N° 1306

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 octobre 2018.

AVIS

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES
SUR LE PROJET DE LOI de finances pour 2019 ( 1255)

 

 

TOME I

 

 

 

ANCIENS COMBATTANTS, MÉMOIRE ET LIENS AVEC LA NATION

PAR M. Philippe MICHEL-KLEISBAUER

Député

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 Voir le numéro : 1302 (annexe 7)


 

 


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SOMMAIRE

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 Pages

Introduction

Première partie :  Garantir léquité dans la reconnaissance et la réparation : les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation »

I. Le programme 167 « Liens entre la nation et son armée »

A. Les liens armées-jeunesse

1. La Journée défense et citoyenneté

2. Le service militaire volontaire

B. La mémoire

1. La politique de mémoire

a. Les actions de mémoire

i. Les commémorations

ii. Les actions à caractère pédagogique

b. Les subventions et transferts

2. Les sépultures de guerre et les lieux de mémoire

a. Un patrimoine riche et entretenu

i. Les sépultures de guerre

ii. Les hauts lieux de la mémoire nationale

b. Des prévisions budgétaires qui peuvent surprendre

II. Le programme 169 « reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant »

A. Ladministration de la dette viagère

1. Les pensions militaires dinvalidité

2. La retraite du combattant

B. Laction sociale et les droits liés aux pensions militaires dinvalidité

1. Les droits liés aux PMI

a. Les soins médicaux gratuits et des appareillages

b. Les réductions sur les transports

c. Le régime de sécurité sociale des pensionnés de guerre

2. La solidarité

a. Laction sociale

b. Les subventions pour charges de service public aux opérateurs publics

C. Les actions en faveur des harkis et des rapatriés

D. Leffort fiscal et social de létat

III. Le programme 158 « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale »

A. Lindemnisation des orphelins de la déportation et des victimes de spoliations

1. Lindemnisation des orphelins

2. Lindemnisation des victimes de spoliations

B. Lindemnisation des victimes dactes de barbarie

Deuxième partie :  Les défis de la transmission de la mémoire combattante

I. Agir face au risque déclatement de la mémoire combattante

A. Quel monde combattant dans dix ans ?

1. Les associations face au temps

2. Nouvelles mémoires, nouvelles pratiques

B. Le défi de la sauvegarde des mémoires

1. Une « maison commune »

2. Laccompagnement par lÉtat

II. conforter les lieux de mémoire du ministère des armées

A. Se recueillir

1. Les nécropoles

2. Les hauts-lieux de la mémoire nationale

B. Transmettre

1. Les musées

2. Le renforcement de la cohésion nationale

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. Audition dE mme geneviève darrieussecq, SECRÉTAIRE DÉTAT AUPRÈS DE LA MINISTRE DES ARMÉES

II. audition de reprÉsentants dASSOCIATIONS DANCIENS COMBATTANTS

III. EXAMEN des crÉdits

annexe :  Liste des personnes auditionnées par le rapporteur pour avis et déplacements

1. Liste des personnes auditionnées

2. Liste des déplacements


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   Introduction

Le 17 octobre 2018, l’état-major de l’armée de terre annonçait la mort du caporal Abdelatif Rafik, du 14e régiment d’infanterie et de soutien logistique parachutiste, décédé accidentellement au Mali où il était déployé dans le cadre de l’opération Barkhane. Pour la treizième fois depuis le lancement de cette opération, la Nation est en deuil après avoir perdu l’un de ses soldats. Au Mali, dix militaires français ont auparavant perdu la vie dans le cadre de l’opération Serval, déclenchée en janvier 2013 pour arrêter l’avancer des groupes terroristes prêts à marcher sur Bamako. Aujourd’hui, 4 500 militaires français combattent le terrorisme au Sahel, où votre rapporteur pour avis s’est récemment rendu avec une délégation de la commission de la Défense nationale et des forces armées. En raison de l’intensité de la menace, liée notamment à la dissémination d’engins explosifs improvisés, leur vie est chaque jour exposée, et les blessures nombreuses. Quatre militaires ont ainsi été blessés lors d’une embuscade tendue par des terroristes à Gao, le 1er juillet dernier.

Au moment d’ouvrir le présent avis, c’est à ces soldats et à leurs familles que votre rapporteur souhaite qu’il soit rendu hommage. Tombés pour la France, blessés pour la France, conscients que « l’état militaire exige en toute circonstance esprit de sacrifice, pouvant aller jusqu'au sacrifice suprême ([1]) », ils méritent la reconnaissance de la Nation, à laquelle il incombe de mettre en œuvre des dispositifs de réparation.

 C’est à ces questions que s’intéresse le présent avis budgétaire, qui porte sur les crédits de la mission budgétaire « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ».

En première partie, il sera procédé à une évaluation des ressources affectées à cette mission par le projet de loi de finances pour 2019. Si, à l’instar des années précédentes, le montant total de la dotation budgétaire diminue en raison de la disparition progressive et naturelle du nombre de bénéficiaires des dispositifs du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre, il convient néanmoins de souligner l’importance de l’effort de l’État en direction du monde combattant. En effet, le projet de budget pour 2019 de la mission s’élève à 2,3 milliards d’euros. Il intègre par ailleurs le financement de mesures nouvelles, permettant de conforter le droit à reconnaissance et à réparation et de garantir une meilleure équité dans sa mise en œuvre.

Ces évolutions sont notamment issues du rapport établi par les trois groupes de travail constitués, sur proposition de Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire d’État auprès de la ministre des Armées, afin de fixer un cap à la politique de reconnaissance et de réparation et d’en déterminer les priorités pour les années 2018 à 2022. Elle s’était d’ailleurs engagée, devant la représentation nationale, à conduire une vaste concertation avec les associations du monde combattant afin d’identifier les ajustements à apporter au droit à reconnaissance et à réparation. Sachons saluer la méthode mise en place par la secrétaire d’État, dont le monde combattant a souligné à plusieurs reprises, au cours des auditions, l’écoute et l’attention.

En seconde partie, le présent avis abordera la thématique de la transmission de la mémoire combattante, au travers de quelques enjeux. En effet, alors que le monde combattant se trouve à un moment charnière compte tenu de l’âge avancé de la plupart de ses membres, il conviendra de s’interroger, à l’avenir, sur les voies et moyens d’assurer la transmission de la mémoire des conflits, sans leurs grands témoins. Se pose ainsi la question de l’organisation du monde combattant à un horizon de dix ans, alors que d’aucuns appellent à la constitution d’une « maison commune » qui abriterait la diversité des mémoires. De plus, le rôle de l’État dans le pilotage de la politique de la mémoire des armées sera sans doute amené à évoluer. S’il ne s’agit pas de bâtir une mémoire unique et officielle, l’État a vocation à conforter les lieux dont il a la charge, comme les nécropoles, les hauts-lieux de la mémoire nationale ou les musées, mais également à accompagner les initiatives des collectivités territoriales et de la société civile dans la grande œuvre de la transmission. À ce titre, prenant exemple sur le remarquable exemple de l’organisation du Centenaire de la Première Guerre mondiale, il lui faudra accompagner, labelliser, soutenir les initiatives foisonnant sur le territoire, et non pas chercher à tout administrer, même si les « grands moments » resteront sans doute définis par le chef de l’État.

À quelques jours de la commémoration du centenaire de l’Armistice du 11 novembre 2018, mettons‑nous en ordre de bataille pour garantir la survivance du souvenir de ceux qui, à un moment ou à un autre, ont sacrifié une part d’eux‑mêmes au nom de la Nation. Cela débute par l’adoption des crédits de la présente mission, à laquelle la commission de la Défense nationale et des forces armées a émis un avis favorable.

 

 

 

 

Le rapporteur pour avis avait demandé que les réponses à ses questionnaires budgétaires lui soient adressées au plus tard le 10 octobre 2018, date limite résultant de larticle 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances. À cette date, 75 réponses sur 79 lui étaient parvenues, soit un taux de 94,9 %.

 


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   Première partie :

Garantir l’équité dans la reconnaissance et la réparation : les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation »

La mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », couvre l’ensemble des politiques qui contribuent à pérenniser les liens entre la Nation et le monde combattant. Elle s’articule autour de trois programmes budgétaires complémentaires, dont les deux premiers sont placés sous la responsabilité du ministère des Armées :

– le programme 167 « Liens entre la Nation et son armée » ;

– le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » ;

– le programme 158 « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale », qui relève du Premier ministre.

Le projet de budget pour 2019 des trois programmes de la mission s’élève à 2,3 milliards d’euros en crédits de paiement (CP), soit une diminution de près de 160 millions d’euros par rapport à la loi de finances pour 2018. Cette baisse importante n’est néanmoins que le reflet de la diminution naturelle du nombre de bénéficiaires de la dette viagère – pensions militaires d’invalidité et retraite du combattant : l’immense majorité de nos anciens combattants a combattu en Afrique du Nord il y a une soixante d’années ; la plupart d’entre eux sont donc âgés de plus de quatre-vingts ans.

Du reste, votre rapporteur pour avis tient à souligner que l’évolution globale des crédits traduit aussi l’introduction de mesures nouvelles, ayant vocation à assurer une meilleure équité dans la mise en œuvre des dispositifs de reconnaissance et la réparation prévus par le code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre (CPMIVG).

On citera notamment :

– l’élargissement, à compter du 1er janvier 2019, du bénéfice de la carte du combattant aux soldats présents en Algérie entre le 2 juillet 1962 et le 1er juillet 1964 ;

– l’augmentation de 300 000 euros de la dotation prévue pour le financement des expertises médicales nécessaires à l’instruction des dossiers de pension militaire d’invalidité ;

– la mise en œuvre d’un plan d’actions en faveur des harkis et de leur famille, qui comprend des mesures comme la revalorisation des allocations de reconnaissance et viagère bénéficiant aux anciens membres des formations supplétives et à leurs conjoints survivants, ainsi que la mise en place d’un dispositif de solidarité au profit des enfants de harkis rencontrant aujourd’hui des difficultés liées à leur histoire spécifique.

De plus, le périmètre de la mission budgétaire a été élargi avec le rattachement au programme 167 du service militaire volontaire et de l’organisation du défilé du 14 juillet, pour un montant de cinq millions d’euros.

Évolution des crédits de la mission

(en millions d’euros)

(hors contribution de lÉtat au CAS Pensions)

LFI 2015

LFI 2016

LFI 2017

LFI 2018

PLF 2019

Plafond des CP

2 747

2 613

2 540

2 461

2 302 ([2])

Source : PAP 2018 et 2019.

I.   Le programme 167 « Liens entre la nation et son armée »

Le programme 167 prévoit un budget de 33,8 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, soit une diminution de 21,1 % et de 20,8 % respectivement.

Cette forte baisse résulte de la combinaison de deux mouvements totalement opposés :

– d’une part, une hausse de 20,3 % en AE et de 21,6 % en CP des crédits affectés à l’action 1, principalement due à l’élargissement de son périmètre ([3]) ;

– d’autre part, une baisse significative des crédits prévus pour la mise en œuvre de la politique de mémoire, à hauteur de 42,9 % en AE comme en CP, du fait de l’arrivée à son terme du cycle du Centenaire.

Évolution des crédits du programme 167 de 2017 à 2019

(en euros)

Mission
« Anciens combattants »

LFI 2017

LFI 2018

PLF 2019

AE

CP

AE

CP

AE

CP

P 167

Action 1

Liens armées-jeunesse ([4])

15 503 766

15 710 000

14 787 483

14 624 062

17 792 623

17 789 899

Action 2

Politique de mémoire

22 586 600

22 586 600

28 056 938

28 056 938

16 020 000

16 020 000

Total P167

38 090 366

38 296 600

42 844 421

42 681 000

33 812 623

33 809 899

Source : PAP 2018 et 2019.

A.   Les liens armées-jeunesse

Le changement de dénomination de l’action 1 du programme 167 tire les conséquences de la diversification des missions confiées à la direction du service national et de la jeunesse (DSNJ), chargée d’animer la commission « Armées‑jeunesse » du ministère des Armées et responsable, désormais, de la mise en œuvre du service militaire volontaire.

De manière plus globale, cette évolution est à lire au regard des travaux relatifs à la rénovation du service national universel (SNU), conduits depuis l’élection à la présidence de la République de M. Emmanuel Macron. En effet, après avoir piloté un groupe de travail constitué par le chef de l’État sur la question, le général de division Daniel Ménaouine a été nommé à la tête de la DSNJ au cours de l’été ([5]), ce qui semble confirmer le rôle essentiel du ministère des Armées dans ce projet de société voulu par le président de la République. Sans qu’il soit possible de dessiner nettement les contours de ce futur service, ni de préciser le calendrier de sa mise en œuvre, il ne fait guère de doute que les dispositifs financés par la présente action évolueront au gré de son déploiement. 

Service national universel : où en est-on ?

L’année 2018 a été l’occasion pour le Gouvernement d’intensifier la réflexion autour de la mise en œuvre du SNU.

Le 26 avril 2018, le groupe de travail ([6]) constitué par le président de la République a remis ses conclusions au Premier ministre ([7]). Sur la base de ces recommandations, le Gouvernement a arrêté les principaux axes du futur SNU, rendus publics à l’issue du conseil des ministres du 27 juin 2018 ([8]). L’architecture du service en deux grandes phases a été actée, selon les modalités suivantes.

La première phase du SNU, dans le prolongement de l’obligation scolaire, constituera l’aboutissement du parcours citoyen, débuté à l’école primaire et poursuivi au collège. Effectuée aux alentours de 16 ans, elle sera d’une durée d’un mois maximum et comportera une période d’hébergement collectif.

Vécue par une classe d’âge entière quels qu’en soient l’origine, le sexe, le milieu ou le territoire, cette phase comprendra une occasion de vie collective permettant à chaque jeune de créer des liens nouveaux, d’apprendre une façon neuve de vivre en commun, de développer sa culture d’engagement pour affermir sa place et son rôle au sein de la société. Elle sera aussi l’occasion de détecter les difficultés de certains jeunes (lecture, santé, insertion, etc.) et d’y remédier par une orientation vers les dispositifs adaptés.

Dans un second temps, chaque jeune sera encouragé, notamment par des mesures d’attractivité variées et ciblées, à poursuivre volontairement une période d’engagement d’une durée d’au moins trois mois, liée à la défense et la sécurité (engagement volontaire dans les armées, la police, la gendarmerie, les pompiers, la sécurité́ civile), à l’accompagnement des personnes, à la préservation du patrimoine ou de l’environnement ou encore au tutorat, sans que cette liste soit limitative. L’offre des différentes opportunités d’engagements, civils ou militaires, intégrera les volontariats existants et des propositions nouvelles, y compris celles qui émaneront des jeunes eux-mêmes. À titre d’exemple, l’actuel service civique sera l’un des moyens d’accomplir cette seconde phase du SNU.

Le SNU poursuit un triple objectif :

– impliquer davantage la jeunesse française dans la vie de la Nation. En favorisant le brassage social et territorial, il doit permettre de développer la cohésion sociale et nationale ;

– faire prendre conscience des enjeux de la défense et de la sécurité nationale, afin d’amener l’ensemble des jeunes à être des acteurs à part entière de l’esprit de défense, en faisant par exemple l’expérience de la vie militaire ou des métiers de la sécurité intérieure ;

– développer la culture de l’engagement, au travers de la découverte des différentes formes d’engagement possibles.

Afin de préciser les modalités de mise en œuvre du SNU, le Gouvernement a décidé du lancement d’une vaste consultation de la jeunesse, au travers de concertations territoriales dont la première a eu lieu le 13 septembre dernier à Avignon.

Au terme du processus de consultation, le Gouvernement précisera l’architecture du SNU, avant le lancement d’une phase expérimentale au cours de l’année 2019.

Dorénavant, le budget de l’action 1 est donc constitué de deux opérations stratégiques permettant de couvrir les dépenses nécessaires à la préparation et la bonne conduite de la JDC sur le territoire national et au déroulement du SMV.

1.   La Journée défense et citoyenneté

La journée défense et citoyenneté assure la diffusion de l’esprit de défense auprès des jeunes Français. Sa mise en œuvre relève de la direction du service national et de la jeunesse (DSNJ) du ministère des Armées. Cette journée, dont le contenu, défini à l’article L. 114-3 du code du service national, n’a eu de cesse d’évoluer ces dernières années, a vocation à sensibiliser les jeunes aux droits et aux devoirs du citoyen, à détecter les jeunes en situation d’échec scolaire et à assurer, avec le concours des mairies, le recensement des jeunes citoyens.

Article L. 114-3 du code du service national

« Lors de la journée défense et citoyenneté, les jeunes Français reçoivent un enseignement qui permet de présenter les enjeux et les objectifs généraux de la défense nationale, les moyens civils et militaires de la défense et leur organisation, le service civique et les autres formes de volontariat ainsi que les possibilités d’engagement dans les forces armées et les forces de réserve. Ils sont sensibilisés aux droits et devoirs liés à la citoyenneté et aux enjeux du renforcement de la cohésion nationale et de la mixité sociale. Ils bénéficient également d’une sensibilisation à la sécurité routière.

À cette occasion sont organisés des tests d’évaluation des apprentissages fondamentaux de la langue française. Il est délivré une information générale sur le don de sang, de plaquettes, de moelle osseuse, de gamètes et sur le don d’organes à fins de greffe. S’agissant du don d’organes, une information spécifique est dispensée sur la législation en vigueur, sur le consentement présumé et sur la possibilité pour une personne d’inscrire son refus sur le registre national automatisé prévu à l’article L. 1232-1 du code de la santé publique. Par ailleurs, une information est dispensée sur la prévention des conduites à risque pour la santé, notamment celles susceptibles de causer des addictions et des troubles de l’audition. »

La JDC se déroule chaque année sur près de 300 sites, dont 200 militaires, et mobilise autour de neuf mille animateurs issus des armées. Depuis 2017, elle a fait l’objet de quelques ajustements, touchant notamment à la présentation du modèle français et du thème de la laïcité, ainsi qu’à l’information portant sur les valeurs et les missions de la sécurité sociale.

Sur la base d’une prévision de 792 745 jeunes convoqués en JDC pour l’année 2018, contre 804 000 jeunes en 2018, les crédits qui lui sont affectés s’élèvent à 15,3 millions d’euros en AE comme en CP. De manière plus précise, les crédits de cette opération stratégique se répartissent en deux opérations budgétaires :

– l’opération « Organisation et soutien JDC », dont les crédits (3,4 millions d’euros en AE et en CP) comprennent l’ensemble des dépenses liées à l’organisation générale de la JDC et au fonctionnement de la DSNJ : dépenses de service, de formation et d’instruction, de frais de déplacement du personnel, de communication interne, de réalisation de modules et formulaires, de fonctionnement des sites et du service civique, de transport des intervenants et encadrants ainsi que les dépenses d’acquisition et d’entretien des matériels techniques ;

– l’opération « Conduite et prestations JDC », qui regroupe les dépenses directement liées au déroulement de la JDC – alimentation, transport des jeunes, modules spécifiques – pour un montant de 11,9 millions d’euros en AE et CP.

Alors même que le nombre de jeunes attendus diminue, la dotation connaît une légère augmentation d’une année sur l’autre à hauteur de 3,4 % en AE et de 4,8 % en CP. Celle-ci s’explique par un accroissement des dépenses de fonctionnement du fait de l’élargissement des missions de la DSNJ et de la poursuite de son processus de modernisation.

La DSNJ a ainsi poursuivi la dématérialisation des démarches liées à la JDC engagée il y a plusieurs années. Si le portail « majdc.fr » est accessible depuis décembre 2017, il s’est enrichi tout au long de l’année 2018, avec la création d’espaces spécifiques : « partenaires de la JDC », « animateurs » et « encadrants ». De plus, les administrations souhaitant connaître la situation d’un administré vis-à-vis des obligations d’accomplissement du service national disposent désormais de la possibilité de s’y connecter afin d’opérer les vérifications nécessaires pour l’inscription d’un candidat au permis de conduire ou aux concours de la fonction publique par exemple. Au-delà, la DSNJ a engagé des travaux de rénovation des outils pédagogiques utilisés par les animateurs de la JDC afin de renforcer son caractère interactif.

Par ces différentes actions, la DSNJ prépare la montée en puissance du SNU, dont elle sera un acteur incontournable.

2.   Le service militaire volontaire

Le service militaire volontaire (SMV) désigne en réalité deux dispositifs qui ont progressivement fusionné : le SMV en tant que tel et le volontariat militaire d’insertion (VMI).

Dispositif de nature expérimentale depuis l’actualisation de la précédente loi de programmation militaire (LPM) ([9]), le SMV a été pérennisé, à compter du 1er janvier 2019, par l’article 32 de la LPM 2019-2025, promulguée par le président de la République le 13 juillet dernier ([10]).

Inspiré par le service militaire adapté (SMA), dispositif d’insertion socioprofessionnelle créé en 1961 au profit des jeunes adultes d’outre-mer âgés de 18 à 25 ans, en situation d’échec ou en voie de marginalisation, le SMV a été créé à l’initiative du précédent président de la République, M. François Hollande, dans la foulée des attentats commis en Île-de-France entre le 7 et le 9 janvier 2015.

Prévue initialement pour une durée de deux années à compter du 1er septembre 2015, cette expérimentation a fait l’objet d’une première prolongation, jusqu’au 31 décembre 2018 ([11]), dont l’objectif était de parfaire l’évaluation du dispositif, dans la foulée de la transmission par le Gouvernement au Parlement, en novembre 2016, d’un premier rapport d’évaluation.

De manière parallèle, le législateur a procédé à la création d’un dispositif expérimental complémentaire ([12]), permettant au jeune engagé de disposer du double statut de stagiaire de la formation professionnelle au sens du droit du travail et de volontaire militaire. Ce volontariat militaire d’insertion (VMI) n’était néanmoins qu’une forme de SMV.

À l’heure de l’élaboration du présent avis, le service militaire volontaire se déploie sur six centres situés à Montigny-lès-Metz, Brétigny-sur-Orge, La Rochelle, Châlons-en-Champagne, Brest et Ambérieu-en-Bugey. En 2018, ces centres devraient accueillir mille volontaires, encadrés par 256 militaires d’active, majoritairement issus de l’armée de terre, et quelques dizaines de réservistes. Le dispositif, ouvert aux jeunes Français de métropole âgés de 17 ans révolus à moins de 26 ans, s’adresse à deux types de volontaires :

– les volontaires stagiaires, peu ou pas diplômés, éloignés de la formation et de l’emploi, souscrivant un contrat de six à douze mois pour une solde de 315 euros par mois ;

– les volontaires techniciens, diplômés sans emploi à la recherche d’une première expérience professionnelle, souscrivant un contrat d’un an pour une solde de 740 euros par mois.

Nourris, blanchis et logés, tous les volontaires suivent un parcours d’insertion socioprofessionnelle comptant deux phases :

– une phase de remise à niveau, d’une durée de cinq mois, qui prend la forme d’une formation militaire et comportementale (secourisme, instruction civique, permis de conduire, remise à niveau scolaire) ;

– une phase de professionnalisation, d’une durée variable de quelques mois, au cours de laquelle les jeunes s’engagent dans une formation dont la nature dépend de chaque site selon le bassin d’emploi. Ces formations sont conduites en lien avec des organismes spécialisés comme les centres de formation d’apprentis (CFA). De plus, certains centres ont noué des partenariats fructueux avec des entreprises, comme par exemple Disneyland Paris ou la SNCF pour le centre de Brétigny-sur-Orge.

Comme le souligne le projet annuel de performance, « les résultats du SMV en termes dinsertion sont encourageants et reconnus. Le taux dinsertion des volontaires stagiaires est ainsi établi à 72 %. » ([13])

Décidé par souci de lisibilité de l’action du ministère des Armées au profit de la jeunesse, le rattachement au programme 167 des crédits consacrés au financement du SMV se traduit par une adjonction de 2,5 millions d’euros en AE et CP, auparavant inscrits au sein de la mission « Défense ».

Plus concrètement, les crédits de l’opération stratégique SMV se répartissent en deux opérations budgétaires :

– une opération « Formation et soutien formation », dont les crédits à hauteur de 1,8 million d’euros, financeront les actions de formation professionnelle délivrées aux stagiaires et les déplacements conséquents ;

– une opération « Rayonnement et recrutement », pour un montant de 700 000 euros, destinée à financer l’ensemble des actions de représentation et de promotion du SMV.

Par ailleurs, selon les documents budgétaires, une contribution du fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) et de l’organisme paritaire collecteur agréé (OPCA) est attendue dans le cadre de fonds de concours, à hauteur de 3,3 millions d’euros.

Aux yeux de votre rapporteur pour avis, la réorganisation de la maquette budgétaire contribue à clarifier l’engagement du ministère des Armées auprès de la jeunesse. Elle demeure incomplète dans la mesure où elle ne reflète pas l’entièreté de cet engagement, également incarné par le service militaire adapté, l’établissement pour l’insertion dans l’emploi, les préparations militaires ou encore les cadets de la défense.

De récents travaux parlementaires ont mis en lumière la diversité des actions entreprises au profit des jeunes Français, seule à même de répondre à la diversité des parcours et des engagements individuels au service de la Nation. S’il faut se réjouir de la montée en puissance du SMV, il convient également d’appeler à une certaine vigilance, afin d’éviter que la réforme du SNU ne conduise à affaiblir les dispositifs qui fonctionnent. 

B.   La mémoire

La mise en œuvre de la politique de mémoire ne relève pas exclusivement du ministère des Armées ; il s’agit d’une politique publique interministérielle, à laquelle contribue notamment le ministère de l’Éducation nationale. Au-delà des différents services de l’État, elle est également le fait des collectivités territoriales comme de la société civile, au travers des associations.

Néanmoins, parce que la mémoire de la Nation est intimement liée à l’histoire de ses armées et des conflits dans lesquels ses enfants ont été engagés – notamment les conflits du XXe siècle –, la défense est étroitement associée à la définition comme à la mise en œuvre de la politique nationale de mémoire.

Aussi, si les crédits inscrits à l’action 2 du programme 167 ne traduisent pas l’ensemble de l’effort de l’État en la matière, ils en constituent une part importante.

La politique de mémoire mise en œuvre par l’État est parfois appréhendée au travers du seul prisme des commémorations, dont les plus importantes sont retransmises en direct à la télévision, commentées, en somme, médiatisées. Pourtant, elles ne constituent que l’une des trois voies d’action du ministère :

– les commémorations, donc, principalement marquées ces dernières années par le cycle du centenaire de la Première Guerre mondiale ;

– diverses actions pédagogiques et civiques ;

– l’entretien et la valorisation du patrimoine mémoriel, composé des sépultures de guerre et des neuf hauts lieux de la mémoire nationale.

La politique de mémoire fait l’objet d’une chute drastique des crédits qui lui sont alloués. En effet, son budget s’établit à 16,02 millions d’euros en AE comme en CP, ce qui représente une baisse respective de 12,18 millions d’euros et de 14,58 millions d’euros à périmètre constant ([14]). Si elle est expliquée, cette évolution n’en appelle pas moins quelques commentaires.

D’abord, elle résulte, pour moitié – 7,4 millions d’euros en CP –, de la fin de l’activité de la Mission du centenaire de la Première Guerre mondiale, groupement d’intérêt public chargé de la mise en œuvre du cycle de commémorations de la Grande guerre.

Ensuite, elle est due à une diminution, à hauteur de 7,18 millions d’euros en CP, de la dotation relative à la rénovation des sépultures de guerre et des lieux de mémoire, afin, selon le ministère, de retrouver un rythme « plus habituel ». Si l’on comprend que le programme de rénovation ait fait l’objet d’une attention particulière durant le cycle du Centenaire, il n’en demeure pas moins que, pour votre rapporteur pour avis, l’entretien des sépultures de ceux qui sont morts pour la France comme des lieux de mémoire placés sous la responsabilité du ministère des Armées doit demeurer prioritaire.

1.   La politique de mémoire

Du point de vue budgétaire, la mise en œuvre de la politique de la mémoire fait l’objet d’une opération stratégique comptant elle-même deux opérations budgétaires.

a.   Les actions de mémoire

Sous cette dénomination, il est question du financement des cérémonies commémoratives et de la conduite de diverses actions à caractère essentiellement pédagogique.

i.   Les commémorations

Rappelons que onze journées dédiées à des commémorations nationales sont prévues par des textes de niveau législatif ou réglementaire ([15]) :

– 19 mars, journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d’Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc (55 000 euros) ;

– 29 avril (dernier dimanche d’avril), journée nationale du souvenir des victimes et héros de la déportation (13 000 euros) ;

– 8 mai, commémoration de la victoire de 1945 (108 000 euros) ;

– 13 mai (deuxième dimanche de mai), fête nationale de Jeanne d’Arc et du patriotisme (non significatif) ;

– 27 mai, journée nationale de la Résistance (18 000 euros) ;

– 8 juin, journée nationale d’hommage aux « morts pour la France » en Indochine (non significatif) ;

– 18 juin, journée nationale commémorative de l’appel du général de Gaulle le 18 juin 1940 à refuser la défaite et à poursuivre le combat contre l’ennemi (43 000 euros) ;

– 22 juillet (16 juillet ou le dimanche qui suit), journée nationale à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l’État français et d’hommage aux « Justes » de France (99 000 euros) ;

– 25 septembre, journée nationale d’hommage aux harkis et autres membres des formations supplétives (60 000 euros) ;

– 11 novembre, commémoration de l’armistice de 1918 et hommage à tous les morts pour la France (financés par le GIP « Mission du centenaire ») ;

– 5 décembre, journée nationale d’hommage aux « morts pour la France », aux rapatriés d’Afrique du Nord, aux personnes disparues, aux populations civiles victimes de massacres ou d’exactions et aux victimes civiles de la guerre d’Algérie et des combats du Maroc et de la Tunisie (55 000 euros).

À ces journées nationales s’ajoute traditionnellement la cérémonie d’hommage à Jean Moulin, célébrée le 17 juin (12 000 euros).

L’année 2018 a par ailleurs été marquée par plusieurs cérémonies nationales et internationales, dont votre rapporteur pour avis ne peut ici fournir la liste exhaustive. On citera néanmoins :

– au titre de la Première Guerre mondiale : le centenaire de la bataille de Villers-Bretonneux et de la bataille du bois-Belleau ou encore de la bataille d’Amiens et de l’offensive de Meuse-Argonne ;

– au titre de la Seconde Guerre mondiale, plusieurs cérémonies ont été organisées afin de commémorer le soixante-quinzième anniversaire de la création du Conseil national de la Résistance et de la libération de la Corse ;

– plusieurs hommages nationaux, comme celui rendu à la mémoire du colonel Arnaud Beltrame.

Pour l’année 2019, le projet de loi de finances fixe le montant du budget alloué aux commémorations à 5,55 millions d’euros, en hausse de 3,36 millions d’euros par rapport à 2018, du fait de la fin des commémorations liées à la Première Guerre mondiale.

De manière détaillée, la dotation se répartit de la manière suivante :

–  financement de l’organisation logistique du défilé du 14 juillet, pour un montant de 2,4 millions d’euros ;

– commémorations, pour un montant de deux millions d’euros, du soixante-quinzième anniversaire des débarquements en Provence et en Normandie et de la Libération de la France ;

– organisation des journées nationales commémoratives, pour un million d’euros ;

– manifestations ponctuelles liées à l’actualité, comme les hommages nationaux rendus à la suite de décès par exemple, pour lesquelles une réserve de 150 000 euros est prévue.

ii.   Les actions à caractère pédagogique

D’un montant de 350 000 euros en projet de loi de finances, cette dotation permet principalement le financement de trois types d’actions, listés par le projet annuel de performance :

– la revue « Les chemins de la mémoire », produite à 23 000 exemplaires et disponible sous un format dématérialisé, qui traite des grands thèmes de l’actualité mémorielle.

En 2018, six numéros auront été élaborés et publiés :

     Trois l’ont été entre janvier et août 2018 : « 1918, sortir de la guerre », « Reporters de guerre », « Le tourisme de mémoire en Auvergne Rhône-Alpes » ;

     À la date de rédaction du présent avis, trois sont prévus : l’un sur le thème de la Déportation, l’autre sur « 1958, une nouvelle République en guerre », le dernier sur « Paysages de guerre, paysages en guerre ».

– diverses actions pédagogiques en relation avec le calendrier commémoratif et la valorisation des lieux de mémoire, organisées dans le cadre du protocole Défense – Éducation nationale signé le 20 mai 2016.

Selon les informations transmises à votre rapporteur pour avis, l’année 2018 devrait voir la réalisation d’environ 680 projets pédagogiques, associant près de 34 000 élèves et enseignants, soit une augmentation de 16 % des publics touchés par rapport à 2017.

– le dispositif « Héritiers de mémoire », créé en 2016 par la DPMA, qui consiste en la réalisation de films documentaires retraçant l’implication de classes d’élèves dans un projet d’enseignement de défense. En 2018, trois documentaires ont ainsi été commandés par la DPMA et réalisés par l’établissement de communication et de production audiovisuelle de la défense (ECPAD).

Par ailleurs, le ministère des Armées a également cofinancé l’édition de deux ouvrages destinés au jeune public, intitulés La France dans la Seconde Guerre mondiale et Les femmes et le monde combattant. L’ECPAD a également réalisé des visites virtuelles à 360° autour de deux hauts lieux de la mémoire nationale : le mémorial national de la prison de Montluc et la nécropole nationale de Notre-Dame de Lorette ([16]).

b.   Les subventions et transferts

Comme l’indique le projet annuel de performance annexé au projet de loi de finances, cette opération budgétaire regroupe les crédits destinés :

– à l’accompagnement de la fin de la mission confiée à la Mission du centenaire, pour un montant de 600 000 euros ;

– au soutien de projets mémoriels divers, qu’il s’agisse de commémorations, de représentations théâtrales ou d’expositions, conduits par des acteurs publics ou privés comme des associations, des fondations, des collectivités territoriales ou des établissements d’enseignement, pour un montant de 1,99 million d’euros. Votre rapporteur pour avis tient à souligner qu’au-delà des grands projets, le ministère des Armées apporte aussi une aide modeste mais souvent essentielle à des petites structures indispensables à la vitalité de la mémoire sur nos territoires. À titre d’exemple, si le musée associatif de la Résistance nationale de Champigny-sur-Marne a bénéficié d’une subvention de 300 000 euros, de multiples associations ont quant à elles reçu des subventions beaucoup plus modestes, de l’ordre de quelques milliers d’euros ;  

– à la conduite des actions pédagogiques de l’Office national des Anciens combattants et des victimes de guerre (ONACVG), pour un montant de 150 000 euros : organisation dans chaque département du concours national de la Résistance et de la Déportation, pédagogie autour des cérémonies patriotiques, actions de mémoire dans les territoires rendant hommage aux combattants et victimes de tous les conflits.

En tout, le budget des subventions et transferts s’élève à 2,74 millions d’euros, ce qui correspond à une baisse de 900 000 euros par rapport à l’année dernière.

2.   Les sépultures de guerre et les lieux de mémoire

a.   Un patrimoine riche et entretenu

L’an passé, votre rapporteur pour avis avait eu l’occasion d’évoquer le patrimoine mémoriel dont est en charge le ministère des Armées. Il comprend les sépultures perpétuelles des soldats « Morts pour la France », dont l’État doit assurer l’entretien à perpétuité, et les hauts lieux de la mémoire nationale (HLMN).

Il s’agit d’un patrimoine riche, composé tant de sépultures de guerre que de lieux de mémoire incarnant le souvenir d’un conflit passé, structurant pour la constitution de la Nation et la consolidation de ses valeurs. Ce patrimoine est entretenu avec attention par l’État, en particulier les sépultures qui font l’objet d’un programme pluriannuel de rénovation.

i.   Les sépultures de guerre

L’Hexagone accueille sur son territoire 274 cimetières militaires, communément appelés « nécropoles nationales ». 740 000 corps y reposent, en tombes individuelles ou en ossuaires.

L’immense majorité de ces corps (88 %) sont ceux de soldats de la Première Guerre mondiale. La Meuse, la Marne, l’Aisne, la Somme, la Meurthe‑et-Moselle et la Moselle sont les départements qui rassemblent le plus grand nombre de cimetières militaires – de vingt à quarante –, les sites les plus importants étant les cimetières de Notre-Dame-de-Lorette et Fleury‑devant‑Douaumont ([17]).

Au cours des quatre dernières années, le ministère des Armées a acquis, à titre gratuit au nom de l’État, trois nécropoles dans le Vercors
– Vassieux‑en‑Vercors, Saint-Nizier du Moucherotte et le Pas de l’Aiguille – tandis que cinq autres sont en cours d’acquisition.

Par ailleurs, l’État entretient 115 000 sépultures qui lui ont été concédées à perpétuité par les communes au sein de 2 200 carrés spéciaux des cimetières communaux, où se trouvent les soldats tombés à proximité ou morts dans les hôpitaux de l’arrière.

Enfin, la France assure aussi l’entretien d’un millier de cimetières français, dans quatre-vingts pays étrangers, principalement en Belgique, en Italie, en Serbie, en Macédoine, en Grèce, en Turquie, à Madagascar et en Afrique du Nord. 230 000 soldats « Morts pour la France » y sont inhumés.

Pour être complet, il convient aussi de noter que sept cimetières militaires étrangers sont entretenus par la France à titre gracieux : un cimetière russe à Saint‑Hilaire-le-Grand (Marne), deux « ex-soviétiques » à Valleroy (Meurthe‑et‑Moselle) et à Noyers-Saint-Martin (Oise), un polonais à Urville‑Langannerie (Calvados), un tchécoslovaque à Neuville-Saint-Vaast (Pas‑de-Calais), un néerlandais à Orry-la-Ville (Oise) et un roumain à Soultzmatt (Haut-Rhin).

Enfin, la DPMA a en charge la sauvegarde des sépultures des militaires morts en service hors guerre, dites « tombes de garnison », situées essentiellement dans les départements et collectivités d’outre-mer, ainsi que dans les anciennes colonies françaises.

La rénovation des sépultures de guerre fait l’objet de programmes pluriannuels, dont le dernier portait sur la période 2011-2018. Celui-ci prévoyait la rénovation de quarante nécropoles et d’une douzaine de carrés communaux, représentant 100 000 tombes et soixante-six ossuaires, principalement liés à la Grande Guerre dans le cadre de la conduite du cycle du Centenaire. Selon le ministère des Armées, « lampleur de la programmation établie en 2011 pour la durée du Centenaire, les aléas dus aux marchés, les contraintes propres aux sites et bâtiments inscrits comme monuments historiques, la durée de certaines opérations de rénovation des sépultures de guerre, qui peuvent être tributaires des conditions climatiques, et la conduite, dans le même temps et par les mêmes équipes, de travaux dinfrastructure importants et complexes dans les hauts lieux de la mémoire nationale (HLMN), expliquent que lONACVG na pas pu mener à bien toutes les opérations programmées initialement dans le calendrier prévu, malgré des recrutements et la mise en place en 2015 dune nouvelle organisation ». ([18]) 

Une nouvelle programmation pluriannuelle couvrant la période 2019‑2023 est en cours d’élaboration. Il s’agira de poursuivre les actions de restauration des sites et de se conformer aux différentes obligations législatives et réglementaires relatives aux sites accueillant du public : mise en œuvre de la charte paysagère des nécropoles nationales élaborée en 2015, application du plan « Zéro Phyto » depuis le 1er janvier 2017, réalisation du plan « Ad’Ap » d’amélioration de l’accessibilité des sites. Enfin, cette programmation s’inscrira plus globalement dans la poursuite de l’objectif d’une inscription des sites de la Grande Guerre au patrimoine mondial de l’UNESCO.

L’établissement de cette programmation ne pourra par ailleurs pas faire l’économie d’une réflexion sur la répartition des rôles et des responsabilités entre l’État et le monde associatif s’agissant de l’entretien des sépultures de guerre. En effet, s’il est indispensable que l’État demeure au cœur de l’action d’entretien des nécropoles nationales, il pourrait être envisagé de confier l’entretien des tombes des « Morts pour la France » dispersées sur le territoire au monde associatif, dès lors que le cahier des charges qui serait défini garantirait le respect dû à leur mémoire. Des acteurs comme Le Souvenir français ont d’ores et déjà indiqué être prêts à assurer une telle mission.

ii.   Les hauts lieux de la mémoire nationale

Le ministère des Armées est en charge de l’entretien et de la valorisation des neuf hauts lieux de la mémoire nationale, dont la liste est fixée par arrêté ([19]). Il s’agit ainsi :

– du cimetière national de Notre-Dame-de-Lorette, à Ablain‑Saint‑Nazaire (Pas-de-Calais), au titre des militaires morts pour la France aux côtés de leurs frères d’armes alliés (1914-1918) ;

– du cimetière national de Fleury-devant-Douaumont et de la tranchée des baïonnettes (Meuse), au titre du sacrifice des soldats français de la Grande Guerre à Verdun ;

– de l’ancien camp de concentration de Natzweiler-Struthof (Natzwiller, Bas-Rhin), au titre du système concentrationnaire nazi et de la résistance européenne (1933-1945) ;

– du Mont-Valérien (Suresnes, Hauts-de-Seine), au titre de la répression exercée par les autorités allemandes pendant l’Occupation (1940-1944) et de la France combattante ;

– du mémorial des martyrs de la Déportation, sur l’Île de la Cité (Paris), au titre de la mémoire des déportés ;

– du mémorial de la prison de Montluc, à Lyon (Rhône), au titre de l’internement par le régime de Vichy et les autorités allemandes pendant l’Occupation (1940-1944) ;

–  du mémorial du débarquement de Provence, au Mont-Faron (Toulon, Var), au titre du débarquement des 15 et 16 août 1944 et de l’armée de la Libération ;

– du mémorial des guerres en Indochine (Fréjus, Var), au titre de la Seconde Guerre mondiale en Indochine (1940-1945) et de la guerre d’Indochine (1946-1954) ;

– du mémorial de la guerre d’Algérie et des combats du Maroc et de la Tunisie, sur la promenade du Quai Branly, à Paris.

Ces hauts lieux accueillent un public nombreux – près de 900 000 visiteurs en 2017 – et constituent à la fois des lieux de commémoration et de transmission, nombre d’entre eux étant pourvus d’espaces de visites et muséographiques.

De plus amples développements y seront consacrés en seconde partie du présent avis.

b.   Des prévisions budgétaires qui peuvent surprendre

Du point de vue budgétaire, la politique de l’État en matière d’entretien et de valorisation des sépultures de guerre et des lieux de mémoire fait l’objet d’une opération stratégique, elle-même composée de deux opérations budgétaires :

– une opération intitulée « Opérations « lieux de mémoire » réalisée par l’État », qui recouvre les activités conduites en France et à l’étranger ([20]) pour un montant de 2,61 millions d’euros, en augmentation de 150 000 euros par rapport à 2018.

Une part importante de cette dotation – de 1,2 à 1,6 million d’euros ([21]) – devrait être consacrée au financement du « monument OPEX », qui sera édifié dans le jardin Eugénie Djendi, dit « jardin noir », du parc André Citroën situé dans le XVe arrondissement de Paris, à proximité du site de Balard. Il sera composé d’une sculpture représentant six militaires portant symboliquement un cercueil, seulement suggéré, et d’un mur des noms des « Morts pour la France ». Si M. François Hollande avait inauguré le lancement des travaux le 18 avril 2017, le réaménagement du jardin, préalablement à la construction du mémorial, sera réalisé début 2019, afin de permettre l’inauguration du monument fin 2019. Votre rapporteur pour avis ne peut que saluer la concrétisation de ce projet, devenu au fil des ans une antienne indigne de la mémoire de nos soldats morts pour la défense des Français, de la France et de ses valeurs.

Le reste de la dotation servira au financement de l’entretien et la rénovation des sépultures de guerre situées outre-mer et à l’étranger, ainsi qu’à des actions de valorisation des sites mémoriels.

– une opération budgétaire « Subventions et transferts », qui couvre la dotation versée à l’ONACVG au titre de sa mission d’entretien et de rénovation des sépultures de guerre et des lieux de mémoire, en France et en Afrique du Nord, ainsi que les crédits destinés au développement du tourisme de mémoire.

La dotation s’élève au total à 4,77 millions d’euros en AE et en CP, ce qui représente une baisse de 7,39 millions d’euros par rapport à 2018. Celle-ci s’explique en partie, on l’a vu, par l’extinction d’un cycle intense de rénovations de sépultures et de hauts lieux de mémoire, initié principalement dans le cadre du cycle commémoratif du centenaire de la Grande Guerre. Néanmoins, n’oublions pas que ces dernières années ont également vu la réalisation d’importants travaux sur des sites liés à d’autres conflits, comme ce fut le cas au mémorial du Mont-Faron, sur les hauteurs de Toulon.

Aussi, votre rapporteur pour avis appelle à la plus grande vigilance quant aux ressources allouées à la mission de rénovation des sépultures et d’entretien des hauts lieux de la mémoire nationale. Elle est primordiale, et l’on ne saurait la délaisser.

À ce titre, comment comprendre la diminution de 6,29 millions d’euros, en un an, des crédits affectés à l’entretien du patrimoine mémoriel, dont le montant prévisionnel n’est que de 3,87 millions d’euros pour l’année 2019 ? Alors que les deux-tiers de cette dotation – 2,3 millions d’euros – couvriront les dépenses récurrentes d’entretien des hauts lieux de la mémoire nationale et des sépultures de guerre, seuls 1,12 million d’euros seront consacrés à leur rénovation. En conséquence, aucun chantier d’envergure ne pourra être engagé, bien que cela soit nécessaire. La prison de Montluc comme le site du Struthof mériteraient ainsi que soient engagés des travaux de rénovation et de valorisation, dont le coût pourrait être important. Par ailleurs, alors que des travaux sont en cours, l’ONACVG, à qui la responsabilité de l’entretien et de la valorisation des HLMN a été confiée au début des années 2010, devra puiser dans son fonds de roulement pour honorer les engagements pris. Si l’Office est actuellement armé pour supporter cette contrainte, il ne faudrait pas que l’utilisation des ressources du fonds de roulement devienne une pratique habituelle à l’avenir. Le cas échéant, il fondrait si vite que l’activité quotidienne de l’Office pourrait être mise en difficulté. Au-delà, il est étonnant de constater qu’au moment où l’ONACVG a acquis une expérience certaine et reconnue en matière d’entretien et de valorisation du patrimoine mémoriel – la rénovation en moins de deux ans du mémorial du Mont-Faron en est une convaincante illustration – il est décidé de quasiment mettre à l’arrêt le financement du programme de rénovation des HLMN, qui pourtant se poursuit ! Notons d’ailleurs que la dotation allouée pour la valorisation des lieux de mémoire diminue de 210 000 euros, pour atteindre un montant de 250 000 euros.

Il y a peut-être là une forme d’incohérence qu’il conviendra d’apprécier au regard des décisions qui seront prises à l’avenir.

Enfin, pour être complet, doit être également pris en compte le remboursement par la Belgique des dépenses d’entretien des sépultures militaires belges situées en France, qui fait l’objet d’un fonds de concours à hauteur de 56 902 euros selon les prévisions figurant dans les documents budgétaires. 

II.   Le programme 169 « reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant »

Le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » retrace l’ensemble des actions et interventions réalisées au profit du monde combattant et destinées à témoigner la reconnaissance de la Nation à leur égard. Le monde combattant rassemble tous ceux qui, anciens combattants, combattants, victimes civiles de guerre, peuvent se prévaloir du bénéfice du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre (CPMIVG), ainsi que les associations et fondations qui œuvrent pour la mémoire des conflits des XXe et du XXIe siècles. En somme, le monde combattant représente 2,4 millions de personnes.

Le dispositif déployé en faveur du monde combattant concerne pour l’essentiel :

– la reconnaissance de la qualité de pensionné, de combattant, d’ancien combattant ou de victime de guerre selon les conditions et les procédures définies par le CPMIVG ;

– la mise en œuvre des droits et avantages accordés aux pensionnés, combattants, anciens combattants et victimes de guerre.

Le programme 169 représente 94 % des crédits de paiement inscrits au sein de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », en projet de loi de finances pour 2019. Ceci s’explique par l’importance des ressources affectées à l’administration de la dette viagère, qui représentent 1,67 milliard d’euros. De manière plus précise, le budget prévisionnel du programme s’élève à 2 194 millions d’euros en AE et à 2 162 millions d’euros en CP, ce qui correspond à une diminution de 5,3 % en AE et de 6,7 % en CP. Celle‑ci traduit la baisse naturelle du nombre de bénéficiaires des dispositions du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre : pensions d’invalidité, retraite du combattant, dépenses médicales, dépenses complémentaires de sécurité sociale, aide sociale de l’ONACVG, etc.

Par ailleurs, le programme intègre les crédits liés aux nouvelles mesures de reconnaissance instituées au titre du présent projet de loi de finances :

– la prise en compte des demandes des anciens militaires qui justifieront de quatre mois de présence en Afrique du Nord entre le 2 juillet 1962 et le 1er juillet 1964. Cette mesure, qui pourrait bénéficier à près de 50 000 anciens militaires, représente un coût de 6,6 millions d’euros pour l’année 2019 ([22]) ;

– l’augmentation de 300 000 euros de la dotation pour les dépenses liées aux expertises médicales, afin de fluidifier l’instruction des dossiers de pension militaire d’invalidité grâce au recrutement de nouveaux médecins experts ;

– la mise en œuvre du plan d’actions décidé par le président de la République en faveur des harkis et de leurs familles, qui comprend des mesures comme la revalorisation des allocations de reconnaissance et viagère bénéficiant aux anciens membres des formations supplétives et à leurs conjoints survivants, ainsi que la mise en place d’un mécanisme de solidarité au profit des enfants de harkis rencontrant aujourd’hui des difficultés liées à leur histoire spécifique. Le coût de ces mesures est estimé à 10 millions d’euros pour l’année 2019.

Enfin, la subvention d’action sociale de l’ONACVG, sa subvention de fonctionnement et celle de l’Institution nationale des Invalides (INI) permettront à ces deux opérateurs de poursuivre leurs missions ainsi que leur modernisation au service du monde combattant. On notera notamment l’évolution significative des crédits alloués à l’INI en AE, qui traduit de manière concrète l’enclenchement des travaux nécessaires à sa réfection.

évolution des crédits du programme 169

Mission « Anciens combattants »
Actions / sousactions

LFI 2017

LFI 2018

PLF 2019

AE

CP

AE

CP

AE

CP

P169

Action 1

Administration de la dette viagère

1 889 350 000

1 889 350 000

1 817 743 717

1 817 743 717

1 673 800 000

1 673 800 000

Sous‑action 

10

PMI‑VG et allocations

1 141 350 000

1 141 350 000

1 073 900 000

1 073 900 000

965 300 000

965 300 000

Sous‑action 

11

Retraite du combattant

748 000 000

748 000 000

743 843 717

743 843 717

708 500 000

708 500 000

 

Action 2

Gestion des droits PMI

143 700 000

143 700 000

136 000 000

136 000 000

129 600 000

129 600 000

Sous‑action 

21

SMG et appareillage

55 300 000

55 300 000

52 400 000

52 400 000

50 500 000

50 500 000

Sous‑action 

22

Rembt transport SNCF

3 200 000

3 200 000

2 700 000

2 700 000

2 200 000

2 200 000

Sous‑action 

23

Rembt prestations SECU

85 200 000

85 200 000

80 900 000

80 900 000

76 900 000

76 900 000

 

Action 3

Solidarité

353 058 642

348 058 642

345 560 945

346 360 945

367 836 311

335 536 311

Sous‑action 

31

Maj. Rentes mutualistes

252 000 000

252 000 000

247 400 000

247 400 000

234 700 000

234 700 000

Sous‑action 

32

Subventions associations

658 010

658 010

260 000

260 000

310 000

310 000

Sous‑action 

33

Indemnités, pécules et voyages

110 000

110 000

50 000

50 000

néant

néant

Sous‑action 

34

Action sociale ONAC

26 400 000

26 400 000

26 400 000

26 400 000

26 400 000

26 400 000

Sous‑action 35

SCSP ONAC

56 801 489

56 801 489

58 027 168

58 027 168

57 627 168

57 627 168

 

Sous‑action 36

SCSP INI

17 089 143

12 089 143

12 089 143

12 889 143

47 089 143

14 789 143

Sous-action 37

CNCCL -

Subventions (nouveau)

Sans objet

Sans objet

1 334 634

1 334 634

1 710 000

1 710 000

 

Action 7

Actions en faveur des rapatriés

17 270 000

17 270 000

17 570 000

17 570 000

23 224 181

23 224 181

Total P 169

2 403 378 642

2 398 378 642

2 316 874 662

2 317 674 662

2 194 460 492

2 162 160 492

Source : PAP 2018 et 2019.

Avant de procéder à l’étude précise des crédits, votre rapporteur pour avis tient à souligner l’action conduite par Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire d’État auprès de la ministre des Armées, afin de recenser et d’évaluer les différentes revendications des associations concernant l’ouverture de nouvelles prestations. Comme elle s’y était engagée devant les parlementaires, Mme Darrieussecq a ainsi mené une vaste concertation avec les associations représentatives du monde combattant afin de recueillir leurs principales attentes et définir les orientations de son action pour les prochaines années.

Dans ce cadre, trois groupes de travail ont été créés sur les thèmes suivants :

– droit à réparation et pensions militaires d’invalidité ;

– quatrième génération du feu ;

– blessés et invalides.

Les conclusions de ces travaux ont été présentées aux associations du monde combattant le 25 mai dernier puis aux parlementaires à l’été ([23]). Elles constituent une feuille de route pour la politique de reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant pour la période 2018-2022. Votre rapporteur pour avis présente ci-dessous, de manière schématique, les principales décisions arrêtées au terme de cette concertation.

Bilan de la concertation conduite par le Gouvernement sur la politique de reconnaissance et de réparation pour les années 2018-2022

Sujets

Avis

Bénéficiaires /coûts

Droit à réparation et pensions militaires dinvalidité

Carte du combattant en Algérie pour la période 62‑64

Favorable pour PLF 2019

 Environ 50 000 bénéficiaires potentiels pour un coût estimé d’environ 30 M€ en année pleine

Création d’une commission tripartite sur l’évolution du point PMI

Favorable pour 2020/2021

Sans objet

Attribution du bénéfice de la campagne double au titre de la guerre d’Algérie

Défavorable

Non évalués

Attribution de la demi-part fiscale pour les conjoints survivants

Défavorable

Non évalués

Indemnisation des orphelins de guerre et des pupilles de la Nation

Défavorable

Bénéficiaires estimés entre 49 000 et 91 000

Supplétifs européens (dits « harkis blancs »)

Défavorable

Forte incertitude quant à l’effectif concerné

Quatrième génération du feu

Carte des familles des blessés de guerre

Non prioritaire

Non évalués

Demande d’attribution de la mention « Mort pour la France »

68 dossiers traités

68 dossiers traités

Attribution du Titre de reconnaissance de la Nation aux réservistes

Défavorable

4 000 réservistes dont 2 320 issus du civil.

Attribution de la mention « Mort pour la France » pour décès en OPINT

Défavorable

Non évalués

Retrait de la condition de ressource pour la pension d’ascendant

Défavorable

Non évalués

Reconnaître l’opération Noroît comme une OPEX

Défavorable

Bénéficiaires : 314

Extension des conditions d’attribution de la croix du combattant volontaire

Défavorable

Non évalués

Installation sous l’Arc de Triomphe d’une plaque évoquant les OPEX

Favorable dans les plus brefs délais

De l’ordre de 27K€ TTC

Mémorial en hommage aux militaires morts pour la France en OPEX

Édification du mémorial dans les plus brefs délais

Sans objet, mesure déjà prise en compte

Prise en charge du syndrome post-traumatique

Description des modalités de prise en charge

Sans objet

Blessés et invalides

Revalorisation des expertises médicales en matière de PMI

Favorable.

300 K€ sont prévus au PLF 2019

Renforcer les droits des conjoints de grands invalides ayant agi comme tierce personne

Réservé

Estimation : 0,65 M€ bénéficiant au maximum à 500 bénéficiaires

Créer un supplément de pension pour tous les conjoints survivants de grands invalides

Défavorable

Non évalués

Revaloriser la majoration uniforme des conjoints survivants

Défavorable

55 000 bénéficiaires pour un coût cumulé supérieur à 58 M€

Instruction des pensions militaires d’invalidité

Renforcement

Sans objet

Jurisprudence Brugnot

Description de la jurisprudence

Sans objet

Attribuer l’allocation de grand mutilé en cas de syndrome post-traumatique

Défavorable

Non évalués

Maintien de la majoration tierce personne en cas d’hospitalisation

Défavorable

Non évalués

Évaluer l’invalidité à la date de la demande de PMI

Défavorable

Non évalués

Le recours administratif préalable obligatoire (RAPO) en matière de PMI

Description du futur RAPO

Sans objet

Source : ministère des Armées.

Si l’ensemble de ces demandes n’a pu faire l’objet d’un avis favorable, nombre de représentants du monde combattant rencontrés par le rapporteur pour avis ont fait état de la qualité d’écoute de Mme la secrétaire d’État. Qu’elle en soit saluée.

A.   L’administration de la dette viagère

L’action 1 finance les prestations versées au titre des pensions militaires d’invalidité (PMI) et de la retraite du combattant, qui représentent respectivement 44,65 % et 32,77 % des ressources du programme 169. Son budget proposé pour 2019 s’établit à 1 673 millions d’euros, soit une baisse de 144 millions d’euros par rapport à l’année 2018. Cette baisse traduit une diminution tendancielle du nombre de bénéficiaires des PMI comme de la retraite du combattant.

Évolution des effectifs des pensionnés et de la retraite du combattant

 

PMI

Retraite du combattant

2009

336 272

1 393 201

2010

308 940

1 339 730

2011

295 073

1 287 388

2012

280 793

1 237 694

2013

266 914

1 200 185

2014

254 668

1 159 167

2015

241 360

1 118 667

2016

230 285

1 059 106

2017

216 496

1 003 202

2018

205 089

950 363

2019

194 282

931 754

Source : PAP 2019.

1.   Les pensions militaires d’invalidité

Pour rappel, les pensions militaires d’invalidité (PMI) sont concédées aux ayants droit pour indemniser la gêne fonctionnelle consécutive aux maladies ou aux blessures reconnues imputables au service ou à un fait de guerre. Elles sont versées à titre militaire ou de victime civile. Les pensions d’ayants cause sont concédées, sous certaines conditions, aux conjoints survivants, orphelins et ascendants d’un militaire décédé au combat ou d’un invalide pensionné.

Les crédits nécessaires au paiement des PMI sont inscrits à la sous‑action 10. Ils sont intégralement reversés au compte d’affectation spéciale « Pensions », dont le programme 743 assure le règlement via les centres régionaux des pensions et le centre de la trésorerie générale pour l’étranger.

En projet de loi de finances pour 2019, la dotation s’établit à 965,3 millions d’euros, ce qui représente une diminution de 108,6 millions d’euros par rapport à l’année 2018. Votre rapporteur pour avis note d’ailleurs que, pour la première fois, elle descend sous le seuil du milliard d’euros.

Cette baisse traduit une diminution naturelle du nombre de pensionnés, constante au cours des dernières années. Pour l’année 2018, le nombre de pensionnés a ainsi chuté de 11 407 personnes, les prévisions pour l’année 2019 étant de 10 807 pensionnés.

Pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre
évolution depuis 2012 – Situation au 31 décembre de l’année considérée

 

 

Invalides

Conjoints et orphelins

Ascendants

Total

Taux dévolution

2012

195 562

81 305

3 926

280 793

- 4,8 %

2013

186 614

76 570

3 730

266 914

- 4,9 %

2014

179 027

72 100

3 541

254 668

- 4,6 %

2015

170 755

67 234

3 371

241 360

- 5,2 %

2016

163 860

63 179

3 246

230 285

- 4,6 %

2017

155 824

57 570

3 102

216 496

- 6 %

Prévisions 2018*

 

 

 

 

- 5,3 %

Prévisions 2019*

 

 

 

 

- 5,3 %

* Moyenne des années 2016 et 2017.

Source : DGFIP, service des retraites de l’État, base des PMIVG 2017.

2.   La retraite du combattant

Pour rappel, la carte du combattant ouvre droit, au titre du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre, à l’âge de 65 ans, voire dès 60 ans, à la retraite du combattant.

Depuis le 1er septembre 2017, le montant annuel de la retraite du combattant est de 748,80 euros.

Les crédits nécessaires au paiement de la retraite du combattant sont inscrits à la sous-action 11. Ils sont eux aussi intégralement reversés au compte d’affectation spéciale « Pensions », dont le programme 743 assure le règlement selon les mêmes modalités que pour les PMI.

Le versement de la retraite du combattant fait l’objet, en projet de loi de finances pour 2019, d’une dotation de 708,5 millions d’euros, en baisse de 35,4 millions d’euros par rapport à l’année passée. Cette évolution traduit la diminution du nombre de bénéficiaires, de plus en plus âgés, les jeunes générations d’anciens combattants n’étant pas encore en âge de percevoir cette retraite. Du reste, le nombre de titulaires de la carte du combattant au titre des OPEX ne compensera pas le nombre de titulaires au titre des guerres mondiales, de l’Indochine ou de l’Afrique du nord.

répartition par conflit des retraites du combattant versées

 

Conflits

Effectifs au

31 décembre 2016

Effectifs au

31 décembre 2017

Guerre 14-18 (1)

1 320

1 240

Guerre 39-45 (2)

85 875

73 762

Algérie - Tunisie - Maroc

879 572

840 906

OPEX

21 212

22 414

Non déterminé (3)

71 127

64 880

TOTAL

1 059 106

1 003 202

(1) Les retraites du combattant de la catégorie « guerre 14-18 » comprennent toutes les opérations de guerre avant 1939.

(2) Les retraites du combattant de la catégorie « guerre 39-45 » concernent également la guerre d’Indochine.

(3) Correspond à des retraites payées dans les États ayant accédé à l’indépendance dont la nature du conflit n’est pas codifiée et des retraites du combattant versées en France pour lesquelles le conflit n’est pas renseigné.

Source : direction générale des finances publiques.

nombre de retraites du combattant en paiement depuis 2012

Années

Effectif au
1er janvier

Attributions
au cours de
lannée

Extinctions
au cours de
lannée

Effectifs au
31 décembre

Solde

2012

1 287 388

16 303

65 997

1 237 694

- 49 694

2013

1 237 694

18 327

55 836

1 200 185

- 37 509

2014

1 200 185

17 058

58 076

1 159 167

- 41 018

2015

1 159 167

11 395

61 566

1 108 996

- 50 171

2016

1 108 996

8 741

58 631

1 059 106

- 49 890

2017

1 059 106

5 472

61 376

1 003 202

- 55 904

Prévision 2018 au 31 décembre

1 003 202

6 161

59 000

950 363

- 52 839

Prévision 2019 au 31 décembre

950 363

40 491

59 100

931 754

- 18 609

Source : ministère des Armées.

Par ailleurs, cette année, la dotation prend en compte l’élargissement du bénéfice de la carte du combattant aux militaires français présents plus de quatre mois sur le territoire algérien entre le 2 juillet 1962 et le 1er juillet 1964. À partir de janvier 2019, près de 50 000 personnes seront ainsi fondées à solliciter la carte du combattant et, compte tenu de leur âge, à bénéficier de la retraite du combattant. Aussi, en 2019, cette extension devrait se traduire par une hausse de 6,6 millions d’euros de la dotation, contre 30 millions d’euros en année pleine. À cela s’ajoutera également une perte de recettes pour l’État de l’ordre de 30 millions d’euros, du fait de la demi-part fiscale dont bénéficient les titulaires de la carte du combattant à partir de 74 ans.

Votre rapporteur pour avis salue la décision du Gouvernement de procéder à cet élargissement du bénéfice de la carte du combattant. Elle correspond à une demande de longue date des associations du monde combattant, qui progressivement se sont regroupées afin de défendre une mesure de justice et d’équité.

B.   L’action sociale et les droits liés aux pensions militaires d’invalidité

Il sera ici question des crédits inscrits au sein des actions 2 « Gestion des droits liés aux pensions militaires d’invalidité » et 3 « Solidarité ».

1.   Les droits liés aux PMI

L’action 2 est dotée de 5,9 % des crédits du programme 169, soit 129,6 millions d’euros en AE comme en CP. Ces crédits ont vocation à permettre le financement des droits accessoires ouverts aux titulaires d’une PMI au titre du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre.

a.   Les soins médicaux gratuits et des appareillages

La sous-action 21 regroupe les crédits nécessaires au financement :

– des prestations médicales, paramédicales, chirurgicales, pharmaceutiques et de cures thermales rendues nécessaires, pour les titulaires d’une pension militaire d’invalidité, par l’infirmité donnant lieu à pension ainsi que des appareils et accessoires nécessaires en raison de l’infirmité donnant lieu la pension. La réparation et le remplacement de ces équipements sont également à la charge de l’État. Ces différentes prestations sont prévues par les articles L. 212-1 et suivants ainsi que l’article L. 213-1 du CPMIVG.

Pour l’année 2019, la dotation des soins médicaux gratuits s’élève à 27,4 millions d’euros, soit une diminution de 1,3 million d’euros par rapport à 2018, tandis que celle relative à l’appareillage des mutilés de guerre s’élève à 7 millions d’euros, ce qui correspond à une augmentation de 500 000 euros en un an. Cette hausse s’explique par le renchérissement continu du coût des équipements, tant en raison du vieillissement des populations concernées – ce qui implique d’adapter les appareils – que de l’amélioration des techniques, dont le corollaire et le renchérissement des produits. Il convient, bien entendu, de se réjouir que l’État soit en mesure d’offrir des prothèses de nouvelle génération à ceux qui ont sacrifié une partie d’eux-mêmes à la France ;

– des frais d’expertises médicales prescrites aux demandeurs dans le cadre de l’instruction des dossiers de PMI. À ce titre, notons que la dotation, qui s’élève à un million d’euros, bénéficie d’une augmentation de 300 000 euros afin de revaloriser la rémunération des expertises médicales pour les rendre plus attractives. Il s’agit d’un enjeu primordial alors que la baisse du nombre d’experts rallonge significativement les délais d’instruction, plaçant les demandeurs dans une situation inconfortable ;

– des dépenses de gestion de la caisse nationale militaire de sécurité sociale et des frais de soins en milieu civil des militaires ayant été reconnus victimes d’une affectation présumée imputable au service (APIAS).

b.   Les réductions sur les transports

Certains pensionnés dont le taux d’invalidité est d’au moins 25 % bénéficient de réductions tarifaires sur le réseau SNCF, de 50 % à 75 %. De plus, la gratuité est accordée à l’accompagnateur des plus grands invalides.

En PLF 2019, la dotation de la sous-action 22, dédiée à cette prestation, s’élève à 2,2 millions d’euros, en diminution de 500 000 euros par rapport à la loi de finances pour 2018. Cette baisse rend simplement compte de la contraction du nombre de bénéficiaires.

c.   Le régime de sécurité sociale des pensionnés de guerre

La sous-action 23 retrace les crédits relatifs au financement de la section « Invalides de guerre » du régime général de l’assurance maladie, qui prend en charge les pensionnés invalides à 85 % et plus et qui ne détiennent pas déjà la qualité d’assuré social.

En 2019, la dotation prévue s’élève à 76,9 millions d’euros, ce qui représente une diminution de 4 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2018. Comme l’an dernier, elle tient compte d’un trop versé prévisionnel de 4,9 millions d’euros qui, en raison des règles de paiement des factures à la caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés, devrait minorer la consommation budgétaire 2019.

2.   La solidarité

L’action 3 « Solidarité » est dotée de 16,8 % des crédits du programme 169, soit 367,8 millions d’euros en AE et 335,5 millions d’euros en CP. Elle couvre ainsi les crédits nécessaires au financement des prestations et avantages particuliers au titre de la solidarité envers les pensionnés et les titulaires d’un titre d’ancien combattant ou de victime de guerre, ainsi que les subventions pour charges de service public de trois opérateurs : l’Office national des anciens combattants et des victimes de guerre, l’Institution nationale des Invalides et l’Ordre de la Libération-Conseil national des communes « Compagnons de la Libération ».

a.   L’action sociale

La mise en œuvre de la politique de solidarité revêt plusieurs modalités.

Premièrement, il s’agit de la majoration des rentes mutualistes des anciens combattants et des victimes de guerre, dont le financement est assuré par la sous‑action 31. Le mécanisme de la rente mutualiste ayant été décrit avec précision dans l’avis établi par votre rapporteur sur le PLF 2018, il ne sera ici mention que des crédits inscrits en PLF 2019. La dotation prévue s’élève donc à 234,7 millions d’euros, en baisse de 12,7 millions d’euros par rapport à l’an dernier. Si cette diminution reflète l’évolution du nombre de bénéficiaires, il convient de noter que son niveau tient toutefois compte de l’augmentation du coût moyen de la majoration en raison, notamment, de la revalorisation annuelle des taux de majoration légale. En 2019, cette dotation permettra de couvrir les coûts associés à un effectif de 330 757 bénéficiaires.

Deuxièmement, la sous-action 32 retrace les crédits de subventions de fonctionnement versées à diverses associations et œuvres, pour un montant de 310 000 euros en PLF 2019, soit une augmentation de 50 000 euros par rapport à l’an dernier. Cette évolution résulte d’une simple évolution de la maquette budgétaire, la sous-action 32 absorbant les crédits auparavant inscrits au sein de la sous-action 33, relatifs à la prise en charge par l’État des frais de pèlerinage des familles sur les tombes des « Morts pour la France ». Ces frais seront dorénavant pris en charge par l’ONACVG, à partir d’une subvention spécifique.

Troisièmement, la sous-action 34, dotée d’un budget de 26,4 millions d’euros, supporte la subvention d’action sociale versée par l’ONACVG. Son niveau est identique à celui prévu en loi de finances initiale pour 2018, ce qui permet de poursuivre l’effort sur les priorités validées par le conseil d’administration de l’Office en 2015, rappelées par le projet annuel de performance 2019 :

– accorder une vigilance particulière aux ressortissants les plus isolés et les plus démunis ;

– améliorer l’accompagnement de la quatrième génération du feu et tout particulièrement des militaires blessés en opération ;

– poursuivre l’accompagnement des victimes du terrorisme et notamment des nouveaux pupilles de la Nation, en augmentation sensible en 2016 et 2017 : 190 pupilles en 2016, 149 adoptions supplémentaires prononcées en 2017 et autour de 90 adoptions depuis janvier 2018 à l’heure de rédaction du présent avis.

b.   Les subventions pour charges de service public aux opérateurs publics

L’action 2 assure également le financement des subventions pour charges de service public de trois opérateurs rattachés au programme 169 :

– la sous-action 35 retrace le montant de la subvention allouée à l’ONACVG. Celle-ci s’élève à 57,6 millions d’euros en PLF 2019, soit une diminution de 400 000 euros en un an, après une augmentation de 1,2 million d’euros en LFI 2018. Alors que le précédent contrat d’objectif et de performance arrive à son terme, l’Office est engagé dans l’élaboration du prochain COP. Au cours des dernières années, l’Office s’est transformé de manière vigoureuse et ambitieuse, afin de recentrer son action sur l’essentiel : l’accompagnement de ses ressortissants et la transmission de la mémoire combattante. C’est ainsi qu’il s’est séparé des établissements médicaux-sociaux qui lui étaient rattachés, qu’il a opéré près de cinquante déménagements des services départementaux afin d’améliorer l’accueil des ressortissants sur les territoires, conduit avec brio les travaux de rénovation et de valorisation de plusieurs hauts lieux de la mémoire nationale et accompagné au plus près les travaux de la mission du Centenaire. De l’aveu de sa directrice générale, Mme Rose-Marie Antoine, la transformation inscrite dans le précédent COP doit se poursuivre, afin d’approfondir les actions déjà engagées. Aujourd’hui, votre rapporteur pour avis tient à saluer l’engagement des personnels de l’ONACVG et leur remarquable dévouement au monde combattant. Il tient aussi à appeler à une certaine vigilance quant aux moyens dévolus à l’Office. Sur tous les territoires, l’ONACVG incarne la politique de l’État en matière de reconnaissance, de réparation et de mémoire. Il est primordial de continuer à se reposer sur le maillage territorial de l’Office comme sur son histoire, ainsi que sur l’expérience et l’expertise de ses personnels pour conduire l’action publique en la matière. Dès lors, il est surprenant de constater que, parfois, son rôle semble minimisé par le ministère des Armées lui-même, et regrettable de voir ses moyens contraints ;

– la sous-action 36 finance, quant à elle, les subventions et dotations allouées à l’Institution nationale des Invalides. Concernant la subvention de fonctionnement, son niveau demeure identique depuis 2014, à 12,9 millions d’euros en AE comme en CP. En revanche, la subvention d’investissement augmente fortement afin d’accompagner la mise en œuvre du contrat d’objectif et de performance, qui se traduit par un nouveau projet d’établissement s’appuyant sur un nouveau projet médical. Ainsi, en PLF 2019, cette dotation s’élève à 35 millions d’euros en AE et à 2,7 millions d’euros en CP. L’INI puisera également dans son fonds de roulement, à hauteur de 11,2 millions d’euros, afin de financer une partie des travaux.

La rénovation de lINI

Le nouveau COP 2017-2021 décline, sur le plan technique, tous les axes d’orientations stratégiques du projet [médical] reposant sur le nouveau schéma d’organisation suivant de l’établissement :

– un centre d’études et de recherche sur l’appareillage des handicapés (CERAH) conforté dans ses missions actuelles par le transfert de l’antenne de Créteil sur le site de l’Hôtel national des Invalides ;

– un centre des pensionnaires pérennisé, réorganisé dans son format et dans son mode de fonctionnement ;

– un nouveau service de prise en charge médicale articulé autour de trois pôles : un nouveau pôle de réhabilitation psychique et d’accompagnement à la réinsertion, un pôle de rééducation médico-chirurgicale (parcours de soins en Médecine Physique et Réadaptation) et un plateau technique et ambulatoire ;

– la poursuite de la transformation du centre médico-chirurgical après la suppression du bloc chirurgical en 2017.

Concernant l’infrastructure, la mise en œuvre du nouveau projet d’établissement de l’Institution est notamment conditionnée à une importante reconfiguration immobilière des espaces sur le site des Invalides. Le nouveau COP 2017-2021 propose une planification des travaux d’infrastructure, reprise dans le schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI).

La période de mise en œuvre du nouveau projet d’établissement, correspondant à la réalisation de la totalité des travaux immobiliers et d’infrastructure, a été évaluée à sept ans, avec un début prévisionnel des travaux lourds au premier semestre 2019. Le coût global du projet est estimé à environ 50 millions d’euros, dont 11,2 millions d’euros seront financés sur la trésorerie de l’établissement, et par des subventions d’investissement en provenance du programme 169.

Source : PAP 2019, p.73.

– la sous-action 37, enfin, retrace les crédits versés à l’Ordre de la Libération – Conseil national des communes « Compagnons de la Libération ». La dotation correspondante s’élève à 1,7 million d’euros en PLF 2019, soit une hausse de 400 000 euros par rapport à l’an dernier. Cette hausse permettra notamment, selon les documents budgétaires, de financer le recrutement d’un archiviste pour numériser les dossiers des médaillés et compagnons de la Libération ainsi que celui d’un vacataire pour les expositions temporaires et la célébration du quatre-vingtième anniversaire de 1940.

Rappelons par ailleurs que la dernière loi de programmation militaire ([24]) a procédé à la modification du nom de cet opérateur, auparavant simplement intitulé « Conseil national des communes « Compagnons de la Libération » ». La LPM a également apporté quelques modifications au fonctionnement de cet opérateur ([25]).

C.   Les actions en faveur des harkis et des rapatriés

L’action 7 retrace les crédits dédiés au financement de certaines aides instituées au bénéfice des harkis et rapatriés. Schématiquement, on distingue :

– l’allocation de reconnaissance, instituée par la loi n° 2005-158 du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés (5 061 harkis et veuves en bénéficiaient en juillet 2018) ;

– l’allocation viagère, créée par l’article 133 de la loi de finances initiale pour 2016 au profit des conjoints et ex-conjoints mariés survivants de harkis qui ont fixé leur domicile en France (781 veuves d’anciens supplétifs en bénéficiaient en juillet 2018) ;

– diverses mesures en faveur des harkis et rapatriés, parmi lesquelles des compléments de bourses pour les enfants scolarisés et les étudiants éligibles aux bourses de l’éducation nationale (183 enfants pour l’année scolaire 2017-2018), l’aide spécifique aux conjoints survivants, instituée en 1994, destinée aux veuves de plus de 60 ans dont le revenu n’excède pas l’allocation aux travailleurs âgés salariés (68 personnes en 2017), l’aide au rachat de trimestres de cotisation retraite pour des enfants de harkis ou encore des mesures d’accompagnement au désendettement ou d’aide à la sauvegarde du toit familial.

En PLF 2019, le budget prévisionnel de cette action s’élève à 23,22 millions d’euros, répartis de la manière suivante :

– 13,67 millions d’euros pour le financement de l’allocation de reconnaissance et de l’allocation viagère ([26]), ce qui représente une hausse de 3,8 millions d’euros en un an. Cette hausse tient compte de l’accroissement du nombre de bénéficiaires de l’allocation viagère, pour un montant de 1,2 million d’euros, ainsi que de la revalorisation de 400 euros des allocations de reconnaissance et viagère, à hauteur de 2,3 millions d’euros, décidée dans le cadre du nouveau « plan Harkis » annoncé le 25 septembre 2018 ;

– 9,55 millions d’euros pour les autres mesures. Cette dotation progresse de 7,35 millions d’euros par rapport à 2018, notamment en raison de la constitution d’un dispositif de solidarité au profit des enfants des anciens harkis, conformément au nouveau plan.

Les nouvelles mesures en faveur des harkis

À la demande du président de la République, un groupe de travail composé de représentants des associations de harkis et de l’administration ainsi que de personnalités qualifiées a été institué afin d’évaluer les dispositifs de reconnaissance et de réparation mis en œuvre en faveur des harkis, et d’en proposer des modifications et des compléments.

Présidé par le préfet Dominique Ceaux, ce travail de concertation a débouché sur un rapport intitulé « Aux harkis, la France reconnaissante », remis à la secrétaire d’État auprès de la ministre des Armées, le 17 juillet 2018 ([27]). Quarante propositions émises par le rapport portent sur la reconnaissance et la mémoire, pour parachever un travail déjà largement entamé. Les seize autres sont destinées à compléter la réparation et à renforcer la solidarité à l’égard des harkis et de leurs enfants.

À la suite de ce rapport, le Gouvernement a décidé des mesures suivantes :

– une hausse de 400 euros de l’allocation de reconnaissance et de l’allocation viagère en faveur des harkis et de leurs veuves ;

– l’institution d’un dispositif de solidarité au profit de leurs descendants qui pourront bénéficier d’une aide individualisée en fonction de leur situation. Ce dispositif sera mis en place pour une période de quatre ans, ce qui représente un montant d’environ 30 millions d’euros.

Au total, 10 millions d’euros supplémentaires permettront en 2019 de compléter les mesures en faveur de ces anciens combattants et de leurs enfants.

Source : ministère des Armées.

D.   L’effort fiscal et social de l’état

Par ailleurs, un certain nombre de dépenses fiscales portant sur des impôts d’état sont rattachées au programme 169. Alors que le Gouvernement a entamé un vaste effort de rationalisation de l’utilisation des deniers publics, il convient de souligner son choix de maintenir les mesures fiscales actuellement en vigueur en faveur des anciens combattants. Ces dispositifs ont été créés au profit des anciens combattants en reconnaissance de leurs sacrifices, au titre du droit à réparation pour services rendus à la Nation. Il serait donc indécent d’y revenir, d’autant plus que les pensions versées par ailleurs ont des niveaux plutôt modestes.

Dépenses fiscales sur impôts d’État rattachées au programme 169

(en millions d’euros)

Libellé

Chiffrage pour 2017

Chiffrage pour 2018

Chiffrage pour 2019

Demi-part supplémentaire pour les contribuables (et leurs veuves) de plus de 74 ans titulaires de la carte du combattant

530

530

515

Exonération de la retraite du combattant, des pensions militaires d’invalidité, des retraites mutuelles servies aux anciens combattants et aux victimes de guerre et de l’allocation de reconnaissance servie aux anciens membres des formations supplétives de l’armée française en Algérie (harkis) et à leurs veuves, ainsi que l’allocation viagère servie aux conjoints et ex-conjoints, survivants de harkis, moghaznis et personnels des autres formations supplétives de statut civil de droit local ayant servi en Algérie qui ont fixé leur domicile en France

170

170

170

Déduction des versements effectués en vue de la retraite mutualiste du combattant

36

42

42

Exonération des indemnités versées aux victimes des essais nucléaires français et à leurs ayants droit

Non significatif (<0,5M€)

1

1

Réduction de droits en raison de la qualité du donataire ou de l’héritier

Non significatif (<0,5M€)

Non significatif (<0,5M€)

Non significatif (<0,5M€)

Exonération de droits de mutation pour les successions des victimes d’opérations militaires ou d’actes de terrorisme

Non chiffrable

Non chiffrable

Non chiffrable

Coût total des dépenses fiscales

736

743

728

Source : PAP 2019.

III.   Le programme 158 « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale »

Placé sous la responsabilité du Premier ministre, le programme 158 assure le financement de dispositifs d’indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie commis durant la Seconde Guerre mondiale. Trois dispositifs ont été institués en ce sens par le pouvoir réglementaire :

 le décret n° 99-778 du 10 septembre 1999 a créé un dispositif dindemnisation des victimes de spoliations intervenues du fait de législations antisémites. Si lactivité de la commission pour lindemnisation des victimes de spoliations (CIVS) connaît un net ralentissement, de nouvelles demandes continuent néanmoins à être enregistrées et sajoutent aux dossiers encore à linstruction ;

 le décret n° 2000-657 du 13 juillet 2000 a créé un dispositif dindemnisation des orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites. Lactivité demeure stable, et lon constate un net ralentissement du dépôt de nouveaux dossiers ;

 le décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004 a créé un dispositif dindemnisation des orphelins dont les parents ont été victimes dactes de barbarie. Lactivité demeure soutenue, et les services enregistrent encore de nouvelles demandes.

Linstruction des dossiers est réalisée par la commission pour lindemnisation des victimes de spoliations (CIVS) pour les spoliations, et pour laide aux orphelins par le département reconnaissance et réparation de lONACVG, situé à Caen. Les décisions accordant ou refusant des mesures de réparation financière sont prises par le Premier ministre, tandis que la mise en paiement est confiée à lONACVG par les trois décrets.

Évolution des crédits du programme 158 de 2018 à 2019

(en euros)

Mission
« Anciens combattants »

LFI 2018

PLF 2019

AE=CP

AE= CP

P 158

Action 1

Indemnisation des orphelins de la déportation et des victimes de spoliations du fait des législations antisémites en vigueur pendant l’Occupation

46 408 864

53 468 605

Action 2

Indemnisation des victimes d’actes de barbarie durant la seconde guerre mondiale

54 383 318

52 439 897

Total P158

100 792 182

105 908 502

Source : PAP 2019.

A.   L’indemnisation des orphelins de la déportation et des victimes de spoliations

1.   L’indemnisation des orphelins

Comme votre rapporteur pour avis le rappelait dans son avis établi l’an dernier, le décret n° 2000-657 du 13 juillet 2000 a institué une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites. Ce dispositif s’adresse à toute personne, mineure de moins de vingt‑et‑un ans au moment des faits, dont le père ou la mère, déporté de France en raison des persécutions antisémites, est décédé ou a disparu en déportation.

Pour ces orphelins, cette mesure de réparation prend la forme, au choix du bénéficiaire, d’un capital au montant fixe de 27 440,82 euros ou d’une rente viagère dont le montant mensuel s’élève, en 2018, à 585,44 euros.

D’octobre 2000, début de la campagne d’indemnisation, au 30 juin 2018, le service instructeur a enregistré 17 649 demandes. 14 319 décisions ont été transmises, 13 639 décisions d’indemnisation ont été prises et 680 rejets ont été notifiés. Sur les 13 639 indemnisations accordées, 6 643 l’ont été sous forme de capital, soit 49 %, et 6 996 sous forme de rente viagère, soit 51 %.

 

Nombre de
demandes reçues

Nombre de bénéficiaires indemnisés

Coût complet

(en millions deuros)

2000

12 135

4 000

24,994

2001

3 465

7 800

163,445

2002

1 072

845

50,690

2003

278

256

44,801

2004

195

201

39,789

2005

121

125

37,789

2006

112

112

38,374

2007

34

55

36,958

2008

19

18

35,722

2009

40

35

36,102

2010

44

28

36,330

2011

30

49

37,189

2012

31

22

36,475

2013

19

25

36,716

2014

14

10

36,359

2015

8

25

36,590

2016

12

22

36,212

2017

3

4

17,898

2018

9

3

20,615

total au 30/06/2018

17 649

13 639

820,651

Source : ministère des Armées.

Le coût total des aides financières accordées aux orphelins de parents victimes de persécutions antisémites s’élève, au 30 juin 2018, à 820,65 millions d’euros.

À l’heure actuelle, force est de constater que l’essentiel des demandes a été traité, l’ONACVG n’étant plus destinataire que d’un faible nombre de requêtes : 8 en 2015, 12 en 2016, 12 en 2017 et 2018.

2.   L’indemnisation des victimes de spoliations

Pour rappel, dans la foulée de la remise du rapport Mattéoli au Premier ministre en 1998, le décret du 10 septembre 1999 a institué auprès de ce dernier une commission d’indemnisation des victimes de spoliations, chargée « de rechercher et de proposer les mesures de réparation, de restitution ou d’indemnisation appropriées ». Cette commission propose au Premier ministre les mesures de réparation, de restitution ou d’indemnisation pour des préjudices consécutifs aux spoliations de biens.

Les indemnités accordées peuvent être mises à la charge de l’État français ou, en application des accords de Washington du 21 mars 2001, imputées sur les fonds du Fonds social juif unifié lorsqu’il s’agit d’indemniser des avoirs bancaires.

Entre le mois d’octobre 2000, qui marque le début de la campagne d’indemnisation, et le 30 juin 2018, 24 096 dossiers ont été transmis aux services du Premier ministre. 22 165 dossiers proposent une indemnisation mise à la charge de l’État français et 1 931 dossiers portent rejet ou désistement. Au 30 juin 2018, 22 058 recommandations ont été traitées par les services du Premier ministre et concernent, compte tenu des partages successoraux, 48 424 bénéficiaires qui perçoivent des indemnités uniquement sous la forme d’un capital.

 

Nombre de recommandations
traitées

Nombre de
bénéficiaires
indemnisés

Coût complet

(en millions deuros)

2000/2001

726

1 576

13,655

2002

1 883

4 353

35,729

2003

2 117

4 719

53,378

2004

1 970

4 465

46,208

2005

2 381

5 290

44,039

2006

2 560

5 345

66,232

2007

2 712

5 565

59,337

2008

1 872

4 119

51,257

2009

1 318

3 090

27,590

2010

939

2 104

14,654

2011

927

1 998

17,220

2012

974

2 119

11,697

2013

470

972

7,792

2014

333

728

7,609

2015

352

847

7,553

2016

231

512

4,791

2017

205

417

4,801

Du 01/01 au 30/06/2018

88

205

2,691

Total au 30/06/2018

22 058

48 424

491,546

Source : ministère des Armées.

 

 

Le coût total des aides financières accordées aux victimes de spoliations s’élève au 30 juin 2018 à 491,5 millions d’euros.

En PLF 2019, le budget prévu pour le financement des indemnisations en faveur des victimes de spoliations croît, à hauteur de huit millions deuros par rapport à la loi de finances initiale pour 2018, en raison des estimations menées par la CIVS. En effet, selon ces prévisions, cinq dossiers à fort enjeu seront traités dans lannée.

B.   L’indemnisation des victimes d’actes de barbarie

L’action 2 du programme 158 couvre les dépenses relatives à l’indemnisation des victimes d’actes de barbarie durant la Seconde Guerre mondiale. Ce dispositif, institué par le décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004, prend la forme d’une aide financière versée en reconnaissance des souffrances endurées par les orphelins de déportés résistants et politiques morts en déportation, les orphelins de personnes arrêtées et exécutées dans les conditions définies aux articles L. 342-3 et L. 343-5 ([28]) du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre, ainsi qu’aux personnes dont le père ou la mère a été déporté à partir du territoire national, durant l’Occupation et dans des conditions mentionnées aux articles L. 342-1 et L. 343-1 ([29]) du même code.

Pour ces orphelins, la mesure prend la forme, au choix du bénéficiaire, d’un capital au montant fixe de 27 440,82 euros ou d’une rente viagère dont le montant mensuel s’élève à 585,44 euros en 2018.

Entre août 2004, qui marque le début de la campagne d’indemnisation et le 30 juin 2018, le service instructeur a enregistré 34 262 demandes. 26 759 décisions ont été transmises, 22 695 décisions d’indemnisation ont été prises et 4 064 rejets ont été notifiés. Sur les 22 695 indemnisations accordées, 13 862 l’ont été sous forme de capital, soit 61 %, et 8 833 sous forme de rente viagère, soit 39 %.

 

Nombre de
demandes reçues

Nombre de bénéficiaires
indemnisés

Coût complet

(en millions deuros)

2004

20 755

1 999

 

2005

4 021

12 000

207,481

2006

2 260

4 736

190,561

2007

2 056

1 231

61,686

2008

1 091

496

56,653

2009

1 229

926

65,168

2010

818

507

55,839

2011

419

277

55,400

2012

583

150

53,734

2013

295

93

50,992

2014

260

54

51,270

2015

110

104

52,131

2016

100

58

51,616

2017

166

52

51,480

Du 01/01 au 30/06/2018

99

12

29,954

Total au 30/06/2018

34 262

22 695

1 033,965

Source : ministère des Armées.

Le coût total des aides financières accordées aux orphelins de parents victimes d’actes de barbarie s’élève, au 30 juin 2018, à 1 033,97 millions d’euros.

Il convient par ailleurs de noter que l’ONACVG, chargé d’instruire les requêtes en la matière, enregistre toujours un nombre significatif de nouvelles demandes : 110 en 2015, 100 en 2016, 166 en 2017.

 


—  1  —

   Deuxième partie :

Les défis de la transmission de la mémoire combattante

Monan Diop, Augustin Sadio, Goudiaby Bakary, Kondé Mamadou ou encore Seck Diegane. Tombés en défendant la France au cours du mois de juin 1940, ils font partie des 194 tirailleurs du 25e régiment de tirailleurs sénégalais dont les corps reposent à la nécropole nationale du Tata sénégalais de Chasselay, au nord de Lyon. La plupart d’entre eux ont été exécutés en juin 1940 par la division SS Totenkopf de l’armée nazie. Séparés des blancs, mitraillés, écrasés sous les chenilles des chars parce qu’ils étaient noirs, ces militaires sont tous « Morts pour la France ».

Créé en 1857 par un décret de Napoléon III, le corps des tirailleurs sénégalais a participé à tous les conflits de la fin du XIXe siècle et du XXe siècle dans lesquels la France a été engagée, jouant un rôle essentiel dans la défense de la Nation et la reconquête du territoire national, de la grande division bleue dans les Ardennes et les glorieux combats de Bazeilles à la boue des tranchées de Verdun puis la libération de la Corse et de la Provence.

Ainsi, entre 1914 et 1918, sur les 161 250 tirailleurs recrutés, 134 000 ont combattu sur le front de France – Verdun, Somme, Aisne – ou aux Dardanelles, les autres servant outre-mer afin d’assurer la souveraineté de la France. Pendant la Seconde Guerre mondiale, l’armée noire a pris part à la bataille de France, à l’instar des tirailleurs du 25e RTS, comme aux combats conduits par la France Libre, intervenant notamment au Gabon, en 1940, à Bir‑Hakeim, en 1942 ou lors du Débarquement de Provence, le 15 août 1944. Plus tard, les tirailleurs ont été mobilisés lors des guerres de décolonisation, en Indochine comme en Algérie.

Face à l’héroïsme des tirailleurs, nous n’avons pas toujours été à la hauteur. À Fréjus, le mémorial de l’Armée noire érigé en 1994 porte pourtant cette inscription : « Passant, ils sont tombés fraternellement unis pour que tu restes français. » Cette phrase de Léopold Sédar Senghor rappelle à chacun l’engagement de l’armée noire au service de la République, et impose de commémorer son souvenir. Dans ce contexte, il convient de mesurer la portée de la décision du président de la République de se recueillir devant le monument aux héros de l’Armée noire de Reims au cours de l’itinérance qu’il s’apprête à conduire dans l’est de la France dans le cadre des commémorations du centenaire du 11 novembre 1918.

Cette brève introduction ne doit pas être interprétée comme un mouvement de repentance. Il s’agit simplement de mettre en lumière un aspect parfois oublié de la mémoire nationale, et de souligner l’importance de sa transmission. C’est en effet à ces questions qu’est consacrée la seconde partie du présent avis. La mémoire combattante est faite de l’accumulation d’une multitude d’événements, de combats, d’engagements et de souffrances. Cette diversité est aujourd’hui fortement incarnée par les associations du monde combattant qui, parfois dans l’ombre, entretiennent les lieux de mémoire ou les tombes des morts pour la France et assurent l’hommage de la Nation à ceux qui sont tombés pour elle. Le monde combattant est aujourd’hui un acteur essentiel de la politique de mémoire. Mais qu’en sera-t-il demain ? Face à l’inéluctable vieillissement des anciens combattants, le risque est grand de voir la mémoire combattante s’étioler en même temps que le monde associatif. Il est du rôle de l’État d’agir pour y remédier.

L’État se trouve en effet au cœur de la définition et de la mise en œuvre de la politique de mémoire. Car s’il ne s’agit pas de construire une mémoire unique et officielle, c’est à lui qu’incombe la responsabilité de préserver la diversité des « lieux où sest condensée, incarnée, exprimée, la mémoire nationale » selon la formule de Pierre Nora dans son ouvrage Les lieux de mémoire. Dans la conception de Pierre Nora, il ne s’agit pas uniquement de lieux physiques ou géographiques, mais bien de l’ensemble des résonances de l’histoire nationale, transformée en mémoire à la fois intime et partagée par la communauté nationale. En somme, si l’on est tant marqué par Verdun, c’est parce que le souvenir de la Grande guerre retentit dans chaque histoire familiale et fait écho à un moment fondateur pour la Nation. C’est dans ce contexte que l’État intervient pour entretenir et transmettre la mémoire nationale. S’agissant de la mémoire combattante, qui n’en constitue qu’un volet, il est plus que jamais nécessaire de conforter les lieux de mémoire du ministère des Armées, et de s’adresser de manière spécifique à la jeunesse.

En effet, à l’heure de la conception du service national universel rénové, il semble incontournable d’y inclure un volet mémoriel dense, permettant de renforcer l’intérêt quasi naturel des jeunes, de tous les jeunes, pour leur histoire. Il en va également de la cohésion nationale. En effet, combien de ceux qui éprouvent parfois le sentiment de ne pas faire pleinement partie de la communauté nationale s’y rattachent instantanément en apprenant qu’un de leurs aïeux a versé son sang pour la défendre ?

Le présent avis ne prétend pas à l’exhaustivité. Il s’agit simplement de souligner quelques-uns des défis de la transmission de la mémoire combattante, afin de contribuer à la réflexion menée par le monde associatif, les universitaires et le Gouvernement en la matière.

I.   Agir face au risque d’éclatement de la mémoire combattante

A.   Quel monde combattant dans dix ans ?

1.   Les associations face au temps

Les associations jouent aujourd’hui un rôle essentiel dans la transmission de la mémoire. Dans tous les villages de France, elles animent les commémorations, fournissent les porte-drapeaux, interviennent dans des réunions publiques ou face aux élèves afin de contribuer à la transmission de la mémoire. Face à un public scolaire, il s’agit d’apporter un regard complémentaire à l’enseignement délivré par l’éducation nationale, la mémoire intime et familiale permettant de conforter le message intellectuel. Au-delà des actions en milieu scolaire, le monde associatif contribue à la transmission de la mémoire au travers du financement d’actions au profit de la jeunesse dans son ensemble. C’est notamment le cas d’associations comme la Fédération nationale André Maginot (FNAM) ou l’Union des blessés de la face et de la tête (UBFT), plus connue sous le nom des Gueules cassées. Toutes deux actionnaires historiques de La Française des jeux, elles disposent actuellement de ressources financières suffisantes pour soutenir de multiples actions mémorielles. Notons que le transfert au secteur privé de la majorité du capital de La Française des Jeux prévu par le projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises devra s’accompagner de mesures garantissant au monde combattant la permanence de ses financements. À titre d’exemple, la FNAM consacre près de 300 000 euros par an au financement d’opérations en direction de la jeunesse. Autrement dit, le monde combattant complète l’action de l’État en la matière.

Aujourd’hui, le monde combattant est à un moment charnière de son histoire. Au cours des auditions organisées dans le cadre de l’élaboration du présent avis, l’ensemble des représentants des associations du monde combattant a mis en lumière le défi que représente le vieillissement de leurs membres. Le monde combattant se contracte à mesure de la disparition des anciens combattants, selon un implacable mouvement. Au début de l’année 2018, 98 % des titulaires de la carte du combattant étaient âgés de plus de 75 ans, 59 % l’étant de plus de 80 ans. Pour les associations, il faut s’attendre à une diminution drastique des anciens combattants au cours des dix prochaines années. Dans ce contexte, il convient de prendre conscience du risque de voir la mémoire combattante disparaître. En effet, de l’avis de certaines des personnes auditionnées, en l’absence de réaction, « les associations disparaîtront les unes après les autres, le plus souvent en silence ».

Avec elles, ce sont la mémoire qu’elles entretiennent et les collections dont elles disposent qui risquent de s’éteindre ou de disparaître.

2.   Nouvelles mémoires, nouvelles pratiques

Le monde combattant a par ailleurs connu une importante transformation, du fait de l’adhésion à nombre d’associations de personnes n’étant pas, elles‑mêmes, des anciens combattants. Il peut s’agir de conjoints survivants, majoritairement des femmes, qui depuis longtemps ont intégré les différentes associations. Il n’y a là que logique dans la mesure où les politiques publiques prévoient un certain nombre de dispositifs à leur profit. Ressortissants de l’Office national des anciens combattants et des victimes de guerre, les conjoints survivants sont logiquement membres de certaines associations. Mais au-delà, les associations ont également été rejointes par des descendants ou des personnes manifestant un simple intérêt pour la mémoire combattante. Selon les informations recueillies au cours des auditions, dans nombre de grandes associations nationales, jusqu’à 60 % des membres ne sont pas, en tant que tel, des anciens combattants. Cette évolution contribue au maintien de l’activité des associations du monde combattant, et il convient bien sûr de les saluer pour avoir su relever le défi constitué par la diminution de leurs membres « historiques ». Néanmoins, elle n’est pas sans conséquence sur l’activité des associations et les combats qu’elles mènent. À terme, les associations d’anciens combattants évolueront de plus en plus vers des associations de transmission de la mémoire.

Par ailleurs, l’apparition de « nouveaux » anciens combattants, issus des OPEX, ne permettra sans doute pas de compenser la contraction du monde combattant. Certes, comme l’ont souligné plusieurs personnes auditionnées, l’arrivée au sein des associations traditionnelles des anciens des OPEX les a quelque peu revigorées. Néanmoins, les militaires ayant participé aux opérations extérieures sont, pour la plupart, des militaires professionnels, sous contrat ou de carrière. Leur engagement au service de la Nation n’est ainsi pas exactement de même nature que celui des appelés. Il en ressort une forme d’émiettement de leur représentation. Si deux associations dédiées à la représentation des militaires déployés en OPEX ont été créées et rassemblent quelques milliers de membres – la Fédération nationale des anciens des missions extérieures – OPEX et l’Association nationale des participants aux OPEX – leurs responsables sont conscients des difficultés à regrouper au sein d’associations nationales ces « nouveaux » anciens combattants, dont la plupart privilégient les amicales régimentaires.  

B.   Le défi de la sauvegarde des mémoires

1.   Une « maison commune »

Face au défi de l’émiettement de la mémoire combattante, il convient d’agir pour conserver et mettre en valeur le patrimoine de la myriade d’associations qui, aujourd’hui, la font vivre sur le territoire national.

Bien sûr, il ne s’agit pas d’imposer, « de force », une quelconque évolution au monde combattant. C’est à lui de conduire sa propre réflexion et d’engager sa mutation. En son sein, certaines voix s’élèvent pour appeler à la constitution d’une maison commune, dont la mission serait d’accueillir ces mémoires diverses, et de pérenniser leur souvenir.

Il s’agit sans nul doute d’une piste intéressante, permettant de répondre à l’éclatement du monde associatif et à la contraction de ses membres. Plutôt que de se laisser dériver, les associations du monde combattant pourraient ainsi s’unir et rassembler leurs forces, de même que leur patrimoine. Cette forme de rationalisation du monde combattant aurait aussi pour conséquence de concentrer les moyens afin de gagner en visibilité comme en efficacité.

En aucun cas, en revanche, la constitution d’une telle maison commune ne devrait déboucher sur l’uniformisation de la mémoire, le patrimoine de chaque association devant être conservé de manière autonome, afin de faire perdurer la spécificité de chaque mémoire. Le monde combattant a déjà su se rassembler, notamment au travers de la constitution de l’Union fédérale des associations de combattants et de victimes de guerre, longtemps présidée par M. Jacques Goujat, dont la parole, si elle se fait rare, est toujours aussi précieuse. Il a été l’un des premiers à évoquer cette maison commune, que le monde combattant semble aujourd’hui prêt à accepter. Pour mener à bien cette transformation, ce dernier devra néanmoins être accompagné.

2.   L’accompagnement par l’État

Si la puissance publique n’a pas vocation à organiser le monde combattant, elle se doit de l’accompagner dans sa transformation, au service de la conservation de la mémoire combattante. À première vue, l’Office national des anciens combattants et des victimes de guerre semble la structure idéale pour être le réceptacle de ces mémoires.

Premièrement, l’histoire de l’Office est concomitante de celle du monde combattant. L’Office trouve son origine dans l’Office national des mutilés et réformés, créé en 1916 afin de reconnaître l’engagement, le sacrifice et la souffrance des milliers de soldats impliqués dans le conflit. De cette histoire commune est née une organisation unique. En effet, établissement public du ministère des Armées, l’ONACVG est géré en étroite relation avec les associations d’anciens combattants et victimes de guerre. Ainsi, l’institution d’une gouvernance paritaire permet aux anciens combattants et victimes de guerre de participer aux grandes décisions concernant leur avenir via différentes structures : le conseil d’administration, les conseils départementaux et l’ensemble des commissions spécialisées.

Deuxièmement, l’ONACVG dispose d’un réseau territorial dense au travers des services départementaux qui déclinent son action sur les territoires, constituent des points d’écoute et d’accueil du monde combattant et mettent en œuvre la politique de mémoire. Pour mémoire, un tel service de proximité est implanté dans chaque chef-lieu de département, y compris outre-mer, ainsi qu’en Algérie, au Maroc et en Tunisie du fait de notre histoire spécifique avec ces pays. Gérés par des directeurs départementaux, les services de proximité sont chargés de décliner localement les différentes missions de l’Office.

Troisièmement, l’ONACVG est devenu, au fil des ans, un acteur incontournable de la politique de mémoire. Chargé de l’entretien des nécropoles nationales et des hauts‑lieux de la mémoire nationale, il contribue également à leur valorisation. De fait, l’Office et ses agents disposent aujourd’hui d’une véritable expertise en matière de mémoire, qui pourrait utilement être mise au service du monde combattant.

Il ne s’agit néanmoins là que d’une possibilité, et d’aucuns pourraient concevoir des solutions alternatives, prenant la forme d’une association fédérale ou d’une fondation. Quoi qu’il en soit, il y a lieu d’accompagner la réflexion du monde combattant afin d’assurer sa pérennité. De manière complémentaire, il conviendra de conforter les lieux de mémoire du ministère des Armées.

II.   conforter les lieux de mémoire du ministère des armées

A.   Se recueillir

1.   Les nécropoles

La première partie du présent avis consacre de larges développements aux nécropoles nationales et aux enjeux auxquels elles sont confrontées. Il s’agit donc simplement ici de rappeler que les 274 nécropoles constituent souvent les dernières traces immédiatement perceptibles des conflits contemporains dans le quotidien de nombreux Français. Parfois délaissées par le grand public, les nécropoles constituent des lieux de recueillement unique. Comme le souligne avec justesse Mme Rose-Marie Antoine, directrice de l’ONACVG, la spécificité d’une nécropole nationale tient au fait qu’elle accueille essentiellement les corps de jeunes Français qui se sont sacrifiés pour la défense de la Patrie. Or, face au sacrifice de la jeunesse, nul ne peut demeurer indifférent.

Les nécropoles constituent ainsi un premier point d’ancrage pour susciter l’intérêt pour la mémoire, avant d’approfondir l’histoire d’un conflit. C’est bien pour cette raison que l’ONACVG s’attache à conduire une valorisation de plus en plus dynamique de ces sites, en vue d’atteindre un public nombreux, tout en respectant comme il se doit la solennité des lieux.

À cet effet, un vaste programme de rénovation a été lancé dans le cadre du cycle mémoriel du Centenaire de la Première Guerre mondiale, principalement dans le nord et l’est de la France. L’Office a ainsi procédé au remplacement de l’ensemble des panneaux d’information présents dans les nécropoles nationales dans le but de rendre ces derniers plus didactiques. Par ailleurs, en lien avec les services de l’éducation nationale, l’ONACVG organise des actions pédagogiques permettant aux élèves de visiter ces nécropoles et d’en apprendre l’histoire ainsi que les valeurs qu’elles incarnent : sens de l’engagement, sacrifices consentis par les Français de métropole et des outre-mer, armée noire avec le Tata sénégalais, parmi d’autres exemples.

Dans ce contexte, il peut paraître surprenant que le projet de loi de finances pour 2019 prévoit une diminution des ressources affectées à l’entretien des nécropoles. Celle-ci s’explique néanmoins par l’arrêt du cycle du Centenaire au cours duquel, on l’a vu, un effort intense a été fourni. Il s’agira toutefois de demeurer vigilant à l’avenir afin de s’assurer du plein effort de l’État en la matière.

Par ailleurs, si l’entretien des nécropoles nationales doit demeurer de la responsabilité de l’État, l’on pourrait s’interroger sur la prise en charge de l’entretien des tombes des « Morts pour la France » qui se trouvent en dehors des nécropoles, au sein des cimetières ou des carrés communaux. Des associations comme le Souvenir français sont prêtes en assurer la responsabilité. Une telle piste mériterait d’être étudiée plus en détails, dès lors qu’un cahier des charges fixerait les exigences pour l’entretien de ces sépultures perpétuelles.

2.   Les hauts-lieux de la mémoire nationale

Neuf hauts-lieux de la mémoire nationale (HLMN) sont répartis sur le territoire national. Relevant du ministère des Armées, leur liste est définie par arrêté et leur gestion, leur entretien et leur valorisation sont confiés à l’ONACVG.

Les HLMN incarnant la mémoire des conflits auxquels la France a participé depuis 1870. On compte aujourd’hui :

– le cimetière national de Notre-Dame-de-Lorette, à Ablain-Saint-Nazaire (Pas-de-Calais), au titre des militaires morts pour la France aux côtés de leurs frères d’armes alliés (1914-1918) ;

– le cimetière national de Fleury-devant-Douaumont et la tranchée des baïonnettes (Meuse), au titre du sacrifice des soldats français de la Grande Guerre à Verdun, 1914-1918 ;

– l’ancien camp de concentration de Natzweiler-Struthof (Bas-Rhin), au titre du système concentrationnaire nazi et de la résistance européenne (1933‑1945) ;

– le Mont-Valérien à Suresnes (Hauts-de-Seine), au titre de la répression exercée par les autorités allemandes pendant l’Occupation (1940-1944) et de la France Combattante ;

– le mémorial des martyrs de la Déportation, sur l’Île de la Cité à Paris, au titre de la mémoire des déportés ;

– le mémorial de la prison de Montluc, à Lyon (Rhône), au titre de l’internement par le régime de Vichy et les autorités allemandes pendant l’Occupation (1940-1944) ;

– le mémorial du débarquement de Provence, au Mont-Faron qui surplombe Toulon (Var), au titre du débarquement des 15 et 16 août 1944 et de l’armée de la Libération ;

– le mémorial des guerres en Indochine à Fréjus (Var), au titre de la Seconde Guerre mondiale en Indochine (1940-1945) et de la guerre d’Indochine (1946-1954), qui abrite également les sépultures perpétuelles des morts pour la France qui y sont inhumés ;

– le mémorial de la guerre d’Algérie et des combats du Maroc et de la Tunisie, sur la promenade du Quai Branly, à Paris.

Les HLMN ont vu leur fréquentation augmenter de manière sensible, comme l’illustre le tableau ci-dessous, qui recense les niveaux de fréquentation des sites pour lesquels elle est mesurable.

Fréquentation des HLMN

Sites

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Struthof

167 671

164 063

172 745

186 587

184 531

175 698

Montluc

12 524

15 415

18 130

23 600

23 045

26 722

Mont-Faron

15 477

14 863

17 580

12 600

0

36 215

Mont-Valérien

14 681

18 302

19 140

19 022

20 083

21 107

Ile de la cité

105 851

129 246

51 651

72 765

85 404

106 444

Fréjus

13 061

10 300

11 599

9 535

8 767

5 963

Total

329 265

352 189

290 845

324 109

321 830

372 149

Source : ONACVG.

Cette évolution est notamment la conséquence des importants travaux qui ont été conduits ces dernières années afin de mettre en valeur ces différents sites.

À titre d’exemple, le mémorial du Mont-Faron a fait l’objet d’une rénovation de grande ampleur, permettant de concevoir une nouvelle muséographie pour l’ensemble du site. Le coût total de la rénovation du mémorial s’établit à quatre millions d’euros. Aujourd’hui, la nouvelle muséographie du Mont-Faron donne toute sa place à l’importante contribution des goumiers marocains et des tirailleurs sénégalais à la Libération.

Lors de son déplacement sur le site de Notre‑Dame de Lorette, votre rapporteur pour avis a également constaté la poursuite des travaux de rénovation de la couverture et de l’étanchéité de la Basilique, tandis qu’à Montluc, les équipes chargées de la valorisation de la prison lui ont exposé les enjeux liés à la rénovation des anciens ateliers et du mur d’enceinte.

À l’avenir, il conviendra également de conduire les travaux de rénovation de la nécropole de Fréjus ainsi que celle des miradors du camp du Struthof, avant d’envisager la réfection de l’auberge, récemment acquise, qui fait face à la chambre à gaz. Enfin, la construction d’une salle pédagogique est attendue au Mont-Valérien.

Il s’agit là d’un point essentiel. En effet, les hauts-lieux de la mémoire ne sont pas de simples lieux de recueillement et de mémoire. Ils contribuent également à la transmission de la mémoire, notamment vers les plus jeunes, dans le cadre d’étroits partenariats avec l’éducation nationale. La plupart de ces sites disposent de salles pédagogiques permettant d’approfondir une visite scolaire, en lien avec l’équipe enseignante.

En outre, le partenariat signé en mai 2018 entre l’ONACVG et la direction du service national et de la jeunesse du ministère des Armées vise notamment à faire découvrir ces lieux de mémoire à un nombre toujours plus important de jeunes.

À l’heure de la disparition des derniers acteurs et témoins vivants des conflits du XXe siècle, les HLMN prennent une place toujours croissante pour la transmission de la mémoire aux jeunes générations. C’est d’ailleurs dans ce cadre qu’il a été demandé à quatre d’entre eux d’élaborer un projet scientifique et culturel qui fixera les axes stratégiques de leur gestion et de leur valorisation.

De manière générale, l’objectif poursuivi par l’ONCAVG est de construire des parcours reliant les HLMN aux nécropoles nationales auxquelles ils sont souvent liés. Il en est par exemple ainsi de l’évidente proximité entre la prison de Montluc et la nécropole nationale de la Doua, à Villeurbane.

Lieux de recueillement, les nécropoles et les HLMN sont également des lieux de transmission.

B.   Transmettre

1.   Les musées

Les musées participent pleinement à l’affermissement du lien entre la Nation et son armée. S’agissant par exemple du musée de l’Armée, il s’agit même d’une mission à part entière, le code de la défense lui confiant la responsabilité « de maintenir et de développer lesprit de défense dans la nation, le goût de lhistoire militaire, le souvenir de ceux qui ont combattu et sont morts pour la patrie et la mémoire des gloires nationales militaires », « de contribuer à léveil de vocations au service des armes » et « dassurer la conservation, la présentation et lenrichissement de ses collections » ([30]). Les deux autres musées établissements publics à caractère administratif – le musée national de la Marine et le musée de l’Air et de l’Espace – sans se voir attribuer des missions similaires, contribuent également grandement au développement du lien armée‑Nation.

La fréquentation des musées du ministère des armées est élevée, témoignant de l’intérêt des Français pour la mémoire des conflits et l’histoire des armées. À titre d’exemple, le musée de l’Armée se classe au sixième rang des musées les plus visités de France, avec environ 1,1 million de visiteurs par an.

Les défis sont néanmoins nombreux.

D’abord, il conviendra de poursuivre les travaux de modernisation engagés. C’est notamment le cas du musée de la Marine nationale. Créé à partir d’une collection offerte à Louis XV, il est le plus ancien musée maritime au monde. Ses collections sont actuellement réparties sur plusieurs sites, à Port‑Louis, Rochefort, Toulon et Brest, qui vient d’ailleurs d’accueillir le canot impérial de Napoléon. À Paris, un vaste projet de rénovation du site du palais de Chaillot a été lancé, afin de bâtir le musée maritime du XXIe siècle. Le nouveau projet scientifique et culturel du site, établi sur le fondement du contrat d’objectifs et de performance 2016-2021, précise que le musée devra contribuer au lien armée-Nation, conforter l’esprit de défense et de sécurité, concourir à l’affirmation du sentiment d’appartenance à la communauté nationale et aider à l’éveil des vocations pour la marine nationale et les autres administrations au service de la Nation.

Le musée de l’Air et de l’Espace est également en cours de rénovation, même s’il demeure ouvert au public. L’année 2019 devrait d’ailleurs voir la réouverture de certains espaces d’exposition, dont la grande galerie.

À plus long terme, le musée de l’Armée sera confronté à la question de son extension afin de compléter le parcours muséographique par le traitement des conflits qui se sont déroulés après la fin de la Seconde Guerre mondiale. À l’heure actuelle, trois grandes thématiques ne sont en effet pas abordées par la collection permanente : la Guerre froide, les conflits liés à la décolonisation, les OPEX. Ces conflits ont fait l’objet d’expositions temporaires, mais il est temps d’actualiser le parcours.

Au côté des trois établissements publics, on compte de nombreux musées d’arme, qui ont, eux aussi, su évoluer. Initialement conçus comme des sortes de conservatoires de l’histoire et des traditions des différentes composantes de l’armée française, ces musées d’arme se sont progressivement « démilitarisés » pour s’ouvrir au grand public, et en premier lieu aux scolaires. À Fréjus, au musée des troupes de marine, à Aubagne, au musée de la légion étrangère ou encore à Draguignan, au musée de l’artillerie, votre rapporteur pour avis a pu constater la richesse des collections et de l’étroitesse des liens noués entre les équipes dirigeantes des musées et les jeunes publics, notamment scolaires, afin d’affermir le lien armées-Nation essentiel au renforcement de la cohésion nationale.

Musées du ministère des Armées

Source : Armées d’aujourd’hui n° 427.

2.   Le renforcement de la cohésion nationale

En fait, c’est bien de cohésion nationale qu’il s’agit. Dans la célèbre conférence « Quest-ce quune Nation ? » qu’il a donnée à la Sorbonne le 11 mars 1882, Ernest Renan définit ainsi la Nation : « Une nation est une âme, un principe spirituel. Deux choses qui, à vrai dire, nen font quune, constituent cette âme, ce principe spirituel. Lune est dans le passé, lautre dans le présent. Lune est la possession en commun dun riche legs de souvenirs ; lautre est le consentement actuel, le désir de vivre ensemble, la volonté de continuer à faire valoir lhéritage quon a reçu indivis ».

La transmission de la mémoire combattante se situe donc au cœur de la constitution de la mémoire nationale et, ce faisant, de la Nation. La robustesse d’un pays et sa résilience se mesurent aussi à sa capacité à transmettre le souvenir de ceux qui, à un moment de leur vie, ont sacrifié une part d’eux-mêmes pour le défendre. En ce sens, transmettre la mémoire des conflits du passé contribue au renforcement de la cohésion nationale.

Dans ce contexte, c’est avant tout à la jeunesse qu’il convient de s’adresser. De multiples actions contribuent à l’affermissement du lien entre la Nation et ses jeunesses, que l’on pense à l’enseignement de défense à l’école ou aux différents dispositifs citoyens mis en place par le ministère des Armées, tels les cadets de la défense, très nombreux dans le Var, ou aux classes de défense et de citoyenneté, inventées à La Seyne-sur-Mer.

Il nous faut aujourd’hui aller plus loin. Au cours des auditions, plusieurs responsables d’associations du monde combattant ont préconisé de donner à chaque élève l’opportunité de visiter un site mémoriel durant son parcours scolaire. Votre rapporteur pour avis y est tout à fait favorable, d’autant que chaque territoire abrite des lieux de mémoire, qu’il s’agisse d’une nécropole, d’un camp, d’un maquis ou d’un musée. Pour ce faire, il est indispensable de compter sur l’action des collectivités territoriales, dont le rôle fut essentiel dans la conduite du cycle du Centenaire.

Alors que se poursuit la concertation relative à la mise en place d’un service national universel rénové, il nous faudra nous assurer de la juste place de la mémoire en son sein.

 

 

 


—  1  —

   TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.   Audition dE mme geneviève darrieussecq,
SECRÉTAIRE D’ÉTAT AUPRÈS DE LA MINISTRE DES ARMÉES

La commission de la Défense nationale et des forces armées a entendu Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire dÉtat auprès de la ministre des Armées, sur le projet de loi de finances pour 2019 (n° 1255), au cours de sa réunion du mardi 9 octobre 2018.

M. le président Jean-Jacques Bridey. Nous recevons aujourd’hui, pour la seconde audition budgétaire, Mme la secrétaire d’État Geneviève Darrieussecq.

Madame, nous avons aujourd’hui le plaisir de vous entendre sur le projet de budget 2019 que vous présentez, et qui concerne le monde combattant, la mémoire et les liens avec la Nation. Déjà 20 députés se sont inscrits pour vous poser des questions, j’espère qu’elles concerneront toutes ces sujets.

Madame, je vous laisse immédiatement la parole pour une présentation de votre budget 2019.

Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire dÉtat auprès de la ministre des Armées. Monsieur le président, Mesdames, Messieurs les députés, nous nous retrouvons aujourd’hui pour la présentation du budget que je défends – anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation – et qui est toujours un moment important de la discussion parlementaire.

Je sais que vous êtes attachés à ce budget, et en particulier aux anciens combattants. Je vous remercie du travail que vous avez réalisé avec nous, pour le monde combattant et ce budget.

Le budget 2019 s’établit, pour la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », à 2,3 milliards d’euros en crédit de paiement (CP). Je concentrerai mon propos sur les deux programmes placés sous ma responsabilité : les programmes 167, « Liens entre la Nation et son armée » et 169 « Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant », qui bénéficient ensemble de 2,2 milliards d’euros.

Il s’agit d’un excellent budget, non seulement il préserve tous les droits, mais nous avons pu y ajouter des mesures nouvelles.

Premièrement, les droits à la reconnaissance et à la réparation dont bénéficie le monde combattant, c’est-à-dire les anciens combattants eux-mêmes et leurs ayant-droits, sont préservés. Aucun dispositif budgétaire ou fiscal n’est revu, et les crédits d’action sociale de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) sont maintenus à leur niveau, soit 26,4 millions d’euros.

Par ailleurs, les moyens d’action des opérateurs du monde combattant sont reconduits : le maillage territorial de l’ONACVG est préservé, et le budget de l’Office s’élève à 57,6 millions d’euros, soit une baisse de 400 000 euros liée aux économies sur les dépenses de fonctionnement et de soutien. Notre appui à l’Institution nationale des Invalides (INI) se poursuit, avec une subvention de fonctionnement maintenue à 12 millions d’euros, et 35 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) lui sont alloués pour les lourds travaux engagés ; la subvention à l’Ordre national de la Libération augmente de 376 000 euros, pour s’élever à 1,7 million d’euros.

Ce budget résulte d’une méthode de concertation à laquelle vous avez participé. L’an dernier, j’avais pris l’engagement de consulter largement les associations d’anciens combattants et les parlementaires intéressés, pour faire le point sur les principales demandes et répondre aux questions soulevées par les associations. C’est ce qui a été fait. Je puis vous assurer que les associations d’anciens combattants sont très satisfaites de la façon dont ce travail a été mené.

Pendant six mois, des échanges ont eu lieu autour de plusieurs groupes de travail qui n’ont laissé aucune question de côté. En outre, j’ai évoqué avec vous, au mois de juillet le résultat de ces travaux.

Parallèlement, à la demande du Président de la République, un groupe de travail spécifique a été mis en place, présidé par le préfet Dominique Ceaux, en vue établir le bilan des actions prises en faveur des anciens harkis et de formuler des propositions d’amélioration. Ce groupe a travaillé pendant six mois et son rapport m’a été remis le 17 juillet.

En ce qui concerne les harkis et leurs enfants, nous avons toujours échangé des points de vue constructifs avec les associations. Il s’agit d’un public hétérogène, notamment dans son expression, et sans représentant marqué, ce qui représente une difficulté pour travailler dans les meilleures conditions. Nous avons cependant réalisé des avancées importantes.

En ce qui concerne les associations d’anciens combattants, j’ai écarté, chiffres et argumentaires à l’appui, des mesures dont les associations aussi convenaient qu’elles n’étaient pas forcément prioritaires. D’abord, l’indemnisation des orphelins de la Seconde Guerre mondiale. Je suis sensible à la souffrance de ceux qui ont perdu leurs parents dans les guerres, mais il me semble symboliquement nécessaire de préserver la spécificité que nous attachons à la barbarie et aux crimes nazis.

Ensuite, l’octroi direct de la demi-part fiscale au conjoint. Cette demi-part est liée à la reconnaissance de la qualité de combattant. Elle a été étendue à la conjointe survivante de l’ancien combattant pour ne pas la mettre en difficulté quand le combattant en avait bénéficié. Mais la lui donner quand ce n’est pas le cas serait dévoyer l’esprit et remettre en cause le fondement même du dispositif.

Le budget 2019 contient également des mesures nouvelles qui répondent à des demandes du monde combattant. Premièrement, l’extension de la carte du combattant aux anciens combattants présents en Algérie entre le 1er juillet 1962 et le 1er juillet 1964, souhait que les anciens combattants expriment depuis longtemps et que j’ai appuyé auprès du Gouvernement et du Premier ministre, qui ont accepté de le satisfaire. Ce sont ainsi 50 000 personnes qui bénéficieront désormais des avantages liés à la carte du combattant, notamment la retraite du combattant et la demi-part fiscale qui y est associée. Au total, en année pleine, cela représente 30 millions d’euros de crédits budgétaires, dont 6,6 millions d’euros inscrits au budget 2019.

Deuxièmement, suite au groupe de travail sur la situation des harkis et de leurs enfants, le Gouvernement a adopté plusieurs mesures qui se concrétisent dans le projet de loi de finances 2019. Je les ai annoncées le 25 septembre dernier dans la Cour d’honneur des Invalides. Ainsi a été décidée, tout d’abord, une hausse de 400 euros de l’allocation de reconnaissance et de l’allocation viagère en faveur des harkis combattants et de leurs veuves.

Ensuite, le gouvernement a décidé la création d’un dispositif de solidarité au profit des descendants des harkis, qui pourront bénéficier d’une aide individualisée en fonction de leur situation. Ce dispositif sera mis en place pour une période de quatre ans et représente un montant d’environ 30 millions d’euros.

Ce sont donc 10 millions d’euros supplémentaires qui permettront en 2019 de compléter les mesures en faveur des harkis et de leurs enfants.

Troisièmement, le budget prévoit une mesure de revalorisation des expertises médicales dans le cadre des demandes – souvent retardées dans la prise de rendez-vous – de dossiers de pensions militaires d’invalidité. Dans ce domaine, il est indispensable que nous allions plus vite, c’est pourquoi j’ai choisi de mettre l’accent sur ces expertises médicales qui permettront d’accélérer le processus de traitement des dossiers. Au total, c’est une revalorisation de 43 % qui sera mise en œuvre en 2019, pour un coût de 300 000 euros.

J’en viens aux crédits consacrés au lien armées-Nation. Le budget de la Journée défense et citoyenneté (JDC) se maintient, à 15,3 millions d’euros – soit une hausse de 500 000 euros, liée au nombre de jeunes qui feront leur JDC. Par ailleurs, comme vous le savez, le service militaire volontaire (SMV) a été pérennisé par la loi de programmation militaire (LPM) dans son format. Les crédits de fonctionnement du SMV sont désormais inscrits dans le programme du lien armées-Nation pour un montant de 2,5 millions d’euros en 2019 au sein d’une nouvelle action du programme 167.

Le budget de la politique de mémoire évolue quant à lui à la baisse. Au terme du cycle mémoriel du Centenaire, le budget mémoire est ramené à 16 millions d’euros en 2019, contre 28 millions d’euros en 2018. Cette baisse est due principalement à l’arrêt de la mission du Centenaire – 8 millions d’euros de subvention en 2018 – et à un retour à une action mémorielle hors cycle exceptionnel. Sur ce montant 5,5 millions d’euros permettront de financer les commémorations, sachant que l’année 2019 sera orientée vers la commémoration de la libération du territoire, dont ce sera le 75e anniversaire.

Le monument opérations extérieures (OPEX), attendu depuis trop longtemps par la quatrième génération du feu, sera inauguré en 2019 ; 1,2 million d’euros y sont consacrés en 2019. L’appel d’offres a été lancé et les travaux devraient démarrer au début de l’année 2019.

Même si elle ne figure pas au budget, je souhaite évoquer avec vous l’action culturelle du ministère.

L’action culturelle et éducative du ministère n’est pas forcément bien individualisée dans le budget de la défense. Elle est dotée de 46 millions d’euros en CP et de 29 millions d’euros en AE, qui permettent de mener des opérations très importantes, notamment la poursuite du chantier de rénovation du Musée de la marine au Trocadéro, pour 17,2 millions d’euros de CP ; la mise en conformité des réserves et ateliers du Musée de l’air et de l’espace au Bourget et la numérisation de ses collections ; le financement des activités du Service historique de la défense, pour 3,2 millions d’euros.

Je suis très attachée à ces sujets – musées et service historique de la défense – qui sont une vitrine importante de notre ministère sur l’histoire de notre pays au travers de ses armées.

Mais il faut aussi préparer l’avenir. En 2019, je lancerai deux chantiers de modernisation qui compléteront les quatorze autres chantiers du ministère. Le premier chantier concerne le lien avec le monde combattant. Il s’agit de repenser nos actions de mémoire dans le contexte de l’achèvement de la mission du Centenaire, notamment en termes de structuration de la gouvernance et nos actions à l’adresse des jeunes, en relation avec l’éducation nationale.

Je travaillerai avec l’ONACVG à la mise en œuvre d’un contrat d’objectifs de performance (COP) pour le début de l’année 2019, afin d’adapter son organisation à la baisse du nombre de ses ressortissants, sans remettre en cause la proximité territoriale de l’Office. Le second chantier concerne le patrimoine culturel du ministère, pour lequel je répondrai à toutes vos questions ; c’est un chantier qui me tient à cœur.

M. le président. Merci, Madame la ministre. Les questions seront nombreuses, puisque je compte vingt-trois inscrits…

M. Christophe Blanchet. Dans la loi de programmation militaire, a été voté un texte qui prévoyait que, pour la commémoration du 11 novembre, le ministère transmette à toutes les communes de France la liste de nos soldats morts en opération dans l’année, et l’âge des orphelins, afin qu’ils soient eux aussi honorés. Aurons-nous cette liste, afin de pouvoir communiquer et nous inscrire dans le devoir de mémoire – lien Nation-jeunesse ?

Par ailleurs, vous avez évoqué le 75e anniversaire du débarquement, une commémoration qui m’est chère en tant qu’élu du Calvados. Déciderez-vous du lieu des cérémonies ou laisserez-vous le Comité du débarquement en décider ? La tradition veut que les cérémonies se tiennent, chaque année, sur un secteur différent : britannique, canadien et américain. En 2018, les cérémonies se sont tenues en secteur britannique, elles devraient donc avoir lieu, en 2019, en secteur américain. L’enjeu géopolitique est important, et nous devons l’anticiper. Quelles sont vos intentions ?

M. Thibault Bazin. Lors des débats budgétaires de l’année dernière, vous aviez indiqué que vous établiriez des estimations du nombre de bénéficiaires potentiels pour les différentes mesures que nous sollicitions et que vous en déduirez les montants.

Pourriez-vous nous transmettre, en vue de l’examen du projet de budget en commission que nous tiendrons dans deux semaines, le nombre des bénéficiaires pour chacune des mesures demandées, et notamment pour la carte de combattant en Algérie pour la période 1962‑1964, pour laquelle le coût estimé est de 30 millions d’euros ?

M. Alexis Corbière. S’agissant des harkis, je salue la volonté de réparation du Gouvernement, qui je l’espère n’est pas considérée comme une espèce de compensation, ou en vue de contrebalancer le geste fort réalisé envers Maurice Audin. La question des harkis mérite en effet que la Nation leur rende justice.

Pouvez-vous nous donner des précisions concernant les 40 millions d’euros qui seront débloqués ? La récente décision du Conseil d’État, qui a dédommagé un fils de harki à hauteur de 15 000 euros, ne risque-t-elle pas d’être considérée comme un précédent ? Si je suis favorable à ce que nous rendions justice aux harkis, je ne suis pas favorable à ce que nous mettions en place une fragmentation de l’ensemble des Français qui ne serait qu’une addition de mémoires blessées et revendicatives à des fins financières.

Quid des politiques mémorielles : programmes scolaires, monuments, commémorations ? Il s’agit d’un travail qu’il convient de mener avec des historiens français et algériens, afin que les harkis prennent leur place dans notre histoire nationale, au-delà des caricatures qui en ont longtemps été faites. Des récents travaux d’historiens ont démontré que de nombreux harkis étaient restés en Algérie après la guerre ; ils n’ont pas été tous massacrés. L’armée française s’est souvent honorée en leur permettant de se rendre en France.

Pensez-vous possible que nous puissions, à travers notre diplomatie, dialoguer avec le Gouvernement algérien afin que les harkis, qui le souhaitent, puissent se faire enterrer en Algérie ?

Mme Frédérique Lardet. Le budget consacré à la politique de mémoire a notamment permis de développer une marque « Qualité Tourisme », spécifique aux lieux de mémoire, et qui labellisent trente-trois sites. Le tourisme de mémoire étant l’un des axes majeurs de la politique de mémoire, pouvez-vous nous indiquer quels sont les crédits affectés et les priorités définies dans le projet de loi de finances 2019 ?

M. Jean-Pierre Cubertafon. Madame la ministre, le taux de féminisation de l’armée de terre s’élevait à 10 % en 2016. À cette même date, il a été relevé que 4,6 % des militaires de l’armée de terre déployés en opérations extérieures étaient des femmes.

Des initiatives visant à promouvoir l’égalité entre les hommes et les femmes au sein de l’armée ont-elles été prises ? Un colloque avait été organisé en 2103, sur le thème des femmes militaires, en 2015, une action avait été mise en place dans le cadre de l’opération « féminisons les métiers de l’aéronautique ».

Des résultats encourageants ont été enregistrés, les femmes sont de plus en plus nombreuses dans les différents métiers de l’armée. L’élection, en 2017, d’une femme au poste de présidente des engagés volontaires de l’armée de terre du 2e régiment d’infanterie marine (RIMa), souligne cette évolution.

Cependant, il semble que la féminisation de l’armée évolue lentement. Le projet de loi de finances 2019 inclut-il des événements ou des directives qui seraient à même de promouvoir la féminisation de l’armée ?

M. Yannick Favennec Becot. Madame la ministre, vous nous avez présenté les mesures en faveur de nos concitoyens d’origine harkie, notamment la valorisation et la protection de lieux de mémoire, et l’élargissement du recueil de mémoire aux femmes et aux enfants. Ces mesures sont légitimes, car elles concernent des femmes et des hommes qui se sont engagés volontairement pour notre pays et qui n’ont pas été justement récompensés. Il s’agit là de vies brisées, de familles entières qui ont été traitées sans aucune humanité.

Ces familles, qui font face à des situations souvent très difficiles, attendent légitimement cette indemnisation financière. Vous nous avez parlé d’un dispositif de solidarité nationale – 10 millions d’euros par an sur quatre ans. Pouvez-vous nous détailler la ventilation de ces crédits ?

M. Joaquim Pueyo. Enfin, le monument aux opérations extérieures va être inauguré ! Nous en parlons depuis 2011. Pouvez-vous nous donner une planification précise de ce monument et nous indiquer à quel endroit il sera construit ?

Par ailleurs, même si mon collègue en a déjà fait la demande, pouvez-vous nous transmettre les noms et les informations concernant les soldats tués en OPEX ?

S’agissant de la politique mémorielle, certes, nous avons connu un pic cette année avec les commémorations de l’armistice du 11 novembre, mais ce serait une erreur de diminuer le budget relatif à la mémoire et à la politique jeunesse. Pourriez-vous nous faire un point précis, lors d’une prochaine réunion, de toutes les manifestations qui ont été labellisées, région par région ?

M. Fabien Roussel. J’ai rencontré, pour la préparation du rapport spécial sur le budget, les associations et les différents acteurs. Ma première question concerne la création du fonds social pour les harkis, avec des critères qui permettront d’attribuer une aide à ceux qui le demanderaient. Qui va étudier les dossiers ? L’ONACVG seul ? Ou y aura-t-il une mission élargie, l’étude de ces dossiers étant compliquée et exigeant des critères très précis ?

Concernant la décision du Conseil d’État accordant la somme de 15 000 euros à un fils de harki, avez-vous envisagé une étude juridique de cette décision, notamment sur ses conséquences ?

Des anciens combattants m’ont indiqué qu’ils avaient reçu un courrier de Bercy les informant que la rente mutualiste ne serait plus déductible des impôts en 2019 ; le confirmez‑vous ? Si oui, il s’agit d’une mauvaise nouvelle, car cette rente participe du droit à réparation.

Enfin, j’ai été relancé par les associations sur la question des veuves des grands invalides de guerre. Vous avez écarté plusieurs mesures qui sont réclamées par le G12, dont une qui ne concerne que quelques centaines de veuves et dont le coût est de quelques centaines de milliers d’euros.

Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire dÉtat auprès de la ministre des Armées. Les noms des soldats décédés dans l’année seront communiqués, en même temps que le message qui sera envoyé à tous les préfets de département – il y a pour l’instant trois noms. Leurs noms seront donc bien cités le 11 novembre.

S’agissant des commémorations du 75e anniversaire, nous attendons d’abord de savoir si le président de la République a des préférences. Je souhaite que nous ayons un temps commémoratif pour tous les combattants – donc pour le débarquement de Provence également – et pour tous ceux qui ont contribué à la victoire. Tous les combattants doivent être honorés, les Américains, les Britanniques, les Canadiens, mais également les combattants français. Nous n’avons pas encore déterminé les temps forts, mais le sujet est discuté entre les différents acteurs.

Monsieur Bazin, concernant le nombre des bénéficiaires des différentes mesures, il me semble vous avoir remis les comptes rendus du groupe de travail. Vous trouverez également ces chiffres dans le document « Politique de reconnaissance et de réparation en faveur du monde combattant ». Vous avez dû recevoir ce document sous forme numérique.

La carte 62-64 sera attribuée à 50 000 anciens combattants : 40 000 anciens des forces dites d’apaisement et 10 000 personnes présentes dans les bases militaires de Mers el‑Kebir et du Sahara.

Nous vous transmettrons, bien entendu, le nombre des bénéficiaires pour chaque mesure.

Monsieur Corbière, le président de la République n’a aucune volonté de contrebalancer quoi que ce soit. Il veut, au contraire, que tous les sujets soient abordés afin que toutes les mémoires soient respectées.

S’agissant des harkis, à la politique inscrite dans le budget, et qui concerne la revalorisation, la réparation et le fonds de solidarité, s’ajoutent des politiques mémorielles. Je souhaite, par exemple, qu’il y ait davantage de témoignages oraux et visuels d’anciens harkis et de leurs femmes et enfants, afin que nous puissions les conserver et les diffuser. Cette mémoire vivante est particulièrement importante pour la jeunesse, qui doit se l’approprier.

Nous allons, investir et restaurer différents lieux de mémoire, tels que la Maison d’histoire et de mémoire d’Ongles, dans les Alpes-de-Haute-Provence, que nous allons continuer à réaménager.

Par ailleurs, nous allons travailler avec l’éducation nationale pour élaborer des supports pédagogiques– qui concerneront aussi la guerre d’Algérie – pour les collégiens et des lycéens.

J’ai reçu en automne dernier, à sa demande, un représentant des moudjahidine, pour évoquer le cas des 500 militaires et des 1 500 civils qui n’ont jamais été retrouvés. Ce travail avait été entamé, mais les parties ne s’étaient pas accordées sur la méthode. Le représentant que j’ai reçu semblait disposé à rouvrir le processus.

Concernant les harkis qui souhaitent se faire enterrer en Algérie, sachez qu’il existe un réseau diplomatique qui essaie, de façon discrète, d’apporter une aide à cet effet. Il s’agit d’un sujet très sensible, dans un pays où des élections se profilent. Nous le traitons donc, discrètement, par le biais de la diplomatie.

Mais je ne désespère pas, puisque lors d’une rencontre intergouvernementale, au mois de décembre dernier, les mots échangés montraient une volonté d’avancer sur ce sujet.

Enfin, par une décision du 3 octobre 2018, le Conseil d’État a accordé 15 000 euros à un enfant de harki, au motif qu’il avait vécu dans des camps et n’avait donc pas eu les mêmes chances que les autres dans son cursus personnel. Cet arrêt souligne les conditions indignes dans lesquelles les harkis ont été accueillis, après qu’ils ont quitté l’Algérie pour rejoindre la France.

Nous connaissons tous cette situation. J’en ai parlé le 25 septembre et le président de la République s’est également exprimé sur cette question. Les mesures que nous mettons en œuvre, dans le prolongement des travaux conduits par le préfet Ceaux, répondent à votre question, Monsieur Corbière. Il s’agit d’un fonds de solidarité qui permettra d’apporter une aide individualisée et adaptée à la situation des enfants de harkis qui ont souffert des conditions d’accueil dans les camps et les hameaux de forestage. Ce fonds permettra également de prendre en compte leur situation socio-économique pour aider à la réalisation de projets ou à une meilleure insertion. Il sera mis en œuvre dès 2019.

L’ONACVG aura pour mission d’étudier les dossiers, mais une commission ad hoc sera également mise en place, le sujet n’étant pas simple et les dossiers étant difficiles à constituer. En effet, nous devrons déterminer, par exemple, combien de temps un enfant de harki – s’il n’en présente pas la preuve – a vécu dans un camp ou un hameau de forestage ; les recherches seront importantes. Des conditions de ressources seront fixées et un examen de la situation sociale établi pour mieux accompagner le bénéficiaire.

Nous allons, bien sûr, continuer de développer le tourisme de mémoire ; un million d’euros y sera consacré en 2019. La direction du patrimoine, de la mémoire et des archives a organisé récemment, à Strasbourg, une réunion sur ce thème, en collaboration avec la région Grand-Est. Nous devons affiner la stratégie en fonction de la situation actuelle – post‑Centenaire –, définir les investissements nécessaires et, éventuellement, accompagner les acteurs qui souhaitent réaliser des investissements pour développer le tourisme de mémoire, et ce avec l’aide d’Atout France, notamment pour promouvoir à l’étranger les chemins de mémoire sur notre territoire français.

Monsieur Cubertafon, l’égalité hommes-femmes et la féminisation des femmes dans les armées sont de vastes sujets. Nous sommes fiers de dire, aujourd’hui, que toutes les femmes peuvent accéder à tous les métiers dans les armées, sans restriction, puisqu’elles servent mêmes désormais dans les sous‑marins… Le taux de féminisation est assez bon : nous sommes la quatrième armée la plus féminisée, avec des différences, bien entendu, selon les corps d’armée : l’armée de l’air est la plus féminisée et l’armée de terre la moins féminisée.

Notre objectif, avec la ministre Florence Parly, est de féminiser également le commandement et de faire en sorte que plus de femmes puissent accéder au grade de général. Nous nous sommes fixé l’objectif ambitieux de 10 % de femmes officiers généraux en 2022. Pour cela, nous devrons motiver et inciter les femmes officiers et sous-officiers à continuer leur carrière.

Cependant, je ne peux pas me satisfaire de ces objectifs. Nos armées doivent absolument rester attractives pour les femmes. Nous devons être capables d’expliquer les métiers et d’élaborer des campagnes de communication visant spécifiquement les femmes, et non pas seulement les hommes – les femmes et les hommes n’ayant pas les mêmes sensibilités, selon moi, sur tous les sujets.

L’armée offre aux femmes comme aux hommes la possibilité d’exercer plusieurs métiers et de progresser rapidement dans leur carrière. L’armée peut être une promotion sociale importante.

Quelle est la ventilation des crédits alloués aux harkis ? Le montant total est de 10 millions d’euros par an sur quatre ans, soit 40 millions d’euros : 2,5 millions d’euros par an, soit une augmentation de 400 euros par personne, seront consacrés à la revalorisation de l’allocation de reconnaissance en faveur des harkis combattants et de leurs veuves ; 7,5 millions serviront à la mise en place, pour une période de quatre ans, de l’institution d’un dispositif de solidarité au profit de leurs descendants, qui pourront bénéficier d’une aide individualisée en fonction de leur situation. Ce fonds sera le premier créé en faveur des enfants de harkis.

Le montant de l’allocation de reconnaissance s’élèvera à 4 109 euros ou à 2 187 euros par an selon l’option choisie – rente ou capital. Je souligne que jamais une augmentation de 400 euros n’avait été accordée.

Oui, le monument OPEX sera enfin inauguré en 2019 ! J’ai débloqué la situation avec la mairie de Paris. Nous avons signé une convention d’occupation du domaine public, ainsi qu’une convention de transfert temporaire de maîtrise d’ouvrage vers l’État, pour les travaux. Ces conventions ont été votées en conseil de Paris et signées.

Le monument sera érigé au parc André-Citroën. À ce titre, nous inscrivons 1,2 million dans le PLF. Cette somme comprend l’œuvre et l’aménagement de l’endroit où elle sera installée. Les sommes qui étaient auparavant prévues s’élevaient à 500 000 euros pour l’œuvre et à 1,3 million d’euros pour l’aménagement. J’ai rencontré toutes les personnes concernées pour leur expliquer que nous devions être raisonnables ; ce n’est pas parce que nous sommes à Paris que l’on doit dépenser des sommes inconsidérées pour aménager 1 000 mètres carrés ! Nous avons ouvert un appel d’offres et le chantier sera lancé début 2019.

Concernant les manifestations qui ont été labellisées, je suis incapable aujourd’hui de vous les indiquer, région par région. Mais nous allons demander à la mission Centenaire, qui possède les documents, de nous faire une liste.

Plus de 6 000 actions ont été labellisées sur le Centenaire, dont plus de 2 100 actions, en 2018. Nombreuses sont celles qui ont été cofinancées. Des actions qui ne se situent pas uniquement au nord et à l’est de la France. Beaucoup de régions, dites « de l’arrière », ont participé à ces commémorations ainsi qu’à des travaux très intéressants et très variés – des travaux de mémoire, des actions culturelles ou sportives…

Concernant la rente mutualiste qui ne serait plus déductible des revenus soumis à l’impôt, je n’en ai pas entendu parler. Il semblerait que cette mesure concerne les personnes qui paient l’impôt sur la fortune immobilière (IFI), c’est‑à‑dire très peu de personnes. Mais je vérifierai cette information, car, comme je vous l’ai annoncé, nous n’avons pas touché aux droits acquis. Monsieur Roussel, pouvez-vous me transmettre, par courrier, la situation des personnes que vous avez rencontrées à ce sujet ?

Enfin, sachez que je porte une attention toute particulière à la situation des veuves des grands invalides. Mais je ne suis pas favorable aux pistes qui ont été évoquées – et qui sont portées de façon récurrente. Nous avons choisi de donner la priorité à la carte 62-64. Si nous avions modifié le dispositif, comme le souhaitent certaines associations, nous nous retrouverions dans des situations curieuses, où les veuves des grands invalides percevraient une somme plus élevée que les invalides eux-mêmes.

J’ai proposé de ne pas fermer la porte et de continuer à travailler sur ce sujet pour mettre à plat la situation réelle. Mais les solutions qui ont été proposées ne sont pas satisfaisantes, car elles entraîneraient des situations d’iniquité qui seraient contestables et contestées par les grands invalides eux-mêmes.

M. Charles de la Verpillière. Je me réjouis de l’attribution de la carte du combattant aux soldats qui sont restés en Algérie entre 1962 et 1964, d’autant que le groupe Les Républicains l’avait inscrite dans une proposition de loi qui a malheureusement été rejetée le 5 avril 2018, pour des motifs qui restent obscurs.

Pourquoi n’envisagez-vous pas une revalorisation de la pension des anciens combattants – je reviens là à la question du point d’indice ? Mon groupe est favorable, non pas à des revalorisations par à-coups, comme cela a été fait en 2016, avec une augmentation de quatre points, mais à une revalorisation, certes faible, mais régulière. C’est ce qui avait été fait sous le quinquennat du président Sarkozy.

D’autant que le budget alloué à ces pensions diminue chaque année, pour des raisons évidentes.

Mme Françoise Dumas. Ma question sera peut-être redondante – c’est l’inconvénient de parler après de nombreux collègues – mais elle aura le mérite de pointer l’importance du sujet.

Madame la ministre, pouvez-vous nous en dire plus sur le fonds de solidarité au profit des harkis – je suis élue d’un territoire qui est très fortement concerné ? Certaines choses ne se réparent pas uniquement par des mesures pécuniaires. Les souffrances béantes ne seront jamais compensées et le vécu d’un enfant dans le camp de Rivesaltes ne sera jamais effacé. C’est la raison pour laquelle, je souhaiterais connaître les mesures, autres que financières, que ce fonds de solidarité mettra en place.

Mme Pascale Fontenel-Personne. Le projet de loi de finances pour 2019 contient beaucoup de bonnes mesures. Nous apprenons malheureusement, toutefois, que la dotation dédiée à l’entretien des sépultures de guerre et des lieux de mémoire est en baisse. Ce sont ainsi plus de 200 000 euros qui sont supprimés pour l’entretien des sépultures de nos anciens combattants.

Même si un effort particulier a été réalisé durant la mission du Centenaire, le montant attribué à ces tâches, inscrit dans le PLF, sera-t-il suffisant pour l’entretien de l’ensemble de nos sépultures, notamment dans les lieux de mémoire basés à l’étranger ?

M. Christophe Lejeune. Madame la ministre, lors de vos vœux 2018, vous avez déclaré qu’un grand plan serait lancé pour réhabiliter les lycées militaires. La LPM prévoit en effet un investissement en vue d’améliorer les conditions d’accueil des élèves, notamment en restaurant les infrastructures. Ce sont près de 4 000 élèves qui ont fait leur rentrée le mois dernier, et force est de constater que l’encadrement attend ce plan avec enthousiasme.

Concrètement, quel sera son impact dans le budget 2019 ?

Mme Aude Bono-Vandorme. Ma première question concernait également les pensions militaires d’invalidité, suite aux interpellations des anciens combattants, dans un contexte où il leur est demandé des efforts financiers importants.

Ma seconde question concerne le monument érigé à la mémoire des militaires morts en OPEX. Un peu plus de 600 noms y seraient inscrits. Cela n’inclut donc pas les quelque 500 militaires tombés en Algérie après juillet 1962. Qu’en est-il ? Y aura-t-il des mesures mémorielles pour ces combattants ?

M. André Chassaigne. La médaille militaire est accordée selon des critères, et il est notamment précisé que les soldats doivent avoir reçu une citation. Cependant, les délais d’attente sont importants et ils créent de la frustration chez les anciens combattants. D’autant que le quota a été baissé en 2018, passant de 1 106 bénéficiaires à 880. Pensez-vous supprimer ce quota ou augmenter le nombre de bénéficiaires ?

S’agissant des aides sociales de l’ONACVG, sur lesquelles je vous ai interrogé l’année dernière, une circulaire, élaborée par vos soins, a permis une harmonisation. Pour autant les dossiers demeurent lourds, de nombreux bénéficiaires potentiels n’osant pas faire la demande. Ne peut-on revenir à ce qui a été supprimé par le gouvernement précédent, c’est‑à‑dire à l’aide différentielle qui permettait au moins, de façon mécanique, de porter le revenu des personnes concernées jusqu’au seuil de pauvreté ?

Enfin, je ne suis pas convaincu par la suppression de la demi-part fiscale, un acquis qui avait été remis en cause en 2009. Il est important de prendre en compte le rôle important joué par les épouses auprès des anciens combattants ; il n’existait pas de soutien psychologique à cette époque.

Mme Patricia Mirallès. Ma question concerne également la dotation à l’entretien des sépultures de guerre et des lieux de mémoire. Cette dotation inclut‑elle les lieux de sépultures d’Afrique du Nord ? Si oui, pour quelle part et sinon quelle sera la dotation allouée à l’entretien de nos carrés militaires, notamment en Oranie ?

Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire dÉtat auprès de la ministre des Armées. Monsieur de la Verpillière, je suis contente que vous vous réjouissiez de la mesure concernant la carte 62-64, mais sachez qu’il n’y avait aucun motif obscur. Je m’étais engagée à la faire passer dans la loi de finances 2019, nous avons tenu nos engagements.

La question de la revalorisation du point d’indice est abordée régulièrement. Je me suis engagée à mettre en œuvre une réflexion sur cette question. Néanmoins, je ne peux pas entendre que le point d’indice n’augmente pas. La valeur du point d’indice de pension militaire d’invalidité est indexée sur l’indice de la fonction publique, choix qui a été fait en 2005, par le monde combattant et les associations. Elle augmente régulièrement tous les ans – peut‑être pas suffisamment, certains disent même qu’il n’augmente pas autant que l’inflation, mais elle a parfois beaucoup augmenté sans qu’il y ait d’inflation.

La valeur du point était de 14,04 euros au 1er janvier 2016, de 14,40 euros au 1er janvier 2017, et passera à 14,50 euros en 2019. Elle va par ailleurs évoluer en lien avec la mise en œuvre du protocole « parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR). Je me suis engagée auprès des associations à remettre en place une commission tripartite – une fois que nous aurons suffisamment de recul sur la mise en œuvre du PPCR – qui aura pour vocation de suivre l’évolution de ce point d’indice.

S’agissant du fonds de solidarité, j’en ai tracé les grandes lignes. Il me tient à cœur d’aider ceux qui sont en difficulté. Mais, pour bénéficier du système d’emplois réservés, des qualifications sont nécessaires. C’est la raison pour laquelle nous devons être très actifs dans le domaine de la formation et proposer des formations adaptées aux métiers qui recrutent, que ce soit dans la fonction publique ou dans le secteur privé.

Je souhaite également que des référents, dans chaque département, suivent ces personnes de façon globale, pour les aider dans toutes leurs démarches – montage des dossiers, formation, sortie de formation. Le but étant de les aider à devenir autonomes, et non plus tributaires du fonds de solidarité.

La dotation des sépultures, en 2019, s’élève à 5 millions d’euros ; ce n’est pas neutre. L’année dernière, un grand nombre de ces crédits n’ont pas été dépensés. Il n’y aura donc en fait pas de diminution. Je souhaite même que cette dotation soit amplifiée. Je ne connais pas les chiffres pour l’Afrique du Nord, mais je vous les communiquerai par écrit. J’ai l’intention, dans le nouveau COP de l’ONACVG, de revoir la façon dont sont suivis les travaux des sépultures. En effet, je n’aime pas quand les crédits ne sont pas consommés alors qu’il y a un réel intérêt à le faire.

Concernant les noms qui seront inscrits sur le monument OPEX, ceux des soldats morts entre 1962 et 1964 en Algérie n’y figureront pas. Mais ils sont inscrits sur le monument du quai Branly – qui est destiné à ce conflit.

Monsieur Chassaigne, pour les médailles militaires, deux décrets sont publiés chaque année, et il est difficile de changer ce contingent : le premier décret, pris en avril, concerne les personnels d’active et 2 000 personnes ; le second concerne les autres personnes et la réserve – 1 000 personnes en sont bénéficiaires.

S’agissant de l’aide sociale de l’ONACVG, nous ne pouvons pas revenir à l’aide différenciée qui a été retoquée par le Conseil constitutionnel. Les veuves des soldats doivent pourvoir s’adresser à l’ONACVG, sans aucune honte. Il s’agit d’un dispositif qui vient s’ajouter à tous les dispositifs de droit commun existant en faveur des personnes âgées en difficulté, gérés par les conseils départementaux et les centres intercommunaux d’action sociale.

Sur les 26 millions d’euros qui financent l’aide sociale de l’ONACVG, 12 millions ont été attribués aux veuves de soldats en 2017 ; un soutien important et régulier. Vous devez donc conseiller aux veuves qui viennent vous voir de ne pas hésiter à aller demander de l’aide auprès de l’ONACVG, elles seront accueillies par des personnes formées, discrètes et empathiques.

La même somme est prévue dans le budget 2019, ce qui représente une augmentation puisque le nombre de bénéficiaires diminue.

Enfin, en ce qui concerne les lycées militaires, j’ai proposé à Mme Florence Parly, après avoir visité plusieurs établissements, de lancer un plan pluriannuel d’investissements, pour déterminer les travaux qui sont à réaliser. Ce plan s’étalerait jusqu’en 2024-2025.

Jusqu’à présent, chaque établissement faisait des propositions au niveau local mais leurs dossiers n’étaient pas considérés comme prioritaires. De sorte que les situations sont devenues très critiques dans certains établissements, ce qui est inacceptable.

Des travaux d’urgence ont été lancés au Prytanée et dans certains internats durant l’été, pour un montant de 1,3 million d’euros. Mais il reste beaucoup à faire, notamment en ce qui concerne les hébergements du Prytanée, de Saint-Cyr et d’Autun, et les installations sportives. Les infrastructures sportives de ces lycées sont remarquables mais nécessitent de l’entretien.

Je vous transmettrai ce plan pluriannuel d’investissement, qui s’élève à 110 millions d’euros. Il s’agit d’une somme importante, mais la modernisation de ces lycées militaires s’intègre dans notre plan famille. Ils sont très importants pour les militaires et leurs enfants.

Mme Séverine Gipson. Madame la ministre, les derniers témoins vivants des guerres passées nous quittent, malheureusement. Lors de rencontres dans ma circonscription, les anciens combattants s’interrogeaient sur le devoir de mémoire. Comment sera-t-il organisé pour les générations futures ? Un travail en ce sens sera-t-il mis en œuvre ? Des moyens sont‑ils prévus dans le PLF 2019 ?

M. Patrice Verchère. Madame la ministre, le Conseil constitutionnel, dans une décision du 8 février dernier, suite à une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), a étendu le droit à pension, alors réservé aux victimes d’actes de violence pendant la guerre d’Algérie, à l’ensemble des personnes qui résidaient dans le pays, quelle que soit leur nationalité. Force est de constater que cette décision, largement discutable, va engendrer un coût pour les finances publiques, donc pour le contribuable français. Votre ministère sera-t-il en charge d’étudier les demandes et de verser les pensions ? Si oui, à combien estimez-vous le coût potentiel de cette décision ?

Mme Natalia Pouzyreff. La France a reconnu la dette de notre patrie envers les harkis. Nous avons parlé des mesures de réparation qui seront introduites dans le PLF pour 2019. La semaine prochaine sera ouverte une nouvelle phase de réexamen de dossiers d’interprètes afghans. Comme les harkis en leur temps, ces interprètes ont fait le choix de devenir auxiliaires de l’armée française et leurs familles sont à présent menacées dans leur pays. Un dispositif d’accompagnement a-t-il été décidé ?

M. Jacques Marilossian. La politique volontariste du Gouvernement en faveur des soldats d’Algérie, qu’ils soient militaires en poste de 1962 à 1964 ou harkis, est à saluer. Ce sont des mesures fortes que nous attendons depuis longtemps et qui n’avaient pas été prises par les gouvernements précédents.

Ma question concerne les anciens combattants et m’a été inspirée par un jeune ancien combattant d’opérations extérieures. Qu’un monument soit mis en chantier pour honorer nos soldats en OPEX est appréciable. Mais, qu’ils soient encore en service après leur retour d’OPEX ou qu’ils aient demandé une carte d’ancien combattant, nos soldats demeurent souvent des êtres potentiellement fragiles d’un point de vue psychologique.

En effet, hormis les quelques jours de décompression, qui sont parfois prévus pour les soldats – par exemple au retour d’Afghanistan –, nous pouvons nous interroger sur leurs besoins en matière de suivi psychologique à long terme. Disposons-nous de bilans de suivi des soldats après leur retour d’OPEX ? Un dispositif à long terme est-il envisagé en matière d’accompagnement psychologique de nos soldats, qu’ils soient encore en service ou qu’ils aient obtenu leur carte d’ancien combattant ?

Mme Anissa Khedher. Il est prévu une revalorisation de 43 % des montants des prestations médicales dans le cadre des pensions militaires d’invalidité. Et ce afin de réduire les délais de traitement des dossiers qui sont en moyenne de seize mois. Quelle accélération est susceptible d’être apportée au traitement de ces dossiers grâce à cette mesure financière ?

M. Jean-Michel Jacques. Le monument destiné aux soldats morts pour la France en opérations extérieures est un sujet qui m’est cher, étant moi-même jeune ancien combattant d’OPEX. Je tiens donc à vous remercier, Madame la ministre, pour votre investissement dans ce dossier.

Une question, cependant : les soldats morts pour la France seront-ils classés par date, par nom ou par opération ?

Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire dÉtat auprès de la ministre des Armées. Les soldats seront classés par théâtre d’opération. Un travail important est réalisé pour obtenir tous les noms de ces soldats. Evidemment, s’il y a des oublis, ou si d’autres soldats malheureusement décèdent d’ici là, nous les ajouterons.

S’agissant des mesures concernant la mémoire, 1,2 million d’euros est prévu dans le PLF pour les actions pédagogiques mémorielles et les enseignements de défense qui sont réalisés avec l’éducation nationale, pour les scolaires. Environ 45 000 à 50 000 élèves et enseignants seront touchés par ces actions de sensibilisation ; ce n’est pas encore suffisant mais, pour aller plus loin, les enseignants doivent avoir la volonté de s’emparer du sujet.

Nous devons donc commencer par sensibiliser les enseignants – les former – en leur montrant l’importance de ces actions pour la jeunesse. Il s’agit là d’un vrai sujet.

Je vous l’ai dit, je suis favorable au recueil des témoignages oraux quand cela est possible. Nous possédons des lettres pour la Première Guerre mondiale, mais c’est vraiment par la vie des soldats, des femmes, des enfants, des familles, que nous pouvons sensibiliser les jeunes aux conflits contemporains. Je souhaite donc que l’on amplifie les recueils de témoignages oraux.

Vous me demandez quel sera le retentissement de la décision « Kherbouche » du Conseil constitutionnel. Le dispositif est forclos puisque, dans la LPM, nous avons fixé au 14 juillet 2018 la date limite de dépôt de nouveaux dossiers.

Concernant les interprètes afghans, le Gouvernement, à la demande du président de la République, a accepté de réexaminer le cas des personnes déboutées. Il a été décidé de mettre en place une mission pilotée par le quai d’Orsay pour procéder à ce nouvel examen, avant la fin de l’année 2018. L’association des anciens interprètes afghans nous prêtera son concours et les services du délégué interministériel chargé de l’accueil et de l’intégration des réfugiés seront mobilisés.

S’agissant des soldats fragilisés psychologiquement, ils bénéficient bien entendu d’un suivi. Un travail important est réalisé par le service de santé des armées, qui est en pointe dans ce domaine. Un travail de prévention est réalisé avant même que les soldats partent en opérations extérieures. Et les cadres militaires qui entourent les soldats sont sensibilisés à cette question, afin qu’ils puissent signaler les hommes et les femmes qu’ils estiment en difficulté. En outre, des psychiatres et des psychologues se trouvent sur les théâtres d’opération. Enfin, au retour, les soldats subissent des examens médicaux.

Mais il est vrai que des problèmes peuvent se déclencher a posteriori. C’est la raison pour laquelle une information est délivrée, et le service de santé des armées est à la totale disposition des soldats et de leurs familles. Il existe également une plateforme « Écoute défense » qui permet d’écouter et d’orienter les personnes qui appellent – les soldats comme les familles ; environ 600 appels ont été traités en 2018. Les 300 soldats qui ont été diagnostiqués fragiles psychologiquement en 2018 sont parfaitement suivis. Par ailleurs, le projet de l’INI vise à réadapter, physiquement et psychologiquement, les blessés. Il se fera en collaboration avec l’hôpital Percy.

Enfin, je ne sais pas si la revalorisation des montants de prestations médicales va réduire le temps des instructions, mais j’espère qu’elle réduira le temps de prise de rendez‑vous, qui peut aller jusqu’à six mois. Nous espérons, en rendant la rémunération des expertises plus attractives – nous étions très en retard –, que les experts n’auront pas tendance à choisir un dossier plutôt qu’un autre.

Ce qui m’inquiète, c’est que nous comptions, en 2012, environ 750 experts, et qu’ils ne sont plus que 550. Cette réduction, qui plus est, va se poursuivre, puisque la moyenne d’âge est de 61,5 ans. Il s’agit là d’un vrai sujet.

M. le président. Madame la ministre, je vous remercie pour vos réponses très précises.

 

 


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II.   audition de reprÉsentants d’ASSOCIATIONS
D’ANCIENS COMBATTANTS

La commission de la Défense nationale et des forces armées a entendu des représentants dassociations danciens combattants, sur le projet de loi de finances pour 2019 (n° 1255), au cours de sa réunion du mercredi 17 octobre 2018.

Les débats sont accessibles sur le portail vidéo du site de l’Assemblée à l’adresse suivante :

http://videos.assemblee-nationale.fr/video.6752730_5bc6f7db5f4cd.commission-de-la-defense--representants-d-associations-d-anciens-combattants-sur-le-plf-2019-17-octobre-2018

 

 


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III.   EXAMEN des crÉdits

La commission de la Défense nationale et des forces armées a examiné, pour avis, les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » au cours de sa réunion du mercredi 24 octobre 2018.

Un débat suit l’exposé du rapporteur pour avis.

Mme Patricia Mirallès. Monsieur le rapporteur, pourriez-vous préciser le rôle de l’Institution nationale des Invalides dans la prise en charge des blessés atteints de syndromes post-traumatiques ? À cette occasion, pourriez-vous faire un point sur les travaux nécessaires à la transformation de l’INI, leur nature et le budget correspondant ?

M. Jean-Pierre Cubertafon. Au cours de votre intervention, vous avez évoqué la question de la transmission de la mémoire sans témoin. Comment voyez-vous l’organisation du monde combattant à horizon dix ans ?

M. André Chassaigne. Ma question porte sur les crédits de l’ONACVG, pour lesquels je constate une baisse de 2,99 %, soit 2,16 millions d’euros. L’Office prend désormais en charge les victimes d’actes de terrorisme, qui disposent du statut de victimes civiles d’actes de guerre. Ceci a deux conséquences. D’une part les victimes peuvent bénéficier de l’aide sociale de l’ONAVG. D’autre part leurs enfants peuvent être reconnues pupilles de la Nation. Cet élargissement de périmètre n’est-il pas susceptible de poser un problème en termes de financement ?

Mme Natalia Pouzyreff. Ma question rejoint celle de M. Cubertafon. Samedi dernier, j’ai organisé une rencontre entre des anciens combattants de la 2e division blindée, la petite-fille du général Leclerc et quelques jeunes. Comment imaginez-vous la transmission de la mémoire entre ces deux générations ?

M. Yannick Favennec Becot. Monsieur le rapporteur pour avis, permettez-moi de vous interroger sur la délivrance de la carte du combattant aux anciens militaires déployés durant quatre mois en Algérie entre le 2 juillet 1962 et le 1er juillet 1964. Évidemment, nous nous réjouissons tous ici de cet élargissement. Sommes-nous certains de la pleine applicabilité du dispositif dès le 1er janvier 2019 ? Le cas échéant, quelles en seront les modalités ? N’encourt‑on pas le risque de vivre un embouteillage au niveau de l’ONACVG dans la mesure où, me semble-t-il, c’est l’Office qui sera chargé de la délivrance de cette carte ?

M. Thibault Bazin. Ma question fait suite à une rencontre sur mon territoire il y a quelques jours. La personne en question était présente en Algérie après 1964, conformément aux dispositions des accords d’Évian qui prévoyaient que la France conserve trois sites durant une période de cinq ans. Un certain nombre de soldats ont donc assuré des missions pour la France, parfois au péril de leur vie puisque, pour la personne dont je parle, sur une chambrée de huit ils ne sont plus que deux. Avez-vous abordé le cas de ces anciens combattants qui, aujourd’hui, ne sont pas reconnus à ce titre par la Nation ?

M. Jean-Charles Larsonneur. Ma question porte sur l’attribution de la carte du combattant aux sous-mariniers, qui sont des combattants de l’ombre, des combattants invisibles mais, néanmoins, des combattants. Ils n’en bénéficient pas pour l’instant.

M. Laurent Furst. Ma question porte sur les musées de France. La France est le pays de tous les musées et de nouveaux musées y sont ouverts régulièrement. Or lorsque l’on regarde les choses dans le détail, nous nous rendons compte que la fréquentation de certains musées est très faible, voire anecdotique. Avez-vous étudié cette question s’agissant des musées militaires ? Selon vous, la mémoire sera-t-elle transmise prioritairement par l’existence, le maintien ou le développement de musées militaires ?

M. Jean-Michel Jacques. Chaque commémoration a un sens, le 8 mai la commémoration de la victoire contre les nazis, le 11 novembre celle du sacrifice de nos soldats pour la Nation. Aujourd’hui apparaît une nouvelle génération et un monument consacré à la mémoire des OPEX va être érigé. Comment voyez-vous l’évolution du 11 novembre s’agissant de la mémoire des OPEX ?

Mme Josy Poueyto. Je connais votre engagement sur ces questions, Monsieur le rapporteur pour avis. Pour ma part, je souhaiterais évoquer la gouvernance de la politique de la mémoire, marquée par un nombre important d’intervenants. Le ministère évidemment, à travers la DPMA ou l’ONACVG, la mission du Centenaire, les collectivités territoriales. Serait-il possible de rationaliser cette gouvernance qui apparaît complexe ?

M. Christophe Blanchet. Ma question concerne la journée défense et citoyenneté. Pouvez-vous nous expliquer la manière dont les fonds sont utilisés et son avenir, selon vous, dans le cadre de la réforme du service national universel.

M. Didier Le Gac. Je travaille avec une association qui vise à réhabiliter les 1 300 victimes de la tragédie de Mers el-Kébir et,  à cette occasion, j’ai appris l’existence d’un bureau de l’ONACVG en Algérie. Pourriez-vous me dire combien de bureaux existent, notamment à l’étranger et quel est le budget correspondant ?

M. Jean-Louis Thiériot. La transmission de la mémoire sans témoin suppose une collaboration étroite avec l’éducation nationale, confrontée à des difficultés financières pour la prise en charge des frais de transport des élèves qui se rendraient sur des lieux de mémoire ou dans des musées. Un budget spécifique est-il prévu à cet effet ? Quelles sont les modalités de coopération avec l’éducation nationale ?

M. Christophe Lejeune. Je m’interroge sur le volet diplomatique du monde combattant. Je pense notamment à l’escadron Lafayette avec les Américains et le Normandie‑Niemen avec les Russes.

M. Philippe Michel-Kleisbauer, rapporteur pour avis. Merci de ces nombreuses questions auxquelles je tenterai d’apporter des réponses simples et précises.

En réponse à Mme Mirallès sur l’INI, le budget de cette institution reste fixé, en PLF 2019 à 12,9 millions d’euros. Néanmoins, en autorisations d’engagement, une enveloppe de 35 millions d’euros est prévue pour l’engagement des travaux. L’INI est étroitement liée à l’hôpital de Percy, notamment depuis l’abandon du bloc opératoire aux Invalides et son transfert vers cet hôpital. En revanche, l’INI a entamé un travail colossal vis-à-vis des victimes de syndromes post-traumatiques, et notamment ceux que l’on avait « perdus des radars ». L’enjeu est de faire de l’INI l’adresse de tous ceux qui souffrent de ces syndromes, au-delà des seuls militaires. Ainsi, si le besoin se fait sentir, les membres de la police nationale pourraient s’en rapprocher, car il est évident que dans le cadre de leurs missions, ils peuvent être confrontés à ce type de syndromes. L’INI devra ainsi être la porte à laquelle l’on puisse frapper quand on se sent mal. Je voudrais simplement ajouter que leurs travaux ont permis d’anticiper la prise en charge des grands blessés, des grands invalides. Vous faisiez partie, chère collègue, de la délégation de notre commission qui a pu voir comment fonctionne un rôle 1 et un rôle 2 sur les théâtres d’opération. Dès le rôle 2 un psychiatre est déployé lors de l’opération du blessé de guerre, de manière à bien prendre en compte sa souffrance dès son réveil et afin de l’accompagner dès ce moment-là. L’INI devient une référence sur ce sujet.

M. Cubertafon, Mme Pouzyreff et Mme Poueyto m’ont interrogé sur la question de la transmission de la mémoire. D’abord la gouvernance est en effet assez complexe. Il y a la direction du patrimoine, de la mémoire et des archives bien sûr, la DPMA, qui a changé de noms récemment, mais aussi l’ONACVG, avec une petite concurrence entre eux parfois, ainsi que des associations. Avec chacune des grandes associations, nous menons une réflexion pour construire une maison commune. Là aussi, il s’agit de ne disposer que d’une seule porte d’entrée. Dans ce contexte, l’ONACVG est connu et reconnu mais, avec l’arrivée de néo‑anciens combattants, peut-être nous faudrait-il changer son nom, et constituer un Office national des combattants, regroupant les combattants du passé et ceux d’aujourd’hui. Nous pourrions aussi y inclure le Bleuet de France, auquel j’avais consacré une partie de mon précédent avis. Le Bleuet est en effet un signe nous permettant de nous rassembler autour à la fois de nos héros, morts et blessés au combat, et des victimes civiles d’actes de terrorisme. À nous de nourrir cette réflexion.

Monsieur le président Chassaigne, la baisse de la dotation attribuée à l’ONACVG ne concerne pas l’enveloppe dévolue à l’action sociale, qui ne bouge pas. Elle s’explique par une diminution des ressources affectées à l’entretien des lieux de mémoire et des nécropoles nationales, conséquence la fin du cycle du Centenaire. Cette ligne budgétaire avait exceptionnellement cru l’an dernier afin de réussir la sortie de ce cycle et de préparer la suite.

Yannick Favennec Becot m’a interrogé sur la carte du combattant pour les nouveaux bénéficiaires. Comme le versement de la retraite du combattant est semestriel et lié à la date d’anniversaire, les choses monteront en puissance dès l’année 2019, avec une première année pleine en 2020. Concernant la délivrance de la carte du combattant aux militaires français déployés en Algérie après le 1er juillet 1964, nous nous situons dans un cadre d’intervention totalement différent et, j’espère que M. Bazin me le pardonnera, je n’ai pas poussé ma réflexion jusqu’à ce point. À nous de nous saisir de la question. Il en va de même s’agissant de la délivrance de la carte du combattant aux sous-mariniers, au sujet desquels M. Larsonneur m’a questionné. À première vue, il s’agit d’un « trou dans la raquette » dont je suis prêt à me saisir avec vous. Je pense en effet que nous pouvons travailler ensemble à combler les quelques vides qui demeurent dans le droit à reconnaissance et à réparation et, si nous travaillons ensemble, notre commission aura de nouveau réussi à œuvrer au profit de nos glorieux aînés.

Laurent Furst m’a interrogé sur les musées. La fréquentation est très importante. Le musée de l’Armée rassemble 1,17 million de visiteurs par an et se situe dans le « top 5 » des musées de France. Par ailleurs, le directeur du site m’a confié que près d’un tiers des jeunes qui visite le musée cherche à se renseigner sur les modalités d’intégrer les armées. L’antenne du musée national de la Marine de Toulon accueille, quant à elle, 60 000 visiteurs par an. Les musées d’arme ne sont pas en reste. Je pense ainsi aux musées des troupes de marine, de l’artillerie ou de la légion étrangère, qui accueillent entre 20 000 et 25 000 personnes par an. Cela signifie que si nous parvenons, en lien avec les collectivités territoriales, qu’il s’agisse des régions, des départements ou des villes dans lesquels ils se trouvent, à les intégrer davantage dans des parcours de mémoire, on en fait d’une part des atouts touristiques attractifs pour ces territoires mais aussi, d’autre part, des outils de valorisation. Par exemple, le musée de la Marine est aussi le musée du génie français depuis le XIVe siècle, voire plus, à une époque où nous avons été à l’origine des innovations qui ont développé des industries. Au musée, l’histoire de Toulon, qui se rapporte à celle de l’arsenal et de la construction navale, est exceptionnellement mise en lumière. C’est aussi l’histoire des métiers et des savoir-faire qui sont les nôtres.

Jean-Michel Jacques a évoqué la mémoire des OPEX, ce qui me permet de faire le point sur le monument OPEX. Nous en voyons le bout, enfin ! Malgré le lancement des travaux par François Hollande, ce monument était resté en cale sèche. On nous parlait de difficultés diverses, de la nécessité de repenser le jardin qui l’accueille, que sais-je encore ! Aujourd’hui, la secrétaire d’État, Mme Geneviève Darrieussecq, est en train de lancer les appels d’offres. Cela signifie qu’hors incident d’exécution, nous pouvons espérer que le monument soit inauguré avant le 23 octobre 2019, c’est-à-dire avant la prochaine commémoration de l’attentat du Drakkar à Beyrouth le 23 octobre 1983. D’ici là, nous travaillons à la pose d’une plaque OPEX sous l’Arc de Triomphe. Cela manquait, cela sera fait.

Par ailleurs, comme vous le savez, dorénavant, les noms des « morts pour la France » lors de l’année en cours seront lus lors des commémorations du 11 novembre. Nous espérons bien sûr que cette liste soit la moins longue possible.

En réponse à M. Blanchet sur la JDC, j’évoquerai la réunion passionnante que nous avons tenue hier, en présence de Fabien Gouttefarde et de Marianne Dubois, avec le général Daniel Menaouine, nouveau directeur du service national et de la jeunesse. Ce dernier nous a indiqué à quel point cette journée était importante et incontournable. Il s’agit d’un point important car alors que certains l’ont beaucoup critiquée, elle est aujourd’hui le seul outil permettant de détecter ceux qui, parmi nos jeunes sont en situation de complet décrochage. De plus, une fois repérés par les divers questionnaires, ces jeunes sont ensuite orientés afin d’être pris en charge. À l’heure actuelle, environ 35 000 jeunes sont ainsi dirigés vers les structures territoriales, au premier rang desquelles les missions locales. Par ailleurs, la JDC participe à la découverte des métiers des armées. Il s’agit donc d’un point d’entrée exceptionnel pour nos armées et, à l’instar des musées, elles suscitent des vocations. Cela signifie que la JDC doit être maintenue jusqu’à la naissance du SNU et que celui-ci devra reprendre en son sein les éléments fondamentaux de la JDC. À ce sujet, il me semble qu’il pourrait être tout à fait utile d’auditionner le général Menaouine, de manière plus large que dans le cadre d’une audition budgétaire.

En réponse à M. Le Gac, l’ONACVG dispose de 105 bureaux dont trois en Algérie, au Maroc et en Tunisie.

M. Thiériot m’a interrogé sur les relations avec l’éducation nationale et la prise en charge des frais de transport des jeunes. Des crédits sont prévus en la matière. Je tiens aussi à souligner l’action des associations, dont certaines consacrent de l’ordre de 200 000 à 300 000 euros au financement d’actions en faveur de la jeunesse. Soulignons aussi l’action des collectivités territoriales, qui contribuent systématiquement. Je dirais qu’il y a là besoin de fonctionner à la manière d’un arrosoir, afin de recueillir les contributions de différents acteurs, car la politique de mémoire dépasse le seul investissement de l’État. À ce sujet, je reviens un instant sur la JDC, pour indiquer à M. Blanchet que le coût de la JDC ne s’élève pas simplement à 15 millions d’euros comme on pourrait le croire à la lecture du programme 167, il faut ajouter les dépenses de personnels, qui représentent autour de 85 millions d’euros.

Enfin, pour répondre à M. Lejeune, je rappellerai que, la semaine dernière, vous m’avez entendu employer, devant le chef d’état-major des armées, l’expression oxymorique de « diplomatie militaire ». La diplomatie militaire comme la diplomatie de mémoire existent. En marge d’un déplacement effectué dans le cadre de mes activités au sein de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, j’ai eu la chance de pouvoir me recueillir devant les tombes des soldats « morts pour la France » à Skopje, remarquablement bien entretenus grâce au soutien financier du MEAE et à l’implication de l’ambassadeur de France qui œuvre pour que la mémoire nationale vive en dehors des lieux nationaux. N’oublions pas ce volet car, si nous allons commémorer la fin du Centenaire de la Première Guerre mondiale, les combats se sont poursuivis au-delà de 1918 à l’est et nous avons contribué à la libération de certains pays, dont la Roumanie, où existent des cimetières français, entretenus par l’État. Soyons-en reconnaissants.

(Applaudissements.)

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M. le président. Nous en venons maintenant au temps réservé aux groupes politiques.

M. Fabien Gouttefarde. J’ai l’honneur d’intervenir en commission, aujourd’hui, au nom de mon groupe La République en Marche, pour exprimer notre vue d’ensemble sur les trois missions budgétaires que nous examinons dans le cadre du projet de loi de finances pour 2019 : la mission « Anciens Combattants, mémoire et liens avec la Nation », la mission « Défense » et enfin le programme « Gendarmerie nationale » de la mission « Sécurités ».

À titre liminaire, concernant la mission « Anciens Combattants, mémoire et liens avec la Nation », je tiens à souligner qu’avec 2,3 milliards d’euros de crédits le budget pour 2019 marque la volonté du Gouvernement de consolider les mesures de reconnaissance et de réparation, tout en renforçant significativement l’équité des dispositifs qu’elle finance. Je veux immédiatement saluer l’intégration du financement de l’octroi de la carte du combattant à près de 35 000 militaires stationnés en Algérie entre le 2 juillet 1962 et le 1er juillet 1964, résultat du travail de concertation colossal qu’a mené la secrétaire d’État, Geneviève Darrieussecq, avec tous les acteurs, et en particulier les associations d’anciens combattants.

C’est une mesure que nous avions appelée de nos vœux, en avril dernier notamment, lors du vote de notre motion de renvoi en commission de la proposition de loi de notre collègue Les Républicains, Gilles Lurton, mus par notre responsabilité politique et l’exigence de sincérité budgétaire. Nous avions alors garanti mettre en œuvre cette mesure de reconnaissance légitime et de juste réparation en l’intégrant dans un futur projet de loi de finances, nous le faisons dès maintenant, nous tenons nos engagements, mais avec la rigueur de la sincérité budgétaire qui nous est singulière.

Pour preuve, le rapporteur d’alors, Gilles Lurton, estimait que cette mesure bénéficierait à 25 000 anciens militaires alors que la concertation menée par la secrétaire d’État aboutit à l’estimation de 50 000 anciens militaires potentiellement concernés pour un coût budgétaire en 2019 estimé à 6,6 millions d’euros. Cette mesure de justice porte l’effort financier total à 60 millions d’euros.

En ce qui concerne les crédits de la mission « Défense », avec une hausse de 5 %, soit 1,7 milliard d’euros, le projet de loi de finances pour 2019 poursuit la mise en œuvre de la politique courageuse et volontariste du président de la République de réparer nos armées, déjà engagée en 2018.

Les crédits de cette mission permettent également de commencer à réaliser les objectifs fixés dans la loi de programmation militaire 2019-2025 récemment votée, et qui permettent de renforcer considérablement les moyens de nos armées, pour que la France puisse s’adapter et consolider son positionnement dans un environnement stratégique mondial durablement marqué par l’incertitude et l’instabilité.

Le PLF pour 2019 engage donc résolument nos armées vers la réalisation de l’ambition 2030, articulée autour d’un modèle d’armée complet, c’est-à-dire autonome vis‑à‑vis de nos partenaires, et équilibré, c’est-à-dire soutenable dans la durée.

Dans le contexte d’un environnement globalisé où les contestations de l’ordre international et du multilatéralisme vont croissantes, où la prolifération des armements, on l’a entendu, va de pair avec un retour de la compétition militaire, où la menace terroriste se pérennise, et où la nécessité d’organiser une politique de défense européenne renforcée apparaît essentielle, le budget 2019 permet une remontée en puissance des moyens de nos armées, ainsi que de toutes nos forces de sécurité intérieure, avec un total des crédits à hauteur de 1,82 % du PIB et renforce ainsi leur capacité à protéger la population et accomplir leur mission sans risque démesuré.

Avec notamment 758 millions d’euros dédiés aux études amont, dissuasion comprise, soit une hausse de 6 % sur l’année, dans la ligne de l’objectif fixé par la LPM, le budget 2019 marque la transformation profonde du ministère des Armées engagé dans la recherche et la modernisation technologique.

Ce budget pour 2019 est manifestement porteur de l’autonomie stratégique de la France, que d’aucuns dans l’opposition déploraient comme absente lors de l’exercice précédent. Pour preuve, les crédits dédiés au renforcement des moyens de renseignement sont en hausse avec, par exemple, une augmentation de 13 % pour la DGSE et la DRSD.

L’emploi des forces est également soutenu par le budget 2019 qui vient réparer les défaillances passées par un renouvellement des équipements et par l’amélioration des conditions de travail et de vie des militaires. Comme nous l’avons vu, la LPM à hauteur d’homme impactera dès sa première année la vie de nos soldats.

S’agissant de l’indispensable remise à niveau des armées, je citerai, par exemple, la livraison de 500 véhicules légers tactiques polyvalents non protégés qui accroîtront la mobilité tactique, celle du quatrième bâtiment multi-missions et celle des derniers bâtiments de soutien et d’assistance hauturiers, le programme dit MILAD qui permettra de réduire la vulnérabilité aux mini-drones, ou encore le lancement du programme FLOTLOG de remplacement des navires ravitailleurs, et sans oublier plus de 820 millions d’euros consacrés au maintien en condition et à la réhabilitation des infrastructures de tout type.

Sur les équipements militaires, je veux saluer l’absence d’annulation de programmes en cours et qui inscrit donc le budget 2019 dans les engagements pris par la LPM

Pour terminer sur un propos général, je veux réaffirmer, avec la force et la responsabilité qui caractérisent notre majorité, que ce projet de loi de finances pour 2019, et en particulier pour la mission « Défense » qui nous occupe principalement, tranche par sa sincérité budgétaire en comparaison des exercices passés. Il prévoit, en effet, des dépenses intégralement financées sur les crédits budgétaires, avec par ailleurs une provision de 850 millions d’euros dédiée aux OPEX et une autre de 100 millions d’euros aux missions intérieures.

La sincérité budgétaire est un engagement fort de notre majorité qui soutient le président de la République, parce que nous sommes conscients et responsables du fait de ne pas faire supporter aux générations futures le prix de promesses certes attrayantes mais irréalistes. Je vous remercie.

M. Patrice Verchère. Avec ce budget 2019 nous avons à discuter de la première année de la mise en œuvre de la LPM votée au printemps dernier. Les annonces budgétaires semblent être en conformité avec la LPM votée puisque nous pouvons constater que le budget est en augmentation. Cette hausse pour la deuxième année consécutive ne doit pas cependant faire oublier que la première mesure en matière de défense du tout nouveau président de la République avait été d’amputer le budget 2017 de 850 millions d’euros. Une fois de plus, c’est le programme 146 qui avait le plus sollicité. Il est à noter, et c’est regrettable, l’absence de publication à ce jour de l’annuaire statistique de la défense 2018 qui faciliterait pourtant la vision globale au regard du budget de la Nation. En effet, cette augmentation de votre budget ne doit pas occulter le fait que la part des dépenses de la défense dans le budget de l’État a reculé de 0,1 % en 2017 pour s’établir à 1,4 % du PIB, pour la seule mission « Défense », hors pensions et anciens combattants, donc loin des 1,7 % annoncés par le Gouvernement. La question du périmètre des dépenses à prendre en considération se pose donc une fois de plus. Mes chers collègues, vous pourrez reconnaître que cette distorsion entre les chiffres, pourtant tous publiés par le ministère des Armées, n’aide pas à la lisibilité du budget et entretient le doute sur l’effort réel accordé aux armées, dont la trajectoire affichée par le Gouvernement est d’atteindre 2 % du PIB en 2025, soit environ 50 milliards d’euros, hors pensions et à périmètre constant.

La fin annoncée et demandée dès 2013 par le groupe Les Républicains des déflations d’effectifs dans les armées se concrétise cette année par la création de 466 postes supplémentaires pour les armées. La LPM 2014-2019 votée fin 2013 prévoyait sur la période une réduction nette de 33 675 équivalents temps plein. Au final, et malgré ses annonces, le ministère de la Défense, a perdu sur la période près de 500 postes.

Venons-en au surcoût des OPEX. Véritable serpent de mer du budget de la défense depuis des années, il devrait dépasser le milliard d’euros en 2018 pour atteindre un total de 1,5 milliard d’euros, soit 1,3 milliard d’euros pour les OPEX et 200 millions pour les OPINT, selon le chef d’état-major de l’armée de terre. La provision initiale dans le budget 2019 a été fixée à 850 millions d’euros, contre 650 millions d’euros en 2018, déjà en hausse par rapport à l’année précédente. La tradition veut que le surcoût par rapport au prévisionnel adopté relève d’un financement interministériel, dont 20 % sont d’ailleurs supportés par le ministère de la Défense. Une fois de plus, les députés Les Républicains demandent que le ministère de la Défense ne participe pas à cette réserve de précaution en vue de financer le surcoût des OPEX tant il nous paraît évident que le ministère de la Défense ne doit pas payer deux fois.

Mes chers collègues, au surcoût des OPEX s’ajoute désormais le coût des opérations intérieures. Celles-ci bénéficiaient dans le budget 2018 de crédits de 100 millions d’euros dans le programme 212, soit une hausse de 59 millions d’euros. Cette somme du titre 2 est inscrite dans la LPM, portant en réalité les sommes consacrées au surcoût pour les OPEX et des OPINT à 950 millions d’euros.

Les députés du groupe Les Républicains restent inquiets quant à un éventuel financement par le ministère de la Défense du service national universel (SNU), ce qui serait contraire à l’article 3 de la LPM 2019-2025. Nous constatons en effet que le SNU n’est mentionné dans aucun document budgétaire alors qu’une expérimentation, réduite certes, est prévue dès 2019. Nous craignons que l’augmentation de 9 millions d’euros inscrite au titre 2 du programme 212 liée à l’augmentation du personnel travaillant à la Journée défense et citoyenneté ne soit un financement déguisé du SNU. Nous y reviendrons plus longuement en séance.

En ce qui concerne le budget des anciens combattants, nous regrettons que le budget 2019 soit en baisse de 5,13 %. Nous regrettons au nom de la reconnaissance de la Nation en faveur du monde combattant que la spirale de la baisse enclenchée en 2013 se poursuive après une baisse de 3,2 % en 2018. Malgré cette baisse du budget et grâce à la diminution naturelle des effectifs, le Gouvernement peut cependant annoncer quelques mesures en faveur des anciens combattants et de leurs ayants-droit, comme la mise en place d’un mécanisme de solidarité au profit des enfants de harkis ou l’attribution de la carte du combattant aux militaires déployés en Algérie après le 2 juillet 1962 et jusqu’au 1er juillet 1964. Les députés Les Républicains se réjouissent de ces annonces mais déplorent que, pour des raisons purement politiciennes, le Gouvernement ait fait rejeter par sa majorité le 5 avril dernier la proposition de loi de notre collègue Gilles Lurton portant sur l’attribution de la carte du combattant aux militaires déployés en Algérie après le 2 juillet 1962 et jusqu’au 1er juillet 1964.

Nous regrettons que ce budget des anciens combattants renoue avec des habitudes de la précédente majorité et rompe de nouveau avec la dynamique enclenchée il y a dix ans sous l’ancienne majorité UMP/LR qui avait permis l’augmentation de 30 % de la retraite du combattant, entre 2007 et 2012, son montant étant ainsi passé de 488 euros à 609 euros. Le groupe Les Républicains poursuivra donc cette logique et demandera à l’occasion du budget 2019 la poursuite de l’augmentation de la retraite du combattant. Il s’agit pour nous de rappeler notre attachement au monde combattant et de faire en sorte que cette augmentation soit régulière et ne dépende pas des aléas électoraux.

Plus généralement les députés LR s’associent aux associations d’anciens combattants qui font part de leurs inquiétudes quant à l’avenir de leur budget et sa refonte dans certains dispositifs existants.

Le groupe Les Républicains regrette également que dans ce nouveau monde aseptisé, Emmanuel Macron ait décidé que la commémoration annuelle du 11 novembre se fera sans militaires ou presque. Il est à noter que ce choix diplomatique n’a pas été effectué par les Britanniques et les Américains. Il faut aussi préciser que, depuis le 11 novembre 2011, la France ne commémore plus seulement l’armistice de 1918 mais aussi tous les soldats tombés en opérations extérieures.

Pour conclure, le groupe Les Républicains, compte tenu des observations exposées, s’abstiendra sur le budget que vous nous présentez. Nous formulons aujourd’hui une abstention vigilante en commission. Vigilante, car nous avons été échaudés dans le passé par des annonces non concrétisées budgétairement. En effet, le chef d’état-major des armées a récemment rappelé à quel point nos armées étaient, je cite, éreintées, sous-équipées, sous‑dotées, sous-entraînées, épuisées par leurs multiples engagements qui dépassent largement leur contrat opérationnel. Ceci démontre à quel point les députés LR, depuis 2014, ont eu raison à chaque audition dès l’engagement de nos armées dans le cadre de l’opération Serval d’alerter l’exécutif de l’inadéquation entre la LPM 2014-2019, même réactualisée, et l’action de nos forces. Dois-je rappeler les commentaires alors dithyrambiques de certains affirmant, malgré les évidences, en audition et à la presse que la LPM de M. Le Drian était totalement en adéquation avec les missions demandées. Nous sommes aujourd’hui dubitatifs et vigilants, certains députés appartenant à la majorité précédente étant toujours dans la majorité, bien qu’ayant changé de parti. Notre abstention est donc vigilante au sein de cette commission.

M. Jean-Pierre Cubertafon. Dans la continuité de certains des exposés précédents je souhaitais rappeler le contexte qui nous mène à l’étude de ce budget défense et anciens combattants. Nous le savons, le panorama des menaces mondiales, établi tant par la Revue stratégique que par la LPM, est aujourd’hui marqué par une augmentation significative des crises et de l’instabilité internationale.

De ce constat, la LPM a traduit ces nouveaux enjeux mondiaux, humains et techniques et pose ainsi les bases d’une remontée en puissance des armées françaises en faisant porter l’effort sur leurs femmes et leurs hommes autant que sur leurs équipements.

En ce sens, si ce budget fait un grand pas vers le renforcement des forces françaises comme « seconde armée du monde libre », la budgétisation appuie un projet d’une rare sincérité et fidèle, dès la première année, à ce travail de planification budgétaire que nous appelons loi de programmation militaire.

La ministre des Armées déclarait devant la représentation nationale le 20 mars dernier « que le temps du sacrifice était révolu, et que le renouveau de nos armées commençait ».

Alors que nous nous apprêtons à soutenir le vote des provisions annuelles pour ce budget à hauteur de cette ambition, je sais que le Gouvernement sera, au même titre que la majorité parlementaire, très attentif à l’exécution budgétaire de cette LPM « an un ».

Nous soulignons le fait qu’il n’y a de richesse ni de force que d’hommes, que les conditions de vie du soldat dans sa vie quotidienne sont la condition sine qua non de sa fidélisation, de son moral et de l’expression harmonieuse de sa charge militaire parfois plus, peut-être, que son équipement.

Ainsi sommes-nous dans la pleine espérance quant à la réalisation du plan Famille, qui bénéficiera de 57 millions d’euros supplémentaires en 2019.

Le budget et les mesures pour cette année, relatives à la reconnaissance et à la réparation au monde ancien combattant, rappellent une autre facette de cette exécution de LPM à « hauteur d’homme » : le soutien et la reconnaissance de la condition du soldat‑citoyen dans la société tout au long de la vie, la mémoire et la reconnaissance de nos anciens combattants, avec la carte 62-64, et le rôle renforcé des familles auprès de leurs blessés.

Au-delà des trois missions qui nous sont soumises, nous rappelons que cet esprit « à hauteur d’homme » s’affirmera dans la prise en compte de la spécificité du métier de militaire dans le cadre de la prochaine réforme des retraites. La prise en compte des spécificités de cette retraite est aussi un levier important quant à la fidélisation de nos vétérans.

C’est donc dans cet esprit de dialogue – constant, apaisé et constructif – que nous renouvelons pleinement notre confiance à ce projet collectif au service d’une ambition commune; celle du « succès des armes de la France ». Je vous remercie.

Monsieur Joaquim Pueyo. Monsieur le président, chers collègues, le temps qui nous est imparti étant limité, je ne reviendrai pas sur les grands équilibres et orientations des Missions « Défense » et « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ». Je salue l’augmentation du budget de la mission « Défense », conforme aux orientations votées dans la loi de programmation militaire. Je souhaite revenir uniquement sur quelques points qui me paraissent importants.

Tout d’abord, je salue les mesures prises pour améliorer les équipements des militaires, qu’il s’agisse des 25 000 gilets pare-balles ou des 8 000 armes individuelles futures. Les 57 millions du plan Famille pour 2019 sont également à souligner, car ils apportent des améliorations concrètes aux militaires et à leurs familles. Comme le rappelle le haut comité d’évaluation de la condition militaire dans son 12e rapport, l’accompagnement à la mobilité des conjoints est essentiel dans la démarche de fidélisation ; ces efforts devront être poursuivis dans les années à venir.

Je souhaite tout de même mettre en lumière la question de l’immobilier. Malgré l’effort de 420 millions d’euros en faveur du maintien et du soutien des sites, nous devrons absolument améliorer les hébergements. Cela implique d’accélérer la mise en place des nouvelles mesures prévues en termes de rénovation et de construction d’immobilier moderne. Toutes ces mesures participent aussi de la fidélisation de nos militaires, ce qui m’amène au second point que j’aborderai.

La question de la fidélisation reste centrale. J’ai posé une question sur ce sujet, je n’y reviendrai donc pas, mais c’est une question importante si l’on veut que notre armée soit attractive. Au-delà du plan d’accompagnement des familles et d’amélioration des conditions de vie des militaires, nous devons également renforcer l’accompagnement des hommes et des femmes dont l’engagement prend fin. Selon les chiffres de Défense mobilité, le dispositif d’accompagnement ne « capte » que 67 % des militaires quittant nos armées, et seulement 60% des accompagnés retrouvent un emploi. Bien sûr, ces chiffres sont en augmentation, mais nous devons investir massivement pour toucher davantage de personnels et mieux les accompagner. Leurs profils sont en effet très recherchés et valorisés, notamment dans le secteur privé. Le groupe Socialistes et apparentés proposera un amendement dans ce sens.

Les équipements constituent un autre point d’attention. L’année 2019 verra l’arrivée de plusieurs matériels importants ; je ne vais pas rappeler les livraisons qui seront faites. Mais des inquiétudes demeurent au sujet des patrouilleurs et, malheureusement, notre pays ne pourra pas remplir 100 % du contrat opérationnel en 2019 et en 2020 dans ce domaine. Malgré des efforts en termes d’augmentation des cibles de commandes et des budgets consacrés au maintien en condition opérationnelle, nous devons impérativement poursuivre une politique ambitieuse en matière d’équipement. Les taux de disponibilité des matériels, notamment aériens, sont encore beaucoup trop bas dans certains cas. Cela a une incidence sur les journées de préparation opérationnelle, dont le nombre est de nouveau en hausse depuis 2016, mais reste parfois encore éloigné des cibles réaffirmées dans la LPM 2019-2025.

Un dernier point d’attention concerne la répartition des créations de postes. Cette année, ce sont 450 équivalents temps plein qui seront créés ; ils bénéficieront notamment au renseignement. Cependant, il existe de réels besoins dans d’autres secteurs, notamment dans le soutien aérien. Le groupe Socialistes et apparentés souhaiterait d’ailleurs que des précisions puissent être apportées sur la répartition des futurs équivalents temps plein.

Pour finir, je souhaite aborder le budget de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ». L’ensemble des gouvernements a diminué les crédits alloués à cette mission, partant du principe que le nombre de bénéficiaires diminuait mécaniquement. Cela peut s’entendre pour le programme 169 « Reconnaissance et réparation », mais cette logique est difficilement applicable au programme 167 « Liens entre la Nation et son armée ». Alors que nous souhaitons tous voir s’accroitre le lien entre l’armée et la Nation, notamment avec les jeunes, que nous insistons sur les valeurs que nos armées portent, nous pourrions envisager de changer de paradigme et de conserver un budget constant, ou du moins d’en limiter la baisse. C’est la proposition que j’avais faite lors de l’audition de Madame la secrétaire d’État. Il me semble particulièrement important de préserver et même de développer les actions favorisant une meilleure connaissance de nos armées par nos jeunes. Cela passe par l’enseignement de défense ou par l’échange avec les associations d’anciens combattants, qui ont exprimé leur volonté de faire davantage. La participation aux cérémonies doit aussi être développée, ainsi que le tourisme de mémoire. Les efforts faits lors de commémorations importantes ne doivent pas se borner à ce laps de temps particulier.

Enfin, je souhaite également que la coopération européenne se renforce et que la France soit moteur dans ce qu’on appelle l’Europe de la défense.

Cette discussion va continuer dans quelques instants avec les amendements. Une fois ces points de vigilance rappelés et les orientations que nous souhaiterions voir se développer abordées, à titre personnel, je proposerai au groupe de voter ce budget, malgré les réserves que j’ai évoquées.

M. Alexis Corbière. Mes chers collègues, nous assistons, nous le savons, à une recrudescence des tensions sur la scène internationale. Je voudrais évoquer un point, qui ne va pas passer inaperçu, pour illustrer mon propos. Ce jeudi 25 octobre, l’OTAN lancera les prémices des plus grandes manœuvres militaires jamais engagées depuis la fin de la Guerre Froide. Cet exercice, baptisé Trident Juncture 18 – je ne le dirai pas, volontairement, avec un accent anglais –, mobilisera près de 50 000 soldats en Norvège. L’amiral américain James Foggo, commandant en chef de l’exercice, assure que cette opération ne vise aucun pays en particulier. C’est pourtant la sécurité internationale elle-même qui est mise en péril. Cet exercice apparaît, selon nous, comme le franchissement d’une nouvelle étape dans la construction d’une Europe de la défense que je qualifierai d’« atlantiste ». La France participe à la course à la guerre en consacrant une partie de son budget à l’OTAN, contribuant par son financement à ces velléités guerrières.

Outre cet aspect budgétaire, c’est l’absence de véritable doctrine qui rend illisibles et incohérentes, selon nous, toutes les actions et mesures annoncées comme, soi-disant, de « rupture ». Ce budget s’inscrit, en fait, dans la continuité de ses prédécesseurs. C’est une forme d’alignement sur la politique extérieure des États-Unis. L’objectif des 2 % du PIB consacrés au budget de la défense d’ici 2024 en est la meilleure preuve : il est sous l’impulsion de la demande des États-Unis d’Amérique.

Les sommes colossales engagées justifieraient, pourtant, la définition d’une stratégie et d’une vision claire pour notre politique de défense. Nous considérons que ce n’est pas le cas. En lieu et place de sauvegarder son indépendance militaire, la France poursuit une infinie course des armements derrière les États-Unis. Nous assistons à une escalade militaire, une escalade dans la guerre spatiale, une escalade dans le théâtre des opérations extérieures. Mais quelles sont les finalités de telles opérations ? Quel est le sous-bassement stratégique de ces multiples escalades ? Ce budget s’apparente à l’action, certes d’un tacticien, mais non pas d’un stratège. Je le répète une nouvelle fois, Bastien Lachaud l’a déjà dit, c’est l’absence d’une vision générale qui ne nous permet pas de construire une ligne politique propre et indépendante.

Alors que les moyens alloués à cet « atlantisme » – vous me pardonnerez l’expression – effréné ne manquent pas, la défense de notre souveraineté se retrouve marginalisée. Ces moyens pourraient notamment servir à réaffirmer notre souveraineté maritime, aujourd’hui menacée en raison d’un manque de patrouilleurs destinés à assurer notre défense en mer. Les six nouveaux patrouilleurs commandés par la marine en 2019 ne suffiront pas à remplir cette mission. L’amiral Prazuck, chef d’état-major de la marine, l’a déploré en 2017 : nous n’avons plus que quatre patrouilleurs, au lieu huit, disait-il, pour assurer la sécurité du deuxième espace maritime mondial.

Ces moyens pourraient servir aussi pour nos militaires engagés en opération extérieure. J’ai pu en rencontrer, avec certains collègues, au Mali et au Niger, sur la base de Niamey. Leurs conditions de vie pourraient être améliorées. Le manque de moyens matériels adéquats et récents accentue les difficultés inhérentes à toute opération extérieure. Nous pourrions par exemple – pardon si c’est un détail, mais je le répète parce que des soldats me l’ont demandé – au moins permettre qu’ils aient une connexion Wi-Fi qui ne soit plus limitée à 2Go. Cette limitation complique bien souvent les relations qu’ils ont avec leurs familles.

L’armée de l’air, elle aussi, gagnerait à disposer de moyens pour accomplir ses missions. Les taux de disponibilité des aéronefs militaires sont alarmants : un avion sur deux est cloué au sol, deux hélicoptères sur trois sont en maintenance, et j’en passe.

Enfin, nos anciens combattants ne sont pas épargnés par ces difficultés. Leurs avancées sociales sont progressivement remises en cause, sacrifiées au profit, souvent, de considérations économiques. Le plafond de l’allocation différentielle du conjoint survivant n’est toujours pas porté au niveau du seul seuil de pauvreté.

Outre les aspects financiers, l’engagement pour la transmission de la mémoire et de l’histoire ne doit pas être négligé. Notamment, la reconnaissance des harkis doit, selon nous, passer par un important travail de mémoire entre historiens algériens et français, pour que toute leur dignité soit rendue à ces supplétifs de notre armée. De la même façon, pourquoi ne pas mieux retracer l’histoire des fusillés pour l’exemple, qui étaient condamnés par des conseils de guerre expéditifs, afin que cette mémoire soit mieux partagée ? Pourquoi ne pas revenir sur la mobilisation des femmes durant tout ce conflit ? Bref, il y a là tout un travail mémoriel qui pourrait être engagé.

Je termine sur ce que nous montrent de récents travaux d’historiens. De nombreux étrangers se sont engagés dans l’armée française, notamment entre 1914 et 1918. Ont participé à cet effort national – si je puis dire ainsi – près de dix nationalités. Ces faits étaient assez peu connus. Un travail de mémoire pourrait être effectué, pour qu’il n’y ait pas seulement une commémoration d’ordre militaire, mais bien une claire restitution de ces évènements permettant une meilleure compréhension de la Nation, des sacrifices qui ont été faits et de la place des uns et des autres.

Mme Manuela Kéclard-Mondésir. Ce budget 2019 s’inscrit dans le contexte de la LPM 2019-2025. Il s’agit même du premier de ce cycle pluriannuel. Ce budget se situe à un niveau de 35,8 milliards d’euros, en hausse de 1,7 milliard d’euros. Il permet ainsi de porter progressivement l’effort de défense à 2 % du PIB.

Ce pourrait donc être une bonne chose, si son exécution n’était pas une source d’inquiétude.  

Par ailleurs, malgré les hausses programmées, l’enveloppe prévue paraît encore insuffisante au vu des besoins des armées précisément identifiés dans cette loi de programmation. Je m’interroge notamment sur le financement des surcoûts des OPEX. Ce sont 850 millions d’euros qui ont été budgétés en 2019, contre 650 millions d’euros en 2018 et 450 millions d’euros en 2017. C’est bien, pourrait-on dire, mais les besoins annoncés sont de plus d’un milliard d’euros !

Si la plupart des parlementaires du groupe GDR auquel j’appartiens reconnaissent des avancées en matière d’équipement et de ressources humaines, ils restent cependant très critiques vis-à-vis de la promotion de la dissuasion nucléaire, qui reste une priorité du Gouvernement avec un effort de modernisation à hauteur de 400 millions d’euros, soit une hausse de 8 % !

Nous sommes également très critiques du haut degré d’allégeance du Gouvernement à l’égard de l’OTAN, mais également de la mise en œuvre de la politique européenne de défense. En effet, la France supporte toujours à elle seule le poids de ses engagements sur de nombreux théâtres d’opérations, y compris dans le domaine logistique, où elle sollicite pourtant un soutien européen.

Pour ces raisons, le groupe GDR votera contre ce budget.

À titre personnel cependant, puisque notre groupe parlementaire est un groupe ouvert où domine la liberté de pensée et de vote, je voterai ce budget tout en adhérant à certaines critiques formulées par mes collègues.

Ce budget comporte en effet des éléments qui recueillent notre assentiment. Je constate notamment que les dépenses de personnel au titre des missions intérieures (MISSINT) sont portées à 100 millions d’euros. Ce budget renforce également les équipements d’accompagnement et de protection des soldats grâce à une enveloppe supplémentaire de 150 millions d’euros par rapport à 2018. Il modernise les infrastructures, et surtout, il met en œuvre le plan Famille, élément très important à nos yeux, en y consacrant 57 millions d’euros en 2019.

Par ailleurs, 400 millions d’euros supplémentaires sont prévus pour le MCO des matériels, notamment de la composante aéronautique.

Je suis particulièrement sensible aux efforts faits pour la Caraïbe. En effet, nous avions traditionnellement un bâtiment de transport léger (BATRAL) prépositionné aux Antilles, avant que celui-ci ne soit déporté vers la Méditerranée. Ce bâtiment est revenu dans la zone Antilles du fait des ouragans Irma et Maria. Aujourd’hui, je salue l’engagement de la ministre de redoter l’Atlantique et la Caraïbe de six navires en 2020 et en 2022.

Enfin, je note que le budget 2019 prévoit 300 millions d’euros pour le renouvellement et la modernisation des équipements conventionnels.

Je finirai par évoquer le renforcement ciblé des moyens dans certains domaines comme le renseignement, la cyberdéfense, l’intelligence artificielle ou le traitement des données.

Pour ces raisons, ce budget aura mon soutien personnel en dépit du positionnement de mon groupe, le groupe GDR.

M. Yannick Favennec Becot. Le budget de la défense traduit – et c’est bien la moindre des choses –, les orientations que nous avons votées lors de la LPM 2019 - 2015. En effet, pour répondre à la menace terroriste tout en garantissant notre autonomie stratégique, une augmentation très significative des moyens était nécessaire. Cet effort budgétaire important devrait permettre d’amorcer les bases d’une remontée en puissance de nos armées.

Ce budget poursuit bien la montée en charge de nos armées, amorcée l’année dernière, avec une hausse de 1,7 milliard d’euros. Cette hausse témoigne de l’engagement déterminé à renforcer les moyens de nos armées dans un contexte international instable et dangereux.

S’agissant en particulier de l’amélioration des conditions de vie et d’engagement de la communauté de défense, un effort particulier est prévu en faveur de la maintenance des infrastructures et du soutien, par la livraison d’équipements essentiels au quotidien du soldat ainsi que par la poursuite du plan « Famille » décidé à l’été 2017. Je tiens ici à saluer cet effort et à vous faire part de la satisfaction de mon groupe.

Permettez-moi de m’interroger malgré tout sur le financement des surcoûts de 600 millions d’euros des OPEX en 2018. En effet, il ne faudrait pas que les OPEX de cette année empiètent sur les augmentations prévues au titre de la LPM.

D’une manière générale, les orientations de ce budget ne pourront être effectives qu’à la condition qu’elles puissent être exécutées. Nous jugerons donc sur les faits et resterons vigilants.

La mission « Anciens combattants, mémoire et lien avec la Nation » joue un rôle essentiel en ce qu’elle incarne l’hommage que la Nation rend à nos armées pour l’engagement et les sacrifices de nos soldats au service de la sécurité de notre pays. Ce budget accuse, par rapport à l’année dernière, une légère baisse à périmètre constant, ce qui s’explique par la diminution naturelle des ayants droits. Je tiens néanmoins, au nom de mon groupe, à vous faire part là aussi de notre satisfaction, d’une part en ce qui concerne les mesures prises à l’égard des anciens militaires qui justifieront de quatre mois de présence en Afrique du Nord entre le 2 juillet 1962 et le 1er juillet 1964 et, d’autre part, pour le plan d’action en faveur des harkis et de leurs familles.

S’agissant plus particulièrement de la carte du combattant, je m’interroge tout de même sur les modalités pratiques de son attribution qui semblent préoccuper les associations, malgré les propos qui se veulent rassurants de la part de notre rapporteur ce matin.

Pour ce qui est de la retraite du combattant, nous regrettons, même si nous sommes bien conscients des contraintes budgétaires, qu’aucune augmentation ne soit prévue cette année. Cette augmentation aurait pourtant été plus que légitime et son absence s’inscrit malheureusement dans la continuité de la législature précédente.

Enfin, nous regrettons également qu’il ne soit toujours pas prévu d’indemniser les pupilles de la Nation et orphelins de guerre en leur accordant le bénéfice des dispositifs de réparation adoptés en 2000 et en 2004.

Ces remarques étant posées, notre groupe parlementaire, dans un souci de consensus politique au nom de l’intérêt de nos armées et des difficiles missions que nous leur demandons d’accomplir pour la défense de notre sécurité et de notre liberté, votera ce budget tout en restant vigilant sur un certain nombre de points.

M. le président. Merci à toutes et à tous pour ces différentes interventions et explications de vote. Il nous revient à présent de procéder à l’examen des amendements et au vote sur les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ». La commission est saisie de trois amendements.

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Article 39 : État B – Mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation »

La commission examine l’amendement II-DN1 de M. de la Verpillière.

M. Charles de la Verpillière. Par cet amendement, le groupe Les Républicains propose d’augmenter de deux points le nombre de points d’indice permettant le calcul de la retraite du combattant. Il s’agit bien d’augmenter le nombre de points et non la valeur du point d’indice en tant que telle. J’avais soulevé cette question lors de l’audition de Mme Geneviève Darrieussecq. Elle m’avait répondu sur la valeur du point, probablement parce que je m’étais alors mal exprimé. Nous proposons bien donc d’augmenter le nombre de points car nous estimons qu’il serait préférable de « tirer profit », et je mesure à quel point cette expression est inappropriée, de l’attrition malheureuse mais naturelle du monde combattant pour revaloriser la retraite de ceux qui sont toujours vivants. C’est cette méthode que nous avions appliquée sous le quinquennat du président Sarkozy, de même que durant le second mandat du président Chirac, en procédant très régulièrement à des hausses du nombre de points de la retraite du combattant. Nous proposons donc de le faire de nouveau, afin de reprendre une évolution que je qualifierais de vertueuse.

M. Philippe Michel-Kleisbauer, rapporteur pour avis. Cet amendement fait écho aux propos de Patrice Verchère sur la retraite du combattant dans la discussion générale. J’aimerais vous rappeler que bien que vous ayez fait des choses par le passé, vous ne disposez pas du monopole de la revalorisation de la retraite du combattant. Sous la précédente législature, le gouvernement de l’époque avait décidé d’augmenter de quatre points le montant de cette retraite, et que l’actuelle majorité a confirmé cette évolution l’an dernier en loi de finances initiale pour 2018. Mme Geneviève Darrieussecq elle-même a privilégié l’extension du bénéfice de la carte du combattant, faisant ainsi bénéficier 50 000 nouvelles personnes de la retraite du combattant. Moi-même, j’avais alerté l’attention de tout le monde, en juin dernier, sur la lecture presque menaçante que la Cour des comptes et Bercy faisaient de la retraite du combattant. Nous aussi, nous nous préoccupons de la retraite du combattant.

Enfin, je noterai qu’il est gênant de vous voir compenser l’augmentation que vous appelez de vos vœux par la suppression quasi intégrale des crédits ouverts – 84 % – pour le financement de la journée défense et citoyenneté. Il est vrai qu’en la matière, le groupe Les Républicains exerce vraiment un monopole pour faire disparaître la JDC. Or, comme je l’ai déjà indiqué, l’audition du général Menaouine que j’ai conduite hier m’a montré combien la JDC monte en puissance et présente un intérêt qui dépasse largement la mission budgétaire qui nous occupe aujourd’hui.

M. Fabien Gouttefarde. À l’instar du rapporteur, le groupe auquel j’appartiens ne votera pas en faveur de cet amendement. Pour mémoire, la valeur du point PMI est indexée sur l’évolution de la grille indiciaire des fonctionnaires et, dès lors, la mise en place du PPCR – parcours professionnels, carrières et rémunérations – va avoir un effet direct sur la grille et, ce faisant, le niveau du point PMI. De fait, une telle évolution va dans le sens d’une revalorisation du montant de la retraite du combattant que vous appelez de vos vœux. Enfin, je souscris tout à fait aux propos du rapporteur sur les conséquences de votre amendement sur la JDC.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement II-DN1.

La commission examine l’amendement II-DN7 de M. Pueyo.

M. Joaquim Pueyo. Cet amendement a pour but de développer les actions pédagogiques et soutenir les projets mémoriels.

Dans le cadre des commémorations de la Première Guerre mondiale, un effort avait été consenti, qui n’est malheureusement pas pérennisé. Le soutien aux projets mémoriels par exemple, qui recouvre notamment le financement d’actions d’enseignement de défense, accuse une perte de 780 000 euros. Le budget consacré aux actions pédagogiques reste également inchangé à hauteur de 350 000 euros alors même que les associations d’anciens combattants nous ont rappelé l’importance de développer les actions auprès de nos jeunes alors même que les associations du monde combattant que nous avons rencontrées ont confirmé l’importance de développer des actions en direction de la jeunesse.

M. Philippe Michel-Kleisbauer, rapporteur pour avis. Cher collègue, je comprends tout à fait votre préoccupation. En tant que rapporteur, il m’a été donné l’opportunité de me rendre sur nombre de hauts lieux de la mémoire nationale, mais aussi d’aller à la rencontre des équipes dirigeantes des musées administrés par le ministère des Armées. À chaque fois, j’ai pu mesurer l’intérêt de la jeunesse pour la mémoire, celui-ci devant être stimulé pour perdurer. Aussi, chacun peut comprendre votre proposition.

Toutefois, je vous proposerai dans l’immédiat de le retirer, afin de tenir de nouveau ce débat en séance publique, en présence de la secrétaire d’État. Je ne voudrais pas que la diminution des crédits prévus pour l’administration de la dette viagère contraigne le versement de la retraite du combattant ou des pensions militaires d’invalidité. Dès lors, nous aurions le temps d’en débattre avec la secrétaire d’État. Je propose donc le retrait, à défaut j’émettrai un avis défavorable.

M. Joaquim Pueyo. J’apprécie fortement la réponse du rapporteur mais je maintiens mon amendement.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement II-DN7.

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M. le président. Nous allons maintenant procéder au vote sur les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ».

Suivant les conclusions du rapporteur pour avis, la commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ».

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Après l’article 73.

La commission examine l’amendement II-DN16 de M. Pueyo.

M. Joaquim Pueyo. Cet amendement propose de diminuer la limite d’âge afin que les veuves d’anciens combattants puissent bénéficier d’une demi-part fiscale supplémentaire. 

Une demi-part fiscale supplémentaire est octroyée aux anciens combattants depuis le projet de loi de finances pour 2016. Depuis le projet de loi de finances pour 2017, l’âge minimum ouvrant droit à cette demi-part a été ramené de 75 à 74 ans. Les veuves d’anciens combattants peuvent également bénéficier de cette demi-part, à condition d’être âgées de plus de 74 ans et que leur conjoint soit décédé après son 74e anniversaire.

Il s’agit donc d’abaisser cet âge de 74 à 70 ans.

M. Philippe Michel-Kleisbauer. Entendons-nous bien, vous proposez d’abaisser à 70 ans, contre 74 ans actuellement, l’âge permettant aux anciens combattants de bénéficier de la majoration d’une demi-part du quotient familial. Par ricochet, une telle mesure bénéficiera aux conjoints survivant dès lors que "l’ayant-cause" a pu bénéficier de cette mesure.

Il m’est impossible d’évaluer le montant de la perte de recettes, pour l’État, d’une telle évolution. En l’état actuel du droit, cette dépense fiscale a néanmoins représenté un coût d’un demi-milliard d’euros – 520 millions d’euros en 2017. Dès lors, j’émettrai un avis défavorable.

M. Fabien Gouttefarde. Pour aller dans le sens du rapporteur pour avis, je rappellerai moi aussi que cette dépense fiscale représente un coût d’environ 520 millions d’euros par an. Ces dernières semaines, à l’occasion de l’examen de la première partie du PLF, M. Gérald Darmanin a rappelé à plusieurs reprises qu’en matière de dépense fiscale, nous étions souvent face à des vases communicants. Par exemple, l’adoption de cette mesure obérerait l’effet de l’extension du bénéfice de la carte du combattant aux militaires déployés entre 1962 et 1964 en Algérie. Pour toutes ces raisons, le groupe auquel j’appartiens ne votera pas cet amendement.

M. Bastien Lachaud. J’avoue être quelque peu étonné par les propos du rapporteur et de M. Gouttefarde. Quand le Gouvernement décide de supprimer l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) ou l’exit tax, nous ne savons pas vraiment non plus combien cela va coûter exactement. Ce que l’on sait en revanche, c’est que les recettes de l’Etat diminueront de manière beaucoup plus importante que si nous adoptions l’amendement de M. Pueyo. Nous le soutiendrons donc.

M. Joaquim Pueyo. Pour mémoire, il s’agit quand même d’une mesure de justice car un certain nombre d’anciens combattants décèdent avant l’âge de 70 ans, ce qui ne permet pas aux veuves de bénéficier de ce dispositif. J’ai bien entendu les propos du rapporteur pour avis mais je ne retirerai pas cet amendement.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement II-DN16.

 

 

 


—  1  —

   annexe :

Liste des personnes auditionnées par le rapporteur pour avis et déplacements

(Par ordre chronologique)

1.   Liste des personnes auditionnées

  Union nationale des combattants (UNC) – M. le général Pierre Saint-Macary (2S), président, et M. Éric Euzen, responsable du service juridique et social ;

  Union française des associations de combattants et victimes de guerre (UFAC) et Fédération nationale des anciens combattants en Algérie, Maroc et Tunisie (FNACA)  M. André Cognard, vice-président de l’UFAC et représentant de la FNACA ;

  Union fédérale des associations françaises d’anciens combattants, victimes de guerre et des jeunesses de l’union fédérale (UF)  M. Dominique Lépine, président ;

  Fédération nationale des déportés, des internés, résistants et patriotes  M. Raymond Lovato, secrétaire général adjoint ;

  Institution nationale des InvalidesM. le médecin général inspecteur Christian Plotton, directeur, et M. le commissaire en chef de 1ère classe Philippe Havil, directeur-adjoint ;

  Office national des anciens combattants et des victimes de guerre Mme Rose-Marie Antoine, directrice générale, et M. le contrôleur général des armées Frédéric Charlet, directeur-adjoint ;

  Le Souvenir français  M. Serge Barcellini, président général ;

  Fédération du mémorial de l’OTAN – M. Willy Breton, président, et Mme Marie-Hélène Lepage, trésorière ;

  Union des blessés de la face et de la tête, « Les Gueules Cassées » (UBFT)  M. le général (2S) Paul Dodane, vice-président, et président du Comité d’entente de grands invalides de guerre 

  Mission du Centenaire de la Première Guerre mondiale  M. Joseph Zimet, directeur général ;

  Direction du patrimoine, de la mémoire et des archives (DPMA) ‑ M. Sylvain Mattiucci, directeur, et Mme Evelyne Piffeteau, sous‑directrice de la mémoire et de l’action éducative ;

  Association nationale des participants aux opérations extérieures (ANOPEX)  M. le colonel (er) Jean Pierre Pakula, président ;

  Union nationale des associations de déportés, internés et familles de disparus (UNADIF)  M. Jean-Marie Muller, président, et Mme Isabelle Charrier, trésorière nationale ;

  Fédération nationale André Maginot (FNAM) – M. l’amiral Henri Lacaille (2S), président, et M. Jacques Sonnet, président de la commission financière ;

  Direction du service national et de la jeunesse – MM. le général de corps d’armée Daniel Menaouine, directeur, Yves Boero, directeur-adjoint, et Mme Suzanne Parrot-Schadeck, cheffe du pôle pilotage et synthèse.

2.   Liste des déplacements

 16 avril 2018 :

 Mémorial de l’OTAN, Fréthun – entretien avec Mme Catherine Fournier, sénatrice du Pas-de-Calais, M. Guy Heddebaux, maire de Fréthun, M. Willy Breton, président de la Fédération du mémorial de l’Otan, M. le colonel (er) Jean-Pierre Pakula, président de l’Association nationale des participants aux opérations extérieures (ANOPEX) – table-ronde en présence de divers membres de la Fédération du mémorial de l’Otan et d’élus locaux ;

 16 avril 2018 :

 Nécropole nationale de Notre-Dame-de-Lorette, Ablain-Saint-Nazaire – entretien avec M. Frédéric Charlet, directeur adjoint de l’Office national des anciens combattants et des victimes de guerre, et M. Frank Beaupérin, chargé d’études, valorisation des hauts-lieux ;

 26 septembre 2018 :

 Musée de l’Armée, Paris – entretien avec M. le général Alexandre d’Andoque de Sériège, directeur ;

 12 octobre 2018 :

 Prison de Montluc, Lyon, et nécropole nationale du Tata sénégalais, Chasselay – entretien avec Mme Aurélie Dessert, directrice adjointe de la prison de Montluc et M. Michel Lestrade, chef de secteur Rhônes‑Alpes-Auvergne-Bourgogne à l’Office national des anciens combattants et des victimes de guerre,

 19 octobre 2018 :

 Musée de l’artillerie, Draguignan – entretien avec M. le lieutenantcolonel Philippe Guyot, conservateur ;

 Musée national de la Marine, Toulon – entretien avec Mme Cristina Baron, administratrice ;

 Musée de la légion étrangère, Aubagne – entretien avec M. le commandant Yann Domenech de Cellès, conservateur du musée.


([1]) Loi n° 2005-270 du 24 mars 2005 portant statut général des militaires, article 1.

([2]) Ce montant tient compte d’un élargissement du périmètre de la mission budgétaire, qui représentent un montant de 5 millions d’euros. 

([3]) Intégration du service militaire volontaire.

([4]) Libellé à compter du PLF 2019 ; auparavant, l’action 1 ne traitait que de la « JDC »

([5]) Décret du 25 juillet 2018 portant nomination d’un directeur à l’administration centrale du ministère des armées- prise d’effet au 31 juillet 2018.

([6]) Présidé par le général Daniel Ménaouine, ce groupe de travail était composé de Mme Juliette Méadel, ancienne secrétaire d’État à l’Aide aux victimes, conseillère référendaire à la Cour des comptes, M. Thierry Tuot, conseiller d’État, M. Kléber Arhoul, préfet, Mme Emmanuelle Pérès, directrice générale adjointe de la plateforme de la filière automobile et mobilités, Mme Marion Chapulut, directrice et fondatrice de CitizenCorps, M. Guy Lavocat, consultant en responsabilité sociale d’entreprise et management social des organisations.

([7]) Depuis la version électronique du présent avis, rapport accessible sur ce lien.

([8]) Depuis la version électronique du présent avis, compte-rendu accessible sur ce lien.

([9])  Loi n° 2015-917 du 28 juillet 2015 actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense.

([10]) Loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense.

([11]) Article 27 de la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté.

([12]) Article 36 de la loi n° 2017-258 du 28 février 2017 relative à la sécurité publique.

([13]) PAP 2018, p.16.

([14]) Comme l’indique le PAP 2018, sur décision du président de la République,  les opérations logistiques du défilé du 14 juillet sont désormais entièrement confiées au ministère des Armées (programme 167) à compter de 2019. En conséquence, le programme 167 bénéficie d’un transfert de 2,4 millions d’euros en AE et CP depuis le programme 175 « Patrimoines » (ministère de la Culture).

([15]) Le coût pour le ministère des Armées de chacune de ces journées figure entre parenthèses.

([16]) Ces films ont présentés au grand public aux Invalides, à l’occasion des journées européennes du patrimoine.

([17]) Respectivement 25 et 14 hectares et 20 058 et 16 000 corps.

([18]) Réponse au questionnaire budgétaire.

([19]) Arrêté du 20 mars 2014 portant définition et fixant la liste des hauts lieux de la mémoire nationale du ministère de la défense

([20]) Hors Algérie, Maroc et Tunisie.

([21]) Le projet annuel de performance mentionne un coût de 1,2 million d’euros tandis que le coût indiqué dans une note adressée à votre rapporteur budgétaire en réponse à son questionnaire budgétaire fait état d’un coût de 1,6 million d’euros hors taxes.

([22]) Selon les informations recueillies par le rapporteur pour avis, le coût en année pleine pourrait atteindre trente millions d’euros.

([23]) Réunion de la commission de la Défense nationale et des forces armées de l’Assemblée nationale du 25 juillet 2018. Compte-rendu accessible, depuis la version électronique du présent avis, sur ce lien.

([24]) Loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la Défense.

([25]) Rapport n° 765 (tome 1) de M. Jean-Jacques Bridey relatif à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense, p. 430.

([26]) L’enveloppe financière totale au profit de l’allocation de reconnaissance est de 19,17 millions d’euros au total, dont 13,67 millions d’euros de crédits budgétaires. Pour l’année 2019, la trésorerie de l’ONACVG sera sollicitée afin de couvrir l’intégralité des besoins.

([27]) À partir de la version électronique du présent avis, rapport accessible sur ce lien.

([28]) Anciennes références L. 274 et L. 290.

([29])  Anciennes références L.272 et L. 286.

([30]) Article R. 3413-1 du code de la défense.