N° 1638

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 24 juin 2025

 

RAPPORT D’INFORMATION

FAIT

 

AU NOM DE LA DÉLÉGATION AUX DROITS DES FEMMES
ET À L’ÉGALITÉ DES CHANCES ENTRE LES HOMMES ET LES FEMMES ([1]),

sur les politiques d’accompagnement à la parentalité

présenté par

Mme Sarah LEGRAIN et Mme Delphine LINGEMANN

Députées


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes est composée de :

 

Mme Véronique Riotton, présidente ; Mme Marie-Charlotte Garin, M. Guillaume Gouffier-Valente, Mme Sarah Legrain, Mme Anne-Cécile Violland viceprésidents ; Mme Julie Delpech, Mme Karine Lebon, secrétaires ; Mme Brigitte Barèges, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Guillaume Bigot, Mme Sylvie Bonnet, Mme Pascale Bordes, M. Louis Boyard, Mme Gabrielle Cathala, Mme Edwige Diaz, Mme Sandrine Dogor-Such, Mme Virginie Duby-Muller, Mme Agnès Firmin Le Bodo, Mme Martine Froger, M. Thierry Frappé, Mme Martine Froger, Mme Sandrine Josso, Mme Fatiha Keloua Hachi, Mme Élise Leboucher, Mme Gisèle Lelouis, M. Guillaume Lepers, Mme Delphine Lingemann, Mme Christine Loir, Mme Marie-France Lorho, Mme Graziella Melchior, Mme Marie Récalde, Mme Sandra Regol, Mme Marie-Pierre Rixain, Mme Sandrine Rousseau, M. Emmanuel Taché de la Pagerie, Mme Andrée Taurinya, Mme Prisca Thevenot, Mme Céline Thiébault-Martinez.

 


SOMMAIRE

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Pages

Synthèse du rapport

liste des recommandations des rapporteures

introduction

PREMIÈRE PARTIE : une charge domestique et parentale encore largement assumée par les femmes : un verrou à l’égalité

I. la division sexuée du travail domestique et parental, ancrée dans un héritage historique encore présent

A. Une lente évolution de la politique familiale vers la parentalité

1. Une politique familiale longtemps centrée sur le rôle de la mère

2. Un avènement de la « parentalité » pourtant aveugle au genre et à la diversité des conditions parentales

B. Des stéréotypes de genre persistants sur le rôle des mères

1. Des stéréotypes de genre durablement enracinés chez les adultes

2. Une inquiétante perpétuation des stéréotypes chez les jeunes

C. une division sexuée du travail domestique et parental au détriment des femmes

1. Malgré une impression d’égalité, une division sexuée des tâches domestiques et parentales

a. Le lourd poids des tâches domestiques et de la charge mentale pour les mères

b. Une fausse impression d’égalité dans la répartition des tâches

2. Avec l’arrivée des enfants, une double journée pour les mères

3. Des difficultés exacerbées pour les mères solos

D. les femmes, « variables d’ajustement » À l’arrivée de l’enfant

1. Un surinvestissement parental des femmes favorisé par le système de congés parentaux

a. Des congés maternité et paternité perpétuant une répartition inéquitable des tâches

b. Un congé parental peu attractif majoritairement pris par les femmes

2. Un système de modes d’accueil en difficulté souvent suppléé par les femmes

a. Pour les parents, des difficultés persistantes à trouver un mode d’accueil

b. Une faible attractivité du secteur de la petite enfance

II. des inégalités parentales aux lourdes conséquences : un coût humain, économique et social pour les mères

A. dans le monde du travail, une pénalité parentale pour les femmes

1. Un impact négatif de la parentalité sur le parcours professionnel des femmes

2. Un phénomène de discrimination persistant à l’encontre des mères

3. Une pénalité maternelle exacerbée pour les mères solos

B. Une responsabilité parentale inéquitable qui fragilise les parcours de vie des femmes

1. Un risque réel d’épuisement pour les mères

2. Un coût économique élevé de la parentalité pour les femmes

a. Un impact négatif de la parentalité sur les revenus

b. Le lourd coût de la séparation pour les mères

DEuxième PARTIE : Avancer vers l’égalité dans la parentalité

I. soutenir une parentalité positive et égalitaire

A. promouvoir une vision égalitaire de la parentalité dans la société

1. Dès le plus jeune âge, inculquer une vision égalitaire des tâches domestiques et parentales

2. Promouvoir une répartition équitable des responsabilités parentales

3. Promouvoir une meilleure information des deux parents sur le parcours parental

B. Impulser une meilleure prise en compte de la parentalité dans le monde professionnel

1. Promouvoir la parentalité comme un sujet clé de la vie au travail pour toutes et tous

a. Favoriser la prise en compte de la parentalité dans le monde professionnel

b. Accorder une attention spécifique aux « aléas de la vie » liés au travail

2. Intégrer les contraintes de la parentalité dans l’organisation du travail

II. faciliter l’arrivée de l’enfant en améliorant l’accompagnement des parents en amont

A. avant l’arrivée de l’enfant, proposer un accompagnement tenant compte de la diversité des besoins

1. Accompagner les parents dès le désir d’enfant

a. Une diversité de parcours d’accès la parentalité à prendre en compte

b. Des consultations pré-conceptionnelles comme porte d’entrée dans la parentalité

2. De la préparation à l’accouchement à la préparation à la parentalité

3. En cas de besoin, proposer un arrêt aux futurs parents

B. Un suivi du post-partum mieux adapté aux besoins des mères

1. Une attention spécifique au risque de dépression post-partum

2. Lutter contre l’isolement des mères

III. revoir les conditions d’accueil du jeune enfant pour favoriser un investissement équivalent des parents

A. une réforme du congé paternité indispensable pour renforcer l’investissement des pères

1. Une aspiration des pères à s’investir davantage qui peine encore à trouver une traduction concrète

2. Un investissement des pères dans la parentalité à mettre en place dès la naissance

3. Le congé paternité, un levier clé pour l’égalité entre les parents

B. repenser la place et le fonctionnement du congé parental

1. En 2015, une réforme budgétaire aux effets mitigés

2. Améliorer l’attractivité financière du dispositif sans réduire sa portée

C. une nécessaire réforme des modes d’accueil

1. Une meilleure lisibilité du système des modes d’accueil

2. Une offre d’accueil riche et homogène sur tout le territoire

3. Valoriser davantage les métiers de la petite enfance

IV. L’adolescence, un âge charnière et des politiques publiques lacunaires

A. mieux prendre en compte les besoins spécifiques des parents d’adolescents

B. Santé mentale des adolescents : aider les parents à soutenir leurs enfants

V. accompagner les familles monoparentales sans les stigmatiser

A. Au moment de la séparation, faciliter la répartition des responsabilités parentales

1. Repenser les règles fiscales pour répartir équitablement les dépenses entre les parents

2. Adapter certaines prestations sociales pour soutenir les mères solos

B. Ouvrir des droits spécifiques et adaptés aux besoins des mères solos

1. Adapter les systèmes de congés et d’autorisations d’absences

2. S’inspirer des bonnes pratiques venues du terrain

ConClusion

TRAVAUX DE LA dÉlÉgation

annexes

annexe  1 : cartographie des acteurs de la parentalitÉ

annexe  2 : liste des personnes entendues par la délégation

annexe  3 : Liste des personnes entendues par les rapporteures en france

annexe  4 : Liste des personnes entendues par les rapporteurEs en espagne

annexe  5 : Liste des contributions écrites reçues

 


   Synthèse du rapport

« Double journée », « charge mentale », « pénalité maternelle », « mythe de la wonder woman », sont autant d’expressions régulièrement employées pour décrire la difficile, et parfois impossible, articulation entre vie familiale et vie professionnelle qui s’impose aujourd’hui aux femmes.

Dans le cadre de leur mission d’information sur Les politiques d’accompagnement à la parentalité, Mmes les députées Sarah Legrain et Delphine Lingemann ont rencontré des chercheurs, des personnalités de la société civile, des journalistes, des organisations féministes, des représentants de l’administration, des partenaires sociaux, plus de cinquante auditions pour mieux comprendre l’impact de la parentalité sur la vie des femmes.

Il ressort que malgré des évolutions positives les femmes demeurent une des principales « variables d’ajustement » - et certainement la plus flexible et facile à activer - d’une politique familiale et d’un marché du travail qui peinent à se mettre en cohérence. Alors que la parentalité n’a aucun effet ou presque sur l’évolution professionnelle des hommes, elle peut transformer radicalement la carrière des femmes. À terme, les « efforts » et « petits sacrifices » consentis par les femmes dans l’intérêt du foyer finissent par peser lourd sur leur évolution professionnelle et leurs revenus. Ainsi, 90 % des inégalités de revenu entre les femmes et les hommes sont directement dues à la « pénalité parentale » ([2]) que subissent les femmes. Par ailleurs, malgré des progrès à la marge dans la répartition des tâches et la conciliation entre vie privée et vie professionnelle, les femmes continuent d’assumer un rôle de « parent principal ». En moyenne, elles réalisent 71 % des tâches domestiques et 65 % des tâches parentales ([3]) du foyer, ce qui n’est pas sans peser sur leur santé physique et psychique.

« Travailler comme si on n’avait pas d’enfants, élever nos enfants comme si on n’avait pas de travail », c’est le paradoxe et l’impossible injonction aujourd’hui imposée aux parents, et en particulier aux mères. Partant de ce constat, vos rapporteures ont identifié des axes clés pour favoriser une répartition plus égalitaire des tâches parentales, et pour promouvoir une vision positive et égalitaire de la parentalité :

faciliter l’arrivée de l’enfant en accompagnant davantage les parents en amont, c’est-à-dire mieux prendre en compte la diversité des parcours parentaux et des familles d’aujourd’hui, mais aussi accorder davantage d’attention à la parentalité dès la grossesse. À ce stade, les séances de préparation à l’accouchement et à la parentalité se concentrent principalement sur l’accouchement et donc sur les mères. Il est proposé d’ouvrir un temps de discussion avec les parents portant plus spécifiquement sur la parentalité en tenant mieux compte de la place du second parent.

Une attention spécifique devrait également être accordée à la santé de la mère pendant la grossesse et après l’accouchement. La dépression post partum, par exemple, est encore mal connue des parents et les professionnels ne sont pas toujours formés pour fournir un accompagnement adapté. Il semble fondamental d’y remédier rapidement en luttant contre l’isolement des mères affectant gravement leur santé mentale.

repenser les conditions d’accueil du jeune enfant qui ne donnent pas satisfaction et obligent les mères à pallier aux dysfonctionnements tant du système de congés que des modes d’accueil.

La différence de durée entre le congé maternité (16 semaines) et le congé paternité (28 jours) consolide la dynamique d’une mère « parent principal » et d’un père « auxiliaire ». C’est pourquoi, s’inspirant des politiques volontaristes menées dans les pays scandinaves et plus près de nous en Espagne, vos rapporteures font une proposition ambitieuse : porter progressivement le congé paternité à égalité avec le congé maternité. Cette mesure permettrait de mieux répartir les tâches domestiques et parentales dès la naissance de l’enfant, en accordant au père un temps spécifique avec le nouveau-né. Il pourrait alors, comme la mère, apprendre à connaître son enfant et à identifier ses besoins. En ce sens, la mesure répond à un besoin d’égalité de droits et de responsabilités entre les parents. Par là même, elle tient compte de l’aspiration des pères à s’investir davantage dans leur vie familiale.

– mettre en place une politique publique spécifiquement destinée aux parents d’adolescents. Conscientes que l’essentiel des politiques publiques familiales portent sur les 1 000 premiers jours de l’enfant, vos rapporteures ont systématiquement cherché à cerner la place accordée aux parents d’adolescents. Or, à cet âge charnière - qui soulève des inquiétudes croissantes en matière de santé mentale ou de décrochage scolaire, peu de dispositifs viennent soutenir les parents pour qu’ils soutiennent leurs enfants. Vos rapporteures plaident donc pour une meilleure articulation entre les politiques de jeunesse et les politiques familiales, outils majeurs pour mieux accompagner les parents et les enfants.

– mieux prendre en compte la parentalité au travail. De nombreuses entreprises et en particulier les grands groupes ont su saisir la nouvelle aspiration des salariés à s’investir dans leur rôle parental et en ont fait un levier d’attractivité. De la même manière, certaines collectivités territoriales ont déployé, avec succès, leurs propres initiatives. Il y a donc un terreau fertile, tant dans le secteur public que privé, pour avancer vers une nouvelle vision de la parentalité.

Néanmoins, ces avancées demeurent hétérogènes et soumises aux marges de manœuvre des différents acteurs. Pour généraliser les bonnes pratiques, vos rapporteures proposent par exemple d’intégrer la parentalité au champ de la négociation collective sur l’égalité salariale, au même titre que les revenus et les conditions de travail.

mieux prendre en compte le parcours spécifique des mères solos, souvent stigmatisées. Les mères solos auraient, au contraire, besoin d’une révision des règles socio-fiscales qui, en l’état, leur portent souvent préjudice. La mise en place d’un statut auquel seraient associés des droits spécifiques, pourrait compléter utilement ces mesures.

 Notre politique familiale comme notre organisation du travail ne sont plus pleinement adaptées aux évolutions contemporaines de la parentalité, et ce sont les femmes qui en portent très souvent le poids. Pour répondre aux aspirations des parents qui souhaitent consacrer davantage de temps à de leurs enfants sans être pénalisés dans leur vie professionnelle, il est essentiel d’imaginer des outils plus cohérents et équitables. Construire une politique de l’égalité, c’est aussi lever ces obstacles silencieux. C’est dans cet esprit que vos rapporteures ont mené cette mission.


    

   liste des recommandations des rapporteures

Éducation et information

Recommandation : mettre en place des cours d’activités domestiques qui pourraient être dispensés à l’école ou au collège afin d’inculquer à tous les enfants, garçons et filles, des compétences domestiques.

Recommandation : mettre en place des campagnes nationales contre les stéréotypes de genre sur la parentalité et le soin aux enfants.

Recommandation : adopter une terminologie neutre favorisant une vision égalitaire de la parentalité.

Recommandation : à travers des campagnes de communication nationales, renforcer l’information des parents sur les dispositifs d’accompagnement à la parentalité.

Recommandation : s’appuyer sur les structures de proximité (Maisons des femmes, Centres d’information sur les droits des femmes et des familles, Maisons France Service) afin d’accroître le niveau d’information des parents sur les politiques d’accompagnement à la parentalité.

Recommandation : mieux faire connaître l’application des 1 000 premiers jours qui devrait recenser du contenu informatif sur la parentalité.

 

Prise en compte de la parentalité au travail

Recommandation : intégrer davantage la parentalité dans les dispositifs de responsabilité sociétale des entreprises (RSE).

Recommandation : généraliser la signature de la charte de la parentalité à l’ensemble des entreprises de plus de 50 salariés.

Recommandation : modifier l’article R 2242-2 du code du travail afin d’intégrer la parentalité dans le champ des négociations d’entreprises relatives à l’égalité professionnelle.

Recommandation : dans le cadre de la réforme de l’index égalité professionnelle, intégrer des critères sur la parentalité au nouvel indicateur.

Recommandation : accorder une attention particulière aux différents « aléas de la vie » liés au travail dans les politiques d’accompagnement à la parentalité.

Recommandation : lancer une réflexion sur l’impact des horaires sur l’articulation entre la vie professionnelle et privée en tenant compte des spécificités des différents corps de métier.

Recommandation : accorder aux parents des autorisations d’absence pour participer aux moments clés de la scolarité de leurs enfants de l’école maternelle au lycée, estimées à 4 demi-journées/an par la Commission parentalité.

 

Accompagnement des parents dès le désir d’enfant

Recommandation : promouvoir et élargir au projet parental le champ des consultations pré-conceptionnelles, actuellement très concentrées sur la santé.

Recommandation : avec l’accord de la mère, permettre à l’autre parent d’assister aux sept rendez-vous médicaux obligatoires de la grossesse.

Recommandation : consacrer une des séances de préparation à la naissance au projet parental.

Recommandation : renforcer le dispositif d’arrêt en cas d’interruption spontanée de grossesse en élargissant son périmètre aux interruptions volontaires de grossesse. Lors d'une interruption de grossesse quelle qu'elle soit, ouvrir la possibilité au conjoint de bénéficier d’une autorisation d’absence limitée à trois jours.

Recommandation : permettre au deuxième parent ou personne de confiance de passer la nuit à la maternité, si la mère le souhaite.

Recommandation : pour les mères qui en feraient la demande, faciliter l’accès des consultations sur l’allaitement avec des praticiens spécifiquement formés.

Recommandation : renforcer la formation des praticiens sur la dépression post-partum.

Recommandation : en complément de l’entretien postnatal, prévoir une consultation facultative et remboursée à 100 % avec un psychologue à effectuer par les mères dans les trois mois après la naissance.

Recommandation : étendre le congé de « proche aidant » au second parent en soutien à la mère souffrant de dépression post-partum.

Recommandation : à la naissance de l’enfant, proposer aux parents volontaires d’être mis en relation avec d’autres parents accueillant leur enfant au même moment dans la même zone géographique afin de lutter contre l’isolement.

Recommandation : prévoir un versement des allocations familiales dès le premier enfant.

 

Système de congés parentaux

Recommandation : porter progressivement le congé paternité à seize semaines, soit à égalité avec le congé maternité.

Recommandation : réformer le congé parental en renforçant son attractivité financière sans réduire sa portée pour les ménages modestes.

Recommandation : réfléchir à l’ouverture d’une reprise progressive, lors du retour à l’emploi, après un congé parental (maternité, paternité, adoption, parental).

 

Modes d’accueil

Recommandation : garantir la lisibilité et la transparence du fonctionnement des modes de garde.

Recommandation : investir pour augmenter et harmoniser l’offre de crèches sur le territoire.

Recommandation : revaloriser les métiers de la petite enfance.

 

Accompagnement des parents d’adolescents

Recommandation : élargir les missions des lieux d’accueil enfants-parents afin qu’ils puissent recevoir des adolescents.

Recommandation : mettre en place des politiques publiques ciblant les parents d’adolescents.

Recommandation : renforcer l’offre en pédopsychiatrie en d’une part, incitant les internes à choisir cette spécialité et d’autre part, en renforçant les moyens des structures de pédopsychiatrie.

Recommandation : renforcer la médecine scolaire en augmentant le nombre de professionnels et en les formant davantage aux enjeux de la santé mentale.

Recommandation : renforcer la formation des acteurs au contact des adolescents sur les enjeux de santé mentale. Lancer une campagne d’information nationale sur la santé mentale des enfants et des adolescents.

 

Soutenir les familles monoparentales

Recommandation : repenser le mode de calcul des pensions alimentaires afin de prendre en compte le coût réel de l’entretien d’un enfant.

Recommandation : permettre au parent bénéficiaire défiscaliser le montant de la pension alimentaire.

Recommandation : instaurer un abattement sur le montant de la pension alimentaire pris en compte dans les bases ressources des prestations familiales et des aides au logement, à hauteur de l’allocation de soutien familial (ASF).

Recommandation : déconjugaliser le versement de l’ASF.

Recommandation : ouvrir les allocations logement (APL) aux deux parents pour faciliter l’accueil des enfants chez les deux parents.

Recommandation : ouvrir aux mères solos la possibilité de transférer des droits de congés vers un proche de leur choix.

Recommandation : doubler les jours « enfant malade » pour les parents solos.

Recommandation : évaluer ou mettre en place une expérimentation sur l’allongement du droit au répit parental, actuellement limité à 1 jour par an.

Recommandation : étudier la création d’un statut des familles monoparentales auquel seraient associés des droits spécifiques.

 

 


   introduction

En 2024, 90 % des inégalités de revenu entre les femmes et les hommes étaient directement dues à la « pénalité parentale » ([4]), c’est-à-dire à l’impact de l’arrivée des enfants sur l’évolution professionnelle des parents. Dans les faits, la « pénalité parentale » n’existe pas pour les hommes. En sens inverse, elle est particulièrement forte et désormais bien documentée pour les femmes : dans les dix années qui suivent l’arrivée du premier enfant, le revenu moyen des femmes chute d’environ 38 % ([5]).

Si de nombreuses inégalités perdurent entre les femmes et les hommes, la parentalité présente une caractéristique spécifique : elle est la source souvent méconnue et invisible de ces inégalités. Au-delà du bonheur et de l’épanouissement que représente la parentalité pour des millions de parents, celle-ci a des conséquences notables sur l’égalité entre les femmes et les hommes, tant les femmes sont encore perçues aujourd’hui comme le « parent principal ».

Alors que l’évolution professionnelle des femmes et des hommes est aujourd’hui semblable avant l’arrivée des enfants, à partir de ce moment, les femmes « décrochent » sur le marché du travail. Un décrochage progressif, souvent fait de petites concessions dans l’intérêt de la famille et des enfants. Les effets de ces concessions se font pourtant sentir tout au long de la vie y compris jusqu’à la retraite.

Malgré des évolutions sociales et une aspiration croissante des pères à s’investir pleinement dans leur rôle de parent, les inégalités engendrées par la parentalité persistent : répartition des tâches domestiques et parentales, charge mentale, évolution professionnelle, niveau de rémunération, congés parentaux sont autant de sphères où les inégalités entre les femmes et les hommes sont intimement liées à la parentalité.

Dans ce contexte, la Délégation aux droits des femmes de l’Assemblée nationale a confié à vos rapporteures une mission d’information sur les politiques d’accompagnement à la parentalité. Dans ce titre, vos rapporteures expriment un choix, celui d’une vision positive et égalitaire de la parentalité. Trop souvent, les politiques publiques se sont cantonnées au « soutien » à la parentalité, c’est-à-dire qu’elles interviennent tardivement lorsqu’elles considèrent que les parents peinent à élever leurs enfants.

Dans les faits, chaque parent suit un parcours unique, plus ou moins complexe, et lié aux conditions sociales, géographiques, familiales dans lesquelles s’exerce sa parentalité. Dans ce parcours, il peut avoir besoin d’être épaulé en fonction de ses besoins. C’est pourquoi, le terme d’« accompagnement », plus neutre et permettant d’englober l’ensemble des mesures prises pour répondre aux besoins des parents, a été retenu.

Le présent rapport relève que la parentalité demeure une responsabilité encore largement assumée par les femmes et représente, en ce sens, un verrou à l’égalité entre les femmes et les hommes. Pour prévenir l’ancrage durable d’une répartition inégale des tâches domestiques et éducatives, il est impératif de placer l’égalité au cœur des politiques familiales, dès la naissance du premier enfant. À défaut, elle continuera de perpétuer les inégalités au détriment des femmes.

En conséquence, vos rapporteures font 44 recommandations pour faire avancer une parentalité égalitaire où chaque parent pourra trouver à s’épanouir pleinement. Elles identifient plusieurs pistes d’évolution en particulier sur le niveau d’information des parents, la prise en compte de la parentalité dans le monde professionnel, la mise en place d’un système d’accueil du jeune enfant, un meilleur accompagnement des parents d’adolescents et une attention spécifique aux familles monoparentales. Agrégées, ces mesures permettront de mieux répartir les tâches parentales entre les parents.

 


   PREMIÈRE PARTIE : une charge domestique et parentale encore largement assumée par les femmes : un verrou à l’égalité

I.   la division sexuée du travail domestique et parental, ancrée dans un héritage historique encore présent

A.   Une lente évolution de la politique familiale vers la parentalité

1.   Une politique familiale longtemps centrée sur le rôle de la mère

Historiquement, la politique familiale en France a poursuivi un objectif principalement démographique. De ce fait, la maternité a longtemps été pensée comme un levier pour encourager la natalité. Cette dernière était perçue comme un moyen de relever le pays au lendemain des deux guerres mondiales. La création du Conseil supérieur de la natalité en 1920 et celle du Haut comité de la population en 1939 par exemple, illustrent la priorité accordée à la natalité.

Dans cette perspective, les femmes étaient essentiellement considérées par les politiques publiques sous le prisme de la maternité. Dans le prolongement de dispositifs précédents, l’allocation de salaire unique (ASU) a été mise en place en 1941. Versée pour une durée de deux ans, dès le mariage, aux couples dont seul le mari était actif, l’ASU visait à relancer la démographie en incitant les femmes à rester à la maison. Son attractivité était renforcée par le caractère peu rémunérateur des emplois proposés aux femmes, le faible taux de chômage des hommes et l’absence de solutions de garde proposées aux parents. Si elle n’est formellement supprimée qu’en 1978, le montant de l’ASU a progressivement diminué à partir de 1962. En lien avec les évolutions de la société, elle a progressivement été délaissée comme instrument de la politique familiale.

À partir des années 1960, la politique familiale embrasse un nouveau tournant. Dans un objectif de croissance économique, les femmes sont progressivement incitées à entrer massivement sur le marché du travail. Si les postes proposés demeurent peu attractifs et sont souvent des temps partiels, l’entrée des femmes dans le salariat fait nécessairement évoluer leur rapport au travail et de ce fait, leur rapport à la parentalité. Elle impose aux parents et en particulier aux mères, une conciliation entre la vie familiale et professionnelle dont l’équilibre est souvent précaire.

2.   Un avènement de la « parentalité » pourtant aveugle au genre et à la diversité des conditions parentales

En parallèle, un nouveau terme venu de l’anglais est apparu à partir des années 1970 : la parentalité. Néologisme proche des notions de « parenthood » et « parenting », l’usage du terme parentalité dans les discours émerge à partir des années 1980 en France. En 1997, le ministère de l’emploi et de la solidarité y a recours de manière officielle pour la première fois. La parentalité est définie alors comme « l’ensemble des savoir-être et savoir-faire affectifs techniques, intellectuels et sociaux que les hommes et les femmes doivent mettre en œuvre pour éduquer leurs enfants » ([6]). Cette nouvelle notion permet ainsi de désigner les évolutions sociétales hors du champ classique de la famille. En ce sens, elle inclut les notions de monoparentalité, beau-parentalité ou encore d’homoparentalité.

Contrairement à la politique familiale qui place la famille et le foyer au centre de la réflexion des politiques publiques, la parentalité se concentre sur l’individu en envisageant chaque parent comme un acteur autonome. De ce fait, les pouvoirs publics ne s’adressent plus à la famille comme entité collective mais à chaque parent comme acteur. Dans cette conception, la maternité et la paternité semblent équivalentes. Selon la philosophe américaine Mary Daly, en effectuant cette équivalence, la notion de parentalité devient « gender blind », c’est-à-dire aveugle au genre. Elle tend à oublier que l’essentiel des tâches parentales sont, encore aujourd’hui, assumées par les mères. Alors que les pouvoirs publics pensent s’adresser aux deux parents en recourant à la parentalité, la mère demeure le sujet principal de la politique publique. Pourtant, la place que prend la parentalité et son impact dans la vie des femmes devrait être un élément clé pour penser les politiques publiques sur la parentalité.

La notion de parentalité souffre de deux biais non négligeables : en premier lieu, en croyant viser les deux parents, elle fait, en réalité, peser de nouvelles injonctions sur les mères. Or, les mères sont déjà confrontées à de nombreuses injonctions bien souvent contradictoires pesant lourdement sur leur bien-être et leur santé mentale.

En outre, le caractère généraliste de la parentalité ne saurait faire oublier que celle-ci s’exerce dans des conditions bien différentes selon le parcours des parents et l’âge des enfants, mais aussi la situation sociale, professionnelle, géographique, familiale. Ainsi, les besoins d’accompagnement d’un jeune couple accueillant son premier enfant différent de ceux-ci d’une femme entamant un parcours médical assisté (PMA), d’une famille où le parent est en position d’aidant d’un proche dépendant, ou d’une mère isolée dont les enfants arrivent à l’adolescence. Les difficultés rencontrées ne sont pas les mêmes pour un parent au chômage ou en emploi, salarié ou exerçant une profession libérale, aux horaires de travail atypiques ou en télétravail, résidant dans une zone bien ou mal dotée en transports, modes d’accueil…

La diversité des conditions parentales impose d’apporter des réponses différentes aux besoins des parents. Une politique de parentalité réussie ne peut se limiter à un âge spécifique des enfants ou à une catégorie particulière de parents.

B.   Des stéréotypes de genre persistants sur le rôle des mères

1.   Des stéréotypes de genre durablement enracinés chez les adultes


Dans l’imaginaire collectif, la parentalité demeure une responsabilité des femmes. Parmi les stéréotypes de genre, l’idée que les mères savent mieux répondre aux besoins des enfants que les pères est même particulièrement enracinée dans la société française. Entre 2020 et 2022, six personnes sur dix y adhéraient alors que seulement 21 % estimaient que les hommes étaient des meilleurs encadrants que les femmes. Il y a une même une personne sur dix qui, dans l’idéal, préférerait que les femmes restent à la maison pour élever leurs enfants. Le graphique ci-dessous présente le niveau d’adhésion à cinq stéréotypes de genre et illustre la prévalence de ceux liés au soin et à la maternité.

Source : Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), « Des stéréotypes de genre encore très ancrés, notamment chez les hommes », Études et résultats, février 2024.

Si le stéréotype sur le rôle des mères est – sans surprise – particulièrement présent chez les personnes adhérant activement aux stéréotypes de genre, il est également bien enraciné chez ceux qui disent pourtant ne pas y adhérer. Parmi cette catégorie de personnes, seulement 26 % se disent plutôt en désaccord avec ce préjugé alors qu’elles rejettent massivement (à 93 %) les autres stéréotypes.

Par ailleurs, l’enracinement des stéréotypes de genre sur la place des femmes dans la sphère familiale se combine à une dévalorisation sociale systématique des tâches considérées comme féminines. Ainsi, les tâches domestiques, au premier rang desquelles le ménage, demeurent des activités pré-assignées aux femmes. Tel que l’explique Titiou Lecoq « On est face à une tautologie : le ménage est dévalorisé parce que c’est une activité féminine, et c’est une activité féminine parce que c’est dévalorisé » ([7]).

2.   Une inquiétante perpétuation des stéréotypes chez les jeunes

La prévalence des stéréotypes de genre chez les adultes est d’autant plus inquiétante qu’elle se transmet aux générations suivantes. Comme le souligne France Stratégie, une partie des jeunes semblent encore assigner les femmes au soin des enfants et des autres. Ainsi, 54 % d’entre eux adhèrent à l’affirmation que les mères savent mieux répondre aux besoins des enfants que les pères.

Plus grave encore, alors que dans l’ensemble la prévalence des stéréotypes de genre tend à diminuer en France, certaines représentations genrées sont en augmentation chez les jeunes âgés de 18 à 24 ans, au premier rang desquelles, la place des mères dans la sphère familiale. En 2022, 23 % des jeunes dans cette tranche d’âge adhéraient à l’idée « un enfant qui n’a pas encore l’âge d’aller à l’école a des chances de souffrir si sa mère travaille », soit un niveau d’adhésion proche de celui des personnes âgées de 70 ans et plus ([8]).

Cette conception de la parentalité est en partie alimentée par la répartition des tâches domestiques et parentales qu’ils observent à la maison et tendent à reproduire. Dès dix ans, la participation aux tâches domestiques varie selon le sexe des enfants. Les filles participent davantage aux tâches domestiques en général (participation à la cuisine, organisation du linge et de la chambre) tandis que les garçons se contentent de participer à une tâche spécifique : sortir la poubelle ([9]).

La participation des enfants est en partie liée à la répartition parentale. Mmes Anne Solaz et Ariane Pailhé, directrices de recherche à l’Institut national d’études démographiques (Ined), entendues par vos rapporteures, montrent que les filles vivant dans une famille où la mère réalise l’essentiel des tâches domestiques participent davantage à celles-ci.

L’adhésion à ces stéréotypes, partiellement transmise par les parents, dans cette tranche d’âge, pose question. Comme le rappelle, à juste titre France stratégie, à l’adolescence, « les attentes sociales en matière de conformité aux normes de genre stéréotypées sont susceptibles de se renforcer et vont influencer leurs aspirations futures et leur bien-être » ([10]) .

C.   une division sexuée du travail domestique et parental au détriment des femmes

Ces stéréotypes de genre traduisent une réalité persistante, unanimement soulignée par les personnes auditionnées par vos rapporteures : malgré une apparente égalité, ce sont les femmes qui continuent d’assumer la majeure partie des responsabilités domestiques et parentales. Elles demeurent considérées comme le « parent principal », responsable de l’organisation du foyer et du bien-être des enfants. En sens inverse, les pères ne sont qu’un « parent auxiliaire », occasionnellement chargé « d’aider » la mère.

1.   Malgré une impression d’égalité, une division sexuée des tâches domestiques et parentales

Comme le rappelle la sociologue Mme Marta Domingues Folgueras, entendue par vos rapporteures, le travail domestique inclut les activités non rémunérées réalisées par un membre du foyer produisant des biens et/ou des services nécessaires au déroulement de la vie quotidienne. Elles comprennent une diversité de tâches telles que le nettoyage, l’entretien du linge, le rangement ou encore la cuisine. En somme, des activités a priori anodines mais dont la répartition entre les femmes et les hommes révèle des inégalités persistantes.

Si de manière générale, le temps alloué aux tâches domestiques a baissé principalement grâce à l’équipement électroménager, les femmes continuent d’assurer l’essentiel de ces tâches. En 2024, 54 % des femmes déclarent prendre en charge les tâches ménagères contre seulement 7 % des hommes ([11]). En volume horaire, selon l’enquête Emploi du Temps de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) de 2010 ([12]), les femmes salariées consacraient trois heures et vingt-sept minutes par jour aux tâches domestiques alors que les hommes y accordaient seulement deux heures et six minutes ([13]).

a.   Le lourd poids des tâches domestiques et de la charge mentale pour les mères

Le graphique ci-dessous présente par exemple l’évolution de la prise en charge de la cuisine et/ou le ménage tous les jours par les femmes et les hommes, en 2022. Si les hommes prennent davantage part à ces activités, les femmes continuent de les assurer dans 68 % des cas en 2022.

De plus, ces tâches font l’objet d’une division sexuée, bien établie, au détriment des femmes. Ces dernières prennent en charge les tâches considérées comme les plus dévalorisantes et/ou rébarbatives. En 2018 par exemple, 83 % des femmes s’occupaient du linge contre 21 % des hommes, 81 % d’entre elles se chargeaient du repassage contre 20 % des hommes et 78 % lavaient les sanitaires pour seulement 22 % des hommes ([14]).

En sens inverse, les hommes s’adonnent davantage au bricolage (71 % des hommes contre seulement 11 % des femmes). Au moins 55 % d’entre eux sortent les poubelles contre 21 % des femmes ([15]). En effet, les hommes tendent à fuir les tâches considérées comme dévalorisantes. En moyenne, ils ne consacrent que quatre minutes par jour à l’entretien du linge et environ sept minutes à la vaisselle ([16]). Ils disposent donc d’un temps de loisir d’environ trois heures trente de plus que les femmes par semaine ([17]).

À ces tâches domestiques, très visibles, vient s’ajouter la charge mentale, concept mis en évidence, dès 1984, par la sociologue Monique Haicault. Comme le précise Mme Marta Domingues Folgueras, la charge mentale renvoie à la dimension cognitive du travail domestique, c’est-à-dire à la constante anticipation des besoins du foyer. Elle engendre un véritable travail de gestion et de planification. Extrêmement difficile à mesurer par les statistiques, elle n’en est pas moins pesante pour les femmes.

Un travail domestique invisibilisé mais au coût économique bien réel

Ce travail domestique fourni par les mères et souvent dévalorisé, a pourtant un coût économique bien réel. Au cours de leur double journée, les femmes réalisent des tâches domestiques qui, si elles étaient déléguées à une personne tierce, seraient facturées comme une prestation. Ainsi, comme le relève la Fondation des femmes, en fonction du périmètre défini, la valeur du travail domestique représentait en 2010 entre 15 et 17 % du produit intérieur brut (PIB) ([18]). En ne retenant qu’une partie des activités ([19]), la Fondation estime le coût de ces tâches à environ 423,7 milliards d’euros dont 275,4 milliards provenant directement du travail des femmes ([20]). Au total, le travail domestique d’une mère représenterait 2 320 euros par mois de plus que celui d’un père ([21]).

En d’autres termes, le travail domestique - quand il n’est pas délégué à un prestataire rémunéré - des femmes constitue une production économique réelle réalisée à titre gratuit. Dans cette configuration, il s’apparente à une économie pour les hommes et également pour l’État. En prenant une rémunération au SMIC, la Fondation des femmes estime qu’une mère qui garderait ses enfants environ sept heures par jour ouvré ferait économiser 4 932 euros par an à la société, dont 2 688 euros à l’État et 2 244 euros à sa famille.

Or, comme l’explique la sociologue du travail Maud Simonet, le travail gratuit s’« le travail gratuit n’est pas seulement gratuit, il est un déni de travail. On refuse de le considérer pour ce qu’il est » ([22]).

b.   Une fausse impression d’égalité dans la répartition des tâches

Pourtant, l’inégale répartition des tâches est mal appréhendée par les Français qui, de manière générale, estiment qu’elle tend à se réduire : 67 % des femmes et 74 % des hommes indiquent que les « hommes en font plus qu’avant, concernant les tâches ménagères » ([23]). Pourtant, la répartition demeure stable dans le temps. Selon l’Insee, en 2010, les hommes effectuaient en moyenne deux heures et treize minutes de tâches domestiques par jour (contre plus de quatre heures pour les femmes), soit une durée similaire à celle observée en 1999 et 1986.

L’impression d’une égale répartition et le travail réellement fourni par les hommes peut s’expliquer par une différence de perception. Au lieu de s’appuyer sur des données précises - par ailleurs difficiles à obtenir, les couples évaluent leur contribution aux tâches du foyer à l’aune de l’organisation de leurs parents ou de leurs proches. Autrement dit, ils évaluent leur contribution au regard de ce qui leur semble juste et donc acceptable – et non de l’égalité elle-même.

Or, selon le sociologue François de Singly, les femmes estiment la répartition juste lorsqu’elles accomplissent en réalité 65,9 % du travail ménager. Les hommes, quant à eux, considèrent la répartition équitable dès lors qu’ils assurent un tiers du travail domestique. Comme le résume Titiou Lecoq, « ce qu’on qualifie pudiquement de « juste », c’est une inégalité supportable » ([24]).

2.   Avec l’arrivée des enfants, une double journée pour les mères

Si l’inégale répartition des tâches dans les foyers précède l’arrivée des enfants, elle est considérablement aggravée par leur arrivée. La naissance d’un enfant démultiplie les tâches domestiques à effectuer en sus des nouvelles tâches parentales. Selon une étude de l’Observatoire des inégalités, 75 % des mères déclarent faire le ménage et/ou la cuisine tous les jours contre 72 % des femmes sans enfants ([25]).

Or, à la naissance des enfants, les pères participent moins aux tâches domestiques. Si pour les femmes, l’arrivée des enfants engendre cinq heures de travail supplémentaire, pour les hommes elle réduit leur temps domestique et parental de deux heures ([26]). Leur participation diminue même en fonction du nombre d’enfants. Les pères de trois enfants effectuent moins de tâches domestiques que ceux d’un seul enfant. De plus, le temps de loisir des pères dépasse les quatre heures indépendamment du nombre d’enfants de trois ans présents à la maison là où celui des mères n’atteint que trois heures et trente-deux minutes lorsque le couple a deux enfants de plus de trois ans ([27]).

De même que pour les tâches d’entretien du domicile, parmi les tâches parentales, les hommes vont davantage effectuer celles qui prennent le moins de temps ou sont les plus gratifiantes (emmener à l’école, donner le repas) tandis que les femmes font les tâches plus prenantes et plus invisibles (tri des vêtements, préparation du repas). Les pères suivent une logique de priorisation de la qualité sur la quantité. En ce sens, ils « privilégient les activités parentales plaisantes et tendent à délaisser les tâches peu gratifiantes en justifiant leur implication par une moindre disponibilité ou compétence » ([28]).

Stéphane Jourdain et Guillaume Daudin présentent les sept types de pères identifiés par la psychosociologue américaine, Francine M. Deutsch : l’aidant, le partageur, le fainéant, l’élogieux, le brouillon et l’autruche qui tous, à leur manière, tentent de se dédouaner de leurs responsabilités parentales au détriment des mères ([29]). Ainsi, alors que l’élogieux aura tendance à flatter les compétences domestiques par exemple culinaires de sa conjointe, le fainéant remettra à plus tard les tâches domestiques incitant de fait sa compagne à les faire.

Dans ce contexte, les femmes qui maintiennent leur activité professionnelle sont contraintes d’assumer « deux métiers » : d’un côté, le travail professionnel et de l’autre, le travail domestique et parental non rémunéré. C’est la notion de « double journée » développée par la sociologie. Dès 2001, le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) établissait qu’en moyenne en additionnant le travail professionnel, le travail domestique et le travail parental, les femmes travaillaient onze heures par jour contre moins de dix heures pour les hommes. Un écart exacerbé pour les mères ayant une activité professionnelle puisqu’elles accomplissaient treize heures de travail contre seulement onze heures pour leur conjoint ([30]). Proportionnellement, la part de ce travail effectivement rémunéré est plus faible pour les femmes ce qui consolide, de fait, les inégalités économiques entre les femmes et les hommes.

La notion de double journée est d’autant plus forte pour les mères dont un proche et notamment un enfant, souffre d’un handicap. Une situation exacerbée pour les familles monoparentales puisque 30 % des bénéficiaires de l’allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH) sont des familles monoparentales et dans neuf cas sur dix le parent présent est la mère ([31]).

Comme le souligne auprès de vos rapporteures Mme Valérie Laudre, membre de l’association des familles d’enfants handicapés et leurs amis (AFEH), « la charge mentale, administrative et des soins repose majoritairement sur elles ». Alors que 60 % des aidants sont des femmes ([32]), lorsque l’aide apportée est physiquement et psychiquement lourde, ce taux atteignait même 74 %, en 2011 ([33]).

3.   Des difficultés exacerbées pour les mères solos

De la même manière, l’inégale répartition des tâches domestiques et parentales pèse particulièrement sur les mères solos. Pour rappel, dans 82 % des familles monoparentales, la mère est le parent présent. Au total, les familles monoparentales représentent aujourd’hui 25 % des familles ([34]). Comme le résume la journaliste Nathalie Bourrus, « quand vous êtes une maman solo, vous cherchez tout le temps des solutions. Il y a un agenda, il y a un deuxième agenda, il y a un sur-agenda. Il y a un plan A, un plan B, un plan C, un plan D... C’est un peu de la folie » ([35]).

À ces contraintes organisationnelles s’ajoutent également une diversité d’embûches pour les mères solos. Une autre journaliste, Johanna Luyssen, raconte dans son livre, « Mères solos : le combat invisible », la multitude de formes que peuvent prendre les difficultés rencontrées par les mères solos. Ainsi, au moment de demander un logement social, elle a découvert que, selon les normes en vigueur, les mères solos ne peuvent obtenir un logement avec une chambre indépendante pour elles et sont donc « sommée[s] de dormir dans le salon ».

L’accès au logement est symptomatique des difficultés affrontées par les mères solos. Selon une étude menée par l’Ined, lorsqu’elles effectuent des recherches de logement, les femmes seules avec enfants sont moins susceptibles de recevoir des réponses positives que les couples avec enfants ou qu’un père seul avec enfants ([36]). Selon l’Ined, « les mères isolées subissent trois pénalités croisées : leur genre, leur situation professionnelle […], leur situation familiale […]. Comme nous nous y attendions, elles sont sous le feu de multiples discriminations » ([37]).

En d’autres termes, en sus des difficultés pratiques, les mères solos doivent supporter un regard parfois stigmatisant de la société comme le rappelle le journaliste M. Selim Derkaoui, entendu par vos rapporteures. La sociologue Mme Audrey Boulin, également entendue par vos rapporteures, explique que les mères solos subissent « des jugements moraux basés sur des interprétations psychologisantes », par exemple en leur donnant l’impression qu’elles n’arriveraient pas à compenser l’absence d’une figure paternelle.

De façon générale, malgré l’inégale répartition des tâches au détriment des mères au sein du couple hétérosexuel, la famille reste pensée par les politiques publiques en termes de bi-parentalité. La situation de monoparentalité, qui peut tout à fait être choisie, est présentée comme une situation subie et accidentelle.

D.   les femmes, « variables d’ajustement » À l’arrivée de l’enfant

Le fonctionnement actuel du système des congés parentaux et les dysfonctionnements du système des modes d’accueil contribuent activement à entretenir le surinvestissement des femmes dans les tâches domestiques et parentales.

1.   Un surinvestissement parental des femmes favorisé par le système de congés parentaux

La répartition actuelle des congés parentaux participe à faire des mères le parent principal et cantonne les pères à un rôle de parent auxiliaire, principalement chargé de subvenir aux besoins matériels de l’enfant.

a.   Des congés maternité et paternité perpétuant une répartition inéquitable des tâches

En effet, la mère dispose d’un congé de seize semaines au total dont six semaines de congé prénatal et dix semaines de congé postnatal pour un premier ou deuxième enfant, prévu à l’article L. 1225-17 du code du travail. Sur ces seize semaines, huit d’entre elles font l’objet d’une interdiction d’employabilité au terme de l’article L. 1225-29 du code du travail, en particulier les six semaines qui suivent l’accouchement.

Or, pour le second parent, depuis 2021, le congé lié à la naissance d’un enfant est de vingt-huit jours au total. Il se décompose en deux congés : un congé de naissance de trois jours à la naissance entièrement pris en charge par l’employeur et un congé dit paternité prévu à l’article L. 1225-35 du code du travail. Ce congé paternité se divise en deux parties, quatre jours obligatoires à prendre à la suite du congé de naissance puis vingt-et-un jours facultatifs pouvant être pris de manière continue ou fractionnée (maximum 2 périodes) avec au moins cinq jours par période.

Dans les deux cas, ces congés peuvent ouvrir leur droit à des indemnisations sous réserve de critères d’éligibilité. L’assuré doit notamment être affilié à la sécurité sociale depuis au moins 6 mois et doit avoir eu un certain niveau d’activité professionnelle dans la période précédant son congé. Le tableau ci-dessous présente les conditions ouvrant droit à indemnisation des congés maternité et paternité.

Source : Les comptes de la Sécurité sociale, Congés maternité et paternité, mai 2024.

Dans le cas du congé maternité, les critères d’éligibilité font que 18 % des mères n’y sont pas éligibles (contre seulement 6 % des pères) ([38]).

De manière générale, les salariés reçoivent des indemnités journalières (IJ) en proportion de leur salaire (autour de 100 % du salaire net et 79 % du salaire brut) tandis que pour les indépendants elles correspondent à un forfait plafonné. Pour les mères, la journée d’IJ représente en moyenne 59 euros alors qu’elle s’élève à 70 euros pour les pères en moyenne. Pour les fonctionnaires, le traitement indiciaire et une partie des primes sont versées.

Par ailleurs, en l’état actuel, les trimestres passés en congé maternité sont comptabilisés en vue de la retraite, de manière automatique. En revanche, les IJ versées pendant le congé maternité ne génèrent pas de cotisation retraite.

Le graphique ci-dessous représente la différence de l’impact des congés maternité et paternité sur les pères et les mères.

Source : Parents et féministes, « Congés parentaux : ce que Parents & Féministes propose », 2025

Alors que la durée du congé maternité n’a pas évolué depuis 1980, le congé paternité a connu des évolutions depuis sa mise en place en 2002. À cette époque, il était d’une durée maximale de onze jours, bien insuffisante pour permettre au père de s’investir pleinement dans les tâches parentales. En ce sens, la réforme de 2021 prévoyant un congé de vingt-huit jours au total, dont sept jours de congé obligatoires et vingt-et-un jours fractionnables est porteuse d’une avancée substantielle pour l’égalité entre les hommes et les femmes.

Toutefois, en l’état, le congé paternité est quatre fois plus court que le congé maternité. Il demeure, de ce fait, « un congé de parent auxiliaire » ([39]). Alors que le père doit impérativement retourner travailler, la mère se retrouve, au mieux, seule avec son enfant au vingt-neuvième jour après la naissance. De ce fait, dès la naissance de l’enfant, c’est bien la mère qui apprend à le connaître et à identifier ses besoins. Ainsi, outre la lourde charge mentale et la responsabilité des tâches domestiques, la jeune mère doit également assumer l’essentiel des tâches parentales.

La mère devient, ce faisant, le parent référent et souvent le « premier interlocuteur de l’environnement de l’enfant » ([40]) . La mère étant présente sur la durée, elle prend souvent la charge des rendez-vous médicaux. Comme le révèle la plateforme Doctolib, 85 % des rendez-vous médicaux pris pour des mineurs chez le pédiatre sont réservés par des femmes ([41]). De la même manière, elle se charge de trouver un mode d’accueil pour l’enfant à l’issue de son congé maternité et effectue l’ensemble des démarches administratives. Dans le cas d’une crèche ou d’une assistante maternelle, elle noue le premier contact avec les professionnels de la petite enfance et est donc identifiée comme le parent référent de l’enfant.

Au contraire, le père contraint de s’absenter ne peut développer le même lien avec son enfant. Or, comme le souligne la Commission des 1 000 jours, il a été constaté que « seuls les pères ayant passé plusieurs semaines avec leur bébé entre la naissance et l’âge de 4 mois sont capables de distinguer les pleurs de leur propre enfant parmi les pleurs d’autres bébés » ([42]). De plus, ainsi que le rappelle à vos rapporteures la sociologue, Mme Alix Sponton, les compétences parentales développées par les pères lors de leur court congé paternité deviennent rapidement obsolètes compte tenu de la vitesse à laquelle grandissent les enfants.

En outre, puisque le père reprend le travail plus rapidement, les couples estiment souvent qu’il a besoin de repos, il ne se lève donc plus la nuit pour prendre soin du bébé lorsque celui-ci se réveille. Là encore, les femmes assument cette tâche alors qu’elles ont également besoin de repos.

Par ailleurs, si le couple a déjà des enfants, alors que le père doit retourner travailler rapidement, la mère qui reste en congé s’occupe également de la fratrie. Dans cette configuration, la mère qui vient d’accoucher doit veiller au bien-être de la fratrie et du nouveau-né tout en ménageant sa récupération (physique et mentale) post accouchement.

La complexité de cette accumulation de rôles pour la mère peut être amplifiée par l’âge des autres enfants ainsi que par leurs éventuels besoins spécifiques. Comme en témoigne, Mme Valérie Laudre auprès de vos rapporteures, lorsque le handicap de l’enfant est détecté dès la naissance, les parents doivent apprendre rapidement à subvenir aux besoins spécifiques. En l’absence du père, la mère assume cette responsabilité. En fonction du type de handicap, cette responsabilité peut se prolonger tout au long de la vie.

De plus, le caractère fractionnable d’une large portion du congé peut également influer sur la répartition des tâches et la santé mentale de la mère. Dans cette configuration, la présence du père pendant seulement sept jours à la naissance puis vingt-et-un jours plusieurs mois après la naissance emporte deux conséquences négatives : d’une part, une présence de seulement sept jours à la naissance ne facilite pas la récupération de la mère pourtant visée par la réforme de 2021 ; d’autre part, elle ne permet pas une répartition équitable des tâches parentales sur la durée.

b.   Un congé parental peu attractif majoritairement pris par les femmes

En outre, le congé parental est pris dans 94 % des cas par les mères ([43]). Dans sa version actuelle, ce congé sollicité par les parents auprès de l’employeur permet de suspendre le contrat de travail jusqu’aux trois ans de l’enfant.

La loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes a modifié le fonctionnement du congé parental. Avant 2014, le congé parental pour un premier enfant était d’une durée de six mois à partager entre les deux parents. À partir du deuxième enfant, les parents avaient chacun le droit à une indemnisation du congé parental pendant une durée de trois ans. Depuis la réforme de 2014, pour un premier enfant, chaque parent peut prétendre à un congé de six mois. En revanche, à partir du deuxième enfant, le droit d’indemnisation a été réduit à deux ans maximum par parent.

En ce sens, cette réforme a aggravé les biais de ce dispositif qui souffre d’un problème d’attractivité structurel pour les classes moyennes et supérieures. Son montant actuel ne leur permet pas de maintenir leur niveau de vie et les pousse à se détourner du dispositif.

En l’état, le dispositif est principalement considéré comme avantageux pour les familles aux revenus modestes sur le court terme. En effet, compte tenu du coût élevé des modes d’accueil, pour ces familles, il est économiquement préférable d’assurer directement la garde des enfants en percevant la prestation Prepare. En revanche, à long terme, les femmes ressortent pénalisées sur le plan professionnel lorsqu’elles recourent longuement au congé parental. D’un point de vue économique, pour ces familles et en particulier les mères, ce système s’apparente toutefois à une trappe à pauvreté. Ainsi, quand un couple n’a pas d’autre choix que de recourir au congé parental faute de mode d’accueil accessible, c’est dans l’immense majorité des cas la mère qui le prend, pour une faible rémunération ; depuis la réforme de 2014, si elle doit s’arrêter une troisième année, elle le fait sans toucher de rémunération. Si la réforme a eu un léger impact sur le retour en emploi des femmes aux deux ans de l’enfant, elle a néanmoins aggravé la situation des femmes qui continuent à s’arrêter la troisième année.

2.   Un système de modes d’accueil en difficulté souvent suppléé par les femmes

Les dysfonctionnements que connaît le secteur de la petite enfance perpétuent l’inégale répartition des tâches parentales qui s’est mise en place à la naissance de l’enfant.

a.   Pour les parents, des difficultés persistantes à trouver un mode d’accueil

Lors du congrès des acteurs de la solidarité en 2022, le président de la République relevait que les parents rencontrent des difficultés substantielles au moment de choisir un mode d’accueil pour leur enfant. Ainsi, « près de 20 % des parents n’obtiennent pas de mode d’accueil, plus de 160 000 ne reprennent pas le travail faute de solution de garde pour leur enfant » ([44]). Or, dans l’écrasante majorité des cas, les parents qui ne peuvent reprendre le travail faute de solution de garde sont les mères.

Les difficultés rencontrées par les parents tiennent à l’offre de garde disponible sur le territoire. Selon la Cour des comptes, fin 2022, 11 % des parents étaient indemnisés par la Prepare tandis que le taux de couverture en accueil formel était de 60,3 %. Dans ce contexte, 29 % des parents ne disposaient ni d’une place en mode d’accueil formel ni ne bénéficiaient d’une aide à l’accueil du jeune enfant ([45]).

Seules 1,31 million de places d’accueil étaient proposées alors qu’il y avait 2,17 millions d’enfants de moins de trois ans à accueillir. La situation est critique tant pour l’accueil en crèche que pour les assistantes maternelles. Ces dernières constituent le premier mode de garde formel, près d’un million de parents y avaient par exemple recours en 2021. En zone rurale notamment, les parents se tournent souvent vers les assistantes maternelles. Ces dernières accueillaient 27 % des enfants en 2022 ([46]).Toutefois, la baisse constante du nombre d’assistantes maternelles constitue une source d’inquiétude réelle pour les pouvoirs publics. Parallèlement, on estime qu’il manquait 230 000 places en crèche en 2022 voire 600 000 places si chaque enfant pouvait avoir accès à ce mode de garde ([47]).

De plus, l’offre de garde disponible souffre de disparités géographiques importantes. La carte ci-dessous présente le taux de couverture des enfants de moins de 3 ans par une offre d’accueil formel en 2022 par département. On remarque dans l’ensemble que l’Ouest du pays est mieux doté que la zone méditerranéenne et les territoires d’Outre-mer.

Certains départements, à l’image de la Seine-St-Denis (32,2 places pour 100 enfants ([48])), ont des taux de couverture particulièrement bas. La situation est particulièrement inquiétante dans les territoires d’Outre-mer qui ne disposent que de 2 % de l’offre de mode d’accueil formels alors que 98 % des modes d’accueil se situent en métropole ([49]).

Par ailleurs, le coût des modes d’accueil peut constituer une entrave d’accès pour les parents. Il est particulièrement élevé pour les assistantes maternelles, pourtant premier mode d’accueil en France. Le tableau ci-dessous présente le reste à charge pour les ménages en fonction des modes de garde en 2022.

De plus, les critères d’accès aux modes d’accueil varient selon les dispositifs. Ainsi, comme le pointe Terra Nova, la plupart des établissements regardent avec attention la situation professionnelle des parents et préfèrent se tourner vers des parents bi-actifs ([50]). Dit autrement, quand bien même les parents arriveraient à dépasser les entraves d’offre et de coût, ils n’ont pas nécessairement accès au mode d’accueil de leur choix. Dans ces conditions, de nombreux parents ne choisissent pas, mais au contraire subissent le mode d’accueil de leur enfant.

Comme le souligne Mme Violaine Dutrop auprès de vos rapporteures, alors que seuls 31 % des parents souhaitent un accueil familial, ils sont 54 % à garder leurs enfants ([51]). En d’autres termes, « un parent sur cinq est contraint de garder lui-même son enfant, faute de solution de garde » ([52]). Une estimation proche de la modélisation ci-dessous. Le tableau suivant compare en effet la répartition des modes d’accueil actuels à une modélisation si les parents avaient obtenu le mode garde qu’ils souhaitaient.

répartition des modes d’accueil réelle et souhaitée par les parents

Source : Fondation des femmes, Observatoire de l’émancipation économique des femmes, « Le coût d’être mère », juin 2023.

Il va sans dire que lorsque les parents n’obtiennent pas le mode de garde souhaité, les mères deviennent souvent la variable d’ajustement. L’écrasant recours des femmes au congé parental illustre bien la compensation exercée par les femmes.

b.   Une faible attractivité du secteur de la petite enfance

Les difficultés rencontrées par les parents font écho à celle des professionnels dans un secteur particulièrement féminisé. La petite enfance fait aujourd’hui face à une réelle pénurie de personnel, difficile à enrayer.

Parmi les nombreuses raisons de cette pénurie, l’attractivité des métiers de la petite enfance est particulièrement pointée du doigt. Quelle que soit la catégorie d’emploi, les métiers de la petite enfance sont mal rémunérés notamment dans les crèches. Ainsi, comme l’explique Terra Nova, alors que le salaire mensuel net médian en France dépasse les 2 000 euros en France, les éducateurs de jeunes enfants touchent une rémunération brute d’environ 1 900 euros par mois ([53]). Une rémunération qui ne s’améliore pas de manière significative en fin de carrière où le salaire brut moyen est d’environ 3 000 euros. En outre, les perspectives d’évolution professionnelle sont peu nombreuses en l’absence d’une formation continue structurée.

Par ailleurs, la pénibilité des métiers de la petite enfance peine encore à être reconnue, ce qui se traduit dans les salaires et les retraites. Elle est bien illustrée par la formule « Amusez-vous bien ! » ([54]) que de nombreux parents emploient lorsqu’ils déposent leurs enfants dans les structures d’accueil. Or cette formule est perçue par les professionnels comme réductrice et révélatrice de la méconnaissance entourant leurs conditions de travail et leurs responsabilités.

En effet, dans les métiers de la petite enfance, le personnel est particulièrement exposé aux risques d’accident du travail. Dans les métiers de la petite enfance, le port de charges lourdes et le contact avec des enfants malades sont récurrents. Surtout, le travail se fait dans un contexte stressant lié aussi bien au bruit qu’à la vigilance, sur une amplitude horaire pouvant être longue. Du point de vue psychologique, la charge émotionnelle que peut engendrer le contact avec les enfants est peu prise en compte.

Dans ce contexte, M. Mathieu Menguy, co-secrétaire de la fédération nationale des éducateurs de jeunes enfants (Fneje) explique à vos rapporteures que dans la filière, de nombreux potentiels candidats renoncent lors des stages d’observations, face à la pénibilité du travail qu’ils avaient sous-estimée.

En outre, comme le rappelle Victor Castanet dans son livre Les Ogres, dans certaines structures privées, des dysfonctionnements sont liés à une recherche excessive de rentabilité de la part des groupes. Ainsi, à propos des micro-crèches, l’inspection générale des affaires sociales (IGAS), souligne la coexistence de « projets de très grande qualité et des dérives inacceptables, guidées par de simples logiques financières » ([55]).

En effet, certains groupes ont par exemple réduit le taux d’encadrement pour limiter leurs coûts de fonctionnement. Ce faisant, les conditions de travail des équipes se sont, par endroits, dégradées ce qui a contribué à augmenter le turn over. Ainsi, 18 % des salariés en établissements d’accueil du jeune enfant ont moins d’un an d’ancienneté dans leur établissement et seuls 25 % ont à l’inverse, plus de dix ans d’ancienneté ([56]).


II.   des inégalités parentales aux lourdes conséquences : un coût humain, économique et social pour les mères

Ce surinvestissement des mères dans la sphère familiale n’est pas sans conséquence pour les femmes, tant sur leur évolution professionnelle, leur santé mentale, que, et bien souvent, leur pouvoir d’achat. L’infographie ci-dessous présente le lien entre la répartition des tâches domestiques et parentales et les inégalités de revenus entre les femmes et les hommes.

A.   dans le monde du travail, une pénalité parentale pour les femmes

Dans le monde professionnel, le child penalty ou pénalité parentale, c’est-à-dire « la divergence entre les trajectoires professionnelles des femmes et des hommes à partir de l’entrée dans la parentalité » ([57]) explique la différence des parcours professionnels entre les femmes et les hommes.

1.   Un impact négatif de la parentalité sur le parcours professionnel des femmes

Alors que la parentalité n’a pas d’impact ou presque sur l’évolution professionnelle des hommes, elle est, au contraire, un élément déterminant du parcours professionnel des femmes. À propos de la Norvège, pays où les congés parentaux sont égaux entre hommes et femmes, M. Tristan Champion constate une conscience collective que les hommes et les femmes seront, à un moment de leur carrière, contraints de s’absenter pour embrasser la parentalité ([58]). Le risque « parental » pèse donc de manière égale pour les hommes et les femmes.

A contrario, en France, le risque « parental » est un « risque maternité » pesant exclusivement sur les femmes. À compétences égales, les employeurs peuvent être tentés de préférer un homme qui n’aura pas à interrompre sa carrière au détriment d’une jeune femme en âge d’avoir des enfants. Ainsi, en moyenne, 31 % des mères ont réduit leur activité professionnelle contre seulement 9 % des pères. Elles sont même 37 % à avoir arrêté de travailler au moins un mois pour seulement 5 % des hommes ([59]).

Afin de réaliser l’écrasante part des tâches domestiques et parentales qu’elles assument, les femmes sont souvent contraintes à une articulation difficile entre vie professionnelle et vie familiale. Comme l’explique M. Pierre Pora à vos rapporteures, la parentalité entraîne une multitude d’effets sur la participation des femmes au marché du travail : arrêt d’activité, passage à temps partiel, absence pour raisons familiales, recherche d’un emploi proche du domicile ou en-dessous de son niveau de diplôme sont autant d’efforts consentis par les femmes pour concilier leur vie professionnelle et familiale.

Loin d’être limités à une catégorie de personnes, ces effets concernent l’ensemble des familles. Ainsi, y compris pour les professions libérales qui ont pourtant une plus grande maîtrise a priori de leur organisation professionnelle, l’arrivée des enfants a un impact sur leur productivité. Le concept des « mompreneuses » qui choisissent le statut d’autoentrepreneur pour la flexibilité horaire qu’il offre illustre bien cette problématique.

De plus, même dans les familles où les femmes mènent des carrières considérées comme plus prometteuses que leurs conjoints avant l’arrivée des enfants, elles consentent davantage à réduire leur activité professionnelle que leur conjoint. Le biais de genre dans l’investissement des pères et des mères dans la parentalité est donc bien réel. Pourtant, selon le dernier baromètre de l’association française des managers de la diversité sorti en mai 2025, près de la moitié des hommes ne font pas le lien entre le partage des tâches au sein des couples et l’égalité professionnelle ([60]).

Pour les mères solos, l’impact de monoparentalité peut être déterminant sur leur participation au marché du travail. En effet, les mères isolées sont particulièrement exposées aux emplois précaires et mal rémunérés. Ainsi, 28,7 % des mères isolées travaillent à temps partiel ([61]). Si certaines choisissent d’y recourir, pour d’autres en revanche, il prend la forme d’un temps partiel subi : 47 % des mères solos ayant un emploi à temps partiel souhaiteraient travailler davantage ([62]). Dans ce contexte, face aux difficultés rencontrées sur le marché du travail, certaines mères solos qui peinent à trouver du travail du travail, peuvent finir par abandonner leurs recherches. Mme Hélène Périvier, entendue par vos rapporteures, évoque par exemple un phénomène de « chômage de découragement » ([63]).

En outre, le nombre d’enfants a un impact considérable sur le taux d’emploi des mères solos : alors que 80 % des mères en couple sont en emploi, ce taux baisse à 76 % chez les mères solos et tombe même à 39 % pour celles qui ont deux enfants ou plus, dont un de moins de trois ans ([64]).

2.   Un phénomène de discrimination persistant à l’encontre des mères

Selon le dernier baromètre de l’association française des managers de la diversité, plus de six femmes sur dix estiment qu’être mère est un frein à la carrière alors qu’être père ne l’est pas. Une opinion partagée par seulement 49 % des hommes, ce qui démontre la méconnaissance des hommes sur le poids de la parentalité pour les femmes. Pourtant, 27 % des femmes se déclarant discriminées au travail estiment que cette discrimination est liée à la grossesse ou au congé maternité ([65]).

Lorsqu’elles exercent une activité professionnelle, les mères doivent composer avec une suspicion de sous-investissement émanant de leurs collègues et/ou supérieurs hiérarchiques. Selon le dernier baromètre de l’association française des managers de la diversité, plus de six femmes sur dix ont le sentiment de devoir en faire plus pour être reconnues dans leur travail. La Fondation des femmes estime que cette suspicion ne commence à se dissiper que lorsque l’enfant atteint la scolarisation soit autour de six ans.

De ce point de vue, le retour à l’emploi après un congé maternité constitue un moment charnière dans la carrière professionnelle des mères où elles sont soumises à des injonctions contradictoires : d’une part, si elles s’investissent pleinement dans leur travail, elles risquent d’être perçues comme de « mauvaises mères ». À l’inverse, si leur engagement parental prend le dessus sur leur carrière, elles seront considérées comme peu investies dans leur travail.

Tel que le résume Mme Thi Nhu An Pham, auteure de La Reprise : Le tabou de la condition des femmes après le congé maternité entendue par vos rapporteures, les femmes sont confrontées au mythe de la « wonder woman », c’est-à-dire qu’elles doivent à la fois exceller dans leur travail et dans leur rôle maternel.

3.   Une pénalité maternelle exacerbée pour les mères solos

L’injonction de « travailler comme si tu n’avais pas d’enfant et d’avoir des enfants comme si tu ne travaillais pas », régulièrement dénoncée par les mères auditionnées, est particulièrement forte pour les mères solos.

Comme le souligne Johanna Luyssen dans son livre Mères solos : Le combat invisible, les mères solos subissent durement la pénalité maternelle. Contraintes de surinvestir la sphère familiale, elles subissent particulièrement la suspicion de sous-investissement professionnel qui pèse sur les femmes. De ce fait, de nombreuses mères solos peuvent choisir de ne pas révéler leur situation personnelle à leurs collègues ou à leur employeur, par crainte de cette suspicion ([66]).

De manière concrète, chez les cadres, la situation de mère solo mène à renoncer à des opportunités utiles à l’évolution de carrière. Elles sont souvent contraintes de renoncer aux déplacements professionnels, et participent moins à la vie sociale de l’entreprise, en particulier les moments conviviaux après le travail.

En parallèle, dans les emplois précaires (nettoyage, grande distribution, aide à domicile par exemple), la monoparentalité entraîne les mères vers une « pauvreté laborieuse » selon Marie-Clémence Le Pape, maîtresse de conférence et co-auteure du livre Idées reçues sur les familles monoparentales. Ainsi, « près d’une mère seule sur cinq est pauvre alors qu’elle a un emploi. Ce ne sont que 5 % des mères en couple » ([67]) .

En outre, les mères solos composent avec un sentiment de culpabilité difficile à dissiper. Shane Love, créatrice de podcast Hello solos, en témoigne en ces termes : « En France, au travail, on vous demande de faire 9 heures-18 heures, et si vous partez à l’heure, on vous fait comprendre que vous prenez votre après-midi. Quant à l’école, qui ferme à 18 heures, on vous fait bien comprendre que les enfants ne doivent pas y rester jusqu’au soir car ça les épuise. La déesse Culpabilité plane donc quoi que vous fassiez » ([68]).

B.   Une responsabilité parentale inéquitable qui fragilise les parcours de vie des femmes

1.   Un risque réel d’épuisement pour les mères

L’organisation actuelle de la parentalité, reposant en grande partie sur les femmes, peut avoir des effets néfastes sur leur santé. Les femmes font face à un risque réel d’épuisement souvent méconnu. Selon l’historienne Michelle Perrot, les femmes ont même longtemps été encouragées au surmenage. Dans son enfance, elle a ainsi longtemps entendu qu’« une femme doit être levée la première et couchée la dernière » ([69])

De manière générale, les femmes font face à un tiraillement constant entre la vie professionnelle et familiale qui ne trouve pas d’équivalent chez les hommes. Alors que ces derniers évoquent en général leurs loisirs ou l’actualité sportive lors des pauses au travail, les femmes tendent à partager leurs inquiétudes en particulier concernant les enfants, entre autres ([70]).

Dès la naissance de l’enfant et la fin du congé paternité, les femmes assument seules – comme nous l’avons vu – l’essentiel des tâches domestiques et parentales. Or, cet isolement peut favoriser la dépression post-partum qui touche environ 20 % des femmes aujourd’hui ([71]). Surgissant dans les semaines suivant la naissance de l’enfant, la dépression post-partum se manifeste, entre autres, par un manque d’énergie, des difficultés à s’occuper du bébé, une profonde tristesse et des pensées négatives par exemple. « Vers qui me tourner ? », « Suis-je folle ? », « Mon bébé va-t-il avoir des séquelles de ce que je vis ? » s’interrogent les mères concernées ([72]). Non détectée, la dépression post-partum peut déboucher sur le suicide, première cause de la mortalité maternelle dans l’année qui suit la naissance de l’enfant ([73]).

Loin de s’atténuer, le risque d’épuisement est présent y compris lors des périodes de vacances : 70 % des femmes rentrent fatiguées de leurs congés alors que 67 % des hommes se sentent plus reposés que leurs conjointes après les vacances ([74]). En d’autres termes, les femmes « ne sont jamais autant en vacances que les hommes » ([75]).

2.   Un coût économique élevé de la parentalité pour les femmes

La parentalité comporte pour les femmes, outre les impacts négatifs de la surcharge parentale sur leur santé, une pénalité économique particulièrement dommageable.

a.   Un impact négatif de la parentalité sur les revenus

Avant même la naissance de l’enfant, son arrivée engendre une multitude de dépenses comme des frais médicaux résiduels liés aux dépassements d’honoraires ou bien non couverts, souvent pris en charge par les mères d’autant plus lorsqu’ils sont assimilés aux « petits maux de la grossesse ». Ainsi, on distingue au moins quatre postes de dépenses liés à la grossesse et en grande partie assumés par les femmes : frais de santé, surplus de l’hôpital pour l’accouchement, garde-robe adaptée et matériel (livres et applications par exemple) ([76]).

À ces petites dépenses, s’ajoute une perte de revenus significative qui commence dès le congé maternité. Pour rappel, les congés sont, pour l’essentiel, rémunérés, par l’Assurance maladie, sous forme d’indemnités journalières plafonnées. Selon les calculs de la Fondation des femmes, une femme et un homme qui auraient des revenus bruts proches du salaire minimum interprofessionnel de croissance (Smic) seraient confrontés à une perte de salaire d’environ 26 % lors de leurs congés. Toutefois, le congé maternité étant considérablement plus long que le congé paternité (16 semaines contre 28 jours), la mère devrait s’attendre à une perte de 1 695 euros contre seulement 379 euros pour le père. Cet écart est encore plus flagrant pour les hauts revenus dont le montant dépasse le plafond de l’indemnité journalière. Ainsi, une femme touchant environ 6 500 euros bruts par mois perdrait environ 13 997 euros de revenus contre 3 124 euros pour un homme touchant le même salaire.

Ces écarts de revenus sont, par la suite, accentués lorsque les mères réduisent leur activité pour prendre soin des enfants, par exemple en se tournant vers le congé parental ou le temps partiel. Le graphique ci-dessous du Conseil d’analyse économique (CAE) illustre l’impact de la naissance du premier
enfant sur les revenus du travail pour les femmes et les hommes.

Ainsi, selon M. Pierre Pora, « dix ans après l’arrivée du premier enfant, les 20 % de femmes qui peuvent prétendre aux salaires les plus faibles perdent environ 25 % de leurs revenus du travail, contre 9 % pour celles qui peuvent prétendre aux salaires les plus élevés ». Alors qu’en moyenne l’écart de rémunération entre les salariés n’ayant pas d’enfants est de 5,8 % en 2022, il atteint 28,2 % entre les mères et les pères.

Un écart qui s’accentue avec le nombre d’enfants puisqu’il atteint 40,9 % entre les mères et les pères de trois enfants ([77]). Il s’explique, entre autres, par le ralentissement de la carrière des femmes après la naissance des enfants. Le graphique ci-dessous présente des conclusions similaires, il détaille l’impact de l’arrivée de chaque enfant sur le salaire des parents.

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À l’échelle européenne, la France se situe dans une position intermédiaire sur le child penalty estimée à 38 % ([78]), bien loin des pays nordiques où cette pénalité est faible (entre 15 % et 20 % ([79])) mais proche d’autres pays tels que la Belgique ou encore l’Italie. Elle est tout de même mieux située que l’Allemagne où la pénalité maternelle avoisine les 60 % ([80]). Au total, selon le CAE, la pénalité parentale représente 90 % des inégalités de revenus entre les sexes.

b.   Le lourd coût de la séparation pour les mères

Au-delà de l’impact global de la parentalité sur les revenus des femmes, lorsque les couples se séparent, la mère qui a la garde de l’enfant doit assumer une série de dépenses sans le soutien de son ancien conjoint. Ainsi, dans le Grand Est par exemple, alors qu’au moment de la séparation, les hommes perdent environ 7 % de leur niveau de vie, celui des femmes subi une baisse de l’ordre de 20 % ([81]). Au niveau national, le Sénat estime qu’« une femme séparée sur trois bascule sous le seuil de pauvreté l’année de la séparation » ([82]).

Outre les inégalités de patrimoine, la baisse de niveau de vie est aggravée par la présence d’enfants à charge. Dans le Grand Est, une femme séparée sans enfant à charge perd environ 20 % de son niveau de vie à la séparation (seulement 6 % pour l’homme) tandis qu’une femme avec au moins un enfant en garde alternée atteint les - 22 % de niveau de vie (contre 10 % pour le père) ([83]).

De manière concrète, les femmes subissent de plein fouet les inégalités salariales entre hommes et femmes tout en reprenant à leur charge, l’essentiel des dépenses parentales, au premier rang desquelles le logement. Comme le souligne, à juste titre le Sénat, la baisse de niveau de vie s’enracine dans le temps puisque quatre ans après la séparation, la moitié des mères garde un niveau de vie inférieur à celui précédant la séparation.


La baisse du niveau de vie a un impact direct sur le niveau de vie des enfants. La surcharge des dépenses parentales assumées par les mères seules peut faire basculer la famille dans la pauvreté, dans la durée. Le tableau ci-dessous présente le niveau de vie des enfants selon le type de famille et le mode de garde. Il apparaît clairement que 39 % des enfants vivant dans une famille monoparentale sont en situation de pauvreté contre seulement 18 % des enfants vivant dans un foyer bi-parental. Ainsi, l’inégale répartition des tâches parentales et des dépenses parentales au détriment des mères a une incidence directe sur le niveau de vie des enfants.

Source : Sénat, Délégation aux droits des femmes, « Familles monoparentales : pour un changement des représentations sociétales », rapport d’information n° 485 (2023-2024), tome I, Mmes Colombe Brossel et Béatrice Gosselin, rapporteures, mars 2024.

 

 

Partant de ce constat, vos rapporteures relèvent que pour l’ensemble des parents, la conciliation entre vie privée et vie familiale est un facteur déterminant dans leurs choix de fécondité. De ce fait, les inégalités de répartition des tâches domestiques et parentales pèsent, en partie, sur le taux de natalité. Comme le signale, à juste titre, le CAE, « la stabilisation des taux de fécondité passe donc par le travail des femmes et une meilleure répartition des tâches domestiques et du temps dédié aux enfants au sein des couples » ([84]). En d’autres termes, l’égalité dans la parentalité est à la fois une source d’émancipation pour les femmes et une réponse aux inquiétudes démographiques croissantes.

De plus, vos rapporteures sont favorables au versement des allocations familiales dès le premier enfant. Cette mesure permettrait de réaffirmer le caractère universel des prestations familiales qui est un marqueur historique de la politique familiale en France. Si des divergences existent sur les voies de financement de cette mesure, vos rapporteures relèvent a minima qu’un réel consensus est possible sur cette mesure. Deux propositions de lois récentes, l’une portée par Mme Anne Bergantz (examinée en commission) et l’autre par M. Édouard Bénard (adoptée en séance publique) démontrent qu’un espace de discussion existe sur cette thématique y compris dans une Assemblée fragmentée.

Recommandation n° 1 : prévoir un versement des allocations familiales dès le premier enfant.


 


   DEuxième PARTIE : Avancer vers l’égalité dans la parentalité

Partant de ces différents constats, vos rapporteures défendent une vision positive de la parentalité qui permette d’avancer vers l’égalité. De ce point de vue, il semble fondamental de faciliter et favoriser un investissement équitable des deux parents. En l’état, l’essentiel des responsabilités domestiques et parentales repose sur les mères et peut entraîner un impact négatif sur leur santé et leurs revenus. Pourtant, de nombreux pères souhaitent s’investir davantage pour leurs enfants. La table ronde sur la paternité organisée par vos rapporteures, a particulièrement mis en avant cette aspiration.

Dans ce contexte, une autre vision de la parentalité est possible. Ailleurs, elle existe déjà. Les pays scandinaves et plus près de nous, l’Espagne ont fait d’une parentalité égalitaire un axe majeur de leur politique familiale. Ces pays ont un point commun : leur modèle passe systématiquement par un plus grand investissement des pères, dès la naissance des enfants. En d’autres termes, avancer vers l’égalité contribue à soulager les mères des fortes injonctions pesant sur elles tout en répondant à une aspiration croissante des pères.

I.   soutenir une parentalité positive et égalitaire

A.   promouvoir une vision égalitaire de la parentalité dans la société

1.   Dès le plus jeune âge, inculquer une vision égalitaire des tâches domestiques et parentales

Alors que les stéréotypes de genre sur les rôles des mères persistent chez les adultes et se transmettent aux enfants, la parentalité égalitaire doit être promue dès le plus jeune âge. En effet, un enfant issu d’une famille où la mère prend à sa charge l’essentiel des tâches domestiques et parentales verra cette répartition comme normale voire nécessaire. Dans le même temps, puisque ces tâches sont dévalorisées car considérées comme féminines, il ne verra aucune incitation à les entreprendre. Pourtant, la maîtrise des tâches domestiques est un levier fort d’autonomie et d’indépendance qu’il convient d’inculquer aux enfants.

De ce fait, en s’inspirant des exemples nordiques où les cours d’activités domestiques sont courants et enseignés à l’école ([85]), vos rapporteures proposent de mettre en place un système similaire pour tous les enfants, quel que soit leur genre. Les filles et les garçons apprendraient à l’école des notions élémentaires de cuisine et de ménage ainsi que de bricolage et de réparation, afin de lutter contre les stéréotypes de genre.

La mesure devrait également permettre de revaloriser les tâches domestiques. Plutôt que d’être assimilées à des corvées, ces tâches devraient être mises en avant comme des compétences utiles favorisant l’autonomie et l’indépendance des enfants.

Par ailleurs, ces cours rejoindraient un objectif d’amélioration de l’éducation alimentaire des Français, promu par le Gouvernement. Alors qu’un jeune âgé de 15 à 24 ans sur cinq ne saurait pas différencier une courgette d’un concombre ([86]), ces cours répondraient, de manière indirecte, à un besoin de santé publique.

Recommandation n° 2 : mettre en place des cours d’activités domestiques qui pourraient être dispensés à l’école ou au collège afin d’inculquer à tous les enfants, garçons et filles, des compétences domestiques.

2.   Promouvoir une répartition équitable des responsabilités parentales

Parallèlement, la promotion d’une parentalité égalitaire devrait viser l’ensemble de la société. De nombreux interlocuteurs espagnols ont souligné à vos rapporteures l’importance des représentations sociales. Ils ont, par exemple, cité l’évolution de la fréquentation de l’espace urbain depuis la réforme du congé paternité égalitaire dans le pays. Ils remarquent une présence plus forte de pères dans les parcs prenant soin de leurs enfants. Elle démontre une évolution de la place dans l’espace public et dans la société de la parentalité et notamment de la paternité, rendue possible par de récentes réformes.

En France, il semble nécessaire de mettre sur pied des campagnes nationales contre les stéréotypes de genre concernant spécifiquement la parentalité. Elles pourraient par exemple cibler en priorité les pères, sur le modèle scandinave. Comme l’a expliqué M. Tristan Champion à vos rapporteures, dès les années 1970, le gouvernement suédois, pionnier en matière de parentalité égalitaire, s’est attelé à ce changement des représentations avec une pointe d’humour. En 1978, le gouvernement a diffusé des affiches prônant le Barnledig pappa, c’est-à-dire le congé paternité. Ainsi, un ancien champion national d’haltérophilie, Lennart Dahlgren, a pris la pose avec un bébé pour cette campagne ([87]).

De plus, souvent associée aux femmes, la capacité à prendre soin des enfants devrait concerner l’ensemble de la société. Comme le souligne l’association suédoise Män auprès du Monde, « le “care”, cette capacité à prendre soin des autres, n’est pas quelque chose qu’on associe aux hommes. Et pourtant, c’est en train de changer, parce que de nombreux pères s’occupent de leurs enfants, les réconfortent et les soutiennent » ([88]). Des campagnes nationales pourraient contribuer à changer l’imaginaire collectif autour du soin des enfants. À cet égard, elles pourraient par exemple porter sur les métiers de la petite enfance qui souffrent d’une image réductrice voire négative alors même qu’ils sont essentiels au développement des enfants.

Recommandation n° 3 : mettre en place des campagnes nationales contre les stéréotypes de genre sur la parentalité et le soin aux enfants.

Ce changement de paradigme devrait s’accompagner d’une évolution lexicale vers une terminologie plus neutre. Comme l’explique à vos rapporteures l’association espagnole Plataforma para permisos personales e intransferibles (PpiiNa), l’usage de termes neutres est un pilier d’une parentalité égalitaire.

En premier lieu, il permet d’inclure toutes les familles, notamment les familles homoparentales.

De plus, le recours à des expressions genrées contribue à cantonner le soin aux enfants à une compétence réservée aux mères. Comme l’a souligné Mme Julia Kerninon auprès vos rapporteures, le recours à des expressions telles que « école maternelle » véhicule l’idée que seules les femmes peuvent et savent prendre soin des enfants. À l’inverse, l’emploi d’un terme neutre tel que « école pré-élémentaire » ne donne aucune indication sur la personne prenant soin de l’enfant. Mieux encore, elle insiste sur le caractère éducatif de l’accueil du jeune enfant. En ce sens, elle reflète la réalité du travail effectué dans le secteur de la petite enfance.

En Espagne, la même logique est appliquée aux congés maternité ou paternité. Au moment de la réforme de 2021 instaurant un congé égalitaire entre les mères et les pères, le gouvernement espagnol a fait le choix de rebaptiser les deux congés en « prestation pour naissance et soin du mineur ». Là encore, cette dénomination présente l’avantage de mieux refléter la réalité. Comme l’ont également souligné des interlocuteurs français, le terme congés renvoie au loisir et aux vacances. Or, quiconque ayant déjà pris un congé parental (maternité, paternité, adoption, parental) sait que l’arrivée d’un enfant est loin d’être de tout repos.

Tenant compte de la richesse et de la plus-value symbolique de cette terminologie égalitaire, vos rapporteurs suggèrent d’avancer en ce sens.

Recommandation n° 4 : adopter une terminologie neutre favorisant une vision égalitaire de la parentalité.

 

3.   Promouvoir une meilleure information des deux parents sur le parcours parental

Au cours des auditions, vos rapporteures ont systématiquement veillé à interroger les acteurs de la parentalité sur la lisibilité du système. À la question « selon vous, les dispositifs actuels d’accompagnement à la parentalité sont-ils suffisamment lisibles pour les parents ? », l’écrasante majorité des personnes auditionnées a insisté sur la complexité actuelle du système des congés parentaux et de modes de garde. Ainsi, selon une étude récente du Haut conseil de la famille, de l'enfance et de l'âge (Hfcea), au moins 46 % des parents s’estiment mal informés sur les politiques de parentalité ([89]). Par ailleurs, la diversité des dispositifs de congés et des termes employés pour les désigner (maternité, paternité, congé de naissance, congé parental, Prepare…) n’aide pas à leur lisibilité.

La méconnaissance des dispositifs existants est problématique au moins à deux égards : en premier lieu, elle nourrit un ressentiment à l’égard des politiques publiques qui sont de fait jugées inefficaces. 52 % des parents estiment que les politiques destinées aux parents ne les aident pas suffisamment, un mécontentement qui monte à 57 % chez les femmes ([90]).

De plus, elle engendre un phénomène de non-recours chez les parents que la politique est pourtant censée accompagner. Ainsi, en pensant ne pas y avoir le droit, de nombreux pères et mères au chômage ne demandent pas les indemnisations auxquelles ils auraient droit au titre des congés paternité et maternité. En 2021 par exemple, au moins 27 % des pères éligibles au congé paternité n’en ont pourtant pas fait la demande ([91]). Il en va de même pour les pères en temps partiel et le faible recours à la PrePare ([92]). Les mères solos sont également concernées par ce défaut d’information. Comme le souligne la Collective des mères isolées, de nombreuses mères solos ignorent l’existence de la case « T » dans la déclaration d’impôts qui leur permettrait de bénéficier d’une majoration des parts dans le calcul des impôts.

La méconnaissance concerne également les politiques visant les parents d’adolescents. Elle a été constatée par vos rapporteures ainsi que par la commission parentalité, présidée par Mme Hélène Roques et M. Serge Hefez, entendus par vos rapporteurs. Ils posent la problématique en ces termes « De nos auditions, il est apparu que les parents méconnaissaient leurs droits et qu’il existait de fortes disparités territoriales d’accès aux droits. Or, il ne peut exister de devoirs sans droits ». Il semble donc essentiel de remédier à la méconnaissance des dispositifs autour de la parentalité. C’est pourquoi, vos rapporteures suggèrent là aussi de faciliter la compréhension du système à travers des campagnes d’information nationales. Elles devraient porter en particulier sur le système de congés et de modes d’accueil ainsi que sur les dispositifs prévus à l’adolescence.

Recommandation n° 5 : à travers des campagnes d’information nationales, renforcer l’information des parents sur les dispositifs d’accompagnement à la parentalité.

Ces campagnes devraient fournir une information la plus complète possible qui souligne, le cas échéant, le caractère obligatoire des dispositifs. En effet, comme l’a justement souligné Mme Elise Marcende à vos rapporteures, alors que le site service.public.fr mentionne explicitement le caractère obligatoire du congé maternité, il néglige d’en faire de même pour la partie obligatoire du congé paternité. Or, cette omission peut avoir un impact sur le niveau d’information des parents et mérite donc d’être corrigée.

Pour amplifier l’efficacité de ces campagnes nationales, elles pourraient s’appuyer sur des structures et dispositifs existants. Ainsi, les Centres d’information sur les droits des femmes et des familles (CIDFF), les Maisons des femmes, les maisons des 1 000 jours et la protection maternelle et infantile (PMI) pourraient participer à ces campagnes d’information.

En zone rurale, les Maisons France Services pourraient par exemple organiser des séances d’information sur les dispositifs existants. De la même manière, les permanences des CAF réalisées dans les Maisons France Services pourraient davantage prendre en compte la parentalité et/ou cibler davantage les parents.

Recommandation n° 6 : s’appuyer sur les structures de proximité (Maisons des femmes, CIDFF, Maisons France Service) afin d’accroître le niveau d’information des parents sur les politiques d’accompagnement à la parentalité.

L’application des 1 000 premiers jours, développée à la suite de la Commission des 1 000 jours, est en cours d’évolution. En effet, dans sa première mouture, elle n’a pas rencontré le succès escompté. Il semble donc nécessaire d’inviter les CAF et les professionnels de santé à relayer auprès des parents l’existence de l’application. Elle devrait également être portée à la connaissance des parents lors des séances de préparation à la naissance et à la parentalité.

Dans sa nouvelle version, l’application pourrait participer à cet effort d’information. Elle pourrait proposer du contenu informatif sur la parentalité et idéalement une carte interactive sur les dispositifs proches de l’utilisateur. Elle répondrait alors à une demande des associations qui accompagnent les parents, à l’instar de Maman Blues.

Recommandation n° 7 : mieux faire connaître l’application des 1 000 premiers jours qui devrait recenser du contenu informatif sur la parentalité.

 

B.   Impulser une meilleure prise en compte de la parentalité dans le monde professionnel

1.   Promouvoir la parentalité comme un sujet clé de la vie au travail pour toutes et tous

a.   Favoriser la prise en compte de la parentalité dans le monde professionnel

Parallèlement, il est nécessaire de promouvoir la prise en compte de la parentalité au travail. L’articulation entre vie professionnelle et vie familiale s’apparente à un défi du quotidien qui est même considéré par 77 % des Français comme « un parcours du combattant » ou « jeu d’équilibriste » ([93]). Alors que 89 % des salariés français ont des responsabilités familiales ([94]), un nouvel équilibre apparaît nécessaire.

Dans cette perspective, vos rapporteures relèvent qu’un certain nombre d’entreprises mènent déjà des politiques ambitieuses en matière de parentalité. Elles relèvent la richesse des dispositifs existants. S’agissant souvent de grands groupes, ils envisagent la parentalité comme un levier supplémentaire de leur politique des ressources humaines et de RSE permettant d’attirer des talents. Ils proposent par exemple un aménagement des horaires pour les salariées enceintes, des participations aux frais de garde, des indemnisations supplémentaires lors des départs en congés maternité ou paternité, un accès facilité aux congés enfants malades, entre autres dispositifs.

Ces employeurs répondent ce faisant à une aspiration croissante des jeunes parents qui en font un critère de fidélité à l’entreprise. À ce titre, 53 % de parents de moins de 35 ans ont par exemple envisagé de changer de travail pour aller dans une entreprise considérée comme « family friendly » ([95]).

En sens inverse, certaines organisations semblent moins tenir compte de ces nouveaux enjeux. Ainsi, la confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) a estimé auprès de vos rapporteures que « la parentalité demeure avant tout un projet personnel […]. Le chef d’entreprise peut tout simplement ignorer la situation personnelle du salarié (par exemple sa monoparentalité). Cela relève de sa vie privée, voire intime ». S’il est clair que les PME ne peuvent disposer des mêmes moyens que les grands groupes et qu’elles rencontrent des difficultés spécifiques, une telle vision de la parentalité va, pour le moins, à rebours des aspirations des salariés.

C’est pourquoi, face aux difficultés et disparités persistantes selon les milieux professionnels malgré des démarches pionnières initiées tant dans le secteur public que privé, vos rapporteures plaident en faveur d’une meilleure prise en compte de la parentalité au travail. Elle pourrait par exemple prendre la forme d’une plus grande intégration de la parentalité dans les dispositifs RSE.

Recommandation n° 8 : intégrer davantage la parentalité dans les dispositifs RSE.

De ce point de vue, la généralisation de la charte de la parentalité à l’ensemble des entreprises de plus de 50 salariés permettrait de les inciter à se saisir de cette thématique. La signature de cette charte impulserait de bonnes pratiques en matière de parentalité sans pour autant imposer un cadre rigide. Par ce même biais, les employés et éventuels candidats auraient accès à une meilleure information sur les engagements de l’entreprise sur ce point.

Recommandation n° 9 : généraliser la signature de la charte de la parentalité à l’ensemble des entreprises de plus de 50 salariés.

Vos rapporteures suggèrent également d’insérer la parentalité dans le champ de la négociation collective. L’article R 2242-2 du code du travail liste les domaines d’actions possibles permettant d’atteindre l’égalité professionnelle. Il cite par exemple les conditions de travail ou encore l’articulation entre l’activité professionnelle et la vie personnelle et familiale. Il est proposé de préciser ce dernier domaine avec une référence explicite à la parentalité comme facteur de pénalités, en particulier pour les femmes.

Recommandation n° 10 : modifier l’article R 2242-2 du code du travail afin d’intégrer la parentalité dans le champ des négociations d’entreprises relatives à l’égalité professionnelle.

De la même manière, alors qu’une réforme de l’index égalité professionnelle est envisagée, il semble judicieux d’inclure des critères sur la parentalité et l’articulation entre la vie professionnelle et familiale dans le nouvel indicateur, d’autant que la parentalité est, comme on l’a vu, un fort facteur d’inégalité professionnelle entre les femmes et les hommes.

Recommandation n° 11 : dans le cadre d’une réforme de l’index égalité professionnelle, intégrer des critères sur la parentalité au nouvel indicateur.

b.   Accorder une attention spécifique aux « aléas de la vie » liés au travail

De manière plus large, vos rapporteures remarquent que les politiques d’accompagnement à la parentalité tiennent peu compte des « aléas de la vie ». Si des dispositifs existent par exemple le congé de deuil ou bien le parcours de séparation récemment lancé par la CAF, ils ne sont, pour l’heure, pas harmonisés. De plus, les cas de changements de la vie liés au travail, déménagements, mutations ou expatriations par exemple, ne sont pas toujours pensés à l’échelle nationale.

Il conviendrait donc de lancer une réflexion d’ensemble sur la prise en compte des aléas de la vie afin de mieux articuler les différents dispositifs entre eux. Une telle réflexion permettra d’identifier clairement les besoins d’accompagnement des parents afin d’y apporter des solutions concrètes et efficaces.

Des dispositifs pourraient par exemple mieux prendre en compte l’impact de ces aléas sur la santé mentale des employés ou des agents concernés. De ce point de vue, pour certains corps de métiers où le travail d’un des parents a un impact notable sur le foyer, la mise en place d’un « Plan Familles » sur le modèle de celui réalisé par le ministère des Armées pourrait être pertinente.

Recommandation n° 12 : accorder une attention particulière aux différents « aléas de la vie » liés au travail dans les politiques d’accompagnement à la parentalité.

2.   Intégrer les contraintes de la parentalité dans l’organisation du travail

Une réflexion générale sur les horaires de travail mériterait d’être menée. Auprès de vos rapporteures, de nombreuses personnes auditionnées ont rappelé que pour les métiers de bureau, la tenue de réunions clés à certains horaires, par exemple avant neuf heures ou après dix-huit heures, horaires auxquels la plupart des parents rejoignent leurs enfants, constitue une difficulté réelle. Les parents, tout particulièrement les mères, sur qui reposent le plus les ajustements entre vie professionnelle et vie familiale, sont contraints de s’absenter ou de trouver une solution de garde ce qui engendre une multitude de complications pratiques.

Dans d’autres corps de métiers, la difficile articulation entre contraintes parentales et travail est liée aux horaires décalés, fractionnés ou atypiques, souvent accompagnés de temps partiel. Ces difficultés touchent en particulier les femmes, puisqu’elles sont surreprésentées dans les métiers ayant recours aux horaires décalés et au temps partiel. Ainsi, 94 % des aides à domicile, 90 % des aides‑soignantes, 87 % des infirmières 80 % des agentes de nettoyage sont des femmes. Les horaires flexibles ou décalés, les journées fragmentées, les longues amplitudes ou encore l’imprévisibilité des emplois du temps qui sont courants dans ces métiers rendent difficile la conciliation entre vie professionnelle et vie personnelle pour les femmes. Cela est d’autant plus vrai pour les mères solos, surreprésentées dans ces métiers, pour qui les difficultés s’amplifient.

Vos rapporteures préconisent donc sur le modèle du droit à la déconnexion, de lancer une réflexion sur un « droit au respect de la vie familiale ». Ce dernier pourrait prendre la forme d’une meilleure conciliation ou limitation des horaires atypiques ou bien un encadrement de certaines plages horaires. En Norvège par exemple, il est d’usage d’éviter les réunions stratégiques passé une certaine heure pour éviter d’empiéter sur la vie personnelle des salariés.

Recommandation n° 13 : lancer une réflexion sur l’impact des horaires sur l’articulation entre la vie professionnelle et privée en tenant compte des spécificités des différents corps de métier.

Dans le même temps, reprenant une proposition effectuée par la commission parentalité, vos rapporteures plaident pour la mise en place de nouvelles autorisations d’absence permettant aux parents de prendre part aux moments clés de la scolarité (rentrée scolaire, réunions parents-professeurs, sorties scolaires, remises de diplômes, rendez-vous d’orientation…) qui pourraient être de quatre demi-journées par an. En l’état les employeurs font preuve d’une souplesse certaine pour la rentrée scolaire. Il existe donc une première base sur laquelle ce dispositif pourrait être approfondi.

Selon la direction générale de la cohésion sociale (DGCS), la faisabilité de cette mesure est actuellement à l’étude. Vos rapporteures appellent à une mise en œuvre effective et rapide de ces autorisations d’absence en lien avec la parentalité.

Recommandation n° 14 : accorder aux parents des autorisations d’absence pour participer aux moments clés de la scolarité de leurs enfants de l’école maternelle au lycée, estimées à 4 demi-journées/an par la Commission parentalité.

 

 


II.   faciliter l’arrivée de l’enfant en améliorant l’accompagnement des parents en amont

Outre ces préconisations, vos rapporteures estiment nécessaire d’offrir un accompagnement à la parentalité qui démarre en même temps que le désir d’enfant et puisse progressivement s’adapter aux besoins des parents.

A.   avant l’arrivée de l’enfant, proposer un accompagnement tenant compte de la diversité des besoins

1.   Accompagner les parents dès le désir d’enfant

a.   Une diversité de parcours d’accès la parentalité à prendre en compte

Dans la mise en place des politiques publiques, il est fondamental de prendre en compte la diversité des parcours des parents pour accéder à la parentalité qui n’est pas suffisamment prise en compte aujourd’hui. En effet, en fonction de la situation du couple, le désir d’enfant peut se manifester très en amont de la grossesse.

Ainsi, l’augmentation de l’infertilité en France qui touche désormais un couple sur quatre ([96]) allonge nécessairement le délai entre le désir d’enfant et son arrivée effective. De plus, alors que les demandes de parcours médical assisté (PMA) augmentent à la suite de la loi bioéthique de 2021, le délai moyen d’attente peut aller de quinze à vingt-quatre mois ([97]). Une durée à peine plus courte que le délai moyen d’attente entre l’octroi de l’agrément d’adoption et le placement en vue d’adoption au sein du foyer estimé à 3,1 ans ([98]), pour les couples se tournant vers cette option. Pour les couples d’hommes qui choisissent d’avoir recours à la gestation pour autrui (GPA), les délais entre le désir d’enfant et la parentalité peuvent atteindre sept ans.

De ce point de vue, il semble judicieux d’ouvrir aux familles ayant recours à l’adoption ou à la PMA dont la fécondation in vitro, une reconnaissance des droits parentaux dès la manifestation d’un projet parental. Cette mesure permettrait à ces familles d’avoir accès à des autorisations d’absence pour les moments précédant l’arrivée de l’enfant.

b.   Des consultations pré-conceptionnelles comme porte d’entrée dans la parentalité

De plus, vos rapporteures recommandent de revaloriser la place et le rôle des consultations pré-conceptionnelles. Ces dernières se concentrent particulièrement sur le volet sanitaire pour l’instant. Toutefois, au vu du contexte actuel, leur champ mériterait d’être élargi pour inclure davantage la question du projet parental. Ainsi, les parents qui en feraient la demande pourraient bénéficier d’un accompagnement spécifique par des professionnels formés sur ces sujets.

Recommandation n° 15 : promouvoir davantage les consultations pré-conceptionnelles, actuellement très concentrées sur la santé mais dont le champ pourrait être élargi au projet parental.

2.   De la préparation à l’accouchement à la préparation à la parentalité

Pour atteindre l’objectif d’une parentalité égalitaire, il est nécessaire de permettre l’implication de l’autre parent dans le projet parental avant la naissance de l’enfant. En effet, si la future mère bénéficie d’autorisations d’absence pour se rendre aux sept rendez-vous médicaux obligatoires, que l’employeur est tenu de respecter, le père ou l’autre parent bénéficie seulement d’autorisations d’absence pour se rendre à trois rendez-vous de suivi médical. C’est pourquoi, afin de l’inclure dans le projet parental, vos rapporteures suggèrent d’étendre aux seconds parents qui le souhaiteraient avec l’accord de la mère, la possibilité d’assister à tous les rendez-vous médicaux.

Recommandation n° 16 : avec l’accord de la mère, permettre à l’autre parent d’assister aux sept rendez-vous médicaux obligatoires de la grossesse.

De plus, en parallèle du suivi médical, les femmes bénéficient de cours de préparation à la naissance et à la parentalité. Ces cours ont pour objectif de « favoriser la participation active [des parents] par une cohérence des actions en continuité, de la période anténatale à la période postnatale », selon la direction de la sécurité sociale.

De manière concrète, la première séance, prévue à l’article L. 2122-1 du code de santé publique prend la forme d’un entretien précoce obligatoire individuel ou en couple adapté à chaque femme ou couple. Réalisé dès la déclaration de grossesse, il doit permettre d’identifier les besoins d’information des parents et de repérer les éventuelles situations de vulnérabilité, entre autres. Les sept séances suivantes sont davantage centrées sur la préparation à l’accouchement.

Toujours dans l’objectif d’inclure le plus possible le second parent, vos rapporteures proposent de consacrer au moins une de ces séances existantes ou une séance supplémentaire au projet parental ouvertes aux seconds parents.

Recommandation n° 17 : consacrer une des séances de préparation à la naissance au projet parental.

3.   En cas de besoin, proposer un arrêt aux futurs parents

La loi n° 2023-567 du 7 juillet 2023 visant à favoriser l'accompagnement psychologique des femmes victimes de fausse couche a créé la possibilité de bénéficier d’un arrêt maladie sans jour de carence la suite d’une interruption spontanée de grossesse ayant lieu avant la vingt-deuxième semaine d’aménorrhée, c’est-à-dire les femmes ayant souffert d’une fausse couche ainsi que les interruptions médicales de grossesse.

Comme le déploiement de ce nouvel arrêt a rencontré des difficultés opérationnelles depuis son lancement le 1er janvier 2024, il est difficile d’évaluer son efficacité.

Pour autant, il semble pertinent d’élargir d’ores et déjà le périmètre de ce dispositif pour viser un public plus large. L’arrêt maladie pourrait ainsi concerner les femmes ayant eu recours à une interruption volontaire de grossesse ou du moins, celles qui le souhaitent pourraient y avoir le droit.

Dans le même temps, dans ces trois cas de figure, les conjoints pourraient également bénéficier d’une autorisation d’absence, à leur demande. Cette mesure aurait vocation à la fois à permettre une présence auprès de la femme après interruption de grossesse et de permettre la prise en compte de son effet psychologique sur son conjoint ou sa conjointe.

Alors que le Royaume-Uni a récemment adopté un congé de ce type, le Women’s committee de la Chambre des communes a insisté sur l’importance d’ouvrir cet arrêt au partenaire. Comme le souligne The Miscarriage Association, le partenaire étant souvent considéré comme moins affecté, il peut se sentir oublié ou négligé dans cette période difficile. Dans ce contexte, l’association anglaise souligne que les hommes peuvent « finir par cacher ou enterrer leurs sentiments afin d’être forts pour leur partenaire » ([99]).

Ce constat rejoint celui de Camille Froidevaux-Metterie. La philosophe souligne que du fait de nombreux stéréotypes de genre persistants, les hommes ne sont pas encouragés à partager leurs sentiments. Évoquant son expérience personnelle lorsque son conjoint a choisi de réaliser un film à propos d’une fausse couche, elle révèle sa prise de conscience ainsi : « l’intensité de la détresse ressentie simultanément par ces deux personnages m’a fait mesurer le mal-être de celui qui les filmait et qui ne pouvait rien dire, ne se sentant ni le droit de se plaindre ni d’être triste » ([100]).

Recommandation n° 18 : renforcer le dispositif d’arrêt en cas d’interruption spontanée de grossesse en élargissant son périmètre aux interruptions volontaires de grossesse. Lors d'une interruption de grossesse quelle qu'elle soit, ouvrir la possibilité au conjoint de bénéficier d’une autorisation d’absence limitée à trois jours.

 

B.   Un suivi du post-partum mieux adapté aux besoins des mères

Il convient de rappeler la diversité des besoins des mères à l’issue de l’accouchement. Accoucher par voie basse ou par césarienne n’a pas les mêmes implications et suppose un suivi médical différent. En ce sens, l’accompagnement dans le post-partum doit être effectué par un personnel soignant conscient et formé à la diversité des situations qui peuvent se présenter. Mais la mère peut aussi avoir besoin de soutien moral et affectif dans ce moment particulier. De ce point de vue, permettre au deuxième parent ou à une personne de confiance de passer la nuit à la maternité pour les mères qui le veulent semble important.

Recommandation n° 19 : permettre au deuxième parent ou personne de confiance de passer la nuit à la maternité, si la mère le souhaite.

Dans cette phase délicate du post-partum, une vigilance particulière doit être entreprise concernant les dépressions post partum, elle pourrait passer par la lutte contre l’isolement des mères.

1.   Une attention spécifique au risque de dépression post-partum

Alors que certaines femmes ne souhaitent pas allaiter, d’autres souhaitent vivement le faire et rencontrent des difficultés. Par ailleurs, l’allaitement est souvent promu comme une solution « économique » pour les femmes en situation de précarité. Or, « le lait maternel est certes gratuit, mais ce n’est pas pour autant qu’il ne coûte rien. Il demande du temps, de la disponibilité, du soutien, de la sécurité » ([101]).

De ce fait, l’allaitement joue de manière significative sur la santé mentale des femmes, soit parce que les femmes sentent une pression sociale pour allaiter soit au contraire qu’elles souhaitent le faire et pour diverses raisons ne peuvent pas. De plus, il s’apparente à une nouvelle responsabilité reposant à titre principal sur la mère y compris lorsqu’elle récupère physiquement après l’accouchement. À ceci s’ajoute parfois un regard négatif de la société sur l’allaitement comme en témoigne l’expulsion récente d’une femme allaitant son enfant à la gare de Nantes ([102]).

C’est pourquoi, pour les femmes qui en feraient la demande, vos rapporteures préconisent de faciliter l’accès à des consultations sur l’allaitement avec des professionnels formés pouvant prodiguer des conseils bienvenus. Si ces consultations existent déjà, elles demeurent difficiles à obtenir. L’accès pourrait être facilité en intégrant des sages-femmes formées spécifiquement formées sur l’allaitement aux programmes de visites à domiciles postnatales.

Recommandation n° 20 : pour les mères qui en feraient la demande, faciliter l’accès des consultations sur l’allaitement avec des praticiens spécifiquement formés.

En outre, une attention particulière devrait être accordée au suivi de la santé mentale. Bien que le baby blues touche entre 50 et 80 % des mères qui accouchent et la dépression post-partum concerne 10 à 20 % des mères dans les semaines suivant l’accouchement, le suivi de la santé mentale des mères à la naissance n’est pas satisfaisant à ce stade ([103]). Comme l’explique Mme Elise Marcende à vos rapporteures, pendant cette période, les femmes traversent de véritables « transformations identitaires » susceptibles de générer une grande souffrance.

De plus, les pères peuvent également être touchés par la dépression post-partum, chez qui elle peut prendre la forme de crises de colère. Il convient de rappeler que la grossesse et la parentalité constituent parfois un élément déclencheur pour les violences conjugales et intrafamiliales. Selon la docteure en psychologie Karine Sadlier, 75 % des passages à l’acte violents ont lieu en rapport avec une question concernant l’enfant ([104]).

C’est pourquoi vos rapporteures recommandent de renforcer, de manière volontariste, la formation des praticiens sur la dépression post-partum et notamment sur ses signes avant-coureurs.

Recommandation n° 21 : renforcer la formation des praticiens sur la dépression post-partum.

Si à l’image des entretiens post-nataux précoces introduits en 2022, des mesures louables ont été prises pour créer des espaces de dialogue avec les deux parents et le personnel soignant, ils mériteraient d’être approfondis. Les besoins de prévention demeurent criants alors que 78 % des parents n’ont jamais entendu parler de post-partum durant le suivi de la grossesse ([105]).

Dans ce contexte, en complément de l’entretien postnatal, vos rapporteures proposent la création d’une consultation facultative et remboursée à 100 % avec un psychologue. Elle pourrait être effectuée dans les trois mois suivant la naissance de l’enfant.

Recommandation n° 22 : en complément de l’entretien postnatal, prévoir une consultation facultative et remboursée à 100 % avec un psychologue à effectuer par les mères dans les trois mois après la naissance.

Pour aller encore plus loin, vos rapporteures plaident pour l’extension du congé de proche aidant au second parent qui pourrait alors venir soutenir la mère souffrant de dépression post-partum. Cette solution constituerait un moyen efficace de rompre l’isolement de la mère et de souder les parents autour de la parentalité.

Recommandation n° 23 : étendre le congé de « proche aidant » au second parent en soutien à la mère souffrant de dépression post-partum.

2.   Lutter contre l’isolement des mères

De nombreuses personnes auditionnées ont signalé à vos rapporteures, l’isolement comme le problème de fond alimentant, parfois de manière silencieuse, les dépressions post-partum. De ce point de vue, le réseau de soutien joue un rôle déterminant dans la capacité du couple à faire face à cette transformation identitaire. De ce fait, certaines populations sont plus vulnérables que d’autres à l’instar des familles migrantes primo-arrivantes qui se trouvent particulièrement isolées. Or, l’insuffisance de ce soutien informel peut favoriser la survenue de la dépression chez les deux parents ([106]).

Partant de ces constats, vos rapporteures suggèrent de prendre toutes les mesures nécessaires pour rompre l’isolement des parents. Comme l’a souligné M. Tristan Champion à vos rapporteures, le succès du modèle parental norvégien réside précisément dans l’efficacité des mesures prises pour rompre l’isolement des parents de nouveau-nés. Il cite notamment la mise en place de groupes de parents à la naissance de l’enfant.

De manière concrète, pour les parents norvégiens, la maternité se charge de mettre en contact les familles qui accueillent un nouveau-né au même moment. En fonction des affinités, ces groupes permettent aux jeunes parents de se lier à d’autres personnes traversant la même étape et donc de trouver une oreille attentive. Ils jouent également un rôle moteur pendant la période de congés où justement chaque parent est amené à passer une période de temps considérable avec l’enfant.

S’inspirant de ce modèle vertueux, vos rapporteurs proposent qu’un tel système soit importé en France, sur la base du volontariat des parents. La mise en relation serait informelle et pourrait être effectuée par la maternité.

Recommandation n° 24 : à la naissance de l’enfant, proposer aux parents volontaires d’être mis en relation avec d’autres parents accueillant leur enfant au même moment dans la même zone géographique afin de lutter contre l’isolement.


III.   revoir les conditions d’accueil du jeune enfant pour favoriser un investissement équivalent des parents

Vos rapporteures relèvent que le système actuel d’accueil du jeune enfant présente des dysfonctionnements dont les mères sont les premières victimes puisqu’elles assurent l’essentiel des tâches parentales. C’est pourquoi elles effectuent des recommandations permettant d’améliorer les dispositifs existants dans l’objectif de faciliter une répartition plus égalitaire de la responsabilité parentale.

A.   une réforme du congé paternité indispensable pour renforcer l’investissement des pères

1.   Une aspiration des pères à s’investir davantage qui peine encore à trouver une traduction concrète

Si de nombreuses personnes auditionnées par vos rapporteures s’élèvent contre l’idée de « nouveaux pères », radicalement plus investis dans la parentalité que les générations précédentes, elles s’accordent sur l’évolution des aspirations et des pratiques. Selon la Fondation des femmes, 82 % des familles déclarent que le père aimerait être davantage présent auprès de l’enfant. De même, dans les familles où les deux parents ont une activité à plein temps et où la mère passe plus de temps avec les enfants, 85 % des pères déclarent aspirer à être davantage présents ([107]). C’est pourquoi, selon la Fondation Jaurès, « l’inégalité des congés de maternité et de paternité/du second parent est donc à la fois une inégalité de droits et de responsabilités » entre les parents ([108]).

Toutefois, dans certains secteurs d’activité le recours au congé paternité est rendu plus difficile par les caractéristiques spécifiques de la profession.

Ainsi, chez les indépendants, seuls 46 % des pères y ont recours. Outre une méconnaissance de leurs droits, un arrêt prolongé pose le risque de perdre des opportunités ou des clients. De plus, les indemnités journalières s’effectuent au forfait pour les indépendants et non en proportion du salaire comme pour les salariés. De ce fait, le montant d’indemnisation est proche de 95 € pour les salariés contre seulement 60 € pour les indépendants.

Plus spécifiquement, le recours à la partie non obligatoire du congé paternité est influencé par différents facteurs, en particulier l’activité professionnelle du père. Structurellement, les fonctionnaires et les salariés en contrat à durée indéterminée (CDI) font davantage usage du congé paternité, un phénomène accentué par la réforme de 2021. Ainsi, en 2021, 91 % des fonctionnaires éligibles et en couple ont fait usage de ce droit et près de 82 % chez les salariés du privé en CDI ([109]).

En sens inverse, les pères en situation précaire y ont moins recours. Ainsi seuls 13 % des pères au chômage éligibles au congé paternité y ont eu recours ([110]) en 2021. Certains pères en situation de chômage pensent – à tort – ne pas y être éligibles. D’autres, par exemple en contrat à durée déterminée (CDD), redoutent les conséquences sur leur carrière et n’osent pas toujours en faire la demande.

Selon l’association les Matermittentes, chez les intermittents du spectacle, le faible taux de recours au congé paternité tient à la modalité de la prise du congé ([111]). Par ailleurs, contrairement au congé maternité et d’adoption, le temps passé en congé paternité n’est pas pris en compte dans le calcul des heures permettant d’obtenir le statut d’intermittent ce qui constitue un frein au recours au congé.

Parallèlement, les pères cadres supérieurs occupant de hautes fonctions n’en font pas la demande parce qu’ils estiment ne pas pouvoir s’absenter sur une telle période.

Un taux de recours plus faible chez les agriculteurs

Pour les agriculteurs, le système diffère. Dans le cadre des congés, ils recourent en général à une allocation de remplacement oscillant entre 180 et 200 €, à défaut des indemnités journalières sont versés à hauteur d’environ 64 €. Ce système est partiellement satisfaisant puisque l’allocation de remplacement permet de maintenir l’activité de l’exploitation, mais l’accès à ce service n’est pas homogène sur le territoire. Par ailleurs, il y a une difficulté réelle à trouver du personnel de confiance pouvant assurer de longues amplitudes horaires, en particulier pour les éleveurs.

Toutefois, malgré ces difficultés, le taux de recours au congé paternité les agriculteurs a considérablement augmenté à la suite de la réforme du congé paternité de 2021. Il est ainsi passé de 28 % en 2013 à 44 % en 2021 ([112]).

Dans ce contexte, une réforme d’allongement du congé paternité pourrait influencer positivement sur le taux de recours surtout si elle s’accompagne d’une harmonisation des IJ avec les salariés et de dispositifs permettant le remplacement des agriculteurs.

Pour autant, depuis la réforme du congé paternité de 2021, on observe une augmentation du recours à cette prestation, signe que les pères souhaitent investir dès la naissance leur rôle de parent. Une aspiration confirmée par les statistiques puisque selon France Stratégie, la réforme de 2021 a permis une augmentation de cinq points du recours au congé paternité entre 2013 et 2021 passant de 62 % à 67 % ([113]). Chez les indépendants, le taux de recours au congé paternité a augmenté à la suite de la réforme de 2021. À cette date, il atteignait 46 % contre seulement 32 % en 2013 ([114]).

Le tableau ci-dessous montre l’évolution du taux de recours au congé paternité selon les caractéristiques socio-démographiques entre 2013 et 2021. On constate une progression significative du recours au congé paternité pour toutes les catégories. Elle démontre l’aspiration des pères à s’investir davantage dans la parentalité, dès la naissance de l’enfant.

Une même observation a été effectuée en Espagne lors de l’allongement progressif du congé paternité à partir de 2019 ([115]). À chaque allongement du congé paternité, les pères ont réagi en prenant la quasi-totalité de la durée légale ([116]).

2.   Un investissement des pères dans la parentalité à mettre en place dès la naissance

Dans un objectif d’égalité entre les femmes et les hommes, il semble fondamental de faciliter un investissement des pères dans la parentalité le plus tôt possible. Les mesures évoquées plus haut sur le parcours parental et la préparation à la parentalité vont dans ce sens. L’allongement du congé paternité pourrait également y contribuer, comme en témoigne M. Tristan Champion qui a effectué un congé paternité en France et un congé paternité en Norvège : « je me suis laissé progressivement influencer par une société qui, depuis trente ans, déconstruit les stéréotypes de genre. Chacune de mes barrières s’est effondrée et j’ai même trouvé plaisir à ressembler à la nouvelle génération de pères qui m’entoure. Je me suis transformé en père décomplexé, fier de s’occuper seul de sa fille durant cinq mois, affrontant déboires et réussites à sa manière » ([117]).

Par rapport au système existant, le congé paternité égalitaire favorise une juste répartition des tâches domestiques et parentales, en particulier si une période est prise en dehors de la présence de la mère. M. Tristan Champion le résume ainsi : « j’ai réalisé que c’est parce que je m’occupais « seul » de ma fille que nombre d’obstacles à l’égalité entre les hommes et les femmes sont tombés : investissement dans l’éducation des enfants, partage des tâches domestiques, charge mentale, équilibre vie personnelle/vie professionnelle » ([118]).

De plus, une présence plus longue du père après la naissance permet de lutter efficacement contre l’isolement des mères, dont on a vu qu’il pouvait favoriser la dépression post-partum. Comme le précise, en outre, Mme Clémentine Sarlat, la présence simultanée des deux parents pendant les semaines qui suivent la naissance leur permet d’avancer ensemble sur le chemin de la parentalité ([119]). Ce faisant, elle prévient le décrochage qui a généralement lieu entre une mère sur-sollicitée et surinvestie dans les tâches parentales et un père considéré comme auxiliaire, dans l’année qui suit la naissance de l’enfant.

Vos rapporteures sont également favorables, dans le cas des mères solos, au transfert de ce congé « second parent » à un proche de leur choix. Cette mesure permettrait de garantir l’égalité entre familles biparentales et familles monoparentales et de lutter contre l’isolement des mères tout en reconnaissant le rôle important des réseaux de soutien.

3.   Le congé paternité, un levier clé pour l’égalité entre les parents

Au vu de ces éléments, vos rapporteures plaident en faveur d’une réforme ambitieuse du congé paternité qui est un levier incontournable de l’égalité dans la parentalité.

Vos rapporteures en ont acquis la conviction au cours des nombreuses auditions réalisées pour cette mission d’information. La plus-value d’un allongement du congé paternité a été pleinement identifiée par les associations féministes, de parents et par les employeurs.

Ainsi, dans le secteur privé et en particulier dans les grands groupes, l’allongement du congé paternité voire d’un congé paternité égal au congé maternité est déjà une réalité. Les entreprises concernées offrent à leurs salariés au moins une rémunération intéressante ou bien un maintien de leur rémunération. De la même manière, dans le secteur public, des villes comme Arras, Lyon ou encore Grenoble ont, malgré certaines réticences provenant des préfectures, mis en place des politiques en faveur de la parentalité, en particulier concernant le système de congés.

De plus, les récents rapports institutionnels portant sur l’égalité que ce soit la lutte contre les stéréotypes de genre ou l’égalité professionnelle ont fait mention de l’influence de la parentalité sur les inégalités. France stratégie et le Conseil d’analyse économique ont notamment plaidé pour un allongement substantiel du congé paternité.

Le CAE propose un allongement du congé paternité de dix semaines, c’est-à-dire égal au congé postnatal de la mère – dont six semaines au moins seraient obligatoires. Sur ces dix semaines, six semaines minimum devraient être prises en dehors du congé maternité. Cette réforme aurait un coût d’environ 1,3 Md€ pour un taux de recours d’environ 80 % ([120]).

Pour sa part, France stratégie plaide en faveur d’une réforme conjointe du congé paternité et du congé parental. Dans cette proposition, le congé paternité serait également porté à dix semaines dont six seraient obligatoires. Sur cette durée totale de dix semaines, six semaines devraient être posées en dehors du congé maternité. Le coût brut de cette mesure est estimé à 1,1 Md€. Le congé parental, quant à lui, verrait sa durée d’indemnisation réduite à huit mois à partager entre les deux parents, parmi lesquels trois mois par parent seraient non transférables. Sous réserve d’une stabilité du taux de natalité et tenant compte des places d’accueil libérées, cette mesure conjointe pourrait coûter 200 M€ la première année puis 1 Md € à l’horizon de cinq ans.

Ailleurs, nos voisins européens, notamment les pays scandinaves et l’Espagne nous montrent l’exemple. Le congé paternité égal au congé maternité y est un axe clé de leur politique familiale. Dans l’actualité, la Chambre des communes du Royaume-Uni vient de rendre un rapport en faveur de l’allongement du congé paternité ([121]). Dans le même temps, en Espagne, le succès du congé égalitaire a fait consensus au-delà des divergences politiques. Il pousse désormais les différents partis politiques, sous des modalités différentes, à porter les congés parentaux à vingt semaines (contre seize actuellement).

Dans ce contexte, vos rapporteures proposent donc d’avancer vers un congé à égalité avec le congé maternité.

À terme, ce congé de seize semaines serait organisé de la manière suivante : huit semaines seraient obligatoires et huit semaines seraient facultatives. Sur les huit semaines obligatoires, quatre semaines, correspondant au système actuel, devraient être prises à la naissance de l’enfant et seraient donc simultanées avec le congé de la mère. Elles auraient pour objectif de favoriser une répartition équitable des tâches parentales tout en facilitant la récupération de la mère. À l’issue du congé maternité, le père prendrait, de manière obligatoire, quatre semaines supplémentaires. De l’avis des experts auditionnés, ces semaines de congé du père seul avec l’enfant sont fondamentales pour éviter l’installation d’une position de « parent auxiliaire » et mettre en place une dynamique égalitaire dans la répartition des tâches parentales et domestiques.

À cette période obligatoire, viendrait s’ajouter une période de huit semaines facultatives et fractionnables, que les pères pourraient poser dans l’année suivant la naissance de l’enfant. Afin d’assurer une certaine prévisibilité pour les employeurs, ces huit semaines ne pourraient être fractionnées qu’en deux fois. De plus, l’employeur devrait être notifié de la demande en amont du congé, par exemple au moins quinze jours avant.

Pour plus de clarté, le schéma ci-dessous représente une des répartitions de ce congé, dans le temps.

Recommandation n° 25 : porter progressivement le congé paternité à seize semaines, soit à égalité avec le congé maternité.

 

Gardant à l’esprit le contexte budgétaire et sur le modèle espagnol, vos rapporteures proposent que le déploiement des huit semaines facultatives se fasse de manière échelonnée dans le temps.

Dans le cas espagnol, la réforme entreprise à partir de 2019 a porté le congé à huit semaines en 2019 dont deux à la naissance de l’enfant ; douze semaines en 2020 dont quatre semaines à la naissance et seize semaines en 2021 dont six à la naissance de l’enfant. Ce déploiement progressif, à la fois, donne de la prévisibilité du point de vue des finances publiques et permet de résoudre les éventuelles difficultés opérationnelles lors du déploiement. Partant du constat que ce déploiement progressif a donné satisfaction, vos rapporteures suggèrent d’y avoir recours en France.

Concernant le coût de la mesure, selon les données du CAE et de la direction de la sécurité sociale, vos rapporteures estiment que tous régimes confondus, l’indemnisation du congé paternité oscille entre 26,5 et 29 M € ([122]) d’euros par jour. Au total, le congé paternité représente, chaque année, un coût d’environ 663 M € (tous régimes confondus) pour la sécurité sociale ([123]).

Partant de ces informations, un congé paternité de huit semaines obligatoires coûterait environ 1,45 Md € ([124]) par an. Considérant que le système actuel finance déjà 25 jours de congé paternité, le coût à amortir serait en réalité autour de 820 M € sur la première année du dispositif. Sur cette période, le taux de recours serait nécessairement très faible puisqu’il existe un délai d’appropriation des dispositifs par les usagers. Par la suite, la montée en charge du dispositif ferait accroître progressivement le coût de la mesure.

À terme, vos rapporteures estiment qu’un congé paternité à égalité avec le congé maternité qui serait donc de seize semaines, pourrait coûter à terme environ 2,9 Md€. Sur ce coût total par an, 663 M € étant déjà financés par la sécurité sociale, seuls 2,3 Md€ resteraient à financer par la branche famille de la sécurité sociale. À noter également que la branche famille affiche régulièrement un bilan excédentaire, estimé à 1 Md€ sur un total de 33 Md€ de prestations familiales versées en 2023 ([125]).

Si vos rapporteures n’ignorent pas le caractère onéreux de la mise en œuvre de cette mesure, elles soulignent son potentiel transformateur. Non seulement elle a un impact sur l’égalité dans la parentalité mais elle aura nécessairement une influence globale sur les stéréotypes de genre dans toute la société, et un impact positif sur l’économie.

En passant du « risque maternité » au risque « parentalité », elle contribuera à réduire la discrimination à l’embauche, la pénalité parentale pour les femmes, et plus important encore, à améliorer leur participation au marché du travail et leur rémunération, c’est-à-dire aussi à augmenter les cotisations.

Par ailleurs, elle provoquera mécaniquement une réduction du taux de recours au congé parental de fait, des coûts liés à la prestation Prepare. De même, elle entraînera une arrivée plus tardive des enfants dans les modes d’accueil, pouvant aller jusqu’à douze semaines après la fin du congé maternité. Ceci permettra de diminuer la demande de modes d’accueil dans les six premiers mois de l’enfant et de favoriser indirectement une meilleure qualité d’accueil.

B.   repenser la place et le fonctionnement du congé parental

La réforme du congé paternité qui est une priorité, devrait s’accompagner à terme d’une réforme du congé parental. Malgré une réforme d’ampleur menée en 2015, il demeure généralement pris par les mères. De ce fait, il semble indispensable d’améliorer l’attractivité du dispositif en augmentant le niveau d’indemnisation. Pour autant, il ne faudrait pas perdre de vue qu’une réduction drastique de sa durée pénaliserait les familles aux revenus modestes.

1.   En 2015, une réforme budgétaire aux effets mitigés

La réforme du congé parental entreprise en 2015 devait répondre à un double objectif : égalitaire d’une part, en encourageant les pères à recourir au congé parental, ce congé devait faciliter la répartition des tâches domestiques parentales. D’autre part, il devait permettre aux femmes de retourner plus rapidement sur le marché du travail après la naissance de l’enfant.

Or, dans les faits, le faible niveau de rémunération proposé pour la Prepare, autour de 456 euros pour un enfant, est de l’avis général jugé trop faible. Au-delà des stéréotypes de genre prédominants, ce niveau de rémunération encourage les couples à un calcul économique rationnel. Ainsi, le partenaire dont les revenus sont plus élevés se maintient le plus souvent en emploi. Or, dans 75 % des cas dans les couples hétérosexuels les hommes gagnent mieux leur vie que les femmes ([126]). Ils ne sont donc pas incités à recourir à ce congé.

Comme le souligne M. Pierre Pora auprès de vos rapporteurs, la réforme de 2015 n’a pas eu d’incidence sur le comportement des pères. Plus grave encore, même dans les familles où, le père travaillant à temps partiel le recours à la Prepare aurait eu une incidence positive sur les revenus du foyer (et donc aucun impact sur l’activité des pères), la prestation n’était pas sollicitée. Dans cette configuration, seuls 15 à 20 % des pères avaient recours à la Prepare contre 50 à 80 % des femmes se trouvant dans une situation équivalente de temps de partiel ([127]). Relevant qu’aucun déficit d’information n’a été signalé sur la Prepare, M. Pierre Pora en déduit que le risque de se sentir stigmatisé incite certains pères à ne pas demander la prestation.

Dans ces conditions, le premier objectif de la réforme d’améliorer le taux de recours des pères n’a pas été atteint. Les économistes Mme Hélène Périvier et M. Grégory Verdugo, également entendus par vos rapporteures, rappellent que « l’objectif était d’atteindre 25 % de pères recourant au dispositif, après la mise en place de la réforme, ils sont moins de 1 % » ([128]).

En sens inverse, le deuxième volet de la réforme sur le retour à l’emploi des femmes semble avoir partiellement fonctionné. Selon le Hcfea, le taux d’emploi des mères de moins de trois ans a augmenté de six points pour les mères de deux enfants et de deux points pour les mères de trois enfants ou plus, depuis 2014 ([129]). Toutefois, Mme Hélène Périvier et M. Grégory Verdugo ont remarqué que les mères aux revenus les plus modestes avaient davantage recours aux allocations-chômage ce qui indiquerait une difficulté de renouer avec l’emploi.

De plus, la baisse du recours global au congé parental, divisé par plus de deux entre 2013 et 2021, confirme l’hypothèse d’une anticipation émanant des parents. Conscients que les mères pourront seulement bénéficier d’un congé de deux ans, certaines familles préfèrent ne pas recourir au dispositif du tout. D’autres mères recourent au dispositif pendant deux ans et pour la troisième année, se tournent vers des modes d’accueil informels.

Dans ce contexte, de l’avis général, la réforme de 2015 est perçue comme une réforme « budgétaire » qui a effectivement permis de réaliser d’importantes économies sur la branche famille. Le graphique ci-dessous montre l’influence de la réforme de 2015 sur la baisse du recours au congé parental.

 

Source : Alternatives Économiques, « La question : faut-il réformer le congé parental ? », novembre 2023.

2.   Améliorer l’attractivité financière du dispositif sans réduire sa portée

En vue d’une nouvelle réforme du congé parental annoncée par le Gouvernement, vos rapporteures attirent l’attention sur des axes incontournables à prendre en compte.

En premier, une réforme du congé parental devrait passer impérativement par une réflexion sur son attractivité et notamment son attractivité financière. Il est clair qu’il s’agit là d’un point fondamental dans la prise de décision des ménages. Il semble judicieux de revaloriser la prestation Prepare. Pour ce faire, différentes propositions ont été effectuées. Le Gouvernement propose notamment une nouvelle rémunération calculée en pourcentage du salaire.

Si le niveau de rémunération adéquat impose une réflexion à part entière accompagnée d’études permettant de tester différents scénarios, il apparaît clair que la revalorisation doit, a minima, garantir une rémunération au moins au niveau du revenu actif de solidarité (RSA), comme le suggère l’association Parents & Féministes.

Recommandation n° 26 : améliorer l’attractivité du congé parental sans réduire sa portée pour les ménages modestes.

Pour autant, améliorer la rémunération ne peut se faire uniquement en raccourcissant la durée du congé. Une réforme qui ne tiendrait pas compte de la plus-value de la Prepare pour les ménages modestes serait en ce sens contre-productive. Elle risquerait même d’avoir un impact négatif sur le taux d’emploi des femmes aux revenus modestes.

C’est pourquoi, vos rapporteures recommandent de débuter par une réforme du congé second parent sur laquelle pourrait s’adosser la réforme du congé parental. Le recours au congé parental pourrait être ouvert seulement à épuisement des congés maternité et paternité. Dans cette hypothèse, le recours au congé parental serait plus tardif puisqu’il serait réduit de fait par l’allongement du congé paternité. Ceci pourrait faciliter une augmentation de la rémunération proposée.

En outre, une réflexion pourrait être menée sur les conditions de retour à l’emploi, après un congé maternité, paternité, adoption ou parental. Dans son livre, Mme Thi Nhu An Pham explique à quel point le retour au travail après un congé maternité peut s’apparenter à une épreuve pour les femmes. Autant que les enfants, les parents appréhendent ce moment charnière qui peut être rendu particulièrement complexe en fonction de l’accueil réservé à l’employé retrouvant son poste. Dans ce contexte, à l’issue d’une réflexion sur le sujet, une reprise progressive pourrait être expérimentée auprès de parents volontaires avant une éventuelle généralisation.

Recommandation n° 27 : réfléchir à l’ouverture d’une reprise progressive, lors du retour à l’emploi, après un congé parental (maternité, paternité, adoption, parental).

C.   une nécessaire réforme des modes d’accueil

De plus, vos rapporteures partagent le constat d’un système de modes d’accueil pour l’instant insatisfaisant, tant sur le nombre de places d’accueil disponibles, la répartition sur le territoire, la formation des professionnels ou la qualité de l’accueil. Un constat similaire a été dressé par de nombreux rapports récents, dont la commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur le modèle économique des crèches et sur la qualité de l’accueil des jeunes enfants au sein de leurs établissements, clôturée en mai 2024 ([130]).

Tenant compte des différentes méthodes possibles pour procéder à une réforme ambitieuse du secteur de la petite enfance, vos rapporteures font le choix d’insister sur les points incontournables d’une telle réforme, ressortis des auditions menées.

1.   Une meilleure lisibilité du système des modes d’accueil

Les associations de parents et les professionnels du secteur s’accordent à dire qu’en l’état, la lisibilité du système des modes d’accueil demeure problématique. Elle l’est particulièrement pour les parents et notamment pour les mères, souvent contraintes de trouver un mode de garde en parallèle de leur grossesse ou de leur congé maternité.

Pour faciliter le choix des parents, il serait judicieux de renforcer le niveau de transparence sur le fonctionnement du système. Il pourrait concerner notamment le coût de l’accueil, le taux d’encadrement de la structure ou encore les critères d’attribution des places en crèche qui peuvent varier selon les municipalités. Disposer d’informations claires et issues d’une source fiable permettrait aux parents de prendre une décision avec davantage de sérénité.

Recommandation n° 28 : garantir la lisibilité et la transparence du fonctionnement des modes de garde.

2.   Une offre d’accueil riche et homogène sur tout le territoire

Un deuxième axe clé réside dans l’homogénéité de l’accueil proposé sur le territoire. Comme nous l’avons vu, certaines zones sont particulièrement sous-dotées, notamment en zone rurale et dans les Outre-mer. Elles pourraient donc être considérées comme prioritaires dans le cadre d’une réforme et lors de la création de nouvelles places d’accueil formel.

De ce point de vue, la construction d’un service public de la petite enfance efficace passe nécessairement par des investissements d’ampleur permettant accueil de qualité indépendamment de la situation géographique.

Recommandation n° 29 : investir pour augmenter et harmoniser l’offre de crèches sur le territoire.

3.   Valoriser davantage les métiers de la petite enfance

Ces deux mesures ne peuvent prendre forme sans une revalorisation substantielle des métiers de la petite enfance, dont l’écrasante majorité sont occupés par des femmes. La revalorisation devrait permettre de reconnaître le caractère clé de ces métiers dans le fonctionnement de la société et du marché du travail. Vos rapporteures ont effectivement constaté que la qualité des modes d’accueil fait partie des préoccupations principales des jeunes parents.

Les données sur la pénurie sont alarmantes : la moitié des crèches en France sont touchées par une pénurie de personnel ; à Paris, plus de 1 000 postes sont vacants ce qui a entraîné la fermeture d’environ 3 700 crèches ([131]). Or sans ces modes d’accueil, ce sont les femmes qui servent de « variable d’ajustement » en recourant au congé parental.

Une revalorisation financière semble indispensable pour attirer de nouveaux professionnels. Elle devrait concerner l’ensemble de la filière et particulier les professionnels en contact direct avec les enfants. Elle pourrait également prendre la forme d’une offre de formation continue permettant de faire évoluer la carrière et donc la rémunération.

Il conviendrait également d’améliorer les conditions de travail en tenant davantage compte de la pénibilité associée à ces métiers. La prise en compte du bruit, de la charge émotionnelle ainsi que des troubles musculo-squelettiques semble indispensable.

Dans le même temps, une augmentation du taux d’encadrement dans les crèches semble fondamentale. Il permettrait de mieux répartir la charge de travail entre les professionnels et donc d’assurer des conditions de travail plus attractives et une meilleure qualité de l’accueil réservé aux enfants.

Recommandation n° 30 : revaloriser les métiers de la petite enfance.

 

 


IV.   L’adolescence, un âge charnière et des politiques publiques lacunaires

Conscientes que la parentalité ne s’arrête pas à la petite enfance, vos rapporteures ont consacré un volet de leur mission à l’accompagnement des parents d’adolescents. Si les femmes assurent l’essentiel des tâches parentales au cours de la petite enfance, elles sont également en première ligne à l’adolescence.

Ainsi, selon l’association Allo Écoute Parents qui réalise de la prévention en santé mentale auprès des adolescents, estime que 94 % des participants aux ateliers de prévention étaient des mères en 2024 ([132]). Un investissement qui se poursuit à l’entrée à l’âge adulte : au moment de choisir, leur orientation, 71 % des jeunes affirment avoir été aidés spécifiquement par leur mère, 37 % reconnaissent même avoir été beaucoup aidés ([133]).

C’est pourquoi, au cours des auditions, vos rapporteures ont systématiquement interrogé les personnes auditionnées sur les mesures mises en place pour accompagner les parents d’adolescents. Si de nombreuses politiques ciblent les parents lors des 1 000 premiers jours de l’enfant, elles tendent à négliger les besoins des parents d’adolescents. Pourtant, l’adolescence est un âge charnière où les enfants évoluent à vive allure ce qui peut engendrer des difficultés pour les parents. De plus, des inquiétudes croissantes émergent sur le bien-être des adolescents notamment en matière de santé mentale.

A.   mieux prendre en compte les besoins spécifiques des parents d’adolescents

Les politiques en faveur de la parentalité semblent rencontrer trois obstacles majeurs à l’adolescence : en premier lieu, la lisibilité du système d’accompagnement n’est pas satisfaisante. Selon Mme Sarah Quilliec, fondatrice du podcast Parentalité et adolescence, entendue par vos rapporteures, « les familles ne savent pas à qui s’adresser et ne trouvent pas facilement les dispositifs ».

Pourtant de nombreux dispositifs existent : Maison des adolescents, centres médico-psychologiques (CMP), centre médico-psycho-pédagogiques (CMPP), points d’accueil et d’écoute jeunes sont autant de lieux d’accueil des parents et des adolescents. Or, l’accroissement des demandes entraîne pour certaines structures, un risque de saturation. Ainsi, l’association des Maisons des adolescents a signalé à vos rapporteures devoir accueillir des adolescents qui, en théorie, ne relèvent pas des missions des MDA mais n’ont aucune structure vers laquelle se tourner.

Surtout, ces lieux se concentrent sur les adolescents rencontrant des difficultés spécifiques ou dont la relation avec les parents s’est particulièrement détériorée. En ce sens, ils ne répondent pas aux interrogations générales des parents d’adolescents. Un parent d’enfant ne présentant pas de difficultés particulières peinerait à trouver des réponses à ses questionnements dans les structures existantes.

C’est pourquoi, selon vos rapporteures, il semble important d’élargir les missions de lieux d’accueil enfants-parents (LAEP). Ils sont, pour l’instant, réservés aux enfants de moins de six ans et à leurs parents. Il serait judicieux qu’ils puissent accueillir des enfants plus âgés par exemple jusqu’à l’adolescence.

Recommandation n° 31 : élargir les missions des lieux d’accueil enfants-parents afin qu’ils puissent recevoir des adolescents.

Par ailleurs, l’élargissement de ces missions pourrait être l’occasion de réfléchir au maillage territorial de ces lieux. En effet, leur répartition n’est pas homogène sur le territoire ce qui engendre nécessairement des inégalités d’accès pour les adolescents.

Dans l’ensemble, il semble fondamental d’opérer un rapprochement entre les politiques publiques d’accompagnement à la parentalité et les politiques de jeunesse. En l’état, ces deux politiques ne dialoguent pas et opèrent en silo. Ce décalage a donc créé un vide pour les parents d’adolescents. En parallèle, les lacunes des politiques de jeunesse en tant que telles contribuent à alimenter une culpabilisation des parents, tenus responsables à eux seuls des difficultés d’une jeunesse encore trop peu prise en compte par les politiques publiques.

Ainsi, l’essentiel des discours sur les parents d’adolescents tend à culpabiliser et stigmatiser les parents dont les enfants rencontrent des difficultés. En lieu et place d’offrir un parcours spécifique, les parents ne se sont sollicités que pour dénoncer la qualité de l’éducation fournie à leurs enfants. Ce discours stigmatisant vise en particulier les familles précaires, les mères solos et les familles s’éloignant de la norme biparentale hétérocentrée. Selon le professeur M. Philippe Duverger, professeur de pédopsychiatrie de l’enfant et de l’adolescent et président de la fédération nationale des Écoles des parents et des éducateurs, « la question de l’autorité est le plus souvent sous-tendue à ces réactions et ces discours culpabilisants et répressifs. Ainsi, à défaut d’autorité, ce sont des réactions de pouvoir qui s’imposent, avec toute la violence qui l’accompagne ».

 

 

 

Dans ce contexte, vos rapporteures recommandent la mise en place de politiques publiques ciblant spécifiquement les parents d’adolescents. Elles pourraient prendre diverses formes notamment un renforcement de la place et du soutien accordé à la recherche scientifique sur les besoins des adolescents. Elles pourraient également se donner pour mission d’inclure davantage les pères, dont le sous-investissement dans la parentalité se constate également lors de l’adolescence, la prise en charge des difficultés de l’enfant revenant à la mère.

Recommandation n° 32 : mettre en place des politiques publiques ciblant les parents d’adolescents.

B.   Santé mentale des adolescents : aider les parents à soutenir leurs enfants

Un des axes prioritaires d’une politique spécifiquement ciblée sur les parents d’adolescents devrait être la santé mentale des adolescents. Depuis l’épidémie de la covid-19, celle-ci s’est particulièrement dégradée. Selon le Conseil économique social et environnemental, 11,7 % des jeunes souffraient de dépression en 2017, un chiffre en progression rapide qui atteignait 20 % en 2020 ([134]). Au cours des ateliers Allo Écoute Ado réalisés en 2024, les adolescents interrogés évoquent principalement un sentiment de stress et d’angoisse (45 % d’entre eux), des troubles psychiques (25 %) et de la solitude (23 %) ([135]). Dans une moindre mesure, certains évoquent l’automutilation ou encore l’épuisement.

Selon Mme Marie Legrand, responsable des services de la ligne téléphonique Allo Écoute parents, entendue par vos rapporteures, cette dégradation tient à la fois à un contexte économique, politique et social inquiétant mais à un contexte scolaire exigeant qui génère chez les adolescents, une pression de la réussite. Un environnement général qui peut être aggravé en fonction du contexte familial et personnel. Mme Sarah Quilliec souligne également le rôle de la surexposition aux réseaux sociaux ajoutant une pression de performance supplémentaire tant sociale que corporelle ([136]).

L’inquiétude chez les jeunes se reflète chez les parents qui se sentent démunis et ne savent pas toujours comment venir en aide à leurs enfants. Les parents éprouvent parfois de réelles difficultés à repérer ou à évaluer le mal-être et les troubles psychiques de leurs enfants. D’autres doivent faire face à des comportements difficiles des adolescents : mutisme, troubles de communication, ou l’addiction aux écrans.

Par la suite, les parents venant en aide à leurs adolescents sont confrontés à l’illisibilité et surtout à la saturation des dispositifs, notamment en pédopsychiatrie. Avec un nombre de pédopsychiatres divisé par deux en dix ans, dans trente-deux départements français, il ne reste qu’un seul pédopsychiatre en exercice ([137]) . De ce fait, les délais d’attente pour les familles sont longs, ils dépassent généralement un an en pédopsychiatrie.

Si les délais d’attente pénalisent les adolescents et peuvent aggraver leurs troubles, ils ne sont pas sans impact sur les parents. Ils souffrent également de stress et d’angoisse, de solitudes voire d’épuisement. Élodie Smette, pédopsychiatre au CMPP de Rouen, l’illustre en ces termes : « J’ai des parents, ils se battent, sauf que le temps qu’ils ont passé sur ma liste d’attente, ils sont au bout du rouleau » ([138]).

C’est pourquoi, vos rapporteures recommandent vivement de renforcer l’offre en pédopsychiatrie. Il conviendrait alors de former davantage de professionnels ce qui impose d’inciter les internes à se tourner vers cette spécialité jugée peu attractive. En parallèle, il semble essentiel de renforcer les moyens des structures de type CMP et CMPP.

Recommandation n° 33 : renforcer l’offre en pédopsychiatrie en d’une part, incitant les internes à choisir cette spécialité et d’autre part, en renforçant les moyens des structures de pédopsychiatrie.

La médecine scolaire, elle aussi, peine à faire face à l’afflux de demandes. Il semble nécessaire d’accroître le nombre de professionnels en leur prodiguant une formation plus poussée aux enjeux de santé mentale.

Recommandation n° 34 : renforcer la médecine scolaire en augmentant le nombre de professionnels et en les formant davantage aux enjeux de la santé mentale.

Il serait également judicieux de sensibiliser davantage la population générale aux enjeux de santé mentale. En ce sens, Mme Sarah Quilliec suggère par exemple d’enseigner davantage les premiers secours en santé mentale.

Sur ce point, il existe des initiatives inspirantes pouvant servir de modèle. Ainsi, le réseau des sentinelles de la Mutuelle sociale agricole (MSA) pourrait servir d’exemple. Sur une journée, les sentinelles sont formées par un binôme de cliniciens leur dispensant une formation théorique centrée sur la déconstruction des préjugés et une formation pratique leur permettant de s’exercer au repérage et à l’orientation d’une personne en détresse psychologique.

En formant des volontaires des organisations professionnelles, des salariés de la MSA mais aussi le grand public, la MSA a construit un réseau d’intermédiaires pouvant faire le lien entre les structures spécialisées et la personne en souffrance.

Vos rapporteures proposent de s’inspirer de ce modèle pour les parents et proches volontaires afin de faciliter le repérage des adolescents confrontés à des problèmes de santé mentale.

Recommandation n° 35 : renforcer la formation des acteurs au contact des adolescents sur les enjeux de santé mentale. Lancer une campagne d’information nationale sur la santé mentale des enfants et des adolescents.

 


V.   accompagner les familles monoparentales sans les stigmatiser

Dans le nouvel élan qu’il convient de donner aux politiques d’accompagnement à la parentalité, un axe prioritaire devrait porter sur les familles monoparentales dans lesquelles les femmes sont surreprésentées. À cet égard, vos rapporteures s’associent aux récents travaux menés par la Délégation aux droits des femmes du Sénat, qui s’est particulièrement intéressée aux problématiques rencontrées par les familles monoparentales.

A.   Au moment de la séparation, faciliter la répartition des responsabilités parentales

Si la monoparentalité précède souvent la séparation, au sens où le rôle de « parent principal » est assumé par la mère, c’est à ce moment, qu’elles assument de manière « officielle » toutes les responsabilités parentales, voient considérablement augmenter leurs dépenses liées aux enfants, sans que ce coût soit suffisamment pris en compte dans les règles fiscales et les prestations sociales. Comme nous l’avons rappelé plus haut, la séparation fait radicalement baisser le niveau de vie des femmes et peut les entraîner vers la pauvreté. Dans ce contexte, il semble essentiel de repenser les règles fiscales et adapter les prestations sociales de manière à apporter un soutien efficace aux mères solos ([139]).

1.   Repenser les règles fiscales pour répartir équitablement les dépenses entre les parents

En l’état actuel, le système fiscal pour les familles monoparentales présente des dysfonctionnements pesant en particulier sur le parent qui détient la garde de l’enfant. Or, dans les trois quarts des cas, lors des séparations, la garde principale de l’enfant revient aux mères ([140]). De ce fait, si les articles 371-2, 373-3 et 373-2-2 du code civil prévoient que, même en cas de séparation les parents doivent partager équitablement les dépenses d’entretien de l’enfant, dans les faits, c’est bien la mère qui assume l’essentiel des dépenses.

Il semble donc nécessaire de repenser le mode de calcul des pensions alimentaires (« contributions à l’entretien et à l’éducation de l’enfant »). Comme le dénonce la Collective des mères isolées, les pensions alimentaires posent différentes problématiques : en premier lieu, le montant moyen actuel est bien loin du coût réel d’entretien d’un enfant. Alors que la contribution moyenne s’élève à 170 euros mensuels par enfant, le coût réel se situait, en 2016, autour de 625 euros par mois ([141]). De plus, les juges aux affaires familiales prennent activement en compte les revenus du parent non gardien, et non ceux du parent gardien. En d’autres termes, on tente de maintenir le niveau de vie des pères sans se poser la question de comment les mères pourront-elles, prendre en charge les coûts d’entretien. Les femmes sont là aussi la « variable d’ajustement » d’un système peu efficace. Dans le cas des gardes alternées, la pension alimentaire peut être considérée comme non nécessaire, alors que la séparation appauvrit davantage les mères et donc amoindrit leur capacité à subvenir aux besoins de l’enfant et à maintenir son niveau de vie.

Si la création de l’agence de recouvrement et d'intermédiation des pensions alimentaires (ARIPA) a permis d’améliorer le recouvrement, cette mesure seule ne saurait suffire à assurer une répartition équitable des dépenses entre les parents.

C’est pourquoi vos rapporteures recommandent de repenser le mode de calcul des pensions alimentaires afin de prendre en compte le coût réel de l’entretien d’un enfant.

Recommandation n° 36 : repenser le mode de calcul des pensions alimentaires afin de prendre en compte le coût réel de l’entretien d’un enfant.

Dans le même temps, la fiscalité de la pension alimentaire mérite également d’être revue. Si le parent non-gardien peut défiscaliser la pension alimentaire, le parent gardien doit, quant à lui, déclarer le montant de cette pension comme s’il s’agissait d’un revenu. Il va sans dire que cette « contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant » comme son nom l’indique, a pour seul objectif de soutenir les besoins matériels de l’enfant. En ce sens, il semble indispensable de revoir le fonctionnement de sa fiscalité. Ainsi, vos rapporteures suggèrent qu’il soit possible pour le parent bénéficiaire de défiscaliser la pension.

Recommandation n° 37 : permettre au parent bénéficiaire de défiscaliser la pension alimentaire.

De la même manière, comme l’a suggéré le Sénat, vos rapporteures soutiennent l’idée d’instaurer un abattement sur le montant de la pension alimentaire pris en compte dans les bases ressources des prestations familiales et des aides au logement, à hauteur de l’ASF.

Pour rappel, l’ASF est versée au nom de l’enfant privé de l’aide de l’un ou de ses deux parents, à hauteur de 199,18 € par enfant à charge et 265,50 € par enfant recueilli. Elle peut être versée à taux plein ou taux partiel. L’ASF est donnée à différents titres notamment pour : substituer une pension alimentaire non versée, compléter une pension alimentaire non versée en totalité, compléter une pension alimentaire inférieure au montant de l’ASF ou bien en l’absence des deux parents.

En l’état actuel, le système socio-fiscal est construit de telle sorte qu’il est financièrement plus intéressant pour les parents isolés en situation précaire de recevoir des transferts publics plutôt que la pension alimentaire. En effet, pour le parent gardien, la pension doit être déclarée comme une ressource et de ce fait, elle est prise en compte lors du versement des prestations sociales. A contrario, l’ASF n’est, quant à elle, pas prise en compte dans les bases ressources pour déterminer l’accès à certaines prestations sociales, en particulier l’aide au logement.

Dans ce contexte, lorsqu’un parent gardien recouvre la pension alimentaire, il risque de perdre certaines prestations sociales. Aux yeux de l’administration, ses ressources ont augmenté et de ce fait, son taux marginal effectif d’imposition augmente également. Pour l’illustrer, le Sénat prend l’exemple d’une mère au SMIC bénéficiaire de l’ASF et dont le père non-gardien commencerait à verser la pension alimentaire. Dans cette configuration, « son taux marginal d’imposition s’élève à 142 % puisque pour un euro de pension, elle perd non seulement le bénéfice de l’ASF, mais également 42 centimes de prestations (RSA, prime d’activité, aides au logement…) » ([142]).

Recommandation n° 38 : instaurer un abattement sur le montant de la pension alimentaire pris en compte dans les bases ressources des prestations familiales et des aides au logement, à hauteur de l’ASF.

2.   Adapter certaines prestations sociales pour soutenir les mères solos

Parallèlement à ces mesures fiscales, il semble important d’adapter certaines prestations sociales dont le fonctionnement actuel peut être pénalisant pour les mères solos.

Ainsi, concernant l’ASF, il semble essentiel de revenir sur la suppression de celle-ci lorsque le bénéficiaire vit en couple. À l’image de la conjugalisation de l’allocation aux adultes handicapés, celle de l’ASF n’a pas lieu d’être. Conjugaliser cette aide revient à ôter aux mères solos une partie de leur autonomie financière.

Symboliquement, elle est porteuse d’un message négatif : une femme devrait dépendre d’un homme pour l’entretien de son enfant. Elle réduit la mère à sa situation conjugale qui n’a pas de lien direct avec l’entretien de l’enfant.

Par ailleurs, même si une mère solo choisit de nouer une nouvelle relation, cette personne tierce, n’est pas tenue, en particulier si elle ne le souhaite pas, à une quelconque responsabilité parentale sur l’enfant.

Y compris en cas de remise en couple, le coût de l’entretien de l’enfant continue de reposer sur la mère.

Recommandation n° 39 : déconjugaliser le versement de l’allocation de soutien familial (ASF).

En complément de ces mesures, il semble important d’ouvrir les allocations logement aux deux parents afin de faciliter l’accueil des parents chez le parent non gardien. En effet, seul le parent gardien peut recevoir ces aides. Or, de nombreuses familles ne sont pas en mesure de financer deux logements disposant de plusieurs chambres. Le versement des APL aux deux parents permettrait au deuxième parent de disposer également d’un logement adéquat pour accueillir les enfants, et faciliterait le cas échéant la mise en place d’une résidence alternée si elle est souhaitée par les deux parents. En ce sens, le versement simultané de l’ASF pourrait donc favoriser le recours à la garde alternée.

Recommandation n° 40 : ouvrir les APL aux deux parents pour faciliter l’accueil des enfants chez les deux parents.

B.   Ouvrir des droits spécifiques et adaptés aux besoins des mères solos

Parallèlement à ces mesures socio-fiscales, de nouveaux dispositifs pourraient utilement compléter le système existant en faveur des familles monoparentales.

1.   Adapter les systèmes de congés et d’autorisations d’absences

En premier lieu, le système de congés parentaux en particulier pourrait s’ajuster davantage à la réalité des mères solos. Il s’agirait d’ouvrir la possibilité aux mères solos notamment de la possibilité de transférer ces jours de congé vers un proche de leur choix, sur le modèle suédois. Dans cette optique, le statut et le rôle de ce proche devraient être précisément définis.

Recommandation n° 41 : ouvrir aux mères solos, la possibilité de transférer des droits de congés vers un proche de leur choix.

De plus, il serait pertinent de doubler le nombre de jours de congé « enfant malade », actuellement au nombre de trois par personne, pour les mères solos.

Recommandation n° 42 : doubler les jours « enfant malade » pour les parents solos.

En outre, suivant les préconisations de la Commission parentalité, vos rapporteures soutiennent l’allongement du droit au répit parental, actuellement limité à un jour par an, pour les familles monoparentales. Comme nous l’avons vu, les mères et en particulier les mères solos, présentent un risque réel d’épuisement qu’il conviendrait de prévenir. En ce sens, comme le rappelle la Commission parentalité, cette mesure ne devrait pas faire l’objet d’une condition de ressources, puisqu’elle s’inscrit à la fois dans un volet médical et social. Cette mesure « n’est pas autre chose qu’une bouée de sauvetage » ([143]).

Or, il est clair qu’une journée par an ne suffit pas à éviter l’effondrement psychique du parent concerné et qu’il conviendrait de prolonger ce dispositif. Il pourrait également s’accompagner d’autres mesures de plus longue durée permettant un accompagnement de plus long terme du parent.

La mise en place de cette mesure pourrait dans un premier temps faire l’objet d’une expérimentation afin de bien appréhender les besoins des mères avant de généraliser le dispositif.

Recommandation n° 43 : évaluer ou mettre en place une expérimentation sur l’allongement du droit au répit parental, actuellement limité à 1 jour par an.

2.   S’inspirer des bonnes pratiques venues du terrain

En plus de ces mesures, de nouvelles voies pourraient être explorées notamment la mise en place d’un statut de famille monoparentale. Des droits spécifiques par exemple sur l’accès aux transports, aux loisirs ou encore au logement pourraient être adossés à ce statut dans l’objectif de faciliter le quotidien des mères solos.

À cet égard, la municipalité de Ris Orangis a par exemple mis en place un statut communal pour les familles monoparentales ouvrant l’accès à vingt et un droits. Partant du constat que celles-ci sont surreprésentées dans la ville (30,83 % de ménages contre une moyenne de 25 % en France) et qu’au moins 33 % d’entre elles se trouvaient sous le seuil de pauvreté, le conseil municipal a voté ce statut en mai 2024.

Parmi les mesures adoptées, se trouvent par exemple des points d’accueil et d’informations pour les familles, un accompagnement sur mesure en matière d’emploi, la création d’un espace de co-voiturage ou encore la création d’un parcours de santé spécifique. Selon le maire de la ville, M. Stéphane Raffali, l’une des mesures qui rencontre le plus de succès porte sur la création d’un « lieu de répit » permettant aux mères de confier leur enfant ce qui leur permet de vaquer temporairement à d’autres occupations. Le succès de cette mesure illustre le besoin réel exprimé par les mères solos de disposer de moments de répit.

Recommandation n° 44 : étudier la création d’un statut des familles monoparentales auquel seraient associés des droits spécifiques.


   ConClusion

Ainsi, malgré des évolutions positives en faveur d’un meilleur partage des tâches domestiques et parentales, les mères demeurent le « parent principal » et les pères « le parent auxiliaire ». L’inégalité qui s’enracine à la naissance de l’enfant perdure quand les enfants grandissent. La mère reste pour eux la première ressource, par exemple au moment de choisir leur orientation. Pourtant, les pères sont de plus en plus nombreux à dire ouvertement leur volonté d’être davantage présents auprès de leurs enfants.

De plus, ce surinvestissement des mères n’est pas sans conséquence sur leur santé en particulier mentale et leur évolution professionnelle. La pénalité maternelle reste encore aujourd’hui particulièrement forte là où la parentalité n’a aucun impact sur la carrière des hommes. Au-delà de la parentalité, il y a donc un enjeu d’égalité professionnelle à passer du « risque maternité » au « risque parentalité ».

C’est pourquoi, vos rapporteures effectuent dans ce rapport 40 recommandations pour changer la donne et avancer vers une parentalité égalitaire.

La construction d’une parentalité égalitaire passe par diverses mesures : information des parents dès le désir d’enfant, lutte contre les stéréotypes de genre, une attention spécifique accordée à la santé des femmes et à la dépression post partum et un meilleur accompagnement des parents d’adolescents.

Avancer vers l’égalité passe aussi nécessairement par une réforme ambitieuse du système des congés. Elle devrait concerner en priorité le congé second parent afin qu’il devienne un moteur d’égalité dans la société. Les pays scandinaves ont mené à bien cette réforme transformatrice dans les années 1970 et l’Espagne il y a quatre ans. Ils constituent des exemples de parentalité égalitaire dont la France pourrait s’inspirer.

 


   TRAVAUX DE LA dÉlÉgation

La Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes a procédé à l’examen des conclusions du rapport de la mission d’information de Mmes Sarah Legrain et Delphine Lingemann sur les politiques d’accompagnement à la parentalité.

 

 

Ces débats n’ont pas fait l’objet d’un compte rendu écrit et sont accessibles sur le portail vidéo du site de l’Assemblée nationale à l’adresse suivante :

 

https://assnat.fr/mh6ZhS

 

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   annexes

   annexe n° 1 :
cartographie des acteurs de la parentalitÉ

 


   annexe n° 2 :
liste des personnes entendues par la délégation

Mme Elsa Foucraut, membre de l’association Parents et féministes ;

Mme Lucile Quillet, journaliste et auteure du livre « le prix à payer » ;

Mme Floriane Volt, directrice des affaires économiques et juridiques de la Fondation des femmes.

Mme Clémentine Sarlat, créatrice du podcast « La Matrescence » ;

Mme Julia Kerninon, autrice et traductrice ;

Mme Elise Marcende, présidente de l’association Maman blues ;

Mme Julie Foubert, consultante en leadership éthique et dirigeante de Be the change – vers une parentalité éclairée.

 

M. Stéphane Jourdain et M. Guillaume Daudin, journalistes et co-auteurs de L’arnaque des nouveaux pères : enquête sur une révolution manquée ;

M. Fabrice Florent, créateur de podcasts dont « Histoire de darons » ;

M. Cédric Rostein, créateur et animateur du podcast « Papatriarcat ».

 


   annexe n° 3 :
Liste des personnes entendues par les rapporteures en france

 

Mme Julie Labarthe, sous-directrice de l’observation de la solidarité et M. Bertrand Lhommeau, chef du bureau « Jeunesse, famille » à la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES) ;

Mme Sylviane Giampino, vice-présidente et Mme Frédérique Chave, secrétaire générale adjointe du Haut conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA) ;

Mme Patricia Poulet Mathis, directrice des offres particulières de l’Urssaf caisse nationale, Mme Catherine Morellon, directrice adjointe des offres particulières de l’Urssaf caisse nationale, Mme Olivia Grangerodet, directrice de l’Urssaf Auvergne et Mme Nicole Barralon, directrice du service Pajemploi de l’Urssaf caisse nationale ;

M. Sacha Reingewirtz, adjoint à la sous-directrice des relations du travail, Mme Sophie Fleurance, adjointe au chef de bureau des relations individuelles du travail et Mme Sylvie Therouanne, chargée de mission de la Direction générale du travail (DGT) ;

Mme Catherine Petit, cheffe du service des droits des femmes et de l’égalité entre les femmes et les hommes et M. Pierre Stecker, directeur de projet chargé du développement des politiques publiques de soutien à la parentalité à la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS) ;

M. Frédéric Vabre, directeur de cabinet du directeur général, Mme Klara Le Corre, chargée des relations institutionnelles, de la Caisse nationale d’allocations familiales (CNAF) ;

Mme Marion Muscat, sous-directrice de l’accès aux soins, des prestations familiales et des accidents du travail et Mme Anne-Laure Boutounet, chargée de mission au bureau de l'accès aux soins, à la Direction de la sécurité sociale (DSS) ;

Mme Sarah El Haïry, Haut-commissaire à l’enfance ;

Mme Manon Chonavel, directrice de cabinet, Mme Nina Vassilieff, cheffe du département de la réglementation et Mme Véronika Levendof, chargée des relations avec le parlement, de la caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) ;

Mme Christine Dechesne-Céard, directrice de la réglementation et M. Christophe Simon, chargé des relations parlementaires de la Caisse centrale de la Mutualité sociale agricole (CCMSA).

 

Mme Violaine Dutrop, membre du collectif « Nos enfants-nous-mêmes » et auteure du livre Maternité, paternité, parité ;

Mme Déborah Vignot Kott, membre du collectif « Pour une parentalité féministe (PAF) » ;

Mme Floriane Volt, directrice des affaires publiques et juridiques de la Fondation des femmes ;

Mme Clémence Pajot, directrice générale et Mme Elise Gorecki-Crison, conseillère technique accès au droit, parentalité et conjugalité de la Fédération nationale des centres d’information sur les droits des femmes et des familles (FNCIDFF) ;

Mme Valérie Laudre, membre de l’association des familles d’enfants handicapés et leurs amis (AFEH) ;

M. Dominique Boren, co-président et Mme Catherine Clavin, co-présidente de l’association des parents et futurs parents gays et lesbiens (APGL) ;

M. Vincent Clivio, directeur du développement et de la vie associative et M. Mickaël Philippe, conseiller technique cohésion sociale de l’association Familles rurales ;

Mme Mylène Armando, secrétaire générale adjointe et Mme Claire Menard, Chargée des relations parlementaires de l’Union nationale des associations familiales, administratrice en charge du soutien à la parentalité (UNAF) ;

Mme Delphine Rideau, directrice de l’association nationale des maisons des adolescents (ANMDA).

 

 

Mme Hélène Périvier, économiste et directrice du programme de recherche et d’enseignement de savoirs sur le genre de Sciences Po et présidente du Haut conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge ;

M. Raymond Debord, docteur en sciences humaines, spécialiste de la famille, auteur de « Faut-il en finir avec la famille ? » ;

M. Claude Martin, sociologue et professeur d’université, titulaire de la Chaire enfance, bien être et parentalité de l’École des hautes études en santé publique (EHESP) ;

Mme Audrey Boulin, docteure en sciences de l’éducation, spécialisée sur les sujets de la jeunesse, l’adolescence ;

Mme Ariane Pailhé, directrice de recherche et Mme Delphine Remillon, directrice de recherche à l’Ined.

 

M. Tristan Champion, créateur du blog Barbapapa, « La paternité en Norvège, comment s’inspirer du modèle nordique ? » et auteur du livre La barbe et le biberon ;

M. Victor Castanet, journaliste et auteur du livre Les ogres ;

Mme Sarah Quilliec, créatrice du podcast « Parentalité et adolescence ».

 

Mme Cécile Garrigues co-présidente et M. Pierre Suesser, co-président du syndicat national des médecins de protection maternelle et infantile (PMI).

 

Mme Amélie Naudot, secrétaire générale de la fédération nationale de la médiation et des espaces familiaux (FENAMEF) ;

M. Philippe Duverger, responsable médical de l’unité de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent du CHU d’Angers, président de la FNEPE (fédération nationale des écoles des parents et des éducateurs) et auteur du livre « L’Amitié à l’adolescence - à la découverte de soi ».

Mme Hélène Boyer, directrice de la communication et des affaires publiques de Kellanova ;

M. Jonathan Noble, directeur de Swello.

 

Commission parentalité « Pour nos enfants et nos adolescents : soutenir la parentalité »

Mme Hélène Roques, co-présidente ;

M. Serge Hefez, co-président ;

M. Philippe Garabiol, rapporteur général.

 

Commission des 1 000 premiers jours

Mme Isabelle Filliozat, vice-présidente.

 

 

Table ronde sur la conciliation vie professionnelle et vie familiale

 

Mme Thi Nhu An Pham, auteure de « La Reprise : Le tabou de la condition des femmes après le congé maternité » ;

Mme Sophie Pochic, sociologue du travail et du genre, directrice de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) ;

M. Pierre Pora, économiste à l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE).

 

Table ronde sur la politique familiale et la répartition de la responsabilité parentale (tâches domestiques) 

 

Mme Marta Domínguez Folgueras, professeure de sociologie, spécialiste de la division des tâches domestiques et de l’attention aux enfants ;

Mme Julie Hebting, fondatrice et directrice de l’association Maydée ;

Mme Anne Solaz, directrice de recherche à l’institut national d’études démographiques (INED) sur l’économie de la famille, du travail et de la démographie.

 

Table ronde sur la monoparentalité et la précarité

Mme Sophie Brescia, membre de la collective des mères isolées ;

Mme Magali Bragard, co-fondatrice de l’association MaMaMa ;

M. Selim Derkaoui, journaliste et auteur du livre « Laisse pas traîner ton fils : comment l’État criminalise les mères seules » ;

Mme Johanna Luyssen, journaliste et auteure du livre « Mères solo : le combat invisible ».

 

Table ronde sur la santé des mères à l’arrivée de l’enfant

 

Mme Judith Aquien, auteure de Trois mois sous silence : Le tabou de la condition des femmes en début de grossesse ;

Mme Catherine Deneux-Tharaux, directrice de recherche à l’institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), spécialiste en santé périnatale ;

Mme Mounia El Kotni, docteure en anthropologie, spécialiste en anthropologie de la santé et co-autrice de Notre corps nous-mêmes.

 

Table ronde sur les enjeux autour d’une réforme du congé paternité

 

Mme Danielle Boyer, ancienne ethnologue, chargée de recherche à la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) et responsable de l’observatoire national de la petite enfance (ONPE) ;

M. Pedro Romero Balsas, docteur en sociologie, domaine de recherche incluant les congés parentaux et la paternité en Europe ;

Mme Alix Sponton, docteure en sociologie et auteure d’une thèse intitulée « Se montrer présent : Réception du congé de paternité, parentalités et masculinités de la grossesse à la petite enfance » ;

Mme Laura Verquère, docteure en sciences de l’information et de la communication et auteure d’une thèse intitulée « Les fabriques du problème public du congé paternité au prisme du genre ».

 

Table ronde sur les enjeux autour d’une réforme du congé parental

Mme Myriam Chatot, docteure en sociologie et auteure de la thèse « Le temps des pères : socialisation et résistances au rôle de pourvoyeur de soins dans le cadre d’un congé parental à temps plein » ;

Mme Elsa Foucraut, membre de l’association Parents et féministes ;

Mme Mathilde Guergoat-Larivière, co-auteure du rapport « L’impact de la PreParE sur l’activité, les revenus et les modes de garde » de France stratégie ;

M. Grégory Verdugo, professeur des Universités en sciences économiques et co-auteur de la note « Cinq ans après la réforme du congé parental (PreParE), les objectifs sont-ils atteints ? » de l’OFCE, avril 2021.

 

Table ronde avec les syndicats de la petite enfance

Mme Véronique Escames, co-secrétaire générale du Syndicat national des professionnels de la petite enfance (SNPPE) ;

Mme Angélique Lemay, représentante du Syndicat Professionnel des assistants maternels et des assistants familiaux (SPAMAF) ;

M. Mathieu Menguy, co-secrétaire de la fédération nationale des éducateurs de jeunes enfants (FNEJE).

 

Table ronde avec les principaux groupes de crèches

M. Vincent Bulan, directeur général de Babilou ;

M. Sacha Tikhomiroff, directeur général des Petits Chaperons Rouges France.

 

Table ronde sur la santé mentale des adolescents

 

Mme Gwenaelle Durand, secrétaire générale du Syndicat national des infirmiers et infirmières éducateurs en santé (SNIES) ;

Mme Marie Legrand, responsable des services de Allo écoute parents, association de professionnels à l’écoute des préoccupations de parents d’adolescents ;

Mme Isabelle Roskam, professeure de psychologie du développement et de la parentalité à l’UCLouvain (Belgique) ;

Mme Muriel Vidalenc, présidente de Premier secours en santé mentale France.

 

Table ronde autour des collectivités ayant entrepris des politiques volontaristes en faveur de la parentalité

Mme Hélène Cailleaud, cheffe de projet inclusion et égalité professionnelle à la ville de Lyon ;

M. Théo Lobry, conseiller délégué à l'égalité femmes/hommes, à l'égalité des chances et à la diversité et à la laïcité de la ville d’Arras ;

Mme Laura Pfister, adjointe au maire de Grenoble à l’égalité des droits ;

M. Stéphane Raffalli, maire de Ris Orangis.

 

Table ronde des organisations syndicales

M. Bruno Lamy, secrétaire confédéral chargé de la politique familiale et Mme Isabelle Taniou, déléguée Femmes de la Confédération française démocratique du travail (CFDT) ;

Mme Clémence Helfter, membre du collectif confédéral « Femmes Mixité » et M. Joël Raffard, administrateur au conseil d'administration de la caisse nationale d’allocations familiales pour la Confédération générale du travail (CGT) ;

Mme Béatrice Clicq, secrétaire confédérale au secteur de l’Égalité de Force ouvrière (FO) ;

Mme Marielle Mangeon, déléguée nationale à l'économie pour la Confédération française de l'encadrement – Confédération générale des cadres (CFE-CGC).

 

 


   annexe n° 4 :
Liste des personnes entendues par les rapporteurEs en espagne

 

Mme Rosa Martínez, secrétaire d’État aux droits sociaux.

M. Ruben Perez, secrétaire d’État à la jeunesse à l’enfance.

Mme Kareen Rispal, ambassadrice de France en Espagne et Mme Audrey Lauze, conseillère pour les affaires sociales.

Mme Alda Recas (Sumar), présidente de la Commission des droits sociaux du Congrès des députés.

Mme Verónica Barbero, porte-parole de la Commission Travail du Congrès des députés.

Mme Águeda Gómez Suárez, conseillère scientifique et Mme Sara Mateos Sillero, conseillère parlementaire du Ministère de l’égalité.

Mme Silvia Valmaña Ochaita, Directrice Générale et Mme Milagros León Martín, Sous-directrice Générale Famille et Natalité du Consejería Familia, Juventud y Asuntos Sociales, Communauté autonome de Madrid.

 

Mme Cristina Castellanos Serrano, professeure d’économie appliquée à l’Université nationale d'enseignement à distance (UNED) ;

M. Gerardo Meil, professeur d’économie et sociologue à l’Université autonome de Madrid (UAM) ;

Mme Irina Fernández Lozano, professeure de sociologie à l’Université nationale d'enseignement à distance (UNED).

 

M. Mariano Nieto Navarro, Mme Adela Recio Alcaide, Mme Virginia Carrera Garrosa, représentants de l’association Plataforma para permisos personales e intransferibles (PpiiNa) ;

 

 


   annexe n° 5 :
Liste des contributions écrites reçues

Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC) ;

Mouvement des entreprises de France (MEDEF) ;

Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) ;

Union des entreprises de proximité (U2P);

M. Philippe Duverger, président de la Fédération Nationale des Ecoles des Parents et des Educateurs (FNEPE) ;

Maisons des jeunes et de la culture (MJC) de France.


([1]) La composition de la Délégation figure au verso de la présente page.

([2]) Conseil d’analyse économique (CAE), « Égalité hommes-femmes : une question d’équité, un impératif économique », Les notes du conseil d’analyse économique, n° 83, novembre 2024.

([3])  Clara Champagne, Ariane Pailhé et Anne Solaz, « Le temps domestique et parental des hommes et des femmes : quels facteurs d'évolutions en 25 ans ? », Économie et statistique, 2015.

([4])  Conseil d’analyse économique (CAE), « Égalité hommes-femmes : une question d’équité, un impératif économique », Les notes du conseil d’analyse économique, n° 83, novembre 2024.

([5])  Idem

([6])  Haut conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (Hcfea), « Les politiques de soutien à la parentalité », Avis et rapport adoptés par consensus, septembre 2016.

 (1) Titiou Lecoq, « Libérées : le combat féministe se gagne devant le panier de linge sale », Fayard, 2017.

([8]) Haut-commissariat au Plan et France stratégie, « Stéréotypes filles-garçons : quel bilan sur dix ans, quelles priorités d’ici à 2030 ? », synthèse, mai 2025.

([9])  Ariane Pailhé et Anne Solaz, « Je mets la table tous les jours » : la participation des enfants de 10 ans aux tâches domestiques », Population et Sociétés, décembre 2024.

([10])  Haut-commissariat au Plan et France stratégie, « Stéréotypes filles-garçons : quel bilan sur dix ans, quelles priorités d’ici à 2030 ? », synthèse, mai 2025.

([11])  Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), « Des stéréotypes de genre encore très ancrés, notamment chez les hommes », Études et résultats, février 2024.

([12])  Dans ce type d’enquêtes de grande ampleur, l’Insee analyse en détail la manière dont les Français répartissent leur temps. Malheureusement, les dernières données disponibles remontent à 2010 et la prochaine enquête est attendue pour 2028.

([13])  Insee, L’emploi du temps en 2010, « Enquête Emploi du temps –Insee Résultats », juin 2012.

([14])  Ipsos, « Les Français et le partage des tâches domestiques : à quand la révolution ménagère  ? », mai 2018.

([15])  Idem

([16])  Fondation des femmes, Observatoire de l’émancipation économique des femmes, « Le coût d’être mère », juin 2023.

([17])  Insee, « L'emploi du temps en 2010 », Enquête Emploi du temps - Insee Résultats, juin 2012.

([18])  Fondation des femmes, Observatoire de l’émancipation économique des femmes, « Le coût d’être mère », juin 2023.

([19])  Les activités retenues contiennent la cuisine, vaisselle, ménage, faire les courses, shopping, rangement, bricolage, soins matériels aux enfants et personnes dépendantes, jardinage, jardinage, linge, gestion du ménage, jeux avec les enfants, conduire, accompagner les enfants ou une autre personne.

([20])  Fondation des femmes, Observatoire de l’émancipation économique des femmes, « Le coût d’être mère », juin 2023.

([21])  Idem

([22])  Tel que cité par Titiou Lecoq, « Le couple et l’argent : Pourquoi les hommes sont plus riches que les femmes », Proche, 2024.

([23])  Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), « Des stéréotypes de genre encore très ancrés, notamment chez les hommes », Études et résultats, février 2024.

([24])  Titiou Lecoq, « Le couple et l’argent : Pourquoi les hommes sont plus riches que les femmes », Proche, 2024.

([25])  Observatoire des inégalités, « Partage des tâches domestiques : les progrès sont lents », analyse, mars 2025.

([26])  Fondation des femmes, Observatoire de l’émancipation économique des femmes, « Le coût d’être mère », juin 2023.

([27]) Fondation des femmes, Observatoire de l’émancipation économique des femmes, « Le coût d’être mère », juin 2023.

([28])  Stéphane Jourdain, Guillaume Daudin et Antoine Grimée, L'Arnaque des nouveaux pères : Enquête sur une révolution manquée, Glénat, 2024.

([29])  Idem

([30])  Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES), Premières informations et premières synthèses, « Le partage des temps pour les hommes et les femmes : ou comment conjuguer travail rémunéré, non rémunéré et non-travail », mars 2001.

([31])  Drees, « Parents d’enfant handicapé : davantage de familles monoparentales, une situation moins favorable sur le marché du travail et des niveaux de vie plus faibles », Études & Résultats, novembre 2020.

([32])  April, baromètre des aidants, édition 2022.

([33])  Assemblée nationale, Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, Rapport d’information n° 3920 sur le genre et la dépendance, Mme Marianne Dubois rapporteure, novembre 2011.

([34])  Insee, « Les familles en 2020 : 25 % de familles monoparentales, 21 % de familles nombreuses », Insee focus, septembre 2021.

([35])  France inter, « Comment vivent les mères célibataires en 2020 ? », septembre 2020.

([36]) Laetitia Challe, Julie le Gallo, Yannick L’Horty, Loïc du Parquet et Pascale Petit, « Parent isolé recherche appartement : discriminations dans l’accès au logement et configurations familiales à Paris », Populations, 2021 tel que cité par Johanna Luyssen, « Mères solos : Le combat invisible », Payot, 2024.

([37])  Idem

([38])  Les comptes de la Sécurité sociale, Congés maternité et paternité, mai 2024.

([39])  Fondation Jaurès, Elsa Foucraut et Violaine Dutrop, « Comment et pourquoi réformer les congés parentaux ? », mars 2024.

([40])  Selon l’expression employée par Mme Violaine Dutrop, membre du collectif Nos enfants, nous-mêmes, entendue par vos rapporteures.

([41])  France inter, « Sur Doctolib, 85 % des rendez-vous médicaux pris pour des enfants sont réservés…par les mères », mars 2023.

([42])  Ministère des Solidarités et de la Santé, « Les 1 000 premiers jours : là où tout commence », rapport de la commission des 1 000 premiers jours, 2020.

([43])  Les Échos, « Ce qu’il faut savoir sur le projet de congé de naissance », mai 2024.

([44])  Les Échos, « Petite enfance : Emmanuel Macron propose d’indemniser les familles sans solution de garde », janvier 2022.

([45])  Cour des comptes, « La politique d’accueil du jeune enfant », Évaluation de politique publique, Rapport public thématique, synthèse, décembre 2024.

([46])  Les Échos, « Petite enfance : Emmanuel Macron propose d’indemniser les familles sans solution de garde », janvier 2022.

([47])  Fondation des femmes, Observatoire de l’émancipation économique des femmes, « Le coût d’être mère », juin 2023.

([48])  UFC Que choisir, « Modes de garde des jeunes enfants : une offre insuffisante et mal répartie ; un long chemin à parcourir pour un accueil formel accessible à tous », septembre 2023.

([49])  ONAPE, La lettre de l’Observatoire national de la petite enfance, n° 5, décembre 2020.

([50])  Terra nova, « La petite enfance : un secteur à bout de souffle en mal d’attractivité », septembre 2024.

([51])  Selon les données fournies par Mme Violaine Dutrop à vos rapporteures.

([52])  Fondation des femmes, Observatoire de l’émancipation économique des femmes, « Le coût d’être mère », juin 2023.

([53])  Terra nova, « La petite enfance : un secteur à bout de souffle en mal d’attractivité », septembre 2024.

([54])  Inspection générale des affaires sociales (Igas), « Qualité de l’accueil et prévention de la maltraitance dans les crèches », mars 2023.

([55])  IGAS, « Qualité de l’accueil et prévention de la maltraitance dans les crèches », tome I : rapport, mars 2023.

([56])  IGAS, « Qualité de l’accueil et prévention de la maltraitance dans les crèches », tome I : rapport, mars 2023.

([57])  Tel que l’explique à vos rapporteures M. Pierre Pora, économiste et chercheur associé au Centre de recherche en économie et statistique (CREST) et à l’Ined.

([58])  La Matrescence, « Épisode 44 : prendre un congé paternité de 5 mois en Norvège – Tristan Champion », podcast.

([59])  Fondation des femmes, Observatoire de l’émancipation économique des femmes, « Le coût d’être mère », juin 2023.

([60])  Association française des managers de la diversité, Initiative #StOpE : Stop au sexisme ordinaire en entreprise, Baromètre #StOpE 2025, mai 2025.

([61])  Libération, « Data : La monoparentalité en chiffres : majorité écrasante de femmes, mal-logement, temps partiel… », mars 2024.

([62])  Le Monde, « Les mères seules dans le piège de la pauvreté : « J’ai eu un ami, mais ce n’était pas jouable », mai 2024.

([63])  Tel que cité par le Sénat, Délégation aux droits des femmes, « Familles monoparentales : pour un changement des représentations sociétales », rapport d’information n° 485 (2023-2024), tome I, Mmes Colombe Brossel et Béatrice Gosselin, rapporteures, mars 2024.

([64])  Le Monde, « Les mères seules dans le piège de la pauvreté : « J’ai eu un ami, mais ce n’était pas jouable », mai 2024.

([65])  Fondation des femmes, Observatoire de l’émancipation économique des femmes, « Le coût d’être mère », juin 2023.

([66])  Une même suspicion frappe les mères d’enfants porteurs de handicap. Certaines craignent la réaction de leurs collègues et/ou de leurs supérieurs hiérarchiques et choisissent de ne pas révéler cette information à leur employeur.

([67])  Le Monde, « Les mères seules dans le piège de la pauvreté : « J’ai eu un ami, mais ce n’était pas jouable », mai 2024.

([68])  France inter, « Comment vivent les mères célibataires en 2020 ? », septembre 2020.

([69])  Jacqueline Fontaine, « Perrot, M. (2023) Le Temps des féminismes, avec Eduardo Castillo. Grasset. », Éducation et socialisation, 67 | 2023.

([70])  Ifop Sondage, « Des conservations en entreprise lors des moments café », juillet 2018.

([71])  Assurance maladie, Dépression post-partum, février 2025.

([72])  Tel que rapporté par Mme Elise Marcende, présidente de l’association Maman blues, à vos rapporteures.

([73])  Centre de Recherche en Épidémiologie et Statistiques et Santé Publique France, « Publication du 7ème rapport de l’Enquête nationale confidentielle sur les morts maternelles (ENCMM) 2016-2018 », avril 2024.

([74]) France Info, « Il me faudrait au moins 2-3 semaines de vacances…pour me reposer des vacances : pourquoi les femmes rentrent majoritairement fatiguées des congés d’été », août 2023.

([75])  François Kraus, directeur du pôle « Genre et sexualités » de l’IFOP tel que cité dans IFOP, « La charge mentale prend-elle des vacances ? Enquête sur la « charge mentale » et la répartition des tâches au sein du couple durant les voyages et les vacances », juillet 2022.

([76])  Listés par le média Plan Cash et tel que cités par la Fondation des femmes, Observatoire de l’émancipation économique des femmes, « Le coût d’être mère », juin 2023.

([77])  Insee, « Écart de salaire entre femmes et hommes en 2023 », n° 349, mars 2025.

([78])  Conseil d’analyse économique (CAE), « Égalité hommes-femmes : une question d’équité, un impératif économique », Les notes du conseil d’analyse économique, n° 83, novembre 2024.

([79])  Idem

([80])  Ibid

([81])  Selon une étude de l’Insee sur la région Grand Est évoquée dans Insee, « Les femmes sont financièrement plus affectées par une séparation », mars 2021.

([82])  Sénat, Délégation aux droits des femmes, « Familles monoparentales : pour un changement des représentations sociétales », rapport d’information n° 485 (2023-2024), tome I, Mmes Colombe Brossel et Béatrice Gosselin, rapporteures, mars 2024.

([83])  Insee, « Les femmes sont financièrement plus affectées par une séparation », mars 2021.

([84])  Conseil d’analyse économique (CAE), « Égalité hommes-femmes : une question d’équité, un impératif économique », Les notes du conseil d’analyse économique, n° 83, novembre 2024.

([85])  Connu sous le nom d’enseignement ménager, ces cours ont existé en France entre la fin du XIXe siècle et les années 1980.

([86])  Ouest France, « 44 % des jeunes mangent régulièrement des plats transformés : le gouvernement veut agir », mars 2024.

([87])  L’affiche illustre cet article du Monde, « Les bébés sont-ils misogynes ? », avril 2025.

([88])  Le Monde, « En Suède, les papas pouponnent », novembre 2024.

([89])  Selon les données transmises par la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC) à vos rapporteures.

([90])  Idem

([91])  Drees, « Premiers jours de l’enfant : un temps de plus en plus sanctuarisé par les pères via le congé de paternité », juillet 2023.

([92])  Ofce, Hélène Périvier et Grégory Verdugo, « Cinq ans après la réforme du congé parental (PreParE), les objectifs sont-ils atteints ? », policy brief, n° 88, avril 2021.

([93])  Boson project, « Parentalité dans le monde du travail : conflit des rôles ou équilibre », janvier 2024 tel que cité par l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail, « Parentalité et travail : une conciliation encore difficile », octobre 2024.

([94])  Forbes, « Parentalité en entreprise : une charge mentale encore peu prise en compte », mai 2025.

([95])  Idem

([96])  Vie publique, « Hausse de l’infertilité : à quoi est –elle due et comment la combattre ? », mars 2022.

([97])  Le Dauphiné libéré, « De 15 à 24 mois d’attente : la demande de PMA en forte hausse », mars 2025.

([98])  RMC, « Âge des adoptants, durée « d’attente »…les 6 chiffres-clés sur l’adoption en France », décembre 2019.

([99])  House of Commons, Women and Equalities Committee, « Equality at work : miscarriage and bereavement leave », HC 335, second report of session 2024-2025.

([100])  Judith Aquien, Trois mois sous silence : le tabou de la condition des femmes en début de grossesse, Payot, 2024.

([101])  Fabienne Lacoude, « Daronne et féministe : grossesse, post-partum, charge mentale…quand la maternité rend féministe ! », Solar Editions, 2022.

([102])  Ouest France, « Un allaitement collectif en soutien à une mère expulsée de la boutique SNCF de la gare de Nantes », février 2025.

([103])  Rapport d’évaluation des politiques de sécurité sociale, annexe 1 Famille, projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale- PLACSS, 2023.

([104])  Tel que cité par Stéphane Jourdain, Guillaume Daudin et Antoine Grimée, L'Arnaque des nouveaux pères : Enquête sur une révolution manquée, Glénat, 2024.

([105])  Fabienne Lacoude, Daronne et féministe : grossesse, post-partum, charge mentale…quand la maternité rend féministe !, Solar Editions, 2022 à partir du sondage Opinion Way pour la plateforme de téléconsultations Qare, septembre 2021.

([106])  Tel que l’explique Mme Mounia El Kotni à vos rapporteures. Elle s’appuie notamment sur les travaux de Fabienne El-Khoury et al., « Women’s mental health in the perinatal period according to migrant status: the French representative ELFE birth cohort », The European Journal of Public Health, 2018, vol. 28, no 3, p. 458‑463 ; Betty Goguikian Ratcliff et al., « Factors associated with antenatal depression and obstetric complications in immigrant women in Geneva », Midwifery, 2015, vol. 31, no 9, p. 871‑878.k

([107])  Fondation des femmes, Observatoire de l’émancipation économique des femmes, « Le coût d’être mère », juin 2023.

([108])  Fondation Jaurès, Elsa Foucraut et Violaine Dutrop, « Comment et pourquoi réformer les congés parentaux ? », mars 2024.

([109])  Drees, « Premiers jours de l’enfant : un temps de plus en plus sanctuarisé par les pères via le congé de paternité », juillet 2023.

([110])  Idem

([111])  Chez les intermittents bénéficiaires d’un congé paternité, celui-ci ne débute qu’avec la naissance réelle de l’enfant (et non la date prévisionnelle d’accouchement comme le congé maternité et d’adoption). Or, de nombreux professionnels rencontrent des difficultés à être remplacés et ne peuvent donc bénéficier de tout ou partie de leur congé.

([112])  Vie publique, « Congé de paternité : un succès grandissant », juillet 2023.

([113])  Haut-commissariat au Plan et France stratégie, « Stéréotypes filles-garçons : quel bilan sur dix ans, quelles priorités d’ici à 2030 ? », synthèse, mai 2025.

([114])  Vie publique, « Congé de paternité : un succès grandissant », juillet 2023.

([115])  Passé de 8 semaines en 2019 dont deux à la naissance de l’enfant à 12 semaines en 2020 dont 4 à la naissance de l’enfant pour atteindre 16 semaines, à partir de 2021 dont 6 à la naissance de l’enfant.

([116])  Selon les données fournies par l’Ambassade de France en Espagne à vos rapporteures.

([117])  Tristan Champion, La barbe et le biberon, Marabout, 2020.

([118])  Idem

([119])  La Matrescence, podcast, « Baby clash, pourquoi tant de décalage entre hommes et femmes ? », janvier 2025.

([120])  CAE, « Égalité hommes-femmes : une question d’équité, un impératif économique », Les notes du conseil d’analyse économique, n° 83, novembre 2024.

([121])  House of Commons, Women and Equalities Committee, « Equality at work: Paternity and shared parental leave », Sixth Report of Session 2024 – 25, HC 502.

([122])  CAE, « Égalité hommes-femmes : une question d’équité, un impératif économique », Les notes du conseil d’analyse économique, n° 83, novembre 2024.

([123])  Rappelons que les trois jours du congé de naissance sont pris en charge par l’employeur.

([124])  Hypothèse fondée sur une journée d’indemnisation estimée à 26,5 m €.

([125])  La sécurité sociale, Rapports d’évaluation des politiques de sécurité sociale (REPSS), synthèse Famille.

([126])  Fondation des femmes, Observatoire de l’émancipation économique des femmes, « Le coût d’être mère », juin 2023.

([127])  Selon les données fournies par M. Pierre Porra

([128])  Ofce, Hélène Périvier et Grégory Verdugo, « Cinq ans après la réforme du congé parental (PreParE), les objectifs sont-ils atteints ? », policy brief, n° 88, avril 2021.

([129])  Hcfea, Conseil de la famille, « Accueil des moins de 3 ans : relancer la dynamique ».

([130])  Voir également le rapport du Hcfea, « Qualité, flexibilité, égalité : un service public de la petite enfance favorable au développement de tous les enfants avant 3 ans », avril 2023 ou encore Inspection générale des affaires sociales, « Qualité de l’accueil et prévention de la maltraitance dans les crèches », mars 2023.

([131])  Le Point, « Ile de France : les crèches en pénurie de personnel », avril 2023.

([132])  Selon les données fournies par l’association Allo Écoute parents à vos rapporteures.

([133])  Institut Montaigne, Yann Algan, Olivier Galland, Marc Lazar, « Les jeunes et le travail : aspirations et désillusions des 16-30 ans », avril 2025.

([134])  Conseil économique social et environnemental, « Quelles conséquences de la dégradation de la santé mentale des jeunes ? », février 2025.

([135])  Selon les données fournies par Mme Marie Legrand à vos rapporteures.

([136])  Vos rapporteures relèvent que la santé mentale des jeunes filles se dégrade davantage que celle des garçons sous-tendue par des biais de genre et des pressions sociales pesant particulièrement sur les filles.

([137])  France Info, « C’est entre six mois et un an d’attente : quand la pénurie de personnel en pédopsychiatrie met en péril le soin des enfants », octobre 2022.

([138])  France Info, « C’est entre six mois et un an d’attente : quand la pénurie de personnel en pédopsychiatrie met en péril le soin des enfants », octobre 2022.

([139])  Sénat, Délégation aux droits des femmes, « Familles monoparentales : pour un changement des représentations sociétales », rapport d’information n° 485 (2023-2024), tome I, Mmes Colombe Brossel et Béatrice Gosselin, rapporteures, mars 2024.

([140])  Ouest France, « Divorce : pourquoi les mères obtiennent-elles si souvent la garde des enfants ? », décembre 2021.

([141])  Selon les données fournies par la Collective des mères isolées à vos rapporteures, évaluées à partir d’une étude de la DREES, Rapport d’activité, 2016.

([142])  Sénat, Délégation aux droits des femmes, « Familles monoparentales : pour un changement des représentations sociétales », rapport d’information n° 485 (2023-2024), tome I, Mmes Colombe Brossel et Béatrice Gosselin, rapporteures, mars 2024.

([143])  Selon l’expression utilisée par la Commission parentalité co-présidée par Hélène Roques et Serge Hefez.