N° 1644
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 25 juin 2025.
RAPPORT D’INFORMATION
DÉPOSÉ
en application de l’article 146 du Règlement
PAR LA COMMISSION DES FINANCES, dE L’Économie gÉnÉrale
et du contrÔLE BUDGÉTAIRE
sur la réalité des bénéfices financiers, directs ou indirects,
de l’Union européenne en France
ET PRÉSENTÉ PAR
M. Jean-Philippe TANGUY,
rapporteur spécial
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SOMMAIRE
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Pages
Principales observations du rapporteur spécial
A. Une contribution nette qui ne cesse de s’accroÎtre
1. La hausse de la contribution nette
B. le plan de relance Next Generation EU
1. Le plan de relance français
2. Les mesures financées par le plan de relance Next Generation EU
4. Versement des fonds et atteintes des jalons et cibles
5. Évaluation macroéconomique des effets du plan de relance Next Generation EU
C. Le plan de relance : une dette qui pèsera lourd dans le budget de la France
1. La dette issue du plan de relance
2. Les restes à liquider issus du CFP 2021 – 2027
II. Une politique de compÉtitivitÉ dÉfaillante
A. Les fonds qui soutiennent la politique de compÉtitivitÉ
1. Une importante marge de progression pour capter les fonds européens en matière de recherche
a. Le programme Horizon Europe
b. Des performances en retrait de la France
2. L’échec de l’agenda de Lisbonne
3. Des niveaux de retours plus satisfaisants au titre du nucléaire et du programme spatial
b. Le programme spatial européen
4. Les investissements stratégiques
a. Le mécanisme d’interconnexion en Europe
b. Le programme Europe numérique
c. Le Fonds européen pour les investissements stratégiques InvestEU
1. La conjoncture dégradée de la chimie et de la métallurgie
a. Les conséquences des hausses du prix de l’énergie pour la chimie et la métallurgie
b. Une hausse de prix essentiellement liée au fonctionnement du marché européen de l’électricité
d. Le saut dans l’inconnu lié à la fin de l’ARENH
3. Le financement de surcapacités mondiales de production par la Chine et les États-Unis
4. La réponse défaillante de l’Union européenne
III. Les principaux retours français : la politique de cohÉsion et la PAC
1. Le fonds européen de développement régional et le fonds de transition juste
3. Les retours français au titre de la rubrique « Résilience et valeurs »
B. La rubrique « ressources naturelles et environnement »
1. La politique agricole commune
a. Le fonds européen agricole de garantie
b. Le Fonds européen agricole pour le développement rural
2. Le Fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l’aquaculture
a. Un fonds conçu pour soutenir la pêche durable et l’aquaculture
c. Un enjeu de prévisibilité des quotas pour les pêcheurs
4. L’articulation des fonds entre l’État et les régions
a. Les enveloppes partagées entre l’État et les régions
b. La coordination entre l’État et les régions
IV. les retours en faveur de la sÉcuritÉ et de la dÉfense
A. Les fonds intervenant en matière de sécurité et d’immigration
1. Le fonds asile, migration et intégration
2. Le fonds de sécurité intérieure
B. Le fonds européen de la défense
1. Les retours français au titre de la rubrique « Sécurité et défense »
2. Le fonds européen pour la défense
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL
Principales observations du rapporteur spécial Le rapporteur spécial s’alarme de la hausse considérable de la contribution française à l’Union européenne (UE). Son montant augmentera de 10,4 milliards d’euros dans les trois prochaines années, passant de 24,2 milliards d’euros en 2024 à 34,6 milliards d’euros en 2027, soit une hausse de plus de 40 % tandis que son montant annuel moyen aura augmenté de 6,4 milliards d’euros entre le cadre financier pluriannuel (CFP) 2014–2020 et le CFP 2021–2027. En outre, le solde net entre les versements de la France au budget de l’UE et les fonds européens investis en France ne cesse de s’accroître : la contribution nette annuelle moyenne de la France est ainsi passée de 7,6 milliards à 10,4 milliards d’euros entre le CFP 2014–2020 et le CFP 2021–2027. Force est de constater que cette évolution fait écho à la dérive générale des dépenses pour ne pas dire que la situation est devenue hors de contrôle. En effet, cette situation risque d’empirer puisque le cadre financier pluriannuel 2021‑2027 laisse aux Français ainsi qu’à l’ensemble de nos partenaires européens un véritable mur d’engagements financiers hors bilan et de dettes à honorer de 707 milliards d’euros, si l’on prend en compte la partie subvention du plan de relance européen Next Generation EU (390 milliards d’euros) que l’UE doit rembourser et les restes à liquider du CFP 2021 – 2027 (507 milliards d’euros à la fin de l’année 2024 dont il faut déduire les 190 milliards d’euros de restes à liquider au titre de la partie subvention du plan de relance européen déjà comptabilisée). La gestion hasardeuse et les conséquences du « plan de relance européen » sont tout aussi préoccupantes. Alors que la France doit percevoir 45 milliards d’euros au titre du plan de relance Next Generation EU, elle pourrait en rembourser jusqu’à 75 milliards pour le seul principal entre 2028 et 2058. À cette somme considérable s’ajoute la charge des intérêts de cet emprunt qui n’a cessé de gonfler : alors qu’elle devait atteindre 15 milliards d’euros pour l’ensemble de l’UE sur les années 2021–2027 selon les estimations réalisées par la Commission européenne en 2021, ce montant pourrait presque doubler et atteindre 28,2 milliards d’euros sur l’ensemble du CFP 2021–2027. À partir de 2028, la direction générale du Trésor estime que le montant de ces intérêts atteindrait 11,5 milliards d’euros par an pour l’ensemble de l’UE. En appliquant la clé de contribution de la France à la ressource liée au revenu national brut qui équilibre le budget de l’UE, les intérêts représentent donc en moyenne 685 millions d’euros par an sur l’ensemble du CFP 2021–2027 et 1,9 milliard d’euros par an à partir de 2028 pour notre pays. En définitive, à partir de 2028, l’UE devra consacrer entre 25 et 30 milliards d’euros par an au remboursement de cet emprunt, ce qui représente une hausse de la contribution annuelle de la France au budget de l’UE comprise entre 4 et 5 milliards d’euros. La contribution moyenne de la France au budget de l’UE pourrait ainsi dépasser chaque année les 30 milliards d’euros. Pour l’heure, cette contribution sert toujours à financer les rabais des États les plus développés de l’Union. La France verse un tribut d’1,5 milliard d’euros pour financer 28 % des 7 milliards d’euros de rabais accordés à l’Allemagne, les Pays-Bas, le Danemark, l’Autriche et la Suède. À chaque négociation des cadres financiers pluriannuels, la France demande la fin des rabais et ne les obtient jamais. Aussi, alors qu’une ponction de plus en plus substantielle sera réalisée sur le budget de la France, le rapporteur s’étonne que la position de la France demeure de demander la fin des rabais et non de négocier un rabais à la française. Cette proposition ne lui paraît pas réaliste. Ces engagements financiers considérables pourraient en théorie se justifier s’ils permettaient le déploiement de politiques européennes pertinentes permettant à la France de bénéficier des opportunités du marché unique et de projets continentaux que notre pays ne pourrait mener seul. Après avoir mené 18 auditions et évalué l’ensemble des 16,4 milliards d’euros de fonds européens investis en France, le rapporteur spécial s’interroge sur leur plus-value. Près des trois quarts de ces fonds sont gérés au niveau national et abondent les politiques nationales sans véritable stratégie intégrée et ni objectifs communs définis au niveau européen. Le fonds européen de développement régional, le fond social européen et le fonds européen intervenant dans le domaine de la sécurité et de l’immigration ne viennent que co-financer des politiques nationales, sans que l’intérêt que ce financement soit réalisé par le budget de l’UE ne soit démontré alors même que ce circuit de financement génère au passage d’importants coûts de gestion et des lourdeurs bureaucratiques pour les porteurs de projets malgré quelques bonnes volontés pour identifier et partager les meilleures pratiques. La politique agricole commune, elle-même très intégrée, est en voie de renationalisation via la mise en œuvre de plans stratégiques nationaux. Le rapporteur spécial s’étonne qu’elle ne s’appuie d’aucune manière sur une stratégie européenne fidèle au principe de subsidiarité permettant de réaliser des projets paneuropéens, par exemple sur la production de protéines végétales, d’engrais ou le génie génétique. Au grand étonnement du rapporteur spécial, nos interlocuteurs ont reconnu, et bien souvent déploré, qu’ils n’existaient bien peu de politiques européennes à proprement parler. La proposition de la Commission d’une refonte du budget de l’UE articulée autour de plans nationaux, sur le modèle des plans nationaux de relance et de résilience, qui donnerait lieu à une fongibilité des fonds, lesquels seraient décaissés en fonction de l’atteinte des jalons et cibles fixés dans le plan national, atteste que le niveau national serait l’échelon démocratique d’action publique le plus efficace tout en limitant paradoxalement le rôle des politiques européennes à une allocation des fonds versés par les pays contributeurs nets. Alors que le rapport Le Futur de la compétitivité européenne (2024) de Mario Draghi alerte sur le déficit d’investissement de l’Union européenne par rapport aux États-Unis et sur le décrochage de la zone euro, dont l’écart de PIB par tête en parité de pouvoir d’achat avec notre concurrent américain est passé de 14 % en 2008 à 25 % en 2024, l’Union européenne manque d’une véritable politique industrielle et de compétitivité lui permettant de faire face aux stratégies commerciales et industrielles agressives de la Chine et des États-Unis. Les industries européennes sont étouffées par les pratiques de dumping chinoises et américaines finançant des surcapacités de production, des coûts de l’énergie peu compétitifs, un financement insuffisant de la recherche et de l’innovation et des instruments de défense commerciale défaillants. En outre, le rapporteur spécial souligne l’incomplétude du marché unique et l’embolie réglementaire causées par la boulimie d’initiatives normatives de la Commission européenne elle-même. Selon le dernier baromètre des réformes publié par Business Europe ([1]), le coût moyen de vente d’un bien entre États membres lié à l’incomplétude du marché unique est équivalent à un droit de douane de 45 % alors que ce taux atteint 15 % aux États-Unis et 60 % des entreprises européennes considèrent les régulations excessives comme une barrière à l’investissement. Le fait que notre marché unique soit sous-développé et sur-réglementé est particulièrement préjudiciable pour les PME. De plus, cela décourage les start-ups de se développer à l’échelle européenne. Dans son rapport, M. Draghi souligne que l’Union européenne a adopté 13 000 actes entre 2019 et 2024 tandis que 3 500 actes législatifs et environ 2 000 résolutions ont été adoptés aux États-Unis au niveau fédéral. En témoigne l’hydre bureaucratique que constituent les directives dites CSRD ([2]) en ce qui concerne la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises et CS3D ([3]) sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité. Chaque texte européen est par ailleurs l’occasion pour les nations en général et la France en particulier d’ajouter des sur-transpositions étouffantes. Enfin, si la France affiche un taux de retour de 11,1 % sur les financements européens, c’est également en raison d’un manque de stratégie interministérielle coordonnée et de véritables moyens pour capter les fonds européens gérés par la Commission : nous ne captons que 11,4 % des fonds du programme de recherche Horizon Europe, principalement en raison de l’insuffisance de nos partenariats européens avec les centres de recherche et les entreprises des autres pays. Ces faibles résultats plaident pour une mobilisation accrue dans ce domaine. |
Les trois dernières années du cadre financier pluriannuel (CFP) 2021-2027 donneront lieu à une hausse de 10,1 milliards d’euros du montant annuel du prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne (PSR-UE), lequel a atteint 22,3 milliards d’euros en 2024 et atteindra 30,4 milliards d’euros en 2026 et 32,4 milliards en 2027. Par ailleurs, ce CFP laisse une dette importante (712 milliards d’euros) et des montants importants de restes à liquider (507 milliards d’euros à la fin de l’année 2024), ce qui laisse augurer une charge particulièrement importante pour le budget de l’État à partir de 2028.
Si l’évolution du PSR-UE est bien renseignée depuis des années, force est de constater que les bénéfices des « retours » du budget de l’Union européenne pour la France sont pris pour argent comptant, sans réelle analyse de leurs réalités et intérêts.
Aussi, le rapporteur spécial a souhaité s’intéresser à la réalité des bénéfices financiers que la France tire du budget de l’Union européenne. En 2023, année au cours de laquelle a été versée une contribution française de 23,9 milliards d’euros au profit du budget de l’Union européenne, la France a ainsi perçu 16,4 milliards de retours au titre de ce budget :
– 9,5 milliards d’euros au titre de la politique agricole commune et de la politique commune de la pêche ;
– 2,7 milliards d’euros au titre des fonds européens en matière de recherche, des investissements stratégiques, du programme spatial et des programmes de recherche dans le domaine du nucléaire ;
– 2,9 milliards d’euros au titre de la politique de cohésion ;
– 322 millions d’euros au titre des politiques régaliennes de l’Union (sécurité, défense, protection des frontières extérieures, immigration et action extérieure) ;
– 518 millions d’euros au titre des dépenses administratives ;
– 504 millions d’euros au titre des instruments spéciaux.
Le rapporteur spécial s’est interrogé sur la pertinence de ces fonds, sur l’intérêt que ces dépenses soient financées par le budget de l’Union européenne et sur le point de savoir si ce circuit de financement permet une véritable harmonisation des politiques concernées à l’échelle européenne et si elles garantissent l’atteinte d’objectifs communs qui ne pourraient pas être atteints par les nations elles-mêmes.
I. Le cadre financier pluriannuel 2021–2027 : une contribution nette toujours plus ÉlevÉe et une dette issue du plan de relance particuliÈrement importante
A. Une contribution nette qui ne cesse de s’accroÎtre
1. La hausse de la contribution nette
● Le rapporteur spécial alerte depuis plusieurs années sur l’envolée de la contribution française à l’Union européenne, composée du prélèvement sur recettes au profit de l’UE (PSR-UE) et des ressources propres traditionnelles, c’est-à-dire des droits de douane perçus sur le territoire français et versés au budget de l’Union après application d’une retenue pour frais de perception de 25 % de ces droits de douane. Ainsi, la contribution française à l’Union européenne augmentera de 10,4 milliards d’euros dans les trois années à venir, passant de 24,2 milliards d’euros en 2024 à 34,6 milliards d’euros en 2027.
Si cette hausse de la contribution française à l’Union européenne a partie liée avec la sous-consommation des plafonds prévus par le cadre financier pluriannuel (CFP) 2021–2027 pendant les quatre premières années du CFP, laquelle donne lieu à un rattrapage en fin de CFP, le montant moyen annuel du PSR-UE aura tout de même augmenté de 6,4 milliards d’euros entre le CFP 2014–2020 et le CFP 2021–2027.
Si cette évolution est induite par la hausse mécanique de la clé de contribution de la France à la ressource du budget de l’Union européenne liée au revenu national brut depuis la sortie du Royaume-Uni de l’Union, laquelle est passée de 15 % à 17,3 % en moyenne entre les deux CFP, le Gouvernement n’a rien fait pour la limiter : les plafonds de crédits de paiement du CFP 2021–2027 sont en hausse de 13,8 % par rapport au CFP précédent et sont automatiquement augmentés de 2 % chaque année pour tenir compte de l’inflation. En outre, une révision à mi-parcours du CFP 2021–2027 a été votée en 2024 pour dépenser 64,6 milliards d’euros supplémentaires (dont 21 milliards d’euros de crédits réellement nouveaux si on tient compte des prêts et redéploiements de crédits ayant en partie financé cette révision). Enfin, la France continue de financer à hauteur de 1,5 milliard d’euros les 7 milliards d’euros de rabais accordés aux Pays-Bas, à l’Autriche, au Danemark, à l’Allemagne et à la Suède, ce qui signifie que la France finance 28 % de ces rabais.
● En conséquence, la contribution nette de la France, entendue comme la différence comptable entre les versements de la France au budget de l’Union européenne et les dépenses de ce même budget sur le territoire français, augmente-t-elle aussi de manière continue. En moyenne annuelle, elle est passée de 2,6 milliards d’euros au titre du CFP 2000–2006 à 6,3 milliards d’euros au titre du CFP 2007–2013, à 7,6 milliards d’euros au titre du CFP 2014–2020 et à 10,4 milliards d’euros en moyenne au titre des trois premières années ([4]) du CFP 2021–2027.
Les soldes nets de 1998 À 2022
(en milliards d’euros et en pourcentage du RNB)
Source : Commission européenne, rapports financiers 2000-2023 et Direction du budget.
Les retours français sont évalués à 14,1 milliards d’euros en moyenne annuelle au titre du CFP 2014–2020 et à 16,4 milliards d’euros en moyenne sur les trois premières années du CFP 2021–2027.
Cette évolution est imputable à la hausse des retours français relevant de l’agriculture et de la pêche (504 millions d’euros en plus en moyenne par an entre les deux CFP), de la politique de compétitivité (365 millions en plus en moyenne par an entre les deux CFP), des instruments spéciaux (358 millions d’euros en plus en moyenne par an), des politiques d’immigration, de sécurité, de défense et d’action extérieure (361 millions en plus en moyenne par an), des politiques internes de l’UE (338 millions d’euros en plus en moyenne par an), de la politique de cohésion (258 millions d’euros en plus en moyenne par an) et des dépenses administratives de l’UE (113 millions d’euros en plus en moyenne par an).
Les retours français sont essentiellement constitués de la politique agricole commune (9,4 milliards d’euros en moyenne par an sur les trois premières années du CFP 2021-2027), des fonds de la politique de cohésion (2,3 milliards d’euros en moyenne par an) et des investissements au titre de la politique de compétitivité de l’Union européenne (2,8 milliards d’euros en moyenne par an). Des retours plus résiduels sont inscrits au titre des politiques internes de l’Union européenne (560 millions en moyenne par an) qui relèvent essentiellement du programme Erasmus + et d’autres programmes sectoriels de l’Union (Europe créative, EU4Health), de la politique d’immigration (160 millions d’euros en moyenne par an), de la rubrique « sécurité et défense » (120 millions d’euros en moyenne par an) et de la politique commune de la pêche (92 millions d’euros en moyenne par an).
Le rapporteur spécial s’interroge sur la comptabilisation comme retours français des dépenses administratives de l’Union réalisées en France tels que celles du Parlement européen (494 millions d’euros en moyenne par an) ou les 81 millions d’euros de retours français relevant l’instrument de voisinage, de coopération au développement et de coopération internationale et du Fonds européen pour le développement durable élargi qui financent l’action extérieure de l’Union via des organisations internationales (OMS, PNUE, FAO) ou des opérateurs français tels que l’Agence française de développement, Expertise France ou l’Institut français.
Enfin, ces retours sont complétés par 383 millions d’euros en moyenne par an sur les trois premières années du CFP relevant des instruments spéciaux qui sont des instruments thématiques créés en dehors des 8 rubriques du budget de l’Union européenne. Il s’agit notamment :
– du fonds de solidarité de l’Union européenne au titre duquel la France a obtenu des fonds pour faire face aux conséquences des inondations dans le Nord-Pas-de-Calais de novembre 2023 (46,7 millions d’euros en 2023) ou du cyclone Chido à Mayotte au titre duquel la France a obtenu une avance de 23,7 millions d’euros en 2024 ;
– du fonds européen d’ajustement à la mondialisation en faveur des travailleurs licenciés confrontés à une restructuration ;
– de la réserve d’ajustement au Brexit, sur laquelle la France a perçu 247 millions pour financer des mesures d’adaptation des infrastructures portuaires, des dépenses publiques liées au rétablissement des contrôles douaniers et sanitaires aux frontières franco-britanniques, des mesures de soutien aux entreprises affectées par le Brexit et des aides aux secteurs de la pêche, quand 504 millions d’euros de cette réserve ont été transférés pour financer le plan national de relance et de résilience ;
– du fonds pour l’innovation qui a par exemple permis de financer un projet de décarbonation de l’industrie de la chaux à hauteur de 31,9 millions d’euros.
La gestion calamiteuse de la réserve d’ajustement au Brexit a conduit à transférer 504 millions d’euros de cette réserve vers le financement du plan national
de relance et de résilience
Le Conseil européen du 21 juillet avait approuvé la mise en place d’une réserve d’ajustement au Brexit de 5 milliards d’euros à l’échelle de l’Union européenne. Au terme de la négociation, la France avait obtenu une hausse substantielle de cette enveloppe par rapport à la proposition de la Commission : les fonds alloués à la France sont ainsi passés de 396 millions de 2018 dans la proposition de la Commission à 672 millions d’euros de 2018 dans l’accord final, ce qui représente 736 millions d’euros courants.
Seulement un tiers de ces fonds (247 millions d’euros) ([5]) ont été affectés à des secteurs économiques ayant subi les conséquences de la sortie du Royaume-Uni de l’Union ou des services publics nécessitant un surcroît de dépense : infrastructures portuaires, financement des dépenses publiques liées au rétablissement des contrôles douaniers et sanitaires aux frontières franco-britanniques, soutien aux entreprises affectées par la sortie du Royaume-Uni de l’Union et aide au secteur de la pêche via des indemnités compensatoires de pertes de chiffre d’affaires, indemnisation des arrêts temporaires d’activité et plans d’accompagnement des entreprises de pêche.
Le rapporteur spécial s’insurge du fait que deux tiers de la réserve d’ajustement au Brexit, soit 504 millions d’euros aient été captés et affectés au plan France relance pour des dépenses qui n’ont pas eu pour objet principal d’aider les entreprises affectées par la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, en particulier les entreprises de pêches.
Auditionnée par le rapporteur spécial, l’Association des régions de France a souligné que la gestion centralisée de ces fonds par le ministère de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique n’avait pas permis d’identifier les bénéficiaires potentiels de cette réserve et qu’une gestion plus décentralisée, déléguée aux régions directement affectées par la sortie du Royaume-Uni de l’Union aurait permis de mieux décaisser ces fonds.
Retours français au titre du cadre financier pluriannuel 2021–2027
(en millions d’euros)
|
2021 |
2022 |
2023 |
Taux de retour moyen (2021 – 2023) |
Compétitivité |
2 626 |
2 958 |
2 711 |
17,05 % |
Fonds de la politique de cohésion |
2 344 |
2 350 |
2 281 |
4,23 % |
Politiques internes de l’UE |
452 |
605 |
622 |
12,2 % |
Agriculture et pêche |
9 419 |
9 499 |
9 540 |
16,35 % |
Frontières et migrations |
162 |
208 |
109 |
6,39 % |
Sécurité et défense |
76 |
143 |
142 |
11,53 % |
Action extérieure |
43 |
128 |
71 |
0,5 % |
Dépenses administratives |
456 |
508 |
518 |
4,56 % |
Instruments spéciaux |
151 |
493 |
504 |
21,84 % |
TOTAL |
15 729 |
16 892 |
16 498 |
11,1 % |
B. le plan de relance Next Generation EU
1. Le plan de relance français
L’accord obtenu au Conseil européen de juillet 2020 prévoyait, en sus du CFP 2021-2027, un plan de relance européen d’un montant de 750 milliards d’euros composé à hauteur de 390 milliards de prêts aux États membres et de 360 milliards de subventions. Ce montant a été ramené à 712 milliards d’euros car les États membres n’ont pas demandé l’intégralité des prêts prévus alors que le délai de souscription a expiré.
La France a fait le choix de ne pas demander de prêt et de financer 40 % de son plan relance doté de 100 milliards d’euros sur les années 2021 à 2023 au moyen des versements du plan de relance européen Next Generation EU. Le montant qui devait initialement être alloué à la France était de 39,4 milliards d’euros. Toutefois, en application de l’article 18 du Règlement UE 2021/241 du Parlement européen et du Conseil du 12 février 2021 établissant la facilité pour la relance et la résilience, la part de la France a été recalculée à la baisse en raison de la reprise plus rapide que prévue observée en France sur la période 2020–2021.
En effet, si 70 % des dotations des États au titre du volet subvention du plan de relance étaient calculées selon les critères de cohésion classiques (population, proportion inverse du PIB par habitant, taux de chômage moyen sur les cinq dernières années par rapport à la moyenne de l’Union entre 2015 et 2019), pour les 30 % restants, le critère du chômage au cours de la période 2015-2019 est remplacé, en proportions égales, par le critère de la chute du PIB réel en 2020 et la chute du PIB réel durant les exercices 2020-2021 combinés.
En définitive, le montant que doit percevoir la France au titre de la Facilité pour la relance et la résilience est de 37,5 milliards d’euros, auxquels se sont toutefois ajoutés 2,3 milliards d’euros au titre du Plan REPowerEU ainsi qu’un transfert de 500 millions d’euros en provenance de la réserve d’ajustement au Brexit, ce qui porte la totalité des fonds que la France doit percevoir à 40,3 milliards d’euros.
Il convient également de souligner que le plan Next Generation EU a financé un réabondement des fonds de cohésion à hauteur de 3,9 milliards d’euros sur la programmation 2014 – 2020, une hausse de 582 millions d’euros du fonds de transition juste alloué à la France et une hausse de 867 millions d’euros pour le FEADER au titre de la programmation 2014 – 2020. La totalité des fonds perçus par la France via l’emprunt Next Generation EU peut donc être évaluée, une fois ces autres aspects pris en compte, à 45,7 milliards d’euros.
2. Les mesures financées par le plan de relance Next Generation EU
Pour permettre le financement des mesures du plan de relance, la France a élaboré un plan national de relance et de résilience, modifié par la suite pour intégrer un chapitre REPowerEU, validé par la Commission européenne. Il devait contenir 37 % d’investissements en faveur la transition climatique et 20 % d’investissements en faveur de la transition numérique. Le France a fait le choix de consacrer 50 % des investissements à la transition climatique et 25 % des fonds à la transition numérique.
Au terme de ses investigations, le rapporteur spécial constate que ce plan est venu en substitution de dépenses que la France aurait pu engager seule, les projets en cause n’étant que très rarement liés à une ou plusieurs politiques publiques menées conjointement par plusieurs pays membres et aucune par la totalité des membres de l’UE.
Le plan est structuré en trois volets :
– un volet compétitivité doté de 4,9 milliards d’euros pour améliorer le financement des entreprises, la souveraineté technologie et la résilience et la mise à niveau numérique de l’État, des territoires et des entreprises ;
– un volet écologique doté de 22,2 milliards incluant des mesures en faveur de la rénovation énergétique des bâtiments, de l’écologie et de la biodiversité, des infrastructures et des mobilités vertes, de l’énergie et des technologies vertes et d’un chapitre REPowerEU en faveur de la transition énergétique ;
– un volet cohésion doté de 14,8 milliards axé autour du soutien à l’emploi et en particulier l’emploi des jeunes, du handicap, de la formation professionnelle, du financement de la recherche, du Ségur de la Santé, du financement de la dépendance et de la cohésion territoire.
Plan national de relance et de résilience – Volet Ecologie
(en millions d’euros)
|
Montant total |
Financement apporté par le plan de relance Next Generation EU |
Rénovation énergétique |
6 700 |
5 825 |
Rénovation énergétique des bâtiments privés, publics et des logements sociaux |
6 500 |
5 705 |
Rénovation énergétique des TPE et PME |
200 |
120 |
Chapitre REPower EU |
6 473 |
2 821 |
Industrie Zéro Fossile |
294 |
294 |
PIIEC Hydrogène |
2 000 |
651 |
Rénovation énergétique des bâtiments publics et privés |
4 079 |
1 876 |
Décarbonation de l’économie et transition écologique |
10 547 |
6 585 |
Décarbonation de l’industrie |
1 200 |
300 |
Innover pour la transition écologique |
3 400 |
1 700 |
Développer l’hydrogène décarboné |
2 000 |
1 275 |
Plan de soutien au secteur de l’aéronautique |
1 925 |
1 544 |
Densification urbaine : construction durable et friches |
650 |
610 |
Protection de la biodiversité |
250 |
186 |
Prévention du risque sismique en Outre-mer |
50 |
50 |
Sécurisation des réseaux d’eau |
300 |
280 |
Modernisation des centres de tri, recyclage et réemploi |
500 |
420 |
Plan en faveur des protéines végétales et forêts |
272 |
220 |
Infrastructures et mobilités vertes |
8 780 |
6 930 |
Soutien au secteur ferroviaire |
4 700 |
4 390 |
Aides à l’achat de véhicules propres et verdissement du parc automobile de l’État |
2 080 |
1 040 |
Mobilités du quotidien |
1 200 |
900 |
Accélération des travaux d’infrastructures de transport |
550 |
350 |
Verdissement des ports |
200 |
200 |
Résilience des réseaux électriques |
50 |
50 |
Total |
32 500 |
22 161 |
Plan national de relance et de rÉsilience – Volet cohÉsion
(en millions d’euros)
|
Montant total |
Financement apporté par le plan de relance Next Generation EU |
Emploi et formation professionnelle |
11 347 |
7 153 |
Formation professionnelle |
2 139 |
1 987 |
Alternance et aides à l’embauche d’apprentis |
6 251 |
3 276 |
Aide à l’embauche des jeunes de moins de 26 ans |
996 |
839 |
Internats de l’excellence et cordées de la réussite |
60 |
60 |
Garanties par l’État des prêts étudiants |
32 |
12 |
Dispositifs d’accompagnement à l’emploi des jeunes (contrats aidés, garantie jaune et PACE) |
1 263 |
615 |
Poursuite d’études des néo-bacheliers |
256 |
256 |
Aides à l’emploi de travailleurs handicapés |
100 |
58 |
Renforcement des moyens de Pôle emploi |
250 |
50 |
Santé |
6 014 |
6 003 |
Rattrapage du retard sur les standards techniques pour le numérique en santé |
2 000 |
2 000 |
Modernisation et restructuration des hôpitaux et de l’offre de soins |
2 500 |
2 500 |
Rénovation des établissements médico-sociaux |
1 500 |
1 500 |
Numéro national de prévention du suicide |
14 |
3 |
Cohésion des territoires |
820 |
490 |
Plan France très haut débit |
570 |
240 |
Inclusion numérique |
250 |
250 |
Recherche |
2 978 |
750 |
Stratégie de relance de la R&D - Agence nationale de la recherche |
428 |
428 |
PIA4 - Soutien aux écosystèmes d’enseignement, de recherche, de valorisation et d’innovation |
2 550 |
750 |
Totaux |
21 159 |
14 824 |
Plan national de relance et de rÉsilience – Volet compÉtitivitÉ
(en millions d’euros)
|
Montant total |
Financement apporté par le plan de relance Next Generation EU |
Souveraineté technologique |
5 215 |
3 095 |
Préservation de l’emploi R&D |
300 |
180 |
PIA – Technologies numériques clés |
2 600 |
1 800 |
PIA – entreprises innovantes |
1 950 |
750 |
Spatial |
365 |
365 |
Transition numérique |
1 461 |
1 389 |
Mise à niveau numérique des entreprises |
385 |
375 |
Mise à niveau numérique de l’État, des services publics et des territoires |
1 076 |
1 014 |
Industries culturelles |
1 600 |
394 |
Total |
8 276 |
4 877 |
Le plan national de relance et de résilience a ainsi été modifié pour financer à hauteur de 2,8 milliards d’euros quatre investissements en faveur de la décarbonation de l’économie et de la rénovation énergétique des bâtiments.
Un premier investissement a alloué 294 millions d’euros pour décarboner l’industrie. Il est axé autour de la production de chaleur par biomasse, de l’amélioration de l’efficacité énergétique des industries et de petits projets de décarbonation portés par des PME. Cette mesure est associée à deux jalons portant sur la mise en service de projets pour un objectif de réduction prévisionnelle de 250 GWh/an de consommation d’énergie fossile par rapport à la situation avant travaux. Le jalon portant sur la sélection des projets a d’ores et déjà été atteint et évalué positivement par la Commission européenne dans le cadre de la troisième demande de paiement.
Le second investissement alloue 651 millions d’euros à un projet important d’intérêt européen commun dans le domaine de l’hydrogène. Ces projets portent sur la mobilité, via la mise au point de matériaux avancés nécessaires à la fabrication de membranes polymères nouvelle génération pour piles à combustible, la recherche et développement, via la production d’électrolyse alcaline sous pression et le stockage d’hydrogène, en particulier via la production de réservoirs cryogéniques de nouvelle génération.
Les troisième et quatrième investissements portent sur la rénovation thermique des bâtiments publics et privés et sont dotés d’1,9 milliard d’euros.
Cette liste parle d’elle-même : comment considérer qu’il s’agit d’un plan de relance européen et non seulement du financement de projets français par de l’argent transitant par l’UE ? Même le financement de projets d’hydrogène ne se fait pas en coordination avec l’effort fait par d’autres pays, notamment l’Allemagne ou l’on peut même parler de projets concurrents !
4. Versement des fonds et atteintes des jalons et cibles
Les fonds sont versés à mesure que la France a atteint les cibles quantitatives et les jalons, c’est-à-dire les réformes qu’elle s’est engagée à accomplir, tels que définis dans le plan national de relance et de résilience (PNRR). Avec le versement de 3,3 milliards d’euros en mai 2025, le montant cumulé versé à la France au titre du plan de relance Next Generation EU s’élève à ce jour à 34,2 milliards d’euros. Les subventions déjà versées l’ont été au titre de l’atteinte de 149 des 181 cibles et jalons du PNRR, que la Commission européenne a validés dans le cadre de quatre demandes de paiement.
Les 34,2 milliards déjà perçus l’ont ainsi été au titre de la mise en œuvre d’investissements tels que la régénération et la modernisation d’environ 1 700 km du réseau ferré national, le soutien à des projets de décarbonation de l’industrie, le déploiement de la fibre optique très haut débit à 4,2 millions de foyers et entreprises, le financement de plus de 300 000 aides à l’embauche pour les jeunes ou encore le soutien apporté à 800 établissements de santé dans leurs projets de modernisation ou de rénovation.
Les cibles et jalons de la dernière demande de paiement concernent notamment l’entrée en vigueur de la loi relative à l’économie circulaire, le soutien au secteur ferroviaire et aux mobilités du quotidien, le soutien du secteur de l’aéronautique, la rénovation des cathédrales et des monuments historiques ou encore la modernisation et la restructuration des hôpitaux et de l’offre de soins et la rénovation des établissements médico-sociaux. Plusieurs cibles et jalons du chapitre REPowerEU seront évalués lors de cette dernière demande de paiement, notamment les projets de décarbonation de l’industrie, les projets du projet important d’intérêt européen commun Hydrogène, les projets de rénovation énergétique des bâtiments publics et les projets de rénovation énergétique des bâtiments privés.
5. Évaluation macroéconomique des effets du plan de relance Next Generation EU
● La direction générale du Trésor a réalisé une évaluation d’impact ex ante à l’aide du modèle Mésange estimant que les 100 milliards d’euros du plan France relance pourraient contribuer à la reprise post-pandémique à hauteur de 1,1 point de PIB en 2021, de 1 point de PIB 2022 et de 0,6 point de PIB en 2023 et en 2024, par rapport à un scénario sans plan de relance.
Une deuxième évaluation in intinere de l’impact macroéconomique global du plan France Relance a été réalisée par l’observatoire français des conjonctures économiques. Sur la base d’un décaissement de 93 milliards d’euros sur les 100 milliards d’euros du plan de relance sur la période 2020-2023, l’évaluation conclut que France Relance aurait permis de rehausser l’activité de 1,2 point de PIB en 2021, de 1,4 point de PIB en 2022 et de 0,5 point de PIB en 2023.
La hausse du PIB aura donc été quasiment égal à l’argent injecté, sans effet multiplicateur sur la richesse créée ni effet de levier sur les investissements réalisés. En effet, l’évaluation ex ante indique des gains cumulés de 3,1 points de PIB tandis que l’évaluation in intinere induit un impact de 3,3 points de PIB, ce qui représente entre 90 et 97 milliards d’euros.
S’agissant des effets de bord de la relance des autres pays européens en France, Pfeiffer et al. (2023) ([6]) ont utilisé le modèle QUEST développé par la Commission européenne pour évaluer l’impact de Next Generation EU. Ils estiment que les externalités des mesures financées dans le reste de l’Union européenne par le plan de relance européen Next Generation EU sur la croissance française auraient contribué à renforcer l’activité de 0,3 point de PIB en 2021 et 0,4 point chaque année en 2022, 2023 et 2024.
Les retours fiscaux de ces effets de bord seraient donc hélas inférieurs à ce que coûtera, à partir de 2028, le remboursement par la France du capital et des intérêts de ce même plan de relance.
Enfin, la Commission européenne a estimé les effets macroéconomiques du plan pour l’Union européenne et pour la France.
● La Commission européenne estime que la Facilité pour la relance et la résilience entraînerait une hausse du PIB réel de l’Union de 0,4 point par an entre 2020 et 2030 par rapport à un scénario sans plan de relance, avec un pic d’impact de 1,2 point en 2026. Cela représente donc 4 points du PIB européen sur 10 ans, soient 718 milliards d’euros, ce qui représente à peine plus que le principal des fonds qui ont ou seront empruntés pour financer ce plan (712 milliards d’euros) et est déjà inférieur à la somme du principal (712 milliards) et des intérêts (28,2 milliards) payés entre 2021 et 2027 pour financer ce plan. Selon les chiffres transmis par la direction générale du Trésor au rapporteur spécial, les intérêts payés au titre de ce plan représenteront 11,5 milliards d’euros par an à partir de 2028.
● Pour la France, selon la Commission européenne, l’effet direct de la Facilité pour la relance et la résilience sur le PIB réel serait de l’ordre de 1 point de croissance du PIB en 2026. Ce chiffre doit être complété par les effets de bord générés par les plans des autres États membres, dont la France bénéficie en tant qu’économie très intégrée dans le marché intérieur. Pour la France, les effets de débordement représenteraient environ un tiers de l’impact total du plan européen, soit près de 18,4 milliards d’euros sur un gain global estimé à 57,5 milliards d’euros d’ici 2030. Pour la direction générale du Trésor, cela signifie que dans un scénario de relance strictement national, la France aurait perdu une part significative des retombées économiques liées à la relance coordonnée de ses partenaires, du fait de son intégration poussée au marché unique
L’effet total est néanmoins inférieur à son coût pour les finances publiques, sauf à trouver des ressources propres pour l’UE qui ne seraient pas payés par les contribuables ou acteurs économiques français. En effet, sans ressources propres, le plan coûtera 75 milliards d’euros au titre du principal tandis que la part de la France dans le paiement des intérêts représenterait 4,8 milliards d’euros au titre du CFP 2021-2027 (ce qui représente 17 % des 28,2 milliards du coût de la charge d’intérêt) et près de 2 milliards d’euros par an à partir de 2028 (ce qui représente 17 % des 11,5 milliards d’euros du coût de la charge d’intérêt payée par l’UE à partir de 2028).
C. Le plan de relance : une dette qui pèsera lourd dans le budget de la France
1. La dette issue du plan de relance
● Le remboursement du principal du plan de relance Next Generation EU débutera en 2028 avec le nouveau cadre financier pluriannuel. Aussi, pour rembourser cet emprunt, la Commission européenne a proposé trois types de ressources propres.
En premier lieu, la Commission a proposé une ressource propre fondée sur les recettes tirées du système d’échange de quotas d’émission carbone (SEQE) dont 30 % seraient affectés au budget de l’Union européenne, soit 18 milliards d’euros de recettes annuelles à l’échelle de l’Union dont le rapporteur spécial souligne qu’ils seront payés par les contribuables et acteurs économiques nationaux.
En second lieu, la Commission a proposé une ressource générée par le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF), taxant les importations de l’Union européenne dans cinq secteurs (acier, aluminium, ciment, engrais, électricité) en fonction des émissions carbone liées à leur production, dont 75 % de la recette pourrait abonder le budget de l’Union européenne à hauteur d’1,5 milliard d’euros. Compte tenu des produits et secteurs choisis, le rapporteur spécial s’interroge si le coût de ce mécanisme sera payé par les producteurs en dehors de l’Union européenne ou répercutés sur les économies et consommateurs européens.
Enfin, la Commission propose une ressource statistique temporaire basée sur l’excédent brut des entreprises qui pourrait générer 16 milliards d’euros de recettes annuelles à l’échelle de l’Union. Cette ressource serait à nouveau supportée soit par les États membres puisqu’il s’agît, dans l’esprit de la proposition de la Commission d’une manière différente de calculer le ressaut de la contribution des États, soit par les acteurs économiques des pays membres.
Il avait été pourtant annoncé avant le déploiement du plan de relance, qu’il conviendrait de faire financer son coût ultime, non par les contribuables français mais par des ressources venant d’acteurs économiques extra-européens, notamment les entreprises américaines du numérique dénommées sous l’acronyme de GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft). Cette option n’est visiblement plus dans les propositions avancées par la Commission européenne.
Nous sommes loin de la promesse d’un remboursement de la dette issue du plan de relance européen par les grandes entreprises internationales et les acteurs extra-européens annoncée par le Président de la République dans son intervention en date du 21 juillet 2020 où il indiquait : « Ce n’est pas le contribuable français qui paiera [ce plan de relance] parce que nous nous sommes engagés dans ce même accord à créer de nouvelles ressources propres c’est-à-dire de pouvoir, au niveau européen, lever un impôt sur les grandes entreprises et les acteurs internationaux qui ne jouent pas le jeu de nos politiques. […] La taxe plastique est déjà une première ressource propre qui permet d’inciter les secteurs à moins utiliser le plastique et qui va aller au niveau européen. Nous allons ensuite au niveau européen créer ces taxes sur lesquelles nous nous battons depuis plusieurs années : une taxe numérique pour les grands acteurs internationaux du numérique qui aujourd’hui ne paient pas d’impôts. […] Nous sommes en train de convaincre nos partenaires européens. Cela permettra de rembourser cet emprunt européen. Deuxième piste : ce mécanisme européen carbone aux frontières. Quand nous importons de l’acier du bout du monde, il faut pouvoir mettre en place une taxe qui évite une concurrence déloyale et qui fait que cet acier, quand il vient d’Inde, de Chine ou d’ailleurs, il paie la taxe carbone quand il rentre dans nos frontières. Cet emprunt européen permettra de rembourser cette dette que nous contractons. […] Ce n’est pas le contribuable français qui paiera cette dette. Ce sont des acteurs, la plupart du temps grandes entreprises internationales, parfois européennes qui aujourd’hui ne sont pas assez sollicitées et qui vont payer cette dette par la fiscalité que nous allons bâtir. »
● Si les États membres ne parviennent pas à se mettre d’accord sur de nouvelles ressources propres, il s’agira soit de diminuer l’ambition du cadre financier pluriannuel, soit de rehausser les contributions des États membres. 75 milliards d’euros ont ainsi été provisionnés dans le compte général de l’État au titre de la quote-part de la France au remboursement du principal de l’emprunt Next Generation EU sur les années 2028 à 2058, ce qui représenterait une hausse moyenne annuelle du PSR-UE de 2,5 milliards d’euros.
En outre, la charge des intérêts de la dette a nettement dépassé les estimations de la Commission européenne. Au lancement de la facilité pour la relance et la résilience, celle-ci avait estimé qu’elle atteindrait 15 milliards d’euros sur l’ensemble du CFP 2021-2027. La Commission prévoyait alors que les taux d’intérêt applicables à ses émissions de dettes fluctueraient entre 0,55 % en 2021 et 1,15 % en 2027.
Or, sous l’effet des hausses du taux d’intérêt directeur décidées par la Banque centrale européenne durant la crise inflationniste, les taux auxquels la Commission a emprunté les fonds du plan de relance ont atteint 3,57 % au second semestre 2023 et 3,13 % au premier semestre 2024. Aussi, lors de la révision à mi-parcours du cadre financier pluriannuel 2021-2027, la Commission a estimé que la charge des intérêts de la dette pourrait doubler et atteindre 30 milliards d’euros sur la totalité du CFP.
Les dernières estimations de la direction générale du Trésor transmises au rapporteur spécial évaluent le coût de la charge d’intérêts liée au plan de relance Next Generation EU à 28,2 milliards d’euros sur l’ensemble du CFP 2021–2027 à l’échelle de l’Union et à 11,5 milliards d’euros par an à l’échelle de l’Union à partir de 2028.
En définitive, la Commission prévoit, qu’à partir de 2028, entre 25 et 30 milliards d’euros du budget de l’Union seront consacrés au remboursement du principal et des intérêts de l’emprunt Next Generation EU. Sans ressources propres, cela représenterait donc une hausse du PSR-UE de la France comprise entre 4,5 et 5,1 milliards d’euros. La contribution nette annuelle de la France pourrait donc atteindre 15 milliards d’euros.
2. Les restes à liquider issus du CFP 2021 – 2027
En outre, l’équation budgétaire du prochain CFP sera également grevée par la masse importante des restes à liquider provenant du cadre financier pluriannuel précédent. Selon les informations transmises par la direction du budget au rapporteur spécial, ces restes à liquider s’élèvent à 506,75 milliards d’euros à la fin de l’année 2024 en incluant les restes à liquider au titre de la Facilité pour la relance et la résilience.
Ces restes à liquider sont toutefois en diminution à mesure que les engagements de la politique de cohésion qui ont pris du retard sont progressivement décaissés. En 2024, ils ont ainsi diminué de 35,6 milliards d’euros par rapport à 2023. Selon les estimations de la Commission, ils devraient atteindre 323 milliards d’euros d’ici à la fin de l’année 2027.
Restes À liquider (RAL) du CFP 2021–2027
(en millions d’euros)
|
RAL à fin 2021 |
RAL à fin 2022 |
RAL à fin 2023 |
RAL à fin 2024 |
|
Rubriques |
|||||
1 |
Marché unique, innovation et numérique |
48 717 |
50 130 |
51 926 |
51 164 |
2a |
Cohésion économique, sociale et territoriale |
152 839 |
154 302 |
154 864 |
174 170 |
2b |
Résilience et valeurs |
56 195 |
146 779 |
221 893 |
169 918 |
3 |
Ressources naturelles et environnement |
43 691 |
53 459 |
57 477 |
50 867 |
4 |
Migration et gestion des frontières |
3 980 |
4 008 |
5 121 |
5 754 |
5 |
Sécurité et défense |
2 397 |
3 061 |
3 803 |
4 445 |
6 |
Le voisinage et le monde |
32 535 |
36 962 |
39 987 |
42 094 |
7 |
Administration publique européenne |
392 |
394 |
396 |
384 |
|
Instruments spéciaux et hors CFP |
147 |
3 071 |
6 929 |
7 952 |
Total hors NGEU ([7]) |
250 985 |
263 015 |
303 743 |
262 178 |
|
Total |
340 892 |
452 167 |
542 395 |
506 748 |
Sources : Commission européenne, tableau d’exécution au 31/12/2024 ; budget initial 2025.
II. Une politique de compÉtitivitÉ dÉfaillante
En 2023, la France a perçu 2,7 milliards d’euros au titre de la rubrique 1 « Marché unique, innovation et numérique » du budget de l’Union européenne. Ces retours sont essentiellement concentrés sur quatre programmes : le programme de recherche Horizon Europe, le mécanisme d’interconnexion en Europe, le programme spatial et le programme ITER.
La particularité de cette rubrique réside dans le fait que ce sont des programmes en gestion directe pilotés par la Commission européenne et ses agences exécutives ou décentralisées. Même si certains programmes, tel que le mécanisme d’interconnexion en Europe, comportent des règles correctrices visant à équilibrer les dotations entre pays de l’Union, l’amélioration du taux de retour de la France sur ces programmes dépend essentiellement de notre capacité à remporter les appels à projets lancés par la Commission.
Si le taux de retour de la rubrique est au niveau de la clé de contribution de la France à la ressource indexée sur le revenu national brut, principale composante de la contribution française à l’Union européenne, cela s’explique essentiellement par un niveau de retour très important au titre du programme spatial européen (37,5 %).
Aussi, le rapporteur spécial souhaite attirer l’attention sur les niveaux de retours décevants au titre du programme de recherche (12 %) et des investissements stratégiques européens (13,5 %), ce qui est d’autant plus regrettable que ces dépenses ont une véritable valeur ajoutée pour améliorer la compétitivité européenne et française, à l’heure où le rapport Le Futur de la compétitivité européenne (2024) de Mario Draghi alerte sur le déficit d’investissement de l’Union européenne par rapport aux États-Unis et sur le décrochage de la zone euro, dont l’écart de PIB par tête en parité de pouvoir d’achat avec notre concurrent américain est passé de 14 % en 2008 à 25 % en 2024.
Niveau de retours au titre de la politique de compÉtitivitÉ
(en millions d’euros)
|
2021 |
2022 |
2023 |
Taux de retour moyen (2021 – 2023) |
Recherche et innovation |
1 272 |
1 774 |
1 389 |
14,8 % |
Horizon Europe |
827 |
1 370 |
1 176 |
12,1 % |
Euratom |
20 |
36 |
14 |
12,2 % |
ITER |
421 |
551 |
385 |
65 % |
Investissements stratégiques |
319 |
473 |
571,9 |
13,5 % |
Mécanisme d’interconnexion en Europe |
279 |
315 |
451,8 |
13,3 % |
Europe numérique |
6 |
118 |
80,7 |
13,8 % |
Invest EU |
4 |
7 |
5,2 |
14,5 % |
Marché unique |
28 |
42 |
46 |
7,3 % |
Programme marché unique |
28 |
41 |
45 |
7,3 % |
Programme Customs |
0 |
1 |
1 |
0,01 % |
Programme spatial |
975 |
642 |
674 |
37,5 % |
Agences décentralisées |
56 |
61 |
64 |
16,5 % |
Autres |
8 |
4 |
4 |
22,9 % |
TOTAL |
2 626 |
2 958 |
2 711 |
17 % |
Source : commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire d’après l’annexe « Relations financières avec l’Union européenne » au projet de loi de finances pour 2025.
1. Une importante marge de progression pour capter les fonds européens en matière de recherche
a. Le programme Horizon Europe
Doté de 95,5 milliards d’euros sur la durée du cadre financier pluriannuel 2021-2027, le programme Horizon Europe, 9e programme-cadre européen pour la recherche et l’innovation, est structuré en quatre axes :
– le premier pilier « Science d’excellence » finance, pour 25 milliards d’euros sur l’ensemble du CFP 2021–2027, des projets de recherche fondamentale, la mobilité des doctorants et chercheurs et le développement des infrastructures de recherche ;
– le deuxième pilier « Problématique mondiales et compétitivité industrielle européenne » finance, pour 53,5 milliards d’euros, des projets de recherche appliquée dans le domaine de la santé (8,2 milliards d’euros), de la culture et des sciences humaines (2,3 milliards d’euros), de la sécurité civile (1,6 milliard d’euros), du numérique, de l’industrie et de l’espace (15,3 milliards d’euros), du climat, de l’énergie et des mobilités (15,1 milliards d’euros) et de l’alimentation, de la bioéconomie, des ressources naturelles, de l’agriculture et de l’environnement (9 milliards d’euros) ;
– le troisième pilier « Europe innovante » finance, pour 13,6 milliards d’euros, l’innovation dans les technologies de rupture et le renforcement de la capacité d’innovation européenne ;
– le dernier pilier, plus transversal, a pour objet de prévenir l’exode des compétences hors de l’Union européenne, avec une dotation de 3,4 milliards d’euros.
b. Des performances en retrait de la France
● La France capte 11,4 % ([8]) des fonds européens en matière de recherche. Si elle affiche de bonnes performances pour ce qui concerne l’obtention des fonds en matière de recherche fondamentale (13,6 %) et d’innovation (14,2 %), elle se caractérise par un taux de retour particulièrement faible s’agissant du pilier 2 qui concentre plus de la moitié des financements du programme et est le plus à même d’améliorer la compétitivité de notre industrie puisqu’il permet aux entreprises et aux centres de recherche de collaborer pour financer la recherche appliquée.
La Cour des comptes a détaillé les raisons de cet échec dans son rapport La mobilisation des fonds européens en matière de recherche : les programmes Horizon 2020 et Horizon Europe présenté devant la commission des finances cette année en réponse à une sollicitation au titre du 2° de l’article 58 de la LOLF. D’une part, le faible taux de retour tient à l’insuffisante collaboration entre les centres de recherche français et les entreprises. La France compte des grandes entreprises performantes dans le domaine de l’aéronautique, de la défense et de l’énergie capables de capter des financements importants : Airbus et Thalès figurent ainsi au deuxième et cinquième rang des entreprises captant les montants les plus importants avec 104,8 millions d’euros pour Airbus et 62,8 millions d’euros pour Thalès au titre du programme Horizon 2020 ayant précédé le programme Horizon Europe. Toutefois, nos PME et ETI innovantes sont moins performantes et déposent moins de projets que nos concurrents espagnols, allemands ou italiens pour capter les financements européens.
Ce faible taux de retour s’explique également par une faible intensité des partenariats de la France avec les équipes de recherche et les entreprises des autres pays européens. Or, la particularité du pilier 2 du programme Horizon Europe réside dans le fait qu’il exige la collaboration d’entreprises et de centres de recherche d’au moins trois porteurs de projets dans trois pays européens différents. La Cour souligne ainsi que la France est moins présente dans les candidatures à des projets européens de recherche : parmi les 71 044 projets de recherche déposés pour capter des financements au titre d’Horizon 2020 et Horizon Europe, il apparaît que 70 052 comprennent un partenaire espagnol, 67 446 un partenaire allemand et seulement 53 210 un partenaire français.
Il convient également de souligner que cette faiblesse française tient à un effet d’éviction lié à la hausse des financements nationaux en faveur de la recherche en lien avec la loi n° 2020-1674 du 24 décembre 2020 de programmation de la recherche et le programme Investir pour la France de 2030.
La Cour des comptes souligne également que la France a moins tiré parti de la sortie du Royaume-Uni de l’Union pour capter davantage de fonds. Ainsi, alors que la part des fonds européens de recherche investis en France a stagné entre 11 % et 12 % entre la programmation 2014–2020 et la programmation 2021–2027, les parts de ces fonds captés par l’Allemagne et l’Espagne ont cru de 3 points : le taux de retour de l’Allemagne est passé de 15 % à 18 % tandis que le taux de retour de l’Espagne a cru de 9 % à 12 %.
Niveaux de retours français par pilier du programme horizon Europe
(en millions d’euros)
Pilier |
Axes du pilier |
Financements obtenus |
Part captée des financements européens par la France |
Pilier 1 |
Conseil européen de la recherche |
892,7 |
13,6 % |
Actions Marie Sklodowska Curie |
310,8 |
11,8 % |
|
Infrastructures de recherche |
155,3 |
12,7 % |
|
Pilier 2 |
Santé |
414 |
10,3 % |
Culture, créativité et société inclusive |
58,6 |
5,9 % |
|
Sécurité civile pour la société |
49,7 |
8,1 % |
|
Climat, énergie et mobilité |
905 |
12,8 % |
|
Alimentation, bio-économie, ressources naturelles, agriculture et environnement |
293,4 |
8,2 % |
|
Villes, climat, cancer, sol, océan et eaux |
144,9 |
7,9 % |
|
Pilier 3 |
Conseil européen de l’innovation |
421,4 |
14,2 % |
Écosystèmes européens d’innovation |
30 |
7,8 % |
|
Institut européen d’innovation et de technologie |
131,2 |
11,9 % |
|
Pilier 4 |
Élargir la participation et diffuser l’excellence |
31,6 |
2,7 % |
Réformer et améliorer le système européen de recherche et d’innovation |
15 |
8,5 % |
|
TOTAL |
|
4 807,1 |
11,4 % |
Source : réponses de la direction du budget aux questions du rapporteur spécial.
● Le Gouvernement a pris acte de ce relatif échec et a exprimé sa volonté d’augmenter les taux de retours français, notamment sur le programme Horizon Europe. Une cellule de mobilisation des fonds européens a été créée à cet effet au sein du Secrétariat général des affaires européennes. Elle a établi un diagnostic des fonds mobilisables et a estimé que la France pourrait percevoir 1,5 milliard d’euros de retours supplémentaires au titre de l’ensemble des fonds en gestion directe, dont une partie serait tirée de la hausse des fonds captés sur le fonds Horizon Europe.
La cellule devrait permettre une approche interministérielle renforcée nécessaire pour capter les fonds qui concernent de très nombreuses politiques publiques tandis que le Premier ministre a confié à Délégation interministérielle de la transformation publique (DITP) une mission visant à optimiser l’organisation de l’État pour mieux mobiliser les fonds européens.
De plus, des objectifs de captation des fonds européens pourraient être fixés aux ministères et aux opérateurs. Dans sa circulaire sur la gestion budgétaire du 23 avril 2025, le Premier ministre a ainsi demandé aux ministères d’instruire systématiquement, en amont de toute dépense nouvelle pouvant être financée par des crédits nationaux, la possibilité d’un financement ou d’un cofinancement européen, y compris auprès des collectivités territoriales, et de fixer aux opérateurs dont ils assurent la tutelle des objectifs précis en termes de mobilisation des crédits européens, en lien avec le Secrétariat général des affaires européennes (SGAE), à l’appui de stratégies à déterminer systématiquement à l’occasion de la révision des contrats d’objectifs et de performance.
Dans cette circulaire, le Premier ministre indique que « toute mise en place ou renouvellement de dispositif d’intervention devra désormais respecter deux critères : d’une part, la vérification préalable de l’existence dans les programmes de travail de la Commission de financements consacrés aux actions visées par le dispositif national et d’autre part, la formalisation d’une stratégie d’articulation des financements nationaux et européens tant pour l’État que pour les autres porteurs de projets ».
Dans le domaine de la recherche, suivant la recommandation de la Cour des comptes, il a été décidé de confier à Bpifrance, à titre expérimental jusqu’à fin 2027, la mission de point de contact national sur les volets « Industrie, numérique et espace » et « Climat, énergie et mobilités » du pilier 2 du programme Horizon Europe, afin de mieux identifier et accompagner les entreprises à même de capter des financements européens. Le rapporteur spécial sera attentif aux moyens budgétaires et humains qui seront donnés à Bpifrance pour assumer cette mission.
2. L’échec de l’agenda de Lisbonne
Le rapporteur spécial ne peut que constater que l’Union européenne échoue, depuis 25 ans à atteindre l’objectif de 3 % du PIB consacré à la recherche et au développement. Il rappelle que dans le prolongement du Conseil européen tenu les 23 et 24 mars 2000 à Lisbonne où les chefs d’État et de gouvernement ont fixé comme objectif à l’Union européenne de devenir, d’ici 2010, « l’économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d’une croissance économique durable accompagnée d’une amélioration quantitative et qualitative de l’emploi et d’une plus grande cohésion sociale », ces derniers ont décidé lors du Conseil européen tenu à Barcelone les 15 et 16 mars 2002 « d’accroître les investissements dans la recherche et le développement (R&D) dans l’Union Européenne de 1,9 % du PIB actuellement à 3 % du PIB en 2010 ».
25 ans après, force est de constater que cette stratégie est en échec. Si la dépense intérieure de recherche et de développement est passée d’1,65 % du PIB à 2,11 % du PIB de l’UE entre 1991 et 2022, la dépense intérieure de recherche et de développement français a légèrement diminué entre 1991 où elle atteignait 2,28 % du PIB et 2023 où elle atteint 2,19 % de PIB.
En définitive, les neuf programmes-cadres en matière de recherche n’ont pas donné lieu à un plan articulé pour atteindre les 3 % de PIB consacré à la recherche et au développement à l’échelle du continent et les financements européens interviennent en substitution des financements nationaux.
Dépense intérieure de recherche et développement
(en points de PIB)
Source : Commission des finances, d’après les données du Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche et de l’OCDE.
3. Des niveaux de retours plus satisfaisants au titre du nucléaire et du programme spatial
a. Le financement de la recherche et de la formation dans le domaine du nucléaire par le budget de l’Union européenne
● Doté de 2 milliards d’euros par le cadre financier pluriannuel 2021–2027, le programme Euratom finance des projets de recherche et de formation dans le domaine du nucléaire axés sur trois volets :
– la composante fusion du programme, à laquelle est allouée 42 % de l’enveloppe, et sur laquelle France enregistre un faible taux de retour (10 %) par rapport à l’Allemagne (30 %) car les priorités françaises sont concentrées sur le programme ITER et la fission nucléaire ;
– la composante fission du programme, à laquelle est allouée 19 % de l’enveloppe, et dont la France est le premier bénéficiaire européen avec 25 % de retours au titre du CFP 2014–2020 et 34 % au titre des trois premières années du CFP 2021–2027 ;
– les frais de fonctionnement liés aux installations du centre commun de recherche auxquels sont alloués 39 % de l’enveloppe, organisme interne de la Commission européenne qui fournit des conseils scientifiques indépendants et soutient l’élaboration des politiques de l’Union en matière de recherche.
Sur les trois premières années du CFP 2021–2027, la France a reçu 70 millions d’euros au titre de ce programme sur les 574 millions d’euros de dépenses financées par le budget de l’UE, ce qui représente un niveau de retour moyen de 12,2 %.
● Les retours perçus par la France au titre du programme du programme ITER représentent eux 988 millions d’euros sur les trois premières années du CFP 2021–2027, ce qui représente 329 millions d’euros par an et un taux de retour moyen de 65 %.
Ce projet de réacteur thermonucléaire expérimental international (ITER) vise à montrer que la fusion peut être utilisée comme source d’énergie à grande échelle, non émettrice de CO2. Le taux de retour particulièrement important tient au fait que le projet est localisé à Cadarache dans les Bouches-du-Rhône.
b. Le programme spatial européen
● Doté de 14,9 milliards d’euros sur la CFP 2021 – 2027, le programme spatial européen finance cinq projets principaux :
– le système de radionavigation Galileo formé de 32 satellites et qui doit donner lieu au lancement de 12 nouveaux engins spatiaux d’ici 2030 ;
– le système de navigation par recouvrement géostationnaire EGNOS qui améliore et corrige les signaux envoyés par les services de géolocalisation afin d’affiner leur précision et doit bientôt être compatible avec Galileo ;
– le système civil d’observation de la Terre Copernicus, qui récolte et analyse des données sur l’état de la planète dans cinq grands domaines : la composition de l’atmosphère, les milieux marins et terrestres, les effets du changement climatique, la sécurité ainsi que la gestion des urgences ;
– le programme de surveillance de la situation spatiale qui permet d’évaluer les risques de collisions entre les différents véhicules spatiaux, leurs débris et les géocroiseurs, d’assurer la sécurité des satellites de Galileo et de Copernicus et d’observer des phénomènes météorologiques tels que les éruptions solaires ;
– le programme de télécommunications gouvernementales par satellite (Govsatcom) afin de fournir un service sécurisé de communication, notamment à usage militaire ou de sécurité, lorsque certains réseaux seraient coupés en cas de catastrophes naturelles ou de cyberattaques par exemple.
● La France représente une part substantielle de l’industrie européenne spatiale. Comme le souligne le rapport de la commission des finances du Sénat sur le financement de la recherche spatiale rédigé par le sénateur Jean-François Rapin, « la France, qui contribue au budget de l’Agence spatiale européenne à hauteur de 24 % des contributions des États membres, représente à elle seule 35 % des emplois industriels du secteur spatial européen ». Aussi, elle enregistre un taux de retour conséquent de 37,5 % au titre des trois premières années du CFP 2021–2027, soit 764 millions d’euros en moyenne par an.
4. Les investissements stratégiques
a. Le mécanisme d’interconnexion en Europe
Le mécanisme d’interconnexion en Europe (MIE) soutient les projets d’infrastructure européenne d’intérêt commun dans les secteurs du transport, de l’énergie et des télécommunications. Sur les trois premières années du CFP 2021–2027, la France a perçu 1 046 millions d’euros au titre du mécanisme d’interconnexion en Europe, soit 347 millions d’euros par an, ce qui représente un taux de retour de 13,3 %.
● Le volet transport du MIE constitue l’essentiel des retours français. 993,7 millions d’euros ont été perçus par la France au titre du MIE Transport depuis 2021, ce qui représente un taux de retour de 17,2 %. À titre d’illustration, les appels à projets remportés par la France pour les années 2022, 2023 et 2024 permettront de financer la section transnationale du Lyon – Turin et les accès français au tunnel (764 millions d’euros), le canal Seine Nord (300 millions d’euros) ou encore la ligne nouvelle Montpelier – Perpignan (22 millions d’euros) ([9]).
Le rapporteur souligne néanmoins que sur les 26 milliards d’euros alloués au MIE Transport pour les années 2021 à 2027, la France ne peut candidater qu’à moins de la moitié des financements (12,5 milliards d’euros) car l’autre partie concerne les États ayant un PIB inférieur à la moyenne de l’Union européenne.
● Les retours français au titre du MIE Énergie sont plus résiduels : entre, 2021 et 2023, les retours français au titre des réseaux transeuropéens d’énergie représentent 18,1 millions d’euros, soit 6 millions d’euros par an et un taux de retour de 1,1 %.
La plupart des projets financés concernent des projets de coopération transfrontalière tels que le projet d’interconnexion électrique du Golfe de Gascogne entre la France et l’Espagne, le projet Celtic Interconnector visant à créer une liaison électrique à courant continu permettant l’échange direct d’électricité entre la France et l’Irlande ou encore le projet de captage de CO2 d’Artagnan consistant à transporter par canalisations ce CO2 jusqu’à Dunkerque, puis à le charger dans des navires en direction de sites de séquestration en Mer du Nord.
● Le volet numérique du MIE vise à financer l’amélioration des infrastructures numériques grâce à des projets d’études et de travaux (déploiement de réseaux à très haute capacité, déploiement ou modernisation des infrastructures de réseaux dorsaux, soutien aux plateformes numériques). Depuis 2021, la France a perçu 34 millions d’euros au titre de ce mécanisme qui a notamment permis de financer des études sur le déploiement de la 5G le long de réseaux transeuropéens tels que les lignes Karlsruhe-Mulhouse ou Metz-Luxembourg. Il permet également de financer des projets de raccordement numérique par câble sous-marin, au bénéfice des outre-mer.
b. Le programme Europe numérique
Doté de 7,6 milliards d’euros sur la période 2021 – 2027, le programme Europe numérique vise à financer la transformation numérique de l’économie européenne à travers cinq domaines d’intervention : le calcul à haute performance (2,2 milliards d’euros), l’intelligence artificielle (2,1 milliards d’euros), la cyber-sécurité (1,6 milliard d’euros), la formation dans le domaine des technologies quantiques, de la robotique, de l’intelligence artificielle ou de l’informatique en nuage (557 millions d’euros) et le déploiement de divers types d’infrastructures et de capacités numériques (1,1 milliard d’euros).
La France a perçu 204,7 millions d’euros au titre du programme Europe numérique entre 2021 et 2023, ce qui représente 68 millions d’euros en moyenne par an et un taux de retour de 13,8 %.
À titre d’exemple, ce programme a permis de financer le projet PREVAIL coordonné par le Commissariat à l’énergie atomique et financé par l’Union européenne à hauteur de 78 millions d’euros, dont 25 millions d’euros pour la France. Ce projet vise à déployer une plateforme permettant de fournir aux acteurs européens des capacités de fabrication de prototypes de puces pour l’intelligence artificielle.
c. Le Fonds européen pour les investissements stratégiques InvestEU
Le programme Invest EU a pour objectif de mobiliser 372 milliards d’euros d’investissement d’ici à 2027 grâce à la mobilisation de 26,2 milliards d’euros de garanties budgétaires apportées par la banque européenne d’investissement et ses partenaires (Caisse des dépôts et consignations et Bpifrance) – ce qui explique que les retours français au titre de ce programme soient très faibles (16,2 millions d’euros en trois ans).
À ce jour, 75 opérations InvestEU ont été mises en œuvre en France, réparties entre les quatre priorités du programme : 33 % pour des infrastructures durables, 24 % pour le soutien aux PME, 23 % pour la recherche et l’innovation, et 20 % pour l’investissement social. À titre d’exemple, Engie a obtenu des garanties de la BEI afin de déployer des bornes de recharges électriques.
B. L’incapacitÉ de l’Union europÉenne À protÉger nos industries face aux pratiques dÉloyales chinoises et amÉricaines
Au-delà de cette approche comptable et financière, le rapporteur spécial s’est intéressé à la capacité de l’Union européenne à soutenir son industrie dans un contexte de concurrence exacerbée. Il a souhaité auditionner les fédérations professionnelles des industries électro-intensives pour savoir dans quelle mesure l’Union européenne est capable de soutenir notre industrie face à la hausse du prix de l’énergie, d’une part et le subventionnement de surcapacités mondiales de production par la Chine et les États-Unis, d’autre part.
1. La conjoncture dégradée de la chimie et de la métallurgie
● Alors qu’elle reste l’une des rares filières industrielles en excédent commercial (+ 3,4 milliards d’euros en 2024) et qu’elle a connu une hausse de sa production de valeur ajoutée de 3 % par an en moyenne entre 2004 et 2019, la chimie est affectée depuis trois ans par la hausse des prix de l’énergie et les surcapacités de production mondiales financées par la Chine.
La filière est marquée par une forte réduction de l’utilisation de ses capacités de production : le taux d’utilisation des capacités de production chimique est en recul de 8 points en Europe et de 10 points en France par rapport à la période 2017 – 2019. Elle ne parvient pas à passer au-dessus des 75 % d’utilisation de ses sites industriels, soit un niveau nettement en-dessous du seuil de rentabilité établi à 80 %.
Les conséquences de cette conjoncture dégradée sont déjà observables. La production chimique européenne est en baisse de 2,6 % en 2024. En Europe, 11 millions de tonnes de production ont été ou seront perdues du fait des fermetures annoncées au cours des années de 2023 et 2024 et cela conduit à la suppression de 10 000 à 20 000 emplois. D’après l’étude réalisée par le cabinet de conseil Advancy « La Chimie, un atout à préserver » commandée par France Chimie, 47 sites seraient menacés en France dans les trois à cinq ans, ce qui représenterait la perte de 15 000 à 20 000 emplois directs et une baisse de 8 milliards d’euros de chiffre d’affaires.
La chimie fait face à une conjonction de facteurs défavorables : des matières premières et une énergie de moins en moins compétitives depuis la guerre en Ukraine, la concurrence provenant de surcapacités mondiales de production, en particulier venant de Chine, une hausse des importations de produits chimiques chinois en raison de droits de douane imposés sur plus de trois-quarts des produits chimiques chinois par les États-Unis. À ces facteurs extérieurs s’ajoutent des facteurs internes à l’Europe, tels qu’une réglementation européenne particulièrement complexe avec des exigences qui ne s’appliquent pas de façon identique aux productions importées et une fiscalité sur la production plus élevée pour l’industrie chimique française.
La chimie étant « l’industrie des industries », à l’amont de la production de la plupart des secteurs industriels, cette fragilité risque de s’exporter à l’ensemble des productions industrielles françaises.
● La métallurgie est affectée par un phénomène similaire : depuis 2017, le volume de production métallurgique a reculé de 6 % en France, pénalisé par la chute de 25 % de l’activité dans le secteur automobile, de 16 % dans les produits métalliques (sidérurgie, fonderie, structures métalliques, emballages métalliques, usinage, etc), et de 14 % dans les matériels de transport autres que l’automobile.
2. La chimie et la métallurgie, deux industries affectées par la hausse du prix de l’énergie que la réforme du marché européen de l’électricité n’a pas permis de résorber
a. Les conséquences des hausses du prix de l’énergie pour la chimie et la métallurgie
● Le secteur de la chimie est particulièrement sensible aux évolutions du coût de l’énergie : elle concentre 30 % de la consommation industrielle de gaz et 20 % de la consommation industrielle d’électricité.
Elle concentre ainsi les entreprises électro-intensives. Elle comprend une quinzaine d’entreprises dites hyper électro-intensives, qui consomment 6 kWh par euro de valeur ajoutée produite, plusieurs dizaines d’entreprises dites électro-intensives qui consomment entre 3 et 6 kWh par euro de valeur ajoutée produite et une centaine d’entreprises dites électro-sensibles qui consomment entre 1,5 et 3 kWh par euro de valeur ajoutée produite.
Par ailleurs, la décarbonation de l’industrie chimique la conduira à être de plus en plus électro-intensive : pour respecter sa trajectoire de baisse de 80 % de ses émissions de gaz à effet de serre par rapport à 1990, le secteur doit électrifier ses procédés de fabrication, avoir recours à l’hydrogène bas-carbone produit par électrolyse et développer la capture et le stockage du CO2. L’ensemble de ces transformations vont la conduire à augmenter de 50 % sa consommation d’électricité, ce qui représente 7 à 12 térawattheure par an.
Aussi, l’industrie chimique est particulièrement sensible aux hausses du prix de l’énergie intervenues en 2021 et 2022. Alors qu’il avoisinait une fourchette comprise entre 15 et 25 euros par MWh sur la décennie 2010-2020, le prix du gaz a atteint 100 euros par MWh en moyenne en 2022. Le prix de l’électricité, lui, évoluait entre 40 et 60 euros par MWh sur la décennie 2010-2020 et a dépassé les 250 euros par MWh en moyenne en 2022.
Si le prix de l’énergie a partiellement diminué depuis, il reste nettement plus élevé pour les industriels français de la chimie par rapport aux États-Unis :
– les prix du gaz en France restent trois à quatre fois plus élevés que les prix du gaz américain : ils s’élèvent entre 30 et 40 euros par MWh en France contre 10 euros par MWh aux États-Unis ;
– les prix de l’électricité en France sont supérieurs de 70 % aux prix observés aux États-Unis : ils s’élèvent à 70 euros MWh en France contre 45 euros par MWh aux États-Unis.
● S’il est d’une importance moindre que pour la chimie, le coût de l’énergie représente néanmoins un élément de compétitivité essentiel pour la métallurgie, en particulier s’agissant des activités les plus amont dans le processus de production, comme la sidérurgie ou la production d’aluminium. Pour des activités un peu plus en aval, tels que la forge, la fonderie, le traitement de surface et la peinture de pièces métalliques, l’énergie représente tout de même 0,2 à 1 kWh de consommation par euro de valeur ajoutée.
b. Une hausse de prix essentiellement liée au fonctionnement du marché européen de l’électricité
● Si la hausse du prix de l’énergie a partie liée avec des causes extérieures, elle a également été influencée par des décisions de politique publique européennes.
En premier lieu, le gaz naturel liquéfié américain n’a pas permis de remplacer le gaz russe aux mêmes coûts. D’une part, les opérations de liquéfaction, de transport en bateau et de regazéification du GNL ont un coût nettement plus élevé que son transport par gazoduc. D’autre part, l’offre de GNL est limitée par la taille de la flotte de méthaniers et par le nombre d’installations de liquéfaction. Sur ce marché tendu, l’Europe est compétition avec une partie de l’Asie, ce qui tire les prix vers le haut.
En second lieu, cette hausse s’explique essentiellement par le fonctionnement du marché européen de l’électricité. Au cœur de la crise, les prix sur les marchés de gros de l’électricité dans l’Union européenne sont fixés par la dernière centrale électrique appelée pour répondre à la demande, qui est le plus souvent une centrale à gaz ou à charbon. Alors que le gaz entre pour une part très faible dans les coûts de production de l’électricité en France, sa forte augmentation dans les années 2021 et 2022 a eu pour conséquence une forte hausse du prix de l’électricité en France.
c. La réforme du marché européen de l’électricité et ses conséquences pour les industries électro-intensives
● Une réforme du marché européen de l’électricité a été définitivement adoptée le 11 avril 2024 par le Parlement européen et le 21 mai 2024 par le Conseil de l’Union européenne. Elle introduit deux dispositifs permettant d’encourager la formation de signaux prix de long terme sur les marchés : les Power purchase Agreements (PPA) et les contrats pour différence bidirectionnels.
Comme l’indique le rapport de la commission d’enquête du Sénat sur la production, la consommation et le prix de l’électricité aux horizons 2035 et 2050, les PPA sont des contrats bilatéraux de long terme de droit privé, négociés entre producteurs et consommateurs, qui doivent donner de la visibilité aux producteurs et gros consommateurs puisqu’ils sont souscrits sur des périodes comprises entre 5 et 20 ans. Ils visent à assurer aux producteurs la couverture de leurs coûts de production et la sécurisation de leurs investissements et aux consommateurs une stabilité des prix. Pour ce que ces contrats fonctionnent, il paraît nécessaire que les État mettent en place des garanties publiques pour couvrir les risques de crédits des acheteurs car les banques exigent des primes de risque élevées pour financer ce type de projet. De tels fonds existent déjà pour les industries électro-intensives et permettent le paiement d’une assurance par les producteurs et les consommateurs. Il convient de les étendre aux petites et moyennes entreprises pour atténuer leur risque de surexposition à la volatilité des prix.
Les contrats pour la différence garantissent sur les volumes d’électricité considérés et sur la maturité du contrat un prix déterminé : si le prix est inférieur au prix visé, le consommateur s’acquitte de la différence entre ce prix et le prix de marché, qui est versé au producteur par l’intermédiaire de l’État. Si le prix de marché est supérieur au prix visé, les recettes du contrat pour différence sont redistribuées au consommateur.
d. Le saut dans l’inconnu lié à la fin de l’ARENH
● Le tarif de l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (ARENH) constituait un élément essentiel de l’approvisionnement des industries électro-intensives en électricité. Les entreprises électro-intensives avaient jusque-là recours à l’ARENH au prix de 42 euros par MWh jusque dans les limites des volumes autorisés, soit jusqu’à 60 % ou 65 % de leur production, complété par des achats sur le marché à moyen terme ou sur le marché spot de court terme. Pour les entreprises les moins électro-intensives, les achats sont le plus souvent réalisés à un prix fixe, s’appuyant aussi sur l’ARENH, sur une durée d’un à trois ans.
Or, l’article 17 de la loi de finances pour 2025 fixe la fin de l’ARENH au 31 décembre 2025. Pour garantir un accès des industriels à une énergie compétitive, l’accord entre EDF et l’État du 14 novembre 2023 garantit la liberté contractuelle à EDF et privilégie la signature de contrats de long terme correspondant aux besoins des consommateurs industriels électro-intensifs ou électrosensibles : des contrats d’allocation de productible nucléaire (CAPN) de 40 TWh/an et des Contrats d’Allocation de Productible Nucléaire ou des contrats nucléaires simplifiés (CNS) de 20 TWh/an. Ces contrats doivent permettre qu’EDF garantisse la vente de volumes d’électricité nucléaire sur le marché à un horizon de 4 à 5 ans et la redistribution d’une partie de la rente du parc nucléaire lorsque celle-ci dépasserait un certain niveau, afin d’amortir une éventuelle hausse des prix de marché de l’électricité.
Cet accord comprend néanmoins plusieurs risques sur lequel le rapporteur spécial avait alerté lors de l’examen de la loi de finances pour 2025. Le dispositif de redistribution de la rente nucléaire n’est qu’un amortisseur contre l’envolée des prix de marché, là où l’ARENH permettait aux industriels de bénéficier d’un prix fixe pour une part substantielle de leur consommation. En outre, sans dispositif étatique de garantie publique des contrats de long terme, seules quelques grandes entreprises pourront signer les contrats de long terme car ils nécessitent une avance en tête ou le paiement d’une prime de risque importante si ces paiements sont assurés par la banque.
Quoi qu’il en soit, les simulations de prix réalisées par France Chimie fin octobre 2023 aboutissaient, malgré des hypothèses optimistes d’accès à des contrats de long terme à un tarif pivot de 67 euros par MWh, à des prix nets en hausse de 50 % à 100 % en 2026 pour l’ensemble de leur consommation par rapport à la situation d’avant crise pour les industriels.
Le même modèle de simulation a été actualisé fin février 2024, alors que les prix calendaires de l’électricité pour 2026 avaient chuté brutalement à 60 €/MWh, (contre plus de 100 €MWh en octobre 2023). Les prix restent toutefois nettement plus élevés que ceux d’avant-crise. Les entreprises hyper-électro-intensives subiraient ainsi une hausse de 20 % par rapport à 2019, à condition d’être en mesure de signer un contrat d’allocation de productible nucléaire pour 50 % de leur consommation au tarif précité et de bénéficier de la compensation des coûts indirects. La hausse pour une entreprise électro-intensives atteindrait environ 40 %.
En définitive, la réforme du marché européen de l’électricité et la mise en place des nouveaux mécanismes se substituant à l’ARENH ne permettraient pas aux industries électro-intensives d’avoir accès à une énergie à un prix compétitif, ce qui désavantagerait les industries européennes par rapport à leurs concurrentes chinoises et américaines.
3. Le financement de surcapacités mondiales de production par la Chine et les États-Unis
● Le secteur de la chimie européen est également affecté par le financement de surcapacités de production chinoises et américaines et des stratégies d’investissements agressives.
L’étude The competitiveness of the european chemical industry (2025) réalisée par le cabinet de conseil Advancy pour le Conseil européen de l’industrie chimique atteste d’investissements particulièrement importants réalisés par la Chine pour financer ses capacités de production. En conséquence, la Chine a gagné quatre points de parts de marché dans le secteur entre 2017 et 2023, ses parts de marché passant de 39 % à 43 %, quand l’Europe a perdu deux points de parts de marché, ses parts de marché passant de 15 % à 13 %.
Investissements cumulÉs dans le secteur de la chimie
(En milliards d’euros)
Source : réponse au questionnaire adressé par le rapporteur spécial à France Chimie et Conseil européen de l’industrie chimique.
● Des évolutions similaires sont observables dans le domaine de la sidérurgie. Selon l’Union des industries et des métiers de la métallurgie, auditionnée par le rapporteur spécial, la production mondiale d’acier va croître de 6,7 % entre 2025 et 2027, surtout en Asie, aggravant les surcapacités mondiales de production. La demande, elle, progresse très faiblement à hauteur de 0,7 % / an jusqu’en 2030. Cela conduirait les industriels européens à réduire leur production face aux pressions à la baisse sur les prix et la concurrence accrue.
De fait, la Chine pratique une stratégie agressive de subvention de ses capacités de production alliant emprunts préférentiels, énergie subventionnée, des subventions directes, des aides aux installations, des incitations à l’investissement et un traitement fiscal préférentiel faussant les conditions de concurrence.
Les cas de dumping se multiplient. En 2024, 19 gouvernements ont lancé 81 enquêtes antidumping impliquant des produits sidérurgiques, soit un quintuplement de ces enquêtes par rapport au niveau de 2023. Presque 80 % des cas ont été initiés contre des producteurs asiatiques, la Chine représentant à elle seule plus d’un tiers du total.
● En outre, les barrières tarifaires envisagées par l’administration américaine risquent d’avoir un double effet négatif sur la chimie : la perte de parts de marché aux États-Unis et le déport d’exportations chinoises vers l’Europe. La chimie serait affectée par les hausses de droits de douane décidées par l’administration américaine dès lors que la France exporte 6,9 milliards d’euros de produits chimiques vers les États-Unis. Le second risque concerne le report de volumes de produits sur le marché européen. Par exemple, les États-Unis exportaient d’importants volumes de polymères vers la Chine qui pourraient dorénavant être proposés à l’Europe. 15 à 30 milliards d’euros de production pourraient ainsi être redirigés vers le marché européen, en raison des hausses de droits de douane chinois et américains.
● Plus largement et au-delà du simple secteur de la chimie, la Chine a développé une politique de soutien unique à plusieurs niveaux et une stratégie d’autosuffisance, donnant à ses entreprises chimiques des avantages sur leurs concurrents. En particulier, le plan « Made in China 2025 », qui vise à promouvoir l’autonomie de la Chine, soutien l’investissement tout au long de la chaîne de valeur avec un soutien public et privé.
Les États-Unis se sont aussi dotées de politiques industrielles plus favorables depuis la fin de la crise de la Covid-19, mises en place pour stimuler la reprise économique. La principale est la loi sur la réduction de l’inflation (IRA), promulguée en 2022. L’initiative comprend un plan d’aide de 692 milliards d’euros, principalement sous forme de crédits d’impôt pour les investissements dans l’efficacité énergétique. Ces aides sont structurées comme des soutiens directs et non plafonnés ciblant principalement les secteurs qui ont besoin d’investissements importants.
4. La réponse défaillante de l’Union européenne
● Les instruments de défense commerciaux induisent une capacité de réaction beaucoup trop lente. Alors que les plaintes sont croissantes, en particulier dans le secteur de la chimie, les délais de réponse après instruction de la plainte peuvent atteindre 15 à 18 mois.
ProcÉdures anti-dumping dans la chimie initiÉeS en europe
(en nombre de plaintes)
Source : réponses au questionnaire du rapporteur spécial.
● Afin de remédier à ces délais de réponse trop lents, la Commission européenne a commencé à rassembler les statistiques demandées pour la constitution d’un dossier de défense commerciale pour certains produits sur lesquels les suspicions sont importantes comme les produits dérivés de l’éthylène et de l’ammoniac.
Le 21 mai 2025, à l’occasion de la présentation d’un quatrième texte dit « Omnibus » de simplification, la Commission européenne a fait des propositions destinées aux ETI, notamment concernant les deux règlements antisubventions et antidumping qui devraient être amendés pour y intégrer une aide directe aux ETI qui veulent soumettre une plainte concernant un potentiel dumping de produits étrangers.
Pour le rapporteur spécial, il convient d’aller plus loin en accélérant le traitement des dossiers anti-subventions par la direction générale Commerce de la Commission européenne. Ces effectifs et moyens financiers doivent être renforcés. Dans certains domaines, il convient de mettre en œuvre de manière beaucoup plus rapide et systématique des droits provisoires afin de protéger efficacement.
Au-delà d’instruments de défense commerciale plus rapidement actionnables, l’Europe doit également assouplir ses lignes directrices en matière d’aides d’État et promouvoir la préférence européenne, notamment dans sa commande publique, se rapprochant ainsi des pratiques de ses grands concurrents.
● Par ailleurs, des exigences de plus en plus lourdes sont imposées aux producteurs européens. Les réglementations dites sectorielles, avec 100 % des preuves demandées aux entreprises européennes, crée des distorsions de concurrence au profit des États hors Union européenne. Il s’agit notamment du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF), du devoir de vigilance en matière de durabilité ou encore du règlement sur la lutte contre la déforestation. Le tronc commun de tous ces textes est un contrôle renforcé et obligatoire sous peine de sanctions de l’ensemble de la chaîne de valeurs pour l’entreprise européenne, ce qui est parfois impossible dans des chaînes complexes ou peut créer une rupture de relations entre une entreprise européenne et ses fournisseurs.
À titre d’exemple, la montée en puissance progressive du MACF couplée à une disparition progressive des quotas carbone gratuits dans le cadre du système européen d’échange de quotas carbone va faire grimper les prix de nos produits et nous rendre moins compétitif à l’exportation face à des concurrents qui n’ont pas les mêmes contraintes.
L’importance des réglementations est telle que les investissements de maintenance et réglementaires sont sans commune mesure avec les investissements de croissance : selon France Chimie, entre 2010 et 2019, 68 % des investissements relèvent d’investissements de maintenance et réglementaires et 32 % relèvent d’investissements de croissance. Si ce rapport a été rééquilibré pendant la mise en œuvre du plan de relance, il est redevenu similaire en 2025 : 73 % d’investissements de maintenance et réglementaires et 27 % d’investissements de croissance.
III. Les principaux retours français : la politique de cohÉsion et la PAC
16,8 milliards d’euros ont été pré-alloués à la France dans le cadre de la politique de cohésion, par le Fonds européen de développement régional (FEDER), le fonds social européen + et le fonds de transition juste.
Fonds de la politique de cohÉsion
(en milliards d’euros)
|
CFP 2014 – 2020 |
CFP 2021 – 2027 |
||||
|
UE |
France |
Taux de retour |
UE |
France |
Taux de retour |
Fonds européen pour le développement économique régional |
193,4 |
11,1 |
5,7 % |
226 |
9,07 |
4 % |
Fonds social européen |
94,4 |
6,6 |
7 % |
99,3 |
6,67 |
6,7 % |
Initiative pour l’emploi des jeunes ([10]) |
8,9 |
0,96 |
10,8 % |
0 |
0 |
- |
Fonds de cohésion |
74,6 |
0 |
0 % |
48 |
0 |
- |
Fonds de transition juste |
0 |
0 |
0 |
19,3 |
1,03 |
5,3 % |
TOTAL |
371,27 |
18,7 |
5,04 % |
392,6 |
16,77 |
4,3 % |
Source : Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, d’après le rapport de la Cour des comptes sur L’impact du budget européen sur le budget de l’État.
1. Le fonds européen de développement régional et le fonds de transition juste
Depuis la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale, le fonds européen de développement régional est quasi intégralement géré par les régions, à l’exception du programme de coordination nationale Europ’Act géré par l’ANCT et de certains programmes ultra-marins gérés par les services de l’État comme c’est le cas dans le département de Mayotte.
Le FEDER permet de financer des projets aussi divers que la recherche et l’innovation, le numérique, l’aide aux PME, la transition énergétique, le climat, l’environnement, les transports, l’emploi, l’inclusion sociale et la formation.
La France a été initialement dotée de 8,4 milliards d’euros au titre du cadre financier pluriannuel 2014–2020, auxquels s’est ajouté l’abondement de ce programme à hauteur de 2,6 milliards d’euros par REACT EU, programme financé par l’emprunt Next Generation EU et dont l’objectif est de remédier aux dommages sociaux et économiques causés par la pandémie de Covid-19 et de préparer une reprise écologique, numérique et résiliente de l’économie. La totalité de ces 11 milliards d’euros ont été programmés, c’est-à-dire qu’une convention a été signée avec les porteurs de projets et que les fonds devraient être progressivement payés d’ici à la clôture de la programmation 2014–2020 du FEDER.
Pour le CFP 2021 – 2027, la France dispose d’un montant de 9,1 milliards d’euros, dont 3,6 milliards ont été programmés et conventionnés.
La maquette de programmation négociée avec la Commission européenne indique la ventilation des fonds par types de projets soutenus. Les niveaux de dépenses les plus importants concernent la recherche et l’innovation (20 % de l’enveloppe), l’aide aux PME (19 % de l’enveloppe) et la transition énergétique (22 % de l’enveloppe).
Fonds europÉen de dÉveloppement rÉgional ([11])
(en millions d’euros)
Objectifs thématiques |
2014–2020 |
Objectifs thématiques |
2021–2027 |
Recherche et innovation |
1 757 |
Recherche, innovation, et compétitivité |
3 650 |
Numérique et TIC |
802 |
||
Aides aux PME |
1 674 |
||
Transition énergétique |
1 899 |
Transition écologique |
3 479 |
Climat |
316 |
||
Environnement |
1 014 |
||
Transport |
406 |
Mobilités, numérique et TIC |
288 |
Emploi |
36 |
Cohésion sociale et emploi |
|
Inclusion sociale |
310 |
573 |
|
Formation |
143 |
|
|
Allocation spécifique Outre-mer |
90 |
Développement durable et aménagement du territoire |
1 079 |
Assistance technique |
314 |
|
|
TOTAL |
8 762 |
577 |
9 069 |
Source : Ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, La nouvelle politique agricole commune PAC 2023 – 2027.
● Le fonds de transition juste a été créé par le cadre financier pluriannuel 2021–2027 afin de soutenir les régions à forte intensité industrielle et dépendantes des énergies fossiles dans leur transition vers une économie bas carbone. Il est doté de 19,3 milliards d’euros dont 1,03 milliard d’euros sont alloués à la France, ce qui représente un taux de retour de 5,3 %. Ces crédits sont partagés entre les conseils régionaux qui gèrent 721 millions d’euros et la délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle qui gère 309 millions d’euros. 278 millions d’euros ont été programmés et conventionnés.
Les crédits de ce fonds sont attribués en fonction de cinq critères pondérés : les émissions de gaz à effet de serre par les installations industrielles des régions dont l’intensité carbone excède deux fois la moyenne européenne (lorsqu’un État n’a pas de régions concernées, sont prises en compte les émissions des régions ayant l’intensité carbone la plus importante), l’emploi dans les mines de charbon et de lignite, l’emploi dans les industries prises en compte dans les régions ayan l’intensité carbone la plus importante, la production de tourbe et la production de schiste bitumineux. Aussi, le fonds de transition de juste est-il alloué à seulement 6 régions françaises : Auvergne Rhône-Alpes, Grand Est, Hauts-de-France, Normandie, Pays-de-la-Loire et Provence-Alpes-Côte d’Azur.
Dans le cadre de la programmation 2014–2020, la France a bénéficié de 7,6 milliards d’euros provenant de deux fonds européens intervenant dans le champ social. Il s’agissait du Fonds social européen (FSE) et de l’initiative pour l’emploi des jeunes. La délégation générale à l’emploi et la formation professionnelle était autorité de gestion sur 65 % du FSE et sur l’Initiative pour l’emploi des jeunes tandis que les régions géraient 35 % du FSE.
Le niveau de consommation de ces crédits est relativement satisfaisant puisque 99,9 % des crédits ont été consommés dans le programme opérationnel du FSE et 93 % des crédits ont été consommés dans le cadre du programme opérationnel national de l’initiative pour l’emploi des jeunes.
Au titre du cadre financier pluriannuel 2021–2027, 6,7 milliards d’euros sont alloués à la France au titre du FSE +. Ainsi, 4 milliards d’euros sont gérés par la DGEFP au titre de la programmation national FSE + « Emploi, Inclusion, Jeunesse et Compétences », 582 millions d’euros sont gérés par la direction générale de la cohésion sociale au titre du soutien européen à l’aide alimentaire et 2 milliards d’euros sont gérés par les conseils régionaux qui correspondent aux projets liés à la formation professionnelle, l’apprentissage, l’orientation ou encore l’aide à la création d’entreprises.
Pour ce qui concerne les 4 milliards d’euros du FSE + dont la DGEFP est autorité de gestion :
– 1 342 millions d’euros sont gérés directement par la DGEFP pour le financement d’opérateurs nationaux : 801 millions d’euros sont ainsi alloués à France travail, 82 millions d’euros sont délégués à l’Avise, agence d’ingénierie sociale dédiée au développement de l’Économie sociale et solidaire qui sélectionne des projets d’insertion professionnelle, et 474 millions d’euros sont gérés directement par la DGEFP ;
– 1 229 millions d’euros sont délégués aux directions régionales de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités ;
– 1 282 millions d’euros sont délégués à des organismes intermédiaires (conseils départementaux, collectivités animant des plans locaux pluriannuels pour l’insertion et l’emploi et métropoles) ;
– 154 millions d’euros sont dédiés à l’assistance technique.
Les priorités d’intervention du FSE + sont fixées dans un programme opérationnel national validé par la Commission européenne, présentant leur stratégie d’intervention, détaillant le type d’actions finançables, et assorti d’une maquette financière allouant des montants prévisionnels.
Priorités du programme national du FSE + ([12])
(en millions d’euros)
|
Montant |
Poids dans la maquette |
Insertion professionnelle et inclusion sociale |
1 979 |
51 % |
Insertion professionnelle des jeunes et appui à la réussite éducative |
1 073 |
28 % |
Améliorer les compétences et les systèmes d’éducation et de formation |
365 |
9 % |
Aide matérielle aux plus démunis |
28 |
1 % |
Innovation sociale en matière d’inclusion active dans l’emploi |
151 |
4 % |
Défis spécifiques des régions ultrapériphériques |
100 |
3 % |
Crédits fléchés en réponses au cyclone Chido à Mayotte dans le cadre du Règlement Restore |
23 |
1 % |
Total |
3 853 |
100 % |
Source : Ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, La nouvelle politique agricole commune PAC 2023 – 2027.
3. Les retours français au titre de la rubrique « Résilience et valeurs »
● La rubrique 2b du budget de l’UE est un autre versant de la politique de cohésion qui relève des politiques internes de l’Union et qui finance des programmes gérés directement par la Commission, par ses agences exécutives ou par des agences décentralisées. La France perçoit en moyenne 522 millions d’euros de retours au titre de cette rubrique sur les trois premières années du CFP 2021‑2027, avec un taux de retour moyen de 11,4 %.
L’essentiel de ces retours est constitué du programme Erasmus + sur lequel la France perçoit 355 millions d’euros en moyenne par an, ce qui représente un taux de retour de 13 % au titre de ce programme. 139 163 mobilités ont ainsi été financées au départ de la France. Le programme concerne pour moitié des étudiants mais permet également les mobilisés d’élèves issus de l’enseignement scolaire (29 % des départs) et d’alternants et apprentis (18 % des mobilités). Il est accompagné de bourses allant de 225 euros à 824 euros par mois en fonction de la durée, de la destination et du type de mobilité.
● 87 millions d’euros relèvent de programmes qui ont peu à voir avec les compétences de l’Union européenne et pour lesquels le risque de saupoudrage est assez élevé selon le rapporteur spécial :
– 61 millions d’euros ont été reçus en moyenne par an depuis le début du CFP au titre du programme « Europe créative » : ils financent divers projets dans le domaine de l’audiovisuel, des médias et des industries culturelles tels que la plateforme « Media Invest » destinée à stimuler l’investissement dans le secteur audiovisuel et les industries culturelles, un dispositif en faveur de la mobilité des artistes ou encore un projet par Europa Cinema, réseau de salles à programmation majoritairement européenne ;
– 12 millions d’euros en moyenne par an au titre du programme EU4Health ;
– 6 millions d’euros en moyenne par an au titre du programme Emploi et innovation sociale qui finance des contributions à des organisations internationales ayant leur siège en France (OCDE et Conseil de l’Europe), des prestations liées aux systèmes d’information dont les entreprises lauréates sont en France et des subventions à France Travail ou à l’Institut national du travail de l’emploi et de la formation professionnelle ;
– 6 millions d’euros en moyenne par an au titre du programme Droits et valeurs, qui finance des subventions aux organisations de la société civile actives dans le domaine de la protection et de la promotion des droits, des programmes de lutte contre les discriminations ou encore les actions de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes, aux filles, aux enfants et aux groupes à risques, et soutient et protège les victimes de violences ;
– 2 millions d’euros en moyenne par an au titre du programme Justice, qui finance des projets dans le domaine de la coopération judiciaire, de la formation et de l’accès à la justice tels que le réseau de recherche et d’action pénitentiaire ou encore le projet CLUE III porté par le ministère de la justice pour diffuser certaines formations de l’EJTN en matière de législation civile et commerciale européenne.
La France a également reçu 12 millions d’euros en moyenne par an au titre du mécanisme de protection civile. Cela a permis de financer l’achat de contre-mesures nucléaire, radiologique, biologique et chimique et de deux avions bombardiers d’eau. Cela a également permis de financer le projet Red Roses piloté par la Croix rouge française et portant sur l’intégration et l’interopérabilité des données indispensables aux interventions de sécurité civile.
La France a également bénéficié de 12 millions d’euros en moyenne par an au titre du corps européen de solidarité qui finance la participation des jeunes de 18 à 30 ans à des actions de volontariat et des projets de solidarité.
● Enfin, trois types de retours peuvent être relevés :
– 15 millions d’euros annuels au titre des montants investis par les agences européennes décentralisées du domaine du travail, de la santé, de la justice et de l’égalité entre les hommes et les femmes dans des projets intervenant en France ;
– 4 millions d’euros au titre de projets pilotes et actions préparatoires qui relèvent d’expérimentations de la Commission avant l’introduction d’une action dans un programme. Il s’agit par exemple du projet Water wardens by rowing pour développer des actions visant à sensibiliser les rameurs à la fragilité de l’écosystème aquatique ou d’une plateforme européenne des médias pilotée par Arte ;
– 27 millions d’euros en moyenne annuelle relevant des prérogatives et compétences spécifiques de la Commission sans que la destination de ces retours ne soit précisée.
Les retours français au titre de la rubrique « rÉsilience et valeurs »
(en millions d’euros)
|
2021 |
2022 |
2023 |
Taux de retour |
Protection civile et opérations d’aide humanitaire européens |
3 |
30 |
4 |
6,8 % |
Europe de la santé |
3 |
14 |
18 |
6,6 % |
Instrument d’aide d’urgence |
32 |
0 |
0 |
6,4 % |
Emploi et innovation sociale |
4 |
7 |
6 |
8,2 % |
Erasmus + |
276 |
386 |
402 |
13 % |
Corps européen de solidarité |
11 |
13 |
13 |
10,8 % |
Europe créative |
40 |
65 |
77 |
23,7 % |
Justice |
2 |
2 |
2 |
5,4 % |
Droits et valeurs |
4 |
8 |
10 |
6,2 % |
Agences décentralisées |
15 |
16 |
15 |
3 % |
Projets pilotes et actions préparatoires |
3 |
3 |
5 |
11,1 % |
Actions relevant des prérogatives et compétences spécifiques de la Commission |
31 |
28 |
22 |
16,1 % |
TOTAL |
423 |
570 |
573 |
11,4 % |
Source : Commission des finances, d’après l’annexe au PLF 2025 « relations financières avec l’Union européenne ».
B. La rubrique « ressources naturelles et environnement »
Les retours français au titre de la rubrique « ressources naturelles et environnement » s’élèvent à 9,5 milliards d’euros : le Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) qui a permis de verser 7,49 milliards d’euros en aides directes aux agriculteurs français, le Fonds européen agricole pour le développement rural qui finance le développement rural (second pilier de la PAC) à hauteur de 2 milliards d’euros, le Fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l’aquaculture (567 millions d’euros sur 7 ans, soient 81 millions d’euros en moyenne par an) et le programme en gestion directe Life + qui finance des projets en faveur de la protection de la biodiversité, de l’économie circulaire, de l’atténuation et l’adaptation au changement climatique et la transition énergétique pour 43 millions d’euros par an en moyenne sur les trois premières années du CFP 2021–2027.
La France enregistre un niveau de retour satisfaisant pour cette rubrique (16,35 %), essentiellement en raison du FEAGA pour lequel le taux de retour (18,2 %) est supérieur à la clé de contribution de la France à la ressource RNB (16,9 %). Le rapporteur spécial souligne néanmoins que les taux de retour sont nettement plus faibles que la clé de contribution de la France pour le second pilier de la PAC (12,4 %) et le Fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l’aquaculture (10,2 %).
Niveau de retours au titre de la rubrique « ressources naturelles et environnement »
(en millions d’euros)
|
2021 |
2022 |
2023 |
Taux de retour moyen (2021–2023) |
Politique agricole commune |
9 300 |
9 362 |
9 491 |
16,6 % |
Fonds européen agricole de garantie |
7 387 |
7 512 |
7 488 |
18,2 % |
Fonds européen agricole pour le développement rural |
1 913 |
1 850 |
2 003 |
12,4 % |
Fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l’aquaculture |
81 |
93 |
101 |
10,2 % |
Life + |
36 |
44 |
48 |
8,5 % |
Agences décentralisées |
1 |
1 |
1 |
1,6 % |
TOTAL |
9 418 |
9 499 |
9 540 |
16,35 % |
1. La politique agricole commune
a. Le fonds européen agricole de garantie
Le Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) constitue l’essentiel des aides de la politique agricole commune. Il est intégralement constitué de paiements directs aux agriculteurs. 85 % des paiements relèvent d’aides découplées, c’est-à-dire qu’elles sont versées indépendamment du type de productions considérées. Il existe quatre types d’aides découplées : l’aide de base au revenu ou droit au paiement de base, l’aide redistributive, l’aide complémentaire pour les jeunes agriculteurs et l’écorégime.
Le droit au paiement de base ou aide de base au revenu représente 48 % des paiements directs du FEAGA. Elle est versée à concurrence du nombre d’hectares admissibles déclarés par les agriculteurs actifs. Elle conditionne l’accès aux trois autres types de paiements directs.
L’écorégime (25 % des paiements directs du FEAGA) est un paiement direct aux exploitants agricoles de métropole qui s’engagent volontairement à mettre en place sur l’ensemble de leur exploitation des pratiques agronomiques favorables au climat et à l’environnement. Il peut atteindre entre 60 et 80 euros par hectares en fonction de l’atteinte des critères environnementaux et peut aller jusqu’à 100 euros par hectare pour les agriculteurs biologiques.
Il peut être ouvert de trois manières : la première est celle de la diversification des cultures sur les terres arables, du non-labour d’au moins 80 % des prairies permanentes ainsi que d’une couverture d’au moins 75 % des inter-rangs des surfaces en cultures permanentes, la deuxième est celle de la certification (agriculture biologique, certification haute valeur environnementale ou certification environnementale privée dite de niveau 2+ répondant a minima aux critères définis dans le plan stratégique national) et la troisième est celle des éléments favorables à la biodiversité, l’éco-régime étant accordé à tout agriculteur actif justifiant sur son exploitation d’au moins 7 % d’infrastructures agroécologiques ou de terres en jachères sur sa surface agricole utile
L’aide redistributive complémentaire représente 10 % des paiements et vise à apporter un soutien aux petites et moyennes exploitations. Elle permet de valoriser les activités génératrices d’emploi, qui se font en moyenne de façon plus forte sur des exploitations de taille inférieure à la moyenne. L’aide redistributive est payée sur les 52 premiers hectares admissibles des exploitations éligibles. Le montant indicatif planifié sur le programme 2023–2027 s’élève à 48 euros par hectare.
L’aide complémentaire au revenu pour les jeunes agriculteurs représente 1,7 % des paiements. L’aide est versée, pour une période maximale de cinq ans, sous la forme d’un montant forfaitaire. Le montant indicatif forfaitaire estimé sur cette base représente ainsi 4 469 euros par exploitation.
Les aides couplées représentent 15 % des paiements directs. Dans le cadre de la programmation 2023 – 2027, les aides couplées peuvent être octroyées dans la limite de 13 % de l’enveloppe nationale des aides directes, avec une possibilité d’octroyer 2 % supplémentaires pour la production de protéines végétales. La France a donc utilisé le maximum de ce que permet le droit européen pour favoriser l’autonomie en protéines végétales de la ferme France via des aides aux légumineuses fourragères et à graines, avec un objectif de doublement des surfaces d’ici à 2030.
b. Le Fonds européen agricole pour le développement rural
Doté de 2 milliards d’euros en moyenne annuelle, le Fonds européen agricole pour le développement rural est partagé entre les aides surfaciques, qui relèvent de la compétence de l’État, et les aides non surfaciques, dont la gestion a été intégralement consacrée aux régions à l’occasion de la programmation 2023‑2027.
Fonds europÉen agricole pour le dÉveloppement rural
(mesures surfaciques)
(En millions d’euros)
|
Enveloppe annuelle |
Cofinancement de l’État |
Total |
Indemnités compensatrices de handicap naturel |
717 |
383 |
1 100 |
Aides à l’agriculture biologique |
197 |
143 |
340 |
MAEC surfaciques |
175 |
44 |
219 |
Prédation |
28 |
7 |
35 |
Gestion des risques |
186 |
0 |
186 |
Assistance technique État |
1 |
0 |
1 |
TOTAL |
1 304 |
577 |
1 881 |
Source : Ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, La nouvelle politique agricole commune PAC 2023 – 2027.
Dotées d’1,3 milliards d’euros en moyenne annuelle, les aides surfaciques concernent :
– les indemnités compensatrices de handicap naturel (717 millions d’euros d’aides européennes et 383 millions d’euros de co-financements de l’État) qui visent à maintenir les activités agricoles dans les zones défavorisées (montagne, piémont et zone défavorisée simple) en compensant une partie du différentiel de revenu entre ces zones et la zone de plaine. L’aide est versée par hectare éligible ;
– les aides à l’agriculture biologique (197 millions d’euros en moyenne annuelle et 143 millions d’euros de co-financement de l’État) qui augmentent de 36 % par rapport à la programmation précédente et ont été dimensionnés dans l’objectif d’atteindre 18 % de la surface agricole cultivée en agriculture biologique en 2027 ;
– les mesures agroenvironnementales et climatiques surfaciques (175 millions d’euros et 44 millions d’euros de cofinancement de l’État) ;
– les dotations pour gestion des risques portant sur les récoltes (186 millions d’euros), notamment via l’assurance multirisques climatique des récoltes et l’aide aux fonds de mutualisation en cas d’aléas sanitaires et d’incidents environnementaux ;
– les crédits visant à financer les mesures de lutte contre la prédation des loups et des ours (28 millions d’euros de fonds de la PAC et 7 millions d’euros de fonds de l’État).
Les mesures non surfaciques transférées aux régions représentent 700 millions d’euros en moyenne annuelle. Plus de la moitié de ce budget est consacrée aux investissements agricoles et en faveur du développement rural (372 millions d’euros) tandis que 100 millions d’euros sont consacrés au programme Liaison entre les actions de développement de l’économie rurale qui finance des projets locaux dans des domaines très vastes.
Le rapporteur souligne que ces aides multiples se recoupent parfois avec les thématiques des aides surfaciques. Ainsi en est-il de la dotation aux jeunes agriculteurs et nouveaux installés en agriculture (107,6 millions d’euros), des mesures agro-environnementales et climatiques forfaitaires ou dédiées à certains types d’agriculture tels que l’apiculture (35,2 millions d’euros) ou la gestion des risques (2,2 millions d’euros).
Fonds europÉen agricole pour le dÉveloppement rural
(mesures non surfaciques)
(En millions d’euros)
Mesure |
Total |
MAEC forfait |
22 |
MAEC Amélioration du potentiel pollinisateur des abeilles |
8,6 |
MAEC Protection des races menacées |
4,6 |
Gardiennage des troupeaux |
1,4 |
Investissements |
372,6 |
Dotation jeunes agriculteurs |
99,5 |
Dotation nouvel installé en agriculture |
8,1 |
Création d’entreprises en milieu rural |
0,4 |
Liaison entre les actions de développement de l’économie rurale |
100,4 |
Autres formes de coopération |
35,6 |
Échanges de connaissances et d’informations |
19,9 |
Assistance technique aux régions |
24,7 |
TOTAL |
700 |
Source : Ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, La nouvelle politique agricole commune PAC 2023‑2027.
2. Le Fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l’aquaculture
a. Un fonds conçu pour soutenir la pêche durable et l’aquaculture
● Doté de 6,1 milliards d’euros au titre du CFP 2021 – 2027, le fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l’aquaculture est l’outil de financement qui accompagne la mise en œuvre de la politique commune de la pêche (PCP) et de la politique maritime intégrée (PMI) de l’Union européenne. Il vise à soutenir une pêche et une aquaculture compétitive et durable, à faciliter la mise en œuvre de la politique commune de la pêche, notamment afin de limiter les captures et d’assurer la reconstitution des stocks et de favoriser le développement économique et social le long du littoral européen.
La France dispose de 567 millions d’euros sur l’ensemble du CFP, ce qui représente un taux de retour de 9,3 %. 322 millions d’euros sont gérés par les régions tandis que 245 millions d’euros sont gérés par l’État, auxquels on peut ajouter 230 millions d’euros de co-financements nationaux.
● L’État pilote les mesures régaliennes de contrôle, de collecte des informations et de surveillance tout en assurant quelques mesures d’investissements structurantes pour l’aquaculture et les filières maritimes, via trois priorités :
– favoriser une pêche durable, la restauration et la conservation des ressources biologiques aquatiques via des contrôles, la collecte de données, des actions de protection des aires marines protégées et des zones Natura 2000, le financement des arrêts temporaires et plans de sortie de flotte ainsi que le financement de formations et de partenariats entre scientifiques et pêcheurs ;
– encourager les activités aquacoles durables ainsi que la transformation et la commercialisation des produits de la pêche et de l’aquaculture via des investissements structurants dans la modernisation des activités aquacoles ainsi que des activités de commercialisation et de transformation, la création de fonds de mutualisation des risques ou encore des actions de planification et de surveillance en aquaculture ;
– le renforcement de la gouvernance internationale des océans pour que les mers et océans soient sûrs, sécurisés, propres et gérés de manière durable via la meilleure connaissance du milieu marin, la surveillance maritime et la coopération des garde-côtes.
● Les régions pilotent les mesures d’interventions économiques, de soutien à l’innovation et de protection de la biodiversité de trois manières :
– en matière de pêche, elles financent la modernisation des activités de pêche, la formation des entreprises de pêche, les investissements dans les ports de pêche, l’installation des jeunes pêcheurs, la remotorisation, et la compensation des surcoûts dans les régions ultramarines ;
– en matière d’aquaculture, elles financent la modernisation des activités d’aquaculture via des investissements pour améliorer les conditions de travail (trieuse, nettoyeuse, surélévation, bassins de purification), l’installation des jeunes aquaculteurs et la recherche et l’innovation dans la transformation des produits aquacoles ;
– le développement d’une économie bleue durable dans les zones côtières, insulaires et intérieures, pour favoriser le développement des communautés de pêche et d’aquaculture.
● La consommation de l’enveloppe de la programmation 2014–2020 est relativement satisfaisante, puisque 572,6 millions d’euros ont été consommés sur les 588 millions d’euros pré-alloués à la France. En revanche, la programmation 2021–2027 est en retard par rapport à la moyenne des pays européens. Ainsi, 159 millions d’euros ont été engagés, ce qui représente un taux d’engagement de 28 % tandis que 50 millions d’euros ont été déclarés à la Commission européenne pour provoquer un paiement. La France se retrouve dix-huitième en matière d’engagement et onzième en matière de paiement.
Les mesures pilotées par l’État les plus avancées en matière d’engagement des crédits concernent la protection de la biodiversité, la commercialisation et la transformation des activités de pêche et les arrêts temporaires et plans de sortie de flotte quand les mesures relatives à l’aquaculture accusent un retard. Les mesures régionales relatives aux installations pêche, aux investissements liés à la jauge, à la remotorisation et au développement local mené par les acteurs locaux sont les moins engagées, avec un taux d’engagement inférieur à 25 %.
Ce retard est essentiellement lié à la publication tardive des règlements européens ayant décalé l’adoption du programme national du FEAMPA pour la programmation 2021-2027, au débordement de la programmation du Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche au titre des années 2014–2020 sur la programmation en cours, au manque de moyens humains au sein des organismes intermédiaires pour l’instruction des dossiers, aux conditions de cofinancement de certains dispositifs trop lourds pour les porteurs de projet et à une conjoncture économique peu propice à l’investissement (renégociation de l’accord Brexit, plan de sortie de flotte, fermeture du golfe de Gascogne et toxi-infections alimentaires collectives au norovirus, agent infectieux causant des gastro-entérites, et donnant lieu à des interdictions temporaires de la pêche et de la commercialisation de coquillages dans certaines zones du littoral français).
b. Des règles de conditionnalité des financements déconnectées du besoin de renouvellement de la flotte
● Le nerf de la guerre pour la compétitivité pêche française concerne la nécessité de renouveler la flotte car les bateaux de pêche français ont un âge moyen de 31 ans tandis que cette moyenne atteint 40 ans dans les départements d’Outre-mer. Aussi, il est urgent de trouver les moyens de déverrouiller les limitations techniques juridiques et financières relatives à l’aide à la modernisation et à la construction de nouveaux navires. En effet, le coût d’un mètre linéaire de navire neuf en France s’établit entre 150 000 à 250 000 € ce qui induit des investissements considérables.
Par ailleurs, il y a un besoin urgent d’investissement dans la recherche et développement pour garantir la transition énergétique et écologique du secteur. Le rapporteur spécial en veut pour preuve le projet Game of Trawls porté par l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer et pôle Mer Bretagne pour permettre aux engins de pêche de détecter et identifier plus efficacement les espèces capturées et réduire les conséquences sur les fonds marins grâce à l’aide apportée par l’intelligence artificielle et les nouvelles technologies aux engins de pêche.
Ces investissements doivent permettre la généralisation de séries de navires standard pour abaisser les coûts de construction des bateaux de pêche.
● Aussi, le rapporteur souhaite dénoncer les règles absurdes inscrites à l’article 18 du Règlement (UE) 2021/1139 du Parlement européen et du Conseil du 7 juillet 2021 instituant le Fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l’aquaculture et modifiant le règlement (UE) 2017/1004 qui conditionnent les aides au remplacement ou à la modernisation d’un moteur principal ou auxiliaire d’un navire de pêche à des critères malthusiens. Ainsi, les aides à remotorisation contiennent plusieurs conditions qui limitent sérieusement la capacité à moderniser la flotte :
– les aides ne peuvent concerner un navire de pêche dépassant les 24 mètres de longueur ;
– dans le cas des navires de petite pêche côtière, le nouveau moteur ou le moteur modernisé n’a pas une puissance exprimée en kW supérieure à celle du moteur actuel ;
– dans le cas des autres navires dont la longueur hors tout ne dépasse pas 24 mètres, le nouveau moteur ou le moteur modernisé n’a pas une puissance exprimée en kW supérieure à celle du moteur actuel et rejette au moins 20 % de CO₂ en moins par rapport au moteur actuel.
Ces normes ne paraissent avoir aucune justification technique ni de faisabilité et limite la capacité du FEAMPA à intervenir sur l’enjeu principal pour la pêche française et européen à savoir le renouvelle de la flotte.
c. Un enjeu de prévisibilité des quotas pour les pêcheurs
Les pêcheurs ont besoin de prévisibilité pour stabiliser leurs revenus et leurs activités. Aussi, il peut être envisagé d’instituer des totaux admissibles de captures et des quotas de pêche pluriannuels afin de garantir une plus grande stabilité des prix et des règles pour les pêcheurs. Toutefois, cette solution peut se heurter à la volonté de la communauté scientifique de maintenir des marges très importantes pour garantir le maintien de la population de poissons ce qui induirait un plancher pluriannuel de non capture particulièrement important.
En outre, un certain nombre d’espèces ne sont pas soumises à des totaux admissibles de captures et des quotas de pêche. Une des facteurs de vulnérabilité des flottilles de la Manche, et notamment de la Manche-Est, est que le chiffre d’affaires dépend de plus en plus d’espères non soumises à des totaux admissibles de captures et des quotas de pêche. Ainsi en est-il pour les chalutiers hauturiers des Hauts de France qui pêchent du rouget barbet, des céphalopodes et du bar qui sont des poissons particulièrement rentables.
Lorsque les espèces non soumises à des totaux admissibles de captures et des quotas de pêche sont exploitées, la compétition selon les zones peut être ouverte entre flottilles de différents pavillons. Ce contexte de concurrence accrue peut désavantage les pêcheurs français sur des segments de pêche particulièrement rentables. Il y a en effet souvent peu d’encadrement sauf celui qu’apportent de leur initiative les professionnels ou le marché : un poisson de taille non commercialisable ne sera pas vendu.
Ce sont par ailleurs des espèces moins étudiées scientifiquement pour diverses raisons (moindre pression commerciale initiale, difficulté à modéliser par absence ou caractère trop court des séries historiques, manque de connaissance du cycle de vie) et donc soumises à plus d’instabilité et d’imprévisibilité ce qui n’est pas un atout pour les flottilles concernées.
Doté de 5,4 milliards d’euros, le programme européen pour l’environnement et le climat Life + a pour but de contribuer à la promotion du développement durable dans l’Union européenne. Le programme soutient la protection de la nature et de la biodiversité, l’atténuation et l’adaptation au changement climatique, le renforcement de l’efficacité énergétique et des énergies renouvelables ainsi que la transition vers une économie circulaire.
Doté de 5,4 milliards d’euros sur l’ensemble du CFP 2021 – 2027 à l’échelle de l’Union européenne, ce qui représente une hausse de 70 % par rapport à 2014‑2020. Il est réparti en quatre sous-programmes :
– le programme Nature et biodiversité est doté de 2,1 milliards d’euros et finance des actions de protection et de restauration des zones naturelles et des espèces protégées ;
– le programme Économie Circulaire et Qualité de Vie est doté de 1,34 milliard d’euros et vise à promouvoir une économie durable et circulaire, notamment via une meilleure gestion des ressources telles que l’eau, les sols et les matières premières, et à lutter contre toutes formes de pollution ;
– le programme Atténuation du Changement Climatique et Adaptation est doté de 947 millions d’euros et soutient les efforts d’atténuation des effets du changement climatique et d’adaptation à ses conséquences ;
– le programme Transition énergétique propre est doté de 997 millions d’euros et appuie la transition vers des sources d’énergie propres et durables, notamment par la structuration des acteurs, l’outillage et le renforcement des compétences.
La France a bénéficié de décaissements à hauteur de 36 millions d’euros en 2021, 44 millions d’euros en 2022 et 48 millions d’euros en 2023 et a remporté des appels à projets dont les décaissements s’étendront sur plusieurs années pour des montants fixés à 1,8 million d’euros en 2021, 72,1 millions d’euros en 2022 et 72,4 millions d’euros en 2023.
Sur le volet biodiversité, la métropole de Bordeaux a par exemple bénéficié de 3,2 millions d’euros pour le programme Biodiver’Cité pour des projets de restauration écologique du Marais de Peychaud et du Parc des Jalles, situés en zones Natura 2000, ainsi que de lisières forestières, tandis que la société d’ornithologie de Polynésie a bénéficié de 3,8 millions d’euros.
UnE articulation territoriale perfectible
4. L’articulation des fonds entre l’État et les régions
a. Les enveloppes partagées entre l’État et les régions
● L’articulation de la responsabilité de l’État et des régions en matière de gestion des fonds européens est d’une clarté perfectible. Si le FEDER est intégralement géré par les conseils régionaux, le fonds de transition juste et le FSE + sont partagés entre ces deux autorités.
Ainsi, le FSE + est-il partagé entre la Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (65 % de l’enveloppe) et les conseils régionaux (35 % de l’enveloppe). En outre, les crédits gérés par la DGEFP sont-eux-mêmes répartis entre gestion directe par la DGEFP, la gestion déconcentrée par les DREETS, la délégation aux opérateurs du ministère et la délégation à des organismes intermédiaires tels que les conseils départementaux, les organismes gestionnaires de programmes locaux d’insertion et emploi et les métropoles. Le rapporteur spécial prend toutefois acte du fait que cela répond au partage de compétences entre l’État (insertion des publics les plus éloignés de l’emploi, accompagnement des jeunes vers l’emploi, compétence des salariés) et les régions (formation professionnelle, apprentissage, appui à la création d’entreprises, orientation tout au long de la vie) et qu’un regroupement de l’enveloppe sous une seule autorité n’est pas nécessairement la voie la plus efficace.
L’enveloppe du fonds de transition juste est également séparée entre les conseils régionaux (70 % de l’enveloppe) et la DGEFP (30 % de l’enveloppe), les régions gérant les mesures économiques et de transition écologique tandis que le Ministère du travail, de l’emploi et de l’insertion gère pilote les mesures d’accompagnement social territorialisée.
L’enveloppe du FEAMPA est également partagée entre les régions (57 % de l’enveloppe) qui gèrent les mesures d’interventions économiques et relatives à l’innovation et la biodiversité et l’État qui gère les mesures régaliennes (contrôles, collecte d’informations, surveillance, aides de crise, investissements structurants). Le rapporteur spécial ne peut toutefois que constater que le transfert d’une partie supplémentaire de l’enveloppe aux régions, notamment s’agissant des mesures relatives à l’innovation et à la biodiversité, se traduit pour l’instant par des niveaux d’engagement très divers : les Pays de la Loire a un taux d’engagement de 7,56 % quand la Normandie a atteint un seuil de 68,82 %, ce qui s’explique notamment par des conditions d’octroi des aides plus larges que les autres régions et des difficultés techniques ou d’instruction du côté des régions qui ont plus de difficultés à programmer. Le rapporteur spécial est conscient qu’un transfert de compétences nécessite du temps pour garantir une programmation et un décaissement efficacement et sera vigilant au niveau de décaissement de ces crédits.
Enfin, si l’État gère le décaissement des aides de la PAC relevant du fonds européen agricole de garantie et les mesures surfaciques du fonds agricole pour le développement rural, les mesures non surfaciques du FEADER ont été transférées aux régions, ce qui représentent 700 millions d’euros par sur les 2 milliards d’euros annuels versés par le FEADER. Cela semble être une simplification bienvenue. Pour la programmation 2014–2022, l’Agence des services de paiement (ASP) était responsable de la mise en paiement et des contrôles sur place de toutes les aides du FEADER alors que l’instruction des aides étaient du ressort des conseils régionaux. L’instruction des dossiers était toutefois réalisée jusqu’en 2022 par les directions départementales des territoires (DDT) avant que les régions n’en reprennent le contrôle. L’ASP assurait la mise en œuvre du système d’information pour l’instruction, le contrôle et le paiement des aides.
Désormais, l’ASP établit un cadre de procédures et les régions instruisent les dossiers dans leur système d’information. Elles réalisent également des contrôles sur place sur un échantillon de dossiers. L’ASP reçoit les demandes de paiement, vérifie leur conformité et les met en paiement. Le rapporteur spécial sera attentif au décaissement de ces crédits et à l’égalité de traitement dans la conception et le calibrage des aides.
b. La coordination entre l’État et les régions
La coordination entre l’État et les régions est d’abord réalisée par l’Agence nationale de cohésion des territoires, autorité de coordination nationale des fonds européens. Elle assure la coordination entre l’État et les régions, développe les systèmes d’information, apporte un appui technique et juridique aux autorités de gestion et coordonne les travaux interfonds en matière de suivi et d’évaluation. Elle pilote également le programme national d’assistance technique interfonds.
À l’occasion de la programmation 2014–2020, il y a eu un décalage calendaire entre la préparation des contrats de plan États–régions (CPER) 2015–2020 et la préparation des programmes opérationnels européens qui encadrent la programmation des fonds européens. La non-concordance des calendriers a conduit les conseils régionaux à élaborer leurs programmes opérationnels sur la base d’orientations stratégiques régionales plutôt que sur des priorités partagées État-Région telles qu’elles auraient pu s’affirmer dans les CPER. Le décalage entre les deux programmations s’est également reflété dans les instances de pilotage et de suivi, seules quelques régions ayant proposé une comitologie commune entre CPER et programmes opérationnels.
Pour la période 2021-2027, les programmes ont été élaborés au niveau régional en cohérence avec les CPER et les contrats de convergence et de transformation. Les comités de suivi des fonds européens sont en très grande majorité co-présidés par le président du conseil régional et le préfet de région, ce qui permet d’assurer une meilleure coordination entre les outils.
5. L’enjeu d’un appui plus important aux régions dont les taux d’engagements sont relativement faibles
Le rapporteur spécial souligne que le taux d’engagement est très contrasté entre les régions. Ainsi, la Guyane (8,5 %), la Corse (10,6 %), la Martinique (15,8 %) et Saint – Martin (4,4 %) enregistrent des taux de programmation particulièrement faibles. D’autres régions ont des taux d’engagement légèrement meilleurs mais mériteraient d’être davantage appuyés tels que Provence Alpes- Côtes d’Azur (35,6 %), les Hauts de France (36,4 %), la Nouvelle Aquitaine (35,6 %), la Réunion (36,9 %) et la Guadeloupe (29,4 %).
Avancement de la programmation dans les différentes régions
(FEDER, FSE + et FTJ)
(en millions d’euros)
|
Enveloppe |
Taux d’engagement |
Taux de paiement |
Auvergne – Rhône-Alpes |
1 902 |
62,6 % |
9,2 % |
Bourgogne- Franche – Comté |
949 |
47,1 % |
15,2 % |
Bretagne |
1 149 |
51,3 % |
25,3 % |
Centre-Val de Loire |
693 |
68,9 % |
11,1 % |
Corse |
196 |
10,6 % |
0 % |
Grand Est |
1 472 |
73,3 % |
17 % |
Guadeloupe |
844 |
29,4 % |
0 % |
Guyane |
647 |
8,5 % |
0,9 % |
Hauts de France |
2 425 |
36,4 % |
2,9 % |
Île-de-France |
1 007 |
36,6 % |
3,2 % |
Martinique |
1 000 |
15,8 % |
0 % |
Mayotte |
644 |
0 % |
0 % |
Normandie |
969 |
54,3 % |
9,3 % |
Nouvelle Aquitaine |
1 459 |
35,6 % |
9,5 % |
Occitanie |
1 383 |
48 % |
11,1 % |
Pays de la Loire |
679 |
35 % |
9,9 % |
Réunion |
1 795 |
36,9 % |
7,5 % |
Saint-Martin |
91 |
4,4 % |
0 % |
Sud – Provence Alpes- Côtes d’Azur |
1 345 |
35,6 % |
4,9 % |
TOTAL |
20 649 ([13]) |
42,6 % |
10,6 % |
Source : Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
Ce retard découle avant tout de la difficulté qu’ont rencontré les autorités de gestion à mener concomitamment différents exercices et notamment la clôture des exercices 2014–2020, le décaissement des crédits relevant du plan de relance Next Generation EU puis la construction et le lancement de leurs programmes 2021‑2027.
Par ailleurs, certaines régions rencontrent des difficultés structurelles de mise en œuvre en raison de restructurations complètes des directions Europe dans certaines collectivités entraînant une perte de connaissances, d’historicité des données et des procédures ainsi que de compétences, un dialogue social parfois compliqué au sein des directions Europe du fait de la surcharge de travail, un manque de personnel et d’une rotation très importante des effectifs.
Afin de renforcer l’accompagnement des régions ultra-marines, l’ANCT en lien avec la direction générale des outre-mer, a été missionnée lors du comité État-régions du 3 décembre 2024, pour apporter aux autorités de gestion qui le souhaitent et qui rencontrent des difficultés, un appui individualisé dans la mise en œuvre de la programmation 2021-2027. Cet appui vient compléter les missions déjà assurées au fil de l’eau notamment de production de documents d’accompagnement et d’animation de groupes de travail techniques et thématiques. Elle vise toute la chaîne de mise en œuvre opérationnelle et d’animation du programme.
Le dispositif d’appui spécifique porté par l’ANCT a été déployé notamment pour la Corse, la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique et Saint-Martin. En ce qui concerne Mayotte, elle fait l’objet d’un suivi plus globalisé, en raison des mesures relevant des suites du cyclone Chido. Des échanges sont en cours avec les services de la Commission européenne pour que l’autorité de gestion puisse mobiliser au mieux les opportunités offertes par le Règlement (UE) 2024/3236 du Parlement européen et du Conseil du 19 décembre 2024 modifiant les règlements (UE) 2021/1057 et (UE) 2021/1058 en ce qui concerne le soutien régional d’urgence à la reconstruction (RESTORE) au service de la reconstruction de l’île.
Pour chacun de ces programmes, un diagnostic des besoins a été effectué avec l’autorité de gestion et des actions ont été mises en place pour faire face aux freins identifiés, sous toutes les formes nécessaires : appui juridique et règlementaire, échanges de pratiques, élaboration d’outils d’aide au pilotage des programmes, accompagnement dans la mise en place de pratiques nouvelles notamment en ce qui concerne la fonction comptable et toutes les mesures de simplification prévues pour la période en cours.
Il convient de rappeler que, en complément, un plan de formation à destination des autorités de gestion et d’audit avait été lancé en milieu d’année 2024 par l’ANCT. Ce plan, élaboré en lien avec les responsables des programmes, permet de couvrir globalement tous les champs de mise en œuvre d’un programme, et a permis de former à ce stade plus de 700 stagiaires au niveau de l’ensemble des autorités de gestion.
Si cet accompagnement a fait d’ores et déjà preuve de son intérêt, il faudra attendre la vague des comités prévue d’ici l’été pour apprécier l’avancement notamment en matière de programmation. La certification utile pour le dégagement devrait suivre cette tendance et permettre globalement d’atteindre les objectifs pour la Guadeloupe et la Martinique. Toutefois, selon l’ANCT, la situation des autres programmes reste quant à elle préoccupante.
Pour suivre les progrès réalisés par les programmes et comprendre les dynamiques d’avancement, l’ANCT établit actuellement des outils de monitorage approfondis qui permettront de remonter des données précises sur l’avancement des programmes. Cette nouvelle mesure devrait notamment nous donner une visibilité accrue sur les flux financiers et les stocks de projets, avant et après programmation.
IV. les retours en faveur de la sÉcuritÉ et de la dÉfense
La France dispose d’1,77 milliard d’euros de fonds en gestion partagée lui permettant de cofinancer ses politiques migratoires et de lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée.
Enveloppes allouées à la France au titre des fonds affaires intérieures
(En millions d’euros et en pourcentage)
|
2014 – 2020 |
Consommation |
2021 – 2027 |
Consommation |
Fonds asile, migration et intégration |
573,6 |
80 % |
1 290,4 |
21 % |
Instrument de gestion des frontières et des visas |
142,1 |
77 % |
357,4 |
20 % |
Fonds de sécurité intérieure |
89,6 |
57 % |
123,3 |
14 % |
TOTAL |
805,3 |
77 % |
1 771,1 |
20 % |
1. Le fonds asile, migration et intégration
Le fonds asile, migration et intégration a quatre objectifs :
– renforcer et développer tous les aspects du régime d’asile européen commun ;
– soutenir la migration légale vers les États membres en fonction de leurs besoins économiques et sociaux, promouvoir l’intégration effective des ressortissants de pays tiers ;
– promouvoir dans les États membres des stratégies de retour équitables et efficaces (pérennité du retour et réadmission effective dans les pays d’origine et de transit) ;
– accroître la solidarité et le partage des responsabilités entre les États membres (en particulier à l’égard des États les plus touchés par les flux de migrants et de demandeurs d’asile).
La gestion des migrations et des frontières faisant partie des nouvelles priorités financées par le budget de l’Union, le budget de ce fond est passé de 2,4 milliards d’euros au titre du CFP 2014–2020 à 10,7 milliards d’euros au titre du CFP 2021–2027. Sans que cette progression globale se reflète arithmétiquement dans les crédits accordés à la France, ceux-ci ont toutefois progressé pour atteindre 964,4 millions d’euros au titre de la deuxième programmation. Deux dotations complémentaires seront allouées à la France au titre de la révision à mi-parcours du CFP 2021–2027 et de la mise en œuvre du Pacte sur la migration et l’asile, pour respectivement 174,1 millions d’euros et 151,9 millions d’euros, ce qui portera l’enveloppe totale du FAMI dont bénéficiera la France à 1,29 milliard d’euros.
À titre d’exemple, ce fonds a permis d’allouer 55,5 millions d’euros à l’Office français de l’immigration et de l’intégration pour financer les dispositifs de premier accueil de plus de 400 000 demandeurs d’asile, 34,7 millions d’euros pour la formation linguistique de 220 000 personnes ou encore 31 millions d’euros pour le financement de vols de retours d’étrangers en situation irrégulière.
Le rapporteur spécial regrette cependant qu’à peine 31 % du FAMI soit utilisé pour lutter contre l’immigration irrégulière quand le reste des fonds relèvent essentiellement de l’accueil des demandeurs d’asile et du développement de la migration légale.
Programmation du Fonds asile, migration et intÉgration
(En millions d’euros)
|
2014–2020 |
2021-2027 |
Renforcer le régime d’asile européen |
84 |
211 |
Migration légale et intégration |
140 |
295 |
Lutte contre l’immigration irrégulière et retour |
128 |
283 |
Réinstallation et relocalisation vers un autre État membre |
NA |
121 |
Assistance technique |
13,96 |
54 |
TOTAL |
366,4 |
964 |
Source : Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, d’après les réponses aux questions du rapporteur spécial.
2. Le fonds de sécurité intérieure
Doté de 1,9 milliard d’euros à l’échelle de l’Union européenne pour les sept années du CFP 2021–2027, le fonds de sécurité intérieure a pour objectif d’apporter un soutien aux efforts des États membres dans le domaine de la sécurité, notamment en matière de lutte contre le terrorisme, la radicalisation, la grande criminalité organisée et la cybercriminalité, ainsi que de protection des victimes, par l’échange d’informations entre les autorités répressives de l’Union européenne, la coordination d’opérations conjointes transfrontières et le renforcement des capacités de lutte contre la criminalité et de prévention.
99 millions d’euros ont été pré-alloués à la France au titre de ce fonds. La programmation du décaissement des fonds est structurée autour de trois axes : l’amélioration et la facilitation des échanges d’informations (56 millions d’euros), la coopération transfrontière pour lutter contre le terrorisme et la criminalité organisée (11 millions d’euros) et le renforcement des moyens et des capacités des États-membres pour lutter contre la criminalité, le terrorisme et la radicalisation (28 millions d’euros). À titre d’exemple, ce fonds a permis de financer des patrouilles européennes (4 millions d’euros), de brigades et unités mixtes transfrontalières (2,2 millions d’euros) ou encore l’achat de matériel d’utilisation du fichier automatisé des empreintes digitales et les évolutions nécessaires pour les systèmes d’information européens pour les services de police et de gendarmerie (7 millions d’euros).
24 millions d’euros supplémentaires sont alloués à la France au titre de ce fonds grâce à la révision à mi-parcours du CFP 2021–2027, ce qui porte le montant total du fonds à 123 millions d’euros sur la période.
3. L’instrument de soutien financier à la gestion européenne intégrée des frontières et à la politique des visas
Doté initialement de 6,2 milliards d’euros à l’échelle du budget de l’Union européenne et abondé à hauteur de 1,1 milliard d’euros supplémentaires lors de la révision à mi-parcours du CFP 2021 – 2027, l’instrument de soutien financier à la gestion des frontières et à la politique des visas a pour objectif d’assurer une gestion européenne intégrée des frontières, rigoureuse et efficace, aux frontières extérieures, tout en garantissant la libre circulation des personnes sur le territoire de l’Union.
215 millions d’euros sont alloués à la France au titre du CFP 2021 – 2027 et répartis en deux objectifs spécifiques : la gestion européenne intégrée efficace des frontières aux frontières extérieures (148 millions d’euros) et le soutien de la politique commune des visas pour garantir une approche harmonisée en ce qui concerne la délivrance de visas et pour faciliter les voyages légitimes, tout en aidant à prévenir les risques migratoires et sécuritaires (46 millions d’euros). Le reliquat des crédits relève de l’assistance technique pour la gestion du programme (12 millions d’euros).
Ces crédits financent par exemple la mise à niveau et le maintien en condition opérationnelle des systèmes permettant l’instruction, la délivrance et le contrôle des visas (9,5 millions d’euros), des équipements tels que la fourniture de trois vedettes côtières et l’adaptation d’une vedette régionale de surveillance pour le ministère des armées (8,9 millions d’euros).
B. Le fonds européen de la défense
1. Les retours français au titre de la rubrique « Sécurité et défense »
Les retours au titre de la rubrique « Sécurité et défense » du budget de l’Union européenne sont évalués à 76 millions d’euros en 2021, 143 millions d’euros en 2022 et 142 millions d’euros en 2023, soit un taux de retour moyen de 11,5 %. Ces retours sont essentiellement composés du fonds européen de la défense (101 millions d’euros en 2023) et du fonds pour la sécurité intérieure (15 millions d’euros en 2023) dont les financements ont été évoqués plus haut.
Le reliquat des retours français relève du démantèlement de réacteurs nucléaires en Bulgarie et en Slovaquie (9 millions d’euros en 2023) sur lesquels interviennent des entreprises françaises, des fonds que l’Office européen de police (Europol), l’Agence européenne de formation des services répressifs (CEPOL) et l’Observatoire européen des drogues et toxicomanies (OEDT) attribuent à des projets ou opérations se déroulant en France (8 millions d’euros), d’actions relevant des prérogatives de la Commission en matière de sécurité nucléaire et de protection contre les radiations (7 millions d’euros) et de mobilités militaires (2 millions d’euros).
2. Le fonds européen pour la défense
Le Fonds européen pour la défense (FEDEF) vise à financer des projets et actions de recherche contribuant aux intérêts de l’Union en matière de sécurité et de défense, conformément aux priorités en matière de capacités de défense définies par les États membres dans le cadre de la politique de sécurité et de défense commune. Il est doté d’un budget de 8 milliards d’euros sur 2021-2027. La révision du CFP comporte une augmentation d’1,5 milliard d’euros de l’enveloppe du fonds européen de défense (FEDEF), dans le cadre de la création de la plateforme STEP (Strategic technologies european plateform) qui a pour ambition de soutenir la compétitivité de l’industrie européenne et d’encourager les investissements dans les technologies critiques.
Le rapporteur se félicite que la France dispose d’un niveau de retour très satisfaisant. Elle a perçu 45 millions d’euros en 2021, 105 millions d’euros en 2022 et 101 millions d’euros en 2023, soit un niveau de retour moyen de 20,9 %. Comme le souligne l’avis budgétaire de la commission de la défense nationale et des forces armées de l’Assemblée nationale sur le projet de loi de finance pour 2024 présenté par le député Mounir Belhamiti ([14]), « sur 102 projets sélectionnés sur les années 2021 et 2022 pour 2 milliards d’euros, l’industrie française est présente dans 80 de ces projets et occupe la première place en termes de participation, avec 178 participations aux projets sélectionnés en 2021 et 163 participations en 2022. La France est également le pays qui coordonne le plus grand nombre de projets. Les industriels français en coordonnent en effet 31 (dix-huit projets en 2021 et treize projets en 2022), soit plus de 30 % des projets attribués par le Fedef. »
Lors de sa troisième réunion le mercredi 25 juin 2025, la commission des finances, réunie en commission d’évaluation des politiques publiques, a entendu M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial des crédits de la mission Affaires européennes, sur son rapport d’information sur la réalité des bénéfices financiers, directs ou indirects, de l’Union européenne en France, présenté en application de l’article 146, alinéa 3, du règlement de l’Assemblée nationale. La commission a autorisé la publication du rapport d’information. L’enregistrement audiovisuel de cette réunion est disponible sur le site de l’Assemblée nationale. Le compte rendu sera bientôt consultable en ligne. |
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LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL
(par ordre chronologique)
Direction du budget, ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique
– M. Louis Pasquier de Franclieu
– M. Alexandre Deschamp
Cour des comptes
– M. Olivier Mousson, conseiller maître
– M. Stéphane Jourdan, conseiller référendaire
– Mme Anne-Laure de Coincy, présidente de section, conseillère maître
– M. Richard Lebaron, conseiller référendaire en service extraordinaire
– M. Emmanuel Giannesini, président de section, conseiller maître
– M. Jérôme Brouillet, conseiller maître
Ministère chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche
– M. Jean-Luc Moullet, directeur général de la recherche et de l’innovation
– M. Donato Giorgi, délégué aux affaires européennes et internationales
Coordination rurale – Union nationale *
– Mme Véronique Le Floc’h, présidente
– Mme Agathe Lecoulant, chargée de mission gouvernance
– M. Jean-Baptiste Oger, chargé de mission des affaires publiques
– Mme Amélie Rebiere, vice-présidente
– M. Patrick Legras, porte-parole
Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle, ministère du travail, de la santé, des solidarités et des familles
– Mme Malissa Marseille, sous-directrice Europe et International
– Mme Véronique Gallo, adjointe à la sous-directrice
Agence nationale de la cohésion des territoires
– M. Stanislas Bourron, directeur général
– Mme Agnès Reiner, directrice générale déléguée à l’Appui opérationnel et stratégique
Observatoire de l’immigration et de la démographique
– M. Nicolas Pouvreau-Monti, directeur général
– M. Grégoire Daubigny, directeur des études et des relations parlementaires
Direction générale des étrangers en France, ministère de l’intérieur
– M. Éric Jalon, directeur général
– Mme Delphine Palmer, chef du bureau des fonds européens
Agence des services et de paiement
– M. Sylvain Maestracci, président-directeur général
Union des industries et métiers de la métallurgie *
– M. Jean-Pierre Fine, secrétaire général
– Mme Fanny Forest-Baccialone, chargée des relations institutionnelles
Direction générale de la Performance économique et environnementale des entreprises, ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire
– M. Philippe Duclaud, directeur général
– M. Yves Auffret, chef du service gouvernance et gestion de la PAC
– Mme Juliette Prade, ajointe à la sous-directrice gestion des aides de la PAC
France Chimie *
– Mme Magali Smets, directrice générale
– M. Mathias Girard, directeur des affaires publiques
– M. Sylvain Le Net, responsable énergie
Régions de France
– M. Daniel Leca, vice-président de la Région Hauts-de-France, chargé de l’Europe, de la stratégie territoriale et des politiques contractuelles
– M. Pascal Gruselle, conseiller affaires européennes et aménagement du territoire
Fédération Nationale des Syndicats d’Exploitants Agricoles *
– M. Yannick Fialip, membre du bureau
– M. Roch-Marie Stern, chargé d’études économiques PAC
– Mme Clémence Galtier, chargé de mission affaires publiques
Comité national des pêches maritimes et des élevages marins *
– M. Philippe de Lambert des Granges, directeur général
Direction générale du Trésor, ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle e numérique
– M. Mikhaël Ayache, sous-directeur affaires européennes (Europe) au service des politiques macroéconomiques et des Affaires européennes (SPMAE)
– M. Emmanuel Chay, sous-directeur adjoint à Europe au SPMAE
– M. Sofien Abdallah, conseiller parlementaire et relations institutionnelles
– Mme Olivia Montel, cheffe du pôle « Autorité de coordination nationale du Plan nationale de relance et résilience » (PNRR) au SPMAE
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Contribution écrite adressée au rapporteur spécial
Secrétariat général des Affaires européennes
* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique
([1]) Business Europe, Reform Barometer, EU in a new political cycle ; competitiveness as a true priority in a complex global context, 2025
([2]) Directive (UE) 2022/2464 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 modifiant le règlement (UE) no 537/2014 et les directives 2004/109/CE, 2006/43/CE et 2013/34/UE en ce qui concerne la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises
([3]) Directive (UE) 2024/1760 du Parlement européen et du Conseil du 13 juin 2024 sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité et modifiant la directive (UE) 2019/1937 et le règlement (UE) 2023/2859
([4]) Le jaune budgétaire « Relations financières avec l’UE » annexé au PLF 2025 ne donne pas d’informations au-delà de l’année 2023.
([5]) 231 millions d’euros seront affectés à des dépenses pour les secteurs ayant subi les conséquences de la sortie du Royaume-Uni de l’Union tandis que 16 millions d’euros ont été programmés pour anticiper d’éventuelles corrections par la Commission mais aussi de pouvoir éventuellement bénéficier d’une sous-consommation dans les autres États membres et 504 millions d’euros ont été transférés vers le plan de relance et de résilience, ce qui explique que la somme de ces montants excède les 736 millions d’euros affectés à la France.
([6]) Pfeiffer, P., J. Varga and J. in ‘t Veld (2023) « Quantifying spillovers of coordinated investment stimulus in the EU ». Macroeconomic Dynamics, 7(27): 1843-1865. DOI: 10.1017/S1365100522000487.
([7]) Le RAL résultant de l’exécution du NGEU est une estimation réalisée à partir des tableaux d’exécution transmis par la Commission.
([8]) Ces chiffres, communiqués par la direction du budget au rapporteur spécial, peuvent partiellement s’écarter de ceux présentés plus haut pour les années 2021 à 2023, car ils concernent l’ensemble des financements de recherche captés, à ce jour, au titre du programme Horizon Europe et s’étendent donc au-delà de l’année 2023.
([9]) Le document Relations financières avec l’UE annexé au projet de loi de finances pour 2025 ne mentionne que les retours français au titre des années 2021 à 2023. Ces chiffres sont utilisés dans le présent rapport afin de présenter les retours français sur les mêmes années pour toutes les rubriques. Toutefois, le présent rapport mentionne les montants alloués à la France au-delà de l’année 2023 lorsque les auditions conduites par le rapporteur spécial lui permettent de disposer de telles informations, ce qui explique des différences de chiffres.
([10]) Le montant de ce fonds a été intégré au FSE + dans le cadre du CFP 2021 – 2027.
([11]) Cette programmation représente les 8,4 milliards alloués initialement au Feder et ne prennent pas en compte les 2,6 milliards d’euros de réabondement via le fonds React-EU. Le montant total excède les 8,4 milliards car les régions sur-programment volontairement les projets en prévision des projets qui n’aboutiront pas ou donneront lieu à des corrections financières en cours de programmation.
([12]) Ce tableau représente le fléchage des crédits du volet national du FSE.
([13]) Ces montants incluent les co-financements nationaux, ce qui explique qu’ils excèdent les 16,7 milliards accordés à la France au titre du FEDER, du FSE + et du FTJ.
([14]) Rapport fait au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées sur le projet de loi de finances pour 2024 par M. Mounir Belhamiti enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 26 octobre 2023.