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N° 3400

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 9 octobre 2020.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES
SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2021 (n° 3360)

TOME VI

ÉCONOMIE

ÉCONOMIE SOCIALE, SOLIDAIRE ET RESPONSABLE

PAR Mme Barbara Bessot-Ballot

Députée

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 Voir les numéros : 3360 et 3399 (Tome III, Annexe 20).

 


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SOMMAIRE

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Pages

introDuction

I. PRÉSENTATION DES DISPOSITIONS FINANCIÈRES RELATIVES AU SECTEUR DE L’ÉCONOMIE SOCIALE, SOLIDAIRE

A. UNE NETTE AMÉLIORATION DE LA LISIBILITÉ DE LA MAQUETTE BUDGÉTAIRE

1. Le transfert de l’action budgétaire consacrée à l’ESS au sein d’un programme de la mission « Économie »

2. Les crédits figurant dans le programme 305 ne reflètent que partiellement les crédits dévolus au financement de l’ESS dans le budget 2021

B. une Évolution stable des crÉdits consacrÉs À l’ess

1. Détail des crédits de la sous-action « Développement de l’économie sociale et solidaire (ESS) et soutien à l’investissement à impact social (IIS) »

a. Les dépenses de fonctionnement

b. Les dépenses d’intervention

2. Détail des crédits de la sous-action « Dispositifs locaux d’accompagnement »

II. Faire de l’ESS un levier pour la relance de l’Économie

A. Les structures de l’Ess face À la crise

1. Les difficultés rencontrées pendant la crise

2. Les dispositifs mis en place globalement salués

B. La place de l’ess dans le plan de relance : une approche transversale

1. La place de l’ESS dans le plan de relance reflète la transversalité de ce secteur

2. Un effort conséquent pour soutenir l’emploi

3. Un plan de soutien à la lutte contre la pauvreté

4. Un accompagnement renforcé pour les tiers-lieux

5. Des dispositifs sectoriels qui bénéficieront aussi à l’ESS

6. Les financements garantis par Bpifrance et la Caisse des Dépôts et consignations

C. faire de l’essr un vecteur de relance pour Le monde d’aprÈs

1. Améliorer et renforcer la portée des outils existants pour une ESS à la fois économique et solidaire

a. L’essaimage des tiers-lieux

b. Repenser l’agrément Entreprise solidaire d’utilité sociale (ESUS)

i. L’agrément ESUS : un label exigeant qui doit faciliter le financement des entreprises poursuivant un impact social avéré

ii. Un dispositif trop peu mobilisé en raison de faiblesses nombreuses

iii. Des clarifications apportées par la loi « PACTE » bienvenues mais encore insuffisantes

iv. Revaloriser l’agrément ESUS : communiquer, simplifier et mobiliser la commande publique

c. Faire de la commande publique un levier pour le développement de l’ESS

i. Des leviers juridiques nombreux et des objectifs ambitieux

ii. Un levier encore très insuffisamment exploité

iii. Une nouvelle ambition pour la commande publique responsable

d. Soutenir les initiatives locales pour assurer la diffusion de l’ESS dans les territoires

i. L’exemple de l’opération « mille cafés »

ii. L’exemple des monnaies locales

2. Poser les jalons au niveau européen d’une diffusion des valeurs et principes de l’ESS à l’ensemble de l’économie

III. Focus sur les coopÉratives d’activitÉs et d’emploi (CAE)

A. La coopÉrative d’activitÉs et d’emploi, un cadre propice au dÉveloppement de l’entrepreneuriat

1. Un cadre sécurisé, émancipateur et collectif

2. L’entrepreneur-salarié : un statut propre aux CAE

B. Des leviers pour encourager le changement d’Échelle des CAE

1. Accroître la visibilité globale et la reconnaissance des CAE par les pouvoirs publics

2. Développer des dispositifs de soutien spécifiques, adaptés à la nature collaborative des CAE, tout en renforçant le maillage territorial

EXAMEN EN COMMISSION

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

 


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introDuction

Consacrée par le législateur avec la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014, l’économie sociale et solidaire (ESS) représente en France 10 % du produit intérieur brut et 14 % de l’emploi privé. Au-delà des chiffres, l’ESS témoigne d’une vision de l’économie renouvelée, où l’entreprise est amenée à jouer un rôle actif dans la cité. L’ESS incarne ainsi la réconciliation et la complémentarité entre le social et l’économie, trop souvent opposés de façon binaire. Dans le contexte très particulier que nous traversons, l’ESS doit être saisie comme une opportunité. Les structures de l’ESS ont été, à l’image de l’ensemble de l’économie, très touchées par la crise sanitaire et économique. Elles recèlent toutefois un potentiel déterminant : les structures de l’ESS seront des acteurs décisifs pour poser les conditions d’une relance inclusive et efficace, fondée sur l’économie de proximité et les territoires. En outre, l’ESS offre des outils particulièrement innovants pour mesurer l’impact économique, social et environnemental du fonctionnement de notre économie. Ces enjeux relatifs à la mesure de l’impact vont prendre une importance croissante dans les années à venir. À ce titre, l’ESS doit jouer un rôle clé pour encourager le déploiement de ces outils et le développement de ces nouveaux modèles économiques, davantage en phase avec les aspirations citoyennes.

Dans la première partie de son avis, votre Rapporteure examine les crédits consacrés à l’ESS dans le projet de loi de finances pour 2021.

Le budget 2021 est marqué par un progrès notable, puisque les crédits consacrés spécifiquement à l’ESS figure désormais dans une action du programme 305 « Stratégies économiques » de la mission « Économie ». Cette amélioration de la maquette budgétaire s’accompagne d’un renforcement considérable du portage politique de l’action publique menée en faveur de l’ESS avec la création d’un secrétariat d’État auprès du ministère de l’économie, des finances et de la relance, en charge de l’économie sociale, solidaire et responsable (ESSR). Votre Rapporteure émet un avis favorable sur les crédits de la mission « Économie » consacrés à l’ESS.

Dans la seconde partie de son avis, votre Rapporteure s’est interrogée sur le rôle que doit jouer l’ESS dans le cadre de la relance de l’économie. Le plan de relance du Gouvernement reflète le caractère profondément transversal de l’ESS. De nombreux soutiens seront apportés, notamment via l’emploi, le plan de lutte contre la pauvreté et les outils de soutien à l’investissement déployés par la Caisse des dépôts et consignations et Bpifrance. L’ESS est créatrice d’emplois non délocalisables et favorise l’émergence sur le long terme de projets économiquement soutenables et socialement innovants. Pour cela, l’ESS a toutes les qualités pour devenir l’un des principaux fers de lance de l’économie du monde d’après. Votre Rapporteure formule un certain nombre de recommandations en ce sens : encourager le développement des tiers lieux, faire de la commande publique un levier pour le changement d’échelle de l’ESS et favoriser le déploiement d’initiatives locales socialement innovantes. L’ESS a également vocation à prendre une nouvelle ampleur au niveau européen, dans un contexte où plusieurs annonces ont été faites par la Commission européenne en ce sens.

Enfin, votre Rapporteure a également souhaité porter une attention particulière dans cet avis au modèle des coopératives d’activités et d’emploi (CAE), qui constituent un cadre très propice au développement de l’entreprenariat. Tirant leur originalité du statut d’entrepreneur-salarié qu’elles admettent en leur sein, les CAE ont l’avantage d’offrir à la fois un accompagnement individuel et collectif à chacun tout en organisant la mutualisation de la gestion des tâches administrative, fiscale et comptable. Le statut d’entrepreneur-salarié ayant notamment démontré sa résilience pendant la crise sanitaire, votre Rapporteure s’est penchée sur les dispositifs adaptés qui pourraient être envisagés pour soutenir le développement des CAE.

 


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I.   PRÉSENTATION DES DISPOSITIONS FINANCIÈRES RELATIVES AU SECTEUR DE L’ÉCONOMIE SOCIALE, SOLIDAIRE

A.   UNE NETTE AMÉLIORATION DE LA LISIBILITÉ DE LA MAQUETTE BUDGÉTAIRE

1.   Le transfert de l’action budgétaire consacrée à l’ESS au sein d’un programme de la mission « Économie »

Cette année et pour la première fois, les crédits consacrés à l’économie sociale, solidaire et responsable figurent au sein de l’action n° 4 « Économie sociale, solidaire et responsable » du programme 305 « Stratégies économiques » de la mission « Économie ». Auparavant, les crédits alloués à l’ESS figuraient au sein de l’action n° 14 « Économie sociale et solidaire » du programme 159 « Expertise, économie sociale et solidaire, information géographique et météorologie » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». Tout comme l’ancienne action n° 14 précitée, l’action n° 4 se décompose en deux sous actions :

– la première sous-action « Développement de l’économie sociale et solidaire (ESS) et soutien à l’investissement à impact social (IIS) » ;

– la deuxième sous-action « Dispositif local d’accompagnement (DLA) ».

La cohérence de la maquette budgétaire s’est donc nettement améliorée depuis l’année dernièreVotre Rapporteure salue le transfert de l’action ESS vers la mission « Économie », qu’elle appelait de ses vœux l’année dernière déjà, et qui devrait permettre de renforcer la cohérence et la lisibilité de l’action publique menée en matière d’économie sociale, solidaire et responsable. Sur le plan administratif, c’est donc désormais le ministère de l’économie, des finances et de la relance qui assurera la gestion des moyens et des personnels en charge de l’ESS et non plus le ministère de la transition écologique. En outre, cette évolution s’inscrit également dans le cadre de la nomination de Mme Olivia Grégoire comme secrétaire d’État à l’économie sociale, solidaire et responsable auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance ([1]). Votre Rapporteure se félicite de ce nouveau portage politique, qui contribue à faire gagner l’ESS en visibilité. Le rattachement au ministère de l’économie et des finances montre également que l’ESS a vocation à irriguer l’ensemble des sujets relatifs aux politiques économiques, sans rester cantonné à un sujet de « niche ».

2.   Les crédits figurant dans le programme 305 ne reflètent que partiellement les crédits dévolus au financement de l’ESS dans le budget 2021

Votre Rapporteure note la persistance de la dispersion des crédits consacrés à l’ESS, liée au caractère intrinsèquement transversal de cette thématique. En effet, l’ESS est bien souvent au croisement de plusieurs politiques publiques, ce qui peut rendre difficile le pilotage et la lisibilité de l’action publique menée en la matière. Il en résulte que certains crédits, qui participent pleinement à la politique publique en faveur de l’ESS, restent inscrits dans d’autres programmes relevant de missions budgétaires distinctes. C’est notamment le cas avec :

 le programme 163 « Jeunesse et vie associative » de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », qui comprend les crédits de soutien à la vie associative. Il faut en effet rappeler que les associations représentent, en nombre, le champ le plus conséquent de l’ESS. L’action n° 1 « Développement de la vie associative » du programme 163 comprend des crédits s’élevant à 55,08 millions d’euros (M€), soit une hausse de 2 % par rapport aux crédits ouverts en 2020 ;

 le programme 102 « Accès et retour à l’emploi » de la mission « Travail et emploi » contient des crédits relatifs au financement des structures d’insertion par l’activité économique (IAE), qui relèvent également du champ de l’ESS. Le projet de loi de finances pour 2021 prévoit une augmentation très conséquente des crédits pour les solutions d’insertion par l’activité économique (IAE), puisque ceux-ci doublent en comparaison au projet de loi de finances (PLF) 2020 ([2]). 2, 419 Md€ en AE et 2, 361 Md€ en CP sont proposés pour la politique de soutien à l’IAE, qui comprend deux lignes budgétaires : l’une relative à l’insertion dans l’emploi au moyen de contrats aidés et l’autre concernant l’accompagnement des publics les plus en difficultés.

B.   une Évolution stable des crÉdits consacrÉs À l’ess

Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2021, les crédits alloués à l’action n° 4 « ESSR » atteignent 19,15 M€ en autorisations d’engagement (AE) et 19,20 M€ en crédits de paiement (CP), soit une diminution d’environ 0,7 M€ en comparaison avec le PLF 2020, où le total des crédits votés avait atteint 19,89 M€ en AE comme en CP. Toutefois, il convient de noter que le périmètre des crédits attribués à l’ESS a intégré en 2020 un « rabot Gilets Jaunes » qui a entraîné une diminution entre les crédits inscrits au PLF 2020 et ceux votés en LFI 2020.

En conséquence, les variations entre les autorisations d’engagement et les crédits de paiement du PLF de cette année, par rapport à la LFI pour 2020, sont quasi inexistantes comme le montre le tableau figurant ci-dessous.

 

En M€

LFI 2020

PLF 2021

 

AE

CP

AE

CP

Sous action « développement de l’ESS »

9 406

9 406

8 752

8 795

Sous alcyons Dispositifs locaux d’accompagnement

9 746

9 746

10 400

10 400

Total

19 152

19 152

19 152

19 196

Source : Données fournies par le Gouvernement.

En outre, il convient de ne pas omettre deux éléments à cette grille de lecture :

– l’action n° 4 « Économie sociale, solidaire et responsable » du programme 305 devrait, comme cela a été indiqué par le Gouvernement, bénéficier de substantiels reports de crédits du fait d’une sous-exécution en 2020, liée notamment aux effets de la crise sanitaire ;

– l’ESS va bénéficier d’un soutien financier accru dans le cadre du plan France Relance. La secrétaire d’État a annoncé 1,3 milliard d’euros en ce sens. Les structures de l’ESS pourront également bénéficier d’un certain nombre d’aides de droit commun ou de dispositifs sectoriels, en lien notamment avec les accords du Ségur de la santé ou des mesures de soutien à l’économie circulaire. Ces éléments propres au plan de relance sont développés dans la deuxième partie du présent rapport.

1.   Détail des crédits de la sous-action « Développement de l’économie sociale et solidaire (ESS) et soutien à l’investissement à impact social (IIS) »

Les crédits de la sous-action « développement de l’ESS et soutien à l’investissement à impact social (ISS) » représentent au total 8,75 M€ en AE et 8,80 M€ en CP. Il s’agit là d’une légère baisse par rapport aux crédits du budget 2020. Comme précisé par le Gouvernement, cette baisse est liée à une modification de périmètre avec le transfert de 692 M€ (AE = CP) de subventions attribuées à six centres de ressources des dispositifs locaux d’accompagnement (DLA). Les crédits sont donc stables à périmètre constant.

a.   Les dépenses de fonctionnement

Les crédits consacrés aux dépenses de fonctionnement restent stables par rapport aux années précédentes, avec un total de 0,3 M€. Ils sont consacrés, selon les informations fournies dans le bleu budgétaire, à quatre types de dépenses :

– les frais de fonctionnement du réseau des correspondants régionaux, présents dans les administrations déconcentrées et travaillant en coordination avec les chambres régionales de l’ESS (CRESS) ;

– l’organisation de conférences et d’évènements favorisant la promotion et le développement de l’ESS ;

– les études destinées à l’évaluation de certains projets à impact social financés via les contrats à impacts ;

– la dématérialisation du dispositif de l’agrément Entreprise solidaire d’utilité sociale (ESUS).

Il convient de noter que les frais de fonctionnement du Haut-Commissariat à l’ESS et à l’innovation sociale ([3]) ainsi que les frais de fonctionnement du portail numérique ESSpace ne figurent plus dans la liste des dépenses de fonctionnement.

b.   Les dépenses d’intervention

Pour rappel, l’année précédente, les dépenses d’intervention comprenaient quatre lignes budgétaires consacrées respectivement :

– au soutien aux structures de l’ESS (hors dispositifs locaux d’accompagnement) pour 2,9 M€ en AE et CP ;

– au programme « French impact » pour 1,8 M€ en AE et 3,8 M€ en CP ;

– au soutien à l’investissement, notamment par le truchement des contrats à impact sociaux (CIS) et du fonds d’innovation sociale (FISO) 2, pour 3,9 M€ en AE et 1,95 M€ en CP ;

– au développement européen et international de l’ESS pour 0,5 M€ en AE et CP.

Dans le PLF 2021, la maquette compte toujours quatre lignes budgétaires, mais les périmètres évoluent. En particulier, la ligne consacrée à l’initiative French Impact disparaît. Pour mémoire, le French Impact a été lancé en 2018 par le Haut-Commissaire à l’économie sociale et solidaire et à l’innovation sociale (HCESSIS) au Ministère de la transition écologique et solidaire. Il s’est organisé en association loi 1901. Le French Impact se décline, jusqu’à fin 2020, en deux programmes structurants :

– le programme pionniers : à la suite de l’appel à projets lancé le 18 janvier 2018, 22 entreprises de l’ESS ont été sélectionnées, pour bénéficier d’un programme d’accompagnement national afin d’accélérer leur développement et leur impact territorial. Elles bénéficient du parrainage d’un membre du Gouvernement et d’un soutien financier de 7,5 M€ sur la période 2018-2020 (5 M€ sur les crédits de l’État et 2,5 M€ sur des crédits de la Caisse des dépôts et consignations).

– le programme « territoires French Impact » : la première vague d’appel à manifestation d’intérêts « French Impact Territoires » a permis de labelliser 13 territoires pour un financement total de 1,2 M€ en AE et CP en 2019 et 2020. Au total, le Gouvernement indique la labellisation de 27 territoires.

Le budget 2021 ne prévoit pas de financements nouveaux pour ces deux programmes, arrivés à échéance.

Les quatre lignes prévues pour le budget 2021 font l’objet d’une analyse plus exhaustive ci-après.

i.   Soutien aux structures de l’ESS : 2, 83 millions d’euros

Ces 2,83 millions d’euros doivent soutenir les structures de l’ESS dans leurs actions de promotion de l’ESS, de structuration des acteurs et d’accompagnement des entreprises et des porteurs de projet. Plus précisément, cela se traduit par l’allocation de crédits aux centres de ressources de l’ESS, aux organismes de recherche, aux têtes de réseaux et aux organismes fédérateurs de l’ESS.

En ce qui concerne les chambres régionales de l’ESS (CRESS) leur financement est en partie assuré par le biais de conventions garantissant l’exécution des missions qui leur ont été confiées par la loi du 31 juillet 2014. Pour mémoire, dans un objectif de simplification bienvenu, ESS France et le Conseil national des chambres régionales de l’économie sociale et solidaire (CNCRESS) ont fusionné au cours du premier semestre 2020. Cette fusion a été saluée par l’ensemble des acteurs comme source d’accroissement de la lisibilité de l’écosystème de l’ESS, ce qui contribue conséquemment au renforcement de leur poids politique. Les acteurs auditionnés insistent cependant sur le fait qu’une certaine flexibilité et adaptabilité territoriale doit être maintenue. Votre Rapporteure estime qu’il pourrait être souhaitable, afin d’assurer une bonne visibilité aux acteurs, d’inscrire les crédits consacrés aux CRESS explicitement dans les documents budgétaires.

ii.   Soutien à l’investissement pour l’innovation sociale : 4,25 millions d’euros en autorisations d’engagement et 4,30 millions d’euros en crédits de paiement

Ces crédits sont en augmentation par rapport à l’année précédente. Ils doivent notamment permettre d’apporter un financement pour les contrats à impact.

Les contrats à impact : un mode de financement innovant

Les contrats à impacts sociaux, désormais dénommés contrats à impact, assurent un mode de financement innovant, dans le cadre d’appels à projets expérimentaux visant à apporter une réponse à des risques sociaux persistants. Les contrats à impact reposent sur le principe d’un paiement au résultat : l’État intervient comme tiers payeur de tout ou partie du pré-financement en fonction du niveau d’atteinte des objectifs d’impact social définis contractuellement. En cas de superformance, une prime peut être versée. Il est d’ailleurs prévu que les résultats des opérateurs soient certifiés par un évaluateur externe. Le recours à un tel dispositif se justifie par la difficulté de trouver des financements de tels programmes sociaux ou environnementaux expérimentaux, à la fois innovants et risqués.

En 2021, les crédits consacrés au soutien à l’investissement permettront notamment de procéder au paiement de la contribution annuelle de l’État aux contrats à impact social engagés entre 2016 et 2020 et d’engager de nouveaux contrats à impact, dans le cadre d’un dispositif organisé sous la forme d’un fonds de paiement aux résultats. La mise en place de ce dispositif correspond à une recommandation du rapport préparé par M. Frédéric Lavenir en 2019 ([4]), visant à développer, simplifier et moderniser les contrats à impact. Ce fonds est également soutenu financièrement par la Caisse des dépôts et consignations et la Banque des territoires. Plusieurs contrats pourraient ainsi être signés dès fin 2020 dans les domaines suivants : économie circulaire, levée des freins à la mobilité, lutte contre le sans-abrisme. Le premier appel à manifestations d’intérêt sur l’économie circulaire a été lancé le 23 septembre 2020. Votre Rapporteure se félicite du soutien apporté aux contrats à impact. Ceux-ci paraissent particulièrement pertinents dans le contexte de la crise actuelle, qui exacerbe un certain nombre de risques sociaux et qui appelle donc à développer de nouvelles modalités d’actions pour les pouvoirs publics.

L’investissement dans l’innovation sociale passe également par le fonds d’investissement social de deuxième génération (FISO 2), créé à l’occasion d’une convention pluriannuelle avec Bpifrance. La convention signée en juillet 2019 entre le ministère de la transition écologique et Bpifrance visait à garantir un montant de 21 M€ de financement de dépenses éligibles à ce dispositif sur une durée de 4 ans. En sus de la dotation budgétaire de l’État, ce fonds est également financé par les régions volontaires. Si FISO 1 a permis le financement de 50 projets innovants pour 11,2 M€ de dépenses éligibles, FISO 2 a pour ambition de financer l’amorçage d’environ 200 projets innovants au cœur des territoires. C’est une montée en puissance dont votre Rapporteure se félicite.

Enfin, l’État poursuivra son soutien à l’accompagnement des projets bénéficiant des fonds d’amorçage. Ces fonds ont vocation à favoriser l’émergence et le développement d’entreprises à impact social sur l’ensemble du territoire français, par des actions de formation, de mises en relation et de financement.

iii.   Soutien territorial à l’innovation sociale : 1 million d’euros

Le Gouvernement indique également dans les documents budgétaires qu’1 million d’euros seront consacrés au soutien territorial à l’innovation sociale. Le secrétariat d’État a l’ambition de poursuivre le soutien de l’État aux territoires et collectifs territoriaux qui portent des projets d’économie sociale et solidaire en 2021, en particulier dans le cadre de pôles territoriaux de coopération économique (PTCE). Votre Rapporteure considère que les PTCE doivent aujourd’hui être encouragés et leurs modalités de fonctionnement simplifiées ([5]). Dans le même esprit, votre Rapporteure souhaite également que des appels à projets pour la labellisation de nouveaux PTCE soient lancés.

iv.   Développement européen et international : 0,37 million d’euros

Le champ de cette ligne budgétaire est presque identique à celui de l’année dernière. Les crédits qui y sont consacrés sont marqués par une légère baisse. Ils doivent notamment permettre de financer les dépenses de représentation de la France auprès de l’Organisation internationale du travail (OIT) et de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

2.   Détail des crédits de la sous-action « Dispositifs locaux d’accompagnement »

Les crédits à destination des dispositifs locaux d’accompagnement (DLA) se maintiennent exactement au même niveau que l’année dernière, avec 10,4 millions d’euros. Pour mémoire, l’enveloppe du PLF 2020 attribuée au DLA était en nette hausse par rapport aux deux années précédentes. Ces crédits d’intervention sont délégués aux directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE) qui attribuent, via des conventions, des subventions aux DLA locaux. La Rapporteure se félicite du maintien du montant de cette dotation budgétaire à destination de ces dispositifs, dont l’efficacité est globalement saluée sur le terrain.

Les DLA assurent des services d’accompagnement professionnel destinés à la consolidation technique et financière des structures employeuses de l’ESS. Comme le prévoit l’article 1er du décret n° 2015-1103 du 1er septembre 2015, les DLA ont pour finalité « la création, la consolidation, le développement de l’emploi et l’amélioration de la qualité de l’emploi par le renforcement du modèle économique de la structure accompagnée, au service de son projet et du développement du territoire ». Cet accompagnement, à destination principalement des associations, se traduit par des missions d’ingénierie sur leurs projets stratégiques, leur organisation et leurs compétences internes, leur modèle économique, leurs projets de regroupements et de partenariats. Ces dispositifs font l’objet d’un cofinancement par l’État, la Caisse des dépôts et consignations (CDC), le Fonds social européen (FSE) et les collectivités territoriales. 6 000 structures sont accompagnées chaque année, dont 80 % de structures associatives et un quart de structures d’insertion par l’activité économique (IAE).

Les DLA jouent un rôle important dans les territoires, notamment dans le contexte actuel de crise sanitaire, puisqu’ils sont à même d’identifier avec pertinence les acteurs en détresse. En effet, les DLA ont été des acteurs essentiels du déploiement, en 2020, du dispositif de secours de l’ESS (DSESS), dont les modalités sont développées dans la deuxième partie du présent rapport.

Depuis mai 2018 et dans le cadre du chantier « DLA 2020 », ce dispositif fait l’objet d’un important travail de refonte de sorte à renforcer son efficacité. Au terme de deux ans de travaux, la réforme du DLA mise en œuvre par le comité stratégique national ([6]) s’articule autour des grands axes suivants :

– le cœur de métier des DLA est réaffirmé : les DLA constituent un véritable parcours d’accompagnement pour les bénéficiaires et ne sauraient se limiter, comme c’est parfois le cas, à l’intervention d’un cabinet extérieur à la structure. Dans la même lignée, des efforts sont également fournis pour améliorer la formation des chargés de mission DLA ;

– la gouvernance régionale du dispositif est renforcée ;

– le financement est sécurisé : l’État et la CDC prennent désormais conjointement en charge un « financement socle » permettant d’assurer, territoire par territoire, et pendant la durée des conventions pluriannuelles d’objectifs  ([7]), les charges des opérateurs liées à l’existence même du dispositif ;

– à l’avenir, la distribution des enveloppes financières déléguées en région devrait être plus équitable. En effet, très certainement pour des raisons historiques, un manque de lisibilité dans les critères d’affectation a été observé, certaines régions parfois comparables en typologie et en taille étant dotées de moyens financiers très différents. Dans le cadre du chantier « DLA 2020 », la nécessité de disposer de critères transparents pour la répartition des enveloppes financières de l’État et de la CDC dans une logique d’équité territoriale a été réaffirmée. Les nouvelles clés de répartition entraînant potentiellement une variation importante du montant des enveloppes allouées jusqu’à présent, il a donc été jugé préférable de mettre en œuvre cette nouvelle méthodologie à l’occasion du nouveau conventionnement (2020‑2022) ;

– l’apport du Fonds social européen (FSE) devrait également être optimisé. Comme l’indique le Gouvernement, si le FSE a été fortement sollicité dès la création du dispositif, sa mobilisation ne représente aujourd’hui qu’en moyenne 2,6 M€ pour des raisons techniques qui freinent considérable sa sollicitation. Dans le cadre des travaux préparatoires au financement FSE pour la période 2021-2027, un travail conjoint entre la direction générale du Trésor (DG Trésor) et la direction générale de l’emploi et de la formation professionnelle (DGEFP) sera mené afin de réduire ces problèmes techniques et être en mesure de solliciter 7 M€ dès 2021 au niveau national.

Le Gouvernement a indiqué qu’une nouvelle négociation avait été ouverte avec l’AVISE, l’opérateur national du DLA, en vue, d’une part, du lancement d’un DLA national et, d’autre part, du renforcement des moyens des DLA départementaux et régionaux.

Ces orientations vont dans un sens qui apparaît très favorable à votre Rapporteure. Les DLA sont en effet un acteur-clé sur le terrain, dont le rôle pivot doit également consister à déceler des projets innovants et utiles pour leur proposer accompagnement et soutien.

 


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II.   Faire de l’ESS un levier pour la relance de l’Économie

A.   Les structures de l’Ess face À la crise

1.   Les difficultés rencontrées pendant la crise

Les entreprises de l’ESS ont été particulièrement touchées par la crise sanitaire engendrée par la Covid-19, et ce, notamment en raison de certaines caractéristiques inhérentes à leur modèle économique. En effet, les structures de l’ESS se caractérisent déjà en temps normal par un faible niveau de fonds propre et une trésorerie limitée. Ainsi, 68 % ([8]) des associations en moyenne se seraient vues contraintes de cesser la quasi-intégralité de leurs activités entre mai et juin derniers. 2,5 % des associations employeuses présenteraient un réel risque de dépôt de bilan, soit environ 4 000 associations. Quant aux tiers-lieux, 80 % d’entre eux considèrent que la situation met leur structure en danger à court ou moyen terme et admettent que 41 % des personnes employées dans un tiers-lieux sont concernées par une potentielle perte d’emploi ([9]).

Certains secteurs de l’ESS ont été bien davantage pénalisés que d’autres par cette crise sanitaire. De manière générale, les structures opérant dans le domaine du sanitaire et du social ont vu leur activité augmenter, du fait de leur mobilisation en première ligne dans la lutte contre la propagation du virus. La situation est en revanche bien différente pour les structures dans les domaines du sport, de la culture, du tourisme social ou de l’insertion par l’activité économique (IAE), qui accusent tous des très fortes pertes d’activité et dont la pérennité est parfois sérieusement mise à mal. Dans le domaine de l’IAE, l’arrêt complet ou une forte diminution des activités a concerné 95 % des structures d’insertion pendant la crise, tandis que 15 % évoquent des difficultés sérieuses de trésorerie  ([10]).

La complexité de l’accès pour les entreprises de l’ESS aux dispositifs de soutien mis en place par le Gouvernement représente l’un des principaux écueils identifiés au cours de la période de gestion de la crise sanitaire. En effet, les différents acteurs de l’ESS auditionnés par votre Rapporteure pointent des difficultés liées aux spécificités économiques et juridiques des structures de l’ESS ainsi qu’un manque d’information de ces dernières quant aux dispositifs auxquels elles étaient légalement éligibles ([11]). Ce manque de reconnaissance des particularismes de l’ESS couplé à une faible lisibilité des aides mises en place ont eu pour conséquence un moindre recours des structures de l’ESS aux dispositifs de droit commun. De fait :

 le fonds de solidarité, annoncé le 30 mai 2020, n’a pu bénéficier aux structures à statut associatif pendant un mois et demi. Ce fonds était entre autres très difficile à mobiliser pour les structures non assujetties aux impôts commerciaux ;

– des difficultés à mobiliser le chômage partiel ont également été recensées, en raison notamment d’une appréciation hétérogène des DIRECCTE en ce qui concerne le ciblage de ces mesures. Par ailleurs, la date de mise en application du dispositif de chômage partiel a été reportée dans le secteur culturel ;

 en matière de prêt garanti par l’État (PGE) ([12]), selon des données de la Banque de France, au 28 août 2020, 4 550 associations avaient bénéficié du PGE, pour un montant total de 1,4 Md€ et 21 fondations, pour un montant total de 21,6 M€. Toutefois, des difficultés sont également soulignées, notamment par les tiers lieux qui font part de leurs difficultés à mobiliser les banques, méconnaissant leur modèle économique.

De manière générale cependant, le Gouvernement a veillé à remédier le plus rapidement à ces entraves techniques, en opérant parfois de profonds ajustements dans des délais contraints, de sorte à éviter la mise à l’écart des structures de l’ESS quant aux dispositifs de soutien financier mis en place au cours de la crise sanitaire.

2.   Les dispositifs mis en place globalement salués

Pour pallier les difficultés économiques induites par la crise sanitaire, le Gouvernement a mis en place un certain nombre de dispositifs ad hoc qui sont progressivement parvenus à lever partiellement certaines entraves à la prise en charge en bonne et due forme des structures de l’ESS :

 la cellule de crise mise en place par le HCESSIS a permis l’établissement d’un dialogue constructif entre les acteurs de l’ESS et les représentants des pouvoirs publics, au cours de réunions hebdomadaires permettant un accroissement de la lisibilité ([13]) des dispositifs à destination des structures de l’ESS mais aussi le signalement au Gouvernement d’angles morts de sa politique de soutien ;

 la mobilisation des têtes de réseaux de l’ESS pendant la crise a été primordiale, puisque celles-ci ont fait office de relais de l’information gouvernementale ;

 des outils de soutien financier spécifiques ont été élaborés, à l’image de la création d’un nouveau prêt « relève solidaire », mis en place par France Active et prévu jusqu’en 2022. Ce prêt, dont la charge du coût de financement revient à l’État, est à taux gratuit jusqu’à 100 000 euros ;

 le dispositif de secours ESS (DSESS) du HCESSIS, élaboré en partenariat avec France Active et BNP Paribas entre autres ([14]), est à destination des très petites entreprises ESS (3 salariés ou moins) et prend la forme d’une subvention forfaitaire de 5 000 €, de sorte à répondre au besoin immédiat en liquidités de ces structures. Un montant d’un million d’euros a été mobilisé (par fongibilité interne des lignes ESS du programme 159) pour l’aide financière forfaitaire. Un appel à abondement à des partenaires publics et privés a été lancé concomitamment ([15]) : un total de 3 M€ de fonds privés a donc été mobilisé en complément du million d’euros apporté par l’État, portant le total des aides à 4 M€, auquel on peut ajouter 4 M€ de fonds de de valorisation de l’accompagnement DLA). Cette aide comprend également un volet diagnostic et un accompagnement par le truchement du DLA. Au 10 juillet 2020, plus de 700 structures avaient bénéficié du dispositif et 1 300 équivalents temps plein (ETP) avaient été sauvegardés par ce biais selon le Gouvernement. Les secteurs le plus concernés ont été la culture (31 %), l’éducation loisirs et animation (15 %) et le développement durable (12 %) ;

 l’adoption de mesures sectorielles a également contribué à renforcer une dynamique transversale de soutien à l’ESS. Pour ce qui est du secteur de l’insertion, le renouvellement exceptionnel des contrats pour le maintien du lien d’accompagnement à distance et l’éligibilité des contrats à durée déterminée d’usage (CDDU) à l’activité partielle ont été garantis. Le plan d’urgence à l’aide alimentaire ou encore le plan de relance pour le secteur du tourisme ont également permis une aide précieuse pour les structures de l’ESS concernées.

B.   La place de l’ess dans le plan de relance : une approche transversale

1.   La place de l’ESS dans le plan de relance reflète la transversalité de ce secteur

Tout en reconnaissant qu’il est nécessaire que les spécificités inhérentes aux structures de l’ESS soient reconnues et prises en considération, le Gouvernement n’a pas considéré comme opportun le fait de distinguer l’ESS parmi l’ensemble des volets du plan de relance. L’ESS regroupe des structures qui partagent certes des valeurs communes, mais exercent également dans des domaines et sous des formes extrêmement variées : le plan de relance du Gouvernement s’est donc fait le reflet de cette transversalité. Les structures de l’ESS seront ainsi bénéficiaires de mesures :

 leur étant spécifiquement destinées ;

 en faveur de secteurs dans lesquels les structures de l’ESS occupent une part dominante, voire quasi-exclusive, à l’image du secteur de l’IAE ;

 en faveur d’autres secteurs (économie circulaire, soutien à l’emploi des personnes en situation de handicap, tourisme durable, transition agro-écologique, médico-social) dans lesquels exercent également des structures de l’ESS, qui bénéficieront dès lors des mêmes mesures que les entreprises dites « classiques » de ces secteurs.

Pour ce plan de relance, le Gouvernement adopte donc la même ligne de conduite que durant la crise sanitaire, où dispositifs d’urgence spécifiquement calibrés pour l’ESS et dispositifs de droit commun (PGE, fonds de solidarité, baisse de charges, notamment) s’étaient mutuellement complétés.

2.   Un effort conséquent pour soutenir l’emploi

Selon les estimations du Gouvernement, près de 600 millions d’euros bénéficieront aux structures de l’ESS qui favorisent l’insertion professionnelle des jeunes, notamment grâce à une hausse de 200 millions d’euros pour l’insertion par l’activité économique.

Le dispositif des contrats « Parcours Emploi Compétences » (PEC) bénéficiera pour sa part d’une enveloppe budgétaire supplémentaire de 200 millions d’euros  ([16]), avec un objectif de 60 000 PEC additionnels.

Un appui important sera également apporté aux missions locales, à l’accompagnement des jeunes en service civique et aux associations sportives, pour un montant de 190 millions d’euros.

3.   Un plan de soutien à la lutte contre la pauvreté

Un plan de soutien de 100 millions d’euros financera directement les associations du secteur, dont l’urgence de l’action s’accroît sous le poids de la crise économique.

4.   Un accompagnement renforcé pour les tiers-lieux

Quel que soit leur statut, leur développement en matière d’inclusion numérique et leur pérennisation seront soutenus à hauteur de 30 millions d’euros.

5.   Des dispositifs sectoriels qui bénéficieront aussi à l’ESS

Comme évoqué précédemment, les structures de l’ESS faisant partie de secteurs de l’économie concernés par des mesures de soutien financier, dans le cadre du plan de relance, pourront bénéficier de plein droit d’aides mobilisées au même titre que les entreprises dites « classiques » du secteur.

Il s’agit notamment des secteurs de l’économie circulaire, du soutien à l’emploi des personnes en situation de handicap, du tourisme durable et de la transition agro-écologique, qui bénéficieront d’une enveloppe totale de 800 millions d’euros, mais également du secteur médico-social, dont 2,1 des 6 milliards d’euros prévus dans le cadre du Ségur de la Santé viendront financer notamment la rénovation des établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) publics comme des EHPAD à statut non lucratif, éligibles de plein droit à ce soutien exceptionnel.

6.   Les financements garantis par Bpifrance et la Caisse des Dépôts et consignations

Au titre de la convention pluriannuelle de partenariat entre l’État et la CDC, l’enveloppe consacrée au développement de l’ESS a été augmentée à hauteur de 300 millions d’euros, ce qui représente un triplement de l’engagement financier initial consenti entre 2020 et 2022.

Bpifrance prévoit non seulement de financer la relance du secteur de l’ESS à hauteur d’au moins 100 millions d’euros mais également d’injecter 130 millions d’euros entre 2020 et 2022 pour le soutien des prêts d’honneur solidaires, de sorte à développer l’entrepreneuriat social dans les territoires, notamment auprès de publics fragiles.

Le volet « vert » du 4ème programme d’investissements d’avenir bénéficiera également aux acteurs de l’ESS.

Au total, la secrétaire d’État à l’ESSR a annoncé 1,3 milliard d’euros spécifiquement orientés pour l’ESS dans le cadre du plan de relance. Ce fléchage pluriannuel correspond à des engagements financiers prévus jusqu’à 2022.

C.   faire de l’essr un vecteur de relance pour Le monde d’aprÈs

Si l’ESS a démontré une vraie résilience dans les territoires, c’est notamment parce qu’elle est créatrice d’emplois non-délocalisables et qu’elle favorise l’émergence sur le long terme de projets économiquement soutenables et socialement innovants. Le plan de relance du Gouvernement gagnerait à proposer des actions visant à s’en inspirer voire à essaimer un certain nombre de dispositifs propres à l’ESS, qui permettent de répondre aux besoins socio-économiques et aux aspirations sociétales des territoires, notamment les plus ruraux.

1.   Améliorer et renforcer la portée des outils existants pour une ESS à la fois économique et solidaire

a.   L’essaimage des tiers-lieux

Les tiers-lieux se définissent par le fait qu’ils accueillent plusieurs activités au sein d’un même lieu. La convivialité et l’esprit collaboratif qui les caractérisent permettent de favoriser l’émergence de projets collectifs innovants et créatifs. Les tiers-lieux participent en outre activement au développement économique des territoires et permettent notamment l’animation des communautés de personnes qui y travaillent et y vivent. En 2018, le France compterait 1 800 tiers-lieux, dont 46 % en dehors des métropoles ([17]).

D’après l’association France Tiers-lieux auditionnée par votre Rapporteure, 9 tiers-lieux sur 10 auraient été mobilisés pendant la crise sanitaire au travers d’actions de solidarité́ locale et ce malgré les importantes difficultés économiques qu’ils rencontraient eux-mêmes à cette période. À titre d’exemple, la fabrication de matériel médical pour le personnel soignant a mobilisé 30 000 personnes au sein de 400 tiers-lieux.

L’action des tiers-lieux, au service d’un développement économique, écologique et solidaire des territoires, est ainsi déjà au cœur des priorités auxquelles les plans de relance ont vocation à répondre dans les mois à venir :

– les tiers-lieux sont au cœur du développement du télétravail, comme alternative au domicile, fournissant un cadre approprié, assurant bonnes conditions matérielles et maintien du lien social ;

– face aux difficultés rencontrées par les acteurs économiques locaux, les artisans, les très petites entreprises (TPE) et les petites et moyennes entreprises (PME), les logiques de mutualisation des moyens, outils et machines prônées par les tiers-lieux sont autant de solutions à une reprise rapide de l’activité ;

– pour contrer la montée significative du chômage, les tiers-lieux sont des acteurs légitimes pour développer des parcours de formation aux modèles pédagogiques innovants. Les tiers-lieux favorisent en outre l’émergence entrepreneuriale locale, en catalysant des écosystèmes accompagnateurs de la création d’entreprise et en animant des communautés d’entrepreneurs ;

– historiquement engagés dans la transition écologique, ils seront clés dans les déploiements des politiques vertes favorisant les circuits courts, les filières de réemploi, le recyclage et la lutte contre l’obsolescence programmée.

Afin d’encourager le développement du modèle des tiers-lieux, il est nécessaire d’appuyer dans les territoires l’ingénierie nécessaire à l’émergence d’acteurs locaux en capacité d’expérimenter et de mettre en place de tels modèles. De plus, il est indispensable d’accélérer la structuration de réseaux régionaux de tiers-lieux en développant des projets à l’échelle de plusieurs tiers-lieux. À cet égard, votre Rapporteure se félicite que le plan de relance prévoit des fonds supplémentaires (20 M€ en AE et 5 M€ en CP) pour le déploiement des programmes nationaux de l’Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT). En effet, parmi ces programmes figure le programme « Nouveaux lieux, nouveaux liens », qui permet justement d’apporter un soutien financier et en ingénierie aux tiers-lieux. Dans le cadre de ce programme, l’État a lancé un appel à manifestation d’intérêt permanent doté de 45 M€, pour identifier 300 fabriques de territoire ([18]) dont la moitié doit être implantées en quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) et l’autre moitié en territoires ruraux.

b.   Repenser l’agrément Entreprise solidaire d’utilité sociale (ESUS)

i.   L’agrément ESUS : un label exigeant qui doit faciliter le financement des entreprises poursuivant un impact social avéré

Créé par la loi relative à l’économie sociale et solidaire du 31 juillet 2014, l’agrément « Entreprise solidaire d’utilité sociale », dit « agrément ESUS » est prévu à l’article L. 3332-17-1 du code du travail. Celui-ci permet aux entreprises qui en sont titulaires d’accéder à des possibilités de financement élargies, via l’épargne solidaire ou via le volet solidaire des dispositifs de réduction d’impôt destinés au financement de certaines catégories de PME, comme le dispositif dit « Madelin IR-PME » ([19]). Dans ce cadre, l’article 137 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 a institué un régime fiscal de faveur au bénéfice des entreprises agréées ESUS. En vertu de ces nouvelles dispositions, les entreprises agréées ESUS peuvent bénéficier du dispositif IR-PME pendant une durée de 10 ans, alors les PME classiques n’y ont accès que pendant 7 ans. Enfin, l’agrément ESUS peut également permettre aux entreprises qui en sont titulaires de bénéficier d’un accès particulier à la commande publique, selon les politiques d’achat public déterminées par les collectivités territoriales, bien que cette dernière possibilité semble peu utilisée.

Certaines entreprises bénéficient de cet agrément de plein droit ([20]). Pour les autres, elles peuvent l’obtenir via une procédure d’agrément dont les critères d’obtention sont particulièrement exigeants. L’entreprise doit ainsi :

– poursuivre une utilité sociale à titre d’objectif principal, cet objectif devant figurer dans les statuts de l’entreprise ;

– prouver que la recherche d’utilité sociale a un impact financier sur l’entreprise ;

– avoir une politique de rémunération respectant 2 conditions : la moyenne des sommes versées, y compris les primes, aux 5 salariés ou dirigeants les mieux payés ne doit pas excéder un plafond annuel fixé à 7 fois le SMIC et la rémunération versée au salarié le mieux payé ne doit pas excéder un plafond annuel fixé à 10 fois le SMIC ;

– les titres de capital de l’entreprise ne doivent pas être négociés sur un marché financier.

Concrètement, les entreprises candidates doivent remplir un dossier d’agrément, instruit par les DIRECCTE. L’agrément ESUS est généralement délivré pour une durée de 5 ans ([21]) par le préfet de département.

ii.   Un dispositif trop peu mobilisé en raison de faiblesses nombreuses

Dans la pratique, l’agrément « ESUS » paraît encore largement sous exploité. Trop peu d’entreprises le sollicitent et l’obtiennent, notamment en raison de la complexité et des difficultés relatives à la procédure de l’agrément. À l’heure actuelle et selon les dernières données du Gouvernement en date du premier trimestre 2019, environ 2000 entreprises sont aujourd’hui titulaires de l’agrément, dont plus de la moitié sont des associations. Si ces chiffres sont en augmentation, c’est encore trop peu face au potentiel que représente l’agrément ESUS.

Plusieurs difficultés sont à souligner :

– l’ensemble des acteurs s’accorde pour souligner la grande complexité des règles administratives afférentes à l’octroi de l’agrément. En outre, la complexité de ces règles semble également être à l’origine de disparités territoriales importantes dans les conditions d’octroi dudit agrément. Les différences de pratiques selon les DIRRECTE nuisent à la clarté du dispositif ;

– cette complexité entraîne une méconnaissance de ce dispositif dont les avantages associés paraissent encore trop limités. Ainsi, l’agrément ESUS n’est pas suffisamment attractif car il nécessite une procédure très complexe pour des avantages méconnus.

iii.   Des clarifications apportées par la loi « PACTE » bienvenues mais encore insuffisantes

La loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi « PACTE », a apporté quelques adaptations au dispositif de l’agrément ESUS dans un double objectif de clarification et de simplification.

Dans l’objectif de clarification, les modalités d’appréciation de l’impact des activités d’utilité sociale sur le modèle économique de l’entreprise demandeuse de l’agrément ESUS ont été modifiées. Alors qu’elles s’appuyaient auparavant en partie sur un schéma de justification complexe, basé sur la notion de rentabilité financière, la loi « PACTE », prévoit que cette appréciation se fonde exclusivement sur la notion d’impact significatif des activités d’utilité sociale sur le compte de résultat de l’entreprise. La notion d’impact social a également été revisitée, comme détaillée dans l’encadré ci-dessous.

La notion d’utilité sociale dans l’agrément ESUS

Selon les modifications apportées par l’article 105 de la loi « PACTE », pour que l’entreprise soit considérée comme poursuivant un objectif d’utilité sociale, elle doit remplir l’une de ces 4 conditions alternatives ([22]) :

 soutenir des personnes fragiles du fait de leur situation socio-économique, médico‑sociale et sanitaire, et lutter contre leur exclusion ;

 participer à la cohésion sociale et territoriale ;

 contribuer à l’éducation à la citoyenneté et la réduction des inégalités sociales et culturelles ;

 concourir au développement durable, à la transition écologique, à la promotion culturelle ou à la solidarité internationale, dans la mesure où ce concours participe des trois missions précitées (soutien aux personnes fragiles, cohésion territoriale, participation à l’éducation à la citoyenneté).

Les exigences formelles ont en outre été simplifiées. Ainsi, le plafonnement de rémunération n’a désormais plus à être inscrit dans les statuts de l’entreprise demandeuse. Cette exigence pouvait pénaliser l’accès à l’ESUS notamment pour de nombreuses associations – pour lesquelles le changement de statuts constitue une difficulté importante – alors qu’il est très simple de justifier du respect du plafond par d’autres moyens.

iv.   Revaloriser l’agrément ESUS : communiquer, simplifier et mobiliser la commande publique

Votre Rapporteure suggère plusieurs pistes afin de donner à l’agrément ESUS toute la place qu’il mérite.

En premier lieu, il est nécessaire de mieux faire connaître cet agrément auprès des entreprises qui pourraient en bénéficier. Ce travail de communication et de sensibilisation a d’autant plus de sens du fait des modifications apportées par la loi « PACTE ». Il est désormais bien établi que l’agrément ESUS est juridiquement ouvert à toute entreprise, notamment issue des secteurs culturel, environnemental ou de la solidarité internationale, à condition que cette entreprise oriente de manière significative son activité vers la recherche d’un impact social et qu’elle respecte les autres conditions d’attribution de l’agrément. Les réseaux consulaires ainsi que les acteurs de terrain du monde de l’ESS doivent être mobilisés en ce sens.

En deuxième lieu, la procédure d’agrément doit être fluidifiée et harmonisée. La simplification des critères d’obtention prévue par la loi « PACTE » va dans le bon sens. Le Gouvernement a indiqué à votre Rapporteure prévoir une procédure de dématérialisation pour l’obtention de l’agrément, ce dont votre Rapporteure se félicite. Il paraît également nécessaire de mobiliser les acteurs de l’ESS, et notamment les CRESS, afin que ces dernières puissent accompagner sur le terrain les entreprises qui souhaitent faire une demande d’agrément. Enfin, votre Rapporteure souhaite également insister sur la nécessaire harmonisation par les DIRECCTE des conditions de délivrance de l’agrément.

Au-delà, votre Rapporteure considère qu’il est essentiel de mieux valoriser les avantages propres à l’obtention d’un label « ESUS ». Pour cela, la commande publique peut être un levier considérable. Le Gouvernement pourrait communiquer en ce sens auprès des collectivités territoriales, afin que celles-ci développent de façon plus systématique des politiques d’achat responsable, qui permettent de valoriser dans les procédures de marchés publics les entreprises « ESUS ».

c.   Faire de la commande publique un levier pour le développement de l’ESS

Avec 10 % du PIB, la commande publique représente un potentiel conséquent pour valoriser le secteur de l’ESS et encourager son changement d’échelle. Les pouvoirs publics sont investis d’un devoir d’exemplarité en la matière. Il est essentiel de mettre en place une commande publique responsable, pour offrir de nouvelles voies de développement aux entreprises du secteur de l’ESS. En vertu du droit national et conformément à nos engagements européens, la commande publique est régie par des règles strictes à même de garantir la transparence des conditions d’attribution, la non-discrimination et le bon usage des deniers publics. Ces règles fondamentales n’empêchent pas les pouvoirs adjudicateurs d’exiger un certain nombre de clauses sociales et environnementales et d’utiliser un certain nombre de leviers pour favoriser à bon escient les acteurs et les valeurs de l’ESS.

i.   Des leviers juridiques nombreux et des objectifs ambitieux

Au niveau national, la commande responsable fait l’objet de plans d’action pluriannuels. Le dernier plan national d’action pour les achats publics durables (PNAAPD), qui couvre la période 2014-2020, a notamment fixé les objectifs suivants : pour 2020, 25 % des marchés passés doivent comprendre au moins une disposition sociale et 30 % au moins une disposition environnementale.

L’article 13 de la loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire a rendu obligatoire, au-delà d’un certain seuil, l’adoption et la publication par les collectivités d’un schéma de promotion des achats publics socialement responsables. Sont soumis à cette obligation l’ensemble des acheteurs qui dépensent dans le cadre de leur commande publique un montant annuel supérieur 100 millions d’euros hors taxe ([23]). À l’occasion de la loi n° 2015-992 du 17 avril 2015 relative à la transition écologique pour la croissance verte, cette obligation a été enrichie d’une nouvelle composante environnementale. Les personnes publiques concernées doivent désormais adopter un schéma de promotion des achats publics socialement et écologiquement responsables (SPASER). Les collectivités ne sont toutefois pas contraintes pour ce qui concerne la détermination, la périodicité, la durée et les modalités de mise à jour du schéma. Au total, près de 160 collectivités publiques doivent répondre de cette obligation.

Les règles relatives à la commande publique ont considérablement évolué ces dernières années sous l’impulsion du législateur européen. Si la Cour de justice de l’Union européenne admet depuis longtemps les critères environnementaux ou sociaux, le législateur européen s’est résolument engagé dans le sens d’une commande publique plus responsable, dans le cadre de la nouvelle directive 2014/24/UE du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics. Ces nouvelles orientations se traduisent aujourd’hui en droit interne dans le nouveau code de la commande publique. Les conditions dans lesquelles les pouvoirs adjudicateurs peuvent intégrer des considérations sociales et environnementales dans les achats publics ont été clarifiées et simplifiées. L’article L. 2112-2 du code de la commande publique dispose ainsi que « les conditions d’exécution peuvent prendre en compte des considérations relatives à l’économie, à l’innovation, à l’environnement, au domaine social, à l’emploi ou à la lutte contre les discriminations ».

En outre, le droit offre également la possibilité de réserver, sous certaines conditions, des marchés publics aux entreprises de l’ESS. Ainsi, l’article L. 2113-5 du code de la commande publique indique que pour un certain nombre de services sociaux et services spécifiques, les pouvoirs adjudicateurs peuvent réserver les marchés en question aux entreprises de l’économie sociale et solidaire.

ii.   Un levier encore très insuffisamment exploité

Malgré les progressions constatées et bien qu’il soit difficile d’obtenir des chiffres actualisés et précis, les objectifs fixés par le plan national 2014-2020 paraissent loin d’être atteints, comme en fait état le rapport du Conseil économique, social et environnemental (CESE) paru en 2018 relatif à la commande publique responsable ([24]). Le rapport indique ainsi qu’environ 8 % des contrats de la commande publique intègrent une clause sociale et 10 % une clause environnementale.

Les obligations fixées par la loi « ESS » concernant l’élaboration de schémas responsables sont trop peu respectées. Selon ce même rapport du CESE, seules 3 à 7 % des collectivités concernées ont répondu à cette obligation.

De façon globale, les acheteurs publics peinent dans l’ensemble – et malgré de nombreuses bonnes pratiques qu’il convient de saluer – à s’approprier les critères d’attribution de la commande publique autre que le prix. La Commission européenne le regrette dans un rapport rendu en 2019, dans lequel elle souligne que « le prix le plus bas est encore utilisé comme seul critère d’attribution dans plus de la moitié des procédures de passation de marchés, en dépit des directives sur les marchés publics qui laissent aux acheteurs publics toute latitude pour décider de fonder leur choix plutôt sur des critères liés au rapport coût/efficacité et à la qualité  ([25]) ».

iii.   Une nouvelle ambition pour la commande publique responsable

Fort de ce constat en demi-teinte, votre Rapporteure estime qu’une nouvelle impulsion doit être donnée en matière de commande publique responsable.

Il incombe en premier lieu que la loi soit respectée et que les SPASER soient effectivement mis en place par les collectivités concernées. Afin de faciliter l’appropriation de cet outil par les collectivités et dans l’objectif d’en faire un dispositif opérationnel au service de la commande publique responsable, ses finalités et objectifs pourraient être précisés. Le rapport du CESE préconise en ce sens que ces SPASER comportent obligatoirement un certain nombre d’objectifs, dont un objectif en volume et en montant de marchés orientés vers les TPE et PME, un objectif en volume et en montant de marchés orientés vers les structures de l’économie sociale et solidaire, une évaluation du déploiement des pratiques de sourçage ([26]) et un suivi du pourcentage des clauses sociales et environnementales. Votre Rapporteure s’associe à ces préconisations.

Il est par ailleurs essentiel de sensibiliser et d’accompagner l’ensemble des collectivités publiques, et non pas uniquement celles concernées par l’obligation d’élaboration d’un SPASER, vers une commande publique plus responsable. Les petites collectivités, en particulier dans les zones rurales, peuvent aussi avoir un rôle à jouer pour valoriser le tissu économique local et les circuits courts. Votre Rapporteure se félicite du rôle joué en la matière par le téseau des collectivités territoriales pour une économie solidaire (RTES) et les CRESS et les encourage à poursuivre leurs actions. Dans ce travail de sensibilisation, les formations et les échanges de bonnes pratiques entre acheteurs publics doivent se multiplier.

Les outils existent, il faut désormais enclencher une volonté politique à même de s’en saisir. Votre Rapporteure invite les collectivités à faire usage des possibilités de réserve des marchés publics aux entreprises de l’ESS, telles que prévues dans le code de la commande publique. Les acheteurs publics doivent également mobiliser la panoplie des différents outils mis à leur disposition pour favoriser une commande responsable. Outre les clauses de nature sociale et environnementale qui doivent impérativement se développer, des pratiques telles que l’allotissement systématique des marchés, qui permettent aux TPE d’accéder à la commande publique, ainsi que le développement du sourçage peuvent permettre des améliorations conséquentes.

La notion de « clause sociale » gagnerait également à être élargie et clarifiée. L’absence de définition précise de cette notion a pour conséquence que les clauses sociales sont essentiellement concentrées sur le levier de l’insertion des personnes éloignées de l’emploi et des personnes en situation de handicap. Des évolutions doivent être envisagées pour élargir les clauses sociales afin de permettre aux entreprises de mieux valoriser leurs actions sociales ou sociétales.

Enfin, il est également essentiel d’accompagner les structures de l’ESS pour que celles-ci puissent candidater avec efficacité à la commande publique. Là encore, les CRESS peuvent offrir un accompagnement juridique essentiel pour permettre aux opérateurs de se positionner efficacement.

d.   Soutenir les initiatives locales pour assurer la diffusion de l’ESS dans les territoires

i.   L’exemple de l’opération « mille cafés »

Votre Rapporteure considère avec un intérêt particulier l’opération « mille cafés » conduite par le groupe SOS en partenariat avec le Gouvernement. Le groupe SOS a lancé l’opération 1 000 cafés en septembre 2019. Cette opération a pour objectif d’assurer la reprise de 1 000 cafés dans des communes de moins de 3 500 habitants. Conçus comme des lieux de vie, ces nouveaux cafés visent à apporter un nouvel espace de convivialité et de services en milieu rural. Outre l’activité de restauration, les cafés en question pourront également offrir d’autres types de services, selon les besoins de chaque territoire (offre d’épicerie, accès à la presse, accès au numérique, accès aux services publics, etc.). Le groupe SOS assure le risque entrepreneurial, notamment en réalisant l’investissement financier initial. Les collectivités territoriales partenaires portent dans la majorité des cas le projet immobilier. Cette initiative est soutenue financièrement et techniquement par le Gouvernement dans le cadre de l’agenda rural, annoncé par la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. 40 premières communes ont pu être officiellement sélectionnées en janvier et juillet 2020. Au total, 100 communes doivent être sélectionnées d’ici la fin de l’année. Ce projet s’accompagne en outre de la création de nouvelles licences IV gratuites pour les communes de moins de 3 500 habitants.

Votre Rapporteure se félicite de ce projet qui constitue un vrai levier pour garantir la vitalité économique et l’attractivité des territoires ruraux.

ii.   L’exemple des monnaies locales

Par ailleurs, votre Rapporteure tient à réitérer les recommandations qu’elle avait pu formuler l’année dernière dans le cadre de son avis consacré aux monnaies locales. Reconnus par la loi « ESS », ces systèmes d’échanges complémentaires à la monnaie centrale peuvent être un vrai levier pour assurer le développement de l’ESS dans les territoires. Au cœur de ces projets réside en effet la volonté de promouvoir l’ESS et le développement territorial de proximité. Votre Rapporteure avait identifié l’année dernière plusieurs leviers pour favoriser leur développement, tels que favoriser l’investissement dans les monnaies locales numériques, faciliter et clarifier les règles d’implication des collectivités territoriales et encourager l’emploi des fonds vers le financement de projets solidaires.

2.   Poser les jalons au niveau européen d’une diffusion des valeurs et principes de l’ESS à l’ensemble de l’économie

La Commission européenne a récemment commandé une étude de terrain à Social Economy Europe (SEE) portant sur l’impact de la crise sanitaire sur les structures de l’ESS dans les différents pays européens. En parallèle, le groupe de travail inter-agences des Nations Unies sur l’économie sociale et solidaire (UNTFSSE) publiait un rapport concluant que les acteurs de l’ESS devaient être absolument intégrés aux plans de relance économique des différents gouvernements. De ces deux rapports, il ressort que l’ESS doit être envisagée comme clé de voûte pour la reconstruction d’une économie plus résiliente, plus innovante et faisant la part belle aux logiques de coopération. Ils proposent également la création d’un nouveau paradigme économique qui aurait pour logiques cardinales celles de l’économie circulaire, de la sécurité alimentaire, de l’échange de bonnes pratiques, du développement économique local, de l’innovation sociale et du bien commun.

Un plan d’action européen 2021 pour l’économie sociale, récemment annoncé par la Commission européenne, a pour objectif de mobiliser toutes les institutions de l’Union européenne de sorte à permettre l’intégration de l’ESS au sein de la stratégie de relance économique, et ce en particulier dans le cadre du budget pluriannuel 2021-2027.

Par ailleurs, la Commission européenne a annoncé en décembre 2019 son intention de réviser la directive comptable relative aux règles de reporting extra‑financier, à l’occasion de sa communication sur le « European Green Deal », suivi de la publication fin janvier 2020 d’un document d’analyse d’impact. La Commission européenne poursuit ici un double objectif : il s’agit de garantir aux investisseurs une information adéquate quant à la soutenabilité des pratiques des entreprises dans lesquelles ils investissent mais aussi de permettre la convergence de pratiques identifiées comme responsables et vertueuses pour l’environnement et la société dans son ensemble.

Enfin, la création d’une taxonomie européenne, introduite dans le cadre du plan « Financer la croissance durable » de la Commission européenne, a été pensée pour réglementer l’investissement durable. Cette taxonomie fournit un outil de classification qui clarifie auprès des acteurs financiers ce qui doit être considéré comme une activité « verte » ou « durable », avec pour intention ferme de couper court aux pratiques de « green-washing ».

C’est donc un véritable virage au niveau européen, voire international, qui s’amorce en faveur de l’ESS à l’horizon 2021. La France peut donc profiter de cette dynamique pour joindre ses efforts à ceux de la Commission européenne en faisant de l’ESS l’un des jalons de la relance économique.

 


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III.   Focus sur les coopÉratives d’activitÉs et d’emploi (CAE)

A.   La coopÉrative d’activitÉs et d’emploi, un cadre propice au dÉveloppement de l’entrepreneuriat

1.   Un cadre sécurisé, émancipateur et collectif

Expérimentées depuis le milieu des années 1990 et consacrées par la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire, les coopératives d’activités et d’emploi (CAE) ont pour objet « l’appui à la création et au développement d’activités économiques » portées par des personnes physiques. Les CAE sont constituées sous forme de sociétés coopératives participatives (SCOP) ([27]) à 65 % ou de sociétés coopératives d’intérêt collectif (SCIC) Scic ([28]) à 25 %, les 10 % restant étant constituées sous forme de coopératives ([29]). On dénombre actuellement 150 CAE. La loi « ESS » a considérablement encouragé leur développement avec une augmentation de 35 % du nombre de structures depuis 2015. Le maillage territorial en matière d’implantation des CAE est très variable d’une région à l’autre, certaines régions comme l’Auvergne-Rhône-Alpes, l’Occitanie, Provence-Alpes-Côte d’Azur et l’Île-de-France étant nettement mieux dotées en la matière que leurs voisines. Comme toute autre entreprise commerciale, la pérennité des CAE est fonction de leur rentabilité. En 2018, leur chiffre d’affaires cumulé est de 200 millions d’euros, la moyenne par CAE se situant à 2,3 millions d’euros. Les CAE sont présentes dans des secteurs très diversifiés tels que l’artisanat, les services aux entreprises ou aux particuliers, la formation, le bâtiment ou le transport.

Le fonctionnement des CAE s’inscrit dans une double dynamique :

– d’une part, il est garanti à chacun un cadre propice à l’apprentissage de son métier d’entrepreneur avec un accompagnement individuel et collectif ;

– d’autre part, la gestion administrative, fiscale et comptable est mutualisée ([30]) de sorte à libérer davantage de temps à chaque entrepreneur pour se focaliser sur le cœur de son activité. En outre, la CAE offre aux porteurs de projets un cadre juridique, c’est-à-dire un numéro de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et une immatriculation au registre du commerce et des sociétés.

2.   L’entrepreneur-salarié : un statut propre aux CAE

Les CAE tirent leur originalité du statut d’entrepreneur-salarié ([31]), légalement assimilé à celui des salariés.

En tant qu’entrepreneur, l’entrepreneur-salarié gère en autonomie son activité et agit en chef d’entreprise indépendant. Les démarches de prospection commerciale ainsi que la comptabilité analytique propre à son affaire sont à sa charge.

En tant que salarié, il est embauché en contrat à durée indéterminée et bénéficie de facto de la couverture sociale d’un salarié classique et non de celle, bien plus parcellaire, d’un micro-entrepreneur ou d’un indépendant. La CAE est en charge de garantir aux entrepreneurs-salariés qu’elle abrite leur affiliation à la sécurité sociale,  le paiement de leurs cotisations ainsi que la déclaration d’éventuels accidents du travail ([32]). L’entrepreneur-salarié bénéficie même d’une indemnisation en cas de chômage. Il perçoit en outre un salaire mensuellement, dont les modalités de calcul sont détaillées dans l’encadré ci-après, ce qui lui assure une relative sécurité financière.

Généralement, l’entrepreneur démarre par une période de test de son activité au sein de la CAE avec un contrat d’appui au projet d’entreprises (CAPE) ([33]), d’une durée maximale de douze mois, renouvelable deux fois. Si l’activité est considérée comme viable, l’entrepreneur signe un contrat d’entrepreneur-salarié (CESA) avec la CAE. À terme, l’entrepreneur-salarié peut devenir entrepreneur-salarié associé de la CAE.

En contrepartie, et pour contribuer au financement des services mis en place par la coopérative dont il bénéficie, l’entrepreneur-salarié doit s’acquitter d’une contribution financière, dont le montant et les modalités de calcul, les assiettes et les taux entre autres, sont déterminés dans le cadre de l’assemblée générale de la CAE par les entrepreneurs-salariés associés. Cette contribution représente en moyenne 8 % à 15 % de la marge brute ([34]) des entrepreneurs-salariés.

Ce statut a démontré une vraie résilience pendant la crise sanitaire, puisqu’il garantissait notamment aux entrepreneurs-salariés l’éligibilité au dispositif de chômage partiel.

Le calcul de la rémunération de l’entrepreneur-salarié

La rémunération de l’entrepreneur-salarié est déterminée au chapitre II du titre III du livre III de la septième partie du code du travail. L’article R. 7331-11 détaille ainsi que celle‑ci est composée :

         d’une part fixe : celle-ci est versée mensuellement et « son montant est déterminé forfaitairement, en fonction des objectifs d’activités minimales définis dans le contrat de l’entrepreneur-salarié ». Elle n’a pas vocation à représenter la part principale du revenu de l’entrepreneur-salarié et son niveau est généralement faible ([35]) ;

        d’une part variable : celle-ci est calculée pour chaque année et dépend du chiffre d’affaires prévisionnel généré par l’activité, après déduction des charges directement et exclusivement liées à son activité ([36]) mais aussi de sa contribution relative aux services mutualisés proposés par la CAE. L’enjeu de sécurisation des entrepreneurs est donc pris en compte par la CAE, qui choisit dans la plupart des cas de lisser la rémunération mensuelle en intégrant la part fixe et un acompte régulier sur la part variable, qui peut être beaucoup plus important. À la fin de chaque exercice, la CAE régularise le calcul de la part variable due à l’entrepreneur-salarié au titre de l’exercice écoulé et lui verse le solde restant ([37]).

Ainsi, une étude conduite en 2015 montre que les entrepreneurs-salariés peuvent espérer atteindre en moyenne un salaire de 1 138 € bruts mensuels, soit 78 % du SMIC brut mensuel en valeur 2015, après avoir passé trois ans ou plus au sein d’une CAE. En comparaison, le niveau de revenu des micro-entrepreneurs actifs est de 450 € en moyenne par mois tandis que les indépendants perçoivent 2 900 €.

Passé un délai maximal de trois ans à compter de la signature du contrat entre la CAE et l’entrepreneur-salarié, ce dernier est confronté à trois possibilités :

 devenir entrepreneur-salarié associé de la CAE, sous réserve que sa candidature soit validée par les sociétaires, pour pérenniser son activité tout en jouissant toujours d’un accompagnement personnalisé. C’est le cas de 30 % ([38]) des entrepreneurs à l’issue des trois années passées au sein d’une CAE. En outre, il sera intégré dans les instances de gouvernance de la CAE et aura la possibilité d’entrer au capital de la CAE ;

 quitter la CAE avec pour intention de créer son entreprise, quelle qu’en soit la forme juridique. C’est le cas de 19 % ([39]) des entrepreneurs ayant intégré une CAE ;

 renoncer à son projet entrepreneurial, si celui-ci s’est avéré non viable. C’est le cas de 51 % ([40]) des entrepreneurs ayant intégré une CAE.

B.   Des leviers pour encourager le changement d’Échelle des CAE

1.   Accroître la visibilité globale et la reconnaissance des CAE par les pouvoirs publics

Contrairement à d’autres formes d’entrepreneuriat, les CAE ne jouissent que d’une visibilité très limitée au niveau national. Ce problème de visibilité a été largement souligné lors des auditions conduites par votre Rapporteure. Plusieurs évolutions peuvent être envisagées pour y remédier :

 favoriser le renforcement de l’accès pour les CAE aux dispositifs de soutien et de sécurisation de droit commun. Aujourd’hui, le manque de visibilité du modèle des CAE conduit à une insuffisante prise en compte de leurs spécificités par les pouvoirs publics. Ainsi, les entrepreneurs-salariés n’ont pas eu immédiatement accès aux dispositifs d’activité partielle mis en place pendant la crise. Si cette problématique paraît désormais réglée, des ajustements sont encore nécessaires notamment pour aligner les modalités de calcul de l’allocation de l’activité partielle des entrepreneurs-salariés sur celles de entrepreneurs-salariés associés ([41]). Enfin, des difficultés importantes concernant l’accès au fonds de solidarité pour les porteurs de projet sous contrat CAPE sont également soulignées ;

 orienter davantage les porteurs de projets vers les CAE : les porteurs de projet en recherche d’une structure pour les accueillir pourraient être plus systématiquement orientés vers les CAE, notamment via Pôle emploi. L’accent devrait être mis sur les nombreux avantages associés au statut d’entrepreneur-salarié, notamment en matière de protection sociale. À ce jour, on ne dénombre que 12 000 entrepreneurs en CAE ([42]) contre 100 000 en portage salarial et 1,3 million de micro entrepreneurs, alors que ces deux derniers statuts sont moins protecteurs que celui d’entrepreneur-salarié.

Dans ce contexte, votre Rapporteure se félicite de la création à venir de la fédération des CAE qui contribuera à l’amélioration de la visibilité de ces structures. La fédération s’est donnée comme objectifs de doubler le nombre d’entrepreneurs-salariés associés d’ici 2025, tout en professionnalisant les pratiques au sein des CAE. Votre Rapporteure souscrit à cet un objectif ambitieux auquel il faut se donner les moyens de réussir.

2.   Développer des dispositifs de soutien spécifiques, adaptés à la nature collaborative des CAE, tout en renforçant le maillage territorial

Deux leviers peuvent être identifiés pour favoriser le développement des CAE.

Premièrement, les fonds propres des CAE doivent être renforcés via des abondements au capital social des CAE. De telles initiatives sont actuellement déjà menées par certaines régions comme la Nouvelle-Aquitaine ([43]), qui apporte un financement pour chaque nouvel entrepreneur-salarié accédant au sociétariat de la CAE. Cet abondement au capital social de la CAE sous forme de subvention varie entre 1 000 € et 2 000 € ([44]) et est calculé en fonction du montant de l’apport de l’entrepreneur-salarié associé lors de son entrée au capital de la CAE. Ces dispositifs gagneraient à se développer sur l’ensemble des territoires. Pour cela, le concours d’opérateurs tels que Bpifrance et la Caisse des dépôts et consignations peut être précieux.

Deuxièmement, l’accès aux prêts d’honneur à taux zéro doit se développer. Certaines régions ont déployé des fonds consacrés à l’octroi de prêts d’honneur à taux zéro aux entrepreneurs des CAE, de sorte à pallier l’inéligibilité de ces acteurs à des prêts bancaires plus classiques, faute d’immatriculation sous un SIRET propre ([45]). Ces fonds sont abondés par les régions elles-mêmes, par France Active, par la Caisse des dépôts et consignations et par l’État dans certains cas ([46]). De tels prêts sont cruciaux pour le bon développement de l’activité de nombreux entrepreneurs en voie de réinsertion sur le marché du travail, puisque 75 % d’entre eux sont des demandeurs d’emploi et 10 % des bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA). Par conséquent, il pourrait être envisagé de généraliser ce dispositif à l’intégralité des régions encore non couvertes.

En conclusion, votre Rapporteure considère que les CAE constituent un modèle particulièrement innovant, alliant entreprenariat et solidarité, qui doit à terme devenir un outil clé pour sécuriser les parcours des indépendants et contribuer à la revitalisation des territoires.

 


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EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du mercredi 21 octobre 2020, la commission des affaires économiques a examiné pour avis, sur les rapports de M. Rémi Delatte (Entreprises), de Mme Bénédicte Taurine (Industrie), de Mme Laure de la Raudière (Commerce extérieur), de M. Éric Bothorel (Communications électroniques et économie numérique), et de Mme Barbara Bessot-Ballot (Économie sociale et solidaire) les crédits de la mission « Économie ».

Mme Barbara Bessot Ballot, rapporteure pour avis. L’économie sociale et solidaire (ESS) est une formidable chance de favoriser une relance économique efficace et inclusive. Elle représente, rappelons-le, 10 % du produit intérieur brut (PIB) et 14 % de l’emploi privé, et on peut aller plus loin.

Définie à l’occasion de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire l’ESS témoigne d’une vision de l’économie renouvelée, dans laquelle l’entreprise joue un rôle actif pour la cité. Les structures de l’ESS portent en leur ADN l’enjeu de leur impact non seulement économique mais aussi social et environnemental.

Or la question de l’impact des entreprises, quelles qu’elles soient, est amenée à devenir l’une des normes structurantes de l’économie responsable de demain. L’ESS sera aux premières loges de ce phénomène de responsabilisation de l’économie. Elle peut également apporter une expertise précieuse en la matière. Il s’agit donc, plus que jamais, d’œuvrer en faveur d’un changement d’échelle du secteur, pour diffuser les valeurs de l’ESS à l’ensemble de l’économie dite « classique ».

J’ai consacré une partie de mes travaux à l’analyse de crédits prévus dans le cadre du présent projet de loi de finances (PLF). Avant d’en venir à l’analyse des crédits à proprement parler, j’aimerais dire un mot de la maquette budgétaire et du pilotage de la politique publique en faveur de l’ESS.

J’ai constaté cette année une très nette amélioration de la maquette budgétaire, puisque l’ESS figure désormais dans le programme « Stratégies économiques » de la mission « Économie ». L’année dernière encore, les crédits pour l’ESS figuraient dans le même programme que celui permettant le financement des activités liées à la météorologie. Un pas considérable est donc franchi cette année pour améliorer la lisibilité de la politique publique conduite en faveur de l’ESS.

La nomination de Mme Olivia Grégoire comme secrétaire d’État en charge de l’économie sociale, solidaire et responsable auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance en est également une preuve, à même de renforcer le programme politique de l’ESS.

J’en viens à l’évolution des crédits : avec 19,2 millions d’euros prévus dans le budget pour 2021, les crédits sont stables par rapport à l’année précédente. L’élan en faveur de l’ESS et de l’innovation sociale se poursuit. Il faut aussi souligner que ces 19,2 millions sont loin de représenter l’ensemble de l’effort consenti par le budget 2021 en faveur de l’ESS. Profondément transversale, l’ESS bénéficie de crédits dans de nombreux autres programmes du budget, dans le domaine de l’emploi, du soutien de la vie associative notamment, ainsi que dans le cadre global du plan de relance.

Les 19,2 millions d’euros consacrés spécifiquement à l’ESS se décomposent en deux piliers. Le premier, doté de 8,7 millions, vise à favoriser le développement du secteur ainsi que l’investissement à impact social. Cette somme visera notamment les actions de soutien aux projets socialement innovants puisqu’une augmentation de crédits doit venir appuyer le financement des contrats à impact social.

Pour ce qui est du maillage territorial en matière d’aide au financement de l’innovation sociale, un fonds d’investissement social de deuxième génération (FISO II) doit voir le jour. Cofinancé par l’État et BPIfrance, il a pour ambition de financer l’amorçage d’environ 200 projets innovants au cœur des territoires. Cette montée en puissance est considérable puisque le précédent FISO a permis de financer 50 projets.

Les dispositifs locaux d’accompagnement (DLA) forment le second pilier. Ils font l’objet d’un cofinancement par l’État, la Caisse des dépôts et consignations, le Fonds social européen et les collectivités territoriales. Six mille structures sont accompagnées chaque année. L’État abonde les DLA à hauteur de 10,4 millions d’euros. C’est une subvention capitale pour assurer le bon fonctionnement de ces dispositifs, identifiés sur le terrain comme un maillon essentiel pour accompagner et professionnaliser les structures de l’ESS.

De façon globale, j’émets donc un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Économie » consacrés à l’ESS.

J’en viens à la partie thématique de mon rapport.

Je me suis dans un premier temps intéressée au rôle que pouvait jouer l’ESS comme levier pour la relance de l’économie.

Les entreprises de l’ESS ont été particulièrement touchées par la crise sanitaire. Elles ont parfois rencontré des difficultés d’accès aux aides de droit commun, et leurs attentes sont fortes à l’égard du plan de relance. Celui-ci devrait leur apporter un soutien à travers les mesures en faveur de l’insertion par l’activité économique, la revalorisation des parcours emploi compétences, les actions de lutte contre la pauvreté ou encore les dispositions sectorielles destinées à la transition agro-écologique, à l’économie circulaire, au soutien à l’emploi des personnes en situation de handicap, ainsi qu’au tourisme durable.

L’ESS est créatrice d’emplois non délocalisables et favorise l’émergence sur le long terme de projets économiquement soutenables et socialement innovants. Elle dispose de toutes les qualités pour devenir l’un des fers de lance de l’économie du monde d’après et dynamiser les territoires, y compris les plus ruraux. J’identifie dans mon rapport plusieurs leviers pouvant être utilisés à cette fin.

D’abord, nous devons impérativement mobiliser la commande publique : représentant 10 % du PIB, elle doit contribuer à valoriser le secteur et encourager son changement d’échelle. Alors que le droit offre de nombreux outils permettant d’orienter la commande publique, les résultats sont pour l’heure plus que mitigés, puisque seulement 8 % des contrats intègrent une clause sociale et 10 % une clause environnementale. Les obligations fixées par la loi du 31 juillet 2014 relative à l’ESS concernant l’élaboration de schémas responsables sont très peu respectées. Je formule dans mon rapport plusieurs propositions en vue de sensibiliser les acheteurs publics à la commande publique responsable.

Nous devons en outre soutenir les initiatives locales assurant la diffusion de l’ESS dans les territoires. Un effort particulier doit être fourni en vue de favoriser le développement des tiers-lieux, ces espaces de travail collaboratif, essentiels notamment pour la transition numérique. On en compte aujourd’hui 1 800, dont 46 % en dehors des métropoles. Leur essaimage doit être encouragé, car ce modèle est susceptible d’apporter des réponses innovantes à des problématiques qui prennent une place croissante, comme le développement du télétravail ou la mutualisation des moyens des petites et moyennes entreprises (PME) et très petites entreprises (TPE) dans les territoires. Historiquement engagés dans la transition écologique, les tiers-lieux seront des vecteurs clés du déploiement des politiques vertes favorisant les circuits courts.

D’autres initiatives sont intéressantes, comme l’opération 1 000 cafés, lancée par le groupe SOS et soutenue par les pouvoirs publics, ou les monnaies locales, que j’avais eu l’occasion d’étudier dans mon rapport pour avis l’année dernière.

J’ai ensuite porté une attention particulière au modèle des coopératives d’activités et d’emplois (CAE), qui devrait favoriser la revitalisation des territoires ruraux grâce à l’entrepreneuriat social et solidaire.

Consacré par la loi du 31 juillet 2014 relative à l’ESS, ce modèle offre un cadre propice au développement de l’entrepreneuriat. Les CAE ont l’avantage d’assurer un accompagnement individuel et collectif, tout en permettant la mutualisation des tâches administratives, fiscales et comptables.

Au sein des CAE, les entrepreneurs sont aussi des salariés. Ce statut original a fait preuve de sa résilience durant la crise sanitaire, ce qui me conduit à proposer un certain nombre de dispositifs visant à soutenir le développement des CAE. On pourrait par exemple généraliser l’accès aux prêts d’honneur pour les CAE ou encourager l’abondement de leur capital social. Ce modèle particulièrement innovant, alliant entrepreneuriat et solidarité, est appelé à devenir un outil clé pour sécuriser les parcours des indépendants et revitaliser les territoires.

Pour conclure, je veux insister sur le formidable défi qui s’offre à nous. L’ESS peut et doit être l’un des jalons de la relance économique française. Elle est l’un des rares modèles susceptibles d’offrir, dans les années à venir, des solutions concrètes aux enjeux de l’entrepreneuriat social, de l’économie responsable et de la transition écologique. Ces thématiques ont trouvé un écho à l’échelon européen, la Commission européenne ayant annoncé pour 2021 un plan d’action visant à mobiliser l’ensemble des institutions européennes en vue d’intégrer l’ESS aux stratégies de relance économique. La France peut tirer parti de ce virage et travailler conjointement avec la Commission européenne sur ces sujets.

Mme Anne-Laurence Petel (LaREM). Commençons par les bonnes nouvelles. L’économie sociale et solidaire dispose enfin de sa propre ligne budgétaire : une action du programme 305 « Stratégies économiques », de la mission « Économie », dotée de plus de 19 millions d’euros. Cette évolution de la maquette budgétaire va de pair avec la création d’un secrétaire d’État dédié, poste occupé par Mme Olivia Gregoire. Je m’en réjouis car cela montre que l’économie sociale et solidaire gagne en importance dans le champ politique, même si son influence est encore bien inférieure à son apport à notre économie, puisqu’elle représente 10 % du PIB, occupe 2,3 millions de salariés et regroupe plus de 220 000 établissements. Si le rattachement de l’ESS au ministère de la transition écologique et solidaire avait un sens, son arrivée au sein du ministère de l’économie renforce la crédibilité des politiques publiques tendant à opérer un changement d’échelle, en considérant l’ESS comme une économie à part entière, complémentaire du secteur marchand et fortement créatrice de valeur ajoutée et d’emplois non délocalisables. Ce changement d’échelle dans les mentalités et au cœur de l’État représente un grand pas en avant pour l’économie sociale et solidaire ; c’est un signal fort.

Vous notez, Madame la rapporteure pour avis, que les lignes budgétaires consacrées à l’ESS dans d’autres programmes budgétaires bénéficient elles aussi d’une hausse de leurs crédits, ce dont nous ne pouvons que nous féliciter. Cette transversalité est une qualité intrinsèque de l’économie sociale et solidaire. Sport, culture, insertion, environnement, mobilité : tous les champs de l’action publique et des besoins humains sont couverts, au plus près des territoires, par l’ESS. Il est donc normal de retrouver cette transversalité dans le budget.

La hausse se note en particulier dans le programme 102, « Accès et retour à l’emploi », de la mission « Travail et emploi ». Comme le reste de la majorité, le groupe LaREM a toujours considéré que l’emploi était la mère des batailles et le retour à l’emploi, la clé de l’émancipation et l’un des fondements de toute politique de lutte durable contre la pauvreté et la précarité ; l’ESS a un rôle important à jouer en la matière. L’année dernière, nous avions crédité ce programme de près de 1 milliard d’euros ; cette année, il le sera de plus de 2,3 milliards. Ce doublement concrétise notre engagement à faire en sorte que la relance bénéficie à chaque Français.

Au plus fort de la crise sanitaire, des dispositifs spécifiques ont été mis en place pour permettre au secteur de l’économie sociale et solidaire de traverser cette épreuve ; ces outils, tels que le prêt relève solidaire ou le dispositif de secours ESS, avaient pour objectif de répondre aux besoins immédiats en liquidité. Les acteurs de l’ESS étaient parallèlement éligibles aux mesures de soutien destinées à l’ensemble des entreprises. Cela a permis au secteur de tenir le choc.

Il est néanmoins nécessaire de poursuivre cet effort, en aidant ces structures à se stabiliser et en leur donnant les moyens de répondre aux défis économiques et sociaux engendrés par la crise, car elles auront en la matière un rôle particulier à jouer. C’est pourquoi le groupe LaREM se félicite de l’annonce de l’allocation, dans le cadre du plan France Relance, d’un soutien financier supplémentaire de 1,3 milliard d’euros à l’ESS, ce qui témoigne de la place que nous souhaitons attribuer à ce secteur dans la relance de notre pays.

Le budget pour 2021 prévoit en outre une augmentation des crédits au soutien à l’investissement pour l’innovation sociale, à travers notamment le financement des contrats à impact. Ces partenariats public-privé se concrétisent par des appels à projets dont le financement, innovant, est objectivé en fonction du résultat. Leur développement est la concrétisation de la volonté de la majorité et du Gouvernement de faire émerger des projets partout dans les territoires, en mobilisant les énergies locales autour des besoins sociaux ou environnementaux.

Enfin, vous notez, Madame la rapporteure pour avis, que les crédits des dispositifs locaux d’accompagnement sont stables, après deux années de hausse. C’est une bonne nouvelle, car les DLA font partie des leviers à utiliser pour sortir de la crise. En effet, pour atteindre l’efficacité, il ne suffit pas d’un projet et de son financement ; l’ingénierie de projet, l’accompagnement et le suivi par des experts sont essentiels. Je vous rejoins sur la nécessité de renforcer encore ce dispositif à l’avenir.

Pour toutes ces raisons, le groupe La République en Marche est favorable à l’adoption de ces crédits.

M. Fabien Di Filippo (LR). S’il est un secteur économique qui prend de l’ampleur, c’est bien celui de l’économie sociale et solidaire ! On parle désormais de 2,4 millions d’emplois, et cela malgré la crise et le taux de chômage élevé – 6 millions de Français étant, d’une manière ou d’une autre, durablement éloignés de l’emploi. Pour ma part, je préférerais qu’on valorise le travail dans notre société et qu’on facilite l’accès à un emploi en mettant l’accent, notamment à travers l’économie sociale et solidaire, sur l’accompagnement socioprofessionnel et l’à‑côté du travail – car c’est souvent ce qui bloque l’accès durable à l’emploi –, plutôt qu’on octroie aux gens des bonifications de l’allocation de rentrée scolaire ou du revenu de solidarité active (RSA), mesures bien plus coûteuses et dont on ne comprend pas très bien l’objectif. Malheureusement, ce n’est pas ce qui a été fait depuis le début de ce quinquennat. De fait, la ligne budgétaire que nous examinons ce matin est très symbolique, tout comme la présence de l’économie sociale et solidaire dans le plan de relance.

Le président de l’Union des employeurs de l’économie sociale et solidaire (UDES) évoque ainsi un climat « mortifère » – on va encore nous accuser de jouer les Cassandre, mais en l’occurrence, ce sont les acteurs qui disent cela. C’est en particulier le cas dans le secteur associatif, où se trouvent 75 % des 2,4 millions d’emplois que j’évoquais tout à l’heure. Les mesures d’accompagnement de la crise sanitaire ont-elles été suffisantes ? Pour ces structures, l’année 2019 a souvent été très bonne et elles ont encore bien du mal à se projeter sur l’année 2020. C’est donc l’année 2021 qui risque d’être mortifère – pour reprendre ce terme.

Vous dites, Madame la rapporteure pour avis, que la commande publique doit jouer son rôle dans le développement de l’économie sociale et solidaire, mais ce serait à l’État de montrer l’exemple, vu les contraintes budgétaires de plus en plus fortes qui pèsent sur les collectivités territoriales ! Certains articles de presse prédisent même une flambée des taxes foncières, faute d’autre solution, étant donné qu’on leur a supprimé nombre de ressources.

Mme Michèle Crouzet (MoDem). Les structures de l’économie sociale et solidaire sont, comme beaucoup d’autres, durement touchées par la crise qui s’installe dans notre pays. Dans ce contexte, le Gouvernement a confirmé dans le plan France Relance sa volonté de faire de l’économie sociale et solidaire un secteur majeur pour l’avenir économique de notre pays. À ce titre, il bénéficiera directement d’une enveloppe de plus de 1 milliard d’euros. En consacrant une part aussi importante du budget de relance à l’économie sociale et solidaire, nous faisons le choix responsable de construire les fondations d’une économie plus durable et plus inclusive pour la France de demain.

Je tiens à souligner le rôle singulier que joue l’ESS en milieu rural, sa part dans l’emploi y étant plus importante que dans le reste du territoire. Je pense que cela est lié, historiquement, à la volonté de nos concitoyens ruraux de travailler main dans la main afin de pallier l’isolement, dynamiser le territoire, tisser de nouveaux liens et valoriser les ressources locales. L’ESS dans la ruralité, c’est une grande diversité de structures : des commerces de proximité promouvant des circuits courts, des épiceries solidaires, des ressourceries, des recycleries, des associations, des tiers lieux…

Toutes ces structures, qu’elles soient sous statut associatif, coopératif, mutualiste, de fondation ou d’entreprise solidaire d’utilité sociale, apportent à leur échelle des solutions innovantes pour répondre aux nombreux défis auxquels sont confrontés nos concitoyens ruraux : l’emploi et l’insertion professionnelle, en particulier des jeunes, qui peuvent être accompagnés grâce aux parcours emploi compétence ou au service civique ; la vie culturelle et sportive, à travers l’action d’associations souvent soutenues par des missions locales ; l’inclusion des personnes en situation de handicap ; la promotion du tourisme durable ; l’accélération de la transition agroécologique, engagée par les coopératives agricoles ; la lutte contre la pauvreté, emmenée par le tissu associatif et dont l’urgence s’accroît en raison de la crise économique et sociale. Nous nous réjouissons que les tiers lieux, espaces de rencontres, d’interactions sociales, d’émancipation et de partage des bonnes pratiques, voient leur budget renforcé à hauteur de 30 millions d’euros afin d’y développer l’inclusion numérique, qui est un enjeu majeur pour les territoires, les habitants les plus isolés souffrant parfois d’illectronisme. Toutes ces initiatives méritent d’être pleinement encouragées en raison des nombreuses retombées positives qu’elles ont sur les territoires, et c’est pourquoi le groupe MoDem et démocrates apparentés est favorable à l’adoption de ces crédits.

Je souhaiterais, pour conclure, appeler votre attention sur le rôle joué par le livret de développement durable et solidaire (LDDS) dans le financement de ces structures. L’encours de ce livret s’élève à près de 120 milliards d’euros, ce qui est considérable. Le Gouvernement a récemment ouvert la possibilité pour ses détenteurs de faire un don aux acteurs de l’économie sociale et solidaire afin de donner un sens à leur épargne. Cela permettra de financer un plus grand nombre de projets en faveur de la transition écologique et solidaire, notamment en milieu rural. Peut-être pourrions-nous aller encore plus loin. À l’heure actuelle, 5 % au moins des ressources collectées par les banques au titre du livret A et du LDDS doivent être affectées au financement de l’ESS, ce mécanisme garantissant qu’au moins 9 milliards d’euros sont fléchés de manière pérenne vers l’ESS. Que diriez-vous d’un éventuel rehaussement de ce taux, afin de soutenir davantage encore l’ESS ?

M. Dominique Potier (Soc). Si je félicite Mme Barbara Bessot Ballot pour son engagement en faveur de l’ESS, je voudrais exprimer un léger désappointement, non sur le fond, mais quant à la forme : du fait de la ventilation des crédits destinés à l’ESS entre différentes thématiques, on finit par s’y perdre. Je salue néanmoins, dans ce maquis budgétaire, les innovations signalées, notamment concernant les coopératives d’activité et d’emplois.

Je voudrais vous faire part de deux préoccupations.

D’abord, il est nécessaire d’apporter un soutien au secteur associatif, qui est aujourd’hui l’une des sentinelles de la cohésion sociale, voire de la République. Partout où il y a besoin de renforcer le lien social, de tendre la main aux plus précaires ou à ceux qui perdent pied, les associations jouent un rôle fondamental. Or, qu’il s’agisse des clubs de sport, des associations culturelles ou des œuvres de charité, toute sont très durement affectées par la crise. Restrictions budgétaires, capacités d’autofinancement réduites, manifestations annulées… Nous devons être très vigilants quant à la survie économique du tissu associatif. Un euro investi dans le secteur, c’est l’équivalent de neuf sous forme de bénévolat : il ne faudrait pas que cet euro manque aujourd’hui.

Deuxième préoccupation : il convient de distinguer l’ESS de l’économie que vous avez appelée avec pudeur, Madame la rapporteure pour avis, « classique ». J’appelle de mes vœux un monde où l’économie capitaliste traditionnelle sera l’exception et l’économie sociale la règle. Celle-ci est tout aussi performante ; simplement, elle s’attache au partage de la valeur et, dans ses processus de fabrication, au respect de l’environnement et de la société. C’est pourquoi elle doit devenir demain le modèle de référence.

Pour ce faire, on peut bricoler – c’est ce qu’on fait depuis des années. On peut aussi engager de grandes réformes. Il y en a eu, et l’on observe une sorte de continuum législatif en la matière. Il me semble ainsi que le rendez-vous que nous avons à honorer aujourd’hui s’inscrit dans la dynamique des lois Hamon ; il s’agit de promouvoir la démocratie interne dans l’ensemble de l’économie – et les statuts des structures d’ESS ne répondent pas toujours à cette exigence. L’ESS doit être exemplaire en matière de codétermination et de participation des salariés et des actionnaires.

L’autre forme de démocratisation réside dans le dialogue de l’entreprise avec les autres acteurs sociaux que sont notamment le consommateur, l’épargnant ou le collaborateur. Au sein du groupe Socialistes et apparentés, nous promouvons une certification en matière de responsabilité sociétale des entreprises (RSE), afin que chaque citoyen puisse, en toute transparence, privilégier le modèle économique de son choix. Nous souhaitons notamment, rejoints en cela par M. Roland Lescure et d’autres députés issus de diverses familles politiques, faire écho aux travaux du Mouvement impact France, qui a organisé une sorte de contre-congrès du MEDEF en vue de promouvoir un autre modèle économique. Que pensez‑vous, Madame la rapporteure pour avis, de l’idée de mettre en place, sur le modèle du Nutri-Score, un « score » de la RSE, qui serait fondé sur une centaine de critères et permettrait à tout un chacun de se positionner en tant qu’épargnant, consommateur ou collaborateur ? Associée à une réforme des marchés publics et à l’instauration d’une taxe sur la valeur ajoutée (TVA) circulaire, une telle mesure contribuerait à transformer l’économie à la source et à faciliter les transitions attendues.

M. Thierry Benoit (UDI-I). Je félicite moi aussi Mme Bessot Ballot pour sa constance et le cœur qu’elle met à soutenir le secteur de l’économie sociale et solidaire, qui représente aujourd’hui 10 % du produit intérieur brut et 14 % de l’emploi privé dans notre pays. Je suis convaincu que celui-ci peut et doit jouer un rôle d’amortisseur social dans la tourmente que nous subissons depuis mars à cause de ce fichu virus, la crise sanitaire s’accompagnant d’une crise économique.

J’entendais ce matin le président de l’Association des départements de France, M. Dominique Bussereau, évoquer le nombre grandissant de demandeurs du RSA. Or l’économie sociale et solidaire, ce sont des emplois dans les territoires, qu’ils soient urbains ou ruraux, ce sont des emplois de proximité et ce sont des emplois non délocalisables.

Je voudrais mettre en rapport le budget plutôt stable qui nous est soumis avec le contenu du plan de relance, qui mobilise à la fois des crédits européens et des crédits nationaux. Chacun a en tête que l’enveloppe la plus importante du plan de relance est consacrée à la cohésion sociale, à hauteur de 36 milliards d’euros, aux côtés de la compétitivité des entreprises et de la transition écologique. De fait, je suis convaincu que ce dont nous avons besoin depuis le début de cette législature, c’est de cohésion parmi la population, et le secteur de l’économie sociale et solidaire peut y contribuer.

Ce qui se joue en ce moment, c’est la mise en application du plan de relance. Il y a d’un côté les ministères qui lanceront des appels à projets, comme celui de la transition écologique ou de l’industrie, d’un autre les crédits qui seront à la main des préfets dans les territoires, et peut-être y aura-t-il aussi d’autres crédits qui seront à la disposition conjointe des préfets et des présidents de région au titre de leurs compétences en matière de développement économique. Comment faire pour assurer l’éligibilité des projets de l’économie sociale et solidaire aux différents dispositifs du plan de relance, afin que ce secteur joue pleinement son rôle d’amortisseur social ? Ce secteur pourrait en effet être une alternative crédible et humaine aux excès du gigantisme financier engendré par l’économie dite « classique ».

M. Olivier Falorni (LT). Outre l’investissement de la rapporteure pour avis, je salue la création d’un secrétariat d’État chargé de l’économie sociale, solidaire et responsable, qui marque la reconnaissance du rôle central joué par ce secteur et permet d’assurer un meilleur pilotage de l’action publique menée en sa faveur. Je reste toutefois convaincu que la maquette budgétaire gagnerait en lisibilité s’il existait un programme budgétaire dédié ou, à défaut, un document de politique transversale.

Les acteurs de l’économie sociale et solidaire jouent dans notre société un rôle clé, tout particulièrement en cette période de crise sanitaire. Ainsi participent‑ils activement à l’accompagnement des plus âgés, avec près de 170 000 salariés travaillant en tant qu’aides à domicile dans le secteur privé, notamment dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). C’est pourquoi je regrette que le plan de relance, qui prévoit seulement 1,3 milliard d’euros sur deux ans pour le secteur, ne se montre pas à la hauteur des besoins. Je pense que le Gouvernement aurait pu être plus ambitieux, par exemple en renforçant le soutien aux têtes de réseaux de l’ESS dans les territoires ou en augmentant le budget consacré au dispositif local d’accompagnement – deux demandes émises par les acteurs de l’économie sociale et solidaire.

Je regrette aussi que le Gouvernement soit revenu, de surcroît en demandant une seconde délibération, sur l’application du taux réduit de TVA à 5,5 % aux prestations relatives à la réparation, au réemploi et à la réutilisation. Cette mesure, que nous avions défendue avec vigueur lors de la discussion du projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, aurait donné un coup de pouce aux ressourceries, touchées de plein fouet par l’arrêt des ventes et la forte baisse des dons pendant le confinement.

Enfin, si les mesures de soutien à l’insertion professionnelle des jeunes, comme le fléchage de 40 000 parcours emploi compétences vers les acteurs de l’ESS, vont dans le bon sens, le groupe Libertés et Territoires estime qu’elles ne sont pas assez ambitieuses.

M. François Ruffin (FI). « Il est temps de se demander si ceux qui créent la richesse n’ont aucun droit aux bienfaits et splendeurs qu’elle procure » : voilà ce que déclarait Jean‑Baptiste Godin, fondateur au XIXe siècle du familistère de Guise, en Picardie, et qui peut être considéré comme l’un des fondateurs de l’économie sociale et solidaire. Et c’est ainsi qu’il décida de redistribuer largement les énormes bénéfices qu’il tirait de la fabrication de son poêle et qu’il aurait pu accaparer, en construisant un Versailles pour les ouvriers, un palais social avec une piscine pour que tout le monde, y compris les enfants, apprenne à nager, un théâtre, des écoles – car l’école laïque et obligatoire n’existait pas encore –, et en partageant son entreprise avec tous ses salariés dans une association du capital, du travail et du talent, à une époque où les autres patrons faisaient construire, y compris le long de la Somme, d’immenses châteaux qui étaient la conversion en pierre de leur capital tiré de l’industrie textile, entretenaient des danseuses à Paris et avaient des chevaux à ne plus savoir qu’en faire.

C’est la même situation qui prévaut aujourd’hui : les milliardaires français sont ceux qui, en une décennie, se sont le plus enrichis dans le monde après les Chinois – la France a la médaille d’argent, bravo ! Leur fortune a été multipliée par cinq – plus 439 % – en dix ans. Je doute que leurs salariés aient vu semblable explosion de leur compte en banque. Et comment cela se traduit-il ? Par des yachts et des châteaux ; le Financial Times publie même un supplément intitulé How to spend it – « Comment le dépenser ». Et ce sont ces gens-là qu’on aide à traverser la crise grâce aux dispositifs de chômage partiel et de soutien aux filières ?

Dans un tel contexte, on ne peut que saluer les efforts des acteurs de l’économie sociale et solidaire – et je veux bien vous compter parmi eux, Madame la rapporteure pour avis – pour promouvoir, en dignes héritiers de Jean-Baptiste Godin, une économie qui respecte les hommes et la nature et se fixe d’autres buts que le profit, d’autres espérances que les dividendes.

Maintenant, comment faire en sorte que l’économie sociale et solidaire, qui devrait être la norme, soit davantage que le supplément d’âme de Bridgestone et d’Amazon, qu’un petit à-côté gentillet, qu’elle interroge le système dominant et vienne transformer une économie qui écrase bien souvent et l’homme et la nature ? Ma conviction est que l’on ne pourra pas développer l’économie sociale et solidaire sans entraver les fauves.

L’économie sociale et solidaire pose deux questions essentielles. Premièrement, à qui est le pouvoir ? À ceux qui font, répond l’ESS : le pouvoir est partagé au sein de l’entreprise et non réservé au capital. En ce qui concerne l’économie dominante, j’accepterais que les représentants du capital siègent au conseil d’administration aux côtés des salariés et d’autres acteurs comme les associations environnementales et de consommateurs.

Seconde question : à qui vont les bénéfices ? Dans l’économie sociale et solidaire, ils sont redistribués, après investissement dans l’outil de travail, non au capital mais aux salariés ou aux membres de la coopérative, selon la nature de la structure.

Ces deux enjeux peuvent être dévoyés, mais ils relèvent du bon sens et devraient guider même l’économie dominante ; les réponses que l’économie sociale et solidaire apporte à ces deux questions devraient devenir la règle pour tous.

M. Robert Therry. On a parlé des bienfaits de l’économie sociale et solidaire, moins de la reconnaissance – je ne parle pas de l’aspect financier – due aux bénévoles qui animent les associations gérant l’ESS. Ils donnent de leur temps pour donner du travail à plus de 2 millions de personnes. Comment leur témoigner cette reconnaissance ?

Mme la rapporteure pour avis. Madame Petel, le changement d’échelle dont vous parlez est très manifeste depuis l’année dernière, et nous devons prendre ce virage.

Monsieur Di Filippo, il faut bien sûr favoriser l’accès à l’emploi, ce qui coûte toujours moins cher que de payer les gens à rester chez eux. Quant à la commande publique, tout le monde doit effectivement faire des efforts, et la volonté est bien celle-là, même si l’on ne balaie pas d’un revers de main des pratiques vieilles de plusieurs années.

Madame Crouzet, je suis persuadée que les lieux d’implantation de l’ESS dans les territoires ruraux, dont les fameux tiers-lieux, sont nos futurs lieux de vie, nos futurs centres commerciaux. De nombreux exemples en France donnent à penser que l’avenir est là. En ce qui concerne l’idée de donner du sens à notre épargne par le biais du livret de développement durable et solidaire, il faut œuvrer dans cette direction ; nos concitoyens souhaitent investir dans cette forme d’épargne.

Monsieur Potier, je vois qu’en fin de compte, nous rêvons du même monde ! Nous voulons travailler au « Nutri-Score de l’économie ». Mme Olivia Grégoire vous le confirmera, mais il me semble qu’elle a la même vision, ainsi qu’une idée des moyens techniques à employer pour y parvenir, ce qui est une tout autre affaire – raison pour laquelle nous avons de la chance de l’avoir au poste de secrétaire d’État chargée de l’économie sociale, solidaire et responsable. Les perspectives européennes dans le secteur au premier trimestre pourraient nous donner l’occasion de nous exprimer en ce sens dans le cadre de l’Union.

Monsieur Benoit, il est bienvenu de souligner comme vous l’avez fait le caractère non délocalisable des emplois de l’ESS, aujourd’hui que nous voyons l’envers du décor du marché international.

Monsieur Falorni, il est exact que la maquette budgétaire peut encore gagner en visibilité et en lisibilité, mais voyez l’évolution opérée en quelques mois ! On ne parlait pas du tout de la même façon de l’ESS lorsque je suis devenue députée. Il est vrai que les crédits alloués au dispositif local d’accompagnement n’augmentent pas cette année, mais ils ont été en hausse pendant deux ans. Du reste, les représentants de l’ESS nous ont bien dit lors des auditions que l’enjeu n’était pas seulement l’argent, mais aussi l’organisation et le repérage mutuel des acteurs afin d’aller ensemble vers le monde dont nous rêvons tous.

Monsieur Ruffin, votre référence à Jean-Baptiste Godin nous convient bien. Mais les châteaux dont vous parlez pourraient faire plus tard partie du patrimoine qu’il nous faudra conserver. J’ai dit il y a un instant qu’il fallait remettre sur la table l’outil du « Nutri-Score de l’économie » ; en effet, l’approche de l’économie par le seul capital doit être remplacée, et nous sommes nombreux à être conscients qu’il faut le faire maintenant, tous ensemble. Le critère du seul chiffre d’affaires d’une entreprise doit devenir très vite obsolète.

Monsieur Therry, c’est aussi grâce aux bénévoles que l’ESS réussit. Or on parle trop rarement d’eux, un peu comme des électeurs qui votent blanc. Votre intervention nous donne l’occasion de leur rendre hommage.

M. le président Roland Lescure. Avant de mettre aux voix l’ensemble des crédits de la mission « Économie », je rappelle que, parmi les rapporteurs pour avis et pour les crédits qui les concernent, Mme Laure de La Raudière, M. Éric Bothorel et Mme Barbara Bessot Ballot se sont déclarés favorables à l’adoption, tandis que Mme Bénédicte Taurine et M. Rémi Delatte ont émis un avis défavorable.

La commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission.

 


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LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

MOUVES

Mme Eva Sadoun, présidente

Mme Caroline Neyron, déléguée générale

Ministère de l’économie, des finances et de la relance – Service du financement de l’économie – direction du Trésor

M. Thomas Boisson, chef du pôle « Financement de l’économie sociale et solidaire (ESS) et investissement à impact » (PESSII)

Mme Charlotte Preuss, collaboratrice au Pôle « Financement de l’économie sociale et solidaire et investissement à impact » – direction générale du Trésor

M. Alban Cathala, adjoint au chef du pôle « Financement de l’économie sociale et solidaire et investissement à impact » – direction générale du Trésor

M. Laurent Hou-Hen-Pen, chargé de mission budget

France Tiers Lieux

M. Patrick Levy-Waitz, président

Mme Yolaine Proult, déléguée générale

Compta durable

M. Hervé Gbego, président

Table ronde : « le modèle des coopératives d’activité et d’emploi » (en visioconférence)

Confédération des commerçants de France (CDF) *

M. Francis Palombi, président

Mme Bénédicte Boudet-Corric, déléguée générale

Confédération générale des Scop *

Mme Fatima Bellaredj, déléguée générale

Mme Anne-Claire Pignal, déléguée CAE

Coopaname

M. Patrick Delemme, codirecteur général

Mme Hélène Vandenbilcke, responsable des affaires sociales

M. Jean-Philippe Dham, coprésident du conseil d’administration

Mme Noémie de Grenier, codirectrice générale

M. Samir Mellal, administrateur

Copea

M. Benoît Boulnois, co-président de Copéa et également dirigeant de la CAE Toerana Habitat

Coopérer pour entreprendre

M. Stéphane Bossuet, président-directeur général

Le Labo de l’ESS

Mme Marie Vernier, déléguée générale

Union des employeurs de l’économie sociale et solidaire (UDES) *

M. Sébastien Darrigrand, directeur général

Avise

Mme Cécile Leclair, directrice générale

Groupe SOS

M. Jean-Marie Borello, président du directoire

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.

 


([1]) Pour mémoire, lors du quinquennat de François Hollande, un secrétaire d’État au commerce, à l’artisanat, à la consommation et à l’économie sociale et solidaire a existé de 2014 à 2017. De 2012 à 2014, M. Benoît Hamon était ministre délégué à l’économie sociale et solidaire et à la consommation.

([2]) L’année précédente, le bleu budgétaire faisait mention de 999 781 244 M€ en AE comme en CP.

([3]) En cohérence avec la nouvelle maquette administrative, les activités exercées les années précédentes par le HCESSIS relèvent désormais du portefeuille de la nouvelle secrétaire d’État.

([4]) « Pour un développement du contrat à impact social au service des politiques publiques », Frédéric Lavenir, juin 2019

([5]) Votre Rapporteure a porté un amendement en ce sens dans le cadre des discussions autour du projet de loi d’accélération et de simplification de l’action publique, amendement disponible au lien suivant : http://www2.assemblee-nationale.fr/user_download/2020-10-19/t29n4u6fBSl0tgO-1.pdf

([6]) Composé : pour l’État, du HCESSIS et de la DGEFP ; de la CDC ; du Mouvement Associatif national ; et de Régions de France

([7]) Ces conventions initialement prévues pour trois ans, pouvaient faire l’objet d’une reconduite expresse de trois ans supplémentaires lorsque le travail des opérateurs était jugé satisfaisant.

([8]) Enquête « Où en sont les associations après le confinement ? » : https://recherches-solidarites.org/wp-content/uploads/2020/06/COVID-2-diaporama-17-06-2020-RS.pdf

([9]) Enquête quantitative (auprès de 1 800 tiers-lieux) et qualitative (entretien avec 120 d’entre eux en visioconférence).

([10]) Données fournies par l’Avise.

([11]) D’après le labo de l’ESS, au début du confinement, 25 % des associations n’avaient pas connaissance des mesures financières proposées.

([12]) Selon des données de la Banque de France, au 28 août 2020, 4 550 associations avaient bénéficié du PGE, pour un montant total de 1,4 Md€ ; et 2  fondations, pour un montant total de 21,6 M€

([13]) Avec notamment la publication d’une synthèse des initiatives étatiques et régionales destinées aux acteurs de l’ESS

([14]) Mais aussi la Fondation de France, Maif, Macif et Malakoff Humanis

([15]) BNPP, la Fondation de France, l’ADEME, Malakoff Humanis, la MAIF, la MACIF, Danone et JP Morgan ont notamment répondu à cet appel.

([16]) Enveloppe spécifique aux PEC propres aux structures de l’ESS. En effet, le budget alloué pour le financement du PEC est de 417 M€ en CP, répartis entre 2020 et 2021, mais ne bénéficie pas exclusivement à des structures de l’ESS (collectivités territoriales, notamment).

([17]) Selon la mission conduite en 2018 par M. Patrick Levy-Waitz et la fondation Travailler Autrement pour « faire un état des lieux des espaces de co-working en France », à la demande du ministre chargé de la cohésion des territoires de l’époque, M. Julien Denormandie.

([18]) Par « fabrique de territoire », l’État entend distinguer un tiers-lieu qui joue un rôle de « lieu ressources pour les porteurs de projets environnants, de lieu de formation et d’apprentissage (...) et d’inclusion numérique pour les populations éloignées d’Internet (...) » comme le précise la Banque des territoires, partenaire du projet.  

([19]) Réduction d’impôt au titre des souscriptions en numéraire au capital de petites et moyennes entreprises (PME) non cotées

([20]) C’est le cas des structures d’insertion par l’activité économique, des régies de quartier, des entreprises adaptées ainsi que des organismes financiers solidaires. Plusieurs organismes de financement contribuant au financement des entreprises de l’ESS sont aussi considérés comme disposant de l’agrément ESUS de plein droit.

([21]) Toutefois, sa durée est limitée à 2 ans pour les entreprises créées depuis moins de 3 ans au moment de la demande d’agrément.

([22]) Modification de l’article 2 de la loi de 2014

([23]) Décret n° 2015-90 du 28 janvier 2015

([24]) Commande publique responsable : un levier insuffisamment exploité, rapport du CESE présenté par Mme Patricia Lexcellent, 2018

([25]) « Orientations sur la participation des soumissionnaires et des produits de pays tiers aux marchés publics de l’UE », Communication de la Commission européenne, 24 juillet 2019

([26]) Le sourçage, ou « sourcing », est défini comme la possibilité pour un acheteur « d’effectuer des consultations ou réaliser des études de marché, de solliciter des avis ou d’informer les opérateurs économiques du projet et de ses exigences » afin de préparer la passation d’un marché public (article 4 du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics).

 

([27]) Dans une SCOP, les salariés possèdent au minimum 51 % du capital. Ils sont donc associés majoritaires. Le partage du profit est équitable puisqu’une partie (environ 45 %) constitue les « réserves impartageables » qui vont contribuer au développement de l’entreprise en permettant la consolidation des fonds propres et les investissements, une partie (environ 10 %) est versée en dividende aux actionnaires et une partie est versée à l’ensemble des salariés de la SCOP, qu’ils soient actionnaires ou pas. En matière de fiscalité, les SCOP bénéficient d’une assiette réduite pour l’impôt sur les sociétés.

([28]) L’objet des SCIC est « la production ou la fourniture de biens et de services d’intérêt collectif qui présentent un caractère d’utilité sociale ». Leur gestion est démocratique (« une personne = une voix ») et le mode de fonctionnement ne privilégie pas la lucrativité. L’entreprise n’appartient pas qu’aux salariés. En effet, le capital peut être détenu également par les bénéficiaires de l’activité (les clients, les usagers, les fournisseurs) et par une troisième catégorie d’actionnaires regroupant des collectivités locales, des bénévoles, des financeurs, etc. Aucune de ces parties prenantes ne peut avoir la majorité.

([29]) Loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération

([30]) En effet, c’est la coopérative qui se charge du calcul et du versement des salaires mais aussi de la satisfaction à l’ensemble des obligations légales, réglementaires et contractuelles découlant de l’exercice de l’activité économique de chaque entrepreneur, et notamment ses obligations fiscales, sociales et comptables.

([31]) Défini à l’article 48 de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire qui vient insérer dans le code du travail un titre dédié.

([32]) L’article D. 412-100 du code de la sécurité sociale apporte des précisions en ce sens.

([33]) On compte actuellement environ 6 000 porteurs de projet en contrat CAPE.

([34]) La marge brute correspond au total des ventes (chiffre d’affaires) d’une activité, duquel sont déduits les achats de matière première, de marchandises ou de sous-traitance directement liée à la prestation. La marge brute reflète la réalité de la richesse produite par l’activité, et traduit ce qui reste à l’activité de son chiffre d’affaires (hors frais de fonctionnement).

([35]) Le montant de la part fixe est une décision propre à chaque coopérative. Chez Co-actions elle est de 50 € tandis qu’elle est de 250 € chez Toérana Habitat.

([36]) L’article L. 7332-3 dispose que la CAE « met à disposition de l’entrepreneur-salarié associé un état des comptes faisant apparaître le détail des charges et des produits liés à son activité ».

([37]) Et ce « dans un délai maximum d’un mois après la date de l’assemblée générale statuant sur la clôture des comptes de l’exercice »

([38]) Enquête CGScop, 2013

([39]) Ibid

([40]) Enquête CGScop, 2013

([41]) https://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/covid-fiche-cae-regles-2ap.pdf

([42]) Environ 6 000 contrats CAPE et 6000 contrats d’entrepreneur-salarié (CESA)

([43]) https://les-aides.nouvelle-aquitaine.fr/economie-et-emploi/soutien-au-developpement-des-cooperatives-dactivite-et-demploi-cae

([44]) Avec un plafond de 20 000 € par CAE

([45]) Les entrepreneurs d’une CAE sous tous immatriculés sous le même SIRET.

([46]) C’est notamment le cas en Auvergne Rhône-Alpes selon les informations transmises lors des auditions conduites par votre Rapporteure.