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N° 5121

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 23 février 2022.

 

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 145-7 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES

sur l’évaluation de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018
portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique
(dite « loi ELAN »)

ET PRÉSENTÉ PAR

M. Thibault BAZIN, Mme Christelle DUBOS,
M. Jean-Luc LAGLEIZE et M. Richard LIOGER,

Députés.

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  SOMMAIRE

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Pages

 

 

SYNTHÈSE DES TRAVAUX DE LA MISSION

INTroduction

A. Une loi ambitieuse qui a connu une période de mise en œuvre très bousculée

B. une bonne implication des pouvoirs publics dans la mise en œuvre et l’Évaluation de la loi

premiÈRE partie : Les dispositions relatives à l’urbanisme et À La construction

I. des outils pour simplifier et accÉLÉRER les projets d’amÉNagement, qui connaissent un succÈs mitigÉ

A. une boîte À outils encore peu ÉPROUVÉE

1. Les mécanismes partenariaux, après des débuts poussifs, connaissent un relatif essor

2. Le permis d’aménager multi-sites, un dispositif riche de possibilités récemment élargi et pérennisé

3. Permis d’innover et permis de faire, des bilans très contrastés

B. La simplification des outils existants connaît des RÉSULTATS mitigÉs

1. Trois évolutions afin d’accélérer le recours aux zones d’aménagement concerté

2. Les opérations de la Solideo, un exemple d’accélération réussie

C. un impact limitÉ sur les chiffres de la construction de logements

1. La modification des normes de construction entraîne des évolutions qui mettent certaines filières en difficulté

2. Les données de la construction ne montrent pas d’impact particulier, à ce jour, des dispositions adoptées

II. la refonte de l’urbanisme rÉglementaire connaÎt des succÈs mais est entravÉE par la succession des textes

A. la place du SCoT confortÉE puis mise en cause par l’instabilitÉ normative

1. La réforme du SCoT a permis une relative simplification de ses contenus

2. La rationalisation de la hiérarchie des normes bien accueillie malgré des impacts réduits

3. Des modifications du règlement de PLU dont l’impact à ce jour est difficilement mesurable

B. Certaines des dispositions littorales ONT ENGENDRÉ DES DIFFICULTÉS D’APPLICATION

1. La suppression du hameau nouveau, globalement bien accueillie, a suscité des difficultés ponctuelles mais importantes

2. La consécration du « SCoT intégrateur » des dispositions littorales, une disposition positive mais encore incertaine

C. des mesures de simplification qui connaissent un bilan en demi-teinte

1. La simplification et l’accélération des procédures d’urbanisme, un chantier encore en cours

2. Les évolutions apportées à la procédure de l’évaluation environnementale n’ont pas entièrement porté leurs fruits

III. la revitalisation du territoire, une politique volontariste et ambitieuse

A. le dÉPLOIEMENT des ORT A permis d’intensifier la dynamique de revitalisation des centres-bourgs

1. Un outil juridique utile aux effets positifs

2. Le Gouvernement a mené une politique financièrement volontariste d’accompagnement du déploiement des ORT

B. l’urbanisme commercial renforcÉ a Permis une meilleure planification territoriale

1. L’ORT ouvre la voie à un régime à la fois protecteur et assoupli pour les autorisations commerciales

2. L’encadrement et la planification renforcés des implantations commerciales a permis un urbanisme de meilleure qualité

seconde partie : Les dispositions relatives au logement

I. la restructuration des organismes de logement social : un bilan MITIGÉ

A. Un dispositif de consolidation volontariste

1. Le regroupement des bailleurs sociaux visait à répondre à des impératifs économiques

2. Le bilan en demi-teinte des mesures visant le regroupement des organismes

B. D’autres instruments ont permis aux bailleurs sociaux de se renforcer

1. L’extension de l’agrément d’organisme de foncier solidaire a suscité le doublement du nombre d’organismes

2. La vente HLM, un dispositif jusqu’ici peu sollicité

II. l’encadrement des loyers : une réponse pragmatique aux tensions en zones tendues

A. Une réponse pragmatique aux tensions sur le marché locatif

1. Un dispositif expérimental qui s’inscrit dans la continuité de tentatives passées

2. Des modalités d’application qui laissent la main à une mise en œuvre différenciée

B. des RÉsultats encore difficiles à APPRÉCIER

1. L’encadrement résulte d’une mise en œuvre encore récente

2. Le champ de l’expérimentation a été récemment étendu et rouvert à de nouveaux candidats

3. Un dispositif qui fait l’objet de retours contrastés

III. UNE fluidification partielle des rapports locatifs

A. la garantie visale : un mécanisme efficace mais insuffisamment connu

1. La montée en puissance progressive de la garantie Visale

2. Un dispositif encore insuffisamment connu et plébiscité

B. le bail mobilité : un dispositif à l’utilité douteuse

C. la lutte contre l’habitat indigne, des dispositifs renforcÉs

1. Le permis de louer et la lutte contre l’habitat indigne, instruments d’une protection des locataires vulnérables

2. Des dispositifs qui continuent à se déployer, mais dont l’efficacité apparaît incertaine

examen du rapport par la commission

Liste des personnes auditionnées

Liste des CONTRIBUTIONS ÉCRITES

ANNEXE I : COMPTES RENDUS des tables rondes menÉES par les rapporteurs

TABLE RONDE n° 1 : La restructuration du logement social

TABLE RONDE n° 2 : L’urbanisme OPÉRATIONNEL

TABLE RONDE n° 3 : Le droit de l’immobilier

TABLE RONDE n° 4 : l’urbanisme rÉglementaire

ANNEXE II : TABLEAU DES DISPOSITIONS de la loi n° 20181021 du 23 novembre 2018

ANNEXE III : Tableau des mesures réglementaires d’application de la loi n° 20181021 du 23 novembre 2018

ANNEXE IV : Tableau des mesures d’habilitation de la loi n° 20181021 du 23 novembre 2018


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   SYNTHÈSE DES TRAVAUX DE LA MISSION

La loi ELAN a participé, en 2018, de la volonté partagée, dans la législature nouvelle, d’imprimer un nouveau rythme au secteur de la construction et à la création de logements. Les dispositions très nombreuses du texte en matière d’urbanisme, en particulier en ses titres Ier et IV, ont visé à supprimer les freins à la construction et à l’aménagement et à encourager les acteurs divers à se réunir par des dispositifs conventionnels, afin d’augmenter la quantité de logements produits.

Plus de trois ans plus tard, à la fin de l’année 2021, la commission des affaires économiques a décidé de créer, en application de l’article 145-7 du Règlement de l’Assemblée nationale, une mission d’évaluation de la mise en œuvre et de l’impact de ces dispositions. Les quatre rapporteurs ont auditionné des acteurs des secteurs concernés et reçu de nombreuses contributions écrites pendant les mois de janvier et de février 2022, en s’efforçant de passer en revue les grandes dispositions du texte et d’en retenir les impacts principaux.

À l’occasion de la loi ELAN et dans une démarche empirique, les outils d’aménagement mis à la disposition des acteurs publics ont été amplifiés et multipliés afin de lever les obstacles administratifs et réglementaires à la réalisation des projets de transformation urbaine : d’où des dispositifs tels que le projet partenarial d’aménagement (PPA) et la grande opération d’urbanisme (GOU) [article 1].

Ces deux outils, qui visent à permettre, sur une opération, une simplification de la compétence avec un pilotage de l’intercommunalité, offrent la possibilité à l’État d’apporter son soutien, notamment financier, aux initiatives des collectivités en matière d’aménagement opérationnel en nouant des partenariats renforcés pour faciliter les programmes complexes qu’elles engagent. Après un accompagnement dynamique par l’État au cours des exercices 2020 et 2021, que vos rapporteurs saluent, on compte, au 31 décembre 2021, 20 contrats de PPA signés et 7 en cours d’élaboration, avec 2 GOU en cours.

L’expérimentation du permis d’innover a été prolongée et élargie [article 5]. Ce permis, qui est attaché au permis de construire, autorise le porteur de projet à déroger à toutes les normes en matière de construction, à condition de vérifier, par la production d’une étude d’impact, que les moyens qu’il met en place permettent néanmoins d’atteindre les objectifs de la norme à laquelle il déroge. S’il a connu des résultats décevants – seulement deux mises en application, les appels à manifestation d’intérêt réalisés dans le cadre de sa mise en œuvre ont témoigné d’un fort intérêt du secteur du bâtiment et de la construction pour des dispositifs de dérogation aux normes en vigueur, notamment constructives : normes incendie, normes des immeubles de grande hauteur, ventilation, acoustique et performance thermique du bâtiment.

Quant à la mise en œuvre du permis d’aménager multi-sites (PAMS), qui permet la réalisation d’une opération d’ensemble, concertée avec les élus locaux, afin de revitaliser les centres villes ou bourgs centres dont le foncier est nécessairement morcelé et discontinu, elle correspondait à un idée positive, d’après les retours, mais doit encore être renforcée, ce qui sera permis par le récent article 112 de la loi 3DS.

Dans la même optique de simplification et d’accélération des projets d’aménagement, la loi a visé à faciliter le recours aux zones d’aménagement concerté (ZAC) [article 9], opération d’aménagement qui, contrairement à l’opération de lotissement menée avec un permis d’aménager, résulte nécessairement d’une initiative publique. Il en a été ainsi de l’introduction de la possibilité de créer une ZAC en adoptant dans le plan local d’urbanisme une orientation d’aménagement et de programmation ; de la clarification de la portée du cahier des charges de cession de terrain (CCCT), document obligatoirement annexé aux actes de cession par l’aménageur des terrains situés dans le périmètre d’une ZAC ; et de l’exemption, pour les concessions d’aménagement qui ont lieu dans une ZAC, des dispositions de la loi MOP.

Au global, les données de la construction n’ont pas montré d’impact particulier des dispositions adoptées en matière d’aménagement. La production de logements n’a pas augmenté depuis l’adoption de la loi. Néanmoins, il est à noter, comme l’ont remarqué plusieurs personnes auditionnées, que les dispositions en matière d’urbanisme mettent du temps à trouver leur effet du fait de la durée très longue des opérations d’aménagement, dont il n’est pas rare qu’elles durent plus de cinq ans.

Les régimes d’urbanisme issus des différents documents territoriaux, et notamment des SCoT, ont été remaniés avec l’objectif de simplifier et d’accélérer les procédures. En effet, la loi ELAN a traduit une volonté forte de simplification et d’accélération : il a semblé nécessaire de s’attaquer aux facteurs de lenteur et de rigidité dans la conduite des projets. Parmi ces facteurs, la longueur des procédures d’élaboration des documents de planification et d’urbanisme occupe une place centrale dans les considérations des exécutifs locaux. Le Gouvernement a donc agi par ordonnance pour simplifier le régime du SCoT [article 46], du point de vue de son contenu et des règles d’opposabilité qui le gouvernent. Ces évolutions, mesurées, ont reçu un accueil globalement positif.

Le texte avait également été enrichi d’une section portant assouplissement du régime d’urbanisme des communes littorales [articles 42 à 45]. Il s’agissait de répondre à une demande croissante des acteurs locaux en facilitant, sans inviter d’excès, l’urbanisation en discontinuité des villages et agglomérations existants. Cette évolution est passée principalement par la suppression du hameau nouveau intégré à l’environnement (HNIE), catégorie permettant l’urbanisation nouvelle à condition qu’elle soit pensée globalement, au profit de la délimitation de secteurs déjà urbanisés dans le SCoT. Au global, les acteurs auditionnés ont émis des avis positifs mais réservés sur les évolutions enregistrées, tout en soulignant des difficultés d’application ponctuelles à l’échelle locale.

La plupart des acteurs ont appelé à aborder plus systématiquement le sujet de l’urbanisme littoral avec un texte entièrement consacré à ce sujet, considérant que le volet « résilience » de la loi Climat et résilience, qui y a été destiné, n’a pas suffi à résoudre toutes les problématiques qui se posent. En ce qui concerne globalement le rôle du SCoT en matière de loi Littoral, les avis sont plutôt que la rationalisation des normes qui a été opérée, si elle aurait pu aller plus loin, a renforcé la sécurité juridique des acteurs et notamment des élus locaux.

D’autres dispositions plus précises ont utilement permis un meilleur déploiement des énergies renouvelables dans les territoires insulaires, ou encore d’affiner le régime d’autorisation de l’implantation d’équipements économiques dans les espaces remarquables du littoral.

Concernant la fluidification et l’accélération de l’instruction des demandes d’urbanisme et des délais contentieux, il s’agit là d’un chantier difficile, encore en cours, qui connaît pour l’instant un bilan mitigé.

Si l’encadrement du nombre de pièces complémentaires au permis de construire exigibles [article 57] par les services municipaux a été salué, les acteurs déplorent de mauvaises habitudes administratives et un manque de volontarisme qui continuent de ralentir les projets.

C’est le cas aussi pour l’obligation, pour toutes les communes, de pouvoir recevoir en format dématérialisé [article 62] les demandes d’autorisation d’urbanisme et pour l’obligation, pour certaines d’entre elles, de les instruire de façon dématérialisée, entrée en vigueur au 1er janvier 2022. Ces évolutions bienvenues ne sont pas entièrement concrétisées, jusqu’à un quart des collectivités n’étant toujours pas en mesure d’assurer cette dématérialisation.

Pour combattre la dévitalisation des territoires urbains, la loi ELAN a créé des outils contractuels afin de faciliter une réponse globale dans le cadre de projets de réhabilitation des centres-villes associant l’ensemble des acteurs concernés. Une des principales créations de la loi, l’opération de revitalisation de territoire (ORT) [article 157], est un outil à la disposition des collectivités territoriales, qui doit permettre la mise en œuvre d’un projet de territoire, dans les domaines urbain, économique et social, ayant pour objectif de lutter contre la dévitalisation des centres-villes. Il s’agit d’un des rares dispositifs suscitant l’unanimité positive des acteurs, qui plébiscitent son élargissement, comme il a été porté à l’article 95 de la récente loi 3DS.

La loi ELAN avait également prévu des modifications importantes de l’urbanisme commercial, autorisant notamment la dispense d’autorisation d’exploitation commerciale (AEC) pour la réalisation d’un projet d’équipement commercial dans un secteur ORT. Cette dispense est accompagnée, d’autre part, de la possibilité pour le préfet de suspendre l’implantation d’un nouveau commerce à l’extérieur des secteurs d’intervention de l’ORT. La relative ineffectivité de ce moratoire a amené le resserrement des projets d’aménagement commercial à l’article 215 de la loi Climat et résilience.

Au demeurant, le tournant de la loi ELAN a permis une meilleure articulation de l’urbanisme commercial avec les autres enjeux de la revitalisation du territoire et un renforcement de la planification commerciale, comme en témoigne la nouvelle place accordée au document d’aménagement artisanal, commercial et logistique [article 169].

Dans ses titres II et III, qui concernaient au premier chef l’amélioration du logement et de l’habitat, la loi s’est fixée des objectifs ambitieux. Elle a d’abord porté haut un objectif de restructuration des organismes de logement social. En effet, partant du constat selon lequel la taille moyenne des bailleurs sociaux était relativement faible, le Gouvernement avait souhaité, en 2018, donner une nouvelle impulsion à la recomposition du tissu des opérateurs du secteur HLM.

Sur la base de ce constat d’un paysage du logement social très morcelé – on dénombrait ainsi, en 2017, encore 37 % d’organismes qui géraient moins de 1 500 logements – au regard d’une territorialisation accrue des politiques de l’habitat, l’étude d’impact considérait qu’une politique plus volontariste de consolidation des organismes de logement social présenterait au moins trois avantages : favoriser une meilleure allocation de l’investissement, organiser une mutualisation des risques, réaliser des économies d’échelle.

La loi prévoyait que tout bailleur social détenant moins de 12 000 logements locatifs sociaux devait, au 1er janvier 2021, justifier de son appartenance à un « groupe d’organismes de logement social » (GOLS) [article 81], qui regroupe des organismes gérant collectivement au moins 12 000 logements, et que tout organisme HLM qui gère moins de 1 500 logements, qui n’a pas construit au moins 500 logements pendant une période de dix ans, peut être dissous par l’autorité administrative, sauf s’il appartient à un groupe d’organismes de logement social. Deux modalités principales de regroupement étaient possibles, à savoir le groupe vertical d’organismes HLM ou sociétés d’économie mixte contrôlés directement ou indirectement par une même société, et le groupe horizontal sous forme de société de coordination, de société anonyme ou de société anonyme coopérative.

Les rapporteurs ont constaté qu’à la date du 22 septembre 2021, 245 organismes, soit 73 % du nombre total des obligés, remplissaient désormais leur obligation de regroupement et moins d’une trentaine d’organismes demeuraient sans aucun projet de regroupement identifié ou viable. En évaluant le résultat de ces évolutions, il apparaît qu’au moment de la promulgation de la loi, la France comptait 638 organismes de logement social, toutes catégories confondues. À la fin de 2021, ce nombre n’était plus que de 556 organismes, soit une diminution de 12,9 % en trois ans.

Les représentants des organismes du logement social rencontrés par vos rapporteurs ont dressé un bilan en demi-teinte des opérations de regroupement en cours. La Caisse de garantie du logement locatif social s’est vu confier, à compter de 2022, une mission d’observation des regroupements et des groupes HLM constitués. Une étude de l’Agence nationale de contrôle du logement social, portant sur les regroupements et leurs effets, est également attendue cette même année.

Autre réponse à la crise du logement, face aux tensions observées sur le marché locatif, la loi ELAN avait prévu, à titre expérimental, pour une durée de cinq ans, un encadrement des loyers à la main des intercommunalités volontaires dans les zones connaissant une tension locative forte [article 140].

Jusqu’à aujourd’hui, l’expérimentation de l’encadrement du niveau des loyers a concerné : Paris, à compter du 1er juillet 2019 ; Lille, à compter du 1er mars 2020 ; l’établissement public territorial Plaine Commune en Seine-Saint-Denis, à compter du 1er juin 2021 ; Lyon et Villeurbanne (Rhône), à compter du 1er novembre 2021 ; l’établissement public Est Ensemble en Seine-Saint-Denis, à compter du 1er décembre 2021 ; Montpellier et Bordeaux, à partir du début de l’année 2022.

Le délai de cinq ans étant insuffisant pour assurer son déploiement et mesurer son efficacité, le dispositif a été récemment prorogé de trois ans [article 85 de la loi 3DS]. Cette prolongation permettra de mener une évaluation avec le recul nécessaire à l’étude d’un dispositif dont les effets s’inscrivent nécessairement dans un temps long, eu égard notamment à la durée des baux.

L’ensemble des acteurs auditionnés par vos rapporteurs ont salué l’efficacité du dispositif Visale [article 154], qui facilite, pour les étudiants, l’obtention d’un garant. Dans le parc privé ou dans le parc social, en adoptant le point de vue des bailleurs ou celui des bénéficiaires, la solution a fait ses preuves et il faut interpréter les vagues successives d’élargissement des catégories éligibles au dispositif comme une marque de son succès.

En revanche, le bail mobilité [article 107], contrat de location de courte durée d’un logement meublé, visant à donner plus de flexibilité au bailleur et à faciliter l’accès au logement des étudiants et des personnes en mobilité professionnelle, a eu des retours décevants, la plupart des acteurs reconnaissant qu’il n’a pas encore trouvé son public.

Pour renforcer la lutte contre l’habitat indigne et les marchands de sommeil, la loi ELAN a retravaillé le dispositif du permis de louer [article 188], introduit par la loi ALUR et qui prévoyait que, dans les zones soumises à déclaration de mise en location, le bailleur doit déposer une déclaration de mise en location auprès de l’intercommunalité compétente, déclaration qui doit être renouvelée à chaque nouvelle mise en location. Elle a ainsi prévu que le dispositif ne s’applique pas aux logements des bailleurs sociaux ou conventionnés à l’Anah, et qu’il peut être délégué aux communes membres, ce qui permet de rapprocher sa gestion du terrain. Le déploiement du permis de louer sur le territoire national s’est fait de manière progressive. La mise en œuvre du permis de louer se heurte néanmoins, à ce jour, à divers freins, et reste également fortement conditionnée à l’adhésion des bailleurs.


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   INTroduction

En septembre 2017, après avoir dévoilé son plan « Logement d’abord », le Gouvernement présentait, concomitamment à la rentrée budgétaire, sa stratégie quinquennale en matière de logement. Partant du constat que la France consacrait plus de 40 milliards d’euros à la politique du logement et qu’elle comptait toujours 4 millions de mal-logés, cette stratégie prévoyait de « réduire la dépense publique associée à la politique du logement tout en améliorant ses résultats » et de mener une action selon trois axes :

 relancer la construction, par la simplification des normes de construction, la mise en place d’un régime fiscal plus favorable pour encourager la cession de terrains en zones tendues, l’augmentation de la production de logements intermédiaires et de logements très sociaux, le renforcement de l’encadrement des recours abusifs, la création d’un bail numérique, et la baisse des loyers ;

 permettre une offre adaptée aux besoins de chacun en parallèle de la politique du « Logement d’abord », par l’encouragement de l’accession à la propriété – élargissement du dispositif Pinel et du prêt à taux zéro, vente de logements sociaux aux locataires – et la construction de 80 000 logements pour les jeunes dans le programme « 60 + 20 », la réforme des aides au logement, le renforcement de la mobilité dans le parc social, la création d’un bail adapté aux jeunes, la facilitation de la colocation, et l’encadrement des loyers ;

 repenser la qualité urbaine et de l’habitat par la rénovation des logements énergivores, le doublement du montant du nouveau programme national de renouvellement urbain, et la généralisation des logements connectés.

Dans ce contexte, la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite « loi ELAN », a participé de la volonté partagée de donner une direction générale à la législature nouvelle en matière de logement. Elle a tout d’abord été le fruit d’une longue concertation. Après une consultation citoyenne numérique, lancée dès l’installation de la XVe législature, en juillet et août 2017, qui a recueilli plus de 2 500 contributions, la préparation du projet de loi a fait l’objet d’une étape qui se voulait novatrice : entre décembre 2017 et février 2018, une conférence de consensus réunissant députés, sénateurs, représentants du Gouvernement, élus locaux et acteurs économiques et associatifs du secteur du logement et de l’urbanisme avait permis à toutes les parties prenantes d’échanger sur l’avant-projet de loi rendu public par le Gouvernement.

A.   Une loi ambitieuse qui a connu une période de mise en œuvre très bousculée

Le ministre de la cohésion des territoires, M. Jacques Mézard, qui portait le texte avec son secrétaire d’État, M. Julien Denormandie, avait partagé sa volonté de « faire sauter les verrous » dans la chaîne de production des logements et d’actionner des leviers multiples afin d’en faciliter la construction tout en adaptant l’habitat aux nouveaux modes de vie, tant en matière d’accessibilité que de nouveaux modes d’occupation.

Le Gouvernement a présenté un projet de loi de 65 articles, divisé en quatre axes similaires à ceux de la stratégie préalablement annoncée :

– construire « plus, mieux et moins cher », dans l’optique de susciter un « choc d’offre » dans le logement, avec l’ambition de revoir ou de poursuivre, en fonction des mesures, l’héritage de la dernière grande loi sectorielle, la loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (dite « loi ALUR »);

– accompagner l’évolution du secteur du logement social et en particulier le regroupement des bailleurs sociaux, mouvement déjà entamé avec, notamment, les dispositions de la loi de 2 juillet 2003 relative à l’urbanisme et à l’habitat, ou encore la réforme, à partir de 2015, de la collecte de la participation des employeurs à l’effort de construction qui a abouti avec l’ordonnance du 20 octobre 2016 et la création du groupe Action Logement ;

– répondre aux besoins en logement de chacun, tout en favorisant la mixité sociale, déjà encouragée dans la précédente loi du secteur, la loi du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté (dite « loi LEC ») ;

– améliorer le cadre de vie, dans la lignée de la loi du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises, mais aussi du lancement du programme Action Cœur de ville annoncé par le Gouvernement en 2018.

Au cours de son examen parlementaire, le projet de loi a donné lieu à de vifs débats dans les deux commissions des affaires économiques de l’Assemblée nationale et du Sénat et en séance publique, concernant aussi bien le foncier que le logement social, les baux, la copropriété ou l’habitat indigne, ainsi que des pans entiers intégrés au cours de l’examen parlementaire, par exemple en matière d’urbanisation littorale ou de planification de l’urbanisme commercial, le Parlement ayant souhaité faire la part belle aux mesures destinées à faciliter les opérations d’aménagement, d’urbanisme et de construction.

Considérablement enrichi par les débats parlementaires au cours desquels 169 articles furent ajoutés, portant à 234 articles le nombre de dispositions de ce texte, et après un accord trouvé en commission mixte paritaire (CMP), le projet de loi ELAN fut définitivement adopté par le Parlement le 16 octobre 2018, soit un peu plus de six mois après son dépôt sur le bureau de l’Assemblée nationale.

Le Conseil constitutionnel ayant censuré 19 articles au motif qu’ils constituaient des cavaliers législatifs sans lien direct ou indirect avec les dispositions du projet de loi initial, la loi promulguée le 23 novembre 2018 compte finalement 215 articles. Ces articles, organisés en quatre titres, abordent des sujets très variés qui vont de la simplification de l’acte de construire et d’aménager à la restructuration du secteur du logement social, en passant par l’amélioration de la lutte contre les marchands de sommeil et la revitalisation des centres-villes.

Il faut souligner d’emblée la difficulté d’un exercice d’évaluation dans un contexte marqué par des événements qui ont affecté, voire bouleversé la mise en œuvre du texte. En premier lieu, le calendrier électoral, avec le premier tour des élections municipales le 15 mars 2020, a occasionné, de manière habituelle, un ralentissement des projets d’aménagement et de construction à partir de 2019, correspondant précisément au moment de l’entrée en vigueur des dispositions d’effet immédiat du texte.

Ensuite, la crise sanitaire due à la covid-19 a occasionné une grande instabilité dans le secteur, en donnant lieu à la suspension et au report de nombreux projets. L’impact sur tout le secteur du bâtiment de la crise sanitaire ainsi que des mesures de confinement qui ont été adoptées dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, a en effet été rapide et brutal. La filière s’est trouvée, dès le 17 mars 2020, confrontée à une crise majeure provoquée par la paralysie quasi-totale de toutes les opérations de construction. Cette situation a résulté notamment du fait de la mise à l’arrêt des chantiers, rendue nécessaire par l’impossibilité d’y assurer la sécurité sanitaire des travailleurs, et de la prorogation de l’instruction des autorisations d’urbanisme par les services publics compétents. Du 16 mars au 6 avril 2020, les activités de construction ont ainsi connu un taux d’arrêt situé autour de 90 %.

En dépit d’une reprise difficile, l’action volontariste des pouvoirs publics a éloigné le spectre d’un ralentissement durable de la filière, qui a regagné ses couleurs depuis 2021. Cette année a vu le retour de chiffres plus robustes en termes de permis de construire octroyés, et les mises en chantier progressent. Toutefois, le ralentissement observé doit compter dans le calendrier d’une évaluation qui a lieu au bout d’une échéance assez serrée.

B.   une bonne implication des pouvoirs publics dans la mise en œuvre et l’Évaluation de la loi

Il a appartenu, en fin de législature, aux quatre rapporteurs nommés par la commission des affaires économiques, de mener un travail d’évaluation de l’impact de cette loi, conformément à l’article 145-7, alinéa 3, du Règlement de l’Assemblée nationale, qui prévoit qu’une telle évaluation s’effectue à l’issue d’un délai de trois ans suivant l’entrée en vigueur de la loi.

Alors que certaines mesures de la loi ELAN sont entrées en vigueur dès le lendemain de la publication de la loi, d’autres mesures très nombreuses nécessitaient la publication de mesures réglementaires de la part du Gouvernement, sous la forme de décrets ou d’arrêtés, afin d’être pleinement applicables. Le présent rapport fait suite à un premier rapport dit « d’application de la loi », réalisé en application de l’article 145-7, alinéa 1, du Règlement de l’Assemblée nationale, qui avait pour objet de contrôler la bonne publication des décrets d’application nécessaires pour permettre la pleine entrée en vigueur de la loi, six mois après son adoption ([1]).

Quatre ans après que la conférence de consensus a réuni les acteurs concernés, les rapporteurs de la présente mission, M. Thibault Bazin, Mme Christelle Dubos, M. JeanLuc Lagleize et M. Richard Lioger, soit deux députés du groupe le plus nombreux, un député d’un groupe minoritaire et un député d’un groupe d’opposition, ont eu à cœur, en écoutant à nouveau les acteurs concernés, de dresser une évaluation honnête et circonstanciée de la loi, en soulignant les avancées qu’elle a rendu possibles, mais en soulevant aussi les sujets qui restent source de difficultés.

L’évaluation à trois ans est un exercice fondamental, même s’il est encore trop tôt pour saisir toute la portée d’une législation, surtout lorsqu’il s’agit d’une loi aussi fournie et transversale que la loi ELAN. À cet égard, les rapporteurs ont préconisé la mise en place d’une évaluation quinquennale systématique des textes normatifs adoptés dans le domaine de l’aménagement et de l’urbanisme, en s’inspirant notamment des dispositions adoptées par les parlementaires dans la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (dite « loi Climat et résilience) pour l’évaluation du régime de réduction de l’artificialisation des sols.

Néanmoins, cette évaluation à trois ans permet d’effectuer une évaluation des dispositions dont l’impact se ressent rapidement – comme par exemple, dans une certaine mesure, la vente HLM ou l’encadrement des loyers – en entendant les acteurs qui ont suivi leur mise en œuvre et qui ont été affectés. Elle permet d’autre part d’apprécier la bonne volonté du pouvoir réglementaire dans l’application des dispositions prises par le législateur, en vérifiant si les ordonnances prévues ont bien été édictées et publiées, dans le respect de l’esprit du législateur, et si les décrets d’application et autres dispositions d’ordre réglementaire ont été arrêtés dans une temporalité raisonnable.

La conduite de la mission elle-même fournit à ses rapporteurs l’occasion de voir à quel point le Gouvernement est impliqué dans sa mise en œuvre, a édicté les outils de suivi nécessaires et les communique avec réactivité, dans un esprit de de transparence et de disponibilité. À cet égard, vos rapporteurs saluent l’implication des services concernés, notamment ceux du ministère de la transition écologique, ainsi que les cabinets ministériels, en particulier celui de la ministre déléguée chargée du logement, ainsi que l’engagement et le volontarisme des différents acteurs publics sollicités par la mission ([2]) .

Du strict point de vue de l’application de la loi, les résultats sont très positifs, comme en témoignent les tableaux d’application qui figurent en annexe III et IV, démontrant un véritable engagement du Gouvernement à mettre en œuvre les décisions du législateur. 85 mesures réglementaires du niveau du décret en Conseil d’État ou du décret ont été prises, dont 67 au cours de l’année 2019. La quasi-totalité des mesures appelant des dispositions d’application ont donc été satisfaites.

La plupart des cas de non-application s’expliquent aisément. Parfois, l’absence d’une mesure réglementaire prévue ne signifie pas l’absence de mise en œuvre d’une disposition. Par exemple, une disposition renvoyant au décret se trouve en fait satisfaite par la rédaction actuelle du droit ([3]). D’autres dispositions peuvent finalement s’avérer immédiatement applicables sans avoir besoin du truchement de la disposition réglementaire ([4]). Parfois encore, des mesures prévues se voient privées d’effet par de nouvelles mesures prises dans des textes ultérieurs ([5]). Enfin, dans certains cas, assez rares, le pouvoir réglementaire a fortement tardé avant de prendre les dispositions nécessaires ([6]). Après avoir éliminé tous ces cas, qui justifient la non-publication d’une mesure réglementaire pourtant appelée par une disposition législative, seules un très faible nombre de dispositions ne sont pas appliquées

Par ailleurs, la loi ELAN contient 31 habilitations autorisant le Gouvernement à prendre des mesures relevant du domaine de la loi par ordonnances, dans des délais qui vont de six à vingt-quatre mois après la promulgation de la loi, certains d’entre eux ayant été prorogés en mars 2020 dans le contexte de la crise sanitaire. 25 de ces habilitations ont été suivies d’effet (cf. encadré suivant).

Ordonnances issues de la loi ELAN

En plus de ses très nombreuses dispositions dont le présent rapport s’efforce d’en évaluer le plus grand nombre (cf. annexe II), neuf ordonnances majeures ont été prises sur le fondement de la loi par le pouvoir réglementaire :

– les ordonnances nos 2020-744 et 2020-745 du 17 juin 2020, prises sur le fondement de l’article 46, qui ont porté une réforme majeure du schéma de cohérence territoriale (SCoT) et de la hiérarchie des normes en matière d’urbanisme (ces dispositions font l’objet de la section A du II de la première partie du présent rapport) ;

– l’ordonnance n° 2019-1170 du 13 novembre 2019, prise sur le fondement de l’article 50, a simplifié et clarifié le régime juridique des schémas d’aménagement régional (SAR) des territoires ultramarins ;

– l’ordonnance n° 2019-395, prise sur le fondement de l’article 65, a adapté le régime des contrats de construction de maisons individuelles (CCMI), bien que le champ de cette réforme ait été critiqué comme étant trop restreint par la Fédération française du bâtiment ;

– les ordonnances n° 2019-418 du 7 mai 2019 et nos 2019-453 et 2019-454 du 15 mai 2019, prises sur le fondement de l’article 88, ont apporté des évolutions conséquentes pour les bailleurs sociaux, en leur permettant de mettre en œuvre des expérimentations sur le niveau de loyer et de supplément de loyer afin de mieux prendre en compte les variations des capacités financières des locataires du parc social ou encore en clarifiant et précisant le régime juridique de la vente de logements HLM (cf. la section B du I de la deuxième partie du présent rapport) ;

– l’ordonnance n° 2020-1144 du 16 septembre 2020, prise sur le fondement de l’article 198, a mis en œuvre une vaste réforme de simplification et de rationalisation des polices administratives de l’habitat indigne, en harmonisant notamment les régimes des codes de la santé publique et de la construction et de l’habitation, et en rendant plus lisible le régime des polices qui en découle ;

– l’ordonnance n° 2019-1101 du 30 octobre 2019, prise sur le fondement du II de l’article 215, a modernisé les règles de l’organisation et de la gouvernance de la copropriété des immeubles bâtis et clarifié les droits et obligations respectives des copropriétaires, du syndicat de copropriétaires, du conseil syndical et du syndic.

En revanche, deux ordonnances n’ont pas été prises et le délai de leur publication a expiré en dépit d’une prorogation en mars 2020 :

– le I de l’article 215 habilitait le Gouvernement à adopter la partie législative d’un code relatif à la copropriété des immeubles bâtis afin de regrouper et organiser l’ensemble des règles régissant le droit de la copropriété, notamment celles issues de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis. Plusieurs acteurs ont regretté vivement ce rendez-vous manqué, la Fédération nationale de l’immobilier appelant par exemple à « aboutir à une véritable codification du droit de la copropriété » ;

– le I de l’article 217, participant du volet « numérique » de la loi, habilitait le Gouvernement à prendre des dispositions tendant à définir un régime d’agrément des prestataires assistant les propriétaires et les locataires dans l’établissement d'un bail d’habitation à l’aide d’outils numériques et à améliorer la connaissance des données relatives à ces contrats.

Les rapporteurs ont souhaité centrer leurs travaux autour de quatre journées thématiques portant sur les axes de travaux majeurs de la loi examinée. Il s’agissait de réunir l’ensemble des acteurs concernés par chaque pan de la législation, tout en s’entretenant par ailleurs ou en sollicitant par écrit les contributions des personnes qui n’ont pas pu participer. Ces tables rondes, qui ont vu des échanges francs et ouverts, ont été très fructueuses et leur compte rendu a été transcrit à la fin du présent rapport (cf. annexe I). Ces travaux thématiques ont porté en priorité sur les volets suivants :

– une table ronde réunissant l’ensemble des fédérations des organismes de logement social a abordé la restructuration du secteur – dynamique des fusions-absorptions, prises de participation – ainsi que les nouvelles compétences qui ont été confiées aux organismes par la loi, l’évolution des modalités de leur gouvernance, les possibilités offertes par l’ouverture de l’agrément comme organisme de foncier solidaire (OFS), l’accélération de la dynamique de vente des logements HLM avec la mise en place de l’opérateur national de vente, ou encore, du point de vue des attributions, la mise en œuvre du système de la cotation de la demande de logements sociaux et la gestion en flux des contingents de logements sociaux ;

– une table ronde avec divers représentants du bâtiment et de l’aménagement a examiné les évolutions apportées en matière de construction, de production de logements, d’aménagement et d’urbanisme opérationnel, notamment l’impact de la simplification et de l’accélération des demandes de permis de construire qui constituaient un objectif de la loi, les évolutions portées au régime des zones d’aménagement concerté, la simplification de l’étude d’impact environnemental, le déploiement de nouveaux outils comme les projets partenariaux d’aménagement, les grandes opérations d’urbanisme, et les permis d’aménager multi-sites ;

– une journée destinée à l’audition des représentants des associations de locataires, de propriétaires et aux professionnels de l’immobilier a vu des discussions sur les principales dispositions immobilières du texte, notamment la mise en œuvre et les résultats de l’encadrement des loyers, l’évolution des rapports locatifs avec les dispositions concernant le logement des jeunes, le bail mobilité, logement des étudiants, la garantie Visale, ou encore l’encadrement de la location des meublés de tourisme, ainsi que travaux sur les instruments mis en œuvre dans le cadre du permis de louer et de la lutte contre l’habitat indigne ;

– enfin, une table ronde des élus locaux a été consacrée à la refonte et à la rationalisation des règles d’urbanisme, avec la rationalisation du schéma de cohérence territoriale et les diverses évolutions apportées en matière de consommation d’espaces naturels ou d’exemptions pour les activités agricoles, à la réforme de la loi Littoral, ainsi qu’à la mise en œuvre des opérations de revitalisation de territoire (ORT) et leur impact sur l’urbanisme commercial.

Ces tables rondes ainsi que les autres travaux menés par la mission ont permis la mise en commun et la discussion d’une grande quantité de retours et d’impressions quant à l’impact de la loi, que le présent rapport se propose de représenter de manière honnête dans leur diversité. Il s’en est dégagé un tableau riche et dense des différents volets du texte, que le présent rapport s’efforce de restituer.

 

 


— 1 —

   premiÈRE partie :
Les dispositions relatives à l’urbanisme et
À La construction

Les dispositions très nombreuses du texte en matière d’urbanisme, en particulier en ses titres Ier et IV, ont participé d’une volonté de supprimer les freins à la construction et à l’aménagement et d’encourager les acteurs divers à se réunir par l’intermédiaire de dispositifs conventionnels, afin d’augmenter la quantité de logements produits :

– les outils d’aménagement mis à la disposition des acteurs publics ont été amplifiés et multipliés afin de lever les obstacles administratifs et réglementaires à la réalisation des projets de transformation urbaine (I) ;

– les régimes d’urbanisme issus des différents documents territoriaux, et notamment des SCoT, ont été remaniés avec l’objectif de simplifier et d’accélérer les procédures (II) ;

– pour combattre la dévitalisation des territoires urbains, des outils contractuels ont été créés afin de faciliter une réponse globale dans le cadre de projets de réhabilitation des centres-villes associant l’ensemble des acteurs concernés (III).

I.   des outils pour simplifier et accÉLÉRER les projets d’amÉNagement, qui connaissent un succÈs mitigÉ

Lors de l’élaboration de la loi ELAN, le Gouvernement et le législateur ont cherché à s’inscrire résolument dans une démarche empirique et « de terrain », proposant une « gamme d’outils » à la disposition des professionnels de l’aménagement, de la construction et de l’immobilier. Ainsi, dans le domaine de l’urbanisme, pour atteindre l’objectif ambitieux de « construire plus, mieux et moins cher », ont-ils proposé des dispositifs tels que le projet partenarial d’aménagement (PPA) et la grande opération d’urbanisme (GOU), un élargissement du permis d’innover expérimental ou la mise en œuvre, sur un périmètre restreint, du permis d’aménager multi-sites (PAMS).

Dans la plupart des cas, ces outils semblent avoir eu des effets à ce jour limités, ce qui n’est pas difficile à comprendre au regard des circonstances particulières qui ont affecté les deux dernières années. Pour certains outils, il s’agissait d’élargissements – eux-mêmes souvent revus de nouveau entre-temps, de manière incrémentale, dans les textes intervenus depuis – de dispositifs existant dans un cadre très restreint pour englober d’autres périmètres. Cette approche très progressive, si elle a pu améliorer les résultats de certains dispositifs, ne contribue pas à la stabilité et à l’intelligibilité de la norme.

A.   une boîte À outils encore peu ÉPROUVÉE

1.   Les mécanismes partenariaux, après des débuts poussifs, connaissent un relatif essor

Le projet partenarial d’aménagement (PPA) et la grande opération d’urbanisme (GOU), outils emblématiques créés à l’article 1er de la loi ELAN, y participent de l’accent mis sur les grands projets d’aménagement, à partir de l’idée selon laquelle la gamme d’outils existants ne permettait pas de répondre aux besoins de souplesse et de « coconstruction » exprimés par les acteurs de l’aménagement pour mener de grands projets urbains, dans une époque marquée par une réticence de plus en plus prononcée pour de telles opérations.

Les outils préexistants pour impulser des grandes opérations d’aménagement

L’opération d’intérêt national (OIN), qui existe depuis la loi du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement (ENL) et permet, sur décret en Conseil d’État, de transférer à l’État la compétence de délivrance d’autorisations d’urbanisme sur des zones à enjeux nationaux particulièrement forts, le préfet pouvant également y créer des zones d’aménagement concerté (ZAC), est considérée comme trop centralisatrice, bien que l’infléchissement permis avec la signature, à partir de 2015, de contrats d’intérêt national ait permis de moduler cette caractéristique. Toutefois, la qualification d’OIN n’est pas le résultat d’une initiative locale, et le transfert de compétences à l’État n’incite pas à l’association étroite des collectivités aux projets.

Le projet d’intérêt majeur (PIM), créé par la loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR), permet à l’État, aux communes et aux EPCI de contractualiser les modalités de financement et de réalisation d’opérations d’aménagement d’ampleur, en y associant facultativement d’autres collectivités ou établissements publics. Aucun PIM n’a été conclu, notamment du fait d’une procédure de consultation et d’enquête publique complexe, d’un encadrement strict du contenu du PIM, ainsi que d’un régime dérogatoire peu incitatif.

Ces deux outils ouvrent la possibilité à l’État d’apporter son soutien, notamment financier, aux initiatives des collectivités en matière d’aménagement opérationnel, sans prendre l’initiative de l’opération, quand les collectivités compétentes sont en capacité de le faire. Ces outils partenariaux auraient vocation à devenir la forme par défaut de l’appui de l’État sur les projets locaux. Dès lors, une opération d’aménagement ne sera plus qualifiée d’intérêt national (OIN) à moins de porter sur un projet d’intérêt majeur à l’échelle nationale.

À compter de 2018, le Gouvernement a en effet souhaité soutenir plus activement l’urbanisme de projet en nouant des partenariats renforcés pour faciliter les programmes d’aménagement complexes engagés par les collectivités territoriales. Il s’agit de faciliter la réalisation de grandes opérations permettant de produire plusieurs milliers de logements, d’accueillir des activités, des commerces, et de construire des équipements publics, en dépassant l’alternative entre l’intervention seule d’une collectivité, d’une part, et la création d’une opération d’intérêt national (OIN), qui permet à l’État de reprendre la compétence d’urbanisme, d’autre part. Le PPA et la GOU ont donc leur place en tant que solutions intermédiaires préférables, qui ont vocation à remplacer la précédente tentative, qui date de 2014, le projet d’intérêt majeur (voir encadré précédent).

Le projet partenarial d’aménagement

Le PPA est un outil contractuel établi entre l’État, d’une part, et une ou plusieurs communes ou intercommunalités (établissements publics de coopération intercommunale, établissements publics territoriaux) ainsi que leurs établissements publics (sociétés d’économie mixte, sociétés publiques locales), d’autre part. Par la convention de PPA, l’État et les collectivités et établissements signataires s’engagent réciproquement sur les aspects opérationnels et financiers d’une opération d’aménagement.

L’initiative de conclure une convention appartient à l’intercommunalité ou à l’État. Par la convention de PPA, l’État et les collectivités et établissements signataires s’engagent réciproquement sur les aspects opérationnels et financiers d’une opération d’aménagement.

Selon les données transmises par la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages, les premiers projets partenariaux d’aménagement été signés dès la fin de l’année 2019 et pendant l’année 2020. Afin d’identifier une première série de projets, une circulaire a été adressée aux préfets dès le 4 février 2019, permettant de lancer les discussions sur une première vague de contrats. À ce jour, 12 PPA ont été signés, et une quinzaine sont en cours d’élaboration.

Après un ralentissement du rythme de conclusion des PPA du fait de la crise sanitaire et du report des élections municipales, le ministère de la transition écologique a adressé en juillet 2020 une instruction aux préfets de région et de département pour qu’ils identifient de nouveaux projets susceptibles de faire l’objet d’un PPA, en privilégiant trois thématiques prioritaires :

– la sobriété foncière, en application de l’impulsion imprimée par le législateur à la réduction de l’artificialisation des sols par les objectifs de l’article 192 à 194 de la loi Climat et résilience ;

– la vitalité territoriale, de façon complémentaire avec les outils de revitalisation des territoires ruraux, notamment les opérations de revitalisation de territoire (ORT, voir III) ;

– la résilience des espaces urbanisés, notamment pour la gestion du recul du trait de côte, conformément aux orientations du chapitre V du titre IV de la loi Climat et résilience. À cette occasion, plus de 70 projets ont été proposés dans une trentaine de départements, ce qui illustre l’intérêt que portent les collectivités au dispositif. Cette adaptation du dispositif pour traiter une problématique ascendante témoigne d’un usage ingénieux des possibilités qu’il offre et d’une bonne capacité d’innovation de la part de l’État.

Dans ce cadre, plus de 75 projets ont été identifiés, marquant une accélération sensible du programme. En comparaison avec la première génération de PPA, les territoires identifiés sont moins métropolitains. Parmi les projets pertinents, la direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature s’est engagée dans un accompagnement « sur mesure » d’une quinzaine de projets supplémentaires, particulièrement complexes, avec l’appui du centre de ressources national assuré par Grand Paris Aménagement. Selon cet établissement, dont vos rapporteurs ont auditionné le directeur général, le PPA constitue « un outil qui permet véritablement une accélération des projets, car il n’a pas été conçu comme une labellisation dont les parties pourraient se prévaloir, mais comme le moyen de mettre autour de la table l’ensemble des parties concernées par une problématique urbaine. Cette façon de procéder permet de trouver des solutions opérationnelles et de fonder des engagements réciproques ».

L’État a accompagné cette dynamique par des dispositifs fiscaux adoptés dans le cadre de la loi du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 ainsi que par la contractualisation d’une enveloppe de subvention de 14 millions d’euros par an dans le cadre des contrats de plan État-région.

C’est ainsi qu’au 31 décembre 2021, on compte, selon la même direction, 20 contrats de PPA signés, 7 en cours d’élaboration, dont 5 susceptibles d’être signés en 2022, et une dizaine en phase d’émergence. Parmi les 20 PPA signés, 2 font l’objet d’une GOU – il s’agit du PPA du centre-ville de Marseille, adopté en juin 2019 (voir encadré), et de celui de Charenton, signé le 16 mars 2021. Pour les projets en cours d’élaboration, des GOU sont envisagées, mais pour cela, la signature du PPA est un préalable. En parallèle de ces projets identifiés, d’autres territoires interrogent régulièrement les administrations centrales et déconcentrées pour prendre connaissance du dispositif et voir dans quelle mesure celui-ci serait le plus pertinent à mobiliser.

La signature d’un contrat de PPA permet de déployer un certain nombre de prérogatives et d’outils spécifiques, destinés à simplifier et accélérer la conduite des actions d’aménagement et de construction. Parmi eux, si la convention de PPA en a expressément prévu la possibilité, la GOU ([7]), dispositif d’aménagement dérogatoire au droit commun, permet de transférer les compétences pertinentes, notamment la délivrance des autorisations d’urbanisme, à un détenteur unique, l’intercommunalité chargée du projet, de manière à améliorer et fluidifier le pilotage des projets et la coordination des acteurs.

Le PPA sert donc comme support pour prévoir et expliciter les modalités de mise en œuvre de la GOU, qui ne sont pas définies dans la loi. Dans tous les cas, néanmoins, la GOU permet, par la mise en œuvre de certaines dispositions dérogatoires (voir encadré), d’adapter ponctuellement le régime juridique de l’urbanisme afin de mener à bien des projets complexes tout en en maîtrisant la qualité urbaine et environnementale.

Dérogations permises dans le cadre de la grande opération d’urbanisme (GOU)

Une fois la GOU conclue, des dérogations au droit de l’urbanisme et de la construction sont mises en place en son sein :

 l’autorité en matière d’octroi des autorisations d’urbanisme est mutualisée au niveau du président de la collectivité territoriale ou du groupement à l’initiative de la GOU ;

– l’autorité compétente en matière d’autorisations d’urbanisme devient compétente pour la réalisation et la gestion d’équipements publics relevant habituellement de la compétence de la commune d’implantation, lorsque ces équipements sont nécessaires à la GOU et identifiés dans son acte de qualification ;

– cette même autorité est seule compétente pour conclure des conventions de projet urbain partenarial (PUP) et délimiter leur périmètre ;

– la création et la réalisation des opérations d’aménagement sont réputées, selon le cas, d’intérêt communautaire ou d’intérêt métropolitain ;

– il devient possible d’utiliser le permis d’innover (voir plus loin), autorisant les maîtres d’ouvrage ou locateurs d’ouvrage à déroger aux règles applicables à leurs projets dès lors que leur sont substitués des résultats à atteindre similaires aux objectifs sous-jacents aux règles auxquelles il est dérogé ;

– si la délibération de qualification de la GOU le décide, elle peut délimiter sur tout ou partie du périmètre de l’opération une zone d’aménagement différé (ZAD). Dans ce cadre, le droit de préemption revient au titulaire de la GOU, qui peut l’exercer pendant une période prolongée à dix ans (au lieu de six ans), renouvelable une fois ;

– un établissement public d’aménagement (EPA) peut, en dehors de son périmètre de compétence, réaliser des opérations d’aménagement ainsi que des acquisitions foncières et immobilières nécessaires, et créer des sociétés publiques locales d’aménagement d’intérêt national (SPLA-IN) ou des sociétés d’économie mixte d’aménagement à opération unique (SEMOP) et acquérir ou céder des participations dans ces sociétés ([8]) ;

– les collectivités concernées peuvent recourir à la procédure intégrée d’élaboration des documents d’urbanisme ([9]) (voir encadré plus loin) ;

– les droits de préemption urbain et sur les fonds de commerce sont transférés à l’autorité signataire du PPA ;

– le permis d’aménager multi-sites (voir le 2 du présent A) peut être mis en œuvre sur tout le territoire de la GOU ([10]) ;

– l’extension du périmètre d’un établissement public foncier d’État (EPF-E) par une procédure dérogatoire simplifiée lorsqu’elle se fait dans le cadre d’une GOU ;

– la collectivité compétente en matière de délivrance des autorisations d’urbanisme peut déroger au règlement de plan local d’urbanisme dans les conditions définies à l’article L. 152-6 du code de l’urbanisme.

Selon la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages, compte tenu du temps nécessaire à une opération d’aménagement – une dizaine d’années en moyenne – le fait qu’il n’existe, à ce jour, que deux grandes opérations d’urbanisme, n’est pas surprenant en soi. Ces opérations seront amenées à se développer quand les secteurs engagés dans des PPA entreront en phase opérationnelle. Si, dans certains cas, le transfert de certaines prérogatives à l’intercommunalité apparaît comme un frein, ce n’est pas nécessairement le cas pour tous les territoires. Dans certaines agglomérations et métropoles, les services sont mutualisés et le transfert est donc déjà effectué et l’intérêt de ce transfert est bien identifié.

En effet, il a été estimé que, là où le soutien des moyens de l’État peut être pertinent dans le cadre d’une opération très complexe, l’échelle décisionnaire pertinente pour la planification et l’aménagement semble celle de l’intercommunalité. À la différence de l’opération d’intérêt national, qui voit l’État prendre la main sur l’essentiel des compétences qui appartiennent en temps normal à la collectivité, le PPA permet aux intercommunalités signataires de préserver les compétences d’aménageur et la compétence pour délivrer les autorisations du droit des sols.

Ainsi, la GOU voit un vrai partage des compétences, les pouvoirs de l’intercommunalité à l’initiative du projet se trouvant nettement renforcés des compétences dérogatoires précitées, mais sans pour autant priver les communes et intercommunalités concernées de l’entièreté de leurs compétences d’urbanisme. La GOU intervient uniquement sur la répartition des compétences entre le maire et le président de l’EPCI. Le texte n’a pas d’effet sur la répartition des compétences entre l’autorité de l’État – le maire au nom de l’État ou le préfet – et l’autorité décentralisée – le maire au nom de la commune ou le président de l’EPCI. En effet, la logique promue dans l’inscription de ces contrats est de se développer au sein d’un territoire n’ayant pas d’OIN, mais dont le projet est structurant. L’association de l’État, qui intervient par complément, se fait principalement par un accompagnement en ingénierie et en apportant des financements pour créer un effet levier qui doit permettre la réalisation effective de l’opération.

Le législateur a veillé au cours des deux dernières années à favoriser le déploiement du dispositif en permettant par exemple le renforcement de son rôle pour la requalification des zones d’activité économique. En effet, bien que peu usité, l’outil de la GOU a été enrichi à deux reprises depuis sa création dans la loi ELAN, le législateur cherchant à le rendre plus attractif par :

– la fixation, au moment de la délibération de création de la GOU, prise par l’intercommunalité, d’une densité minimale de constructions en son sein, qui pourra être déclinée par secteur au sein de son périmètre (article L. 312-4 du code de l’urbanisme), afin de promouvoir la sobriété foncière dans les opérations dans lesquelles l’État est un partenaire d’aménagement (article 208 de la loi n° 2021‑1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite « loi Climat et résilience ») ;

– le recours, au sein du périmètre de la GOU, aux dérogations au règlement de plan local d’urbanisme ouvertes à l’article L. 152-6 du code de l’urbanisme (article 209 de la loi Climat et résilience) ;

– la création de facultés dérogatoires de mise en demeure et d’expropriation en vue de la réhabilitation de zones d’activité économique (article 220 de la loi Climat et résilience) ;

– le transfert, au sein du périmètre de la GOU, et sur accord explicite du maire, de l’exercice du droit de préemption urbain et du droit de préemption sur les fonds artisanaux, les fonds de commerce, les baux commerciaux et les terrains faisant l’objet de projets d’aménagement commercial, à l’EPCI ou à la collectivité spéciale signataire du PPA, qui peut les déléguer à un établissement public y ayant vocation ou concessionnaire d’une opération d’aménagement ([11]) (article 112 de la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dite « loi 3DS ») ;

– l’extension du champ du permis d’aménager multi-sites aux opérations inscrites dans les contrats de PPA (même article) ;

– l’extension du périmètre d’un établissement public foncier d’État (EPF‑E) par une procédure dérogatoire simplifiée lorsqu’elle se fait dans le cadre d’une GOU (même article).

Pour la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI), l’ensemble PPA‑GOU constitue « un outil souple, capable de s’adapter aux différents contextes territoriaux ». Toutefois, ne s’agissant ni d’une zone d’aménagement concerté, ni d’un permis d’aménager, il ne se substitue pas aux procédures d’aménagement opérationnel ou aux contrats de concession, ce qui l’empêche d’être « systématisé sur des opérations de moindre ampleur ». La fédération s’interroge sur la pertinence d’un travail dans cet objectif. Elle observe aussi « en pratique, dans certains territoires, que le manque de moyens humains et financiers dans les périmètres couverts ralentit les projets ».

A contrario, la Fédération française du bâtiment (FFB) a considéré tout simplement que « la création de ces procédures spécifiques est inutile », puisque les outils opérationnels existants, notamment les OIN, semblent suffisants pour permettre la réalisation des grandes opérations d’aménagement. Toutefois, l’essentiel de la critique exprimée par la FFB porte sur la durée longue des zones d’aménagement différé, qui constituent néanmoins des outils précieux de maîtrise foncière et un rare mécanisme anti-spéculatif à la main des élus. Par ailleurs, la FFB invite également, comme dans les opérations de revitalisation de territoire, à repenser l’interdiction de l’intervention des opérateurs privés en situation de conflit d’intérêts, qui entravent l’intervention des opérateurs privés en tant qu’aménageurs de second rang.

La grande opération d’urbanisme de la métropole Aix-Marseille-Provence

Au sein du contrat de projet partenarial d’aménagement pour le centre-ville de Marseille, signé le 15 juillet 2019 et qui s’étend sur un périmètre de plus de 1 000 hectares et concerne près de 200 000 habitants, la première grande opération d’urbanisme a concerné, dès 2019 et à la demande de la métropole, un périmètre regroupant des quartiers prioritaires de centre-ville, la complexité et les grands enjeux urbains qui leur sont attachés justifiant, de l’avis de la métropole, leur intégration dans une telle opération :

– au nord, le territoire du projet de transformation urbaine « Quartiers Libres Saint-Charles Belle de Mai », créé en 2015 ;

– au sud, les quartiers de Noailles, Opéra, Thiers, Belsunce et Chapitre dans le 1er arrondissement ainsi qu’une partie du 6e arrondissement.

Les îlots concernés sont des secteurs fortement touchés par la problématique de l’habitat indigne et dégradé, des conditions d’habitat difficile, une forte vacance et la dégradation du bâti ancien. Ils font l’objet d’un projet urbain multithématique qui propose des solutions, comme le bâtiment zéro charge ou le bail réel solidaire, visant à l’amélioration du cadre de vie dans le centre-ville. Les interventions se font aussi sur d’autres leviers :

– l’offre et la qualité des équipements publics : écoles, crèches, centres sociaux, médiathèques, espaces publics et de loisirs ;

– l’animation et l’attractivité commerciale ;

– l’amélioration de la gestion urbaine de proximité : livraisons et logistique urbaine, gestion et valorisation des déchets, circulation, stationnement, modes de déplacement, nettoiement, sécurité, gestion des espaces verts, mobilier urbain ;

– le confort urbain et la lutte contre les îlots de chaleur urbaine : végétalisation, espaces de pleine terre, perméabilisation des sols.

En septembre 2021, dans le cadre de concertations et d’une réflexion sur l’avenir de la GOU, Mme Martine Vassal, présidente de la métropole, soulignant le soutien très fort apporté par l’État dans le cadre de l’intervention sur le centre-ville de Marseille, a fait à la ministre déléguée chargée du logement des propositions pour renforcer les moyens du projet, parmi lesquelles :

– le positionnement de la métropole comme acquéreur privilégié des immeubles confisqués aux marchands de sommeil ;

– un meilleur encadrement des obligations et sanctions éventuelles dans le cadre des autorisations de mise en location conditionnées à des travaux ;

– la prolongation et le renforcement de l’opération programmée d’amélioration de l’habitat de renouvellement urbain (OPAH-RU) transitoire sur le centre-ville de Marseille, qui a pour objectifs contractualisés de traiter 80 copropriétés dégradées et 20 mono-propriétés, pour une enveloppe de subventions aux travaux de 4 M€ (le montant moyen de travaux par immeuble est de près de 250 000 euros) ;

– la majoration systématique des aides de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine pour la transformation du parc social et le recyclage de l’habitat ancien dégradé à Marseille.

Source : métropole Aix-Marseille-Provence, contribution écrite.

 

2.   Le permis d’aménager multi-sites, un dispositif riche de possibilités récemment élargi et pérennisé

Le législateur a également introduit des outils pour faciliter la conduite de projets d’aménagement sur une échelle plus réduite que ceux qui nécessitent des conventions de PPA. Le permis d’aménager multi-sites, instauré, à titre expérimental, pour une durée de cinq ans à compter de la publication de la loi, visait à permettre de déroger au permis d’aménager classique (voir encadré). Il consiste en la délivrance d’un unique permis d’aménager portant sur des unités foncières non contiguës, mais visant à la réalisation d’opérations caractérisées par une unité architecturale et paysagère sur les sites concernés.

L’expérimentation, ouverte au IV de l’article 157 de la loi, introduit par l’adoption d’un amendement de la rapporteure de la commission des affaires économiques du Sénat, a eu un champ limité aux seuls secteurs d’intervention prioritaire des opérations de revitalisation de territoire (ORT). Elle avait pour objectif de permettre la réalisation d’une opération d’ensemble, concertée avec les élus locaux, afin de revitaliser les centres villes ou bourgs centres dont le foncier est nécessairement morcelé et discontinu.

Comme le remarquent certains des acteurs, ce permis a été institué pour répondre à un besoin avéré de rénovation et de réaménagement des centres urbains, des centres-bourgs ou des bourgs ruraux aux trames foncières ou aux dents creuses discontinues. Dans ces cas, la zone d’aménagement concerté n’est pas un outil adapté car elle concerne un territoire d’un seul tenant et ne permet pas systématiquement d’équilibrer économiquement l’opération menée. En dépit de sa valeur ajoutée, le PAMS n’a néanmoins pas connu le succès escompté. Pourtant, selon l’Union nationale des aménageurs, en dépit de cette sous-utilisation, « nous pensons néanmoins qu’il s’agit d’un bon outil, qui a vocation à être généralisé ». La Fédération française du bâtiment explique l’absence de mise en œuvre de cet instrument par deux motifs :

– une insécurité juridique, résultant de la rédaction du dispositif dans la loi ELAN, quant à l’obligation ou non, pour la collectivité concernée, de prendre une orientation d’aménagement et de programmation (OAP) spécifique pour autoriser l’octroi d’un PAMS. Cette ambiguïté a été définitivement résolue, sur l’initiative du Sénat, à l’article 112 de la loi 3DS qui pérennise le dispositif (voir ci-dessous) : il n’est pas requis qu’une collectivité prenne une OAP dédiée pour permettre la mise en œuvre du PAMS ([12]). Celle-ci est possible dès le moment où les prescriptions générales du règlement et des OAP existantes sont respectées, comme c’est le cas pour toute autorisation d’urbanisme ;

– la limitation du champ d’application aux seuls secteurs d’intervention prioritaire des ORT, ce qui empêche la péréquation entre des sites situés en milieu urbain à restructurer et des opportunités foncières en limite de centre-ville ou en couture urbaine.

Opérations pour lesquelles un permis d’aménager est obligatoire

Le code de l’urbanisme soumet à délivrance préalable d’un permis d’aménager « les travaux, installations et aménagements affectant l’utilisation des sols » ([13]). Le permis d’aménager se distingue donc du permis de construire en ce qu’il ne porte pas sur la réalisation d’une ou plusieurs constructions, mais sur l’aménagement d’un ou plusieurs terrains ([14]). Le permis d’aménager est donc une autorisation, délivrée par la collectivité compétente en matière d’urbanisme, qui doit obligatoirement précéder certains travaux, installations et aménagements affectant l’utilisation du sol, désignés et énumérés par le code de l’urbanisme. Ces opérations sont les suivantes ([15]) :

– les opérations de lotissement et de remembrement : la création des lotissements qui prévoient la création ou l’aménagement de voies, d’espaces ou d’équipements communs internes au lotissement ou qui sont situés dans le périmètre d’un site patrimonial remarquable (PMR) ainsi que dans les abords des monuments historiques ;

– les aménagements de terrains pour l’hébergement : les opérations importantes relatives aux campings ou aux parcs résidentiels de loisirs, notamment pour la création ou l’agrandissement d’un terrain de camping d’une capacité d’accueil supérieure à vingt personnes ou de plus de six hébergements constitués de tentes, caravanes ou résidences mobiles de loisirs ou d’habitation légères de loisirs ; l’aménagement de terrains destinés aux aires d’accueil et aux terrains familiaux des gens du voyage pour l’installation de plus de deux résidences mobiles ;

– les aménagements de loisir : les aménagements de terrains pour la pratique de sports ou loisirs motorisés, les aménagements de parcs d’attractions ou d’aires de jeux et de sport d’une superficie supérieure à deux hectares et les aménagements de golfs d’une superficie supérieure à vingt-cinq hectares ;

– les autres opérations majeures sur les sols : créations d’importantes aires de stationnement ouvertes au public et les affouillements ou exhaussements du sol, non nécessaires à l’exécution d’un permis de construire, dont la hauteur ou la profondeur excède deux mètres et qui portent sur une superficie supérieure ou égale à deux hectares.

La demande de permis d’aménager est déposée à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés par une personne ayant qualité à former une telle demande, après quoi les services instruisent la demande. Comme il est d’usage en matière d’urbanisme, une décision refusant un permis d’aménager doit être motivée. Si les travaux objet du permis d’aménager n’ont pas été entrepris dans les trois ans suivant sa notification, le permis est périmé.

Comme le rapporte la FFB, « les opérations de construction ou d’aménagement dans les secteurs ORT sont, en l’absence de soutien public, difficilement viables économiquement en ce sens qu’elles demandent bien souvent des opérations préalables de démolition, de dépollution, de restructuration avant la réalisation de toute construction nouvelle ». Selon la fédération, cette difficulté à trouver l’équilibre économique explique une moindre intervention des opérateurs privés dans les ORT. Cette difficulté a également été résolue récemment, au même article de la loi 3DS (voir ci-dessous).

Quoique peu mis en œuvre du fait de ces limitations – qui devraient interroger quant à une timidité excessive du législateur à l’introduction de nouveaux dispositifs – cet instrument continue de concentrer l’intérêt des élus et des opérateurs, ce qui explique sa codification, son prolongement et son élargissement récents à l’article 112 de la loi 3DS :

– il pourra désormais être mis en œuvre, de manière pérenne et au-delà du seul secteur d’intervention, dans tout le ressort territorial d’une convention d’ORT (III de l’article L. 303-2 du code de la construction et de l’habitation) ([16]), évolution qui devrait offrir aux opérateurs économiques la capacité d’opérer une péréquation financière de nature à rendre possible la réalisation de l’aménagement du site prévu par l’ORT ;

– il concerne désormais également le ressort des contrats de projet partenarial d’aménagement, et notamment le territoire des grandes opérations d’urbanisme qui y ont lieu (article L. 312-2-1 du code de l’urbanisme).

La loi 3DS ayant à la fois clarifié la rédaction, élargi et sécurisé le dispositif en le pérennisant, il est à espérer que le dispositif du permis d’aménager multi-sites, qui correspondait à une idée pertinente mais a connu des difficultés de démarrage, puisse désormais trouver son public. Il convient toutefois de rappeler que l’objectif de cet outil est avant tout de promouvoir la revitalisation, le recyclage et la réhabilitation d’espaces déjà urbanisés, sans qu’il doive être mis à profit pour promouvoir des projets engendrant une artificialisation nette des sols.

Une meilleure association de la filière des paysagistes au permis d’aménager

Depuis mars 2017, l’intervention d’un architecte est obligatoire pour les demandes de permis d’aménager concernant un lotissement d’une superficie supérieure à 2 500 mètres carrés. L’article 2 de la loi ELAN a permis aux paysagistes concepteurs d’élaborer, au même titre que les architectes, le projet architectural, paysager et environnemental (PAPE) nécessaire à l’obtention d’un permis d’aménager pour ces projets. Cette modification, portée à L. 441-4 du code de l’urbanisme, a été répercutée dans le formulaire de demande de permis d’aménager ([17]).

Pour mémoire, le PAPE est un projet d’ensemble qui prévoit l’organisation spatiale du lotissement en proposant une division parcellaire. D’après le retour de la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages, cette évolution a été perçue et vécue comme une avancée importante pour la profession des paysagistes concepteurs, et était nécessaire et utile à plusieurs égards.

Les professions d’architectes et de paysagistes concepteurs, toutes deux réglementées, sont également légitimes pour élaborer un PAPE et apporter cette cohérence d’ensemble. Ces métiers possèdent en effet les compétences pour appréhender au mieux les enjeux en termes d’organisation de l’espace et d’intégration paysagère et environnementale du lotissement : délimitation harmonieuse des parcelles, tracé des voies, articulation entre espaces bâtis et espaces publics, implantation des équipements, etc.

En outre, cette évolution a conduit à une reconnaissance accrue et nécessaire des compétences des paysagistes concepteurs, dans le processus d’instruction des dossiers déposés par les pétitionnaires, précédemment plutôt réservé aux seuls architectes, permettant ainsi de valoriser et légitimer les aptitudes et les responsabilités que les paysagistes concepteurs endossent aussi bien sur le plan créatif, technique et désormais administratif.

Bien qu’il soit encore trop tôt pour dresser un bilan quantitatif de cette mesure, il est néanmoins possible d’affirmer qu’elle a eu un effet positif pour la profession, qui doit continuer à valoriser et maîtriser cette nouvelle mission. La Fédération française du bâtiment (FFB) s’est réjouie de ce recours alternatif à un paysagiste concepteur. Tout en reconnaissant que les architectes, en dépit d’un besoin de formation des architectes à l’aménagement et à la conception de maisons individuelles, « apportent une plus-value pour la rédaction du règlement de lotissement, qui détermine la morphologie des futures constructions », la FFB estime en effet que « les compétences requises pour l’élaboration d’un permis d’aménager sont plurielles et varient plus en fonction du contexte et de l’environnement de l’opération que de son emprise foncière » et que « l’intégration des géomètres et urbanistes serait également pertinente, en fonction des projets ».

3.   Permis d’innover et permis de faire, des bilans très contrastés

Le permis d’innover avait été introduit dès 2016 dans le droit de la construction, sous la forme d’une expérimentation ([18]), en même temps que le permis de faire, autre outil de dérogation en matière de normes de construction. Le permis d’innover, qui est attaché au permis de construire, autorise le porteur de projet à déroger à toutes les normes en matière de construction, à condition de vérifier, par la production d’une étude d’impact, que les moyens qu’il met en place permettent néanmoins d’atteindre les objectifs de la norme à laquelle il déroge.

Dans le cadre de la prorogation du permis d’innover à l’article 5 de la loi ELAN, un appel à manifestation d’intérêt a été lancé par trois établissements publics d’aménagement – Bordeaux Euratlantique, Grand Paris Aménagement et Euroméditerrannée – pour susciter le recours au permis d’innover dans le cadre de la réalisation de composantes de projets urbains. 36 candidatures ont été reçues, portant sur des domaines variés tels que l’énergie, l’utilisation des eaux usées domestiques (dites « eaux grises »), la construction modulable et réversible, la construction bois et la réutilisation de granulats et de déchets.

L’élargissement du permis d’innover dans la loi ELAN

Initialement prévu dans les limites des opérations d’intérêt national – concrètement, les périmètres établissements publics d’aménagement (EPA) et de la Société de livraison des ouvrages olympiques (Solideo) – le dispositif a vu son champ d’application élargi et précisé par l’article 5 de la loi ELAN, qui a résulté de l’adoption d’un amendement du Gouvernement. Le champ de l’expérimentation, qui est prorogée pour prendre fin au 23 novembre 2025, comprend désormais les projets réalisés au sein des GOU et au sein des secteurs d’intervention d’ORT. En outre, en sus des constructions soumises à permis de construire, l’application de l’expérimentation est étendue aux projets soumis à déclaration préalable, permis d’aménager ou permis de démolir.

Le dispositif de la loi ELAN précise aussi, pour sécuriser le dispositif, que l’examen de l’étude des dérogations aux règles, qui est réalisée par le maître d’ouvrage, est sanctionné par la production d’un avis. Cet examen peut être effectué par un EPA, par un établissement public foncier et d’aménagement (EPFA) ou par la Solideo. L’articulation du permis d’innover avec les autorisations d’urbanisme est précisée : l’autorisation d’urbanisme est expressément désignée comme autorisation unique, valant à la fois autorisation d’occuper le sol et approbation des dérogations aux règles.

La plupart des demandes de dérogation aux normes portait sur des normes de construction. Les plus intéressantes, et les plus en lien avec les enjeux de l’innovation urbaine portaient sur les dérogations aux modalités d’attribution des permis de construire notamment en matière de réversibilité des équipements. Au terme d’une analyse conjointe des projets par les EPA, sept lauréats ont été sélectionnés.

Parmi les projets sélectionnés, seul un projet situé dans le périmètre de Bordeaux Euratlantique a fait l’objet d’un permis d’innover en définitive. Ce projet porte sur la réalisation d’un bâtiment sans destination, ce qui doit permettre la construction de bâtiments réversibles. Un atelier d’architecture conçoit un bâtiment de neuf étages comptant 4 000 mètres carrés d’espaces évolutifs, qui pourront recevoir des habitants, des entreprises, des commerces ou d’autres activités qui ont vocation à varier selon les arrivées et des départs des locataires. Selon un entretien accordé dans la presse par le fondateur de l’atelier d’architecture, la nouveauté de la procédure a consisté dans le fait que le permis déposé cochait deux cases, bureaux et logements, impliquant par exemple que les normes de sécurité incendie, normalement différenciées entre ces deux catégories, soient les mêmes. Cela implique également le choix d’une hauteur sous plafond (2,70 mètres) moyenne entre le logement (2,50 mètres) et le bureau (3,20 mètres).

Dans le cas d’espèce, il apparaît que le permis d’innover octroyé emporte très peu de véritable innovation, notamment par rapport au permis de faire. Par contraste, un autre cas de permis d’innover, délivré hors cadre de l’appel à manifestation d’intérêt, suscite davantage d’intérêt. Il s’agit du cas de l’opération de requalification du quartier des Ardoines sur la commune de
Vitry‑sur‑Seine (Seine-et-Marne), portée par l’EPA Orly Rungis – Seine Amont (ORSA), membre de Grand Paris Aménagement. Il s’agit de déroger aux règles du plan de prévention des risques d’inondation (PPRI) de la Seine, en matière de résilience des équipements De nombreux porteurs de projets, en particulier en matière de renouvellement urbain, s’interrogent en effet sur la manière de concilier les enjeux d’aménagement et les mesures de prévention des risques d’inondation que les PPRI ont tendance à figer.

Au-delà des résultats décevants du permis d’innover, la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages considère que l’appel à manifestation d’intérêt organisé par les établissements publics d’aménagement a mis en évidence un intérêt du secteur du bâtiment et de la construction pour des dispositifs de dérogation aux normes en vigueur, et en particulier les normes constructives : normes incendie, normes des immeubles de grande hauteur, ventilation, acoustique et performance thermique du bâtiment. Ces possibilités de dérogation en matière de construction sont toutefois déjà partiellement satisfaites par le permis de faire, dispositif créé au I de l’article 88 de la loi LCAP, qui a été pérennisé, élargi, renforcé et codifié par l’ordonnance n° 2018-937 du 30 octobre 2018 visant à faciliter la réalisation de projets de construction et à favoriser l’innovation. 

En matière d’aménagement urbain, par contraste, le recours au permis d’innover n’est pas concurrencé par le permis de faire. Son déploiement est encore incertain, l’élargissement décidé dans la loi ELAN n’ayant pas produit d’effet en terme de nombre de permis d’innover accordés. Les services compétents du ministère chargé de la construction rappellent cependant à cet égard que les GOU sont encore faiblement développées et que les ORT définies sont récentes, les projets n’ayant pas atteint une « maturité opérationnelle » suffisante pour susciter un besoin de permis d’innover, même si le permis d’innover accordé dans le cadre de l’opération des Ardoines suscite un vif intérêt (voir encadré). Selon la FPI, « les professionnels se heurtent aux réticences des collectivités à endosser la responsabilité de déroger à des règles, ce qui en fait un dispositif marginal ».

Cet instrument, qui se voulait à la pointe d’une évolution vers davantage de réflexion en termes de solutions d’effet équivalent (SEE), n’a pas encore fait ses preuves, en dépit de possibilités de développement, notamment dans la ventilation ou de réglementation incendie.

Pour la Fédération française du bâtiment, « favoriser l’innovation, permettre le déploiement de solutions d’effet équivalent lorsqu’on peut démontrer l’atteinte des objectifs attendus vont dans le bon sens ». En revanche, les dispositifs concrets sont encore trop peu développés, et l’État doit en assurer une meilleure publicité : « pour réussir le passage d’une culture de la règle à une culture du résultat, révolution pour notre filière, il faut faire connaître ce dispositif – ce à quoi s’emploie la FFB auprès des entreprises de bâtiment ». En outre, la fédération souligne que les assureurs continuent de se montrer réticents. Selon la FPI, la responsabilité est peut-être ailleurs : « on ne sent pas aujourd’hui les élus prêts à prendre la responsabilité de déroger aux règles normalement applicables et, par crainte des recours et des contentieux, à faire appel à des solutions d’effet équivalent ».

B.   La simplification des outils existants connaît des RÉSULTATS mitigÉs

1.   Trois évolutions afin d’accélérer le recours aux zones d’aménagement concerté

Dans la même optique de simplification et d’accélération des projets d’aménagement, la loi ELAN a introduit, à son article 9, trois mesures visant à faciliter le recours aux zones d’aménagement concerté (ZAC), opération d’aménagement qui, contrairement à l’opération de lotissement menée avec un permis d’aménager, résulte nécessairement d’une initiative publique et est utilisé pour les projets nécessitant des équipements publics importants, car il permet la participation des aménageurs aux dépenses liées à leur réalisation :

– l’introduction de la possibilité de créer une ZAC en adoptant dans le plan local d’urbanisme une orientation d’aménagement et de programmation valant création d’une ZAC ;

– la clarification de la portée du cahier des charges de cession de terrain (CCCT), document obligatoirement annexé aux actes de cession par l’aménageur des terrains situés dans le périmètre d’une ZAC ;

– l’exemption, pour les concessions d’aménagement qui ont lieu dans une ZAC, des dispositions de la loi du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d’ouvrage publique (MOP).

La zone d’aménagement concerté (ZAC)

À l’intérieur d’une ZAC, une collectivité publique ou un établissement public intervient pour produire du foncier prêt à bâtir, par la viabilisation, l’aménagement et l’équipement des terrains, en vue de les céder ou de les concéder ultérieurement à des utilisateurs publics ou privés. Une fois équipés, les terrains sont revendus à des constructeurs par l’aménageur dans les conditions qu’il fixe ([19]).

L’initiative de la création d’une ZAC peut être prise par l’État, une collectivité territoriale ou un établissement public y ayant vocation. L’acte de création de la ZAC n’est pas tenu de respecter les dispositions du PLU(i), mais la mise en œuvre de la zone ne sera possible qu’après modification du PLU si le programme d’aménagement prévu n’est pas compatible avec les prescriptions qu’il contient.

Une fois prise l’initiative de la création de la ZAC, plusieurs études préalables sont prescrites afin d’évaluer notamment la pertinence de l’emplacement du site et la faisabilité du projet. Une étude d’impact est réalisée pour les grandes ZAC, afin d’évaluer les incidences du projet sur l’environnement. Une concertation est ensuite menée qui associe, pendant toute la durée de l’élaboration du projet, les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées.

Lorsqu’une commune ou un EPCI est à la fois compétent en matière de PLU et de ZAC, la délibération d’approbation du PLU contenant des OAP peut valoir acte de création de la ZAC (voir encadré). Cette possibilité paraît encore assez peu mise en œuvre. En témoigne le retour de la Fédération française du bâtiment (FFB), qui dit avoir « trop peu de recul » sur cette disposition pour apprécier son succès.

La même fédération considère toutefois que cette disposition n’a apporté qu’une simplification très relative, puisqu’antérieurement, rien n’interdisait à la commune ou à l’EPCI de délibérer le même jour pour créer une ZAC et pour approuver, réviser ou modifier le PLU, sauf dans le cas exceptionnel où la commune ou l’EPCI n’étaient pas couverts par un PLU et devaient donc attendre que le PLU soit entré en vigueur pour acquérir la compétence en matière de création de ZAC.

La FFB a également attiré l’attention sur le fait que « le nombre de ZAC est en chute libre depuis plusieurs années en France, au bénéfice d’aménagements hors procédure », concluant qu’il est nécessaire d’aller plus loin dans la refonte des ZAC. Elle a notamment proposé, dans le cadre d’une vision globale de l’effort de simplification de la ZAC, de fusionner les dossiers de création et de réalisation de cette procédure.

Les orientations d’aménagement et de programmation (OAP) du PLU(i)

Le législateur a créé, à l’occasion de la loi n° 2003-590 du 2 juillet 2003 urbanisme et habitat, la faculté pour les plans locaux d’urbanisme de se doter d’orientations d’aménagement et de programmation (OAP).

Leur statut a évolué avec la loi Grenelle II, qui précise que le plan local d’urbanisme comprend, entre autres documents, des orientations d’aménagement et de programmation. Bien qu’il existe depuis cette date un questionnement sur le caractère obligatoire ou non des OAP ([20]), il est généralement reconnu qu’il s’agit d’instruments utiles, voire incontournables, pour traduire en termes opérationnels les ambitions d’aménagement que se donne la collectivité.

Les OAP, comme le règlement, permettent de rendre concrètes les intentions exprimées dans le projet d’aménagement et de développement durables (PADD). Mais, tandis que le règlement tient de l’urbanisme réglementaire, les OAP permettent en revanche de préférer une approche plus souple, fondée sur la bonne pratique. Le règlement détermine des interdictions, conditionne des autorisations, ou édicte des prescriptions visant à encadrer ou limiter la capacité à aménager et à construire. Les OAP, a contrario, indiquent les options à privilégier et l’aménagement généralement souhaité.

Les OAP sont opposables aux tiers dans un rapport de compatibilité, ce qui signifie qu’il ne doit pas y avoir de contrariété majeure entre elles et le contenu d’une demande d’autorisation d’urbanisme ([21]). Elles doivent être écrites sous forme de directions à suivre, ou encore de résultats à atteindre, mais à condition que les moyens pour l’atteindre ne soient pas imposés.

La loi ELAN, en son article 9, a permis de clarifier l’autorisation faite à l’aménageur d’être aussi maître d’ouvrage de bâtiments, alors qu’une confusion régnait quant à la possibilité pour lui d’assurer autre chose que la réalisation d’ouvrages et d’équipements d’infrastructure. La Fédération française du bâtiment a salué cette clarification, rapportant que « les modifications apportées au régime de réalisation et de financement des équipements publics ou la simplification du régime du cahier des charges de cession de terrains ont unanimement été saluées », tout en soulignant la rareté des cas dans lesquels l’aménageur privé, concessionnaire de la réalisation de la ZAC, est maître d’ouvrage de tout ou partie des bâtiments à réaliser en son sein.

Autre clarification salutaire, la loi a également amélioré la rédaction de l’article L. 300-3 du code de l’urbanisme sur la faculté qui est celle de l’État, des collectivités et de leurs établissements publics de confier, au moyen d’une convention de mandat d’aménagement, une mission d’aménagement foncier à une personne publique ou privée, en prévoyant explicitement que ce contrat porte à la fois sur la réalisation d’études, sur la réalisation de travaux et la construction d’ouvrages, et sur l’achat et la revente de biens fonciers et immobiliers.

Enfin, là où les projets de création d’une zone d’aménagement concerté (ZAC) étaient, dès avant la loi ELAN, expressément dispensés d’enquête publique en vertu d’une dispense introduite dans la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement (« loi Grenelle II »), et soumis à l’obligation de participation du public par voie électronique ([22]), seule l’étape de la création était mentionnée et bénéficiait à ce titre d’un régime d’évaluation environnementale plus souple. Cette formulation était source d’insécurité juridique, puisque le régime applicable à la phase de réalisation de la ZAC n’était pas explicitement prévu, et que les éventuelles actualisations des projets restaient donc soumises à enquête publique. Cette ambiguïté nuisant à la bonne tenue des ZAC, l’article 6 de la loi a clarifié ce point de façon salutaire.

2.   Les opérations de la Solideo, un exemple d’accélération réussie

L’article 19 de la loi a permis de mettre en œuvre des assouplissements utiles dans la réalisation des ouvrages nécessaires en vue des Jeux olympiques et paralympiques de 2024 (JOP). Une dérogation sectorielle a été créée au principe de la séparation de la mission de maîtrise d’œuvre et de celle des entreprises de travaux ([23]), permettant le recours aux marchés publics de conception-réalisation sans condition pour les opérations de construction ou de réhabilitation portant sur les ouvrages nécessaires à l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques 2024 ([24]).

Pour la réalisation de ces ouvrages, des maîtres d’ouvrage, supervisés par la Société de livraison des ouvrages olympiques (Solideo), ont ainsi pu avoir recours à des marchés de conception-réalisation, contribuant notamment au respect des calendriers impératifs de livraison pour les jeux et au respect des différentes prescriptions relatives aux ouvrages. La direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages cite, à titre d’exemple, les opérations suivantes : les groupes scolaires de Saint-Ouen au sein de la ZAC du Village des athlètes, la Marina du Roucas Blanc à Marseille, les équipements sportifs du Bourget, le franchissement de l’A1 sur Dugny – Le Bourget, l’enfouissement des lignes à haute tension à Saint-Denis.

L’article 20 de la loi prévoit que les opérations liées aux Jeux olympiques et paralympiques peuvent être réalisées selon la procédure intégrée de mise en compatibilité des documents d’urbanisme (MECDU), avec possibilité de participation du public par voie électronique unique organisée. Cette procédure s’applique aux constructions et opérations d’aménagement dont la liste est fixée par décret, situées à proximité immédiate d’un site nécessaire aux JOP, lorsque ces constructions et opérations d’aménagement sont de nature à affecter les conditions de desserte, d’accès, de sécurité ou d’exploitation dudit site pendant les JOP.

La procédure intégrée de mise en compatibilité des documents d’urbanisme

La procédure intégrée, définie à l’article L. 300-6-1 du code de l’urbanisme, a pour objet principal de faciliter la « mise en compatibilité » des documents d’urbanisme, afin de simplifier et de raccourcir les délais nécessaires au déploiement de certains projets d’aménagement ou de construction. Cette procédure permet de ne réaliser qu’une seule enquête publique et une seule étude d’impact. Elle peut aujourd’hui être mise en œuvre dans deux cas de figure :

– pour la réalisation d’une opération d’aménagement ou d’une construction comportant principalement des logements et présentant un caractère d’intérêt général dans une unité urbaine. L’opération doit concourir, à l’échelle de la commune, à la mixité sociale dans l’habitat ;

– pour la réalisation d’un projet immobilier de création ou d’extension de locaux d’activités économiques présentant un caractère d’intérêt général en raison de son intérêt majeur pour l’activité économique locale ou nationale.

Le décret n° 2019-95 pour l’application de l’article 20 a été pris le 12 février 2019, déterminant les constructions et opérations d’aménagements situées à proximité immédiate d’un site nécessaire à la préparation, à l’organisation ou au déroulement des jeux olympiques et paralympiques, susceptibles d’affecter les conditions de desserte, d’accès, de sécurité ou d’exploitation de ce site. Ces constructions et opérations bénéficient donc du régime spécifique de la procédure intégrée de mise en compatibilité des documents d’urbanisme. Deux sites sont définis par le décret :

– la rénovation de la Porte de la Chapelle, qui permet la réalisation de l’Aréna II sous maîtrise d’ouvrage de la ville de Paris, supervisée par la Solideo ;

– le projet immobilier situé 4 à 30 rue Ernest Renan – Paris 15 (Tour Triangle), à proximité du Parc des Expositions de la Porte de Versailles.

Cette évolution participe des différents dispositifs législatifs et réglementaires mis en place pour faciliter la réalisation des ouvrages olympiques, notamment la loi 26 mars 2018 relative à l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques de 2024, qui ont contribué à l’action de la Solideo en tant que maître d’ouvrage ou superviseur des ouvrages olympiques. Ces évolutions ont permis qu’à l’heure actuelle le calendrier de réalisation des ouvrages soit globalement respecté.

C.   un impact limitÉ sur les chiffres de la construction de logements

1.   La modification des normes de construction entraîne des évolutions qui mettent certaines filières en difficulté

L’article 181 de la loi ELAN, créé par l’Assemblée nationale au cours de l’examen parlementaire, a élargi la réglementation environnementale du bâtiment afin de faire évoluer les exigences constructives. Là où les réglementations thermiques qui se sont succédé – de la RT 1974 à la RT 2012 – ont priorisé l’amélioration de la construction des bâtiments neufs du point de vue de la performance et de l’économie d’énergie, le législateur a souhaité que la prochaine réglementation énergétique – la RE 2020 – intègre de nouveaux impératifs dans le cadre d’une action plus large de lutte contre le dérèglement climatique ([25]) :

– le niveau d’empreinte carbone tout au long du cycle de vie du bâtiment ;

– l’amélioration de la qualité de l’air intérieur ;

– le recours à des matériaux issus de l’économie circulaire, notamment du recyclage.

Le texte dispose qu’un décret précise, à partir de 2020, « pour les constructions nouvelles, en fonction des différentes catégories de bâtiments, le niveau d’empreinte carbone à respecter, évalué sur l’ensemble du cycle de vie du bâtiment, en intégrant la capacité de stockage du carbone dans les matériaux ».

Afin de ne pas donner préférence ou porter préjudice à des filières identifiées, une référence aux matériaux biosourcés avait été supprimée par le législateur au moment de l’examen de la loi. Pourtant, le décret n° 2021-1004 (voir encadré) et la RE 2020 – entrée en vigueur le 1er janvier 2022 – tous deux publiés par le pouvoir réglementaire ont opéré un arbitrage clair en faveur de la filière du bois, ce qui interroge quant à la conformité du choix réglementaire effectué par rapport à la volonté du législateur.

Le ministère de la transition écologique a mis en avant la progressivité de la nouvelle réglementation, qui prévoit plusieurs jalons d’évolution des seuils d’émission carbone en 2025, 2028 et 2031, arguant que la mise en œuvre des exigences sur le futur indicateur d’impact carbone des bâtiments s’effectuera donc par paliers mesurés, assurant à l’avance une visibilité sur l’ensemble de la trajectoire pour toute la filière forêt-bois comme pour l’ensemble des constructeurs.

Le décret n° 2021-1004 du 29 juillet 2021

Sur le fondement de l’article 181 de la loi ELAN, le pouvoir réglementaire a pris le décret n° 2021-1004 du 29 juillet 2021 relatif aux exigences de performance énergétique et environnementale des constructions de bâtiments en France métropolitaine, qui fixe les exigences de performance énergétique et environnementale que doivent respecter les bâtiments ou parties de bâtiments à usage d’habitation, aux constructions de bâtiments ou parties de bâtiments de bureaux, ou d’enseignement primaire ou secondaire situés en France métropolitaine, notamment les cinq exigences de résultat suivantes :

– l’optimisation de la conception énergétique du bâti indépendamment des systèmes énergétiques mis en œuvre ;

– la limitation de la consommation d’énergie primaire ;

– la limitation de l’impact sur le changement climatique associé à ces consommations ;

– la limitation de l’impact des composants du bâtiment sur le changement climatique ;

– la limitation des situations d’inconfort dans le bâtiment en période estivale.

M. Benoist Thomas, secrétaire général de la Filière Béton, qui rassemble les métiers de l’extraction de granulats, de la fabrication de ciment, du béton prêt à l’emploi et du béton préfabriqué, a estimé que l’interprétation retenue par le Gouvernement de l’article « fausse la concurrence entre les matériaux, au détriment de nos produits », et ceci « sans bénéfice pour l’environnement, puisqu’elle déforme de façon outrancière la réalité des émissions carbone du bois ». À cet égard, il est avancé que « alors que les produits du bois sont significativement émetteurs de carbone lorsqu’ils arrivent en fin de vie, la méthodologie retenue, sans aucun fondement scientifique, et en l’absence de toute norme, revient à conférer au bois une empreinte carbone négative ».

 

La recodification des dispositions sur la réglementation énergétique

Le législateur a prévu à l’article 181 de la loi ELAN la codification des dispositions sur la réglementation thermique à l’article L. 1119 du code de la construction et de l’habitation, qui dispose ainsi que :

« (…) Un décret en Conseil d’État détermine :

«  pour les constructions nouvelles, en fonction des différentes catégories de bâtiments, leurs caractéristiques et leur performance énergétiques et environnementales, notamment au regard des émissions de gaz à effet de serre, de la consommation d’eau ainsi que de la production de déchets liées à leur édification, leur entretien, leur réhabilitation et leur démolition ;

«  à partir de 2020, pour les constructions nouvelles, en fonction des différentes catégories de bâtiments, le niveau d’empreinte carbone à respecter, évalué sur l’ensemble du cycle de vie du bâtiment, en intégrant la capacité de stockage du carbone dans les matériaux ;

«  à partir de 2023, pour les constructions nouvelles, les exigences de limitation de consommation d’eau potable dans le respect des contraintes sanitaires afférentes à chaque catégorie de bâtiment, notamment s’agissant des dispositifs de récupération des eaux de pluie ;

«  les exigences en matière de qualité de l’air intérieur des bâtiments ;

«  les exigences en matière de recours à des matériaux issus des ressources renouvelables ou d’incorporation de matériaux issus du recyclage ;

«  les exigences en matière de stockage du carbone pendant le cycle de vie du bâtiment ; (…) »

 

Cette rédaction a été modifiée par le pouvoir réglementaire dans l’ordonnance n° 2020‑71 du 29 janvier 2020 relative à la réécriture des règles de construction et recodifiant le livre Ier du code de la construction et de l’habitation, prise sur le fondement d’une habilitation très large prévue au II de l’article 49 de la loi du 10 août 2018 pour un État au service d’une société de confiance ([26]).

L’article L. 171-1 (nouveau) du même code dispose que :

« Pour la construction et la rénovation de bâtiments, un décret en Conseil d’État fixe les résultats minimaux :

«  De performance énergétique pour des conditions de fonctionnement définies, évaluée en tenant compte du recours aux énergies renouvelables au sens de l’article L. 111-1 ;

«  De limitation de l’impact sur le changement climatique, évaluée sur l’ensemble du cycle de vie du bâtiment et en prenant en compte le stockage du carbone de l’atmosphère durant la vie du bâtiment ;

«  De performance environnementale, évaluée notamment au regard des émissions de gaz à effet de serre, de la consommation d’eau et de la production de déchets liées à la fabrication des composants des bâtiments, à leur édification, leur entretien, leur rénovation et leur démolition, ainsi que du recours à des matériaux issus de ressources renouvelables et de l’incorporation de matériaux issus du recyclage. »

L’article L. 172-1 (nouveau) du même code dispose que :

« Pour la construction de bâtiments neufs, sont fixés par décret en Conseil d’Etat les résultats minimaux :

«  En matière de stockage du carbone de l’atmosphère pendant le cycle de vie du bâtiment ;

«  En matière de recours à des matériaux issus des ressources renouvelables ou d’incorporation de matériaux issus du recyclage. »

 

2.   Les données de la construction ne montrent pas d’impact particulier, à ce jour, des dispositions adoptées

Comme le rapporte sèchement le Conseil national de l’Ordre des architectes, « la loi ELAN n’a pas aidé à construire plus : on en est à 380 000 logements autorisés en 2021, c’est-à-dire une production à peu près équivalente à celle d’avant la loi ». Ce témoignage est confirmé par les chiffres de la construction enregistrés dans les années 2019 à 2021 (voir graphique). Le sentiment est partagé par la Fédération française du bâtiment, qui rappelle que « la loi ELAN avait été annoncée et présentée comme " la " grande loi de simplification de l’acte de construire, qui devait ouvrir la voie à un " choc de l’offre ". Même s’il est vrai que la crise sanitaire est intervenue entre-temps, on ne peut malheureusement que constater que la construction de logement reste à un niveau bas et que le choc de simplification n’a pas eu lieu ».

nombre de mises en chantier en date réELLE, 2000-2020

Source : service des données et études statistiques (SDES), ministère de la transition écologique. Estimations sur données arrêtées à fin avril 2021. Champ : France hors Mayotte.

Selon les conclusions de la commission pour la relance durable de la construction de logements, dite « commission Rebsamen », réunie à la demande de la ministre chargée du logement à partir de mai 2021, un décrochage de la construction particulièrement prononcé a eu lieu dans les zones tendues, là même où se concentre une grande partie de la demande. Les autorisations de construire dans ces zones connaîtraient une dynamique négative avec - 14 % en 2021 par rapport au niveau de l’année 2018 ([27]). Cette tendance baissière apparaît plus clairement dans certaines zones tendues, notamment en Île-de-France et particulièrement en zone A bis. Depuis un point haut atteint en 2017, une diminution s’est engagée qui s’est confirmée même dans la période de reprise observée après la crise sanitaire ([28]). Selon la Fédération française du bâtiment, le cycle des élections municipales de 2020 a contribué à cette tendance.

Le déclin des ventes de logements neufs s’explique principalement par une carence de l’offre et non de la demande, comme en atteste la hausse des transactions immobilières dans l’ancien. Malgré un léger reflux en 2020 en contrecoup de la crise sanitaire, les transactions immobilières dans l’ancien se sont maintenues à un niveau très élevé (1,02 million de transactions en 2020, contre un record historique de 1,07 million de transactions enregistrées en 2019) ([29]). En 2021, elles ont même fortement progressé, avec un volume record estimé à 1,18 million de transactions. Cette situation s’expliquerait notamment par une attractivité forte du logement ancien du fait de la faiblesse de l’offre de logement neuf et de la hausse de l’épargne des ménages à l’occasion de la crise sanitaire.

Cette évolution ne doit pas empêcher une réflexion plus large sur la qualité de la construction. L’Ordre des architectes, auditionné par vos rapporteurs, a évoqué « une dégradation du logement depuis quarante ans, qui s’est accélérée à partir des années 2000 ». Il a notamment mis en cause la baisse de la taille des biens : « au cours des dix dernières années, les appartements de trois pièces ont perdu de 10 à 15 % de leur surface, soit l’équivalent d’une pièce. La surface moyenne d’un logement neuf était de 69 mètres carrés en 2001 ; elle n’est plus que de 62 mètres carrés aujourd’hui ». Ces observations n’ont pas suscité l’unanimité des personnes auditionnées.

Les représentants des architectes ont aussi questionné le recours croissant à la vente en l’état futur d’achèvement (VEFA), notamment par les bailleurs sociaux : « en 2019, 64 % des logements sociaux ont été construits en VEFA, avec une concentration et une exacerbation du phénomène en zone tendue (75 % des logements sociaux en Île-de-France et 73 % en Provence-Alpes-Côte d’Azur) ». Les architectes poursuivent leur diagnostic négatif : « la loi a permis aux bailleurs sociaux de s’exonérer des règles spécifiques de la commande de maîtrise d’œuvre et qu’elle a favorisé un recours massif aux ventes en l’état futur d’achèvement (VEFA) : il en est résulté que les bailleurs ont été privés de leur capacité à assurer et contrôler la qualité des logements construits, sans leur permettre, pour autant, de construire moins cher ou de construire mieux ».

 

II.   la refonte de l’urbanisme rÉglementaire connaÎt des succÈs mais est entravÉE par la succession des textes

A.   la place du SCoT confortÉE puis mise en cause par l’instabilitÉ normative

La loi ELAN a traduit une volonté forte de simplification et d’accélération : il a semblé nécessaire de s’attaquer aux facteurs de lenteur et de rigidité dans la conduite des projets. Parmi ces facteurs, la longueur des procédures d’élaboration des documents de planification et d’urbanisme occupe une place centrale dans les considérations des exécutifs locaux. Le législateur a donc souhaité, à l’article 46 de la loi ELAN, permettre au Gouvernement d’agir par ordonnance pour simplifier le régime du SCoT, du point de vue de son contenu et des règles d’opposabilité qui le gouvernent.

La principale critique a concerné les difficultés de conciliation entre les différents textes affectant le droit de l’urbanisme. Certaines mesures de la loi ELAN sont entrées directement en vigueur, mais un grand nombre d’évolutions ont dû être prises par ordonnances. En particulier, les ordonnances nos 2020-744 et 2020-745 sont entrées en vigueur le 1er avril 2021, au moment de l’examen de la loi Climat et résilience, elle-même publiée le 22 août 2021 et dont la plupart des mesures ont une entrée en vigueur échelonnée en fonction de leur place dans la hiérarchie des normes d’urbanisme.

Cet enchevêtrement de textes induit une très forte complexité pour les acteurs – y compris le législateur lui-même – qui se traduit par une frustration face à ce qui est perçu comme une injonction contradictoire : les acteurs sont priés de stabiliser et planifier l’aménagement par des documents de long terme, mais l’État a modifié les paramètres de ces mêmes documents tous les six mois.

1.   La réforme du SCoT a permis une relative simplification de ses contenus

Au II de l’article 46 de la loi ELAN, le Gouvernement est habilité à prendre par ordonnance « toute mesure de nature législative propre à adapter (…) l’objet, le périmètre et le contenu du SCoT, afin de tirer les conséquences de la création du SRADDET et du transfert de la compétence en matière de PLU aux EPCI à fiscalité propre ».

L’ordonnance n° 2020-744 du 17 juin 2020 vise à moderniser des schémas de cohérence territoriale (SCoT). Selon les termes du Gouvernement dans l’étude d’impact qui accompagne l’ordonnance, son objectif a été de « faire du SCoT un exercice moins formel et de faciliter la mise en œuvre du projet territorial ainsi que le passage à l’action ».

Le processus de concertation mené pour la refonte du SCoT a associé les acteurs de l’aménagement du territoire dans la démarche « Planifions nos territoires ensemble », initiative du ministère de la cohésion des territoires menée en coordination avec la « fabrique à projets » du ministère de la transition écologique. Cette démarche ainsi que ses résultats ont été salués par différents acteurs auditionnés par vos rapporteurs, notamment la Fédération nationale des SCoT, qui a rapporté que l’ordonnance « a été une réussite à la fois sur le travail de fond qui a été mené et sur la qualité de la concertation et du partage entre tous les acteurs ».

Schéma de cohérence territoriale et pôle d’équilibre territorial et rural

Le schéma de cohérence territoriale (SCoT), document d’armature de la planification territoriale élaboré par un établissement public de coopération intercommunale ou par un syndicat mixte, souvent un pôle d’équilibre territorial et rural (PETR), veille, à l’échelle d’un bassin de vie, à l’équilibre des polarités du territoire et de la répartition de l’espace. À cette fin, il doit mettre en cohérence les politiques des communes et des intercommunalités, en matière d’urbanisme, d’habitat et de transport, mais aussi de développement économique et de protection de l’environnement. Pour assurer l’équilibre territorial, il détermine les secteurs à protéger et les équipements publics structurants.

Le territoire français est actuellement couvert à 84 % par des SCoT en termes de nombre de communes impliquées, qui concernent 92 % de la population. La mise en conformité des documents impliquera de renforcer le volet lutte contre l’artificialisation des sols, et transition énergétique et climatique, bien que certains SCoT soient déjà très moteurs sur ces questions. Cependant, sur les 466 SCoT existants à ce jour, 94 SCoT sont en cours d’élaboration, 116 en révision et 229 sont approuvés en 2022. Ces derniers n’auront à se mettre en conformité qu’à la prochaine révision. Les SCoT en projet n’ayant pas délibéré avant le 1er avril 2021 pour engager la procédure sont élaborés selon le nouveau format. Les SCoT ayant déjà délibéré sont libres de choisir leur format.

L’ordonnance n° 2020-744 du 17 juin 2020 vise à moderniser des schémas de cohérence territoriale (SCoT). Selon les termes du Gouvernement dans l’étude d’impact qui accompagne l’ordonnance, son objectif a été de « faire du SCoT un exercice moins formel et de faciliter la mise en œuvre du projet territorial ainsi que le passage à l’action ». Le projet simplifie et assouplit le contenu du document, prévu aux articles L. 141-2 et suivants du code de l’urbanisme :

– sans foncièrement en modifier la teneur, la structure du document est revue par parallélisme avec celle du SRADDET, réorganisée autour de deux documents principaux, le projet d’aménagement stratégique (PAS) et le document d’orientation et d’objectifs (DOO), qui comprend le document d’aménagement artisanal, commercial et logistique (DAACL). Le rapport de présentation trouve sa place en annexe et l’obligation de justifier de la compatibilité avec les documents de rang supérieur est supprimée, ce qui est de nature à simplifier le travail d’élaboration ;

– pour ce qui concerne le contenu du DOO, complexifié par la loi Grenelle II, trois grands thèmes transversaux regroupent les onze sous-thématiques préexistantes : les activités économiques, dont les activités agricoles et commerciales ; les grands éléments de structuration des lieux de vie : offre de logements, de mobilité, d’équipements, de services ; la transition écologique et énergétique, notamment la valorisation des paysages et la gestion économe des espaces naturels, agricoles et forestiers. Cette transformation devrait avoir un impact positif en terme de coût, les études pouvant être mutualisées, et moins dispersées, et la Fédération nationale des SCoT y a vu « une très grande avancée », qui renforce la cohérence des documents produits ([30]).

L’ordonnance rend aussi possible l’élargissement du périmètre au bassin d’emploi et de mobilité, plutôt qu’au bassin de vie, permettant ainsi d’élaborer des SCoT sur des périmètres plus larges, avec des coûts moindres, quand ils sont rapportés à chaque commune. Les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) dotés d’un plan local d’urbanisme à cette même échelle (PLUi) sont notamment invités élaborer un SCoT à l’échelle du bassin d’emploi ou de mobilité. L’ordonnance conforte également, dans le pilotage du SCoT, le rôle des EPCI, et en ouvre le portage aux pôles métropolitains.

En dépit de ces évolutions bien accueillies dans l’ensemble, certains acteurs, notamment Intercommunalités de France et la Fédération nationale des agences d’urbanisme, ont rappelé l’importance de la stabilité des périmètres : « Lorsqu’on change de périmètre au niveau d’un SCoT, on change de gouvernance, et il faut retravailler une vision commune d’un territoire et de son projet, qui est ensuite traduit dans les documents d’urbanisme. Pour nous, c’est un peu compliqué ».

À l’inverse, certains estiment que l’ordonnance a péché par excès de timidité. Elle encourage en effet les pôles d’équilibre territoriaux et ruraux (PETR), successeurs des pays prévus par la loi n° 95-115 du 4 février d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire (« loi Pasqua »), à s’impliquer dans l’élaboration du SCoT, en prévoyant notamment que le PAS du SCoT peut tenir lieu de projet de territoire pour un PETR, si le périmètre du premier inclut celui du second. Le projet de territoire « définit les conditions du développement économique, écologique, culturel et social dans le périmètre du pôle d’équilibre territorial et rural » ([31]) et doit être compatible avec le SCoT sur un périmètre d’ampleur similaire, ce qui induit inévitablement un sentiment de redondance entre les deux documents. Un regroupement des documents, voire même, à terme, des structures porteuses, pourrait utilement être envisagé.

Au demeurant, un volet important de la réforme a concerné l’extension du champ de compétence des SCoT, qui est implicite dans la nouvelle rédaction de l’article L. 141-4 du code de l’urbanisme, qui prévoit que « le DOO peut décliner toute autre orientation nécessaire à la traduction du PAS, relevant des objectifs énoncés à l’article L. 101-2 et de la compétence des collectivités publiques en matière d’urbanisme ». Cette extension, qui résulte d’une simplification par suppression des dispositions précises sur les contenus facultatifs du DOO, ouvre la possibilité aux SCoT d’intervenir dans de nombreux domaines et pourrait occasionner des conflits de compétence avec d’autres niveaux de groupements de collectivités.

2.   La rationalisation de la hiérarchie des normes bien accueillie malgré des impacts réduits

Dans la même volonté de simplification et de rationalisation, au I du même article 46, le législateur a habilité le Gouvernement à prendre par ordonnance « toute mesure relevant du domaine de la loi propre à limiter et simplifier (…) les obligations de compatibilité et de prise en compte pour les documents d’urbanisme :

«  en réduisant le nombre des documents opposables aux schémas de cohérence territoriale, aux plans locaux d’urbanisme et aux documents d’urbanisme en tenant lieu, ainsi qu’aux cartes communales ; (…)

«  en prévoyant les conditions et modalités de cette opposabilité, notamment en supprimant le lien de prise en compte au profit de la seule compatibilité ; (…)

«  en prévoyant que seuls le projet d’aménagement et de développement durable du PLU ainsi que les orientations d’aménagement et de programmation qui concernent l’ensemble du territoire couvert par ledit plan doivent être compatibles avec le document d’orientation et d’objectifs du SCoT. »

Dans le cadre de cet exercice, largement concerté, le Gouvernement a retenu cinq orientations dans son ordonnance :

– la suppression du lien juridique de prise en compte au profit de la seule compatibilité, qui doit permettre de rationaliser et de simplifier la compréhension de la nature des liens juridiques qui unissent les différents documents. Le lien de prise en compte est néanmoins maintenu pour les objectifs du rapport du schémas régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet), compte tenu de son caractère récent, et pour les programmes d’équipement ;

– la confirmation du rôle intégrateur du SCoT dans la hiérarchie des normes opposables aux documents d’urbanisme. Ce positionnement du SCoT s’est brouillé au fil de l’évolution de la législation, divers textes ayant prévu, pour certains documents sectoriels, une opposabilité à la fois au SCoT, au PLU et à la carte communale, et ce que le territoire soit couvert ou non par un SCoT. Or, il n’y a pas lieu de maintenir de double ou triple opposabilité de certains documents lorsque le SCoT joue un rôle intégrateur ;

– l’exclusion de la hiérarchie des normes de quatre documents dont l’opposabilité aux SCoT, PLU(i) et cartes communales ne se justifiait pas réellement. Cette exclusion est le résultat d’un diagnostic de chacun des documents opposables, réalisé autour d’un premier critère tenant à l’impact urbanistique du document, notamment au regard des objectifs listés à l’article L. 101-2 du code de l’urbanisme, et d’un second critère tenant à la pérennité du document ;

– la consécration de la note d’enjeux, évolution bien accueillie par les acteurs locaux. Cette pratique veut que le représentant de l’État dans le département transmette aux auteurs des SCoT et des PLUi, indépendamment de la démarche dite du « porter à connaissance », une note faisant état des enjeux qu’il identifie sur leur territoire et que le document d’urbanisme est appelé à traduire. Elle permet de renforcer le dialogue entre l’État et la collectivité en amont de l’élaboration du document d’urbanisme et favorise la compréhension partagée des enjeux issue de la hiérarchie des normes opposables au document d’urbanisme ;

– l’unification des délais de mise en compatibilité des documents d’urbanisme, objectif expressément énoncé dans l’exposé des motifs de l’habilitation législative. Il s’agit d’appliquer indistinctement à tous les documents d’urbanisme des délais unifiés de mise en compatibilité en faisant démarrer ces délais à partir de la date de la dernière entrée en vigueur du document d’urbanisme. Pour accélérer cette mise en compatibilité, celle-ci pourra s’opérer par modification simplifiée. De plus, le document d’urbanisme bénéficiera d’une immunité contentieuse entre l’entrée en vigueur du document opposable et l’expiration du délai de mise en compatibilité. Les délais de mise en compatibilité ont quant à eux été pour l’essentiel conservés.

En dépit de retours globalement satisfaisants quant aux impacts, certes limités mais positifs de cette réforme, les élus ont tout de même souligné la difficulté récurrente, qui n’est pas née sous la présente législature, de composer avec l’évolution rapide des textes. Le caractère hautement décentralisé de la planification en matière d’aménagement et d’urbanisme a dans ce contexte un effet anti-simplificateur. Il est en effet nécessaire de mettre systématiquement à jour les différents dispositifs réglementaires locaux des innovations décidées par le législateur à l’échelle nationale et précisées par le pouvoir réglementaire national.

Selon les acteurs auditionnés, ces obligations de mise à jour engendrent une tension entre le caractère de long terme et de projection des documents – un SCoT est censé durer vingt ans – et l’obligation de procéder régulièrement à des révisions ou des modifications, parfois structurantes, afin de ne pas voir son document frappé de caducité. Cela est particulièrement ressenti par les acteurs avec les dernières évolutions amenées dans le cadre de l’article 194 de la loi Climat et résilience en matière de réduction de la consommation d’espaces.

On peut comprendre de leurs retours que, dans un contexte de transformations importantes comme celle qui a été causée par la loi Climat et résilience, les impacts, même globalement positifs, de réformes de moindre importance comme celles des deux ordonnances sont, en dernière analyse, plus déstabilisateurs qu’adjuvants pour les acteurs locaux. Le « télescopage » des réformes par ordonnance, entrées en vigueur le 1er avril 2021, et de l’entrée en vigueur des dispositions de la loi Climat et résilience, entrées en vigueur le 22 août, a été vivement critiqué.

DOCUMENTS opposables aux documents d’urbanismE
AVANT et APRÈS LE 1ER AVRIL 2021
(SCOT/PLU/cartes communales)

 

Source : direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (ministère de la transition écologique).

Dans le cas particulier qui concerne la superposition et le conflit entre les dispositions issues de ces deux textes, un facteur supplémentaire consiste dans la difficulté de l’État à mettre de façon efficace et rapide les outils dont les collectivités estiment avoir besoin pour procéder à une mise en conformité avec les nouvelles attentes. Comme le rapporte Mme Virginie Carolo-Lutrot, première vice-présidente d’Intercommunalités de France : « En ce qui concerne la gestion économe des espaces, (…) cette thématique est déjà développée dans les projets d’aménagement stratégique des SCoT (…). Mais la loi Climat et résilience ajoute un niveau de complexité avec la prise en compte de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers, qui doit être mesurée pour respecter la trajectoire de réduction de l’artificialisation des sols. Cet indicateur est à retravailler par les intercommunalités en coordination avec des services de l’État : or ceux-ci nous disent que l’indicateur a beau ne pas encore être prêt, il faut d’ores et déjà l’intégrer dans nos documents d’urbanisme ! »

Il en résulte à l’échelon local une incompréhension accompagnée d’un sentiment marqué de frustration et de décalage entre les attentes des collectivités et les normes imposées par l’État : d’après la même intervenante, « on a l’impression d’un travail comme celui de Pénélope, où on détricote quelque chose qu’on avait construit ensemble et qu’on doit retravailler avec l’ensemble des élus. Pour nous, la trajectoire de sobriété foncière est actée : ce que nous cherchons désormais, c’est la stabilité des modèles et des lois ».

3.   Des modifications du règlement de PLU dont l’impact à ce jour est difficilement mesurable

La loi ELAN comprend plusieurs dispositions modifiant l’allocation des zonages dans le règlement du plan local d’urbanisme.

Une évolution première significative a concerné la promotion de la diversification des usages du patrimoine agricole bâti. En effet, le droit de l’urbanisme limite fortement les constructions et installations autorisées dans les zones naturelles, agricoles ou forestières (NAF) des PLU. Les articles 39 et 41 de la loi ELAN ont visé à faciliter l’utilisation de bâtiments pour de la transformation et commercialisation de produits agricoles et pour l’accueil touristique en complément des activités agricoles.

La dérogation créée concerne trois catégories de zonages : en dehors des parties urbanisées en règlement national d’urbanisme (RNU) ; dans les secteurs des cartes communales où les constructions ne sont pas admises ; dans les zones agricoles ou naturelles des PLU. Elle permet d’autoriser les constructions et installations nécessaires à la transformation, au conditionnement et à la commercialisation des produits agricoles lorsque ces activités constituent le prolongement de l’acte de production, et sous réserve qu’elles ne sont pas incompatibles avec l’exercice d’une activité agricole, pastorale ou forestière sur le terrain d’implantation et ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages, ce que vérifie dans son avis la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF).

Ces articles ont pour objectif de permettre aux agriculteurs de compléter leurs revenus, tout en permettant dans certains cas le réemploi de certains bâtiments. L’évaluation de ces mesures est complexe, car, compte tenu des délais de leur mise en œuvre, elles n’ont pas d’effet immédiat. L’impact peut être réduit, notamment quand ces utilisations se font dans des bâtiments existants : hangars servant à la vente de produits agricoles de façon ponctuelle, transformations et rénovation de granges en habitations touristiques, etc.

Ensuite, toujours dans l’optique de concilier la recherche de la sobriété foncière, la protection des espaces naturels et les besoins du développement économique et la production de logements, le législateur a clarifié à l’article 40 de la loi ELAN le régime des secteurs de taille et de capacité d’accueil limitées (« pastilles » ou « STECAL »). La loi ALUR avait encadré, en 2014, en créant cette catégorie, la possibilité prévue par l’article L. 123-1-5 du code de l’urbanisme de délimiter de tels espaces, qui permettent de prévoir des secteurs où les constructions peuvent être autorisées au sein des zones agricoles ou naturelles des PLU.

Le caractère exceptionnel des STECAL

L’article 40 de la loi ELAN a modifié l’article L. 151-13 du code de l’urbanisme en vue de préciser les critères de définition du caractère exceptionnel de la délimitation des STECAL dans les zones naturelles, agricoles ou forestières d’un PLU, notion introduite dans le cadre de la loi ALUR du 24 mars 2014 pour éviter certaines dérives. Ainsi, depuis la loi ELAN, le caractère exceptionnel de ces secteurs s’apprécie, « entre autres critères, en fonction des caractéristiques du territoire, du type d’urbanisation du secteur, de la distance entre les constructions ou de la desserte par les réseaux ou par les équipements collectifs ». Ces critères ne sont ni exhaustifs, ni cumulatifs.

Grâce à ces précisions, les auteurs du règlement bénéficient d’éléments de référence leur permettant d’expliciter, dans le rapport de présentation, les motifs « exceptionnels » qui justifient la délimitation de STECAL dans les zones agricoles ou naturelles. La précision apportée à cette notion par la loi ELAN fournit également des éléments d’appréciation utiles lors de l’examen des projets de délimitation de STECAL en commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF) et pour l’avis de l’État sur les projets de plan local d’urbanisme.

Cependant, aucune base de données ne permet de vérifier si les précisions apportées par le texte ont eu pour effet de réduire le nombre de STECAL délimités dans les PLU ou de rendre leur délimitation plus pertinente. Pour cela, un examen au cas par cas serait nécessaire.

Par ailleurs, une analyse la jurisprudence intervenue depuis 2018 ne met pas en évidence que l’appréciation des juges administratifs s’appuie particulièrement sur les nouveaux critères de définition du caractère exceptionnel de ces secteurs dans leurs décisions.

Cet encadrement constituait une traduction des objectifs d’encouragement de la densification, de lutte contre l’étalement urbain et de réduction de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers. Il était considéré que les zones naturelles et agricoles doivent rester, par principe, des zones inconstructibles. Néanmoins, certains mécanismes d’exception permettent de gérer le bâti existant présent dans ces zones. Ainsi, la création de STECAL en zone agricole, naturelle ou forestière reste envisageable sous réserve de respecter certaines conditions afin de demeurer exceptionnelle et d’éviter ainsi le mitage des espaces à protéger de l’urbanisation.

Dérogations au règlement du plan local d’urbanisme

L’article L. 152-6 du code de l’urbanisme, créé par l’ordonnance du 3 octobre 2013 relative au développement de la construction de logement, définit un régime spécifique d’autorisations d’urbanisme pour les constructions à vocation de logement dans certaines situations. Au sein des communes situées dans une zone tendue, dans le périmètre d’une GOU, dans les secteurs d’intervention comprenant un centre-ville d’une opération de revitalisation de territoire ([32]), et dans les communes soumises à l’article 55 de la loi SRU, le maire ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de délivrance des autorisations d’urbanisme peut, au cas par cas :

– dans un objectif de mixité sociale, déroger aux règles de gabarit et de densité du règlement pour autoriser un dépassement de la hauteur maximale prévue dans le règlement, sous réserve d’une intégration harmonieuse dans l’environnement ;

– dans un objectif de mixité sociale, déroger aux règles de densité et de création d’aires de stationnement du règlement pour autoriser la surélévation d’une construction existante lorsque cette surélévation permet du logement ;

– dans un objectif de mixité sociale, déroger aux règles de retrait fixant la distance minimale par rapport aux limites séparatives, pour du logement, sous réserve d’intégration harmonieuse dans l’environnement urbain ;

– déroger aux obligations de création d’aires de stationnement dans les secteurs situés à moins de 500 mètres d’une gare ou d’une station de transport collectif guidé ou en site propre (ligne de métro, ou de tram ou bus en site propre) ;

– autoriser une dérogation supplémentaire de 15 % des règles relatives au gabarit pour les constructions contribuant au cadre de vie (balcons, jardins, loggias).

Ce régime, qui prévoit des dérogations qui ne peuvent être accordées par le maire qu’au cas par cas ([33]), ne doit pas être confondu avec le régime, prévu à l’article L. 151-28, des secteurs dans lesquels le règlement définit a priori la possibilité de déroger aux règles de gabarit et hauteur. Ces dépassements, prévus pour les seuls immeubles d’habitation, ne peuvent permettre de dépasser + 20 % de surface de plancher (ou + 30 % pour les constructions énergétiquement exemplaires).

Enfin, la loi ELAN a également, en son article 28, assoupli les dérogations qu’il est possible pour l’autorité compétente d’octroyer en vertu de l’article L. 152-6 du code de l’urbanisme. Elle a d’abord allégé les conditions permettant la transformation d’immeubles existants en logements par reconstruction, rénovation ou réhabilitation. À cet effet, l’objectif de mixité sociale a été levé, sous réserve que la commune ne soit pas carencée au titre de la loi SRU. Une dérogation aux règles de densité, dans la limite d’une majoration de 30 % du gabarit du bâtiment existant, est permise. Le mécanisme dérogatoire de l’article L. 152-6 a encore été retravaillé et nettement élargi depuis, à l’occasion des lois Climat et résilience et 3DS.

Selon la FFB, la transformation de bureaux en logements s’est muée en « serpent de mer » des politiques de logement. En effet, d’après ses données, « les chiffres de transformation de bureaux en logements restent très faibles, représentant environ 1 % des logements neufs produits en France, et ceci alors même que la période est favorable à de telles transformations, car des milliers de mètres carrés de bureaux restent inutilisés du fait de la généralisation du télétravail et pourraient être convertis, dans un contexte où l’on souffre d’un manque crucial de foncier pour la construction de logements neufs ».

B.   Certaines des dispositions littorales ONT ENGENDRÉ DES DIFFICULTÉS D’APPLICATION

Le projet de loi ELAN avait été enrichi, particulièrement lors de son examen par notre commission, de plusieurs dispositions, contenues dans ses articles 42 à 45, relatives au régime issu de la loi du 3 janvier 1986 relative à l’aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral (« loi Littoral »), qui ont été portées notamment par le Gouvernement.

Il s’agissait de répondre à une demande croissante des acteurs locaux en facilitant, sans excès, l’urbanisation en discontinuité des villages et agglomérations existants, sous réserve de l’adaptation des documents de planification avant le 31 décembre 2021. À cette fin, plusieurs modifications d’ampleur limitée ont été apportées :

– une nouvelle catégorie d’espace intermédiaire, entre village et urbanisation diffuse, devait permettre une constructibilité raisonnée ;

– les activités agricoles et conchylicoles ont été encouragées ;

– le déploiement de la fibre a été favorisé avec l’implantation de réseaux de télécommunications dans la bande littorale et les espaces remarquables du littoral.

Au global, les acteurs auditionnés ont émis des avis réservés sur les évolutions enregistrées. La plupart des acteurs ont appelé à aborder plus systématiquement le sujet de l’urbanisme littoral avec un texte entièrement consacré à ce sujet, considérant que le volet « résilience » de la loi Climat et résilience, qui a cet objet, n’a pas suffi à résoudre les problématiques qui se posent.

Le régime de la loi Littoral de 1986

Pour faire face aux défis particuliers des communes littorales ([34]) et notamment au phénomène du mitage urbain qui les caractérisait, le législateur a créé en 1986 un régime d’extension de l’urbanisation spécifique en distinguant trois zones :

– 1° sur l’ensemble des territoires communaux, en principe ([35]), l’extension de l’urbanisation se réalise :

 – en continuité avec les agglomérations et villages existants ;

 – (avant la loi ELAN) en hameaux nouveaux intégrés à l’environnement ;

 – (après la loi ELAN) dans les secteurs déjà urbanisés autres que les agglomérations et villages, à des fins exclusives de logement ou d’hébergement ou de services publics ;

– 2° dans les espaces proches du rivage ([36]), seule une extension limitée de l’urbanisation est admise ([37]), une opération qui conduit à étendre ou renforcer de manière trop significative l’urbanisation ou à modifier sensiblement les caractéristiques d’un quartier par densification pouvant être annulée sur ce fondement ;

– 3° dans la bande littorale de 100 mètres à compter de la limite haute du rivage, deux régimes peuvent prévaloir :

 – en dehors des espaces urbanisés ([38]), les constructions ou installations sont interdites, de même que l’extension de constructions ou installations existantes ;

 – les espaces déjà urbanisés sont considérés comme des espaces proches du rivage et l’extension de l’urbanisation y est donc limitée.

1.   La suppression du hameau nouveau, globalement bien accueillie, a suscité des difficultés ponctuelles mais importantes

Les dispositions littorales ont concerné, en premier lieu, à l’article 42, la modification de la typologie des formes urbaines intermédiaires, qui portent des impacts immédiats en termes de l’extension en continuité permise au titre de l’ensemble du territoire communal des communes littorales (voir encadré). Cet article a supprimé les hameaux nouveaux intégrés à l’environnement (HNIE) et a créé une nouvelle catégorie urbaine, les secteurs déjà urbanisés (SDU).

Il était admis depuis plusieurs années que le régime de l’urbanisation nouvelle en zone littorale ne donnait pas entière satisfaction et devait être revu, de nombreuses insuffisances étant relayées à propos de la catégorie du hameau nouveau intégré à l’environnement. Celle-ci, qui avait eu pour visée initiale de promouvoir une réflexion d’urbanisme globale prenant en compte l’insertion des nouvelles implantations dans l’environnement, faisait l’objet de contournements, les auteurs des documents d’urbanisme se contentant de qualifications hâtives en tant que hameaux pour parvenir à un respect formel des dispositions prévues.

Hameau, village, agglomération

L’article L. 121-8 du code de l’urbanisme, article central pour le régime littoral, dispose que l’extension de l’urbanisation doit se réaliser en continuité avec les agglomérations et les villages existants. Le Conseil d’État a rappelé « qu’il résulte de ces dispositions que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les agglomérations et villages existants, c’est-à-dire avec les zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions, mais que, en revanche, aucune construction ne peut être autorisée, même en continuité avec d’autres, dans les zones d’urbanisation diffuse éloignées de ces agglomérations et villages » ([39]). Jusqu’à la loi ELAN, il était cependant possible de construire, par création d’un hameau nouveau (voir encadré), de déroger à cette interdiction générale.

La jurisprudence a progressivement approfondi les critères de nombre et de densité afin de mieux situer les différences entre les villages, les hameaux et les agglomérations, sans que les catégories soit toujours parfaitement distinguées. Pour le Conseil d’État, une zone comprenant 60 constructions densément regroupées est une agglomération ([40]). La cour administrative d’appel de Nantes juge pour sa part qu’un secteur composé de deux hameaux regroupant plus de 50 constructions dans un rayon de cent mètres constitue un village ([41]). C’est également le cas d’un ensemble d’une cinquantaine de maisons groupées et desservies par des voies de circulation ([42]).

Globalement, le hameau s’entend d’un petit groupe d’habitations, 10 à 15 au maximum, avec éventuellement d’autres constructions, telles que des bâtiments agricoles, isolé et distinct du bourg, du village ou de l’agglomération ([43]). Il est caractérisé par sa taille modeste et le regroupement des constructions qui le constituent.

Le village, par contraste, est une petit ensemble de constructions en milieu rural, plus important que le hameau, et comprenant des équipements ou lieux collectifs administratifs, cultuels ou commerciaux.

L’agglomération recouvre l’ensemble des urbanisations d’une taille supérieure ou d’une nature différente : une zone d’activités, un ensemble de maisons d’habitation excédant nettement la taille du hameau ou du village mais non doté des équipements ou lieux collectifs, une ville, un bourg important.

La suppression du HNIE n’a donc pas suscité de critique appuyée à l’époque de l’examen de la loi. Peu de communes avaient défini de tels espaces depuis 1986, estimant que les hameaux nouveaux étaient peu pertinents dans des territoires souvent marqués par une urbanisation dispersée. L’absence de définition juridique claire de la notion jusqu’en 2014 avait aussi pesé, dans un contexte marqué par une insécurité juridique croissante des documents d’urbanisme du fait de la multiplication des contentieux.

Par ailleurs, les acteurs ont salué la sécurisation forte des autorisations d’urbanisme qui a été effectuée par le législateur, qui a eu le souci de s’assurer que la suppression d’une catégorie n’entraîne pas la fragilisation des permis délivrés. C’est pourquoi la suppression des hameaux nouveaux n’a pas été appliquée aux révisions, mises en compatibilité et modifications des documents approuvés ni aux demandes de permis de construire déposées avant le 31 décembre 2021.

La nouvelle catégorie d’espaces à urbaniser, le secteur déjà urbanisé (voir encadré suivant), permet explicitement le développement d’une constructibilité limitée à la fois dans ses emplacements (dents creuses) et dans ses objectifs (logement, hébergement, services publics).

Selon la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages, « la suppression du HNIE, qui était très peu mise en œuvre, n’a pas posé de difficultés dans les territoires, excepté à La Réunion où il était utilisé pour permettre la réalisation de certains projets dans des zones montagneuses soumises à la loi Littoral, plus particulièrement dans le cirque de Mafate ».

M. Michel Heinrich, président de la Fédération nationale des SCoT, a confirmé que ces évolutions avaient, dans certains cas bien identifiés, occasionné de réelles difficultés pour les collectivités : « pour le cirque de Mafate (La Réunion), la situation est dramatique. Il s’agit d’un territoire sans accès routier ni électricité, concerné par un HNIE qui devait permettre une zone de relocalisation en déplaçant des habitations d’une zone à risque, pour pérenniser l’espace d’habitat et améliorer les conditions de vie. Au 1er janvier 2022, la commune se retrouve sans aucune possibilité d’accorder des autorisations d’urbanisme. (…) Le principe des SDU n’est pas adapté au cirque de Mafate et ses îlets ou hameaux, et la disparition du HNIE laisse le territoire sans solution : aujourd’hui, les habitants habitent dans un territoire à risque, mais la suppression des HNIE signifie qu’on ne peut les emmener nulle part. »

En ce qui concerne l’impact général des évolutions apportées, les retours de l’Association nationale des élus du littoral sont mesurés. L’association estime que la suppression des hameaux nouveaux a eu peu d’effet, le nombre de HNIE qui ont été créés étant assez faible. Ils ont cependant regretté que cet outil ne soit pas mis à contribution dans le cadre des réflexions relatives à la recomposition spatiale des territoires soumis au recul du trait de côte (cf. encadré plus loin). Les SDU ont, pour l’heure, d’après ces mêmes retours, une effectivité limitée.

La catégorie de secteur déjà urbanisé

L’article 42 de la loi ELAN a pour objet de modifier la règle d’extension de l’urbanisation en continuité de l’existant, fixée à l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme :

– il supprime la possibilité d’urbaniser sous forme de « hameaux nouveaux intégrés à l’environnement » (HNIE), délimités dans le PLU, qui existait depuis 1986. Une période transitoire applicable jusqu’au 31 décembre 2021 a accompagné la suppression de ce mécanisme afin de permettre aux projets déjà engagés d’aboutir ;

– il crée les « secteurs déjà urbanisés » (SDU), définis dans le SCoT, forme urbaine intermédiaire entre le village et l’urbanisation diffuse, au sein desquels une densification est possible sous certaines conditions :

– la densification doit se faire par comblement des dents creuses, sans possibilité d’étendre la forme urbaine ;

– la densification ne peut être autorisée qu’en dehors de la bande des 100 mètres et des espaces proches du rivage ;

– les possibilités de construire dans ces secteurs sont circonscrites au logement, à l’hébergement ainsi qu’aux services publics ;

– les constructions et installations ne doivent pas modifier de manière significative les caractéristiques du bâti existant ni porter atteinte à l’environnement ou aux paysages ;

– les autorisations d’urbanisme sont soumises à l’avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites (CDNPS).

Les critères qui permettent de définir un secteur déjà urbanisé dépendent du contexte local, et il n’appartient pas de les fixer au niveau national, notamment s’agissant du nombre de constructions. L’article L. 121-3 du code de l’urbanisme, issu de la loi ELAN, renvoie, d’une part au SCoT le soin de déterminer les critères d’identification de ces secteurs et leur localisation et, d’autre part, au PLU(i) le soin d’en déterminer le périmètre précis.

Ces dispositions impliquent que pour bénéficier de ce dispositif, la collectivité doit nécessairement être couverte par un SCoT et un PLU(i). Une exception existe en Corse où les dispositions du IV de l’article 42 permettent au PADDUC de se substituer au SCoT.

Le législateur a toutefois dressé une liste de critères pour aider à l’identification des secteurs déjà urbanisés, qui permet aux SCoT de s’appuyer sur une grille de lecture :

– densité de l’urbanisation ;

– continuité de l’urbanisation ;

– structuration de l’urbanisation par des voies de circulation et des réseaux d’accès aux services publics de distribution d’eau potable, d’électricité, d’assainissement et de collecte de déchets ;

– présence d’équipements ou de lieux collectifs.

Les critères de cette liste ne sont pas cumulatifs. Cela signifie que si ces critères doivent être étudiés, ils ne doivent pas nécessairement tous être remplis. Par exemple, l’absence d’équipements ou de lieux collectifs ne conduit pas automatiquement à exclure une zone de la qualification de secteur déjà urbanisé.

Par rapport aux autres catégories existantes, on peut considérer que le SDU est caractérisé par un nombre suffisant de constructions pour constituer un village, mais sans en avoir la densité, ce qui explique la possibilité d’en remplir les interstices.

La recomposition spatiale des territoires littoraux

La question de la recomposition spatiale des territoires concernés par des enjeux de dynamique littorale est rendue plus pressante avec les évolutions des documents d’urbanisme apportées dans le volet « résilience » de la loi Climat et résilience (articles 236 à 251).

Les autorités compétentes dans les territoires les plus exposés au recul du trait de côte, définis par décret, doivent délimiter, conformément à la nouvelle section dédiée du code de l’urbanisme (articles L. 121-22-1 à L. 121-22-12), dans leur plan local d’urbanisme ou dans leur carte communale, deux zones :

– l’une correspondant à la survenance du recul à horizon proche (moins de trente ans), dans laquelle seuls peuvent être autorisés les travaux de réfection et d’adaptation des constructions existantes, et les constructions ou installations nouvelles nécessaires à des services publics ou à des activités économiques exigeant la proximité immédiate de l’eau, ou l’extension des constructions existantes, dans les deux cas à condition qu’elles présentent un caractère démontable ;

– l’autre correspondant à l’exposition des enjeux humains au recul du trait de côte à plus long terme (entre trente et cent ans), dans laquelle la démolition de toute construction nouvelle et de toute extension de constructions existantes, ainsi que la remise en état du terrain, sous la responsabilité et aux frais de leur propriétaire, sont imposées lorsque le recul du trait de côte est tel que la sécurité des personnes ne pourra plus être assurée au-delà d’une durée de trois ans.

Face à ces contraintes plus fortes sur certaines parties de leurs territoires, des possibilités nouvelle de recomposition spatiale avec déplacement des habitations seront ouvertes, notamment dans le cadre des projets partenariaux d’aménagement.

2.   La consécration du « SCoT intégrateur » des dispositions littorales, une disposition positive mais encore incertaine

Le juge administratif avait eu, avant la loi ELAN, l’occasion de reconnaître que les dispositions de la loi Littoral s’appliquent directement aux plans locaux d’urbanisme et aux documents en tenant lieu ([44]). Ceci à la différence du droit commun de l’urbanisme, dans lequel des documents de rang supérieur peuvent faire « écran » entre la norme nationale contenue au code de l’urbanisme et la norme locale. Dans la foulée de cette décision, l’État avait déjà souhaité clarifier l’organisation de l’application des dispositions de la loi Littoral.

Dans ce contexte, le législateur a souhaité consacrer la place privilégiée du SCoT dans la déclinaison de la loi Littoral, en prévoyant qu’il « précise, en tenant compte des paysages, de l’environnement, des particularités locales et de la capacité d’accueil du territoire, les modalités d’application des dispositions » du chapitre relatif au littoral. Il est également chargé de « déterminer les critères d’identification des villages, agglomérations et autres secteurs déjà urbanisés », dans le respect des conditions définies par la loi ([45]). C’est donc au SCoT qu’il revient désormais de préciser les modalités d’application des dispositions particulières aux zones littorales, d’une manière qui soit adaptée aux particularités géographiques locales. Les dispositions de la loi Littoral se trouvent donc intégrées à la démarche planificatrice du SCoT intégrateur, situant cette réforme dans la lignée des évolutions enregistrées depuis la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement (« loi Grenelle II »).

Un point obscur demeure toutefois sur l’opposabilité directe, une fois un SCoT conforme aux nouvelles dispositions adopté, des dispositions du code de l’urbanisme. Le Conseil d’État a estimé depuis qu’à ce titre, « l’autorité administrative s’assure de la conformité d’une autorisation d’urbanisme avec l’article L. 121-8, compte tenu des dispositions du SCoT applicable déterminant les critères d’identification des villages, agglomérations et autres secteurs déjà urbanisés et définissant leur localisation, dès lors qu’elles sont suffisamment précises et compatibles avec les dispositions législatives particulières au littoral » ([46]). Le SCoT, sans pour autant faire écran aux dispositions de la loi Littoral, constitue donc désormais un truchement central dans l’appréciation que le représentant de l’État ou le juge administratif peuvent livrer de la conformité d’un projet d’acte ou de document par rapport à la loi.

D’après les retours d’expérience des communes adhérentes de l’Association nationale des élus du littoral (Anel), seule la dernière partie du nouvel alinéa relatif aux SCoT a pour le moment été mise en œuvre par certains SCoT littoraux, essentiellement pour identifier les secteurs déjà urbanisés, tout en soulignant que « de nombreux SCoT comprenant une liste ou des critères d’identification des agglomérations et des villages existaient déjà ». Par ailleurs, l’association a fait valoir un besoin de qualification supplémentaire en ce qui concerne l’obligation faite au SCoT de préciser les modalités d’application de la loi Littoral en vue de problèmes concrets d’application : « nous nous interrogeons pour savoir si le SCoT doit cartographier les espaces remarquables du littoral, et s’il doit prévoir les dérogations prévues par les articles L. 121-4 et L. 121-5, comme les stations d’épuration des eaux usées (STEP) ».

Les retombées de ces évolutions sont globalement jugées comme étant positives. Selon les retours de l’Anel, ces dispositions ont « renforcé notre sécurité juridique par l’action de rationalisation de la hiérarchie des normes » : en effet, d’après ces mêmes retours, « avec le SCoT intégrateur des dispositions de la loi Littoral, nous avons une appréciation in concreto par les SCoT et donc une sécurité juridique renforcée ». Il faut cependant souligner à nouveau que le SCoT ne fait pas écran de l’application de la loi Littoral.

Modification du schéma de mise en valeur de la mer dans le SCoT

L’ordonnance n° 2020-744 supprime également la nécessité, pour les SCoT, de regrouper les principales orientations relatives à la protection et au développement du littoral dans un chapitre individualisé valant schéma de mise en valeur de la mer (SMVM). Sur le fond, cette réforme n’accorde pas de possibilités nouvelles aux SCoT, mais elle améliore la lisibilité du texte en regroupant dans une seule sous-section les dispositions portant sur le littoral.

La procédure est sensiblement simplifiée et les pouvoirs des élus renforcés par la réforme : les articles L. 143-19 et L. 143-23 du code de l’urbanisme, qui imposent de recueillir l’accord de l’État préalablement à l’approbation ou à la modification du chapitre individualisé valant SMVM, sont abrogés par l’ordonnance. Les dispositions transitoires prévoient que, lorsqu’un SCoT comprend un chapitre individualisé valant SMVM, l’établissement public gestionnaire du SCoT peut décider de le maintenir en vigueur ou d’intégrer ses dispositions dans le document d’orientations et d’objectifs lors de toute procédure de révision ou de modification prescrite avant ou après le 1er avril 2021.

Selon la même association, la possibilité d’actionner une modification simplifiée des SCoT et des plans locaux d’urbanisme a été appréciée et largement mise en œuvre.

En ce qui concerne le développement de l’éolien et du photovoltaïque dans les territoires insulaires, prévu à l’article 44, l’association fait savoir que « cette réforme apparaissait nécessaire pour permettre à nos collègues ultramarins et à nos populations, dans ces îles non connectées par des câbles électriques au continent, d’implanter des exploitations de génération d’énergie au sol en discontinuité des agglomérations et villages existants, ce que la jurisprudence administrative interdisait ».

Développement des énergies renouvelables en territoire insulaire

Dans un contexte de promotion des énergies renouvelables, l’article 44 de la loi ELAN vise à permettre le développement de l’éolien et du photovoltaïque sur de petits territoires insulaires.

L’article 44 a introduit dans le code de l’urbanisme un article L. 121-5-1 autorisant, par dérogation à l’ensemble des dispositions de la loi Littoral, la construction des ouvrages nécessaires à la production d’électricité à partie d’énergies renouvelables implantées dans les zones non interconnectées au réseau électrique métropolitain continental dont la largeur est inférieure à dix kilomètres au maximum (soit Chausey, Ouessant, Molène, Sein et les Glénan). Ces ouvrages ne peuvent être autorisés que sous réserve de l’accord du représentant de l’État dans la région, après avis de la CDNPS.

Selon les retours de la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages, depuis son entrée en vigueur, l’article L. 121-5-1 a été utilisé dans les îles Glénan et à Ouessant.

Enfin, en matière de protection renforcée des espaces remarquables du littoral (ERL), à l’article 45, la loi ELAN a modifié l’article L. 121-24 du code de l’urbanisme afin de rendre limitative la liste des aménagements dits « légers » fixée par l’article R. 121-5. Cette modification visait à répondre à des décisions du Conseil d’État, qui avait autorisé dans ces espaces des aménagements non explicitement listés. Selon les retours de l’ANEL, si ce décret ferme la liste des aménagements « légers », il allonge dans le même temps la liste et ne renforce donc pas réellement la protection des espaces remarquables. Toutefois, il a pour vertu de limiter les divergences d’interprétation et donc les contentieux.

Préservation des espaces remarquables du littoral

Selon la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages, l’article 45 de la loi ELAN conforte la philosophie restrictive du régime de préservation des espaces remarquables du littoral, qui sont les milieux les plus sensibles des communes littorales, en raison de leur haute valeur paysagère et environnementale.

À cet effet, l’article 45 introduit une modification de l’article L. 121-24 du code de l’urbanisme qui a pour effet de rendre limitative la liste des aménagements légers pouvant être implantés au sein des espaces littoraux remarquables. L’article L. 121‑24 modifié par la loi ELAN ajoute que ces aménagements ne doivent pas porter atteinte au caractère remarquable du site. Il intègre également, à titre de garantie supplémentaire, la consultation obligatoire de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites (CNDPS) préalablement à leur autorisation.

L’article R. 121-5, pris en application de l’article L. 121-24, précise les aménagements autorisés. Le décret d’application n° 2019-482 du 21 mai 2019 a modifié à la marge les dispositions de cet article en ajoutant quelques catégories d’aménagement pour inclure certains équipements identifiés par la jurisprudence et les canalisations nécessaires aux services publics ou aux activités économiques, dès lors qu’elles sont enfouies et qu’elles laissent le site dans son état naturel après enfouissement. Cet ajout répond aux besoins qu’ont les établissements de thalassothérapie d’installer des systèmes de pompage d’eau de mer nécessaires à leur activité.

C.   des mesures de simplification qui connaissent un bilan en demi-teinte

La loi ELAN s’est inscrite dans une volonté forte de simplification, qui s’est heurtée dans sa réalisation à d’autres impératifs, de telle façon que la Fédération des promoteurs immobiliers a pu rapporter que « saluées par les acteurs, les mesures de simplification de la loi n’ont pas produit les effets escomptés en pratique ». L’ambition de cette législature a été de construire plus sans aggraver l’étalement urbain et l’artificialisation des sols : pour cela il fallait simplifier les procédures afin d’en accélérer le lancement et d’augmenter le nombre de projets de logement mis en chantier chaque année.

Pour autant, la période a également été témoin d’une volonté croissante de ne pas porter atteinte à la qualité de construction : bien au contraire, le législateur a même porté, à partir de la loi du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat, un renforcement des normes en matière d’isolation thermique des bâtiments ([47]). À partir de 2020 et de la crise sanitaire, un accent nouveau a été mis sur la qualité du cadre urbain et sur l’insertion urbaine des projets d’aménagement, ainsi que sur la qualité des logements en matière d’espace, d’agencement et d’orientation.

Vos rapporteurs estiment qu’il est important de garder à l’esprit l’ensemble de ces ambitions, sans les considérer comme des injonctions contradictoires et en continuant de porter haut la volonté d’accomplir de concert ces transformations.

Le législateur a dû également composer avec d’autres objectifs, comme l’amélioration patrimoniale et paysagère des projets, ambition dont témoignent certaines des mesures de la loi ELAN, comme la protection des paysages ou une association plus étroite des paysagistes aux opérations de lotissement (voir précédemment). Certains acteurs auditionnés ont pu chercher, au risque peut-être d’une caricature, à réduire cette problématique à une contradiction nette : « d’un côté, on simplifie ; de l’autre, on ajoute des contraintes supplémentaires, parfois irrationnelles, pour les porteurs de projet », selon les représentants de la Fédération française du bâtiment.

Il apparaît néanmoins que l’intention du législateur ne se réduit pas facilement à cette caricature : en effet, il ne s’est pas agi, dans la loi ELAN, de simplifier pour davantage bétonner, mais de simplifier pour construire de meilleure qualité et plus durablement, ce qui implique en retour d’instituer certaines normes qui permettent de garantir ces objectifs. La simplification est une démarche vertueuse en ce qu’elle cherche à se défaire de procédures et d’obligations dont les coûts ou la longueur, économique ou d’opportunité, sont supérieures aux bénéfices qu’en retire la société. Il ne s’agit nullement, en revanche, de supprimer des normes de façon indiscriminée afin de bonifier la marge des porteurs de projet.

1.   La simplification et l’accélération des procédures d’urbanisme, un chantier encore en cours

Une doléance fréquente du secteur de la construction concerne la difficulté et la longueur des procédures d’autorisation d’urbanisme, qui freinent et fragilisent les projets de toutes natures. Au cours de l’examen de la loi ELAN, le législateur a apporté une attention soutenue à cette question, cherchant par trois leviers à accélérer de façon décisive les processus en la matière :

– l’article 57 limite la liste des pièces exigibles lors des demandes d’autorisations d’urbanisme ;

– l’article 62 fixe l’objectif de la dématérialisation des demandes d’autorisation et de l’instruction ;

– l’article 80 a intégré certaines recommandations issues du rapport Maugüe de 2018 visant à raccourcir les délais contentieux et à sécuriser les projets.

En termes généraux, la Fédération française du bâtiment (FFB) a salué à ce sujet « un ensemble de mesures très positives, pour ce qui concerne les recours contentieux et dans le prolongement des propositions présentées par le rapport Maugüe de 2018 », en soulignant que « les effets de ces mesures sont d’ores et déjà perceptibles sur le terrain ». Toutefois, elle a relevé dans le même temps que « s’agissant de la simplification et de l’accélération du traitement des demandes de permis, le compte n’y est pas ».

L’article 57 de la loi a permis d’encadrer par voie réglementaire le nombre de pièces exigibles par les services instructeurs lors du dépôt d’une demande d’autorisation d’urbanisme. En effet, il était considéré que nombre de services demandaient une quantité excessive de pièces complémentaires. Il s’agissait en vérité d’une réaffirmation législative d’un principe réglementaire déjà prévu au code de l’urbanisme ([48]), faisant interdiction aux autorités compétentes de solliciter des pièces autres que celles limitativement listées par le code de l’urbanisme. Par ailleurs, en précisant la base légale des dispositions relatives au contenu des dossiers de demande d’autorisation d’urbanisme, l’article a empêché l’ajout par le pouvoir réglementaire lui-même de pièces étrangères aux législations énumérées.

En parallèle de ces évolutions, une autre réforme a été adoptée par décret : une demande de pièce illégale lors de l’instruction d’un permis ne peut désormais avoir pour effet d’interrompre le délai d’instruction et de faire obstacle au bénéfice d’une autorisation tacite. Selon la FFB, « c’est un marqueur fort de la volonté de lutter contre les demandes de pièces illégales lors de l’instruction des permis », dont elle se réjouit.

D’après les retours des services concernés, ils ne disposent pas à ce jour d’éléments permettant d’évaluer la bonne application de ces mesures par les autorités compétentes. Il convient de rappeler en tout cas que les pétitionnaires ne sont pas tenus de répondre aux demandes de pièces abusives et peuvent faire annuler par le juge un refus de permis fondé sur cette base dans le cadre d’un recours contentieux. La Fédération française du bâtiment, qui a salué une mesure positive, a rapporté toutefois que « les habitudes sont tenaces et les demandes de permis restent, pour l’administration un moyen de demander des attestations n’ayant pas de lien avec le droit de l’urbanisme ».

Concernant l’obligation de pouvoir recevoir en format dématérialisé les demandes et pour certaines communes de les instruire de façon dématérialisée, entrée en vigueur au 1er janvier 2022, il s’agit là aussi d’une mesure saluée par les acteurs entendus. L’article 62 de la loi ELAN dispose en effet que les communes de plus de 3 500 habitants sont tenues de mettre en place les procédures pour dématérialiser les demandes d’autorisation d’urbanisme. En pratique, cependant, toutes les communes ne sont pas encore prêtes : selon les données transmises par le ministère, seules 60 % des communes sont connectées à la plateforme « Plat’AU » au 1er janvier. Cette réforme va cependant dans le bon sens, a assuré la FFB, car « la crise sanitaire a démontré l’urgence d’accélérer la transformation numérique des services publics, afin d’offrir à tous les citoyens des services en ligne de qualité ».

Selon l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité, cette réforme entraîne la saisine par voie électronique des demandes d’autorisation d’urbanisme, quelle que soit la taille des communes. Elle considère que « c’est un point de vigilance pour l’appropriation du dispositif de saisine électronique, qui ne résulte pas de la loi ELAN mais est aligné dessus, et la mise en place des téléprocédures pour les communes de 3 500 habitants » et attire l’attention sur le fait qu’« il y a un besoin d’accompagnement fort de la part des directions départementales des territoires vis-à-vis des communes qui sont guichets uniques. L’ensemble de la chaîne de dématérialisation doit être opérationnelle et éviter les autorisations tacites ».

D’autres acteurs sont plus critiques : selon la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI), « un délai supplémentaire de trois ans a été accordé par la loi, qui touche désormais à son terme. D’après un sondage auprès de nos adhérents, les trois quarts des collectivités sur les territoires desquelles ces adhérents portent des projets ne mettent pas encore en œuvre la dématérialisation attendue ». Selon la FPI, cette réforme est emblématique de la dynamique plus large de la loi ELAN : « on espérait un " choc de simplification " ; la vérité est qu’il n’y a eu ni choc, ni simplification ». La fédération en conclut qu’une « chape de complexification, qui empêche l’initiative privée de s’épanouir », s’est substituée au « choc de simplification » escompté.

D’autres mesures de la loi ELAN ont permis de sécuriser davantage les situations en modifiant les règles du contentieux de l’urbanisme. Selon le directeur général de Grand Paris Aménagement, « les mesures relatives à la sécurisation ont fait l’objet d’une appropriation progressive par les juges et elles commencent à produire des effets perceptibles : la redéfinition du périmètre de l’intérêt à agir permet désormais de rejeter beaucoup plus rapidement les recours abusifs ; les régularisations s’opèrent plus aisément, notamment quand les autorisations d’urbanisme étaient entachées d’irrégularités plus formelles que substantielles ».

2.   Les évolutions apportées à la procédure de l’évaluation environnementale n’ont pas entièrement porté leurs fruits

Dans le même esprit que pour les dispositions concernant la sécurisation des autorisations d’urbanisme, le législateur a souhaité simplifier et accélérer les démarches en matière d’évaluation environnementale, tout en les rendant plus pertinentes au regard des nouvelles exigences du droit de l’urbanisme, en matière notamment de sobriété foncière :

– l’article 6 a expressément retiré les opérations concernant les zones d’aménagement concerté du champ de l’évaluation (cf. supra), et ouvert la possibilité aux maires d’ouvrir et d’organiser la participation du public par voie électronique, prévue au I de l’article L. 123-19 du code de l’environnement ;

– l’article 7 a soustrait du champ de la concertation préalable prévue par le code de l’environnement les projets faisant déjà l’objet d’une concertation facultative au titre de l’article L. 300-2 du code de l’urbanisme, exclusion qui pouvait concerner un grand nombre de projets ;

– l’article 8, qui ne vise pas en premier lieu à simplifier ou accélérer les procédures mais à les rendre plus pertinentes, ajoute une étude de faisabilité sur le potentiel de développement en énergies renouvelables de la zone visée par une opération d’aménagement dans l’étude d’impact à préparer par le maître d’ouvrage. Cette obligation a été encore alourdie à l’article 214 de la loi Climat et résilience, qui contraint également le maître d’ouvrage à faire réaliser une étude de densification de l’opération envisagée.

Pour ces trois articles, le ministère de la transition écologique ne dispose pas, à ce jour, de données permettant d’en suivre l’application. La mission n’a pas reçu d’éléments supplémentaires sur la mise en œuvre par les exécutifs locaux de la possibilité d’organiser la participation du public par voie électronique. Avec plus de trois ans de retard, le Gouvernement a transmis le 6 janvier 2022 au Parlement un rapport relatif au bilan de l’application de l’ordonnance du 3 août 2016 portant réforme des procédures destinées à assurer l’information et la participation du public à l’élaboration de certaines décisions susceptibles d’avoir une incidence sur l’environnement ([49]).

La FFB a toutefois estimé que « la problématique d’articulation des législations environnementales et urbanistiques, en matière de participation du public, n’a pas été suffisamment traitée par la loi ELAN malgré les demandes des acteurs de l’aménagement et de la construction ». Il a fallu attendre la loi du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique (ASAP) pour mieux articuler les procédures de concertation prévues au code de l’urbanisme et celles prévues au code de l’environnement pour les projets ayant un impact sur l’environnement.

Le directeur général de Grand Paris Aménagement a exprimé des regrets quant à la fragilisation juridique a posteriori de certaines dispositions de la loi, estimant que la « clause filet », qui permet de s’assurer que les projets y compris de petite taille ayant un impact notable sur l’environnement soient bien évalués ([50]), actuellement prévue par le pouvoir réglementaire, constitue une telle fragilisation : selon lui, « il devient désormais possible de contester systématiquement le fait qu’un projet n’ait pas fait l’objet d’une évaluation environnementale, alors même que son montant est inférieur au seuil fixé ».

De son côté, la FFB a pareillement attiré l’attention sur le fait que « les efforts de simplification vont à nouveau être douchés par un projet de décret en cours de concertation, qui prévoit d’introduire une " clause filet " dans le cadre de la procédure d’évaluation environnementale des projets », évolution qui permettrait de soumettre à évaluation environnementale des projets qui se situent actuellement en dessous des seuils fixés par l’annexe à l’article R. 122-2 du code de l’environnement. Selon la FFB, une telle évolution « risque de ralentir et de renchérir fortement le coût d’opérations mineures, voire les rendre irréalisables, compte tenu des contraintes opérationnelles et financières supplémentaires ».

L’évaluation environnementale

L’évaluation environnementale ([51]) vise à faire intégrer par le maître d’ouvrage les préoccupations environnementales et de santé le plus en amont possible dans l’élaboration du projet, du plan ou du programme, ainsi qu’à chaque étape importante du processus de décision publique, selon le principe d’intégration. Elle vise aussi à en rendre compte vis-à-vis du public, notamment lors de l’enquête publique ou de la mise à disposition du public, selon le principe de participation.

La démarche d’évaluation environnementale traduit également les principes de précaution et de prévention : les décisions autorisant les projets et approuvant les plans et programmes et autres documents d’urbanisme doivent être justifiées, notamment quant au risque d’effets négatifs notables sur l’environnement et la santé, ces derniers devant être évités, réduits ou compensés (séquence ERC).

L’évaluation doit rendre compte des effets potentiels ou avérés sur l’environnement du projet, du plan ou du programme et permet d’analyser et de justifier les choix retenus au regard des enjeux identifiés sur le territoire concerné. L’évaluation environnementale doit être réalisée le plus en amont possible, notamment, en cas de pluralité d’autorisations ou de décisions, dès la première autorisation ou décision, et porter sur la globalité du projet et de ses impacts.

L’évaluation environnementale est constituée de trois phases principales :

– l’élaboration d’un rapport d’évaluation des incidences sur l’environnement (étude d’impact pour les projets, rapport sur les incidences environnementales pour les plans et programmes) par le maître d’ouvrage du projet ou la personne publique responsable du plan ou programme ;

– la réalisation des consultations prévues, notamment la consultation de l’autorité environnementale, qui rend un avis sur le projet, plan, programme et sur le rapport d’évaluation des incidences sur l’environnement, et la consultation du public ;

– l’examen par l’autorité autorisant le projet ou approuvant le plan des informations contenues dans le rapport d’évaluation et reçues dans le cadre des consultations.

Les acteurs de la construction semblent globalement d’accord pour estimer que la clause filet doit être mieux encadrée, afin qu’elle ne soit mobilisable qu’à titre exceptionnel et par décision motivée et qu’un délai doit être laissé avant son entrée en vigueur, afin de laisser le temps aux opérateurs et à l’administration de procéder aux adaptations nécessaires et ainsi d’assurer l’entrée en vigueur du dispositif dans de bonnes conditions.

III.   la revitalisation du territoire, une politique volontariste et ambitieuse

A.   le dÉPLOIEMENT des ORT A permis d’intensifier la dynamique de revitalisation des centres-bourgs

1.   Un outil juridique utile aux effets positifs

Une des principales créations de la loi ELAN, l’opération de revitalisation de territoire (ORT), qui résulte de son article 157 et constitue le cœur de son volet « revitalisation », est un outil à la disposition des collectivités territoriales, qui doit permettre la mise en œuvre d’un projet de territoire, dans les domaines urbain, économique et social, ayant pour objectif de lutter contre la dévitalisation des centres-villes. Il s’agit d’un des rares dispositifs suscitant l’unanimité positive des acteurs.

L’opération est encadrée par une convention réunissant l’État, ses établissements publics intéressés, un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre, tout ou partie de ses communes membres, comprenant nécessairement sa ville principale, ainsi que toute personne publique ou acteur privé susceptible d’apporter un soutien ou de prendre part à la réalisation des opérations prévues par la convention. La convention définit sa durée et le calendrier, le plan de financement et la répartition dans les secteurs d’intervention délimités des actions prévues. La mise en œuvre de ces actions fait ensuite l’objet d’un bilan annuel et d’une évaluation biannuelle.

Organisée à plusieurs échelles, l’ORT repose d’abord sur un périmètre de stratégie territoriale étendu à tout ou partie de l’EPCI signataire, afin d’y élaborer un projet global de revitalisation du territoire. Au niveau opérationnel, elle se décline, à l’heure actuelle, en secteurs d’intervention comprenant nécessairement le centre-ville de la ville principale de l’EPCI accueillant une ou plusieurs actions dans le cadre de l’ORT. Le périmètre défini peut également inclure un ou plusieurs centres-villes d’autres communes membres de cet établissement ([52]).

Le dispositif se matérialise concrètement par une série d’outils financiers et institutionnels au service d’un projet de territoire maîtrisé (voir encadré). Une fois le projet de territoire défini par les élus en lien avec l’État et les partenaires, la convention d’ORT confère de nouvelles capacités juridiques et fiscales afin de renforcer l’attractivité commerciale en centre-ville par un régime dérogatoire en matière d’autorisations commerciales, de favoriser la réhabilitation de l’habitat par l’accès prioritaire aux aides budgétaires et fiscales, de faciliter le déroulement des projets d’urbanisme opérationnel à travers la mise en œuvre de dispositifs expérimentaux et de mieux maîtriser le foncier, notamment par le renforcement des droits de préemption.

L’ORT constitue également l’outil juridique central sur lequel s’appuient les deux programmes de revitalisation des centres-villes portés par l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), « Action Cœur de ville » (ACV), qui compte 222 villes bénéficiaires, et « Petites villes de demain » (PVD), qui compte 850 signataires au 30 juin 2021.

La fédération des SCoT a évoqué un « dispositif positif », qui « traduit un esprit d’adaptation des dispositifs de l’État aux collectivités, qui est à valoriser ». M. François Rieussec, président de l’Union nationale des aménageurs, a salué « une véritable révolution dans la façon de penser ». Comme d’autres, il a évoqué positivement la possibilité d’élargir le dispositif à l’ensemble du territoire, constatant qu’elle s’est à ce jour « trouvée concentrée sur des secteurs où il y a peu de marchés et peu de demande » et estimant que « la méthode est bonne, il faut la généraliser pour ce qui concerne notamment la confiance entre acteurs publics et privés ».

Facultés ouvertes par la conclusion d’une convention d’ORT

Les dispositifs ouverts par la mise en œuvre d’opérations de revitalisation de territoire (ORT) renforcent les projets des territoires cherchant à regagner en attractivité et à revitaliser leur tissu urbain. Cette démarche permet notamment d’accéder à :

– une opération programmée d’amélioration de l’habitat (OPAH) prolongée, afin de mieux intégrer la dimension de l’habitat au projet de revitalisation urbaine du centre-ville.

– la défiscalisation de la réhabilitation des logements grâce au dispositif « Denormandie dans l’ancien » ;

 l’abattement sur les plus-values résultant de la cession de biens immobiliers bâtis applicable dans les villes signataires d’une ORT (loi de finances 2020 pour 2021) ;

– des financements de l’Agence nationale de l’habitat (Anah) dans le cadre de la vente d’immeuble à rénover (VIR), subvention disponible pour les opérateurs publics lorsqu’ils s’engagent à effectuer des travaux de réhabilitation ou d’amélioration dans un délai déterminé et perçoivent des sommes de l’acquéreur avant leur réalisation, ou du dispositif d’intervention immobilière et foncière (DIIF), subvention délivrée aux opérations de revalorisation des îlots d’habitats vacants ou dégradés ;

– l’exemption d’autorisation d’exploitation commerciale (AEC) pour des projets non artificialisants situés dans un de ses périmètres d’intervention ainsi qu’une suspension par le préfet de l’examen en commission départementale d’aménagement commercial (CDAC) des projets commerciaux en périphérie. Trois communes ont bénéficié d’un tel arrêté en 2020 : Limoges (Haute-Vienne), Blois (Loir-et-Cher) et Saint-Dié-des-Vosges (Vosges) ;

– le permis d’aménager « multi-sites », étendu au territoire entier de l’ORT et non plus seulement au secteur d’intervention depuis l’article 112 de la loi 3DS, ainsi que le permis d’innover ;

– les dérogations au règlement de plan local d’urbanisme prévues à l’article L. 152‑6‑4 du code de l’urbanisme, clarifiées à l’article 96 de la loi 3DS ;

– les communes ORT et classées en zone de revitalisation des centres-villes (ZRCV), peuvent exonérer totalement ou partiellement d’impôts locaux les petites et moyennes entreprises (PME) exerçant une activité commerciale ou artisanale en centre-ville.

– le bénéfice du droit de préemption urbain renforcé : les villes peuvent instaurer des périmètres de sauvegarde du commerce et de l’artisanat, en écho à leur projet de revitalisation urbaine, permettant ainsi de renforcer juridiquement la procédure de préemption en faveur de la sauvegarde du petit commerce ;

– le bénéfice du droit de préemption sur les fonds artisanaux, les fonds de commerce, les baux commerciaux et les terrains qui font l’objet de projets d’aménagement commercial ;

– un apport en ingénierie par les agences d’urbanisme situés à proximité ;

– des prêts à taux privilégiés de la Banque des territoires peuvent être délivrés aux villes dont les projets de revitalisation du centre-ville sont situés dans le périmètre ;

– une aide majorée à la relance de la construction durable, financée par le plan « France Relance » et destinée à l’ensemble des communes françaises pendant deux ans, est calculée, dans l’objectif de favoriser la sobriété foncière, pour tout mètre carré de surface de logement construit au-delà d’un certain seuil de densité ; cette aide est augmentée de 20 % en ORT.

Les aménageurs ont également insisté sur la pertinence d’une extension de la contractualisation à d’autres zones et d’autres villes. En effet, d’après eux, l’essentiel de la croissance urbaine est aujourd’hui porté par les couronnes et les périphéries métropolitaines : comme c’est là que se concentre la demande, il faut y multiplier les projets. Si une telle perspective peut se révéler intéressante, vos rapporteurs estiment qu’elle ne doit toutefois pas être confondue avec une ouverture à poursuivre l’étalement en périphérie urbaine que la France a déjà connu depuis plusieurs décennies. Une telle tendance doit au contraire porter sur un nouvel ELAN donné à la densification des quartiers pavillonnaires et au recyclage des entrées de ville.

Du fait de leur succès, les ORT ont vu, à l’article 95 de la récente loi 3DS, leur champ d’application élargi afin de permettre, sur dérogation préfectorale, la conclusion d’une convention d’ORT sur le périmètre d’une ou de plusieurs membres d’un EPCI, sans intégrer la ville principale de cet établissement. Pour permettre l’octroi de cette dérogation, deux conditions doivent être réunies : la ou les communes signataires doivent présenter une « situation de discontinuité territoriale ou d’éloignement » par rapport à la ville principale de l’EPCI dont elles sont membres, et la convention qui est conclue doit identifier parmi ses signataires une ou plusieurs villes présentant des « caractéristiques de centralité », qui sont appréciées notamment au regard de la diversité des fonctions urbaines exercées en matière d’équipements et de services vis-à-vis des communes environnantes.

Cette extension a été pensée pour des cas qui sont remontés du terrain, où la configuration de l’EPCI fait que certaines villes secondaires jouent un rôle de centralité, en discontinuité urbaine avec la ville-centre de cet EPCI. Les cas principalement remontés sont ceux de la Métropole Aix-Marseille Provence, de la Métropole Nice-Côte d’Azur et de certains EPCI des départements d’outre-mer, notamment à La Réunion. Cette extension mesurée est positive, car c’est précisément le peu de demandes qui justifie, dans ces territoires, la mise en œuvre de dispositions fortement dérogatoires au droit commun. Une normalisation de telles dispositions dérogatoires, en revanche, comme y appellent certains acteurs, pourrait revenir à mettre en péril le droit commun.

Là où la dispense d’autorisation d’exploitation commerciale (voir plus loin) a eu un impact remarqué, d’autres dispositifs comme le dispositif fiscal « Denormandie dans l’ancien » permettant le financement de la rénovation des logements anciens, ou le permis d’aménager multi-sites, n’ont pas eu le succès escompté (cf. supra).

Au demeurant, la FFB souligne l’insuffisante association aux contrats de revitalisation territoriale des opérateurs privés pour la réalisation, dans les périmètres d’intervention prioritaire, des opérations d’aménagement, de construction ou de démolition-reconstruction. Selon elle, les raisons de cette lacune sont les suivantes : le modèle économique de ces opérations de restructuration n’est pas viable, et la signature n’est possible que si les personnes ne se trouvent pas placées en situation de conflits d’intérêts. Selon la FFB, il importe de lever cette dernière exigence, car elle entraîne l’exclusion du dispositif d’un opérateur, propriétaire d’un foncier stratégique dans le périmètre d’intervention prioritaire d’une ORT, qui est considéré à ce titre comme étant en conflit d’intérêts alors qu’il souhaite, sur le foncier qu’il maitrise, réaliser l’opération prévue au contrat d’ORT.

2.   Le Gouvernement a mené une politique financièrement volontariste d’accompagnement du déploiement des ORT

Le dispositif connaît un succès particulièrement prononcé dans les villes éligibles aux programmes Action Cœur de ville (ACV) et Petites villes de demain (PVD) de l’Agence nationale de la cohésion des territoires, qui ont intégré l’ORT comme un outil supplémentaire de revitalisation des territoires. Elles prévoient ainsi de faciliter la conversion de leur convention-cadre ou convention d’initialisation en convention d’ORT ([53]).

L’ORT permet de ce fait, selon la Fédération française du bâtiment (FFB), « un rééquilibrage de l’aménagement du territoire au profit des villes moyennes ou des centralités locales ». En revanche, la même fédération remarque « qu’en dehors de ces deux programmes, le dispositif ORT peine à convaincre, notamment en raison de l’absence de financements publics spécifiquement ».

Déploiement des ORT au 31 octobre 2021

À fin janvier 2022, selon le ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, qui pilote le dispositif, 278 conventions d’ORT ont été signées ou homologuées, parmi lesquelles 81 sont de dimension pluri-communale, souvent associées à une opération programmée d’amélioration de l’habitat (OPAH) multi-sites et à une ville du programme Action Cœur de ville (ACV), avec une montée en puissance des villes du programme Petites villes de demain (PVD).

Les 278 conventions concernent 484 villes, parmi lesquelles 223 sont membres du programme ACV et 127 du programme PVD.

Au-delà de ces 484 villes déjà signataires, 609 autres communes ont des projets d’ORT, et la contractualisation de l’ensemble des villes du programme PVD est attendue d’ici la fin de l’année 2022.

Source : Agence nationale de la cohésion des territoires.

Le programme national ACV est une politique publique partenariale qui vise, depuis son lancement effectif en mars 2018, à soutenir le développement et l’attractivité des villes moyennes, de métropole et d’outre-mer, qui exercent un rôle de centralité pour l’ensemble de leur territoire. La politique repose principalement sur l’investissement prioritaire des cœurs de ville de 222 territoires bénéficiaires concernant 234 villes moyennes hexagonales et ultramarines. Fin 2021, 3,8 milliards d’euros (Md€) ont été engagés depuis le début du programme, sur un objectif au 31 décembre 2022 de 5 Md€, les engagements provenant de trois financeurs : la Banque des Territoires (groupe Caisse des dépôts et consignations), Action Logement et l’État (Agence nationale de l’habitat et dotation de soutien à l’investissement local).

Au 31 décembre 2021, plus de 50 000 logements ont été conventionnés à l’Anah, et près de 15 000 logements ont été réhabilités ou construits par Action Logement. La Banque des Territoires a mené 81 projets de construction ou réhabilitation de locaux d’activités. L’ouverture de 100 antennes locales du Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) doit permettre de promouvoir l’accès à la formation dans les villes moyennes (72 antennes sont ouvertes en janvier 2022). 56 villes ACV ont été retenues pour accueillir des antennes de la direction générale des finances publiques (DGFiP), permettant le redéploiement dans les territoires de 2 500 emplois des grandes métropoles. D’autres partenariats existent avec la SIAGI, pour la garantie des emprunts des commerçants et artisans, la Cité de l’architecture, Enedis, le Centre national de la fonction publique territoriale, le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement, le groupe La Poste, et d’autres acteurs majeurs.

La contractualisation ACV permet aussi aux collectivités partenaires de participer aux appels à manifestations d’intérêt pour des projets nationaux comme « Réinventons nos cœurs de ville », qui vise à aider les villes souhaitant lancer un appel à projets local sur un projet innovant et emblématique en centre‑ville, ou encore l’initiative « Territoires pilotes de sobriété foncière », avec sept agglomérations lauréates, et une vingtaine d’autres associées, toutes en ORT. Le programme a aussi permis aux villes partenaires d’être lauréates des fonds friches lancés en mai et novembre 2021, dans le cadre du plan « France Relance ».

De plus en plus de communes du programme Petites villes de demain (PVD), lancé le 1er octobre 2020, concluent des conventions d’ORT. Le programme PVD est un programme d’appui aux villes comptant moins de 20 000 habitants, qui vise à donner davantage de moyens aux élus, tout au long de leur mandat, pour concrétiser leurs projets de revitalisation au bénéfice de leur commune et territoires alentours. Annoncé par le Premier ministre en septembre 2019, il se fonde sur trois leviers : le soutien en ingénierie, la mise en réseau au sein d’un club, et des actions thématiques. Piloté par l’ANCT, il rassemble aussi la Banque des Territoires, l’Anah, le Cerema, l’Agence de la transition écologique et des associations d’élus. Doté de 250 millions d’euros en ingénierie dès l’origine, le budget total du programme à l’horizon 2026 atteint 3 Md€ hors plan de relance.

Selon les données transmises par le ministère de la cohésion des territoires, le programme concerne 1 646 communes dans 878 EPCI : leur démographie est basse, avec une densité faible ou intermédiaire, et une population plus âgée et plus fragile que la moyenne nationale. 55 % des communes du programme comptent moins de 3 500 habitants.

B.   l’urbanisme commercial renforcÉ a Permis une meilleure planification territoriale

1.   L’ORT ouvre la voie à un régime à la fois protecteur et assoupli pour les autorisations commerciales

Au sein des ORT, la loi ELAN a prévu, à son article 157, la mise en œuvre d’une dispense d’autorisation d’exploitation commerciale (AEC) pour la réalisation d’un projet d’équipement commercial dans un secteur ORT comprenant un centre-ville identifié dans les centres-villes bénéficiant d’une ORT. Cette disposition vise à imprimer une impulsion supplémentaire à la revitalisation commerciale des centres-bourgs concernés. Elle ne s’applique pas pour les projets engendrant une artificialisation des sols.

L’autorisation d’exploitation commerciale

Le régime de l’aménagement commercial, prévu aux articles L. 750-1 et suivants du code de commerce ([54]), est un régime d’autorisation. Lorsqu’un entrepreneur souhaite ouvrir ou étendre une surface commerciale supérieure à 1 000 mètres carrés de surface de vente, il doit obtenir au préalable une autorisation d’exploitation commerciale (AEC) ([55]).

Cette autorisation est délivrée par une commission départementale de l’aménagement commercial (CDAC), dont la décision est susceptible de recours devant la Commission nationale de l’aménagement commercial (CNAC). La délivrance de l’AEC s’articule avec celle de l’autorisation d’urbanisme, qui est délivrée par l’autorité compétente en matière d’urbanisme (maire ou président d’intercommunalité) ([56]). Deux situations sont donc possibles :

– lorsque le projet de création ou d’extension de surface requiert un permis de construire, celui-ci ne peut être délivré par le maire qu’après avis favorable de la CDAC. Dès lors que la demande de permis de construire a fait l’objet d’un avis favorable de la CDAC, il tient alors lieu d’autorisation d’exploitation ([57]) ;

– lorsque le projet ne requiert pas de permis de construire, l’entrepreneur saisit directement la CDAC pour obtenir l’autorisation d’exploitation.

La CDAC apprécie si les implantations, extensions et transferts d’activités ainsi que les changements de secteur d’activité des entreprises commerciales et artisanales répondent, dans le cadre d’une concurrence loyale entre acteurs, aux exigences existantes en matière d’aménagement du territoire, de protection de l’environnement et de qualité de l’urbanisme ([58]). De ce fait, les critères d’appréciation de l’implantation des projets ont évolué pour mieux prendre en compte l’intégration urbaine des équipements commerciaux, la consommation économe de l’espace, leur qualité environnementale et la nécessité de limiter les nuisances sur l’environnement proche.

Un régime renforcé, issu de l’article 215 de la loi Climat et résilience, s’applique pour les projets commerciaux engendrant une artificialisation des sols ([59]), qui sont interdits en principe mais dont certains peuvent obtenir une dérogation, après quoi il peut être demandé une autorisation d’exploitation dans les conditions de droit commun :

– si le projet a une surface de vente supérieure à 10 000 mètres carrés, il ne peut lui être accordé de dérogation et aucune demande d’autorisation ne peut donc être déposée ;

– si le projet a une surface de vente inférieure à ce plafond, une dérogation peut être accordée s’il remplit les quatre conditions cumulatives suivantes :

 – il s’insère en continuité avec les espaces urbanisés ;

– il s’insère dans un secteur au type d’urbanisation adéquat ;

– il répond aux besoins du territoire ;

– il se situe dans le secteur d’intervention d’une ORT ou dans un quartier prioritaire ou dans une opération d’aménagement située au sein d’un espace déjà urbanisé afin d’en favoriser la mixité fonctionnelle ou dans une zone commerciale ou une centralité urbaine ou un secteur d’implantation périphérique définis par un SCoT ou une zone d’activité commerciale délimitée par un PLUi sous réserve que ces documents soient entrés en vigueur avant le 22 août 2021, ou fait l’objet d’une compensation par transformation d’un sol artificialisé en sol non artificialisé.

Pour les projets d’une surface de vente supérieure à 3 000 mètres carrés, la dérogation n’est accordée qu’après avis conforme du préfet.

Cette dispense est accompagnée, d’autre part, de la possibilité pour le préfet de suspendre l’implantation d’un nouveau commerce à l’extérieur des secteurs d’intervention de l’ORT, le plus souvent en périphérie urbaine, avec l’idée de décourager l’implantation de grandes surfaces en périphérie urbaine, qui ont historiquement contribué à la dévitalisation des centres-villes. Cependant, cet outil n’a été que peu sollicité, comme le rapportent les représentants du Conseil national des centres commerciaux : « ce moratoire a été peu utilisé : une fois dès la mise en œuvre de la loi ELAN, en janvier 2019, sur deux projets dans une préfecture, et depuis, à notre connaissance, il n’a pas été utilisé par les préfets ».

2.   L’encadrement et la planification renforcés des implantations commerciales a permis un urbanisme de meilleure qualité

La relative ineffectivité de ce moratoire a amené le Gouvernement, par une circulaire du Premier ministre 24 août 2020 ([60]), à préciser aux préfets, dans le cadre de la lutte contre l’artificialisation, leur rôle en matière d’aménagement commercial. Il y a rappelé que les CDAC doivent apprécier les effets des projets et refuser ceux qui pourraient compromettre les objectifs d’intérêt général susmentionnés, « au premier rang desquels la lutte contre l’artificialisation des sols ». Le Premier ministre invite les représentants de l’État à exercer une « vigilance toute particulière » sur le respect du principe de la consommation économe de l’espace.

Dans ce même esprit, l’article 215 de la loi Climat et résilience a apporté une meilleure sécurité et une lisibilité accrue. Dans le cadre du nouveau principe général du droit de l’urbanisme portant absence de toute artificialisation nette des sols et réduction par deux de l’artificialisation dans la prochaine décennie, il a organisé un encadrement renforcé pour les projets commerciaux artificialisants d’une surface inférieure à 10 000 mètres carrés et l’interdiction des projets artificialisants au-delà de ce plafond.

Les acteurs sollicités n’ont pas remis en cause ces objectifs, tout en soulignant la nécessité d’accompagner la requalification des entrées de ville, ce que permet le régime de la loi Climat et résilience. Dans ce sens, l’article 96 de la loi 3DS, qui modifie le régime des dérogations au règlement de plan local d’urbanisme pour permettre « le recyclage et la transformation des zones déjà urbanisées », constitue une évolution positive.

L’article 169 de la loi ELAN a marqué le renforcement de la planification commerciale par le caractère obligatoire du document d’aménagement artisanal et commercial (DAAC, dénommé DAACL depuis son élargissement à la planification en matière de logistique commerciale à l’article 219 de la loi Climat et résilience. La fédération des SCoT a applaudi cette évolution, remarquant qu’elle avait « permis de sécuriser juridiquement certaines pratiques déjà à l’œuvre, et a surtout complété intelligemment l’arsenal juridique dont disposent les élus du bloc local pour piloter les stratégies d’aménagement commercial dans les territoires et mieux encadrer les implantations commerciales ». La fédération des Scot attire en effet l’attention sur la nécessité de sensibiliser les élus au besoin de travailler les mutations en cours du commerce, les enjeux de modernisation, de requalification et d’évolution des espaces commerciaux vers d’autres fonctions, le maintien d’un maillage de magasins physiques dans le territoire face au développement du numérique, ainsi que les liens de complémentarité centre-ville et périphérie.

Les évolutions en matière d’aménagement commercial n’ont pas, globalement, été mises à mal par les autres changements intervenus depuis, notamment dans le cadre de la loi Climat et résilience. En revanche, plusieurs acteurs ont soulevé des inquiétudes concrètes quant à la possibilité de voir les objectifs de la loi ELAN mis à mal par une autre disposition, issue de l’article 26 ter de la loi. Cette disposition permettra, dans certains territoires – secteurs d’intervention des ORT, communautés urbaines, métropoles, métropole d’Aix‑Marseille-Provence, métropole de Lyon et métropole du Grand Paris – d’exempter les demandes d’autorisation d’exploitation commerciale de passage devant la CDAC. Les représentants du Conseil national des centres commerciaux ont rappelé qu’une telle évolution « ôte aux élus locaux un pouvoir de décision et d’intervention sur les projets commerciaux », et donc que « les projets commerciaux pourraient se voir développer sans autorisation ni contrôle à l’extérieur même des centres-villes ». En effet, l’accent mis dans cette disposition sur le rôle planificateur du document d’urbanisme, au détriment de l’autorisation individuelle, impliquera une difficulté à parvenir à une « appréciation juste des projets ». Comme le rappellent ces mêmes acteurs, « c’est la vertu des CDAC, qui pour les opérateurs ne représente pas une grande difficulté : c’est qu’il y a une étude au cas par cas de chaque projet sur le fondement d’éléments concrets, ainsi que des échanges préalables avec les élus du territoire ».

Autres mesures de la loi ELAN concernant le régime de l’AEC

Au cours de l’examen parlementaire de la loi, de nombreuses dispositions ont été ajoutées pour affiner l’expertise des commissions départementales et améliorer le traitement des dossiers ([61]) :

– la revitalisation du tissu commercial est prise en compte à l’échelle du bassin de vie (article 166) : la CDAC doit en effet tenir compte de la contribution des projets à la préservation et à la revitalisation du tissu commercial, non seulement dans le centre-ville de sa commune – ce qui avait été prévu dans la loi relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises du 18 juin 2014 – mais aussi dans les communes limitrophes et dans l’intercommunalité plus généralement ;

– l’implication des chambres consulaires dans l’instruction des demandes d’AEC a été augmentée (article 163) : la composition des CDAC a évolué, comprenant trois personnalités supplémentaires, désignés par la chambre de commerce et d’industrie (CCI, la chambre des métiers et de l’artisanat (CMA), et la chambre d’agriculture, afin de mieux éclairer les élus. La protection des espaces agricoles a été renforcée avec un avis préalable de la chambre d’agriculture lorsqu’un projet implique une consommation de terres agricoles. Les chambres consulaires sont habilitées à réaliser, à la demande du préfet, des études de consommation de terres agricoles ou d’organisation du tissu économique, commercial et artisanal ;

– la requalification des sites commerciaux a été facilitée : l’obligation de démantèlement et de remise en état des sites sur lesquels une exploitation commerciale a cessé est renforcée (article 164), le seuil de soumission à AEC des projets de réouverture, sur le même emplacement, de magasins de commerce de détail dont les locaux ont cessé d’être exploités depuis plus de trois ans est augmenté de 1 000 mètres carrés à 2 500 mètres carrés (article 172) ;

– la procédure d’instruction après un premier refus a été accélérée (article 171) : après le refus d’un projet par la Commission nationale d’aménagement commercial (CNAC), il n’est pas nécessaire de reprendre au début la procédure : le pétitionnaire est fondé à déposer un second dossier directement auprès de la CNAC, sans repasser en CDAC, à condition toutefois que le projet ait été mis en conformité avec les motifs du rejet sans pour autant qu’il n’y ait été porté de « modification substantielle ». Le Conseil national des centres commerciaux a souligné l’utilité de cette accélération.

 


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   seconde partie :
Les dispositions relatives au logement

I.   la restructuration des organismes de logement social : un bilan MITIGÉ

A.   Un dispositif de consolidation volontariste

1.   Le regroupement des bailleurs sociaux visait à répondre à des impératifs économiques

Partant des constats selon lequel la taille moyenne des bailleurs sociaux était relativement faible, le mouvement de consolidation des opérateurs lent et les effets induits par cette dynamique, peu perceptibles sur les territoires, le Gouvernement avait souhaité, en 2018, donner une nouvelle impulsion à la recomposition du tissu des opérateurs du secteur des habitations à loyer modéré (HLM).

L’étude d’impact annexée au projet de loi ELAN indique ainsi que le secteur du logement social compte, en 2015, 4,8 millions de logements (foyer-logements exclus) et 861 bailleurs, dont 261 offices publics de l’habitat (OPH), 241 sociétés anonymes d’HLM (SA d’HLM, dites aussi entreprises sociales pour l’habitat [ESH]), 184 sociétés d’économie mixte (SEM) et 175 sociétés coopératives d’HLM (dont 143 à activité immobilière dominante).

Le nombre moyen de logements gérés par organisme est faible, soit 5 621 logements, et avec une forte dispersion autour de cette moyenne. Si le nombre moyen de logements par organisme est de 8 482 logements pour les offices et de 8 242 logements pour les entreprises sociales de l’habitat, il n’est que de 2 215 logements pour les SEM et de 164 logements pour les coopératives. ([62])

Par ailleurs, le modèle économique des bailleurs sociaux, notamment pour les plus petits d’entre eux, se révèle fragile et soumis à de fortes pressions :

– du point de vue des ressources, la gestion locative apparaît fragilisée à long terme par des évolutions économiques, sociétales et réglementaires : la précarisation des populations résidentes dans le logement social (accroissement de la proportion de populations à faibles ressources dans les attributions, contexte économique général, etc.) pèse directement sur les revenus locatifs ;

– du point de vue des charges supportées, l’accroissement des besoins en fonds propres résultant du moindre niveau des subventions publiques, de la croissance du coût du foncier en zones tendues et du coût de la construction neuve, ainsi que le durcissement de l’encadrement réglementaire (loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, réglementation thermique 2012, loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, etc.), ont fortement affecté la capacité de production de nouveaux logements.

Par ailleurs, les besoins croissants en rénovation devraient également absorber une part supérieure de l’autofinancement, réduisant d’autant celle consacrée à la production neuve, source de revenus futurs.

Sur la base de ce constat d’un paysage du logement social très morcelé – on dénombrait ainsi, en 2017, encore 37 % d’organismes qui géraient moins de 1 500 logements – au regard d’une territorialisation accrue des politiques de l’habitat, l’étude d’impact considérait qu’une politique plus volontariste de consolidation des organismes de logement social présenterait au moins trois avantages :

– favoriser une meilleure allocation de l’investissement par l’intermédiaire d’une péréquation interne de l’autofinancement disponible, permettant notamment d’affecter les ressources nécessaires à l’investissement au plus près de la localisation des besoins ;

– organiser une mutualisation des risques (vacances, impayés, dégradations, etc.) et des ressources, permettant au bailleur social ou au groupe à l’implantation géographique large et diversifiée d’absorber un choc asymétrique sur un territoire spécifique (par exemple, la fermeture d’une implantation industrielle majeure induisant un déclin démographique durable) plus aisément qu’un bailleur social présent sur ce seul territoire ;

– réaliser des économies d’échelle, tant sur les achats et les systèmes d’information que sur certaines fonctions communes, et diffuser des compétences et savoir-faire dont ne peuvent se doter des organismes de petite taille (notamment, pour ce qui concerne la capacité de maîtrise d’ouvrage).

2.   Le bilan en demi-teinte des mesures visant le regroupement des organismes

Les dispositions visant à conforter, voire accélérer, le mouvement de restructuration des organismes de logement social (OLS) figurent à l’article 69 de la loi ELAN. Les mécanismes institués par la loi sont les suivants :

– tout bailleur social (hors outre-mer) détenant moins de 12 000 logements locatifs sociaux devra, au 1er janvier 2021, justifier de son appartenance à un « groupe d’organismes de logement social » (GOLS), qui regroupe des organismes gérant collectivement au moins 12 000 logements locatifs sociaux ;

– tout organisme HLM qui gère moins de 1 500 logements, qui n’a pas construit au moins 500 logements pendant une période de dix ans et qui ne contribue pas suffisamment aux missions et objectifs d’intérêt général définis par le code de la construction et de l’habitation, peut être dissous par l’autorité administrative, sauf s’il appartient à un groupe d’organismes de logement social.

La société de coordination (SAC)

La société de coordination, une des formes de regroupement rendues possibles par l’article 81 de la loi ELAN, est définie au nouvel article L. 423-1-2 du code de la construction et de l’habitation. Il s’agit d’une société anonyme ou d’une société anonyme coopérative dont le capital ne peut être détenu que par :

– des organismes HLM ;

– des sociétés d’économie mixte agréées ;

– des organismes qui exercent une activité de maîtrise d’ouvrage.

Les collectivités territoriales sont représentées à leur demande dans les instances délibératives de la société de coordination selon des modalités prévues par les statuts. Un représentant de la société de coordination siége sans voix délibérante dans le conseil de surveillance ou le conseil d’administration de chacun des organismes actionnaires.

L’article définit l’objet de la société de coordination en distinguant les compétences obligatoires et les compétences optionnelles. Parmi les compétences obligatoires, figurent :

– l’élaboration du plan stratégique de groupe et le cadre stratégique d’utilité sociale ;

– la définition de la « politique technique » des associés ;

– la définition et la mise en place d’une politique d’achat des biens et services, hors investissements immobiliers, nécessaires à l’exercice des activités des associés ;

– l’élaboration et le développement d’une « unité identitaire des associés » et la définition des moyens communs de communication, notamment par la création ou la licence de marques et de signes distinctifs ;

– l’organisation de la mise à disposition des ressources disponibles ;

– l’appel des cotisations ;

– la prise de mesures nécessaires à la garantie de la soutenabilité financière du groupe ainsi que de chacun des organismes qui le constituent, notamment par la mise en place de mécanismes appropriés de solidarité interne du groupe, par l’interdiction ou la limitation de la distribution du résultat ou la réalisation d’un investissement, par la cession totale ou partielle du patrimoine d’un organisme ou sa fusion avec un autre organisme du groupe lorsque la situation financière de l’organisme le justifie ;

– le contrôle de gestion des associés et l’élaboration d’une consolidation de leurs comptes annuels.

Parmi les compétences optionnelles, figurent :

– l’assistance, comme prestataire de services, des actionnaires organismes HLM dans toutes interventions sur les immeubles qui leur appartiennent ou qu’ils gèrent ;

– la réalisation de tout ou partie de la maîtrise d’ouvrage des opérations de construction neuve, rénovation ou réhabilitation d’ensembles immobiliers pour le compte de ses actionnaires HLM ;

– la réalisation, pour le compte de ses actionnaires et dans le cadre d’une convention passée par la société avec une collectivité territoriale compétente sur le périmètre où sont conduits des projets en commun, toutes les interventions foncières, les actions ou opérations d’aménagement.

La loi aménage néanmoins cette obligation en prévoyant :

– des exceptions « départementales » : l’organisme HLM qui serait le seul organisme de logement social de son département à ne pas appartenir à un GOLS, aucun groupe de tels organismes n’ayant son siège dans ledit département, pourra déroger au seuil des douze mille logements, de même que le groupe d’organismes de logement social qui serait l’unique groupe ayant son siège dans un département ;

– des exceptions liées à l’activité : sont dispensés de l’obligation de regroupement les organismes dont l’activité principale, entre 2018 et 2020, est une activité d’accession sociale à la propriété et qui n’ont pas construit ou acquis plus de 600 logements locatifs sociaux au cours de la période 2015-2020.

Deux modalités principales de regroupement sont possibles, à savoir :

– le groupe « vertical » d’organismes HLM ou SEM contrôlés directement ou indirectement par une même société, société HLM ou non (article L. 233-3 du code de commerce) ;

– le groupe « horizontal » sous forme de société de coordination, de société anonyme ou de société anonyme coopérative, dont les membres sont des organismes HLM ou des SEM.

Un organisme ne peut appartenir à deux sociétés de coordination mais peut appartenir à une société de coordination et à un groupe vertical ou à plusieurs groupes verticaux.

Le suivi des opérations de restructuration en cours est opéré sur une base bimestrielle par la direction de l’habitat, de l’urbanisme et du paysage, service central du ministère de la transition écologique, dans le cadre de l’application Harmonia.

Selon les informations transmises à vos rapporteurs, à la date d’échéance prévue par la loi ELAN (31 décembre 2020), 164 organismes (49 %) respectaient leurs obligations, sur les 335 organismes soumis à l’obligation de regroupement. Les 171 organismes restants (51 %) pouvaient alors être répartis en trois catégories, en fonction de l’état d’avancement du regroupement envisagé :

– les organismes ayant un projet aux contours arrêtés et dont la mise en œuvre était appelée à aboutir rapidement (49) ;

– les organismes dotés d’un projet crédible et stabilisé, dont la finalisation juridique était engagée mais la mise en œuvre faisait l’objet de retards (75) ;

– les organismes n’ayant pas fourni d’information sur leurs intentions ou dont les contours du projet envisagé n’étaient pas aboutis, voire non viables (47).

À la date du 22 septembre 2021, il apparait que 245 organismes, soit 73 % du nombre total des obligés, remplissaient désormais leur obligation de regroupement et que moins d’une trentaine d’organismes demeuraient sans aucun projet de regroupement identifié ou viable.

Fusion d’opérateurs : l’exemple de Châlons-en-Champagne

L’Agence nationale de contrôle du logement social (Ancols) a réalisé, à l’occasion de son rapport public annuel de contrôle de l’année 2020, des contrôles des principaux bailleurs sociaux de la communauté d’agglomération (CA) de Châlons-en-Champagne (Marne).

Châlons-en-Champagne, qui regroupe 46 communes, comprenait 80 100 habitants en 2018. La commune-centre, Châlons-en-Champagne, où résident 44 800 habitants, est la préfecture du département de la Marne. Les autres communes de la communauté d’agglomération comptent en moyenne 780 habitants, les trois communes de Saint-Memmie, Mourmelon-le-Grand et Fagnières comptabilisant environ 5 000 habitants chacune.

Au 1er janvier 2020, la communauté d’agglomération de Châlons-en-Champagne comprend 12 176 logements sociaux détenus par sept opérateurs. À cette date, deux organismes, l’OPH Châlons-en-Champagne Habitat et la SA d’HLM Renaissance Immobilière Chalonnaise (La Ric) détiennent, respectivement, 39 % et 38 % de ce parc. Plurial Novilia constitue ensuite le troisième bailleur de l’intercommunalité avec 15 % des logements sociaux, les autres bailleurs représentent au total moins de 8 % du parc social de l’intercommunalité et en détiennent chacun 3 % ou moins. L’office Châlons‑en‑Champagne Habitat dispose de 81 % de son parc dans la communauté d’agglomération et la Ric 97 %. Plurial Novilia possède quant à lui 5 % de son patrimoine sur ce territoire intercommunal, la majorité de ses logements étant sur la communauté urbaine du Grand Reims (61 %).

Fin 2019, les deux premiers bailleurs châlonnais ont la particularité d’être contrôlés par les mêmes collectivités. L’OPH est rattaché, depuis 2017, à la CA de Châlons‑en‑Champagne en lieu et place de la ville de Châlons-en-Champagne, dans le cadre des dispositions de la loi ALUR instituant le rattachement des offices publics de l’habitat à un EPCI compétent en matière d’habitat. L’actionnariat de référence de la RIC est la ville de Châlons-en-Champagne, qui détient 41 % du capital en 2019 et la communauté d’agglomération, qui en possède 25 %.

Compte tenu du nombre de logements conventionnés gérés, les obligations de rapprochement ou d’adossement issues de la loi ELAN ont conduit l’office Châlons‑en‑Champagne Habitat et la SA d’HLM la Ric à fusionner avec date d’effet au 1er janvier 2020, le nouvel ensemble issu de cette fusion prenant la dénomination Nov’Habitat.

Actionnariat de la SA d’HLM La Ric avant et après fusion

Source : données Harmonia, tableau extrait du rapport public annuel de l’Ancols au titre de l’année 2020 (page 150).

Cette opération s’est faite par voie de fusion-absorption de Châlons-en-Champagne Habitat par la Ric. L’actif net apporté par Châlons-en-Champagne Habitat a été rémunéré par une augmentation de capital de la Ric au moyen de l’émission de 115 932 nouvelles actions, attribuées à la communauté d’agglomération de Châlons-en-Champagne, collectivité de rattachement de l’office.

Après la fusion et afin de se conformer à la réglementation qui interdit aux collectivités de détenir plus de 66 % du capital, la ville et la communauté d’agglomération de Châlons‑en-Champagne ont créé le fonds de pérennité Nov’Participation qu’elles ont doté de 18,9 % du capital. Ce fonds est contrôlé par les salariés de Nov’Habitat et son conseil d’administration est composé de quatre membres désignés pour moitié par le comité social et économique de Nov’Habitat et pour moitié par la direction générale de l’organisme. Au terme de cette opération, Nov’Habitat est conjointement contrôlé par la communauté d’agglomération de Châlons-en-Champagne et la ville de Châlons-en-Champagne, qui forment l’actionnariat de référence et détiennent ensemble la majorité du capital.

Nov’Habitat gère au 1er janvier 2020, selon les données disponibles, 10 447 logements conventionnés et construits ou acquis et améliorés avant 1977, ainsi que 867 équivalents‑logements de foyers et résidences sociales, soit un total de 11 314 logements ou équivalents-logements gérés.

Au regard des dispositions réglementaires de comptabilisation des logements pris en compte pour l’obligation de regroupement de la loi ELAN, l’organisme constitué n’atteint pas encore, à la date d’effet de la fusion (1er janvier 2020), le seuil de 12 000 logements ou équivalents-logements gérés applicable au 1er janvier 2021.

L’organisme a donc cherché les moyens de se mettre en pleine conformité avec l’obligation légale, les options dans un contexte démographique contraint étant l’acquisition de logements auprès d’autres bailleurs sociaux ou la passation de conventions de gestion. Au 1er janvier 2021, 450 logements conventionnés ont donc été acquis, portant le total de logements conventionnés gérés à 12 171 logements

Les enjeux opérationnels de la fusion résident dans la convergence et l’optimisation de la stratégie et des pratiques, notamment en termes de gestion locative, d’organisation et de gestion financière des deux entités fusionnées.

Source : rapport public annuel 2020 de l’Agence nationale de contrôle du logement social, pp.145-162, et commission des affaires économiques.

Pour ce qui concerne les modalités d’intégration retenues, 50 % des organismes regroupés ont fait le choix d’adhérer à une société de coordination, 11 % celui d’une intégration dans un groupe vertical, 20 % celui de la fusion avec un autre organisme ou d’une cession des parts à un autre organisme, les autres organismes (11 %) relevant de situations particulières ([63]).

Le suivi de ces évolutions s’améliore après des débuts difficiles. La Caisse de garantie du logement locatif social s’est vu confier, à compter de 2022, une mission d’observation des regroupements et des groupes HLM constitués. Une étude de l’Agence nationale de contrôle du logement social, portant sur les regroupements et leurs effets, est également attendue cette même année.

L’observatoire durable des regroupements

Le principe de la mise en place d’un observatoire durable des regroupements a été posé par la feuille de route conclue par l’État et l’Union sociale pour l’habitat (USH), signée lors du dernier congrès de l’USH (septembre 2021). Ce principe a également été intégré lors du renouvellement, fin 2021, des conventions triennales qui lient la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) avec l’USH, d’une part, et avec chacune des fédérations de bailleurs, d’autre part.

Un premier comité de pilotage s’est tenu fin janvier 2022 avec l’USH, les fédérations et les tutelles de la CGLLS.

Le cahier des charges, en cours d’établissement, prévoit qu’il devra s’agir d’un observatoire pérenne, non limité à la production d’une synthèse à l’échéance prévue par la loi ELAN. La mise en place de l’observatoire sera progressive, devra capitaliser sur l’existant et s’appuyer sur les données déjà disponibles. Les moyens mis à disposition ne sont pas encore déterminés.

Les travaux de l’observatoire auront vocation à se concentrer, par priorité, sur l’observation des regroupements issus de la loi ELAN. Au-delà du suivi de la conformité réglementaire, l’observatoire ambitionne de s’interroger sur l’ambition et la dynamique réelle de fonctionnement de ces regroupements, voire, à terme, de questionner leur efficacité (sujet non encore tranché).

L’observatoire vise également à répondre à un besoin d’observation plus général, autour d’un ensemble de questions émergentes comme la diversification issue de la loi ELAN, l’opportunité de formats de regroupement au-delà des groupes HLM au sens de la loi ELAN ou encore les problématiques spécifiques des bassins miniers, de l’outre-mer, des marchés détendus et de l’Île-de-France, où les enjeux de regroupement peuvent avoir des déclinaisons particulières.

Source : commission des affaires économiques et Caisse de garantie du logement locatif social.

Le graphique ci-dessous présente l’évolution du nombre d’organismes gérant, sur la base des chiffres de la direction de l’habitat, de l’urbanisme et du paysage communiqués à vos rapporteurs.

Au moment de la promulgation de la loi, la France comptait 638 organismes de logement social, toutes catégories confondues. À la fin de 2021, ce nombre n’était plus que de 556 organismes, soit une diminution de 12,9 % en trois ans. La diminution est encore plus prononcée pour les offices publics de l’habitat (de 251 organismes en 2018 à 216 en 2021, soit - 13,9 %) et pour les SA d’HLM (- 19,1 %), alors que la baisse du nombre de SEM est modeste (- 5,5 %) et que le nombre des coopératives est en croissance légère (+ 5,0 %).

Il n’apparait néanmoins pas possible de conclure, à partir de cette évolution, à un impact significatif de la loi ELAN en matière de restructuration des OLS. Les dispositions votées en 2018 ne marquent pas, en effet, le point de départ d’une accélération dans un mouvement de consolidation déjà engagé plusieurs années auparavant : entre 2015 et 2018, le nombre d’organismes passe ainsi de 727 à 638, soit une baisse du même ordre de grandeur (- 12,2 %) que celle constatée entre 2018 et 2021.

Nombre d’organismes gérant des logements sociaux et assujettis
à la Caisse de garantie du logement locatif social

Source : données de la Caisse de garantie du logement locatif social, tableau de la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (ministère de la transition écologique).

Au global, les représentants des organismes du logement social rencontrés par vos rapporteurs ont dressé un bilan en demi-teinte des opérations de regroupement en cours.

Les échanges avec la Fédération nationale des sociétés anonymes et fondations d’HLM, la Fédération nationale des sociétés coopératives d’HLM ou la Fédération des élus des entreprises publiques locales n’ont ainsi pas fait apparaître de difficultés particulières.

M. Marcel Rogemont, président de la Fédération nationale des offices publics de l’habitat (FNOPH), a néanmoins observé, pour le regretter, que la logique de regroupement d’organismes a abouti à créer une distance entre les réalités et les besoins locaux et les centres décisionnels : « L’idée de créer des sociétés anonymes de coordination (SAC) nationales va, par définition, à l’encontre de l’idée de garder une proximité avec les centres de décisions territoriaux. Même si des organismes nationaux peuvent intervenir en soutien des élus locaux, la création de telles SAC, très hétéroclites et inaptes à définir des objectifs cohérents de gestion, pose problème. »

Alors que la loi ELAN avait eu pour objectif de consolider, voire renforcer, le lien avec les élus locaux, qui sont en charge de la mixité sociale et qui sont au cœur du déploiement et du développement de toute la politique du logement social, c’est une autre logique qui se trouve poussée par un mouvement de consolidation auquel la Fédération nationale des offices publics de l’habitat n’est pas hostile dans son principe : « Là où des filiales de grands groupes s’implantent, la capacité décisionnelle locale se réduit. Dans un département où coexistent une filiale de la Caisse des dépôts et consignations et un office, la loi ELAN impose la fusion ; peu de temps après, la Caisse décide de fusionner toutes ses filiales ; conséquence : il n’y a désormais plus d’opérateur strictement départemental, ce qui est éminemment dommageable. »

Ce constat est partagé par M. Jean-Luc Vidon, président de la Fédération nationale des associations régionales d’organismes d’habitat social (FNAR), qui souligne également les gains d’efficacité attendus de la participation d’opérateurs plus puissants : « En Île-de-France, qui a longtemps connu un (trop) grand nombre de bailleurs par commune ou par EPCI, la loi a permis aux élus de disposer d’un nombre plus réduit d’interlocuteurs – sans doute mieux à même de traiter avec eux des sujets complexes, nécessitant une grande efficacité à tous les niveaux. Dans d’autres territoires où il y a peu de bailleurs, il va falloir s’assurer que la proximité avec les réalités du terrain perdure. »

B.   D’autres instruments ont permis aux bailleurs sociaux de se renforcer

1.   L’extension de l’agrément d’organisme de foncier solidaire a suscité le doublement du nombre d’organismes

Les organismes de foncier solidaire (OFS) sont des organismes sans but lucratif créés par l’article 164 de la loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) ([64]). L’article 88 de la loi ELAN a poursuivi la dynamique de création des OFS en incluant les bailleurs sociaux parmi les organismes pouvant bénéficier d’un agrément.

Les organismes de foncier solidaire sont agréés par le préfet de région. Ils ont pour objet d’acquérir et de gérer des terrains, bâtis ou non, en vue de réaliser des logements et des équipements collectifs, qui sont ensuite cédés à des ménages sous conditions de ressources dans le cadre d’un bail réel solidaire. Peuvent être agréés à ce titre :

– les organismes sans but lucratif : associations loi 1901, sociétés coopératives d’intérêt collectif, groupements d’intérêt public ;

– depuis la loi ELAN, les « organismes HLM » au sens du code de la construction et de l’habitation : offices publics de l’habitat, SA d’HLM, sociétés coopératives d’HLM, fondations d’HLM, sociétés de coordination, sociétés de vente HLM ([65]) ;

– depuis la loi ELAN, les sociétés d’économie mixte de construction et de gestion de logements sociaux ([66]), qui sont des entreprises publiques locales agréées pour exercer une compétence habitat.

Le bail réel solidaire (BRS)

Le bail réel solidaire, dont la création a été décidée dans le cadre de la loi ALUR et rendue effective par ordonnance du 20 juillet 2016, est un contrat par lequel un organisme de foncier solidaire consent à laisser à un preneur la jouissance d’un bien immobilier. Le preneur acquiert le bâti tandis que le foncier reste la propriété de l’organisme qui perçoit une redevance pour l’occupation dudit foncier. L’investissement que doit consentir l’acquéreur est réduit de 20 à 50 % du fait de la dissociation. L’article 23 de la loi ELAN a permis une décote du prix du foncier public pour les logements faisant l’objet d’un contrat de bail réel solidaire ([67]).

Les BRS sont conclus pour une durée de dix-huit à quatre-vingt-dix-neuf ans, renouvelables à chaque cession. Afin de limiter la spéculation, les prix de cession des droits réels sont plafonnés ([68]) et l’agrément de l’acquéreur ou du donataire par l’organisme de foncier solidaire doit être sollicité ([69]).

Le BRS, qui vise à permettre aux ménages modestes d’accéder à la propriété, revêt une dimension sociale importante. Le ménage qui acquiert un bien par l’intermédiaire d’un BRS est soumis à un plafond de ressources fixé par un décret et similaire au plafond du prêt social location-accession (PSLA). Sur le fondement de la loi ELAN, les BRS sont désormais intégrés à l’inventaire des logements pris en compte dans l’inventaire SRU des communes ([70]).

Alors que le dispositif existe depuis 2016, seuls 20 organismes de foncier solidaire avaient été agréés en décembre 2019. Cette sous-exploitation du dispositif commence néanmoins à se résorber puisque le nombre d’organismes agréés par les services de l’État s’élevait à 69 en janvier 2022, selon les chiffres de Foncier solidaire France (FSF), la fédération des OFS. Ils se répartissent de la manière suivante :

– 27 OFS « ex nihilo » (associations, coopératives, groupements d’intérêt public, représentant 39 % des organismes ;

– 39 organismes HLM agréés OFS, représentant 56 % ;

– 3 établissements publics fonciers locaux, représentant 4 % ;

– 1 société d’économie mixte.

Une enquête auprès des adhérents de Foncier solidaire France a permis d’estimer la production de logements permise par le recours à cet outil. À la fin de l’année 2021, 372 logements en BRS auront été livrés, et près de 2 300 logements sont en commercialisation. Il s’agit donc d’une forte dynamique qui va se poursuivre les prochaines années. En effet, à l’horizon 2025, FSF estime que quelque 11 000 logements auront été livrés.

Parmi les facteurs qui expliquent cette nette progression, l’article 88 de la loi ELAN qui a ouvert l’agrément aux bailleurs sociaux tient le premier rôle. Cette ouverture a suscité l’intérêt de la part de ces organismes, puisqu’elle leur permet de se séparer d’anciens logements locatifs sous le régime du BRS. Ainsi l’essentiel des nouveaux organismes agréés en 2021 ont-ils été des bailleurs sociaux. L’intégration des BRS dans le décompte des logements sociaux au titre de la loi SRU (article 130 de la loi ELAN), quant à elle, a entraîné une participation plus active des communes et des établissements publics fonciers locaux.

Devant le succès de cet outil, un nouvel élargissement des compétences des organismes de foncier solidaire a été décidé à l’article 106 de la loi 3DS.

2.   La vente HLM, un dispositif jusqu’ici peu sollicité

Afin de permettre aux organismes HLM de valoriser leur patrimoine, notamment le patrimoine ancien et amorti, et d’optimiser ainsi leurs capacités financières tout en favorisant l’accession sociale à la propriété et le parcours résidentiel des locataires, la loi ELAN a visé à faciliter et accélérer le recours à la vente HLM.

À cet effet, l’article 97 de la loi ELAN a créé deux nouveautés essentielles :

– un nouveau type d’organisme HLM, la société de vente d’habitations à loyer modéré, qui est une société anonyme ou une société anonyme coopérative agréée ayant pour seul objet l’acquisition de biens immobiliers appartenant à des organismes HLM, à des sociétés d’économie mixte agréées et à des organismes qui bénéficient de l’agrément relatif à la maîtrise d’ouvrage, en vue de la vente de ces biens. Ces derniers continueront de gérer les biens ;

– une nouvelle procédure de vente de logements sociaux est créée ([71]) : désormais, c’est la convention d’utilité sociale qui vaudra autorisation de vendre pour les logements qui seront mentionnés dans le plan de mise en vente de la convention et ce pour la durée de la CUS.

Les articles 88, 98 et 99 de la loi, entre autres, ont apporté d’autres évolutions de simplification des procédures et de sécurisation des parcours, d’une plus ou moins grande importance (voir encadré suivant).

Évolutions portées à la loi ELAN sur la vente de logements sociaux

En plus de la création de sociétés de vente et de l’inscription dans la convention d’utilité sociale (CUS) signée entre le préfet et l’organisme d’un plan de mise en vente qui vaut autorisation de vente, la loi a amené dans ses articles 88, 97 et 98 d’autres évolutions visant à amplifier le mouvement de vente HLM par les organismes de logement social :

– l’autorisation du préfet pour les ventes entre organismes de logement social est supprimée, sauf lorsque l’aliénation conduit à diminuer de plus de 30 % le parc de logements locatifs détenu sur les trois dernières années par un organisme ;

– l’autorisation ministérielle, en cas d’avis divergent du maire de la commune d’implantation et du préfet de département sur un projet de vente, est supprimée. Le maire dispose toutefois désormais d’un avis conforme en cas de vente de logements si la commune n’atteint pas le taux légal de logements sociaux ou ne l’atteindrait plus du fait de la vente ;

– le prix de mise en vente est fixé librement par l’organisme vendeur qui prend pour référence le prix d’un logement comparable, supprimant ainsi le recours obligatoire et la référence à l’estimation des domaines ;

– les personnes morales de droit privé peuvent acquérir des logements auxquels sont appliqués les plafonds de ressources des prêts locatifs sociaux (PLS), acquis ou construits depuis plus de quinze ans par un bailleur social. Cette acquisition intervient dans le respect des ordres de priorité mentionnés à l’article L. 443-11 du code de la construction et de l’habitation pour les logements vacants ou directement pour les ensembles de plus de cinq logements, quel que soit leur statut d’occupation ;

– une nouvelle catégorie d’organisme de logement social est créée, la société de vente, dont le seul objet est d’acquérir des logements détenus par les bailleurs sociaux, en vue de leur vente. Une société de vente, l’opérateur national de vente, filiale du groupe Action Logement, a été agréée en 2019 ;

– les logements sociaux vendus à leurs locataires sont comptabilisés pendant dix ans à l’inventaire des logements sociaux (SRU), au lieu de cinq ans ;

– en cas de ventes dans les communes n’atteignant pas le taux de logement social qui leur est applicable, la loi prévoit un réemploi prioritaire du produit de la vente sur cette commune. Le préfet de région en informe le comité régional de l’habitat et de l’hébergement ;

– les organismes ont la possibilité de vendre au moyen d’un contrat de vente d’immeuble à rénover ;

– les organismes doivent inclure une clause de rachat du logement dans tous les contrats de vente au bénéfice des acquéreurs sous plafonds de ressources de l’accession sociale ;

– en cas de vente à une personne physique d’un logement situé dans un immeuble, l’organisme vendeur a la possibilité de différer le transfert à l’acquéreur de la propriété de la quote-part des parties communes correspondante.

Depuis, l’article 75 de la loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale (dite « loi 3DS ») a précisé que la vente est interdite lorsque la commune dans laquelle se situent les logements n’a pas conclu de contrat de mixité sociale et fait l’objet d’un arrêté de carence, sauf au bénéfice d’autres organismes HLM.

Les retours des acteurs rencontrés au sujet de la vente HLM sont assez variés. Globalement, l’Union sociale pour l’habitat a résumé ainsi la situation : « avant l’adoption de la loi ELAN, 75 % des organismes s’étaient dotés d’une stratégie de cession de patrimoine ; en 2020, la proportion est même de 77 %, contre 70 % en 2012. En 2020, 122 000 logements étaient mis en vente dans ce cadre, débouchant sur environ 10 000 ventes effectives à des personnes physiques. Depuis 2019, on s’écarte peu de ce niveau de 10 000 ventes annuelles (contre une moyenne de 5 000 ventes annuelles pendant la période 2000-2010) ».

Cette observation est confirmée par la Fédération nationale des offices publics de l’habitat (FNOPH), qui observe que « l’objectif affiché par le gouvernement, avant l’adoption de la loi, de 40 000 ventes par an, est loin d’être atteint puisqu’en 2020, elles sont de l’ordre de 11 000, dont 3 100 pour les offices, malgré la création d’un nouvel outil, l’opérateur national de vente ».

Le président de cette même fédération, M. Marcel Rogemont, rappelle en effet que, pour les offices, « la vente de logements HLM ne saurait constituer le mécanisme sur lequel reposerait le choc d’offre espéré. Pour les offices, elle représente un simple élément de respiration patrimoniale, qui ne saurait être le mode de financement du logement social ». La fédération précise que la vente doit être considérée comme « un moyen de financement complémentaire, (…) à condition qu’elle ne contrecarre pas les politiques locales de l’habitat et (…) qu’elle complète mais ne se substitue pas aux aides à la pierre, aux subventions des collectivités locales et aux dispositifs de prêts aidés ».

De la même façon, les sociétés d’économie mixte agréées habitat rapportent qu’elles y ont peu recours, pour deux raisons principales : d’une part, « avec une moyenne d’âge de 25 ans, leur patrimoine est beaucoup plus jeune. Ce patrimoine n’est que très partiellement amorti, et il n’est donc pas intéressant à céder », et d’autre part, « on observe que les mouvements de regroupement d’organismes ont permis une recapitalisation de nos sociétés – alors que, dans le passé, l’Agence nationale de contrôle du logement social (ANCOLS) nous avait souvent reproché d’être sous-capitalisés. Nous regagnons ainsi un peu d’air pour entamer les programmes de rénovation énergétique ». Le même raisonnement s’applique aux coopératives, dont la fédération rapporte que « la typologie du parc locatif géré par les coop’HLM fait qu’elles sont peu actives dans ce domaine, leur patrimoine étant majoritairement récent ou situé dans des communes où les besoins de logements sociaux sont très importants ».

En revanche, c’est une activité qui revêt une importance plus centrale dans les opérations des sociétés anonymes d’HLM, comme le rapporte leur fédération : « les ventes HLM représentent environ 7 000 logements par an, soit la moitié de notre résultat ».

 

La vente HLM : le témoignage du groupe Action Logement

La vente HLM constitue un des piliers de la stratégie patrimoniale et financière du groupe Action Logement, permettant de reconstituer les fonds propres des bailleurs. Elle accompagne également la politique d’accession sociale sécurisée à la propriété voulue par les partenaires sociaux et favorise la mixité sociale.

La loi ELAN a permis de créer la première, et à date la seule, société de vente HLM, l’organisme national de vente (ONV). L’ONV, filiale d’Action Logement Services, a été doté en capitaux sur les fonds de la participation des employeurs à l’effort de construction pour accompagner l’ensemble du secteur HLM, y compris dans les départements-régions d’outre-mer, dans la mise en place d’une politique de vente HLM, en privilégiant la vente aux locataires du parc social. L’ONV intervient dans le respect du droit au maintien dans les lieux : les locataires qui ne souhaitent ou ne peuvent pas acheter leur logement conservent leur statut de locataire et continuent à habiter leur logement.

L’ONV dispose au 1er janvier 2022 d’un patrimoine de 5 127 logements dont 2 300 sont déjà commercialisés. 52 biens ont été acquis en 2021 pour un montant de 582 millions d’euros (M€), l’opérateur a engagé des travaux à hauteur de 4,2 M€ pour rénover le patrimoine avant de le mettre en vente et a acté 115 ventes et signé 51 promesses de ventes pour un montant de 24 M€.

L’activité de l’ONV révèle en particulier le poids des facteurs suivants pour pleinement développer la vente HLM :

– la stratégie patrimoniale des bailleurs et les arbitrages qu’ils décident d’opérer, notamment le peu d’allant des OPH sur la vente en bloc ;

– le contexte politique des territoires et l’acceptabilité de la vente HLM en fonction des sensibilités locales, en particulier dans les communes SRU avec des élus très précautionneux ;

– l’appétence et les capacités financières des locataires, fragilisés par la crise sanitaire ;

– l’environnement réglementaire et légal, toujours ressenti comme strict malgré les avancées de la loi ELAN.

Source : Action Logement Groupe, contribution écrite aux travaux des rapporteurs.

II.   l’encadrement des loyers : une réponse pragmatique aux tensions en zones tendues

A.   Une réponse pragmatique aux tensions sur le marché locatif

1.   Un dispositif expérimental qui s’inscrit dans la continuité de tentatives passées

Face aux tensions observées sur le marché locatif, l’article 140 de la loi ELAN a prévu qu’à titre expérimental, pour une durée de cinq ans à compter de la promulgation de la loi et dans les zones mentionnées à l’article 17 de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs, les établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière d’habitat, la commune de Paris, les établissements publics territoriaux de la métropole du Grand Paris, la métropole de Lyon et la métropole d’Aix‑Marseille‑Provence puissent demander qu’un dispositif d’encadrement des loyers soit mis en place.

Cette expérimentation s’inscrit dans la continuité d’un premier dispositif établi sur le fondement de l’article 6 de la loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi « ALUR ». Dans la rédaction votée par le Parlement et modifiant l’article 17 de la loi du 6 juillet 1989 précitée, il était alors prévu une application automatique des outils destinés à prévenir des évolutions excessives au regard d’un loyer de référence fixés en considération de l’état du marché locatif dans des zones en tension. Cet article avait fait l’objet d’une censure du Conseil constitutionnel portant sur des éléments essentiels de son dispositif. ([72])

L’expérimentation engagée dans le cadre de la loi ELAN peut être mise en œuvre dans les zones en tension locative. Conformément à la définition qui en est donnée par l’article 17 de la loi du 6 juillet 1989 précitée, entrent dans ce champ les zones d’urbanisation continue de plus de cinquante mille habitants où existe un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements, entraînant des difficultés sérieuses d’accès au logement sur l’ensemble du parc résidentiel existant. Ces zones se caractérisent notamment par un niveau élevé des loyers, un niveau élevé des prix d’acquisition des logements anciens ou encore un déséquilibre marqué entre le nombre de demandes de logement par rapport au nombre d’emménagements annuels dans le parc locatif social.

Sur proposition du demandeur transmise dans un délai de deux ans à compter de la promulgation de la loi, c’est-à-dire avant le 24 novembre 2020, un décret détermine le périmètre du territoire de la collectivité demandeuse sur lequel s’applique le dispositif, lorsque les conditions suivantes sont réunies :

– un écart important entre le niveau moyen de loyer constaté dans le parc locatif privé et le loyer moyen pratiqué dans le parc locatif social ;

– un niveau de loyer médian élevé ;

– un taux de logements commencés, rapporté aux logements existants sur les cinq dernières années, faible ;

– des perspectives limitées de production pluriannuelle de logements inscrites dans le programme local de l’habitat et de faibles perspectives d’évolution de celles-ci.

Selon les informations transmises à vos rapporteurs, les services de l’État ont reçu dix candidatures dans le délai précité, dont cinq en Île-de-France et cinq en région. L’expérimentation de l’encadrement du niveau des loyers concerne donc aujourd’hui :

– la ville de Paris, à compter du 1er juillet 2019 (en application d’un arrêté préfectoral en date du 28 mai 2019) ;

– la ville de Lille, à compter du 1er mars 2020 (en application d’un arrêté préfectoral en date du 30 janvier 2020) ;

– l’établissement public territorial Plaine Commune en Seine‑Saint‑Denis, à compter du 1er juin 2021 (en application d’un arrêté préfectoral en date du 1er avril 2021) ;

– la ville de Lyon et la commune de Villeurbanne (Rhône), à compter du 1er novembre 2021 (en application d’un arrêté préfectoral en date du 29 septembre 2021) ;

– l’établissement public Est Ensemble en Seine-Saint-Denis, à compter du 1er décembre 2021 (en application d’un arrêté préfectoral en date du 3 novembre 2021) ([73]) ;

– les villes de Bordeaux et Montpellier, à partir du début de l’année 2022.

2.   Des modalités d’application qui laissent la main à une mise en œuvre différenciée

L’encadrement des loyers organisée dans le cadre de l’expérimentation ne donne pas lieu à fixation directe de ces loyers par l’autorité administrative. Le dispositif impose simplement aux bailleurs de déterminer le montant des loyers demandés dans la limite ou en fonction de trois valeurs de référence fixées par arrêté préfectoral, en considération de l’évolution du marché locatif :

– le loyer de référence : égal au loyer médian, le loyer de référence est établi à partir des niveaux de loyers constatés par les observatoires locaux des loyers dans chaque zone entrant dans le champ de l’expérimentation ;

– le loyer de référence majoré, soit un montant correspondant au loyer de référence augmenté de 20 % ;

– le loyer de référence minoré, soit un montant correspondant au loyer de référence diminué de 30 %.

Le B du III de l’article 140 de la loi ELAN reconnait néanmoins aux bailleurs le droit de demander un complément de loyer pour des logements présentant des caractéristiques de localisation ou de confort le justifiant, par comparaison avec les logements de la même catégorie situés dans le même secteur géographique.

Le locataire qui souhaite contester le complément de loyer dispose d’un délai de trois mois à compter de la signature du bail pour saisir la commission départementale de conciliation prévue à l’article 20 de la loi du 6 juillet 1989 précitée, sauf lorsqu’il s’agit d’un bail mobilité (cf. infra), soumis au titre Ier ter de la même loi :

– en cas de contestation, il appartient au bailleur de démontrer que le logement présente des caractéristiques de localisation ou de confort justifiant le complément de loyer demandé par comparaison avec les logements de la même catégorie situés dans le même secteur géographique ;

– en l’absence de conciliation, le locataire dispose d’un délai de trois mois à compter de la réception de l’avis de la commission départementale de conciliation pour saisir le juge d’une demande en annulation ou en diminution du complément de loyer.

Lorsque le représentant de l’État dans le département constate qu’un contrat de bail ne respecte pas les dispositions précitées relatives à l’encadrement des loyers, il peut mettre en demeure le bailleur, dans un délai de deux mois, de mettre le contrat en conformité avec ces dispositions et de procéder à la restitution des loyers trop-perçus.

Si cette mise en demeure reste infructueuse, le représentant de l’État dans le département peut prononcer une amende à l’encontre du bailleur, dont le montant ne peut excéder 5 000 euros pour une personne physique et 15 000 euros pour une personne morale.

B.   des RÉsultats encore difficiles à APPRÉCIER

1.   L’encadrement résulte d’une mise en œuvre encore récente

 Les effets du dispositif d’encadrement sur les loyers du parc privé, dans les territoires où ce dispositif est expérimenté, ne peuvent pas être encore pleinement mesurés à ce jour, compte tenu d’une mise en œuvre encore récente
– y compris à Paris et Lille, où l’encadrement n’est effectif, respectivement, que depuis le 1er juillet 2019 et le 1er mars 2020. Telle est d’ailleurs la raison qui a conduit à proroger la durée de cette expérimentation dans le cadre de la loi 3DS, la période supplémentaire sollicitée par le Gouvernement permettant de procéder à une évaluation réelle du dispositif sur plusieurs territoires.

Les principales données disponibles à ce jour, notamment à Paris, sont celles relatives aux actions engagées par les locataires et aux sanctions : ces données sont en effet recensées par les services de l’État, qui sont en mesure de fournir des informations sur le nombre de procédures administratives engagées sur le fondement de l’article 140, paragraphe VII de la loi ELAN et celui des saisines de la commission départementale de conciliation.

À la fin octobre 2021, directement ou par l’intermédiaire du secrétariat de la commission départementale de conciliation, la direction régionale et interdépartementale de l’hébergement et du logement d’Île-de-France avait recensé 263 saisines recevables de locataires, dont 160 signalaient un dépassement par le bailleur du loyer de référence majoré applicable à leur situation, dans le cadre d’une première location ou relocation. Par ailleurs, 21 saisines recevables avaient été reçues contestant un loyer supérieur au loyer de référence majoré, au moment du renouvellement de bail, et 82 saisines recevables s’opposaient à l’application d’un complément de loyer.

À Lille, selon les dernières données disponibles, 33 baux ont été portés à la connaissance des services de l’État, par l’intermédiaire de la commission de conciliation ou de la ville de Lille ou directement auprès des services territoriaux de l’État (27 dossiers jugés recevables au total).

Une étude de l’Observatoire des loyers de l’agglomération parisienne (OLAP) publiée en février 2021 et portant sur l’encadrement des loyers au second semestre 2019, a conclu à un effet modérateur du dispositif au cours du semestre étudié. L’OLAP a notamment relevé que, réintroduit à Paris à compter du 1er juillet 2019, l’encadrement des loyers s’y est traduit, au second semestre de l’année, par une baisse moyenne de 3 % des loyers de relocation initialement supérieurs au loyer de référence majoré (loyer de l’ancien locataire). Dans une situation analogue, au premier semestre, les loyers de relocation supérieurs au plafond avaient progressé de 2,6 %.

Dans son bilan de l’encadrement des loyers à Paris en 2020 et publié en décembre 2021, l’OLAP note « un effet indéniable, mais limité, de resserrement des loyers de relocation des logements non meublés autour de la fourchette légale ». La part des dépassements lors des emménagements (26 %) est légèrement inférieure à celle constatée en 2019 (28 %) et proche des valeurs de la période 2015-2017 (soit 26 % en 2015, 23 % en 2016 et 21 % en 2017). Le dépassement moyen en 2020, soit 168 €, se situe au niveau de ceux de 2019 et 2016.

2.   Le champ de l’expérimentation a été récemment étendu et rouvert à de nouveaux candidats

La notoriété positive dont jouit le dispositif d’encadrement dans un contexte marqué par une dynamique forte des prix de l’immobilier a poussé un certain nombre d’acteurs et notamment d’élus locaux à en demander l’extension. L’article 85 de la loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dite « loi 3DS », comporte ainsi plusieurs mesures d’ordre technique visant à améliorer le dispositif.

Cet article précise ainsi le champ de compétence de la commission départementale de conciliation dans le cadre de l’expérimentation et clarifie l’articulation entre le dispositif expérimental d’encadrement du niveau des loyers et la colocation à baux multiples.

Dans le cadre de la loi ELAN, le législateur avait fixé à cinq ans la durée totale d’expérimentation du dispositif. Il est toutefois apparu que ce délai était insuffisant pour assurer, d’une part, son déploiement, et prendre la mesure de son efficacité, d’autre part. Une fois délimité, par décret, le périmètre de la collectivité (ou de l’EPCI à fiscalité propre) soumis à l’expérimentation, le préfet doit en effet disposer des niveaux de loyers constatés par un observatoire local des loyers agréé pour fixer les loyers de référence, par arrêté, et pour que le dispositif puisse ensuite être effectivement mis en œuvre.

L’article 85 précité prévoit donc de prolonger de trois ans le dispositif expérimental d’encadrement des loyers. Cette prolongation permettra de réaliser l’évaluation du dispositif avec le recul nécessaire à l’étude d’un dispositif dont les effets s’inscrivent nécessairement dans un temps long, eu égard notamment à la durée des baux.

Par ailleurs, certaines collectivités qui souhaitaient prendre part à cette expérimentation n’ont pas pu déposer de candidature dans les délais impartis par l’article 140 de la loi ELAN, soit le 23 novembre 2020. Dès lors, ce même article 85 prévoit de prolonger de deux ans cette période de candidature, soit jusqu’au 23 novembre 2022.

L’Assemblée nationale a également introduit, avec l’avis favorable du Gouvernement, deux mesures visant à renforcer l’effectivité du dispositif expérimental :

– les annonces immobilières publiées par les professionnels devront prochainement contenir des informations sur l’encadrement des loyers et notamment le loyer de référence majoré applicable au logement, et l’arrêté du 10 janvier 2017 relatif à l’information des consommateurs par les professionnels intervenant dans une transaction immobilière devrait être prochainement modifié en ce sens ;

– les obligations imposées aux professionnels seront étendues aux particuliers, le principe étant que chaque futur locataire puisse être informé du montant du loyer de référence majoré, du loyer de base et, le cas échéant, du complément de loyer exigé pour le bien qu’il s’apprête à louer dans une zone soumise à l’encadrement des loyers.

Ces deux mesures devraient permettre, à terme, d’améliorer la transparence du marché et de diminuer le nombre d’annonces non conformes.

Le déploiement du réseau des observatoires des loyers

Depuis 2013, le réseau des observatoires locaux des loyers (OLL), animé par l’Agence nationale pour l’information sur le logement (Anil) et son réseau d’associations départementales d’information sur le logement (Adil), vise à améliorer la connaissance du parc locatif privé par les décideurs publics et les particuliers. Ce réseau est en croissance continue, avec 30 observatoires couvrant plus de 50 agglomérations en 2022 et des projets de nouveaux observatoires sur plusieurs territoires.

L’article 139 de la loi ELAN concernait les observatoires locaux des loyers au titre de deux objectifs, celui d’accroitre le périmètre observé avec cette méthodologie (4°) et celui de faciliter l’obtention d’un agrément pour les structures porteuses d’observatoire local des loyers (3°, b).

Pour ce qui concerne le premier objectif, six nouvelles agglomérations sont couvertes par un observatoire local des loyers depuis la promulgation de la loi ELAN : Bastia, Saint Malo, Tours, Arras, Chalon-sur-Saône/Macon et Pointe-à-Pitre. En 2022, deux nouveaux OLL devraient effectuer leurs premières collectes : Châteauroux et Chambéry.

La mise en place d’un observatoire à Cayenne (Guyane) et à Mamoudzou (Mayotte) n’a pu se concrétiser, du fait de difficultés apparues dans les collectes et dans le portage d’un tel OLL par des structures locales. Pour ce qui concerne plusieurs agglomérations de Haute-Savoie (Thonon-les-Bains, Annemasse et Annecy), des travaux de préfiguration ont été engagés en 2018, auxquels les collectivités locales n’ont pas souhaité donner suite ; la mise en place d’observatoires sur les agglomérations de ce territoire en tension demeure néanmoins un objectif pour le ministère chargé du logement.

Pour ce qui concerne le second objectif, la loi ELAN a autorisé le rattachement d’un observatoire non pas aux organes dirigeants de l’organisme qui le porte, mais à une instance créée spécifiquement à cette fin, ce qui ouvrait la possibilité d’octroyer un agrément aux agences d’urbanisme. Lors de la promulgation de la loi ELAN, seules quatre structures étaient effectivement agréés ; en 2022, 19 structures ont obtenu leur agrément.

L’agrément a vocation à consolider juridiquement le fonctionnement de l’observatoire, en lui permettant notamment d’exiger des professionnels de l’immobilier relevant de son périmètre la transmission d’informations relatives aux baux signés. L’arrêté du 29 août 2014 modifié pris en application de l’article 4 du décret n° 2014-890 du 1er août 2014 est venu préciser les modalités de transmission de certaines informations par ces professionnels. Par ailleurs, lorsqu’une collectivité demande à pouvoir activer le dispositif d’encadrement des loyers prévu à l’article 140 de la loi ELAN, l’agrément est une condition préalable pour l’utilisation des données de l’OLL dans le cadre de la fixation des loyers de référence.

En permettant aux agences d’urbanisme d’être agréée, la loi ELAN a donc permis que le dispositif d’encadrement des loyers s’applique dans les communes de Lyon, Villeurbanne et Bordeaux, couvertes par une agence d’urbanisme agréée.

Source : Agence nationale pour l’information sur le logement et commission des affaires économiques.

3.   Un dispositif qui fait l’objet de retours contrastés

Dans son économie actuelle, le dispositif d’encadrement des loyers suscite un certain nombre de critiques, plus ou moins vigoureuses et parfois différentes quant à leurs motifs.

Tout en soutenant un dispositif qui vise à mieux encadrer les prétentions des bailleurs, la Confédération générale du logement (CGL), la Confédération nationale du logement (CNL) et la Confédération syndicale des familles (CSF) regrettent, de manière générale, des mécanismes trop complexes. Comme le dit M. Stéphane Pavlovic, directeur de la CGL, ces mécanismes « sont supposés répondre à de vraies problématiques de terrain et, au final, [ils] font souvent l’objet de réformes successives, soit parce que les objectifs fixés n’ont pas été atteints, soit parce que les différents acteurs ne réussissent pas à mettre en œuvre ces mécanismes, soit encore parce que les moyens d’action ne sont pas suffisants ».

Les carences constatées dans la mise en œuvre privent d’effet la volonté du législateur, suscitant des incompréhensions légitimes : « Depuis plusieurs années, de nombreuses réglementations se sont empilées et, du point de vue de la protection des usagers du logement, la question de l’effectivité du droit en vient parfois à être oubliée. Or cette question est centrale ! Pour chaque règle de droit créée, il faut s’assurer de sa mise en œuvre effective et que le bénéficiaire de droits nouveaux, comme l’usager du logement, puisse les exercer véritablement ».

Ces organisations plaident donc à la fois pour une sortie rapide « par le haut » de l’expérimentation, c’est-à-dire la transformation du dispositif en règle de droit de commun et son extension à l’ensemble du territoire, sauf cas particuliers, et pour une simplification destinée à assurer l’effectivité des droits des locataires : M. Eddie Jacquemart, président de la CNL, a ainsi déploré « un véritable parcours du combattant – non seulement, d’abord, pour obtenir un logement, mais également, ensuite, pour obtenir gain de cause au tribunal devant lequel on aurait fait comparaitre le propriétaire dudit logement. Il faut donc impérativement simplifier la procédure ».

Au-delà, la question posée est celle du contrôle et de la sanction des pratiques irrégulières : « les sanctions prévues par la loi ELAN (…) ne sont pas appliquées : en 2020, seulement 9 condamnations ont été prononcées de ce chef, alors que le nombre de propriétaires en infraction est évidemment très supérieur. De ce point de vue, il conviendrait de pouvoir également sanctionner les agences immobilières qui ne respectent pas la loi (…). Il faudrait que l’on mette en place une véritable “ police du logement ”, qui vérifierait que les lois votées sont effectivement appliquées. Imagine-t-on un code de la route sans radars ni policiers chargés de sanctionner les infractions ? Sans police ni moyens pour faire respecter la loi, cela ne fonctionne pas ».

La Fédération nationale de l’immobilier (FNAIM) reconnait à la loi ELAN le mérite d’avoir dissocié l’observation agréée des loyers et l’obligation d’encadrement, « défaut structurel des dispositions législatives qui avaient cours auparavant ». La Fédération se dit « défavorable au principe même d’un encadrement des loyers », tout en convenant que « le dispositif actuel n’est pas inintéressant ». Elle observe que le mécanisme d’encadrement aboutit à « un écrêtement pour les petites surfaces, qui se propage ensuite aux autres segments du marché » et que cet encadrement « intervient à un moment où nous sommes confrontés à des phénomènes de " démétropolisation " et d’émergence de demandes nouvelles hors zones tendues, ce qui en réduit peut-être la pertinence – d’autant que des obligations considérables se font également jour en matière de rénovation énergétique du parc locatif ».

Quant à l’Union nationale des propriétaires immobiliers (UNPI), elle voit dans l’encadrement des loyers une mesure difficilement applicable, parfois instrumentalisée par des élus à des fins politiques et très défavorable aux propriétaires : « L’UNPI considère qu’il est dangereux de maintenir ce dispositif et, plus encore, de l’étendre. Une première période d’application avait été ouverte et l’on s’apprête désormais à expliquer aux opérateurs, qui ont fait le choix d’investir sur la base d’un certain modèle économique et d’un équilibre donné entre charges et recettes, que les règles ont désormais changé. Cela revient à les placer dans des situations inextricables, dans un contexte où les obligations de rénovation énergétique se sont considérablement durcies et où le DPE, tel qu’il fonctionne, est un instrument à produire des passoires énergétiques (qui ne l’étaient pas auparavant) ».

III.   UNE fluidification partielle des rapports locatifs

A.   la garantie visale : un mécanisme efficace mais insuffisamment connu

1.   La montée en puissance progressive de la garantie Visale

Le visa pour le logement et l’emploi, dénomination officielle de la « garantie Visale » (voir encadré suivant), est issu de la convention quinquennale conclue entre l’État et l’Union d’économie sociale du logement (structure depuis devenue le groupe Action Logement) le 2 décembre 2014 et a pris la suite du dispositif de garantie des risques locatifs.

L’ensemble des acteurs auditionnés par vos rapporteurs ont salué l’efficacité du dispositif Visale, qui facilite, pour les étudiants, l’obtention d’un garant. Dans le parc privé ou dans le parc social, en adoptant le point de vue des bailleurs ou celui des bénéficiaires, la solution a fait ses preuves et il faut interpréter les vagues successives d’élargissement des catégories éligibles au dispositif comme une marque de son succès.

Selon les données transmises à vos rapporteurs, la garantie Visale a connu un développement significatif depuis son lancement effectif en 2016 et a touché un large public. Au 31 décembre 2021, plus de 1,7 million de demandes avaient ainsi été présentées et plus de 616 000 contrats émis. Après une forte activité en 2020 (157 000 contrats émis en dépit d’un contexte défavorable du fait de la crise sanitaire), la demande s’est encore accrue en 2021 (plus de 227 000 contrats sur l’année).

S’agissant du profil des locataires couverts, le dispositif est essentiellement tourné vers les jeunes, qui représentent 91 % des contrats émis. Les premiers bénéficiaires sont les étudiants (56 % des contrats émis), devant les autres jeunes de moins de 30 ans (36 %), les salariés en double mobilité de plus de trente ans (5,3 %) et les ménages accompagnés en intermédiation locative (3,7 %).

Les études réalisées par l’Association pour l’accès aux garanties locatives (APAGL) montrent que la garantie remplit efficacement son rôle social d’élargissement de l’accès au marché locatif. Ainsi, au regard des critères de solvabilité des publics privilégiés par le marché – stabilité professionnelle (CDI confirmé) et taux d’effort inférieur à 33 % – les bénéficiaires de Visale sont en quasi-intégralité (93 %) hors marché (85 % sont sans stabilité professionnelle, 80 % ont un taux d’effort supérieur à 33 %).

D’après l’Association interprofessionnelle des résidences étudiants et services (Aires), la garantie Visale s’est ainsi « installée dans le paysage » et joue un rôle bénéfique sur le montant des loyers, car les exploitants de résidences la prennent de plus en plus en compte en amont, pour construire leur offre, puisque la garantie diminue le risque de l’activité d’exploitation. Selon la FNAIM, « la garantie Visale a constitué la colonne vertébrale du discours du ministère chargé du logement pendant un certain temps et il faut admettre qu’elle a aujourd’hui trouvé son public, particulièrement chez les étudiants, un peu moins chez les salariés défavorisés ».

La dynamique de Visale et le profil des locataires demandeurs

Les résultats observés font état de plus de 600 560 visas demandés et plus de 227 000 contrats émis au cours de l’année 2021, avec des demandes de Visa en hausse de + 41 % et + 45 % de contrats émis par rapport à 2020. Depuis janvier 2016, plus d’1,7 million de visas ont été demandés parmi lesquels près d’1,4 million ont été certifiés (80 %), dont près de 617 000 ont donné lieu à l’émission d’un contrat (45 %).

La montée en charge de Visale est continue et progressive depuis 2016, en lien avec les évolutions du produits (élargissement aux jeunes en 2017, aux étudiants en 2018, aux salariés à revenus modestes en juin 2021) mais aussi avec les actions de communication et de développement qui renforcent la notoriété du dispositif.

Le dynamisme du développement est porté par l’ensemble des publics bénéficiaires. Si, en volume, le public étudiant est celui qui a connu la plus forte hausse (+ 31 500 contrats) suivi de près par les moins de 30 ans (+ 30 700 contrats), la dynamique de développement a été beaucoup plus forte pour les moins de 30 ans (+ 55 % de contrats émis en 2021 par rapport à 2020) et surtout pour les plus de 30 ans. Moins visible du fait de volumes plus faibles, le public des 30 ans et plus a connu la plus forte dynamique avec un doublement des contrats émis en 2021 par rapport à 2020 en lien avec l’élargissement du dispositif aux salariés modestes.

Le déploiement régional de Visale est structurellement cohérent avec la mobilité observée au sein du parc locatif privé. Depuis 2016, près de 47 % des contrats émis l’ont été pour des logements situés en Île-de-France, Occitanie et Auvergne-Rhône-Alpes, trois régions qui concentrent 41 % des emménagés récents du parc locatif privé.

Sur l’ensemble de la période 2016-2021, 55 % des contrats émis l’ont été pour des étudiants (y compris alternants), 36 % pour les 30 ans et moins, 6% pour les plus de 30 ans et 3% pour le public de l’intermédiation locative. Cœur de cible des partenaires sociaux, le public salarié représente 47 % des contrats émis depuis 2016. Depuis 2019, le nombre de contrats émis pour les salariés augmente plus rapidement que celui des non-salariés (respectivement + 31 % et + 14 % entre 2019 et 2020, + 54 % et + 31 % entre 2020 et 2021).

Les caractéristiques socio-économiques des locataires reflètent les critères d’éligibilité de Visale. Comparativement aux locataires du parc privé, les bénéficiaires Visale sont en proportion plus jeunes (92 % ont 30 ans ou moins), plus isolés (88 %), plus précaires au regard des ressources (en moyenne de 1 864 euros mensuels hors étudiants). Ils ont un loyer charges comprises plus faible (430 euros en moyenne) et in fine un taux d’effort un peu plus important (34 % hors étudiants). Le faible taux de bénéficiaires de l’aide au logement (14 % hors étudiants) laisse supposer que les bénéficiaires ne déclareraient leurs aides au logement que lorsque celles-ci permettent de les rendre éligibles.

Cette prédominance des jeunes de 30 ans et moins s’explique selon Action Logement par plusieurs motifs :

– l’élargissement aux jeunes puis aux étudiants a permis d’accroître leur part, déjà prépondérante ;

– le public jeune est davantage concerné par la cible du dispositif : ils sont plus mobiles et plus touchés par la précarité de l’emploi ;

Les modalités numériques et digitales de diffusion et de communication ont pu toucher plus facilement les jeunes très connectés et plus investis dans ces médias (50 % de connexions sur visale.fr se font par téléphone mobile).

Source : Action Logement Groupe, contribution écrite.

2.   Un dispositif encore insuffisamment connu et plébiscité

L’Association pour l’accès aux garanties locatives poursuit ses efforts en matière de communication pour encore renforcer la notoriété du dispositif et lever les éventuelles réticences des bailleurs, en particulier en zone tendue où les candidats sont plus nombreux à ne pas mobiliser Visale même en ayant obtenu la certification. Ainsi, l’extension de la garantie aux salariés de plus de trente ans a été accompagnée d’une campagne de communication et le site destiné au dispositif a été remanié et mis à jour. C’est ainsi que la fédération Consommation Logement Cadre de vie (CLCV) estime que « la garantie Visale est un dispositif qui marche de mieux en mieux ; de plus en plus de bailleurs mentionnent désormais cette garantie dans leurs annonces – alors qu’auparavant, on voyait plutôt des indications « Loca-pass refusé ». C’est une excellente nouvelle ! ».

La garantie Visale

Le dispositif Visale prend la forme d’un contrat de cautionnement dans lequel Action Logement s’engage à payer au bailleur les loyers et charges récupérables non payés par son locataire, dans la limite d’un plafond fixé à 50 % des ressources, avec un plafonnement à 1 500 euros de loyer mensuel en Île-de-France et 1 300 euros pour le reste du territoire. Pour les étudiants et alternants sans justification de ressources, le loyer maximum est fixé à 800 euros en Île-de-France et 600 euros dans le reste du territoire. À ce jour, le taux d’impayés moyen des étudiants est de 4,6 %.

Ce dispositif a été progressivement élargi afin de couvrir tous les jeunes.

Il avait ainsi été convenu à l’occasion de la convention quinquennale 2015-2019 entre l’État et l’organisme gestionnaire de la participation des employeurs à l’effort de construction (PEEC), signée le 2 décembre 2014, et de la convention État-Action Logement du 24 décembre 2015 pour la mise en œuvre de Visale, de mettre en place un dispositif permettant de « sécuriser les salariés entrant dans un emploi par tout contrat de travail, y compris mission d’intérim, ou par promesse d’embauche, hors contrat à durée indéterminée (CDI) confirmé, d’une entreprise du secteur dit assujetti (secteur privé hors agricole) et entrant dans un logement du parc locatif privé ».

Ces deux conventions ont fait l’objet de deux avenants, signés le 21 juillet 2016 et prévoyant l’élargissement du dispositif Visale à compter du 30 septembre 2016 :

– à l’ensemble des jeunes de moins de 30 ans, salariés ou non, hormis les étudiants non boursiers rattachés au foyer fiscal de leurs parents ;

– aux salariés du secteur privé agricole ou d’organismes du secteur non assujetti à la PEEC, en échange de contributions financières.

La nouvelle convention quinquennale 2018-2022 et l’avenant à la convention Visale du 19 juin 2018 prévoient une nouvelle extension du dispositif, pour les publics suivants :

– tous les étudiants sans distinction (notamment en incluant les publics non boursiers et rattachés au foyer fiscal de leurs parents, dans tous les parcs de logement) ;

– les titulaires d’un « bail mobilité » et bénéficiaires du dispositif de mobilisation des logements vacants du parc privé « Louer pour l’emploi » ;

– les salariés de plus de 30 ans en double mobilité professionnelle et résidentielle, y compris ceux en CDI confirmé.

À la suite des dispositions de l’avenant de relance du 15 février 2021 et à compter de juin 2021, les salariés de plus de 30 ans sous conditions de ressources peuvent également bénéficier de la garantie.

La couverture par Visale comprend 36 mois de loyers maximum dans le parc privé, et 9 mois dans le parc social. Visale couvre par ailleurs les dégradations locatives pour les logements relevant du parc locatif privé. Les frais de remise en état, en cas de dégradations imputables au locataire, sont couverts jusqu’à deux mois de loyer et charges inscrits au bail, après déduction du dépôt de garantie (sauf pour le bail mobilité qui n’autorise pas de dépôt de garantie).

La garantie Visale est distribuée directement et gratuitement par le réseau Action Logement pour le compte de sa filiale, l’Association pour l’accès aux garanties locatives. En outre, Action Logement est en charge du recouvrement des créances auprès des locataires en impayés, par voies amiable et contentieuse.

Néanmoins, la garantie Visale continue également de souffrir d’un déficit de crédibilité en comparaison de la caution classique. Comme le rapporte l’Union nationale des propriétaires immobiliers, « il est vrai que le système de garantie classique, celui de la caution personnelle, reste néanmoins plébiscité – c’est un système qui bénéficie de son antériorité, qui fonctionne depuis de très nombreuses années et qui est ancré dans les habitudes des propriétaires ».

La FNAIM confirme cette analyse : « cette garantie n’est pas indéfiniment extensible, au regard des engagements hors bilan qu’elle engendre pour Action Logement, et elle ne constitue pas encore une réelle avancée en zone tendue – car les candidats locataires y sont pléthoriques et qu’entre le candidat locataire « classique », disposant d’une rémunération confortable, et le candidat moins bien rémunéré, mais bénéficiant d’une garantie Visale, c’est généralement le « meilleur » dossier, c’est-à-dire le plus solvable, qui est privilégié. Un sondage réalisé auprès de nos administrateurs de biens montre qu’à revenus identiques, les dossiers de location s’appuyant sur une caution personnelle l’emportent à 62 %, contre 37 % pour les dossiers s’appuyant sur une garantie Visale ».

D’après l’association Plurience, la garantie a néanmoins réussi à bien s’implanter en surmontant une image initialement négative : « la garantie Visale est un « produit » abouti, bien utilisé par le segment des étudiants. Mais elle a pâti du passé et notamment de l’image très négative, chez les professionnels, de la garantie des logements locatifs (GRL), dont le pilotage et la gestion étaient très difficiles ».

B.   le bail mobilité : un dispositif à l’utilité douteuse

Le législateur a eu à cœur dans la loi ELAN de soutenir l’accès au logement des jeunes. Créé par l’article 107 de la loi, le bail mobilité est un contrat de location de courte durée d’un logement meublé, visant à donner plus de flexibilité au bailleur et à faciliter l’accès au logement des étudiants et des personnes en mobilité professionnelle. Il est issu de la recommandation d’une mission d’inspection sur le logement locatif meublé en 2016 ([74]). Celle-ci préconisait la création d’un « bail de location meublée à titre de résidence principale, de durée comprise entre trois mois et un an, non renouvelable sauf à l’initiative du locataire, permettant à la fois l’affectation des pied-à-terre à cette activité et le logement d’étudiants et de salariés en mobilité ».

Les principales caractéristiques de ce contrat, qui sont inspirées par le souci d’en faire un instrument flexible et adaptable aux attentes respectives du bailleur et du locataire, sont les suivantes :

– le bail est conclu pour une durée comprise entre un et dix mois et le contrat ne peut être ni renouvelé, ni reconduit. La durée du contrat de location peut toutefois être modifiée une fois, par avenant, sans que la durée totale du contrat dépasse dix mois ;

– le loyer est fixé librement sauf, si le logement est situé en zone tendue. Dans ce cas, le loyer est établi en fonction des règles issues du décret annuel d’encadrement des loyers ;

– les charges locatives sont versées de manière forfaitaire ;

– le bail est ouvert à un locataire justifiant suivre des études supérieures ou être en formation professionnelle, en contrat d’apprentissage, en stage, en engagement volontaire dans le cadre d’un service civique, en mutation professionnelle ou en mission temporaire (intérimaires ou travailleurs saisonniers).

Le bail permet donc au propriétaire d’une résidence principale ou secondaire de la mettre en location pour quelque temps, tout en étant certain d’en retrouver l’usage au terme fixé puisque le bail ne peut être renouvelé ou reconduit.

La direction de l’habitat, de l’urbanisme et du paysage a indiqué à vos rapporteurs qu’il n’existait pas, à ce jour, de données consolidées sur la mise en œuvre de ce dispositif.

Selon la Fédération nationale de l’immobilier (FNAIM), « le bail mobilité partait d’un principe simple, avec un objectif technique et politique sous-jacent : trouver une formule qui permettrait de réorienter les choix faits par certains bailleurs au bénéfice de Airbnb, en vue de conforter une offre locative de nature à aider les salariés et les étudiants en mobilité. La démarche était louable, mais l’outil mis à la disposition des bailleurs n’a été que peu utilisé – sauf à Paris, où certains groupes comme Foncia l’ont largement mobilisé. Il n’a pas véritablement trouvé son public et il est simplement venu se surimposer à la législation existante sur les meublés et à la loi de 1989 : le constat d’ensemble est donc plutôt celui d’un échec ».

Selon l’Union nationale des propriétaires immobiliers, « il s’agit d’un dispositif qui est peu ou pas utilisé, peut-être parce qu’il n’est pas bien calibré ou insuffisamment sécurisé. Peutêtre aurait-il fallu prévoir, comme nous l’avions demandé, un assouplissement ou la possibilité d’un renouvellement du bail à l’intérieur du délai de dix mois ».

Néanmoins les acteurs s’accordent sur le fait que le dispositif est encore trop jeune pour pouvoir être efficacement évalué : selon Plurience, « s’agissant du bail mobilité, peu utilisé, je réitère le constat selon lequel trop de dispositifs nouveaux n’ont pas le temps de s’installer dans les pratiques. Le temps de l’immobilier est un temps long ». Comme la FNAIM l’a aussi reconnu, « il est vrai qu’une politique du logement ne s’évalue pas l’immédiateté, elle se mesure dans le temps ».

L’article 128 et la colocation en HLM

Le dispositif de colocation, introduit par la loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR), à l’article 8-1 de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs, est applicable dans le parc privé, mais l’article 40 de la loi du 6 juillet 1989 écarte expressément l’application de la colocation :

– aux logements appartenant aux organismes HLM et ne faisant pas l’objet d’une convention APL ;

– aux logements faisant l’objet d’une convention APL.

Dans le parc social, l’article L. 442-8-4 du code de la construction et de l’habitation prévoyait, dès avant la loi ELAN, une exception pour les étudiants, les personnes de moins de trente ans et les personnes titulaires d’un contrat d’apprentissage ou de professionnalisation. Un contrat de location, d’une durée d’un an, pouvait être conclu dans ce cadre par des organismes HLM, des SEM agréées et des Crous. Le dispositif, peu lisible et peu connu, était peu usité.

L’article 128 de la loi ELAN a renforcé et clarifié considérablement les possibilités ouvertes par la colocation. Dans ce nouveau cadre, le bailleur social signe avec chaque colocataire du logement un bail. Chaque bail doit préciser les informations suivantes :

– pièce du logement dont chaque colocataire a la jouissance exclusive ;

– parties communes mises à la disposition de l’ensemble des colocataires (cuisine, salle de bain, salon, etc.).

Chaque colocataire doit disposer d’une surface au moins égale à 9 mètres carrés et d’un volume au moins égal à 20 mètres cubes, hors parties communes.

C.   la lutte contre l’habitat indigne, des dispositifs renforcÉs

1.   Le permis de louer et la lutte contre l’habitat indigne, instruments d’une protection des locataires vulnérables

Afin d’améliorer la lutte contre l’habitat indigne et dans la continuité de l’expérimentation menée en application de la loi du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement (dite « loi ENL »), la loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (dite « loi ALUR ») avait institué des dispositifs de déclaration et d’autorisation préalable de mise en location, dits « permis de louer », aujourd’hui codifiés aux articles L. 634-1 à L. 635-11 du code de la construction et de l’habitation.

Les zones soumises à ces dispositifs sont délimitées à l’initiative de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) compétent en matière d’habitat ou, à défaut, de la commune. Leur périmètre en est arrêté « au regard de l’objectif de lutte contre l’habitat indigne et en cohérence avec le programme local de l’habitat et le plan départemental d’action pour le logement et l’hébergement des personnes défavorisées », selon les termes des articles L. 634-1 et L. 635-1 du code de la construction et de l’habitation. S’agissant du seul dispositif de l’autorisation préalable de mise en location, la zone concernée doit également présenter « une proportion importante d’habitat dégradé ».

Dans les zones soumises à déclaration de mise en location, le bailleur doit déposer une déclaration de mise en location auprès de l’EPCI compétent en matière d’habitat, déclaration qui doit être renouvelée à chaque nouvelle mise en location. À défaut de déclaration, le bailleur s’expose à une amende d’un montant maximum de 5 000 euros prononcée par le préfet.

Dans les zones soumises à l’autorisation préalable de mise en location, le bailleur doit demander à l’EPCI compétent en matière d’habitat, ou à défaut à la commune, l’autorisation de mettre en location le logement, avant la signature d’un contrat de location. Le président de l’EPCI compétent, ou à défaut le maire, peut refuser ou conditionner la délivrance de l’autorisation au respect des conditions prévues par l’article L. 635-3 du code de la construction et de l’habitation. À défaut de demande d’autorisation, le bailleur s’expose au prononcé par le préfet de département d’une amende d’un montant maximum de 5 000 euros, dont le produit est reversé à l’Agence nationale de l’habitat. Le bailleur qui mettrait en location le logement en dépit d’une décision de rejet de sa demande d’autorisation s’expose au prononcé d’une amende d’un montant maximum de 15 000 euros.

La loi ELAN est venue modifier les dispositions de la loi ALUR sur certains points et surtout renforcer la sanction pénale réprimant l’infraction de soumission à des conditions d’hébergement incompatibles avec la dignité humaine. Elle a ainsi prévu que :

– le dispositif de déclaration de mise en location ne s’applique ni aux logements mis en location par un organisme de logement social, ni aux logements qui font l’objet d’une convention prévue à l’article L. 351-2 du code de la construction et de l’habitation (article 188) ;

– à la demande d’une ou plusieurs communes membres d’un établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat, l’organe délibérant de cet établissement peut déléguer à ces communes la mise en œuvre et le suivi, sur leurs territoires respectifs, des articles L. 634-3 à L. 634-4 s’agissant des zones soumises à déclaration de mise en location et L. 635-3 à L. 635-10 s’agissant des zones soumises à déclaration de mise en location, et ce, dans la limite de la durée de validité du programme local de l’habitat (article  88) ;

– les personnes physiques et morales coupables de l’infraction de soumission à des conditions d’hébergement incompatibles avec la dignité humaine encourent également les peines complémentaires de confiscation de tout ou partie de leurs biens ayant servi à commettre l’infraction et d’interdiction pour une durée de dix ans au plus d’acheter un bien immobilier à usage d’habitation ou un fonds de commerce d’un établissement recevant du public à usage total ou partiel d’hébergement ou d’être usufruitier d’un tel bien ou fonds de commerce (article  190).

Dans sa rédaction initiale, l’article L. 635-3 du code de la construction et de l’habitation prévoyait que l’autorisation de mise en location pouvait être refusée « lorsque le logement est susceptible de porter atteinte à la sécurité des occupants et à la salubrité publique ». Toutefois, le dispositif d’autorisation préalable de mise en location n’avait pas défini un corpus de normes techniques et sanitaires pour caractériser l’atteinte « à la sécurité des occupants et à la salubrité publique ».

La loi Climat et résilience est venue élargir les possibilités de refus de l’autorisation en prévoyant que l’autorisation pourra également être refusée si le logement « ne respecte pas les caractéristiques de décence prévues à l’article 6 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 ». L’autorisation peut donc désormais être refusée si le logement ne respecte pas l’ensemble du corpus juridique définissant les caractéristiques de décence (article 6 de la loi du 6 juillet 1989, décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002).

2.   Des dispositifs qui continuent à se déployer, mais dont l’efficacité apparaît incertaine

Le déploiement du permis de louer sur le territoire national, sous les « deux espèces » de la déclaration de mise en location et de l’autorisation préalable à la mise en location, s’est fait de manière progressive.

À l’automne 2021, la direction de l’habitat, de l’urbanisme et du paysage a réalisé une enquête sur la mise en œuvre et les résultats obtenus par ces dispositifs. Il ressort des chiffres collectés, qui ne sont peut-être pas exhaustifs, que plus de 150 délibérations de communes ou d’établissements publics de coopération intercommunale sont aujourd’hui recensées, mettant en œuvre l’un ou l’autre des dispositifs ou les deux. Ces délibérations, réparties dans onze régions métropolitaines, couvrent les territoires d’environ 350 communes.

L’expérience des collectivités qui mettent en œuvre ce permis depuis plusieurs années permet de mettre en lumière les avantages d’un dispositif doté d’une dimension politique et symbolique forte, dont l’appropriation constitue le marqueur d’une volonté de ne pas laisser prospérer des comportements inacceptables. Le permis permet ainsi de :

– s’engager de façon volontaire dans la lutte contre l’habitat indigne ;

– d’agir à titre préventif et de disposer d’un outil de veille et de repérage en amont des dispositifs de police sanitaire ;

– de responsabiliser et d’informer les bailleurs privés et leurs mandataires, en leur rappelant la responsabilité qui leur échoit et les aides auxquelles ils peuvent prétendre ;

– d’intervenir en amont en anticipant les risques potentiels pour les occupants, afin de leur assurer un logement digne ;

– d’améliorer et de compléter les dispositifs et les partenariats existant sur les territoires ;

– de valoriser les propriétaires œuvrant à l’entretien de leur patrimoine.

La mise en œuvre du permis de louer se heurte néanmoins à divers freins, qui peuvent être de nature politique, juridique, organisationnelle ou opérationnelle et intervenir à diverses étapes, en amont de la mise en œuvre ou au contraire lors du déploiement effectif.

Le déploiement du permis de louer dépend, en premier lieu, de l’existence d’un portage politique local et de facteurs territoriaux contingents, de nature à influer sur la décision des collectivités de le mettre en œuvre. Localement, certains maires peuvent être réfractaires à une mise en œuvre susceptible de dégrader les relations qu’ils entretiennent avec les propriétaires et de pousser ces derniers à retirer de la location les logements qu’ils détiennent. A contrario, certaines communes volontaires peuvent se heurter à la réticence des EPCI compétents.

Les territoires déplorent, en amont de la délibération comme au stade du déploiement, un manque d’éléments, notamment réglementaires, permettant de mieux encadrer le permis de louer et d’organiser sa mise en œuvre opérationnelle. La difficulté à trouver des adossements normatifs, jurisprudentiels ou documentaires conduit donc à des pratiques locales diverses, susceptibles de créer des inégalités de traitement.

Le dispositif soulève également la question de la responsabilité des autorités et des services locaux. Les visites de logement visant à autoriser la mise en location au regard de sa conformité peuvent être réalisées par des opérateurs privés ou assurées par les agents de la commune. Dans l’hypothèse où un logement déclaré conforme porterait néanmoins atteinte à la sécurité de ses occupants, la responsabilité engagée serait-elle celle du maire, décisionnaire dans le déploiement du dispositif, ou de l’agent, public ou privé, ayant réalisé la visite ?

Par ailleurs, le permis de louer nécessite le déploiement de moyens humains et financiers substantiels, à chaque étape de sa mise en œuvre. Le permis de louer n’est pas une source de revenus pour les collectivités et représente au contraire un coût pour ces dernières.

Plus généralement, l’efficacité du dispositif apparait conditionnée à l’adhésion des bailleurs. Ce dispositif repose en effet sur une déclaration des logements par les propriétaires, ce qui laisse ouverte la question de la captation des marchands de sommeil et de tous les bailleurs qui tentent de contourner le système. Selon la Confédération nationale du logement (CNL), « s’agissant du permis de louer, il faut aller beaucoup plus loin, il faut des contrôles et des sanctions. La loi a prévu une série de sanctions importantes, mais je n’ai pas le sentiment que les jugements condamnant des « marchands de sommeil » soient très nombreux ».

En sens contraire, les professionnels de l’immobilier ont plutôt évoqué une trop grande complexité de l’outil et sa propension à freiner les opérations sur le marché immobilier. Ainsi la Fédération nationale de l’immobilier (FNAIM) a-t-elle fait valoir que « le permis de louer est un instrument à la disposition des maires et, sur ce point également, la FNAIM ne partage pas l’analyse centralisatrice de la CNL. Aujourd’hui, 384 communes ont choisi de déployer cet outil pour « cibler » certains quartiers ou certaines zones, où l’habitat indigne constitue une problématique devant être traitée. Mais certains maires se sont empressés d’en étendre l’usage, au risque de créer des freins à la relocation et de finir par perdre de vue l’objectif initial ».

La même fédération a critiqué un glissement législatif qui pourrait s’avérer en contradiction avec le peu de moyens dont disposent les collectivités pour le mettre en œuvre : « avec la loi Climat, les collectivités territoriales n’ont d’ailleurs peut-être pas assez remarqué qu’on glissait du contrôle de « l’indignité » à celui de « l’indécence » – ce qui n’est pas du tout la même chose, car, derrière le contrôle de l’indécence, se profile l’enjeu de l’engagement d’une responsabilité. Or les maires ne disposent que de très peu de pouvoirs en matière de police de l’habitation et du logement : c’est l’un des points faibles du dispositif et nous avons des exemples de suroccupations de logement dénoncées par des syndics aux maires et restées sans suite, car les maires n’avaient pas de solutions de relogement à proposer ».

Enfin, les professionnels de l’immobilier, notamment les agents immobiliers, ont souhaité, au titre de leur responsabilité professionnelle, pouvoir être exemptés de la délivrance du permis de louer.

 


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examen du rapport par la commission

Lors de sa réunion du mercredi 23 février 2022, la commission des affaires économiques a examiné les conclusions de la mission d’information sur l’évaluation de la loi ELAN ([75]).

M. le président Roland Lescure. Nous en venons à l’examen du rapport de la mission d’évaluation de la loi ELAN, promulguée le 23 novembre 2018. Ce sont quatre rapporteurs qui ont été nommés pour mener à bien ce travail : Christelle Dubos et Richard Lioger, rapporteurs de la loi en 2018, ainsi que Thibault Bazin et Jean-Luc Lagleize.

M. Richard Lioger, rapporteur. J’ai eu un grand plaisir à siéger pendant ces cinq années au sein de notre commission. Je salue la qualité de votre animation de nos travaux, monsieur le Président. Jean-Luc Lagleize, Christelle Dubos, Thibault Bazin et moi-même avons le plaisir de venir vous présenter la synthèse des travaux que nous avons réalisés dans le cadre de la mission d’évaluation à trois ans de la loi ELAN.

Longue de 215 articles, elle en comprenait au départ 65. C’est dire l’importance des ajouts effectués au Parlement ! Elle a donné lieu à une commission mixte paritaire conclusive, et je salue ici les sénateurs qui ont contribué avec nous à l’enrichir, particulièrement la rapporteure, Mme Dominique Estrosi-Sassone, et la présidente, Mme Sophie Primas.

Cette loi touche à l’urbanisme opérationnel, à l’urbanisme réglementaire et commercial, à la loi Littoral, à la gouvernance du secteur du logement social, mais également à l’encadrement des loyers ou encore à l’amélioration des rapports locatifs. Elle est assurément l’une des plus importantes et représentatives de la présente législature.

Vouloir dresser un tableau exhaustif d’une loi aussi complexe était une tâche difficile dans le calendrier serré qui nous était imposé. Nous avons donc dû faire des choix, c'est-à-dire nous concentrer sur les enjeux et les problématiques principaux, ceux qui appelaient des échanges approfondis avec l’ensemble des acteurs, et accepter de laisser de côté des sujets plus particuliers. Par exemple, nous n’avons malheureusement pas eu la possibilité d’aborder le volet numérique de la loi, auquel nos collègues Laure de La Raudière, Éric Bothorel et Christine Hennion avaient beaucoup contribué.

Je crois pouvoir dire, en notre nom à tous, que nos échanges ont toujours été extrêmement riches, constructifs et courtois, sur des sujets souvent techniques.

La table-ronde ronde que j’ai eu l’honneur de présider a été consacrée au secteur du logement social et nous a permis d’échanger avec tous les grands acteurs que sont l’Union sociale pour l’habitat, la Fédération nationale des offices publics de l’habitat, la Fédération des entreprises sociales de l’habitat, la Fédération nationale des sociétés coopératives d’Hlm, Procivis, la Fédération nationale des associations régionales Hlm et la Fédération des élus des entreprises publiques locales.

L’une des dispositions-phares de la loi ELAN figurait à son article 69, dont l’objectif était d’accélérer le regroupement des petits organismes de logement social (OLS), c’est-à-dire ceux dont le parc était inférieur à 12 000 logements, à travers différents mécanismes comme l’absorption par un opérateur plus important ou la participation à une société nationale de coordination.

Les chiffres que vous trouverez dans le projet de rapport montrent que ce mouvement de concentration, que tous les acteurs jugent absolument nécessaire au regard des investissements considérables qui devront être réalisés sur le parc social au cours des prochaines années, progresse. Peut-être cette progression n’est-elle pas encore suffisamment rapide, peut-être l’inflexion de tendance représentée par la mise en œuvre de la loi ELAN demeure-t-elle modeste, il n’empêche : ce mouvement est en cours et il doit permettre de faire émerger des acteurs moins nombreux et plus puissants. Et c’est là une nécessité, car la construction et la gestion de logements sont des activités consommatrices de temps et de fonds propres.

Dans certaines régions, comme l’Île-de-France, qui ont longtemps connu un (trop) grand nombre de bailleurs par commune ou par EPCI, la loi a permis aux élus de disposer d’un nombre plus réduit d’interlocuteurs – donc, sans doute mieux à même de traiter avec eux des sujets complexes, nécessitant une grande efficacité à tous les niveaux. Dans d’autres territoires où il y a peu de bailleurs, il va en revanche falloir s’assurer que la proximité avec les réalités du terrain perdure.

La loi ELAN a également permis de faciliter le processus de vente de logements, à travers notamment la simplification de l’autorisation de vente – puisque le respect du plan de vente annexé à la convention d’utilité sociale permet d’éviter d’avoir à demander une nouvelle autorisation – et l’allégement de certaines formalités – comme la consultation des Domaines pour l’évaluation du prix.

Cette simplification constitue, pour les OLS, un élément de respiration bienvenu, de nature à pousser ces organismes à mettre en œuvre une gestion plus active de leur patrimoine et à leur permettre, le cas échéant, de dégager des fonds propres utilisables pour des opérations de construction nouvelles ou des opérations de rénovation.

Tous nos interlocuteurs se sont néanmoins accordés pour dire que la vente de logements HLM ne saurait constituer le mécanisme sur lequel reposerait le « choc d’offre » espéré pour relancer une construction de logements qui demeure à des niveaux très bas depuis plusieurs années.

Je retire des échanges avec nos interlocuteurs que les dispositions de la loi ELAN relatives au secteur du logement social ont globalement reçu un accueil favorable, voire très favorable, de la part des professionnels mais que leur mise en œuvre est loin d’être achevée et que quelques années supplémentaires seront encore nécessaires pour en dresser pleinement le bilan.

M. Jean-Luc Lagleize, rapporteur. Je souhaiterais tout particulièrement saluer les collègues avec lesquels nous avons construit au fil de la législature un dialogue approfondi sur les sujets relatifs au logement, Richard Lioger et Thibault Bazin qui sont avec moi aujourd’hui, mais aussi Sylvia Pinel et Mickaël Nogal.

À mon tour de saluer la qualité et l’intérêt de ce travail d’évaluation à trois ans de la loi ELAN, dans un esprit toujours constructif et qui nous a permis, au-delà de nos positionnements respectifs, de nous retrouver presque systématiquement sur les constats et assez fréquemment sur les solutions.

Nous avons voulu dans cette loi renforcer l’offre de logements accessible et adaptée à chacun, et notamment les personnes modestes, les personnes en difficulté et les jeunes.

La mesure peut-être la plus emblématique pour servir cet objectif, ce fut l’encadrement des loyers, qui figurait à l’article 140 de la loi. Signe de son succès auprès des maires, celui-ci a été mis en œuvre huit fois en dépit de son périmètre réduit : à Paris, à compter du 1er juillet 2019 ; à Lille, depuis mars 2020 ; dans l’établissement public territorial (EPT) Plaine Commune en Seine-Saint-Denis, depuis juin 2021 ; à Lyon et Villeurbanne, depuis novembre 2021 ; dans l’EPT Est Ensemble en Seine-Saint-Denis, depuis décembre 2021 ; à Montpellier et Bordeaux, depuis le début de l’année 2022.

Bien que son évaluation soit encore difficile en raison du peu de recul qui nous sépare de sa mise en œuvre dans bien de ces cas, la notoriété positive dont jouit cet encadrement doit nous rassurer. Évidemment, la table ronde sur l’immobilier que nous avons organisée et que j’ai présidée, a vu une véritable opposition sur ce sujet entre les associations de locataires, celles des propriétaires et les professionnels de l’immobilier. C’est un secteur dans lequel chacun défend très âprement son intérêt…

En tout état de cause, nous n’avons eu aucun retour qui montre, pour l’heure, que l’encadrement aurait conduit, comme le prévoyaient certains, à une fuite des biens du marché locatif, qui est plutôt le fait des plateformes comme Airbnb. C’est justement pour pouvoir disposer de données plus solides sur son efficacité que nous l’avons prorogé dans la loi du 21 février 2022 dite 3DS, et je m’en réjouis. Dans une époque marquée par des niveaux de loyer extrêmement élevés dans les zones tendues, il est important d’expérimenter tous les outils qui pourraient nous permettre de maîtriser ce phénomène.

Si des signes encourageants de resserrement des loyers commencent à se voir, tous s’accordent pour dire qu’il faut mieux veiller au respect de la loi par les bailleurs particuliers. Pour cette raison, nous avons ajouté de nouvelles obligations dans la loi 3DS qui contraindront désormais les annonces immobilières à contenir des informations sur le loyer applicable.

Un autre dispositif très intéressant issu de la loi ELAN est à mon sens la garantie Visale, sur laquelle nous avons eu de très bons retours des acteurs interrogés. Pour rappel, il s’agit d’un contrat de cautionnement par lequel le groupe Action Logement s’engage à payer au bailleur les loyers et charges non payés par le locataire.

D’après les chiffres que nous avons reçus d’Action Logement, 1,7 million de demandeurs ont eu recours à cette possibilité, avec une nette montée en charge à mesure que sa notoriété s’améliore. Ainsi, plus de 600 000 personnes, surtout des jeunes, y ont eu recours en 2021. Même si les retours des professionnels de l’immobilier laissent penser qu’il y a encore un avantage à la caution apportée par un proche, la garantie Visale constitue donc un substitut de mieux en mieux accepté.

Les jeunes ne sont pas le seul public qui éprouve des difficultés à se loger dans le parc privé. Nous avions très à cœur au moment de la loi ELAN de renforcer la prise en charge de la lutte contre l’habitat indigne. Nous avons notamment amélioré le dispositif des permis de louer, sur lequel je souhaiterais m’attarder un peu.

Comme vous le savez, le permis de louer peut être mis en place dans les zones, définies à l’initiative de l’intercommunalité ou de la commune, qui connaissent une proportion importante d’habitat dégradé. L’expérience des collectivités qui ont mis en œuvre ce permis montre à mon sens que son appropriation est le marqueur d’une volonté de ne pas laisser prospérer des comportements inacceptables.

En dépit de certains freins, et notamment la dépendance à la volonté des bailleurs, le dispositif a une bonne efficacité. Il faudrait encore l’améliorer en renforçant la déclaration des logements par les propriétaires. Je souhaite également relayer devant la commission la demande des agents immobiliers, qui souhaiteraient être exemptés de ce permis au titre de leur responsabilité professionnelle.

D’autres instruments mis en œuvre par la loi ont également contribué à améliorer l’accès au logement – je pense par exemple au bail réel solidaire (BRS). Lors de la loi ELAN, nous avions souhaité nous emparer de cet outil qui constitue une vraie piste de promotion de l’accession sociale à la propriété en permettant de dissocier le coût du bâti de celui du foncier.

À cette fin, nous avions souhaité permettre aux bailleurs sociaux d’être agréés organismes de foncier solidaire (OFS). C’est plus qu’un doublement que cette avancée a permis, puisque 56 % des organismes de foncier solidaire sont aujourd’hui des organismes HLM.

Je me réjouis du reste que le BRS ait été renforcé et élargi à l’article 106 de la loi 3DS, qui a été promulguée lundi dernier. En effet, nous avons élargi les activités des OFS aux commerces de pied d’immeuble, pour encourager la mixité fonctionnelle et promouvoir une revitalisation d’ensemble des quartiers, ainsi qu’aux actions de réhabilitation.

Globalement, notre travail d’évaluation a montré, en prenant en compte aussi les évolutions menées sur le secteur du logement social, comme l’a dit mon collègue Lioger, que la loi a permis certains succès importants pour l’accès de l’ensemble de la population au logement, même s’il faut laisser le temps à l’ensemble des dispositions de faire leur effet.

M. Thibault Bazin, rapporteur. Trois ans après la remise de notre rapport d’application à six mois de la loi ELAN, réalisé avec mon collègue lorrain Richard Lioger, nous nous sommes remis à la tâche pour essayer d’évaluer sur un temps plus long les impacts de cette loi. Vous le savez, nous n’étions pas d’accord sur tout au moment de l’examen de ce texte, mais les objectifs initiaux visant à répondre aux besoins de notre pays pouvaient nous rassembler pour essayer de lever ces défis avec l’ensemble des parties prenantes.

Trois ans plus tard, nous avons la possibilité d’en faire une première vérification. Je dis première, car en termes d’urbanisme et d’aménagement trois ans sont peu de chose. Une zone d’aménagement concerté (ZAC) typique peut bien durer dix ans, donc la temporalité de l’évaluation est assez mal calibrée, et en vérité la majorité aurait dû prévoir un exercice d’évaluation systématique pour cette loi, tous les cinq ans peut-être, comme nous l’avons ajouté pour le régime d’artificialisation issu de la loi Climat et résilience.

Globalement, et vous le verrez aisément à la lecture de la première partie de notre rapport, cette loi peut être considérée comme un assemblage de dispositions, certes hétéroclites, mais qui étaient censées fonctionner ensemble pour relancer la construction et permettre, comme le disait à l’époque le ministre Denormandie, de « construire plus, mieux et moins cher ».

Alors, on peut discuter du mieux – même si les architectes que nous avons rencontrés au cours de cette mission n’en semblaient pas convaincus – mais en tout cas il est parfaitement clair, mes chers collègues, qu’on ne construit aujourd’hui, ni davantage, ni moins cher qu’il y a trois ans. Sous ce point de vue, nous sommes donc bien obligés de conclure à l’échec du texte.

Qu’il y ait eu des circonstances atténuantes, je veux bien l’admettre : la crise sanitaire n’a pas été très favorable au bon déroulement des projets de construction, même si le choc d’offre n’avait pas eu lieu avant même ces événements de 2020.

Au-delà des circonstances dont on peut discuter, il faut admettre que les personnes que nous avons auditionnées n’avaient pas grand-chose de positif à dire sur le contenu de la loi – en tout cas sur les dispositions en matière d’aménagement et d’urbanisme dont je me suis particulièrement occupé. Je citerai les aménageurs, qui nous ont expliqué qu’au lieu du « choc de simplification » tant vanté à l’époque, il n’y avait eu « ni choc ni simplification » et qu’on avait plutôt eu droit à une « chape de complexification » !

En effet, l’accélération de l’instruction des permis de construire n’a pas encore réellement abouti, et la simplification de l’évaluation environnementale est combattue à chaque instant par les mesures d’application prises par le ministère de la transition écologique – c’est le cas, tout récemment, de la « clause filet » qui a pour but de contraindre même les projets de petite taille à être évalués en termes d’impact environnemental. Je crois que vous êtes un certain nombre ici à pouvoir le constater sur le terrain.

D’autres dispositifs, même s’ils ont correspondu à une idée positive, ont témoigné d’une timidité et d’un incrémentalisme qui confine parfois à l’immobilisme. Il en est ainsi du permis d’innover, qu’il s’agissait d’encourager et que la loi ELAN a donc étendu à la catégorie nouvelle des grandes opérations d’urbanisme (GOU) inventées par la loi, et aux secteurs d’intervention des opérations de revitalisation de territoire (ORT).

Problème : les GOU ont elles-mêmes un champ tellement réduit qu’elles n’ont été mises en œuvre qu’à deux reprises à ce jour. De ce fait, le permis d’innover n’a connu que peu d’applications – deux, pour être précis. Le choc de l’innovation attendra ! Mais le permis d’innover a été battu par le permis d’aménager multi-sites, mis en œuvre, mes chers collègues, zéro fois, du fait notamment d’un champ d’application, là encore, très restreint.

Les récentes lois Climat et résilience et 3DS ont revu par petites touches les périmètres d’application de ces divers dispositifs – tantôt on élargit aux secteurs d’intervention des ORT, puis à tout le périmètre de l’ORT, ou au périmètre des GOU, puis aux périmètre des projets partenariaux d’aménagement (PPA). Tout cela est très lent et manque de vision.

En traçant ce tableau forcément à grands traits, je ne voudrais pas donner l’impression qu’il n’y a rien eu de bon dans ce texte : c’est pourquoi je veux parler à présent des opérations de revitalisation de territoire dont nous avons tous entendu beaucoup parler.

Elles ont plutôt trouvé leur public et été bien accompagnées financièrement et en ingénierie par les programmes déployés par le Gouvernement. Nous avons tous des exemples de communes et d’intercommunalités qui se sont saisies de cet instrument et qui ont reçu un soutien utile dans ce contexte – je pense chez moi à Lunéville, première convention Action Cœur de ville signée par le ministre Mézard. Là encore, il y a des choses à améliorer : le dispositif fiscal « Denormandie dans l’ancien », par exemple, est un échec : moins de 200 dispositifs déployés l’an dernier, car les investissements privés se font attendre. D’autres volets ont mieux fonctionné, comme la prolongation des opérations programmées d’amélioration de l’habitat (OPAH), mais cet outil existait déjà et sa prolongation était prévue.

Globalement, les acteurs que nous avons entendus ont parlé en termes positifs de l’apport des ORT, et plusieurs ont souhaité une extension du périmètre. Je mets en garde tout de même contre le risque véritable, augmenté par les politiques menées par la majorité, de voir se mettre en place une France à deux vitesses : les communes qui ont signé des conventions avec le Gouvernement, qui bénéficient de toutes sortes de dispositifs dérogatoires, notamment sur le plan fiscal et financier, et les autres.

Comme les ORT, les projets partenariaux d’aménagement, même après un retard à l’allumage, sont un outil plébiscité par les collectivités, et qui est en train d’être intelligemment adapté pour faire face à de nouveaux défis, comme la recomposition des territoires exigée par le recul du trait de côte.

Pour finir, je voudrais dire quelques mots justement des dispositions qui concernent la loi Littoral, dispositions qui avaient été ajoutées en cours d’examen à l’Assemblée. Elles poursuivaient un but louable – mieux maîtriser l’urbanisme en étalement dans les communes littorales. Cependant, la pratique a montré qu’elles ont pu susciter – notamment s’agissant de la suppression du hameau nouveau intégré à l’environnement – des problèmes importants dans certaines communes, particulièrement à La Réunion. J’espère que le Gouvernement prendra au sérieux ces remontées du terrain et prendra les mesures requises pour permettre le développement de ces communes. 

Je conclus : ces dispositions sont à l’image de la loi, nombreuses, touffues, complexes, et au bilan incertain, en dépit de certaines réussites.

M. Mickaël Nogal (LaREM). C’est ma dernière intervention pour ce mandat qui prend fin pour moi dans quelques jours. Je souhaite vous remercier, monsieur le Président, pour votre accompagnement et votre confiance. Je remercie aussi mes collègues Christelle Dubos, Richard Lioger, Nicolas Démoulin, Jean-Luc Lagleize, Thibault Bazin, Sylvia Pinel, François Pupponi et Stéphane Peu pour leur implication sur les questions de logement. Je remercie aussi les services administratifs de l’Assemblée nationale ainsi que mon équipe pour leur soutien précieux.

La loi ELAN a contribué puissamment à la politique de cette majorité, qui a concouru à permettre une politique du logement qui améliore concrètement la vie des Français. Elle s’inscrit dans une continuité, faisant suite à d’autres textes, notamment la loi ALUR, qui ont créé des outils que nous avons souhaité améliorer. Monsieur Lagleize, vous avez parlé notamment du bail réel solidaire et des organismes de foncier solidaire, qui fonctionnent aujourd’hui. Les premiers BRS d’Occitanie ont été inaugurés il y a peu : cela fonctionne.

Je pense aussi à l’encadrement des loyers, que la loi 3DS a récemment reconduit. Je pourrais aussi citer la rénovation énergétique et la fiabilisation du diagnostic de performance énergétique, travail permis par la loi ELAN et concrétisé dans la loi Climat et résilience. Je citerai aussi la transformation de bureaux en logements : le bonus de constructibilité de 30 % avait fait consensus sur tous les bancs dans la loi ELAN.

Vous avez parlé de la réorganisation utile du secteur HLM, et je retiendrai aussi la revitalisation des territoires : Action Cœur de ville est un succès qui doit être amplifié.

M. Fabien Di Filippo (LR). Je salue le travail des rapporteurs et notamment de mon collègue Thibault Bazin, très investi sur ces questions. Je poursuis sur la revitalisation des territoires : les dispositifs Action Cœur de ville et Petites villes de demain sont très importants pour lutter contre la métropolisation. Ces dispositifs sont d’autant plus importants que dans les villes très anciennes, les cœurs de ville sont souvent la partie la plus dégradée, et il faut impérativement leur redonner des marges de manœuvre pour leur développement.

J’ai deux remarques par rapport au travail de cette législature. D’abord, à travers l’action pseudo-environnementale de cette majorité, chaque texte est l’occasion d’un empilement de normes supplémentaires qui crée une complexité qui n’est favorable ni au travail de nos entreprises, ni à la construction, ni à l’accessibilité et au caractère abordable du logement pour nos concitoyens. Les résultats ont été contre-productifs, et on constate sur ce point une asymétrie entre ce qui se passe en France et les autres pays européens.

Il y a aussi, deuxième remarque, une asymétrie entre ce qui se passe dans les métropoles et dans les zones rurales, notamment en termes d’étalement urbain. On voit bien avec les derniers textes parus, pour des petites communes, notamment dans la ruralité, qui ont pourtant retrouvé une attractivité nouvelle au cours des deux dernières années, qu’elles sont incapables de se développer. En revanche, en périphérie des métropoles, on peut toujours artificialiser et trouver de nouvelles terres agricoles à conquérir, ce qui facilite la métropolisation. Or celle-ci aggrave la fracture sociale dans notre pays. C’est donc un constat d’échec cinglant que l’on doit faire.

M. David Corceiro (Dem). En 2018, la loi ELAN portait l’ambition de réponses profondes en matière de logement. Il est donc de notre devoir de contrôler sa bonne mise en œuvre et d’évaluer ses impacts. Il s’agissait de simplifier la démarche de construction de logements, en supprimant les freins à la construction de logements, et de renforcer le modèle de logement social pour lutter contre la fracture territoriale et donner plus à ceux qui en ont besoin.

Des améliorations sont à noter comme le relève le rapport de mes collègues : la garantie Visale ou encore les ORT. Toutefois, le rapport fait aussi état du travail qu’il reste à accomplir : les dispositions adoptées en matière d’aménagement ont peu d’impact et la production de logements n’a pas augmenté depuis 2018.

Je tiens à rappeler le constat que nous avions fait avec mon collègue Richard Lioger sur le logement et la précarité des étudiants, des apprentis et des jeunes actifs : le logement représente le premier poste de dépense des étudiants, à hauteur de 60 % de leurs ressources. Quel a été l’impact de la loi ELAN dans ce domaine ?

Pensez-vous, trois ans après la promulgation de la loi ELAN, que le rôle social des bailleurs sociaux soit mieux pris en charge ? Je vous interroge aussi sur le nouveau dispositif de contrat de mixité sociale issu de la loi 3DS. Notre groupe avait proposé la généralisation de cet outil : au regard des conclusions de votre rapport, estimez-vous qu’il soit opportun de procéder à une telle évolution ?

M. Antoine Herth (Agir ens.). L’ambiance de la commission de ce matin, la dernière de cette législature, où chacun est venu avec ses tripes et ses convictions, est une attitude favorable.

Je veux remercier l’ensemble des spécialistes de l’urbanisme et du logement pour leur expertise tout au long de la législature, qui m’ont permis, à moi qui ne suis pas un expert de ce domaine, de comprendre mieux ces questions. C’est aussi la richesse de notre mandat, où nous devons parler de tout et examiner tout.

Je constate, à la lumière de votre rapport et de nos discussions, que le combat de l’Abbé Pierre n’est pas terminé : comme dans le mythe de Sisyphe, nous devons toujours pousser la pierre. Je pense qu’il est néanmoins important, comme sur les questions agricoles que je connais beaucoup mieux, de regarder l’ensemble de la législature, et d’examiner l’impact de la loi ELAN en combinaison avec celui des lois Climat et résilience et 3DS.

Je rappelle aussi que l’isolation thermique des bâtiments est un volet stratégique de la question du logement. Nous avons la chance d’être très bien lotis en matière de génération d’électricité, mais il ne faut pas du tout négliger l’importance de cette problématique.

Mme Sylvia Pinel (LT). Je veux saluer à mon tour le travail de nos rapporteurs et le travail mené au sein de cette commission tout au long de la législature, dans un état d’esprit positif et apaisé. La qualité de nos échanges m’a fait grand plaisir.

Sur l’urbanisme et la construction, nous sommes sur du temps long, et nos calendriers d’évaluation peuvent en effet être inadaptés pour apprécier l’effet d’une politique sur le terrain.

Je voudrais vous interroger sur le regroupement des bailleurs sociaux. Sur les territoires moins dotés, la question de la proximité se pose : je veux remonter la difficulté de certains élus pour trouver des bailleurs pour porter leurs projets dans des territoires moins denses où nous avons besoin de logements sociaux. C’est un effet de bord de la loi ELAN.

Qu’en est-il des locataires ? Ont-ils perçu une amélioration des services qui leur sont offerts, ou regrettent-ils plutôt cette proximité ?

En ce qui concerne la transformation des bureaux vides en logements, avez-vous pu évaluer son impact sur la mixité sociale ? Avez-vous des retours quantitatifs sur ces réalisations ? Avec Thibault Bazin, nous avions exprimé certains doutes sur cette question.

Sur le bail mobilité, vous évoquez des résultats décevants. Avez-vous pu identifier des causes, des freins, et avez-vous des propositions pour le rendre plus efficace ? Jean-Luc Lagleize a évoqué la garantie Visale, que je me réjouis d’avoir initié, et c’est une bonne continuité que je constate là-dessus.

Quant aux BRS et aux OFS, je note ce que vous dites, mais ce n’est pas le cas partout : dans certains territoires, on note encore des freins à leur développement. Avez-vous là aussi des propositions pour amplifier le recours à cet instrument ?

Mme Stéphanie Do. En tant que rapporteure budgétaire de cette commission sur le logement depuis 2017, ma question est la suivante : pensez-vous au regard des retours des acteurs du logement social lors des auditions que vous avez conduites, que, malgré les doutes exprimés par certains bailleurs sociaux, l’objectif de production de 250 000 logements sociaux sur les deux prochaines années soit réellement atteignable ?

En effet, le constat est clair : nous devons favoriser la construction et trouver une solution pérenne pour les 300 000 personnes toujours privées de logement pérenne.

Mme Jacqueline Maquet. Il y a eu des avancées sur le logement pendant cette législature. Néanmoins, le chemin est encore très long. Au regard de son impact sur le pouvoir d’achat, il faut qu’il soit une priorité sur la prochaine législature.

Ma question est pour M. Lagleize. Je me suis intéressé aux dispositifs permettant la lutte contre l’habitat indigne. À la lecture de votre rapport, il apparaît que la bonne mise en œuvre du permis de louer se heurte à plusieurs freins de nature politique, juridique, organisationnelle ou opérationnelle ou intervenir à diverses étapes. Le rapport mentionne notamment le manque d’éléments réglementaires permettant d’organiser sa mise en œuvre opérationnelle. Il souligne que le déploiement du permis de louer nécessite des moyens humains et financiers à chaque étape de sa mise en œuvre. Il montre enfin, et je crois que c’est là l’obstacle principal, que l’efficacité du dispositif repose sur la bonne volonté des bailleurs.

Ma question est simple : mes chers collègues, quelles mesures faut-il renforcer pour mieux garantir l’efficacité du permis de louer ?

M. Éric Bothorel. Dans la loi ELAN, il y a aussi la dernière lettre, « N » pour numérique. Le rapport n’y était pas consacré, mais je vais en faire une micro-évaluation. J’ai le plaisir de m’y livrer aux côtés de mon collègue Mounir Mahjoubi, qui a été, en tant que membre du Gouvernement, une cheville ouvrière de l’impulsion donnée au numérique sur notre territoire.

Sans la loi ELAN, pourrions-nous aujourd’hui constater que 80 % des logements sont raccordables à la fibre ? Pourrions-nous imaginer que 90 % des sites mobiles auraient été basculés en 4G sur le territoire ? Certes la loi y a aidé, et les opérateurs ont contribué. Mais il faut dire que cela a été un bénéfice en amont du « New Deal Mobile ».

Nos perspectives sont les suivantes, pour une loi « ELAN 2 » : il faut traiter le problème de la loi Littoral et les derniers obstacles de couverture, et travailler sur les structures d’hébergement et les infrastructures critiques.

M. Richard Lioger, rapporteur. De manière globale, je rappelle que le projet de la loi était de donner des outils aux maires bâtisseurs pour construire plus et moins cher. En réponse à ce qu’a dit M. Bazin tout à l’heure, la clef pour construire plus est largement dans les mains des maires eux-mêmes, qui délivrent les permis de construire. Pour les élections municipales, le débat dans toutes les grandes villes s’est fait contre le bétonage. Nous en payons les conséquences.

Quand on entend que certains maires demandent des pièces complémentaires pour les demandes de permis de construire, malgré l’interdiction de la loi ELAN, ou freinent la numérisation de l’instruction des demandes, tout cela concourt à la difficulté qu’ont les bailleurs sociaux à être aussi productifs qu’il faudrait l’être.

En ce qui concerne le logement très social, je crois que tous les bailleurs sociaux devraient se doter d’une filiale de logement très social. Il faut s’occuper des populations qui se situent entre celles qui sont à la rue et celles à qui on demande des fiches de salaire.

Pour répondre à la ministre Pinel, en ce qui concerne les retours des locataires du parc HLM après les regroupements des bailleurs, nous n’avons pas senti un problème particulier.

En matière de transformation de bureaux de logements en revanche, nous éprouvons une certaine déception. Il faudrait savoir pourquoi il n’y a pas plus de bureaux vacants transformés : il y a des phénomènes de spéculation, d’attente, et des grands groupes qui conservent des bureaux vides. Pourtant, cela nous semblait être une solution permettant de débloquer certaines situations, de la même manière que nous avions proposé que les personnes vendant un foncier en centre-ville soit dispensée d’impôt.

M. Jean-Luc Lagleize, rapporteur. Comme l’ont rappelé nos collègues Di Filippo et Pinel, nous sommes sur du temps long. L’idée d’une évaluation quinquennale globale des lois prises en matière d’urbanisme et de logement me semble bonne et à transmettre à nos successeurs. Ne serait-ce que sur cette législature, la loi ELAN a été complétée dans les lois Climat et résilience et 3DS.

Je pense à ce qui touche aux OFS, que l’on a améliorés dans la loi 3DS. C’est un dispositif qui a été long à mettre en œuvre car il est très nouveau : les banques ont été frileuses au financement. Ensuite, des organismes de logement social l’ont pris en main et développé. Partout où il y en a, cela fonctionne et il n’y a pas de difficulté de vente.

Parmi les outils qui fonctionnent moyennement, nous avons évoqué le bail mobilité. Il connaît cependant un relatif succès dans certains territoires, notamment à Paris, car il y a beaucoup de personnes qui y viennent travailler ou se former ponctuellement, et donc il y a un besoin de ce bail. Selon certains acteurs, le fait qu’il ne soit pas renouvelable pourrait être un frein qu’il serait peut-être intéressant de lever, tout en restant au sein de la limite des dix mois, afin de ne pas le pérenniser.

La transformation des bureaux en logements est un excellent outil qui a du mal à monter en charge. Mais il va prendre de l’ampleur avec la réduction de l’artificialisation nette des sols imposée au titre de l’article 194 de la loi Climat et résilience. Il faudra bien trouver du foncier non agricole et non naturel pour construire : de ce point de vue, un bureau vide c’est comme une friche.

En ce qui concerne le permis de louer, c’est intrinsèquement une excellente idée. Mais il est difficile à mettre en œuvre, car il a été inventé pour empêcher les marchands de sommeil de mettre en location leur bien. Or ceux qui déclarent leur bien sont les bailleurs honnêtes, et non pas les malhonnêtes. C’est donc aux communes qu’il revient de se doter des moyens humains pour contrôler ces comportements. Quant aux professionnels de l’immobilier qui font valoir qu’il s’agit d’un dispositif pénalisant et qu’il faudrait les en dispenser, il pourrait en effet être intéressant de leur accorder cette confiance.

M. Thibault Bazin, rapporteur. Les désaccords sur les choix stratégiques qui ont été faits en matière d’aménagement et de logement se poursuivent. Les craintes que nous avions émises existent encore, et c’est logique. Je veux remercier à mon tour Mickaël Nogal avec lequel nous avons eu des échanges dans le respect et la cordialité.

Fabien Di Filippo soulève un enjeu important, qui est celui de l’aménagement du territoire. Dans la production de logements, il y a des difficultés qui varient en fonction des territoires. Cette approche territoriale, nous ne l’avons pas eue dans notre rapport. Les interlocuteurs que nous avons pu avoir n’ont pas fait une déclinaison territoriale de leurs retours et ont eu plutôt une approche globale.

Sur l’accessibilité et le caractère abordable du logement, également soulevé par mon collègue Di Filippo, cette législature a pris des dispositions réglementaires mais a fait l’impasse sur la question des moyens pour y arriver. Or nous ne pouvons pas avoir un choc de l’offre si nous n’avons pas un choc de la demande solvable. Si l’offre est de plus en plus chère, la demande en face ne se retrouve pas forcément.

Les petites communes n’ont pas été prises en compte. Je reconnais l’expertise de mes collègues rapporteurs sur les métropoles, mais les mêmes règles ne correspondent pas à des territoires périurbains ou ruraux avec une ville-centre. Tout le monde était d’accord pour soutenir le commerce de proximité et susciter des rénovations dans les cœurs anciens, mais nous n’avons pas trouvé une dynamique en la matière. Notre rapport est probant car nous reconnaissons des outils intéressants mais pas toujours bien appropriés.

David Corceiro a soulevé la question du logement étudiant et le rôle des bailleurs sociaux. Mais les bailleurs sociaux, nous leur avons imposé une réforme de structure qui les a bouleversés, et la mise en œuvre des sociétés de regroupement les a occupés. Leur autofinancement a été affecté. En fonction des bailleurs, l’impact n’a pas toujours été le même. L’idée était que la vente permettrait de construire davantage : le constat que nous avons fait est que la vente a patiné et que le volume n’est pas celui qui avait été évoqué dans les débats.

Je fais remarquer aussi que les dispositions sont nombreuses qui ont été percutées par celles des lois Climat et résilience et 3DS.

Le collègue Antoine Herth mentionnait la question du bâtiment par rapport à l’enjeu climatique. C’est fondamental, et la question des moyens pour relever le défi reste sur la table. Derrière la question de la rénovation, on trouve la question du pouvoir d’achat. Comment faisons-nous pour être au rendez-vous de la rénovation énergétique et des obligations issues de la loi Climat et résilience ?

Madame la ministre Pinel, j’ai beaucoup apprécié nos échanges tout au long de la législature. Vous nous demandez des éléments quantitatifs sur la transformation de bureaux en logements, le serpent de mer de la politique de logements. Cela représente moins de 1 % des logements neufs produits en France : ce n’est pas le gisement de logements neufs. Demeure la question de l’usage, car dans ces quartiers on n’a pas forcément les stationnements en cohérence avec les besoins, par exemple.

En matière de BRS, on a depuis la loi ELAN un doublement des OFS, mais revenons-en aux chiffres : 372 logements BRS livrés en 2021, d’après Foncier solidaire France, avec 2 300 en commercialisation. Par rapport au défi de 500 000 logements, ramenons donc ces données à leur juste proportion. La même fédération estime qu’on pourrait arriver en 2025 à 11 000 logements. C’est un potentiel certes intéressant mais qu’il faut comparer au volume total de production de logements que nous devons viser.

Notre collègue Stéphanie Do mentionnait le défi de la qualité. Nos échanges avec les architectes ont révélé que nous n’avions pas gagné en qualité. Est-ce que notre prisme de la haute qualité environnementale n’est pas biaisé, surtout au regard de la crise sanitaire ? Est-ce qu’il ne faut pas viser plutôt la haute qualité d’usage ? Tous les modèles incitent à une forme de compacité, qui peut se comprendre du point de vue de la rentabilité mais qui pose problème du point de vue de la qualité de vie dans les logements, avec peu de surfaces extérieures ou de rangement. Comment concilier le développement durable, le non-étalement urbain et la qualité de vie ?

Notre collègue Bothorel a voulu nous faire la promotion de la politique numérique du Gouvernement : la loi ELAN n’est pas la cause qui a permis des avancées dans le secteur numérique. La couverture mobile promise pour 2022 sera en réalité pour 2026. C’est plutôt dû au « New Deal Mobile ».

Il restera à évaluer avec plus de recul certains dispositifs de la loi ELAN, car trois ans c’est trop court, et les évaluer en cohérence avec la loi Climat et résilience. Nos successeurs auront encore du travail devant eux.

M. le président Roland Lescure. Je n’en doute pas ! Je mets aux voix le rapport.

La commission adopte le rapport.

M. le président Roland Lescure. Je mets fin aux travaux de la commission pour cette législature. Cela a été un plaisir et un honneur pour moi de présider cette commission.

 


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Liste des personnes auditionnées

Par ordre chronologique

Table ronde n° 1 – 18 janvier 2022

Restructuration des organismes de logement social

Union sociale pour l’habitat (USH) *

Mme Marianne Louis, directrice générale

Mme Francine Albert, directrice des relations institutionnelles

Fédération nationale des offices publics de l’habitat (FNOPH) *

M. Marcel Rogemont, président  

M. Laurent Goyard, directeur général

Fédération nationale des sociétés anonymes et fondations d’HLM (F-ESH) *

M. Didier Poussou, directeur général

Mme Élisabeth Pinto, directrice d’études juridiques

Procivis Union d’économie sociale pour l’accession à la propriété (UES-AP) *

M. Yannick Borde, président

M. Guillaume Macher, directeur général

Fédération nationale des sociétés coopératives d’HLM (Coop’HLM) *

M. Vincent Lourier, directeur

Fédération nationale des associations régionales HLM (FNAR) *

M. Jean-Luc Vidon, président

Fédération des élus des entreprises publiques locales (Fed EPL)

M. Philippe Clemandot, responsable du département immobilier et développement


 

Table ronde n° 2 – 19 janvier 2022

Réforme de l’urbanisme opérationnel

 

Conseil national de l’Ordre des architectes (CNOA) *

Mme Valérie Flicoteaux, vice-présidente

M. Pierre Sellin, relations institutionnelles (Séance publique)

Grand Paris Aménagement (GPA)

M. Stéphan de Faÿ, directeur général

M. Jean-Baptiste Corteel, directeur de cabinet

Union nationale des aménageurs (UNAM) *

M. François Rieussec, président

M. Nicolas Thouvenin, directeur général

Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) *

M. Didier Bellier-Ganière, délégué général

Mme Bérengère Joly, directrice juridique

Mme Anne Peyricot, directrice de cabinet et des relations institutionnelles

Fédération Française du Bâtiment (FFB) *

M. Stéphane Chenuet, chef de service des affaires juridiques et fiscales

M. Yann Le Corfec, responsable du pôle habitat, chargé de l’aménagement

M. Benoît Vanstavel, directeur des relations institutionnelles

Association des établissements publics fonciers locaux (EPFL)

M. Arnaud Portier, secrétaire général, directeur de l’EPFL Pays basque


 

Table ronde n° 3 – 25 janvier 2022

Dispositions de droit immobilier

 

Confédération nationale du logement (CNL)

M. Eddie Jacquemart, président national

Mme Jocelyne Herbinski, secrétaire confédérale

Confédération générale du logement (CGL) *

M. Stéphane Pavlovic, directeur général

Fédération nationale de l’immobilier (Fnaim) *

M. Jean-Marc Torrollion, président

Mme Bénédicte Rouault, cheffe de cabinet

Association Plurience *

M. David Chouraqui, président

Union nationale des propriétaires immobiliers (UNPI) *

M. Pierre Hautus, directeur général

Confédération de la consommation, du logement et du cadre de vie (CLCV) *

M. David Rodrigues, juriste secteur habitat

Association Force ouvrière Consommateurs (AFOC)

M. Alain Misse, secrétaire général

Confédération syndicale des familles (CSF)

Mme Camille Giraudet, chargée de mission


Table ronde n° 4 – 26 janvier 2022

Urbanisme réglementaire et commercial

Fédération nationale des schémas de cohérence territoriale (Fédé SCoT)

M. Michel Heinrich, président

Mme Stella Gass, directrice

Association nationale des pôles d’équilibre territoriaux et ruraux et des pays (ANPP)

Mme Martine Boutillat, administratrice

M. Michael Restier, directeur

Fédération nationale des agences d’urbanisme (FNAU)

Mme Virginie Carolo-Lutrot, première vice-présidente

Mme Brigitte Bariol Mathais, directrice générale

Mme Zoé Chaloin, chargée de mission

Conseil national des centres commerciaux (CNCC) *

M. Bertrand Marguerie, vice-président de la commission urbanisme commercial

M. Dorian Lamarre, directeur des affaires publiques

Intercommunalités de France (AdCF)

Mme Virginie Carolo-Lutrot, première vice-présidente

Mme Carole Ropars, responsable des questions d’urbanisme et d’aménagement

Mme Montaine Blonsard, responsable des relations avec le Parlement

Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF)

Mme Nathalie Fourneau, responsable du département aménagement des territoires

M. Matthias Tilloy, conseiller technique urbanisme

Agence nationale des élus du littoral (Anel)

M. Jordan Dartier, vice-président de la commission urbanisme et aménagement

Mme Anne-Sophie Leclère, déléguée générale

Mme Catherine Bersani, administratrice

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire des représentants d’intérêts de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), qui vise à fournir une information aux citoyens sur les relations entre les représentants d’intérêts et les responsables publics lorsque sont prises des décisions publiques.

  
Liste des CONTRIBUTIONS ÉCRITES

 

Métropole Aix-Marseille-Provence

Direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature (DGALN)

Direction générale de la prévention des risques (DGPR)

Agence nationale pour l’information sur le logement (Anil)

Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT)

Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS)

Cabinet de la ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement

Cabinet de la ministre de la transition écologique

Cabinet de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales

Fondation Abbé Pierre *

Union sociale pour l’habitat (USH) *

Fédération nationale des offices publics de l’habitat (FNOPH) *

Fédération des élus des entreprises publiques locales (Fed EPL) *

Fédération nationale des sociétés anonymes et fondations d’HLM (F-ESH) *

Fédération nationale des sociétés coopératives d’HLM (Coop’HLM) *

Action Logement Groupe *

Conseil national de l’Ordre des architectes (CNOA) *

Fédération française du bâtiment (FFB) *

Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) *

La Filière Béton *

 

 

 

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.


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   ANNEXE I : COMPTES RENDUS des tables rondes menÉES par les rapporteurs

TABLE RONDE n° 1 : La restructuration du logement social

M. Richard Lioger, rapporteur, président de séance. J’ai le plaisir de vous accueillir à cette première table-ronde que la commission des affaires économiques organise pour le suivi de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite loi « ELAN ».

Comme vous le savez peut-être, l’article 145-7, alinéa 3, du Règlement de l’Assemblée nationale prévoit en effet qu’à l’issue d’un délai de trois ans suivant l’entrée en vigueur d’une loi, deux députés ou plus, dont l’un au moins appartient à un groupe d’opposition, présentent à la commission compétente un rapport d’évaluation sur l’impact de cette loi. Ce rapport « fait notamment état des conséquences juridiques, économiques, financières, sociales et environnementales de la loi, le cas échéant au regard des critères d’évaluation définis dans l’étude d’impact préalable, ainsi que des éventuelles difficultés rencontrées lors de la mise en œuvre de ladite loi. ».

C’est sur ce fondement que la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale, à laquelle nous appartenons, nous a demandé, le 16 novembre dernier, de réaliser le suivi à trois ans de la loi ELAN.

Je remercie l’ensemble des personnalités, institutions et organisations qui ont répondu positivement à notre invitation et qu’à défaut de pouvoir saluer en présentiel, mes collègues et moi-même accueillons donc dans le cadre de la présente visioconférence, qui est enregistrée.

Nous vous demanderons de concentrer votre propos sur les quelques sujets que vous jugerez les plus importants — je pense, par exemple, aux nouvelles compétences des organismes de logement social (OLS), à l’évolution de leur gouvernance, aux mouvements de fusions-absorptions d’organismes, mais aussi à l’ouverture de l’agrément comme organisme de foncier solidaire (OFS), à l’accélération de la dynamique de vente des logements HLM, à la mise en œuvre du système de la cotation de la demande de logements sociaux, ou encore à la gestion en flux des contingents de logements sociaux.

À l’issue de nos travaux, à la fin du mois de février prochain, nous présenterons à la commission des affaires économiques de l’Assemblée un rapport qui s’efforcera de dresser un bilan équilibré de cette loi ELAN, qui fut assurément l’une des plus importantes de l’actuelle législature.

Mme Christelle Dubos, rapporteure. La loi ELAN a eu pour objet de faciliter l’accès de nos concitoyens au logement, avec un souci de mixité sociale. Son évaluation à trois ans permettra, au cours de la prochaine législature, de reprendre certains sujets incomplètement traités ou de lutter contre les freins éventuellement observés au niveau local.

Mme Marianne Louis, directrice générale de l’Union sociale pour l’habitat (USH). En accord avec les fédérations, avec lesquelles nous nous sommes concertés pour préparer la présente table ronde, l’USH concentrera son propos sur les ventes, les marchés globaux de conception et les politiques d’attribution, les questions du bilan des fusions-absorptions, des rapprochements entre organismes, des titres participatifs et de l’évolution de la gouvernance étant, quant à elles, principalement suivies par les fédérations du fait de notre modèle confédéral.

Si vous en étiez d’accord, les fédérations pourraient donc commencer par prendre la parole sur les sujets qui les concernent plus particulièrement.

M. Marcel Rogemont, président de la Fédération nationale des offices publics de l’habitat (FNOPH). Je commencerai en évoquant les rapprochements entre organismes : il faut rappeler que la loi ELAN avait pour objectif de conserver une certaine proximité territoriale. Qui décide de construire des logements sociaux ? Ce sont les élus locaux, qui sont en charge de la mixité sociale et qui sont au cœur du déploiement et du développement de toute la politique du logement social.

Dans son application, la loi ELAN a-t-elle suffisamment préservé la proximité avec les élus ? Inévitablement, les regroupements entrainent un éloignement. Ces regroupements ont, certes, commencé bien avant la loi ELAN. La mise en place d’établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et d’établissements publics territoriaux (EPT) a débouché sur des regroupements d’organismes, pour garder une certaine cohérence, et sur des processus d’évitement de la loi, qui se sont d’ailleurs accrus avec la loi ELAN. Comment appliquer une loi de caractère général, tout en proposant des dispositifs d’évitement ?

L’idée de créer des sociétés anonymes de coordination (SAC) nationales va, par définition, à l’encontre de l’idée de garder une proximité avec les centres de décisions territoriaux. Même si des organismes nationaux peuvent intervenir en soutien des élus locaux, la création de telles SAC, très hétéroclites et inaptes à définir des objectifs cohérents de gestion, pose problème.

Dans le cadre de la conférence de consensus, la fédération des offices HLM avait soulevé le problème de la double appartenance à un groupe capitalistique et à une société locale. Cette situation fait apparaitre plusieurs problématiques : qui contrôle qui et comment ? Comment s’opère la consolidation, quand un office se retrouve membre d’un regroupement national et que la maison-mère et la SAC dont sa filiale est membre déploient des stratégies opposées ? L’attention du Parlement avait été attirée sur ces sujets, qui n’ont peut-être reçu l’écho que nous espérions.

Nous aurions préféré que, plutôt que d’imposer la présence d’un « organisme » par département, la loi ait imposé celle d’un office public de l’habitat (OPH) par département. Là où des filiales de grands groupes s’implantent, la capacité décisionnelle locale se réduit. Dans un département où coexistent une filiale de la Caisse des dépôts et consignations et un office, la loi ELAN impose la fusion ; peu de temps après, la Caisse décide de fusionner toutes ses filiales ; conséquence : il n’y a désormais plus d’opérateur strictement départemental, ce qui est éminemment dommageable.

Plusieurs dispositions de la loi ELAN vont à l’encontre de son objet même : c’est notamment le cas des dispositions relatives aux sociétés d’économie mixte (SEM). Une double mécanique est à l’œuvre. D’une part, une mécanique d’évitement des dispositions de la loi ELAN : des organismes gérant moins de douze mille logements se sont fait absorber par des SEM créées ex nihilo à cette seule fin. D’autre part, des SEM non agréées pour la construction de logements ont demandé l’agrément pour pouvoir ensuite absorber un office – en d’autres termes, la demande d’agrément est présentée alors que la SEM n’a pas encore de logements, ce qui est un peu surprenant…

M. Laurent Goyard, directeur général de la FNOPH. Selon nos informations, quatre SEM ont été créées à la seule fin de pouvoir absorber des offices : il s’agit de l’office de Montélimar (1 500 logements), Les Résidences de l’Orléanais (10 000 logements), Metz Habitat Territoire et Sarreguemines Confluences Habitat. Mais cette liste n’est pas exhaustive.

Nous connaissons également des exemples de SEM qui n’étaient pas agréées pour le logement et qui l’ont été pour pouvoir absorber le patrimoine d’offices : Habitats du Littoral (Boulogne-sur-Mer), Logidôme (ancien OPH de Clermont Communauté), Val-Savoie Habitat et l’office Bougy.

M. Marcel Rogemont. La fédération n’est pas hostile au principe même des regroupements. Nous avons bien compris que des offices de 1 500 logements ou des SEM de 400 logements ne présentent pas un grand intérêt et que, pour offrir des services à nos concitoyens logés en HLM, il faut une densité de logements suffisante pour absorber le coût de cette capacité à offrir des services. Nous ne reprochons donc pas à la loi ELAN cet approfondissement d’une dynamique de concentration déjà engagée, mais plutôt les possibilités laissées ouvertes à certains détournements.

L’éloignement des élus par rapport à l’acte de construire et à leur responsabilité en termes de mixité sociale pose problème. Si la loi ELAN devait être améliorée, ce serait dans le sens d’un approfondissement de la relation territoriale et de la relation avec les élus, dans une coresponsabilisation des organismes du logement social et des élus locaux.

M. Laurent Goyard. Les dispositions de la loi ELAN relatives aux regroupements ont abouti, selon notre décompte, à 19 fusions concernant 40 OPH. Après fusion, il apparait que ces organismes gèrent 17 000 logements en moyenne, avec une médiane à 15 000 logements. 55 sociétés de coordination avec des offices ont été créées, qui ont été agréées ou sont en cours d’agrément.

Au total, 211 organismes de logement social (offices, SEM, entreprises sociales pour l’habitat, etc.) sont concernés, pour la gestion de 1,6 million de logements. Parmi ces 211 organismes, on compte 117 offices, qui représentent 1 million de logements.

Globalement et quelle qu’en soit la structure, les sociétés de coordination ont une taille moyenne de 28 900 logements, avec une médiane à 21 000 logements. Pour les sociétés de coordination dans lesquelles les OPH sont majoritaires en nombre de logements, la moyenne est à 21 900 logements, donc inférieure, mais la médiane est supérieure (27 000 logements). Cet écart trouve son origine dans le fait qu’il y beaucoup de petites sociétés de coordination, sans office ou dans lesquelles les offices sont minoritaires, qui font baisser la médiane. 49 offices restent seuls, qui représentent 1 million de logements et avec une moyenne de 20 000 logements gérés par office.

M. Didier Poussou, directeur général de la Fédération nationale des sociétés anonymes et fondations d’HLM (F-ESH). Je m’en tiendrai à un bilan synthétique.

Les objectifs visés par la loi en matière de regroupements ont été atteints par les entreprises sociales pour l’habitat (ESH). Une cinquantaine de fusions sont intervenues du côté des ESH, faisant passer le nombre d’opérateurs de 220 en 2017 à 172 sociétés au 1er aout 2021.

L’ensemble des ESH respecte aujourd’hui les conditions posées par la loi ELAN et la quasi-totalité des sociétés (168 sur 172) appartient à un groupe. Il reste encore quatre sociétés indépendantes, mais certaines correspondent à un groupe dérogatoire de moins de douze mille logements. 133 ESH, c’est-à-dire la majorité, dépendent d’un groupe national, dont 13 sont engagées dans une société de coordination territoriale. 13 ESH sont regroupées au sein de groupes territoriaux composés exclusivement d’ESH. 34 ESH sont regroupées au sein de sociétés de coordination comprenant des OPH et/ou des SEM. 5 ESH font partie de groupes OPH.

Ce mouvement de réorganisation a bénéficié d’un accompagnement de la part de la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS), à hauteur de 100 000 euros. Cet accompagnement a notamment permis de financer les processus de fusion ou des études juridiques préalables.

Nous dressons donc un bilan plutôt positif, sans difficultés particulières au niveau des processus de regroupement.

M. Yannick Borde, président de Procivis Union d’économie sociale pour l’accession à la propriété (UES-AP), vice-président de l’USH. Le réseau Procivis était dans une situation un peu particulière, pour ce qui concerne cette question du regroupement. Avant l’adoption de la loi ELAN, nous détenions en effet par l’intermédiaire de nos cinquante sociétés anonymes coopératives d’intérêt collectif pour l’accession à la propriété (SACICAP), qui ne sont pas des bailleurs sociaux, un certain nombre d’ESH de façon majoritaire. Nombre d’entre elles n’atteignaient pas le seuil des douze mille logements.

Dans le cadre des nouvelles règles de gouvernance et de l’obtention des agréments, il nous était difficile d’imaginer laisser les ESH situées sous ce seuil sortir du périmètre de notre réseau. Il nous a donc fallu réfléchir à une nouvelle organisation. Nous nous sommes interrogés sur le mécanisme de la SAC, que nous n’avons pas retenu parce qu’il s’appuie sur un montage qui ne correspond pas à notre ADN.

Nous avons voulu construire une organisation reconnue comme respectant naturellement le cadre de la loi ELAN, mais gardant certaines de nos valeurs comme un processus de décision totalement décentralisé, un fonctionnement localisé et des équipes territoriales opérationnelles. Cette réflexion a donné naissance, dans le courant de 2021, au groupe Procivis Logement social, qui regroupe l’ensemble des acteurs que nous fédérons. Tant au niveau de l’actionnariat que des équipes de direction et des équipes opérationnelles des organismes concernés, une vraie dynamique s’est créée, facilitée par le fait qu’il n’y a pas de concurrence directe entre les organismes au niveau territorial.

Nous avions déjà essayé de changer la structure du réseau avant la loi ELAN, mais sans succès. La loi nous aura donc permis d’aboutir à la création de ce groupe HLM.

L’article 92 de la loi ELAN intéressait tout particulièrement notre réseau, en ceci qu’il autorisait une modification de l’objet social de nos adhérents. L’ensemble des sociétés ont procédé à la modification de leurs statuts et cette modification se retrouve aujourd’hui dans la dynamique du réseau, puisque les acteurs ont vu leur activité immobilière devenir principale – pour l’année 2021, nous aurons franchi les seuils de 10 000 logements construits et vendus et 800 000 logements en administration de biens, ce qui fait de nous un acteur complet et diversifié en matière de logement.

Je ne crois pas, contrairement à ce qui a pu être dit, que la loi ELAN soit une loi qui ait permis de favoriser la construction de logements. C’est une loi qui a organisé le secteur ; ce n’est pas négligeable, mais l’organisation n’est qu’un facteur minime pour expliquer la dynamique actuelle de la construction dans notre pays, qui souffre de beaucoup d’autres problèmes que la loi n’a pas traités.

M. Richard Lioger. On entre là dans un débat politique compliqué !

M. Vincent Lourier, directeur général de la Fédération nationale des sociétés coopératives d’HLM. Les coopératives d’HLM ayant pour activité principale, voire unique, la production de logements en accession à la propriété, nous ne relevions pas des attendus du projet de loi ELAN tel que présenté lors de la conférence de consensus.

Le législateur a, en définitive, tenu compte de notre spécificité, puisque la loi votée reconnait que les organismes qui n’ont pas d’activité locative – ou de façon très marginale – ne sont pas tenus de se soumettre à la règle imposant le regroupement des opérateurs gérant moins de douze mille logements. De ce fait, sur les 161 adhérents de la fédération, 122 ne sont pas soumis à cette règle de regroupement, ce qui ne leur interdit pas d’être individuellement dans des écosystèmes pouvant les conduire, par exemple, à entrer volontairement dans une société de coordination.

Pour ce qui concerne les autres coopératives d’HLM, exerçant à titre principal ou unique le métier de bailleur social, 4 disposaient déjà d’un patrimoine supérieur à douze mille logements ou bénéficiaient d’une dérogation liée à une implantation ultramarine. Quant aux 24 coopératives qui avaient l’obligation de s’organiser pour répondre aux exigences de la loi, 9 ont fait le choix de justifier leur appartenance à un groupe capitalistique (y compris, le cas échéant, au prix de modifications statutaires) et 15 ont rejoint une société de coordination. Aucune coopérative n’a fait le choix d’une fusion ou d’un transfert de patrimoine, toutes ont choisi de poursuivre leur activité dans l’une des formes autorisées par la loi.

La loi ELAN a eu un autre impact sur le tissu des coopératives d’HLM, à travers l’accélération des phénomènes de fusion entre coopératives. Depuis 2018, 8 coopératives ont ainsi fusionné dans une optique de rationalisation des structures sur certains territoires. Compte tenu des facilités offertes par loi, 7 coopératives ont absorbé, à la demande de leur gouvernance, 9 offices HLM pour un total de 53 000 logements.

M. Jean-Luc Vidon, président de la Fédération nationale des associations régionales d’organismes d’habitat social (FNAR). Les associations régionales HLM structurent et organisent, à l’échelle de chaque région, la représentation du mouvement HLM.

L’évolution législative a naturellement affecté le travail de chacune de ces associations régionales, puisqu’elles regroupent aujourd’hui des bailleurs qui ont changé : ils sont moins nombreux, certains ont changé de « famille », d’autres ont fusionné et rejoint des opérateurs de taille supérieure.

Les situations sont naturellement diverses. En Île-de-France, qui a longtemps connu un (trop) grand nombre de bailleurs par commune ou par EPCI, la loi a permis aux élus de disposer d’un nombre plus réduit d’interlocuteurs – sans doute mieux à même de traiter avec eux des sujets complexes, nécessitant une grande efficacité à tous les niveaux. Dans d’autres territoires où il y a peu de bailleurs, il va falloir s’assurer que la proximité avec les réalités du terrain perdure.

La loi ELAN visait à donner plus d’efficacité au mouvement HLM. Un indicateur de réussite pourrait tenir à la production de logements, c’est-à-dire la capacité à répondre davantage aux besoins des territoires. Malheureusement, nous sommes depuis plusieurs années sur une trajectoire descendante et l’impact de la loi ELAN n’est pas aujourd’hui mesurable. Certains bailleurs ont certes pu être affectés dans leur capacité de production, du fait des ressources qu’ils mobilisaient par ailleurs pour opérer les regroupements, mais d’autres facteurs expliquent plus largement la faible production actuellement constatée.

M. Philippe Clemandot, responsable du département Immobilier et développement de la Fédération des élus des entreprises publiques locales (Fed EPL). La fédération des EPL se félicite des résultats de la loi ELAN sur deux points : la prise en compte de la spécificité des EPL, au titre notamment de la multiactivité, et la territorialisation de la gouvernance, pour ce qui concerne le choix des élus locaux.

Nous avions 122 SEM à la fin de 2019, il y en a une centaine aujourd’hui. 46 SEM n’ont pas été concernées par des mesures de regroupement : 17 étaient conformes, car gérant plus de douze mille logements ou déclarant un chiffre d’affaires supérieur à 40 M€ ; 15 SEM d’outre-mer, représentant 130 000 logements, restaient en dehors du dispositif ; 14 SEM avaient une activité se situant majoritairement hors du secteur du logement social (3 % du parc).

54 SEM ont donc eu l’obligation de se regrouper : 12 SEM ont rejoint des sociétés de coordination locale comprenant d’autres types de bailleurs (5 % du parc) ; 15 SEM ont rejoint des groupes verticaux comme CDC Habitat, Action Logement, BPCE, Grand Delta Habitat, etc. (5 % du parc) ; 24 SEM ont intégré la société de coordination HACT France (8 % du parc).

En définitive, l’obligation de regroupement instituée par la loi ELAN n’a touché que 18 % du parc des sociétés d’économie mixte et seules 22 SEM, représentant de l’ordre de 8 000 logements, ont quitté notre famille.

Mme Marianne Louis. J’attire également votre attention sur le fait que la CGLLS a récemment mis en place un observatoire du regroupement : au-delà de l’atteinte d’un objectif législatif, il s’agit de savoir dans quelle mesure ce mouvement permet d’atteindre des gains d’efficience, modifie les comportements et les dynamiques locales, affecte les services rendus aux territoires et aux locataires, etc.

M. Marcel Rogemont. Je voudrais évoquer la question des titres participatifs (TP), instruments permettant de renforcer les fonds propres des organismes HLM.

L’accord signé en 2019 avec la Caisse des dépôts prévoyait un montant de 800 millions d’euros (M€) sur deux ans mais, dès la première année, près de 700 M€ de TP ont été souscrits, au bénéfice de 66 OPH. Il est vrai que les conditions financières étaient avantageuses pour l’émetteur.

Plus récemment, le législateur a permis aux collectivités territoriales d’acheter les titres participatifs émis par les offices.

Nous regrettons que la seconde enveloppe négociée ait été assortie de conditions de rémunération nettement moins favorables que pour la première enveloppe. Ce second volet a donc connu un succès plus mitigé.

M. Yves Daniel. La crise de la covid-19 a aggravé la crise du logement que nous connaissons depuis plusieurs années. Sur ce marché, la demande est durablement supérieure à l’offre et tant qu’on ne réussira pas à rééquilibrer les choses, on assistera à des phénomènes spéculatifs et inflationnistes. Le coût du logement et les loyers augmentent, déséquilibrant la situation financière de nombreux ménages.

La loi ELAN at-t-elle permis un rééquilibrage de l’offre et de la demande ? Si oui, sur quels volets ? Que faudrait-il faire pour qu’enfin on passe de la parole aux actes, face à la crise terrible qui s’annonce ?

Mme Marianne Louis. S’agissant des ventes de logements HLM, il faut d’abord rappeler qu’il ne s’agit pas d’une procédure nouvelle : le premier accord entre l’État et le mouvement HLM sur ce sujet date de 2007.

Avant l’adoption de la loi ELAN, 75 % des organismes s’étaient dotés d’une stratégie de cession de patrimoine ; en 2020, la proportion est même de 77 % (contre 70 % en 2012).

En 2020, 122 000 logements étaient mis en vente dans ce cadre, débouchant sur environ 10 000 ventes effectives à des personnes physiques. Depuis 2019, on s’écarte peu de ce niveau de 10 000 ventes annuelles (contre une moyenne de 5 000 ventes annuelles pendant la période 2000-2010).

Les logements HLM sont proposés, d’abord et prioritairement, à leurs occupants et, dans une seconde étape, à d’autres locataires HLM ou à des tiers. Pendant un certain temps, les ventes aux occupants ont surtout été constituées de ventes provenant du parc en logement individuel ; ce potentiel s’est néanmoins progressivement épuisé.

Aujourd’hui, 32 % des acquéreurs sont les occupants actuels du logement, 26 % sont des locataires HLM vivant dans un autre logement que le logement vendu et 40 % sont des tiers au monde HLM. Pour quelques locataires, la vente HLM permet donc le franchissement d’une étape sur un parcours d’accession.

La loi ELAN a facilité le processus de vente, à travers notamment la simplification de l’autorisation de vente – le respect du plan de vente annexé à la convention d’utilité sociale (CUS) permet d’éviter d’avoir à demander une nouvelle autorisation – et l’allégement de certaines formalités (consultation des Domaines pour l’évaluation du prix). Représente également une amélioration intéressante la possibilité d’appliquer de manière différée le statut de la copropriété – s’il faut immédiatement entrer en copropriété dès la vente d’un lot, cela crée des complexités…

M. Vincent Lourier. Je voudrais revenir sur la question de l’agrément des organismes HLM en tant que gestionnaires de foncier solidaire.

La fédération des coopératives est fortement investie sur ce sujet depuis dix ans, puisque nous avions beaucoup contribué, avec d’autres, aux travaux de la loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi « ALUR », puis de l’ordonnance du 20 juillet 2016 relative au bail réel solidaire (BRS). Dès la publication des textes d’application en mai 2017, nous avons accompagné la création, par nos adhérents, de 9 organismes de foncier solidaire et participé, au côté de collectivités territoriales, à la création de 3 organismes supplémentaires à Nantes, Rennes et Bordeaux.

Le législateur a souhaité accompagner cette dynamique en permettant aux organismes de logement social de solliciter un agrément. Sur les 71 OFS agréés à la fin d’octobre 2021, 38 sont des organismes HLM, ce qui montre l’appétence du monde HLM pour ce dispositif. Pourquoi cette réussite ? Un grand nombre d’organismes ont demandé un agrément avec l’ambition de pouvoir mobiliser le BRS dans le cadre de leur politique de cession de patrimoine : il permet en effet d’ajuster le prix de vente à un niveau compatible avec les revenus des locataires en place, d’accompagner la copropriété, de rassurer les collectivités territoriales et de garantir la vocation sociale du logement dans la longue durée – si le patrimoine connaissait une évolution peu souhaitée, il y aurait une réversibilité possible. Par ailleurs, last but not least, les logements relevant de baux réels solidaires sont assimilés à des logements sociaux au titre de l’article 55 de la loi SRU et restent donc comptabilisés comme tels, au-delà du terme de dix ans prévu dans le cadre d’une vente HLM classique ; sur certains territoires, l’argument peut convaincre des élus réticents quant au bien-fondé d’une politique de cession de patrimoine.

D’autres organismes ont sollicité l’agrément plutôt avec l’idée de pouvoir proposer une offre de logements abordables en accession à la propriété : du fait de la dissociation du foncier et du bâti, les organismes sont en mesure de présenter une offre compétitive sur des territoires qui leur seraient inaccessibles dans le cadre de montages classiques en VEFA ou en PSLA.

Cet attrait a néanmoins généré deux phénomènes qui nous préoccupent. D’une part, nous constatons une « inflation » du nombre d’organismes agréés OFS – en Nouvelle Aquitaine, on compte ainsi 17 OFS, dont 12 organismes HLM – qui peut déboucher localement sur une inflation foncière. Cette situation est totalement contre-productive, puisque le BRS vise précisément, dans son principe, à sortir du jeu de la spéculation foncière : du fait de la dissociation foncier-bâti, les opérateurs sont en mesure d’acquérir du foncier à un prix plus élevé que s’ils avaient mobilisé un montage classique.

D’autre part, en ouvrant l’agrément OFS aux organismes HLM, la loi ELAN n’a pas été jusqu’au bout du travail législatif nécessaire : l’agrément est bien codifié au code de l’urbanisme, mais ce dernier n’a pas été adapté au cas spécifique des organismes HLM. D’une part, il est prévu que l’organisme de foncier solidaire doive être un organisme à but non lucratif ; or les sociétés privées d’HLM, à savoir les ESH et les coopératives, sont des sociétés à lucrativité limitée – la loi leur reconnait en effet la possibilité de verser des dividendes, même s’ils sont d’un montant limité ; il en résulte la nécessité de contorsions juridiques puisque, pour obtenir l’agrément OFS, l’organisme doit auparavant modifier ses statuts et donc se mettre en contradiction avec les clauses-types qui ont vocation à lui être appliquées.

D’autre part, il est prévu que les OFS cantonnent les réserves produites par l’activité BRS à cette seule activité. Si la disposition se comprend bien pour un organisme créé ex nihilo à la seule fin de « produire du BRS », il n’en va pas de même pour les organismes HLM qui mobilisent ce bail réel solidaire dans le cadre d’opérations de vente de leur patrimoine, cette disposition se révèle gênante, car les cessions de patrimoine visent précisément à générer des fonds propres supplémentaires… qui ne pourront être affectés à d’autres activités d’intérêt général, comme la production de logements sociaux neufs et la réhabilitation du parc ancien ; le sujet n’avait malheureusement pas été anticipé lors des débats parlementaires.

M. Marcel Rogemont. Je confirme qu’un nombre significatif d’offices s’interrogent également sur l’opportunité de créer leur propre OFS. La fédération recense aujourd’hui a minima une vingtaine d’offices qui ont déjà obtenu l’agrément ou devraient l’obtenir rapidement. C’est un élément de nature à conforter la vente HLM dans l’ancien, notamment au bénéfice des locataires occupants.

Depuis 2016, nous sommes aujourd’hui bien loin d’un quelconque « choc d’offre » en matière de ventes de logement : 126 400 agréments en 2016, 87 501 en 2021 et 94 000 en 2022, c’est-à-dire bien en-deçà des 120 000 logements prévus.

Je rappelle qu’en mars 2021, la fédération des offices n’avait pas souhaité signer le protocole en faveur de la construction de 250 000 logements sociaux en deux ans, car le monde HLM a d’ores et déjà trois défis à relever : celui de réaliser 60 % du volume ANRU, c’est-à-dire un investissement de plusieurs milliards d’euros à la charge des offices sur les dix prochaines années ; celui de la neutralité carbone d’ici à 2050 pour les 2,3 millions de logements dont les offices ont la responsabilité, soit de l’ordre de 500 M€ supplémentaires pour la mise à niveau du stock de logements existants ; celui de la production neuve. Le besoin de financement global est donc considérable et il dépasse très fortement les moyens aujourd’hui disponibles.

La vente de logements HLM ne saurait constituer le mécanisme sur lequel reposerait le choc d’offre espéré. Pour les offices, elle représente un simple élément de respiration patrimoniale, qui ne saurait être le mode de financement du logement social.

Les logements HLM ne sont pas uniquement des actifs, mais également un patrimoine. La plupart des ménages que nous accueillons ont des revenus inférieurs à 60 % des plafonds réglementaires, c’est-à-dire de l’ordre de 800 euros par mois pour une femme seule et 1 000 euros pour une femme avec enfant. Pour ces ménages dans la difficulté, nous représentons un point de stabilité dans la vie. Toute remise en cause de cette stabilité n’est pas propice à conforter le logement dans son statut « d’objet de première nécessité » dans le pacte républicain, pour reprendre l’expression du Premier ministre au récent congrès HLM.

À Rennes, où j’étais adjoint au maire chargé des finances et du personnel entre 1977 et 1995, nous avons construit plus de 2 000 logements sociaux en centre-ville, dans ce qu’il faut bien appeler un « ghetto de riches ». La ville en refuse aujourd’hui la vente car, compte tenu de l’investissement qui serait nécessaire, elle serait dans l’incapacité de les reconstruire au même endroit. Et la mixité sociale ne doit pas être réservée aux quartiers populaires, elle doit être partout et pour tous.

Mme Marianne Louis. S’agissant des marchés globaux, la loi ELAN est venue compléter un dispositif existant. La loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion, dite loi « Molle », avait déjà introduit la possibilité de déroger à la loi du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d’ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée, dite loi « Mop », avec les marchés de « conception-réalisation ».

Ces marchés globaux présentent un grand intérêt du point de vue du bailleur, car ils permettent des engagements sur les prix et les délais. Mais dans la période que nous traversons, marquée par l’instabilité du prix des matériaux et du coût de la construction, les entreprises craignent d’avoir à s’engager sur des montants et des délais fermes. Les opérateurs sont ainsi confrontés à de nombreuses demandes de renégociation des conditions contractuelles – et l’État et les collectivités territoriales, qui sont de grands donneurs d’ordre, font également face à ces problématiques.

Le secteur de l’artisanat avait considéré cette faculté de recourir à des marchés globaux avec une certaine inquiétude. Des travaux ont donc été engagés avec la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (CAPEB), pour permettre aux artisans de se regrouper et ainsi pouvoir répondre aux appels d’offre lancés en conception-réalisation. Dans la critérisation appliquée par les bailleurs, la dimension locale joue désormais un rôle de plus en plus important.

S’agissant du concours d’architecte, qui avait fait couler beaucoup d’encre à l’époque de l’examen de la loi ELAN, il faut rappeler que le souci des bailleurs n’était pas d’éviter d’avoir à faire appel à un architecte, mais plutôt de pouvoir mobiliser des procédures adaptées et différenciées en fonction des caractéristiques du projet porté. En pratique, ce recours à l’architecte est d’ailleurs presque systématique, hors éventuellement l’hypothèse, rarissime au demeurant, de logements individuels en diffus…

Depuis la promulgation de la loi, le monde des architectes s’est réinstallé dans des modalités de travail plus apaisées avec le secteur et leurs relations sont désormais normalisées. Le rapport sur la qualité des logements sociaux, remis en janvier 2021 par M. Pierre-René Lemas, concluait d’ailleurs clairement que ce n’était pas le mode de désignation de l’architecte qui faisait la qualité finale d’une opération.

M. Didier Poussou. Les ESH lancent annuellement de l’ordre de 50 000 mises en chantier pour des logements familiaux, un chiffre stable au cours des années récentes (49 330 mises en chantier en 2016, 49 450 en 2019 et environ 45 000 en 2020 et 2021, pendant la crise sanitaire). Il s’agit de construction neuve dans les deux tiers des cas.

Parallèlement, les ventes HLM représentent environ 7 000 logements, soit la moitié de notre résultat.

M. Philippe Clemandot. Les SEM immobilières utilisent peu la vente HLM, pour deux raisons.

D’une part, avec une moyenne d’âge de 25 ans, leur patrimoine est beaucoup plus jeune. Ce patrimoine n’est que très partiellement amorti, et il n’est donc pas intéressant à céder.

D’autre part, on observe que les mouvements de regroupement d’organismes ont permis une recapitalisation de nos sociétés – alors que, dans le passé, l’Agence nationale de contrôle du logement social (ANCOLS) nous avait souvent reproché d’être sous-capitalisés. Nous regagnons ainsi un peu d’air pour entamer les programmes de rénovation énergétique.

Nous sommes très favorables au mécanisme des marchés globaux de conception-réalisation, à partir du moment où la SEM est capable d’assumer pleinement sa fonction de maître d’ouvrage – y compris la surveillance des coûts et des délais. En revanche, nous sommes beaucoup plus allants s’il s’agit de récupérer des immeubles construits par la promotion immobilière, que celle-ci n’arrive pas à commercialiser et qui sont parfois inadaptés, en coût et en qualité, au logement HLM.

Mme Marianne Louis. Je souscris pleinement aux propos de Philippe Clemandot !

M. Richard Lioger. On se rend progressivement compte, comme député et les années passant, qu’il faut régulièrement remettre certaines problématiques sur le métier. En matière de logement HLM, la martingale aurait été découverte depuis longtemps, si elle existait !

Il est clair qu’on s’en remet aux maires bâtisseurs… mais qu’on entend aussi dire, de plus en plus, qu’il faut arrêter de construire et de « bétonner la ville ». Le contexte est difficile, alors que la nécessité de construire du logement social, notamment pour les jeunes et les étudiants, est absolument évidente.

M. Marcel Rogemont. Je voudrais évoquer la question des attributions.

La particularité des offices HLM est d’être présents sur l’ensemble du territoire. De nombreux offices départementaux participent aux politiques d’aménagement du territoire et ne concentrent pas uniquement leur activité sur les agglomérations ou les zones les plus tendues. En Ille-et-Vilaine, le département permet ainsi le déploiement de l’acte de construire sur des territoires qu’on dit être moins tendus – je rappelle, pour mémoire, que sur la partie littorale de ce département, les prix de marché sont égaux, voire supérieurs, à ceux de Rennes.

Les règles en vigueur, notamment pour les attributions, ont été conçues par référence à la situation des zones les plus tendues. Ces règles apparaissent superfétatoires par rapport à la réalité du terrain, dans les zones moins tendues. Il faut garder à l’esprit que, pour gérer leur politique de l’habitat, une seule personne suffit à certains EPCI… Certaines mesures ne sont d’aucune utilité à certains territoires et nous sommes donc favorables à la mise en place d’autorités organisatrices de l’habitat (AOH) qui puissent, à l’intérieur de leur programme local de l’habitat (PLH), mobiliser des dispositions dérogatoires aux règles nationales – d’autant que les PLH sont soumis à l’examen des comités régionaux de l’habitat et de l’hébergement (CRHH), c’est-à-dire au contrôle des services déconcentrés de l’État. Quelle utilité aux commissions d’attribution des logements et d’examen de l’occupation des logements (Caleol), à la gestion en flux, à la cotation, etc., dans un département comme celui de l’Orne ?

La variété des territoires commande une gestion plus rapprochée des principes d’organisation posés au plan national, à travers les AOH ou les délégations à la pierre.

M. Jean-Luc Lagleize, rapporteur. L’observation selon laquelle la multiplication des OFS pouvait déboucher sur une concurrence inflationniste pour l’obtention du foncier fait réfléchir, car tel n’était certes pas l’objectif poursuivi !

En vérité, quand il n’y avait encore que 24 OFS existants en France, on avait déjà observé ce genre de problème dans le sud-ouest de la France : un OFS avait « soufflé » un terrain à un promoteur en le surpayant largement par rapport au prix de marché, pour pouvoir ensuite construire un hôtel dessus. Ce n’est donc pas le nombre d’OFS qui est à l’origine de l’inflation foncière, c’est la cupidité humaine…

Inversement, sachons aussi reconnaitre que l’OFS est infiniment plus respectueux de l’argent public que d’autres systèmes. Dans le cas de l’accession sociale à la propriété, par exemple, il est fréquent que des communes vendent, à l’euro symbolique, un terrain à un organisme HLM, qui construit des logements et les vend ensuite aux accédants à un prix très inférieur au prix de marché ; mais, quelques années plus tard, ces propriétaires revendent et encaissent alors la plus-value, alors que celle-ci résulte fondamentalement du don fait par la commune à l’organisme HLM. Ce problème n’existe pas avec les OFS, puisque le terrain donné reste propriété de l’OFS et n’est pas revendu : donc, pas de plus-value captée par une personne privée à partir du domaine public.

M. Richard Lioger. Nous sommes tous convaincus que la question du foncier se trouve au cœur de la problématique du logement.

Mme Marianne Louis. Dans un contexte où le foncier se raréfie, d’une part, et où les acteurs intéressés par ce foncier, comme les OFS, se multiplient, d’autre part, il n’est pas étonnant que des tensions inflationnistes apparaissent.

Je rappelle à ce propos que la commission pour la relance durable de la construction de logements, dite « commission Rebsamen », avait fait des propositions intéressantes comme la fiscalité inversée sur le foncier, afin d’éviter la rétention foncière, et la mise en place d’une servitude de densité, visant à lutter contre la sous-densification en zone urbaine.

Les dispositions de la loi ELAN intéressant les commissions d’attribution et les Caleol visaient à fluidifier l’occupation des logements et à lutter contre d’éventuelles situations de « rente », au bénéfice de locataires disposant de revenus élevés et/ou de logements spacieux. En pratique, l’immense majorité des dossiers faisant l’objet d’un réexamen devant les Caleol concernent des ménages dont les ressources ont baissé : les cas d’utilisation du logement social par des publics qui n’en sont pas les destinataires et les bénéficiaires naturels sont extrêmement marginaux – et l’examen attentif de ces dossiers met souvent en lumière des situations particulières (personnes âgées, personnes handicapées… en toute hypothèse soumises au surloyer).

Ce mécanisme de réexamen est intéressant, il nécessite un gros travail, il permet un accompagnement social… mais il n’a pas fait augmenter la mobilité dans le parc. Comment l’espérer, d’ailleurs, dans une situation où il y a 2 millions de demandeurs et 430 000 attributions par an ?

S’agissant de la cotation des demandes de logements sociaux, d’une part, et de la gestion en flux des contingents de logements sociaux, d’autre part, le mouvement HLM soutient le principe de ces réformes, mais il est demandeur de simplifications : partant d’une bonne intention, on en arrive par l’entremise des textes réglementaires d’application à des situations ubuesques ! C’est le cas, par exemple, du candidat intéressé par un logement vide et qui se trouve en définitive écarté, au motif que ce demandeur ne relève pas du bon contingent... Autre question : comment gère-t-on le contingent de l’État ? Sur quel contingent impute‑t‑on le relogement ANRU ?

Certains territoires ont commencé à mettre en œuvre la cotation à titre expérimental, en avance de phase. Il s’agit d’un dispositif d’autant plus intéressant que la grille de cotation reflète adéquatement les priorités définies localement. Pour les intercommunalités qui se sont saisies du sujet, l’instrument présente un véritable atout pour le traitement des zones tendues, dans la mesure où il permet une objectivation des problématiques et un dialogue sur les priorités territoriales au sein de la conférence intercommunale du logement. En revanche, l’exercice perd de son intérêt s’il y a autant de demandeurs que de logements…

La démarche est néanmoins compliquée et l’État se soit d’accompagner les collectivités, il ne peut pas se positionner seulement comme un réservataire de logements et s’exonérer de son rôle d’animateur.

M. Jean-Luc Vidon. La réforme de la gestion des flux est très difficile à mettre en œuvre, dans la mesure où tous les territoires ne sont pas dans des situations identiques et où cette réforme affecte les territoires, les bailleurs et les réservataires.

La démarche est intéressante en ce qu’elle permet d’éviter un « effet silo ». Mais elle pose des problèmes techniques complexes, tenant notamment à la transformation des stocks en flux et à la prise en compte des différentiels de taux de rotation : tout cela n’est pas neutre, car l’équilibre entre réservataires est en jeu et certains de ces réservataires financent le logement social à travers le « 1 % logement ». Il ne faudrait pas que ces réservataires finissent par se considérer comme perdants dans ce système et préfèrent se tourner vers d’autres solutions, comme le logement intermédiaire.

Cette réforme met les bailleurs face à leurs responsabilités, puisqu’ils auront à tenir les objectifs fixés dans les conventions signées avec leurs partenaires. Là encore, il convient que la responsabilité des attributions ne pèse pas sur les épaules des seuls bailleurs : à l’échelle de chaque territoire, il convient de définir des objectifs et que les acteurs du logement trouvent un accord sur les modalités seront lesquelles ces objectifs seront atteints. Dans les territoires très tendus, là où peut exister un écart de 1 à 5 entre l’offre et la demande, la réforme ne constitue pas une solution par elle-même ; elle risque même d’exacerber des tensions avec les réservataires et les territoires mal servis, dont les bailleurs sociaux s’exposent à être le réceptacle.

M. Yannick Borde. Les parlementaires doivent avoir à l’esprit que les professionnels ont besoin de stabilité et de temps long : entre le moment où le foncier est acquis et celui où les habitants entrent dans leur logement, il s’écoule au minimum de trois à quatre ans. Qu’il s’agisse de production de logement social ou d’accession sociale à la propriété, il n’est pas possible d’être en permanence sous l’épée de Damoclès de la loi de finances de l’année ou de nouvelles lois : le fait de reconduire tous les ans le prêt à taux zéro n’est pas très sérieux.

Il faudrait que la sphère politique et la sphère technique reconnaissent un jour que, pour faire du logement, on a besoin d’organismes qui soient puissants et solides financièrement. Il ne faut pas détourner les yeux lorsqu’on parle du besoin de fonds propres et de la taille économique de ces structures : le logement est une activité consommatrice et immobilisatrice de fonds propres sur le long terme.

Pour relancer la construction de logement, il y a un sujet majeur : l’aménagement du territoire. Sous cette appellation, je range la refonte du zonage, la lutte contre l’artificialisation des terres, les fonds « friches », les problématiques locales de densité, etc. Cela fait trop longtemps que le logement n’a pas été pris en charge dans une telle approche.

M. Richard Lioger. Le débat est extrêmement technique et, dans la perspective de l’élection présidentielle qui s’approche, il faut que les acteurs du logement puissent présenter leurs propositions dans des termes compréhensibles par le plus grand nombre.

Je vous remercie.


TABLE RONDE n° 2 : L’urbanisme OPÉRATIONNEL

M. Thibault Bazin, rapporteur, président de séance. J’ai le plaisir de vous accueillir à cette deuxième table-ronde que la commission des affaires économiques organise pour le suivi de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite loi « ELAN ».

Je remercie l’ensemble des personnalités, institutions et organisations qui ont répondu positivement à notre invitation et qu’à défaut de pouvoir saluer en présentiel, mes collègues et moi-même accueillons donc dans le cadre de la présente visioconférence, qui est enregistrée.

Nous vous demanderons de bien vouloir votre propos sur les quelques aspects de la loi ELAN que vous jugerez les plus importants dans le contexte des thématiques qui nous réunissent aujourd’hui. Je pense notamment à tout ce qui a trait à la réforme des opérations d’urbanisme : simplification et accélération des demandes de permis de construire, réforme du régime des zones d’aménagement concerté, simplification de l’étude d’impact environnemental. Il peut s’agir aussi des mesures relatives aux opérations d’aménagement d’ampleur : déploiement des projets partenariaux d’aménagement et des grandes opérations d’urbanisme, évolution du régime des opérations d’intérêt national, permis d’aménager multi-sites. Vous pouvez aussi évoquer la production de logements : transformation de bureaux en logements, ou encore évolution des contrats de construction de maisons individuelles.

Mme Valérie Flicoteaux, vice-présidente du Conseil national de l’Ordre des architectes (CNOA). L’Ordre des architectes considère que la loi ELAN n’a pas répondu à l’ensemble de ses ambitions, notamment pour ce qui a trait à la question de la qualité des logements, qui n’a pas augmenté. Or cette question de la qualité a été mise en exergue par la crise liée à la covid-19 et aux confinements successifs, qui a exacerbé les problématiques de précarité et d’inégalités territoriales pour certaines populations. Il y a désormais une sensibilisation accrue aux défauts des logements, notamment l’insuffisance des surfaces, la difficulté de conversion à d’autres usages, l’absence d’espaces extérieurs et l’exiguïté d’ensemble de ces logements. À quoi s’ajoute l’aggravation des situations d’isolement.

Toutes les études publiées récemment confirment une dégradation du logement depuis quarante ans, qui s’est accélérée à partir des années 2000. Le logement neuf se détériore, du fait notamment d’un appauvrissement des espaces habitables en matière d’usage. Au cours des dix dernières années, les appartements de trois pièces ont perdu de 10 à 15 % de leur surface, soit l’équivalent d’une pièce. La surface moyenne d’un logement neuf était de 69 mètres carrés en 2001, elle n’est plus que de 62 mètres carrés aujourd’hui. La baisse de la qualité s’exprime, au premier chef, par des pratiques de construction à l’économie : le logement est désormais conçu comme un produit financier, dont on cherche la rentabilité et qui ne participe plus du tout de la problématique des manières d’habiter en ville. On ne peut que s’interroger sur les conséquences de cette vision « privatisée » du logement, que la loi ELAN a malheureusement renforcée.

L’un des enjeux de la loi ELAN était de remettre les opérateurs du logement social en compétence de maîtrise d’ouvrage. Or on observe que la loi a permis à ces bailleurs de s’exonérer des règles spécifiques de la commande de maîtrise d’œuvre et qu’elle a favorisé un recours massif aux ventes en l’état futur d’achèvement (VEFA) : il en est résulté que les bailleurs ont été privés de leur capacité à assurer et contrôler la qualité des logements construits, sans leur permettre, pour autant, de construire moins cher ou de construire mieux. Ils ont ainsi été conduits à procéder à un travail de banalisation du logement social. En 2019, 64 % des logements sociaux ont été construits en VEFA, avec une concentration et une exacerbation du phénomène en zones tendues (75 % des logements sociaux en Île-de-France et 73 % en Provence-Alpes-Côte d’Azur).

S’agissant des questions liées au logement « abordable », la loi n’a pas permis un meilleur accès au foncier et l’ensemble des intervenants à la présente table ronde conviendra certainement que le coût du foncier joue un rôle majeur dans celui du logement : le prix du foncier a augmenté de 71 %, pour représenter aujourd’hui près de 50 % du coût de production du logement. La tendance à ne considérer le logement que comme un produit n’a fait qu’amplifier cette situation.

Les architectes s’interrogent aujourd’hui sur les modalités de l’action du Gouvernement, centrée autour de la quantité de logements neufs produits. La loi ELAN n’a pas aidé à en construire plus : on en est à 380 000 logements autorisés en 2021, c’est-à-dire une production à peu près équivalente à celle d’avant la loi. Mais cette production ne représente que 1 % de l’ensemble du parc, alors qu’on compte aujourd’hui trois millions de logements vacants, vides depuis plus de deux ans. Il y a là un potentiel et un gisement exploitables immédiatement, qui permettraient de répondre aux enjeux de la transition écologique : ce sont des logements qui peuvent être investis sans avoir recours à l’extension urbaine et sans avoir à mobiliser du foncier.

La profession formule donc des propositions autour de quatre thématiques, destinées à concilier les nécessaires objectifs de quantité avec des objectifs de qualité :

– déclarer le logement « d’intérêt général » ; imposer des exigences de qualité pour tous les logements ; systématiser des clauses d’éco-conditionnalité afin d’améliorer la filière Reconstruction autour des enjeux du développement durable ; limiter et encadrer strictement les VEFA – ou favoriser les « VEFA inversées » au bénéfice des bailleurs sociaux ;

– accompagner les élus autour d’une politique locale de l’aménagement, afin notamment de mieux tirer parti localement des ressources foncières disponibles sur le territoire ; systématiser le recours aux études de faisabilité ; intégrer des conseils en interne (conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement [CAUE] ou architectes-conseils) ou en externe (agences d’urbanisme ou ateliers d’architecture spécialisés dans le conseil) ; mieux travailler avec les architectes des bâtiments de F rance autour de la question du patrimoine et des interventions sur le patrimoine local ;

– encourager la maîtrise du foncier par les collectivités publiques ; encourager l’État à vendre du foncier public ; encourager les montages innovants, dissociant le foncier et le bâti (baux emphytéotiques, baux réels solidaires [BRS], etc.) ; encourager le recyclage afin de limiter l’extension urbaine au bénéfice de l’intensification urbaine, réinvestir les territoires monofonctionnels, les friches, etc., et, plus généralement, porter une vision de rééquilibrage territorial et de nouvelles alliances entre les métropoles et leurs territoires limitrophes – le télétravail ouvre d’énormes possibilités, de ce point de vue ;

– sécuriser les permis d’aménager ; encourager les procédures exemplaires dans les opérations bénéficiant d’un financement de l’État (grandes opérations d’urbanisme [GOU] et opérations d’intérêt national [OIN]) ; favoriser l’innovation ; moderniser les procédures afin d’accélérer la délivrance des permis de construire et le traitement des contentieux.

M. Stéphane Chenuet, chef du service des affaires juridiques et fiscales de la Fédération française du bâtiment (FFB). La Fédération française du bâtiment, qui a beaucoup travaillé et contribué à la loi ELAN, nourrissait beaucoup d’attentes à l’égard de ce texte. Et de fait, la loi contient un ensemble de mesures très positives, par exemple pour ce qui concerne les recours contentieux et dans le prolongement des propositions présentées par le rapport Maugüe de 2018 : les effets de ces mesures sont d’ores et déjà perceptibles sur le terrain. Certains dispositifs doivent néanmoins être encore améliorés, au regard de la jurisprudence, ou pérennisés – par exemple, la suppression de l’appel. Il reste également beaucoup à faire en matière de recours contre les refus de délivrer des permis, alors même que les projets sont conformes aux règles d’urbanisme applicables sur le territoire : de plus en plus de permis sont aujourd’hui délivrés à la suite de l’ordonnance d’un juge, ce qui en ralentit la mise en œuvre.

La loi ELAN avait été annoncée et présentée comme « la » grande loi de simplification de l’acte de construire, qui devait ouvrir la voie à un « choc de l’offre ». Même s’il est vrai que la crise sanitaire est intervenue entre-temps, on ne peut malheureusement que constater que la construction de logement reste à un niveau bas et que le choc de simplification n’a pas eu lieu.

S’agissant ainsi de la simplification et de l’accélération du traitement des demandes de permis, le compte n’y est pas : la dématérialisation, applicable à compter du 1er janvier 2022, est certes une bonne mesure ; pour autant, la loi ELAN n’en est pas à l’origine et elle a même repoussé sa mise en œuvre de trois ans. Force est de constater que de nombreuses communes ne sont pas prêtes, comme les chiffres du ministère le démontrent : seuls 60 % des centres instructeurs concernés sont aujourd’hui connectés à la plateforme et le ministère reconnait que, d’ici la fin du premier semestre 2022, on n’aura au maximum que 80 % des centres instructeurs qui seront connectés. Il s’agit pourtant là d’un dispositif nécessaire et attendu des porteurs de projet : si la dématérialisation avait été opérationnelle pendant la crise sanitaire, les professionnels n’auraient pas été confrontés aux blocages d’instruction et aux retards qu’ils ont connus pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois.

Le permis d’innover, auquel la FFB a également beaucoup contribué, était une bonne idée, qui a été reprise et généralisée dans le cadre d’une réécriture du code de la construction et de l’habitation : favoriser l’innovation, permettre le déploiement de solutions d’effet équivalent lorsqu’on peut démontrer l’atteinte des objectifs attendus vont dans le bon sens. Si les attentes sont fortes, ces dispositifs restent néanmoins peu développés : nous en faisons la publicité au sein de notre réseau, l’État doit également prendre sa part. Il faut également composer avec les réticences des assureurs vis-à-vis de ce dispositif.

Pour ce qui concerne l’évaluation environnementale, les grands espoirs de simplification ont également été partiellement déçus. Le décret en cours de consultation met en œuvre une « clause filet » pour l’évaluation environnementale, l’idée étant qu’en dépit des seuils fixés par le code de l’environnement, on pourrait décider de soumettre à évaluation environnementale des projets situés en-deçà de ces seuils. Il faut certes reconnaitre la prééminence du droit européen, mais la FFB estime qu’il serait néanmoins préférable que de petits projets ne se trouvent pas ainsi remis en cause par des dispositifs d’évaluation coûteux et chronophages.

En matière d’accessibilité, la loi ELAN a fait judicieusement passer du « 100 % accessible » au « 80 % évolutif – 20 % accessible », mais cette simplification a immédiatement été contrebalancée par deux nouvelles mesures : les douches « à l’italienne » obligatoires dans tous les logements à compter du 1er juillet 2021 – un sujet qui peut paraître anodin, mais il faut savoir que des avis très négatifs ont été émis sur ce point, l’Agence pour la qualité de la construction attirant notamment l’attention sur les enjeux de sinistralité – et l’obligation d’ascenseurs dans tous les immeubles en R +3. D’un côté, on simplifie ; de l’autre, on ajoute des contraintes supplémentaires, parfois irrationnelles, pour les porteurs de projet.

S’agissant de la conversion de bureaux en logements, beaucoup de mesures ont été annoncées, mais elles ne sont toujours pas entrées en vigueur – par exemple, la notion « d’immeuble de moyenne hauteur » (IMH) et l’uniformisation des règles de sécurité incendie entre les immeubles de bureau et les immeubles de logement. C’est un serpent de mer. Les chiffres de transformation de bureaux en logements restent très faibles (à peine 1 % des logements neufs produits en France), alors même que la période est exceptionnellement favorable à de telles transformations : des milliers de mètres carrés de bureaux restent inutilisés du fait de la généralisation du télétravail et pourraient être convertis, dans un contexte où l’on souffre d’un manque crucial de foncier pour la construction de logements neufs.

Le constat dressé pour le contrat de construction de maison individuelle (CCMI) est assez comparable : de bonnes idées – par exemple, favoriser la préfabrication, ce qui implique de pouvoir financer en amont les constructeurs en charge de cette préfabrication – mais une mise en œuvre décevante – le champ prévu par la loi ELAN est extrêmement restreint, puisque le dispositif ne peut bénéficier qu’aux seules entreprises intégrées, réalisant la préfabrication et la pose… soit quatre entreprises en France aujourd’hui. Le modèle économique des entreprises consiste en effet plutôt à distinguer préfabrication et construction, dans des sociétés distinctes et donc inéligibles à ce mécanisme d’échéancier de paiement favorable. Plus généralement, les garants refusent systématiquement d’accorder les garanties financières nécessaires en contrat de CCMI, car ils ne voient pas d’un bon œil que les constructeurs puissent recevoir des fonds avant que les pièces préfabriquées soient arrivées sur le chantier. On souhaitait favoriser ces constructeurs en préfabriqué ; ils se trouvent aujourd’hui encore plus pénalisés que des opérateurs de construction « classiques ».

M. Yann Le Corfec, responsable du pôle habitat de la FFB, en charge des questions d’aménagement. La loi ELAN a permis une évolution du régime des zones d’aménagement concerté (ZAC) dans un sens favorable : au-delà de la levée d’incertitudes juridiques relevées par certains praticiens en matière de concessions d’aménagement et de mandat d’aménagement, plusieurs dispositions de la loi – simplification du régime juridique des cahiers des charges, modifications apportées aux régimes de financement et de réalisation des équipements publics – ont été bienvenues et ont permis de simplifier le cadre juridique applicable.

Il faut néanmoins observer que le nombre de ZAC est en chute libre depuis plusieurs années en France, au bénéfice d’aménagements « hors procédure » : il conviendrait donc d’aller encore plus loin dans la réforme des ZAC, dans le cadre d’une fusion des dossiers de création et de réalisation. Celle-ci avait bien été envisagée par la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP), mais elle n’avait finalement pas été retenue à l’issue de la concertation avec les acteurs de l’aménagement. Il faudrait reprendre ce dossier, afin de simplifier et surtout d’accélérer le traitement des ZAC.

L’aménagement opérationnel a bien été remis au centre du jeu, notamment dans le cadre de la définition des opérations de revitalisation de territoire (ORT), mais aussi dans celui de la création des GOU et des projets partenariaux d’aménagement (PPA). Le contrat d’ORT comme cadre juridique de la mise en œuvre des programmes « Action Cœur de ville » et « Petites villes de demain » connait un développement encourageant, même s’il faut observer que peu d’ORT sont conclues en dehors de ces deux programmes.

Le renforcement de l’attractivité commerciale en centre-ville, avec la mise en place des dispenses d’autorisation d’exploitation commerciale (AEC) et la possibilité de suspendre, au cas par cas, l’instruction des projets commerciaux en périphérie urbaine, est une bonne chose et satisfait aux objectifs poursuivis. En revanche, le dispositif fiscal « Denormandie dans l’ancien », reconduit dans le cadre de la loi de finances pour 2022, est un échec : en 2021, moins de deux cents réductions d’impôt de cette nature ont été octroyées.

Au-delà, nous regrettons que les contrats d’ORT ne fassent pas plus largement appel aux opérateurs privés – qu’ils soient aménageurs, constructeurs ou promoteurs – pour la réalisation, dans les secteurs d’intervention prioritaires, des opérations d’aménagement, de construction ou de démolition-reconstruction. Cette situation s’explique par l’absence d’un modèle économique pérenne pour l’intervention d’opérateurs privés en milieu urbain à restructurer : seules les subventions publiques permettent d’équilibrer les bilans. Par ailleurs, la signature d’un contrat d’ORT par une personne privée n’est possible que si cette personne n’est pas exposée à une situation de conflit d’intérêts : or comment plaider qu’un opérateur, propriétaire d’un foncier dans le périmètre d’intervention prioritaire avant même que n’intervienne la conclusion du contrat d’ORT, puisse ne pas être considéré dans comme se trouvant dans une telle situation, alors même qu’il souhaite, sur le foncier qu’il maitrise, réaliser l’opération telle qu’elle a été définie dans le contrat d’ORT ?

Le même problème apparait d’ailleurs pour les PPA – je remarque au passage qu’à ce jour il n’y a que peu de PPA conclus sur le territoire – dont les opérateurs publics ou privés ne peuvent être signataires s’ils sont en conflit d’intérêts, ce qui aboutit à interdire, de fait, une véritable coproduction public-privé. Pour réaliser un PPA, il faudrait réussir à mobiliser l’ensemble des acteurs et permettre notamment à des aménageurs de second rang, éventuellement privés, de réaliser des macro-lots ou d’intervenir pour le compte de l’aménageur public signataire de la convention de PPA : ce serait une avancée importante.

À notre connaissance, un seul permis d’aménager multi-sites (PAMS) a, pour l’instant, été délivré. Cet instrument ne peut être mobilisé que dans les périmètres d’intervention prioritaire des ORT. Il faudrait pouvoir l’utiliser plus largement afin de rendre possible, par une procédure d’autorisation unique et sans encourager l’étalement urbain, une « péréquation » des opérations. Je m’explique : il faudrait permettre l’intervention d’un opérateur privé à l’intérieur d’une ORT, sur une opération en centre-ville déficitaire, qui serait équilibrée, sur le fondement du même permis multi-sites, par une opération bénéficiaire en « couture urbaine », par exemple.

M. Thibault Bazin. Je signale que le PAMS est en cours d’élargissement et d’extension dans le cadre de l’article 30 du projet de loi portant différenciation, décentralisation, déconcentration et diverses mesures de simplification de l’action publique locale (3DS). Au-delà de la loi ELAN, la question de la conjugaison du PA multi-sites avec les dispositions de la loi « Climat » se trouvera inévitablement posée.

M. Didier Bellier-Ganière, délégué général de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI). Je réagis rapidement aux propos tenus sur la qualité des logements, pour redire simplement que, pour les promoteurs, c’est la satisfaction des clients qui constitue le principal référentiel – et non des « on-dit » ou des études fondées sur l’analyse d’un nombre limité de permis de construire, qui se transforment en rapports et deviennent ensuite l’alpha et l’oméga de la politique du logement. Les études réalisées directement auprès des particuliers acheteurs de logement, par Immodvisor par exemple, font remonter des taux de satisfaction de l’ordre de 90 % : il est donc faux de dire que la qualité des logements serait aujourd’hui désastreuse et bien inférieure à celle d’il y a vingt ou trente ans et alors même que la réglementation contraint de plus en plus. Dans le cadre d’une expérience professionnelle antérieure chez un bailleur social francilien, 70 % des ventes se faisaient en VEFA et le niveau d’exigence n’était pas moindre que pour les particuliers.

Une étude récente de l’Insee constate effectivement un volume important et en croissance de logements vacants, mais cette progression correspond, au moins partiellement, à une inadéquation entre l’offre et la demande – par exemple, des logements vacants situés dans des zones en voie de désertification – et il ne faut pas en tirer des conclusions ou des raccourcis hâtifs : il est faux de croire qu’on résoudrait la question du logement en remettant sur le marché des logements vacants.

S’agissant de la loi ELAN, on espérait un « choc de simplification ». La vérité est qu’il n’y a eu ni choc, ni simplification… en tous cas, pas sur les sujets concernant les promoteurs immobiliers au premier chef. C’est le cas, par exemple, en matière de dématérialisation : un délai supplémentaire de trois ans a été accordé par la loi, qui touche désormais à son terme ; d’après un sondage auprès de nos adhérents, les trois quarts des collectivités sur les territoires desquelles ces adhérents portent des projets ne mettent pas encore en œuvre la dématérialisation attendue.

On ne dispose que de peu de retours sur les permis d’aménager multi- sites. Il en va de même pour les permis d’innover, pour lesquels nous n’avons pas identifié de territoires sur lesquels de tels permis existeraient.

Nous avons le sentiment d’être confrontés à un tonneau des Danaïdes : on simplifie d’un côté, mais on complexifie de l’autre ! S’agissant des études environnementales, la consultation du public par voie électronique est une bonne mesure ; parallèlement, ces études sont complexifiées par de nouvelles dispositions, comme celle relative à l’analyse de la densification – une disposition venue, au demeurant, après le vote de la loi ELAN.

On sent également que certaines « mauvaises habitudes » perdurent. Un nombre significatif de collectivités, pourtant entrées en voie de dématérialisation de leurs procédures, continuent ainsi de demander, en parallèle, le dépôt des dossiers sous forme papier. Les pré-instructions de dossier de permis de construire, les demandes de pièces complémentaires au-delà de ce qui est requis persistent. Et il faut également mentionner la prolifération des chartes, véritables « normes sur la norme », qui imposent aux promoteurs de nouvelles contraintes sur la taille minimale des pièces ou le plafonnement du prix de sortie des appartements construits : ce n’est plus un « choc de simplification », mais une « chape de complexification » qui empêche l’initiative privée de s’épanouir !

Certaines mesures nous semblent en décalage avec la réalité du terrain. S’agissant des GOU, je ne crois pas un seul instant, à titre personnel, que les maires se montreront disposés à transférer leur compétence d’attribution des permis de construire à un échelon supérieur – c’est-à-dire, passer de la commune à l’EPCI. La simplification est ici toute théorique, elle se heurte à la réalité des pratiques – et c’est bien dommage. La même remarque vaut pour les permis d’innover : on ne sent pas aujourd’hui les élus prêts à prendre la responsabilité de déroger aux règles normalement applicables et, par crainte des recours et des contentieux, à faire appel à des solutions « d’effet équivalent ».

À rebours de cette façon de faire, essayons plutôt de reproduire la méthode qui avait abouti aux propositions du rapport Maugüe sur les recours, c’est-à-dire l’association de professionnels, de juristes et de parlementaires dans un travail en commun. Nos adhérents y ont trouvé les outils dont ils avaient besoin, c’est-à-dire l’accélération du traitement des demandes et la réduction des délais d’instruction. C’est la bonne méthode pour aboutir à des mesures équilibrées, qui permettent ensuite aux opérationnels et aux collectivités de porter leurs projets dans la sécurité juridique et en confiance.

M. Thibault Bazin. La direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP) nous a indiqué qu’il n’y a eu que deux permis d’innover délivrés, respectivement dans le périmètre de l’Établissement public d’aménagement (EPA) Bordeaux Euratlantique et dans le cadre de l’opération d’intérêt national de requalification du quartier des Ardoines à Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne).

M. François Rieussec, président de l’Union nationale des aménageurs. Je donne acte à la présente législature d’avoir voulu être très à l’écoute des citoyens, sur deux questions majeures : celle de l’environnement et du climat, à travers notamment la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite « loi Climat » ; celle du « décrochage » d’un certain nombre de territoires, à laquelle la loi ELAN a voulu apporter un ensemble de réponses.

La loi ELAN a porté de nouveaux concepts et de nouvelles façons d’envisager l’aménagement du territoire, mais il faut désormais aller plus loin. De nouvelles contractualisations ont été mises en place à travers les ORT associant État, élus et porteurs de projet – c’est-à-dire une véritable révolution dans la façon de penser ! Nous serions favorables à élargir à l’ensemble du territoire, ou à d’autres types de territoires, cette façon de procéder, qui a fait ses preuves mais s’est trouvée concentrée sur des secteurs où il y a peu de marchés et peu de demande. Seuls quelques milliers de logements ou de rénovations de commerce ont pu, à ce jour, en bénéficier. La méthode est bonne, il faut la généraliser pour ce qui concerne notamment la confiance entre acteurs publics et privés. Aujourd’hui, toute la filière de la construction bute en effet sur des injonctions contradictoires issues de différentes strates – d’un côté, empêcher pour protéger ; de l’autre, des besoins à satisfaire. Pourquoi ces injonctions contradictoires ? Parce qu’il n’y pas de concertation et de contractualisation entre les différents acteurs. Si on y arrive, on aura fait un grand pas dans la confiance citoyenne et entre opérateurs.

On n’a, pour l’instant, que peu de recul sur les permis d’aménager multi‑sites, dont le législateur et l’autorité réglementaire doutaient eux-mêmes et dont le périmètre de déploiement géographique demeure restreint. Nous pensons néanmoins qu’il s’agit d’un bon outil, qui a vocation à être généralisé.

La cristallisation des règles d’urbanisme a débouché sur une sécurisation bienvenue pour les opérateurs, dans les situations où des permis de construire ont été délivrés alors que les plans locaux d’urbanisme (PLU) ont été ultérieurement annulés.

Nous soutenons une extension de la contractualisation à d’autres zonages, d’autres secteurs, d’autres villes. L’essentiel de la croissance urbaine est aujourd’hui porté par les « couronnes » et les périphéries métropolitaines : c’est là où se situe la demande et où les projets devraient être poussés.

Les organismes de foncier solidaire (OFS) ont correctement fonctionné et devraient être généralisés. Nos opérations comprennent généralement entre 20 et 25 % de logement social comptabilisé dans le cadre de l’inventaire SRU. Pourquoi ne ferait-on pas également du logement social abordable à travers ce type de financement ? L’OFS constitue, en définitive, une nouvelle modalité de ce qu’avait été le « pass foncier », qui était un report de financement permettant à l’acquéreur de devenir à terme propriétaire de son foncier, assorti d’un portage un peu complexe et d’un avantage fiscal. Cette façon d’aborder le sujet peut constituer une piste de réflexion intéressante pour soutenir le logement abordable.

Le fonds pour le recyclage des friches est un succès, puisqu’il est très régulièrement réabondé. Il faudrait réfléchir à mettre également en place un fonds pour la renaturation, qui puisse amener un équilibre opérationnel à des opérations autrement dépourvues d’un tel équilibre. La main droite des financements publics sait toujours trouver la main gauche des opérateurs publics ; mais il faut rappeler que 80 % de l’aménagement du foncier et de la production de logements sont le fruit de l’action d’opérateurs privés, qui sont donc légitimes à accéder à de tels financements ! À défaut de quoi, il ne faut pas s’étonner que cette loi ELAN n’ait pas généré l’activité qu’elle méritait de générer.

Au cours de la prochaine législature, on n’échappera pas à une réforme de la fiscalité locale. La taxe d’habitation a notamment désolvabilisé nombre de communes et c’est l’une des raisons du blocage constaté dans la production de logements. Nous proposons également une inversion de la plus-value, visant à inciter les nouveaux propriétaires à remettre rapidement le bien sur le marché. On peut également songer à une taxe d’aménagement plus incitative ou à subventionner certains opérateurs privés pour charges d’intérêt général.

Le législateur a bien identifié ces deux sujets fondamentaux, pour notre société, que sont le décrochage de certains territoires et la nécessité d’intégrer aux opérations le solde de leur « bilan carbone ». Il faut que l’on parvienne à ce que ces opérations constituent bien des solutions à ces questions sociétales et que l’on écarte les visions dans lesquelles les projets se résument à une accumulation d’inconvénients. À l’avenir, les opérations devront inclure les problèmes climatiques, de résilience et de stockage du carbone et ce n’est pas en validant les discours d’opposition qu’on permettra aux opérationnels de mieux faire : c’est pourquoi par exemple nous proposons un permis d’aménager bioclimatique. Il ne faudrait pas que la loi Climat et les autres lois de cette catégorie deviennent des lois « antivax » de l’urbanisme.

M. Stéphan de Faÿ, directeur général de Grand Paris Aménagement. Grand Paris Aménagement et d’autres grands aménageurs, avec lesquels nous nous sommes concertés en amont de cette audition, portent sur la loi ELAN un regard contrasté.

Elle a su aborder avec beaucoup de pragmatisme plusieurs sujets de sécurisation, notamment ceux des autorisations d’urbanisme et des procédures de recours. Les relations avec les architectes des bâtiments de France s’ajustent désormais mieux, avec une incitation plus forte au dialogue en amont – même si l’on peut que regretter que l’on ne soit pas allé plus loin dans cette voie, en intégrant notamment des dispositions de type « rescrit » architectural assurant une continuité dans le débat et le traitement des sujets.

Ces mesures relatives à la sécurisation ont fait l’objet d’une appropriation progressive par les juges et elles commencent à produire des effets perceptibles : la redéfinition du périmètre de l’intérêt à agir permet désormais de rejeter beaucoup plus rapidement les recours abusifs ; les régularisations s’opèrent plus aisément, notamment quand les autorisations d’urbanisme étaient entachées d’irrégularités plus formelles que substantielles.

Il est vrai néanmoins que la redynamisation de l’activité que les professionnels espéraient s’est heurtée, au cours des deux dernières années, à la sur‑mobilisation des élus locaux autour des enjeux sanitaires et de l’urgence du quotidien. On peut regretter la fragilisation juridique a posteriori de certaines dispositions de loi, notamment la « clause filet » : il devient désormais possible de contester systématiquement le fait qu’un projet n’ait pas fait l’objet d’une évaluation environnementale, alors même que son montant est inférieur au seuil fixé.

S’agissant des projets partenariaux d’aménagement (PPA), pour lesquels Grand Paris Aménagement est centre de ressources national quant à leur mise en œuvre, il s’agit d’un outil qui permet véritablement une accélération des projets, car il n’a pas été conçu – comme c’est parfois le cas pour des dispositifs de cette nature – comme une labellisation dont les parties pourraient se prévaloir, mais comme le moyen de mettre autour de la table l’ensemble des parties concernées par une problématique urbaine. Cette façon de procéder permet de trouver des solutions opérationnelles et de fonder des engagements réciproques.

On compte aujourd’hui 20 PPA signés, 7 en cours d’élaboration et 8 encore au stade de l’incubation. Cet outil contractuel par nature et mis à la disposition des collectivités de toute strate pour aborder les projets dans leur complexité a pu être mobilisé dans des configurations extrêmement diverses : réponse à des catastrophes et à des situations d’urgence (Marseille, Theil), coordination et priorisation de projets en grand nombre (Mulhouse, bassins miniers), articulation d’interventions en matière d’habitat privé dégradé et d’aménagement (Mulhouse), traitement de problématiques liées au recul du trait de côte (Lacanau), accélération d’opérations dans un contexte de libération foncière (Le Mans).

Le simple fait que cet outil soit protéiforme et largement adaptable aux réalités des besoins de chaque territoire constitue indéniablement l’une de ses forces, de même que le fait que l’outil soit produit à l’initiative des collectivités : on n’est pas dans une logique d’appels à projets, de cahiers des charges ou autre, mais dans l’initiative des collectivités qui, dans le cadre de leurs relations avec l’État déconcentré, provoquent l’activation de la démarche. On détermine ainsi très concrètement qui seront les pilotes et ce que seront les actions nécessaires et les engagements de chacun.

Ces projets partenariaux bénéficient du fait de pouvoir accéder à des financements dédiés et centralisés, lesquels permettent de s’ajuster aux besoins réels de chaque PPA, d’une part, et de se concentrer ensuite sur la résolution des difficultés opérationnelles éventuelles, d’autre part. Le risque se profile néanmoins, parfois, de voir cet instrument sortir de son champ pour venir bâtir des éléments de stratégie territoriale – pour lesquels d’autres outils existent, comme les documents de planification.

Les grandes opérations d’urbanisme (GOU) constituent un autre outil introduit par la loi ELAN, mais elles n’ont été que faiblement mobilisées jusqu’à présent : seules 2 GOU sont aujourd’hui en cours, à Marseille et à Charenton. Il faut rappeler que cet outil permet des interventions dans un cadre dérogatoire au droit commun, notamment pour ce qui concerne les modalités de modification de certains documents de planification produisant des effets en matière d’urbanisme. C’est d’ailleurs souvent la première motivation, voire la seule, pour recourir à ce dispositif : dans le cadre d’une opération complexe, qui n’est ni une opération « 100 % logement », ni une opération « 100 % économique », il n’y a longtemps eu d’autre outil utilisable que la procédure intégrée pour les grandes opérations d’urbanisme (PIGOU) pour la mise en compatibilité d’un certain nombre de documents. Des outils comme la procédure intégrée pour le logement ou la procédure intégrée pour l’immobilier d’entreprise ont été conçus pour des « silos » et des problématiques particulières, ne permettant pas la prise en charge de la « ville mixte » – c’est-à-dire la problématique urbaine contemporaine par excellence, celle de la sortie du zoning, du dogme corbusien de la charte d’Athènes et de ces mécanismes qui créent de la ségrégation plutôt que du vivre-ensemble.

La mise en œuvre du permis d’innover a été lente, du fait du faible nombre de GOU. Il s’agit d’un outil qui doit permettre de « franchir un cap ». À Bordeaux a ainsi été conçu un immeuble sans affectation, c’est-à-dire un immeuble susceptible d’évoluer entre logements et bureaux sans autorisations administratives ultérieures : le permis d’aménager n’a pas tant visé à déroger à des régimes ou des normes techniques qu’à s’abstraire des cadres très spécialisés applicables au tertiaire ou au logement, héritages d’une sédimentation et d’une spécialisation juridiques sur ces classes d’actifs.

Une autre application réussie du permis d’innover intéresse la question des places de stationnement. Le code de l’urbanisme ne permet pas, aujourd’hui, d’externaliser le stationnement, c’est-à-dire de le « sortir » du sous-sol des immeubles pour le mutualiser dans des parkings ; plus exactement, cette possibilité existe bel et bien, mais elle se heurte à la réalité économique et à la nécessité que ces « parkings-silos » soient construits préalablement à la délivrance des autorisations d’urbanisme pour les immeubles correspondants. Le permis d’innover correspond à une disposition simple à mettre en œuvre, qui permet de résoudre des problématiques très concrètes.

La question est désormais celle de la promotion de l’outil et de la conviction de la chaîne d’acteurs : aujourd’hui, ce ne sont pas les élus qui portent le risque, notamment juridique, mais l’État, en la personne du préfet. Il serait opportun d’élargir, avec prudence, son domaine d’application, par exemple dans le cadre des PPA et des ORT.

S’agissant de la question du foncier et de celle de son prix, il reste des choses à faire, y compris du côté de l’État. On ne peut ainsi que regretter que l’État, conformément à la loi, soit le seul acteur public tenu de mettre aux enchères le foncier qu’il entend céder. Il n’est d’ailleurs pas certain que cette règle garantisse nécessairement la préservation des intérêts financiers de l’État. Les aménageurs prônent plutôt le recours à des cessions à charges foncières fixes, nécessaires pour concomitamment atteindre le réalisme économique des opérations, lutter contre la spéculation et viser des objectifs de qualité de la construction.

Il y aurait également un grand intérêt à mieux sécuriser le cadre dans lequel se développent les projets. La loi ELAN a permis d’opérer un certain nombre d’avancées très positives, comme la « cristallisation » dans le cadre du permis d’aménager. Mais il faut aller plus loin. Il conviendrait ainsi d’opérationnaliser le certificat de projet, que les administrations refusent aujourd’hui de facto d’utiliser. S’agissant des relations avec les architectes des bâtiments de France (ABF), il faudrait organiser la formalisation des débats et des engagements en amont, afin d’éviter certains problèmes encore trop souvent rencontrés – par exemple, à l’occasion d’un changement d’ABF, une remise en cause totale des discussions engagées avec son prédécesseur.

Un sujet peu abordé jusqu’à présent, mais extrêmement important, est celui du périurbain et de la libération de l’initiative privée dans les tissus à dominante pavillonnaire. Les textes aujourd’hui applicables limitent très fortement cette initiative privée, ne serait-ce que parce que le découpage foncier aboutit à des aberrations dans les règles des PLU, qui n’ont pas toujours été anticipées. Or il y a un vrai enjeu à ce que ces tissus pavillonnaires apportent leur contribution à la lutte contre le réchauffement climatique, tout en permettant une densification vertueuse et respectueuse de l’identité de ces territoires. Le sujet est complexe, mais les notaires, les architectes et naturellement les aménageurs doivent pouvoir s’en saisir.

L’Ordre des architectes a lié la question de la dégradation de la qualité des logements à celle du recours excessif aux VEFA, mais le lien avec la loi ELAN ne me parait pas évident. Le sujet de l’utilisation des VEFA par les bailleurs sociaux est plus complexe qu’il n’y parait. Aujourd’hui, sur le périmètre de Grand Paris Aménagement, plus de 70 % des logements des bailleurs sociaux sont réalisés en maitrise d’ouvrage directe ; d’autres bailleurs, de manière parfaitement légitime, ont décidé de renoncer à la maîtrise d’ouvrage directe en construction et de concentrer leurs moyens sur la rénovation de leur parc existant. Ce sont de vraies stratégies d’entreprise et, comme il a été dit justement, le niveau de qualité exigé par ces bailleurs pour leurs ventes en l’état futur d’achèvement est aujourd’hui très élevé, bien loin de « laisser les clés » au promoteur.

La loi ELAN a abordé, très timidement, la question de la préfabrication en construction : c’est un enjeu majeur pour résoudre les problèmes liés au coût de la construction, qui aujourd’hui explosent, mais aussi ceux liés aux recrutements dans le secteur. Il faudra donc s’interroger sur les modalités d’association des constructeurs à la conception des bâtiments, sauf à risquer de « passer à côté » du sujet : on le sait bien pour la construction en bois, séparer la conception et le choix du constructeur dans ce mode constructif est une aberration. Le sujet induit des questionnements sur la maîtrise d’ouvrage publique dans le cadre de la loi du 12 juillet 1985, dite loi « MOP », qui est une exception française et se heurte à la révolution des modes constructifs aujourd’hui nécessaire.

M. Arnaud Portier, secrétaire général de l’Association des établissements publics fonciers locaux (EPFL), directeur général de l’EPFL Pays Basque. Je concentrerai mon propos sur la problématique foncière, qui est centrale pour les établissements publics fonciers locaux.

La loi ELAN a permis de simplifier le fonctionnement des EPFL, en ouvrant notamment la possibilité de créer des filiales, de clarifier les modalités de leur intervention en proto-aménagement et d’ouvrir à toutes les collectivités territoriales la possibilité de bénéficier de l’appui d’un établissement public foncier.

Depuis de nombreuses années, nous attirons l’attention des pouvoirs publics sur le fait que les EPFL sont favorables ce que les collectivités adhèrent par priorité à des EPCI, dès lors que la politique foncière se réfléchit et se pense à l’échelle d’un territoire. Mais le constat, sur le terrain, est parfois celui du rôle hégémonique d’une commune dans un EPCI et qui, pour des raisons diverses, décide d’entraver la capacité d’autres communes membres du même EPCI à rejoindre un EPFL. On a même vu, en Occitanie, le préfet de région s’opposer à l’adhésion d’un EPCI à un EPFL, au motif que la mise en place d’un EPF d’État sur le même territoire était en gestation. Comment comprendre la position adoptée par le préfet, qui va à l’encontre des préférences exprimées par les élus locaux ?

Aujourd’hui, chacun reconnait que la capacité d’intervention des collectivités est facilitée par la possibilité de s’appuyer sur les moyens et les compétences d’un EPFL.

Au pays basque, territoire tendu où le prix du foncier est très élevé, le nombre de logements sociaux produits a progressé, mais nombre de ces logements ne répondent qu’imparfaitement aux attentes des habitants. Nous avons constaté une forte progression des ventes en défiscalisation Pinel et de la production de logements sociaux en VEFA (entre 75 % et 90 % sur l’agglomération bayonnaise), mais aussi une dégradation de la qualité de ces constructions, une réduction de la surface des logements produits et une explosion du prix du foncier et des logements. Une proportion importante des logements a été achetée pour faire de la location touristique ou comme résidence secondaire et aucun encadrement réglementaire ne permet aujourd’hui de juguler ou de maîtriser une telle tendance.

Que dire également des ventes ou acquisitions réalisées par des opérateurs qui ont constitué eux-mêmes des structures d’agence immobilière ou de négociation et qui, quand ils achètent un bien, se facturent des frais d’agence ?

Il faut aller vers plus de sobriété foncière, alors que les collectivités s’appuient sur des documents d’urbanisme qui n’ont aucunement été votés et mis en œuvre à l’aune d’une telle problématique. Les services de l’État ont validé des documents parfois excessivement permissifs, qui ouvrent à la construction des surfaces sur lesquelles des opérateurs se positionnent. Quand une commune décide de réduire sa surface constructible dans le cadre d’un nouveau PLU, elle s’expose à être attaquée devant le tribunal administratif et celui-ci finit par donner raison au propriétaire, considérant que cette « perte de chance » ou suppression de constructibilité est une atteinte portée à son droit de propriété.

Les relations public-privé sont devenues plus complexes et plus difficiles, alors même que l’objectif d’un développement cohérent et harmonieux de nos territoires passe par la capacité à faire travailler tous les acteurs en bonne intelligence.

A qui doit profiter la rente foncière ? Peut-elle ne profiter qu’au propriétaire-vendeur ? Il faut se poser la question et le législateur doit s’en saisir.

M. Richard Lioger, rapporteur. Je remercie chaleureusement l’ensemble des participants, pour leurs interventions riches et denses.

Plusieurs d’entre vous ont semblé rendre la loi ELAN responsable de la faiblesse de la construction aujourd’hui en France. Je rappelle néanmoins que la loi ELAN a été promulguée en 2018 ; en 2019, la période préalable aux élections municipales a commencé ; en 2020 et 2021, nous avons traversé une crise sanitaire.

La question du foncier est absolument centrale, à l’évidence, et elle doit constituer une priorité pour la prochaine législature. Il faudra également poser la question de l’accès au foncier public.

Je suis irrité d’entendre que la dématérialisation n’est toujours pas généralisée au sein des collectivités territoriales, que des pièces complémentaires et non nécessaires restent parfois demandées et qu’on crée des freins à différents niveaux. La loi ELAN ne doit pas être tenue pour responsable : c’est à ces collectivités de s’expliquer sur ces situations.

La frilosité de nombre de communes en matière de construction s’explique aussi par l’image de « bétonneur » souvent attachée au secteur et nombre d’exécutifs locaux, y compris dans des grandes villes, se sont fait élire sur un programme de limitation de l’effort de construction. La génération des maires « bâtisseurs » n’est plus.

La loi ELAN a mis en place un certain nombre d’outils, il convient désormais que les acteurs locaux se les approprient.

M. Jean-Luc Lagleize, rapporteur. Je ne partage pas le constat selon lequel la VEFA serait synonyme de logement de mauvaise qualité. Ayant acheté un appartement en VEFA en tant que particulier, je confirme avoir reçu exactement ce que j’avais acheté et payé.

La mobilisation des logements vacants est un véritable sujet. Ils ne sont certes pas toujours situés au bon endroit, parfois dans des zones en déprise – mais on en trouve aussi dans les zones tendues. Mais comment inciter à ce que les logements et les bureaux vacants soient remis sur le marché, tout en respectant le droit de propriété ?

L’intérêt des OFS n’est pas de vendre, à terme, le foncier au propriétaire de l’appartement. L’idée est plutôt de « geler » un terrain et de le « sortir » définitivement de la spéculation foncière. L’objectif est bien de ne le vendre jamais – à la différence de l’accession sociale à la propriété classique, où une commune donne un terrain à un bailleur social, qui construit des logements et les vend : si l’acquéreur du logement revend ensuite celui-ci, au prix du marché, c’est lui qui encaisse la plus-value.

Je confirme que l’État a remboursé aux communes les recettes de taxe d’habitation, à l’euro près. La réforme n’a donc pas appauvri les communes.

S’agissant de la question du partage de la rente foncière, le plus simple me semble être de modifier la structure de la fiscalité de la plus-value foncière. Aujourd’hui, après 22 ans, on n’a pas d’impôt supplémentaire sur le revenu en cas de plus-value foncière ; à partir de 30 ans, plus de prélèvements sociaux non plus. Si on décidait que la plus-value est immédiatement taxable et à tout moment, l’État ou la commune qui ont permis cette plus-value en retireraient une juste quote-part.

M. Thibaut Bazin, rapporteur. Les éléments apportés montrent que plusieurs articles de la loi allaient dans le bon sens, mais que les effets constatés se situent en-deçà des objectifs affichés ou espérés. L’évaluation qualitative est plutôt positive, le constat quantitatif plutôt décevant. Certains points dépendent de la loi, d’autres de la manière dont les acteurs locaux se la sont appropriée.

Je vous remercie.


TABLE RONDE n° 3 : Le droit de l’immobilier

M. Jean-Luc Lagleize, rapporteur, président de séance. J’ai le plaisir de vous accueillir à cette troisième table-ronde que la commission des affaires économiques organise pour le suivi de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite « loi ELAN ».

Je remercie immédiatement l’ensemble des personnalités, institutions et organisations qui ont répondu positivement à notre invitation et qu’à défaut de pouvoir saluer en présentiel, mes collègues et moi-même accueillons donc dans le cadre de la présente visioconférence, qui est enregistrée.

Je vous demanderai de concentrer votre prise de parole liminaire sur les points de la loi qui vous intéressent au premier chef. Je pense, par exemple, à tout ce qui a trait à l’encadrement des loyers, à l’évolution des rapports locatifs (bail mobilité, logement des étudiants, garantie Visale, encadrement des meublés de tourisme) ou encore au permis de louer et à la lutte contre l’habitat indigne.

À l’issue de nos travaux, à la fin du mois de février prochain, nous présenterons à la commission des Affaires économiques de l’Assemblée un rapport qui s’efforcera de dresser un bilan équilibré de cette loi ELAN, qui fut assurément l’une des plus importantes de l’actuelle législature.

M. Richard Lioger, rapporteur. La présente table-ronde est l’occasion de se retrouver, cinq ans après la conférence de consensus qui avait préfiguré la loi ELAN. Nous avons déjà rencontré les bailleurs sociaux, les promoteurs et la fédération du bâtiment et des travaux publics.

M. Stéphane Pavlovic, directeur de la Confédération générale du logement (CGL). Je rappelle que la CGL est une association de défense des usagers du logement, qui a vocation à aider et informer ces usagers dans leurs droits au quotidien.

Les mécanismes mis en place par loi ELAN en matière d’encadrement des loyers, d’évolution des rapports locatifs, de permis de louer et de lutte contre l’habitat indigne nous apparaissent, de manière générale, trop complexes. Ils sont supposés répondre à de vraies problématiques de terrain et, au final, ils font souvent l’objet de réformes successives, soit parce que les objectifs fixés n’ont pas été atteints, soit parce que les différents acteurs ne réussissent pas à mettre en œuvre ces mécanismes, soit encore parce que les moyens d’action ne sont pas suffisants.

Depuis plusieurs années, de nombreuses réglementations se sont empilées et, du point de vue de la protection des usagers du logement, la question de l’effectivité du droit en vient parfois à être oubliée. Or cette question est centrale ! Pour chaque règle de droit créée, il faut s’assurer de sa mise en œuvre effective et que le bénéficiaire de droits nouveaux, comme l’usager du logement, puisse les exercer véritablement.

En matière d’encadrement des loyers, la préfecture va pouvoir donner délégation aux collectivités territoriales. En matière d’habitat indigne, les collectivités interviennent certes beaucoup… mais quels sont les moyens d’action en propre de l’usager ? C’est là une question que l’on ne se pose qu’assez peu. La CGL estime qu’il faut aller beaucoup plus loin pour rendre effectifs les droits appartenant aux usagers et leur permettre de les exercer de manière très simple – sans nécessairement devoir aller devant les tribunaux.

M. Jean-Luc Lagleize. Mesurer l’effectivité de la loi est au cœur des préoccupations des quatre rapporteurs de la présente mission d’évaluation !

M. Stéphane Pavlovic. Face au problème de l’encadrement des loyers, on met en place des strates de réglementation – la dernière en date étant, par exemple, l’obligation de faire figurer dans les annonces immobilières les plafonds de loyer applicables dans la zone considérée. Quel est l’intérêt et l’effectivité pour l’usager ? Limité. Que se passe-t-il si l’information ne figure pas dans l’annonce ? Que pourra faire l’usager ? Une sanction s’appliquera-t-elle rapidement, qui lui bénéficiera directement ? Toutes ces questions demeurent ouvertes.

M. Eddie Jacquemart, président de la Confédération nationale du logement (CNL). Du point de la CNL et pour ce qui a trait notamment au secteur social, la loi ELAN a constitué la pire loi régressive que notre pays ait connue depuis plusieurs décennies. Avec l’arrivée du président Emmanuel Macron, une grande loi sur le logement était attendue ; en définitive, on se retrouve avec une loi qui a emprunté de mauvaises directions, tout particulièrement du point de vue des locataires du parc social.

Cette loi a été préparée et votée au pas de course, sans négociations et concertations suffisantes. La stratégie du Gouvernement, en matière de logement, est bien claire : on commence par assécher financièrement les organismes HLM avec la réduction du loyer de solidarité (RLS), puis on organise la déstructuration du parc social dans le cadre de la loi ELAN.

À force de réclamations et de manifestations et avec l’appui de l’USH et d’autres organisations du secteur du logement, nous avons fini par obtenir l’organisation d’une conférence de consensus, au cours de laquelle nous avons apporté des éléments qui ont permis d’atténuer les effets régressifs de la loi.

S’agissant de l’encadrement des loyers, un article très intéressant de Mme Manon Romain dans le Monde, en date du 5 décembre 2021, indique que 37 % des annonces à Paris présentent des loyers abusifs (et 43 % en Seine‑Saint‑Denis). Ces chiffres montrent bien les limites rencontrées par le dispositif actuel. Selon nous, un tel encadrement a vocation à devenir universel dans les zones tendues ; seules une vingtaine de villes ont aujourd’hui obtenu sa mise en œuvre, ce n’est pas suffisant ! Et on a du mal à comprendre pourquoi certaines demandes ont été rejetées, comme Grenoble ou Champigny-sur-Marne.

La CNL regrette qu’en dépit de l’article adopté dans le cadre de l’examen du projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dit « 3 DS », ce dispositif reste encore expérimental et n’entre pas dans le droit commun. Je rappelle incidemment que la situation actuelle est la résultante des recours en nombre, parfois abusifs, déposés par l’Union nationale des propriétaires immobiliers (UNPI) et la Fédération nationale de l’immobilier (FNAIM), la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite « ALUR », ayant prévu en son temps un dispositif d’encadrement des loyers beaucoup plus extensif.

Nous savons gré au ministre Julien Denormandie d’avoir réintroduit le dispositif d’encadrement dans la loi ELAN. Mais il ne fallait pas qu’il soit expérimental, il fallait l’inscrire « dans le dur » - à l’exception peut-être de certains territoires, où il serait manifestement inapplicable. En tout cas, toute ville ou communauté qui demanderait sa mise en œuvre devrait pouvoir l’obtenir.

Pour ce qui concerne l’application de ce mécanisme d’encadrement des loyers, c’est un véritable parcours du combattant – non seulement, d’abord, pour obtenir un logement, mais également, ensuite, pour obtenir gain de cause au tribunal devant lequel on aurait fait comparaitre le propriétaire dudit logement. Il faut donc impérativement simplifier la procédure pour le locataire.

Quant aux sanctions prévues par la loi ELAN, elles ne sont pas appliquées : en 2020, seulement 9 condamnations ont été prononcées de ce chef, alors que le nombre de propriétaires en infraction est évidemment très supérieur. De ce point de vue, il conviendrait de pouvoir également sanctionner les agences immobilières qui ne respectent pas la loi : une récente étude de la Ville de Paris et de la Fondation Abbé Pierre a permis de mesurer l’ampleur des défaillances.

Il faudrait que l’on mette en place une véritable « police du logement », qui vérifierait que les lois votées sont effectivement appliquées. Imagine-t-on un code de la route sans radars ni policiers chargés de sanctionner les infractions ? Sans police ni moyens pour faire respecter la loi, cela ne fonctionne pas.

S’agissant du « bail mobilité », ne faudrait-il pas le rebaptiser « bail précarité » ? On ne peut pas accepter, en effet, d’être logé en contrat à durée déterminée. Ce dispositif n’a visé qu’à satisfaire les attentes de certaines catégories de propriétaires, qui en avaient besoin pour le combiner habilement avec la location touristique : on loue dix mois par an à des étudiants en bail mobilité et on met en location touristique pour le reste du temps. Ce n’était donc pas une bonne idée, et elle a alimenté des stratégies aux limites des règles applicables en matière de location touristique.

Pour ce qui concerne la « garantie Visale », il faut également regretter que seule une partie de la population soit concernée. De surcroît, ce n’est pas l’État qui finance, mais les salariés eux-mêmes à travers le versement au groupe Action Logement. Le dispositif devrait être étendu et devenir universel. Dans le cadre de la loi ALUR, on avait bien tenté d’avancer sur la garantie universelle des loyers, mais ces tentatives ont suscité une levée de boucliers de la part des propriétaires et des assureurs. Veut-on réellement, dans ce pays, faciliter l’accès du plus grand nombre au logement ? De ce point de vue, avec la garantie Visale, la loi ELAN ne va pas assez loin – la CNL défend l’idée innovante d’une véritable « sécurité sociale du logement », avec une caisse de garantie nationale alimentée par tous les acteurs du logement (propriétaires, locataires, accédants, assureurs, État, collectivités, etc.) et qui permettrait d’en finir avec les SDF et les nuitées d’hôtel dépensées inutilement pour de l’hébergement précaire.

S’agissant du permis de louer, il faut aller beaucoup plus loin, il faut des contrôles et des sanctions. La loi a prévu une série de sanctions importantes, mais je n’ai pas le sentiment que les jugements condamnant des « marchands de sommeil » soient très nombreux. Il ne faut pas s’interdire de franchir une étape supplémentaire et d’envisager la confiscation des biens en cause : ne serait-ce pas une juste sanction pour des propriétaires qui mettent en péril la vie de leurs locataires ? Souvenons-nous de ce qui s’est passé à Aubagne : il n’est pas acceptable qu’on puisse aujourd’hui mourir d’habiter.

Il faudrait envisager la mise en place d’un véritable « répertoire des loyers », chaque propriétaire bailleur privé remplissant d’ores et déjà une déclaration normalisée pour l’ensemble de ses revenus fonciers. Il y aurait simplement à compléter la déclaration d’impôt par la mention de la superficie du logement et celle du loyer moyen appliqué. On pourrait ainsi construire une base d’information sur les loyers qui soit fiable, déclarative mais contrôlable… et beaucoup plus satisfaisante que les informations qui remontent des observatoires locaux des loyers, dont la qualité est aléatoire.

Quant au permis de louer, il faudrait le rendre systématique et obligatoire, à l’instar du permis de chasse ou du permis de conduire. Le « tsunami » espéré en matière de qualité des logements n’est jamais survenu…

La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique, dite loi « Climat », a introduit un dispositif intéressant pour ce qui concerne le diagnostic de performance énergétique (DPE), dans le cadre notamment du permis de louer, et la CNL se félicite de cette avancée : les marchands de sommeil sont des personnes qui louent parfois des « épaves thermiques » et il ne faudrait pas que des aides publiques arrivent dans leurs poches, sans que les travaux prévus soient finalement réalisés.

M. Jean-Marc Torrollion, président de la Fédération nationale de l’immobilier (FNAIM). La loi ELAN, qu’il faut apprécier à l’aune des évolutions législatives depuis 2018 – y compris les dispositions de la loi Climat et résilience – est celle qui a rendu opposable le diagnostic de performance énergétique. Elle a ainsi posé le socle d’une législation ambitieuse.

Elle a aussi habilité le Gouvernement à réformer profondément, par voie d’ordonnances, le régime de la copropriété. Il aurait été souhaitable d’aller encore plus loin, pour aboutir à une véritable codification du droit de la copropriété, ou encore à une organisation des baux électroniques.

La loi ELAN a également contribué à structurer le secteur des professionnels : le Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières (CNTGI) a été entièrement réformé, les titres d’agent immobilier, administrateur de biens et syndic de copropriété sont désormais protégés… mais nous attendons toujours la nomination de la commission de contrôle.

S’agissant de l’encadrement des loyers, il me semble que les associations qui se sont exprimées ont été parfois injustes vis-à-vis de la loi ELAN. Effectivement, la FNAIM a obtenu l’annulation des arrêtés d’encadrement à Lille et Paris, et c’est précisément la loi ELAN qui est venue supprimer les causes de ces nullités : ces associations doivent donc lui reconnaître ce mérite ! Par ailleurs, la loi a eu l’intelligence de dissocier l’observation agréée des loyers et l’obligation d’encadrement. On l’oublie parfois, c’était là un défaut structurel des dispositions législatives qui avaient cours auparavant.

L’encadrement des loyers est un dispositif expérimental, ouvert initialement pour une période de trois ans – désormais prolongé par le projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dit « 3DS » – et dont l’activation repose sur le choix des collectivités territoriales de faire ou de ne pas faire. Neuf collectivités ont déposé un dossier pour obtenir la faculté de prendre un arrêté d’encadrement et sept ont été retenus ; le dossier de Grenoble n’a pas été retenu, ce qui n’est pas difficile à comprendre après analyse de l’offre de logements disponibles et de l’évolution des loyers.

La FNAIM est défavorable au principe même d’un encadrement des loyers, mais convient que le dispositif actuel n’est pas inintéressant. Vouloir mesurer dès aujourd’hui les effets de ces dispositifs, comme le suggère la CNL, nous semble prématuré : on sait qu’ils aboutissent à un écrêtement pour les petites surfaces, qui se propage ensuite aux autres segments du marché. J’observe néanmoins que cet encadrement intervient à un moment où nous sommes confrontés à des phénomènes de « démétropolisation » et d’émergence de demandes nouvelles hors zones tendues, ce qui en réduit peut-être la pertinence – d’autant que des obligations considérables se font également jour en matière de rénovation énergétique du parc locatif.

S’agissant des rapports locatifs, la loi ELAN n’a pas constitué une révolution. Le bail mobilité partait d’un principe simple, avec un objectif technique et politique sous-jacent : trouver une formule qui permettrait de réorienter les choix faits par certains bailleurs au bénéfice de Airbnb, en vue de conforter une offre locative de nature à aider les salariés et les étudiants en mobilité. La démarche était louable, mais l’outil mis à la disposition des bailleurs n’a été que peu utilisé – sauf à Paris, où certains groupes comme Foncia l’ont largement mobilisé. Il n’a pas véritablement trouvé son public et il est simplement venu se surimposer à la législation existante sur les meublés et à la loi de 1989 : le constat d’ensemble est donc plutôt celui d’un échec. Il est vrai qu’une politique du logement ne s’évalue pas l’immédiateté, elle se mesure dans le temps.

Pour ce qui concerne le logement des étudiants, il faut rappeler que seulement 4 % des étudiants font aujourd’hui appel à la colocation ; il s’agit souvent d’un choix économique ou d’opportunité, plus qu’une volonté de sociabilité. Une réflexion plus globale sur le logement des jeunes reste à conduire.

La garantie Visale a constitué la colonne vertébrale du discours du ministère chargé du logement pendant un certain temps et il faut admettre qu’elle a aujourd’hui trouvé son public, particulièrement chez les étudiants, un peu moins chez les salariés défavorisés. Cette garantie n’est pas indéfiniment extensible, au regard des engagements hors bilan qu’elle engendre pour Action Logement, et elle ne constitue pas encore une réelle avancée en zone tendue – car les candidats locataires y sont pléthoriques et qu’entre le candidat locataire « classique », disposant d’une rémunération confortable, et le candidat moins bien rémunéré, mais bénéficiant d’une garantie Visale, c’est généralement le « meilleur » dossier, c’est-à-dire le plus solvable, qui est privilégié. Un sondage réalisé auprès de nos administrateurs de biens montre qu’à revenus identiques, les dossiers de location s’appuyant sur une caution personnelle l’emportent à 62 % (contre 37 % pour les dossiers s’appuyant sur une garantie Visale).

L’encadrement de la location des meublés de tourisme a été une bonne mesure, car ces locations sont partout en très forte croissance, au détriment des locations destinées aux familles, locations nues à usage de résidence principale : entre 2006 et 2017, le parc locatif privé à usage touristique est ainsi passé de 14 % à 23 %. Des législations successives et des initiatives des collectivités territoriales sont certes venues progressivement encadrer ce mouvement, mais un certain nombre de décisions claires de la part des pouvoirs publics font encore défaut. J’attire d’ailleurs l’attention des associations de locataires sur l’impossibilité, d’un côté, d’encadrer les loyers, assujettir les propriétaires à des permis et les contrôler, et, de l’autre côté, d’avoir des locations Airbnb et des locations touristiques qui prospèrent pratiquement sans contraintes. L’État doit prendre position et dire si la priorité se situe dans le fait de loger les citoyens de manière durable, y compris l’accompagnement des bailleurs en tant que de besoin et le choix de la neutralité fiscale, ou dans celui de soutenir l’essor de la location touristique meublée.

Le permis de louer est un instrument à la disposition des maires et, sur ce point également, la FNAIM ne partage pas l’analyse centralisatrice de la CNL. Aujourd’hui, 384 communes ont choisi de déployer cet outil pour « cibler » certains quartiers ou certaines zones, où l’habitat indigne constitue une problématique devant être traitée. Mais certains maires se sont empressés d’en étendre l’usage, au risque de créer des freins à la relocation et de finir par perdre de vue l’objectif initial. Avec la loi Climat, les collectivités territoriales n’ont d’ailleurs peut-être assez remarqué qu’on glissait du contrôle de « l’indignité » à celui de « l’indécence »
– ce qui n’est pas du tout la même chose, car, derrière le contrôle de l’indécence, se profile l’enjeu de l’engagement d’une responsabilité. Or les maires ne disposent que de très peu de pouvoirs en matière de police de l’habitation et du logement : c’est l’un des points faibles du dispositif et nous avons des exemples de suroccupations de logement dénoncées par des syndics aux maires et restées sans suite, car les maires n’avaient pas de solutions de relogement à proposer.

M. Pierre Hautus, directeur général de l’Union nationale des propriétaires immobiliers (UNPI). Je veux tout d’abord me faire le relais d’un message porté par les propriétaires et, probablement, par de nombreux Français : il faut arrêter de changer les règles tout le temps !

S’agissant de l’encadrement des loyers, la loi ELAN est revenue sur un sujet déjà abordé par la loi ALUR, mais cette fois-ci de manière expérimentale et peut-être plus pragmatique, en dissociant l’observation des loyers et leur encadrement. La CNL regrettait que la mesure ne soit pas appliquée ; mais peut-être n’est-elle tout simplement pas applicable et peut-être conviendrait-il de revoir ce dispositif, voire de l’abandonner s’il n’est pas efficace ? Que dire de son instrumentalisation à des fins politiques, quand des élus locaux demandent à mettre en place un encadrement des loyers alors même qu’ils freinent l’effort constructif dans leur collectivité ?

L’UNPI considère qu’il est dangereux de maintenir ce dispositif et, plus encore, de l’étendre. Une première période d’application avait été ouverte et l’on s’apprête désormais à expliquer aux opérateurs, qui ont fait le choix d’investir sur la base d’un certain modèle économique et d’un équilibre donné entre charges et recettes, que les règles ont désormais changé. Cela revient à les placer dans des situations inextricables, dans un contexte où les obligations de rénovation énergétique se sont considérablement durcies et où le DPE, tel qu’il fonctionne, est un instrument à produire des passoires énergétiques (qui ne l’étaient pas auparavant).

Nous continuerons donc à nous opposer partout à l’encadrement des loyers, y compris devant les tribunaux, et à dénoncer une mesure inadaptée.

Nous participons aux observatoires locaux des loyers via les associations départementales d’information sur le logement (ADIL) et nous y contribuons via « Connaitre les loyers et analyser les marchés sur les espaces urbains et ruraux » (Clameur), un observatoire créé par les propriétaires et les professionnels il y a plus de vingt ans.

S’agissant des rapports locatifs, M. Jean-Marc Torrollion a justement dressé le constat de l’échec du bail mobilité. Il s’agit d’un dispositif qui est peu ou pas utilisé, peut-être parce qu’il n’est pas bien calibré ou insuffisamment sécurisé. Peut‑être aurait-il fallu prévoir, comme nous l’avions demandé, un assouplissement ou la possibilité d’un renouvellement du bail à l’intérieur du délai de dix mois.

Pour ce qui concerne le logement des étudiants, plusieurs facteurs ont permis d’intégrer plus d’étudiants dans le parc locatif privé. La garantie Visale joue ici pleinement son rôle, pour tous les publics dont la situation financière le justifie : le candidat qui présente un dossier complet et muni de sa garantie témoigne de sa bonne volonté et de son sérieux. Il est vrai que le système de garantie classique, celui de la caution personnelle, reste néanmoins plébiscité – c’est un système qui bénéficie de son antériorité, qui fonctionne depuis de très nombreuses années et qui est ancré dans les habitudes des propriétaires.

La question de l’encadrement des locations meublées de tourisme me conduit à rappeler cette vérité de l’histoire : la propriété, c’est la liberté. Plus on veut encadrer, taxer, soumettre à permis ou à autorisation, plus on alimente les comportements de fuite vers des solutions moins contraintes. Et les victimes en sont les ménages qui souhaitent se loger dans le parc locatif, notamment privé. La « fuite » vers les locations de tourisme illustre parfaitement ce phénomène. Nous croyons qu’il faut désormais s’interroger sur la manière de « remettre de la liberté » dans l’acte de mise en location et les rapports entre locataire et propriétaire. N’oublions pas néanmoins que le développement de l’offre de locations meublées n’est que la réponse à une demande touristique forte – si l’on veut attirer de nombreux touristes, notamment dans la capitale, il faut leur offrir des possibilités de logement – et que les sociétés offrant des meublés de tourisme nouent des partenariats avec les élus locaux et les offices de tourisme.

L’indifférenciation sémantique utilisée par certains pour parler des propriétaires et des marchands de sommeil n’est pas acceptable : les marchands de sommeil sont, purement et simplement, des voyous et non des propriétaires‑bailleurs au sens noble du terme, qui mettent en location des logements aux standards de qualité les plus élevés. Le permis de louer ne constitue un instrument de lutte contre les marchands de sommeil qu’à la condition d’appliquer les termes de la loi. Or aujourd’hui, la loi n’est pas appliquée dans les termes qui sont les siens et se trouve détournée, en dépit de nos alertes répétées auprès du ministère chargé du logement et des contrôles de légalité que nous demandons aux préfets d’opérer. Les élus qui se saisissent du permis de louer l’appliquent sur des territoires entiers, en excluant le parc social et parfois les logements neufs, et nous sommes parfois obligés d’engager des procédures pour que soient respectés les termes de loi – c’est-à-dire l’application du dispositif à l’échelle d’un immeuble ou d’un ilot, l’attaque « chirurgicale » d’endroits précis et bien identifiés par les élus locaux, qui connaissent parfaitement le territoire.

Le « permis de louer » recouvre, en réalité, deux dispositifs différents – à savoir « l’autorisation préalable » de mise en location et la simple « déclaration préalable » de mise en location – et il ne vaut, en aucun cas, présomption de décence du logement. Tout cela est donc totalement inefficace pour le propriétaire, si ce n’est une démarche administrative supplémentaire qui ne fait que retarder le moment de la mise en location.

Pourrons-nous espérer, un jour, voir revenir à l’agenda un véritable conventionnement, instrument d’une offre locative de qualité excluant les logements F ou G et assortie de loyers modérés ? Réussirons-nous à avoir 200 000, 300 000 ou 400 000 logements entrant dans ce dispositif ? Il s’agirait d’un véritable outil de baisse des loyers, en lieu et place d’un mécanisme politique destiné à écrêter les loyers.

M. Jean-Luc Lagleize. L’analyse des conséquences de l’encadrement des loyers constituera certainement l’un des sujets majeurs de l’évaluation à trois ans de la loi 3DS, en 2025…

M. David Chouraqui, président de Plurience. De manière générale, le législateur « verrouille » beaucoup le marché avec des lois successives et dont l’empilement aboutit à ce qu’à la fin, ce soit l’arroseur qui se retrouve arrosé… On nivelle le marché par le bas, les lois contraignent et punissent indistinctement tous les acteurs pour traiter certaines situations particulières, certes intolérables, mais relativement circonscrites. D’autant qu’on a le sentiment d’un « deux poids, deux mesures » et que les professionnels et les bailleurs de bonne foi pâtissent d’un ensemble de mesures, alors qu’à côté, certaines plateformes prolifèrent et profitent d’une liberté qui dévoie le marché. À force de multiplier les dispositifs contraignants, de plus en plus difficiles à mettre en œuvre, on aboutit à des situations pratiquement dysfonctionnelles.

Inversement, on ne voit plus certaines réalités et, tout d’abord, le fait qu’on manque aujourd’hui de logements. On répartit la pénurie et on oublie que le socle d’une politique de logement inscrite dans le long terme, c’est la création de logements. L’encadrement des loyers vise à contenir leur progression. Mais celle-ci est tirée par le marché et elle traduit la tension qui existe sur les stocks : il faut assumer de dire qu’on retire aujourd’hui des logements du parc louable à travers, par exemple, les locations meublées poussées par certaines plateformes ou les opérations de rénovation énergétique, dont nous avons au demeurant besoin. Le marché est en attrition ; les difficultés de logement, les hausses de loyer ne peuvent se résoudre sans une réflexion globale.

Il faut arrêter de modifier constamment les règles applicables : cette instabilité casse la confiance que les Français ont dans le logement et l’investissement locatif, qui est en pleine vitalité. L’immobilier est le secteur du temps long, les dispositifs ne peuvent s’y imposer par la magie d’un claquement de doigts. Il faut recréer de la confiance, éviter des choix qui soient remis en cause fréquemment, privilégier des mesures faciles à déployer et qui ne soient pas l’expression d’une forme de punition à l’égard des propriétaires.

L’intermédiation peut être une réponse à ces enjeux. La loi a permis de renforcer l’organisation de la profession, ce qui va dans le bon sens. Celle-ci est désormais très encadrée, elle est garante et pénalement comptable de l’ensemble de ses activités. Le législateur peut donc s’appuyer sur les professionnels avec confiance, alors que ceux-ci sont souvent aux prises avec des injonctions contradictoires – d’un côté, beaucoup d’attentes dans l’accompagnement ; de l’autre, le sentiment qu’on nous met les bâtons dans les roues. Il faudrait mettre l’ensemble des questions sur la table, dire clairement ce que l’on attend de nous et mettre en regard l’ensemble des moyens, notamment législatifs, qu’on veut bien nous donner.

S’agissant de l’encadrement des loyers, on voit bien qu’il y a un phénomène de fuite vers l’offre meublée, que cet encadrement ne tient pas compte du standard énergétique du logement et que la désintermédiation constatée se retourne contre le respect de la réglementation.

Au sein de l’observatoire Clameur, des efforts importants ont été consentis au cours des dernières années afin de collecter des données réellement fiables, fondées sur des baux réels et non sur des annonces. L’objectivité des observations constitue un prérequis indispensable à la construction de politiques adaptées.

S’agissant du bail mobilité, peu utilisé, je réitère le constat selon lequel trop de dispositifs nouveaux n’ont pas le temps de s’installer dans les pratiques. Le temps de l’immobilier est un temps long, tant pour la propriété que pour la gestion locative : le temps d’expliquer les dispositifs à nos clients, le temps d’avoir nous-mêmes un retour d’expérience et d’être capables de conseiller de manière utile et pertinente, la loi a déjà changé…

La garantie Visale est un « produit » abouti, bien utilisé par le segment des étudiants. Mais elle a pâti du passé et notamment de l’image très négative, chez les professionnels, de la garantie des logements locatifs (GRL), dont le pilotage et la gestion étaient très difficiles. On peut toujours brasser des idées parfois séduisantes ; derrière, il y a une mise en œuvre à assurer par des professionnels, avec des conséquences sur les pratiques, les systèmes d’information, les équipes, etc.

Les professionnels ont toujours à cœur d’accompagner au mieux les lois votées. Mais travaillons le plus en amont possible sur le réalisme et la mise en place des dispositifs concernés.

Mme Camille Giraudet, chargée de mission à la Confédération syndicale des familles (CSF). La CSF est favorable à l’encadrement des loyers et souhaite que la mesure soit pérennisée, sous réserve de la rendre pleinement effective – c’est-à-dire d’avoir plus de contrôles, car tout le monde ne joue pas le jeu. Il faudrait également revoir la notion de « complément de loyer », un mécanisme parfois détourné pour passer outre l’encadrement : le décret n° 2015‑650 évoque, de manière évasive, des caractéristiques « de localisation et de confort », sans que l’on sache très bien ce que cette formulation recouvre précisément.

Dans l’hypothèse de la mobilisation d’un cautionnement pour une location, il conviendrait de savoir si l’apposition d’une mention manuscrite est nécessaire ou pas.

La CSL est très favorable au permis de louer, s’il est mis en œuvre de manière intelligente. À Niort, plusieurs acteurs ont ainsi décidé de travailler ensemble (agglomération, ville, caisse d’allocations familiales et ADIL) pour mettre en place un tel permis, avec des procédures d’instruction des demandes, des visites de terrain et l’éventuelle prise en charge des propriétaires en cas d’insalubrité ou d’indécence des logements.

M. Alain Misse, secrétaire général de l’Association Force ouvrièreConsommateurs (AFOC). Je souhaite tout d’abord attirer l’attention sur les colonnes montantes électriques dans les immeubles collectifs. Des dispositions législatives sont venues clarifier la question de leur propriété. Malheureusement, des problèmes demeurent : Enedis, gestionnaire du réseau de distribution d’électricité, considère toujours ces colonnes comme des branchements collectifs, ce dont il résulte que les demandes d’augmentation de puissance ou de création d’une dérivation individuelle restent à la charge des copropriétaires. Nous considérons cette situation comme inéquitable et il conviendrait donc qu’une disposition de loi puisse énoncer clairement que ces colonnes constituent bien des éléments du réseau.

La loi ELAN a prévu la fin de la solidarité conjugale en cas de violences. C’est un point que nous partageons et sur lequel nous avons échangé avec le monde HLM.

S’agissant de l’encadrement des loyers, plusieurs questions se trouvent posées : les données utilisées sont-elles fiables ? Les contrôles sont-ils suffisants ? Le locataire qui se plaint d’un loyer abusif sait-il qu’il dispose d’une plateforme en ligne, dédiée à cette fin ? Ce locataire franchira-t-il le pas de la saisine de la commission départementale de conciliation, face au risque de la dégradation de sa relation avec son bailleur ? Quant au projet de loi 3DS, il envisage de prolonger encore la période d’expérimentation. On a du mal à comprendre…

M. David Rodrigues, juriste spécialisé dans le secteur de l’habitat à l’association Consommation Logement Cadre de vie (CLCV). La CLCV se félicite du dispositif d’encadrement des loyers, qu’elle a toujours soutenu. Est-il appliqué ou pas ? Les chiffres varient entre 50 et 80 %, ce qui peut être considéré comme un niveau élevé, notamment à Paris. Faut-il lui donner davantage de visibilité ? Oui, d’autant qu’un système de sanctions est prévu.

Le système vise à stabiliser le niveau des loyers et éviter les abus, à travers l’écrêtement de ces loyers. Les critères pris en considération sont aujourd’hui restreints : localisation géographique, caractère meublé ou non, période de construction, etc. Faudra-t-il introduire le DPE ? Probablement, car il s’agit d’un critère simple, à défaut d’être parfaitement fiable.

Aujourd’hui, le mécanisme est activé sur la base du volontariat communal. Un contrôle supplémentaire est prévu, celui du ministre chargé du logement. En zone tendue, on ne comprend pas bien la justification de ce contrôle supplémentaire, car les élus connaissent parfaitement la situation locative locale et l’état du marché. Un refus a ainsi été opposé par le ministère aux dossiers de l’établissement public territorial Grand-Orly Seine Bièvre et de la communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essonne-Sénart. Or je ne pense pas que la tension locative ait récemment diminué en petite couronne…

S’agissant du complément de loyer, une définition plus précise serait effectivement bienvenue. Celle-ci pourrait prendre une forme négative, c’est-à-dire exclure certains logements, de par leurs caractéristiques, de l’éligibilité au complément de loyer : un logement de moins de 14 mètres carrés, ou dépourvu de sanitaires, quelle que soit sa localisation, ne devrait pas pouvoir se voir appliquer un tel supplément.

Pour ce qui concerne le bail mobilité, il faut parler sans détours : c’est un « flop ». Au moment de sa mise en place, les représentants des locataires et ceux des bailleurs au sein de la Commission nationale de concertation étaient tombés d’accord pour considérer que les dispositions existantes permettaient déjà de faire des baux de courte durée.

La garantie Visale est un dispositif qui marche de mieux en mieux, de plus en plus de bailleurs mentionnent désormais cette garantie dans leurs annonces – alors qu’auparavant, on voyait plutôt des indications « Loca-pass refusé ». C’est une excellente nouvelle !

Nous sommes défavorables aux meublés de tourisme, qui détournent des logements susceptibles de constituer de l’habitat pérenne au bénéfice d’une de l’habitation de courte durée.

Quant au permis de louer, il faut le conserver, mais j’entends les objections de la FNAIM et de l’UNPI : le dispositif vise les marchands de sommeil, mais ceux-ci feront tout pour y échapper. Il faut donc un réel accompagnement tant des bailleurs que des locataires.

M. Stéphane Pavlovic. Pour l’encadrement des loyers, il faut un dispositif plus simple, qui ressemblerait un peu à ce qui avait été fait pour les frais d’agence immobilière – on avait bien été capables d’encadrer les frais d’état des lieux, de rédaction d’acte, etc. Et il faut lui redonner de l’effectivité pour les usagers : il n’est pas normal que le demandeur ait à passer devant une commission départementale, voire devant le juge, pour faire valoir ses droits. Le plafonnement doit s’appliquer de droit, c’est au bailleur qu’il devrait appartenir de prendre éventuellement l’initiative de saisir le juge, s’il s’estime en droit de pratiquer un loyer supérieur.

S’agissant des rapports locatifs, la véritable problématique est celle de l’articulation des différentes garanties avec, au centre, le chantier de la garantie universelle de paiement des loyers, assise sur une mutualisation des dépôts de garantie. Comment sécuriser les bailleurs tout en faisant accéder le plus grand nombre au logement locatif ? Tel est l’enjeu de fond, qui nécessite un travail concerté et en profondeur.

Quant au permis de louer et à l’habitat indigne, nous n’avons jamais été vraiment favorables à ce dispositif, qui éloigne encore plus l’usager du logement. Le cœur du sujet réside, là encore, sur les sanctions et l’effectivité : il n’est pas besoin de permis, si les règles relatives à l’habitat indigne et au logement décent sont réellement tournées vers l’usager et qu’elles peuvent être appliquées de manière rapide, efficace et simple.

M. Jean-Luc Lagleize. Tout mécanisme a ses propres limites : si on interdit tout dépassement de loyer, sous réserve de l’autorisation d’un juge à aller au-delà du plafond, on générera immanquablement des dessous-de-table et donc une économie parallèle. Il y aura les montants affichés sur les baux et les compléments cachés. Et les candidats devront en passer par là, s’ils veulent un logement en zone tendue.

Quant à dénier le droit de propriété aux marchands de sommeil, l’idée avait bien été avancée, mais elle n’a pas pu prospérer : elle n’aurait pas franchi l’étape du contrôle par le Conseil constitutionnel, qui est le gardien sourcilleux de ce droit de propriété.

M. Richard Lioger. En vous écoutant, on se rend compte combien les intérêts des uns sont contradictoires avec ceux des autres, ce qui rend difficile le rapprochement des points de vue…

Les adjoints aux maires de Paris et de Lille, que nous avons auditionnés dans le cadre de la préparation de l’examen du projet de loi 3DS, nous ont confirmé que les dispositions existantes étaient difficiles à faire respecter, suscitant un besoin de recruter en nombre des agents dévolus à la seule surveillance de l’encadrement des loyers.

Force est d’admettre, à Paris notamment, qu’il vient un moment où la puissance publique doit intervenir, quand on voit le niveau exorbitant atteint par les loyers pour des jeunes, des étudiants, des infirmières…

J’ai noté qu’un certain nombre de décrets d’application n’ont toujours pas été publiés, ce qui est extrêmement regrettable.

M. Thibault Bazin, rapporteur. Les retours, tant du côté des propriétaires que de celui des locataires, montrent que les résultats de la loi ELAN se situent bien en-deçà des attentes. S’agissant du bail mobilité, vous avez été nombreux à observer son échec et certains ont esquissé des raisons : pourrez-vous les expliciter sous forme écrite ?

La question des contrôles et celle de l’effectivité a été au cœur de la discussion sur l’encadrement des loyers. Il serait intéressant d’essayer de mesurer, notamment sur Paris, combien de logements sont « sortis » de l’offre locative pour éviter d’être contraints par les dispositions sur l’encadrement. On évaluerait mieux, ainsi, les externalités négatives imputables à ce mécanisme – concrètement, le stock de logements vacants par choix des propriétaires.

Quant au permis de louer, il raterait sa cible : il n’affecte pas véritablement les marchands de sommeil, qu’il vise pourtant à éradiquer, tout en pénalisant les propriétaires ordinaires qui mettent en location. C’est d’autant plus gênant que sa mise en œuvre mobilise un volume considérable de moyens. Que faudrait-il faire d’autre ? Quelles alternatives ?

M. Jean-Luc Lagleize. Je ne dirais pas que la loi ELAN a raté sa cible, je préfère dire qu’elle ne l’a pas atteinte dans certains cas – la nuance sémantique n’est pas négligeable à mes yeux. Je vous remercie.

TABLE RONDE n° 4 : l’urbanisme rÉglementaire

Mme Christelle Dubos, rapporteure, présidente de séance. J’ai le plaisir de vous accueillir à cette quatrième et dernière table-ronde qu’organise notre mission pour le suivi de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite loi « ELAN ».

Je remercie l’ensemble des personnalités, institutions et organisations qui ont répondu positivement à notre invitation et qu’à défaut de pouvoir saluer en présentiel, mes collègues et moi-même accueillons donc dans le cadre de la présente visioconférence, qui est enregistrée. À l’issue de nos travaux, à la fin du mois de février prochain, nous présenterons à la commission des affaires économiques de l’Assemblée un rapport qui s’efforcera de dresser un bilan équilibré de cette loi ELAN, qui fut assurément l’une des plus importantes de l’actuelle législature.

Nous allons aborder aujourd’hui les sujets qui ont trait à la réforme de l’urbanisme réglementaire. Ces sujets sont multiples et tous importants, et nos échanges seront fort riches, j’en suis certaine. Il nous faudra parler de la refonte des règles d’urbanisme avec la rationalisation du SCoT, de la sécurisation des documents d’urbanisme et des évolutions en matière de consommation foncière. Nous évoquerons aussi, dans la mesure du possible, la réforme de la loi Littoral, ainsi que la mise en œuvre, dans tout le pays, des opérations de revitalisation de territoire (ORT), qui permettent d’actionner des outils intéressants comme la dispense d’autorisation d’exploitation commerciale en centre-ville ou encore la réduction fiscale « Denormandie dans l’ancien ».

M. Michel Heinrich, président de la communauté d’agglomération d’Épinal, président du schéma de cohérence territoriale des Vosges centrales, président de la Fédération nationale des schémas de cohérence territoriale (Fédé SCoT). La loi ELAN a beaucoup mobilisé la Fédé SCoT pendant presque deux ans. En effet, nombreuses de ses dispositions ont directement concerné les SCoT : l’aménagement commercial, les dispositions littorales, l’ordonnance de rationalisation de la hiérarchie des normes, et l’ordonnance de modernisation et de rationalisation du SCoT.

Le retour du document d’aménagement artisanal et commercial (DAAC), devenu obligatoire dans la loi, a permis de sécuriser juridiquement certaines pratiques déjà à l’œuvre, et a surtout complété intelligemment l’arsenal juridique dont disposent les élus du bloc local pour piloter les stratégies d’aménagement commercial dans les territoires et mieux encadrer les implantations commerciales. Les mutations en cours du commerce, les enjeux de modernisation, la requalification, l’évolution des espaces commerciaux vers d’autres fonctions ou vers la renaturation, le maintien d’un maillage de magasins physiques dans le territoire face au développement du numérique, les liens de complémentarité centre‑ville-périphérie à retisser : voilà les sujets sur lesquels travaillent les élus en charge des SCoT.

Cette évolution en matière de DAAC est très positive et, depuis 2018, les élus ont à leur disposition tous les outils qui permettent de renforcer leur stratégie d’aménagement commercial. Il faudra cependant veiller à ce que le récent moratoire – certains récusent l’emploi de ce terme mais, dans les faits, c’est bien de cela qu’il s’agit… – issu de l’article 215 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi « Climat », sur les projets commerciaux qui engendrent une artificialisation des sols, permette néanmoins d’accompagner la requalification de nos entrées de ville.

En ce qui concerne les dispositions regardant les communes soumises au régime issu de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l’aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, dite loi « Littoral », nous sommes moins élogieux. Les retours de terrain sont nettement moins positifs, comme j’ai eu l’occasion de le dire lors des auditions conduites par le rapporteur Lionel Causse à l’occasion de la loi Climat. En vérité, les enjeux sont tels dans les territoires littoraux qu’ils mériteraient une loi spécifique pour aborder de manière globale et transversale toutes leurs problématiques et pour s’adapter à la réalité des différents territoires littoraux.

Je vous donne deux exemples vraiment catastrophiques pour les territoires concernés : en premier lieu, la suppression des hameaux nouveaux intégrés à l’environnement (HNIE). Elle a été trop rapide, et vécue avec beaucoup de brutalité (subie) dans les territoires. La disparition des HNIE a nécessité d’importants travaux de réflexion pour essayer de trouver des solutions adaptées, et elles ne sont pas encore trouvées. Deux exemples le montrent bien, à commencer par le HNIE du territoire du Mont-Saint-Michel (Manche), qui devait accueillir des équipements hôteliers pour le secteur touristique, bien intégrés au paysage et à l’environnement, et dont le secteur était concerné par un HNIE. Au lendemain de la loi, il est devenu inconstructible, et aucune solution satisfaisante n’a été trouvée à ce jour.

Il en est de même pour le cirque de Mafate (La Réunion), où la situation est dramatique. Il s’agit d’un territoire sans accès routier ni électricité, concerné par un HNIE qui devait permettre une zone de relocalisation en déplaçant des habitations d’une zone à risque, pour pérenniser l’espace d’habitat et améliorer les conditions de vie. Au 1er janvier 2022, la commune se retrouve sans aucune possibilité d’accorder des autorisations d’urbanisme. La modification du SCoT a été engagée en 2021 pour travailler sur les secteurs déjà urbanisés (SDU), mais le travail est colossal pour un territoire comme celui de La Réunion. Le SCoT du Territoire de la Côte Ouest (TCO) doit traiter des sites qui représentent 200 hectares, mais concernent douze mille habitants. Le principe des SDU n’est pas adapté au cirque de Mafate et ses îlets ou hameaux, et la disparition du HNIE laisse le territoire sans solution : aujourd’hui, les habitants habitent dans un territoire à risque, mais la suppression des HNIE signifie qu’on ne peut les emmener nulle part.

Les parlementaires et le préfet ont alerté sur cette situation, mais pour le moment le Gouvernement n’a pas réagi. Concernant spécifiquement les dispositions de la loi ELAN sur les SDU qui permettent de travailler une densification maîtrisée des espaces déjà urbanisés identifiés par les élus dans les SCoT, si sur le principe elles étaient très attendues, elles posent des problèmes dans les faits. De nombreux contentieux sont en cours, où les juges ne prennent pas en compte la définition des SDU sur les critères locaux prévus dans le SCoT, mais s’appuient sur la liste des critères de la loi ELAN, qui ne devait pas être exclusive, et qui pourtant est interprétée de cette manière dans les décisions de justice. Les élus font face à la fois à des contentieux amenés par les « plumés », catégorie que vous allez voir fleurir et qui regroupe les habitants qui se sentent spoliés et trouvent que les élus ont des critères trop limitatifs dans la définition des SDU, et par les associations environnementales qui les trouvent trop permissifs. On a là une opposition frontale et il faudra bien trouver un juste milieu. Selon les juges, le SCoT ne joue pas le rôle de document intégrateur au titre de la hiérarchie des normes, et on ne peut donc pas considérer que la loi ELAN a participé à la consécration du rôle des SCoT dans la déclinaison des dispositions littorales.

J’évoquerai également trois sujets qui n’ont pas été traités dans la loi. En premier lieu, les annexes agricoles en zone littorale : je veux citer la problématique des agneaux de pré salé dont l’appellation d’origine protégée (AOP) est liée aux marais littoraux, sur lesquels la loi ne permet pas d’annexes pour les bêtes et oblige les agriculteurs à les déplacer parfois sur de longues distances. Avec la déprise agricole, les conséquences sur le littoral sont de nature paysagère mais aussi écologique. On voit apparaître de nouvelles espèces de plantes, qui habituellement étaient broutées et qui ont complètement bouleversé le paysage. Comme il n’y aura plus d’ovins pour assurer le pâturage, on peut imaginer qu’un jour ces paysages seront remplacés par des champs de maïs.

Il faudrait également permettre, en zone concernée par la loi Littoral, sur des décharges existantes par exemple, dans les espaces déjà artificialisés même s’ils sont en discontinuité, la mise en place du dispositif d’énergies renouvelables. De nombreux projets sont ainsi bloqués, par exemple sur le territoire du SCoT du pays de Saint-Malo, du Bassin d’Arcachon, ou du Golfe du Morbihan – Vannes Agglomération.

Du reste, la loi ne prévoit pas, dans les espaces proches du rivage (EPR), la possibilité d’un repli stratégique exigé par le retrait du trait de côte, or il y a des situations où certaines îles sont intégralement classées en EPR, ce qui complique fortement les actions de relocalisation.

En ce qui concerne l’ordonnance n° 2020-745 du 17 juin 2020 relative à la rationalisation de la hiérarchie des normes applicable aux documents d’urbanisme, elle a en partie simplifié les choses en rationalisant le lien juridique entre les documents et en le concentrant sur la compatibilité. De la même façon, la procédure d’analyse de la compatibilité des SCoT avec les documents de rang supérieur, tous les trois ans, est vraiment une avancée par rapport à l’analyse au fil de l’eau qui prévalait avant la loi ELAN. Néanmoins, le nombre de documents à prendre en compte – une vingtaine – reste trop important.

Quant à l’ordonnance n° 2020-744 du 17 juin 2020 relative à la modernisation des SCoT, elle a mobilisé de multiples acteurs de l’aménagement du territoire pendant de nombreux ateliers de la démarche « Planifions nos territoires ensemble ». Fruit de l’initiative du ministère de la cohésion des territoires et de la Fabrique à projets du ministère de la transition écologique, elle a été une réussite à la fois sur le travail de fond qui a été mené et sur la qualité de la concertation et du partage entre tous les acteurs. L’ordonnance a également replacé le SCoT comme outil de stratégie territoriales des intercommunalités et de leurs établissements interterritoriaux, et elle a incontestablement rationalisé le nombre de thématiques obligatoires à traiter. En effet, depuis la loi ELAN, le SCoT repose sur trois piliers :

– un pilier « activités économiques, artisanales, commerciales, agricoles et forestières » ;

– un pilier « offre de logements et d’habitat renouvelé, implantation des grands équipements et services, organisation des mobilités » ;

– un pilier « transition écologique et énergétique, lutte contre l’étalement urbain et le réchauffement climatique, prévention des risques, préservation et valorisation des paysages, de la biodiversité et des ressources naturelles ».

Ces trois piliers ont remplacé entre treize et vingt politiques sectorielles qui revêtaient chacune une valeur quasi-obligatoire. Nous considérons que c’est une très grande avancée, la gestion économe du foncier et la lutte contre l’artificialisation des sols devant être pris en compte dans chacun des piliers évoqués, ce qui est cohérent. Les élus dans les territoires qui élaborent des SCoT ont trouvé beaucoup d’intérêt à cette ordonnance, et grand nombre d’entre eux ont utilisé ont utilisé les dispositions transitoires qui permettaient d’anticiper le travail sur la modernisation de leur SCoT avant l’application effective de l’ordonnance. Certains territoires ont déjà engagé un SCoT valant plan climat-air-énergie territorial (PCAET) ou ajouté un volet mise en œuvre de leur SCoT, qui sont deux innovations incontestables de la loi ELAN.

Je souligne aussi en concluant que parmi les autres dispositifs positifs créés par la loi, on compte aussi les opérations de revitalisation de territoire (ORT), qui traduit un esprit d’adaptation des dispositifs de l’État aux collectivités, qui est à valoriser. Cela ne peut masquer cependant la vraie catastrophe de la partie littorale de la loi, qui aurait mérité une loi à elle seule.

Mme Martine Boutillat, présidente du Pays d’Épernay Terres de Champagne, présidente du SCoT d’Épernay et de sa région, vice-présidente d’Épernay Agglo Champagne, administratrice de l’Association nationale des pôles d’équilibre territoriaux et ruraux et des pays (ANPP). Qu’est-ce que la loi ELAN pour nous dans le pays et le SCoT ? Voilà la question qui nous intéresse et, par rapport à mon collègue qui vient de s’exprimer, comme nous nous sommes concertés en amont de cette table ronde, j’aurai une vision de terrain pour illustrer certains de ses propos.

Je précise que mon territoire compte 85 000 habitants dans 115 communes et qu’il est centré autour de la ville d’Épernay (Marne). Il est situé dans un triangle entre Reims au nord, Châlons-en-Champagne à l’est et Château-Thierry (Aisne) à l’ouest. Une partie des communes du pays et du SCoT, puisque nous avons le même périmètre, appartiennent au parc naturel régional de la Montagne de Reims, et une partie de notre territoire est inscrite à l’Unesco au titre des coteaux, paysages et maisons de Champagne. Le SCoT d’Épernay est né presque en même temps que la loi ELAN, ce qui signifie naturellement que nous n’avons pas tenu directement compte de ce texte dans son élaboration, puisqu’il a été adopté en décembre 2018. D’une certaine façon, il marche côte à côte avec la loi ELAN, et nous nous sommes efforcés d’en prendre toute la substance afin de porter sur le territoire ce que nous pouvions y porter : nous avons donc un SCoT axé sur trois piliers. Je vais essayer de vous montrer comment nous nous sommes appropriés les outils issus de la loi ELAN. Sur notre territoire, la ville d’Épernay fait partie du dispositif Action Cœur de ville (ACV), plusieurs opérations de revitalisation de territoire (ORT) ont été créées au sein de chacune des communautés de communes. L’utilité du SCoT se manifeste particulièrement sur deux volets.

D’une part, sur le volet du logement, bien que ce ne soit pas du tout la compétence ni d’un pays ni d’un SCoT. Chaque communauté a son programme local de l’habitat (PLH), mais nous avons essayé d’être utile en apportant notre aide sur la rénovation énergétique. Nous disposons depuis 2017 d’une plateforme de la rénovation que nous avons appelé « maison de l’habitat » afin que nos concitoyens et les acteurs de l’habitat puissent venir s’adresser à nous pour obtenir de l’aide dans la transition énergétique des bâtiments, qu’il s’agisse de propriétaires ou de locataires. Il faut que tout le monde puisse trouver intérêt à accompagner la rénovation énergétique et l’architecture des bâtiments pour essayer d’éliminer, notamment dans les cœurs de ville, qui sont à restaurer avant tout, les passoires énergétiques et les logements vétustes, qui ont pu être abandonnés. Notre action est destinée à tout le territoire, pas seulement aux cœurs de ville, mais c’est là que nous avons axé notre action afin de venir en appui aux ORT. Nous avons donc deux conseillers orientés sur ces actions, qui viennent en appui lorsque nous sommes sollicités, que ce soit à titre privé ou dans le cadre des opérations programmées d’amélioration de l’habitat (OPAH) mises en œuvre, sous l’impulsion du pays, dans le cadre du mouvement de revitalisation des centres-bourgs.

D’autre part, sur le volet du commerce. Avant la loi ELAN, nous avions été relativement peu diserts sur ce sujet dans le SCoT, et nous nous sommes aperçus que nos élus ne disposaient pas des outils dont ils avaient besoin pour mener des actions de revitalisation ou voir ce qui se passait dans la périphérie de leurs centre-ville ou communes. Le SCoT ayant été adopté, il n’était pas question d’établir un DAAC, puisque cela aurait impliqué une révision. Mais nous nous sommes dits que nous pouvions nous mettre sur le chemin du DAAC en élaborant une charte. Nous sommes aujourd’hui en cours d’élaboration de la charte de développement commercial pour chacune de nos communes : toutes les communes du territoire ont été classées, soit en centre urbain névralgique, soit en pôle structurant, soit en pôle actif, etc. Et, en concertation avec tous les élus du territoire, nous avons travaillé à voir ce qu’il était souhaitable de préconiser pour les uns et pour les autres. Nous en sommes à la fin de cette étude. En revanche, pour les communes qui ont été directement concernées par des ORT, compte tenu du fait que la loi ELAN a été votée en 2018, que les diagnostics ont commencé à courir en 2019, et que la crise sanitaire a eu un impact considérable, les actions ont été fortement freinées. Le calendrier d’évaluation doit donc compter une année de mise en sourdine du fait de la pandémie.

Outre ces deux volets, nous avons aussi eu à cœur de travailler à soutenir l’identité des villages. Tout au long de l’élaboration du SCoT, avec le parc naturel régional de la Montagne de Reims, nous avons défini des zones architecturales de notre territoire, et des zones à étudier, afin que chaque maire ait une connaissance exacte de la manière dont son village ou sa ville est construite ou s’est construite. Cela nous sert aussi à déterminer comment mener des opérations d’urbanisme dans les dents creuses : car nous souhaitons « combler les trous », et ne pas poser des maisons nouvelles sur nos territoires comme des petites maisons qu’on achèterait au Monopoly. Nous souhaitons travailler sur un ensemble architectural cohérent, comme par exemple en comprenant l’importance de l’orientation dans la décision d’implanter un village. Nous avons le souci d’un aménagement cohérent et d’un maillage correct du territoire, de développement qui se fonde sur la volonté de grandir, mais de manière raisonnée et réfléchie au regard des considérations environnementales.

Nous sommes allés plus loin, du fait du classement Unesco, qui vous dit de quoi est composé l’essentiel de nos paysages : des vignes en appellation d’origine contrôlée Champagne. Avec l’Unesco, nous avons été amenés à réfléchir à la protection des paysages, et notamment à définir des zones protégées d’implantation de fermes éoliennes. Cela fait partie des exigences du cahier des charges du classement Unesco. Ces travaux, que nous avons menés de notre propre initiative, ont permis de compenser les lacunes de la loi ELAN en matière de conciliation du besoin de logements avec des exigences patrimoniales et de qualité paysagère.

M. Michael Restier, directeur de l’ANPP. Je précise que notre intervention a été pensée en complément avec celle de la fédération des SCoT, afin de fournir des cas concrets pour les problématiques qui ont été soulevées.

Mme Christelle Dubos. Je vous remercie en effet pour ces exemples concrets, qui viennent utilement illustrer les propos précédents. C’est bien par ces exemples concrets que nous pouvons mieux évaluer l’impact d’une loi sur le terrain, son objectif étant d’apporter des solutions locales à des problèmes locaux.

Mme Virginie Carolo-Lutrot, maire de la ville de Port-Jérôme-sur-Seine (Seine-Maritime), présidente de Caux Seine Agglo, première vice-présidente d’Intercommunalités de France (AdCF) et administratrice de la Fédération nationale des agences d’urbanisme (FNAU). Je commencerai par les deux remarques négatives qu’il nous a paru important, dans notre prisme, de transmettre.

D’une part, il faut souligner l’instabilité qu’on rencontre au niveau des lois qui modifient nos documents d’urbanisme. Les intercommunalités travaillent le PLUi et le SCoT. Le SCoT est un document à long terme, mais nous avons affaire à une succession de lois qui nous empêche de travailler avec les élus sur une projection à long terme. Dans la loi ELAN, le la modification, à nouveau, de certaines règles du SCoT a pu amener des dysfonctionnements et de l’incompréhension chez les élus. Lorsqu’on change de périmètre au niveau d’un SCoT, on change de gouvernance, et il faut retravailler une vision commune d’un territoire et de son projet, qui est ensuite traduit dans les documents d’urbanisme. Pour nous, c’est un peu compliqué.

En ce qui concerne la gestion économe des espaces, nous avons également ce problème. Cette thématique est déjà développée dans les projets d’aménagement stratégique des SCoT, qui ont remplacé les projets d’aménagement et de développement durable avec la loi ELAN. Mais la loi Climat ajoute un niveau de complexité avec la prise en compte de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers, qui doit être mesurée pour respecter la trajectoire de réduction de l’artificialisation des sols. Cet indicateur est à retravailler par les intercommunalités en coordination avec des services de l’État : or ceux-ci nous disent que l’indicateur a beau ne pas encore être prêt, il faut d’ores et déjà l’intégrer dans nos documents d’urbanisme ! On a l’impression d’un travail comme celui de Pénélope, où on détricote quelque chose qu’on avait construit ensemble et qu’on doit retravailler avec l’ensemble des élus. Pour nous, la trajectoire de sobriété foncière est actée : ce que nous cherchons désormais, c’est la stabilité des modèles et des lois.

Nous avons aussi évoqué en réunion préparatoire le bilan mitigé concernant la revitalisation commerciale, un des objectifs de la loi ELAN, qui répondait à la volonté de revitaliser les centre-bourgs. Nous avons plutôt assisté à une baisse des surfaces commercialisées dans nos territoires, mais nous ne sommes pas capables de vous dire si cela provient des évolutions législatives ou de la crise sanitaire. Nous ne connaissons pas encore la raison de cette baisse des surfaces commerciales, même si nous pouvons dire que la possibilité des projets sur des friches et des reconstructions sur l’existant sera très importante.

Sur la revitalisation commerciale, nous regrettons l’amendement validé à l’époque par le Sénat, concernant certaines mesures de simplification pour les passages en commission départementale d’aménagement commercial (CDAC), nous avions porté la possibilité d’exonération de passage en CDAC quand le territoire est doté d’une réelle stratégie commerciale d’aménagement et d’animation, dans le cadre d’une contractualisation entre l’État et le territoire. Cette possibilité a été réintroduite dans le cadre de l’examen du projet de loi portant différenciation, décentralisation, déconcentration et diverses mesures de simplification de l’action publique locale (3DS), avec une philosophie un peu différente. À présent, si la stratégie commerciale territoriale est robuste, il pourra y avoir une exonération de passage en CDAC pour les projets commerciaux, à condition d’avoir obtenu au préalable une validation par la Commission nationale de l’aménagement commercial (CNAC). Cette expérimentation pourra être mise en œuvre sur de nombreux territoires, dont le mien ne fera cependant pas partie, car je trouve qu’il est intéressant de confier la stratégie de développement commercial à des organes spécialisés. Cependant nous considérons que le frein de la CNAC, qui doit valider ou non la stratégie d’aménagement et d’animation commerciaux, pourrait être excessif. Pour sa part, l’inscription dans le document d’aménagement artisanal, commercial et logistique (DAACL) du SCoT et dans le PLUi ne pose pas de problème particulier. La contractualisation aurait pu être plus souple, mais 3DS constitue déjà une avancée importante par rapport à ELAN.

L’ORT, quant à elle, est un très bon outil, qui a été bien pris en main par les maires, et pas seulement ceux qui sont concernés par les programmes nationaux Action Cœur de ville (ACV) et Petites villes de demain (PVD). Toutes les communes-centres qui ont des commerces et une stratégie à mettre en place ont utilisé l’outil ORT, qui nous a paru très intéressant et pragmatique. En revanche, nous trouvons beaucoup moins d’utilité et moins d’exemples d’utilisation pour le projet partenarial d’aménagement (PPA) et la grande opération d’urbanisme (GOU). Au global, nous n’avons pas suffisamment de recul pour nous prononcer sur l’efficacité de ces deux dispositifs : si les PPA sont assez connus et ont permis de mettre dans certains territoires les bons acteurs autour de la table, ce n’est pas le cas des GOU, qui n’ont pas encore trouvé leur public. L’outil en lui-même est certainement perfectible, et nous aurions des propositions à faire dans ce sens.

Un autre point vraiment intéressant concerne l’observatoire local des loyers (OLL). Les OLL ont été simplifiés et sont désormais portés principalement par les agences d’urbanisme à plus de 50 %. C’est une souplesse qui permet l’inter‑territorialisation, car ces agences d’urbanisme ou groupements d’agences ont des périmètres plus larges qu’une seule intercommunalité. L’OLL a une certaine souplesse dans son fonctionnement qui nous a vraiment permis d’avancer sur la connaissance immobilière et de mettre fin à des concurrences stériles entre territoires.

J’avais une dernière remarque à faire, sur la cotation des demandes de logements et la gestion en flux des attributions de logements sociaux. Dans de nombreux territoires, des freins ont empêché la mise en place de ces outils. La répartition des logements HLM reste l’image de marque d’une commune, et ces outils n’ont pas d’utilité dans des territoires non tendus : pourquoi demander à l’intercommunalité de régler la cotation des nombres de logements ou de gérer leur attribution en flux, sachant que les personnes concernées ont des mobilités difficiles ? Cela sert probablement pour les territoires denses et les métropoles, mais pour les territoires ayant moins de difficulté en tension, cela n’a pas été utilisé, et je pense que c’est un des enseignements à tirer de la loi ELAN.

Mme Brigitte Bariol Mathais, directrice de la FNAU. J’ajouterai deux points en complément de ce qu’a dit Mme Carolo. Il est vrai que la transformation de la hiérarchie des normes dans le SCoT a contribué à simplifier l’élaboration des documents, mais nous demeurons dans une instabilité des documents d’urbanisme qui sont une vraie difficulté pour les acteurs locaux, car source d’insécurité, puisqu’ils viennent d’être à nouveau modifiés. Pour les ORT, c’est en effet un bilan très positif, du fait de leur dimension contractuelle, et qui peut aussi jouer un rôle clef dans les enjeux de mise en œuvre de l’objectif d’absence de toute artificialisation nette des sols (ATANS). Il s’agirait d’une approche qui ne soit pas seulement intégrée à la planification, mais qui associe également les leviers de la planification et une approche plus contractuelle et opérationnelle. C’est la même philosophie que celle qui a été portée dans les amendements pour l’expérimentation d’exonération de passage en CDAC pour les projets commerciaux, afin qu’il y ait une instruction directe par les collectivités. Celles-ci souhaiteraient qu’il y ait à la fois une stratégie commerciale et des documents d’urbanisme et une politique robuste, dans une logique de pacte de confiance entre les collectivités et l’État, associant à la fois la planification et l’opérationnel.

Mme Virginie Carolo-Lutrot. En ce qui concerne les opérations de revitalisation de territoire, il serait intéressant d’étudier l’accompagnement nécessaire pour une généralisation du dispositif. À l’heure actuelle, seulement un quart des collectivités qui y ont recours ne relèvent ni d’Action Cœur de ville ni de Petites villes de demain. Car il faut connaître ce système pour pouvoir l’utiliser : c’est une question d’accompagnement.

Mme Carole Ropars, responsable des questions d’urbanisme et d’aménagement à Intercommunalités de France. Je souhaiterais souligner un point concernant l’amendement du Gouvernement qui a été adopté lors de l’examen du projet de loi 3DS en séance publique à l’Assemblée nationale. Celui-ci vise à simplifier l’examen des dossiers en exonérant de passage en CDAC les projets d’exploitation commerciale quand une stratégie commerciale est inscrite dans le SCoT et dans le PLU. Le cadre est celui d’une expérimentation sur six ans, à proroger ou pas dans six ans. La mise en œuvre d’une telle exonéraration exige des éléments importants, notamment l’adaptation des documents d’urbanisme locaux et la mise en œuvre de stratégies qui peuvent être longues et avoir des difficultés à s’inscrire dans une durée de six ans. Si l’expérimentation n’est pas prolongée, cela peut être problématique pour la mise en œuvre de ce dispositif.

M. Jordan Dartier, maire de Vias (Hérault), vice-président de la commission urbanisme, aménagement et risques à l’Association nationale des élus du littoral (ANEL). Les éléments que nous souhaitons communiquer s’articulent autour de plusieurs points.

Tout d’abord, concernant les nouveautés en ce qui concerne le rôle de SCoT pour la déclinaison de la loi Littoral. L’article 42 de la loi ELAN a complété l’article L. 121-3 du code de l’urbanisme en disposant que le SCoT doit préciser les modalités d’application de la loi Littoral et déterminer les critères d’identification des villages, agglomérations et autres secteurs déjà urbanisés prévus à l’article L. 121-8 du même code. D’après les retours de nos communes adhérentes, seule la dernière partie de ce nouvel alinéa a pour le moment été mise en œuvre par certains SCoT littoraux, essentiellement pour identifier les secteurs déjà urbanisés (SDU). De nombreux SCoT comprenant déjà une liste ou des critères d’identification des agglomérations et des villages existaient déjà. Concernant l’obligation pour les SCoT de préciser les modalités d’application de la loi Littoral (premier alinéa), son application mériterait d’être précisée, car on s’interroge pour savoir si le SCoT doit cartographier les espaces remarquables du littoral (ERL), et s’il doit prévoir les dérogations prévues par les articles L. 121-4 et L. 121-5, comme les stations d’épuration des eaux usées (STEP), donc il serait utile de fournir quelques précisions en la matière.

Globalement, comme le disait tout à l’heure M. Heinrich, la loi ELAN a permis de redéfinir et de préciser la hiérarchie des normes en matière d’application de la loi Littoral, et en qualité de maire de la commune de Vias, commune littorale située à côté de la station du Cap d’Agde, membre du SCoT biterrois autour de Béziers, je peux dire que cette loi a renforcé notre sécurité juridique par l’action de rationalisation de la hiérarchie des normes. Si je parle aussi en qualité d’avocat
– c’est mon métier – je dirais qu’avant cette loi, dans la mesure où nous n’avions pas de SCoT intégrateur de la loi Littoral, la conformité du PLU était apprécié par le juge admin directement au regard de la loi Littoral, ce qui engendrait une insécurité juridique du fait des interprétations que peut avoir le juge administratif. Avec le SCoT intégrateur des dispositions de la loi Littoral, nous avons une appréciation in concreto par les SCoT et donc une sécurité juridique renforcée. Le rôle du SCoT est donc renforcé et étendu vis-à-vis du PLU, ce qui est positif.

En ce qui concerne la suppression des hameaux nouveaux intégrés à l’environnement (HNIE) et la création des secteurs déjà urbanisés (SDU) : la première, prévue par l’article L. 121-8, a eu peu d’effet, car depuis 1986 peu de HNIE avaient été créés. Néanmoins, c’est un outil qui aurait pu être utilisé dans le cadre des réflexions relatives à la recomposition spatiale, terme nouveau qui a succédé à la relocalisation. Cette terminologie aurait pu être intégrée à la réflexion pour faire face au recul du trait de côte, et notamment en vue des projets d’ordonnances sur les dérogations à la loi Littoral, qui sont en cours d’élaboration sur le fondement de la loi Climat. J’insiste sur le sujet, puisque l’érosion du trait de côte, nous y sommes contraints et y faisons face en territoire métropolitain mais aussi ultramarin, et qu’aujourd’hui il est nécessaire de trouver des dispositifs pour recomposer les territoires face à cet aléa. À cet égard, il est vrai que les HNIE auraient pu être utiles.

Quant aux SDU, certains territoires en bénéficient, mais ils sont limités dans les possibilités offertes. Comme les SDU répondaient essentiellement à une demande de propriétaires bretons, concernés par une problématique de terrains devenus inconstructibles avec la double mise en œuvre des lois n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) et ELAN, aujourd’hui certains territoires en bénéficient mais de façon limitée, avec des possibilités restreintes en la matière.

J’en viens à quelques ultimes remarques. La possibilité d’actionner une modification simplifiée des SCoT et des PLU a été fortement appréciée et assez largement mise en œuvre. Concernant le développement de l’éolien et du photovoltaïque dans les territoires insulaires, à l’article 44, cette réforme apparaissait nécessaire pour permettre à nos collègues ultramarins et à nos populations, dans ces îles non connectées par des câbles électriques au continent, d’implanter des exploitations de génération d’énergie au sol en discontinuité des agglomérations et villages existants, ce que la jurisprudence administrative interdisait. Enfin, en matière de protection renforcée des espaces remarquables du littoral (ERL), à l’article 45, il a modifié l’article L. 121-24 afin de rendre limitative la liste des aménagements dits « légers » fixée par l’article R. 121-5. Cette modification visait à répondre à des décisions du Conseil d’État, qui avait autorisé dans ces espaces des aménagements non explicitement listés. Si ce décret ferme la liste des aménagements « légers », il allonge dans le même temps cette liste et ne renforce donc pas réellement la protection des espaces remarquables, mais limite les interprétations et les contentieux.

Mme Anne-Sophie Leclère, déléguée générale de l’ANEL. En complément de ce qu’a dit M. Dartier, je rappelle simplement que certaines questions n’ont pas été abordées par la loi ELAN : on ne les évalue pas aujourd’hui, mais elles restent posées pour l’avenir, concernant l’adaptation de la loi Littoral sur les territoires littoraux, avec des questions émergentes parce qu’elles n’existaient pas en 1986. C’est le cas, par exemple, du développement du photovoltaïque, ou des débats récents sur les antennes de téléphonie, qui sont considérées par le juge comme des constructions, donc ne pouvant pas être installées en discontinuité de l’urbanisation existante, alors que si l’on doit en ériger une en continuité d’une construction existante, il y aura des recours des riverains. Sur ces sujets nouveaux, il conviendrait aujourd’hui de légiférer.

Quant à la recomposition des territoires littoraux face au recul du trait de côte et plus largement face à l’adaptation issue du changement climatique, c’est aussi une question pour l’avenir qui demeure en partie sans réponse, parce qu’elle n’est pas complètement traitée par la loi Climat.

M. Dorian Lamarre, directeur des affaires publiques du Conseil national des centres commerciaux (CNCC). Je vous prie d’excuser M. Gontran Thüring, notre délégué général, qui a eu un empêchement de dernière minute et qui m’a chargé de vous faire quelques retours en son nom.

L’objectif n’est pas de revenir sur le bien-fondé de la loi. Nous étions mesurés sur ce qu’elle prévoyait, avec sa volonté de revitaliser les centres-villes et de renforcer les contraintes pesant sur l’exploitation commerciale en périphérie, essentiellement sur le développement des centres commerciaux, qui n’allaient pas complètement dans le sens, naturellement, que nous défendons. Nous avions considéré à l’époque que tout ce qui est d’ordre coercitif n’est pas la meilleure des solutions. Sans revenir à ce que nous avions proposé, nous souhaitions des mesures plus incitatives et orientées vers la simplification. Car l’urbanisme commercial est très complexe en France, avec deux systèmes qui se superposent : un système anglo‑saxon avec beaucoup de concertation en amont et un système plus latin avec beaucoup de recours avec aval. Ce qui fait que les projets de développement commerciaux sont très, très, longs et peuvent prendre plusieurs années, voire une dizaine d’années. Toutes les propositions que nous avons faites avaient été assorties d’études quant à leur impact économique. Je rappelle par ailleurs que les centres commerciaux représentent 2 milliards d’euros (Mds€) d’investissements annuels, 725 000 emplois et 14 Mds€ de fiscalité.

Cela étant dit, de notre point de vue, l’évaluation est prématurée, puisque les derniers décrets d’application n’ont été pris qu’en août 2019 et que certaines obligations n’ont été mises en œuvre qu’à partir du 1er janvier 2020. Donc nous n’avons que peu de recul sur un certain nombre de points. Nous avons néanmoins listé nos retours sur quatre grandes mesures.

Pour ce qui concerne la création des ORT, elle a permis de formaliser le programme ACV, et nous avons constaté qu’un certain nombre de conventions étaient signées. Néanmoins, une interrogation demeure quant à la réalité opérationnelle du partenariat : il n’est pas certain que la loi ELAN en ait accéléré la mise en œuvre. Les coopérations public-privé restent difficiles à mettre en œuvre pour le développement d’espace commercial. Je rappelle à cet égard que nous sommes dans une industrie qui est davantage portée sur l’extension-rénovation, qui représentent trois quarts des projets, pour un quart seulement de création d’espaces. Certaines des parties prenantes ont toujours des réticences à s’associer ou à nouer des partenariats dans cet objectif, considérant, à tort à notre avis, que ces espaces commerciaux les empêchent de se développer ou de se revitaliser. Nous avons cependant quelques retours opérationnels : un exemple d’un projet à Montesson (Yvelines), où deux conventions ont été signées et qui ont permis une convention d’ORT avec le centre-ville de la commune limitrophe de Sartrouville.

D’ailleurs, ces diverses conventions ont été signées grâce à la clause de revoyure qui a été introduite à notre initiative dans la loi ELAN et qui permet à un projet refusé en CNAC d’être présenté à nouveau six mois plus tard, à partir du moment où il est corrigé. Je mentionnerai également l’absence d’AEC ayant un objectif de revitalisation rapide, ce qui correspond pourtant à un objectif louable. Nous sommes aussi interrogatifs sur la perte de contrôle que les élus peuvent avoir du fait de l’action des CDAC.

Quant au moratoire de trois ans, plus une année à la discrétion du préfet, nous l’avions mal vécu, puisqu’il s’agissait d’un véritable frein, une interdiction à la liberté d’entreprendre. Ce moratoire a été peu utilisé : une fois dès la mise en œuvre de la loi ELAN, en janvier 2019, sur deux projets dans une préfecture, et depuis, à notre connaissance, il n’a pas été utilisé par les préfets. C’est davantage un contrôle qu’un moratoire effectif. Nous nous y étions opposés, mais il a finalement été plus léger, puisqu’il ne s’agit pas d’un moratoire comme l’interdiction introduite par la loi Climat : ici, on ne parle plus de moratoire puisque la limitation n’a pas de durée déterminée comme dans la loi ELAN. Ces outils, connaissant le fonctionnement des CDAC, de la CNAC et des recours, nous considérons qu’ils sont inutiles. La jurisprudence de la CNAC en matière de développement durable et de protection des consommateurs est conséquente et vigilante. Ces moratoires n’ont donc pas forcément d’utilité : preuve en est leur utilisation quasi inexistante.

En troisième lieu, je mentionnerai l’analyse d’impact introduite dans la loi ELAN, que nous avions considéré comme étant un retour des tests économiques qui étaient en œuvre avant la loi de modernisation de l’économie. Le problème de cette étude d’impact, c’est qu’elle renchérit les coûts des porteurs de projets, alors même que les coûts de dossier sont déjà élevés, et que ceux des permis de construire (PC) et permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale (PCAEC) sont particulièrement élevés. Les coûts d’étude d’impact s’y ajoutent, et nous voyons dans les faits que cette étude n’a pas véritablement d’utilité en CDAC et qu’elle y est très peu utilisée. Du reste je soulignerai que tout porteur de projet, quand il portait un projet conséquent et bien construit, assortissait dès avant la loi ELAN son projet d’une analyse d’impact.

Enfin, je veux revenir sur le certificat de conformité, qui introduit une obligation de figer, un mois avant l’ouverture d’une exploitation commerciale, une « photographie » de ce projet », le préfet ayant la possibilité de s’y opposer dans les deux mois qui suivent l’ouverture. Ceci nourrit une incertitude durant trois mois. Nous n’avons pas eu de retours d’expérience, puisque ce dispositif ne s’applique qu’aux seuls projets déposés à partir du 1er janvier 2020. On peut dire que, manifestement, les préfets ne contrôlent pas de façon systématique, et que ce certificat de conformité aurait eu une utilité il y a une vingtaine d’années, lorsqu’il y avait un développement fort des espaces commerciaux. Dorénavant, compte tenu du ralentissement constaté chaque année en CNAC et qui va s’accentuer avec l’article 215 de la loi Climat, il n’a plus grande utilité. Néanmoins, les règles n’étant pas très claires, cela fait peser des risques importants sur les projets, puisqu’on pourrait voir un projet être retoqué alors même qu’il a ouvert depuis un mois ou un mois et demi et que les emplois ont été créés.

En conclusion, vous le savez, l’urbanisme commercial est très codifié et réglementé, et je dirais que la loi ELAN n’a pas simplifié mais ajouté des contraintes et superposé de nouvelles règles à l’existant. Depuis, nous avons eu la circulaire du Premier ministre du 24 août 2020, qui a durci les conditions d’octroi des autorisations d’exploitation commerciale, et l’article 215 de la loi Climat. La conséquence de ces évolutions, c’est que nous sommes dans une dynamique de restructuration et que ces contraintes figent des situations, dans lesquelles l’amélioration, la modernisation ou la restructuration de l’existant se trouvent être freinées. Cela ne permet donc pas de répondre aux attentes et besoins des consommateurs, et surtout, sujet connexe pour la revitalisation des territoires, cela ouvre de plus en plus de place au commerce électronique, qui n’a pas besoin d’autant de temps pour se développer ou se moderniser.

M. Bertrand Marguerie, vice-président de la commission de l’urbanisme commercial au CNCC. J’insisterai sur un point, qui est relatif à la loi ELAN mais dont l’amendement récent adopté lors de l’examen du projet de loi 3DS, mentionné par Mme Carolo, nous permet de penser qu’il y a une volonté d’aller dans ce sens, c’est la suppression des CDAC et de facto de la CNAC – sauf si le texte de l’article 26 ter était retenu dans son état actuel. Les ORT permettent de ne plus avoir à faire avaliser les projets qui sont situés dans le périmètre d’intervention par la CDAC.

Je veux vous alerter sur cette évolution : contrairement à ce que l’on peut penser, cela ôte aux élus locaux un pouvoir de décision et d’intervention sur les projets commerciaux. Les projets sont de nature diverse et variée quant à leur typologie comme à leurs caractéristiques – les projets soumis à autorisation peuvent être de création ou d’extension, sur un magasin ou plusieurs, comme dans le cas des centres commerciaux – ce qui légitime un examen au cas par cas. Mais les élus locaux n’auront plus rien à dire si dans certains territoires la décision de la CDAC est supprimée. A l’échelle du périmètre d’intervention de l’ORT, ce n’est pas foncièrement un problème, parce qu’à partir du moment où le périmètre est bien défini, et en particulier en limitant aux centres-villes, cela signifie que tout projet en centre-ville sera un bon projet pour le territoire. Mais si le périmètre n’est pas bien défini et est trop extensif, cela signifie que, quelque part, ce contrôle serait enlevé aux élus locaux ainsi qu’aux personnalités qualifiées, et donc les projets commerciaux pourraient se voir développer sans autorisation ni contrôle à l’extérieur même des centres villes.

Dans l’écriture qui viserait à ce qu’il n’y ait plus d’examen par la CDAC dans les territoires dotés d’une stratégie, je souhaite un bon courage aux élus locaux pour parvenir à écrire quelque chose d’équilibré, qui permette une appréciation juste des projets, dans un rapport au temps qui est très long, celui des documents d’urbanisme, qui sont longs à être mis en œuvre et doivent s’appliquer un certain temps. Le commerce évolue très rapidement, et une telle évolution amènerait soit à une situation de carcan, c’est-à-dire que le document d’urbanisme interdirait tout projet, soit à un système complètement perméable, mais je ne vois pas comment pourrait être écrite une clause trouvant un juste équilibre en la matière. C’est la vertu des CDAC, qui pour les opérateurs ne représente pas une grande difficulté : c’est qu’il y a une étude au cas par cas de chaque projet sur le fondement d’éléments concrets, ainsi que des échanges préalables avec les élus du territoire. C’est, à notre sens, le meilleur moyen d’avoir une juste valeur de la décision rendue.

Autrement, je partage ce qu’a évoqué Bertrand Lamarre, qui est le manque de recul pour les ORT, en plus avec une période sanitaire qui n’a pas permis la mise en place rapide des projets. Visiblement, l’ORT est un outil qui intéresse beaucoup les élus locaux : beaucoup de conventions ont été signées, mais le caractère opérationnel reste à être mis en place.

Mme Nathalie Fourneau, responsable du département d’aménagement des territoires à l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité. Je vous prie d’excuser l’indisponibilité de nos élus chargés de ces questions ; je me ferai le relais technique des positions de l’AMF sur les sujets évoqués.

En premier lieu, je rejoins les propos de Mme Carolo, qui sont partagés par nos élus, relatifs au télescopage des calendriers entre l’ordonnance de modernisation des SCoT et l’article 194 de la loi Climat, s’agissant des objectifs de lutte contre l’étalement urbain et de modération de la consommation d’espaces, puisque un certain nombre de SCoT évoluent en fonction de ces objectifs, et se voient déjà sur une trajectoire sur laquelle travaillent les régions dans le cadre de l’adaptation à la loi Climat pour la réduction de l’artificialisation. Cette conjonction de calendrier est complexe à appréhender pour les élus.

Un dispositif qui nous paraissait intéressant, sur lequel nous avions échangé avec le ministère de la cohésion des territoires s’agissant de l’ordonnance de rationalisation des normes, c’était la note d’enjeux, que les EPCI et les syndicats mixtes ou établissements porteurs de SCoT peuvent demander aux préfets en amont de l’élaboration des documents d’urbanisme. Le dispositif n’a pas été étendu aux communes ; l’AMF aurait souhaité que les communes puissent en bénéficier. Il devient d’autant plus fondamental dans le cadre de l’application de la loi Climat, de la lutte contre l’artificialisation des sols et de l’objectif de réduction par deux de la consommation d’espaces dans les dix ans à venir. Il faut évaluer comment ces notes d’enjeux permettent une meilleure collaboration en amont entre les communes porteuses de documents d’urbanisme, les pays et pôles d’équilibre territoriaux et ruraux porteurs de SCoT, et l’État, pour travailler sur une bonne application, en coordination avec les besoins des territoires.

Concernant le littoral, nous avons eu les mêmes remontées d’adhérents que la fédération des SCoT et l’ANEL, surtout à propos de la définition des SDU dans les SCoT littoraux, point discuté dans le cadre de la loi ELAN. Ce que nos élus constatent, c’est, par rapport au nombre de hameaux nouveaux intégrés à l’environnement que ces SCoT avaient identifiées avant d’être labellisés SCoT littoraux, une réduction drastique entre le nombre de ces hameaux et le nombre de SDU en cours d’identification, en lien avec les directions départementales des territoires et de la mer (DDTM). C’est un vrai facteur de fragilité, notamment dans le cadre des opérations d’aménagement liés aux besoins de relocalisation dus au recul du trait de côte. Il faut évaluer pourquoi le nombre de hameaux se trouve à ce point diminué dans le cadre des SDU : est-ce que la définition prévue par la loi ELAN des SDU est correctement appréciée par les DDTM ? C’est un point important pour nos élus, dès lors que pour eux, il n’y a pas d’évolution réelle dans la façon dont la loi ELAN était censée adapter la loi Littoral au comblement des dents creuses. Car il n’y a pas vraiment d’évolution positive sur ce point.

L’ORT, c’est un dispositif qui avait beaucoup intéressé les élus de l’AMF, très en attente, et nous n’avons pas eu de retours négatifs : les territoires se l’approprient bien. Dans le cadre du groupe de travail sur les ORT créé par l’AMF, il avait même été souhaité, comme l’a dit Mme Carolo, d’étendre ce dispositif à toutes les communes, quelle que soit leur appartenance ou non à un programme national, parce que le dispositif en soi est attrayant du fait qu’il permet de déroger à un certain nombre de règles d’urbanisme et d’accélérer le projet global visé dans le cadre de l’ORT.

Sur l’habitat indigne, c’est une réforme qui a été fortement portée chez nous : la rationalisation des polices était portée par l’AMF dans un groupe de travail depuis 2014. L’ordonnance était souhaitée par ses élus, et ce qu’il en ressort, c’est une rationalisation. Il y a eu des discussions sur les transferts de police spéciale dont on connaissait le contenu, mais l’AMF souhaite des transferts concertés entre les communes et les intercommunalités sur les polices spéciales d’habitat indigne. Malgré les avancées de l’ordonnance, la prise en charge des travaux d’office par les commune pose toujours problème : rien n’est prévu dans le cadre législatif pour permettre aux élus de supporter la prise en charge de ces travaux d’office, puisque c’est le cas lorsque le propriétaire n’exécute pas les arrêtés de mise en sécurité, anciens arrêtés de péril. Il y a là encore quelque chose à approfondir. À côté de cela, l’Agence nationale de l’habitat (Anah) a développé des régimes d’aide avec prise en charge de la moitié des travaux d’office. Il faut signaler aussi une éventuelle fragilisation juridique qui pèse sur les maires dans ce cadre-là, l’ordonnance exemptant le maire de l’obligation d’avoir recours à un expert pour mettre en œuvre ces arrêtés de mise en sécurité. Or le fait de ne pas avoir recours à un expert peut fragiliser la procédure.

Nous faisons partie du comité de pilotage de la dématérialisation des autorisations des sols (Démat.ADS) en lien avec le ministère de la cohésion des territoires et Intercommunalités de France. La loi ELAN dispose que les communes de plus de 3 500 habitants sont tenues de mettre en place les procédures pour dématérialiser les demandes d’autorisation d’urbanisme. Cette réforme entraîne la saisine par voie électronique des demandes d’autorisation d’urbanisme, quelle que soit la taille des communes, pour toutes les communes. C’est un point de vigilance pour l’appropriation du dispositif de saisine électronique, qui ne résulte pas de la loi ELAN mais est aligné dessus, et la mise en place des téléprocédures pour les communes de 3 500 habitants. Il y a un besoin d’accompagnement fort de la part des DDT vis-à-vis des communes qui sont guichets uniques. L’ensemble de la chaîne de dématérialisation doit être opérationnelle et éviter les autorisations tacites.

M. Jean-Luc Lagleize, rapporteur. Je vous invite, sur les sujets qui ne sont pas ceux de la table ronde, à vous saisir de tous les sujets portés par la loi ELAN en faisant des contributions écrites. Aujourd’hui nous nous concentrons sur l’urbanisme réglementaire, mais les idées que vous avez sur tous les sujets sont les bienvenues.

M. Richard Lioger, rapporteur. Merci à tous pour vos remarques. En tant que rapporteur de la loi et de son titre I sur l’urbanisme, j’ai écouté avec intérêt ces retours concrets. Je ne souhaite pas débattre des choses qui ont été dites et rouvrir les débats de la loi ELAN. Je dirais à M. Heinrich et à Mme Fourneau que nous avons bien compris que nous avons loupé certaines choses pour ce qui concerne la loi Littoral. Cependant, autant pendant la conférence de consensus que lors de l’examen de la loi au Parlement, et avec nos collègues corses, bretons, normands, etc., la discussion a été intense avec le Gouvernement. Concrètement, des choses doivent être améliorées sur les prés salés et le trait de côte. Ce sont peut-être des éléments à aborder dans un texte spécifique.

Concernant les CDAC et la CNAC, je suis d’accord sur le fond : la discussion y est vive, et nous sommes passés près pendant la loi ELAN d’un moratoire total sur les grandes surfaces. Nous avons dû défendre une situation d’équilibre qui n’est peut-être pas entièrement acceptable aujourd’hui. Les CDAC représentent une certaine garantie de l’investissement des élus locaux et de leur regard sur les implantations.

Globalement, vous avez renvoyé des évaluations intéressantes dont nous tiendrons compte. Mme Carolo demandait une stabilité dans les lois, mais en écoutant les uns et les autres, nous avons de nouveaux motifs de modifier la loi. Pénélope faisait toujours la même chose : ici on nous demande de faire des choses différentes.

M. Thibault Bazin, rapporteur. Merci à tous pour vos contributions. Ce qui est compliqué dans le travail d’évaluation de la loi ELAN, c’est qu’il est affecté par la loi Climat et le projet de loi 3DS, qui occupent d’ailleurs nos esprits, puisque le projet de loi 3DS sera examiné demain en commission mixte paritaire (CMP).

La loi Climat modifie ce que nous avions arrêté sur la loi ELAN, et nous ne mesurons pas encore les effets du cumul des lois ELAN et Climat. Je suis rassuré cependant par les retours concernant les SCoT, dans lesquels vous nous dites que vous n’aviez pas attendu les lois ELAN et Climat pour prendre des trajectoires cohérentes. Par rapport aux différents outils évoqués, vous avez mentionné des pistes d’amélioration, et je regarderai avec attention vos retours détaillés.

M. Jean-Luc Lagleize. La loi ELAN embrassait très large, et donc n’a pas réussi à tout étreindre. Certains des éléments que nous attendions n’ont pas été mis en place. Mon co-rapporteur Thibault Bazin a raison quant à la difficulté de l’évaluation lorsque les dispositions ont depuis été affectées par deux autres textes examinés depuis. Merci à tous, et au plaisir de vous rencontrer à nouveau pour la loi ELAN 2 !

 


— 1 —

   ANNEXE II : TABLEAU DES DISPOSITIONS
de la loi n° 2018‑1021 du 23 novembre 2018

 

Numéro définitif

Numéro navette

Objet de l’article

TITRE IER - CONSTRUIRE PLUS, MIEUX ET MOINS CHER

Chapitre Ier - Dynamiser les opérations d’aménagement pour produire plus de foncier constructible

1

1er

Création du contrat de partenariat public d’aménagement (PPA) et de la grande opération d’urbanisme (GOU)

2

1er bis 

Association renforcée des paysagistes-concepteurs à  l’élaboration du projet architectural, paysager et environnemental (PAPE) des demandes de permis d’aménager concernant un lotissement

3

2

Clarification du régime juridique des opérations d’intérêt national (OIN)

4

3

Mesures diverses concernant le régime applicable aux grandes opérations d’urbanisme et aux opérations d’intérêt national

5

3 bis

Prolongation et modification du dispositif expérimental de « permis d’innover »

6

4

Mise à  disposition par voie électronique des études d’impact environnemental relatives aux projets de zones d’aménagement concerté (ZAC) et organisation de la participation du public par voie électronique

7

4 bis

Rationalisation des procédures de concertation préalable prescrites par le code de l’urbanisme et par le code de l’environnement

8

4 ter

Intégration de l’étude de faisabilité sur le potentiel de développement en énergies renouvelables du périmètre d’une opération d’aménagement au sein de l’étude d’impact environnemental

9

5

Réforme du régime des ZAC et des concessions d’aménagement

10

5 bis AAA

Réquisition de terrains pour la réalisation des équipements nécessaires aux Jeux olympiques et paralympiques (JOP) 2024

11

5 bis AA  

Autorisation de percevoir une redevance pour les personnes publiques accueillant des déchets sur leurs terrains

12

5 bis A

Précisions relatives au bail réel solidaire (BRS)

13

5 bis B

Personnes publiques chargées de conduire la procédure d’expropriation pour cause d’utilité publique

14

5 bis

Modalités de renouvellement du droit de préemption en zone d’aménagement différé (ZAD)

15

5 ter

Clarification relative aux missions pouvant être confiées dans le cadre d’un mandat d’aménagement

16

5 quater

Composition et missions du comité consultatif de l’Établissement public d’aménagement de Paris-Saclay

17

5 quinquies

Versement direct de la participation financière au coût des équipements publics à  la personne publique maître d’ouvrage dans le cadre d’une convention de projet urbain partenarial

18

5 sexies

Substitution de la Société de livraison des ouvrages olympiques (Solideo) au maître d’ouvrage des opérations nécessaires aux JOP 2024 en cas de défaillance

19

5 septies

Recours aux marchés de conception-réalisation pour la réalisation des ouvrages nécessaires aux JOP 2024

20

5 octies A

Application de la procédure intégrée de mise en compatibilité des documents d’urbanisme aux aménagements réalisés en vue des JOP 2024

21

5 octies  

Harmonisation du champ des compétences obligatoires d’aménagement des communautés d’agglomération avec les autres établissements publics de coopération intercommunale à  fiscalité propre

Chapitre II - Favoriser la libération du foncier

22

6 A

Promotion du principe de conception universelle et de l’élimination des obstacles à  l’accessibilité

23

6

Cession du domaine privé de l’État au bénéfice des opérations de PPA et élargissement des critères d’application de la décote sur le logement social

24

7

Activités de la Foncière publique solidaire

25

8

Dispositions diverses relatives aux acquisitions foncières et aux droits de préemption, de priorité et de délaissement

26

8 bis A

Transfert gratuit des voies privées dans le domaine public communal dans les zones d’activités ou commerciales

27

8 bis  

Autorité compétente pour approuver la constitution ou le plan de remembrement d’une association foncière urbaine (AFU)

Chapitre III - Favoriser la transformation de bureaux en logements

28

9

Extension des dérogations d’urbanisme en zone tendue pour la transformation de bâtiments existants en logements

29

9 bis

Occupation temporaire de locaux vacants en vue d’en assurer la protection et la préservation

30

10

Création de la catégorie d’immeuble de moyenne hauteur

31

10 bis

Validation législative des constructions réalisées selon des normes réglementaires relatives aux immeubles de grande hauteur postérieurement annulées par le juge administratif

32

11

Extension de la procédure de réquisition avec attributaire à  l’hébergement d’urgence de personnes sans abri et dispositions diverses relatives à  la réquisition avec attributaire

33

11 bis  

Réquisition des logements en déshérence

Chapitre IV - Simplifier et améliorer les procédures d’urbanisme

34

12

Encadrement de la remise en vigueur transitoire du plan d’occupation des sols à  la suite de l’annulation ou déclaration d’illégalité du document d’urbanisme ultérieur

35

12 bis AB  

Délai limite pour la tenue du débat sur les orientations générales du projet d’aménagement de développement durables (PADD) des plans locaux d’urbanisme intercommunaux (PLUi)

36

12 bis A

Période couverte par le bilan de consommation d’espace du schéma de cohérence territoriale

37

12 bis B

Période couverte par le bilan de consommation d’espace du plan local d’urbanisme

38

12 bis  

Objectifs de densification et de lutte contre l’étalement urbain

39

12 ter

Dérogations à  l’inconstructibilité des zones non urbanisées

40

12 quater A  

Détermination du caractère exceptionnel des secteurs de taille et de capacité d’accueil limités (STECAL)

41

12 quater B  

Dérogations à  l’inconstructibilité des zones agricoles, naturelles et forestières des communes

42

12 quinquies

Constructibilité en zone littorale et rôle du SCoT dans la détermination des modalités d’application de la loi Littoral

43

12 sexies

Dérogation à  l’exigence de continuité de l’urbanisation visant les activités agricoles, forestières, et les cultures marines du littoral

45

12 nonies

Modification du régime d’autorisation de l’implantation d’aménagements légers dans les espaces remarquables du littoral

46

13

Habilitation à  simplifier par ordonnance la hiérarchie des normes des documents d’urbanisme

47

13 bis

Suppression des clauses de caducité automatique de certaines règles de lotissement

48

13 ter

Extension de la procédure de modification de règlement de lotissement aux parties communes

49

13 quarter

Applicabilité de la cristallisation des droits à lotir même dans le cas d’une annulation de document d’urbanisme pour un motif étranger aux règles d’urbanisme applicables au lotissement

50

14

Habilitation à  modifier par ordonnance le régime juridique des schémas d’aménagement régional

51

14 bis A

Transfert différé de la compétence de politique de l’habitat à  la métropole du Grand Paris

54

14 quater

Entrée en vigueur différée des obligations relatives à  l’intégration d’éléments de stratégie foncière au sein des PLUi-H

55

14 quinquies  

Assouplissement des conditions d’adhésion à  un établissement public foncier local (EPFL)

56

15

Modification des dispositions relatives à  l’avis des Architectes des Bâtiments de France et aux modalités de recours à  son encontre

57

16

Encadrement des pièces exigibles dans le cadre d’une demande d’autorisation d’urbanisme

58

16 bis AAA  

Conditions de dépôt d’une demande d’autorisation d’urbanisme visant un terrain pour lequel une autorisation a déjà été accordée

59

16 bis AA  

Obligation de motivation de l’opposabilité du sursis à  statuer sur une demande d’autorisation d’urbanisme dans le certificat d’urbanisme

60

16 bis A

Rectification relative au champ d’application du différé de travaux

61

16 bis

Dérogations aux règles d’urbanisme et travaux de mise en état définitif dans le cadre d’un permis à double état pour les projets relatifs aux JOP 2024

62

17

Mise à  disposition de l’administration des données relatives aux autorisations d’urbanisme et dématérialisation des démarches d’autorisation d’urbanisme

Chapitre V - Simplifier l’acte de construire

63

18 A  

Extension de la dispense du recours à  un architecte pour les constructions de faible surface des coopératives d’utilisation de matériel agricole

64

18

Assouplissement des normes d’accessibilité

65

19

Adaptation, par ordonnance, du régime applicable au contrat de construction d’une maison individuelle avec fourniture de plan au cas des constructions préfabriquées

67

19 bis

Définition de la préfabrication

68

19 ter

Étude géotechnique préalable à  la vente d’un terrain constructible et à  la construction d’un nouvel immeuble dans les zones exposées au retrait-gonflement des sols argileux

69

20

Recours à  la conception-réalisation pour les organismes de logement social

70

20 bis

Rôle de la politique d’aide au logement en matière énergétique

71

21

Simplifier les règles en matière d’individualisation des frais de chauffage

74

21 bis E

Interdiction de l’utilisation d’appareils de chauffage dans le cadre des plans de protection de l’atmosphère

75

22

Modification du régime de la vente en l’état futur d’achèvement

77

23

Sécurisation juridique du contrôle de la conformité des constructions, aménagements, installations et travaux et de la constatation des infractions aux dispositions applicables en matière d’urbanisme et de construction

78

23 bis

Extension des pouvoirs des enquêteurs de la DGCCRF et renforcement des sanctions pour non-respect des règles applicables aux contrats de construction de maison individuelle

Chapitre VI - Améliorer le traitement du contentieux de l’urbanisme

79

23 ter

Mise en conformité des délais de rétractation à dix jours lors de l’acquisition immobilière (coordination loi Alur)

80

24

Dispositions diverses visant à  réformer le contentieux de l’urbanisme

TITRE II - EVOLUTIONS DU SECTEUR DU LOGEMENT SOCIAL

Chapitre Ier - Restructuration du secteur

81

25

Réorganisation du secteur HLM

82

25 bis

Avis de l’autorité compétente pour les acquisitions et cessions des SEM

83

26

Mesures pour faciliter les possibilités de fusions et d’absorption des organismes d’habitation à  loyer modéré et sociétés d’économie mixte entre eux

84

27

Mesures pour faciliter la circulation des capitaux entre les organismes

85

27 bis A

Possibilité pour les OPH d’accorder des sûretés réelles mobilières

86

27 bis B

Possibilité pour les organismes HLM d’émettre des titres participatifs

87

27 bis

Réduction de la contribution de sécurité immobilière proportionnelle perçue pour les formalités hypothécaires

Chapitre II - Adaptation des conditions d’activité des organismes de logement social

88

28

Mesures de simplification pour les organismes HLM

89

28 bis AA

Évolution de la composition du conseil d’administration de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru)

90

28 bis AB

Soumission de l’Anru à la comptabilité privée

92

28 bis

Actualisation de l’objet des SACICAP

93

28 ter

Participation des SACICAP dans les sociétés de tiers-financement

94

28 quater

Gouvernance des SACICAP

95

28 quinquies

Rôle de Procivis UES-AP dans la gouvernance des SACICAP

96

28 sexies

Révision coopératives des sociétés anonymes coopératives d’intérêt collectif HLM

97

29

Modalités de vente des logements sociaux

98

29 bis A

Vente de logement par l’Association foncière Logement

99

29 bis

Vente de logements-foyers à  des investisseurs en vue de la réalisation de logements étudiants

Chapitre III - Dispositions diverses

100

30

Diverses mesures relatives à  l’ANCOLS

102

31

Ratification des ordonnances relatives à  la réforme d’Action Logement

103

31 bis

Emplois de la participation des employeurs à l’effort de construction

104

32

Report de la date de conclusion de la seconde génération de CUS

105

33

Prolongation du délai d’habilitation pour la codification des dispositions relatives aux aides sociales en matière de logement

106

33 bis B

Extension des dispositifs de l’allocation de logement sociale (ALS) et de l’allocation de logement familiale (ALF) à Saint-Pierre-et-Miquelon

TITRE III - REPONDRE AUX BESOINS DE CHACUN ET FAVORISER LA MIXITE SOCIALE

Chapitre Ier - Favoriser la mobilité dans le parc social et le parc privé

107

34

Création du bail mobilité

109

35

Adaptation des missions des commissions d’attribution de logements

110

35 bis

Liste des personnes prises en compte pour l’instruction de la demande de logement social

111

36

Généralisation du système de cotation de la demande

112

37

Suppression de la pré-commission d’attribution dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville

113

37 bis

Cas d’individualisation des ressources pour instruire une demande de logement social

114

38

Gestion en flux des contingents de logements sociaux

115

38 bis

Mission du GIP SNE

Chapitre II - Favoriser la mixité sociale

116

39

Modalités de versement des aides personnelles au logement en cas de sous-location dans le parc social

117

39 bis

Cohabitation intergénérationnelle solidaire

118

40

Conciliation des procédures de surendettement et de résiliation du bail

119

40 bis B  

Financement du diagnostic social et financier par le FSL

120

40 bis C  

Conditions de transfert du bail dans le parc social

122

41

Informations transmises par les bailleurs à  la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives

124

42

Conclusion d’un protocole de cohésion sociale en l’absence de dette locative

125

43

Modification du pilotage du dispositif d’accueil, d’hébergement et d’accompagnement vers l’insertion et le logement destiné aux personnes sans-domicile ou éprouvant des difficultés à  se loger

126

42 bis A

Statut des organismes d’accueil communautaire et d’activités solidaires

127

44

Suppression de l’autorisation pour réaliser des travaux dans les établissements recevant du public lorsque ces travaux conduisent à  la perte de cette qualité pour la totalité de l’immeuble

128

45

Permettre la colocation dans les logements sociaux

129

45 bis

Habitat inclusif pour les personnes handicapées et âgées

130

46

Liste des logements décomptés dans le cadre de la loi SRU- Rôle des communes dans la demande d’exemptions

131

46 bis A  

Uniformisation des seuils permettant de déterminer les communes éligibles à  la loi SRU

132

46 bis B  

Calendrier d’application de la loi SRU

133

46 bis

Calcul du supplément de loyer de solidarité

Chapitre III - Améliorer les relations entre locataires et bailleurs et favoriser la production de logements intermédiaires

134

47

Suppression du caractère manuscrit de l’acte de cautionnement en matière de bail

136

47 bis B

Absence de solidarité du conjoint détenteur d’une ordonnance de protection

137

47 bis C

Contenu du commandement de payer

138

47 bis

Action de groupe en matière de logement

139

48

Conditions de délivrance de l’agrément aux observatoires locaux des loyers

140

49

Mise en place d’un encadrement des loyers à  titre expérimental

141

50

Modification des règles relatives à  la décence dans les hôtels meublés et en cas de colocation à  baux multiples

142

50 bis  

Critères du logement décent

143

50 ter  

Demandeur à  l’action en cas de manquement à  l’obligation de disposer d’une autorisation de changement d’usage

145

51

Encadrement des locations meublées touristiques

146

51 bis A

Clarification du régime d’autorisation temporaire de changement d’usage

148

52

Obligation pour certaines communes définies par décret de programmer une offre de logements intermédiaires

149

52 bis

Clarification des règles applicables à  l’usufruit locatif

150

52 ter

Convention pour le logement des travailleurs saisonniers

151

53

Réforme du Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières

153

53 ter

Harmonisation des délais de préavis du locataire

154

53 quater A  

Abrogation de la garantie universelle des loyers (GUL) et substitution par le dispositif Visale

156

53 quater

Sanction de l’utilisation de la dénomination agent immobilier , syndic de copropriété ou administrateur de biens sans être titulaire de la carte professionnelle

TITRE IV - AMELIORER LE CADRE DE VIE

Chapitre Ier - Revitalisation des centres-villes

157

54

Opérations de revitalisation de territoire

158

54 bis AAA

Interdire de toute obligation de création de stationnement pour des travaux effectués sur des logements existants sans création de surface de plancher supplémentaire

159

54 bis AB  

Maintien des services publics dans les centres-villes

160

54 bis AD

Abandon manifeste d’une partie d’immeuble en secteur d’ORT

162

54 bis B

Extension du dispositif « Louer abordable »

163

54 bis C  

Modification de la composition des commissions départementales d’aménagement commercial et de la commission nationale d’aménagement commercial

164

54 bis D  

Renforcement de l’obligation de démantèlement et de remise en état des sites sur lesquels une exploitation commerciale a cessé

165

54 bis E  

Seuils d’autorisation d’exploitation commerciale en centre-ville pour certains types de commerces

166

54 bis F  

Évaluation des projets d’implantation commerciale

167

54 bis G  

Portée des décisions des commissions départementales d’aménagement commercial

168

54 bis H  

Contrôle de la conformité de l’implantation réalisée à  l’autorisation d’exploitation commerciale

169

54 bis I  

Contenu et caractère obligatoire du document d’aménagement artisanal et commercial

170

54 bis J  

Modification substantielle d’une autorisation d’exploitation commerciale accordée

171

54 bis K  

Examen par la commission nationale d’aménagement commercial des nouvelles demandes visant à  prendre en compte les motifs de ses décisions

172

54 bis

Augmentation du seuil d’autorisation d’exploitation commerciale pour les réouvertures de surfaces commerciales inexploitées pendant trois ans

173

54 ter A  

Abaissement général des seuils d’autorisation d’exploitation commerciale

174

54 ter

Participation expérimentale de l’EPARECA aux actions menées dans le cadre d’une opération de revitalisation de territoire

Chapitre II - Rénovation énergétique

175

55

Définition et modalités d’application de l’obligation de rénovation énergétique pour les bâtiments tertiaires

176

55 bis AA

Transfert des colonnes montantes au réseau public

177

55 bis A

Règles générales de construction

178

55 bis B

Caractéristiques relatives aux produits de construction

179

55 bis C  

Opposabilité du diagnostic de performance énergétique

180

55 bis D

Prise en compte des exigences environnementales dans la commande publique relative à  la construction et à  la rénovation des bâtiments

181

55 bis

Exigences en matière de constructions neuves

182

55 ter

Règles applicables au carnet numérique d’information, de suivi et d’entretien du logement

183

55 quater

Inscription d’un principe de performance énergétique dans le PLH

Chapitre III - Lutte contre l’habitat indigne et les marchands de sommeil

185

56

Renforcement des sanctions financières contre les « marchands de sommeil »

186

56 bis  

Application de la police de la sécurité des immeubles collectifs à  usage d’habitation aux opérations de division

187

56 ter

Adoption des plans locaux de lutte contre l’habitat indigne dans certaines collectivités d’outre-mer (Guadeloupe, Guyane, Martinique, La Réunion, Mayotte et Saint-Martin)

188

56 quater

Modification des régimes de déclaration et d’autorisation préalables de mise en location

189

56 quinquies B

Information du maire de la commune sur le territoire duquel est situé le bien objet d’une vente qui n’a pas eu lieu du fait de l’interdiction d’acheter pesant sur l’acquéreur

190

56 sexies B

Peines complémentaires obligatoires de confiscation et d’interdiction d’acheter à  l’encontre des « marchands de sommeil »

191

56 sexies C

Interdiction aux « marchands de sommeil » d’enchérir lors d’une vente par adjudication judiciaire

192

56 sexies D

Non-versement des allocations logement en cas de réalisation d’office des travaux de mise en conformité avec les normes de décence.

193

56 sexies

Déclaration au Procureur de la République, par les syndics de copropriété et les agents immobiliers, des locations indignes

194

57

Généralisation des astreintes en cas de non-respect de mesures de police rattachables à  la lutte contre l’habitat indigne

195

57 bis A

Transmission du rapport de visite à l’autorité compétente

197

57 bis

Lutte contre l’expansion des bidonvilles à  Mayotte et en Guyane

198

58

Habilitation du Gouvernement à  clarifier et à  harmoniser les polices administratives spéciales rattachables à  la lutte contre l’habitat indigne

199

58 bis A  

Cession gratuite, par l’État, de terrains situés sur son domaine public maritime à  des organismes agréés exerçant des activités en faveur du logement et de l’hébergement des personnes défavorisées

Chapitre IV - Lutte contre l’occupation illicite de domiciles et de locaux à usage d’habitation

201

58 ter  

Lutte contre l’occupation illicite de domiciles et de locaux à usage d’habitation

Chapitre V - Améliorer le droit des copropriétés

203

59 bis AB

Pénalités financières lors de la non-remise par le syndic de documents demandés par le conseil syndical

204

59 bis A  

Règles relatives aux fonds de travaux

205

59 bis B  

Contenu de l’espace dématérialisé sécurisé des copropriétés

206

59 bis D  

Lots transitoires

207

59 bis E  

Détermination du moment à  partir duquel la loi de 1965 sur la copropriété s’applique

208

59 bis F  

Droit de construire et droit d’affichage

209

59 bis G  

Définition des parties communes spéciales et des parties communes à  jouissance privative

210

59 bis K  

Facilitation des actions en paiement à  l’encontre d’un copropriétaire

211

59 bis M  

Modalités de vote dans les assemblées générales de copropriétaires

212

59 bis N  

Uniformisation des règles de vote pour les travaux en matière d’économie d’énergie

213

59 bis O  

Délai de prescription des actions entre copropriétaires

214

59 bis

Droit de vote dans les assemblées générales de copropriétaire en cas de bail réel solidaire

215

60

Habilitation à  légiférer par ordonnances pour réformer le droit de la copropriété

216

60 bis

Transfert de la gestion des droits sur le sol des copropriétaires BRS au syndicat de copropriétaires

Chapitre V - Numérisation du secteur du logement

217

61

Création, par ordonnance, d’un agrément des prestataires assistant les propriétaires et les locataires dans l’établissement d’un bail d’habitation à  l’aide d’outils numériques

218

61 bis

Dématérialisation du diagnostic technique obligatoirement annexé au bail d’habitation

Chapitre VI - Simplifier le déploiement des réseaux de communication électronique à très haute capacité

219

62

Délais de dépôt du dossier d’information du maire préalablement à  l’installation ou à  la modification d’une installation radioélectrique

220

62 bis A

Information préalable du maire pour les travaux ayant pour objectif l’installation de la quatrième génération du réseau de téléphonie mobile sur un équipement existant

221

62 bis

Dérogation à  la procédure de mise en concurrence et de publicité en matière d’utilisation du domaine public par des réseaux de communications électroniques

222

62 ter

Dérogation, à  titre expérimental, à  la procédure de retrait d’une décision d’autorisation ou de non-opposition en matière de déploiement d’antennes de radiotéléphonie

223

62 quater  

Dérogation au principe d’urbanisation en continuité de l’existant en zone de montagne

224

62 quinquies  

Facilitation de l’atterrage des canalisations de communications électroniques

225

63

Modification du régime des servitudes sur les propriétés privées en matière de réseaux de communications électroniques

226

63 bis

Accessibilité des opérateurs aux parties communes des immeubles pour le déploiement et l’entretien de la fibre optique

227

63 ter  

Application de la participation pour équipements publics exceptionnels aux réseaux de communications électroniques

228

63 quater

Désignation, par l’assemblée générale des copropriétaires, de l’opérateur en charge du déploiement de la fibre optique

229

64

Sanctions du non-respect d’engagements de déploiement de réseaux de communications électroniques

230

64 bis

Recours aux marchés publics globaux pour le déploiement de réseaux de communications électroniques

231

64 ter  

Obligation de fourniture d’offres de gros activées par les opérateurs d’infrastructures aux opérateurs de services en vue de fournir des services de communications électroniques aux utilisateurs finals

232

64 quater  

Création d’une base normalisée des adresses au niveau national

Chapitre VIII - Diffusion par voie hertzienne de données horaires du temps légal français

233

65

Compétence de l’Agence nationale des fréquences en matière de diffusion du temps légal français

Chapitre IX - Dispositions spécifiques à  la Corse

234

66

Extension du programme exceptionnel d’investissement pour la Corse


— 1 —

   ANNEXE III : Tableau des mesures réglementaires d’application de la loi n° 2018‑1021 du 23 novembre 2018

Art.

Base légale

Objet

NOR du décret

Référence du décret et observations

Date de publication du décret

4, VI

Article L324-10, code de l’urbanisme

Conditions dans lesquelles les établissements publics fonciers locaux sont habilités à créer des filiales et à acquérir ou à céder des participations dans des sociétés, groupements ou organismes dont l’objet concourt à la réalisation de leurs missions.

LOGL1833535D

 Décret n° 2019-304 du 10 avril 2019 fixant les conditions d’approbation par le préfet de région des délibérations des conseils d’administration des établissements publics fonciers locaux relatives aux créations de filiales et aux acquisitions ou cessions de participations dans des sociétés, groupements ou organismes

12.04.19

8

Article L. 300-1, code de l’urbanisme

Modalités de prise en compte des conclusions de l’étude de faisabilité sur le potentiel de développement en énergies renouvelables de la zone dans l’étude d’impact prévue à l’article L. 122-3 du code de l’environnement.

TRED1908115D

Décret n° 2019-474 du 21 mai 2019 pris en application du dernier alinéa de l’article L. 300-1 du code de l’urbanisme

22.05.19

9, I, 1°

Article L. 151-7-2, code de l’urbanisme

Conditions selon lesquelles la délibération d’approbation du plan local d’urbanisme contenant des orientations d’aménagement et de programmation peut valoir acte de création de la zone d’aménagement concerté.

LOGL1834443D

Décret n° 2019-481 du 21 mai 2019 modifiant diverses dispositions du code de l’urbanisme

22.05.19

9, I, 4°

Article L. 311-1, code de l’urbanisme

Condition selon lesquelles le périmètre et le programme de la zone d’aménagement concerté sont approuvés.

LOGL1834443D

Décret n° 2019-481 du 21 mai 2019 modifiant diverses dispositions du code de l’urbanisme

22.05.19

9, VIII

Article L. 311-6, code de l’urbanisme

Mesures de publicité du cahier des charges des cessions ou concessions d’usage de terrains à l’intérieur des zones d’aménagement concerté.

LOGL1834443D

Décret n° 2019-481 du 21 mai 2019 modifiant diverses dispositions du code de l’urbanisme

22.05.19

10

Article 13-1, loi n°2018-202 du 26 mars 2018

Conditions d’application de l’article 13-1 relatif à la réquisition temporaire de terrains et de bâtiments pour assurer dans les délais la réalisation du village olympique et paralympique

LOGL1901836D

Décret n° 2019-441 du 13 mai 2019 relatif à la réquisition temporaire de terrains et de bâtiments nécessaires à l’organisation et au déroulement des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024

15.05.19

16

Article L. 321-39, code de l’urbanisme

Composition du comité consultatif placé auprès du conseil d’administration de l’établissement public d’aménagement de Paris-Saclay.

LOGL1908586D

Décret n° 2019-471 du 20 mai 2019 relatif à la composition du comité consultatif de l’Établissement public d’aménagement de Paris-Saclay

21.05.19

20

Article 12, loi n°2018-202 du 26 mars 2018

Liste des constructions et opérations d’aménagement situées à proximité immédiate d’un site lié au déroulement des jeux olympiques et paralympiques.

TERL1900887D

Décret n° 2019-95 du 12 février 2019 pris pour l’application de l’article 20 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique

14.02.19

23, II

Article 3211-7, code général de la propriété des personnes publiques

Amélioration du dispositif de décote sur le prix de cession des terrains de l’État à la valeur vénale (modification du décret existant)

LOGL1900856D

Décret n° 2019-423 du 9 mai 2019 modifiant les conditions d’octroi par l’État et ses établissements publics de la décote sur le prix des terrains de leur domaine privé et complétant le contenu des rapports d’activité des organismes de foncier solidaires

10.05.19

25, V

Article L. 240-1, code de l’urbanisme

Conditions selon lesquelles l’organe délibérant de la commune ou l’établissement public de coopération intercommunale peut déléguer son droit de priorité sur tout projet de cession d’un immeuble ou de droits sociaux situé sur leur territoire et appartenant à l’État.

LOGL1902326D

Décret n° 2019-424 du 9 mai 2019 fixant les conditions de délégation de l’exercice du droit de priorité par les organismes mentionnés au troisième alinéa de l’article L. 240-1 du code de l’urbanisme

10.05.19

29

 

Forme et stipulations des contrats de résidence temporaire conclus entre l’organisme ou l’association et chaque occupant.

LOGL1832785D

Décret n° 2019-497 du 22 mai 2019 relatif à l’occupation par des résidents temporaires de locaux vacants en vue de leur protection et préservation en application de l’article 29 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique

23.05.19

29

 

Durée minimale du contrat de résidence temporaire et de son renouvellement.

LOGL1832785D

Décret n° 2019-497 du 22 mai 2019 relatif à l’occupation par des résidents temporaires de locaux vacants en vue de leur protection et préservation en application de l’article 29 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique

23.05.19

29

 

Montant maximal de la redevance pouvant être versée par le résident à l’organisme ou à l’association qui a reçu la disposition des locaux.

LOGL1832785D

Décret n° 2019-497 du 22 mai 2019 relatif à l’occupation par des résidents temporaires de locaux vacants en vue de leur protection et préservation en application de l’article 29 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique

23.05.19

29

 

Règles de préavis, de notification et de motivation en cas de rupture anticipée du contrat de résidence temporaire par l’organisme ou l’association.

LOGL1832785D

Décret n° 2019-497 du 22 mai 2019 relatif à l’occupation par des résidents temporaires de locaux vacants en vue de leur protection et préservation en application de l’article 29 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique

23.05.19

29

 

Conditions d’application de l’article 29 instituant, sur l’ensemble du territoire et à titre expérimental, un dispositif visant à assurer la protection et la préservation de locaux vacants par l’occupation de résidents temporaires, notamment à des fins de logement, d’hébergement, d’insertion et d’accompagnement social.

LOGL1832785D

Décret n° 2019-497 du 22 mai 2019 relatif à l’occupation par des résidents temporaires de locaux vacants en vue de leur protection et préservation en application de l’article 29 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique

23.05.19

30, 2°

Article L. 122-1 CCH

Règles de sécurité fixées pour les immeubles de moyenne hauteur et les immeubles de grande hauteur.

LOGL1907226D

Décret n° 2019-461 du 16 mai 2019 relatif aux travaux de modification des immeubles de moyenne hauteur

17.05.19

32, 1°, b

Article L. 642-1 CCH

Modalités selon lesquelles la réquisition de locaux situés dans un quartier prioritaire de la politique de la ville n’est possible qu’après l’accord du maire de la commune où les locaux sont implantés.

LOGL1908578D

Décret n° 2019-635 du 24 juin 2019 relatif à la réquisition avec attributaire

25.06.19

45, I, 1°

Article L. 121-24, code de l’urbanisme

Liste limitative et caractéristiques des aménagements légers pouvant être implantés dans des espaces remarquables ou caractéristiques et des milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques.

LOGL1909499D

Décret n° 2019-482 du 21 mai 2019 relatif aux aménagements légers autorisés dans les espaces remarquables ou caractéristiques du littoral et des milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques

22.05.19

49

Article L. 442-14, code de l’urbanisme

Conditions permettant de constater l’achèvement des travaux dans un lotissement.

 

Ce décret existe déjà et la loi n’implique pas sa modification (article R. 121-5 du code de l’urbanisme)

 

56

Articles L. 621-31, L. 631-2 et L. 631-2-1, code du patrimoine

Modalités d’application de l’article

LOGL1903811D

Décret n° 2019-617 du 21 juin 2019 relatif aux abords de monuments historiques, aux sites patrimoniaux remarquables et à la dispense de recours à un architecte pour les coopératives d’utilisation de matériel agricole

22.06.19

57

Article L. 423-1, code de l’urbanisme

Mise à jour de la liste des pièces à joindre à une demande d’autorisation d’urbanisme

LOGL1834443D

Décret n° 2019-481 du 21 mai 2019 modifiant diverses dispositions du code de l’urbanisme

22.05.19

62, I

Article L. 423-2 c. urb.

Modalités et conditions dans lesquelles le maire ou le préfet pour délivrer le permis de construire, d’aménager ou de démolir et pour se prononcer sur un projet faisant l’objet d’une déclaration préalable transmet aux autorités administratives compétentes les informations contenues dans les demandes de permis et les déclarations préalables (décret prévu à l’article L. 426-1 du code de l’urbanisme).

LOGL1908983D

Décret n° 2019-472 du 20 mai 2019 relatif à la collecte et la transmission d’informations et de documents relatifs aux déclarations et autorisations d’occupation des sols

21.05.19

62

 

Rationaliser les données demandées aux collectivités en urbanisme, et permettre de confier leur instruction au privé

LOGL1908523D

Décret n° 2019-505 du 23 mai 2019 relatif à l’instruction par des prestataires privés des demandes d’autorisation d’urbanisme

24.05.19

62

 

Dématérialiser l’instruction des permis de construire à compter du 1er janvier 2022

LOGL2106382D

Décret n° 2021-981 du 23 juillet 2021 portant diverses mesures relatives aux échanges électroniques en matière de formalité d’urbanisme

25.07.21

62, III

Article L. 423-1 c. urb.

Modalités d’application de la possibilité, pour l’organe délibérant de la commune mentionnée à l’article L. 422-1 ou de l’établissement public de coopération intercommunale mentionné à l’article L. 422-3, de confier l’instruction des demandes de permis de construire, d’aménager ou de démolir à des prestataires privés.

LOGL1908523D

Décret n° 2019-505 du 23 mai 2019 relatif à l’instruction par des prestataires privés des demandes d’autorisation d’urbanisme

24.05.19

64

Article L. 111-7-1 CCH

Modalités relatives à l’accessibilité aux personnes handicapées prévue à l’article L. 111-7 que doivent respecter les bâtiments ou parties de bâtiments nouveaux

LOGL1833056D

 Décret n° 2019-305 du 11 avril 2019 modifiant les dispositions du code de la construction et de l’habitation relatives à l’accessibilité des bâtiments d’habitation et au contrat de construction d’une maison individuelle avec fourniture du plan

12.04.19

68 ,I, 2°

Article L. 112-23 CCH

Techniques particulières de construction que le constructeur de l’ouvrage est tenu de respecter, lorsqu’un contrat a pour objet des travaux de construction ou la maîtrise d’œuvre d’un ou plusieurs immeubles à usage d’habitation ou à usage professionnel et d’habitation ne comportant pas plus de deux logements.

LOGL1914897D

 Décret n° 2019-1223 du 25 novembre 2019 relatif aux techniques particulières de construction dans les zones exposées au phénomène de mouvement de terrain différentiel consécutif à la sécheresse et à la réhydratation des sols

26.11.19

68,I, 2°

Article L. 112-25 CCH

Modalités d’application de la sous-section 2 relative à la prévention des risques de mouvement de terrain différentiel consécutif à la sécheresse et à la réhydratation des sols

LOGL1909554D

Décret n° 2019-495 du 22 mai 2019 relatif à la prévention des risques de mouvement de terrain différentiel consécutif à la sécheresse et à la réhydratation des sols argileux

23.05.19

71, 4°

Article L241-9, code de l’énergie

Cadre de mise en place des méthodes rentables permettant de déterminer la quantité de chaleur fournie à chaque local occupé à titre privatif.

LOGL1909857D

Décret n°2019-496 du 22 mai 2019 relatif à la détermination individuelle de la quantité de chaleur, de froid et d’eau chaude sanitaire consommée et à la répartition des frais de chauffage, de refroidissement et d’eau chaude sanitaire, dans les immeubles collectifs à usage d’habitation ou à usage d’habitation et professionnel

23.05.19

75, 3°, b

Article L261-15 CCH

Modalités relatives à la mise en œuvre du contrat préliminaire, notamment la nature des travaux dont l’acquéreur peut se réserver l’exécution.

LOGL1902697D

Décret n° 2019-641 du 25 juin 2019 relatif aux travaux réservés par l’acquéreur d’un immeuble vendu en l’état futur d’achèvement

26.06.19

80

Article L600-5-2 c. urb.

Articulation du nouvel article L. 600-5-2 du code de l’urbanisme (contestation des actes de régularisation dans le cadre de l’instance contre l’acte initial) avec la règle de cristallisation des moyens et la règle de notification des recours

LOGL1830746D

Décret n° 2019-303 du 10 avril 2019 pris pour l’application de l’article L. 600-5-2 du code de l’urbanisme

12.04.19

81

 

Clauses types des sociétés de coordination (SC)

LOGL1901383D

Décret n° 2019-911 du 29 août 2019 relatif aux sociétés de coordination mentionnées à l’article L. 423-1-2 du code de la construction et de l’habitation

31.08.19

81

Article L423-2 CCH

Définition de la notion de logements gérés, notamment pour les logements foyers

LOGL1903358D

Décret n° 2019-634 du 24 juin 2019 portant diverses dispositions relatives aux organismes d’habitations à loyer modéré et aux sociétés d’économie mixte de construction et de gestion de logements sociaux

25.06.19

81

Article L452-2-1 CCH

Commission de péréquation et de réorganisation des organismes de logement social + autres mesures CGLLS

LOGL1909140D

Décret n° 2019-618 du 21 juin 2019 relatif à la commission de péréquation et de réorganisation et portant modification du fonctionnement de la Caisse de garantie du logement locatif social

22.06.19

84

Article L423-15 CCH

Avances et prêts en compte courant

LOGL1909542D

Décret n° 2019-383 du 29 avril 2019 relatif aux modalités de déclaration des avances en compte courant prévues à l’article L. 423-15 du code de la construction et de l’habitation et des prêts participatifs prévus à l’article L. 423-16 du même code

30.04.19

84

Article L423-16 CCH

Placement des fonds

LOGL1909542D

Décret n° 2019-383 du 29 avril 2019 relatif aux modalités de déclaration des avances en compte courant prévues à l’article L. 423-15 du code de la construction et de l’habitation et des prêts participatifs prévus à l’article L. 423-16 du même code

30.04.19

88, I, 6°, b)

Article L421-1 CCH

Délai au-delà duquel si un avant-contrat ou un contrat de vente ou de location-accession n’est pas conclu, ces logements peuvent être vendus aux différents organismes d’habitations à loyer modéré.

LOGL1909240D

Décret n° 2019-484 du 21 mai 2019 relatif au délai au-delà duquel un logement, réalisé par une société civile immobilière et destiné à l’accession sociale à la propriété, peut être cédé à un organisme d’habitations à loyer modéré

22.05.19

88, 12°

Article L421-10 CCH

Conditions d’application de la possibilité de prévoir, dans le règlement intérieur du conseil d’administration de l’office public de l’habitat, que sont réputés présents, pour le calcul du quorum et de la majorité, les administrateurs qui participent à la réunion par des moyens de visioconférence ou de télécommunication permettant leur identification et garantissant leur participation effective au conseil.

LOGL1907931D

Décret n° 2019-462 du 16 mai 2019 relatif aux conditions de participation des administrateurs aux conseils d’administrations des offices publics de l’habitat par des moyens de visioconférence ou de télécommunication

17.05.19

88, 14°

Article L421-12-1 CCH

Conditions selon lesquelles lorsqu’un directeur général d’office assure également la direction d’une société de coordination prévue à l’article L. 423-1-2 dont est actionnaire l’office qu’il dirige, les fonctions de direction de cette société de coordination peuvent donner lieu à une rémunération.

LOGL1909990D

Décret n° 2019-702 du 3 juillet 2019 relatif au cumul de rémunérations d’un directeur général d’office public de l’habitat lorsqu’il assure également la direction d’une société de coordination dont l’office est actionnaire

04.07.19

88, 21°, c)

Article L422-2 CCH

Délai au-delà duquel si un avant-contrat ou un contrat de vente ou de location-accession n’est pas conclu, ces logements peuvent être vendus aux différents organismes d’habitations à loyer modéré

LOGL1909240D

Décret n° 2019-484 du 21 mai 2019 relatif au délai au-delà duquel un logement, réalisé par une société civile immobilière et destiné à l’accession sociale à la propriété, peut être cédé à un organisme d’habitations à loyer modéré

22.05.19

88, 31°, c)

Article L424-2 CCH

Zones géographiques se caractérisant par un déséquilibre important entre l’offre et la demande de logements en dehors desquelles les organismes d’habitations à loyer modéré peuvent participer à des actions de développement à caractère social d’intérêt direct pour les habitants des quartiers prioritaires de la politique de la ville.

LOGL1903358D

Décret n° 2019-634 du 24 juin 2019 portant diverses dispositions relatives aux organismes d’habitations à loyer modéré et aux sociétés d’économie mixte de construction et de gestion de logements sociaux

25.06.19

88, 33°

Article L445-1-1 CCH

Indicateurs permettant de mesurer le niveau de réalisation des objectifs fixés pour chaque aspect de la politique des sociétés de vente d’habitations à loyer modéré.

LOGL1913894D

Décret n° 2019-499 du 22 mai 2019 relatif aux indicateurs des conventions d’utilité sociale des sociétés de vente d’habitations à loyer modéré

23.05.19

89

Article 11, loi n°2003-710 du 1er août 2003

Conditions dans lesquelles le commissaire du Gouvernement désigné par le ministre chargé de la ville, peut demander l’inscription d’un point à l’ordre du jour du conseil d’administration de l’ANRU.

LOGV1910802D

Décret n° 2019-438 du 13 mai 2019 relatif à l’Agence nationale pour la rénovation urbaine

14.05.19

90

Article 15-1, loi n°2003-710 du 1er août 2004

Modalités spécifiques de contrôle économique et financier de l’ANRU.

LOGV1935813D

LOGB2008267D

Décret n° 2020-11 du 7 janvier 2020 relatif au contrôle économique et financier de l’Etat sur l’Agence nationale pour la rénovation urbaine

Décret n° 2020-540 du 6 mai 2020 relatif à l’Agence nationale pour la rénovation urbaine

08.05.20

97, II, 3°

Article L422-4 CCH

Conditions d’applications de l’article L. 422-4 relatif aux sociétés de vente d’habitations à loyers modérés.

LOGL1901384D

Décret n° 2019-929 du 3 septembre 2019 relatif aux sociétés de vente d’habitations à loyer modéré mentionnées à l’article L. 422-4 du code de la construction et de l’habitation et aux autres organismes privés d’habitations à loyer modéré

05.09.19

97, II, 9°, g)

Article L443-11, IV CCH

Modalités de la publicité relative à la mise en vente du ou des logements sociaux.

LOGL1904988D

Décret n° 2019-1183 du 15 novembre 2019 relatif aux ventes de logements locatifs sociaux

16.11.19

97, II, 10°

Article L443-12 CCH

Conditions selon lesquelles l’organisme vend le logement social vacant à des bénéficiaires prévus au III de l’article L. 443-11.

LOGL1904988D

Décret n° 2019-1183 du 15 novembre 2019 relatif aux ventes de logements locatifs sociaux

16.11.19

97, II, 25°

Article L443-15-8 CCH

Modalités d’application de l’article L. 443-15-8 selon lesquelles les organismes d’habitations à loyer modéré et les sociétés d’économie mixte de construction sont tenus d’inclure dans les contrats de vente une clause de rachat systématique.

LOGL1904988D

Décret n° 2019-1183 du 15 novembre 2019 relatif aux ventes de logements locatifs sociaux

16.11.19

102, III

Article L313-17-2 du code de la construction et de l’habitation

Fonctionnement du comité des partenaires du logement social

LOGL1834798D

Décret n° 2019-500 du 22 mai 2019 relatif aux modalités de fonctionnement du comité des partenaires du logement social

23.05.19

102, VII, 2°

Article 41 ter, loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986

Conditions selon lesquelles est agréé un collecteur par le ministre chargé du logement, aux fins de collecter la participation des employeurs à l’effort de construction.

 

Mesure déjà appliquée par les articles R. 313-21 et suivants du code de la construction et de l’habitation.

 

106, I, 1°, c)

Article 11, 9° bis, ordonnance n° 77-1102 du 26 septembre 1977

Conditions de décence auxquelles un logement doit répondre

LOGL2125307D

Décret n° 2021-1750 du 21 décembre 2021 portant diverses mesures sur les aides personnelles au logement et relatif aux aides personnelles au logement à Saint-Pierre-et-Miquelon

23.12.21

106, I, 1°, c)

Article 11, 9° bis, ordonnance n° 77-1102 du 26 septembre 1978

Barème permettant de déterminer le montant de l’allocation de logement familiale.

LOGL2125307D

Décret n° 2021-1750 du 21 décembre 2021 portant diverses mesures sur les aides personnelles au logement et relatif aux aides personnelles au logement à Saint-Pierre-et-Miquelon

23.12.21

106, I, 2°

Article 13-1-1, ordonnance n° 77-1102 du 26 septembre 1978

Conditions de décence auxquelles un logement doit répondre pour le versement de l’allocation logement.

LOGL2125307D

Décret n° 2021-1750 du 21 décembre 2021 portant diverses mesures sur les aides personnelles au logement et relatif aux aides personnelles au logement à Saint-Pierre-et-Miquelon

23.12.21

106, I, 2°

Article 13-1-1, ordonnance n° 77-1102 du 26 septembre 1978

Conditions de peuplement auxquelles est soumis le versement de l’allocation logement.

LOGL2125307D

Décret n° 2021-1750 du 21 décembre 2021 portant diverses mesures sur les aides personnelles au logement et relatif aux aides personnelles au logement à Saint-Pierre-et-Miquelon

23.12.21

109, II

Article L441-2, II, code de la construction et de l’habitation

Modalités de désignation de six membres représentant l’organisme d’habitations à loyer modéré, qui élisent en leur sein un président, au sein de la commission d’attribution des logements et d’examen de l’occupation de logements créée dans chaque organisme d’habitations à loyer modéré.

 

L’article L441-2 du code de la construction et de l’habitation, dans sa nouvelle rédaction issue de la présente loi, est applicable même sans modification nécessaire de l’article R441-9

 

109, II

Article L441-2, II CCH

Modalités de désignation du représentant désigné par des organismes bénéficiant de l’agrément relatif à l’ingénierie sociale, financière et technique prévu à l’article L. 365-3.

 

L’article L441-2 du code de la construction et de l’habitation, dans sa nouvelle rédaction issue de la présente loi, est applicable même sans modification de l’article R441-9

 

109, II

Article L441-2, III CCH

Modalités d’octroi de l’autorisation spécifique délivrée par le représentant de l’État dans le département dans le cadre de programmes de logements construits ou aménagés spécifiquement pour cet usage à des personnes en perte d’autonomie liée à l’âge ou au handicap.

 

Ce décret existe déjà et la loi n’implique pas sa modification (Décret 2017- 760 du 3 mai 2017 pris pour application de l’article 20 de la loi n° 2015-1776 du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement et portant diverses dispositions relatives aux modalités d’instruction des demandes de décision favorable pour le financement de logements sociaux et article R. 331-6 du code de la construction et de l’habitation.)

 

109, I

 

Modalités d’octroi de l’autorisation spécifique délivrée par le représentant de l’État dans le département dans le cadre de programmes de logements construits ou aménagés spécifiquement pour les jeunes de moins de trente ans

LOGL1903707D

Décret n° 2019-624 du 21 juin 2019 portant diverses dispositions relatives aux procédures d’octroi des aides à l’investissement pour la construction, l’acquisition et l’amélioration de logements locatifs et pris pour application de l’article 109 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique

23.06.19

109, III

Article L442-3-1 CCH

Zones géographiques se caractérisant par un déséquilibre important entre l’offre et la demande de logements

LOGL1903358D

Décret n° 2019-634 du 24 juin 2019 portant diverses dispositions relatives aux organismes d’habitations à loyer modéré et aux sociétés d’économie mixte de construction et de gestion de logements sociaux

25.06.19

109, IV

Article L442-5-2 CCH

Zones géographiques se caractérisant par un déséquilibre important entre l’offre et la demande de logements.

LOGL1903358D

Décret n° 2019-634 du 24 juin 2019 portant diverses dispositions relatives aux organismes d’habitations à loyer modéré et aux sociétés d’économie mixte de construction et de gestion de logements sociaux

25.06.19

111, II

Article L441-2-9, 7° code de la construction et de l’habitation

Conditions d’attribution des logements à loyer modéré et plafonds de ressources, notamment les modalités d’élaboration, d’évaluation et de révision du plan partenarial et de son contenu, de même que les modalités d’application du système de cotation prévu au troisième alinéa du I du même article L. 441-2-8.

LOGL1909776D

Décret n° 2019-1378 du 17 décembre 2019 relatif à la cotation de la demande de logement social

18.12.19

114, IV

 

Conditions de mise en conformité, dans un délai de trois ans à compter de la promulgation de la présente loi, des conventions de réservation conclues entre les bailleurs et les réservataires en application de l’article L. 441-1 du code de la construction et de l’habitation avant la publication de la présente loi.

LOGL1909777D

Décret n° 2020-145 du 20 février 2020 relatif à la gestion en flux des réservations de logements locatifs sociaux

21.02.20

116

Article L831-2 du code de la sécurité sociale

Modalités de calcul des aides personnelles au logement versées aux personnes recourant à la sous-location

LOGL1925926D

Décret n° 2020-17 du 8 janvier 2020 précisant les modalités de liquidation des aides personnelles au logement selon le mode d’occupation ou la nature du logement

10.01.20

116

Article L831-2 du code de la sécurité sociale

Modalités de calcul des aides personnelles au logement versées aux personnes recourant à la sous-location – abrogation d’un DCE existant

 

Il s’agit d’une mesure de coordination et non d’application de la loi.

 

118, II

Article 714-1, IV, code de la consommation

Conditions dans lesquelles le bailleur est informé des conséquences de l’absence de contestation des décisions de la commission de surendettement des particuliers ou du juge mentionnées à l’article L714-1.

PRMX1902682D

Décret n° 2019-455 du 16 mai 2019 relatif à l’information des bailleurs quant aux conséquences de l’absence de contestation des décisions de la commission du surendettement et du juge du surendettement sur la décision d’expulsion conditionnelle antérieurement rendue par le juge du bail

17.05.19

119, II

Article 24, loi n° 89-462 du 6 juillet 1989

Modalités et contenu du diagnostic social et financier réalisé par l’organisme compétent désigné par le plan départemental d’action pour le logement et l’hébergement des personnes défavorisées.

LOGI1915176D

Décret n° 2021-8 du 5 janvier 2021 relatif aux modalités de réalisation et au contenu du diagnostic social et financier effectué dans le cadre d’une procédure judiciaire aux fins de résiliation du bail

07.01.21

129, 2°

Article L281-2, code de l’action sociale et des familles

Montant, modalités et conditions de versement du forfait pour l’habitat inclusif pour les personnes mentionnées à l’article L. 281-1 au profit de la personne morale en charge d’assurer le projet de vie sociale et partagée.

SSAA1906187D

Décret n° 2019-629 du 24 juin 2019 relatif aux diverses dispositions en matière d’habitat inclusif pour les personnes handicapées et les personnes âgées mentionné au titre VIII du livre II du code de l’action sociale et des familles

25.06.19

129, 2°

Article L281-4, code de l’action sociale et des familles

Conditions d’application du titre VIII relatif à l’habitat inclusif pour les personnes handicapées et les personnes âgées

SSAA1906187D

Décret n° 2019-629 du 24 juin 2019 relatif aux diverses dispositions en matière d’habitat inclusif pour les personnes handicapées et les personnes âgées mentionné au titre VIII du livre II du code de l’action sociale et des familles

25.06.19

130, I, 1°, b)

Article L302-5 CCH

Conditions selon lesquelles les logements occupés par des titulaires de contrats de location-accession conclus dans les conditions prévues par la loi n° 84-595 du 12 juillet 1984 définissant la location-accession à la propriété immobilière font l’objet d’une convention et d’une décision d’agrément prise par le représentant de l’État dans le département.

 

Ce décret existe déjà et la loi n’implique pas sa modification : Décret n°2004-286 du 26 mars 2004 relatif aux conditions d’octroi des prêts conventionnés pour des opérations de location-accession à la propriété immobilière et modifiant le code de la construction et de l’habitation.

 

130, II, I

 

Liste des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre concernés par l’expérimentation permettant le transfert des obligations qui découlent de la section 2 du chapitre II du titre préliminaire du livre III pour les communes mentionnées aux I et II de l’article L. 302-5 du code de la construction et de l’habitation à l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont ces communes sont membres.

 

Absence de candidats à l’expérimentation.

 

Dispositif abrogé par coordination à l’article 68 de la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale (3DS).

 

139, I, 2°, c)

Article 5, loi n° 89-462 du 6 juillet 1989

Nature des informations communiquées à l’observatoire local des loyers, conditions dans lesquelles elles sont transmises et nombre de logements correspondant à une part significative du parc de référence.

LOGL1912241D

Décret n° 2019-625 du 21 juin 2019 modifiant le décret n° 2014-890 du 1er août 2014 relatif au plafonnement des honoraires imputables aux locataires et aux modalités de transmission de certaines informations par les professionnels de l’immobilier et le décret n° 2014-1334 du 5 novembre 2014 relatif aux observatoires locaux des loyers, aux modalités de communication et de diffusion de leurs données et à la création du Comité scientifique de l’observation des loyers

23.06.19

139, I, 3°, b)

Article 16, loi n° 89-462 du 6 juillet 1989

Modalités de consultation et de fonctionnement de l’instance chargée de la validation du dispositif d’observations, assurant la représentation équilibrée des bailleurs, des locataires et des gestionnaires et comprenant des personnalités qualifiées.

LOGL1912241D

Décret n° 2019-625 du 21 juin 2019 modifiant le décret n° 2014-890 du 1er août 2014 relatif au plafonnement des honoraires imputables aux locataires et aux modalités de transmission de certaines informations par les professionnels de l’immobilier et le décret n° 2014-1334 du 5 novembre 2014 relatif aux observatoires locaux des loyers, aux modalités de communication et de diffusion de leurs données et à la création du Comité scientifique de l’observation des loyers

23.06.19

139, I, 4°

Article 17, loi n° 89-462 du 6 juillet 1989

Liste des communes comprises dans les zones d’urbanisation continue de plus de 50 000 habitants où il existe un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements.

 

Décret existant et n’ayant pas besoin d’être modifié : Décret n° 2015-650 du 10 juin 2015 relatif aux modalités de mise en œuvre du dispositif d’encadrement du niveau de certains loyers et modifiant l’annexe à l’article R.* 366-5 du code de la construction et de l’habitation

 

139, I, 5°, c)

Article 17-2, loi n° 89-462 du 6 juillet 1989

Éléments constitutifs des loyers servant de références, devant être représentatifs de l’ensemble des loyers habituellement constatés dans le voisinage pour des logements comparables, situés soit dans le même groupe d’immeubles, soit dans tout autre groupe d’immeubles comportant des caractéristiques similaires et situés dans la même zone géographique.

 

Décret existant et n’ayant pas besoin d’être modifié : Décret n° 90-780 du 31 août 1990 portant application de l’article 17-2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs

 

139, I, 5°, c)

Article 17-2, loi n° 89-462 du 6 juillet 1989

Liste des communes faisant partie d’une agglomération de plus d’un million d’habitants pour lesquelles le nombre de références à fournir est de six, au lieu de trois pour les autres communes.

 

Déjà appliqué par le décret n°87- 818 du 2 octobre 1987 fixant la liste des communes faisant partie d’une agglomération de plus de 1 000 000 d’habitants

 

140, I

 

Périmètre du territoire sur lequel s’applique un dispositif d’encadrement des loyers régi par le présent article, à titre expérimental et pour une durée de cinq ans à compter de la publication de la présente loi, pour les établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière d’habitat, la commune de Paris, les établissements publics territoriaux de la métropole du Grand Paris, la métropole de Lyon et la métropole d’Aix-Marseille-Provence.

 

Cette mesure est une habilitation donnée au Premier ministre dont la première utilisation a été faite par le Décret n° 2019-315 du 12 avril 2019 fixant le périmètre du territoire de la ville de Paris sur lequel est mis en place le dispositif d’encadrement des loyers prévu à l’article 140 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique

 

140, VI

 

Liste des communes faisant partie d’une agglomération de plus d’un million d’habitants pour lesquels le nombre de références à fournir est de six, au lieu de trois pour les autres communes.

 

Déjà appliqué par le décret n°87-818 du 2 octobre 1987 fixant la liste des communes faisant partie d’une agglomération de plus de 1 000 000 d’habitants

 

140, VIII

 

Modalités d’application de l’article 49 de la présente loi relatif à l’expérimentation, pour une durée de cinq ans à compter de la publication de la présente loi, d’un dispositif d’encadrement des loyers pour les établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière d’habitat, la commune de Paris, les établissements publics territoriaux de la métropole du Grand Paris, la métropole de Lyon et la métropole d’Aix-Marseille-Provence.

LOGL1834168D

Décret n° 2019-437 du 13 mai 2019 relatif aux modalités d’application de la mise en demeure en cas de non-respect du dispositif expérimental d’encadrement du niveau des loyers et au recouvrement des amendes administratives dans le cadre des rapports locatifs

14.05.19

Article, 145, II, 2°

Article L324-2-1, code du tourisme

Fréquence et modalités techniques de transmission des informations relatives au nombre de jours au cours desquels un meublé de tourisme a fait l’objet d’une location par l’intermédiaire de la personne mettant en location ce logement.

ECOI1910663D

Décret n° 2019-1104 du 30 octobre 2019 pris en application des articles L. 324-1-1 et L. 324-2-1 du code du tourisme et relatif aux demandes d’information pouvant être adressées par les communes aux intermédiaires de location de meublés de tourisme

31.10.19

146, 2°

Article L631-9 CCH

Liste des zones d’urbanisation continue de plus de 50 000 habitants;

 

Décret existant (n° 2013-392 du 10 mai 2013 relatif au champ d’application de la taxe annuelle sur les logements vacants instituée par l’article 232 du code général des impôts) et la loi n’implique pas de le modifier

 

148, I

Article L302-1 CCH

Liste des communes sur lesquelles les PLH devront prévoir des objectifs en matière de logements intermédiaires

LOGL1909019D

Décret n° 2019-483 du 21 mai 2019 fixant la liste des communes sur lesquelles le programme local de l’habitat précise l’offre de logements intermédiaires

22.05.19

151, I

Article 13-1, loi n° 70-9 du 2 janvier 1970

Contenu du code de déontologie applicable aux personnes titulaires de la carte professionnelle mentionnée à l’article 3 de la loi n°70-9 et, lorsqu’il s’agit de personnes morales, à leurs représentants légaux et statutaires.

 

Décret existant n° 2015-1090 du 28 août 2015 fixant les règles constituant le code de déontologie applicable à certaines personnes exerçant les activités de transaction et de gestion des immeubles et des fonds de commerce.

 

151, I

Article 13-4, loi n° 70-9 du 2 janvier 1970

Conditions d’application du Titre II BIS de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 relatif au conseil national de la transaction et de la gestion immobilière.

LOGL1901012D

Décret n° 2019-298 du 10 avril 2019 relatif au Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières

11.04.19

157, I, 2°

Article L303-2 du code de la construction et de l’habitation, II, 1°

Permettre à l’Anah de financer de nouveaux bénéficiaires dans le cadre du dispositif immobilier et foncier en ORT

LOGL1832186D

Décret n° 2019-498 du 22 mai 2019 relatif aux aides de l’Agence nationale de l’habitat

23.05.19

157, V

Article L752-1-1, code de commerce

Conditions de publicité des projets d’aménagement commercial soumis à autorisation bénéficiant la dérogation introduite par l’article L.752-1-1 (dispense d’AEC pour une implantation en secteur d’intervention ORT comprenant un centre-ville, ou autorisation exigée qu’à partir de seuils plus élevés -cf. 5000 m² en secteur 2, et 2500 m² en secteur 1).

ECOI1910285D

Décret n° 2019-563 du 7 juin 2019 relatif à la procédure devant la Commission nationale d’aménagement commercial et au contrôle du respect des autorisations d’exploitation commerciale

08.06.19

157, V

Article L752-1-2, code de commerce

Conditions et modalités d’application de la possibilité pour le représentant de l’État dans le département de suspendre par arrêté l’enregistrement et l’examen en commission départementale d’aménagement commercial des demandes d’autorisation d’exploitation commerciale relatives aux projets mentionnés aux 1° à 5° et 7° de l’article L. 752-1 du présent code.

ECOI1915595D

Décret n° 2019-795 du 26 juillet 2019 relatif à la faculté de suspension de la procédure d’autorisation d’exploitation commerciale

28.07.19

172

 

Faciliter la réouverture au public d’un commerce.

 

Ce texte n’est pas nécessaire à l’application de la loi.

 

163

 

Conditions de désignation et de convocation des nouveaux membres de CDAC et des personnes auditionnées.
Conditions et modalités d’application de la possibilité pour le représentant de l’État dans le département de demander des études spécifiques à la CCI, à la CMA et à la chambre d’agriculture préalablement à l’analyse d’un dossier de demande d’AEC.

ECOI1905098D

Décret n° 2019-331 du 17 avril 2019 relatif à la composition et au fonctionnement des commissions départementales d’aménagement commercial et aux demandes d’autorisation d’exploitation commerciale

18.04.19

164

L752-1, code de commerce

Modalités d’application du contrôle, par le représentant de l’État dans le département de la commune d’implantation, des dispositions prévues par le ou les propriétaires du site pour mettre en œuvre, dans les délais prescrits, les opérations de démantèlement et de remise en état des terrains ou de transformation en vue d’une autre activité à la fin de l’exploitation commerciale.

ECOI1910285D

Décret n° 2019-563 du 7 juin 2019 relatif à la procédure devant la Commission nationale d’aménagement commercial et au contrôle du respect des autorisations d’exploitation commerciale

08.06.19

165

 

Modalités de dérogation d’AEC pour les surfaces de vente de projets mixtes en secteurs d’intervention ORT

 

Ce texte n’est pas nécessaire à l’application de la loi.

 

166

 

Composition de l’étude d’impact
Conditions d’habilitation par le préfet d’organismes indépendants pour la réalisation des études d’impact.
Modification de la composition du dossier de demande d’AEC, avec notamment la prise en compte des nouveaux critères et la démonstration "anti-friche"

ECOI1905098D

Décret n° 2019-331 du 17 avril 2019 relatif à la composition et au fonctionnement des commissions départementales d’aménagement commercial et aux demandes d’autorisation d’exploitation commerciale

18.04.19

167

 

Conditions de désignation et de convocation du membre de CDAC auditionné en CNAC

ECOI1910285D

Décret n° 2019-563 du 7 juin 2019 relatif à la procédure devant la Commission nationale d’aménagement commercial et au contrôle du respect des autorisations d’exploitation commerciale

08.06.19

168, II

L752-23, III, code de commerce

Modalités d’application de l’article L752-23 relatif au respect de l’autorisation d’exploitation commerciale.

ECOI1910285D

Décret n° 2019-563 du 7 juin 2019 relatif à la procédure devant la Commission nationale d’aménagement commercial et au contrôle du respect des autorisations d’exploitation commerciale

08.06.19

171

L752-21, code de commerce

Adapter la partie réglementaire du code de commerce (et celle du code de l’urbanisme) pour y prévoir le cas d’un passage direct en CNAC

ECOI1910285D

Décret n° 2019-563 du 7 juin 2019 relatif à la procédure devant la Commission nationale d’aménagement commercial et au contrôle du respect des autorisations d’exploitation commerciale

08.06.19

175, I

L111-10-3, I CCH

Bâtiments, parties de bâtiments ou ensembles de bâtiments à usage tertiaire dans lesquels des actions de réduction de la consommation d’énergie finale sont mises en œuvre.

LOGL1909871D

Décret n° 2019-771 du 23 juillet 2019 relatif aux obligations d’actions de réduction de la consommation d’énergie finale dans des bâtiments à usage tertiaire

25.07.19

175, I

L111-10-3, III CCH

Catégories de bâtiments soumis à l’obligation de réduction de la consommation d’énergie finale, conditions de détermination de l’objectif de cette réduction et modalités d’évaluation, conditions d’application des modulations, modalités de mise en place d’une plateforme informatique relative aux données de consommation, modalités de mise en œuvre de la sanction en cas non-respect de l’objectif de réduction de la consommation d’énergie.

LOGL1909871D

Décret n° 2019-771 du 23 juillet 2019 relatif aux obligations d’actions de réduction de la consommation d’énergie finale dans des bâtiments à usage tertiaire

25.07.19

181

 

Obligations et échéances de la réglementation énergétique et environnementale des bâtiments neufs

LOGL2107361D

Décret n° 2021-1004 du 29 juillet 2021 relatif aux exigences de performance énergétique et environnementale des constructions de bâtiments en France métropolitaine

31.07.21

178, 1°

L111-9-2 CCH

Modalités de calcul et de formalisation, dans la déclaration de performance environnementale du produits de construction, de divers indicateurs. Catégories de produits dont la déclaration de performance environnementale doit indiquer leur impact sur la qualité de l’air intérieur du bâtiment. Obligations de transmission des déclarations de performance environnementale des produits de construction à l’observatoire de la performance environnementale des produits de construction. Obligations de compétences et d’indépendance des personnes réalisant ou vérifiant les déclarations de performance environnementale des produits de construction.

LOGL2113184D

Décret n° 2021-1674 du 16 décembre 2021 relatif à la déclaration environnementale de produits de construction et de décoration ainsi que des équipements électriques, électroniques et de génie climatique

17.12.21

178, 2°

L111-9-1 CCH

Conditions dans lesquelles, à l’issue de l’achèvement des travaux portant sur des bâtiments neufs ou sur des parties nouvelles de bâtiment existant soumis à permis de construire, le maître d’ouvrage fournit à l’autorité qui a délivré le permis de construire un document attestant que les réglementations environnementales ont été prises en compte par le maître d’œuvre ou, en son absence, par le maître d’ouvrage.

 

Décret en Conseil d’État non publié – base légale abrogée par l’ordonnance n° 2020-71.

 

182, II

L111-10-5 CCH

Modalités d’application de l’article 182 de la présente loi, relatif au carnet numérique d’information, de suivi et d’entretien du logement.

 

Décret en Conseil d’État non publié – base légale abrogée par l’ordonnance n° 2020-71.

 

191, II

 

Modalités d’application de l’article L. 322-7-1 relatif à l’impossibilité pour une personne condamnée à certaines peines de se porter enchérisseur.

JUSC1910034D

Décret n° 2019-488 du 22 mai 2019 relatif aux personnes condamnées à une peine leur interdisant de se porter enchérisseur

23.05.19

199, 4°, b

L5112-4 CG3P

Conditions dans lesquelles les terrains autres que ceux libres de toute occupation peuvent être cédés aux organismes agréés exerçant les activités mentionnées à l’article L. 365-1 CCH.

 

Décret en Conseil d’État non publié.

 

203

21, loi n°65-557 du 10 juillet 1965

Montant minimal des pénalités par jour de retard imputées sur les honoraires de base du syndic en cas d’absence de transmission des pièces.

JUSC1908986D

Décret n° 2019-503 du 23 mai 2019 fixant le montant minimal des pénalités applicables au syndic de copropriété en cas d’absence de communication des pièces au conseil syndical

24.05.19

205, 2°

18, loi n° 65-557 du 10 juillet 1965

Liste minimale des documents dématérialisés relatifs à la gestion de l’immeuble ou des lots gérés devant être accessibles en ligne dans un espace sécurisé lorsque le syndic est un syndic professionnel.

JUSC1908508D

Décret n° 2019-502 du 23 mai 2019 relatif à la liste minimale des documents dématérialisés concernant la copropriété accessibles sur un espace sécurisé en ligne

24.05.19

211, II

17-1 A, loi n°65-557 du 10 juillet 1965

Conditions d’identification des copropriétaires usant de moyens de communication électronique pour participer à l’assemblée générale, mentions du formulaire de vote par correspondance et modalités de remise au syndic.

JUSC1908985D

Décret n° 2019-650 du 27 juin 2019 portant diverses mesures relatives au fonctionnement des copropriétés et à l’accès des huissiers de justice aux parties communes d’immeubles

28.06.19


— 1 —

   ANNEXE IV : Tableau des mesures d’habilitation
de la loi n° 2018‑1021 du 23 novembre 2018

 

Article

Objet de l’ordonnance

Terme de l’habilitation

Nor ordonnance

Titre de l’ordonnance

Date de publication

46, I, 1°

Réduire le nombre des documents opposables aux schémas de cohérence territoriale, aux plans locaux d’urbanisme et aux documents d’urbanisme en tenant lieu, ainsi qu’aux cartes communales.

18 mois à compter de la promulgation de la loi

+ 4 mois (article 14 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19)

LOGL2006959R

Ordonnance n° 2020-745 du 17 juin 2020 relative à la rationalisation de la hiérarchie des normes applicable aux documents d’urbanisme

18.06.20

46, I, 2°

Prévoir les conditions et modalités des documents opposables aux schémas de cohérence territoriale, aux plans locaux d’urbanisme et aux documents d’urbanisme, notamment en supprimant le lien de prise en compte au profit de la seule compatibilité.

18 mois à compter de la promulgation de la loi

+ 4 mois (article 14 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19)

LOGL2006959R

Ordonnance n° 2020-745 du 17 juin 2020 relative à la rationalisation de la hiérarchie des normes applicable aux documents d’urbanisme

18.06.20

46, I, 3°

Prévoir les modifications des dispositions du chapitre Ier du titre IV du livre Ier du code de l’urbanisme relatives au contenu du schéma de cohérence territoriale rendues nécessaires par les évolutions prévues aux 1° et 2° du présent article ;

18 mois à compter de la promulgation de la loi

+ 4 mois (article 14 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19)

LOGL2006959R

Ordonnance n° 2020-745 du 17 juin 2020 relative à la rationalisation de la hiérarchie des normes applicable aux documents d’urbanisme

18.06.20

46, I, 4°

Prévoir les mesures de coordination rendues nécessaires par le 2° du présent article pour l’adaptation du schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires prévu à l’article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales, ainsi que les modalités d’application dans le temps de ces mesures à ce schéma.

18 mois à compter de la promulgation de la loi

+ 4 mois (article 14 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19)

LOGL2006959R

Ordonnance n° 2020-745 du 17 juin 2020 relative à la rationalisation de la hiérarchie des normes applicable aux documents d’urbanisme

18.06.20

46, I, 5°

Prévoir que seuls le projet d’aménagement et de développement durable du plan local d’urbanisme ainsi que les orientations d’aménagement et de programmation du plan local d’urbanisme qui concernent l’ensemble du territoire couvert par ledit plan doivent être compatibles avec le document d’orientation et d’objectifs du schéma de cohérence territoriale.

18 mois à compter de la promulgation de la loi

+ 4 mois (article 14 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19)

LOGL2006959R

Ordonnance n° 2020-745 du 17 juin 2020 relative à la rationalisation de la hiérarchie des normes applicable aux documents d’urbanisme

18.06.20

46, II

Adapter l’objet, le périmètre et le contenu du schéma de cohérence territoriale prévu à l’article L. 141-1 du code de l’urbanisme, afin de tirer les conséquences de la création du schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires prévu à l’article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales et du transfert de la compétence en matière de plan local d’urbanisme aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre.

18 mois à compter de la promulgation de la loi

+ 4 mois (article 14 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19)

LOGL2006962R

Ordonnance n° 2020-744 du 17 juin 2020 relative à la modernisation des schémas de cohérence territoriale

18.06.20

50, 1°

Actualiser, clarifier, simplifier et compléter le régime juridique des schémas d’aménagement régional prévus aux articles L. 4433-7 à L. 4433-11 du code général des collectivités territoriales en redéfinissant le plan de ces dispositions et en en améliorant la rédaction afin de supprimer les difficultés d’intelligibilité du régime actuel ;

12 mois à compter de la promulgation de la loi

LOGL1922260R

 Ordonnance n° 2019-1170 du 13 novembre 2019 relative au régime juridique du schéma d’aménagement régional

14.11.19

50, 2°

Actualiser, clarifier, simplifier et compléter le régime juridique des schémas d’aménagement régional prévus aux articles L. 4433-7 à L. 4433-11 du code général des collectivités territoriales en supprimant les dispositions obsolètes et en prenant en compte les trois types de collectivités concernées ;

12 mois à compter de la promulgation de la loi

LOGL1922260R

 Ordonnance n° 2019-1170 du 13 novembre 2019 relative au régime juridique du schéma d’aménagement régional

14.11.19

50, 3°

Actualiser, clarifier, simplifier et compléter le régime juridique des schémas d’aménagement régional prévus aux articles L. 4433-7 à L. 4433-11 du code général des collectivités territoriales en modifiant le contenu du schéma d’aménagement régional et en redéfinissant ses effets, notamment en ce qu’il tient lieu de schéma de mise en valeur de la mer, de schéma régional de cohérence écologique et de schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie ;

12 mois à compter de la promulgation de la loi

LOGL1922260R

 Ordonnance n° 2019-1170 du 13 novembre 2019 relative au régime juridique du schéma d’aménagement régional

14.11.19

50, 4°

Actualiser, clarifier, simplifier et compléter le régime juridique des schémas d’aménagement régional prévus aux articles L. 4433-7 à L. 4433-11 du code général des collectivités territoriales en modifiant la liste des normes et documents avec lesquels le schéma d’aménagement régional doit être compatible ou qu’il doit prendre en compte, en harmonisant les modalités de mise en compatibilité et en procédant aux modifications qui seraient rendues nécessaires pour mieux définir son articulation avec les autres documents de planification et d’urbanisme ;

12 mois à compter de la promulgation de la loi

LOGL1922260R

 Ordonnance n° 2019-1170 du 13 novembre 2019 relative au régime juridique du schéma d’aménagement régional

14.11.19

50, 5°

Actualiser, clarifier, simplifier et compléter le régime juridique des schémas d’aménagement régional prévus aux articles L. 4433-7 à L. 4433-11 du code général des collectivités territoriales en simplifiant certaines modalités procédurales relatives à son élaboration et son évolution ainsi qu’à son approbation.

12 mois à compter de la promulgation de la loi

LOGL1922260R

 Ordonnance n° 2019-1170 du 13 novembre 2019 relative au régime juridique du schéma d’aménagement régional

14.11.19

65

Adapter le régime applicable au contrat de construction d’une maison individuelle avec fourniture de plan lorsque le constructeur assure la fabrication, la pose et l’assemblage sur le chantier d’éléments préfabriqués sur un site de production ou sur le chantier et réalise l’ouvrage.

6 mois à compter de la promulgation de la loi

TERL1908590R

Ordonnance n° 2019-395 du 30 avril 2019 relative à l’adaptation du contrat de construction d’une maison individuelle avec fourniture de plan dans le cadre de la préfabrication

02.05.19

88, III, 1°

Permettre aux organismes d’habitations à loyer modéré mentionnés à l’article L. 411-2 du code de la construction et de l’habitation et aux sociétés d’économie mixte mentionnées à l’article L. 481-1 du même code de mettre en œuvre à titre expérimental une politique des loyers qui prenne mieux en compte la capacité financière des ménages nouveaux entrants du parc social ;

6 mois à compter de la promulgation de la loi

LOGL1907092R

Ordonnance n° 2019-453 du 15 mai 2019 relative à l’expérimentation d’une politique des loyers prenant mieux en compte la capacité financière des ménages nouveaux entrants du parc social

16.05.19

88, III, 2°

Adapter le mode de calcul du supplément de loyer de solidarité mentionné à l’article L. 441-3 dudit code afin de renforcer la prise en compte des capacités financières des locataires.

6 mois à compter de la promulgation de la loi

LOGL1908732R

Ordonnance n° 2019-454 du 15 mai 2019 portant adaptation du mode de calcul du supplément de loyer de solidarité

16.05.19

88, IV, 1°

Permettre l’inclusion, dans un contrat de vente par un organisme d’habitations à loyer modéré à une personne physique d’un logement situé dans un immeuble destiné à être soumis au statut de la copropriété, d’une clause permettant de différer le transfert de propriété de la quote-part de parties communes à l’acquéreur jusqu’à l’expiration d’une période ne pouvant excéder dix ans à compter de la première de ces ventes intervenues dans cet immeuble, en prévoyant la possibilité d’une décote du prix de vente ;

6 mois à compter de la promulgation de la loi

LOGL1907111R

Ordonnance n° 2019-418 du 7 mai 2019 relative à la vente de logements appartenant à des organismes d’habitations à loyer modéré à des personnes physiques avec application différée du statut de la copropriété

08.05.19

88, IV, 2°

Définir les droits et les obligations de l’organisme vendeur et de l’acquéreur durant une période ne pouvant excéder dix ans à compter de la première de ces ventes intervenues dans cet immeuble ;

6 mois à compter de la promulgation de la loi

LOGL1907111R

Ordonnance n° 2019-418 du 7 mai 2019 relative à la vente de logements appartenant à des organismes d’habitations à loyer modéré à des personnes physiques avec application différée du statut de la copropriété

08.05.19

88, IV, 3°

Définir les conditions dans lesquelles l’acquéreur participe au paiement des charges d’entretien et de fonctionnement des parties communes de l’immeuble pendant la période mentionnée au 1°, en dehors de toute application du statut de la copropriété, de toute association syndicale libre ou de toute association foncière urbaine libre.

6 mois à compter de la promulgation de la loi

LOGL1907111R

Ordonnance n° 2019-418 du 7 mai 2019 relative à la vente de logements appartenant à des organismes d’habitations à loyer modéré à des personnes physiques avec application différée du statut de la copropriété

08.05.19

198, 1°

Harmoniser et simplifier les polices administratives mentionnées aux articles L. 123-1 à L. 123-4, L. 129-1 à L. 129-7, L. 511-1 à L. 511-7, L. 521-1 à L. 521-4, L. 541-1 à L. 541-6 et L. 543-1 à L. 543-2 du code de la construction et de l’habitation et aux articles L. 1311-4, L. 1331-22 à L. 1331-30 et L. 1334-1 à L. 1334-12 du code de la santé publique, et de prendre les mesures de coordination et de mise en cohérence nécessaires pour favoriser la mise en œuvre effective des mesures prescrites par l’autorité administrative.

18 mois à compter de la promulgation de la loi

+ 4 mois (article 14 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19)

LOGL2007763R

Ordonnance n° 2020-1144 du 16 septembre 2020 relative à l’harmonisation et à la simplification des polices des immeubles, locaux et installations

17.09.20

198, 2°

Répondre plus efficacement à l’urgence, en précisant les pouvoirs dévolus au maire dans le cadre de ses pouvoirs de police générale en matière de visite des logements et de recouvrement des dépenses engagées pour traiter les situations d’urgence, et en articulant cette police générale avec les polices spéciales de lutte contre l’habitat indigne ;

18 mois à compter de la promulgation de la loi

+ 4 mois (article 14 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19)

LOGL2007763R

Ordonnance n° 2020-1144 du 16 septembre 2020 relative à l’harmonisation et à la simplification des polices des immeubles, locaux et installations

17.09.20

198, 3°, a)

Favoriser l’organisation au niveau intercommunal des outils et moyens de lutte contre l’habitat indigne, en particulier en modifiant les dispositions prévues à l’article L. 5211-9-2 du code général des collectivités territoriales relatives au transfert aux présidents des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre compétents en matière d’habitat des polices de lutte contre l’habitat indigne relevant du code de la construction et de l’habitation, en particulier les modalités de décision des maires, de façon à établir un cadre stable à l’exercice des compétences transférées et sécuriser les actes juridiques pris pendant les périodes transitoires de transfert de compétences ;

18 mois à compter de la promulgation de la loi

+ 4 mois (article 14 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19)

LOGL2007763R

Ordonnance n° 2020-1144 du 16 septembre 2020 relative à l’harmonisation et à la simplification des polices des immeubles, locaux et installations

17.09.20

198, 3°, b)

Favoriser la création, par les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre compétents en matière d’habitat et par la métropole de Lyon, de services mutualisant au niveau intercommunal les moyens matériels et financiers de lutte contre l’habitat indigne et les immeubles dangereux

18 mois à compter de la promulgation de la loi

+ 4 mois (article 14 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19)

LOGL2007763R

Ordonnance n° 2020-1144 du 16 septembre 2020 relative à l’harmonisation et à la simplification des polices des immeubles, locaux et installations

17.09.20

198, 3°, c)

Modifier l’article L. 301-5-1-1 du code de la construction et de
l’habitation pour favoriser la délégation des prérogatives du préfet en matière de police de santé publique définies aux articles L. 1311-4, L. 1331-22 à L. 1331-30 et L. 1334-1 à L. 1334-12 du code de la santé publique au président de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre lorsqu’a été créé au niveau intercommunal un service mutualisant les moyens de lutte contre l’habitat indigne et les immeubles dangereux

18 mois à compter de la promulgation de la loi

+ 4 mois (article 14 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19)

LOGL2007763R

Ordonnance n° 2020-1144 du 16 septembre 2020 relative à l’harmonisation et à la simplification des polices des immeubles, locaux et installations

17.09.20

198, 3°, d)

Adapter les dispositions prévues aux a à c du présent 3° à la situation particulière de la métropole du Grand Paris.

18 mois à compter de la promulgation de la loi

+ 4 mois (article 14 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19)

LOGL2007763R

Ordonnance n° 2020-1144 du 16 septembre 2020 relative à l’harmonisation et à la simplification des polices des immeubles, locaux et installations

17.09.20

215, I

Adopter de la partie législative d’un code relatif à la copropriété des immeubles bâtis afin de regrouper et organiser l’ensemble des règles régissant le droit de la copropriété.

24 mois à compter de la promulgation de la loi

+ 4 mois (article 14 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19)

 

Non prise (délai expiré le 23 mars 2021)

 

215, II, 1°

Redéfinir le champ d’application et adapter les dispositions de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis au regard des caractéristiques des immeubles, de leur destination et de la taille de la copropriété, d’une part, et modifier les règles d’ordre public applicables à ces copropriétés, d’autre part ;

12 mois à compter de la promulgation de la loi.

JUSC1920054R

Ordonnance n° 2019-1101 du 30 octobre 2019 portant réforme du droit de la copropriété des immeubles bâtis

31.10.19

215, II, 2°

Clarifier, moderniser, simplifier et adapter les règles d’organisation et de gouvernance de la copropriété, celles relatives à la prise de décision par le syndicat des copropriétaires ainsi que les droits et obligations des copropriétaires, du syndicat des copropriétaires, du conseil syndical et du syndic.

12 mois à compter de la promulgation de la loi.

JUSC1920054R

Ordonnance n° 2019-1101 du 30 octobre 2019 portant réforme du droit de la copropriété des immeubles bâtis

31.10.19

217, I, 1°

Définir un régime d’agrément des prestataires qui assistent les propriétaires et les locataires dans l’établissement du contrat de location à l’aide d’outils numériques permettant à la fois d’établir des contrats de location conformes à la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 et d’assurer la transmission automatique des données relatives à ces contrats prévue au 2° du présent I.

18 mois à compter de la publication de la loi

Délai prolongé de quatre mois par l’article 14 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19

 

Non prise (délai expiré le 23 septembre 2020)

 

217, I, 2°, a)

Déterminer les obligations et modalités de transmission à l’État et à l’association nationale mentionnée à l’article L. 366-1 du code de la construction et de l’habitation des données relatives à ces contrats, y compris ceux en cours d’exécution à la date d’entrée en vigueur de l’ordonnance, en prévoyant, le cas échéant, des règles spécifiques pour les contrats donnant droit à des avantages fiscaux liés à l’investissement locatif.

18 mois à compter de la publication de la loi

Délai prolongé de quatre mois par l’article 14 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19

 

Non prise (délai expiré le 23 septembre 2020)

 

217, I, 2°, b)

Prévoir les sanctions applicables en cas de non-respect des règles adoptées sur le fondement du a.

18 mois à compter de la publication de la loi

Délai prolongé de quatre mois par l’article 14 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19

 

Non prise (délai expiré le 23 septembre 2020)

 

217, I, 2°, c)

Déterminer les modalités de conservation et d’utilisation de ces données par l’État et l’association mentionnée au même a.

18 mois à compter de la publication de la loi

Délai prolongé de quatre mois par l’article 14 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19

 

Non prise (délai expiré le 23 septembre 2020)

 

217, I, 2°, d)

Déterminer les conditions de la mise à disposition du public des résultats des traitements effectués sur ces données.

18 mois à compter de la publication de la loi

Délai prolongé de quatre mois par l’article 14 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19

 

Non prise (délai expiré le 23 septembre 2020)

 

 


([1]) Rapport d’information n° 2077, déposé en application de l’article 145-7 du Règlement par la commission des affaires économiques sur la mise en application de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, présenté par M. Thibault Bazin et M. Richard Lioger, enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 26 juin 2019.

([2]) La documentation reçue par vos rapporteurs a rendu possible une vérification exhaustive de la bonne mise en application des dispositions de la loi. Les tableaux d’application compilés par le secrétariat général du Gouvernement (cf. annexes III et IV) et transmis à la demande des rapporteurs ont permis de faire un tour d’horizon des mesures appliquées. Les administrations contactées, notamment la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages, ont fait preuve de diligence dans la transmission des informations demandées, répondant de manière réactive et complète aux questions transmises par vos rapporteurs, en tenant compte des délais contraints de cette mission. Il en va de même des différents acteurs publics sollicités pour des contributions techniques, à l’image de la métropole d’Aix-Marseille-Provence, de l’Agence nationale pour l’information sur le logement, de la Caisse de garantie du logement locatif social, ou encore du groupe Action Logement, qui ont soumis des retours d’expérience et des analyses techniques extrêmement précieuses pour vos rapporteurs. Enfin, les outils de suivi de la loi créés par le Sénat, notamment le tableau de concordance des articles et l’état d’application de la loi, mis à jour régulièrement, ont également été très utiles.

([3]) C’est le cas par exemple du VII de l’article 102 qui prévoit la prise d’un décret mais est en fait satisfait par la rédaction actuelle du code de la construction et de l’habitation (article R. 313-21).

([4]) C’est le cas par exemple du II de l’article 109.

([5]) Il en va ainsi de la possibilité expérimentale de conclure un contrat de mixité sociale à l’échelle intercommunale (II de l’article 130), qui n’a fait l’objet d’aucune candidature, et a été abrogée et remplacée par un dispositif plus simple (III de l’article 68 de la loi 3DS).

([6]) Il en est ainsi du décret du 21 décembre 2021 relatif aux dispositions applicables à Saint-Pierre-et-Miquelon, qui a permis de répondre aux besoins restants de l’article 106.

([7]) La grande opération d’urbanisme est codifiée aux articles L. 312-3 et suivants du code de l’urbanisme.

([8]) Article L. 321-23 du code de l’urbanisme.

([9]) Article L. 300-6-1 du code de l’urbanisme.

([10]) Article L. 312-2-1 du code de l’urbanisme.

([11]) Article 112 de la loi 3DS.

([12]) Article 30 bis A du projet de loi, créé par le Sénat et transféré en cours de navette à l’article 112 de la loi.

([13]) Article L. 421-2 du code de l’urbanisme, issu de l’ordonnance n° 2005-1527 du 8 décembre 2005.

([14]) Ce régime, créé en 2005, a permis de simplifier le droit des opérations complexes en fusionnant quatre autorisations préexistantes : le permis de lotir, l’autorisation d’installations et travaux divers (ITD), l’autorisation d’aménager un parc résidentiel de loisirs et l’autorisation d’aménager un camping.

([15]) Article R. 421-19 du code de l’urbanisme.

([16]) Par coordination, le IV de l’article 157 de la loi ELAN a été abrogé.

([17]) Formulaire CERFA 88065-07.

([18]) II de l’article 88 de la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine (LCAP).

([19]) Contrairement au permis d’aménager, les terrains peuvent aussi être vendus avant d’être équipés.

([20]) Une partie de la doctrine ainsi que les administrations (réponse ministérielle n° 3785, JOAN 6 nov. 2012, p. 6302) considèrent que leur caractère obligatoire découle de la rédaction de l’article L. 151-2 du code de l’urbanisme aussi bien que du conditionnement de l’ouverture des zones AU à l’urbanisation à l’existence d’orientations d’aménagement (cf. commentaire de l’article 49 bis C). Une autre partie de la doctrine estime que le caractère obligatoire est incompatible avec la rédaction de l’article L. 152-1 du code de l’urbanisme.

([21]) Par comparaison, les dispositions réglementaires s’appliquent aux autorisations d’urbanisme selon un rapport de conformité, ce qui implique qu’est interdit tout écart entre la norme et la mesure d’exécution.

([22]) Articles L. 123-2 et L. 123-19 du code de l’environnement.

([23]) Article 7 de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d’ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée (loi MOP).

([24]) Dans le droit commun, le marché public de conception-réalisation n’est possible que sous réserve de l’existence de circonstances rendant nécessaire l’association de l’entrepreneur aux études de l’ouvrage : motifs d’ordre technique ou engagement contractuel sur un niveau d’amélioration de l’efficacité énergétique.

([25]) Ancien article L. 111-9 du même code. À nouveau, une recodification, menée par le pouvoir réglementaire dans l’ordonnance n° 2020-71 du 29 janvier 2020, a compromis, comme dans le cas des ordonnances de recodification des dispositions concernant le SCoT (voir plus bas), la lisibilité des normes dans le temps et celle de l’action du législateur, sans contribuer fortement à une meilleure intelligibilité des normes prévues par ce code difficile.

([26]) Cette ordonnance a été ratifiée par le législateur à l’article 175 de la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, par l’adoption d’un amendement n° CS3913, introduit en cours de navette par le Gouvernement. L’exposé des motifs de cet amendement est le suivant : « Le présent amendement procède à la ratification de l’ordonnance n° 2020‑71 du 29 janvier 2020 relative à la réécriture des règles de construction et recodifiant le livre Ier du code de la construction et de l’habitation. Cette disposition fut initialement prévue par l’article Ier du projet de loi nº 3235 ratifiant l’ordonnance n° 2020‑71 ».

([27]) Commission pour la relance durable de la construction de logements, rapport, Tome I : Diagnostic et mesures phares, 22 septembre 2021, page 4

([28]) Données SDES des logements autorisés en Île-de-France par trimestre, par zones de tension (Sit@del2).

([29]) Cette stabilité tend à confirmer que l’ordre de grandeur annuel moyen pour les transactions dans l’ancien se situe, depuis 2017, autour de 1 million de transactions, contre 0,8 million jusqu’en 2015.

([30]) Selon l’étude d’impact du projet d’ordonnance, le coût d’élaboration d’un schéma de cohérence territoriale est variable d’un territoire à un autre, de 100 000 euros à plus de 2 millions d’euros. Les études occupent le principal poste de dépenses avec 86 % du budget. La concertation-communication représente quant à elle 10 % du budget, et l’enquête publique seulement 4 %.

([31]) Article L. 5741-2 du code général des collectivités territoriales.

([32]) Depuis l’article 96 de la loi 3DS, les ORT bénéficient d’un régime séparé mais similaire prévu à l’article L. 152-6-4 du code de l’urbanisme.

([33]) L’obligation de motivation de la décision d’octroi de la dérogation a en revanche été supprimée à l’article 112 de la loi 3DS.

([34]) Le littoral est une bande du territoire à la fois terrestre et maritime qui inclut le rivage – bande côtière, lais et relais de la mer – ainsi que des espaces littoraux voisins. Un document-cadre, la stratégie nationale pour la mer et le littoral, est décliné au niveau régional par les documents stratégiques de façade ou de bassin.

([35]) Des exceptions sont ouvertes pour les constructions liées aux activités agricoles ou sylvicoles ou encore pour l’implantation d’éoliennes, à condition notamment que ces constructions soient incompatibles avec le voisinage des zones habitées et qu’elles se trouvent en dehors des espaces proches du rivage.

([36]) Cette notion s’apprécie au regard des critères suivants, qui ne sont pas cumulatifs : la distance séparant la zone du rivage ; les caractéristiques des espaces séparant les terrains de la mer : caractère urbanisé ou non, existence  d’une coupure physique (voie de chemin de fer, autoroute, route), relief et configuration des lieux ; l’existence d’une co-visibilité entre les secteurs concernés et la mer, la visibilité étant appréciée aussi bien depuis le rivage que depuis l’intérieur des terres (Conseil d’État, 3 mai 2004, Barrière,  n° 251534).

([37]) À condition qu’elle soit justifiée et motivée dans le PLU selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l’accueil d’activités économiques exigeant la proximité immédiate de l’eau.

([38]) La notion d’espace urbanisé est appréciée au cas par cas par le juge administratif.

([39]) Conseil d’État, 6e et 1re sous-sections réunies, 9 novembre 2015, n° 372531, « Commune de Porto-Vecchio ».

([40]) Conseil d’État, 21 avril 2017, n° 403765.

([41]) Cour administrative d’appel de Nantes, 29 novembre 2013, n° 12NT01794, Commune de Fermanville.

([42]) Cour administrative d’appel de Nantes, 28 février 2014, n° 12NT01411, Commune de Crozon.

([43]) Circulaire UHC/DU1 n° 2006-31 du 14 mars 2006 relative à l’application de la loi Littoral (abrogée).

([44]) Conseil d’État, 6e et 1re sous-sections réunies, 9 novembre 2015, n° 372531, « Commune de Porto-Vecchio ».

([45]) Nouvelles rédactions des articles L. 121-3 et L. 121-8 du code de l’urbanisme, issues de l’article 42 de la loi.

([46]) Conseil d’État, 6e et 5e chambres réunies, 9 juillet 2021, no° 445118.

([47]) En témoignent la nouvelle réglementation énergétique RE2020, la création de la prime de transition énergétique baptisée « Ma Prime Rénov’ », et la création d’une obligation de rénovation énergétique renforcée dans la loi Climat et résilience.

([48]) Articles R. 431-4 et R. 431-35 du code de l’urbanisme.

([49]) Rapport NOR. TRED2026185X.

([50]) Clause prévue dans le projet de décret relatif à l’évaluation environnementale des projets, proposé à consultation publique par le ministère de la transition écologique, le 20 janvier 2022.

([51]) Introduite par la loi du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature, qui a imposé, dans le cadre des procédures d’autorisation préalable à la réalisation de certains travaux ou ouvrages, la réalisation d’une étude d’impact.

([52]) Article L. 303-2 du code de la construction et de l’habitation

([53]) Dans la circulaire du 4 février 2019 relative à l’accompagnement par l’État des projets d’aménagement des territoires, le Gouvernement encourage la conversion de dispositifs tels qu’Action Cœur de ville en convention ORT afin d’accélérer le déploiement de ces outils juridiques.

([54]) Ces articles résultent des dispositions de la loi n° 2014‑626 du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises (ACTPE).

([55]) Ces dispositions s’appliquent aussi aux services au volant (dits aussi « drives »).

([56]) Sur la compétence d’urbanisme, cf. commentaire de l’article 51.

([57]) Article L. 425-4 du code l’urbanisme.

([58]) Article L. 750-1 du code de commerce résultant des dispositions de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie.

([59]) V de l’article L. 752-6 du code de commerce.

([60]) Circulaire 6206/SG, NOR PRMX2022573C, 24 août 2020. 

([61]) Ces diverses dispositions sont codifiées au titre V du livre VII du code de commerce, qui porte sur l’aménagement commercial (articles L. 750-1 à L. 752-27).

([62]) Au 31 décembre 2015, les OPH franciliens, départementaux ou d’agglomération, dont le parc compte 10 000 logements et plus, représentent 60 % du parc social des OPH, soit un tiers du parc social total. L’OPH Paris Habitat compte, à lui seul, pour plus de 120 000 logements, soit 5,5 % du parc des OPH.

([63]) Il s’agit notamment des organismes ayant fait le choix de céder leur patrimoine et de ceux relevant du régime de « l’exception départementale » (organismes ayant leur siège dans un département dans lequel aucun groupe, ni aucun autre organisme d’HLM ou SEM agréée appartenant un groupe, n’a son siège).

([64]) Article L. 329-1 du code de l’urbanisme.

([65]) Article L. 411-2 du code de la construction et de l’habitation.

([66]) Article L. 481-1 du code de la construction et de l’habitation.

([67]) Cet article a modifié les dispositions de l’article L. 3211-7 du code général de la propriété des personnes publiques.

([68]) Article L. 255-2 du code de la construction et de l’habitation.

([69]) Article L. 255-10 du code de la construction et de l’habitation.

([70]) Article 2 du décret n° 2019-661 du 27 juin 2019 relatif à l’application des articles L. 302-5 et suivants du code de la construction et de l’habitation et à l’octroi de la subvention spécifique en faveur du développement d’une offre de logements locatifs très sociaux.

([71]) Article L. 443-7 du code de la construction et de l’habitation (4° du II ).

([72]) Dans sa décision n° 2014-691 DC du 20 mars 2014, le Conseil constitutionnel a reconnu « qu’en instaurant un mécanisme d’encadrement des loyers applicable à certaines zones urbanisées marquées par un déséquilibre de l’offre et de la demande de logements entraînant une hausse des loyers, le législateur a entendu lutter contre les difficultés d’accès au logement qui résultent d’un tel déséquilibre ; qu’il a ainsi poursuivi un but d’intérêt général » (considérant 22).

 Au soutien de la censure de certaines dispositions des articles 6 et 17 de la loi votée par le Parlement, le Conseil constitutionnel a fait valoir, d’une part, qu’en réservant la faculté de demander un complément de loyer aux seuls cas de logements présentant des caractéristiques « exceptionnelles », le législateur « a porté à l’exercice du droit de propriété et à la liberté contractuelle une atteinte disproportionnée à l’objectif poursuivi » (considérant 26) et, d’autre part, qu’en permettant que les loyers de référence majoré et minoré soient fixés par majoration et par minoration du loyer de référence « en fonction de la dispersion des niveaux de loyers observés » et qu’en permettant ainsi « que les conditions d’exercice de la liberté contractuelle varient sur le territoire national en fonction d’un tel critère, indépendant de celui des catégories de logement et des secteurs géographiques, le législateur a méconnu le principe d’égalité » (considérant 27).

([73]) La mesure s’applique aux baux nouveaux signés à compter du 1er décembre 2021 dans les villes de Bagnolet, Bobigny, Bondy, Le Pré Saint-Gervais, Les Lilas, Montreuil, Noisy-le-Sec, Pantin et Romainville. En 2017, le loyer moyen sur le marché libre du territoire d’Est Ensemble atteignait 16,50 €/m² hors charges, soit plus que celui constaté dans certaines grandes métropoles (13 €/m² à Nice, 10 à 11 €/m² à Rennes, Toulouse, Lyon ou Lille). Cf. L. da Veiga, « Seine-Saint-Denis : Est Ensemble expérimente à son tour l’encadrement des loyers », Les Échos, 5 nov. 2021.

([74]) Inspection générale des finances, Conseil général de l’environnement et du développement durable, « Mission d’évaluation de politique publique : le logement locatif meublé », janvier 2016.

([75]) Lien permanent vers l’enregistrement vidéo de cette réunion : https://event.assemblee-nationale.fr/video.11909113_6215ee0723d5e.commission-des-affaires-economiques--rapport-d-information-sur-l-equilibre-des-relations-commercial-23-fevrier-2022.