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N° 1285

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 3 octobre 2018.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE LAMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2019 (n° 1255)

TOME IX

COHÉSION DES TERRITOIRES

 

 

PAR Mme Florence LASSERRE-DAVID

Députée

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 Voir les numéros : 1255, 1302 (Tome III, annexe 9).


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  SOMMAIRE

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Pages

introduction

premiÈre partie : le programme 112 « impulsion et coordination de la politique damÉnagement du territoire »

I. prÉsentation gÉnÉrale du programme 112

II. de nombreux outils de contractualisation ÉtatcollectivitÉs territoriales

A. Les contrats de plan ÉTat-RÉgion

B. les contrats de ruralitÉ

1. Un outil souple et dédié aux ruralités

2. La participation financière de lÉtat

3. Un premier bilan globalement positif

C. Les autres contrats du programme 112

1. Le Pacte État-métropoles

2. Le programme « Action Cœur de ville »

3. Le dispositif daccompagnement territorial du redéploiement des armées

III. Les actions en faveur de la compÉtitivitÉ des territoires

A. La prime d’amÉnagement du territoire (PAT)

B. Les pÔles de compÉtitivitÉ

C. Le numÉrique

1. Le déploiement des infrastructures

2. Les usages du numérique : pour une démarche active de promotion des tiers-lieux

IV. vers la crÉation de lagence nationale de la cohÉsion des territoires

DeuxiÈme partie : les maisons de services au public (m.S.A.P)

I. les dispositions lÉgislatives et leur Évolution

II. le dÉploiement des MSAP

III. le financement des MSAP

A. Le financement des MSAP portÉes par des collectivitÉs territoriales ou des associations

B. Le financement des MSAP portées par La Poste

C. Le financement des MSAP, victime de leur succÈs

IV. un foisonnement disparate qui appelle lÉlaboration dun nouveau modÈle pour les MSAP

A. De belles rÉussites… mais pas partout

B. Une volontÉ politique forte de « mettre À niveau » le dispositif des MSAP, mais un chantier qui commence À peine

TroisiÈme partie : le programme « interventions territoriales de lÉtat » (programme 162)

I. prÉsentation gÉnÉrale du programme

A. un programme budgÉtaire dune nature particuliÈre

B. le PITE dans le projet de loi de finances pour 2019

II. Laction « Eau – agriculture en bretagne »

III. le programme exceptionnel dinvestissements (pEI) en faveur de la corse

IV. le plan daction gouvernemental pour le marais poitevin

V. le plan chlordÉcone en guadeloupe et en martinique

VI. le plan littoral 21 en occitanie

EXAMEN EN COMMISSION

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES


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   introduction

La mission « Cohésion des territoires » rassemble, depuis la loi de finances pour 2018, les programmes auparavant rattachés aux missions « Égalité des territoires et logement » et « Politique des territoires », et couvre ainsi l’ensemble des actions mises en œuvre par le ministère de la cohésion des territoires en faveur du développement et de l’aménagement du territoire, du renouvellement urbain, de la solidarité entre les territoires, du logement, de l’hébergement et de l’habitat durable. Le projet de loi de finances pour 2019 prévoit de doter cette mission d’un montant total de 16,16 milliards d’euros en autorisations d’engagement et de 16,05 milliards d’euros en crédits de paiement.

Comme l’a souligné le secrétaire d’État, M. Julien Denormandie, auditionné le 9 octobre dernier par la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, l’intitulé de ce ministère « traduit en premier lieu la volonté politique de réduire les fractures territoriales ». Le ministère de la cohésion des territoires mène des actions transversales mais son budget ne représente quune partie des crédits du budget de lÉtat relatifs à laménagement du territoire : au sein du budget de l’État, pas moins d’une trentaine de programmes, rattachés à différentes missions et donc à plusieurs ministères, comportent des crédits pouvant être considérés comme une contribution de l’État à l’aménagement du territoire.

Effort financier total de l’État en faveur de la politique d’amÉnagement du territoire (crÉdits de paiement, en milliers d’euros)

 

 

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Prévision 2018

Prévision 2019

Dépenses du budget général de l’État

Programme 112

300,23

279,78

281,10

263,15

249,14

214,95

253,23

243,07

Programme 147

483,15

452,11

420,89

386,78

397,23

343,44

405,86

490,85

Programme 162

83,91

53,27

53,14

22,41

38,87

39,20

42,03

42,02

Autres programmes

5 198,86

5 509,98

5 169,15

5 002,82

5 819,99

6 392,24

7 108,25

7 358,04

Total

6 066,15

6 295,14

5 924,28

5 675,16

6 505,23

6 989,82

7 809,37

8 133,98

Dépenses fiscales

12 014

10 553

12 678

13 079

14 246

15 964

14 872

12 112

Sources : Ministère de la cohésion des territoires et Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET)

NB. : le programme 112 (Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire), le programme 147 (Politique de la ville) et le programme 162 (Interventions territoriales de l’État) font partie de la mission budgétaire « Cohésion des territoires ». Les « autres programmes » mentionnés dans le tableau sont une trentaine de programmes placés dans d’autres missions budgétaires.

Le présent rapport examine les crédits du programme 112, intitulé « Impulsion et coordination de la politique daménagement du territoire », et du programme 162, intitulé « Interventions territoriales de lÉtat ».

Le premier est piloté et géré par le ministère de la cohésion des territoires et par le Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), tandis que le second est géré par les services du ministère de l’intérieur pour le compte du Premier ministre.

À eux deux, ces programmes représentent moins de 2 % des crédits de la mission « Cohésion des territoires », mais ils permettent de financer ou de cofinancer une grande diversité dactions de lÉtat et des collectivités territoriales en faveur des citoyens et des entreprises sur les territoires.

Votre Rapporteure pour avis salue la méthode et les priorités de l’action du Gouvernement, qui comportent trois orientations principales.

Tout d’abord, une méthode de travail consistant à mieux accompagner les projets de collectivités locales, et qui constitue une évolution majeure par rapport aux démarches antérieures car, comme l’a rappelé le secrétaire d’État lors de son audition, « lÉtat, qui a été planificateur, doit savoir tenir un rôle de facilitateur ». Cette méthode, déjà mise en œuvre à travers plusieurs démarches de contractualisation et de partenariat comme par exemple « Action Cœur de ville », trouvera prochainement à s’appliquer également dans un nouveau cadre, celui de la future Agence nationale de cohésion des territoires, qui sera créée dans les prochains mois.

Le deuxième axe est l’amélioration de laccessibilité à un certain nombre de services, notamment des services publics. Cette amélioration porte à la fois sur les infrastructures – en particulier dans le numérique et la téléphonie mobile – et sur les usages.

Votre Rapporteure pour avis a choisi détudier particulièrement deux de ces actions publiques en faveur des usagers : les maisons de services au public (MSAP), qui existent depuis plusieurs années mais qui constituent un « chantier » encore inachevé, et les « tiers lieux », qui émergent de manière spontanée mais que le Gouvernement a décidé de promouvoir de manière active.

Enfin, le troisième axe est la poursuite du soutien au développement économique des territoires. Le présent projet de loi de finances va permettre aux outils existants, notamment l’opérateur Business France et le Fonds national d’aménagement et de développement du territoire (FNADT), de continuer à produire leurs effets positifs, et de lancer de nouvelles démarches comme « Territoires d’industrie ».

Votre Rapporteure pour avis invite la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire à émettre un avis favorable sur les programmes dont elle s’est saisie pour avis.


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   premiÈre partie :
le programme 112 « impulsion et coordination de la politique d’amÉnagement du territoire »

I.   prÉsentation gÉnÉrale du programme 112

Le programme 112 a pour objet la préparation et la mise en œuvre des décisions du Gouvernement en matière d’aménagement et de compétitivité des territoires. Il se caractérise par une forte dimension interministérielle, tant dans les réflexions préparatoires que dans la nature des actions engagées. Il concourt à la réalisation de deux objectifs : dune part, renforcer lattractivité économique et la compétitivité des territoires, et dautre part, assurer la cohésion et léquilibre des territoires et favoriser leur développement durable. Il concerne à la fois l’attractivité des territoires, leur développement économique et l’accessibilité des services au public, et il est notamment l’outil du développement du numérique.

Le projet de loi de finances pour 2019 prévoit, pour le programme 112, un montant denviron 201,66 millions deuros en autorisations dengagement (+ 7,34 millions deuros par rapport à la loi de finances pour 2018) et denviron 243 millions deuros en crédits de paiement (- 10,16 millions deuros par rapport à la loi de finances pour 2018).

les crÉdits de paiement du programme 112

(en euros)

Intitulé de l’action

Exécution 2017

LFI 2018

PLF 2019

01 - Attractivité économique et compétitivité des territoires

67 285 711

95 433 461

82 098 992

02 - Développement solidaire et équilibré des territoires

112 641 474

127 189 499

130 823 968

04 - Instruments de pilotage et d’étude

35 020 599

30 609 189

30 149 372

TOTAL

214 947 784

253 232 149

243 072 332

Sources : Rapport annuel de performance annexé au projet de loi de règlement pour 2017 et Projet annuel de performance annexé au projet de loi de finances pour 2019.

Votre Rapporteure pour avis note quau sein de lenveloppe globale de crédits proposée pour 2019 pour le programme 112, 181,8 millions deuros en crédits de paiement sont destinés à être versés aux collectivités locales ([1]) :

– 113,2 millions d’euros pour le financement d’actions initiées dans le cadre des contrats de projet État-région 2007-2014 et des contrats de plan État-région 2015-2020 ;

– 33,4 millions d’euros pour le financement des restes-à-payer concernant les contrats de ruralité ;

– 35,2 millions d’euros pour d’autres financements (accompagnement de la redynamisation des territoires touchés par des fermetures d’implantations militaires, revitalisation des centres-bourgs, soutien financier aux maisons de services au public).

Par ailleurs, le programme 112 comporte une subvention pour charges de service public versée à l’opérateur Business France (environ 5,77 millions d’euros pour 2019). Business France est une agence chargée d’aider les petites et moyennes entreprises et les entreprises de taille intermédiaire à mieux se projeter à l’international et à attirer davantage d’investissements étrangers en France pour y créer ou y reprendre des activités créatrices d’emplois.

Le programme 112 comporte un outil budgétaire transversal, le Fonds national d’aménagement et de développement du territoire (FNADT). Ce fonds a été créé en 1995 pour regrouper les crédits consacrés, notamment, aux interventions pour l’aménagement du territoire, à l’aide aux initiatives locales pour l’emploi, au développement des zones de montagne et à l’aménagement rural. Il soutient en investissement et en fonctionnement les actions qui permettent de mettre en œuvre les stratégies nationales dans le domaine de l’aménagement du territoire, et verse des aides financières aux porteurs de projets. Le versement d’une partie des crédits du FNADT est déconcentré à l’échelon des préfets de région. Cette enveloppe déconcentrée alimente, d’une part, la mise en œuvre de dispositifs contractuels comme les CPER, et d’autre part, des financements non contractualisés (par exemple pour les pôles de compétitivité ou les subventions versées à des associations œuvrant pour l’aménagement du territoire).

Votre Rapporteure pour avis ayant choisi de consacrer une attention particulière au dispositif des maisons de services au public (MSAP), celui-ci fait l’objet de la deuxième partie du présent rapport. Les principaux autres dispositifs financés par le programme 112 sont rapidement présentés ci-après.

II.   de nombreux outils de contractualisation ÉtatcollectivitÉs territoriales

Les crédits du programme 112 contribuent au financement de nombreux contrats conclus entre l’État et les collectivités territoriales. Il s’agit principalement des contrats de plan État-région (CPER) mais aussi, pour des montants moindres, des conventions du programme « Action Cœur de ville », des contrats de ruralité, des contrats de redynamisation des sites de défense (CRSD) dans les territoires affectés par des redéploiements militaires, et du pacte État-métropoles.

Le CGET travaille sur un projet de création d’un nouveau type de contrats, les « contrats de cohésion territoriale », qui pourraient se substituer à certains dispositifs contractuels existants comme les contrats de ruralité, mais dont les caractéristiques ne seront définies qu’après la création de l’Agence nationale de cohésion des territoires puisqu’il s’agirait de contrats signés par les préfets en tant que délégués territoriaux de l’agence, préconisés par le rapport de préfiguration de celle-ci (voir IV. de la première partie du présent rapport).

Votre Rapporteure pour avis reconnaît que la multiplicité des dispositifs contractuels entre l’État et les collectivités territoriales pose un problème global de lisibilité et de complémentarité, mais a entendu les inquiétudes de certains acteurs sur les problèmes que pourraient soulever, d’une part, la création d’une catégorie supplémentaire de contrats, et d’autre part, la disparition par « absorption » dans ces nouveaux contrats, de contrats qui donnent actuellement satisfaction.

A.   Les contrats de plan ÉTat-RÉgion

Les contrats de plan État-région 2015-2020 ont succédé aux contrats de projet État-région de la période précédente (2007-2014), mais sont, comme l’étaient ceux-ci, des accords de grande ampleur, portant sur de nombreuses thématiques. Ainsi, pour les régions de France métropolitaine ([2]), les CPER actuels comportent un objectif transversal, l’emploi, cinq volets thématiques (la mobilité multimodale ; l’enseignement supérieur et la recherche ; l’innovation, les filières d’avenir et l’usine du futur ; la couverture du territoire par le très haut débit et le développement de l’usage du numérique ; la transition écologique et énergétique) et un volet territorial destiné à assurer la cohérence entre les interventions de l’État et celles des collectivités territoriales. Le CGET pilote et coordonne au niveau interministériel la mise en œuvre des CPER.

En raison de l’entrée en vigueur de la nouvelle carte des régions en 2016, une « revoyure » de chaque CPER a été menée entre l’État et les nouveaux exécutifs régionaux afin d’ajuster le contenu des contrats à ce nouveau contexte. Cette révision des CPER, par l’ajout d’avenants, a porté prioritairement sur le volet « Enseignement supérieur et recherche » et sur le volet « Mobilité » ; elle a fait évoluer la liste des opérations contractualisées, et l’État s’est engagé à abonder les CPER de 245,7 millions de crédits supplémentaires par rapport aux accords initiaux. La revoyure n’a toutefois pas permis de procéder à la fusion des CPER à l’échelle des nouvelles régions.

Le budget général de lÉtat apporte sa contribution financière par le biais des crédits ouverts au programme 112 de la mission « Cohésion des territoires », mais des programmes dautres missions sont également contributeurs, en particulier la mission « Écologie, développement et mobilité durables » (plus de 50 % des crédits contractualisés par lÉtat sont affectés au volet « mobilité » des CPER), la mission « Recherche et enseignement supérieur » et la mission « Outre-mer ». Dautre part, les budgets de nombreux opérateurs publics comme lADEME, lAgence française pour la biodiversité ou les agences de leau contribuent également au financement de la mise en œuvre de ces contrats.

Concernant la contribution financière de l’État au titre du programme 112, il convient de noter qu’elle abonde les crédits affectés au volet numérique des CPER, par le biais du FNADT, et qu’elle finance également de nombreux projets qui figurent dans les volets territoriaux des CPER. Ces volets sont ciblés sur les territoires qui présentent des enjeux particuliers en termes de coordination des interventions publiques, de solidarité nationale et de développement territorial intégré. Les crédits du FNDAT ont par exemple permis dapporter des contributions au financement du programme de gestion de la bande côtière de Lacanau (la subvention du FNADT couvrant plus de 10 % du coût total) en Nouvelle-Aquitaine, de la revitalisation de la friche de lusine Doux et de la création dun pôle de formation, de coworking et de télétravail en Bretagne, ou encore de la revitalisation du centre-bourg des Trois-Ilets en Martinique.

Pour 2019, le projet de loi de finances prévoit que les crédits affectés à la mise en œuvre des CPER 2007-2014 et 2015-2020 représenteront 62 % des autorisations dengagement et 47 % des crédits de paiement du programme 112 (29 millions d’euros de l’action 01 « Attractivité économique et compétitivité des territoires » et 76 millions d’euros de l’action 02 « Développement solidaire et équilibré des territoires »).

B.   les contrats de ruralitÉ

1.   Un outil souple et dédié aux ruralités

Initiés à la suite du comité interministériel aux ruralités du 20 mai 2016, les contrats de ruralité visent à accompagner les territoires ruraux dans leurs projets de développement, en coordonnant tous les dispositifs et moyens existants et en fédérant l’ensemble des partenaires institutionnels, économiques et associatifs en vue d’accélérer la réalisation de projets concrets au service des habitants et des entreprises. Leur mise en œuvre s’est appuyée sur une circulaire ministérielle aux préfets de région et de département en date du 23 juin 2016. Celle-ci précisait notamment que les contrats de ruralité doivent être signés avec les pôles déquilibre territorial et rural (PETR) ou, à défaut, les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) concernés et peuvent associer d’autres collectivités locales, ainsi que tout autre acteur (chambre consulaire, opérateur public, syndicat mixte, parcs naturels régionaux…) intéressé par le projet de développement local.

La démarche reposant sur une très large déconcentration, les préfets ont bénéficié dune grande marge de manœuvre pour informer, par tous moyens, les collectivités de l’existence de ce nouveau dispositif, sélectionner les territoires retenus et négocier les contrats. Une analyse de la première année d’application du dispositif réalisée par l’Assemblée des communautés de France (AdCF) et l’Association nationale des pôles territoriaux et des pays (ANPP) a noté que certains préfets ont choisi de contractualiser en priorité avec des EPCI, sans tenir compte de l’existence de PETR dans leur ressort géographique de compétence. Au niveau national, le CGET assure un suivi des signatures et joue un rôle de conseil auprès des préfets.

Un élément de « souplesse » des contrats de ruralité tient à ce qu’il nexiste pas de règle unifiée de répartition des crédits entre les territoires ; celle-ci a été laissée à l’appréciation des préfets de région, en fonction des réalités locales. Certains d’entre eux ont ainsi procédé à une répartition uniforme entre les départements en fonction de leur poids démographique ; d’autres ont pris en compte un ensemble de critères comme la densité de population pour définir une répartition entre les départements ; d’autres enfin ont conservé une partie des crédits au niveau régional pour abonder des projets plus structurants.

Chaque contrat de ruralité doit s’articuler autour de six volets prioritaires, susceptibles d’être complétés en fonction des besoins locaux : l’accessibilité des services et des soins ; le développement de l’attractivité (économie, numérique, téléphonie mobile, tourisme…) ; la redynamisation des bourgs-centres, le renforcement des centralités et le soutien au commerce de proximité ; les mobilités ; la transition écologique ; la cohésion sociale.

2.   La participation financière de l’État

Une part de la dotation de soutien à linvestissement local (DSIL) représentant 216 millions deuros a été dédiée aux contrats de ruralité pour la période 2016-2020 ([3]). Cette enveloppe avait été répartie entre régions en amont de la signature des premiers contrats, pour des montants allant, en France métropolitaine, de 2 millions d’euros pour la Corse et 8,6 millions d’euros pour Centre-Val de Loire à 21,9 millions d’euros pour la région Grand Est et 22,7 millions d’euros pour la région Auvergne-Rhône-Alpes. Mais selon l’étude précitée AdCF-ANPP, cette ventilation s’est révélée inadaptée au nombre de contrats effectivement signés, bien supérieur aux anticipations dans certaines régions, ce qui a eu pour résultat un montant moyen de DSIL par contrat très inégal selon les régions.

Les fonds qui peuvent, au sein du budget de l’État, être mobilisés pour le financement d’un contrat de ruralité ne proviennent qu’en partie de la DSIL : il peut en effet s’agir aussi de crédits du FNADT et du volet territorial des CPER (programme 112), et de crédits d’autres ministères comme le ministère de la culture.

crÉdits de paiement du programme 112
affectÉs aux contrats de ruralitÉ en 2017

(en millions d’euros)

Programme 112

Crédits de paiements

Action 01 « Attractivité économique et compétitivité des territoires »

Interventions économiques

0,55

Soutien à la mobilité

0,38

Soutien à l’ingénierie

0,07

Action 02 « Développement solidaire et équilibré des territoires »

Revitalisation des centres-bourgs

1,92

Développement des services au public

2,50

Usages du numérique

0,16

Transition écologique et énergétique

0,68

Cohésion sociale

1,02

Total - exécution 2017

7,28

Source : rapport annuel de performances annexé au projet de loi de règlement pour 2017.

Votre Rapporteure pour avis note que les contrats de ruralité signés après le 1er janvier 2018 ne sont plus intégrés dans la mission « Cohésion des territoires » (programme 112) mais dans une autre mission budgétaire, parce que la DSIL, qui avait au départ été créée à titre exceptionnel en 2016-2017, a été pérennisée ([4]) et intégrée par la loi de finances pour 2018 dans les financements de droit commun destinés aux collectivités locales, qui relèvent de la mission budgétaire « Relations avec les collectivités territoriales ».

Le projet de loi de finances pour 2019 comporte donc deux enveloppes de crédits distinctes pour les contrats de ruralité :

● dans le programme 119 de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », un montant total de 503,5 millions d’euros de crédits de paiement est prévu pour la DSIL, dont une partie sera affectée à la mise en œuvre des contrats de ruralité signés depuis le 1er janvier 2018 (cette part n’est pas précisément chiffrée dans le projet annuel de performance) ;

● dans le programme 112 de la mission « Cohésion des territoires », un montant de 33,4 millions d’euros est prévu pour la mise en œuvre des contrats de ruralité signés en 2016-2017.

3.   Un premier bilan globalement positif

Au 31 décembre 2016, 40 contrats de ruralité avaient été signés ; en mars 2017, le nombre de contrats atteignait 90, selon l’étude précitée AdCF-ANPP. La date-butoir pour la signature des contrats avait été initialement fixée au 30 juin 2017, mais le Gouvernement a affiché sa volonté de poursuivre le processus. Selon les informations fournies par les services du ministère à votre Rapporteure pour avis, fin 2017, 463 contrats de ruralité étaient signés, dont 93 avec des PETR. Au 1er octobre 2018, selon le CGET, 485 contrats de ruralité étaient signés ou en cours de signature.

Le ministère de la cohésion des territoires a souhaité effectuer un « bilan flash » du dispositif, à partir dune évaluation qualitative réalisée sur six territoires test. Ce bilan a été présenté par le CGET en mai 2018. Il en ressort que la mise en place des contrats de ruralité, dans des délais contraints, a été particulièrement appréciée des acteurs locaux en ce quelle a permis à ces territoires de disposer dune approche plus globale dans leur relation avec lÉtat et de bénéficier de crédits utiles à la finalisation des plans de financement de certains de leurs projets.

Cette appréciation très positive a également été présentée à votre Rapporteure pour avis par les représentants de lAssociation des maires ruraux de France (AMRF).

L’étude du CGET a permis de mettre en évidence le caractère hétérogène des contrats et des projets soutenus. Il ressort tout de même de l’étude AdCF-ANPP que certains items sont présents dans au moins 50 contrats de ruralité, parmi lesquelles des projets d’aménagement de centres-bourgs, des actions en faveur du tourisme local, des cheminements piétons ou cyclables, l’installation de bornes de recharge pour les véhicules électriques, des lieux d’accueil pour la petite enfance… Il convient de noter que l’État n’est pas intervenu dans la hiérarchisation des objectifs des contrats de ruralité.

Le CGET reconnaît que la démarche d’élaboration de ces contrats a été lancée de manière accélérée, laissant peu de temps aux acteurs concernés, et que la qualité des contrats s’en ressent. Fort logiquement, l’étude du CGET conclut que ce sont les contrats portés par des PETR, dotés de moyens en ingénierie, ou des EPCI constitués depuis plusieurs années qui apparaissent comme adossés aux projets de territoire les plus solides et les plus stratégiques.

En revanche, l’ambition initiale de ces contrats de fédérer l’ensemble des acteurs du développement local, y compris privés, s’est très peu traduite dans les faits. À de rares exceptions, les contrats ne rassemblent que des projets portés par des collectivités. L’association d’opérateurs comme l’ADEME, l’ANAH ou la Caisse des dépôts et consignations demeure très limitée – la Caisse des dépôts est toutefois partenaire d’un contrat sur cinq. C’est encore plus vrai de la contribution du mouvement associatif ou de la participation des citoyens, généralement absentes dans le processus d’élaboration des contrats.

Enfin, l’étude souligne les difficultés à promouvoir une véritable animation territoriale en raison des critères très limitatifs fixés par la loi de finances pour 2017 pour le financement des dépenses dingénierie (montant fixé initialement à 15 % des crédits et ramené en 2018 à 10 % ; ce montant devant en outre être rattaché à un projet particulier). Or, les collectivités sont inégalement dotées en moyens dingénierie ce qui, pour les moins structurées d’entre elles, peut rendre difficile l’élaboration d’un véritable projet stratégique de territoire. C’est l’une des principales problématiques auxquelles la création de la future Agence nationale de la cohésion des territoires devra répondre (voir IV. de la première partie du présent rapport).

C.   Les autres contrats du programme 112

1.   Le Pacte État-métropoles

Le Pacte État-métropoles a été annoncé par le Gouvernement le 25 mars 2016, et les 15 pactes métropolitains dinnovation déclinant ce plan national ont été signés entre novembre 2016 et mars 2017. La grande majorité des pactes porte sur la conception et la mise en place doutils et dispositifs « intelligents » pour inventer la ville de demain (réseaux énergétiques, plateformes de données…). Ces pactes ont été assortis des financements suivants : 53 % des financements ont été engagés par les métropoles elles-mêmes sur leurs projets ; une part provient de la DSIL dans le cadre du programme 112 (23 % des financements) ; 21 % des financements ont été apportés par dautres collectivités territoriales ; le reste des crédits a été apporté par dautres ministères, par des opérateurs de lÉtat et par dautres partenaires publics nationaux comme la Caisse des dépôts et consignations.

Chaque pacte doit comporter un volet lié au renforcement des coopérations entre la métropole et les territoires qui l’environnent, ces coopérations pouvant avoir des thématiques variées (les circuits courts et les filières alimentaires, la mobilité, le tourisme…).

Sur le programme 112, la couverture, par des crédits de paiement, des engagements pris dans le cadre du pacte État-métropoles se poursuivra à hauteur de 3,8 millions deuros pour 2019.

2.   Le programme « Action Cœur de ville »

Comme l’a rappelé le ministre M. Jacques Mézard lors de son audition à l’Assemblée le 2 octobre, il y a souvent, dans les villes moyennes, le sentiment que la métropolisation les laisse à l’écart ; il est donc apparu indispensable de « donner un coup de main » à ces villes moyennes avec un dispositif simple d’emploi, en regroupant les moyens de différents partenaires. La seule contrainte imposée est l’obligation d’obtenir à la fois la signature de la ville-centre et de l’intercommunalité dont elle fait partie.

Le programme « Action Cœur de ville » est un programme d’intervention coordonné par le CGET, doté d’une enveloppe globale de 5 milliards d’euros d’ici 2022 apportés par l’État, notamment par le biais de la DSIL, Action Logement (1,5 milliard d’euros), la Caisse des dépôts et consignations (1 milliard d’euros de fonds propres et 700 millions d’euros de prêts), l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) et plusieurs autres partenaires.

Le programme est ciblé sur 222 villes moyennes ([5]) et leurs centres‑villes, cœurs de vie de leurs agglomérations et des territoires environnants. Chaque convention est fondée sur les spécificités de chaque ville dans les domaines du logement, de l’offre commerciale et artisanale, des mobilités et des services.

Parallèlement, l’expérimentation en faveur de la revitalisation des centres-bourgs, initiée en 2014, se poursuit dans 54 territoires, avec la mise en œuvre de conventions de soutien à l’ingénierie financées par le FNADT.

3.   Le dispositif d’accompagnement territorial du redéploiement des armées

Le CGET coordonne et pilote, en lien avec le ministère des armées, les plans de redynamisation des territoires touchés par les redéploiements militaires, l’objectif étant de recréer un volume d’emplois et d’activité économique comparable à celui supprimé sur le territoire concerné. Ce dispositif d’accompagnement prend la forme de contrats de redynamisation de sites de défense (CRSD). Selon les informations communiquées à votre Rapporteure pour avis par les services du ministère, le dispositif a permis, à ce stade, de créer ou de maintenir environ 10 000 emplois directs.

Huit CRSD resteront actifs sur les années 2019 et suivantes, et un nouveau CRSD va être conclu en lien avec la fermeture de la base aérienne de Châteaudun prévue pour 2021. Le programme 112 comportera un montant de 8,35 millions deuros de crédits de paiement en 2019 pour ce dispositif.

III.   Les actions en faveur de la compÉtitivitÉ des territoires

A.   La prime d’amÉnagement du territoire (PAT)

La prime d’aménagement du territoire est une aide directe à l’investissement destinée à promouvoir l’implantation et le développement d’entreprises créatrices d’emplois et d’activités durables. Le dispositif de la PAT est un des rares dispositifs d’aide directe à l’investissement des entreprises existant au niveau national, et a un effet de levier avéré sur les aides versées par les collectivités locales. Il est encadré par le décret n° 2014-1056 du 16 septembre 2014, qui l’a recentré sur les PME. Le projet annuel de performances du programme 112 estime à 8 960 le nombre d’emplois qui ont été créés ou maintenus grâce à la PAT pendant l’année 2017. Le projet de loi de finances pour 2019 prévoit un montant de 19,08 millions d’euros pour ce dispositif.

B.   Les pÔles de compÉtitivitÉ

Le financement public des pôles de compétitivité est partagé entre l’État (différents ministères sont concernés, dont le ministère de la cohésion des territoires via l’action 01 du programme 112) et les collectivités territoriales. En 2019, les crédits qui seront versés par l’État sont destinés au financement du fonctionnement des structures porteuses des pôles de compétitivité labellisés pour une nouvelle phase de quatre ans (2019-2022). Dans ce cadre, le programme 112 sera mobilisé à hauteur de 2,6 millions d’euros.

C.   Le numÉrique

1.   Le déploiement des infrastructures

Le Président de la République a pris l’engagement que la couverture du territoire en haut débit fixe soit effective en 2020 et que le très haut débit soit accessible à 100 % des foyers en 2022. L’extension de la couverture en services mobiles s’inscrit désormais dans un accord conclu en janvier 2018 entre l’État, les opérateurs et l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), qui comporte un programme d’investissements de 3 milliards d’euros sur six ans, les opérateurs s’engageant à financer 5 000 nouveaux sites. Il s’agit d’engagements contraignants, dont l’ARCEP pourra sanctionner le non-respect.

2.   Les usages du numérique : pour une démarche active de promotion des tiers-lieux

Les transformations des territoires liées au numérique – lorsque les infrastructures les rendent possibles ! – sont nombreuses, notamment par le développement des nouvelles formes de travail que sont le télétravail, l’auto-entreprenariat et le cotravail (coworking ou bureaux partagés). En particulier, les espaces de coworking se multiplient depuis quelques années. Ils permettent, d’une part, aux personnes ne bénéficiant pas d’un lieu de travail d’avoir accès librement à des salles de travail et de réunion équipées d’une manière optimale, et d’autre part, de donner la possibilité à ceux qui le souhaitent de diversifier leurs lieux de travail.

Un rapport de mission sur le coworking ([6]) a été remis au Gouvernement le 19 septembre dernier par M. Patrick Lévy-Waitz, président de la fondation Travailler Autrement. Ce rapport dénombre plus de 1 800 tiers-lieux et souligne combien les tiers-lieux constituent une opportunité d’avenir pour les territoires, notamment pour les territoires ruraux où de nombreux espaces partagés sont déjà installés.

La notion de tiers-lieux vise à englober des espaces collectifs de travail très divers (espaces de coworking, mais aussi ateliers partagés, FabLabs ([7]), hacklabs ([8]), garages solidaires…), qui, selon le rapport de mission, « composent une solution hybride entre espace personnel et espace ouvert, domicile et travail, convivialité et concentration ». Le rapport regroupe les tiers-lieux en cinq catégories : les tiers-lieux d’activités (espaces de travail partagés pour des télétravailleurs, des travailleurs indépendants ou des communautés de personnes ou d’organisations), les tiers-lieux culturels, les tiers-lieux de service et d’innovation publique (dont font partie les maisons de services au public voir deuxième partie du présent rapport), les tiers-lieux d’innovation comme les FabLabs et les tiers-lieux sociaux.

La mission a constaté que de tels espaces sont souvent installés dans d’anciennes usines, des églises désaffectées, des locaux qui abritaient des services publics qui ont fermé… La mise à disposition de lieux désaffectés, gratuitement ou à bas prix, par une collectivité locale est un élément important pour le développement de ces tiers-lieux.

Dans le cadre de sa stratégie numérique, le Gouvernement a décidé, sur la base des préconisations du rapport :

– de créer un réseau national des tiers-lieux pour organiser et valoriser cette filière ;

– de mettre en place 300 « Fabriques des territoires » d’ici 2022 dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) et dans les villes petites et moyennes, qui seront des tiers-lieux structurants, de grande taille ;

– de créer, d’une part, un fonds de dotation de 20 millions d’euros par an sur trois ans, et d’autre part, un fonds d’investissement socialement responsable de 50 millions d’euros pour aider à la reconversion d’espaces en tiers-lieux. L’État s’engage donc à hauteur de 110 millions d’euros sur trois ans pour aider à créer et à pérenniser des tiers-lieux dans les territoires ;

– de reconnaître et de professionnaliser le métier d’animateur des tiers-lieux ;

– de favoriser la coopération public-privé en encourageant la mise à disposition de locaux par les collectivités et en formant les agents publics aux tiers-lieux.

Votre Rapporteure pour avis salue cette démarche engagée par le Gouvernement.

IV.   vers la crÉation de l’agence nationale de la cohÉsion des territoires

Le 17 juillet 2017, lors de la première réunion plénière de la Conférence nationale des territoires, le Président de la République a annoncé la création d’une Agence nationale de la cohésion des territoires. Le 9 avril 2018, le Premier ministre a confié au Commissaire général à l’égalité des territoires, M. Serge Morvan, une mission de préfiguration de cette nouvelle agence de l’État, destinée à mieux accompagner les projets des collectivités, en particulier celles qui sont faiblement dotées en ingénierie ou qui sont confrontées à des difficultés particulières. Le constat de départ du préfigurateur est que, trop souvent, des élus porteurs de projets ne parviennent pas à les faire aboutir. Cette agence, qui fédérera plusieurs organismes existants, devra développer une offre de services pour tous les territoires, de manière différenciée selon leurs besoins. Son organisation sera largement déconcentrée puisque les préfets constitueront les délégués territoriaux de l’agence.

Le projet annuel de performance de la mission « Cohésion des territoires » du projet de loi de finances pour 2019 présente la création de cette agence comme l’un des chantiers majeurs de la mission, et indique que l’agence aura vocation à intervenir dans le déploiement de grands programmes nationaux d’intervention (aménagement numérique du territoire, revitalisation des centres-villes, rénovation urbaine, accès aux services, accès aux soins…) mais aussi en appui spécifique aux territoires pour des projets particuliers.

Le Gouvernement conçoit donc cette future agence comme un « bras armé » de la politique de cohésion des territoires, comme l’incarnation de la nouvelle forme de partenariat entre l’État et les collectivités qu’il met en œuvre et comme un outil de rationalisation des instruments en faveur de la cohésion territoriale. À ce stade, le programme 112 ne comporte pas d’autorisations d’engagement ni de crédits de paiement pour la future agence.

Interrogé par votre Rapporteure pour avis, le directeur adjoint du cabinet du ministre de la cohésion des territoires a confirmé que les principes de fonctionnement proposés par M. Morvan dans son rapport de préfiguration correspondent à l’approche choisie par le Gouvernement. L’agence sera une « structure ensemblière », gérant des moyens agrégés autour de programmes en ciblant des objectifs précis. Le ministre M. Jacques Mézard, auditionné à l’Assemblée nationale le 2 octobre dernier par la Délégation aux collectivités territoriales, a défini l’agence comme « une structure permettant de donner un coup de main aux collectivités, et en particulier aux collectivités les plus fragiles » en assurant une coordination entre les actions d’un certain nombre d’établissements publics comme l’ANAH, le CEREMA, l’ANRU ou l’ADEME, et en répondant aux besoins d’ingénierie non satisfaits à l’heure actuelle.

Votre Rapporteure pour avis note que l’Assemblée nationale aura prochainement à examiner la proposition de loi des sénateurs du groupe RDSE « portant création d’une Agence nationale de la cohésion des territoires » ([9]). Elle constate que plusieurs questions restent en suspens, comme par exemple le nombre d’organismes nationaux existants ayant vocation à être associés ou incorporés dans l’agence, les moyens humains et financiers de celle-ci, la définition des catégories de collectivités ou de groupements de collectivités qui pourront s’adresser à l’agence ([10]), ou encore son articulation avec la Banque des territoires de la Caisse des dépôts et consignations.


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   DeuxiÈme partie :
les maisons de services au public (m.S.A.P)

Laccessibilité des services pour la population est une dimension essentielle de laménagement du territoire – et correspond à un besoin très profond exprimé par les résidents de territoires ruraux mais aussi de certains territoires urbains. Si le terme d’« accessibilité » est souvent utilisé au sens de l’accessibilité physique des équipements pour des personnes en situation de handicap ou à mobilité réduite, cet aspect n’est qu’une des composantes de cette notion, qui est en réalité « multidimensionnelle » puisqu’elle implique un temps d’accès à un service réduit au maximum, un tarif bas, un niveau satisfaisant de qualité de service, un accès à plusieurs opérateurs, une information complète sur les services publics et leur fonctionnement. Ces différentes composantes de la notion d’« accessibilité » supposent qu’un effort soit réalisé quant à l’image des services publics, qui restent, bien souvent, mal perçus par les usagers.

Les maisons de services au public, auxquelles le programme 112 apporte la contribution financière de lÉtat, constituent un instrument remarquable pour améliorer le service rendu à la population, répondre à l’enjeu dégalité des territoires et remédier au sentiment disolement, voire dabandon, que peuvent ressentir certaines populations et certains territoires. Mais – comme la constaté votre Rapporteure pour avis au cours des auditions quelle a tenues – les MSAP restent un chantier ouvert, moins au plan quantitatif quen termes qualitatifs. De nombreuses MSAP ont été créées dans les territoires, pour répondre à de réels besoins, mais le bilan de leurs premières années de fonctionnement est mitigé.

Votre Rapporteure pour avis se félicite que le programme 112 permette de poursuivre, en 2019, le soutien de l’État à ces structures, mais tient à souligner qu’un travail important reste à mener – il est d’ailleurs engagé par le Gouvernement – avant de pouvoir considérer que l’ensemble des MSAP constitue une réussite apportant une réelle plus-value pour les territoires et leurs habitants.

I.   les dispositions lÉgislatives et leur Évolution

● La loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations a prévu la création de « maisons des services publics » (MSP) pour réunir des services relevant de l’État, de ses établissements publics, des collectivités territoriales ou de leurs groupements, des organismes de sécurité sociale « ou dautres organismes chargés de missions de service public », afin de « faciliter les démarches des usagers et daméliorer la proximité des services publics sur le territoire en milieu urbain et rural ».

Il était prévu que chacune de ces maisons serait créée par une convention approuvée par le préfet de département, cette convention devant définir le cadre géographique dans lequel la maison des services publics exercerait son activité, les missions qui y seraient assurées, les modalités de désignation de son responsable, les prestations qu’elle pourrait délivrer, les modalités financières et matérielles de son fonctionnement, et les conditions dans lesquelles les personnels relevant des personnes morales qui y participent exerceraient leurs fonctions.

Il était également prévu la possibilité de proposer les services publics accessibles dans une MSP « de façon itinérante », notamment en milieu rural.

● La loi du 12 avril 2000 ayant été modifiée par plusieurs lois postérieures, notamment par la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (« loi NOTRe »), les « maisons des services publics » sont devenues les « maisons de services au public », ayant pour objet « daméliorer laccessibilité et la qualité des services, en milieu urbain ou rural, pour tous les publics », ces services pouvant être des services publics mais aussi dautres services « nécessaires à la satisfaction des besoins de la population », donc des services marchands ou non marchands ([11]).

La convention-cadre, signée par l’ensemble des acteurs impliqués dans une MSAP et qui donne corps à une structure doit se conformer aux prescriptions du schéma départemental d’amélioration de l’accessibilité des services au public (créé par la loi NOTRe) lorsqu’il en existe un dans le département ([12]).

Il convient de noter que les modifications opérées par voie législative ne sont pas revenues sur la possibilité d’organiser une offre de service itinérante. Mais, afin de compléter l’éventail des modalités d’organisation d’une MSAP, la loi NOTRe est venue ajouter qu’une MSAP pouvait être organisée « selon des modes daccès dématérialisés ».

En revanche, cette même loi a supprimé la disposition de la loi du 12 avril 2000 qui donnait la possibilité d’accorder à une MSAP la personnalité morale sous forme d’un groupement d’intérêt public. Les MSAP ne peuvent donc plus avoir la personnalité morale.

La loi NOTRe a par ailleurs donné la possibilité aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre, dans le cadre des maisons de services au public, de définir des obligations de service public pour assurer la présence effective de certains services sur leur territoire, en cas d’inadaptation de l’offre privée. Ces obligations de service public « intercommunales » doivent donner lieu à une procédure de mise en concurrence pour la sélection d’un opérateur, et à une compensation financière par l’EPCI.

Enfin, une disposition législative particulière (qui existe depuis une loi du 25 juin 1999 et qui a été modifiée par la loi NOTRe) oblige l’État à rembourser aux collectivités locales concernées « tout ou partie des rémunérations et des charges directes ou indirectes liées à la mise à disposition de personnels et de locaux », lorsquil sagit de structures situées dans les zones de revitalisation rurale (ZRR) ou dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV).

Le décret d’application n° 2016-403 du 4 avril 2016 précise quels éléments doivent obligatoirement figurer dans la convention-cadre de chaque MSAP, et indique que la structure peut évoluer après sa création par conclusion de conventions bilatérales entre le gestionnaire de la MSAP et des opérateurs, ces conventions venant compléter la convention-cadre.

● La Stratégie nationale d’orientation de l’action publique, annexée à la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un État au service dune société de confiance, réaffirme que « la proximité territoriale doit permettre à ladministration dassurer le service public sur tout le territoire de la République, notamment grâce à limplantation des maisons de services au public ».

La loi du 10 août 2018 elle-même, à l’initiative du rapporteur de l’Assemblée nationale, a lancé une expérimentation, pour une durée de trois ans, permettant aux opérateurs présents dans une MSAP de désigner le responsable de celle-ci en qualité de référent unique à même de traiter, pour des procédures et des dispositifs déterminés, les demandes qui lui sont adressées et de prendre, sil y a lieu, les décisions correspondantes au nom des organismes participants. Dans ce cas, c’est la convention-cadre de la MSAP qui définit les décisions que le responsable de la MSAP pourra prendre sur délégation des autorités compétentes.

Votre Rapporteure pour avis note que la loi prévoit que les résultats de l’évaluation de cette expérimentation seront transmis au Parlement.

II.   le dÉploiement des MSAP

Après leur création, suite à la promulgation de la loi du 12 avril 2000, le déploiement des maisons des services publics, puis des maisons de services au public, a été très lent. Au 31 décembre 2014, seules 363 maisons étaient en service et labellisées.

Le comité interministériel pour la modernisation de l’action publique du 17 juillet 2013 a donc décidé de généraliser la création d’espaces mutualisés de services au public, en fixant un objectif de 1 000 maisons en activité pour la fin de l’année 2017.

Sept opérateurs ([13]) ont signé le 5 décembre 2014 un accord national créant le Fonds inter-opérateurs (FIO), ces sept opérateurs devant ensuite conclure des conventions locales de partenariats pour chaque MSAP, en fonction des besoins des territoires, des décisions des élus et des stratégies nationales des opérateurs. Ils ne sont donc pas dans lobligation dêtre présents dans toutes les MSAP. Mais lorsqu’ils le sont, ils doivent assurer un contact direct et privilégié avec leurs directions locales, afin de permettre aux MSAP implantées de les saisir pour assurer un traitement des dossiers dans des délais raisonnables.

Toujours au nom de l’ambition de réduire plus rapidement les inégalités daccès aux services, le Gouvernement a décidé, en 2015, daccélérer le déploiement des MSAP sur le territoire, en concluant une convention distincte avec le groupe La Poste ([14]) pour permettre la création de MSAP dans des bureaux de poste existants en déficit d’activité. Les bureaux de poste principalement visés par ce dispositif de revitalisation sont ceux situés dans les zones rurales et les zones de montagne. Ces MSAP postales doivent se conformer à un cahier des charges précis sur la qualité de service et l’accompagnement délivrés aux usagers. Comme les autres MSAP, ces MSAP « postales » sont labellisées par les préfets. Environ 500 MSAP postales sont actuellement en activité.

En août 2018, on dénombrait au total 1 284 MSAP reconnues par les préfets, dont 85 % dans des communes de moins 5 000 habitants. L’objectif quantitatif a donc été largement atteint. Les MSAP sont aujourdhui principalement implantées dans des EPCI ruraux. 20 % seulement le sont dans des chefs-lieux de cantons, 2 % dans des sous-préfectures. Un peu plus de 3 % des quartiers prioritaires de la ville (QPV) sont couverts par le réseau des MSAP.

RÉpartition territoriale des mSAP

Typologie despaces

Pourcentage des MSAP implantées

Espaces densément peuplés (communes de plus de 10 000 habitants)

7 %

Espaces de densité intermédiaire (communes entre 5 000 et 10 000 habitants)

8 %

Espaces peu denses (communes entre 2 000 et 5 000 habitants)

27 %

Espaces très peu denses (communes de moins de 2 000 habitants)

58 %

Source : Ministère de la cohésion des territoires.

PrÉsence des diffÉrents opÉrateurs dans les MSAP au 27 juin 2018

Opérateur

CAF

Pôle emploi

CNAM

MSA

CNAV

GRDF

Nombre de MSAP offrant des services de l’opérateur (sur les 1271 MSAP existantes au 27 juin 2018)

1 212

1 180

1 154

1 040

1 033

625

Source : Ministère de la cohésion des territoires.

Maillage gÉographique des 1 284 MSAP au 3 aoÛt 2018

Source : Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET).

Les MSAP ne peuvent en principe être reconnues comme telles et labellisées que si elles respectent un cahier des charges. Les principales caractéristiques exigées par celui-ci sont les suivantes :

– la présence d’au moins deux opérateurs des secteurs de l’emploi, des prestations ou de l’aide sociale ;

– une ouverture régulière au moins 24 heures par semaine ;

– un animateur d’accueil, formé par chaque opérateur partenaire et destinataire d’une information régulière provenant des opérateurs ;

– un équipement informatique mis à la disposition du public, avec une connexion internet ;

– un local comportant, au minimum, un point d’accueil du public par l’animateur, un lieu d’attente assise et un espace confidentiel permettant l’organisation d’entretiens dans de bonnes conditions (en direct ou à distance par utilisation d’un outil numérique) ;

– une bonne visibilité extérieure du site et la mise en place d’une signalétique pour orienter les usagers.

Les MSAP sont animées par 1 814 agents-médiateurs qui assurent l’accueil, l’information et l’orientation du public, ainsi que l’aide à l’accès aux services en ligne des partenaires de chaque MSAP. Ces agents assurent, dans les faits, une information et un accompagnement administratif de « premier niveau » uniquement, car ils nont pas vocation à se substituer aux personnels des agences de la MSA ou de Pôle emploi, par exemple. Il ne leur appartient donc pas de répondre aux demandes complexes ou de traiter eux-mêmes les dossiers des usagers. Leur activité doit permettre, en réalité, de « désengorger » l’activité des agences territoriales des différents opérateurs, et de renseigner en un seul lieu des usagers de plusieurs organismes administratifs pour les orienter vers la bonne structure et les aider à accomplir certaines démarches, notamment des démarches dématérialisées.

Les agents des MSAP, dont 53 % sont des fonctionnaires, reçoivent des formations financées et assurées par les organismes partenaires de la MSAP. Un service de la Caisse des dépôts et consignations – à laquelle l’État et le CGET ont confié la création et la gestion du programme d’animation nationale du réseau des MSAP – est chargé délaborer loffre de formation et de coordonner les formations proposées par les organismes partenaires : la Caisse des dépôts, par le biais de la Banque des territoires, aide donc les collectivités et les opérateurs à créer des MSAP, et est également chargée d’un travail de reporting.

III.   le financement des MSAP

Le fonctionnement des MSAP est financé principalement par les collectivités territoriales. Depuis 2014, l’État les accompagne en prenant à sa charge une partie du budget de ces maisons, mais une étape majeure a été franchie en 2015 avec la conclusion d’un partenariat financier entre l’État et les opérateurs pour créer un Fonds de soutien inter-opérateurs permettant de doubler l’effort financier déjà engagé par l’État. Ce fonds devait être doté de plus de 21 millions d’euros pour la période 2015-2017, afin de permettre à l’État et aux opérateurs nationaux de prendre ensemble en charge la moitié du budget de fonctionnement des maisons de services au public.

A.   Le financement des MSAP portÉes par des collectivitÉs territoriales ou des associations

Les MSAP portées par des collectivités ou des groupements de collectivités (communes, EPCI, départements), une association (Points information médiation multiservices - PIMMS, ou autre structure associative) ou un centre communal daction sociale (CCAS), bénéficient dun financement de 25 % de leur budget annuel de fonctionnement par le budget de lÉtat via le FNADT, dans la limite d’un plafond de 15 000 euros.

Ce financement de lÉtat est doublé par le fonds inter-opérateurs (le FIO, un fonds de concours adossé au FNADT avec un plafonnement unitaire similaire), abondé par les sept opérateurs signataires de laccord du 4 décembre 2015. Le budget restant (au moins 50 %) est à la charge des porteurs de MSAP. En moyenne, le FNADT et le FIO financent une MSAP à hauteur de 25 000 euros.

Participation financiÈre des opÉrateurs au fonds inter-opÉrateurs (FIO) prÉvue dans l’accord du 4 dÉcembre 2015 pour la pÉriode 2016-2018

(en euros)

Opérateurs

2016

2017

2018

TOTAL

Pôle emploi

970 474

1 464 460

1 907 761

4 342 695

CNAF

917 156

1 384 003

1 802 948

4 104 107

CNAMTS

834 513

1 259 294

1 640 489

3 734 296

MSA

725 745

1 095 160

1426 671

3 247 577

CNAV

421 300

635 748

828 163

1 885 241

La Poste (*)

224 024

338 056

440 387

1 002 466

GRDF

217 093

327 596

426 761

971 450

TOTAL

4 310 305

6 504 317

8 473 209

19 287 831

(*) Il convient de noter l’absence de versement effectif de La Poste au FIO, dont le statut de partenaire a été modifié ensuite par la conclusion de la convention prévoyant l’installation de MSAP dans des bureaux de poste.

Source : Ministère de la cohésion des territoires.

Les représentants du groupe La Poste auditionnés par votre Rapporteure pour avis ont précisé que la part de chacun des opérateurs a été calculée en fonction de leur présence dans les 363 maisons existantes au 1er janvier 2015.

B.   Le financement des MSAP portées par La Poste

Les MSAP dites « postales » disposent d’un financement différent, avec un coût forfaitaire de 32 000 euros par structure :

– 24 000 euros (75 %) sont pris en charge par le Fonds de péréquation postale territoriale. Ce fonds est alimenté grâce à un abattement fiscal sur les taxes locales, qui compense les coûts de la mission de service public d’aménagement du territoire confiée à la Poste (soit 174 millions d’euros par an) ; il consacre 12 millions d’euros par an au financement des MSAP postales ;

– 8 000 euros (25 %) proviennent du FIO.

C.   Le financement des MSAP, victime de leur succÈs

Fin 2017, il existait 1 150 MSAP, dont 500 MSAP postales. Le coût de fonctionnement du dispositif a été estimé à 61 millions deuros en 2017 pour les acteurs publics (État, opérateurs et collectivités locales). Au niveau national, 9,5 millions d’euros du FNADT et 12,5 millions d’euros du FIO ont ainsi été engagés pour y contribuer.

Selon les informations communiquées à votre Rapporteure pour avis par les services du ministère, au 31 juillet 2018, les six opérateurs partenaires autres que La Poste ont apporté leur contribution conformément aux termes de l’accord du 4 décembre 2015. Mais il était initialement prévu que le FIO soit alimenté par neuf opérateurs et non sept, et la participation des sept signataires finaux de l’accord-cadre n’a pas été revue à la hausse, alors même que le développement du réseau suite à cet accord a été plus rapide que prévu.

Le chiffre de 1 300 MSAP reconnues ([15]) devrait être atteint avant fin 2018, or le financement avait été calibré pour assurer le fonctionnement de 1 000 MSAP. Le financement actuel du dispositif souffre d’un endettement évalué à près de 14 millions d’euros à la fin de l’année 2018.

Pour 2019, le programme 112 supportera la part incombant à lÉtat pour le financement des MSAP autres que celles installées dans les bureaux de poste, pour un montant de 13,73 millions deuros en autorisations dengagement comme en crédits de paiement. Dautre part, une enveloppe de 2 millions deuros est inscrite au programme pour financer les activités de la cellule nationale danimation de la Caisse des dépôts. Le Fonds inter-opérateurs devrait intervenir, selon les prévisions du projet de loi de finances, dans les mêmes proportions que les crédits du FNADT, soit 13,7 millions deuros. Laction cumulée du FNADT et du FIO permettra ainsi de couvrir 50 % du budget de fonctionnement des MSAP.

Le projet de loi de finances pour 2019 ne prévoit pas de crédits consacrés à la création de nouvelles MSAP. Le ministère de la cohésion des territoires a indiqué à votre Rapporteure pour avis que les modalités de financement des nouvelles MSAP ne seront fixées quune fois conclus les travaux de réflexion sur un nouveau cahier des charges et sur la « montée en gamme » du réseau des MSAP (voir ci-après).

IV.   un foisonnement disparate qui appelle l’Élaboration d’un nouveau modÈle pour les MSAP

A.   De belles rÉussites… mais pas partout

En termes quantitatifs, les objectifs sont atteints, et le Commissaire général à l’égalité des territoires, lors de son audition, a souligné qu’un grand nombre de communes souhaitent encore créer des MSAP. Le double indicateur utilisé par les services de l’État, et dont rend compte le projet annuel de performance annexé au projet de loi de finances, a connu une évolution nettement positive : une part croissante de la population se situe dans les zones où les MSAP sont accessibles en moins de 20 minutes ou entre 20 et 30 minutes. Le troisième indicateur utilisé est plus qualitatif puisqu’il concerne la variété des services présents dans les MSAP (nombre de partenaires) ; cet indicateur évolue également de manière positive.

rÉduction du temps d’accÈs des usagers À une MSAP

 

2017

Réalisation

2018

Prévision

2019

Prévision

Taux de population dans les communes de moins de 30 000 habitants à moins de 20 minutes d’une MSAP

68 %

75 %

90 %

Taux de population dans les communes de moins de 30 000 habitants à plus de 30 minutes d’une MSAP

6 %

6 %

5 %

Taux de MSAP abritant plus de 7 partenaires

60 %

65 %

70 %

Source : Projet annuel de performance de la mission « Cohésion des territoires » annexé au projet de loi de finances pour 2019.

Lensemble des MSAP traitent désormais 3 millions de demandes par an. Mais la qualité nest pas partout au rendez-vous. Le CGET a d’ailleurs volontiers reconnu que ces chiffres positifs recouvrent une réalité très hétérogène : certaines MSAP ont simplement pris le relais de structures plus anciennes, d’autres sont récentes mais jouent pleinement leur rôle avec des moyens importants, mais d’autres encore connaissent de graves difficultés ou sont tout bonnement des échecs à ce stade.

Votre Rapporteure pour avis a auditionné de nombreux acteurs du dispositif des MSAP ([16]). Il ressort de ces auditions un premier bilan mitigé de ce dispositif.

Le représentant de l’Association des petites villes de France (APVF), en particulier, a fait l’amère expérience de la création, dans de très mauvaises conditions, d’une MSAP postale dans sa commune, dont le fonctionnement est défaillant, la formation des personnels n’ayant pas été correctement assurée et les modalités de communication et de signalétique demeurant totalement insatisfaisantes.

En revanche, les représentants de l’AMRF ont fait la démonstration parfaite du « cercle vertueux » que peut représenter la création bien pensée d’une MSAP à proximité de laquelle viennent ensuite s’adjoindre d’autres activités de service, commerciales, paramédicales, créant ainsi une dynamique d’attractivité qui peut non seulement « retenir » la population que l’absence de services ferait « fuir », mais aussi attirer de nouveaux habitants.

Il ressort clairement des auditions que les MSAP portées par des collectivités territoriales sont plus souvent plébiscitées que les MSAP postales, et que le degré de réussite dune MSAP est directement lié au degré dimplication de la ou des collectivités territoriale(s), dune part, et à la motivation et à la formation des animateurs, dautre part.

Le groupe La Poste a reconnu que de nombreuses critiques visent particulièrement les MSAP postales, mais a signalé à votre Rapporteure pour avis que le FIO n’a pas apporté effectivement les 8 000 euros par an et par MSAP postale qui étaient prévus par le contrat, l’État ayant décidé d’affecter prioritairement les fonds disponibles aux MSAP portées par des collectivités ; il manquerait ainsi environ 9 millions d’euros du FIO pour les MSAP postales pour la période 2016-2018 par rapport aux engagements pris.

Plusieurs acteurs auditionnés ont fait part à votre Rapporteure pour avis de leur souhait qu’un niveau d’exigence plus élevé soit appliqué pour l’attribution du label « MSAP », et ce, pour deux raisons :

D’une part, force est de constater que certaines MSAP ne répondent pas, en réalité, aux exigences de l’actuel cahier des charges – plusieurs personnes auditionnées ayant même témoigné de l’existence de MSAP totalement dépourvues du matériel « de base », notamment en matériel informatique, pour assurer leur activité, ou de locaux adaptés à celle-ci.

D’autre part, il semble que certaines MSAP aient été créées sans analyse préalable des besoins réels de la population, ce qui explique sans doute que des fermetures de MSAP aient pu être constatées à peine un an après leur ouverture.

Parmi les autres constats dont les personnes auditionnées ont fait part à votre Rapporteure pour avis, il est unanimement admis que les MSAP pâtissent dun grave déficit de notoriété, ce qui est dautant plus regrettable que les attentes et les besoins des usagers sont élevés.

Le second constat unanime des personnes auditionnées, à lexception du CGET, est quen létat le coût des MSAP est déraisonnable, et que laccord État-opérateurs de 2015 arrive à son terme fin 2018 sans quun nouvel accord ait été conclu pour la période suivante. Les représentants de la Caisse centrale de la MSA, par exemple, ont indiqué à votre Rapporteure pour avis que l’accueil d’une personne dans une agence de la MSA représente un coût de 24 euros, alors que l’accueil dans une MSAP a un coût de 279 euros !

B.   Une volontÉ politique forte de « mettre À niveau » le dispositif des MSAP, mais un chantier qui commence À peine

Une réflexion est actuellement menée sur l’évolution de l’ensemble de la politique publique des MSAP. Cette démarche interministérielle est co-construite avec les opérateurs impliqués, les préfectures et les collectivités territoriales.

Une circulaire du Premier ministre du 24 juillet 2018 relative à l’organisation territoriale des services publics, adressée aux ministres et aux préfets, a annoncé le lancement d’une démarche de « réinvention » du service public de proximité, en partant du constat que le dispositif des MSAP présente un bilan mitigé.

Circulaire du Premier ministre du 24 juillet 2018 sur l’organisation territoriale des services publics (extrait)

« 4. Réinventer le service public de proximité avec un projet ambitieux, concret et fédérateur pour les citoyens comme pour les agents et inscrit au cœur des territoires :

« La promesse des maisons de services au public a jusque-là incarné une solution « défensive », par défaut, en regard du repli des différents réseaux. Celles-ci sont restées assez peu visibles, avec un contenu de services et des taux de fréquentation variables. Les investissements en matière de formation nont pas toujours été réalisés et leur modèle de financement nest pas toujours pérenne.

« Le Gouvernement souhaite repenser le modèle des points de contact avec la population. Il s’agit, en tirant le bénéfice des opportunités offertes par le numérique, de renforcer le maillage territorial des services publics, et de proposer de nouveaux services en s’appuyant sur des accès communs et mutualisés.

« Dans un contexte de risque de « fracture numérique » et de poursuite du mouvement de dématérialisation, le Gouvernement doit répondre au fort besoin de proximité exprimé par les Français, aux enjeux de simplification des démarches et d’accompagnement personnalisé.

« Dans les territoires où cela est pertinent en raison de la faible accessibilité des services publics, l’État pourra mettre à disposition des collectivités et des opérateurs des lieux n’accueillant actuellement plus de public (maisons d’État, sous-préfectures), où pourront être implantés de nouveaux points de contact mutualisés et polyvalents. Un travail avec plusieurs territoires « pilotes » va être engagé afin de définir le contenu et les modalités de fonctionnement de ces points de contact de proximité. »

Le CGET et lensemble des partenaires mobilisées autour du dispositif des MSAP viennent de lancer quatre groupes de travail, portant sur le maillage territorial, loffre de services, le design, lanimation et la gouvernance des MSAP. Au moins deux de ces groupes de travail devraient rendre leurs conclusions à la fin du premier trimestre 2019. Le CGET a également indiqué à votre Rapporteure pour avis qu’un référentiel de compétence des agents des MSAP est actuellement en cours de construction, en partenariat avec le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) et l’ensemble des acteurs du réseau des MSAP.

Les personnes auditionnées par votre Rapporteure pour avis ont présenté plusieurs pistes de réflexion pertinentes : faire des MSAP des acteurs de l’inclusion numérique, développer les MSAP itinérantes (selon le CGET, il n’en existe qu’une vingtaine actuellement), implanter plus de MSAP dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (qui ne comptent que 80 MSAP à ce stade pour les 1 514 QPV), lancer des expérimentations avant de généraliser un nouveau cahier des charges, permettre à une ou plusieurs communes de créer une MSAP à une échelle différente de celle de l’intercommunalité dont elles sont membres, former les animateurs des MSAP à l’utilisation d’outils « multiservices » comme le Portail numérique des droits sociaux (PNDS)…

Les organismes engagés dans les MSAP ont également dit clairement que ces maisons ne doivent pas proposer un bouquet de services trop nombreux et/ou non pertinents pour le territoire considéré, pas plus que ces maisons ne doivent être implantées dans l’ensemble des communes françaises, ou encore devenir des « mini-préfectures ».

Au-delà des sept opérateurs nationaux partenaires du FIO, de nouveaux partenaires pourraient être associés pour répondre aux besoins des territoires (notamment pour répondre aux problématiques identifiées dans les travaux des schémas départementaux d’amélioration de l’accès des services au public). Le Gouvernement a annoncé que des travaux seront menés en 2019 dans ce sens, dans le cadre du renouvellement de l’accord national de partenariat.

 


—  1  —

   TroisiÈme partie :
le programme « interventions territoriales de l’État » (programme 162)

I.   prÉsentation gÉnÉrale du programme

A.   un programme budgÉtaire d’une nature particuliÈre

Le programme 162 est un dispositif budgétaire atypique par rapport au dispositif mis en place pour l’application de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). La LOLF a prévu un système vertical de gestion des crédits, où les programmes sont rattachés à un ministère et les crédits transférés vers des budgets opérationnels de programme (BOP) déconcentrés. Ce système vertical peut entraîner des retards importants dans la conduite de grands programmes intégrés mobilisant plusieurs ministères ou opérateurs.

Créé en 2006, le programme « Interventions territoriales de l’État » (PITE) a été conçu comme un outil financier destiné à regrouper, sur un programme unique, l’ensemble des crédits consacrés à quelques politiques territoriales interministérielles particulières. Le PITE ne crée pas de dépenses supplémentaires pour le budget de l’État : il permet la mutualisation de moyens consacrés aux actions qui le composent, celles-ci étant géographiquement « ciblées ».

Géré par le ministère de l’intérieur pour le compte des services du Premier ministre, ce programme traduit une volonté d’approche territorialisée pour des problématiques particulières. Les crédits fixés par la loi de finances, répartis en autant d’ « enveloppes » que d’actions du programme, sont délégués aux préfets de région pour être dédiés à une action précise, ce qui assure leur sécurisation, et ce qui permet concrètement à chaque préfet d’avoir un interlocuteur unique. Toutefois, aucune des actions du PITE n’est intégrée au contrat de plan État‑région des régions concernées.

À sa création, plusieurs actions budgétaires existantes y ont été regroupées, notamment le programme exceptionnel d’investissement (PEI) pour la Corse (créé en 2002 pour une durée de quinze ans). Pendant ses deux premières années d’existence, le PITE a financé huit actions et a clôturé cinq d’entre elles. De nouvelles actions ont ensuite été créées, toujours dans la même logique d’une approche interministérielle permettant une rapidité d’action et une multiplicité de mesures financées par une seule enveloppe.

B.   le PITE dans le projet de loi de finances pour 2019

Parmi les cinq actions que réunit le PITE en 2018 et qui continueront à y figurer en 2019, trois portent exclusivement sur des questions environnementales, la quatrième correspond à des préoccupations à la fois environnementales et économiques (le Plan Littoral 21 pour la région Occitanie), et la cinquième est structurelle (le PEI en faveur de la Corse). Ce dernier constitue lenveloppe la plus importante au sein du PITE.

Les crÉdits de paiement du PITE depuis 2012

(en millions d’euros, hors fonds de concours ([17]))

Action

Exécution 2012

Exécution 2013

Exécution 2014

Exécution 2015

Exécution 2016

Exécution 2017

Loi de finances pour 2018

Projet de loi de finances pour 2019

02 : Eau et agriculture en Bretagne

9,17

5,89

9,50

0,54

8,98

4,12

3,29

1,79

04 : PEI Corse

35,24

45,25

39,01

33,25

23,50

37,59

19,93

17,94

06 : Marais Poitevin

5,15

4,68

4,04

3,22

1,69

1,60

1,59

1,59

08 : Plan chlordécone

2,68

2,36

2,22

4,11

2,18

3,75

1,99

1,99

09 : Plan Littoral 21

 

 

 

 

 

 

0,50

2,49

TOTAL

52,24

58,18

54,77

10,04

36,36

47,07

27,31

25,81

Source : Projet annuel de performance annexé au projet de loi de finances pour 2019.

Le PLF pour 2019 prend en compte la clôture progressive de laction 06 « Plan gouvernemental pour le Marais poitevin ». Initiée en 2003 pour favoriser une agriculture conforme aux enjeux environnementaux du Marais en préservant les milieux naturels et en valorisant de façon durable son territoire et son patrimoine. Cette action a permis d’accélérer le rythme de reconstitution des prairies. L’État poursuivra ses actions par d’autres moyens financiers. L’objet et les caractéristiques des quatre autres actions inscrites au PITE en 2018 ont justifié leur maintien pour 2019.

Le montant total des autorisations dengagement demandées pour 2019 pour le programme 162 représente 35,7 millions deuros (dont 29,7 millions d’euros qui seront transférés aux collectivités locales concernées par les actions du PITE), et le montant des crédits de paiement sélève à 25,8 millions deuros (dont 19,4 millions d’euros qui seront transférés aux collectivités locales).

II.   L’action « Eau – agriculture en bretagne »

La reconquête de la qualité des eaux constitue un objectif prioritaire de la région Bretagne, pour lequel des actions publiques ont été engagées dans le cadre du programme 162 (PITE), notamment en réponse à la condamnation de la France en 2001 pour non-respect de la directive « nitrates ». Au vu des résultats atteints par le « plan d’urgence nitrates » ([18]), qui ont permis la levée du contentieux européen, le Gouvernement a décidé d’adosser le « plan algues vertes » (PLAV), élaboré pour la période 2010-2015, aux actions déjà mises en œuvre dans le cadre du PITE. Ses caractéristiques en font en effet un outil adapté à la démarche d’appels à projets de territoire visant à réduire les rejets d’azote responsables de la prolifération des algues vertes.

Le programme 162 concentre ainsi la partie budgétaire du financement de l’État consacré au PLAV, les autres financeurs étant l’agence de l’eau, l’ADEME et les collectivités, auxquels s’ajoute le financement des dispositifs de méthanisation des algues collectées. Un partenariat est conclu avec l’agence de l’eau Loire-Bretagne pour certaines actions de recherche.

Un deuxième plan de lutte contre la prolifération des algues vertes a été élaboré pour la période 2017-2021, son financement étant ainsi réparti :

– 25 millions d’euros apportés par l’État ;

– 16 millions d’euros par l’agence de l’eau Loire-Bretagne ;

– 11,8 millions d’euros par le conseil régional de Bretagne ;

– 2,7 millions d’euros par les conseils départementaux (Côtes d’Armor et Finistère) ;

– et 4,5 millions d’euros par les collectivités locales porteuses des huit projets de territoire correspondant aux huit baies concernées.

Les huit « chartes de territoire » se déclinent localement par des engagements individuels dans les exploitations agricoles.

Selon les informations transmises à votre Rapporteure pour avis par les services du ministère, limpact du plan est clairement positif sur le terrain, car il contribue largement à la modification des comportements des agriculteurs en termes dutilisation des pesticides, et à la diminution de la concentration en nitrates des cours deau des huit baies du PLAV.

L’action 02 « Eau et agriculture en Bretagne » est maintenue dans le PITE pour l’année 2019, un transfert financier du ministère de l’agriculture et de l’alimentation devant permettre d’assurer le financement du PLAV : le projet annuel de performance de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » annexé au projet de loi de finances pour 2019 prévoit que les crédits du programme 149 « Compétitivité et durabilité de l’agriculture » incluront un montant de 5 millions d’euros destiné au financement du PLAV, afin de pouvoir, notamment, reconduire le soutien de l’État aux communes pour le ramassage et le traitement des algues vertes échouées.

Sagissant des autres mesures financées par laction 02, elles seront réparties en deux séries d’actions :

– une série de mesures pour inciter les agriculteurs et les autres acteurs à supprimer les atteintes à l’environnement (environ 542 000 euros de crédits de paiement en 2019), notamment pour apporter un soutien aux programmes de recherche et de transfert de connaissances et à des initiatives concourant à accompagner le changement des pratiques agricoles ;

– pour un montant d’environ 1,25 million d’euros en crédits de paiement, des mesures permettant d’assurer le suivi des objectifs de « bon état écologique » des masses d’eau, notamment par des contrôles in situ, d’améliorer l’évaluation des résultats, de développer les retours d’expérience, etc.

L’intégration de cette action dans le PITE a permis la suspension de la procédure en infraction lancée contre la France pour violation des règles européennes relatives à la qualité des eaux, et l’accélération du rythme de mise en œuvre du programme de maîtrise des pollutions d’origine agricole (PMPOA).

III.   le programme exceptionnel d’investissements (pEI) en faveur de la corse

Le programme exceptionnel d’investissement pour la Corse (PEI) vise à aider la Corse à surmonter les handicaps naturels que constituent son relief et son insularité, et à résorber son déficit en équipements et services collectifs. Il est singulier tant par sa durée que par son ampleur, qui a un effet accélérateur sur des investissements indispensables pour le développement de la Corse et, en ce sens, contribue à réduire les inégalités entre l’île et le continent.

Institué par l’article 53 de la loi du 22 janvier 2002 relative à la Corse (codifié à l’article L. 4425-9 du code général des collectivités territoriales), le PEI, initialement prévu pour quinze ans (2002-2016), a vu sa durée d’exécution prolongée de deux années supplémentaires par la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe), avec un terme fixé à la fin de l’année 2018.

La contribution globale de lÉtat est plafonnée à 70 % du coût total du programme. Elle est complétée par une participation des collectivités (la collectivité territoriale de Corse, les conseils départementaux, les communes et les EPCI) et dautres maîtres douvrage publics tels que les chambres de commerce et dindustrie. Il convient de noter que le programme 162 du budget de lÉtat (le PITE) nassure pas à lui seul le financement national du PEI Corse : lAgence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) apporte des financements pour les investissements routiers, ferroviaires et portuaires du PEI, lagence de leau Rhône-Méditerranée et Corse intervient dans sa mise en œuvre dans les domaines de leau potable et de lassainissement, lADEME contribue aux actions relatives à la gestion des déchets, et le Fonds damortissement des charges délectrification (FACE), à la remise à niveau des réseaux délectrification rurale.

Une sous-consommation constatée des crédits du PEI Corse a conduit le Gouvernement à présenter un amendement, dans le cadre de l’examen du projet de loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ELAN), afin d’en prolonger de deux ans la durée, alors que celle-ci avait déjà été prolongée de deux ans par la loi « NOTRe ». La loi « ELAN » a donc reporté à la fin de l’année 2020 le terme du PEI Corse, comme l’avait annoncé le Président de la République le 7 février 2018 dans son discours prononcé à Bastia. Ainsi, la date limite dengagement des crédits du PEI est portée à 2020, et la date ultime de paiement, à 2024.

Interrogés à ce sujet par votre Rapporteure pour avis, les services du ministère ont fait valoir que la mise en œuvre du PEI a, effectivement, connu un ralentissement sur la période 2014-2016, qui s’est manifesté par une moindre consommation des crédits, et surtout par une baisse des mesures de programmation. La capacité d’autofinancement des collectivités locales, notamment de la collectivité territoriale de Corse, a constitué un facteur « limitant », et comme les programmes budgétaires de l’Union européenne pour la période 2007-2013 arrivaient à leur terme, l’autorité de gestion et les maîtres d’ouvrage ont donné la priorité à la consommation des fonds européens pour éviter le dégagement d’office. Depuis 2017 en revanche, une augmentation des besoins à la fois en autorisations d’engagement et en crédits de paiement est observée, et les enveloppes sont consommées en totalité, mais le Gouvernement a demandé au Parlement de proroger de nouveau le PEI en raison de limportance du montant restant à programmer.

La Cour des comptes, dans son rapport sur l’exécution du PEI en 2017, a souligné la nécessité d’améliorer le suivi des restes-à-payer de ce programme.

Selon les informations communiquées à votre Rapporteure, le PEI a déjà permis de rattraper une partie du retard de développement constaté en 2002 et a conduit à une amélioration concrète de la vie quotidienne grâce aux investissements réalisés pour améliorer les infrastructures de transport, de l’eau potable, de l’assainissement, des déchets, de l’électrification rurale, et pour construire des établissements d’enseignement secondaire et supérieur, ainsi que des équipements sportifs, culturels et médicaux. Aujourdhui, les taux déquipement de la Corse, rapportés à sa population, sont identiques à ceux du continent.

Sagissant des crédits de paiement demandés dans le cadre du projet de loi de finances pour 2019 pour laction « PEI Corse » du PITE, le projet annuel de performance de la mission « Cohésion des territoires » indique qu’ils seront ainsi répartis :

– 4,1 millions d’euros seront consacrés à la mise à niveau des réseaux et équipements collectifs, notamment pour poursuivre la réhabilitation des réseaux d’eau potable et assurer la montée en débit des réseaux internet ;

– 8,1 millions d’euros seront consacrés au renforcement des infrastructures de mise en valeur du territoire, principalement pour contribuer au financement de projets de rénovation urbaine, mais aussi, par exemple, pour la réfection des pistes de l’aéroport de Figari ;

– 5,7 millions d’euros seront affectés à la résorption du déficit en services collectifs, notamment pour l’enseignement secondaire et les maisons de santé pluridisciplinaires.

Votre Rapporteure pour avis note que le Président de la République, dans son discours du 7 février, a également annoncé quun plan daccompagnement de la Corse serait lancé pour couvrir « laprès-2020 » et prendre le relais du PEI.

IV.   le plan d’action gouvernemental pour le marais poitevin

C’est un contentieux européen qui est à l’origine du plan d’action national consacré à ce territoire. Le 25 novembre 1999, la France a été condamnée par la Cour de justice des Communautés européennes, pour sa mauvaise application de la directive « Oiseaux » sur le Marais poitevin. Le Marais poitevin est un territoire d’une grande richesse écologique, du fait de la diversité des milieux naturels qui le composent. Mais les habitats naturels de la zone humide étaient menacés par une emprise croissante des terres cultivées et une gestion de l’eau qui ne leur était pas favorable. Le manque de mesures appropriées pour protéger le patrimoine naturel et éviter sa détérioration justifiait cette condamnation.

En réaction, le Gouvernement a présenté en juin 2002 un plan d’action pour le Marais poitevin pour la période 2003-2012. Ce plan devait permettre d’améliorer progressivement la situation, en préservant ces milieux, notamment les prairies naturelles, et en restaurant leur fonction de zone humide d’intérêt international (ce territoire étant situé sur la route des migrations d’oiseaux). Mais un rapport d’évaluation à mi-parcours, publié en mai 2009, a mis en évidence la nécessité de renforcer les moyens déjà mis en œuvre, sous peine de voir le contentieux européen ré-ouvert. La loi « Grenelle 2 » du 12 juillet 2010 a donc prévu la création d’un établissement public de l’État, l’Établissement public du Marais poitevin (EPMP). Cet opérateur met en œuvre, depuis 2011, certaines mesures du plan daction grâce à une subvention budgétaire provenant du PITE ([19]), les autres mesures étant mises en œuvre directement par les services de lÉtat.

Le périmètre géographique d’intervention de l’EPMP couvre 352 communes, situées dans deux régions (Pays de la Loire et Nouvelle‑Aquitaine) et quatre départements.

En novembre 2014, un rapport du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) et du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) a dressé un bilan positif de la mise en œuvre du plan, qui s’est traduit notamment par :

– l’introduction dans le schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE Loire-Bretagne) d’une disposition spécifique pour la gestion de l’eau dans le Marais poitevin ;

– l’adoption de trois schémas d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE) pour les cours d’eau du bassin correspondant ;

– une harmonisation des règles et des pratiques en matière de drainage, qui est désormais très fortement encadré ;

– un dispositif de mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC) à l’échelle du territoire, grâce auquel 90 % des prairies du Marais font l’objet d’une contractualisation ;

– un développement de l’économie touristique du territoire ;

– une bonne gestion des fonds du programme 162 mis à la disposition du préfet coordonnateur, le PITE constituant un outil satisfaisant de travail interministériel et interrégional.

Grâce à la mise en œuvre de ce plan, le Marais poitevin a pu obtenir de nouveau, en mai 2014, le label de « Parc naturel régional », qu’il avait perdu en raison de la diminution des surfaces enherbées.

Le Plan daction gouvernemental pour le Marais poitevin arrive à terme en 2019. Cette dernière année de mise en œuvre devra donc permettre de solder l’ensemble des opérations de préservation de la ressource en eau et de la biodiversité, de protection des milieux naturels au titre des sites Natura 2000 et de préservation des prairies. Les crédits de paiement prévus par le PLF pour 2019 s’élèvent à environ 1,59 million d’euros (dont 494 000 euros versés à l’EPMP).

V.   le plan chlordÉcone en guadeloupe et en martinique

La chlordécone est un pesticide hautement toxique qui a été utilisé de manière intensive pendant plus de vingt ans en Guadeloupe et en Martinique (il y a finalement été interdit en 1993) pour lutter contre le charançon du bananier. Ce perturbateur endocrinien demeure présent pendant très longtemps dans les sols. Au début des années 2000, des études ont établi que la chlordécone avait contaminé non seulement les sols, mais aussi les cours d’eau, une partie du littoral marin, et de nombreuses denrées alimentaires végétales et animales. Selon une étude de Santé Publique France, plus de 90 % de la population de la Guadeloupe et de la Martinique sont contaminées par cet insecticide, mais les connaissances scientifiques sur l’impact potentiel sur la santé humaine sont encore parcellaires.

Un premier « plan chlordécone » a été lancé par l’État pour la période 2008-2010, suivi d’un deuxième (2011-2013) et d’un troisième qui est en cours de mise en œuvre (2014-2020). Ce plan, qui correspond dans le PITE à l’action 08, a pour objectif principal de réduire l’exposition des populations de Martinique et de Guadeloupe au chlordécone. Il finance notamment :

– l’élaboration d’une cartographie des zones polluées, encore incomplète à ce jour ;

– des contrôles effectués sur les denrées alimentaires les plus susceptibles d’être contaminées, ainsi que des campagnes d’information ;

– les actions engagées pour accompagner les professionnels impactés (agriculteurs, marins-pêcheurs, éleveurs…), notamment pour faciliter leur reconversion ou l’adoption de nouvelles techniques de production ou de transformation.

Auditionnée par la Délégation aux outre-mer de l’Assemblée nationale le 21 février dernier, Mme Agnès Buzyn, ministre de la santé, a insisté sur la nécessité de poursuivre les travaux de recherche scientifique, les connaissances actuelles sur l’impact de l’utilisation de la chlordécone étant encore très partielles. Elle a souligné le caractère nécessairement interministériel de toute action nationale relative à la chlordécone, impliquant notamment le ministère de l’agriculture (qui a la responsabilité de définir le zonage de la contamination), le ministère de la santé et le ministère chargé de la recherche, ainsi que les agences régionales de santé, et a présenté certains travaux en cours concernant le volet sanitaire de l’action de l’État.

Audition de Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé, par
la Délégation aux outre-mer de l’Assemblée nationale
(21 février 2018) – extraits des déclarations de la ministre

« Le traitement de la crise de la chlordécone est compliqué par le fait que plusieurs autorités publiques sont impliquées. J’ai demandé que me soit communiqué l’ensemble des mesures prises dans le cadre du Plan national d’action chlordécone (PNAC) 1, 2, et 3 : la Direction générale de la santé (DGS), qui pilote la plupart de ces actions, a fait preuve de constance dans leur organisation telle que prévue par le plan. L’ensemble des registres des cancers a été recollé, toutes les études programmées ont été lancées et financées, certaines sont terminées. D’autres vont être prolongées (…). Nous avons également adopté des mesures de suivi des travailleurs exposés, et mesuré l’intoxication des populations à la chlordécone. (…)

« Notre premier axe de travail porte sur l’amélioration des connaissances des liens entre chlordécone et maladie, que ce soit des maladies hormonales (…), des maladies du développement neurologique (...) ou des cancers (…). Le deuxième axe concerne une meilleure information des populations vulnérables, singulièrement des femmes enceintes (…). Nous avons, par ailleurs, la ferme volonté d’augmenter le nombre de messages de prévention, notamment de ceux portant sur l’alimentation, qui doit impérativement être sécurisée. Le moyen d’aboutir à une alimentation sans chlordécone est le développement des jardins familiaux, après évaluation de la contamination des sols chez les particuliers afin de leur permettre de pratiquer une agriculture saine à leur propre usage. Nous pensons être en mesure, dans les années qui viennent, d’organiser des circuits sans chlordécone à l’issue d’un nouveau zonage de la contamination qui, d’après le ministère de l’agriculture, sera achevé avant l’été prochain, ainsi que de l’évaluation individuelle des sols. (…)

« Vous demandez par ailleurs si nous sommes sûrs que toutes les données sont connues : bien sûr que non ! Car la France est le seul pays à essayer d’obtenir des données sur la chlordécone. Ce produit a été utilisé dans d’autres pays européens (…) mais le sujet n’a pas soulevé l’intérêt et les études sont rares, et sont quasi-exclusivement françaises. (…) Si nous disposions de toutes les connaissances nécessaires sur la chlordécone, j’en serais ravie. Mais tel n’est pas le cas, ainsi ne connaissons-nous pas les effets à long terme. (…) »

En déplacement aux Antilles en septembre dernier, le Président de la République M. Emmanuel Macron a donné une nouvelle impulsion à ce « plan chlordécone », en dénonçant le « scandale environnemental » de cette pollution [voir encadré ci-après].

Discours du Président de la République
du 27 septembre 2018 à Morne-Rouge (Martinique)

« La pollution à la chlordécone est un scandale environnemental, dont souffrent la Martinique et la Guadeloupe depuis quarante ans. La chlordécone a été utilisée dans plusieurs autres territoires, mais de manière beaucoup moins intensive et avec d’autres conséquences. Tout ça, c’est le fruit d’une époque qui est désormais révolue, où il faut bien dire, la conscience environnementale était moindre qu’aujourd’hui. Ce fut aussi le fruit d’un aveuglement collectif. (…) Au fond, pendant des années, pour ne pas dire des décennies, nous avons collectivement choisi de continuer à utiliser la chlordécone, là où d’autres territoires avaient cessé beaucoup plus tôt. Nous l’avons fait aussi parce que l’État, les élus locaux, les acteurs économiques ont accepté cette situation, pour ne pas dire l’ont accompagnée pendant cette période, en considérant qu’arrêter la chlordécone, c’était menacer une partie des exploitations en Martinique comme en Guadeloupe.

« LÉtat doit prendre sa part de responsabilité dans cette pollution et doit avancer dans le chemin de la réparation et des projets. Réparation collective d’abord, c’est le sens du plan d’action mis en place depuis dix ans pour la recherche scientifique, la prévention, les contrôles, la dépollution avec de vraies avancées qui ont été faites – je veux saluer toutes celles et ceux qui y sont impliqués – qui fait qu’aujourd’hui quand un particulier, par exemple, veut savoir s’il y a de la chlordécone dans son jardin, c’est l’État qui prend en charge ce test, c’est l’ARS qui le paye. Évidemment, nous continuerons cela et je souhaite que le plan s’inscrive dans la durée, que nous puissions accroître chaque année la transparence, la connaissance du public, j’y reviendrai.

« Ensuite, il y a les sujets individuels, là aussi, la question qui se pose – autant le dire franchement – c’est celle d’une réparation individuelle, lorsqu’elle est possible. Létat des connaissances scientifiques qui est aujourdhui le nôtre permet de constater la présence de chlordécone dans le corps humain. Mais il ne permet pas de certifier que cette présence a un effet sur la santé humaine. Toutefois, on présume le lien avec des naissances prématurées, des retards de développement cérébral et d’autres pathologies. Mais il n’y a pas aujourd’hui de preuves scientifiques établies de cela. Donc, je ne serais pas responsable à dire il y a une réparation individuelle pour tous ces cas, parce que ce n’est pas avéré.

« De façon générale, nous allons poursuivre l’investissement dans les études scientifiques de manière indépendante et transparente, pour justement poursuivre ces éléments qui nous permettraient d’attribuer telle ou telle pathologie à la présence de chlordécone dans le corps humain. Je souhaite quà chaque fois, il y ait des rendezvous de transparence qui soient effectués par lARS sur les avancées en la matière.

« Toutefois, il est possible d’avancer davantage sur la question des maladies professionnelles pour les personnes particulièrement exposées à la molécule. J’ai demandé à ce titre que les tableaux des maladies professionnelles soient réactualisés en fonction des connaissances scientifiques en priorisant l’impact de la molécule de chlordécone et en particulier [pour] toutes celles et ceux qui ont travaillé pendant des années dans le secteur de la banane [qui] ont été beaucoup plus exposés à ce sujet. L’INSERM et l’ANSES rendront leurs travaux d’ici mars prochain. Les partenaires sociaux entameront leurs travaux sur la base de ces expertises pour les rendre le plus rapidement possible. La procédure d’ouverture du registre des maladies professionnelles sera engagée par le Gouvernement dès le 2 octobre pour le régime général des maladies professionnelles et le 9 octobre pour le régime agricole. (…)

« Ensuite, il y a ce qu’on appelle le Plan Chlordécone, ce plan pluriannuel qui est indispensable pour accompagner les acteurs économiques et tout le territoire. Laction de lÉtat sur le terrain sera portée à 3 millions deuros par an, soit une augmentation de 40 % sur deux ans. Les priorités de ce plan en Guadeloupe et en Martinique seront laccroissement des contrôles des sols (…), des aliments et lachèvement de la cartographie des zones polluées. (…) Je souhaite aussi que dans le cadre de ce plan, nous puissions accompagner l’installation des jeunes agriculteurs, mais aussi des mécanismes de compensation à l’investissement pour les exploitants agricoles qui sont victimes de certains choix, en raison justement de cette cartographie et de leurs terres. La relance de la recherche sur la dépollution des sols est également indispensable. Les précédentes études lancées par le BRGM n’ont pas permis d’identifier à ce stade des solutions viables. De nouvelles recherches seront lancées, notamment sur la dépollution biologique. (…) Les travaux de préparation dun quatrième plan chlordécone seront enclenchés dici lété 2019, avec une large concertation (…).

« Ensuite, vient la question des limites maximales de résidus. C’est un sujet qu’il faut que, là aussi, nous regardions en face. Nous savons que pour certaines espèces, il y a une limite qui est réduite à zéro. Pour d’autres, en particulier les bovins, on a des tolérances qui sont aujourd’hui supérieures. Les nouveaux seuils à très court terme seront plus stricts, conformément aux recommandations de l’ANSES. Mais plus largement, j’ai demandé que, sous la supervision du préfet, nous ayons une transformation profonde aujourd’hui de notre organisation collective. Dabord, nous devons beaucoup mieux contrôler la présence de chlordécone et donc les limites maximales de résidus pour tous les aliments, y compris et à commencer par les aliments importés. (…) Deuxième point, je souhaite que, collectivement, nous inscrivions nos efforts pour aller vers le « zéro chlordécone » dans lalimentation. (…) il faut qu’il y ait une transition, il y aura des coûts, ces coûts, nous les prendrons en charge dans le cadre du plan chlordécone. (…)

« Voilà sur ce sujet grave, (…) qui nous oblige à l’égard de toutes les générations que nous avons exposées à cette pollution, qui nous oblige à l’égard de tous nos concitoyens qui sont aujourd’hui exposés à une pollution environnementale, les décisions que je voulais vous annoncer et les actions que nous allons conduire dans les prochains mois et les prochaines années. (…) ».

Le projet de loi de finances prévoit que laction 08 soit dotée denviron 2 millions deuros en autorisations dengagement comme en crédits de paiement pour 2019, soit les mêmes montants que pour 2018. Votre Rapporteure pour avis note toutefois que le Président de la République a annoncé un montant de 3 millions par an, donc supérieur aux prévisions du PLF, ainsi que le lancement dun quatrième « Plan Chlordécone » à lissue de lactuel plan 2014-2020.

Votre Rapporteure note également qu’une polémique porte actuellement sur la fixation des LMR (limites maximales de résidus) présents dans les aliments, un recours contentieux ayant été engagé contre l’arrêté qui les a définies en 2008, et l’ANSES ayant rendu, en décembre 2017 et mai 2018, des avis ne comportant pas de recommandation d’abaissement de ces LMR. En tout état de cause, cette question des LMR est un sujet relevant de la réglementation européenne. En effet, les LMR sont fixées par décision de la Commission européenne après avis de l’Agence européenne du médicament, et s’appliquent à une même substance de manière identique sur tout le territoire de l’Union européenne.

VI.   le plan littoral 21 en occitanie

Le « Plan Littoral 21 Méditerranée », qui concerne le littoral de la région Occitanie, s’inscrit dans la stratégie nationale pour la mer et le littoral présentée en février 2017 (décret n° 2017-222 du 23 février 2017), dont l’un des objectifs est la préservation d’un littoral attractif. Le vieillissement des stations touristiques en Occitanie, l’inadaptation des infrastructures aux nouveaux usages, les effets du réchauffement climatique et ceux de l’urbanisation sur les espaces naturels forment un ensemble de facteurs qui portent atteinte à la compétitivité de ce territoire. Le plan, prévu pour une durée totale de dix ans, se base sur un accord-cadre signé le 10 mars 2017 par l’État, la région et la Caisse des dépôts et consignations, pour un montant total de 1,08 milliard d’euros pour la période 2017-2020.

Les financements apportés par l’État sur la période devraient s’élever à environ 200 millions d’euros ; ils se composent des crédits du Programme d’Investissements d’Avenir (PIA) sur les éoliennes en mer, des crédits consacrés à plusieurs appels à projets lancés par l’État, et de la dotation budgétaire inscrite dans le PITE depuis la loi de finances pour 2018 (qui n’a prévu qu’un montant de 1 million d’euros en autorisations d’engagement et 0,5 million d’euros en crédits de paiement, le plan étant encore « à bâtir » à ce stade).

Pour lannée 2019, le programme 162 comporte environ 4 millions deuros en autorisations dengagement et environ 2,5 millions deuros en crédits de paiement, répartis autour de trois axes : l’adaptation du littoral de l’Occitanie face aux évolutions liées au réchauffement climatique et à la croissance démographique (avec par exemple des actions pour promouvoir une meilleure utilisation de l’eau dans le secteur viticole), le soutien à des actions innovantes et à des projets de recherche, et l’attractivité du territoire (revitalisation des centres-villes des stations touristiques et des centres-bourgs dans l’arrière-pays, déploiement des infrastructures numériques, travaux de valorisation des phares…).


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   EXAMEN EN COMMISSION

Après l’audition de M. Julien Denormandie, secrétaire d'État auprès du ministre de la cohésion des territoires, au cours de sa réunion du mardi 9 octobre 2018 ([20]), la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a examiné le mercredi 31 octobre 2018, pour avis, sur le rapport de Mme Florence Lasserre-David, les crédits des programmes « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire » et « Interventions territoriales de l’État » de la mission « Cohésion des territoires ».

Mme la présidente Barbara Pompili. Nous achevons aujourd’hui l’examen pour avis des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilités durables » du projet de loi de finances pour 2019, et nous procéderons également à l’examen pour avis de la mission « Cohésion des territoires ». Nous entendrons donc successivement les deux rapporteurs pour avis, M. Jimmy Pahun et Mme Florence Lasserre-David.

M. Jimmy Pahun, rapporteur pour avis. En tant que rapporteur pour avis sur les affaires maritimes, j’ai souhaité inscrire mes travaux dans la continuité de ceux que j’avais réalisés lors de la préparation du projet de loi de finances (PLF) pour 2018 en privilégiant les sujets suivants : la déconstruction des navires de plaisance, les exonérations de cotisations sociales patronales au profit de la marine de commerce et la dépollution du transport maritime. Ce dernier thème n’apparaît pas en tant que tel dans mon rapport car c’est notre collègue rapporteur de la commission des finances sur le même budget, M. Saïd Ahamada, qui l’a traité. Sur ce sujet, je me contenterai donc de me féliciter de la création d’une incitation fiscale pour développer les propulsions décarbonées comme le gaz naturel liquéfié, l’hydrogène et la voile, et de remercier le Gouvernement et les services concernés d’y avoir œuvré.

Avant toute chose, je souhaite vous dire que le niveau global du budget des affaires maritimes me satisfait très largement, puisqu’il est stable en 2019. Le programme 205 intitulé « Affaires maritimes » finance des actions relatives à la politique de sécurité et de sûreté maritimes civiles, la régulation sociale de l’emploi maritime, le soutien à la qualité et au développement du pavillon français, et la participation à la protection de l’environnement marin et littoral.

Les crédits consacrés à l’action 1 relative à la sécurité et à la sûreté maritimes diminuent de 8 % par rapport à 2018 mais leur niveau demeure sensiblement supérieur au montant des crédits accordés chaque année entre 2010 et 2017, puisqu’ils atteignent 29 millions d’euros en 2019 contre moins de 26 millions en 2017. Permettez-moi deux remarques sur cette action. La première a trait à l’importance qu’il y a à conserver des moyens humains à la hauteur des enjeux de sécurité maritime car les effectifs relatifs au programme 205 ont baissé de 10 % depuis 2010 et, cette année encore, le plafond d’emploi subit une réduction de 35 équivalents temps plein travaillé. Ma deuxième remarque concerne le financement de la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM) : je me réjouis certes de l’accroissement de l’engagement financier de l’État, qui atteint 6 millions d’euros en 2019, car il faut renouveler en grande partie la flotte des canots tous temps, mais je ne peux que regretter que les affectations de taxes au profit de la SNSM n’aient pas porté leurs fruits. À l’évidence, il faut repenser le financement de la SNSM. C’est un chantier compliqué mais important qu’il nous faut entreprendre en nous appuyant notamment sur les pistes de réflexions tracées par le rapport de Mme Chantal Guittet.

Les crédits dédiés à l’action 3 relative à la flotte de commerce, qui représentent près de la moitié du budget des affaires maritimes, soit 81,2 millions d’euros, restent stables en 2019. Je me félicite en particulier de la pérennisation des exonérations de cotisations sociales patronales pour la marine de commerce mises en place par la loi du 20 juin 2016 pour l’économie bleue, dont le coût est évalué à 14 millions d’euros et qui avaient bien failli être supprimées l’an passé. Je précise également que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 prévoit une extension de ces exonérations aux navires battant pavillon européen pour des raisons de conformité au droit communautaire. Le maintien de ce dispositif est important pour la compétitivité du transport maritime français et l’emploi dans un contexte de concurrence internationale très forte.

Les crédits de l’action 2 relative aux gens de mer et à l’enseignement maritime sont quasiment stables : 27,3 millions d’euros en 2019 contre 27,8 millions en 2018. La plus grande partie de cette enveloppe est consacrée à l’École nationale supérieure maritime (ENSM). Les lycées professionnels maritimes perçoivent également une subvention. Je reviendrai dans un instant sur la question de l’enseignement.

Quelques mots, enfin, sur l’action 4 relative à l’action interministérielle de la mer : je me réjouis d’autant plus de l’augmentation de près de 3 millions d’euros de son budget qui, en 2019, atteint 12,99 millions d’euros, que cette action a fait l’objet pendant plusieurs années d’annulations et de gels importants, ce qui est regrettable compte tenu des actions essentielles qu’elle finance pour préserver l’environnement marin et la sécurité maritime.

J’en viens aux crédits du programme 203 alloués aux infrastructures portuaires. La plus grande partie d’entre eux finance l’entretien des accès et des ouvrages d’accès des grands ports maritimes – le dragage. En 2019, ils augmentent de 29 millions d’euros par rapport à 2018. Je m’en réjouis car ils n’avaient cessé de baisser jusqu’en 2017, alors que le dragage est l’une des conditions de la survie économique des grands ports français. D’autre part, il faut mettre le paquet, si j’ose dire, sur la transformation environnementale du port du Havre, premier port européen en termes d’accès maritime.

Cette année, j’ai choisi de concentrer mon rapport sur deux sujets : la formation maritime et la mise en place d’une filière de responsabilité élargie du producteur (REP) pour la déconstruction des navires de plaisance.

L’enseignement maritime attire moins les projecteurs que d’autres domaines ; pourtant, ses enjeux sont cruciaux pour rendre à la France sa puissance maritime. Il souffre de plusieurs maux. Tout d’abord, la carte des formations et le réseau des établissements mériteraient d’être revus pour en rationaliser l’organisation et en améliorer l’attractivité. En effet, les métiers de la mer souffrent d’un manque de visibilité qui leur est très préjudiciable pour attirer de nouvelles vocations. Il existe aussi un déficit en matière d’apprentissage : seuls cinq lycées professionnels sur douze le proposent. C’est une démarche qu’il faut pourtant encourager, dans la droite ligne de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel. Sans doute faut-il aussi améliorer l’organisation de l’apprentissage, notamment pour inciter davantage les professionnels à accueillir des jeunes en formation sur leurs bateaux tout en permettant à ces jeunes de se former aux conditions réelles du métier. Le secteur du mareyage connaît également des difficultés de renouvellement des générations.

Enfin, je suis avec intérêt la réorganisation de l’ENSM, née en 2010 suite au regroupement de quatre écoles nationales de la marine marchande. La Cour des comptes a jugé très sévèrement cette réforme dans un rapport paru cette année. L’avenir de l’école est pourtant primordial pour garantir la compétitivité de notre pavillon et l’emploi français. Il convient donc de remédier au manque d’attractivité de l’ENSM, à son manque d’enseignants permanents et aux dysfonctionnements engendrés par son éclatement sur quatre sites.

Je me suis intéressé à un autre sujet relatif à la formation, bien qu’il n’entre pas dans le champ de mon rapport : la formation continue. Je m’interroge en particulier sur la durée et le coût des formations et des certificats de compétences. Permettent-ils d’attirer des personnes en reconversion et d’améliorer les compétences de celles qui exercent déjà dans ce métier ? On sait combien les métiers de la mer sont difficiles, et l’on n’a ni la même motivation ni les mêmes capacités physiques à vingt ans qu’à cinquante ans. Nous devons parvenir à faire évoluer ces métiers de la mer – je le dis quatre jours avant le départ de la Route du Rhum à laquelle prendront part de grands navigateurs qui peinent parfois à réussir leur reconversion professionnelle, tant la validation des acquis de l’expérience prend un temps fou.

Je conclurai par un mot sur la filière de responsabilité élargie du producteur pour la déconstruction des navires de plaisance, sur laquelle nous sommes plusieurs ici à travailler. Après plusieurs reports successifs, cette filière doit enfin être mise en place en 2019. Elle sera financée par la création d’une écocontribution à l’achat des navires de plaisance et par l’affectation d’une partie du produit du droit annuel de francisation et de navigation (DAFN). Cette REP doit permettre de se débarrasser plus facilement des navires en fin de vie et d’éviter ainsi qu’ils polluent nos paysages littoraux. C’est dans le même esprit qu’a été adopté l’amendement que j’ai défendu pour mieux sanctionner les occupants sans titre du domaine public maritime portuaire.

La répartition du produit du DAFN entre ses différents affectataires est un enjeu connexe : il diminue d’année en année en raison de l’application de différents abattements en fonction de l’âge des navires. Avec le groupe Modem et apparentés, j’ai défendu un amendement au PLF 2019 pour figer ce barème et stopper l’hémorragie en attendant la réforme globale de la taxe qui devrait advenir d’ici un ou deux ans. Cet amendement a également été défendu par des collègues appartenant à plusieurs groupes et je me félicite de son adoption lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances en séance publique.

La REP « plaisance » ne prendra pas en charge les engins de plage ou autres paddles et planches à voile. Ils devraient l’être par la REP « loisirs », en cours d’élaboration conformément à la feuille de route pour l’économie circulaire. Nous serons particulièrement intéressés par l’avancement de ces travaux car ces engins constituent une autre source de pollution qu’il nous faut traiter.

Enfin, je tiens à remercier mon assistant et surtout l’administratrice de notre commission qui m’a aidé à rédiger ce rapport dans des conditions délicates, puisque j’ai été absent quelque temps. Son travail de grande qualité et son souci du détail m’ont été précieux.

Mme la présidente Barbara Pompili. Je vous remercie, monsieur le rapporteur pour avis, de rappeler à quel point l’appui des administratrices et administrateurs de la commission nous est précieux.

La parole est à Mme Florence Lasserre-David, rapporteure pour avis.

Mme Florence Lasserre-David, rapporteure pour avis. Le rapport pour avis qui m’a été confié porte d’une part sur les crédits du programme 112, intitulé « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire », et d’autre part sur les crédits du programme 162, intitulé « Interventions territoriales de l’État ». Ces deux programmes relèvent de la mission « Cohésion des territoires » qui couvre l’ensemble des actions mises en œuvre par le ministère de la cohésion des territoires en faveur du développement et de l’aménagement du territoire, et de la solidarité entre les territoires.

Le projet de loi de finances pour 2019 prévoit de doter cette mission d’un montant total de 16,16 milliards d’euros en autorisations d’engagement et de 16,05 milliards d’euros en crédits de paiement.

Le programme 112, piloté par le Commissariat général à l’égalité des territoires, concourt à la réalisation de deux objectifs : d’une part, renforcer l’attractivité économique et la compétitivité des territoires et, d’autre part, assurer la cohésion et l’équilibre des territoires et favoriser leur développement durable. Il concerne à la fois l’attractivité des territoires, leur développement économique et l’accessibilité des services au public ; en outre, il est l’outil par excellence du développement du numérique.

Le projet de loi de finances pour 2019 prévoit, pour le programme 112, un montant d’environ 201,66 millions d’euros en autorisations d’engagement – soit une augmentation par rapport à la loi de finances pour 2018 – et d’environ 243 millions d’euros en crédits de paiement, soit une baisse par rapport à la précédente loi de finances. Au sein de cette enveloppe globale de crédits, 181,8 millions d’euros en crédits de paiement sont destinés à être versés aux collectivités locales. Ces fonds serviront à financer les contrats de plan État‑région qui représentent 62 % des autorisations d’engagement et 47 % des crédits de paiement du programme 112, l’accompagnement – dans le cadre des contrats de redynamisation des sites de défense – de la redynamisation des territoires touchés par la fermeture d’implantations militaires, la revitalisation des centres-bourgs dans le cadre de l’expérimentation lancée dans 54 villes, l’accompagnement des conventions du programme « Action Cœur de ville », les contrats de ruralité, à hauteur de 33,4 millions d’euros, pour la mise en œuvre des contrats signés en 2016-2017 uniquement – puisque les contrats de ruralité signés après le 1er janvier 2018 sont couverts par le programme 119 de la mission budgétaire « Relations avec les collectivités territoriales » – ainsi que le pacte État-métropoles, pour un montant de 3,8 millions d’euros et, enfin, le soutien au fonctionnement des maisons de services au public (MSAP) existantes, dont l’enveloppe financière de 2018 est reconduite à l’identique pour 2019.

La question des MSAP a constitué le fil rouge des auditions que j’ai menées. Ces maisons ont connu un démarrage très lent au début des années 2000. Selon les statistiques des préfectures, elles sont désormais au nombre de 1 284, dont 500 sont des MSAP « postales ».

Les maisons de services au public, auxquelles le programme 112 apporte la contribution financière de l’État, constituent un instrument remarquable pour améliorer le service rendu à la population, répondre à l’enjeu d’égalité des territoires et remédier au sentiment d’isolement voire d’abandon parfois ressenti sur certains territoires. L’ensemble des MSAP traitent désormais 3 millions de demandes par an.

Cependant, le service qui y est rendu au public est inégal selon les territoires. Certaines maisons sont en échec. Le manque de formation des personnels et les modalités insatisfaisantes de communication et de signalétique sont souvent invoqués pour expliquer leurs difficultés. Compte tenu du bilan mitigé de leurs premières années de fonctionnement, les MSAP restent un chantier ouvert. Tous les organismes auditionnés demeurent cependant attachés à ce modèle et sont convaincus de l’utilité de ces établissements, de leur potentiel et de la nécessité de les faire évoluer. C’est d’ailleurs pour répondre à ces attentes qu’une réflexion est actuellement menée avec les opérateurs impliqués, les préfectures et les collectivités territoriales afin de penser la MSAP de demain en termes de maillage territorial, d’offre de services, d’animation et de gouvernance.

Je saisis donc l’occasion qui m’est donnée pour exprimer mon soutien en faveur de l’action de l’État et des acteurs mobilisés sur ce sujet qui se heurtent non seulement aux difficultés susmentionnées mais aussi à un problème de financement. En effet, alors que 1 300 MSAP devraient être labellisées avant la fin de l’année, le financement n’a été calibré que pour assurer le fonctionnement de 1 000 maisons. De ce fait, le dispositif accuse un endettement évalué à près de 14 millions d’euros à la fin 2018.

J’en viens à la création prochaine de l’Agence nationale de cohésion des territoires, présentée dans le projet annuel de performance de la mission « Cohésion des territoires » du PLF pour 2019. À la lecture de ce document budgétaire, il apparaît clairement que cette agence est conçue comme la traduction concrète du « pacte girondin » que le Président de la République et le Premier ministre ont appelé de leurs vœux. Cette agence devrait donner corps à la volonté du Gouvernement de mettre en œuvre une politique de cohésion des territoires qui soit véritablement partenariale et non plus verticale.

À ce stade, le programme 112 ne comporte ni autorisations d’engagement ni crédits de paiement pour la future agence. Il nous faudra donc attendre l’examen de la proposition de loi des sénateurs du groupe Rassemblement démocratique et social européen (RDSE) portant création d’une Agence nationale de la cohésion des territoires pour débattre de cette question.

En ce qui concerne le programme 162 – le programme « Interventions territoriales de l’État », ou PITE –, il s’agit d’un dispositif budgétaire atypique, conçu comme un outil financier d’actions interministérielles. Le montant total des autorisations d’engagement demandées à ce titre représente 35,7 millions d’euros, et le montant des crédits de paiement s’élève à 25,8 millions d’euros. Ce programme comporte cinq actions. l’action 2, relative à la qualité de l’eau en Bretagne, porte principalement sur le financement du nouveau plan de lutte contre les algues vertes. L’action 4 relative au programme exceptionnel d’investissement pour la Corse, vise à aider cette collectivité à surmonter ses handicaps naturels et à réduire les inégalités entre l’île et le continent – un objectif en passe d’être atteint puisque selon les informations communiquées par le ministère de l’intérieur, les taux d’équipement de la Corse, rapportés à sa population, sont désormais identiques à ceux du continent. L’action 6 relative au plan gouvernemental pour le Marais poitevin vise à protéger les prairies et les zones humides ; le PLF 2019 confirme sa clôture progressive. Je n’entre pas dans les détails de l’action 8 relative au plan chlordécone en Martinique et Guadeloupe, car nous y reviendrons lors de l’examen des amendements. L’action 9, enfin, concerne le plan Littoral 21 pour la région Occitanie et vise à répondre aux préoccupations environnementales et économiques de ce territoire.

En conclusion et après avoir remercié les personnes qui m’ont aidée à rédiger ce rapport, je vous invite, chers collègues, à émettre un avis favorable sur les deux programmes que je viens de vous présenter.

Mme la présidente Barbara Pompili. Nous en venons aux interventions des représentants des groupes.

Mme Nathalie Sarles. Je tiens à remercier M. Pahun et Mme Lasserre-David pour leurs rapports, qui nous éclairent sur les missions qu’ils rapportent. Le lien entre le programme 205 « Affaires maritimes » et le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire » ne semble pas d’emblée évident mais au fond, leur ADN est semblable : ils correspondent l’un et l’autre à la même stratégie d’accompagnement des territoires fragiles ou dont les enjeux sont nationaux, et ils posent la question essentielle de la subsidiarité de l’action publique face aux enjeux de solidarité nationale.

La France possède le deuxième domaine maritime du monde ; c’est dire si les questions maritimes sont primordiales. Comme vous l’avez rappelé, monsieur le rapporteur pour avis, elles recouvrent des enjeux géopolitiques, militaires, stratégiques, économiques, sociaux, sécuritaires et écologiques majeurs. L’enjeu global de la sécurité maritime – la sécurité des personnes comme la préservation de l’environnement marin – nous semble fondamental dans le contexte actuel.

La récente marée noire qui s’est produite en Corse replace la dimension environnementale de la navigation maritime sur le devant de la scène. La création de parcs nationaux marins ou terrestres, comme celui des Calanques, ne saurait faire l’économie d’une politique ambitieuse en matière de lutte contre les marées noires accidentelles. Le maintien des moyens du plan Polmar/Terre apporte la preuve que le Gouvernement a pleinement pris conscience de ces enjeux. De même, nous pouvons nous satisfaire de la hausse de 3 millions d’euros qui est dévolue à l’action 4 relative à l’action interministérielle en mer. Je note également avec satisfaction le maintien des crédits de fonctionnement consacrés à l’action 1 relative à la sécurité et à la sûreté maritimes.

Vous avez abordé, monsieur le rapporteur pour avis, la question de l’enseignement et de la formation. Nous devrons en effet redoubler de vigilance sur ce point au cours des exercices à venir.

Quant au programme 112, madame la rapporteure pour avis, il pose clairement la question de la subsidiarité, de la modularité et de la déconcentration de l’action publique. L’idée n’est pas que l’État intervienne partout mais qu’il intervienne là où les besoins de solidarité nationale sont les plus forts et là où existent des enjeux nationaux importants. Là encore, l’actualité législative récente et à venir place ce programme au cœur du débat : « Action Cœur de ville », dont l’outil législatif dit « opération de revitalisation du territoire » (ORT) vient d’être adopté dans le cadre de la loi ELAN, projet d’Agence nationale de la cohésion des territoires – qui suscite de nombreux espoirs – et projet de couverture numérique intégrale du territoire d’ici à 2022.

Nous pouvons nous féliciter que le budget global pour 2019 soit en hausse, notamment grâce à l’augmentation de plus de 10 millions d’euros des crédits destinés à l’action 2 relative au développement solidaire et équilibré des territoires. C’est cette action qui finance les fameuses maisons de services au public concernant lesquelles les attentes et les besoins sont nombreux.

Peut-être pourriez-vous préciser davantage quel sera l’avenir des contrats de ruralité, car les crédits actuellement affectés ne concernent que les contrats signés avant 2018.

Enfin, quel est l’avis des deux rapporteurs pour avis sur ces programmes et sur la capacité des budgets actuels à répondre aux enjeux de solidarité nationale et de subsidiarité de l’action publique dans les domaines de la sécurité maritime environnementale et humaine, de l’accompagnement des projets des collectivités, d’amélioration de l’accessibilité des services publics et, surtout, d’encouragement au développement économique ? En attendant, le groupe La République en Marche vous remercie pour ces deux rapports.

M. Vincent Descoeur. Avec votre permission, madame la présidente, je partagerai le temps de parole accordé au groupe Les Républicains avec M. Thibault Bazin, qui est bien meilleur spécialiste des questions maritimes que l’élu cantalien que je suis.

Je concentrerai mon propos sur quelques actions, en particulier celle qui concerne l’Agence nationale de cohésion des territoires, non sans faire remarquer que les moyens de la mission « Cohésion des territoires » diminuent pour la deuxième année consécutive, ce qui contraste avec la volonté affichée que le « soutien de l’État s’exprime au plus près du terrain ».

Votre rapport, madame la rapporteure pour avis, aborde la création de l’Agence nationale de cohésion des territoires dont les contours seraient définis par une proposition de loi d’initiative sénatoriale – ce qui est pour le moins curieux. Quelles seront les missions de cette agence ? De quels moyens disposera‑t-elle ? La lecture de votre rapport permet de répondre à ces questions : le programme 112 ne prévoit ni autorisations d’engagement ni crédits de paiement, ce qui laisse dubitatif quant à la force de frappe de ce qui doit être « le bras armé de la politique de cohésion des territoires ». Nous ne sommes guère plus rassurés en lisant plus loin que l’agence sera une « structure ensemblière gérant des moyens agrégés autour de programmes en ciblant des objectifs précis ».

Mercredi dernier, devant les maires ruraux, le Premier ministre a évoqué l’ouverture de cette agence aux communes, et non plus seulement aux structures intercommunales – ce qui, vous en conviendrez, modifiera singulièrement son périmètre. Aussi jugez-vous crédible le fait que cette ouverture se fasse sans moyens nouveaux ?

Enfin, certaines collectivités ont pris des initiatives en matière d’ingénierie. Je pense en particulier aux départements qui ont créé des instances d’ingénierie départementale accompagnant les projets des communes et des intercommunalités. Que pensez-vous de l’articulation entre ces agences, qui ont fait leurs preuves, et l’agence nationale en gestation ?

M. Thibault Bazin. En complément des propos de M. Vincent Descoeur, je souhaite aborder la question de l’accompagnement par l’État des politiques de transition énergétique des collectivités. La rapporteure pour avis a évoqué les contrats existants mais certains territoires semblent oubliés. Elle a aussi annoncé de nouveaux contrats à venir : il serait intéressant de décliner un volet concret qui n’oublie aucun territoire et permette de toucher chaque foyer dans son quotidien.

Pourtant, la transition écologique des logements semble en marche ralentie. En effet, la rénovation des logements a été et sera profondément ralentie par les effets des mesures prises dans la loi de finances pour 2018, qu’il s’agisse du parc social ou du parc privé. Le bouleversement du modèle économique du logement social a produit des effets néfastes sur le programme de rénovation énergétique du parc existant des bailleurs sociaux, leur plan d’investissement ayant été réduit de 30 %. De même, les mesures ayant restreint les dispositifs d’incitation à l’investissement dans la pierre affectent profondément les constructions de logements vertueux. Les dépôts de permis de construire sont en panne dans les zones B et C, oubliées : 95 % du territoire sont ainsi privés de la production de logements respectueux du développement durable. L’absence d’offres attractives voisines n’incite pas les bailleurs privés à améliorer la performance énergétique de leurs logements puisque leurs locataires ne bénéficient pas d’offres concurrentes qui tirent les marchés locaux vers le haut. Avec cette baisse d’activité programmée, c’est tout l’artisanat et le bâtiment qui souffriront sur les territoires, alors que les besoins sont importants et que la précarité énergétique est grande.

Au rythme constaté des rénovations, il faudra au parc français, qui compte plus de 30 millions de logements, un siècle pour accomplir sa transition énergétique. Alors que vous prévoyez d’augmenter considérablement le coût du chauffage, il est urgent de mener une politique volontariste et ambitieuse qui aide les particuliers à rénover leurs logements, faute de quoi de nombreux foyers se trouveront noyés – là est le lien avec les affaires maritimes – par votre politique. Il y va de la cohésion des territoires !

Mme Patricia Gallerneau. Je salue, au nom du groupe Mouvement Démocrate et apparentés, la stabilité budgétaire de ces deuxièmes budgets des affaires maritimes et de la cohésion du territoire pour la législature.

S’agissant du budget de la cohésion des territoires, je souhaite revenir sur les maisons de services au public, auxquelles mon groupe est très attaché et auxquelles vous avez accordé, madame la rapporteure pour avis, une large place dans votre rapport. Les MSAP permettent, c’est important, de remédier au sentiment d’enclavement des territoires et ont pour objectif notamment d’endiguer la fracture territoriale. Il s’agit d’ailleurs de la volonté du ministre, comme l’a souligné M. Julien Denormandie lors de son audition début octobre.

Beaucoup de travail reste à faire pour que toutes les MSAP répondent au cahier des charges qui leur a été attribué et qu’elles soient réellement une réussite pour les territoires. Je constate toutefois, comme d’autres, que le PLF pour 2019 ne prévoit pas de crédits consacrés à la création de nouvelles MSAP. Que pensez‑vous donc, madame la rapporteure pour avis, de ces choix budgétaires du Gouvernement un peu limités ?

S’agissant du budget des affaires maritimes, je me réjouis particulièrement de l’accroissement de l’engagement de l’État en faveur de la SNSM, association dont l’objet est de secourir bénévolement et gratuitement les vies humaines en danger, en mer et sur les côtes. Depuis de nombreuses années, les rapporteurs aux affaires maritimes demandent un soutien de l’État à la SNSM, qui rencontre d’importantes difficultés de financement – c’est ce que j’entends très fréquemment dans mon département, la Vendée. Ces augmentations budgétaires sont donc à saluer.

Cette stabilité des crédits s’ajoutera en 2019 à une nouvelle redevance sur le domaine public portuaire, et notre groupe, comme l’a rappelé M. Jimmy Pahun, a fait adopter en première partie du PLF, sur le même schéma que ce qui existe pour le domaine public fluvial, un amendement donnant au gestionnaire du domaine public portuaire la possibilité d’instaurer une majoration de redevance en cas d’occupation irrégulière. Le domaine public maritime est, au même titre que le domaine public fluvial, rare et convoité. Il convenait donc d’assurer au gestionnaire les moyens de cette protection. Grâce à cet amendement, nous dissuaderons et sanctionnerons plus efficacement les occupants sans titre. Cet amendement s’inscrit aussi en parfaite cohérence avec le budget des affaires maritimes, que nous essayons de préserver afin de continuer à faire valoir l’image de grande nation maritime dont bénéficie toujours notre pays.

Monsieur le rapporteur pour avis, je termine mon propos sur le sujet de la pollution maritime, à laquelle vous êtes sensible, je le sais, et qui doit nous alerter en tant que membres de la commission du développement durable. La plupart des navires fonctionnent au fioul lourd, qui engendre une pollution importante et des milliers de décès prématurés par an au sein de l’Union européenne. L’année dernière, les armateurs français ont adopté une démarche volontaire en faveur de l’option du gaz naturel liquéfié (GNL), en faisant en sorte que leurs porte‑conteneurs soient propulsés au gaz. Dès lors, que pensez-vous de la solution préconisée par les acteurs du secteur et les associations environnementales, à savoir la conversion au GNL ? Pensez-vous que les initiatives du Gouvernement en ce sens soient suffisantes ?

Mme la présidente Barbara Pompili. Pour le groupe UDI, Agir et Indépendants, je donne la parole à M. Stéphane Demilly et à M. Guy Bricout.

M. Stéphane Demilly. Avec près de onze millions de kilomètres carrés, vingt fois la superficie du pays, la France est le second pays au monde en termes de surface maritime, une géographie qui nous procure une formidable force économique. Le secteur maritime français représente ainsi près de 310 000 emplois directs, hors tourisme, un million d’emplois indirects et 65 milliards d’euros de chiffre d’affaires, sans compter les activités littorales. C’est autant que l’automobile et deux fois plus que le secteur aéronautique. Les enjeux sont donc considérables.

Le renforcement de la compétitivité de nos grands ports maritimes doit à l’évidence faire l’objet d’une stratégie dont l’investissement est l’un des éléments clés. Les sept grands ports maritimes français tels que définis par la réforme portuaire de 2008, Marseille, Le Havre, Dunkerque, Nantes-Saint-Nazaire, Bordeaux, La Rochelle et Rouen, méritent ainsi la plus grande attention des services de l’État et doivent faire l’objet d’un véritable travail partenarial avec les exécutifs régionaux. En effet, par la loi NOTRe, les conseils régionaux ont été dotés de compétences renforcées en la matière. Quelles sont donc, monsieur le rapporteur pour avis, les pistes qui ont pu être dégagées dans le cadre de vos travaux afin de renforcer la compétitivité de nos grands ports maritimes, d’optimiser leurs retombées économiques sur nos territoires, et de renforcer le travail partenarial entre l’État et les régions ?

M. Guy Bricout. Les programmes qui nous sont soumis aujourd’hui appellent quelques réflexions et interrogations. Le programme « Action Cœur de ville » se voit dédier 5 milliards d’ici à 2022 ; c’est très bien mais j’avoue ne pas comprendre la manière dont le choix a été fait. Je pense par exemple à des villes de 10 000 à 20 000 habitants dont le commerce de centre-ville est en souffrance. Il faudrait sans doute à l’avenir élargir le choix à des villes dont le nombre d’habitants est moindre.

Concernant les MSAP, pour en avoir mis en place deux dans le Nord, je peux témoigner qu’elles rendent de précieux services. Je me félicite donc que le PLF priorise leur développement et y consacre 5 millions d’euros, bien que je vous aie entendue dire, madame la rapporteure pour avis, que le financement n’était pas suffisant.

S’agissant des services mobiles, l’ambition de couvrir l’ensemble du territoire en très haut débit dès 2020 est louable. Néanmoins, beaucoup d’implantations d’antennes sont bloquées par des recours intempestifs. Ne pourrait-on enfin avoir des études claires sur la nocivité ou non des antennes, pour mettre fin à ces blocages ?

Alors que l’ANCT est indispensable, sa création n’en finit pas de traîner. Notre groupe avait ainsi proposé sa mise en place via une proposition de loi. Que peut-on espérer au sujet de son calendrier et son périmètre exact ?

Enfin, si ce budget fait la part belle à la ville, quid de nos territoires ruraux ? Lors de ma campagne des législatives, j’avais suggéré l’idée d’un plan Marshall de la ruralité visant à ce que, pour chaque euro mis pour la ville, on mette l’équivalent pour la ruralité. Espérons que l’on tendra un jour vers ce véritable équilibre.

M. Christophe Bouillon. Pour ceux qui doutent que la France est une puissance maritime, il suffit d’entendre M. Jimmy Pahun pour se convaincre au contraire de sa vocation maritime forte. D’ailleurs, c’est la seule vigie que je connaisse qui dit « mer ! » plutôt que « terre ! », et je crois qu’on peut lui faire confiance pour la connaissance qu’il a de ce domaine.

Malgré tout, je regrette qu’à aucun moment n’ait été prononcé le mot Brexit. Je vous le dis en tant qu’élu normand : c’est un sujet qui nous inquiète, et j’aimerais savoir concrètement quels moyens d’accompagnement sont prévus pour permettre que, dans le corridor maritime que représente aujourd’hui la Manche, le Brexit ne pénalise pas les grands ports français – je pense au Havre, à Rouen et à beaucoup d’autres. On sait qu’une certaine volonté est exprimée au niveau européen, notamment par la Commissaire européenne Mme Violeta Bulc, qui a indiqué que l’on trouverait d’autres moyens que de passer par les ports français. Voilà qui peut nous inquiéter.

M. Jimmy Pahun a fait référence, et je l’en remercie, au développement du grand port maritime du Havre. Une question ancienne est celle de la chatière, un accès au chenal. Cet investissement, évoqué de manière récurrente, représente aujourd’hui la coquette somme de 100 millions d’euros. J’aimerais savoir si, dans le budget dont il a fait la présentation, des moyens sont dédiés à cette fameuse chatière attendue par la communauté portuaire havraise.

Sur la cohésion du territoire, a été évoquée la création de l’ANCT. Elle va se faire par voie législative, le texte étant actuellement au Sénat. Pour que ce soit une réussite, il faut qu’elle soit une agence territorialisée et non un « machin » parisien. Il faut que place soit faite aux élus, des élus qui représentent des collectivités de toutes tailles. Il faut également que cette agence soit dotée de moyens et notamment de moyens humains. Ce qui remonte des territoires, c’est souvent un manque d’ingénierie pour accompagner des projets. Il est bon de mettre en œuvre des dispositifs, de faire des appels à manifestation d’intérêt, mais, pour un élu d’une collectivité petite ou moyenne, il est toujours difficile de mettre en œuvre, ensuite, les moyens d’action.

Vous avez évoqué le programme « Action Cœur de ville » ; c’est un bon dispositif, mais il concerne 222 communes alors que l’on sait que la question de la revitalisation des centres-villes concerne au bas mot 700 à 800 communes dans notre pays. Je voudrais savoir si vous pensez à une possibilité d’élargissement de ce dispositif.

Vous avez par ailleurs évoqué la question des contrats de plan État-région. Nous arrivons en « queue de comète » de la précédente génération. Avez-vous des indications sur un calendrier et la façon dont se construira la prochaine génération ? Notamment, intégrera-t-elle, c’est une question que nous avons souvent discutée ici, l’avenir des petites lignes ferroviaires et un certain nombre d’investissements nécessaires en termes d’infrastructures ?

Enfin, s’agissant des MSAP, je considère, comme beaucoup, que la première des MSAP, c’est la mairie. Nous pouvons nous réjouir d’avoir, comme vous l’avez rappelé, 1 284 MSAP; c’est plutôt une réussite, cela permet de coordonner l’ensemble des services. Malgré tout, je pense qu’il faut continuer à porter attention à toutes les communes de France, qui sont les premières maisons de services au public.

M. Loïc Prud’homme. Nous discutons ce matin de cohésion des territoires. Pourtant, on finance des pôles de compétitivité à hauteur de plusieurs millions d’euros et des grands plans d’urbanisme pour suivre une logique de métropolisation qui met les territoires en concurrence plutôt que d’œuvrer à leur cohésion. On se trompe en faisant cela ; l’attractivité d’un territoire passe d’abord par une offre de logements abordables, accessibles pour tous, par un parc HLM suffisant, adapté et performant au niveau thermique.

Cela passe aussi par des services publics accessibles à toutes et tous. C’est notamment l’objet du déploiement des MSAP. La nécessité de pouvoir accéder à des services publics de proximité n’est pas une idée abstraite mais une nécessité absolue, concrète, notamment pour réaliser la transition écologique qui s’impose à nous.

Je prendrai simplement l’exemple de la hausse du prix des carburants, qui n’est pas couplée à des mesures d’accompagnement à la hauteur. Comment pensez-vous que l’on puisse vivre dans les territoires ruraux ou péri-urbains quand il devient impossible de se déplacer ou qu’il faut arbitrer entre se chauffer et se déplacer, parfois loin, pour accéder aux services publics indispensables à notre vie quotidienne ? Croyez-vous sincèrement que la transition énergétique, notamment pour la mobilité, passe par des aides à la conversion de ce niveau ? Avec 250 000 bénéficiaires attendus pour un parc d’à peu près trente millions de véhicules particuliers, il faudra plus de cent ans pour renouveler le parc.

La cohésion du territoire passe évidemment par la prise en considération de ces réalités quotidiennes de nos concitoyens. Je pourrais apporter la même démonstration sur la faiblesse de l’investissement public dans la rénovation thermique des bâtiments, où il faudra des décennies pour atteindre une qualité suffisante du bâti. Pensez-vous que ce soit à la hauteur, alors que le GIEC tire la sonnette d’alarme et nous indique qu’il faut infléchir toutes les politiques publiques dans les deux ans qui viennent ?

M. Hubert Wulfranc. Nous sommes depuis plusieurs années sur un fond de restriction des moyens humains, des services de l’État et de ses opérateurs. C’est une trajectoire qui a entraîné une perte d’expertise de proximité privant de plus en plus souvent les collectivités territoriales d’un soutien en matière d’ingénierie. Il n’y a qu’à interroger la plupart des maires et des présidents de structures plus élaborées : ils y sont sans cesse confrontés. C’est vrai dans les domaines de l’habitat, de la salubrité, de la santé, de l’environnement ou encore des infrastructures.

La fédération de plusieurs organismes telle que signifiée dans le projet, chambres régionales des métiers et de l’artisanat (CRMA), Agence nationale de l’habitat (ANAH), Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME), nous apparaît davantage comme un risque majeur de désarticulation des missions qui, malgré les difficultés engendrées par les politiques que vous pérennisez avec Cap 22, parvenaient à se conclure encore auprès des élus au travers des projets locaux. Vous parliez de rationalisation des instruments en faveur de la cohésion des territoires. Les mots ont un sens et votre vocabulaire confirme nos craintes. Les élus locaux n’ont pas besoin d’une descente de commandos pour donner un coup de main dans les territoires locaux, mais d’un suivi attentif et régulier des services de l’État sous l’autorité préfectorale pour dénouer, par un éclairage démocratique, avec et pour les élus, les dossiers. Et ce pour toutes les collectivités, fragiles ou non. Encore faut-il s’entendre sur ce que l’on considère comme fragile. Nous redoutons donc la consolidation d’une gestion technocratique des enjeux territoriaux, habillée du doux mot de « girondisme ».

Votre conclusion à ce stade, madame la rapporteure pour avis, illustre d’ailleurs les difficultés de l’exécutif vis-à-vis de l’ANCT : nombre d’organismes concernés, moyens alloués, collectivités interlocutrices, autant de questions sans réponse à ce jour, alors que le Commissaire général à l’égalité des territoires demandait une mise en place de cette structure à l’automne. Le report et les conditions du débat sur la création de cette agence finissent de nous convaincre de son innocuité.

M. Olivier Falorni. Je commencerai mon intervention par les affaires maritimes et je voudrais évoquer tout particulièrement la SNSM, un outil primordial du sauvetage maritime mais dont le modèle financier reste très fragile. La SNSM occupe une place majeure dans le dispositif national du sauvetage en mer. Il faut souligner l’action des 7 000 bénévoles que compte la SNSM et qui permet de porter secours à des milliers de personnes en détresse en mer chaque année. Dans mon département, la Charente-Maritime, on ne compte pas moins de six stations et deux centres de formation, animés par 200 bénévoles. Lors de l’inauguration du Grand Pavois, Mme la ministre des transports, Élisabeth Borne, a annoncé la signature de la convention de partenariat liant l’État à la SNSM pour la période 2018-2020. Comme notre rapporteur pour avis, je me félicite de l’accroissement de l’engagement financier de l’État et de sa pérennisation, mais le compte n’y est pas.

En effet, en Charente-Maritime, chaque station dispose de ses propres moyens nautiques et gère son propre budget, pour un montant avoisinant les 350 000 euros, et le nombre d’interventions est en augmentation constante : 135 missions en 2017 contre 195 missions comptabilisées fin septembre 2018. Au plan national, ce sont trente-cinq canots tous temps qu’il faut renouveler, pour un budget de 1,2 million d’euros.

Pour renforcer la stabilité financière de la SNSM, la loi de finances initiale pour 2018 a introduit une nouvelle mesure lui permettant de bénéficier d’une partie des recettes issues du droit annuel de francisation et de navigation et du droit de passeport, dans la limite d’un plafond de 4 millions d’euros pour chaque taxe. Ma question porte sur le rendement effectif de cette taxe attribuée à la SNSM, qui paraît aujourd’hui relativement incertain et même improductif. Il apparaît que seul un montant de droit de francisation supplémentaire de 7 500 euros a été acquitté par un seul navire français. Pourrait-on connaître précisément le produit collecté de ce droit annuel de francisation et de navigation et, le cas échéant, les modalités pratiques de mécanismes permettant de faire participer les assurances au financement de la SNSM ?

S’agissant des crédits de la mission « Cohésion des territoires », je souhaiterais aborder plus particulièrement la question de la création de l’ANCT, présentée comme l’un des grands chantiers de la mission et qui aura vocation à collaborer dans le déploiement des grands programmes nationaux d’intervention, mais aussi en appui spécifique aux territoires pour des projets particuliers. La cohésion des territoires constitue l’ADN de notre groupe, Libertés et Territoires. Je souhaite poser quelques questions à propos de cette nouvelle agence qui devrait sortir de terre comme un guichet ouvert au bénéfice de toutes les collectivités.

L’ANCT s’adressera-t-elle à toutes les collectivités territoriales, sans omettre les communes rurales de moins de 3 500 habitants, afin de lutter efficacement contre les fractures territoriales grâce à une meilleure intervention de l’État sur le territoire ? D’autres questions restent en souffrance avant le lancement de l’agence en 2019. Quels sont les moyens humains et financiers dont elle disposera ? Quels seront les outils qui lui permettront de mener des projets partagés avec les agences nationales qui ne l’intégreront pas ? Enfin, par quelle articulation la Caisse des dépôts, avec la Banque des territoires, doit permettre de renforcer la capacité de cette agence ?

M. Jimmy Pahun, rapporteur pour avis. Madame Sarles, la sécurité maritime est surtout née de la catastrophe de l’Amoco Cadiz, après laquelle ont été créés les préfets maritimes et tout un système qui fonctionne bien, puisqu’en quarante ans, il ne s’est pas produit d’accident maritime grave alors qu’un bateau entre dans la Manche chaque minute et demie. Ce sont essentiellement les centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (CROSS) français, à Corsen, Jobourg, Gris-Nez, qui gèrent cette sécurité maritime.

On a vu avec l’accident improbable il y a trois semaines en Corse que, sur la pollution, nous sommes encore démunis. Elle est présente en effet de façon assez importante autour de Porquerolles et dans la baie de Saint-Tropez.

Les passerelles maritimes, au niveau de l’enseignement, me tiennent à cœur. Je vais vous révéler un secret : j’étais mauvais élève à l’école. Quand on n’était pas bon élève, chez nous, on était envoyé travailler à la ferme ou à la mer. C’est ainsi que mon père m’a envoyé travailler comme marin-pêcheur entre seize et dix-neuf ans. J’y ai fait mes armes et j’ai connu la difficulté de ce métier. C’est un métier que l’on fait quand on est jeune car on y gagne bien sa vie. Quand on est un peu moins jeune, c’est parce qu’on a trouvé l’amour et qu’il faut construire une maison. Et quand on est un peu plus vieux, c’est difficile. Il faut donc penser à des évolutions de carrière pour ces marins-pêcheurs, qui exercent un métier à risque car je vous rappelle qu’il s’est encore produit vingt-trois accidents mortels cette année. Sur ce nombre, dix-sept marins ne portaient pas de gilet de sauvetage ; ceux-ci sont à présent tellement lourds qu’ils en porteront de moins en moins. Ces évolutions de carrière à imaginer pour les marins-pêcheurs se feraient peut-être à terre, dans le transport maritime, dans d’autres métiers moins physiques et moins difficiles en termes de rythme de sommeil.

Madame Gallerneau et monsieur Falorni, vous avez raison de souligner que la SNSM fonctionne grâce à 7 000 bénévoles. C’est la première des choses à rappeler. Le profil de ces bénévoles évolue. Les marins-pêcheurs y vont moins car ils sont de moins en moins nombreux, et ces occupations de sauvetage intéressent de plus en plus des gens venant du monde terrestre, des médecins, des retraités… Il faut donc les former et, pour cela, se donner les moyens. Vous avez également raison de rappeler qu’il faut entièrement renouveler la flotte, reconstruite en grande partie après le drame de l’Aber-Wrac’h en 1986.

Il faudra trouver un autre mode de financement et c’est pourquoi j’ai brièvement évoqué le rapport de Mme Chantal Guittet. Plusieurs pistes sont possibles. Il conviendrait par exemple d’estimer les économies que la SNSM permet de faire réaliser aux compagnies d’assurances, car les bateaux sauvés par la SNSM sont autant de préjudices épargnés aux assurances. On pourrait donc demander à ces compagnies de participer à l’effort de guerre de la SNSM. De même, ne pourrait-on demander, comme les Britanniques, une participation aux plaisanciers, alors que chez nous seuls 11 % de plaisanciers participent à l’aide de la SNSM ? Nous avons envie de travailler sur ces pistes car la SNSM est un emblème de la France.

Madame Gallerneau, avec le GNL on part de loin car il n’y avait pas plus polluant que le transport maritime. L’Organisation maritime internationale (OMI) demande d’aller vers un transport propre et décarboné. Dans la zone SECA Manche/Mer du Nord/Baltique, les émissions ne doivent pas contenir plus de 0,1 % de soufre. Ce sont des choses qui vont dans le bon sens. J’en parlais l’autre jour, à l’issue d’un colloque sur la Méditerranée, avec ma camarade Mme Catherine Chabot, qui disait que la paix en Méditerranée viendra peut-être de la nécessité d’un environnement sain et propre. Les armements français prennent leur part et nous avons de même adopté un amendement important en première partie du PLF : le suramortissement qui permettra aux armateurs de réaliser des économies d’impôt dans la mesure où ils propulseront leurs bateaux avec un autre carburant que le fioul. C’est déjà le cas de Brittany Ferries et ce sera très probablement le cas des navires qui desservent la Corse.

Il y a d’autres métiers à imaginer, dans l’enseignement, autour des éoliennes en mer, des hydroliennes, de la programmation pluriannuelle de l’énergie, qui sera très maritime, j’en suis certain.

Monsieur Demilly, je sais que ce rapport vous intéresse puisque vous en étiez le précédent rapporteur. Je vous remercie de rappeler que nous sommes le deuxième domaine maritime du monde. Il faut s’en servir. Vous avez également évoqué le tourisme, dont nous n’avons pas parlé dans ce rapport alors que c’est tout de même, il ne faut pas l’oublier, la première activité de bord de mer. Vous avez vu que nous avons « mis le paquet » sur le dragage. Le dossier sur les hinterlands, qui était votre préoccupation, est suivi. Nous sommes conscients de l’importance de développer la chatière du Havre, cette arrivée entre le port du Havre et la Seine, mais les cordonniers sont parfois les plus mal chaussés : le maire du Havre a changé de mission…

Merci, monsieur Bouillon, de vos gentils propos sur ma « maritimité ». Le Brexit n’est pas encore réalisé. Étant au Modem, je suis naturellement optimiste ; on peut espérer trouver une solution. Le vrai problème du Brexit, c’est la pêche, car tous nos armements, lorientais, concarnois, boulonnais, qui vont pêcher dans le canal Saint-Georges, ne pourront plus s’y rendre. Il faut vraiment trouver des solutions, sinon ces contrôles à la frontière seront terribles, cela prendra des heures.

Comme MM. Prud’homme, Wulfranc, Descoeur et Bazin n’ont pas posé de question sur la « maritimité », je les remercie d’avoir été là. (Sourires.)

Mme Florence Lasserre-David, rapporteure pour avis. Comme j’ai regroupé mes réponses en fonction des thèmes, je vais commencer par les contrats de ruralité. À ce jour, il y en a plus de 480 et le financement va continuer. Les contrats de ruralité signés après le 1er janvier 2018 ne seront plus intégrés dans la mission « Cohésion des territoires » mais dans une autre mission budgétaire. Le ministère de la cohésion des territoires a souhaité effectuer un bilan « flash » de ce dispositif. Il se révèle globalement positif mais souligne néanmoins les difficultés à promouvoir une véritable animation territoriale en raison des critères très limitatifs fixés par la loi de finances pour 2017 en ce qui concerne les dépenses d’ingénierie. Les collectivités sont inégalement dotées en moyens d’ingénierie et elles sont structurées différemment, ce qui peut rendre difficile l'élaboration d'un véritable projet de stratégie de territoire. C’est l’une des principales problématiques auxquelles sera confrontée la future ANCT.

Il m’est difficile de vous apporter des réponses précises sur cette ANCT car nous ne pouvons pas préjuger des débats parlementaires, qui viennent de commencer à la commission du développement durable du Sénat. Lorsqu’il est venu nous voir il y a quelques semaines, M. Julien Denormandie a rappelé que les moyens d’ingénierie existent mais que les collectivités ont besoin de ce guichet unique pour y accéder. Si l’on s'en tient à ce qu'avait annoncé M. Jacques Mézard, la future agence sera notamment dotée des moyens du Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET) et de l’Établissement public national d’aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (EPARECA). Monsieur Olivier Falorni, vous m'avez demandé si cette agence s'adresserait à toutes les collectivités. On peut l’imaginer mais je ne peux pas encore vous répondre de façon certaine. Aura-t-elle des moyens humains et financiers ainsi que des outils ? Je l'espère, ce sera là tout notre travail.

Le logement social ne fait pas partie des sujets que nous devions traiter ce matin, mais je tiens à dire que, comme vous, je pense que nous devons conduire une politique volontariste dans ce domaine.

S’agissant des MSAP, un diagnostic est en cours et il reste beaucoup à faire. Vous avez noté, madame Patricia Gallerneau, qu'il n'est pas prévu de leur affecter de nouveaux crédits pour l'an prochain. Nous voulons stabiliser le modèle et établir un diagnostic sur ce qui pourrait les rendre plus efficaces avant d’envisager d’en implanter sur d'autres territoires.

Comme vous l’avez rappelé, M. Guy Bricout, 222 villes ont été sélectionnées pour l'action « Cœur de ville ». Toutes les villes ont pu répondre car le Gouvernement avait volontairement écarté l’idée de créer un seuil de population. Comme vous, je pense aussi qu’il ne faut pas en faire un « machin parisien » car l’action doit se situer au plus près des territoires. Il faut écouter ce qu’ils ont à dire sur leur fonctionnement et sur ce que ces contrats vont pouvoir apporter à toutes les collectivités. Il va falloir leur donner des moyens, notamment humains. Je suis d’accord avec vous mais, à ce stade, il m’est difficile de vous apporter plus d’informations.

En ce qui concerne la nocivité des ondes et des antennes, je ne peux qu’abonder dans votre sens. Ce n’est pas du tout le sujet de notre réunion mais il est à noter que ces MSAP ne peuvent pas fonctionner correctement sans une excellente connexion numérique. Toutes les personnes auditionnées nous l’ont dit : la majorité des citoyens poussent la porte des MSAP pour avoir une bonne connexion et pour être aidés dans leurs relations numériques. J’ai entendu le parallèle établi entre les MSAP et la réalité des foyers français, mais c’est un peu hors sujet par rapport à notre débat du jour.

Quant aux contrats de plan État-région (CPER), ceux qui existent durent jusqu'en 2020. Nous n’avons pas de nouvelles indications à ce jour.

Mme la présidente Barbara Pompili. Nous allons passer aux questions. Je rappelle qu’elles ne doivent pas excéder une minute chacune.

Mme Danielle Brulebois. Ma question s'adresse à Mme la rapporteure pour avis Lasserre-David que je félicite pour la qualité de son exposé. Les CPER 2015-2020 concernent le programme 112 ; 50 % des crédits de l'État sont affectés aux mobilités. À l'heure de la hausse du prix des carburants, ce volet est indispensable à la réduction des émissions de CO2. Il est important de proposer des solutions de mobilité en zone rurale et de développer l'offre ferroviaire dans les territoires.

Dans cette optique, le CPER signé entre l'État et la région Bourgogne-Franche-Comté prévoyait un important volet consacré à la modernisation des infrastructures existantes. Pour la ligne de Remiremont, par exemple, il était prévu de construire deux évitements supplémentaires pour que les trains puissent se croiser et pour que le trafic soit sûr et satisfaisant. Mme la ministre Élisabeth Borne m'avait assuré que l’État tiendrait ses engagements mais le conseil régional s’est retiré. L'État a-t-il les moyens de faire respecter les conventions signées ?

Mme Valérie Beauvais. Dans le programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat », j'ai noté l’inscription de la somme de 35,7 millions d'euros pour 2019. Après avoir connu une baisse d'environ 22 % en 2018 par rapport à 2017, ce programme est à nouveau mis à la diète, devant supporter une diminution de 33 millions d'euros en 2019. Cette baisse affecte principalement l'action n° 1 « Construction locative et amélioration du parc » puisque les crédits de l'État passent de 61,8 millions d’euros en 2018 à 10,8 millions d’euros en 2019 contre, je le rappelle, 204,8 millions d’euros en 2017. Cette mission a pour objectif de financer des actions en faveur du développement et de l'aménagement du territoire, mais aussi du renouvellement urbain, de la solidarité entre les territoires, du logement et de l'habitat durable.

Pourriez-vous nous dire quelle sera la répartition des moyens entre ces actions ? Quels sont les budgets qui vont augmenter et, à l'inverse, quels sont ceux qui vont diminuer ?

M. Fabrice Brun. Madame la rapporteure pour avis, ma question porte sur le lien entre les territoires métropolitains et les territoires ruraux, et sur les essais de contractualisation entre métropole et ruralité. Où en sont les contrats de réciprocité ville-campagne ? Ces contrats apparus en 2014 ont-ils fait l'objet d'une évaluation ? À ma connaissance, il y en a au moins deux qui ont été signés : l’un entre la métropole de Brest et le Pays Centre Ouest Bretagne ; l’autre entre la métropole de Toulouse et le Pays Portes de Gascogne. Cette initiative intéressante mérite d'être évaluée parce qu'elle matérialise la théorie du ruissellement de la richesse produite, avec la métropole comme fer de lance, ainsi que cela devait être le cas dans les pactes métropolitains d'innovation qui doivent désormais intégrer des contrats de coopération avec les territoires environnants.

Mme Sophie Panonacle. Monsieur Pahun, je voulais vous alerter sur le décret du 31 août 2018 concernant l'application de la responsabilité élargie des producteurs (REP) qui exclut les bateaux de plaisance ou de sport destinés à l'exportation de l’éco-contribution. Sachant que 80 % des bateaux de ce type sont exportés, nous sommes face à un petit dilemme. Quelle est votre position sur le sujet ?

J’aurais aussi quelques remarques à faire. Le ministre M. Jean-Michel Blanquer a dernièrement inauguré le Navire des métiers. L'Éducation nationale est partenaire de cet espace de recrutement dans les métiers de l'industrie navale. C’est très intéressant, de même que la semaine de l’emploi maritime développée avec Pôle Emploi. N'oublions pas les femmes dans le maritime, elles ont un positionnement particulièrement fort et à développer. Enfin, nous attendons avec impatience les déclarations du Premier ministre dans le cadre du Comité interministériel de la mer (CIMer).

M. Emmanuel Maquet. Monsieur le rapporteur pour avis, vous évoquez à raison les problèmes de financement de la SNSM. La situation de cette structure est totalement paradoxale. Elle est un maillon essentiel de la sécurité maritime : elle intervient jour et nuit pour accomplir une mission d'utilité publique en secourant près de 6 000 personnes par an. C’est pourtant une simple association loi 1901, financée par l'État à hauteur de 6 millions d'euros et par les dons gracieux de nos concitoyens.

Votre rapport nous rappelle que l'État a affecté à la SNSM les recettes d'une taxe sur les casinos embarqués sur les navires. Cette taxe ne rapporte rien puisqu’il n’existe pas de casino embarqué sur les navires français. C'est ubuesque. Pour y remédier, le secrétaire d'État M. Sébastien Lecornu s’était engagé à affecter 5 % des recettes fiscales générées par les parcs éoliens en mer à la SNSM, soit environ 2 millions d'euros par an. Au vu de l'augmentation constante des interventions de la SNSM et de ses besoins, pensez-vous que c’est suffisant ?

M. Martial Saddier. À l’instar de M. Vincent Descoeur, je m’inquiète à propos de l’ANCT. Le Gouvernement, très fraîchement remanié, a annoncé une nouvelle proximité avec les collectivités territoriales. Que la première réponse soit de créer une agence nationale a de quoi susciter des interrogations, d’autant plus qu'il n’y a pas le début du commencement du moindre financement. Sans faire de procès d’intention, je trouve qu’une volonté de recentralisation est perceptible depuis dix-huit mois dans ce secteur comme dans d’autres. Avant de créer cette agence nationale, il faudrait se souvenir que dans chaque territoire et dans chaque arrondissement, il y a ce que l'on appelle une sous-préfecture. Avant de créer de nouvelles instances, on serait peut-être bien inspiré de remettre un peu de monde dans nos sous-préfectures, là où est la vraie proximité avec les territoires et les élus locaux.

Mme Stéphanie Kerbarh. Monsieur le rapporteur pour avis, vous nous annoncez que le matériel de sports nautiques – les planches à voile, par exemple – fera partie de la REP « loisirs » et non pas de la REP « plaisance ». Or les matériaux tels que le polystyrène, la fibre de verre, la fibre de carbone, le Kevlar et la résine époxy se retrouvent aussi dans le domaine de la plaisance. Comment expliquez-vous ce classement ?

M. Jean-Pierre Vigier. La poursuite de la modernisation de l'action publique doit prendre en compte toutes les spécificités de nos territoires, particulièrement celles des territoires ruraux. Ayant un rôle d'aménageur, l'État intervient de manière capitale dans notre territoire et il ne doit jamais perdre de vue la qualité et surtout la proximité que sont en droit d'attendre nos concitoyens. Comment pouvez-vous nous garantir la satisfaction de cet objectif – apporter un service de qualité et de proximité en milieu rural – alors que seront supprimés 400 emplois en raison de la poursuite du plan Préfectures nouvelle génération ?

M. Jean-Marie Sermier. Pour ma part, je voudrais revenir sur les villes moyennes qui regroupent un quart de la population française. Tout le monde constate que leur centre‑ville va mal. En mars 2018, M. Jacques Mézard a proposé un dispositif pouvant engager 222 villes dans une opération « Action Cœur de ville ». À mon avis, le budget annoncé – 5 milliards d'euros sur cinq ans – provenait d’une affectation prioritaire plutôt que de nouveaux fonds : 1,7 milliard d’euros de la Caisse des dépôts, 1,5 milliard d’euros d'Action Logement, 1,2 milliard d’euros de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) et 600 millions d’euros de différents financeurs, dont l’État. Où en est-on au niveau de l'État qui devait notamment investir dans l’ingénierie et les études ? C'est maintenant qu'il faut le faire. Des autorisations d’engagement ont été mises en place. Les crédits de paiement suffiront-ils ?

M. Yannick Haury. Monsieur le rapporteur pour avis, comme vous le soulignez, il existe un vrai décalage entre la puissance maritime de la France et son manque de culture maritime. Le potentiel économique lié à la mer et aux océans est insuffisamment mis en valeur. Dans votre rapport, vous regrettez aussi le manque d'attractivité et de débouchés de certaines formations, notamment dans le secteur de la pêche et du mareyage. Vous émettez un souhait qui est aussi le mien : réconcilier les Français avec la mer pour que la vocation maritime de la France devienne une évidence pour chacun. Selon vous, comment parvenir à valoriser cette économie et à développer une vraie culture maritime dans notre pays ?

M. Pierre Vatin. L'action n° 3 « Lutte contre l'habitat indigne » du programme 135 connaît une forte augmentation, passant de 7,2 millions d'euros en 2018 à 25,2 millions d’euros en 2019. Cette action a pour but de financer les diagnostics et contrôles après travaux, les mesures d'office en cas de carence du propriétaire – travaux, hébergement ou relogement des occupants. Pouvez-vous nous dire comment seront répartis ces crédits ? Quelles seront les régions les plus dotées et les moins dotées ?

M. David Lorion. Dans le cadre de la réflexion sur la cohésion des territoires, il y a une anomalie concernant l'enseignement maritime. Il existe douze lycées professionnels maritimes sur l'ensemble du littoral métropolitain, qui scolarisent 1 900 étudiants, dont 100 étudiants préparant un brevet de technicien supérieur (BTS). En outre-mer, il existe des centres agréés – qui comptent 600 élèves chacun – mais aucun lycée professionnel. Rappelons les budgets : 20 millions d'euros pour les lycées professionnels et seulement 720 000 euros pour les centres agréés outre-mer. Quand on sait que l'outre-mer permet à la France d'être le deuxième pays du monde en termes de zone économique exclusive et que la seule île de La Réunion concentre 12 % des pêches nationales grâce à la légine, il est assez étonnant qu'il n'y ait aucun lycée professionnel maritime dans les départements d'outre-mer. À un moment donné, pourrait-on inscrire un tel projet ?

Mme la présidente Barbara Pompili. Vous avez la parole, madame la rapporteure pour avis, pour répondre à cette série de questions.

Mme Florence Lasserre-David, rapporteure pour avis. Madame Danielle Brulebois, vous m’avez interrogée sur la mobilité dans votre circonscription, et sur la modernisation des infrastructures avec la construction de deux évitements. Vous regrettez le recul de la région et vous demandez si l'État a les moyens de faire respecter les CPER. Je l'espère, mais je ne peux pas vous répondre aujourd'hui. Je vous encourage à poser cette question à Mme la ministre, la prochaine fois qu'elle viendra nous rencontrer.

Mme Valérie Beauvais je vais avoir un peu de mal à répondre à votre question qui était hors du champ de notre saisine.

Monsieur Fabrice Brun, vous me demandez où en sont les contrats de réciprocité ville-campagne. Il n’y a pas vraiment de bilan puisqu'ils viennent d'être signés. Seulement deux des quatre contrats proposés ont été finalisés : la métropole de Brest et le Pays Centre Ouest Bretagne ont signé un protocole d’accord le 14 novembre 2016 ; la métropole de Toulouse et le Pays Portes de Gascogne ont signé le leur le 10 juillet 2017. Cette expérience a fait des émules puisque la métropole de Tours travaille à l'élaboration d'un contrat de réciprocité avec les intercommunalités du département. Plutôt que d'envisager des contractualisations spécifiques, nous pensons que la dimension de réciprocité, et plus largement de coopération inter-territoriale, a vocation à constituer une donnée structurante de toutes les contractualisations existantes ou à venir, qu'il s'agisse des CPER, des contrats de ruralité, des pactes État-métropole ou des futurs contrats de cohésion.

Monsieur Martial Saddier, à propos de l’ANCT, vous faites un constat de recentralisation et vous émettez un souhait : que nous remettions du monde dans les sous-préfectures avant d'imaginer d'autres structures. J’entends votre constat et vos préconisations, que je transmettrai.

Monsieur Jean-Marie Sermier, je n’ai pas entendu tout à fait la même chose que vous en ce qui concerne l’opération « Action Cœur de ville ». M. Julien Denormandie nous a expliqué ici même que les 5 milliards d'euros alloués ne sont pas des crédits recyclés. Action Logement va ainsi mettre 1,5 milliard d'euros supplémentaires qui ne sont pas pris sur les crédits de rénovation urbaine, ni sur ceux qui sont utilisés avec les bailleurs sociaux. Ce sont de nouveaux crédits, ce qui est plutôt rassurant.

M. Jimmy Pahun, rapporteur pour avis. Madame Sophie Panonacle, je vous remercie de votre question qui me donne l’occasion de faire un petit rappel sur ce que rapporte le droit annuel de francisation et de navigation qui avait été donné en quasi-totalité au Conservatoire du littoral par le président Chirac en 1986. Cette enveloppe tend à diminuer : elle est passée de 47,19 millions d'euros à 44,27 millions d'euros entre 2010 et 2017. L’an dernier, ce montant de 44,27 millions d’euros avait été réparti de la manière suivante : 37,95 millions d’euros pour le Conservatoire du littoral, 4,6 millions d’euros pour la collectivité territoriale de Corse et 1,72 million d’euros reversés au budget de l’État. Depuis 2016, le montant affecté au Conservatoire du littoral est plafonné à 38,5 millions d’euros. Par ailleurs, à partir de 2018, une fraction du DAFN est attribuée à la SNSM. Au premier janvier 2018, le montant était de 75 000 euros, mais il s’agit d’un chiffre provisoire. Nous réfléchissons à une réfection totale du DAFN afin de faciliter la collecte.

Dans le secteur de la plaisance, nous avons des champions du monde de l'exportation. Essentiellement vendéens, ces chantiers exportent neuf bateaux sur dix. À mon grand désarroi, neuf bateaux vendus sur dix sont des bateaux à moteur. Il ne serait pas tout à fait logique de leur faire payer à l'export, une taxe qui revient en France. D’ailleurs, il serait bon que chaque pays puisse mettre en place une telle taxe. Au passage, je remercie les plaisanciers de faire cet effort supplémentaire.

Madame Panonacle, je suis d’accord avec vous sur la formation et sur les femmes qui naviguent, et je sais que l’on peut compter sur vous pour suivre ce dossier. Votre propos rejoint un peu la question de M. Lorion. En France, nous avons le luxe d’avoir douze lycées maritimes dont les effectifs sont probablement équivalents à ceux d'un lycée classique : 1 900 élèves. Vous avez raison, monsieur Lorion, de soulever la question de la création d’un lycée maritime outre-mer.

Pour sa part, M. Haury s’interroge sur le rapport des Français à la mer. Le général de Gaulle disait que les Français tournaient le dos à la mer. Cet été, je suis allé écouter un historien qui nous rappelait l'évolution de Belle-Île-en-Mer où, de tout temps, il n’y a jamais eu que 20 % des habitants à travailler avec la mer. Ce pourcentage peut sembler faible dans une île. La mer est parfois un territoire difficile : il faut savoir y nager, y être heureux. Dans un territoire maritime, l’équilibre peut comporter plusieurs dimensions. Il faut que l'on arrive à faire aimer la mer en France. On s’y efforce. Comme vous le savez, je vous casse souvent les pieds avec mes régates et mes courses. Il y en a une magnifique qui part dimanche prochain et qui va certainement faire aimer les marins, qui sont des gens simples et très compétents, aux Français. J’espère qu'ils auront beau temps pour cette Route du Rhum.

Monsieur Maquet, il a en effet été décidé d’affecter 5 % des recettes fiscales générées par les parcs éoliens en mer à la SNSM. Le problème est qu’aucun parc n’est encore achevé. Mais vous avez pu constater avec quelle rapidité le Gouvernement a créé le permis enveloppe pour simplifier les procédures. Dépêchons-nous car nous avons déjà beaucoup de retard par rapport aux pays du nord de l'Europe. Outre la SNSM, les pêcheurs récupèrent une partie des taxes liées à l'implantation de ces parcs éoliens. L’érection des premiers parcs éoliens a peut-être été décidée un peu vite. On peut penser qu'avec le document stratégique de façade, le processus sera plus simple et facile.

M. Emmanuel Maquet. Nous avons fait des bêtises !

M. Jimmy Pahun, rapporteur pour avis. Vous avez raison, mais ce Gouvernement a la volonté de faire évoluer les choses.

Madame Kerbarh, vous m’interrogez sur le recyclage du matériel des sports nautiques. Il ne faut pas que ce soient les industriels français qui prennent en charge l’éco-contribution sur tous ces petits engins – bateaux Zodiac, planches de paddle, planches à voile, kayaks – car il y aurait une vraie distorsion de concurrence avec les fabricants étrangers. Là encore, l’éco-contribution doit être réglée directement par l'acheteur. Nous pourrons aborder le sujet au cours des débats concernant le texte sur l'économie circulaire. Nous pouvons peut-être intervenir avec plus de fermeté en ce qui concerne la puissance des moteurs embarqués. Le drame de cette profession est qu’il n’y a pas grand-chose à recycler et à valoriser dans un bateau. Nous allons devoir être créatifs.

Quoi qu’il en soit, je vous remercie de vous intéresser aux choses de la mer.

Mme la présidente Barbara Pompili. Merci beaucoup madame la rapporteure pour avis, monsieur le rapporteur pour avis, pour cet excellent travail. Nous allons passer à l'examen des amendements.

Article 39 et État B : Crédits du budget général

La commission examine l'amendement II-CD76 de Mme Mathilde Panot.

M. Loïc Prud’homme. Quand on parle de cohésion des territoires, il ne faut pas oublier les outre-mer. Je voudrais parler ici de l’affaire du chlordécone qui est un véritable scandale d’État. La France Insoumise demande d’ailleurs la mise en œuvre d’une commission d’enquête parlementaire à ce sujet. La prise en charge par la collectivité publique des conséquences de l’usage du chlordécone, un insecticide particulièrement toxique, pendant plus de vingt ans dans les bananeraies des Antilles françaises, est un enjeu écologique fondamental pour ces territoires.

Au-delà des écosystèmes, la quasi-totalité des Antillais sont eux aussi contaminés – 95 % des Guadeloupéens et 92 % des Martiniquais – comme le révèle une étude menée pour la première fois à grande échelle par Santé publique France. Ce perturbateur endocrinien très puissant altère, semble-t-il, la fertilité et entrave le développement neurologique des nourrissons. Au vu de la persistance du chlordécone dans les écosystèmes et du degré de contamination des populations locales, des mesures concrètes et urgentes de dépollution et de protection doivent être prises. Près de trente ans après l’interdiction du chlordécone, les populations antillaises ont droit à la reconnaissance des préjudices subis et de leur statut de victime par l’État et la société.

Pour ce faire, il est proposé de puiser dans le programme n° 112 « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire » la somme de 6,415632 millions d’euros. Nous considérons que l’attractivité des territoires passe avant tout par des plans environnementaux qui améliorent la qualité de vie et l’activité économique dans les territoires, conformément aux ambitions écologiques du Gouvernement, plutôt que par le financement de pôles de compétitivité et un modèle de métropolisation qui met les territoires en concurrence.

Mme Florence Lasserre-David, rapporteure pour avis. Le Président de la République a annoncé des financements supplémentaires de 3 millions d'euros sur deux ans pour mener à bien ce plan chlordécone alors que vous demandez 6,4 millions d'euros. On considère que les fonds ne pourraient pas être employés dès l'année prochaine, tant que la cartographie des terres polluées n'est pas achevée. Je demande le retrait de l'amendement, sinon j’émettrai un avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Puis elle passe à l’amendement II-CD77 de M. Loïc Prud’homme.

M. Loïc Prud’homme. Nous ne comptons plus les articles de la presse quotidienne régionale et nationale faisant état de fermetures de bureaux de poste et relayant le désarroi des habitants abandonnés. Nous observons le même phénomène à l’œuvre avec les hôpitaux. Cette tendance est d’autant plus préjudiciable dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville où se concentrent les populations les plus fragiles. L’outre-mer et les zones rurales ne sont pas en reste.

D’après l’indicateur 2.2 du rapport budgétaire de la mission, qui porte sur la « réduction du temps d’accès des usagers à une maison de services au public », en 2018, 75 % de la population des communes de moins de 30 000 habitants dans les quatre-vingt-dix-sept départements équipés sont à moins de vingt minutes d’une maison de services au public. Cela est insuffisant. En zone rurale, un temps de trajet de plus de vingt minutes signifie que ces services ne sont pas dans la commune de la personne concernée. Des milliers d’habitants sans moyen de transport n’ont donc accès à aucun service public, ce qui n’est pas acceptable.

Par cet amendement, nous proposons de transférer 31 millions d’euros de l’action 7 du programme 135, qui vise notamment à financer les grandes opérations d’urbanisme bien souvent inutiles, vers le redéploiement de l’accès aux services publics par le biais du programme 112.

Mme Florence Lasserre-David, rapporteure pour avis. Cet amendement, qui a été rejeté hier en commission des finances, propose une forte hausse des crédits dédiés à l'accès aux services publics et aux MSAP. L'enveloppe que vous demandez est disproportionnée, notamment parce qu’il faut laisser le temps d’établir le diagnostic des besoins et de mener une réflexion sur les services à proposer avant d’ouvrir une MSAP. Les 13,73 millions d'euros prévus par le programme 112 sont suffisants pour l'année à venir. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Cohésion des territoires ».

La commission émet ensuite un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilités durables. »

Après l’article 76

La commission examine l'amendement II-CD46 de M. Lionel Causse.

M. Lionel Causse. Cet amendement propose la remise d’un rapport sur la réforme du DAFN qui finance le Conservatoire du littoral, mais aussi la filière REP du recyclage des bateaux et la SNSM. Le Gouvernement a prévu de réformer le DAFN en 2020. Il est important que nous puissions avoir ce rapport d'information dans le courant de l’année 2019, afin de pouvoir préparer l'avenir du financement de ces activités.

M. Jimmy Pahun, rapporteur pour avis. Je suis favorable à votre amendement, monsieur Causse, mais je vous propose de donner un peu plus de temps aux services ministériels pour élaborer ce rapport car le Brexit leur donne beaucoup de travail en ce moment. Je vous propose de remplacer « six mois » par « neuf mois ».

M. Lionel Causse. Je suis d’accord pour un délai de neuf mois, mais c’est un maximum car une durée plus longue ne nous permettrait pas d’avoir les informations à temps.

La commission adopte l'amendement rectifié.

*

*     *

Lors de sa réunion du mercredi 31 octobre 2018, suivant l’avis favorable du rapporteur pour avis, Mme Florence Lasserre-David, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Cohésion des territoires ».


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   LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

(par ordre chronologique)

Association des petites villes de France (APVF)

– M. Fabien Lainé, député des Landes, membre du Bureau de l’association

– M. Matthieu Vasseur, chargé de mission

Ministère de la cohésion des territoires – cabinet du ministre

– M. Marc Chappuis, directeur adjoint du cabinet

– Mme Soraya Hamrioui, conseillère budgétaire, finances et Grand Paris

Commissariat général à légalité des territoires (CGET)

– M. Serge Morvan, commissaire général

– Mme Sophie Duval-Huwart, directrice du développement des capacités des territoires

 M. Romain Ornato, chef du bureau de la programmation et des affaires financières

Caisse nationale dassurance vieillesse

– M. Antonin Blanckaert, directeur national de la retraite

Pôle Emploi

– Mme Laurence Salter, responsable du département actions territoriales

Caisse nationale dassurance maladie

– M. Richard Vieau, responsable du département organisation et marketing (direction déléguée aux opérations)

Groupe La Poste

– M. Philippe Bajou, secrétaire général

– Mme Smara Lungu, déléguée aux affaires territoriales et parlementaires

Caisse des dépôts et consignations

– M. Laurent Depommier-Cotton, directeur de la transition numérique

– Mme Aurélia Brunon, chargée des relations institutionnelles

Association des maires ruraux de France (AMRF)

– M. Louis Pautrel, maire du Ferré, vice-président

– M. Jean-Paul Carteret, maire de Lavoncourt, vice-président

Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA)

– M. Pascal Cormery, président

– Mme Émilie Rougié, attachée de direction, direction métiers assurés et relations de services

– M. Christophe Simon, chargé des relations parlementaires


([1]) Source : « Jaune » annexé au PLF 2019 sur les transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales.

([2]) Les CPER en outre-mer sont structurés selon des thématiques différentes, et comportent notamment un volet « Cohésion sociale et employabilité ».

([3]) Une autre part de la DSIL est affectée à la mise en œuvre d’une autre catégorie de contrats relevant du programme 112 : le pacte État-métropoles.

([4]) La DSIL a été codifiée par la loi de finances pour 2018 à l’article L. 2334-42 du code général des collectivités territoriales. La notion de « contrat de ruralité » ne figure pas dans cet article, mais y sont visées des « opérations visant au développement des territoires ruraux inscrites dans un contrat signé entre, dune part, le représentant de lÉtat et, dautre part, létablissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ou le pôle déquilibre territorial et rural ».

([5]) Par exemple, 22 villes ont été sélectionnées en Nouvelle-Aquitaine, notamment Bayonne et Pau.

([6]) « Faire ensemble pour mieux vivre ensemble », rapport de la mission « Coworking – territoires, travail, numérique » réalisé avec la collaboration du CGET, septembre 2018.

([7]) Fabrication Laboratory (FabLab) : plate-forme ouverte de création et de prototypage d’objets physiques.

([8]) Un hacklab (ou hackerspace) est un espace dédié à des ateliers spécifiques, autour d’un outil ou d’un projet numérique, qui rassemblent des groupes de passionnés possédant un intérêt commun (souvent autour de l’informatique, de la technologie, des sciences, des arts...).

([9]) Proposition de loi n° 2 portant création d’une Agence nationale de la cohésion des territoires, présentée par M. Jean-Claude Requier et plusieurs de ses collègues, enregistrée à la Présidence du Sénat le 2 octobre 2018.

([10]) Selon un communiqué de presse de l’Association des maires ruraux de France (AMRF) du 25 octobre 2018, le Premier ministre s’est engagé à ce que des communes puissent solliciter les services de la future agence, et pas seulement les intercommunalités.

([11]) Parmi les exemples qui ont été mentionnés au cours des auditions, votre Rapporteure pour avis a notamment relevé l’exemple de la présence, dans une MSAP, d’activités commerciales (opticien, coiffeur, café…), dont les loyers permettent de financer une partie des dépenses de fonctionnement de la MSAP (par exemple le salaire d’un agent permanent de la mairie).

([12]) 61 schémas départementaux d’amélioration de l’accessibilité des services au public (SDAASaP) ont été arrêtés à ce jour. Ces schémas sont pilotés conjointement par les préfets et les présidents des conseils départementaux. Ils ont pour objet d’identifier puis de répondre aux déséquilibres repérés entre l’offre de services et les besoins des habitants.

([13]) Pôle Emploi, la Caisse nationale d’allocations familiales (CNAF), la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV), la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (MSA), La Poste et GRDF.

([14]) Cette convention a pris la forme d’un avenant au contrat triennal de présence postale 2014-2016 signé par l’État, le groupe La Poste et l’Association des maires de France (AMF).

([15]) Le CGET dénombre actuellement près de 1 350 MSAP sur l’ensemble du territoire, mais toutes ne sont pas labellisées.

([16]) La liste des personnes auditionnées figure en annexe au présent rapport.

([17]) Le PEI Corse comporte, outre les crédits du programme 162, des fonds de concours provenant de plusieurs opérateurs de l’État, notamment l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF), pour un montant prévu de 20 millions d’euros pour 2018 et de 20 millions d’euros pour 2019.

([18]) Il n’y aura pas de crédits affectés au Plan d’urgence nitrates dans le PLF 2019, car toutes les actions de ce plan ont été soldées en 2018.

([19]) Le budget de l’EPMP est, par ailleurs, alimenté par une subvention de l’État pour charges de service public au titre du programme 113 « Paysages, eau et biodiversité », qui devrait s’élever à 501 000 euros pour 2019, et par une partie des redevances perçues par l’agence de l’eau Loire-Bretagne. L’EPMP est en cours de rattachement à l’Agence française de la biodiversité (AFB).

([20]) http://assnat.fr/ONA1aq