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N° 1305

______

 

ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 octobre 2018.

 

 

AVIS

 

 

PRÉSENTÉ

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LE PROJET DE LOI de finances pour 2019,

 

 

TOME III

 

 

TRAVAIL ET EMPLOI

FINANCEMENT NATIONAL DU DÉVELOPPEMENT ET DE LA MODERNISATION DE LAPPRENTISSAGE

 

 

 

PAR M. Stéphane VIRY,

 

Député.

——

 

 

 

Voir les numéros :

Assemblée nationale :  1255, 1302 (annexe n° 43).

 

 

 


—  1 

SOMMAIRE

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Pages

Avant-propos

Première partie : le budget 2019 marqué par une importante diminution des crédits de la mission travail et emploi

I. Le programme 102 : les crédits en faveur de laccès et du retour à lemploi

A. Des crédits en diminution pour le service public de lemploi et le régime dindemnisation du chômage

B. Les Contrats aidés et linsertion par lactivité économique (IAE) : une enveloppe budgétaire désormais fongible, mais une volumétrie en-deçÀ des besoins

1. Une volumétrie en baisse pour les contrats aidés, pour la deuxième année consécutive

2. Une relative embellie pour le secteur de linsertion par lactivité économique

C. Les Crédits consacrés à linsertion professionnelle des jeunes

D. Les autres mesures financées par le programme 102

II. Le programme 103 relatif à laccompagnement des mutations économiques et au développement de lemploi

1. Les dispositifs en faveur de lemploi dans les TPE-PME marqués par lextinction de laide à lembauche PME et la lente montée en charge des emplois francs

2. Les conséquences de la loi relative à la liberté de choisir son avenir professionnel et de la LFSS pour 2018 sur les crédits consacrés à la formation et à lalternance

3. Les actions en faveur du développement de lemploi

III. Des crédits stables pour les programmes 111 et 155 et en légÈre hausse pour le compte daffectation spéciale relatif À lapprentissage

A. Le programme 111 : Amélioration de la qualité de lemploi et des relations du travail

B. Le programme 155 : Conception, gestion et évaluation des politiques de lemploi et du travail

C. Les crédits du compte daffectation spéciale relatif à lapprentissage en légère hausse, avant sa disparition en 2020

Deuxième partie : Bilan de la mise en œuvre des parcours emploi compétences

I. Des contrats aidés aux « parcours emploi compétences » : À la recherche dune meilleure efficacité des politiques dinclusion dans lemploi

A. Les contrats aidés : un dispositif ancien et protéiforme, dont lefficacité est soumise à conditions

1. Les contrats aidés, un outil privilégié à destination des personnes les plus éloignées de lemploi

2. Un bilan en demi-teinte des contrats aidés en termes de retour durable vers lemploi

a. Des effets mitigés sur linsertion dans lemploi mais des bénéfices indéniables en termes dutilité sociale, notamment dans le secteur non marchand

b. Lobjectif dinclusion dans lemploi parfois relégué au profit deffets daubaine, notamment dans le secteur marchand

B. La création des « parcours emplois compétences » consacre le recentrage de la politique de contrats aidés autour du triptyque « emploi – formation – accompagnement »

1. Les « parcours emploi compétences » (PEC) privilégient une logique de parcours individuel, directement orientée vers linsertion dans lemploi

a. Un recentrage du dispositif sur le secteur non marchand et sur lobjectif unique dinsertion professionnelle des personnes les plus éloignées de lemploi

b. Des exigences renforcées en matière de formation et daccompagnement pour les employeurs

2. La création du fonds dinclusion dans lemploi parachève le rapprochement des contrats aidés avec le secteur de linsertion par lactivité économique

a. Une nouvelle approche territorialisée des politiques dinclusion

b. Une fongibilité asymétrique qui peut sopérer au détriment des parcours emploi compétences

II. Un bilan mitigé pour la première année de mise en œuvre  des parcours emploi compétences, qui invite à ajuster le dispositif

A. La sous-consommation de parcours emploi compétences en 2018 traduit la montée en exigences du dispositif mais également une inquiétude réelle de la part des employeurs

1. La très lente montée en charge des parcours emploi compétences, signe dun ciblage plus efficace du dispositif ?

a. Une sous-consommation des PEC depuis le début de lannée 2018

b. Un ciblage efficace, mais sans évolution significative par rapport aux CUI-CAE

2. De fortes inquiétudes à légard des parcours emploi compétences, notamment au sein des collectivités et du secteur associatif

a. Plus dexigences, moins daide financière : léquation complexe des parcours emplois compétences

b. Les employeurs du secteur associatif et les petites collectivités territoriales : les laissés-pour-compte de la nouvelle formule des contrats aidés

B. Personnaliser les parcours emploi compétences en fonction des profils des demandeurs demploi et Restaurer un climat de confiance : les propositions du rapporteur pour avis

1. Agir sur les différents curseurs des parcours emploi compétences pour élargir les publics des bénéficiaires potentiels

a. Assouplir le critère de la durée

b. Relever le taux minimal de prise en charge

2. Renforcer la gestion territorialisée des politiques dinclusion dans lemploi et restaurer un climat de confiance parmi les employeurs

a. Pour éviter les politiques de « stop and go », privilégier une gestion pluriannuelle des contrats aidés et promouvoir la création dinstances de concertation au niveau des territoires

b. Proposer des alternatives pour lemploi dans le secteur associatif et les collectivités territoriales habituées à recourir aux contrats aidés

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. Audition de la ministre

II. Examen des crédits

ANNEXES

annexe N° 1 : Liste des personnes auditionnées par le rapporteur

Annexe n° 2 : LISTE DES personnes rencontrées lors des déplacements du rapporteur


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   Avant-propos

« Soutenir le travail, investir pour lavenir » ([1]) : ce leitmotiv repris par le Gouvernement lors de la présentation du projet de loi de finances pour 2019 est pour le moins paradoxal, alors que les crédits de la mission « Travail et emploi » connaissent une forte diminution depuis le début de cette législature. Il existe en effet une certaine incohérence à déclarer soutenir le travail, alors que les crédits qui y sont directement consacrés sont en diminution à tous les niveaux, et que les difficultés d’accès à la formation et à l’emploi de nos concitoyens, en particulier des plus fragiles d’entre eux, sont plus que jamais d’actualité.

Le projet de budget pour 2019 se caractérise ainsi, pour la deuxième année consécutive, par une forte diminution des crédits de la mission « Travail et emploi » ( 3 milliards deuros en crédits de paiement), pour atteindre 12,4 milliards deuros, contre 15,4 milliards deuros ouverts par la loi de finances initiale (LFI) pour 2018. La restriction est plus contenue en termes dautorisations dengagement, puisque celles-ci se maintiennent à un niveau presque équivalent à celui de la LFI 2018 (13,4 milliards deuros contre 13,9 milliards deuros en 2018).

Hors effets de périmètre, liés principalement à la réforme du régime d’exonérations sociales dans le secteur de l’insertion par l’activité économique (IAE) et de la formation professionnelle, l’importante contraction des crédits de paiement de la mission est l’une des conséquences les plus visibles du coup de frein brutal porté à la politique des contrats aidés à l’automne 2017.

C’est par égard pour les femmes et les hommes qui ont recours depuis des années à ces contrats pour remettre un pied dans le monde du travail, pour reprendre confiance en eux, acquérir de nouvelles compétences et se réinsérer durablement dans l’emploi ; par égard, aussi, pour leurs employeurs : bénévoles du secteur associatif, maires engagés des petites communes rurales de notre pays, les responsables de structures du secteur sanitaire et social, qui s’engagent chaque jour pour rendre service à la population et accompagner les personnes exclues du monde du travail vers l’emploi, que le rapporteur a choisi de porter son regard sur les contrats aidés, devenus en 2018 « parcours emploi compétences ».

Le bilan dressé est à demi-teinte, car si le triptyque « emploi – formation – accompagnement » autour duquel s’articulent ces parcours peut s’avérer gagnant en termes d’insertion durable dans l’emploi de leurs bénéficiaires, cette nouvelle formule de contrats aidés, à la volumétrie très modeste, laisse de côté des catégories entières d’employeurs potentiels insatisfaits non outillés pour répondre au renforcement des exigences qualitatives ce qui risque, par répercussion, de renforcer l’exclusion des personnes déjà éloignées de l’emploi.

 

En application de l’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, les réponses au questionnaire budgétaire devaient parvenir au rapporteur pour avis au plus tard le 10 octobre 2018.

À cette date, 107 réponses aux 133 questions posées étaient parvenues au rapporteur pour avis, soit un taux de réponse de 80,4 % (contre 67,2 % l’année précédente). Entre cette date et l’achèvement de la rédaction du présent rapport, 11 réponses supplémentaires ont été reçues, portant ce taux à 88,7 %.

Le rapporteur pour avis remercie les services du ministère du travail, du ministère des solidarités et de la santé, du ministère de l’économie et des finances et du ministère de l’action et des comptes publics de leur coopération.

 

 


—  1 

   Première partie : le budget 2019 marqué par une importante diminution des crédits de la mission travail et emploi

Les crédits de la mission Travail et emploi connaissent une forte diminution dans le projet de loi de finances pour 2019, de l’ordre de  19,2 % en crédits de paiement par rapport à 2018 : les plafonds de crédits de paiement demandés pour 2019 s’élèvent ainsi à 12,4 milliards d’euros, contre 15,4 milliards d’euros prévus par la loi de finances initiale (LFI) pour 2018.

Récapitulation des crédits par programme

(en millions d’euros)

 

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

LFI 2018

PLF 2019

LFI 2018

PLF 2019

102 – Accès et retour à lemploi

7 154,12

6 286,16

7 833,33

6 449,79

103 – Accompagnement des mutations économiques et développement de lemploi

5 876,32

6 341,33

6 758, 37

5 188,76

111 – Amélioration de la qualité de lemploi et des relations du travail

154, 93

57,06

86,52

88,07

155 – Conception, gestion et évaluation des politiques de lemploi et du travail

686,65

690,89

683,33

689,29

Total

13 872,02

13 375,43

15 361, 56

12 415,91

Source : Projet annuel de performances – Annexe au projet de loi de finances.

La diminution des crédits est particulièrement marquée s’agissant du programme 102 : Accès et retour à lemploi ( 17,7 % en crédits de paiement), en raison d’importantes mesures de périmètre mais également d’une diminution importante du volume des contrats aidés financés pour 2019.

L’évolution des crédits du programme 103 : Accompagnement des mutations économiques et développement de lemploi est plus contrastée puisque les autorisations d’engagement sont en progression de 7,9 %, alors que le montant des crédits de paiement connaît une forte diminution, de 23,2 % entre 2018 et 2019.

Les crédits des programmes 111 : Amélioration de la qualité de lemploi et des relations du travail et 155 : Conception, gestion et évaluation des politiques de lemploi et du travail sont globalement stables en 2019. Quant aux crédits du compte daffectation spéciale (CAS) relatif au financement national du développement et de la modernisation de lapprentissage, ils sont en légère progression.

Les dépenses fiscales rattachées à la mission Travail et emploi représentent en 2019 un total prévisionnel de 8,43 milliards d’euros, sans évolution par rapport à l’exercice précédent.

On notera enfin la montée en puissance du plan d’investissement dans les compétences (PIC), qui a vocation, d’après le Gouvernement, à former et accompagner deux millions de jeunes et demandeurs d’emploi peu qualifiés sur la période 2018-2022, tout en accélérant la transformation du système de formation professionnelle continue. Le montant total des crédits destinés au plan s’élève à 1 447 millions d’euros en autorisations d’engagement et 979 millions d’euros en crédits de paiement, auxquels s’ajoute un fonds de concours de 1,5 milliard d’euros en provenance de France compétences. Ces crédits ont principalement vocation à financer le dispositif de la Garantie jeunes et l’allocation versée dans le cadre du parcours d’accompagnement contractualisé vers l’emploi et l’autonomie (PACEA) (programme 102), ainsi que le financement des parcours de formation et le développement de mesures de ciblage et d’accompagnement des demandeurs d’emploi (programme 103).

I.   Le programme 102 : les crédits en faveur de l’accès et du retour à l’emploi

Le projet de loi de finances 2019 présente une diminution des crédits du programme 102, à périmètre constant, de 12 % en autorisations d’engagement et de 18 % en crédits de paiement. Cette réduction significative s’explique en partie par des mesures de périmètre liées, d’une part, à la suppression des exonérations spécifiques de cotisations sociales dans le secteur de l’insertion par l’activité économique (IAE) et, d’autre part, au transfert au ministère de l’éducation nationale du contingent de contrats aidés dédiés à l’accompagnement des élèves en situation de handicap.

Hors effets de périmètre, l’évolution à la baisse des crédits du programme 102 reflète principalement la forte diminution du nombre de contrats aidés en 2019, ainsi qu’une diminution tendancielle des dépenses d’allocations de solidarité et les efforts d’économies demandées à Pôle emploi.

A.   Des crédits en diminution pour le service public de l’emploi et le régime d’indemnisation du chômage

L’action n° 1 : Amélioration de lefficacité du service public de lemploi, représente 3 597,4 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) et en crédits de paiement (CP), en diminution de 11,5 % par rapport à la LFI pour 2018.

Cette action, qui vise à mobiliser les moyens d’action de Pôle emploi en faveur des demandeurs d’emploi, couvre principalement :

 la subvention pour charges de service public à Pôle emploi, qui s’élève à 1 372,7 millions d’euros en AE et CP pour 2019, contre 1 457,4 millions d’euros en 2018 : une diminution principalement liée aux efforts de productivité engagés par Pôle emploi ;

 la participation de l’État au financement du régime de solidarité d’indemnisation du chômage, pour un montant de 2 060,9 millions d’euros en AE et CP pour 2019 contre 2 462,4 millions d’euros en 2018 ( 16,3 %). Cette participation est réalisée au moyen de cinq allocations dites de solidarité, versées aux demandeurs d’emploi qui ne peuvent bénéficier du régime d’assurance chômage. L’allocation de solidarité spécifique (ASS) représente l’essentiel des dépenses : 1 993,9 millions d’euros contre 2 372 millions d’euros en 2018. La diminution du coût de cette allocation s’explique principalement par celle envisagée du nombre d’allocataires en 2019, liée à l’amélioration de la conjoncture économique.

 le financement, par une subvention de lÉtat versée à Pôle emploi, de plusieurs allocations, notamment lallocation équivalent retraite (AER) prime transitoire de solidarité (PTS), pour un montant total de 4,1 millions deuros en 2019, et la rémunération de fin de formation (R2F), qui représente un montant de 201,2 millions deuros en 2019, contre 132,4 millions deuros en 2018. Cette augmentation de 52 % est liée à la suppression du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) par la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel ([2]), qui assurait jusque-là conjointement avec lÉtat le cofinancement de cette allocation.

B.   Les Contrats aidés et l’insertion par l’activité économique (IAE) : une enveloppe budgétaire désormais fongible, mais une volumétrie en-deçÀ des besoins

L’action n° 2 : Amélioration des dispositifs en faveur de lemploi des personnes représente un montant de 2 102,5 millions d’euros en autorisations d’engagement ( 18,3 % par rapport à 2018) et 2 273 millions d’euros en crédits de paiement, soit une diminution de 30,36 % par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2018.

Cette action regroupe les actions d’accompagnement personnalisé et de mise à l’emploi et en situation professionnelle à destination des personnes les plus éloignées de l’emploi. À ce titre, elle assure notamment le financement des emplois aidés et des structures et dispositifs relevant du secteur de l’insertion par l’activité économique (IAE). En application des préconisations du rapport de M. Jean-Marc Borello : « Donnons-nous les moyens de linclusion » ([3]), l’organisation du financement de ces deux secteurs a fait l’objet d’une importante transformation au début de l’année 2018 :

 d’une part, les « parcours emploi compétences » (PEC) se sont substitués aux contrats aidés du secteur non marchand (contrats uniques d’insertion – contrats d’accompagnement dans l’emploi [CUI-CAE]) ([4]) ;

 d’autre part, les crédits consacrés aux PEC et à l’IAE sont désormais regroupés au sein d’un « fonds d’inclusion dans l’emploi » et partiellement fongibles, offrant ainsi à chaque préfet de région les marges de manœuvre pour dépasser les cloisonnements et favoriser une articulation plus fine de ces dispositifs en fonction des besoins du terrain.

1.   Une volumétrie en baisse pour les contrats aidés, pour la deuxième année consécutive

Le recentrage des contrats aidés vers le secteur non marchand et la transformation de ces contrats en « parcours emploi compétences » (PEC) n’ont pas fondamentalement remis en cause l’évolution tendancielle à la baisse du nombre de contrats aidés, déjà constatée à l’automne 2017 : l’enveloppe repose en effet sur une projection de 100 000 entrées en PEC, contre 200 000 entrées en CUI-CAE prévues par la LFI pour 2018.

Parmi les 200 000 contrats prévus en 2018, 30 500 devaient permettre le financement des contrats dédiés à l’accompagnement des élèves en situation de handicap. Ces contrats sont transférés, pour l’année 2019, au programme 230 « Vie de lélève », qui relève du Ministère de l’éducation nationale, ce qui constitue une mesure de périmètre sortant d’un montant de 124,3 millions d’euros.

Les crédits prévus pour le financement des entrées en PEC en 2019 s’élèvent ainsi à 380,9 millions d’euros en AE et 189,6 millions d’euros en CP, contre respectivement 764,7 millions d’euros et 401,2 millions d’euros en 2018 ([5]). Ce montant est fondé sur une hypothèse de taux de prise en charge de 50 % du SMIC brut, une durée moyenne de 10,2 mois, une durée hebdomadaire de 21,5 heures et un cofinancement par les conseils départementaux de 15 000 contrats en faveur des bénéficiaires du RSA.

Les autres formes de contrats aidés – contrats d’avenir, contrats initiative emploi (CUI-CIE) et contrats d’accompagnement dans l’emploi (CUI-CAE) étant en voie d’extinction, seul le stock reste financé en 2019, pour un montant total de 48,83 millions d’euros en AE et de 410,69 millions d’euros en CP.

2.   Une relative embellie pour le secteur de l’insertion par l’activité économique

L’insertion par l’activité économique (IAE) permet le retour vers l’emploi de personnes rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières, qui les éloignent souvent durablement de l’emploi. Elle offre un accompagnement renforcé et global intégrant une logique d’insertion professionnelle forte, par une mise en situation de travail ainsi qu’une forte dimension sociale visant à lever les freins périphériques à l’emploi des personnes embauchées. La subvention de l’État aux structures de l’IAE associations intermédiaires (AI), ateliers et chantiers d’insertion (ACI), entreprises d’insertion (EI) et de travail temporaire d’insertion (ETTI) vise à compenser le différentiel de productivité des salariés de l’IAE par rapport à des structures classiques du secteur marchand et à prendre en charge une partie du coût de l’accompagnement renforcé dont ils bénéficient.

Évolution du Financement des Mesures en faveur de l’Insertion par l’activitÉ économique entre 2018 et 2019

 (en millions d’euros)

 

LFI 2018

(en AE et CP)

PLF 2019

(en AE et CP)

Progression

(en %)

Associations intermédiaires (AI)

28,6

30

+ 5 %

Ateliers et chantiers dinsertion (ACI)

612,4

639,2

+ 4,3 %

Entreprises intermédiaires (EI) et entreprises de travail temporaire dinsertion (ETTI)

180,6

203,7

+ 12,8 %

Fonds départemental dinsertion

18,7

16,9

 9,6 %

Sous-total

840,3

889,8

+ 5,8

Exonérations de cotisations sociales en faveur des AI

82,4

19 *

 91 %

Exonérations de cotisations sociales en faveur des ACI

124,6

TOTAL

1 047,3

908,8

 13,2 %

(*) Les exonérations de cotisations sociales spécifiques en faveur de l’IAE sont remplacées, en 2019, par un allègement général de cotisations sociales pour l’ensemble des employeurs privés. Seul le montant correspondant aux entreprises publiques est maintenu (cf. supra).

Source : Projets annuels de performance 2018 et 2019 – Annexes au projet de loi de finances.

● Les crédits consacrés à l’IAE connaissent une légère évolution de 5,8 % entre la loi de finances initiale pour 2018 et le projet de loi de finances pour 2019, de 840,2 millions d’euros à 889,8 millions d’euros, ce qui correspond à une progression de 5 000 équivalents temps plein (ETP), pour un total de 76 000 ETP (contre 70 985 ETP prévus en 2018). S’il se félicite de l’augmentation des postes ouverts dans le secteur de l’IAE, le rapporteur regrette que cette augmentation soit encore bien loin de l’objectif préconisé par le rapport de M. Borello, recommandant une augmentation du nombre de places de 20 % par an dans les structures de l’IAE.

Le projet de loi de finances pour 2019 prévoit en outre d’ « augmenter très significativement la formation des salariés en IAE », car seul un tiers d’entre eux bénéficie à ce jour d’au moins une action de formation au cours de leur parcours. Cette volonté affichée risque cependant de ne rester qu’un vœu pieu : bien que 60 millions d’euros d’autorisations d’engagement soient effectivement consacrés à cette fin par le Plan d’investissement des compétences (PIC), aucun crédit de paiement n’y est associé pour l’année 2019.

● Le projet de budget 2019 consacré aux mesures en faveur de l’IAE est par ailleurs affecté par une importante mesure de périmètre sortant, à hauteur de 188 millions d’euros.

En effet, l’entrée en vigueur en 2019 de l’accroissement des allègements généraux de cotisations sociales porté par la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2018 a conduit à la suppression des exonérations spécifiques dont bénéficiait le secteur de l’IAE par le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS pour 2019), au profit de l’allègement général renforcé de cotisations patronales. De fait, au niveau du SMIC, cet allègement général renforcé (32,6 %) est nettement plus avantageux que l’exonération spécifique dont bénéficiaient jusqu’en 2018 les associations intermédiaires (21,4 %) et les ateliers et chantiers d’insertion (20,9 %). L’allègement général reste plus favorable que l’exonération spécifique jusqu’à 1,1 SMIC. Compte tenu de la forte concentration de la masse salariale à ces niveaux de rémunération, la suppression de l’exonération spécifique au profit de l’allègement général bénéficiera à environ 90 % des personnes employées par des AI et à la quasi-totalité de ceux employés par les ACI.

Les pertes de recettes attachées à cette exonération spécifique seront désormais compensées à la sécurité sociale par la voie fiscale, et non plus par la voie budgétaire qui présidait pour les exonérations spécifiques. Cependant, les structures publiques ne sont pas concernées par la suppression des exonérations de cotisations spécifiques : une enveloppe de 19 millions d’euros en AE et CP est donc prévue au sein du PLF pour 2019.

C.   Les Crédits consacrés à l’insertion professionnelle des jeunes

Les mesures en faveur des jeunes sont éclatées entre deux actions distinctes du programme 102 :

 l’action n° 2 pour les crédits relatifs à l’accompagnement par les missions locales (197,88 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement) et aux écoles de la deuxième chance (E2C) ;

 l’action n° 3, consacrée au Plan d’investissement des compétences (PIC), pour les crédits dévolus à l’accompagnement et au financement du coût de la Garantie jeunes ainsi qu’à l’allocation PACEA (parcours d’accompagnement contractualisé vers l’emploi et l’autonomie).

Mesures en faveur de l’insertion des jeunes

(en millions d’euros)

 

LFI 2018

PLF 2019

 

 

AE

CP

AE

CP

Action n° 2 (Amélioration des dispositifs en faveur de lemploi des personnes les plus éloignées du marché du travail)

Accompagnement par les missions locales au titre des conventions pluriannuelles d’objectifs (CPO) conclues avec l’État

206,13

197,88

Allocation PACEA (*)

10

Action n° 3

(Plan dinvestissement des compétences)

Garantie jeunes

Accompagnement

160

148,68

160

153,08

Allocation

354,6

390,66

Total des dépenses

514,6

503,28

550,66

543,74

Dont co-financement communautaire (**)

35,96

54,05

Dont financement PIC

478,64

467,32

496,61

489,69

Allocation PACEA

48

(*) Cette allocation peut être versée aux jeunes qui s’engagent dans un parcours d’accompagnement contractualisé vers l’emploi et l’autonomie (PACEA). Créé par la loi n° 2016-1088, ce parcours constitue le nouveau cadre contractuel de l’accompagnement des jeunes par les missions locales. La Garantie jeunes constitue une modalité spécifique, la plus intensive, de ce parcours d’accompagnement.

(**) Ce co-financement communautaire entre dans le cadre de l’Initiative pour l’emploi des jeunes (IEF) et concerne les régions éligibles à l’IEJ, c’est-à-dire les régions dont le taux de chômage des jeunes était supérieur à 25 % au 31 décembre 2016.

Source : Projets annuels de performance pour 2018 et 2019 – Annexes au projet de loi de finances.

Globalement, les crédits consacrés à la Garantie jeunes, dispositif phare du « Parcours d’accompagnement contractualisé vers l’emploi et l’autonomie » (PACEA) sont stables (pour le volet accompagnement) ou en légère progression (pour le volet allocation). L’objectif d’atteindre le seuil de 100 000 nouveaux jeunes accompagnés dans le cadre de la Garantie jeunes est en effet reconduit au même niveau que celui prévu par le PLF 2018, bien que seuls 94 000 jeunes aient été effectivement accompagnés en 2018.

Le rapporteur regrette toutefois une diminution de 4 % des crédits d’accompagnement des jeunes par les missions locales au titre des conventions pluriannuelles d’objectifs (CPO), alors que les missions locales sont pourtant les acteurs clés de l’accompagnement des jeunes sur le terrain. La fusion annoncée, pour l’année prochaine, de l’enveloppe allouée à l’accompagnement des jeunes par les missions locales accompagnement dans le cadre de la Garantie jeunes et accompagnement au titre des conventions pluriannuelles d’objectifs devrait néanmoins offrir davantage de souplesse de gestion aux missions locales, tout en améliorant la lisibilité des crédits à destination de l’insertion des jeunes, aujourd’hui particulièrement complexe (cf. tableau ci-dessus).

S’agissant des missions locales, le rapporteur s’inquiète en outre du projet d’expérimentation, confirmé par Mme la ministre du travail lors de son audition par la commission des affaires sociales, visant à fusionner les structures volontaires de missions locales au sein de Pôle emploi.

Des craintes se sont en effet d’ores et déjà fait entendre sur le terrain face à ces projets de fusion, car les missions locales, présidées statutairement par les élus locaux, disposent à ce jour d’une grande autonomie pour élaborer et piloter les projets territoriaux d’insertion des jeunes, au plus près des besoins de leurs bassins d’emploi. Elles jouent par ailleurs un rôle pivot pour fédérer, au sein de leurs instances associatives, l’ensemble des acteurs de l’emploi au niveau local : collectivités territoriales, services de l’État, Pôle emploi, partenaires économiques et sociaux et secteur associatif.

S’il peut y avoir un intérêt, pour certaines missions locales, à coopérer plus étroitement avec le service public de l’emploi, cette coopération ne saurait en aucun cas constituer une tutelle remettant en cause l’autonomie d’organisation des missions locales, qui permet l’adaptation territoriale et décentralisée des politiques en faveur de l’insertion des jeunes.

Le rapporteur sera donc particulièrement vigilant à ce que les éventuelles fusions qui auront lieu dans le cadre expérimental annoncé ne remettent nullement en cause l’ancrage territorial des missions locales et leur approche globale et décentralisée des outils d’insertion des jeunes, qui font aujourd’hui leur force.

D.   Les autres mesures financées par le programme 102

● Le projet de loi de finances pour 2019 met en application les transformations de la politique d’emploi des travailleurs handicapés prévues par la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel  simplification de l’obligation d’emploi, refondation de la politique d’offre de service aux travailleurs handicapés et aux entreprises, etc. et en particulier la réforme du financement des entreprises adaptées (EA), qui entrera en vigueur le 1er janvier 2019.

Dans un souci de simplification, les différents types d’aides au poste (aide au poste finançant l’embauche en contrat à durée indéterminée de salariés dans les EA, aide au poste finançant l’accompagnement par les EA des travailleurs mis à disposition des entreprises du milieu ordinaire, etc.) sont désormais regroupés au sein d’une seule ligne budgétaire sur le programme 102 : 395,43 millions d’euros en AE et CP sont prévus à ce titre pour l’année 2019, contre 371,81 millions d’euros en 2018.

● Les crédits destinés au réseau des écoles de la deuxième chance (E2C), qui ont accueilli en 2017 près de 15 000 jeunes au sein de 59 écoles sont stables, à 24 millions d’euros.

De même, la contribution du ministère du travail au financement des frais de fonctionnement de l’Établissement public d’insertion de la défense (EPIDe) s’élève à 54,44 millions d’euros en 2019 contre 54,86 millions d’euros en 2018.

Les crédits consacrés à l’expérimentation territoriale visant à résorber le chômage de longue durée, mise en œuvre en 2017 pour une durée de cinq ans, progressent de 22,77 %, de 18,22 millions d’euros en 2018 à 22,37 millions d’euros en 2019. Cette expérimentation vise à favoriser la création d’emplois sous forme de contrats à durée indéterminée en faveur des chômeurs de longue durée, dans des entreprises à but d’emploi de l’économie sociale et solidaire. L’augmentation des crédits devrait permettre de doubler le nombre de personnes accompagnées, soit 1 170 salariés contre 565 à l’été 2018.

● Notons enfin que les maisons de l’emploi ne percevront plus aucun financement de la part de l’État à compter de 2019, alors que la loi de finances initiale pour 2018 leur consacrait une enveloppe de 10,5 millions d’euros (contre 21 millions d’euros en 2016 et 2017).

Mises en place à l’initiative d’élus locaux et organisées par la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale, les maisons de l’emploi (MDE) avaient pour ambition de fédérer l’action locale en faveur de l’emploi, de la formation, de l’insertion et du développement économique, et de contribuer à mieux ancrer le service public de l’emploi dans les territoires.

Au titre de leur rôle de coordonnateur des différents acteurs de l’emploi au niveau territorial, leur financement était assuré notamment, jusqu’en 2018, par une enveloppe de l’État et par les collectivités territoriales. L’absence de crédits au sein du PLF pour 2019 ne fait que confirmer le désengagement de l’État observé depuis plusieurs années auprès des maisons de l’emploi. Le rapporteur regrette cependant que l’arrêt du financement par l’État n’ait pas fait l’objet d’une concertation approfondie avec les collectivités territoriales, ni d’une réflexion sur l’avenir de ces structures.

Le financement des maisons de l’emploi par les seules collectivités territoriales ou par le biais d’appels à projets risque donc, à brève échéance, d’entraîner la déshérence des 114 structures comptabilisées au 1er janvier 2018, qui étaient encore souvent un acteur incontournable des politiques locales de l’emploi.

II.   Le programme 103 relatif à l’accompagnement des mutations économiques et au développement de l’emploi

Le programme 103 vise à mieux anticiper les conséquences des mutations économiques sur lemploi, grâce à une montée en compétence des actifs – par le développement de lalternance notamment  et à laccompagnement des entreprises.

Hors effet de périmètre, le programme 103 présente une hausse des autorisations d’engagement de 7 % et une baisse des crédits de paiement de 16 %, qui s’explique principalement par la fin des mesures du plan d’urgence pour l’emploi : extinction de l’aide en faveur de l’embauche dans les petites et moyennes entreprises (PME) et fin des plans de formation du plan d’urgence.

1.   Les dispositifs en faveur de l’emploi dans les TPE-PME marqués par l’extinction de l’aide à l’embauche PME et la lente montée en charge des emplois francs

Les crédits de l’action n° 1 : Anticipation et accompagnement des conséquences des mutations économiques connaissent une importante progression en autorisations d’engagement (459,7 millions d’euros dans le PLF 2019 contre 269,8 millions d’euros en 2018) mais une très importante diminution des crédits de paiement (418,8 millions d’euros en 2019 contre 1 450 millions d’euros en 2018).

La très forte diminution des crédits de paiement est une conséquence directe de la fin du dispositif d’aide à l’embauche dans les petites et moyennes entreprises (PME), créé par le décret du 25 janvier 2016 et qui a pris fin, en flux, au 1er juillet 2017. Cette aide était versée à l’entreprise pour toute embauche en contrat à durée indéterminée (CDI) ou en contrat à durée déterminée (CDD) d’au moins six mois, lorsque la rémunération prévue au contrat était inférieure ou égale à 1,3 SMIC. Une dotation de 90,07 millions d’euros en crédits de paiement est prévue en 2019 (contre 1 095,55 millions d’euros en 2018) pour couvrir les paiements restant à effectuer au titre des aides validées jusqu’au 1er juillet 2017.

L’augmentation des autorisations d’engagement de l’action résulte quant à elle de la montée en charge des emplois francs, dispositif expérimental introduit par l’article 175 de la loi de finances initiale (LFI) pour 2018 permettant à une entreprise ou une association, quel que soit l’endroit où elle est située sur le territoire national, de bénéficier d’une prime pour l’embauche durable d’un demandeur d’emploi résidant dans l’un des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). L’exercice 2019 constitue la première année pleine de la mesure, entrée en vigueur au 1er avril 2018 : une dotation de 237,06 millions d’euros en AE et de 70,85 millions d’euros en CP est ainsi prévue pour couvrir le coût d’environ 25 000 contrats d’ici la fin de l’expérimentation.

2.   Les conséquences de la loi relative à la liberté de choisir son avenir professionnel et de la LFSS pour 2018 sur les crédits consacrés à la formation et à l’alternance

Les crédits de l’action n° 2 : Amélioration de linsertion dans lemploi par ladaptation des qualifications et la reconnaissance des compétences couvrent :

 d’une part, le financement de dispositifs de reconnaissance des compétences acquises (validation des acquis de l’expérience ; rémunération des stagiaires de la formation professionnelle, etc.), pour un montant de 24,24 millions d’euros en AE et 23,95 millions d’euros en CP ;

 d’autre part, les actions consacrées à la promotion de l’alternance, pour un montant de 1 511,47 millions d’euros en autorisations d’engagement et 881,4 millions d’euros en crédits de paiement.

Les principales évolutions en 2019 résultent de la réforme des exonérations spécifiques de cotisations sociales dans le champ de l’alternance par le PLFSS 2019, et de la création de la nouvelle aide unique à l’apprentissage.

● Les crédits du programme 103 sont en premier lieu marqués par un effet de périmètre important lié à la réforme des allègements généraux de cotisations sociales portée par la LFSS pour 2018 et ses conséquences déclinées au sein du PLFSS pour 2019 : comme pour l’IAE, les dispositifs d’exonérations spécifiques à l’alternance seront en effet supprimés – à l’exception de ceux qui concernent les employeurs publics au profit du nouveau régime de droit commun d’allègement de charge, globalement plus favorable pour les bénéficiaires. La fin de cette exonération spécifique pour les employeurs privés se traduit par une mesure de périmètre sortant de 863 millions d’euros dans le PLF pour 2019.

● La loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel prévoit par ailleurs la fusion au 1er janvier 2019 de plusieurs aides aux employeurs d’apprentis  les primes régionales à l’apprentissage, le crédit d’impôt apprentissage, la prime aux apprentis en situation de handicap et l’aide aux très petites entreprises (TPE) pour les jeunes apprentis en vue de les remplacer, à budget constant, par une aide unique à l’apprentissage, versée automatiquement par l’État pour les entreprises de moins de 250 salariés qui emploient des apprentis préparant un diplôme ou une qualification égale ou inférieure au baccalauréat.

La suppression du crédit d’impôt apprentissage au profit de l’aide unique entraîne une mesure de périmètre entrante à hauteur de 213 millions d’euros, pour une dotation totale d’aide unique s’élevant à 922,76 millions d’euros en AE et 172,33 millions d’euros en CP en 2019 : cette enveloppe se fonde sur l’hypothèse de 144 000 nouvelles entrées dans le dispositif en 2019.

Compte tenu de la date d’entrée en vigueur de la nouvelle aide unique à l’apprentissage, les crédits de l’action n° 2 continuent de financer en 2019 le coût du stock de contrats d’apprentissage signés jusqu’au 31 décembre 2018 et bénéficiant de l’aide TPE jeunes apprentis, pour un montant de 120 millions d’euros en autorisations d’engagement et 192,7 millions d’euros en crédits de paiement.

3.   Les actions en faveur du développement de l’emploi

L’action n° 3 : Développement de lemploi finance, dans des proportions à peu près équivalentes à celles prévues par la LFI pour 2018, une série de déductions ou d’exonérations forfaitaires ayant pour objectif de diminuer le coût du travail en vue de faciliter le développement de territoires, tels que les zones rurales, et de secteurs à forts potentiels d’emplois, notamment les services d’aide à domicile :

 la déduction forfaitaire des cotisations sociales patronales au titre des rémunérations relatives aux heures supplémentaires (513,64 millions d’euros) ;

 les exonérations en zones de revitalisation rurale [ZRR] (18,20 millions d’euros) et pour les organismes d’intérêt général et associations en ZRR (77,47 millions d’euros) ;

 la déduction forfaitaire pour les particuliers employeurs (388,04 millions d’euros) ;

 les exonérations en faveur des services d’aide à domicile employée par un particulier « fragile » en emploi direct ou mandataire (794,98 millions d’euros) ou en prestataire (1 009,29 millions d’euros).

Par ailleurs, le montant consacré par le PLF 2019 à l’aide à la création et à la reprise d’entreprise (ACCRE) progresse de 217,09 millions d’euros à 527,55 millions d’euros. En effet, l’article 13 de la LFSS pour 2018 a élargi le champ de cette exonération de cotisations de sécurité sociale à l’ensemble des créateurs ou repreneurs d’entreprise au titre de leur début d’activité, pour la fraction de leur revenu n’excédant pas 1,2 SMIC, alors que jusqu’au 31 décembre 2018, seuls les chômeurs créant ou reprenant une activité en étaient bénéficiaires.

III.   Des crédits stables pour les programmes 111 et 155 et en légÈre hausse pour le compte d’affectation spéciale relatif À l’apprentissage

A.   Le programme 111 : Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

Le programme 111 a pour objectif l’amélioration des conditions d’emploi et de travail des salariés du secteur concurrentiel. Il couvre principalement à ce titre le financement :

 des actions en matière de santé et de sécurité au travail, pour un budget prévisionnel de 24 millions d’euros ;

 du renouvellement et de la formation des conseillers prud’hommes ainsi que des moyens à destination des défenseurs syndicaux et des conseillers du salarié (21 millions d’euros) ;

des organisations syndicales et patronales, de la mesure de leur audience aux élections professionnelles à l’ensemble des missions relevant du paritarisme  conception, gestion, animation et évaluation des politiques d’intérêt général menées par les organismes paritaires, formation des salariés appelés à exercer des responsabilités syndicales, etc.  pour 42,48 millions d’euros.

Au total, le budget prévisionnel pour 2019 au titre du programme 111 s’élève à 88,07 millions d’euros en crédits de paiement, contre 86,52 millions d’euros en 2018. Les autorisations d’engagement associées au programme sont en revanche en forte diminution par rapport à la LFI 2018 (57,05 millions d’euros contre 154,93 millions d’euros) en raison du renouvellement, en 2018, des conventions triennales 2018-2020 de l’État pour l’association de gestion du fonds paritaire et les instituts régionaux du travail, qui avait mobilisé 102 millions d’euros l’année passée.

B.   Le programme 155 : Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

Le programme n° 155 constitue le support des politiques publiques de la mission Travail et emploi. Il regroupe à ce titre l’essentiel de leurs moyens en personnel, fonctionnement, investissement et recherche.

Le projet de loi de finances pour 2019 lui attribue 689,3 millions d’euros en crédits de paiement, contre 683,3 millions d’euros en 2018.

Près de 90 % de ce montant est destiné à couvrir la masse salariale relevant de la mission Travail et emploi, dont le plafond d’emplois est fixé à 9 012 équivalents temps plein travaillés (ETPT) pour 2019, en baisse de 239 ETPT par rapport à la LFI 2018.

Le reste de l’enveloppe budgétaire du programme 155 vise à financer, par ordre d’importance, la politique des ressources humaines (27,9 millions d’euros), les systèmes d’information (17,6 millions d’euros), les travaux d’études, de statistiques et de recherche (14,3 millions d’euros), ainsi que les dépenses de communication (7,5 millions d’euros), les affaires immobilières (4 millions d’euros) et les dépenses de fonctionnement courant du ministère du travail (3,5 millions d’euros).

C.   Les crédits du compte d’affectation spéciale relatif à l’apprentissage en légère hausse, avant sa disparition en 2020

Les recettes du compte d’affectation spéciale (CAS) : Financement national du développement et de la modernisation de lapprentissage sont constituées de la fraction régionale pour l’apprentissage mentionnée à l’article L. 6 241-2 du code du travail, qui correspond à 51 % du produit de la taxe d’apprentissage, de versements opérés au Trésor public en application des articles L. 6252-10 et L. 6252-12 du même code ainsi que d’éventuels fonds de concours.

Les recettes prévisionnelles du compte d’affectation spéciale progressent légèrement dans le projet de loi de finances 2019 pour s’établir à 1 709,7 millions d’euros, contre 1 632,7 millions d’euros en 2018.

Il convient toutefois de relever que le compte d’affectation spéciale sera supprimé à compter du prochain projet de loi de finances. En effet, la loi n° 2018‑771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a réformé les modalités de collecte et de répartition des financements de la formation professionnelle et de l’apprentissage, notamment par la création de « France compétences », établissement public chargé de la régulation et de la répartition de ces fonds. 2019 représente en conséquence la dernière année de versement aux régions de la ressource régionale pour l’apprentissage, avant la suppression du CAS.

 


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   Deuxième partie : Bilan de la mise en œuvre des parcours emploi compétences

« Orienter chaque demandeur demploi, en fonction de ses besoins, vers le bon parcours » : tel est l’objectif des parcours emploi compétences, dernier né des dispositifs de contrats aidés à destination des personnes très éloignées de l’emploi et des employeurs du secteur non marchand.

Pour dépasser les critiques régulièrement adressées à l’encontre des contrats aidés – faible taux d’insertion dans l’emploi, manque d’accompagnement vers la formation, logique quantitative privilégiée au détriment de la qualité des contrats – les parcours emploi compétences se fondent sur un diagnostic individuel de la situation du demandeur d’emploi, en vue de l’orienter vers un parcours personnalisé utilisant la palette la plus large possible des outils disponibles pour assurer un retour durable vers l’emploi : mise en situation professionnelle, actions de formations, suivi personnalisé, etc.

La création des parcours emploi compétences s’accompagne en outre d’une plus grande territorialisation des politiques d’insertion dans l’emploi, matérialisée par la création du Fonds d’inclusion dans l’emploi, qui offre aux préfets de région une plus grande flexibilité dans l’utilisation des crédits alloués aux dispositifs de retour vers l’emploi – insertion par l’activité économique et contrats aidés notamment.

Moins d’un an après la mise en place des premiers parcours emploi compétences, le bilan est en demi-teinte : si les effets de ces contrats aidés nouvelle formule sur l’insertion dans l’emploi ne sont pas encore connus compte tenu de la jeunesse du dispositif, les premiers chiffres disponibles font cependant état d’une importante sous-consommation depuis le début de l’année 2018, signe à la fois d’un mauvais paramétrage de certains critères des parcours emploi compétences, et d’une grande défiance de certaines catégories d’employeurs à l’égard de ces nouveaux contrats.

La diminution importante du nombre de parcours emploi compétences au sein du projet de loi de finances pour 2019, conjuguée à l’importante fongibilité au profit de l’IAE et aux limites inhérentes du dispositif tel qu’il a été construit, font par ailleurs craindre une nouvelle diminution du recours aux contrats aidés au cours de l’année 2019. Convaincu que les contrats aidés font partie intégrante des politiques publiques d’insertion dans l’emploi, le rapporteur invite en conséquence le Gouvernement à procéder rapidement aux indispensables ajustements du dispositif.

I.   Des contrats aidés aux « parcours emploi compétences » : À la recherche d’une meilleure efficacité des politiques d’inclusion dans l’emploi

A.   Les contrats aidés : un dispositif ancien et protéiforme, dont l’efficacité est soumise à conditions

1.   Les contrats aidés, un outil privilégié à destination des personnes les plus éloignées de l’emploi

Lancés en 1984 sous la forme de « travaux d’utilité collective » (TUC), les contrats aidés ont pour caractéristique commune le ciblage de publics rencontrant des difficultés particulières d’accès à l’emploi en vue de favoriser leur insertion professionnelle. En contrepartie de l’embauche dans le cadre d’un contrat aidé, l’employeur bénéficie d’une aide – subvention à l’embauche, exonération de cotisations sociales ou aide à la formation afin de compenser la différence de productivité supposée par rapport à une embauche classique.

Depuis leur création, les contrats aidés n’ont cessé de voir leur appellation, leur ciblage et leurs paramètres modifiés au gré des politiques publiques de l’emploi. Alors que les TUC ciblaient à l’origine principalement les jeunes, particulièrement exposés au risque de chômage, le champ des contrats aidés s’est ensuite progressivement élargi à diverses catégories de bénéficiaires, tels que les jeunes issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), les seniors ou les bénéficiaires de minima sociaux. En outre, les contrats aidés ont été instaurés tantôt dans le secteur marchand, tantôt le secteur non marchand. La plupart de ces contrats avaient une durée minimale de six mois, étendue jusqu’à trois voire cinq ans dans certains cas.

Depuis 2010, les contrats aidés ont été rationalisés sous la forme de « contrats uniques d’insertion » (CUI) dénommés respectivement contrats d’accompagnement dans l’emploi (CUI-CAE), dans le secteur non marchand, et contrats initiative emploi (CUI-CIE), dans le secteur marchand. S’y ajoutaient jusqu’en 2017 les emplois d’avenir, contrat d’aide à l’insertion de longue durée, destiné aux jeunes particulièrement éloignés de l’emploi.

Tous ces contrats aidés ont pour objectif prioritaire l’amélioration de l’insertion professionnelle de leurs bénéficiaires. Ainsi, en 2017, 88 % des recrutements en contrat aidé ont concerné des personnes présentant des difficultés particulières d’accès à l’emploi.

Les contrats aidés ont par ailleurs été abondamment utilisés dans les périodes de ralentissement économique, car l’augmentation du volume de contrats aidés a un effet positif sur l’emploi à court terme. Dans le secteur non marchand, en particulier, les employeurs ont des besoins en emploi qu’ils ne peuvent réaliser en raison de contraintes financières. L’aide accordée aux employeurs de salariés en contrats aidés leur permet de dépasser cette contrainte, de telle sorte que le financement d’un contrat aidé dans le secteur non marchand est créateur d’emplois. En 2015, le contingent de 60 000 contrats aidés supplémentaires aurait ainsi permis la création nette de 21 000 emplois ([6]). A contrario, la baisse drastique du nombre de contrats aidés à partir de l’automne 2017 aurait entraîné la suppression nette de 66 000 emplois en 2017, et une hausse du nombre de demandeurs d’emploi de catégorie A d’environ 47 000, principalement au second semestre de l’année 2017 ([7]).

2.   Un bilan en demi-teinte des contrats aidés en termes de retour durable vers l’emploi

a.   Des effets mitigés sur l’insertion dans l’emploi mais des bénéfices indéniables en termes d’utilité sociale, notamment dans le secteur non marchand

L’efficacité des contrats aidés est le plus souvent analysée au prisme de l’insertion durable dans l’emploi. À cet égard, le bilan est mitigé s’agissant des contrats aidés dans le secteur non marchand puisque dans ce secteur, la moitié (49 %) des bénéficiaires de contrats aidés seulement sont en emploi six mois après la fin de leur contrat, et 36 % en emploi durable, contre respectivement 72 % et 61 % des bénéficiaires de contrats aidés dans le secteur marchand. La différence de taux d’insertion entre les deux secteurs doit toutefois être relativisée compte tenu de la situation des bénéficiaires de CUI-CAE, souvent davantage éloignés de l’emploi que les bénéficiaires de contrats aidés employés dans le secteur marchand.

Pour autant, l’insertion dans l’emploi n’est pas le seul critère permettant de juger de l’efficacité des contrats aidés. Les bénéficiaires de ces contrats tirent en effet de leur expérience en contrat aidé d’autres types de bénéfices tels qu’une première expérience professionnelle, la possibilité d’acquérir de nouvelles compétences grâce à des formations ou, plus prosaïquement, de reprendre confiance et se sentir utile à la société. Les contrats aidés remplissent ainsi pleinement un rôle d’ « utilité sociale » à destination des bénéficiaires les plus éloignés de l’emploi.

La société tire également bénéfice de ces contrats. Au sein du secteur associatif ou des petites communes, par exemple, les contrats aidés ont permis depuis leur origine le développement d’activités qui n’auraient pas vu le jour sans l’aide financière à l’employeur accordée en contrepartie de l’embauche en contrat aidé. Dans certains secteurs d’activité, les contrats aidés sont même devenus incontournables pour assurer certaines activités ou garantir une égale qualité de service public aux usagers : le ministère de l’Éducation nationale recourt ainsi abondamment aux contrats aidés pour assurer l’accompagnement des élèves en situation de handicap – 45 000 contrats prévus par la loi de finances initiale pour 2018, et un volume équivalent prévu pour 2019 à tel point que le secteur de l’enseignement représentait plus d’un tiers du volume des contrats aidés en décembre 2017 (35,40 %).

Le second secteur d’activité ayant le plus recours aux contrats aidés est le secteur de la santé et de l’action sociale (24,56 % du total en décembre 2017) : le rapporteur a d’ailleurs recueilli lors des auditions préparatoires à la rédaction de ce rapport de nombreux témoignages de représentants du secteur associatif et d’employeurs d’établissements ou de centres sociaux auxquels les contrats aidés ont permis de développer de nouvelles activités au bénéfice de la population (recrutement de personnel au sein de crèches associatives, ou d’animateurs au sein de centres sociaux, etc.) ou de maintenir la qualité du service rendu, en dépit de baisses de subventions publiques – dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), par exemple. Particulièrement conscients de leur responsabilité en matière d’insertion dans l’emploi, ces employeurs avaient pour la plupart à cœur d’accompagner leurs salariés en contrat aidé tout au long de leur parcours par des actions de formation personnalisées, ou le cas échéant en pérennisant ces emplois dans le cadre de contrats à durée indéterminée de droit commun.

Concomitamment à l’objectif d’insertion dans l’emploi des publics les plus fragiles, les contrats aidés remplissent donc un rôle d’utilité sociale que l’on ne saurait nier, tout en permettant à certains secteurs d’activité de poursuivre des missions d’intérêt général de qualité pour la société.

b.   L’objectif d’inclusion dans l’emploi parfois relégué au profit d’effets d’aubaine, notamment dans le secteur marchand

Il est cependant régulièrement reproché aux employeurs de salariés en contrat aidé de bénéficier d’un effet d’aubaine, c’est-à-dire d’une main d’œuvre bon marché grâce au soutien financier de l’État, sans contrepartie réelle de leur part en termes d’accompagnement des bénéficiaires vers l’emploi. En réalité, les contrats aidés du secteur marchand (CUI-CIE) sont beaucoup plus marqués par des effets d’aubaine que dans le secteur non marchand : 58 % des employeurs reconnaissent qu’ils auraient embauché au même moment et avec la même personne même en l’absence d’aide financière, contre seulement 21 % des employeurs du secteur non marchand.

En conséquence, les effets sur l’emploi sont faibles dans le secteur marchand : selon la Direction de l’animation, de la recherche, des études et des statistiques (DARES) du ministère du travail, en 2015, l’augmentation de 32 000 bénéficiaires de contrats aidés aurait permis de créer seulement 3 000 emplois nets.

Outre l’effet d’aubaine constaté dans le secteur marchand, l’on peut également déplorer que le recours aux contrats aidés ne soit pas systématiquement accompagné d’actions en matière de formation, lesquelles témoignent d’une réelle intention de la part des employeurs d’accompagner les bénéficiaires vers l’emploi. Si la quasi-totalité des employeurs s’engage, à la signature du contrat, à proposer des actions de formation aux personnes recrutées en CUI-CAE, selon les données produites par la DARES pour l’année 2016, en pratique, seuls 48 % des bénéficiaires de contrats aidés dans le secteur non marchand ont déclaré avoir effectivement suivi au moins une formation au cours de leur contrat.

Or, toutes choses égales par ailleurs, les études de la DARES montrent que pour les personnes sorties de contrat aidé, le fait d’avoir suivi une formation s’accompagne d’une probabilité supérieure d’être en emploi six mois après la sortie de contrat aidé. Ce résultat, même s’il doit être nuancé car il peut refléter le degré de motivation des salariés davantage que l’effet de la formation elle-même, suggère que les actions de formation peuvent améliorer l’insertion dans l’emploi à l’issue du contrat.

B.   La création des « parcours emplois compétences » consacre le recentrage de la politique de contrats aidés autour du triptyque « emploi – formation – accompagnement »

Le rapport de M. Jean-Marc Borello, « Donnons-nous les moyens de linclusion », remis en janvier 2018 à la ministre du travail, préconisait la transformation des contrats aidés en « parcours emploi compétences » (PEC) pour dépasser les critiques régulièrement adressées aux contrats aidés : effets d’aubaine dans le secteur marchand, insuffisance de l’effort de formation, relative faiblesse du taux d’insertion dans l’emploi dans le secteur non marchand.

La création des PEC, rendue effective par une circulaire ministérielle du 11 janvier 2018 ([8]), recentre les contrats aidés sur le seul secteur non marchand et les personnes les plus éloignées de l’emploi. Pour ces dernières, le Gouvernement a en effet fait le pari que la clé de leur insertion professionnelle repose désormais sur le triptyque : « emploi – formation – accompagnement ». L’objectif est ainsi d’accompagner résolument et durablement ces personnes vers l’emploi, grâce à des actions de formation et à un accompagnement personnalisé permettant une montée en compétences et en savoir-être dans le milieu professionnel.

Les parcours emploi compétences consacrent également le rapprochement des contrats aidés avec les principes directeurs de l’insertion par l’activité économique (IAE), car les deux dispositifs visent à préparer à l’emploi les personnes exclues du marché du travail. Ce rapprochement s’est illustré par la mise en place du Fonds d’inclusion dans l’emploi (FIE), qui permet aux services de l’État, sur un territoire donné, d’adapter l’offre d’insertion aux spécificités des publics en privilégiant tantôt les contrats aidés, tantôt l’IAE.

1.   Les « parcours emploi compétences » (PEC) privilégient une logique de parcours individuel, directement orientée vers l’insertion dans l’emploi

a.   Un recentrage du dispositif sur le secteur non marchand et sur l’objectif unique d’insertion professionnelle des personnes les plus éloignées de l’emploi

Les parcours emploi compétences peuvent être prescrits exclusivement dans le secteur non marchand et se substituent à l’ensemble des contrats qui pouvaient être conclus jusque-là : CUI-CAE, CUI-CIE ([9]) et contrats d’avenir.

La mise en place des parcours emploi compétences s’est également accompagnée d’un recentrage sur les publics les plus éloignés du marché du travail, en articulation avec les autres leviers de la politique de l’emploi et de la formation que sont les structures d’insertion par l’activité économique (IAE), les entreprises adaptées ou encore l’alternance.

Le parcours emploi compétences a ainsi pour particularité d’associer des périodes de mise en situation professionnelle à un accès facilité à la formation, en vue de l’acquisition de compétences. À partir du diagnostic préalable effectué par un conseiller du service public de l’emploi, par les missions locales ou Cap emploi, un parcours emploi compétences peut être prescrit :

 soit lorsque la formation n’est pas l’outil approprié pour le demandeur d’emploi, parce que les freins d’accès à l’emploi ne relèvent pas d’un défaut de qualification mais plutôt d’un manque d’expérience et de savoir-être professionnel, ou d’une rupture trop forte avec le monde éducatif ;

 soit parce que les raisons de son éloignement à l’emploi défaut d’expérience, de compétence, de savoir-être, etc. ne justifient pas un parcours dans une structure dédiée à l’insertion par l’activité économique (IAE).

Dès l’initiation du parcours, un accompagnement renforcé est mis en place pour tout bénéficiaire de parcours emploi compétences :

 en amont de la signature du contrat, la demande d’aide fait l’objet d’un entretien tripartite entre le prescripteur, l’employeur et le demandeur d’emploi, qui a notamment pour objet de définir les engagements respectifs de chacune des parties et de définir les conditions de suivi de ces engagements ([10]).

 en cours de contrat, le suivi des engagements peut prendre la forme d’un livret de suivi dématérialisé ou éventuellement d’entretiens réguliers visant à s’assurer que les engagements de l’employeur sont respectés, d’une part, et à mesurer l’évolution du salarié, d’autre part ;

 à la fin du contrat, un entretien de sortie est obligatoirement réalisé, afin de maintenir le bénéficiaire dans une posture de recherche active d’emploi, de faire le point sur les compétences acquises et d’évaluer le cas échéant l’opportunité du renouvellement de l’aide au regard de l’intérêt pour le bénéficiaire et des actions de formation préalablement engagées.

b.   Des exigences renforcées en matière de formation et d’accompagnement pour les employeurs

L’objectif d’insertion durable dans l’emploi des bénéficiaires de parcours emploi compétences suppose en outre une sélection plus stricte des employeurs, en fonction de leurs capacités à proposer les conditions d’un parcours insérant. La circulaire du 11 janvier 2018 fixe quatre critères de sélection des employeurs :

 le poste offert doit permettre de développer la maîtrise de comportements professionnels et de compétences techniques répondant à des besoins d’emploi existants, ou transférables à d’autres métiers qui recrutent ;

 l’employeur doit démontrer une capacité à accompagner le salarié au quotidien, notamment grâce à la désignation d’un tuteur ;

 l’employeur doit de plus s’engager à faciliter l’accès à la formation : les employeurs proposant des formations a minima pré-qualifiantes sont ainsi prioritaires ;

 enfin, la capacité de l’employeur à pérenniser le poste est également prise en compte.

La logique de prescription d’un PEC est ainsi inversée par rapport à celle qui prévalait pour la prescription de contrat aidé : il s’agit de construire un parcours vers l’autonomie et l’emploi à partir du besoin de la personne, et non de proposer un contrat « clé en main », pas toujours adapté au profil du demandeur d’emploi. Le principe est de passer d’un pilotage quantitatif des contrats aidés à un pilotage plus qualitatif, grâce à une stratégie ciblée d’orientation des bénéficiaires et à une sélection stricte des employeurs.

Cette logique prévaut également pour les renouvellements, qui ne sont « ni prioritaires, ni automatiques » selon la circulaire du 11 janvier 2018, mais conditionnés à l’évaluation par le prescripteur de l’utilité du parcours pour le bénéficiaire, et au respect de ses engagements par l’employeur.

Cette recrudescence des exigences à l’égard des employeurs potentiels et l’effort de ciblage plus précis des bénéficiaires de parcours emploi compétences se décline, en termes budgétaires, par une forte diminution des crédits destinés aux contrats aidés. La loi de finances initiale pour 2018 autorisait ainsi la prescription de 200 000 parcours emploi compétences, contre 291 396 prescrits en 2017. Le projet de loi de finances pour 2019 divise par deux ce volume, à 100 000 nouveaux contrats.

2.   La création du fonds d’inclusion dans l’emploi parachève le rapprochement des contrats aidés avec le secteur de l’insertion par l’activité économique

a.   Une nouvelle approche territorialisée des politiques d’inclusion

La mise en place des parcours emploi compétences et leur rapprochement avec la philosophie de l’insertion par l’activité économique (IAE) témoignent d’une volonté de territorialiser davantage les politiques d’inclusion dans l’emploi : le rapport de M. Borello déplorait en effet que les enveloppes budgétaires des contrats aidés fassent l’objet d’une répartition entre départements « selon une logique « descendante », tenant compte de lhistorique des volumes réalisés, davantage que des contextes locaux et des tissus économiques ».

La création d’un Fonds d’inclusion dans l’emploi (FIE), seconde nouveauté introduite par la circulaire du 11 janvier 2018, traduit ainsi le passage d’une « politique du chiffre », pilotée d’en-haut, à une gestion déconcentrée des outils d’insertion.

Parce que les besoins peuvent varier dans le temps et selon les territoires, le Fonds d’inclusion dans l’emploi dispose en effet d’une enveloppe régionale regroupant l’ensemble des crédits destinés aux PEC et à l’IAE. Les préfets peuvent recourir à cette enveloppe, fongible, pour mieux adapter l’offre d’insertion sur leur territoire. Toutefois, la fongibilité est asymétrique : seule l’enveloppe consacrée aux parcours emploi compétences permet d’abonder le volume des aides au poste au sein des structures de l’insertion par l’activité économique, dans la limite d’une fongibilité maximum de 20 % du volume de contrats aidés notifié. Les crédits de l’IAE, à l’inverse, ne peuvent être mobilisés pour augmenter le volume des parcours emploi compétences.

Les préfets peuvent en outre mobiliser les crédits du fonds pour soutenir des projets innovants, créateurs d’emplois ou favorisant l’insertion, mais qui n’entrent pas dans le cadre précis des dispositifs existants. Ces projets, appelés « initiatives territoriales », peuvent représenter jusqu’à 2 % des autorisations d’engagement notifiées au titre des parcours emploi compétences.

Il est attendu de cette gestion territorialisée des crédits alloués aux dispositifs d’insertion dans l’emploi une meilleure prise en compte des spécificités territoriales et, in fine, une meilleure répartition des moyens en fonction du profil des demandeurs d’emploi et des besoins en compétences d’un bassin d’emploi.

Le passage à une logique « ascendante », supposée reposer davantage sur la concertation avec les acteurs territoriaux, doit ainsi favoriser l’appropriation par chacun des acteurs de l’objectif d’insertion durable dans l’emploi poursuivi à la fois par le secteur de l’IAE et par les nouveaux parcours emploi compétences. De plus, à mesure que les incitations à consommer l’enveloppe de crédits relative aux contrats aidés se dissiperont, les prescripteurs devraient pouvoir se concentrer davantage sur la sélection des employeurs et la construction de parcours personnalisé d’accompagnement dans l’emploi pour les bénéficiaires de PEC.

b.   Une fongibilité asymétrique qui peut s’opérer au détriment des parcours emploi compétences

Un premier bilan fait apparaître une très grande mobilisation par les préfets de région de leurs marges de manœuvre pour adapter la politique de l’emploi aux spécificités de leur territoire, tant en recourant à la fongibilité des parcours emploi compétences vers l’IAE qu’en soutenant des initiatives territoriales.

Ainsi, au 30 septembre 2018, 28 000 contrats ont été « fongibilisés » dans le cadre du Fonds d’inclusion dans l’emploi, soit près de 18 % du volume notifié, sur un plafond fixé à 20 %. Selon les informations transmises au rapporteur, certaines régions n’ont pas eu recours à la fongibilité des PEC vers l’IAE, tandis que d’autres l’ont fait au maximum de leurs capacités. Cette fongibilité a permis de financer trois types de projets pour l’emploi :

 en premier lieu, le secteur de l’insertion par l’activité économique a bénéficié de la fongibilité à hauteur de 45,6 millions d’euros en AE et CP, soit un peu plus de 3 600 ETP, ce qui a indéniablement permis de consolider l’offre d’insertion au sein des entreprises, ateliers et chantiers d’insertion ;

 2 830 contrats initiative emploi (CUI-CIE) ont par ailleurs été programmés dans les départements d’outre-mer grâce à la fongibilité, pour un montant de 12,4 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 7,1 millions d’euros en crédits de paiement (CP) ;

 enfin, des initiatives territoriales innovantes ont été financées pour un total de 6,8 millions d’euros en AE et 6,1 millions d’euros en CP. Ces projets couvrent des thématiques diversifiées telles que le développement de causes sociales, l’accompagnement vers l’emploi des seniors ou des réfugiés, ou encore l’aide au financement d’actions de mobilité.

La fongibilité de l’enveloppe « parcours emploi compétences » porte donc sur un niveau total d’environ 65,2 millions d’euros en AE et 59,2 millions d’euros en CP à la fin du mois de septembre 2018.

Fervent défenseur de l’insertion par l’activité économique ([11]), le rapporteur pour avis ne peut que saluer l’utilisation de cette fongibilité, qui témoigne à la fois d’une bonne dynamique du secteur de l’IAE, et de la prise en compte par les acteurs sur le terrain de la nécessité d’apporter des réponses adaptées aux besoins des territoires. Mais le rapporteur s’inquiète parallèlement de la diminution de crédits disponibles à destination des parcours emploi compétences, car la complémentarité de ces dispositifs avec l’IAE permet d’apporter une réponse supplémentaire aux personnes très éloignées de l’emploi, pour lesquelles un parcours d’insertion par l’activité économique ne constitue pas une réponse adaptée. Pour cette raison, le rapporteur s’interroge sur la pertinence d’une fongibilité « à sens unique » qui ne peut s’opérer qu’au détriment des contrats aidés.

L’utilisation par les préfets de la quasi-totalité de leur enveloppe budgétaire fongible au profit de l’IAE peut ainsi faire état d’une inquiétante sous‑estimation des besoins de ce secteur par la LFI pour 2018 : le relèvement de 5 000 ETP prévu par le projet de loi de finances pour 2019 étaye d’ailleurs cette hypothèse.

La mobilisation de la fongibilité peut également traduire des difficultés d’appropriation de l’outil « parcours emploi compétences » par les employeurs potentiels, ou un mauvais calibrage de celui-ci par rapport aux effets attendus.

Quelle que soit l’hypothèse avancée, la sous-utilisation des PEC par rapport au contingent prévu en loi de finances et la pertinence de la fongibilité à sens unique devront être analysées plus en détail à l’avenir pour s’assurer que les bénéficiaires potentiels de ces parcours puissent en bénéficier dès lors que le PEC est identifié comme l’outil le plus approprié pour assurer leur montée en compétences et leur retour durable vers l’emploi.

II.   Un bilan mitigé pour la première année de mise en œuvre  des parcours emploi compétences, qui invite à ajuster le dispositif

A.   La sous-consommation de parcours emploi compétences en 2018 traduit la montée en exigences du dispositif mais également une inquiétude réelle de la part des employeurs

1.   La très lente montée en charge des parcours emploi compétences, signe d’un ciblage plus efficace du dispositif ?

a.   Une sous-consommation des PEC depuis le début de l’année 2018

Les premières données disponibles sur la consommation de parcours emploi compétences font état d’une lente montée en charge du dispositif sur les trois premiers trimestres de l’année 2018. Sur les 200 000 parcours emploi compétences inscrits en loi de finances initiale pour 2018, moins de la moitié ont été effectivement prescrits au 29 septembre 2018 (94 564 parcours). Selon les estimations de la Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) du ministère du travail, en tenant compte de la mise en réserve de 3 % des crédits (équivalent à 6 000 contrats), des 5 500 PEC consacrés au financement du taux spécifique outre-mer ([12]) et de la fongibilité au profit de l’IAE, entre 130 000 et 150 000 contrats devraient finalement être prescrits en 2018.

Ces données traduisent une diminution drastique du nombre de bénéficiaires de contrats aidés, tous secteurs confondus, en une année : en 2017, 226 515 CUI-CAE et 28 359 CUI-CIE avaient en effet été prescrits, pour 200 000 CUI-CAE et 45 000 CUI-CIE prévus par la LFI pour 2017.

Or, le PLF pour 2019 prévoit une nouvelle diminution du volume de contrats aidés pour l’année prochaine, avec seulement 100 000 PEC financés ce total ne tient cependant pas compte du contingent de 30 500 contrats transféré au programme 230 afin de couvrir le coût des contrats aidés permettant l’accompagnement des élèves en situation de handicap.

Entrées et nombre de bénéficiaires de contrats aidés (CUI-CIE, CUI-CAE, PEC) entre 2014 et le premier trimestre 2018

  (Entrées, données brutes en milliers)         (Nombre de bénéficiaires en milliers)

Champ : France métropolitaine

Lecture : au 2e trimestre 2018, 25 000 PEC ont été initiés, et 43 000 personnes bénéficiaient d’un PEC fin juin.

Source : ASP, traitement DARES.

b.   Un ciblage efficace, mais sans évolution significative par rapport aux CUI-CAE

Au 31 juillet 2018, l’objectif de ciblage des publics les plus éloignés au sein des parcours emploi compétences prescrits était globalement atteint, puisque la proportion de demandeurs d’emploi de longue durée atteignait 42 % (stable par rapport à août 2017), celle des travailleurs en situation de handicap 17,8 % (contre 16 % en août 2017) et celle des bénéficiaires de minima sociaux 20,7 %, contre 19,7 % en 2017.

La proportion de bénéficiaires en France métropolitaine issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville a légèrement augmenté (12,8 % contre 11,7 % en août 2017), tandis que la proportion de seniors bénéficiaires de PEC a pour sa part augmenté de trois points en une année (de 34,6 % à 37,7 %).

Le rapporteur pour avis note néanmoins une absence d’évolution significative du profil des bénéficiaires de parcours emploi compétences par rapport aux bénéficiaires de CUI-CAE, qui laisse planer un doute sur les éventuels efforts supplémentaires de ciblage des bénéficiaires effectués par les prescripteurs lors du diagnostic préalable (cf. tableau ci-dessous).

Répartition des bÉnéficiaires de contrats aidés par type de profil

 

Août 2017

(CUI-CAE)

Août 2018

(PEC)

Demandeurs d’emploi de très longue durée

42,4 %

42,0 %

Travailleurs en situation de handicap

16,0 %

17,8 %

Bénéficiaires issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV)*

11,7 %

12,8 %

Bénéficiaires du RSA

19,7 %

20,7 %

Jeunes de moins de 26 ans

15,6 %

14,7 %

Seniors

34,6 %

37,7 %

Source : Réponse au questionnaire budgétaire.

Seule la diminution de la part des jeunes, passée de 15,6 % à 14,7 % de l’ensemble des contrats prescrits, pourrait révéler une meilleure orientation de ces publics vers des solutions de formation ou d’alternance (apprentissage, contrat de professionnalisation) ou vers les mesures qui leur sont spécifiquement dédiées à travers un accompagnement intensif : Garantie jeunes, écoles de la deuxième chance, etc. Le faible écart statistique constaté, inférieur à 1 %, ne permet toutefois pas de confirmer cette hypothèse.

2.   De fortes inquiétudes à l’égard des parcours emploi compétences, notamment au sein des collectivités et du secteur associatif

a.   Plus d’exigences, moins d’aide financière : l’équation complexe des parcours emplois compétences

Plusieurs facteurs permettent dexpliquer la lente montée en charge des parcours emploi compétences. Certains sont inhérents à la nouveauté du dispositif, qui requiert un temps dadaptation nécessaire à son appropriation par lensemble des acteurs : services déconcentrés de lÉtat, prescripteurs, employeurs et bénéficiaires.

Au-delà de cette explication ponctuelle, la sous-consommation de l’enveloppe de crédits consacrée aux PEC peut également s’expliquer par une plus grande difficulté des prescripteurs à trouver des employeurs répondant aux nouvelles exigences qualitatives du PEC, et disposés de surcroît à recourir à ces contrats plus contraignants, compte tenu notamment de la moindre aide financière qui leur est accordée en contrepartie des exigences renforcées.

Le cadre des parcours emploi compétences est en effet plus exigeant que celui des anciens CUI-CAE : outre l’entretien tripartite initial et le suivi plus intensif des bénéficiaires, d’autres contraintes d’ordre administratif ont été régulièrement évoquées lors des auditions conduites par le rapporteur pour avis dans le cadre de la préparation de ce rapport, telles que la question du tutorat. L’employeur souhaitant embaucher un salarié en parcours emploi compétences doit en effet désigner un tuteur parmi les salariés qualifiés et volontaires pouvant assumer cette fonction. Interprétée parfois strictement au début de la mise en place du PEC, cette règle s’est heurtée dans la pratique à des difficultés opérationnelles, par exemple au sein de petites communes dans lesquelles le maire assume seul l’ensemble des tâches administratives ou au sein de petites associations. La DGEFP a admis depuis une interprétation plus large de ces règles, afin que les employeurs de petites collectivités rurales ou d’associations ayant peu de salariés puissent confier l’encadrement et le tutorat à des personnes n’ayant pas le statut de salarié de la structure, sous réserve du contrôle, par le prescripteur, de leur aptitude à encadrer les personnes en insertion.

La durée cible retenue pour les parcours emploi compétences – neuf mois minimum, avec un objectif de douze mois, sans automaticité du renouvellement  peut être également partiellement responsable du faible attrait de ces nouveaux contrats aidés : de l’aveu des personnes auditionnées par le rapporteur pour avis, une durée d’un an est très souvent insuffisante pour répondre de manière satisfaisante à l’ensemble des exigences d’un parcours emploi compétences, notamment en matière de formation, d’autant que ces contrats sont destinés à des publics très éloignés de l’emploi qui ont besoin d’un temps de réadaptation aux exigences du milieu professionnel.

Outre ces contraintes, le principal frein au recours à ces contrats est la moindre incitation financière accordée aux employeurs. Le taux de prise en charge par l’État des parcours emploi compétences, fixé par chaque préfet de région, varie selon les territoires et les profils entre 35 % et 60 % du SMIC, la moyenne s’établissant à 50,9 % environ depuis le début de l’année 2018. Certaines régions ont fixé des taux de base très inférieurs aux moyennes observées avant la mise en place du PEC : 35 % pour la région Normandie, 40 % dans la région Grand Est ou les Pays de la Loire. Par comparaison, le taux moyen de prise en charge des CUI-CAE s’élevait à 72,5 % en 2017 et à 75,95 % en 2016.

La progression significative du reste à charge pour les employeurs, conjuguée à une exigence renforcée en matière d’engagements de toute nature pour les employeurs potentiels, a de facto conduit certains d’entre eux à renoncer au recours aux parcours emplois compétences.

b.   Les employeurs du secteur associatif et les petites collectivités territoriales : les laissés-pour-compte de la nouvelle formule des contrats aidés

La transformation des contrats aidés en parcours emploi compétences n’a pas engendré de modification fondamentale dans la répartition entre catégories d’employeurs des contrats aidés non marchands. Ainsi, les associations et collectivités territoriales restent les principaux employeurs de contrats aidés pour la période courant de janvier à septembre 2018 : 38,6 % des PEC sont signés par des associations, et 22,4 % par des collectivités territoriales, soit une proportion stable par rapport aux années précédentes (37,4 % des CUI-CAE signés par des collectivités territoriales en 2017, et 21,5 % par des collectivités territoriales).

Pourtant, force est de constater que l’annonce brutale de la baisse draconienne du nombre de contrats aidés à l’automne 2017 et leur transformation en parcours emploi compétences au début de l’année 2018 ont été ressentis comme une onde de choc, en particulier par les employeurs de petites collectivités territoriales et du secteur associatif.

Plusieurs représentants des associations auditionnés par le rapporteur pour avis ont ainsi déploré l’inadéquation entre les moyens mis à disposition des employeurs – parfois diminués de 50 % par rapport aux anciens contrats aidés – et l’accroissement des exigences leur incombant, alors que contrairement aux structures d’insertion par l’activité économique, les associations n’ont pas toutes, par nature, la vocation ou la capacité à accompagner durablement vers l’emploi des personnes qui en sont très éloignées.

Cette mise à l’écart du secteur associatif était de fait connue, voire assumée dès la création des PEC : selon le rapport de M. Borello, l’accroissement des exigences à l’égard des employeurs de parcours emploi compétences impliquait en effet « de ne plus interpréter ce dispositif comme étant, de manière directe, un outil de soutien au secteur associatif ou aux collectivités territoriales ». En conséquence, alors que ces derniers ont, au cours de ces dernières décennies, toujours eu à cœur de recourir aux contrats aidés pour assurer une mission d’utilité sociale et améliorer le service rendu à la population, les nouvelles exigences qualitatives des parcours emploi compétences, non assorties de contreparties financières permettant a minima de répondre aux exigences en termes d’accompagnement et de formation, ont achevé de décourager une bonne partie de ces employeurs potentiels.

La DGEFP n’a pas été en mesure de fournir au rapporteur une analyse détaillée des effets de la réforme des contrats aidés sur les associations en fonction de leur taille, de leur situation géographique et de leur secteur d’activité ; seule la ventilation globale des parcours emploi compétences par catégorie d’employeurs est en effet disponible. Toutefois, la division par deux du volume de parcours emploi compétences conclus à la mi-2018, même si la répartition par catégorie d’employeurs n’a pas connu d’évolution significative, révèle bien une véritable rupture dans le recours aux contrats aidés, cohérente avec les craintes exprimées sur le terrain par les personnes entendues par le rapporteur.

Le moindre recours aux contrats aidés par les deux principales catégories d’employeurs n’est pas sans conséquence, à la fois pour l’employabilité des bénéficiaires potentiels de contrats aidés et pour la société dans son ensemble. Dès l’examen du projet de loi de finances pour 2018, votre rapporteur pour avis avait ainsi alerté des conséquences de la suppression sans concertation des contrats aidés sur l’activité et le modèle économique d’un certain nombre de structures ayant recours de manière structurelle à ce type de contrats pour satisfaire aux besoins de la population : associations à caractère social, entreprises de l’économie sociale et solidaire, petites collectivités rurales.

Le rapporteur tient à tirer de nouveau la sonnette d’alarme, en particulier sur la situation des associations qui contribuent fortement à la vitalité du tissu associatif et solidaire local, et accomplissent pour certaines un remarquable travail d’insertion des publics les plus éloignés de l’emploi au quotidien. Le fait que les paramètres du parcours emploi compétences en termes de durée, de prise en charge financière ou d’exigence de formation soient inadaptés pour certaines de ces structures est audible au regard de l’exigence d’accompagnement vers l’emploi des bénéficiaires de ces contrats. Pour autant, le secteur associatif et les acteurs locaux ne doivent pas être laissés pour compte et méritent qu’une réflexion soit engagée afin de leur offrir des alternatives crédibles pour l’emploi, et leur permettre de continuer à assurer leurs missions de service auprès des populations.

B.   Personnaliser les parcours emploi compétences en fonction des profils des demandeurs d’emploi et Restaurer un climat de confiance : les propositions du rapporteur pour avis

Au terme des auditions menées dans le cadre de la préparation de ce rapport, le rapporteur pour avis dresse un bilan mitigé des premiers mois de mise en place des parcours emploi compétences.

Le recentrage des contrats aidés sur le seul secteur marchand et l’objectif d’inclusion durable dans l’emploi des personnes qui en sont le plus éloignées correspondent à des ajustements certainement inéluctables afin d’améliorer l’efficacité de ces contrats en termes d’insertion dans l’emploi et éviter les effets d’aubaine.

Mais la sous-consommation de parcours emploi compétences depuis le début de lannée 2018 est sans doute révélatrice de linadéquation des paramètres de ces parcours au profil de certaines catégories de demandeurs demploi. Elle rend compte également dune inquiétude réelle de la part des employeurs potentiels à légard des PEC, laissant démunis une grande partie dentre eux, notamment dans le secteur associatif et les petites collectivités rurales, en labsence dalternative crédible pour assurer les activités de service à la collectivité.

Le nouveau tour de vis budgétaire prévu par le projet de loi de finances 2019 consistant à réduire de 41 % ([13]) le contingent de contrats aidés pour lannée prochaine tend à prendre acte des carences des parcours emploi compétences. Le rapporteur est pourtant convaincu quil conviendrait au contraire den ajuster les paramètres afin, dune part, que ces contrats soient adaptés au plus grand nombre de personnes très éloignées de lemploi et, dautre part, de restaurer la confiance des employeurs potentiels à légard de ces contrats aidés.

1.   Agir sur les différents curseurs des parcours emploi compétences pour élargir les publics des bénéficiaires potentiels

a.   Assouplir le critère de la durée

Deux paramètres des parcours emploi compétences concentrent l’essentiel des reproches : la durée, jugée insuffisante pour engager un réel effort de formation, et le taux de prise en charge par l’État, parfois diminué de moitié par rapport aux anciens CUI-CAE.

Le critère de la durée désigne à la fois la durée du parcours emploi compétences, comprise entre neuf et douze mois, et la durée hebdomadaire de travail des bénéficiaires. Ces deux durées étaient assez variables parmi les contrats aidés qui ont précédé la mise en place du PEC (cf. tableau ci-dessous). Or, le Gouvernement a fait le choix en 2018 de retenir des critères relativement stricts pour la prescription des parcours emploi compétences.

Caractéristiques des contrats aidés

 

Durées minimales et maximales du contrat (hors renouvellement)

Hypothèse de durée moyenne retenue **

Durée moyenne constatée*

Hypothèse de durée hebdomadaire retenue **

Taux moyen de prise en charge retenu **

 

(en % du SMIC brut)

CUI-CAE

6 – 24 mois

10,2 mois

10,4 mois

21,5 heures

72,5 %

CUI-CIE

6 – 24 mois

9,1 mois

9,6 mois

32,8 heures

36 %

Emplois davenir

12 – 36 mois

21,7 mois

20,3 mois

33,6 heures

64,7 %

(75 % dans le secteur non marchand, 35 % dans le secteur marchand)

PEC

9 – 12 mois

10,2 mois

11,3 mois

21,5 heures

50 %***

(*) Durée moyenne constatée en 2017 pour les CUI-CAE, CUI-CIE et emplois d’avenir, et en 2018 pour les PEC.

(**) Hypothèses retenues par la LFI 2017 pour les CUI-CAE, CUI-CIE et emplois d’avenir, et par le PLF 2019 pour les PEC pour la fixation du coût de ces contrats au sein des lois de finances.

(***) Taux valable pour les contrats en métropole variant de 30 à 60 % selon les régions et le profil des bénéficiaires ou des employeurs. Le taux moyen pour les contrats aidés en outre-mer est fixé à 60 %.

Source : Questionnaires budgétaires et projets annuels de performance 2017 à 2019

La durée hebdomadaire retenue pour les parcours emploi compétences est ainsi de 21,5 heures, et la durée cible retenue est de douze mois, avec une durée minimale de neuf mois.

Or, de l’avis de la plupart des personnes auditionnées par le rapporteur, la courte durée des PEC est peu compatible avec la mise en place d’actions de formation et d’insertion de qualité, dont les effets ne sont parfois visibles que sur le long terme, a fortiori lorsque les bénéficiaires des contrats sont très éloignés de l’emploi et qu’un temps de resocialisation et d’adaptation à la situation de travail est indispensable.

Le choix d’une durée minimale de neuf mois, très proche de la durée « cible » de douze mois, risque en outre de générer des « trous dans la raquette » dans le dispositif, car certains demandeurs d’emploi gagneraient à être accompagnés sur une plus courte durée, en cas de besoins très spécifiques – renouer avec une situation d’activité, par exemple , ou au contraire sur une durée plus longue, notamment pour bénéficier d’actions de formation qualifiantes.

Par comparaison, beaucoup ont vanté les mérites des emplois d’avenir, contrats à destination des jeunes dont la durée allant jusqu’à trente-six mois permettait aux employeurs de s’engager pour mettre en place un véritable parcours professionnel d’insertion.

Certes, les parcours emploi compétences peuvent faire l’objet de renouvellements, mais ces derniers ne sont pas garantis car conditionnés à la réalisation effective de mesures d’accompagnement ou de formation depuis le démarrage du parcours en PEC. Additionnées aux autres reproches adressés au PEC, ces exigences liées au renouvellement ont pu être interprétées par certains employeurs comme de nouvelles contraintes administratives témoignant d’un manque de confiance de l’administration à leur égard, qui ont achevé de les détourner du dispositif des parcours emploi compétences.

De surcroît, le rapporteur remarque que l’hypothèse de durée moyenne des PEC retenue dans le cadre du projet de loi de finances pour 2019 est de 10,2 mois, soit une durée bien inférieure à la durée moyenne constatée de 10,9 mois depuis le début de l’année 2018. Cette hypothèse sous-évaluée pourrait, dès lors, conduire à une nouvelle diminution du nombre de parcours emploi compétences effectivement prescrits, faute de financements suffisants.

Au regard de ces éléments, le rapporteur considère qu’il est indispensable d’assouplir le critère de la durée des parcours emploi compétences en ne considérant plus la durée de douze mois comme une durée « cible », mais a minima comme une durée « moyenne », qui permettrait aux employeurs et aux bénéficiaires désireux de s’engager dans un parcours de développement des compétences et de formation plus long de le faire, sans avoir besoin de recueillir nécessairement l’aval du prescripteur à mi-chemin du parcours.

b.   Relever le taux minimal de prise en charge

Le relèvement du taux minimal de prise en charge des parcours emploi compétences apparaît également nécessaire pour que les employeurs potentiels continuent de considérer ces contrats comme un outil à part entière des politiques publiques d’insertion dans l’emploi.

La diminution d’un tiers du taux de prise en charge moyen des contrats aidés (de 72,5 % à 50,5 %) ne repose en effet sur aucune justification autre que le souci de réaliser des économies budgétaires. Le rapporteur estime pourtant que les personnes les plus éloignées de l’emploi ne doivent pas être la variable d’ajustement du budget de la mission Travail et emploi : au contraire, ces personnes ont à tout prix besoin d’un accompagnement sur le long terme pour revenir durablement dans l’emploi et ainsi trouver leur place dans la société.

Par ailleurs, la flexibilité donnée aux préfets de région pour fixer le taux de prise en charge entre 30 % et 60 % du SMIC brut, et moduler le cas échéant ce taux en fonction du profil des bénéficiaires, a conduit certaines régions à retenir des taux de base très bas, nous l’avons vu, pour les personnes sans emploi rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières d’accès à l’emploi mais ne présentant pas de caractéristique particulière susceptible de majoration (résidents de quartiers prioritaires de la politiques de la ville ou statut de travailleur handicapé par exemple).

Or de toute évidence, ces taux de prise en charge résiduels ne permettent pas de compenser l’investissement des structures employeuses tout au long du parcours. La mise en place d’un accompagnement personnalisé, de formation adaptées et du suivi nécessaire à la montée en qualification des salariés en contrat aidé sont chronophages et nécessitent un dédommagement financier adapté pour compenser le coût résultant nécessairement de ces actions en faveur de l’insertion dans l’emploi.

Sans remettre en cause le principe d’une libre fixation par les préfets des taux de prise en charge au niveau régional, le rapporteur considère donc qu’il serait judicieux de relever significativement le taux minimal de prise en charge.

2.   Renforcer la gestion territorialisée des politiques d’inclusion dans l’emploi et restaurer un climat de confiance parmi les employeurs

a.   Pour éviter les politiques de « stop and go », privilégier une gestion pluriannuelle des contrats aidés et promouvoir la création d’instances de concertation au niveau des territoires

Le coup d’arrêt brutal porté à la politique de contrats aidés à l’automne 2017, marqué par une forte diminution de la volumétrie des contrats aidés et du soutien financier de l’État, puis la transformation des CUI-CAE en parcours emploi compétences au début de l’année 2018 sont symptomatiques des politiques de « stop and go » qui régulent les contrats aidés depuis plusieurs décennies.

Dès lors, un nombre croissant de secteurs ou d’employeurs tend à se détourner de ces outils, pas tant par méconnaissance des nouveaux dispositifs qu’en raison de leur inadéquation par rapport aux exigences demandées ou par lassitude à l’égard des revirements perpétuels des pouvoirs publics sur les contrats aidés.

Sans revenir sur la mise en place des parcours emploi compétences, le rapporteur plaide en conséquence pour une gestion davantage pluriannuelle des politiques de contrats aidés.

Le fonds d’inclusion dans l’emploi pourrait constituer le support de cette gestion pluriannuelle. Le rapport de M. Borello incitait en effet les directions régionales des entreprises, de la concurrence de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE) à mettre en place, au niveau des territoires, des conventions pluriannuelles d’inclusion afin de fournir aux employeurs une plus grande visibilité, leur permettant de s’investir dans une démarche de longue durée : mise en œuvre de procédures internes d’accompagnement, relation suivie avec les organismes de formation pour mobiliser les formations les plus adaptées.

Le rapporteur est par ailleurs convaincu que la restauration d’un climat de confiance auprès des employeurs potentiels de salariés en parcours emploi compétences repose sur l’instauration d’une concertation permanente et un dialogue de qualité avec l’ensemble des acteurs concernés d’un territoire donné : représentants des différentes catégories d’employeurs, partenaires sociaux, collectivités territoriales, services territoriaux de l’État.

Les structures d’insertion par l’activité économique gagneraient naturellement à être associées à cette concertation, compte tenu des enjeux croisés entre l’IAE et les contrats aidés. Cette instance territoriale de concertation sur les emplois aidés et l’insertion par l’activité économique pourrait dès lors prendre la forme de comités territoriaux de l’inclusion dans l’emploi ([14]), dont l’échelle pourrait être régionale, départementale voire infra-départementale, afin de développer les liens entre les prescripteurs, les employeurs et les collectivités territoriales, et d’adapter les priorités et la répartition des moyens grâce à leur retour d’expérience.

b.   Proposer des alternatives pour l’emploi dans le secteur associatif et les collectivités territoriales habituées à recourir aux contrats aidés

Les PEC sont désormais octroyés aux employeurs uniquement au regard de leur capacité dinclusion dans lemploi. Cette nouvelle exigence met à lécart de nombreux employeurs du secteur associatif, quil sagisse dassociations à vocation culturelle, sportive ou sociale, qui nont évidemment pas tous pour objet prioritaire de favoriser linsertion durable dans lemploi de leurs salariés – et lon ne saurait leur reprocher. De fait, le secteur associatif a été particulièrement fragilisé par la diminution du volume de contrats aidés concomitante au relèvement des exigences daccompagnement et dinsertion demandées à lemployeur.

La diminution du nombre de contrats aidés est en outre intervenue dans un contexte financier déjà fragilisé pour les associations, en raison de la suppression de la réserve parlementaire et de la baisse des dotations de l’État au secteur associatif et aux collectivités territoriales.

Le rapporteur invite donc les pouvoirs publics à se pencher de nouveau sur la question de l’emploi dans le secteur associatif, extraordinaire gisement d’emplois, afin de redonner un souffle aux associations qui accomplissent quotidiennement, au sein des territoires, un travail remarquable pour le bénéfice de la société toute entière.

La révision des paramètres des parcours emploi compétences pour les employeurs du secteur associatif – relèvement des taux de prise en charge, relèvement de la durée des contrats, accompagnement spécifique par les prescripteurs des employeurs associatifs – pourrait constituer une réponse plus pertinente aux attentes de ces associations.

Au-delà de la problématique des contrats aidés, le rapporteur souhaite qu’une véritable réflexion sur les emplois au sein des associations et le soutien public à la vie associative soit rapidement lancée en concertation avec l’ensemble des parties prenantes, pour continuer à faire vivre le tissu associatif dans toutes ses composantes.

 


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   TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.   Audition de la ministre

La commission procède, le mardi 30 octobre 2018, à l’audition de Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail, sur les crédits de la mission « Travail et emploi » et du compte spécial « Financement national du développement et de la modernisation de lapprentissage ».

http://www.assemblee-nationale.tv/video.6851839_5bd880aeae05c.commission-des-affaires-sociales--audition-de-mme-muriel-penicaud-ministre-du-travail-sur-les-cre-30-octobre-2018

Mme la présidente Brigitte Bourguignon. Notre ordre du jour appelle l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2019 dont la commission des affaires sociales s’est saisie pour avis. Nous allons commencer par la mission « Travail et emploi ».

Je souhaite la bienvenue à Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail, à qui je vais donner la parole pour une présentation d’une dizaine de minutes. Nous entendrons ensuite notre rapporteur pour avis, Stéphane Viry, pour une intervention d’une même durée, puis nous passerons aux orateurs des groupes, qui auront la parole pour 5 minutes chacun, et enfin à une phase de questions et réponses.

J’appelle votre attention sur le fait que notre agenda est contraint et que nous devons en principe examiner cet après-midi deux missions budgétaires. Le bureau de la commission a décidé que la durée de l’ensemble de l’examen de chaque mission devrait être de deux heures, au plus. Je demande à chaque député désireux d’intervenir de se manifester tout de suite. Les inscriptions seront ensuite closes.

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail. Je vous remercie de me recevoir pour vous présenter le budget 2019 de la mission « Travail et emploi » dans le cadre de votre examen du projet de loi de finances.

L’année 2019 permettra de poursuivre la transformation profonde des politiques de l’emploi et de la formation professionnelle que j’ai engagée dès mon arrivée, en parallèle des ordonnances visant à renforcer le dialogue social. J’ai ainsi mené en 2018 des réformes structurantes qui reposent sur des choix forts et assumés de réallocation de nos moyens, notamment en faveur des compétences.

Nous avons réalisé ensemble le premier chantier, qui est la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel. Ce texte a réformé les règles de gouvernance et de financement des politiques de la formation professionnelle et de l’apprentissage en replaçant l’individu et l’entreprise au centre du jeu – l’individu doit aussi être en mesure de décider son propre parcours. Par ailleurs, cette loi a élargi la couverture de l’assurance chômage en vue de faciliter les transitions professionnelles, de lutter contre la précarité et de conforter le retour à l’emploi. Ces objectifs sont au cœur du document de cadrage remis aux partenaires sociaux en septembre dernier.

Le deuxième chantier est le déploiement du plan d’investissement dans les compétences (PIC). Un montant de 1,5 milliard d’euros a déjà été engagé cette année pour lancer une vingtaine de programmes qui servent deux objectifs. Il s’agit, tout d’abord, d’accompagner et de former les personnes peu qualifiées en recherche d’emploi, dans une logique d’acquisition des compétences attendues sur le marché du travail, qu’il s’agisse de jeunes, de chômeurs de longue durée ou de demandeurs d’emploi éloignés du monde du travail – c’est évidemment la priorité et le cœur du PIC. Le deuxième objectif est d’intensifier les effets de la loi « avenir professionnel » en accélérant, par l’investissement et l’innovation, la transformation de notre système de formation professionnelle.

Le troisième chantier consiste à renouveler notre approche de la politique d’inclusion dans l’emploi, qui est une priorité de mon budget pour 2019. Ce renouvellement repose notamment sur la création des « parcours emploi compétences » (PEC), dès le 1er janvier 2018, et sur des moyens effectifs pour que la mise en emploi s’accompagne d’ambitions en termes d’accompagnement et de formation. La dimension territoriale du pilotage des outils de l’insertion a, en outre, été renforcée avec la création du Fonds d’inclusion dans l’emploi, qui permet d’adapter à l’échelle régionale, c’est-à-dire au niveau des préfets et des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE), l’allocation des moyens aux besoins observés, dans une logique de fongibilité des enveloppes.

Le quatrième chantier mené en 2018 et en 2019 est un renforcement sans précédent du modèle inclusif des entreprises adaptées. C’est le sens de l’accord pluriannuel « Cap vers l’entreprise inclusive » que j’ai signé le 12 juillet dernier avec le secteur des entreprises adaptées, en présence de ma collègue Sophie Cluzel. Cet accord est le fruit d’une concertation nourrie avec ce secteur. La réforme vise à ce que 40 000 personnes handicapées supplémentaires puissent avoir accès à un emploi d’ici à 2022. Nous la mettrons en œuvre dès la fin de l’année avec le lancement, prévu dans les prochains jours, de l’expérimentation des emplois dits « tremplins », qui visent à faciliter les passerelles vers le milieu ordinaire.

Enfin, un plan de transformation de l’Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) a été annoncé il y a quelques jours. Nous pourrons y revenir. C’est une question de survie, et d’avenir, pour l’AFPA.

Je tiens à souligner que l’ensemble de ces actions ont été menées dans le strict respect des crédits qui m’ont été alloués.

En 2019, le budget de la mission « Travail et emploi » s’élèvera à 12 milliards d’euros. À périmètre constant, il y aura certes une baisse des crédits, de 2 milliards d’euros, mais cette évolution est principalement liée à l’extinction de certaines mesures qui a été décidée par le précédent Gouvernement et dont j’ai pris acte à mon arrivée. Cela concerne en particulier l’aide ponctuelle à l’embauche dans les très petites entreprises (TPE) et petites et moyennes entreprises (PME) – il n’y aura donc de changement de politique. C’est aussi un choix assumé de réduire, en volume, les contrats aidés pour en faire des parcours plus qualitatifs et pour tenir compte de la consommation réelle des crédits qui est observée cette année. Maintenant que nous avons transformé ce dispositif en « parcours emploi compétences », avec un accompagnement et une formation, la demande a beaucoup baissé, ce qui montre bien a contrario qu’il n’y avait vraiment pas d’accompagnement jusque-là. Les crédits demandés pour 2019 sont à la hauteur de leur consommation cette année.

Le budget que je vous présente poursuit les efforts engagés en 2018, avec un objectif affirmé et renforcé qui est de permettre l’inclusion dans l’emploi des personnes les plus vulnérables. Il est primordial qu’elles soient replacées au cœur des politiques que nous menons, en cohérence avec l’objectif de la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté qui a été présentée par le Président de la République le 13 septembre 2018.

C’est dans cet esprit de transformation et en multipliant les déplacements sur le terrain, dans le cadre de la semaine de l’apprentissage et de celle de la lutte contre la pauvreté, que j’ai construit ce budget de l’emploi et de la formation professionnelle pour 2019.

Tout d’abord, nous poursuivrons la montée en puissance du plan d’investissement dans les compétences, avec un engagement financier qui passera de 1,5 à 3 milliards d’euros. Il sera financé pour moitié par des crédits budgétaires et pour moitié par une contribution des entreprises, via France Compétences – cela représente 1,5 milliard d’euros qui ne figure pas directement dans ce budget mais qui accompagnera les politiques menées.

Ces crédits seront mobilisés dans quatre directions.

Il s’agit, tout d’abord, de mettre en œuvre des parcours de formation dans le cadre des pactes régionaux pluriannuels d’investissement dans les compétences qui sont actuellement en cours de négociation entre l’État et les régions – et avec les collectivités compétentes dans les territoires ultramarins. Le but est d’avoir vraiment une visibilité et une programmation au service de l’innovation et de la montée en gamme, grâce à une contractualisation avec les régions sur la période 2019-2022. Nous provisionnerons 1,5 milliard d’euros d’engagements pour la seule année 2019.

Ensuite, nous réaliserons un effort particulier pour certains publics de la politique de l’emploi, dont nous renforcerons l’articulation avec les enjeux de la formation. Après avoir consacré 20 millions d’euros en 2018 à la formation des bénéficiaires de l’insertion par l’activité économique, nous ferons passer ce montant à 60 millions d’euros par an à compter de 2019. On sait, en effet, que c’est souvent un des points qui manquent dans le domaine de l’insertion par l’activité économique.

Nous consoliderons, par ailleurs, les mesures d’accompagnement des jeunes dans le cadre du parcours contractualisé vers l’autonomie et l’emploi (PACEA), dont la formule la plus intensive, la Garantie jeunes, est destinée à 100 000 personnes – ce nombre est en augmentation par rapport à 2018, et plus encore par rapport à 2017. Ces mesures représenteront environ 550 millions d’euros l’année prochaine. Le plan d’investissement dans les compétences permettra aussi de renforcer les capacités d’accueil dans les écoles de la deuxième chance et les établissements pour l’insertion dans l’emploi (EPIDE), qui ont fait la preuve de leur réussite.

Enfin, nous allons promouvoir les expérimentations d’approches innovantes sur des problématiques ciblées, telles que la remobilisation et le retour à l’emploi dans les quartiers prioritaires de la ville, grâce à l’appel à projets « 100 % inclusion », dont je présenterai les premiers résultats le 6 novembre prochain, et grâce à la préparation à l’apprentissage, qui fait l’objet d’un appel à projets lancé auprès de l’ensemble des centres de formation d’apprentis (CFA).

Le budget de l’emploi pour 2019 traduit également un engagement important en direction des publics les plus éloignés de l’emploi, mais qui peuvent accéder au marché du travail grâce à un tremplin – ou à un marchepied. L’objectif est que 10 000 personnes supplémentaires puissent accéder à l’insertion par l’activité économique dès 2019. Les crédits correspondants seront ainsi augmentés de 50 millions d’euros.

Comme je l’ai déjà indiqué, 2019 sera aussi l’année du plein déploiement de la réforme des entreprises adaptées, qui vise à avoir une offre plus inclusive et diversifiée tout en changeant d’échelle. Les moyens, en hausse, que nous consacrerons à cette ambition seront de 400 millions d’euros. Au total, nous souhaitons que 10 000 personnes supplémentaires accèdent aux entreprises adaptées dès 2019.

Ces efforts sont complétés par 100 000 nouveaux « parcours emploi compétences » prescrits en 2019 et par 30 000 contrats dédiés à l’accompagnement des élèves en situation de handicap, dont le financement est désormais transféré sur le budget de l’éducation nationale, ce qui est plus logique car c’est ce ministère qui met en œuvre ce dispositif. Les 124 millions d’euros correspondant à ces 30 000 contrats ont donc été transférés de mon budget vers celui de l’éducation nationale.

L’expérimentation des emplois francs, lancée au 1er avril, se poursuivra en 2019. Après un démarrage progressif, qui est lié à l’appropriation du dispositif par les acteurs concernés, nous avons constaté une intensification des signatures au cours des dernières semaines – nous sommes à plus de 2 200 contrats signés à l’heure actuelle.

Par ailleurs, la réforme de la formation professionnelle et de l’apprentissage se traduira dans le budget 2019 sous deux formes.

Tout d’abord, la simplification du paysage des aides à l’apprentissage, et donc des démarches pour les entreprises, sera mise en œuvre dès le 1er janvier 2019. Il y aura ainsi une aide unique pour les entreprises de moins de 250 salariés qui emploient des apprentis de niveaux IV et V. Comme l’a prévu la loi « avenir professionnel », cette aide regroupe quatre dispositifs existants qui font l’objet de versements par les régions et l’État.

À cela s’ajoute la création d’un nouvel opérateur, France Compétences, qui associera les partenaires sociaux, l’État et les régions pour l’exercice de missions de nature financière, de régulation, de recommandation ou concernant la qualité, en vue de favoriser le développement et l’efficacité des politiques de formation et d’alternance.

À travers cette réforme, mais aussi de manière plus générale, nous souhaitons accompagner les actifs et les entreprises dans leurs phases de transition et leur montée en compétences, ainsi que les restructurations dans les territoires. Notre priorité est le travail, grâce à l’éducation, la formation et la valorisation sur le plan financier.

Pour ce qui est du coût du travail, l’année 2019 sera marquée par une simplification du paysage des exonérations, grâce au basculement de certains allégements spécifiques vers le droit commun, souvent plus favorable. Lorsque ce sera le cas, les allégements de charge s’appliqueront dès le 1er janvier, et non en octobre. Par ailleurs, un effort budgétaire de 3,8 milliards d’euros, soit un tiers de mon budget, sera consacré au soutien de l’emploi dans les services à la personne ou par la création d’entreprises.

La mise en œuvre et la réussite de ces orientations nécessitent de renforcer la performance et la coordination des acteurs du service public de l’emploi. L’expérimentation d’un rapprochement entre les missions locales et Pôle emploi ne doit pas être un sujet tabou. C’est en effet ce que demandent certaines collectivités territoriales. L’objectif est de permettre davantage de synergies, au service des demandeurs d’emploi et des entreprises, notamment grâce à des systèmes d’information communs.

De la même façon que nous demandons à tous les opérateurs d’identifier des leviers d’efficience dans le cadre d’Action publique 2022, mon ministère appliquera l’objectif gouvernemental de réduction des effectifs – en parallèle d’une amélioration de l’efficacité. La baisse sera de 233 emplois en 2019, ce qui représente un taux d’effort de 2,5 %, qui est stable par rapport à 2018. Les effectifs se réduiront de 1 385 équivalents temps pleins travaillés (ETPT) pour les opérateurs, y compris Pôle emploi – nous pourrons y revenir si vous le souhaitez.

Cet effort s’inscrit dans le cadre d’une réflexion plus générale sur l’évolution du périmètre des missions et de l’organisation territoriale de mes services, en particulier les DIRECCTE.

Enfin, le ministère relèvera le défi du numérique par le biais de la modernisation des systèmes d’information en appui des politiques de l’emploi. Pôle emploi fait de même en ce qui concerne ses propres systèmes.

Voilà ce que je voulais vous dire, mesdames et messieurs les députés, sur ce budget et ce qui fait sa cohérence. Il traduit, pour résumer, deux grandes ambitions : intensifier l’effort d’inclusion des plus vulnérables ; stimuler la création d’emplois, notamment par la libération de l’apprentissage et un renforcement de l’effort en ce qui concerne la baisse du coût du travail.

M. Stéphane Viry, rapporteur pour avis. Le deuxième budget de cette législature se caractérise par une baisse significative des crédits de paiement de la mission « Travail et emploi », qui s’élèveront à 12,4 milliards d’euros en 2019, contre 15,4 milliards d’euros dans la loi de finances initiale pour 2018.

Cette diminution des crédits est pour le moins paradoxale alors que l’ambition de ce projet de loi de finances est de « soutenir le travail » et d’« investir pour l’avenir » : il y a, à mes yeux, une certaine incohérence à déclarer que l’on soutient le travail quand les crédits qui y sont directement consacrés sont en diminution à presque tous les niveaux et que les difficultés d’accès à la formation et à l’emploi de nos concitoyens, en particulier les plus fragiles d’entre eux, sont plus que jamais d’actualité.

Certes, plusieurs effets de périmètre expliquent en partie la diminution des crédits, notamment la bascule des exonérations spécifiques pour le secteur de l’insertion par l’activité économique (IAE) et la formation professionnelle vers le régime de l’allégement général, renforcé, de cotisations patronales. Cette réforme, mise en œuvre dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2019, sera globalement plus favorable aux bénéficiaires de l’IAE et de la formation professionnelle dont les revenus sont proches ou au niveau du SMIC.

En dehors de ces effets de périmètre, néanmoins, l’importante contraction des crédits reflète avant tout des efforts d’économies qui pèsent sur le Programme 102, relatif à l’accès et au retour à l’emploi. Je pense en particulier aux économies demandées à Pôle emploi, mais aussi et surtout au coup de frein donné, pour la deuxième année consécutive, à la politique des emplois aidés.

Dans le cadre de mon avis budgétaire, j’ai donc choisi de travailler cette année sur les contrats aidés, qui ont été transformés en 2018 en « parcours emploi compétences ».

Depuis les travaux d’utilité collective (TUC), lancés en 1984, les contrats aidés ont toujours fait partie des outils incontournables des politiques publiques d’insertion dans l’emploi, même si leur appellation, leur ciblage et leurs paramètres ont été modifiés au fil du temps et des priorités politiques.

Alors que près de 300 000 personnes éloignées de l’emploi avaient eu recours, jusqu’en 2017, à un contrat aidé pour retrouver le chemin de l’emploi, le Gouvernement a décidé brutalement, il y a un an, d’interrompre la dynamique de ces contrats en réduisant significativement leur volume et en ajustant strictement leurs paramètres, principalement en vue de réaliser des économies budgétaires.

Les contrats aidés ont ainsi été recentrés sur le seul secteur non marchand : tous les autres dispositifs, notamment ceux destinés au secteur marchand, qui a été accusé de bénéficier d’effets d’aubaine, ont quasiment disparu au profit des seuls « parcours emploi compétences ».

Cette volte-face, non anticipée, a provoqué un vent de colère chez ceux qui recrutaient traditionnellement des salariés en contrats aidés, notamment des employeurs du secteur associatif et des municipalités, et elle a fait naître des inquiétudes qui, comme j’ai pu le constater sur le terrain, ne se sont toujours pas dissipées un an plus tard.

Sur le papier, les nouveaux « parcours emploi compétences » (PEC), qui ont été créés par la circulaire du 11 janvier 2018, constituent une avancée indéniable. Ils visent à accompagner les personnes les plus éloignées de l’emploi grâce à des actions de formation et à un accompagnement personnalisés, par analogie avec le triptyque qui a déjà porté ses fruits dans le secteur de l’IAE, à savoir l’emploi, la formation et l’accompagnement.

Le rapprochement avec l’IAE se traduit aussi par la création d’un fonds d’inclusion dans l’emploi qui permet une gestion déconcentrée des politiques menées dans ce domaine, au plus près des besoins des territoires. Grâce à ce fonds, les préfets de région ont désormais la possibilité d’utiliser jusqu’à 20 % de l’enveloppe des crédits allouée aux PEC afin d’augmenter le nombre d’aides au poste dans les structures d’insertion par l’activité économique ou de financer des initiatives territoriales innovantes.

À titre personnel, je pense que ce fonds est une avancée intéressante sur le plan de l’adaptation des politiques d’inclusion dans l’emploi aux réalités des territoires, mais je regrette qu’aucune instance de concertation n’ait été créée au niveau local pour accompagner la déconcentration des décisions. Ce sera en effet ma première question, madame la ministre : afin d’instaurer un dialogue de qualité avec l’ensemble des acteurs compétents dans le domaine de l’insertion dans l’emploi, que penseriez-vous de la création d’une instance de concertation permanente, au niveau territorial, sur les emplois aidés et l’insertion par l’activité économique, par exemple sous la forme de comités territoriaux de l’inclusion dans l’emploi ?

La ligne directrice des PEC est que « personne n’est inemployable » : il existe toujours une solution reposant sur la formation, l’accompagnement et l’emploi. La logique suivie est l’individualisation des parcours et de l’orientation vers des dispositifs permettant de lever les freins diagnostiqués en ce qui concerne l’accès à l’emploi.

Afin de s’assurer que les employeurs puissent proposer un accompagnement personnalisé, les exigences ont été renforcées à leur égard : ils font l’objet d’une sélection plus stricte de la part des prescripteurs, et ils doivent s’engager à offrir des postes permettant d’acquérir des compétences transférables, dans une perspective qui est celle de la construction d’un projet professionnel.

La transformation des contrats aidés en PEC permet ainsi, en théorie, d’individualiser et d’ajuster les contrats en fonction du profil et du projet des personnes concernées. Il serait difficile d’être en désaccord avec cette ambition : je suis personnellement convaincu qu’un accompagnement personnalisé de chaque demandeur d’emploi, grâce à un parcours adapté et individualisé à ses besoins, est la clé du retour durable vers l’emploi.

Pourtant, dix mois après la création du nouveau dispositif, j’ai pu constater, au cours des auditions que j’ai conduites et d’un déplacement sur le terrain, que les PEC sont encore loin de faire l’unanimité.

Cela tient tout d’abord à la réduction importante du nombre de contrats : 100 000 seront financés dans le cadre du PLF pour 2019, contre 170 000 cette année, hors effets de périmètre. Cette réduction inquiétante du volume des contrats aidés, pour la deuxième année consécutive, laisse à penser qu’un certain nombre de bénéficiaires potentiels resteront exclus du marché de l’emploi, faute de places disponibles au sein des PEC et d’alternatives adaptées.

Cette crainte est renforcée par l’importante fongibilité qui a été mise en œuvre, en 2018, au profit de l’IAE : les préfets ont utilisé en sa faveur la quasi-totalité de leurs marges de manœuvre, ce qui s’est traduit par une diminution encore plus forte du nombre de PEC disponibles que ce qui était prévu par la loi de finances. Je proposerai donc un amendement pour augmenter le nombre de PEC.

La fongibilité utilisée au détriment des PEC est non seulement révélatrice de la sous-budgétisation des besoins de l’IAE, mais aussi des difficultés d’appropriation des PEC par les employeurs. De leur point de vue, le principal point d’achoppement est l’augmentation du reste à charge : le taux de prise en charge, désormais fixé par les préfets de région, oscille entre 35 % et 60 % du SMIC brut selon les territoires et le profil des bénéficiaires. On est donc très loin de la moyenne de 72 % qui était observée en 2017.

J’ai pu constater que cela se traduit en pratique par un désengagement contraint de catégories entières d’employeurs potentiels, qui ne savent pas comment répondre à l’équation impossible des PEC. En effet, comment proposer, en moins d’un an, un accompagnement personnalisé, qui suppose un réel investissement de la structure employeuse, et des actions de formation de qualité pour des personnes très éloignées de l’emploi, qui présentent le plus souvent, au début de leur parcours, des difficultés particulières d’adaptation aux exigences du monde professionnel, alors que l’aide financière de l’État a parfois été divisée par deux par rapport aux anciens contrats aidés ?

La diminution du nombre de contrats et celle du montant de l’aide financière accordée par l’État sont ressenties comme une double peine par les employeurs du secteur non marchand qui, pourtant, ont toujours été convaincus de l’utilité sociale des contrats aidés et de leur capacité à accompagner vers l’emploi les publics en difficulté.

Ce désengagement non souhaité, et même subi, a des conséquences sur notre société car les contrats aidés permettaient au secteur associatif et aux petites collectivités, notamment rurales, de développer de nouvelles activités au service de la population ou, a minima, de maintenir un niveau de service de qualité.

Je peux concevoir que les PEC ne soient plus considérés comme un soutien direct au secteur associatif ou aux collectivités territoriales, car l’objectif visé est avant tout celui de l’inclusion dans l’emploi. Mais l’absence d’alternative crédible, en particulier pour les associations, est alarmante. Pourriez-vous nous indiquer, madame la ministre, quelles sont les intentions du Gouvernement en ce qui concerne le soutien au secteur associatif ?

Du point de vue des bénéficiaires, plusieurs paramètres des PEC, en particulier la durée des contrats, qui est comprise entre 9 et 12 mois, hors renouvellement, paraissent incompatibles avec l’ambition de proposer des parcours cohérents avec les besoins. Certains bénéficiaires gagneraient, par exemple, à suivre des formations sur le long terme, mais la durée trop courte des contrats et leur renouvellement non systématique les en empêchent. Ne pensez-vous pas, madame la ministre, qu’il conviendrait d’allonger la durée des PEC afin de donner plus de marges de manœuvre aux prescripteurs et de permettre une meilleure adaptation aux besoins des bénéficiaires ?

Pour conclure sur une note un peu plus positive, je relève avec satisfaction la relative embellie budgétaire qui concerne le secteur de l’insertion par l’activité économique : il bénéficiera en 2019 du financement de 5 000 postes supplémentaires en équivalent temps plein (ETP), ce qui portera le total à 76 000. J’avais attiré votre attention, il y a un an, sur la situation des structures de l’IAE, qui voyaient s’échapper des pistes de développement faute de places disponibles. Un effort est prévu pour 2019, mais il reste insuffisant au regard des attentes du secteur et de l’extraordinaire potentiel que représente l’IAE pour l’insertion dans l’emploi des personnes les plus fragiles. Seriez-vous favorable à un relèvement significatif de l’effort réalisé en faveur de l’IAE, grâce à une augmentation du nombre d’aides au poste de 20 % par an jusqu’à la fin du quinquennat ? Cela représenterait un peu plus de 14 000 postes supplémentaires en 2019, comme l’avait d’ailleurs recommandé le rapport de M. Jean-Marc Borello en janvier 2018.

Je vous avais également interrogée l’an dernier sur la possibilité de faire de la formation l’une des missions explicites de l’IAE, afin de permettre un meilleur accès à la formation des salariés en insertion. Cette demande semble avoir porté ses fruits, puisque le projet de loi de finances prévoit 60 millions d’euros en autorisations d’engagement au titre de la formation en IAE. J’ai néanmoins constaté qu’aucun crédit de paiement n’y est associé. Dans ces conditions, comment comptez-vous développer concrètement l’accès à la formation dans les structures d’insertion par l’activité économique ?

Enfin, à ma connaissance, aucune évaluation exhaustive de la réforme du financement de l’IAE qui a eu lieu en 2014 n’a été réalisée à ce jour. Pensez-vous qu’un rapport pourrait être remis sur ce sujet ?

Je vous remercie pour les réponses que vous nous apporterez, madame la ministre. Elles conditionnent mon avis sur les crédits de cette mission.

Mme la présidente Brigitte Bourguignon. Merci pour la qualité de votre travail, monsieur le rapporteur. Cela promet un débat intéressant…

Mme Fadila Khattabi. Le budget de l’emploi et de la formation professionnelle pour 2019 poursuit l’effort de transformation qui est engagé depuis près d’un an et demi, et met notamment en musique la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel. Ce texte, que nous avons adopté l’été dernier, a pour objectif principal de lutter contre le chômage de masse. C’est un budget responsable et ambitieux que vous nous présentez. Il traduit parfaitement les engagements qui ont été pris par le Président de la République et qui se concrétisent dans les différentes actions menées par le Gouvernement en faveur de l’emploi et, surtout, de l’emploi durable.

Les chiffres sont encourageants : le chômage s’est réduit d’une façon significative au cours des douze derniers mois et le nombre d’embauches en contrat à durée indéterminée (CDI) a augmenté de 10 %. Néanmoins, nous devons poursuivre la lutte contre le chômage de masse, qui met à mal la cohésion de notre société. Avec mes collègues du groupe La République en Marche, je me réjouis donc des choix politiques et stratégiques opérés dans ce budget, qui est avant tout en faveur des personnes les plus fragiles, c’est-à-dire peu ou pas qualifiées, et dont le fer de lance est un investissement massif, jamais égalé jusqu’à présent, dans les ressources humaines, l’emploi, mais aussi et surtout les compétences et l’insertion des personnes vulnérables. Ce ne sont pas là de simples déclarations, mais des actions bien concrètes et courageuses.

Sur les 15 milliards d’euros prévus dans le cadre du plan d’investissement dans les compétences (PIC), dont l’objectif est la formation d’un million de demandeurs d’emploi peu qualifiés et d’un million de jeunes décrocheurs au cours de ce quinquennat, 3 milliards d’euros sont fléchés dans le budget pour 2019, ce dont on ne peut que se réjouir. En cohérence avec le plan pauvreté, ce budget permettra aussi à 10 000 personnes supplémentaires de bénéficier de l’insertion par l’activité économique. C’est un dispositif qui a fait toutes ses preuves dans les territoires et qui s’adresse également aux personnes les plus éloignées de l’emploi. Ce budget renforce par ailleurs l’emploi inclusif. Comme vous nous l’avez souligné, madame la ministre, nous permettrons à 10 000 personnes supplémentaires en situation de handicap d’être embauchées dans des entreprises adaptées. C’est un bel objectif qui illustre bien la politique volontariste que nous menons depuis le début de cette législature en matière de handicap. J’en profite pour souligner que l’aide pour les entreprises adaptées passera de 338 à 400 millions d’euros.

En ce qui concerne les contrats aidés, désormais appelés « parcours emploi compétences », ce budget prévoit le financement de 100 000 nouveaux contrats centrés sur le secteur non marchand, auxquels il faut ajouter les contrats prescrits dans le cadre de l’accompagnement des élèves en situation de handicap – leur nombre s’élevait à 45 000 en 2018. Ces contrats seront naturellement reconduits, mais c’est désormais l’éducation nationale qui les financera.

Je vous invite, mes chers collègues, au nom du groupe La République en Marche, à apprécier ce budget de manière globale avant de crier au loup. Nous nous réjouissons de voir que les dispositifs donnant d’excellents résultats sont reconduits ou confortés dans leur fonctionnement. Je pense en particulier à la Garantie jeunes, qui sera généralisée pour 100 000 personnes, et aux écoles de la deuxième chance, pour lesquelles 12 000 places conventionnées sont prévues. C’est également un budget qui soutiendra les expérimentations innovantes, comme celle des « Territoires zéro chômeur de longue durée », qui bénéficiera de 22 millions d’euros de crédits pour 1 270 postes. Il s’agit d’un beau projet que je souhaiterais d’ailleurs développer chez moi, en Côte-d’Or, tout comme les emplois francs, dispositif qui bénéficiera de 237 millions d’euros en autorisations d’engagement.

On ne peut réformer la politique de l’emploi et renforcer la formation professionnelle sans avoir une parfaite connaissance des réalités socio-économiques des territoires et des besoins des entreprises. Des pactes pluriannuels vont donc être signés, dans le cadre du PIC, avec toutes les régions – leur rôle est indiscutable en la matière.

L’objectif ultime de ce budget, ambitieux et responsable, est de permettre à chacun, notamment les personnes les plus vulnérables, de choisir son avenir professionnel. Pour les publics dits « fragiles », cela ne peut pas se faire sans un accompagnement individualisé et une prescription de qualité. Dans la continuité des chantiers qui ont été engagés, pourriez-vous nous donner des éléments, madame la ministre, sur la mise en route concrète du conseil en évolution professionnelle, dans sa nouvelle version, et des éléments de calendrier sur les prochains appels d’offres qui seront lancés ?

M. Gérard Cherpion. Merci pour votre intervention liminaire, madame la ministre. Vous avez présenté ce budget avec talent et conviction, mais on est obligé de constater que les crédits sont en recul par rapport à l’année dernière. J’adresse mes félicitations à Stéphane Viry pour la qualité de son travail, qui devrait, me semble-t-il, faire consensus à propos de la réinsertion des personnes les plus éloignées de l’emploi.

Les crédits de la mission « Travail et emploi » sont en baisse, je l’ai dit, d’environ 3 milliards d’euros à périmètre constant. Il est vrai que l’on retrouve un milliard d’euros dans le PLFSS, au travers des exonérations de charges qui sont liées, en particulier, à l’apprentissage. Sur les deux milliards d’euros restants, j’ai compris, d’après ce que vous nous avez dit, que 1,5 milliard d’euros reviendrait aussi via France Compétences, qui n’est pas né mais apportera déjà des financements – c’est d’ailleurs un exercice assez intéressant… J’espère que cela se passera le mieux possible car c’est dans l’intérêt de tous, mais je suis quand même inquiet. Comme vous l’avez rappelé, France Compétences est de nature quadripartite, et c’est à cette agence de prendre la responsabilité de financer les actions qu’elle souhaite.

Il y a des ruptures avec le quinquennat précédent, notamment la suppression des emplois d’avenir, des contrats de génération, de l’aide à l’embauche dans les très petites entreprises (TPE) et du « plan 500 000 formations ».

Je voudrais revenir sur Pôle emploi : après avoir connu une baisse de 50 millions d’euros en 2018, ses moyens diminueront encore de 85 millions d’euros l’année prochaine, alors que le chômage est reparti légèrement à la hausse. L’Allemagne et les États-Unis sont au plein-emploi, le taux de chômage étant de 3,7 % dans ce dernier pays, mais nous continuons à avoir un chômage de masse.

L’équilibre du système est réalisé grâce à la subvention versée par l’Union nationale interprofessionnelle pour l’emploi dans l’industrie et le commerce (UNEDIC), qui finance 10 % du budget de Pôle emploi, lequel s’élève à environ 3,5 milliards d’euros. D’où l’importance de la négociation relative à l’UNEDIC, pour laquelle votre lettre de cadrage a fixé pour objectif d’arriver à une économie comprise entre 3,5 et 4 milliards d’euros chaque année.

L’assurance chômage change par ailleurs de nature : alors qu’elle était assurantielle, elle se transforme en un système de solidarité nationale, qui sera financé par une partie de la contribution sociale généralisée (CSG). On passe ainsi d’un paritarisme de gestion à un paritarisme de caution.

Je ne vais pas m’étendre sur les problèmes des missions locales, dont une partie du budget va disparaître – il y aura une baisse de 4 % des crédits. Bernard Perrut reviendra, en effet, sur ce point.

Je m’interroge sur les maisons de l’emploi : elles ont disparu de la loi de finances, alors qu’il était convenu de réaliser une évaluation de ce dispositif afin de voir s’il était nécessaire ou non de le maintenir.

En ce qui concerne l’apprentissage, on arrive à une aide unique, qui bénéficiera seulement aux entreprises de moins de 250 salariés. Les crédits de paiement passeront de 1,2 milliard d’euros à 172 millions d’euros, mais il est indiqué qu’il y aura 922 millions d’euros en autorisations d’engagement : j’aimerais savoir si c’est lié à la montée en charge du dispositif.

Enfin je voudrais terminer sur l’AFPA qui est en difficulté et qui a annoncé des suppressions de postes. Il y a deux ans à peine, nous avions légiféré sur sa transformation en établissement public industriel et commercial (EPIC). À l’époque, j’avais dit que ce n’était pas la solution, que ce n’était pas cela qui allait absorber les dettes de l’AFPA. Le budget, tel que présenté, prévoit la disparition de 1 081 ETP. De son côté, l’AFPA a annoncé la disparition de 1 541 contrats en CDI, la création de 603 postes et un solde net de 550 emplois, ce que je ne comprends pas très bien. L’État et l’AFPA ne donnent pas les mêmes chiffres. Madame la ministre, que comptez-vous faire avec l’AFPA ? Cette structure a-t-elle un avenir ? Qui va prendre en charge les plus de 200 millions d’euros de dettes accumulées par cet organisme nécessaire et d’intérêt public ?

Mme Michèle de Vaucouleurs. Nous nous apprêtons à nous prononcer sur les crédits de la mission « Travail et emploi » et sur ceux du compte spécial consacré à la modernisation de l’apprentissage. Ce budget s’inscrit pleinement dans les transformations structurelles initiées par les ordonnances réformant le code du travail et sur la loi relative à la liberté de choisir son avenir professionnel, qui a désormais été promulguée.

Ce budget concrétise les changements forts voulus par le Gouvernement et adoptés par le Parlement pour permettre au plus grand nombre d’acquérir tout au long de la vie les compétences nécessaires à l’adaptation aux mutations économiques et sociales. Il témoigne aussi de l’attention spécifique portée aux publics et aux territoires les plus en difficultés, avec deux axes forts : créer les conditions d’une société plus inclusive pour les personnes en situation de handicap ; combattre les inégalités en favorisant la lutte contre la pauvreté dès la naissance et pour l’accès à l’emploi. Ainsi, les moyens affectés à l’accès et au retour à l’emploi se concentrent sur les publics les plus en difficultés : personnes en situation de handicap, demandeurs d’emploi de longue durée, jeunes sans qualification, résidents de quartiers prioritaires de la ville (QPV).

Le groupe du Mouvement Démocrate et apparentés (MODEM) salue cette attention particulière qui est nécessaire pour que chacun puisse être inséré dans notre société et s’y épanouisse. Nous sommes en effet convaincus que le travail reste un levier d’insertion déterminant et primordial.

Les nombreuses mesures prises en faveur de l’inclusion des personnes en situation de handicap visent, d’une part, à créer davantage d’emplois dans les entreprises adaptées – la trajectoire est de 40 000 nouveaux postes à l’horizon 2022 et près de 400 millions d’euros dans ce PLF pour 2019 contre 371 millions d’euros en 2018 – et, d’autre part, à réformer en profondeur les modalités d’accès à l’emploi pour ces personnes en favorisant notamment les passerelles et l’accès au milieu ordinaire, ce qui reste notre objectif premier.

Les mesures en faveur des personnes éloignées de l’emploi sont également à la hauteur des engagements. Elles se fondent sur la conviction profonde que c’est par l’acquisition de compétences, qui est émancipatrice, que l’accès à l’emploi durable peut être effectif. Cet objectif se concrétise à travers le renforcement des actions de formation financées par le PIC, l’expérience acquise des structures d’IAE – où 5 000 postes seront ouverts –, la montée en charge de la Garantie jeunes qui prévoit des périodes d’activité – l’objectif est d’accompagner 100 000 nouveaux jeunes –, l’acquisition ou la réacquisition de compétences de bases avec les écoles de la deuxième chance (E2C) ou les EPIDE. Ces derniers sont largement soutenus : le maintien de leurs crédits va permettre l’extension des dispositifs – création d’un nouvel EPIDE en 2020 – et la poursuite de l’expérimentation des emplois francs – 25 000 contrats d’ici à la fin de l’expérimentation – et des « Territoires zéro chômeur de longue durée ».

Le budget prend également en compte la montée en puissance de l’apprentissage : il est prévu une hausse de 5 % des contrats signés en 2019 et une garantie de financement de chaque contrat. Nous nous réjouissons de cette montée en puissance actée dans la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, que notre groupe avait soutenue et enrichie.

On notera spécialement les forts moyens attribués au PIC dont les crédits sont abondés par des fonds de concours. Ces moyens permettront de financer des formations supplémentaires et des parcours personnalisés d’accès à la qualification, mais aussi de développer une ingénierie de formation plus performante et plus agile pour répondre aux enjeux de repérage des publics et de leur accompagnement.

Sans modifier notablement le montant des aides dévolues à la baisse du coût du travail, le budget les fait évoluer vers l’aide unique en faveur de l’apprentissage.

En outre, l’État continue à accompagner les TPE et PME dans les difficultés conjoncturelles qu’elles peuvent rencontrer, à travers une prise en charge du chômage partiel, les aides à l’embauche ou les aides à la création d’entreprise.

Notre groupe salue ce budget ambitieux et porteur d’espoir pour l’emploi des personnes qui en sont les plus éloignées. Nous voterons donc pour les crédits de la mission ainsi que ceux du compte spécial.

J’aurais cependant, madame la ministre, quelques questions à vous poser.

Où en sont le renforcement et la modernisation du dialogue social, initiés par les ordonnances adoptées il y a plus d’un an ? En 2018, l’Action « dialogue social et démocratie sociale » avait fait l’objet d’autorisations d’engagements élevées. L’investissement nécessaire a-t-il été réalisé ?

Il est précisé que France Compétences sera dotée de quarante-quatre ETP pour 2019, une dotation susceptible d’évoluer. Pouvez-vous nous préciser l’enveloppe budgétaire attribuée à France compétences cette année, étant entendu qu’un fonds de concours de 1,5 milliard d’euros sera destiné au financement du PIC ?

M. Francis Vercamer. Force est de constater le caractère paradoxal de ce budget de la mission « Travail et emploi » pour 2019.

Le Gouvernement nous assure que l’emploi est l’une de ses priorités et pourtant les crédits de la mission accusent une baisse significative. S’il est naturel que l’ensemble des départements ministériels soient appelés à la maîtrise de la dépense publique, on peut néanmoins s’étonner de l’ampleur de la baisse, dans la mesure où la mobilisation en faveur de la création d’emplois et de l’accompagnement des demandeurs justifierait, sinon une hausse des crédits, au moins leur sanctuarisation.

Certes, nous constatons que vous ouvrez la voie à l’innovation dans les territoires et nous saluons les efforts déployés en faveur de la formation. Pour autant, nous constatons que plusieurs orientations de votre budget laissent, pour l’heure, place à de nombreuses interrogations.

Quelle est la place des partenaires locaux du service public de l’emploi ?

Ce budget est le premier à ne plus financer les maisons de l’emploi (MDE) dont l’objet est, d’une part, d’assurer la convergence des politiques publiques de l’emploi et de la formation professionnelle et, d’autre part, d’associer les élus locaux, de fédérer l’action des partenaires et d’ancrer le service public de l’emploi dans les territoires. Les MDE sont clairement l’outil support de la territorialisation des politiques de l’emploi. Or, à l’instar de vos prédécesseurs, vous avez choisi de poursuivre la réduction des financements à ces structures jusqu’à leur supprimer tout soutien de l’État, ce qui menace l’existence de nombre d’entre elles à plus ou moins brève échéance.

En cohérence avec leurs convictions décentralisatrices, les membres du groupe UDI, Agir et Indépendants (UAI) ne peuvent que déplorer ce retrait. Nous le regrettons d’autant plus qu’il pénalise les territoires les plus touchés par le chômage et la désindustrialisation, et les communes les moins riches qui auront les plus grandes difficultés à subvenir seules aux besoins de financements de MDE. Ce retrait pose la question du rôle que peut encore jouer l’État dans la gouvernance des structures qui survivront tant bien que mal à la suppression des financements.

L’exemple des MDE augure mal de la manière dont est perçue l’expérimentation proposée par le Premier ministre, en juillet dernier, dans le cadre du plan « Action publique 2022 » et visant à associer davantage, dans les territoires volontaires, Pôle emploi et les missions locales.

Pour notre groupe, il ne s’agit pas ici de rejeter d’emblée toute perspective d’expérimentation pour gagner en efficience. Cependant, nous considérons que les élus locaux ont une influence décisive dans le développement économique, donc de l’emploi local, et dans la gouvernance des missions locales. Ils sont évidemment attentifs à ce que les structures d’accompagnement vers l’emploi, qu’ils financent, soient efficaces.

Créer des synergies avec Pôle emploi, pourquoi pas ? Mais créer des synergies au moment où ce budget entérine la suppression de 800 postes chez l’opérateur du service public de l’emploi, est-ce vraiment créer des dynamiques de territoire ? N’est-ce pas, plus vraisemblablement, opérer un transfert de charges vers les missions locales, comme le précise la note de la Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) : « la participation aux expérimentations doit s’accompagner d’un engagement des élus à maintenir le niveau de leurs subventions pendant toute la durée de l’expérimentation » ?

Comme vous, nous pensons qu’il faut donner une chance à l’expérimentation mais en la plaçant, sans arrière-pensée, sur de bons rails. Pour être au plus près du terrain, pourquoi passer systématiquement par un organisme national ? Pourquoi ne pas se fonder sur la structure d’accompagnement la plus pertinente à porter l’expérimentation ? Dans certains QPV où les jeunes sont particulièrement victimes du chômage, les missions locales sont les plus aptes à agir.

Pourquoi ne pas proposer également des expérimentations dans lesquelles les élus locaux pourraient être associés à la gouvernance des agences locales de Pôle emploi, si l’on veut vraiment faire le pari de la territorialisation ?

Enfin je mentionnerai trois points touchant à la situation de l’emploi.

S’agissant de l’emploi des seniors, les résultats restent particulièrement contrastés. Si notre pays a eu tendance à rattraper son retard pour ce qui concerne le taux d’emploi des 55-59 ans, celui des 50-54 ans reste en berne. Les disparités régionales demeurent importantes. La région Hauts-de-France est ainsi touchée par la désindustrialisation et de nombreux bassins d’emplois peinent à retrouver une activité économique.

Pour ce qui est des emplois francs, je voudrais saluer l’efficacité du dispositif créé dans le cadre de l’expérimentation menée dans les QPV. Son succès doit beaucoup à la clarté et à la simplicité de l’aide accordée aux entreprises et à l’implication des élus locaux. Citons l’exemple de la Métropole Européenne de Lille où l’objectif initial de 1 000 embauches en emplois francs a déjà été atteint. Ce succès encourageant incite à faire confiance aux élus locaux, à étendre le dispositif dès à présent et à le pérenniser pour l’avenir.

Quant à l’expérimentation dite « Territoires zéro chômeur de longue durée », elle connaît aussi un développement encourageant. De nombreux territoires, au-delà des dix concernés par l’expérimentation, sont candidats à ce dispositif. L’évaluation finale de l’expérimentation doit avoir lieu en 2020. Au regard des résultats, devons-nous vraiment attendre deux ans pour tenter une seconde expérimentation ? Nous présenterons un amendement proposant d’amorcer une partie des fonds nécessaires à une seconde expérimentation.

Enfin, bien qu’encourageants, ces deux dispositifs ne sont que des expérimentations qui ne compensent pas la baisse du nombre des contrats aidés dont les titulaires ne trouvent pas nécessairement de solutions de repli dans les territoires ruraux ou périurbains.

Le propre d’une société juste et solidaire est de s’assurer de ne laisser personne au bord du chemin. Malheureusement, nous ne pensons pas que votre politique de l’emploi soit parvenue à la hauteur de cet enjeu. Nous ne voterons donc pas pour ce budget.

M. Boris Vallaud. Au nom du groupe Socialistes et apparentés, je tenais tout d’abord à remercier Stéphane Viry pour la qualité de son rapport et de son intervention qui nous éclairent utilement.

Depuis quelques jours, le Gouvernement fait feu de tout bois pour assurer aux Françaises et aux Français que sa politique a une priorité : que le travail paye. Pour cela, encore faudrait-il que la politique du Gouvernement contribue à une baisse du chômage.

Il y a un an, vous passiez en force par ordonnances un ensemble de mesures dont vous promettiez qu’elles allaient améliorer le fonctionnement du marché du travail. Nous étions nombreux à dire qu’elles allaient surtout dans le sens d’une précarisation des salariés, d’un amoindrissement de leur protection collective et d’une facilitation des licenciements. Les derniers chiffres du chômage – que je ne lis pas de la même façon que notre collègue – nous donnent malheureusement raison : depuis un an, il y a 22 000 demandeurs d’emploi de plus, toutes catégories confondues, et 16 000 demandeurs d’emploi en contrat précaire – c’est‑à‑dire des catégories B et C – de plus.

Au printemps, vous avez prétendu apporter la solution avec les fameux droits nouveaux accordés aux Françaises et aux Français pour qu’ils puissent se former et s’adapter à ce marché du travail dérégulé. À nouveau, les résultats sont décevants : les entrées en formation sont en baisse de 3 100 personnes entre 2017 et 2018 ; l’AFPA, l’opérateur historique de la formation des adultes, est en pleine crise et s’apprête à supprimer 1 541 postes en CDI et à fermer trente-huit sites. En matière de formation, votre budget indique 760 millions d’euros au titre du PIC 2018. Dans le bleu budgétaire, figure un fonds de concours d’un montant de 1,5 milliard d’euros en provenance de France Compétences. Il nous sera utile que vous puissiez nous éclairer sur la réalité de ces circuits financiers.

Vous avez supprimé 250 000 emplois aidés, condamnant autant de Françaises et de Français. Considérant qu’il s’agissait de faux emplois, vous préfériez en faire de vrais chômeurs. Au passage, vous avez aussi fragilisé de nombreux employeurs associatifs : 12 500 associations ont disparu en un an, ce qui représente une hausse de 15 %. Les petites associations considèrent que 60 000 de leurs emplois sont menacés.

Dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), les contrats aidés étaient financés à 80 % ou 90 % par l’État et ils ne le sont plus qu’à 40 % avec votre dispositif PEC, ce qui ne fait qu’accroître les difficultés financières d’établissements déjà fragiles.

La très faible montée en puissance de votre dispositif PEC, que vous opposiez aux emplois aidés, témoigne de votre erreur d’appréciation aux dépens des Français les plus éloignés de l’emploi ainsi que des associations. Vous aviez prévu une enveloppe budgétaire couvrant 200 000 contrats en loi de finances initiale l’année dernière, or seulement 20 % étaient consommés en mai dernier. Vous entérinez cet échec en ne prévoyant plus que 100 000 PEC pour 2019.

Vous revenez devant nous, madame la ministre, pour nous présenter un budget en baisse de plus de 2 milliards d’euros que vous ne manquez pourtant pas de qualifier d’ambitieux.

Vous vous apprêtez à poursuivre la suppression des emplois aidés à hauteur de 60 %. Les aides à l’embauche spécifiques pour les TPE-PME sont supprimées. Pôle emploi va devoir supprimer 800 postes après en avoir déjà supprimé 600 en 2018. Les missions locales perdent des crédits alors que votre priorité est l’accompagnement des demandeurs d’emploi. Vous réduisez de 20 % le budget des dispositifs locaux d’accompagnement, pourtant essentiels à la consolidation technique et financière des employeurs associatifs et de l’insertion économique.

Pour celles et ceux qui ont un travail, encore faut-il qu’il paie, comme le proclame le Gouvernement. Je serai tenté de compléter ce truisme : tout travail mérite salaire. Il serait juste que le salaire paie plutôt que les grands-mères. Ce n’est pas avec les annonces du Gouvernement que l’on paie ses courses surtout quand ces annonces sont de la fausse monnaie : la prime d’activité augmentera seulement de 8 euros pour un salarié au SMIC, inflation non déduite, et non pas de 20 euros pour tout le monde comme annoncé.

Le rapport mondial de 2018 sur les inégalités souligne l’importance des syndicats et de la représentation des salariés pour l’amélioration des conditions de travail et la réduction des écarts de rémunération.

Quelles leçons en tirez-vous dans ce budget ? Dans vos documents budgétaires, vous proclamez que « la politique du travail ne peut se construire et s’appliquer sans la participation active des partenaires sociaux ». Or vous avez déjà démantelé le compte personnel de prévention de pénibilité (C3P), vous avez supprimé le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) et vous avez affaibli comme jamais les moyens de la représentation salariale. Dans ce budget, vous voulez réduire de 900 000 euros les crédits alloués au défenseur syndical qui assiste ou représente les parties devant les conseils de prud’hommes, vous diminuez de 100 000 euros les crédits alloués au développement de la négociation collective. Ces mesures ne vont pas dans le bon sens et relèvent de la duplicité du discours.

Comme depuis bientôt un an et demi, les députés socialistes vont donc s’opposer vigoureusement à votre politique. Ils présenteront des amendements pour montrer que d’autres politiques sont possibles.

M. Pierre Dharréville. Au nom du groupe de la Gauche démocrate et républicaine (GDR), je remercie à mon tour le rapporteur pour le travail qu’il a effectué.

Après les coupes opérées l’année dernière, ce budget représente la plus forte baisse de crédit en volume comme en pourcentage sur l’ensemble des missions budgétaires : hors effets de périmètre, c’est plus de 2 milliards d’euros en moins pour la politique du travail et de l’emploi en 2019.

Premier point : c’est un budget de rapetissement du service public de l’emploi, comme en témoigne la diminution de 18 % des crédits affectés au Programme 102. En 2019, la subvention de fonctionnement de Pôle emploi est diminuée de 85 millions d’euros, après 50 millions d’euros d’économies en 2018. Pour autant, le chômage ne reflue pas et la charge de travail des conseillers de Pôle emploi est déjà importante, certains d’entre eux devant suivre des portefeuilles de 200 ou 300 demandeurs d’emploi. Comment garantir un accompagnement de qualité dans ces conditions ? Parallèlement, la dotation à Pôle emploi pour le financement de l’allocation de solidarité spécifique des chômeurs en fin de droits diminue de 400 millions d’euros au motif que la conjoncture économique va s’améliorer, selon le bleu. Nous craignons que cela ne se traduise par une réduction des droits.

Deuxième point : ce budget contribue à fragiliser les politiques d’accompagnement des publics et des structures, notamment les associations et les petites entreprises. Il prend acte de la division par deux des contrats aidés, transformés en PEC, dont 100 000 sont inscrits au budget pour 2019. Une étude de la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES), parue en septembre, montre une baisse de 41 % des contrats aidés entre mi-2017 et mi-2018. Cette décision brutale a contribué à fragiliser de nombreuses structures du tissu associatif dans le domaine de l’éducation, du social, du sport ou de la culture.

Les nouvelles suppressions de contrats aidés que vous prévoyez dans ce budget ne sont pas compensées à la même hauteur par la mise en place d’autres dispositifs en faveur de l’insertion professionnelle. On note seulement la création de 25 000 emplois francs pour les personnes issues des QPV et de 5 000 postes pour le secteur de l’IAE. Dans le même temps, les crédits dédiés à l’insertion des jeunes sont pérennisés. Nous notons également la fin de l’aide à l’embauche en PME, d’un montant d’un milliard d’euros, qui semblait bien fonctionner. Votre logique se traduit donc par le recentrage des financements vers les plus démunis, préfigurant un système réduit à l’assistance.

Troisième point : c’est un budget de compression des effectifs dédiés à la politique de lutte contre le chômage et de la formation. Il suffit de regarder les chiffres. Au sein du ministère du travail et des services déconcentrés, 239 postes sont supprimés dans le PLF pour 2019, un niveau comparable à celui de l’année dernière. Comment l’inspection du travail pourra-t-elle remplir convenablement ses missions de contrôle et de conseil sur le terrain dans un contexte de baisse des moyens, alors que les ordonnances sur la réforme du code du travail ont renvoyé aux entreprises la création des normes sociales ?

Dans le périmètre non étatique, vous prévoyez la suppression de 1 485 postes, dont 800 postes au sein de Pôle emploi, en garantissant « que cela ne dégradera pas le service apporté aux demandeurs d’emploi et aux entreprises ». Nous avons du mal à y croire. Je voudrais relayer ici les interpellations de l’ensemble des syndicats de Pôle emploi, qu’ils nous ont transmises dans un courrier du 20 octobre. Ils indiquent : « Aucun poste n’est de trop dans notre établissement et ces informations suscitent de fortes inquiétudes du personnel alors que le nombre de demandeurs d’emploi, catégories A, B et C confondues, ne cesse de croître : 7,2 % de plus en un an. ».

L’AFPA se voit amputée de 550 emplois alors que c’est un acteur majeur de la formation professionnelle dans notre pays et que la marchandisation de la formation professionnelle à l’œuvre l’a placée en position de grande fragilité. Je vous ai demandé à plusieurs reprises quelle était votre ambition pour cet organisme. Les dernières décisions prises ont de quoi inquiéter et elles ne constituent pas une réponse satisfaisante. Pour ce qui me concerne, je n’accepte pas ce renoncement au service public de l’emploi. Dans le territoire où je suis élu, il y a l’un des trente-huit sites dont la fermeture a été annoncée. Cela constitue un véritable contresens économique et pour les populations concernées.

Comment remplir vos engagements en matière de lutte contre le chômage et de formation alors que vous affaiblissez les principales structures qui mettent en œuvre ces politiques sur le terrain ? Selon nous, il y a là des contradictions majeures.

Au-delà des faux-semblants, ce budget s’apparente à un budget de rapetissement du service public de l’emploi, de désengagement de l’État en matière d’accompagnement des publics et de la politique du travail. Notre appréciation est donc négative sur l’ensemble de cette mission.

Mme Jeanine Dubié. Au nom du groupe Libertés et Territoires, je voulais remercier le rapporteur pour son travail et pour l’éclairage qu’il nous a apporté.

Dans le Programme 102 « Accès et retour à l’emploi », et plus particulièrement dans l’Action n° 1 « Amélioration de l’efficacité du service public de l’emploi » et l’Action n° 2 « Amélioration des dispositifs en faveur de l’emploi des personnes les plus éloignées du marché du travail », il est question d’un retour durable à l’emploi. À ce titre, Pôle emploi est l’acteur central. Néanmoins, on constate une baisse du budget global de 12,3 %, c’est-à-dire de près d’un milliard d’euros.

La ligne concernant les subventions pour charge de service public baisse de 85 millions d’euros. Or le Gouvernement a fait de l’accompagnement des personnes les plus éloignées de l’emploi, une priorité. Cela nous paraît contradictoire.

Dans l’action n° 2 du Programme 102, vous prévoyez la création de 5 000 aides ou postes dans l’IAE pour 2019 afin d’atteindre les objectifs annoncés dans la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté. Toutefois, nous regrettons la communication peu claire du Gouvernement sur le sujet. Ces postes toucheront 100 000 personnes mais sur quatre ans et pas en une année.

Vous annoncez aussi 100 000 entrées en Garantie jeunes, comme les années précédentes. C’est le statu quo. C’est d’autant plus regrettable qu’il n’y a aucune proposition nouvelle et aucun dispositif innovant pour les jeunes de dix-huit à vingt-cinq ans. La part réservée à la Garantie jeunes est en baisse même si le budget global de cette action est en hausse par rapport à 2018. Que faut-il comprendre ?

Le PIC est doté de 14 milliards d’euros entre 2018 et 2022 pour accompagner 2 millions de jeunes et demandeurs d’emploi peu qualifiés. Or ce PIC est financé à hauteur d’un milliard d’euros en 2019. Est-ce à dire qu’il y aura une croissance exponentielle des budgets dans les années à venir ?

Madame la ministre, comment pensez-vous atteindre concrètement vos objectifs en matière d’aide aux personnes les plus éloignées de l’emploi, comme évoqué dans la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté, avec autant d’incohérences ? Pouvez-vous nous apporter les éléments de compréhension face à nos interrogations ?

Mme la présidente Brigitte Bourguignon. Madame la ministre, vous avez la parole pour répondre aux orateurs des groupes. Nous passerons ensuite aux questions des députés.

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail. Je vous remercie pour vos questions qui vont me permettre de préciser certains points de la mission « Travail et emploi ».

Concernant les chiffres globaux, la différence est de 2 milliards d’euros – et non pas de 3 milliards d’euros – à périmètre comparable. Cette différence est due, à hauteur d’un milliard d’euros, à la fin de la prime à l’embauche pour les TPE-PME. Cette mesure, décidée par le précédent Gouvernement, produit encore ses effets mais elle n’a pas d’incidence sur la politique que nous menons. La différence s’explique aussi par la baisse des contrats aidés, les PEC, à hauteur de 900 millions d’euros. Quand on fait du qualitatif pour les plus vulnérables, de façon vraiment efficace, afin de leur permettre d’accéder à l’emploi, il y a moins de demandes.

En matière de PEC, nous sommes partis de la conviction que nul n’est inemployable et d’un constat : toute l’histoire du mouvement associatif français montre que pour être efficace il faut allier travail, formation et accompagnement. Nous avons été guidés par cette exigence pour la création des PEC qui remplacent les contrats aidés. Que constate-t-on cette année ? Une augmentation de 9 % des parcours allant vers des compétences reconnues, de 6 % vers des qualifications reconnues, et de 11 % vers un projet professionnel. Quelque 42 % des bénéficiaires sont des demandeurs d’emploi de longue durée, 21 % sont des allocataires du revenu de solidarité active (RSA), 18 % sont des personnes en situation de handicap et 13 % viennent de QPV.

Nous constatons un resserrement du dispositif sur le public qui en a le plus besoin, ce qui n’était pas toujours le cas avec les contrats aidés qui bénéficiaient parfois à des titulaires d’un bac + 3 ou d’un bac + 4 pour lesquels l’employeur profitait d’un effet d’aubaine. Nous avons posé une exigence de dialogue tripartite entre l’employeur, le bénéficiaire du contrat et Pôle emploi, au début et à la fin du parcours, ce qui permet d’envisager des formations plus longues pour certains. La durée recommandée se situe autour de douze mois et la moyenne constatée est de 10,2 mois car elle s’apprécie en fonction des besoins du bénéficiaire. Il y a très souvent un renouvellement. En l’état actuel des choses, la moyenne entre les contrats initiaux et les renouvellements est de 10,2 mois, mais ce n’est pas une contrainte que nous avons imposée.

Quelque 39 % des PEC sont effectués dans le secteur associatif, ce qui est légèrement supérieur à ce qu’y représentaient les contrats aidés. À ce propos, je voudrais préciser un point très important sur le soutien financier au secteur associatif auquel nous sommes tous attachés parce qu’il apporte des services à la population. À partir du 1er janvier, toutes les associations bénéficieront de la suppression des charges patronales alors que la grande majorité d’entre elles ne pouvaient pas prétendre au crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE). Cela signifie concrètement que 1,5 milliard d’euros vont être injectés dans le tissu associatif l’année prochaine et de façon récurrente. Il faut le prendre en compte dans la logique d’ensemble.

Pour les bénéficiaires du RSA, la loi a prévu que les PEC seraient cofinancés par les conseils départementaux qui sont chargés de l’insertion de cette population. L’application de cette mesure est très inégale sur le territoire : certaines collectivités ont entrepris un travail très approfondi pour les bénéficiaires du RSA alors que d’autres ont encore des progrès à faire.

Notre approche générale, évoquée par nombre d’entre vous, vise à inclure les plus vulnérables et à développer une stratégie de compétences. Ce sont les leviers essentiels pour permettre l’accès au marché du travail des demandeurs d’emploi, des jeunes sans qualification et des personnes les plus éloignées de l’emploi. C’est pourquoi nous avons donné la priorité au PIC, aux budgets de l’IAE et des entreprises adaptées, à la Garantie jeunes, aux écoles de la deuxième chance, aux EPIDE. C’est un choix très affirmé. Notre budget est centré sur l’inclusion par l’emploi, sur les compétences et sur le coût du travail pour les exonérations.

L’an prochain, l’IAE, recevra 50 millions d’euros pour la création de 5 000 postes supplémentaires et 60 millions d’euros pour la formation. De nombreuses entreprises ou chantiers d’insertion nous disaient manquer de postes mais aussi de moyens pour compléter la formation. Au total, l’IAE recevra donc 110 millions d’euros de plus. Comme annoncé dans le cadre du plan de lutte contre la pauvreté, notre objectif est de passer de 134 000 à 230 000 places dans les IAE et de 20 000 à 40 000 places dans les entreprises adaptées au cours du quinquennat.

En ce qui concerne le conseil en évolution professionnelle, le cahier des charges sera élaboré par France Compétences, l’appel d’offres sera lancé au printemps, les résultats seront connus en septembre et les services aux salariés seront en place pour le 1er janvier 2020, comme prévu et comme demandé par la représentation nationale lors de l’adoption de la loi.

France Compétences sera en place le 1er janvier. J’ai nommé récemment un préfigurateur qui est en train d’organiser le système. Les montants prévus pour financer le PIC transiteront par cette structure ; 1,5 milliard d’euros venant de cotisations des entreprises et 1,5 milliard d’euros d’abondement de l’État via un fonds de concours. Ce financement était prévu par les partenaires sociaux et inscrit dans la loi. Comme l’État, les partenaires sociaux considèrent qu’une partie des financements doit aller à la formation des demandeurs d’emploi afin qu’ils puissent acquérir les qualifications qui leur permettent d’accéder au marché du travail.

S’agissant de Pôle emploi, la baisse de la subvention de 85 millions d’euros par rapport au montant inscrit dans la loi de finances initiale (LFI) pour 2018 s’explique par l’existence d’une ressource très dynamique. La contribution UNEDIC, l’autre partie du budget de Pôle emploi, est assise sur la masse salariale, elle-même dynamique. Cette contribution augmenterait d’environ 100 millions d’euros entre 2018 et 2019 pour atteindre 3,5 milliards d’euros. Nous en tenons évidemment compte dans le dispositif. La baisse de subventions est justifiée aussi par l’effort transversal qui est demandé à l’ensemble des opérateurs publics. Cette baisse de 85 millions d’euros s’applique à un budget global de 5 milliards d’euros dont 4 milliards d’euros de budget de fonctionnement. Dans une logique d’amélioration continue, cette baisse est tout à fait absorbable. C’est aussi le point de vue de la direction générale.

La baisse tient compte des efforts de productivité engagés et notamment des plateformes de back office mises en place. Comme dans beaucoup des transformations du secteur public que vous voyez, mission après mission, le sujet essentiel est la dématérialisation de certaines tâches administratives. Chez Pôle emploi, notamment pour la partie UNEDIC, les tâches administratives sont très importantes puisqu’il faut en permanence ouvrir des droits nouveaux, les réévaluer, payer. La dématérialisation de l’inscription diminue le temps dédié à l’indemnisation. Une partie de ces gains peut être recyclée au bénéfice de la mise en œuvre des missions de l’opérateur. Entre 2014 et 2018, 3 000 ETP supplémentaires ont ainsi pu être réaffectés aux fonctions d’accompagnement des personnes les plus en difficulté. On va continuer dans cette logique-là car certains demandeurs d’emploi n’ont besoin que d’un accompagnement léger, en partie dématérialisé, alors que d’autres nécessitent un accompagnement personnalisé beaucoup plus important. Pôle emploi compte 53 300 ETP. La baisse de 800 ETP ou de 400 ETPT doit être évaluée en fonction de l’effectif global et de la réduction des tâches administratives qui permet de réinjecter des ressources au contact des demandeurs d’emploi. En tant qu’acteur essentiel de la mise en œuvre du PIC, Pôle emploi recevra 306 millions d’euros en 2018.

J’en viens aux missions locales qui sont financées à hauteur de 57,2 % par l’État, par mon ministère qui a d’ailleurs une vision dynamique de la chose. Le financement des missions locales se décompose en trois parties : un financement structurel sous forme de subvention ; un financement au titre des missions d’accompagnement exercées pour la Garantie jeunes sous forme de prestations de service ; un financement pour le développement du parrainage. Dans le PLF pour 2019, ce financement global diminue de 1 % – et non pas de 5 % –, passant de 360 à 356 millions d’euros. Nous considérons qu’il est tout à fait possible de compenser cette baisse par des gains d’efficacité.

En outre, des réflexions sont en cours sur l’évolution des modalités de financement et de fonctionnement des missions locales. Nous les conduisons aussi avec les collectivités territoriales – régions, intercommunalités, communes et parfois départements – notamment en ce qui concerne la mutualisation de fonctions supports qui visent à améliorer l’efficacité collective.

Nous souhaitons conclure des contrats d’objectifs clairs avec chaque mission locale, pour une offre de service adaptée et avec un engagement des différents financeurs selon une logique de conférence des financeurs qui nous permette de faire converger notre vision du sujet avec celles des régions et des collectivités territoriales – communales et intercommunales. Nous avons déjà pris contact avec les uns et les autres pour pouvoir nous fixer des priorités communes. C’est cela qui rendra le dispositif plus efficace, encore qu’aujourd’hui, la priorité soit d’aller chercher en bas des tours et dans les zones rurales les jeunes qui ne vont pas spontanément dans les missions locales. Il y a un énorme travail à faire car certaines de ces missions sont devenues des guichets auxquels on se rend mais qui ne vont plus chercher le jeune là où il est. D’autres font ce travail remarquable et vont sur le terrain : c’est cela que nous voulons encourager dans toutes les missions locales en travaillant d’ailleurs aussi avec d’autres secteurs – comme le secteur sportif, les associations, les éducateurs et l’ASE avec laquelle les relations ne sont pas assez fréquentes. Il faut qu’avec les missions locales, nous allions chercher de façon proactive les publics les plus en difficulté.

En ce qui concerne les maisons de l’emploi, le désengagement financier est enclenché depuis dix ans. Aujourd’hui, leur nombre a baissé car beaucoup de collectivités ont considéré qu’il fallait les fusionner soit avec les maisons de service au public, soit avec les missions locales. L’année 2018 a constitué une année de transition forte pour les maisons de l’emploi que nous avons accompagnées dans la construction de stratégies alternatives au financement de leur fonctionnement par l’État. Le dispositif est désormais résiduel au plan national. Des restructurations sont en cours. Certaines maisons de l’emploi ont décidé de fusionner soit entre elles, soit avec des missions locales, soit encore dans des structures communales de type PLIE (plan local pour l’insertion et l’emploi). Le désengagement financier de l’État sera achevé en 2019, ce qui ne veut pas dire qu’il n’y aura pas de financements en faveur des maisons de l’emploi mais qu’ils se feront sur la base de projets. Les maisons de l’emploi sont en effet éligibles au Fonds social européen. De plus, certaines d’entre elles ont développé de vraies stratégies de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences qui peuvent tout à fait entrer dans le cadre des appels à projet lancés par mon ministère.

Quant à l’AFPA, elle se trouve depuis longtemps confrontée à de très grandes difficultés. L’ouverture à la concurrence de son activité et les effets de la régionalisation ont effectivement engendré une situation financière très dégradée que les subventions publiques ne peuvent pas améliorer. Il n’est pas responsable de laisser les choses se dégrader ainsi, année après année. Je vous avais indiqué l’an dernier que nous travaillerions à un plan de transformation à même de garantir la pérennité de l’agence, de façon saine, en la recentrant sur des missions de service public comblant des défaillances du marché. Entre 2012 et 2016, l’AFPA a accumulé plus de 723 millions d’euros de pertes d’exploitation et la situation se dégrade en continu chaque année puisqu’en 2018, l’AFPA enregistrera une perte de 70 millions d’euros. La décentralisation, aux régions, de la compétence « formation professionnelle » a mis en évidence que l’AFPA avait des coûts 15 % plus élevés que le reste du marché. La direction de l’agence a donc travaillé à un projet, débattu il y a quelques jours par son conseil d’administration. Il vise, d’une part, à recentrer les activités de l’agence sur les publics les plus éloignés de l’emploi et sur lesquels le marché n’est pas opérant – je pense par exemple aux réfugiés. Il tend, d’autre part, à adopter, dans les secteurs concurrentiels, un plan de réorganisation permettant à l’agence d’être viable et non plus sous la menace de faire faillite tous les trois mois.

La direction de l’AFPA a estimé à 1 541 le nombre de postes devant être supprimés et à 603 le nombre de créations de postes nécessaires car il est de nombreux champs dans lesquels l’AFPA est compétitive, utile et efficace. Les départs à la retraite attendus se chiffrent à 600 et il y aura des reconversions internes importantes. Des sites seront fermés : certains ont plus de formateurs que de stagiaires tandis que d’autres sont complètement en déshérence du fait des appels d’offres régionaux. Dans les Pays de la Loire, l’AFPA a ainsi perdu 100 % de ses marchés en formation dans l’industrie et le bâtiment. Au Puy-en-Velay, il y a vingt-trois formateurs pour huit stagiaires. Et je pourrais citer de nombreux autres exemples… Aucune organisation normalement constituée – établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) ou entreprise – ne peut survivre dans de telles conditions ! Soit on va à la faillite, soit on redresse la situation à temps. Cela ne veut pas dire pour autant qu’aucune formation ne sera proposée sur ces sites puisqu’il faut tenir compte de la territorialité. L’AFPA va donc s’organiser pour proposer des formations mobiles, en fonction des besoins. Il n’est pas forcément nécessaire d’être toute l’année dans un bâtiment en dur pour pouvoir faire des formations. Par ailleurs, il faut respecter le temps du dialogue social pour favoriser au maximum les reconversions, les départs à la retraite, les plans de départ volontaire et faire en sorte que tout se passe de façon exemplaire. C’est ce que j’ai demandé à l’AFPA. Le retour à l’équilibre financier, qui sera assuré par ce plan et qui doit intervenir dans le respect des modalités de la consultation des instances représentatives du personnel, est très important. Je crois en l’avenir de l’AFPA – sinon nous l’aurions fermée – à condition qu’elle soit centrée sur des missions apportant une vraie valeur ajoutée de service public de formation, dans des conditions de viabilité qui lui permettent d’avoir un avenir conquérant et non pas désespérant, y compris pour le personnel.

Nous pensons atteindre cette année 93 000 Garantie jeunes. Nous en avons donc budgétisé 100 000 pour l’an prochain pour pouvoir augmenter leur nombre. En tout état de cause, il s’agit d’une dépense de guichet : si des jeunes demandent cette garantie et qu’ils remplissent les conditions pour l’obtenir, le chiffre ira au-delà. Simplement, nous essayons d’estimer les besoins de la façon la plus juste possible ; 81 300 Garantie jeunes ont été accordées en 2017 et nous serons autour des 93 000 en 2018. Nous en prévoyons donc 100 000 pour l’an prochain. S’il en y a 105 000, nous nous réjouirons que cette garantie soit une solution pour autant de jeunes.

Je voudrais rectifier certains chiffres inexacts. D’abord, les ordonnances n’ont pas eu pour effet de démultiplier le chômage puisqu’on a créé des emplois et fait baisser le taux de ce chômage – qui est passé de 9,7 à 9,1 % en un an. Ensuite, le nombre de CDI augmente depuis un an, ce qui n’était pas arrivé depuis dix ans. Enfin, le nombre de formations sera légèrement supérieur en 2018 à celui de 2017. Dans les seize des dix-huit régions avec lesquelles nous avons négocié des contrats pour l’année dans le cadre du Plan d’investissement dans les compétences, nous avons choisi de ne pas provoquer les effets d’accordéon qu’on a connus dans le passé. Injecter énormément d’argent très rapidement dans l’appareil de formation est la garantie de faire un travail de mauvaise qualité. Nous n’avons pas fait de traitement statistique du chômage. Nous avons préféré opter pour une vision pluriannuelle et progressive et un ciblage renforcé. C’est pourquoi, dans le cadre des pactes régionaux que nous négocions pour les quatre ans à venir, nous allons pouvoir faire monter en puissance le dispositif de façon qualitative.

Quant au dialogue social, il a lui aussi progressé et on constate des signaux intéressants depuis la publication des ordonnances : 364 accords ont ainsi été conclus dans les entreprises de moins de vingt salariés. Vous me direz que ce n’est pas beaucoup mais il y en avait zéro auparavant. La démarche est engagée et 96 observatoires sur les 100 prévus sont déjà en place au bout de huit mois, permettant un dialogue tripartite entre les partenaires sociaux et l’État pour aider au dialogue social dans les TPE-PME. On savait que ce dernier était un des points faibles du système français. Ce chiffre est donc très positif.

En ce qui concerne le financement du budget du dialogue social, l’ajustement de 900 000 euros en 2019 des crédits d’intervention pour les remboursements de frais liés à l’activité des défenseurs syndicaux permet d’adapter l’enveloppe en fonction des remboursements constatés en 2018 et de tenir compte de la mise en œuvre du dispositif d’accompagnement des défenseurs syndicaux. Par ailleurs, les moyens donnés aux organisations syndicales et patronales augmentent fortement puisqu’ils sont financés par l’AGFPN (Association de gestion du fonds paritaire national), elle-même essentiellement financée par une cotisation de 0,016 % qui croît avec la masse salariale.

Concernant France Compétences, un plafond de 44 emplois a effectivement été initialement prévu. Nous souhaitons porter ce plafond à 70 ETP par le biais d’un amendement déposé en séance publique. Le financement de l’agence étant assuré par la contribution des entreprises prévue par la loi, il n’y a pas lieu de le prévoir dans le budget de l’État.

Le dispositif des emplois francs vise à apporter une réponse innovante aux barrières discriminantes à l’emploi. En effet, les habitants des quartiers prioritaires de la politique de la ville, à expérience et diplôme équivalents, ont 2,5 fois moins de chances d’accéder à l’emploi. Le dispositif est lancé de manière expérimentale depuis le 1er avril dans 200 quartiers répartis dans quatre régions. On aura une évaluation de cette expérimentation en septembre 2019 avant l’examen du budget qui devra décider de généraliser ou pas le dispositif. En tout état de cause, le déploiement de la mesure a été progressif : nous en sommes à 2 200 contrats signés. Les signatures s’accélèrent beaucoup depuis deux mois, au terme d’un temps nécessaire à la compréhension du dispositif. Comme ce dernier n’est pas le même que celui qui avait échoué en 2013 mais qu’il porte le même nom, il a effectivement fallu un temps d’explication. L’un des premiers enseignements qu’on puisse tirer de cette expérimentation est que 80 % des contrats signés sont en CDI, ce qui était le but recherché. Par ailleurs, sur le plan de la mobilité géographique, un tiers des demandes faites au profit des demandeurs d’emploi résidant en Seine-Saint-Denis provient d’entreprises qui n’y sont pas situées. Ce dispositif offre ainsi la chance aux demandeurs de ne pas être assignés à résidence.

Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas, rapporteure spéciale. Le développement de l’activité et de l’emploi est au cœur des préoccupations du Gouvernement et de la majorité. Et vous nous l’avez dit, madame la ministre : depuis un an, les résultats sont encourageants avec une baisse d’1,2 % du nombre de chômeurs inscrits en catégorie A et une augmentation du taux d’activité, qui atteint 72 %. Si les chiffres sont parfois capricieux, la tendance de fond est indéniable. Les embauches depuis deux mois, hors intérim, atteignent un nouveau pic au troisième trimestre 2018, avec une hausse globale de 2,7 % et de 2,6 % pour les CDI. Dans cette volonté de développement de l’emploi, les crédits de la mission « Travail et emploi » sont un des éléments de la stratégie mise en œuvre par le Gouvernement et notre majorité. Ils s’inscrivent dans une politique d’ensemble consistant à baisser le coût du travail, à développer le système de formation professionnelle et à offrir aux entreprises davantage de flexibilité dans leur gestion quotidienne. Vous nous avez expliqué de façon très claire la baisse apparente du budget de la mission et démontré votre volonté de mieux gérer et dépenser l’argent public en valorisant les dispositifs les plus efficaces.

Compte tenu des remarques qui ont été faites sur les contrats aidés et les nouveaux contrats de parcours emploi compétences qui sont plus exigeants en matière d’accompagnement et de qualité de la formation, pouvez-vous nous expliquer le dispositif de fongibilité institué pour tenir compte des spécificités des territoires ? Pouvez-vous par ailleurs nous parler du dispositif de soutien à la reprise ou à la création d’une entreprise dénommé « ACCRE » (aide au chômeur créant ou reprenant une entreprise), autrefois réservé aux chômeurs ? Ce dispositif me semble cohérent et complémentaire des dispositifs votés dans le cadre de la loi relative à la croissance et à la transformation des entreprises, dite loi PACTE.

Mme Fiona Lazaar. Un jeune sur cinq vit sous le seuil de pauvreté. Or l’emploi constitue l’un des principaux leviers d’action pour permettre aux jeunes de s’insérer socialement et professionnellement et de devenir autonomes. Ce constat est connu depuis quarante ans. Pourtant, depuis le premier dispositif dédié à l’emploi des jeunes en 1977, l’insertion de ceux-ci reste très difficile. Aujourd’hui, le chômage touche environ 20 % des jeunes et plus encore dans certains quartiers. C’est deux fois plus que pour le reste des actifs. Pourtant, les solutions existent sur les territoires et personne ne s’est résigné, comme vous avez pu le constater lors de vos échanges avec les acteurs de l’emploi et de l’insertion dans ma circonscription d’Argenteuil et de Bezons. Quels moyens proposez-vous dans ce projet de budget pour soutenir les dispositifs qui marchent, comme la Garantie jeunes ou les écoles de la deuxième chance ? Ces dispositifs ont fait leurs preuves – on le voit sur le terrain. Il me paraît essentiel de continuer à les porter et de leur permettre d’innover au travers, notamment, de l’appel à projets « 100 % inclusion ».

M. Bernard Perrut. Quatre cent cinquante missions locales, soit 6 500 lieux d’accueil en milieu rural et en milieu urbain, s’attachent à accompagner vers l’autonomie 1,5 million de jeunes chaque année. Bien évidemment, l’accompagnement global de chaque jeune dans sa spécificité par les missions locales n’a pas beaucoup de rapport avec l’action de Pôle emploi dont la mission est centrée sur la seule remise en activité des chômeurs. Vous avez d’ailleurs confié à ces structures la Garantie jeunes. Vous envisagez une meilleure articulation entre Pôle emploi et les missions locales. Pourquoi pas ? S’il s’agit d’améliorer les coopérations, j’y suis favorable. S’il s’agit d’absorber les missions locales, je dis non. L’originalité des missions locales par rapport à Pôle emploi ne semble pas avoir été perçue. Il est vrai que ces missions sont toutes très différentes et que les meilleures doivent servir de modèle. La présence, autour de la table, des élus, des chambres consulaires, des organismes socio‑professionnels, des services de l’État et des associations permet à ces missions locales de mener de vraies politiques territoriales en lien avec le bassin d’emplois et les communes et les régions apportent aussi des financements. C’est peut-être dans le cadre d’une vraie politique globale que la réforme doit avoir lieu et pas simplement dans celui de financements par actions, fort peu lisibles. Je vous invite, madame la ministre, à venir voir une mission locale qui fonctionne bien, compte tenu de ses résultats, et souhaiterais savoir quel avenir vous réservez à ces missions.

M. Aurélien Taché. Madame la ministre, vous allez mettre en œuvre un plan d’investissement dans les compétences qui est inédit par son ampleur, puisqu’il est doté de 15 milliards d’euros, et par les publics auxquels il s’adresse puisqu’il va principalement concerner les chômeurs de longue durée, les décrocheurs scolaires et les jeunes des quartiers populaires – autrement dit, tous ceux qui ont du mal à accéder à la formation professionnelle. Il va aussi concerner les réfugiés : 15 millions d’euros seront ainsi consacrés dans ce plan à l’intégration professionnelle de ces derniers. J’avais indiqué dans le rapport que j’ai remis au Gouvernement en février dernier que seul un étranger sur trois régulièrement admis sur notre sol trouvait un emploi dans les cinq premières années de son arrivée en France. L’insertion professionnelle fait désormais pleinement partie de la politique d’intégration. C’est très important car il n’y a pas d’intégration sans autonomie ni d’autonomie sans travail. Les réfugiés ont de vraies difficultés pour voir leurs compétences professionnelles et leurs diplômes reconnus et ils ont des besoins spécifiques – en matière de formation linguistique, bien sûr, mais pas seulement. Au-delà de la formation en français et aux métiers, les réfugiés ont aussi besoin d’apprendre les codes de la vie professionnelle en France et d’être correctement orientés. Quelles sont les modalités précises de mise en œuvre de ce volet du plan d’investissement dans les compétences ?

M. Belkhir Belhaddad. Je voudrais revenir sur les effets de la transformation des emplois aidés en parcours emploi compétences, notamment sur les associations et les petites collectivités employeuses. Je partage totalement la philosophie de cette mesure décidée l’année dernière : l’effort public opéré en faveur de l’accès ou du retour à l’emploi des personnes qui en sont éloignées doit avoir des conséquences positives aussi bien en termes de formation que d’employabilité. Je note des disparités territoriales dans le taux de prise en charge par l’État du financement de ces contrats. Dans ma région, le Grand Est, le taux retenu est de 40 %. Aussi, sans remettre en cause le principe de libre fixation des taux par les préfets, je voudrais vous interroger quant à l’opportunité de fixer un taux minimal de prise en charge par l’État de ces parcours emploi compétences.

M. Alain Ramadier. À la fin du mois de septembre, la DGEFP et Pôle Emploi ont adressé aux DIRECCTE et aux directeurs régionaux de Pôle emploi des instructions pour mener à bien des expérimentations de fusion entre les missions locales et Pôle emploi. Ces expérimentations remettent en cause la spécificité de l’accompagnement personnalisé des jeunes fondé sur l’ancrage territorial des missions locales et l’engagement politique et financier des élus locaux. En effet, les collectivités locales vont perdre totalement la main sur le pilotage opérationnel des expérimentations de la même manière qu’elles l’ont perdue sur les publics adultes mais continueront d’être sollicitées pour financer les politiques de l’emploi au plan local. Ce type d’approche réduit à néant ou presque les capacités d’influence des maires sur les politiques de l’emploi alors que les résultats positifs sont évidents. Dans ma ville d’Aulnay-sous-Bois, on suit un peu plus de 2 000 jeunes et on obtient des résultats : la préfète à l’égalité des chances l’a souligné il y a peu. Face à une inquiétude légitime, quelle stratégie entend poursuivre le Gouvernement pour favoriser l’insertion économique de nos jeunes ?

Mme Albane Gaillot. Le 25 novembre 2017, le Président de la République a consacré l’égalité entre les femmes et les hommes grande cause nationale du quinquennat. Cet engagement s’est traduit par l’adoption, le 8 mars 2018 par le Premier ministre, d’un plan d’action interministériel comportant des avancées concrètes pour l’égalité professionnelle, notamment dans la fonction publique. Composée à 62 % de femmes et représentant 20 % de l’emploi en France, la fonction publique a un rôle structurant à jouer et se doit d’être exemplaire. Or les inégalités entre les femmes et les hommes sont persistantes, aussi bien dans les rémunérations que dans les parcours professionnels. À ce titre, je souhaiterais vous interroger sur le nouveau protocole d’accord sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique que vous avez proposé aux syndicats de fonctionnaires la semaine dernière. Je souhaiterais également savoir si cet accord sera retranscrit dans le projet de loi de finances pour 2019.

Mme Catherine Fabre. Madame la ministre, comme vous l’avez rappelé, nous avons engagé un grand investissement de long terme dans les compétences. Il a commencé avec la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel et se poursuit par le déploiement du Plan d’investissement dans les compétences (PIC), qui représente 14 milliards d’euros – une somme sans précédent dédiée à l’inclusion dans l’emploi des plus vulnérables. Je me réjouis d’une politique de l’emploi si ambitieuse. Pourriez-vous nous rappeler la vision globale du PIC au cours de la période 2019-2022 ? Quelle règle de distribution avez-vous retenue pour répartir votre budget entre les cinq grands axes que sont la prospective et l’analyse des besoins, le repérage des publics, le financement de parcours de formation qualitatifs alliant le « très qualifiant » et le « qualifiant », le soutien aux expérimentations prometteuses telles que celle des « Territoires zéro chômeur de longue durée » et l’interconnexion des systèmes d’information de la formation professionnelle ? Compte tenu de l’ampleur des sommes engagées au cours du quinquennat, comment allez-vous encadrer la mise en œuvre de ce plan et vous assurer du respect, par les régions, de leurs engagements financiers ? Comment évaluez-vous la qualité des formations financées et leur pertinence dans le cadre du PIC ?

Mme Geneviève Levy. Madame la ministre, pourriez-vous nous assurer de votre soutien à la pérennité des missions locales ? Ces établissements, qui exercent une mission de service public, sont aujourd’hui particulièrement fragilisés. Présidant la mission locale de Toulon, je vois des personnels qui ne comptent pas leurs heures et qui vont, comme vous le souhaitez, au pied des tours et dans les quartiers où les jeunes sont les plus éloignés de l’emploi. Il n’y a pas que le manque de moyens budgétaires : le manque de reconnaissance fragilise aussi nos missions locales, notamment du fait de ces annonces d’expérimentations avec Pôle emploi. Il faut que les choses soient claires car nos collaborateurs dans les missions locales sont particulièrement inquiets et m’ont demandé de vous transmettre ce message à l’occasion de cette audition.

Mme Mireille Robert. Les écoles de la deuxième chance accueillent des jeunes de moins de vingt-six ans qui sont sortis du système scolaire sans qualification ni diplôme. L’objectif est de les aider à accéder à une formation qualifiante et à intégrer le marché du travail. Les jeunes bénéficient également d’un accompagnement continu tout au long de leur scolarité pour trouver des solutions à leurs problèmes de logement, de santé, de transport, de garde d’enfants et parfois aussi de surendettement. Dans tous les cas, les jeunes doivent sortir des écoles de la deuxième chance avec un projet professionnel abouti et réaliste. En juin dernier, vous avez annoncé la création de neuf nouvelles écoles. Les crédits destinés au réseau des écoles de la deuxième chance sont stables. En 2017, ils ont permis d’accueillir près de 15 000 jeunes au sein de 59 écoles. Compte tenu du rôle primordial de ce dispositif, pourriez-vous m’indiquer quelle est la trajectoire prévue ? Comment renforcerez-vous ce dispositif ?

M. Thierry Michels. Madame la ministre, un des enjeux de votre action, dans le cadre du programme 103, est de favoriser l’insertion dans l’emploi par le développement de l’alternance et des titres professionnels, et en particulier l’insertion dans l’emploi des apprentis. Vous prévoyez à ce titre pour 2019 un taux d’insertion professionnelle des jeunes diplômés de CFA de 72 %. La loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel permet de renforcer l’information des élèves quant aux filières d’apprentissage afin de rendre cette voie d’excellence plus attractive. Est ainsi offerte aux collégiens de troisième la possibilité de suivre une classe « prépa métiers » qui vise à préparer l’orientation des élèves vers la voie professionnelle et l’apprentissage, notamment grâce à des périodes d’immersion en milieu professionnel. Quels moyens seront octroyés à ces classes « prépa métiers » et quelle sera la feuille de route de leur déploiement sur l’ensemble du territoire ?

Mme Gisèle Biémouret. Le Premier ministre a annoncé, sans concertation préalable avec les structures concernées, la fusion des missions locales avec Pôle emploi. Pouvez-vous vous engager aujourd’hui à ce que cette fusion ne se fasse pas ? Par ailleurs, vous affirmez que l’évolution est possible dans certains territoires : lesquels ? Est-ce dans les territoires ruraux ? Je vous le demande car tout à l’heure, je vous ai justement entendu dire que certaines missions locales ne fonctionnaient pas bien dans ces territoires.

M. Marc Delatte. Les réformes engagées portent leurs fruits puisque 2,14 millions d’embauches ont été enregistrées au troisième trimestre 2018. Ce niveau, jamais atteint depuis 18 ans, témoigne d’une confiance retrouvée. Chacun y contribue : c’est le cas des services de Pôle emploi de ma circonscription de Chauny-Soissons. Dans le cadre d’une expérience pilote, ils ont délocalisé leurs services dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, à la rencontre des demandeurs d’emploi qui n’ont pas toujours de grands moyens de locomotion ni toujours accès à l’outil numérique – lorsqu’ils savent s’en servir. Cette démarche a été saluée en termes de respect de la dignité de la personne humaine tout en donnant plus de sens à la mission des conseillers. Quels moyens déployer pour pérenniser ces initiatives, tant vers un public fragile que vers les entreprises, et ainsi renforcer le dialogue et nourrir une confiance mutuelle favorable à une politique de retour à l’emploi ?

Mme Josiane Corneloup. Dans cette mission, on constate un certain désengagement de l’État du fait de la disparition de certains programmes et de la baisse significative de certains crédits, consécutive à l’annonce préoccupante qu’a faite le Gouvernement de fusionner les missions locales avec Pôle emploi. Ces structures jouent pourtant un rôle essentiel dans le cadre du service public de l’emploi. Cette perspective de fusion, qui voit le jour alors que les crédits d’accompagnement disséminés dans les programmes 102 et 103 du PLF 2019 sont en baisse, inquiète les acteurs des missions locales. Ces derniers craignent l’impact d’une telle fusion sur le service rendu à l’usager et sur les structures en place. Nous connaissons tous la spécificité des 436 missions locales. Nous savons qu’elles sont complémentaires de Pôle emploi puisque 30 % des jeunes accueillis ne passent pas par cette agence. Par ailleurs, des conventions existent déjà entre les missions locales et Pôle emploi qui permettent un travail partenarial. Moi aussi, je vous invite à venir rencontrer dans ma circonscription une mission locale qui fonctionne très bien grâce à l’implication totale de ses personnels et qui enregistre des résultats tout à fait remarquables. Quelles sont les intentions du Gouvernement tant en termes de gouvernance que de fonctionnalité ? Quels sont les contours des expérimentations envisagées ? Les personnels et les publics concernés ont besoin d’être rassurés et d’avoir la garantie de la continuité des services dispensés.

M. Cyrille Isaac-Sibille. Je serai très bref car vous avez répondu à toutes les questions que je voulais vous poser. L’emploi et la formation sont des enjeux majeurs et on commence à voir les résultats de votre action. On vous fait confiance, madame la ministre !

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail. En ce qui concerne la fongibilité régionale, nous avons fait une expérience de déconcentration en donnant aux préfets, aidés par les DIRECCTE et le service public de l’emploi (SPE), la possibilité de disposer d’une seule enveloppe réunissant à la fois les parcours emploi compétences et l’insertion par l’activité économique (IAE). En effet, les structures d’insertion par l’activité économique, les dynamiques, le tissu associatif ou le nombre de collectivités locales sont très variables selon les territoires. Nous avons donc voulu donner une marge de manœuvre aux préfets pour qu’ils puissent coller aux besoins du terrain. Cette fongibilité a précisément joué dans le sens de l’IAE, ce qui me conforte dans l’idée qu’on peut et qu’on doit agrandir ce chantier. Elle a en effet conduit à la création de 4 000 places en plus dans les structures d’insertion par l’activité économique. C’est important car nous cherchons justement à créer de véritables tremplins permettant à des gens très éloignés du marché du travail d’y accéder. Je ne défends pas un programme plus qu’un autre : je promeus des budgets pour financer ce qui réussit le mieux. Si ce sont les entreprises adaptées et l’insertion par l’activité économique qui fonctionnent, ce seront eux que nous financerons. Notre but commun est de permettre à ces publics de retrouver le chemin de la qualification et de l’emploi.

Le dispositif « Territoires zéro chômeur de longue durée » est une expérimentation dont nous continuons à accompagner la montée en charge. Nous allons multiplier par deux les effectifs du dispositif par rapport aux prévisions de 2018, en les faisant passer de 650 à 1 270 ETP, en cohérence avec la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté. Concrètement, le budget augmente de 4 millions d’euros. À la mi-2018, onze entreprises à but d’emploi avaient été créées en France, comptant 565 salariés. L’objectif est de redéployer les dépenses liées à la privation d’emploi – l’accompagnement des chômeurs et le revenu de solidarité active (RSA) – vers un financement d’emplois en CDI sans surcoût pour la collectivité, conformément à l’hypothèse d’activation des dépenses passives. L’État contribue au financement de ces emplois à hauteur de 17 000 euros par ETP. Comme c’est un des dispositifs les plus chers, il faut vraiment vérifier que nous économisons par ailleurs. Cette participation étatique vient en complément de la mobilisation en cours des collectivités territoriales, et notamment des conseils départementaux qui sont très engagés sur le sujet. Je suis allée voir sur le terrain ces expériences. Il faut vérifier que le dispositif ne se substitue pas à de l’emploi permanent, notamment dans les TPE-PME du secteur de l’artisanat et des services de proximité. Il faut vérifier ensuite que l’emploi est durable. Un comité scientifique sera donc chargé d’évaluer cette expérimentation. La loi prévoit qu’au plus tard douze mois avant son terme, ce comité fera une évaluation et rendra au premier trimestre 2020 ses premières conclusions. Cela nous permettra d’envisager la suite avec une connaissance plus grande et, éventuellement, d’apporter les correctifs nécessaires.

Les écoles de la deuxième chance sont un outil d’insertion professionnelle adapté aux jeunes qui se sentent en échec, soit parce qu’ils sont fâchés avec l’école, soit parce qu’ils ont eu un parcours difficile. Il s’agit de remobiliser ces jeunes, ce qui implique de travailler avec eux sur l’estime de soi puis à l’élaboration d’un projet professionnel. En 2017, 14 600 jeunes ont bénéficié d’un soutien dans l’une des 124 écoles de la deuxième chance. Ce réseau s’étend au fil du temps – j’ai d’ailleurs donné mon accord à l’ouverture d’une nouvelle école. 31 % des jeunes bénéficiaires du dispositif sont issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville et 86 % d’entre eux ont un niveau inférieur ou égal au niveau 5 – CAP, BEP ou brevet. Le taux de sortie positive vers l’emploi ou la formation qualifiante est de 61 %. Notre tissu associatif joue un rôle formidable et les collectivités locales sont très engagées : développons ces dispositifs ! Mieux vaut financer des dispositifs structurants s’appuyant sur un accompagnement effectué par des personnes ayant une méthodologie et sachant faire réussir les jeunes que de saupoudrer de l’emploi subventionné. Certes, il faut garder des contrats aidés, maintenant qu’ils ont été bien recalibrés, mais ils sont moins structurants et efficaces que le développement de l’IAE, les entreprises adaptées, les écoles de la deuxième chance et les EPIDE.

Les écoles de la deuxième chance rassemblent de nombreux financeurs, au premier rang desquels se trouvent les régions. L’État les cofinance à hauteur de 28 % et les crédits seront naturellement maintenus en 2019, et même complétés par le plan d’investissement dans les compétences à hauteur de 2,6 millions d’euros, afin de financer l’évolution de réseau. Certaines écoles de la deuxième chance répondront d’ailleurs aux appels d’offres du PIC. L’objectif est d’étendre leurs capacités d’accueil à raison de 2 000 jeunes supplémentaires par rapport à 2018, pour accueillir 16 600 jeunes en 2022, soit 15 % de plus qu’aujourd’hui.

J’en viens aux missions locales sur lesquelles de nombreuses questions m’ont été posées. Qu’il n’y ait aucune ambiguïté : à défaut d’être convaincue par toutes les missions locales, je le suis tout à fait par le principe même de ce mécanisme. J’ai eu l’honneur de faire partie des trois premiers directeurs de missions locales auprès de Bertrand Schwartz, et j’estime que son postulat initial, formulé en 1982, qui consistait à créer des missions locales tout à la fois sur la formation et l’emploi, la santé et le logement, bref, l’accompagnement global des jeunes, était excellent. Cette idée reste hélas très actuelle et toujours aussi utile qu’à l’époque. 

Le rapprochement des missions locales avec Pôle emploi recouvre trois points. La coopération, tout d’abord : comme vous, je rencontre de nombreuses missions locales et des agences de Pôle emploi, et je constate qu’elles travaillent très bien ensemble dans certains endroits, beaucoup moins ailleurs. La coopération entre ces deux instances du service public de l’emploi doit être systématique. C’est à Pôle emploi que se trouvent les conseillers d’entreprise et la connaissance des offres ; en l’absence d’articulation avec Pôle emploi, une mission locale ne disposera donc pas des leviers lui permettant d’amener les jeunes vers l’emploi. En clair, la coopération n’est pas facultative.

Deuxième point : le patrimoine commun. Il concerne notamment les systèmes d’information. Aujourd’hui, sauf mission particulière, les missions locales ne bénéficient pas d’un accès direct aux offres d’emploi, de sorte que les jeunes doivent parfois faire la navette entre les missions et Pôle emploi. À l’ère numérique, il est absurde de ne pas partager ces informations. Cela ne signifie pas pour autant que le système d’information de Pôle emploi suffit aux missions locales puisque celles-ci sont également saisies des questions de santé et de logement, mais au moins faut-il partager un dénominateur commun. Accessoirement, cela permettra de réaliser des économies en matière d’informatique. L’essentiel, cependant, est d’améliorer l’efficacité du système.

Troisième point : l’État – je le réaffirme solennellement – ne fusionnera aucune mission locale avec Pôle emploi de sa propre initiative mais certains élus locaux provenant de territoires où la coopération porte souvent ses fruits proposent de créer une plateforme commune plus large, qui comprendrait naturellement une équipe dédiée aux jeunes, une autre à l’emploi et ainsi de suite. Toutes agiraient sous une ombrelle commune qui permettrait de penser une stratégie locale. Je ne vois pas pour quelle raison j’interdirais à des élus locaux qui le proposent de le faire. Structure chapeau ou fusion, les collectivités locales devront s’impliquer dans la gouvernance. C’est une expérimentation et non un plan d’ensemble. Ne nous l’interdisons pas sur certains territoires où les acteurs veulent se rapprocher. Il s’agit toujours du secteur de l’emploi et des jeunes et des chômeurs. C’est dans cet esprit que j’ai proposé une expérimentation. Si aucune demande n’est formulée en ce sens, il n’y aura pas d’expérimentation, mais certains acteurs y réfléchissent. Quoi qu’il en soit, la pérennité des missions locales n’est pas en cause : elle sera maintenue. En revanche, je souhaite privilégier une logique d’objectifs pour aller chercher ceux qui ne viennent pas spontanément – et tous les élus locaux et les financeurs me semblent être d’accord sur ce point.

Le plan d’investissement dans les compétences comporte un volet important relatif à la contractualisation avec les régions. Pendant la durée du quinquennat, 6 milliards d’euros seront ainsi apportés aux régions – un montant qui ne sera pas comptabilisé au titre du plafond de leur dotation de fonctionnement. Il s’agit d’un partenariat approfondi.

Il est d’autant plus important de veiller à la bonne utilisation de ces crédits que certaines régions ont fait le choix – la décentralisation les y autorise – de baisser fortement le nombre de formations destinées aux demandeurs d’emploi, notamment les moins qualifiés. Il s’agit d’une minorité de régions, mais le nombre de formations y a beaucoup baissé voire tout bonnement disparu dans certaines catégories – les formations destinées aux personnes incarcérées, par exemple. Dès lors, nous avons fixé comme condition à la contractualisation avec les régions l’obligation de ne pas réduire le budget, car l’État ne peut pas se substituer à la région, et d’augmenter à due proportion le nombre de demandeurs d’emploi peu qualifiés qui sont concernés par les formations. Ce cadre étant fixé, il est possible d’être très innovant : certaines régions, qui possèdent la compétence économique, adoptent des stratégies de filière, et il est utile que les filières de formation correspondent aux emplois de demain. C’est pourquoi je crois profondément à ce partenariat entre l’État et les régions, et je pense que la majorité des régions le signeront.

Ensuite, le plan d’investissement dans les compétences englobe l’appel d’offres « 100 % inclusion » : il s’agit d’un appel d’offres ouvert qui pourra donner lieu à de nouveaux projets labellisés et financés tous les trois mois. D’autre part, 15 millions d’euros sont consacrés à un projet de formation des réfugiés, en complément de ce qui est déjà fait dans le cadre du programme HOPE (hébergement, orientation, parcours vers l’emploi) financé par le ministère de l’intérieur et réalisé en grande partie par l’AFPA. Ce programme comprend le parcours d’intégration par l’acquisition de la langue française (PIAL) – trois mille parcours de ce type ont été financés en 2018, pour un montant de 4,4 millions d’euros. Ce parcours est également financé au titre du parcours contractualisé d’accompagnement vers l’emploi et l’autonomie (PACEA) pour les jeunes, notamment pour ce qui concerne les jeunes mineurs isolés et les jeunes majeurs – les jeunes, en effet, sont nombreux parmi les réfugiés.

Par ailleurs, la direction de l’asile a lancé un appel à projets et onze projets innovants ont été présentés par des associations pour l’intégration de bénéficiaires d’une protection internationale. Suite à l’appel à projets que le ministère du travail a lancé ce mois-ci sur le plan territorial, on constate que les projets portent souvent sur des métiers en tension pour lesquels il est difficile de trouver des qualifications et, surtout, des volontaires susceptibles de se qualifier. C’est le cas du secteur de la couverture, où les volontaires sont rares. Les réfugiés à qui nous devons accorder l’asile au titre des droits de l’homme qui souhaiteront s’intégrer en contribuant ainsi à la vie de la nation seront les bienvenus et chacun s’en portera mieux. Cet appel à projets privilégiera également les femmes, qui bénéficient d’un moins grand nombre de programmes.

En clair, le budget consacré à l’insertion des réfugiés en 2019 est de 35 millions d’euros se répartissant entre le parcours HOPE et le PIAL, les 1 000 parcours de validation des acquis de l’expérience (VAE) collective ainsi que l’appel à projets pour 15 millions d’euros.

Autre volet du PIC : la prépa apprentissage. Il s’agit d’un appel à projets lancé auprès de 965 centres de formation d’apprentis (CFA) qui considèrent à juste titre que certains jeunes pourraient entrer en apprentissage mais n’y sont pas encore prêts parce qu’ils manquent de savoir-être professionnels – l’habitude de se lever tous les jours à la même heure, travailler en équipe, être autonome, faire preuve de respect. Pour entrer en apprentissage, il leur faut améliorer ces savoir-être, affiner leur connaissance des métiers par une immersion en entreprise et consolider des acquis de base.

Ce dispositif est assez proche par sa philosophie d’un autre mécanisme relevant du PIC, « Prépa compétences », qui est également centré sur les savoir-être professionnels mais s’adresse davantage aux adultes. En effet, un tiers des difficultés d’embauche constatées chez Pôle emploi sont liées non pas aux compétences tactiques – un problème auquel nous consacrons par ailleurs d’importants efforts – mais aux savoir-être professionnels, d’où l’existence, dans le cadre du PIC, d’un appel à projets en la matière.

Un autre appel à projets a été lancé pour ouvrir 10 000 formations numériques et – rançon de la gloire, en quelque sorte – ce nombre devrait être augmenté, ce dont il faut se réjouir. En effet, 80 000 emplois sont disponibles dans le numérique, dont bon nombre sont accessibles à l’issue de huit mois de formation, et ce à tout niveau de qualification. De même, 10 000 formations seront ouvertes dans le secteur des emplois verts et ce nombre devrait augmenter.

En ce qui concerne les métiers en tension, qui représentent un gisement de plusieurs centaines de milliers d’emplois, j’ai lancé avec Pôle emploi l’expérimentation #versunmétier afin de résoudre le problème du désajustement entre l’offre et la demande, qui empêche les entreprises de gagner des marchés faute de compétences et les demandeurs d’emploi de saisir des opportunités. Ce secteur est donc une priorité du PIC. Il s’agit, à partir d’une évaluation territoriale des métiers en tension, de permettre aux entreprises et aux demandeurs d’emploi de se rencontrer afin de faire découvrir d’autres métiers. Citons par exemple cette formation de « référent Web TPE-PME » qu’offrait une agence Pôle emploi dans laquelle je me suis rendue récemment : nul ne sait a priori de quoi il s’agit. En réalité, ce référent est le « couteau suisse » d’une TPE-PME sur internet. Or, il existe des milliers d’emplois de cette nature ! Comment les demandeurs d’emploi pourraient-ils cependant postuler à des emplois qu’ils ne connaissent pas ? Les entreprises proposent donc des séquences thématiques sur les métiers en tension, par bassin d’emploi. Nous verrons comment ce mécanisme pertinent monte en puissance.

S’agissant des parcours emploi compétences, sur lesquels j’ai déjà largement répondu, je précise qu’il a été laissé aux préfets une capacité d’adaptation du taux prise en charge entre 30 % et 60 %, avec un taux pivot fixé à 50 % en métropole et à 60 % en outre-mer, toutes les structures ne disposant pas des mêmes capacités financières et d’encadrement. C’est une mesure d’adaptation au terrain.

La question de l’égalité entre les hommes et les femmes dans la fonction publique ne relève ni du budget ni de mon ressort mais du ministère de l’action et des comptes publics et du secrétariat d’État chargé de l’égalité entre les femmes et les hommes, et de la lutte contre les discriminations. Je confirme néanmoins qu’un protocole d’accord est soumis à la signature des partenaires sociaux qui, le cas échéant, le signeront le 26 novembre, auquel cas il deviendra impératif. Dans le cas contraire, c’est le projet de loi relatif à la fonction publique qui sera examiné au premier semestre de l’année prochaine qui traitera ce sujet, selon une démarche analogue aux mesures annoncées faites dans le cadre de la loi sur l’avenir professionnel dans le secteur privé. Je saisis cette occasion pour vous indiquer que j’annoncerai dans quelques semaines le mécanisme qui s’appliquera dès le 1er janvier dans toutes les entreprises du secteur privé.

En parallèle des prépas apprentissage, qui s’adressent à des personnes sorties du système scolaire, le ministère de l’éducation nationale va fusionner les prépas professionnelles et les dispositifs d’initiation aux métiers en alternance (DIMA) pour proposer des « prépas métiers » à des jeunes encore scolarisés, en privilégiant là aussi les savoir-être professionnels et la découverte des métiers. Les deux dispositifs vont de pair, avant et après la sortie du système scolaire.

M. Stéphane Viry, rapporteur pour avis. Après ces propos très détaillés, permettez-moi une brève intervention qui, bien que je diverge sur certains points – mais là n’est pas l’objet de la discussion – portera sur trois points, en complément de mon rapport pour avis, établi sur la base d’éléments financiers bruts faisant apparaître une contraction des crédits de plusieurs milliards d’euros.

Je retiens votre conviction, madame la ministre, concernant l’insertion par l’action économique, que j’avais déjà décelée l’an passé. Vous avez depuis démontré votre volonté de vous servir de cet outil. D’une manière générale, je note que vous êtes favorable à tous les outils d’accompagnement vers l’emploi qui permettraient d’atteindre votre objectif d’émancipation par le travail. Je vous confirme que même si la situation économique du pays était plus prospère et la croissance plus généreuse, cela ne suffirait pas pour permettre à des hommes et à des femmes durablement éloignés du travail de retrouver le chemin de l’emploi. Il est de la responsabilité de notre pays de dépenser de l’argent public pour leur permettre de trouver leur place dans la société. Tous les outils que vous avez cités avec bienveillance vont dans ce sens – même s’il m’appartient de soutenir la hausse des crédits.

Ensuite, j’ai noté que vous étiez favorable à toute expérimentation permettant d’éviter de plaquer un schéma de manière verticale. Étant donné les interrogations que suscite le rapprochement entre Pôle emploi et les missions locales, je serai attentif à ce que nous puissions envisager d’ici à la séance un nouveau dispositif qui permette à des territoires – de manière comparable à ce qui a été fait avec le dispositif « Territoires zéro chômeur » – de s’asseoir autour le table avec Pôle emploi, avec les missions locales, avec les collectivités territoriales, évidemment avec les associations – qui agissent directement sur le terrain et qui, connaissant les jeunes, pourraient identifier ceux qui sont en difficulté ou en situation d’exclusion – et pourquoi pas avec les entreprises, qui peuvent se mobiliser comme certaines l’ont fait dans le cadre de la charte Entreprises & Quartiers. Cela permettrait de conceptualiser une expérimentation sur ce sujet pour, in fine, l’inscrire dans la loi. Peut-être s’agirait-il de maisons de l’emploi bis, en quelque sorte, et j’ai noté que ce n’était pas dans l’air du temps. Il me semble néanmoins que l’on pourrait structurer ainsi la méthode pour aboutir à cet outil nouveau.

Enfin, j’ai entendu vos propos sur les réfugiés. À titre personnel, je suis très favorable à ce que ces hommes et ces femmes qui se trouvent sur le territoire national ne soient pas laissés sans rien, parce que nous ne pouvons à l’évidence pas faire autrement que de leur permettre de s’insérer, et nous n’y parviendrons que par le travail. Quels que soient les avis des différents groupes politiques, je serai à vos côtés, madame la ministre, pour examiner le dispositif que vous proposerez. Pour moi, c’est un sujet sur lequel nous devons être à la hauteur des enjeux.

 

 


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II.   Examen des crédits

Puis la commission examine, pour avis, les crédits de la mission « Travail et emploi » et du compte spécial « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage ».

Mme la présidente Brigitte Bourguignon. Nous en venons à l’examen des amendements sur la mission « Travail et emploi » et du compte spécial « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage ».

Article 39 et État B

La commission examine l’amendement II-AS18 de M. Boris Vallaud.

M. Boris Vallaud. Cet amendement vise à abonder le Fonds de cohésion sociale, créé par la loi de programmation pour la cohésion sociale de 2005 afin de garantir des prêts à des personnes physiques ou morales, notamment pour aider les demandeurs d’emploi à créer des entreprises. Certes, les crédits de ce Fonds passent de 14 millions d’euros à 17 millions entre 2018 et 2019, mais ce montant reste inférieur à celui de 22 millions qui était prévu en 2017. Nous proposons, compte tenu de l’importance du sujet, de rétablir ce montant, en prenant ces crédits sur une autre action afin de respecter l’article 40 de la Constitution.

M. Stéphane Viry, rapporteur pour avis. En effet, les crédits du Fonds de cohésion sociale (FCS) s’élevaient à 14 millions d’euros en 2018 et passent à 17 millions en 2019. Vous proposez de les porter à 22 millions. Je constate que le Gouvernement a déjà consenti un effort pour 2019, et que cette hausse de crédits bénéficiera aux microcrédits professionnels pour 2 millions d’euros et aux microcrédits sociaux pour 1 million supplémentaire. Je ne suis pas favorable à la hausse de 5 millions des crédits du FCS, d’autant plus que vous proposez de l’abonder en prélevant des fonds consacrés à l’insertion par l’activité économique (IAE) et les contrats aidés, ce qui, vous l’aurez compris, serait incohérent avec mes priorités.

M. Boris Vallaud. Je partage votre sentiment, monsieur le rapporteur pour avis, selon lequel ce mode de financement n’est pas satisfaisant mais, malgré tout, l’article 40 de la Constitution nous oblige…

La commission rejette l’amendement.

Elle passe à l’amendement II-AS19 de M. Boris Vallaud.

M. Boris Vallaud. Le budget pour 2019 prévoit 3 millions d’euros pour la mise en œuvre du compte personnel d’activité (CPA) et du compte personnel de formation (CPF), contre 8 millions l’année dernière. À dire vrai, la baisse de ces crédits nous inquiète quant à la mise en œuvre de la réforme de la formation professionnelle et la mise en place de la fameuse application CPA-CPF à laquelle les uns et les autres ont largement fait écho pendant l’examen du projet de loi sur l’avenir professionnel. C’est pourquoi, en cohérence avec le discours de la majorité, nous proposons d’augmenter ces crédits en utilisant un expédient semblable à celui de l’amendement précédent pour passer le cap de l’article 40.

M. Stéphane Viry, rapporteur pour avis. Avis favorable. Cet amendement vise en effet à relever de 5 millions d’euros le montant des crédits consacrés à la mise en œuvre du système d’information du CPA-CPF. J’observe que le projet de loi de finances pour 2019 prévoit une forte diminution de ces crédits, ce qui est pour le moins paradoxal compte tenu de l’extension considérable du champ et des missions du CPF par la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel du 5 septembre 2018. J’observe également que les annexes au projet de loi de finances évoquent certes un « financement complémentaire » de la dotation prévue dans le PLF par un abondement du PIC, mais qu’aucune indication n’est donnée quant au montant de ce financement complémentaire. En période budgétaire, cela semble un peu léger pour une réforme qui prétend « transformer et amplifier l’accès des actifs à la formation professionnelle ». Compte tenu de l’enjeu que constitue le développement du système d’information du CPF, j’émets un avis favorable.

Mme Fadila Khattabi. Je précise que le groupe La République en Marche est défavorable à cet amendement dans la mesure où le montant des crédits affectés repose sur une évaluation préalable des besoins.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement II-AS17 de M. Boris Vallaud.

M. Boris Vallaud. Dans le budget pour 2018, les crédits alloués aux dispositifs locaux d’accompagnement (DLA) ont été transférés au programme 159 de la mission « Écologie, développement et mobilités durables ». Dotés de 10,4 millions d’euros en 2017, les DLA constituent un dispositif très structurant d’appui aux associations et aux structures de l’économie sociale et solidaire. Pour 2019, vous prévoyez des crédits d’un montant de 8,4 millions d’euros, soit une baisse de 2 millions d’euros.

Les DLA assurent des services d’accompagnement professionnel destinés à la consolidation technique et financière des employeurs associatifs et de l’insertion économique. Ils font l’objet d’un partenariat financier entre de multiples acteurs : l’État, la Caisse des dépôts et consignations, le Fonds social européen (FSE), les régions, les départements, les communes et les intercommunalités. L’État ne doit donc pas donner un tel signe de désengagement afin d’inciter les autres acteurs à continuer de financer ces structures majeures pour le développement de l’emploi dans le secteur associatif, si important dans les quartiers populaires, notamment.

Je sais que M. le rapporteur pour avis nous opposera le fait que ce n’est pas au titre de la mission « Travail et emploi » qu’il convient d’abonder des crédits de ces DLA, mais plutôt dans la mission « Écologie » ; je m’en serais voulu, cependant, de ne pas aborder cette question devant la commission.

M. Stéphane Viry, rapporteur pour avis. Je m’en voudrais quant à moi de ne pas respecter l’orthodoxie budgétaire, même si je crois profondément à l’utilité des DLA pour soutenir les acteurs de l’économie sociale et solidaire, notamment le milieu associatif, et pour promouvoir et consolider l’emploi. Il n’en demeure pas moins que ce budget n’entre plus dans le champ de la mission « Travail et emploi ». Je vous invite donc à déposer cet amendement pertinent dans le cadre de la mission « Écologie » afin qu’il ait une chance d’être adopté. Avis défavorable.

M. Boris Vallaud. Je tiens tout de même à ce que la commission, dont le rôle est aussi d’examiner le budget de la mission « Travail et emploi », prenne note du recul de 2 millions d’euros du budget des DLA.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Je remercie M. Vallaud d’avoir appelé notre attention sur la question de ce financement. Nous ne voterons pas en faveur de son amendement puisque ce n’est pas le lieu, mais il me semble tout à fait pertinent de corriger le tir dans un autre budget, étant donné l’importance des missions des DLA. Nous veillerons à en examiner la possibilité.

La commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement II-AS21 de M. Boris Vallaud.

M. Boris Vallaud. Le groupe Socialistes et apparentés regrette vivement que les crédits alloués au défenseur syndical baissent de 900 000 euros en 2019. Rappelons que le défenseur intervient au nom d’une organisation syndicale pour assister ou représenter les parties devant les conseils de prud’hommes. Réduire les crédits alloués à une telle mission est un très mauvais signal envoyé à ces défenseurs dont les attentes et les besoins sont pourtant nombreux, notamment en termes de formation. Le nombre d’heures d’exercice – dix heures – reste faible et le temps de formation – deux semaines par mandat – l’est également.

C’est pourquoi nous proposons de rehausser de 900 000 euros l’enveloppe dédiée aux défenseurs syndicaux. Je ne reviens pas sur le détail du mécanisme financier permettant cet abondement.

M. Stéphane Viry, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à relever au même niveau qu’en 2018 les crédits destinés à l’indemnisation des autorisations d’absence et au maintien du salaire des défenseurs syndicaux. Rappelons que l’année 2018 correspondait à la première année pleine de mise en place de ce dispositif de remboursement. Or, le montant prévu en loi de finances pour 2018 était surestimé par rapport aux demandes effectives de remboursement, ce qui explique la diminution des crédits prévue dans le PLF pour 2019. Il s’agit simplement de réajuster ce montant en fonction de l’utilisation concrète qui a été faite de ces crédits en 2018. Avis défavorable ; en l’état, il n’y a pas de sous-budgétisation.

Mme Fadila Khattabi. Nous partageons l’avis du rapporteur : la pertinence du rôle du défenseur syndical n’est pas en cause. La diminution des crédits correspond simplement à celle du nombre de recours aux prud’hommes, notamment depuis l’adoption de la loi autorisant les ordonnances.

M. Boris Vallaud. Ce dernier argument prouve que le plafonnement des indemnités prud’homales entraîne bien des conséquences en termes de droit de recours.

La commission rejette l’amendement.

Elle passe à l’amendement II-AS20 de M. Boris Vallaud.

M. Boris Vallaud. Les documents budgétaires du Gouvernement affirment que « la politique du travail ne peut se construire et s’appliquer sans la participation active des partenaires sociaux » et que « la place croissante accordée à la négociation collective dans l’élaboration de la norme sociale conduit à renforcer la légitimité des acteurs et des accords collectifs », ce à quoi nous pourrions souscrire sans réserve. Pourtant, vous réduisez discrètement de 100 000 euros les crédits alloués au développement de la négociation collective. Le groupe Socialistes et apparentés dénonce ce décalage entre les discours et les actes. C’est pourquoi nous proposons de rétablir les crédits au profit du développement de la négociation collective à hauteur de 2018, par une hausse de 100 000 euros.

M. Stéphane Viry, rapporteur pour avis. Cette baisse de 100 000 euros participe de l’effort budgétaire que la ministre invite chacun à faire. Je ne prétends pas approuver cette contraction de crédits mais j’observe qu’elle correspond à un mouvement tendanciel du budget. Elle peut me heurter, car ce n’est pas en donnant moins que l’on pourra faire autant voire davantage. Une réserve me retient néanmoins d’émettre un avis favorable à votre amendement, monsieur Vallaud : pour respecter l’article 40, vous proposez de réduire de 100 000 euros le montant consacré au PIC dans le cadre du programme 102, qui finance la Garantie jeunes. En tant que rapporteur, je ne saurais accepter que ces crédits soient ainsi amputés, car la Garantie jeunes me paraît nécessaire à leur intégration. Avis défavorable.

M. Boris Vallaud. Vous avez compris que cet amendement me donne l’occasion d’interpeller la majorité – qui s’en fera peut-être l’écho auprès de la ministre – au sujet de son double discours. Vous avez plus souvent qu’à votre tour proclamé votre amour des syndicats et du dialogue social ; je vous donne l’occasion d’exiger une preuve d’amour de la part de la ministre. Nous avons encore la séance pour y parvenir !

Mme Michèle de Vaucouleurs. J’ai interrogé la ministre tout à l’heure sur le dialogue social. Elle nous a fait une réponse plutôt encourageante concernant les premiers résultats obtenus suite aux ordonnances : 364 accords ont été conclus dans les entreprises de moins de vingt salariés et 93 observatoires ont été créés, à quoi s’ajoute le paiement des crédits des défenseurs syndicaux. Tous ces éléments vont dans le sens de l’amélioration du dialogue social que nous souhaitons. L’enveloppe budgétaire a été adaptée de manière raisonnable à la montée en puissance de ce dispositif.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement II-AS23 de M. Boris Vallaud.

M. Boris Vallaud. Le groupe Socialistes et apparentés n’est pas le seul à dénoncer avec force la brutalité de la baisse drastique du nombre de contrats aidés qui a été décidée l’année dernière et qui se poursuit cette année avec des conséquences dramatiques sur nos territoires, notamment dans les secteurs du sport, de l’animation et de la culture, et pour celles et ceux qui, parce qu’ils travaillaient dans le cadre de contrats que vous assimiliez à de faux emplois, sont devenus de vrais chômeurs.

Le nouveau contrat que vous avez créé, le contrat unique d’insertion parcours emploi compétences (PEC), est un échec manifeste. En mai dernier – je n’ai pas réussi à obtenir d’informations plus récentes –, à peine 20 % d’entre eux étaient signés. C’est un constat d’échec qui trouve sa traduction dans le budget pour 2019 : l’an dernier, vous aviez prévu 200 000 PEC mais vous n’en inscrivez que 100 000 cette année.

Les auditions du rapporteur pour avis ont permis de mettre en lumière les trois raisons de cet échec. La première tient à l’obligation de formation non financée, la deuxième au taux de prise en charge par l’État, qui chute de 70 % à 45 % en moyenne, et la troisième est psychologique – par vos annonces, vous avez traumatisé les employeurs qui ne veulent plus recruter car ils redoutent votre instabilité.

Nous proposons donc de relever de 100 000 le nombre de PEC financés et de porter à 70 % du SMIC au moins le taux de prise en charge par l’État. Je rappelle que le taux de défaillance des associations est historiquement fort depuis les décisions que vous avez prises : il a augmenté de 15 % cette année et 60 000 emplois sont désormais menacés dans les petites associations employeuses.

M. Stéphane Viry, rapporteur pour avis. Cet amendement propose de doubler le nombre de PEC, c’est-à-dire de le porter à 200 000 au lieu de 100 000 prévus dans le PLF 2019, et de relever le taux moyen de prise en charge de l’État à 70 %.

Je partage totalement l’intention de votre amendement puisque j’ai moi-même proposé deux amendements de même nature. Je partage également votre remarque sur la méthode et j’ai souhaité comme vous connaître la formule de calcul des PEC, qui figurait jusqu’en 2017 dans les annexes budgétaires, mais aucune réponse ne m’a été apportée. Les chiffrages que nous effectuons par voie d’amendement présentent donc des risques d’imprécision.

J’observe que votre amendement budgétise le contingent de 30 500 contrats destinés à l’accompagnement des élèves en situation de handicap, alors que ces contrats et le financement associé sont désormais transférés au Programme 230 qui relève du ministère de l’éducation nationale. Cette mesure de périmètre réduit donc à 170 000 contrats le nombre de contrats effectivement ouverts en 2018 dans le champ de la mission « Travail et emploi ».

Puisque nous convergeons dans l’esprit, je vous propose de retirer votre amendement au profit de mon amendement II-AS27 que nous examinerons dans un instant. À défaut, avis défavorable.

M. Boris Vallaud. Je maintiens cet amendement mais cela ne signifie pas que je ne voterai pas le vôtre.

Mme Monique Iborra. Je ne partage pas votre avis, monsieur le rapporteur pour avis. Je me suis comme vous posé des questions quand les emplois aidés classiques ont été supprimés. Je me suis par exemple rendue au Pôle emploi de la région Occitanie où il m’a été dit que les demandes des employeurs n’étaient plus ce qu’elles étaient antérieurement parce que ces emplois sont bien plus exigeants dans la mesure où ils s’accompagnent forcément d’un accompagnement. Les intercommunalités et grandes communes, pour lesquelles ces emplois représentaient un certain « confort » entre guillemets, renoncent à demander ces nouveaux emplois aidés.

La commission rejette cet amendement.

Elle examine ensuite l’amendement II-AS16 de M. Boris Vallaud.

Mme Gisèle Biémouret. La semaine dernière, les chiffres du chômage sont tombés : 22 000 demandeurs d’emploi en plus toutes catégories confondues depuis un an, 16 000 demandeurs d’emploi en contrats précaires en plus en un an, et 3 100 entrées en formation en moins en 2018 par rapport à 2017.

Je ne rappelle pas ce que Boris Vallaud a indiqué au sujet de la déstabilisation des associations mais je répondrai à Mme Iborra : le problème n’est pas seulement l’exigence de formation car, même avec les emplois aidés, des associations et d’autres structures consentaient cet effort de formation. C’est la prise en charge financière qui déstabilise les associations et ne leur permet pas d’utiliser ces PEC.

Si j’en crois la lecture des documents budgétaires, la ministre prévoit non pas 200 000 PEC pour l’année prochaine, comme cela avait été annoncé dans la loi de finances pour 2018, mais seulement 100 000 nouveaux pour 2019. Pour que le Gouvernement puisse tenir ces engagements, le groupe Socialistes et apparentés propose la création de 100 000 contrats aidés supplémentaires, conformément aux annonces faites dans le cadre de notre budget.

Pour des raisons constitutionnelles liées à l’application de l’article 40 de la Constitution, nous proposons d’abonder à hauteur de 380,89 millions d’euros en AE et 189,58 millions en CP les crédits de l’action n° 2 « Amélioration des dispositifs en faveur de l’emploi des personnes les plus éloignées du marché du travail » du programme 102 « Accès et retour à l’emploi », en réduisant d’autant les crédits de l’action 4 « Plan d’investissement des compétences » du programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi ».

M. Stéphane Viry, rapporteur pour avis. J’ai le même raisonnement et la même motivation sur cet amendement que sur le précédent. Je vous invite à le retirer car le mien va dans la même direction. À défaut, avis défavorable.

La commission rejette cet amendement.

Puis elle examine l’amendement II-AS27 du rapporteur pour avis.

M. Stéphane Viry, rapporteur pour avis. Nous en venons à ce nouvel outil d’émancipation par le travail que constitue le PEC.

Pour la deuxième année consécutive, le Gouvernement a fait le choix de réduire très significativement le nombre de nouvelles entrées en contrat aidé dans le secteur non marchand, en prévoyant le financement de 100 000 PEC contre 200 000 en LFI 2018. Sur ces 200 000 contrats, 30 500 étaient destinés à l’accompagnement des élèves en grande difficulté : ils sont transférés en 2019 au ministère de l’éducation nationale.

En dehors de cette mesure de périmètre, le différentiel entre la LFI 2018 et le PLF 2019 s’établit donc à 69 500 contrats de moins. Cette diminution m’apparaît comme une nouvelle régression pour un certain nombre d’employeurs putatifs ainsi que de demandeurs d’emploi qui n’auront pas ces outils à disposition pour retrouver le chemin de l’emploi. Cela vient à la suite d’un brusque coup d’arrêt en août 2017. Or les employeurs du secteur non marchand, associations, collectivités territoriales, établissements du secteur sanitaire et social, entreprises de l’ESS, restent disposés à permettre à des hommes et femmes de revenir à l’emploi avec ces outils. Ces employeurs, que j’ai rencontrés, ne cherchent pas un effet d’aubaine quand ils proposent des emplois aidés ; ils sont parfaitement conscients du coup de main qu’ils donnent pour permettre l’accès durable à l’emploi.

Il me paraît donc nécessaire de conserver la voilure qui avait été fixée par le Gouvernement lui-même en 2018, c’est-à-dire 200 000 emplois financés. J’admets que l’on sorte du périmètre les 30 500 emplois qui partent à l’éducation nationale mais je propose d’ouvrir, au titre du PLF 2019, 160 500 contrats aidés, qui pourraient être spécifiquement destinés au soutien du secteur associatif qui n’a plus accès aussi facilement à des emplois aidés.

Cette mesure n’est pas une régression puisque nous restons dans le volume fixé par le Gouvernement il y a un an. Pour la financer, je propose de réduire les crédits destinés au dispositif expérimental des emplois francs car, comme la ministre l’a indiqué tout à l’heure, sur 25 000 postes budgétés, seuls 2 200 ont été mobilisés à ce jour, soit même pas 10 %, et de réduire une partie des crédits destinés aux personnels transversaux et de soutien du ministère du travail.

M. Bernard Perrut. C’est un amendement de bon sens qui nous est proposé car il respecte le nombre de contrats qui avait été souhaité par le Gouvernement et répond à une attente. Nous avons vu par le passé quels étaient les points positifs et négatifs des contrats aidés. On sait qu’il faut éviter l’inflation de ce système, qui peut être parfois dévoyé ou mal utilisé. Toujours est-il que les conséquences de la restriction de ces contrats sont fortes sur le terrain. Des associations et autres structures œuvrant dans le domaine social, solidaire, sportif ou de l’accompagnement ont dû en effet renoncer à mettre des personnes au travail en les dirigeant, souvent, vers une formation et un parcours pérenne. C’est dans cette optique qu’il faut soutenir cet amendement et ce type de contrats dès lors qu’ils mènent réellement à un emploi, à une formation et à un accompagnement sérieux.

Mme Fadila Khattabi. Notre groupe est défavorable à cet amendement dans la mesure où nous avons décidé d’investir massivement dans le triptyque accompagnement-formation-emploi, et de soutenir, voire de renforcer des dispositifs qui fonctionnent tels que les écoles de la deuxième chance, le dispositif « Territoires zéro chômeur », l’emploi inclusif dans les entreprises adaptées, ainsi que l’apprentissage, qui répond en partie à la problématique du chômage des jeunes.

M. Boris Vallaud. Il s’agit en fait de renforcer un dispositif qui ne marche pas car, si le Gouvernement est passé de 200 000 à 100 000 PEC, c’est qu’il n’a pas réussi à les placer, personne n’en voulant. En même temps, il faut plus d’emplois aidés car les dégâts causés sur le territoire par les mesures du Gouvernement sont très considérables, dans les associations comme d’ailleurs à l’éducation nationale, d’où l’on a retiré des adultes. Je constate par ailleurs que l’amendement n’augmente pas le taux de prise en charge. Cependant, parce que nous sommes attachés aux emplois aidés, et même si ce dispositif ne nous convainc pas, nous voterons l’amendement.

Mme Michèle de Vaucouleurs. La proposition du rapporteur pour avis est calibrée de manière beaucoup plus modérée que les précédentes. Elle prend notamment en considération le transfert des emplois en milieu scolaire à l’éducation nationale. Le volume de 2018 devait tenir compte des contrats en cours et de conditions d’accès bien plus larges. Les PEC s’adressent aux personnes les plus en difficulté et qui n’entrent que difficilement dans les autres propositions. Il conviendrait d’affiner le besoin pour la séance. Le groupe MODEM réserve donc son vote d’ici là.

M. Stéphane Viry, rapporteur pour avis. Je ne partage pas l’explication du Gouvernement, qui parle d’une réorientation du dispositif vers d’autres outils tels que la garantie jeunes pour expliquer la baisse des PEC. Je ne partage pas non plus l’avis de M. Vallaud selon lequel les PEC ne fonctionnent pas car, s’il s’est produit une certaine latence dans la montée en puissance, on s’aperçoit que l’amorçage pouvait permettre d’atteindre le volume de crédits ouverts. Je déplore simplement que le Gouvernement réalise une économie sur des crédits destinés aux emplois aidés, en faisant fi du reste. Certes, 5 000 postes d’insertion par l’activité économique (IAE) en plus vont être ouverts mais cela ne couvrira pas les 70 000 postes qui ne sont pas ouverts. Des hommes et des femmes resteront sur le carreau, ne seront plus pris en charge au titre des politiques publiques de l’emploi, et je le déplore. Je suis un fervent partisan des emplois aidés.

La commission rejette cet amendement.

Elle examine ensuite l’amendement II-AS28 du rapporteur pour avis.

M. Stéphane Viry, rapporteur pour avis. Outre le volume d’emplois aidés ouverts, une deuxième question porte sur le taux de prise en charge au bénéfice de l’employeur. Des auditions que j’ai conduites auprès des employeurs putatifs de différentes entités, il ressort que le taux de prise de charge apparaît insuffisant. Ce taux est entre 30 et 60 %, à la discrétion du préfet selon les régions. Or ce qui fonctionnait bien, auparavant, c’est un taux de prise en charge de l’ordre de 70 %. Afin que le texte fonctionne et que les employeurs se mobilisent pour que des hommes et des femmes retrouvent le chemin de l’emploi, je propose de réévaluer l’hypothèse de prise en charge moyenne des PEC à 72 %. L’équilibre financier est assuré, comme pour le précédent amendement, sur le dispositif des emplois francs.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Comme vous l’avez souligné, une marge de manœuvre est laissée au préfet. Rien ne l’empêchera, dans l’attribution des PEC, de définir que, sur certains recrutements, la part payée sera de 30 %.

M. Bernard Perrut, rapporteur pour avis. L’amendement a une logique. Si nous voulons que ce type de contrats fonctionne, il faut que l’aide soit suffisante afin qu’ils puissent être créés. La logique de M. Viry est celle de l’efficacité : faire en sorte que les structures puissent utiliser ces outils. Encore faut-il que les préfets considèrent la réalité des associations qui en ont besoin.

La commission rejette cet amendement.

Ensuite de quoi, la commission est saisie de l’amendement II-AS29 du rapporteur pour avis.

M. Stéphane Viry, rapporteur pour avis. S’agissant des PEC, j’ai cherché à montrer que l’on pouvait faire plus et mieux en termes d’ouverture d’emplois et en augmentant le taux de participation ; je cherche à présent à vous faire comprendre qu’il faut relever l’hypothèse de durée moyenne des PEC, qui est actuellement de 10,2 mois, à douze mois. Les auditions que j’ai conduites ont fait ressortir que l’hypothèse de 10,2 mois est doublement problématique. D’une part, cette durée est inférieure à la durée moyenne de 10,9 mois constatée depuis la création des PEC. Ce que propose le PLF est donc régressif et on peut ainsi craindre une sous-budgétisation des nouvelles entrées en PEC en 2019. D’autre part, la durée de 10,2 mois est très éloignée des réalités du terrain. Lorsque l’on veut prendre en charge une personne, il faut s’inscrire dans la durée. Ce sont des publics parfois très éloignés de l’emploi et qui connaissent des difficultés d’ordre personnel ; souvent, il faut plus de dix mois pour que l’issue soit positive et profitable au bénéficiaire. C’est pourquoi je propose un allongement de la durée moyenne, avec, pour l’équilibre financier, les mêmes remarques que précédemment, sur les emplois francs.

Mme Michèle de Vaucouleurs. La ministre semble avoir indiqué tout à l’heure que douze mois serait la bonne durée. Sous réserve d’une confirmation, cela me paraît devoir être pris en compte.

Mme Fadila Khattabi. Nous avons la même position que Mme de Vaucouleurs. Nous vérifierons la position de Mme la ministre.

M. Stéphane Viry, rapporteur pour avis. J’ai bien noté que Mme la ministre a indiqué que c’est la durée de douze mois qui était optimale dans le cadre de ce dispositif.

La commission rejette cet amendement.

Elle examine ensuite l’amendement II-AS25 de M. Boris Vallaud.

M. Boris Vallaud. Le présent budget prévoit de diminuer de 84,3 millions d’euros la subvention pour charges de service public attribuée à Pôle emploi, et vous imposez à Pôle emploi une diminution de 800 postes en 2019, après avoir déjà supprimé 600 postes l’an dernier. Compte tenu de l’engagement des agents de Pôle emploi, de la charge de travail qui est la leur, du fait que le chômage ne baisse pas et que vous avez donné priorité à l’accompagnement des demandeurs d’emploi, cet amendement vise à maintenir les moyens de Pôle emploi.

M. Stéphane Viry, rapporteur pour avis. Avis défavorable. J’ai consulté les annexes budgétaires, qui justifient les crédits proposés pour 2019 par les « efforts de productivité » que doit réaliser Pôle emploi dans l’exercice de ces attributions. On peut certes déplorer la diminution des effectifs de Pôle emploi dans un contexte où le niveau du chômage reste alarmant, mais il ne me semble pas illégitime de demander à Pôle Emploi, comme à d’autres opérateurs publics, de réaliser des efforts de productivité et d’amélioration des services dans l’intérêt d’une maîtrise de nos dépenses.

La commission rejette cet amendement.

Puis elle examine l’amendement II-AS39 de M. Francis Vercamer.

M. Paul Christophe. Le présent amendement propose de mobiliser les crédits nécessaires au lancement d’une seconde phase d’expérimentation ayant pour but de résorber le chômage de longue durée. Afin de garder au dispositif son caractère expérimental, l’ouverture de la démarche serait circonscrite à de nouveaux territoires où la situation significativement dégradée de l’emploi le justifie.

M. Stéphane Viry, rapporteur pour avis. C’est un amendement très important qui propose de doubler la dotation prévue dans le PLF pour cette expérimentation « territoires zéro chômage de longue durée ». J’ai noté que la ministre s’est montré tout à l’heure très ouverte à ce type de dispositif.

Le PLF 2019 prévoit le financement de 1 270 emplois dans le cadre de cette expérimentation. Le doublement du budget permettrait d’en financer 2 500, soit, à mes yeux, autant de personnes sorties du chômage pour exercer de nouveau une activité professionnelle. Autant je suis très réservé sur les emplois francs, autant je crois profondément en l’expérimentation « Territoires zéro chômage de longue durée », qui a trouvé son public et a déjà fait ses preuves dans les territoires où elle a été déployée. Je suis donc intéressé à la prolonger et à augmenter les crédits qui lui sont destinés, d’autant plus que vous proposez de concentrer cet effort budgétaire sur de nouveaux territoires où la situation de l’emploi est significativement dégradée, bassins d’emplois sinistrés, territoires ruraux, quartiers prioritaires de la politique de la ville, des territoires parfois abandonnés en termes de dotations publiques. Avis favorable.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Mme la ministre a bien indiqué qu’elle souhaitait développer ce dispositif. Ce qui manque à l’heure actuelle, ce sont les entreprises candidates. Elle double, ou presque, le nombre de personnes pouvant être employées au sein de cette expérimentation dans les entreprises existantes. Cette expérimentation trouvera toute son efficience à son terme mais, dans l’immédiat, le budget doit tenir compte de la réalité, et je ne suis donc pas favorable à une revalorisation.

La commission rejette cet amendement.

Ensuite de quoi, la commission est saisie de l’amendement II-AS15 de M. Boris Vallaud.

Mme Gisèle Biémouret. Le groupe Socialistes et apparentés dénonce la baisse de budget alloué aux missions locales. Si l’enveloppe destinée à ces missions locales au titre de l’accompagnement et du suivi de la Garantie jeunes est en hausse, celle du budget global est en baisse de 8,12 millions d’euros. Lors de la présentation du plan pauvreté, le Président de la République a affirmé vouloir quintupler le nombre de Garantie jeunes. Pourtant, votre budget ne se fixe comme objectif que 100 000 nouveaux jeunes entrants en 2019, ce qui correspond à peine aux ambitions portées depuis sa création. Nous proposons de rétablir les crédits alloués aux missions locales à hauteur de ce qu’ils étaient en 2018.

Pour des raisons de recevabilité financière au titre de l’article 40 de notre Constitution, les crédits de l’action 2 du programme 102 sont abondés à hauteur de 8,12 millions d’euros et ceux de l’action 4 du programme 103 réduits d’autant.

M. Stéphane Viry, rapporteur pour avis. Le PLF 2019 prévoit une diminution de 4 % des crédits consacrés à l’accompagnement des jeunes par les missions locales au titre des conventions pluriannuelles d’objectifs (CPO). Votre amendement vise à relever de 8,12 millions d’euros ces crédits. Je partage un certain nombre d’inquiétudes concernant les capacités des missions locales qui sont pour moi des acteurs clés de l’accompagnement des jeunes sur le terrain. C’est pourquoi je suis d’avis de sacraliser ce qui existait jusqu’alors et ne souhaite pas que l’on fasse des économies dès à présent. Avis favorable.

La commission rejette cet amendement.

Elle examine ensuite l’amendement II-AS30 du rapporteur pour avis.

M. Stéphane Viry, rapporteur pour avis. Nous abordons la question de l’IAE. Le PLF 2019 prévoit le financement de 76 000 ETP pour les quatre structures de l’IAE, soit 5 000 postes supplémentaires par rapport à 2018. Il faut saluer cette indéniable avancée : une hausse de 7 %.

Néanmoins, elle demeure insuffisante pour répondre aux besoins de développement du secteur de l’IAE, largement exprimés par ses réseaux qui nous ont tous expliqué qu’ils étaient disposés et capables de faire beaucoup plus. Je considère que le PLF ne va pas assez loin pour deux raisons.

Tout d’abord, l’utilisation par les préfets de région de la quasi-totalité de leur marges de manœuvre en matière de fongibilité des crédits destinés aux contrats aidés vers l’IAE en 2018 est une bonne illustration de la sous-budgétisation de l’IAE. Les préfets sont allés piocher ailleurs pour permettre à l’IAE d’aller de l’avant, ce qui prouve bien qu’il n’y avait pas assez de crédits ouverts. Manifestement, 5 000 ETP prévus en 2019 ne permettront pas de rectifier cet état de fait. La fongibilité permet de masquer la sous-budgétisation.

Ensuite, le rapport de M. Borello « Donnons-nous les moyens de l’inclusion », remis à la ministre du travail en janvier 2018 et qui fait autorité, a formulé une recommandation n° 10 proposant d’atteindre une croissance de 20 % par an du nombre de salariés jusqu’à la fin du quinquennat. Je vous propose simplement d’appliquer cette recommandation de M. Borello et, ce faisant, de l’ajuster en augmentant de 14 200 le nombre d’aides au poste supplémentaires par rapport à 2018. Ce sont exactement les 20 % préconisés par M. Borello et cela correspond au potentiel de développement des acteurs de l’IAE.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Vous connaissez, monsieur le rapporteur pour avis, mon attachement à l’IAE, qui, je pense, égale le vôtre. Le budget actuel ne satisfait pas encore le potentiel qu’offre l’IAE mais une trajectoire est inscrite : plus 25 % d’ici à 2020 et plus de 100 000 personnes à l’horizon 2022. On y va mais il faut accepter que cette montée en puissance se fasse en douceur. Par ailleurs, 60 millions d’euros sont dédiés à la formation pour l’IAE, ce qui est une avancée très importante, et la fongibilité, vous l’avez souligné, offre de la souplesse aux préfets, notamment pour les recrutements en entreprises d’insertion qui sont souvent bloqués. Avec tout l’amour que je porte à l’IAE, je ne suis cependant pas favorable à cet amendement.

La commission rejette cet amendement.

Elle émet ensuite un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Travail et emploi » et de l’état B, du compte spécial « Financement de la modernisation de l’apprentissage », puis de l’article 84.

Après l’article 84

La commission est saisie de l’amendement II-AS31 du rapporteur pour avis.

M. Stéphane Viry. Cet amendement vise à solliciter un rapport sur l’IAE. Une réforme structurante de l’IAE a eu lieu en 2014, qui a totalement modifié le financement de l’aide au poste. Cela faisait suite à un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) qui avait mis en lumière la complexité des structures de l’IAE. La réforme de 2014 a été plutôt bien vécue et a permis à l’IAE d’entrer dans un nouveau cycle, mais à ce jour nous n’avons pas d’éléments précis sur sa mise en œuvre. C’est pourquoi il conviendrait que nous bénéficiions d’une évaluation exhaustive alors que les crédits dédiés à l’IAE, s’ils restent insuffisants, sont néanmoins conséquents dans le budget.

Mme Fadila Khattabi. Nous y sommes défavorables car, si votre demande est pertinente, le plan pauvreté sera accompagné d’une réflexion sur le sujet et nous procéderons à une évaluation à ce moment-là.

M. Boris Vallaud. Je suis très favorable à ce rapport.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Nous y sommes très favorables également.

La commission rejette cet amendement.

 

 

 

 

 


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   ANNEXES

annexe N° 1 : Liste des personnes auditionnées par le rapporteur

(par ordre chronologique)

 

                                Table ronde acteurs de linsertion dans lemploi

     Pôle emploiM. Michaël Ohier, directeur général adjoint en charge du Réseau

     Union nationale des missions locales  M. Jean-Patrick Gille, président, et M. Serge Kroichvili, secrétaire général

     Association nationale des collectivités territoriales pour la formation, linsertion et lemploiM. Pascal Bolo, président délégué, Mme Marie-Pierre Establie dArgencé, déléguée générale

                   Fédération des entreprises dinsertion (*)  M. Luc de Gardelle, président, M. Olivier Dupuis, secrétaire général

                                Table ronde personnalités qualifiées

     Ministère du Travail – Direction de lanimation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) – Mme Sandra Bernard, responsable de la mission Action Régionale, Mmes Sandrine Firquet et Lisa Mourlot, chargées d’études sur les contrats aidés de la DARES

     Conseil danalyse économique M. Pierre Cahuc, professeur

     Observatoire national de la politique de la ville M. Jean-François Cordet, président, Mme Stéphanie Mas, cheffe du bureau de lobservation des territoires en politique de la ville

                                Table ronde de lassociatif et de léconomie sociale et solidaire

     Le Mouvement associatif (*) – Mme Frédérique Pfrunder, déléguée générale, et Mme Lucie Suchet, responsable plaidoyer du Mouvement associatif

     Chambre française de léconomie sociale et solidaire (ESS) (*)  M. Emmanuel Verny, délégué général

     Union des employeurs de léconomie sociale et solidaire (UDES) (*)  M. Sébastien Darrigrand, délégué général

       Assemblée des départements de France (ADF) – M. Jean-Michel Rapinat, directeur délégué en charge des politiques sociales, et Mme Ann-Gaëlle Werner-Bernard, conseillère en charge des relations avec le Parlement

       Groupe SOS – M. Jean-Marc Borello, président du directoire

       Association des maires ruraux de France (AMRF) – M. Michel Fournier, vice-président délégué

       Association des maires de France (AMF) – M. Wilfried Schwartz, maire de La Riche, Mme Valérie Brassart, chargée d’études et Mme Charlotte de Fontaines, chargée des relations avec le Parlement

       Ministère du Travail – Délégation générale à lemploi et à la formation professionnelle (DGEFP) – Mme Carine Chevrier, déléguée générale, Mme Alexandra Noël, adjointe au chef de mission Affaires financières, et M. Laurent Suster, chef de mission insertion professionnelle

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

(*) Ce représentant dintérêts a procédé à son inscription sur le répertoire de la Haute Autorité de transparence pour la vie publique sengageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de lAssemblée nationale


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Annexe n° 2 : LISTE DES personnes rencontrées lors des déplacements du rapporteur

     Table ronde de représentants de crèches associatives

 Crèche Sucre dOrge (Pouxeux) Mme Sylvie Mangin, responsable

     Multi-accueil Pousse poussette (Épinal) Mme Sophie Wald, directrice et Mme Sophie L., éducatrice de jeunes enfants

     Multi-accueil Tournicoti (Châtel-sur-Moselle) M. Jeannot, président

     Mairie dÉpinal - Mme Pascale Deau, 4e adjointe au Maire d’Épinal chargée du personnel municipal, des affaires sociales et du logement

     Table ronde de directeurs détablissements dhébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD)

     EHPAD de Xertigny et Darney M. Daniel Picard, directeur

     EHPAD de Golbey M. Bachir Filali, directeur

     Communauté détablissements de la Déodatie M. Pierre Tsuji, directeur

     Table ronde de représentants du secteur associatif

     Ligue de lenseignement des Vosges Mme Christine Le Valois, présidente, Mme Rachel Joly et M. Francis Thomas, membres

     Centre Léo Lagrange dÉpinal Mme Corinne Burger, présidente du centre Léo Lagrange d’Épinal

     M. Christian Simon

     Table ronde de représentants de centres sociaux

     Centre social de Rambervillers Mme Amandine Lamotte, présidente

     Centres sociaux à Épinal Mme Sylvie Valentin, directrice

     Centre social de Thaon les Vosges Mme Claudine Welschbillig, présidente

     Centre social de Golbey Mme Françoise Claudel, directrice

   Association des Maires des Vosges (AMV) – M. Dominique Peduzzi, président, Maire de Fresse-sur-Moselle, M. Henri Vouaux, Maire de Jeuxey, Mme Christine Vauzelle, Maire de Charmois l’Orgueilleux, M. Yannick Villemin Maire de Girancourt, M. Pascal Larrière 1er adjoint au Maire de Golbey, M. Daniel Midon Maire de Les Forges, M. Alain Pierre, Maire d’Uzemain, M. Gilles Dubois, Maire de Sanchey.

 

 


([1]) « Soutenir le travail, investir pour lavenir », Dossier du presse du projet de loi de finances 2019.

([2]) Loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel.

([3]) M. Jean-Marc Borello, « Donnons-nous les moyens de l’inclusion », janvier 2018.

([4]) La deuxième partie de cet avis budgétaire, consacrée aux contrats aidés, présente plus en détail les conséquences de cette transformation.

([5]) Les chiffres renseignés pour l’année 2018 comprennent les 30 500 contrats aidés dédiés à l’accompagnement des élèves en situation de handicap pour l’année scolaire 2018-2019.  

([6]) DARES Analyses n° 21, « Les contrats aidés : quels objectifs, quel bilan ? », mars 2017.  

([7]) DARES Analyses n° 31, « Emploi, chômage et population active en 2017 », juillet 2018.

([8]) Circulaire n° DGEFP/SDPAE/MIP/MPP/2018/11 du 11 janvier 2018 relative aux parcours emploi compétences et au Fonds dinclusion dans lemploi en faveur des personnes les plus éloignées de lemploi.

([9]) La prescription de CUI-CIE n’est plus autorisée que dans deux cas dérogatoires : pour les territoires d’outre-mer, d’une part, dans le strict respect de l’enveloppe allouée aux PEC, et dans le cadre des conventions annuelles d’objectifs et de moyens (CAOM) conclues avec les conseils départementaux d’autre part, sous réserve que le coût soit nul pour l’État.  

([10]) Les engagements de l’employeur sont formalisés au moyen d’un formulaire CERFA.  

([11]) Cf. la deuxième partie du rapport pour avis présenté par M. Stéphane Viry au nom de la commission des affaires sociales sur le projet de loi de finances pour 2018, consacrée à l’IAE.

([12]) Le taux moyen de prise en charge des parcours emploi compétences dans les départements d’outre-mer est fixé à 60 %, contre 50 % en métropole.

([13]) Ce pourcentage ne tient pas compte des 30 500 contrats consacrés à l’accompagnement des élèves en situation de handicap, transférés dans le PLF 2019 au programme 230 qui relève de la tutelle du ministère de l’Éducation nationale.

([14]) Le rapport de M. Borello préconisait pour sa part d’étudier la transformation des conseils départementaux de l’IAE (CDIAE) en comités régionaux d’inclusion dans l’emploi (CRIDE).