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N° 1288

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 3 octobre 2018.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES
SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2019 (n° 1255)

TOME V

COHÉSION DES TERRITOIRES

VILLE

PAR Mme Annaïg Le MEUR

Députée

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 Voir les numéros : 1255 et 1302 (Tome III, annexe 9).

 


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SOMMAIRE

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Pages

introduction

I. Un budget en forte hausse pour appliquer la feuille de route en faveur des quartiers prioritaires

1. De nouveaux moyens spécifiques pour les acteurs de terrain de la politique de la ville

2. La poursuite de leffort de territorialisation des politiques de droit commun relevant de lÉtat

3. Le lancement de lexpérimentation relative aux emplois francs

II. Des ambitions à concrétiser pour favoriser lÉmancipation par le sport et accroÎtre la présence des services publics dans les quartiers prioritaires

1. Le sport dans les QPV est un levier pour faire République et un tremplin vers lemploi

a. Le constat

b. La nécessité de nouveaux équipements et dun investissement accru de toutes les fédérations sportives

c. Le soutien aux actions dinsertion par le sport

2. De nouveaux moyens et des changements de méthode sont nécessaires pour tenir les objectifs du Gouvernement en matière de renforcement des services publics dans les QPV

a. Les objectifs de la feuille de route

b. La nécessité de financements complémentaires pour le développement des Maisons de services au public dans les QPV

c. Une réflexion à mener pour changer déchelle dans la création des maisons et centres de santé

EXAMEN EN COMMISSION

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNées


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   introduction

Après une année 2018 qui fut celle de la co-construction de la mobilisation nationale pour les habitants des quartiers prioritaires, l’année 2019 sera celle de la traduction financière et de la mise en œuvre des décisions prises à l’occasion de cette mobilisation.

Entre le 14 novembre 2017, date du discours du Président de la République à Tourcoing, et le 18 juillet 2018, date de la présentation de la feuille de route du Gouvernement pour la politique de la ville, un cycle inédit de co‑construction a permis à tous les acteurs locaux, politiques, associatifs et économiques, de proposer de nouvelles solutions afin de faire durablement reculer les inégalités territoriales et les concentrations urbaines de pauvreté dans notre pays. 180 tables-rondes locales, réunissant plus de 15 000 participants dans 72 départements, ont ainsi été organisées. 10 groupes de travail nationaux ont, en outre, été mis en place. Les idées de terrain remontées à l’occasion de ces échanges et compilées dans le rapport de M. Jean-Louis Borloo, ont ensuite alimenté le travail interministériel de définition de la feuille de route du Gouvernement.

Contrairement aux échos qui ont pu l’accompagner, la feuille de route du Gouvernement annoncée le 18 juillet dernier est d’une ampleur inédite. 40 décisions engageant l’ensemble des ministères ont été prises, représentant 2,5 à 3 milliards deuros de financements supplémentaires en faveur des habitants des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). Ces décisions couvrent tous les aspects de la vie de ces quartiers et se déclinent en trois grands objectifs :

– garantir les mêmes droits aux habitants des QPV qu’à tous les autres citoyens de France, en termes de sécurité, de logement, de services publics et de mobilité ;

– favoriser l’émancipation de ces habitants par l’éducation et par l’emploi ;

– « faire République », en soutenant les solidarités locales et en prévenant les discriminations.

La mise en œuvre de ces décisions repose, par ailleurs, sur une nouvelle méthode partenariale. Trois pactes ont été conclus, au cours de l’année 2018, entre le Gouvernement et les acteurs incontournables de la politique de la ville : les collectivités territoriales, les entreprises et les associations. Le pacte de Dijon, signé le 16 juillet 2018 entre le Premier ministre d’une part, et France urbaine et l’Assemblée des communautés de France (AdCF) d’autre part, réaffirme l’engagement de l’État et des collectivités locales à travailler ensemble en assumant leurs responsabilités respectives.

Le projet de loi de finances pour 2019 est la traduction financière de ces engagements. Pour la première fois depuis 2012, le budget du programme 147, qui porte les crédits spécifiques de la politique de la ville, connaît une forte hausse, de près de 20 %, dune année sur lautre. Parallèlement, la mobilisation des crédits de droit commun se poursuit avec la montée en puissance du dédoublement des classes dans les réseaux d’éducation prioritaire (REP/REP+) et la mise en place de la police de la sécurité du quotidien (PSQ) dans certains quartiers.

Votre rapporteure se félicite de cet engagement accru de l’État dans la politique de réduction des inégalités territoriales, tant la situation de certains quartiers est aujourd’hui préoccupante. Dans le présent rapport, votre rapporteure a également souhaité assurer le suivi de l’expérimentation relative aux emplois francs, qui a démarré au printemps dernier dans certains territoires, et insister sur deux volets essentiels de l’action publique pour favoriser l’émancipation des habitants des QPV et leur garantir les mêmes droits : le sport et la présence des services publics.

Au terme de son analyse, votre rapporteure émet un avis favorable à ladoption des crédits du programme 147 de la mission « Cohésion des territoires ».

 


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I.   Un budget en forte hausse pour appliquer la feuille de route en faveur des quartiers prioritaires

1.   De nouveaux moyens spécifiques pour les acteurs de terrain de la politique de la ville

Comme en 2018, le programme 147 relatif à la politique de la ville fait figure d’exception au sein de la mission « Cohésion des territoires ». Alors que, dans un contexte de réduction des déficits publics, le budget total de la mission « Cohésion des territoires » sera en baisse de 6,8 % l’année prochaine, celui de la politique de la ville sera en hausse de 19,7 %.

Cette hausse se traduit par l’octroi de 85 millions deuros de crédits de paiement supplémentaires par rapport à 2018, permettant au programme 147 d’atteindre une enveloppe globale de 513,1 millions d’euros en 2019. Un tel niveau de crédits de paiement n’avait jamais été atteint depuis 2012.

Par ailleurs, la répartition entre les quatre actions du programme, prévue par le présent projet de loi de finances et décrite dans le tableau ci-dessous, fait apparaître les priorités affichées par la feuille de route du Gouvernement annoncée le 18 juillet dernier : les hausses de crédits iront directement aux acteurs de terrain qui agissent pour les habitants des QPV (action n° 1) et pour l’amplification du Nouveau programme national de renouvellement urbain (action n° 4). La baisse des crédits de l’action n° 2 correspond à la baisse naturelle des compensations des exonérations de charges sociales en zones franches urbaines (ZFU), ces exonérations ayant été mises en extinction par la réforme du dispositif des ZFU en 2015.

Répartition et évolution des crédits de paiement du programme 147

(En millions deuros)

Numéro et intitulé de laction

LFI 2018

PLF 2019

Évolution (en %)

01 – Actions territorialisées et dispositifs spécifiques de la politique de la ville

333,9

419,4

+ 25,6 %

02 – Revitalisation économique et emploi

50,3

44,3

‑ 11,9 %

03 – Stratégie, ressources et évaluation

29,4

24,4

      ‑ 17 %

04 – Rénovation urbaine et amélioration du cadre de vie

15

25

+ 66,7 %

Total

428,6

513,1

+ 19,7 %

Source : Projet annuel de performances (PAP) du programme n° 147

Les 85 millions d’euros de crédits de paiement supplémentaires correspondent intégralement à des dépenses d’intervention, c’est-à-dire à des subventions versées aux associations, aux collectivités territoriales et aux entreprises. En 2019, 89 % des crédits de paiement du programme 147 seront ainsi consacrés à des dépenses dintervention, contre 87 % en 2018. Les dépenses de personnel et de fonctionnement ne représentent que 10 % des crédits du programme.

Ces nouveaux moyens permettront, en premier lieu, de soutenir les associations intervenant dans les QPV :

Ces moyens supplémentaires permettront de soutenir l’emploi associatif, dans un contexte de réduction importante du volume des contrats aidés, renommés « parcours emploi compétences » (PEC) en 2018. Certes, les volumes et les moyens ne sont pas strictement équivalents, dans la mesure où le nombre des PEC, qui sont mobilisés à 40 % par des associations et à 25 % par des collectivités territoriales, est passé de 226 000 en 2017 à 154 000 en 2018 sur l’ensemble de la France (sans qu’un chiffrage ait pu être porté à la connaissance de votre rapporteure sur le nombre de PEC dans les associations intervenant dans les QPV).

Toutefois, à des contrats aidés précaires et non ciblés succèdent des dispositifs spécifiquement fléchés sur les territoires de la politique de la ville (adultes-relais et FONJEP) et quantifiables. Alors que les contrats PEC ont une durée maximale d’un an, les contrats d’adultes-relais et FONJEP portent sur une durée de trois ans et bénéficient de conditions financières tout aussi avantageuses.

La hausse des crédits du programme 147 en 2019 permettra, en second lieu, de concrétiser un autre engagement formulé dans la feuille de route du 18 juillet 2018 : renforcer l’encadrement en maternelle dans une soixantaine de grands quartiers sans mixité scolaire et développer les places en crèches en QPV. Des aides, d’un montant total de 22 millions d’euros en 2019, seront ainsi apportées aux communes pour la création de postes dagents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (ATSEM), afin que chaque classe en maternelle soit systématiquement encadrée par deux adultes. D’après le Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), un tiers des classes de maternelle situées en réseau d’éducation prioritaire renforcé (REP+) ne disposent pas d’ATSEM. En outre, 12 millions d’euros supplémentaires seront consacrés au renforcement du programme de réussite éducative (PRE) dans le cadre de la mise en place de « citées éducatives » prenant modèle sur une expérimentation menée à Grigny.

Enfin, l’engagement pris lors de la loi de finances initiale pour 2018 de doubler le budget du Nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU), pour le porter de 5 à 10 milliards d’euros sur la période 2014-2031, est tenu. En effet, au cours de l’année 2018, deux conventions ont été signées par l’État avec Action Logement et le mouvement HLM prévoyant que ces deux acteurs apportent chacun 2 milliards d’euros au financement du NPNRU. Conformément à l’article 132 de la loi de finances initiale pour 2018, lÉtat contribuera au NPNRU à hauteur de 1 milliard deuros, dont 200 millions deuros sur la durée du quinquennat. Cet engagement se traduit, dans le PLF 2019, par l’inscription de 185 millions d’euros d’autorisations d’engagement supplémentaires qui, cumulés avec les 15 millions d’euros de l’année dernière, permettent d’atteindre les 200 millions d’euros prévus pour le quinquennat. Les crédits de paiement inscrits pour 2019 s’élèvent à 25 millions d’euros, ce qui correspond à un peu plus de 10 % du budget de 203 millions d’euros que l’ANRU prévoit de consacrer au NPNRU en 2019. Comme le montre le tableau ci-dessous, l’exécution financière du NPNRU et donc les crédits de paiement de l’État associés, monteront progressivement en puissance, principalement entre 2022 et 2027.

crÉdits de paiement programmés par lanru pour le npnru

(En millions deuros)

2018

2019

2020

2021

2022

2023

2024

2025

2026

2027

108

203

304

576

880

1136

 1257

1247

1109

874

2028

2029

2030

2031

 

 

 

597

343

147

27

 

 

 

Source : Réponse au questionnaire budgétaire

2.   La poursuite de l’effort de territorialisation des politiques de droit commun relevant de l’État

Conformément au pacte de Dijon, l’État s’engage dans un effort de territorialisation des politiques de droit commun qui relèvent principalement de sa compétence : la sécurité et l’éducation.

Le dédoublement des classes de CP et de CE1 dans les écoles des réseaux d’éducation prioritaire (REP et REP+), entamé en 2017, se poursuit en 2018. Le taux de dédoublement des CP en REP+ à la rentrée 2017 était de 89 % en France métropolitaine, avec 100 % des classes de CP de REP+ totalement dédoublées dans 11 académies. Depuis la rentrée 2018, ce mouvement est amplifié avec l’attribution de près de 4 000 nouveaux emplois pour les CP et un objectif de dédoublement de 75 % des classes de CE1 en REP+. Une prime de 3 000 € est, par ailleurs, mise en place progressivement sur trois ans pour les 60 000 enseignants de REP+.

Tous les acteurs auditionnés par votre rapporteur se félicitent du succès de cette mesure et soulignent son importance pour les habitants de QPV. En outre, l’État accompagne l’effort demandé aux collectivités territoriales pour réaliser les travaux nécessaires au dédoublement des classes. À ce titre, les communes peuvent mobiliser des subventions de la dotation politique de la ville (DPV) et de la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL).

S’agissant de la sécurité, les années 2018 et 2019 sont celles de la mise en œuvre d’une autre promesse de campagne du Président de la République : le lancement de la police de la sécurité du quotidien (PSQ). La PSQ correspond, sur l’ensemble du territoire, à un renouvellement de l’action des policiers et des gendarmes, orienté vers la résolution des problèmes concrets de la population. Par ailleurs, 60 quartiers de reconquête républicaine (QRR) ont été désignés car leur situation, notamment au regard de la délinquance et des incivilités, justifie un engagement de moyens particuliers afin que la PSQ puisse pleinement s’y déployer. Ces 60 quartiers bénéficieront, par tranche (15 dès septembre 2018, 15 en 2019 et 30 en 2020) de 1 300 postes de policiers et de gendarmes supplémentaires dici 2020. Comme le montre la carte ci-dessous, les 15 premiers QRR définis en septembre dernier recoupent la géographie prioritaire de la politique de la ville. Chacun de ces quartiers bénéficiera de 10 à 30 policiers et gendarmes supplémentaires. Votre rapporteure se félicite de ce ciblage particulier, tant la question de la sécurité dans les QPV est un prérequis indispensable au succès de toutes les autres politiques publiques.

LES 15 PREMIERS QUARTIERS DE REconquête républicaine en 2018

Source : Ministère de lIntérieur

3.   Le lancement de l’expérimentation relative aux emplois francs

Lors des débats à l’Assemblée nationale sur le PLF pour 2018, un amendement du Gouvernement, soutenu par votre rapporteure, a permis de concrétiser une des promesses de campagne du Président de la République : la mise en place d’un dispositif « d’emplois francs » afin d’encourager l’embauche des habitants des QPV qui sont confrontés à des discriminations et des freins spécifiques dans l’accès à l’emploi.

Conformément à l’article 175 de la loi de finances initiale pour 2018, une expérimentation a dont été lancée du 1er avril 2018 au 31 décembre 2019, dans sept territoires. Ces sept territoires d’expérimentation, dont la liste a été définie par un décret et un arrêté du 30 mars 2018, comprennent 194 QPV. Il s’agit de :

– la métropole de Lille ;

– la métropole d’Aix-Marseille-Provence ;

– la communauté urbaine d’Angers ;

– la communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essonne-Sénart ;

– la communauté d’agglomération de Roissy Pays de France ;

– le département de la Seine-Saint-Denis ;

– la communauté d’agglomération de Cergy-Pontoise.

Ces sept territoires d’expérimentation ont été choisis afin que 25 % des chômeurs résidants en QPV, soit 200 000 personnes, soient éligibles au dispositif. D’après les acteurs auditionnés par votre rapporteure, ces territoires représentent une maille d’expérimentation suffisamment importante pour que les résultats de l’expérimentation soient significatifs. Par ailleurs, les sept territoires choisis sont à la fois des villes moyennes et des grandes métropoles d’Île‑de‑France ou de région.

Chaque entreprise ou association employant un demandeur d’emploi résidant dans les QPV concernés peut recevoir 5 000 € par an pendant trois ans, pour une embauche en contrat à durée indéterminée (CDI), et 2 500 € par an pendant deux ans, pour une embauche en contrat à durée déterminée (CDD) de plus de six mois. Tous les demandeurs d’emploi résidant dans ces QPV sont éligibles au dispositif sans condition d’âge, de niveau de diplôme, d’ancienneté d’inscription à Pôle Emploi ou de rémunération.

Pôle Emploi est le principal opérateur chargé de mettre en œuvre l’expérimentation. Grâce à un système d’information et des échanges très réguliers avec le Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), les conseillers de Pôle Emploi sont désormais capables d’identifier les demandeurs d’emploi qui résident dans des QPV et sont éligibles à l’aide « emploi franc ». Pôle Emploi et les préfets ont, par ailleurs, développé des campagnes de communication au niveau local dans les territoires concernés, à la fois en direction des demandeurs d’emplois et des entreprises. Des réunions d’information ont été organisées pour les demandeurs d’emploi afin que ceux-ci revendiquent leur appartenance à un QPV auprès des entreprises et qu’ils présentent cette appartenance non plus comme un handicap mais comme un atout. Les actions de communication et de marketing en direction des entreprises se sont principalement déployées par l’intermédiaire d’internet et des réseaux sociaux : envois massifs de courriels aux entreprises implantées dans et autour des QPV, fil d’information dédiée et pop-ins apparaissant spontanément sur le site internet de Pôle Emploi lorsqu’une entreprise cherche des salariés. Cette communication, initialement centrée sur les 70 agences présentes dans les QPV des territoires expérimentaux a été peu à peu élargie aux 191 agences susceptibles de recruter des demandeurs d’emploi éligibles.

D’après Pôle Emploi, au 1er septembre 2018, soit cinq mois après le démarrage de l’expérimentation, 2 093 demandes d’aides « emplois francs » lui ont été transmises et 1 617 ont été attribuées. Ce résultat est déjà supérieur à celui de la première expérimentation menée en 2013, qui s’était soldée par la signature de 280 contrats seulement en un an. Toutefois, force est de constater que ces chiffres sont inférieurs aux prévisions alors que l’objectif fixé pour 2018 est de 5 000 emplois francs. Ce décalage peut s’expliquer facilement : les demandes d’aides ont été peu nombreuses lors des trois premiers mois dans la mesure où le dispositif n’était pas connu et qu’il se caractérise par un effet-retard mécanique : les employeurs ont un délai de deux mois après l’embauche pour demander l’aide. Depuis juillet, le rythme s’accélère : de 100 à 150 aides sont attribuées chaque semaine et Pôle Emploi attend un décollage fort du dispositif dans les deux mois qui viennent, avec un objectif de 200 emplois francs par semaine. En outre, les premiers retours qualitatifs sont encourageants : 80 % des emplois francs sont des CDI et 90 % des employeurs sont des entreprises. Toutes les classes d’âge sont concernées : 25 % des bénéficiaires d’emplois francs ont moins de 26 ans, 62 % ont entre 26 et 49 ans et 13 % ont 50 ans et plus. Tous les niveaux de qualification sont également représentés parmi les bénéficiaires. Ce dernier élément est intéressant dans la mesure où les personnes les plus qualifiées habitant les QPV sont autant touchées par les discriminations territoriales que les personnes les moins qualifiées. À niveau de diplôme égal, les habitants des QPV connaissent, en effet, un taux de chômage deux fois et demi supérieur à la moyenne nationale.

En tout état de cause, votre rapporteure estime quil est bien trop tôt pour juger du succès ou de lefficacité de ce dispositif qui vient à peine de démarrer dans seulement sept territoires de France. Elle considère toutefois que le dispositif doit encore gagner en publicité et que Pôle Emploi doit davantage se tourner vers les réseaux informels locaux dentreprises, animés notamment par les collectivités territoriales et les chambres consulaires. Les débuts de l’expérimentation ont, en effet, montré que les territoires les plus dynamiques en matière de création d’emplois francs étaient ceux où le dispositif s’inscrivait dans un environnement très structuré, comme à Angers ou à Lille, s’appuyant sur des clubs dentreprises partenaires et un accompagnement adapté des demandeurs d’emploi par les collectivités territoriales, des associations ou Pôle Emploi.

En outre, le dispositif des emplois francs vient en complément de nombreux autres dispositifs de droit commun qui sont mobilisés en faveur des habitants des quartiers prioritaires. La convention 2016-2020 liant le ministère du travail et le ministère de la cohésion des territoires prévoit, en effet, des objectifs spécifiques de ciblage en direction des habitants des QPV, selon un principe simple : la part des bénéficiaires des dispositifs en faveur de l’emploi provenant des QPV doit correspondre a minima à la proportion, au niveau national, de chômeurs résidant dans les QPV, soit 13 %. En 2018, comme en 2017, cet objectif est atteint s’agissant des parcours emplois compétences (PEC) dont 13 % ont été prescrits en faveur de demandeurs d’emploi résidant en QPV.

Poursuivant cette logique, le Gouvernement s’est engagé, dans le cadre du Plan dinvestissement dans les compétences (PIC), à flécher 2 milliards d’euros vers les QPV sur les 15 milliards d’euros dont bénéficiera ce plan. D’ici 2022, 150 000 jeunes sans qualification et 150 000 chômeurs de longue durée issus de QPV bénéficieront ainsi de parcours de formation. À cela s’ajoute un engagement de doubler, d’ici 2022, les actions de parrainage et de tutorat permettant d’accompagner les jeunes des QPV vers l’insertion professionnelle. À ce titre, le PLF pour 2019 prévoit une hausse de 3 millions d’euros des crédits consacrés aux « Cordées de la réussite » et au soutien aux parrainages. Votre rapporteure se félicite de ces engagements et de ces moyens, tout en attirant l’attention sur le risque dun possible décalage dans le temps entre la baisse rapide des contrats aidés PEC et la montée en puissance du Plan d’investissement dans les compétences (PIC), ces deux dispositifs visant en partie les mêmes publics. Elle appelle donc le Gouvernement à accélérer, dans les quartiers prioritaires, la mise en œuvre du PIC.


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II.   Des ambitions à concrétiser pour favoriser l’Émancipation par le sport et accroÎtre la présence des services publics dans les quartiers prioritaires

Afin de garantir aux habitants des quartiers populaires les mêmes droits que les autres citoyens et favoriser leur émancipation par l’éducation et l’emploi, deux thématiques paraissant particulièrement importantes aux yeux de votre rapporteure : le sport et la présence des équipements et services publics dans les QPV. Sur ces deux points, les QPV présentent à la fois des carences importantes et des potentiels élevés.

1.   Le sport dans les QPV est un levier pour faire République et un tremplin vers l’emploi

a.   Le constat

Le sport constitue un élément essentiel de la vie sociale des quartiers de la politique de la ville. Le goût pour la pratique sportive y est élevé et les éducateurs des clubs et associations sportives locales y réalisent un travail exceptionnel. Bien souvent, les clubs sportifs locaux sont des outils de maintien de la paix sociale.

Pourtant, malgré une forte demande, les QPV sont marqués par un souséquipement chronique en termes d’infrastructures sportives. Ainsi, en 2017, 428 quartiers prioritaires dont 50 en outre-mer, soit 28,5 % des QPV de France, ont été identifiés comme des quartiers qui ne disposaient d’aucun équipement sportif. Par ailleurs, la pratique sportive licenciée est particulièrement faible dans les QPV. D’après le rapport 2017 de l’Observatoire national de la politique de la ville (ONPV), deux fois moins de licences sportives sont attribuées en QPV comparativement à la population de ces territoires : 4 % des licences sont localisées dans un QPV, alors que ces quartiers représentent 8 % de la population de la France métropolitaine. Ce constat est encore plus marqué pour les femmes résidant dans les QPV qui ne représentent que 3,3 % des licenciées au niveau national. Les freins à la pratique sportive des jeunes filles sont nombreux et vont des pressions sociales et culturelles à la surreprésentation de certains sports dans les QPV, comme le football. La Fédération française de football (FFF) est, en effet, surreprésentée parmi les licences délivrées en QPV, avec plus d’une licence sur quatre contre 13,4 % au niveau national.

b.   La nécessité de nouveaux équipements et d’un investissement accru de toutes les fédérations sportives

Face à ce constat, le Gouvernement s’est engagé, dans le cadre de la feuille de route du 18 juillet 2018 en faveur des habitants des quartiers, à développer des équipements sportifs dans les 50 QPV les plus carencés. Ces 50 quartiers ont été identifiés par le centre national pour le développement du sport (CNDS) comme cumulant le plus de handicaps : non seulement ils ne disposent d’aucun équipement sportif mais le taux d’équipements pour 10 000 habitants est particulièrement faible dans un zonage défini autour de ces quartiers. Sur les 18 millions d’euros qui seront consacrés par la future Agence nationale du sport (qui doit remplacer le CNDS en 2019) au développement des équipements sportifs,  la moitié, soit 9 millions deuros, sera ainsi consacrée aux projets de création déquipements sportifs dans ces 50 QPV. Votre rapporteure salue cette décision et émets le vœu que la création de l’Agence nationale du sport, dont la gouvernance sera partagée entre tous les acteurs du monde du sport, soit l’occasion de recentrer durablement l’action de cet opérateur sur les territoires les plus fragiles. En outre, votre rapporteure considère que le Nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) est une occasion formidable pour développer les équipements sportifs dans les QPV. À ce stade, parmi les 50 quartiers retenus par le CNDS, seuls 5 relèvent du NPNRU (à Lisieux, Béziers, Trappes, Brunoy et Saint-Denis).

Pour développer, diversifier et féminiser la pratique sportive dans les QPV, votre rapporteure estime qu’une implication accrue de toutes les fédérations sportives est également nécessaire. Certaines fédérations ont d’ores et déjà développé des actions spécifiques. C’est notamment le cas de la fédération française de cyclisme (FFC) que votre rapporteure a auditionnée. La pratique du cyclisme est, en effet, particulièrement sous-représentée dans les QPV. Ces quartiers ne concentrent que 2 % des licenciés. Un plan d’actions est donc mené depuis trois ans par la FFC pour reconquérir les territoires urbains et les QPV. Dans ce cadre, la FFC a notamment développé un concept de parc BMX en milieu urbain dont elle soutient la création dans les QPV. La FFC apporte une aide financière et technique pour les travaux de construction de pistes (ou rampes) qui nécessitent peu de foncier. 35 nouvelles pistes ont ainsi été construites en trois ans, dont une particulièrement active et symbolique à Bobigny, dans le département de la Seine-Saint-Denis. En outre, la FFC lance chaque année un appel à projets pour un « cyclisme plus solidaire », en partenariat avec la Française des jeux (FDJ). Les projets retenus doivent avoir pour thème l’accessibilité, la solidarité ou l’insertion par le cyclisme. Chaque année, la FFC apporte ainsi une aide financière et technique de 75 000 € pour 45 projets environ. Enfin, la FFC a créé un label pour encourager l’implantation d’écoles de cyclisme à destination des plus jeunes et développé une action de formation pour apprendre aux plus jeunes à rouler sur la voie publique. La fédération se heurte cependant à l’opposition du ministère de l’éducation nationale qui refuse que la fédération intervienne dans les collèges. Votre rapporteure regrette ce blocage alors même que savoir rouler peut permettre à des jeunes de sortir de leur quartier. Au plan d’action de la FFC s’ajoute, en outre, un « plan citoyen du vélo », soutenu par le CGET, qui apporte un financement complémentaire aux clubs dont le siège social est situé dans un QPV. Ce dispositif ne prend toutefois pas en compte les clubs dont le siège social n’est pas situé dans un QPV mais dont les licenciés sont originaires de QPV, ce que votre rapporteur regrette.

Sur le modèle de la FFC, votre rapporteure estime que toutes les fédérations sportives agréées, qui sont chargées dune mission de service public, devraient se voir imposer dans leurs conventions dobjectifs et de performance (COP) signées avec lÉtat, un volet daction spécifique en faveur du développement de la pratique sportive dans les QPV. Ces actions devraient notamment permettre de féminiser et de diversifier le sport dans les QPV et de mieux en prendre en compte les nouvelles pratiques sportives urbaines que les fédérations ont du mal à appréhender. En outre, le coût d’une licence, même s’il est le plus souvent peu élevé, peut être un frein pour le développement de la pratique sportive licenciée dans les QPV. Votre rapporteure considère que les systèmes de gratuité de la licence pour les jeunes issus des QPV devraient être généralisés.

c.   Le soutien aux actions d’insertion par le sport

Le sport dans les QPV est le plus souvent une école de vie et un tremplin vers l’emploi. Des associations et des clubs sportifs locaux utilisent, en effet, le sport comme un outil pour accompagner des jeunes de QPV jusqu’à l’insertion dans l’emploi. C’est le cas notamment de l’association « Sport dans la Ville » que votre rapporteure a auditionnée. Cette association gère 40 centres sportifs en régions Auvergne-Rhône-Alpes, Île-de-France et Hauts-de-France, accueillant 6 500 jeunes issus des QPV. L’association développe pour cela, en coopération avec les municipalités et avec le soutien financier de l’État (programme 147), des équipements sportifs de proximité en pied d’immeubles. Ces équipements, qui sont le plus souvent des petits terrains de football et de basketball, sont ensuite animés tous les mercredis et samedis à destination des jeunes de 6 à 20 ans par des éducateurs diplômés, sans logique de club ou de compétition. Des actions spécifiques ont, en outre, commencées à être développées pour les jeunes filles et des activités culturelles hors du quartier sont également proposées aux jeunes.

Surtout, l’association utilise le sport pour créer des liens avec les jeunes afin déviter le décrochage scolaire et les accompagner vers lemploi. Le taux de jeunes ni en emploi, ni en formation (NEET) atteint 35,8 % dans les QPV. L’association a créé le programme « Job dans la ville » pour accompagner chaque jeune, à partir de 14 ans, et rétablir l’égalité des chances sur le chemin de la formation et de l’accès à l’emploi. Les jeunes présents dans les centres sportifs manquent le plus souvent de confiance dans leurs aptitudes pour poursuivre des études et ne maîtrisent pas les codes et les outils nécessaires à l’insertion dans le marché du travail. Le sport et l’accompagnement de l’association leur permettent d’apprendre un certain « savoir-être ». Le programme « Job dans la ville » repose sur un réseau d’entreprises partenaires qui soutiennent financièrement l’association, proposent des systèmes de parrainages, de tutorat, de stages et organisent des journées portes ouvertes. L’association emploie des « responsables d’insertion » dans chaque quartier, qui travaillent avec les familles de jeunes, les missions locales et les centres sociaux.

De nombreuses autres associations sportives ont développé le même type d’actions. Lagence pour léducation par le sport, association fondée il y a 20 ans, a labellisé 1 000 clubs sportifs engagées dans des démarches d’accompagnement et d’insertion en faveur des jeunes des quartiers populaires. Selon cette association, les clubs sportifs présents dans les QPV sont toutefois dans un état inquiétant aujourd’hui. Le secteur sportif est, en effet, particulièrement impacté par la diminution du volume des contrats aidés de droit commun. Sur 90 000 emplois dans le sport, 30 000, soit un tiers, sont des contrats aidés. L’association propose donc de continuer à soutenir ces actions par la création d’un métier de « coach dinsertion par le sport », qui bénéficierait d’une certification par l’État et d’un financement par le Plan dinvestissement dans les compétences (PIC). D’après l’association, l’objectif serait d’aider au financement de 1 000 entraineurs, suivant chacun 10 jeunes, soit 10 000 jeunes en tout. Votre rapporteure soutient cette proposition, dans la mesure où le PIC a justement pour vocation de financer des parcours d’insertion de jeunes sans qualification. Ce dispositif pourrait, par ailleurs, être l’occasion de lancer un plan de recrutement dentraineuses féminines, dont l’absence est souvent un frein au développement de la pratique sportive féminine dans les quartiers. Votre rapporteure espère, enfin, que les associations précitées seront bien éligibles à l’enveloppe de 15 millions d’euros créée par le PLF 2019 pour soutenir les associations nationales les plus structurantes agissant dans les quartiers de la politique de la ville.

2.   De nouveaux moyens et des changements de méthode sont nécessaires pour tenir les objectifs du Gouvernement en matière de renforcement des services publics dans les QPV

a.   Les objectifs de la feuille de route

Pour garantir les mêmes droits aux habitants des QPV, la feuille de route du Gouvernement du 18 juillet 2018 a affiché des objectifs ambitieux en matière de présence des services publics de première nécessité dans les quartiers. Le Gouvernement s’est ainsi engagé à doubler le nombre de maisons et centres de santé d’ici 2022 et à développer les Maisons de services au public (MSAP) dans les QPV.

Comme votre rapporteure l’avait indiqué dans son rapport l’année dernière, la situation de l’accès aux soins est préoccupante dans les QPV. D’après l’Observatoire national de la politique de la ville, la densité en professionnels de santé de proximité est 1,8 fois inférieure en QPV à ce qu’elle est dans les unités urbaines environnantes.

Pour cibler au mieux l’effort nécessaire, le CGET a engagé des travaux pour mesurer laccessibilité géographique des habitants des QPV aux équipements de proximité. Un indicateur est en cours de construction pour estimer la part des habitants des QPV qui ont accès en moins de 15 minutes à pied à un panier d’équipements (santé, sport, sécurité culture etc.). Le temps d’accès des habitants des QPV ainsi que l’offre disponible à proximité immédiate de ces territoires pourra ainsi être comparée à celle des habitants des autres quartiers des unités urbaines englobant les QPV. Les premiers résultats de ces études seront disponibles d’ici la fin de l’année 2018.

b.   La nécessité de financements complémentaires pour le développement des Maisons de services au public dans les QPV

Sans attendre ces résultats statistiques, des premiers enseignements peuvent être tirés du retour d’expérience des Maisons de services au public (MSAP).

Le statut juridique des MSAP a été défini par la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (loi NOTRe). Les MSAP ont pour objet d’améliorer l’accessibilité et la qualité des services en milieu rural et urbain, pour tous les publics. Elles peuvent rassembler des services publics relevant de l’État, des collectivités territoriales et d’organismes nationaux ou locaux chargés d’une mission de service public, comme Pôle Emploi ou l’Assurance maladie. La France compte aujourd’hui 1 350 MSAP, dont 200 sont en cours de création. La plupart de ces MSAP sont toutefois situées en milieu rural. D’après la Banque des territoires de la Caisse des dépôts et consignations, qui porte l’équipe d’animation nationale des MSAP, seulement 80 MSAP sont situées dans des QPV. Environ 700 MSAP ont été créées en milieu rural par les collectivités territoriales et 500 MSAP sont abritées par des bureaux de poste, également en milieu rural.

Pourtant, d’après la Banque des territoires, le succès et lutilité des MSAP dans les QPV est indéniable. Contrairement aux MSAP situées en milieu rural qui sont marquées par une faible fréquentation, les MSAP situées dans des QPV affichent une très forte activité. Elles nécessitent l’emploi de 3 agents en moyenne, contre 1 seul en milieu rural, et il n’est pas rare qu’elles soient confrontées à un phénomène d’engorgement les obligeant à fermer l’accueil une heure avant la fin de la journée. En 2017, 2,3 millions de démarches ont été accompagnées en MSAP, dont 20 % en QPV, alors même que seulement 6 % des MSAP sont situés dans ces territoires. Ce succès est en partie dû au développement des télé-procédures, dont l’appréhension peut poser des difficultés à certains habitants des QPV. De nombreux postes d’agents d’accueil en MSAP sont financés par le dispositif des adultes-relais qui jouent le rôle de médiateurs entre les usagers et les différentes institutions.

Les acteurs auditionnés par votre rapporteure se sont donc montrés favorables à la création de nouvelles MSAP en QPV pour répondre à ces besoins. Ils ont accueilli avec satisfaction l’engagement pris par le Gouvernement de développer les MSAP dans les quartiers de la politique de la ville. Toutefois, cette ambition se heurte pour le moment à une absence de financements adéquats. D’après la Banque des territoires, le système des MSAP est actuellement en déficit car les financements apportés par l’État par l’intermédiaire du Fonds national d’aménagement et de développement du territoire (FNADT), porté par le programme 112, avaient été dimensionnés pour atteindre l’objectif initial de 1 000 MSAP fin 2016 et non 1 350. Si le programme 112 du PLF pour 2019 prévoit 15,7 millions d’euros de crédits de paiement en 2019 pour le fonctionnement des MSAP contre 11,3 millions d’euros en 2018, ces crédits supplémentaires ne parviendraient même pas à combler le déficit actuel. Par ailleurs, aucune réflexion n’a été lancée pour la création de nouvelles MSAP dans les QPV, le CGET ayant indiqué vouloir d’abord évaluer les MSAP existantes et travailler à leur uniformisation. Or, si la question de l’hétérogénéité du réseau des MSAP se pose en milieu rural, il n’en est pas de même en QPV où le nombre de MSAP n’a pas encore atteint un niveau significatif. Votre rapporteure appelle donc le Gouvernement à concrétiser les annonces de la feuille de route du 18 juillet 2018 en lançant sans tarder une réflexion sur le développement des MSAP en QPV et en envisageant la création dune nouvelle ligne budgétaire dédiée dans le programme 147.

c.   Une réflexion à mener pour changer d’échelle dans la création des maisons et centres de santé

En matière de santé, le Gouvernement s’est fixé des objectifs encore plus ambitieux. Dans le cadre du plan de renforcement de l’accès territorial aux soins, il s’est engagé à doubler le nombre de maisons et centres de santé dici 2022. La feuille de route du 18 juillet 2018 a confirmé que cet objectif s’appliquerait également à l’échelle des QPV, le Président de la République ayant affirmé qu’une priorité serait donnée aux territoires les plus fragiles.

Les QPV comptent aujourd’hui 42 maisons de santé pluridisciplinaires et 209 centres de santé. Au-delà de la question du financement, votre rapporteure estime qu’un tel développement des maisons et centres de santé nécessite au préalable une réflexion approfondie sur leur mode de fonctionnement et sur leur capacité à attirer des professionnels de santé. Les enjeux relatifs à la création de structures coordonnées ne tiennent pas tant à la recherche d’un foncier ou d’une structure immobilière mais plutôt à la recherche d’une activité et d’une structure juridique et fiscale répondant aux diverses aspirations des professionnels de santé.

Un des freins majeurs au développement des structures coordonnées réside dans la segmentation entre l’activité salariée et la fonction publique d’une part, et l’exercice privée et libérale d’autre part. Cette segmentation se retrouve dans les deux types de structures coordonnées : maisons de santé pour les professionnels libéraux et centres de santé pour les professionnels salariés. Or, cette segmentation n’a plus de sens et ne répond pas aux attentes des nouvelles générations de professionnels de santé. Votre rapporteure considère donc que la réintroduction de la santé dans les quartiers de la politique de la ville doit impérativement être accompagnée d’une souplesse accrue dans les structures et les statuts, permettant de mélanger des professionnels libéraux et salariés, qui exercent si besoin à temps partiel. Des freins administratifs, particulièrement préjudiciables dans les QPV, pourraient par ailleurs être levés comme l’interdiction faite aux cabinets de santé d’abriter d’autres activités commerciales.

En outre, le développement des maisons et centres de santé doit s’accompagner d’un financement accru des actions de prévention qui, dans le système de rémunération à l’acte, sont aujourd’hui pénalisées. Or, la présence de structures coordonnées dans les QPV doit justement permettre aux professionnels de santé de développer des actions de prévention à long terme avec les habitants et tous les acteurs locaux, comme les écoles et les associations sportives.


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   EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du mercredi 24 octobre 2018, la commission des affaires économiques a examiné pour avis, sur les rapports de Mme Annaïg Le Meur (Ville) et de Mme Stéphanie Do (Logement), les crédits de la mission « Cohésion des territoires ».

M. Mickaël Nogal, président. Mesdames les rapporteures, mes chers collègues, l’année dernière, les débats relatifs au budget de la mission « Cohésion des territoires » nous avaient beaucoup occupés. À la suite de l’annonce de la stratégie du Gouvernement sur le logement, la loi de finances initiale pour 2018 avait marqué le lancement d’un mouvement de réforme du modèle économique du secteur HLM. Depuis, la loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ELAN) a apporté de nouveaux outils pour faciliter la construction, protéger les plus fragiles et inciter les organismes HLM à se regrouper et à se moderniser.

En 2019, la mission « Cohésion des territoires », qui regroupe à la fois les crédits consacrés à la politique du logement, à la politique de la ville et à la politique de l’aménagement du territoire, contribuera une nouvelle fois à l’effort de réduction des dépenses publiques. Les crédits de la mission sont en baisse de 1,16 milliard d’euros, mais cette diminution globale masque des hausses ciblées, en faveur notamment de la politique de la ville et de la lutte contre l’habitat indigne.

Je crois que nos deux rapporteures pour avis, Mme Stéphanie Do, pour les crédits relatifs au logement, et Mme Annaïg Le Meur, pour les crédits relatifs à la politique de la ville, ont eu à cœur dans leurs travaux d’assurer le suivi des mesures décidées l’année dernière et d’analyser certains chantiers à venir, comme la poursuite de la modernisation des aides personnelles au logement ou le développement des services publics dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.

J’aurai, pour ma part, deux questions.

À quoi correspond la hausse de 21 millions d’euros en faveur de la lutte contre l’habitat indigne dans le programme 135, et comment cette hausse s’articule-t-elle avec les objectifs de la loi ELAN ?

Quels sont les premiers enseignements du démarrage de l’expérimentation relative aux emplois francs en faveur des habitants des quartiers prioritaires ?

Je vous remercie encore pour votre travail, mesdames les rapporteures, et vous cède la parole.

Madame Stéphanie Do, rapporteure pour avis. Monsieur le président, mes chers collègues, j’ai l’honneur, pour la deuxième année consécutive, d’être rapporteure pour avis sur les crédits relatifs au logement.

Après une année 2018 marquée par le lancement d’une modernisation sans précédent de la politique du logement en France, l’année 2019 s’annonce comme celle de la poursuite et de la mise en œuvre des transformations engagées. Partant du constat que la politique du logement ne parvenait pas à remplir les objectifs qui lui avaient été assignés, malgré une dépense publique de plus de 35 milliards d’euros par an, le Gouvernement et la majorité se sont engagés dans une stratégie combinant la libération des énergies pour construire plus, mieux et moins cher, la protection des plus fragiles et l’amélioration de l’efficacité de la dépense publique. Cette stratégie a été déclinée dans deux textes majeurs et complémentaires : la loi de finances initiale pour 2018 et le projet de loi ELAN, qui a été définitivement adopté début octobre.

Le projet de loi de finances pour 2019 s’inscrit dans cette continuité. En 2019, comme en 2018, les programmes 109 et 135, consacrés au financement des aides personnelles au logement et aux différentes aides à la construction et à la rénovation contribueront significativement à l’effort de réduction des dépenses publiques. Les crédits de paiement (CP) de ces deux programmes sont en baisse respectivement de 8 % et de 7 % par rapport à 2018.

Ces baisses sont principalement dues à la modernisation des aides au logement qui, comme annoncé dès l’automne 2017, se poursuit en 2019. À partir de juin ou de juillet 2019, le montant des aides au logement ne sera plus calculé sur le fondement des revenus de l’allocataire de l’année « n – 2 » mais sur celui des revenus de l’année en cours. Cette réforme, attendue depuis tant d’années, permettra, d’une part, de rendre le montant de ces aides plus juste et plus en adéquation avec les changements de situation des allocataires et, d’autre part, de générer une économie budgétaire importante pour l’État. Elle est permise par la mise en œuvre de la retenue à la source de l’impôt sur les revenus et par la création, à l’article 50 du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), d’une base ressources regroupant les différentes déclarations de revenus. Le montant mensuel de l’aide personnalisée au logement (APL) sera ainsi actualisé tous les trimestres sur le fondement des revenus des quatre derniers trimestres glissants de l’allocataire.

La mise en œuvre de cette réforme est un véritable défi technique pour la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF). Elle est également le début d’un grand changement stratégique visant à moderniser les systèmes d’information et le modèle de délivrance de toutes les aides sociales d’ici à 2021. Les nouveaux outils développés permettront de supprimer des démarches déclaratives lourdes et fréquentes pour les allocataires et de mieux lutter contre la fraude et le non-recours.

Le PLF pour 2019 prévoit une économie de 900 millions d’euros sur les crédits du programme 109 grâce à la mise en œuvre de cette réforme. Ce gain pour les finances de l’État tient à deux facteurs. D’une part, du fait de la croissance économique et de l’inflation, les revenus des Français ont progressé en deux ans, ce qui conduira à une baisse globale du coût des APL. D’autre part, le système actuel de calcul des APL est asymétrique : les chutes brutales de revenus, comme lors d’une période de chômage, sont prises en compte, notamment grâce à un mécanisme d’abattement sur les revenus de l’année « n – 2 », mais pas les améliorations de revenus, comme le passage du statut d’étudiant à celui de jeune actif salarié. C’est la combinaison de ces deux facteurs qui explique le gain budgétaire engendré par la réforme, sans toutefois qu’il soit possible aujourd’hui de connaître le poids de chacun d’eux. La réforme fera inévitablement des gagnants et des perdants. Pour les jeunes passant du statut d’étudiant à celui de jeune actif, l’impact sera négatif, même si la prise en compte des quatre derniers trimestres amortira la baisse de l’aide. À l’inverse, pour les salariés passant d’un temps plein à un temps partiel, il sera positif.

Je considère que cette réforme est juste et relève du bon sens. Elle constitue un progrès car elle met fin au décalage actuel entre le montant des APL versées et les revenus de plus en plus instables des allocataires, qui ont fréquemment recours à des contrats à durée déterminée et subissent des variations de salaire. Sa mise en œuvre devra toutefois être accompagnée d’un effort de pédagogie important auprès de tous les allocataires et des bailleurs percevant l’aide en tiers payant.

Les autres économies sur les aides au logement en 2019, de l’ordre de 350 millions d’euros, proviennent majoritairement des effets en année pleine de la loi de finances initiale pour 2018 et d’une mesure nouvelle, la revalorisation en 2019 de la plupart des prestations sociales au taux de 0,3 % au lieu du taux d’inflation.

En compensation de la mise en extinction progressive de l’APL accession, décidée l’année dernière, le Gouvernement propose cette année de créer un nouveau dispositif d’aide aux travaux des propriétaires modestes, doté d’une enveloppe budgétaire de 17 millions d’euros dans le programme 135. Ce nouveau dispositif est en cours d’élaboration et devrait concerner en priorité 1 000 opérations d’accession à la propriété nécessitant des travaux de réhabilitation lourde, en particulier dans les départements d’outre-mer. Je me félicite de cette mesure nouvelle, qui permet de cibler encore davantage les propriétaires modestes et s’inscrit dans le renforcement de la lutte contre l’habitat indigne prévu par la loi ELAN.

Dans mon rapport, j’ai souhaité cette année évaluer et suivre l’application des mesures décidées à l’occasion de la loi de finances initiale pour 2018, en particulier la mise en œuvre de la réduction de loyer de solidarité (RLS) dans le secteur HLM, qui avait fait couler beaucoup d’encre.

À l’issue de négociations parfois âpres entre le Gouvernement et le mouvement HLM, l’article 126 de la loi de finances pour 2018 a procédé à une baisse concomitante des loyers et des APL dans le secteur HLM, via le mécanisme de la RLS. Conformément à l’accord intervenu entre le Gouvernement et une partie du monde HLM, l’effort financier demandé aux bailleurs sociaux devait atteindre 800 millions d’euros en 2018 et 2019, avant de s’élever à 1,5 milliard d’euros en 2020. Il devait être accompagné d’une série de mesures de compensation. Toutes les promesses en la matière ont été tenues.

La mise en œuvre technique de la RLS a connu quelques difficultés au premier semestre, notamment avec la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole, mais le mécanisme fonctionne désormais bien et aucun des acteurs que j’ai auditionnés, qu’ils soient bailleurs ou locataires, n’a rapporté d’incidents techniques depuis cet été ou de problème dans le calcul et l’imputation de la RLS sur les quittances de loyer. En outre, un mécanisme de lissage et de péréquation entre les bailleurs sociaux a été mis en place par l’intermédiaire de la modulation de la cotisation des bailleurs sociaux à la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS). Ce mécanisme permet d’éviter que les bailleurs sociaux logeant une proportion importante de locataires modestes soient plus affectés que les autres alors même qu’ils remplissent mieux la mission sociale qui leur est assignée. Tous les acteurs que j’ai auditionnés ont jugé que ce mécanisme était juste et fonctionnait bien.

Afin de compenser l’impact de la RLS sur l’autofinancement des bailleurs sociaux et donc sur leur capacité à investir dans la construction et la réhabilitation, le Gouvernement s’était engagé à mettre en place une série de mesures d’accompagnement. Celles-ci consistaient principalement à améliorer les conditions de financement des bailleurs sociaux auprès de la Caisse des dépôts et consignations pour diminuer leurs charges financières. Je peux vous confirmer que toutes ces mesures sont aujourd’hui opérationnelles.

La mesure ayant eu l’impact le plus immédiat a été le gel du taux du livret A qui a dégagé un gain de trésorerie de 670 millions d’euros en 2018 pour les bailleurs sociaux, sous la forme d’intérêts financiers moins élevés. En outre, la Caisse des dépôts et consignations a proposé aux organismes de logement social un mécanisme d’allongement de leurs dettes contractées auprès d’elle : 360 organismes ont opté pour cet allongement, ce qui devrait leur permettre de gagner 350 millions d’euros par an en trésorerie sur les cinq prochaines années.

Une seconde catégorie de mesures concerne plus particulièrement des dispositifs de soutien à l’investissement dont l’objectif est de permettre aux organismes de logement social de maintenir un niveau élevé de construction et de réhabilitation de logements sociaux, malgré une baisse de leur autofinancement. Parmi ces mesures, celle qui a rencontré le plus grand succès est l’ouverture, sur trois ans, de 2 milliards d’euros de prêts de haut de bilan. Un appel à manifestations d’intérêt a été organisé en juin dernier pour une première tranche de 700 millions d’euros. Il a remporté un franc succès auprès des organismes HLM puisque 384 d’entre eux y ont souscrit en un mois seulement.

La plupart des acteurs du logement social redoutaient une forte baisse de la production de logements sociaux et une hausse du nombre d’organismes HLM en difficulté financière dès 2018 ; rien de tel n’a pour l’instant été constaté. D’après le ministère de la cohésion des territoires, le niveau des agréments de nouveaux logements sociaux en 2018 sera proche de celui de 2017 : 107 000 contre 113 000, soit une baisse de 5 % seulement. Par ailleurs, selon la CGLLS, seuls cinq ou six organismes devraient solliciter auprès d’elle la mise en place d’un protocole de redressement financier en 2018, contre dix en 2016 et 2017. Aucun décrochage de la production neuve et aucune explosion du nombre d’organismes en situation de défaillance financière n’est donc observé pour le moment. Je me félicite de ces éléments rassurants qui témoignent de la pertinence et de l’efficacité des mesures de compensation.

Toutefois, tous les acteurs que j’ai auditionnés estiment qu’il est encore trop tôt pour mesurer l’impact réel de la RLS sur les comptes des bailleurs sociaux. Aucune évaluation chiffrée précise n’est pour l’instant disponible et les premières données sur l’évolution de l’autofinancement des bailleurs ne devraient pas être connues avant le printemps 2019.

En outre, des craintes nombreuses s’expriment quant au doublement du montant de la RLS dès 2020, à hauteur de 1,5 milliard d’euros. Toutes choses étant égales par ailleurs, un montant de RLS à 1,5 milliard d’euros représenterait une baisse de 7 % des recettes locatives des bailleurs et réduirait leur autofinancement à 2 % ou 3 % seulement. À un tel niveau moyen d’autofinancement, la construction de logements sociaux pourrait être affectée.

À moyen terme, seule une diminution des frais de fonctionnement des organismes HLM leur permettra d’absorber une augmentation de la RLS. C’est d’ailleurs le sens et l’objectif de la loi ELAN, qui prévoit une obligation de regroupement des bailleurs d’ici à 2021 afin de les inciter à mutualiser certaines fonctions support. Toutefois, les effets de ces regroupements en termes de mutualisation et de réduction des frais de fonctionnement ne se feront sans doute pas sentir avant 2021 ou 2022. Il en va de même pour la montée en puissance du volume des ventes HLM.

Dans ce contexte, j’estime qu’il est essentiel qu’une évaluation sérieuse de l’impact de la RLS sur la capacité d’autofinancement des bailleurs sociaux soit menée dès 2019 et que des projections chiffrées soient fournies sur l’impact d’un éventuel doublement de la RLS en 2020. Au vu de ces évaluations et des premiers effets des regroupements, le calendrier de la montée en puissance du dispositif de la RLS pourrait être réinterrogée à l’occasion du prochain projet de loi de finances.

Mme Annaïg Le Meur, rapporteure pour avis. Après une année 2018 qui fut celle de la co-construction de la mobilisation nationale pour les habitants des quartiers prioritaires, l’année 2019 sera celle de sa traduction financière et de sa mise en œuvre. Entre le 14 novembre 2017, date du discours du Président de la République à Tourcoing, et le 18 juillet 2018, date de la présentation de la feuille de route du Gouvernement pour la politique de la ville, un cycle inédit de concertation a permis à tous les acteurs locaux, politiques, associatifs et économiques, de proposer de nouvelles solutions afin de faire durablement reculer les inégalités territoriales et les concentrations urbaines de pauvreté en France. J’ai eu le privilège, avec d’autres parlementaires, d’y participer.

Les idées de terrain formulées à l’occasion de ces échanges et compilées dans le rapport de M. Jean-Louis Borloo, ont ensuite alimenté le travail interministériel de définition de la feuille de route du Gouvernement. Contrairement aux échos qui l’ont parfois accompagnée, la feuille de route du Gouvernement pour la politique de la ville annoncée le 18 juillet dernier est d’une ampleur inédite : quarante décisions engageant l’ensemble des ministères ont été prises pour un montant de 2,5 à 3 milliards d’euros de financements supplémentaires en faveur des habitants des quartiers prioritaires. Ces décisions couvrent tous les aspects de la vie de ces quartiers et se déclinent en trois grands objectifs : garantir les mêmes droits aux habitants des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), favoriser l’émancipation et « faire République ».

Le projet de loi de finances pour 2019 est la traduction financière de ces engagements. Le budget du programme 147, qui comporte les crédits spécifiques de la politique de la ville, connaît une forte hausse de 85 millions d’euros en crédits de paiement, soit une progression de près de 20 % d’une année sur l’autre. En 2019, le budget de la politique de la ville bénéficiera d’une enveloppe globale de 513 millions d’euros. Un tel niveau de crédits de paiement n’avait jamais été atteint depuis 2012. Je me félicite de cet engagement accru de l’État dans la politique de réduction des inégalités territoriales, tant la situation de certains quartiers est préoccupante.

Ces 85 millions d’euros supplémentaires correspondent intégralement à des dépenses d’intervention, c’est-à-dire à des subventions versées aux associations de proximité, aux collectivités territoriales et aux entreprises qui agissent directement dans les quartiers.  Conformément à la feuille de route du 18 juillet 2018, le PLF pour 2019 prévoit la création de mille postes supplémentaires d’adultes-relais et le doublement du nombre de postes de coordonnateurs associatifs financés par l’intermédiaire du Fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire (FONJEP). S’y ajoute la création d’une nouvelle dotation de 15 millions d’euros pour les associations nationales les plus structurantes afin qu’elles soutiennent et mettent en œuvre des actions de proximité.

L’ensemble de ces moyens supplémentaires permettra de soutenir l’emploi associatif, dans un contexte de réduction importante du volume des contrats aidés, renommés « parcours emploi compétences » en 2018. Certes, les volumes et les moyens ne sont pas strictement équivalents, mais à des contrats aidés précaires et non ciblés succèdent des dispositifs durables et spécifiquement fléchés en direction des territoires de la politique de la ville.

La hausse des crédits du programme 147 en 2019 permettra en outre de concrétiser d’autres engagements formulés dans la feuille de route du 18 juillet 2018, comme le renforcement de l’encadrement en maternelle dans une soixantaine de grands quartiers sans mixité sociale et la mise en place de « cités éducatives » prenant modèle sur une expérimentation menée à Grigny dans le cadre du programme de réussite éducative. Enfin, l’engagement pris en  loi de finances initiale pour 2018 de doubler le budget du Nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU), pour le porter de 5 à 10 milliards d’euros sur la période 2014-2031, est tenu.

Conformément au « pacte de Dijon » conclu avec les collectivités territoriales, l’État continue par ailleurs d’accroître la territorialisation des politiques de droit commun qui relèvent principalement de sa compétence, à savoir la sécurité et l’éducation. Le dédoublement des classes de CP et de CE1 dans les écoles des réseaux d’éducation prioritaire (REP), entamé en 2017, se poursuit en 2018. Tous les acteurs que j’ai auditionnés se félicitent du succès de cette mesure et soulignent son importance pour les habitants des QPV. S’agissant de la sécurité, les années 2018 et 2019 seront celles de la mise en place de la police de sécurité du quotidien. Dans soixante quartiers qui recoupent largement la géographie prioritaire de la politique de la ville, 1 300 postes supplémentaires de policiers et de gendarmes seront créés d’ici à 2020. Je me réjouis de ce ciblage particulier tant le traitement de la question de la sécurité dans les QPV est un prérequis indispensable au succès de toutes les autres politiques publiques.

Cette année, j’ai abordé dans mon rapport trois points en particulier : le suivi de l’expérimentation relative aux emplois francs, l’émancipation par le sport dans les quartiers et, enfin, le renforcement de la présence des services publics.

Lors des débats sur le PLF pour 2018, un amendement a permis de concrétiser une des promesses de la majorité : la mise en place d’un dispositif expérimental d’emplois « francs » visant à encourager l’embauche des habitants des QPV qui sont confrontés à des discriminations et à des freins spécifiques dans l’accès à l’emploi. Depuis le 1er avril 2018, une expérimentation a donc été lancée sur sept territoires, regroupant 25 % des demandeurs d’emploi résidant en QPV. Pôle Emploi est le principal opérateur chargé de mettre en œuvre cette expérimentation et a développé plusieurs campagnes de communication au niveau local. D’après Pôle Emploi, au 1er septembre 2018, soit cinq mois après le démarrage de l’expérimentation, 2 092 demandes d’aides « emplois francs » lui ont été transmises et 1 617 ont été directement attribuées. Certes, ces chiffres sont inférieurs aux prévisions alors que l’objectif fixé pour 2018 est de 5 000 emplois francs mais, depuis début juillet, le rythme s’accélère : de 100 à 150 aides sont attribuées chaque semaine et Pôle Emploi attend un décollage fort du dispositif dans les deux mois qui viennent. En outre, les premiers retours qualitatifs sont encourageants : 80 % des emplois francs sont des contrats à durée indéterminée (CDI) et 90 % des employeurs sont des entreprises. En tout état de cause, j’estime qu’il est bien trop tôt pour juger du succès ou de l’efficacité de ce dispositif qui vient à peine de démarrer sur sept territoires seulement. Je considère toutefois que le dispositif doit encore gagner en publicité et que Pôle Emploi doit davantage se tourner vers les réseaux informels locaux d’entreprises qu’animent notamment les collectivités territoriales et les chambres consulaires. Les débuts de l’expérimentation ont montré que les territoires les plus dynamiques en création d’emplois francs sont ceux où le dispositif s’inscrit dans un environnement très structuré, comme à Angers ou à Lille.

Deuxième point : l’émancipation par le sport. Le sport constitue un élément essentiel de la vie sociale des quartiers de la politique de la ville. Le goût pour la pratique sportive y est élevé et les éducateurs des clubs et associations sportives locales y réalisent un travail exceptionnel. Pourtant, malgré cette demande, les QPV sont marqués par un sous-équipement chronique en infrastructures. En 2017, 428 QPV, soit 28,5 % du nombre total de ces quartiers, ne disposaient d’aucun d’équipement sportif. Par ailleurs, deux fois moins de licences sportives sont attribuées en QPV en proportion de la population de ces territoires et ce constat est encore plus prononcé pour les femmes. Face à cette situation, le Gouvernement s’est engagé, dans le cadre de la feuille de route du 18 juillet 2018, à développer des équipements sportifs dans les cinquante QPV les plus carencés. Sur les 18 millions d’euros que la future Agence nationale du sport consacrera au développement des équipements sportifs, la moitié, soit 9 millions d’euros, sera consacrée aux projets de création d’équipements sportifs dans ces cinquante quartiers. Je salue cette décision et espère que la création de l’Agence nationale du sport sera l’occasion de recentrer durablement l’action de cet opérateur sur les territoires les plus fragiles.

Pour développer, diversifier et féminiser la pratique sportive dans les QPV, j’estime qu’une implication accrue de toutes les fédérations sportives est également nécessaire. Certaines fédérations ont d’ores et déjà développé des actions spécifiques, comme la Fédération française de cyclisme qui a développé un concept de parc BMX en milieu urbain dont elle soutient la création dans les QPV. Sur ce modèle, je considère qu’il conviendrait d’imposer à toutes les fédérations sportives agréées, qui sont chargées d’une mission de service public, d’insérer dans les conventions d’objectifs et de performance qu’elles signent avec l’État un volet d’action spécifique en faveur du développement de la pratique sportive dans les QPV.

En outre, le sport dans les QPV est le plus souvent une école de vie et un tremplin vers l’emploi. Des associations et des clubs sportifs locaux, comme l’association « Sport dans la ville » que j’ai auditionnée, utilisent le sport pour créer des liens avec les jeunes afin d’éviter le décrochage scolaire et les accompagner vers l’emploi grâce au soutien de réseaux d’entreprises partenaires. Or, ces associations et clubs locaux sont aujourd’hui particulièrement touchés par la diminution du volume des contrats aidés de droit commun. Je soutiens donc la proposition de l’agence pour l’éducation par le sport de créer un métier de « coach d’insertion par le sport », qui bénéficierait d’une certification par l’État et d’un financement par le plan d’investissement dans les compétences.

M. Thibault Bazin. Disons plutôt « entraîneur d’insertion » !

Mme Annaïg Le Meur, rapporteure pour avis. Soit, si vous préférez ce terme. Quoi qu’il en soit, ce dispositif pourrait aussi être l’occasion de lancer un plan de recrutement de femmes entraîneurs, dont l’absence est souvent un frein au développement de la pratique sportive féminine dans ces quartiers.

J’en viens à mon dernier point : la présence et l’accessibilité des services publics. Pour garantir les mêmes droits aux habitants des QPV, la feuille de route du Gouvernement affiche des objectifs ambitieux : doubler le nombre de maisons et centres de santé d’ici à 2022 et développer les maisons de services au public (MSAP) dans les QPV. Ces annonces sont importantes, car les services publics de première nécessité ont déserté certains quartiers. D’après la Caisse des dépôts et consignations, seules 80 MSAP sont situées dans les QPV. Or, le succès et l’utilité des MSAP dans les QPV sont indéniables. Contrairement aux MSAP situées en milieu rural, qui sont marquées par une faible fréquentation, les MSAP situées dans des QPV affichent une forte activité. De nombreux postes d’agents d’accueil en MSAP sont financés par le dispositif des adultes-relais qui jouent un rôle de médiateurs entre les usagers et les différentes institutions. Tous les acteurs que j’ai auditionnés se sont donc montrés satisfaits de l’engagement pris par le Gouvernement. Toutefois, cette ambition se heurte pour le moment à une absence de financements adéquats. Certes le programme 112 prévoit 4 millions d’euros supplémentaires pour les MSAP en 2019, mais ce montant ne suffirait même pas à combler le déficit actuel. J’appelle donc le Gouvernement à concrétiser sans tarder les annonces de la feuille de route du 18 juillet 2018 en envisageant la création d’une nouvelle ligne budgétaire dédiée dans le programme 147.

Enfin, en matière de santé, j’estime que le doublement du nombre de maisons et centres de santé en QPV nécessite, au préalable, une réflexion approfondie sur leur mode de fonctionnement et sur leur capacité à attirer les professionnels de santé. Les enjeux relatifs à la création de structures coordonnées ne tiennent pas tant à la recherche d’un foncier ou d’une structure immobilière mais plutôt à la recherche d’une activité et d’une structure juridique et fiscale répondant aux diverses aspirations des professionnels de santé. À ce titre, je considère que la réintroduction de la santé dans les quartiers de la politique de la ville doit impérativement être accompagnée d’une souplesse accrue dans les structures et les statuts, permettant de mélanger des professionnels libéraux et salariés. Enfin, le développement des maisons et centres de santé doit s’accompagner d’un financement accru des actions de prévention.

M. Mickaël Nogal, président. Nous en venons aux interventions des représentants des groupes.

Mme Véronique Hammerer. Je me satisfais de découvrir un budget qui donne à notre politique les moyens de nos ambitions tout en assurant la maîtrise des dépenses. C’est un budget pensé reposant sur une approche globale, qui doit être mis en regard des politiques visées par les autres missions budgétaires. Le budget de la mission « Cohésion des territoires » est un budget de transformation qui traduit l’ambition de redonner du sens à l’action publique. En outre, la politique de l’État délaisse les mesures catégorielles pour défendre une ambition réelle et tangible consistant à favoriser l’accès de tous les citoyens à un logement décent et à promouvoir l’égalité des territoires en réduisant les multiples fractures existantes.

En matière de logement, le programme d’accès au logement demeure la principale priorité, avec un budget maîtrisé qui tend vers l’efficience. Le Gouvernement est parvenu à proposer une économie substantielle de près de 1 milliard d’euros tout en assortissant ces aides, légèrement revalorisées de 0,3 %, d’une mesure de contemporanéisation des ressources. Il sera ainsi demandé à une personne bénéficiaire pour définir l’aide dont elle a besoin le montant de ses revenus à l’instant t, et non plus deux ans auparavant. Cette aide sera dès lors plus efficace et permettra à ceux qui perdent leur emploi de retrouver rapidement une aide plus conséquente qui correspond à leur situation réelle.

Le programme 177, quant à lui, est repensé : le financement des centres d’hébergement d’urgence dédiés aux migrants est transféré à la mission « Immigration et asile ». Ainsi, à périmètre constant, les crédits de paiement de la principale action visant à proposer des logements et hébergements adaptés augmentent de près de 2,3 % par rapport à la loi de finances pour 2018. Face au constat implacable selon lequel seules 619 places en pension de famille ont été ouvertes en 2018, alors qu’il s’agit d’une mesure nécessaire et à forte valeur sociale, les choix qui s’imposent ont été faits pour accélérer dans un premier temps la mise en œuvre de la stratégie logement, avec une augmentation significative de 3,7 % du budget dédié, soit plus de 11,5 millions d’euros supplémentaires pour l’année prochaine. J’insiste : le dispositif des pensions de famille est un outil-clé pour sortir les gens de la rue et permettre leur réinsertion.

S’il vise à faciliter l’accès au logement, ce budget vise aussi à garantir la qualité des logements proposés. Dans la continuité des mesures prises par le Gouvernement en faveur de la transition écologique et solidaire, les ressources de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH), qui contribue à la rénovation énergétique des logements privés, sont confortées moyennant une contribution de l’État à hauteur de 110 millions d’euros. Dans le même temps, le projet de loi de finances prévoit un nouveau dispositif d’aide aux travaux pour les propriétaires modestes via une mesure de 17 millions d’euros qui contribuera notamment à la résorption de l’habitat insalubre dans les territoires d’outre-mer.

Je me félicite de la volonté manifeste du Gouvernement de réaffirmer la nécessité de réduire les écarts de développement entre les quartiers urbains défavorisés et les autres territoires de la République. Avec une augmentation de près 20 %, l’État se dote d’un budget renforcé à hauteur de 85 millions d’euros, qu’il faudra employer utilement pour retisser le lien social et favoriser le développement économique, l’accès à l’emploi et l’égalité des chances.

Je salue également les propositions formulées par la rapporteure Annaïg Le Meur qui réaffirment l’importance du sport dans les politiques consacrées à la jeunesse et à l’éducation populaire, mais aussi et surtout comme tremplin vers l’emploi. De plus, votre rapport souligne la nécessité d’orienter davantage certains services publics essentiels en direction des quartiers prioritaires de la ville, comme les maisons de services au public – qui constituent parfois le seul lien de proximité entre les citoyens et l’administration – ou encore les centres de santé, véritables outils permettant de rompre l’isolement des professionnels de santé et d’assurer un maillage efficient.

Je conclus par un regret personnel concernant les centres socio-culturels. Ces espaces sont parfois le seul lieu laïc et accessible à tous qui permet de tisser ou retisser du lien social. Leur présence sur les territoires, en particulier dans les quartiers prioritaires de la ville, devrait à mon sens être réaffirmée et soutenue par cette augmentation budgétaire sensible à destination de ces territoires.

Enfin, ce budget semble cohérent avec les orientations politiques que défend le Gouvernement ; c’est pourquoi je le soutiendrai volontiers.

M. Thibault Bazin. Examinons les évolutions budgétaires que vous proposez au titre de la mission « Cohésion des territoires » : vous envoyez des signaux positifs – en millions – qui ne sauraient masquer un coup de rabot – en milliards. Il faut reconnaître que les dépenses du programme 147 relatif à la politique de la ville augmentent de 360 millions d’euros : c’est une bonne nouvelle pour des dispositifs bénéfiques tels que les écoles de la deuxième chance. Il faut reconnaître aussi que les crédits dédiés à la lutte contre l’habitat indigne augmentent fortement, passant de 7,2 à 25,2 millions d’euros. Au total, cependant, le Gouvernement prévoit une baisse de ce budget de 2,19 milliards d’euros par rapport à 2018 et de près de 4,66 milliards par rapport à 2017, soit une baisse de près de 13 %.

Il est indéniable que ce budget 2019 s’inscrit dans la continuité du budget 2018 en matière de politique du logement. La cohésion des territoires ne fait pas partie des priorités budgétaires du Gouvernement. On peut même s’étonner que les moyens consacrés à la mission « Prévention de l’exclusion », qui finance notamment les allocations et prestations d’aides sociales versées aux personnes âgées et handicapées, soient en baisse de 2 % en 2019 après une réduction de 19 % en 2018 par rapport à l’année précédente. On peut s’étonner que les crédits qui financent les centres d’hébergement d’urgence diminuent de 93 millions d’euros par rapport à 2018 alors que l’on en connaît les besoins criants. On peut aussi s’étonner de la baisse de 8,8 % de l’action « Revitalisation économique et emploi », ou encore de la quasi-disparition des aides à la pierre versées par le Fonds national des aides à la pierre (FNAP).

Avant de voter le budget pour 2019, il aurait été utile d’évaluer l’impact des mesures néfastes que vous avez prises lors de votre premier budget l’an passé. Baisse des APL que vous avez fait supporter aux bailleurs sociaux, quasi suppression de l’APL-accession, réduction considérable du prêt à taux zéro et du dispositif Pinel : les effets de ces mesures commencent à se faire ressentir, avec un net ralentissement de la construction en 2018 qui s’aggravera encore en 2019. Le nombre d’agréments a reculé de 20 % en deux ans alors que la demande de logements aidés a progressé de 9 % au cours de la même période. Avez-vous raison de persister sur cette pente du déclin alors que les besoins sont criants ? Ne faut-il pas avancer la clause de revoyure programmée pour le PLF 2020 ? Ne faut-il pas pondérer l’effort demandé en fonction du taux de ménages bénéficiant de l’APL ?

Votre objectif quantitatif ne sera pas atteint. Vous ne construirez pas plus, au contraire : il y aura moins de logements aidés réhabilités, moins de logements aidés produits, moins d’accession sociale à la propriété, moins d’investisseurs dans la pierre, moins de logements privés construits. Pire : l’intitulé même de la mission, « Cohésion des territoires », semble mensonger puisque les fractures s’aggravent depuis un an. Ma région a connu à elle seule une baisse de 47 % des demandes de permis de construire et aucune demande n’y a été déposée en zone B2.

Il existe un problème de cohérence entre les politiques publiques que vous menez. Certains collèges accueillent jusqu’à 50 % voire 70 % d’élèves qui habitent en QPV mais ne se trouvent pas pour autant en zone REP ou REP+ ! Y aurait-il des sous-quartiers ?

Ma question est simple : quel avenir envisagez-vous pour les zones B2 et C ? Sont-elles des sous-territoires ? Quel avenir envisagez-vous pour les territoires en souffrance qui ne bénéficient pas des dispositifs de zone de revitalisation rurale (ZRR) recentrés ou de cœurs de ville ?

Mme Marguerite Deprez-Audebert. Dotée d’un budget global de 31 milliards d’euros, la mission « Cohésion des territoires » se rattache à une politique transversale qui s’appuie largement sur deux chantiers majeurs : les conférences nationales des territoires et une stratégie ambitieuse pour le logement.

S’agissant du logement, le Gouvernement a présenté une stratégie s’articulant autour d’objectifs bien connus, que l’on retrouve dans le projet de loi ELAN et qui constituent un subtil équilibre visant à répondre aux besoins des Français en matière de logement. Nous approuvons la modernisation du fonctionnement des APL et la prise en compte des ressources en temps réel dans leur calcul – il s’agit là d’une réforme structurelle inédite qui, dans certains cas, se traduira peut-être par un gain de pouvoir d’achat immédiat et surtout par des économies pour l’État, ce à quoi le groupe du Mouvement Démocrate (MODEM) et apparentés est particulièrement attentif. Nous avons bien noté les outils proposés aux bailleurs sociaux et le fait que cette année et la prochaine sont des années de transition.

Je souhaite revenir sur le chantier de la rénovation énergétique des bâtiments, auquel le Gouvernement a fixé plusieurs objectifs. Pourriez-vous préciser les dispositifs qui seront mis en place afin de les atteindre ?

Heureusement, la protection des plus fragiles demeure une priorité, non seulement par conviction mais aussi par fidélité à l’une de nos plus anciennes valeurs républicaines, la fraternité. Nous notons à cet égard que le budget consacré à l’hébergement d’urgence, aux parcours vers le logement et à l’insertion des personnes vulnérables augmente, et passe d’un montant de 1,74 milliard d’euros cette année à 1,99 milliard l’an prochain. Cette hausse contribuera notamment, dans le cadre du plan quinquennal pour le logement d’abord, à produire et à mobiliser un plus grand nombre de logements dits abordables et adaptés, l’objectif étant de produire 40 000 logements abordables par an et l’ouverture sur cinq ans de 50 000 places en intermédiation locative.

Quant à la politique de la ville, elle est structurée autour de trois axes d’action : la mobilisation du service public de l’emploi, la poursuite du renouvellement urbain et le renforcement du lien social. Ce sont des marqueurs forts. Pour financer ces actions et concrétiser les mesures significatives qu’a évoquées Mme Le Meur, les crédits alloués à la politique de la ville ont été accrus de 85 millions d’euros pour 2019. Ces décisions, qui visent à renforcer l’insertion et la sécurité de nos concitoyens, nous semblent aller dans le sens d’une politique de la ville et du logement plus juste et plus équilibrée. Le groupe MODEM et apparentés approuve les orientations budgétaires arbitrées par le Gouvernement et soutiendra ce budget.

M. Thierry Benoit. Je ne reprocherai pas au Gouvernement le fait que cette mission contribue à l’effort national de réduction de la dépense publique à hauteur de 2 milliards d’euros car, à mon sens, il en aurait été de même avec n’importe quel autre gouvernement.

Je concentrerai mon propos sur le programme le plus important, à savoir le programme 109, et dans une moindre mesure sur le programme 135. Le programme 109, doté de quelque 13 milliards d’euros, a trait au logement. J’aurais souhaité que la rapporteure pour avis nous indique les enseignements qu’elle tire des dispositions que le Gouvernement a adoptées il y a un an. Bon nombre d’entre elles ont eu une incidence sur le secteur du logement : l’APL, en particulier l’APL-accession, le prêt à taux zéro mais aussi la niche fiscale que constitue le dispositif « Pinel », qui a finalement été maintenu dans les territoires où la demande de logements est forte – ce qui revient à alimenter la chaudière, en quelque sorte. Quitte à conserver cette niche fiscale, mieux vaudrait qu’elle bénéficie à des territoires qui, en matière de logement, manquent de dynamisme. Se pose alors la question des zones B2 et C, c’est-à-dire des villes moyennes. J’interpelle le Gouvernement sur cette disposition.

M. Thibault Bazin. Il a raison !

M. Thierry Benoit. Deuxième point : la politique de la ville. Le Président de la République et le Premier ministre ont confié une mission à Jean-Louis Borloo parce qu’il est l’homme-clé des politiques de la ville en France. Je serai franc : je ne partageais pas sa proposition de consacrer 50 milliards d’euros supplémentaires à ces politiques car j’ai le sentiment d’un puits sans fond. J’approuve certaines de ses orientations, mais je suis d’accord avec le choix du Gouvernement de cesser de déverser des milliards d’euros dans les politiques de la ville.

En revanche, comme dans le cas des programmes d’investissement d’avenir dont nous venons d’examiner le budget, il me semble qu’il appartient au Gouvernement de mettre de l’ordre dans cette situation et de relier la politique de la ville avec celles de l’éducation, du sport, de la culture et de la sécurité. Je suis très inquiet non pas du départ de M. Collomb, ancien ministre de l’intérieur, mais de ses déclarations : dans certaines banlieues, a-t-il dit, les habitants vivent côte à côte, mais il est à craindre qu’ils ne vivent face à face d’ici à quelques mois. Or, je ne retrouve pas l’impulsion nécessaire dans le budget de la politique de la ville, hormis dans le programme de rénovation urbaine qui est malgré tout abondé de 10 milliards d’euros.

Enfin, pour ce qui concerne la cohésion des territoires, l’expérience du terrain m’autorise à dire que tous les outils existants – contrats de plan État-régions, dotation de soutien à l’investissement local, contrats de ruralité, programme « action cœur de ville » – et les enveloppes correspondantes ne sont que du recyclage : on prend ici pour donner là et l’on sollicite les bonnes idées qu’ont les maires pour leurs villes – et ils en ont – afin de demander aux préfets ou sous-préfets de signer des conventions tantôt pour la ruralité, tantôt pour le cœur de ville, et ainsi de suite. En fin de compte, je ne sens pas là non plus une impulsion gouvernementale nouvelle, que j’appelle de mes vœux.

Pour conclure, je réitère ma question à Mme la rapporteure pour avis concernant le logement, en particulier l’APL, le prêt à taux zéro et le dispositif « Pinel ».

M. François Ruffin. Une fois n’est pas coutume, je tiens à féliciter la majorité et le Gouvernement au sujet du budget du logement : 5,7 milliards d’euros sur trois ans pour construire 1,5 million de logements abordables, parce qu’il n’est pas normal que les ménages consacrent 30 % de leurs ressources au logement, et jusqu’à 50 % dans les foyers les plus modestes. C’est une excellente décision ! Pardon, veuillez m’excuser, j’ai confondu mes notes : cette décision n’est pas prise en France mais en Allemagne. Elle n’est pas de Macron mais d’Angela Merkel, qui investit plus de 5 milliards d’euros dans les logements sociaux.

Quoi qu’il en soit, je félicite tout de même le Gouvernement et la majorité : 2 milliards d’euros ! C’est certes un montant moindre mais on peut espérer qu’il permette aux offices HLM de bâtir 300 000 logements supplémentaires. Ce sera un coup de boost ; je dis bravo ! Pardon, je me suis de nouveau trompé : ce n’est pas en France mais en Angleterre, ce n’est pas Macron mais Theresa May.

Encore un essai, et j’espère ne plus me tromper : en France, les crédits du logement social connaissent une baisse de 2 milliards d’euros sur deux ans. Grâce à votre politique très efficace, la construction de logements sociaux plonge déjà. En 2016, 128 000 logements étaient programmés, contre 113 000 en 2017 et à peine 100 000 en 2018. Chapeau pour ces résultats !

Et ce n’est qu’un début. Vous continuez le combat et poursuivez la casse. La « Casse » des dépôts et consignations, justement, prévoit dans son étude annuelle que vos mesures entraîneront une baisse de la construction de 38 % dans les vingt prochaines années. Diviser par deux : voilà votre œuvre ! En outre, les réhabilitations suivent grosso modo la même courbe de déclin.

Que signifient concrètement ces décisions pour les gens ? Quelle est la principale attente exprimée à ma permanence à Amiens, comme sans doute dans les vôtres ? C’est le logement. En l’occurrence, le mot « attente » convient parfaitement car les familles modestes doivent s’armer de patience et attendre des années avec trois, quatre ou cinq enfants dans un F2 ou un F3. Il y a quinze jours, j’ai fait un petit « Banlieue Tour » en Seine-Saint-Denis pour comparer la situation qui y prévaut avec celle de ma circonscription. Quelle y est la principale attente ? Le logement, là aussi. L’attente d’un logement, mais aussi l’attente de travaux de réhabilitation dans des logements délabrés, ou simplement de la réparation d’un ascenseur en panne.

Vos chiffres abstraits auront des conséquences très concrètes – fuites non réparées, champignons sur les murs, infiltrations d’eau, halls dégradés, ascenseurs en panne – et pour tous, toujours, de l’attente, de l’attente, de l’attente.

M. Sébastien Jumel. Il est très bon !

M. Richard Lioger. Non, il est démagogue !

M. Sébastien Jumel. Ses propos reflètent la réalité. Il est juste et cohérent de traiter en même temps la politique de la ville et le logement car la place du logement social est évidemment déterminante dans les quartiers de la politique de la ville. Un tiers de la ville dont j’ai été maire est en QPV. Force est de constater que les familles monoparentales, les retraités modestes, les salariés précaires et les jeunes demandeurs d’emploi ont été les premières cibles des mauvaises politiques que vous avez décidées depuis un an. Elles ont certes produit un résultat positif : les millionnaires se portent mieux. Leur nombre a augmenté de 147 000 depuis le début du quinquennat, ce qui place la France au deuxième rang mondial juste derrière les États-Unis de Trump, avec 2,147 millions de millionnaires.

Quant aux pauvres, qui sont au cœur de la politique de la ville – et même si je souligne le courage de Mme la rapporteure pour avis qui a dénoncé l’impact de la suppression des emplois aidés, laquelle ne sera pas compensée par le doublement des « emplois FONJEP », et qui a insisté sur la fragilité de ces quartiers, notamment en matière de politique sportive – les pauvres, donc, souffrent, et ils souffrent fort. Vous abondez le budget de la politique de la ville de 80 millions d’euros et, dans le même temps, vous asphyxiez les départements qui ferment des services de protection maternelle et infantile, qui réduisent les dotations horaires globales des collèges situés dans les quartiers de la politique de la ville ou qui diminuent les moyens d’accompagnement des fonds de solidarité logement (FSL). Vous asphyxiez également les petites communes – pourtant le partenaire essentiel des politiques de la ville –, ce qui a pour effet de battre en brèche et même de réduire en miettes les contrats de ville. La politique de la ville est pourtant censée être conduite selon le principe de subsidiarité. Or, en flinguant les politiques publiques de droit commun, vous rendez la vie des populations de ces quartiers plus difficiles.

Stéphane Peu a dénoncé les risques majeurs que présentait le projet de loi ELAN. Si Claire O’Petit était ici, elle dirait qu’il faut que les jeunes arrêtent de pleurer pour 5 euros, mais la ponction sur les APL constitue un véritable hold-up, qui me fait craindre un décrochage des plus fragiles d’entre nous dans l’accès au logement social.

Outre le fait qu’elle rendra moins facile la construction de logements dans les villes moyennes et les territoires tendus, la loi ELAN va flinguer les bailleurs à dimension humaine, en les privant de leur capacité à agir sur la rénovation thermique, le cadre de vie, la gestion urbaine de proximité, les murs humides, les ascenseurs en panne et les cages d’escalier indignes.

Pour étayer mon propos, j’userai de chiffres objectifs : entre 2017 et 2018, le nombre de permis de construire a chuté de 19 %. Selon la Fondation Abbé Pierre, le nombre de logements financés par un prêt locatif aidé d’intégration (PLAI) ou un prêt locatif à usage social (PLUS) a subi une baisse de 12 %. Votre politique de démolition du logement social commence déjà à produire ses effets, et ce, jusque dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.

Que les efforts accomplis par les maires, dans la proximité, puissent être à ce point déconstruits m’interpelle et je suis profondément inquiet de la déstabilisation que cela peut produire chez les publics les plus fragiles. Un an après l’« appel de Grigny », le danger est plus que jamais présent : il y a urgence à se trouver au chevet de la France qui manque, de la France qui souffre – une France qui a pourtant de l’énergie à revendre. C’est le sens de notre contribution à l’examen des crédits du programme politique de la ville : leur progression ne compense pas l’abandon des politiques de droit commun et la démolition de la politique du logement social.

M. Dominique Potier. À la différence de Thierry Benoit, je me demande si, finalement, Jean-Louis Borloo n’a pas raison. La nation devrait consentir à cet effort, constitutif de notre république, et rétablir une équité d’accès au logement. Nous devrions nous pencher sur la question du coût élevé du logement, un phénomène qui nous est propre et que l’on ne retrouve pas partout en Europe. Nous devrions, comme pour l’alimentation et d’autres sujets encore, mobiliser les crédits en faveur d’un égal accès à un logement digne. La marge de manœuvre existe, elle est à trouver entre la fraude, l’optimisation fiscale et les choix iniques de redistribution des deniers publics.

Néanmoins, et dans une logique de mesure, le groupe Socialistes et apparentés constate que les choses sont moins pire qu’ailleurs, notamment sur le plan humain. Après les dégâts causés en 2018, les efforts entrepris, notamment autour du plan pauvreté, marquent une légère inflexion par rapport au début du quinquennat et doivent être salués. Mais le budget n’est pas à la hauteur des enjeux et nous plaiderons pour que 100 millions d’euros supplémentaires viennent abonder la politique de la ville.

En revanche, nous ne pouvons pas nous satisfaire de la diminution drastique des crédits alloués aux aides au logement. Là encore, on détricote d’une main ce que l’on essaye de fabriquer de l’autre. Les crédits annoncés pour le plan pauvreté ne sont pas encore confirmés, mais on sait qu’à l’effet de la baisse de 5 euros des APL viendra s’ajouter la revalorisation des prestations sociales de seulement 0,3 % au lieu du taux de l’inflation. Au fil du temps, ces réductions s’accumulent et grignotent le pouvoir d’achat des plus fragiles.

Un chiffre publié par Alternatives économiques dans son « Panorama 2018-2019 » m’a profondément touché : les 5 % des Français les plus pauvres vivent dix ans de moins que les 5 % les plus riches. La pauvreté ne représente pas seulement du pouvoir d’achat en moins ; c’est aussi une espérance de vie en bonne santé réduite et, tout simplement, une durée de vie moindre. Ce scandale français, nous pouvons le constater dans nos territoires. Ces 5 euros sont tout sauf un détail ; ils peuvent faire la différence, dans l’alimentation, dans l’accès à la culture pour un enfant. Ne nous payons pas de mots : nous ne sommes pas du tout à la hauteur.

Nous défendrons un amendement sur l’APL-accession, telles qu’elle existait dans la loi de finances pour 2018. Chacun a constaté les conséquences catastrophiques de cette mesure sur la mobilité résidentielle et la production de logements neufs en zone détendue.

Enfin, le Gouvernement opère des coupes budgétaires sans précédent sur les centres d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS), cela a été dit sur tous les bancs, en contradiction totale avec l’urgence sociale. Vous avez prévu 57 millions d’euros d’économies sur quatre ans, et après 20 millions d’euros de coupes budgétaires en 2018, vous supprimez 13,4 millions d’euros de crédits pour 2019. De plus en plus de personnes et de familles sont confrontées au sans‑abrisme et ont besoin d’accéder à un logement, a minima à un hébergement et à un accompagnement. Les politiques de désengagement de l’État ont des conséquences tragiques, que nous devons dénoncer. Monsieur le président, à Toulouse, l’inadéquation entre l’offre et la demande de logements a provoqué des tensions, aujourd’hui publiques et connues de tous. Nous défendrons donc en séance publique un amendement visant à mobiliser une enveloppe de crédits à la hauteur de ces enjeux.

M. Mickaël Nogal, président. Je vous remercie d’avoir cité ma ville, Monsieur Potier, mais je pense sincèrement que les Toulousains, qu’il s’agisse des jeunes, des familles, des foyers monoparentaux ou des personnes victimes de violences sexistes et sexuelles, pourront mieux se loger grâce aux dispositifs prévus par la loi ELAN. Je ne monopolise pas davantage la parole et la donne aux rapporteures pour avis.

Mme Stéphanie Do, rapporteure pour avis. Monsieur le président, vous m’avez demandé à quoi correspondaient les 21 millions d’euros en faveur de la lutte contre l’habitat indigne – une priorité du quinquennat – : 17 millions seront dédiés à l’aide aux propriétaires modestes pour les travaux de réhabilitation et 4 millions permettront de financer les opérations de résorption de l’habitat insalubre dans certains territoires, notamment l’Île-de-France.

S’agissant du logement social, sur lequel M. Bazin a centré son intervention, l’audition des acteurs majeurs du secteur a fait ressortir que la production de nouveaux logements sociaux était en baisse, mais de 5 % seulement. S’agissant de la clause de réexamen, les données concernant les dispositifs récents ne seront connues qu’en 2019. Pour ce qui est de la péréquation entre bailleurs sociaux, un mécanisme de modulation de leur cotisation à la CGLLS a été mis en œuvre, ainsi que je l’ai expliqué en introduction.

La loi de finances pour 2018, Monsieur Benoit, a prévu une clause de réexamen du dispositif « Pinel » en 2019. Celui-ci ne concerne que les territoires tendus, qui ont besoin d’un choc de l’offre. Dans les territoires détendus, l’expérience a montré que les programmes n’avaient pas beaucoup d’acheteurs.

Monsieur Jumel, je me suis longuement attardée sur la réduction des APL dans mon propos liminaire ; un dispositif de compensation de la RLS pour les bailleurs sociaux a été mis en œuvre : il comporte notamment le gel du taux du livret A et des prêts de haut de bilan. Les acteurs que j’ai auditionnés n’ont pas manifesté d’inquiétude particulière quant à ces mesures.

M. Potier a évoqué l’hébergement d’urgence. Dans le cadre du plan « logement d’abord », 10 000 places en pension de famille, destinées à accueillir, sans limitation de durée, des personnes en forte exclusion sociale, seront créées sur la durée du quinquennat. Elles s’ajouteront aux 16 521 places existantes au 31 décembre 2017. Les pensions de famille, comme les dispositifs d’intermédiation locative, sont des solutions de logements adaptés permettant une insertion plus durable des publics accueillis. La qualité de l’accompagnement y est bien supérieure à celle des centres d’hébergement d’urgence. Leur financement relève du programme 177, relatif à l’hébergement et à l’insertion des personnes vulnérables. Le PLF pour 2019 prévoit une hausse des crédits consacrés aux pensions de famille de près de 4,4 % : ces 4,8 millions d’euros supplémentaires permettront la création de 2 300 places d’ici fin 2019 et la pérennisation en année pleine de celles créées en 2018. Les crédits contribuent à financer le fonctionnement de ces maisons et en rémunèrent les hôtes, à hauteur de 16 euros par jour et par place. La Fondation Abbé Pierre, que j’ai auditionnée, a estimé que cette hausse de 4,8 millions d’euros pour 2019 était a priori suffisante pour tenir les objectifs. Elle s’est toutefois inquiétée du fait que la rémunération, l’accompagnement social et les moyens de gestion n’ont pas évolué depuis douze ans.

Mme Annaïg Le Meur, rapporteure pour avis. Je commencerai par une évidence : dans les quartiers prioritaires, les difficultés s’accumulent. Le Gouvernement a décidé d’orienter les dispositifs et la plupart des moyens vers l’emploi.

Votre première question, Monsieur le président, a porté précisément sur les emplois francs. J’ai rappelé en introduction que 2 093 contrats avaient été signés, à 90 % par des entreprises, et pour 80 % d’entre eux à durée indéterminée – l’aide pour un CDI représente 5 000 euros par an pendant trois ans, contre 2 500 euros par an pendant deux ans pour un CDD.

Des adaptations s’avèrent nécessaires. En effet, les personnes qui ont travaillé au sein de l’entreprise dans les six mois précédents dans le cadre d’une mission d’intérim, d’un contrat de professionnalisation ou d’un contrat d’apprentissage ne peuvent pas bénéficier du dispositif, ce qui est dommageable.

Par ailleurs, il faut améliorer la communication pour que les agences Pôle emploi qui ne se trouvent pas dans les QPV, mais alentour, proposent également ce dispositif. Lors des auditions que j’ai menées, j’ai été interpellée par le fait que nombre de recrutements se faisaient par les réseaux sociaux et les réseaux informels, les entreprises étant réticentes à s’adresser à Pôle Emploi. J’ai sollicité l’institution pour qu’elle sorte de ses murs, interagisse avec ces réseaux et les chambres consulaires, notamment, qui créent des forums de l’emploi.

Je note que les territoires qui enregistrent les meilleurs résultats sont ceux où les élus locaux se sont le plus investis pour porter ce dispositif au sein même des quartiers. Je pense notamment à Angers et à Trélazé, dont le maire a pris le sujet à bras-le-corps. Il faut que nous nous battions ensemble, concrètement, pour ces dispositifs, car c’est bien par l’emploi que l’on peut répondre aux besoins du quotidien.

M. Sébastien Jumel. Allez-vous dresser la liste des mauvais élèves ?

Mme Annaïg Le Meur, rapporteure pour avis. Ce n’est pas mon style : il ne s’agit pas de dénoncer, mais de faire de la pédagogie par l’information.

Madame Hammerer, vous m’avez interpellée sur les centres socioculturels. Produire un rapport implique de faire des choix, et je n’ai pas abordé ce sujet. Je vous signale que, conformément à la feuille de route du 18 juillet 2018, 1 000 postes d’adultes-relais ont été créés grâce aux 20 millions d’euros de crédits supplémentaires consacrés à leur financement. Ces médiateurs pourront constituer le lien que vous appelez de vos vœux sur les plans culturel et social. L’année prochaine, et si vous le souhaitez, nous pourrons consacrer davantage d’attention à ce sujet.

En préparant mon rapport pour 2018, j’avais pris la mesure de la forte paupérisation des villes moyennes. J’ai proposé que les moyens de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), qui allaient être portés à 10 milliards d’euros, soient aussi consacrés aux cœurs de villes moyennes, qui ne battaient plus si fort. C’est aussi par-là que passe la cohésion territoriale. Les dispositifs qui ont fonctionné dans les zones urbaines peuvent être transposés dans les zones rurales, et inversement : les maisons de services au public, proposées initialement en zone rurale, ont été intégrées dans les QPV. Progressivement, la porosité se crée, on raisonne moins en silo. Compte tenu de la mobilité de nos concitoyens, il est désormais ridicule et dépassé d’opposer la ruralité aux territoires urbains.

M. Benoit m’a interrogée sur la sécurité, un argument que les entreprises qui souhaitaient s’intégrer dans les QPV ont mis en avant et qui m’a été renvoyé l’an dernier lorsque j’ai parlé d’entreprenariat, de la nécessité de créer au sein de ces quartiers des cellules pour les entreprises de l’artisanat. Une police de sécurité du quotidien sera déployée sur les territoires ; il faut peut-être aller au-delà et imaginer d’autres mesures.

Il est certain, Monsieur Jumel, qu’il faut avoir un toit, mais l’emploi est essentiel dans les QPV. J’avais parlé l’année dernière de la nécessité de développer plusieurs formes d’emploi, notamment l’entreprenariat, de mettre en place des cellules, et je persévère dans cette voie. Je suis d’accord avec vous sur le fait que ce sont des zones où les difficultés se cumulent. Il faudra s’emparer de chaque dispositif, pour le développer plus largement. C’est la raison pour laquelle j’ai demandé plus de moyens sur certains projets.

M. Mickaël Nogal, président. Nous passons à une nouvelle série de questions.

M. Richard Lioger. J’ai été interpellé, d’une certaine manière, sur la loi ELAN, et j’aurais beaucoup de chose à dire si le temps ne m’était pas compté. Je suis d’accord avec l’intervention de M. Benoit : l’opposition critique les réductions budgétaires mais ne propose pas de nouvelles économies.

Certes, les crédits ont diminué pour certains dispositifs, mais la loi ELAN prévoit la libération du foncier, la limitation des recours abusifs, et toutes sortes de mesures qui aideront la construction.

Les chiffres qui ont été mis en avant concernent le nombre de mises en chantier, lesquelles font suite à des permis de construire déposés début 2017. En aucun cas la politique du Gouvernement peut être corrélée à cette baisse. Celle-ci se produit effectivement, sans doute après des années de production importante de logements, et un certain attentisme des promoteurs dans la nouvelle situation politique de 2017.

M. Fabien Di Filippo. Avec cette mission budgétaire sur la cohésion des territoires en baisse de 1 milliard d’euros et des crédits spécifiques sur l’aménagement du territoire en baisse également, on s’interroge. Peut-on encore parler de cohésion des territoires quand on dédouble les classes uniquement dans les réseaux d’éducation prioritaire, au prix de fermetures de classes dans nos villages, quand la mise en place des emplois francs uniquement dans les QPV se fait au détriment des emplois aidés dans nos communes et dans nos associations, quand la lutte contre l’habitat indigne n’a aucune commune mesure avec la lutte contre les dents creuses dans les cœurs de nos villages et quand la hausse des taxes, chaque 1er janvier de chaque année du quinquennat, sur les prix indécents du gasoil se produit en parallèle de financements sur l’achat de vélos électriques ?

La fracture territoriale s’amplifie et vous ne comprenez pas la colère et le sentiment d’abandon des habitants d’une France périphérique, devenus majoritaires au fur et à mesure de la marginalisation de territoires supplémentaires, au profit d’une start-up nation parisienne, minoritaire mais dominante sous cette majorité technocratique.

Tous les beaux principes écologistes et urbanistiques que vous prônez ne valent rien si votre politique conduit à entasser de plus en plus de Français dans les grandes métropoles, en accélérant la désertification et en accentuant les difficultés sociales, si vous ne consacrez pas davantage de moyens au désenclavement de nos territoires, pour leur donner des chances équitables de se développer, si vous continuez de charger de taxes et de prélèvements les classes moyennes et les travailleurs de nos territoires. Vous les punissez de leur mode de vie rural ou périurbain, pourtant constitutif de notre identité ; nous le défendrons car il reste une force de notre pays.

Mme Sophie Beaudouin-Hubière. Un peu plus de propositions, un peu moins d’idéologie !

M. Mickaël Nogal, président. Après l’intervention de M. Delatte, je donnerai la parole aux rapporteures car il est nécessaire d’apporter une clarification au regard des mensonges qui ont été prononcés. Nous avons tous travaillé sur la loi ELAN, et je prends à témoin M. Bazin, porte-parole de son groupe sur ce texte. Je ne pense pas que ce qui a été dit par M. Di Filippo soit factuellement vrai. J’invite les personnes qui nous regardent à le vérifier en prenant connaissance du texte adopté définitivement par le Sénat le 16 octobre.

M. Rémi Delatte. La rénovation urbaine est un sujet majeur. On peut se féliciter de voir concrétisé l’engagement de doubler l’enveloppe consacrée au NPNRU, après un désengagement pendant plusieurs années de l’État en matière d’offre de logements, et ce, au détriment de la mixité sociale.

Faut-il rappeler que ces crédits reposent sur un financement partenarial, essentiellement assuré par les acteurs du logement social ? Or ceux-ci se voient fragilisés par des mesures récentes, comme la réduction de loyer de solidarité ou la restructuration prévue dans la loi ELAN. J’aimerais vous entendre, mesdames les rapporteures pour avis, sur les incertitudes alarmantes quant à la trésorerie de l’ANRU, qui pourrait être déficitaire entre 2023 et 2030, et à la capacité réelle des acteurs du logement social à répondre aux besoins financiers, eu égard aux tensions dans leurs propres trésoreries. Il ne vous a pas échappé que la Cour des comptes alerte régulièrement le Parlement sur la soutenabilité du financement de la rénovation urbaine.

Mme Stéphanie Do, rapporteure pour avis. Monsieur Di Filippo, vous avez parlé des dents creuses : je vous invite à consulter le texte définitif du projet de loi ELAN, qui prévoit un assouplissement des règles d’urbanisme pour stimuler la construction dans les années à venir. C’est un projet pour lequel députés et sénateurs ont travaillé main dans la main et qui a fait l’objet de nombreux consensus.

Mme Annaïg Le Meur, rapporteure pour avis. Les emplois francs sont en phase d’expérimentation. Il faudra évaluer le dispositif avant de le déployer sur l’ensemble du territoire. Je rappelle aussi à M. Di Filippo que le programme 147 cible spécifiquement la politique de la ville, dans des territoires où se concentrent les difficultés.

Monsieur Delatte, sur ce projet essentiel pour notre territoire que constitue le doublement du NPNRU, tout le monde s’est engagé : Action Logement y contribue pour 2 milliards d’euros, les bailleurs sociaux apportent également 2 milliards d’euros et la participation de l’État s’élève à 1 milliard d’euros. Il faut également compter avec les 700 millions d’euros de reliquat du plan précédent. Les crédits ne seront pas débloqués d’un coup, une montée en puissance est prévue entre 2022 et 2027.

M. Daniel Fasquelle. M. Di Filippo n’a pas proféré de mensonges : il a dit un certain nombre de vérités, à sa façon, peut-être un peu forte. Je ne pense pas que vous soyez autorisé, Monsieur le président, à répondre à un député qu’il a menti. Personne ne ment ici ; chacun dit ce qu’il a l’intention de dire, selon ce qu’il ressent sur le terrain. La parole est libre à l’Assemblée nationale !

Moi aussi, je ressens cette pénurie de logements et cette fracture territoriale. Je le dis avec mes mots, d’une autre façon sans doute. Il est vrai que nous recevons dans nos permanences un nombre croissant de personnes pour des demandes de logement. C’est un problème dont nous devons nous emparer collectivement.

Nous n’avons pas abordé la question de l’accès des personnes handicapées à un logement décent. Nous n’avons pas non plus évoqué les logements insalubres en milieu rural. Pour avoir piloté un schéma de cohérence territoriale (SCoT) dans ma circonscription, je dispose de statistiques qui révèlent un taux de logements insalubres beaucoup trop élevé. Certes, il faut porter l’effort dans les QPV, mais aussi dans la ruralité. C’est le message que je veux faire passer aujourd’hui.

Je ne comprends pas pourquoi les moyens déployés dans les zones de revitalisation rurale (ZRR) sont bien inférieurs à ceux accordés aux QPV. C’est vrai pour le dédoublement des classes : je connais des écoles de bourgs centres où les niveaux de pauvreté et d’illettrisme sont tout aussi élevés que dans certains QPV. Mais les moyens sont incomparables : on a même fermé des classes dans ma circonscription pour pouvoir en dédoubler d’autres dans le département du Pas-de-Calais. Cette situation existe, nous révolte et nous fait réagir, chacun avec nos mots. Ce que je vous demande, c’est de la prendre en considération et de ne pas la nier !

M. Mickaël Nogal, président. Monsieur Fasquelle, j’entends vos remarques. Mais si nous pouvons partager des désaccords, je ne pense pas qu’un ressenti puisse tenir lieu de vérité. Quand je parle de mensonges, c’est que je les oppose à des faits, vérifiables. Les opérations de revitalisation des territoires prévues par la loi ELAN, c’est factuel ; le budget de 5 milliards d’euros débloqué grâce au concours de l’État, d’Action Logement, de l’ANAH, de la CDC, c’est factuel. Tel était le sens de mon propos.

M. Thibault Bazin. Je veux revenir sur l’intervention de Richard Lioger. Les mises en chantier sont un indicateur des travaux en cours. Mais ce qu’il est intéressant de regarder, ce sont les réservations de logements, qui se traduiront en travaux demain ou après-demain. Ce que l’on observe, et de façon inégale sur le territoire, c’est que les conséquences en zone B2 et en zone C ne sont pas bonnes. Dans certaines régions, l’activité demeure correcte, dans d’autres, le recul est net.

N’ayant pas eu de réponse à mes questions, je les pose à nouveau. Comment prend-on en compte les bailleurs qui logent un nombre élevé de bénéficiaires de l’APL ? Certains vivent de plein fouet les conséquences des mesures que vous avez prises quand d’autres, à Paris, ont un taux d’allocataires des APL deux fois moindre.

Y aura-t-il une mise en cohérence des zonages ? Si l’on veut restaurer la République dans ces quartiers, il faut les faire bénéficier des autres politiques publiques, dans l’éducation, le logement. Le zonage positif pour le prêt à taux zéro (PTZ) pourrait y participer.

M. Éric Straumann. Ma remarque rejoint celle de mon collègue : ce sont des témoignages véridiques ; je ne crois pas que ce soit le rôle du président de faire la part du vrai et du faux.

En ce qui concerne la sortie de la zone B2 du dispositif « Pinel », il fallait déposer le permis avant le 31 décembre 2017. J’habite une ville moyenne, Colmar, qui est très attractive et où l’on constate qu’il n’y a plus d’offre de logement en ville. Admettons que le marché y soit un peu compliqué mais il n’y a plus aucun logement disponible non plus dans ma commune de Houssen, en proche périphérie. C’est une situation absolument absurde dans une ville au fort dynamisme économique. Plus au sud, Mulhouse est maintenue en zone B1 alors que la tension y est très faible et que l’on trouve très facilement à s’y loger. La majorité a décidé de ne pas faire d’ajustements locaux, ce qui conduit à créer une pénurie dans certaines villes.

M. Richard Lioger. Quelle est la politique générale suivie par la majorité et le Gouvernement actuels ? Nous avons décidé de passer de l’aide à la personne à l’aide à la pierre, comme nous l’avons répété plusieurs fois. La diminution des APL, correspondant à une baisse demandée des loyers, est compensée par une aide à la pierre, donnée notamment par Action logement et la CDC.

Le passage d’un modèle à l’autre peut entraîner un décalage, ce qui explique les difficultés de certains bailleurs sociaux, que l’on ne nie pas. Cependant, ces bailleurs sociaux pourront construire massivement sur la base des prêts de haut de bilan et des sommes que vont investir Action logement et la CDC dans le logement social. En même temps, on leur demande de se regrouper et d’être plus efficaces sur les territoires où ils sont quelquefois trop petits pour assumer un investissement important. C’est une politique globale que nous devons défendre de cette manière-là.

On peut regretter la diminution des APL mais c’est un passage, une transition. Il est dommage que nos collègues communistes ne soient plus là car j’aurais aimé leur parler du débat que j’ai eu sur France Inter avec Ian Brossat. Cet élu communiste de Paris était complètement d’accord avec ce modèle d’aide à la pierre qu’il trouve beaucoup plus cohérent.

Mme Stéphanie Do, rapporteure pour avis. Monsieur Fasquelle, vous êtes intervenu sur la rénovation de logements en milieu rural. Par le biais de son programme « habiter mieux », l’ANAH a rénové près de 50 000 logements en 2017, et ce nombre va passer à 75 000 en 2018. Pour tous les propriétaires modestes, cela représente un budget en forte hausse.

Monsieur Bazin, je vais me répéter car vous n’étiez pas là lorsque j’ai répondu à votre question sur la prise en compte des bailleurs qui ont le plus de locataires bénéficiaires d’APL. Cette particularité a été prise en compte grâce à la modulation de la cotisation à la CGLLS. Après ce lissage, tous les bailleurs sont affectés de la même façon, peu importe leur nombre de locataires bénéficiaires de l’APL. 353 bailleurs étaient bénéficiaires du dispositif et 93 d’entre eux ont même reçu une subvention de la CGLLS.

Mme Annaïg Le Meur, rapporteure pour avis. La cartographie des REP+ est totalement cohérente avec celle des QPV définie dans la loi de 2014. Les personnes que nous avons auditionnées se sont montrées plutôt satisfaites d’avoir une cartographie s’inscrivant dans une durée de cinq ans. Nous pourrons donc en rediscuter en 2020, à l’occasion de la révision de cette cartographie. Étant donné qu’elle est définie à partir de zones de paupérisation, nous pourrons peut-être en identifier en zone rurale. Les QPV ne sont pas synonymes de banlieues urbaines parisiennes, contrairement à ce que vous pouvez penser. Ce n’est peut‑être pas la réponse que vous vouliez mais c’est celle que je vous donne. Nous pourrons en rediscuter, il n’y a aucun souci.

M. Thibault Bazin. Il n’y a pas de ZEP ni de REP !

Mme Annaïg Le Meur, rapporteure pour avis. Nous pourrons peut-être revoir certains critères.

Monsieur Fasquelle, vous avez notamment évoqué l’accès au logement des personnes handicapées, un sujet qui ne peut que m’intéresser puisque je suis masseur-kinésithérapeute de formation. Ces derniers temps, la notion de logement évolutif a un peu animé les débats. En fait, nous avons annoncé le taux de 10 %, puis de 20 % de logements adaptés aux personnes à mobilité réduite, ce qui couvre largement la demande.

Nous avons aussi opté pour une autre mesure, pour laquelle j’avais beaucoup œuvré et dont les gens ne sont pas encore forcément au courant : l’ascenseur devient obligatoire dans les immeubles de trois étages, et non plus de quatre étages. Les personnes à mobilité réduite pourront ainsi avoir accès à plus d’immeubles. Les logements évolutifs sont parfaits parce qu’ils sont adaptés à la diversité des handicaps, encore faut-il y avoir accès. Selon moi, il était essentiel d’installer des ascenseurs dans des immeubles qui ne sont pas nécessairement des tours et qui peuvent être situés dans des zones reculées. Le décret concernant cette mesure paraîtra avant la fin de l’année.

Ce sont peut-être de petites évolutions mais il est intéressant de les souligner car, en la matière, les choses n’avaient pas bougé depuis 1980.

M. Mickaël Nogal, président. Nous en venons à l’examen des amendements. Je précise qu’un amendement portant article additionnel après l’article 74 a été déclaré irrecevable.

La commission examine lamendement II-CE19 de M. Serge Letchimy.

M. Dominique Potier. Cet amendement prévoit de porter de 25 millions d’euros à 100 millions d’euros les crédits de paiement alloués à l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU).

Mme Annaïg Le Meur, rapporteure pour avis. Comme vous l’indiquez dans votre exposé sommaire, nous avons, l’année dernière, inscrit dans la loi le doublement du budget du Nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) pour le porter de 5 à 10 milliards d’euros sur la période 2014-2031. Cette promesse de campagne a été tenue grâce à la signature de deux conventions, l’une avec Action Logement, l’autre avec le mouvement HLM, chacun de ces deux acteurs apportant 2 milliards d’euros. Pour la première fois depuis 2009, l’État contribuera également au financement du NPNRU, à hauteur de 1 milliard d’euros, soit 10 % du budget global, sur toute la durée du programme.

Toutefois, le NPNRU n’en est encore qu’à sa phase de démarrage. Seules onze conventions pluriannuelles de renouvellement urbain ont pour l’instant été signées, sur un total attendu de 235. En 2019, les décaissements de l’ANRU seront donc en majorité encore consacrés au paiement du premier programme de rénovation urbaine. D’après le budget prévisionnel fourni par l’ANRU, 428 millions d’euros seront consacrés au paiement du premier programme et seulement 203 millions le seront pour le nouveau programme. La participation de l’État inscrite dans le PLF 2019 correspond donc parfaitement à sa part du financement du NPNRU, à savoir 10 %. Elle est même légèrement supérieure puisqu’elle est de 25 millions d’euros sur un total 203 millions d’euros.

L’exécution financière du NPNRU et, par conséquent, les crédits de paiement de l’État qui y sont associés monteront ensuite progressivement en puissance, principalement entre 2022 et 2027.

Mon avis est défavorable.

La commission rejette lamendement.

Suivant lavis favorable des rapporteures, elle donne un avis favorable à ladoption des crédits de la mission « Cohésion des territoires ».

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 74.

 


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   LISTE DES PERSONNES AUDITIONNées

Pôle Emploi

M. Michaël Ohier, directeur général adjoint en charge du réseau

Mme Catherine Poux, directrice des services aux entreprises

Agence pour léducation par le sport

M. Jean-Philippe Acensi, président de l’association Bleu Blanc Zèbres, délégué général de l’Agence pour l’éducation par le sport

Mme Alice Dorandeu, chargée de mission auprès du président

M. Samir Guerza

Fédération française de cyclisme (FFC)

M. Ludovic Sylvestre, vice-président

Établissement public national daménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (EPARECA)

Mme Valérie Lasek, directrice générale

M. Jorris Auffret, directeur administratif et financier

France Urbaine

M. Emmanuel Heyraud, directeur cohésion sociale de France urbaine

Mme Chloé Mathieu, responsable des relations avec le Parlement

Association des maires Villes & Banlieue de France

M. Marc Goua, maire de Trélazé

Association « Sport dans la ville »

M. Quentin Moreno, directeur général adjoint

Commissariat général à légalité des territoires (CGET)

M. Sébastien Jallet, commissaire général délégué, directeur de la ville et de la cohésion urbaine

Mme Gabrielle de Nadaillac, cheffe du pôle programmation et exécution des crédits de la politique de la ville

Mme Anne Beauchesne, cheffe du pôle pilotage, contrats de ville et coordination

Fédération nationale des centres de santé (FNCS)

Dr Hélène Colombani, présidente

Dr Carine Martini-Pemezec, membre du bureau

Délégation générale à lemploi et à la formation professionnelle (DGEPF)

M. Yann Debos, adjoint à la sous-directrice en charge des parcours d’accès à l’emploi

M. Nicolas Thierse, chef de mission affaires financières

Caisse des dépôts et consignations

M. Laurent Depommier-Cotton, directeur de la transition numérique

M. Yves Aguiton, directeur du département de l’appui à la performance

M. Adil Taoufik, chargé de relations institutionnelles