N° 1309

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 17 octobre 2018

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE LÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET LOI de financement de la sécurité sociale pour 2019 (n° 1297),

 

par M. Éric ALAUZET,

Député.

 

 

 

 


 


—  1  —

  SOMMAIRE

___

Pages

Introduction

PremiÈre partie : lÉquilibre gÉNÉral et les recettes

I. Le retour à lÉquilibre de la sÉCURITÉ sociale en 2018 et 2019

A. Une nette amÉlioration des comptes sociaux symBolisÉe par le retour à lÉquilibre du rÉgime gÉNÉral et des rÉgimes obligatoires de base en 2018

1. Léquilibre du régime général en 2018

2. Léquilibre de lensemble des régimes obligatoires de base en 2018

B. 2019 : LexcÉdent du rÉgime gÉNÉral et du fonds de solidaritÉ vieillesse ainsi que de lensemble des rÉgimes obligatoires de base

1. Le retour à léquilibre du régime général et du FSV

2. Léquilibre des comptes sociaux en 2019

C. Lextinction de la dette sociale en 2024 et lavenir des ressources de la Cades

1. Létat de la dette sociale

2. La reprise des déficits cumulés de lACOSS par la CADES à hauteur de 15 milliards deuros

3. Lavenir des ressources de la CADES : la question comptable

II. Les dispositions relatives aux recettes : la poursuite des engagements pour valoriser davantage le travail et encourager la compÉTITIVITÉ des entreprises

A. LexonÉration de cotisations des heures supplÉmentaires

1. Les régimes des heures supplémentaires

a. Le cas général des heures supplémentaires des salariés

b. Les heures complémentaires des salariés à temps partiel

c. Les salariés sous convention de forfait en heures ou en jours sur lannée

d. Les salariés des particuliers employeurs, les assistants maternels, les agents publics et les salariés relevant des régimes spéciaux de la SNCF et de la RATP

e. Les agents publics

2. Exonérer de cotisations sociales les heures supplémentaires pour dynamiser le pouvoir dachat des actifs

a. Le champ des rémunérations éligibles à lexonération

b. Le montant de la réduction de cotisations

c. Un coût de 2 milliards deuros à compter de 2020

d. Une mesure en faveur du pouvoir dachat des personnes en emploi

B. Des rÈgles dassujettissement des revenus de remplacement au taux plein de CSG plus justes

1. La CSG sur les revenus de remplacement

a. Lassiette de la CSG sur les revenus de remplacement

b. Les taux applicables aux revenus de remplacement

2. Le critère du RFR pour déterminer les seuils dassujettissement et laugmentation du taux plein de CSG de 1,7 point en LFSS pour 2018

3. Le lissage de lentrée des bénéficiaires de revenus de remplacement dans le champ du taux plein : une mesure de justice fiscale

C. La concrÉtisation en 2019 de la transformation du CICE et du CITS en baisse pÉrenne de cotisations sociales et la réforme des dispositifs dexonÉrations spÉcifiques

1. La compensation de la suppression du CICE par une réduction forfaitaire de la cotisation maladie et par le renforcement de lallégement général

2. Modifier le calendrier dentrée en vigueur dune partie du renforcement de lallégement général

3. Des effets à attendre globalement positifs et différenciés selon les employeurs

4. Les réformes des dispositifs spécifiques dallégements de cotisations sociales patronales

a. La réforme du dispositif spécifique aux contrats en alternance

i. Le contrat dapprentissage

ii. Le contrat de professionnalisation

b. La réforme des exonérations applicables au secteur de linsertion par lactivité économique

c. La réforme des exonérations sociales applicables aux contrats uniques dinsertion et aux contrats daccompagnement dans lemploi

d. La modification du régime dexonération spécifique applicable aux structures employant des aides à domicile auprès de publics fragiles

e. La suppression de lexonération spécifique pour lemploi des travailleurs occasionnels et de demandeurs demploi dans le secteur agricole

f. La refonte des dispositifs dexonérations applicables dans les anciens départements et régions doutre-mer

g. Les allégements de cotisations pour les employeurs des salariés relevant de régimes spéciaux

III. Les autres dispositions relatives aux recettes

A. La prolongation de la durÉe de lexonÉration de début dactivité, de création ou de reprise dentreprise pour les exploitants agricoles

B. Lajustement de la cotisation subsidiaire maladie

C. SÉcuriser la participation des organismes complÉmentaires santÉ au financement des nouveaux modes de rÉmunÉration

D. Des mesures de simplification

1. La simplification des modalités de calcul des cotisations sociales des travailleurs indépendants

2. La démarche de simplification de la déclaration et du recouvrement des cotisations

IV. Les transferts financiers entre lÉtat et la sÉCURITÉ sociale et entre branches de la sÉCURITÉ sociale

A. LÉvolution des modalitÉs de compensation des pertes de recettes de la sÉcuritÉ sociale

1. Létat des lieux des compensations par lÉtat des exonérations de cotisations sociales

2. La non-compensation des mesures nouvelles dexonération

B. Les transferts financiers entre lÉtat et la sÉcuritÉ sociale

1. Laugmentation significative de la TVA transférée par lÉtat à la sécurité sociale

2. Compenser les effets des mesures dampleur en faveur du pouvoir dachat des actifs et de la compétitivité des entreprises

a. Les compensations induites par la mesure de hausse de la CSG en contrepartie de la baisse de cotisations salariales

b. Les transferts liés à la transformation du CICE en baisse de cotisations

3. Sécuriser juridiquement les prélèvements sociaux sur les revenus du capital

4. Compenser les pertes de recettes de la branche vieillesse

5. Tenir compte des besoins de financement du secteur médico-social et de laide à domicile

6. Tirer les conséquences du transfert à la CADES dune partie du déficit cumulé de lACOSS

7. Des affectations visant à neutraliser pour les branches les effets des transferts entre lÉtat et la sécurité sociale

seconde partie : Les dÉpenses

I. Les dÉpenses dassurance maladie

A. Lefficience des dÉpenses de santÉ, un enjeu crucial pour lavenir de lAssurance maladie

1. Des dépenses élevées et structurellement dynamiques

2. Une progression freinée par les mesures de limitation de la dépense, mais une augmentation des soins de ville dynamique

3. Veiller à lefficience des dépenses de santé pour maîtriser la dépense sans dégrader laccès aux soins

B. En 2018, lONDAM devrait Être respectÉ pour la neuviÈme année consÉcutive

C. Les objectifs de dÉpenses de la branche maladie pour 2019

1. Les objectifs de la branche maladie, invalidité et maternité

2. Un ONDAM pour 2019 rehaussé à 2,5 %

a. Un ONDAM fixé à 200,3 milliards deuros

b. Les principales mesures déconomies relatives à lONDAM pour 2019

D. Les principales mesures relatives aux dÉpenses dassurance maladie

1. La mise en œuvre du reste à charge « 0 »

2. Le renforcement des dispositifs daide à la complémentaire santé

3. Des modes de tarification diversifiés

4. Les dispositions relatives aux médicaments

5. Les autres mesures du projet de loi

II. la branche vieillesse et le Fonds de solidaritÉ vieillesse

A. Une rÉduction de lexcÉdent de la branche vieillesse en 2018

B. Vers la poursuite du redressement des comptes du FSV

C. Les Objectifs de dÉpenses de la branche vieillesse et du FSV en 2019

III. La branche accidents du travail-maladies professionnelles (AT-MP)

A. Un excÉdent en baisse en 2018…

B. … qui augmenterait en 2019

C. Les dotations de la branche AT-MP aux fonds amiante et les versements au titre de la sous-dÉclaration des accidents du travail, du dispositif de retraite anticipÉe et du compte professionnel de prÉvention

IV. La branche famille

A. Un solde excÉdentaire en 2018, après dix ans de dÉficit

B. Un excÉdent en augmentation en 2019, sous leffet de recettes dynamiques

C. Des mesures concrÈtes pour les familles

1. La majoration du complément mode de garde pour les familles ayant un enfant en situation de handicap

2. La prolongation du complément mode de garde à taux plein jusquà lentrée à lécole maternelle

3. La prolongation du congé maternité pour les travailleuses indépendantes et les exploitantes agricoles

V. Les mesures communes À lensemble des branches

A. La revalorisation diffÉRENCIÉe des prestations sociales

B. Le recouvrement des indus et la lutte contre la fraude

C. La modernisation de la dÉlivrance des prestations sociales

EXAMEN en commission

Liste des personnes auditionnÉes PAR LE RAPPORTEUR


—  1  —

   Introduction

    

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2019 marque le retour à l’équilibre des comptes de la sécurité sociale. Dès 2018, le solde du régime général sera positif pour la première fois depuis dix-huit ans, atteignant 1,1 milliard d’euros. En 2019, les comptes sociaux dans leur ensemble retrouveront l’équilibre, avec un excédent de 0,7 milliard d’euros.

Ce retour à l’équilibre concrétise les réformes et actions entreprises depuis plusieurs années pour réduire les déficits sociaux. Il traduit aussi le dynamisme de l’activité qui s’explique par des facteurs exogènes, mais également par le retour de la confiance des acteurs économiques depuis plus d’un an. Enfin, il résulte des mesures pour maîtriser les dépenses du champ de la sécurité sociale, symbolisées par le respect de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM).

Ces résultats et ces prévisions responsables permettent d’affermir l’objectif de disparition de la « dette sociale » en 2024. À cette échéance, la totalité de la dette transférée à la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) aura été apurée et les déficits cumulés de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) qui n’ont pas été transférés à la CADES devraient être comblés par les excédents annuels dégagés par le régime général.

La perspective de l’extinction à moyen terme de la dette sociale s’accompagne de multiples propositions de réaffectation des 17,2 milliards d’euros de ressources dont bénéficie actuellement la CADES. La plupart d’entre elles visent à ce qu’elles participent à la couverture de besoins de financement identifiés, comme la dépendance. Il convient toutefois de souligner qu’en comptabilité nationale, le débat se pose d’une toute autre manière. Selon ce référentiel comptable, les remboursements de dette sociale effectués par la CADES ne sont pas comptabilisés en charges, puisque la dette constituée résulte de charges passées déjà comptabilisées. En revanche, les sommes issues de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) et de la fraction de la contribution sociale généralisée (CSG) affectée à la CADES sont comptabilisées en produits. Autrement dit, la suppression de ces ressources ou leur affectation à des dépenses au sens de la comptabilité nationale dégraderait le déficit public. Il faut garder à l’esprit cet aspect purement comptable pour aborder le débat de l’avenir des ressources de la CADES.

De même, le contexte de retour à l’équilibre des comptes sociaux doit permettre d’engager une réflexion sur les modalités de compensation des pertes de recettes de la sécurité sociale par l’État. Le déficit de l’État est à un niveau extrêmement important (98,7 milliards d’euros dans le projet de loi de finances pour 2019) et il résulte en partie des mesures de compensations de pertes de recettes de la sécurité sociale, que ce soit par des crédits budgétaires ou par des affectations de recettes. Le PLFSS pour 2019 marque une évolution de la pratique s’agissant de ces compensations, reflétant la prise en compte par le Gouvernement du rapport remis au Parlement sur les relations financières entre l’État et la sécurité sociale en application de l’article 27 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 ([1]). Il propose en effet de ne pas compenser certaines mesures nouvelles entraînant des pertes de recettes pour la sécurité sociale. Cette évolution est pleinement justifiée dans la mesure où les exonérations de cotisations décidées par le législateur ont notamment pour effet d’encourager l’emploi et, partant, d’augmenter les recettes de la sécurité sociale.

Au-delà du retour à l’équilibre, 2019 sera une année exceptionnelle s’agissant du soutien aux entreprises. La transformation du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) en baisse pérenne de cotisations patronales traduit en actes le choix de la majorité en faveur de la compétitivité de nos entreprises. En 2019, les entreprises éligibles bénéficieront à la fois de versements de CICE au titre des années 2018 et antérieures et de l’allégement de cotisations, pour un total supérieur à 40 milliards d’euros.

Le PLFSS pour 2019 comporte également des mesures majeures pour le pouvoir d’achat des Français, comme l’exonération sociale des heures supplémentaires ou encore le lissage de l’assujettissement des revenus de remplacement au taux plein de CSG.

En dépenses, la préférence nationale en faveur de la santé reste marquée, avec une augmentation de l’ONDAM fixée à 2,5 % pour 2019, au lieu de 2,3 % prévus dans la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022. Cet effort permettra d’investir 400 millions d’euros supplémentaires dans la transformation du système de santé et la modernisation de l’hôpital.

Pour autant, les efforts de maîtrise des dépenses engagés courageusement depuis plusieurs années – et qui ont permis de rétablir les comptes – devront être poursuivis, à hauteur de 3,8 milliards d’euros en 2019.

Le rapporteur salue les mesures de pouvoir d’achat au bénéfice de tous, et singulièrement des retraités, que constituent la mise en œuvre du reste à charge « 0 » ou l’extension de la couverture maladie universelle complémentaire aux bénéficiaires de l’aide au paiement d’une complémentaire santé, moyennant une participation financière modeste. Elles viennent compléter la hausse de certaines prestations comme le minimum vieillesse.

Parallèlement, un effort est demandé aux bénéficiaires de certaines prestations sociales, en particulier aux retraités, par une revalorisation inférieure à l’inflation. Cette mesure permet de maintenir l’équilibre de la branche vieillesse, alors que le retour du déficit était anticipé.

Enfin, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale comprend plusieurs mesures adaptant certaines prestations aux besoins des familles, qu’il s’agisse des congés maternité des travailleuses indépendantes et des exploitantes agricoles, de la majoration du complément mode de garde pour les familles ayant un enfant en situation de handicap ou du maintien du taux plein du complément mode de garde jusqu’à l’entrée en maternelle pour les enfants atteignant l’âge de trois ans au premier semestre.

 

 

 

 

 

 


—  1  —

   PremiÈre partie : l’Équilibre gÉNÉral et les recettes

I.   Le retour à l’Équilibre de la sÉCURITÉ sociale en 2018 et 2019

A.   Une nette amÉlioration des comptes sociaux symBolisÉe par le retour à l’Équilibre du rÉgime gÉNÉral et des rÉgimes obligatoires de base en 2018

1.   L’équilibre du régime général en 2018

En 2018, le régime général dégagerait des excédents pour la première fois depuis 2001, le solde prévisionnel s’élevant à 1,1 milliard d’euros, contre un déficit de 2,2 milliards d’euros en 2017. Si l’on y agrège les comptes du Fonds de solidarité vieillesse (FSV), l’ensemble serait en léger déficit de 1 milliard d’euros en 2018, contre un déficit de 5,1 milliards d’euros en 2017.

À l’exception de la branche maladie, en déficit de 0,9 milliard d’euros, les branches du régime général seraient excédentaires en 2018, y compris la branche famille (+ 0,4 milliard d’euros), situation inédite depuis 2007.

solde des branches du rÉgime gÉNÉral et du FSV

(en milliards d’euros)

 

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018 (p)

Variation

Maladie

– 5,9

– 6,8

– 6,5

– 5,8

– 4,8

– 4,9

– 0,9

+ 4,0

AT-MP

– 0,2

0,6

0,7

0,7

0,8

0,8

0,8

0,0

Famille

– 2,5

– 3,2

– 2,7

– 1,5

– 1,0

– 0,2

0,4

+ 0,6

Vieillesse

– 4,8

– 3,1

– 1,2

– 0,3

0,9

1,8

0,8

– 1,0

Régime général

– 13,3

– 12,5

– 9,7

– 6,8

– 4,1

– 2,2

1,1

+ 3,3

FSV

– 4,1

– 2,9

– 3,5

– 3,9

– 3,6

– 2,9

– 2,1

+ 0,8

RG + FSV

– 17,5

– 15,4

– 13,2

– 10,8

– 7,8

– 5,1

– 1,0

+ 4,1

Source : commission des finances, d’après le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019.

● Le retour à l’équilibre est permis par la franche réduction du déficit en 2018. Après une diminution de 1,9 milliard d’euros en 2017, le déficit du régime général de la sécurité sociale se réduirait de 3,3 milliards d’euros en 2018. Cette diminution résulterait d’une plus forte progression des recettes (+ 17,6 milliards d’euros) que des dépenses (+ 14,3 milliards d’euros).

 

 

 

 

Évolutions des recettes et dÉpenses du rÉgime gÉNÉral et du FSV

(en milliards d’euros)

 

Recettes

Dépenses

Solde

 

2017

2018

Variation

2017

2018

Variation

2017

2018

Variation

Maladie

201,3

210,4

+ 9,1

206,2

211,3

+ 5,1

– 4,9

– 0,9

+ 4,0

AT-MP

12,6

12,8

+ 0,2

11,7

12,0

+ 0,3

1,1

0,8

– 0,3

Famille

49,8

50,5

+ 0,7

50,0

50,1

+ 0,1

– 0,2

0,4

+ 0,6

Vieillesse

126,6

134,5

+ 7,9

124,8

133,7

+ 8,9

1,8

0,8

– 1,0

Régime général

377,6

395,2

+ 17,6

379,8

394,1

+ 14,3

– 2,2

1,1

+ 3,3

Régime général + FSV

376,5

394,6

+ 18,1

381,6

395,7

+ 14,1

– 5,1

– 1,0

+ 4,1

Source : commission des finances, d’après les données du PLFSS pour 2019.

La croissance des recettes serait dynamique en 2018, tirée par l’évolution de la masse salariale du secteur privé (+ 3,5 %). Le montant total des recettes du régime général pour 2018 ne serait que marginalement modifié par les mesures du PLFSS pour 2018 en faveur du pouvoir d’achat. La hausse du taux de CSG de 1,7 point procurerait un supplément de recettes de 22,6 milliards deuros en 2018 qui serait compensé :

– par une baisse de recettes de l’ordre de 8 milliards d’euros, correspondant à la suppression des cotisations salariales maladie, à la modulation des cotisations sociales des travailleurs indépendants et à la baisse du taux de cotisations patronales des fonctionnaires et des régimes spéciaux ;

– par la compensation par le régime général (via l’ACOSS) à l’Unédic de la perte de recettes pour l’assurance chômage liée à la suppression de la cotisation chômage à partir du 1er octobre, par un moindre transfert de l’État vers la sécurité sociale sous la forme d’une réduction de la quote-part de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) affectée à la sécurité sociale et par le transfert des recettes du prélèvement de solidarité pour un total de 13,0 milliards d’euros ;

– par une perte de TVA de 1,2 milliard d’euros comptabilisée en 2017 (voir encadré infra).

En définitive, le gain net pour la sécurité sociale de ces mesures en recettes s’établit à 0,4 milliard deuros en 2018, ce qui permet au régime général de compenser des moindres recettes correspondant à des recettes exceptionnelles (one shot) de 2017 non reconduites en 2018 : l’affectation à la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) des sommes mises en réserve dans la section III du FSV (– 0,9 milliard d’euros) et la modification du fait générateur de la taxe sur les véhicules de société (‑ 0,2 milliard d’euros).

L’impact des changements d’affectation de TVA en 2018 sur les comptes 2017

La mesure du pouvoir d’achat en faveur des actifs, consistant en une hausse de la CSG en contrepartie pour les actifs, de baisses de cotisations, a nécessité des ajustements dans les transferts financiers entre l’État et la sécurité sociale et entre les organismes de sécurité sociale. La clé de répartition de la TVA a ainsi été modifiée : à compter du 1er janvier 2018, la fraction de TVA affectée à la CNAM est passée de 7,03 % à 0,34 %.

En comptabilité budgétaire de l’État, les recettes de TVA d’un exercice correspondent aux encaissements portant sur les périodes d’activité de décembre N‑1 à novembre N. Dans la comptabilité générale de la sécurité sociale, en droits constatés, les produits sont comptabilisés par période d’activité de janvier à décembre N.

Le taux fixé en loi de finances pour la fraction de TVA affectée à la CNAM s’applique aux recettes budgétaires de l’exercice. Les produits de TVA nette affectés à la sécurité sociale au titre de l’exercice N sont constitués des encaissements nets de février à décembre N affectés au taux applicable à l’année N et des encaissements nets de janvier N+1, affectés au taux applicable à l’année N+1.

Appliqué au cas d’espèce, devaient être rattachés à l’année 2017 les produits de TVA nette correspondant aux encaissements de TVA de février 2017 à décembre 2017 au taux de 7,03 % et les produits de TVA nette correspondant aux encaissements de janvier 2018 au taux de 0,34 %.

Or, les prévisions de la LFSS pour 2018 n’ont pas tenu compte de ce principe. Elles ont retenu l’estimation tendancielle du niveau de TVA sans appliquer le taux de 0,34 % aux recettes du mois de janvier 2018.

L’application rétroactive de ce principe a conduit à minorer les prévisions de recettes de la sécurité sociale pour 2017 de 1,2 milliard d’euros.

Source : commission des finances, d’après le rapport présenté à la Commission des comptes de la sécurité sociale et d’après le rapport de la Cour des comptes sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale d’octobre 2018.

Les dépenses évolueraient en 2018 au même rythme qu’en 2017 (+ 2,4 %). Une nouvelle fois l’ONDAM serait respecté (voté en progression de 2,3 %), traduisant une augmentation de 2,2 % des prestations entrant dans son champ et une forte progression de la dotation au Fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés (FMESPP).

L’année serait marquée par une évolution dynamique des prestations vieillesse (+ 3,1 %), en raison de la fin de l’effet du décalage de l’âge légal de départ à la retraite.

● La LFSS pour 2018 prévoyait qu’en 2018 le déficit du régime général et du FSV s’établirait à 2,2 milliards d’euros. La prévision a été améliorée par le présent PLFSS, qui prévoit un excédent d’1 milliard d’euros. L’amélioration résulte d’hypothèses macroéconomiques plus favorables qui ont un effet positif sur la prévision des recettes assises sur les revenus d’activité. Les recettes assises sur les revenus du capital ont également été sous-évaluées de 0,6 milliard d’euros. Les prestations seraient en augmentation de 0,8 milliard d’euros par rapport à la prévision.

2.   L’équilibre de l’ensemble des régimes obligatoires de base en 2018

En 2018, le solde des régimes obligatoires de base s’améliorerait de 2,6 milliards d’euros. Ces régimes dégageraient un excédent de 0,7 milliard deuros, permis par la réduction du déficit du régime général. Hors régime général, les autres régimes de base afficheraient un déficit de 0,4 milliard d’euros en 2018, après un excédent de 0,3 milliard d’euros en 2017. Ce déficit s’explique par la forte détérioration de la situation financière de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) : son déficit devrait atteindre 1,2 milliard d’euros, tandis que les autres régimes seraient proches de l’équilibre.

Les recettes croîtraient de 3,2 % grâce à la bonne orientation de la conjoncture. La dynamique des dépenses resterait identique à 2017 (+ 2,3 %), mais les pensions de retraite versées enregistreraient un rebond du fait de la fin de la montée en charge du report de l’âge légal de départ à la retraite.

Solde de l’ensemble des rÉgimes obligatoires de base et du FSV

(en milliards d’euros)

 

 

2017

2018 (p)

2019 (p)

2020 (p)

2021 (p)

2022 (p)

Variation 2017/2018

Régime général

Maladie

– 4,9

– 0,9

– 0,5

0,0

0,0

0,0

+ 4,0

AT-MP

0,8

0,8

1,1

1,2

1,3

1,3

0,0

Famille

– 0,2

0,4

1,2

0,0

0,0

0,0

+ 0,6

Vieillesse

1,8

0,8

0,7

0,8

0,4

0,0

– 1,0

Total Régime général

– 2,2

1,1

2,5

1,9

1,6

1,2

+ 3,3

Ensemble des régimes de base

Maladie

– 4,9

– 0,9

– 0,5

0,0

0,0

0,0

+ 4,0

AT-MP

1,2

0,9

1,2

1,2

1,3

1,3

– 0,3

Famille

– 0,2

0,4

1,2

0,0

0,0

0,0

+ 0,6

Vieillesse

2,0

0,4

0,3

0,6

– 0,2

– 1,3

– 1,6

Total Régimes de base

– 1,9

0,7

2,2

1,8

1,0

– 0,1

+ 2,6

FSV

– 2,9

– 2,1

– 1,8

– 0,7

– 0,3

0,1

+ 0,8

Régime général et FSV

– 5,1

– 1,0

0,7

1,2

1,3

1,3

+ 4,1

Régimes de base et FSV

– 4,8

– 1,4

0,4

1,0

0,7

0,1

+ 3,4

Source : commission des finances, d’après le PLFSS pour 2019.

B.   2019 : L’excÉdent du rÉgime gÉNÉral et du fonds de solidaritÉ vieillesse ainsi que de l’ensemble des rÉgimes obligatoires de base

En 2019, l’ensemble constitué du régime général et du FSV dégagera des excédents à hauteur de 0,7 milliard d’euros, selon la prévision du PLFSS. De même, les régimes obligatoires de base et le FSV seront à l’équilibre, ce qui permettra d’accélérer le désendettement des administrations de sécurité sociale (+ 0,4 milliard d’euros).

1.   Le retour à l’équilibre du régime général et du FSV

● Comme indiqué supra, le régime général hors FSV sera à l’équilibre dès 2018. Le déficit du FSV persisterait toutefois (1,8 milliard d’euros en 2019). L’amélioration des comptes en 2019 s’expliquerait, comme pour l’année 2018, par un contexte économique favorable et par la bonne maîtrise des dépenses.

Le Gouvernement estime que la croissance du PIB s’établira à 1,7 % en 2019 et celle de la masse salariale à 3,5 %, comme en 2018. La croissance du PIB demeurerait à ce niveau entre 2020 et 2022, tandis que les recettes de la sécurité sociale bénéficieraient d’une accélération de la croissance de la masse salariale qui atteindrait 3,7 % en 2022. Il n’est pas inutile de rappeler que les hypothèses macroéconomiques sur lesquelles a reposé l’élaboration du PLF et du PLFSS pour 2019 ont été jugées crédibles par le Haut Conseil des finances publiques ([2]).

Parallèlement, les mesures d’économies sur le champ de l’ONDAM et la revalorisation maîtrisée des pensions de retraite permettraient de limiter la croissance des dépenses à 2,2 % en 2019.

SOlde du rÉgime gÉNÉral et du FSV

(en milliards d’euros)

 

2016

2017

2018 (p)

2019 (p)

2020 (p)

2021 (p)

2022 (p)

Maladie

– 4,8

– 4,9

– 0,9

– 0,5

0,0

0,0

0,0

AT-MP

0,8

1,1

0,8

1,1

1,2

1,3

1,3

Famille

– 1,0

– 0,2

0,4

1,2

0,0

0,0

0,0

Vieillesse

0,9

1,8

0,8

0,7

0,8

0,4

0,0

Régime général

– 4,1

– 2,2

1,1

2,5

1,9

1,6

1,2

FSV

– 3,6

– 2,9

– 2,1

– 1,8

– 0,7

– 0,3

0,1

Régime général + FSV

– 7,8

– 5,1

– 1,0

0,7

1,2

1,3

1,3

Source : annexe B du PLFSS pour 2019.

Le retour à l’équilibre du régime général du FSV est d’autant plus marquant que cette situation n’est pas arrivée depuis 2001. Le FSV bénéficie aujourd’hui du dynamisme des prélèvements sur le capital mais pourrait voir ses perspectives se dégrader en cas de diminution de ces prélèvements, très volatils, ou d’augmentation du taux de chômage.

 

Solde de l’ensemble constitué du rÉgime gÉNÉral et du FSV

(en milliards d’euros)

Source : commission des finances, d’après le PLFSS pour 2019.

Le rapporteur estime que les excédents de la branche vieillesse doivent être considérés avec prudence. L’effet des réformes passées a permis de maîtriser l’évolution des prestations servies par la branche vieillesse, mais cet effet s’estompe. Le coût lié aux fluctuations du marché du travail a par ailleurs été absorbé par le FSV. Les difficultés structurelles de cette branche n’ont pas été réglées et la réflexion concernant la réforme des retraites, lancée par la ministre de la santé et des solidarités, est éminemment nécessaire.

2.   L’équilibre des comptes sociaux en 2019

L’ensemble constitué des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale et du FSV serait excédentaire de 0,4 milliard d’euros en 2019. Le déficit des régimes de base autres que le régime général se réduirait, passant de 0,4 milliard d’euros en 2018 à 0,3 milliard d’euros en 2019.

Les produits progresseraient de 2,4 %, à un rythme inférieur à celui attendu sur le champ du régime général et du FSV. Cette moindre croissance s’expliquerait par la baisse des produits reçus de l’État pour équilibrer le régime vieillesse, en raison de l’effet sur le montant des prestations de la revalorisation maîtrisée de 0,3 % des pensions.

Les charges augmenteraient de 2,0 % en 2019. L’évolution serait contenue par les mesures d’économies du présent PLFSS qui s’élèveraient à 6,1 milliards deuros sur le champ de lensemble des régimes obligatoires de base et du FSV : 3,8 milliards deuros correspondant à la réalisation de l’ONDAM ; 3,1 milliards d’euros correspondant à la revalorisation maîtrisée de certaines prestations dont les pensions de retraite, cet impact étant ramené à 2,2 milliards deuros si l’on prend en compte les moindres subventions d’équilibre reçues de l’État par certains régimes spéciaux ; 0,1 milliard deuros correspondant à des économies de gestion.

Soldes de l’ensemble des rÉgimes de base et du FSV

(en milliards d’euros)

 

 

2014

2015

2016

2017

2018 (p)

2019 (p)

2020 (p)

2021 (p)

2022 (p)

Régime général

Maladie

– 6,5

– 5,8

– 4,8

– 4,9

– 0,9

– 0,5

0,0

0,0

0,0

AT-MP

0,7

0,7

0,8

0,8

0,8

1,1

1,2

1,3

1,3

Famille

– 2,7

– 1,5

– 1,0

– 0,2

0,4

1,2

0,0

0,0

0,0

Vieillesse

– 1,2

– 0,3

0,9

1,8

0,8

0,7

0,8

0,4

0,0

Total

– 9,7

– 6,8

– 4,1

– 2,2

1,1

2,5

1,9

1,6

1,2

Régimes de base

Maladie

6,5

– 5,8

– 4,7

– 4,9

– 0,9

– 0,5

0,0

0,0

0,0

AT-MP

0,7

0,8

0,8

1,2

0,9

1,2

1,2

1,3

1,3

Famille

2,7

– 1,5

– 1,0

– 0,2

0,4

1,2

0,0

0,0

0,0

Vieillesse

0,8

0,2

1,6

2,0

0,4

0,3

0,6

– 0,2

– 1,3

Total

– 9,3

– 6,3

– 3,4

– 1,9

0,7

2,2

1,8

1,0

– 0,1

FSV

– 3,5

– 3,9

– 3,6

– 2,9

– 2,1

– 1,8

– 0,7

– 0,3

0,1

Régime général + FSV

– 13,2

– 10,8

– 7,8

– 5,1

– 1,0

0,7

1,2

1,3

1,3

Régimes de base + FSV

– 12,8

– 10,2

– 7,0

– 4,8

– 1,4

0,4

1,0

0,7

0,1

Source : commission des finances.

C.   L’extinction de la dette sociale en 2024 et l’avenir des ressources de la Cades

1.   L’état de la dette sociale

Le passif des régimes de sécurité sociale se compose, d’une part, des déficits accumulés par l’ACOSS et, d’autre part, de la dette reprise et non encore amortie de la CADES.

Dette consolidÉe de l’ACOSS et de la CADES

(en milliards d’euros)

 

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018 (p)

Solde moyen de trésorerie ACOSS

– 33,3

– 14,4

– 8,1

– 19,0

– 22,2

– 26,4

– 19,9

– 19,1

– 18,8

Dette restant à amortir CADES

– 86,7

– 142,8

– 137,5

– 132,7

– 130,2

– 126,7

– 135,8

– 121,0

– 105,8

Dette sociale ACOSS + CADES

– 120,0

– 157,2

– 145,6

– 151,7

– 152,4

– 153,1

– 155,7

– 140,1

– 124,6

Source : commission des finances, d’après les comptes présentés à la Commission des comptes de la sécurité sociale et les données de la CADES (septembre 2018).

● L’ACOSS gère de façon centralisée la trésorerie du régime général de sécurité sociale. Pour couvrir ses besoins de financement, elle a recours à des avances de trésorerie et à des prêts à court terme auprès de la Caisse des dépôts et consignations (CDC). Elle peut également émettre directement sur les marchés financiers des titres de créance.

En 2017, le solde moyen de trésorerie de l’ACOSS s’est établi à 19,1 milliards d’euros. Il s’améliorerait en 2018 pour s’établir à 18,8 milliards d’euros, selon les données présentées à la Commission des comptes de la sécurité sociale.

Compte tenu des conditions particulièrement favorables sur les marchés financiers depuis 2015 et de la qualité de sa signature, l’ACOSS a obtenu un résultat de trésorerie positif de 125,7 millions d’euros en 2017 (contre 91,7 millions en 2016) qui s’explique par les taux d’emprunt négatifs dont elle a bénéficié. Son taux de financement moyen annuel a été de – 0,35 % sur l’année. En 2018, le résultat financier resterait largement positif, aux alentours de 88 millions d’euros.

● L’apurement de la dette sociale par la CADES répond à plusieurs principes. Tout d’abord, la CADES bénéficie de ressources affectées ([3]) :

– le produit de la CRDS, pour un montant de 7,2 milliards d’euros en 2017 ;

– le produit d’une fraction de 0,6 point de la CSG sur les revenus d’activité, de remplacement et du capital et d’une fraction de 0,3 point de la CSG sur les jeux, pour un total de 7,9 milliards d’euros ;

– le versement annuel du Fonds de réserve des retraites (FRR) d’un montant de 2,1 milliards d’euros.

En 2018, les ressources de la CADES devraient atteindre 17,6 milliards d’euros.

Ensuite, la durée de l’apurement de la dette transférée à la CADES est limitée dans le temps ([4]). L’article 1er de l’ordonnance 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale ([5]) dispose que la CADES disparaîtra à la date de l’extinction de ses missions. La date prévisionnelle d’extinction de la CADES, créée en 1996, a été reportée plusieurs fois. Initialement fixée à treize ans et un mois par l’ordonnance du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale, l’existence de la CADES a été prorogée à plusieurs reprises.

Enfin, tout nouveau transfert de dette à la CADES doit s’accompagner de l’affectation des ressources nécessaires à son remboursement ([6]). Ce principe de niveau organique devait agir comme un verrou empêchant les allongements répétés de la durée d’amortissement de la CADES. Il a toutefois été contourné, la loi organique du 13 novembre 2010 relative à la gestion de la dette sociale ([7]) ayant autorisé que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 prévoie des transferts conduisant à un accroissement de la durée d’amortissement.

Fin 2018, la CADES devrait avoir amorti 15,4 milliards d’euros de dettes sur l’année, ce qui porterait le montant total de la dette amortie depuis sa création à 155,1 milliards d’euros. Le montant de la dette restant à amortir, avant toute mesure nouvelle du PLFSS, serait de 105,4 milliards d’euros.

Dette votÉe, reprise et amortie à fin 2017

2018_INFORMATIONS_FINANCIERES_Chiffres_cles_Dette_votee_reprise_et_amortie_a_fin_2017

Source : CADES, octobre 2018.

2.   La reprise des déficits cumulés de l’ACOSS par la CADES à hauteur de 15 milliards d’euros

● La date à laquelle la CADES aura apuré l’intégralité de la dette qui lui aura été transférée reste fixée à 2024. L’ACOSS a toutefois accumulé des déficits pour un montant qui s’élèvera à 28 milliards d’euros environ au 31 décembre 2018.

L’article 20 du PLFSS pour 2019 propose la reprise par la CADES des déficits cumulés de l’ACOSS à hauteur de 15 milliards d’euros. Ce transfert interviendrait dans un contexte de retour à l’équilibre des comptes sociaux en 2019, le reste des déficits cumulés ayant vocation à être apuré par les excédents futurs.

Cette mesure s’inscrit en cohérence avec les recommandations répétées de la Cour des comptes pour la mise en œuvre d’un schéma global d’amortissement de la dette sociale compatible avec son extinction d’ici 2024 ([8]).

La reprise de dette s’échelonnera dans le temps : en 2020, la CADES reprendra à l’ACOSS des déficits cumulés à hauteur de 6 milliards d’euros, que la CADES placera à un horizon de 4 à 5 ans ; des reprises progressives de 6 milliards d’euros, puis de 3 milliards d’euros seront ensuite effectuées, le montant étant fixé chaque année en LFSS.

Conformément aux dispositions précitées de lordonnance du 24 janvier 1996, ce transfert saccompagnerait dune augmentation du produit de la CSG affecté à la CADES. Le PLFSS propose ainsi daffecter à la CADES, à compter de 2020, une fraction supplémentaire de CSG à hauteur de 1,5 milliard deuros la première année, de 3,5 milliards deuros en 2021 et de 5 milliards deuros en 2022.

3.   L’avenir des ressources de la CADES : la question comptable

● En 2024-2025, la CADES aura amorti l’intégralité de la dette qui lui aura été transférée. À cet horizon, elle pourrait bénéficier de ressources dont le montant total avoisinerait les 23 milliards d’euros. Parmi ces ressources figure le versement annuel de 2,1 milliards d’euros en provenance du FRR. L’actif net du FRR sera lui‑même d’environ 20 milliards d’euros à cette échéance.

La suppression prévue de la CADES conduit à s’interroger sur l’avenir de ses ressources et sur leur affectation. Les suggestions pour utiliser ces dernières ou les fonds du FRR ne manquent pas.

Il a ainsi été proposé d’affecter tout ou partie de ces ressources au financement des besoins liés à la dépendance. Le Président de la République a d’ailleurs évoqué la possibilité de repenser la prise en charge des personnes âgées dépendantes en évoquant la création d’un « cinquième risque ».

De même, la création d’un fonds national d’épargne-retraite par capitalisation a été proposée par amendement lors de l’examen du projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises ([9]). Il s’appuierait sur le FRR existant et serait abondé par une contribution sur les revenus d’activité et sur certains revenus de remplacement. Cette dernière pourrait se substituer à tout ou partie des actuels prélèvements obligatoires actuellement affectés à la CADES. Les assurés pourraient alors bénéficier, à leur retraite, d’une rente ou d’un capital en fonction des parts du fonds qu’ils auraient investis et de son rendement. Notons que ce système de retraite par capitalisation viendrait s’ajouter au système actuel par répartition pour compléter la retraite des actifs. Il serait créé à niveau de prélèvements obligatoires constant.

Cette proposition reviendrait à rendre au FRR sa mission originelle. Créé pour préparer le choc du « papy-boom » sur le système de retraite, le montant des ressources dont il est attributaire ne lui a jamais permis d’atteindre la masse critique nécessaire à l’accomplissement de cette mission. Une partie de ces sommes a été utilisée, de surcroît, pour amortir la dette sociale. Il apparaît cependant totalement impossible pour ce fonds d’atteindre la dimension suffisante pour assumer seul les difficultés auxquelles notre système de retraite devra faire face dans les années à venir. Il resterait alors un outil complémentaire.

Enfin, certains proposent de supprimer la CRDS et la part de CSG affectée à la CADES pour baisser les prélèvements obligatoires sur les revenus des ménages.

Il convient toutefois de garder à l’esprit qu’en comptabilité nationale, réduire les prélèvements obligatoires actuellement attribués à la CADES ou les affecter à de nouvelles dépenses, comme des dépenses de dépendance, aurait pour effet de dégrader le déficit public. En effet, les prêts, les acquisitions de prêts, les remboursements de prêts et les cessions d’actions sont des opérations financières enregistrées dans les comptes financiers et de patrimoine, sans impact sur le déficit public. Ainsi, la fraction de la CSG affectée à la CADES et la CRDS constituent des produits, alors que le remboursement de la dette sociale n’est qu’une opération financière. Il n’est pas comptabilisé comme une charge au sens de la comptabilité maastrichtienne.

La question de l’avenir des ressources de la CADES, une fois cette dernière éteinte, relève de choix collectifs qui auront des conséquences importantes sur la pérennité de notre système de protection sociale et un impact pour plusieurs générations de Français. L’effet de ces choix sur les finances publiques, s’il n’est qu’un critère parmi d’autres, doit être pris en compte.

II.   Les dispositions relatives aux recettes : la poursuite des engagements pour valoriser davantage le travail et encourager la compÉTITIVITÉ des entreprises

A.   L’exonÉration de cotisations des heures supplÉmentaires

L’exonération sociale des heures supplémentaires est un engagement du Président de la République. En cohérence avec celui-ci, le Gouvernement propose de mettre en œuvre un dispositif d’exonération de la part salariale des cotisations sociales sur ces heures à compter du 1er septembre 2019.

L’ensemble des salariés du secteur privé et les agents publics seront concernés par cette mesure. Les salariés du secteur privé bénéficieront d’un gain de pouvoir dachat de 11,3 % sur chacune de ces heures, correspondant à la somme des taux actuels de la cotisation vieillesse et de la cotisation de retraite complémentaire.

1.   Les régimes des heures supplémentaires

a.   Le cas général des heures supplémentaires des salariés

Les heures supplémentaires sont les heures accomplies au-delà de la durée légale hebdomadaire, c’est-à-dire au-delà de la trente-cinquième heure, en vertu des articles L. 3121-27 et L. 3121-28 du code du travail ([10]). Les heures supplémentaires effectuées par un salarié ne doivent toutefois pas le conduire à dépasser la durée maximale hebdomadaire de travail, fixée à 48 heures.

Ces heures sont accomplies à l’initiative de l’employeur ou, a minima, avec son accord implicite ([11]). Elles ouvrent droit à une majoration salariale ou, lorsqu’elles sont accomplies pour effectuer des travaux urgents, à un repos compensateur équivalent. Une convention ou un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, de branche, peut fixer le taux de majoration des heures supplémentaires, lequel ne peut être inférieur à 10 %. En l’absence d’accord collectif, ce taux est de 25 % pour chacune des huit premières heures supplémentaires et de 50 % au-delà.

Les heures supplémentaires peuvent être effectuées dans la limite d’un contingent annuel (article L. 3121-30) défini par convention ou accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, par convention ou accord de branche (article L. 3121-33). En l’absence de tels conventions ou accords, ce contingent est fixé à 220 heures par salarié (articles L. 3121-39 et D. 3121-3). Les heures effectuées en raison de travaux urgents ou ouvrant droit à un repos compensateur équivalent ne sont pas prises en compte dans le contingent annuel d’heures supplémentaires.

Si une convention ou un accord collectif d’entreprise ou d’établissement (ou, à défaut, une convention ou un accord de branche) le prévoit, les heures supplémentaires effectuées dans la limite du contingent annuel ouvrent droit à une contrepartie en repos. Au-delà du contingent annuel, cette contrepartie est obligatoire et doit être au minimum de 50 % des heures accomplies au-delà du contingent pour les entreprises de vingt salariés ou moins et 100 % pour les entreprises de plus de vingt salariés. La contrepartie sous forme de repos s’ajoute à la majoration salariale.

b.   Les heures complémentaires des salariés à temps partiel

Une heure effectuée par un salarié à temps partiel au-delà de la durée prévue par son contrat de travail est appelée « heure complémentaire ». Le contrat de travail doit prévoir les limites dans lesquelles ces heures peuvent être effectuées, dans le respect d’un double plafond auquel il ne peut être dérogé :

– en l’absence de disposition conventionnelle, le nombre d’heures complémentaires effectuées au cours d’une même semaine ou d’un même mois ne peut pas être supérieur à 10 % de la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail prévue au contrat. Une convention ou un accord de branche étendu peut porter ce nombre d’heures jusqu’au tiers de cette durée (article L. 3123-28) ;

– les heures complémentaires ne peuvent pas avoir pour effet de porter la durée du travail du salarié au niveau de la durée légale ou conventionnelle du travail (article L. 3123-9).

Chaque heure complémentaire donne lieu à une majoration salariale égale à 10 % pour celles qui sont en deçà de la durée prévue par le contrat et de 25 % pour celles excédant cette limite. Un accord de branche étendu peut prévoir un taux moindre au moins égal à 10 %.

c.   Les salariés sous convention de forfait en heures ou en jours sur l’année

Certains salariés ne dépendent pas du régime de droit commun, mais d’un régime de forfait annuel en heures ou d’un régime de forfait annuel en jours. La convention de forfait peut alors prévoir une durée du travail différente de la durée légale ou conventionnelle.

Ainsi, les salariés ayant conclu une convention de forfait en jours ne sont pas soumis aux dispositions relatives à la durée quotidienne maximale de travail effectif, aux durées hebdomadaires maximales de travail et à la durée légale hebdomadaire. Le régime des heures supplémentaires stricto sensu ne leur est donc pas applicable. Néanmoins, ces salariés bénéficient d’un certain nombre de jours de repos, prévus à l’avance. Le salarié peut renoncer à une partie de ces jours de repos, en contrepartie d’une majoration de son salaire pour les jours de travail supplémentaires d’au minimum 10 %.

Sous le régime du forfait annuel en heures, les salariés relèvent des dispositions sur la durée du travail et ont droit aux majorations pour heures supplémentaires. En revanche, ils sont exclus du champ du contingent annuel d’heures supplémentaires et donc de la contrepartie obligatoire en repos.

Les régimes de forfait annuel, qu’ils soient en heures ou en jours, sont ouverts aux cadres dont la nature des activités explique qu’ils ne suivent pas les horaires des équipes auxquelles ils sont intégrés et aux salariés qui disposent d’une réelle autonomie, selon les articles L. 3121-56 et L. 3121-58 du code de la sécurité sociale.

La mise en place de ces régimes au forfait est subordonnée à la conclusion d’un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, de branche (article L. 3121-63), qui détermine :

– les catégories de salariés susceptibles de conclure une convention individuelle de forfait ;

– le nombre d’heures ou de jours inclus dans ce forfait, dans la limite de 218 jours pour les forfaits en jour ;

– les caractéristiques principales de ces conventions ;

– s’il autorise la conclusion de conventions de forfait en jours, des clauses supplémentaires en matière de suivi de la charge de travail des salariés ;

– la période de référence du forfait, qui peut être toute période de douze mois consécutifs, ainsi que les conditions de prise en compte des absences, des arrivées et des départs en cours de période pour la rémunération des salariés.

La forfaitisation du temps de travail doit en outre faire l’objet de l’accord du salarié.

d.   Les salariés des particuliers employeurs, les assistants maternels, les agents publics et les salariés relevant des régimes spéciaux de la SNCF et de la RATP

Plusieurs catégories d’actifs répondent à des régimes spécifiques s’agissant des heures supplémentaires.

● La durée normale de travail d’un salarié employé à domicile à temps plein est de quarante heures par semaine. Les heures supplémentaires sont donc les heures effectuées au-delà de cette durée. Dans le cas où les horaires du salarié sont irréguliers, les heures supplémentaires sont déterminées par rapport à une moyenne de quarante heures hebdomadaires par trimestre.

Les heures supplémentaires effectuées par les salariés employés à domicile ne peuvent toutefois pas excéder dix heures par semaine, ni huit heures en moyenne par semaine sur une période de douze semaines consécutives.

● Pour les assistants maternels, les heures supplémentaires sont celles effectuées au-delà de la quarante-cinquième heure travaillée. Elles sont rémunérées à un taux majoré, stipulé dans le contrat de travail.

e.   Les agents publics

Les fonctionnaires des trois versants de la fonction publique et les contractuels de droit public peuvent également être amenés à réaliser des heures supplémentaires. Elles donnent droit à des compensations sous la forme de repos compensateur ou d’indemnités horaires pour travaux supplémentaires.

2.   Exonérer de cotisations sociales les heures supplémentaires pour dynamiser le pouvoir d’achat des actifs

Le présent article met en œuvre un dispositif d’exonération de cotisations sociales qui tient compte des limites des mesures de défiscalisation et d’exonérations sociales de la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat ([12]) dite « loi TEPA ». Le Gouvernement propose une exonération de la part salariale des cotisations sociales assises sur les rémunérations dues au titre des heures supplémentaires, qui se présentera, pour les salariés du secteur privé, sous la forme d’une réduction de cotisations sociales salariales dorigine légale et conventionnelle. Sont ainsi visées les cotisations d’assurance vieillesse – seules cotisations salariales de sécurité sociale auxquelles le salarié est soumis – et les cotisations de retraite complémentaire. La cotisation d’assurance-chômage a en effet été supprimée le 1er octobre 2018, conformément à l’article 8 de la LFSS pour 2018.

a.   Le champ des rémunérations éligibles à l’exonération

L’article 7 liste les types de rémunération qui donnent droit à une réduction de cotisations sociales, tenant compte de la diversité des régimes d’heures supplémentaires applicables aux salariés et agents publics. Il s’agit :

– des rémunérations versées aux salariés au titre des heures supplémentaires et, pour ceux relevant du régime de forfait annuel en heures, des heures effectuées au-delà de 1 607 heures ;

– des rémunérations versées au titre des heures supplémentaires effectuées par des salariés dont le temps de travail a fait l’objet d’un dispositif d’aménagement, à l’exception des rémunérations versées au titre des heures réalisées en deçà de 1 607 heures lorsque la durée annuelle fixée par l’accord est inférieure à ce niveau ;

– des salaires et majorations de rémunération versés au-delà du plafond de 218 jours, dans le cadre de conventions de forfait annuel en jours, en contrepartie de la renonciation par les salariés à des jours de repos ([13]) ;

– des rémunérations versées aux salariés à temps partiel au titre des heures complémentaires ;

– des rémunérations versées aux salariés des particuliers employeurs au titre des heures supplémentaires qu’ils réalisent ;

– des rémunérations versées aux assistants maternels au-delà de 45 heures par semaine, ainsi que des salaires versés au titre des heures complémentaires, c’est-à-dire, s’agissant des assistants maternels, des heures réalisées au-delà de l’horaire hebdomadaire fixé dans le contrat d’assistance maternelle ;

– des rémunérations versées aux autres salariés dont la durée du travail ne relève pas du titre II du livre Ier de la troisième partie du code du travail ou du chapitre III du titre Ier du livre VII du code rural et de la pêche maritime au titre des heures supplémentaires ou complémentaires ;

– des éléments de rémunération versés aux agents publics titulaires ou non titulaires au titre des heures supplémentaires qu’ils réalisent ou du temps de travail additionnel effectif ;

– de la rémunération des heures supplémentaires ou complémentaires effectuées par les salariés relevant des régimes spéciaux.

b.   Le montant de la réduction de cotisations

Le montant de la réduction sera égal au produit de la rémunération brute de chaque heure supplémentaire par un taux fixé au niveau réglementaire.

● D’après l’exposé des motifs du projet de loi et l’étude d’impact, il sera fixé à 11,31 % dans le cas d’un salarié non-cadre du secteur privé. Ce taux correspond à la somme des taux d’assurance vieillesse plafonnée et déplafonnée et du taux de cotisation de retraite complémentaire applicables au 1er janvier 2019.

 

Cotisations sociales acquittÉes par les salariÉs du secteur privÉ

Cotisation

Assiette

Taux

Sécurité sociale

Assurance vieillesse plafonnée

Salaire brut jusqu’à 1 PSS ([14])

6,90 %

Assurance vieillesse déplafonnée

Salaire brut

0,40 %

Retraite complémentaire

AGIRC-ARRCO Tranche 1

Salaire brut jusqu’à 1 PSS

3,15 %

AGIRC-ARRCO Tranche 2 (de 1 à 8 PSS)

Salaire brut de 1 à 8 PSS

8,64 %

Contribution d’équilibre général (CEG) Tranche 1

Salaire brut jusqu’à 1 PSS

0,86 %

Contribution d’équilibre général (CEG) Tranche 2

Salaire brut de 1 à 8 PSS

1,08 %

Contribution d’équilibre technique (CET)

Totalité du salaire brut des salariés dont la rémunération > 1 PSS

0,14 %

Association pour l’emploi des cadres (APEC)*

Salaire brut des cadres jusqu’à 4 PSS

0,02 %

Total pour un salarié non-cadre à la rémunération < 1 PSS

11,31 %

* Taux en 2018, susceptible d’être modifié en 2019.

Source : commission des finances.

Le taux de cotisation salariale et donc le taux de la réduction de cotisation sur les heures supplémentaires dépendent à la fois du niveau de revenu du salarié et de son statut de cadre ou de non-cadre, pour plusieurs raisons :

– une partie de la cotisation vieillesse de sécurité sociale, la tranche 1 de la cotisation AGIRC-ARRCO et la tranche 1 de la contribution d’équilibre général (CEG) ne sont dues que sur la partie de la rémunération brute inférieure au plafond de la sécurité sociale (PSS) ; la tranche 2 de l’AGIRC-ARRCO et la tranche 2 de la CEG sont dues sur la partie de la rémunération comprise entre une et huit fois ce plafond ;

– la contribution d’équilibre technique (CET) est assise sur la totalité de la rémunération, mais seuls les salariés dont la rémunération est supérieure au PSS l’acquittent ;

 la cotisation à lAssociation pour lemploi des cadres (APEC) nest due que pour les salariés cadres sur la partie de la rémunération jusquà quatre fois le PSS.

● Les agents publics effectuant des heures supplémentaires ou du temps de travail additionnel effectif pourront également bénéficier du dispositif et gagner en pouvoir d’achat. Entrent en effet dans le champ de l’exonération les éléments de rémunération versés aux agents publics titulaires et non titulaires au titre des heures supplémentaires qu’ils réalisent, selon une formulation identique à celle de la loi TEPA.

Le décret du 4 octobre 2007 ([15]) pris pour son application avait inclus dans le champ de l’exonération les dispositifs indemnitaires correspondant à la définition des heures supplémentaires comme étant des heures effectuées au-delà des obligations professionnelles normales et s’inscrivant dans le cadre de l’activité principale de l’agent. N’entraient donc pas dans ce champ les indemnités visant à compenser des sujétions particulières ou à rémunérer des activités accessoires.

Sur ces indemnités, les fonctionnaires et agents contractuels sont en effet soumis à des cotisations.

Les fonctionnaires sont redevables d’une cotisation à la retraite additionnelle de la fonction publique (RAFP) ([16]), assise sur la rémunération, à l’exception du traitement indiciaire et de la nouvelle bonification indiciaire (NBI), dans la limite de 20 % du montant du traitement indiciaire brut. Le taux de la cotisation dont ils s’acquittent est de 5 % ([17]), l’employeur contribuant également à hauteur de 5 %.

Les agents publics contractuels s’acquittent :

– des cotisations vieillesse du régime général ;

– d’une cotisation au titre de la retraite complémentaire à l’Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l’État et des collectivités publiques (Ircantec).

Cotisations sociales acquittÉes par les agents publics sur les ÉlÉments de rÉmunÉration perçus au titre des heures supplÉmentaires rÉalisÉes

 

Cotisation

Assiette

Taux

Fonctionnaire

RAFP

Totalité de la rémunération, sauf traitement indiciaire et NBI, dans la limite de 20 % du montant du traitement indiciaire brut

5 %

Agents contractuels

Assurance vieillesse plafonnée

Revenus bruts jusqu’à 1 PSS

6,90 %

Assurance vieillesse déplafonnée

Revenus bruts

0,40 %

Ircantec tranche A

Revenus bruts (sauf supplément familial de traitement) jusqu’à 1 PSS

2,80 %

Ircantec tranche B

Part des revenus bruts supérieure à 1 PSS

6,95 %

Source : commission des finances.

c.   Un coût de 2 milliards d’euros à compter de 2020

Applicable pour les cotisations dues à partir du 1er septembre 2019, le coût estimé de l’exonération sociale des heures supplémentaires est de 650 millions deuros en 2019, de 1,94 milliard deuros en 2020 et de 2,01 milliards deuros en 2021, selon l’étude d’impact.

Ce coût est nettement inférieur à celui du dispositif de la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat dit « loi TEPA »  ([18]). Cette dernière consistait à la fois en une exonération sociale des heures supplémentaires et en une exonération d’impôt sur le revenu.

L’exonération sociale concernait dans les faits l’ensemble des cotisations et contributions sociales salariales dues au titre des heures supplémentaires. Mais elle prenait la forme d’une réduction de cotisations de sécurité sociale dont le taux était fixé par décret ([19]). Le dispositif ne visait donc pas l’ensemble des cotisations et contributions sociales concernées par l’exonération, mais fixait un taux général de réduction de cotisations de sécurité sociale à un niveau permettant d’annuler le montant total des cotisations et contributions sociales dues au titre des heures supplémentaires.

En effet, le taux de la réduction prenait en compte non seulement les taux de cotisations de sécurité sociale, mais également les taux des contributions sociales (CSG et CRDS), des cotisations de retraite complémentaire et des cotisations chômage. Il s’établissait donc à 21,5 %, alors que le taux cumulé des seules cotisations de sécurité sociale s’élevait en 2007 à 7,5 %.

L’exonération fiscale et sociale de la loi TEPA comportait toutefois plusieurs inconvénients.

D’abord, ces mesures avaient un coût majeur, de l’ordre de 4,5 milliards deuros en 2010 se décomposant de la façon suivante :

– 1,4 milliard d’euros au titre du volet fiscal ;

– 2,4 milliards d’euros au titre de l’exonération sociale salariale ;

– 700 millions d’euros au titre de la déduction forfaitaire de cotisations patronales de 0,50 euro par heure supplémentaire effectuée, portée à 1,50 euro pour les entreprises de vingt salariés ou moins ([20]).

Seule l’exonération majorée pour les entreprises de vingt salariés ou moins demeure en vigueur, pour un coût annuel d’environ 500 millions d’euros ([21]). Le dispositif TEPA limité à l’exonération sociale et fiscale des heures supplémentaires coûtait environ 4 milliards deuros, soit deux fois plus que le dispositif envisagé. Ce dernier ne comportera pas d’exonération d’impôt sur le revenu et le taux de la réduction de cotisation ne prendra pas en compte la CSG et la CRDS, comme le faisait TEPA.

Ensuite, lavantage fiscal et social procuré croissait plus que proportionnellement en fonction du salaire, compte tenu de la progressivité de l’impôt sur le revenu. Cet effet anti-redistributif s’expliquait par l’avantage fiscal consenti. Le comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques de l’Assemblée nationale, dans son rapport d’information sur les mesures de la loi TEPA ([22]), note ainsi que la mesure de défiscalisation ne bénéficiait complètement qu’aux foyers imposables. Or, en 2017, moins de la moitié des ménages a dû s’acquitter de l’impôt sur le revenu. La mesure fiscale ne pouvait donc pas profiter aux ménages les moins aisés. Le rapporteur note que la mesure proposée au PLFSS 2019 est bien plus égalitaire. En s’adressant à tous les actifs, elle participe à la politique de valorisation du travail mise en place par la majorité depuis un an.

Enfin, il créait une situation de fait – et non de droit – d’exonération de CSG et de CRDS sur les heures supplémentaires, complexifiant les assiettes de ces deux impositions, alors que ces dernières avaient pour avantage principal d’être lisibles.

La loi du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012, notamment pour ces raisons, a supprimé l’exonération de cotisations sociales salariales et l’exonération d’impôt sur le revenu des heures supplémentaires.

d.   Une mesure en faveur du pouvoir d’achat des personnes en emploi

Le dispositif proposé bénéficiera directement au pouvoir d’achat des personnes en emploi, qu’ils exercent leur activité dans le secteur privé ou dans le secteur public. Compte tenu des taux de recours actuels aux heures supplémentaires, il est raisonnable d’estimer quenviron 9 millions de personnes bénéficieraient directement de la mesure. Il faut rappeler que cette mesure vient s’ajouter au dispositif de l’article 8 de la LFSS pour 2018 qui a opéré une baisse des cotisations – nette de l’augmentation du taux de CSG – pour les salariés et pour la plupart des indépendants.

● Pour les salariés du secteur privé, le gain sur les heures supplémentaires des non-cadres s’établirait à 11,31 %, soit le taux de la réduction de cotisation applicable. Pour les cadres, il serait de 11,33 % au niveau de 2,2 SMIC, niveau correspondant au PSS, et décroîtrait lentement en fonction de la rémunération : il atteindrait 11,04 % pour les salariés dont la rémunération est de 3,5 SMIC.

Concrètement, un salarié non-cadre au SMIC, s’il effectue 109 heures supplémentaires en 2020, c’est-à-dire le nombre moyen d’heures supplémentaires par salarié qui fait des heures supplémentaires ([23]), gagnera plus de 150 euros par an par rapport à la situation actuelle. Ces 150 euros sajoutent aux 263 euros de gains nets que ce salarié au SMIC a obtenus en année pleine grâce à la mesure de suppression de cotisations maladie et chômage partiellement compensée par la hausse du taux de la CSG prévue par la LFSS pour 2018. Le tableau ci-dessous expose quelques exemples d’application de la mesure telle que proposée par cet article.

Effets de la mesure pour plusieurs cas de salariés du secteur privé effectuant des heures supplÉmentaires

(en euros, sauf indication contraire)

Statut du salarié

Salaire en SMIC

Salaire horaire brut de base

Rémunération brute d’une heure supplémentaire (25 % de majoration)

Taux d’exonération

Gain net par heure supplémentaire pour le salarié

Gain net annuel pour le salarié

Non cadre

1

9,88*

12,35

11,31 %

+ 1,40

+ 152,25

Non cadre

1,5

14,82

18,53

11,31 %

+ 2,10

+ 228,37

Non cadre

1,8

17,78

21,74

11,31 %

+ 2,51

+ 274,05

Cadre

2,2

21,74

27,17

11,34 %

+ 3,08

+ 335,54

Cadre

3

29,64

37,05

11,16 %

+ 4,14

+ 451,09

Cadre

3,5

34,58

43,23

11,04 %

+ 4,77

+ 520,15

Note : il est supposé que les salariés ayant recours à des heures supplémentaires effectuent 109 heures supplémentaires par an, soit le nombre moyen d’heures supplémentaires ou complémentaires rémunérées effectuées par ceux qui effectuaient des heures supplémentaires en faisaient selon les données de la DARES publiées en 2015.

* SMIC horaire applicable jusqu’au 31 décembre 2018.

Source : commission des finances, d’après l’annexe 9 du PLFSS.

● La rémunération des agents publics serait également revalorisée par la mesure, ces agents pouvant être amenés à effectuer des heures supplémentaires.

L’étude d’impact de l’article fait d’ailleurs état de différences sensibles de recours aux heures supplémentaires selon le versant de la fonction publique considéré. Le taux de recours aux heures supplémentaires serait de 21 % dans la fonction publique d’État, les agents non titulaires y ayant beaucoup moins recours (7 %) que les fonctionnaires (30 %). Dans certains corps, les fonctionnaires effectuent quasiment tous des heures supplémentaires : 84 % des professeurs certifiés et 100 % des professeurs agrégés font des heures supplémentaires ou complémentaires. Dans la fonction publique hospitalière, le taux de recours aux heures supplémentaires est à un niveau comparable à celui de la fonction publique d’État (22 %). Ce taux est bien plus élevé dans la fonction publique territoriale, où il atteint 33 %.

L’étude d’impact fournit quelques cas types de gains de pouvoir d’achat pour les agents publics concernés par le dispositif.

Effets de la mesure pour plusieurs cas d’agents publics effectuant
des heures supplÉmentaires

(en euros, sauf indication contraire)

Statut de l’agent

Traitement indiciaire brut mensuel

dont heures supplémentaires

Taux d’exonération

Gain net mensuel pour l’agent

Gain net annuel pour lagent

Professeur certifié de classe normale – 7e échelon

2 706

188

5 %

+ 9,40

+ 112,80

Professeur de classe normale – 7e échelon

2 717

200

5 %

+ 10,00

+ 120,00

Gardien de la paix – 7e échelon

2 906

312

5 %

+ 15,60

+ 187,20

Surveillant brigadier

3 172

206

5 %

+ 10,30

+ 123,60

Contractuel

2 650

255

10,10 %

+ 25,76

+ 309,10

Contractuel

1 557

113

10 %

+ 11,41

+ 137,00

Source : annexe IX du PLFSS.

B.   Des rÈgles d’assujettissement des revenus de remplacement au taux plein de CSG plus justes

Le présent article lisse le franchissement du seuil de revenu fiscal de référence au-delà duquel le taux plein de contribution sociale généralisée (CSG) sur les revenus de remplacement – y compris les allocations de chômage – s’applique. Il atténue l’effet de la hausse du taux de 1,7 point du taux plein de CSG sur les pensions de retraite et d’invalidité entrée en vigueur au 1er janvier 2018.

En l’état du droit (article L. 136-8 du code de la sécurité sociale), plusieurs taux de CSG sont applicables aux revenus de remplacement perçus en année N, en fonction du revenu fiscal de référence (RFR) de l’année N‑2 du bénéficiaire. Peuvent s’appliquer un taux plein, un taux réduit à 3,8 % ou un taux nul, ce dernier n’étant susceptible de s’appliquer qu’aux pensions de retraite et d’invalidité.

Le taux plein applicable diffère selon la nature des revenus de remplacement. Pour les allocations de chômage, il est de 6,2 %. Pour les pensions de retraite et d’invalidité, il s’élève à 8,3 %, après l’augmentation de 1,7 point au 1er janvier 2018 conformément à l’article 8 de la LFSS pour 2018.

Outre l’instauration d’un décalage temporel entre la réalisation de la condition de l’application du taux plein et le paiement de l’impôt, l’utilisation du RFR comme critère d’assujettissement au taux plein a pour effet de prendre en compte l’ensemble des revenus imposables à l’impôt sur le revenu de l’ensemble du foyer fiscal.

Pour ces raisons, la perception de revenus exceptionnels par le foyer fiscal du bénéficiaire d’un revenu de remplacement d’un faible montant est susceptible d’assujettir ce revenu de remplacement au taux plein de CSG durant toute une année. Pour atténuer cet effet, le Gouvernement propose que l’application du taux plein soit conditionnée au franchissement des seuils de RFR deux années de suite, c’est-à-dire à la fois en année N–2 et en année N–3.

Cette mesure de correction, concrétisant un engagement du Premier ministre, aura pour effet déviter chaque année lentrée de 350 000 contribuables dans le champ du taux normal, pour un montant total de 350 millions deuros.

Le rapporteur se félicite de cet aménagement qui permet d’éviter les passages « accidentels » de seuils et de la prise en compte des alertes qu’il avait formulées lors de la discussion des projets de lois financières discutés à l’automne 2018. Il note que le dispositif a l’avantage de corriger un problème qui préexistait à l’adoption des mesures de la LFSS pour 2018. À titre d’exemple, certaines personnes ayant effectué un retrait occasionnel important sur une assurance vie ou sur un plan d’épargne pour parer à un événement de vie ou pour venir en aide à leurs familles, ce qui est régulièrement le cas de ménages retraités modestes, n’auront pas à s’acquitter du taux normal de CSG.

1.   La CSG sur les revenus de remplacement

a.   L’assiette de la CSG sur les revenus de remplacement

● Les personnes domiciliées en France et affiliées à un régime obligatoire d’assurance maladie sont redevables de la CSG sur leurs revenus de remplacement (article L. 136-1 du code de la sécurité sociale), entendus comme les sommes destinées à compenser la perte du revenu d’activité, y compris en tant qu’ayant droit et versées sous quelque forme que ce soit (article L. 136-1-2 du code de la sécurité sociale).

Plusieurs types de revenus de remplacement sont toutefois expressément exclus de l’assiette de la CSG :

– les pensions de retraite et d’invalidité ou les allocations de chômage et avantages attachés à la cessation d’activité bénéficiant en année N aux personnes dont le RFR de l’année N–2 est inférieur à certains seuils (voir infra) ;

 les pensions de retraite et dinvalidité des bénéficiaires dun avantage de vieillesse ou dinvalidité non contributif servi par un régime de base de sécurité sociale sous condition de ressources et financé par le FSV ou le Fonds spécial invalidité ;

– les pensions d’invalidité des anciens combattants et la retraite du combattant ;

– les retraites mutuelles des anciens combattants ;

– l’allocation de solidarité spécifique ;

– les rentes viagères et indemnités en capital servies aux victimes d’accidents du travail ou de maladies professionnelles par les organismes de sécurité sociale ou par les employeurs ;

– l’indemnité de cessation d’activité des travailleurs de l’amiante ;

– l’allocation veuvage ;

– le capital versé au titre de l’assurance décès ou versé dans le cadre d’un régime collectif et obligatoire de protection sociale complémentaire.

La CSG sur les revenus de remplacement s’applique donc aux pensions de retraite, aux pensions d’invalidité, aux allocations de préretraite, aux allocations de chômage, aux indemnités d’activité partielle et aux indemnités journalières de sécurité sociale.

● En 2018, le rendement de la CSG sur les revenus de remplacement s’élèverait à 23,9 milliards d’euros, son assiette étant composée à 90 % par les pensions de retraite, à 6 % par les revenus de pensions d’invalidité et à 3 % par les allocations de chômage ([24]).

b.   Les taux applicables aux revenus de remplacement

● Alors que la CSG sur les revenus d’activité est due au taux de 9,2 %, plusieurs taux, tous inférieurs à celui-ci, sont applicables aux revenus de remplacement ([25]).

En principe (II de l’article L. 136-8), sont ainsi assujetties :

– au taux de 8,3 % les pensions de retraite et les pensions d’invalidité, depuis le 1er janvier 2018, après l’augmentation de 1,7 point de ce taux par l’article 8 de la LFSS pour 2018 ;

– au taux de 6,2 % les allocations de chômage et les indemnités journalières de sécurité sociale.

Par dérogation, les pensions de retraite, les pensions d’invalidité, les allocations de chômage et les avantages issus de la cessation partielle d’activité, hors préretraites, sont assujettis au taux réduit de 3,8 % en année N, dès lors que le RFR de l’année N–2 du bénéficiaire est compris dans une tranche de RFR. Ces seuils de RFR sont revalorisés au 1er janvier de chaque année en fonction de l’évolution annuelle des prix à la consommation hors tabac constatés.

Ainsi, ces revenus de remplacement perçus en 2018 sont soumis au taux de 3,8 % si le RFR de l’année 2016 du bénéficiaire est compris entre :

– 11 018 euros pour la première part de quotient familial, majorés de 2 942 euros pour chaque demi-part supplémentaire (articles L. 136-1-2 et circulaire CNAV 2017-34) ([26])

 et 14 404 euros pour la première part, majorés de 3 846 euros par chaque demi-part supplémentaire (III de larticle L. 136-8 et circulaire CNAV 201734) ([27]).

Sont enfin exclus du champ de l’assiette de la CSG ces mêmes revenus de remplacement perçus en année N par les personnes dont le RFR de l’année N–2 est inférieur au seuil d’entrée dans le champ du taux réduit.

Taux de csg applicable par catÉgories de Revenus

Type de revenu

RFR de lannée N-2*
(première part)

Taux applicable lannée N

Assiette de calcul

Pensions de retraite et pensions d’invalidité

RFR < 11 018 € + 2 942 € par demi-part

0 %

100 % du revenu brut

11 018 € + 2 942 € par demi-part < RFR < 14 404 € pour la première part + 3 846 € par demi-part

3,8 %

14 404 € + 3 846 € par demi-part < RFR

8,3 %

Allocations de chômage et avantages résultant de la cessation partielle d’activité (hors préretraites)

RFR < 11 018 € + 2 942 € par demi-part

0 %

98,25 % du revenu brut dans la limite de 4 PASS

11 018 € + 2 942 € par demi-part supplémentaire < RFR < 14 404 € + 3 846 € par demi-part

3,8 %

14 404 € + 3 846 € par demi-part < RFR

6,2 %

Indemnités journalières de sécurité sociale (IJSS)

 

6,2 %

100 % des IJSS brutes

Allocations de préretraite**

 

9,2 %

100 % de l’allocation brute

* Pour les seuils applicables dans certaines collectivités de l’article 73 de la Constitution, voir supra.

** Les allocations de préretraite perçues au titre des préretraites ou cessations anticipées d’activité ayant pris effet avant le 11 octobre 2007 sont imposées au taux de 8,3 %.

Source : commission des finances.

2.   Le critère du RFR pour déterminer les seuils d’assujettissement et l’augmentation du taux plein de CSG de 1,7 point en LFSS pour 2018

● L’utilisation du critère de niveau de RFR pour déterminer si le bénéficiaire d’un revenu de remplacement est redevable de la CSG sur ce revenu de remplacement au taux plein, au taux réduit ou s’il en est exonéré permet de mieux prendre en compte la capacité contributive des redevables. L’assujetti à la CSG sur les revenus de remplacement est en effet individuellement redevable de cette contribution sur un revenu particulier, mais le taux de cette contribution individuelle dépend du niveau de l’ensemble des revenus de l’intégralité du foyer fiscal.

En effet, selon le IV de l’article 1417 du code général des impôts, le RFR est égal au montant net, après application des règles du quotient familial, des revenus et plus-values retenues pour l’établissement de l’impôt sur le revenu, majoré du montant de certains revenus exonérés d’impôt ou soumis à un prélèvement libératoire, comme les revenus des capitaux mobiliers et de certains abattements et charges déductibles du revenu.

Néanmoins, ce mode dassujettissement a des effets pervers, dans la mesure où la perception par le membre dun foyer fiscal de revenus temporaires et limitées peut conduire le RFR dudit foyer à franchir le seuil dassujettissement au taux plein des revenus de remplacement. Ces revenus de remplacement passent alors du régime du taux réduit à celui du taux plein pour une année complète, alors même que l’augmentation des revenus du foyer en N–2 a pu être limitée.

Le décalage temporel entre le critère d’assujettissement et la perception des revenus imposés suscite parfois l’incompréhension du contribuable, qui peut voir le taux de CSG sur ses revenus de remplacement augmenter, alors même qu’il vient de subir une baisse de l’ensemble de ces revenus. Ce décalage est toutefois inévitable car en janvier de l’année N, date du premier paiement de la contribution de l’année, le RFR de l’année N–2 est le dernier connu de l’administration.

● Les mesures de la LFSS pour 2018 en faveur du pouvoir d’achat des actifs ont accentué ces effets de seuil indésirables. L’article 8 de la LFSS pour 2018 a en effet augmenté de 1,7 point l’ensemble des taux de CSG, à l’exception du taux de 6,2 % applicable aux allocations de chômage et du taux réduit de 3,8 %. Ainsi, les retraités dont le RFR de 2016 les rendait éligibles au taux réduit ou à l’exonération de CSG sur les revenus de remplacement, soit environ 40 % des retraités, n’ont pas été soumis à l’augmentation du taux.

Il n’en demeure pas moins que la hausse de 1,7 point du taux plein, qui est passé de 6,6 à 8,3 %, a porté l’écart entre le taux plein et le taux réduit de 2,8 à 4,5 points, rendant d’autant plus sensible pour les contribuables le passage au taux plein.

Pour cette raison, l’article 11 du PLFSS instaure un dispositif de lissage de l’entrée dans le champ du taux plein de CSG.

3.   Le lissage de l’entrée des bénéficiaires de revenus de remplacement dans le champ du taux plein : une mesure de justice fiscale

● Pour atténuer l’effet de l’entrée des revenus de remplacement dans le champ du taux plein, le Gouvernement propose de conditionner cette entrée en année N au franchissement du seuil de RFR correspondant non seulement l’année N–2, mais également l’année N–3. La disposition empêchera des bénéficiaires du taux réduit de basculer dans le champ du taux plein en raison de la perception de revenus non récurrents.

Ainsi, un couple de retraités percevant une pension en année N et dont le RFR a connu un rebond exceptionnel en année N‑2 ne sera pas redevable de la CSG au taux de 8,3 % si son RFR de l’année N–3 n’excède pas le seuil d’assujettissement. Cette mesure bénéficiera également aux allocataires des revenus de l’assurance chômage, lesquels n’ont pas été concernés par la hausse du taux de CSG intervenue en 2018.

Le dispositif proposé conduit par ailleurs à corriger un effet dommageable de la déductibilité de la CSG supplémentaire acquittée en cas de franchissement du seuil au taux plein. Un contribuable franchissant le seuil de RFR en année N voit en effet sa CSG augmenter de 1,7 point et sa CSG déductible augmenter de 2,1 points ([28]). Cette augmentation de la CSG déductible en année N minore le RFR de cette même année, ce qui est susceptible de rendre le contribuable à nouveau bénéficiaire du taux réduit de CSG en année N+2. À son tour, le bénéfice du taux réduit en année N+2 tendra à augmenter le RFR N+2 du contribuable et risquera de l’assujettir à nouveau au taux plein en N+4 et ainsi de suite.

● Selon l’étude d’impact, le coût budgétaire de la mesure s’élèvera à 350 millions d’euros à partir de 2019, dont 330 millions d’euros au titre des pensions de retraite. Elle profitera à 350 000 foyers.

C.   La concrÉtisation en 2019 de la transformation du CICE et du CITS en baisse pÉrenne de cotisations sociales et la réforme des dispositifs d’exonÉrations spÉcifiques

Conformément aux engagements du Président de la République et aux dispositions de la LFI pour 2018 et de la LFSS pour 2018, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) et le crédit d’impôt de taxe sur les salaires (CITS) seront transformés, à compter de 2019, en baisse pérenne de cotisations sociales à la fois pour les entreprises et pour les associations.

La modification du profil des allégements de cotisations patronales et notamment de l’allégement général rend nécessaire une réforme de plusieurs dispositifs spécifiques d’exonération, dont la plupart seront moins favorables que les allégements de droit commun.

1.   La compensation de la suppression du CICE par une réduction forfaitaire de la cotisation maladie et par le renforcement de l’allégement général

● La LFI pour 2018 a supprimé le CICE et le CITS pour les rémunérations versées à compter du 1er janvier 2019 ([29]). Parallèlement, la LFSS pour 2018 ([30]) a instauré une compensation pour les entreprises sous deux formes : une réduction forfaitaire de la cotisation sociale d’assurance maladie de 6 points et un renforcement de l’allégement général applicable aux salaires inférieurs à 1,6 SMIC.

D’une part, l’article L. 241-2-1 du code de la sécurité sociale, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2019, prévoit une réduction forfaitaire de la cotisation sociale d’assurance maladie de 6 points pour les rémunérations inférieures à 2,5 SMIC, ce qui conduit à faire passer son taux de 13 % à 7 %. Le coût de cette exonération, appelée à compenser strictement la suppression du CICE, sélève à 21,5 milliards deuros selon létude dimpact.

Montant annuel de l’allÉgement forfaitaire
en fonction du niveau de rÉMUNÉration

Rémunération brute en multiples SMIC

Montant annuel de lallégement forfaitaire
(en euros)

1

1 079

1,1

1 187

1,2

1 295

1,3

1 403

1,4

1 510

1,5

1 618

2

2 158

2,5

2 697

Source : commission des finances.

● La LFSS pour 2018 a également prévu de renforcer l’allégement général de cotisation patronale – prévu à l’article L. 241‑13 – en étendant son champ aux cotisations sociales patronales chômage (4,05 %) et aux cotisations patronales au titre de la retraite complémentaire (6,01 % au 1er janvier 2019).

Lallégement général, instauré par la loi du 17 janvier 2003 relative aux salaires, au temps de travail et au développement de lemploi ([31]), prend la forme dune réduction dégressive de cotisations sociales patronales, au taux maximal au niveau du SMIC et nul au niveau de 1,6 SMIC. Concernant initialement les seules cotisations de sécurité sociale, son champ a été étendu par la LFRSS 2014 ([32]) aux cotisations accident du travail et maladie professionnelle (AT-MP), à la contribution des employeurs au Fonds national daide au logement (FNAL) et à la contribution de solidarité pour lautonomie (CSA).

Le tableau ci-dessous présente les taux de cotisations et contributions dans le champ de l’allégement général proposé par le Gouvernement. Au niveau du SMIC, l’ensemble de ces cotisations est annulé par la réduction dégressive. Le total des taux présentés correspond donc, à ce niveau, au taux de la réduction de l’allégement général.

Comparaison des taux de cotisations dans le champ de l’allÉgement gÉNÉral avant et après son renforcement

Cotisations et contributions
dans le champ de lallégement général

Taux applicable avant le PLFSS pour 2018

Taux applicable après le PLFSS pour 2018

Cotisation maladie*

13,00 %

7,00 %

Cotisation famille**

3,45 %/5,25%

3,45%/5,25%

Cotisation vieillesse plafonnée***

8,55 %

8,55 %

Cotisation vieillesse déplafonnée***

1,90 %

1,90 %

Cotisation « socle » AT-MP

0,84 %

0,84 %

Contribution FNAL****

0,10 % ou 0,50 %

0,10 % ou 0,50 %

CSA

0,30 %

0,30 %

ARRCO tranche 1

Hors champ

4,72 %

CEG Tranche 1

Hors champ

1,29 %

Cotisation chômage

Hors champ

4,05 %

Total*****

28,14 % ou 28,54 %

32,20 % ou 32,60 %

* L’article D. 242-3 du code de la sécurité sociale fixe le taux de la cotisation maladie à 13 % en 2018. On fait ici l’hypothèse qu’il sera ramené par voie réglementaire à 7 % pour 2019, après application de la réduction forfaitaire de 6 points en vertu de l’article 9 de la LFSS pour 2018.

** Le taux de la cotisation d’allocations familiales de droit commun est fixé à 5,25 % par l’article D. 241-3-1. Il fait toutefois l’objet d’une réduction forfaitaire de 1,8 point sur les rémunérations allant jusqu’à 3,5 SMIC en application de l’article L. 241-6-1.

*** Le taux de la cotisation employeur au titre de l’assurance vieillesse est fixé à 8,55 % sur la part de la rémunération n’excédant pas le PSS. Il est de 1,90 % sur la totalité de la rémunération.

**** Le taux de la contribution au Fonds national d’aide au logement (FNAL) est fixé à 0,10 % sur la part des rémunérations dans la limite du PSS pour les employeurs occupant moins de vingt salariés et de 0,50 % sur la totalité de la rémunération pour les employeurs occupant vingt salariés et plus, en application de l’article L. 834-1 du code de la sécurité sociale.

***** Il est fait l’hypothèse d’un taux de cotisation d’allocations familiales de 3,45 %. Le taux de 32,20 % correspond à une contribution FNAL de 0,10 % et le taux de 32,70 % à une contribution FNAL de 0,50 %.

Source : commission des finances.

Alors que la réduction forfaitaire de 6 points du taux de cotisation maladie a pour effet de compenser strictement la suppression du CICE ([33]) et d’octroyer un gain immédiat aux bénéficiaires du CITS ([34]), le renforcement de l’allégement général permet d’aller au-delà. Son coût en année pleine est estimé à 3,5 milliards deuros.

2.   Modifier le calendrier d’entrée en vigueur d’une partie du renforcement de l’allégement général

Le PLFSS pour 2018 avait prévu une entrée en vigueur de l’ensemble de ces allégements au 1er janvier 2019. L’article 8 du PLFSS pour 2019 propose une modification du calendrier d’entrée en vigueur d’une partie du renforcement de l’allégement général, tout en maintenant l’entrée en vigueur au 1er janvier de la réduction forfaitaire de 6 points de la cotisation maladie.

● Selon le dispositif proposé, l’entrée en vigueur de l’allégement forfaitaire de cotisations d’assurance maladie de 6 points pour les rémunérations n’excédant pas 2,5 SMIC est maintenue au 1er janvier 2019, permettant une stricte neutralité pour les employeurs bénéficiaires du CICE. L’entrée dans le champ de l’allégement général des cotisations de retraite complémentaire (pour un total de 6,01 %) sera également appliquée à compter du 1er janvier 2019.

Le maintien de l’entrée en vigueur de ce volet du renforcement de l’allégement général dès le 1er janvier 2019 est nécessaire car la cotisation maladie est dans le champ de l’allégement général. Réduire de 6 points de la cotisation maladie sans majorer d’autant le taux de réduction maximal au titre de l’allégement général aurait pour effet d’annuler ou d’atténuer son effet pour les rémunérations comprises entre 1 et 1,6 SMIC. Sans l’intégration dans le champ de l’allégement général des cotisations patronales au titre de la retraite complémentaire, la suppression du CICE n’aurait pas été strictement compensée à ces niveaux de rémunération.

● Le Gouvernement souhaite que soit reportée au 1er octobre 2019 l’entrée dans le champ de l’allégement général de la cotisation chômage, ce qui représente, au niveau du SMIC, une majoration de 4,05 points de la réduction de cotisations au titre de ce dispositif.

Le graphique ci-dessous compare le profil des allégements de cotisations qui entreront en vigueur au 1er janvier 2019 à celui qui sera applicable à compter du 1er octobre.

Exemple de calcul du taux d’exonÉration en 2019 dans le cas d’une entrée
en vigueur en deux temps du renforcement des allÉgements gÉNÉraux

Note : le schéma présente les taux d’exonération de cotisations sociales employeurs à la suite de la réforme, pour des rémunérations allant de 1 à 2 SMIC.

Source : annexe 9 du PLFSS pour 2019.

● Le montant de l’allégement de cotisations au titre de l’allégement général, maximal au niveau du SMIC et dégressif jusqu’à s’annuler au niveau de 1,6 SMIC, est égal au produit de la rémunération annuelle brute et d’un coefficient. Ce dernier dépend lui-même du rapport entre la rémunération annuelle brute du salarié et le SMIC. Au niveau du SMIC, ce coefficient est donc égal à la somme des taux des cotisations entrant dans le champ de l’allégement général.

Le report d’une partie du renforcement de l’allégement général impliquera l’application de deux taux pour chaque salarié dont la rémunération est comprise entre 1 et 1,6 SMIC : un premier taux applicable entre le 1er janvier et le 30 septembre et un second taux à partir du 1er octobre.

Le tableau ci-dessous présente les baisses de cotisations supplémentaires instaurées par les mesures nouvelles de la LFSS pour 2018 et les mesures proposées par le PLFSS pour 2019.

Diminution du montant des cotisations patronales par les mesures des PLFSS pour 2018 et 2019 en fonction du niveau du salaire

(en euros, sauf indication contraire)

Rémunération brute
(en multiples de SMIC)

2019

À partir de 2020

Réduction forfaitaire de 6 points de la cotisation maladie compensant strictement la perte de CICE (1)

Renforcement de lallégement général (2)*

Impact combiné des deux mesures
(1) + (2)

Réduction forfaitaire de 6 points de la cotisation maladie compensant strictement la perte de CICE (3)

Renforcement de lallégement général (4) *

Impact combiné des deux mesures (3) + (4)

1

1 079

184

1 263

1 079

730

1 809

1,1

1 187

153

1 340

1 187

608

1 795

1,2

1 295

123

1 417

1 295

487

1 781

1,3

1 403

92

1 494

1 403

365

1 768

1,4

1 510

61

1 572

1 510

243

1 754

1,5

1 618

31

1 649

1 618

122

1 740

1,59

1 715

3

1 719

1 715

12

1 728

1,6

1 726

1 726

1 726

1 726

2

2 158

2 158

2 158

2 158

2,5

2 697

2 697

2 697

2 697

Note : il est supposé que l’entreprise est redevable de la contribution au FNAL au taux de 0,5 %. Les calculs sont effectués sur la base du SMIC 2018.

* Pour 2019, cette colonne présente les effets cumulés de l’entrée dans le champ de l’allégement général des cotisations de retraite complémentaire au 1er janvier et de l’entrée dans le champ de la cotisation chômage au 1er octobre. Pour 2020, elle présente ces mêmes effets en année pleine.

Source : commission des finances.

● L’étude d’impact évalue le gain pour les finances publiques de la mesure de report de l’intégration de la cotisation chômage dans le champ des allégements généraux à 2,5 milliards d’euros. Si l’on prend en compte l’effet restrictif de ce report sur l’assiette de l’impôt sur les sociétés et de l’impôt sur le revenu appelé « effet-retour », la recette supplémentaire est évaluée à 2,2 milliards deuros, selon l’étude d’impact.

3.   Des effets à attendre globalement positifs et différenciés selon les employeurs

● Le rapporteur tient à souligner les impacts bénéfiques de cette transformation pour les entreprises et associations qui sont les suivants :

– en 2019, l’effet de « l’année double », c’est-à-dire de l’année lors de laquelle les entreprises bénéficieront du cumul des baisses de cotisations patronales et des versements au titre du CICE et du CITS au titre des rémunérations versées les années précédentes, pour le surplus par rapport à l’année précédente s’élevant à environ un point de PIB ;

– à l’horizon 2020-2021, un effet continu évalué à 0,2 point de PIB et 100 000 emplois ;

– à long terme, une simplification importante pour les bénéficiaires.

Il note aussi l’immédiateté du gain pour les bénéficiaires du CITS, dont de nombreuses associations et établissements médicaux et médico‑sociaux, ainsi que l’effet bénéfique sur l’emploi d’une exonération de cotisations par rapport à un crédit d’impôt.

● La note d’évaluation commandée par l’Assemblée nationale en vue de l’examen des textes financiers sur les effets de la transformation du CICE en réductions de cotisations patronales met en exergue les effets de trésorerie positifs de cette bascule.

Elle entraînera aussi un élargissement du périmètre des entreprises soutenues et un recentrage de l’aide sur les bas salaires, c’est-à-dire là où elle est le plus efficace pour l’emploi ([35]). L’effet de la bascule sera très favorable aux entreprises éligibles au CITS, puisqu’elles bénéficieront de l’allégement forfaitaire de 6 points de la cotisation maladie, alors que le taux du CITS était de 4 % sur la même assiette. Les établissements, éligibles ni au CICE ni au CITS verront leur coût du travail diminuer de 6 % des rémunérations brutes inférieures à 2,5 SMIC. La note précitée chiffre à 1,7 milliard deuros l’effet de l’élargissement du périmètre du soutien, cet effort se concentrant essentiellement vers les établissements non lucratifs.

Pour chaque entreprise, l’impact de cet effet-retour de l’impôt dépendra de la part de la masse salariale éligible au CICE et du taux d’imposition sur les bénéfices qui lui est applicable. Ce supplément d’impôt varie en fonction de la taille des entreprises. Il croît pour atteindre son effet maximum pour les entreprises de taille moyenne, avant de décroître pour les plus grandes entreprises.

Il sera en effet moins défavorable aux petites entreprises, qui s’acquittent en moyenne d’un impôt sur les bénéfices à un taux plus faible que les plus grandes entreprises. Ce phénomène s’explique par le taux minoré de 15 % applicable aux petites et moyennes entreprises (PME) et à une proportion plus importante d’entreprises déficitaires parmi les petites entreprises que parmi les entreprises de taille plus importante. L’impact plus faible de l’effet-retour sur les grandes entreprises a pour cause le moindre impact du CICE sur la masse salariale de ces entreprises.

 

 

Supplément d’impôt sur les sociétés imputable à la bascule du CICE en fonction de la taille des entreprises (nombre d’employés)

(en % de la masse salariale)

Source : note de l’Institut des politiques publiques, octobre 2018.

● Les effets seront également différenciés par secteur. La note précitée montre que les secteurs intensifs en main-d’œuvre peu qualifiée tirent davantage parti de la réforme que les secteurs industriels ou financiers, comme le montre le graphique ci-après. Notons toutefois qu’indirectement, le secteur industriel bénéficiera de la mesure par le canal des consommations intermédiaires, en particulier via les services proposés par des entreprises intensives en main‑d’œuvre peu qualifiée.

Effet de la réforme par secteur

(en % de la masse salariale)

Source : note précitée de l’Institut des politiques publiques, octobre 2018.

● D’un point de vue budgétaire, l’Institut des politiques publiques estime l’impact en 2019 de l’effet-retour sur l’impôt à 3,3 milliards d’euros, dont 0,3 milliard d’euros au titre de l’impôt sur le revenu. Le Gouvernement estime ce même effet à 2,0 milliards d’euros en 2019 et environ 5 milliards d’euros en année pleine ([36]).

Pour rappel, le renforcement de l’allégement général par l’intégration des cotisations de retraite complémentaire et de la cotisation chômage permet d’aller au-delà de la simple compensation du CICE. Le coût du renforcement de l’allégement général pour les finances publiques est en effet estimé à 3,5 milliards d’euros en année pleine par le Gouvernement.

L’étude précitée indique qu’en année pleine, le montant de l’allégement supplémentaire sur les bas salaires serait égal au montant de l’effet retour de l’impôt à 3,3 milliards d’euros. Leffet-retour serait donc couvert par le renforcement de lallégement général.

4.   Les réformes des dispositifs spécifiques d’allégements de cotisations sociales patronales

La suppression du CICE et du CITS et la baisse de cotisations sociales patronales rendent indispensable une refonte de plusieurs dispositifs existants rendus, pour la plupart, moins avantageux que le dispositif de droit commun. Ces modifications ou suppressions de régimes particuliers entraîneront un coût pour la sécurité sociale de 1,2 milliard deuros en 2019.

a.   La réforme du dispositif spécifique aux contrats en alternance

Pour rappel, l’apprentissage est un contrat de travail à durée limitée (CDD) ou à durée indéterminée (CDI) entre un salarié et un employeur, permettant à l’apprenti de suivre une formation en alternance en entreprise sous la responsabilité d’un maître d’apprentissage et en centre de formation des apprentis (CFA) durant un à trois ans. Peuvent être apprenties les personnes âgées d’au moins 16 ans et d’au plus 25 ou 30 ans selon les régions.

Le contrat de professionnalisation est un autre type de contrat en alternance qui doit permettre l’acquisition d’une qualification professionnelle reconnue (diplôme, titre, certificat de qualification professionnelle). Il est ouvert aux personnes de 16 à 25 ans, aux demandeurs d’emploi d’au moins 26 ans, aux bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA), de l’allocation de solidarité spécifique (ASS), de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) et aux personnes ayant bénéficié d’un contrat unique d’insertion (CUI).

Les contrats de formation en alternance, qu’il s’agisse des contrats d’apprentissage ou des contrats de professionnalisation, bénéficient de dispositifs spécifiques d’exonération de cotisations sociales plus avantageux que les dispositifs de droit commun actuellement en vigueur.

i.   Le contrat d’apprentissage

● Le régime d’allégements applicables dépend du nombre de salariés que compte l’entreprise.

Pour les artisans et les entreprises de moins de onze salariés, l’employeur est exonéré de la totalité des cotisations sociales patronales et salariales d’origine légale et conventionnelle, à l’exclusion de la cotisation AT-MP (article L. 6243-2 du code du travail).

Pour les autres entreprises, l’employeur est exonéré des cotisations patronales de sécurité sociale à l’exclusion de la cotisation AT-MP.

Pour les employeurs qui n’en sont pas exonérés, le montant des cotisations qui restent dues est actuellement avantageux par rapport au régime de droit commun en vigueur. En effet le montant des contributions et cotisations sociales, qu’elles soient patronales ou salariales, est calculé sur la base d’une assiette déterminée selon une méthode favorable, sauf pour la cotisation vieillesse ([37]).

Cette base est d’abord égale à un pourcentage de la rémunération légale minimale d’un apprenti qui dépend lui-même de l’âge du salarié en contrat d’apprentissage (articles L. 6243-2 et D. 373-1 du code de la sécurité sociale et article D. 6222‑26 du code du travail).

Elle fait également l’objet d’un abattement forfaitaire de 11 %.

Le taux de l’abattement est donc égal au pourcentage du SMIC correspondant au niveau de rémunération minimum de l’apprenti majoré de 11 points. Cette majoration est de 20 points dans les anciens départements d’outre‑mer, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin.

RÉmunÉrations minimales applicables et assiette forfaitaires
(en pourcentage du smic)

 

Avant 18 ans

De 18 à 20 ans

21 ans et plus

1re année d’apprentissage

Rémunération minimale applicable

25 %

41 %

53 %

Assiette de cotisations

14 %

30 %

42 %

2e année d’apprentissage

Rémunération minimale applicable

37 %

49 %

61 %

Assiette de cotisations

26 %

38 %

50 %

3e année d’apprentissage

Rémunération minimale applicable

53 %

63 %

78 %

Assiette de cotisations

42 %

54 %

67 %

Source : annexe IX du PLFSS pour 2019.

● Les niveaux d’allégement sont moins favorables que les allégements généraux renforcés. Au niveau du SMIC, la somme des taux de cotisation dans le champ de l’exonération spécifique aux contrats d’apprentissage s’élève à 31,5 % pour les artisans et les entreprises de moins de onze salariés et de 20,9 % pour les autres employeurs. Le Gouvernement propose donc une réforme de ce régime.

Il est envisagé de supprimer les allégements spécifiques de cotisations patronales dont bénéficient les employeurs de contrats d’apprentissage pour les faire basculer dans le régime des allégements généraux renforcés à compter du 1er janvier 2019. Cette mesure permettra d’annuler la différence de traitement qui a actuellement cours entre les employeurs de moins de onze salariés et les autres.

L’abattement forfaitaire de 11 points sera supprimé et l’allégement portera sur l’ensemble de l’assiette des cotisations et contributions sociales. Celle-ci correspondra à la rémunération brute effectivement perçue par l’apprenti. Ce changement d’assiette sera sans conséquence pour l’employeur, mais permettra à lapprenti douvrir des droits sociaux sur la rémunération réellement perçue.

Selon l’étude d’impact, le passage du régime spécifique au régime de droit commun tel que modifié par la LFSS pour 2018 :

– sera neutre ou se traduira par un gain pour 94 % des contrats, les entreprises gagnantes étant celles de onze salariés et plus ;

– se traduira par une perte pour les entreprises de moins de onze salariés dont les apprentis sont rémunérés au-delà du SMIC, soit 1,8 % de ces entreprises ;

– se traduira par une perte pour les employeurs dont les apprentis sont rémunérés au-delà de 1,6 SMIC ([38]) qui ne bénéficieront plus des exonérations de cotisations. Ces derniers représentent 0,3 % des contrats d’apprentissage.

RÉpartition (par assiette de cotisations et par nombre de contrats)
des gagnants et des perdants du passage aux exonÉrations
de droit commun renforcÉes

Source : annexe 9 PLFSS pour 2019, d’après les données de l’ACOSS (2016) et les calculs de la Direction de la sécurité sociale (DSS).

Pour les contrats d’apprentissage, le Gouvernement propose que la totalité du renforcement de l’allégement général, c’est-à-dire y compris l’intégration de la cotisation chômage dans son champ, entre en vigueur dès le 1er janvier 2019 et non le 1er octobre 2019. Sur cette période, les exonérations applicables aux contrats d’apprentissage seraient donc plus favorables que le droit existant.

ii.   Le contrat de professionnalisation

● Selon les articles L. 6325-16 à L. 6325-22 du code du travail, les contrats de professionnalisation signés par des demandeurs d’emploi de plus de 45 ans ouvrent droit à une exonération de cotisations patronales de sécurité sociale, à l’exception des cotisations AT-MP.

Lorsqu’ils sont conclus par des groupements d’employeurs qui organisent des parcours d’insertion et de qualification à destination de jeunes âgés de seize à vingt ans sortis du système scolaire sans qualification ou de demandeurs d’emploi de plus de quarante-cinq ans, l’exonération inclut également dans son champ les cotisations AT-MP. Le montant de ces exonérations ne peut excéder un SMIC mensuel.

● Dans l’étude d’impact, il est indiqué que le régime de cotisations patronales lié à ces contrats est, dans la majorité des cas, moins attractif que les allégements généraux. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement propose de supprimer ce régime particulier, afin que le régime de droit commun qui entrera en vigueur en 2019 s’applique.

b.   La réforme des exonérations applicables au secteur de l’insertion par l’activité économique

● Le secteur de l’insertion par l’activité économique rassemble quatre types de structure :

– les entreprises d’insertion (EI) ;

– les ateliers et chantiers d’insertion (ACI) ;

– les entreprises de travail temporaire d’insertion (ETTI) ;

– les associations intérimaires (AI).

Les ETTI, les EI et les ACI interviennent dans le secteur marchand, tandis que l’activité des ACI porte sur le secteur non marchand.

En dépit de plusieurs recommandations ([39]) visant à simplifier le régime des exonérations sociales applicable au secteur de l’insertion par l’activité économique, ce dernier demeure complexe et fragmenté. Les EI et les ETTI sont éligibles aux allégements généraux ; à l’inverse, les AI et les ACI bénéficient de dispositifs qui leur sont propres, comme le montre le tableau ci-dessous.

Les rÉgimes d’exonÉration de cotisations applicables au secteur de l’insertion par l’activitÉ Économique

Type de structure

Entreprise d’insertion (EI)

Entreprise de travail temporaire d’insertion (ETTI)

Association intermédiaire (AI)

Atelier et chantier d’insertion (ACI)

Exonérations sociales applicables

Allégements généraux

Allégements généraux

Exonération totale de cotisations patronales hors AT-MP, dans la limite de 750 heures par an

Exonération totale des cotisations patronales de sécurité sociale, hors AT-MP, dans la limite de 1 SMIC

Source : annexe IX PLFSS pour 2019.

● En vertu de l’article L. 241-11 du code de la sécurité sociale, les AI sont exonérées de cotisations patronales de sécurité sociale hors AT-MP dans la limite de 750 heures par salarié et par an. Elles ne sont pas redevables du FNAL ni de la contribution au versement transport ni de la taxe d’apprentissage.

Au niveau du SMIC, l’allégement général est un régime plus favorable que celui applicable aux AI. Il le demeure jusqu’à 1,1 SMIC. La distribution des salaires dans ce type de structure garantit que la réforme sera largement favorable aux employeurs. Au surplus, les AI bénéficient du CITS au taux de 4 %, lequel sera surcompensé par la réduction forfaitaire de cotisation maladie au taux de 6 %, sur la même assiette.

En 2019, les allégements généraux représenteraient 121 millions d’euros, contre 92 millions d’euros actuellement pour les exonérations de cotisations de sécurité sociale et de contributions au FNAL et au versement transport. Ces structures seraient gagnantes à hauteur d’environ 29 millions d’euros.

● Les ACI bénéficient d’une exonération de cotisations sociales patronales de sécurité sociale hors AT-MP sur la partie de la rémunération n’excédant pas le SMIC au titre des contrats à durée déterminée d’insertion (CDDI) qu’ils concluent. Ils sont également exonérés de la taxe d’apprentissage, de la taxe sur les salaires et de la participation au titre de l’effort de construction ([40]).

L’allégement général est plus avantageux que le régime spécifique applicable aux ACI au niveau du SMIC jusqu’à 1,2 SMIC. Le nombre de perdants bénéficiant de l’allégement général serait donc faible.

Source : annexe IX du PLFSS pour 2019.

Le montant des allégements généraux pour les ACI s’élèverait à 166 millions d’euros en 2019, contre 118 millions d’euros pour les exonérations actuellement applicables. La réforme représentera donc un gain pour ces structures de 48 millions deuros.

En revanche, les employeurs publics, représentant environ 14 % de la masse salariale, ne peuvent pas bénéficier de l’allégement général. Le PLFSS prévoit donc que le dispositif actuel leur demeure applicable, pour un coût de 19 millions deuros.

Comparaison de l’allÉgement gÉnÉral renforcÉ
avec les dispositifs spÉcifiques aux AI et aux ACI

Cotisations et contributions

Allégement général

Cotisations et contributions patronales exonérées pour les AI
(dans la limite de 750 h par salarié et par an)

Cotisations et contributions patronales exonérées pour les ACI (pour les rémunérations nexcédant pas le SMIC)

Cotisation maladie

7,00 %

7,00 %

7,00 %

Cotisation famille

3,45 %

3,45 %

3,45 %

Cotisation vieillesse plafonnée

8,55 %

8,55 %

8,55 %

Cotisation vieillesse déplafonnée

1,90 %

1,90 %

1,90 %

Cotisation "socle" AT-MP

0,84 %

Non exonérée

Non exonérée

 

Contribution FNAL

0,1 % ou 0,5 %

0,1 % ou 0,5 %

CSA

0,30 %

Non exonérée

ARRCO tranche 1

4,72 %

CEG Tranche 1

1,29 %

Cotisation chômage

4,05 %

Total

32,2 % ou 32,60 %

21,00 % ou 21,40 %

20,90 %

Source : commission des finances, d’après l’annexe 9 PLFSS pour 2019.

c.   La réforme des exonérations sociales applicables aux contrats uniques d’insertion et aux contrats d’accompagnement dans l’emploi

Le contrat unique d’insertion (CUI) est un contrat aidé qui se décline en contrat d’accompagnement dans l’emploi (CUI-CAE) dans le secteur non marchand et en contrat initiative emploi (CIE) dans le secteur marchand et dans certains départements.

L’article L. 5134-31 du code du travail prévoit que les embauches réalisées en CAE donnent droit à une exonération :

– des cotisations patronales de sécurité sociale, à l’exception des cotisations AT-MP ;

– de la taxe sur les salaires ;

– de la taxe d’apprentissage ;

– des participations des employeurs au titre de l’effort de construction.

À partir de 2019, les allégements généraux deviendront plus favorables que l’exonération spécifique des employeurs CUI-CAE.

Comparaison de l’allÉgement gÉNÉral renforcé avec le dispositif spÉcifique au CUI-CAE

 

Allégement général

CUI-CAE 2018

Cotisation maladie

7,00 %

7,00 %

Cotisation famille

3,45 %

3,45 %

Cotisation vieillesse plafonnée

8,55 %

8,55 %

Cotisation vieillesse déplafonnée

1,90 %

1,90 %

Cotisation "socle" AT-MP

0,84 %

Non exonérée

Contribution FNAL

0,1 % ou 0,5 %

CSA

0,30 %

ARRCO tranche 1

4,72 %

CEG Tranche 1

1,29 %

Cotisation chômage

4,05 %

Total

32,2 % ou 32,60 %

20,90 %

Source : commission des finances, d’après l’annexe 9 du PLFSS pour 2019.

Le gain du passage au régime de droit commun pour un contrat n’ouvrant pas droit au CICE serait de 12 % du salaire brut au niveau du SMIC, selon l’étude d’impact et le nouveau barème serait plus favorable jusqu’à 1,2 SMIC. L’alignement du régime spécifique sur le droit commun représenterait un surcoût de 100 millions d’euros pour les finances publiques par rapport au régime actuel. Si l’on tient compte de l’impact de la suppression du CICE, estimée à 13 millions d’euros, le bénéfice pour ces employeurs s’élèverait à 87 millions d’euros.

Les employeurs publics, énumérés à l’article L. 5134-21 du code du travail, étant exclus du champ de l’allégement général, le Gouvernement propose de continuer à leur appliquer le dispositif actuel, ce qui représente un coût annuel de 310 millions deuros.

d.   La modification du régime d’exonération spécifique applicable aux structures employant des aides à domicile auprès de publics fragiles

● L’article L. 241-10 du code de la sécurité sociale prévoit un régime d’exonération de cotisations patronales de sécurité sociale, à l’exclusion des cotisations AT-MP, pour l’emploi d’une aide à domicile par des personnes « fragiles », c’est-à-dire :

– les personnes âgées d’au moins 70 ans ;

– les personnes ayant à charge un enfant en situation de handicap ;

– les personnes en situation de handicap, invalides ou victimes d’un accident de travail ;

– les personnes dans l’obligation de recourir à l’assistance d’un tiers et d’au moins 70 ans ;

– les personnes éligibles à l’allocation personnalisée d’autonomie.

L’aide à domicile peut être employée directement par les particuliers fragiles ou par l’intermédiaire :

– d’associations ou d’entreprises relevant du secteur à la personne ;

– de centres communaux ou intercommunaux d’action sociale ;

– d’organismes habilités au titre de l’aide sociale ou ayant passé une convention avec un organisme de sécurité sociale.

Dans chacun de ces cas, la rémunération de l’aide à domicile est actuellement totalement exonérée pour les cotisations qui entrent dans le champ de ce régime spécifique. Elle est sans limite pour les rémunérations effectuées en contrepartie de l’exécution de tâches effectuées au domicile des personnes fragiles ; elle est plafonnée à 65 fois le SMIC horaire par mois et par particulier lorsque le bénéficiaire est âgé d’au moins 70 ans mais n’est pas dépendant ([41]).

● Le Gouvernement propose de modifier le barème de l’allégement spécifique, pour le rapprocher de l’allégement de droit commun. Afin de maintenir le même niveau de soutien, il souhaite conserver un régime spécifique.

Le dispositif proposé se présente sous la forme d’un allégement de cotisations et de contributions dont le champ est élargi pour qu’il soit aligné sur le dispositif de droit commun et dégressif pour s’annuler à 1,6 SMIC.

Seraient ainsi incluses dans le champ de l’allégement, outre les cotisations qui font l’objet de l’allégement spécifique en vigueur, la CASA, la contribution au FNAL, les cotisations AT-MP, les cotisations de retraite complémentaire et les contributions dues au titre de l’assurance chômage.

À la différence de l’allégement général, l’exonération spécifique, dans sa version proposée, serait totale pour les rémunérations entre 1 et 1,1 SMIC.

● L’exonération spécifique représente un effort prévisionnel de 1,7 milliard d’euros en 2019 pour la sécurité sociale, compensé par le budget de l’État, dont 861 millions d’euros au titre des exonérations accordées aux organismes prestataires. Il convient d’ajouter à ce montant les aides versées au titre du CICE et du CITS, qui ont des coûts respectifs de 47 et de 50 millions d’euros.

L’étude d’impact indique que la réforme du dispositif serait à coût constant. Plus de 60 % des structures, tous statuts confondus, seraient gagnantes. Le gain serait moindre pour les associations de plus de 50 salariés et une partie serait perdante. Le gain moyen (7,5 % de la masse salariale) serait toutefois bien supérieur à la perte moyenne (3 % de la masse salariale).

Le rapporteur se réjouit de cet aménagement qui concerne directement les citoyens les plus fragiles. Dans la continuité de celui-ci, il s’interroge sur l’opportunité de faire bénéficier les établissements de santé et établissements médico-sociaux d’une exonération majorée comparable. En effet, les auditions conduites et les tables rondes organisées avec les personnels de santé ont montré l’existence d’une tension importante sur les effectifs de ces établissements. Le passage à une exonération totale à 1,1 SMIC et dégressive jusqu’à 1,6 SMIC permettrait de libérer des marges de manœuvre aux établissements. Elle semble particulièrement appropriée dans la mesure où elle ciblerait les professions aux rémunérations modestes et aux charges de travail importantes, dont l’attractivité apparaît particulièrement faible aujourd’hui.

Cependant, une telle exonération entraînerait des déséquilibres dans la mesure où les établissements publics, qui ne s’acquittent pas des mêmes cotisations que leurs homologues privés et n’étaient pas concernés par le CICE et le CITS, n’entrent pas dans le champ de cet article. Le rapporteur propose que les dispositions soient prises pour que nos établissements publics tirent eux aussi profit de l’allégement du coût du travail. Si le bénéfice serait logiquement plus réduit que pour les établissements privés, en raison de taux de cotisations déjà moindres, une telle mesure contribuerait à l’amélioration des conditions de travail, de la qualité des soins et des comptes de nos hôpitaux. Elle serait facteur d’égalité entre les différents types d’établissements de santé.

e.   La suppression de l’exonération spécifique pour l’emploi des travailleurs occasionnels et de demandeurs d’emploi dans le secteur agricole

● Les exploitants agricoles employant des travailleurs occasionnels bénéficient d’une exonération de cotisations patronales en vertu de l’article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime.

Sont considérés comme des travailleurs occasionnels :

– les salariés recrutés pour des tâches temporaires liées au cycle de production animale ou végétale ou activités de transformation, de conditionnement et de commercialisation de produits agricoles lorsque ces activités sont accomplies sous l’autorité d’un exploitant agricole et constituent le prolongement direct de l’acte de production ;

– les demandeurs d’emploi inscrits depuis au moins quatre mois lorsqu’ils sont recrutés en CDI par un groupement d’employeurs relevant du régime agricole.

Les coopératives d’utilisation du matériel agricole (CUMA) mettant des salariés à disposition de leurs adhérents ne sont pas éligibles au dispositif.

L’assiette des cotisations sociales prises en compte pour le calcul des cotisations dues pour l’emploi de chaque travailleur occasionnel est constituée des rémunérations versées aux travailleurs occasionnels agricoles par tout employeur relevant du régime de la protection sociale agricole et des rémunérations et aux demandeurs d’emploi répondant aux conditions présentées supra.

Aux termes du même article L. 741-16, l’exonération est dégressive et linéaire de façon à être totale jusqu’à 1,25 SMIC et dégressive pour s’annuler à 1,5 SMIC. La formule du montant de l’exonération est précisée à l’article D. 741‑60 du même code.

Les cotisations et contributions dans le champ de l’exonération sont les suivantes :

– les cotisations d’assurance maladie ;

– les cotisations d’assurance vieillesse ;

– les cotisations au titre des allocations familiales.

Restent en revanche dues :

– les cotisations AT-MP ;

– la contribution FNAL ;

– la cotisation solidarité autonomie (CASA).

En année pleine, selon l’étude d’impact, 73 000 entreprises bénéficient du dispositif TO-DE pour environ 927 000 contrats éligibles.

● Le Gouvernement propose que le dispositif TO-DE soit supprimé au profit des allégements généraux renforcés de droit commun entrant en vigueur au 1er janvier 2019.

Comme l’indique l’étude d’impact, le dispositif TO-DE est plus avantageux que les allégements renforcés, mais la réforme entraînera de moindres exonérations de cotisations pour deux secteurs : la viticulture (‑38 millions d’euros) et les cultures spécialisées (‑52 millions d’euros). Les autres filières seraient globalement gagnantes avec 20 millions d’euros d’exonérations supplémentaires.

Le rapporteur s’inquiète de l’impact que pourrait avoir cette mesure sur ces filières parfois fragiles, notamment au vu de la concurrence mondiale. Étant donné la catégorie de salariés concernés, aux revenus relativement faibles, il demande à ce que le dispositif d’exonération spécifique soit maintenu ou à ce qu’une alternative crédible soit proposée par le Gouvernement.

f.   La refonte des dispositifs d’exonérations applicables dans les anciens départements et régions d’outre-mer

● Pour tenir compte des handicaps structurels qui touchent les économies ultramarines, comme l’éloignement ou l’étroitesse des marchés, le législateur a créé un dispositif d’allégements de cotisations sociales spécifiques par la loi d’orientation du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer ([42]) dit « exonérations LODEOM ».

Actuellement, les employeurs exerçant leur activité en Guadeloupe, en Martinique, à La Réunion, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin bénéficient d’une exonération de cotisations patronales de sécurité sociale, hors AT-MP, en vertu de l’article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale. Le régime d’exonération applicable diffère selon les effectifs de l’entreprise, son secteur d’activité et selon qu’elle est éligible au CICE dont le taux est majoré dans les anciens départements et régions d’outre-mer.

Elle s’applique aux entreprises de moins de onze salariés, quel que soit leur secteur d’activité et aux entreprises, quel que soit le nombre de salariés, exerçant dans des secteurs prioritaires ([43]).

Le régime de ces exonérations est plus avantageux pour les employeurs que le régime de droit commun : les niveaux des exonérations sont plus élevés et elles s’appliquent à des niveaux de rémunération plus élevés. De plus, des barèmes spécifiques s’appliquent aux employeurs de secteurs prioritaires, comme la recherche, le tourisme ou l’environnement et aux entreprises de moins de onze salariés, quel que soit le secteur d’activité. Certains secteurs prioritaires et les entreprises de moins de onze salariés font l’objet de régimes d’exonérations particuliers.

Les dispositifs d’exonération tiennent enfin compte de la possibilité pour les entreprises de bénéficier du CICE, dont le taux est majoré dans les outre-mer, s’établissant à 9 %. Il y a lieu d’ajouter que les entreprises bénéficient également de la réduction forfaitaire de cotisations d’allocations familiales de 1,8 point pour les rémunérations inférieures ou égales à 3,5 SMIC.

Le tableau ci-dessous, extrait de l’étude d’impact, récapitule les dispositifs applicables en fonction des niveaux de rémunération.

Les dispositifs spÉcifiques d’exonÉration outre-mer

Seuils actuels de salaire horaire brut déterminant le montant de lexonération (en fonction du SMIC)

Pour les employeurs ne bénéficiant pas du CICE

Pour les employeurs bénéficiant du CICE

Exonération de droit commun

Seuil d’exonération totale

1,4

1,3

Seuil à partir duquel l’exonération devient dégressive

1,4

1,3

Seuil à partir duquel l’exonération devient nulle

3

2

Employeurs de moins de 11 salariés

Seuil d’exonération totale

1,4

1,4

Seuil à partir duquel l’exonération devient dégressive

2

1,6

Seuil à partir duquel l’exonération devient nulle

3

2,3

Exonération renforcée (entreprises implantées dans les ZFA ou relevant d’un secteur prioritaire)

Seuil d’exonération totale

1,7

1,7

Seuil à partir duquel l’exonération devient dégressive

2,5

2,5

Seuil à partir duquel l’exonération devient nulle

4,5

3,5

Allégements généraux

Seuil d’exonération totale

1

Seuil à partir duquel l’exonération devient dégressive

1

Seuil à partir duquel l’exonération devient nulle

1,6

Source : annexe IX PLFSS pour 2019.

● La transformation du CICE en baisse de cotisations sociales patronales et les imperfections propres aux dispositifs d’exonération spécifiques aux outre‑mers rendent indispensable leur rénovation.

Tout d’abord, leur superposition ne favorise pas leur lisibilité. En plus des six dispositifs spécifiques, fonction de la taille des entreprises, des secteurs concernés et de leur éligibilité ou non au CICE, les allégements généraux sont également applicables aux entreprises qui choisissent d’en bénéficier, à condition qu’elles renoncent aux dispositifs spécifiques d’exonération.

Ensuite, ces avantages en termes de cotisations sociales ne sont pas assez ciblés. Tel est d’ailleurs le constat du Livre bleu des Assises des outre-mer, tenant compte notamment du diagnostic de la mission IGAS-IGF de revue des dépenses sur les exonérations et exemptions de charges sociales spécifiques de juin 2015. Les points de sortie de certains de ces dispositifs sont à des niveaux très supérieurs à celui de 1,6 SMIC ([44]). Il en résulte un manque d’efficience de ces dispositifs rendant une évolution souhaitable.

Enfin, la baisse de 6 points de la cotisation maladie et le renforcement des allégements généraux pour compenser la suppression du CICE n’auront qu’un impact limité dans les territoires ultramarins. L’exonération de cotisations sociales étant intégrale jusqu’à des niveaux élevés de rémunération, la plupart des entreprises qui, dans le régime de droit commun, auraient bénéficié de la baisse de cotisations, sont, dans les régimes spécifiques, déjà exonérées à des niveaux supérieurs. Le taux du CICE outre-mer étant par ailleurs majoré par rapport au taux hexagonal, le profil des baisses de cotisations de droit commun proposées ne convient pas aux entreprises ultramarines.

● Le PLFSS propose une simplification des exonérations applicables dans les outre-mer. Trois volets d’exonérations coexisteraient.

Les rÉgimes d’exonÉration proposÉs

 

Seuil à partir duquel lexonération devient dégressive
(en multiples de SMIC)

Seuil à partir duquel lexonération devient nulle
(en multiples de SMIC)

Régime de droit commun (11 salariés et plus)

1

1,6

Régime de compétitivité (moins de 11 salariés)

1,3

2

Régime de compétitivité renforcée

1,4

2,4

Source : annexe IX du PLFSS pour 2019.

Le régime de droit commun, tel que modifié par la LFSS pour 2018 et par le présent PLFSS, s’appliquerait aux entreprises de onze salariés et plus.

Les entreprises de moins de onze salariés bénéficieraient d’un régime dit de « compétitivité ». L’exonération concernerait le même champ de cotisations que le droit commun, mais elle serait totale jusqu’à 1,3 SMIC, dégressive entre 1,3 et 2 SMIC et nulle à 2 SMIC. De façon notable, le secteur du bâtiment et des travaux publics est intégré dans le champ des secteurs du régime de compétitivité renforcé, ce qui se justifie par l’effet d’entraînement du secteur, son poids dans l’économie des outre-mer et les manques en matière d’infrastructures et de logements sociaux dans les territoires ciblés.

Enfin, un régime de compétitivité renforcée permettrait d’encourager le développement de secteurs prioritaires. Le seuil de rémunération jusqu’auquel l’exonération serait totale est porté à 1,4 SMIC et le point de sortie du dispositif serait à 2,4 SMIC. Il inclut les secteurs les plus stratégiques pour les territoires, leur permettant de favoriser la croissance de l’activité à long terme et les secteurs fortement soumis à la concurrence internationale.

Secteurs relevant du rÉgime de compÉtitivitÉ
et du rÉgime de compÉtitivitÉ renforcÉ

Régime de compétitivité

(exonération totale jusquà 1,3 SMIC et dégressive jusquà 2 SMIC)

Régime de compétitivité renforcée

(exonération totale jusquà 1,4 SMIC et dégressive jusquà 2,4 SMIC)

– BTP

– Employeurs de moins de onze salariés (tous secteurs)

– Industrie

– Restauration

– Environnement, agronutrition et énergies renouvelables

– Nouvelles technologies de l’information et de la communication et centres d’appel

– Pêche, cultures marines, aquaculture

– Agriculture

– Tourisme, restauration de tourisme, loisirs, hôtellerie

– Recherche et développement

Source : commission des finances, d’après l’annexe 9 au PLFSS pour 2019.

● Ce recentrage sur des niveaux de salaires plus bas et sur les secteurs les plus porteurs réduira le coût des exonérations spécifiques à l’outre-mer de 66 millions d’euros. Leur montant était estimé à 958 millions d’euros en 2019 ([45]).

g.   Les allégements de cotisations pour les employeurs des salariés relevant de régimes spéciaux

Les entreprises dont les salariés sont affiliés à certains régimes spéciaux, c’est-à-dire les régimes de la SNCF, de la RATP et des entreprises de la branche des industries électriques et gazières, sont assujetties à l’impôt sur les sociétés et bénéficiaient donc du CICE.

Les agents statutaires de ces entreprises ne peuvent cependant pas bénéficier des baisses de cotisations accordées en contrepartie de la suppression du CICE. L’étude d’impact chiffre la perte du CICE à 0,4 milliard d’euros pour les entreprises concernées.

Compte tenu des différences de taux de cotisations maladie applicables aux régimes spéciaux par rapport au droit commun et des différences de prestations auxquelles ces cotisations ouvrent droit, il n’est pas souhaitable d’appliquer une réduction uniforme de 6 points de la cotisation maladie pour chacun de ces employeurs. En effet, les indemnités journalières maladie maternité et les pensions d’invalidité ne sont pas couvertes par ces cotisations, ce qui explique des taux de cotisation d’assurance maladie inférieurs à ceux de droit commun.

Le Gouvernement souhaite faire converger ces taux de cotisation vers les taux de droit commun, en déduisant le financement des indemnités journalières maladie et maternité, assuré directement par les employeurs en question. Relevant du pouvoir réglementaire, ces modifications de taux interviendront par décret.

Par ailleurs, il est proposé d’étendre aux entreprises dont les salariés relèvent de régimes spéciaux la réduction de 1,8 point de la cotisation d’allocations familiales instaurée par la LFRSS 2014 ([46]). En contrepartie, les entreprises ne bénéficieraient plus de l’exonération de cotisation d’allocations familiales instituée en 1996 pour les agents non titulaires. Globalement, les employeurs seraient bénéficiaires nets de l’opération.

L’étude d’impact chiffre à 103 millions d’euros le coût du nouveau dispositif pour les finances publiques.

III.   Les autres dispositions relatives aux recettes

A.   La prolongation de la durÉe de l’exonÉration de début d’activité, de création ou de reprise d’entreprise pour les exploitants agricoles

● L’aide aux chômeurs créateurs d’entreprise (ACCRE) est un dispositif créé par la loi du 3 janvier 1979 portant diverses mesures en faveur des salariés privés d’emploi qui créent une entreprise ([47]).

Il a été progressivement élargi. Peuvent actuellement en bénéficier (article L. 5141-1 du code de la sécurité sociale) :

– les demandeurs d’emploi indemnisés et les demandeurs d’emploi non indemnisés inscrits à Pôle emploi dix mois au cours des dix-huit derniers mois ;

– les bénéficiaires de l’allocation de solidarité spécifique (ASS) ou du revenu de solidarité active (RSA) ;

– les personnes âgées de 18 à moins de 26 ans ;

– les personnes de moins de 30 ans handicapées bénéficiant de l’obligation d’emploi ou qui ne remplissent pas la condition de durée d’activité pour ouvrir des droits à l’allocation d’assurance des travailleurs involontairement privés d’emploi ;

– les personnes salariées ou licenciées d’une entreprise soumise à l’une des procédures de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires qui reprennent tout ou partie d’une entreprise ;

– les personnes ayant conclu un contrat d’appui au projet d’entreprise pour la création ou la reprise d’une activité économique ;

– les créateurs ou repreneurs d’une entreprise implantée au sein d’un quartier prioritaire de la politique de la ville (QPV) ;

– les bénéficiaires du complément de libre choix d’activité.

Le décalage croissant entre l’objectif initial du dispositif, qui était l’aide au retour à l’emploi des chômeurs, et le public éligible a plaidé pour sa refonte.

● L’article 13 de la LFSS pour 2018 a donc rénové le dispositif, dorénavant dénommé « exonération de début dactivité de création ou reprise dentreprise » (ACCRE). Il entrera en vigueur au 1er janvier 2019.

En vertu de l’article L. 131-6-4 du code de la sécurité sociale, le dispositif bénéficiera, au 1er janvier 2019, à tout créateur ou repreneur d’entreprise que la création ou la reprise concerne :

– une activité indépendante relevant de l’ancien Régime social des indépendants ou du régime des non-salariés agricoles

– une activité sous la forme d’une société, à condition que le créateur ou le repreneur d’activité en exerce effectivement le contrôle.

L’exonération est accordée pour une période de douze mois. Elle est totale pour les revenus inférieurs ou égaux à 75 % du PASS, soit 29 799 euros en 2018. Elle est dégressive jusqu’à s’annuler pour les revenus égaux au PASS, soit 39 732 euros.

Les créateurs ou repreneurs d’entreprise relevant du régime des micro‑entreprises de l’article 50-0 du code général des impôts (régime des micro‑BIC) ou de l’article 102 ter (régime des micro-BNC) bénéficieront d’une prolongation du dispositif ACCRE, dans des conditions fixées par décret, jusqu’à ce qu’ils ne bénéficient plus de ces régimes.

Les travailleurs indépendants, pour la grande majorité d’entre eux, ne bénéficient pas d’un régime fiscal de micro-entreprise propre aux bénéfices agricoles. Ils étaient donc, de fait, exclus du champ de la prolongation. Le dispositif ne prévoyait pas, en effet, que la prolongation s’applique aux exploitants agricoles relevant du régime fiscal des micro-bénéfices agricoles de l’article 64 bis du code général des impôts (régime micro-BA).

● Le Gouvernement propose donc d’étendre la prolongation de l’ACCRE aux exploitants agricoles soumis à ce régime fiscal.

Le coût de la mesure est évalué à 0,5 million d’euros en 2019 et à 0,8 million d’euros en année pleine.

B.   L’ajustement de la cotisation subsidiaire maladie

● Dans le cadre de la création de la protection universelle maladie (Puma), l’article 32 de la LFSS pour 2016 a réformé l’ancienne cotisation CMU‑B, qui était due par les personnes affiliées à la CMU dont les ressources excédaient un plafond fixé par décret ([48]). Le taux de l’ancienne cotisation, assise sur le montant du RFR qui dépasse le plafond, était réglementairement fixé à 8 %. L’assiette, exprimée sous la forme du RFR, était majorée de l’ensemble des « moyens dexistence et de train de vie, notamment les avantages en nature et les revenus procurés par des biens mobiliers et immobiliers » du bénéficiaire, déterminés selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État.

La contribution a été instaurée par la LFSS pour 2016 pour faire participer au financement de la Puma les assurés ne justifiant pas de revenus tirés d’activités professionnelles ni d’un rattachement à l’assurance vieillesse, tout en disposant d’un niveau de revenus du capital relativement important. Régie par l’article L. 380‑2 du code de la sécurité sociale, elle est due par toute personne travaillant en France ou y résidant en bénéficiant de la protection maladie, dès lors :

– que ses revenus et ceux de son conjoint tirés d’activités professionnelles exercées en France sont inférieurs à 10 % du PASS, soit 3 973 euros pour 2018 (article D. 380-1 du code de la sécurité sociale) ;

– que ni elle ni son conjoint n’ont perçu de revenus sous forme de pension de retraite, de rente ou d’allocation chômage au cours de l’année considérée.

La contribution est assise au taux de 8 % sur le montant des revenus issus du capital ou du patrimoine excédant 25 % du PASS, c’est-à-dire 9 933 euros en 2018. Il s’agit plus précisément des revenus fonciers, des capitaux mobiliers, des plus-values de cession à titre onéreux, des BIC et BNC exprimé sous la forme du RFR, majoré, comme l’ancienne contribution, des moyens d’existence et des éléments de train de vie.

L’article L. 380-2 précise que lorsque les revenus d’activités professionnelles de l’assujetti sont inférieurs au seuil de 10 % du PASS (3 973 euros en 2018), mais supérieurs à la moitié de ce seuil (1 987 euros), l’assiette de la cotisation fait l’objet d’un abattement progressif qui atteint 100 % au niveau de 10 % du PASS. En application de cette disposition, l’article D. 380-1 prévoit une formule spécifique dans ce cas.

En 2017, selon l’étude d’impact, 60 000 personnes étaient redevables de la contribution pour un rendement denviron 130 millions deuros.

● Plusieurs défauts dans la conception de la contribution se sont révélés :

– des travailleurs indépendants ou exploitants agricoles ayant une activité déficitaire mais disposant d’un important revenu du capital sont passibles de la contribution ;

– certains contribuables disposant de revenus du capital très élevés et de revenus issus de leur activité professionnelle très légèrement supérieurs au seuil de 10 % du PASS sont exonérés de la contribution. À l’inverse les personnes bénéficiant de revenus du capital très légèrement supérieurs à ce seuil sont redevables de la contribution. Le mécanisme de lissage de la cotisation, qui prend la forme de l’abattement progressif décrit ci-avant, ne remédie pas assez efficacement à ce problème d’effet de seuil ;

– le montant de la cotisation subsidiaire n’est pas plafonné, ce qui peut faire peser une charge fiscale importante sur certaines personnes.

● Pour remédier à cette situation insatisfaisante, le Gouvernement propose plusieurs améliorations au dispositif. Elles concernent le champ des personnes redevables, les modalités de calcul de la contribution et ses modalités de recouvrement.

S’agissant du champ des personnes redevables, les travailleurs indépendants et les exploitants agricoles actifs bénéficieront d’une exonération de cotisation subsidiaire dassurance maladie, dès lors qu’ils sont assujettis par ailleurs à des cotisations de sécurité sociale au moins égales aux cotisations minimales dues au titre de leur activité professionnelle.

S’agissant des modalités de calcul, le PLFSS pour 2019 propose d’abord de renforcer le lissage de leffet du seuil dassujettissement à la contribution, l’abattement d’assiette de la cotisation est rehaussé à hauteur de 50 % du PASS, soit 19 866 euros en 2018.

Le Gouvernement s’engage ensuite à réduire de 8 à 6,5 % le taux de la contribution.

Un mécanisme de décote linéaire du taux sera également mis en place pour lisser le montant de la cotisation en fonction des revenus d’activité et d’éviter les effets pervers du seuil d’assujettissement actuel.

Enfin, le PLFSS propose un plafonnement de lassiette de la contribution au niveau de 8 PASS, soit 317 856 euros, pour prendre en compte la perception de revenus exceptionnels.

Selon l’étude d’impact, le nombre de redevables devrait être réduit d’un tiers (– 20 000) et le montant de la contribution devrait être réduit de 40 millions d’euros.

C.   SÉcuriser la participation des organismes complÉmentaires santÉ au financement des nouveaux modes de rÉmunÉration

● Afin de sécuriser la participation des organismes complémentaires au financement du « forfait patientèle » des médecins traitants, le Gouvernement propose la création d’une contribution fiscale assise sur le montant des primes et cotisations versées au profit des organismes complémentaires au titre des contrats d’assurance maladie complémentaires.

Elle s’inscrit dans le cadre de l’engagement pris en 2012 par les organismes complémentaires de participer au financement de ces modes de rémunérations alternatifs au paiement à l’acte, concrétisé dernièrement dans la convention médicale du 25 août 2016.

● Entre 2013 et 2016 ([49]), cette participation s’est matérialisée par une taxe dont le produit correspondait à l’engagement financier des complémentaires, réparti entre les organismes. Son rendement venait en déduction des dépenses du champ de l’ONDAM.

Elle a été prorogée par les LFSS pour 2017. Pour 2017, son produit, plafonné à 150 millions deuros, est affecté à la CNAM.

En 2018, le montant forfaitaire annuel était fixé à 8,10 euros par assuré consultant son médecin traitant, le forfait étant dû par chaque organisme complémentaire, pour chacun de ses assurés de plus de seize ans ne bénéficiant pas de la CMU-c, ayant déclaré un médecin traitant et ayant eu recours à des soins au cours de l’année ([50]).

● Le dispositif actuel est complexe et son taux manque de stabilité, ce qui pose des difficultés aux organismes complémentaires et à l’union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF), chargée de son recouvrement.

Le Gouvernement propose donc de lui substituer un dispositif fiscal permanent, qui prendrait la forme d’un prélèvement sur les primes et cotisations d’assurance maladie complémentaire des organismes complémentaires. L’assiette serait donc identique à celle de l’actuelle taxe de solidarité additionnelle de l’article L. 861-4. Son taux serait de 0,8 %, calibré de telle sorte que la taxe engendrerait un rendement estimé à 300 millions deuros.

Cette mesure contribuerait utilement au développement de modes de rémunération autres que le forfait à l’acte.

D.   Des mesures de simplification

1.   La simplification des modalités de calcul des cotisations sociales des travailleurs indépendants

L’article 16 du PLFSS vise à clarifier les modalités de calcul des cotisations sociales des travailleurs indépendants. Cette clarification œuvre en faveur d’une meilleure lisibilité du droit applicable, mais elle ne modifie pas le montant des cotisations dues.

En vertu du I de l’article L. 131-6 du code de la sécurité sociale, l’assiette des cotisations de sécurité sociale est constituée des revenus d’activité indépendante à retenir pour le calcul de l’impôt sur le revenu, c’est-à-dire que sa définition repose sur une notion fiscale. Dans une rédaction assez complexe, le II dudit article liste les éléments qui, par dérogation au I, sont inclus dans l’assiette. Comme l’étude d’impact le mentionne, l’une des difficultés consiste dans le mode de calcul « circulaire » de l’assiette : les cotisations sociales des travailleurs indépendants sont calculées sur la base d’une assiette dont ces cotisations sont elles-mêmes exclues. S’il permet de déterminer une assiette représentative de la réalité des bénéfices tirés de l’activité, il présente une complexité importante. Cette dernière est source d’incompréhensions, notamment parce que les cotisations à déduire doivent être estimées par les contribuables eux-mêmes.

L’article 16 du PLFSS propose, par conséquent, que la loi détaille clairement les modalités du calcul des cotisations sociales personnelles à déduire. De plus, il prolonge l’expérimentation de l’article 15 de la LFSS pour 2018 permettant aux travailleurs indépendants, s’ils sont volontaires, d’acquitter leurs cotisations et contributions sociales provisionnelles sur une base mensuelle et non plus trimestrielle. Dans le droit en vigueur, son terme est fixé au 30 juin 2019 ; il est proposé de la prolonger jusqu’au 31 décembre 2019.

2.   La démarche de simplification de la déclaration et du recouvrement des cotisations

L’article 13 du présent projet de loi propose de poursuivre la démarche de simplification et de modernisation des dispositifs de recouvrement des cotisations sociales.

Elle renforce la dématérialisation des démarches des particuliers employeurs et des travailleurs indépendants. Pour les particuliers employeurs, les formalités à remplir dans le cadre du chèque emploi-service universel (CESU) devront se faire par voie dématérialisée. La déclaration par support papier restera possible uniquement pour les personnes qui ne sont pas soumises à l’obligation de dématérialisation, que ce soit pour leur déclaration CESU ou pour la souscription de leur déclaration annuelle. Il s’agit des personnes qui ne sont pas en capacité d’effectuer ces formalités par voie dématérialisée. Pour les travailleurs indépendants, la déclaration sociale des revenus devra être réalisée exclusivement par voie dématérialisée à compter de 2019.

En outre, le Gouvernement propose de renforcer la dématérialisation des documents utilisés entre les organismes de recouvrement et les cotisants.

IV.   Les transferts financiers entre l’État et la sÉCURITÉ sociale et entre branches de la sÉCURITÉ sociale

A.   L’Évolution des modalitÉs de compensation des pertes de recettes de la sÉcuritÉ sociale

1.   L’état des lieux des compensations par l’État des exonérations de cotisations sociales

● L’article 27 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 ([51]) prévoyait la remise par le Gouvernement d’un rapport au Parlement sur la rénovation des relations financières entre l’État et la sécurité sociale. Ce rapport s’ajoute à la liste de ceux qui dressent le constat d’un manque de lisibilité criant et d’une structure trop complexe des sources de financement de la sécurité sociale. Les allégements de cotisations sociales et les modalités de leurs compensations, évolutives, ont contribué à apporter encore davantage de complexité dans un système qui n’en manque pourtant pas.

Il montre que les modalités actuelles de compensation des allégements de cotisations ont évolué et se sont éloignées des règles initiales.

Le principe de compensation intégrale et le principe de neutralité en trésorerie

 

Assurant l’équilibre financier de la sécurité sociale, deux principes financiers régissent les relations financières État/sécurité sociale.

Le principe de compensation intégrale

Énoncé à l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, le principe de compensation intégrale prévoit que l’État prend à sa charge, au moyen de recettes fiscales ou de crédits budgétaires, les pertes de recettes de la sécurité sociale relatives à :

– toute mesure de réduction ou d’exonération de cotisations de sécurité sociale, instituée à compter de la date d’entrée en vigueur de la loi du 25 juillet 1994 relative à la sécurité sociale ([52]) ;

– toute mesure de réduction ou d’exonération de contributions sociales instituée à compter de la publication de la loi du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie ([53]) ;

– toute mesure de réduction ou dabattement de lassiette de ces cotisations et contributions instituée à compter de la publication de la loi du 13 août 2004 précitée ;

– toute mesure de transfert de charges opéré entre l’État et la sécurité sociale à compter de la même date.

Toutefois, des exceptions à ce principe peuvent être prévues de manière expresse en loi de financement de la sécurité sociale, conformément à l’article LO. 111-3 du code de la sécurité sociale.

Les mesures d’exonération ou de réduction font l’objet d’un suivi statistique et comptable précis afin que les recettes fiscales ou les crédits budgétaires compensent exactement les pertes de recettes constatées (compensation dite « à l’euro l’euro »).

Une autre forme de compensation peut être mise en œuvre dite « pour solde de tous comptes ». Cela se traduit par l’affectation définitive d’une recette nouvelle à la sécurité sociale ou la reprise d’une dépense en compensation des pertes de recettes subies.

Cette option doit toutefois prévoir une dérogation expresse à larticle L. 131-7 du code de la sécurité sociale, même si la compensation est assurée financièrement en pratique. L’article 24 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 ([54]) a prévu cette dérogation expresse s’agissant de la baisse du taux de cotisation d’allocations familiales, du nouvel abattement de contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) et des mesures prévues par la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques ([55]).

Comme l’illustre l’annexe 5 du PLFSS, l’ensemble des allégements de cotisations sociales ne fait pas l’objet de compensation à l’heure actuelle. En 2017, le montant des exonérations non compensées atteignait 2,3 milliards d’euros, à comparer avec les 31 milliards d’euros d’allégements généraux compensés et les 6,4 milliards d’euros de dispositifs spécifiques d’exonérations compensés.

La rÉpartition des catÉgories d’exonÉrations en 2017

(en milliards d’euros)

Source : annexe 5 du PLFSS pour 2019.

Les allégements généraux font l’objet de compensations intégrales par affectation de recettes de l’État à la sécurité sociale pour solde de tout compte. Autrement dit, les pertes de recettes des organismes concernés sont compensées par des affectations directes de recettes auxdits organismes.

En revanche, les allégements ciblés ne sont pas systématiquement compensés, en particulier les allégements entrés en vigueur antérieurement à la loi du 25 juillet 1994 relative à la sécurité sociale (voir encadré ci-dessus). Depuis l’origine, les exonérations ciblées ont été compensées pour moitié par l’État. En 2017, la part des exonérations compensées a augmenté, après un effort qui a consisté, entre autres, à compenser les mesures destinées à favoriser l’emploi à domicile. Certaines exonérations ciblées demeurent toutefois non compensées.

2.   La non-compensation des mesures nouvelles d’exonération

● Le présent PLFSS entreprend un changement dans le principe de compensation des pertes de recettes de la sécurité sociale par l’État. Dans le contexte du retour à l’équilibre du régime général et des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale, il propose que les nouvelles pertes de recettes pour la sécurité sociale ne soient plus compensées.

Plusieurs mesures nouvelles du PLFSS ne donneront donc pas lieu à une compensation financière de l’État pour un total d’environ 2 milliards d’euros en 2019.

Les mesures nouvelles de rÉduction de recettes non compensÉes par l’État

(en millions d’euros)

Mesure

Coût en 2019

Exonération de cotisations sociales sur les heures supplémentaires

643

Suppression du forfait social

593

Suppression de la taxe sur les farines

60

Lissage de l’entrée dans le champ du taux plein de la CSG sur les revenus de remplacement

340

Application aux salariés des régimes spéciaux des réductions de taux de cotisation d’assurance maladie et d’allocations familiales

393

Total

2 029

Source : commission des finances, d’après l’annexe 9 du PLFSS pour 2019.

La trajectoire financière pluriannuelle tient compte de la réduction des recettes fiscales affectées par l’État à la sécurité sociale au titre des allégements généraux de cotisations, afin de répartir leur coût entre l’État et la sécurité sociale. Le PLF pour 2019 prévoit ainsi de réduire la fraction de TVA attribuée à la sécurité sociale de 1,5 milliard d’euros en 2019, de 2 milliards d’euros en 2020 et de 1,5 milliard d’euros à compter de 2022.

Le rapporteur souligne que ce choix s’inscrit dans une perspective de réduction de la dette et du déficit publics. L’amélioration des comptes de la sécurité sociale est mise à profit pour financer des mesures en faveur du pouvoir d’achat des Français, sans pour autant que la trajectoire d’apurement de la dette sociale ne soit remise en cause.

● Les mesures de la LFSS pour 2018 et les dispositions proposées par le présent PLFSS modifieraient considérablement la structure des exonérations de cotisations. En 2019, le montant total des allégements généraux atteindrait 57 milliards d’euros.

MontaNt des exonÉrations compensÉes et non compensÉes

(en milliards d’euros)

 

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Évolution
2018/2019

Part dans les exonérations
de cotisations

en valeur

en %

Allégements généraux (1)

20,7

20,9

25,8

29,0

30,1

31,6

57,0

+ 25,4

+ 80,2 %

89,0 %

Réduction générale des cotisations patronales

20,7

20,9

21,2

21,5

22,9

23,7

26,8

+ 3,1

+ 13,2 %

 

Baisse du taux de cotisations d’allocations familiales des salariés

0,0

0,0

3,6

6,5

7,0

7,2

7,5

+ 0,3

+ 4,4 %

 

Baisse du taux de cotisations d’allocations familiales des travailleurs indépendants

0,0

0,0

1,0

1,0

0,1

0,7

0,4

 0,4

 49,4 %

 

Baisse du taux de cotisation maladie des travailleurs indépendants

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

+ 0,0

+ 3,2 %

 

Baisse du taux de cotisation maladie de 6 points

(PLFSS 2019)

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

22,2

+ 22,2

na

 

Mesures ciblées compensées (2)

3,9

3,8

3,5

4,1

6,6

6,1

5,9

 0,2

 2,9 %

 

Montant total des exonérations compensées
(1) + (2)

24,6

24,7

29,3

33,1

36,7

37,7

62,9

+ 25,2

+ 66,8%

98,3%

Mesures ciblées non compensées

3,2

3,7

3,7

3,8

1,4

0,9

1,1

+ 0,2

+ 21,2 %

1,7 %

Source : annexe 5 du PLFSS pour 2019.

B.   Les transferts financiers entre l’État et la sÉcuritÉ sociale

1.   L’augmentation significative de la TVA transférée par l’État à la sécurité sociale

L’article 19 du PLFSS prévoit des transferts de recettes entre, d’une part, l’État et la sécurité sociale et, d’autre part, les organismes de sécurité sociale entre eux.

Il tire les conséquences des mesures nouvelles de la loi de finances et de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, du PLF pour 2019 et du PLF pour 2018 qui ont radicalement modifié la structure des prélèvements obligatoires affectés à la sécurité sociale. Elles ont bien entendu un impact majeur sur les montants et la nature des transferts financiers entre l’État et la sécurité sociale. L’article 19 contient également des mesures visant à sécuriser juridiquement certains prélèvements obligatoires ou à modifier leur affectation pour qu’elle soit en adéquation avec les besoins de financement.

L’article 36 du PLF pour 2019, de manière symétrique, tire les conséquences au niveau du budget de l’État des flux financiers entre l’État et la sécurité sociale. Il augmente de manière très significative la part de TVA affectée à la sécurité sociale, via la CNAM.

DÉtermination de la fraction de TVA À affecter
aux administrations de sÉcuritÉ sociale

Mesures

Montants
(en milliards deuros)

Bascule CICE/allégements généraux

– 23,4

dont impact sur lAGIRC-ARRCO

– 5,1

dont impact sur lUNEDIC

– 0,9

Refonte des dispositifs d’exonérations ciblées

– 1,2

Effet année pleine de la bascule CSG/cotisations sociales

– 4,1

Transfert à l’État des prélèvements sociaux sur le capital

– 7,4

Autres

– 0,2

Ajustement de la fraction de TVA

– 36,3

Source : étude d’impact de l’article 36 du PLF pour 2019.

L’ajustement s’élève à 36,3 milliards d’euros. L’article 36 prévoit qu’au total, une fraction de 26,36 % de TVA budgétaire représentant 46,8 milliards deuros soit affectée :

– à la branche maladie, maternité, invalidité et décès du régime général de la sécurité sociale, à hauteur de 23,49 points, dont 17,56 points (31,2 milliards d’euros) affectés en 2019, dans le cadre de l’ajustement décrit dans le tableau ci‑dessus ;

– à l’ACOSS, à hauteur de 2,87 points (5,1 milliards d’euros), également dans le cadre de l’ajustement en 2019.

2.   Compenser les effets des mesures d’ampleur en faveur du pouvoir d’achat des actifs et de la compétitivité des entreprises

Les mesures nouvelles ont entraîné des changements importants dans la structure et le montant des prélèvements obligatoires affectés à la sécurité sociale. La suppression du CICE concomitante à la baisse de cotisations patronales d’une part, et l’augmentation de la CSG, financée par la suppression ou la diminution de cotisations dues par les salariés, les indépendants et les fonctionnaires a eu des effets massifs sur les finances de la sécurité sociale en général et sur les relations financières entre plusieurs organismes de sécurité sociale en particulier.

a.   Les compensations induites par la mesure de hausse de la CSG en contrepartie de la baisse de cotisations salariales

L’article 8 de la LFSS pour 2018, dont l’objet était la revalorisation du pouvoir d’achat des actifs, a supprimé la cotisation salariale d’assurance maladie due au taux de 0,75 % et a supprimé en deux étapes la cotisation chômage (0,45 point au 1er janvier 2018 et 0,95 point au 1er octobre 2018), en contrepartie de la hausse de 1,7 point du taux de la CSG sur les revenus d’activité, sur les revenus du capital, sur les revenus des jeux et sur certains revenus de remplacement. Un mécanisme de contrepartie a été mis en place via l’ACOSS. Elle a reçu une fraction de TVA, à hauteur de 9,4 milliards d’euros, destinée à compenser l’UNÉDIC (voir supra).

En 2019, l’effet en année pleine de la suppression de la cotisation chômage a un effet négatif de 4,1 milliards d’euros pour l’UNÉDIC, qu’il convient de compenser.

Le Gouvernement souhaite que les modalités de compensation de la perte de recettes pour l’UNÉDIC soient plus lisibles que le mécanisme transitoire instauré par la LFSS pour 2018. Il s’agit également de tirer les conséquences de dispositions de la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel ([56]) qui a procédé à une refonte du financement de l’assurance chômage, entraînant la suppression intégrale des cotisations salariales d’assurance chômage en contrepartie de l’affectation d’impositions de toute nature au régime.

Le PLFSS propose en conséquence que l’UNÉDIC bénéficie d’une fraction de CSG sur les revenus d’activité (1,45 point) pour compenser intégralement les pertes de recettes pour l’assurance chômage que l’étude d’impact chiffre à 13,9 milliards d’euros.

b.   Les transferts liés à la transformation du CICE en baisse de cotisations

En vertu de la même LFSS pour 2018, par son article 9, de nouveaux allégements de cotisations sociales vont bénéficier aux entreprises à partir de 2019 : la réduction forfaitaire de 6 points sur la cotisation patronale d’assurance maladie pour les rémunérations inférieures à 2,5 SMIC et l’intégration dans le champ de l’allégement général de la cotisation chômage (au taux de 4,05 %) et des cotisations de retraite complémentaire (pour taux total de 6,01 %). Le renforcement de l’allégement général, à l’image de la diminution, pour les salariés, de la cotisation chômage, prendra effet en deux temps : l’allégement de 6,01 points de la cotisation de retraite complémentaire entrera en vigueur dès le 1er janvier 2019 ; l’allégement de la cotisation chômage sera applicable à partir du 1er octobre 2019.

L’État compensera les pertes de recettes induites pour la sécurité par l’affectation d’une fraction du produit de la TVA, comme décrit supra. Elle rend indispensables des modifications d’affectations de recettes.

La transformation du CICE en allégements de cotisations patronales par la LFSS pour 2018 doit entraîner une refonte de plusieurs dispositifs d’exonérations spécifiques (voir supra) qui aura également un impact sur les transferts entre l’État et la sphère sociale.

Là encore, l’État compensera par un ajustement de la quote-part du produit de la TVA, pour l’ensemble des dispositifs qui étaient déjà compensés (voir supra). Cette fraction tient compte des amplifications des allégements de cotisations liées aux dispositifs proposés.

S’agissant des dispositifs non compensés, le surcoût du passage dans le régime général pour la sphère sociale ne sera pas compensé par l’État.

3.   Sécuriser juridiquement les prélèvements sociaux sur les revenus du capital

● L’arrêt De Ruyter ([57]) rend nécessaires des réaffectations de prélèvements obligatoires pour sécuriser les dispositifs. Il remet en cause la faculté pour la France d’assujettir des résidents européens affiliés au régime de sécurité sociale d’un autre État membre à des prélèvements sociaux sur les revenus du capital si ces prélèvements financent des prestations contributives.

Pour tenir compte de cet arrêt, la LFSS pour 2016 a affecté les prélèvements sociaux sur les revenus du capital à des organismes finançant des prestations non contributives ou de solidarité nationale. Toutefois, le prélèvement de solidarité au taux de 4,5 % et la contribution de solidarité pour l’autonomie (CASA) sont affectés à la sécurité sociale. Il est donc souhaitable de modifier l’affectation de ces dispositifs.

● Le PLFSS propose d’abord de réaffecter à l’État les prélèvements sociaux sur les revenus du capital, à l’exception de la CRDS qui reste affectée à la CADES et de la CSG, dont le produit continuera d’être affecté à la sécurité sociale. Les prélèvements concernés par ce mouvement sont :

– le prélèvement social de 4,5 %, dont le rendement est estimé à 5,9 milliards d’euros ;

– la contribution additionnelle au prélèvement social de 0,3 % dont le rendement est estimé à 393 millions d’euros.

Il propose ensuite de diminuer de 0,7 point le taux de CSG applicable aux revenus du capital et d’augmenter à due concurrence le taux du prélèvement social. Le taux de la CSG sur les revenus du capital serait donc aligné sur celui de la CSG applicable aux revenus d’activité (9,2 %). La mesure serait neutre pour le contribuable et pour les finances publiques.

Il propose enfin de fusionner les prélèvements sociaux réaffectés à l’État, pour simplifier les deux prélèvements, assis sur la même base et affectés désormais attribués au même affectataire.

Le FSV et la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), qui bénéficiaient des prélèvements sociaux, seraient compensés à due concurrence par l’affectation d’une part de CSG.

4.   Compenser les pertes de recettes de la branche vieillesse

Le Gouvernement propose de compenser les pertes de recettes de la branche vieillesse pour garantir son équilibre financier et respecter son caractère contributif. La compensation s’effectuerait par l’affectation d’une partie de la taxe sur les salaires actuellement affectée à la branche famille.

Le régime complémentaire obligatoire agricole, affectataire de la taxe sur les farines que le PLF propose de supprimer, doit également être compensé. Cette dernière s’opérera par une modification de la clé de répartition des droits sur les alcools.

5.   Tenir compte des besoins de financement du secteur médico-social et de l’aide à domicile

Les transferts auxquels le PLFSS propose de procéder ont également pour but de renforcer le financement des actions des agences régionales de santé (ARS) dans le secteur médico-social de l’aide à domicile.

La CNSA finance des actions du secteur médico-social pilotées par les ARS par l’intermédiaire du Fonds d’intervention régional (FIR). Mais cette possibilité ne concerne que la section 1 du budget de la CNSA pour le financement des groupes d’entraide mutuelle et la méthode d’action pour l’intégration d’aide et de soins dans le champ de l’autonomie. Les autres sections ne peuvent pas apporter de financements complémentaires aux actions du FIR, ce qui contraint les actions des ARS.

S’agissant de l’aide à domicile, le besoin de modernisation du système est important et le Gouvernement veut que le rôle des services d’aide et d’accompagnement à domicile (SAAD) auprès des publics fragiles s’affirme.

6.   Tirer les conséquences du transfert à la CADES d’une partie du déficit cumulé de l’ACOSS

L’article 20 du PLFSS autorise le transfert de 15 milliards d’euros de déficits cumulés de l’ACOSS vers la CADES, sur un total de déficits cumulés estimés à 28 milliards d’euros en 2018 (voir supra). Ce transfert s’est accompagné d’une affectation à la CADES d’une fraction accrue de CSG pour un montant de 1,5 milliard d’euros en 2020, augmenté de 2 milliards d’euros en 2021 et de 1,5 milliard d’euros en 2022.

Comme l’indique l’étude d’impact, le mouvement opéré permet de sécuriser une fraction de dette publique face au risque de remontée des taux d’intérêt.

7.   Des affectations visant à neutraliser pour les branches les effets des transferts entre l’État et la sécurité sociale

Pour compenser la totalité des pertes prévues pour la sécurité sociale par les mesures nouvelles du présent PLFSS, à l’exception des mesures non compensées (voir supra), la sécurité sociale bénéficiera de l’affectation d’une fraction de TVA supplémentaire.

● La majorité de cette recette supplémentaire revient à la branche maladie, qui est le seul affectataire de cette taxe au sein des régimes obligatoires de base. Les recettes qu’elle perçoit au titre de mesures visant à compenser d’autres branches doivent donc être réaffectées au sein des organismes de sécurité sociale :

– en 2019, une fraction de la taxe sur les salaires sera donc affectée à l’ACOSS pour que l’UNÉDIC soit compensée à l’euro de la perte de recettes induite par la perte de recettes issues de l’allégement des cotisations patronales chômage ;

– une fraction de CSG est affectée au FSV pour compenser la réaffectation des prélèvements sociaux sur les revenus du capital à l’État ;

– enfin, une partie de la TVA compensatoire est affectée par le PLF pour 2019 à l’ACOSS qui prendra intégralement en charge les pertes de recettes liées à l’intégration des cotisations de retraite complémentaire dans le champ de l’allégement général.

DÉcomposition de la fraction de la TVA affectÉe à la sÉcuritÉ sociale

(en millions d’euros)

Source : annexe IX du PLFSS pour 2019.

 

 

 

 


—  1  —

   seconde partie : Les dÉpenses

I.   Les dÉpenses d’assurance maladie

A.   L’efficience des dÉpenses de santÉ, un enjeu crucial pour l’avenir de l’Assurance maladie

1.   Des dépenses élevées et structurellement dynamiques

Comme la Cour des comptes le relevait dans son rapport de novembre 2017 sur l’avenir de l’assurance maladie, si, malgré des fragilités (mortalité infantile, et mortalité précoce évitable élevées, inégalités dans l’accès aux soins), les résultats d’ensemble de notre système de santé sont honorables selon les comparaisons des organisations internationales et au regard de l’espérance de vie à la naissance, « les performances sanitaires enregistrées par notre pays le sont au prix de dépenses très élevées » ([58]).

Selon les données de l’OCDE, en 2016, la dépense courante de santé au sens international de la France s’élevait à 11,5 % du PIB et était la troisième la plus élevée du monde, après les États-Unis (17 %) et la Suisse (12 %), alors que la moyenne de l’UE-15 se situe à 10 % du PIB.

DÉpense courante de santÉ au sens international en 2016

Source : OCDE, système international des comptes de la santé.

Si l’on retient le critère de la dépense courante de santé par habitant exprimée en parité de pouvoir d’achat, la France se situe en revanche juste au-dessus de la moyenne européenne.

ONDAM et dépenses de santé

Au-delà de l’ONDAM, l’évolution des dépenses de santé peut être appréhendée au moyen de trois agrégats des comptes nationaux de la santé ([59]) :

– la consommation de soins et de biens médicaux (CSBM), que financent la sécurité sociale, l’État, les collectivités locales, les organismes de protection complémentaire (mutuelles, sociétés d’assurances, institutions de prévoyance) et les ménages, comprend la consommation de soins hospitaliers, la consommation de soins de ville, la consommation de médicaments en ambulatoire, la consommation d’autres biens médicaux (optique, prothèses, petits matériels et pansements) et la consommation de transports de malades ;

– la dépense courante de santé (DCS) est l’agrégat global des comptes de la santé, qui comprend l’ensemble des dépenses courantes effectuées dans le secteur de la santé. Outre la CSBM, qui en représente les trois quarts, elle comprend les dépenses individualisables qui ne prennent pas la forme de biens et services de santé mais qui y sont liées (principalement les dépenses engagées pour compenser la perte de revenu, comme les indemnités journalières), les soins de longue durée apportés aux personnes âgées et handicapées en établissement et, à domicile, par les services de soins infirmiers, les dépenses comptabilisées comme relevant de la prévention des maladies (qu’elles revêtent un caractère individuel ou collectif), ainsi que les dépenses afférentes au fonctionnement et au développement du système de santé (subventions au système de soins, formation des personnels de santé, recherche, coûts de gestion de la santé) ;

– la dépense courante de santé au sens international (DCSi), utilisée par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), l’Union européenne et l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour comparer les dépenses de santé entre les pays. La DCSi est évaluée à partir de la DCS, diminuée des indemnités journalières, d’une partie des dépenses de prévention, des dépenses de recherche et de formation, et augmentée de certaines dépenses sociales liées à la prise en charge du handicap et de la dépendance.

La CSBM, qui constitue l’agrégat central des comptes de la santé, diffère de l’ONDAM à plusieurs égards : il s’agit d’un agrégat plus large en termes de financeurs (l’ONDAM comptabilise les seules dépenses de l’assurance maladie, ainsi que certaines dépenses de la branche AT-MP) et plus restreint en termes de champ (l’ONDAM comprend les indemnités journalières maladie et accidents du travail, les soins de longue durée aux personnes âgées délivrés en institution ou réalisés à domicile par des services de soins infirmiers à domicile (SSIAD), les soins aux personnes handicapées ou en situation précaire hébergées en établissement, les dépenses du FIR non comprises dans la CSBM, des prises en charge des cotisations sociales des professionnels de santé, des dotations à certains fonds, ainsi que des prises en charge des ressortissants français à l’étranger).

Le rapporteur a entendu la demande des acteurs de la santé pour une visibilité pluriannuelle sur l’évolution des dépenses. Si celle-ci est bien entendu compréhensible, l’idée d’un ONDAM pluriannuel apparaît difficilement réalisable et poserait de vrais problèmes d’adaptabilité et de flexibilité. Il semble cependant qu’une réflexion pourrait être ouverte sur la communication d’une « fourchette d’évolution » des tarifs aux acteurs sur certaines prestations et dans un cadre pluriannuel.

Ce niveau de dépenses par rapport au PIB est le résultat d’un accroissement continu de la dépense de santé, à un rythme plus rapide que la richesse nationale. Entre 1950 et 2017, les dépenses de santé ont progressé en France à un rythme annuel moyen de deux points supérieur à celui de la richesse nationale : + 9,7 % pour la consommation de soins et de biens médicaux (CSBM) contre + 7,7 % pour le PIB en valeur. De ce fait, la part de la CSBM dans la production nationale a plus que triplé au cours de la période, passant de 2,5 % à 8,7 % du PIB (199,3 milliards d’euros en 2017).

Croissance annuelle moyenne en valeur de la CSBM et du PIB

Source : Pierre-Yves Cusset, Les déterminants de long terme des dépenses de santé en France, document de travail de France Stratégie n° 2017-07, juin 2017.

La dépense s’est accrue fortement entre 1950 et 1985 (+ 4,4 points de PIB) corrélativement au développement de la sécurité sociale, qui a rendu solvable la demande de soins et, en retour, stimulé le développement de l’offre. Sur la même période, la part de la sécurité sociale dans le financement de la CSBM est passée de 50,9 % à 78,6 %. En 2017, elle atteignait 77,8 %, soit 155,1 milliards d’euros.

Financement de la consommation de soins et de biens mÉdicaux

Source : Les dépenses de santé en 2017, DREES.

Comme le souligne la Cour des comptes dans son rapport sur l’avenir de l’assurance maladie, « les déterminants à moyen et long terme des dépenses de santé sont fermement orientés à la hausse ». Il s’agit en particulier :

– du vieillissement de la population ;

– du poids croissant des maladies chroniques et des cancers, corollaire à la fois du vieillissement de la population et des progrès de la médecine. Selon une récente étude de la DREES, entre 2011 et 2016, les dépenses de santé des personnes ayant une affection de longue durée ont augmenté de 3,8 % en moyenne par an, soit 2,1 points de plus que l’ensemble des dépenses de santé ;

– du coût du progrès technique et médical ;

– de l’effet des affections liées aux comportements et à l’environnement, qui renvoie aux insuffisances de la politique de prévention dans notre pays. La Cour des comptes a par exemple déjà mis en lumière l’étendue des coûts directs et indirects induits par la consommation de tabac et d’alcool, qui seraient, pour les seules dépenses d’assurance maladie, de 12 milliards d’euros pour le premier et de près de 3 milliards d’euros pour le second.

À ces facteurs structurels d’augmentation des dépenses de santé s’ajoutent les enjeux majeurs auxquels notre système de santé doit faire face en matière d’égalité d’accès aux soins sur tout le territoire et de conditions d’exercice des professionnels de santé.

France Stratégie a réalisé en 2017 une synthèse de quelques exercices de projection réalisés par le FMI, l’OCDE, la Commission européenne et la Direction générale du Trésor. Il ressort de toutes ces projections à long terme une anticipation d’accroissement, plus ou moins important en fonction des hypothèses retenues, de la part des dépenses de santé dans le PIB.

 

 

Dépenses de santé en début de période (% PIB)

Dépenses de santé en fin de période (% PIB)

Différence (points de PIB)

FMI

2010-2050

France

9 %

Moyenne économies avancées

7,3 %

France

11,6 %

Moyenne économies avancées

13,9 %

France

+ 2,6

Moyenne économies avancées

+ 6,4

OCDE

2010-2060

France

7,4 %

Moyenne OCDE

5,5 %

France

9,6 %

Moyenne OCDE

8 %

France

+ 2,2

Moyenne OCDE

+ 2,5

Commission européenne (2012)

2010-2060

France

8 %

Moyenne UE27

7,1 %

France

9,4 %

Moyenne UE27

8,3 %

France

+ 1,4

Moyenne UE27

+ 1,2

DG Trésor (2013)

2012-2060

France

6,8 %

 

France

8 %

 

France

+ 1,2

 

Commission européenne (2015)

2013-2060

France

7,7 %

Moyenne UE28

6,9 %

France

8,6 %

Moyenne UE28

7,8 %

France

+ 0,9

Moyenne UE28

+ 0,9

Source : Pierre-Yves Cusset, op.cit.

2.   Une progression freinée par les mesures de limitation de la dépense, mais une augmentation des soins de ville dynamique

Dès le milieu des années 1980 et plus encore depuis 2005, des mesures de limitation de la dépense de santé ont été introduites, dans un contexte de déficits récurrents de la branche maladie.

Sur la période 2006-2015, le rythme de progression de la consommation de biens et soins médicaux a ainsi ralenti, passant de 4 % en 2007 à 3,1 % en 2008-2009 et à moins de 3 % depuis 2010. Comme le montre le graphique suivant, la CSBM a atteint en 2017 sa plus faible croissance depuis 10 ans (+ 1,3 % par rapport à 2016).

Contribution à la croissance en valeur de la CSBM

Source : DREES, Les dépenses de santé enregistrent une faible croissance en 2017, Études et résultats n° 1076, septembre 2018.

Ce graphique fait en outre apparaître clairement, depuis 2015, la diminution de la part des soins hospitaliers dans la croissance de la CSBM. En 2017, les soins de ville deviennent le premier contributeur à la CSBM. Le constat de la part prépondérante prise par les soins de ville dans la croissance de la CSBM rejoint celui de la sur-exécution de l’ONDAM soins de ville depuis 2015. Le sous‑objectif soins de ville a ainsi été sur-exécuté de 220 millions d’euros en 2015, 730 millions d’euros en 2016 et 620 millions d’euros en 2017. Selon le rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale, il devrait s’établir en 2018 à un niveau supérieur de 560 millions d’euros à l’objectif voté en loi de financement de la sécurité sociale.

Lors de son audition, le directeur général de la Caisse nationale d’assurance maladie a toutefois tenu à rappeler que les dépenses retracées dans le sous-objectif « soins de ville » comprenaient en fait de nombreuses dépenses décidées à l’hôpital, comme les transports, les indemnités journalières ou la rétrocession hospitalière.

Si les dépenses comptabilisées dans le sous-objectif soins de ville de l’ONDAM se sont systématiquement établies en dessous de l’objectif voté par le Parlement entre 2010 et 2014, les remboursements de soins de ville sont, depuis 2015, systématiquement supérieurs aux objectifs fixés. Au total, sur la période 2010-2017, les dépenses de soins de ville ont augmenté de 12,4 milliards d’euros. Du fait de leur dynamique spontanée (vieillissement de la population, augmentation du nombre de patients en affection de longue durée, comportement des prescripteurs, innovations…), elles auraient augmenté de près de 20 milliards d’euros si des mesures de régulation n’avaient pas été mises en œuvre dans le cadre de l’ONDAM.

Évolution comparÉe des dépenses de soins de ville et hospitaliÈres
(2012-2017)

Source : Cour des comptes, d’après les informations de la Direction de la sécurité sociale.

Les effets de la régulation peuvent jouer à la hausse (revalorisations accordées aux professionnels de santé) ou à la baisse (efforts d’économies) sur le montant des dépenses dans le champ de l’ONDAM. Par rapport à l’évolution spontanée des dépenses, les revalorisations ont expliqué en moyenne 365 millions de dépenses supplémentaires par an sur la période 2010-2017, principalement au bénéfice des médecins, des auxiliaires médicaux et des transports, soit 2,9 milliards d’euros au total. Les mesures d’économies ont quant à elle permis d’atténuer la dépense de 9,5 milliards d’euros, dont 7,9 milliards d’euros sur les produits de santé (baisses de prix et régulation des volumes de prescriptions).

Le rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale de juin 2018 fournit un éclairage sur les dynamiques des différents postes composant le sous-objectif soins de ville entre 2010 et 2017 :

– pour les honoraires médicaux, la moitié de la croissance est due aux revalorisations décidées lors des négociations conventionnelles depuis 2010, l’autre à l’augmentation du volume d’activité. Ainsi, alors que les volumes de soins de médecine générale ont décru de 0,6 % par an, corrélativement à la baisse du nombre de médecins de 1,4 % sur la période, les médecins généralistes ont bénéficié de 810 millions d’euros de revalorisations, auxquels s’ajoutent les nouveaux modes de rémunération tels que la rémunération sur objectifs de santé publique, le forfait médecin traitant ou les majorations pour consultations de personnes âgées. Les médecins spécialistes ont pour leur part connu une dynamique des volumes de soins importante (+ 2,6 % en moyenne), avec une accélération à partir de 2014. Si les radiologues ont contribué aux économies via des baisses de tarifs à hauteur de 680 millions d’euros, l’ensemble des médecins spécialistes ont bénéficié de 480 millions de revalorisations. Enfin, pour les dentistes, les revalorisations ont été plus faibles que pour les médecins, mais les remboursements ont augmenté en 2015 après la mise en œuvre d’une nouvelle nomenclature des actes dentaires ;

– les transports et les remboursements des honoraires paramédicaux ont connu une progression importante (4,5 % de croissance moyenne pour les transports sanitaires et 5,4 % pour les honoraires médicaux), les volumes participant pour les deux postes fortement à la croissance. En 15 ans, les dépenses de transport ont presque doublé et elles continuent à progresser à un rythme très supérieur à celui de l’ONDAM ;

– les remboursements de dispositifs médicaux et de médicaments connaissent une augmentation (respectivement + 42,2 % et + 2,1 % entre 2010 et 2017) soutenue par les innovations et le vieillissement de la population. Cette forte dynamique est partiellement compensée par des économies importantes sous forme de baisses de tarifs (7,9 milliards d’euros sur la période), de clause de sauvegarde (0,6 milliard d’euros) ou de remises conventionnelles versées par les laboratoires pharmaceutiques (6 milliards d’euros) ;

– les remboursements pour la biologie médicale ont crû en moyenne de 0,8 % sur la période, ralentis par les baisses de tarifs ;

– les versements d’indemnités journalières sont très dynamiques (+ 4,2 % par an depuis 2014), en particulier les arrêts maladie de plus de trois mois. Cette augmentation est en partie liée au décalage de l’âge légal de départ à la retraite de 60 à 62 ans. La probabilité d’être en arrêt et la durée moyenne d’un arrêt croissent en effet avec l’âge.

DurÉe moyenne d’un arrêt indemnisé en fonction de l’âge

(en nombre de journées)

Source : Caisse nationale d’assurance maladie, Rapport au ministre chargé de la sécurité sociale et au Parlement sur lévolution des charges et produits de lAssurance maladie au titre de 2019, juillet 2018, page 40.

Pour la Cour des comptes, il serait abusif d’imputer à titre principal le report d’une partie de l’activité de soins de l’hôpital vers la ville au « virage ambulatoire ». Il résulterait en grande partie des effets du vieillissement de la population et de la chronicisation croissante des pathologies sur la demande de soins de ville. Elle estime en outre que les mécanismes de régulation des dépenses de soins médicaux et paramédicaux de ville et des prescriptions hospitalières exécutées en ville sont insuffisants.

Le rapporteur souscrit à ces conclusions mais souligne que l’impact du virage ambulatoire sur les soins de ville doit tout de même être mieux suivi et mesuré. Ce suivi passe notamment par la mise en place des mesures de coordination proposées par le Gouvernement dans la stratégie de santé.

Le rapporteur signale que le dépassement chronique du sous-objectif soins de ville compensé par l’utilisation des réserves du sous-objectif hospitalier génère un sentiment d’injustice fort chez les personnels hospitaliers. L’inclusion dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019, et pour la première fois, d’une réserve prudentielle dans les provisions du sous-objectif soins de ville – même pour un montant modeste de 120 millions d’euros – répond partiellement à cette problématique. Le rapporteur restera attentif à l’évolution de cette provision et considère qu’elle pourrait être appelée à augmenter au cours des prochaines années.

Les indemnités journalières : une augmentation importante depuis 2014

Les dépenses au titre des indemnités journalières maladie sont une composante du sous‑objectif soins de ville de l’ONDAM. Entre 2009 et 2016, le nombre de journées indemnisées est passé de 197 à 227 millions par an, soit une hausse de 14,9 % et un taux de croissance annuel moyen de 2 %. Sur la même période, le montant global indemnisé par le régime général est passé de 6 à 7,1 milliards d’euros, soit une hausse de 19,3 % et un taux de croissance annuel moyen de 2,9 %.

Elles ont toutefois connu une évolution contrastée, avec un ralentissement en début de période (de + 5,1 % en 2009 à – 1 % en 2012 et – 0,1 % en 2013), puis une croissance annuelle moyenne de 4,3 % par an entre 2014 et 2017, nettement supérieure à celle de l’ONDAM soins de ville.

Au premier semestre 2018, les indemnités journalières (IJ) du régime général ont augmenté de 4,5 % par rapport aux dépenses du premier semestre 2017 : + 4,8 % pour les IJ AT-MP, + 3,8 % pour les IJ maladie de moins de 3 mois et + 5,3 % pour les IJ maladie de plus de 3 mois.

La revue de dépenses sur l’évolution des dépenses d’indemnités journalières de juillet 2017 a permis d’identifier certains facteurs structurels d’augmentation, comme l’évolution de l’emploi salarié et le vieillissement de la population, mais qui ne suffisent pas à expliquer l’évolution récente. C’est pourquoi le gouvernement a mis en place une mission de réflexion qui doit rendre ses conclusions en fin d’année.

Source : réponse au questionnaire du rapporteur pour avis.

3.   Veiller à l’efficience des dépenses de santé pour maîtriser la dépense sans dégrader l’accès aux soins

Alors que les facteurs d’augmentation des dépenses de santé sont nombreux et puissants, le rapporteur pour avis estime primordial de veiller à l’efficience des dépenses de santé, afin que les légitimes mesures d’économies ne se traduisent pas par une dégradation de la qualité des soins ou des conditions de travail des professionnels de santé, mais s’inscrivent dans une démarche de suppression des actes inutiles et de réorganisation du système de soins, au service des patients, et avec les professionnels. L’un des enjeux de cette réorganisation est de décloisonner notre système de santé (ville, hôpital et médico-social) afin que les patients puissent bénéficier d’un vrai parcours de soins et ne soient plus obligés de coordonner eux-mêmes les différents professionnels de santé.

Le rapporteur pour avis partage le constat de la Cour des comptes d’une régulation trop orientée vers la gestion conjoncturelle de l’ONDAM, qui aboutit au recours, trop systématique, dans le secteur hospitalier, à des baisses de tarifs supplémentaires, qui éloignent ceux-ci des coûts réels, ou à l’annulation de crédits d’investissement et d’enveloppes finançant des mesures d’intérêt général.

Cette maîtrise conjoncturelle de l’ONDAM, qui pèse essentiellement sur les établissements de santé et médico-sociaux, rencontre des limites. Comme le relève la Cour des comptes, la régulation infra-annuelle des dotations allouées aux établissements de santé et médico-sociaux n’est pas de nature à peser sur la dynamique rapide des dépenses de soins de ville, mais seulement à couvrir leur dérapage récurrent. Elle peut en outre alimenter un cercle vicieux incitant les établissements à accroître le nombre de séjours ou, à l’inverse, mettre les établissements en difficulté lorsque, comme en 2017, l’ajustement par les volumes ne se réalise pas. La réforme à venir de la tarification devrait permettre d’assainir cette situation en rendant la tarification moins dépendante du volume de soins. Les dispositions du projet de loi de financement de la sécurité sociale font un pas dans ce sens, en introduisant notamment un financement au forfait pour certaines pathologies chroniques et en renforçant la part des financements à la qualité des établissements de santé.

Les instruments utilisés pèsent en outre sur les conditions de travail des personnels et la situation financière des hôpitaux, les marges d’optimisation des achats des hôpitaux n’étant pas infinies. Ceci a été à plusieurs reprises souligné lors des auditions menées par le rapporteur pour avis. La Mutualité française a ainsi estimé que l’on était arrivé au bout de la logique de la baisse des tarifs et la Fédération des cliniques et hôpitaux privés de France que les campagnes tarifaires avaient conduit à une situation « au-delà de la mise sous tension ». La Cour des comptes, dans son rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, estime pour sa part que les dispositifs mis en œuvre pour contenir la hausse globale des dépenses de santé « montrent un essoufflement certain ».

En 2017, la progression des séjours hospitaliers moindre qu’attendu, compte tenu des baisses des tarifs des séjours et de la rigidité des charges d’exploitation des établissements, a provoqué un quasi-doublement du déficit des établissements publics de santé, pour leurs activités de soins stricto sensu (835 millions d’euros en 2017, contre 439 millions d’euros en 2016), malgré l’attribution tardive de dotations en mars 2018. Près de six hôpitaux publics sur dix sont déficitaires (59 %, après 48 % en 2016). L’essentiel du déficit est toutefois concentré sur un petit nombre d’établissements (la moitié du déficit est imputable à une quarantaine d’établissements).

Selon de premiers éléments d’analyse figurant dans le rapport de la Cour des comptes sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, la dégradation des comptes s’expliquerait principalement par un ralentissement de leurs produits d’activité (+ 1,3 % contre + 1,9 % en 2016), lié à la moindre progression du nombre de séjours par rapport à 2016, conjugué à une progression plus élevée de la masse salariale (+ 2,3 % contre 1,4 % en 2016) et à une hausse des dépenses liées au recrutement de personnels temporaires.

Même si l’encours de la dette des hôpitaux a diminué de 100 millions d’euros en 2017, dans un contexte où les enveloppes nationales dédiées à l’investissement sont placées sous forte contrainte, il reste proche de 30 milliards d’euros.

Le rapporteur tient à alerter sur l’importance de la dette contractée directement par les hôpitaux et dont l’augmentation à moyen terme est inquiétante. Il note que cette dette dispersée pose question, notamment en termes d’efficacité économique et financière. En effet, les conditions d’endettement des établissements sont moins favorables que celles de la sécurité sociale et de l’État. De plus, les compétences de ces établissements en matière de gestion de dette apparaissent logiquement limitées.

Évolution du taux d’endettement des hÔpitaux publics entre 2002 et 2017

(en % des ressources stables)

Source : DREES, Les dépenses de santé en 2017.

En outre, lors des auditions menées par le rapporteur pour avis sur l’efficience des dépenses de santé, les organisations syndicales ont insisté, même si les situations sont contrastées en fonction des établissements, sur la dégradation des conditions de travail des personnels en raison, d’une part, d’effectifs insuffisants et, d’autre part, des réorganisations successives. En outre, le développement de l’ambulatoire a pu accroître la difficulté des tâches des personnels médicaux, dont l’action se concentre désormais sur une patientèle aux pathologies plus lourdes. Il modifie également la nature des tâches des personnels et s’avère plus exigeant en termes d’organisation.

Au-delà du ressenti indiscutable des personnels, il n’est pas aisé de disposer d’indicateurs permettant de suivre finement l’évolution des conditions de travail dans les établissements de santé ([60]), mais on peut relever que les arrêts maladie touchent plus fortement les hôpitaux que la plupart des autres secteurs d’activité, ce aussi bien dans le secteur public que dans le secteur privé ([61]).

Selon les données des rapports annuels sur l’état de la fonction publique :

– la proportion de salariés absents au moins un jour au cours d’une semaine pour raison de santé était en 2016 de 4,7 % dans la fonction publique hospitalière (contre 4,6 en 2013), contre 3 % dans la fonction publique de l’État ;

– en 2012, la part des agents ayant eu un accident du travail s’élevait à 12,9 % dans la fonction publique hospitalière, contre 6,6 % dans la fonction publique de l’État ;

– entre 2013 et 2015, le nombre moyen de jours d’absence par agent de la fonction publique hospitalière est passé de 5,3 à 5,6 pour les personnels médicaux et de 21 à 22,7 pour les personnels non médicaux.

Les auditions menées par le rapporteur pour avis ont permis d’identifier, des marges de progression pour améliorer l’efficience des dépenses de santé, qui recoupent celles qui sont évoquées par la Cour des comptes dans son dernier rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale :

– améliorer la prévention pour prévenir les pathologies évitables. À cet égard, les résultats enregistrés en matière de tabagisme sont encourageants ([62]) et l’élargissement du fonds de lutte contre le tabac à toutes les addictions va dans la bonne direction. Il reste cependant à mieux mesurer et cerner le périmètre global des dépenses de prévention, publiques et privées ;

– il y a encore trop d’actes redondants ou inutiles, notamment à cause de problèmes de coordination des parcours. Le déploiement du dossier médical partagé devrait permettre d’améliorer la pertinence des soins et les expérimentations conduites sont encourageantes ;

– le développement des médicaments génériques peut encore se poursuivre ;

– l’organisation des soins pourrait être rationalisée en fonction de critères de qualité et de sécurité, en particulier par la poursuite du développement de l’ambulatoire. Si le mode ambulatoire représente désormais la moitié des séjours en chirurgie, en raison d’incitations financières puissantes, il reste minoritaire en médecine. De plus, l’utilisation de seuils d’activité, sur certaines activités non essentielles, apparaît particulièrement utile pour concilier qualité de soin et maîtrise des dépenses ;

– pour permettre la poursuite du « virage ambulatoire », des efforts doivent être réalisés sur les soins de ville pour améliorer les soins non programmés et la prise en charge de pathologies lourdes, en améliorant le parcours de soins et la coordination. L’amélioration de la prise en charge des soins non programmés permettrait d’apporter une réponse à l’encombrement des urgences ;

– accroître l’adaptabilité des structures, par exemple en favorisant la transformation de chambres en chambres dédoublables et les démarches d’ouvertures et de fermetures de lits selon les besoins, notamment en cas d’épidémie.

C’est pourquoi le rapporteur pour avis soutient la démarche engagée par le Gouvernement pour la transformation de notre système de santé. Si elle ne portera ses fruits que dans quelques années, elle pourrait permettre d’améliorer le service rendu à nos concitoyens tout en rendant l’équilibre de l’assurance maladie moins dépendant de mesures de pilotage à court terme.

Par ailleurs, le rapporteur souhaite qu’une vraie démarche de qualité de vie au travail soit importée dans le secteur de la santé. Il est aujourd’hui difficile, voire impossible, d’« objectiver » le mal-être ressenti par les personnels et, encore plus, de déterminer son impact socio-économique et sanitaire pour offrir des solutions efficaces. À terme, la production et la fiabilisation d’indicateurs pourraient permettre d’évaluer le coût induit par le mal-être des personnels et d’identifier des initiatives permettant d’améliorer le bien-être au travail et la qualité des soins.

Les travaux de l’Observatoire national de la qualité de vie au travail des professionnels de santé, fondé le 2 juillet 2018, ainsi que la stratégie nationale pour les établissements médico-sociaux, lancée cet été, sont des premiers pas intéressants en la matière.

Le rapporteur tient aussi à souligner que la question des effectifs ne peut pas être évitée, bien qu’elle ne soit pas la seule à même d’améliorer la qualité de vie au travail des personnels, et qu’elle doit être liée à une meilleure association et implication des personnels dans la gouvernance des établissements. Il propose donc qu’une réflexion soit ouverte sur trois points :

– la mise en place de taux cibles ou taux minimums d’encadrement ([63]) sur certains postes : elle pourrait notamment faire l’objet d’un rapport préparatoire identifiant les activités dans lesquelles elle serait pertinente, les taux actuels réels mesurables dans les établissements, les pratiques comparables et alternatives éventuelles ;

– la consultation obligatoire des personnels à partir d’un certain seuil d’engagement budgétaire pour l’établissement : elle ne serait pas contraignante pour la direction de l’établissement mais contribuerait à mieux intégrer le savoir-faire pratique des personnels dans la gestion de l’établissement ;

– l’ouverture d’un référentiel ouvert et contributif de bonnes pratiques accessible en ligne.

Le rapporteur souhaite que soit conduite une évaluation précise de l’évolution des heures supplémentaires réalisées dans les établissements de santé, de l’évolution du nombre d’heures accumulées sur les comptes épargne temps (CET) des fonctionnaires y travaillant et du coût que représentent ces évolutions. Les propos recueillis lors des auditions suggèrent que le nombre d’heures supplémentaires ou comptabilisées dans les CET aurait considérablement augmenté et il apparaît nécessaire de mesurer l’impact financer de cette accumulation qui peut participer à la dégradation des conditions de travail des personnels soignants.

Enfin le rapporteur alerte sur la perte d’attractivité (pénibilité, rémunération) de certains métiers de soins, tels que celui d’aide-soignant, en particulier dans les établissements médico‑sociaux, qui rendent les recrutements de plus en plus difficiles. Ainsi, des professionnels optent pour le travail intérimaire et à durée déterminée pour améliorer leur revenu et faire le choix de la flexibilité.

B.   En 2018, l’ONDAM devrait Être respectÉ pour la neuviÈme année consÉcutive

● En 2017, les dépenses entrant dans le champ de l’ONDAM sont estimées à 190,7 milliards d’euros, inférieures de 25 millions d’euros à l’objectif rectifié en loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 et en progression de 2,2 % par rapport à 2016. L’objectif a été globalement respecté grâce à une activité hospitalière sensiblement inférieure aux prévisions.

Le respect global de l’ONDAM masque cependant des situations contrastées selon ses différents sous-objectifs :

 

– les dépenses de soins de ville (87,2 milliards d’euros) sont supérieures de 0,35 milliard d’euros à l’objectif rectifié en loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 et de 0,65 milliard d’euros à la prévision initiale. À périmètre constant, elles augmentent de 2,2 % par rapport à 2016 ;

– les versements de l’assurance maladie aux établissements de santé se sont élevés à 78,6 milliards d’euros, en hausse de 1,9 % par rapport à 2016 et en retrait de 0,6 milliard d’euros par rapport à l’objectif initial. Cette sous-exécution s’explique principalement par le ralentissement de l’activité des établissements de santé publics (- 385 millions d’euros) et privés (- 75 millions d’euros). Le nombre de séjours a augmenté moins rapidement que les années précédentes (+ 1,8 % contre + 5 % en 2016), pour des raisons encore mal identifiées ([64]). Dans le cadre des opérations de fin de gestion et pour sécuriser le respect de l’ONDAM global, il avait été décidé de maintenir en réserve 180 millions d’euros de crédits hospitaliers et d’en annuler 20 millions d’euros supplémentaires. En début d’année 2018, le constat d’une baisse de l’activité hospitalière plus forte qu’anticipée et d’une situation financière dégradée des hôpitaux a conduit à leur déléguer 250 millions d’euros de crédits complémentaires, imputés sur l’enveloppe 2017 ;

– l’exécution de l’objectif global de dépenses (OGD) au bénéfice des personnes âgées et des personnes handicapées s’est élevée à 21,3 milliards d’euros, soit un niveau proche de l’objectif. La contribution de l’ONDAM aux établissements sociaux et médico-sociaux s’est élevée à 20 milliards d’euros en 2017, en progression de 3,1 % par rapport à 2016.

À la différence des années précédentes, le dépassement du sous-objectif soins de ville n’a pas été couvert principalement par des annulations de dotations aux établissements de santé et médico-sociaux, mais par le ralentissement imprévu de l’activité hospitalière, et par conséquent du nombre de séjours facturés par les établissements de santé, dans un contexte de baisse des tarifs.

● Pour 2018, la loi de financement de la sécurité sociale a fixé un objectif de dépenses de 195,2 milliards d’euros, soit une hausse de 2,3 % par rapport aux dépenses 2017. Si la Cour des comptes relève des biais de présentation de l’ONDAM, comme en 2016 et 2017, ils ne minoreraient qu’à la marge le taux de progression des dépenses.

Selon le rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2018, l’ONDAM devrait être respecté pour la neuvième année consécutive, grâce toutefois à l’annulation d’une partie des crédits mis en réserve en début d’année.

Évolution des dÉpenses dans le champ de l’ONDAM depuis 2004

Note : en abscisses figure le niveau de dépenses constaté en milliards d’euros et en ordonnées le taux d’évolution associé. La taille de la bulle représente l’ampleur du dépassement (rouge) ou de la sous-exécution (vert).

Source : Rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale, septembre 2018.

Les dépenses de soins de ville devraient s’établir à 89,4 milliards d’euros, en hausse de 2,7 % par rapport à la réalisation de 2017, soit un niveau supérieur de 0,6 milliard d’euros à l’objectif voté en LFSS pour 2018. Cette sur-exécution provient pour une large part du report sur 2018 de la sur-exécution constatée en 2017, mais aussi d’une dynamique plus forte que prévu des dépenses de médicaments en officine de ville, d’indemnités journalières – pour lesquelles la CNAM anticipe un rendement nul de la maîtrise médicalisée – et de dispositifs médicaux, notamment en raison d’une montée en charge très rapide des dispositifs d’autocontrôle du diabète.

Sur le champ du régime général, les dépenses de prestations de ville devraient augmenter de 2,9 % en 2018, en légère décélaration par rapport à 2017 (+ 3 %).

Évolution des prestations de soins de ville du rÉgime gÉNÉral
(À champ constant)

(en %)

 

Évolution 2017/2016

Prévision 2018/2017

Contribution à la croissance

Soins de ville

3

2,9

100

Honoraires médicaux et dentaires

2,7

3

28,4

Généralistes

1,9

3,5

10,2

Spécialistes

3,3

3,3

16

Sages-femmes

8,6

6,7

0,8

Dentistes

1,5

1

1,4

Honoraires paramédicaux

3,9

4,1

19,1

Infirmiers

4,6

4,3

12

Kinésithérapeutes

2,8

3,5

5,8

Orthophonistes

3,8

2

0,6

Orthoptistes

4

24

0,8

Laboratoires

1,2

 0,4

 0,6

Transports de malades

4

2,8

5,2

Produits de santé

2,2

1,8

20,2

Médicaments

1,7

1

8,6

Médicaments de ville

0,7

3,9

32,8

Rétrocession

8,7

 17,8

 24,2

Dispositifs médicaux

4,1

4,2

11,6

Indemnités journalières

4,5

4,4

22,3

Autres

6,1

9,7

5,4

Source : rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale.

Les honoraires médicaux accéléreraient (+ 3 % après + 2,7 % en 2017) et deviendraient le principal contributeur à la croissance des soins de ville, du fait notamment des revalorisations accordées aux médecins généralistes et spécialistes par la convention médicale signée fin 2016. La montée en charge des dispositions de la convention représente un surcroît de dépenses estimé à environ 0,5 milliard d’euros se répartissant à égalité entre généralistes et spécialistes.

Les indemnités journalières demeureraient dynamiques (+ 4,4 %) et contribueraient pour 0,6 point à la croissance des prestations de soins de ville. Cette croissance serait portée par les arrêts maladie de plus de trois mois, qui augmentaient de 6,1 % à fin mai 2018.

Les dépenses des établissements de santé devraient se situer plus de 100 millions d’euros en dessous de l’objectif, du fait d’une moindre dynamique des dépenses au titre des médicaments et dispositifs médicaux facturés en sus.

Compte tenu des prévisions d’exécution des dépenses de soins de ville (+ 560 millions d’euros) et des dépenses de guichet des établissements de santé (‑ 105 millions d’euros), le dépassement pourrait atteindre 455 millions d’euros avant mobilisation des crédits mis en réserve au début de l’année à hauteur de 625 millions d’euros. Les crédits mis en réserve portent principalement sur l’ONDAM hospitalier (415 millions d’euros, dont 302 millions d’euros au titre du coefficient prudentiel et 113 millions d’euros sur les dotations hospitalières). À ces réserves sur l’ONDAM hospitalier s’ajoutent des mises en réserve de crédits sur l’ONDAM médico-social (152 millions d’euros), le FIR (45 millions d’euros) et le sixième sous-objectif (autres prises en charge, 13 millions d’euros).

C.   Les objectifs de dÉpenses de la branche maladie pour 2019

1.   Les objectifs de la branche maladie, invalidité et maternité

Comme le prévoit le D du I de l’article L.O. 111‑3 du code de la sécurité sociale, la loi de financement de la sécurité sociale fixe pour l’année à venir, outre l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM), l’objectif de dépenses de la branche pour l’ensemble des régimes obligatoires de base et l’objectif de dépenses pour le seul régime général.

Ces objectifs se distinguent de l’ONDAM sur trois points :

– l’ONDAM est un objectif interbranches, qui comprend à la fois des dépenses relevant de la branche maladie et des dépenses de la branche accidents du travail – maladies professionnelles (AT-MP) ;

– le champ des prestations de l’ONDAM est plus limité que celui des comptes de branches. Il ne couvre par exemple ni les indemnités journalières maternité ni les prestations pour incapacité permanente. Sur le champ de la branche AT-MP, il ne retrace que les prestations en nature et les indemnités journalières compensant une incapacité temporaire ;

– enfin, l’ONDAM est un concept de nature économique, alors que les dépenses des régimes suivent des règles comptables.

Le tableau ci-après récapitule ces distinctions.

Composition de l’objectif de la branche maladie
et de l’ONDAM pour l’exercice 2019

Objectif de la branche maladie, maternité, invalidité décès

Objectif de la branche AT-MP

Hors ONDAM

ONDAM

Hors ONDAM

A.gestion technique

I.– Prestations sociales

I.– Prestations légales maladie maternité :

I.– Prestations pour incapacité temporaire :

 

– part des prestations médico-sociales financée par la CNSA

– prestations en espèce = IJ maternité

– prestations invalidité décès

– prestations extralégales (action sanitaire et sociale)

– actions de prévention hors FIR

– autres prestations

 prestations en nature maladie maternité (hors part des prestations médico-sociales financée par la CNSA et conventions internationales), minorées des remises conventionnelles pharmaceutiques et de la participation des assurances complémentaires à la rémunération du forfait médecin traitant

 prestations en espèce (hors IJ maternité)

 prestations en nature

 prestations en espèce suite à AT

 prestations pour incapacité permanente

II. Charges techniques

II. Charges techniques, dont :

 dotation ONDAM médico-social à la CNSA

 Fonds d’intervention régional

 prise en charge de cotisations des professionnels libéraux et en centres de santé

 autres transferts

 

II. Charges techniques :

 Prises en charge de cotisations ACAATA (Allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante)

 dotations aux fonds amiante

III. Diverses charges

 

 

III. Diverses charges

IV. Dotations aux provisions sur les dépenses hors ONDAM

 

 

IV. Dotations aux provisions sur les dépenses hors ONDAM

V. Charges financières

 

 

V. Charges financières

B. gestion courante

 

 aide à la télétransmission

 

 

Source : annexe 7 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019.

Pour l’année 2019, l’article 52 du projet de loi de financement de la sécurité sociale fixe les objectifs de dépenses à :

– 218 milliards d’euros pour l’ensemble des régimes obligatoires de base, soit une progression de 2,4 % par rapport à l’objectif révisé pour 2018 ;

– 216,4 milliards d’euros pour le régime général de sécurité sociale, soit une hausse de 2,4 % par rapport à l’objectif révisé pour 2018.

Selon les prévisions figurant à l’annexe B du PLFSS, le déficit de la branche maladie se réduirait à 0,5 milliard d’euros en 2019, puis la branche serait à l’équilibre de 2020 à 2022.

Évolution des recettes, dÉpenses et soldes de la branche maladie
(rÉgime gÉNÉral)

(en milliards d’euros)

 

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Recettes

201,3

210,4

216

221

225,7

230,6

Dépenses

206,2

211,3

216,4

221

225,7

230,6

Solde

– 4,9

– 0,9

– 0,5

0

0

0

Source : annexe B du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

2.   Un ONDAM pour 2019 rehaussé à 2,5 %

Avant économies, les dépenses dans le champ de l’ONDAM progresseraient de 4,5 % en 2019. Ce taux intègre l’évolution prévisible des prestations remboursées compte tenu de la prévision d’exécution de l’objectif pour 2018 et des tendances de moyen terme, ainsi que les mesures nouvelles de dépenses prévues pour 2019. Les dépenses de soins de ville et hospitalières seraient particulièrement dynamiques sous l’effet de l’arrivée sur le marché de traitements médicamenteux innovants et onéreux, de la fin de la montée en charge de la convention médicale signée en 2016, des revalorisations de tarifs pour les taxis sanitaires et de la mise en œuvre de la réforme du 100 % santé dans le secteur dentaire.

a.   Un ONDAM fixé à 200,3 milliards d’euros

Comme le Président de la République l’a annoncé le 18 septembre dernier lors de son discours sur la transformation du système de santé, alors que la loi de programmation des finances publiques prévoyait le maintien de l’ONDAM à 2,3 % sur la période 2018-2020, il est exceptionnellement porté à 2,5 % en 2019, ce qui permet de dégager 400 millions d’euros supplémentaires pour investir dans la transformation du système de santé et la modernisation de l’hôpital. Il s’agit de l’ONDAM le plus élevé depuis 2011, mais il est toutefois nettement inférieur aux niveaux constatés entre 2000 et 2010. L’annexe B au présent PLFSS précise que le niveau de progression des dépenses sera ensuite limité à 2,3 % sur la période 2020-2022.

Source : rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2018.

Pour l’année 2019, l’ONDAM et ses sous-objectifs sont fixés comme suit :

 

(montants en milliards d’euros)

Sous-objectif

Objectif de dépenses

Taux dévolution

Dépenses de soins de ville

91,5

2,5 %

Dépenses relatives aux établissements de santé

82,7

2,4 %

Contribution de lassurance maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes âgées

9,4

2,1 %

Contribution de lassurance maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes handicapées

11,3

2,2 %

Dépenses relatives au Fonds dintervention régional

3,5

4,8 %

Autres prises en charge

1,9

6,3 %

Total

200,3

2,5 %

Source : annexe 7 au projet de financement de la sécurité sociale.

L’ONDAM est construit, comme en 2018, sur l’hypothèse d’une croissance tendancielle des dépenses de 4,5 % alimentée, outre par les facteurs structurels que constituent notamment le vieillissement de la population et l’augmentation des maladies chroniques, par les effets des conventions récentes, la poursuite de la mise en œuvre du protocole parcours professionnels, carrières et rémunérations (PPCR) dans les établissements publics de santé et l’arrivée de médicaments innovants.

Le taux d’évolution des dépenses de soins de ville avant économies nouvelles s’établirait à 5,3 %. Ce taux est obtenu en majorant la tendance d’évolution spontanée de ce poste, évaluée à 4,3 %, de l’impact des mesures de revalorisations des professions de santé telles qu’anticipées pour 2019. Des revalorisations et provisions pour les négociations en cours ont été incluses dans la construction du sous-objectif à hauteur de 0,9 milliard d’euros. La fin de la montée en charge de la convention médicale en 2019 devrait générer 0,2 milliard d’euros de dépenses supplémentaires. Des montants équivalents sont prévus au titre, d’une part, des accords conventionnels passés avec les masseurs-kinésithérapeutes, les orthophonistes, les orthoptistes, les pharmaciens et les sages-femmes et, d’autre part, de la première étape de la mise en œuvre de la réforme « 100 % santé », avec des investissements dans les soins dentaires et les audioprothèses. Des financements supplémentaires de 0,1 milliard d’euros sont prévus pour les évolutions de la nomenclature des actes de médecine ou pour le remboursement de la télémédecine. Enfin, des revalorisations sont prévues pour les taxis, qui voient leur tarif augmenter chaque année au 1er janvier ou dans le cadre des négociations en cours (0,1 milliard d’euros).

Il est à relever que, pour la première fois, une réserve prudentielle fixée à 120 millions d’euros est incluse dans les provisions pour couvrir, grâce à la réalisation d’économies supplémentaires, une partie du dépassement éventuel constaté en cours d’exercice. Il s’agit d’organiser au sein du sous-objectif une régulation infra-annuelle, par analogie avec le coefficient prudentiel instauré pour les établissements de santé.

Le taux d’évolution des dépenses afférentes aux établissements de santé avant mesures s’établit à 3,7 %, soit un niveau plus bas qu’en 2017 et 2018 (+ 4 %). Outre la croissance spontanée liée à la hausse de l’activité, à l’inflation ou au glissement vieillesse technicité, ce taux prend en compte l’impact de la mise en place du protocole « parcours professionnels, carrières et rémunérations » de la fonction publique hospitalière pour environ 0,2 milliard d’euros, et une hausse du financement du Fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés (FMESPP) qui participera à hauteur de 0,2 milliard d’euros supplémentaires à la modernisation et au renouvellement des équipements techniques et de l’immobilier hospitalier. De même, des financements sont prévus notamment pour favoriser la qualité et la pertinence des prises en charge.

Les dépenses médico-sociales dans le cadre de l’objectif global de dépenses ([65]) progresseraient de 2,7 % en 2019 contre 2,4 % en 2018 notamment pour assurer le financement de la feuille de route grand âge et autonomie ainsi que la mise en œuvre de la stratégie autisme au sein des troubles du neuro‑développement. Le taux d’évolution de la contribution de l’assurance maladie (ONDAM) à ces dépenses s’élèverait à 2,2 %, ce qui traduit, à champ constant, un effort financier supplémentaire de 445 millions d’euros sur la prise en charge des personnes âgées et handicapées.

L’évolution prévue pour le sous-objectif des dépenses relatif au Fonds d’intervention régional s’établit à 4,8 % en 2019, avec la montée en charge des mesures nouvelles décidées en 2018, et l’accompagnement de mesures annoncées dans le cadre du plan « ma santé 2022 ».

Enfin, le taux d’évolution des autres prises en charge par l’assurance maladie est évalué à 6,3 % en 2019.

Dans son rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, la Cour des comptes pointe certaines fragilités dans les modalités de calcul des tendanciels de dépenses. Ainsi, le tendanciel de dépenses de soins de ville est construit sur la base des données en date de soins de janvier N-1 et les variations conjoncturelles de l’exercice N-1 ne sont pas prises en compte. Pour ce qui concerne les établissements de santé, la Cour des comptes estime que l’évolution tendancielle de leurs charges « est encore appréciée de manière imprécise » et les déterminants d’évolution de leur masse salariale ne sont pas systématiquement actualisés. Enfin, le taux d’évolution des dépenses des établissements médico-sociaux ne s’appuie pas sur un tendanciel, mais est estimé en majorant les dépenses constatées des mesures nouvelles et de la prise en compte de l’inflation.

À 200,3 milliards deuros, lONDAM pour 2019 est en augmentation de 4,9 milliards deuros par rapport à lONDAM 2018 rectifié par larticle 6 du présent PLFSS. La Cour des comptes relève que cette marge substantielle de progression des dépenses est en grande partie préemptée par des décisions de revalorisation des rémunérations des acteurs du système de santé : conventions de lassurance maladie de 2016 avec les médecins et de 2018 avec les chirurgiens-dentistes, avenants aux conventions dautres professions libérales de santé, revalorisation des carrières dans la fonction publique hospitalière et engagements daugmentation des dépenses de médicaments. Elle estime quil sera « difficile à tenir ».

b.   Les principales mesures d’économies relatives à l’ONDAM pour 2019

Compte tenu du rythme élevé d’augmentation tendancielle des dépenses de santé et de l’effort prévu d’investissement dans le système de santé, le respect de l’objectif fixé pour 2019, même réhaussé à 2,5 %, nécessitera un effort important de modération de la croissance des dépenses d’assurance maladie, du même ordre que celui qui était prévu les années précédentes (4,2 milliards d’euros en 2018, 4,05 milliards d’euros en 2017 et 3,4 milliards d’euros en 2016).

Les mesures d’économies prévues en 2019 s’élèvent à 3,8 milliards d’euros. Elles se répartissent entre les différentes thématiques autour desquelles s’organise le plan ONDAM 2018-2022 d’appui à la transformation du système de santé, qui met l’accent sur des actions de pertinence engagées de manière pluriannuelle. Elles comprennent la prévention, la structuration de l’offre de soins, la pertinence et l’efficience des produits de santé, la pertinence et la qualité des actes, la pertinence et l’efficience des prescriptions d’arrêts de travail et de transport, ainsi que le contrôle et la lutte contre la fraude.

Comme les années précédentes, le montant d’économies attendues par le Gouvernement comprend des mesures qui ne correspondent pas réellement à des économies, comme la contribution des organismes complémentaires au financement des rémunérations forfaitaires des médecins, qui augmente de 50 millions d’euros en application de la convention médicale.

TABLEAU rÉcapitulatif des Économies attendues en 2019

(en millions d’euros)

Structuration de loffre de soins

910

Structurer des parcours de soins efficients (chirurgie et médecine ambulatoires, alternatives à l’hospitalisation, réduction des hospitalisations évitables, etc.)

210

Améliorer la performance interne des établissements de santé et médico-sociaux

700

Restructuration et optimisation des achats (programme PHARE)

415

Rééquilibrage de la contribution de lONDAM aux dépenses médico-sociales

235

Améliorer la performance interne (notamment achats) des établissements et services médico-sociaux

50

Actions sur les tarifs des produits de santé et remises

1 360

Prix nets des médicaments en ville

700

Évolution des prix nets des médicaments de la liste en sus

260

Prix nets des dispositifs médicaux en ville

150

Évolution des prix nets des dispositifs médicaux de la liste en sus

50

Remises sur nouveaux produits

200

Pertinence et qualité des actes et des produits de santé

895

Pertinence et adaptation tarifaire de la biologie (protocole)

120

Pertinence et adaptation tarifaire de la radiologie (protocole)

85

Pertinence et adaptation tarifaire sur les autres actes

190

Maîtrise médicalisée et structure de prescription des produits de santé (volume, génériques, biosimilaires)

500

Pertinence et efficience des prescriptions darrêts de travail et de transports

335

Transport

135

Indemnités journalières (renforcement des actions de maîtrise médicalisée et mise en œuvre des recommandations de la mission lancée en septembre 2018)

200

Contrôle et lutte contre la fraude

90

Lutte contre la fraude et dispositifs de contrôle associés

90

Autres mesures

240

Participation des organismes complémentaires au financement de la convention médicale

50

Gestion dynamique du panier de soins remboursés (dont 90 millions d’euros d’impact de mesures déjà mises en œuvre en 2018)

190

TOTAL

3 830

Source : annexe 7 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019.

 

Si les économies prévues par le Gouvernement sont peu explicitées dans les annexes du PLFSS, le rapport « charges et produits » de l’assurance maladie fournit des pistes plus étayées pour ce qui relève de son champ d’action, ce qui exclut notamment les actions sur les prix des produits de santé, pour un montant d’environ 2 milliards d’euros.

Le tableau ci-après récapitule les économies prévues par l’assurance maladie, ainsi que, lorsqu’elles sont disponibles, les explications sur la stratégie permettant de les atteindre.


 

Économies attendues des actions de l’Assurance Maladie en 2019

(en millions d’euros)

Actions de lassurance maladie

Impact sur lONDAM

Explication de lassurance maladie

Pertinence des prises en charge

410

 

Adaptation des modes de recours à lhôpital

 

 

Développer la chirurgie ambulatoire

200

Une économie de 200 millions d’euros est envisageable avec une progression de 3 points du taux de chirurgie ambulatoire, nécessaire pour atteindre la cible de 70 % en 2022 (contre 54,7 % en 2017). Pour atteindre cet objectif, l’assurance-maladie va s’appuyer sur la poursuite des mises sous accord préalable à destination des établissements les plus en retrait et une démarche d’accompagnement pour faire évoluer les pratiques des établissements vers les 20 % d’établissements français les plus performants.

Développer les programmes PRADO

70

Le programme PRADO consiste à prendre rendez-vous pour le patient avec les professionnels de santé libéraux dont l’intervention est nécessaire en sortie d’hospitalisation. Sa mise en place part du constat qu’il est souvent difficile pour un patient de s’organiser dès la sortie de l’hospitalisation, ce qui peut aboutir à un délai entre la sortie de l’hôpital et la reprise des soins pouvant être préjudiciable au patient et aboutir à une réadmission à l’hôpital. En 2019, la priorité sera mise sur l’accompagnement des patients atteints de maladies chroniques, des sorties précoces de maternité, et des prises en charge post-chirurgicales nécessitant une suite de soins réalisée en ville.

Autres types de prises en charge

30

30 millions d’euros d’économies sont attendues :

– de la poursuite de la diffusion des démarches de réhabilitation améliorée après chirurgie (RAAC), qui repose sur une prise en charge globale du patient favorisant le rétablissement précoce de ses capacités après la chirurgie ;

– du développement de la médecine ambulatoire, par un cadre tarifaire incitatif et l’optimisation des organisations.

Meilleure orientation des patients

 

 

Améliorer la pertinence du recours au SSR

90

Un séjour en soins de suite et de réadaptation (SSR) a un coût moyen de 5 112 € alors qu’une prise en charge en ville s’élève en moyenne à 894 €. La poursuite des procédures de mise sous accord préalable des décisions d’orientation en SSR devrait permettre d’éviter environ 7 000 séjours supplémentaires en SSR, soit une économie de 28 millions d’euros. La montée en charge du programme PRADO orthopédie devrait permettre de prendre en charge en ville 14 700 séjours, soit une économie de 62 millions d’euros.

Favoriser les prises en charge adaptées aux besoins des patients

20

Une journée d’hospitalisation à domicile coûte en moyenne 198 € contre 703 € pour une journée en médecine, chirurgie ou obstétrique (MCO). Une substitution de 40 000 journées du MCO et du SSR vers l’hospitalisation à domicile, dans le cadre de parcours sans hospitalisation traditionnelle en amont, permettrait d’économiser 20 millions d’euros.

Pertinence des prescriptions et des actes

1 380

 

Gestion de la liste en sus

100

 

Maîtrise médicalisée des prescriptions de produits de santé en ville et à lhôpital

 

 

Médicaments de médecine générale

215

Certaines classes thérapeutiques concernant des médicaments largement prescrits en médecine générale font l’objet d’actions récurrentes. Un plan d’actions renouvelé concernant les antidiabétiques (1,14 milliard d’euros remboursés en 2017) sera mis en place en 2019.

L’assurance maladie poursuivra en outre ses actions sur la thématique des biothérapies dans les maladies inflammatoires chroniques. 50 millions d’euros d’économies en sont attendues.

Médicaments de spécialité

70

Iatrogénie

100

L’impact attendu des actions mises en œuvre en 2019 vise à obtenir une diminution de 1 % du nombre d’unités prescrites chez les patients de plus de 65 ans, ainsi que de 1 % des hospitalisations pour cause de iatrogénie.

Dispositifs médicaux

80

Les nouvelles actions mises en œuvre pour accompagner les prescripteurs de dispositifs médicaux devraient permettre de générer 80 millions d’euros d’économies en 2019.

Diffusion des médicaments génériques et des biosimilaires

160

La France accuse un retard significatif de prescription des médicaments génériques et biosimilaires par rapport aux pays voisins. Les efforts des pharmaciens et les actions visant à réserver l’application du tiers payant à la délivrance de médicaments génériques ont permis d’atteindre un taux moyen de substitution de 88,1 % en 2017. La poursuite des actions en faveur de la diffusion des médicaments génériques avec un taux de substitution cible fixé à 90 % et les actions d’incitation à la prescription des médicaments biosimilaires permettront de dégager une économie de 160 millions d’euros en 2019.

Transports en ville et à lhôpital

175

Sur la base d’une hypothèse de substitution de 15 % des trajets réalisés en ambulance vers du transport assis professionnalisé, 75 millions d’euros d’économies peuvent être réalisées. Par ailleurs, une progression de 20 % des transports partagés permettrait d’atteindre 30 millions d’euros d’économies supplémentaires. Enfin, la révision des conventions départementales des taxis et la montée en charge de la télémédecine, qui limitera le recours à certains transports, permettront d’envisager 70 millions d’euros d’économies additionnelles.

Indemnités journalières

100

Les arrêts de travail pour maladie ont représenté 7,1 milliards d’euros de dépenses pour l’assurance maladie en 2016 et leur progression demeure dynamique. Les actions pour 2019 comprennent un plan d’action de prévention en entreprise en particulier sur les problématiques des risques psycho-sociaux, des troubles musculo-squelettiques, de la lombalgie et du maintien dans l’emploi des séniors.

Les opérations de contrôle des arrêts de travail seront maintenues.

L’accompagnement des forts prescripteurs d’indemnités journalières est également renouvelé avec de nouveaux supports. 16 000 médecins présentant les plus grands volumes d’indemnités journalières prescrites seront accompagnés. Le rendement moyen attendu de cette campagne est la diminution de chaque arrêt de travail d’une journée, soit une économie de 90 millions d’euros.

Actes en ville et à lhôpital

165

Les démarches d’accompagnement des professionnels sont un levier important pour essayer de promouvoir les meilleures pratiques : les programmes de maîtrise médicalisée incluent des visites sur les examens de biologie, sur certains actes médicaux ou sur la prescription de soins de masso-kinésithérapie.

L’assurance maladie met également en œuvre des mesures d’accompagnement concernant les actes chirurgicaux.

Enfin, les établissements considérés comme atypiques peuvent se voir proposer la signature d’un volet additionnel du CAQES relatif à la promotion de la pertinence des actes, des prestations et des prescriptions en santé.

Autres prescriptions

 

 

Biologie

95

L’Assurance Maladie informera les prescripteurs du remboursement de nouveaux actes de biologie médicale ou de la modification des conditions de prise en charges d’actes de biologie médicale. Une fiche synthétique présentant les indications des nouveaux actes et leur place dans la prise en charge diagnostique sera élaborée avec les biologistes et mise à disposition des prescripteurs.

Les actions de maîtrise médicalisée de l’assurance maladie se concentreront sur les actes pour lesquels la prescription n’est pas toujours pertinente, notamment le bilan martial.

Paramédicaux

120

 

Lutte contre la fraude et les abus

220

 

Total

2 010

 

Source : Rapport au ministre chargé de la sécurité sociale et au Parlement sur l’évolution des charges et produits de l’Assurance maladie au titre de 2019.

 


—  1  —

Un certain nombre d’incitations financières sont mises en place pour accompagner la maîtrise des dépenses de santé. Elles sont récapitulées dans le tableau suivant :

Source : direction de la sécurité sociale.

D.   Les principales mesures relatives aux dÉpenses d’assurance maladie

1.   La mise en œuvre du reste à charge « 0 »

L’article 33 vise à mettre en œuvre l’engagement pris par le Président de la République pendant la campagne électorale de 2017 de donner à tous les Français un accès à des soins de qualité pris en charge à 100 % dans le domaine de l’optique, de l’audiologie et du dentaire.

Bien que la France soit l’un des pays de l’OCDE où le reste à charge des ménages est parmi les plus faibles (7,5 % de la consommation de soins et de biens médicaux en 2017), il demeure important en optique, aides auditives et prothèses dentaires. Les restes à charge des ménages après intervention de l’assurance maladie complémentaire représentent ainsi 25 % de la dépense en soins prothétiques dentaires, 56 % pour les aides auditives et 22 % en optique. Le reste à charge est d’autant plus fort dans ces domaines que les prix y sont fixés librement et déconnectés des tarifs de remboursement. La part prise en charge par l’assurance maladie obligatoire y est en outre depuis longtemps plus faible que dans les autres domaines du soin.

Cela signifie que nombre de nos concitoyens renoncent à se soigner pour des raisons financières. Ainsi, on estime que le taux d’appareillage effectif dans notre pays est de l’ordre de 35 % de la population souffrant d’une déficience auditive. En optique, si le taux de renoncement pour des raisons financières s’établit à 10 % en moyenne, il est de 17 % pour les 20 % de Français avec les revenus les plus faibles. Enfin, en matière de prothèses dentaires, le taux de renoncement moyen s’établit à 16,8 % en moyenne, mais 28 % pour les 20 % de Français avec les revenus les plus faibles.

La réforme a été décidée après une large concertation avec les différents acteurs de la santé et professionnels concernés ([66]). L’offre « 100 % santé », dont les prix seront plafonnés et progressivement abaissés, montera en charge à compter du 1er janvier 2019 pour les aides auditives, du 1er avril 2019 pour les prothèses dentaires et du 1er janvier 2020 pour les équipements d’optique. La couverture intégrale du panier « 100 % santé » sera obligatoire pour les contrats responsables souscrits ou renouvelés à compter du 1er janvier 2020 pour l’optique et une partie du dentaire et à compter du 1er janvier 2021 pour l’ensemble des trois secteurs.

Calendrier de mise en œuvre du reste À charge « 0 »

Source : Caisse nationale d’assurance maladie.

Même si une négociation distincte a été menée pour chaque secteur, les accords conclus obéissent à des principes communs :

– des équipements de qualité, dont les avis de projets de nomenclature sont soumis à la Haute Autorité de santé, avec des offres amenées à évoluer pour s’adapter aux évolutions techniques et aux besoins de santé des Français ;

– la préservation de la liberté de choix : si l’offre sans reste à charge doit être systématiquement proposée, les assurés conservent la possibilité de choisir des équipements différents, à tarif libre, remboursés par leur assurance complémentaire dans des conditions définies par leur contrat ;

– au-delà de la seule levée des obstacles financiers, la réforme s’inscrit dans une démarche globale d’amélioration de l’accès aux soins, en facilitant l’accès aux professionnels et en développant les actions de prévention (création de nouvelles consultations prises en charge à 100 %, création d’un « forfait de prévention » dentaire, etc.)

Contenu du « panier » reste À charge « 0 »

Optique

– monture respectant les normes européennes, avec un prix inférieur ou égal à 30 €. Chaque opticien aura au minimum 17 modèles différents de montures adultes en deux coloris différents ;

– verres traitant l’ensemble des troubles visuels ;

– amincissement des verres en fonction du trouble, durcissement des verres pour éviter les rayures, traitement anti-reflet obligatoires

Dentaire

 couronnes céramiques monolithique et céramo-métalliques sur les dents visibles ; couronnes céramique monolithique zircones (incisives et canines) ; couronnes métalliques toute localisation

 inlays core et couronnes transitoires

 bridges céramo-métalliques (incisives et canines) ; bridges full zircon et métalliques toute localisation ; prothèses amovibles à base résine

Aides auditives

 tous les types d’appareils sont concernés : contour d’oreille classique, contour à écouteur déporté, intra-auriculaire ;

 au moins 12 canaux de réglage (ou dispositif de qualité équivalente) pour assurer une adéquation de la correction au trouble auditif ; système permettant l’amplification des sons extérieurs restituée à hauteur d’au moins 30 dB ;

 4 ans de garantie ;

 au moins trois des options suivantes : système anti-acouphène, connectivité sans fil, réducteur de bruit du vent, synchronisation binaurale, directivité microphonique adaptative, bande passante élargie supérieure ou égale à 6 000 Hz, fonction apprentissage de sonie, système anti-réverbération ;

 des prestations de suivi (au moins une fois par an) pour adapter en continu le réglage de lappareil en fonction de lévolution de la perte auditive

Source : ministère des solidarités et de la santé.

L’article 33 adapte le cadre législatif existant pour mettre en œuvre le reste à charge « 0 » en optique, audiologie et dentaire, soit la réforme dite « 100 % santé », pour tous les assurés disposant d’un contrat de complémentaire santé responsable. D’une part, il prévoit que les contrats de complémentaire santé responsables et solidaires ([67]) couvrent obligatoirement les frais en sus des tarifs de responsabilité pris en charge par la sécurité sociale pour les soins dentaires prothétiques, les aides auditives et les dispositifs d’optique médicale du panier « 100 % santé ». D’autre part, il prévoit que les opticiens et les audioprothésistes seront tenus de proposer les offres du panier « 100 % santé » et d’établir systématiquement un devis faisant apparaître un équipement sans frais.

Pour ce qui concerne l’assurance maladie, elle pourra différencier la base de remboursement selon que les produits relèvent ou non du panier « 100 % santé ».

Enfin, afin de développer la prévention, il est mis en place un examen bucco-dentaire obligatoire pour les enfants de 3 ans, qui sera pris en charge à 100 % par l’assurance maladie.

Selon l’annexe 9 du présent PLFSS, les impacts de la réforme pour l’assurance maladie, qui reposent sur une revalorisation des bases de remboursement et des hausses de volume de soins prothétiques réalisés du fait d’une diminution du renoncement aux soins, seraient de 220 millions d’euros en 2019 (170 millions en dentaire et 50 millions en auditif), 480 millions d’euros en 2020 et jusqu’à 755 millions d’euros en 2022. La base de remboursement de la sécurité sociale des équipements en optique « 100 % santé » sera revalorisée. La participation de l’assurance maladie obligatoire sera ainsi doublée pour les aides auditives d’ici 2021, de 200 euros à 400 euros, et atteindra 18 % du coût total des équipements d’optique « 100 % santé ». De même, en dentaire, les tarifs des soins conservateurs seront progressivement augmentés pour mieux valoriser ces actes de prévention.

2.   Le renforcement des dispositifs d’aide à la complémentaire santé

L’article 34 du projet de loi de financement de la sécurité sociale réforme le dispositif de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU‑C) et l’étend aux personnes aujourd’hui éligibles à l’aide au paiement d’une complémentaire santé (ACS), moyennant une participation financière réduite, afin de réduire le taux de non-recours à ces deux dispositifs.

Créée en 1999, la CMU-C offre la prise en charge de la part complémentaire des dépenses de santé (consultations, hospitalisations, médicaments, examens médicaux, etc.) à hauteur de 100 % des tarifs de responsabilité de la sécurité sociale. Elle inclut de plus des forfaits de prise en charge pour les prothèses dentaires, les lunettes, les prothèses auditives et d’autres dispositifs médicaux. Ses bénéficiaires ont droit à la dispense d’avance des frais et sont exonérés de la participation forfaitaire de 1 euro et des franchises médicales. Les bénéficiaires doivent résider en France de manière régulière depuis plus de trois mois ([68]) et avoir des ressources inférieures à un plafond. Les allocataires du revenu de solidarité active (RSA) et chaque membre de leur foyer ont droit à la CMU-C.

Plafond de ressources pour l’attribution de la CMU complÉmentaire

Nombre de personnes composant le foyer

Montant du plafond annuel en France métropolitaine

Montant du plafond annuel dans les départements doutre-mer

1 personne

8 810 €

9 806 €

2 personnes

13 215 €

14 709 €

3 personnes

15 858 €

17 650 €

4 personnes

18 501 €

20 592 €

Au-delà de 4 personnes, par personne supplémentaire

+ 3 524,09 €

+ 3 922,31 €

La CMU-C peut être gérée, au choix du bénéficiaire, soit par l’organisme d’assurance maladie qui est en charge de la protection obligatoire, soit par un organisme complémentaire agréé inscrit sur la liste nationale des organismes participant à la CMU complémentaire.

Pour atténuer l’effet de seuil de la CMU-C, la loi du 13 août 2004 portant réforme de l’assurance maladie a créé l’aide au paiement d’une complémentaire santé (ACS) à destination des personnes dont les ressources dépassent, dans la limite de 35 %, le plafond d’attribution de la CMU complémentaire.

Plafond de ressources pour l’attribution de l’ACS

Nombre de personnes composant le foyer

Plafond annuel en France métropolitaine

Plafond annuel dans les départements doutre-mer

1 personne

11 894 €

13 238 €

2 personnes

17 841 €

19 857 €

3 personnes

21 409 €

23 828 €

4 personnes

24 977 €

27 799 €

Au-delà de 4 personnes, par personne supplémentaire

+ 4 757,52 €

+ 5 295,12 €

L’ACS est une aide financière qui permet de réduire, et dans certains cas de prendre en charge totalement, le montant de la cotisation annuelle à une complémentaire santé. Son montant varie en fonction de l’âge des personnes composant le foyer.

Montant de l’Aide complÉmentaire santÉ (ACS)

Âge du bénéficiaire ([69])

Montant de laide

Moins de 16 ans

100 €

De 16 à 49 ans

200 €

De 50 à 59 ans

350 €

60 ans et plus

550 €

Outre l’aide financière, l’ACS ouvre droit au tiers-payant intégral et donne accès à des tarifs médicaux sans dépassement d’honoraires dans le cadre d’un parcours de soins coordonné. Depuis le 1er octobre 2017, pour les prothèses dentaires et l’orthodontie, les professionnels de santé doivent respecter des tarifs maximums fixés par arrêté et correspondant aux tarifs maximums applicables aux bénéficiaires de la CMU-C.

 

Ces deux dispositifs sont financés par le Fonds de financement de la CMU-C, qui bénéficie pour ce faire de l’affectation d’une fraction de la taxe de solidarité additionnelle (TSA) aux cotisations d’assurance maladie complémentaire prévue aux articles L. 862‑3 et L. 862‑4 du code de la sécurité sociale, la CNAM étant affectataire de la part de TSA ne revenant pas au fonds CMU. En 2017, le rendement de la TSA s’est élevé à 4,8 milliards d’euros, dont 2,6 milliards sont allés au Fonds de financement de la CMU-C.

En 2017, le nombre de bénéficiaires de la CMU-C s’est élevé à 5,52 millions, en hausse de 0,4 %, pour une dépense de 2,195 milliards d’euros. La dépense par bénéficiaire s’élève à 410 euros pour le régime général. Pour ce qui concerne l’ACS, sur les 1,58 million de bénéficiaires d’attestation (+ 7,9 %), 1,2 million les ont utilisés, pour un coût de 324 millions d’euros.

Le taux de non-recours est élevé pour ces deux dispositifs. Environ 30 % des personnes éligibles à la CMU-C n’y recourent pas. Pour l’ACS, le taux de non-recours est d’environ 55 %, et atteint 65 % si l’on tient compte des 23 % de personnes qui n’utilisent pas leur attestation ACS pour adhérer à un contrat de complémentaire santé.

Ce taux élevé de non-recours peut avoir plusieurs explications : la complexité de l’accès au droit, la crainte de la stigmatisation ou du refus de soins ou la rareté de l’offre de soins dans certaines zones de notre territoire.

C’est pour remédier à cette situation et faciliter l’accès au droit que le Gouvernement propose une refonte d’ampleur du dispositif d’aide à la couverture complémentaire santé, dont l’aspect principal est l’extension de la CMU-C aux personnes aujourd’hui éligibles à l’ACS, moyennant une participation financière variant en fonction de l’âge du bénéficiaire mais dont le montant ne pourra excéder un euro par jour, à compter du 1er novembre 2019. Cette extension s’accompagne d’un allégement des démarches à entreprendre, avec notamment l’instauration d’un renouvellement automatique de la CMU-C pour les allocataires du RSA et les bénéficiaires du minimum vieillesse et la mise en place d’un téléservice de demande de la CMU-C.

La personne pourra choisir librement le gestionnaire de sa couverture, notamment parmi les organismes d’assurance complémentaire, qui se verront remboursés à l’euro l’euro, et non plus de manière forfaitaire, les dépenses constatées au titre de la couverture complémentaire. Les personnes qui bénéficient déjà d’un contrat avec une mutuelle dans le cadre de l’ACS ou qui deviendraient éligibles au dispositif pourront ainsi conserver leur mutuelle, ce qui est un élément supplémentaire pour diminuer le taux de non-recours.

Sur la base d’une hypothèse d’augmentation du taux de recours par les anciens bénéficiaires de l’ACS de 3 points en 2020, 6 points en 2021 et 9 points en 2022, le coût de la mesure est estimé à 11 millions d’euros en 2019, 160 millions d’euros en 2020, 190 millions d’euros en 2021 et 220 millions d’euros en 2022.

Le rapporteur se félicite de ce nouveau dispositif qui permettra de lutter efficacement contre le non-recours et offre un complément utile au plan de lutte contre la pauvreté. Il note que la santé et le social peuvent être liés, pour accroître l’efficacité de nos politiques publiques. Ainsi, les plateformes territoriales d’appui (PTA) pourraient contribuer, de manière additionnelle à la « fonction d’appui » définie à l’article 74 de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, à la lutte contre le non-recours aux droits en matière de soins et de prestations sociales en permettant aux médecins et personnels médicaux de signaler la vulnérabilité d’un patient aux services sociaux et organismes de sécurité sociale. À la suite du signalement, les services sociaux et organismes de sécurité sociale alertés prendraient contact avec la personne signalée et lui proposeraient une évaluation de sa situation afin de déterminer les prestations auxquelles elle est éligible et de l’accompagner dans les démarches nécessaires à l’obtention de ces prestations. Ce type de dispositif tirerait profit du maillage territorial établi par les médecins et les infirmiers.

3.   Des modes de tarification diversifiés

● L’article 27 étend le dispositif de paiement à la qualité des établissements de santé aux établissements psychiatriques à un horizon de trois ans. Il prévoit également la possibilité d’appliquer, à partir de 2020, une pénalité aux établissements dont les résultats n’atteignent pas un seuil minimum pour certains critères liés à l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins. Cette pénalité sera plafonnée à 0,5 % des recettes annuelles d’assurance maladie de l’établissement.

● L’article 28 met en place une rémunération forfaitaire pour certaines pathologies chroniques dont la liste sera précisée par arrêté. Il s’agit d’utiliser une tarification plus adaptée à la prise en charge des pathologies chroniques que la tarification à l’activité. Les forfaits seront financés par redéploiement des financements à l’activité de la prise en charge des pathologies concernées. Le financement forfaitaire assurera aux professionnels une rémunération leur permettant de mettre en place des actions de prévention, d’éducation du patient et d’assurer la fonction de coordination des soins nécessaire à une prise en charge de qualité de ce type de patients. Il devrait ainsi contribuer à limiter les complications liées aux pathologies chroniques.

En 2019, le forfait ne concernera que les établissements de santé, pour deux pathologies uniquement, le diabète et l’insuffisance rénale chronique. L’objectif est de financer, pour les activités concernées, l’ensemble des établissements de santé, non plus via les tarifs des groupes homogènes de séjours et des actes en consultation mais via un forfait.

Dans un second temps, la démarche sera étendue aux professionnels de ville, dont l’implication est déterminante dans la prise en charge des patients atteints de pathologies chroniques.

Ces articles complètent la démarche initiée par l’article 51 de la loi de financement pour 2018.

4.   Les dispositions relatives aux médicaments

● L’article 15 simplifie les règles des mécanismes de sauvegarde destinés à permettre à la sécurité sociale de faire face à l’évolution des dépenses de médicaments. Ce mécanisme permet de demander aux industriels de verser une contribution à l’assurance maladie en fin d’année lorsque leur chiffre d’affaires augmente trop rapidement.

La réforme a pour but à la fois de rendre le dispositif plus lisible pour les industriels et d’élargir son assiette à l’ensemble des médicaments. Les principales modifications sont les suivantes :

– la nouvelle assiette est constituée du chiffre d’affaires de l’ensemble des médicaments remboursables sans exception, net des remises produits versées au Comité économique des produits de santé (CEPS). La clause actuelle exclut en effet les médicaments génériques et certains médicaments orphelins de son champ en dépit du dynamisme de la dépense ;

– la contribution est répartie au prorata du seul chiffre d’affaires et non de sa progression ;

– la distinction entre les mécanismes de régulation des dépenses de médicaments de ville (ancien taux Lv) et ceux de l’hôpital (ancien taux Lh) est supprimée au profit d’une régulation unique. La clause de sauvegarde se déclenchera si un certain montant de chiffre d’affaires est dépassé pour l’année considérée.

Pour 2019, la clause se déclenchera si le chiffre d’affaires est supérieur de 0,5 % à celui de 2018.

En matière de médicament, l’article 4 supprime par ailleurs le fonds de financement pour l’innovation pharmaceutique, introduit par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017, et dont la Cour des comptes estimait qu’il permettait de réduire artificiellement la progression de l’ONDAM.

● L’article 42 du projet de loi vise à concilier le renforcement de l’accès précoce à certains produits de santé innovants et la soutenabilité du dispositif pour les finances publiques. Les dépenses consacrées par l’assurance maladie à ce dispositif, qui représentaient une centaine de millions d’euros en 2013, ont en effet dépassé un milliard d’euros à deux reprises depuis 2014. Parallèlement, il ne permet pas de couvrir toutes les situations, comme celles de certaines extensions d’indication sans alternatives thérapeutiques, de l’accès précoce pour les dispositifs médicaux, ou des produits pour lesquels une demande d’autorisation temporaire d’utilisation n’a pu être déposée à temps.

L’article 42 propose trois élargissements de l’accès précoce :

– un accès au dispositif d’accès précoce, sur décision ministérielle, pour les médicaments qui n’auraient, en raison des contraintes de calendrier, pu disposer du mécanisme d’autorisation temporaire d’utilisation (ATU) mais qui en remplissent toutes les conditions (médicament innovant dans des situations graves, en l’absence d’alternative thérapeutique, et dont l’efficacité et la sécurité d’emploi sont établies) ;

– l’extension du principe de l’accès précoce au cas des médicaments déjà pris en charge par l’assurance maladie mais pour lesquels une nouvelle indication innovante pourrait être rapidement disponible ;

– la prise en charge anticipée de certains dispositifs médicaux.

Pour ces deux derniers cas, les ministres fixeront un prix temporaire durant la phase d’accès précoce puis le prix net finalement négocié avec le Comité économique des prix de santé (CEPS) sera appliqué rétroactivement sur la période d’accès précoce.

L’article 42 étend en outre aux médicaments utilisés en association le dispositif de fixation des remises par le CEPS actuellement en vigueur pour les dispositifs médicaux.

● L’article 43 vise à favoriser le recours aux médicaments génériques et biosimilaires en prévoyant que le recours à la mention « non substituable » sur l’ordonnance, qui n’aura plus à être manuscrite, devra être justifié sur des critères définis par arrêté ministériel pris après avis de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé. Lorsque l’absence de substitution n’est pas justifiée médicalement, le médicament princeps sera remboursé sur la base du prix du médicament générique, la différence restant à la charge de l’assuré qui refuse la substitution. Le champ de la substitution est en outre étendu aux médicaments hybrides, proches des médicaments génériques, mais qui doivent fournir des études supplémentaires pour montrer leur équivalence thérapeutique.

Enfin, cet article permet aux acheteurs hospitaliers de prendre en compte le caractère biologique similaire ([70]) d’une spécialité lorsqu’ils mettent en œuvre une procédure de passation de marché public.

5.   Les autres mesures du projet de loi

● L’article 38 crée un fonds de lutte contre les addictions liées aux substances psychoactives en élargissant le périmètre du fonds actuel de lutte contre le tabac ([71]), afin de déployer une stratégie cohérente qui concerne l’ensemble des produits concernés. Selon l’exposé des motifs du projet de loi, ce fonds sera doté de ressources supplémentaires correspondant au produit des amendes forfaitaires sanctionnant la consommation de cannabis.

● L’article 39 prévoit la généralisation de l’expérimentation portant sur la vaccination antigrippale par les pharmaciens, conduite en Auvergne-Rhône-Alpes et Nouvelle-Aquitaine pour la campagne 2017-2018, au cours de laquelle 160 000 personnes ont été vaccinées dans près de 2 700 officines. Cette généralisation, en 2019-2020, est précédée par l’extension de l’expérimentation à deux régions supplémentaires pour la campagne d’octobre 2018 à janvier 2019. Cette mesure vise à faciliter la vaccination pour freiner la propagation du virus. Son impact financier est relativement modeste : compte tenu de l’écart entre le coût de la vaccination par les pharmaciens et le coût de la vaccination par les médecins, la généralisation de la vaccination contre la grippe saisonnière par les pharmaciens pourrait générer une économie de 18 millions d’euros en 2020.

● L’article 40, s’inscrivant dans le cadre de la stratégie pour l’autisme 2018-2022, prévoit la prise en charge par l’assurance maladie d’un parcours de bilan et intervention précoce pour l’accompagnement des enfants présentant un trouble du neuro-développement et la réalisation d’un diagnostic. Il s’agit, conformément aux recommandations de bonnes pratiques professionnelles, de développer les interventions précoces qui permettent notamment de limiter le sur-handicap. Cet article crée une prestation organisée par des structures médico-sociales ou sanitaires et réalisée par les professionnels de ville (psychologues, psychomotriciens, ergothérapeutes). Le coût de cette mesure est estimé à 21 millions d’euros pour 2019.

● L’article 41 modifie l’article 58 de la loi du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement pour accélérer la convergence tarifaire des forfaits soins des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD).

La réforme tarifaire prévue par cet article prévoit la détermination du forfait soins de ces établissements à l’aide d’une équation tarifaire prenant en compte notamment le niveau de dépendance moyen et les besoins en soins des résidents.

Alors que la convergence était prévue sur une durée de sept ans (2017‑2023), l’article 41 la réduit à cinq ans afin qu’elle s’achève en 2021. Cette accélération permettra aux EHPAD présentant un niveau de financement inférieur à celui du tarif soins cible (plus de 80 % des établissements) de bénéficier plus rapidement de moyens complémentaires pour renforcer les équipes soignantes auprès des résidents. Sur la période 2019-2021, les EHPAD percevront 143 millions d’euros supplémentaires du fait de cette accélération, en plus des 217 millions d’euros déjà programmés. Pour 2019, l’impact de cette mesure est estimé à 48 millions d’euros.

Le rapporteur note que le gouvernement a pris la mesure de l’ampleur de la question des EHPAD et débloque des moyens immédiats pour répondre à l’urgence. Plus largement, il est nécessaire de repenser en profondeur le fonctionnement de ces établissements en intégrant complètement ces structures aux tissus de soins du territoire. Les EHPAD pourraient ainsi être appelés à devenir de réelles plateformes de soins gérontologiques, à établir des partenariats avec des médecins locaux, à se repenser pour offrir aux personnes les moins dépendantes une offre concentrée sur l’hébergement plutôt que sur le soin… La réflexion doit être globale et intégrer l’ensemble des acteurs du secteur.

II.   la branche vieillesse et le Fonds de solidaritÉ vieillesse

A.   Une rÉduction de l’excÉdent de la branche vieillesse en 2018

D’après les prévisions du présent projet de loi de financement, après avoir renoué avec les excédents en 2016 et connu une amélioration sensible de son solde en 2017, avec un excédent de 1,8 milliard d’euros, la branche vieillesse du régime général verrait son excédent se réduire en 2018, à 0,8 milliard d’euros, les dépenses devenant plus dynamiques que les recettes, après la fin des hausses de cotisations prévues par la loi du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites.

Les dépenses de pensions ont progressé de manière modérée au cours des dernières années sous l’effet du recul de l’âge légal de départ et de l’âge du taux plein, ainsi que de la faible inflation, qui s’est traduite par de faibles revalorisations des pensions.

Taux de revalorisation des pensions depuis 2000

Date

Taux de revalorisation des pensions

1er janvier 2019

0,3

2018

0

1er octobre 2017

0,8

1er octobre 2016

0

1er octobre 2015

0,1

1er octobre 2014

0

1er avril 2013

1,3

1er avril 2012

2,1

1er avril 2011

2,1

1er avril 2010

0,9

1er avril 2009

1

1er septembre 2008

0,8

1er janvier 2008

1,1

1er janvier 2007

1,8

1er janvier 2006

1,8

1er janvier 2005

2

1er janvier 2004

1,7

1er janvier 2003

1,5

1er janvier 2002

2,2

1er janvier 2001

2,2

1er janvier 2000

0,5

Source : commission des finances, d’après les données de la Caisse nationale d’assurance vieillesse.

● En 2017, la réforme des retraites de 2010, en particulier le relèvement progressif de l’âge légal dans les principaux régimes de retraite, a continué à produire ses effets en freinant le nombre de départs en retraite. Les effets du report de l’âge légal, ainsi que la modération de la revalorisation des pensions et des rentrées de cotisations dynamiques (augmentation de la masse salariale et hausse des taux) ont permis à la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) de connaître un excédent de 1,7 milliard d’euros.

● À partir de 2018, les dépenses de pensions devraient augmenter sous l’effet d’une progression des effectifs de départs en retraite due à la fin de la montée en charge du recul de l’âge légal et à la hausse de la pension moyenne du fait de l’effet noria (les nouveaux retraités ont en moyenne une pension plus élevée que les retraités décédés), ainsi que d’une revalorisation des pensions en moyenne annuelle plus élevée qu’en 2017, malgré le décalage du 1er octobre 2018 au 1er janvier 2019 de la revalorisation des pensions.

La contribution des effectifs à la croissance des prestations serait légèrement plus élevée en 2018 qu’en 2017. À partir de 2018, l’âge légal de départ à la retraite est de 62 ans pour la première génération entière, celle née en 1956, et les flux de départ ne sont désormais plus freinés à ce titre. La remontée de l’âge du taux plein automatique se poursuit au-delà de 2017, mais ses effets sont moins puissants que ceux de la réforme de 2010. Les flux d’entrée dans le dispositif de départ anticipé, en revanche, ont atteint un pic en 2017 et diminueraient fortement dès 2018.

La pension moyenne des retraités suit une tendance à la hausse, hors effet de revalorisation. D’une part, les nouveaux retraités ont eu des carrières plus complètes, notamment en raison d’une participation plus élevée des femmes au marché du travail dans les générations arrivant actuellement à la retraite. D’autre part, le recul de l’âge légal conduit à la majoration de la durée d’assurance cotisée, et donc du niveau des pensions.

● En 2019, la contribution des effectifs à la hausse des dépenses devrait être réduite par rapport à 2018 du fait de l’impact attendu des mesures d’économies prises par l’AGIRC-ARRCO, qui inciteraient de nombreux assurés à décaler leur date de liquidation car le montant de leurs pensions complémentaires serait désormais diminué pendant trois ans s’ils liquident leur pension avant l’âge du taux plein.

À législation constante, l’effet en moyenne annuelle de la revalorisation tendancielle s’élèverait à 1,5 point en 2019 et constituerait le premier facteur contribuant à la hausse des prestations versées.

Contribution des diffÉrents facteurs à l’Évolution des droits propres (hors mesures nouvelles PLFSS 2019)

Source : rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale, septembre 2018.

Parallèlement, les recettes augmentent moins rapidement, la progression des cotisations n’étant plus tirée par les hausses de taux. Aussi, selon le rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2018, avant mesures nouvelles, la CNAV serait à nouveau en déficit en 2019.

Pour les prochaines années, l’excédent de la branche vieillesse se maintiendrait mais serait plus réduit, du fait des perspectives démographiques et de la fin des effets des réformes des retraites de 2010 et 2014. Sur la période 2018-2021, il passerait de 0,8 à 0,4 milliard d’euros et la branche serait quasiment à l’équilibre en 2022 (+ 0,1 milliard d’euros). Conventionnellement à ce stade, l’annexe B au PLFSS prévoit la disparition de l’excédent de la CNAV à l’horizon 2022, en considérant que la CNAV restituerait des recettes à l’État dans le cadre de sa participation aux allégements généraux de cotisations sociales.

Évolution prÉvisionnelle du solde de la branche vieillesse
(rÉgime gÉNÉral)

(en milliards d’euros)

 

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Recettes

126,6

134,5

137,6

140,9

145,3

150,2

Dépenses

124,8

133,7

136,9

140,2

144,9

150,2

Solde

1,8

0,8

0,7

0,8

0,4

0

Source : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019.

À l’échelle de l’ensemble des régimes obligatoires de base, le solde, nettement excédentaire en 2017 (2 milliards d’euros), se dégraderait dès 2018, deviendrait déficitaire en 2021 et s’établirait à – 1,3 milliard d’euros en 2022, essentiellement en raison de la dégradation du solde de la Caisse nationale de retraite des agents de collectivités locales (CNRACL), dont le déficit devrait s’élever à 2,6 milliards d’euros en 2022. Cette dégradation reflète le ralentissement des recrutements, et donc des cotisations sociales, ainsi que le flux de liquidation élevé compte tenu de la structure relativement jeune de ce régime.

● À plus long terme, selon les projections du Conseil d’orientation des retraites (COR), le solde financier du système de retraite devrait rester négatif quelles que soient les hypothèses d’évolution de la productivité du travail retenues. Il retrouverait l’équilibre à l’horizon 2040 dans les scénarios d’augmentation de la productivité de 1,5 ou 1,8 % par an, mais resterait durablement en besoin de financement en cas de croissance des revenus d’activité inférieure à 1,5 % par an à long terme.

Il faut toutefois souligner que la part des dépenses de retraite dans le PIB, qui s’élevait à 13,8 % en 2017, devrait légèrement baisser jusqu’en 2022 (13,5 %), le PIB progressant plus rapidement que les dépenses de retraite, avant de légèrement remonter à l’horizon 2028.

DÉpenses du systÈme de retraite observÉes et projetÉes

(en % du PIB)

Source : Conseil d’orientation des retraites, rapport annuel de juin 2018.

À plus long terme, les projections sont très dépendantes du scénario retenu. La part des dépenses de retraite dans le PIB baisserait dans trois scénarios sur quatre (gains de productivité du travail de 1,3 %, 1,5 % ou 1,8 % par an), malgré le contexte du vieillissement de la population. Elle serait relativement stable dans le scénario de 1 % de gains de productivité du travail jusqu’au début des années 2050, avant de progresser à nouveau.

Concernant le solde, la dégradation à moyen terme proviendrait principalement de la baisse des ressources du système de retraites en pourcentage du PIB. La diminution du taux de prélèvement global serait liée à la baisse progressive du poids, dans la masse totale des rémunérations, des régimes pour lesquels les taux de cotisation sont les plus élevés, en particulier le régime des fonctionnaires de l’État ([72]).

Solde financier projetÉ du systÈme de retraite

(en % du PIB)

Source : Conseil d’orientation des retraites, rapport annuel de juin 2018.

B.   Vers la poursuite du redressement des comptes du FSV

● Après avoir accusé un déficit annuel supérieur à 3 milliards d’euros par an de 2010 à 2016 (– 3,6 milliards d’euros en 2016), le solde du FSV s’est amélioré en 2017 (– 2,9 milliards d’euros), de manière plus sensible que prévu en loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, en raison principalement des effets favorables de la conjoncture sur les recettes de CSG sur les revenus du capital (+ 4,4 %).

Les dépenses du fonds ont fortement diminué en 2017 (– 3,7 %) en raison de la diminution progressive de sa contribution au financement du minimum contributif, comme prévu par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017, ainsi que de la fin de la prise en charge de la majoration pour conjoint à charge.

Les prises en charge de cotisations au titre des périodes non travaillées, qui représentent de loin la première charge du FSV (environ 65 %), ont en revanche augmenté, en raison à la fois de l’augmentation de la cotisation forfaitaire et du nombre de bénéficiaires, que ce soit pour les cotisations prises en charge au titre du chômage ou au titre de la maladie, de l’invalidité ou des accidents du travail et des maladies professionnelles. Les arrêts maladie sont dynamiques et le recul de l’âge de départ à la retraite augmente le nombre de bénéficiaires de prestations d’invalidité.

Prises en charge de cotisations et de prestations par le FSV

(en millions d’euros)

Source : rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2018.

● Le déficit du FSV devrait poursuivre sa résorption en 2018 et 2019, en raison des deux dernières baisses de la contribution du FSV au financement du minimum contributif. En application du décret n° 2017‑583 du 20 avril 2017 fixant le montant de la fraction des dépenses au titre de la majoration mentionnée à l’article L. 351‑10 du code de la sécurité sociale prise en charge par le Fonds de solidarité vieillesse, les dépenses du FSV au titre du minimum contributif sont fixées à 1 737 millions d’euros en 2018 et 967 millions d’euros en 2019.

Cette baisse serait toutefois partiellement compensée par la hausse des prises en charge au titre du minimum vieillesse consécutive à la revalorisation prévue en loi de financement pour 2018 (cf. infra). Cette mesure représente un effort estimé à 525 millions d’euros sur trois ans.

En 2019, la diminution du déficit du FSV serait plus réduite, en raison d’une diminution des dépenses moins marquée et d’un ralentissement des recettes assises sur le capital.

● Grâce au transfert progressif du financement du minimum contributif du FSV à la branche vieillesse d’ici 2020, le FSV pourrait revenir à l’équilibre en 2022.

Évolution prÉvisionnelle du solde du FSV

(en milliards d’euros)

 

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Recettes

16,6

16,8

16,6

17,1

17,7

18,3

Dépenses

19,6

18,9

18,4

17,8

18

18,2

Solde

– 2,9

– 2,1

– 1,8

– 0,7

– 0,3

0,1

Source : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019.

Ces prévisions sont toutefois à considérer avec prudence. D’une part, en recettes, le rendement des prélèvements sur le capital affectés au FSV est très sensible à la conjoncture économique et à l’évolution de la législation fiscale. D’autre part, les prévisions de dépenses dépendent fortement des hypothèses retenues par Pôle emploi pour l’évolution du chômage, puisque les prises en charge au titre du chômage devraient représenter près des deux tiers des charges du FSV sur la période 2018-2022.

C.   Les Objectifs de dÉpenses de la branche vieillesse et du FSV en 2019

Pour 2019, les articles 56 et 58 fixent respectivement les objectifs de dépenses de la branche vieillesse et la prévision de charges du FSV :

– l’objectif de dépenses pour l’ensemble des régimes obligatoires de base est fixé à 241,2 milliards d’euros, en hausse de 2 % par rapport à l’objectif révisé pour 2018 ;

– l’objectif pour le régime général à 136,9 milliards d’euros, en hausse de 2,4 % par rapport à l’objectif révisé pour 2018 ;

 les prévisions de charges du FSV à 18,4 milliards deuros, en baisse de 2,7 %.

III.   La branche accidents du travail-maladies professionnelles (AT-MP)

A.   Un excÉdent en baisse en 2018…

Positif depuis 2013 après avoir présenté un déficit continu de 2009 à 2012, le solde de la branche AT-MP devrait rester excédentaire en 2018, à 0,8 milliard d’euros, mais l’excédent se réduirait par rapport à 2017 (1,1 milliard d’euros). Comme le relève la Cour des comptes, contrairement aux autres branches de prestations du régime général, la branche AT-MP est gérée à l’équilibre sur le moyen terme, les paramètres de calcul des taux permettant de compenser les déficits enregistrés au titre de certaines années par des excédents les années suivantes. Les excédents dégagés depuis 2013 ont ainsi permis à la branche de résorber graduellement son endettement, ses déficits ne faisant, à la différence de ceux des autres branches du régime général, pas l’objet de reprises par la CADES.

Solde cumulé de la branche AT-MP

Source : réponse au questionnaire du rapporteur pour avis.

En 2017, l’excédent de la branche, qui s’établissait à 0,8 milliard d’euros en 2016, a fortement augmenté sous le double effet d’une baisse des dépenses de 0,6 %, s’expliquant principalement par la réduction de la dotation au Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, et d’une augmentation des produits de 2,4 %, sous l’effet du dynamisme de la masse salariale du secteur privé et malgré la baisse du taux moyen de cotisation.

En 2018, l’excédent diminuerait en revanche en raison d’une augmentation des charges de 2 %, alors que les recettes baisseraient de 0,4 % compte tenu de la baisse de 0,1 point du taux de cotisation décidée en loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

Les prestations entrant dans le champ de l’ONDAM (cf. supra) expliqueraient à elles seules la moitié de l’augmentation des dépenses, les indemnités journalières étant particulièrement dynamiques (+ 3,7 %).

Les prestations hors ONDAM repartiraient à la hausse en raison du transfert des charges du fonds pénibilité à la branche. Les charges liées à l’amiante, en revanche, diminuent (- 8,9 %) tendanciellement en lien avec la décrue du nombre de travailleurs y ayant été exposé.

B.   … qui augmenterait en 2019

En 2019, l’excédent des comptes de la branche AT-MP devrait retrouver son niveau de 2017, à 1,1 milliard d’euros. La hausse des dépenses, estimée à 2,8 % en lien notamment avec la modification de la date d’indemnisation des victimes de maladies professionnelles, devrait être plus que compensée par une augmentation des produits de cotisations de 3,4 % en raison du dynamisme de la masse salariale.

Évolution des recettes, dÉpenses et soldes de la branche AT-MP
(rÉgime gÉNÉral)

(en milliards d’euros)

 

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Recettes

12,6

12,8

13,3

13,4

13,6

13,8

Dépenses

11,7

12

12,2

12,2

12,4

12,5

Solde

1,1

0,8

1,1

1,2

1,3

1,3

Source : annexe B du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Pour l’année 2019, l’article 55 du présent projet de loi fixe à :

– 13,5 milliards d’euros l’objectif de dépenses de la branche AT-MP pour l’ensemble des régimes obligatoires de base,

– 12,2 milliards d’euros l’objectif de dépenses pour le régime général,

soit des niveaux identiques à ceux votés en loi de financement pour 2018 et supérieurs de 0,2 milliard d’euros à la prévision d’exécution pour 2018.

C.   Les dotations de la branche AT-MP aux fonds amiante et les versements au titre de la sous-dÉclaration des accidents du travail, du dispositif de retraite anticipÉe et du compte professionnel de prÉvention

L’article 54 fixe les montants des quatre dotations versées par la branche AT-MP du régime général, qui représentent plus de 2 milliards d’euros.

La dotation au Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA) est fixée à 260 millions d’euros, contre 270 millions d’euros en loi de financement pour 2018. La tendance à la baisse de la demande, conjuguée à une augmentation du coût moyen des dossiers liée à l’augmentation de la fréquence des pathologies graves, conduisent à évaluer le total des dépenses du fonds à 364,9 millions d’euros en 2019. La dotation de la branche AT-MP est complétée par la dotation de l’État et les produits du fonds.

La dotation au Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (FCAATA) est quant à elle fixée à 532 millions d’euros, contre 613 millions d’euros en 2018, pour tenir compte de la diminution du nombre d’allocataires et réduire le résultat cumulé excédentaire.

Le versement annuel de la branche AT-MP au profit de la branche maladie au titre de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles, destiné à compenser les dépenses supportées par la branche maladie au titre des accidents et maladies professionnelles non pris en charge par la branche AT-MP, est fixé à 1 milliard d’euros.

Enfin, la dotation destinée à couvrir les dépenses supplémentaires engendrées par le dispositif de retraite anticipée pour incapacité permanente et par le compte professionnel de prévention est fixée à 254,2 millions d’euros pour la branche AT-MP du régime général et 8 millions d’euros pour la branche AT-MP du régime des salariés agricoles. Ces montants se répartissent de la manière suivante :

(en millions d’euros)

 

Retraite anticipée pour incapacité permanente

Compte professionnel de prévention

Régime général

87,7

158,5

Régime des salariés agricoles

5,5

2,5

Source : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019.

IV.   La branche famille

A.   Un solde excÉdentaire en 2018, après dix ans de dÉficit

Après avoir sensiblement réduit son déficit en 2017 (– 0,2 milliard d’euros), la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) devrait renouer avec les excédents en 2018. Selon la prévision de l’article 5 du présent PLFSS, le solde devrait être excédentaire de 0,4 milliard d’euros.

Cette amélioration résulterait à la fois de la relative stabilité des charges (+ 0,3 %) et de la dynamique des produits (+ 2,1 %), sous l’effet du dynamisme de la conjoncture économique.

En 2018, les prestations sociales financées par la CNAF, y compris les prestations indirectes financées sous forme de transferts aux organismes gestionnaires de ces dépenses, s’élèveraient à 42,2 milliards d’euros, en hausse de 0,6 % après plusieurs années de baisse des dépenses résultant de la mise en œuvre du pacte de responsabilité et de solidarité, qui s’est traduite par le transfert à l’État de la fraction d’aides personnelles au logement (APL) destinée aux familles en 2015, puis du financement des allocations logement à caractère familial (ALF) et de la protection juridique des majeurs en 2016. Sur un périmètre inchangé en 2018 par rapport à 2017, les prestations légales s’élèveraient à 31,6 milliards d’euros, en légère progression de 0,4 %.

Évolution des dÉpenses de la branche famille depuis 2007

(en milliards d’euros)

Source : réponse au questionnaire du rapporteur pour avis.

Les dépenses d’entretien en faveur de la famille, qui représentent 58 % de la dépense, progresseraient en 2018 de 2,2 %, avec une hausse notable du complément familial (+ 7,1 %) et de l’allocation de soutien familial (+ 6,1 %). Les allocations familiales augmenteraient à un rythme moins soutenu.

Ces prestations bénéficieront des dernières revalorisations exceptionnelles issues du plan pauvreté de 2013, ainsi que des revalorisations annuelles automatiques (+ 0,8 % en moyenne annuelle). En outre, le nombre d’allocataires serait en hausse.

À l’inverse, les dépenses au titre de la prestation d’accueil du jeune enfant (PAJE) continueraient de baisser en 2018 (- 3 %), mais à un rythme moindre qu’en 2017. Trois facteurs peuvent expliquer la baisse des prestations de la PAJE : le moindre recours au congé parental, à la suite de la réforme du complément de libre choix d’activité pour les enfants nés ou adoptés à compter du 1er janvier 2015, qui impose un partage du congé entre les deux parents, la baisse du nombre de naissances constatée depuis 2014 et les mesures d’économies portant sur l’allocation de base et la prime à la naissance votées en loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

B.   Un excÉdent en augmentation en 2019, sous l’effet de recettes dynamiques

En 2019, avant mesures nouvelles, l’excédent de la CNAF atteindrait 1,6 milliard d’euros du fait d’une progression des recettes plus dynamique que celle des dépenses.

 

Les prévisions de la CCSS pour 2019 sont faites sur la base d’une revalorisation du barème des prestations de 1,6 % au 1er avril, alors qu’une partie d’entre elles ne progresseront en fait que de 0,3 %. La revalorisation différenciée des prestations permettra une économie de 260 millions d’euros en 2019.

Le solde de la branche devrait rester équilibré, après prise en compte des transferts à l’État et liés au désendettement, jusqu’en 2022.

Évolution des recettes, dÉpenses et soldes de la branche famille

(en milliards d’euros)

 

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Recettes

49,8

50,5

51,5

50,4

50,9

51,9

Dépenses

50

50,1

50,3

50,5

51

51,9

Solde

– 0,2

0,4

1,2

0

0

0

Source : annexe B du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

C.   Des mesures concrÈtes pour les familles

1.   La majoration du complément mode de garde pour les familles ayant un enfant en situation de handicap

L’article 45 du PLFSS majore le montant maximum du complément de mode de garde pour les familles au titre de l’enfant en situation de handicap. Le complément de libre choix du mode de garde (CMG) de la prestation d’accueil du jeune enfant (PAJE) est versé, sans condition de ressources, aux familles qui exercent une activité professionnelle ou sont en parcours d’insertion et qui font garder leur enfant de moins de 6 ans par un mode d’accueil individuel (assistant maternel, garde à domicile).

Des majorations des montants maximums du CMG existent pour les familles travaillant en horaires spécifiques (+ 10 %), les familles dont l’un des parents bénéficie de l’AAH et les familles monoparentales (+ 30 %). En revanche, le montant du CMG est le même que l’enfant soit porteur d’un handicap ou non, alors que l’accueil d’enfants ouvrant droit au bénéfice de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH) en crèche donne lieu à une réduction du tarif appliqué à la famille et que le coût de l’accueil individuel d’un enfant handicapé peut être renchéri.

Afin d’éviter à ces familles d’assumer un reste à charge supérieur à celui des autres parents, il est proposé de majorer, à compter du 1er novembre 2019, les montants maximums du CMG « emploi direct » (emploi direct d’un assistant maternel ou d’une garde à domicile) et « structure » (recours à une crèche familiale, un service de garde d’enfants à domicile ou une micro-crèche) lorsqu’un enfant est en situation de handicap au sein de la famille. Le niveau de la majoration sera fixé par décret, l’exposé des motifs évoquant une majoration de 30 %. Une telle majoration représenterait une augmentation pouvant atteindre jusqu’à 256 euros pour la garde d’un enfant de moins de 3 ans en cas de recours à une micro-crèche si le ménage a des revenus modestes.

Cette mesure aurait un coût de 0,3 million d’euros en 2019 et de 1,8 million d’euros en année pleine. La CNAF dénombrait en 2015 4 300 familles ayant un enfant de moins de 6 ans bénéficiant de l’AEEH et du CMG. 4 700 familles ayant un enfant âgé entre 6 et 20 ans bénéficiant de l’AEEH bénéficiaient également du CMG pour un autre de leurs enfants âgé de moins de six ans la même année.

2.   La prolongation du complément mode de garde à taux plein jusqu’à l’entrée à l’école maternelle

Outre la majoration pour les familles ayant un enfant en situation de handicap prévue à l’article 45, l’article 46 prévoit un autre aménagement du CMG, en cohérence avec l’avancée à 3 ans de l’âge de l’obligation scolaire, annoncée par le Président de la République à compter de la rentrée 2019.

Alors que, aujourd’hui, le CMG est réduit de moitié lorsque l’enfant gardé a entre 3 et 6 ans, l’article 46 permet le maintien du CMG à taux plein pour les enfants nés entre le 1er janvier et le 31 août jusqu’à leur scolarisation à l’école maternelle en septembre de l’année civile de leur troisième anniversaire, pour permettre aux familles de conserver à coût constant le même mode de garde jusqu’à la scolarisation en maternelle.

Cette mesure s’appliquera pour les enfants nés à compter du 1er janvier 2017, qui seront les premiers enfants atteignant l’âge de 3 ans non scolarisés après l’abaissement de l’âge de l’obligation scolaire, soit à compter du 1er janvier 2020, à la suite de la réforme qui interviendra en septembre 2019.

3.   La prolongation du congé maternité pour les travailleuses indépendantes et les exploitantes agricoles

● L’article 47 du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale harmonise les modalités d’indemnisation du congé maternité, sur la base du rapport de notre collègue Marie-Pierre Rixain, tout en maintenant les règles spécifiques qui permettent de répondre aux contraintes propres à chaque type d’activité professionnelle, en modifiant les régimes qui s’appliquent aux travailleuses indépendantes et aux agricultrices.

Aujourd’hui, la durée minimale d’interruption pour les travailleuses indépendantes est de 44 jours, soit 12 de moins que pour les salariées, ce qui ne paraît pas suffisant pour la santé de la mère et de l’enfant. Les travailleuses indépendantes sont soumises à des contraintes liées à la nécessité d’assurer la pérennité de leur activité et à l’instabilité de leurs revenus, qui ne les incitent pas à s’arrêter pendant une durée suffisante. Le projet de loi aligne la durée minimale d’arrêt pour les travailleuses indépendantes sur celle des salariées, soit huit semaines dont deux de congé prénatal. L’étude d’impact précise en outre que la durée de versement maximale des indemnités journalières sera portée par décret à 112 jours, comme pour les salariées.

Quant aux agricultrices, elles ne bénéficient pas d’indemnités journalières au titre de la maternité, mais peuvent bénéficier d’une allocation de remplacement visant à rémunérer l’emploi d’une personne pour les remplacer pendant la durée du congé de maternité afin de garantir la viabilité de l’exploitation. Cependant, 40 % des exploitantes ne bénéficient pas de cette allocation, soit parce qu’elles n’en font pas la demande, soit parce qu’elles ne trouvent pas de remplaçant. Elles ne reçoivent alors aucun revenu de remplacement alors qu’elles ont contribué au financement du risque maladie-maternité.

Le projet de loi instaure une indemnité journalière pour les exploitantes agricoles lorsqu’elles ne peuvent pas bénéficier de l’allocation de remplacement, l’allocation de remplacement demeurant le dispositif privilégié. Cette indemnité journalière sera forfaitaire, comme pour les travailleuses indépendantes.

Les exploitantes agricoles sont aujourd’hui redevables de la CSG et de la CRDS sur l’allocation de remplacement, ces contributions n’étant pas prélevées par précompte sur le salaire versé au remplaçant. Selon l’étude d’impact, des dispositions réglementaires seront prises pour appliquer le prélèvement sur l’allocation, qui sera majorée d’un montant équivalent.

Le coût de la mesure en faveur des exploitantes agricoles est évalué à 5 millions d’euros, dont 4 millions pour l’indemnité journalière forfaitaire et 1 million pour le précompte de CSG-CRDS au titre des revenus de remplacement de l’allocation de remplacement. Le coût de l’allongement de 74 à 112 jours de la durée de versement maximum des indemnités journalières des travailleuses indépendantes est évalué à 37 millions d’euros.

V.   Les mesures communes À l’ensemble des branches

A.   La revalorisation diffÉRENCIÉe des prestations sociales

Aux termes de l’article L. 161‑25 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de l’article 67 de la loi de finances pour 2016 ([73]), « la revalorisation annuelle des montants de prestations dont les dispositions renvoient au présent article est effectuée sur la base dun coefficient égal à lévolution de la moyenne annuelle des prix à la consommation, hors tabac, calculée sur les douze derniers indices mensuels de ces prix publiés par lInstitut national de la statistique et des études économiques lavant-dernier mois qui précède la date de revalorisation des prestations concernées.

« Si ce coefficient est inférieur à un, il est porté à cette valeur. »

L’article 44 du projet de loi de financement de la sécurité sociale déroge à la règle fixée à l’article L. 161‑25 du code de la sécurité sociale pour les années 2019 et 2020 en prévoyant une revalorisation déconnectée de l’inflation, à 0,3 % ([74]). Il prévoit toutefois un certain nombre d’exception à la dérogation.

Certaines prestations bénéficieront en outre de revalorisations exceptionnelles. C’est le cas notamment du minimum vieillesse ([75]), dont le montant pour une personne seule a été porté à 9 998,40 euros par an à compter du 1er avril 2018 et sera porté à 10 418,40 euros par an à compter du 1er janvier 2019 et à 10 838,40 euros par an à compter du 1er janvier 2020 (soit 903,20 euros par mois) ([76]), ce qui représente une augmentation de 30 euros par mois au 1er avril 2018, 35 euros par mois au 1er janvier 2019 et 35 euros par mois au 1er janvier 2020.

C’est également le cas de l’allocation aux adultes handicapés, dont le montant mensuel devrait être porté à 860 euros le 1er novembre 2018 et à 900 euros le 1er novembre 2019. Le projet de loi de finances prévoit en outre une revalorisation exceptionnelle de la prime d’activité.

Le tableau ci-après récapitule les prestations concernées par la revalorisation à 0,3 %, ainsi que celles pour lesquelles la règle de l’article L. 161‑25 du code de la sécurité sociale continuera à s’appliquer en 2019 et 2020.

Prestations revalorisées à 0,3 %

Prestations non concernées par la mesure

pensions d’invalidité

minimum vieillesse (ASPA et anciennes allocations)

indemnités en capital AT-MP

allocation de veuvage

rentes AT-MP et salaire minimum des rentes AT-MP (assiette minimale)

allocation supplémentaire d’invalidité (ASI)

prestation complémentaire pour recours à tierce personne et majoration pour tierce personne AT-MP

revenu de solidarité active (RSA)

prestations familiales

allocation pour demandeur d’asile

pensions de vieillesse de base (y compris des régimes dits intégrés)

allocation temporaire d’attente

retraite complémentaire du BTP

aide à la réinsertion familiale et sociale des anciens migrants (ARFS)

retraite de l’IRCANTEC sauf indication contraire du plan quadriennal

prestation transitoire de solidarité

allocation de congé-solidarité

plafond de ressources prises en compte pour l’attribution de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-c) et de l’aide au paiement d’une complémentaire santé (ACS)

pension majorée de référence des exploitants agricoles et seuil d’écrêtement

allocation de solidarité spécifique

retraite complémentaire des travailleurs indépendants (RCI)

 

régime additionnel de retraite (régime additionnel des enseignants du privé)

 

minimum contributif

 

minimum de réversion

 

plafond de ressources pour la majoration de pension de réversion

 

majoration de la pension de retraite pour conjoint à charge

 

majoration forfaitaire pour enfant à charge

 

majoration pour aide constante d’une tierce personne (MTP) et, par voie d’incidence :

– allocation personnalisée d’autonomie (APA) (plafond du plan d’aide et barème de participation financière laissée à la charge du bénéficiaire) ;

– allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP) ;

– prestation de compensation du handicap (PCH)

 

capital décès

 

allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (ACAATA)

 

fonds spécial des unions d’associations familiales visé au 1° du L. 211‑10 du code de l’action sociale et des familles

 

Source : annexe IX du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

 

L’effort sera en conséquence principalement supporté par :

– les pensions de retraite de droit propre et de droit dérivé des régimes de base et du régime complémentaire des indépendants, ainsi que leurs majorations (minimum contributif et minimum de réversion) ;

– les prestations familiales ;

– les prestations AT-MP (rentes, indemnités en capital, prestation complémentaire pour recours à tierce personne) ainsi que le salaire minimum des rentes, les pensions d’invalidité et la majoration pour tierce personne.

L’économie permise par cette mesure est estimée à 3,2 milliards d’euros en 2019, soit 2,4 milliards sur le champ des administrations de sécurité sociale (ASSO) (dont 1,5 milliard d’euros pour la branche vieillesse du régime général et 260 millions d’euros pour la branche famille) et 0,8 milliard pour l’État. L’économie serait de 6,4 milliards d’euros en 2020 et 2021.

Le rapporteur souligne que c’est cette économie qui permet à la CNAV de ne pas basculer à nouveau dans le déficit dès l’année 2019 alors que les effets des deux dernières réformes des retraites, qui ont permis de retarder les difficultés du régime et de financer les retraites actuelles, en allongeant la durée de travail et augmentant les cotisations pour de nombreux actifs, voient leurs effets prendre fin à partir de cette même année. Le Gouvernement a choisi entre trois possibilités pour préserver l’équilibre du régime de retraites :

– augmenter la durée de cotisation, ce qui a été fait par le Gouvernement Fillon et a pesé sur les générations au travail ;

– augmenter les cotisations salariales, ce qui a été fait avec le Gouvernement Ayrault et a encore pesé sur les générations au travail, occasionnant une baisse de pouvoir d’achat ;

– maîtriser les dépenses et le montant des pensions.

Avec les deux réformes précédentes, on remarquera que l’ensemble des leviers de maîtrise auront été actionnés. D’après le COR, le taux de cotisation moyen d’un salarié non cadre de la génération 2000 s’élèvera à 28,1 % contre 19,6 % pour un même salarié de la génération 1940.

impact financier de l’article 44 (moindre dÉpense)

(en milliards d’euros)

 

 

Champ

2019

2020

2021

2022

Ensemble des prestations

Total

3,2

6,1

6,4

6,4

 

État

0,8

1,5

1,5

1,5

 

ROBSS

2,4

4,6

4,9

4,9

Dont prestations revalorisées en janvier

 

Total

2,8

5,3

5,4

5,4

État

0,8

1,5

1,5

1,5

ROBSS

2,0

3,8

3,9

3,9

Prestations dinvalidité (Fonction publique et régimes équilibrés par l’État)

État

0,00

0,01

0,01

0,01

Rentes AT-MP (Fonction publique et régimes équilibrés par l’État)

État

0,01

0,01

0,01

0,01

Pensions de retraite

Total

2,8

5,2

5,4

5,4

ROBSS

2,0

3,8

3,9

3,9

État

0,8

1,4

1,5

1,5

Dont prestations revalorisées en avril

ROBSS

0,4

0,8

0,9

0,9

Prestations familiales

ROBSS

0,2

0,6

0,7

0,7

Allocations familiales

 

0,1

0,3

0,3

0,3

Complément familial et allocation de soutien familial

 

0,04

0,1

0,1

0,1

Prestation d’accueil du jeune enfant

 

0,1

0,2

0,2

0,2

Allocation d’éducation de l’enfant handicapé

 

0,01

0,02

0,03

0,03

Allocation de rentrée scolaire

 

0,01

0,03

0,05

0,05

Prestations dinvalidité

ROBSS

0,1

0,2

0,2

0,2

Rentes AT-MP

ROBSS

0,05

0,1

0,1

0,1

Source : annexe IX du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

L’article 65 du projet de loi de finances pour 2019 apporte parallèlement plusieurs dérogations aux règles de revalorisations de prestations sociales :

– l’aide personnalisée au logement (article L. 351‑3 du code de la construction et de l’habitation), l’allocation de logement familiale (article L. 542‑5 du code de la sécurité sociale) et l’allocation de logement sociale (article L. 831‑4 du code de la sécurité sociale) sont revalorisées en 2019 et 2020 de 0,3 %, et non selon l’indice de référence des loyers ;

– par dérogation au sixième alinéa de l’article L. 842‑3 du code de la sécurité sociale, le montant forfaitaire de la prime d’activité et le montant maximal de sa bonification principale ne seront pas revalorisés en fonction de l’inflation en 2019 et 2020. La prime d’activité, dont le montant forfaitaire a été revalorisé de 20 euros au 1er septembre 2018, fera cependant l’objet d’une revalorisation supérieure à la règle d’indexation par le biais de la création en 2019 d’une seconde bonification (article 82 du projet de loi de finances) dont le montant maximal (20 euros) sera revalorisé en 2020 et 2021. Pour les travailleurs rémunérés au SMIC, la hausse atteindra in fine 80 euros ;

– par dérogation au deuxième alinéa de l’article L. 821-3-1 du code de la sécurité sociale, le montant de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) ne fait pas l’objet de la revalorisation en fonction de l’inflation, mais fait l’objet d’une revalorisation supérieure, en passant à 860 euros au 1er novembre 2018 et à 900 euros au 1er novembre 2019.

B.   Le recouvrement des indus et la lutte contre la fraude

L’article 49 du PLFSS vise à améliorer le recouvrement des indus par les organismes de sécurité sociale. Pour le seul régime général, le stock d’indus restant à recouvrer à la clôture de l’exercice 2017 s’élève à 1,4 milliard d’euros pour la branche famille, 598,1 millions d’euros pour la branche maladie et 220,1 millions d’euros pour la branche vieillesse, soit un total de 2,2 milliards d’euros.

En l’état du droit, il existe un mécanisme de fongibilité du recouvrement des indus pour les prestations versées par les organismes débiteurs de prestations familiales, qui permet par exemple de récupérer un indu de prestation familiale sur un indu d’aide personnelle au logement. En revanche, aucune disposition ne permet de recouvrer l’indu constitué au titre d’une branche sur les prestations versées par une autre branche, ce qui fait que, lorsque les indus ne peuvent être recouvrés sur une prestation à échoir, le recouvrement forcé est la seule solution, ce qui peut mettre le débiteur dans une situation difficile. Or, s’il reçoit des prestations d’une autre branche, il serait possible d’éviter le recouvrement forcé en appliquant une retenue sur ces prestations, avec une adaptation du rythme de récupération à la situation financière de la personne. C’est cette fongibilité des indus que permet l’article 49. Dans le régime général, l’organisme de sécurité sociale auprès duquel l’indu a été généré pourra demander à un autre organisme de sécurité sociale versant des prestations à ce même débiteur d’assurer la gestion déléguée du recouvrement des montants indûment versés par retenue sur les prestations à échoir. Cette procédure sera mise en œuvre si l’allocataire ne conteste pas l’indu et ne choisit pas le remboursement en un seul versement.

Cet article renforce également les dispositifs permettant à l’assurance maladie de recouvrer les sommes dues par les organismes complémentaires dans le cadre de l’avance des frais pour les bénéficiaires de la CMU-C, en prévoyant une majoration de 10 % en cas de retard et permettant la délivrance d’une contrainte lorsque le recouvrement amiable s’avère impossible.

Enfin, pour les prestations versées par les organismes débiteurs de prestations familiales, en cas de fraude, le directeur de l’organisme liquidateur aura la possibilité de majorer la retenue mensuelle appliquée pour récupérer l’indu, cette majoration pouvant en outre être doublée en cas de réitération d’acte frauduleux au cours d’une période de cinq ans.

Selon l’étude d’impact, l’ensemble de ces mesures pourrait permettre une économie de 41 millions d’euros en 2019, pouvant aller jusqu’à 176 millions d’euros en 2021.

C.   La modernisation de la dÉlivrance des prestations sociales

Afin de limiter les erreurs dans les données prises en compte pour le calcul des prestations, notamment en cas de déclarations erronées des allocataires, l’article 50 prévoit la mise en place d’une déclaration sociale nominative permettant de récupérer, outre les ressources d’activité qui peuvent être appréhendées par les outils existants, les revenus de remplacement des personnes amenées à solliciter le bénéfice de prestations sociales.

Ces données seront utilisées par les organismes de la sphère sociale dans le cadre de leurs missions de délivrance des prestations, qu’il s’agisse de prestations de sécurité sociale ou versées pour le compte de tiers.

La mise en place de cette base constituera un levier pour moderniser le système de délivrance des prestations, gagner en efficience pour les organismes gestionnaires comme la Caisse nationale des allocations familiales, et limiter le nombre d’indus.

 

 


—  1  —

   EXAMEN en commission

Au cours de sa réunion du 17 octobre 2018, la commission examine, pour avis, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 (n° 1297).

M. Éric Alauzet, rapporteur pour avis. La commission des finances a vocation à étudier les comptes sociaux, sans se contenter, comme c’était le cas jusqu’en 1996, de l’analyse des seuls comptes de l’État, de manière à disposer d’une vision globale des comptes de la nation. Cette nécessité est renforcée par l’évolution, plus marquée encore au cours de cette législature qu’au cours des précédentes, de notre système de protection sociale vers un système plus universel, tant du point de vue des recettes que de celui des dépenses. J’en veux pour preuve le transfert des cotisations sociales salariales vers la contribution sociale généralisée (CSG), la participation de l’État à l’équilibre des comptes de l’UNEDIC ou encore l’utilisation d’une part de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) pour financer la sécurité sociale.

Je souhaite vous proposer dans cet exposé liminaire un état des lieux de la sécurité sociale, un panorama rapide de la protection sociale, des enjeux et des évolutions des comptes sociaux et, évidemment, des dispositifs inscrits dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2019.

Le fait majeur de ce PLFSS est le retour à l’équilibre de comptes sociaux et la fin des déficits – ce n’est quand même pas rien. Dès 2018, le régime général sera en excédent. Il faut remonter à l’année 2001 pour retrouver une telle situation. En 2019, c’est l’ensemble du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) qui sera en excédent de 700 millions d’euros.

Cette situation emporte une double conséquence. D’une part, l’échéance de 2024, date prévisionnelle du remboursement de la dette stockée à la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) depuis 1996 est désormais à portée de main. D’autre part, nous pouvons maintenant envisager l’apurement de la dette accumulée par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) depuis le dernier transfert de dette à la CADES. En 2019, les deux tiers de cette dette, soit 15 milliards d’euros, seront transférés à la CADES et remboursés grâce à une augmentation progressive d’une fraction de CSG. Cela ne couvrira pas l’ensemble de la dette de l’ACOSS ; le tiers résiduel sera progressivement couvert par les excédents des comptes sociaux.

Nous devons ce résultat à une bonne maîtrise de la dépense. Ainsi, en 2017, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM), fixé à 190,7 milliards d’euros, a été tenu pour la huitième année consécutive.

En conséquence, nous voyons poindre un nouveau débat avec l’extinction de la dette et de la CADES : que deviendront les ressources qui lui sont actuellement affectées, notamment la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) et une part de CSG ? Ce débat est déjà d’actualité, et nous en verrons les prémices lors de l’examen de certains amendements.

Plusieurs pistes s’ouvrent à nous, par exemple celle d’une diminution des prélèvements obligatoires – une part de CSG et la CRDS. Il faut cependant garder à l’esprit que si, en comptabilité nationale, les ressources de la CADES constituent bien des produits, le remboursement de la dette reste une opération purement financière, sans impact sur le déficit public. Autrement dit, si nous diminuons les prélèvements obligatoires en supprimant la CRDS et la part de CSG affectée à la CADES, nous dégraderons le déficit public quand bien même la dette sociale aurait été remboursée.

De même, l’affectation de ces prélèvements à une dépense, comme le financement de la dépendance ou à un fonds de pension public, reviendra encore à dégrader le déficit public.

Je résume : la suppression des recettes de la CADES ou l’affectation de ces recettes à une dépense contribuerait à creuser le déficit public, même si la dette sociale est remboursée.

Une troisième piste serait de consacrer tout ou partie de cette recette au remboursement de la dette pour l’accélérer. S’ouvre alors un débat sur les relations entre l’État et la sécurité sociale, dont nous allons avoir un avant-goût lorsque nous débattrons de certains allégements sociaux prévus par ce PLFSS.

Dans ce contexte de retour à l’équilibre des comptes sociaux et d’apurement de la dette sociale, les règles de compensation des pertes de recettes de la sécurité sociale par l’État devraient évoluer : une partie des pertes de recettes de la sécurité sociale ne sera pas compensée par l’État. Nous y reviendrons.

Je ne ferai qu’effleurer les mesures de ce PLFSS 2019 qui visent à la restauration de la compétitivité de nos entreprises, à la création d’emplois et à la valorisation du travail.

La transformation du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) en baisse de cotisations entraînera un cumul exceptionnel de plus de 20 milliards d’euros mobilisés en faveur des entreprises, de quoi patienter jusqu’à l’automne pour bénéficier de l’allégement de 3,5 milliards d’euros de cotisations chômage en année pleine autour du SMIC.

L’exonération de cotisations salariales sur les heures supplémentaires et complémentaires est une autre mesure majeure, qui accroît le pouvoir d’achat des salariés de 2 milliards d’euros en année pleine, avec un gain moyen de 200 euros par salarié environ.

Une autre mesure de pouvoir d’achat, de 350 millions d’euros, est destinée aux 350 000 retraités ou chômeurs qui flirtent avec le seuil au-dessus duquel s’applique la hausse de CSG.

Citons également la nouvelle augmentation de 20 euros par mois de la prime pour l’activité, pour les salaires jusqu’à 1,3 SMIC.

Le sujet précis des cotisations sociales des travailleurs occasionnels dans la viticulture et les cultures spécialisées a suscité des critiques dans tous les groupes politiques, avec la suppression annoncée de fameux dispositif « travailleurs occasionnels demandeurs d’emploi » (TODE). Je vous proposerai donc un amendement pour restaurer ce dispositif après que les rapporteurs de la commission des affaires sociales nous ont ouvert la voie hier après-midi.

J’en viens aux dépenses, en commençant par la branche maladie.

Si les dépenses de santé devaient évoluer comme leur évolution naturelle, en lien avec ces phénomènes massifs que vous connaissez, le vieillissement, le progrès technique et le poids croissant des maladies chroniques, non seulement nous n’aurions pas résorbé la dette sociale, mais, au contraire, elle serait aujourd’hui insupportable. Je remercie donc celles et ceux qui ont eu le courage d’entrer dans le cycle de la maîtrise des dépenses. Cependant, la préférence nationale en faveur de la santé reste fortement marquée puisque la progression de l’ONDAM, à 2,5 %, reste, cette année encore, largement supérieure au niveau de l’inflation. Elle correspond à une augmentation de 4,9 milliards d’euros de la dépense en matière de santé. Il est donc impératif d’adapter en permanence notre système de santé pour mieux articuler médecine de ville, médico-social et médecine hospitalière et pour veiller à la pertinence des actes. La prévision était de 2,3 % en loi de programmation des finances publiques, mais 400 millions d’euros supplémentaires sont libérés pour la transformation du système de santé et la modernisation de l’hôpital.

Parallèlement les mesures d’économies, par rapport au tendanciel de 4,5 %, s’élèvent à 3,8 milliards d’euros.

Dans le champ de la santé, il faut saluer des mesures de pouvoir d’achat au bénéfice de tous, et principalement des retraités, avec la mise en œuvre du « reste à charge zéro » en optique, audiologie et dentaire, ou encore le renforcement des dispositifs d’aide à la complémentaire santé, par l’extension de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) aux bénéficiaires de l’aide au paiement d’une complémentaire santé, moyennant une participation financière faible. Simplicité, lisibilité pour réduire le taux de non-recours : cette évolution est favorable à 1,4 million de personnes.

Concernant la branche vieillesse, le maintien de l’équilibre est permis par la mesure, dont je ne doute pas que nous reparlerons lors de l’examen des amendements, de revalorisation des pensions limitée à 0,3 %. Si l’on veut bien regarder l’ensemble de la période entre 2010 et 2020, ce sont les actifs qui auront principalement contribué à l’équilibre, d’abord en 2010 avec l’allongement des durées de cotisation et encore en 2014 avec l’augmentation des cotisations salariales. Cette fois, ce sont les retraités qui fournissent l’effort.

Pour mémoire, je vous rappelle l’augmentation du minimum vieillesse de 35 euros et de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) de 50 euros.

L’excédent de la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) devrait rester relativement stable entre 2019 et 2022, compris entre 1,1 et 1,3 milliard d’euros. Les excédents dégagés depuis 2013 ont permis à la branche de résorber son endettement, ses déficits ne faisant pas, à la différence de ceux des autres branches du régime général, l’objet de reprises par la CADES.

Enfin, la branche famille devrait renouer avec les excédents en 2018, après dix ans de déficits. L’excédent devrait s’élever à 1,2 milliard d’euros en 2019 du fait d’une progression des recettes plus dynamique que celle des dépenses. Il est atténué par plusieurs mesures destinées à adapter certaines prestations aux besoins des familles.

Le complément « mode de garde » sera ainsi majoré de 30 % pour les familles ayant un enfant en situation de handicap, afin de prendre en compte les coûts supplémentaires liés à ces situations et d’éviter à ces familles d’assumer un reste à charge supérieur à celui des autres parents. Le taux plein de ce complément sera maintenu jusqu’à l’entrée en école maternelle pour les enfants atteignant l’âge de trois ans entre le 1er janvier et la rentrée scolaire afin de faciliter l’emploi de parents isolés au cours d’une année scolaire.

Enfin, les congés maternité des travailleuses indépendantes et des exploitantes agricoles seront allongés pour faire converger les règles relatives aux différents régimes tout en respectant les contraintes particulières de chacun. Cette mesure, bénéfique pour la santé de la mère comme pour l’enfant, illustre une fois encore l’évolution de notre système de protection sociale vers l’universalité, comme pour l’indemnisation du chômage ou encore la retraite et la protection sociale du XXIe siècle.

J’invite donc la commission à émettre un avis favorable à ce projet de loi de financement, qui prévoit le retour à l’équilibre de la sécurité sociale pour la première fois depuis dix-huit ans.

M. le président Éric Woerth. Le retour à l’équilibre, fruit d’un travail de longue haleine, mené tout au long de ces dernières années, dans tous les domaines, est une bonne nouvelle.

En ce qui concerne la maîtrise de l’ONDAM, la part que prend l’inflation à la progression de celui-ci n’est pas si claire. En réalité, ce sont plutôt la démographie, la nature des pathologies et celle des soins prodigués qui l’emportent, plutôt que le seul facteur de l’inflation. Pendant longtemps encore, l’ONDAM progressera à un rythme un peu supérieur à l’inflation. Quant à raisonner en comparant une progression de 2,5 % à un tendanciel qui serait de 4,5 %, c’est très artificiel. Bien sûr, chaque gouvernement l’a fait, mais il me semble que le tendanciel retenu renvoie à une période de référence qui commence à dater et à ne plus correspondre à la réalité des dernières années, ce qui a pour effet de gonfler un peu artificiellement le montant des économies.

Vous avez évoqué, et pour la première fois sur un plan technique, un point important : il est vrai que, sur le plan purement maastrichtien, la réaffectation de la CRDS à une dépense est considérée comme une dépense et tendra à creuser le déficit, mais c’est également un prélèvement obligatoire : le rapport entre les prélèvements obligatoires et le produit intérieur brut (PIB) ne s’en trouve donc pas augmenté.

Il faudra choisir. Vous avez évoqué quatre possibilités, que j’avais également évoquées. Cela dépendra des priorités qui se feront jour, mais c’est extrêmement important. Un prélèvement obligatoire existe, que paient déjà les Français. Il y a donc un choix difficile à opérer.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je remercie notre rapporteur d’avoir cité ce qui a été fait pour les travailleurs occasionnels, notamment les saisonniers agricoles, hier en commission des affaires sociales, avec notre collègue Olivier Véran, et d’appeler à une mise en cohérence.

Plus généralement, une question se pose de plus en plus crûment dans ce pays : celle du travail saisonnier ou occasionnel. Les professions qui recourent à des contrats courts, souvent des contrats de travailleur indépendant de huit ou dix jours, souvent liés aux métiers sportifs, ne jouissent pas d’un encadrement adapté. Elles se retrouvent à devoir cotiser pour des périodes extrêmement longues, alors que les périodes de travail sont très courtes. Il faudra aborder le sujet, mais en séance publique.

Le travail devient de plus en plus saisonnier en France, où de plus en plus de gens cumulent des emplois, avec des casquettes différentes : salarié un jour, travailleur indépendant le lendemain, dans le cadre d’un autre type de contrat le surlendemain. Il faut faire très attention à ces travailleurs indépendants aux contrats très courts qui ne justifient en aucun cas de créer une structure particulière d’entreprise.

M. le président Éric Woerth. J’oubliais une remarque directement issue du rapport rendu par Christian Charpy et Julien Dubertret : l’État pourrait abandonner la règle à peu près établie de la compensation – quand l’État impose une règle qui affecte les finances de la sécurité sociale, il est tenu d’en compenser l’effet. On peut considérer que c’est très bien, que les excédents d’un côté doivent compenser les pertes de l’autre ; on peut aussi estimer que cela accroît la confusion entre ce qui est financé par le contribuable et ce qui est financé par l’assuré social. Au-delà, faisons attention à ne pas nous lancer dans une fuite en avant, au motif que cela va un peu mieux grâce à la masse salariale – sa croissance est de 3,5 % ; si nous redescendons à 1 %, cela changera la situation… Il faut vraiment mesurer à quoi nous nous engageons si nous décloisonnons complètement projet de loi de finances et projet de loi de financement de la sécurité sociale. Les parties des deux textes consacrées aux recettes devraient être examinées en même temps.

Mme Véronique Louwagie. Nous pouvons tous nous réjouir de ce retour à l’équilibre, pour la première fois depuis 2001, qui n’est pas sans raison : c’est grâce à des décisions prises au cours des années qui précèdent, l’instauration de l’ONDAM en 1996 ou la réforme des retraites en 2010, que cet équilibre est restauré.

Malheureusement, dans le même temps, il faut rappeler le très grand malaise qui traverse les établissements de santé. Leur personnel et l’ensemble de notre système de santé sont soumis à une très forte pression. Il ne faut pas non plus oublier la nécessité, rappelée par la Cour des comptes, de réformes structurelles, sans lesquelles les objectifs de maintien à l’équilibre de la sécurité sociale et de rééquilibrage de ses relations financières ne pourront être simultanément tenus – tout cela est fortement tributaire de la conjoncture économique.

Monsieur le rapporteur pour avis, vous avez établi un lien entre la maîtrise des dépenses et une revalorisation des retraites et des allocations familiales inférieures à l’inflation. Effectivement, cette sous-indexation rapporte, pour les deux années 2019 et 2020, près de 9,3 milliards d’euros, mais, très sincèrement, il ne me paraît pas du tout opportun de faire ainsi un lien entre cette décision, cette orientation et la notion de maîtrise des dépenses. C’est une mesure injuste : si elle permet de réaliser 9 milliards d’euros d’économies, les grands perdants sont les familles et les retraités. On ne saurait la considérer comme une action de maîtrise structurelle de la dépense.

Pour ce qui est de la compétitivité des entreprises, nous ne pouvons pas parler d’une amélioration de 20 milliards d’euros en 2019. La transformation du CICE en exonérations de charges sociales ne permet pas comptablement aux entreprises d’avoir 20 milliards d’euros de plus en 2019, c’est totalement faux. Certes, il y a un décaissement et un effet de trésorerie, dans les comptes de l’État, induit par la transformation du CICE en exonération de charges sociales, à hauteur de 40 milliards d’euros. Mais, au niveau des entreprises, il y avait le CICE, pour 20 milliards d’euros en 2018, et il y a une exonération des charges patronales de 20 milliards d’euros en 2019… Vous ne pouvez laisser entendre qu’il y aurait un effort supplémentaire d’amélioration de la compétitivité des entreprises de 20 milliards d’euros en 2019, c’est absolument faux.

Enfin, je regrette que cette mesure en faveur du pouvoir d’achat qu’est l’exonération de charges sociales sur les heures supplémentaires ait été différée. Je regrette également l’absence de défiscalisation des heures supplémentaires.

Mme Sarah El Haïry. Le groupe du Mouvement Démocrate et apparentés se réjouit du retour à l’équilibre. Il faut poursuivre les efforts pour le préserver ; c’est essentiel. Se pose évidemment pour nous la question de la politique familiale, qui est dans l’ADN de notre mouvement.

Nous nous félicitons du rééquilibrage des seuils de la CSG au profit des foyers les plus modestes : l’alerte avait été donnée l’an dernier.

Pour ce qui est de l’ONDAM, l’alignement de sa progression sur l’inflation n’est pas l’alpha et l’oméga de la démarche à suivre. Il faut surtout garder la volonté de maîtrise, de contention, allais-je dire, des dépenses.

M. Boris Vallaud. Je vous remercie d’accorder quelques minutes l’asile à un membre de la commission des affaires sociales afin qu’il exprime la position du groupe Socialistes et apparentés.

J’entends chacun se féliciter d’un retour à l’équilibre des comptes sociaux. C’est le fruit d’un effort ancien demandé aux assurés sociaux, aux personnels soignants, aux personnels des hôpitaux et des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD).

Les comptes sociaux reviennent à l’excédent sous l’effet de mesures d’économies qui, dans ce PLFSS, pèsent sur les familles, les retraités, les malades et les soignants, tandis que la baisse des impôts des plus aisés siphonne, par ailleurs, les excédents. Le pire, c’est que malgré les excédents, le Gouvernement continue de demander des efforts aux familles avec la sous-indexation des allocations familiales ou des pensions. Mesurez bien que la sous‑indexation des allocations familiales, pour un couple au SMIC avec trois enfants, représente une perte de 130 euros par an. Autrement dit, la « désocialisation » des heures supplémentaires permettra à beaucoup de familles de travailler plus, mais pour gagner autant !

L’absence – c’est une première – de compensation intégrale des mesures d’exonération de cotisations sociales et le siphonage des excédents compromettent un certain nombre de financements nécessaires pour répondre à des besoins sociaux. Je pense aux crèches, aux hôpitaux, aux maisons de retraites et au plan pauvreté.

Quant à l’ONDAM, sa progression paraît facilement plus favorable, mais en réalité, compte tenu de l’inflation plus forte que les années passées, l’effort demandé aux hôpitaux continue d’être considérable.

M. Romain Grau. Je remercie notre rapporteur pour avis, qui a dit l’essentiel.

Tous ceux qui se sont exprimés avant moi ont expliqué que le retour à l’équilibre n’avait rien d’exceptionnel. Mais, tout de même, dix-huit ans sans équilibre des comptes sociaux, quel dommage que personne n’y soit parvenu avant nous ! Cela tient sûrement à des efforts antérieurs, de longue haleine, nous n’en doutons pas un instant, mais reconnaissez‑nous au moins, le mérite de garder le pied sur la charrue et de persévérer.

Mme Véronique Louwagie a évoqué la compétitivité des entreprises. Oui, 20 milliards d’euros du CICE sont remplacés par des baisses de charges. Vous nous dites, chère collègue, que cela n’a pas d’effet sur la compétitivité. Mais cette transformation du CICE en baisse de charges est une garantie en termes de pérennité, de visibilité, de certitude. En soi, c’est déjà une bonne nouvelle pour la compétitivité et le tissu entrepreneurial.

Ensuite, le 1er septembre prochain, la désocialisation des heures supplémentaires donnera la priorité au travail. C’est d’ailleurs notre priorité depuis le début de la législature : remettre le pays au travail pour relever l’économie. C’est donc tout à fait cohérent.

Enfin, la baisse, le 1er octobre, des charges sociales pour les salariés autour du SMIC améliorera la compétitivité des entreprises, et cette baisse du coût du travail permet d’espérer le retour à l’emploi d’un grand nombre de personnes.

Il faut se féliciter de ce retour à l’équilibre. Notre pays néglige parfois les bonnes nouvelles, et c’en est une. Il ne faut cependant pas commencer à vouloir dépenser l’argent que nous n’avons pas – j’entends parler de baisse de la CRDS. Remboursons d’abord les dettes que nous ont léguées tant d’années d’errance et d’errements, soyons persévérants, réduisons le niveau de dette hallucinant qu’on nous a laissé en 2017 et redonnons un peu de compétitivité pour remettre le pays au travail.

M. Éric Coquerel. Eh bien, moi, je ne suis pas satisfait de ce PLFSS. En réalité, vous mettez encore un peu plus en péril le service public de la santé. Votre retour à l’équilibre est un peu paradoxal ; qui plus est, vous mettez en danger la sécurité sociale elle-même.

Ce sont encore 3,8 milliards d’euros d’économies qui sont réalisés dans le champ de l’assurance maladie : compression des coûts pour les hôpitaux, poursuite de la traque des patients, culpabilisation des arrêts de travail, etc. Évidemment, on peut parvenir ainsi à tous les équilibres, mais on poursuit le travail de casse, notamment dans les hôpitaux.

Les retraités et les familles sont sous pression avec la désindexation de l’inflation des pensions de retraite, allocations familiales et aides personnalisées au logement (APL). Les prestations ne progresseront que de 0,3 % alors que l’inflation est de 1,7 %. Certes, on peut ainsi trouver un équilibre à bon compte, mais ce sont évidemment les retraités et les familles qui en paieront le prix.

Je remarque quelques coups de pouce, très limités : ce ne seraient maintenant plus 100 000 retraités qui bénéficieraient de la mesure de lissage de la CSG, mais 300 000, et 125 millions d’euros seraient alloués aux EHPAD. Mais on est bien loin des besoins.

Le plus gros problème, qui annonce en réalité la fiscalisation de la sécurité sociale, ce sont toutes les exonérations que vous accordez sans les compenser, entre la désocialisation des heures supplémentaires et la transformation du CICE en exonération. À l’arrivée, bien évidemment, on nous expliquera qu’il n’y a plus assez d’argent pour les comptes sociaux et qu’il faut donc changer de système, passer à un système fiscalisé. C’est à peu près votre projet, tout l’inverse de celui de la sécurité sociale, héritée du Conseil national de la résistance.

Autant vous dire que ce PLFSS ne convient pas au groupe La France insoumise.

M. Jean-Paul Dufrègne. Tout le monde se félicite du retour à l’équilibre des comptes, mais un équilibre à quel prix ?

Comme d’autres, je mentionnerai le CICE et ces exonérations et allégements de 20 milliards d’euros – deux fois au cours de l’année, – et certaines exonérations ne sont plus compensées. Pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine, c’est aussi un avant-goût de la fusion que vous voulez entre PLF et PLFSS. Malheureusement, l’hôpital devra encore faire des efforts : 900 millions d’euros ! Quand on connaît la situation des hôpitaux, comment peut-on encore oser demander au personnel sous pression dans les hôpitaux de faire encore des efforts ? Sans doute est-ce un problème d’organisation, puisque, présentant le plan santé, le Président de la République soutenait que ce n’était pas un problème de sous-financement, mais un « handicap d’organisation ». Cela ne nous rassure d’ailleurs absolument pas, dans la perspective de la réorganisation dans les territoires avec les hôpitaux dits de proximité : un certain nombre de services seront totalement asséchés.

C’est un budget au service de la baisse du coût du travail qui ne répond pas aux besoins réels de la population : la progression de l’ONDAM est fixée à 2,5 %, alors que la progression naturelle des dépenses de santé s’élève à 4,5 %, ce qui, avec une médecine de plus en plus performante, qui requiert de plus en plus de moyens, n’a rien de scandaleux.

C’est pour nous aussi un budget qui ne va vraiment pas dans le bon sens.

M. Charles de Courson. Mes chers collègues, on ne peut que se féliciter du retour à l’équilibre, encore très fragile, fruit notamment de réformes qui remontent parfois à sept ou huit ans.

Monsieur le rapporteur pour avis, avez-vous eu le temps d’examiner les effets économiques de la transformation du CICE en exonération de charges ? Le taux baisse d’un point, parce que le champ s’élargit. Avez-vous pu, monsieur le rapporteur, mesurer l’effet par branche, par nature économique ? Et avez-vous pu voir quel était l’effet sur la majoration de l’impôt sur les sociétés (IS) ? Quand vous transformez ce qui était un crédit d’impôt en exonération de charges, vous augmentez le bénéfice comptable des entreprises, et donc les bénéfices. Il me semble que ce devrait être de l’ordre de 3 milliards d’euros. Ce n’est pas tout à fait neutre.

Ensuite, quelle est votre position sur l’abandon du principe de compensation intégrale d’exonération ? Pendant plus de dix ans, tous les gouvernements, quelle que soit leur tendance l’avaient respecté. Tout ou presque était compensé, à 100 ou 200 millions d’euros près, ce qui était vraiment négligeable par rapport aux masses en jeu. Voici qu’on abandonne ce principe, et on ne sait jamais jusqu’où les choses vont lorsqu’on abandonne des règles de discipline.

Quant à la branche vieillesse, nous voyons bien que le retour à l’équilibre est lié au fait que l’augmentation des retraites n’est que de 0,3 % alors que l’inflation prévisionnelle est de 1,3 %. Autrement dit, on fait baisser le pouvoir d’achat d’un point en 2019 et 2020. Tout cela parce qu’on n’a pas poursuivi la réforme dite « Fillon ». La sagesse était de continuer de relever d’un trimestre par an l’âge de départ à la retraite, ce qui rapportait à peu près 2 milliards d’euros, soit l’équivalent de la perte de pouvoir d’achat. On a donc préféré baisser le pouvoir d’achat des retraités plutôt que de continuer une politique de réformes courageuses – personne n’est revenu sur la réforme Fillon, pas même ceux qui l’avaient combattu. Quelle est donc votre position, monsieur le rapporteur ? Nous n’allons pas, pendant quatre ans, continuer de faire perdre entre 1 et 1,3 point de pouvoir d’achat aux retraités, parfois très modestes. Indépendamment du minimum vieillesse, des mesures particulières sont-elles prévues pour les petites retraites ?

Enfin, pourriez-vous nous éclairer sur le montant des déficits de fonctionnement des hôpitaux publics et l’augmentation de leur dette ?

Mme Marie-Christine Dalloz. Certaines formulations me paraissent relever de la provocation. L’intitulé du titre III, par exemple, « Moduler et adapter les prestations aux besoins », ne signifie rien d’autre que la sous-indexation des retraites. Les retraités n’ont-ils pas besoin que leurs retraites soient indexées sur l’évolution des prix ? Je rappelle qu’entre 2019 – qui n’est pas une année pleine – et 2020, ils vont perdre 9 milliards d’euros de pouvoir d’achat. Si l’on y ajoute les 260 millions d’euros que perdent les familles en 2019, on comprend bien quelles sont les catégories perdantes de ce PLFSS pour 2019.

En second lieu, je voudrais, comme le rapporteur général, insister sur le travail saisonnier, auquel le recours est indispensable sur certains de nos territoires. Les besoins de saisonnalité doivent être pris en compte, et le PLFSS ne doit pas fragiliser les équilibres existants.

Ensuite, tout le monde se félicite du retour à l’équilibre, mais remercions-en la réforme des retraites adoptée en 2010, sans laquelle nous n’aurions pas aujourd’hui une branche vieillesse excédentaire, qui va permettre de compenser le déficit de l’État et de ramener le déficit public à 2,8 % du PIB. Enfin, je crains que le « reste à charge zéro » mette à mal certaines de nos filières, comme la lunetterie, avec le risque de voir des produits d’importation de très mauvaise qualité, bas de gamme, concurrencer nos lunettes françaises, d’excellente qualité.

M. Fabrice Le Vigoureux. Véronique Louwagie a insisté sur le fait que la transformation du CICE en exonérations de charges n’avait aucun effet sur le résultat comptable des entreprises, ce qui est exact. Néanmoins, on peut considérer que cela a un effet sur la compétitivité, dans la mesure où il s’agit d’un dispositif pérenne, ce qui explique d’ailleurs que les entreprises demandaient depuis plusieurs années cette baisse des charges.

Par ailleurs, cette transformation représente 20 milliards d’euros supplémentaires dans la trésorerie des entreprises, et donc une amélioration de leur fonds de roulement, ce qui peut accélérer certains projets d’investissement. En cela, on peut considérer qu’il s’agit d’une mesure en faveur de la compétitivité.

M. Patrick Hetzel. L’article 43 et l’article 32 du PLFSS prévoient la possibilité de recourir à ce qu’on appelle des médicaments dits « hybrides », ce qui correspond à une évolution assez majeure du droit de substitution et ce, sans que ni les professionnels de santé, ni les associations de patients, ni les industriels n’aient été consultés.

Alors qu’il existait déjà un débat autour des médicaments génériques, aucune étude de biodisponibilité n’a encore démontré scientifiquement la bioéquivalence des médicaments dits « hybrides » par rapport au médicament princeps. Je suis assez effaré de constater qu’on profite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour franchir ce pas, en décidant de pénaliser le patient qui refuserait ces « hybrides ». J’alerte donc la commission des finances sur le fait que le Gouvernement joue ici les apprentis sorciers.

Mme Christine Pires Beaune. Ce PLFSS remet en cause le principe qui était en vigueur jusqu’à présent et selon lequel, lorsqu’une cotisation sociale était réduite ou supprimée, l’État la compensait à la sécurité sociale par de la TVA ou de la CSG. Nous ne voulons pas de la nouvelle doctrine mise en place, car elle met en danger notre système de sécurité sociale. Notre proposition est donc simple : pourquoi ne pas affecter tout de suite l’excédent ou les futurs excédents à la réforme annoncée par la ministre de la santé elle‑même, autrement dit au cinquième risque ?

M. Michel Lauzzana. Alors qu’on se lamente depuis des années sur l’hôpital, il y a tout lieu de se réjouir de ce PLFSS, qui concrétise certains engagements du plan Santé. Il tourne le dos à l’hôpital du XXe siècle sur la défense duquel s’arc-boutent ceux qui se lamentent, pour proposer une nouvelle vision adaptée à la médecine moderne.

On sait que toutes les évolutions de cette médecine ne pourront s’accomplir à proximité de tous les Français, et c’est la raison pour laquelle le plan Santé propose une cartographie rationalisée des hôpitaux, organisant les établissements de proximité et les établissements plus performants ou spécialisés.

On ne peut que se réjouir de ce véritable changement de paradigme, là où on avait l’habitude de procéder en empilant les mesures et l’argent, sans s’attaquer aux questions de structure. En réorganisant notamment les liens entre hôpital et médecine de ville, on peut considérablement améliorer notre système de soins.

Enfin, je me réjouis également des dispositions concernant les autorisations temporaires d’utilisation. C’est une demande que les associations de patients et les familles, celles notamment dont les enfants sont atteints d’un cancer, attendaient depuis longtemps. C’est un pas supplémentaire vers la médecine du XXIe siècle.

M. le rapporteur pour avis. Je voulais d’abord pointer une petite incohérence dans vos propos, monsieur le président. Vous affirmez qu’il n’est pas pertinent de se référer à l’inflation pour parler de l’ONDAM, compte tenu notamment de critères comme le vieillissement de la population, et qu’il ira bien au-delà de 2,5 % – chiffre qui témoigne cependant, selon moi, de ce que nous consacrons les moyens nécessaires à la santé –, tout en nous expliquant que se fonder sur un tendanciel à 4,5 % pour mesurer les économies revient à reprendre des références dépassées. C’est quelque peu contradictoire, mais l’essentiel est que nous engageons un effort très sensible par rapport à la progression tendancielle de l’ONDAM.

Pour ce qui concerne l’hôpital, sur lequel m’ont interrogé Véronique Louwagie, Éric Coquerel ou Boris Vallaud, épargnons-nous le manichéisme. J’ai largement développé dans mon rapport la question de la qualité de vie au travail et, partant, celle de la qualité des soins, puisque l’on sait combien la relation entre les soignants et les patients influe sur la qualité des soins. J’ai auditionné beaucoup d’aides-soignantes, d’infirmières, de directeurs d’établissements hospitaliers ou médico-sociaux pour approfondir cette question, et je considère qu’il n’est pas incompatible de dire qu’il y a, à l’hôpital, à la fois des problèmes d’organisation et des problèmes de ressources humaines, qu’il faut traiter les uns comme les autres.

En ce qui concerne en particulier les aides-soignantes, il y a un vrai problème d’attractivité de la profession, au point que les chefs d’établissement ont souvent du mal à recruter en CDI. En revanche, on trouve très facilement des aides-soignantes en intérim, car les contrats courts sont en effet pour elles une manière d’améliorer leur rémunération et de bénéficier d’une forme de flexibilité choisie. Quoi qu’il en soit, cette pénurie est l’une des raisons pour lesquelles la ministre a consenti des efforts importants pour les EHPAD, même s’il faudrait le faire encore davantage. J’ajoute enfin que la situation varie énormément selon les établissements, voire selon les services au sein d’un même établissement. Cela doit donc nous inciter à éviter les généralisations.

En ce qui concerne les retraités, Madame Louwagie, je veux bien qu’on continue à nous accuser de leur demander trop d’efforts, mais ça ne me semble pas à la hauteur du débat. Prenez un peu de hauteur et embrassez dans votre raisonnement les deux réformes précédentes, celle de 2010 et de 2014. Je rends à César ce qui est à César, et veux bien admettre que ce sont notamment les efforts décidés alors qui ont permis le retour à l’équilibre. Mais convenez que ces réformes ont pesé essentiellement sur les actifs. Je veux bien qu’on continue à tout demander aux actifs, qui ne savent d’ailleurs pas très bien où ils en seront dans vingt ou trente ans, et qu’on soit aux petits soins pour nos retraités, mais je rappelle que certains d’entre eux sont quand même dans des situations très confortables. Pour d’autres, c’est en effet difficile, et il ne faut pas mettre tout le monde dans le même panier, mais je trouve grossier de résumer notre politique comme vous le faites : il est vrai que, dans l’attente de la réforme structurelle à venir, nous sommes obligés de leur demander un effort supplémentaire, car le déficit va de nouveau se creuser en 2020 et 2021. Il s’agit de prendre des mesures d’urgence pour colmater les brèches. Et durant les dix années passées, ce sont les actifs qui ont supporté l’essentiel des réformes des retraites.

Pour agir sur le régime des retraites, on dispose de trois leviers : l’augmentation de la durée de cotisation, l’augmentation des cotisations, la maîtrise des dépenses et donc des pensions. En dix ans, nous aurons eu recours aux trois, et il est normal que chacun contribue à son tour.

Enfin, si on va jusqu’au bout de votre raisonnement sur le CICE, on peut considérer que les baisses de charge auraient dû être affectées sur l’année 2013, puisqu’il y a un décalage d’un an, voire de deux ou trois ans dans certains cas – ce que vous ne dites pas ; les baisses de charges ayant commencé en 2014, il est tout à fait logique que nous prenions cette année en considération à la fois le crédit d’impôt de 2018, qui s’applique en 2019, et la baisse des cotisations sociales. Nous aurions tout aussi bien pu n’enclencher cette baisse qu’à partir de 2020 et nous aurions eu 20 milliards de charges en moins pour les entreprises en 2019 et 20 milliards en moins en 2020. Nous avons préféré donner en 2019 un coup de pouce extrêmement important aux entreprises, et je pense qu’elles sauront en profiter.

J’en profite pour confirmer à Charles de Courson qu’en effet la transformation du CICE en abaissement de charges aura un effet sur l’IS, de l’ordre de 3 à 5 milliards d’euros, mais il ne faut pas oublier que la baisse générale des cotisations chômage autour du SMIC représentera un gain du même ordre.

M. Charles de Courson. Oui, mais en année pleine, pas en 2019.

M. le rapporteur pour avis. D’accord, mais reconnaissez que cette année se cumulent les 20 milliards au titre du CICE et les 20 milliards de baisse des cotisations sociales, à tout le moins 15 milliards si l’on prend en compte l’augmentation de l’IS. Ces 35 milliards doivent permettre aux entreprises d’encaisser le report à l’automne de la baisse des cotisations chômage.

Mme El Haïry, le rééquilibrage des seuils de la CSG concerne essentiellement des retraités, ainsi que quelques chômeurs. Après avoir annoncé que cela concernerait 100 000 foyers fiscaux, le Gouvernement a finalement consenti un effort de 350 millions d’euros pour 330 000 retraités, afin surtout de ne pas pénaliser fiscalement les revenus accidentels.

Monsieur Vallaud, la question des relations entre l’État et la sécurité sociale est un vaste sujet politique. Si la commission des finances se penche sur le PLFSS, c’est que nous considérons qu’il est de notre devoir de regarder l’ensemble des comptes de la nation, ceux de l’État, des collectivités territoriales et de la sécurité sociale, tout simplement parce qu’il existe des passerelles entre ces différents budgets. Ainsi, par la TVA, l’État finance la sécurité sociale. Il n’y a donc pas d’étanchéité. Même si cela n’a pas toujours été le cas, l’État a beaucoup fait depuis quelques années pour améliorer l’équilibre des comptes sociaux, et il est donc normal, dans une période où l’État consent beaucoup d’efforts financiers pour endiguer le chômage, ce qui profite non seulement à nos concitoyens mais aussi aux régimes de protection sociale, d’envisager une forme de retour des organismes sociaux vers l’État. Le débat mérite en tout cas d’avoir lieu. Je ne parlerai en aucun cas d’un siphonage des comptes sociaux, mais plutôt d’une vision solidaire des comptes de la nation.

Monsieur Coquerel, bien sûr qu’il y a des gens pauvres dans notre pays : c’est précisément pour cela que le Gouvernement a lancé son plan Pauvreté. Il n’y a pas de privilège à connaître des gens pauvres : nous en connaissons malheureusement tous. C’est aussi la raison pour laquelle vont bénéficier de l’allégement, voire de la suppression de la taxe d’habitation, les ménages jusqu’au quatrième décile, c’est-à-dire des ménages qui ne sont pas riches. Je vous invite donc à établir vos analyses plus objectivement, à partir de l’ensemble des dispositifs mis en place.

En ce qui concerne la hausse de la CSG qui sera compensée, cela concerne bien 300 000 retraités et chômeurs au lieu de 100 000, et non l’inverse : sans doute votre langue a‑t-elle fourché.

Monsieur Dufrègne, vous dites que la baisse du coût du travail n’est pas une demande des Français. En effet, ce que demandent les Français, c’est qu’il y ait moins de chômage et plus d’emplois… ce qui s’obtient en baissant le coût du travail. Donc c’est bien pour eux que nous agissons comme nous le faisons.

Monsieur de Courson, vous avez posé plusieurs questions très précises, comme toujours. Je ne peux vous répondre sur les effets, secteur par secteur, de l’élargissement de l’assiette, mais il existe différentes études sur le sujet, notamment celles de l’Institut des politiques publiques, qui devraient en grande partie satisfaire à vos interrogations. Il est clair en tout cas que les grands bénéficiaires de cette transformation seront les établissements du secteur associatif et les établissements de santé. Nous avons fait le choix, comme les majorités précédentes, de privilégier le court terme et l’emploi, plutôt que, dans une perspective à plus long terme, les emplois à haute rémunération ; on peut le regretter, mais c’est ainsi.

Vous avez également évoqué les petites retraites. Il est vrai que les mesures que nous prenons vont peser sur les retraites dans les deux prochaines années. C’est ennuyeux pour les petites retraites, mais je veux croire que la solidarité est possible entre les générations – j’en veux pour preuve, je le répète, le fait que, ces dix dernières années, toutes les catégories d’âge ont contribué à l’équilibre des régimes de retraite. Il me semble par ailleurs qu’il est dangereux pour la démocratie de chercher à défendre à l’extrême telle ou telle frange de la population dans l’espoir d’en tirer un bénéfice électoral. Cela ne peut que favoriser les extrêmes.

Madame Dalloz, l’augmentation de 0,3 % des retraites est une mesure visant à préserver l’équilibre du régime de retraite et non à redresser les comptes de l’État. Le régime de retraite alimenté très majoritairement par les cotisations et ne sert qu’aux retraites. C’est un système étanche, ce qui nous oblige à cette sous-indexation, avant d’envisager une réforme plus structurelle.

Sur la question des travailleurs occasionnels, je crois que nous sommes en passe d’aboutir, grâce notamment aux amendements qui ont été déposés par l’ensemble des groupes.

Monsieur de Courson, la dette cumulée des hôpitaux se monte à 30 milliards d’euros, ce qui est un chiffre stable.

M. le président Éric Woerth. Le déficit annuel s’élève à 1 milliard par an environ, me semble-t-il.

M. le rapporteur pour avis. Il était précisément de 835 millions d’euros en 2017, ce qui est un chiffre en augmentation.

M. le président Éric Woerth. Mais où se trouve ce déficit annuel dans la loi de financement de la sécurité sociale ?

M. le rapporteur pour avis. Ce n’est pas très clair à mes yeux, et je crois utile de reposer la question pour obtenir une réponse qui puisse nous éclairer.

Mme Véronique Louwagie. Disposez-vous du montant cumulé des charges sociales qui n’ont pas été payées par les hôpitaux ? Certains établissements n’acquittent plus leurs charges sociales et accumulent des retards qui, dans certains cas, peuvent aller jusqu’à vingt‑quatre mois, ce qui est problématique pour les salariés et les agents qui partent en retraite.

M. le rapporteur pour avis. C’est en effet une vraie question, mais qui relève davantage de la commission des affaires sociales.

 

La commission en vient à lexamen pour avis des articles du projet de loi.

PREMIÈRE PARTIE :
Dispositions relatives à lexercice 2017

Article 1er : Approbation des tableaux déquilibre relatifs à lexercice 2017

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 1er sans modification.

 

Article 2 : Approbation du rapport annexé sur le tableau patrimonial et la couverture des déficits de lexercice 2017 (annexe A)

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 2 sans modification.

Puis elle émet un avis favorable à ladoption de la première partie sans modification.

DEUXIÈME PARTIE :
Dispositions relatives à lexercice 2017

Article 3 : Rectification des dotations 2018 de la branche maladie

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 1er sans modification.

 

Article 4 : Suppression du Fonds de financement de linnovation pharmaceutique

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 1er sans modification.

Article 5 : Rectification des prévisions et objectifs relatifs à 2018

La commission est saisie de lamendement CF22 de Mme Valérie Rabault.

Mme Christine Pires Beaune. Aujourd’hui, les employeurs qui sont redevables de taxes sur les salaires bénéficient d’un crédit d’impôt, lequel était compensé dans sa totalité à la sécurité sociale. Nous souhaitons qu’il en reste ainsi.

M. le rapporteur pour avis. Nous voici d’entrée de jeu dans le débat sur la non‑compensation. Le chômage a légèrement diminué et l’État a, ces dernières années, consenti beaucoup d’efforts financiers, ce qui a contribué à son endettement ou, en tout cas, à un ralentissement de l’apurement de la dette. Cela explique aussi que l’État n’a pas toujours tenu ses engagements en termes de baisse de la dépense publique.

Dans ce contexte, qui se traduit par un supplément de recettes pour les caisses de sécurité sociale, il n’est pas totalement aberrant qu’une partie de ces recettes supplémentaires revienne à l’État et que les allégements ne soient pas systématiquement compensés. Toute la question est ensuite de savoir où on place le curseur. Avis défavorable.

M. Gilles Carrez. Je crois me souvenir qu’il avait été décidé, dès 2017, que le crédit d’impôt sur la taxe sur les salaires mis en place pour les structures, comme les associations, qui ne bénéficiaient pas du CICE ne serait pas compensé à la sécurité sociale. Il faudrait que Mme Pires Beaune vérifie ce point.

M. le rapporteur pour avis. La compensation a été décidée en 1994, puis confirmée par la loi organique de 2005. L’article 24 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 a ensuite prévu des dérogations expresses pour les cotisations familiales, la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) et les mesures prévues pour la croissance. La non‑compensation n’est donc pas une nouveauté – je le rappelle à mes collègues qui siégeaient dans la majorité sous la précédente législature.

M. le président Éric Woerth. Ce principe était tout de même assez bien ancré, même s’il souffrait en effet un certain nombre d’exceptions, qui d’ailleurs faisaient débat ; mais il semble que vous alliez plus loin en abolissant ce principe.

M. Charles de Courson. Quelle somme ce crédit d’impôt qui n’est plus compensé représente-t-il ?

M. le rapporteur pour avis. 600 millions d’euros.

Mme Christine Pires Beaune. Puisque les dérogations sont possibles, nous n’avons pas à institutionnaliser cette non-compensation. Il ne s’agit pas de défendre à tout prix l’étanchéité des tuyaux mais, alors que la ministre vient de lancer la concertation sur le grand âge et l’autonomie et que l’on sait que les hôpitaux et les EHPAD, dans le cadre de la gestion du cinquième risque, vont avoir besoin de milliards d’euros, il serait sage de mettre les excédents de côté, en prévision de ces investissements. C’est le sens de notre amendement CF22.

M. le rapporteur pour avis. La non-compensation concerne des éléments précis, elle n’est pas érigée en principe général. En l’espèce, elle porte en 2019 sur plusieurs dispositifs, dont les heures supplémentaires, les 350 millions d’euros destinés aux retraités et la suppression du forfait social.

M. le président Éric Woerth. À un tel niveau, on peut parler de principe général.

M. Jean-Louis Bourlanges. J’entends le rapporteur, qui explique aux socialistes l’accusant de ne pas respecter un principe établi que celui-ci a déjà été rompu ; le péché ayant été commis, on peut donc continuer. Certes, mais les trois mesures qui sont en cause sont néanmoins suffisamment importantes pour qu’on s’interroge sur le maintien ou non du principe de compensation intégrale. C’est un problème de doctrine qu’il faut clarifier, même si je comprends les choix qui sont faits aujourd’hui et si personne ne peut se prévaloir d’avoir eu en l’espèce un comportement parfaitement vertueux.

M. le rapporteur pour avis. Je suis d’accord pour avoir ce débat, dont les enjeux seront encore plus cruciaux à partir de 2024.

La commission rejette lamendement.

Puis elle émet un avis favorable à ladoption de larticle 5 sans modification.

 

Article 6 : Rectification de lONDAM et des sous-ONDAM pour 2018

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 6 sans modification.

 

Puis elle émet un avis favorable à ladoption de la deuxième partie sans modification.

 

TROISIÈME PARTIE :
Dispositions relatives aux recettes et à léquilibre de la sécurité sociale
pour lexercice 2019

TITRE IER
Dispositions relatives aux recettes, au recouvrement et à la trésorerie

Chapitre Ier
Mesures en faveur du soutien à l’activité économique et des actifs

Article 7 : Exonération de cotisations sociales salariales sur le recours aux heures supplémentaires et complémentaires

La commission examine lamendement CF81 de M. Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel. L’exonération de cotisations sociales sur les heures supplémentaires me paraît délétère pour deux raisons. Pour commencer, ne tournons pas autour du pot : le véritable problème dans notre pays, c’est que les salaires en tant que tels sont insuffisants, notamment par rapport à la richesse nationale et aux revenus du capital. Vouloir y remédier par des contournements, en augmentant le salaire net par le biais d’exemptions de cotisations sociales, qui ne sont rien d’autres que des soustractions aux salaires socialisés que nous mettons en commun, ce n’est pas la solution.

En second lieu, en rendant toujours plus avantageuses les heures supplémentaires, à défaut de mieux payer les gens pour la durée légale de leur travail, vous incitez en réalité les chefs d’entreprise à utiliser ces heures supplémentaires exonérées, qui leur coûteront moins cher que d’embaucher quelqu’un. Votre dispositif est donc une machine à produire du chômage.

Il ne s’agit pas que les gens qui travaillent déjà travaillent plus, mais qu’ils soient mieux payés et que les gens qui ne travaillent pas trouvent un emploi. Je vous rappelle que la réduction de temps de travail entre 1997 et 2002 a créé des centaines de milliers d’emplois. Il n’y avait jamais eu autant de millions d’heures travaillées dans notre pays et il n’y en a jamais eu autant depuis.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable. Nous reparlerons, à l’occasion de l’un de vos amendements suivants, de la réduction du temps de travail ; ma réponse s’en tiendra ici aux heures supplémentaires. Mathématiquement, je peux assez facilement vous suivre : dix fois trois heures supplémentaires, cela fait trente heures, cela fait un emploi ; en mathématiques, cela marche, mais dans la vraie vie, c’est beaucoup plus compliqué. J’ai voté, sous la précédente législature, la suppression de la défiscalisation des heures supplémentaires avec la même intention que vous ici ; mais nous n’avons pas eu la démonstration que cela ait créé des centaines de milliers d’emplois – ce qui ne veut pas dire que le contraire soit exact. En tout cas, quelques heures supplémentaires ne suppriment pas un emploi. Dans une entreprise, pour une fonction dédiée, ce ne sont pas trois heures de plus ou de moins qui libèrent de l’emploi. Dans certains cas, la suppression de la défiscalisation a même pénalisé les entreprises car les salariés, mécontents de perdre cet avantage, rechignaient à faire des heures supplémentaires. Et plus généralement, en cas d’activité temporairement dynamique, il peut être difficile de mobiliser des salariés sur des heures supplémentaires, alors qu’il n’y a pas d’autre possibilité. Cela peut mettre en danger des entreprises qui ne peuvent faire face à un carnet de commandes temporairement gonflé. C’est un effet pervers qu’il faut prendre en considération.

Vous dites aussi que cela incite au temps partiel. C’est possible, mais après tout, pourquoi pas, si c’est le choix des gens et s’ils peuvent obtenir une meilleure rémunération grâce à des heures supplémentaires ? C’est bénéfique car cela libère du temps pour d’autres.

Quant aux répercussions sur la santé, s’il ne s’agit que de quelques heures à un moment de sa vie – je ne parle pas du travail de nuit –, c’est aller un peu vite en besogne…

M. Jean-Louis Bourlanges. Je soulignerai le paradoxe idéologique. En écoutant M. Coquerel, j’ai envie de lui décerner le prix Milton Friedman de l’économie libérale, car il nous dit que l’État doit être totalement neutre et ne pas influer sur le choix des employeurs entre l’embauche d’un nouveau salarié ou le recours aux heures supplémentaires… Cela m’amuse d’autant plus que le Gouvernement, lui, mérite en revanche, avec cette proposition, le prix Stakhanov : on est bien là dans le stakhanovisme de Nicolas Sarkozy et Joseph Staline réunis, c’est-à-dire « travailler plus pour gagner plus ». Je suis complètement perdu idéologiquement mais, comme je suis un loyal serviteur du Gouvernement, je voterai contre l’amendement.

M. Éric Coquerel. J’aime assez les paradoxes, monsieur Bourlanges, mais nous sommes au contraire pour des lois qui encadrent très précisément la durée du temps de travail au lieu de la remettre en question, plafonnent les heures supplémentaires et fassent en sorte qu’elles coûtent plus cher. Nous sommes donc pour une intervention de l’État et n’avons aucun rapport avec les Chicago boys.

Mme Marie-Christine Dalloz. Comme cela a été rappelé hier soir par Charles de Courson, on parle du chômage mais on oublie toujours que des secteurs entiers d’activité peinent énormément à recruter, dans le tourisme, la restauration, le commerce… Il est nécessaire que ce dispositif permette d’accompagner ces entreprises.

La commission rejette cet amendement.

 

Elle examine ensuite lamendement CF23 de Mme Valérie Rabault.

Mme Christine Pires Beaune. Nous proposons d’ajouter un alinéa pour assurer la compensation intégrale. Le 2 octobre dernier, l’ensemble des caisses nationales de sécurité sociale se sont réunies et ont massivement rejeté ce PLFSS, notamment sur la base de la présente argumentation.

Suivant lavis défavorable du rapporteur, la commission rejette cet amendement.

Elle émet ensuite un avis favorable à ladoption de larticle 7 sans modification.

 

Après larticle 7

La commission est saisie de lamendement CF82 de M. Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel. Le recours à l’intérim s’est considérablement développé ces dernières années : huit embauches sur dix se font désormais en contrat court et précaire. Nous proposons d’introduire une fluctuation des cotisations patronales à la branche AT-MP qui prenne en considération le taux d’intérim dans le calcul de ces cotisations.

M. le rapporteur pour avis. Les principales victimes, à court terme, en seraient les travailleurs eux-mêmes. Il en est de même pour cet autre amendement, que vous avez déposé un peu plus loin, sur l’aide à la création ou à la reprise d’entreprise (ACCRE), où les principaux concernés, les travailleurs indépendants, se retrouveraient les premiers pénalisés. Avis défavorable.

La commission rejette cet amendement.

 

Elle examine ensuite lamendement CF84 de M. Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel. Cet amendement va exactement à l’inverse de ce que vous proposez. Vous exonérez les entreprises sans contrainte, sans fléchage, y compris les heures supplémentaires ; nous proposons quant à nous une expérimentation sur l’exonération de cotisations sociales pour les entreprises qui passent à trente-deux heures payées trente-cinq, de façon à en mesurer l’effet en termes d’emploi. L’IGAS a rappelé que le passage aux trente-cinq heures a permis de créer 350 000 emplois, et les statistiques de l’époque montrent que non seulement la compétitivité horaire n’a jamais si fortement augmenté dans le pays, mais aussi que le nombre global d’heures travaillées n’a jamais été aussi élevé. Nous soutenons que la réduction du temps de travail, adossée à une politique de répartition des richesses, est la bonne solution.

M. le rapporteur pour avis. J’entrerais volontiers avec vous dans ce débat intéressant, mais ce serait sortir du strict champ de ce projet de loi… À l’occasion, vous me direz si vous êtes favorable au partage du travail et des revenus. Avis défavorable.

La commission rejette cet amendement.

 

Article 8 : Mise en œuvre de la transformation en 2019 du CICE et du CITS en baisse pérenne de cotisations sociales pour les employeurs

La commission est saisie de lamendement CF85 de M. Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel. Nous proposons de supprimer l’article 8 qui prévoit la transformation du CICE en exonérations. Vous avez compris que nous ne sommes pas d’accord avec cette logique d’exonération qui est une fausse manière d’augmenter les salaires et affaiblit le système français fondé sur des prestations liées aux cotisations sociales.

L’objectif de l’article est bien en réalité de maintenir le CICE. Or le rapport annuel, publié il y a quelques semaines, du comité de suivi du CICE nous apprend que, pour la période 2013-2015, celui-ci aura au mieux permis de maintenir ou créer 100 000 emplois, pour un coût de 47,8 milliards d’euros, ce qui représente pour l’État une dépense de 160 000 euros par emploi et par an. On a rarement fait pire ! Qui plus est, il va doubler cette année.

Vous maintenez ici des exonérations pour des salaires atteignant jusqu’à 2,5 fois le SMIC, autrement dit pour les trois quarts des salariés. Cela ne créera pas d’emplois, et ce sera une mauvaise affaire pour les prestations sociales, la sécurité sociale et l’État.

M. le rapporteur pour avis. Le CICE, c’est 20 milliards ; les 40 milliards, c’était le pacte de responsabilité et de solidarité.

J’ai évoqué tout à l’heure le rapport de l’Institut des politiques publiques. Il compare le CICE et les baisses de cotisations sociales, solution que nous préférons. Votre amendement, techniquement, ne fait pas ce qu’il prétend faire, mais peu importe. Passer du CICE aux baisses de cotisations sociales présente un réel intérêt en termes de lisibilité et d’instantanéité, alors que le crédit d’impôt était presque considéré comme une baisse d’IS ; ajoutons que le spectre est élargi, ce qui devrait vous réjouir, à l’ensemble des activités associatives, mutualistes, coopératives. Si notre pays va mieux et crée davantage de richesses, l’État récupérera des recettes par le biais de l’IS. Je le regrette comme vous, mais nous vivons dans un monde de compétition. Nous sommes notamment en concurrence avec l’Allemagne, que vous accusez souvent de pratiquer le moins-disant social. Je ne le conteste pas, mais c’est une réalité que l’on ne peut contourner. Avis défavorable.

M. Jean-Louis Bricout. Je partage quelques analyses de M. Coquerel sur le CICE, qui présente certains écueils. Il s’adaptait mieux en termes de compétitivité-coût avec les entreprises ayant une relation avec l’export ; peut-être arrosait-il trop large, mais nous aurions certainement dû négocier avec le patronat pour limiter les distributions de dividendes, car il fallait privilégier l’investissement ou l’amélioration des salaires.

Cela étant, j’aimerais savoir exactement quelle incidence exacte aura sur l’IS la transformation du CICE en baisse de charges, dans la mesure où celle-ci interviendra désormais avant l’impôt et non plus après. Par ailleurs, pourquoi n’avez-vous pas étalé cette transformation sur deux années, avec le paiement du CICE 2018 en 2019 et le paiement de la réduction de cotisations seulement à partir de 2020, ce qui aurait évité la double dépense ?

M. le rapporteur pour avis. L’effet du retour d’IS est de 2,6 milliards cette année et 5 milliards les années suivantes. Ce à quoi vient s’ajouter la baisse de cotisation chômage autour du SMIC, à hauteur de 3,5 milliards en année pleine. Autrement dit, cela s’équilibre.

La commission rejette cet amendement.

 

Elle examine ensuite lamendement CF98 du président Éric Woerth.

M. le président Éric Woerth. Cet amendement est symétrique d’un autre amendement défendu lors de la discussion du projet de loi de finances. La première conséquence de la transformation du CICE touchera l’IS, à hauteur de 5 milliards en année pleine, qui ne sont pas compensés. Cet amendement vise à augmenter d’un point le taux de réduction forfaitaire de la cotisation maladie pour qu’il passe de 6 à 7 % ; le Président Hollande avait ramené le taux du CICE de 7 à 6 % en échange de la non-suppression de la dernière tranche de la C3S. Je pense qu’il faut rendre aux entreprises ce qu’elles avaient, c’est-à-dire une masse correspondant à 7 %.

Par ailleurs, la transformation du CICE fera, selon les branches, des gagnants, mais également des perdants, notamment en fonction de la répartition des salaires dans les entreprises, en particulier les entreprises employant de la main-d’œuvre qualifiée. J’aimerais savoir, monsieur le rapporteur pour avis, si vous avez une analyse plus fine sur les gagnants et les perdants.

M. le rapporteur pour avis. Vous revenez sur la question de Charles de Courson relative à la sectorisation ; je vous renvoie au rapport de l’Institut des politiques publiques, qui détaille les réponses à ces questions. Je rappelle une nouvelle fois qu’il y aura, parallèlement, la baisse de cotisations salariales sur le chômage autour du SMIC pour 3,5 milliards d’euros à partir de novembre en année pleine, ce qui compense le passage de 7 à 6 %, qui bénéficiera principalement aux entreprises à forte densité de main-d’œuvre et à bas coûts, ainsi que la baisse d’IS avec une trajectoire sur trois ans pour aller à 25 %, ce qui fera à nouveau 4 milliards au bénéfice des entreprises : autrement dit, des efforts importants sont consentis pour les entreprises. De façon un peu taquine, monsieur le président, je noterai que c’est votre premier amendement à 3 milliards…

M. le président Éric Woerth. Les amendements que vous avez défendus à l’intérieur d’autres projets coûtent beaucoup plus que 3 milliards. Accordez à l’opposition le droit d’utiliser les moyens d’une façon différente de la vôtre !

M. Gilles Carrez. Derrière cet amendement, c’est tout le problème de fond de l’efficacité économique de ces baisses des charges, du point de vue de la compétitivité de nos entreprises, qui est posé. Le rapport de M. Alauzet nous présentera-t-il le détail, par niveaux de salaire, des allégements de cotisations ? Car nous sommes confrontés à un double risque. Aujourd’hui, nous affectons 40 milliards d’euros, soit 2 points de PIB, aux exonérations de cotisations sociales salariales ; or, depuis vingt-cinq ans, cette politique a toujours été concentrée sur les bas salaires, jusqu’à 1,6 SMIC pour les allégements généraux et 2,5 SMIC pour le CICE. Du coup, les baisses de charges profitent principalement à des secteurs protégés, grande distribution, propreté, sécurité, tandis que les secteurs exposés à la concurrence internationale et qui exportent, industrie automobile, industrie pharmaceutique, chimie, etc., en bénéficient très peu. Ce sont des politiques structurelles, qui mettent en jeu des montants énormes et depuis des décennies ; il devient vraiment urgent de les évaluer, sans parler du danger de créer des trappes à bas salaires : au niveau du SMIC il n’y aura plus du tout de cotisations sociales patronales. Quel est l’intérêt pour une entreprise, dans ces conditions, d’augmenter les salaires, si cela se traduit pour elle par une augmentation en flèche des cotisations ? Pourrez-vous nous éclairer dans votre rapport ?

Un dernier point, essentiel : nous sommes en pleine fiction. Alors que l’on est supposé payer 35 % de charges ; au niveau du SMIC, c’est en réalité zéro. Quand introduirons-nous la vérité du barème ? Pourquoi ne pas « barémiser », surtout quand il s’agit de 40 milliards d’euros ? Cela lèvera beaucoup de confusion, par exemple sur le problème des travailleurs détachés. On ne sait pas que le SMIC aujourd’hui correspondra, pour l’entreprise, au net et non plus au brut.

M. le président Éric Woerth. Les entreprises qui ont une répartition majoritaire au‑dessus de 1,3 SMIC perdront probablement à la transformation du CICE en baisse de charges. Ce devrait normalement être un simple changement de méthode de répartition, un peu comme le prélèvement à la source, parfaitement neutre, sans gagnant ni perdant ; or ce n’est pas le cas. La neutralité n’est pas du tout garantie dans votre texte.

M. le rapporteur pour avis. Monsieur Carrez, vous aurez dans mon rapport le détail par catégories. Vous évoquez un sujet récurrent : c’est tout le débat sur la cible, la préparation de l’avenir, avec les postes à valeur ajoutée, la recherche, l’innovation, la compétitivité, etc. Malheureusement, nous sommes tous pris à la gorge par le chômage massif et le besoin de donner un emploi aux gens peu formés. Au demeurant, entre la baisse de cotisations sociales jusqu’à 2,5 SMIC et le crédit d’impôt qui était à 2,5 SMIC, on ne change rien à l’assiette.

Enfin, monsieur le président, je ne vois pas comment éviter une nouvelle redistribution. C’est pour cette raison, je le répète, que d’autres dispositifs sont prévus, tels que les 3,5 milliards d’allégement général autour du SMIC, qui compenseront la baisse d’IS pour les secteurs que l’on peut estimer défavorisés par la conversion.

M. le président Éric Woerth. Nous avons besoin de calculs plus précis sur l’impact en fonction de la répartition des salaires dans les entreprises.

M. le rapporteur pour avis. Vous en aurez dans mon rapport.

M. Charles de Courson. Il faut que, dans votre rapport, vous posiez la question : ces mesures vont-elles dans le sens de la compétitivité du pays ? C’est la question soulevée depuis quinze ans. Ne faisons-nous pas collectivement d’énormes erreurs ? Car nous sommes tenus par les contraintes européennes ; chaque fois que nous avons voulu faire quelque chose de sectorisé, nous nous sommes trompés. Le rapport Gallois avait préconisé les baisses sur les salaires médians, car c’est là où sont les salaires dans l’industrie.

M. Jean-Louis Bourlanges. Ce qu’a dit Gilles Carrez est tout à fait juste. Nous poursuivons deux objectifs contradictoires et qui n’en doivent pas moins être poursuivis simultanément. Nous poursuivons un objectif de compétitivité internationale, qui devrait nous conduire à ne pas mettre d’argent sur les bas salaires, car c’est un frein à la modernisation des entreprises, à la robotisation, au développement de la compétitivité ; et en même temps nous savons bien que les gisements de salaire sont des emplois mal rémunérés, actuellement insolvables du fait du niveau de charges sociales qui pèsent sur eux. La vie consiste à gérer des contradictions et des tensions. Nous devrions consentir un effort d’analyse de la tension entre ces deux objectifs également légitimes mais contradictoires.

M. Nicolas Forissier. Je souscris à ce que dit M. Bourlanges, mais si nous voulons créer des emplois pour les bas salaires, il faut d’abord retrouver la compétitivité des entreprises. Disposez-vous ou disposerez-vous, monsieur le rapporteur pour avis, d’éléments de comparaison avec ce qui se passe structurellement dans l’échelle des salaires, et donc en termes de compétitivité, parmi les pays de l’Union européenne qui sont nos principaux concurrents, notamment l’Allemagne ? J’entends bien qu’il faut traiter les deux sujets mais peut-être dans un certain ordre, pour créer de la richesse d’abord.

M. le rapporteur pour avis. Vous trouverez dans le rapport des éléments concernant l’impact sur la compétitivité, le type de branches, etc. Sera-ce suffisant à notre bonne compréhension de la problématique ? Je n’en suis pas certain. En tout cas, je n’ai pas de comparaisons européennes ; une mission à part entière serait sans doute nécessaire pour conduire un tel travail.

La commission rejette cet amendement.

 

Ensuite de quoi, la commission est saisie de lamendement CF5 de Mme Cendra Motin.

Mme Cendra Motin. L’article 8 comporte des dispositions spécifiques pour le bâtiment et les travaux publics, l’agriculture, le tourisme, l’industrie, le numérique et la recherche et développement. Je propose d’aller un peu plus loin pour les services à la personne puisque la ministre a entamé une négociation avec la fédération des entreprises de ces services afin que les aides restent totales jusqu’à 1,2 SMIC et non 1,1 SMIC comme c’est actuellement dans le texte. Il s’agit en quelque sorte de respecter un engagement des négociations avec un secteur qui a également besoin qu’on l’aide.

M. le rapporteur pour avis. Votre amendement propose de porter à 1,2 SMIC le seuil de dégressivité de l’allégement de cotisations sociales pour les organismes offrant des aides à la personne en direction de publics fragiles. Le Gouvernement propose de rapprocher le dispositif spécifique d’exonération en faveur de l’emploi d’aides à domicile auprès des personnes fragiles de l’allégement général de droit commun. La réforme serait à coût constat, 60 % des structures seraient gagnantes, et il y aurait des perdants plutôt parmi les structures de plus de cinquante salariés.

Votre amendement cherche donc à rendre plus favorable le nouveau dispositif d’allégement spécifique en repoussant à 1,2 SMIC le seuil de dégressivité de l’allégement, contre 1,1 SMIC actuellement dans le dispositif proposé par le Gouvernement. Le point de sortie resterait à 1,6 SMIC. Selon le Gouvernement, l’effort serait concentré sur les rémunérations les plus proches du SMIC. Aujourd’hui, le dispositif est évalué à 1,7 milliard d’euros par an. Le recentrage du dispositif répond à des préconisations formulées tant par la Cour des comptes que par des rapports parlementaires. L’exonération est déjà plus favorable que le dispositif de droit commun. Il n’est pas sûr qu’il faille aller plus loin. Je vous invite à retirer votre amendement et à le redéposer en séance publique pour approfondir le sujet.

Lamendement est retiré.

 

La commission est saisie de lamendement CF86 de M. Éric Coquerel.

Mme Sabine Rubin. Cet amendement conditionne les exonérations de cotisations sociales en tirant les leçons des alertes qui ont eu lieu sur le CICE, qui a été dévoyé. Les entreprises de la distribution en ont été les premières bénéficiaires alors que le secteur est très peu soumis à la concurrence internationale. Les PME en ont très peu profité. Il a très peu créé d’emplois. Afin que ce genre de dévoiements ne se reproduise pas avec les exonérations de cotisations sociales, nous proposons que celles-ci soient attribuées aux entreprises qui en ont réellement besoin et que soient exclues celles dont la bonne santé financière ne nécessite pas de tels cadeaux.

M. Éric Alauzet rapporteur pour avis. Sur la forme, votre amendement ne fait pas ce qu’il prétend faire. Sur le fond, le mélange de prestations sociales et d’impôt n’est pas forcément de bon aloi. On ne peut pas mettre sur le même plan les cotisations sociales et l’imposition des bénéfices des sociétés. Avis défavorable.

La commission rejette cet amendement.

 

Elle examine ensuite, en discussion commune, lamendement CF95 du rapporteur, lamendement CF52 de M. Julien Aubert, ainsi que les amendements CF53, CF55 et CF71 de M. Philippe Chassaing.

M. le rapporteur pour avis. Le processus est en cours sur la mesure TODE : tout le monde a compris que nous allions vers une sortie heureuse. L’amendement CF95 est identique à celui qui a été adopté hier en commission des affaires sociales.

M. Julien Aubert. Mon amendement CF52 va dans de même sens. Dans mon département, pas moins de 6 000 exploitations étaient concernées, et menacées d’une hausse des cotisations de 12 millions d’euros et d’une perte de chiffre d’affaires de 200 millions d’euros. Et il en est de même dans beaucoup de départements. Je ne peux donc que me féliciter que les rapporteurs aient déposé un amendement qui rétablira ce dispositif TODE : un écart de 3 à 4 euros entre l’Allemagne et la France, signifie chez moi l’arrêt pur et simple de toute agriculture saisonnière. On parle de 180 euros en moyenne ; mais cela peut, dans certains secteurs d’agriculture, représenter 500 euros sur la fiche de paie pour un revenu de 1 200 euros bruts. Il fallait le sanctuariser et je m’en félicite.

M. Philippe Chassaing. J’ai moi aussi proposé deux amendements, CF53 et CF55, qui visent au rétablissement du TODE. Que cette exonération puisse prendre fin est extrêmement problématique pour la pérennité de certaines exploitations. Je me réjouis donc que le rapporteur général ait présenté cet amendement de rétablissement et retire les miens.

Les amendements CF53, CF55 et CF71 sont retirés.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Un amendement similaire a en effet été adopté hier en commission des affaires sociales. J’ai également précisé qu’au cas où aucun dispositif alternatif ne serait proposé par le Gouvernement, j’ai prévu à l’article 36 du PLF un transfert de crédits sur le budget du PLFSS correspondant aux économies réalisées sur la niche Copé, par le biais d’un amendement adopté dans notre commission, de façon à financer ce dispositif. Le Gouvernement aura peut-être d’autres idées d’ici à la séance. En attendant, le dispositif est bordé pour être voté le cas échéant.

M. Charles de Courson. Quel en est le coût total ? Vous évoquez deux secteurs très affectés : les fruits et légumes et la viticulture. La somme des deux fait 90 millions. L’ensemble des TODE représente actuellement 170 millions. D’autres secteurs sont-ils donc concernés ?

Si j’ai bien compris l’exposé sommaire, votre amendement CF95, monsieur le rapporteur, propose de maintenir le choix pour les exploitants entre le dispositif de TODE et l’allégement général, y compris le futur 4 %, mais ce n’est pas le texte de l’amendement. Pouvez-vous nous éclairer à ce sujet ?

Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas. Je ne suis pas certaine qu’il y ait lieu d’avoir ce débat. Un amendement est proposé par le rapporteur pour avis, le rapporteur général en a fait adopter un hier et nous sommes en attente d’une proposition du Gouvernement pour rectifier le tir. Dans un souci de rapidité et d’efficacité, il n’est pas besoin d’avoir de nouveau le débat sur le TODE ici.

M. le rapporteur pour avis. Monsieur Aubert, je sais que vous êtes très impliqué sur le sujet. Parallèlement au maintien du dispositif TODE est prévu le report de l’allégement de cotisations chômage, qui servait à compenser la suppression du TODE, à l’échéance normale de l’automne. Il faut tenir compte de cette articulation.

M. le rapporteur général. Très concrètement, les simulations présentées par le ministère de l’agriculture faisaient état des gains du nouveau système et des pertes liés à la suppression du système TODE. On nous a présenté un certain nombre de fiches techniques. Par exemple, pour une exploitation classique – qu’il s’agisse d’arboriculture, de viticulture ou de maraîchage – employant sept salariés permanents en CDI, deux CDD et des saisonniers représentant onze équivalents temps plein annuels, ce qui signifie une plus grande concentration pendant la période de ramassage, en tenant compte des plus comme des moins, la perte se situe aux alentours de 6 000 euros, ce qui correspond à la marge moyenne de ce type d’exploitation. Autrement dit, on pénalise les plus fragiles et ils doivent aller voir leur banquier pour négocier – ce qui est extrêmement facile, comme chacun sait. C’est donc sur la foi de ces documents officiels présentés par le ministère de l’agriculture que nous avons déposé ces amendements.

Si, d’ici à l’examen du texte en séance publique, le Gouvernement analyse les gains et les pertes pour proposer un nouveau régime des TODE garantissant la neutralité, je n’y serai pas opposé. Il faut simplement qu’on ait un système honnête. Je le répète : je suis persuadé que personne n’a vu venir le coup, pour la bonne raison qu’on ne pense jamais aux problèmes liés au travail saisonnier, que ce soit pour les salariés de droit privé, pour les salariés de droit public, pour les professions libérales intermédiaires ou pour les autres.

J’attends donc de savoir si la réflexion du Gouvernement aboutit de manière à répondre à la question. Le dispositif proposé vise à maintenir le système TODE tel qu’il existe, ce qui veut dire qu’il est alternatif au système d’allégement général des charges qui serait mis en place.

M. le rapporteur pour avis. Pour répondre à M. de Courson, oui, on peut choisir.

M. Charles de Courson. Non, monsieur le rapporteur pour avis. Comme vient le dire M. Giraud, le système n’est pas alternatif : les travailleurs saisonniers dépendent du régime des TODE. Les employeurs n’ont pas le choix entre le TODE et le système général.

M. le président Éric Woerth. Le système général n’entre en vigueur qu’à partir du 1er octobre.

Mme Stella Dupont. C’est un sujet essentiel. Ce sur quoi nous sommes d’accord, c’est qu’il reste à définir la juste mesure pour que les exploitants agricoles qui bénéficient actuellement du dispositif TODE ne soient pas perdants dans le cadre de la transformation du CICE. Je me réjouis de cette suppression, mais je reste inquiète quant à l’atterrissage du dispositif dans son ensemble.

M. Julien Aubert. À ce stade de la discussion, nous retirons l’amendement CF52, en espérant nous aussi avoir des précisions sur l’atterrissage.

Lamendement CF52 est retiré.

La commission adopte lamendement CF95.

 

Elle se saisit ensuite de lamendement CF97 du président Éric Woerth.

M. le président Éric Woerth. Cet amendement est lié à la question précédente, le TODE n’étant qu’un élément supplémentaire. Il s’agit du report du 1er janvier au 1er octobre de l’allégement de cotisations sur les bas salaires au taux de 4,05 %. Le chômage, en France, concerne surtout les travailleurs non qualifiés. Vous reportez, je ne sais pourquoi, quelque chose qui avait été négocié pour l’ensemble du CICE. Dans ce bloc qu’était le CICE, il y avait la réduction des cotisations patronales, avec quasiment zéro charge au niveau du SMIC. Vous reportez cela au 1er octobre, visiblement pour des raisons financières. Or vous pouviez faire d’autres choix. Celui-là ne me semble pas le bon, parce qu’on est au cœur du chômage pour les non qualifiés.

M. le rapporteur pour avis. Nous l’avons déjà dit : le report s’explique principalement par le cumul en 2019 du CICE et de la baisse de cotisations sociales, à raison de 40 milliards au total – 35 ou 37 si vous intégrez l’effet retour et IS. Avis défavorable.

M. le président Éric Woerth. Ce n’est pas un argument.

M. le rapporteur pour avis. Si, c’en est un.

M. le président Éric Woerth. C’est le vôtre.

La commission rejette lamendement.

 

Puis elle émet un avis favorable à ladoption de larticle 8 modifié.

 

Après larticle 8

La commission se saisit de lamendement CF4 de Mme Cendra Motin.

Mme Cendra Motin. Il s’agit d’un amendement d’appel. Nous devons avoir une vraie réflexion sur la taxe sur les salaires qui touche notamment les établissements publics de santé, dont on sait qu’ils ne la paient pas toujours forcément – un rapport a été rédigé sur le sujet. Je vais retirer mon amendement à ce stade, mais je souhaite que nous ayons une discussion sur ce point en séance publique.

M. le rapporteur pour avis. Vous soulevez un vrai problème, madame Motin, qui a effectivement été explicité par la Cour des comptes : le dispositif ne s’applique pas et souffre d’une insécurité juridique – qui ne concerne pas, d’ailleurs, que les établissements de santé ; le barème est incohérent et a été compensé par la création d’un abattement ; le dispositif est complexe et incite au recours à temps partiel. Bref, il a de multiples inconvénients. Il faut donc trouver une solution et vous avez tout à fait raison de vouloir y revenir.

Lamendement est retiré.

 

La commission examine ensuite lamendement CF72 de Mme Sarah El Haïry.

Mme Sarah El Haïry. Cet amendement vise à exonérer l’Établissement français du sang du versement de la taxe sur les salaires. Nous tenons à cette disposition, car l’organisme assure une mission spécifique, qui permet d’assurer l’autosuffisance de notre territoire en produits sanguins. Il y va de notre souveraineté en matière de santé publique.

M. le rapporteur pour avis. Le sujet est tout à fait lié au débat précédent : certains sont exonérés, d’autres non, personne ne sait plus où on en est. D’un autre côté, si clarifier c’était exonérer tout le monde, cela coûterait 13 milliards. Faut-il ou non créer des niches ? Nous allons avoir ce débat. C’est la bouteille à l’encre ! Avis défavorable, à ce stade.

La commission rejette lamendement.

 

Elle se saisit ensuite de lamendement CF100 du président Éric Woerth.

M. le président Éric Woerth. Cet amendement s’inscrit dans la même logique que celui que j’ai présenté, dans le cadre du projet de loi de finances, concernant la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Il s’agit ici des impôts de production. La C3S est un impôt de production dont le niveau est extrêmement élevé.

Nous, parlementaires d’opposition, faisons une série de propositions, qui ont évidemment leur cohérence, mais vous pourriez tout à fait en adopter seulement certaines. Je comprendrais ainsi que l’on adopte l’amendement relatif à la CVAE dans le cadre du PLF et pas celui-ci, relatif à la C3S – ou le contraire. En revanche, je ne comprendrais pas qu’on n’adopte ni l’un ni l’autre, parce qu’on est là au cœur de la question de la compétitivité du pays. Les impôts de production sont deux fois plus élevés en France que dans la zone euro et ils affectent directement la compétitivité de nos entreprises. La C3S est un impôt ancien, dont le rendement est de 3,8 milliards. Le précédent gouvernement avait voulu la supprimer, et cela a été fait en partie, de manière progressive. Il en reste quand même une partie importante, puisque ce sont près de 4 milliards d’euros qui sont prélevés sur le chiffre d’affaires des entreprises. La C3S ne dépend donc pas du résultat de l’entreprise – voilà pourquoi nous parlons d’« impôt de production ».

M. le rapporteur pour avis. Vous avez raison, monsieur le président : les impôts de production ne sont pas favorables à notre économie, puisqu’on peut avoir un résultat négatif et les payer quand même. Cela dit, la C3S a déjà été pour partie supprimée, au bénéfice des petites et moyennes entreprises. Ce ne sont plus désormais que les très grosses entreprises qui la paient. Il faut en avoir en avoir conscience. La disposition coûte 4 milliards – je n’ai guère d’autres arguments à avancer.

M. le président Éric Woerth. Vous trouverez facilement 4 milliards pour la compétitivité en annulant des mesures inutiles prises précédemment. C’est un choix : vous pouvez maintenir des mesures inutiles et ne pas voter des mesures utiles. Ce n’est pas notre position, et l’opposition a le droit de défendre des mesures telles que celle-là. Quoi qu’il en soit, ce n’est pas là une affaire de coût.

M. le rapporteur pour avis. Mesures utiles, mesures inutiles, tout cela mériterait d’être approfondi.

M. le président Éric Woerth. Certes, mais nous n’avons pas le temps de le faire ici. Je me contentais de répondre à ce que vous et le Gouvernement dites systématiquement sur le sujet : objecter un coût élevé, c’est un peu court.

La commission rejette lamendement.

 

La commission examine ensuite lamendement CF6 de Mme Cendra Motin.

Mme Cendra Motin. Il s’agit, là encore, de mettre un sujet sur la table. Dans les services à la personne, il n’y a pas que les entreprises, il y a aussi des employeurs particuliers. C’est un écosystème très divers, qui bénéficie de très nombreux allégements de cotisations, de dispositifs dégressifs pour les charges, sans compter les allocations et les diverses aides à la famille. On est un peu dans le bourbier : parmi toutes ces aides, on ne reconnaît plus très bien les statuts du particulier employeur, des associations, des entreprises. Cet amendement a surtout pour objectif de faire prendre conscience au législateur du fait que le système est devenu complètement illisible et qu’il serait intéressant d’y remettre un peu d’ordre. Il s’agit de montrer qu’un des dispositifs d’exonération est mal ficelé et qu’il n’est plus très bien adapté à son objet. Il convient aussi de se poser plus globalement la question des aides pour tout ce qui concerne les services à la personne.

M. le rapporteur pour avis. Votre objectif est tout à fait louable et le dispositif serait bénéfique aux usagers : cela garantirait la contemporanéité et la lisibilité de l’aide, contrairement au crédit d’impôt, qui intervient tardivement. Le point qu’il faudra tenter de clarifier en séance est celui de la fluidité du passage entre les deux systèmes et de son impact financier. Cela suppose de trouver des arguments qui portent. Je demande le retrait de cet amendement, qui pourrait être redéposé en séance.

Mme Cendra Motin. Comme je le disais, il s’agit d’un amendement d’appel : l’objectif était d’ouvrir le débat. Rendre les aides contemporaines, cela coûte entre 6 et 10 milliards. Il va falloir être créatif.

Lamendement est retiré.

 

La commission examine ensuite, en discussion commune, les amendements CF87 et CF88 de M. Éric Coquerel.

Mme Sabine Rubin. L’amendement CF87 vise à supprimer l’allégement général de cotisations sociales patronales sur les bas salaires. Ce dispositif, il faut le rappeler, était destiné à alléger ce qu’on appelle maintenant le « coût du travail » – alors que le travail a également un prix, mais passons – pour les emplois les moins qualifiés. En réalité, le dispositif a été étendu et il constitue une sorte d’incitation à recruter à bas salaire, y compris pour des salariés qualifiés et diplômés, ce qui, par ailleurs, a un coût pour les finances publiques.

L’amendement CF88 est en faveur de l’égalité salariale hommes-femmes. Quelques rappels : les femmes gagnent 24 % de moins que les hommes en moyenne, et elles représentent 80 % des travailleurs pauvres. La course à la précarisation les touche pleinement, et ce malgré les lois successives qui ont été votées. Nous proposons de supprimer les exonérations de cotisations sociales patronales aux entreprises qui ne respecteraient pas leurs obligations en matière d’égalité salariale.

M. le rapporteur pour avis. En ce qui concerne l’amendement CF87, nous avons déjà largement discuté de la question : avis défavorable. Pour l’amendement CF88, ce que vous proposez paraît disproportionné. Au demeurant, des sanctions sont déjà prévues dans le code du travail, et elles paraissent adaptées. Avis défavorable également.

Mme Sabine Rubin. Je ne vois pas de quelles discussions vous voulez parler concernant le premier amendement.

M. le rapporteur pour avis. Je parlais de la suppression des allégements de cotisations. Cela fait deux heures que nous en discutons : je n’ai pas nécessairement envie de répéter la même chose pour la quatrième fois.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Article 9 : Extension de lexonération triennale de cotisations sociales
aux créateurs dentreprises relevant du micro-bénéfice agricole

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 9 sans modification.

 

Après larticle 9

La commission se saisit de lamendement CF89 de Mme Sabine Rubin.

Mme Sabine Rubin. L’économie dite collaborative a donné naissance à un nouveau type de travail, reconnu par la loi comme indépendant mais, dans les faits, ceux qui l’exercent ne sont ni salariés ni indépendants. Je veux parler des chauffeurs de voitures de transport avec chauffeur, ou encore des livreurs à vélo. Ils ne sont pas indépendants parce qu’ils ne sont pas libres de fixer leurs prix ni de choisir leur rythme de travail, et ils ne sont pas non plus salariés. En tout cas, ils ne bénéficient d’aucune des protections liées au statut de salarié, notamment s’agissant des accidents du travail.

Si nous entendons favoriser la création d’entreprise et l’activité d’indépendant par le dispositif ACCRE, comme cela a été évoqué, nous devons le faire pour déboucher sur une indépendance réelle, et non alimenter une sorte de salariat déguisé. C’est pourquoi nous demandons que le dispositif ne s’applique pas aux travailleurs placés dans une situation de dépendance économique, notamment ceux des plateformes.

M. le rapporteur pour avis. On voit bien votre intention, madame Rubin, et on peut la partager. Mais une telle disposition pénaliserait en réalité les travailleurs indépendants eux‑mêmes, qui ne pourraient plus bénéficier des allégements de cotisations sociales. Comme vous le savez, leur situation n’est pas forcément très favorable ; en leur supprimant de surcroît des aides, vous n’atteindriez pas l’objectif que vous visez. En outre, la subordination économique n’est pas définie. Par ailleurs, si un lien de subordination est avéré, le contrat de travail est requalifié en salariat. Avis défavorable.

La commission rejette lamendement.

 

Chapitre II
Des règles de cotisations plus claires et plus justes

Article 10 : Aménagement de la cotisation subsidiaire d’assurance maladie

 

La commission examine lamendement CF8 de Mme Valérie Rabault.

M. Jean-Louis Bricout. En 1999, il semblait équitable que ceux qui ne dépendaient que des revenus du capital, sans avoir de revenus du travail – les rentiers, en quelque sorte –, contribuent à notre système de protection. Or, avec l’article 10, vous augmentez l’abattement de 20 000 à 40 000 euros et diminuez le taux de 8 % à 6,5 %… Un tel cadeau fiscal fait aux rentiers est à nos yeux inacceptable. Nous demandons donc la suppression de cet article. Alors que vous répétez sans cesse qu’il faut que le travail paie, cette disposition favorise la rente. Vous êtes en totale contradiction avec vos belles annonces.

M. le rapporteur pour avis. Certains proposent de supprimer complètement le dispositif ; nous, nous le maintenons en l’aménageant. En l’état, il apparaît assez injuste. Le cas typique est celui d’un agriculteur ayant des revenus d’activité inférieurs à 3 900 euros par an, ce qui est extrêmement faible et qui bénéficie de revenus exceptionnels. Le mécanisme est inégal car selon le niveau où l’on se situe, on ne bénéficie pas du même régime. Nous proposons donc à la fois de réduire le taux, qui passera de 8 % à 6,5 %, et de rehausser le plafond à 20 000 euros – il ne s’agit pas de 1 million d’euros, ou que sais-je encore. Typiquement, le cas visé est celui du paysan dont les revenus s’effondrent – il y en a quelques-uns en ce moment –, qui arrête son activité, vend son exploitation et qui se trouve pénalisé de façon importante. Voilà ce que nous voulons éviter.

M. Jean-Louis Bricout. Vous êtes quand même en complète contradiction avec votre principe selon lequel il faut récompenser le travail : vous favorisez les revenus du capital. On est bien dans l’encouragement de la rente.

La commission rejette lamendement.

Puis elle émet un avis favorable à ladoption de larticle 10 sans modification.

 

Article additionnel après larticle 10 : Extension aux boissons aromatisées à base de vin de la taxe sur les prémix

La commission examine les amendements identiques CF57 du rapporteur pour avis, et CF76 de Mme Sarah El Haïry.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement vise à taxer certaines boissons alcoolisées que je qualifierais de sournoises. Dans le passé, on a taxé certaines boissons du type prémix, dont la cible était surtout des jeunes, qu’il s’agissait d’accoutumer à l’alcool. Qui plus est, ces boissons contiennent beaucoup de sucre. Pour échapper à la taxation, certains fabricants ont utilisé du vin comme ingrédient de base, car celui-ci n’est pas soumis à la même taxation. L’amendement CF57 vise à imposer ceux qui veulent contourner le système de sensibilisation précoce de nos jeunes aux risques de l’alcoolisation en jouant sur des taux de sucre élevés.

Mme Sarah El Haïry. Mon amendement CF76 a le même objet. Précisons qu’il ne s’agit pas du tout ici de produits tels que ceux qui sont porteurs d’indications géographiques protégées, notamment le vin : on parle de boissons qui sont fabriquées de manière à présenter des taux de sucre extrêmement élevés. C’est une question de santé publique et de prévention.

La commission adopte les amendements.

 

Article 11 : Atténuation du franchissement du seuil dassujettissement de la CSG au taux normal sur les revenus de remplacement

La commission se saisit de lamendement CF73 de Mme Sarah El Haïry.

Mme Sarah El Haïry. Il s’agit principalement de relever le seuil à partir duquel les pensions sont assujetties au taux plein de la CSG afin de prendre en compte l’amélioration des comptes publics. Nous prévoyons en outre, par coordination, de relever les plafonds d’application dans les départements d’outre-mer.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable. Madame El Haïry, si on augmente le seuil, on diminue d’autant la baisse de cotisations sociales pour les salariés : ce sont des vases communicants. On ne peut pas faire intervenir d’autres critères pour équilibrer. Il y a environ 20 milliards de CSG supplémentaires qui permettent de financer des cotisations salariales. Je vois donc une forme de contradiction ici, alors même que ce n’est pas le sens de votre démarche.

Mme Sarah El Haïry. Mon amendement est tout de même gagé !

M. le rapporteur pour avis. Certes, mais le mécanisme que nous avons mis en place est bien celui que j’ai décrit : une augmentation de 22 milliards de la CSG, qui permet de financer une baisse des cotisations salariales. En outre, si tout le monde paie la CSG – qui s’applique également, je le rappelle, aux revenus du capital –, 40 % des retraités ne subissent pas son augmentation et, pour les 40 % de la partie intermédiaire, l’augmentation est compensée à hauteur de 34 % – certes avec un léger décalage – par la suppression de la taxe d’habitation. Il s’agit donc d’un système complet, qu’il faut apprécier dans sa globalité.

Mme Sarah El Haïry. Je vais faire mûrir ma réflexion sur le sujet, peut-être d’ici à l’examen du texte en séance publique. À ce stade, je retire mon amendement.

Lamendement est retiré.

 

La commission se saisit ensuite de lamendement CF9 de Mme Valérie Rabault.

Mme Christine Pires Beaune. Avec l’article 11, vous corrigez les effets de la hausse de la CSG, mais seulement à la marge, puisque 350 000 foyers seront concernés. Nous déposons le même amendement que l’année dernière. Nous considérons en effet que la hausse de la CSG, qui s’applique à partir d’un revenu de 1 289 euros mensuels pour les personnes ayant moins de 65 ans et de 1 394 euros pour celles ayant plus de 65 ans, est pénalisante : celles qui la subissent ne peuvent pas, par exemple, se payer une maison de retraite, ce que nous considérons comme la jauge essentielle.

M. le rapporteur pour avis. À mon avis, la question des maisons de retraite, des EHPAD, ou encore du maintien à domicile est très importante, mais d’une tout autre ampleur que celle qui est posée ici. C’est un défi terrible qui est devant nous et que nous allons devoir aborder avec la création d’un cinquième risque. Ne mélangeons pas tout : il s’agit, d’un côté, de 40 euros environ, et, de l’autre, de 1 000 euros.

Vous proposez, d’une certaine façon, de ne pas appliquer l’augmentation de la CSG pour les revenus de remplacement en revenant au taux de 6,6 %. Or la CSG, je le rappelle au passage, s’applique à tous les revenus : elle s’applique aux revenus du travail, aux revenus du capital et aux revenus de remplacement. Votre amendement pose donc un problème d’équité.

Par ailleurs, comme je viens de l’expliquer à Mme El Haïry, vous remettez en cause mécaniquement, avec cet amendement, une partie au moins de la baisse des cotisations salariales : il faut l’assumer. Tel n’est pas notre choix, car nous voulons valoriser le travail en augmentant sa rémunération. Dans le même temps, nous avons instauré des dispositifs afin que la hausse de la CSG pèse le moins possible sur les retraités ayant des pensions modestes ou d’un niveau moyen.

La commission rejette lamendement.

Elle émet ensuite un avis favorable à ladoption de larticle 11 sans modification.

 

Article 12 : Sécurisation de la participation aux organismes complémentaires santé au financement des nouveaux modes de rémunération

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 12 sans modification.

 

Article 13 : Poursuivre la simplification de la déclaration et du recouvrement des cotisations

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 13 sans modification.

 

Article 14 : Simplification de la procédure de dépôt des demandes de modifications mineures dautorisation de mise sur le marché des médicaments

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 14 sans modification.

 

Article 15 : Réforme des mécanismes de sauvegarde applicables aux produits de santé

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 15 sans modification.

 

Article 16 : Mesures en faveur des travailleurs indépendants (1/2) : Clarification des modalités de calcul des cotisations sociales des travailleurs indépendants

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 16 sans modification.

 

Article 17 : Modulation des sanctions applicables en cas de travail dissimulé

La commission examine lamendement CF10 de Mme Valérie Rabault.

M. Jean-Louis Bricout. En matière de travail dissimulé, une des sanctions applicables consiste à annuler l’ensemble des exonérations de cotisations générales sur la période faisant l’objet du redressement, jusqu’à cinq ans. Pour des raisons de risques de disproportion entre l’infraction et la peine, vous proposez de moduler les annulations de réduction de cotisations de sécurité sociale et même de réduire les majorations de retard quand le paiement intervient rapidement. Nous voyons dans ces mesures un allégement des peines ; il y a un vrai risque de banalisation du travail dissimulé. Nous demandons donc la suppression de cet article, en vous rappelant que ce sont précisément ces sanctions qui dissuadent les entreprises d’avoir recours au travail dissimulé.

M. le rapporteur pour avis. La lutte contre le travail dissimulé reste bien sûr une priorité, mais nous considérons que dans le dispositif en vigueur, les sanctions ne sont pas proportionnées à la nature réelle des anomalies. Avis défavorable.

La commission rejette lamendement, puis, suivant lavis défavorable du rapporteur pour avis, la commission rejette lamendement CF92 de Mme Sabine Rubin.

Puis elle émet un avis favorable à ladoption de larticle 17 sans modification.

 

Article 18 : Mesure defficience de la gestion financière des organismes de sécurité sociale

 

La commission examine lamendement CF96 du président Éric Woerth.

Mme Véronique Louwagie. Cet amendement du président Éric Woerth concerne les allégements de charges sociales, ce qui rejoint l’échange que nous avons eu il y a quelques instants. Les allégements de charges sont concentrés sur les bas salaires, ce qui est tout à fait normal compte tenu du chômage. Toutefois, pour renforcer la compétitivité de notre économie, il faut aussi intervenir sur les salaires dépassant largement le niveau du SMIC. C’est une vraie question au regard de la compétitivité de nos entreprises, comme l’a rappelé Jean-Louis Bourlanges tout à l’heure. L’allégement de charges porte sur les salaires jusqu’à 2,5 SMIC maximum. À travers cet amendement, nous vous proposons d’aller au-delà en l’étendant jusqu’à 3 SMIC. Je rappelle que c’était une réflexion du ministre de l’économie et des finances lui-même. Nous n’allons pas jusqu’à 3,5 SMIC comme le rapport Gallois le préconise.

M. le rapporteur pour avis. Le rapport Gallois préconisait d’aller jusqu’à 3,5 SMIC, mais ici vous vous arrêtez à 3, sans doute parce que le président Éric Woerth a systématiquement placé la toise à 3 milliards d’euros dans tous ses amendements. Plus sérieusement, cette proposition, comme les autres, représenterait une dépense trop importante. Il y a d’autres dispositifs pour les entreprises ; c’est une question de choix, comme souvent.

La commission rejette lamendement.

Elle émet ensuite un avis favorable à ladoption de larticle 18 sans modification.

TITRE II
Conditions générales de léquilibre financier de la sécurité sociale

Article 19 : Transfert de recettes entre la sécurité sociale et lÉtat et entre régimes de sécurité sociale

La commission se saisit des amendements identiques CF11 de Mme Valérie Rabault et CF93 de Mme Sabine Rubin.

Mme Christine Pires Beaune. Dans la continuité de ce que nous avons dit depuis le début de cette réunion, dans la mesure où l’article 19 vise à organiser un transfert de recettes de la sécurité sociale vers le budget de l’État, nous proposons, par l’amendement CF11, sa suppression.

Mme Sabine Rubin. Bien que les comptes de la sécurité sociale soient de nouveau dans le vert, le modèle social continue d’être attaqué avec, d’une part, la désocialisation des heures supplémentaires et, d’autre part, la suppression du forfait social – soit 440 millions en moins. Notre amendement CF93 tend à également à supprimer l’article qui met en œuvre ces deux mesures.

M. le rapporteur pour avis. Vous ne m’en voudrez pas, je l’espère, l’une et l’autre, si je ne reviens pas sur ce débat que nous avons déjà eu. En ce qui concerne l’attaque dont ferait l’objet le modèle social, madame Rubin, je rappelle que la France est le troisième pays au monde en termes de pourcentage du PIB consacré à la santé, et le premier pour ce qui est de la faiblesse du reste à charge : il est de 7,5 %. Est-ce l’austérité ? Le modèle social est-il mis à mal ? Il y a des difficultés, que je vois aussi bien que vous, mais les excès ne sont sans doute pas utiles dans le débat.

Mme Émilie Cariou, présidente. Je vous confirme, madame Rubin, que le modèle social est pérennisé, et non mis à mal.

La commission rejette les amendements.

Elle émet ensuite un avis favorable à ladoption de larticle 19 sans modification.

Article 20 : Reprise par la CADES des déficits portés en trésorerie par lACOSS

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 20 sans modification.

 

Article 21 : Approbation du montant de la compensation des exonérations mentionnées à lannexe 5

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 21 sans modification.

 

Articles 22 et 23 : Approbation des tableaux déquilibre de lensemble des régimes obligatoires, du régime général et du FSV pour 2019

La commission émet un avis favorable à ladoption des articles 22 et 23 sans modification.

 

Article 24 : Objectif damortissement de la dette sociale et prévisions sur les recettes affectées au FRR ou mises en réserve par le FSV

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 24 sans modification.

 

Article 25 : Habilitation des régimes de base et des organismes concourant à leur financement à recourir à lemprunt

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 25 sans modification.

 

Article 26 : Approbation du rapport sur lévolution pluriannuelle du financement de la sécurité sociale (annexe B)

 

La commission examine lamendement CF24 de Mme Valérie Rabault.

M. Jean-Louis Bricout. L’amélioration des comptes de la sécurité sociale et le retour à l’équilibre – et même, on l’espère, à l’excédent très prochainement – sont sûrement de bonnes nouvelles. Il est utile de rappeler que c’est aussi l’aboutissement d’une trajectoire amorcée depuis quelques années, et que cette trajectoire est le fruit des sacrifices consentis par les familles et des efforts de gestion réalisés par tous ceux ayant un lien avec la sécurité sociale. Or le rapport Charpy-Dubertret sur les relations financières entre l’État et la sécurité sociale appelle à transférer les excédents de la sécurité sociale vers les caisses de l’État. Nous ne partageons pas du tout les conclusions de ce rapport et réclamons l’autonomie financière de la sécurité sociale. Nous demandons donc la suppression de cet article.

M. le rapporteur pour avis. Je ne reviens pas sur ce débat. Je me contenterai de rappeler que l’imbrication entre activité économique et protection sociale est une réalité. Cela dit, le débat reste totalement ouvert sur ce sujet.

La commission rejette lamendement.

 

Puis elle émet un avis favorable à ladoption de larticle 26 sans modification, de même quà ladoption de la troisième partie modifiée.

 

QUATRIÈME PARTIE :
Dispositions relatives aux dépenses et à léquilibre de la sécurité sociale
pour lexercice 2019

TITRE Ier
Transformer le système de soins

Article 27 : Extension du dispositif de paiement à la qualité des établissements de santé

La commission se saisit, en présentation commune, des amendements CF12 et CF39 de Mme Valérie Rabault.

Mme Christine Pires Beaune. L’amendement CF12 vise à supprimer l’article 27. En effet, il nous semble qu’avant d’envisager de financer la qualité à partir d’indicateurs, encore faut-il que ceux-ci soient adaptés, ce qui n’est pas le cas. De surcroît, l’article prévoit une pénalisation.

L’amendement CF39 est un amendement de repli : il vise à améliorer les indicateurs en ajoutant des indicateurs de résultats mais aussi de satisfaction des usagers.

M. le rapporteur pour avis. Il existe déjà un certain nombre d’indicateurs, madame Pires Beaune – sur l’accueil, la prise en charge par les médecins, les infirmières et les aides-soignantes, la chambre, le repas, ou encore l’organisation de la sortie. Il ne s’agit pas des soins au sens strict : on sait combien l’environnement est important lui aussi. Il existe également des indicateurs purement médicaux, concernant par exemple des événements thromboemboliques, après la pose d’une prothèse de hanche. Tout cela est en construction ; il reste encore beaucoup de progrès à faire. Je partage donc totalement votre préoccupation, mais on ne peut pas dire qu’il n’y a rien. Par ailleurs, la distinction que vous établissez entre indicateurs de procédure et indicateurs de résultats est sujette à interprétation. Je vous demande donc de retirer l’amendement CF39, même si le sujet mérite d’être approfondi.

En ce qui concerne l’amendement CF12, la qualité, comme je l’expliquais à l’instant, on y vient : on a vu les impasses – ou à tout le moins les limites – de la tarification à l’activité, tout comme les limites du budget global. Il faut s’orienter vers la notion de qualité, avec un système de bonus-malus. Il est vrai que le malus peut poser question – c’est le sujet que vous soulevez. Je voudrais toutefois insister sur le fait qu’il existe un certain nombre de garde-fous, de manière à éviter qu’un établissement qui serait en difficulté pour des raisons indépendantes de sa volonté ne soit pénalisé. Nous avons deux ans devant nous pour travailler sur ces questions. Par ailleurs, le seuil minimal de qualité requis doit être mis en cause pendant trois années consécutives, ce qui laisse largement le temps de réagir ; l’établissement peut faire valoir ses observations et les raisons pour lesquelles il n’a pas atteint les objectifs. Bref, on peut appliquer intelligemment le malus. Avis défavorable, par conséquent, à l’amendement CF12.

Mme Christine Pires Beaune. J’entends ce que vous dites, monsieur Alauzet, mais n’étant pas à l’origine de ces amendements, je ne me sens donc pas autorisée à les retirer. Par ailleurs, si je me souviens bien, l’article prévoit une application de ces mesures en 2020.

M. le rapporteur pour avis. Tout à fait.

Mme Christine Pires Beaune. Nous pourrions donc surseoir et les examiner de nouveau dans le cadre du prochain PLFSS.

M. Charles de Courson. Monsieur le rapporteur pour avis, y aura-t-il, oui ou non, dans les indicateurs de qualité, des indicateurs de perception par les malades ?

M. le rapporteur pour avis. Ils sont déjà pris en compte, monsieur de Courson. Je les ai évoqués : il y a l’accueil à l’hôpital, la relation avec le médecin et les infirmières, etc.

M. Charles de Courson. Certes, mais l’évaluation est-elle précise ? Autrement dit, envoie-t-on des enquêteurs demander aux personnes qui ont été soignées quelle est leur perception ? Les médecins sont tous les mêmes : ils font leurs meilleurs efforts mais ils ne se rendent pas compte du fait que, parfois, le patient n’a pas du tout la même perception.

M. le rapporteur pour avis. Je ne peux pas vous répondre avec certitude parce que je ne connais pas la procédure exacte, mais je suppose qu’il y a des questionnaires que le patient doit remplir, parfois même qu’on l’aide à remplir. Quoi qu’il en soit, ces questions de qualité, notamment dans la relation, sont déjà examinées. On recueille d’ores et déjà l’avis du patient : il ne s’agit pas de demander au médecin si son patient est content de son séjour…

La commission rejette successivement les amendements.

Elle émet un avis favorable à ladoption de larticle 27 sans modification.

 

Article 28 : Financement forfaitaire de pathologies chroniques

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 28 sans modification.

 

Article 29 : Amplifier la portée du dispositif dinnovation du système de santé (article 51 LFSS 2018)

La commission examine lamendement CF74 de Mme Sarah El Haïry.

Mme Sarah El Haïry. Nous proposons d’aller plus loin que le texte actuel en permettant, pour la mise en œuvre des expérimentations d’innovation du système de santé, de déroger non seulement aux règles de tarification, mais également aux règles d’organisation. L’idée est de faciliter la coopération de tous les acteurs sociaux, médico-sociaux et du secteur sanitaire. Cet amendement a pour objet de permettre une certaine agilité et une coopération un peu plus large.

M. le rapporteur pour avis. Si nous avions été en commission des affaires sociales, je vous aurais dit : « Avis favorable ». Mais, sur ce sujet, nous sommes à la limite du champ de compétence de notre commission. Sagesse.

La commission adopte lamendement.

Elle émet ensuite un avis favorable à ladoption de larticle 29 modifié.

 

Article 30 : Simplification de lexercice libéral à titre accessoire pour les médecins remplaçants

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 30 sans modification.

 

Article 31 : Étendre lobjet des sociétés interprofessionnelles de soins ambulatoires (SISA) aux pratiques avancées

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 31 sans modification.

 

Article 32 : Renforcer lusage du numérique et le partage dinformation pour améliorer la qualité de la prise en charge

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 32 sans modification.

 

Après larticle 32

La commission examine, en discussion commune, les amendements CF29, CF32 et CF33 de Mme Valérie Rabault.

M. Jean-Louis Bricout. Ces amendements sont chers à notre collègue Guillaume Garot, qui a abordé la question il y a quelques mois dans le cadre d’une proposition de loi. Il s’agit de démographie médicale et du manque de médecins. Nous sommes certainement plusieurs ici à bien nous rendre compte du problème dans des territoires sous-dotés.

L’amendement CF29 concerne plutôt les territoires sur-dotés : il vise à faire en sorte que le conventionnement à l’assurance maladie d’un médecin libéral ne puisse intervenir qu’en concomitance avec la cessation d’activité d’un autre médecin. L’idée est de dire que, là où il y a déjà beaucoup de médecins, le conventionnement ne sera accordé que si l’on prend la place d’un médecin qui exerçait déjà dans la même zone. Il ne s’agit pas de porter atteinte à la liberté d’installation, mais plutôt d’inciter à s’installer dans les zones où la présence du médecin est plus indispensable.

L’amendement de repli CF32 propose de mettre en place ce dispositif d’autorisation de conventionnement dans les zones sur-dotées à titre expérimental, pour une durée de trois ans.

Beaucoup d’efforts ont été faits dans les territoires, avec notamment des contrats de territoire destinés à favoriser l’installation de jeunes médecins, ou encore l’installation de maisons de santé pluridisciplinaires (MSP) : on voit qu’il y a une véritable mobilisation de nos élus dans les territoires. À travers l’article L. 111-2-2 du code de la sécurité sociale, l’État s’est donné à lui-même l’obligation de garantir l’accès effectif des assurés aux soins sur l’ensemble du territoire. Il ne faut pas que le principe de libre installation conduise à la désertification médicale. L’amendement CF33 vise à faire en sorte qu’un décret en Conseil d’État définisse des mesures conciliant le respect de la libre installation et les besoins d’installation. Il prévoirait notamment les modalités selon lesquelles les prestations effectuées par les praticiens ne respectant pas ces conditions peuvent faire l’objet de restrictions dans le remboursement par les organismes d’assurance maladie.

M. le rapporteur pour avis. Monsieur Bricout, il faut prendre en compte le fait qu’un médecin peut faire bien d’autres choses que s’installer en libéral à la fin de ses études. Il peut ainsi travailler dans l’industrie, dans la communication et dans un certain nombre d’institutions. D’ailleurs, seuls 11 % des jeunes médecins s’installent à l’issue de leurs études. Attention, donc, aux fausses bonnes idées, de même qu’à l’illusion selon laquelle il y aurait pléthore dans certains endroits. Il y a effectivement de nombreux médecins à Paris et Lyon et sur la Côte d’Azur, mais il manque des médecins un peu partout, y compris dans les villes. Il n’existe donc pas de réservoir dans lequel on pourrait se fournir. Comme je le disais, les médecins font autre chose que de la médecine libérale. Le problème n’est pas non plus lié uniquement au numerus clausus. Avis défavorable aux trois amendements.

M. Jean-Louis Bricout. Quand on regarde la carte de France de la démographie médicale, les choses sont tout de même assez claires : les médecins se concentrent sur les bords de mer et dans les grandes villes, pour des questions d’attractivité des territoires – car c’est là le problème essentiel. Nous ne proposons pas, dans ces amendements, de remettre en cause la liberté d’installation. Il s’agit plutôt de dire : « Là, vous êtes trop nombreux, arrêtez de vous y installer. Venez plutôt là où la situation est tendue. »

M. le rapporteur général. Je voulais simplement recommander, à la suite du rapporteur pour avis, de prendre garde aux fausses bonnes idées. La sur-dotation se réfère à la population permanente : dans les zones touristiques, ainsi que dans les zones transfrontalières, on constate effectivement, en dépit d’une sur-dotation, des problèmes de couverture médicale. Or ces situations ne sont pas prises en compte. Ce genre d’amendements, que j’appelle « licence IV » – on ouvre un bar licence IV à condition qu’un autre ferme –, risque vraiment de se retourner contre des territoires qui, tout en étant sur‑dotés, ont des problèmes d’affectation de médecins en raison de pointes de fréquentation, ou parce qu’une zone de chalandise est située de l’autre côté de la frontière. Comme le volet transfrontalier n’existe dans aucun plan régional de santé, en dépit de la loi qui l’impose, nous nous retrouverions Gros-Jean comme devant. Je vous invite donc à retirer ces amendements.

M. Michel Lauzzana. Le propos de M. Alauzet est tout à fait pertinent : il ne faut pas chercher à contraindre toujours plus l’installation. Les jeunes médecins ont tellement d’autres possibilités que ce sera contre-productif : ils sont déjà de plus en plus nombreux à se tourner vers la médecine salariée. Il ne s’agit pas d’aggraver les déserts médicaux, et il ne faudrait pas interdire à un médecin d’en remplacer un autre. Et puis voyez la pyramide des âges : les médecins désireux de s’installer auront le choix. La conception autoritaire en vertu de laquelle il serait possible de dicter à un médecin le lieu de son installation ne peut fonctionner avec ces jeunes médecins.

M. Jean-Louis Bricout. Il ne s’agit pas de prendre des mesures coercitives, et nous ne portons pas atteinte au droit d’installation. Simplement, ceux qui s’installent où il y a trop de médecins ne seraient plus conventionnés.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Article 33 : Une santé sans frais en optique, aides auditives et prothèses dentaires

La commission examine lamendement CF13 de Mme Valérie Rabault.

Mme Christine Pires Beaune. Nous demandons que soit remis au Parlement, au plus tard le 1er janvier 2022, un rapport d’évaluation portant sur les conséquences de la mise en œuvre du « 100 % santé » sur l’évolution du prix des complémentaires santé.

M. le rapporteur pour avis. Avis favorable : il faut y voir clair. Pour ma part, je voudrais que l’on sache quelle est, au bout du compte, la part prise par les professionnels, la part prise par la sécurité sociale et la part prise par les mutuelles – et, à travers celles-ci, par les patients. C’est l’ensemble qu’il faut considérer.

Mme Christine Pires Beaune. Je me propose dans ce cas de retirer cet amendement pour le redéposer, une fois réécrit dans le sens suggéré par M. le rapporteur pour avis.

Lamendement est retiré.

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 33 sans modification.

 

Après larticle 33

La commission examine, en discussion commune, les amendements CF42, CF31 et CF30 de Mme Valérie Rabault.

Mme Christine Pires Beaune. Ces trois amendements concernent tous le tiers payant. L’amendement CF42 a pour objet de le généraliser tandis que les amendements de repli CF31 et CF30 visent à l’appliquer dans les centres de santé et les maisons de santé.

M. le rapporteur pour avis. Un autre choix a été fait : celui de passer du tiers payant généralisé au tiers payant généralisable. Voyez le succès, sans contrainte, de la carte Vitale : 99 % des pharmaciens l’utilisent. L’utilité du tiers payant l’imposera plus facilement que la contrainte. Et je vous rappelle que se posait un problème de « tuyauterie » avec 350 ou 400 mutuelles : le Président Hollande lui-même avait prévenu à l’époque qu’il fallait le résoudre au préalable. Nous avons fait le choix du tiers payant généralisable ; nous pensons qu’il s’imposera progressivement.

La commission rejette successivement les amendements.

TITRE II
Améliorer la couverture des besoins de santé

Chapitre Ier
Lever les obstacles financiers à l’accès aux droits et aux soins

 

Article 34 : Amélioration du recours aux dispositifs daide à la couverture complémentaire santé

La commission se saisit de lamendement CF56 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement vise à protéger les bénéficiaires de la CMU complémentaire contributive dans une situation où ils n’auraient pas acquitté leurs droits. Il s’agit de leur permettre de faire valoir leurs observations et d’indiquer, avant que leur couverture complémentaire ne soit suspendue, si leur retard ou leur absence de cotisation s’explique par des raisons légitimes.

La commission adopte lamendement.

 

Puis elle en vient à lamendement CF67 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement s’adresse toujours au même public : après avoir donné à l’assuré la possibilité de s’expliquer, il s’agit de lui accorder un délai de quinze jours pour le faire.

La commission adopte lamendement.

 

Puis elle émet un avis favorable à ladoption de larticle 34 modifié.

 

 

Article 35 : Exonération du ticket modérateur sur les soins de ville pour les personnes modestes à Mayotte

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 35 sans modification.

Article 36 : Gestion et financement des dispositifs de prise en charge exceptionnelle par lassurance maladie

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 36 sans modification.

 

Chapitre II
Renforcer la prévention

Article 37 : Modification du calendrier des examens de santé obligatoires des jeunes de moins de dix-huit ans

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 37 sans modification.

 

Article 38 : Création dun fonds de lutte contre les addictions liées aux substances psychoactives

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 38 sans modification.

 

Article 39 : Généralisation de lexpérimentation portant sur la vaccination antigrippale par les pharmaciens

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 39 sans modification.

Chapitre III
Améliorer les prises en charge

Article 40 : Prise en charge de lintervention précoce pour lautisme et les troubles du neuro-développement             

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 40 sans modification.

 

Article 41 : Accélération de la convergence tarifaire des forfaits soins des établissements dhébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD)

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 41 sans modification.

Chapitre IV
Améliorer les conditions de l’accès aux produits de santé

Article 42 : Renforcer laccès précoce à certains produits de santé innovants, tout en assurant la pérennité du système de prise en charge

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 42 sans modification.

 

Article 43 : Favoriser le recours aux médicaments génériques et biosimilaires

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 43 sans modification.

 

Après larticle 43

La commission se saisit de lamendement CF15 de Mme Valérie Rabault.

M. Jean-Louis Bricout. Cet amendement vise à prendre en compte les investissements en recherche et développement réalisés par l’État, afin d’éviter que le contribuable ne se retrouve à payer deux fois, une première à travers le financement public de la recherche et développement biomédicale et une seconde avec un prix final élevé du médicament, remboursé par l’assurance maladie. Il convient donc de prendre en compte dans la définition du prix du médicament les financements publics qui ont contribué à sa mise au point. En somme, il s’agit de compléter les critères selon lesquels le prix du médicament doit être défini.

M. le rapporteur pour avis. C’est un sujet un peu compliqué : effectivement, un certain nombre de critères président aujourd’hui à la fixation du prix des médicaments et à sa révision : le service médical rendu, les résultats de l’évaluation médico‑économique, les prix des médicaments comparables, les volumes des ventes, etc. Vous voulez, cher collègue, y ajouter un élément totalement différent : l’aide publique dont auraient bénéficié pendant la période de recherche ces médicaments. La mise en œuvre du critère me paraît difficile. En l’état, en l’absence de plus d’informations sur une méthode ou une procédure, j’y suis plutôt défavorable. Et, depuis 2010, je le rappelle, les industries ont beaucoup contribué aux économies – à hauteur, je crois, de 7 milliards d’euros.

Dans le doute, j’émets un avis défavorable, mais la question mérite largement débat.

La commission rejette lamendement.

 

Elle en vient ensuite à lamendement CF16 de Mme Valérie Rabault.

M. Jean-Louis Bricout. Cet amendement fait suite à une observation de la Cour des comptes, qui recommande précisément de renforcer le dispositif de révision des prix des médicaments – révision qui n’est d’ailleurs pas obligatoire aujourd’hui. La Cour recommande d’examiner les critères de révision : à l’issue des cinq années de garantie de prix européen, pour les médicaments les plus innovants ; au bout de trois ans pour les autres médicaments ; en cas d’extension d’indications thérapeutiques.

M. le rapporteur pour avis. Le Premier ministre a rappelé devant le Conseil stratégique des industries de santé l’importance de la négociation. Je préfère m’en tenir à privilégier le dialogue et la négociation à des impératifs.

 

Titre III
Moduler et adapter les prestations aux besoins

Article 44 : Revalorisation maîtrisée des prestations sociales

La commission est saisie des amendements identiques CF99 du président Éric Woerth, CF18 de Mme Valérie Rabault et CF94 de Mme Sabine Rubin.

Mme Véronique Louwagie. Vous proposez dans cet article de sous-indexer certaines prestations sociales, au premier rang desquelles les pensions. Nous n’admettons pas cette disposition, estimant qu’il faudrait plutôt engager des réformes structurelles qui permettent de réduire la dépense publique, au lieu de raboter le pouvoir d’achat des retraités : pas moins de 3 milliards d’euros seront prélevés sur leur pouvoir d’achat en 2019, puis 6 milliards les années suivantes ! Nous proposons donc, par notre amendement CF99 la suppression de cet article.

Mme Christine Pires Beaune. L’amendement CF18 a le même objet. La revalorisation de 0,3 % des pensions est très inférieure au taux d’inflation de 1,4 % prévu dans le PLF pour 2019. Mais les retraités ne seront pas les seuls à être touchés, puisque la sous-indexation concerne également les allocations logement et les allocations familiales.

Mme Sabine Rubin. Notre amendement CF94 est identique. La sous-indexation aura un effet direct sur le pouvoir d’achat des retraités et de certaines familles. De façon indirecte, elle affectera donc également la consommation, voire la croissance. Votre politique nous conduit droit dans le mur.

M. le rapporteur pour avis. En dix ans de réformes des retraites, les actifs ont été largement mis à contribution ; aujourd’hui, nous demandons un effort aux retraités. Il n’est jamais très facile de voir son pouvoir d’achat réduit, mais il ne faut pas oublier que, parallèlement, le minimum vieillesse va augmenter de 100 euros en trois ans, ce qui ne s’était probablement jamais vu, et que nous prenons par ailleurs un certain nombre de dispositions réduisant les dépenses des retraités et donc améliorant leur pouvoir d’achat : le « reste à charge zéro » en particulier constitue une aide très importante pour ceux qui ont besoin d’être appareillés, ou encore à la réforme de l’ACS qui devrait bénéficier à un million et demi de Français, dont un certain nombre de retraités. La réforme structurelle des retraites nous attend dans l’année qui vient. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Puis elle émet un avis favorable à ladoption de larticle 44 sans modification.

 

Article 45 : Majoration du montant maximum du complément de libre choix du mode de garde pour les familles ayant un enfant en situation de handicap

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 45 sans modification.

 

Article 46 : Conséquences de labaissement de linstruction obligatoire à trois ans sur les prestations familiales

La commission est saisie de lamendement CF19 de Mme Valérie Rabault.

M. Jean-Louis Bricout. Puisque le Président de la République propose d’avancer à trois ans l’âge de la scolarisation obligatoire, ce qui me paraît une bonne mesure, nous proposons que l’allocation de rentrée scolaire soit également versée dès les trois ans de l’enfant.

M. le rapporteur pour avis. Pardonnez-moi d’être trivial, mais cette mesure coûterait 475 millions d’euros, alors que la branche famille retrouve à peine l’équilibre. Par ailleurs, ne perdez pas de vue que les familles qui scolarisent leurs enfants voient du même coup leurs frais de garde réduits. L’école permet souvent aux familles de faire quelques économies.

M. Jean-Louis Bricout. Je souscris à votre analyse, mais la branche maladie affiche malgré tout un excédent prévisionnel de 1,2 milliard d’euros… On reste donc dans les clous budgétaires.

La commission rejette lamendement.

 

Puis elle émet un avis favorable à ladoption de larticle 46 sans modification.

 

Article 47 : Harmonisation des modalités dindemnisation du congé de maternité

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 47 sans modification.

 

Article 48 : Mesures en faveur des travailleurs indépendants : convergence des règles en matière de prestations en espèces vers le régime général             

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 45 sans modification.

 

Article 49 : Amélioration du recouvrement de diverses sommes par les organismes de sécurité sociale

La commission est saisie des amendements identiques CF25 de Mme Valérie Rabault et CF75 de Mme Sarah El Haïry.

Mme Christine Pires Beaune. Au moment où le Président de la République lance le chantier d’un revenu universel d’activité, il nous semble prématuré de modifier les modalités de recouvrement des prestations versées à tort. Cela risque non seulement d’être inefficace mais également de pénaliser d’abord les plus faibles. C’est pourquoi nous proposons, par notre amendement CF25, de supprimer l’article 49.

Mme Sarah El Haïry. Une fois n’est pas coutume, mais mon amendement CF75 a le même objet. Permettre des retenues sur des prestations comme l’AAH ou d’autres minima sociaux que touchent les personnes les plus fragiles risque d’accroître la précarité de ces personnes, qui n’ont absolument pas les moyens de faire face à de tels imprévus. Mieux vaut en l’état supprimer cet article et revoir ultérieurement la question du recouvrement dans une perspective plus globale.

M. le rapporteur pour avis. Dans la mesure où nous parlons de personnes en grande difficulté, je n’insisterai pas sur les aspects budgétaires de cette mesure pour les comptes des organismes sociaux. Cela étant, si nous prenons cette mesure, c’est justement pour éviter à ces personnes de subir des mises en demeure, des recouvrements forcés ou des saisies de biens immobiliers, qui sont des procédures autrement plus violentes et bien plus humiliantes.

Dans le revenu universel d’activité, l’ensemble des prestations seront fondues, et je suis donc pour leur fongibilité. Je suis également pour la responsabilisation des bénéficiaires de minima sociaux. Cela n’empêche pas qu’en cas de difficulté majeure, on trouve des solutions pour les accompagner. L’humanité ne se décrète pas, et certainement pas en posant des barrières étanches entre les prestations. Je considère que le principe d’humanité et le principe de responsabilité sont parfaitement compatibles.

Mme Sarah El Haïry. Les règles de calcul de ces prestations ne sont pas les mêmes, et on ne peut donc pas encore parler de fongibilité. Je rappelle qu’il s’agit de minima sociaux et donc d’une population extrêmement fragile.

Nous ne sommes pas pour laisser les choses en l’état, au contraire, mais nous vous alertons sur le fait que ces recouvrements ne sont pas nécessairement la conséquence de fraudes et qu’ils peuvent résulter de simples erreurs de calcul. S’en prendre ainsi aux bénéficiaires est donc potentiellement risqué.

Mme Christine Pires Beaune. J’abonde dans ce sens. Ces prestations ont toutes des modalités et des règles de calcul différentes, et j’imagine que, dans le cadre du chantier qu’ouvre le Président de la République sur le revenu universel, nous aurons à étudier tout cela. Pourquoi se précipiter, au risque de mettre en difficulté des personnes fragiles ?

M. le rapporteur pour avis. C’est un sujet difficile. Nous reprendrons le débat en séance. Pour l’instant, j’émets un avis défavorable.

La commission rejette ces amendements.

Puis elle émet un avis favorable à ladoption de larticle 49 sans modification.

 

Article 50 : Modernisation de la délivrance des prestations sociales

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 50 sans modification.

 

TITRE IV
Dotations et objectifs de dépense des branches et des organismes
concourant au financement des régimes obligatoires

Article 51 : Dotation de lassurance-maladie au FMESSP, à lONIAM, et de la CNSA aux ARS

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 51 sans modification.

 

Article 52 : Objectifs de dépenses de la branche maladie, maternité, invalidité et décès

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 52 sans modification.

Article 53 : ONDAM et sous-ONDAM

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 53 sans modification.

Article 54 : Dotations au FIVA, au FCAATA et transfert au titre de la sousdéclaration AT-MP

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 54 sans modification.

Après larticle 54

La commission est saisie de lamendement CF28 de Mme Valérie Rabault.

M. Jean-Louis Bricout. Il est proposé par cet amendement de tenir compte du burn‑out – un vrai sujet dans les entreprises et même à l’Assemblée – dans le coût des maladies psychiques liées au travail, alors qu’elles sont actuellement supportées par l’assurance maladie. C’est un amendement issu du rapport de Gérard Sebaoun et Yves Censi relatif au syndrome d’épuisement professionnel, dont on sait les dégâts qu’il peut faire dans les entreprises.

M. le rapporteur pour avis. Il s’agit d’un sujet extrêmement subtil, multifonctionnel. Bien souvent, les personnes en burn-out réunissent un cocktail de problèmes professionnels, familiaux, divers et variés, pas toujours faciles à pondérer. Vous soulevez le risque que ces pathologies, si elles sont bien identifiées, et ce n’est jamais très facile, soient plutôt fléchées sur la prise en charge par l’assurance maladie alors qu’elles devraient l’être au titre des risques professionnels. Mais le problème se pose aussi dans l’autre sens : certaines pathologies qui devraient être prises en charge par l’assurance maladie le sont par la branche AT-MP. Il est difficile de mesurer la part professionnelle et la part personnelle du burn-out. Avis défavorable.

La commission rejette cet amendement.

 

Elle examine ensuite lamendement CF44 de Mme Valérie Rabault.

M. Jean-Louis Bricout. Cet amendement est encore lié à la problématique du burn‑out, et des problèmes qui se sont manifestés dans les entreprises Renault et France Télécom : il propose une réfection du barème d’invalidité partielle permanente, qui ne correspond plus à la réalité des nouvelles pathologies de souffrance au travail et empêche toute réelle reconnaissance de celles-ci.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable. Cela rejoint une autre discussion que nous avons eue tout à l’heure sur l’ONDAM, l’hôpital, la qualité de vie au travail. Il faut mettre le paquet sur la qualité de vie au travail. En tout cas, pour la part qui ressortit au travail dans le burn‑out, c’est par ce biais que l’on réglera le problème.

La commission rejette cet amendement.

 

Puis elle examine lamendement CF69 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement reprend une suggestion de notre collègue Perrine Goulet, qui souhaite empêcher que les accidents du travail survenant pendant le temps de la pause méridienne lors d’une activité sportive organisée par l’entreprise, soient imputés à celle-ci. C’est une bonne pratique de l’entreprise d’offrir à ses salariés une activité récréative et de bien-être mais, en cas d’accident pendant cette activité, la faute peut aujourd’hui être imputée à l’employeur.

Mme Cendra Motin. Je suis un peu circonspecte. L’objectif visé est certes honorable : plusieurs études démontrent que, quand l’employeur réussit à faire faire du sport à ses employés, cela augmente la productivité, c’est très bénéfique tout à la fois pour les employés et l’entreprise. Mais cet amendement pourrait être mal perçu. La branche AT-MP, en tout cas les caisses d’assurance retraite et de la santé au travail, fait très bien la distinction. En tant que responsable des ressources humaines, il m’est arrivé d’avoir à gérer un accident de ski en AT-MP au motif que le directeur avait organisé une activité physique dans le cadre d’un séminaire… Si je comprends l’intérêt de l’amendement, je vois aussi les risques qu’il peut faire courir aux salariés et aux employeurs. Je ne suis pas sûre que ce soit très abouti.

Mme Christine Pires Beaune. Je partage le sentiment de Cendra Motin. On sait que les entreprises qui offrent ces activités à leurs salariés le font dans le cadre du bien-être de leurs salariés. Ce sont en général de grandes entreprises, pas des TPE ni des artisans. Elles peuvent supporter financièrement le risque, et elles ne semblent pas demandeuses d’une telle mesure.

Mme Catherine Osson. Je me pose pour ma part la question des professions où la pratique du sport est incluse dans le temps de travail – les pompiers et policiers par exemple.

Mme Véronique Louwagie. Si nous n’adoptons pas un tel amendement, cela ne risque-t-il pas de dissuader les entreprises de promouvoir la pratique sportive sur le lieu de travail, par crainte du risque que cela peut représenter ? Je pense qu’il faut promouvoir cette pratique et donc la sécuriser.

M. le rapporteur pour avis. Je crois que cette proposition de Perrine Goulet est issue de son rapport. Cela résulte donc sans doute d’un travail approfondi. Mme Pires Beaune affirme qu’il n’y a pas de demande, mais j’imagine que Mme Goulet ne l’a pas inventée. Cela étant, je vois que le sujet soulève un débat. Je retire l’amendement à ce stade et nous expliquerons à Perrine Goulet le contenu de nos échanges.

Lamendement est retiré.

 

Article 55 : Objectifs de dépenses de la branche AT-MP

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 55 sans modification.

 

Article 56 : Objectifs de dépenses de la branche vieillesse

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 56 sans modification.

 

Article 57 : Objectif de dépenses de la branche famille

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 57 sans modification.

 

Article 58 : Prévision des charges des organismes concourant au financement des régimes obligatoires en 2019

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 58 sans modification.

Puis elle émet un avis favorable à ladoption de la quatrième partie modifiée.

Enfin, la commission émet un avis favorable à ladoption de lensemble du texte modifié.

 

 

 

*

*     *

 


—  1  —

   Liste des personnes auditionnÉes PAR LE RAPPORTEUR

FHF : M. Alexis Thomas, directeur de cabinet, et Mme Cécile Chevance, responsable du pôle finances

* Conseil national de lOrdre des médecins : Dr François Simon, président de la section Exercice professionnel, et M. Francisco Jornet, directeur des services juridiques

Cour des comptes : M. Denis Morin, président de la 6e chambre, et M. Patrick Lefas, président de chambre honoraire

* Fédération de lhospitalisation privée (FHP) : M. Michel Ballereau, délégué général, et Mme Béatrice Noëllec, directrice des relations institutionnelles

Haute Autorité de santé : Mme Dominique Leguludec, présidente, Mme Katia Julienne, directrice générale, et Mme Catherine Rumeau-Pichon, cheffe du service Évaluation économique et de santé publique

* FEHAP : Mme Christine Schibler, directeur de l’offre de soins et de la coordination des parcours de santé, et Mme Stéphanie Rousval-Auville, directrice adjointe de l’offre de soins et de la coordination des parcours de santé

Santé publique France : M. François Bourdillon, directeur général, M. Martial Mettendorff, directeur général adjoint, et M. Mili Spahic, directeur de cabinet

Direction générale de loffre de soins (DGOS) : M. Thomas Deroche, sous-directeur de la régulation de l’offre de soins, et Mme Céline Faye, cheffe du bureau synthèse organisationnelle et financière de la sous-direction de la régulation de l’offre de soins

* Fédération nationale de la mutualité française (FNMF) : MM. Albert Lautman, directeur général, et Alexandre Tortel, directeur adjoint affaires publiques

Direction de la sécurité sociale : Mme Mathilde Lignot-Leloup, directrice, et M. Morgan Delaye, sous-directeur du financement

Caisse damortissement de la dette sociale (CADES) : M. Jean-Louis Rey, président, et Mme Geneviève Gauthey, responsable budget et communication

Caisse nationale dassurance vieillesse (CNAV) : Mme Pascale Breuil, directrice statistiques, prospective et recherche, et M. Frédéric Guiguet, directeur financier et comptable national

Fonds de solidarité vieillesse (FSV) : M. Frédéric Favié, président

CGT : Mme Julie Massieu et M. Patrick Bourdillon, secrétaires fédéraux

CFDT : M. Bruno Lamy, secrétaire général adjoint de la fédération CFDT Santé-Sociaux

Syncass-CFDT : Mme Anne Meunier, secrétaire générale, et M. Emmanuel Sys, secrétaire national

FO Santé : MM. Luc Delrue et Didier Birig, secrétaires fédéraux, et Mme Amina Moussa, directrice d’hôpital (Syndicat national des Cadres Hospitaliers FO)

Fonds de réserve pour les retraites (FRR) : M. Yves Chevalier, membre du directoire

Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA) : MM. Pascal Cormery, président, et Nicolas Bondonneau, directeur délégué aux politiques sociales

Ministère des solidarités et de la santé : M. Laurent Habert, conseiller budgétaire auprès de Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

Caisse nationale de lassurance maladie (CNAM) : M. Nicolas Revel, directeur général, Mmes Veronika Levendof, responsable du département juridique, et Delphine Rouilleault, directrice de cabinet

Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) : MM. Yann-Gaël Amghar, directeur, Emmanuel Dellacherie, directeur de la réglementation, du recouvrement et du contrôle, et Mme Estelle Denize, secrétaire générale du conseil d’administration, directrice de la communication et des relations publiques

Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) : Mme Isabelle Sancerni, présidente, M. Vincent Mazauric, directeur général, Mme Patricia Chantin, chargée des relations avec le Parlement, et M. Jean-Baptiste Hy, agent comptable

Direction du budget : Mme Marie Chanchole, sous-directrice en charge des finances sociales, et M. David Bonnoit, chef du bureau santé et comptes sociaux

 

 

 

* Ce représentant d’intérêts a procédé à son inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique


([1]) Loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

([2]) Avis n° HCFP – 2018 – 3 relatif aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour l’année 2019.

([3]) Article 6 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale.

([4]) Article 1er de la même ordonnance.

([5]) Ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale.

([6]) Article 4 bis de l’ordonnance n° 96-50, créé par la loi organique n° 2005-881 du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale.

([7]) Article 1er de la loi organique n° 2010-1380 du 13 novembre 2010 relative à la gestion de la dette sociale.

([8]) Cour des comptes, Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, octobre 2018.

([9]) Voir notamment la discussion de l’amendement n° 1605 de M. Éric Woerth lors de la deuxième séance du vendredi 28 septembre 2018 (http://www.assemblee-nationale.fr/15/cri/2017-2018-extra2/20182022.asp#P1430436 ).

([10])  Pour certains emplois comportant des périodes d’inaction, des régimes spécifiques d’équivalence s’appliquent pour déterminer la durée du temps de travail et sa rémunération, selon l’article L. 3121-13 du code du travail.

([11]) Cass. soc. 20-3 1980 n° 78‑840.979 D.

([12]) Loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat.

([13]) La limite maximum du nombre de jours que peut prévoir une convention de forfait annuel en jours est 218 jours, selon l’article L. 3121-64 du code du travail. Le salarié qui le souhaite peut toutefois, en accord avec son employeur, renoncer à une partie de ses jours de repos en contrepartie d’une majoration de son salaire, en vertu de l’article L. 3121-59.

([14]) Le plafond mensuel de la sécurité sociale est fixé à 3 311 euros, ce qui correspond à un plafond annuel de 39 732 euros, selon l’arrêté du 5 décembre 2017 portant fixation du plafond de la sécurité sociale pour 2018.

([15]) Décret n° 2007-1430 du 4 octobre 2007 portant application aux agents publics de l’article 1er de la loi n° 2007–1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat.

([16]) Article 76 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites.

([17]) Articles 2 et 3 du décret n° n°2004-569 du 18 juin 2004 relatif à la retraite additionnelle de la fonction publique.

([18])  Loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat.

([19]) À la différence des impositions de toute nature, les taux des cotisations sociales relèvent du domaine règlementaire.

([20])  La déduction forfaitaire de cotisation patronale de 1,50 euro par heure supplémentaire effectuée dans les entreprises d’au plus vingt salariés est toujours en vigueur (articles L. 241-18 et D. 241-24 du code de la sécurité sociale) ; la déduction de 0,50 euro par heure pour les entreprises de plus de vingt salariés a été supprimée par la loi du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012.

([21]) Annexe 5 du PLFSS.

([22]) Rapport d’information n° 3615 fait au nom du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques sur l’évaluation des dispositifs de promotion des heures supplémentaires prévus par l’article premier de la loi n° 2001-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dite loi « Tepa », par MM. Jean-Pierre Gorges et Jean Mallot, 30 juin 2011, p. 97.

([23]) Selon les données publiées par la DARES en 2015.

([24]) Rapport présenté à la Commission des comptes de la sécurité sociale, Les comptes de la sécurité sociale. Résultats 2017. Prévisions 2018 et 2019, septembre 2018, p. 43.

([25])  Notons toutefois qu’à la lecture des articles L. 136-1 et du I de L. 136-8 du code de la sécurité sociale, le principe est l’application du même taux aux revenus d’activité et aux revenus de remplacement. Dans les faits, seul le régime dérogatoire du II de l’article L. 136-8, prévoyant l’application de taux inférieurs à des revenus de remplacement listés, trouve à s’appliquer.

([26])  Pour la Guadeloupe, la Martinique et La Réunion, ces seuils sont portés à 13 037 euros pour la première part et 3 236 euros pour la première demi-part supplémentaire. Pour la Guyane, ces montants sont respectivement de 13 632 euros et 3 383 euros. À Mayotte, la circulaire de la CNAV du 20 octobre 2017 indique que la CSG n’est pas applicable aux revenus de remplacement.

([27])  Pour la Guadeloupe, la Martinique et La Réunion, ces seuils sont portés à 15 757 euros pour la première part et 4 229 euros pour la première demi-part supplémentaire. Pour la Guyane, ces montants sont respectivement de 16 507 euros et 4 423 euros.

([28]) L’intégralité des 3,8 % du taux réduit de CSG sont déductibles de l’impôt sur le revenu, alors que sur les 8,3 % du taux plein de CSG, 5,9 points sont déductibles de l’impôt sur le revenu.

([29]) Articles 86 et 87 de la loi n° 2017-837 de finances initiale pour 2018.

([30])  Article 9 de la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018.

([31]) Loi n° 2003-47 du 17 janvier 2003 relative aux salaires, au temps de travail et au développement de lemploi.

([32]) Article 2 de la loi n° 2014-892 du 8 août 2014 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014.

([33]) L’assiette (les rémunérations brutes jusqu’à 2,5 SMIC) et le taux (6 %) du CICE et de la réduction forfaitaire sont identiques, la réduction forfaitaire venant donc strictement compenser le CICE.

([34]) Le CITS, lui aussi assis sur les rémunérations brutes jusqu’à 2,5 SMIC, est applicable au taux de 4 %. Ses bénéficiaires se verront appliquer la réduction forfaitaire au même niveau que les bénéficiaires du CICE (6 points), leur procurant un gain net important.

([35])  Antoine Bozio, Sophie Cottet, Clément Malgouyres, Quels effets attendre de la transformation du CICE en réductions de cotisations employeurs ?, Institut des politiques publiques, note IPP n° 36, octobre 2018.

([36]) Tome I de l’annexe Voies et moyens, p. 181.

([37]) L’exception de la cotisation vieillesse permet de ne pas réduire la rémunération prise en compte pour le calcul de la pension de retraite.  

([38]) Ce niveau correspond à l’extinction de l’allègement général.

([39])  Inspection générale des finances, Inspection générale des affaires sociales, Le financement de l’insertion par l’activité économique, rapport n° 2012-M-073-02 et n° RM2013-011P, janvier 2013.

([40]) Article 20 de la loi n° 2013-1203 du 23 décembre 2013.

([41]) Article D. 241-5 du code de la sécurité sociale.

([42]) Loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer.

([43])  Les secteurs du bâtiment et travaux publics, de l’industrie, de la restauration, de la presse, de la production audiovisuelle, des énergies renouvelables, des nouvelles technologies et des centres d’appel, de la pêche, des cultures marines, de l’aquaculture, de l’agriculture, du tourisme, du transport aérien et du transport maritime ou fluvial et l’ensemble des secteurs éligibles au dispositif d’aide fiscale à l’investissement productif de l’article 199 undecies B du code général des impôts.

([44])  P. Cahuc et S. Carcillo dans Alléger le coût du travail pour augmenter lemploi : les clés de la réussite, Institut Montaigne (2014), montrent qu’à des niveaux relativement élevés de rémunération (des niveaux notamment supérieurs à 2,5 SMIC), l’essentiel de l’avantage pour l’employeur se traduit par une augmentation de la rémunération pour le salarié, ce qui n’est pas l’objet principal de ces dispositifs.

([45]) Il convient d’ajouter à ce montant le coût des allègements consentis aux entreprises éligibles aux dispositifs LODEOM mais ayant fait le choix de bénéficier des allègements généraux, pour un total de 171 millions d’euros.  

([46]) Article 2 de la loi n° 2014-892 du 8 août 2014 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014.

([47]) Loi n° 79-10 du 3 janvier 1979 portant diverses mesures en faveur des salariés privés d’emploi qui créent une entreprise.  

([48]) 9 601 euros pour la période du 1er octobre 2015 au 31 décembre 2015.

([49]) Article 4 de la loi n° 2013-1203 du 23 décembre 2013 de financement de la sécurité sociale pour 2014.

([50]) Article L. 862-4 du code de la sécurité sociale.  

([51]) Loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

([52]) Loi  94-637 du 25 juillet 1994 relative à la sécurité sociale.

([53]) Loi  2004-810 du 13 août 2004 relative à lassurance maladie.

([54]) Loi  2015-1702 du 21 décembre 2015 de financement de la sécurité sociale pour 2016.

([55]) Loi  2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, lactivité et légalité des chances économiques.

([56]) Article 54 de la loi n°2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel.

([57])  Cour de justice de l’Union européenne, 26 février 2015, affaire C-623/13, Ministre de lÉconomie et des finances contre Gérard de Ruyter.

([58]) Cour des comptes, L’avenir de l’assurance maladie : Assurer l’efficience des dépenses, responsabiliser les acteurs, novembre 2017.

([59]) Voir l’annexe 7 au projet de loi de financement de la sécurité sociale.

([60]) L’enquête « conditions de travail » de la DARES n’est réalisée que tous les sept ans.

([61]) DREES, Arrêts maladies dans le secteur hospitalier : les conditions de travail expliquent les écarts entre professions, novembre 2017.

([62]) Selon les données publiées par Santé publique France, le nombre de fumeurs quotidiens a diminué d’un million entre 2016 et 2017.

([63]) Nombre de soignants pour un résident.

([64]) Parmi les facteurs d’explication évoqués figurent un nombre de jours ouvrés plus faible qu’en 2016, la baisse de la natalité et la faiblesse de l’épisode de grippe saisonnière.

([65]) L’objectif global de dépenses (OGD) est composé d’une partie de l’ONDAM médico-social, augmenté d’une part des recettes propres de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA).

([66])  Ces concertations ont abouti à la signature du projet de convention dentaire par deux des trois syndicats de chirurgiens-dentistes, représentant plus de 60 % des chirurgiens-dentistes libéraux, ainsi qu’à la signature de protocoles d’accord par deux des trois syndicats d’opticiens, représentant 80 % de la profession, et par l’intégralité des syndicats de l’aide auditive.

([67]) Contrats complémentaires en santé répondant à des critères de prise en charge minimale, notamment du ticket modérateur, et de plafonnement des prix des prestations et actes couverts, dans un objectif de régulation des dépassements d’honoraires et des prix de l’optique, et donnant lieu à l’application d’un régime de prélèvements sociaux favorables.

([68]) La CMU-C n’est pas applicable à Mayotte.

([69]) Au 1er janvier de l’année en cours.

([70]) Un médicament biologique est une substance qui est produite à partir d’une cellule ou d’un organisme vivant ou dérivée de ceux-ci (vaccins, facteurs de croissance, médicaments dérivés du sang…). Un médicament biosimilaire est similaire à un médicament biologique de référence qui a déjà été autorisé en Europe. Le principe de biosimilarité s’applique à tout médicament biologique dont le brevet est tombé dans le domaine public.

([71]) Le fonds était doté de 32 millions d’euros en 2018.

([72]) Ce qui apparaît comme un besoin de financement pour le système de retraite est en revanche une moindre dépense pour le budget de l’État.

([73]) L’article 67 de la loi de finances pour 2016 a substitué aux différents mécanismes de revalorisation fondés sur un taux d’inflation prévisionnel un mécanisme unique fondé sur les données d’inflation portant sur les douze derniers mois, et n’appelant par conséquent pas de régularisation a posteriori.

([74]) Cette mesure n’affecte pas les paramètres de calcul de retraites tels que les cotisations et salaires pris en compte dans le calcul des pensions lors de leur liquidation (salaires portés au compte).

([75]) L’article 40 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 prévoit que « de 2018 à 2020, les montants de l’allocation de solidarité aux personnes âgées mentionnée à l’article L. 815-1 du code de la sécurité sociale et de l’allocation supplémentaire vieillesse prévue à l’article L. 815-2 du même code, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2004-605 du 24 juin 2004 simplifiant le minimum vieillesse, ainsi que les plafonds de ressources prévus pour le service de ces allocations et des prestations mentionnées à l’article 2 de la même ordonnance peuvent être portés, par décret, à des niveaux supérieurs à ceux qui résulteraient de l’application de l’article L. 816-2 du code de la sécurité sociale ».

([76])  Décret n° 2018‑227 du 30 mars 2018 portant revalorisation de l’allocation de solidarité aux personnes âgées.