N° 1913

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 22 novembre 2023.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES (1)

sur la réponse européenne à l’Inflation Reduction Act (IRA),

 

ET PRÉSENTÉ

PAR Mmes Marietta KARAMANLI et Sabine THILLAYE,

Députées

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  1.     La composition de la commission figure au verso de la présente page.

 

La Commission des affaires européennes est composée de : M. Pieyre-Alexandre ANGLADE, président ; M. Pierre-Henri DUMONT, Mme Marietta KARAMANLI, MM. Frédéric PETIT, Charles SITZENSTUHL, vice-présidents ; M. Henri ALFANDARI, Mmes Louise MOREL, Nathalie OZIOL, secrétaires ; MM. Gabriel AMARD, David AMIEL, Rodrigo ARENAS, Mme Delphine BATHO, MM. Pierrick BERTELOOT, Manuel BOMPARD, Mme Pascale BOYER, MM. Stéphane BUCHOU, André CHASSAIGNE, Mmes Sophia CHIKIROU, Annick COUSIN, Laurence CRISTOL, MM. Thibaut FRANÇOIS, Guillaume GAROT, Mmes Félicie GÉRARD, Perrine GOULET, MM. Benjamin HADDAD, Michel HERBILLON, Alexandre HOLROYD, Philippe JUVIN, Mmes Brigitte KLINKERT, Julie LAERNOES, Constance LE GRIP, Nicole LE PEIH, M. Denis MASSÉGLIA, Mmes Joëlle MÉLIN, Yaël MENACHE, M. Thomas MÉNAGÉ, Mmes Lysiane MÉTAYER, Danièle OBONO, Anna PIC, MM. Christophe PLASSARD, Jean-Pierre PONT, Alexandre SABATOU, Nicolas SANSU, Vincent SEITLINGER, Mmes Michèle TABAROT, Liliana TANGUY, Sabine THILLAYE, Estelle YOUSSOUFFA.

 

 


SOMMAIRE

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Pages

introduction

PREMIÈRE PARTIE : La réponse européenne à l’IRA doit préserver la compétitivité de l’industrie européenne par le soutien aux filières technologiques décarbonées

I. L’ira, dont l’impact macroéconomique est difficile à évaluer, marque l’ambition des états-unis en matière de lutte contre le réchauffement climatique

A. L’ira est un plan de réformes écologiques et sociales, dont le principal volet concerne le climat

1. L’IRA soutient, du côté de l’offre et de la demande, la transition verte de l’industrie américaine

2. L’IRA comprend également un volet social, sans effets détectés sur la compétitivité de l’industrie européenne

B. si l’IRA a fait craindre un déficit de compétitivité de l’industrie européenne, les prévisions de son impact macroéconomique sont rassurantes

1. Les craintes de différentiel de compétitivité et de délocalisation s’expliquent notamment par le volet protectionniste de l’IRA

2. Les études les plus récentes relèvent toutefois que les moyens consacrés à l’IRA et ses effets macroéconomiques sont modestes

II. Le plan industriel du pacte vert pour l’europe constitue le volet principal de la réponse européenne à l’ira

A. la réponse européenne à l’ira s’appuie sur trois initiatives législatives d’importance

1. Le soutien à la constitution d’une véritable filière industrielle « net zéro »

2. La réforme du marché européen de l’électricité

B. le financement de cette nouvelle initiative s’appuie pour une part écrasante sur les financements déjà existants

1. La constitution du programme « STEP » s’appuie sur des financements déjà existants, dans l’attente d’un véritable Fonds de souveraineté

2. Les financements supplémentaires prévus à la suite de l’annonce de l’IRA sont très limités, en raison du volume des financements déjà existants dans l’Union

Deuxième partie : l’union européenne doit rapidement apporter une réponse normative, budgétaire et commerciale à l’ira

I. Les initiatives législatives apportant un soutien à l’industrie décarbonée doivent être mieux calibrées

A. l’ambition du règlement sur les matières premières critiques doit être rehaussée au cours des trilogues par rapport à la proposition intiale

1. Les objectifs globaux du texte en matière d’extraction, de transformation et de recyclage doivent être revalorisés, et déclinés à plus long terme

2. Les mécanismes de suivi et d’atténuation des risques doivent trouver un équilibre entre efficacité et protection des données sensibles

B. Le texte sur l’industrie à zéro émissions net doit être le plus opérationnel possible pour les pouvoirs publics et les acteurs économiques

1. La structure du règlement et le périmètre des technologies couvertes font débat au Parlement européen et au Conseil

2. L’accessibilité et le caractère opérationnel des dispositions du règlement sont également importants pour les milieux industriels et les pouvoirs adjudicateurs

II. la réponse européenne à l’ira doit également inclure un volet budgétaire et commercial solide

A. La réponse européenne à l’ira nécessite la constitution d’un véritable fonds de souveraineté

1. La création d’un fonds de souveraineté est nécessaire pour le soutien aux technologies propres sur le sol de l’Union

2. Le Fonds de souveraineté pourrait être alimenté de par nouvelles ressources propres de l’Union européenne

B. L’union doit également apporter une réponse commerciale à l’ira

1. L’Union doit privilégier le dialogue aux représailles commerciales ou à une course aux subventions

2. Des accords avec les États-Unis doivent permettre de rendre éligibles les produits européens aux crédits d’impôt de l’IRA

ConClusion

TRAVAUX DE LA COMMISSION

proposition de résolution européenne initiale

Amendements examinés par la commision

Le 9 mars 2023, la Commission européenne a modifié l'encadrement temporaire de crise et de transition pour les mesures d'aide d'État visant à soutenir l'économie à la suite de l'agression de la Russie contre l'Ukraine, adopté pour la première fois le 23 mars 2022 et déjà modifié. Les mesures de soutien visant à faciliter la transition vers une industrie à émissions nulles, telles que les mesures visant à accélérer le déploiement des énergies renouvelables et le stockage de l'énergie et à la décarbonation des processus de production industriels, sont prorogées jusqu'au 31 décembre 2025 ; les autres dispositions de l'encadrement temporaire pour les crises restent applicables jusqu'au 31 décembre 2023 notamment vis-à-vis des montants limités de l’aide, soutien sous forme de garanties d'État et de prêts bonifiés, aides destinées à compenser les prix élevés de l'énergie, mesures visant à soutenir la réduction de la demande d'électricité. Nous souhaiterions donc par cet amendement que la Commission puisse approfondir sa réflexion sur une prolongation voire une pérennisation de ces mesures.

La loi n°2023-973 relative à l’industrie verte, promulguée le 23 octobre 2023 au Journal officiel, a pour objectif d’accélérer la réindustrialisation du pays et de faire de la France le leader de l’industrie verte en Europe notamment par l’amélioration de la prise en compte des considérations environnementales dans la commande publique. Le soutien à l'industrie verte, qui s'inscrit dans le nouveau cadre européen du Net Zero Industry Act (NZIA) et Temporary Crisis and Transition Framework (TCTF), se veut être une réponse à l'Inflation Reduction Act (IRA) adopté en 2022 par les États-Unis.

Sous l'impulsion de la France, la Commission européenne a pris acte, avec le Net Zero Industry Act, de l'importance du soutien aux technologies vertes alors que la concurrence avec les États-Unis s'accélère sur les implantations industrielles. L'affirmation d'une souveraineté industrielle européenne est une condition indispensable au développement d'industries vertes sur notre continent. Conformément à cette orientation, en complément des actions visant une meilleure orientation des aides et soutiens publics, la loi n°2023-973 vise à mobiliser l'épargne privée en faveur du verdissement.

Cet amendement est adopté.

Proposition de résolution européenne adoptée par la commission

Annexe  1 : Liste des personnes auditionnées par les rapporteures

 


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   introduction

 

Mesdames, Messieurs,

 L’annonce par les États-Unis de l’Inflation Reduction Act (IRA) a suscité une réaction partagée des Européens. D’une part, ce plan massif d’investissements de 432 milliards de dollars sur dix ans en incluant son volet social, permet d’impliquer à nouveau les États-Unis dans la lutte contre le réchauffement climatique après les errements liés à la présidence de Donald Trump. L’IRA marque également une orientation sociale du plan de relance des États-Unis, avec un plafonnement du prix de certains médicaments.

D’autre part, l’IRA a fait naître dans les États membres la crainte d’effets dévastateurs sur l’industrie européenne, avec des risques de renoncement au développement de projets, ou de délocalisation. Cette crainte s’explique notamment par la présence d’une clause de contenu local imposée dans l’IRA. Les Américains pourront bénéficier d’un crédit d’impôt uniquement si le produit est construit ou assemblé sur le sol des États-Unis. Outre un prix de l’énergie plus faible aux États-Unis qu’en Europe, les subventions massives pourraient ainsi accroître le différentiel d’attractivité.

Vos rapporteures tiennent toutefois à souligner que leurs travaux n’ont pas mis en exergue de risques majeurs pour la compétitivité de l’industrie européenne. La première conclusion est que les effets de l’IRA à moyen et long terme restent difficiles à estimer à la fin de l’année 2023. La deuxième conclusion est que l’Union européenne dispose d’une capacité d’investissement comparable et d’un environnement réglementaire favorable au développement d’une industrie propre. Les études les plus récentes, d’instituts spécialisés ou de la Commission européenne, démontrent ainsi que les moyens consacrés à l’IRA et ses effets macroéconomiques sont modestes, en particulier au regard des dispositifs existants dans l’Union.

En réponse au vote de l’IRA par le Congrès américain, la Commission européenne a présenté le volet industriel du Pacte Vert. Trois textes principaux sont en cours de négociation entre le Parlement européen et le Conseil : le règlement sur les matières premières critiques pour sécuriser l’approvisionnement de l’Union dans les matériaux nécessaires à la transition ; le règlement sur l’industrie à « zéro net » pour accroître la production de technologies propres de l’Union ; la réforme du marché de l’électricité pour protéger les consommateurs, y compris industriels, de la variation des prix sur le marché de court terme.


La réponse ne saurait toutefois être uniquement réglementaire. L’Union doit également apporter un soutien budgétaire à l’industrie européenne. Si ce soutien existe déjà, notamment grâce au plan de relance NextGenerationEU et au cadre financier pluriannuel 2021-2027, la création d’un Fonds de souveraineté paraît nécessaire, pour soutenir spécifiquement les objectifs de décarbonation et d’autonomie stratégique de l’Union.

Vos rapporteures mettent également l’accent sur la nécessité d’établir un volet commercial solide en réponse à l’IRA. Si la saisine de l’organisation mondiale du commerce (OMC) pour contrariété aux règles du commerce international paraît contreproductive, il est indispensable de négocier rapidement des accords commerciaux avec les États-Unis pour rendre éligibles les produits européens aux crédits d’impôt de l’IRA.

La réponse européenne à l’IRA doit ainsi être un moyen de servir les objectifs de souveraineté, d’autonomie stratégique et de décarbonation du mix de l’Union européenne.

 


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   PREMIÈRE PARTIE : La réponse européenne à l’IRA doit préserver la compétitivité de l’industrie européenne par le soutien aux filières technologiques décarbonées

I.   L’ira, dont l’impact macroéconomique est difficile à évaluer, marque l’ambition des états-unis en matière de lutte contre le réchauffement climatique

A.   L’ira est un plan de réformes écologiques et sociales, dont le principal volet concerne le climat

1.   L’IRA soutient, du côté de l’offre et de la demande, la transition verte de l’industrie américaine

Promulguée le 16 août 2022, la loi américaine sur la réduction de l’inflation (Inflation Reduction Act – IRA) prévoit 369 milliards de dollars de dépenses sur dix ans en faveur de la transition énergétique. Ce texte vise notamment à promouvoir la production et l’utilisation d’énergies propres aux États-Unis pour favoriser l’émergence d’une industrie verte américaine. La loi accorde des avantages fiscaux aux entreprises qui investissent dans les technologies propres sur le territoire américain et des subventions aux consommateurs qui achètent des produits verts fabriqués aux États-Unis.

L’IRA prévoit ainsi une réduction d’impôt allant jusqu’à 7 500 dollars pour les ménages achetant des véhicules électriques neufs et jusqu’à 4 000 dollars pour des véhicules d’occasion. Les bornes de recharge obtiendront également une réduction d’impôt lors de leur installation, l’objectif étant que les véhicules électriques représentent la moitié des voitures neuves en 2030.

L’IRA soutient également le développement du secteur des technologies décarbonées aux États-Unis. La loi prévoit des crédits d’impôt pour la production de composants liés aux énergies vertes, notamment les panneaux photovoltaïques, les cellules de batterie et certains minerais critiques. Des subventions sont également prévues pour prolonger la durée de vie des réacteurs nucléaires américains et pour favoriser la production d’hydrogène vert. Les aides d’État prévues par l’IRA visent donc à favoriser une production américaine neutre en carbone pour lutter contre le réchauffement climatique et réindustrialiser le pays.

L’ensemble de ces mesures est financé par différentes mesures fiscales, comme la hausse du taux de l’impôt minimum sur le revenu des sociétés, représentant une économie de 313 milliards d’euros sur 10 ans. La réforme des services fiscaux doit également représenter 124 milliards d’euros sur 10 ans.


Vos rapporteures se réjouissent d’abord de l’effort des États-Unis pour atteindre les objectifs de l’accord de Paris et le maintien du réchauffement climatique bien en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels. L’IRA est en effet un effort massif et planifié, étendu sur une dizaine d’années, qui part du constat d’un retard généralisé des investissements dans les énergies propres pour atteindre les objectifs de cet accord. Les États-Unis se sont engagés à réduire de 50 % les émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2030 par rapport à 2005 : cet effort, comparable à celui de l’Union européenne, nécessite des investissements massifs.

2.   L’IRA comprend également un volet social, sans effets détectés sur la compétitivité de l’industrie européenne

L’IRA comprend également un volet social, financé à hauteur de 64 milliards de dollars, afin de diminuer les dépenses de santé des ménages modestes. Ce programme prévoit notamment de prolonger l’Affordable Care Act, autrement appelé Obama care, et de renforcer les pouvoirs du programme fédéral Medicare. Ce programme est l’assurance santé publique pour les seniors qui couvre 63 millions d’Américains de plus de 65 ans. Medicare obtiendra ainsi le pouvoir de négocier les tarifs de certains médicaments, comme le fait la Sécurité sociale en France. Les laboratoires qui refusent de vendre le médicament au prix proposé par le gouvernement devront s’acquitter de pénalités dissuasives. Les dispositions visant à borner le prix des médicaments permettront aux finances publiques d’engranger une économie de 288 milliards de dollars, finançant ainsi une partie substantielle de l’IRA.

Jusqu’alors, Medicare était soumis à une obligation de non-interférence dans les négociations entre les laboratoires, les assureurs et les employeurs. Medicare passe ainsi par des intermédiaires, pharmacies ou assureurs santé privés, à qui il appartient de négocier le prix des médicaments.

Au lancement du dispositif, ce nouveau pouvoir de Medicare concernera dix médicaments sur prescription, coûtant au moins 200 millions de dollars par an à Medicare, sans générique. L’insuline sera ainsi concernée. La réforme fait l’objet d’une levée de boucliers des laboratoires pharmaceutiques aux États-Unis, à l’image de Merk qui a introduit un recours en justice. L’argument des laboratoires est notamment le risque de ralentissement de l’innovation en matière pharmaceutique.

Source : Congressionnal Budget Office (CBO) et Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE)

Vos rapporteures saluent l’effort déployé par le gouvernement fédéral américain pour lutter contre les difficultés d’accès de la population aux médicaments. Ces réformes vont dans le sens d’un rapprochement du système de santé aux États-Unis avec le système « à l’européenne », même si de multiples modèles existent au sein de l’Union.

B.   si l’IRA a fait craindre un déficit de compétitivité de l’industrie européenne, les prévisions de son impact macroéconomique sont rassurantes

Vos rapporteures tiennent à souligner que les États-Unis ne visent pas à établir un différentiel de compétitivité avec l’économie européenne, mais souhaitent d’abord freiner l’inflation, réduire le déficit et investir dans la production d’énergie domestique propre. Les aspects protectionnistes ne visent pas en premier lieu l’Union européenne, mais à réduire la dépendance des États-Unis vis-à-vis « d’entités étrangères préoccupantes », notamment la Russie et la Chine dans des secteurs essentiels. La Chine est par exemple le pays leader en matière de véhicules électriques, d’énergie solaire et éolienne.

Les mesures protectionnistes de l’IRA ne visent ainsi pas l’Union en priorité, mais l’impact sur l’économie européenne ne doit pas être éludé.

1.   Les craintes de différentiel de compétitivité et de délocalisation s’expliquent notamment par le volet protectionniste de l’IRA

L’adoption de l’IRA a fait naître plusieurs craintes chez les acteurs politiques et industriels français.

La première crainte tient à la logique d’acheter américain, qui sous-tend certaines mesures de subventions. Ainsi, seuls les véhicules assemblés en Amérique du Nord (Mexique, États-Unis, Canada) sont éligibles à la réduction d’impôt de l’IRA. Les voitures fabriquées en Europe et en Asie sont ainsi pénalisées. Les véhicules subventionnés par l’IRA doivent aussi être équipés de batteries fabriquées à partir de composants extraits ou transformés aux États-Unis ou dans des pays avec lesquels les États-Unis ont conclu un accord de libre-échange. L’arrêt des négociations du Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement entre les États-Unis et l’Union (TAFTA) exclut ainsi l’Union européenne des subventions de l’IRA.

La seconde crainte tient aux allègements fiscaux pour les entreprises produisant aux États-Unis. La plupart des dispositions de l’IRA accordent un traitement préférentiel aux énergies renouvelables produites aux États-Unis. Par exemple, pour que les entreprises puissent bénéficier de l’ensemble des crédits d’impôt, l’acier et l’aluminium des éoliennes et des panneaux solaires devront obligatoirement avoir été produits aux États-Unis.

La troisième crainte est que la logique de subventions à la production enclenchée par l’IRA ne provoque une course aux subventions partout à travers le monde. Le secteur des véhicules électriques chinois étant particulièrement touché par les mesures de l’IRA, un rehaussement des subventions à ce secteur est ainsi attendu. Si chaque État subventionne ses entreprises nationales, il existe un risque de désorganisation du marché mondial, voire du marché intérieur de l’Union européenne, avec une concurrence faussée.

Taxation des énergies fossiles ou subvention des énergies vertes ?

Lors d’une table ronde organisée par la commission des affaires européennes de l’Assemblée nationale le 22 mars 2023, M. Pierre-André de Chalendar, président de Saint-Gobain a également relevé que la philosophie de l’IRA est aux antipodes de l’approche européenne. L’IRA accorde en effet des subventions, alors que l’Union préconise de taxer les énergies fossiles et de mettre une réglementation en palce pour les limiter.

Cette dichotomie dans l’approche du développement d’une industrie verte renforce les craintes d’un différentiel de compétitivité entre l’Union européenne et les États-Unis.

La conséquence est qu’en incitant les acteurs industriels à produire sur le sol américain, l’IRA pourrait conduire les constructeurs européens à délocaliser leurs usines outre-Atlantique et pénaliser les entreprises européennes implantées aux États-Unis dont les chaînes de production se trouvent en dehors du pays. Ce risque est d’autant plus important que les industriels européens voient leur compétitivité se détériorer en raison du différentiel de prix de l’énergie entre l’Europe et les États-Unis. Le constructeur automobile Tesla a par exemple annoncé que la production de cellules de batterie pourrait être réorientée vers les États-Unis, en dépit de l’ouverture de la giga factory de Grüneheide près de Berlin en 2022.

 

Une loi contraire au droit de l’Organisation mondiale du commerce (OMC)

L’Union européenne dénonce le caractère protectionniste de certaines mesures de l’IRA, en violation des règles de l’OMC. La clause de traitement national interdit aux pays membres de l’OMC de soumettre les importations à un traitement moins favorable que celui qui est accordé aux produits d’origine nationale semblables.

L’IRA ne respecte pas cette clause, puisque sept crédits d’impôts prévus par l’IRA contiennent une clause de contenu local. Ainsi, une voiture électrique importée de l’Union ne bénéficiera pas du même traitement commercial, fiscal et réglementaire qu’une voiture électrique américaine.

Les risques de délocalisation s’expliquent notamment par le fait que l’IRA viendrait renforcer un différentiel d’attractivité déjà existant entre le sol américain et le sol européen. Les États-Unis bénéficient en effet d’un prix de l’énergie particulièrement compétitif, en raison notamment de l’exploitation sur leur sol du gaz de schiste, particulièrement nocif pour l’environnement. Alors que l’IRA prévoit également un investissement massif dans l’hydrogène, la différence des coûts de l’énergie pourrait encore s’accroître entre les deux zones. L’Union européenne fait en effet face à des coûts élevés de l’électricité sur le marché de court terme depuis la reprise de la pandémie et le début de la guerre en Ukraine, en raison de l’indexation du prix de l’électricité sur celui du gaz lors des pics de consommation.

2.   Les études les plus récentes relèvent toutefois que les moyens consacrés à l’IRA et ses effets macroéconomiques sont modestes

Plusieurs études économiques relativisent les effets de l’IRA sur l’économie européenne.

Une note du centre d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII) ([1]) relève ainsi que les clauses de contenu local pourraient avoir une efficacité limitée pour attirer les entreprises des filières vertes :

-         la localisation d’une activité de production dépend de nombreux facteurs et l’Union européenne a des atouts en termes d’attractivité des investissements directs étrangers. Les principaux déterminants de ces investissements sont ainsi la taille économique des pays d’origine et de destination, la croissance économique du pays de destination, la proximité entre les deux pays, les coûts unitaires du travail et le capital humain disponible dans le pays de destination. La fiscalité peut donc jouer un rôle, mais n’est pas le critère prépondérant de l’investissement direct à l’étranger ;

-         si la loi donne des incitations fiscales attractives, les critères techniques associés pour respecter des obligations de contenu local sont restrictifs et le deviendront de plus en plus sur les dix prochaines années. Parmi les critères techniques figure notamment la clause de contenu local, qui est une barrière reconnue à l’investissement direct à l’étranger, tant en amont qu’en aval de la chaîne de valeur ;

-         les montants de subventions en jeu ne sont pas si importants, représentant 0,17 % du PIB américain par an pendant dix ans, ce qui est inférieur aux aides européennes dans le secteur.

Une seconde étude du Conseil franco-allemand des experts économiques ([2]) relève également que le volume financier global des divers programmes lancés par l’Union pour atteindre les objectifs climatiques et faciliter la transition verte est comparable à celui de l’IRA.

Comparaison des subventions à la production et des subventions environnementales aux États-Unis et dans l’Union européenne

Source : Conseil allemand des experts économiques (2023) : The Inflation Reduction Act : Is the new U.S. industrial policy a threat for Europe ?

Cette étude note également que les subventions accordées dans le cadre de l’IRA ne devraient avoir qu’un impact macroéconomique global minime, tant aux États-Unis que dans l’Union européenne. À technologie constante, les résultats des modélisations macroéconomiques sont négligeables pour les pays européens à horizon de 5 à 10 ans : le revenu national réel ne serait pas affecté en Allemagne et diminuerait de 0,004 % en France et de 0,001 % pour l’Union européenne dans son ensemble.


Effet estimé de l’IRA sur le revenu national réel par pays dans un modèle multi-pays et multi-secteurs

Source : Conseil franco-allemand des experts économiques

L’analyse des effets sectoriels de l’IRA démontre également les effets macroéconomiques limités de l’IRA dans l’Union européenne :

-         l’expansion du marché américain des véhicules électriques ne devrait pas attirer une part importante de la demande ou de la production en dehors de l’Europe. À l’horizon 2030, l’Europe resterait un marché plus important que les États-Unis, avec 10,5 millions de véhicules électriques vendus en Europe contre 8,2 millions aux États-Unis. Un effet de bord sera toutefois l’augmentation de la demande des fabricants américains en matériaux critiques provenant de pays avec lesquels les États-Unis ont conclu un accord de libre-échange, compliquant les efforts de diversification des fabricants européens ;

-         les crédits d’impôts pour la production d’hydrogène vert sont également compensés par des coûts de transport pour l’exportation, actuellement élevés. La demande locale d’hydrogène vert est par ailleurs importante, rendant peu probable que de grandes quantités d’hydrogène vert subventionné en provenance des États-Unis soient importées en Europe au cours des prochaines années.

L’analyse par la Commission européenne sur la promotion des investissements dans les technologies propres ([3])

Le 24 octobre 2023, la Commission européenne a publié une analyse des effets l’IRA et de la réponse à y apporter, qui devait initialement être discutée lors du Conseil européen des 26 et 27 octobre.

La Commission estime qu’il est difficile, à ce stade, d’évaluer pleinement l’incidence de l’IRA sur l’économie de l’Union et sur le développement à long terme de la base industrielle des technologies propres de l’Union.

La communication rappelle néanmoins que l’Union a créé un cadre réglementaire stimulant le développement de technologies propres. L’Union a tout d’abord élaboré un cadre réglementaire ambitieux, avec le paquet « Fit for 55 » pour faire de l’Europe le premier continent à parvenir à la neutralité carbone à l’horizon 2050.

L’Union agit également en matière d’investissements dans la transition. Sur la période 2021-2027, 578 milliards d’euros doivent contribuer aux dépenses en faveur du climat. L’Union a également établi un cadre favorable aux investissements privés, avec l’élaboration d’une taxonomie de l’Union. Enfin, les investissements publics nationaux sont également favorisés par un assouplissement du régime d’aides d’États.

II.   Le plan industriel du pacte vert pour l’europe constitue le volet principal de la réponse européenne à l’ira

Le plan industriel du Pacte vert s’articule autour de quatre axes :

-         la modernisation de l’environnement réglementaire, notamment en réformant le marché de l’électricité pour permettre la stabilité des coûts ;

-         la formation de main d’œuvre européenne dans les domaines de la transition écologique ;

-         l’amélioration de l’accès de l’industrie aux financements, par la simplification des démarches administratives et l’assouplissement des règles encadrant les aides d’États ;

-         la mobilisation de la politique commerciale pour assurer des conditions de concurrence équitables.

Le 16 mars 2023, la Commission européenne a présenté plusieurs initiatives pour répondre à l’IRA. Conformément au programme lancé par l’agenda de Versailles en mars 2022, les initiatives législatives prévoient un soutien à l’industrie décarbonée sur le territoire de l’Union, une sécurisation des chaînes d’approvisionnement, et une meilleure régulation des prix de l’électricité dans les États membres.

Vos rapporteures se félicitent de ce plan, qui permet d’affirmer les ambitions de l’Union européenne en matière industrielle et climatique. L’effort climatique de l’Union est toutefois plus large : l’Union fait ainsi le pari d’une plus grande sobriété dans le cadre des transitions énergétiques et écologiques. L’adoption récente de la directive sur l’efficacité énergétique fixe ainsi un objectif de réduction de 11,7 % de la consommation finale d’énergie en 2030 par rapport au niveau des efforts consentis dans le cadre du scénario de référence de l’Union de 2020 ([4]) . L’industrie devra donc également s’adapter à cet objectif de sobriété.

A.   la réponse européenne à l’ira s’appuie sur trois initiatives législatives d’importance

1.   Le soutien à la constitution d’une véritable filière industrielle « net zéro »

Le volet industriel du Pacte Vert repose sur deux principaux textes, afin de sécuriser la maîtrise par l’Union européenne des chaînes de valeur des technologies vertes.

Le règlement sur les matières premières critiques ([5]) porte sur les secteurs « amont ». Le texte vise à renforcer l’autonomie européenne en fixant une liste de matériaux nécessaires à la transition écologique, énergétique et numérique, et à diversifier les importations pour réduire les dépendances stratégiques. Alors que la demande mondiale pour ces matières premières devrait fortement augmenter, les fournisseurs de ces importations sont pourtant fortement concentrés dans un petit nombre de pays tiers. La Commission relève ainsi dans son exposé des motifs que l’Union achète 97 % de son magnésium en Chine, les terres rares lourdes sont exclusivement raffinées en Chine et 63 % du cobalt mondial est extrait en République démocratique du Congo.

Le texte actualise la liste préexistante des matières premières critiques et crée une nouvelle liste de matières premières stratégiques, essentielles pour les transitions écologiques et numériques et dont l’approvisionnement futur n’est pas sûr. Plusieurs matières premières sont listées à la fois comme critiques et stratégiques, comme le cuivre ou le cobalt. Le texte fixe des niveaux d’autosuffisance de référence à l’horizon 2030. La capacité d’extraction de l’Union doit ainsi représenter 10 % de sa consommation annuelle, contre 40 % pour la capacité de transformation et 15 % pour la capacité de recyclage. Pour atteindre ces objectifs, le texte établit une méthode de sélection de projets stratégiques, qui seront admissibles à des procédures d’autorisation simplifiées et à un accès facilité aux possibilités de financement.

Le second texte est la proposition de règlement pour une industrie « zéro net » ([6]) , qui porte sur les secteurs « aval », de manière à renforcer les capacités de production européennes de technologies vertes. Ce texte vise à un objectif de 40 % de production européenne dans ces secteurs d’ici 2030. Pour atteindre cet objectif global, la proposition de règlement décline plusieurs moyens :

-         l’accélération des processus d’implantation en Europe pour les technologies vertes en simplifiant les procédures d’octroi de permis. Ces dispositions sont similaires à celles de la loi relative à l’industrie verte du 23 octobre 2023 ([7]). Le texte prévoit notamment la désignation d’un guichet unique au sein des États membres ;

-         la formation de main d’œuvre et de compétences nécessaires aux métiers des nouvelles industries ;

-         l’introduction de critères de résilience et de durabilité dans les procédures d’octroi de marchés publics.

La proposition de la Commission couvre 11 technologies mais seules 8 technologies considérées comme « stratégiques » net-zéro peuvent bénéficier de l’ensemble des avantages prévus par le règlement, comme la réduction des délais d’octroi de permis.

Vos rapporteures saluent l’ambition de ces deux textes, en cours de négociation au Parlement européen et au Conseil, qui doivent non seulement permettre à l’Union européenne d’atteindre ses objectifs climatiques, mais aussi de soutenir une filière industrielle face aux risques que fait peser l’IRA sur la compétitivité des entreprises dans les États membres.

L’analyse par la Commission européenne
des effets de la réponse européenne à l’IRA

Dans la communication publiée le 24 octobre 2023, la Commission européenne estime que le plan industriel du Pacte vert vise à préserver la compétitivité de l’industrie européenne des technologies propres et à positionner l’Europe en tant que fer de lance de l’innovation industrielle. Le règlement pour une industrie « zéro net » vise à lever les obstacles et à accroître les capacités européennes de production de technologies « zéro net », tandis que le règlement sur les matières premières critiques apportera davantage de sécurité à l’industrie européenne.

Aux termes de l’analyse de la Commission, le règlement pour une industrie « zéro net » contribue également à faire en sorte que la main d’œuvre de l’Union dispose de compétences suffisantes pour mener la double transition vers une économie verte et numérique.

2.   La réforme du marché européen de l’électricité

Le 16 mars 2023, la Commission européenne a également proposé une réforme du marché européen de l’électricité afin de lutter contre la volatilité des prix sur le marché de court terme. La volonté de la Commission est de mieux protéger les consommateurs face à la logique du principe de « l’ordre de mérite », qui mène à un alignement des tarifs de l’électricité sur ceux du gaz lors des pics de consommation.

La Commission propose ainsi le développement de contrats de long terme de deux types :

-         les contrats privés de gré à gré, dits Power Purchase Agreement (PPA) aux termes desquels un consommateur industriel peut acheter de l’électricité directement au producteur, à un tarif fixé pour 4 ou 5 ans. Ce mécanisme protège ainsi les consommateurs des aléas du marché spot de court terme ;

-         les contrats pour la différence (CFD), qui sont des contrats publics fixant un prix plancher et un prix plafond aux producteurs d’électricité. Si le prix de marché dépasse le prix plafond, l’État capte alors le différentiel de prix, pour une redistribution aux consommateurs. À l’inverse, lorsque le prix de marché est inférieur au prix plancher, l’État verse la différence au producteur.

Vos rapporteures relèvent que ce texte doit permettre de favoriser la compétitivité des entreprises industrielles françaises et européennes face à l’envolée des prix de l’énergie. Le prix annuel moyen du mégawattheure d’électricité a augmenté de 45 % par rapport à 2021, à la suite d’une première hausse de 21 % en 2021 en raison de la reprise économique à la suite de la crise sanitaire ([8]). Cette évolution s’explique notamment par l’indexation du prix de l’électricité sur celui du gaz.

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Source : Insee Première, n°1952, juin 2023

B.   le financement de cette nouvelle initiative s’appuie pour une part écrasante sur les financements déjà existants

1.   La constitution du programme « STEP » s’appuie sur des financements déjà existants, dans l’attente d’un véritable Fonds de souveraineté

Lors de son discours sur l’état de l’Union du 14 septembre 2022, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a annoncé la création d’un Fonds de souveraineté, pour financer des projets d’intérêt européen en faveur de la transition écologique. Les conclusions du Conseil européen du 23 mars 2023 reprennent cette initiative, en relevant toutefois que le Fonds devrait être en priorité abondé par les fonds disponibles et les instruments financiers existants.

La Commission européenne a depuis proposé la création d’une plateforme des technologies stratégiques pour l’Europe, dite « STEP » ([9]). Cette plateforme doit aider l’Europe à conserver une avance dans le domaine des technologies émergentes nécessaires à la transition écologique et numérique. La Commission pourra labelliser les projets d’investissement contribuant aux objectifs de la plateforme STEP afin de prioriser l’attribution de financements et de faciliter le cumul d’aides.

Comme le note le rapport pour observations sur le projet de loi « industrie verte » de la commission des affaires européennes ([10]), la plateforme est une coquille vide puisque la mise en œuvre opérationnelle repose sur les financements européens existants, comme demandé par le Conseil européen. La plateforme STEP est ainsi financée par le programme de recherche Horizon Europe, le fonds InvestEU (ex-plan Juncker) et le Fonds européen de développement régional (FEDER).

Vos rapporteures regrettent ainsi fortement que le programme STEP ne soit pas le véritable Fonds de souveraineté dont l’Union européenne a rapidement besoin pour formuler une réponse européenne à l’IRA. Les discussions relatives au Fonds de souveraineté sont repoussées aux débats relatifs au cadre financier pluriannuel pour la période 2027-2034.

L’assouplissement du régime des aides d’États

Le 9 mars 2023, a Commission a adopté un nouvel encadrement temporaire de crise et de transition afin d’encourager les mesures de soutien dans les secteurs essentiels à la transition vers une économie à zéro émissions nette. Ce texte prolonge la possibilité pour les États membres de continuer à soutenir les mesures nécessaires à la transition vers une industrie verte, étend la portée de ces mesures, et introduit de nouvelles dispositions pour accélérer encore les investissements dans les secteurs essentiels à une industrie verte. Ce nouveau régime pourrait permettre des aides d’États pour un budget total d’environ 6,9 milliards d’euros en vue de la réalisation d’investissements dans les technologies propres.

Vos rapporteures soulignent ainsi que l’effort budgétaire de soutien aux industries « zéro net » en réponse à l’IRA s’effectuera en grande partie au niveau national à court terme.

L’augmentation de l’investissement public ne sera toutefois pas suffisante pour réussir les transitions climatiques, énergétiques et industrielles. L’Union agit également en faveur du verdissement de l’investissement privé, comme en témoigne l’adoption de la taxonomie verte ([11]). La réorientation des flux d’investissement vers des projets écologiques et durables doit être une priorité pour les entreprises. Il s’agit aussi d’une condition de réussite de la politique climatique de l’Union.

2.   Les financements supplémentaires prévus à la suite de l’annonce de l’IRA sont très limités, en raison du volume des financements déjà existants dans l’Union

L’augmentation de budget prévue pour irriguer le programme STEP, débattue à l’occasion de la révision de mi-mandat du cadre financier pluriannuel, est minime. Dans un contexte budgétaire contraint par la hausse des taux d’intérêt affectant le budget de l’Union, la proposition de la Commission consiste à doter de 10 milliards d’euros supplémentaires d’argent « neuf », les fonds et programmes concourant aux objectifs de la plateforme STEP ([12]). Les plafonds de dépenses des programmes seraient ainsi relevés de la façon suivante :

-         le programme Horizon Europe bénéficierait de 2,63 milliards d’euros supplémentaires ;

-         le Fonds pour l’innovation bénéficierait de 5 milliards d’euros supplémentaires ;

-         le Fonds européen de défense bénéficierait de 1,5 milliard d’euros supplémentaires ;

-         le fonds InvestEU serait renforcé de 3 milliards d’euros supplémentaires.

Vos rapporteures relèvent ainsi que le volet budgétaire de la réponse européenne à l’IRA est minime. La raison principale est toutefois l’existence préalable d’un soutien d’ampleur apporté aux filières vertes de l’Union par le cadre financier pluriannuel existant et le plan de relance NextGenerationEU. D’un point de vue strictement budgétaire, l’IRA représente ainsi un rattrapage des États-Unis par rapport à l’Union européenne.

 


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Deuxième partie : l’union européenne doit rapidement apporter une réponse normative, budgétaire et commerciale à l’ira

  1.   Les initiatives législatives apportant un soutien à l’industrie décarbonée doivent être mieux calibrées

A.   l’ambition du règlement sur les matières premières critiques doit être rehaussée au cours des trilogues par rapport à la proposition intiale

1.   Les objectifs globaux du texte en matière d’extraction, de transformation et de recyclage doivent être revalorisés, et déclinés à plus long terme

Afin de renforcer les capacités de l’Union tout au long de la chaîne de valeur des matières premières stratégiques, la proposition de règlement de la Commission européenne prévoit dans sa version initiale les objectifs suivants à l’horizon 2030 :

-         les États membres devront être en mesure d’extraire les matériaux nécessaires à la production d’au moins 10 % des matières premières stratégiques consommées dans l’Union ;

-         l’Union doit accroître sa capacité de transformation tout au long de la chaîne de valeur et être en mesure de produire au moins 40 % de sa consommation annuelle de matières premières stratégiques ;

-         une capacité de recyclage de l’Union doit lui permettre de produire au moins 15 % de sa consommation annuelle de matières premières stratégiques.

Ces objectifs ont été relevés lors des discussions au Parlement européen et au Conseil. La position du Parlement européen, adoptée lors de la session plénière de septembre 2023, relève l’objectif de 40 à 50 % en matière de transformation. Le texte prévoit également en matière de recyclage une production de 10 % de volume en plus par rapport à la base de référence pour la période 2020-2022 pour chaque matière stratégique, en vue de rassembler, trier et transformer au moins 45 % de chaque matière première stratégique contenue dans les déchets de l’Union.

L’orientation générale du Conseil prévoit de relever de 40 % à 50 % la cible en matière de transformation, et de 15 à 20 % en matière de recyclage.

Vos rapporteures se félicitent que les cibles de transformation et de recyclage aient été relevées au cours des négociations. Un consensus semble se dégager entre le Parlement et le Conseil pour atteindre une cible de capacité de transformation représentant 50 % de la consommation annuelle des matières premières stratégiques. Le Parlement européen relève toutefois que 20 % de ces 50 % peuvent être obtenus par l’intermédiaire de partenariats stratégiques dans des marchés émergents et des pays en développement. Vos rapporteures plaident pour une véritable cible de 50 % de transformation sur le sol européen, conformément aux objectifs de souveraineté portés par ce texte. L’objectif est de réduire les dépendances vis-à-vis d’États tiers, même partenaires.

Vos rapporteures se rapprochent également de la position du Conseil pour l’objectif en matière de recyclage : la mention d’une production de 10 % de volume en plus par rapport à la base de référence pour la période 2020-2022 prévue par le Parlement pourrait en effet s’avérer inefficace. Si une matière première critique n’était pas du tout recyclée sur la période 2020-2022, l’augmentation de 10 % d’une valeur de zéro représentera une augmentation nulle. L’approche du Conseil pour le recyclage, individualisée par matière première, paraît plus pertinente.

La liste des matières premières stratégiques et critiques

Dans la version initiale de la proposition de règlement, la Commission a listé 16 matières premières stratégiques, et 34 matières premières critiques. Le Parlement européen et le Conseil ont ajouté l’aluminium à cette liste. Le Conseil a également ajouté l’alumine. Cet ajout s’explique par l’usage crucial de ces matières dans les technologies bas carbone, l’industrie de défense et dans toutes les filières industrielles stratégiques de l’Union. Vos rapporteures soutiennent ainsi l’ajout de l’aluminium et de l’alumine dans la liste des matières premières critiques.

La Commission européenne avait également retenu dans la version initiale du texte une périodicité de quatre ans pour la mise à jour des matières premières stratégiques et critiques. L’orientation générale du Conseil demande une mise à jour plus fréquente de cette liste, au moins tous les trois ans. La position du Parlement européen réclame une actualisation tous les deux ans. Vos rapporteures soutiennent la position du Parlement : l’actualisation des matières premières critiques doit intervenir dès que nécessaire, pour soutenir nos filières stratégiques. Il est nécessaire de prévoir une flexibilité suffisante dans la mise à jour de cette liste.

Les objectifs de la proposition de règlement de la Commission ne portent cependant que jusqu’à 2030. Vos rapporteures estiment utile de prévoir des cibles à plus long terme, notamment 2040 et 2050, pour donner une trajectoire aux États membres et davantage de visibilité aux entreprises. Cette mesure se retrouve notamment dans l’orientation générale du Conseil, qui prévoit que la Commission, dans son rapport d’évaluation du règlement, devrait également mesurer l’opportunité d’établir des critères de référence à horizon 2040 et 2050 pour les matières premières stratégiques.

2.   Les mécanismes de suivi et d’atténuation des risques doivent trouver un équilibre entre efficacité et protection des données sensibles

La proposition de règlement de la Commission européenne prévoit des mécanismes de suivi et d’atténuation des risques. En matière de suivi et de tests de résistance, les autorités nationales partagent ainsi les informations dont ils disposent sur l’approvisionnement en matières critiques avec la Commission européenne. La version initiale du texte prévoit que la Commission publie sur un site web librement accessible un tableau de bord de suivi, régulièrement actualisé, avec un niveau des stocks stratégiques, les résultats des tests de résistance et un calcul des risques pour la sécurité d’approvisionnement. Cette publicité des niveaux des stocks stratégiques présente un risque de révéler les vulnérabilités des États membres ou d’opérateurs économiques stratégiques, par exemple en matière de défense. Il en résulte un risque pour la protection de la sécurité nationale. L’orientation générale du Conseil prévoit la publication de données agrégées. Le Parlement européen indique que « S’il existe des raisons raisonnables de penser que la mise à disposition des informations visées au premier alinéa du présent paragraphe à l’un des acteurs visés dans ce premier alinéa donnerait lieu à des désavantages géopolitiques, la Commission peut refuser, au cas par cas, de mettre ces informations à la disposition d’un quelconque de ces acteurs ». Vos rapporteures relèvent en effet l’importance de prévoir des garanties suffisantes pour ne pas révéler les vulnérabilités des États membres de l’Union, et appellent le Conseil et le Parlement à se saisir pleinement de ce sujet dans la phase de trilogues.

Les entreprises européennes ont également un rôle à jouer dans le suivi et l’atténuation des risques de rupture d’approvisionnement des matières premières critiques et stratégiques. La proposition initiale de la Commission européenne prévoyait ainsi une obligation pour les grandes entreprises utilisant des matières premières critiques pour la fabrication de technologies stratégiques de procéder à un audit. Le Parlement européen a supprimé cette obligation pour les entreprises, conformément à une idée libérale consistant à réduire les contraintes pesant sur les entreprises.

Vos rapporteures soutiennent toutefois la position du Conseil, qui maintient cette disposition. Au lendemain de la crise des semi-conducteurs, il est nécessaire d’imposer aux entreprises une obligation de procéder à des tests de résistance et à cartographier leurs risques d’approvisionnement : avec des scénarios d’évaluation, les entreprises utilisant ces matières premières critiques pourront être plus agiles dans la gestion des stocks.

B.   Le texte sur l’industrie à zéro émissions net doit être le plus opérationnel possible pour les pouvoirs publics et les acteurs économiques

1.   La structure du règlement et le périmètre des technologies couvertes font débat au Parlement européen et au Conseil

La proposition initiale de la Commission européenne couvre 11 technologies « net zéro », mais seules 8 technologies sont considérées comme « stratégiques » net-zéro et peuvent, à ce titre, bénéficier de certaines dispositions du règlement, notamment relatives à la réduction des délais d’octroi de permis, l’éligibilité aux critères de soutenabilité et de résilience ou à l’accès à la plateforme de coordination des financements.

Le Conseil a conservé cette logique, même si un accord final n’a pas encore été trouvé. La commission de l’Énergie du Parlement européen a élargi le champ d’application du texte, en ne prévoyant plus qu’une seule liste de technologies « zéro net », plus large que celle initialement prévue, qui inclut l’ensemble des technologies bas carbone. Dans les six mois suivant l’entrée en vigueur du règlement, chaque État membre devra sélectionner, parmi les technologies « zéro net », celles qui peuvent bénéficier des dispositions relatives aux projets stratégiques dans l’État membre concerné. Le risque est donc de mobiliser des moyens humains très importants pour sélectionner les projets, en aval de la publication du règlement. La position de la commission de l’Énergie doit être discutée lors de la session plénière du Parlement européen du 20 au 23 novembre.

Vos rapporteures soutiennent la position du Conseil, avec le maintien des deux listes, dont une « stratégique » net-zéro. Le risque du passage à une seule liste est de mobiliser des moyens humains très importants pour sélectionner les projets, en raison du nombre de technologies éligibles. Il est nécessaire d’avoir une couverture large de technologies, mais il importe également de restreindre leur nombre par rapport à la solution proposée par le Parlement, pour des raisons de charge administrative. L’implication finale d’une telle solution pourrait en effet être une incapacité à tenir les délais, notamment en matière de délivrance de permis : cet effet de bord irait ainsi à l’encontre direct de l’objectif initial du règlement.

Les débats relatifs au périmètre de la liste « stratégique » net zéro

La proposition de règlement de la Commission couvre 11 technologies « net-zéro » et 8 technologies « stratégiques » net-zéro. La France défend au Conseil un élargissement de la liste des technologies « stratégiques » net-zéro, notamment aux carburants durables maritimes et d’aviation, à l’hydroélectricité et au nucléaire.

Vos rapporteures relèvent toutefois le risque d’une extension trop importante de la liste de technologies, qui pourrait conduire à un saupoudrage des aides.

2.   L’accessibilité et le caractère opérationnel des dispositions du règlement sont également importants pour les milieux industriels et les pouvoirs adjudicateurs

Pour tenir son objectif de 40 % de production européenne dans le secteur des technologies propres à horizon 2030, le règlement doit être opérationnel pour l’ensemble des acteurs publics et privés qui auront à s’en saisir.

Les dispositions relatives aux marchés publics sont à ce titre particulièrement importantes. La proposition de règlement prévoit qu’il est nécessaire de garantir la durabilité de nouvelles installations industrielles, notamment en incluant des critères de durabilité et de résilience dans les marchés publics. L’enjeu est toutefois de donner une méthodologie suffisamment claire et opérationnelle pour l’ensemble des pouvoirs adjudicateurs, afin de calculer le critère de résilience de façon simple et uniforme. Le risque serait sinon l’annulation de l’octroi de marchés publics à des entreprises lors de recours devant les juridictions, en raison d’un calcul défaillant du critère de résilience ou de durabilité. Ce risque juridique serait un obstacle à l’atteinte des objectifs économiques et industriels de la proposition de règlement.

Le caractère opérationnel des critères de résilience et de durabilité passe également par un meilleur calibrage du « frein prix ». En l’état, le texte prévoit en effet que le pouvoir adjudicateur n’est pas tenu d’appliquer les considérations relatives à la durabilité et à la résilience des technologies « zéro net » lorsque cette application implique une différence de coût supérieure à 10 %. Ce niveau de 10 % rend les critères inopérants, car les différences de prix peuvent aller jusqu’à 200 % sur le solaire. Là encore, il est essentiel que les pouvoirs adjudicateurs et les opérateurs économiques soumissionnaires puissent disposer de critères de lecture clairs.

Vos rapporteures soutiennent ainsi l’inclusion des critères de durabilité et de résilience dans les marchés publics mais souhaitent que ces critères soient rendus parfaitement opérationnels au cours des négociations, de façon à éloigner tout risque juridique lors de la conclusion de contrats publics futurs.

II.   la réponse européenne à l’ira doit également inclure un volet budgétaire et commercial solide

A.   La réponse européenne à l’ira nécessite la constitution d’un véritable fonds de souveraineté

1.   La création d’un fonds de souveraineté est nécessaire pour le soutien aux technologies propres sur le sol de l’Union

Le Fonds de souveraineté annoncé par la présidente de la Commission doit être constitué, à court ou moyen terme, en tant qu’instrument essentiel au soutien à la compétitivité des industries propres européennes et à l’atteinte de l’autonomie stratégique de l’Union.

Cet instrument pourrait être mis en œuvre très rapidement, à l’occasion de la révision du cadre financier pluriannuel 2021-2027. La conjoncture politique et économique rend toutefois peu probable un tel scénario. En effet, la demande de la Commission, relativement modeste avec 66 milliards d’euros supplémentaires, dont seulement 10 milliards d’euros pour abonder la plateforme STEP, ne permet toutefois pas de constituer un véritable fonds de souveraineté. De plus, les chefs d’États et de gouvernement, lors de la réunion du Conseil européen des 26 et 27 octobre 2023, ont réaffirmé leur opposition à toute augmentation du budget européen à mi-parcours. Le contexte de stress budgétaire intense freine ainsi la constitution à court terme du Fonds de souveraineté.

Dans ce contexte, la constitution du fonds n’interviendrait que lors de la mise en œuvre du nouveau cadre financier pluriannuel, pour la période 2027-2033. Les négociations budgétaires, qui commenceront dès le second semestre de l’année 2024, devront mettre l’accent sur la nécessité du soutien à l’autonomie stratégique et industrielle de l’Union.

Même si la question de la réponse européenne à l’IRA sera moins dans l’actualité immédiate, il est absolument essentiel pour la souveraineté de notre continent de prévoir une capacité de réponse industrielle suffisante dans les années à venir, alors que la compétition mondiale s’intensifie. L’IRA n’est en effet pas la seule menace pour les industries européennes : la concurrence chinoise, avec des entreprises d’États subventionnées, est particulièrement préoccupante.

Si l’Union manque une occasion de créer un fonds de souveraineté avec la révision du cadre financier pluriannuel, vos rapporteures rappellent que cet instrument devra absolument être créé pour la période 2027-2033, afin de soutenir l’autonomie stratégique européenne.

Vos rapporteures tiennent à souligner que la création de ce fonds ne s’inscrit pas dans une logique de course aux subventions, mais dans un objectif de décarbonation et de souveraineté de l’économie européenne.

La nécessité de simplifier l’accès aux différents fonds

Vos rapporteures portent une attention particulière à l’accessibilité administrative aux différents fonds par les entreprises. Le soutien de l’Union européenne peut en effet passer par la mobilisation de plusieurs types d’instruments : Next Generation EU, le programme Horizon Europe, le Fonds pour l’innovation, le Fonds européen de défense, le fonds Invest EU… Le fractionnement des différentes modalités de soutien de l’Union aux entreprises européennes nuit à la visibilité globale des dispositifs.

Vos rapporteures plaident donc à court terme, et dans l’attente de la constitution d’un véritable fonds de souveraineté, en faveur d’une simplification réglementaire et de l’instauration de conditions d’accès simples, claires et prévisibles aux différentes aides. La création d’un guichet unique, envisagée par la proposition de règlement relative à l’industrie « zéro net » va ainsi dans le bon sens et doit être saluée.

2.   Le Fonds de souveraineté pourrait être alimenté de par nouvelles ressources propres de l’Union européenne

La constitution d’un fonds de souveraineté pose la question des modalités de son financement. Or l’augmentation du budget européen ne peut être portée uniquement par une augmentation de la contribution directe des États.

Le remboursement de l’emprunt nécessaire au financement du plan de relance européen et du fonds NextGenerationEU, a permis la création de trois nouvelles ressources propres, fondées sur le marché carbone européen, le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, et les produits du premier pilier de l’OCDE, qui vise une imposition minimale des entreprises multinationales sur le lieu de consommation.

Vos rapporteures soutiennent la position du Parlement européen ([13]), appelant à la création de nouvelles ressources propres pour financer le budget européen à partir de 2027, et donc le Fonds de souveraineté. Le Parlement européen invite notamment la Commission à proposer un corpus réglementaire unique en matière d’impôt à l’échelle de l’Union ayant pour éléments constitutifs principaux une assiette commune et la répartition de l’impôt sur les sociétés reposant sur les ressources BEFIT. Le Parlement appelle également à relancer la discussion sur la taxe sur les transactions financières (TTF), qui pourrait être complétée par une taxe sur les cryptomonnaies.

B.   L’union doit également apporter une réponse commerciale à l’ira

1.   L’Union doit privilégier le dialogue aux représailles commerciales ou à une course aux subventions

L’IRA ne respecte pas droit de l’Organisation mondiale du Commerce (OMC), dans la mesure où la clause de contenu local est contraire à l’article 3 du GATT. L’IRA crée en outre un risque de représailles commerciales et de course mondiale aux subventions pour les industries décarbonées.

Vos rapporteures soulignent l’importance de ne pas saisir l’OMC. L’Union aurait en effet pu envoyer un signal symbolique et politique en saisissant cette organisation internationale. Au moins quatre affaires ont été portées devant l’organe de règlement des différends (ORD) de l’OMC s’agissant des clauses de contenu local ([14]). Par exemple, le Japon a obtenu gain de cause contre le Canada au sujet de tarifs de rachat (feed-in tariffs) destinés à favoriser l’acier et l’aluminium canadien dans la production d’équipements éoliens et solaires ([15]). Bien que les chances de succès de l’action de l’Union auprès de l’OMC soient élevées, les États-Unis pourraient faire appel, causant un obstacle à la résolution du différend dans le contexte du blocage de l’ORD.

Le recours aux instruments de défense commerciale semble par ailleurs peu opportun, alors que les États-Unis se montrent ouverts à la coopération et que la guerre en Ukraine nécessite une alliance transatlantique forte. L’Union a d’ailleurs d’ores-et-déjà obtenu des concessions, annoncées le 30 décembre 2022 par le Trésor américain, telle que l’exonération d’impôt pour les véhicules mis sur le marché en leasing, y compris lorsqu’ils sont assemblés dans les pays tiers. Cette interprétation a ainsi augmenté l’attractivité du leasing par rapport à l’achat de véhicules propres, avec une forte hausse de la part du leasing, passée de 9,7 % en décembre 2022 à 34,3 % en mars 2023 ([16]) .

Vos rapporteurs soulignent ainsi que l’administration Biden a ainsi démontré sa volonté de coopérer, rendant dès lors inefficiente voire contreproductive une action devant l’OMC.

2.   Des accords avec les États-Unis doivent permettre de rendre éligibles les produits européens aux crédits d’impôt de l’IRA

Les produits en provenance d’États bénéficiant d’un accord commercial avec les États-Unis pourront entrer dans le champ des crédits d’impôt prévus par l’IRA. Les négociations relatives au projet d’accord commercial global entre l’Union européenne et les États-Unis (TTIP) sont enlisées : les accélérer paraît, dans le contexte politique actuel, inutilement complexe.

L’importance du dialogue entre les États-Unis et l’Union européenne

Vos rapporteures relèvent la pertinence du Conseil du commerce et des technologies Union européenne - États-Unis (TTC), créé comme alternative au TTIP. Cette enceinte permet de maintenir le dialogue entre les deux continents sur la conduite de la politique commerciale.

Vos rapporteures formulent toutefois deux observations relatives à cette structure. Le TTC doit rester un espace de dialogue précieux, afin de bien coordonner les approches sur les questions commerciales : il ne s’agit pas d’un organe de discussion de sujets politiques, mais d’un organe de coopération technique. D’autre part, le TTC doit évoluer afin de devenir plus transparent, de manière à susciter la confiance de l’ensemble des acteurs publics et privés dans le processus. La Médiatrice européenne a ainsi ouvert une enquête sur ce sujet, faisant suite aux inquiétudes quant à l’opacité de cet organe ([17]).

À l’inverse, des accords de libre-échange plus sectoriels pourraient permettre aux produits européens d’entrer dans le champ de l’IRA. Ainsi, il est envisageable que les minéraux critiques extraits ou raffinés dans l’Union soient éligibles au crédit d’impôt « véhicules propres » via un accord sur les minéraux critiques. Le département du Trésor américain a en effet fixé des critères permettant d’amender la liste des pays tiers couverts par un accord de libre-échange au sens de l’IRA. Le Japon a par exemple été intégré à cette liste le 28 mars 2023, à la suite d’un accord sur les minéraux critiques entre les deux pays.

Vos rapporteures soutiennent ainsi la conclusion d’un accord sur les minéraux critiques avec les États-Unis, qui présenterait un double avantage. D’une part, les véhicules électriques européens seraient éligibles au crédit d’impôt « véhicules propres ». D’autre part, l’Union a tout intérêt à conclure un accord pour résoudre les difficultés d’accès aux matières premières critiques, dans un contexte où la demande mondiale pour ces matériaux est appelée à fortement croître dans les prochaines années.


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   ConClusion

La réponse européenne à l’IRA est donc progressivement mise en œuvre sur le plan réglementaire, avec la négociation de textes importants au Parlement européen et au Conseil.

La réponse à l’IRA représente une brique nécessaire dans la construction d’une véritable politique industrielle européenne, qui a longtemps fait défaut à l’Union européenne. L’Union sera désormais capable, par ses plans et programmes, d’identifier des secteurs prioritaires et de les accompagner à l’échelle du continent.

Vos rapporteures ne sauraient toutefois trop insister sur la nécessité de compléter l’approche réglementaire, proprement européenne, par une véritable réponse budgétaire et commerciale.

La réponse européenne à l’IRA est une chance de renforcer l’autonomie stratégique européenne en mettant fin aux dépendances vis-à-vis de pays tiers, et de continuer d’affirmer l’Union comme leader mondial de la lutte contre le changement climatique. Pour atteindre ces objectifs, il est primordial d’actionner l’ensemble des leviers à la disposition de l’Union et des États membres, en concluant rapidement des accords commerciaux sur les matériaux critiques avec les États-Unis, et en constituant un véritable Fonds de souveraineté dans les années à venir.

 

 


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   TRAVAUX DE LA COMMISSION

La Commission s’est réunie le mercredi 22 novembre 2023, sous la présidence de M. Pieyre‑Alexandre Anglade, Président, pour examiner le présent rapport d’information.

Mme Sabine Thillaye, rapporteure. Monsieur le Président, mes chers collègues. Nous avons choisi de travailler sur la réponse européenne à la loi américaine sur la réduction de l’inflation, plus connue sous son acronyme « IRA ».

Notre communication propose une analyse préliminaire des défis posés à l’économie européenne et des actions engagées par l’Union et les 27 États membres. Elle prolonge la table ronde organisée à ce sujet le 22 mars dernier par notre commission, durant laquelle nous avions pu échanger avec des experts de haut niveau.

En premier lieu, de quoi la loi américaine sur la réduction de l’inflation est‑elle le nom ? Ce texte marque le ralliement nécessaire des États-Unis à la lutte contre le changement climatique. Les errements de l’ère Trump laissent place au volontarisme de l’administration Biden. En effet, l’IRA mobilise sur 10 ans près de 370 milliards de dollars de financements publics pour soutenir l’investissement et la demande dans les filières de l’industrie verte. C’est une bonne nouvelle pour l’action climatique au niveau international. Les États-Unis ont pu être soupçonnés par le passé d’adopter un comportement de « passager clandestin », laissant aux autres nations le soin de supporter les efforts liés à la protection de l’environnement. La trajectoire carbone actuelle des États-Unis devait conduire à une réduction de 26 % des émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2030, par rapport à 2005. Cette baisse devrait atteindre 42 % avec l’IRA. Si nous saluons la prise conscience de nos partenaires américains, c’est bien le fond et la forme de la solution retenue qui posent d’importantes difficultés.

C’est un « coup de boost » (permettez-moi l’expression) à l’industrie américaine financé par la puissance publique.

Disons-le aussi, l’adoption de l’IRA a laissé penser que l’économie européenne allait faire face à un déficit de compétitivité du fait du montant des aides, de leur simplicité et de la perspective de long terme qu’elles ouvrent.

Nous pouvons évoquer ici l’un des éléments les plus connus et les plus contestés. Un crédit d’impôt de 7 500 dollars est institué, sous conditions de ressources, au profit des ménages pour l’achat d’un véhicule électrique neuf. Or l’octroi de l’aide dans sa totalité est soumis à des exigences de contenu local préjudiciables aux constructeurs européens qui exportent vers les États-Unis. Trois critères discriminatoires peuvent être identifiés. D’abord, le véhicule devra être assemblé aux États-Unis, au Canada ou au Mexique. Ensuite, les composants de la batterie devront entièrement être produits aux États-Unis d’ici à 2029. Enfin, les minerais critiques nécessaires à la fabrication de la voiture devront, d’ici 2027, être extraits, transformés ou recyclés à 80 % en Amérique du Nord ou dans un pays signataire d’un accord de libre-échange avec les États-Unis. Ce n’est pas le cas de l’Union européenne, les négociations du partenariat transatlantique – le fameux TAFTA – se trouvant au point mort depuis plusieurs années. Un seul modèle produit par un constructeur étranger en Amérique du Nord, en l’occurrence une voiture Volkswagen, est aujourd’hui éligible à ce crédit d’impôt.

Mme Marietta Karamanli, rapporteure. Il ne fait aucun doute que la majorité des dispositions de l’IRA portant sur les technologies propres sont contraires au droit de l’Organisation mondiale du commerce. La clause de traitement national prévue à l’article 3 du GATT interdit expressément toute mesure discriminatoire à l’encontre des produits étrangers similaires. L’Organe de règlement des différends de l’OMC a reconnu à plusieurs reprises le caractère illégal des exigences de contenu local.

Le protectionnisme vert pratiqué par les États-Unis manque ainsi sa cible environnementale. La révision du bonus écologique en France, fondée sur des critères objectifs liés à l’empreinte carbone du véhicule, démontre pourtant que des marges de manœuvre existent dans le respect du droit de l’OMC. C’est bien la performance environnementale de la voiture – et non la localisation de sa production – qui déterminera l’éligibilité à l’aide.

L'Europe peut s’inspirer de la révision du bonus écologique en France. Il faut s’assurer que les normes édictées en matière de réduction d'émissions ne soient pas seulement applicables aux industries européennes, mais à tous les acteurs internationaux qui investissent et vendent sur notre continent. L’analyse du cycle de vie des voitures électriques y contribue.

La principale incertitude réside désormais dans l’ampleur des conséquences du plan américain sur l’attractivité et la résilience de notre industrie. L’appel d’air créé par l’IRA, à l’origine d’un risque de délocalisations ou d’éviction des investissements vers les États-Unis, est difficile à mesurer. Dans cette bataille des chiffres, la Commission européenne, comme les instituts économiques à l’image du Conseil franco-allemand d’experts économiques, ou du CEPII que nous avons auditionné, se veulent rassurants. Il est encore difficile d’évaluer précisément les implications financières de l’IRA, mais nous avons que le volume financier global des divers programmes déjà lancés par l’Union pour faciliter la transition verte est comparable à celui de l’IRA. En termes relatifs, les subventions de l’IRA représentent moins de 0,2 % du PIB américain par an – contre près de 0,5 % du PIB européen pour les dépenses équivalentes. La taille du marché unique, la qualité des infrastructures et la disponibilité de la main d’œuvre formée sont autant d’atouts à mettre au crédit du tissu productif européen.

Les projections alarmistes de l’automne dernier, ponctuées de quelques annonces de réorientation de projets industriels, ont ainsi laissé place à des analyses plus mesurées.

Mme Sabine Thillaye, rapporteure. Ces éléments de cadrage soulignent que l’Europe n’est pas désarmée face à l’IRA américain. Ils démontrent néanmoins des fragilités et des insuffisances, auxquelles il convient de remédier rapidement. Comme elle le démontre régulièrement dans les situations de crise depuis quelques années maintenant, l’Union européenne a ainsi su réagir rapidement, pour protéger l’industrie européenne.

La Commission européenne a présenté le 1er février 2023 son plan industriel du Pacte vert. Les propositions de la Commission dépassent la seule réponse conjoncturelle à l’IRA. C’est bien le développement de l’industrie verte européenne et l’atteinte de l’objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050 qui sont en jeu.

Le plan industriel du Pacte vert s’articule autour de plusieurs axes de travail. Nous nous sommes attachées en priorité aux leviers de la réglementation, du financement et de la politique commerciale, qui appellent diverses observations et recommandations de notre part.

D’abord, la simplification de l’environnement réglementaire sur l’ensemble de la chaîne de valeur de l’industrie verte nous semble prioritaire. C’est le sens des propositions de règlement de la Commission européenne sur les matières premières critiques et pour une industrie « zéro net », présentées le 16 mars 2023.

Le texte sur les matières premières critiques vise en priorité à accélérer les procédures d’autorisation des projets d’extraction, de transformation ou de recyclage de matières premières critiques. Il est important que l’Union réduise ses dépendances stratégiques sur la phase « amont » de la production, alors que les sites d’extraction et de transformation sont aujourd’hui extrêmement concentrés. La Chine raffine par exemple 90 % des terres rares mondiales. C’est un matériau qui entre dans la fabrication de nombreuses technologies vertes, dont les aimants permanents des éoliennes. En complément de nouveaux partenariats avec les pays tiers, la Commission souhaite donc renforcer les capacités de production sur le sol européen.

Sur ce texte relatif aux matières premières critiques, nous souhaitons souligner que la position du Conseil relève l’ambition de la proposition initiale de la Commission. Notre proposition de résolution européenne envisage ainsi de soutenir la position du Conseil, notamment avec des cibles ambitieuses pour le recyclage et la transformation de matières premières critiques. Les trilogues sont en cours.

Le second texte en cours de négociation, relatif à l’industrie « net zéro », fixe un objectif global de 40 % de production européenne dans les secteurs des technologies propres, telles que les batteries électriques et les électrolyseurs pour l’hydrogène. Cette approche dite de « fast-tracking » est bienvenue et renvoie, en France, aux dispositions à la loi relative l’industrie verte récemment adoptée par le Parlement. Ce texte prévoit également de créer deux nouveaux critères d’évaluation dans l’attribution des marchés publics, relatifs à la durabilité et à la résilience de l’offre proposée. L’idée générale est de soutenir l’implantation d’installations durables.

Ce texte dit « NZIA » est toujours en cours de négociation au Conseil. Le Parlement européen, qui a adopté sa position officielle hier, a profondément revu l’architecture du texte, en laissant chaque État membre décider, parmi une liste prédéfinie et très large, quelles technologies propres soutenir. Nous craignons que cette nouvelle architecture ne mène ensuite les autorités administratives nationales et européennes à mobiliser des moyens humains très importants, pour déterminer ensuite concrètement quels projets soutenir ou non.

Mme Marietta Karamanli, rapporteure. Ensuite, la capacité de l’Union et des États membres à déclencher efficacement les financements privés est au cœur de la réponse européenne à l’IRA. La simplicité et la prévisibilité des aides gagneraient à être renforcées en Europe. C’est le sens des recommandations récemment formulées par notre collègue Charles Sitzenstuhl sur le fonctionnement des projets importants d’intérêt européen commun, les PIIEC, dans son rapport sur le projet de loi relatif à l’industrie verte. Nous insistons sur la portée transnationale de ce dispositif, à l’heure où le soutien budgétaire déployé par chaque État membre pour soutenir son économie crée un risque de fragmentation du marché intérieur. L’ampleur des réponses nationales peut varier : seules l’Allemagne et la France sont encore en mesure de mobiliser des milliards euros, les autres États ont moins cette capacité.

La mise en place d’un véritable Fonds de souveraineté européen est donc nécessaire. L’Union européenne ne peut pas se contenter de faire les « fonds de tiroirs » en ré‑agençant les dispositifs existants et en proposant seulement 10 milliards d’euros de nouveaux financements. Identifier les projets stratégiques au niveau européen et mobiliser le budget de l’Union, voilà qui devrait rationaliser les initiatives redondantes voire concurrentes au niveau national. Dans un contexte de stress budgétaire intense à l’occasion de la révision du cadre financier pluriannuel, la Commission a proposé la création d’une plateforme dite « STEP », pour le soutien aux technologies industrielles innovantes, dotées de 10 milliards d’euros d’argent « neuf ». Si cette solution se comprend à court terme, l’Union ne peut faire l’économie de la création d’un véritable Fonds de souveraineté d’ampleur à moyen terme.

Enfin, la réponse européenne à l’IRA suppose d’explorer toutes les options de politique commerciale à la disposition de l’Union. Il nous semble peu opportun, à ce stade, d’introduire une plainte devant l’OMC ou de reproduire les exigences de contenu local mises en place outre-Atlantique. Nous aurions tout à perdre d’une guerre commerciale. Les États-Unis demeurent un partenaire privilégié au niveau international, en particulier alors que l’Union réévalue son approche stratégique à l’égard de la Chine.

Une Task Force commune entre les États-Unis et l’Union a permis de maintenir le dialogue et d’obtenir de premières concessions, par exemple pour les véhicules assemblés en Europe et mis sur le marché américain en leasing. Ces efforts se poursuivent avec la négociation d’un accord sur les matières premières critiques. Il permettrait aux matériaux extraits ou transformés en Europe de bénéficier du crédit d’impôt pour les véhicules électriques prévu par l’IRA. En 2022, les pays européens ont exporté aux États-Unis pour plus de 8 milliards d’euros de matières premières entrant dans la fabrication de véhicules électriques. L’effet d’un tel partenariat ne serait donc pas négligeable.

Notre attachement au cadre commercial multilatéral ne doit pas nous empêcher, au contraire, de recourir si nécessaire aux instruments de défense commerciale. L’entrée en application en septembre 2023 du règlement sur les subventions étrangères complète utilement la boîte à outils de l’Union pour lutter contre les pratiques déloyales. La Commission pourra se saisir d’office des subventions étrangères faussant le marché intérieur, par exemple dans le cadre d’un marché public.

Nous souhaitions, chers collègues, vous présenter notre première analyse des difficultés soulevées par l’IRA et de la réponse européenne en cours de déploiement. La proposition de résolution européenne que nous vous soumettons aujourd’hui reprend les principaux points que nous avons développés. Le soutien à des projets de règlements ambitieux sur les matières premières critiques et l’industrie à zéro émission net ; la création d’un véritable fonds de souveraineté pour rassembler tous les fonds existants et simplifier l’accès ; la mobilisation de la politique commerciale européenne pour conclure un partenariat avec les États-Unis, de manière à garantir l’éligibilité des produits européens à un maximum de disposition de l’IRA. Je vous remercie.

La capacité de l’Union et des États membres à déclencher efficacement les financements privés est au cœur de la réponse européenne à l’IRA. La simplicité et la prévisibilité des aides gagneraient à être renforcées en Europe. C’est le sens des recommandations récemment formulées par notre collègue Charles Sitzenstuhl sur le fonctionnement des projets importants d’intérêt européen commun, les PIIEC, dans son rapport sur le projet de loi relatif à l’industrie verte. Nous insistons sur la portée transnationale de ce dispositif, à l’heure où le soutien budgétaire déployé par chaque État membre pour soutenir son économie crée un risque de fragmentation du marché intérieur. L’ampleur des réponses nationales peut varier : seules l’Allemagne et la France sont encore en mesure de mobiliser des milliards d’euros, tandis que les autres États membres n’ont pas les mêmes capacités.

La mise en place d’un véritable Fonds de souveraineté européen est donc nécessaire. L’Union européenne ne peut pas se contenter de faire les « fonds de tiroirs » en réagençant les dispositifs existants et en proposant seulement 10 milliards d’euros de nouveaux financements. Identifier les projets stratégiques au niveau européen et mobiliser le budget de l’Union, voilà qui devrait rationaliser les initiatives redondantes, voire concurrentes au niveau national. Dans un contexte de stress budgétaire intense à l’occasion de la révision du cadre financier pluriannuel, la Commission a proposé la création d’une plateforme dite « STEP », pour le soutien aux technologies industrielles innovantes, dotées de 10 milliards d’euros d’argent « neuf ». Si cette solution se comprend à court terme, l’Union ne peut faire l’économie de la création d’un véritable Fonds de souveraineté d’ampleur à moyen terme.

Enfin, la réponse européenne à l’IRA suppose d’explorer toutes les options de politique commerciale à la disposition de l’Union. Il nous semble peu opportun, à ce stade, d’introduire une plainte devant l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ou de reproduire les exigences de contenu local mises en place outre-Atlantique. Nous aurions tout à perdre d’une guerre commerciale. Les États-Unis demeurent un partenaire privilégié au niveau international, en particulier alors que l’Union réévalue son approche stratégique à l’égard de la Chine.

Une Task Force commune entre les États-Unis et l’Union a permis de maintenir le dialogue et d’obtenir de premières concessions, par exemple pour les véhicules assemblés en Europe et mis sur le marché américain en leasing. Ces efforts se poursuivent avec la négociation d’un accord sur les matières premières critiques. Il permettrait aux matériaux extraits ou transformés en Europe de bénéficier du crédit d’impôt pour les véhicules électriques prévu par l’IRA. En 2022, les pays européens ont exporté aux États-Unis pour plus de 8 milliards d’euros de matières premières entrant dans la fabrication de véhicules électriques. L’effet d’un tel partenariat ne serait donc pas négligeable.

Notre attachement au cadre commercial multilatéral ne doit pas nous empêcher, au contraire, de recourir si nécessaire aux instruments de défense commerciale. L’entrée en application en septembre 2023 du règlement sur les subventions étrangères complète utilement la boîte à outils de l’Union pour lutter contre les pratiques déloyales. La Commission pourra donc se saisir d’office des subventions étrangères faussant le marché intérieur, par exemple dans le cadre d’un marché public.

Nous souhaitions, chers collègues, vous présenter notre première analyse des difficultés soulevées par l’IRA et de la réponse européenne en cours de déploiement. La proposition de résolution européenne que nous vous soumettons aujourd’hui reprend les principaux points que nous avons développés, c’est-à-dire : le soutien à des projets de règlements ambitieux sur les matières premières critiques et l’industrie à zéro émission net ; la création d’un véritable fonds de souveraineté pour rassembler tous les fonds existants et simplifier l’accès ; la mobilisation de la politique commerciale européenne pour conclure un partenariat avec les États-Unis, de manière à garantir l’éligibilité des produits européens à un maximum de disposition de l’IRA.


L’exposé des rapporteures a été suivi d’un débat.

Mme Brigitte Klinkert (RE). Avec l’adoption de l’IRA – puissant catalyseur de subventions aux industries vertes –, les États-Unis mettent en péril la compétitivité de notre industrie européenne, tout en faisant peser le risque d’une délocalisation massive outre-Atlantique. L’IRA est donc un vrai danger pour la réindustrialisation de notre pays et de l’Union. C’est pourquoi nous devons apporter une réponse européenne rapide et coordonnée, tout en repensant les fondamentaux de notre économie et la protection de notre marché unique, sur le court et le moyen terme. Il y va de la stabilité et de la prospérité économique de notre continent : la déstabilisation du marché unique est un danger vital pour l’Union européenne.

Il y a urgence, car l’avenir de nos emplois se joue maintenant. Six mois après le lancement de l’IRA, plusieurs géants industriels ont déjà annoncé l’abandon de projets en Europe et leur redéploiement aux États-Unis. On peut citer Iberdrola pour l’Espagne, Safran pour la France, Northvolt pour la Suède ou encore BASF pour l’Allemagne. Nous devons maintenir l’emploi dans l’Union, mais aussi attirer les industries de l’économie de demain. Dès lors, pour inverser la tendance et sauver nos emplois, c’est résolument en Européens que nous devons répondre. Si l’Union ne se dote pas aujourd’hui d’une stratégie robuste et offensive, elle prend le risque de voir les entreprises européennes délocaliser massivement demain.

Nous devons agir dès aujourd’hui pour rattraper notre retard vis-à-vis des autres puissances dans la course aux technologies vertes. Un choc de simplification des procédures est nécessaire pour faciliter les investissements de nos entreprises sur le sol européen.

Le fonds de souveraineté, initiative soutenue notamment par la France, permettra un soutien rapide de toutes les entreprises européennes, pour éviter notamment qu’elles ne quittent le territoire européen. L’Union a la responsabilité de protéger ses entreprises – quelle que soit leur taille – des conséquences de l’IRA.

Le groupe Renaissance soutient la réponse européenne forte à l’IRA : l’Union doit faire preuve d’unité face à ce défi.

M. Pierrick Berteloot (RN). Le 7 août 2022, le Sénat Américain approuvait l’IRA, un plan prévoyant 400 milliards de dollars de dépenses pour promouvoir l’énergie propre et lutter contre le changement climatique, ainsi que 100 milliards de dollars pour réduire les coûts des soins de santé. Cette législation s’inscrit dans la continuité d’une politique économique américaine protectionniste, parfois au détriment des alliés européens. Ses objectifs sont de favoriser la production nationale, de soutenir une politique industrielle respectueuse de l’environnement, ainsi que de renforcer la sécurité sociale tout en combattant l’inflation.

À cette fin, la loi propose – entre autres mesures – des avantages fiscaux aux entreprises qui produisent aux États-Unis, et offre des subventions pour encourager la production d’énergies renouvelables. Le maintien du patriotisme économique aux États-Unis est un message fort. Il nous rappelle que, dans un monde en constante évolution, les nations ont la responsabilité de protéger leurs économies de manière souveraine.

Les accords de libre-échange ne doivent pas être suivis aveuglément. L’IRA démontre que les traités internationaux, tels que le Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement – ou TTIP – ne sont pas la seule réponse. Chaque nation doit défendre ses intérêts économiques. L’IRA est également un rappel important pour les pays européens de la concurrence à laquelle ils sont confrontés sur ces marchés ouverts. Il est impératif de souligner que les États-Unis ne sont pas les seuls à embrasser cette orientation. L’Union européenne devrait également puiser des enseignements de cette tendance.

Au Rassemblement National, nous penchons en faveur d’une approche d’un patriotisme économique impulsé au niveau des États membres de l’Union européenne, plutôt que d’une forme de protectionnisme centralisé au niveau européen. Il convient de noter que chaque entité possède ses particularités, lesquelles doivent également être dûment prises en considération. L’heure est venue pour l’Union européenne de changer de paradigme et de respecter la souveraineté des États membres dans ce domaine.

Nous devons encourager la production en Europe, soutenir nos industries et créer des incitations pour les entreprises qui investissent sur notre continent. Cela ne signifie pas un repli sur nous-mêmes, mais plutôt une stratégie économique plus équilibrée et résiliente. En résumé, la législation américaine dite « IRA » nous rappelle l’importance de protéger nos économies, tout en favorisant une économie respectueuse de l’environnement.

Les États-Unis ont maintenu leur tradition de patriotisme économique, et il est temps que l’Union européenne emprunte une voie similaire, en préservant la souveraineté de ses États membres. Il y a urgence : nous devons agir résolument pour créer un environnement propice à la production en Europe, ce qui protégera nos industries et assurera notre avenir économique.

Mme Nathalie Oziol (LFI-NUPES). En décembre dernier, Emmanuel Macron, en déplacement aux États-Unis, était allé se plaindre à Joe Biden de l’Inflation Reduction Act. Ce plan de 370 milliards de dollars de soutien à l’économie des États-Unis a toujours été perçu comme venant mettre à mal la concurrence avec l’Europe. Emmanuel Macron n’avait reçu aucune réponse concrète de Joe Biden, contrairement à ce que le gouvernement français n’a cessé de prétendre. Les grandes phrases sur l’amitié franco‑américaine et le partenariat solide et historique ne sont pas des engagements.

En somme, Emmanuel Macron, la France, l’Europe ont encore une fois été considérés comme des partenaires subalternes dont les États-Unis n’ont pas à s’inquiéter. La guerre en Ukraine a démenti la prétendue solidarité occidentale, avec l’envolée des prix du gaz et du pétrole que nous vendent les États-Unis. Nous aurions tout intérêt à discuter avec les États-Unis des urgences de notre époque – l’écologie et la sortie de l’économie globalisée notamment – mais il n’en est jamais question.

Or, Joe Biden a pris des orientations dont l’Europe et la France pourraient s’inspirer : le conditionnement des aides publiques à la création d’emplois locaux, la relocalisation des productions pour réduire la vulnérabilité des États-Unis, le fléchage de 80 milliards de dollars au renforcement de la lutte et de l’évasion contre la fraude fiscale. En parallèle, la politique néolibérale et libre-échangiste du gouvernement français paraît complètement dépassée avec 140 milliards d’euros d’aides annuelles aux entreprises sans contreparties, un plan de relance européen qui n’aura fait que gaver la finance, le refus de tout protectionnisme, l’obsession des équilibres budgétaires alors même que cela gonfle la dette contre laquelle ce gouvernement prétend lutter.

Il faut arrêter changer de politique en France et en Europe. Nous défendons, à la France insoumise, une vision indépendante dans laquelle la France n’est alignée ni sur les États-Unis, ni sur la Russie, ni sur la Chine, ni sur personne. Ce n’est qu’ainsi que nous pouvons construire un projet et un avenir pour l’industrie, l’emploi, et renforcer notre indépendance énergétique, sanitaire, stratégique.

Nous regrettons donc que nous ne mettions pas nos efforts au service du protectionnisme écologique et social européen. C’est en désobéissant aux traités européens qu’un tel protectionnisme pourra être mis en place en France. Nous n’avons jamais autant parlé d’écologie, d’environnement, de protection sociale. Pourtant, les politiques qui causent la course au moins-disant social et écologique ne changent pas. Il est temps d’organiser la planification à partir de nouveaux indicateurs de progrès humain.

M. Henri Alfandari (HOR). Ce rapport porte sur une loi américaine dotée de beaucoup d’ambition, adoptée dans un contexte de crise énergétique sur le sol européen et d’inflation au niveau mondial. Elle met en place un système fait de subventions, d’allègements fiscaux et d’autres outils incitatifs. Nos inquiétudes à son égard sont nombreuses et ont été exprimées dans le rapport. Elles portent sur les risques de délocalisation mais aussi de technologies innovantes aux États-Unis plutôt qu’en France. Il y a même un risque d’abandon du marché européen, et il faut faire attention à ne pas devenir une zone de seconde classe.

Face à ce mouvement d’ampleur, la Commission européenne a répondu en début d’année 2023 par une série de mesures : le règlement sur les matières premières critiques, la proposition de règlement pour une industrie zéro net, la mise en place de la plateforme technologique stratégique pour l’Europe pour regrouper les capacités de financement existantes, et la réforme du marché de l’électricité. On peut dire de cette réponse qu’elle est extrêmement salutaire car elle prend bien en compte la totalité des énergies décarbonées, dont le nucléaire. La réforme du marché et les avancées récentes vont bénéficier réellement à l’attractivité du continent européen et de notre pays.

Cette proposition de résolution européenne permet de couvrir l’ensemble du spectre de la réponse européenne à l’IRA. Vous avez raison de dire qu’il nous faut avancer sur le financement des technologies vertes et bénéficier d’un budget propre. Le fonds de souveraineté serait absolument nécessaire pour porter ces investissements au niveau européen.

Il ne faut pas dénoncer l’IRA auprès de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) pour diverses raisons. Vous maintenez en revanche que l’impact sur le marché européen sera somme toute assez limité. Nous pouvons l’espérer mais nous pouvons tout de même toujours craindre l’inverse.

Il y a donc globalement une vraie réponse à l’IRA, y compris avec le projet de loi « industrie verte » et les crédits d’impôts qui sont alloués en France. Mais il ne faut jamais oublier à qui l’on s’adresse : plus les choses sont simples et lisibles, plus elles sont compréhensibles et accessibles, tandis que plus les choses se complexifient, plus la perte de temps orientera les entreprises vers des marchés extérieurs. En l’état, nous voterons en faveur de cette proposition de résolution.

M. David Amiel (RE). Je suis très frappé que dans la foulée de l’IRA, dans l’année qui s’est écoulée, les réponses qui ont été mises en place en matière de politique industrielle, de matières premières critiques ont marqué une rupture profonde dans l'approche européenne de la politique économique. Elles se situent très loin du néolibéralisme que l’on a longtemps associé aux politiques européennes. L’appel de la France a donc été entendu.

Il est étonnant d’entendre La France insoumise critiquer les aides importantes mises en place en réponse à la politique américaine, qui ont permis à nos industries, nos commerçants, nos artisans et nos PME de tenir le choc. Nous assumons, pour notre part, cette politique d’inspiration keynésienne et ce renouveau de la politique industrielle, loin du « tout marché ».

Il nous faut continuer à aller plus loin. L’IRA marque aussi du côté américain une rupture profonde dans leur approche des politiques économiques aux Etats-Unis. Nous verrons ce qu’il se passera lors des prochaines élections américaines, mais tout laisse à penser que cette inspiration va, d’une manière ou d’une autre, perdurer. Cela vaut pour le meilleur, les États-Unis devraient pouvoir embrasser la transition énergétique davantage qu’ils ne le faisaient avant, et relancer une politique industrielle d’innovation technologique qui bénéficiera à l’économie mondiale. Mais cela vaut aussi pour le pire, par ce protectionnisme et cet unilatéralisme.

Nous devons nous interroger sur le cadre européen qu’il va falloir construire pour être capables de répondre aux prochains IRA. Cela pose la question des relations commerciales avec les États-Unis, alors même qu’ils dévitalisent le cadre commercial international sur fond de rivalité avec la Chine.

Il y a également la possibilité d’un contre-feu financier si ces mesures venaient à s’amplifier au-delà du fonds de souveraineté. Nous aurons besoin de mettre en place des investissements très importants, et cela soulève la question du cadre financier européen pour les années à venir.

Mme Sophia Chikirou (LFI-NUPES). Ce rapport est instructif et accablant sur l’incapacité de l’Union européenne à apporter des réponses proportionnées et rapides à l’IRA américain, mais aussi plus largement aux exigences qui sont partout relevées s’agissant de la transition écologique.

Ainsi que vous l’avez rappelé, ce sont 369 milliards de dollars du côté américain pour soutenir à la fois l’offre et la demande, et quasiment aucun fonds nouveau mobilisé du côté européen, si ce n’est des fonds existants et la plateforme pour les technologies stratégiques. Cela représente à peine 10 milliards d’euros. C’est assez négligeable, ainsi que le dit l’eurodéputée libérale espagnole Eva Maria Poptcheva. J’en profite pour rappeler qu’en France non plus nous ne sommes pas à la hauteur. Je vous rappelle que la partie financement du projet de loi « industrie verte » ne contenait rien, si ce n’est le plan épargne avenir climat. Le gouvernement l’évalue à un milliard d’euros mais nous sommes très sceptiques sur cette estimation.

Je souhaite appeler votre attention sur la dernière partie du rapport. Vous y préconisez des mesures contre lesquelles je m’insurge. Vous souhaitez développer et amplifier une coopération avec les États-Unis alors même qu’ils sont dans une stratégie et une position protectionnistes qui ne nous est pas favorable, même hostile. J’aimerais savoir pourquoi vous faites ce choix d’aller plus amplement vers un développement des relations avec les Américains, alors que l’Union européenne aurait tout intérêt à se protéger.

Mme Constance Le Grip (RE). Dans le rapport d’information, il est indiqué que l’Union européenne doit apporter une réponse commerciale à l’IRA mais, dans le même temps, les rapporteures jugent peu opportun le recours aux instruments de défense commerciale. Je ne méconnais pas les risques de mesures de rétorsions qui courent lorsque l’on prend des mesures de défense commerciale trop importantes, et je comprends la pertinence de ne pas saisir l’OMC. Néanmoins, l’Union européenne est dotée d’une boîte à outils pour assurer sa défense commerciale, par exemple par des mesures anti-dumping ou des clauses de sauvegarde.

Dès lors, pourquoi semblez-vous considérer comme peu opportun le recours aux instruments de défense commerciale dans la relation entre les États-Unis et l’Union européenne ?

Mme Sabine Thillaye, rapporteure. Pour répondre à Brigitte Klinkert, les dangers immédiats de l’IRA sont, selon nous, à relativiser. Si l’on regarde les chiffres, nous avons effectivement 370 milliards de dollars mis sur la table par les États-Unis, mais l’Union européenne met, sur 10 ans, 600 milliards d’euros sur la table, ce qui est une somme conséquente.

Cela ne signifie pas qu’il faille rester les bras croisés. Nous avons besoin d’un choc de simplification, dans l’Union européenne et dans les États membres, dont le nôtre. Nous avons également besoin de financements privés. Il nous faut donc regarder comment faire en sorte que nos entreprises trouvent les financements publics et privés adéquats. Mais tout cela intervient dans un cadre budgétaire assez restreint et dans un contexte de réticences des États membres dès lors qu’il s’agit de ressources propres ou d’augmentation du financement de l’Union européenne. Si l’on veut davantage d’action de l’Union européenne sans lui en donner les moyens adéquats, il nous faut faire preuve d’honnêteté avec nous-mêmes.

Pour répondre à Pierrick Berteloot, j’apprécie le fait que vous jugiez que l’Union européenne doit apporter des réponses, et pas seulement les États membres. Les deux apportent aujourd’hui des réponses. En effet, les États membres peuvent prendre des mesures suite à l’assouplissement des critères des aides d’État, adopté récemment au niveau européen pour prolonger le dispositif. Nous ne sommes pas non plus sans atouts. L’Union européenne représente aujourd’hui un marché d’une taille extrêmement intéressante pour nos concurrents, et je crois qu’il ne faut pas le sous-estimer.

Pour répondre à Nathalie Oziol, vous avez dit souhaiter un non-alignement par rapport à la Russie et à la Chine. C’est également notre cas, et je crois que tous les États membres de l’Union européenne souhaitent ce non-alignement. C’est la raison pour laquelle nous parlons de souveraineté européenne et que nous souhaitons tous arrêter les délocalisations. Cela suppose également d’en avoir les moyens, au-delà des règles commerciales. Peut-être devrions-nous revoir les règles de concurrence au niveau de l’Union européenne puisque nous ne sommes aujourd’hui pas en mesure de créer des entités de taille suffisante pour faire face à la concurrence.

Mme Marietta Karamanli, rapporteure. Quand nous avons décidé de se saisir de cette question de l’IRA, nous étions dans un moment particulier où nous reprochions aux États-Unis ce que nous aurions pu faire. Et en observant et en analysant ce que les États-Unis ont fait, cela nous a permis d’être dans une approche dynamique et positive qui permet aujourd’hui de faire des propositions. Les investissements dans les véhicules propres et les batteries sont concentrés dans des zones défavorisées aux États-Unis, où les salaires, les taux de personnes diplômées et de personnes employées sont parmi les plus faibles. L’IRA a donc un fort aspect social.

Nous parlons beaucoup des investissements qui ont réalisé dans l’industrie, les 400 milliards souvent évoqués. Toutefois, l’IRA présente trois aspects : les entreprises décarbonées, mais aussi un volet santé et un volet recettes. Le volet santé traite de la question de la sécurité sociale et c’est un élément que je salue chez Joe Biden. Il y a aussi un volet recettes qui figure dans le rapport que je vous invite à lire et qui traite de la taxation pharmaceutique. Nous parlons souvent du volet industrie et beaucoup moins des autres. Il faut insister sur ce côté volontariste et nous en inspirer dans l’Union européenne.

Il y a une dimension de souveraineté qui est indispensable pour embarquer les populations et les décideurs.

Mme Sabine Thillaye, rapporteure. Pour compléter ce qui vient d’être dit et élargir la réflexion, il ressort de nos auditions que l’IRA n’est pas nécessairement tourné contre l’Union européenne, mais surtout un message à l’adresse de la Russie et de la Chine.

M. le Président Pieyre-Alexandre Anglade. Nous en passons maintenant à l’examen de l’article unique de la proposition de résolution européenne et des amendements déposés.

Amendement n°1 de Mme Constance Le Grip et sous-amendement n° 4 des rapporteures

Mme Constance Le Grip (RE). J’ai souhaité compléter l’excellente proposition de résolution européenne de nos deux rapporteures en ajoutant un alinéa supplémentaire dans lequel je souhaite que soit approfondie la réflexion sur les nouvelles mesures d’aides d’État c’est-à-dire le cadre temporaire qui a été adopté le 9 mars 23. Le sujet des aides d’État doit être abordé dans le cadre des réflexions actuelles.

Mme Sabine Thillaye, rapporteure. La prolongation des mesures d’aides d’État est actée et la Commission européenne a entendu les États membres en permettant à ceux-ci d’aider les entreprises affectées par l’inflation énergétique jusqu’en 2024. Nous saluons cette réflexion dans notre sous-amendement. Nous sommes favorables à l’amendement de Madame Le Grip si notre sous-amendement, qui distingue ce qui est déjà fait de ce qui doit encore être réalisé, est adopté.

Le sous-amendement n° 4 est adopté.

L’amendement n° 1 ainsi sous-amendé est adopté.

Amendement n°2 de Mme Constance Le Grip

Mme Constance Le Grip (RE). L’amendement n° 2 vise à saluer un certain nombre d’États membres qui ont pris des initiatives, à l’instar de la France, avec la loi « Industrie verte ».

Mme Marietta Karamanli, rapporteure. Nous émettons un avis plutôt favorable à cet amendement qui vise à faciliter les investissements dans les industries vertes.

L’amendement n° 2 est adopté.


Amendement n°4 des rapporteures

Mme Sabine Thillaye, rapporteure. L’amendement vise à soutenir nos entreprises européennes dans la compétition mondiale. Nous avons besoin de revoir nos règles de concurrence. Nous proposons donc d’ouvrir une réflexion sur l’adaptation de nos règles aux enjeux industriels européens, afin de favoriser la compétitivité de nos entreprises.

Mme Sophia Chikirou (LFI-NUPES). Nous allons vraiment nous opposer à cet amendement qui propose un assouplissement des règles pour les entreprises au moment où nous avons besoin de règles pour conditionner écologiquement et socialement les aides d’État. Par ailleurs, dans le contexte actuel nous ne pouvons pas faire plus sur le volet énergétique. La question posée est : que voulons-nous ? Voulons-nous amorcer une transition énergétique ? Voulons-nous harmoniser dans ce domaine ou voulons-nous comme vous le dites, lever des barrières et enlever le peu de protections qui existent encore ? Nous nous y opposons très fermement.

M. Henri Alfandari (HOR). Ce n’est pas du tout ce que les rapporteures proposent. Que ce soit en France ou en Europe, nous sommes particulièrement bloqués sur une question d’opérateur public ou privé : nous ne pouvons subventionner d’opérateurs privés que dans le cadre restrictif des aides d’Etat. Nous ferions mieux de nous poser la question de savoir si un secteur est stratégique ou non. Et cette dimension stratégique devrait permettre de déroger à un certain nombre de règles, et d’allouer des aides d’État car nous en avons bien besoin au regard de l’intérêt stratégique. J’aurais souhaité, Mesdames les rapporteures, que vous ajoutiez la mention de l’intérêt stratégique.

Mme Marietta Karamanli, rapporteure. La question que vous évoquez ici est celle de la défense des secteurs stratégiques au niveau européen avec l’ensemble des États pour investir plus.

Mme Sabine Thillaye, rapporteure. À la fin de l’alinéa 49, nous souhaitons rajouter « l’émergence de champions européens dans les domaines stratégiques » et ouvrir une réflexion sur la suspension temporaire des aides d’État.

L’amendement n° 4 est adopté.

L’article unique modifié de la proposition de résolution européenne est adopté.

Par conséquent, la proposition de résolution européenne ainsi modifiée est adoptée.

La commission a ensuite autorisé le dépôt du rapport d’information en vue de sa publication.

 

 


1

   proposition de résolution européenne initiale

 

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu les articles 114, 173 et 194 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

Vu la directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE,

Vu la directive 2014/23/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur l’attribution des contrats de concession

Vu le règlement (UE) 2017/821 du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2017 fixant des obligations liées au devoir de diligence à l’égard de la chaîne d’approvisionnement pour les importateurs de l’Union qui importent de l’étain, du tantale et du tungstène, leurs minerais et de l’or provenant de zones de conflit ou à haut risque,

Vu le règlement (UE, Euratom) 2020/2093 du Conseil du 17 décembre 2020 fixant le cadre financier pluriannuel pour les années 2021 à 2027,

Vu le règlement (UE) 2020/2094 établissant un instrument de l’Union européenne pour la relance en vue de soutenir la reprise à la suite de la crise liée à la Covid-19,

Vu le règlement (UE) 2020/852 du Parlement européen et du Conseil établissant le cadre requis pour parvenir à la neutralité climatique et modifiant les règlements (CE) 401/2009 et (UE) 2018/1999,

Vu le règlement (UE) 2021/1119 du Parlement européen et du Conseil du 30 juin 2021 établissant le cadre requis pour parvenir à la neutralité climatique et modifiant les règlements (CE) n° 401/2009 et (UE) 2018/1999 (« loi européenne sur le climat »),


Vu le règlement (UE) 2021/695 du Parlement européen et du Conseil du 28 avril 2021 portant établissement du programme-cadre pour la recherche et l’innovation « Horizon Europe » et définissant ses règles de participation et de diffusion, et abrogeant les règlements (UE) n° 1290/2013 et (UE) n° 1291/2013,

Vu le règlement (UE) 2021/523 du Parlement européen et du Conseil établissant le programme InvestEU et modifiant le règlement (UE) 2015/1017,

Vu le règlement (UE) 2023/1781 du Parlement européen et du Conseil du 13 septembre 2023 établissant un cadre de mesures pour renforcer l’écosystème européen des semi-conducteurs et modifiant le règlement (UE) 2021/694 (règlement sur les puces),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant un cadre visant à garantir un approvisionnement sûr et durable en matières premières critiques et modifiant les règlements (UE) nº 168/2013, (UE) 2018/858, (UE) 2018/1724 et (UE) 2019/1020 (règlement sur les matières premières critiques, COM(2023) 160 final),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à l’établissement d’un cadre de mesures en vue de renforcer l’écosystème européen de la fabrication de produits de technologie « zéro net » (règlement pour une industrie « zéro net », COM(2023) 161 final),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant les règlements (UE) 2019/943 et (UE) 2019/942 ainsi que les directives (UE) 2018/2001 et (UE) 2019/944 afin d’améliorer l’organisation du marché de l’électricité de l’Union (COM(2023) 148 final),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant la plateforme « Technologies stratégiques pour l’Europe » (STEP) et modifiant la directive modifiant la directive 2003/87/CE et les règlements (UE) 2021/1058, (UE) 2021/1056, (UE) 2021/1057, (UE) nº 1303/2013, (UE) nº 223/2014, (UE) 2021/1060, (UE) 2021/523, (UE) 2021/695, (UE) 2021/697 et (UE) 2021/241 (COM(2023) 335 final),

Vu la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 3 septembre 2020 « Résilience des matières premières critiques : la voie à suivre pour un renforcement de la sécurité et de la durabilité » (COM(2020) 474 final),

Vu la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 18 mai 2022, « Plan RePower EU » (COM(2022)230 final),


Vu la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 1er février 2023, « Un plan industriel du Pacte vert pour l’ère du zéro émission nette », COM(2023) 62 final,

Vu la communication de la Commission du 9 mars 2023 relative à l’encadrement temporaire de la crise et de transition pour les mesures d’aide d’État visant à soutenir l’économie à la suite de l’agression de la Russie contre l’Ukraine (2023/C 101/03),

Considérant que l’Inflation Reduction Act prévoit un plan de financement fédéral de 432 milliards de dollars sur dix ans pour la production et l’utilisation d’énergies propres, amplifiant ainsi l’effort des États-Unis en faveur de la lutte contre le changement climatique ;

Considérant que l’Inflation Reduction Act comprend également un volet social et sanitaire, avec un financement de 64 milliards de dollars, notamment dans l’objectif de faire baisser le prix des médicaments pour les consommateurs ;

Considérant que l’Inflation Reduction Act prévoit des allègements fiscaux pour les entreprises produisant aux États-Unis et des subventions à la production, notamment pour les voitures électriques ;

Considérant que la taille du marché unique, la qualité des infrastructures et la disponibilité du capital humain constituent d’importants atouts pour attirer les industries sur le sol de l’Union ;

Considérant la nécessité de soutenir les secteurs industriels stratégiques identifiés par l’Agenda de Versailles, particulièrement ceux liés à la transition verte ;

Considérant que l’Union européenne dispose d’un grand nombre de programmes axés sur les objectifs climatiques, parmi lesquels le Plan industriel du Pacte vert comprenant des crédits provenant du fonds NextGenerationEU et du fonds RePowerEU ;

Considérant que l’ampleur du plan fait craindre un déficit de compétitivité industrielle de l’Union européenne et un risque accru de délocalisations, notamment en raison du traitement préférentiel accordé aux énergies renouvelables et aux voitures électriques produites aux États-Unis, dont les acheteurs bénéficieront d’un crédit d’impôt fédéral pouvant aller jusqu’à 7 500 € si ces véhicules sont fabriqués en Amérique du Nord ;

Considérant que l’ensemble des programmes budgétaire de l’Union présente un volume de financement global comparable à celui de l’Inflation Reduction Act, permettant ainsi de compenser le différentiel de compétitivité initialement craint ;

Considérant que l’adoption le 9 mars 2023 par la Commission européenne d’un cadre temporaire pour les aides d’État permet aux États membres de stimuler les investissements dans les technologies propres, en complément des financements européens ;

1. Se félicite des moyens accrus engagés par les États-Unis pour atteindre leurs objectifs climatiques prévus par l’Accord de Paris de 2015 ;

2. Salue la proposition par la Commission européenne d’un volet industriel du Pacte Vert ;

3. Appelle à une adoption rapide de la proposition de règlement sur les matières premières critiques, de la proposition de règlement sur une industrie à zéro émissions nettes et de la proposition de règlement relative à l’amélioration de l’organisation du marché de l’électricité de l’Union ;

4. Relève l’importance de procéder à une analyse économique détaillée de l’incidence de l’Inflation Reduction Act sur l’économie européenne, de manière à mieux en anticiper les effets ;

Sur le règlement relatif aux matières premières critiques

5. Estime nécessaire de compléter l’objectif fixé pour 2030 par des objectifs pour 2035 et 2040, afin de donner une trajectoire-cible aux États membres et aux entreprises ;

6. Demande l’intégration de l’alumine et de l’aluminium dans la liste des matières premières stratégiques, puisque ces métaux sont des matières cruciales dans les technologies bas carbone et l’industrie de défense ;

7. Souhaite une mise à jour de la liste des matières premières critiques tous les trois ans, et non tous les quatre ans, afin de refléter au mieux l’état des tensions sur les matières premières ;

8. Appelle à relever le niveau d’ambition pour les matières premières recyclées et transformées de 40 à 50 % en matière de transformation et de 15 à 20 % en matière de recyclage ;

9. Déplore la mise en place des mesures relatives à la publicité des stocks de matières premières critiques, qui présentent un risque de révéler des vulnérabilités économiques des États membres ou d’opérateurs économiques stratégiques ;

10. Appelle au maintien de l’obligation pour les grandes entreprises utilisant des matières premières critiques pour la fabrication de technologies stratégiques à procéder à un audit ;


Sur le règlement « industrie à zéro émissions nettes » :

11. Se félicite de l’objectif global de capacité de production européenne d’au moins 40 % des besoins annuels de déploiement de l’Union dans le domaine des technologies net-zéro, mais souhaite que cet objectif global soit décliné par secteur et par technologie, de manière donner davantage de visibilité aux acteurs économiques ;

12. Relève la nécessité de ne pas allonger de façon trop importante la liste des technologies stratégiques, afin de ne pas matérialiser un risque de saupoudrage des financements publics ;

13. Souhaite une cohérence des dispositions du règlement, notamment du périmètre des technologies stratégiques, avec le cadre temporaire pour les aides d’État adopté par la Commission le 9 mars 2023 ;

14. Accueille favorablement l’insertion de critères qualitatifs de résilience et de durabilité dans la commande publique, en rendant ces critères les plus opérationnels possibles pour les pouvoirs adjudicateurs ;

15. Souhaite toutefois que la possibilité pour le pouvoir adjudicateur de ne pas tenir en compte les critères de résilience et de durabilité soit restreinte, en revalorisant le critère actuellement fixé à 10 % de différence de coûts ;

Sur le financement :

16. Regrette que les plans européens et nationaux soient aussi fragmentés, les programmes variés de sorte qu’il pourrait en résulter un manque de lisibilité et de visibilité pour les investisseurs ;

17. Regrette que la plateforme de technologies stratégiques pour l’Europe, dite « STEP » aux objectifs divers ne mobilise que des financements européens existants, tels que le programme de recherche Horizon Europe, le fonds InvestEU, et le Fonds européen de développement régional ;

18. Estime que l’amendement au cadre financier pluriannuel doit être revalorisé d’au moins de 13 milliards d’euros de crédits additionnels pour concourir aux objectifs de la plateforme STEP ;

19. Appelle de ses vœux à l’occasion des négociations du futur cadre financier pluriannuel la création d’un véritable fonds de souveraineté, doté d’un budget suffisamment ambitieux pour préserver la compétitivité de toutes les industries « net zéro » sur le sol de l’Union européenne ;

20. Soutient l’objectif de simplification réglementaire et d’accélération des procédures, de manière à poser des conditions d’accès simples, claires et prévisibles aux différentes aides ;


Sur les aspects de politique commerciale :

21. Insiste sur l’inutilité, voire le caractère contreproductif d’une plainte à l’Organisation mondiale du commerce pour dénoncer la violation du traitement préférentiel prévu pour les entreprises américaines par l’Inflation Reduction Act ;

22. Se félicite du rôle du Conseil du commerce et des technologies Union européenne – États-Unis, qui permet de maintenir des plateformes de dialogue transatlantique dans la conduite de la politique commerciale ;

23. la démarche de conclusion d’un partenariat sur les matières premières critiques avec les États-Unis, à l’image du partenariat conclu entre les États-Unis et le Japon, de manière à garantir l’éligibilité des produits européens à un maximum de dispositions de l’Inflation Reduction Act.

 

 

 


1

   Amendements examinés par la commision

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

22 NOVEMBRE 2023


Proposition de rÉsolution europÉenne
relative À la rÉponse europÉenne À l’Inflation Reduction Act (IRA)

 

AMENDEMENT

No 1

 

présenté par

Constance Le Grip

----------

ARTICLE UNIQUE

 

Après l’alinéa 33, insérer l’alinéa suivant :

« Souhaite que soit approfondie la réflexion sur une prolongation voire une pérennisation des nouvelles mesures d’aides d’État, prévues dans le cadre temporaire adopté le 9 mars 2023, applicable jusqu’au 31 décembre 2025, et jusqu’au 31 décembre 2023 pour certaines d’entre elles »

EXPOSÉ SOMMAIRE

Le 9 mars 2023, la Commission européenne a modifié l'encadrement temporaire de crise et de transition pour les mesures d'aide d'État visant à soutenir l'économie à la suite de l'agression de la Russie contre l'Ukraine, adopté pour la première fois le 23 mars 2022 et déjà modifié. Les mesures de soutien visant à faciliter la transition vers une industrie à émissions nulles, telles que les mesures visant à accélérer le déploiement des énergies renouvelables et le stockage de l'énergie et à la décarbonation des processus de production industriels, sont prorogées jusqu'au 31 décembre 2025 ; les autres dispositions de l'encadrement temporaire pour les crises restent applicables jusqu'au 31 décembre 2023 notamment vis-à-vis des montants limités de l’aide, soutien sous forme de garanties d'État et de prêts bonifiés, aides destinées à compenser les prix élevés de l'énergie, mesures visant à soutenir la réduction de la demande d'électricité. Nous souhaiterions donc par cet amendement que la Commission puisse approfondir sa réflexion sur une prolongation voire une pérennisation de ces mesures.

 

Cet amendement est adopté.


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

22 NOVEMBRE 2023


Proposition de résolution européenne

Réponse européenne à l’Inflation Reduction Act (IRA)

 

SOUS-AMENDEMENT

No 4

 

présenté par

Mme Marietta Karamanli et Mme Sabine Thillaye

à l’amendement n° 1 de Mme Constance Le Grip

----------

  1.                    A l’alinéa qu’il est proposé d’insérer après l’alinéa 33 :

Remplacer :

« Souhaite que soit approfondie la réflexion sur une prolongation voire une pérennisation …»

Par :

« Se félicite de la prolongation… »

  1.                 Déplacer l’alinéa ainsi inséré après l’alinéa 49

EXPOSÉ SOMMAIRE

La prolongation des mesures d’aide d’Etat est déjà actée, par la présentation du cadre temporaire adopté par le collège des commissaires le 9 mars 2023. Par ailleurs, la Commission européenne a également entendu les Etats membres lundi dernier, en autorisant la possibilité pour les Etats d’aider les entreprises affectées par l’inflation énergétique jusqu’en 2024.

Vos rapporteures saluent la prise de ces décisions. Puisque la Commission s’est déjà saisie du sujet, nous vous proposons donc de saluer cette décision des institutions européennes.

La question de l’ouverture d’une réflexion sur la pérennisation de ce cadre temporaire fait l’objet de l’amendement 3. Pour la cohérence de la PPRE, il semble pertinent de séparer ce qui a déjà été fait au niveau européen, de ce qui pourrait encore être réalisé.

Le déplacement de l’alinéa 33 à l’alinéa 49 a pour objectif de mettre ce paragraphe dans le volet de la proposition dédié aux aspects budgétaires de la réponse européenne à l’IRA.

 

Cet amendement est adopté.


 

 

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

22 NOVEMBRE 2023


Proposition de rÉsolution europÉenne
relative À la rÉponse europÉenne À l’Inflation Reduction Act (IRA)

 

AMENDEMENT

No 2

 

présenté par

Constance Le Grip

----------

ARTICLE UNIQUE

 

Après l’alinéa 48, insérer l’alinéa suivant :

« Souligne que la réponse européenne à l’Inflation Reduction Act relève aussi des initiatives nationales prises dans les États membres, et, qu’à cet égard, l’adoption par la France de la loi n°2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte permet à notre pays d’utiliser de manière pertinente les modalités de financement proposées par la Commission européenne. »

EXPOSÉ SOMMAIRE

La loi n°2023-973 relative à l’industrie verte, promulguée le 23 octobre 2023 au Journal officiel, a pour objectif d’accélérer la réindustrialisation du pays et de faire de la France le leader de l’industrie verte en Europe notamment par l’amélioration de la prise en compte des considérations environnementales dans la commande publique. Le soutien à l'industrie verte, qui s'inscrit dans le nouveau cadre européen du Net Zero Industry Act (NZIA) et Temporary Crisis and Transition Framework (TCTF), se veut être une réponse à l'Inflation Reduction Act (IRA) adopté en 2022 par les États-Unis.

Sous l'impulsion de la France, la Commission européenne a pris acte, avec le Net Zero Industry Act, de l'importance du soutien aux technologies vertes alors que la concurrence avec les États-Unis s'accélère sur les implantations industrielles. L'affirmation d'une souveraineté industrielle européenne est une condition indispensable au développement d'industries vertes sur notre continent. Conformément à cette orientation, en complément des actions visant une meilleure orientation des aides et soutiens publics, la loi n°2023-973 vise à mobiliser l'épargne privée en faveur du verdissement.

 

Cet amendement est adopté.


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

22 NOVEMBRE 2023


Proposition de résolution européenne
Réponse européenne à l’Inflation Reduction Act (IRA)

 

AMENDEMENT

No 3

 

présenté par

Mme Marietta Karamanli et Mme Sabine Thillaye

----------

ARTICLE UNIQUE

 

Après l’alinéa 49, insérer l’alinéa suivant :

"Appelle à l’ouverture d’une réflexion globale sur l’assouplissement des règles relatives aux aides d’Etats, de manière à soutenir la compétitivité des entreprises européennes dans la compétition mondiale et à favoriser l’émergence de champions industriels européens dans les secteurs stratégiques ;"

EXPOSÉ SOMMAIRE

Dans la compétition mondiale, les entreprises européennes sont contraintes par le droit européen de la concurrence, comme l’a rappelé le refus par la Commission européenne de la fusion Alsthom-Siemens en 2019. Les rapporteures proposent donc appeler à l’ouverture d’une réflexion sur l’adaptation de nos règles de concurrence aux enjeux industriels européens, afin de préserver la compétitivité de nos entreprises dans la transition énergétique.

Cet amendement reprend en les élargissant les arguments de l’amendement 1, qui demande l’ouverture d’une réflexion sur la pérennisation du cadre temporaire et dérogatoire des aides d’Etat.

Cet amendement est adopté.



1

   Proposition de résolution européenne
adoptée par la commission

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu les articles 114, 173 et 194 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

Vu la directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE,

Vu la directive 2014/23/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur l’attribution des contrats de concession

Vu le règlement (UE) 2017/821 du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2017 fixant des obligations liées au devoir de diligence à l’égard de la chaîne d’approvisionnement pour les importateurs de l’Union qui importent de l’étain, du tantale et du tungstène, leurs minerais et de l’or provenant de zones de conflit ou à haut risque,

Vu le règlement (UE, Euratom) 2020/2093 du Conseil du 17 décembre 2020 fixant le cadre financier pluriannuel pour les années 2021 à 2027,

Vu le règlement (UE) 2020/2094 établissant un instrument de l’Union européenne pour la relance en vue de soutenir la reprise à la suite de la crise liée à la Covid-19,

Vu le règlement (UE) 2020/852 du Parlement européen et du Conseil établissant le cadre requis pour parvenir à la neutralité climatique et modifiant les règlements (CE) 401/2009 et (UE) 2018/1999,

Vu le règlement (UE) 2021/1119 du Parlement européen et du Conseil du 30 juin 2021 établissant le cadre requis pour parvenir à la neutralité climatique et modifiant les règlements (CE) n° 401/2009 et (UE) 2018/1999 (« loi européenne sur le climat »),

Vu le règlement (UE) 2021/695 du Parlement européen et du Conseil du 28 avril 2021 portant établissement du programme-cadre pour la recherche et l’innovation « Horizon Europe » et définissant ses règles de participation et de diffusion, et abrogeant les règlements (UE) n° 1290/2013 et (UE) n° 1291/2013,

Vu le règlement (UE) 2021/523 du Parlement européen et du Conseil établissant le programme InvestEU et modifiant le règlement (UE) 2015/1017,

Vu le règlement (UE) 2023/1781 du Parlement européen et du Conseil du 13 septembre 2023 établissant un cadre de mesures pour renforcer l’écosystème européen des semi-conducteurs et modifiant le règlement (UE) 2021/694 (règlement sur les puces),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant un cadre visant à garantir un approvisionnement sûr et durable en matières premières critiques et modifiant les règlements (UE) nº 168/2013, (UE) 2018/858, (UE) 2018/1724 et (UE) 2019/1020 (règlement sur les matières premières critiques, COM(2023) 160 final),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à l’établissement d’un cadre de mesures en vue de renforcer l’écosystème européen de la fabrication de produits de technologie « zéro net » (règlement pour une industrie « zéro net », COM(2023) 161 final),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant les règlements (UE) 2019/943 et (UE) 2019/942 ainsi que les directives (UE) 2018/2001 et (UE) 2019/944 afin d’améliorer l’organisation du marché de l’électricité de l’Union (COM(2023) 148 final),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant la plateforme « Technologies stratégiques pour l’Europe » (STEP) et modifiant la directive modifiant la directive 2003/87/CE et les règlements (UE) 2021/1058, (UE) 2021/1056, (UE) 2021/1057, (UE) nº 1303/2013, (UE) nº 223/2014, (UE) 2021/1060, (UE) 2021/523, (UE) 2021/695, (UE) 2021/697 et (UE) 2021/241 (COM(2023) 335 final),

Vu la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 3 septembre 2020 « Résilience des matières premières critiques : la voie à suivre pour un renforcement de la sécurité et de la durabilité » (COM(2020) 474 final),

Vu la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 18 mai 2022, « Plan RePower EU » (COM(2022)230 final),

Vu la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 1er février 2023, « Un plan industriel du Pacte vert pour l’ère du zéro émission nette », COM(2023) 62 final,

Vu la communication de la Commission du 9 mars 2023 relative à l’encadrement temporaire de la crise et de transition pour les mesures d’aide d’État visant à soutenir l’économie à la suite de l’agression de la Russie contre l’Ukraine (2023/C 101/03),

Considérant que l’Inflation Reduction Act prévoit un plan de financement fédéral de 432 milliards de dollars sur dix ans pour la production et l’utilisation d’énergies propres, amplifiant ainsi l’effort des États-Unis en faveur de la lutte contre le changement climatique ;

Considérant que l’Inflation Reduction Act comprend également un volet social et sanitaire, avec un financement de 64 milliards de dollars, notamment dans l’objectif de faire baisser le prix des médicaments pour les consommateurs ;

Considérant que l’Inflation Reduction Act prévoit des allègements fiscaux pour les entreprises produisant aux États-Unis et des subventions à la production, notamment pour les voitures électriques ;

Considérant que la taille du marché unique, la qualité des infrastructures et la disponibilité du capital humain constituent d’importants atouts pour attirer les industries sur le sol de l’Union ;

Considérant la nécessité de soutenir les secteurs industriels stratégiques identifiés par l’Agenda de Versailles, particulièrement ceux liés à la transition verte ;

Considérant que l’Union européenne dispose d’un grand nombre de programmes axés sur les objectifs climatiques, parmi lesquels le Plan industriel du Pacte vert comprenant des crédits provenant du fonds NextGenerationEU et du fonds RePowerEU ;

Considérant que l’ampleur du plan fait craindre un déficit de compétitivité industrielle de l’Union européenne et un risque accru de délocalisations, notamment en raison du traitement préférentiel accordé aux énergies renouvelables et aux voitures électriques produites aux États-Unis, dont les acheteurs bénéficieront d’un crédit d’impôt fédéral pouvant aller jusqu’à 7 500 € si ces véhicules sont fabriqués en Amérique du Nord ;

Considérant que l’ensemble des programmes budgétaire de l’Union présente un volume de financement global comparable à celui de l’Inflation Reduction Act, permettant ainsi de compenser le différentiel de compétitivité initialement craint ;

Considérant que l’adoption le 9 mars 2023 par la Commission européenne d’un cadre temporaire pour les aides d’État permet aux États membres de stimuler les investissements dans les technologies propres, en complément des financements européens ;

1. Se félicite des moyens accrus engagés par les États-Unis pour atteindre leurs objectifs climatiques prévus par l’Accord de Paris de 2015 ;

2. Salue la proposition par la Commission européenne d’un volet industriel du Pacte Vert ;

3. Appelle à une adoption rapide de la proposition de règlement sur les matières premières critiques, de la proposition de règlement sur une industrie à zéro émissions nettes et de la proposition de règlement relative à l’amélioration de l’organisation du marché de l’électricité de l’Union ;

4. Relève l’importance de procéder à une analyse économique détaillée de l’incidence de l’Inflation Reduction Act sur l’économie européenne, de manière à mieux en anticiper les effets ;

Sur le règlement relatif aux matières premières critiques

5. Estime nécessaire de compléter l’objectif fixé pour 2030 par des objectifs pour 2035 et 2040, afin de donner une trajectoire-cible aux États membres et aux entreprises ;

6. Demande l’intégration de l’alumine et de l’aluminium dans la liste des matières premières stratégiques, puisque ces métaux sont des matières cruciales dans les technologies bas carbone et l’industrie de défense ;

7. Souhaite une mise à jour de la liste des matières premières critiques tous les trois ans, et non tous les quatre ans, afin de refléter au mieux l’état des tensions sur les matières premières ;

8. Appelle à relever le niveau d’ambition pour les matières premières recyclées et transformées de 40 à 50 % en matière de transformation et de 15 à 20 % en matière de recyclage ;

9. Déplore la mise en place des mesures relatives à la publicité des stocks de matières premières critiques, qui présentent un risque de révéler des vulnérabilités économiques des États membres ou d’opérateurs économiques stratégiques ;

10. Appelle au maintien de l’obligation pour les grandes entreprises utilisant des matières premières critiques pour la fabrication de technologies stratégiques à procéder à un audit ;

Sur le règlement « industrie à zéro émissions nettes » :

11. Se félicite de l’objectif global de capacité de production européenne d’au moins 40 % des besoins annuels de déploiement de l’Union dans le domaine des technologies net-zéro, mais souhaite que cet objectif global soit décliné par secteur et par technologie, de manière donner davantage de visibilité aux acteurs économiques ;

12. Relève la nécessité de ne pas allonger de façon trop importante la liste des technologies stratégiques, afin de ne pas matérialiser un risque de saupoudrage des financements publics ;

13. Souhaite une cohérence des dispositions du règlement, notamment du périmètre des technologies stratégiques, avec le cadre temporaire pour les aides d’État adopté par la Commission le 9 mars 2023 ;

14. Accueille favorablement l’insertion de critères qualitatifs de résilience et de durabilité dans la commande publique, en rendant ces critères les plus opérationnels possibles pour les pouvoirs adjudicateurs ;

15. Souhaite toutefois que la possibilité pour le pouvoir adjudicateur de ne pas tenir en compte les critères de résilience et de durabilité soit restreinte, en revalorisant le critère actuellement fixé à 10 % de différence de coûts ;

Sur le financement :

16. Regrette que les plans européens et nationaux soient aussi fragmentés, les programmes variés de sorte qu’il pourrait en résulter un manque de lisibilité et de visibilité pour les investisseurs ;

17. Souligne que la réponse européenne à l’Inflation Reduction Act relève aussi des initiatives nationales prises dans les Etats membres, et, qu’à cet égard, l’adoption par la France de la loi n°2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte permet à notre pays d’utiliser de manière pertinente les modalités de financement proposées par la Commission européenne ;

18. Regrette que la plateforme de technologies stratégiques pour l’Europe, dite « STEP » aux objectifs divers ne mobilise que des financements européens existants, tels que le programme de recherche Horizon Europe, le fonds InvestEU, et le Fonds européen de développement régional ;

19. Se félicite de la prolongation des nouvelles mesures d’aides d’Etat, prévues dans le cadre temporaire adopté le 9 mars 2023 applicable jusqu’au 31 décembre 2025, et jusqu’au 31 décembre 2023 pour certaines d’entre elles ;

20. Appelle à l’ouverture d’une réflexion globale sur l’assouplissement des règles relatives aux aides d’Etat, de manière à soutenir la compétitivité des entreprises européennes dans la compétition mondiale et à favoriser l’émergence de champions industriels européens dans les secteurs stratégiques ;

21. Estime que l’amendement au cadre financier pluriannuel doit être revalorisé d’au moins de 13 milliards d’euros de crédits additionnels pour concourir aux objectifs de la plateforme STEP ;

22. Appelle de ses vœux à l’occasion des négociations du futur cadre financier pluriannuel la création d’un véritable fonds de souveraineté, doté d’un budget suffisamment ambitieux pour préserver la compétitivité de toutes les industries « net zéro » sur le sol de l’Union européenne ;

23. Soutient l’objectif de simplification réglementaire et d’accélération des procédures, de manière à poser des conditions d’accès simples, claires et prévisibles aux différentes aides ;

Sur les aspects de politique commerciale :

24. Insiste sur l’inutilité, voire le caractère contreproductif d’une plainte à l’Organisation mondiale du commerce pour dénoncer la violation du traitement préférentiel prévu pour les entreprises américaines par l’Inflation Reduction Act ;

25. Se félicite du rôle du Conseil du commerce et des technologies Union européenne – États-Unis, qui permet de maintenir des plateformes de dialogue transatlantique dans la conduite de la politique commerciale ;

26. Soutient la démarche de conclusion d’un partenariat sur les matières premières critiques avec les États-Unis, à l’image du partenariat conclu entre les États-Unis et le Japon, de manière à garantir l’éligibilité des produits européens à un maximum de dispositions de l’Inflation Reduction Act.

 

 

 

 


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   Annexe n° 1 :
Liste des personnes auditionnées par les rapporteures

 

-         Mme Luisa Santos, directrice générale adjointe

-         M. Antoine Bouët, directeur

-         Mme Ségolène Milaire, conseillère politique industrielle

-         M. Alexis Chalopin, conseiller politique industrielle


([1]) Bouët, A., « Inflation reduction Act – Comment l’Union européenne peut-elle répondre ? », CEPII, février 2023.

([2])  Joint Statement du Conseil d’analyse économique et du Conseil allemand des experts économiques, Quelle réponse de l’Europe face à l’Inflation Reduction Act ?, septembre 2023.

([3]) Communication du 24 octobre 2023 de la Commission européenne au Parlement européen, au Conseil européen et au Conseil, sur la promotion des investissements dans les technologies propres COM(2023) 684 final.

([4])  Directive (UE) 2023/1791 du Parlement européen et du Conseil du 13 septembre 2023 relative à l’efficacité énergétique et modifiant le règlement (UE) 2023/955 (refonte).

([5]) Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant un cadre visant à garantir un approvisionnement sûr et durable en matières premières critiques et modifiant les règlements (UE) n° 168/2013, (UE) 2018/858, (UE) 2018/1724 et (UE) 2019/1020 – COM (2023) 160 final.

([6]) Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à l’établissement d’un cadre de mesures en vue de renforcer l’écosystème européen de la fabrication de produits de technologie « zéro net » (règlement pour une industrie « zéro net ») – COM(2023) 161 final.

([7]) Loi n°2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte.

([8]) Insee Première, n°1952, juin 2023.

([9]) Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant la plateforme « Technologies stratégiques pour l’Europe » (STEP) et modifiant la directive 2003/87/CE et les règlements (UE) 2021/1058, (UE) 2021/1056, (UE) 2021/1057, (UE) nº 1303/2013, (UE) nº 223/2014, (UE) 2021/1060, (UE) 2021/523, (UE) 2021/695, (UE) 2021/697 et (UE) 2021/241.

([10])  Rapport d’information n°1450 déposé par la commission des affaires européennes portant observations sur le projet de loi relatif à l’industrie verte, 28 juin 2023.

([11])  Règlement (UE) 2020/852 sur l’établissement d’un cadre visant à favoriser les investissements durables.

([12]) Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (UE, Euratom) n° 2020/2093 du Conseil fixant le cadre financier pluriannuel pour la période 2021-2027, 2023/0201 (APP).

([13])  Résolution du Parlement européen du 10 mai 2023 sur les ressources propres : un nouveau départ pour les finances de l’Union, un nouveau départ pour l’Europe (2022/2172(INI)).

([14]) Audition de M. Antoine Bouët, directeur du CEPII.

([15]) 2014, S412, Canada-Certain Measures Affectif the Renewable Energy Generation Sector.

([16]) C. Bown, Industrial policy for electric vehicle supply chains, PIIE, 2023.

([17]) Enquête n° SI/4/2023/KR.