérieure à ce qu’elle reçoit actuellement.

Une telle réduction des rejets est fortement approuvée par les participants à la consultation publique de la mission d’information (près des deux-tiers des répondants attribuent la note maximale à cette proposition) ([105]). En revanche, la fermeture totale de la centrale, qui est demandée par certains participants, ne semble pas opportune en l’état des connaissances. Il est en effet d’abord nécessaire d’expérimenter une diminution des quotas de rejet afin d’en analyser les résultats. Par ailleurs, une fermeture totale pénaliserait fortement la production d’électricité de toute la chaîne hydroélectrique Durance-Verdon. Enfin, EDF rappelle que les émissions induites par la perte de production déjà effective des centrales de Salon et de Saint-Chamas du fait des contraintes de rejets aujourd’hui en vigueur est de 250 000 tonnes de CO2.

2.   L’accroissement de la transparence quant aux conditions de rejets

Le cadre issu du règlement d’eau de 2006 définit les obligations de chacune des parties prenantes, et en particulier d’EDF. Par ailleurs, EDF et le GIPREB sont chargés de la réalisation d’un certain nombre de mesures au sein de l’étang de Berre afin de permettre un suivi de son évolution.

Toutefois, il semblerait que plusieurs acteurs locaux souhaitent que les rejets effectués par EDF s’accompagnent d’une transparence accrue quant à leur date et quant à leur nature. Ainsi, l’absence d’information donnée par EDF s’agissant des rejets exceptionnels de l’été 2018 a été critiquée par le premier rapport du CGEDD, qui a qualifié cette absence d’information de « manquement quil conviendra de ne plus réitérer » ([106]). De même, il a été indiqué à la mission d’information que les pêcheurs de l’étang souhaiteraient être avertis, ou au moins informés, des rejets, afin de pouvoir adapter leur activité.

L’adaptation du cadre réglementaire devra donc également porter sur les obligations d’information et de transparence liées aux rejets effectués. Plus généralement, il est nécessaire d’améliorer l’information des riverains de l’étang sur la qualité de ses eaux (sanitaire comme écologique). En effet, plus de la moitié des participants à la consultation publique ont indiqué ne pas disposer de suffisamment d’informations en la matière ([107]).

Proposition n° 2 : Réduire les quotas deau douce et de limons rejetés dans létang de Berre et améliorer linformation et la transparence sur la gestion des rejets. Instaurer un comité de suivi de la trajectoire de réduction.

3.   La question du bassin de délimonage

La question des limons préoccupe les scientifiques depuis le début du projet de rejet d’une partie des eaux de la Durance dans l’étang de Berre. En effet, dès 1950, il avait été demandé à EDF que les prises d’eau à Cadarache et à Mallemort soient équipées « de bassins de délimonage très importants » ([108]). Toutefois, des inquiétudes se sont fait jour à l’occasion de l’enquête publique, provenant notamment des agriculteurs qui craignaient que les vertus fertilisantes des eaux amenées par le canal EDF soient réduites. Dès lors, la décision fut prise de ne pas prendre de mesures initiales visant à réduire la charge en limons des eaux destinées à être rejetées dans l’étang de Berre.

Toutefois, d’autres inquiétudes concernaient le comblement de l’étang et la nécessité de pouvoir continuer à assurer sa navigabilité, ce qui supposait de réduire les apports en limons. Par conséquence, deux mesures ont été arrêtées ([109]). D’une part, EDF s’est engagé à ne pas rejeter dans l’étang les eaux d’une charge solide supérieure à 5 g/l. Dans ces cas, l’eau est restituée à la Durance à Mallemort. D’autre part, l’étang a été doté, au débouché de la centrale de Saint-Chamas, d’une « zone de sédimentation organisée ». Cette zone a vocation à orienter les flux d’eau à la sortie de l’usine et à diriger le panache de sédiments dans un espace bien déterminé en bordure de l’étang, afin que ces derniers n’envasent pas excessivement d’autres zones. Toutefois, ces mesures ne se sont pas révélées suffisantes, du fait notamment de la difficulté à délimoner la zone de sédimentation organisée au sein de l’étang et d’une dispersion des limons supérieure à celle qui avait été envisagée. EDF proposa alors de transformer le réservoir d’éclusée de Cadarache en bassin de délimonage. Ce dernier a été mis en service en 1980, pour une durée de vie estimée à 24 ans (soit jusqu’en 2004). Il était prévu que cette dernière puisse être prolongée par curage ([110]). L’efficacité du bassin était attestée puisqu’il avait permis de diviser par environ trois les apports solides rejetés dans l’étang de Berre par la centrale de Saint-Chamas ([111]). Elle est désormais réduite, du fait du comblement du bassin.

Variation de la profondeur des fonds de l’étang entre 1962 et 1992

Source : Note EDF en réponse au questionnaire de la mission.

Les apports en limons dans l’étang de Berre ont été conséquents mais ils sont en diminution importante, du fait notamment des quotas européens (cf. supra). Ils ont ainsi été ramenés d’une moyenne de 600 000 tonnes par an dans les années 1980, à environ 60 000 tonnes par an aujourd’hui, soit une division par dix ([112]). Toutefois, les rejets de la centrale de Saint-Chamas demeurent encore une source importante, voire principale, d’azote et de phosphore. Il est donc essentiel de réfléchir aux moyens de diminuer ces rejets. Si la question de la diminution des rejets d’eau douce doit être posée en tant que telle, elle ne doit pas empêcher de poser également celle du délimonage. C’est la raison pour laquelle le dernier rapport du CGEDD préconise de s’intéresser au fonctionnement du bassin de délimonage de Cadarache, afin de limiter les apports en nutriments ([113]).

Interrogé sur la perspective d’un curage du bassin, EDF a fait valoir des difficultés d’ordre technique, environnemental, juridique et économique. D’un point de vue technique, le curage est complexe car le bassin se trouve dans une zone très dense et très urbanisée, ce qui rend difficile l’entreposage provisoire des limons à des fins de séchage. Par ailleurs, la quantité de sédiments à curer est très importante (9 millions de mètres cubes soit 18 millions de tonnes). D’un point de vue environnemental, le bassin est situé au sein d’une zone protégée abritant une biodiversité avicole importante. D’un point de vue juridique, les sédiments extraits sont considérés comme des déchets et ne peuvent donc pas être valorisés. Enfin, d’un point de vue économique, le coût du curage entier du bassin est évalué à 90 millions d’euros. Toutefois, EDF indique qu’il « étudie en ce moment la possibilité de curer partiellement le bassin de Cadarache à un coût raisonnable, en lien avec la fragilité économique de la concession. Ce curage permettrait ainsi de mieux valoriser la capacité de production de pointe des centrales de Salon et Saint-Chamas, actuellement contraintes notamment par le quota solide. » ([114]). Il souligne toutefois que le coût d’une telle opération devra être partagé avec d’autres acteurs territoriaux et qu’un changement de la législation relative au statut des sédiments serait de nature à favoriser l’opération.

Proposition n° 3 : Prévoir une obligation de curage du bassin de décantation de Cadarache. Étudier l’opportunité de l’octroi du statut de déchet aux boues.

E.   Les STEP : un projet intéressant mais complexe À réaliser

En complément de sa proposition consistant à réduire les quotas de rejet dans l’étang de Berre, l’association L’Étang Nouveau préconise également de transformer la chaîne hydroélectrique Durance-Verdon en station de transfert de l’énergie par pompage (STEP). Une STEP est un ensemble composé de deux bassins (amont et aval) séparés par une chute d’eau où l’eau est turbinée. Contrairement à un barrage classique, l’eau peut circuler dans un sens ou dans l’autre. Ainsi, elle peut être turbinée pendant les pics de consommation d’électricité et remontée dans le bassin amont durant les périodes creuses. Une STEP fonctionne donc en circuit fermé, pouvant turbiner la même eau un grand nombre de fois.

L’Étang Nouveau promeut depuis plusieurs années la transformation de la chaîne Durance-Verdon en STEP ([115]). Chaque bassin de la chaîne pourrait servir à la fois de bassin aval et de bassin amont. Le bassin le plus un amont serait celui de Serre-Ponçon, quand le bassin le plus en aval serait situé dans l’étang de Berre.

Projet de STEP promu par l’association L’étang nouveau

Pour l’association, ce projet aurait de nombreux avantages. En premier lieu, il permettrait de restituer une quantité d’eau importante à la Durance dès l’amont de son cours, contribuant à restaurer la vie aquatique. Par ailleurs, l’eau issue de la Durance est actuellement délimonée pour ses différents usages. De ce fait, les matériaux solides apportés au Rhône et à la Camargue sont beaucoup moins nombreux, ce qui fragilise cette dernière. Ainsi, avec la transformation de la chaîne en STEP, la charge naturelle en limon de la Durance pourrait continuer à alimenter la Camargue. En troisième lieu, il n’y aurait plus de nécessité à rejeter de l’eau douce et des limons dans l’étang de Berre, ce qui devrait contribuer à sa réhabilitation. Enfin, les STEP seraient de nature à pérenniser la production hydroélectrique de la chaîne et la production d’électricité nucléaire dans la vallée du Rhône. En effet, la chaîne fonctionnant en circuit fermé, elle ne serait plus dépendante du débit des rivières. Par ailleurs, les centrales nucléaires de la vallée du Rhône pourraient continuer à disposer de suffisamment d’eau pour assurer leur refroidissement.

Toutefois, interrogé à propos de la faisabilité d’un tel projet, EDF a émis d’importantes réserves. EDF considère en effet que des travaux importants devraient être entrepris s’agissant des canaux, qui ne sont pas conçus pour pouvoir acheminer de l’eau vers l’amont. Ils fonctionnent en effet selon un principe gravitaire. Par ailleurs, pour mener le projet à bien, un bassin « aval » devrait être aménagé dans l’étang de Berre, ce qui soulèverait des questions environnementales ([116]). Enfin, une très grande partie des turbines devrait être remplacée et des lignes à haute ou très haute tension devraient être construites afin d’alimenter les pompes. Au total, les travaux pourraient s’élever à plusieurs milliards d’euros, sans perspective de rentabilité. En outre, EDF souligne que même si tous ces travaux étaient réalisés, la chaîne ne pourrait plus être mobilisée en urgence, compte tenu de l’inertie des masses d’eau. Ces éléments sont fournis par EDF « à dire d’experts » et sans étude spécifique.

Compte tenu des avantages potentiels de ce projet et des obstacles importants à sa réalisation, la mission préconise qu’une étude préalable de faisabilité en bonne et due forme soit réalisée, afin que ce dernier puisse être écarté ou approfondi en connaissance de cause. Cette étude devra être menée par un prestataire autre que le concessionnaire de la chaîne, afin de pouvoir être conduite de manière indépendante.

Proposition n° 4 : Mener une étude de faisabilité de la transformation de tout ou partie de lusine de Saint-Chamas en station de transfert de lénergie par pompage afin de limiter les rejets tout en exploitant au maximum de sa capacité cette usine.

II.   Rouvrir le tunnel du Rove à la courantologie

Tout autant que l’idée d’une dérivation des eaux en amont de l’étang de Berre, la perspective d’une réouverture à la courantologie du tunnel du Rove (qui reliait le port de l’Estaque et l’étang de Berre) constitue un projet discuté et étudié depuis au moins vingt ans ([117]), dans la perspective d’une réhabilitation de l’étang.

A.   La réouverture du tunnel, un état des lieux

Comme évoqué, le tunnel du Rove a fait l’objet d’un éboulement en 1963 sur une longueur de 170 mètres, qui empêche la navigation et la circulation de l’eau en son sein. Si aucune demande n’existe pour une réouverture à la navigation (projet dont le coût s’élèverait à plusieurs centaines de millions d’euros), en revanche, l’idée d’une réouverture à la courantologie est promue par certains acteurs, en premier lieu par le GIPREB, comme un levier pour la réhabilitation des étangs de Berre et de Bolmon (1). Ce projet a néanmoins connu des vicissitudes, du fait notamment d’une gouvernance inadaptée (cf. infra), qui en a retardé l’accomplissement. Inscrit au contrat d’étang en 2013, son financement avait fait l’objet d’un accord entre l’État et les collectivités territoriales, pour un projet estimé à environ 8,5 millions d’euros et un débit de 20 m3/s ([118]). Toutefois, les études préalables réalisées par le cabinet Egis ont réévalué en 2016 le montant du projet à 31 millions d’euros, compromettant ainsi lourdement ses possibilités de financement. En conséquence, des scenarii alternatifs de réouverture ont été élaborés et deux rapports successifs du CGEDD (avril 2017 et juillet 2018) ont tenté de dresser un état des lieux du projet ([119]). Le premier promeut un recalibrage à la baisse et un séquençage du projet (2), quand le second juge toute réouverture peu opportune (3).

1.   Les arguments favorables à la réouverture à la courantologie

La réouverture à la courantologie est un projet porté historiquement par le GIPREB, dans la perspective de permettre un apport d’eau salée dans l’étang, de manière à en renouveler plus rapidement les eaux et à en augmenter la salinité. Ce projet a fait l’objet d’un accord, en 2003, du ministère de l’environnement, pour un débit de 20 m3/s et pour un coût prévisionnel de 8 millions d’euros. L’objectif de cette réouverture était triple :

– en premier lieu, il s’agissant de créer un nouvel apport en eau de mer, en plus de celui du canal de Caronte, afin d’augmenter le niveau de salinité de l’étang ;

– par ailleurs, cet apport d’eau marine étant pauvre en nutriments, il avait également pour vocation de faire diminuer la concentration de ces derniers dans l’étang ;

– enfin, cet apport d’eau externe aurait pour conséquence de faire diminuer le temps de renouvellement de l’eau dans l’étang de Berre d’environ 30 jours pour un débit de 20 m3/s ([120]).

Le projet devait également permettre de restaurer le bon état écologique du canal du Rove qui est aujourd’hui à l’abandon et d’améliorer l’état écologique de l’étang de Bolmon par un dispositif de pompage entre le canal du Rove et l’étang de Bolmon.

Tel qu’il a été conçu, le projet comprenait notamment le creusement d’une nouvelle galerie parallèle à l’effondrement et de canaux de part et d’autre, la réalisation d’un puits de surface destiné notamment à accueillir le dispositif de pompage pour 20 m3/s, ainsi que l’installation d’un second dispositif de pompage pour réguler le transfert d’eau entre le canal du Rove et l’étang de Bolmon ([121]).

Le projet de réouverture à la courantologie avait fait l’objet d’une validation dans le cadre du contrat d’étang. La réouverture avait d’ailleurs été inscrite au neuvième plan de financement de l’agence de l’eau. Toutefois, en 2016, à la suite d’études techniques préalables, il est apparu que le coût d’une réouverture du tunnel serait substantiellement supérieur à celle qui avait été anticipée (31 millions d’euros au lieu des 8,5 millions d’euros initialement prévus). Par conséquent, cette réouverture n’a pas été réalisée dans les délais prévus.

À la suite de cet épisode, le CGEDD a été saisi par le ministre de la transition écologique et solidaire de deux études successives sur la réouverture du tunnel du Rove, dont les conclusions ont été en partie contradictoires.

2.   La proposition de séquençage et de redimensionnement du projet par le premier rapport du CGEDD

Le premier rapport du CGEDD remis en avril 2017 préconisait de revoir les ambitions du projet à la baisse, compte tenu des incertitudes quant à son efficacité, et de se limiter à un pompage de 4 m3/s dans un premier temps. Il validait par ailleurs le sérieux des chiffrages du projet, effectués par Egis, qui avait été mis en cause par le GIPREB.

Le rapport soulignait plusieurs difficultés. En particulier, s’agissant de l’étang de Bolmon, le projet consisterait à élever le niveau de salinité (passage de 20 g/l à un taux compris entre 25 et 30 g/l). Toutefois, faute d’études appropriées, les effets de cette élévation sur les écosystèmes ne peuvent pas être anticipés. Par ailleurs, une crue de la Cadière engendrerait le risque d’une brutale dessalure de l’étang, susceptible de mettre à mal le nouvel écosystème. Le système devait donc être conçu pour pouvoir renouveler en quelques jours la totalité de la masse d’eau de l’étang. Les auteurs soulignaient le fait qu’« il ne sagit pas de restaurer un écosystème pour laider à retrouver un équilibre et une capacité de résilience, mais de créer un écosystème artificiel sous « perfusion » permanente deau marine nécessitant des ajustements continus » ([122]). Enfin, le rapport soulignait que le Conservatoire du littoral était opposé au projet et que l’agence de l’eau était dubitative.

Pour ce qui concerne l’étang de Berre, le rapport estimait que « tous les projets de réouverture à la circulation de leau de mer du tunnel du Rove, la solution de base à 20 m3/s comme les scénarios à 4 ou 10 m3/s, ont comme caractéristique commune de ne pas avoir deffet significatif sur létang de Berre » ([123]).

Sur ce fondement, le rapport explorait des pistes et des dimensionnements alternatifs pour le projet. D’un point de vue technique, les travaux à réaliser, et donc le coût du projet, dépendent, selon le rapport, du débit souhaité. Pour schématiser, trois grandes possibilités existent :

– pour un débit de 4 m3/s, il est possible de faire transiter l’eau par la galerie de 2,6 m2 de section d’ores et déjà percée au travers de l’éboulis (dite « ovoïde »), ce qui réduit fortement le coût des travaux et minimise les risques de fragilisation du tunnel ;

– pour un débit de 10 m3/s, le creusement d’une seconde galerie dans l’éboulis est indispensable ;

– pour un débit de 20 m3/s, le creusement d’une galerie parallèle, tel qu’envisagé par le projet initial, est nécessaire.

Coût estimatif de la réouverture à la courantologie du tunnel du Rove

Débit

Coût

20 m3/s

31 millions d’euros

10 m3/s

21 millions d’euros

4 m3/s

13 millions d’euros

Source : B. Abrial et D. Hucher, op. cit., p. 19 et s. Ces coûts ne comprennent que le chiffrage des travaux. Il faut par ailleurs leur ajouter 400 000 euros de coûts de fonctionnement annuels.

Le rapport du CGEDD proposait plusieurs scenarii, que ce soit pour le débit dans le tunnel du Rove ou pour les capacités de transfert d’eau entre le canal du Rove et l’étang de Bolmon. Il préconisait d’adopter une démarche expérimentale et progressive. Du fait des incertitudes entourant les conséquences d’une réouverture du tunnel pour l’étang de Bolmon et pour l’étang de Berre, sa conclusion était de privilégier une réouverture dans un premier temps avec un débit de 4 m3/s, avant, le cas échéant, d’engager de nouveaux travaux pour en augmenter la capacité.

Le GIPREB a fait part, le 28 mars 2017, de son opposition à tout nouveau périmètre pour le projet s’il ne permettait pas d’obtenir un débit d’au moins 10 m3/s ([124]). En conséquence, pour sortir de cette situation de blocage, le ministère chargé de l’environnement a commandé un second rapport au CGEDD.

3.   Les doutes émis par le second rapport du CGEDD

Ce second rapport, remis en juillet 2018, portait spécifiquement sur l’évaluation des effets d’un système de pompage au travers du tunnel du Rove. Il conclut que les effets d’un apport d’eau de mer par le tunnel du Rove sont incertains. Pour les auteurs du rapport, il faut différencier les effets d’une réouverture à la courantologie du tunnel :

– pour le grand étang, ils estiment que les effets seront réduits, notamment pour l’apport en oxygène, et que l’apport supplémentaire d’eau de mer n’est pas susceptible de mettre un terme à la stratification des eaux ;

– pour le canal du Rove, en revanche, un dispositif de pompage est susceptible de mettre fin à la stratification des eaux, dès 4 m3/s, sans induire de phénomène de remobilisation des métaux lourds présents dans les vases. La qualité des eaux devrait ainsi incontestablement s’améliorer ;

– pour l’étang de Bolmon, les scenarii sont en partie contradictoires. L’apport d’eau de mer est susceptible d’en augmenter très substantiellement la salinité, en la faisant passer d’une moyenne de 6,7 mg/l à 20 à 25 mg/l et donc d’induire une « évolution majeure du milieu » ([125]), avec une disparition des espèces de poissons d’eau douce. Se pose donc une question d’objectifs à moyen terme pour l’écologie de cet étang.

En conséquence, la mission du CGEDD propose de mettre fin au projet de réouverture à la courantologie du tunnel du Rove.

B.   Rouvrir le tunnel à la courantologie

La réhabilitation de l’étang de Berre n’est pas le seul enjeu actuel du tunnel du Rove. Il importe en effet également de s’assurer de sa robustesse, au regard notamment de la sécurité des populations et des activités qui prennent place à sa verticale, sur la commune de Gignac. Des travaux de consolidation ont ainsi été réalisés en 1983, en 1988 et en 1998, pour un total de 25 millions d’euros. À l’occasion de la deuxième campagne de travaux, une galerie ovoïde a été percée au travers de l’éboulement.

Au vu de l’impact important qu’aurait la réouverture à la courantologie du tunnel sur le canal du Rove et, potentiellement, sur l’étang de Bolmon, la mission soutient ce projet. Il ne lui appartient toutefois pas de se prononcer sur son calibrage. En revanche, dans le contexte actuel de réduction des consommations d’énergie, il ne paraît pas opportun de créer un système permanent de pompage qui devra être alimenté sur le long terme. Par conséquent, la piste du percement sous-marin de l’éboulis et de l’installation d’un clapet anti-retour semble être une option prometteuse, dans la mesure où elle permettrait d’assurer, au bénéfice du canal du Rove et de l’étang de Bolmon, un débit proche des effets d’un pompage à 4 m3/s ([126]).

Cette réouverture est fortement soutenue (note de 5/5) par plus des répondants à la consultation, qui y voient donc un élément important de la réhabilitation de l’étang de Berre ([127]).

La réouverture du tunnel du Rove à la courantologie n’aurait de sens que si, de manière concomitante, les rejets de la centrale hydroélectrique de Saint-Chamas sont réduits. En effet, il serait difficile de justifier les travaux nécessaires à la réouverture si l’on continue à rejeter la même quantité d’eau douce dans l’étang. En ce sens, les deux mesures forment un ensemble cohérent.

Proposition n° 5 : Rouvrir le tunnel du Rove à la courantologie par lintermédiaire dun percement sous-marin accompagné dun clapet anti-retour éventuellement aidé dun système de pompage.

Toutefois, selon la société Egis qui a été chargée d’étudier les scénarios de réouverture du tunnel, il semblerait préférable de mettre en œuvre un système de pompage d’un équivalent de 10 mètres cubes par seconde pour avoir un effet plus important sur la renaturation de l’étang de Berre. En dessous, le débit risquerait, selon la société Egis, de demeurer trop faible. Deux scénarios se dessinent ainsi, dont les coûts, les avantages et les inconvénients varient.

Source : EGIS

C.   Engager une action spécifique pour réhabiliter l’étang de Bolmon

Comme évoqué précédemment, la réouverture du tunnel du Rove à la courantologie devra être organisée soigneusement et de manière progressive, afin de ne pas déstabiliser brutalement les écosystèmes. Cette prudence devra valoir en particulier pour l’étang de Bolmon.

De manière complémentaire, une action volontariste doit être engagée afin de réhabiliter ce dernier. En effet, tous les projets en la matière ont été suspendus dans l’attente de la réouverture du tunnel. Par ailleurs, ils ont également été retardés voire compromis par des divergences entre acteurs, en particulier entre le Conservatoire du littoral et le GIPREB. Or, l’état de l’étang de Bolmon est très dégradé et ne semble pas être en cours d’amélioration ([128]).

Quelle que soit la temporalité de la réouverture du tunnel du Rove à la courantologie, il est désormais indispensable d’élaborer un plan d’ensemble concernant la gestion et l’état écologique de l’étang de Bolmon. Un tel projet avait été envisagé par le Conservatoire du littoral dans les années 1990 et 2000 mais sans être mis en œuvre, dans l’attente d’une décision concernant la réouverture du tunnel du Rove.

De même, en 2009, le Conservatoire avait souhaité engager des actions à hauteur de 400 000 euros au bénéfice de l’étang de Bolmon, mais ces dernières ont été bloquées du fait de l’opposition du GIPREB. Elles consistaient notamment à restaurer les bourdigues et les fenêtres afin de mieux contrôler les échanges entre l’étang de Berre et l’étang de Bolmon tout en évitant les mouvements de vase de fond. S’agissant de ces vases, le Conservatoire du littoral a indiqué souhaiter étudier la possibilité de les prélever à des fins de traitement dans des institutions spécialisées ([129]). Ces différentes perspectives de restauration de l’étang de Bolmon sont appuyées par France Nature Environnement (FNE) ([130]). Elles devront figurer dans le prochain contrat d’étang.

Proposition n° 6 : Prévoir, au sein du prochain contrat détang, un plan dinvestissements spécifique pour la réhabilitation de létang de Bolmon.

III.   Continuer à réduire les apports en nutriments des bassins versants

Près de 500 masses d’eau dans le monde sont désormais dépourvues de toute vie pour cause d’anoxie ([131]). Seule une douzaine d’entre elles ont pu être reconquises à ce jour. Dans tous les cas, cette reconquête est passée par la limitation des apports en nutriments. Il s’agit donc d’une action essentielle pour la réhabilitation de l’étang de Berre. Compte tenu de l’eutrophisation des eaux de l’étang, les efforts de limitation des sources de pollution déjà entrepris (A) doivent être accentués (B). Par ailleurs, de nouvelles actions doivent être engagées, afin de limiter non seulement les rejets provenant des réseaux d’assainissement, mais également les rejets directs, notamment par temps de pluie (C).

A.   Les efforts entrepris pour limiter les sources de pollution

Le bassin versant de l’étang de Berre comprend 39 stations d’épuration des eaux usées urbaines (STEU), si l’on exclut la Durance et son bassin versant ([132]). Sur ces 39 stations, seules quatre rejettent directement leurs effluents dans l’étang de Berre, les autres les rejetant dans l’Arc, la Touloubre ou la Cadière, ou dans leur bassin versant.

Depuis 2003, l’agence de l’eau a octroyé 42 millions d’euros d’aides pour lutter contre les pollutions domestiques, pour un montant total investi dans le financement de ces projets de 156 millions d’euros. Ces aides représentent plus de la moitié des aides versées par l’agence de l’eau au bénéfice de l’étang de Berre ou de son bassin versant. Grâce à ces investissements, le parc de stations d’épuration a pu être rendu performant. L’étang de Berre et son bassin versant ayant été classés en zones sensibles à l’eutrophisation au titre de l’azote et du phosphore sur le fondement de la directive 91/271/CEE du 21 mai 1991 relative au traitement des eaux urbaines résiduaires, des mesures complémentaires doivent être prises pour limiter les rejets des polluants responsables de l’eutrophisation des masses d’eau ([133]). En particulier, toutes les stations de traitement dont la capacité est supérieure à 10 000 équivalents habitants (EH) doivent remplir des objectifs plus élevés en matière de traitement de l’azote et du phosphore.

Ces efforts ont aussi concerné l’étang de Bolmon. En effet, l’ouverture des stations d’épuration de Vitrolles et de Les Pennes-Mirabeau, en 2008, a permis de faire substantiellement diminuer les rejets d’azote (d’un facteur 5) et de phosphore (d’un facteur 10) ([134]). Grâce aux efforts entrepris, 98 % des stations d’épuration du bassin versant seraient aux normes de la directive 91/271/CEE du 21 mai 1991 ([135]).

Des actions ont également été menées pour limiter les rejets agricoles. Ainsi, à l’occasion de son dixième programme (2013-2018), l’agence de l’eau a financé une trentaine d’aires de lavage individuelles de pulvérisateurs et cinq aires collectives sur le bassin versant de l’étang. Il a été souligné le caractère exemplaire du travail d’animation mené dans ce cadre par le syndicat d’aménagement du bassin de l’Arc (SABA). Les investissements ont toutefois été moindres puisque l’agence de l’eau y a consacré 5,2 millions d’euros d’aides depuis 2003, pour des projets d’un montant total de 6,5 millions d’euros.

B.   Poursuivre les efforts de limitation des rejets

Si les rejets industriels de polluants lourds dans l’étang de Berre par les usines installées sur son pourtour appartiennent au passé, n’en demeurent pas moins de multiples sources de rejets, directs ou indirects, de produits polluants ([136]). Il s’agit en particulier des rejets d’eaux chargées en azote et en phosphore. Comme évoqué précédemment, ces rejets émanent de plusieurs grandes sources principales.

Source des rejets d’azote et de phosphore 2014-2018

Source

Part dans les apports dazote

Part dans les apports de phosphore

Usine de Saint-Chamas

59 %

37 %

Cours d’eau
(Arc, Touloubre et Cadière)

27 %

36 %

Ruissellement

8 %

8 %

Stations d’épuration

3 %

7 %

Industriels

3 %

12 %

   Source : GIPREB

Des actions doivent continuer d’être menées pour chacune de ces sources de nutriments. S’agissant de l’azote, la réduction des rejets de l’usine de Saint‑Chamas que la mission d’information préconise par ailleurs aura des conséquences très importantes sur les apports au sein de l’étang de Berre. Pour ce qui est du phosphore, les conséquences d’une telle diminution seraient également non négligeables, mais d’ampleur moindre. Il est par conséquent important d’engager également une action résolue sur les autres facteurs.

S’agissant des cours deau, des études portant sur les flux admissibles d’intrants ont été engagées en 2019 s’agissant de l’étang de Berre et du bassin de l’Arc. Toutefois, le bassin versant de la Touloubre ne bénéficie pas d’une démarche analogue, qui devrait donc être initiée. Ces études doivent permettre de fixer des objectifs de plafonds de rejets.

Pour ce qui est des stations dépuration du pourtour de l’étang, ces dernières sont toutes équipées – quand leur capacité est supérieure à 10 000 EH – de dispositifs de traitement renforcé de l’azote et du phosphore, à l’exception de la station d’épuration de La Fare les Oliviers, qui doit être modernisée afin de remplir ces normes renforcées au cours de l’année 2020 ([137]). Toutefois, certaines stations de plus petite taille ne satisfont pas à leurs obligations de performance. Bien qu’elles soient de plus petite capacité, leur mise à niveau doit être envisagée, dans le cadre d’une politique d’ensemble de réduction des apports, avec un niveau de priorité correspondant à leur impact sur le milieu. Par ailleurs, leur mise à niveau permettrait aux collectivités gestionnaires de bénéficier de la prime financière pour épuration versée par l’agence de l’eau, cette dernière étant réduite en cas de non-conformité.

Stations d’épuration dont la performance n’est pas conforme
à leurs obligations

Unité : équivalent habitants

Station dépuration

Capacité

Pourrières

5 000

Chateauneuf Le Rouge

2 600

Puyloubier - Village

1 500

Pourcieux - Chef-Lieu

1 200

Cornillon Confoux

1 200

Venelles - Nord

1 000

Fuveau - Hameau de la Barque

1 000

Vauvenargues

600

Source : Note transmise par l’Agence de l’eau

Désormais, il serait possible de fixer un objectif quantitatif de rejet des nutriments dans l’étang, de manière à prioriser les actions à engager. C’est la démarche qui a été adoptée au sein du schéma d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE) du bassin de l’Arc. Par ailleurs, ce schéma impose des capacités de traitement renforcées de l’azote et du phosphore dès une capacité de 4 000 EH, et non de 10 000 EH, comme c’est le cas pour l’étang de Berre.

Proposition n° 7 : Fixer un objectif quantitatif de rejets de nutriments (azote et phosphore) dans létang de Berre de manière à prioriser les actions de réduction des rejets.

C.   Engager des actions pour prévenir les écoulements par temps de pluie

Une dernière source de rejets est à prendre en considération : il s’agit des rejets directs dans l’étang, qu’ils prennent la forme de ruissellements directs ou acheminés par des canalisations aboutissant à déverser directement les eaux pluviales dans l’étang lors des épisodes de forte pluie. Ces rejets proviennent des 35 bassins versants directs de l’étang de Berre. Si les chiffres communiqués par le GIPREB indiquent que ces ruissellements représenteraient 8 % des sources de phosphore et d’azote, une étude de 2017 les valorise respectivement à 20 % et 14 %. Ces rejets ne peuvent donc pas être ignorés.

Les bassins versants directs de l’étang de Berre

Source : GIPREB, Carnet détudes sur les apports directs du bassin versant de létang de Berre, avril 2017, p. 11.

Le GIPREB a recensé les conduites de rejet direct au début des années 2010 et en a dénombré 276 ([138]) le long du littoral de l’étang. Selon lui, « une grande partie de ces rejets sont des pluviaux de petite section, des points de rejets anciens, des exutoires de canaux dirrigation véhiculant de leau durancienne. » Sur la base de ce recensement, les 20 points de rejet les plus significatifs ont fait l’objet de prélèvements pendant une durée de sept mois en 2015. Les rejets atmosphériques ont également été évalués. Les analyses effectuées visaient les produits suivants : nutriments, hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), métaux et PCB, pesticides et bactériologie fécale.

Presque tous ces polluants ont été retrouvés dans les prélèvements effectués par temps de pluie (à l’exception des pesticides), en particulier des métaux et des hydrocarbures. Ces derniers sont absents des rejets par temps sec, ce qui tend à montrer qu’ils procèdent, en temps de pluie, du lessivage des surfaces souillées. En revanche, s’agissant des retombées atmosphériques, aucun des polluants recherchés n’a été décelé dans les prélèvements effectués.

Exemple de rejet direct dans l’étang

Source : GIPREB, Carnet détudes sur les apports directs du bassin versant de létang de Berre, avril 2017, p. 1.

Plusieurs pistes existent pour voir diminuer les pollutions liées aux eaux de pluie, qui passent en premier lieu par la désimperméabilisation de certains sols, notamment dans les zones d’activité et pour les parkings des principales surfaces commerciales. Cette perspective de désimperméabilisation des sols a déjà donné lieu à des concertations locales. Elle devra induire un effort partagé de l’ensemble des communes riveraines du bassin versant, ce qui rend d’autant plus nécessaire une réforme de la gouvernance de la réhabilitation de l’étang de Berre (cf. infra).

En seconde intention, il est également possible de construire des bassins d’orage afin de stocker le trop-plein d’eau ponctuel. Ainsi, les expérimentations conduites à Marseille ont permis de réduire de moitié les rejets dans la rade par temps d’orage ([139]).

Enfin, le fonctionnement de plusieurs stations d’épuration devra également être perfectionné afin de mieux collecter et traiter les eaux de pluie, en particulier celles de Vitrolles, Marignane, Berre-L’étang, Aix-en Provence ou Rognac ([140]).

Enfin, il est essentiel de renforcer la police des eaux afin de mettre fin aux branchements directs sur l’étang de Berre. Toutes les installations doivent être reliées au réseau d’assainissement, qui est seul en mesure de limiter les rejets de polluants dans l’étang. Il revient aux collectivités qui sont chargées de la compétence en matière d’assainissement des eaux de procéder à ces vérifications (commune, intercommunalité ou syndicat). À titre d’exemple, l’action volontariste de la municipalité de Saint-Mitre-Les-Remparts a permis de collecter 20 % d’effluents supplémentaires dans le réseau d’assainissement ([141]). Dans le cas de l’étang de Berre, la compétence en matière d’assainissement relève de la métropole, mais elle est assurée, sous sa responsabilité et pour son compte, par les six territoires qui la composent (et qui correspondent aux six anciens EPCI).

Proposition n° 8 : Renforcer la mise en œuvre de la police de leau et créer des dispositifs de lutte contre la pollution par temps de pluie (désimperméabilisation et bassins de stockage).

IV.   Développer les solutions fondées sur la nature

Les solutions fondées sur la nature constituent des pistes prometteuses pour la réhabilitation de l’étang de Berre. Elles ont en effet pour mérite de ne pas reposer sur une logique d’artificialisation supplémentaire pour lutter contre les effets néfastes de l’artificialisation passée mais au contraire de viser à la fois l’amélioration de la qualité des eaux et la poursuite d’autres objectifs écologiques ou économiques. Il en va ainsi du développement d’une filière de culture des coquillages (A) et de valorisation des algues (B). Par ailleurs, la réimplantation des zostères dans l’étang serait bénéfique pour son équilibre (C), de même que les conversions à l’agriculture biologique (D).

A.   Encourager le développement de la filière conchylicole et mytilicole

Comme évoqué précédemment, la pêche à la palourde et aux coques est désormais possible dans l’étang de Berre. Elle donne lieu à une pêche amateur et à une pêche professionnelle. Après la suspension causée par l’épisode de malaïgue en 2018, elle a été à nouveau autorisée par un arrêté préfectoral du 6 avril 2020.

La culture de coquillages semble constituer une perspective d’avenir pour l’étang de Berre, tant d’un point de vue économique que dans le cadre de sa réhabilitation environnementale. En premier lieu, ces coquillages ont des capacités de filtration des eaux et d’export des nutriments. Ils permettraient donc de faire diminuer les concentrations en azote et en phosphore dans l’étang – il faut toutefois noter que ces coquillages consomment également de l’oxygène et sont donc moins bénéfiques que les herbiers pour la réhabilitation de l’étang. Par ailleurs, ces activités constitueraient une source d’emplois et de revenus locaux. Enfin, le développement de telles cultures permettrait de renforcer la vigilance et l’exigence de bonne qualité des eaux, du fait des intérêts économiques induits.

L’exemple de l’étang de Thau est à ce titre instructif. En effet, la conchyliculture y a été déclarée activité principale en 1986 et elle représente 1 300 hectares sur les 6 800 hectares de la lagune, ce qui induit 2 000 emplois directs. Par ailleurs, l’importance de l’activité conchylicole a justifié une amélioration continue de la qualité des eaux de la lagune, du fait des enjeux économiques liés ([142]). M. Didier Réault, président du parc national des Calanques et vice-président du conseil départemental des Bouches-du-Rhône, a confirmé que la métropole considérait avec attention le développement d’une filière économique reposant sur les huîtres et que des investisseurs étaient prêts à s’y engager ([143]).

L’IFREMER, qui réalise le suivi de routine de la qualité des eaux (plancton, qualité microbiologique et contaminants chimiques), avait été saisi en 2018 d’une demande de classement de l’étang de Berre pour la culture des moules. Actuellement, seule la collecte du naissain est autorisée, mais non la culture des moules. Cette étude a toutefois été reportée pour cause de malaïgue.

Le développement d’une filière de culture des coquillages supposerait de faire diminuer la turbidité des eaux et d’éviter les phénomènes de dessalure brutale liés aux rejets d’eau douce. Il devrait donc être favorisé par une diminution des quotas de rejets d’eau douce dans l’étang.

La prud’homie de pêche de Martigues rappelle cependant que la culture des moules, des huîtres et des coquillages n’est pas sans risque puisque ce type de culture est plus fragile par nature que le poisson. Un épisode de malaïgue pourrait ainsi contrecarrer rapidement les efforts entrepris. En outre, les activités de pêche qui se trouvent actuellement autour de l’étang ont un potentiel important de développement qu’il conviendrait également d’encourager.

Proposition n° 9 : Favoriser le développement dune filière conchylicole et mytilicole au sein de létang de Berre ainsi que le développement des activités de pêche déjà présentes autour de l’étang.

B.   Envisager la création d’une filière de valorisation des algues

L’étang de Berre est un lieu de production important d’algues. Les quantités d’algues sont mesurées de deux manières différentes, d’une part en fonction de leur production au sein de l’étang (qui est toujours difficile à évaluer) et d’autre part en fonction des échouages, qui sont principalement causés par le vent. En effet, à défaut de vent fort pendant le cycle de vie des algues, ces dernières sont évacuées par le canal de Caronte ou se dégradent dans l’étang. Plusieurs travaux ont été engagés afin de mesurer la production annuelle d’algues au sein de l’étang, notamment en lien avec le Centre d’étude et de valorisation des algues (CEVA). Il en ressort que le stock d’algues dans l’étang varierait entre 265 et 7 000 tonnes, pour des échouages annuels d’environ 1 500 tonnes qui ne paraissent pas connaître d’évolution structurelle ([144]). S’il est important à l’échelle de l’étang, ce chiffre demeure faible au regard des 60 000 tonnes échouées et valorisées chaque année en Bretagne, ainsi que l’a rappelé le CEVA ([145]).

Ces échouages d’algues présentent des nuisances pour les riverains et pour les promeneurs, du fait notamment de l’odeur nauséabonde qui s’en dégage et de la nécessité de restreindre l’accès à certaines plages le temps qu’elles soient nettoyées. Les algues ont par ailleurs été mises en cause dans la mort d’un chien à l’été 2019, après une promenade sur la plage du Jaï ([146]).

Les algues produites au sein de l’étang et qui s’échouent sur ses rives sont principalement des ulves (algues vertes), dont la prolifération est causée par les apports en azote combinés à la lumière du soleil. Dans la mesure où elles se développent dans des masses d’eau dont la salinité est comprise entre 5 ‰ et 25 ‰, l’étang de Berre leur offre un milieu idéal. Par ailleurs, en captant la lumière, ces algues nuisent au développement des autres plantes et donc à la biodiversité de l’étang. Dans un contexte d’eutrophisation de la lagune, le développement des algues n’en est que renforcé.

À l’image des efforts engagés en Bretagne pour la valorisation des algues, il serait envisageable de développer une filière de valorisation locale des algues. Un projet industriel pilote est en cours depuis 2018 à Port-Saint-Louis. Porté par la société Eranova et soutenu par la région, la Banque publique d’investissement (BPI) et Total, il vise à produire des plastiques biosourcés, dégradables et compostables à partir d’algues échouées. Il a été labellisé par l’agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) et devrait conduire à l’ouverture d’un site industriel en 2021.

Proposition n° 10 : Accompagner le développement local dune filière de valorisation des algues.

C.   Mener une politique volontariste de réimplantation des zostères

Les herbiers de zostère sont un marqueur particulièrement important de la qualité écologique des eaux de l’étang de Berre. Il s’agit en effet du principal indicateur utilisé pour les macrophytes et, à l’heure actuelle, du facteur de déclassement principal de la masse d’eau au titre de la DCE. Surtout, les herbiers de zostères sont susceptibles de faire régresser l’anoxie présente dans l’étang, en tant que producteurs d’oxygène.

Les herbiers de zostères permettent également la stabilisation des substrats et forment un milieu favorable à la reproduction de nombreuses espèces de poissons et de coquillages. La conservation de leur diversité génétique pourrait être importante pour la résilience écologique des milieux littoraux face aux dérèglements climatiques, à l'acidification des océans et à la montée de la mer.

Dans ce cadre, les efforts entrepris dans les années 2010 pour favoriser leur développement sont particulièrement importants. Ces herbiers avaient en effet quasiment disparu des fonds de l’étang au début des années 2010. Leur surface est passée de 1,2 hectares en 2009 à 18 hectares en 2017 ([147]), avant l’épisode de malaïgue de 2018 qui a réduit substantiellement les peuplements, d’environ 55 %.

EDF a développé des projets très prometteurs de transplantation des herbiers ([148]). Fondés sur des capacités d’éco-ingéniérie, ils visent à implanter des dispositifs de « cages à huîtres » destinés à protéger les lieux de colonisation potentielle des herbiers, en atténuant les vagues et en réduisant la turbidité, ce qui favorise la diffusion de la lumière et donc la croissance des herbiers. Cette technologie pourrait être couplée à des transplantations d’herbiers.

Les réimplantations d’herbiers doivent donc constituer l’une des priorités des années à venir, notamment dans le cadre du prochain contrat d’étang. Elles pourraient bénéficier de financements renforcés de la part de l’agence de l’eau. Si le rythme de croissance des surfaces de zostères connu entre 2009 et 2017 se maintenait, un objectif de 1 500 hectares de surface de zostères au sein de l’étang de Berre pourrait être atteint d’ici 2035.

Proposition n° 11 : Massifier la politique de réimplantation des zostères dans létang de Berre de manière à atteindre 1 500 hectares de zostères dici 2035.

D.   Poursuivre la conversion de terrains sur le pourtour de l’étang

La réduction des apports de nutriments dans l’étang de Berre suppose que l’utilisation des terrains qui se situent sur son pourtour et dans son bassin versant génère le moins de nutriments possibles. Plusieurs pistes sont envisageables dans cette perspective, en particulier la conversion des exploitations agricoles à l’agriculture biologique et la poursuite de l’acquisition de terrains à des fins de conservation.

Destination des terrains situés sur le pourtour de l’étang de Berre

Source : GIPREB, Carnet détudes sur les apports directs du bassin versant de létang de Berre, avril 2017, p. 9

Les activités agricoles contribuent pour une part importante aux rejets de nutriments dans l’étang de Berre (cf. cartes ci-dessous). En effet, les bassins versants de l’Arc et de la Touloubre sont fortement agricoles. Par conséquent, il serait souhaitable d’aider les agriculteurs du pourtour de l’étang et du bassin versant à entreprendre une politique de conversion à l’agriculture biologique afin de limiter les rejets de nutriments. Cette dynamique de conversion est d’ores et déjà engagée (entre 5 % et 15 % par an) mais elle est plus faible que dans le reste de la région ([149]). Par ailleurs, des actions pourraient être engagées afin de restaurer les haies et de créer des zones tampons sur le pourtour de l’étang, de manière à lutter, de manière globale, contre la pollution des eaux ([150]).

Apports en azote et en phosphore du bassin versant direct

Apports en azote

Apports en phosphore

Source : GIPREB, Carnet détudes sur les apports directs du bassin versant de létang de Berre, avril 2017, p. 12.

Dans cette perspective, l’agence de l’eau a indiqué à la mission d’information qu’elle devrait retenir un dossier de candidature présenté par le syndicat d’aménagement du bassin de l’Arc (SABA) dans le cadre du nouveau programme expérimental de paiements pour services environnementaux (PSE).

Ce projet prévoit notamment de rémunérer les agriculteurs qui s’engagent dans des démarches de réduction des produits phytosanitaires et des engrais minéraux. Ainsi, pourraient bénéficier d’une rémunération les agriculteurs (maraîchage, vigne et céréales) réunis au sein de l’association régionale de gestion et d’étude des sols naturels et agricoles (ARGENA) qui expérimentent des pratiques culturales (compostage, engrais verts) destinées à réduire le recours aux intrants et à améliorer la qualité des sols agricoles. Pourraient également en bénéficier quinze viticulteurs qui, dans le cadre du plan Ecophyto 2, se sont engagés dans une démarche « Fermes 30 000 » pour réduire l’usage des produits phytosanitaires et qui développent les bandes tampons (haies, bandes végétales) destinées à limiter les transferts d’intrants. De même, une quinzaine de viticulteurs (représentant 500 hectares, soit 12 % de la surface en vigne de la haute vallée de l’Arc) pourraient être soutenus dans leur démarche de réduction des herbicides.

Ces actions pourront servir de laboratoire et de modèle pour d’autres exploitations et pour d’autres bassins versants de l’étang de Berre.

Proposition n° 12 : Accompagner les conversions des agriculteurs du bassin versant à lagriculture biologique ou raisonnée.

Depuis plusieurs années, le Conservatoire du littoral acquiert des terrains sur le pourtour de l’étang à des fins de conservation. Il possède ainsi 2 000 hectares sur le pourtour de l’étang, dont 1 000 hectares de zones humides, qui comprennent les 800 hectares de l’étang de Bolmon ([151]). Ces acquisitions permettent d’améliorer la gestion de l’eau et de limiter le ruissellement par temps de pluie. Si certaines communes étaient initialement réticentes à ces acquisitions, il semblerait que les interventions du Conservatoire du littoral soient désormais bien acceptées. La gestion de ces espaces fait d’ailleurs l’objet de conventions entre le Conservatoire et les collectivités concernées.

Proposition n° 13 : Poursuivre les acquisitions de terrains sur le pourtour de létang par le Conservatoire du littoral dans une optique foncière mais surtout de conservation de patrimoine et de la biodiversité.

Cette double dynamique (conversion et acquisition de terrains) contribuerait à la poursuite d’objectifs environnementaux par des moyens naturels, comme l’illustrent les cas de la « Petite Camargue » et du Parc de la Poudrerie à Saint-Chamas. Elle permettrait de surcroît de contribuer à la protection des quatre zones Natura 2000 qui bordent l’étang de Berre (Salines de l’étang de Berre, Marais et zones humides liés à l’étang de Berre – qui recouvre notamment l’étang de Bolmon – Garrigues de Lançon et chaînes alentour et étangs entre Fos et Istres) ([152]). Le rapporteur tient ainsi à souligner l’importance de conserver et de développer le caractère naturel de l’étang et d’en faire un écosystème de référence au niveau mondial.

 


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   Troisième partie : La nécessité d’une nouvelle gouvernance

Incontestablement, l’étang de Berre doit bénéficier d’une gouvernance rénovée. Tous les acteurs rencontrés ont fait état des tensions, des incompréhensions et des rivalités entre parties prenantes pour la gestion de l’étang. Bien entendu, chaque acteur aborde cette question avec son propre point de vue et établit son propre diagnostic des causes du mauvais fonctionnement de la gouvernance actuelle. Il n’en demeure pas moins que le constat s’impose : un profond renouvellement des instances de décision et de planification est nécessaire (II) du fait des dysfonctionnements connus ces dernières années (I). Il s’agit d’un préalable à la recherche de financements pour les projets de réhabilitation de l’étang (III).

I.   Des retards imputables à la multiplicité des acteurs

Les dysfonctionnements constatés trouvent une partie de leur cause dans le défaut de coordination des nombreux acteurs publics intervenant dans la réhabilitation de l’étang de Berre (A), qui a connu un cas exemplaire dans l’échec de la réouverture du tunnel du Rove, qui faisait pourtant consensus (B). Si le contrat d’étang a constitué une avancée incontestable pour la coordination des différents acteurs, il n’en demeure pas moins insuffisant (C).

A.   Une panoplie d’acteurs publics

De nombreux acteurs publics sont compétents s’agissant de la gestion ou de la réhabilitation de l’étang de Berre. Il faut distinguer ceux qui relèvent de l’État (1) de ceux qui relèvent des collectivités territoriales (2).

1.   Les acteurs relevant de l’État

Il revient bien évidemment au préfet des Bouches-du-Rhône de coordonner l’action des services de l’État dans le département. Dans les faits, l’étang de Berre se situe dans l’arrondissement du sous-préfet d’Istres qui assume la mission de coordination de l’État. L’État peut s’appuyer sur les différentes directions régionales et départementales interministérielles, en particulier la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) et la direction départementale de la protection des populations (DDPP) des Bouches-du-Rhône.

D’autres organes relevant de l’État sont également compétents. Il s’agit en premier lieu de l’agence de leau Rhône-Méditerranée-Corse, établissement public de l’État qui cofinance les projets destinés à améliorer la qualité des eaux. Elle a ainsi contribué à hauteur de près de 100 millions d’euros depuis 2003 à des projets visant à améliorer la qualité des eaux de l’étang de Berre ou de son bassin versant (cf. infra).

Par ailleurs, le Conservatoire du littoral, qui est un établissement public administratif national, est propriétaire et gestionnaire de l’étang de Bolmon. Toutefois, la gestion de ce dernier est déléguée au Syndicat intercommunal du Bolmon et du Jaï (SIBOJAI) rassemblant les communes de Châteauneuf-les-Martigues et de Marignane. Le Conservatoire possède également des terrains sur le pourtour de l’étang.

Enfin, le Grand port maritime de Marseille (GPMM), qui est également un établissement public de l’État, intervient à au moins deux titres s’agissant de l’étang de Berre. En premier lieu, il est chargé du dragage du canal de Caronte. Surtout, il s’est vu confier par l’État la gestion du service annexe des voies navigables (SAVN) comprenant le canal et le tunnel du Rove. Ces missions sont effectuées sur les crédits et pour le compte de l’État. Toutefois, ces dernières n’étant pas au cœur de l’activité du GPMM, elles ont reçu peu d’attention de la part de ce dernier qui les perçoit essentiellement comme une contrainte.

Ainsi, l’étang de Berre, l’étang de Bolmon et le canal/tunnel du Rove connaissent-ils chacun un gestionnaire différent du côté des services de l’État, ce qui ne contribue pas à une gestion efficace. Du côté des collectivités territoriales, la situation n’est guère plus satisfaisante.

2.   Les acteurs locaux

Né en 1987 à la demande de l’État, le GIPREB est un organe clef dans la compréhension et la gestion de l’étang de Berre par les pouvoirs publics. C’est en effet la seule instance publique à être dédiée à l’étang de Berre. Il s’agit d’un syndicat mixte composé de représentants du conseil régional, du conseil départemental et des communes riveraines de l’étang, ainsi que de la chambre d’agriculture et de la chambre de commerce et d’industrie des Bouches-du-Rhône. Sont membres associés (sans droit de vote), deux représentants associatifs, un représentant de la Prud’homie de pêche de Martigues, de la métropole et des syndicats d’aménagement de la vallée de la Durance, du bassin de l’Arc et de la Touloubre ([153]).

Toutefois, le GIPREB ne s’estimait compétent que pour des missions d’études et de recherches ([154]). Il ne joue donc pas de rôle opérationnel ou même de coordination des différents intervenants, alors que le libellé de ses statuts semblerait pouvoir le lui permettre. Si la fusion du GIPREB au sein de la métropole s’est posée à la création de cette dernière en 2016, le choix a été fait de maintenir l’existence du GIPREB.

Objet et compétences du GIPREB

Le syndicat a pour objet l’amélioration de la qualité écologique des milieux aquatiques du complexe lagunaire de l’étang de Berre et notamment le retour des caractéristiques d’une lagune méditerranéenne profonde au fonctionnement équilibré pour le grand étang. Pour cela, il met en œuvre tous moyens et actions de nature à concrétiser les objectifs suivants :

– Améliorer la connaissance par les études et le suivi écologique de l’étang de Berre, des étangs périphériques directement en lien avec lui et de leurs rivages terrestres ;

– Assurer la cohérence de l’action de ses membres concernant l’étang de Berre en y associant, au moyen notamment des outils réglementaires et contractuels appropriés, tous les partenaires publics ou privés intéressés dans un but de concertation, de globalisation de l’approche et de mise en cohérence des interventions ;

– Réaliser pour le compte de ses membres les études concourant directement et exclusivement à la connaissance de l’écosystème, de son fonctionnement, de ses usages et à leur mise en valeur par la diffusion des informations acquises ;

– Participer aux réflexions des collectivités et de l’État sur les actions publiques affectant son périmètre, notamment celles en lien avec la qualité de l’eau (réduction des pollutions urbaines, agricoles, industrielles et portuaires sur le bassin versant) et participant à l’atteinte du bon état des eaux au titre de la directive cadre sur l’eau ;

– Travailler en étroite collaboration du fait de son objet et de ses compétences avec les gestionnaires des milieux connexes et éventuellement à intervenir sur ces milieux ;

– Réaliser pour ses membres et potentiellement pour des tiers publics ou privés et par tous moyens, des missions et équipements en lien avec son objet ;

– Œuvrer, à l’aide de ses moyens et connaissances, à une meilleure gestion des usages et des ressources marines halieutiques et conchylicoles ;

– Coordonner et participer aux programmes de recherche scientifique et à la mise en place d’opérations expérimentales en lien avec son objet et assurer la collecte, la conservation et la diffusion des données relatives à l’étang de Berre ;

– Assurer l’information du grand public sur toutes actions portées par lui et ses membres et en lien direct avec son objet. Un volet spécifique de communication est dédié aux publics scolaires.

Conformément aux dispositions de l’article L. 5721-5 du code général des collectivités territoriales (CGCT), cet objet est poursuivi par tous moyens, et notamment par la voie d’exploitation directe ou de participation financière dans des entités tierces, par voie de conventions ou par la création de régies ou de toutes autres entités appropriées dans les mêmes conditions que les collectivités locales.

Le Comité syndical est seul compétent pour arrêter le niveau des participations financières éventuelles et procéder en tant que de besoin à la désignation de représentants au sein de ces organismes, sous la seule réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires.

Source : art. 2 des statuts du GIPREB.

Si une métropole a été créée le 1er janvier 2016, elle continue de reposer sur six territoires qui correspondent aux six intercommunalités préexistantes. Or, les onze communes riveraines de l’étang appartiennent à cinq territoires différents, ce qui ne permet pas d’appréhender efficacement, à ce niveau, les enjeux communs relatifs à l’étang de Berre. Il n’existe ainsi pas de schéma de cohérence territorial (SCOT) qui permette de considérer le territoire de l’étang de Berre dans son ensemble ([155]). Ainsi, dans la mesure où ce sont les territoires qui exercent la compétence, pour le compte de la métropole, en matière d’eau et d’assainissement, ces derniers ne sont pas le cadre naturel de l’élaboration d’une politique concertée de diminution des rejets dans l’étang.

Les territoires de la métropole d’Aix-Marseille-Provence

https://www.ampmetropole.fr/sites/default/files/inline-images/Carte-territoire-AMP.png

Source : Métropole Aix-Marseille-Provence

Il faut également mentionner d’autres syndicats intercommunaux dont l’action peut avoir des conséquences sur la réhabilitation de l’étang de Berre. Il s’agit en particulier du Syndicat intercommunal du Bolmon et du Jaï (SIBOJAI), précédemment mentionné, qui assure la gestion de l’étang de Bolmon pour le compte du Conservatoire du littoral, du syndicat d’aménagement du bassin de l’Arc et du syndicat d’aménagement de la Touloubre. Bien entendu, il faut enfin mentionner le rôle du département et de la région, notamment s’agissant des compétences dédiées à l’activité économique ou des financements de projets.

B.   Le cas exemplaire de l’échec de la réouverture du tunnel du Rove

La réouverture du tunnel du Rove illustre également les effets néfastes d’une multiplication des acteurs publics sans véritable coordination.

La demande de réouverture a en effet été historiquement portée par le GIPREB, mais ce dernier ne souhaite pas disposer de compétences opérationnelles. Par conséquent, il n’a pas été en mesure d’assurer le rôle de maîtrise d’ouvrage du projet de réouverture. Par ailleurs, malgré la demande formulée par l’État, aucune collectivité et aucun groupement de collectivités ne s’est porté volontaire pour assurer la maîtrise d’ouvrage du projet.

D’un point de vue juridique, le tunnel et le canal appartiennent à l’État, dont ils constituent un élément du domaine public fluvial artificiel ([156]). Les décisions d’investissement relèvent donc de la direction générale des infrastructures de transport et de la mer (DGITM) mais la gestion du tunnel et du canal a été confiée au Grand port maritime de Marseille (GPMM) ([157]), en tant que service annexe des voies navigables (SAVN). Si ce dernier mobilise ses ressources pour faire face aux nécessités d’entretien des infrastructures, l’État lui en rembourse in fine le coût. Or, il apparaît clairement, à la lumière des auditions conduites par la mission d’information, que l’entretien de ces infrastructures constitue une préoccupation très annexe du GPMM qui ne verrait aucun inconvénient à céder cette responsabilité éloignée de ses activités principales.

Par ailleurs, comme indiqué précédemment, la réouverture du tunnel du Rove serait susceptible d’avoir des conséquences importantes sur l’étang de Bolmon. Ce dernier est la propriété du Conservatoire du littoral mais c’est la métropole d’Aix-Marseille-Provence qui est compétente au titre de la gestion des milieux aquatiques pour le bassin versant. Or, le Conservatoire du littoral est opposé à la réouverture du tunnel du Rove qui constituerait, pour lui, un facteur de fragilisation de l’étang de Bolmon.

Par conséquent, alors que le GIPREB était le promoteur du projet et le maître d’ouvrage des études préalables, c’est le Grand port maritime de Marseille qui a été désigné maître d’ouvrage du projet de réouverture du tunnel, alors qu’il n’y avait pas d’intérêt particulier. Dès lors, ainsi que le note le CGEDD, la relation de maîtrise d’ouvrage a été fortement déficiente. En effet, plutôt que d’échanger régulièrement avec le responsable de la réalisation de l’étude afin d’adapter la configuration de l’aménagement demandé, ce n’est qu’en fin de course, soit neuf années après la définition du besoin, que le GIPREB a été informé de son coût estimatif. Le dialogue normal qui doit s’instaurer entre maîtrise d’ouvrage et maîtrise d’œuvre n’a ainsi pas trouvé à jouer et ce n’est qu’à la toute fin du projet que le GIPREB a revu ses besoins à la baisse ([158]). Il en est résulté une situation de blocage, faute de dialogue préalable suffisant.

Par ailleurs, lors du lancement du projet de réouverture, aucun responsable du paramétrage et de l’exploitation des pompes n’a été désigné. Alors que le tunnel relève du domaine public fluvial, l’État a indiqué ne pas souhaiter être chargé de la responsabilité du pompage dans la mesure où le tunnel n’a plus d’usage pour la navigation. L’État a ainsi « écrit quil ne souhaitait pas assurer ce volet, sans réaction depuis plus de cinq ans » ([159]) de la part des collectivités territoriales.

La gouvernance du projet de réouverture a donc été marquée par un écheveau d’interlocuteurs se renvoyant sans cesse les responsabilités opérationnelles. Il s’agit assurément là de l’une des causes majeures de son échec pendant près de vingt ans.

C.    Les insuffisances du contrat d’étang

Les principales actions des différents acteurs de l’étang de Berre sont regroupées, depuis 2012, au sein de contrats d’étang. Il s’agit de documents qui retracent les engagements de chaque partie prenante, ainsi que les moyens qui y seront consacrés et les objectifs recherchés. Ces contrats d’étang ont permis de créer une dynamique partenariale minimale de nature à susciter des synergies entre acteurs. Deux « saisons » du contrat d’étang se sont succédé.

La première a couvert les années 2012-2015, avec une signature officielle du premier contrat d’étang le 16 mai 2013. Le contrat d’étang dans cette première version comportait 81 actions, pour un total de financement de 35 millions d’euros, impliquant 28 maîtres d’ouvrage. Les actions étaient structurées autour de quatre axes : retrouver un fonctionnement équilibré des écosystèmes, rétablir et développer les usages, améliorer la gestion des rives et des zones naturelles et réhabiliter l’image de l’étang.

La seconde saison du contrat d’étang a pour sa part pris place entre 2017 et 2019. Elle porte sur 99 actions, pour un budget total de 88 millions d’euros.

Les actions prévues par la saison 2 du contrat d’étang

Source : GIPREB, Restaurer létang de Berre, p. 15.

Si cette démarche est positive et marque un progrès, elle est néanmoins amoindrie par plusieurs difficultés.

En premier lieu, les mécanismes de suivi du contrat détang sont déficients. En effet, si un bilan a été réalisé à l’issue de la première saison du contrat d’étang, ce dernier a permis de mesurer que toutes les actions envisagées n’avaient pas été engagées. Le bilan de la saison 2 est en cours de réalisation par le GIPREB. Un état des lieux provisoire a néanmoins pu être transmis à la mission d’information. Il fait en particulier ressortir le fait que, faute de réel responsable de sa réalisation et de son suivi, toutes les informations pertinentes ne sont pas disponibles, les actions relevant de nombreux acteurs différents, sans mécanisme de centralisation.

Bilan de la mise en œuvre de la saison 1 du contrat d’étang

Actions réalisées

Actions initiées

Actions reportées

Actions annulées

Total

10,3 M€

3 M€

9,9 M€

1,2 M€

22,7 M€

45,4 %

13,2 %

43,6 %

5,3 %

100 %

Source : GIPREB, Restaurer létang de Berre. Contrat détang. Bilan saison I. Avenant saison II, p. 55.

Bilan provisoire des actions de la saison 2 du contrat d’étang

Actions réalisées

Actions initiées

Actions à létude

Actions reportées

Actions annulées

Information non disponible

64 %

14 %

10 %

12 %

Source : GIPREB, Note en réponse au questionnaire du 20 février 2020.

Par ailleurs, le contrat d’étang doit s’articuler avec de nombreux autres documents de planification. C’est le cas notamment du schéma directeur daménagement et de gestion des eaux (SDAGE). Ce dernier est défini au niveau de chaque bassin versant pour une durée de six ans et vise à regrouper les actions entreprises en vue d’atteindre le bon état des eaux. Ces schémas sont élaborés par les comités de bassin et bénéficient de l’appui technique des agences de l’eau. Le contrat d’étang coexiste également avec des documents d’échelle plus locale. Il s’agit en particulier du schéma d’aménagement et de gestion de l’eau (SAGE) et du contrat de rivière de l’Arc provençal, du contrat de rivière de la Touloubre, du contrat de rivière/étang Cadière-Bolmon et du contrat de rivière de la Durance/plan Durance. L’ensemble de ces documents concerne le bassin versant de l’étang de Berre et porte donc sur des actions qui sont susceptibles d’avoir un impact sur ce dernier. Par conséquent, une démarche intégrée est indispensable pour assurer la cohérence de toutes les actions menées.

Afin de coordonner toutes les actions à engager en faveur de l’étang de Berre, l’élaboration d’un nouveau contrat d’étang sera certainement opportune. Elle devra toutefois prendre place dans le cadre d’une gouvernance rénovée pour éviter les aléas du passé.

II.   Une gouvernance à revoir

Sur le fondement des constats précédents, il apparaît nécessaire de revoir profondément la gouvernance de la réhabilitation écologique de l’étang de Berre. Ceci passe par la désignation d’un chef de file au plan local (A), par l’élaboration d’un SAGE (B) et par la création d’instances de coordination associant le public (C).

A.   Une meilleure répartition des compétences

L’absence de chef de file opérationnel pour la gestion de la qualité des eaux de l’étang de Berre pénalise fortement la réhabilitation de ce dernier. L’échec de la réouverture du tunnel du Rove à la courantologie en fournit une démonstration. Par ailleurs, la mobilisation de certains fonds, notamment européens, suppose que le projet financé soit porté par un chef de file bien identifié ([160]).

Le GIPREB a pendant plusieurs décennies eut un rôle moteur dans la connaissance de l’étang de Berre et dans la coordination scientifique des différents acteurs concernés. Il conduit toujours cette mission qui a contribué à la production d’un nombre d’études et de connaissances particulièrement importantes. Le GIPREB a également œuvré à porter sur la place publique la question de la réhabilitation de l’étang de Berre et à faire progresser les politiques publiques en la matière. Il a donc été un acteur essentiel de l’amélioration, au cours des trente dernières années, de l’état écologique de l’étang.

Toutefois, son action n’est pas aussi efficace qu’elle pourrait l’être car certains leviers lui font défaut. Il ne dispose en effet d’aucune compétence opérationnelle et en particulier pas de la compétence en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations (GEMAPI). Cette compétence relève, depuis le 1er janvier 2018, des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre. Elle comprend notamment, sur le fondement de l’article L. 211-7 du code de l’environnement, l’aménagement des bassins hydrographiques, l’entretien et l’aménagement des plans d’eau et la protection et la restauration des sites et des écosystèmes. Elle est donc stratégique pour la réhabilitation de l’étang de Berre.

Deux pistes sont envisageables pour la désignation d’un chef de file. La première consisterait, pour les communes du pourtour de l’étang, à confier au GIPREB la compétence GEMAPI afin d’en faire un véritable acteur opérationnel doté de compétences propres. D’autres syndicats, tels que le syndicat du bassin versant de l’Huveaune, qui exercent une telle compétence démontrent l’intérêt que peut présenter une telle démarche ([161]). Une autre possibilité serait que cette compétence soit exercée par la métropole d’Aix-Marseille-Provence, qui regroupe l’ensemble des communes du pourtour de l’étang de Berre ainsi qu’une très grande partie de leurs bassins versants. Au demeurant, la métropole doit prochainement définir son schéma directeur métropolitain d’assainissement qui orientera les investissements devant être réalisés dans les quinze à vingt prochaines années.

Ce chef de file pourrait également assumer la maîtrise d’ouvrage unique du projet de réouverture à la courantologie du tunnel du Rove. Cette unification des compétences permettrait de disposer d’une gouvernance unique, tant pour les aspects environnementaux que pour les dimensions techniques, ainsi que l’a notamment préconisé le CGEDD.

Proposition n° 14 : Désigner une instance intercommunale unique responsable des travaux et actions afférents à la réhabilitation de létang de Berre, soit par la refonte du GIPREB, soit par la désignation de la métropole.

B.   Envisager la création d’un SAGE

Comme évoqué, la coordination des actions des différents acteurs concernés par l’étang de Berre est aujourd’hui réalisée, de manière imparfaite, dans le cadre de l’élaboration de contrats d’étang. Ces derniers se heurtent à plusieurs limites : ils ne sont pas opposables juridiquement aux tiers, ils coexistent avec d’autres documents de planification à l’échelle du bassin versant et ils ne bénéficient pas de mécanismes de suivi satisfaisants.

Or, les schémas d’aménagement et de gestion de l’eau (SAGE) sont des outils de planification qui permettent de répondre à certaines de ces difficultés. Ces derniers constituent des déclinaisons locales des SDAGE pour un sous-bassin ou un groupement de sous-bassins correspondant à une unité hydrographique cohérente, condition qui semble remplie pour l’étang de Berre et son bassin versant ([162]). Ils sont par ailleurs dotés d’une instance de gouvernance unique, la commission locale de l’eau, qui rassemble toutes les parties prenantes, en particulier les collectivités, les usagers, les associations et l’État. Cette dernière est responsable de l’élaboration, de la modification, de la révision et du suivi de l’application du SAGE.

Par ailleurs, sur le fondement de l’article L. 212-5-2 du code de l’environnement, le règlement adopté en même temps que le SAGE est opposable aux personnes publiques ou privées pour la mise en œuvre de toute installation, ouvrage, travaux ou activité (IOTA), notamment s’agissant des mesures nécessaires à la restauration et à la préservation de la qualité de l’eau et des milieux aquatiques, en fonction des différentes utilisations de l’eau. D’autre part, les décisions des autorités administratives prises dans le domaine de l’eau doivent être compatibles avec le plan d’aménagement et de gestion durable de la ressource en eau défini dans le SAGE. Ce dernier a donc une force juridique incontestable lui permettant d’imposer la compatibilité des autres décisions locales pouvant avoir un impact sur la masse d’eau.

Enfin, il revient à la commission locale de l’eau (CLE) d’assurer le suivi de la mise en œuvre du SAGE. Rassemblant les différentes parties prenantes, elle est en mesure à la fois de recueillir les informations sur les actions accomplies et d’établir, sur une base régulière, le bilan de celles qui restent à mener ([163]). Le schéma doit par ailleurs prévoir, dès son élaboration, une évaluation des moyens matériels et financiers nécessaires à son suivi ([164]). Enfin, il incombe, sur une base annuelle, au comité de bassin de suivre l’avancée de l’élaboration et de la révision des SAGE ([165]).

La création d’un SAGE serait donc susceptible d’apporter des réponses à plusieurs difficultés rencontrées dans le cadre de la mise en œuvre des contrats d’étang, en donnant un cadre de gouvernance clair et opposable pour la gestion de la réhabilitation de l’étang de Berre. Tous les acteurs, notamment la société civile, les industriels (en particulier EDF) et les parlementaires, devront être associés à la commission locale de l’eau. Au demeurant, rien n’empêche de structurer ultérieurement, dans le cadre d’un SAGE, l’action conduite sous la forme de « contrats d’étang », comme le montre l’exemple du contrat d’étang de Salses‑Leucate, qui est élaboré dans le cadre d’un SAGE par la commission locale de l’eau. Le SAGE ainsi créé devrait comprendre l’ensemble du bassin versant de l’étang de Berre et de ses affluents (Arc, Touloubre et Cadière). Compte tenu de l’interconnexion des enjeux, sa rédaction devrait être réalisée en bonne coordination avec celle du SAGE en cours d’élaboration pour la Durance.

La perspective de la création d’un SAGE prend place sur le moyen terme, compte tenu des délais inhérents à son élaboration et à sa mise en œuvre. Si cette perspective doit être poursuivie, elle ne doit pas empêcher, d’ici là, de continuer à œuvrer pour la réhabilitation de l’étang de Berre.

Proposition n° 15 : Élaborer un schéma daménagement et de gestion de leau (SAGE) dédié à létang de Berre.

C.   Créer des instances de coordination et de planification associant la société civile

Les constats établis précédemment démontrent les lacunes de la coordination actuelle des différents acteurs impliqués dans la gestion ou dans l’utilisation de l’étang de Berre. Si le GIPREB rassemble la plupart des acteurs locaux, il ne constitue qu’une structure d’études. Par ailleurs, il ne regroupe pas l’ensemble des parties prenantes et ne saurait à ce titre constituer un lieu de discussion et de coordination pérenne. Par ailleurs, l’État n’a pas pris la pleine mesure, jusqu’à présent, du rôle de coordination qui pourrait être le sien.

La gestion du bassin versant de l’étang de Thau fournit un exemple de bonne pratique dont les acteurs de l’étang de Berre pourraient s’inspirer. L’instance de coordination est le syndicat mixte du bassin de Thau qui coordonne à la fois les politiques de gestion de l’eau et d’aménagement du territoire. Il est responsable à la fois de l’élaboration du SCOT et du SAGE, ce qui permet de mettre en cohérence ces deux documents. Il élabore par ailleurs un contrat de gestion intégré qui décline ces documents généraux. La coordination des différents acteurs est réalisée au moyen d’un comité stratégique qui réunit à la fois les maîtres d’ouvrage des actions inscrites au contrat, les financeurs et l’ensemble des communes concernées. Présidé par le préfet de région, il réunit les services de l’État (dont l’agence de l’eau, Voies navigables de France et le Conservatoire du littoral), l’ensemble des collectivités (depuis les communes jusqu’à la région, en passant par le département et les intercommunalités), les professionnels concernés (conchyliculture, pêche, loisirs, agriculteurs…), ainsi que les responsables des commissions locales de l’eau, des sites Natura 2000 et des associations environnementales ([166]). De fait, l’étang de Thau, grâce à cette coordination et aux contrats d’étang successifs a su lutter contre les difficultés écologiques qu’il avait pu rencontrer ([167]).

Il est nécessaire, dans le cas de l’étang de Berre, de créer une structure de coordination analogue qui puisse réunir les différents acteurs mobilisés dans le cadre des contrats d’étang. Les acteurs membres de la CLE précédemment évoquée pourraient en fournir l’ossature institutionnelle.

Proposition n° 16 : Créer une instance pérenne de coordination rassemblant les différents acteurs et chargée délaborer et de piloter la mise en œuvre des contrats détang.

La poursuite de la réhabilitation de l’étang de Berre ne peut pas se concevoir aujourd’hui sans ses habitants et sans la société civile. C’est la raison pour laquelle la mission d’information a organisé une consultation publique permettant à chacun, particulier comme association, de partager sa vision de l’avenir de l’étang de Berre ([168]). Cette démarche ne saurait toutefois être limitée à cette séquence, elle doit devenir partie intégrante de la gestion de l’étang de Berre.

À ce titre, la création d’un SAGE permettra de faire perdurer l’association des citoyens à l’élaboration des actions de réhabilitation de l’étang. En effet, son élaboration doit être précédée d’une enquête publique, sur le fondement de l’article L. 212-6 du code de l’environnement. Il en va de même en cas de modification substantielle du schéma ([169]).

Par ailleurs, c’est l’ensemble de la société civile organisée en lien avec la question de la gestion de l’eau qui est incluse dans les commissions locales de l’eau. La CLE doit en effet comprendre, au sein d’un collège identifié, « au moins un représentant des chambres dagriculture, un représentant des chambres de commerce et dindustrie territoriales, un représentant des associations syndicales de propriétaires ou des représentants de la propriété foncière ou forestière, un représentant des fédérations des associations agréées pour la pêche et la protection du milieu aquatique, un représentant des associations de protection de lenvironnement et un représentant des associations de consommateurs ainsi que, sil y a lieu, un représentant des producteurs dhydroélectricité, un représentant des organismes uniques bénéficiant dautorisations de prélèvement de leau pour lirrigation et un représentant des associations de pêche professionnelle. » ([170]). Cette composition permettrait la représentation des principales parties prenantes de la gestion de l’eau au sein de l’étang, et en particulier d’EDF.

Au-delà, il serait souhaitable de créer des mécanismes permanents d’association des citoyens à la gestion de l’étang de Berre. À ce titre, le projet RÉPONSES, centré sur la pollution de l’air dans le secteur de l’étang de Berre, pourrait faire figure de modèle. Ce projet a non seulement pour ambition d’informer les habitants quant aux données disponibles en matière de pollution de l’air, mais également de recenser leurs attentes et d’initier des actions afin d’y répondre ([171]).

Proposition n° 17 : Associer de manière pérenne la société civile organisée et les citoyens à la gestion de létang de Berre.

Enfin, le constat a été dressé des lacunes persistantes dans la compréhension de la dynamique de l’étang de Berre ([172]). Il est donc nécessaire, là aussi, de renforcer la coordination et les partenariats, afin d’éviter le morcellement des études et des connaissances. Pour favoriser l’émergence d’une vision d’ensemble et pour identifier les connaissances manquantes à une compréhension globale de l’écosystème, il serait possible de créer une « zone atelier ». Cette notion recouvre des projets de recherche pluridisciplinaires et de long terme centrés autour d’une thématique ou d’un objet géographique particulier (fleuves et bassins versants notamment).

Il existe aujourd’hui quatorze zones ateliers labellisées par le CNRS. Si leur périmètre est aujourd’hui plus important qu’une unique masse d’eau, la spécificité de l’étang de Berre pourrait justifier un périmètre plus restreint. Une extension à l’ensemble du bassin de la Durance serait également envisageable, même si une partie des bassins versants concernés est déjà incluse dans la zone atelier des Alpes. En revanche, l’étang de Berre en lui-même n’est compris dans aucune zone. Cette nouvelle zone atelier serait le support d’une recherche de long terme portant sur l’étang de Berre, permettant notamment de travailler à la modélisation physique de l’étang prenant en compte la circulation, la salinité et la stratification des eaux, ainsi que les cycles de l’azote et du phosphore.

Proposition n° 18 : Créer, en lien avec le GIPREB, une « zone atelier » de manière à coordonner les productions scientifiques portant sur létang de Berre.

III.   Des financements à mobiliser

Les projets d’actions précédemment évoqués ne pourront être menés à bien que si une nouvelle gouvernance est créée. Mais il sera également nécessaire de mobiliser les financements pertinents tant au niveau national (A) qu’européen (B).

A.   Les financements innovants à l’échelle nationale

Au niveau national, les principaux financements disponibles dans le domaine de la qualité des eaux proviennent des agences de l’eau. En effet, ces dernières perçoivent des redevances en fonction notamment des prélèvements effectués et versent des aides à des projets d’amélioration de la qualité des eaux ([173]). Les agences élaborent un programme pluriannuel d’intervention qui prévoit leurs recettes et définit la liste des projets financés « qui contribuent à la gestion équilibrée et durable de la ressource en eau, des milieux aquatiques, du milieu marin ou de la biodiversité » ([174]). Ces programmes sont établis pour une durée de six années, les programmes en cours couvrant les années 2019-2024.

Dans le cadre de son programme 2019-2024, l’agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse a prévu 2,6 milliards d’euros de dépenses, avec quatre priorités principales : la lutte contre les pollutions, les économies d’eau, la préservation des milieux et l’accompagnement des services publics d’eau et d’assainissement ([175]). Nombre de ces actions s’inscrivent dans le cadre de l’adaptation au changement climatique et d’une solidarité entre territoires urbains et ruraux ([176]). Il est possible à l’agence d’adapter, en cours de programme, les actions financées par des décisions spécifiques.

Depuis 2003, l’agence de l’eau a financé 700 actions en lien avec l’étang de Berre, représentant 94 millions d’euros, sur un total d’investissements de 300 millions d’euros. Ces financements ont dans un premier temps été versés au cas par cas puis ils se sont inscrits dans le cadre des contrats d’étang.

Financements de l’Agence de l’eau au profit de l’étang de Berre depuis 2003

Actions

Aides de lAgence

Part des financements

Pollutions domestiques

42 324 266 €

52 %

Pollutions industrielles

40 419 980 €

40 %

Restauration des milieux

6 281 137 €

5 %

Pollutions agricoles

5 195 448 €

2 %

Total

94 220 831 €

100 %

Source : table ronde du 25 février 2020.

Les financements de l’agence de l’eau sont conditionnés à la démonstration de la pertinence des projets financés. Le directeur général de l’agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse a ainsi indiqué que la réouverture du tunnel du Rove ne pourrait être en partie financée par l’agence que s’il était démontré qu’elle était de nature à contribuer à l’amélioration de la qualité des eaux de l’étang, ce que le dernier rapport du CGEDD ne semble pas confirmer ([177]). Il faut pourtant noter que la réouverture du tunnel était inscrite au neuvième programme pluriannuel de l’agence de l’eau, les financements n’ayant pas pu, in fine, être engagés pour les raisons précédemment évoquées. En tout état de cause, l’agence de l’eau s’est dite prête à contribuer au financement des actions nécessaires à l’amélioration de l’état écologique des eaux de l’étang de Berre, notamment celles figurant dans le dernier rapport du CGEDD. Pour l’agence de l’eau, les « mesures sans regret » dans le cadre d’un nouveau contrat d’étang pourraient être chiffrées à 100 millions d’euros ([178]).

En dehors des financements de l’agence de l’eau et des autres parties prenantes (collectivités, EDF…), il serait également souhaitable d’explorer la possibilité de bénéficier des financements de CDC Biodiversité ([179]). Filiale de la Caisse des dépôts et consignations, cette dernière intervient pour financer des projets en lien avec l’environnement et la biodiversité. Deux programmes pourraient en particulier être pertinents pour l’étang de Berre.

En premier lieu, le programme Natura 2000, initié en 2016, permet aux entreprises volontaires de s’engager pour la réhabilitation de la nature. Pour 5 euros investis, CDC Biodiversité s’engage à gérer un mètre carré de terrain de manière durable jusqu’en 2050. Quarante projets sont actuellement en cours, en lien avec des collectivités territoriales. Ce programme pourrait être pertinent s’il était par exemple financé par les grandes entreprises industrielles qui profitent ou ont profité de la proximité de l’étang et s’il permettait l’entretien et la conservation de zones naturelles à proximité de ce dernier qui auraient pour intérêt de retenir l’eau et les polluants.

En second lieu, CDC Biodiversité est en train d’initier un programme de paiement pour la préservation des services écologiques (PSE). L’idée est que le bénéficiaire final d’un « service » fourni par la nature apporte une contribution pour le rendre pérenne. Ce programme doit s’appuyer sur les collectivités territoriales (notamment à l’échelon régional) pour identifier les actions pertinentes. 150 millions d’euros doivent ainsi être investis, notamment par l’intermédiaire des agences de l’eau dans les trois années à venir. Il serait souhaitable que les entités, notamment industrielles et commerciales, qui profitent des eaux de l’étang puissent intégrer ce programme. À titre expérimental, l’agence de l’eau a ainsi retenu une vingtaine de projets au début de l’année 2020 afin de les faire bénéficier de soutiens. En particulier, des agriculteurs qui s’engagent dans des démarches de mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC) dans le bassin de l’Arc seront rémunérés dans ce cadre ([180]).

Ces deux programmes pourraient par exemple permettre la protection et la conservation des zones humides du pourtour de l’étang. Cette orientation serait cohérente avec les préconisations qu’ont récemment formulées notre collègue Mme Frédérique Tuffnell et le sénateur M. Jérôme Bignon dans le cadre de leur rapport sur les zones humides ([181]).

Enfin, les financements octroyés dans le cadre du plan de relance pourraient également servir la réhabilitation de l’étang. En dehors de nouveaux prêts à taux zéro instaurés par la Banque des territoires et par Bpifrance, plusieurs enveloppes budgétaires devraient aussi être consacrées au secteur fluvial, à la modernisation et à la rénovation des canaux ou à la préservation de la biodiversité. L’État pourrait ainsi soutenir une action spécifique concernant la réhabilitation de l’étang de Berre.

Proposition n° 19 : Faire de létang de Berre un lieu exemplaire de mobilisation des financements innovants de CDC Biodiversité dans le cadre du prochain contrat détang. Mobiliser et orienter une partie des financements du plan de relance vers la réhabilitation de l’étang.

B.   Des financements européens à mobiliser davantage

À l’occasion du déplacement à Bruxelles de la mission d’information, cette dernière a pu constater que plusieurs financements européens étaient susceptibles d’être mobilisés en soutien à la réhabilitation de l’étang de Berre.

Le programme LIFE est un programme de l’Union européenne visant à financer des actions dans le domaine du climat et de l’environnement ([182]). Il a notamment pour objectif de « protéger et [d]améliorer la qualité de lenvironnement, et [de] stopper et [d’] inverser le processus dappauvrissement de la biodiversité, en appuyant le réseau Natura 2000 et en luttant contre la dégradation des écosystèmes » ([183]). Sur ce fondement, de nombreuses actions visant à la réhabilitation de l’étang de Berre pourraient ainsi recevoir un soutien financier. Le programme était doté de près de 3,5 milliards d’euros pour la période 2014-2020. Son montant pour la période à venir n’a pas encore été arrêté mais il est probable que ce dernier soit en augmentation ([184]). Sur le fondement de ce programme, des projets peuvent être soutenus pour un maximum de 10 millions d’euros représentant au plus 70 % du montant total de financement du projet. À n’en pas douter, de nombreuses actions qui pourraient figurer à un prochain contrat d’étang pourraient bénéficier de ces financements, d’autant plus que la France bénéficie peu de cette enveloppe d’aides. Les projets candidats à ces crédits peuvent s’appuyer sur la cellule d’assistance créée par le ministère de la transition écologique.

Une deuxième série d’aides réside dans les prêts effectués par la Banque européenne d’investissement (BEI). Par différences avec les aides du programme LIFE, il ne s’agit pas de subventions mais de prêts destinés à être remboursés. Ces derniers ont donc vocation à bénéficier à des projets économiquement viables. Il est probable que dans le cadre du Green Deal, ces prêts soient plus globalement fléchés vers les politiques environnementales, et en particulier vers les actions visant à lutter contre le changement climatique ou à s’adapter à ce dernier. Son action prend place dans le cadre du plan Invest EU. Ces prêts peuvent bénéficier à des acteurs publics comme privés.

Enfin, la politique de cohésion constitue une dernière possibilité de financement européen pour les actions visant à la réhabilitation de l’étang de Berre. Les priorités de cette dernière pour la période 2021-2027 sont en cours de négociation, mais il est très probable que le développement durable en constitue un axe essentiel, peut-être à hauteur de 30 % des fonds attribués. Le montant de cette politique est très conséquent puisqu’il s’élève à 351,8 milliards d’euros, soit le premier poste de dépenses de l’Union européenne.

Pour l’ensemble de ces aides, leur sollicitation suppose de disposer de projets déjà circonscrits et entrant dans les priorités de financements des programmes européens. Dans la plupart des cas, ils doivent être sollicités par les régions. Aux yeux de la mission, ils constituent des pistes de financement à mobiliser dans le cadre du prochain contrat d’étang ou de la mise en œuvre d’un SAGE dans les années à venir.

Proposition n° 20 : Mobiliser activement les financements européens dans le cadre du prochain contrat détang.

 


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   Synthèse des propositions

 

Proposition n° 1 : Repenser et moderniser les aménagements hydroélectriques de la chaîne Durance-Verdon (étudier la possibilité d’aménager des micro-centrales sur les canaux existants et réactualiser l’étude sur le projet de dérivation des eaux rejetées par la centrale de Saint-Chamas).

 

Proposition n° 2 : Réduire les quotas d’eau douce et de limons rejetés dans l’étang de Berre et améliorer l’information et la transparence sur la gestion des rejets. Instaurer un comité de suivi de la trajectoire de réduction.

 

Proposition n° 3 : Prévoir une obligation de curage du bassin de décantation de Cadarache. Étudier l’opportunité de l’octroi du statut de déchet aux boues.

 

Proposition n° 4 : Mener une étude de faisabilité de la transformation de tout ou partie de l’usine de Saint-Chamas en station de transfert de l’énergie par pompage afin de limiter les rejets tout en exploitant au maximum de sa capacité cette usine.

 

Proposition n° 5 : Rouvrir le tunnel du Rove à la courantologie par l’intermédiaire d’un percement sous-marin accompagné d’un clapet anti-retour éventuellement aidé d’un système de pompage.

 

Proposition n° 6 : Prévoir, au sein du prochain contrat d’étang, un plan d’investissements spécifique pour la réhabilitation de l’étang de Bolmon.

 

Proposition n° 7 : Fixer un objectif quantitatif de rejets de nutriments (azote et phosphore) dans l’étang de Berre de manière à prioriser les actions de réduction des rejets.

 

Proposition n° 8 : Renforcer la mise en œuvre de la police de l’eau et créer des dispositifs de lutte contre la pollution par temps de pluie (désimperméabilisation et bassins de stockage).

 

Proposition n° 9 : Favoriser le développement d’une filière conchylicole et mytilicole au sein de l’étang de Berre ainsi que le développement des activités de pêche déjà présentes autour de l’étang.

 

Proposition n° 10 : Accompagner le développement local d’une filière de valorisation des algues.

 

Proposition n° 11 : Massifier la politique de réimplantation des zostères dans l’étang de Berre de manière à atteindre 1 500 hectares de zostères d’ici 2035.

 

Proposition n° 12 : Accompagner les conversions des agriculteurs du bassin versant à l’agriculture biologique ou raisonnée.

 

Proposition n° 13 : Poursuivre les acquisitions de terrains sur le pourtour de l’étang par le Conservatoire du littoral dans une optique foncière mais surtout de conservation de patrimoine et de la biodiversité.

 

Proposition n° 14 : Désigner une instance intercommunale unique responsable des travaux et actions afférents à la réhabilitation de l’étang de Berre, soit par la refonte du GIPREB, soit par la désignation de la métropole.

 

Proposition n° 15 : Élaborer un schéma d’aménagement et de gestion de l’eau (SAGE) dédié à l’étang de Berre.

 

Proposition n° 16 : Créer une instance pérenne de coordination rassemblant les différents acteurs et chargée d’élaborer et de piloter la mise en œuvre des contrats d’étang.

 

Proposition n° 17 : Associer de manière pérenne la société civile organisée et les citoyens à la gestion de l’étang de Berre.

 

Proposition n° 18 : Créer, en lien avec le GIPREB, une « zone atelier » de manière à coordonner les productions scientifiques portant sur l’étang de Berre.

 

Proposition n° 19 : Faire de l’étang de Berre un lieu exemplaire de mobilisation des financements innovants de CDC Biodiversité dans le cadre du prochain contrat d’étang. Mobiliser et orienter une partie des financements du plan de relance vers la réhabilitation de l’étang.

 

Proposition n° 20 : Mobiliser activement les financements européens dans le cadre du prochain contrat d’étang.


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   EXAMEN du rapport en commission

Lors de sa réunion du mercredi 23 septembre 2020, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a procédé à l’examen du rapport de la mission d’information sur la réhabilitation de l’étang de Berre.

Les débats sont accessibles sur le portail vidéo de l’Assemblée nationale à l’adresse suivante :

http://assnat.fr/5cRL7D

 

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À l’issue de la réunion, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a autorisé la publication du rapport d’information.

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   AnnexeS

 


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LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

(par ordre chronologique)

M. Jean-Marc Sénateur, sous-préfet dIstres

Électricité de France (EDF)

M. Hervé Guillot, directeur hydro Méditerranée, délégué chargé de la coordination sur le bassin méditerranéen

M. Bruno de Cherge, délégué chargé des relations institutionnelles et régulations d’EDF hydro

Mme Véronique Loy, directrice adjointe des affaires publiques

Conseil général de lenvironnement et du développement durable (CGEDD)

M. Nicolas Forray, ingénieur général des ponts, des eaux et des forêts, président de la section milieux, ressources et risques

Mme Aline Baguet ingénieure générale des ponts, des eaux et des forêts

Conservatoire du littoral

Mme Agnès Vince, directrice du Conservatoire du littoral

M. François Fouchier, délégué de rivages Provence-Alpes-Côte d’Azur

M. Laurent Roy, directeur général de l’agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse

EDF – Direction recherche et développement

Mme Emma Gouze, ingénieure chercheuse à la direction Recherche et Développement

M. Bruno de Cherge, responsable des relations institutionnelles à EDF hydro

M. Véronique Loy, directrice adjointe des affaires publiques

Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (IFREMER)

M. Christophe Brach-Papa, responsable du laboratoire environnement ressources Provence-Azur-Corse

Société du canal de Provence

M. Bruno Vergobbi, directeur général

Grand port maritime de Marseille

M. Renaud Paubelle, directeur de l’aménagement

Tour du Valat 

M. Jean Jalbert, directeur général

Centre de valorisation des algues (CEVA)

Mme Stéphanie Pedron, directrice générale

Institut méditerranéen docéanologie (IMO)

M. Sylvain Rigaud, maitre de conférence, EA CHROME, Université de Nîmes

M. Christian Grenz, directeur adjoint, directeur de recherche CNRS

Table ronde sur la situation de létang de Berre

Ministère de la transition écologique et solidaire

 Direction générale de laménagement, du logement et de la nature (DGALN)

M. Olivier Thibault, directeur de l’eau et de la biodiversité

M. Brice Huet, adjoint au directeur de l’eau et de la biodiversité

Mme Fabienne Ricard, sous-directrice de la protection et de la restauration des écosystèmes littoraux et marins

 Direction générale de la prévention des risques (DGPR)

M. Philippe Merle, chef de service

Table ronde sur le financement de la réhabilitation de létang de Berre

 Agence de leau Rhône-Méditerranée-Corse

M. Laurent Roy, directeur général

 CDC Biodiversité

M. Philippe Thiévent, directeur

 Agence nationale de la cohésion des territoires

Mme Valérie Lasek, directrice générale déléguée adjointe à l’appui opérationnel et stratégique

IFREMER Sète

Mme Fiandrino Annie, responsable du laboratoire Environnement-Ressources

Via Marina

M. Félix Bogliolo, associé fondateur et gérant

Parc national des Calanques

M. Didier Réault, président

Compagnie nationale du Rhône (CNR)

M. Michel Carret

GIPREB

M. Raphaël Grisel, directeur du GIPREB Syndicat-Mixte

Agence régionale de santé PACA

Mme Karine Huet, déléguée départementale des Bouches-du-Rhône à l’ARS PACA

M. Loïc Hattermann, ingénieur Santé-Environnement

Mme Cécile Morciano, responsable du service Santé-Environnement

M. Philippe Silvy, adjoint de la responsable du service Santé-Environnement

Comité national de la conchyliculture 

M. Philippe Le Gal, président

M. Patrice Lafont, président du comité régional conchylicole (CRC) de Méditerranée

M. Samuel Meulé, président du comité scientifique du GIPREB

M. Nicolas Maughan, professeur à l’université d’Aix-Marseille

Chambre de commerce et dindustrie de Marseille

M. Philippe Blanquefort, directeur général

Suez

M. Hugues d’Antin, directeur délégué aux relations institutionnelles

Eaux de Marseille

Mme Marie Borni, directrice générale déléguée

Table ronde

 Syndicat mixte de gestion de la nappe phréatique de la Crau (SYMCRAU)

Mme Charlotte Alcazar, directrice

 Association syndicale des arrosants de la Crau

M. Jean-Louis Plazy, président de l’Union du Canal commun Boisgelin-Craponne et président de l’association syndicale constituée d’office des arrosants de la Crau

EGIS

M. Michel Allari, directeur technique

M. Claude Canaleta, directeur ingénierie

 

 

 

Déplacement à Bruxelles
Jeudi 13 février 2020

Commission européenne, direction générale de l’environnement

Mme Sabine Bourdy, cheffe de l’unité « Mise en œuvre et soutien aux États Membres, intégration et évaluations environnementales », représentant M. Daniel Calleja‑Crespo, directeur général

M. Jean Préat, conseiller juridique

M. Christian Probst, conseiller juridique

Mme Jill Michielssen, responsable des questions juridiques liées à la politique de l’UE dans le domaine des eaux intérieures

Mme Yvette Izabel, chargée des questions relatives à la politique de cohésion pour la France

 

Représentation permanente de la France auprès de l’Union européenne

M. Fabrice Dubreuil, représentant permanent adjoint

Mme Océane Thieriot, conseillère environnement

 

 

 

 

 

Déplacement à l’étang de Berre
Jeudi 9 et vendredi 10 avril 2020

Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL)

Mme Marie-Françoise Maserque, directrice adjointe

Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM)

M. Pascal Jobert, directeur adjoint

GIPREB

M. Serge Andreoni, ancien directeur

Table-ronde d’associations

Association départementale du gibier d’eau

Nosta Mar

Association de sauvegarde de l’Étang de Berre

Étang de Berre, patrimoine universel

France Nature Environnement PACA

L’Étang Nouveau

 

Déplacement à l’étang de Berre
Lundi 7 septembre 2020

Table ronde regroupant des associations environnementales

France Nature Environnement (FNE)

M. René Tassy

Mouvement national de lutte pour l’environnement (MNLE)

M. Jean-Claude Cheinet

Conservatoire d’espaces naturels de Provence-Alpes-Côte d’Azur

Mme Bénédicte Meffre, adjointe au responsable du pôle 13

Coordination de l’Étang Marin

M. Bernard Niccolini, président

M. Félix Marza, deuxième vice-président

Mme Jeanne Grassi, administratrice de l’association de sauvegarde de l’étang de Berre (ASEB)

Étang de Berre, patrimoine universel (conseil scientifique)

M. Claude Vella, membre du comité scientifique


Table ronde regroupant des acteurs économiques de la région

Prud’homie de pêche de Martigues

M. William Tillet

M. Jo Pilato, deuxième prud’homme

Chambre de commerce et d’industrie

Mme Marina Hutin, animatrice de territoire et réseaux « Étang de Berre Ouest Métropole »

Mme Floriane Leclercq, collaboratrice de la direction « Études et prospective économique »

Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME)

M. Eric Molie, membre élu

Société du canal de Provence (SCP)

M. Bruno Vergobbi, directeur général

Table ronde regroupant des services de l’État

Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL)

Mme Bazerque, directrice régionale adjointe

Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM)

M. Pascal Jobert directeur adjoint

Agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse

M. Jean-Michel Eiffes, chef de service, service territorial 13

Conservatoire du littoral

M. François Fouchier, délégué territorial

Table ronde regroupant les collectivités territoriales et les élus

GIPREB

M. Didier Khelfa, président, maire de Saint-Chamas

M. Raphaël Grisel, directeur

Mairie d’Istres

Mme Nicole Joulia, première adjointe au maire

Mairie de Marignane

M. Eric Le Disses, maire

Mairie de Martigues

M. Gaby Charroux, maire

Mairie de Saint-Mitre les Remparts

M. Goyer, maire

M. Patrick Lambert, maire adjoint, conseiller municipal

Mairie de Vitrolles

M. Loïc Gachon

Conseil régional de Provence-Alpes-Côte d’Azur

M. Philippe Maurizot, conseiller régional, vice-président de la commission Économie, industrie, innovation, nouvelles technologies et numérique

Mairie de Charleval, Syndicat mixte d'aménagement de la vallée de la Durance (SMAVD)

M. Yves Wigt, maire, président du syndicat mixte d’aménagement de la vallée de la Durance

M. Christian Doddoli, directeur général du syndicat mixte d’aménagement de la vallée de la Durance

Syndicat mixte de gestion de la nappe phréatique de la Crau (SYMCRAU)

Mme Céline Tramontin, présidente

Mme Charlotte Alcazar, directrice


—  1  —

Synthèse de la consultation publique

 


—  1  —

INTRODUCTION

 

La mission d’information sur la réhabilitation de l’étang de Berre a organisé une consultation en ligne afin de recueillir des pistes d’amélioration de la qualité des eaux de l’étang. Cette consultation, qui s’adressait directement au grand public, est complémentaire des auditions et des déplacements effectués par la mission d’information.

Ouverte du 30 janvier au 6 mars 2020, cette consultation a pris deux modalités différentes : un questionnaire fermé et une plateforme de débat.

Le questionnaire fermé comprenait des questions relatives au rapport des citoyens avec l’étang ainsi que des questions portant sur les principales pistes de réhabilitation proposées par les acteurs auditionnés. Les réponses aux premières questions permettent d’établir le profil des répondants, ainsi que la nature et les caractéristiques de leur rapport à l’étang (proximité, activités pratiquées…). Les répondants devaient ensuite classer les solutions proposées pour la réhabilitation de l’étang de 1 à 5 en fonction de leurs préférences.

S’agissant de la plateforme de consultation ouverte, deux débats étaient ouverts, portant respectivement sur :

-          Comment améliorer la qualité des eaux de l’étang de Berre?

-          Quel étang dans vingt ans ?

Le questionnaire fermé a recueilli 1121 réponses (dont 22 réponses dorganisations et 1099 de particuliers). S’agissant de la plateforme de consultation ouverte, elle a pour sa part recueilli 126 contributions (commentaires et réponses) et près de 687 votes. En tout, ce sont près de 150 citoyens qui, à titre individuel ou en tant qu’association ou organisation, ont pris part aux échanges sur cette plateforme.

La présente synthèse détaille les principaux résultats recueillis à partir de l’analyse de ces réponses et contributions à l’aide d’outils quantitatifs et qualitatifs.

NB : dans un souci de lisibilité, la syntaxe et lorthographe des extraits cités ont été quelques fois modifiés à la marge.

 

Première partie : Qui sont les participants à la consultation ?

Deuxième partie : Quelle perception de létang de Berre ?

Troisième partie : Quelles pistes pour réhabiliter létang de Berre ?


Première partieQui sont les participants à la consultation ?

 

1121 personnes ont participé au questionnaire fermé. Il s’agit de 1099 particuliers et de 22 organisations. Ces dernières sont pour l’essentiel des associations (notamment de protection de l’environnement, de chasse, de pêche ou sportives). Ont également participé des groupements et émanations de collectivités territoriales (par exemple le GIPREB ou l’office du tourisme de Saint-Chamas), des établissements publics (Voies navigables de France) ainsi qu’un hôtel.

S’agissant de la plateforme ouverte, 126 contributions ont été recueillies. Par ailleurs, 687 votes ont été enregistrés. Au total, ce sont 151 personnes qui ont participé activement à la plateforme. La possibilité était ouverte de remplir des champs facultatifs du formulaire d’inscription (âge, code postal et activité) dont les données permettent une analyse plus fine de la typologie des participants. 93 participants, soit 61 % d’entre eux, ont rempli ces champs facultatifs lors de leur inscription sur la plateforme. L’analyse développée dans la présente partie ne porte donc, s’agissant de la plateforme ouverte, que sur ces 61 % de participants.

 

Une participation plus élevée chez les hommes

De manière assez classique pour des dispositifs de consultation en ligne, la participation des hommes au questionnaire fermé a été plus forte puisqu’elle s’est élevée à 60 % du total. Ces derniers sont également majoritaires à faire des propositions aux questions ouvertes « Autres ».

Il convient de noter que la plateforme participative ouverte ne permet pas d’établir de statistiques de participation par sexe car cette information n’est pas demandée à l’inscription.

 

Une participation de tous les âges, légèrement en retrait chez les jeunes

1 121 comptes ont participé à la consultation, avec une répartition centrée sur les actifs de 30 à 65 ans, aucune tranche d’âge n’étant toutefois absente. Une plus faible participation est relevée chez les participants de moins de 30 ans (près de 10 % pour le questionnaire et à peine 5 % pour la plateforme participative). Là encore, ce résultat est en phase avec les constats observés dans d’autres dispositifs consultatifs.

 

 

 

 

Questionnaire fermé

Plateforme participative

Âge

Nombre de participants

Part des participants

Population générale par tranche dâge

Commentaires

Réponses

Votes

Total

Part dans les contributions

Moins de 18 ans

6

0,54 %

24,00 %

0

0

0

0

0 %

18 à 29 ans

121

10,79 %

11,14 %

4

3

34

43

5 %

30 à 39 ans

233

20,79 %

12, 36 %

6

17

113

136

14 %

40 à 49 ans

231

20,61 %

12,80 %

50 à 64 ans

298

26,58 %

19,20 %

14

19

175

225

24 %

65 à 74 ans

167

14,90 %

11,00 %

11

62

139

218

23 %

75 ans et plus

33

2,94 %

9,50 %

Sans réponse

4

0,36 %

NA

31

33

279

318

34 %

Non complété ou Non affiché

28

2,50 %

NA

Total renseigné

1121

100,00 %

100,0 %

66

134

740

940

100 %

 

Participants au questionnaire fermé par tranches dâge

 

151 comptes différents ont participé à la consultation ouverte, avec une moyenne de 6,23 actions par personne (réponse + commentaire + vote). Il existe cependant de très grandes disparités entre les contributeurs puisque les 10 comptes les plus actifs ont cumulé 275 actions, soit 29 % du total.

Les contributions ont principalement été réalisées par des personnes de plus de 50 ans, qui représentent 47 % des contributions – 25 commentaires, 81 réponses ainsi que 314 votes. Ce pourcentage est d’autant plus élevé si l’on rappelle que 34 % des participants, représentant 318 contributions, ne se sont pas identifiés.

Participation à la plateforme ouverte par tranches dâge

 

Les retraités et les cadres et salariés du privé ont été les deux catégories les plus nombreuses et les plus actives sur la plateforme

Ce sont plutôt les catégories socioprofessionnelles les plus favorisées qui ont majoritairement répondu au questionnaire et sur la plateforme de consultation, ainsi que les retraités. Les deux catégories socioprofessionnelles « retraités » et « cadres et professions intellectuelles supérieurs » représentent 57 % des répondants au questionnaire. Les retraités, avec 27%, ont été les plus actifs s’agissant des contributions sur la plateforme ouverte. Là encore, ce résultat est classique au regard des personnes participant habituellement aux dispositifs consultatifs.

 

Participants au questionnaire fermé par catégorie socioprofessionnelle

Catégorie socio-professionnelle

Nombre de participant

Part des participants

Part dans la population générale

Agriculteurs exploitants

9

0,80 %

1,50 %

Artisans, commerçants et chefs d’entreprises

58

5,17 %

6,70 %

Cadres et professions intellectuelles supérieures

398

35,50 %

19,30 %

Professions intermédiaires

94

8,39 %

25,60 %

Employés

192

17,13 %

26,80 %

Ouvriers

26

2,32 %

19,60 %

Retraités

242

21,59 %

NA

Autres personnes sans activité professionnelle

70

6,24 %

0,50 %

Sans réponse

4

0,36 %

NA

Non complété ou Non affiché

28

2,50 %

NA

Total

1121

100,00 %

100,00 %

 


Participants à la plateforme de consultation par catégorie socioprofessionnelle

Catégorie socio-professionnelle

Nombre dactions

Part des actions

Réponses

Commentaires

Votes

Artisans et entrepreneurs

19

2,02 %

1

3

15

Salarié du secteur Privé

183

19,47 %

20

7

146

Fonctionnaire ou contractuel du secteur public

122

12,98 %

13

5

94

Étudiants

18

1,91 %

1

0

17

Professions libérales

5

0,53 %

0

0

5

Retraités

254

27,02 %

64

15

166

Sans activité professionnelle

12

1,28 %

0

3

8

Autres

16

1,70 %

1

1

14

Non complété

311

33,09 %

34

32

465

Total

940

97,98 %

134

66

462

 

Des participants habitant, pour la majorité dentre eux, à proximité de létang de Berre

Compte tenu de la thématique de la consultation, une question a été posée sur le lieu de résidence des participants à la consultation. Il en ressort que la majorité des participants à la consultation habite à proximité de l’étang de Berre.

Réponse à la question : « Habitez-vous à proximité de létang de Berre ? »

Habitez-vous à proximité de lÉtang de Berre ?

Décompte

Pourcentage

Oui

892

79,57 %

Non

180

16,06 %

Sans réponse

7

0,62 %

Non complété ou Non affiché

42

3,75 %

Total

1121

100,00 %

Par ailleurs, la mention du code postal de la résidence permet d’établir plus précisément le lieu de résidence des participants. Il en ressort que plus de la moitié des répondants habite l’une des dix communes limitrophes de l’Étang.

Code postal de résidence des participants

Commune

Code postal

Fréquence

%

Saint Chamas

13250

97

9 %

Salon de Provence

13300

87

8,1 %

Istres

13800

87

8,1 %

Vitrolles

13127

65

6,0 %

Martigues

13500

62

5,7 %

Rognac

13340

60

5,6 %

Marignane

13700

57

5,3 %

Berre lÉtang

13130

46

4,3 %

Châteauneuf les Martigues

13220

39

3,6 %

Velaux

13880

37

3,4 %

La Fare les Oliviers

13580

36

3,3 %

Miramas

13140

26

2,4 %

Coudoux

13111

18

1,7 %

Fos sur Mer

13270

17

1,6 %

Saint Mitre les Remparts

13920

17

1,6 %

NB : figurent en rouge les dix communes limitrophes de létang de Berre.

Un panel de participants pratiquant de nombreuses activités en lien avec létang de Berre

Le questionnaire fermé comprenait une question portant sur les activités pratiquées en lien avec l’étang de Berre. Il en ressort que les répondants pratiquent de nombreuses activités en lien avec ce dernier.

Réponses à la question : « Pratiquez-vous des activités en lien avec lÉtang ? »

 

Décompte

Pourcentage

Oui, régulièrement

334

29,79 %

Oui, occasionnellement

486

43,35 %

Non

254

22,66 %

Sans réponse

5

0,45 %

Non complété ou Non affiché

42

3,75 %

Total

1121

100,00 %

 

Une liste d’activités était proposée dans le questionnaire. Il était par ailleurs possible d’en mentionner d’autres.

 

Réponses à la question : « Quelle(s) activité(s) pratiquez-vous ? »

 

Décompte

Pourcentage

Promenades

669

59,68 %

Activités nautiques

367

32,74 %

Baignade

357

31,85 %

Pêche

126

11,24 %

Autre

80

7,14 %

Non complété ou Non affiché

301

26,85 %

Total

1900

169,49 %

 

Parmi les réponses libres à la question « Quelles activités pratiquez-vous ? », les trois activités les plus citées sont la course à pied, le vélo et le nettoyage.

 

Réponses libres à la question : « Quelles activités pratiquez-vous ? »

Le nuage de mots permet de faire ressortir les mots dont loccurrence est la plus grande. Plus la fréquence dun mot est importante, plus il sera placé au centre du nuage et dans une grande police de caractères.


Deuxième partie – Quelle perception de létang de Berre ?

 

Le questionnaire fermé comportait des questions portant tant sur la perception de l’état de l’étang de Berre que sur le niveau d’information disponible.

 

Un sentiment damélioration de la qualité des eaux de létang

Une partie des questions portait sur la perception des répondants relative à l’état de l’étang de Berre, et en particulier sur la qualité de ses eaux.

 

Réponses à la question : « Selon vous, la qualité des eaux de létang sest-elle améliorée ou dégradée au cours des dix dernières années ? »

 

Décompte

Pourcentage

Elle s’est beaucoup améliorée

105

9,37 %

Elle s’est légèrement améliorée

415

37,02 %

Elle est restée la même

175

15,61 %

Elle s’est légèrement dégradée

93

8,30 %

Elle s’est beaucoup dégradée

195

17,40 %

Sans opinion

92

8,21 %

Sans réponse

4

0,36 %

Non complété ou non affiché

42

3,75 %

 

Le sentiment qui domine est donc celui d’une amélioration de la qualité des eaux de l’étang de Berre, seul un quart des répondants ayant le sentiment d’une dégradation. Ces éléments statistiques correspondent presque parfaitement aux réponses données par les organisations répondantes. Il s’agit donc d’un sentiment assez largement partagé.

 

Réponses à la question : « Selon vous, la qualité des eaux de létang sest-elle améliorée ou dégradée au cours des dix dernières années ? »

 

Une information perçue comme insuffisante sur létat de létang de Berre

Malgré les efforts entrepris, notamment par les collectivités locales et leurs groupements, l’information dont disposent les répondants quant à la qualité des eaux de l’étang est perçue comme insuffisante.

Réponses à la question : « Estimez-vous être suffisamment informé(e)
sur la qualité des eaux de létang ? »

 

Décompte

Pourcentage

Oui

448

42,55 %

Non

605

57,45 %

Total

1053

100,00 %

NB : ninclut pas les réponses des organisations, mais uniquement celles des particuliers.

 

Ce sentiment n’est pas forcément partagé par les organisations répondantes, ce qui peut s’expliquer par un accès facilité à l’information en ce qui les concerne. En effet, parmi les 22 organisations répondantes, plus de 60 % s’estiment informées sur la qualité des eaux de l’étang. L’effort d’information résiduel doit donc porter essentiellement sur le grand public.

 

Des répondants prêts à débuter de nouvelles activités en cas damélioration de la qualité des eaux

Les répondants indiquent à une très forte majorité être prêts à débuter de nouvelles activités si la qualité des eaux de l’étang venait à s’améliorer. Parmi les activités citées, la baignade et les activités nautiques arrivent en tête, ce qui témoigne du potentiel de développement touristique de l’étang.

Réponses à la question : « Si la qualité des eaux de létang saméliorait,
envisageriez-vous de débuter de nouvelles activités ? »

 

Décompte

Pourcentage

Oui

896

79,93 %

Non

176

15,70 %

Sans réponse

7

0,62 %

Non complété ou Non affiché

42

3,75 %

NB : ninclut pas les réponses des organisations, mais uniquement celles des particuliers.

 

Réponses à la question : « Quelles activités pourriez-vous envisager de débuter ? »

 

Décompte

Pourcentage

Baignade

623

55,58 %

Activités nautiques

476

42,46 %

Pêche

339

30,24 %

Promenades

303

27,03 %

Autre

68

6,07 %

Non complété ou Non affiché

225

20,07 %

NB : ninclut pas les réponses des organisations, mais uniquement celles des particuliers.

 

L’intégralité des activités citées dans la rubrique « autres » correspond à une activité de plongée sous-marine.


Troisième partie – Quelles pistes pour réhabiliter létang de Berre ?

 

Les participants à la consultation pouvaient faire part de leurs idées pour la réhabilitation de l’étang de Berre à la fois dans le questionnaire fermé et sur la plateforme ouverte. S’agissant de cette dernière, la ventilation de la part des votes par débat révèle la surreprésentation du débat 1 (« Comment améliorer la qualité des eaux de l’étang ? ») avec 680 contributions, soit 77 % du total. Le débat 2 (« Quel étang dans vingt ans ? ») ne représente que 23 % des contributions mais il est possible de compenser la faiblesse de cette participation par les réponses au questionnaire fermé. Ce dernier comportait en effet une question sur le sujet suivant : « Quelles activités pourriez-vous envisager de débuter ? ». Cette question donnait la possibilité de proposer une réponse libre (« Autre ») où les répondants ont fait part de leurs souhaits, évoquant ainsi leur conception du futur de l’étang (cf. supra).

 

Répartition des contributions sur la plateforme ouverte

 

Commentaires

Réponses

Votes

Total des contributions

Part des contributions de chaque thématique dans le total

Comment améliorer la qualité des eaux de létang?

47

118

515

680

76,66 %

Quel étang dans vingt ans ?

19

16

172

207

23,34 %

Total

66

134

687

887

100,00 %

 

Toutes les solutions proposées dans le questionnaire fermé recueillent une forte approbation

Le questionnaire proposait quatre des pistes les plus régulièrement évoquées au cours des auditions pour réhabiliter l’étang de Berre. Il était demandé aux répondants d’indiquer leur niveau d’approbation de ces différentes pistes, à savoir : rouvrir le tunnel du Rove ; réduire les rejets d’eau douce ; développer les solutions naturelles sur le pourtour de l’étang ; et améliorer les réseaux d’assainissement. Toutes ces pistes recueillent une majorité d’avis favorables.


Réponses à la question : « Selon vous, quelles pistes devraient être étudiées pour améliorer la qualité des eaux de létang ? » (de 0 peu important à 5 à très important)

Rouvrir le tunnel du Rove

Décompte

Pourcentage

1

100

8,92 %

2

74

6,60 %

3

104

9,28 %

4

108

9,63 %

5

561

50,04 %

Sans opinion

116

10,35 %

Sans réponse

16

1,43 %

Non complété ou Non affiché

42

3,75 %

Réduire les rejets deau douce dans lÉtang

Décompte

Pourcentage

1

112

9,99 %

2

32

2,85 %

3

67

5,98 %

4

109

9,72 %

5

723

64,50 %

Sans opinion

21

1,87 %

Sans réponse

15

1,34 %

Non complété ou Non affiché

42

3,75 %

Développer les solutions naturelles sur le pourtour de lÉtang (développement de lagriculture biologique, végétalisation…)

Décompte

Pourcentage

1

56

5,00 %

2

68

6,07 %

3

181

16,15 %

4

180

16,06 %

5

542

48,35 %

Sans opinion

19

1,69 %

Sans réponse

33

2,94 %

Non complété ou Non affiché

42

3,75 %

Améliorer les réseaux dassainissement

Décompte

Pourcentage

1

60

5,35 %

2

48

4,28 %

3

137

12,22 %

4

191

17,04 %

5

604

53,88 %

Sans opinion

21

1,87 %

Sans réponse

18

1,61 %

Non complété ou Non affiché

42

3,75 %

 

Toutefois, on peut noter de légères différences dans l’appréciation de ces différentes mesures, la réduction des rejets d’eau douce étant l’option la plus plébiscitée. De surcroît, cette idée est également dominante dans les propositions pouvant être librement indiquées dans la rubrique « Autres ».

Niveau dapprobation des différentes mesures proposées

 

Forte approbation
(4 -5)

Approbation moyenne (3)

Faible approbation (1-2)

Rouvrir le tunnel du Rove

71 %

11 %

18 %

Réduire les rejets deau douce

80 %

6 %

14 %

Développer les solutions naturelles

70 %

18 %

12 %

Améliorer les réseaux dassainissement

76 %

13 %

10 %

 

 

On peut observer une corrélation entre la durée de résidence à proximité de l’étang et l’opinion quant aux différentes solutions proposées. De manière générale, ceux qui habitent depuis le moins longtemps à proximité de l’étang plébiscitent davantage les solutions fondées sur la nature et l’amélioration des réseaux d’assainissement, quand ceux qui y résident depuis plus longtemps privilégient la réouverture du tunnel du Rove et la réduction des rejets d’eau douce.

Les réponses des organisations sont convergentes en la matière avec celles des particuliers. Seule la réouverture du tunnel du Rove fait exception, puisqu’elle ne recueille que 50 % de forte approbation parmi ces dernières, un tiers des organisations répondantes jugeant cette perspective peu intéressante (1-2).

S’agissant de la rubrique « Autres », la réduction des rejets d’eau douce est fortement mentionnée, ainsi que l’indique le nuage de mots suivants.

Nuage de mots correspondant à la rubrique « autres propositions »

S’agissant des organisations, les cinq réponses suivantes sont mentionnées.

Réponses des organisations dans la rubrique « Autres propositions »

Créer des liaisons maritimes et des chemins pédestres pour que nos enfants et nous mêmes puissions profiter de ce bel espace

Lutter contre les écoulements deaux polluées (issues des casses automobiles ou parkings comme la casse de Rognac par exemple) et restaurer les cours d’eau qui s’y jettent

Arrêter complètement les rejets (volontaires ou accidentels) de la part des industriels ; éradiquer la pollution par les déchets

Mettre en place une campagne d’élimination des alluvions au niveau des ports du nord de l’étang

Oxygénation des eaux quand le besoin s’en fait sentir

 

Les thèmes dominants de la plateforme ouverte

Compte tenu de la méthodologie retenue, il a été possible d’isoler trois thèmes principaux dans les contributions de la plateforme ouverte.

 

Analyse de tous les mots du jeu de données sans pondération

 

Analyse de tous les mots du jeu de données avec pondération en fonction des votes (échelle 1:10)

Ainsi, si l’on prend en considération l’ensemble du jeu de données du premier débat avec une pondération en fonction du nombre de votes positifs, c’est la thématique des rejets d’eau douce de la centrale EDF qui prédomine. Une analyse plus fine permet de distinguer les trois sujets principaux : les rejets de la centrale EDF, le lien avec la Durance, dans la perspective notamment de création de STEP, et le tunnel du Rove.

Analyse des mots du jeu de données avec une pondération en fonction des votes
(échelle 1:10)

NB : ne sont prises en compte que les contributions au débat  1.

Les différences d’approche entre générations sont également sensibles. Elles confortent les analyses menées précédemment, les plus jeunes semblant être plus sensibles aux solutions fondées sur la nature et liées à la diminution des rejets d’épuration, quand les plus âgés privilégient la réouverture du tunnel du Rove. Le thème de la diminution des rejets d’EDF ne ressort pas spécifiquement car il est commun à toutes les classes d’âge.

 

 

Analyse du jeu de données avec une pondération en fonction des votes (échelle 1:10) et de lâge

18-29 ans

30-49 ans

50-65 ans

+ 65 ans

 

Débat n° 1 : Les principales propositions pour la réhabilitation de létang de Berre

Il est procédé ci-dessous à une analyse qualitative des débats. Ne sont pas ici reprises les propositions qui n’ont pas suscité de débat ou d’échanges d’arguments.

 

1/Arrêter les déversements/ taux de salinité minimum qui soit compatible avec la vie halieutique de létang/laisser faire la nature.

Jean Claude Bourgault                                                                                                            56/ 0.          4

 

idée commentée: Les commentaires portant sur la contribution portent sur les rejets d’eau douce et de limons de la centrale EDF.

 

Pour René Marion, un « bassin de retenue des limons » doit être construit pour « limiter les effets des rejets boueux noirâtres » au lieu d’arrêter les déversements de la centrale. Robert revient sur cette idée et précise qu’« un grand bassin de sédimentation [existe] à Saint Paul depuis lorigine de la création du canal » en admettant que « son efficacité doit être amoindrie » depuis sa création. Cependant, Robert met en avant le « projet de prolonger le canal jusque dans la Crau pour rejoindre le Rhône » et suggère d’utiliser l’eau pour l’irrigation de la plaine de la Crau afin d’y développer l’agriculture. Bruno David soutient l’idée que « les rejets de la centrale électrique [doivent être délocalisés] vers la Crau » malgré le coût de l’opération.

 

Concernant les limons, JPSAN demande s’il est possible d’« utiliser les limons rejetés dans la construction ».

 

René Marion pense également que le « projet de STEP » doit être développé, idée soutenue par Bruno David.

 

 

2) Un simple contrôle des stations dépurations en remontant chaque cours deau et en sanctionnant les contrevenants (Arc, Touloubre, Cadière, etc.)

Franck Vidal                                                                                                                            46/ 0.          2

 

Mireille Quintavalla appuie la proposition et ajoute la nécessité « détendre les réseaux dassainissement collectif ». Elle fait également part de son mécontentement vis-à-vis de la tolérance dont bénéficient les « villages de mobil-homes fixes et caravanes de Marignane ou Châteauneuf les Martigues » qui ne possèdent pas de fosses septiques.

 

Robert ajoute l’utilité « de vérifier la ségrégation des eaux pluviales de tous les bassins versants ». Il appuie son idée par une étude sur les eaux pluviales du parking de Carrefour Vitrolles. Ces eaux, chargées de résidus d’hydrocarbures et de polluants, se déversent dans l’étang de Bolmon par l’intermédiaire de la Cadière.

 

3) Réouverture du canal du Rôve

Cathou                                                                                                                                     40/ 2.          8

Jlouis 14127                                                                                                                            37/ 4.          2

 

Points de vigilance : Plusieurs commentateurs ont exprimé leur scepticisme quant à l’ouverture du tunnel qui risque de faire « remonter de leau polluée de Marseille et de remuer le fond de létang » selon Rene Marion. Jacques53 s’oppose à ce projet « irréaliste et dangereux ».

 

Christophe a appuyé la proposition de Jlouis13127 en proposant de « rouvrir largement le tunnel pour la navigation sans pompage ce qui remettrait le système sous perfusion artificielle ».

 

4) rouvrir le tunnel du Rove;

     arrêter les rejets deau douce dEDF et lautorisation qui leur est donné de relâcher en cas dorages... ou de travaux comme il y a 2 ans;

     aux pollueurs Total; Shell; etc.

     pénaliser financièrement les municipalités en infraction sur la qualité de leurs réseaux dassainissement;

     arrêter et interdire le plastique; éduquer les populations du pourtour de létang pour se prendre en charge et faire des opérations de nettoyage et de prévention... Tout le plastique (bouchons; tube de dentifrice etc.) qui arrive dans létang arrive souvent par les rivières et cours deau et donc de bien en amont par rapport au pourtour de létang..: chasse à ces municipalités en amont qui laissent dériver des plastiques dans ces rivières...

Leau de létang sest considérablement améliorée depuis plusieurs années; il faut continuer et agir plus fermement !

Olivier Paulhiac                                                                                                                      37/ 1.          6

 

idée commentée: Les réponses apportées au commentaire d’Olivier Paulhiac portent sur la centrale EDF.

 

Christophe fait part de la nécessité de « reconvertir la fin de la chaîne hydroélectrique Mallemort Saint-Chamas en Step », idée soutenue par Rene Marion qui souhaiterait cependant que « toute la chaîne depuis Serre Ponçon soit transformée en step ». Selon lui, cette solution permettrait de maintenir la production électrique et de rétablir les nappes phréatiques.

 

Concernant le tunnel du Rove, Jacque 53 rappelle sa farouche opposition au projet. Jolindien13 pense que ce projet n’est pas la priorité et accorde son soutien à Olivier Paulhiac pour « larrêt des apports deau douce de la centrale et lamélioration du traitement des eaux des stations [dépuration] ».

 

5) Fermer la centrale EDF de Saint Chamas

Sebastien RUIZ                                                                                                                        22/ 2          5

Points de vigilance : Bruno David rappelle la nécessité de la centrale qui « fournit 60 % de notre électricité ». Jacques53 s’oppose également à la fermeture de la centrale et privilégie « la limitation des rejets domestiques ».

 

Bruno David propose de détourner les rejets par un canal en Camargue, idée soutenue par Maurilene, tandis que Michel.d propose un détournement vers la Durance. Bruno et Michel rappellent également leur intérêt pour les systèmes de Step.

 

6) ARRÊTER DE TERGIVERSER ! La situation est parfaitement documentée; on sait ce quil faut faire.

jjghg                                                                                                                                         22/ 2          6

 

idée commentée : Plusieurs commentateurs ont exprimé leur accord avec cette affirmation.

 

JJghg appuie son commentaire par un lien vers un article intitulé « lEtat remet à plus tard le sauvetage de létang de Berre au bord de lasphyxie », soutenu par Bruno David. Michel.d rappelle que « la réouverture du tunnel du Rove et la diminution de leau provenant du canal EDF » ont été documentées. Michel.d propose également la « mise en place de STEP sur toutes les centrales hydrauliques du canal EDF » afin de réduire les rejets de la centrale de saint Chamas dans l’étang de Berre.

 

7) Réduire les apports provenant des activités agricoles

Robert Luciano                                                                                                                        20/ 2          2

 

Points de vigilance : Bruno David fait part de son opposition à cibler les agriculteurs qui ne sont « pas les pollueurs de létang de Berre ». Jacques53 appuie cette remarque en précisant que les agriculteurs ne sont pas la principale cause de la pollution et rappelle l’existence d’une « pollution domestique».

 

8) Lassociation “lEtang Nouveau”, indépendante des mondes politiques et financiers, milite depuis des années et fait des propositions dont la STEP.

René Marion                                                                                                                            11/ 0          2

 

Points de vigilance : le fonctionnement des STEP n’a pas semblé avoir été très bien connu par les participants à la consultation, ainsi qu’en témoigne un commentaire.

 

9) Que se soit pour le CT ou LT, cest surtout la question du financement qui coince ! Voici deux humbles propositions pour les régler. Court terme: La réouverture du tunnel du Rove peut être remplacée par la mise en place dune STEP en point haut de la chaîne du Rove avec pompage dans la mer et rejet dans létang. La vente délectricité générée rentabilise le tout. Long terme: La construction du contournement de leau de la chaîne de la Durance (de Salon vers le Rhône) peut être financée en contractualisant avec le concessionnaire en contrepartie des bénéfices à venir et en lui garantissant un temps dutilisation allongé.

LesLaurons                                                                                                                             10/ 1          12

 

idée commentée : Pascal Bazile soutient l’idée de court terme proposée par lesLaurons en rappelant qu’il manque, au niveau local, « des capacités de stockage électrique ». Jacques53 s’oppose à l’idée de pompage puisque les pompes fonctionnent au carburant, ce qui aggraverait la pollution. Mireille quitavalla propose au contraire « de rouvrir une des bordigues de Marignane avec une circulation de leau à sens unique Berre-Bolmon » afin de ne pas traumatiser le Bolmon.

 

LesLaurons appuie son commentaire par un lien vers une étude du GIPREB sur le détournement des rejets d’eau douce de Saint-Chamas vers le Rhône. Mireille quintavalla s’oppose au détournement des eaux de la chaîne Durance-Verdon vers le Rhône, d’une part à cause de « son coût prohibitif » et, d’autre part, du « gaspillage de milliards de m3 deau douce ». Pascal Bazile s’oppose également à cette idée au vu de son coût et préconise une réduction des rejets d’EDF dans l’étang, « nouvelle limite 600 millions de m3/an par ex) et le nouveau surplus sera alors relâché en Durance à Mallemort ».

 

Hubert Jaussaud réfute l’étude du GIPREB proposée par lesLaurons qui ne prend pas en compte les autres options telles que la création de Step. Il qualifie cette étude d’« étrange parti pris [..] commanditée par le GIPREB » et rappelle le prix exorbitant du projet. LesLaurons rappelle la rentabilité financière de ce projet soutenu par un grand nombre d’associations. Hubert Jaussaud rétorque que ce projet a été disqualifié en 2002 par le rapport Balland qui le jugeait « peu réaliste », puis en 2006 par le préfet de région et le ministre de l’industrie. Il rappelle que le changement climatique va entraîner une pénurie d’eau en Durance, ce qui rend ce projet « ridicule ». De plus, Hubert Jaussaud précise que de nombreuses associations telles que « SOS Durance Vivante », « le Collectif l’Eau Vive », « L’Étang Nouveau » sont opposées au projet de dérivation.

 

10) Dévier le canal dEDF 2 -Remettre en état le tunnel du Rove, 3 - sur chaque sortie deau dans létang mettre des filets afin de récupérer tout déchets. 4 - Créer un comité unique qui rassemble les villes du pourtour de létang afin de travailler ensemble sur la vie et laménagement de létang de Berre.

Bastien13340                                                                                                                            12/ 4          2

 

Points de vigilance : Jacques53 soutient les idées bien qu’il les juge « irréalisables ».

 

Pour Hubert Jaussaud, la dérivation du canal d’EDF est une « revendication des élus locaux ». Il considère que cette proposition est « irréaliste ». Au sujet du tunnel du Rove, Hubert Jaussaud rappelle la nécessité d’une « dépollution préalable du tunnel, du canal et du Bolmon ». Cette idée ne lui semble pas primordiale sachant que « létang a vécu depuis des millions dannées sans le tunnel du Rove », sa réouverture aura des effets limités voire néfastes.

 

Hubert Jaussaud revient sur l’idée de Bastien13340 d’installer des filets pour récupérer les déchets. Selon lui, cette idée est insuffisante pour retenir « les petits polluants (bouchons, pailles, etc) et micro-plastiques ». Elle aurait un impact négatif « sur la continuité écologique en empêchant la circulation des organismes vivants, ce qui serait contraire à la DCE ». Hubert Jaussaud s’oppose également à la création d’un comité unique. Il rappelle que le GIPREB existe depuis 20 ans : « une inutilité qui a même entraîné un énorme gaspillage dargent public », soutenue par Jacques53.

 

Débat n° 2 : Quel étang dans vingt ans ?

Comme évoqué précédemment, le second espace de débat a plutôt été utilisé pour prolonger le premier débat. La plupart des contributions constituent des propositions pour réhabiliter l’étang de Berre. Leur analyse n’en est pas pour autant dépourvue d’intérêt, les propositions effectuées étant souvent différentes de celles figurant dans le premier débat.

Certaines de ces propositions portant sur les mêmes thématiques et d’autres ayant fait l’objet de commentaires, il est procédé ci-dessous à une analyse plus qualitative des débats. Ne sont pas ici reprises les propositions qui n’ont pas suscité de débat ou d’échanges d’arguments.

 

1) Il faut interdire les activités nautiques polluantes. Il y a trop de jet-skis ou de bateaux de course à moteur. Cest incompatible avec la sauvegarde de létang et avec la nature ! Létang est une étendue deau incroyable, y naviguant toutes les semaines dessus. Mais il faut le protéger, pourquoi ne pas en faire un parc naturel régional ?

Olivier Paulhiac.                                                                                                                      21/ 7         2

 

Points de vigilance : 13 Paca s’oppose à l’idée d’un parc naturel et promeut plutôt un développement touristique, notamment de Marignane, afin de développer « les activités touristiques en tous genres, qui créeraient des milliers demplois » et permettraient de « générer dimportants revenus qui seraient utilisés pour purifier leau, nettoyer les berges, etc. »

 

2) Jai participé à Marignane à une opération de nettoyage de la rive sud de létang de Berre : ramasser les déchets plastiques échoués sur la plage. Bouchons de dentifrices, bâtons de sucettes, bouteilles de champoing…

Maxime Giacometti                                                                                                                  21/ 7         2

 

Points de vigilance : Olivier Paulhiac et Jselles sont en désaccord avec ce commentaire. Ils estiment que « depuis 10 ans la qualité de leau sest fortement améliorée, leau est magnifique, translucide sur certaines plages », sans pour autant négliger la fragilité de l’étang lors des fortes chaleurs. 

 

3)Arrêt de la surpêche professionnelle, contrôle rigoureux et fin du massacre des dernières tortues carcouannes

Franck Vidal                                                                                                                              19/ 0         1

 

Points de vigilance : Jselles est en désaccord avec ce commentaire. Elle estime que la pêche professionnelle est « anecdotique dans létang de Berre »

 

4) Aménagement plage du Jaï

Valoriser la plage du Jaï pour la pratique des sport nautiques non polluant Cette plage est pratiquée par de nombreux adeptes du kitesurf ou du windsurf car réputée pour la présence de vent fréquent (environ 200 jours par an). Cest un grand atout pour la région et pour profiter de cet étang sans le polluer. Il pourrait être envisagé un projet daménagement des plages : zone réservée à la pratique, amélioration de la route daccès, parking derrière la plage, infrastructures daccueil de clubs, de loueurs/stockage de matériel sportif. Dun manière générale le site nest pas valorisé car il y a aussi une pollution visuelle de toutes ces cheminées de lindustrie pétrolière en face de la plage à Fos

Franck Vidal                                                                                                                              19/ 0         1

 

Points de vigilance : Errol.vela soutient l’idée sous condition que tout aménagement de route ou parking soit réalisé en respectant les contraintes naturelles et réglementaires. Elle rappelle que « la plage du Jai est un lido naturel qui regorge despèces végétales rares et protégées par la loi ».

 

Frederic Pesseguier propose de développer des activités non polluantes telles que la planche à voile. Il estime que la plage du Jaï pourrait être une zone d’accueil touristique, ce qui permettrait une « revalorisation de cette plage ainsi quune sensibilisation du public ».


Méthodologie du traitement des contributions déposées sur la plateforme ouverte

 

Un suivi quantitatif et qualitatif hebdomadaire de la plateforme a été réalisé afin de prendre connaissance progressivement de l’évolution du corpus de propositions. L’objectif de la méthodologie de traitement des contributions a été double : la prise en compte de l’ensemble des contenus sans pour autant sacrifier la granularité des relations entre les arguments. Il a été fait recours, à cette fin, au logiciel de traitement automatique du langage R.

À l’issue de la consultation, une analyse a permis de mettre en évidence les mots-clés et les verbatim les plus discriminants, c’est-à-dire ceux qui se distinguent des autres éléments et sont les plus explicites et révélateurs compte tenu des problématiques abordées dans le débat. À partir de ces éléments, une analyse semi-automatique a été réalisée grâce à des outils de textométrie afin d’obtenir une visualisation graphique des mots-clés par nuages de mots.

La représentation des données par un nuage de mots permet de mettre en valeur les mots dont la fréquence est la plus significative. Un mot sera centré et agrandi proportionnellement à sa fréquence d’apparition. La représentation graphique a également été ajustée selon deux orientations :

- une pondération en fonction du nombre de votes (positifs-négatifs). Ainsi, les mots clés du commentaire ayant reçu 55 votes positifs seront multipliés par 55. Cette pondération permet de mettre en avant les commentaires les plus « populaires » en prenant directement en compte le poids des votes des participants, positifs comme négatifs. Les avis négatifs ont toutefois un poids minime dans la pondération compte tenu de leur faible nombre ;

- une pondération de un à dix en fonction du nombre de votes positifs et négatifs : chaque mot est multiplié par le nombre de votes positifs (après déduction du nombre de votes négatifs) rapporté sur une échelle de un à dix. Le facteur multiplicatif est ainsi compris dans l’intervalle [1;10]. Pour le commentaire ayant reçu le solde de votes positifs le plus élevé (soit 56), l’importance des mots-clés qu’il contient sera multipliée par dix. Cette pondération permet de mettre en évidence les mots clés des commentaires ayant reçu peu de votes et évite qu’ils ne soient écrasés dans la représentation graphique, tout en prenant en compte le poids des votes.

 

 

 

 

 

 


([1]) La composition de la mission d’information se trouve au verso.

([2]) L. Germain, « Létang de Berre », Annales de Géographie, t. 26, n° 143, 1917, p. 329-343.

([3]) IFREMER, Étang de Berre. Bilan des connaissances écologiques, 1985, p. 7.

([4]) La mission d’information portant sur la réhabilitation de l’étang de Berre, elle a décidé de ne pas se saisir des autres sujets environnementaux affectant également le pourtour de l’étang, en particulier la question de la pollution de l’air. Cette question mériterait des travaux spécifiques et elle est largement disjointe de l’état écologique de l’étang.

([5]) Directive n° 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l’eau (dite directive cadre sur l’eau ou DCE).

([6]) Source : audition de l’IFREMER du 3 mars 2020.

([7]) A. Baguet et N. Forray, Réhabiliter lÉtang de Berre ? Évaluation des effets dun pompage au travers du tunnel du Rove sur lécosystème de lÉtang. Autres pistes, Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) juillet 2018, p. 11.

([8]) Voir le plan de gestion établi par le Conservatoire du littoral, « Site de l’étang de Bolmon », 2015.

([9]) A. Baguet et N. Forray, op. cit., p. 12.

([10]) Art. 2 des statuts du GIPREB.

([11]) La mission d’information a eu l’occasion de se rendre dans les locaux du LNHE le 4 février 2020. Le LNHE est composé de 105 ingénieurs et dispose de 61 000 m2 de halls d’essai à Chatou.

([12]) Sur ces dispositifs de suivi, voir A. Baguet et N. Forray, op. cit., p. 12.

([13]) B. Abrial et D. Hucher, Expertise sur le projet de réouverture du tunnel du Rove à la circulation deau de mer, CGEDD, avril 2017 et A. Baguet et N. Forray, Réhabiliter lÉtang de Berre ? Évaluation des effets dun pompage au travers du tunnel du Rove sur lécosystème de lÉtang. Autres pistes, CGEDD, juillet 2018.

([14]) A. Baguet et N. Forray, op. cit., p. 34.

([15]) Le conseil scientifique du comité de bassin note ainsi : « très peu de choses sont connues sur le phosphore dans létang ». Conseil scientifique du comité de bassin,  Quel objectif écologique atteignable en 2027 pour létang de Berre ?, 2017, p. 10.

([16]) Conseil scientifique du comité de bassin, op. cit., p. 3 et 13.

([17]) A. Baguet et N. Forray, op. cit., p. 30, proposition n° 3.

([18]) Conseil scientifique du comité de bassin, op. cit., p. 3.

([19]) B. Abrial et D. Hucher, op. cit., p. 24. Cette remarque porte sur la réouverture du tunnel du Rove mais elle est valable bien au-delà.

([20]) Loi n° 57-897 du 7 août 1957 portant interdiction de la pêche dans l’étang de Berre. En 1969, un arrêté du préfet de région autorise la pêche à l’anguille, compte tenu du développement de la demande, « cette espèce […] ayant en outre la faculté de ne pas garder de goût très prononcé dhydrocarbures contrairement aux muges, loups et daurades. » (IFREMER, op. cit., p. 97).

([21])  Audition de MM. Christian Grenz et Sylvain Rigaud du 18 février 2020.

([22]) A. Baguet et N. Forray, op. cit., p. 12.

([23]) Une masse d’eau est dite « eutrophe » quand les nutriments (notamment l’azote et le phosphore) y sont surabondants.

([24]) IFREMER, Étang de Berre. Bilan des connaissances écologiques, 1985, p. 92.

([25]) L. Germain, op. cit., p. 334.

([26]) Audition de Mme Emma Gouze du 28 janvier 2020.

([27]) L. Germain, op. cit., p. 339.

([28]) IFREMER, Étang de Berre. Bilan des connaissances écologiques, 1985, p. 94.

([29]) L. Germain, op. cit., p. 341.

([30]) A. Baguet et N. Forray, op. cit., p. 5.

([31]) A. Baguet et N. Forray, op. cit., p. 26.

([32]) Voir Bouches-du-Rhône : Une centaine de tonnes de poissons morts ramassée, « Je ne peux que le subir » estime le maire, 20 minutes, le 1er juillet 2019.

([33]) Glissements de terrain sur les talus du canal du Rove à Marignane, Mars actu, 6 décembre 2019. Voir également le communiqué de presse du Grand port maritime du même jour.

([34]) Audition de M. Renaud Paubelle du 11 février 2020.

([35]) Audition de M. Renaud Paubelle du 11 février 2020.

([36]) Pour un constat analogue, voir Conseil scientifique du comité de bassin, op. cti., p. 8.

([37]) Loi n° 56-5 du 5 janvier 1955 relative à l’aménagement de la Durance.

([38]) IFREMER, op. cit., p. 77.

([39]) IFREMER, op. cit., p. 81.

([40]) IFREMER, op. cit, p. 83.

([41]) A. Baguet et N. Forray, op. cit., p. 4.

([42]) La Tour du Valat est un institut de recherche pour la conservation des zones humides en Méditerranée.

([43]) Audition du 18 février 2020.

([44]) Ces prescriptions sont précisées par le protocole relatif à la protection de ‎la mer méditerranée contre la pollution d’origine tellurique signé à Athènes le 17 mai 1980.

([45]) CJCE, 7 octobre 2004, Commission c/ France, n° C-239/03, § 49.

([46]) M. Laurenceau et Fr. Molle, Controverses environnementales et arbitrages politiques : les logiques d’action du système Étang de Berre/Basse-Durance, VertigO, vol. 19, n° 3, décembre 2019.

([47]) A. Baguet et N. Forray, op. cit., p. 22.

([48]) Art. 34 de la loi n° 94-114 du 10 février 1994 portant diverses dispositions concernant l’agriculture.

([49]) Voir l’étude sanitaire préalable de l’IFREMER, Études sanitaires du cordon du Jaï et de l’Étang de Berre, juillet 2017.

([50]) GIPREB, « Les pêcheries professionnelles et de loisirs de l’étang de Berre », 2019

([51]) G. Marchessaux, Étude de lanthroposystème emblématique de létang de Berre : approches écosystématique et sociologique de limpact du cténaire invasif Mneliopsis leidyi, thèse, mai 2019.

([52]) A. Baguet et N. Forray, op. cit., p. 22.

([53]) Pour une synthèse, voir la note complémentaire au rapport du CGEDD portant sur la crise d’anoxie de l’été 2018, janvier 2019.

([54])GIPREB, Observatoire du milieu, Bilan annuel 2018, p. 59.

([55])  GIPREB, Observatoire du milieu, Bilan annuel 2018, p. 59.

([56]) A. Baguet et N. Forray, op. cit., p. 22.

([57]) A. Baguet et N. Forray, Réhabiliter létang de Berre ? Note complémentaire sur la crise danoxie de lété 2018, janvier 2019, p. 8.

([58]) GIPREB, Observatoire du milieu, Bilan annuel 2018, p. 59.

([59]) Note de réponse au questionnaire de la mission d’information.

([60]) A. Baguet et N. Forray, op. cit., p. 12.

([61]) Ibid.

([62]) Audition de M. Christian Grenz du 18 février 2020.

([63])  Conseil scientifique du comité de bassin, op. cit.

([64]) A. Baguet et N. Forray, op. cit., p. 22, n. 29.

([65]) Audition de M. Brice Huet du 19 novembre 2019.

([66])  La Méditerranée se réchauffe plus vite que le reste de la planète, Futura Sciences, 19 octobre 2019.

([67]) Rapport final du projet R2D2 2050, Risque, ressource en eau et gestion durable de la Durance en 2050, novembre 2014.

([68]) Ibid., p. 11 et p. 17 et s.

([69]) Audition de la Société du Canal de Provence du 11 février 2020.

([70]) Rapport final du projet R2D2 2050, op. cit.

([71]) Audition de la Compagnie nationale du Rhône du 5 mars 2020.

([72]) Audition de la Société du Canal de Provence du 11 février 2020.

([73]) Audition de MM. Christian Grenz et Sylvain Rigaud du 18 février 2020.

([74]) Plan de bassin d’adaptation au changement climatique dans le domaine de l’eau. Bassin Rhône-Méditerranée, mai 2014. Document rédigé par un groupe technique composé de la délégation du bassin Rhône-Méditerranée, de l’Agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse et des conseils régionaux de Bourgogne, Languedoc-Roussillon, Franche-Comté, Rhône-Alpes, Provence-Alpes-Côte d’Azur.

([75]) La concession dont bénéficie EDF a une durée de 75 ans et se conclut en 2051.

([76]) UICN, Thèmes du Congrès mondial de la nature de l’UICN 2020.

([77]) Classé au patrimoine mondial depuis 1997.

([78]) Cette liste est disponible à l’adresse suivante : https://whc.unesco.org/fr/listesindicatives/state=fr. Sur la notion de liste indicative et la procédure de classement, voir § 62 et s. de UNESCO, Orientations devant guider la mise en œuvre de la Convention du patrimoine mondial, 10 juillet 2019.

([79]) A. Baguet et N. Forray, op. cit., p. 55.

([80]) Cf. annexe, synthèse de la consultation publique.

([81]) Pour un total de 45 000 suffrages exprimés, soit 60 % de la population concernée. Cf. M. Laurenceau et Fr. Molle, op. cit.

([82]) Source : EDF.

([83])Audition du 10 décembre 2019.

([84])  Note d’EDF en réponse au questionnaire de la mission d’information.

([85]) Audition de MM. Christian Grenz et Sylvain Rigaud du 18 février 2020.

([86]) Éléments transmis par M. S. Rigaud en réponse à un questionnaire de la mission d’information.

([87]) Éléments transmis par M. S. Rigaud en réponse à un questionnaire de la mission d’information.

([88]) Éléments transmis par M. S. Rigaud en réponse à un questionnaire de la mission d’information.

([89]) CJCE, 7 octobre 2004, Commission contre France, n° C-239/03. Pour le détail de cette décision, voir supra, première partie.

([90]) Rencontre avec des représentants de la Commission européenne du 13 février 2020.

([91]) A. Baguet et N. Forray, op. cit., p. 53.

([92]) Audition de la Compagnie nationale du Rhône du 5 mars 2020. On note d’ailleurs que les événements extrêmes sur la Durance sont de plus en plus fréquents.

([93]) Audition du 3 mars 2020.

([94]) Audition du 11 février 2020.

([95]) Rapport final du projet R2D2 2050, op. cit., p. 19.

([96]) Rapport final du projet R2D2 2050, op. cit., p. 212.

([97]) Audition du 11 février 2020.

([98]) Source : Société du Canal de Provence, audition du 11 février 2020.

([99]) Source : Société du Canal de Provence, audition du 11 février 2020.

([100]) Source : Société du Canal de Provence, audition du 11 février 2020.

([101]) Source : Société du Canal de Provence, audition du 11 février 2020.

([102]) A. Baguet et N. Forray, op. cit., p. 53.

([103]) EDF et GIPREB, Évolutions et perspectives du point de vue de la DCE, 2016, p. 101.

([104]) GIPREB, Visions d’étang, n° 8, décembre 2018

([105])  Cf. synthèse de la consultation en annexe.

([106]) A. Baguet et N. Forray, op. cit., p. 12.

([107]) Cf. synthèse de la consultation publique en annexe.

([108]) IFREMER, Étang de Berre. Bilan des connaissances écologiques, 1985, p. 33.

([109]) Sur ces éléments, voir ibid., p. 33 et s.

([110]) Ibid., p. 37.

([111]) Ibid., p. 39.

([112]) EDF estime que le taux de sédimentation dans l’étang est aujourd’hui équivalent à celui des années 1930, même si la nature des sédiments a changé.

([113]) A. Baguet et N. Forray, op. cit., p. 51.

([114]) Note d’EDF en réponse au questionnaire de la mission d’information.

([115]) Pour une description du projet envisagé, voir L’Étang Nouveau, Contribution de l’association « L’Étang Nouveau » au débat public sur la révision de la programmation pluriannuelle de l’énergie prévu par la loi de transition énergétique, 2018.

([116]) L’Étang Nouveau souligne toutefois que la construction d’un tel bassin était prévue à l’ouverture de la centrale de Saint-Chamas, en 1966, à des fins de décantation

([117]) Le projet était notamment inscrit à l’ordre du jour du comité interministériel d’aménagement et de développement du territoire de 2001.

([118]) Étude réalisée par SCP-Id en 2004 pour le compte du GIPREB.

([119]) B. Abrial et D. Hucher, op. cit., et A. Baguet et N. Forray, op. cit.

([120]) Selon A. Baguet et N. Forray, op. cit., p. 35.

([121]) Pour le détail, cf. B. Abrial et D. Hucher, op. cit., p. 19 et s.

([122]) B. Abrial et D. Hucher, op. cit., p. 16.

([123]) B. Abrial et D. Hucher, op. cit., p. 34.

([124]) Courrier du président du GIPREB à la ministre chargée de l’environnement du 28 mars 2017.

([125]) A. Baguet et N. Forray, op. cit., p. 37.

([126]) Piste avancée par A. Baguet et N. Forray, op. cit., p. 47.

([127]) Cf. synthèse de la consultation en annexe.

([128]) Table-ronde avec les associations, 2 décembre 2019.

([129]) Audition du Conservatoire du littoral du 10 décembre 2019.

([130]) France Nature Environnement PACA, Restauration de l’étang de Berre, de l’étang de Bolmon et du canal du Rove, février 2018.

([131]) Audition de MM. Christian Grenz et Sylvain Rigaud du 18 février 2020.

([132])  Les éléments factuels de la présente sous-partie proviennent d’une note adressée à la mission d’information par l’agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse.

([133]) L’article 5 de la directive évoque « un traitement plus rigoureux » des eaux urbaines résiduelles dans ces zones.

([134]) A. Baguet et N. Forray, op. cit., p. 25.

([135]) GIPREB, note en réponse au questionnaire du 20 février 2020.

([136]) Ne seront pas traités ici les rejets de la centrale de Saint-Chamas précédemment évoqués.

([137]) Note fournie par l’agence de l’eau.

([138]) GIPREB, Carnet d’études sur les apports directs du bassin versant de l’étang de Berre, avril 2017, p. 2.

([139]) M. Laurent Roy, directeur général de l’agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse, table ronde du 25 février 2020.

([140]) Note transmise à la mission d’information par l’agence de l’eau.

([141]) Audition de Mme Aline Baguet et de M. Nicolas Forray du 10 décembre 2019.

([142]) Audition de l’IFREMER du 3 mars 2020.

([143]) Audition du 3 mars 2020.

([144]) Note du GIPREB en réponse au questionnaire du 20 février 2020. Les chiffres communiqués par le CEVA lors de son audition du 18 février 2020 sont un peu différents mais concordants. Entre 1 000 et 3 300 tonnes d’algues seraient immergées dans l’étang et les échouages annuels seraient de 1 000 tonnes par an.

([145]) Audition du 18 février 2020.

([146]) Marseille : Les algues vertes de l’Étang de Berre ont-elles tué un chien ?, 20 minutes, 19 juin 2019.

([147]) A. Baguet et N. Forray, op. cit., p. 22. Cf. supra.

([148]) Ils ont été présentés à la mission d’information au cours de la visite du LNHE du 4 février 2020.

([149]) M. Laurent Roy, directeur général de l’agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse, table ronde du 25 février 2020.

([150]) Audition de l’agence de l’eau du 14 janvier 2020.

([151]) Audition du Conservatoire du littoral du 10 décembre 2019.

([152]) Les cartographies liées à ces sites peuvent être consultées sur le site de l’Inventaire national du patrimoine naturel.

([153]) Art. 1 des statuts du GIPREB. La composition du GIPREB doit être renouvelée à la suite des élections municipales mais les instances représentées figurant dans les statuts, elles ne seront pas modifiées.

([154]) Rencontre du 2 décembre 2019 avec M. Serge Andreoni, ancien président du GIPREB.

([155]) B. Abrial et D. Hucher, op. cit., p. 25.

([156]) Art. L. 2111-10 du code général de la propriété des personnes publiques.

([157]) Arrêté du 16 février 2012. Ce domaine public comprend également des dépendances : darse de Marignane, chemin de halage, port des Trois Frères, pont ferroviaire des Florides et pont du Jaï.

([158]) Sur ces aspects, voir B. Abrial et D. Hucher, op. cit., p. 25 et s.

([159]) A. Baguet et N. Forray, op. cit., p. 5 et p. 43.

([160]) A. Baguet et N. Forray, op. cit., p. 5 et p. 43.

([161]) Audition de M. Didier Réault, président du Parc national des Calanques, du 3 mars 2020.

([162]) Art. L. 212-3 du code de l’environnement. Au sein du SDAGE, l’étang de Berre est aujourd’hui identifié en tant que masse d’eau distincte (LP_16_03).

([163]) Art. L. 212-4 du code de l’environnement.

([164]) 5° de l’article R. 212-46 du code de l’environnement

([165]) Art. R. 212-45 du code de l’environnement.

([166]) Annexe n° 4 du contrat de gestion intégré 2012-2017.

([167]) Audition de l’IFREMER du 3 mars 2020.

([168]) Pour la synthèse des résultats de cette consultation, voir annexe.

([169]) Art. L. 212-7 et L. 212-9 du code de l’environnement.

([170]) Art. R. 212-30 du code de l’environnement.

([171]) Voir le site https://www.dispositif-reponses.org/

([172]) Cf. supra, première partie.

([173]) Art. L. 213-9 et suivants du code de l’environnement.

([174]) Art. L. 213-9-2 du code de l’environnement.

([175]) Agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse, 11ème programme 2019-2024. Sauvons l’eau.

([176]) Audition du 14 janvier 2020.

([177]) Audition du 14 janvier 2020.

([178]) Audition du 25 février 2020.

([179]) Table ronde du 25 février 2020.

([180]) Pour la description de ces mesures, cf. supra.

([181]) Mme Frédérique Tuffnell et M. Jérôme Bignon, Terres d’eau, terres d’avenir. Faire de nos zones humides des territoires pionniers de la transition écologique, janvier 2019.

([182]) Règlement (UE) n° 1293/2013 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2013 relatif à l’établissement d’un programme pour l’environnement et l’action pour le climat (LIFE) et abrogeant le règlement (CE) n° 614/2007.

([183]) Art. 3 du même règlement.

([184]) Rencontre avec les services de la Commission européenne du 13 février 2020.