N° 2638
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
SEIZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 22 mai 2024.
RAPPORT D’INFORMATION
DÉPOSÉ
en application de l’article 146 du Règlement
PAR LA COMMISSION DES FINANCES, dE L’Économie gÉnÉrale
et du contrÔLE BUDGÉTAIRE
sur l’évaluation de la réussite des étudiants en licence
ET PRÉSENTÉ PAR
M. Charles SITZENSTUHL,
rapporteur spécial
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Pages
recommandations Du RAPPORTEUR SPÉCIAl
a. Le taux de réussite en licence en trois ou quatre ans, un indicateur indispensable
b. Les limites de l’utilisation du taux de réussite en licence en trois ou quatre ans
2. Les voies d’un renforcement qualitatif de la mesure de la réussite étudiante
a. La mesure de la capitalisation des crédits ECTS acquis
a. Une progression continue de la réussite en licence, en partie sous l’effet de la loi ORE de 2018
b. La France, élève moyen de l’OCDE en matière de réussite des étudiants
2. La réussite en licence demeure hétérogène selon le profil des étudiants et les formations suivies
a. Une action sur les déterminants académiques : les dispositifs issus de la loi ORE de 2018
b. Une action sur les déterminants non académiques : l’exemple des bourses sur critères sociaux
a. L’ampleur des moyens budgétaires alloués à l’objectif de réussite des étudiants en licence
b. Un premier chiffrage du coût, pour les finances publiques, de l’échec en licence
A. AGIR EN AMONT et À l’entrÉE DES ÉTUDES SUPÉRIEURES
1. Restaurer la valeur académique du baccalauréat comme premier grade de l’enseignement supérieur
2. Orienter davantage les lycéens vers les filières courtes et professionnalisantes
C. PERSONNALISER LES PARCOURS D’ÉTUDES au bénéfice de l’autonomie des Étudiants
1. La logique de semestrialisation de la licence
2. La conciliation des études et des contraintes ou projets extra‑académiques
PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL
Annexe : FINANCEMENT DES DISPOSITIFS « OUI SI » en 2023
La notion de réussite étudiante en licence, jugée normative, peut être contestée en ce qu’elle valorise les parcours linéaires et se concentre sur les étudiants qui obtiennent leur diplôme « dans les temps ». Elle n’en demeure pas moins incontournable puisqu’elle détermine les conditions d’insertion des jeunes générations sur le marché de l’emploi et, plus largement, dans la société.
La réussite des étudiants en licence est habituellement mesurée, à l’échelle d’une cohorte de néo-bacheliers, par le taux de passage en deuxième année de licence et par le taux d’obtention du diplôme en trois ou quatre ans. Les données examinées par le rapporteur spécial portent uniquement sur les étudiants inscrits à l’université en licence générale et en licence professionnelle, soit, dans le premier cas, dans une formation non sélective. Près de 186 600 néo-bacheliers s’étaient inscrits en première année de licence au cours de l’année universitaire 2018-2019, dernier exercice pour lequel le parcours de ces étudiants est connu ([1]).
Les indicateurs publiés par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche témoignent, en premier lieu, des progrès accomplis par la France. Le taux de réussite en trois ou quatre ans croît de 41 % à 46,9 % entre les bacheliers de la session 2012 et ceux de la session 2018, tandis que le taux de passage en deuxième année de licence progresse de 39,7 % à 45,5 % sur la même période. Si la France se situe dans la moyenne de l’OCDE, elle ne saurait toutefois se satisfaire d’un système d’enseignement supérieur dans lequel plus d’un étudiant sur deux échoue dans l’obtention de son diplôme.
Le rapporteur spécial regrette l’incomplétude des données relatives à l’effort budgétaire en faveur du premier cycle universitaire, qui nuit au pilotage fin des politiques de l’enseignement supérieur. Les données recueillies auprès du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche n’ont pas permis de déterminer avec précision la dépense publique moyenne ou agrégée allouée pour chaque étudiant inscrit en licence, qu’il s’agisse des dépenses de formation ou des dépenses de vie étudiante.
En revanche, une estimation du coût de l’échec en licence est proposée sur la base d’hypothèses conservatrices, portant sur les seuls étudiants qui sortent précocement de l’enseignement supérieur à l’issue de la première année de licence. Il s’élèverait à près de 350 millions d’euros par an, en considérant la subvention pour charges de service public moyenne allouée par étudiant aux universités et la dépense moyenne des bourses sur critères sociaux par bénéficiaire.
Au regard des marges d’amélioration conséquentes dont dispose la France en matière de promotion de la réussite étudiante, le rapporteur spécial recommande d’agir sur les déterminants académiques selon trois axes. Il appelle, au préalable, à redonner toute sa valeur au baccalauréat pour garantir de véritables perspectives de réussite aux bacheliers en difficulté et limiter la sélection qui s’opère, sans bruit et par défaut, en licence.
recommandations Du RAPPORTEUR SPÉCIAl
Recommandation n° 1
Créer un nouvel indicateur de réussite mesurant la progression académique par l’intermédiaire du rythme de validation des crédits ECTS (direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle).
Au préalable, améliorer la prise en compte des crédits ECTS préalablement acquis par l’étudiant en cas de réorientation et moderniser les systèmes d’information relatifs au suivi des parcours académiques (direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle, établissements d’enseignement supérieur, GIP AMUE).
Recommandation n° 2
Modifier la maquette de performance du programme 231 Vie étudiante, en intégrant un indicateur sur le taux de réussite en trois ou quatre ans des étudiants boursiers (direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle).
Recommandation n° 3
Fiabiliser les données sur l’assiduité et la réussite des étudiants engagés dans un parcours « oui si » pour en évaluer l’efficacité et, le cas échéant, en poursuivre les financements (direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle ; établissements d’enseignement supérieur).
Recommandation n° 4
Ventiler l’exécution budgétaire des crédits engagés au titre des bourses sur critères sociaux par grade universitaire (direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle ; Centre national des œuvres universitaires et scolaires).
Établir le montant de la dépense publique annuelle par étudiant inscrit en licence à l’université, sur la base de l’ensemble des dépenses relatives à l’enseignement supérieur et à la vie étudiante (direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle).
Recommandation n° 5
Intégrer la définition de l’offre de formation et la fixation des capacités d’accueil dans l’expérimentation relative à l’acte II de l’autonomie des universités, en supprimant la décision préalable des services de l’État (direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle, établissements d’enseignement supérieur).
I. LA RÉUSSITE DES ÉTUDIANTS EN LICENCE : UNE NOTION DIFFICILE À APPRÉHENDER, DES PROGRÈS INDÉNIABLES DEPUIS 2017
La mesure de la réussite étudiante est indispensable pour évaluer l’efficacité de notre système d’enseignement supérieur, mais repose sur des indicateurs imparfaits (A). La réussite des étudiants en licence, marquée par des disparités significatives selon l’origine sociale ou le profil académique des bacheliers, progresse de manière continue en France (B). Cet objectif est au cœur des politiques de l’enseignement supérieur et bénéficie de moyens financiers importants, bien que difficiles à estimer (C).
A. L’OBTENTION DU DIPLÔME EN 3 OU 4 ANS EST UNE MESURE indispensable mais PERFECTIBLE DE LA RÉUSSITE DES ÉTUDIANTS EN LICENCE
La mesure de la réussite des étudiants en licence par le taux d’obtention du diplôme en trois ou quatre ans souffre de limites méthodologiques (1) et gagnerait à être complétée par des indicateurs plus qualitatifs (2).
1. La mesure de la réussite des étudiants en licence : le mirage du diplôme « à temps » et du parcours linéaire
Le taux de réussite en licence en trois ou quatre ans, s’il constitue un indicateur indispensable et conforme aux pratiques internationales (a), tend à valoriser les parcours académiques linéaires (b).
a. Le taux de réussite en licence en trois ou quatre ans, un indicateur indispensable
La réussite des étudiants en licence est habituellement mesurée, en France, par la part des néo-bacheliers, c’est-à-dire des étudiants inscrits pour la première fois en première année de licence à l’université ayant obtenu leur diplôme de licence en trois ou quatre ans. Cette approche est notamment utilisée dans les publications de la sous-direction des systèmes d’information et des études statistiques (SIES), le service statistique du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche ([2]).
La période de référence de trois ou quatre ans est cohérente avec les dispositions réglementaires du code de l’éducation qui précisent que « les parcours types des formations préparant au diplôme [de licence] sont organisés sur trois années. » ([3]). La licence s’insère dans le système dit LMD, en référence à l’organisation de l’offre de formation en trois cycles d’études supérieures (licence, master, doctorat), déployée volontairement par les pays européens à l’issue de la déclaration dite de Bologne du 19 juin 1999. Cette période de référence renvoie également aux pratiques statistiques de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). En effet, l’organisation internationale mesure le taux de réussite en licence à l’aune de la « durée théorique des études », définie comme le « nombre réglementaire ou courant d’années d’études à suivre à temps plein pour réussir le niveau d’enseignement visé » dans le pays concerné ([4]). L’horizon de quatre ans offre une souplesse, qui tient compte des cas de redoublement et de la faculté reconnue aux établissements d’enseignement supérieur de prévoir, en France, un « allongement de la durée de la période d’études » dans le cadre des dispositifs d’aide à la réussite ([5]) prévus par les textes d’application de la loi du 8 mars 2018 dite ORE ([6]).
Le rapporteur spécial estime que le taux de réussite en trois ou quatre ans est un indicateur indispensable, en ce qu’il est fiable, accessible et comparable. Il rend compte de l’atteinte d’objectifs d’apprentissage par une génération d’étudiants, dont le cycle d’études – sanctionné par un diplôme – assure l’acquisition de connaissances et de compétences spécifiques ou transversales. Le taux de réussite en trois ou quatre ans, s’il est le moins mauvais des indicateurs, ne permet toutefois pas à lui seul d’appréhender la réussite étudiante dans sa complexité et sa pluralité.
b. Les limites de l’utilisation du taux de réussite en licence en trois ou quatre ans
Les auditions menées par le rapporteur spécial, si elles ont démontré la pertinence de l’indicateur du taux de réussite en trois ou quatre ans, ont également permis d’identifier certaines limites méthodologiques. Le rapporteur spécial rejoint l’analyse de France Universités, qui appelle, dans ses réponses écrites, à « rester prudent » et à « ne pas tirer des conclusions trop hâtives » quant aux notions de réussite et d’échec à l’université.
Le taux de réussite en licence porte sur l’ensemble des étudiants ayant réalisé leur inscription administrative à l’université, et non seulement sur les étudiants assidus. Or la présence aux examens est, par définition, corrélée positivement au passage dans l’année supérieure : selon le SIES, les néo-bacheliers présents à au moins un examen dans l’année ou à au moins un examen de chaque unité d’enseignement (UE) présentent des taux de passage en deuxième année de licence (L2) de respectivement 50,3 % et 62,7 %, contre 45,4 % pour l’ensemble des néo-bacheliers ([7]). Le rapporteur spécial regrette l’absence, à l’échelle de l’ensemble du premier cycle universitaire, de données sur le taux de réussite en fonction de la présence aux examens uniquement disponibles pour le passage en L2. Des données pour l’ensemble du cycle permettraient de mieux appréhender le décrochage en licence.
Par ailleurs, le taux de réussite en licence ne peut, à lui seul, fonder une comparaison entre les formations universitaires et les systèmes nationaux d’enseignement supérieur. Ainsi, le taux de réussite en licence en trois ou quatre ans s’élève à 46,9 % pour les néo-bacheliers de la session 2018 ([8]), alors même que 79 % des néo-bacheliers intégrant un institut universitaire de technologie (IUT) obtiennent leur diplôme en deux ou trois ans ([9]). Au niveau international, le Royaume-Uni affiche un taux de réussite en trois ans de 69 %, soit le meilleur résultat des pays de l’OCDE ([10]).
Ces disparités s’expliquent largement par l’absence de sélection à l’entrée de l’université en France, l’article L. 612-3 du code de l’éducation reconnaissant le droit à tout bachelier de s’inscrire dans une licence non sélective. Le principe de non-sélection est sans préjudice des règles d’inscription dans les filières non sélectives dites en tension introduites par la loi du 8 mars 2018 dite ORE ([11]), pour lesquelles le nombre de candidatures excède les capacité d’accueil ([12]). À l’inverse, les formations dispensées par les IUT sont sélectives, de la même manière que le brevet de technicien supérieur (BTS) et l’accès en classe préparatoire aux grandes écoles (CPGE). Au Royaume-Uni, tous les étudiants sont sélectionnés à l’entrée de l’université, quel que soit le résultat obtenu à l’équivalent britannique du baccalauréat (A-Level). Par conséquent, le taux de réussite en licence nous renseigne moins sur la qualité de la formation universitaire française que, selon l’expression de France Universités, sur l’ampleur de « l’orientation par défaut » voire de « l’orientation contrainte » des étudiants refusés dans la formation sélective ou non sélective de leur choix.
Enfin, le taux de réussite en trois ou quatre ans valorise les parcours linéaires et entretient le mythe du diplôme « à temps » ([13]), sans reconnaître un droit à l’essai ou à l’erreur aux étudiants. Les cas de réorientation ou de reprise d’études ainsi que les périodes de césure sont à l’origine de parcours davantage diversifiés et discontinus que par le passé. Par exemple, les statistiques du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche couvrent le devenir des néo-bacheliers après trois ans, en distinguant la poursuite d’études en licence, la réorientation en IUT ou dans d’autres formations universitaires, et la sortie de l’université. Ces données portent naturellement sur le devenir « universitaire » des néo-bacheliers, sans nous renseigner sur la poursuite d’études hors de l’université, c’est-à-dire sur « les réorientations réussies à travers l’obtention d’un diplôme dans le supérieur au-delà de l’inscription administrative initiale » ([14]). Le suivi d’un panel de bacheliers démontre toutefois que, à la rentrée 2020, seuls 72 % des bacheliers de la session 2014 inscrits en licence après leur baccalauréat et sortis de l’enseignement supérieur ont obtenu un diplôme – contre 92 % des bacheliers inscrits dans un diplôme universitaire de technologie (DUT) en 2014 ([15]).
Au-delà de la vision normative de la réussite académique, le rapporteur spécial partage l’analyse de l’ensemble des acteurs auditionnés quant à la nécessité d’intégrer autant que possible les déterminants et les critères non académiques de la réussite étudiante. Les syndicats étudiants ont notamment insisté sur la fonction émancipatrice de l’enseignement supérieur, dont la dimension subjective et qualitative rend la mesure malaisée. En revanche, des indicateurs permettant de mesurer la réussite étudiante sous l’angle de la lutte contre les inégalités et de l’insertion professionnelle sont d’ores et déjà publiés par l’enseignement supérieur. Le taux de réussite en trois ou quatre ans gagnerait à être plus largement analysé en combinaison avec ces derniers.
2. Les voies d’un renforcement qualitatif de la mesure de la réussite étudiante
Les indicateurs visant à mesurer la progression académique en licence (a) et, plus spécifiquement, la réussite des étudiants boursiers (b) pourraient être renforcés.
a. La mesure de la capitalisation des crédits ECTS acquis
La mise en place de l’architecture « LMD » et du système européen de transfert et d’accumulation de crédits (ECTS) devait renforcer la mobilité et la capacité de réorientation des étudiants dans l’espace européen de l’enseignement supérieur.
Les textes réglementaires successifs ont, depuis le décret n° 2022-482 du 8 avril 2002 dit LMD ([16]), progressivement introduit des flexibilités dans les conditions de validation du diplôme de licence. Le droit positif est ainsi plus souple que ne le laisse paraître le recours systématique au taux de réussite en trois ou quatre ans afin de mesurer la réussite étudiante. L’arrêté du 30 juillet 2018 relatif au diplôme national de licence abandonne toute référence à l’organisation du cursus en trois ans, disposant que la licence sanctionne « un niveau validé par l’obtention de 180 crédits européens » et correspond à « une charge de travail pour l’étudiant comprise entre 4 500 et 5 400 heures » ([17]). Les crédits ECTS sont acquis à raison de la validation des unités d’enseignement, chaque crédit ECTS représentant pour l’étudiant une charge de travail – en cours et en autonomie – comprise entre 25 heures et 30 heures.
Or le suivi de l’accumulation des crédits ECTS est insatisfaisant en pratique, au détriment de la progression académique des étudiants au parcours non linéaires. À cet égard, l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGÉSR) estime que, à l’exception des redoublants, « plus de 90 % des étudiants en réorientation [d’un échantillon de trois universités] commencent une nouvelle formation de L1 sans avoir pu conserver le moindre crédit ECTS acquis, le cas échéant, durant leur parcours antérieur » ([18]).
● Les auditions conduites par le rapporteur spécial ont permis d’identifier deux obstacles principaux à la mesure de la capitalisation des crédits ECTS dans le temps :
– le caractère lacunaire des informations pédagogiques figurant dans le système d’information des universités, à l’origine d’une rupture dans le suivi du dossier de l’étudiant en cas de changement d’établissement ;
– tel que souligné par l’IGÉSR dans ses travaux ([19]), en cas de changement d’établissement, l’absence d’obligation pour l’établissement d’origine et pour l’établissement d’accueil d’examiner systématiquement la situation individuelle de l’étudiant et de valoriser les crédits ECTS certifiant de l’acquisition de compétences et de connaissances utiles à la réorientation envisagée.
Cette seconde difficulté, qui intervient en cas de réorientation vers une formation conduisant à la délivrance d’une autre mention de licence, résulte de la formulation des articles 16 et 19 de l’arrêté du 30 juillet 2018 dit arrêté licence. Ces derniers prévoient la simple faculté pour les établissements d’origine et d’accueil d’examiner la demande, formulée par l’étudiant, de capitalisation des crédits ECTS préalablement acquis.
France Universités a indiqué au rapporteur spécial que la capitalisation des crédits ECTS était « certes prévue par les textes réglementaires, mais en laissant une large part d’initiative aux établissements d’enseignement supérieur et à leurs composantes, voire à chaque responsable de formation, pour déterminer les conditions dans lesquelles les crédits ECTS qui ont été validés antérieurement dans le cadre d’une autre formation, dans le même établissement ou dans un autre, sont pris en compte ou non dans la préparation de la nouvelle formation ».
Le rapporteur spécial souscrit aux recommandations de l’IGÉSR tendant à renforcer la capitalisation des crédits ECTS préalablement acquis ([20]). À titre d’exemple, une modification de l’arrêté du 30 juillet 2018 dit licence pourrait être envisagée afin de prévoir systématiquement l’examen, par l’établissement d’accueil, de la situation de l’étudiant en phase de réorientation et susceptible de se prévaloir de crédits ECTS acquis antérieurement. Sans préjudice de la révision des dispositions réglementaires en matière de réorientation, la mesure de l’obtention du diplôme de licence « à temps » gagnerait à être complétée pour mieux tenir compte de la diversité des publics et des parcours.
● Il est ainsi souhaitable de créer un indicateur de réussite mesurant la progression académique à travers le rythme de validation des crédits ECTS. Celui-ci n’aurait ni pour objet ni pour effet de décorréler l’accumulation des crédits ECTS de la durée théorique nécessaire à leur validation, dès lors que la progression de l’étudiant pourrait également être évaluée sur une période de référence de trois, quatre voire cinq ans.
Le déploiement d’un tel dispositif nécessite au préalable d’améliorer la qualité et la complétude des informations dont disposent les établissements d’enseignement supérieur sur le parcours de chaque étudiant. France Universités a spécifié au rapporteur spécial que les données recueillies par les universités étaient aujourd’hui « trop succinctes et pas assez uniformisées ». Aucun outil informatique unique n’est proposé aux établissements, qui ont toutefois développé diverses solutions numériques pour élaborer et suivre les contrats pédagogiques pour la réussite étudiante (CPRE). Ces derniers, conclus entre l’établissement et l’étudiant, énoncent des engagements réciproques et s’inscrivent dans la logique de personnalisation des parcours portée par la loi du 8 mars 2018 dite ORE ([21]). Plusieurs établissements utilisent par exemple le logiciel ConPéRe, conçu à l’origine par l’Université Grenoble Alpes et mis à disposition par l’Agence de mutualisation des universités et des établissements (AMUE), groupement d’intérêt public (GIP) exerçant des fonctions « support » auprès des établissements.
Le projet Pégase, expérimenté dans trois établissements et piloté par l’AMUE, devrait améliorer le suivi des parcours académiques et de la validation des crédits ECTS. Il doit aboutir à la mise en place d’un nouveau système d’information de gestion de la scolarité et de la vie étudiante. Le projet Pégase a bénéficié, en 2023, de 1 million d’euros au titre des crédits attribués à l’AMUE, portés par le programme 150 Formations supérieures et recherche universitaire de la mission interministérielle Recherche et enseignement supérieur (MIRES).
Recommandation n° 1
Créer un nouvel indicateur de réussite mesurant la progression académique par l’intermédiaire du rythme de validation des crédits ECTS (direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle).
Au préalable, améliorer la prise en compte des crédits ECTS préalablement acquis par l’étudiant en cas de réorientation et moderniser les systèmes d’information relatifs au suivi des parcours académiques (direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle, établissements d’enseignement supérieur, GIP AMUE).
b. La mesure de la réussite des étudiants boursiers dans le cadre de la maquette de performance du budget de l’État
La réforme des bourses sur critères sociaux, dont la première phase est effective depuis la rentrée 2023, est l’occasion de renforcer l’évaluation de la réussite des étudiants confrontés à des difficultés financières. Celle-ci pourrait être davantage articulée avec le dispositif de performance issu de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).
Le rapporteur spécial relève que le projet annuel de performances (PAP) du programme 231 Vie étudiante, qui finance l’action sociale au bénéfice des étudiants, comporte un objectif relatif à l’égalité des chances. L’atteinte de cet objectif est notamment mesurée par un indicateur de réussite comparée des étudiants boursiers par rapport aux étudiants non boursiers en troisième année de licence (L3). Les ratios obtenus révèlent un taux de réussite en L3 supérieur des étudiants boursiers, qui sont notamment soumis à une obligation d’assiduité en cours et aux examens. La pertinence de cet indicateur situé en aval, restreint aux étudiants sur le point d’obtenir leur diplôme de licence, semble limitée.
Il serait opportun de remplacer l’indicateur de réussite comparée en L3 par un indicateur sur le taux de réussite en trois ou quatre ans des étudiants boursiers et non boursiers. Cette approche limiterait le biais de sélection due à la sur-représentation des meilleurs étudiants boursiers en L3. En effet, les étudiants boursiers sont davantage susceptibles de sortir du système universitaire en raison d’un effet de déperdition dès la première année de licence : le taux de passage en L2 des néo-bacheliers de la session 2021 s’établit à 42 % pour les étudiants boursiers, contre 46,1 % pour les étudiants non boursiers. Le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche publie d’ores et déjà des données sur le taux de réussite en trois ou quatre des étudiants boursiers, qui s’élève à 46,8 % contre 47,4 % pour les étudiants non boursiers ([22]). L’intégration de cet indicateur dans le PAP annexé au projet de loi de finances renforcerait la pertinence de la maquette de performance, sans impliquer des travaux complémentaires de la part du SIES.
Recommandation n° 2
Modifier la maquette de performance du programme 231 Vie étudiante, en intégrant un indicateur sur le taux de réussite en trois ou quatre ans des étudiants boursiers (direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle).
B. LA RÉUSSITE DES ÉTUDIANTS EN LICENCE, EN PROGRESSION continue EN FRANCE, connaÎT d’importantes disparitÉs
Les indicateurs mesurant la réussite des étudiants en licence progressent depuis dix ans en France (1). Ils témoignent également de l’hétérogénéité des parcours de réussite, qui dépendent d’un ensemble de facteurs académiques et non académiques (2).
1. La réussite des étudiants français en licence, qui se situe dans la moyenne de l’OCDE, progresse chaque année
Les dispositions de la loi du 8 mars 2018 dite ORE favorisent la réussite des étudiants en licence, qui progresse sur le long terme (a) et se situe dans la moyenne dans l’OCDE (b).
a. Une progression continue de la réussite en licence, en partie sous l’effet de la loi ORE de 2018
La réussite des étudiants en licence générale et professionnelle progresse significativement en France si l’on considère les cohortes successives de néo-bacheliers depuis la session 2012 du baccalauréat. À cet égard, la réussite cumulée en quatre ans s’élève à 46,9 % pour les néo-bacheliers de la cohorte 2018, dernière année pour laquelle les données sont disponibles. Cela signifie que près de la moitié des bacheliers de la session 2018 inscrits en L1 à la rentrée suivante ont obtenu leur diplôme en trois ou quatre ans. Il s’agit d’une progression d’un point de pourcentage par rapport à la cohorte 2017 et de 4,9 points de pourcentage par rapport à la cohorte 2012.
L’ensemble des acteurs interrogés par le rapporteur spécial ont souligné que le passage en deuxième année de licence constituait une étape clé dans l’obtention du diplôme de licence, conditionnant largement le taux de réussite en trois ou quatre ans. Moins d’un étudiant sur deux passe directement en deuxième année de licence, notamment en raison d’une mauvaise orientation ou de difficultés à s’adapter à un environnement très différent du lycée. L’année universitaire 2018‑2019 a donné lieu à une forte progression du taux de passage en L2, qui a atteint 45,5 % après une relative stabilité autour de 40 % depuis 2012.
Les études statistiques concluent à l’incidence positive des dispositions de la loi du 8 mars 2018 dite ORE ([23]). La hausse de 3,8 points de pourcentage du taux de passage en L2 entre les cohortes 2017 et 2018 est due pour moitié aux effets de la loi dite ORE, tels que l’amélioration de l’orientation des étudiants via la plateforme Parcoursup et la modulation des parcours via les dispositifs de remédiation et d’accompagnement réservés aux étudiants en difficulté.
Le rapporteur spécial se félicite des progrès réalisés depuis 2017, tout en relevant que le taux de passage en L2 se dégrade depuis la crise sanitaire. La session 2020 avait connu un recul inédit de l’échec en L1, dans un contexte d’assouplissement des modalités de passation des examens.
rÉussite des nÉo-bacheliers en licence depuis 2012
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Effectifs de la cohorte (1) |
Taux de passage en L2 |
Réussite en 3 ans |
Réussite en 4 ans |
Réussite cumulée en 4 ans |
Cohorte 2012 |
147 841 |
39,7 % |
28,4 % |
12,6 % |
41,0 % |
Cohorte 2013 |
154 385 |
39,5 % |
28,5 % |
12,7 % |
41,2 % |
Cohorte 2014 |
158 222 |
40,8 % |
29,2 % |
12,7 % |
41,9 % |
Cohorte 2015 |
165 367 |
41,6 % |
29,6 % |
12,5 % |
44,2 % |
Cohorte 2016 |
169 944 |
41,1 % |
29,6 % |
14,0 % |
43,6 % |
Cohorte 2017 |
171 945 |
41,6 % (3) |
32,4 % |
13,5 % |
45,9 % |
Cohorte 2018 |
186 644 |
45,4 % |
35,6 % |
11,3 % |
46,9 % |
dont bacheliers généraux |
153 373 |
52,5 % |
41,4 % |
12,5 % |
53,9 % |
dont bacheliers techno. |
24 188 |
15,1 % |
10,2 % |
7,3 % |
17,5 % |
dont bacheliers pro. |
9 083 |
6,9 % |
4,5 % |
3,3 % |
7,7 % |
Cohorte 2019 (2) |
184 737 |
53,5 % (4) |
– |
– |
– |
Cohorte 2020 (2) |
205 856 |
47,8 % |
– |
– |
– |
Cohorte 2021 (2) |
195 486 |
44,1 % |
– |
– |
– |
Source : commission des finances, d’après les notes flash du SIES sur le parcours et la réussite en licence depuis les résultats de la session 2016.
(1) Les effectifs sont composés de tous les étudiants ayant obtenu leur baccalauréat l’année N et inscrits pour la première fois en L1 au cours de l’année N/N+1. En sont exclus les étudiants ayant pris une inscription parallèle en section de technicien supérieur (STS), en DUT ou en CPGE. Le diplôme de licence recouvre la licence générale et la licence professionnelle.
(2) Les données relatives à l’obtention du diplôme de licence des cohortes 2019, 2020 et 2021 ne sont pas encore connues ou publiées par le SIES.
(3) Le SIES a calculé un taux de passage « corrigé », qui tient compte des effets des grèves et des blocages d’universités intervenus au printemps 2018. Celui-ci s’établit à 41,6 %, contre 43,5 % pour le taux de passage observé.
(4) La nette amélioration des résultats de la cohorte composée des néo-bacheliers 2019 inscrits en licence à la rentrée 2019-2020 découle en partie de conséquences de la crise sanitaire, qui ont conduit à un aménagement des conditions d’enseignement et de passage des examens.
b. La France, élève moyen de l’OCDE en matière de réussite des étudiants
Le taux de réussite des étudiants en licence en France est légèrement inférieur à la moyenne des pays de l’OCDE. L’organisation internationale mesure celui-ci au regard de la durée théorique des études considérées, qui varient de trois à cinq ans dans l’échantillon des pays de l’OCDE. Les données utilisées par l’OCDE et présentées infra couvrent, dans le cas de la France, un périmètre différent des publications du SIES. À titre d’exemple, les données publiées par l’OCDE sur la France portent sur la cohorte 2014 des néo-bacheliers quelle que soit leur poursuite d’études dans l’enseignement supérieur, y compris hors formations universitaires.
Le taux de réussite varie de 12 % en Colombie à 69 % au Royaume‑Uni, pour une moyenne de 39 % ([24]). La situation de la France, dont le taux de réussite en trois ans s’établit à 36 % selon l’OCDE, est comparable à celles de l’Espagne (37 %) et de la Suède (33 %), mais est nettement plus favorable que celles de l’Italie (21 %) et de l’Autriche (26 %).
La France affiche des résultats plus satisfaisants en considérant le taux de réussite trois ans après la fin de la durée théorique des études de premier cycle (soit au bout de six ans), qui reflète mieux les parcours non linéaires marqués par des réorientations ou des décrochages temporaires. Cet indicateur, qui porte sur une période de six ans en France, atteint 71 %, contre 68 % en moyenne dans l’OCDE.
Taux de réussite en licence dans l’OCDE (2020)
(en pourcentage)
Source : commission des finances, d’après les données de l’OCDE (Regards sur l’éducation 2022, tableau B5.1., novembre 2022, p. 226).
(1) L’année de référence des données (2020) correspond à la fin de la durée théorique des études (2017) plus trois ans. L’année d’inscription des étudiants peut varier selon la durée théorique des études prévue par chaque pays. À titre d’exemple, la durée théorique équivaut à trois ans en France et dans l’essentiel des pays européens, contre quatre ans pour un bachelor de premier cycle aux États-Unis.
Si les comparaisons internationales permettent utilement de situer la capacité du système d’enseignement supérieur français à favoriser la réussite des étudiants, le rapporteur spécial est conscient des limites méthodologiques de cette approche. La grande diversité des traditions académiques, des méthodes pédagogiques et des modèles d’enseignement supérieur, en particulier en matière de sélection à l’entrée de l’université, rend l’exercice malaisé. À cet égard, la Commission européenne identifie trois grandes catégories de facteurs susceptibles d’influencer la réussite étudiante : la sélectivité de l’enseignement supérieur ; la flexibilité de l’enseignement supérieur ; le soutien financier apporté aux étudiants et les droits d’inscription dans l’enseignement supérieur ([25]). La modulation de ces trois critères permet, à la manière d’un kaléidoscope, de constituer un nombre presque infini de modèles d’enseignement supérieur selon les combinaisons retenues.
Interrogée sur la pertinence des comparaisons internationales en matière de réussite des étudiants, la direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle (DGESIP) du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche a souligné que les analogies brutes, par l’intermédiaire des indicateurs de l’OCDE par exemple, nous renseignaient peu sur la performance relative des systèmes nationaux.
À titre d’exemple, le Royaume-Uni ne propose pas un enseignement supérieur de masse comme la France et pratique une sélection rigoureuse à l’entrée de l’université, qui constitue une voie d’excellence. Les établissements appliquent des droits d’inscription sensiblement plus élevés qu’en France et soutiennent de longue date les parcours non linéaires, notamment par le biais d’une année préparatoire de remise à niveau (foundation year) ou d’une année de césure (gap year). En France, les universités accueillaient près de 958 800 étudiants en licence à la rentrée 2022, dont 108 200 étudiants en IUT ([26]). Tous les bacheliers souhaitant rejoindre une formation non sélective qui n’est pas en tension y sont admis, alors que les meilleurs profils tendent à s’orienter vers les filières sélectives. Ces dernières sont pour la plupart situées en dehors de l’université, telles que les CPGE (81 200 étudiants), les écoles de commerce (242 000 étudiants) et les formations d’ingénieurs (160 100 étudiants). En comparaison, le Royaume-Uni ne compte que près de 649 000 étudiants inscrits en premier cycle en 2020, pour 439 000 étudiants diplômés ([27]). Le taux de réussite obtenu, s’il ne résulte pas du suivi d’une cohorte, s’élève à près de 68 % et correspond aux résultats calculés par l’OCDE (69 %).
Les meilleurs bacheliers français ou inscrits dans une filière universitaire sélective obtiennent des résultats tout aussi satisfaisant que leurs camarades britanniques. Près de 72 % des titulaires d’une mention très bien au baccalauréat obtiennent ainsi leur licence en trois ans, tandis que 79 % des étudiants valident leur DUT en deux ou trois ans.
2. La réussite en licence demeure hétérogène selon le profil des étudiants et les formations suivies
Si elles s’améliorent globalement, les perspectives de réussite des étudiants en licence demeurent fortement dépendantes d’un ensemble de facteurs académiques et non académiques. Les données publiées par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche témoignent du caractère multifactoriel des parcours de réussite.
● Au regard de la série du baccalauréat obtenu, il apparaît que 53,9 % des bacheliers généraux de la cohorte 2018 obtiennent leur licence en trois ou quatre ans, contre 17,5 % des bacheliers technologiques et 7,7 % des bacheliers professionnels. Les titulaires d’un baccalauréat technologique ou professionnel se sont trop souvent résolus à une orientation par défaut en licence, faute de capacités d’accueil suffisantes dans les formations plus adaptées à leur profil, en particulier les sections de techniciens supérieurs (STS) et les cursus proposés par les instituts universitaires de technologie (IUT). Au contraire, les bacheliers généraux présentent des taux de réussite plus élevés en licence générale car les méthodes de travail et les enseignements dispensés à l’université sont moins éloignés de l’enseignement secondaire.
rÉussite des nÉo-bacheliers en licence selon la sÉrie du baccalaurÉat (cohorte 2018)
|
Effectifs de la cohorte (1) |
Réussite en 3 ans |
Réussite en 4 ans |
Réussite cumulée en 4 ans |
Baccalauréat général |
137 207 |
41,4 % |
12,5 % |
53,9 % |
Littéraire |
33 838 |
35,3 % |
11,5 % |
46,8 % |
Économique |
25 745 |
42,2 % |
13,1 % |
55,3 % |
Scientifique |
77 624 |
44,3 % |
12,4 % |
56,7 % |
Baccalauréat technologique |
24 188 |
10,2 % |
7,3 % |
17,5 % |
Technologique STMG |
12 243 |
7,3 % |
6,3 % |
13,6 % |
Autre technologique |
11 945 |
13,2 % |
8,4 % |
21,6 % |
Baccalauréat professionnel |
9 083 |
4,5 % |
3,3 % |
7,7 % |
Total cohorte 2018 |
186 644 |
35,6 % |
11,3 % |
46,9 % |
Source : commission des finances, d’après la note flash du SIES, Parcours et réussite en licence : les résultats de la session 2022, n° 26, novembre 2023.
(1) Les effectifs sont composés de tous les étudiants ayant obtenu leur baccalauréat l’année N et inscrits pour la première fois en L1 au cours de l’année N/N+1. En sont exclus les étudiants ayant pris une inscription parallèle en section de technicien supérieur (STS), en DUT ou en CPGE. Le diplôme de licence recouvre la licence générale et la licence professionnelle.
● L’origine sociale de l’étudiant, mesurée par la catégorie socio‑professionnelle de ses parents ([28]), pèse également sur son parcours de réussite. Les étudiants dont l’origine sociale est « très favorisée », qui bénéficient d’un bagage social, culturel et économique les prédisposant davantage à un parcours académique, réussissent davantage à l’université. Leur taux de réussite en licence en trois ou quatre ans s’établit à 55,3 %, contre 38,4 % pour l’origine sociale « défavorisée ».
rÉussite des nÉo-bacheliers en licence selon L’origine sociale de l’Étudiant (cohorte 2018)
|
Effectifs de la cohorte (1) |
Réussite en 3 ans |
Réussite en 4 ans |
Réussite cumulée en 4 ans |
Très favorisée |
33 838 |
43,4 % |
11,9 % |
55,3 % |
Favorisée |
25 745 |
38,1 % |
11,9 % |
50,0 % |
Assez défavorisée |
77 624 |
34,5 % |
11,4 % |
45,9 % |
Défavorisée |
32 818 |
27,9 % |
10,5 % |
38,4 % |
Non réponse |
16 619 |
24,7 % |
9,9 % |
34,5 % |
Total cohorte 2018 |
186 644 |
35,6 % |
11,3 % |
46,9 % |
Source : commission des finances, d’après la note flash du SIES, Parcours et réussite en licence : les résultats de la session 2022, n° 26, novembre 2023.
(1) Les effectifs sont composés de tous les étudiants ayant obtenu leur baccalauréat l’année N et inscrits pour la première fois en L1 au cours de l’année N/N+1. En sont exclus les étudiants ayant pris une inscription parallèle en section de technicien supérieur (STS), en DUT ou en CPGE. Le diplôme de licence recouvre la licence générale et la licence professionnelle.
● Le taux de réussite en licence varie également en fonction du groupe disciplinaire d’inscription en L1. Il est compris entre 44,3 % en sciences-santé et 49,3 % en droit et sciences politiques.
Les hypothèses les plus robustes pour expliquer ces inégalités de réussite porte sur les formations en sciences-santé. L’accès en L2 du premier cycle d’études de santé, qui correspond aux filières dites MMPOK (médecine, maïeutique, odontologie, pharmacie, kinésithérapie), est très sélectif. Les capacités d’accueil en L1 de ces cursus sont déterminées annuellement par les universités après avis conforme des agences régionales de santé (ARS) territorialement compétentes Elles sont fixées sur la base des objectifs pluriannuels de formation des professionnels de santé. Par ailleurs, la part des femmes inscrite dans les filières scientifiques est systématiquement inférieure à celle des hommes, alors que les femmes réussissent mieux en premier cycle universitaire. Le taux de réussite en licence en trois ou quatre ans des néo-bachelières de la cohorte 2018 atteint ainsi 51,9 %, contre 39,7 % pour les hommes.
rÉussite des nÉo-bacheliers en licence selon la discipline d’inscription (cohorte 2018)
|
Effectifs de la cohorte (1) |
Réussite en 3 ans |
Réussite en 4 ans |
Réussite cumulée en 4 ans |
Droit, sciences politiques |
33 838 |
36,3 % |
12,9 % |
49,3 % |
Sciences économiques, AES |
25 745 |
34,4 % |
11,4 % |
45,8 % |
Arts, lettres, langues, SHS |
77 624 |
37,3 % |
9,8 % |
47,0 % |
Sciences-santé |
32 818 |
31,5 % |
12,8 % |
44,3 % |
STAPS |
16 619 |
36,5 % |
12,4 % |
48,9 % |
Total cohorte 2018 |
186 644 |
35,6 % |
11,3 % |
46,9 % |
Source : commission des finances, d’après la note flash du SIES, Parcours et réussite en licence : les résultats de la session 2022, n° 26, novembre 2023.
(1) Les effectifs sont composés de tous les étudiants ayant obtenu leur baccalauréat l’année N et inscrits pour la première fois en L1 au cours de l’année N/N+1. En sont exclus les étudiants ayant pris une inscription parallèle en section de technicien supérieur (STS), en DUT ou en CPGE. Le diplôme de licence recouvre la licence générale et la licence professionnelle.
C. l’objectif de rÉussite des Étudiants occupe une place centrale dans les politiques de l’enseignement supÉrieur, y compris dans leur dimension budgétaire
Les politiques publiques renforcent les conditions de la réussite étudiante en intervenant à la fois sur ses déterminants académiques et non académiques (1). Si les formations du premier cycle universitaire bénéficient de moyens financiers importants, il est aujourd’hui impossible de chiffrer précisément l’effort budgétaire correspondant (2).
1. L’objectif de réussite des étudiants en licence est au cœur des politiques de l’enseignement supérieur
Aux termes de l’article L. 123-2 du code de l’éducation, le service public de l’enseignement supérieur assure plusieurs missions, dont la première est de contribuer « à la réussite de toutes les étudiantes et de tous les étudiants ». Si la portée normative de cette déclaration d’intention, introduite par la loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche, est contestable, la réussite des étudiants est une priorité des politiques de l’enseignement supérieur. Il est difficile d’identifier et d’isoler les politiques publiques qui contribuent spécifiquement à la réussite des étudiants en licence, qui est indissociable de l’objectif d’acquisition des connaissances et des compétences ou de la réponse aux défis économiques de notre pays.
Il apparaît, en tout état de cause, que les mesures déployées dans le cadre du plan Étudiants du 30 octobre 2017 et de la loi du 8 mars 2018 dite ORE améliorent les conditions de la réussite étudiante en licence (a), de même que l’action des pouvoirs publics sur les déterminants non académiques de la réussite (b).
a. Une action sur les déterminants académiques : les dispositifs issus de la loi ORE de 2018
Le renforcement du continuum « –3/+3 » et la personnalisation des parcours permettent d’accompagner plus efficacement les jeunes générations de la classe de seconde à la L3. Une meilleure orientation de l’élève dès le lycée, suivie d’une affectation dans l’enseignement supérieur adaptée à son profil, favorise l’obtention du diplôme de licence à terme.
La mise en place de la plateforme Parcoursup en 2018, qui assure un accès simplifié à l’offre de formation dans le supérieur, remédie à la sélection par tirage au sort opérée dans le cadre du dispositif Admission post-bac (APB). Les candidats aux filières non sélectives et confrontées à une demande supérieure à leur capacité d’accueil ne sont plus départagés aléatoirement. La commission d’examen des vœux (CEV) de chaque établissement évalue et classe les dossiers des candidats, qui comprennent un projet de formation motivé, sans toutefois pouvoir opposer de refus en cas de places disponibles dans la formation ([29]). En parallèle, les candidats – et leur famille – sont plus à même de réaliser un choix d’orientation éclairé. Pour chaque formation disponible sur Parcoursup, une fiche d’information présentant l’établissement, les parcours d’études, la procédure de sélection et le ratio de candidats admis est mise à la disposition des candidats. Les informations sur les débouchés professionnels associés à la formation, dont le taux d’insertion, sont progressivement intégrées dans lesdites fiches à partir de la session 2023. Le rapporteur spécial estime, comme France Universités, que les dispositions de la loi du 8 mars 2018 dite ORE concourent « à l’amélioration de l’orientation et de la réussite par l’accès des lycéens à une information lisible et identique quel que soit le cursus ».
L’opinion portée par les principaux intéressés sur la procédure d’admission mise en œuvre via Parcoursup est ainsi globalement favorable ([30]) : 69 % des lycéens interrogés estiment que Parcoursup contribue à l’élaboration de leur projet d’orientation (+ 6 points par rapport à 2022), tandis que 74 % d’entre eux considèrent que Parcoursup facilite l’entrée dans l’enseignement supérieur (+ 6 points par rapport à 2022).
Par ailleurs, la loi du 8 mars 2018 dite ORE a introduit la faculté pour les établissements d’enseignement supérieur de proposer aux candidats une entrée en licence conditionnée, communément appelée « oui si », afin de maximiser leurs perspectives de réussite ([31]). Les candidats dont le profil ne correspond pas pleinement aux attendus de la formation se voient proposer un parcours aménagé, qui comporte des dispositifs d’accompagnement et de remise à niveau (type 1) ou un allongement de la durée d’études (type 2).
● Le déploiement, depuis 2018, des dispositifs « oui si » dans les établissements d’enseignement supérieur est modeste. Selon les données communiquées par la DGESIP, 27 570 étudiants ont accepté une proposition « oui si » lors de la campagne 2023 de Parcoursup, contre un total de 111 029 propositions formulées par les établissements, dont 75 037 à destination d’élèves de classe de terminale. Le nombre de candidats acceptant une proposition « oui si » est relativement stable depuis quatre ans, après de premiers résultats encourageants lors de la création du dispositif : 25 600 étudiants suivaient un aménagement de parcours en 2019, en hausse de 11 000 étudiants par rapport à 2018. Ces étudiants sont aujourd’hui accueillis dans 71 établissements répartis dans l’ensemble des académies. France Universités souligne que trois académies se détachent en accueillant plus de 1 000 étudiants dans ces cursus : l’académie de Versailles (1 749 étudiants), l’académie de Nantes (1 139 étudiants) et l’académie de Grenoble (1 094 étudiants). Les propositions d’aménagement sont plus fréquentes en licences d’économie, de sciences et techniques des activités physiques et sportives (STAPS), de psychologie et de droit, les trois dernières étant des filières en tension.
● La DGESIP a indiqué au rapporteur spécial que « l’impact pédagogique [des dispositifs « oui si »] est difficile à établir », renvoyant à l’incomplétude des remontées d’informations réalisées par les établissements du fait d’un manque de pilotage par ces derniers. Contribue également à cette incertitude la diversité des dispositifs « oui si » mis en place par les universités, qui disposent d’une marge de manœuvre appréciable pour adapter le parcours d’accompagnement aux besoins de l’étudiant (tutorat, séances de remédiation ou d’orientation, allongement de la durée des études, etc.). Ce manque de visibilité est d’autant plus regrettable que l’article L. 612-3 du code de l’éducation, modifié par l’article 1er de la loi ORE, dispose expressément que les opérateurs « communiquent chaque année au ministre chargé de l’enseignement supérieur des statistiques, qui sont rendues publiques, sur le suivi et la validation de ces parcours et de ces dispositifs. »
L’absence d’évaluation robuste et récente de l’effet des dispositifs « oui si » sur la réussite étudiante est préjudiciable à la bonne mise en œuvre de cette politique. Le réseau Udice conclut ainsi que leur pertinence « en termes de réussite étudiante n’est pas complétement démontrée », tandis que France Universités porte une appréciation favorable sur les effets de la modulation de la L1. Il est révélateur que la DGESIP, interrogée sur l’assiduité et la réussite des étudiants ayant accepté une licence conditionnée, ait renvoyé le rapporteur spécial vers une publication du SIES en date de 2021, portant sur les effectifs de la rentrée 2019 ([32]).
L’accès conditionné en licence offre un cadre prometteur pour accompagner les étudiants les plus fragiles, sans que son inefficacité ou, à l’inverse, son intérêt ne soient pleinement démontrés. Les données du SIES démontrent simplement que 21 % des néo-bacheliers inscrits dans un parcours aménagé en 2018 sont passés en L2 à la rentrée 2019, un résultat nettement inférieur à la moyenne nationale (45,4 %). Or il s’agit précisément d’un public fragile, qui a rarement obtenu une mention au baccalauréat et dont un tiers des effectifs a accumulé un « retard » scolaire lié à un ou plusieurs redoublements dans l’enseignement primaire ou secondaire.
● Le rapporteur spécial appelle par conséquent le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche à évaluer plus précisément les effets des dispositifs « oui si ». Si l’intérêt de ces parcours était pleinement démontré, il conviendrait de corriger, en lien avec les établissements, les obstacles identifiés. Certaines bonnes pratiques, telles que l’organisation d’une rentrée spécifique comprenant un test de positionnement, pourraient à être généralisées. Le réseau Udice a également regretté un « défaut de ciblage » dans la sélection des étudiants faisant l’objet d’une entrée en licence conditionnée et des modalités d’accompagnement « trop générales ».
Recommandation n° 3
Fiabiliser les données sur l’assiduité et la réussite des étudiants engagés dans un parcours « oui si » pour en évaluer l’efficacité et, le cas échéant, en poursuivre les financements (direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle ; établissements d’enseignement supérieur).
b. Une action sur les déterminants non académiques : l’exemple des bourses sur critères sociaux
Les bourses sur critères sociaux, en levant une partie des obstacles financiers à la poursuite d’études, sont l’un des instruments principaux de la politique d’égalité des chances et de promotion de la diversité dans l’enseignement supérieur.
La littérature économique conclut à la relation positive entre l’attribution d’une bourse et la réussite étudiante en licence. Un article des économistes Gabrielle Fack et Julien Grenet évalue, par exemple, que le bénéfice d’une bourse d’un montant annuel de 1 500 euros ([33]) accroît de 2,7 à 2,8 points de pourcentage le taux d’inscription en licence des futurs étudiants ([34]). Par ailleurs, la probabilité d’obtention du diplôme des étudiants boursiers inscrits en L3 augmente de près de 3 points de pourcentage.
Les études statistiques du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche aboutissent à des résultats similaires, en démontrant toutefois que le bénéfice d’une bourse ne corrige pas intégralement les écarts d’accès et de réussite des étudiants boursiers et non boursiers. Il apparaît ainsi que « les étudiants les plus en difficulté financière réussissent toujours moins bien que les autres » et que « le fait de ne pas percevoir d’allocation diminue encore la probabilité de réussir », témoignant de « l’effet protecteur » des bourses ([35]).
Le rapporteur spécial se félicite du soutien important apporté aux étudiants modestes dans le cadre du système des bourses sur critères sociaux, dont les financements s’élèvent à 2,25 milliards d’euros en 2024. Les effectifs bénéficiaires se sont établis à 692 101 étudiants boursiers au 31 décembre 2023, soit 13 213 étudiants supplémentaires par rapport au 31 décembre 2022 ([36]). La première phase de la réforme des bourses engagée à la rentrée 2023 ([37]), qui repose notamment sur l’augmentation de 6 % des plafonds de ressources, a élargi le public éligible. Cette mesure bienvenue met un terme à la baisse tendancielle du nombre de boursiers de l’enseignement supérieur, qui résultait de l’absence de revalorisation du barème revenus/points de charge des bourses depuis 2013 et du développement de l’apprentissage.
La seconde phase de la réforme des bourses, annoncée pour la rentrée 2025, doit permettre de corriger les insuffisances structurelles du système actuel. La simplification des démarches administratives et la fiabilisation du calcul des ressources y contribueraient utilement.
Réussite des étudiants et conditions d’attribution des bourses
Le système actuel des bourses sur critères sociaux est principalement réservé aux étudiants français inscrits dans un établissement d’enseignement public ou privé, proposant une formation habilitée à recevoir des boursiers.
● En application des articles L. 612-1-1 et D. 821-1 du code de l’éducation, les élèves percevant une bourse doivent, en contrepartie, respecter des conditions générales de scolarité et d’assiduité. Ce principe a été établi pour la première fois par l’article 2 du décret n° 51-445 du 16 avril 1951 relatif au payement des bourses d’enseignement supérieur.
Ainsi, l’étudiant titulaire d’une bourse doit être régulièrement inscrit, aussi bien aux niveaux administratif que pédagogique. Il doit assister assidument aux activités relevant de sa formation, rendre tous les devoirs prévus et être présent aux examens correspondants à ses enseignements. Dans le cas contraire, l’étudiant aura à rembourser les sommes indûment perçues.
Les règles de contrôle de l’assiduité sont définies par les établissements. Ces-derniers transmettent les documents attestant de l’assiduité des étudiants aux services du CROUS, qui sont les opérateurs du système des bourses. Dans le cas où l’établissement ne fournit pas ces documents, le CROUS les demande directement à l’étudiant. Si les justificatifs d’absence ne sont pas transmis dans les délais fixés, le versement de la bourse est suspendu et dans le cas où la situation persiste, le rectorat, saisi par le CROUS, émet un ordre de reversement de tout ou partie du montant de la bourse.
Le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche réalise, à destination des services académiques, une enquête sur l’assiduité des étudiants boursiers depuis l’année universitaire 2012-2013.
La DGESIP a communiqué au rapporteur spécial les dernières données disponibles sur l’assiduité des étudiants boursiers, qui portent sur l’année 2018‑2019. Il apparaît que la non-assiduité est un phénomène limité, qui concerne 21 269 étudiants, soit près de 3,5 % des effectifs inscrits à l’université, en BTS et en CPGE cette année-là. Les étudiants non assidus sont principalement inscrits à l’université (68,8 %) et, dans une moindre mesure, en BTS (29,5 %) et en CPGE (1,7 %). Les ordres de reversement portent sur 43 691 mensualités, pour un montant total de 11,1 millions d’euros.
● Par ailleurs, le maintien de la bourse est soumis à des conditions de progression dans les études ([38]). Un étudiant peut ainsi utiliser jusqu’à sept droits annuels à bourse durant sa scolarité dans l’enseignement supérieur. Le troisième droit à bourse ne peut lui être accordé que si l’étudiant a validé au moins 60 crédits ECTS, deux semestres ou une année. Par ailleurs, le cycle de licence ne peut donner lieu à plus de cinq droits à bourse. Des droits supplémentaires peuvent être attribués dans certaines situations particulières, par exemple au bénéfice des étudiants en situation de handicap ou sportifs de haut niveau.
L’amélioration des conditions de vie et d’études ne repose pas uniquement sur le système des bourses sur critères sociaux. Ce dernier est complété par un ensemble d’aides directes et indirectes accordées par l’État pour lutter contre la précarité des étudiants et favoriser leur réussite. Relèvent de cette politique l’exonération des droits d’inscription à l’université pour les étudiants boursiers, l’activité d’hébergement et l’offre de restauration à tarif modéré du réseau des œuvres universitaires et scolaires.
2. Les moyens consacrés à la réussite des étudiants en licence, s’ils sont a priori importants, ne peuvent être chiffrés avec précision
Les données communiquées par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche n’ont pas permis au rapporteur spécial de circonscrire l’effort budgétaire associé à la licence (a). Par symétrie, il propose une première estimation du coût de l’échec en licence pour les finances publiques (b).
a. L’ampleur des moyens budgétaires alloués à l’objectif de réussite des étudiants en licence
Le rapporteur spécial n’a pas été en mesure d’établir avec précision le montant annuel des dépenses publiques alloués à l’objectif de réussite des étudiants en licence et, plus largement, au cycle de licence. Les montants présentés infra à partir de trois méthodes distinctes ne sont pas cumulatifs et se recoupent pour l’essentiel.
● Une conception extensive de cet effort budgétaire consiste à considérer que l’ensemble des dépenses publiques en faveur du cursus licence contribue à la réussite des étudiants inscrits dans ces formations.
Or la dépense annuelle moyenne par étudiant inscrit à l’université calculée dans le compte de l’éducation est peu représentative. Elle s’établit à 10 270 euros en 2021, contre 9 550 euros constants en 1990 (+ 7,5 %) ([39]). Ces données ne distinguent pas les grades universitaires (licence, master, doctorat) et, surtout, agrègent les dépenses des administrations publiques, des entreprises et des ménages, par exemple au titre de l’apprentissage ou de l’hébergement.
Similairement, la DGESIP a communiqué au rapporteur spécial le montant annuel moyen de la subvention pour charges de service public (SCSP) par étudiant en 2023. Celle-ci s’élève à 9 348 euros. Le tableau infra porte sur les opérateurs financés par le programme 150 Formations supérieures et recherche universitaire de la MIRES, qui porte les crédits alloués à la formation initiale et continue de la licence au doctorat dans les établissements publics et privés d’enseignement supérieur.
Scsp moyenne par Étudiant dans les Établissements d’enseignement supÉrieur publics (tous cycles confondus, 2023)
Catégorie d’établissements |
SCSP moyenne par étudiant (1) |
Universités |
9 348 euros |
Écoles normales supérieures (ENS) |
45 171 euros |
Écoles d’ingénieurs et assimilés |
15 233 euros |
Instituts d’études politiques (IEP) et IAE de Paris |
6 717 euros |
Autres établissements (1) |
15 745 euros |
Source : commission des finances, d’après les réponses écrites de la DGESIP.
(1) La SCSP moyenne par étudiant est obtenue en rapportant les financements des programmes 150 Formations supérieures et recherche universitaire et 231 Vie étudiante attribués aux établissements d’enseignement supérieur au nombre d’étudiants inscrits dans les formations concernées. Sont considérées les inscriptions principales en formation initiale, hors doubles inscriptions en CPGE et hors apprentissage, dans les formations conduisant à la délivrance d’un diplôme national ou conférant un grade universitaire, hors formation continue et diplômes d’établissement – à l’exception des diplômes d’établissement délivrés dans le cadre d’une formation post-bac (DSP, PaRéO).
(2) La catégorie des autres établissements regroupe divers établissements publics financés par le programme 150 Formations supérieures et recherche universitaire, tels que l’Institut national des langues et civilisations orientales (INALCO) et l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS).
L’analyse des données transmises par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche appelle les observations suivantes :
– la SCSP moyenne par étudiant varie significativement selon les catégories d’établissements en raison des différences de taux d’encadrement et des spécificités propres à certains opérateurs, telles que la rémunération des élèves des Écoles normales supérieures au titre de leur statut de fonctionnaire-stagiaire ;
– l’amplitude, entre universités, de l’effort budgétaire par étudiant est importante : la SCSP moyenne par étudiant se situe entre 5 416 euros à l’université Paul-Valéry Montpellier III et 18 401 euros à l’université Paris Sciences et Lettres (PSL).
● L’indicateur de la SCSP moyenne par étudiant fait l’objet d’une estimation tous cycles confondus, sans distinguer les montants consacrés à la licence. Par ailleurs, il exclut l’essentiel des dépenses en faveur de la vie étudiante, portée par le programme 231 Vie étudiante de la mission interministérielle Recherche et enseignement supérieur (MIRES). Seuls sont comptabilisés les crédits alloués aux établissements d’enseignement supérieur au titre des actions de vie étudiante (contrats étudiants, mise en accessibilité des bâtiments, etc.), pour un montant total de 48,9 millions d’euros en 2023. Or les crédits de paiement exécutés en 2023 au titre du programme 231 Vie étudiante s’élèvent à 3,08 milliards d’euros, dont 2,25 milliards d’euros uniquement pour les bourses versées par le réseau des œuvres universitaires et scolaires.
Le caractère lacunaire des données officielles est d’autant plus regrettable que le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche pilote le projet dit P2CA relatif à la connaissance des coûts des activités des établissements. La cartographie des coûts de formation des universités a ainsi permis au Conseil d’analyse économique (CAE) d’estimer le coût moyen d’un étudiant en licence à 3 370 euros au titre des activités de formation, hors frais généraux et dépenses de vie étudiante, contre 5 430 euros de coût moyen pour un étudiant en master ([40]). Ce coût moyen cache de fortes disparités selon les formations de licence, du fait des différences de taux d’encadrement et de volume horaire, les filières scientifiques étant plus coûteuses que celles portant sur les sciences humaines et sociales.
L’effort budgétaire mesuré par la SCSP moyenne par étudiant inscrit en licence, s’il est un indicateur utile, ne permet ainsi pas d’isoler les financements publics spécifiquement mobilisés en faveur des étudiants en licence. Cet exercice se heurte aux mêmes obstacles méthodologiques et d’indisponibilité des données lorsqu’il est mené au niveau agrégé.
De la même manière, la ventilation des dépenses du budget de l’État en matière d’enseignement supérieur et de vie étudiante ne permet pas d’identifier précisément les moyens consacrés aux formations de licence, et encore moins à l’objectif de réussite des étudiants.
● En premier lieu, les crédits ouverts en loi de finances au titre du programme 150 Formations supérieures et recherche universitaire (15,18 milliards d’euros en 2024) contribuent à la réussite des étudiants sans être mobilisés à cette seule fin. Le RAP annexé au PLF pour 2024 indique, certes, que l’action n° 1 Formation initiale et continue du baccalauréat à la licence, dotée de 3,92 milliards d’euros en 2024, vise en premier lieu à « assurer la réussite du plus grand nombre ». Cette enveloppe finance la masse salariale et les dépenses de fonctionnement courant de l’ensemble des opérateurs rattachés au programme 150 Formations supérieures et recherche universitaire (universités, écoles d’ingénieur, etc.). En complément des crédits réservés au premier cycle, l’État déploie des moyens transversaux qui contribuent également à la réussite des étudiants, y compris en licence. Tel est le cas de la politique documentaire et de la politique immobilière des établissements d’enseignement supérieur, financées respectivement à hauteur de 481,4 millions d’euros par l’action n° 5 Bibliothèques et documentation et de 1,27 milliard d’euros par l’action n° 14 Immobilier. Ces dépenses sont toutefois indissociables par nature et bénéficient autant aux étudiants de licence que de master.
● En second lieu, les crédits du programme 231 Vie étudiante, qui porte notamment les financements attribués au réseau des œuvres universitaires et scolaires, contribuent indéniablement à la réussite des étudiants – quel que soit leur niveau d’études. Les conditions de vie de ces derniers, telles que l’accès à un logement décent ou à une alimentation saine, sont des facteurs clés de réussite. Le programme 231 Vie étudiante est doté de 3,33 milliards d’euros en 2024, dont près de 2,48 milliards d’euros pour le système des bourses sur critères sociaux.
MONTANT DES AIDES DIRECTES ET INDIRECTES FINANCÉES
PAR LE PROGRAMME 231 Vie Étudiante
(en millions d’euros)
|
LFI 2023 |
LFI 2024 |
|
Aides directes |
Bourses sur critères sociaux |
2 355,2 |
2 475,6 |
Aides au mérite |
42,8 |
42,8 |
|
Aides à la mobilité internationale |
28,9 |
28,9 |
|
Aides spécifiques |
48,8 |
48,8 |
|
Aide à la mobilité Parcoursup |
10,0 |
10,0 |
|
Aide à la mobilité en master |
7,2 |
7,2 |
|
Grande école du numérique (GEN) |
2,4 |
2,4 |
|
Prêts bancaires garantis par Bpifrance |
4,0 |
4,2 |
|
Financement de la certification en langue anglaise |
7,3 |
0,0 |
|
Aides indirectes (1) |
Repas à 1 euro |
51,0 |
51,4 |
Gel des loyers des résidences CROUS |
12,7 |
31,7 |
|
Développement de l’offre de restauration à tarif modéré (loi du 13 avril 2023 dite Lévi) |
0,0 |
25,0 |
|
Total des aides directes et indirectes |
2 570,3 |
2 728,0 |
(1) Le montant des aides indirectes ne comprend pas les dépenses associées au repas à tarif social (3,30 euros) proposés par le réseau des CROUS, même si le prix de vente est inférieur au coût de production.
Source : commission des finances, d’après réponses écrites de la DGESIP en vue de l’examen du projet de loi de finances pour 2024.
La DGESIP a indiqué au rapporteur spécial ne pas disposer « de données d’exécution budgétaire selon le niveau ou le grade de l’étudiant mais uniquement selon l’échelon auquel appartiennent les étudiants boursiers pour la répartition des crédits relatifs à la bourse sur critères sociaux ». Il est ainsi impossible de distinguer la dépense de bourses sur critères sociaux bénéficiant aux étudiants inscrits en licence à l’université de celle profitant aux étudiants inscrits en master.
Le rapporteur spécial regrette que de telles informations ne soient pas disponibles, alors même que le compte de l’éducation indique que la licence concentre 74 % des étudiants boursiers inscrits à l’université en 2021, soit des effectifs de 378 405 étudiants ([41]). Il appelle le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche à récolter et publier ces informations, qui contribueront à fiabiliser la mesure de l’effort budgétaire au bénéfice du premier cycle universitaire.
Recommandation n° 4
Ventiler l’exécution budgétaire des crédits engagés au titre des bourses sur critères sociaux par grade universitaire (direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle ; Centre national des œuvres universitaires et scolaires).
Établir le montant de la dépense publique annuelle par étudiant inscrit en licence à l’université, sur la base de l’ensemble des dépenses relatives à l’enseignement supérieur et à la vie étudiante (direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle).
La mise en place de la loi du 8 mars 2018 dite ORE s’est accompagnée d’un renforcement substantiel des moyens accordés aux universités. Ces financements ont notamment permis de créer des emplois d’enseignants pour augmenter les capacités d’accueil des filières en tension et pour encadrer les étudiants inscrits dans un dispositif « oui si ». Leur affectation est mieux documentée par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche que l’effort budgétaire moyen ou global en faveur de la licence. Le rapporteur spécial relève toutefois les critiques de la Cour des comptes à l’encontre de « l’absence de suivi » ministériel du recrutement de ces personnels et de la masse salariale correspondante ([42]).
À titre d’exemple, les crédits alloués aux établissements d’enseignement supérieur dans le cadre des dispositifs d’accompagnement « oui si » s’élèvent à 38,21 millions d’euros en 2023. Ces moyens ont été répartis entre les opérateurs dans le cadre du dialogue stratégique et de gestion (DSG) mis en place entre 2019 et 2022, dispositif contractuel auquel les contrats d’objectifs, de moyens et de performance (COMP) se sont substitués à partir de 2023. Ils sont aujourd’hui pérennes, c’est-à-dire « soclés » dans la SCSP des établissements. La répartition des financements « oui si » entre les établissements pour l’année 2023 est présentée en annexe du présent rapport d’information.
Les montants alloués aux dispositifs « oui si » sont ainsi relativement modestes au regard des crédits de l’action n° 1 Formation initiale et continue du baccalauréat à la licence du programme 150 Formations supérieures et recherche universitaire, dotée de 3,92 milliards d’euros en 2024.
Il n’en demeure pas moins que la faiblesse des effectifs bénéficiaires de l’accompagnement « oui si » et l’effet incertain de celui-ci sur la réussite des étudiants, décrits supra, invitent à réexaminer l’intérêt de tels financements. La Cour des comptes a par ailleurs souligné que les crédits « oui si » sont insuffisamment concentrés sur les établissements présentant les taux d’échec en licence les plus élevés, l’attribution des crédits étant réalisée en fonction des demandes des universités. Ces modalités d’allocation sont susceptibles de générer un effet d’aubaine, les établissements les plus attentifs à la réussite des étudiants en licence étant favorisés même lorsqu’ils affichent des taux de réussite satisfaisants ([43]).
b. Un premier chiffrage du coût, pour les finances publiques, de l’échec en licence
● Le rapporteur spécial a souhaité estimer le coût pour les finances publiques que représente l’échec en licence, par symétrie avec l’estimation des financements consacrés à l’objectif de réussite en licence ou, plus généralement, des financements alloués aux formations de licence.
France Stratégie s’était livrée à un tel exercice en 2017, en concluant que « le coût collectif [des] accidents de parcours [en licence] peut être estimé à plus de 500 millions d’euros par an, soit le budget de fonctionnement de deux universités de taille moyenne » ([44]). L’institution ne développe pas la méthode employée, se bornant à préciser que l’évaluation est réalisée « sur la base d’un coût d’une année d’études dans le supérieur, hors recherche, soit près de 7 000 euros par étudiant ». Interrogée sur la pertinence de cette méthode, la DGESIP a répondu au rapporteur spécial qu’elle « ne [disposait] pas encore d’outils permettant d’estimer le coût budgétaire des "accidents de parcours" ».
Le coût de l’échec en licence pourrait être évalué en rapportant les sorties sans diplôme de l’enseignement supérieur au bout de trois ou quatre ans à la dépense annuelle que représente un étudiant en licence. Les données du SIES sur le devenir des bacheliers à moyen et long terme, par exemple sur la cohorte 2014 ([45]), ne permettent malheureusement pas cet exercice. En effet, le temps passé dans l’enseignement supérieur par les étudiants sortis sans diplôme n’est pas renseigné.
● Une approche par le taux de sortie de l’enseignement supérieur à l’issue de la L1 semble plus fiable, bien qu’extrêmement restrictive. Elle ne tient pas compte des passages en L2, des redoublements ou des réorientations qui n’aboutissent pas à la délivrance d’un diplôme, alors même que 9 % d’une cohorte de néo-bacheliers inscrits à l’université est toujours en L1 ou en L2 après quatre années d’études. La dernière publication du SIES sur le devenir des bacheliers indique que les sorties précoces de l’enseignement supérieur à l’issue de la L1 concernent 32 938 étudiants au cours de l’année universitaire 2021-2022, soit 16,7 % des néo-bacheliers ayant obtenu leur baccalauréat en 2021 ([46]).
Cela représente un coût de 307,9 million d’euros par an pour le budget de l’État, sur la base d’une dépense annuelle moyenne de 9 348 euros par étudiant inscrit à l’université. Cette estimation est plutôt conservatrice, en ce qu’elle se limite aux SCSP notifiées aux établissements d’enseignement supérieur pour leurs dépenses de formation et de vie étudiante, sans tenir compte des missions du réseau des œuvres universitaires et scolaires – même si elle néglige le fait qu’une partie des SCSP assure des coûts structurels qui ne seraient pas diminués avec un nombre d’étudiants moindre.
● Il est toutefois possible de donner un ordre de grandeur des dépenses par étudiant au titre des aides directes, même en l’absence de données sur la ventilation des crédits des bourses par grade universitaire.
D’après les données communiquées par la DGESIP, le montant moyen de bourse par étudiant inscrit dans l’enseignement supérieur, périmètre couvrant aussi bien les étudiants de master que ceux inscrits hors de l’université, s’élève à 2 926 euros pour l’année universitaire 2021-2022. Il s’agit du dernier exercice pour lequel le niveau des sorties précoces de l’enseignement supérieur est connu. Par ailleurs, les données du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche font état de 14 403 étudiants boursiers sortis précocement de l’enseignement supérieur après avoir échoué en L1 lors de l’année universitaire 2021-2022 ([47]).
La dépense relative aux bourses sur critères sociaux attribuées à des étudiants inscrits en L1 et sortant précocement de l’enseignement supérieur représenterait un coût estimé de l’ordre de 42,14 million d’euros par an pour le budget de l’État.
montant annuel MOYEN, par Étudiant, des bourses sur critères sociaux
Année universitaire |
Montant moyen par étudiant |
2018-2019 |
2 796 |
2019-2020 |
2 819 |
2020-2021 |
2 884 |
2021-2022 |
2 926 |
2022-2023 |
3 055 |
2023-2024 |
3 442 |
Source : réponses écrites de la DGESIP.
Le chiffrage proposé par le rapporteur spécial gagnerait à être affiné par la DGESIP pour obtenir la dépense totale engagée pour les étudiants d’une cohorte de néo‑bacheliers inscrits en licence qui ne sont pas diplômés en quatre ans. De manière plus structurelle, l’estimation des coûts financiers associés à l’échec en licence pourrait utilement inclure les coûts économiques et sociaux induits par la sortie sans diplôme de l’enseignement supérieur (exposition au chômage de longue durée, rémunération inférieure, etc.). Selon l’OCDE, le salaire d’un actif travaillant à temps plein et ayant obtenu un diplôme de licence est ainsi supérieur de 44 % à celui d’une personne diplômée du deuxième cycle de l’enseignement secondaire, soit le baccalauréat en France ([48]).
II. LE RENFORCEMENT DES CONDITIONS DE LA RÉUSSITE ÉTUDIANTE, UNE STRATÉGIE D’AVENIR POUR L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR FRANÇAIS
Les travaux du rapporteur spécial interviennent dans le cadre de la réforme des bourses sur critères sociaux, dont il est démontré qu’elles contribuent à réduire les inégalités de réussite dans l’enseignement supérieur. Par conséquent, le rapporteur spécial a concentré ses propositions sur les facteurs académiques de la réussite en licence.
Ces dernières visent à orienter les bacheliers vers des formations supérieures adaptées à leur profil (A), à simplifier les procédures de définition de l’offre de formation et de fixation des capacités d’accueil (B), ainsi qu’à renforcer l’autonomie dont disposent les étudiants tout au long de leur parcours (C).
A. AGIR EN AMONT et À l’entrÉE DES ÉTUDES SUPÉRIEURES
La massification de l’enseignement supérieur n’emporte pas nécessairement la démocratisation de celui-ci, comme le démontrent les taux de réussite différenciés selon l’origine sociale de l’étudiant et le baccalauréat obtenu. Si le législateur a pu fixer l’objectif de porter 50 % d’une classe d’âge à un diplôme de l’enseignement supérieur ([49]), cette cible ne saurait justifier l’engorgement à tout prix des formations universitaires.
La réussite des étudiants en licence se prépare dès le lycée (1). Le renforcement des formations courtes et professionnalisantes contribuerait à tempérer l’orientation par défaut en licence (2).
1. Restaurer la valeur académique du baccalauréat comme premier grade de l’enseignement supérieur
Les effectifs de bacheliers progressent de manière continue depuis plusieurs décennies, sous l’effet de la croissance démographique – qui induit un nombre plus conséquent de candidats à l’examen – et de la hausse du taux de réussite. Le nombre d’élèves admis au baccalauréat s’élève à 672 368 lors de la session de juin 2023, dont 370 395 en série générale, 133 275 en série technologique et 168 698 en série professionnelle ([50]). Il s’agit d’une cohorte près de 2,5 fois plus importante qu’en 1985. En parallèle, le taux de réussite globale a progressé de 67 % à 90,9 % sur la même période, avec un pic à 95,7 % en 2020 dans le contexte de la crise sanitaire. L’objectif annoncé en 1985 par M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l’éducation nationale, d’atteindre 80 % d’une classe d’âge au baccalauréat, c’est-à-dire en classe de terminale, est atteint en 2012. Par ailleurs, la proportion de bacheliers dans une génération s’établit à 79,3 % en 2023, après un pic à 86,4 % en 2020.
La massification de l’accès au baccalauréat met sous pression les capacités d’accueil de l’enseignement supérieur. Le taux de poursuite d’études des néo‑bacheliers s’établit à 78,5 % en 2021, caractérisé par de fortes disparités : plus de neufs bacheliers généraux sur dix poursuivent leurs études dans l’enseignement supérieur, dont près six sur dix à l’université, contre moins de cinq sur dix pour les bacheliers professionnels.
Le rapporteur spécial partage l’analyse de France Universités, selon laquelle la hausse des effectifs de bacheliers et l’admission de droit dans les formations universitaires non sélectives conduit un nombre croissant d’étudiants à intégrer l’université « sans projet d’études précis, avec un niveau académique faible, ce qui explique au demeurant qu’ils n’aient pas été retenus dans des filières sélectives ». Cette situation reporte, en partie, sur l’enseignement supérieur la difficile tâche de sélectionner les étudiants aptes à poursuivre leurs études, alors même que ceux-ci se sont vu offrir une place dans une formation non sélective. Reporter le filtre de la sélection à l’issue de la L1, source de mal être pour les étudiants et d’embolie des formations universitaires, est à la fois injuste et inefficace.
La lutte contre l’échec et le décrochage en licence, due en partie à l’afflux de bacheliers mal préparés ou orientés, doit être une priorité. La prise en compte des résultats académiques constitue une avancée bienvenue de la loi du 8 mars 2018 dite ORE, en substitution au tirage au sort arbitraire qui régissait la procédure APB.
En revanche, une politique ayant pour objectif de renforcer la réussite des étudiants en licence ne peut faire l’économie d’une revalorisation du baccalauréat, sans céder à la critique facile de la « baisse du niveau » ou du « déclassement scolaire ». À cet égard, le rapporteur accueille favorablement les mesures visant un « choc des savoirs » annoncées par le Gouvernement le 5 décembre 2023 ([51]), en particulier la suppression des correctifs académiques apportés aux notes du baccalauréat, que cette modification résulte d’une décision du jury ou de l’autorité académique ([52]).
2. Orienter davantage les lycéens vers les filières courtes et professionnalisantes
Les réformes tendant à renforcer les capacités d’accueil des filières courtes et professionnalisantes, en complément de l’offre de formation en licence, gagneraient à être approfondies. Ces formations favorisent la réussite des bacheliers professionnels et technologiques, qui sont confrontés à un taux d’échec élevé en L1, et leur insertion sur le marché du travail.
Parmi les mesures concourant à la diversification des profils des étudiants accédant à l’enseignement supérieur, le rapporteur spécial signale en particulier :
– la création de nouveaux diplômes de niveaux bac+1, accessibles depuis la plateforme Parcoursup. Dans le cadre du plan « 1 jeune, 1 solution » lancé en juillet 2020, le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche a par exemple labellisé des diplômes universitaires dits « Passeports pour réussir et s’orienter » (PaRéo) et portant diplôme de spécialisation professionnelle (DSP) ([53]). Le cursus PaRéo repose sur un cursus multidisciplinaire et un stage de découverte du monde professionnel, formant une année de préorientation permettent à l’étudiant de poursuivre ses études en connaissance de cause. Le DSP est davantage orienté vers une insertion professionnelle directe à l’issue de l’année universitaire, plus particulièrement dans les filières en tension ou émergentes (cyber, chimie verte, etc.) ;
– le renforcement des moyens alloués au cursus du BUT, qui remplace progressivement le diplôme universitaire de technologie (DUT) depuis la rentrée 2021 ([54]). Une enveloppe de 15 millions d’euros a été ouverte en loi de finances initiale pour 2024 pour financer l’ouverture de 600 places dans de nouveaux départements d’IUT situés dans des villes de taille moyenne et le déploiement de la 3e année de BUT. Le taux de réussite en DUT en deux ou trois ans, qui s’élevait à 79 % en 2022, est particulièrement élevé avant la réforme du BUT. Il s’explique par la sélection à l’entrée des IUT, ainsi que par une méthode pédagogique caractérisée par un taux d’encadrement et un nombre d’heures d’enseignement plus importants qu’en licence.
Le rapporteur spécial se félicite du déploiement de parcours de réussite adaptés aux profils des étudiants. Il rejoint la proposition d’Udice consistant à faire de ces diplômes universitaires post-bac de véritables « sas » d’adaptation et d’orientation à l’entrée dans le supérieur. À titre d’exemple, les inscriptions dans une formation de type PaRéo ou DSP pourraient être exemptées du décompte des droits à bourse, qui plafonne à cinq le nombre de droits à bourse ouverts en cycle de licence « aussi bien dans le cadre d’un cursus linéaire que dans le cadre d’une ou de plusieurs réorientations » ([55]).
Les quotas de bacheliers professionnels et technologiques pour l’accès aux filières courtes
La loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche a introduit la faculté, pour le recteur d’académie, de fixer un pourcentage minimal de bacheliers professionnels et technologiques pour l’accès en STS et en IUT. Ces lycéens sont mieux préparés à ces filières sélectives, qui permettent une transition en douceur entre le lycée et l’enseignement supérieur.
La politique de « quotas » en faveur des bacheliers professionnels et technologiques a été renforcée dans le cadre de la loi dite ORE de 2018. L’arrêté du 6 décembre 2019 portant réforme de la licence professionnelle fixe, par exemple, un taux minimum de 50 % de bacheliers technologiques en première année de BUT ([56]).
Cette priorité d’accès produit des résultats encourageants. Dans les IUT, la part de bacheliers issus des séries technologiques passe ainsi de 28,8 % à 40,2 % des inscrits entre 2013 et 2021, avec une progression marquée de 7 points de pourcentage entre 2020 et 2021 ([57]).
B. RENFORCER Le rÔle DES ÉTABLISSEMENTS D’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR dans la dÉfinition de l’OFFRE DE FORMATION et la fixation des capacitÉs d’accueil
Les procédures d’accréditation de l’offre de formation et de fixation des capacités d’accueil, aujourd’hui insuffisamment responsabilisantes pour les établissements (1), pourraient utilement faire l’objet de mesures d’expérimentation dans le cadre de l’acte II de l’autonomie des universités (2).
1. La rigidité des procédures d’accréditation de l’offre de formation et de fixation des capacités d’accueil des établissements
L’offre de formation et les capacités d’accueil des établissements conditionnent largement la procédure d’entrée dans l’enseignement supérieur. Celles-ci doivent être correctement définies pour répondre aux besoins de l’économie en termes de compétences et d’emplois. Par ailleurs, le dimensionnement des capacités d’accueil face à la demande des candidats détermine le caractère sélectif ou non d’une formation dans le cadre des filières en tension.
● L’offre de formation proposée par les établissements est préalablement accréditée par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche ([58]). La loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche a substitué cette procédure simplifiée d’accréditation des établissements à une démarche d’habilitation de chacune des formations conduisant à un diplôme national, dont la licence. Concrètement, chaque établissement est accrédité par la DGESIP sur une base pluriannuelle pour l’ensemble des formations qu’il propose, après évaluation par le Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (HCÉRES) du projet d’offre de formation soumis par son président ou directeur ([59]). La DGESIP a indiqué au rapporteur spécial que l’avis d’accréditation du HCÉRES, qui examine notamment la qualité de l’encadrement et les perspectives d’insertion professionnelle des diplômés, constitue une « aide à la décision d’accréditation » pour ouvrir ou fermer une formation par mention de diplôme (lettres, philosophie, chimie, etc.). La décision finale prend la forme d’un arrêté d’accréditation, pris « le cas échéant après échange avec l’établissement concerné ».
Les représentants des établissements d’enseignement supérieur auditionnés par le rapporteur spécial ont alerté sur le caractère « bureaucratique » et « centralisé » de la procédure d’accréditation de l’offre de formation. Une meilleure maîtrise par les universités de leur offre de formation serait source de souplesse et de réactivité dans l’ouverture et la fermeture des cursus, afin de répondre aux besoins en compétences de l’économie aux niveaux national et territorial.
● La fixation des capacités d’accueil des établissements d’enseignement supérieur relève également de la compétence de l’État, par l’intermédiaire des rectorats de régions académiques. L’autorité académique fixe, chaque année, les capacités d’accueil des établissements « après dialogue » avec ceux-ci, en considérant trois critères ([60]) : les perspectives d’insertion professionnelle des formations, l’évolution des projets de formation exprimés par les candidats et le projet de formation et de recherche de l’établissement.
En pratique, la doctrine de fixation des capacités d’accueil relève avant tout du « bricolage », faute de « cadrage méthodologique » ([61]). Celles-ci sont établies par les rectorats en fonction des références historiques des effectifs inscrits et de la disponibilité effective des locaux universitaires, dont le nombre et la taille des salles de classe ou des amphithéâtres. La Cour des comptes relève ainsi que le taux de pression, mesuré en rapportant le nombre de candidats au nombre de places disponibles, constitue le « moteur principal de la discussion » entre les rectorats et les établissements ([62]). Les considérations académiques et stratégiques, telles que le nombre d’enseignants statutaires en mesure d’assurer les enseignements, les capacités d’insertion professionnelle à l’issue du diplôme et la cohérence de la formation avec le projet d’établissement, y occupent une place insuffisante.
Interrogée sur les modalités de fixation des capacités d’accueil, la DGESIP a reconnu que, « compte tenu de l’évolution démographique à la hausse depuis la génération née en 2000, l’enjeu de permettre de poursuivre leurs études aux élèves de terminale qui le souhaitent a pu être plus important dans certains territoires pour des filières de formation très demandées ». Selon la DGESIP, 31 094 places nettes ont été créées en licence sur la période 2018-2021 ([63]), financées par l’intermédiaire du programme 150 Formations supérieures et recherche universitaire de la MIRES et du programme 346 Cohésion de la mission Plan de relance. Les places supplémentaires ont été ouvertes en premier lieu dans les filières en tension, mobilisant des moyens budgétaires importants, à hauteur de 427,7 millions d’euros sur la période 2018-2022. Ces crédits ont été ventilés entre les places ouvertes au titre de la loi ORE (341,7 million d’euros) et les places ouvertes au titre du plan de relance (86 millions d’euros) selon les informations communiquées par la DGESIP dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2024.
Le rapporteur spécial est pleinement conscient de la nécessité de tenir compte du nombre de néo-bacheliers candidats sur Parcoursup dans la modulation des places ouvertes. Par ailleurs, comme l’a relevé France Universités dans ses réponses écrites, il peut être « réducteur de considérer que [la fixation des capacités d’accueil] ne relève que du taux de pression ». La détermination des capacités d’accueil est nécessairement articulée avec l’offre de formation, par exemple pour favoriser la poursuite d’études en master et en doctorat dans le même établissement ou sur le même territoire.
En revanche, une stratégie se bornant à créer de nouvelles places dans les établissements d’enseignement supérieur présente un risque de fuite en avant si elle n’est pas associée à un renforcement des perspectives de réussite des étudiants. Il serait dommageable et inutilement coûteux de chercher à satisfaire les demandes d’inscription des étudiants sans agir sur les déterminants de la réussite et sans répondre aux besoins en compétences aux niveaux national et régional.
2. Pour un acte II de l’autonomie des universités renforçant la maîtrise des établissements sur leur offre de formation et leurs capacités d’accueil
L’annonce par le Président de la République, le 7 décembre 2023, d’un acte II de l’autonomie des universités ouvre la voie à la consolidation des acquis de la loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités, dite LRU ([64]). Les prérogatives des établissements d’enseignement supérieur en matière de définition de l’offre de formation et de fixation des capacités d’accueil gagneraient à être renforcées à cette occasion.
Le rapporteur spécial accueille favorablement l’expérimentation de « nouvelles mesures d’autonomie » par neuf établissements pilotes, dont les contours ont été présentés par la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche le 26 mars 2024 ([65]). Celle-ci doit porter sur cinq thèmes prioritaires : la gouvernance ; l’offre de formation ; les finances ; le patrimoine immobilier et les ressources humaines. L’exercice devrait se dérouler entre juillet 2024 et juillet 2025, à l’issue d’une phase de cadrage associant les établissements et les services de l’IGÉSR.
L’expérimentation des « nouvelles mesures d’autonomie » pourrait utilement aborder le rééquilibrage, au bénéfice des établissements, des procédures administratives d’accréditation de l’offre de formation et de fixation des capacités d’accueil. Concrètement, une sélection d’établissements pilotes pourraient se voir attribuer, à titre expérimental, la compétence de fixer librement son offre de formation et de déterminer le nombre de places ouvertes dans chaque filière, sans solliciter l’autorisation préalable du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Le rapporteur spécial a pris connaissance avec intérêt des propositions de France Universités et d’Udice en la matière, estimant que le pilotage de l’offre de formation et des capacités d’accueil gagnerait, à terme, à satisfaire les conditions suivantes :
– l’offre de formation et les capacités d’accueil font l’objet d’une contractualisation entre l’État et l’université, qui donne lieu à l’actualisation des financements récurrents et à l’attribution de moyens additionnels ([66]) ;
– le rôle de la DGESIP et des rectorats est concentré sur la phase « amont », notamment pour définir les objectifs nationaux de formation initiale, et sur la phase « aval », par l’intermédiaire d’un contrôle a posteriori renforcé des politiques mises en œuvre (taux d’insertion professionnelle, cohérence de la carte régionale des formations, etc.) ;
– les intérêts et les droits des étudiants sont protégés, la fermeture d’une formation ne pouvant être effective avant que les étudiants engagés dans ce cursus ne se voient délivrer le diplôme correspondant.
La responsabilisation des établissements d’enseignement supérieur est de nature à renforcer l’adaptation des formations aux perspectives d’insertion professionnelle afférentes et aux besoins du tissu économique.
Recommandation n° 5
Intégrer la définition de l’offre de formation et la fixation des capacités d’accueil dans l’expérimentation relative à l’acte II de l’autonomie des universités, en supprimant la décision préalable des services de l’État (direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle, établissements d’enseignement supérieur).
C. PERSONNALISER LES PARCOURS D’ÉTUDES au bénéfice de l’autonomie des Étudiants
En cohérence avec l’esprit de la loi du 8 mars 2018 dite ORE, il convient de fluidifier les parcours des étudiants en leur permettant de suivre des formations « décalées » (1) et d’aménager leurs études au regard de leurs activités extra‑académiques (2).
1. La logique de semestrialisation de la licence
La loi du 8 mars 2018 dite ORE, qui prévoit notamment la conclusion d’un contrat pédagogique pour la réussite étudiante (CPRE) entre l’étudiant et la direction d’études de son établissement, a utilement renforcé les modalités de personnalisation des parcours des néo-bacheliers entrant en licence.
En complément de la mesure de la capitalisation des crédits ECTS recommandée supra, le rapporteur spécial préconise de développer la semestrialisation des cursus. Cette approche n’est pas inédite, dans la mesure où les établissements proposent d’ores et déjà des formations ad hoc aux étudiants en situation d’échec à la fin du premier semestre de L1. Tel est le cas du diplôme d’université « Tremplin – Réussite » mis en place en 2010 par l’Université de Strasbourg, qui permet aux étudiants de réintégrer un cursus universitaire après un semestre de remise à niveau, et des rentrées décalées proposées par de nombreux IUT, qui admettent des étudiants en réorientation dans une formation semestrielle intensive à partir des mois de janvier ou de février.
Ces initiatives visant à « semestrialiser » les formations gagneraient à être approfondies, d’autant que l’arrêté « licence » du 30 juillet 2018 se borne à préciser que « les parcours de licence sont organisés en semestres » et rappelle que l’offre de formation « comprend les dispositifs nécessaires de remédiation et de remise à niveau » ([67]).
Le rapporteur spécial a pris connaissance avec intérêt de la semestrialisation pratiquée par l’Université de Strasbourg dans l’unité de formation et de recherche (UFR) de mathématiques et d’informatique. Il est proposé aux étudiants en difficulté de valider leur premier semestre de L1 au printemps et non à l’automne, créant de fait un décalage de six mois par rapport une formation traditionnelle. Ce dispositif pourrait utilement inspirer d’autres établissements, bien que l’Université de Strasbourg ait précisé au rapporteur spécial que la plus-value de cette approche par rapport à un accompagnement classique de type « oui si » n’était pas pleinement démontrée. La semestrialisation est, par ailleurs, associée à des surcoûts de formation importants, les enseignements étant « doublés » pour être proposés à chaque semestre aux étudiants.
2. La conciliation des études et des contraintes ou projets extra‑académiques
Les engagements extra-académiques des étudiants ont une incidence sur la réussite des étudiants. Ces activités revêtent des formes très diverses, telles que l’emploi rémunéré, l’engagement associatif, la mission service civique ou encore le volontariat dans les armées. Elles peuvent contribuer à l’épanouissement personnel de l’étudiant, ainsi qu’à la construction de son projet professionnel. En revanche, ces engagements sont susceptibles de peser sur la réussite de l’étudiant s’ils entrent en concurrence avec ses obligations académiques.
● Parmi les activités extra-académiques répandues, le rapporteur spécial s’est intéressé en particulier aux situations de cumul de l’emploi et des études. Selon la dernière enquête de l’Observatoire national de la vie étudiante (OVE) ([68]), près de 40 % des étudiants ont exercé une activité rémunérée pendant l’année universitaire 2019‑2022, dont près de 8 % sous la forme d’une activité concurrente ou très concurrente des études – définie comme toute activité rémunérée non liée aux études, exercée au moins à mi-temps et respectivement moins ou plus de six mois par an. Par ailleurs, seuls 26 % d’un panel de 5 000 étudiants interrogés n’a jamais exercé d’activité rémunérée en parallèle de leurs études sur la période 2014-2016 ([69]). Dans ses réponses écrites, l’Union nationale des étudiants de France (UNEF) estime ainsi que « la précarité étudiante » et « le travail étudiant » comptent parmi les principaux facteurs d’échec à l’université.
L’emploi étudiant reflète et aggrave les inégalités sociales puisqu’il concerne davantage les étudiants les plus précaires : 6,1 % des étudiants issus des classes populaires, dont les parents sont ouvriers ou employés, exercent une activité rémunérée très concurrente des études, contre 4,2 % pour les étudiants dont les parents appartiennent à la catégorie des cadres et professions intellectuelles supérieures ([70]).
Les réalités du cumul entre l’emploi et les études sont très hétérogènes, les étudiants étant conduits à occuper, selon leurs motivations et leurs ressources, des emplois « alimentaires », c’est-à-dire des jobs étudiants dont la fonction est le financement des études et l’amélioration de leurs conditions de vie, soit des emplois « professionnalisants », qui ont un lien avec leur filière d’études. Moins complémentaire avec les études que l’emploi « professionnalisant », l’emploi « alimentaire » est susceptible de concurrencer les études.
De manière générale, l’emploi affecte les perspectives de réussite des étudiants à partir d’une certaine intensité, selon un modèle de courbe en « U inversé » : un emploi associé un faible volume horaire de travail serait bénéfique à la réussite étudiante, mais l’activité rémunérée devient préjudiciable à la réussite académique au-delà d’un seuil compris entre 8 heures et 16 heures hebdomadaires selon les études ([71]). Interrogée sur l’intensité des rythmes de travail, la DGESIP a répondu au rapporteur spécial ne pas avoir connaissance « de publications récentes concernant la durée hebdomadaire des emplois occupés par les étudiants ».
● Des dispositifs pour concilier les études et les engagements extra‑académiques des étudiants ont été mis en place. À titre d’exemple, la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dite Macron, instaure un congé supplémentaire non rémunéré pour la préparation des examens ([72]). Celui‑ci est ouvert aux étudiants salariés à hauteur de cinq jours ouvrables par tranche de soixante jours ouvrables travaillés et doit être pris dans le mois qui précède les examens.
En parallèle, un régime spécial d’études (RSE) a été instauré en 2014 afin que les établissements puissent aménager le déroulement des études de certaines catégories d’étudiants ([73]). Le dispositif s’applique aux étudiants chargés de famille, en situation de handicap ou salariés travaillant au moins 10 heures par semaine, auxquels il peut être proposé des aménagements tenant compte de la spécificité de leurs besoins ou des études suivies (modifications d’emploi du temps, dispense de contrôle continu, etc.). Ces dispositions ont été approfondies par la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté, qui fait obligation aux établissements de proposer aux étudiants éligibles qui le demandent des aménagements dans l’organisation de leurs études et de leurs examens ([74]).
La mise en place de dispositifs favorisant la conciliation des contraintes extra-académiques et des études constitue une avancée bienvenue, marquée toutefois par l’hétérogénéité des droits et aménagements reconnus entre les établissements. Ces derniers disposent d’une marge d’appréciation importante dans l’application des RSE, sous réserve de respecter « le cadre défini par la commission de la formation et de la vie universitaire du conseil académique » (CFVU) de l’université ([75]). Les syndicats étudiants entendus par le rapporteur spécial ont ainsi alerté sur l’absence de prises en compte, dans certains établissements de la situation particulière des étudiants engagés dans une formation artistique de haut niveau ou exerçant une activité de sapeur-pompier volontaire. De même, la nécessité pour les étudiants salariés de justifier d’une activité professionnelle « d’au moins 10 heures par semaine en moyenne » est jugée trop contraignante et restrictive.
Le rapporteur spécial prend acte du « travail d’accompagnement des établissements » annoncé par la DGESIP afin de tendre vers « l’harmonisation et la généralisation » des RSE. De manière complémentaire, la borne inférieure de 10 heures hebdomadaires d’activité rémunérée pourrait être abaissé afin de faciliter la mise en place d’aménagements. De nombreux étudiants exerçant une activité rémunérée ne sont pas éligibles au RSE dans la mesure où près de 48 % d’entre eux travaillent « occasionnellement », soit moins de 10 heures et 30 minutes par semaine selon la typologie des activités élaborée par l’OVE ([76]).
Lors de sa réunion de 21 heures, le mardi 21 mai 2024, la commission, réunie en commission d’évaluation des politiques publiques, a entendu M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur spécial des crédits de la mission Recherche et enseignement : Enseignement supérieur et vie étudiante, sur son rapport d’information sur l’évaluation de la réussite des étudiants en licence.
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur spécial (Enseignement supérieur et recherche). La réussite en licence témoigne de l’attention accordée par les pouvoirs publics à la formation et à l’épanouissement des jeunes générations. L’automne dernier, lors de l’examen du projet de loi de finances, j’avais alerté sur le ressentiment que créait notre système d’enseignement supérieur en orientant les lycéens vers des formations parfois sans débouchés ni perspectives. La réussite des étudiants en licence est également, en partie au moins, une affaire d’argent public. Le chiffrage des moyens alloués par l’État au cycle de licence est toutefois difficile à réaliser.
Deux indicateurs principaux permettent de mesurer où en est la France en termes de réussite des étudiants en licence : le taux d’obtention du diplôme en trois ou quatre ans, et le taux de passage en deuxième année de licence. Des réserves, que je partage, ont été exprimées, en particulier par les syndicats étudiants, sur cette approche que l’on pourrait dire normative, car elle valorise les trajectoires linéaires. Ce sont néanmoins les seules données statistiques objectives et comparables disponibles aujourd’hui.
À cette aune, peut-on dire que les étudiants réussissent en licence en France ? Insuffisamment, sans aucun doute. Réussissent-il mieux en licence qu’auparavant ? Oui ; la situation s’améliore depuis quelques années. Le taux de réussite en licence en trois ou quatre ans atteint près de 47 % pour les bacheliers entrés à l’université en 2018, dernière année pour laquelle les données de cohorte sont disponibles. C’est moins d’un étudiant sur deux, mais nettement mieux que les 41 % enregistrés pour les bacheliers de la session 2012. Le taux de passage en deuxième année de licence progresse également, passant de moins de 40 % pour les bacheliers de 2012 à 45,4 % pour ceux de 2018.
Cette amélioration est, pour partie, à mettre au crédit des réformes adoptées depuis 2017 sous l’impulsion de la majorité : la moitié des 4 points de hausse du taux de passage en deuxième année de licence enregistrés entre 2017 et 2018 est liée aux mesures de la loi du 8 mars 2018 relative à l’orientation et à la réussite des étudiants, dite loi ORE.
Je relève cependant une dégradation de cet indicateur depuis la crise sanitaire et, surtout, des disparités persistantes selon l’origine académique ou sociale des étudiants. Près de 15 points séparent le taux de réussite d’un étudiant dont l’origine sociale, évaluée à partir du profil de ses parents, est très favorisée, de celui d’un étudiant défavorisé. C’est énorme. Je me réjouis, en revanche, que le taux de réussite en trois ou quatre ans soit quasiment équivalent pour les étudiants boursiers et non boursiers, atteignant respectivement 46,8 % et 47,4 %. Notre système de bourses pour soutenir les étudiants les plus fragiles financièrement s’avère donc efficace. Les études statistiques menées en France révèlent un lien positif entre l’attribution d’une bourse et le taux de poursuite d’études dans le supérieur et d’obtention du diplôme.
Sur le plan de la comparaison internationale, ce taux de réussite en licence est légèrement inférieur à la moyenne de l’OCDE ; il est donc à améliorer. Il serait toutefois absurde de comparer nos résultats avec les près de 70 % obtenus par le Royaume-Uni, où la sélection très rigoureuse se fait autant à l’entrée de l’enseignement supérieur que sur l’argent. En France, il n’y a pas de sélection à l’entrée de l’université, à l’exception des filières dites en tension, comme les licences STAPS ou de psychologie ; pour ces formations, dans le cas précis où la demande excède les capacités d’accueil, l’établissement peut classer le dossier des candidats.
Il n’existe pas, à ce jour, de données sur le coût moyen annuel d’un étudiant inscrit en licence à l’université. La subvention pour charge de service public attribuée par l’État aux universités s’élève à 9 348 euros par étudiant et par an, mais tous grades universitaires confondus. Ce chiffre ne distingue pas les étudiants inscrits en licence de leurs camarades inscrits en master ou au-delà. Plus regrettable encore, il n’intègre pas les dépenses de vie étudiante du réseau des Crous, qui représentent pourtant des montants importants – les seules bourses sur critères sociaux s’élèvent à 2, 48 milliards d’euros en 2024. Il faut donc prendre le chiffre de 9 348 euros avec une certaine réserve méthodologique. Le ministère nous a indiqué ne pas disposer d’informations sur la ventilation des dépenses de bourses selon le niveau d’études des bénéficiaires, mais uniquement selon leur échelon. Je regrette cette absence d’information et m’étonne d’autant plus de l’absence de remontée d’informations sur le sujet de la part des Crous.
Le caractère incomplet des données sur l’effort budgétaire de l’État ne permet pas de piloter au mieux la dépense publique et de soutenir efficacement les principaux concernés. Nous ne sommes pas en mesure d’évaluer l’incidence qu’aurait 1 euro d’argent public en plus ou en moins sur la réussite d’un étudiant en licence. Le ministère de l’enseignement supérieur et la recherche devrait s’engager dans la voie d’une meilleure évaluation.
Avec les moyens dont nous disposons à la commission des finances, nous avons essayé d’évaluer, avec prudence, le coût budgétaire de l’échec en licence. En se fondant sur les 33 000 sorties précoces en première année de licence, ce coût représenterait annuellement pour l’État 308 millions d’euros – plus, en réalité, car les décrochages postérieurs à la première année de licence et d’autres dépenses relatives à la vie étudiante ne sont pas pris en compte. Augmenté du coût de la bourse versée aux 14 400 boursiers faisant partie de ces sorties précoces, soit 42 millions d’euros annuels, le coût de l’échec en licence pourrait être estimé à 350 millions d’euros annuels, et il y a fort à parier que ce chiffre est minoré. Une mission plus longue et des outils budgétaires plus performants permettraient d’aboutir à une estimation plus juste.
Il est ressorti de plusieurs auditions que la massification de l’enseignement supérieur appelait une réflexion sur la valeur et le sens à donner au baccalauréat. Constatant que le taux de réussite des étudiants inscrits dans les IUT, qui sont des formations universitaires sélectives, avoisine les 80 %, offrir une place à l’université à tous les bacheliers qui le souhaitent, alors qu’ils sont souvent mal préparés et mal orientés, paraît une stratégie inefficace et, à mon sens, hypocrite compte tenu du fonctionnement implicite de notre société. À quoi bon atteindre 80 % de bacheliers dans une génération, si plus d’un étudiant sur deux échoue en première année de licence ? Il est indispensable de rehausser le niveau d’exigence des enseignements au lycée et de l’examen du baccalauréat.
Je pense aussi qu’il y aurait matière à réfléchir sur la question de la réussite en licence dans le cadre de l’acte II de l’autonomie des universités annoncé par le Président de la République. Quelques établissements pilotes ont déjà commencé à y travailler. Le ministère aurait-il des informations à nous communiquer sur le sujet ?
Enfin, plusieurs auditionnés ont évoqué l’intérêt de passer à une logique de semestrialisation des parcours, alors que nous sommes encore dans une logique très annuelle. Qu’en pense le ministère ?
Mme Sylvie Retailleau, ministre. La définition actuelle de la réussite en licence correspond à la réussite au diplôme dans lequel l’étudiant est inscrit, dans le temps prévu plus une année. En 2022, on calcule ainsi un taux de réussite en trois ou quatre ans de 49 %, chiffre qui fait généralement voir la licence comme un diplôme au fort taux d’échec. Toutefois, cette image mérite d’être nuancée, car le suivi d’un parcours de licence en trois ou quatre années ne permet pas, à lui seul, de résumer la notion de réussite ou d’échec.
La définition de la réussite étudiante doit être réinterrogée. Le parcours de formation des étudiants dans le supérieur est aujourd’hui ponctué de réorientations et l’acquisition de compétences se fait par des approches plus diverses qu’auparavant. Les étudiants peuvent bénéficier d’équivalences et de passerelles entre formations, commencer à étudier une année dans un diplôme puis rebondir l’année suivante pour préparer un autre diplôme, comme dans tous les pays du monde. Peut-on parler d’échec lorsqu’un étudiant est réorienté dans un autre diplôme et qu’il l’obtient ?
On peut estimer que c’est la sortie du système éducatif sans aucun diplôme in fine qui est réellement synonyme d’échec. Or le taux de sortie sans diplôme des inscrits en licence ou en équivalent dit bachelor, c’est-à-dire trois ans supplémentaires après la licence, est de 22 %. D’après les données de l’OCDE de 2022, le système d’enseignement supérieur français fait donc réussir 78 % des étudiants, alors que la moyenne de l’OCDE se situe un peu en dessous, à 76,5 %.
Plusieurs autres indicateurs peuvent aider à recontextualiser le taux de réussite des étudiants en licence à l’université. La moyenne de l’OCDE pour le taux d’étudiants qui obtiennent leur diplôme de premier cycle dans le délai prévu est de 39 %. Avec 37 %, la France atteint quasiment cette moyenne. Pour comparer avec les pays qui nous ressemblent, cette moyenne est de 21 % en Belgique et en Italie, 37 % en Espagne, 34 % en Suède et 47 % au Canada.
Je rappelle que la structure du premier cycle est très spécifique en France, car le diplôme national de licence n’y est majoritairement pas sélectif. L’université accueille tous les jeunes qui, ayant obtenu un baccalauréat général, technologique ou professionnel, souhaitent s’y inscrire. Le public accueilli en licence à l’université est donc composé de jeunes aux parcours et aux niveaux très différents. Les meilleurs étudiants partent généralement dans les filières sélectives, comme les CPGE, les bachelors universitaires de technologie (BUT), même professionnalisants, ou les doubles licences à l’université. En Angleterre, pour reprendre cet exemple, les formations post-bac équivalentes à la licence sélectionnent leurs étudiants. Le taux de réussite du système sélectif anglais est de 68 %, contre 80 % pour une filière universitaire sélective française comme les DUT. En outre, on constate que les meilleurs bacheliers français – ceux qui ont obtenu une mention très bien et qui seraient potentiellement sélectionnés si l’université française était sélective – ont un taux de réussite en licence de 79 %, ce qui est bien supérieur au taux britannique. À formation égale et à profil étudiant similaire, nous faisons donc au moins aussi bien, sinon mieux, réussir nos étudiants.
Les taux de réussite en licence ne sont donc pas le reflet d’une mauvaise qualité de la formation, mais le résultat de la dévalorisation de la licence face aux filières sélectives, qui aboutit à une concentration dans cette filière d’un public refusé dans les filières sélectives. L’université, par de multiples dispositifs – année rebond, passeport pour réussir et s’orienter (Paréo), passerelles –, aide l’étudiant qu’elle accueille et lui permet de réussir dans une filière mieux adaptée à son profil et à son projet.
Le taux de réussite en licence en trois ou quatre ans est un indicateur indispensable qui gagnerait à être complété par d’autres éléments pour affiner l’analyse. D’abord, le contexte d’accès à la formation : l’entrée en première année s’est-elle effectuée avec un « oui si », ou après une formation Paréo, une passerelle ou une réorientation ? Autre critère essentiel, la corrélation entre la présence aux examens et la réussite : le taux de passage de la L1 à la L2 des étudiants présents aux examens est supérieur de 16 points à celui du total des étudiants inscrits – l’université fait réussir les étudiants lorsqu’ils sont assidus.
Pour améliorer la réussite et éviter que des jeunes ne s’inscrivent en licence faute de mieux, nous menons un travail d’accueil et d’orientation afin que chaque jeune qui arrive dans le supérieur trouve une place dans la formation qui convient le mieux à son profil. Priorité a donc été donnée aux bacheliers technologiques et professionnels pour l’accès, respectivement, aux BUT et aux BTS. Entre 2013 et 2021, la part des bacheliers technologiques en IUT a augmenté de 11,4 points et celle des bacheliers professionnels en BTS a augmenté de 7 points. Le nombre de jeunes issus de la voie technologique ou professionnelle inscrits en licence par défaut a ainsi diminué.
L’adéquation de l’orientation au profil passe aussi par la mise en place de politiques d’accompagnement et de soutien personnalisé dans les établissements. La loi ORE a permis de mettre l’accent sur l’accueil et l’individualisation des parcours en fonction du profil des étudiants : en 2023, 26 000 étudiants ont accepté une proposition d’admission avec un aménagement de licence pour les accompagner vers la réussite. Depuis cette loi, le taux de passage en deuxième année de licence progresse de façon continue.
La réussite est toujours fortement liée aux caractéristiques sociales et scolaires des étudiants. Le taux de passage des étudiants en L2 varie de presque 20 points en fonction du milieu social, de plus de 35 points en fonction du baccalauréat obtenu – général, technologique ou professionnel – et de plus de 26 points en fonction de la mention obtenue au bac.
La réussite en licence est en hausse malgré une augmentation démographique importante entre 2010 et 2022 : le nombre d’étudiants inscrits est passé de 572 000 à 714 000 sur cette période, soit plus de 142 000 étudiants supplémentaires, et le taux de passage en deuxième année a augmenté de 10 points entre 2017 et 2021. Cette augmentation est en partie due à un meilleur travail sur l’orientation des étudiants titulaires d’un baccalauréat technologique ou professionnel dans les formations mieux adaptées à leur cursus, où ces étudiants réussissent beaucoup plus qu’en licence générale : en 2018, 57,8 % des bacheliers technologiques réussissaient leur première année de DUT et 76,4 % leur première année de BTS, tandis que le taux de passage en L2 n’était que de 15 %.
Ces différents taux de réussite ou de passage dans l’année supérieure recouvrent une grande variété de parcours de formation, avec des trajectoires particulières et des situations diverses, qui soulignent le rôle de la licence générale dans le processus d’orientation et de réorientation pour un grand nombre d’étudiants. Nous devons continuer à améliorer l’orientation des élèves en amont du supérieur, prendre en compte les parcours non linéaires et développer la formation tout au long de la vie pour permettre durablement la réussite des étudiants.
M. le président Éric Coquerel. Je vous remercie, monsieur le rapporteur, pour les chiffres que vous avez présentés et pour les précautions méthodologiques dont vous les entourez ; ils sont une base de travail, même si nous n’en tirons pas les mêmes conclusions.
Les chiffres indiquent une augmentation mesurée et sensible du taux d’obtention du diplôme et de passage en deuxième année, mais celui-ci varie de manière très importante selon le niveau social. Plus qu’un progrès, que vous attribuez à Parcoursup, je vois là une augmentation manifeste de la sélection et du tri social. Seuls 10,9 % des étudiants du supérieur sont issus des classes ouvrières, et l’Institut des politiques publiques (IPP) a montré que les enfants issus de familles défavorisées avaient cinq fois moins de chances d’obtenir un diplôme du supérieur que ceux des familles très favorisées. De fait, la France figure parmi les pays développés où la mobilité intergénérationnelle est la plus faible.
Vous appelez à se garder des mirages et à instaurer davantage de sélection ; je n’emprunterai pas cette voie. Je reconnais toutefois la nécessité de revaloriser l’enseignement professionnel dès le lycée et de développer les études post-bac de courte durée, du type BTS. Je crois surtout qu’il faut mettre les moyens pour que les bacheliers puissent aller à l’université. Je regarde donc les chiffres avec inquiétude : par rapport à ceux dont je dispose – 10 270 euros par étudiant en 2021 et 12 050 euros en 2013 –, les 9 348 euros annuels par étudiant, tous niveaux confondus, indiquent une dégradation continue. Or la baisse des moyens a toujours des conséquences plus fortes pour les enfants des classes défavorisées, qui travaillent souvent en parallèle de leurs études. Selon moi, l’attention doit se porter sur cette question plutôt que sur une sélection accrue.
Mme Sylvie Retailleau, ministre. La répartition des boursiers par niveau de formation, et en particulier la part des boursiers inscrits en licence, est disponible sur le site du Systèmes d’information et d’études statistiques (SIES).
Le taux de réussite des bacheliers professionnels et technologiques ne s’est pas dégradé ; il est moins bon que celui des bacheliers généraux, mais on constate une amélioration globale du taux de passage de L1 en L2 et du taux de réussite au diplôme. Néanmoins, les bacheliers technologiques et professionnels, lorsqu’ils sont orientés en BTS ou en DUT, réussissent bien mieux qu’en licence classique où leur taux de réussite est extrêmement faible, au point que l’on peut dire que ce n’est pas une question de moyens. Ces étudiants ont, à l’instant T, un profil différent, et leur taux de réussite est bien meilleur lorsqu’ils suivent une formation plus adaptée à leurs prérequis. C’est la raison pour laquelle je suis favorable aux passerelles : quand on a 18 ou 19 ans, perdre un an pour suivre un parcours plus adapté permet de mieux réussir par la suite.
M. le président Éric Coquerel. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.
M. Alexandre Sabatou (RN). L’article L. 123-2 du code de l’éducation dispose que la mission du service public de l’enseignement supérieur est « la réussite de toutes les étudiantes et de tous les étudiants ». Pourtant, le taux de réussite en trois ans des étudiants en licence s’élève à seulement 36 %. Si l’on y ajoute les étudiants qui réussissent en quatre ans, ils sont moins de la moitié à obtenir leur diplôme. Nous sommes bien loin de l’objectif affiché d’une réussite générale des étudiants. Plus encore, le taux de réussite en France est inférieur à la moyenne de l’OCDE. Ces résultats ne sont pas à la hauteur d’un pays comme le nôtre. Visiblement, le problème tient à l’orientation des élèves et des étudiants du fait de politiques dont l’inefficacité aboutit au gaspillage de l’argent public.
Ne faudrait-il pas adopter un système plus sélectif, comme celui qui existe en Grande‑Bretagne ? Cela rendrait service aux étudiants qui, mieux orientés, éviteraient de perdre du temps, et permettrait également d’utiliser plus efficacement les deniers publics, voire de revaloriser les bourses pour les étudiants des classes populaires.
À propos des classes populaires, n’oublions pas les lycéens qui en sont issus et qui ne font pas du tout d’études supérieures, faute de moyens. Avec plus de bourses, ils pourraient y accéder et contribuer à un meilleur taux de réussite de cette catégorie sociale.
Mme Sylvie Retailleau, ministre. Il est contradictoire d’appeler à rapprocher notre système du système anglais tout en souhaitant que plus d’étudiants des classes sociales défavorisées accèdent à l’enseignement supérieur. En Grande-Bretagne, la sélection se fait aussi par l’argent ; nous ne souhaitons pas adopter ce modèle.
La priorité donnée à la réussite en premier cycle s’est traduite dans la loi ORE, qui visait à adapter les parcours au profil des étudiants. La création des BUT en remplacement des DUT est ainsi née du constat que plus de 85 % des étudiants de DUT poursuivaient leurs études. La nouveauté des BUT, qui sont des diplômes obtenus en trois ans, c’est qu’ils ouvrent aussi bien une voie d’insertion dans le milieu professionnel, pour répondre aux besoins en techniciens supérieurs, qu’une voie de poursuite d’études. En conséquence, les chiffres augmentent de façon non négligeable : le taux de réussite en trois ans a augmenté de 7 points.
Au total, nous avons revu les objectifs des formations et travaillé, en partenariat avec le ministère de l’éducation nationale, à améliorer l’orientation et à proposer des passerelles adaptées aux parcours non linéaires des étudiants. Je crois beaucoup à la formation tout au long de la vie : au lieu de viser l’obtention d’un master ou d’un diplôme d’ingénieur en cinq ans, nous devons inciter les étudiants à sortir des études au niveau bac ou bac+3 en leur permettant de revenir, après trois à cinq ans d’expérience professionnelle, pour obtenir un diplôme supérieur par la validation des acquis de l’expérience ou par des compléments de diplôme.
Mme Véronique Louwagie (LR). Vous avez tempéré l’échec en creux que le taux de 49 % de réussite en licence représente en précisant que seulement 22 % des étudiants sortaient sans diplôme. C’est encore beaucoup – près d’un étudiant sur quatre –, même si les autres pays de l’OCDE font moins bien. Derrière les décrochages, il y a la question de l’orientation, on l’a vu, mais n’y a-t-il pas aussi un problème d’impréparation à l’environnement universitaire, complètement différent de celui du lycée ?
Si je partage votre point de vue concernant la formation continue, il me semble difficile de faire passer les jeunes dans le monde de l’entreprise immédiatement après le baccalauréat. Cette formation très générale ne correspond pas aux attentes des entreprises.
Mme Sylvie Retailleau, ministre. Je pensais moins aux bacheliers généraux qu’aux bacheliers professionnels, pour lesquels nous avons créé des diplômes bac+1 au sein des lycées et des universités, pour faciliter le passage vers les entreprises grâce à un accompagnement et à l’acquisition de compétences supplémentaires. Plusieurs formations de ce type ont été créées.
Je suis d’accord pour dire que l’orientation va de pair avec la préparation. Le diplôme universitaire (DU) Paréo est ainsi une année transitoire qui sert à formaliser le projet professionnel de l’étudiant, car un étudiant qui sait ce qu’il veut faire a déjà effectué 70 % du chemin vers la réussite. À 18 ans, beaucoup d’étudiants ne savent pas pourquoi ils sont là, soit parce qu’ils n’ont pas eu le choix, soit parce qu’ils n’ont pas la maturité nécessaire ; nous devons les aider à construire leur projet. L’année Paréo leur enseigne une méthodologie de travail qui leur permet d’atteindre l’autonomie, mais aussi d’affiner leur futur projet, que ce soit à l’université, en DUT, en BTS ou ailleurs – j’ai rencontré des étudiants qui s’étaient orientés vers des professions comme celle de verrier et qui en étaient très heureux.
M. Emmanuel Mandon (Dem). Depuis 2018, la loi pose le principe que l’évaluation des étudiants en fin de licence doit porter non plus sur les connaissances, mais sur les compétences acquises. Certaines universités ont défini des programmes qui permettent une approche par les compétences – je pense au modèle de formation expérimentale Prélude proposé conjointement par l’Université polytechnique de Valenciennes et par l’Université catholique de Lille. Que comptez-vous faire pour encourager ce mouvement ?
Dans quelle mesure peut-on apprécier le lien entre la qualité de la formation en licence et l’insertion dans la formation en master ? Est-il possible d’établir un lien, dès l’étape de la licence, entre la qualité de la formation sanctionnée par ce diplôme et la formation professionnelle ? L’évaluation finale ne doit-elle pas s’accompagner d’une évaluation en cours d’études de la qualité de la maîtrise de l’expression écrite et orale, qui pose parfois problème ?
Mme Sylvie Retailleau, ministre. Certaines universités qui ont répondu à l’appel à projets sur les nouveaux cursus universitaires (NCU) ont développé une approche par compétences. Celle-ci se fait à plusieurs niveaux : d’une part, en définissant la formation en blocs de compétences ; d’autre part, en fixant le mode d’évaluation de ces compétences. Cette deuxième étape est encore peu développée, même dans les formations définies par blocs de compétences. Nous devons y travailler à l’échelle des formations plutôt que des établissements.
L’évaluation des compétences et celle des connaissances ne sont pas antinomiques. Nous devons continuer de travailler à tous les niveaux, en premier cycle comme en master, pour les développer.
Mme Fatiha Keloua Hachi (SOC). Monsieur le rapporteur, la troisième partie de votre rapport d’information présente le renforcement des conditions de la réussite étudiante comme reposant en priorité sur des leviers académiques. Je partage l’idée que la réussite se prépare en amont. Elle est, selon nous, le fruit d’un continuum de bac–3 à bac+3. Il est donc nécessaire de l’appréhender dès le lycée pour favoriser l’orientation et la réussite de tous les étudiants.
Je partage également la nécessité d’encourager l’orientation des lycéens vers des formations courtes et professionnalisantes. À cet égard, les modèles scandinaves pourraient être utiles à notre trajectoire d’enseignement supérieur professionnel. L’ouverture de crédits dédiés à la professionnalisation doit être un premier pas vers la valorisation de celle-ci. La vocation initiale des formations professionnelles est actuellement détournée par les étudiants en mal d’orientation, qui se dirigent vers celles-ci par défaut pour ensuite poursuivre en master.
Pourriez-vous indiquer à quels dispositifs concrets vous pensez lorsque vous parlez de redonner sa valeur au baccalauréat ? Quelle place voyez-vous pour les formations professionnalisantes dans le système actuel de l’enseignement supérieur ?
Mme Sylvie Retailleau, ministre. Je suis évidemment d’accord avec l’idée que toutes les formations, en particulier les formations professionnalisantes, ont trop longtemps été choisies par défaut, à tous les niveaux. En master, ou plutôt en licence pro, ou anciennement en DUT, on a observé un certain détournement, cette dernière filière en particulier, puisqu’elle est sélective, étant davantage utilisée comme poursuite d’études que comme formation des techniciens dont nous avions besoin.
Une revalorisation s’impose donc à tous les niveaux. Bac pro ou licences pro doivent offrir, non seulement une insertion professionnelle, mais aussi une possibilité de se projeter dans des évolutions de carrière en revenant acquérir des compétences, par exemple par validation des acquis de l’expérience. Il faut développer de telles possibilités en complément de l’orientation. Mais il faut aussi des passerelles permettant des remises à niveau et des années de transition permettant d’ajuster les prérequis à la poursuite d’études.
Nous vivons à une époque où nous devons gérer, voire valoriser, les parcours non linéaires, valoriser l’insertion et permettre le retour aux études et l’acquisition de connaissances et de compétences.
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur spécial. Je remercie ma collègue socialiste d’avoir abordé ce thème, qui était le message principal que je souhaitais exprimer dans le cadre de ce travail d’évaluation. Après avoir procédé à une dizaine d’auditions sur ce sujet, j’ai la conviction que les problèmes d’orientation et d’échec que nous avons à traiter au moment de la licence tiennent à tous ceux qui n’ont pas été traités ou qui l’ont mal été auparavant, en particulier au lycée.
C’est la raison pour laquelle j’ai souhaité que nous parlions aussi du baccalauréat. À titre personnel, je pense que le modèle que la France a adopté depuis une trentaine d’années, avec pour objectif « 80 % d’une classe d’âge au bac », selon la fameuse formule de Lionel Jospin en son temps, a aussi de nombreux effets néfastes. La société française s’est en quelque sorte acheté une bonne conscience en donnant à quasiment tout le monde le bac et la possibilité d’entrer à l’université, mais c’est au prix d’importants dégâts, car un très grand nombre de jeunes vont à l’université en n’ayant pas le niveau pour y être – je l’ai entendu dire par des présidents d’université – ou en n’étant pas au bon endroit. Tout cela a des incidences budgétaires mais, à la limite, si ce n’était que cela, ce ne serait pas très grave. Or cela a aussi des incidences psychologiques et sociales déplorables pour la société française.
J’ai observé des progrès depuis quelques années, avec des dispositifs inventés notamment par les présidents d’université depuis la loi ORE. On sait un peu mieux appliquer des traitements individualisés en licence et offrir des parcours adaptés à des étudiants en difficulté. Reste cependant une donnée structurelle : des étudiants qui ont le baccalauréat peuvent facialement entrer à l’université, sans que l’on sache pour autant où ils vont aller. Il y a quelque chose d’hypocrite dans ce système.
Si nous voulons vraiment nous efforcer de résoudre le problème pour qu’un plus grand nombre de jeunes soient mieux orientés et se sentent mieux, sans perdre leur temps dans des formations qui les découragent et les rendent malheureux, nous allons devoir nous interroger sur la manière dont fonctionnent le lycée et le baccalauréat depuis trente ans.
Peut-être va-t-il falloir rendre le baccalauréat un peu plus difficile, et c’est du reste le sens de certaines des annonces faites par le ministère de l’éducation, qui envisage de ne plus apporter de correctifs aux notes, c’est-à-dire de ne plus donner le bac à des gens qui ne l’ont pas obtenu à l’examen. Nous pourrons avoir à ce sujet un beau débat dans la suite de la législature, mais je n’exprime ici qu’un avis personnel.
La commission autorise, en application de l'article 146 alinéa 3 du Règlement de l’Assemblée nationale, la publication du rapport d’information de M. Charles Sitzenstuhl..
PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL
France Universités*
– M. Guillaume Gellé, président ;
– M. Kévin Neuville, conseiller chargé des relations institutionnelles et parlementaires ;
– M. Antoine Guery, chargé de mission pour les relations institutionnelles et parlementaires.
Table ronde des organisations étudiantes représentées au conseil d’administration du CNOUS
Fédération des associations générales étudiantes (FAGE)*
– Mme Maëlle Nizan, présidente ;
– Mme Carla Sardellitti, vice‑présidente chargée des affaires académiques.
Union nationale des étudiants de France (UNEF)*
– M. Arthur Sabatier, délégué général ;
– Mme Clara Privé, membre du bureau national.
Union étudiante
– Mme Emmy Marc, secrétaire fédérale ;
– Mme Livia Jampy, membre de l'équipe nationale.
Direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche
– Mme Anne-Sophie Barthez, directrice générale ;
– Mme Laure Vagner-Shaw, adjointe à la direction générale, cheffe du service de la stratégie des formations et de la vie étudiante ;
– M. Géraud de Marcillac, chef du service de la stratégie de contractualisation, du financement et de l’immobilier ;
– M. Philippe Burdet, sous-directeur du financement de l’enseignement supérieur.
École normale supérieure Paris-Saclay
– Mme Nathalie Carrasco, présidente ;
– Mme Anne Peyroche, vice-présidente chargée de la stratégie et des moyens.
Udice
– M. Michel Deneken, président ;
– Mme Anne-Isabelle Bischoff, déléguée générale ;
– Raphaëlle Viallet, responsable des études.
* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.
Annexe : FINANCEMENT DES DISPOSITIFS « OUI SI » en 2023
(en millions d’euros)
Établissement bénéficiaire |
SCSP attribuée aux titre des dispositifs « oui si » |
Aix-Marseille |
1,42 |
Lille |
1,37 |
Lorraine |
1,36 |
Lyon I |
1,35 |
Grenoble Alpes |
1,12 |
Bordeaux III |
1,07 |
Paris I |
0,96 |
Strasbourg |
0,95 |
Amiens |
0,95 |
Nantes |
0,92 |
Paris-Saclay |
0,92 |
Toulouse III |
0,90 |
Rouen |
0,87 |
Paris Cité |
0,82 |
Montpellier |
0,81 |
Clermont Auvergne |
0,80 |
Caen |
0,80 |
Montpellier III |
0,80 |
Rennes I |
0,73 |
Gustave Eiffel |
0,67 |
Saint-Étienne |
0,64 |
Paris XIII |
0,63 |
La Réunion |
0,62 |
Savoie Mont-Blanc |
0,62 |
Dijon |
0,61 |
Reims |
0,60 |
Le Mans |
0,59 |
Lyon III |
0,57 |
CY Cergy Paris Université |
0,56 |
Poitiers |
0,56 |
Côte d’Azur |
0,53 |
Rennes II |
0,52 |
Paris X |
0,51 |
Pau |
0,51 |
Tours |
0,47 |
Bordeaux |
0,46 |
Limoges |
0,46 |
Paris XIII |
0,46 |
Bretagne Occidentale |
0,44 |
La Rochelle |
0,42 |
Le Havre |
0,41 |
Angers |
0,41 |
Bretagne Sud |
0,41 |
Versailles-Saint-Quentin |
0,39 |
Perpignan |
0,39 |
Avignon |
0,39 |
Nîmes |
0,38 |
Besançon |
0,37 |
INALCO |
0,36 |
Orléans |
0,36 |
Mulhouse |
0,31 |
Université Polytechnique Hauts-de-France |
0,30 |
Institut national universitaire Jean-François Champollion |
0,30 |
Lyon III |
0,29 |
Antilles |
0,29 |
Évry-Val d’Essonne |
0,28 |
Paris VIII |
0,27 |
Artois |
0,26 |
Littoral |
0,25 |
INSA Toulouse |
0,22 |
Paris III |
0,21 |
Guyane |
0,19 |
Toulouse II |
0,18 |
Toulon |
0,13 |
Polynésie française |
0,12 |
Sorbonne Université |
0,11 |
Nouvelle-Calédonie |
0,08 |
Toulouse I |
0,07 |
CUFR Mayotte |
0,04 |
Paris Panthéon-Assas |
0,03 |
Corse |
0,02 |
Total des crédits en 2023 |
38,21 |
Source : commission des finances, d’après les réponses écrites de la DGESIP.
([1]) La population prise en compte est composée des étudiants s’inscrivant pour la première fois en première année de licence à l’université, hors sections de technicien supérieur (STS), bachelor universitaires de technologie (BUT) et classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE).
([2]) Voir en ce sens la dernière publication du SIES sur la réussite en licence : ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, Parcours et réussite en licence : les résultats de la session 2022, note flash du SIES, n° 26, novembre 2023.
([3]) Article D. 612-32-5 du code de l’éducation.
([4]) OCDE, Regards sur l’éducation 2022, novembre 2022, p. 223.
([5]) I de l’article D. 612-1-14 du code de l’éducation.
([6]) Loi n° 2018-166 du 8 mars 2018 relative à l’orientation et à la réussite des étudiants.
([7]) Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, Réussite et assiduité en 1ère année de licence : impact de la loi ORE, nouveaux indicateurs, note d’information du SIES, n° 20.16, octobre 2020, p. 8.
([8]) Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, Parcours et réussite en licence : les résultats de la session 2022, note flash du SIES, n° 26, novembre 2023.
([9]) Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, Parcours et réussite en DUT : les résultats de la session 2022, note flash du SIES, n° 27, novembre 2023.
([10]) OCDE, Regards sur l’éducation 2022, novembre 2022, p. 226.
([11]) IV de l’article L. 612-3 du code de l’éducation.
([12]) Selon le comité éthique et scientifique de Parcoursup, en 2021, près de 1 200 licences non sélectives représentant 19 % des places offertes à l’entrée dans l’enseignement supérieur étaient en tension. Parmi ces formations qualifiées « d’attractives », la moitié étaient des parcours accès spécifique santé (PASS), des licences avec option « accès santé » (LAS), des licences de sciences et techniques des activités physiques et sportives (STAPS) ou des licences de psychologie (5e rapport annuel au Parlement, février 2023, p. 41).
([13]) Jean-Michel Jolion, Concertation sur la vie étudiante : conditions de vie, conditions d’études, conditions de réussite, rapport remis à Sylvie Retailleau, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, juin 2023, p. 60.
([14]) Réponses écrites d’Udice.
([15]) Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, Les bacheliers 2014 entrés dans l’enseignement supérieur : où en sont-ils à la rentrée 2020 ?, note d’information du SIES, n° 20.02, janvier 2022.
([16]) Décret n° 2002-482 du 8 avril 2002 portant application au système français d’enseignement supérieur de la construction de l’Espace européen de l’enseignement supérieur.
([17]) Articles 2 et 8 de l’arrêté du 30 juillet 2018 relatif au diplôme national de licence.
([18]) IGÉSR, Mesure de la réussite étudiante en licence au regard de la mise en œuvre de la loi ORE. Une approche par les crédits ECTS – Volet 2, n° 78, avril 2021, p. 7.
([19]) IGÉSR, Mesure de la réussite étudiante en licence au regard de la mise en œuvre de la loi ORE. Une approche par les crédits ECTS – Volet 1, n° 4, janvier 2021, p. 4.
([20]) IGÉSR, Mesure de la réussite étudiante en licence au regard de la mise en œuvre de la loi ORE. Une approche par les crédits ECTS – Volet 1, n° 4, janvier 2021, p. 18.
([21]) Article 5 de l’arrêté du 30 juillet 2018 relatif au diplôme national de licence.
([22]) Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, Parcours et réussite en licence : les résultats de la session 2022, note flash du SIES, n° 26, novembre 2023 (annexe « tableaux nationaux »).
([23]) Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, Réussite et assiduité en 1ère année de licence : impact de la loi ORE, nouveaux indicateurs, note d’information du SIES, n° 20.16, octobre 2020, p. 4.
([24]) OCDE, Regards sur l’éducation 2022, novembre 2022, p. 226.
([25]) Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, Effectifs universitaires en 2022-2023, note flash du SIES, n° 2023-06, juin 2023.
([26]) Commission européenne, Dropout and Completion in Higher Education in Europe. Main report, décembre 2015, p. 18-19.
([27]) Higher Education Statistics Agency (HESA), Higher Education Student Statistics, Statistical Bulletin SB265, janvier 2023.
([28]) L’origine sociale du bachelier fait référence à la profession ou à la catégorie socio-professionnelle (PCS) des parents, qui s’insère dans une nomenclature élaborée par le ministère de l’éducation nationale : origine très favorisée ; origine favorisée ; origine assez défavorisée ; origine défavorisée.
([29]) Le IV de l’article L. 612-3 du code de l’éducation dispose que, pour l’accès aux formations du premier cycle, « lorsque le nombre de candidatures excède les capacités d’accueil d’une formation, les inscriptions sont prononcées par le président ou le directeur de l’établissement dans la limite des capacités d’accueil, au regard de la cohérence entre, d’une part, le projet de formation du candidat, les acquis de sa formation antérieure et ses compétences et, d’autre part, les caractéristiques de la formation. ».
([30]) Institut CSA et ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, Baromètre – Parcoursup 2023, octobre 2023.
([31]) Le IV de l’article L. 612-3 du code de l’éducation dispose que l’inscription d’un candidat peut « être subordonnée à l’acceptation, par ce dernier, du bénéfice des dispositifs d’accompagnement pédagogique ou du parcours de formation personnalisé proposés par l’établissement pour favoriser sa réussite ».
([32]) Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, Parcours des étudiants suivant un aménagement loi ORE, note d’information du SIES, n° 21.03, avril 2021, p. 5.
([33]) L’étude de Gabrielle Fack et Julien Grenet, publiée en 2013, est réalisée sur une cohorte composée de boursiers appartenant aux échelons 0 et 1. L’échelon 0 ouvrait droit à l’exonération des droits d’inscription dans le supérieur et l’échelon 1 ouvrait droit à l’attribution d’une bourse annuelle de 1 525 euros au cours de l’année universitaire 2010-2011.
([34]) Fack et Grenet, Improving College Access and Success for Low-Income Students: Evidence from a Large Need-based Grant Program, PSE Working Papers, n° 2013-33, 2013.
([35]) Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, La réussite des étudiants selon les difficultés financières et la perception d’une allocation, note d’information du SIES, n° 14.05, juillet 2014, p. 5.
([36]) Rapport annuel de performances (RAP) du programme 231 Vie étudiante, annexé au projet de loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l’année 2023, p. 37.
([37]) La première phase de la réforme des bourses, effective depuis la rentrée 2023, représente un effort budgétaire supplémentaire de 440,6 millions d’euros et repose sur trois piliers : augmentation de 6 % des plafonds de ressources ; revalorisation de 37 euros par mois du montant des bourses versées ; mesures complémentaires ciblées, au bénéfice des étudiants boursiers qui suivent leurs études en outre‑mer et des étudiants en situation de handicap.
([38]) Annexe 4 – Organisation des droits à bourse et conditions de maintien (point 1.1) de la circulaire du 17 juillet 2023 relative aux bourses d’enseignement supérieur sur critères sociaux, des aides au mérite et des aides à la mobilité pour l’année 2023-2024, Bulletin officiel de l’enseignement supérieur et de la recherche n° 29 du 20 juillet 2023.
([39]) Ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse, 169 milliards d’euros consacrés à l’éducation en 2021 : 6,8 % du PIB, note d’information de la DEPP, n° 22.34, novembre 2023.
([40]) Bennani et al., Les coûts des formations dans l’enseignement supérieur français : déterminants et disparités, focus du CAE n° 074-2021, décembre 2021.
([41]) Ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse, Repères et références statistiques 2023, fiche 9.08, DEPP, août 2023.
([42]) Cour des comptes, Un premier bilan de l’accès à l’enseignement supérieur dans le cadre de la loi ORE, février 2020, p. 92.
([43]) Cour des comptes, op. cit., p. 104.
([44]) France Stratégie, La transition lycée-enseignement supérieur, Actions critiques, janvier 2017, p. 1.
([45]) Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, Les bacheliers 2014 entrés dans l’enseignement supérieur : où en sont-ils à la rentrée 2020 ?, note d’information du SIES, n° 20.02, janvier 2022.
([46]) Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, Parcours et réussite en licence : les résultats de la session 2022, note flash du SIES, n° 26, novembre 2023.
([47]) Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, Parcours et réussite en licence : les résultats de la session 2022, note flash du SIES, n° 26, novembre 2023.
([48]) OCDE, Regards sur l’éducation 2022, novembre 2022, p. 84.
([49]) Rapport annexé à la loi n° 2005-380 du 23 avril 2005 d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école, censuré par le Conseil constitutionnel pour défaut de consultation du Conseil économique et social (décision n° 2005-512 DC du 21 avril 2005, Loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école, cons. 14).
([50]) Ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse, Le baccalauréat 2023 – session de juin, note d’information de la DEPP, n° 22.34, novembre 2023.
([51]) Ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse, Choc des savoirs. Élever le niveau de notre école, dossier de presse, 5 décembre 2023.
([52]) Ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse, des sports, des Jeux olympiques et paralympiques, Déroulement des corrections aux examens du second degré à compter des épreuves 2024, note de service du 12 janvier 2024, Bulletin officiel de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports n° 5 du 2 février 2024.
([53]) Décret n° 2020-1273 du 20 octobre 2020 relatif aux labels « Formation supérieure de spécialisation » et « Passeport pour réussir et s’orienter ».
([54]) Décret n° 2023-469 du 15 juin 2023 relatif à la licence professionnelle « bachelor universitaire de technologie ».
([55]) Annexe 4 – Organisation des droits à bourse et conditions de maintien de la circulaire du 17 juillet 2023 relative aux bourses d’enseignement supérieur sur critères sociaux, des aides au mérite et des aides à la mobilité pour l’année 2023-2024, Bulletin officiel de l’enseignement supérieur et de la recherche n° 29 du 20 juillet 2023.
([56]) Article 17 de l’arrêté du 6 décembre 2019 portant réforme de la licence professionnelle.
([57]) Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, Parcours et réussite en DUT : les résultats de la session 2022, note flash du SIES, n° 27, novembre 2023.
([58]) Article L. 613-1 du code de l’éducation.
([59]) Arrêté du 22 janvier 2014 fixant les modalités d’accréditation d’établissements d’enseignement supérieur et article 23 de l’arrêté du 30 juillet 2018 relatif au diplôme national de licence.
([60]) III de l’article L. 612-3 du code de l’éducation.
([61]) Comité éthique et scientifique de Parcoursup, 4e rapport annuel au Parlement, février 2022, p. 71.
([62]) Cour des comptes, Un premier bilan de l’accès à l’enseignement supérieur dans le cadre de la loi ORE, février 2020, p. 99.
([63]) La création nette de 31 094 places est répartie de la manière suivante, selon la nomenclature établie par le Conseil européen de la recherche (CER) : 32 000 nouvelles places en sciences humaines et sociales ; 9 000 nouvelles places en mathématiques, sciences et technologies de l’information et de la communication ; 6 000 nouvelles places en sciences de la matière, de l’univers et de la terre ; 16 000 places supprimées en sciences de la matière, de l’univers et de la terre, dans le cadre de la réforme des études de santé et de la suppression de la possibilité de redoublement de l’ancienne première année commune à l’entrée dans les études de santé (PACES).
([64]) Loi n° 2007-1199 du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités.
([65]) Discours de Mme Sylvie Retailleau, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, sur l’acte II de l’autonomie des établissements d’enseignement supérieur, prononcé à la Cité internationale universitaire de Paris le 26 mars 2024.
([66]) La première vague des COMP, initiée en 2023 et mobilisant des financements additionnels à hauteur de 112 millions d’euros, comporte d’ores et déjà un objectif relatif à l’adaptation de l’offre de formation aux besoins des métiers d’avenir et en tension, qui regroupe 15 % des moyens alloués.
([67]) Article 9 de l’arrêté du 30 juillet 2018 relatif au diplôme national de licence.
([68]) Observatoire national de la vie étudiante, Enquête 2020 sur les conditions de vie – Activité rémunérée, 2020, p. 6.
([69]) Catherine Béduwé et al., Salariat étudiant, parcours universitaires et conditions de vie, La Documentation française, collection « Études & recherche », 2019.
([70]) Observatoire national de la vie étudiante, op. cit., p. 11.
([71]) Inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche, L’emploi étudiant, n° 2019-075, septembre 2019, p. 8.
([72]) Article 296 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.
([73]) Article 12 de l’arrêté du 22 janvier 2014 fixant le cadre national des formations conduisant à la délivrance des diplômes nationaux de licence, de licence professionnelle et de master.
([74]) Article L. 611-11 du code de l’éducation.
([75]) Article 12 de l’arrêté du 22 janvier 2014 fixant le cadre national des formations conduisant à la délivrance des diplômes nationaux de licence, de licence professionnelle et de master.
([76]) Observatoire national de la vie étudiante, op. cit., 2020, p. 7.