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N° 1285

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 3 octobre 2018.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2019 (n° 1255)

TOME II

ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES

PROTECTION DE L’ENVIRONNEMENT
ET PRÉVENTION DES RISQUES

PAR Mme Danielle BRULEBOIS

Députée

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 Voir les numéros : 1255, 1302 (Tome III, annexes 16 et 18).


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SOMMAIRE

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Pages

introduction

I. Une sanctuarisation récente des crédits du programme 181 dans un contexte de contraction des finances publiques

A. Une baisse modérée mais néanmoins préoccupante dans un contexte de forte aversion au risque

1. Une baisse des crédits modérée comparée aux exercices budgétaires précédents (2015-2017)

a. Une baisse des crédits continue sur les exercices budgétaires de 2015 à 2017

b. Une augmentation des crédits dans le PLF 2018 qui démontre un changement de paradigme

c. Une baisse modérée des crédits en loi de finances 2019 qui marque la sanctuarisation des crédits consacrés à la prévention des risques

2. Des effets de bord à corriger pour ne pas affaiblir le cœur du programme 181 « Prévention des risques » : le cas de l’inspection des installations classées

a. L’inspection des installations classées est au cœur de la prévention des risques d’accidents industriels

b. Sur le terrain, formation, moyens de fonctionnement et manque de personnel affectent le bon fonctionnement des missions d’inspection

c. Revoir les critères d’attribution des effectifs en fonction du budget base zéro (BBZ) pour les territoires ruraux

B. un programme ambitieux pour prévenir le risque

1. Présentation du programme 181 par action et par titre des crédits demandés pour 2019

2. La prévention des risques est au cœur des actions du programme 181

a. La prévention des risques technologiques et des pollutions (action n° 01)

b. La sûreté nucléaire et la radioprotection (action n° 9)

c. La prévention des risques naturels et hydrauliques (action n° 10)

d. La prévention des risques liés aux anciens sites miniers (action n° 11)

e. Le financement de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) (action n° 12)

3. Des opérateurs fortement engagés dans la prévention des risques

a. L’ANSES

b. L’INERIS

II. un renforcement des crédits néanmoins NÉcessaire pour trois actions prioritaires

A. La prévention des risques : une action prioritaire dans un contexte de forte croissance de l’aversion au risque

1. PPRT, PPRN et PPRI : prévenir les catastrophes industrielles et naturelles

a. Installations classées : un suivi renforcé par les services de l’État de l’usine Alteo de Gardanne et du site de stockage de « Mange Garri »

b. Évolution d’un PPRT : l’exemple de la raffinerie de La Mède reconvertie dans la fabrication de bio-carburants

2. Construire une culture du risque

a. Accompagner la communication de crise : le barrage de Vouglans

b. Une communication de crise réussie : le cas de l’usine Chimirec à Lons-le-Saunier

c. Les sites orphelins : renforcer la présence de l’État sur le territoire

B. Renforcer la recherche pour les risques émergents

1. Des risques mal définis dont on ne mesure pas encore tous les effets

2. La santé au travail : le cas de l’entreprise GCPAT, à Larnaud

C. Conforter les crédits de l’ademe, acteur majeur de la transition énergétique et donc écologique

1. La budgétisation de l’ADEME ne doit pas être une variable d’ajustement de la transition écologique

2. Le Fonds chaleur, un acteur essentiel de la transition énergétique

examen en commission

liste des personnes auditionnées


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   introduction

Programme ambitieux, le programme 181 « Prévention des risques » est doté de 841 067 615 euros en autorisations d’engagement (AE) et 835 541 183 euros en crédits de paiement (CP) dans le présent projet pour 2019.

Ces crédits, répartis en cinq actions, la prévention des risques technologiques et des pollutions (action n° 1), la sûreté nucléaire et la radioprotection (action n° 9), la prévention des risques naturels et hydrauliques (action n° 10), la prévention des risques liés aux anciens sites miniers (action n° 11), répondent, à l’exception de la dernière action, l’action n° 12, financement de l’ADEME (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie) dont la finalité est plurielle, au même impératif : prévenir les risques, à savoir empêcher une catastrophe d’advenir.

À ce titre, la politique financée par ce programme apparaît, clairement, eu égard aux objectifs affichés, comme une réussite au vu du peu d’accidents industriels ou naturels recensés, car paradoxalement, c’est bien parce que la prévention des risques est bien assurée, que le risque disparaît et devient invisible.

Pour autant, l’absence d’accidents spectaculaires souvent meurtriers tant d’origine naturelle que d’origine industrielle, ne doit pas conduire à baisser la garde, et ce, à un double titre. L’absence de véritable culture du risque en France conduit à ne tirer les leçons que des catastrophes passées – l’usine AZF, la tempête Xynthia, voire la catastrophe nucléaire de Fukushima – leçons qui ont par ailleurs conduit à une approche davantage prudentielle en termes de prévention des risques, dont l’élaboration des plans de prévention des risques technologiques (PPRT) est la conséquence en passe d’être définitivement concrétisée.

Or, d’une part, cette apparente réussite repose sur un suivi renforcé des mesures prises et tirées des expériences passées, suivi qui nécessite des moyens afférents et des crédits constants.

Et, d’autre part, le développement de la technologie et du réchauffement climatique nécessite également de davantage anticiper les conséquences de ce qu’il est convenu d’appeler les risques émergents, dans un domaine de recherche nouveau qui implique de faire une liaison entre la santé et l’environnement, et conduit à la mesure des effets dits « cocktail », à l’analyse de la lutte contre l’apparition d’espèces envahissantes exotiques telles que la pyrale du buis, ou encore à l’analyse des mesures des effets de la 5G, des nano particules et des perturbateurs endocriniens notamment.

La prévention des risques appelle donc de la part des pouvoirs publics une vigilance constante et renforcée, d’autant que l’absence de culture du risque, au sens anglo-saxon du terme, implique une sensibilité accrue au risque qui se manifeste par une tolérance zéro à son endroit et a pour corollaire une défiance envers les pouvoirs publics.

C’est pourquoi si votre rapporteure pour avis soutient sans réserve les crédits affectés au programme 181, elle souhaite tant que des moyens nouveaux soient affectés à la direction générale de la prévention des risques (DGPR) pour renforcer les moyens humains présents sur le terrain, qu’une augmentation des crédits de la recherche consacrés aux risques dits émergents, notamment dans le domaine de la santé liée à l’environnement.


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I.   Une sanctuarisation récente des crédits du programme 181 dans un contexte de contraction des finances publiques

A.   Une baisse modérée mais néanmoins préoccupante dans un contexte de forte aversion au risque

1.   Une baisse des crédits modérée comparée aux exercices budgétaires précédents (2015-2017)

a.   Une baisse des crédits continue sur les exercices budgétaires de 2015 à 2017

Avec une dotation de 841 067 615 euros en autorisations d’engagement (AE) et 835 541 183 euros en crédits de paiement (CP), les prévisions relatives au programme 181 « Prévention des risques » pour la loi de finances pour 2019, dans un contexte de forte maîtrise des finances publiques, mettent en exergue le choix du Gouvernement de faire de la protection des risques l’une de ses actions prioritaires.

En effet, par rapport aux crédits votés en 2018, les prévisions pour 2019 accusent simplement une légère baisse, qui correspond à une réduction générale des crédits dans un contexte de maîtrise des finances publiques.

Pour autant, eu égard à l’importance des actions mises en œuvre par le programme 181, il importe de s’assurer que cette baisse restera modérée et ne sera pas accentuée, en fin d’exercice budgétaire, une fois les crédits votés, par un gel, voire un surgel, des crédits.

Le programme 181 n’a pas connu de changement de périmètre au sens classique du terme, ce qui permet d’opérer une comparaison relativement fiable sur les exercices budgétaires des quatre dernières années, même s’il importe de noter que dans le projet de loi de finances pour 2019, le programme 181 intègre une budgétisation de 2 millions d’euros pour assurer le financement de la recherche sur les radiofréquences, budgétisation qui remplace la suppression de l’affectation à l’ANSES (l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) de la taxe additionnelle à l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER).

Cette comparaison sur les quatre derniers exercices budgétaires amène au constat que s’il y a une érosion progressive mais néanmoins avérée des crédits sur cette période, la volonté du Gouvernement, depuis le changement de majorité opéré en 2017, est de faire de la protection des risques l’une de ses actions prioritaires comme l’a précisé le Premier ministre dans la circulaire relative à l’organisation territoriale des services publics du 24 juillet dernier : « pour certaines missions, le rôle de l’État doit être réaffirmé, en renforçant si nécessaire ses moyens, [] il s’agit, notamment des missions de sécurité, de prévention et de gestion des crises (…sécurité sanitaire et alimentaire, prévention des risques naturels et technologiques, gestion des sinistres industriels) » ([1]).

En effet, de 2015 à 2017, les crédits du programme 181 ont connu trois années de baisse continue, qui s’est effectuée en opposition à l’augmentation régulière des crédits affectés à la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EDMD et des crédits du programme 181

(en millions d’euros)

 

 

LFI 2015

LFI 2016

LFI 2017

PLF 2018

Évolution
2017-2018

Crédits de la mission EDMD

AE

7 842

9 182

10 298

11 357

+10,28 %

CP

7 289

9 164

10 356

11 321

+9,32 %

Crédits du programme 181

AE

300

283

238

854

+258,82 %

CP

245

221

228

844

+270,18 %

Part des crédits de la mission attribués au programme 181

AE

3,83 %

3,08 %

2,31 %

7,52 %

+225,54 %

CP

3,36 %

2,41 %

2,20 %

7,46 %

+239,09 %

Source : Annexes pour la LFI 2016 et 2017 ; Projet Annuel de Performance 2018

b.   Une augmentation des crédits dans le PLF 2018 qui démontre un changement de paradigme

La forte augmentation des crédits constatée en loi de finances initiale pour 2018 (+ 258,82 % en AE et +270,18 % en CP), si elle marque le début d’un changement de paradigme porté par la nouvelle majorité, à savoir la sanctuarisation des crédits relatifs à la prévention des risques, est également la conséquence de la « budgétisation » des crédits de l’ADEME au sein du programme 181.

En effet, le financement de l’ADEME, précédemment éclaté, d’une part entre plusieurs programmes, les programmes 422 « Valorisation de la recherche » et 423 « Accélération de la modernisation des entreprises » (Mission « Investissements d’avenir »), et d’autre part, par l’affectation d’une partie de la TGAP (taxe générale sur les activités polluantes) que l’agence percevait depuis 2014, a été intégralement budgétisé, en 2018, de manière à assurer un financement pérenne des activités de l’agence eu égard à ce qui représente le cœur de son activité, assurer la transition énergétique pour la croissance verte.([2])

En effet, tant la variabilité des recettes relevant d’une taxe affectée que l’éclatement du financement de l’agence entre plusieurs programmes ne correspondaient pas à la volonté affichée du Gouvernement de faire de l’ADEME « le bras armé » de la transition énergétique. Cette illisibilité relative à ses recettes n’était pas non plus propice à une lecture transparente des enjeux que l’agence entend porter en loi de finances initiale, notamment en ce qui concerne le Fonds chaleur.

c.   Une baisse modérée des crédits en loi de finances 2019 qui marque la sanctuarisation des crédits consacrés à la prévention des risques

Le tableau ci-dessous présente les crédits ouverts en loi de finances en 2018 et en 2019, par actions, hors titre 2. Il importe de préciser que les dépenses de personnel (titre II) dépendent du programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables », à l’exception des personnels affectés à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) qui, eux, sont inclus dans les crédits du programme 181, ce qui explique également que la variation entre les crédits hors titre II et titre II compris soit faible.

PJ1 – Évolution des crÉdits en AE/CP

(en millions d’euros)

Actions

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

LFI 2018

PLF 2019

Évolution (en %)

LFI 2018

PLF 2019

Évolution (en %)

Action 01 – Prévention des risques technologiques et des pollutions

106 191 318

102 730 698

-3,26 %

90 961 318

92 668 909

1,88 %

Action 09 – Contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection

58 527 314

59 193 718

1,14 %

63 527 314

64 193 718

1,05 %

Dont titre 2

45 887 596

46 446 540

1,22 %

45 887 596

46 446 540

1,22 %

Action 10 – Prévention des risques naturels et hydrauliques

37 111 461

37 618 511

1,37 %

37 111 461

37 153 868

0,11 %

Action 11 – Gestion de l’après-mines et travaux de sécurité, indemnisations et expropriations sur les sites

38 277 129

38 277 130

0,00 %

38 277 129

38 277 130

0,00 %

Action 12 – Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie

609 247 557

603 247 558

-0,98 %

609 247 557

603 247 558

-0,98 %

Titre 2 (P217, A 16)

 

 

 

 

 

 

Total (hors titre 2) du P181

803 467 183

794 621 075

-1,10 %

793 237 183

789 094 643

-0,52 %

Total y.c. titre 2 du P181

849 354 779

841 067 615

-0,98 %

839 124 779

835 541 183

-0,43 %

Source : Réponse du MTES au questionnaire budgétaire - Octobre 2018

Une lecture attentive de ce tableau comparatif qui reflète précisément les évolutions de crédits en autorisation d’engagement (AE) et crédits de paiement (CP) entre l’exercice budgétaire 2018 et 2019 permet de mettre en exergue que la baisse des crédits reste bien modérée et que la prévention des risques ainsi que la transition écologique portée par les crédits de l’ADEME sont toujours, depuis 2017 et le changement de majorité, des priorités de l’action gouvernementale.

S’il faut se réjouir de cette priorisation gouvernementale, il ne faut pas pour autant négliger les éventuels « effets de bord » que la réduction de crédits d’autres programmes de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » peut avoir sur les actions conduites au sein du programme 181.

À ce titre, les réductions de crédits opérées sur le programme 217, programme support de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » ont des « effets de bord » sur le programme 181, en particulier en ce qui concerne son cœur de métier, la prévention des risques, notamment industriels mais pas uniquement.

2.   Des effets de bord à corriger pour ne pas affaiblir le cœur du programme 181 « Prévention des risques » : le cas de l’inspection des installations classées

Lors de son audition, le directeur général de la prévention des risques (DGPR), M. Cédric Bourillet ([3]), s’il s’est avéré satisfait de la sanctuarisation des crédits affectés à son programme, a néanmoins reconnu qu’il était amené à jouer à un jeu d’équilibriste dans la répartition des crédits de fonctionnement ou l’affectation des personnels afin de ne pas impacter, sur le terrain, le cœur des missions du programme 181, à savoir la prévention des risques, prévention qui passe nécessairement par une visite régulière des sites classés qu’il s’agisse des ICPE (installation classée pour l’environnement) ou des sites Seveso, voire Seveso seuil haut.

a.   L’inspection des installations classées est au cœur de la prévention des risques d’accidents industriels

L’inspection des installations classées instruit les demandes d’autorisation et d’enregistrement, depuis avril 2010, ce qui n’est pas sans accroître la charge des inspecteurs, parfois au détriment de leur seconde mission qui consiste à contrôler l’ensemble des installations classées pour l’environnement, sur le terrain.

En 2017, 700 autorisations nouvelles ont été accordées, qu’il s’agisse de nouvelles installations ou d’extensions d’autorisation, et 2 500 autorisations ont été modifiées. La croissance du nombre d’installations classées n’est pas non plus sans conséquences sur la fréquence des contrôles, leur nombre ayant notamment crû du fait d’une législation plus protectrice et donc plus englobante.

Il importe de souligner, en effet, que le rythme d’inspection des installations classées a fortement décru en 10 ans puisque l’on est passé d’une moyenne annuelle d’environ 25 000 contrôles par an à environ 18 500 par an.

Si le nombre de contrôles réalisés reste élevé en 2017 près de 18 500 visites d’inspection ont été réalisées, dont 10 000 visites d’inspection approfondie il n’est pas suffisant eu égard à l’importance de ces inspections pour préserver l’environnement, mais également éviter la survenue d’accidents industriels.

Selon la réponse apportée par le ministère de la transition écologique et solidaire, « les établissements dits Seveso seuil haut (à hauts risques) ont été inspectés de manière approfondie au moins une fois dans l’année. Les préfets ont par ailleurs pris plus de 2 000 arrêtés de mise en demeure proposés par l’inspection, qui ont été suivis de 350 sanctions administratives. L’inspection a parallèlement transmis plus de 700 procès-verbaux aux parquets.

Si le rapport annuel de performance pour 2017 met en évidence « une difficulté à améliorer le nombre total pondéré de contrôles des installations classées par rapport à l’effectif de l'inspection, la part des inspections dites approfondies sur le total des inspections tous types confondus reste élevée et le programme pluriannuel de contrôle (qui impose d’inspecter normalement, sauf disposition particulière, les installations les plus à risque tous les ans, celles qui présentent des enjeux importants mais moins de risques tous les 3 ans, et la totalité du parc au moins une fois tous les 7 ans) est globalement respecté. » ([4])

Pour autant, si selon la réponse du ministère apportée à votre rapporteure pour avis dans le cadre du questionnaire qu’elle a adressé au Gouvernement, ce programme d’inspection semble globalement respecté, il fait néanmoins craindre, sur le terrain, eu égard aux deux déplacements que votre rapporteure pour avis a pu faire, qu’il ne soit pas suffisant dans la mesure où tant les effectifs que les moyens de fonctionnement sont particulièrement en tension.

Selon les chiffres donnés par la DGPR elle-même lors de son audition, un inspecteur a en charge l’inspection de 440 usines ou barrages, chiffre éloquent qui montre l’ampleur de la tâche à accomplir et la nécessité de renforcer les effectifs sur le terrain pour que le nombre d’accidents recensés en France reste peu élevé.

En effet, le nombre minime d’accidents industriels recensés en France – 978 accidents industriels survenus sur des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) en 2017 – ainsi que l’absence d’accidents spectaculaires et meurtriers récents ne doivent pas faire oublier que les causes profondes des accidents industriels sont dues soit à une mauvaise organisation sur le site industriel, soit à un non-respect de la législation, ce qui renforce la nécessité, pour maintenir ce taux bas, d’un contrôle régulier et continu des installations classées.

b.   Sur le terrain, formation, moyens de fonctionnement et manque de personnel affectent le bon fonctionnement des missions d’inspection

En effet, lors de la visite que votre rapporteure pour avis a pu effectuer auprès de la DREAL PACA, le 4 octobre dernier, les services chargés de la mise en œuvre du programme 181 n’ont pas caché leurs inquiétudes quant aux risques de ne plus pouvoir effectuer correctement les missions qui sont au cœur de leur métier, à savoir le contrôle régulier des installations classées. Les services de la DREAL Bourgogne-Franche Comté rencontrés deux semaines plus tard ont fait part exactement des mêmes inquiétudes.

Selon eux, l’une des premières causes, outre le manque d’effectifs en termes de nombre d’ETPT d’inspecteurs affectés, réside dans la réduction des crédits affectés à la formation de ces mêmes inspecteurs, mais également dans la contraction des dépenses inhérentes aux frais de déplacement dans les territoires où se trouvent les installations classées lorsque le département ou la région possèdent un territoire étendu.

La formation, du fait de l’évolution constante de la législation mais également de la prise en compte des risques émergents dans cette même législation, est essentielle pour que les inspecteurs puissent effectuer correctement leur mission. Essentiellement dispensée à Paris, au sein du ministère ou par l’INERIS (Institut national de l’environnement industriel et des risques), cette formation a des coûts qui grèvent le budget des DREAL du fait de la baisse globale des crédits de fonctionnement qui leur sont attribués par le programme 217.

Afin de rappeler l’importance que revêt la formation des inspecteurs des installations classées, il importe de préciser que pour qu’un inspecteur puisse devenir véritablement opérationnel sur le terrain, au moins un an de formation s’avère nécessaire. Ce qui a également pour corollaire l’attractivité des territoires et l’intérêt, pour les DREAL, de fidéliser plus de trois ans un inspecteur affecté dans leurs services.

Même si ces problématiques concernent uniquement le programme 217 qui porte les effectifs du programme 181 ainsi que les crédits de formation et de fonctionnement des DREAL, cet aspect nécessite d’être précisément et spécifiquement souligné pour que le programme 181 ne devienne pas la variable d’ajustement indirecte d’une baisse des crédits du programme support.

c.   Revoir les critères d’attribution des effectifs en fonction du budget base zéro (BBZ) pour les territoires ruraux

Les critères d’attribution des effectifs se font en fonction du budget dit base zéro (BBZ). 15 % des effectifs sont attribués en fonction de la population d’un territoire ; or tous les territoires, et notamment les territoires ruraux, ne possèdent pas la même densité industrielle.

Lors de son déplacement à Lons-le-Saunier, le 19 octobre dernier, dans le cadre de son rapport pour avis, votre rapporteure pour avis a pu constater auprès des services de la DREAL Bourgogne-Franche-Comté, que cette règle de répartition des emplois était particulièrement défavorable au Jura.

En effet, riche d’un savoir-faire ancestral, le département du Jura est le premier département industriel de France en nombre d’établissements et en part des effectifs salariés (23,6 % des emplois contre 13,7 % en France). Les industries du Jura témoignent d’une réelle capacité d’adaptation et d’investissement pour moderniser les équipements de production ce qui explique que l’activité industrielle soit de 50 à 100 % plus importante dans le Jura que dans les autres départements. Aussi eu égard à l’étendue du secteur concerné par les visites d’installations classées, les effectifs sont-ils en tension alors que la nécessité de déployer davantage de personnels sur le terrain s’avère essentielle.

À cela s’ajoute un surcroît d’activité en raison de l’élargissement du champ des ICPE (installations classées pour l’environnement) pour les départements ruraux : ainsi des inspections relatives aux éoliennes qui génèrent, par ailleurs, un fort contentieux, et des installations relatives au stockage de déchets inertes.

Ces deux nouveaux champs d’intervention, s’ils sont particulièrement prégnants dans le département du Jura, impactent également fortement les autres départements ruraux.

La clé de répartition des ETPT (équivalent temps plein travaillé) en fonction du BBZ, si elle n’appartient pas entièrement au domaine législatif, mérite néanmoins d’être soulevée à ce stade du fait des conséquences qu’elle emporte sur le terrain, à savoir, l’impossibilité eu égard au nombre d’inspecteurs affectés, de réaliser la moitié des objectifs fixés par le ministère, le principe de la compensation départementale ne pouvant pas s’appliquer dans le Jura du fait des contraintes territoriales et de la densité industrielle inhérentes au territoire de Bourgogne-France-Comté.

B.   un programme ambitieux pour prévenir le risque

Le programme 181, selon les mots mêmes du projet annuel de performance (PAP) « élabore et met en œuvre les politiques relatives :

 « à la connaissance, l’évaluation, la prévention et la réduction des risques industriels et miniers, et des pollutions chimiques, biologiques, sonores, électromagnétiques, lumineuses, radioactives ;

 « à la connaissance, l’évaluation, la prévention et la prévision des risques naturels (inondations notamment) et à la sécurité des ouvrages hydrauliques ;

 « à l’évaluation et la gestion des sols pollués ;

 « à la prévention et la gestion des déchets et au développement de l’économie circulaire (prévention, valorisation, et traitement) ;

 « à l’évaluation des risques en matière de santé /environnement, notamment ceux que présentent les produits chimiques ou les organismes génétiques modifiés (OGM). » ([5])

Décliné en 5 actions, le programme 181 est essentiellement axé sur la prévention des risques, à l’exception de l’action n° 12 qui concerne uniquement le financement de l’ADEME, acteur majeur de la transition énergétique.

Compte tenu de l’importance et à l’ambition du programme 181, du fait qu’une commission d’enquête a déjà porté sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires ([6]) dont les conclusions ont été rendues le 28 juin dernier, qu’une mission d’information commune a porté sur le site de stockage souterrain de déchets Stocamine ([7]), dont les conclusions ont été rendues le 18 septembre dernier, votre rapporteure pour avis a choisi de privilégier dans le cadre de cet avis budgétaire 3 actions parmi les cinq présentées ici : la gestion des risques industriels ; le financement de la recherche notamment par l’ANSES, sur les risques émergents, en particulier sur les questions en lien avec la santé et l’environnement ; l’importance de la transition énergétique dans le cadre des actions portées par l’ADEME et plus particulièrement par le Fonds chaleur.

Dans le cadre d’un premier déplacement, à Marseille, le 4 octobre dernier, sur le site du Parc national des Calanques, à Gardanne ainsi qu’à La Mède, votre rapporteure pour avis a pu observer les actions relatives à la prévention des risques industriels ainsi que celles relatives à la dépollution des sites industriels dits « orphelins » en partenariat avec l’ADEME, sites situés dans le Parc national des Calanques, ainsi que les actions de prévention et de sanction des pollutions industrielles du fait de la présence de « poussières rouges », la question du rejet des « boues rouges » ayant été préalablement traitée par l’usine Alteo, à l’origine de cette pollution industrielle, du fait d’une action ferme des services de la DREAL PACA.

Lors d’un second déplacement, le 19 octobre dernier, à Lons-le-Saunier, votre rapporteure pour avis a également pu observer la prévention de la santé au travail dans le cadre d’une usine de l’entreprise GCPAT, à Larnaud, dans le Jura, et notamment la difficulté à anticiper la question des risques émergents qui ne sont pas encore entièrement pris en compte par la législation, tels que les effets des nanoparticules ou des perturbateurs endocriniens sur les salariés qui manipulent ses substances.

Votre rapporteure pour avis a également pu observer le travail de retraitement des déchets industriels opéré par l’entreprise CHIMIREC et la manière dont l’entreprise a su communiquer sur le risque après la survenue d’un incident impliquant l’usine la semaine précédant sa visite.

1.   Présentation du programme 181 par action et par titre des crédits demandés pour 2019

Composé de 5 actions, le programme 181 consacre 4 d’entre elles à la prévention des risques sous toutes leurs composantes. L’action n° 1 concerne la prévention des risques technologiques et des pollutions, l’action n° 9, la sûreté et la radioprotection, l’action n° 10, la prévention des risques naturels et hydrauliques, l’action n° 11, la prévention des risques liés aux anciens sites miniers.

L’action n° 12, rattachée au programme 181, concerne uniquement le financement de l’ADEME suite à l’intégration de son budget dans le programme 181 en loi de finances initiale pour 2018. Si l’action de l’agence ne concerne pas directement la prévention des risques, elle a néanmoins toute sa place dans le programme 181 en tant qu’acteur majeur de la transition énergétique, donc écologique.

Le tableau ci-dessous extrait du rapport du PAP 2019 expose clairement les crédits affectés par action et par type de dépenses. L’action la plus dotée en crédits est le financement de l’ADEME, suivie de l’action n° 1 « Prévention des risques technologiques et des pollutions ».

Ainsi, 102 730 698 euros sont affectés à l’action n° 1 « Prévention des risques technologiques et des pollutions » et 603 067 615 euros à l’action n° 12, « Financement de l’Ademe », en AE, pour respectivement 92 668 909 euros et 603 247 558 euros en CP.

AUTORISATIONS D’ENGAGEMENT

(en millions d’euros)

Numéro et intitulé de l’action

Titre 2
Dépenses de personnel

Titre 3
Dépenses de fonction-nement

Titre 5
Dépenses d’investisse-ment

Titre 6
Dépenses d’interven-tion

Total

FDC et ADP attendus

01 – Prévention des risques technologiques et des pollutions

 

64 186 092

0

38 544 606

102 730 698

3 500 000

09 – Contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection

46 446 540

10 708 178

350 000

1 689 000

59 193 718

500 000

10 – Prévention des risques naturels et hydrauliques

 

22 568 511

4 020 000

11 030 000

37 618 511

5 200 000

11 – Gestion de l’après-mine et travaux de mise en sécurité, indemnisations et expropriations sur les sites

 

35 911 096

866 034

1 500 000

38 277 130

 

12 – Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME)

 

603 247 558

 

 

603 247 558

 

Total

46 446 540

736 621 435

5 236 034

52 763 606

841 067 615

9 200 000

Source : Plan annuel de performance octobre 2018

CRÉDITS DE PAIEMENT

(en millions d’euros)

Numéro et intitulé de l’action

Titre 2
Dépenses de personnel

Titre 3
Dépenses de fonctionnement

Titre 5
Dépenses d’investissement

Titre 6
Dépenses d’intervention

Total

FDC et ADP attendus

01 – Prévention des risques technologiques et des pollutions

 

62 186 302

0

30 482 607

92 668 909

3 500 000

09 – Contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection

46 446 540

15 708 178

350 000

1 689 000

64 193 718

500 000

10 – Prévention des risques naturels et hydrauliques

 

22 103 868

4 020 000

11 030 000

37 153 868

4 590 000

11 – Gestion de l’après-mine et travaux de mise en sécurité, indemnisations et expropriations sur les sites

 

35 911 096

866 034

1 500 000

38 277 130

 

12 – Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME)

 

603 247 558

 

 

603 247 558

 

Total

46 446 540

739 157 002

5 236 034

44 701 607

835 541 183

8 590 000

Source : Plan annuel de performance octobre 2018

2.   La prévention des risques est au cœur des actions du programme 181

a.   La prévention des risques technologiques et des pollutions (action n° 01)

Action majeure du programme 181, la prévention des risques technologiques et des pollutions est, après le financement de l’ADEME, l’action la plus dotée du programme 181 en titre 3 et titre 5. Le titre 2, dépenses de personnel, lui, dépend du programme support 217.

La prévention des risques technologiques et des pollutions comprend un nombre étendu d’actions, qu’il s’agisse pour les principales d’entre elles :

– de la mise en œuvre des dispositifs de contrôle, notamment des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE),

– de la réforme du cadre réglementaire et en particulier de la mesure de simplification qui a abouti à la mise en place de l’autorisation environnementale unique,

– de l’élaboration du troisième PNSE (plan national santé environnement pour la période 2015-2019),

– de la mise en œuvre des plans de prévention des risques technologiques (PPRT).

Dans le cadre de cette action, sont également abordées les questions relatives à la problématique des risques émergents, qu’il s’agisse de leur articulation avec la législation européenne avec la mise en œuvre du nouveau règlement « REACH », de la mise en œuvre de la stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens ou du financement de la recherche pour mesurer les incidences des effets cocktail, des nano particules, voire des effets de la 5G.

b.   La sûreté nucléaire et la radioprotection (action n° 9)

L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) est une autorité administrative indépendante créée par la loi du 13 juin 2006 qui contrôle la sûreté nucléaire et la radioprotection. Spécificité française, la sûreté nucléaire se partage entre l’Autorité de sûreté nucléaire à laquelle appartient le pouvoir de régulation et l’IRNS (Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire) qui fournit une expertise en la matière.

L’action  9 du programme 181 regroupe la totalité des emplois de l’ASN, effectifs qui en 2018, comprennent en application de l’article L 592-12 du code de l’environnement, à la fois des personnels sous plafond d’emplois et des personnels mis à disposition par des établissements publics (IRSN, CEA, ANDRA, AP-HP) auprès de l’ASN. La mise à disposition de ces personnels donne lieu à remboursement par l’ASN sur la base de conventions.

Le plafond d’emplois autorisé de l’ASN est de 422 ETPT. En moyenne annuelle, la consommation du plafond d’emplois s’est établie à 406 ETPT. Au 31 décembre 2017, les effectifs, sous plafond, se sont élevés à 419 ETP.

En vertu des conclusions de la commission d’enquête sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires, l’ASN devrait relever son plafond d’emplois de manière à renforcer ses missions, notamment celles relatives au renforcement de la gestion prudentielle après Fukushima ainsi qu’au renforcement de sa communication sur les dangers liés à la radioactivité.

c.   La prévention des risques naturels et hydrauliques (action n° 10)

Le programme 181 complète la source principale de subvention de projets des collectivités, qu’il s’agisse des études, travaux et équipements, que constitue le Fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), dit Fonds Barnier, même si l’action du programme 181 est davantage ciblée sur la connaissance, la surveillance, l’information du public, la sécurité des ouvrages hydrauliques ainsi que la préparation à la gestion de crise.

Votre rapporteure pour avis a, à ce sujet, interrogé les services de la DREAL Bourgogne-Franche-Comté quant aux risques inhérents à l’état du barrage de Vouglans suite à un reportage d’Envoyé spécial diffusé le 13 septembre dernier qui concluait à une possible vétusté de l’ouvrage hydraulique. Selon les services de la DREAL, actuellement, aucun signe de vétusté manifeste ne pourrait faire craindre une quelconque catastrophe. Se pose, dès lors, la question de la communication des services de l’État après un tel reportage alarmiste. Une communication qui pourrait s’apparenter à une communication de crise pourrait avoir des effets contre-productifs et ne pas atteindre l’objectif attendu, à savoir rassurer la population environnante.

Cette question, outre le fait qu’elle soulève l’importance des missions de surveillance des ouvrages hydrauliques, interroge fortement la question de la culture du risque en France qui conditionne la communication de crise.

L’action n° 10 vise également à prévenir les risques naturels tant à l’aide des PPRN (plans de prévention des risques naturels) que des systèmes de surveillance et de prévision pour les risques d’inondation tels que Vigicrues et Vigicrues Flash.

d.   La prévention des risques liés aux anciens sites miniers (action n° 11)

Anticiper, prévenir et traiter sont les maîtres mots de l’action de l’État pour prévenir les risques liés à l’exploitation minière.

L’État s’appuie, dès lors, notamment sur GEODERIS qui est un groupement d’intérêt public entre l’État, le bureau des recherches géologiques et minières (BRGM) et l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (INERIS) afin de prévenir les risques liés à l’exploitation des mines.

Votre rapporteure pour avis souscrit aux conclusions de la mission commune sur le site de stockage souterrain de déchets Stocamine en ce qu’elles prescrivent une amélioration et une gestion particulièrement prudentielle de cette question.

e.   Le financement de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) (action n° 12)

L’ADEME joue un rôle à part dans le programme 181 puisque la prévention des risques ne constitue pas sa première mission, qui est de permettre la transition énergétique et la croissance verte.

La transition énergétique et le financement de la croissance verte se trouvent, en effet, au cœur de sa mission, et se déclinent essentiellement autour de deux programmes, le programme « Chaleur renouvelable » plus connu sous le nom de Fonds chaleur et le programme « Économie circulaire et déchets », plus communément intitulé Fonds déchets.

Le programme « Chaleur renouvelable » contribue à l’objectif, fixé dans la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte du 17 août 2015, de porter d’ici 2020 la part des énergies renouvelables à 23 % de la consommation énergétique nationale et à 32 % en 2030. Il finance essentiellement les investissements de production et de distribution de chaleur renouvelable.

Quant au programme « Économie circulaire et déchets », il est également un outil majeur de la transition énergétique et de la croissance verte. Il s’inscrit par ailleurs dans la feuille de route pour l’économie circulaire présentée par la secrétaire d’État Mme Brune Poirson.

Ces deux fonds sont les principaux acteurs au service de la transition énergétique et de la croissance verte, mais pas les seuls. À titre d’exemple, lADEME vient récemment d’adopter également un Fonds mobilité air afin d’encourager les déplacements propres.

Le financement de l’ADEME fait l’objet, depuis 2018, d’une dotation budgétaire en remplacement d’une partie de la taxe affectée sur les activités polluantes (TGAP) dont l’agence bénéficiait depuis 2014.

La dotation budgétaire dont bénéficie l’ADEME, pour charges de service public, à hauteur de 591 millions d’euros en loi de finances initiale en 2019, est en baisse de 6 millions d’euros par rapport à 2018. Si en valeur nominale cette baisse peut sembler conséquente, en valeur relative elle se trouve inférieure à 1 %, soit 0,98 % exactement.

La dotation de l’ADEME est essentiellement celle de l’État car ses ressources propres s’élèvent à seulement 35,3 millions d’euros. Le tableau ci‑dessous décrit assez précisément la répartition budgétaire des crédits et dépenses de l’ADEME en 2018.

RÉPARTITION BUDGÉTAIRE DES CRÉDITS ET DÉPENSES DE L’ADEME

Dépenses 2018 (EJ)

Recettes 2018

 

 

Source : ADEME- Réponse au questionnaire budgétaire – Octobre 2018

Cette sanctuarisation du budget de l’ADEME, acteur majeur de la transition énergétique, s’avère donc essentielle pour que l’agence puisse accomplir ses missions. La baisse de ses crédits, cette année, est relativement modérée, baisse d’autant plus modérée que l’engagement du Président de la République de doubler les crédits du Fonds chaleur entraînera mécaniquement une hausse conséquente du budget.

Le ministère de la transition énergétique et solidaire, M. François de Rugy, a déjà largement concrétisé cette augmentation de crédits en annonçant porter les crédits du Fonds chaleur à 300 millions d’euros pour 2019.

3.   Des opérateurs fortement engagés dans la prévention des risques

a.   L’ANSES

L’ANSES offre la particularité d’avoir cinq ministères de tutelle, dont le ministère de la Transition écologique et solidaire.

Malgré une augmentation substantielle de ses crédits, l’ANSES a perdu plus de 2 millions d’euros de taxe affectée sur le tabac du fait d’un changement de législation qui ne prend pas en compte les produits concernés par le vapotage. Cette perte de recettes n’est pas sans conséquences pour l’agence, raison pour laquelle votre rapporteure pour avis proposera un amendement afin de corriger les effets de la législation qui grèvent le budget de l’agence.

Le programme 181 cofinance la partie appel à projets de recherche comme le démontre assez précisément le tableau suivant.

Compte FINANCIER 2017 et BUDGET initial 2018

(en millions d’euros)

 

COFI 2017

BI 2018

Ministère chargé de l’agriculture (prog 206)

Arrêté complémentaire

59 522 304

1 566 340

60 584 696

2 944 000

Ministère chargé de la santé (prog 204)

Arrêté complémentaire

13 315 992

1 345 000

13 978 719

1 345 000

Ministère chargé de l’écologie (prog 181)

Appels à projets de recherche

6 801 159

6 911 904

600 000

Ministère chargé de l’écologie (prog 190)

1 507 135

1 531 676

Ministère chargé du travail (prog 111)

8 175 588

8 175 000

TOTAL SUBVENTIONS SCSP

92 233 519

96 070 995

Taxes médicaments vétérinaires

6 758 609

8 000 000

Taxes phytosanitaires (dossiers)

9 867 750

13 000 000

Taxes phytopharmacovigilances (chiffre d’affaires)

4 329 511

4 500 000

Redevances biocides

4 008 100

5 100 000

Taxes radiofréquences

2 000 000

2 000 000

Taxe tabac

4 290 430

2 100 000

TAXES ET REDEVANCES RÉGLEMENTÉES

31 254 399

34 700 000

Conventions et autres subventions

8 666 137

11 600 000

Prestations de services et ventes

2 975 224

2 800 000

Autres produits

1 167 285

940 000

TOTAL AUTRES PRODUITS

12 808 645

15 340 000

TOTAL RECETTES FONCTIONNEMENT

136 296 563

146 110 995

Source : ANSES – Réponse au questionnaire budgétaire. Octobre 2018

Le champ d’intervention des appels à projets est relativement vaste. Il concerne en particulier les questions relatives aux effets potentiels de la 5G, à savoir une concentration de fréquences très élevées sur des points précis, le risque potentiel résidant dans les facteurs d’exposition à ces fréquences qui concerneront l’ensemble des objets connectés dont la présence est particulièrement prégnante aujourd’hui.

Mais les appels à projets portent également sur la recherche dans le domaine du végétal dont les espèces ligneuses forestières (nématode du pin, pyrale du buis…), fruitières (alternaria sur pommier) et ornementales (charançon rouge du palmier…), ainsi que les plantes et cultures tropicales et méditerranéennes.

Votre rapporteure pour avis tient à souligner l’importance de ces sujets de recherche, le département du Jura étant particulièrement affecté par les nuisances induites par la pyrale du buis. Elle tient à souligner, eu égard à l’importance des nuisances que cette espèce envahissante produit, que le classement actuel en catégorie 3 par l’ANSES ne correspond pas à la réalité des nuisances sur le terrain et qu’en attendant que les résultats de la recherche produisent une meilleure connaissance des moyens de combattre cette espèce envahissante, une classification en danger de seconde catégorie ([8]) permettrait une meilleure lutte sur le terrain.

Renforcer la ligne budgétaire relative aux appels à projets concernant les risques émergents est donc pour votre rapporteure pour avis également un préalable à une véritable politique de prévention des risques.

b.   L’INERIS

L’INERIS (Institut national de l’environnement industriel et des risques) intervient également dans le domaine de la santé environnementale ainsi que sur l’impact de la pollution sur la biodiversité. L’INERIS travaille notamment sur les inégalités environnementales, l’exposome, et la recherche sur les perturbateurs endocriniens.

Si contrairement aux autres opérateurs de recherche, l’INERIS n’a pas véritablement bénéficié de la sanctuarisation des subventions et effectifs des opérateurs de recherche, le budget pour 2019, comme pour l’ensemble des crédits affectés à la prévention des risques, montre un retournement de tendance marqué excepté en ce qui concerne le nombre d’ETPT.

Exécution budgétaire et budget prévisionnel pour 2019

(en millions d’euros)

 

CF 2017

Budget initial 2018 (*)

Prévisions 2019 (**)

Subventions pour charges de service public

35 697

36 712

36 712

P181

26 540

27 455

27 455

P190

6 188

6 288

6 288

P174

2 969

2 969

2 969

Anciens CP de P190

0

0

400

Subventions des agences et ministères

4 169

4 019

3 368

Subventions européennes

2 021

2 365

2 422

Ressources propres

30 964

34 310

32 498

RESSOURCES TOTALES

72 851

77 406

75 400

 

 

 

 

Personnel

39 525

41 773

42 040

Fonctionnement

33 185

35 632

33 360

CHARGES TOTALES

72 710

77 406

75 400

Résultat

141

0

0

 

 

 

 

Fonds de roulement au 31/12 en k€

17 087

13 335

13 335

Trésorerie

11072

6002  

6002  

Source : INERIS - Réponse au questionnaire budgétaire - octobre 2018

(*) Budget rectificatif approuvé par le conseil d’administration du 26/09/2018.

(**)Prévisions ne tenant pas lieu de budget : le budget 2019 sera voté lors du conseil d’administration du 28/11/2018.

Évolution des emplois

(en nombre d’ETPT)

ETPT (*)

Réalisé 2016

Réalisé

2017

Budget

2018

Prévision d'exécution 2018

Prévision 2019

sous plafond

540,6

522,8

522

515

511

hors plafond

48,5

46,6

54

43

50

Source : INERIS - Réponse au questionnaire budgétaire - octobre 2018

(*) le plafond d’emploi de l’INERIS est exprimé en ETPT depuis 2015

Votre rapporteure pour avis rappelle l’importance des missions de l’INERIS, importance qu’il faudrait prendre en compte dans le prochain budget. La baisse des ETPT, si elle continue, pourrait ne pas être sans conséquences en termes de perte de compétence et donc de niveau d’expertise.

II.   un renforcement des crédits néanmoins NÉcessaire pour trois actions prioritaires

A.   La prévention des risques : une action prioritaire dans un contexte de forte croissance de l’aversion au risque

L’absence de culture du risque en France a pour corollaire, à la fois, un manque d’anticipation des risques de la part des pouvoirs publics – il faut que la catastrophe advienne pour que la législation évolue – et une forte aversion au risque en ce qui concerne les citoyens. Cette forte aversion au risque peut conduire à une défiance à l’égard des pouvoirs publics, contrairement à d’autres pays tels que le Japon ou les pays anglo-saxons qui, du fait d’une forte culture du risque, adoptent une approche probabiliste – le risque est certain. Le rôle des pouvoirs publics consiste, dès lors, à le rendre le plus minime possible pour qu’il devienne acceptable.

C’est cette approche qu’a, en quelque sorte, théorisée le philosophe Jean Pierre Dupuy, dans son ouvrage Pour un catastrophisme éclairé, quand l’impossible est certain. La certitude de l’inacceptable doit pousser à agir, et à agir en toute transparence pour rendre justement le risque acceptable, le risque zéro n’existant pas.

Faire de la prévention des risques une action prioritaire s’avère d’autant plus nécessaire du fait de la prise de conscience de l’apparition de possibles nouveaux dangers du fait des risques dits émergents, en particulier dans le domaine de la santé et de l’environnement, tels que la mesure des « effets cocktail » sur la santé humaine, le rôle des perturbateurs endocriniens ou des forts rayonnements induits par la technologie 5G sur l’homme et son environnement. Ces nouveaux risques ont un fort potentiel anxiogène, notamment dû au fait que l’on n’en mesure pas encore véritablement les effets tant par méconnaissance scientifique de leur rôle exact sur la santé humaine, animale et végétale que de leur rôle en matière d’exposome.

Faire de la prévention des risques une action prioritaire s’avère essentiel dans un contexte de défiance sociétale forte afin de rassurer les populations quant à l’importance et au rôle des pouvoirs publics pour maîtriser la communication sur les risques et construire, en France, une véritable culture du risque, l’information médiatique reposant encore trop souvent sur un sensationnalisme qui attise les peurs – au lieu de permettre de construire une communication responsable afin de limiter l’exposition des populations à des dangers avérés.

C’est justement parce que le Gouvernement a choisi d’en faire une action prioritaire de sa politique en sanctuarisant ces crédits que votre rapporteure pour avis soutient sans réserve les crédits du programme 181.

Pour autant, pour votre rapporteure pour avis une hausse des crédits s’impose également pour répondre à cet impératif de transparence et d’efficacité dans trois secteurs : la politique de prévention des risques sur le terrain, le financement de la recherche des risques émergents et l’accompagnement de la transition énergétique portée par l’ADEME, préalable à la préservation de l’environnement du fait d’une croissance propre.

1.   PPRT, PPRN et PPRI : prévenir les catastrophes industrielles et naturelles

En matière de prévention des risques, la législation est souvent la résultante des leçons que les pouvoirs publics ont dû et su tirer du passé du fait justement de cette absence de culture de risque inhérente à l’approche culturelle française en la matière.

Ainsi après la catastrophe de l’usine AZF à Toulouse, en 2001, la loi du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages a rendu obligatoire les plans de prévention des risques technologiques (PPRT).

Ces plans visent à sécuriser les abords dangereux des sites industriels à risque pour éviter qu’en cas d’accidents industriels les populations environnantes ne soient touchées.

Pour les biens existants, les plans de prévention des risques technologiques (PPRT) prévoient deux types de mesures :

 dans les zones pour lesquelles les risques sont les plus élevés, des mesures foncières sont financées de manière tripartite entre l’État, les collectivités et les industriels qui sont à l’origine des risques, permettant d’indemniser les riverains concernés à hauteur du préjudice subi ;

 dans les zones pour lesquelles les risques sont moins élevés, seuls des travaux de renforcement sont préconisés.

Au 1er août 2018, sur 392 PPRT à réaliser, 390 sont prescrits et 372 sont approuvés. Pour votre rapporteure pour avis, une partie des crédits attribués aux PPRT pourra, dès lors, être redistribuée au sein du programme 181 vers la police des installations classées, police indispensable à la prévention des risques.

La loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l’environnement, dite Loi Barnier, a rendu obligatoire l’élaboration des plans de prévention des risques naturels prévisibles (PPRN) ainsi que des plans de prévention du risque inondation (PPRI).

En 2000, l’objectif à atteindre était que 12 500 communes soient couvertes par un PPRN approuvé.

Ainsi sur les 2 568 communes situées dans le périmètre d’un territoire à risque important d’inondation, 1 923 communes sont couvertes par un PPRI approuvé et 303 communes sont concernées par un PPRI prescrit.

Les priorités ainsi définies intègrent également les 303 communes du littoral pour lesquelles un plan de prévention des risques littoraux doit être établi pour répondre à l'instruction ministérielle du 2 août 2011 qui a tiré les conséquences de la tempête Xynthia.

Ainsi au 1er août 2018, 284 communes du littoral étaient couvertes par un PPR littoral prescrit, dont 162 communes pour lesquelles il est approuvé ou appliqué par anticipation.

Selon la DGPR, un retard est néanmoins à souligner en ce qui concerne les mesures à prendre post-Xynthia.

Évolution du nombre de communes couvertes par un plan de prévention des risques naturels ou assimilé (hors PSS)

(situation au 31 décembre 2017, d'après la base de données GASPAR)

Source : Réponse au questionnaire budgétaire – octobre 2018

Les PPRN relatifs aux inondations, mouvements de terrains et subsidence représentent plus de 90 % de la couverture du territoire par des PPRN.

En décembre 2017, 78 % des communes de plus de 10 000 habitants (698 communes sur 854) exposées à un risque naturel étaient couvertes par un PPRN approuvé.

Le fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), dit Fonds Barnier, prend en charge les dépenses d’élaboration des PPRN et des actions d’information préventive sur les risques majeurs depuis 2014.

Le Gouvernement va déposer un amendement, pour donner une suite aux annonces du Président de la République, après son voyage aux Antilles, de manière à la fois à renforcer la prévention des risques cycloniques et sismiques outre-mer et augmenter le Fonds Barnier (FPRNM) pour la mise en œuvre des mesures relatives à la prévention des risques outre-mer mais également en France métropolitaine.

a.   Installations classées : un suivi renforcé par les services de l’État de l’usine Alteo de Gardanne et du site de stockage de « Mange Garri »

Le scandale dit des « boues rouges », en 2015, c’est-à-dire le rejet dans le Parc national des Calanques de résidus de bauxite, n’a pu cesser que grâce à un suivi renforcé par les services de l’État, préfecture et DREAL, du site industriel incriminé.

Votre rapporteure pour avis a pu constater, sur place, lors de la visite du site, le 4 octobre dernier, avec les services de la DREAL, que le dialogue entre l’industriel et les services de l’État était constant et que les rapports étaient cordiaux. Cela a renforcé sa conviction d’une nécessaire présence accrue sur le terrain des inspecteurs des installations classées.

Le site industriel est, en effet, visité sur place une dizaine de fois par an. Mais il aura fallu 17 contrôles inopinés des rejets aqueux depuis mars 2016, 2 arrêtés préfectoraux complémentaires renforçant les prescriptions d’exploitation, 2 arrêtés préfectoraux d’urgence, et 4 arrêtés préfectoraux de mise en demeure pour aboutir à ce résultat, à savoir la fin du rejet en mer des « boues rouges » et la quasi-stabilisation des « poussières rouges » sur le site de Mange Garri, situé à 2 kilomètres de l’usine sur la commune de Bouc-bel-air.

L’usine de Gardanne, actuellement exploitée par la Société Alteo Gardanne, est la première usine au monde à avoir mis en œuvre le procédé Bayer qui consiste à extraire de l’aluminium à partir de la bauxite, c’est-à-dire du minerai d’aluminium naturellement présent sur le site de Gardanne.

Cette extraction est ancienne puisque les débuts de l’exploitation à Gardanne remontent à 1893. L’usine produit également de l’alumine, notamment de l’alumine de spécialité, à partir de la bauxite, aujourd’hui importée de Guinée.

Le procédé d’extraction génère des rejets sous forme de résidus de bauxite solide plus communément appelés « boues rouges » du fait de leur couleur rouge brun foncé. Le rejet de ses boues rouges se faisait en mer dans le Parc national des Calanques, à une profondeur de 320 mètres, à côté de la fosse Cassidaigne, un canyon marin.

Dans le cadre de leurs pouvoirs de police en matière de prévention des risques mais également de police de l’environnement en matière de pollution, les services de l’État ([9]) ont intimé à l’usine d’arrêter de rejeter en mer ces boues rouges au plus tard au 31 décembre 2015. Grâce à un nouveau procédé mis en place par l’exploitant, le rejet, en mer, des boues rouges, depuis 2015, a cessé, faisant place à un rejet sous forme d’effluents liquides. La contrepartie de ce nouveau procédé qui utilise des filtres-presses s’avère être des déchets sous la forme de « boues sèches rouges » que l’exploitant du site a dû stocker. L’entreprise a choisi de les stocker sur le site de Mange Garri à Bouc-bel-Air, mais lors de forts épisodes venteux cela génère des « poussières rouges » qui ne sont pas sans désagréments pour les riverains car elles recouvrent les habitations et la végétation d’une couche de poussière rougeâtre.

Si l’ANSES, dont l’expertise a été sollicitée, n’a pas conclu sur le plan sanitaire au caractère dangereux de ces poussières, une mise en demeure faite par les services de la DREAL a obligé l’usine à humidifier et étanchéifier le plancher sur lequel elle entrepose ces résidus de bauxite pour stabiliser et empêcher l’envol de ces poussières.

Sans une action ferme des services de l’État, un tel résultat n’aurait pu être obtenu d’où la nécessité d’une présence accrue des inspecteurs sur les sites des installations classées, de la multiplication des visites surprises et d’une augmentation du nombre d’ETPT consacrés à ces missions.

C’est le sens de l’amendement déposé par votre rapporteure pour avis qui demande d’augmenter les crédits du programme 217 à hauteur de 10 000 000 d’euros sur l’action n° 16 « Personnels œuvrant pour les politiques du programme « Prévention des risques » afin d’augmenter le nombre d’inspecteurs affectés au contrôle des installations classées, ce qui correspondrait à une augmentation d'environ 200 ETPT affectés à ces missions de première importance.

b.   Évolution d’un PPRT : l’exemple de la raffinerie de La Mède reconvertie dans la fabrication de bio-carburants

Votre rapporteure pour avis a visité, le 4 octobre dernier, lors du même déplacement, l’usine de la Mède, Total Raffinage France, la filiale française de la branche Raffinage-Chimie du groupe Total S.A. qui exploite cinq raffineries en France métropolitaine à Gonfreville, Donges, La Mède, Feyzin et Grandpuits.

Du fait de la baisse de la demande en produits pétroliers en France, la raffinerie était devenue déficitaire. L’entreprise Total a alors souhaité opérer une reconversion de ce site vers une production de biocarburants (projet Phoenix).

Cette évolution du site industriel a conduit à un double changement : l’instruction par la DREAL d’une nouvelle autorisation environnementale, eu égard au changement d’affectation du site, ainsi qu’une modification du PPRT, les risques industriels du fait du changement d’affectation du site étant moindres.

L’autorisation environnementale a été délivrée le 16 mai 2018 sous réserve d’un engagement sur le circuit d'approvisionnement des huiles végétales et usagées car l’usine retraitait au moment de la demande d’instruction du dossier de l’huile de palme en provenance d’Indonésie.

Le premier PPRT autour de la raffinerie avait été approuvé le 2 mai 2014. Il concernait les communes de Martigues et de Châteauneuf-les-Martigues - quartier de la Mède. Ce PPRT prescrivait des travaux pour 800 logements dont 600 sur le quartier de La Mède pour se prémunir des effets thermiques, toxiques et de surpression, mais définissait également des mesures foncières d’expropriation et de délaissement. Le coût total de ce PPRT était estimé à 50 millions d’euros, dont 30 millions d’euros environ pour les seules mesures foncières.

Le projet de reconversion de la raffinerie s’est accompagné d’une réduction très sensible du risque technologique (disparition du risque toxique, réduction des distances d’effets), notamment pour les enjeux situés dans l’emprise des mesures foncières du PPRT approuvé le 2 mai 2014. Cela a conduit à une demande de révision du PPRT du fait d’une modification significative et pérenne des risques autour de l'établissement, ainsi qu'à un changement notable de l'économie générale du PPRT dont la mise en révision sera faite en fin d’année par les services de la DREAL.

2.   Construire une culture du risque

a.   Accompagner la communication de crise : le barrage de Vouglans

Le reportage sensationnaliste d’Envoyé Spécial, le 13 septembre dernier, sur le barrage de Vouglans, dans le Jura, n’a pas été sans conséquences pour les riverains de cet ouvrage d’art ni ceux de la centrale nucléaire du Bugey, qui se trouve en contrebas, le reportage sous-entendant qu’en cas de rupture du barrage, les conséquences pourraient être catastrophiques, notamment pour les riverains de la centrale.

Votre rapporteure pour avis a interrogé à ce sujet tant les services de l’État dans le département – ce qui lui a notamment permis de constater l’excellence de la coordination entre les services de la DREAL et de la préfecture dans le département du Jura, le secrétaire général de la préfecture et sous-préfet de Lons-le-Saunier ayant participé à cette mission – que l’administration centrale. La réponse est unanime : il n’y a aucun risque de rupture du barrage, tant pour les riverains du barrage que pour ceux de la centrale du Bugey.

Les mini-fissures mises en exergue par le reportage sont normales et nécessaires sur ce type d’ouvrage contrairement à ce que laissaient entendre les journalistes pour lesquels il s’agissait de signes de vétusté manifestes, indicateurs d’une probable prochaine rupture. Les calculs d’étude de danger relatifs à ce type d’ouvrage sont communicables par les services de l’État à tout citoyen intéressé qui en ferait la demande.

Quant au risque d’inondation de la centrale en contrebas en cas de rupture de l’ouvrage, elle relève du pur fantasme. Outre le fait que ce barrage est l’un des ouvrages de ce type les plus équipés en capteurs pour sonder justement tout risque de rupture, la centrale, comme l’a confirmé l’Autorité de sûreté nucléaire, a été construite de manière à se trouver hors d’eau dans l’hypothèse irréaliste ou le barrage viendrait à céder.

Cet exemple est typique d’une désinformation du public qui fonctionne en l’absence de culture du risque, d’où la nécessité de porter des actions dans le sens d’une éducation au risque en France.

Éducation au risque qui nécessite également de mieux communiquer sur les risques, donc d’être davantage transparent en particulier dans une période où la menace terroriste peut faire des sites industriels ou hydrauliques une cible.

Cet exemple pose également la question de la difficulté de communiquer après une émission sensationnaliste. En effet, la communication institutionnelle classique – affichage en mairie – ne paraît pas suffisante pour rassurer la population. La question du recours à d’autres moyens de communication, notamment numériques, a donc été largement évoquée avec les services de la DREAL et le secrétaire général de la préfecture et sous-préfet de Lons-le-Saunier, M. Stéphane Chipponi, afin de répondre à ces nouvelles attentes.

b.   Une communication de crise réussie : le cas de l’usine Chimirec à Lons-le-Saunier

Lors du déplacement qu’elle a effectué, le 19 octobre dernier, à Lons-le-Saunier, votre rapporteure pour avis a pu visiter l’entreprise CHIMIREC, spécialisée dans le retraitement des déchets industriels qui avait d’ailleurs fait, la semaine précédant sa visite, l’objet « d’une visite surprise » des services de la DREAL, visite qui avait conclu à la conformité des installations.

Outre l’intérêt que présente cette usine quant à la question du retraitement des déchets industriels, votre rapporteure pour avis a été attentive à la manière dont l’entreprise a eu à communiquer sur un incident survenu peu de temps avant sa visite. Une odeur suspecte en provenance de l’usine CHIMIREC a fait craindre un risque d’accident industriel et a conduit à l’évacuation de l’établissement scolaire voisin.

L’usine n’était en fait pas responsable et l’odeur suspecte n’emportait pas de risques sanitaires. Pour autant, plutôt que de choisir la discrétion et de ne pas communiquer sur l’incident, l’entreprise a pris le parti contraire, qui s’est avéré efficace, de largement communiquer sur l’incident et sur les risques réels inhérents à son site, dans l’hypothèse où une véritable situation de crise surviendrait.

Cette stratégie de transparence s’est non seulement avérée payante pour l’entreprise, mais elle met également en exergue la nécessité de construire en France une véritable culture du risque en partenariat avec les industriels et les services de l’État.

c.   Les sites orphelins : renforcer la présence de l’État sur le territoire

La responsabilité des industriels peut être engagée lorsqu’ils ne se conforment pas aux obligations des services de l’État, et des sanctions peuvent être prononcées. Cependant, lorsque le responsable de la pollution industrielle est défaillant soit parce que le site est en déshérence, soit parce que son légitime propriétaire n’est pas identifiable, il revient à l’État d’assurer la dépollution du site et de prévenir les risques liés à cette pollution.

Votre rapporteure pour avis a pu observer lors de son déplacement le 4 octobre dernier que sur le site remarquable du Parc des calanques (cf. la cartographie infra), du fait d’un passé industriel ancien, subsistaient un certain nombre de « sites orphelins » qu’il appartient à l’État de remettre en état, soit en contenant la pollution pour qu’elle ne se répande pas aux alentours, soit en dépolluant entièrement le lieu, ce qui s’avère souvent trop coûteux.

Une activité industrielle de traitement de minerais de plomb a débuté au milieu du XIXe siècle sur le littoral sud des Calanques entre Mont Rose et Callelongue et s’est exercée jusqu’au début du XXe siècle. La présence de dépôts anciens et massifs de scories métalliques sur ce secteur résulte de cette activité industrielle passée. Certains dépôts affleurent en surface alors que les concentrations en métaux et métalloïdes qui ont été mesurées au sein de ces dépôts montrent qu’ils constituent encore aujourd’hui une menace pour l’environnement du fait de leur dispersion, et un risque pour la santé des personnes exposées, tant du fait d’une forte densité urbaine que touristique.

La mise en sécurité des sites à responsable défaillant appartient à l’ADEME en partenariat avec la DREAL, car l’ADEME assure au nom de l’État la maîtrise d’ouvrage des interventions de mise en sécurité sur les sites et sols pollués à responsables défaillants, selon des modalités fixées par la circulaire du 26 mai 2011 relative à la cessation d’activité d’une ICPE – chaîne de responsabilités – défaillance des responsables.

À ce titre, l’ADEME est intervenue 34 fois en 2017. Le budget dont elle dispose pour cette mission s’élève à 19 millions d’euros de crédits en application de la loi de finances pour 2019.

En ce qui concerne le site remarquable du Parc des Calanques, les services de la DREAL ont précisé que la dépollution serait trop coûteuse – à hauteur de 10 ou 12 millions d’euros – du fait notamment de la dissémination des sites orphelins sur l’ensemble du parc. La vue aérienne ci-après témoigne de cette dispersion, dans des sites notoirement difficiles d’accès. Le choix a donc été fait de contenir la pollution, l’impact financier se réduisant à 4,7 millions d’euros, dans un premier temps.

Renforcer la présence territoriale de l’État s’avère donc bien une nécessité tant en termes de prévention des risques que de dépollution des sites.

Vue aérienne des sites « orphelins » dans le Parc national des Calanques

Source : Note DREAL PACA – Octobre 2018

B.   Renforcer la recherche pour les risques émergents

La question des risques émergents est devenue prégnante dans un contexte de forte aversion au risque, en particulier dans le domaine de la santé et de l’environnement. Par définition, le risque émergent est un risque qui n’a pas encore été identifié comme étant un risque à part entière, raison pour laquelle il n’est donc pas encore pris en compte par la législation.

Se pose dès lors pour l’État le risque d’une action en carence si la dangerosité de ce qui n’était alors perçu uniquement que comme étant un risque émergent s’avérait être un risque avéré. C’est pourquoi renforcer les crédits de la recherche pour l’ANSES, notamment en ce qui concerne les appels à projets propres aux risques émergents, s’avère essentiel afin de pallier la possible inaction de l’État dans un domaine particulièrement sensible.

Votre rapporteure pour avis a donc déposé un amendement en ce sens, visant à augmenter les crédits de l’ANSES à hauteur de 5 millions d’euros pour financer des appels à projets sur les risques émergents dans le domaine de la santé et de l’environnement.

1.   Des risques mal définis dont on ne mesure pas encore tous les effets

Par définition, les risques émergents sont des risques mal définis dont on ne mesure pas encore tous les effets sur la santé humaine, animale et végétale pour pouvoir les classer comme étant des risques à part entière. Cette nouvelle catégorie de risques est particulièrement large car elle englobe tant la 5G, que la prise en compte des effets cocktail, l’exposition aux nanoparticules voire aux perturbateurs endocriniens, pour n’en citer que quelques-uns.

Le concept récent d’exposome ([10]) désigne la totalité des expositions à des facteurs environnementaux subis par un organisme humain de sa conception à sa mort. Il met bien en exergue la difficulté qu’il y a à prendre en compte la totalité des risques émergents ainsi que leur combinaison entre eux pour s’assurer qu’ils ne portent pas atteinte à la santé humaine.

La mesure de ces risques émergents nécessite donc d’engager d’importants crédits. Les appels à projets étant pluriannuels il importe pour l’ANSES, sur des projets de cette envergure, d’avoir une certitude pluriannuelle quant aux engagements de l’État dans ce domaine. L’augmentation des crédits de recherche demandée répond donc partiellement à cette demande.

2.   La santé au travail : le cas de l’entreprise GCPAT, à Larnaud

Lors de la visite de l’entreprise GCPAT, à Larnaud, votre rapporteure pour avis a été particulièrement attentive à la qualité de la santé au travail et notamment à la question de la prévention des risques quant à l’exposition des salariés à des substances potentiellement à risque.

Il importe de préciser que les services de la DREAL ne sont pas compétents sur ce point qui relève de l’inspection du travail. La prévention des risques dont les services de l’État sont en charge est plus globale et ne concerne pas directement la santé au travail. C’est donc la législation et son respect qui permettent de prévenir les risques auxquels seraient exposés les salariés.

La responsable interne de l’entreprise GCPAT a mis en évidence les difficultés inhérentes à la question des risques émergents concernant précisément les perturbateurs endocriniens. La refonte en cours du règlement européen REACH pour les produits chimiques – la date limite d’enregistrement des substances chimiques est portée au 31 mai 2018 – n’a pas encore produit tous ses effets, notamment en ce qui concerne « les substances extrêmement préoccupantes » qui incluent les perturbateurs endocriniens que le règlement entend proscrire.

L’ANSES joue également un rôle non négligeable tant dans l’élaboration de la réglementation REACH que dans la stratégie nationale pour les perturbateurs endocriniens. Elle a déjà été saisie cinq fois quant à la possible classification comme perturbateurs endocriniens de solvants, peintures, etc., domaine dans lequel opère l’entreprise CGPAT.

C.   Conforter les crédits de l’ademe, acteur majeur de la transition énergétique et donc écologique

1.   La budgétisation de l’ADEME ne doit pas être une variable d’ajustement de la transition écologique

Si l’ADEME n’est pas sous dotée dans les prévisions budgétaires en loi de finances pour 2019, M. Arnaud Leroy, son président, n’a pas manqué de rappeler, lors de son audition, qu’eu égard aux enjeux en termes de transition énergétique et de fonctionnement de l’agence, la stabilité du budget était au minimum un préalable, et qu’eu égard à l’élargissement du champ d’intervention de l’agence, l’augmentation du budget devrait être envisagée.

En effet, la budgétisation de l’agence votée en loi de finances initiale pour 2018, si elle a des vertus - visibilité annuelle, budget pérenne non soumis à la variabilité d’une taxe - emporte un inconvénient majeur : celui relatif à la régulation budgétaire, gel et surgel des crédits décidés par Bercy, notamment en fin d’exercice budgétaire.

Pour votre rapporteure pour avis l’agence devrait avoir la garantie du Gouvernement qu’elle ne sera pas concernée par les questions de régulation budgétaire, eu égard à l’importance de ces missions.

2.   Le Fonds chaleur, un acteur essentiel de la transition énergétique

De nombreux amendements ont été déposés, notamment par l’opposition, pour demander un doublement du Fonds chaleur, conformément aux engagements du Président de la République.

La parole présidentielle ayant été engagée, le ministre de la transition écologique et solidaire, M. François de Rugy, a rappelé devant le Sénat, le 2 octobre dernier, l’engagement du Gouvernement à augmenter le Fonds chaleur dès 2019, à hauteur de 300 millions d’euros, proposition à laquelle votre rapporteure pour avis souscrit, le Fonds chaleur étant un acteur essentiel de la transition énergétique.


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   examen en commission

Après laudition de M. François de Rugy, ministre dÉtat, ministre de la transition écologique solidaire, au cours de sa réunion du mardi 16 octobre 2018 ([11]), la commission du développement durable et de laménagement du territoire a examiné le mardi 30 octobre 2018, pour avis, sur le rapport de Mme Danielle Brulebois, les crédits « Protection de l’environnement et prévention des risques » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

M. Alain Perea, président. Chers collègues, je vous prie de bien vouloir excuser notre présidente Mme Barbara Pompili, qui est retenue par d’autres obligations.

Nous allons poursuivre aujourd’hui l’examen des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » du projet de loi de finances pour 2019 sur lesquels nous voterons demain matin.

Je donnerai tout d’abord la parole à Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis pour les crédits du programme « Prévention des risques », puis à Mme Jennifer De Temmerman, rapporteure pour avis pour les crédits du programme « Énergie, climat et après‑mines » et pour le compte d’affectation spéciale « Transition énergétique »

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Monsieur le Président, mes chères collègues, mes chers collègues. Programme ambitieux, le programme 181 « Prévention des risques » est doté, pour l’année 2019, de 841 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 835 millions d’euros en crédits de paiement (CP).

Ces crédits, répartis en 5 actions, la prévention des risques technologiques et des pollutions (action n° 1), la sûreté nucléaire et la radioprotection (action n° 9), la prévention des risques naturels et hydrauliques (action n° 10), la prévention des risques liés aux anciens sites miniers (action n° 11), répondent, à l’exception de la dernière action, l’action n° 12, financement de l’ADEME (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie) dont la finalité est plurielle, au même impératif : prévenir les risques, à savoir empêcher une catastrophe d’advenir.

Les deux actions les plus dotées du programme sont l’action n° 1 « Prévention des risques technologiques et des pollutions » et l’action n° 12 « Financement de l’ADEME ».

L’analyse des crédits de ce programme fait apparaître une sanctuarisation des crédits dont il faut se féliciter, dans un contexte de contrainte des finances publiques.

En effet, par rapport aux crédits votés en 2018, les prévisions pour 2019 accusent simplement une légère baisse, inférieure à 1 % des crédits votés en loi de finances pour 2018, légère baisse qui correspond à une réduction générale des crédits dans un contexte de maîtrise des finances publiques, baisse dont il importe de s’assurer qu’elle restera modérée et ne sera pas accentuée, en fin d’exercice budgétaire, une fois les crédits votés, par un gel, voire un surgel, des crédits.

C’est parce que c’est la majorité actuelle qui a mis fin à cinq années de baisse continue des crédits du programme 181 et que la prévention des risques ainsi que la transition écologique portées par les crédits de l’ADEME restent, depuis 2017, des priorités de l’action gouvernementale.

Parce que le Gouvernement a choisi d’en faire une action prioritaire de sa politique en sanctuarisant ces crédits, votre rapporteure pour avis soutient sans réserve les crédits du programme 181.

À ce titre, ce programme apparaît, clairement, eu égard aux objectifs affichés, comme une réussite au vu du peu d’accidents industriels recensés, car paradoxalement, c’est bien parce que la prévention des risques est bien assurée, que le risque disparaît et devient invisible.

Pour autant, l’absence d’accidents spectaculaires souvent meurtriers d’origine industrielle, ne doit pas conduire à baisser la garde, et ce, à un double titre.

L’absence de véritable culture du risque en France conduit à ne tirer les leçons que des catastrophes passées – l’usine AZF voire la catastrophe nucléaire de Fukushima – leçons qui ont par ailleurs conduit à une approche davantage prudentielle en termes de prévention des risques, dont l’élaboration des plans de prévention des risques technologiques (PPRT) est la conséquence en passe d’être définitivement concrétisée.

Or, d’une part, cette apparente réussite repose sur un suivi renforcé des mesures prises et tirées des expériences passées, suivi qui nécessite des moyens afférents et des crédits constants.

Et, d’autre part, le développement de la technologie et du réchauffement climatique nécessite également de davantage anticiper les conséquences de ce qu’il est convenu d’appeler les risques émergents, dans un domaine de recherche nouveau qui implique de faire une liaison entre la santé et l’environnement, et conduit à la mesure des effets dits « cocktail », à l’analyse de la lutte contre l’apparition d’espèces envahissantes exotiques telles que la pyrale du buis, ou encore à l’analyse des mesures des effets de la 5G, des nano particules et des perturbateurs endocriniens notamment.

La prévention des risques appelle donc de la part des pouvoirs publics une vigilance constante et renforcée, d’autant que l’absence de culture du risque, au sens anglo-saxon du terme, implique une sensibilité accrue au risque qui se manifeste par une tolérance zéro à son endroit et a pour corollaire une défiance envers les pouvoirs publics.

Dans le cadre d’un premier déplacement, à Marseille, le 4 octobre dernier, sur le site du Parc national des Calanques, à Gardanne ainsi qu’à La Mède, votre rapporteure pour avis a pu observer les actions relatives à la prévention des risques industriels ainsi que celles relatives à la dépollution des sites industriels dits « orphelins » en partenariat avec l’ADEME, sites situés dans le Parc national des Calanques, ainsi que les actions de prévention et de sanction des pollutions industrielles du fait de la présence de « poussières rouges », la question du rejet des « boues rouges » ayant été préalablement traitée par l’usine Alteo, à l’origine de cette pollution industrielle, du fait d’une action ferme des services de la DREAL PACA.

Lors d’un second déplacement, le 19 octobre dernier, à Lons-le-Saunier, votre rapporteure pour avis a également pu observer la prévention de la santé au travail dans le cadre d’une usine de l’entreprise GCPAT, à Larnaud, dans le Jura, et notamment la difficulté à anticiper la question des risques émergents qui ne sont pas encore entièrement pris en compte par la législation, tels que les effets des nanoparticules ou des perturbateurs endocriniens sur les salariés qui manipulent ses substances.

C’est pourquoi si votre rapporteure pour avis soutient sans réserve les crédits affectés au programme 181 un renforcement des crédits s’avère nécessaire pour répondre à un impératif de transparence et d’efficacité pour trois actions prioritaires : la politique de prévention des risques sur le terrain, le financement de la recherche des risques émergents et l’accompagnement de la transition énergétique portée par l’ADEME, préalable à la préservation de l’environnement du fait d’une croissance propre.

Tout d’abord, la prévention des risques demeure une action prioritaire à consolider.

En effet, le rythme d’inspection des installations classées a fortement décru en 10 ans puisque l’on est passé d’une moyenne annuelle d’environ 25 000 contrôles par an à environ 18 500 par an.

Si le nombre de contrôles réalisés reste élevé en 2017 – près de 18 500 visites d’inspection ont été réalisées, dont 10 000 visites d’inspection approfondie – il n’est pas suffisant eu égard à l’importance de ces inspections pour préserver l’environnement, mais également éviter la survenue d’accidents industriels.

En effet, un inspecteur a en charge l’inspection de 440 usines ou barrages, chiffre éloquent qui montre l’ampleur de la tâche à accomplir et la nécessité de renforcer les effectifs sur le terrain pour que le nombre d’accidents recensés en France reste peu élevé.

Le nombre minime d’accident ne doit pas faire oublier que les causes profondes des accidents industriels sont dues soit à une mauvaise organisation sur le site industriel, soit à un non-respect de la législation, ce qui renforce la nécessité, pour maintenir ce taux bas, d’un contrôle régulier et continu des installations classées.

C’est la raison pour laquelle votre rapporteure pour avis a déposé un amendement de crédits visant à augmenter les crédits du programme 217 portant les personnels du programme 181 à hauteur de 10 millions d’euros de manière ce qui correspond à une augmentation d’environ 200 ETPT qu’il faudrait affecter au contrôle des installations classées.

Renforcer les crédits de la recherche sur les risques émergents demeure également fondamental, notamment dans un contexte d’aversion au risque.

Jean-Pierre Dupuy, dans son ouvrage Pour un catastrophisme éclairé, quand l’impossible est certain, rappelle que la certitude de l’inacceptable doit pousser à agir, et à agir en toute transparence pour rendre justement le risque acceptable, le risque zéro n’existant pas.

Par définition, les risques émergents sont des risques mal définis dont on ne mesure pas encore tous les effets sur la santé humaine, animale et végétale pour pouvoir les classer comme étant des risques à part entière. Cette nouvelle catégorie de risques est particulièrement large car elle englobe tant la 5G, que la prise en compte des effets cocktail, l’exposition aux nanoparticules voire aux perturbateurs endocriniens, ou les nuisances induites par des espèces envahissantes telles que la pyrale du buis pour n’en citer que quelques-uns.

La mesure de ces risques émergents nécessite donc d’engager d’importants crédits. Les appels à projets étant pluriannuels il importe pour l’ANSES, sur des projets de cette envergure, d’avoir une certitude pluriannuelle quant aux engagements de l’État dans ce domaine. L’augmentation des crédits de recherche demandée par l’amendement de votre rapporteure répond donc partiellement à cette demande.

Conforter les crédits de l’ADEME pour assurer la transition énergétique et solidaire, notamment le financement du Fonds chaleur reste une priorité.

La transition énergétique et le financement de la croissance verte se trouvent, en effet, au cœur de la mission de l’ADEME et se décline essentiellement autour de deux programmes, le programme « Chaleur renouvelable » plus connu sous le nom de Fonds chaleur et le programme « Économie circulaire et déchets », plus communément intitulé Fonds déchets.

Le programme « Chaleur renouvelable » contribue à l’objectif, fixé dans la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte du 17 août 2015, de porter d’ici 2020 la part des énergies renouvelables à 23 % de la consommation énergétique nationale et à 32 % en 2030. Il finance essentiellement les investissements de production et de distribution de chaleur renouvelable.

La dotation budgétaire dont bénéficie l’ADEME, pour charges de service public, à hauteur de 591 millions d’euros en loi de finances initiale en 2019, est en baisse de 6 millions d’euros par rapport à 2018. Si en valeur nominale cette baisse peut sembler conséquente, en valeur relative elle se trouve inférieure à 1 %, soit 0,98 % exactement.

Si l’ADEME n’est pas sous dotée dans les prévisions budgétaires en loi de finances pour 2019, eu égard aux enjeux en termes de transition énergétique, et de fonctionnement de l’agence, la stabilité du budget était au minimum un préalable, et qu’eu égard à l’élargissement du champ d’intervention de l’agence, l’augmentation du budget devrait être envisagée.

En effet, la budgétisation de l’agence votée en loi de finances initiale pour 2018, si elle a des vertus – visibilité annuelle, budget pérenne non soumis à la variabilité d’une taxe – emporte un inconvénient majeur : celui relatif à la régulation budgétaire, gel et surgel des crédits décidé par Bercy, notamment en fin d’exercice budgétaire.

Pour votre rapporteure pour avis l’agence devrait avoir la garantie du Gouvernement qu’elle ne sera pas impactée par les questions de régulation budgétaire, eu égard à l’importance de ses missions.

Concernant l’augmentation du Fonds chaleur, la parole présidentielle ayant été engagée, le ministre de la transition écologique et solidaire, M. François de Rugy, a rappelé devant le Sénat, le 2 octobre dernier, l’engagement du Gouvernement à augmenter le Fonds chaleur dès 2019, à hauteur de 300 millions d’euros, proposition à laquelle votre rapporteure pour avis souscrit, le Fonds chaleur étant un acteur essentiel de la transition énergétique.

Mme Jennifer De Temmerman, rapporteure pour avis. Monsieur le président, madame la rapporteure pour avis, chers collègues, nous en arrivons à l’examen des crédits du programme 174 « Énergie, climat et après-mines » et du compte d’affectation spéciale « Transition énergétique », qui représentent une partie significative des crédits dédiés à l’impulsion et à l’accompagnement de la transition énergétique et écologique de notre pays.

Les crédits du programme 174 représentent un peu plus de 400 millions d’euros, dont près de 90 % sont dédiés au financement de l’accompagnement social de la fin de l’activité minière. La plupart sont gérés par l’Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs (ANGDM) qui s’occupe notamment de verser des prestations de logement et de chauffage aux anciens mineurs. Une autre partie finance la remise en état de certains sites, notamment du site de stockage de déchets Stocamine qui a fait l’objet de la mission d’information présidée par notre collègue M. Vincent Thiébaut.

Les 22,8 millions d’euros prévus pour 2019 ont été calculés sur la base d’un scénario de poursuite du confinement des déchets. Le rapport de la mission d’information étudie toutefois l’hypothèse d’un déstockage des déchets. Le montant des crédits exécutés est donc susceptible de varier fortement selon le scénario retenu. Un arbitrage pourrait être rendu au printemps prochain.

Globalement, les crédits de l’action 04 connaissent une baisse de près de 31 millions d’euros, baisse mécanique qui résulte essentiellement de la diminution du nombre de bénéficiaires des dispositifs d’accompagnement social de l’après-mines. Les droits des anciens mineurs ne sont bien entendu nullement affectés. J’ai au contraire pu constater la très grande qualité de l’action de l’ANGDM, dont le plan « Bien vieillir » porte une attention particulière aux aidants, qui est à saluer.

Cette baisse des crédits de l’action 04 explique la diminution de 26 millions d’euros des crédits du programme 174. Les crédits des trois autres actions connaissent, quant à eux, une augmentation de près de 5 millions d’euros qui traduit le volontarisme du Gouvernement dans la mise en œuvre d’une transition écologique réussie, notamment en matière de lutte contre le changement climatique.

Les crédits de l’action 05 augmentent de trois millions d’euros pour atteindre près de 34 millions d’euros. C’est un montant significatif qui permettra de financer des études et des démarches liées à la mise en œuvre des plans et dispositifs de lutte contre la pollution.

L’action 05 comporte aussi les crédits de l’enveloppe spéciale de transition énergétique (ESTE), au titre de laquelle 700 millions d’euros ont été engagés et 475 millions d’euros ont déjà été payés.

Le projet de loi de finances ne prévoit pas cette année de crédits de paiement au titre des 255 millions d’euros de restes à payer jusqu’en 2021. Un état de l’avancement des actions serait en conséquence nécessaire pour mieux estimer le montant des crédits de paiement qui devront être ouverts et le calendrier de leur décaissement.

Les crédits de l’action 01 relative à la mise en œuvre de la politique de l’énergie augmentent de près d’un million d’euros pour atteindre 5,2 millions d’euros.

Ces crédits serviront à poursuivre le financement d’actions peu onéreuses mais néanmoins essentielles, qu’il s’agisse de la participation du ministère au Conseil supérieur de l’énergie (CSE) ou encore du soutien des revendications françaises en matière de délimitation du plateau continental, dit programme EXTRAPLAC.

Je tiens d’emblée à préciser que je m’opposerai aux amendements qui visent à réduire les crédits de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA) au motif d’une opposition au projet de centre industriel de stockage géologique (CIGÉO). La subvention de 2,8 millions d’euros qui lui est accordée ne sert pas à financer ce projet mais à réaliser un inventaire national des déchets radioactifs et à traiter des déchets orphelins lorsque le principe « pollueur-payeur » ne peut pas être appliqué. Ces deux missions me semblent indiscutablement être d’intérêt général et justifier un financement de l’État. Prétendre régler la question du nucléaire en écartant la question des déchets et en niant leur existence m’apparaît dangereux.

Le second volet des crédits examinés dans le rapport est le compte d’affectation spéciale « Transition énergétique », dont l’objet est de financer les dispositifs de soutien aux producteurs d’énergie renouvelable.

Ce soutien s’élèvera à plus de 5 milliards d’euros pour 2019, le montant total du compte atteignant plus de 7 milliards d’euros pour tenir compte du remboursement du principal de la dette due à EDF par l’État au titre d’anciennes obligations dans le cadre de sa contribution au service public de l’électricité (CSPE).

Ce montant est considérable. Je constate toutefois que le soutien apporté aux producteurs est presque exclusivement tourné vers l’électricité, alors que la consommation de chaleur représente 50 % de la consommation finale et que d’autres filières que l’électricité contribuent fortement à sa production.

Je salue l’augmentation de 30 % des aides au gaz renouvelable et considère que l’effort doit être encore amplifié.

De ce point de vue, l’augmentation des crédits du Fonds chaleur de l’ADEME est essentielle pour le volet consacré à l’investissement des dispositifs de soutien. Le conseil d’administration de l’agence a voté une augmentation de 14 % du budget du fonds pour 2018 et le ministre a annoncé son augmentation de 100 millions d’euros pour 2019.

Ces deux décisions vont dans la bonne direction et elles nécessitent d’être appuyées. J’ai donc déposé deux amendements alternatifs pour consolider la démarche.

Le premier vise à doubler le fonds en augmentant de 200 millions d’euros le budget de l’ADEME. Ce n’est que par ce doublement que la France se placera à la hauteur des enjeux et des objectifs qu’elle a inscrits dans la loi et sur lesquels elle s’est engagée vis-à-vis de ses partenaires dans le cadre de l’Accord de Paris et de l’Agenda 2030.

Le second, qui est un amendement de repli, prévoit de consolider le budget de l’agence de 100 millions d’euros afin que l’augmentation annoncée ne se fasse pas a minima, au détriment des autres missions de l’agence. Je pense à la mise en œuvre du plan hydrogène, à la feuille de route sur l’économie circulaire ou encore au financement de la recherche.

Lors des auditions, mon attention a également été attirée sur d’autres sujets essentiels à la mise en œuvre d’une transition énergétique et écologique solidaire.

Il s’agit en premier lieu du crédit d’impôt pour la transition écologique (CITE) : le Gouvernement a pris l’an dernier les dispositions nécessaires pour concentrer l’effort sur des gestes plus performants du point de vue énergétique. Dans cette perspective, il faudrait renforcer la démarche de diagnostic afin de rendre le dispositif encore plus efficient.

Le Gouvernement a également décidé de faciliter les démarches pour que les ménages les plus précaires n’aient plus besoin d’avancer les sommes nécessaires en lien avec l’Agence nationale de l’habitat (ANAH). C’est une initiative essentielle qui mériterait à mon avis d’être prolongée, dès que cela sera techniquement possible, par la conversion du crédit d’impôts en prime pour tous.

Il s’agit, en deuxième lieu, du chèque énergie. L’augmentation de son montant a été unanimement saluée mais il a également été indiqué que l’augmentation du prix du gaz pourrait gommer l’effet de cette augmentation pour certains publics, pour lesquels le montant du chèque demeure par ailleurs insuffisant.

Il s’agit, en troisième lieu, du changement d’approvisionnement de gaz dans les Hauts-de-France en raison du tarissement des gisements de gaz aux Pays‑Bas. Les chaudières de plus de quinze ans n’étant pas compatibles avec le nouveau type de gaz, il faudra trouver un véhicule législatif adapté dans les prochains jours pour résoudre ce problème urgent et éviter une rupture d’approvisionnement dès le premier trimestre de l’année 2019. Le gouvernement précédent avait pris en compte ce problème dans une loi, mais les décrets d’application n’ont jamais été publiés. J’ai déposé un amendement qui propose une solution rapide à mettre en œuvre, qui bénéficiera notamment aux personnes âgées exposées à la précarité énergétique qui n’ont pas les moyens de rénover leurs appareils.

Avant de conclure, je voudrais vous inviter à lire la seconde partie de mon rapport qui interroge la contribution de la recherche, de l’innovation et du numérique à l’atteinte des objectifs de développement durable (ODD), notamment l’ODD n° 7 « Garantir l’accès de tous à des services énergétiques fiables, durables et modernes, à un coût abordable ».

Le choix d’un angle large pour traiter le sujet a permis de mettre en évidence certaines difficultés qu’il serait très intéressant d’approfondir dans le cadre de la mission d’information en cours sur les freins à la transition énergétique ou d’une mission dédiée.

Je voudrais toutefois d’ores et déjà partager avec vous trois conclusions importantes de mon rapport.

Premièrement, la recherche française dans le domaine de l’énergie est excellente mais les choses se compliquent à la sortie du laboratoire. Les innovations dont le modèle économique n’a pas encore prouvé sa viabilité immédiate mais qu’il est néanmoins nécessaire de tester, ne bénéficient pas d’un soutien suffisant comme l’avait déjà pointé l’an dernier notre collègue M. Gérard Menuel dans son avis sur la recherche. La faiblesse des taux de consommation des crédits du programme d’investissement d’avenir (PIA) gérés par l’ADEME qui visent à soutenir les « démonstrateurs » montre que, même lorsque la viabilité du modèle économique est testée, le soutien financier n’est pas forcément à la hauteur des enjeux. Enfin, une fois les innovations éprouvées, demeure l’enjeu de la consolidation des filières et de la baisse des coûts de production. C’est tout le droit commun de l’aide aux entreprises qui est interrogé, notamment la cohérence et le ciblage des dispositifs fiscaux, eu égard à l’encadrement européen très strict des aides directes.

Cela m’amène à mon deuxième point : si le financement des innovations techniques est indispensable, il faut aussi faire preuve d’audace dans l’innovation juridique, budgétaire et sociale afin de faciliter la mise sur le marché des innovations technologiques. Il y a aussi derrière cela un enjeu humain décisif, car sans pédagogie et surtout sans protection des citoyens, le progrès technique ne sera pas accepté, comme l’illustrent les difficultés rencontrées avec les compteurs Linky.

Dernier point : la multiplicité des acteurs, des financements et des centres de décision rend nécessaire un renforcement de la gouvernance afin que les enjeux environnementaux soient pris en compte à la hauteur de leur importance en matière de recherche et d’innovation dans les domaines de l’intelligence artificielle et du numérique. Je suis convaincue qu’avec un recentrage de certains dispositifs sous l’impulsion du ministère de la transition écologique et solidaire, nous pourrions faire du numérique un puissant levier de transformation au service de la transition écologique que nous appelons tous de nos vœux.

Enfin, j’invite chacun d’entre nous à s’interroger sur la lisibilité des indicateurs budgétaires actuels. Je soutiens l’idée que ceux-ci devraient être revus pour être alignés, par exemple, sur les excellents indicateurs de l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) qui reprennent les objectifs de développement durable.

Pour conclure, je donne un avis favorable à l’adoption des crédits du programme 174 et du compte d’affectation spéciale « Transition énergétique ».

M. Alain Perea, président. Je vous remercie, mesdames les rapporteures pour avis. Nous allons maintenant entendre les orateurs des groupes.

M. Jean-Marc Zulesi. Je tiens tout d’abord à féliciter Mme Brulebois et Mme De Temmerman pour leur engagement et leur travail de terrain auprès des services et des agences de l’État.

Les défis de la transition écologique ne sont plus à rappeler. Le rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a de nouveau mis en exergue les conséquences humaines, écologiques et environnementales désastreuses de l’augmentation des températures. Malheureusement, ce sont les catastrophes naturelles, comme les inondations récentes dans l’Aude, ou bien industrielles qui nous rappellent l’urgence à agir. Notre philosophie est claire : le temps n’est plus au constat ou encore à la culpabilisation mais à l’action. C’est le sens de ce budget pour 2019 qui sanctuarise les crédits dédiés à la transition écologique et à la prévention des risques.

Ce projet de loi de finances prévoit ainsi une augmentation de 3,1 milliards du budget du ministère de la transition écologique et solidaire, dont 1 milliard d’euros d’autorisations d’engagement.

Le volet « Énergie, climat et après-mines » incarne cette philosophie. La prorogation du CITE ou l’augmentation de la dotation du Fonds chaleur donnent à nos concitoyens et aux entreprises des outils pour être acteurs de leur transition énergétique.

Comme le souligne votre rapport, madame De Temmerman, recherche scientifique et innovation technologique sont au cœur de cette transition. L’innovation doit être le carburant de la transformation de notre modèle énergétique. Pourtant il existe un double paradoxe que vous pointez du doigt : d’une part, un niveau de financement élevé pour la transition énergétique, mais insuffisant à des moments-clef de la vie des projets ; d’autre part, une consommation insuffisante des crédits d’innovation mis à disposition dans les programmes de subvention existants, en particulier le PIA.

Dès lors, Madame la rapporteure pour avis, quelles sont vos recommandations pour améliorer l’affectation des crédits d’investissement tout au long du cycle d’innovation énergétique ?

Le budget de l’État doit répondre aux défis présents. Il doit également prévenir les risques futurs. L’impact des activités humaines se fait toujours plus visible sur nos écosystèmes et nous en connaissons les conséquences. Dans les Bouches-du-Rhône, je ne citerai qu’un seul exemple, notre cher étang de Berre.

Madame Brulebois, votre rapport met en avant la volonté du Gouvernement de faire de la prévention des risques une priorité après une baisse continue des crédits du programme 181 sous la précédente majorité. Notre rôle de parlementaires est de garantir aux opérateurs tels que l’ANSES et l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (INERIS) les ressources nécessaires à la réalisation de leurs missions qui sont cruciales pour la sécurité de nos concitoyens. Ces deux établissements ont un rôle central à jouer dans la prévention des risques dits émergents, sur lesquels vous mettez l’accent dans votre rapport. Je pense notamment à l’impact du développement de la 5G, à la mesure des effets cocktail ou encore à l’exposition aux perturbateurs endocriniens. Selon vous, comment pourrait-on accroître les synergies entre les secteurs privés et publics afin de renforcer la prévention de ces nouveaux risques souvent mal définis et mal connus ?

M. Fabrice Brun. Le projet de loi de finances pour 2018 avait abondé de 616 millions d’euros les crédits de paiement du programme 181, bond financier qui s’expliquait par le rattachement budgétaire de l’ADEME. En tant que rapporteur pour avis, j’avais souligné que si ce rattachement était positif, la vigilance s’imposait. Je suis au regret de constater aujourd’hui que mes craintes étaient fondées : Mme Brulebois souligne dans son rapport que le programme 181 ne doit pas devenir la variable d’ajustement indirect d’une baisse des crédits du programme support.

Les crédits du programme font l’objet, dès la loi de finances initiale, d’une baisse, baisse que vous qualifiez de modérée mais qui pourrait être importante si, en fin d’exercice budgétaire, Bercy imposait des gels voire des surgels. Vous exprimez l’idée que l’ADEME devrait obtenir du Gouvernement la garantie qu’elle ne sera pas concernée par la régulation budgétaire, compte tenu de l’importance de ses missions d’accompagnement de la transition énergétique. Sachez que sur ce point, nous partageons votre position.

Je regrette en revanche que vous abordiez la question de la sécurité et de la sûreté nucléaires de manière aussi rapide. Je souhaiterais d’ailleurs, à cette occasion, revenir sur la commission d’enquête qui nous a mobilisés au début de cette année 2018 : nous regrettons en effet que son rapport n’ait pas évité l’écueil de l’opposition entre pronucléaires et antinucléaires, dans un contexte politique où un large consensus serait nécessaire pour décarboner l’économie. Peut-on sortir en même temps du charbon, du pétrole et du nucléaire ? Au moment où les usages électriques se développent dans le transport ou l’économie numérique, la question reste entière et les objectifs de la loi de transition énergétique toujours aussi irréalistes.

S’agissant du programme 181, j’avais insisté l’an dernier sur la nécessité de contrôler de manière continue les agents travaillant pour les acteurs du nucléaire et leurs sous-traitants, et pas seulement au moment de leur embauche. J’avais également souligné qu’il convenait de remédier à la baisse régulière des moyens de recherche de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), dont l’expertise doit demeurer mondialement reconnue. Je tiens donc, une nouvelle fois, à affirmer la nécessité de conforter ces crédits de recherche, qui semblent quelque peu oubliés.

Je tiens enfin à revenir sur la notion de risques émergents, ces risques que vous décrivez comme des risques à part entière mais encore mal identifiés et qui sont donc peu ou mal pris en compte par la législation. Je pense en particulier au risque que représentent les espèces invasives, qu’il s’agisse de la pyrale du buis, du frelon asiatique, de la bactérie Xylella fastidiosa ou du moucheron Drosophila suzukii, à cause duquel nous ne pourrons peut-être bientôt plus manger de fruits frais, pour ne citer que quelques espèces dévastatrices, toutes importées d’Asie. J’avais déjà évoqué ce sujet l’an dernier, mais force est de constater que, depuis, rien n’a changé et que l’action de l’État reste insuffisante. Ma collègue Mme Véronique Louwagie vient d’interpeller le Premier ministre sur le frelon asiatique et je viens d’en faire de même pour la pyrale du buis, dont je recommande le classement en deuxième catégorie du code rural : qu’en pensez-vous ?

Nous resterons donc vigilants sur ces crédits, et j’appelle nos collègues de la majorité à faire de même, pour que la question de ces risques émergents soit enfin traitée, et pour que la fin de l’exercice budgétaire ne se traduise pas par des régularisations trop violentes, qui signifieraient le renoncement à nos ambitions.

M. Bruno Duvergé. Le groupe MoDem et apparentés se félicite que, dans le cadre d’un budget contraint, une politique ambitieuse en faveur de la transition énergétique et de la lutte contre le changement climatique continue d’être l’une des priorités fondamentales du Gouvernement et se traduise par une hausse des crédits du ministère de la transition écologique et solidaire et de ses opérateurs.

Nous saluons tout particulièrement l’engagement de 2 milliards d’euros de crédits destinés aux actions dans le domaine de l’eau et de la biodiversité, engagement qui s’inscrit, d’une part, dans la trajectoire dessinée par la Stratégie nationale pour la biodiversité 2011‑2020, et, d’autre part, à la fois dans la mise en œuvre de la loi de 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, et dans la continuité des actions déjà initiées dans le cadre du plan Biodiversité, présenté le 4 juillet dernier par le Premier ministre.

La préservation de la biodiversité mériterait néanmoins un financement plus soutenu, plus pérenne et plus diversifié. Il a par exemple été décidé de financer l’enveloppe dévolue à ces actions par un prélèvement supplémentaire sur le budget des agences de l’eau, ce qui fait craindre aux acteurs du secteur que ces budgets deviennent une variable d’ajustement : quel est le point de vue de nos rapporteures pour avis à ce sujet ?

Pour rester dans le domaine des agences, l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS), voué à fusionner avec l’Agence française de la biodiversité (AFB), doit faire face à une baisse des redevances cynégétiques, soit un manque à gagner de quelque 21 millions d’euros : comment est-il prévu qu’en dépit de ce manque à gagner, l’office puisse continuer de remplir au mieux ses missions ?

Le Fonds chaleur enfin, qui a pour objet de financer des projets de production de chaleur à partir de la biomasse, de la géothermie ou du solaire, tout en garantissant des prix inférieurs à celui de la chaleur produite à partir d’énergies conventionnelles, a été augmenté, de 50 %, pour un montant prélevé sur le budget de l’ADEME : nous nous inquiétons donc de la baisse des crédits que l’agence pourra par ailleurs consacrer à ses principales missions.

En ce qui concerne la politique de l’énergie, les crédits de paiement dédiés à la protection des consommateurs en situation de précarité énergétique ont fortement augmenté, ce qui correspond à la montée en puissance du dispositif du chèque énergie et à la hausse du nombre de bénéficiaires. Nous nous réjouissons de ce geste en faveur des foyers modestes.

La politique de l’énergie, c’est aussi une politique en faveur de la transition énergétique, ce qui implique de faire preuve de pédagogie et d’offrir à nos concitoyens une véritable vision prospective de ce que sera notre consommation énergétique dans les cinquante prochaines années. À ce titre, la future programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) devra présenter la nouvelle stratégie française pour l’énergie. Nous devrons être particulièrement vigilants sur le développement de nouvelles énergies – je pense notamment à l’hydrogène, qui peut être l’une des solutions d’avenir pour nos transports. Il faut offrir à tous une modélisation compréhensible de ce que sera demain notre mix énergétique – à la fois en production et en consommation –, afin de susciter l’adhésion de nos concitoyens.

En ma qualité de rapporteur de la mission d’information relative aux freins à la transition énergétique, je serais heureux que le PLF soit désormais un outil permettant de mieux comprendre et d’anticiper la transition énergétique, en offrant au législateur l’ensemble des outils mis en place pour favoriser cette transition – indicateurs, dispositifs fiscaux, législatifs et réglementaires – regroupés dans un même document.

Je souhaiterais enfin la position de la rapporteure pour avis, Mme Jennifer De Temmerman, sur l’action 05 du programme 174, qui témoigne d’un ralentissement de la dotation du plan de réduction des émissions de polluants atmosphériques (PREPA), sans pour autant que cet effort important, initié en 2018, soit remis en cause.

Mme Sophie Auconie. M. le ministre François de Rugy a annoncé que le Fonds chaleur de l’ADEME, qui finance des projets de production de chaleur à partir d’énergies renouvelables, serait augmenté de 40 % en 2019, pour atteindre un montant de 300 millions d’euros, contre 215 millions en 2018. Or cette augmentation n’apparaît pas dans le PLF pour 2019.

L’engagement du Président de la République était de doubler le Fonds chaleur pendant le quinquennat. Or, l’action 12 du programme 181, qui recouvre le financement de l’ADEME, fait apparaître que la subvention versée à l’ADEME pour 2019 s’élèvera à 603,2 millions d’euros contre 609,2 millions en 2018 : elle est donc en baisse malgré la communication du Gouvernement, qui soulignait l’augmentation des moyens de l’agence. Il est d’autant plus difficile de savoir de quoi il retourne précisément. Je n’ai pas compris si l’augmentation de 40 % du Fonds chaleur était incluse dans la subvention versée à l’ADEME : pourriez-vous nous éclairer sur ce point ?

Ensuite, en ce qui concerne le compte d’affectation spéciale « Transition énergétique », entre la hausse de la trajectoire carbone, qui reflète la fiscalité sur les carburants, et la suppression du taux réduit pour certains usages non routiers du gazole, la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) devrait, selon le rapporteur général M. Joël Giraud, rapporter 3,7 milliards d’euros de recettes nouvelles au budget de l’État. Or le compte d’affectation spéciale, qui finance les actions liées à la transition énergétique, n’augmente que de 80 millions d’euros. La mise en regard de ces deux chiffres pose un certain nombre de questions, d’autant que l’alourdissement de la fiscalité écologique n’a de sens, selon moi, que si le supplément de recettes qu’elle génère sert à financer des actions incitatives en faveur de la transition écologique. En l’occurrence, il ne semble pas que cela soit le cas – mais je ne demande qu’à être contredite – et nous avons plutôt affaire à une fiscalité punitive, qui pèse sans contrepartie sur ceux qui la subissent.

Comment expliquez-vous donc le différentiel entre l’abondement du compte d’affectation spéciale et les recettes tirées de la fiscalité écologique ? Ne serait-il pas plus juste et plus acceptable d’affecter massivement ces recettes au compte d’affectation spéciale « Transition énergétique » ?

M. Christophe Bouillon. Je voudrais en préambule mettre en garde nos collègues de la majorité contre la tentation qu’ils pourraient éprouver de penser que rien n’a été fait avant qu’ils arrivent au pouvoir. On ne peut en effet faire comme s’il n’y avait pas eu le vote de la loi « Grenelle 2 », celui de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte ni celui de la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. Si nous parlons aujourd’hui du Fonds chaleur, de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) ou d’autres instruments, c’est que ces lois ont permis leur mise en œuvre.

Vous avez évoqué les plans de prévention des risques technologiques (PPRT) : n’oublions pas que c’est à la fin des années 1990 et dans les années 2000 que les pouvoirs publics se sont emparés de cette notion de risque à la suite d’accidents majeurs qu’a connus notre pays. Certes, il a fallu du temps pour mettre en œuvre ces PPRT, mais il s’agit d’exercices complexes, qui se heurtent chaque fois, sur le terrain, à des difficultés concrètes et obligent les collectivités et les acteurs concernés à définir avec précision des principes d’action pertinents.

Je tiens ensuite à féliciter nos deux rapporteures pour avis. Le travail qu’elles ont accompli n’est jamais évident, a fortiori quand, comme ce fut le cas cette année, le Gouvernement multiplie les plans d’actions : plan méthanisation, plan solaire, plan de lutte contre l’artificialisation des sols, autant d’objectifs et autant d’ambitions pour lesquels il fallait vérifier s’ils étaient soutenus par un engagement budgétaire approprié. On sait en effet que, pour la plupart des budgets qui composent le PLF, le risque est toujours de se faire rattraper par la « patrouille » de Bercy, qui voudra procéder à des gels ou à des « surgels » de crédits.

L’exercice remarquable auquel vous vous êtes donc livrées, mesdames, a consisté à tracer les engagements gouvernementaux et à faire en sorte que l’on puisse vérifier qu’ils soient bien traduits en engagements budgétaires dans ce PLF, et que Bercy ne les efface pas, comme c’est malheureusement souvent le cas – vous l’avez souligné.

J’aurais une question concernant la dépollution des sites, d’autant plus cruciale que le foncier est aujourd’hui une denrée rare. Or les outils à la disposition de ceux qui sont en charge de la dépollution ne sont pas toujours à la hauteur de l’enjeu – je pense notamment au fonds de minoration foncière et à l’exemple de la dépollution du site de l’ancienne raffinerie Petroplus en Seine-Maritime, pour lesquels nous manquons d’outils d’évaluation. Qu’en pensez-vous ?

Vous avez par ailleurs évoqué la nécessaire éducation à la prévention des risques. Ne serait-il pas utile que le projet de service national universel intègre cette dimension de prévention des risques industriels ?

Mme Mathilde Panot. Madame Brulebois, j’aimerais partager votre optimisme quant à la priorité qu’accorde le Gouvernement à la prévention des risques et au fait que « c’est bien parce que la prévention des risques est bien assurée, que le risque disparaît et devient invisible ». Malheureusement, je crains qu’une fois encore ce budget ne soit pas à la hauteur, au moment où l’on voit se multiplier les événements climatiques extrêmes. Vous le dites d’ailleurs vous-même, les crédits sont en baisse et le nombre des contrôles de sites classés a diminué.

Que vous ont dit les différents acteurs que vous avez auditionnés des problèmes d’effectifs ? Depuis 2013, ce sont en effet 13 250 postes qui ont été supprimés au sein du ministère et dans les agences, ce qui met en péril les capacités d’expertise du Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CEREMA), comme la production par Météo France de prévisions permettant d’anticiper les épisodes de dérèglement climatique. Comment dans ces conditions peut-on avoir une gestion des risques à la hauteur de ce qui est exigé ?

Dans le domaine de la gestion des risques nucléaires, la commission d’enquête sur la sûreté et la sécurité nucléaire a en outre établi que nous faisions désormais face à des risques accrus, du fait notamment du vieillissement des centrales et de l’apparition de problèmes – répertoriés ou non – dans les cuves, mais également pour des raisons liées à la sous-traitance de 80 % des travaux de maintenance et aux cadences imposées aux personnels, qui sont telles que les risques d’erreur humaine se multiplient.

Sans parler du fait que nombre de centrales ont été conçues pour une durée de vie au‑delà de laquelle on envisage aujourd’hui de les maintenir en fonctionnement, ce qui, là encore, nous expose à de vrais problèmes, comme l’a notamment démontré Greenpeace. Que l’on soit pour ou contre le nucléaire, il faut assurer la sûreté et la sécurité des Français, ce dont nous sommes loin aujourd’hui.

En ce qui concerne ensuite la transition énergétique, on sait que le nucléaire empêche le développement des énergies renouvelables. J’aimerais savoir ce que vous a dit à cet égard le Syndicat des énergies renouvelables : je sais qu’il s’inquiète de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), dont la révision doit avoir lieu très prochainement mais sur laquelle le Parlement n’a aucune prise.

Qui dit enfin transition énergétique, dit sobriété et efficacité énergétiques. Or nous sommes encore loin du but, par exemple en matière de rénovation thermique : le CLER Réseau pour la transition énergétique, anciennement Comité de liaison pour les énergies renouvelables, évalue à 700 000 le nombre de logements qu’il faudrait rénover chaque année, chiffre dont nous atteignons à peine 10 % ; en matière d’accompagnement des ménages, le Gouvernement va augmenter le chèque énergie de 150 à 200 euros, là où le CLER estime qu’il faudrait monter jusqu’à 600 euros.

Si nous voulons respecter l’Accord de Paris, il va falloir y aller beaucoup plus fort et mettre en place un accompagnement social digne de ce nom.

M. Hubert Wulfranc. En matière de gestion des risques, les problématiques liées à la dépollution sont de plus en plus importantes, du fait de la reconversion industrielle ou de la reconstruction de la ville sur la ville. Les enjeux sanitaires liés à la dépollution des sols exigeraient de revisiter l’action publique en la matière et les moyens afférents.

Sans même parler des projets à venir, un certain nombre d’installations publiques posent aujourd’hui problème. Le ministère de l’écologie avait lancé en 2012 une campagne de diagnostic des établissements scolaires. Cette campagne d’évaluation n’est toujours pas achevée, mais certaines écoles, situées sur d’anciens sites industriels, ont d’ores et déjà été classées en catégorie C, avec les risques que cela comporte pour la sécurité des élèves. J’aimerais donc vous entendre sur cette question.

Vous avez insisté par ailleurs sur la nécessité de renforcer les effectifs chargés de l’inspection des installations classées. Je ferai néanmoins remarquer que vous avez supprimé les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), qui possédaient une vraie culture du risque et savaient la diffuser auprès des salariés.

Je vous remercie également d’avoir émis le vœu que la révision de la PPE que le Gouvernement s’apprête à présenter fasse l’objet d’un débat approfondi à l’Assemblée nationale. Ce qu’il faut garder à l’esprit dans cette perspective, c’est que les Français souhaitent une transition écologique équitable et juste.

Cela m’amène pour conclure à la question de l’habitat et du bâti en général qui, malgré le Fonds chaleur, le crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE) ou le chèque énergie, demeurent les parents pauvres de la transition énergétique. Nous avons reçu avec intérêt le rapport de Mme De Temmerman et ses propositions d’amendement, mais nous sommes dans un domaine où des recettes substantielles sont nécessaires, ainsi qu’un plan d’investissements publics massifs.

M. François-Michel Lambert. Je félicite les rapporteures pour avis pour le travail qu’elles ont effectué sur des sujets techniques mais qui sont essentiels pour le quotidien de nos concitoyens. Je retire notamment du rapport de Mme Danielle Brulebois le sentiment que, si la prévention des risques est un sujet de plus en plus essentiel, les moyens ne suivent pas.

Plus précisément, j’aimerais d’abord savoir ce qui empêche le classement de la pyrale du buis en danger sanitaire de catégorie 1 et non plus de catégorie 3.

Je voudrais ensuite revenir sur la mission que vous avez conduite à Marseille et à Gardanne – où je précise qu’il n’y a jamais eu de bauxite. La DREAL a en effet été ferme dans son traitement de la question des boues rouges, mais elle n’a pas agi seule et ne peut se prévaloir de tout le mérite d’avoir mis un terme au rejet de ces boues rouges dans la mer. Engagé depuis plus de six ans sur cette question des boues rouges, je considère que la DREAL a certes un rôle de contrôle mais qu’il faudrait qu’elle assume par ailleurs un rôle d’accompagnement des entreprises à risque, si l’on veut aider celles-ci à évoluer vers des modèles de production non polluants, ce qui est un enjeu majeur pour les Bouches-du-Rhône, compte tenu du poids de l’alumine dans leur industrie. Alors que l’on recense dans le département des dizaines de sites orphelins, Alteo demeure un interlocuteur avec lequel les services de l’État doivent coopérer pour trouver des solutions. Les DREAL doivent ainsi comprendre qu’au lieu de mettre des bâtons dans les roues des industriels, il est de l’intérêt de tous qu’elles travaillent avec eux.

Que pensez-vous par ailleurs du choix budgétaire retenu pour la dépollution des sites du parc national des Calanques ? Est-il pertinent d’investir 5 millions d’euros pour contenir la pollution plutôt que 10 millions d’euros, qui auraient permis de régler définitivement le problème, sans le reporter à plus tard ?

Je voudrais enfin demander à Mme Jennifer De Temmerman comment elle évalue la fragilité de la trésorerie de l’Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs (ANGDM) et savoir si la fermeture des centrales à charbon sera prise en compte dans l’action 04 du programme 174.

Pour ce qui concerne la politique énergétique, j’aurais souhaité que les financements soient davantage fléchés vers l’énergie fatale, qui représente dans l’industrie un potentiel de 50 térawattheures, soit l’équivalent de la consommation électrique de l’Île-de-France.

Nous soutiendrons plusieurs de vos amendements, tout en soulignant que, compte tenu des opinions divergentes des uns et des autres sur l’évolution des crédits de la mission, il serait sans doute souhaitable qu’un compte global retrace l’ensemble des flux financiers liés à la transition énergétique, afin de mesurer avec exactitude la réalité de nos engagements.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Monsieur Zulesi, je pense comme vous qu’il faut donner des moyens à l’ANSES et à l’INERIS, afin de soutenir la recherche face aux risques émergents, devenus de plus en plus complexes en raison du progrès technologique. C’est dans cette perspective que nous déposerons en séance un amendement demandant des équivalents temps plein (ETP) supplémentaires, notamment dans le domaine de l’expertise.

Vous avez également émis le souhait de faire travailler ensemble le secteur privé et le secteur public. On peut considérer que c’est déjà le cas, puisque les DREAL travaillent en étroite coopération avec les entreprises privées, non seulement dans le cadre de leurs missions d’inspection mais également pour la recherche de solutions. Pourquoi en effet ne pas envisager des partenariats plus poussés ?

Monsieur Brun, j’ai fait le choix de ne pas orienter mon rapport sur la sûreté et la sécurité nucléaires car les conclusions de la commission d’enquête, dont la présidente de notre commission était rapporteure, déboucheront, je n’en doute pas, sur des mesures. Mais, vous avez raison, il importe de contrôler les agences. Par ailleurs, ayant lu votre excellent rapport sur la pyrale du buis, dans lequel vous demandez que cet insecte soit inscrit sur la liste des dangers sanitaires de seconde catégorie, j’ai adressé une question écrite au ministre de l’agriculture, compétent en la matière. Si les choses n’ont pas avancé plus vite, monsieur Lambert, c’est parce qu’on avait fondé beaucoup d’espoirs sur les bio-solutions, en particulier le bacillus thuringiensis, lequel s’est avéré moins performant qu’on ne le pensait. Ses effets collatéraux ont ainsi conduit l’ANSES à décider qu’en 2019 les recherches devaient être poursuivies dans d’autres directions. En tout état de cause, la pyrale du buis pose, à l’instar du frelon asiatique et des autres espèces invasives importées d’Asie, un problème important.

Monsieur Duvergé, madame Auconie, la légère baisse des crédits de l’ADEME, qui s’élèvent à 603 millions d’euros, s’explique par le fait que certains appels à projet n’ayant pas abouti, la trésorerie actuelle de l’agence est suffisante pour lui permettre de remplir l’ensemble de ses missions. Quant à l’engagement de notre ministre d’État, M. François de Rugy, d’augmenter de 40 %, en 2019, les crédits du Fonds chaleur, les portant ainsi à 300 millions d’euros, il n’est pas inscrit dans le PLF pour 2019, car il doit trouver sa traduction dans la PPE, pour laquelle les arbitrages n’ont pas encore été rendus.

Monsieur Bouillon, si vous avez compris que j’estimais que rien n’avait été fait, je m’en excuse, car telle n’est pas mon opinion. Au contraire, j’ai évoqué les PPRT, qui ont été créés en 2000. Par ailleurs, 2 500 communes sont couvertes par un plan de prévention des risques d’inondation (PPRI) approuvé et 303 par un PPRI prescrit. Mais vous avez raison, l’effort doit être poursuivi.

Quant à la dépollution des sites, c’est un vaste problème. À ce propos, monsieur Lambert, j’ai pu constater, en visitant le parc national des Calanques, qu’il existait de nombreux sites orphelins. La difficulté tient au fait que les entreprises qui ont produit les déchets ont disparu depuis longtemps, de sorte que leur traitement incombe aux collectivités et au parc, en liaison avec la DREAL et les associations environnementales, qui font un travail important. Néanmoins, j’ai pu observer que de tout petits sites orphelins, que l’on remarque à peine, avaient été identifiés et que l’on s’en occupait. Il existe une véritable volonté de traiter ce problème. S’il a été décidé de contenir la pollution plutôt que de l’éliminer, c’est parce que les collectivités disposent de moyens limités. L’arbitrage a été rendu en tenant compte de la dangerosité.

Par ailleurs, l’éducation à la prévention est actuellement insuffisante. Elle doit être assurée dès l’école. Le service national pourrait être un vecteur important à cet égard. De fait, un risque est d’autant mieux accepté qu’il a été expliqué et compris. Je le constate avec le barrage de Vouglans, dans le Jura, qui inquiète bien davantage les nouveaux habitants que ceux qui ont assisté à sa construction, même après la diffusion du reportage d’Envoyé spécial. L’éducation aux risques et la culture du risque doivent être développées. Encore une fois, il me semble que le service national serait un très bon vecteur.

Madame Panot, j’ai, moi aussi, souligné combien il est nécessaire que l’inspection et la recherche conservent des effectifs suffisants. La sécurité et la sûreté nucléaires ont fait l’objet, je l’ai indiqué, d’une commission d’enquête. J’ai néanmoins auditionné les représentants de l’IRSN, qui se sont montrés rassurants. Ils estiment en effet que l’expertise nucléaire française demeure de très haute qualité et que la vigilance est importante, en dépit des problèmes de sous-traitance et de qualité des matériaux que vous avez mentionnés.

Monsieur Wulfranc, j’ai en partie répondu à votre question sur la dépollution industrielle des sites orphelins. Vous avez évoqué les écoles. C’est un sujet sur lequel il faut rester vigilant.

Monsieur Lambert, vous estimez, à propos de Gardanne, que le rôle d’accompagnement de la DREAL n’est pas suffisant. J’ai toutefois pu remarquer, lors de ma visite, que celle-ci assumait auprès d’Alteo une mission de conseil et d’accompagnement. Il m’a semblé que l’une et l’autre entretenaient des relations de confiance et que le directeur d’Alteo était à l’écoute de la DREAL. Je signale tout de même que c’est grâce à la mise en demeure de cette dernière que les rejets en mer ont cessé. J’ajoute qu’aucune étude ne montre, s’agissant des poussières rouges, que l’enjeu sanitaire est avéré. Quant aux alumines de spécialité d’Alteo, elles sont utilisées partout, que ce soit dans nos smartphones, nos télévisions ou nos voitures. D’un côté, nous consommons des produits, de l’autre, nous avons du mal à assumer les conséquences de leur fabrication. Telles sont les contradictions de notre société de consommation.

Mme Jennifer De Temmerman, rapporteure pour avis. Monsieur Zulesi, il existe en effet une contradiction, soulignée dans mon rapport : les investissements sont élevés, mais ils ne portent pas suffisamment sur les étapes clés, identifiées comme telles lors des auditions, à savoir la sortie du laboratoire – lorsque la recherche s’incarne dans une technologie –, et la construction et le renforcement de la filière. Les problèmes diffèrent selon le dispositif de financement. S’agissant du programme d’investissements d’avenir (PIA), les montants décaissés représentent seulement 29 % des montants autorisés au titre des deux premiers volets et ils sont nuls au titre du troisième volet. En fait, l’obligation de démontrer le caractère innovant de la technologie empêche le financement d’actions menées à certains stades des projets. En outre, la gestion du PIA est complexe et manque d’agilité. Le Grand Plan d’investissement (GPI) est, quant à lui, plus agile, mais on se heurte de nouveau à la question de l’innovation, car ce plan est destiné à ne financer que des innovations de rupture. Nous sommes ainsi confrontés à un paradoxe : nous finançons l’innovation sans favoriser sa transformation en une filière stable et durable. Un rapport pour avis est un cadre trop restreint pour proposer des solutions, mais la mission d’information relative aux freins à la transition énergétique pourrait se pencher sur cette question.

Monsieur Duvergé, les crédits de l’action 05 augmentent de 3 millions d’euros, soit une hausse de 27,4 %. Le PREPA a été adopté en mai 2017 pour une période de cinq ans. Les ambitions ne sont pas réduites, mais il faut laisser au dispositif le temps de monter en puissance. Ainsi, plusieurs mesures sont progressivement mises en œuvre. Je pense notamment à la prime à la conversion des véhicules, à laquelle un site internet est dédié depuis le 1er janvier dernier, ou à la création du fonds « Air-mobilité » par l’ADEME.

M. Wulfranc et Mme Panot m’ont interrogée sur la rénovation énergétique des bâtiments, à laquelle j’ai consacré un développement particulier dans mon rapport de l’an dernier. Un grand plan de rénovation énergétique des bâtiments a été présenté en avril 2018. On ne manque donc pas d’ambition dans ce domaine. Il est vrai – je réponds là à Mme Auconie – que les financements de la transition énergétique ne sont pas forcément visibles. Mais l’application du taux de TVA de 5,5 % à la rénovation énergétique représente, à elle seule, plus d’1 milliard d’euros. Quant au montant du CITE, il s’élève à 800 millions. Les crédits existent donc : des milliards sont dépensés pour la transition énergétique mais, vous avez raison, ils ne sont pas visibles. De manière générale – je suis désolée de le dire –, le budget manque cruellement de lisibilité. Moi qui, en tant que gestionnaire d’un collège, avais à cœur de présenter chaque année un budget lisible par quiconque, je reste perplexe face à la maquette budgétaire, qui me semble très éloignée de l’esprit de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). À nous d’améliorer tous ensemble, puisque cette préoccupation est transpartisane, la lisibilité du budget en repensant sa maquette et les indicateurs.

M. Emmanuel Maquet. Madame Brulebois, dans votre rapport, vous mettez l’accent sur les risques technologiques et industriels ; les risques naturels ne sont évoqués qu’en quelques phrases. Pourtant, les inondations qui ont frappé le sud-ouest de la France le mois dernier nous rappellent la gravité de la menace. Élu d’une circonscription littorale qui a subi des inondations et dont plusieurs communes sont exposées au recul du trait de côte, je suis particulièrement sensible à ce qui s’est passé dans l’Aude. Même si l’État participe, notamment grâce au « fonds Barnier », au financement des ouvrages de lutte contre les inondations, la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) attribue la majeure partie de la responsabilité de ce financement aux territoires concernés, qui doivent se débrouiller eux-mêmes en recourant à la taxe de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations (GEMAPI). Puisque vous indiquez, dans votre rapport, à propos de la situation du Jura, que le risque technologique y est élevé mais que les moyens ne suivent pas, je souhaiterais que vous nous indiquiez si vous jugez équitable qu’on laisse les territoires vulnérables assumer seuls les risques naturels auxquels ils sont exposés. Quelles propositions pouvez-vous formuler pour y remédier ?

M. Guy Bricout. L’objectif, martelé par le Gouvernement, de rénover 500 000 passoires thermiques par an est, selon moi, quasiment impossible à atteindre. Les mesures du PLF pour 2019 concernant le CITE n’en sont que plus inacceptables. D’une part, contrairement à ce que prévoit le PLF pour 2018, ce crédit d’impôt n’est toujours pas transformé en prime. Ce retard, que ne cessent de dénoncer la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (CAPEB) ainsi que les artisans du bâtiment, découragera immanquablement un grand nombre de particuliers d’entreprendre des travaux nécessaires. D’autre part, il est tout aussi incompréhensible, comme je l’ai dénoncé à plusieurs reprises lors de l’examen du précédent projet de loi de finances, que l’on persiste à exclure les menuiseries du champ du CITE. En effet, un récent rapport du Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) et de l’ADEME a très clairement démontré que le remplacement d’un simple vitrage par des fenêtres performantes avait un impact significatif sur la consommation énergétique.

M. Yannick Haury. Mesdames les rapporteures pour avis, je vous remercie vivement pour la qualité de votre travail. Vous proposez d’améliorer la présentation des documents budgétaires en tenant compte des objectifs stratégiques de la politique gouvernementale, afin que les parlementaires puissent mieux se les approprier pour décider et évaluer. Un autre outil d’aide à la décision me semble pertinent pour mieux prévoir et anticiper : un projet de loi de programmation environnementale. En effet, il faut du temps pour planifier le développement d’énergies alternatives, des mesures de protection de l’environnement ou des adaptations au changement climatique. Comme en matière de finances publiques ou militaire, ce cadre pourrait être pluriannuel. C’est, du reste, une recommandation du Conseil économique, social et environnemental (CESE) et c’est la qualification retenue par le Conseil constitutionnel s’agissant de la loi de transition énergétique – j’avais moi-même déposé un amendement en ce sens dans le cadre de la réforme constitutionnelle.

Même si ce projet de loi de programmation dépasse le cadre des programmes examinés ce jour, puisqu’il concernerait, outre la transition écologique, la préservation de la biodiversité, la protection de l’environnement et la lutte contre le changement climatique, pensez-vous que ce serait un bon outil pour affecter les moyens nécessaires à ces politiques ?

M. Martial Saddier. Le coût de la réparation des dégâts survenus dans l’Aude est estimé, pour l’instant, entre 100 et 120 millions d’euros. Le Président de la République, qui s’est rendu sur place, s’est tourné vers l’agence de l’eau Rhône-Méditerranée, qui a pris ses responsabilités en votant dans l’urgence, lundi matin, une première enveloppe de 20 millions d’euros – 20 millions ! –, prélevée sur le onzième programme, lequel a été adopté il y a deux mois pour six ans. Nous subissons déjà les conséquences du changement climatique. Depuis le vote de lundi, l’alerte rouge a été déclenchée en Corse et un « épisode cévenol » est annoncé dans le Var... Mes chers collègues, il est impératif que la République se penche sur la création d’un véritable dispositif de financement pour faire face aux conséquences des épisodes climatiques exceptionnels, car ceux-ci vont devenir récurrents. J’appelle la création d’un tel dispositif de mes vœux, et j’espère que nous pourrons tous nous accorder sur ce point, car nos territoires sont d’ores et déjà touchés.

M. Stéphane Demilly. Madame De Temmerman, la fiscalité sur le carburant atteint, on l’a dit, un niveau insoutenable pour nombre de nos concitoyens, sans que soit garanti par ailleurs l’accès de tous à des services énergétiques fiables, durables et modernes à un coût abordable, qui correspond à l’objectif de développement durable (ODD) n° 7 de l’Agenda 2030. Les habitants des territoires ruraux, qui effectuent en moyenne 60 kilomètres aller-retour chaque jour pour aller travailler, en sont les premières victimes et n’ont aucune alternative à la voiture. Or, les véhicules dits propres se vendent encore à des prix prohibitifs pour les foyers aux revenus modestes. Selon votre rapport, des moyens importants sont consacrés par le Gouvernement à l’habitat. Deux tiers des dépenses fiscales rattachés au programme 174 vont ainsi à la rénovation énergétique des bâtiments. Qu’en est-il des déplacements ?

M. Jean-Marie Sermier. Je crains fortement que la transition énergétique ne se fasse sur le dos de nos concitoyens. J’en veux pour preuve l’évolution de la contribution au service public de l’électricité (CSPE) qui, de 4,50 euros par mégawatt il y a quelques années, est passée à 22,50 euros le mégawatt – un mégawatt, je le rappelle, c’est ce que consomme une ampoule allumée pendant une année. Pour nos concitoyens, le coût de l’électricité sera donc très élevé. J’en veux pour preuve le fait qu’en 2019, le produit de la CSPE s’élèvera à 7,8 milliards d’euros ! En même temps – l’expression est à la mode –, nous avons, en France, quatre centrales à charbon qui rejettent du CO2. Quand ces centrales seront-elles fermées ?

Mme Aude Luquet. Madame De Temmerman, dans votre rapport, vous souhaitez que nous élaborions, en nous inspirant du modèle finlandais, une nouvelle structure budgétaire qui prendrait en compte les ODD pour améliorer l’acceptabilité des mesures fiscales contraignantes prises en application de la trajectoire carbone. Comment envisagez-vous l’intégration des ODD dans les futures lois de finances ?

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Monsieur Maquet, monsieur Saddier, si je n’ai pas abordé la question des risques climatiques dans mon rapport, c’est parce que nous avions déjà choisi son orientation lorsque les inondations sont survenues dans l’Aude. Le Président de la République a annoncé la création d’un fonds de 80 millions d’euros pour venir en aide aux territoires sinistrés. Par ailleurs, il est nécessaire d’augmenter le « fonds Barnier ». Mais nous ne connaissons pas encore la déclinaison précise des annonces qui ont été faites. Quant à la loi du 30 décembre 2017 relative à l’exercice des compétences des collectivités territoriales dans le domaine de la gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations, dite « loi GEMAPI », l’assouplissement apporté a appelé l’attention sur le rôle de l’État dans l’entretien des digues, dans le cadre de la continuité écologique d’un fleuve. Il s’agit de faire en sorte que les responsabilités soient partagées, notamment au plan financier, car cela représente une lourde charge pour les collectivités. Des mesures sont prises également pour que les aménagements hydrauliques et fonciers permettent de prévenir les inondations. En tout état de cause, nous partageons votre point de vue sur la nécessité de réviser à nouveau la loi « GEMAPI ». C’est regrettable, mais c’est ainsi : ce sont les catastrophes qui font progresser la loi.

Mme Jennifer De Temmerman, rapporteure pour avis. Monsieur Bricout, je me suis moi-même étonnée que le CITE n’ait pas été transformé en prime dès cette année. J’ai donc interrogé la direction générale de l’énergie et du climat (DGEC), qui m’a répondu que ce retard s’expliquait par des difficultés techniques. Mais l’idée n’est pas pour autant abandonnée, et un dispositif transitoire a été mis en place pour les ménages les plus précaires, via l’ANAH. Sur la question des portes et fenêtres, en revanche, je ne vous rejoins pas, car lors des auditions réalisées l’an dernier, de nombreuses personnes ont souligné l’existence d’un effet d’aubaine dans ce secteur. Il n’y a donc plus lieu d’inclure les portes et fenêtres dans le CITE.

Monsieur Demilly, je veux tout d’abord vous rappeler que 80 % de la hausse du prix du carburant est due à des facteurs géopolitiques et que le prix actuel est à peu près le même qu’en 2012. Quant à l’augmentation des taxes, elle s’explique par le fait que nous devons respecter la trajectoire carbone, voire l’accélérer, pour atteindre les objectifs de développement durable. Cela passe évidemment par la convergence des prix du gasoil et de l’essence. En ce qui concerne l’accompagnement des personnes les plus fragiles, nous attendons tous avec impatience le projet de loi d’orientation des mobilités (LOM), que nous devrions examiner au cours du premier semestre 2019 et qui comportera, nous n’en doutons pas, des mesures de nature à accompagner ces personnes.

Monsieur Sermier, j’ai conscience des difficultés liées à la hausse des factures d’énergie dues à la CSPE. Des mesures transitoires ont été prises en faveur des ménages les plus précaires – je pense au chèque énergie. Mais ce ne sont que des mesures transitoires. Le véritable enjeu réside dans l’accélération de la rénovation énergétique des bâtiments – la meilleure énergie est celle qu’on ne consomme pas. Lorsque les bâtiments consommeront moins, les choses iront mieux.

Madame Luquet, je me réjouis que vous m’interrogiez sur les ODD. Je vous invite à rejoindre le groupe de travail que nous allons créer afin d’accompagner l’élaboration de la feuille de route. En Finlande, par exemple, le budget est aligné sur les objectifs de développement durable, qui sont d’ores et déjà inclus dans la maquette budgétaire. Il serait intéressant d’entamer notre réflexion par la lecture du rapport devant être remis par le Gouvernement en application de la loi du 13 avril 2015 visant à la prise en compte des nouveaux indicateurs de richesse dans la définition des politiques publiques, mais nous ne l’avons pas encore obtenu.

La commission en vient à l’examen des amendements.

Article 39 et état B : crédits du budget général de l’État

La commission examine, en discussion commune, les amendements II-CD73 de M. Vincent Descoeur, II-CD81 et II-CD82 de Mme Jennifer De Temmerman, rapporteure pour avis, II-CD72 de M. Vincent Descoeur et II-CD61 de M. Matthieu Orphelin.

M. Vincent Descoeur. L’amendement II-CD73 vise à traduire dans le PLF l’engagement du Président de la République de doubler l’enveloppe du Fonds chaleur, afin d’apporter le soutien nécessaire au développement de la chaleur renouvelable et de récupération, qui ne se développe pas à un rythme satisfaisant. Je rejoins ainsi la préoccupation de Mme Auconie qui remarquait que, le budget de l’ADEME n’augmentant pas, on pouvait s’interroger sur l’évolution des moyens consacrés à ce fonds.

Mme Jennifer De Temmerman, rapporteure pour avis. Le fait que plusieurs d’entre nous – appartenant, qui plus est, à des groupes différents – aient déposé des amendements sur le sujet montre que nous partageons la volonté de voir la France respecter la trajectoire qu’elle s’est fixée et réussir sa transition écologique.

Je suis inquiète, car l’ADEME s’est vu confier de nombreuses nouvelles missions, qu’il s’agisse du plan « Hydrogène » ou de la feuille de route sur l’économie circulaire. Il serait dommage qu’elle doive réduire la voilure dans ces domaines pour pouvoir abonder le Fonds chaleur. Je suis, pour ma part, favorable à un doublement direct de ce fonds. C’est pourquoi je propose, par l’amendement II-CD81, d’augmenter de 200 millions les crédits du programme « Prévention des risques » par une ponction sur le programme « Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables ». Quant à l’amendement II-CD82, il constitue une solution de repli puisqu’il tend à n’augmenter ces crédits que de 100 millions.

M. Vincent Descoeur. L’amendement II-CD72 est de repli. Il tend à traduire dans le PLF l’engagement pris, cette fois-ci, par le ministre de la transition écologique et solidaire, qui a annoncé au Sénat que le montant des crédits du Fonds chaleur serait porté à 300 millions d’euros en 2019. Comme vous pouvez le constater, je multiplie les efforts pour rendre service à la majorité…

Mme Véronique Riotton. Manifestement, nous nous rejoignons tous. L’amendement de Mme De Temmerman est très ambitieux. Le nôtre, le II-CD61, vise, quant à lui, à abonder de 85 millions le programme 181 afin de porter les crédits du Fonds chaleur à 300 millions d’euros, conformément à l’annonce du ministre de la transition écologique et solidaire.

M. Jean-Charles Colas-Roy. Je comprends l’objet de ces amendements, mais Mme Brulebois a indiqué, tout à l’heure, que le ministre préciserait à la fin du mois, lors de la présentation de la PPE, les modalités selon lesquelles il souhaitait respecter l’engagement pris devant le Sénat. Dès lors, peut-être est-il souhaitable d’attendre ses annonces.

M. Matthieu Orphelin. Nous reparlerons de ce sujet en séance, mais je retiens pour l’heure la convergence de vues des rapporteures pour avis et des groupes sur la nécessité de progresser s’agissant du Fonds chaleur et des énergies renouvelables. Envoyons donc dès maintenant un signal clair à l’ensemble des acteurs – ce qui ne sera jamais que la traduction d’un engagement fort pris par le Gouvernement.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Mes chers collègues, le fait que vous soyez si nombreux à demander que l’on abonde les crédits de l’ADEME montre notre volonté et notre intérêt commun pour une transition énergétique réussie, qui se trouve au cœur des missions de cette agence.

Le Gouvernement s’est engagé devant la représentation nationale, au Sénat, le 2 octobre dernier, à porter les crédits du Fonds chaleur à 300 millions d’euros d’ici à 2019, dans le cadre de la PPE. Je pense que nous pouvons accorder notre crédit à la parole gouvernementale, qui est la traduction de la parole portée pendant la campagne présidentielle.

Il paraît toutefois difficile d’accepter des amendements visant à augmenter les crédits de l’ADEME en déplaçant des crédits d’autres programmes, car ils conduisent à privilégier une seule action, la transition énergétique, au détriment des autres actions de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », actions qui sont également essentielles, comme on vient de le voir – je pense notamment à la prévention des risques. Cela reviendrait, permettez-moi cette expression, à déshabiller Pierre pour habiller Paul. Et cela n’empêcherait sans doute pas Bercy de ponctionner le fonds de roulement de l’ADEME, comme cela a déjà été le cas par le passé…

Par ailleurs, l’argument consistant à dire, comme je l’ai lu dans un exposé sommaire, qu’une augmentation du budget permettrait de compenser le gel probable, du fait des élections, des investissements des collectivités locales en 2020, ne me semble pas recevable.

Enfin, certains amendements feraient tomber, du fait de leurs gages, d’autres amendements ultérieurs, tel celui relatif au chèque énergie.

C’est pourquoi je vous invite à retirer vos amendements pour les redéposer en séance publique, où vous pourrez redéployer votre argumentaire afin que le ministre puisse vous donner lui-même l’assurance de son engagement et vous en préciser les moyens.

Mme Jennifer De Temmerman, rapporteure pour avis. Mon discours sera différent.

Comme vous le soulignez, Madame Brulebois, la manière dont les mesures proposées sont gagées pose problème. Pour ma part, j’ai veillé à ne pas toucher aux dépenses de personnel, ce qui explique la complexité de mon dispositif, mais ce qui peut aussi en faire la force par rapport aux autres propositions.

L’enjeu est le suivant : comment la France va-t-elle atteindre les objectifs qu’elle s’est fixés dans la loi, si les moyens nécessaires ne sont pas votés ? Le ministre l’a dit lors de son audition : les dépenses sont contraintes et il faut faire preuve de sérieux, en mettant derrière chaque dépense une recette. Mais le cadre de la mission « Écologie » n’est pas forcément le bon ; les ressources nécessaires doivent être trouvées, certes, mais sur l’ensemble du budget. De ce point de vue, d’ailleurs, tous ceux qui ont déposé des amendements allant dans le même sens que moi auraient peut-être pu faire des propositions plus rigoureuses si l’architecture du budget avait été plus claire.

Cependant, tel n’est pas le fond du sujet. Il s’agit en réalité que le doublement soit opéré maintenant, et non l’année prochaine ou l’année suivante. Si l’effort ne porte pas sur le budget 2019, il sera trop tard. Quant à moi, j’estime recevable l’argument selon lequel les investissements des collectivités locales seront gelés en 2020. Le processus d’investissement s’inscrit dans un temps long : retarder son démarrage, c’est courir le risque d’arriver après la bataille.

Je pense donc qu’il faut débloquer dès maintenant 200 millions d’euros pour l’ADEME. Cela impliquera nécessairement des arbitrages compliqués, mais la transition écologique doit rester un cap prioritaire. Je vous invite donc, chers collègues, à adopter mon amendement. Ainsi, le ministre d’État aura le temps de préparer sa réponse d’ici à la séance.

La commission adopte l’amendement II-CD73.

En conséquence, les autres amendements en discussion commune tombent.

La commission examine ensuite l’amendement II-CD64 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Cet amendement vise à ajouter 30 millions d’euros au plan de déploiement de l’hydrogène pour la transition énergétique. Ce plan a été annoncé en juillet dernier par le Gouvernement, qui a égrené une kyrielle d’actions structurantes et ambitieuses, en visant un soutien public de 100 millions d’euros par an dès 2019. Ce soutien annuel serait poursuivi les années suivantes, en fonction de la réussite des premières années.

En examinant les différents documents budgétaires, je ne retrouve pas, pour l’instant, ces 100 millions d’euros. Si l’on additionne le programme très ambitieux que vient de lancer l’ADEME, mais doté pour l’heure d’environ 20 millions d’euros seulement – un appel à projets a été lancé la semaine dernière – et les 50 millions d’euros d’avances remboursables prévues dans le Grand Plan d’investissement (GPI), on constate qu’il manque au moins 30 millions d’euros pour parvenir aux 100 millions annoncés.

Cet amendement vise donc à engager la discussion avec le Gouvernement sur la concrétisation de son engagement à trouver 100 millions d’euros par an. Un tel effort paraît indispensable, étant donné l’ensemble des actions envisagées dans le plan de déploiement de l’hydrogène, plan sur lequel nous devons exercer notre rôle de contrôle de l’action du Gouvernement.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Le financement du plan « Hydrogène » est effectivement essentiel dans le cadre du développement des mobilités propres. Sur le fond, on ne peut donc que souscrire à cette idée.

Cependant, j’émettrai un avis réservé. D’abord, en raison de la ponction sur l’action 03 à laquelle conduirait l’adoption de cet amendement.

En outre, le financement actuel du fonds « Hydrogène » est suffisant, ce fonds étant doté de 50 millions d’euros sur cinq ans, auxquels s’ajoutent 50 millions d’euros au titre du PIA.

Je vous invite donc à retirer votre amendement.

M. Matthieu Orphelin. Nous connaissons tous la mécanique du gage, et je ne voudrais pas qu’il y ait d’ambiguïté sur le fait que personne ne gage son amendement par plaisir : c’est tout bonnement la seule solution à notre disposition.

Le Gouvernement avait pris l’engagement, dans un document de juillet dernier, de financer à hauteur de 100 millions d’euros le plan « Hydrogène » sous la forme de soutiens publics. Je rappelle que d’autres pays européens, ainsi que le Japon, ont investi des montants plus importants. Je vais retirer mon amendement, mais pour en rediscuter en séance avec le Gouvernement, car il est important que les engagements pris soient tenus.

Sans rechercher la polémique, je redis que, si l’on suit l’allocation des moyens publics de recherche en France sur les dix dernières années, on constate que l’énergie nucléaire reçoit autant d’argent que toutes les énergies renouvelables confondues.

L’amendement est retiré.

La commission examine l’amendement II-CD62 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Cet amendement vise à ouvrir, au profit des ménages ruraux, la possibilité d’une bonification du chèque énergie les années où le prix du pétrole est élevé.

Lorsque le prix du baril est élevé, il faut en effet plus de mesures redistributives. Le Gouvernement a déjà annoncé la semaine dernière une prime à la conversion automobile, et je m’en félicite. De même, le soutien au changement des chaudières au fioul va dans le bon sens.

Je pense qu’il faut aller plus loin et ajouter une mesure supplémentaire, à savoir cette bonification ponctuelle du chèque énergie, au profit des ménages en situation précaire vivant en zone rurale. Cela représente un redéploiement de 50 millions d’euros.

Mme Jennifer De Temmerman, rapporteure pour avis. Je suis un peu mal à l’aise pour vous répondre, car j’ai cosigné l’amendement pour me rendre compte, après coup, qu’il ne s’applique pas au bon programme budgétaire, mais au  programme 345.

Nous sommes donc devant une alternative : soit nous l’adoptons avec cette imperfection, pour envoyer un signal fort, car la hausse du prix du gaz va neutraliser l’augmentation du chèque énergie, soit vous le retirez et nous le retravaillerons pour le faire porter sur le bon programme budgétaire – l’action 02 du programme 345, pour être précise.

L’amendement est retiré.

La commission examine ensuite, en discussion commune, les amendements II-CD74 de Mme Mathilde Panot et II-CD75 de M. Loïc Prud’homme.

Mme Mathilde Panot. Je réponds d’abord au propos préliminaire tenu tout à l’heure par Mme la rapporteure pour avis : non, à nos yeux, il ne s’agit pas du tout d’abandonner la gestion des déchets nucléaires. L’ANDRA perçoit déjà des taxes affectées auxquelles on ne peut pas toucher, dont une taxe « Recherche » plafonnée à 65 millions d’euros dans le PLF et une taxe « Conception » dont le produit est estimé à 149 millions d’euros en 2019. Or, si l’on regarde le projet et les financements de l’ANDRA, on constate que ses personnels sont payés par les exploitants des installations nucléaires.

L’amendement II-CD74 porte sur le renforcement de la prévention des risques. J’ai déjà évoqué les réductions d’emplois à Météo France, mais on doit aussi s’alarmer du manque de moyens dont souffrent actuellement les communes pour entretenir leurs ouvrages d’art – en un mot, de la perte d’expertise publique. Il nous semble donc important de donner plus de moyens à Météo France.

L’amendement II-CD75 vise à faire respecter les dispositions de la loi de 2015 relatives à la transition énergétique qui ont trait à la rénovation des passoires énergétiques et aux 4,5 millions de ménages en situation de précarité énergétique. Il faut, là aussi, mettre des moyens supplémentaires.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Je ne suis pas favorable à ces amendements qui visent à supprimer des moyens alloués à l’ANDRA, car cette agence joue un rôle important dans la gestion des déchets radioactifs, pour laquelle la commission d’enquête animée par Mme Barbara Pompili a dessiné quelques pistes.

Je partage, cela dit, votre souhait d’augmenter les moyens humains dans le domaine de la prévention des risques. Aussi ai-je déposé un amendement en ce sens, en particulier pour abonder le programme 217.

La commission rejette successivement les amendements.

Elle examine ensuite l’amendement CD80 de Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Cet amendement vise à augmenter de 5 millions d’euros les crédits de l’ANSES destinés à financer les appels à projets.

L’ANSES nous alerte sur le fait que les risques émergents demandent une recherche de plus en plus experte. Elle a notamment identifié des risques sanitaires liés à l’économie circulaire, s’agissant par exemple du retraitement des pneus – vous avez tous entendu parler, je pense, des stades et des pistes synthétiques faits à base de pneus usagés. Dans un autre domaine, celui de la lutte contre les espèces invasives, la recherche est une entreprise toujours recommencée, car on croit souvent trouver des solutions qui finalement n’en sont pas…

Je propose que ces crédits nouveaux soient compensés par un prélèvement du même montant sur l’action 52 « Transport aérien » du programme 203 « Infrastructures et services de transport ».

M. Jean-Charles Colas-Roy. Avez-vous mesuré l’impact d’un tel prélèvement sur les dépenses financées par ce programme ?

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Il s’agit seulement du gage. Cet amendement est un amendement d’appel, mais il vise aussi à sensibiliser l’opinion à la question des moyens à investir dans la recherche en matière de prévention des risques. Nous avons besoin d’experts, de techniciens et d’ingénieurs ayant une compétence aiguë de ces risques émergents, liés entre autres aux effets « cocktail » provoqués par les mélanges de substances. Il faut vraiment insister sur la recherche dans ce domaine.

La commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement II-CD79 de Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Cet amendement a trait, lui aussi, à la prévention des risques. Les inspecteurs des installations classées doivent davantage pouvoir se déplacer sur le terrain s’ils veulent remplir leur mission convenablement, et ont en outre un important rôle d’accompagnement. Ils m’ont notamment signalé l’insuffisance des moyens consacrés à leur formation, dispensée à Paris alors qu’ils sont affectés dans toute la France. Il est pourtant essentiel qu’ils puissent mettre à jour leurs connaissances.

Je vous propose donc d’augmenter de 10 millions d’euros les crédits de paiement du programme 217 consacrés aux personnels œuvrant aux politiques du programme de prévention des risques.

La commission rejette l’amendement.

M. Alain Perea, président. Le vote sur les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » n’aura lieu que demain, lorsque nous aurons achevé d’entendre l’ensemble de nos rapporteurs pour avis.

Article 41 : Crédits du compte d’affectation spéciale « Transition énergétique »

La commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits du compte d’affectation spéciale « Transition énergétique ».

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Lors de sa réunion du mercredi 31 octobre 2018, suivant lavis favorable des rapporteurs pour avis M. Yannick Haury, M. Damien Pichereau, Mme Zivka Park, Mme Danielle Brulebois, Mme Jennifer De Temmerman et M. Jimmy Pahun, la commission du développement durable et de laménagement du territoire a émis un avis favorable à ladoption des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », Mme Mathilde Panot, rapporteure pour avis, exprimant un avis défavorable.

 

 


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   liste des personnes auditionnées

(par ordre chronologique)

Direction générale de la prévention des risques

– M. Cédric Bourillet, directeur général de la prévention des risques

– M. Patrick Soulé, adjoint au directeur général de la prévention des risques

– M. Christophe Josseron, chef du département des affaires générales et des systèmes d’information

Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME)

– M. Arnaud Leroy, président

– M. Fabrice Boissier, directeur général délégué

Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN)

– M. Jean-Christophe Niel, directeur général

– Mme Valérie Marchal, chargée des relations parlementaires auprès du directeur général

Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES)

– M. Roger Genet, directeur général

– M. Matthieu Schuler, directeur de l’évaluation des risques

– Mme Sarah Aubertie, chargée des relations institutionnelles

Déplacement à la DREAL de Provence - Alpes-Côtes d’Azur (PACA)

– Mme Corinne Tourasse, directrice régionale de la DREAL PACA

 Mme Marie-Françoise Bazerque, directrice générale adjointe de la DREAL PACA

– M. Patrick Couturier, chef de l’unité départementale Bouches-du-Rhône

– M. Stéphane Calpena, directeur du service prévention des risques

– M. Serge Planchon, responsable du pilotage des crédits du BOP 181

Visite du site Total – La Mède

– M. Georges Fauque, responsable du département prévention industrielle

– M. François Bourasse, directeur de la Plateforme de La Mède

Visite du site de l’entreprise Alteo et du site « Mange Garri »

– M. Eric Duchenne, directeur des opérations

Déplacement à Lons-le-Saunier

– M. Pierre Chrisment, chef de l’Unité départementale du Jura

– M. Flavien Simon, chef du service prévention des risques de la DREAL Bourgogne-Franche-Comté

– M. Stéphane Chipponi, secrétaire général de la préfecture du Jura et sous-préfet de Lons-le-Saunier

Visite de l’entreprise CHIMIREC

– M. Christophe Savel, directeur du site de Montmorot

– M. Sébastien Dupuy, directeur adjoint du site

– M. Christophe Maillet, directeur général adjoint de la société CHIMIREC

Visite de l’entreprise GCPAT

– M. Olivier Scubla, directeur du site

– Mme Félicie Loison, responsable qualité sécurité environnement du site

– M. Philippe Antoine, maire de Larnaud, conseiller départemental du Jura.


([1]) Circulaire du Premier ministre, 24 juillet 2018, n° 6029/SG, p. 3.

([2]) Loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte.

([3]) Audition du 3 octobre 2018 de la direction générale de la prévention des risques du ministère de la transition écologique et solidaire.

([4]) Réponse au questionnaire budgétaire présenté par votre rapporteure pour avis.

([5]) p. 256 du projet annuel de performances, programme 181, loi de finances 2019.

([6]) http://www.assemblee-nationale.fr/15/rap-enq/r1122.asp

([7]) http://www.assemblee-nationale.fr/15/rap-enq/r1122.asp

([8]) La classification comme danger de deuxième catégorie implique la possibilité de définir des mesures règlementaires ou de reconnaître l’action menée par certaines filières de production.

([9]) Arrêté préfectoral du 1er juillet 1996.

([10]) Ce concept a été défini par M. Christopher Wild, directeur du Centre international de recherche sur le cancer (CIRC).

([11]) http://assnat.fr/JsoftM