N° 1307

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 12 octobre 2018

AVIS

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LE PROJET DE LOI (n° 1255)
de finances pour 2019

TOME I

ADMINISTRATION GÉNÉRALE ET TERRITORIALE DE L’ÉTAT

ADMINISTRATION TERRITORIALE
CONDUITE ET PILOTAGE DES POLITIQUES DE L’INTÉRIEUR

VIE POLITIQUE, CULTUELLE ET ASSOCIATIVE

PAR M. Olivier MARLEIX

Député

——

 

 

 

 Voir le numéro : 1255-III-3


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

En application de l’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), les réponses au questionnaire budgétaire devaient parvenir au rapporteur pour avis au plus tard le 10 octobre 2018 pour le présent projet de loi de finances. À cette date, 98 % des réponses attendues étaient parvenues à votre rapporteur pour avis.

 

 


— 1 —

SOMMAIRE

___

 Pages

INTRODUCTION............................................ 5

Première partie : les crédits pour 2019 de la mission « administration générale et territoriale de l’État »

I. Le programme « Administration territoriale »

II. Le programme « Conduite et pilotage des politiques de lintérieur »

III. Le programme « Vie politique, cultuelle et associative »

Seconde partie : Le contrôle des comptes de campagne et du financement des partis politiques

I. Les contrôles de la CNCCFP, un système fortement sollicité en année électorale

1. Le contrôle des comptes de campagne des candidats

2. Le contrôle des comptes des partis et groupements politiques

II. Un budget en décalage avec l’activité électorale

1. Une activité électorale soutenue en 2017 et en 2019

2. Des effectifs en inadéquation

3. Des dépenses d’investissement lourdes

III. La nécessaire rénovation du cadre législatif et des pouvoirs de la CNCCFP

1. Des prérogatives nouvelles devraient être reconnues à la CNCCFP

a. La numérisation des comptes de campagne

b. La clarification du financement des campagnes électorales par les partis

c. La capacité de la CNCCFP d’avoir, avec les commissaires aux comptes, accès aux comptes des partis

2. Une réforme plus profonde de la CNCCFP pourrait être envisagée

a. La transformation d’une vérification ex post en un contrôle continu

b. La capacité de la CNCCFP d’effectuer des contrôles sur place pendant la campagne

c. La réécriture du code électoral

examen en commission

Personnes entendues


— 1 —

 

 

 

 

MESDAMES, MESSIEURS,

La mission « Administration générale et territoriale de l’État » (AGTE) regroupe principalement les moyens financiers des préfectures et les crédits de soutien du ministère de l’Intérieur. En 2019, ceux-ci devraient atteindre 2,8 milliards d’euros d’autorisations d’engagement et de crédits de paiement, en hausse de 3 % par rapport à l’exercice précédent (hors fonds de concours).

Cette mission présente un profil atypique : l’essentiel des crédits est alloué aux programmes « Administration territoriale » et « Conduite et pilotage des politiques de l’Intérieur », qui représentent, en crédits de paiement, respectivement 58 % et 35 % de l’ensemble, tandis que le programme « Vie politique, cultuelle et associative » compte pour 7 %.

Après une présentation des crédits prévus pour l’année prochaine, votre rapporteur pour avis a choisi de s’intéresser au contrôle des comptes de campagne et du financement des partis politiques, qui a connu, avec la tenue de trois scrutins nationaux la même année, une intense activité en 2017 qui s’est prolongée en 2018.

Ces derniers mois ont été, pour la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP), ceux de toutes les polémiques : les contrôles opérés sur les comptes de campagne de MM. Emmanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon ont été critiqués, de même que la saisine du Procureur de la République de plusieurs irrégularités constatées dans les dépenses de campagne de ce dernier. La commission nationale, créée en 1990 ([1]), est régulièrement l’objet de propositions d’évolutions en dépit des améliorations intervenues. C’est pourquoi il a paru utile d’y consacrer des développements dans le présent avis.


— 1 —

 

   Première partie : les crédits pour 2019 de la mission « administration générale et territoriale de l’État »

lÉvolution des autorisations dengagement

(en millions deuros)

Programme

Exécution
2017

LFI
2018

PLF
2019

Variation
2019/2018

Administration territoriale

1 725,4

1 695,6

1 656,8

– 2,3 %

Vie politique, cultuelle et associative

381,0

122,5

207,5

+ 69,4 %

Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur

923,6

879,3

923,4

+ 5,0 %

lÉvolution des crédits de paiement

(en millions deuros)

Programme

Exécution
2017

LFI
2018

PLF
2019

Variation
2019/2018

Administration territoriale

1 705,3

1 691,3

1 657,1

– 2,0 %

Vie politique, cultuelle et associative

370,8

125,8

207,1

+ 64,6 %

Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur

943,5

939,8

976,1

+ 3,8 %

I.   Le programme « Administration territoriale »

Par rapport aux crédits votés en loi de finances initiale pour 2018, la baisse des moyens consacrés en 2018 au programme « Administration territoriale » atteindrait 38,8 millions deuros en autorisations dengagement et 34,2 millions d’euros en crédits de paiement. La baisse des moyens des préfectures et des sous-préfectures se poursuit inexorablement.

Du point de vue de la destination des crédits, l’ensemble des actions du programme – « Coordination de la sécurité des personnes et des biens », « Réglementation générale, garantie de l’identité et de la nationalité et délivrance des titres », « Contrôle de légalité et conseil aux collectivités territoriales », « Pilotage territorial des politiques gouvernementales » et « Animation et soutien du réseau » – enregistre une diminution des crédits, qui se traduit pour la deuxième par des économies significatives suite à la dématérialisation des procédures de délivrance des titres aux usagers.

Du point de vue de la nature des crédits, l’essentiel des économies attendues pour l’an prochain concernerait :

– les dépenses de personnel, en baisse de 33 millions d’euros par rapport à 2018, pour atteindre 1 481,4 millions d’euros en crédits de paiement ;

– et les dépenses de fonctionnement, en repli de 3 millions d’euros par rapport à 2018.

Les dépenses d’investissement enregistreraient une augmentation modeste de 3 millions d’euros, du fait essentiellement de dépenses d’entretien exceptionnelles dans les préfectures de la Drôme, du Rhône et de la Somme.

Le plafond d’emplois traduirait une baisse de 512 équivalents-temps plein travaillés (ETPT) par rapport à l’exercice précédent ([2]).

Ce plafond tient, en particulier, compte du schéma d’emploi prévu par le Plan Préfectures Nouvelle Génération (PPNG) sur la période 2016 à 2018 (– 1 300 ETPT) suite à la fermeture des guichets de délivrance des titres aux usagers et à la mise en place d’un réseau de centres d’expertise et de ressources des titres (CERT). Il tient également compte du renforcement des effectifs des services en charge des étrangers dans les préfectures, à hauteur de 170 ETPT en 2018.

Les autres effets en 2019 sur le plafond d’emplois (– 153 ETPT) résultent de corrections techniques et de transferts budgétaires.

Ce programme appelle deux observations de la part de votre rapporteur pour avis.

S’agissant de la mise en œuvre du plan préfecture nouvelle génération, la crise de la délivrance des cartes grises semble en grande partie résolue. Votre rapporteur pour avis déplore tout de même le fait que le Gouvernement se soit contenté d’une phase d’expérimentation si courte (deux mois seulement) et ait procédé à la généralisation malgré des dysfonctionnements évidents.

Le choix de fermer les guichets aux usagers nationaux et de réserver l’accueil physique aux seuls étrangers demeure aux yeux de votre rapporteur pour avis un choix toujours aussi contestable. On peut néanmoins souligner avec satisfaction la mise en place par le ministère de l’Intérieur d’un service minimum d’accompagnement avec les « médiateurs numériques ».

S’agissant du contrôle de légalité, votre rapporteur pour avis regrette à nouveau cette année le peu de moyens consacrés à cette mission et s’inquiète des conséquences qui ne manqueront pas d’en résulter sur le terrain. À titre d’exemple, la loi du 9 décembre 2016 ([3]), dite loi Sapin II, fait obligation, à son article 8, aux communes de plus de 10 000 habitants et à toutes les collectivités de mettre en place un dispositif de recueil des alertes pour « prévenir la corruption ». Cela devait être fait au 1er janvier 2018. Or, selon l’Agence française anti-corruption, seules 15 % des sociétés d’économie mixtes (SEM), 8,7 % des communes et 5,1 % des EPCI ont répondu à cette obligation.

Malgré cette absence massive d’application de la loi, votre rapporteur pour avis n’a pas eu connaissance de rappels à la loi effectués par les préfets auprès des collectivités locales oublieuses. Alors même que le Parlement a voté de nombreuses lois sur la moralisation et la transparence de la vie publique, la non application de la loi et le manque de contrôles sur le terrain risquent de voir éclater dans les années à venir des scandales de corruption ou de manque de probité dans notre vie politique locale forts préjudiciables à notre démocratie.

II.   Le programme « Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur »

Après une année 2018 ayant vu une stabilisation de son périmètre que le rapporteur pour avis avait tenu à saluer, cet exercice est marqué par la reprise sur le programme d’une partie des effectifs de la direction de la modernisation de l’administration territoriale (DMAT) qui demeurait sur le programme 307 « Administration territoriale ».

Les dépenses prévues pour 2019 appellent les observations suivantes :

– les crédits de personnel connaîtraient une augmentation de 17,6 millions d’euros, liée principalement à cette mesure de transfert, contribuant à augmenter le plafond d’emplois du programme de 127 ETPT pour le porter à 7 613 ETPT ;

– les dépenses liées au projet « Réseau Radio du futur », annoncé par le Président de la République lors de son discours aux forces de sécurité intérieure le 18 octobre 2017, représenteraient 22 millions d’euros en crédits de paiement pour 2019 et 142,6 millions d’euros pour les années 2020 et au-delà ; son imputation budgétaire précise n’est pas arrêtée ;

– les dépenses immobilières (action « Affaires immobilières ») diminueraient, par rapport à 2018, de 12,4 millions d’euros en crédits de paiement (pour atteindre 137,1 millions d’euros), tout en tenant compte des travaux d’aménagement d’un troisième site de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) à Neuilly-sur-Seine ;

– les dépenses de contentieux confirment l’effort consenti depuis l’an dernier pour corriger la situation de sous-budgétisation persistante : pour 2019, 80 millions d’euros sont prévus sur l’action « Affaires juridiques et contentieuses ».

III.   Le programme « Vie politique, cultuelle et associative »

Avec les élections européennes du 26 mai 2019, le programme « Vie politique, cultuelle et associative » enregistrerait une hausse significative des dépenses de 85 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 81,3 millions d’euros en crédits de paiement, par rapport à la loi de finances initiale pour 2018.

L’action « Organisation des élections » bénéficierait en 2019 de 128 millions d’euros de crédits de paiement, à comparer aux 45,5 millions d’euros votés en loi de finances pour 2018 et aux 305,9 millions d’euros consommés sur 2017.

Ces crédits consommés sont inférieurs au montant des crédits inscrits en loi de finances initiale de 72,4 millions d’euros du fait du report en gestion sur l’exercice 2018 des remboursements forfaitaires des comptes de campagne des candidats aux élections présidentielle et législatives, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) n’ayant pas achevé l’examen de ces comptes avant la fin de l’exercice 2017.

Les crédits prévus pour 2019 tendent, pour les quatre cinquièmes, à financer l’organisation des élections européennes. Ils tiennent compte du coût de la propagande électorale, conjuguée au changement de format du bulletin de vote lié au rétablissement d’une circonscription électorale unique par la loi du 25 juin 2018 ([4]).

Les crédits consacrés à l’aide publique aux partis et groupements politiques demeureraient stables : l’action « Financement des partis » bénéficierait en 2019 de 68,7 millions d’euros, soit le même montant que celui ouvert dans chaque loi de finances initiale depuis 2014.

En application de l’article 9 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique, un parti politique peut bénéficier de la première fraction de l’aide publique si, lors du plus récent renouvellement de l’Assemblée nationale, il a présenté des candidats ayant obtenu chacun au moins 1 % des suffrages exprimés dans au moins 50 circonscriptions ou s’il a présenté des candidats uniquement outre-mer (collectivités territoriales relevant des articles 73 ou 74 de la Constitution ou Nouvelle-Calédonie) ayant chacun obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés. Une seconde fraction de l’aide publique est attribuée aux partis bénéficiaires de la première fraction, proportionnellement au nombre de membres du Parlement qui ont déclaré au bureau de leur assemblée, au cours du mois de novembre de l’année précédente, y être inscrits ou s’y rattacher ([5]).

Le tableau présenté ci-après récapitule les montants perçus au titre de 2018 par les différents partis politiques, en précisant l’impact des modulations financières liées à la règle de la parité.

Compte tenu du retard pris dans le traitement par le Conseil constitutionnel du contentieux des décisions de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP), ces montants ont été arrêtés au mois d’octobre seulement. Afin de ne pas peser excessivement sur les finances des partis politiques, dont certains peinent à obtenir des lignes de trésorerie auprès des établissements de crédit, le Gouvernement a versé au mois de juillet une avance représentant la moitié du montant à percevoir. Votre rapporteur pour avis estime que cette pratique pourrait, à l’avenir, être systématisée à condition de lui donner un cadre juridique adéquat.


Les aides publiques aux partis politiques en 2018

(en euros)

I. Partis et groupements politiques ayant présenté des candidats dans au moins 50 circonscriptions (métropole)

Première fraction

Seconde fraction

TOTAL

Modulation financière liée à la parité (a)

En marche !

10 100 657,58

12 414 404,87

22 515 062,45

-

Les Républicains

3 923 414,52

9 021 879,82

12 945 294,34

1 787 885,10

Parti socialiste

2 618 430,28

3 802 610,50

6 421 040,78

-

Front national

4 881 804,92

298 243,96

5 180 048,88

-

La France insoumise

3 751 173,02

671 048,91

4 422 221,93

252 517,99

Union des démocrates, radicaux et libéraux

1 042 819,98

3 057 000,60

4 099 820,58

-

Mouvement démocrate

1 840 186,44

2 013 146,74

3 853 333,18

-

Parti communiste français

1 041 401,55

969 292,87

2 010 694,42

-

Europe écologie les verts

1 270 252,47

149 121,98

1 419 374,45

-

Parti radical de gauche

199 360,91

596 487,92

795 848,83

-

Debout la France

393 041,50

111 841,49

504 882,99

13 248,59

Régions et peuples solidaires

275 541,12

186 402,48

461 943,60

-

Lutte ouvrière

260 811,71

-

260 811,71

-

Régions et peuples solidaires

-

186 402,48

186 402,48

 

La France qui ose

113 900,02

-

113 900,02

34 297,03

Alliance écologiste indépendante

105 919,31

-

105 919,31

54 626,67

Parti animaliste

67 205,81

-

67 205,81

37 336,56

Sous-total I

31 885 921,14

33 477 884,62

65 363 805,76

2 179 911,94

II. Partis et groupements politiques ayant présenté des candidats exclusivement outre-mer

Première fraction

Seconde fraction

TOTAL

Modulation financière liée à la parité (a)

Parti progressiste martiniquais (ppm)

-

335 524,46

335 524,46

30 750,85

Tapura huiraatira

54 022,07

149 121,98

203 144,05

-

Calédonie ensemble

-

111 841,49

111 841,49

27 487,13

Rassemblement pour la Calédonie dans la république

6 437,14

74 560,99

80 998,13

-

Tavini huiraatira no te ao maohi -
Front de libération de Polynésie

29 056,60

37 280,50

66 337,10

-

Mouvement indépendantiste
martiniquais

14 414,20

37 280,50

51 694,70

-

Archipel demain

1 984,83

37 280,50

39 265,33

-

Cap sur l'avenir

1 984,83

37 280,50

39 265,33

-

Tahoeraa huiraatira

35 726,87

-

35 726,87

-

Groupement France réunion

13 560,51

-

13 560,51

-

Parti communiste réunionnais

8 861,94

-

8 861,94

-

Les Républicains ensemble dans la France

7 914,68

-

7 914,68

-

Mouvement populaire calédonien

7 264,56

-

7 264,56

-

Rézistans égalité 974

6 479,82

-

6 479,82

-

La France en mouvement

3 321,18

-

3 321,18

-

Vivre la réunion

1 443,06

-

1 443,06

-

Progrès 974

-

-

-

15 986,96

Tau hoturau

-

-

-

2 805,68

Sous-total II

192 472,29

820 170,92

1 012 643,21

77 030,62

TOTAL (I + II)

32 078 393,43

34 298 055,54

66 376 448,97

2 256 942,56

(a)   Montant qui aurait été perçu en plus par les partis politiques s’ils avaient pleinement respecté les exigences légales en matière de parité entre les femmes et les hommes lors des élections législatives de juin 2017.

Source : décret n° 2018-877 du 11 octobre 2018 pris pour l’application des articles 9 et 9-1 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique ; ministère de l’Intérieur.

Il convient de souligner que la ventilation de ces aides publiques pour 2019 dépendra des déclarations de rattachement des membres du Parlement aux différents partis politiques – lesquelles déterminent l’attribution de la seconde fraction de l’aide publique. Ces déclarations de rattachement seront effectuées au mois de novembre, auprès du bureau de chaque assemblée, qui les communiquera, avant le 31 décembre 2018, au Premier ministre. Elles seront rendues publiques.

Les autres dépenses du programme « Vie politique, cultuelle et associative » prévues en 2019 sont plus modestes :

– le fonctionnement de la CNCCFP serait assuré par une dotation de 7,5 millions d’euros de crédits de paiement (contre 7,6 millions d’euros en 2018) et un plafond d’emplois maintenu à 51 équivalents temps plein travaillés (ETPT) ; cette stabilité des moyens se justifie par le contrôle des comptes de campagne des candidats aux élections européennes de mai 2019, par les nouvelles missions confiées par la loi du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique ([6]) et par le contrôle des comptes de campagne des candidats qui se présenteront aux élections partielles ;

– les cultes bénéficieraient de 2,8 millions d’euros de crédits, correspondant à 2,1 millions d’euros de subventions et à 700 000 euros de dépenses immobilières directes ;

– la vie associative mobiliserait 160 000 euros, contre 89 000 euros l’an dernier, de dépenses de fonctionnement destinées à la maintenance du répertoire national des associations.

S’agissant de la vie cultuelle, votre rapporteur pour avis regrette que ce budget ne marque plus aucune ambition. Des initiatives avaient été prises en 2015 et 2016 notamment sur la formation civique des imams. Aujourd’hui les crédits et les initiatives semblent à l’arrêt. Même si le FIPD (dont les crédits sont inscrits au programme « Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur ») contribue aussi à ces moyens de lutte contre la radicalisation, ses crédits diminuent eux aussi. C’est d’autant plus regrettable que le précédent ministre de l’Intérieur, M. Gérard Collomb, a laissé un testament alarmiste sur la situation très dégradée de nos quartiers, sans doute a-t-il considéré que les moyens dont il disposait n’étaient pas à la hauteur de l’enjeu.

 


— 1 —

 

   Seconde partie : Le contrôle des comptes de campagne et du financement des partis politiques

Suite à la campagne pour l’élection présidentielle de 2017, puis à celle des élections législatives, des voix se sont élevées pour s’interroger sur d’éventuels dysfonctionnements de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) et sur l’adéquation de ses moyens avec les missions qui lui sont confiées. C’est la raison pour laquelle plusieurs députés membres du groupe Les Républicains ont récemment déposé une proposition de résolution afin de créer une commission d’enquête sur le sujet ([7]). D’autres travaux avaient déjà concerné, sous la précédente législature, la commission nationale ([8]).

I.   Les contrôles de la CNCCFP, un système fortement sollicité en année électorale

Inédite sous la Vème République, la conjonction de trois scrutins nationaux la même année a imposé un rythme très soutenu à la commission en 2017 ([9]). Elle a obligé celle-ci à étaler sa charge de travail jusqu’au premier trimestre 2018, même si l’ensemble des décisions a été rendu dans les délais prescrits par la loi ([10]).

Avant la fin de l’année 2018, la CNCCFP aura encore à examiner les comptes de campagne des candidats têtes de liste à l’élection de l’Assemblée de Corse des 3 et 10 décembre 2017, à l’élection de l’Assemblée de la Polynésie française des 22 avril et 6 mai 2018 et les dépenses des partis politiques habilités à participer à la campagne en vue du référendum du 4 novembre 2018 en Nouvelle-Calédonie ([11]).

1.   Le contrôle des comptes de campagne des candidats

Ce contrôle concerne les élections présidentielles, européennes, législatives, sénatoriales, régionales, départementales, municipales (dans les circonscriptions de plus de 9 000 habitants), provinciales et territoriales (outre-mer).

Le candidat est tenu de respecter plusieurs formalités substantielles :

– il doit désigner un mandataire financier (personne physique ou association de financement) et le déclarer en préfecture dès le début de la campagne électorale ; ce mandataire ouvrira un compte bancaire unique retraçant les mouvements financiers du compte (recettes et dépenses) ;

– il ne doit pas dépasser le plafond des dépenses applicable à l'élection en cause ;

– il est obligé de faire présenter son compte par un expert-comptable, sauf si aucune dépense et recette n'a été engagée et s'il n'a perçu aucun don ;

– il est tenu de déposer à la commission un compte en équilibre ou, éventuellement, en excédent, si le candidat a obtenu plus de 1 % des suffrages exprimés ou s'il a bénéficié de dons de personnes physiques ;

– enfin, il doit fournir à la commission toutes les pièces justificatives de dépenses et de recettes.

À l'issue de l'examen des comptes de campagne, la CNCCFP peut approuver le compte de campagne, approuver après réformation le compte, notamment lorsque des dépenses engagées par le candidat ne présentent pas de caractère électoral, ou rejeter le compte en cas de manquement aux règles de droit électoral (absence d'expert-comptable, don de personne morale, compte en déficit, dépassement de plafond...). Elle a également la faculté de moduler le montant du remboursement forfaitaire de l'État lorsque la commission relève des irrégularités qui n'entraînent pas le rejet du compte de campagne.

La CNCCFP peut être conduite à constater le non dépôt ou le dépôt hors-délai d'un compte par le candidat.

Le rejet, le non dépôt et le dépôt hors-délai du compte privent le candidat de son droit au remboursement des dépenses de campagne et entraînent la saisine du juge de l'élection. Ce dernier peut soit prononcer l'inéligibilité du candidat et le déclarer démissionnaire d'office dans le cas d'un candidat élu, soit ne pas prononcer l'inéligibilité, s'il considère que le candidat est de bonne foi ou s'il juge que la commission n'a pas statué à bon droit.

Les décisions de réformations peuvent diminuer le montant du remboursement dû au candidat. Celui-ci peut contester la décision prise par la commission en intentant un recours gracieux devant elle, ou contentieux devant le Conseil d'État.


Pour être remboursé, un candidat doit satisfaire quatre conditions :

– avoir obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés (au moins 3 % pour les élections européennes et territoriales de Polynésie française) ;

– avoir respecté les obligations lui incombant (voir supra les obligations du candidat) ;

– avoir engagé des dépenses présentant un caractère électoral ;

– et ne pas avoir vu son compte rejeté.

Le candidat est alors remboursé du montant arrêté par la CNCCFP à hauteur de son apport personnel (versements personnels et emprunts du candidat remis au mandataire), dans la limite de 47,5 % du plafond fixé pour chaque circonscription électorale.

L’article 26 de la loi du 15 septembre 2017 ([12]) a élargi les dispositions relatives aux emprunts et modifié sensiblement les dispositions des articles L. 52-8 à L. 52-12 du code électoral :

– les personnes physiques peuvent consentir des prêts à un candidat dès lors que ces prêts ne sont pas effectués à titre habituel, dans une limite de cinq ans ; le candidat devra adresser chaque année à la commission un état de remboursement du prêt ; le fait pour un candidat bénéficiaire d’un prêt de ne pas transmettre le document mentionné sera puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende ;

– les dons de personnes physiques sont désormais limités aux personnes physiques de nationalité française ou résidant en France ;

– les personnes morales, à l’exception des partis et groupements politiques ainsi que des établissements de crédit ou sociétés de financement ayant leur siège social dans un état membre de l’Union européenne ou partie à l’accord sur l’Espace économique européen, ne peuvent ni consentir des prêts à un candidat ni apporter leur garantie aux prêts octroyés aux partis et groupements politiques ; les associations n’ayant pas le statut de parti ou groupement politique au sens de la loi du 11 mars 1988 ([13]) ne peuvent donc plus intervenir dans le financement d’une campagne électorale ;

– un parti politique ne peut pas refacturer d’intérêts à son candidat sauf s’il a lui-même contracté un prêt avec intérêts auprès d’un établissement de crédit – on parle alors de prêt miroir ;

– la publication des comptes de campagne par la commission nationale doit désormais se faire dans un format de données libre.

2.   Le contrôle des comptes des partis et groupements politiques

L’article 11-7 de la loi du 11 mars 1988 impose aux partis et groupements de tenir une comptabilité, qui doit retracer « tant les comptes du parti ou groupement politique que ceux de tous les organismes, sociétés ou entreprises dans lesquels le parti ou groupement détient la moitié du capital social ou des sièges de l’organe d’administration ou exerce un pouvoir prépondérant de décision ou de gestion ».

Les comptes de ces partis sont arrêtés chaque année ; ils sont certifiés par deux commissaires aux comptes et déposés dans le premier semestre de l’année suivant celle de l’exercice à la CNCCFP, qui assure leur « publication sommaire » au Journal officiel. Toutefois, s’agissant des partis dont les ressources annuelles ne dépassent pas 230 000 euros, l’article 7 de la loi du 6 mars 2017 ([14]) a limité l’exigence de certification à un commissaire aux comptes.

Les sanctions infligées aux partis et groupements politiques

Au titre de l’exercice 2016, la CNCCFP a constaté que 341 partis avaient respecté leurs obligations légales et que 152 ne les avaient pas respectées.

Parmi ces derniers :

– 114 ont été privés pour trois ans du bénéfice de la réduction d’impôt (soit 114 comptes non déposés) ;

– 3 ont été privés pour 18 mois du bénéfice de la réduction d’impôt (3 comptes déposés hors délai et non certifiés) ;

– 12 ont été privés pour un an du bénéfice de la réduction d’impôt (4 comptes certifiés déposés hors délai et 8 comptes déposés non certifiés) ;

– 5 ont été privés pour six mois du bénéfice de la réduction d’impôt (5 comptes certifiés déposés hors délai) ;

– 17 n’ont pas été privés du bénéfice de la réduction d’impôt car le parti avait été dissout ou ne relevait plus de la loi du 11 mars 1988 à la date de la décision de la commission ;

– 1 parti n’a pas été privé du bénéfice de la réduction d’impôt eu égard aux circonstances de l’espèce ;

– 1 a été privé du bénéfice de l’aide publique pour une dure de trois ans (comptes non déposés) ;

– 14 n’ont pas été privés du bénéfice de l’aide publique car le parti avait été dissout ou ne relevait plus de la loi du 11 mars 1988 à la date de la décision de la commission.

La CNCCFP n’est donc pas un « juge des comptes » des partis : la certification est faite par des commissaires aux comptes et il revient seulement à la commission nationale d’en vérifier la cohérence d’ensemble (bilan, compte de résultat et annexe ; justificatifs de recettes présentés par le mandataire).

Votre rapporteur pour avis rappelle qu’en réalité, et contrairement à une idée reçue, les comptes des partis politiques ne sont pas contrôlés en vertu de la liberté constitutionnelle de fonctionnement qui leur est reconnue.

En cas de méconnaissance des obligations comptables des partis, constatée par la CNCCFP (absence de dépôt des comptes dans le délai légal, comptes non certifiés, comptes ayant fait l’objet d’un refus de certification par les commissaires aux comptes, etc.), plusieurs sanctions, éventuellement cumulatives, et qui peuvent faire l’objet d’une modulation ([15]), sont prévues :

– le parti perd le droit, pour l’année suivante, au bénéfice de l’aide publique (en particulier, un parlementaire ne peut plus s’y rattacher) ;

– le parti perd le droit de financer une campagne électorale ou un autre parti politique ;

– le parti redevient en quelque sorte une association de droit commun et se retrouve soumis au contrôle de la Cour des comptes et à la réglementation des associations subventionnées, en application de l’article 10 de la loi du 11 mars 1988 ;

– les dons et cotisations à son profit ne peuvent, à compter de l’année suivante, ouvrir droit à réduction d’impôt, ce qui revient à pénaliser le donateur et donc indirectement le parti ;

– la CNCCFP peut également retirer l’agrément de l’association de financement, aboutissant à priver le parti de la possibilité de recevoir des dons, jusqu’à la désignation d’un nouveau mandataire financier.

L’article 25 de la loi du 15 septembre 2017 ([16]) a modifié sur plusieurs points la loi du 11 mars 1988. Ainsi, à compter du 1er janvier 2018 :

– l’ensemble des ressources du parti politique doit être perçu par le mandataire ;

– l’absence de dépôt de la liste des donateurs, la non communication dans l’annexe aux comptes de l’état de remboursement des prêts consentis ainsi que la non transmission, le cas échéant, de toutes les pièces comptables et de tous les justificatifs nécessaires au bon accomplissement de la mission de contrôle de la commission est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende ;

– l’absence de dépôt des comptes du parti est punie de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende ;

– le périmètre des comptes d’ensemble des partis devra inclure les comptes de leurs organisations territoriales ;

– les prêts des personnes physiques et morales sont encadrés ; les partis communiqueront à la commission, dans l’annexe de ses comptes, un état du remboursement des prêts consentis et adresseront l’année de sa conclusion une copie des contrats de prêt ;

– les partis politiques devront transmettre dans l’annexe des comptes « les montants et les conditions d’octroi des emprunts souscrits ou consentis par eux, l’identité des prêteurs ainsi que les flux financiers nets avec les candidats » ;

– enfin, la commission nationale devra indiquer, dans le cadre de la publication des comptes des partis politiques, les montants consolidés des emprunts souscrits répartis par catégories de prêteurs, types de prêts et pays d’établissement ou de résidence des prêteurs, ainsi que l’identité des prêteurs personnes morales. En outre, s’agissant de la publication des comptes des partis politiques, la commission devra également publier les montants des flux financiers nets des partis politiques avec les candidats.

II.   Un budget en décalage avec l’activité électorale

La cyclicité de l’activité de la CNCCFP et l’augmentation des compétences qui lui sont confiées par le législateur ont eu un effet négatif sur l’effectivité du contrôle, telle qu’elle est ressentie par les candidats et les trésoriers des partis.

1.   Une activité électorale soutenue en 2017 et en 2019

La CNCCFP dispose, en tant qu’autorité administrative indépendante, d’une compétence propre en matière de gestion et de recrutement. Comme on l’a vu dans la première partie de cet avis, les crédits et les plafonds d’emploi de la commission sont inscrits sur le programme 232 « Vie politique, cultuelle et associative ».

Le collège de la commission s’est réuni lors de 69 séances tenues entre le 1er janvier et le 31 décembre 2017 et de 39 séances tenues entre le 1er janvier et le 30 avril 2018.

La composition de la CNCCFP

La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) a été créée par la loi n° 90-55 du 15 janvier 1990 relative à la limitation des dépenses électorales et à la clarification du financement des activités politiques. L’ordonnance n° 2003-1165 du 8 décembre 2003 portant simplifications administratives en matière électorale a juridiquement consacré son statut d’autorité administrative indépendante, confirmé par la loi organique n° 2017-54 du 20 janvier 2017.

Les neuf membres de la commission sont nommés pour cinq ans par décret du Premier ministre, sur propositions du Vice-président du Conseil d’État, du Premier président de la Cour de cassation et du Premier président de la Cour des comptes.

La composition de la commission nationale est la suivante :

- membres du Conseil d’État :

• Mme Françoise DUCAROUGE, conseillère d’État honoraire

• M. Philippe GRÉGOIRE, ancien conseiller d’État en service extraordinaire

• Mme Martine DENIS-LINTON, conseillère d'État honoraire

- membres de la Cour de cassation :

• Mme Martine BETCH, conseillère honoraire

• Mme Francine LEVON-GUÉRIN, conseillère honoraire

• M. Jean-Dominique SARCELET, avocat général honoraire

- membres de la Cour des comptes :

• M. François LOGEROT, Premier président honoraire

• M. François DELAFOSSE, président de chambre honoraire

• Mme Maud COLOMÉ, conseillère maître honoraire

Les membres de la commission ont réélu président, M. François LOGEROT, dans la séance du 6 mai 2015.

Le plafond autorisé d’emplois équivalents temps plein travaillé (ETPT), qui s’élevait à 44 ETPT en 2016, a été fixé à compter de l’année 2017 à 51 ETPT. Cette hausse traduisait la nécessité pour la commission de renforcer ses effectifs permanents en recourant à des agents vacataires lors d’une augmentation de son activité de contrôle en période électorale, comme ce fut le cas en 2017.

En 2017, la commission, qui dispose d’un socle de 38 agents permanents, a ainsi fait appel à des vacataires (CDD de 6 à 12 mois) pour un total de 12 ETPT environ. Ceux-ci ont été principalement affectés au contrôle des comptes des candidats aux élections présidentielle et législatives (14 chargés de mission adjoints ayant une formation de niveau master II en droit et huit secrétaires de filière), mais également au service de l’administration générale sur les fonctions logistiques ainsi qu’au service des systèmes d’information.

Pour exercer ses missions de contrôle, la commission nationale s’est également appuyée sur des rapporteurs extérieurs. Ce sont 25 rapporteurs (17 rapporteurs épaulés par huit rapporteurs d’appui dans les premières semaines de l’examen des comptes) qui ont conduit l’instruction des comptes de l’élection présidentielle. Le montant total des vacations attribuées à ses rapporteurs s’est élevé à 91 000 euros. L’examen des comptes des élections législatives a été confié à 169 rapporteurs, le montant des vacations qui leur ont été attribuées s’élève à 564 000 euros. Seule une partie de ces vacations (17 %) a été payée en 2017, en raison de la date à laquelle a pu être constaté le service fait.

Selon son dix-huitième rapport public, la commission nationale observe un très fort renouvellement de ses rapporteurs : ainsi, parmi les 17 rapporteurs ayant instruit les comptes de l’élection présidentielle, seuls deux avaient participé à l’examen des comptes de l’élection présidentielle de 2012. De même, 33 % (soit 57) des rapporteurs pour les élections législatives étaient de nouveaux rapporteurs.

2.   Des effectifs en inadéquation

Pour l’exercice 2019, les dépenses de personnel (titre 2) prévues atteindraient 4,61 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, correspondant à un niveau stable de 51 ETPT (contre 44 ETPT en 2016), tandis que les dépenses d’administration générale (hors titre 2) de la commission nationale ne dépasseraient pas 1,56 million d’euros en autorisations d’engagement et 2,66 millions d’euros en crédits de paiement.

Pour mener à bien les nouvelles compétences octroyées par la loi du 15 septembre 2017, il a été nécessaire de renforcer le pôle chargé de l’examen des comptes des partis politiques avec 2 ETPT permanents, occupant des fonctions de chargés de mission. Ces créations de poste ont un coût budgétaire neutre, car elles ont pris la forme d’un redéploiement interne de personnels.

Votre rapporteur pour avis juge inadaptés les moyens dont dispose cette commission : ceux-ci sont parfois trop élevés, notamment les années où il n’y a pas de scrutin ou un seul scrutin comme en 2018, mais très insuffisants les années où il y a, comme en 2017, autant de scrutins à la fois – présidentiel, législatif et sénatorial.

3.   Des dépenses d’investissement lourdes

La montée en charge du projet de dématérialisation des processus de la commission dans les domaines du contrôle des comptes des candidats aux élections, du contrôle du respect par les partis de leurs obligations comptables et de la gestion des reçus-dons, représentera une part conséquente des investissements informatiques de la commission en 2019 avec 525 000 euros en AE-CP sur les 918 000 euros prévus de dépenses informatiques.

La dématérialisation du traitement des comptes de campagne (de l’envoi par le candidat au dépôt aux archives nationales) envisagée par la CNCCFP

La CNCCFP va dématérialiser ses processus d’ici 2022 et s’inscrire ainsi dans le projet « Action Publique 2022 ».

Suite à une étude commandée par la commission, aucun obstacle juridique ne s’oppose, sous réserve des adaptations nécessaires, à la dématérialisation des procédures, notamment celle du dépôt du compte de campagne et de l’échange contradictoire avec le candidat.

Au mois de mai 2018, le collège, à la vue de l’étude de faisabilité juridique menée, a décidé de poursuivre le projet.

La seconde étape qui va débuter au mois d’octobre 2018 aura donc pour objectif d’ici mai 2019 de proposer plusieurs scénarios détaillés de mise en œuvre de la dématérialisation. Ces scénarios devront notamment indiquer le périmètre à dématérialiser en indiquant si celui-ci ne comprendra que les éléments du compte ou également les pièces justificatives. En effet, si la dématérialisation paraît relativement aisée dans le premier cas, elle est plus complexe à réaliser dans le second, à la fois pour des raisons matérielles, mais aussi parce qu’il faut justifier le caractère électoral d’une dépense par la fourniture d’informations complémentaires à une simple facture ou à un état numérisé. Il faudra par ailleurs adapter, le cas échéant, les procédures de contrôle elles-mêmes en préservant les capacités de vérification du rapporteur comme les garanties offertes au candidat. Enfin, le scénario finalement adopté devra résoudre la question de l’identification du déclarant, qu’il s’agisse du candidat, du mandataire ou d’un responsable de parti politique.

Cette étape devra également aboutir au choix de l’externalisation, ou non, de la plateforme d’hébergement des processus dématérialisés. Cette plateforme, interne ou externe, devra être conforme au Référentiel Général de Sécurité (RGS) et garantir les principes de confidentialité, d’intégrité, de traçabilité et de disponibilité.

Cet investissement permettra de réaliser le scénario de dématérialisation que la commission a conçu en 2018 et que le collège aura validé mi-2019. Ce scénario définira aussi bien le périmètre de ce qui sera dématérialisé, que la stratégie de déploiement. Cet important effort d’investissement pour la dématérialisation se poursuivra en 2020 et 2021 afin de s’inscrire dans le cadre du projet « Action publique 2022 ».

D’autres projets importants pour la commission feront l’objet d’un investissement en 2019 dont notamment le renforcement de la sécurité du système d’informations avec la poursuite du plan d’action défini en 2017 dans le cadre de la Politique de Sécurité des Systèmes d’information (PSSI, dérivée de celle de l’État : PSSI-E). L’un des grands volets de cette PSSI est la mise en place en 2019 d’un plan de continuité d’activité. Enfin, la mise en conformité, débutée en 2018, du système d’information de la CNCCFP au nouveau Règlement Européen sur la Protection des Données (RGPD) sera également l’un des projets importants de la commission nationale en 2019.

Auditionnés par le rapporteur pour avis, le Président et la secrétaire général de la commission ont estimé que celle-ci, au regard des demandes qu’elle a exprimées, disposerait en 2019 des moyens d’exercer ses missions.

Ils ont mis en garde votre rapporteur pour avis concernant l’année 2020. En effet, le budget de la commission nationale devrait atteindre un pic aussi inédit que temporaire, lié au cumul sur cet exercice budgétaire de dépenses immobilières importantes (renouvellement du bail des locaux de la CNCCFP ou éventuel déménagement) conjuguées à un pic de la masse salariale lié au chevauchement de deux systèmes de remise de comptes (papier pour les élections générales et expérimentation de la dématérialisation pour les élections partielles) pour le scrutin municipal, qui constitue le plus dense en termes de volume des comptes contrôlés. En outre, des dépenses supplémentaires d’investissement informatique seront nécessaires pour achever la dématérialisation.

III.   La nécessaire rénovation du cadre législatif et des pouvoirs de la CNCCFP

En l’état actuel du droit, la CNCCFP ne dispose pas des moyens juridiques, techniques et humains et des pouvoirs d’investigation suffisants, notamment pour déceler d’éventuelles manipulations comptables.

1.   Des prérogatives nouvelles devraient être reconnues à la CNCCFP

Au-delà des efforts budgétaires qui pourraient être consentis afin de mettre les moyens de la CNCCFP davantage en adéquation avec le cycle électoral, les auditions conduites par votre rapporteur pour avis ont mis en évidence la nécessité de renforcer la transparence du financement politique en élargissant les missions de celle-ci.

a.   La numérisation des comptes de campagne

Dans son dix-neuvième rapport public pour 2017, la CNCCFP demandait à développer la numérisation des comptes de campagne. Votre rapporteur pour avis souscrit à cette proposition et souhaite que les projets récemment lancés puissent déboucher sur une dématérialisation complète et opérationnelle d’ici la prochaine élection présidentielle.

D’ores-et-déjà, les échanges avec le Conseil constitutionnel et les juridictions administratives s’effectuent essentiellement par voie électronique, grâce à l’application Télérecours. Il en est de même de la transmission aux préfectures des décisions arrêtant le montant des remboursements qu’elles sont chargées d’effectuer et celui des dévolutions qu’elles doivent surveiller.

De l’aveu de son président, auditionné par votre rapporteur pour avis, aucun obstacle d’ordre juridique ne s’oppose à la dématérialisation des procédures, notamment celle du dépôt du compte de campagne et de l’échange contradictoire avec le candidat. Des adaptations législatives seront toutefois nécessaires.

Une telle dématérialisation présenterait l’intérêt, pour le candidat, de ne disposer que d’un seul point d’entrée, sous la forme d’un portail unique. Elle ne devrait pas se limiter au seul compte de campagne mais bien inclure, même si cela est plus complexe à réaliser, les pièces justificatives.

b.   La clarification du financement des campagnes électorales par les partis

À l’occasion de l’élection présidentielle de 2017, la CNCCFP a relevé que les partis politiques, par la contribution qu’ils apportent aux comptes de campagne, sont indirectement un moyen de collecter des dons de personnes physiques, dont le plafond vient s’ajouter à celui applicable aux dons directs faits aux candidats, soit un plafond total de 12 100 euros par an et par personne, le tout subventionné à hauteur de 66 % via la réduction d’impôt.

À titre d’exemple, dans le cas de la campagne d’Emmanuel Macron, à la somme de 1 million d’euros de dons affichée dans le compte de campagne, il faut ajouter 5 millions d’euros de dons effectués au parti En Marche créé pour la campagne (pour la seule année 2016).  Le président de la CNCCFP a souligné lors de son audition que s’agissant de la campagne de M. Macron, 90 % des dons avaient bénéficié au parti.

Cette pratique ne contredit pas expressément la loi mais elle en méconnaît l’esprit dans la mesure où elle permet de s’affranchir du plafond de dons fixé à 4 600 euros par campagne électorale. Votre rapporteur pour avis estime qu’il conviendrait d’interdire ce type de reversement, ou à tout le moins d’en fixer un montant maximal.

c.   La capacité de la CNCCFP d’avoir, avec les commissaires aux comptes, accès aux comptes des partis

Reprenant une proposition avancée, en 2015, par la commission des Finances de notre Assemblée ([17]), votre rapporteur pour avis propose aussi de donner à la CNCCFP un accès à la comptabilité des partis politiques pendant la période d’examen des comptes de campagne des candidats à l’élection présidentielle.

Aujourd’hui, rien ne permet à la CNCCFP de vérifier si les dépenses engagées par un parti dans le cadre de l’élection présidentielle ont été intégrées ou non dans le compte de campagne du candidat concerné. Il s’agirait non pas d’interférer dans la vie des formations politiques, le principe de liberté des partis consacré par l’article 4 de la Constitution faisant obstacle à un contrôle des activités des partis et des dépenses afférentes, mais d’inscrire dans la loi le principe selon lequel les commissaires aux comptes des partis politiques transmettent à la CNCCFP, au cours de la période d’examen des comptes de campagne des candidats à l’élection présidentielle, une attestation retraçant l’ensemble des recettes et des dépenses liées à l’élection. Cela permettrait à la CNCCFP de confronter le compte de campagne du candidat et la comptabilité du parti pendant la période électorale.

2.   Une réforme plus profonde de la CNCCFP pourrait être envisagée

Une réforme d’ampleur pourrait également être étudiée, conduisant à repenser le modèle français de contrôle des comptes de campagne.

a.   La transformation d’une vérification ex post en un contrôle continu

Votre rapporteur pour avis propose une modification radicale des modalités du contrôle assuré par la CNCCFP, en remplaçant la vérification des comptes de campagne déposés après l’élection par une forme de contrôle en cours de campagne.

Une telle évolution autoriserait les rapporteurs de la CNCCFP à travailler « au fil de l’eau ». Elle permettrait de repérer très rapidement les analyses erronées, tout comme les bonnes pratiques, et constituerait pour les candidats eux-mêmes un élément sécurisant. La commission pourrait davantage jouer un rôle de conseil au candidat et à son mandataire, sous forme de « rescrit », avec harmonisation de la jurisprudence de la commission en temps réel. Le cas échéant, il serait permis au collège de la Commission nationale d’adresser des observations.

b.   La capacité de la CNCCFP d’effectuer des contrôles sur place pendant la campagne

Votre rapporteur pour avis propose de donner la possibilité aux rapporteurs de la CNCCFP d’effectuer un contrôle sur place, pendant la campagne présidentielle. Ce contrôle leur permettrait d’apprécier le coût réel des prestations (d’un meeting par exemple) et d’éviter ainsi les possibilités d’erreur ou de manipulation comptables comme les surfacturations.

 

La question de la publication des données comptables à l’étranger

Aux États-Unis, la Federal election commission (FEC) publie sur son site Internet l’intégralité des sommes récoltées et des dépenses effectuées par chaque candidat à l’élection présidentielle et aux élections législatives. L’autorité de contrôle rend également public un historique des groupements politiques sanctionnés pour manquement à leurs obligations déclaratives. Cette dynamique de transparence s’accompagne également d’une action de communication, de forums de discussion où les utilisateurs peuvent demander de plus amples informations sur les données diffusées et de visualisation de ces données qui sont téléchargeables en format ouvert, et comparables grâce à des modules en ligne. En Finlande, à la suite des controverses suscitées par le financement de la campagne électorale de 2007, les partis politiques sont tenus de fournir une liste détaillée des dépenses et des sources de financement pendant la campagne électorale. Ils doivent aussi divulguer leurs dons par voie électronique au plus tard le 15ème jour du mois civil suivant le mois où la contribution a été reçue, de sorte à garantir la transparence des financements externes reçus.

Source : Transparency International France

Votre rapporteur pour avis n’est en revanche pas favorable à la publication des données comptables qui seraient ainsi recueillies. Les exemples américain et finnois paraissent, à cet égard, difficilement transposables et risqueraient dans notre pays de susciter des débats sur l’opportunité de telle ou telle dépense et d’éloigner les électeurs des débats électoraux.

c.   La réécriture du code électoral

Au cours des dernières années, de nombreux textes législatifs ou règlementaires ont complété ou modifié les règles et les modalités du financement de la vie politique, comme le souligne la CNCCFP dans son dix-huitième rapport public pour 2016. Les lois du 9 décembre 2016 et du 15 septembre 2017 (organique et ordinaire) avaient été précédées de trois textes du 14 avril 2011 ([18]) et du 11 octobre 2013 ([19]). Si la CNCCFP s’efforce d’informer au mieux les acteurs de la politique, la complexité et la volatilité des règles applicables ne rendent pas aisée leur application.

Aussi votre rapporteur pour avis propose-t-il, comme l’avait fait la commission nationale, une réécriture du code électoral dans son volet financier, qui avait été initiée par la Commission supérieure de codification en 2010.

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   examen en commission

Lors de sa première réunion du jeudi 25 octobre 2018, la Commission auditionne M. Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur, sur les crédits de la mission « Administration générale de l’État » du projet de loi de finances pour 2019.

M. Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur. J’ai le plaisir d’ouvrir aujourd’hui ces auditions budgétaires sur les crédits relevant de la responsabilité du ministère de l’Intérieur en évoquant la mission « Administration générale et territoriale de l’État ». Je n’hésite pas à parler, en effet, de plaisir, car j’ai à vous présenter un budget solide et réaliste, reflétant la conscience qu’a le Gouvernement de l’importance des missions accomplies par le ministère de l’Intérieur. C’est pourquoi notre budget augmente en 2019 de 3,4 % par rapport à celui de 2018. Cette augmentation de 575 millions d’euros porte l’ensemble des crédits du ministère à 17,4 milliards d’euros.

Je suis heureux, également, de débuter cette audition par cette mission. Cette dernière abrite en effet les crédits de l’administration centrale du ministère, qui sont indispensables pour venir en soutien et à l’appui de l’activité opérationnelle des forces. Elle inclut aussi le budget du réseau des préfectures et des sous-préfectures. Or, les missions accomplies par le réseau préfectoral sont à mes yeux fondamentales. Je le sais, comme certains d’entre vous, en tant qu’ancien élu local, et je le mesure désormais aussi en tant que ministre de l’Intérieur, tout particulièrement à l’heure où le Premier ministre a souhaité ouvrir le chantier de la réorganisation de l’administration territoriale de l’État. Je sais la place des préfets et je sais qu’ils sont au cœur de cette réorganisation.

Au sein d’un budget dynamique, la mission « Administration générale et territoriale de l’État » présente elle-même des crédits consolidés et préservés, qui atteignent 2,2 milliards d’euros, en croissance de près de 5,6 %.

Je commencerai par évoquer les crédits portés par l’administration centrale du ministère au bénéfice de toutes ses composantes, dans une logique de transversalité et de mutualisation des ressources. Je souhaite en effet m’inscrire autant que possible dans la recherche de la mutualisation des moyens dans tout le périmètre ministériel, pour dégager autant que possible des marges d’efficience. Le regroupement, en soi, n’a strictement aucun intérêt s’il ne permet pas de gagner en efficacité.

Il me semble important de commencer par évoquer les moyens qui sont au service de tous au sein du programme « Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur ». Ces crédits augmentent significativement, d’un peu plus de 40 millions d’euros.

Le premier projet est immobilier et concerne la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI). Après la réalisation d’une première tranche de travaux de mise en sécurité en 2018, pour 18 millions d’euros, des travaux d’aménagement nécessaires à l’accueil de 400 postes de travail seront réalisés sur le site de Neuilly en 2019, pour accompagner la montée en puissance de ce service de renseignement. Je souhaite que nous nous engagions très vite à trouver les conditions de réalisation d’un site unique pour cette direction générale. Chacun sait que c’est plus que jamais d’actualité. La création de ce site unique figure dans le schéma pluriannuel de stratégie immobilière du ministère de l’Intérieur : 450 millions d’euros sont ainsi mobilisés d’ici à 2022 pour le financement de ce projet de très grande ampleur. Les recherches se poursuivent pour identifier le site à même d’accueillir la DGSI et l’année 2019, voire peut-être la fin de l’année 2018, devrait voir l’engagement des premiers crédits d’études.

Le deuxième projet que je souhaite évoquer est celui du réseau radio du futur, que le Président de la République avait annoncé dans son discours du 18 octobre 2017 aux forces de sécurité : 22,5 millions d’euros seront mobilisés pour entrer dans la phase opérationnelle de ce projet dont le coût global est estimé à 145 millions d’euros. L’exercice 2019 sera celui des premières réalisations concrètes, avec la mise en place d’un établissement public porteur du projet, la conception des premières briques techniques et le lancement des études relatives aux infrastructures physiques. Ce dispositif est absolument indispensable pour permettre aux forces de sécuriser les grands événements à venir, tels que les Jeux Olympiques de Paris. Il figurait d’ailleurs parmi les atouts du dossier de candidature de la capitale.

Le troisième projet d’importance est le plan de renforcement de la sécurité des applications et systèmes d’information du ministère de l’Intérieur. Là encore, votre Commission sait l’importance de ce sujet – importance justement rappelée par le récent rapport de vos collègues Didier Paris et Pierre Morel-À-L’Huissier. En matière d’identité, chacun se souvient des débats afférents au fichier « titres électroniques sécurisés », dont le Conseil d’État vient de confirmer la légalité. Soulignons aussi l’importance de ce plan dans le domaine des élections politiques ou dans celui du contrôle aux frontières. La combinaison d’un patrimoine applicatif sensible et d’un niveau de menace élevé font que les enjeux de sécurité vont croissant : il faut sans cesse améliorer la profondeur et la robustesse de nos défenses. C’est une matière en laquelle le ministère de l’Intérieur n’a pas le droit à l’erreur : la confiance de nos concitoyens dans l’action des forces et la protection des libertés publiques serait en effet très directement affectée par des défaillances qui porteraient atteinte à l’intégrité, à la confidentialité ou à l’opérationnalité de nos systèmes d’information. C’est pourquoi le budget pour 2019 prévoit de financer un plan de renforcement de la sécurité des systèmes d’information, doté de 9,5 millions d’euros.

Je dirai à présent quelques mots de notre administration territoriale.

S’agissant des préfectures, le budget se maintient à 1,2 milliard d’euros, avec 8 millions d’euros de moins que l’année précédente. Avant d’évoquer les crédits et les effectifs prévus par ce projet de loi de finances pour 2019, je voudrais évoquer les priorités qui me semblent devoir être celles du réseau des préfectures pour l’année à venir. Ces priorités sont doubles : l’approfondissement de la réforme de l’organisation territoriale de l’État et l’attention à porter aux missions de l’asile et du séjour.

L’approfondissement de la réforme de l’administration territoriale est un objectif sur lequel le Premier ministre s’est engagé. Il faut le voir comme une chance et une opportunité pour les préfets comme pour le réseau des préfectures et des sous-préfectures. En tant que ministre de l’Intérieur, je suis évidemment très concerné par la question. Je rencontrerai cet après-midi même le Premier ministre pour y travailler car je souhaite que le ministère de l’Intérieur joue un rôle-clef dans l’accompagnement de cette évolution majeure pour nos 26 000 agents partout sur le territoire.

Je rappellerai dès que possible aux préfets de région, actuellement chargés de réfléchir à des propositions, ainsi qu’aux préfets de département les objectifs que je vais vous présenter.

Le premier objectif est celui de la proximité. Tout ce qui éloignerait du terrain pénalise la représentation de l’État et nuit à son action, en particulier dans les plus grandes des nouvelles régions. La réorganisation ne peut donc se faire autour du seul échelon régional, au détriment de l’échelon départemental. Cette orientation a clairement été posée : la circulaire du Premier ministre du 24 juillet, qui la prescrit explicitement, est la feuille de route que nous appliquerons. Nous prenons ainsi le contrepied de la régionalisation que nous avions connue les années précédentes : cette régionalisation peut avoir une utilité dans certains champs, mais ne doit pas conduire à rapatrier la totalité du pilotage de l’État au niveau régional.

Le deuxième objectif est celui de l’unité, pour éviter un émiettement des responsabilités et faire en sorte d’avoir une personne unique en charge, à même de porter la parole et les politiques de l’État, d’en rendre compte et d’en assumer la responsabilité. Atteindre cet objectif implique de ne pas multiplier les agences et les établissements publics. Il faut rappeler que ce sont les préfets qui, partout en France, incarnent la représentation de l’État. Les personnels de préfecture ont un rôle à jouer en ce domaine : la coordination interministérielle des politiques publiques fait partie des missions prioritaires que je rappellerai aux préfets.

Cela étant, l’unité n’exclut pas la diversité. De la modularité pourra être apportée aux organisations et à l’approche territoriale de nos organisations. Les solutions à trouver ne sont sans doute pas les mêmes dans le Pas-de-Calais, département de 1,5 million d’habitants, que dans un département comme le Lot qui en compte 170 000.

Le troisième objectif est la mutualisation. Il est essentiel que nous poursuivions les travaux engagés sur cette question. Je veux parler ici des moyens de fonctionnement des directions départementales interministérielles (DDI) et des secrétariats généraux aux affaires régionales (SGAR), des emplois de direction dans les DDI et dans les SGAR et de certains de leurs personnels, ainsi que des services interministériels départementaux des systèmes d’information et de communication (SIDSIC). Le ministère de l’Intérieur est clairement favorable à ce rapprochement. À cette occasion, des secrétariats généraux mutualisés pourront être expérimentés pour assurer la gestion de ces moyens.

Tout cela traduit à mon sens la grande confiance qu’a le Gouvernement dans la capacité des préfets et des préfectures à réussir les réformes qui s’annoncent. Très clairement, le réseau des préfectures et sous-préfectures a vocation à être le pivot de cette réorganisation. C’est pourquoi je considère avec sérénité les évolutions qui s’annoncent, et qui n’affaibliront en rien la force du réseau des préfectures et sous-préfectures. Je crois qu’elles sont au contraire une chance pour ce réseau.

Je voudrais évoquer ensuite le soutien à l’activité des services chargés de l’asile et des étrangers. Le contexte migratoire est caractérisé par une hausse soutenue des demandes d’asile : cette hausse fut de 18 % au cours des six premiers mois de l’année 2018 par rapport à 2017, et de 32 % en 2017 par rapport à 2016. L’activité des services chargés de l’asile et des étrangers est donc pour moi une préoccupation de premier plan.

Je sais que les préfectures et leurs personnels sont en première ligne dans ce domaine au même titre que la police aux frontières (PAF) et les agents de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) et de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). L’implication de ces agents a été déterminante pour atteindre le délai cible de trois jours ouvrés pour l’enregistrement des premières demandes d’asile aux guichets uniques d’accueil des demandeurs d’asile (GUDA). Ce délai paraissait inatteignable mais il a été respecté. De même, l’engagement des personnels de préfecture a contribué à l’augmentation de 26 % en 2018 du taux de transferts réalisés au titre du règlement dit « de Dublin ». Enfin, les personnels de préfecture sont en préparation et en appui de la mise en œuvre des retours volontaires, qui ont augmenté de 32 % au cours des six premiers mois de l’année 2018, mais aussi des éloignements forcés qui ont augmenté de 14,6 % au cours de la même période. Évidemment, nous maintiendrons la pression et cet objectif.

En 2019, les priorités demeureront inchangées mais s’étendront encore à de nouvelles missions. D’une part, il faudra parvenir à assurer la contribution de l’État à l’évaluation de la minorité des personnes se déclarant mineurs isolés. D’autre part, la mise en œuvre des décisions du Comité interministériel à l’intégration sera déconcentrée aux préfets pour un coût de 17 millions d’euros. L’engagement de chacun sera requis sur ce terrain.

C’est pourquoi je souhaite que les missions relatives à l’asile, au séjour et à l’intégration des étrangers soient considérées comme prioritaires. C’est aussi pourquoi ces services ont été renforcés. Depuis l’entrée en fonctions de ce Gouvernement, 170 emplois de titulaires supplémentaires ont été affectés aux GUDA et aux services étrangers et 1 200 mois de vacataires ont été mobilisés en 2017, comme en 2018. Je serai, en 2019, à nouveau très vigilant à l’égard de la situation de ces services car je sais leur importance dans les politiques que nous nous efforçons de mener en matière d’asile et d’immigration.

J’en viens maintenant à notre budget pour 2019 et aux moyens des préfectures et de l’administration centrale. Je vous le disais en introduction, notre budget préserve les préfectures. Le plafond d’emploi s’établira pour celles-ci à 25 317 équivalents temps plein (ETP) en 2019. Cela représente pour elles un schéma d’emploi de moins 200. La ventilation me semble parfaitement compatible avec les objectifs que j’ai rappelés.

En matière d’immobilier, le budget dédié aux préfectures sera en 2019 de 34 millions d’euros. Les principales opérations concernent les préfectures de Rennes et de Bastia, la sous-préfecture de Palaiseau ainsi que les opérations en cours de relogement des services de l’État à Saint-Martin et Saint Barthélemy.

Je souhaite enfin évoquer avec vous les grands axes de la politique salariale et indemnitaire qui sera menée en 2019.

Cette année sera la première année de mise en œuvre du protocole « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR) dans la police nationale, après le report d’un an des dispositions transverses à toute la fonction publique. Cela représente 2,7 millions d’euros de crédits supplémentaires. Dans ce contexte, les mesures catégorielles devaient, par principe, être exclues de ce projet de loi de finances. Concernant les personnels de préfecture, le financement de plusieurs mesures catégorielles, à hauteur de 2,9 millions d’euros, a été obtenu.

Ces crédits seront mobilisés pour permettre l’adoption de quatre types de mesures en lien avec la situation humainement difficile que chacune et chacun d’entre vous connaissez. Premièrement, et j’y tiens beaucoup, j’ai demandé qu’un plan d’attractivité en faveur des services étrangers des préfectures soit engagé. L’objectif est de rendre ces postes plus attractifs financièrement, mais aussi de fidéliser des personnels dont la compétence technique, longue à acquérir, est particulièrement précieuse. Quand on perd un agent ayant cette expérience, on fragilise un service.

Ce plan d’attractivité comportera quatre mesures. Tout d’abord, nous disposons du financement nécessaire pour attribuer des points de nouvelle bonification indiciaire (NBI) supplémentaires aux personnels affectés aux guichets des services des étrangers. Trois dispositions visent à améliorer l’évolution du régime indemnitaire et à faciliter la progression de carrière. La deuxième mesure cible les personnels de la filière sociale. Là encore, nous avons obtenu des crédits qui nous permettront d’attribuer des points de NBI complémentaires. Ces personnels ont en effet été particulièrement sollicités ces dernières années par la création de cellules de veille, en lien avec des attentats ou des phénomènes de radicalisation. Cette mesure me semble donc parfaitement légitime et j’en profite pour saluer l’engagement et le travail de ces personnels. La troisième mesure concerne les personnels administratifs et techniques. Nous disposons en effet de crédits nous permettant de financer le réexamen du régime indemnitaire des personnels n’ayant bénéficié d’aucune revalorisation de leur indemnité de fonctions, de sujétions et d’expertise (IFSE) depuis la création de cette dernière en 2015. Enfin, je confirme que le processus de rapprochement des corps des adjoints techniques du ministère de l’Intérieur et de l’outre-mer et des adjoints techniques de la police nationale sera engagé à l’issue des élections professionnelles, c’est-à-dire dans quelques semaines. Ces mesures indemnitaires traduisent notre reconnaissance à l’égard de l’engagement des personnels administratifs et techniques du ministère, dont l’appui et le soutien est indispensable au bon accomplissement de nos missions opérationnelles et à celles propres au réseau préfectoral. Dans le contexte du PLF pour 2019, qui ne comporte pas ou très peu de mesures catégorielles, il s’agit d’un effort tout à fait exceptionnel.

Voilà, mesdames et messieurs les députés, les quelques orientations que je souhaitais évoquer en introduction s’agissant des crédits de la mission. Je suis maintenant à votre disposition pour répondre à vos questions.

M. Olivier Marleix, rapporteur pour avis. Je suis heureux d’être le premier, monsieur le ministre, à vous interroger quelques jours après votre prise de fonctions. J’espère que le marathon budgétaire qui vous attend aujourd’hui ne vous découragera pas de revenir devant la commission des Lois.

La mission « Administration générale et territoriale de l’État » constitue le cadre budgétaire des moyens dont le ministère de l’Intérieur dispose pour assurer trois de ses responsabilités : garantir l’exercice des droits des citoyens, assurer la présence et la continuité de l’État et mettre en œuvre des politiques publiques sur l’ensemble du territoire. Cette mission se décline en trois programmes : le programme 307 « Administration territoriale », le programme 232 « Vie politique, cultuelle et associative » et le programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur ».

Le projet de loi de finances pour 2019 prévoit qu’y seront consacrés environ 2,8 milliards d’euros, montant légèrement supérieur à celui inscrit en loi de finances initiale pour 2018, avec une augmentation de 3 % hors fonds de concours mais cette variation s’explique essentiellement par la mobilisation des ressources consacrées à l’organisation des élections européennes au mois de mai prochain.

Avec près de 33 000 équivalents temps plein travaillé (ETPT), les effectifs sur la mission sont en légère baisse, de 1 %, ce qui correspond, à périmètre constant, à la poursuite du processus d’adaptation engagé en 2016, avec deux objectifs, souvent contradictoires : assurer la pérennité de la présence de l’État sur l’ensemble du territoire et contribuer au redressement des finances publiques.

En tant que rapporteur pour avis, je m’étais attardé l’année dernière, parmi les moyens du programme 307, sur deux enjeux. Le premier est la mise en œuvre du plan « Préfectures nouvelle génération » (PPNG). Cette mise en œuvre est, à mes yeux, marquée par deux défauts. D’abord, ce qu’on a appelé à juste titre le « bug des cartes grises » a conduit certains usagers à attendre pendant parfois plusieurs mois ce document. La crise est, je crois, derrière nous, monsieur le ministre, mais je déplore que le Gouvernement se soit contenté d’une phase d’expérimentation aussi courte – de deux mois seulement – et soit passé à la phase de généralisation, malgré le fait que des dysfonctionnements évidents avaient été observés. Cela s’est produit aux dépens des usagers, qui ont parfois été verbalisés pour une faute revenant à l’administration.

J’avais également regretté la fermeture des guichets d’accueil des préfectures aux Français. Les seuls usagers encore admis physiquement dans les préfectures et échappant au tout dématérialisé sont, de façon pour le moins paradoxale, les étrangers. Cette mission continue d’absorber la totalité des moyens nouveaux que vous arrivez à dégager grâce à des réductions massives d’emplois par ailleurs. Si je regrette toujours ce choix pour le moins contestable, je me réjouis que votre prédécesseur ait mis en place une sorte de service minimum d’accompagnement, avec 313 points d’accueil numériques, essentiellement dans les préfectures. Vous avez parlé tout à l’heure de proximité, monsieur le ministre. J’aurais aimé que ces points d’accueil numériques puissent exister aussi dans les sous-préfectures qui n’en sont pas dotées actuellement.

L’autre sujet qui m’avait alerté est celui des moyens « peau de chagrin » consacrés au contrôle de légalité. Cette observation demeure. Je veux redire très solennellement, monsieur le ministre, mon inquiétude quant à la portion très congrue consacrée à ces moyens et aux conséquences qui ne manqueront pas d’en résulter. Le décalage entre les lois de moralisation, de transparence et de confiance qui s’empilent au Parlement et l’absence de tout contrôle sur le terrain risquent de finir par se voir. Un seul exemple : la loi « Sapin 2 » du 9 décembre 2016 fait obligation, en son article 8, aux communes de plus de 10 000 habitants, aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre dont elles sont membres, aux départements et aux régions de mettre en place un dispositif de recueil des alertes pour prévenir la corruption. Cela devait être fait au 1er janvier 2018. Or, selon l’Agence française anticorruption, 8,7 % seulement des communes et 5,1 % des EPCI ont répondu à cette obligation. Malgré cette absence massive d’application de la loi, je n’ai pas connaissance que les préfets aient effectué des rappels à la loi auprès des collectivités locales oublieuses. Je pense que notre démocratie n’a pas les moyens de s’offrir des scandales de corruption ou de manquement à la probité dans notre vie politique locale. Il est pour le moins regrettable que les obligations imposées par la loi – par une majorité à laquelle, d’ailleurs, vous apparteniez, monsieur le ministre – restent lettre morte. Une fois encore, l’application de la loi sur le territoire est la première des missions du contrôle de légalité. Vos services, monsieur le ministre, doivent se sentir soutenus et forts dans ces missions. De ce point de vue, j’accueille avec beaucoup d’intérêt et de satisfaction votre volonté de sortir de la « tout-régionalisation » et de redonner des moyens à l’échelon départemental – ce qui me semble une nécessité absolue.

Cette année, je me suis davantage intéressé au programme 232 « Vie politique, cultuelle et associative ».

S’agissant de la vie cultuelle, tout d’abord, il est regrettable que ce budget ne marque plus aucune ambition. Des initiatives avaient été prises en 2015-2016 par Manuel Valls, notamment en matière de formation civique des imams. Aujourd’hui, les crédits et les initiatives ont un encéphalogramme plat. Vous me direz que le Fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD), dont les crédits sont inscrits sur le programme 216, contribue aussi aux moyens de lutte contre la radicalisation mais globalement, les crédits de ce fonds diminuent après avoir connu, en 2018 déjà, une baisse très lourde. J’ai d’ailleurs aussi un doute quant à la déconcentration des crédits du FIPD et à la capacité réelle des préfets à trouver des interlocuteurs fiables et pertinents au niveau local. Bref, votre prédécesseur vous a laissé un testament alarmiste sur la situation très dégradée dans les quartiers. Je comprends qu’il ait pu considérer que les moyens dont il disposait dans ce projet de loi de finances n’étaient pas à la hauteur de l’enjeu.

Dernier sujet au sein de ce programme 232 : les moyens consacrés au contrôle des comptes de campagne et au financement des partis politiques.

L’année 2018 a été, pour la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP), celle de toutes les polémiques, qu’il s’agisse de l’enquête ouverte par le parquet de Paris sur la campagne de M. Mélenchon, des révélations de ristournes dont aurait bénéficié le candidat Emmanuel Macron jusqu’à la rémunération du président de la CNCCFP, François Logerot, qui a été à tort mis en cause.

Je souhaiterais que le ministre nous donne son avis sur les critiques qui ont pu être adressées à la CNCCFP, l’un de ses rapporteurs ayant démissionné bruyamment en novembre 2017. Quel regard portez-vous sur ces dysfonctionnements ? Je voudrais aussi, monsieur le ministre, que vous nous donniez votre sentiment sur les moyens dont dispose cette commission : 51 ETPT, c’est parfois trop, notamment les années où il n’y a pas de scrutin ou un seul scrutin comme cette année, mais ce peut être très insuffisant les années où il y a, comme en 2017, autant de scrutins à la fois – présidentiel, législatif et sénatorial.

Enfin, s’agissant des comptes de campagne, la commission a aussi constaté, à l’occasion de l’élection présidentielle en 2017, des dépassements des montants de dons des personnes physiques autorisés par la loi. Ces montants sont, je le rappelle, de 4 600 euros par campagne électorale. Vingt-quatre dons, dans le cadre de la campagne de M. Macron, dépassaient ce plafond. La commission note aussi dans son rapport que les partis politiques, par la contribution qu’ils apportent aux comptes de campagne, sont aussi un moyen de collecter des dons de personnes physiques, cette fois à hauteur de 7 500 euros. Ainsi, dans le cas de la campagne de M. Macron, au-delà du million d’euros de dons affiché dans le compte de campagne, il faut ajouter 5 millions d’euros de dons effectués au parti En Marche !, créé pour la campagne. Ce chiffre concerne la seule année 2016 puisque nous n’avons pas encore connaissance des dons récoltés au cours de l’année 2017. Le président Logerot, lorsque je l’ai auditionné, a souligné que, s’agissant de la campagne de M. Macron, 90 % des dons avaient bénéficié au parti, qui les avait transférés. Cette pratique ne contredit pas expressément la loi mais use et abuse d’une forme de syllogisme juridique en vertu duquel puisque les partis politiques peuvent concourir aux dépenses des campagnes électorales, les dons faits aux partis politiques peuvent aussi concourir à ces campagnes. Cela va à l’encontre si ce n’est de la lettre de la loi, du moins de son esprit. Je rappelle que tous les dons sont remboursés à hauteur de 66 % par le contribuable. Il est précieux, dans ce cas-là, d’être le candidat des gens qui ont de la trésorerie… Ne vous semblerait-il pas nécessaire, monsieur le ministre, d’en revenir à une pratique plus conforme à l’esprit de la loi ? Ne serait-ce pas plus équitable ?

Enfin, l’aide publique aux partis représente 63 millions d’euros chaque année, financés sur les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de la République » (AGTE). S’agissant en particulier de la première fraction de cette aide publique, les dispositions d’adaptation des seuils prévues à l’article 3 du projet de loi ordinaire pour une démocratie plus représentative, responsable et efficace ne me semble pas tenir compte de l’introduction d’une dose de proportionnelle pour l’élection des députés. En clair, seules les voix qui seront acquises au scrutin majoritaire continueront d’ouvrir droit au financement au titre de la première fraction et pas les voix acquises au scrutin proportionnel. Or, il me semble que les petits partis auront plus de facilité à présenter une liste nationale que des candidats dans chaque circonscription : pouvez-vous nous éclairer sur ce choix du Gouvernement ?

M. Jacques Savatier, rapporteur spécial de la commission des Finances. La commission des Finances s’est prononcée sur cette mission AGTE hier, à l’issue de la présentation que je lui avais faite. Mon rapport résultait des différentes auditions que j’ai menées et de l’examen des documents qui m’ont été transmis par le ministère de l’Intérieur. Je me bornerai à compléter le propos de votre rapporteur pour avis par quelques remarques.

L’ensemble des moyens budgétaires proposés pour cette mission est en légère augmentation, mais cette dernière est essentiellement liée aux ressources nécessaires à l’organisation des élections européennes. En effet, le scrutin sera organisé dans une circonscription unique et les frais engagés pour l’organiser doivent être couverts par le ministère de l’Intérieur.

S’agissant des moyens en personnel, le plafond d’emploi est en diminution avec, d’un côté, un renforcement des services support du ministère de l’Intérieur et, de l’autre, l’ajustement du format territorial de ce ministère dans les départements, dans le prolongement du plan « Préfectures nouvelle génération » (PPNG), sur lequel je ferai des observations.

Le PPNG a été engagé sous la précédente législature. Nous avons décidé en 2017 de le prolonger, y compris en 2018. Il a atteint ses objectifs en matière de réorganisation des services du ministère sur le territoire et accompagnait d’ailleurs la concentration du nombre de régions. On peut considérer que nous avons aujourd’hui assisté à la reconfiguration des services dans les départements. Le programme a aussi atteint ses objectifs en matière de réduction de personnel puisqu’il y avait une prévision de 1 300 emplois en moins, le service aux usagers étant rendu, d’une part, par les collectivités territoriales et, d’autre part, par des procédures de dématérialisation. Ces procédures sont pilotées à la fois dans les centres d’expertise de ressources et des titres (CERT), structures spécialisées du ministère de l’Intérieur réparties dans les régions, et par l’Agence nationale des titres sécurisés (ANTS).

On a pu constater au cours de l’année 2018 des dysfonctionnements qui ont entraîné des retards et des désagréments pour les usagers. Le ministère de l’Intérieur a pris plusieurs dispositions pour y remédier. Aujourd’hui, les délais sont redevenus à peu près normaux mais il y a, j’imagine, dans l’esprit de beaucoup de mes collègues, une rémanence de ces dysfonctionnements – largement relayés auprès de nous dans nos permanences. Pourriez-vous confirmer que les mesures qui ont été prises vont nous permettre de mettre rapidement un terme à ces dysfonctionnements ?

J’ai demandé par ailleurs qu’un bilan soit fait du PPNG, tel qu’il s’est déroulé pendant trois ans, et que le bilan porte à la fois sur le service rendu aux usagers, sur les moyens mobilisés et leur efficience et sur les conditions de travail des personnels dans les préfectures. La commission des Finances m’a soutenu à l’unanimité dans cette démarche qui fera l’objet d’un amendement en séance. J’ai présenté à la commission des Finances, dans le cadre de l’évaluation menée au printemps dernier, un rapport sur l’activité des services des étrangers, qui est particulièrement soutenue depuis quelques temps. Le dysfonctionnement de l’ANTS a d’ailleurs aussi perturbé le fonctionnement de ces services qui ont désormais essentiellement des fonctions d’accueil des étrangers. À l’issue de ce travail, plusieurs propositions ont pu être faites. Vous y avez répondu. J’aimerais donc que vous puissiez également nous confirmer que ces services vont faire l’objet d’une attention particulière. Vous avez parlé de mesures catégorielles et de moyens supplémentaires, notamment pour les mineurs isolés. Il reste encore un travail à faire concernant l’expertise, notamment pour les cas qui relèvent du règlement de Dublin et pour la dématérialisation qui doit se poursuivre dans ce domaine.

Pour terminer, je voudrais également appeler l’attention sur la poursuite de l’organisation interministérielle de l’État. Cette organisation me paraît devoir être conduite à la suite des réponses des préfets aux demandes du Premier ministre que soient faites des propositions sur la réorganisation des services de l’État pour assurer une bonne présence territoriale. C’est le moment de faire un bilan et de prendre des mesures. Peut-être pourriez-vous nous dire où en est le projet de fusion des programmes 307 « Administration territoriale » et 333 « Moyens mutualisés des administrations déconcentrées ». Cette fusion apporterait une première réponse à la nécessité de mieux coordonner les services de l’État au niveau départemental.

Je tiens à vous alerter sur deux sujets. D’une part, j’ai proposé par amendement une dotation d’un million d’euros pour permettre à la CNCCFP de s’engager dans une procédure de dématérialisation beaucoup plus efficace qu’elle ne l’est actuellement. D’autre part, la Cour des comptes a eu un jugement assez sévère sur le fonctionnement du Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS). Le ministère de l’Intérieur a pris un certain nombre de dispositions. Il conviendra au cours des mois et des années qui viennent de surveiller l’évolution de cette activité.

M. Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur. Monsieur Marleix, s’agissant des cartes grises, si des usagers ont été verbalisés en raison du retard dans la délivrance de ces documents, nous avons fait passer une consigne très claire : du moment que l’usager peut établir sa bonne foi, il ne doit pas être verbalisé. Les services du ministère ont indiqué qu’il suffisait de produire l’accusé de réception de la demande pour empêcher la verbalisation. La consigne a été passée. Il y a pu y avoir des trous dans la raquette. C’est une anomalie voire une forme d’injustice pour ceux qui auraient fait l’objet à tort d’une contravention. Je crois que les cas sont relativement marginaux.

Quant au contrôle de légalité, il s’agit d’une des missions prioritaires des préfectures. Elles vont même bénéficier de renforts issus de redéploiement des personnels de guichet qu’on évalue à quelque 90 équivalents temps plein en deux ans. Vous avez raison de dire que c’est un sujet majeur : 90 ETP, indépendamment de la qualité des agents concernés, peuvent ne pas suffire.

Il y a des méthodes de travail, par sondages, ou encore sur la base de l’expérience – je n’entrerai pas dans le détail –, relevant de l’autorité des préfets, qui conduisent effectivement à cibler le contrôle sur tel ou tel sujet – je ne vise aucun territoire en particulier. Il est nécessaire de réaffirmer la fonction du contrôle de légalité. Des efforts ont été faits depuis deux ans ; il est nécessaire que nous les poursuivions.

S’agissant des points d’accueil numériques, dont vous souhaiteriez qu’ils soient plus nombreux dans les sous-préfectures, il en existe 213. C’est un dispositif qui marche bien, et vous avez raison de l’évoquer. Il est nécessaire d’aller encore plus loin.

En ce qui concerne la vie cultuelle et son financement, et plus particulièrement la formation civique des imams, je partage votre sentiment quant à l’utilité et l’efficacité du dispositif. Il n’a pas de traduction budgétaire particulière, parce que le Président de la République va ouvrir une discussion sur le sujet – je souhaite d’ailleurs pouvoir l’animer avec vous : nous devons discuter ensemble des choix qui seront faits. Après, les décisions se traduiront par des choix budgétaires. C’est pourquoi il n’y a pas eu d’anticipation budgétaire. Il n’en reste pas moins que le sujet est particulièrement important.

À propos des comptes de campagne, je ne reviendrai pas sur ceux que vous avez ciblés en particulier, monsieur Marleix…

M. Ugo Bernalicis. C’est sage !

M. Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur.… mais je précise que j’appartiens à un mouvement politique qui a vu les siens validés et remboursés. Cela dit, tout comme vous, je considère que la transparence est toujours nécessaire. En amont, elle est essentielle dans la capacité de contrôle de la CNCCFP, laquelle doit pouvoir faire tout ce qui relève de ses missions. Si l’on veut rétablir la confiance de nos concitoyens envers la politique – tous partis politiques confondus –, il faut prendre des mesures fortes en faveur de la transparence et de l’exemplarité, en amont comme en aval.

Chaque fois que la Commission nationale a suspecté des anomalies, elle a pu transmettre les informations à qui de droit, et des procédures ont été engagées. Il est parfaitement légitime qu’elles suivent leur cours. En disant cela, je ne pratique la suspicion à l’égard de personne. Quoi qu’il en soit, s’il fallait une évolution législative pour garantir la transparence nécessaire, le Gouvernement serait parfaitement attentif aux initiatives que la représentation nationale serait amenée à prendre.

Concernant le financement des partis politiques, et pour répondre à votre remarque, monsieur Marleix, aucune décision n’a été prise à ce jour. En particulier, aucun vote n’est intervenu au Parlement quant à l’introduction d’une dose de proportionnelle. Néanmoins, votre remarque me semble pertinente ; il faudrait que nous y réfléchissions. J’ai bien en tête les conséquences de la réforme, avec la diminution de 30 % du nombre de parlementaires – c’est ce qui est envisagé pour le moment – et l’introduction d’une dose de proportionnelle. En l’état, le projet de loi ne prend pas en compte la question du financement parce que ce n’est pas vraiment le bon véhicule, mais la discussion sur le sujet doit être ouverte. Le Gouvernement n’a pas pris de décision et n’empêche pas l’ouverture du débat. Je comprends parfaitement votre inquiétude.

Les moyens de la Commission nationale évoluent, vous le savez, en fonction du calendrier électoral. Une partie est stable – pour les loyers, les charges de fonctionnement et le personnel permanent, à hauteur de 51 équivalents temps pleins travaillés –, l’autre varie suivant l’activité de contrôle qui résulte du calendrier électoral : 25 rapporteurs ont été mobilisés pour l’élection présidentielle, 69 pour les comptes de campagne des élections législatives et 43 pour les sénatoriales.

Cela me permet de rebondir sur la question de M. Savatier concernant la numérisation, et sur sa proposition d’amendement visant à allouer un million d’euros supplémentaires. Nous avons prévu, en 2018, pour la dématérialisation du processus de contrôle, un financement de 500 000 euros sur deux ans qui, selon les informations que nous avons, correspond aux besoins. Nous avons le sentiment que les moyens affectés – 7,7 millions d’euros au total – sont appropriés au fonctionnement d’une autorité telle que la Commission nationale. Ils sont comparables, à volume d’activité identique, à ceux dont disposent d’autres autorités administratives indépendantes. Je suis d’accord avec vous, monsieur Marleix : il est toujours utile de réaffirmer l’indépendance de cette structure et la confiance que nous avons en ceux qui y exercent au quotidien des responsabilités qui ne sont pas légères.

Monsieur Savatier, s’agissant du plan « Préfectures nouvelle génération », j’ai déjà abordé l’un des sujets que vous avez évoqués dans mon propos introductif. Pour le reste, la demande d’un bilan est parfaitement légitime après trois ans de réforme. Il faut que nous prenions le temps d’y réfléchir. J’émettrai, au banc du Gouvernement, un avis favorable sur votre amendement : il est important que nous évaluions nos politiques.

En ce qui concerne la fusion des programmes 307 et 333, le ministère de l’Intérieur y est clairement favorable. C’est là le moyen, à mon sens, d’approfondir la mutualisation entre les services déconcentrés. Nous veillerons à rendre compte aux autres ministères de cette gestion mutualisée.

M. Rémy Rebeyrotte. En ce qui concerne l’adaptation du réseau des préfectures au numérique, les difficultés les plus importantes sont-elles derrière nous ? Notre collègue Savatier l’a dit : c’est pour nous un enjeu extrêmement important. La numérisation s’est traduite, pour bon nombre de nos administrés, par des difficultés. Peut-on dire que, pour l’essentiel, la page est tournée et qu’on arrivera, avec les moyens complémentaires que vous annoncez, à faire passer pleinement au numérique les services de proximité des préfectures et sous-préfectures ?

Par ailleurs, comment envisagez-vous, à l’avenir, le rôle des préfets et sous-préfets ? Je m’explique. Nous sommes un certain nombre à penser qu’il serait important que préfets et sous-préfets aient véritablement un rôle transversal par rapport aux services déconcentrés de l’État, et surtout une fonction de coordination plus forte – coordination s’agissant des investissements réalisés au niveau de l’implantation des services de l’État et de leur organisation ; coordination aussi concernant les relations budgétaires entre l’État et les départements et régions, surtout dans le contexte actuel ; capacité des préfets, enfin, à incarner véritablement l’unicité de l’État là où subsistent encore quelques difficultés avec un certain nombre de services déconcentrés. La demande est d’avoir non pas moins de préfets ou de sous-préfets, mais des pilotes de l’action de l’État dans les territoires, notamment en ce qui concerne la communication de l’État, la capacité à expliquer sa politique au plus près du terrain. Partagez-vous cette vision ? Autrement dit, considérez-vous qu’il n’y aura pas de décentralisation réussie sans une déconcentration efficace des services de l’État, de manière à ce que ces derniers soient véritablement, et de manière plus efficace, les interlocuteurs des élus et de la population dans les territoires ?

En ce qui concerne les étrangers, se pose bien sûr la question de l’organisation des services de l’État en matière de procédures, mais également celle des centres de rétention administrative, dont certains – force est de le constater – ne sont pas à la hauteur des valeurs de notre pays. L’engagement avait été pris de faire en sorte que ces lieux, même s’ils n’hébergent que transitoirement les personnes, soient humanisés – ou ré-humanisés. Je sais que vous vous êtes saisi très récemment de la question et que vos services y travaillent, mais c’est un point que je souhaitais aborder car il faut faire mieux en la matière et être plus efficace.

M. Raphaël Schellenberger. Ma première question concerne le plan préfectures nouvelle génération et la dématérialisation, qui traduisent, dans les territoires, un éloignement pour l’usager au regard des fonctions qui sont celles des préfectures et des sous-préfectures. À cela s’ajoutent les bugs qui ont été évoqués par Olivier Marleix, notamment pour les cartes grises. Tout cela est dramatique : dans bon nombre de nos territoires, se développe le sentiment d’un éloignement de l’État par rapport à leurs préoccupations et à leur quotidien.

Quels moyens allez-vous mettre en œuvre pour assurer la continuité du lien de confiance dans les territoires entre les citoyens et les préfectures et sous-préfectures, qui incarnent la représentation de l’État ? Je pense notamment à votre objectif de dématérialiser les services, à travers la plateforme de l’ANTS, que les Français apprennent tout doucement à connaître. Cette plateforme est pensée comme un outil de simplification, certes, mais avant tout de simplification des différentes plateformes numériques des services de l’État : du point de vue de l’usager, elle est relativement complexe, et le concept d’identifiant unique n’est encore pas tout à fait abouti. Comment entendez-vous continuer à travailler sur ces sujets – ce qui est d’autant plus nécessaire que la dématérialisation est incontournable, voire obligatoire, notamment pour les déclarations d’impôts ? Heureusement, à cet égard, on peut encore, à titre exceptionnel, dans les zones éloignées du haut débit, faire sa déclaration d’impôts sur papier, grâce à l’adoption d’un amendement du groupe Les Républicains – mais, pour beaucoup d’autres démarches administratives, ce n’est plus possible. Comment entendez-vous donc simplifier le fonctionnement de la plateforme, non pas du point de vue des services de l’État, mais de celui des citoyens et des usagers ?

La loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) a introduit une compétence optionnelle, pour les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre, concernant les maisons de services au public (MSAP). Je souhaite vous interroger sur ce sujet aussi car, pour le coup, c’est le rôle de l’État de s’assurer que, en dépit du fait qu’il dévitalise sa représentation dans les territoires, un outil d’accès aux services publics est maintenu pour les citoyens. Les MSAP peuvent être une solution, l’État agissant de manière coordonnée avec les collectivités territoriales, mais, à mon sens, ce n’est pas à ces dernières d’assumer la compétence : c’est le rôle de l’État.

S’agissant du contrôle de légalité, comment entendez-vous replacer l’administration préfectorale au cœur du dispositif déconcentré de l’État ? Comme cela a été dit précédemment, on a quand même le sentiment, du point de vue des collectivités territoriales notamment, d’une forme de glissement du pouvoir de l’administration préfectorale vers les directions régionales déconcentrées, ce qui pose un vrai problème dans les territoires, car l’interlocuteur reste en réalité le sous-préfet ou le préfet. Un maire a beaucoup de mal à aller discuter avec la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL), alors qu’il rencontre très régulièrement le sous-préfet. Or c’est la DREAL qui, in fine, pour beaucoup de sujets, va décider, avec un certain éloignement par rapport au territoire, avec une forme d’incapacité à pénétrer le fond des dossiers, à envisager la transversalité d’un certain nombre de décisions. Cela crée un grand nombre de crispations dans les territoires, notamment ceux où le besoin d’aménagement se fait plus particulièrement sentir, par exemple en milieu rural. Comment entendez-vous repositionner l’administration préfectorale dans ce système ?

Quid enfin du projet de réforme de la carte des sous-préfectures, qui a été expérimenté en Alsace, notamment, avec la suppression de deux arrondissements dans le Haut-Rhin ? J’imagine que l’État a d’ores et déjà un certain nombre de retours au sujet de cette expérimentation. Entendez-vous continuer dans cette direction, et ainsi repositionner le sous-préfet dans le rôle de représentant de l’État dans les territoires ?


Mme Élodie Jacquier-Laforge. La dématérialisation est effectivement un sujet important, comme le montre le fait que l’ensemble des groupes l’évoque ce matin. Elle crée un éloignement. Pour certains, toutefois, elle constitue une facilité, car elle augmente l’accessibilité. Elle permet, en plus, au sein des préfectures, de dégager du temps et des agents pour l’accueil. La multiplication des points numériques donne aussi un accès aux services en ligne aux personnes qui vivent dans une zone blanche ou souffrent d’illettrisme numérique – cela existe. Pour la majeure partie de nos concitoyens – en tout cas ceux que je croise tous les jours –, c’est extrêmement positif.

En ce qui concerne l’accueil des étrangers également, on peut se demander pourquoi on ne va pas vers plus de dématérialisation – cela a été mentionné par l’un des rapporteurs. J’aimerais entendre M. le ministre sur ce sujet. Il a dit qu’il fallait effectivement aller plus loin : des éléments pourraient-ils être d’ores et déjà portés à notre connaissance ? Cela permettrait notamment de rationaliser les prises de rendez-vous dans les préfectures, étant donné que la gestion de l’accueil est parfois compliquée. Pour les personnes demandant le renouvellement de leur titre de séjour, le fait de ne pas avoir été convoqué alors que la date d’expiration approche est souvent source d’angoisse : par souci de se montrer proactives et de rester dans les clous, elles se présentent en préfecture. Cela crée des flux qui pourraient parfaitement être anticipés grâce à des moyens numériques.

En ce qui concerne la question plus spécifique des demandes d’asile, on voit que, d’ores et déjà, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a entièrement dématérialisé les dossiers. Pourriez-vous me donner des éléments sur cette avancée ?

Je souhaite aborder un dernier point qui a été évoqué cette année dans le cadre du projet de loi relatif à l’asile et à l’immigration : l’obligation de traiter de façon simultanée une demande d’asile et une demande de titre de séjour. Auparavant, la possibilité en était offerte aux préfectures, mais c’est devenu une obligation. Pourriez-vous m’expliquer, monsieur le ministre, comment vous allez mettre en place cette nouvelle disposition dans les préfectures ?

M. David Habib. Je voudrais commencer par saluer le travail de notre rapporteur pour avis et du rapporteur spécial.

Je note que l’augmentation de 3,4 % des moyens alloués à cette mission pour 2019 fait suite à une diminution dans la loi de finances pour 2018. Je note par ailleurs, pour un certain nombre de thématiques – notamment en ce qui concerne la radicalisation –, une continuité avec la précédente législature. À la suite de plusieurs orateurs, je remarque aussi la poursuite du PPNG.

S’agissant de la dématérialisation, ayant été pendant cinq ans rapporteur spécial de la commission des Finances sur le sujet, je veux redire que le groupe socialiste se félicite que l’on mène à bien, dans les préfectures, cette révolution – dont nous avons d’ailleurs été à l’origine –, même s’il est vrai qu’elle a également des conséquences. Quoi qu’il en soit, la dématérialisation était indispensable.

Monsieur le ministre, j’ai apprécié votre propos concernant la proximité, et cela d’autant plus que vous avez voté, lors de la précédente législature, la réforme des régions, ce qui n’est d’ailleurs pas mon cas. À l’époque, nous étions assis côte à côte dans l’hémicycle…

M. Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur. Je n’ai pas honte d’avoir voté cette réforme !

M. David Habib. Je me réjouis que vous insistiez sur la nécessité de maintenir un niveau départemental garantissant l’accessibilité et la proximité, permettant à chacun de faire valoir ses droits de citoyen.

En ce qui concerne l’asile, si je souscris à ce qui vient d’être dit par l’oratrice du MODEM, je note tout de même un effort moindre dans ce budget par rapport à ceux qui avaient été faits l’année dernière et surtout les deux années précédentes – efforts qui avaient permis à l’État de rattraper un retard important et d’examiner dans de meilleurs délais les dossiers qui lui étaient soumis.

Pour ce qui est de la dématérialisation de la propagande électorale – sujet dont je m’occupe depuis longtemps –, je suis persuadé, monsieur le ministre, que vous allez subir toutes les pressions possibles. Certes, en 2019, ce sont les élections européennes, lesquelles n’intéressent guère que les imprimeurs parisiens, mais plus on va se rapprocher des échéances locales, plus vous allez subir de pressions. Pour ce qui me concerne – et j’espère que mon groupe fera de même –, je soutiendrai toutes les initiatives que vous pourrez prendre pour favoriser une dématérialisation de la propagande électorale. Ce sont 400 millions d’euros qui sont en jeu pour les quatre années qui nous séparent de la fin du quinquennat.

J’avais suggéré que l’on distingue entre les élections nationales et les élections locales. Les premières donnent lieu à une publicité, notamment télévisée, et je ne suis pas certain que l’envoi de documents papier soit nécessaire ; pour les secondes, dans un premier temps, le système actuel pourrait être maintenu, de manière à habituer progressivement nos citoyens à la dématérialisation. En tout cas, nous sommes ouverts au dialogue sur cette question.

J’en reviens à la dématérialisation des titres. Je vous ai entendu dire que nous voyions le bout des difficultés. Or les Pyrénées-Atlantiques, qui sont le dernier département – géographiquement, s’entend, par rapport au nord : elles sont le premier pour le reste (Sourires) –, sont confrontées à des problèmes graves pour ce qui est de la délivrance des cartes grises et des permis. Chez nous, les difficultés subsistent. Il est donc absolument nécessaire de valider les processus et de mettre des moyens humains, ce qui n’a pas été le cas – je peux le constater – depuis deux ans, pour offrir à chaque citoyen, y compris à ceux qui ont difficilement accès à internet – pour des raisons techniques ou des raisons de culture –, ce qui est le cas pour un tiers de la population environ, un accès plus sécurisé et plus confortable. Nous avons le devoir d’assurer l’égalité entre les citoyens, comme l’a rappelé le Défenseur des droits. Il est, me semble-t-il, de la responsabilité du Gouvernement d’entendre ce qui a été dit sur ce sujet.

S’agissant enfin de la question des migrants, je ne peux pas, étant élu du département des Pyrénées-Atlantiques, faire comme si rien ne se passait à Hendaye. Je souhaite que vous donniez les moyens à l’État, en termes de sécurité comme du point de vue administratif, bien évidemment, de faire face à une situation qui a été notée par beaucoup : désormais, on déporte les difficultés du Sud-Est vers le Sud-Ouest, et tout particulièrement vers Hendaye.

M. Philippe Dunoyer. Je commencerai par remercier à mon tour nos collègues rapporteurs pour la qualité de leur travail. La mission « Administration générale et territoriale de l’État » est essentielle en ce qu’elle vise à garantir aux citoyens l’exercice de leurs droits et à assurer la présence et la continuité de l’État sur l’ensemble du territoire de la République. La mission qui nous est présentée dispose d’un budget total de 2,8 milliards d’euros, en hausse de 3,4 % par rapport à 2018. Toutefois, cette hausse doit être relativisée car, comme cela a déjà été dit, elle s’explique en très grande partie par l’organisation des élections européennes en 2019. Ainsi, les dépenses se rapportant à l’organisation de ces élections représentent plus de la moitié des crédits du programme 232. Je voudrais néanmoins, s’agissant de ce programme, et en tant qu’élu de Nouvelle-Calédonie, saluer l’État et le remercier pour l’effort budgétaire supplémentaire qu’il nous appelle à approuver pour 2019. Je pense en effet au référendum d’autodétermination qui aura lieu le 4 novembre. Si les estimations ont été dépassées, c’est en raison de l’implication totale et à un investissement, en l’occurrence financier, de l’État.

Au-delà de l’aspect budgétaire, je tiens à appeler votre attention sur le taux d’abstention particulièrement élevé aux élections européennes. Il était de 56 % en 2014 et de 59 % en 2009. C’est loin d’être une fatalité : ce constat démontre, à nos yeux, la nécessité de mieux sensibiliser les concitoyens à l’importance de ces élections qui peuvent leur sembler éloignées de leurs préoccupations quotidiennes. Plus largement, il convient de sensibiliser les concitoyens à l’utilisation de ce droit fondamental qu’est le droit de vote. Peut-être pourriez-vous nous indiquer, monsieur le ministre, les initiatives que vous comptez prendre en ce sens d’ici au prochain rendez-vous électoral, mais aussi de façon plus générale.

La priorité accordée à la lutte contre la délinquance et la radicalisation est également un message très positif. Le Gouvernement entend mettre l’accent sur la prévention avec, d’une part, la prévention de la radicalisation, accompagnée d’un suivi des victimes et d’une lutte contre les discours radicaux diffusés sur internet et, d’autre part, l’établissement d’une stratégie nationale de prévention de la délinquance, centrée sur les 12-25 ans. Ce sont là des mesures essentielles : nous considérons qu’il n’y aura pas de bonne politique de lutte contre la délinquance et la radicalisation sans une stratégie de prévention ambitieuse.

L’action du Gouvernement s’inscrit dans la continuité, avec la dernière année du plan « Préfectures nouvelle génération » – souvent cité –, qui améliore les modalités de délivrance des titres. Nous saluons les objectifs, qui sont de permettre à un nombre de plus en plus important de citoyens d’obtenir leur titre dans un délai raisonnable et en évitant des déplacements fastidieux, notamment grâce à un recours accru à la dématérialisation. Toutefois, nous déplorons de nouveau l’insuffisance de ce plan : nous pensons qu’il faut entreprendre une véritable réorganisation de l’État, une requalification de sa présence dans les territoires, et qu’il est nécessaire que cela se fasse dans un esprit de concertation avec les acteurs locaux. À cet égard, la politique du Gouvernement en matière d’administration territoriale ne nous semble pas assez ambitieuse, car bien souvent les objectifs fixés pour 2020 reviennent simplement à respecter ceux qui avaient été initialement fixés pour 2018 – c’est vrai en matière de contrôle des établissements recevant du public, de niveau de préparation aux crises, de délais moyens de délivrance des titres ou encore de contrôle des actes des collectivités locales et des établissements publics.

Nous ne pouvons pas faire l’économie d’une redéfinition des missions de l’administration territoriale. Le bilan demandé tout à l’heure par notre collègue Savatier constituera une première étape, mais nous devrons en tirer rapidement les conclusions si nous voulons, à l’avenir, sauvegarder nos services publics et leur nécessaire proximité avec les Français sur l’ensemble du territoire national – je précise : de l’Hexagone mais aussi, bien sûr, des outre-mer.

Sous ces réserves, le groupe UDI, Agir et indépendants votera en faveur des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État ».

M. Ugo Bernalicis. Je souhaite, tout d’abord, évoquer à mon tour la hausse des crédits de la mission. Il aurait été plus judicieux d’expliquer d’emblée qu’elle devait être relativisée du fait des 111 millions d’euros prévus pour les élections européennes.

Au-delà de ce point, de nombreuses questions ont été soulevées, à juste titre. Je relève pour ma part des paradoxes étranges. Ainsi, vous affichez la volonté de renforcer la présence de l’État dans les départements, de faire en sorte que l’État soit un interlocuteur pour les collectivités territoriales, pour les accompagner dans la mise en œuvre de réformes – que je peux par ailleurs contester –, et en même temps vous diminuez les moyens, en particulier le personnel affecté aux préfectures et aux sous-préfectures. On aurait pu imaginer, comme je l’avais dit à votre prédécesseur l’année dernière, que les économies structurelles permises, au sein du ministère de l’Intérieur, par la dématérialisation – l’ANTS et tout ce qui s’ensuit – soient redéployées pour améliorer le service public auprès des collectivités territoriales. Or ce n’est pas ce qui a été fait.

Pis encore, comme il est désormais de coutume au ministère de l’Intérieur – mais c’est aussi le cas dans la plupart des ministères –, on oublie que, quand on conduit une réforme, quelle qu’elle soit, sa mise en œuvre demande de l’énergie, et que la diminution des effectifs, à supposer qu’il faille vraiment qu’ils diminuent – mais je m’inscris dans votre logique, même si elle n’est pas la mienne –, doit intervenir seulement après, et non avant ou pendant : on met en œuvre la réforme, on évalue les gains possibles en termes d’ETPT, puis on diminue les effectifs. En faisant les deux simultanément, vous déstabilisez le fonctionnement des préfectures et des sous-préfectures. Qui plus est, vous vous mettez dans la difficulté quand il s’agit de réagir à des dysfonctionnements – c’est précisément ce qui s’est passé pour la dématérialisation des cartes grises. Mes anciens collègues des préfectures se sont retrouvés en première ligne, ils ont essuyé les plâtres, se faisant engueuler par les citoyens qui arrivaient à la préfecture énervés, et à juste titre. Ici ou là, on a même pris des jeunes en service civique pour faire le primo-accueil en préfecture et faire face aux mécontents. L’administration a fait ce qu’elle a pu, avec le peu de moyens qu’on lui avait donnés. Arrêtons donc de supprimer les emplois tout en conduisant les réformes.

Quant aux propositions, l’une des nôtres serait justement de renforcer le réseau des préfectures et sous-préfectures. Et puis, s’agissant de l’interministérialité, je me permets de rebondir sur la question soulevée par mon collègue de La République en Marche : pourquoi ne rattacherait-on pas le corps préfectoral directement aux services du Premier ministre, plutôt que de le laisser au ministère de l’Intérieur ? Ce serait un gage d’interministérialité flagrant, même si je sais bien, monsieur le ministre, que vous avez déjà perdu la direction générale des collectivités locales (DGCL). Quoi qu’il en soit, le moment est peut-être venu de franchir l’étape suivante…

Je signale, par ailleurs, un problème technique relevé par la Cour des comptes : la sous-budgétisation du programme 216, consacré notamment au contentieux juridique. Il faut lui affecter des moyens suffisants car, du fait de la sous-budgétisation systématique, le budget n’est sincère qu’une fois que nous sommes en fin d’exercice, ce qui est problématique.

En ce qui concerne l’accueil des étrangers en préfecture, des moyens ont été mis, c’est vrai, mais ils sont toujours en deçà de ce qu’il faudrait étant donné le nombre de personnes qui viennent déposer des dossiers. Mettez les moyens, faites des redéploiements : si vous économisez des ETPT, mettez-les dans les sous-préfectures ou dans les préfectures pour l’accueil des personnes, notamment de celles qui font des demandes d’asile. Voilà qui serait responsable. On peut tout de même attendre un an ou deux pour diminuer de 500 le nombre d’ETPT au ministère de l’Intérieur – à moins, bien sûr, que certaines choses ne m’échappent, ou que la sacro-sainte règle des 3 % ne s’applique là aussi.

S’agissant de la CNCCFP, je ne relèverai pas les allusions que j’ai entendues. Pour le reste, je peux partager un certain nombre de points mis en avant par M. le rapporteur pour avis. Par ailleurs, ne faudrait-il pas, à un moment donné, sortir de l’hypocrisie qui consiste à imposer aux candidats d’avoir leur propre mandataire financier pendant la campagne ? Pourquoi les directions régionales des finances publiques ou la direction générale des finances publiques (DGFiP) n’endosseraient-elles pas le rôle de comptable, de mandataire financier, les candidats n’étant alors que des ordonnateurs ? Le paiement serait effectué directement par l’État. Ce serait une solution simple et efficace, qui permettrait les contrôles en direct, avec un personnel suffisant.

M. Stéphane Peu. Je rejoins tout ce qui a été dit par nos collègues à propos de la dématérialisation et quant au fait qu’il est absolument nécessaire – même si le mouvement de dématérialisation est normal et si je le soutiens – de maintenir les possibilités d’un accueil physique.

Je souhaite dire aussi ma grande préoccupation concernant l’accueil des étrangers. Vous le savez, je suis élu de la Seine-Saint-Denis. Tous les matins, chaque jour de l’année, dès cinq heures, des queues se forment devant la préfecture de Bobigny, et elles ne cessent de s’allonger au fil des ans – il est vrai que cela vaut aussi pour d’autres préfectures – sans qu’il y soit jamais apporté de solution. Or, vous le savez – et je vais faire le lien avec un autre débat qui a émergé dans notre pays –, un État, pour être respecté, doit être respectable. En l’espèce, ni les personnels de l’État en charge de ces dossiers ni les usagers ne se sentent respectés : les uns, du fait des conditions de travail, les autres en raison des conditions d’accueil. Il en ressort un État dont l’autorité est inévitablement affaiblie.

Dans mon groupe, beaucoup de députés ont été élus dans ces territoires que l’on dit oubliés de la République. En tant que commissaire aux Lois, j’ai participé à une mission pilotée par François Cornut-Gentille et Rodrigue Kokouendo sur la situation de la Seine-Saint-Denis. Nous avons été reçus par le Premier ministre, qui nous a beaucoup écoutés et a porté une attention particulière aux conclusions de notre rapport, lequel doit désormais se traduire par des actes et des choix budgétaires. Votre prédécesseur, lors de sa passation de pouvoirs, a parlé de cette République où l’on vit de plus en plus côte à côte et où l’on vivra, un jour peut-être, face à face. La République ne peut être incarnée, pour partie, par l’État – son rôle, sa respectabilité, son autorité – et voir, dans des départements comme la Seine-Saint-Denis, un État aussi affaibli et, de ce fait, déconsidéré et en manque d’autorité.

Dans ma circonscription, l’arrondissement de Saint-Denis, qui compte 650 000 habitants, soit plus que bien des départements français, ne dispose toujours pas d’une préfecture de plein exercice, alors même que l’État a acheté des locaux en 2012 en plein centre-ville. À l’heure actuelle, nous n’avons toujours pas vu l’once d’un début d’opération d’installation de cette sous-préfecture. L’État se retrouve propriétaire de locaux vacants, depuis six ans, au centre même de Saint-Denis.

Il y va de l’autorité et de la respectabilité de l’État et de la République. Dans l’un des arrondissements les plus pauvres de France, où la criminalité est la plus élevée, où les questions qui se posent à la République le sont d’une façon extrêmement aiguë, on ne peut avoir un État qui s’efface. Quand l’État s’efface, la République s’affaisse. Il est impossible de ne pas répondre à notre rapport, qui a fait l’unanimité sur les bancs de l’assemblée. Il est urgent d’apporter des réponses, lesquelles passent par des budgets qui prennent en compte cet impératif politique. Or, sauf erreur de ma part, il ne me semble pas avoir vu de sommes inscrites pour implanter une sous-préfecture de plein exercice dans l’arrondissement de Saint-Denis.

Mme Typhanie Degois. Monsieur le ministre, je souhaiterais vous interroger sur le programme 232 relatif à la vie politique, cultuelle et associative. Ses crédits sont en forte augmentation, puisqu’ils sont passés de 122,5 millions d’euros à 207,5 millions d’euros, soit une hausse de 71 %, du fait notamment de l’organisation des élections européennes en 2019. Il y a quelques mois, nous avons voté un projet de loi relatif à l’élection des représentants au Parlement européen, qui comporte plusieurs avancées. La durée des émissions, en tant qu’outils de propagande électorale, a été réajustée afin de permettre davantage de pluralisme : trois minutes au lieu de deux seront accordées à chaque liste ; la fraction corrective à la disposition du Conseil supérieur de l’audiovisuel a été portée d’une heure à une heure trente, afin de s’assurer d’une représentation la plus juste possible, en tenant compte de la contribution de chaque liste candidate au débat national et à la vie démocratique de la nation.

Dans ce budget, quelle enveloppe précise a été prévue pour les élections européennes ? À combien estimez-vous le coût de l’allongement des temps d’antenne ?

M. Mansour Kamardine. Monsieur le ministre, hier, lors de la séance des questions, j’ai interrogé le Gouvernement sur la nécessité de faire reconnaître Mayotte internationalement comme territoire sous souveraineté française. La réponse que vous m’avez faite en a surpris plus d’un. Elle s’apparentait bien plus à un mépris de la Représentation nationale et à une atteinte aux droits parlementaires constitutionnels. J’espère que la question que je vous poserai aujourd’hui, qui est très simple, obtiendra une réponse plus appropriée. Mayotte est confrontée depuis très longtemps à des problèmes de sécurité et d’immigration. Nous avons souhaité que des moyens de sécurité soient mobilisés. Les forces de l’ordre sur place travaillent dans des conditions difficiles, dans la mesure où il n’y a pas de budget de fonctionnement leur permettant d’assurer leur mission. Entendez-vous leur donner des moyens de fonctionnement, alors qu’elles peinent aujourd’hui à acheter du papier ou du carburant, afin qu’elles puissent assurer leur mission, nécessaire à la sécurité de nos concitoyens de Mayotte, aussi longtemps que vous accepterez qu’elle soit une collectivité française ?

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Mon cher collègue, votre question porte plutôt sur la mission suivante.

M. Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur. Monsieur Kamardine, vous venez de parler de mépris. J’en appelle à un respect réciproque. Lorsque j’étais député dans cette assemblée, j’ai toujours veillé à respecter mes interlocuteurs, même ministres. Hier, j’ai tenté de vous répondre, en vous donnant des éléments précis d’actualité. En aucun cas, je n’ai méprisé votre question, et encore moins la collectivité que vous représentez, qui a tout mon respect. Votre attitude ne me semble pas la plus constructive qui soit. Je vous présenterai tout à l’heure plusieurs éléments pour vous prouver qu’il est faux d’affirmer qu’il n’y a pas de budget de fonctionnement pour la sécurité publique à Mayotte.

Monsieur Schellenberger,…

M. Raphaël Schellenberger. Je n’étais pourtant pas le premier à vous interroger !

M. Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur. Mais j’étais impatient de vous répondre !

M. Raphaël Schellenberger. Vous avez été impressionné ! (Sourires.)

M. Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur. Toutes les questions qui m’ont été posées étaient non pas impressionnantes, monsieur Schellenberger, mais de qualité, parce qu’elles l’ont été par des élus, dotés de cultures politiques différentes, qui connaissent les territoires. À ce titre, toutes les questions sont parfaitement légitimes et je ne fais pas de hiérarchie entre elles. Pour avoir été maire, je connais l’importance de l’accompagnement des services de l’État dans notre quotidien.

Les maisons de services au public n’abritent pas que des services de l’État, au contraire même, mais elles ont un rôle majeur de lien avec l’État. C’est en effet à l’État, en lien avec les collectivités, notamment les départements qui constituent un bon échelon de proximité, qu’il revient d’organiser leur déploiement. La ministre Jacqueline Gourault annoncera bientôt les orientations du réinvestissement de ce sujet par l’État vers de nouveaux types de lieux : les « tiers-lieux ».

Monsieur Bernalicis, je n’ai pas « perdu » la DGCL. L’État est représenté par un exécutif : peu importe dans quel ministère sont logées les politiques publiques, ce qui compte c’est qu’elles soient engagées. Je suis très favorable à l’existence d’un ministère en charge des territoires et des collectivités locales.

S’agissant de l’organisation territoriale, il est essentiel de comprendre qu’il existe aujourd’hui deux niveaux de pouvoir, ce que notre administration centrale a parfois un peu de mal à admettre : le pouvoir central et le pouvoir territorial. La loi sur le non‑cumul des mandats a participé de cette démonstration : le choix de l’enracinement territorial fait par de grands élus montre bien que nous devons travailler à ces deux niveaux. Il nous faut un État capable de mettre en œuvre nos politiques publiques, de manière à représenter l’État national et à accompagner le pouvoir local. Si l’on ne comprend pas cela, c’est l’échec assuré. Il est essentiel de travailler ainsi partout : il n’y a pas de territoires oubliés de la République, mais des territoires plus difficiles que d’autres – je ne le nie pas.

C’est pourquoi il est essentiel de ne pas remettre en cause l’autorité des préfets. Elle ne l’est d’ailleurs pas. Le Président de la République l’a clairement dit aux préfets en septembre dernier : il faut, dans chaque territoire, un responsable pour incarner l’État et assumer sa responsabilité. Nous souhaitons que les préfets soient les entrepreneurs de la République et ceux qui, dans le schéma que je viens de définir, nous accompagnent et nous représentent. Par nous, j’entends la puissance publique, sans faire de hiérarchie entre le maire de Saint-Denis, celui d’une commune rurale et le ministre, dans notre volonté d’engagement politique en faveur des territoires. C’est le message que je ferai passer dès ma première rencontre avec les préfets de région et les préfets de département. Il faut réaffirmer leur autorité fonctionnelle sur l’ensemble des services déconcentrés, comme la DREAL.

Monsieur Rebeyrotte, monsieur Schellenberger, monsieur Habib, vous avez évoqué les difficultés du PPNG. Selon les informations dont je dispose, la situation a été globalement rétablie, après de graves problèmes en 2018. M. Bernalicis a mentionné à raison les difficultés qu’ont eues les agents pour faire face à des problèmes dont ils n’étaient pas responsables. La situation s’est clairement améliorée. Il subsiste quelques difficultés techniques, sur la levée de gage des véhicules anciens, par exemple, qui sont en cours de résolution. Il sera important de refaire un point sur ce sujet. Les délais de délivrance sont aujourd’hui acceptables : trois jours pour 80 % des opérations sur les cartes grises et quinze jours pour les permis de conduire. Désormais, les usagers peuvent effectuer leurs démarches sept jours sur sept et vingt-quatre heures sur vingt-quatre.

Par ailleurs, si personne ici n’a peur de la dématérialisation des procédures, sachant les plus-values qu’elle peut apporter, chacun sait aussi qu’il existe une rupture numérique dans notre pays, qui n’est pas seulement liée à la question de l’âge, à laquelle on voudrait souvent la réduire. Il est essentiel d’avoir des guichets, dans les maisons de services au public ou les mairies.

Madame Jacquier-Laforge, nous travaillons au virage numérique pour les procédures destinées aux étrangers. C’est l’enjeu du projet « administration numérique des étrangers en France » (ANEF). C’est un chantier au long cours, qui prendra du temps. Notre objectif est de le voir monter en puissance d’ici à 2022, grâce au déploiement des téléprocédures, à la refonte des systèmes d’information de l’asile, du séjour et de la nationalité. Le projet est cofinancé par l’Union européenne, au titre du fonds asile, migration, intégration (FAMI). En outre, la loi du 10 septembre 2018 prévoit la simultanéité des demandes d’asile et de titre de séjour pour un autre motif. Cette mesure, qui permettra de réduire les délais de réponse aux demandeurs d’asile et de séjour, va dans le bon sens.

Monsieur Dunoyer, madame Degois, vous m’avez interrogé sur la prise en charge du coût des campagnes et l’enjeu de mobilisation pour les élections, ambition dans laquelle je ne peux que vous accompagner. Nous devons améliorer l’information des électeurs. La propagande papier sera doublée d’une propagande en ligne. Qui plus est, la ministre en charge des affaires européennes conduit actuellement une réflexion visant à populariser la démarche du vote aux élections européennes, dans la grande neutralité devant s’appliquer à toute parole de l’État sur un tel sujet.

La réforme du répertoire électoral unique, qui entrera en vigueur au 1er janvier 2019, a été conduite en partenariat avec l’Association des maires de France (AMF). Elle permettra de s’inscrire sur les listes électorales jusqu’à six semaines avant le scrutin, afin de favoriser les inscriptions et la participation.

Monsieur Dunoyer, vous m’avez également interrogé sur les indicateurs relatifs aux pratiques exigibles prioritaires (PEP). Nous devons aller plus loin. S’il y a des indicateurs physiques, il ne faut pas construire de politique sur leur seul fondement. Nous voulons changer en profondeur la méthode de travail, pour réorganiser l’administration territoriale avec les acteurs du terrain.

Monsieur Bernalicis, le PPNG a supprimé environ 1 300 emplois, grâce aux gains de productivité permis par le numérique, ce qui a généré 70 millions d’euros d’économies. Plusieurs centaines de personnels, pour environ 600 équivalents temps plein (ETP), ont été redéployés des guichets vers d’autres missions. Environ 600 agents ont été formés et accompagnés pour évoluer vers d’autres métiers.

S’agissant de vos propositions relatives au financement des campagnes, sachez que nous serons attentifs aux initiatives qui iront vers plus de transparence, de contrôle et d’économies.

Quant aux dépenses de contentieux, qui sont, comme vous l’avez rappelé, traditionnellement sous-budgétisées, ce n’est plus le cas depuis le projet de loi de finances pour 2018, où vous aviez voté une dotation de 80 millions d’euros. À l’heure actuelle, aucun problème de sous-budgétisation ne se pose. C’est pourquoi nous avons choisi de reconduire la même somme. En cas d’accident au cours de l’année, elle serait abondée.

Monsieur Peu, l’État est présent en Seine-Saint-Denis, parce qu’il y est incarné par des femmes et des hommes. Je connais les tensions de ce département, où j’ai effectué mon premier déplacement. Nous devons y être présents. Mais nous ne pouvons pas redéployer des effectifs du jour au lendemain, au risque de fragiliser d’autres territoires. Il faut concentrer des moyens dans toutes les zones difficiles. La Seine-Saint-Denis a besoin d’être accompagnée, qu’il s’agisse de la scolarité, dès le plus jeune âge, ou de la sécurité du quotidien.

Concernant la sous-préfecture de Saint-Denis, rappelons que l’État ne peut se résumer à sa seule présence. Les quartiers de reconquête républicaine d’Aulnay-sous-Bois et de Sevran font partie des outils du retour de l’État sur le territoire. Mais vous avez raison de m’interpeller : nous ferons un point ensemble, dès que j’aurai plus d’informations sur le relogement de cette sous-préfecture. Comme vous l’avez dit, il faut prendre en compte le flux des étrangers. Je demanderai que l’on me propose des options que j’examinerai avec vous, si vous en êtes d’accord.

Madame Degois, nous avons prévu 1,5 million d’euros pour la campagne audiovisuelle et 111 millions d’euros au total pour le plafond des dépenses remboursables – 9,2 millions d’euros par liste, inscrits dans le programme 232. Le coût de la campagne audiovisuelle a bien été pris en compte.

Monsieur Habib, parler d’une baisse du budget de la mission par rapport à 2017, c’est partiellement exact et partiellement faux. Vous savez que la récurrence des élections en 2017 l’avait fait fortement abonder. La baisse n’est donc qu’optique, rassurez-vous.

Votre propos sur la dématérialisation ne me surprend pas. Chaque année électorale, le ministère de l’Intérieur propose cette dématérialisation, dans sa première version du budget, et, généralement, ce sont les parlementaires qui montent au créneau. Nous devons nous interroger sur ce sujet ; nous savons tous ce qu’il advient des petites enveloppes marron qui arrivent chez les électeurs deux jours avant l’élection, sans grand impact ni sur la mobilisation, ni sur le vote final. En revanche, il faut distinguer les élections nationales des élections locales, qui offrent une lecture un peu différente. Nous serons ouverts à toute discussion sur ce sujet.

Même si l’on sort un peu de la mission qui nous occupe, je vais revenir sur la question des migrants à Hendaye et, plus globalement, à la frontière espagnole. Ces dernières semaines, les arrivées ont augmenté de 155 % en Espagne, ce qui représente le principal flux vers l’Europe, alors même qu’ils y ont baissé de 90 %. Cela doit nous éclairer sur les conséquences de choix politiques et les messages politiques qui sont passés. L’accueil de l’Aquarius par le gouvernement espagnol a pu donner l’impression que c’était un pays plus ouvert.

M. David Habib. Ne dites pas cela !

M. Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur. Vous pouvez ne pas être d’accord ! Je ne suis pas là pour être d’accord avec tout le monde, mais pour vous dire mon sentiment et la réalité des chiffres. Le gouvernement espagnol a pu constater, dans les jours qui ont suivi l’accueil de l’Aquarius, un afflux de migrants venus du Maroc. Mon premier déplacement international sera en Espagne, où je rencontrerai mon homologue. Je me rendrai également au Maroc pour travailler avec les autorités. Il est essentiel de travailler de concert.

Dans le cadre d’une expérimentation, j’ai pris la décision de nommer, à la frontière franco-espagnole, un coordinateur, afin de disposer d’un référent unique capable de piloter l’ensemble des actions et des forces, et de nous représenter dans les échanges avec les autorités espagnoles. La gestion des flux migratoires doit se faire dans un dialogue permanent entre les deux pays concernés : l’Espagne et la France, l’Italie et la France ou l’Allemagne et la France. J’ai bien conscience de cette difficulté. Le secrétaire d’État, Laurent Nuñez, s’est rendu à Hendaye, à la frontière espagnole. Nous connaissons les difficultés des agents assurant la sécurité et la gestion des flux migratoires. Nous devons trouver des solutions en moyens humains, mais aussi de nouvelles méthodes.

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Après le départ du ministre, la Commission examine les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État » (M. Olivier Marleix, rapporteur pour avis).

Mme Yaël Braun-Pivet, présidente. Il appartient à la commission des Lois, saisie pour avis du projet de loi de finances pour 2019, de se prononcer sur les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État ».

Nous allons d’abord examiner les amendements de crédits, qui portent sur l’état B annexé à l’article 29 du projet de loi de finances.

Je suis saisie d’un amendement n° II-CL17 de M. David Habib. Il est défendu par Mme Cécile Untermaier.

Mme Cécile Untermaier. Nous proposons d’augmenter de six millions d’euros les crédits de personnel du programme « Administration territoriale » afin de mieux accueillir et accompagner les demandeurs de titre. Cela représente 400 équivalents temps plein.

Je dois dire que cette dématérialisation a très mal fonctionné ; elle a plongé plus de 400 000 personnes dans les difficultés, certaines ont été convoquées au tribunal. Nous devons y remédier.

M. Olivier Marleix, rapporteur pour avis. L’honnêteté m’oblige à rappeler que 313 points numériques d'accueil ont été créés en 2018 dans les préfectures, soit le double de la prévision initiale, signe que le ministère de l'Intérieur a pris conscience de l'importance de cette question.

À titre personnel, je partage cependant votre analyse et je ne peux qu’être favorable à cet amendement.

M. Rémy Rebeyrotte. Le ministre l’a rappelé, les problèmes sont, pour la plupart, dernière nous. Il pourrait être nécessaire de mobiliser 500 000 ou 1 million d’euros pour solder les dernières difficultés, mais en aucun cas six millions d’euros.

M. Ugo Bernalicis. Je soutiens cet amendement. Je vais moi-même visiter demain l’ANTS, dont on est en train de privatiser une partie des missions, notamment l’accueil téléphonique. Un service public doit être assuré par des agents publics.

Mme Cécile Untermaier. Cet amendement mériterait d’être adopté comme un signal de notre exigence en matière d’accueil physique des usagers.

La Commission rejette l’amendement n° II-CL17.

Elle aborde l’amendement n° II-CL18 de M. David Habib.

Mme Cécile Untermaier. Il s’agit d’abonder de 30 millions d’euros le fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD), dont les moyens avaient été significativement diminués en 2018.

M. Olivier Marleix, rapporteur pour avis. Effectivement, la situation du FIPD n’est pas satisfaisante. Ses moyens sont passés, en 2018, de 80,4 millions à 72,9 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement alors que ses missions ont été élargies à la prévention de la radicalisation.

Là encore, je rejoins l’analyse de Mme Untermaier et, à titre personnel, j’émettrai un avis favorable.

M. Rémy Rebeyrotte. Nous avons interrogé le ministère sur cette question, car nous partageons les préoccupations exprimées. Le FIPD fait actuellement l’objet d’une mission d’évaluation ; nous proposons d’attendre les conclusions de celle-ci et de repousser cet amendement.

M. Ugo Bernalicis. Je suis favorable à cet amendement de rééquilibrage. Je ne suis, par ailleurs, pas certain que la vidéosurveillance participe réellement de la prévention de la délinquance. Sur ce sujet, on pilote décidément à vue…

M. Philippe Dunoyer. Je vais soutenir cet amendement. La prévention de la délinquance prend plusieurs formes : la délinquance des mineurs, mais aussi les violences faites aux femmes.

M. Stéphane Peu. Nous allons soutenir cet amendement. Il ne se passe pas une semaine sans que l’on relève le cadavre d’un jeune dans mon département… et, pendant ce temps, les associations de prévention de la délinquance mettent la clé sous la porte, faute de subventions. Le FIPD est un maillon essentiel de la chaîne.

M. Rémy Rebeyrotte. Je suis d’accord avec ce qui a été dit. Il faudra sans doute réorienter ce fonds, mais ne l’abondons pas avant d’avoir achevé l’évaluation qui a été lancée.

La Commission rejette l’amendement n° II-CL18.

Mme Yaël Braun-Pivet, présidente. Avant de mettre aux voix les crédits de la mission, je vais demander à notre rapporteur quel est son avis sur ces crédits.

M. Olivier Marleix, rapporteur pour avis. À titre personnel, je m’abstiendrai d’émettre un avis.

La Commission donne un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État » pour 2019.


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   Personnes entendues

 Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) :

— M. François LOGEROT, premier président honoraire de la Cour des comptes, président de la Commission ;

— Mme Marie-Thérèse MERNY, secrétaire générale adjointe de la Commission et cheffe du service de l’administration générale.

 Ministère de l’Intérieur – Direction de la Modernisation et de l’Action territoriale (DMAT) :

— M. Alain ESPINASSE, directeur de la Modernisation et de l’Action territoriale, secrétaire général adjoint ;

— M. Laurent BUCHAILLAT, administrateur civil hors classe, sous-directeur de l'Administration territoriale ;

— Mme Pascale PIN, chargée de mission au bureau des élections et des études politiques.

 Transparency International France :

— M. Marc-André FEFFER, président ;

— Mme Elsa FOUCRAUT, responsable du plaidoyer.

 

 

 


([1]) La loi n° 90-55 du 15 janvier 1990 relative à la limitation des dépenses électorales et à la clarification du financement des activités politiques est à l'origine de la création de la commission.

([2]) À partir du 1er janvier 2019, l’ensemble des emplois du programme « Administration territoriale » sont rattachés aux services déconcentrés (préfectures, sous-préfectures et représentations de l’État dans les collectivités d’outre-mer). Les emplois précédemment affectés en administration centrale en raison de la nature de leurs missions (96 ETPT) font l’objet d’un transfert sortant du programme 307 vers le programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur » conformément à une recommandation de la Cour des comptes.

([3]) Loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.

([4]) Loi n° 2018-509 du 25 juin 2018 relative à l'élection des représentants au Parlement européen.

([5]) La loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique a interdit à un parlementaire élu en métropole ou dans une circonscription à l’étranger de se rattacher, pour l’attribution de la seconde fraction, à un parti ayant présenté des candidats uniquement outre-mer. Il est ainsi mis fin aux détournements du mécanisme de financement, qui consistaient à majorer artificiellement la seconde fraction perçue par des partis ultra marins, avant de la reverser à d’autres partis non éligibles au financement public.

([6]) Loi n° 2017-1339 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique.

([7]) Proposition de résolution de MM. Antoine SAVIGNAT, Daniel FASQUELLE et plusieurs de leurs collègues tendant à créer une commission d’enquête sur l’organisation et le fonctionnement de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (n° 1254).

([8]) Rapport d’information de M. Romain COLAS sur l’évaluation de la pertinence des dispositions législatives et réglementaires relatives au financement des campagnes électorales et des partis politiques (Assemblée nationale, XIVème législature, n° 2979).

([9]) L’élection présidentielle des 23 avril et 7 mai, les élections législatives des 11 et 18 juin et les élections sénatoriales du 24 septembre 2017.

([10]) Le code électoral prévoit que le dépôt des comptes de campagne des candidats intervient deux mois après la tenue de l’élection. La commission dispose d’un délai de six mois, à compter de la date de dépôt des comptes, pour se prononcer ; ce délai est ramené à deux mois en cas de contentieux initial sur l’élection et il court alors à compter de l’expiration du délai légal de dépôt des comptes.

([11]) Dans les conditions prévues par l’article 11 du décret n° 2018-457 du 6 juin 2018 portant convocation des électeurs et organisation de la consultation sur l'accession à la pleine souveraineté de la Nouvelle-Calédonie.

([12]) Loi n° 2017-1339 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique.

([13]) Loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique.

([14]) Loi n° 2017-286 du 6 mars 2017 tendant à renforcer les obligations comptables des partis politiques et des candidats.

([15]) Ce pouvoir de modulation ne porte que sur les conséquences prévues par l’article 11-7 de la loi du 11 mars 1988, à savoir : la perte de réduction d’impôt et sa durée ; la perte du bénéfice de l’aide publique et sa durée.

([16]) Loi n° 2017-1339 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique.

([17])  Rapport d’information de M. Romain COLAS, précité.

([18]) Loi n° 2011-412 du 14 avril 2011 portant simplification de dispositions du code électoral et relative à la transparence financière de la vie politique.

([19]) Loi organique n° 2013-906 du 11 octobre 2013 et loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relatives à la transparence de la vie publique.