Commission des affaires culturelles  RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

et de l’éducation

 


La commission des affaires culturelles et de l’éducation a confié à Mme Frédérique Meunier, députée de la Corrèze (Droite républicaine), et M. Christophe Proença, député du Lot (Socialistes et apparentés), une mission flash sur l’activité physique et sportive (APS) et la prévention de l’obésité en milieu scolaire. Son objet était d’analyser le rôle de l’école, à travers la pratique et la promotion de l’APS, dans l’intensification de la lutte contre l’obésité. Dans ce cadre, les rapporteurs ont tenté de déterminer la prévalence, les disparités et l’évolution du surpoids et de l’obésité chez les publics d’âge scolaire. Ils se sont également penchés sur les différentes modalités de pratique de l’APS à l’école ainsi que sur les moyens d’améliorer à la fois leur efficacité en termes de santé publique et leur attractivité pour les jeunes éloignés de la pratique.

 

À l’issue d’une quinzaine d’auditions et tables rondes, les rapporteurs estiment que les risques sanitaires majeurs induits par la sédentarisation des modes de vie et la baisse de l’activité physique qui y est associée justifient que l’école s’empare beaucoup plus activement de ce sujet. Ils considèrent que la littératie physique et les compétences motrices constituent des savoirs fondamentaux, dont l’acquisition par tous les élèves, dès le premier degré, est indispensable. Dans le contexte de l’élaboration de la prochaine Stratégie nationale sport-santé et du cinquième Programme national nutrition-santé (PNNS 5), les rapporteurs formulent dix propositions pour mettre l’APS au cœur des missions de l’école.

Voir ici la vidéo de la réunion de la commission du 19 mars 2025

Voir ici l’intégralité de la communication de
Mme Frédérique Meunier et M. Christophe Proença


 

Déficit d’activité physique et augmentation du surpoids et de l’obésité
chez les enfants d’âge scolaire : une bombe à retardement

 


 

Un déficit d’activité physique de plus en plus marqué chez les enfants d’âge scolaire

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), tout enfant et adolescent entre 5 et 17 ans devrait pratiquer « au moins 60 minutes par jour en moyenne d’activité physique[1] essentiellement aérobique, d’intensité modérée à soutenue ». Ces recommandations sont loin d’être suivies : chez les 6-17 ans, malgré une pratique du sport licencié plus importante que celle des adultes, à peine plus de la moitié des garçons les atteignent, pour seulement un tiers des filles. Ces chiffres tombent respectivement à 40 % et 16 % pour les 1517 ans. Les inégalités sont également sociales : deux fois plus d’adolescents présentent un faible niveau d’activité dans les établissements défavorisés que dans les établissements favorisés[2].

La sédentarité comme cause majeure de l’augmentation du surpoids et de l’obésité

Il résulte de ces données que la sédentarité[3], induite notamment par l’usage croissant des écrans, constitue désormais l’une des caractéristiques fondamentales d’un mode de vie qui fabrique des « enfants d’intérieur ». Quatrième cause de décès prématurés selon l’OMS, la sédentarité est, avec l’alimentation et les facteurs génétiques, l’une des causes principales du surpoids et de l’obésité – tout en ayant d’autres conséquences néfastes sur le plan sanitaire : baisse des capacité cardio-respiratoires, retentissement moteur, psychologique et cognitif.

L’évolution du surpoids et de l’obésité et la baisse des capacités motrices des jeunes d’âge scolaire sont difficiles à évaluer précisément en l’absence d’enquêtes sanitaires ou de tests de forme physique menés selon une fréquence suffisamment régulière. Les données disponibles témoignent néanmoins d’une forte hausse du surpoids et de l’obésité du début des années 1980 au début des années 2000, puis d’une stabilisation à un niveau élevé : 17 % des enfants d’âge scolaire étaient en surpoids et 4 % en situation d’obésité au terme de la dernière enquête publique nationale, Esteban, publiée en 2017 sur la base de données collectées en 2015 et 2016. Près d’une décennie plus tard, alors que la sédentarité et l’usage des écrans ont nettement augmenté, aucune donnée publique nationale ne permet d’appréhender la tendance à l’œuvre. Un certain nombre d’enquêtes locales ou effectuées par des associations laissent toutefois présager une nouvelle tendance haussière très préoccupante, la Ligue nationale de lutte contre l’obésité allant jusqu’à estimer que 34 % des 2-7 ans sont en surpoids et 18 % en situation d’obésité. Comme pour le niveau d’activité physique, la prévalence du surpoids et de l’obésité est très marquée par les inégalités : le surpoids touche deux fois plus les enfants d’ouvriers que les enfants de cadres, l’obésité trois fois plus. Sur le plan territorial, le surpoids atteint 17 % en moyenne nationale, mais 22 % dans les Hauts-de-France, et respectivement deux et trois fois plus en Guadeloupe et en Martinique que dans l’Hexagone.

Le risque majeur pour la santé publique que dresse ce panorama, et les inégalités marquées qu’il révèle, invitent à renforcer le rôle de l’école dans la promotion et l’encadrement de l’activité physique et sportive (APS).

 


Face à l’insuffisance des mesures récemment déployées, une politique à repenser plus largement pour intensifier la pratique dès le plus jeune âge


 

Renforcer les cours d’EPS, en particulier au premier degré

Le premier levier d’action de l’école est celui des cours d’éducation physique et sportive (EPS), dont le volume horaire et l’intensité de pratique sont aujourd’hui insuffisants : trois heures à l’école et au collège (quatre heures en sixième), puis deux heures au lycée. Ce volume est, surtout, largement théorique : il ressort que la pratique effective ne représente qu’1 heure 45 en moyenne dans le premier degré. Par ailleurs, de nombreux élèves restent en marge des cours d’EPS, du fait de la délivrance de certificats médicaux d’inaptitude, alors que les contre-indications médicales à la pratique sportive encadrée sont en fait extrêmement rares. D’une façon générale, la relégation de l’EPS au rang de discipline secondaire rend difficile la transmission de savoirs qui devraient pourtant être considérés comme fondamentaux (savoir courir, sauter, lancer, nager, rouler). Pour ce qui concerne le premier degré, à l’insuffisance du volume horaire s’ajoute un déficit de formation des enseignants, avec un volume horaire variable selon les formations et l’absence d’épreuve au concours. Ces difficultés devraient être atténuées par l’appui des conseillers pédagogiques en EPS, ce qui est trop rarement le cas.

Pour y remédier, le dispositif des « 2 heures de sport supplémentaires au collège » (2HSC) a été lancé en décembre 2022. Avant même d’être substantiellement réduit par son recentrage sur les établissements classés REP/REP+, décidé à l’automne 2024, il présentait déjà le défaut de reposer sur la base du volontariat, et donc d’attirer, en pratique, les élèves déjà sportifs.

Inciter à la pratique en rendant le sport scolaire plus accessible

Concernant le sport scolaire, malgré un fonctionnement plutôt satisfaisant pour le second degré, il ne concerne qu’un élève sur quatre, et le premier degré se trouve là aussi moins bien loti : l’absence d’adhésion obligatoire des écoles à l’Union sportive de l'enseignement du premier degré (Usep) est à l’origine d’une inégalité importante, dans la mesure où les élèves des établissements concernés, le plus souvent ruraux, se voient privés de l’opportunité de pratiquer une activité au sein d’une association sportive rattachée à leur établissement. Il est par ailleurs regrettable que le pass’ sport ne puisse servir à financer les licences que les élèves souscrivent auprès des fédérations de sport scolaire, à l’exception de l’Union générale sportive de l’enseignement libre (Ugsel), qui ne concerne que les établissements privés. Cette difficulté s’ajoute à la pénurie de bénévoles à laquelle est confronté, de façon croissante, le sport scolaire du premier degré.

Au-delà du sport, promouvoir l’activité physique au quotidien

Pour améliorer la santé de nos enfants, une pratique sportive ponctuelle ne suffit pas. C’est à l’aune de cette prise de conscience qu’a été lancé en 2020 le dispositif « 30 minutes d’activité physique quotidienne ». Sa mise en œuvre s’avère néanmoins décevante, alors que ce temps d’activité n’est effectif que dans 42 % des établissements, par manque de temps, de formation, mais aussi d’espaces adaptés.

Les cours d’école n’ont en général pas été conçues pour permettre la pratique d’activités physiques, ou elles n’encouragent pas des pratiques variées. Le plan « 5 000 équipements – Génération 2024 », intègre le financement de « cours actives », mais les enveloppes octroyées dans ce cadre n’excèdent pas quelques milliers d’euros et sont trop peu nombreuses.

Ce déficit d’infrastructures ne concerne pas que les cours d’écoles mais bien l’ensemble des APS pratiquées dans le cadre scolaire. Le financement d’équipements très légers, éloignés des écoles et de taille insuffisante a largement été privilégié ces dernières années, aboutissant à une forme de saupoudrage en l’absence de vision globale sur les équipements structurants.

 


Recommandations de la mission pour renforcer le rôle de l’école dans le développement de l’APS et lutter contre le surpoids et l’obésité



[1] La notion d’activité physique intègre tout mouvement corporel induisant une dépense d’énergie. Elle est plus large que celle d’activité sportive, qui implique une activité encadrée et organisée autour de règles.

[2] Il s’agit des 20 % d’établissements présentant l’IPS le plus bas/le plus élevé.

[3] Entendue comme un mode de vie impliquant une station assise ou allongée pendant la majeure partie du temps éveillé.