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N° 3459

______

 

ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 21 octobre 2020.

 

 

AVIS

 

 

PRÉSENTÉ

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION SUR LE PROJET DE LOI de finances pour 2021,

 

 

TOME III

 

 

MÉDIAS, LIVRE ET INDUSTRIES CULTURELLES

AVANCES À L’AUDIOVISUEL PUBLIC

 

 

Par Mme Céline CALVEZ,

 

Députée.

 

 

——

 

 

 

Voir les numéros :

Assemblée nationale :  3360, 3399 (annexe n° 30).


 

 

 


  1  

SOMMAIRE

___

 Pages

AVANT-PROPOS

Les crÉdits de la mission médias, livre et industries culturelles :  un budget de soutien et de refondation pour des secteurs lourdement affectÉs par la crise sanitaire

I. la presse et les mÉdias

A. Une annÉe de crise et de refondation pour la presse

1. 2020, année de crise et de refondation

a. Une crise sans précédent pour la presse écrite

a. Une nouvelle structure : France Messagerie

b. Un soutien d’urgence avec la troisième loi de finances rectificatives pour 2020

2. Le soutien financier à la presse en 2021

a. Les crédits du programme 180

b. Le plan de relance

3. De nouvelles réflexions à mener pour les années à venir

B. Une annÉe relativement prÉservÉe pour l’AFP, qui poursuit sa transformation

C. Un soutien stable aux mÉdias locaux

II. Un soutien exceptionnel au livre et À la lecture

A. Une nÉcessaire hausse des dotations de la BNF, pour lui permettre de mener À bien ses projets d’investissement

B. Une dotation stable pour la BPI, dans la poursuite de ses travaux de rÉnovation

C. Un soutien important aux librairies et bibliothÈques dans le cadre du plan de Relance

1. Un plan d’urgence en faveur du livre voté en loi de finances rectificatives

a. Une action en urgence avec les fonds du CNL

b. Une dotation supplémentaire en loi de finances rectificatives

2. Un soutien affirmé en 2021 dans le cadre du plan de relance

III. Un budget de secours pour les industries culturelles

A. Un budget qui fait la part belle au cinÉma, dÉvastÉ par le confinement

1. 2020, annus horribilis pour le cinéma

a. Une crise sanitaire dévastatrice pour l’ensemble de la filière

b. Un fort impact en ressources pour le CNC

2. L’effort financier de l’État pour le cinéma en 2021 et 2022

a. Les mesures d’urgence

b. Un réarmement conséquent en 2021 avec le plan de relance

B. Un net renforcement des crÉdits du Centre national de la musique

C. Une annÉe d’incertitudes pour la Hadopi, dans la vive attente de sa fusion avec le CSA

Le compte de concours financiers Avances à l’audiovisuel public : faire de la crise une opportunitÉ pour renforcer les synergies

I. France TÉlÉvisions : un dÉficit maîtrisÉ en 2020, dans un contexte de report de charges et de soutien via le plan de relance

A. Une action diversifiÉe durant le confinement

B. Des difficultÉs À prÉvoir pour 2021

C. La recherche de synergies dans l’audiovisuel public, une stratÉgie À consolider

II. Radio France : un impact important de la crise sur les recettes, qui ne doit pas masquer des perspectives encourageantes

III. Mieux protégÉe de la crise par la structure de ses recettes, France MÉdias Monde reste confrontÉe à d’importants dÉfis

IV. Arte France : un fort effet en dÉpenses de l’Épidémie, dont les secousses risquent de perdurer en 2021

V. L’INA : des ressources et des chantiers fortement affectÉs

VI. TV5 Monde : un dÉveloppement numÉrique qui se poursuit malgrÈ la crise sanitaire

Travaux de la commission

I. AUDITION DE LA MINISTRE

II. EXAMEN DES CRÉDITS

annexe : Liste des personnes auditionnÉes par la rapporteure

 


–  1  –

 

   AVANT-PROPOS

 

● L’année 2020, écrivions-nous en préambule de notre précédent avis, devait être une année charnière pour les médias et les industries culturelles. Réforme majeure de l’audiovisuel public, création du Centre national de la musique, mise en application des lois relatives aux droits voisins et à la distribution de la presse : les chantiers ne manquaient pas pour moderniser la régulation de chacun ces secteurs et les doter d’un cadre juridique rénové.

L’épidémie de Covid-19 est venue heurter de plein fouet ces ambitions.

L’impact économique et social de la crise sanitaire est majeur pour les médias et les industries culturelles, avec des conséquences économiques cataclysmiques sur l’ensemble du secteur. Selon une étude du ministère de la culture parue en septembre 2020, l’impact de l’épidémie sur le monde de la culture pourrait atteindre 22,3 milliards d’euros sur l’ensemble de l’année. Ces prévisions pourraient être revues à la hausse, compte tenu de la reprise de l’épidémie observée au mois d’octobre.

Les médias dans leur ensemble – télévision, radio, presse – bien que plus sollicités durant la crise, et le cinéma ont été très lourdement affectés par la contraction des recettes publicitaires, qui occupent en temps normal une place majeure parmi leurs ressources. Au total, les annulations massives de campagnes publicitaires pourraient conduire à un recul de 20 % des recettes associées sur l’ensemble de l’année.

● À cet effet global se sont rajoutées des conséquences spécifiques à chaque secteur.

La presse écrite a été confrontée à une forte diminution des ventes au numéro, avec la fermeture d’un grand nombre de points de vente pendant le confinement.

La fermeture des salles et l’interruption des tournages ont entraîné la mise à l’arrêt complète des industries du cinéma. Les effets à plus long terme devront faire l’objet d’une attention toute particulière, dans un contexte de report massif voire d’annulation des sorties et de renchérissement des coûts de production d’environ de 10 % du fait des normes sanitaires et de l’activité redoublée des plateformes sur le marché.

L’audiovisuel fait face à des problématiques similaires, avec des travaux de production largement affectés par le confinement et des conséquences importantes sur les autres médias.

La fermeture des librairies pendant le confinement et l’annulation de nombreux festivals littéraires depuis lors met en difficulté un secteur structurellement précaire, avec des conséquences à long terme particulièrement imprévisibles pour les éditeurs et les auteurs. Nous nous réjouissons tout de même de la forte fréquentation des librairies après le confinement.

Pour d’autres filières, à l’instar de la musique enregistrée, les effets plus contrastés de la crise ne doivent pas occulter les fortes incertitudes qu’annonce l’année 2021. Véritable « baptême du feu » pour le Centre national de la musique (CNM), la crise sanitaire oblige à consolider le soutien de l’État en direction d’un secteur en quête de transformation.

● Face à cette crise sans précédent dans notre histoire récente, le Gouvernement a répondu présent.

Au-delà des mesures d’urgence généralistes, pas moins de 384 millions d’euros ont été inscrits en troisième loi de finances rectificatives, avec 170 millions d’euros pour la presse et les médias et 214 millions pour le livre et les industries culturelles.

Outre ces crédits supplémentaires, les médias et les industries culturelles bénéficient de deux nouveaux crédits d’impôt, portant sur les abonnements à la presse d’information politique et générale et la création audiovisuelle.

Quant à 2021, si la mission Médias, livre et industries culturelles n’est pas en reste avec une hausse des crédits de paiement de 19,74 millions d’euros, l’essentiel du soutien financier est apporté par le plan France Relance, avec pas moins de 140 millions d’euros en 2021 et en 2022.

La diminution de 70 millions d’euros des dotations à l’audiovisuel public, conforme à la trajectoire financière, est quant à elle globalement contrebalancée par l’inscription d’un montant égal dans le plan de relance compensant les pertes de ressources propres et les dépenses occasionnées par la crise sanitaire, réparti entre les sociétés.

● Au-delà des enjeux budgétaires, l’année 2020 a également vu l’interruption soudaine de l’examen à l’Assemblée nationale du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et la souveraineté culturelle à l’ère numérique. Le retour de ce texte à l’ordre du jour semble aujourd’hui malheureusement incertain.

Si la rapporteure se félicite de la transposition prochaine des directives « droit d’auteur », « câble satellite » et « Services de médias audiovisuels », elle s’interroge sur l’avenir des autres dispositions du texte adopté en mars en commission. De la fusion du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) et de la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (HADOPI) à la création de synergies organisationnelles entre les grandes sociétés de l’audiovisuel public, le chemin engagé avec le projet de loi était utile et nécessaire.

 

 

 

L’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances fixe au 10 octobre la date butoir pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires. À cette date, 98,3 % des réponses étaient parvenues.

 

 


–  1  –

   Les crÉdits de la mission médias, livre et industries culturelles :
un budget de soutien et de refondation pour des secteurs lourdement affectÉs par la crise sanitaire

L’engagement de l’État en faveur de la relance économique et culturelle de notre pays se reflète dans les crédits ouverts pour la mission Médias, livre et industries culturelles, qui affichent en 2021 une hausse conséquente de 8,4 % en autorisations d’engagement (AE) et 3,36 % en crédits de paiement (CP). Au total, et à périmètre inchangé, les deux programmes de la mission seront dotés de 625,29 millions d’euros d’AE et 606,49 millions d’euros de CP.

Hors périmètre de la mission, l’effort le plus conséquent – et sans précédent dans notre histoire récente – s’inscrit dans la mission Plan de relance, avec 347 millions d’euros de crédits de paiement pour 2021 principalement au bénéfice du cinéma, de la presse et du livre ([1]) .

Ces crédits supplémentaires font suite à un renforcement déjà très conséquent en cours d’année en lois de finances rectificatives, avec respectivement 170 millions d’euros et 214 millions d’euros au bénéfice des programmes Presse et médias et Livre et industries culturelles.

Ce soutien financier, qui suit un budget initial 2020 déjà en hausse pour les industries culturelles, traduit l’engagement sans faille des pouvoirs publics pour un secteur prometteur en pleine mutation et fortement affecté par la crise sanitaire.

Évolution des crÉdits de paiement de la mission mÉdias, livre et industries culturelles entre 2020 et 2021

(en millions d’euros)

Programme et action

Ouverts en LFI 2020

Demandés pour 2021

Variation en %

180 – Presse et médias

280,40

288,56

+ 2,91

Relations financières avec l’AFP

135,48

134,98

 0,37

Aides à la presse

110,92

118,09

+ 6,46

Soutien aux médias de proximité

1,58

1,83

+ 15,81

Soutien à l’expression radiophonique locale

30,75

32,00

+ 4,07

Compagnie internationale de radio et télévision

1,67

1,67

0,00

334 – Livre et industries culturelles

306,35

317,93

+ 3,78

Livre et lecture

283,30

287,38

+ 1,44

Industries culturelles

23,05

30,55

+ 32,54

Total

586,75

606,49

+ 3,36

Source : projet annuel de performance de la mission pour 2021.

I.   la presse et les mÉdias

Le programme 180 Presse et médias connaît une hausse de 2,91 % en crédits de paiement, soit un total de 288,56 millions d’euros demandés pour 2021. Près de deux fois supérieure à la hausse inscrite en 2020, cette progression bénéficie en particulier à la presse, avec 7,1 millions d’euros de crédits de paiement supplémentaires, ainsi qu’aux médias et radios locaux, tandis que le soutien financier de l’État à l’AFP connaît une légère diminution.

A.   Une annÉe de crise et de refondation pour la presse

Marquée autant par l’impact de la crise sanitaire que la disparition de Presstalis, 2020 est à n’en pas douter une année historique pour le secteur de la presse. Les difficultés rencontrées justifient le soutien sans précédent apporté par le Gouvernement, aussi bien en loi de finances rectificatives qu’avec le présent projet de loi de finances.

1.   2020, année de crise et de refondation

a.   Une crise sans précédent pour la presse écrite

La crise connue par la presse écrite s’inscrit dans un contexte déjà contraint, marqué par la baisse structurelle de 3 % du chiffre d’affaires attendue en 2020. L’épidémie est venue largement amplifier cette prédiction, en portant à 16 % la baisse estimée de l’activité pour le secteur de la presse sur l’ensemble de l’année, après une chute de 36 % observée pendant la période de confinement.

Ces résultats s’expliquent en premier lieu par la baisse des ventes au numéro, qui devraient connaître un recul de 20 % en 2020. Au 27 mars, et malgré l’autorisation d’ouverture accordée aux kiosquiers pendant le confinement, 3 379 des 20 000 points de vente de presse avaient fermé, pour un manque à gagner de 19,3 % du chiffre d’affaires. Selon les informations recueillies par le ministère de la Culture, un total de 1 000 points de vente ont fermé définitivement entre janvier et juillet 2020, contre 700 sur l’ensemble de l’année 2019.

La récession s’explique également par la forte contraction des recettes publicitaires, qui constituent en temps normal environ un tiers du chiffre d’affaires des éditeurs de presse. En volume, les campagnes publicitaires ont diminué de 70 % sur le mois d’avril, tandis que les annonces immobilières et culturelles ainsi que les offres d’emploi ont complètement cessé de paraître.

a.   Une nouvelle structure : France Messagerie

« Accélérateur de l’histoire », la crise sanitaire a entraîné la disparition de Presstalis après des années de difficultés financières.

La baisse d’activité majeure observée lors du confinement, avec une diminution de 36 % de chiffre d’affaires entre mars et avril, a conduit le groupe à se déclarer en cessation de paiement le 21 avril. Après une phase d’incertitudes, due au refus de la coopérative des magazines de s’engager dans une nouvelle structure avec les éditeurs de presse quotidienne nationale (PQN), une offre de reprise a finalement été formulée in extremis par la seule coopérative des quotidiens, avec le soutien financier de l’État.

Dénommée France Messagerie, la nouvelle entité voit son périmètre largement resserré, avec un recentrage de ses activités sur le niveau 1 de la distribution de la presse et une diminution massive de ses effectifs. De 2 500 salariés en 2012, puis 900 au début de l’année 2020, France Messagerie compte aujourd’hui seulement près de 250 salariés, répartis entre le siège et les dépôts de Bonneuil et de Bobigny.

En définitive, l’État aura apporté un soutien financier très conséquent sur l’ensemble de l’année 2020. Après 17 millions d’euros apportés en avril pour retarder la liquidation judiciaire, l’État a en effet apporté 80 millions d’euros pour soutenir la nouvelle structure, auxquels s’ajoutent, sur l’ensemble de l’année, l’aide de 27 millions d’euros pour la modernisation de la distribution et 134 millions d’euros de créances perdues. Au total, la contribution publique nette totale sur l’année 2020 s’élève ainsi à 204 millions d’euros.

Tout en portant un regard attentif à la situation sociale de l’entreprise, la rapporteure prend acte de la création de la nouvelle structure, qui pourrait mettre fin aux difficultés chroniques rencontrées par Presstalis depuis plusieurs décennies. Il revient désormais à France Messagerie et au ministère de la Culture de ne pas laisser réapparaître de nouvelles situations structurellement déficitaires. Les pouvoirs publics devront être particulièrement vigilants sur les pratiques commerciales de la nouvelle entreprise et ses relations avec son actionnaire, afin que ne soient pas reproduites les dérives ayant conduit à la faillite de Presstalis.

Un travail devrait également être mené au sujet des invendus, dont la distribution vers les diffuseurs puis la récupération en sens inverse représentent un coût économique et écologique considérable.

b.   Un soutien d’urgence avec la troisième loi de finances rectificatives pour 2020

Venant s’ajouter au soutien financier à Presstalis puis France Messagerie, trois dispositifs d’aide en faveur des acteurs les plus fragiles de la filière presse ont été créés avec la troisième loi de finances rectificatives :

     une aide de 19 millions d’euros pour les diffuseurs de presse indépendants et spécialistes, qui font face à une double situation d’urgence liée à aux conséquences de la crise sanitaire et à la restructuration de Presstalis ;

     un soutien de 8 millions d’euros pour les éditeurs d’information politique et générale, destinées en partie à compenser les pertes de créances d’environ 120 millions d’euros enregistrées avec la faillite de Presstalis ;

     enfin, 3 millions d’euros ont été débloqués en urgence pour les éditeurs de titres ultramarins d’information politique et générale (IPG).

Également à destination des éditeurs, un crédit d’impôt sur les abonnements a été créé pour un coût estimé par le ministère des finances à 60 millions d’euros en année pleine. D’un montant de 30 % du montant de l’abonnement, sans plafond et sans conditions de ressources, le crédit d’impôt est ouvert à tous les foyers pour un premier abonnement de 12 mois minimum à un titre de presse papier ou numérique d’information politique et générale (IPG) jusqu’au 31 décembre 2022. Le soutien potentiel apporté avec ce crédit d’impôt est estimé à 135 millions d’euros d’ici 2022.

L’estimation élevée de 60 millions d’euros retenue par le ministère des finances invite à suivre de près les effets de ce nouveau crédit d’impôt, dont le périmètre mériterait d’être étendu aux titres non-IPG si son coût budgétaire s’avérait inférieur aux prévisions.

2.   Le soutien financier à la presse en 2021

a.   Les crédits du programme 180

Poursuivant l’effort de grande ampleur du Gouvernement en faveur de la presse en 2020, le montant des aides à la presse dans le programme 180 connaît une hausse de 7,16 millions d’euros en 2021, soit 6,46 % de progression par rapport aux crédits ouverts pour 2020. Au total, 118,09 millions d’euros sont consacrés aux aides directes à la presse écrite, auxquels s’ajoutent 87,8 millions d’euros d’aides au transport postal inscrites dans le programme 134.

Regroupant les aides au portage de la presse et les exonérations de charges patronales pour les vendeurs-colporteurs et porteurs de presse, les aides à la diffusion de la presse sont stables pour la deuxième année consécutive, à 39,39 millions d’euros.

Les aides à la modernisation de la presse sont également maintenues à un niveau pratiquement égal à celui de 2020, avec 55,47 millions d’euros en 2021. Cette dotation a vocation à financer les aides à la modernisation de la distribution de la presse et à la modernisation des diffuseurs, pour lesquelles la rapporteure avait proposé des aménagements lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2020, ainsi que le Fonds stratégique pour le développement de la presse et le Fonds de soutien à l’émergence et l’innovation dans la presse.

C’est sur les aides au pluralisme que le soutien des pouvoirs publics est le plus affirmé en 2021, avec une progression de 7,20 millions d’euros des crédits consacrés. Avec une hausse du nombre de bénéficiaires, elle-même due aux difficultés rencontrées par le secteur, l’aide aux publications nationales IPG à faibles ressources publicitaires connaît une croissance de 1,20 million d’euros.

Tout en notant le caractère mécanique de cette progression du fait de la crise sanitaire et des difficultés rencontrés par les titres de presse dans la période actuelle, la rapporteure souhaiterait obtenir davantage d’informations sur le maintien et le contrôle de ces aides.

Enfin, deux nouvelles aides destinées à soutenir le pluralisme de la presse seront mises en place en 2021, dans le cadre du plan « filière presse » annoncé par le Gouvernement le 27 août 2020 :

– Une aide au pluralisme des titres ultramarins, à hauteur de 2 millions d’euros ;

– Une aide aux services de presse en ligne (SPEL), destinée aux services « tout en ligne » d’IPG, pour un montant de 4 millions d’euros.

La rapporteure se félicite tout particulièrement de la création de cette dernière aide, rendue nécessaire par l’évolution des pratiques et de l’offre journalistique au cours des dernières années et préconisée par la Cour des comptes depuis 2018.

b.   Le plan de relance

Parallèlement aux hausses de crédits opérées dans le périmètre de la mission Médias, 140 millions d’euros en AE et 70 millions d’euros en CP sont prévus en 2021 pour la filière presse dans le plan France Relance.

Ces nouveaux crédits doivent en premier lieu permettre d’accélérer la transformation de la filière. Le Fonds stratégique pour le développement de la presse sera doté de 45 millions d’euros supplémentaires répartis en 2021 et 2022. Les démarches administratives seront également simplifiées.

Parallèlement, le montant des crédits dédiés à l’aide à la modernisation des diffuseurs sera doublé en 2021 et 2022, pour atteindre un total de 12 millions d’euros annuels.

En outre, la modernisation des imprimeries de la presse quotidienne régionale fera l’objet d’une aide spécifique de 18 millions d’euros par an, dont 5 millions ont déjà été prévus en 2020, afin de financer la restructuration du secteur dans un contexte de baisse constante des volumes imprimés.

Enfin, les enjeux sociaux et environnementaux seront pris en compte par l’intermédiaire de deux nouveaux fonds, destinés à être reconduits annuellement pour un coût total de 26 millions d’euros par an. 18 millions d’euros seront dédiés à un fonds de lutte contre la précarité, destiné notamment aux pigistes et photojournalistes, tandis qu’un fonds visant à soutenir la transition écologique du secteur et à la mise en œuvre de la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire pour la transition écologique sera doté de 8 millions d’euros.

Le plan filiÈre presse : 483 millions d’euros en faveur du secteur d’ici 2022

(en millions d’euros)

Mesures

PLFR3 2020

Mission Relance sur 2021 et 2022

Mission Médias sur 2021 et 2022

Total

Urgence

Presstalis – continuité de l’activité

52

 

 

52

Presstalis – chèques de qualification aux diffuseurs

24

 

 

24

Presstalis – Aide exceptionnelle aux éditeurs

8

 

 

8

Aide exceptionnelle aux diffuseurs

19

 

 

19

Aide exceptionnelle aux titres ultra-marins

3

 

 

3

Total urgence

106

 

 

106

Relance

Crédit d’impôt abonnement IPG

135

 

 

135

Aide au pluralisme des SPEL

 

 

8

8

Aide au pluralisme des titres ultra-marins

 

 

4

4

Réforme industrielle imprimeries

5

31

 

36

Fonds transition écologique

 

16

 

16

France Messagerie

80

 

 

80

Renforcement soutien diffuseurs

 

12

 

12

Renforcement FSDP

5

45

 

50

Fonds précarité

 

36

 

36

Total relance

105

140

12

377

Total plan de filière presse 2020 – 2022

331

140

12

483

 

Source : ministère de la Culture.

3.   De nouvelles réflexions à mener pour les années à venir

● Si les montants provisionnés par France Messagerie laissent présager une relative stabilité du secteur de la distribution pour les deux prochaines années, la question du niveau de concentration du secteur demeure posée pour la suite, alors que les MLP assurent désormais toute la distribution de la presse magazine. À terme, l’engagement de l’État dans la distribution pourrait mériter un réexamen, compte tenu des subventions croissantes à prévoir pour assurer la poursuite de la vente au numéro de la PQN sur l’ensemble du territoire.

La rapporteure rappelle à cet égard que la part des aides publiques dans le chiffre d’affaires de la presse a progressé de 6 % entre 2010 et 2020, dans un contexte de baisse des ventes de plus en plus affirmée. En définitive, en apportant près de 22 % du chiffre d’affaires de la presse, les pouvoirs publics devront être attentifs aux choix effectués par les quotidiens en matière de transition numérique dans les années à venir, qui détermineront de fait par ricochet le niveau d’engagement financier de l’État sur la presse papier. Cette part importante de l’État dans le modèle économique de la presse l’invite également à être exigeant quant aux contreparties sociétales de ces acteurs, s’agissant notamment des nécessaires efforts à poursuivre en matière d’égalité entre les femmes et les hommes.

● Outre la vente au numéro, le système d’aide au transport des abonnements pourrait connaître de nettes transformations, suite aux travaux menés par M. Emmanuel Giannesini. Un second rapport est attendu à la fin de l’année, avec comme objectif un accord tripartite entre la Poste, l’État et la presse au début de l’année 2021. À terme, le système d’aides au transport postal pourrait évoluer vers un renforcement du portage, moyennant une aide publique assise sur le nombre d’exemplaires distribués.

La rapporteure salue le travail de M. Giannesini, tel que ce dernier lui a présenté au cours de son audition, et invite les acteurs de la presse à s’engager pleinement sur ce chantier qui permettrait, à terme, d’améliorer tant la qualité du service pour les lecteurs que le coût total du système d’aides pour le contribuable. Sur le plan strictement budgétaire, il aurait vocation à rapatrier les aides au transport de la presse vers la mission Médias, après plusieurs années de demandes vaines de transfert vers le programme 180.

● Au-delà, les critères permettant de qualifier d’IPG une publication – et ainsi lui ouvrir le bénéfice des nombreuses aides associées – demeurent parfois flous, et mériteraient un travail plus soutenu d’actualisation et de renforcement de la transparence des décisions d’attribution. La neutralité des aides vis-à-vis du support de diffusion, sans préjudice pour la transition numérique de la presse, mérite également une évaluation approfondie. En définitive, la rapporteure déplore l’opacité persistante du système d’aides, et regrette ne pas avoir pu obtenir des informations actualisées lors des travaux préparatoires au présent avis.

● Enfin, des interrogations persistent chez certains acteurs au sujet de la transition écologique du secteur et des nouvelles obligations fixées par loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire. Le dispositif de contribution en nature pour s’acquitter de l’éco-contribution prendra fin le 1er janvier 2023, tandis que les encres à base d’huiles minérales seront proscrites à compter de 2025. L’horizon est plus proche encore pour les emballages plastiques pour l’expédition de la presse, qui seront interdits dès janvier 2022.

Tout en prenant acte des inquiétudes exprimées par les acteurs, la rapporteure rappelle la pleine légitimité de ces dispositions pour engager la transition écologique de la presse. Il demeure essentiel de favoriser l’émergence de nouvelles pratiques et de nouvelles filières de production sur le territoire français, en particulier pour les encres minérales et les fibres recyclées. Ces nouvelles mesures devraient par ailleurs être appréciées à la lumière du questionnement sur l’impact écologique de la publicité.

B.   Une annÉe relativement prÉservÉe pour l’AFP, qui poursuit sa transformation

Troisième agence de presse mondiale après Reuters et Associated Press (AP), l’Agence France Presse (AFP) est un acteur essentiel d’une information de qualité au niveau mondial autant qu’un facteur de rayonnement pour la France à l’international. Longtemps confrontée à une situation financière préoccupante, l’Agence est en cours de rétablissement et pourrait même bénéficier de perspectives favorables, sous réserve de la bonne exécution de son nouveau contrat d’objectifs et de moyens (COM) pour la période 2019 – 2023.

Les crédits alloués à l’AFP dans la mission Médias diminuent de 0,37 % en 2021 pour atteindre un total de 134,98 millions d’euros. Si la part liée au paiement des abonnements reste stable à 21,66 millions d’euros, la subvention au titre de la compensation des missions d’intérêt général s’inscrit en baisse par rapport à 2020 avec 113,82 millions d’euros. Cette compensation revient ainsi à son niveau exécuté en 2018, après un apport cumulé de l’État de 17 millions d’euros en 2019 et 2020 pour soutenir la transformation.

Initié en 2018, le plan de transformation de l’AFP visait à répondre à un « effet ciseaux » caractérisé par la croissance des dépenses de personnel et l’érosion des recettes commerciales traditionnelles de l’Agence. L’objectif du plan est double : retrouver des recettes commerciales dynamiques et maîtriser les charges d’exploitation, principalement la masse salariale.

S’agissant des ressources, le plan prévoit une hausse du chiffre d’affaires de 30 millions d’euros à l’horizon 2023, fondée sur trois vecteurs de croissance que sont la vidéo, la lutte contre les fausses informations et la production journalistique et audiovisuelle à la demande ou « corporate ».

La contrepartie en dépenses est une trajectoire d’économies de 19 millions d’euros, dont le principal élément est un plan de départs volontaires de 95 départs nets d’ici 2023 devant permettre à l’Agence de réduire sa masse salariale de 14 millions d’euros par an. Autre élément majeur de la trajectoire, le regroupement de toutes les équipes de l’AFP en son siège historique de la place de la Bourse doit assurer une économie annuelle à terme de 2,5 millions d’euros. Le télétravail mis en œuvre depuis le début du confinement devrait également permettre d’accélérer les travaux et la mise en service du nouveau siège, pour un impact budgétaire positif. Ces objectifs ont été réaffirmés par le COM 2019  2023. À date d’octobre 2020, les objectifs fixés semblent davantage atteints en dépenses qu’en recettes, qui connaissent une hausse moins importante que prévue.

En définitive, l’AFP devrait dégager un résultat d’exploitation positif en 2020, permis par une baisse des charges de 10,9 millions d’euros imputable pour l’essentiel au plan de départs volontaires de 78 postes engagé en juin 2019 et allégeant la masse salariale de 7,8 millions d’euros en 2020.

Si ce résultat est encourageant pour la suite et témoigne des efforts réalisés par l’Agence pour assainir sa situation financière, il repose en partie sur le report des charges liées aux grandes manifestations sportives initialement prévues pour 2020. Tout en saluant ses bons résultats, la rapporteure encourage par conséquent l’AFP dans la poursuite de ce travail en 2021 et 2022. Si les objectifs de croissance des activités vidéo inscrits dans le COM paraissent très ambitieux, ils demeurent atteignables avec une pleine mobilisation des équipes de l’Agence.

C.   Un soutien stable aux mÉdias locaux

Les crédits de paiement de l’action 5 « Soutien aux médias de proximité » connaissent une hausse de 250 000 euros par rapport aux crédits ouverts en 2020. Le fonds de soutien aux médias de proximité bénéficiera ainsi de 1,83 million d’euros en 2021, soit sa plus large dotation depuis sa création en 2016. Cette croissance de plus de 15 % doit lui permettre de développer son action en faveur des médias locaux, avec un ciblage renforcé sur les quartiers prioritaires de politique de la ville et les zones rurales à revitaliser.

L’engagement de l’État en faveur de l’expression radiophonique locale connaît également une hausse marquée, avec 1,25 million d’euros supplémentaires en AE et CP en 2021 et une subvention totale de 31,99 millions d’euros. Venant en soutien aux radios locales associatives accomplissant une mission de communication sociale de proximité dont les ressources publicitaires sont inférieures à 20 % de leur chiffre d’affaires total, le Fonds de soutien à l’expression radiophonique locale (FSER) bénéficie ainsi d’une dotation supérieure de 4,07 % à celle perçue en 2020. Ces moyens supplémentaires permettront notamment au fonds d’accompagner les radios associatives face au fort déclin de leurs recettes publicitaires depuis le début du confinement.

Finançant à hauteur de 13,7 % la radio franco-marocaine Médi1, la Compagnie internationale de radio et télévision (CIRT) bénéficie en 2021 d’une subvention de 1,67 million d’euros, soit un montant stable par rapport à 2019 et 2020. Dans la continuité de ses remarques émises lors des exercices précédents, la rapporteure s’interroge sur la pertinence de l’existence et de l’inscription dans le programme 180 de cette ligne de crédits, dont le contrôle paraît lacunaire et qui semble davantage relever de l’action diplomatique de la France.

II.   Un soutien exceptionnel au livre et À la lecture

La filière livre a été très durement frappée par l’épidémie de Covid-19, qui a entraîné une baisse d’activité majeure des librairies après leur fermeture pendant le confinement, l’annulation des grandes manifestations littéraires, le report de nombreuses parutions par les éditeurs et la fermeture complète pendant plusieurs mois des bibliothèques.

En conséquence, le budget pour 2021 prévoit un effort important pour le livre et la lecture, avec 359,18 millions d’euros en autorisations d’engagement et 316,88 millions d’euros en crédits de paiement.

Dans le périmètre de la mission Médias, l’action 1 « Livre et lecture » voit ses crédits de paiement progresser à hauteur de 4,08 millions d’euros, soit une hausse de 1,44 %, pour un total de 287,38 millions d’euros demandés.

C’est toutefois dans le cadre de la mission Plan de relance que l’effort financier de l’État est le plus conséquent, avec 53 millions d’euros en autorisations d’engagement et 29,5 millions d’euros en crédits de paiement.

À l’échelle des deux missions, la différence de 42,3 millions d’euros entre les autorisations d’engagement et les crédits de paiement traduit principalement le soutien des pouvoirs publics aux investissements en faveur de la modernisation des bibliothèques, s’agissant aussi bien des bibliothèques locales que de la Bibliothèque nationale de France (BnF) avec la rénovation du quadrilatère Richelieu et la construction d’un nouveau site de conservation.

A.   Une nÉcessaire hausse des dotations de la BNF, pour lui permettre de mener À bien ses projets d’investissement

● Établissement public administratif placé sous la tutelle du ministère de la Culture, la BnF dispose de trois missions principales : collecter, cataloguer, conserver et enrichir le patrimoine national dont elle a la garde, qu’il soit imprimé, graphique, audiovisuel ou numérique administratif ; permettre l’accès du plus grand nombre à ses collections, tout en veillant à leur conservation ; préserver, gérer et mettre en valeur son patrimoine immobilier.

La BnF bénéficie en 2021 d’une subvention de 216,88 millions d’euros en crédits de paiement, soit une hausse conséquente de 6,76 millions d’euros par rapport à l’année précédente. Supérieure à celle opérée en 2020, cette hausse doit permettre de couvrir la croissance naturelle de la masse salariale et les effets de la crise sanitaire sur les ressources de l’établissement.

En effet, si la BnF a été relativement « protégée » par sa faible dépendance aux ressources propres, l’arrêt de la billetterie ainsi que la baisse d’activité en matière d’édition, de reproduction, de location d’espaces et de mécénat devraient toutefois entraîner un total de 5 millions d’euros de pertes de recettes sur l’année. Les dépenses supplémentaires engendrées notamment par le respect des normes sanitaires viennent s’y ajouter à hauteur de 1 million d’euros, et portent le manque à gagner brut pour 2020 à 6 millions d’euros. Ces surcoûts devraient partiellement perdurer en 2021, avec des dépenses supplémentaires et pertes de recettes respectivement estimées à 3 et 2 millions d’euros.

L’épidémie a également eu un impact notable sur les travaux de rénovation du site Richelieu, dont l’arrêt total pendant la durée du confinement reporte de quelques mois la date prévue d’ouverture du site au public, désormais prévue pour début 2022. En 2021, 11,5 millions d’euros de crédits de paiement sont prévus pour finaliser le soutien financier pluriannuel du programme 334 au projet, qui s’élèvera en tout à 163 millions d’euros.

Il convient de noter à cet égard le volontarisme de la BnF dans sa politique de mécénat pour financer le projet Richelieu, qui aboutirait, selon les estimations du ministère de la Culture, à 12,2 millions d’euros de recettes de mécénat en 2020 contre 2,3 millions d’euros en 2018. Cette progression prononcée porterait le total des ressources propres de l’établissement à 27,1 millions d’euros sur l’année.

La rapporteure salue les efforts réalisés sur ce point par la BnF, contrainte en dépenses par la structure de ses coûts. Cette initiative et l’expérience accumulée à cette occasion pourraient servir d’inspiration aux établissements publics culturels en quête de financements pour leurs projets d’investissement.

● La hausse des moyens de la BnF est plus marquée s’agissant des autorisations d’engagement, qui s’élèvent à 246,88 millions d’euros en 2021 soit un bond de 36,76 millions d’euros par rapport à 2020.

Ces autorisations d’engagement doivent permettre à la BnF de mener à bien son projet de nouveau centre de conservation, dont le coût est estimé entre 70 et 90 millions d’euros. Confrontée à l’accroissement significatif de ses collections, dû notamment à l’augmentation de la production éditoriale française qu’elle collecte par le dépôt légal, la BnF souhaite y répondre par la construction d’un nouveau pôle hors de Paris, doté d’équipements de conservation à haut standard technologique. Un appel à manifestation d’intérêt a été lancé le 29 juin 2020, pour une inauguration attendue en 2026 ou 2027.

À plus long terme, des investissements de grande ampleur seront également nécessaires pour l’entretien du site Tolbiac, qui fêtera ses trente ans en 2025.

Enfin, le plan de relance devrait permettre à la BnF de bénéficier de nouvelles aides à la rénovation énergétique de ses bâtiments, dont le montant n’est pas encore précisément connu.

B.   Une dotation stable pour la BPI, dans la poursuite de ses travaux de rÉnovation

● La Bibliothèque publique d’information (Bpi) est une bibliothèque de référence insérée au sein du Centre national d’art et de culture Georges Pompidou. Accessible gratuitement, elle a pour mission d’ouvrir le plus largement au public un choix de collections françaises et étrangères de documents d’information générale et d’actualité, et de constituer un centre de recherche documentaire en liaison avec les autres institutions culturelles.

Sa subvention s’élève en 2021 à 7,26 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 10,44 millions d’euros de crédits de paiement, soit respectivement une baisse de 4 millions d’euros et une hausse de 800 000 euros.

Cette évolution s’inscrit dans la continuité de la trajectoire financière engagée en 2021, qui avait vu la Bpi bénéficier d’une dotation exceptionnelle en autorisations d’engagement afin de mener à bien la première phase des travaux de rénovation de ses espaces de lecture.

L’impact financier de l’épidémie demeure relativement faible sur la bibliothèque, compte tenu de la part réduite des ressources propres dans son budget. Si le confinement a entraîné la fermeture complète de la Bpi au public, la période a néanmoins été marquée par une forte hausse de la consultation des contenus numériques de la bibliothèque, consécutive pour partie à la mise en libre accès de plusieurs bases de données habituellement payantes.

● Pour l’avenir, les travaux de rénovation de la Bpi auront notamment vocation à faciliter les flux entre le Centre Pompidou et la bibliothèque, qui ne sont pas reliés à ce jour par une voie d’accès intérieure. Des initiatives ont toutefois récemment été lancées pour développer les liens mutuels, à l’instar du partenariat « 15 minutes chrono », qui permet aux usagers de la Bpi de découvrir gratuitement, toutes les 15 minutes entre 18 et 19 heures, une œuvre du Centre Pompidou présentée par un conférencier.

Ouverte le dimanche depuis 1977, la Bpi souhaite par ailleurs un engagement plus important des bibliothèques de la ville de Paris et surtout universitaires dans une démarche d’élargissement de leurs jours et horaires d’accueil. La rapporteure s’associe pleinement à ce souhait, dont la satisfaction bénéficierait aux usagers des bibliothèques publiques comme aux agents de la Bpi.

C.   Un soutien important aux librairies et bibliothÈques dans le cadre du plan de Relance

L’essentiel du soutien à la chaîne du livre pour 2021 est inscrit dans la mission Plan de relance, avec 53 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 29,5 millions d’euros de crédits de paiement.

Dans le périmètre de la mission, et à l’exclusion de la BnF et de la Bpi, les crédits dédiés au livre sont maintenus en 2021 à un niveau identique à celui de 2020, soit 52,04 millions d’euros.

Si la dotation du Centre national du livre (CNL) dans le programme 334 demeure constante en 2020, avec 24,72 millions d’euros, ses moyens d’action sont abondés à hauteur de 6 millions d’euros dans le cadre du plan de relance.

1.   Un plan d’urgence en faveur du livre voté en loi de finances rectificatives

Face aux conséquences de la crise et du confinement, le CNL est intervenu en deux temps : avec ses moyens propres d’abord, sans subvention supplémentaire dans le budget de l’État et avec la participation d’organismes de gestion collective, puis par l’intermédiaire de la troisième loi de finances rectificatives, qui a renforcé ses moyens à hauteur de 34 millions d’euros.

a.   Une action en urgence avec les fonds du CNL

Les auteurs ont bénéficié du premier dispositif de crise du CNL, avec le lancement début avril d’un fonds de 1 million d’euros, abondé par cinq organismes de gestion collective pour un total de 2,2 millions d’euros de subventions. À la fin du mois de juillet, 1,6 million d’euros avaient déjà été versés.

Les petits éditeurs réalisant un chiffre d’affaires inférieur à 0,5 million d’euros ont fait l’objet d’un fonds dédié de 0,5 million d’euros mis en place par le CNL, abondé par la suite par plusieurs organismes de gestion collective – ADAGP, CFC, SAIF, SCAM et Sofia – à hauteur de 0,35 million d’euros.

Un soutien en urgence de 0,5 million d’euros a également été décidé pour les librairies francophones à l’étranger, au bénéfice en octobre 2020 de près de 80 librairies européennes, africaines, américaines et proche-orientales.

En outre, le conseil d’administration du CNL a décidé, à titre dérogatoire jusqu’à fin 2020 et à niveau égal de dotation de l’État, de maintenir les subventions déjà allouées aux festivals annulés en raison de la crise sanitaire et d’accorder de nouvelles aides aux festivals annonçant qu’ils seraient annulés à cause de la crise. Les organisateurs de ces manifestations littéraires ont été incités à prendre en compte le dédommagement des auteurs invités dans leur programmation. Au 30 juin, 36 festivals littéraires annulés en raison de la crise sanitaire avaient ainsi bénéficié d’une subvention, pour un total d’environ 0,65 million d’euros.

b.   Une dotation supplémentaire en loi de finances rectificatives

À ces fonds débloqués en urgence se sont ajoutés 34,06 millions d’euros ouverts en loi de finances rectificatives, qui ont permis au CNL d’apporter un soutien important aux libraires et aux éditeurs.

Outre les mesures prises dès le début du confinement pour éviter les faillites de librairies, et plus largement assurer la continuité des paiements entre les maillons de la chaîne du livre, un soutien supplémentaire de 25 millions d’euros a été décidé par le CNL, afin de compenser les coûts incompressibles supportés par les libraires pendant la période du confinement. Au niveau local, trois régions ont décidé de compléter l’effort national, tandis que les librairies ultra-marines ont bénéficié d’une bonification.

Mise en lumière lors du déconfinement, la nécessité d’une modernisation des librairies a justifié un soutien de l’État de 6 millions d’euros en cette direction. Reconduite en 2021, cette aide a vocation à financer les projets des librairies en faveur de l’attractivité de leur magasin et de leur gestion informatique, et l’investissement dans des solutions de vente à distance.

Si l’aide demeure faiblement consommée, avec seulement 3,9 millions d’euros engagés en octobre 2020, il ressort de l’audition du CNL menée par la rapporteure que cette sous-consommation s’explique avant tout par la prudence des libraires, qui attendent la normalisation de leur activité avant d’engager des travaux de rénovation de grande ampleur.

Les maisons d’édition non couvertes par la première aide (cf. supra) ont été également soutenues à hauteur de 4,2 millions d’euros supplémentaires, selon un périmètre plus large incluant tous les éditeurs dont le chiffre d’affaires est compris entre 0,1 et 10 millions d’euros.

2.   Un soutien affirmé en 2021 dans le cadre du plan de relance

Le « plan filière livre » donnera lieu, en 2021, à un investissement sans précédent de 53 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 29,5 millions d’euros de crédits de paiement.

Les actions de la mission Plan de relance en faveur du livre
 

Associant régions, établissements scolaires et librairies indépendantes depuis 2009 et donnant notamment lieu à distribution de chèques lire, les opérations « Jeunes en librairie » sont étendues et financées à hauteur de 7 millions deuros sur deux ans, dont 3,5 millions deuros en 2021.

Les achats de livres par les bibliothèques publiques sont aidés par l’État à hauteur de 5 millions deuros en 2021, de même en 2022. Outre le soutien financier à la filière que cela représente, cette aide doit permettre de compenser la baisse des moyens consacrés par les collectivités pour renouveler les collections.

Dans la continuité des 6 millions deuros déployés en urgence avec la troisième loi de finances rectificatives pour 2020, une somme identique est engagée en 2021 pour appuyer les librairies dans leurs investissements.

Enfin, les collectivités territoriales sont soutenues à hauteur de 30 millions deuros à parts égales en 2021 et 2022 pour la construction et la rénovation énergétique de leurs bibliothèques. Ces crédits doivent notamment financer la participation de l’État aux projets de grande bibliothèque de Besançon, à hauteur de 11 millions deuros, et de Clermont-Ferrand.

La rapporteure salue l’engagement de l’État en faveur d’un secteur pour qui les risques de crise « à retardement » sont élevés, du fait des pertes de chiffre d’affaires enregistrées en 2020 et de la lenteur du retour à la situation antérieure. De fait, le niveau variable de reprise d’activité des librairies sur le territoire doit inciter les pouvoirs publics à la plus grande vigilance pour l’année à venir.

De nouveaux dispositifs de soutien pourraient être mis en œuvre, notamment pour soutenir les libraires face à la concurrence des grands acteurs de la vente sur internet. Aussi, une réflexion sur une nouvelle aide au transport postal du livre mériterait d’être engagée, de même que sur la fixation du prix du livre.

Hors de nos frontières, le soutien financier du CNL à la reconstruction des librairies francophones de Beyrouth mené en coopération avec le ministère de l’Europe et des Affaires Étrangères doit également être salué.

III.   Un budget de secours pour les industries culturelles

Les crédits de paiement de l’action 2 Industries culturelles s’élèvent à 30,55 millions d’euros en 2021, et connaissent donc une hausse marquée de 7,50 millions d’euros soit 32,54 % par rapport à 2020. Destinés au Centre national de la musique (CNM), ces crédits supplémentaires contribueront au redémarrage de l’activité dans le secteur musical et à la stabilisation du Centre, dont le lancement a été fortement perturbé par la crise.

A.   Un budget qui fait la part belle au cinÉma, dÉvastÉ par le confinement

L’effondrement des ressources du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) consécutif à la crise rencontrée par le secteur ainsi que notre attachement à la création française motivent l’allocation de moyens exceptionnels au cinéma dans le projet de loi de finances pour 2021.

S’il n’existe pas habituellement de lien budgétaire entre le budget de l’État et le CNC, en raison de son financement autonome par taxes affectées, ce dernier se voit doté à titre exceptionnel de 165 millions d’euros en 2021, inscrits dans la mission Plan de relance. Ce montant vise à compenser le déficit du CNC du fait de la crise sanitaire, et à lui permettre de poursuivre son soutien au secteur.

Outre les dispositifs transversaux dont a bénéficié le secteur, cette aide fait suite à une dotation de 50 millions d’euros supplémentaires dans le cadre du PLFR 3, destinée à financer le fonds d’indemnisation pour les tournages (cf. infra).

1.   2020, annus horribilis pour le cinéma

a.   Une crise sanitaire dévastatrice pour l’ensemble de la filière

Avec la fermeture des salles du 14 mars au 22 juin et l’interruption complète des tournages, le secteur du cinéma a été très durement frappé par la crise, en aval comme en amont.

Au total, les 420 œuvres soutenues par le CNC lors de l’entrée en vigueur du confinement ont été mises à l’arrêt pendant plusieurs semaines voire plusieurs mois, à des stades allant de l’écriture à la post-production.

Si l’ensemble de la filière fait face à des difficultés majeures, l’impact à court terme est particulièrement prononcé pour les distributeurs et exploitants, qui, après avoir été contraints de suspendre entièrement leur activité lors du confinement, font aujourd’hui face à une fréquentation en très net recul par rapport au début de l’année, après une baisse de 70 % en juillet et en août. Outre la diminution des jauges dans les salles, ces données s’expliquent notamment par le report ou l’annulation des sorties d’œuvres américaines à l’échelle mondiale dans le contexte de la pandémie. Selon les dernières estimations, le nombre total d’entrées sur l’année pourrait atteindre seulement un tiers des montants initialement attendus. Sans compter les effets du couvre-feu, la perte pour les exploitants s’élèverait à 750 millions d’euros en 2020, soit un recul historique de 46 % de leur chiffre d’affaires.

b.   Un fort impact en ressources pour le CNC

La crise rencontrée par le secteur n’est pas sans conséquence pour le CNC qui, en application du principe selon lequel l’aval finance l’amont, connaît en 2020 une diminution importante de ses recettes.

Entièrement financé par taxes affectées, sans dotation de l’État, le CNC devrait voir ses ressources ordinaires diminuer de 92 millions d’euros en 2021 pour atteindre un total de 589 millions d’euros. Cette évolution est imputable pour l’essentiel à la taxe sur les entrées en salles de spectacles cinématographiques (TSA), dont le rendement est attendu à 60 millions d’euros en 2020 contre 147 millions prévus initialement.

2.   L’effort financier de l’État pour le cinéma en 2021 et 2022

a.   Les mesures d’urgence

Face aux problèmes rencontrés par les entreprises du secteur, le CNC a adopté au début du mois d’avril un plan de continuité d’activité comprenant un large éventail de mesures, destinées à soutenir tous les acteurs de la filière.

Les mesures du plan durgence du CNC

Le paiement au CNC, par les salles de cinéma, des échéances de mars et avril 2020 de la TSA a été suspendu.

Le CNC a versé par anticipation, dès le début du mois davril, les aides financières aux salles Art et essai (16,5 millions deuros) et les aides sélectives à la distribution (5,5 millions deuros), de même dès le mois de mai pour les aides financières aux salles à « programmation difficile » (1,7 million deuros).

La possibilité a été ouverte à toute entreprise détentrice dun compte automatique de soutien auprès du CNC – producteurs, distributeurs, exploitants, éditeurs vidéo, exportateurs – de mobiliser par anticipation, avant même d’être en mesure de développer ses nouveaux projets, 30 % des sommes qui sont inscrites sur ce compte pour faire face à des besoins de trésorerie pressants en lien direct avec les conséquences de l’épidémie, que les mesures générales de l’État ne lui permettaient pas de surmonter.

Les subventions du CNC aux manifestations annulées pour raisons sanitaires, notamment les festivals, ont été maintenues en intégralité.

Le fonds de solidarité créé par la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD), permettant de verser une aide durgence de 1 500 euros par mois aux auteurs dont lactivité est particulièrement affectée par la crise et qui nont pu être éligibles au fonds de solidarité du Gouvernement, a été abondé.

Pour accompagner les industries techniques dans leurs projets dinvestissement liés à lorganisation du travail à distance et aux plans de reprise dactivité, le CNC a lancé un appel à projets dédié, au-delà de la période de crise, destiné à accroître durablement la compétitivité de la filière.

Source : CNC

Un fonds d’indemnisation et de garantie pour les tournages a également été mis en place au début du mois de mai, afin de permettre aux productions de reprendre dans un contexte de fortes incertitudes économiques. Ouvert à toutes les productions françaises ou majoritairement françaises éligibles aux aides du CNC, le fonds est doté de 100 millions d’euros fournis à parts égales par le CNC et un regroupement d’assureurs mutualistes français. Au 7 octobre 2020, aucun sinistre n’avait été recensé et plus de 300 œuvres avaient eu accès à ce fonds, au bénéfice, à terme, de l’ensemble du secteur.

Enfin, le Gouvernement a permis aux films exploités en salle de cinéma au 14 mars de bénéficier d’un avancement de leur date de sortie en vidéo, à la demande (VOD) et sur support physique, dérogeant ainsi à la chronologie des médias, sans soulever des cris d’orfraies.

b.   Un réarmement conséquent en 2021 avec le plan de relance

Le CNC bénéficie dans la mission Plan de relance d’une dotation exceptionnelle de 165 millions d’euros en 2021.

Cette dotation doit en premier lieu lui permettre de combler son déficit attendu en 2021, que l’État prendra en charge à hauteur de 60 millions d’euros, et ainsi d’assurer au CNC la poursuite de ses missions de soutien au secteur.

Un versement de 105 millions d’euros complète ce dispositif afin de financer plusieurs nouvelles mesures de relance en faveur :

  de la production cinématographique et de la production audiovisuelle, respectivement à hauteur de 12,2 millions d’euros ;

  de la distribution, pour 17,7 millions d’euros ;

  des industries techniques, avec 10 millions d’euros supplémentaires ;

  de l’export et de l’attractivité du cinéma et de l’audiovisuel français, à hauteur de 8,3 millions d’euros ;

  de la diffusion cinématographique, avec 34,3 millions d’euros à destination des salles de cinéma, avec des actions particulières en faveur de la diversité des films programmés ;

  de la jeunesse, avec un investissement de 6 millions d’euros, en partenariat avec la FEMIS, pour soutenir les auteurs et jeunes diplômés du cinéma ;

  du patrimoine, avec 1,8 millions supplémentaires.

En sus de ces 165 millions d’euros, les cinémas subissant une perte d’au moins 30 % de leur chiffre d’affaires entre le 1er septembre et le 31 décembre bénéficient d’une enveloppe de 50 millions d’euros. Destinée à compenser les pertes de recettes des exploitants à hauteur de 40 %, cette aide est bonifiée pour les salles de petite taille.

Faisant suite à l’entrée en vigueur du couvre-feu le 17 octobre, la ministre de la Culture a par ailleurs annoncé un nouveau dispositif de soutien au cinéma a doté de 30 millions d'euros. Un complément au prix du billet devrait ainsi être apporté par l'État aux salles de cinéma, de même que sont prévues des aides aux distributeurs, aux producteurs dont les films enregistrent moins de 1,5 million d'entrées et aux exploitants.

Avec l’interruption des tournages, le montant total des crédits d’impôt exigibles au titre de 2020 devrait quant à lui s’inscrire en net retrait par rapport à l’année précédente, avec un coût total estimé à 348 millions d’euros contre 412,2 millions d’euros au titre de 2019. Aussi, une réflexion mériterait d’être engagée pour adapter temporairement les taux des cinq crédits d’impôt – SOFICA, cinéma, cinéma international, audiovisuel, et jeux vidéo – et préserver le soutien financier net qu’ils apportent au secteur.

B.   Un net renforcement des crÉdits du Centre national de la musique

● D’année de naissance, 2020 est rapidement passée, avec la crise sanitaire, à année d’adolescence pour le Centre national de la musique (CNM). Institué par la loi n° 2019-1100 du 30 octobre 2019 relative à la création du Centre national de la musique, le Centre a vocation à rassembler la quasi-totalité des organismes intervenant dans le secteur de la musique afin d’en faire, à terme, un acteur unifié et puissant pour le soutien à la filière musicale.

La structure de recettes du CNM, qui devait être un gage de dynamisme à terme, a toutefois été fragilisée par la crise sanitaire.

Sur un total de 85,5 millions d’euros prévus en moyens d’action, dont 55,5 millions d’euros hors crédits d’impôt, 30 millions d’euros devaient en effet provenir des recettes de taxe sur les spectacles de variété (TSV), dont le rendement devrait être très fortement réduit sur l’année du fait de la nécessaire annulation des spectacles et la reprise très lente de l’activité.

Un effet similaire est à prévoir pour la contribution des organismes de gestion collective (OGC), attendue initialement à 6 millions d’euros. Si cette contribution est, à court terme, peu affectée par la crise, les conséquences à long terme sont plus marquées du fait d’un effet à retardement de l’effondrement des collectes des OGC au titre du droit d’auteur.

 

Les ressources initialement prÉvues pour le CNM en 2020

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Source : commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat

 

● Dans ce contexte de très fortes incertitudes, et suite aux annonces du président de la République en faveur de la culture le 6 mai, le CNM a été doté de 50 millions d’euros supplémentaires en troisième loi de finances rectificative, qui lui ont permis de poursuivre le soutien apporté aux acteurs de la filière avec :

  L’extension du fonds de secours existant pour le spectacle vivant à hauteur de 7 millions d’euros,

  La création d’un fonds de sauvegarde de 16 millions d’euros, dont 11 millions d’euros de subventions et 5 millions d’euros d’avances remboursables, qui permettra de soutenir les entreprises du spectacle de musique et de variétés dont le chiffre d’affaires est inférieur à 120 000 euros,

  Le maintien du niveau d’intervention des aides automatiques et des aides sélectives,

  La mobilisation de 4 millions d’euros pour soutenir le secteur de la production phonographique – aide aux enregistrements, aux clips et à la promotion des œuvres,

  Le renforcement à hauteur de 700 000 euros des programmes visant à soutenir l’activité phonographique dans le domaine de la musique classique et contemporaine, des musiques du monde et des musiques traditionnelles, du jazz et du jeune public,

  Le renforcement du dispositif de secours au bénéfice des disquaires et distributeurs à hauteur de 250 000 euros.

● En 2021, la dotation centrale du CNM dans la mission Médias, livre et industries culturelles s’élève à 15,80 millions d’euros, soit 7,8 millions d’euros supplémentaires par rapport à 2020.

Ses capacités d’intervention sont en outre accrues par l’intermédiaire du plan de relance, qui dote l’établissement de 210 millions d’euros sur deux ans, dont 170 et 5 millions d’euros respectivement dédiés en 2021 au soutien à la filière musicale et au renforcement des crédits propres du CNM.

La rapporteure se félicite de ce soutien affirmé, qui bénéficiera au monde de la musique dans son ensemble. En définitive, la qualité de l’aide d’urgence apportée au secteur par le CNM lors de la crise sanitaire témoigne une nouvelle fois de la pertinence de cette nouvelle structure.

L’assouplissement du critère de francophonie pour l’attribution du crédit d’impôt pour la production phonographique (CIPP), voté en loi de finances pour 2020, devrait également avoir un effet favorable sur la filière en 2021. La rapporteure souhaite sur ce point disposer d’une première évaluation de l’effet budgétaire de cette modification, salué par le secteur lors de son adoption.

● Par ailleurs, et sans lien avec la crise sanitaire, la rapporteure note avec préoccupation les effets attendus de la décision de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) sur les « irrépartissables juridiques », qui pourraient à terme considérablement affaiblir l’écosystème français de la création, et les ressources du CNM issues des contributions des OGC.

 

Larrêt Recorded Artists Actors Performers Ltd. de la CJUE :

un séisme pour la création

Par un arrêt Recorded Artists Actors Performers Ltd contre Phonographic Performance (Ireland) Ltd du 8 septembre 2020, la CJUE est venue remettre en question le système dit des « irrépartissables juridiques », représentant chaque année près de 25 millions deuros daide à la création gérés par les OGC.

Larticle L. 324-17 du code de la propriété intellectuelle prévoit que les sommes perçues par les OGC au titre des droits dauteur et droits voisins et nayant pu être réparties en application des conventions internationales auxquelles la France est partie peuvent être utilisées à des actions daide à la création, à la diffusion du spectacle vivant, au développement de l’éducation artistique et culturelle et à des actions de formation des artistes.

Jusqu’à la décision du 8 septembre, les États membres de lUnion européenne, dont la France, considéraient que faisaient partie de ces irrépartissables les sommes perçues au titre de la diffusion de phonogrammes dont les titulaires de droits étaient situés hors de lUnion. Cette pratique était motivée par les réserves émises par plusieurs pays, et notamment les États-Unis, à larticle 15 du traité de lOrganisation mondiale de la propriété intellectuelle sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes (TIEP), qui prévoit un droit à rémunération pour les artistes-interprètes pour lutilisation de leurs œuvres dans un État partie au traité.

Sappuyant sur la Charte européenne des droits fondamentaux, qui prévoit notamment un droit à rémunération équitable pour les auteurs, la Cour estime quen labsence de disposition en ce sens dans le droit dérivé de lUnion européenne, et quelles que soient les réserves émises à larticle 15, le traité ne saurait avoir pour effet dexclure les artistes‑interprètes de pays tiers du bénéfice des sommes perçues dans les États membres de lUnion.

En définitive, et en application de la décision, les sommes jusquici considérées comme irrépartissables devront désormais être reversées à leurs bénéficiaires dans leurs États, et ce quand bien même aucun droit ne serait reversé aux auteurs européens pour lexploitation de l’œuvre dans les États ayant formulé la réserve susmentionnée – dont les États-Unis.

Tout en prenant acte de cette décision, la rapporteure s’inquiète des conditions potentiellement déloyales qu’elle a pour effet d’instaurer au détriment des artistes-interprètes européens, et de ses conséquences plus générales pour l’écosystème de la création. Les dispositions votées dans le projet de loi « DDADUE » portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière devraient, tout au moins, permettre de sécuriser les aides versées par le passé.

● Au-delà, la mise à contribution des nouveaux dispositifs d’écoute de musique mériterait d’être examinée, afin d’adapter le soutien au secteur aux nouvelles pratiques de consommation musicale.

C.   Une annÉe d’incertitudes pour la Hadopi, dans la vive attente de sa fusion avec le CSA

La Hadopi bénéficiera en 2021 d’une subvention de 8,65 millions d’euros, soit un montant identique à celui autorisé en loi de finances pour 2020. Après plusieurs années de baisse, le montant de la subvention est ainsi stabilisé au niveau exécuté en 2019.

Sur le plan budgétaire, l’impact de la crise sanitaire devrait conduire la Hadopi à une situation légèrement déficitaire, à hauteur de 400 000 euros, due à des dépenses exceptionnelles de fonctionnement ainsi qu’aux dépenses de préfiguration de la fusion avec le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA). Évaluées à 166 000 euros, ces dépenses ont été prises en charge à parts égales par chaque autorité. En définitive, la Hadopi reste en mesure d’absorber le déficit attendu grâce à sa gestion prudente sur les années passées, qui lui ont permis de constituer des disponibilités suffisantes en fonds de roulement.

La priorité est aujourd’hui la création de l’Autorité de régulation des communications (ARCOM), qui devait voir le jour en 2021 avec le projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle à l’ère numérique, dont l’examen à l’Assemblée nationale a été interrompu par le confinement.

Cette fusion demeure d’une pleine actualité, compte tenu notamment des changements de pratiques en matière de piratage qui nécessitent de mobiliser non seulement les moyens de la Hadopi, traditionnellement centrés sur la lutte contre le « pair à pair » (peer to peer), mais aussi ceux du CSA, davantage en mesure d’identifier et de lutter contre le streaming illégal dont la place croît d’année en année.

En outre, après un important travail de préfiguration de la nouvelle structure, marqué notamment par la signature d’une convention de préfiguration en janvier 2020, les personnels des deux autorités font aujourd’hui face à un flou qui nuit au bon accomplissement de leurs missions.

La rapporteure insiste par conséquent sur la nécessité de mettre en œuvre cette fusion au plus vite, par tout véhicule législatif disponible. L’audition commune des deux autorités à l’occasion du présent avis a mis en lumière leur vive attente de voir ce projet se concrétiser prochainement.

À terme, et au-delà de la fusion, les missions de la Hadopi seront bientôt élargies par l’article 17 de la directive « droits d’auteurs », dont les ordonnances de transposition doivent assurer l’effectivité d’ici au 1er janvier 2021. La Hadopi se verra ainsi confier l’évaluation des différentes technologies de reconnaissance de contenus utilisées par les plateformes et les conditions de leur déploiement, ainsi que la mise en place d’une voie de recours pour les utilisateurs en cas de blocage de leur contenu par une plateforme qu’ils considèreraient comme abusif.

Le coût lié à cette deuxième mission demeure difficile à évaluer à ce stade, du fait de l’impossibilité de prévoir avec précision le nombre de recours formés. Selon la Haute autorité, la charge supplémentaire devrait toutefois pouvoir être prise en charge à niveau de subvention égal.


   Le compte de concours financiers Avances à l’audiovisuel public : faire de la crise une opportunitÉ pour renforcer les synergies

Fortement affecté par la crise sanitaire, l’audiovisuel public a poursuivi sa transformation en 2020. Avec l’essor des contenus en ligne, dont témoigne le succès de France.tv, des podcasts de Radio France et d’Educ’Arte, ou encore le lancement de nouveaux outils, comme la plateforme TV5Mondeplus et les nouvelles offres Madelen et Mediaclip de l’INA, le confinement a été un accélérateur pour la transition numérique des six sociétés. Si l’effondrement des recettes publicitaires constitue évidemment un défi majeur pour 2020 et 2021, les perspectives encourageantes du numérique pour l’avenir doivent donc être soulignées, avec l’élargissement des publics atteints et la croissance des recettes qu’elles pourront apporter.

● Les crédits inscrits dans le compte de concours financier Avances à l’audiovisuel public connaissent une baisse de 70 millions d’euros, soit une évolution globalement conforme à la trajectoire financière sur ce périmètre. Après une diminution de 35 millions d’euros en 2019, la réduction pour les six sociétés en 2021 est ainsi équivalente à celle opérée en 2020. Pour respecter l’objectif de 190 millions d’euros d’ici 2022, une nouvelle diminution de 15 millions d’euros est attendue en loi de finances de l’année prochaine.

● Parallèlement, et pour soutenir un secteur confronté à un effondrement de ses ressources propres, le Gouvernement apporte un soutien exceptionnel de 70 millions d’euros dans le cadre du plan de relance en 2021 et 2022, dont 65 millions d’euros en 2021.

Sur ces 70 millions, France Télévisions devrait bénéficier de 45 millions d’euros, Radio France de 20 millions d’euros dont 15 en 2021, Arte et l’Institut national de l’audiovisuel (INA) de 2 millions d’euros chacune, et TV5 Monde ainsi que France Médias Monde de 0,5 million d’euros.

Évolution des crÉdits allouÉs À chaque sociÉtÉ entre 2020 et 2021

(en millions d’euros)

Société

CCF Avances à l’audiovisuel public

Relance (prévisionnel)

Variation nette attendue en 2021

Crédits totaux
en 2021

France Télévisions

 60,8

+ 45

- 15,8

2 421,05

Radio France

 8,2

+ 15

+ 6,8

591,43

ARTE France

 2

+ 2

0

279,04

France Médias Monde

 0,5

+ 0,5

0

259,99

INA

+ 1,5

+ 2

+ 3,5

89,74

TV5 Monde

0

+ 0,5

+ 0,5

77,75

Total

 70

+ 65

- 5

3 719,02

Source : documents budgétaires annexés au projet de loi de finances pour 2021.

● Si le projet de « holding » prévu dans le projet de loi relatif à l’audiovisuel et relatif à la communication audiovisuelle paraît ajourné, le travail de développement de synergies pourrait être poursuivi, s’agissant notamment des offres des différentes sociétés en direction de la jeunesse. Le succès rencontré pendant le confinement par France 4 et sa grille restructurée autour de contenus ludo-éducatifs pourrait servir d’inspiration pour de nouveaux projets de mutualisation thématique, à même de renforcer la lisibilité et l’attractivité des chaînes.

La crise sanitaire pourrait ainsi se révéler, contre toute attente, une opportunité pour développer des offres communes et accélérer la transition numérique de l’audiovisuel public français.

I.   France TÉlÉvisions : un dÉficit maîtrisÉ en 2020, dans un contexte de report de charges et de soutien via le plan de relance

Conformément à la trajectoire financière établie en 2018, les crédits alloués à France Télévisions connaissent une nouvelle baisse en 2021, avec 2 421,05 millions d’euros soit un recul de 60,81 millions d’euros par rapport à 2020. Avec une baisse de dotation cumulée de 146,85 millions d’euros depuis 2018, le budget 2022 devrait donc prévoir une nouvelle baisse de 13,15 millions d’euros pour atteindre la cible de 160 millions d’euros décidée par le Gouvernement en 2018.

France Télévisions bénéficie par ailleurs d’un refinancement de 45 millions d’euros dans le plan de relance. Cette dotation supplémentaire doit permettre au groupe de faire face aux conséquences financières particulièrement lourdes de la crise, du fait de l’importante part des ressources propres dans son budget. En 2020, celles-ci devraient s’établir à 359,2 millions d’euros, soit une chute de 51,8 millions d’euros par rapport à 2019 et de 67,7 millions d’euros par rapport à la prévision 2020. Les recettes publicitaires sont les premières touchées, avec un recul de 42,2 millions d’euros par rapport à l’année précédente.

Instrument essentiel pour le respect de la trajectoire financière, la maîtrise de la masse salariale s’est poursuivie en 2019 et 2020 à un rythme légèrement plus soutenu qu’initialement prévu. L’ouverture à l’été 2019 d’un dispositif de rupture conventionnelle collective et sa poursuite en 2020 devaient permettre au groupe d’atteindre une cible de 9 255 ETP, soit une diminution totale de 200 ETP par rapport à 2019. En définitive, le niveau moyen annuel devrait être inférieur à cette prévision avec 9 100 ETP en 2020. En conséquence, l’objectif de 8 570 ETP en 2023 devrait pouvoir être respecté.

En définitive, après une première estimation à 37 millions d’euros, les économies réalisées en dépenses de fonctionnement et la reprise plus rapide que prévue du marché publicitaire devraient permettre de ramener le déficit d’exploitation de France Télévisions à environ 20 millions d’euros en 2020.

A.   Une action diversifiÉe durant le confinement

 Dès le début du confinement, France Télévisions a adapté son offre de programmes pour accompagner et informer les Français dans un quotidien bouleversé par le confinement et déployer un plan de soutien à des industries culturelles mises à l’arrêt.

Une offre éducative renforcée pendant le confinement

En réponse à la fermeture des écoles, France Télévisions a largement revu la grille des programmes de la chaîne France 4 pour en faire un outil de soutien ludo-éducatif aux familles.

Proposant quotidiennement un contenu spécifique pour chaque classe d’âge et préparée avec des professeurs de l’Éducation nationale, l’émission Les cours Lumni a rencontré un vif succès avec un pic d’un million denfants atteints simultanément en avril. Au total, à la fin du mois de mai, 8,8 millions de téléspectateurs avaient regardé au moins un programme Lumni depuis mars, tandis quun élève sur deux et un enseignant sur deux déclaraient connaître l’émission.

Lancé au début du mois davril pour une durée de deux mois, le magazine quotidien Allo Ôkoo visait à présenter la pandémie avec un regard simple et bienveillant. Il a rencontré un total de 3,3 millions de téléspectateurs, tandis que les vidéos disponibles en ligne ont enregistré une moyenne de 8,7 millions de visionnages hebdomadaires.

Le succès de ces deux nouveaux programmes a conduit à prolonger lexpérience au-delà du confinement, et à renforcer durablement les contenus pédagogiques dans la programmation de France 4.

La rapporteure tient à souligner le rôle important joué par les offres jeunesse Lumni et Okoo lancées en novembre et décembre 2019, qui ont contribué à la continuité éducative pendant le confinement. Elle regrette que ces offres délinéarisées soient parfois occultées par les réflexions sur le maintien de France 4.

Tous programmes confondus, la période a été marquée par une forte progression des audiences. Signe de l’importance, aux yeux des Français, d’un service public télévisuel proposant une information fiable et de qualité, l’audience des journaux d’information a fortement progressé, la croissance atteignant même 90 % chez les 15-34 ans. En prenant en compte l’ensemble des supports, télévision ou web, 80 % des Français regardent un programme de France Télévisions chaque semaine, pour une part d’audience cumulée de 28,6 % en août 2020.

Les offres numériques ont également connu succès notable. Outre le succès d’Okoo (cf. supra), le premier semestre 2020 a vu la plateforme France.tv enregistrer sa plus forte croissance depuis sa création, avec un total de 105 millions de visionnages, soit 20 % supplémentaires par rapport au premier semestre 2019. Avec 25 millions de visiteurs uniques par mois, le site franceinfo est quant à lui passé en tête des sites d’information généraliste français.

Face à la mise à l’arrêt complète du secteur avec le confinement, France Télévisions a également déployé un large plan d’action pour soutenir le monde de la création. Ce plan comprend notamment des mesures visant à assurer la continuité de l’instruction des contrats avec les producteurs, la poursuite des écritures avec les auteurs de fiction, la réduction des délais de paiement à 30 jours contre 60 jours en temps normal, ou encore la prise en charge partielle de surcoûts de production externe dus à l’épidémie. S’agissant des programmes, les diffusions de pièce de théâtre comme celles de la Comédie Française ou l’opération « Opéra chez soi » ont permis de donner davantage de visibilité au spectacle vivant, lui‑même fortement affecté.

● Initialement prévu pour le mois d’août, l’arrêt de la chaîne France 4 a finalement été reporté d’un an suite au succès rencontré par ses offres éducatives. Cette chaine est un support de programmes en faveur de la jeunesse et de l’éducation, dans un contexte sanitaire qui demeure incertain. France Télévisions dispose d’un délai supplémentaire pour articuler une offre pérenne à ce canal, ce qui ne l’empêche nullement de programmer des émissions à destination de la jeunesse sur ses autres canaux.

La chaîne France Ô a en revanche bien cessé d’émettre le 23 août 2020, conformément à la stratégie engagée avec le pacte pour la visibilité des outre-mer signé en juillet 2019 avec le ministère des Outre-mer. Il serait judicieux de pouvoir procéder à l'évaluation de cette visibilité.

B.   Des difficultÉs À prÉvoir pour 2021

L’année 2021 s’annonce difficile pour France Télévisions, en raison à la fois des aléas de la crise sanitaire et d’un effet « ciseaux » attendu en recettes et en dépenses.

Si la baisse de dotation sur l’année a été réduite de 10 millions afin de donner des marges de manœuvre supplémentaires à court terme à la société, 2021 demeurera une année exigeante avec une diminution des subventions à hauteur de 60 millions d’euros. Cette baisse porte à 13,14 millions d’euros l’effort financier restant à réaliser en 2022.

tableau rÉcapitulatif des crÉdits allouÉs À France TÉlÉvisions 2018-2022

(en millions d’euros)

Année

Crédits alloués

Économies cumulées

2018

2 567,91

 

2019

2 543,12

24,79

2020

2 481,87

86,04

2021

2 421,05

146,86

2022

2 407,91

160

Source : lois de finances initiale pour 2018, 2019 et 2020 ; projet de loi de finances pour 2021.

À ces recettes publiques en diminution s’ajoutent des dépenses supplémentaires prises en charge par France Télévisions en 2021 :

  Le report des charges liées à la diffusion des Jeux olympiques de Tokyo, pour un montant d’environ 20 millions d’euros ;

  L’amortissement de l’achat des droits pour les Jeux olympiques de Paris 2024 sur 4 ans et qui débute donc en 2021 ;

  Les coûts supplémentaires induits par les normes sanitaires, entraînant notamment un allongement des durées de tournage,

  Le maintien de France 4, dont le coût minimal est évalué à 10 millions d’euros de janvier à août 2020 ;

  Le sous-titrage de franceinfo ;

  L’effort supplémentaire de 20 millions d’euros en faveur de la création, décidé lors de la crise sanitaire.

En définitive, France Télévisions évalue l’effort financier total brut à réaliser en 2021 à 125 millions d’euros. La dotation supplémentaire de 45 millions d’euros inscrite dans la mission Plan de relance porte par conséquent l’effort net du groupe à 80 millions d’euros sur l’année.

C.   La recherche de synergies dans l’audiovisuel public, une stratÉgie À consolider

Affichées comme une priorité par les pouvoirs publics depuis 2017, les synergies entre les différentes entités de l’audiovisuel public demeurent une piste à développer autant qu’à consolider, eu égard aux surcoûts que leur création peut entraîner.

Le succès de l’offre ludo-éducative de France 4 pendant le confinement pourrait servir d’inspiration à une offre commune en matière de jeunesse, proposant en libre accès les contenus produits par chacune des sociétés. France 4 pourrait devenir la vitrine linéaire des offres du service public, qu’elles soient originellement linéaires ou numériques. Outre un enjeu de mise en commun des financements et de cohérence de l’offre, une telle stratégie permettrait d’améliorer la lisibilité comme l’accessibilité des contenus à destination des enfants.

Tout en saluant les efforts d’ores et déjà réalisés, la rapporteure appelle à développer les pistes de mutualisation sur ce segment de programmes dont l’audience lors du confinement a démontré toute la pertinence dans le service public audiovisuel.

II.   Radio France : un impact important de la crise sur les recettes, qui ne doit pas masquer des perspectives encourageantes

Premier groupe radio-hertzien en France avec 30 % d’audience cumulée au troisième trimestre 2020, Radio France bénéficie d’une dotation de 591,43 millions d’euros en 2021 dans le CCF Avances à l’audiovisuel public, soit un recul de 8,17 millions d’euros par rapport à 2020.

Le refinancement supplémentaire prévu à 20 millions d’euros dans le plan de relance porte donc l’effort financier supplémentaire de l’État en 2021 à près de 12 millions d’euros.

Ces dotations doivent permettre de rétablir une situation financière dégradée par la crise sanitaire. Après un budget initial prévu à l’équilibre, le déficit d’exploitation de Radio France devrait s’élever à 11,2 millions d’euros en 2020.

Dans le détail, ce résultat s’explique essentiellement par :

  l’effondrement des ressources de publicité et de billetterie du groupe, qui devraient reculer de 12,5 millions d’euros ;

  les dépenses supplémentaires liées à la crise sanitaire, pour un montant de 4,1 millions d’euros liés aux mesures d’adaptation pour la continuité du service public et de protection de ses salariés ;

  un surplus de 6,6 millions d’euros sur la masse salariale, dû notamment à la décision de la direction de ne pas procéder aux non‑renouvellements de contrat et de maintenir la rémunération des salariés non-permanents.

Ces pertes brutes sont partiellement compensées par des économies en fonctionnement de 7 millions d’euros, liées à l’annulation et au report de certaines activités.

L’effondrement des ressources propres fait suite à un élan pourtant favorable sur ces dernières années. L’année 2019 a en effet vu celles-ci s’inscrire à 72,1 millions d’euros, soit une croissance de 13,2 millions d’euros depuis 2017.

Limpact de l’épidémie sur le chantier de la Maison de la radio

Après une période dinterruption entre mars et mai, le chantier de la Maison de la radio a repris progressivement dans le respect des nouvelles normes de sécurité sanitaire. À date doctobre 2020, sans présumer des aléas futurs, Radio France estime le retard pris par le chantier à 6 mois sur le calendrier établi en 2018.

La mise en service complète des nouveaux équipements est donc désormais prévue au début de lannée 2023, contre mi-2022 précédemment.

● Outre l’épidémie, l’année 2020 a été marquée par la négociation du plan social, en cours d’aboutissement après son homologation en octobre. Après un objectif initial de près de 300 suppressions de poste, le périmètre du plan a été revu à la baisse avec la crise sanitaire. En définitive, il prévoit 340 départs volontaires et 271 créations de postes d’ici 2022. Outre une diminution nette des effectifs, ce plan devrait produire des économies significatives de masse salariale par une priorité donnée aux départs volontaires en retraite.

La réussite de ce plan social est vitale pour la bonne réalisation de la trajectoire financière fixée en 2018. Son coût total pour le groupe, après le provisionnement de plus de 18 millions d’euros réalisé en 2019 pour en assurer le financement à court terme, devra faire l’objet d’attention de la part des pouvoirs publics.

En outre, en accord avec le CSA ([2]), elle rappelle que d’autres réformes structurelles seront nécessaires pour garantir le dynamisme et la viabilité financière de Radio France.

● Au-delà, un effet positif du confinement a été le remarquable succès de l’offre numérique de Radio France, marqué par une croissance des audiences de 42 % sur les contenus en ligne. Avec 60 millions de téléchargements par mois et la valorisation de programmes originaux sur ce format, les podcasts connaissent un essor notable.

Ce résultat, qui témoigne d’une réelle capacité à toucher de nouveaux publics et à s’adapter aux nouveaux usages d’écoute de la radio, est un résultat encourageant à la fois pour le service public radiophonique dans son ensemble, et pour les perspectives financières que représente la croissance de ses recettes publicitaires digitales.

Une activité redoublée pendant le confinement

Pendant la crise, Radio France a témoigné de son fort engagement en faveur dune information fiable et de qualité et de la création musicale et radiophonique française avec :

– une activité renforcée de lutte contre les fausses informations en lien avec l’épidémie, par lintermédiaire de la cellule de vérification des informations de Radio France ;

– un soutien aux artistes-interprètes et auteurs par lopération « Radio France avec la scène française », marquée notamment par la hausse de 25 % du volume de musique à lantenne, lintensification de la diffusion de productions françaises et le soutien aux festivals par la diffusion danciennes éditions et la préparation de programmes conçus en partenariat avec les organisateurs et les artistes ;

– la commande d’œuvres radiophoniques nouvelles supplémentaires, dont notamment des séries de podcasts, des fictions et des pièces de théâtre courtes.

● Le COM 2020-2022 devrait être finalisé dans les prochains mois, avec entre autres comme objectifs attendus la poursuite de la transition numérique et du rajeunissement du public des chaînes de Radio France, ainsi qu’un engagement du groupe en faveur du débat et de la radio en proximité.

Sur le plan financier, la plus grande vigilance sera de mise en 2021, face aux enjeux que représentent d’une part la mise en œuvre du plan de départs volontaires, et d’autre part les dépenses supplémentaires liées au report de charges.

III.   Mieux protégÉe de la crise par la structure de ses recettes, France MÉdias Monde reste confrontÉe à d’importants dÉfis

Créée en 2008 pour unifier et renforcer l’action audiovisuelle extérieure de la France, France Médias Monde (FMM) a pour mission de contribuer à la diffusion et à la promotion des cultures française et francophone ainsi qu’au rayonnement de la France dans le monde, par la programmation et la diffusion d’émissions de télévision et de radio relatifs à l’actualité en français et en langues étrangères.

Sa dotation connaît une baisse de 0,51 million d’euros en 2021 dans le compte Avances à l’audiovisuel public. Cette diminution devrait toutefois être compensée par une subvention exceptionnelle d’un montant équivalent dans le plan de relance. Les ressources publiques totales du groupe sont par conséquent stables par rapport à 2020, à 260,50 millions d’euros.

Cette stabilisation devrait permettre à France Médias Monde de surmonter les difficultés financières liées à la pandémie. Avec un total de 11,4 millions d’euros de ressources propres en 2019, soit seulement 4,2 % de ses ressources totales, et des dépenses globalement stables, le groupe apparaît relativement préservé par la crise sanitaire. Pour autant, celle-ci n’est pas sans conséquence, avec une baisse des recettes publicitaires qui pourrait s’inscrire, selon des estimations de septembre 2020, à 1,6 million d’euros en 2020 et près de 1 million d’euros en 2021.

Le budget 2020 s’inscrit en outre dans le cadre de la stratégie « Horizon 2022 », initiée depuis le début de l’année.

La stratégie « Horizon 2022 »

Approuvée par le conseil dadministration de France Médias Monde en décembre 2019, le plan « Horizon 2022 » repose sur les axes suivants :

– La garantie dun cadre dinformation de référence et de qualité à l’échelle mondiale, via ladaptation continue des médias de la chaîne aux usages numériques et la réaffirmation de la vocation universelle du groupe,

– La poursuite de la transformation numérique ;

– La promotion de la francophonie dans un monde plurilingue, notamment par le déploiement dun journal télévisé en français facile et de nouvelles collaborations avec les acteurs de la Francophonie et de lapprentissage du français ;

– La consolidation de la présence du groupe en langue étrangère et le développement dune stratégie régionalisée, avec notamment le renforcement des langues africaines de Radio France internationale, le passage à 12 heures quotidiennes de France 24 en espagnol ou encore louverture dun relais FM pour Monte Carlo Doualiya à Khartoum (Soudan) ;

– Lamplification des actions daide au développement, en collaboration notamment avec lAFD ;

– La poursuite des coopérations avec les autres sociétés de laudiovisuel public français ainsi quavec des partenaires internationaux, en recherchant des financements européens.

Afin de mettre en œuvre ce plan dans un contexte financièrement contraint, marqué par une baisse totale de dotation de 3,5 millions d’euros sur la période 2018‑2022, France Médias Monde a d’ores et déjà engagé une stratégie globale de maîtrise des coûts marquée notamment par :

  La réalisation d’efforts supplémentaires de réduction des réseaux de diffusion et de distribution, tout en préservant la présence mondiale des médias de FMM ;

  La mise en œuvre de nouvelles mutualisations d’activités au niveau éditorial, d’une part par la reconfiguration de la grille de programme de Monte Carlo Doualiya pour une meilleure synergie avec la rédaction de France 24 en arabe, d’autre part dans le cadre d’une nouvelle offre média numérique et multilingue de RFI pour l’Afrique. Ces mutualisations devraient se traduire par la suppression de 30 postes de journalistes arabophones, anglophones et lusophones dans le cadre d’un plan de départs volontaires devant être mis en œuvre à partir de la fin de l’année 2020, pour une économie à terme de 3 millions d’euros par an ;

  La poursuite d’efforts d’économies sur toutes les directions de l’entreprise, au moyen d’une renégociation systématique des grands contrats, d’une modération salariale et d’économies sur les frais de fonctionnement.

La société s’est par ailleurs engagée sur une nouvelle stratégie de recherche de financements et de partenariats.

De nouvelles coopérations au niveau national et international

Lancé en juillet 2020 en partenariat avec lAgence française de développement médias (CFI) et lAgence française de développement (AFD), le projet « AfriKibaaru » – « Informations » dans les langues africaines concernées – propose aux publics du Grand Sahel, en sappuyant sur lancrage solide de RFI dans la région, une offre éditoriale enrichie en mandingue, peul et haoussa à destination de 13 millions de locuteurs potentiels, principalement au Burkina Faso, au Niger, au Mali, en Mauritanie, au Sénégal, au Tchad, au Nigéria et au Cameroun.

Le projet « ENTER » vise à mettre en place en une offre numérique plurilingue à destination des jeunes européens. Fruit dune coopération inédite avec la Deutsche Welle, il devrait être déployé en 6 langues, et diffusé entre autres en Irlande, en Pologne, au Portugal, en Roumanie et en Irlande.

Destiné à lutter contre la désinformation dont sont victimes les migrants, « InfoMigrants » est un projet multiplateforme collaboratif piloté par trois grands médias européens : France Médias Monde, Deutsche Welle et lagence de presse italienne ANSA. Il est co-financé par lUnion Européenne et disponible en français, arabe et anglais.

Cette stratégie d’enrichissement des actions du groupe a jusqu’ici porté ses fruits, avec un total de 1,5 milliard de vidéos vues et 207 millions de visiteurs uniques en 2019.

En définitive, France Médias Monde semble en mesure de poursuivre en 2021 les bons résultats d’audience enregistrés lors des années précédentes, bien que la baisse nette de dotation attendue en 2022 place la société face à d’importants défis en termes de gains d’efficience et de développement de sa présence à l’échelle mondiale.

IV.   Arte France : un fort effet en dÉpenses de l’Épidémie, dont les secousses risquent de perdurer en 2021

La dotation prévue pour ARTE France en 2021 s’élève à 273,4 millions d’euros, soit une baisse de 2,06 millions d’euros par rapport à 2020 liée à la participation de la société à l’effort de redressement des finances publiques. La baisse est toutefois compensée d’un montant équivalent par l’intermédiaire du plan de relance.

Sans pour autant compenser le lourd impact de l’épidémie sur le bilan financier d’ARTE, les succès d’audience rencontrés lors du confinement confirment les bonnes performances affichées depuis plusieurs années. La chaîne enregistre 3 % d’audience cumulée en juin 2020, soit une hausse marquée de 0,4 % en un an. La consultation des contenus numériques a quant à elle progressé de 64 %, avec une stabilisation à ce niveau élevé au cours de l’été. Le confinement a également vu l’offre Éduc’Arte rencontrer un véritable succès auprès des enseignants.

Le confinement, tremplin pour ÉducArte

Destiné aux enseignants et à leurs élèves, EducARTE est une plateforme pédagogique mettant à disposition un catalogue de plus de 1 000 programmes sous droits. La plateforme est accessible sur abonnement de l’établissement ou de la collectivité locale, ouvrant ensuite un usage libre à des fins pédagogiques.

Avec la généralisation des cours à distance et la nécessité de proposer des contenus numériques de qualité, le nombre d’établissements abonnés a très fortement crû pendant le confinement : 3 300 étaient abonnés en septembre 2020, contre 2 000 au début de lannée. Le nombre de visionnages a quant à lui été multiplié par deux.

La plateforme a également rencontré un succès à linternational, avec des consultations au Luxembourg et en Allemagne. Dans ce dernier pays, lensemble des établissements scolaires de Sachsen-Anhalt ont été abonnés, à linitiative du Land.

À terme, un rapprochement avec la plateforme Lumni pourrait être envisagé, afin de constituer un point d’entrée unique pour l’offre éducative du service public à destination des enseignants et des familles.

Financièrement, la hausse des frais généraux et des coûts de tournage alourdit le bilan de la chaîne à hauteur de 1,4 million d’euros au minimum en 2020. L’interruption de 147 tournages pendant la crise, et leur lente reprise depuis, pourrait porter ce coût à 1,8 million d’euros, compte tenu des dépenses supplémentaires et difficultés rencontrées par les productions à l’étranger.

C’est toutefois de façon différée que les conséquences de la crise devraient se faire le plus ressentir, en raison des spécificités d’un modèle fondé sur la diffusion, en très majeure partie, d’œuvres coproduites et non acquises. Deux effets négatifs pourraient ainsi se conjuguer en 2021 :

  D’une part, le retard dans les livraisons d’œuvres risque de contraindre la chaîne à réaliser de nouvelles acquisitions, pour un impact financier net potentiellement élevé ;

  D’autre part, les investissements d’ARTE pour la production pourraient connaître un net renchérissement avec la hausse des prix sur le marché des droits de diffusion et de coproduction, consécutive à la forte croissance de la demande adressée par les principales plateformes de vidéo à la demande depuis le début de l’année.

Dans un scénario « noir », le coût total de l’épidémie pour ARTE France pourrait ainsi atteindre près de 10 millions d’euros sur l’année 2021, avec des surcoûts potentiels estimés à 1,8 million d’euros pour assurer le respect des normes sanitaires sur les productions, 2,8 millions d’euros pour les acquisitions hors cinéma, 3,9 millions d’euros pour les acquisitions en cinéma, et plus de 1 million d’euros de pertes de recettes d’exploitation perçues par ARTE France pour ses parts de production, et plus généralement des ressources que les filiales peuvent apporter à la société-mère.

Eu égard à ces difficultés anticipées, ARTE devrait procéder pour la première fois depuis 2017 à une diminution de son budget de programmes, qui reculerait de 1,5 million d’euros en 2021.

V.   L’INA : des ressources et des chantiers fortement affectÉs

Né de la réforme de l’ORTF en 1974, l’Institut national de l’audiovisuel (INA) est un établissement public à caractère industriel et commercial, dont la principale mission est de conserver et de mettre en valeur le patrimoine audiovisuel national. Elle a la charge du dépôt légal de la radio et de la télévision, de même que celui de l’internet français, réparti avec la BnF.

À la différence des autres sociétés de l’audiovisuel public, l’INA tire une partie significative de ses ressources de ses activités commerciales.

Les ressources propres de l’INA sont issues essentiellement :

  de ventes d’archives et de droits,

  de la commercialisation de prestations de services, et notamment de formation,

  de redevances qui lui sont versées au titre de ses conventions avec divers organismes, dont ceux de l’audiovisuel public,

  de subventions versées à l’Institut au titre de son activité de formation ou de sa participation à des projets de recherche.

Ces ressources constituent sur la période récente un tiers des moyens dont dispose l’INA, les deux tiers restants faisant l’objet d’une dotation de l’État.

En 2021, cette dotation s’élève à 87,9 millions d’euros, soit une progression de 1,5 million d’euros par rapport à 2020.

Cette progression fait en réalité suite à une diminution contrainte de 1 million d’euros l’année dernière, destinée à préserver dans le CCF Avances à l’audiovisuel public les moyens d’Arte France dans le cadre de sa négociation pluriannuelle avec son partenaire allemand. Hors remboursement par l’État de cette ponction temporaire, la dotation de l’INA devrait donc s’élever à 87,4 millions d’euros en 2021 et en 2022, soit une restitution en deux ans de la somme prélevée en 2020.

Par ailleurs, l’INA bénéficie du plan de relance à hauteur de 2 millions d’euros, sur le total de 70 millions engagés pour l’audiovisuel public.

Ces moyens doivent permettre à l’INA de redresser sa situation financière après le très fort impact de la crise sanitaire sur ses ressources propres, marqué notamment par l’arrêt complet de ses activités commerciales de formation et de communication pendant le confinement. En définitive, la perte de chiffre d’affaires sur l’année devrait atteindre 8,5 millions d’euros. Le déficit devrait quant à lui se stabiliser à environ 5,9 millions d’euros, notamment grâce à des charges de fonctionnement réduites de 3 millions par rapport au budget initial.

Ces difficultés interviennent dans un contexte économique déjà contraint pour l’INA. Ses ressources propres connaissent en effet un déclin marqué depuis 2018, en raison d’une part de la baisse de ses activités de formation depuis l’entrée en vigueur de la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, qui a réorienté le marché vers les actions d’aide au retour à l’emploi, et d’autre part des tensions financières pesant sur l’audiovisuel public dans son ensemble, qui affectent par ricochet les ventes d’extraits et de productions audiovisuelles réalisées par l’Institut.

Autre conséquence du confinement, le projet immobilier de regroupement des personnels de l’INA sur le site « Bry 1 » a été entièrement interrompu au printemps, et voit sa livraison reportée de trois mois. Le budget global de 25 millions d’euros devrait être respecté par l’Institut, moyennant des gains en dépenses de fonctionnement encore à réaliser.

● La crise a également eu un impact contrasté sur les nouvelles offres de l’INA, qui doivent à terme prendre le relais des ressources traditionnelles en déclin. Madelen, nouvelle offre de streaming illimité de l’INA destinée au grand public, a connu un succès indéniable lors de son lancement avant de connaître un certain déclin depuis. Cette évolution s’explique essentiellement par la décision de l’INA de la rendre gratuite pendant trois mois lors de son lancement, au surplus engagé au début du confinement. Après un pic à 60 000 abonnés, l’audience de la plateforme a en toute logique nettement décru depuis, en dépit d’un coût d’abonnement volontairement fixé à un tarif bas de 2,99 euros par mois.

Tout en relevant son succès lors du confinement, la rapporteure sera attentive à la réussite future de la plateforme sur le marché très compétitif du streaming illimité, et à sa capacité à remplir l’objectif ambitieux de 50 000 abonnés qui lui a été fixé pour 2022. Il en va de même pour Mediaclip, nouvelle offre de vente de contenus audiovisuels sous droit pour les professionnels, dont l’élan a été freiné par la crise économique.

● Par ailleurs, s’agissant des actions déployées en 2020, la rapporteure salue la démarche socialement responsable engagée par l’INA avec son projet « Classe Alpha » devant accueillir, à partir du 1er octobre 2020, 100 jeunes franciliens de 17 à 25 ans pour un parcours préqualifiant d’un an les menant à l’emploi ou à la poursuite d’études professionnalisantes dans le secteur de l’audiovisuel et des médias numériques.

VI.   TV5 Monde : un dÉveloppement numÉrique qui se poursuit malgrÈ la crise sanitaire

● Chaîne généraliste francophone de service public, TV5 Monde est détenue conjointement par les sociétés audiovisuelles publiques françaises, belges, canadiennes, québécoises et suisses. Elle est régie par la Charte « TV5 », renégociée en 2015, qui lui confie la mission de promouvoir la Francophonie et la diversité culturelle par la diffusion et l’exportation internationale de programmes francophones. Son modèle économique repose sur la mise à disposition des programmes des chaînes partenaires, complété par des achats et de la production propre. Elle enregistre, en 2020, un total de 353 millions de foyers connectés et 60 millions de téléspectateurs hebdomadaires.

Sa dotation dans le programme 843 est reconduite au niveau de 2020, soit 77,75 millions d’euros. Elle devrait rester constante en 2022, soit un total de 2,2 millions d’euros de baisse de dotation depuis 2017. TV5 Monde doit bénéficier par ailleurs de 0,5 million d’euros parmi les 70 millions d’euros destinés aux sociétés de l’audiovisuel public dans le plan de relance.

Au même titre que les autres sociétés de l’audiovisuel, TV5 Monde subit un double impact de l’épidémie de Covid-19 en recettes et en dépenses. Les recettes publicitaires devraient s’affaisser à hauteur de 1 million d’euros, tandis que les revenus de distribution connaîtraient une baisse de 1,5 million d’euros, liée notamment à la fermeture des magasins proposant les abonnements en Amérique latine. Au total, la société enregistre 2,5 millions d’euros de pertes brutes, ramenées à 2 millions d’euros de déficit au moyen de dépenses évitées, principalement en voyages et marketing.

● La transition numérique de la chaîne marque un tournant en 2020 avec le démarrage de la nouvelle plateforme TV5MONDEplus. Annoncée lors du sommet de la Francophonie d’Erevan de 2018, la plateforme a été lancée le 9 septembre 2020. Son offre généraliste, qui comprend tous les programmes proposés par la chaîne à l’exception de l’information en direct et des programmes sportifs, est accessible dans tous les pays du monde à l’exception de la Chine, des États-Unis et des Pays-Bas et sous-titrée en cinq langues. Elle a notamment donné lieu à une collaboration inédite avec l’Agence française de développement (AFD), qui cofinance la série Wara, tournée au Sénégal.

En 2020, le lancement de TV5MONDEplus devrait représente un coût de plus de 6 millions d’euros pour la chaîne. Ce coût est couvert par des redéploiements en interne, avec la fin de certaines émissions et des journaux télévisés de nuit pour une économie de 2,9 millions d’euros, et l’arrêt de satellites de diffusion en Europe.

La question est toutefois posée des perspectives financières liées à terme au passage à une diffusion exclusivement numérique dans certains territoires. Outre les pertes d’audience qu’un tel virage peut entraîner, comme l’a montré la forte décrue dans les îles Britanniques avec la fin de la diffusion par satellite, les gains à court terme pourraient cacher un potentiel renchérissement de la diffusion à plus long terme, en fonction des stratégies de prix pratiquées par les plateformes partenaires.

● L’année 2021 devrait apporter son lot de défis pour TV5 Monde. Les coûts occasionnés par les Jeux Olympiques de Tokyo et la couverture du Sommet de la Francophonie en Tunisie, tous deux reportés d’un an, auront un impact négatif sur les dépenses. En recettes, des incertitudes demeurent concernant le rétablissement des ressources publicitaires et, dans les pays où sa diffusion a été entravée par l’épidémie, des audiences.

 


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   Travaux de la commission

I.   AUDITION DE LA MINISTRE

La commission des Affaires culturelles et de l’Éducation procède, le mardi 27 octobre 2020, à l’audition de Mme Roselyne Bachelot, ministre de la Culture, sur les crédits pour 2021 de la mission « Médias, livre et industries culturelles » et du compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public » ([3]) ([4]).

M. le président Bruno Studer. Nous achevons aujourd’hui l’examen du projet de loi de finances pour 2021 par l’audition de Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture, et la discussion des missions « Culture » et « Médias, livre et industries culturelles » ainsi que du compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public ».

Je souhaite la bienvenue à Mme Dominique David, rapporteure spéciale de la commission des finances sur les programmes Création et Transmission des savoirs et démocratisation de la culture de la mission « Culture », et à Mme Marie‑Ange Magne, rapporteure spéciale de la mission « Médias, livre et industries culturelles » et du compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public ».

Les projets de rapports de Mmes Valérie Bazin-Malgras et Céline Calvez, nos rapporteures pour avis, vous ont été remis hier.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture. Le budget des missions « Culture » et « Médias et industries culturelles » connaîtra en 2021 une hausse exceptionnelle. L’augmentation de 4,8 % des crédits budgétaires du ministère dit l’importance que le Gouvernement accorde à la culture. Comme l’a révélé la période difficile que nous traversons, la culture a un rôle indispensable dans notre vie économique, sociale et démocratique comme dans notre vie intime. Cet effort budgétaire exceptionnel participe de la mobilisation totale dont l’État a fait preuve dès le début de la crise sanitaire pour soutenir les acteurs culturels.

Indispensables pour protéger nos concitoyens, les mesures sanitaires prises par le Gouvernement affectent très durement l’ensemble des secteurs culturels. Alors que la reprise s’engageait, le durcissement des mesures et l’instauration du couvre-feu, il y a quelques jours, ont à nouveau plongé le spectacle vivant et le cinéma dans une situation très difficile. Face à cette épreuve, le Gouvernement continue à prendre ses responsabilités. Le monde de la culture a déjà bénéficié de plus de 5 milliards d’euros de mesures d’urgence, dont 3,3 milliards d’euros de mesures transversales à tous les secteurs et 949 millions pour l’année blanche des intermittents. Pour que le secteur culturel puisse se projeter dans l’avenir, j’ai obtenu que le volet culturel du plan France relance mobilise une enveloppe exceptionnelle de 2 milliards d’euros pour lui apporter un soutien massif à partir du 1er janvier 2021.

Après un été difficile, il fallait donner de la visibilité au secteur culturel pour que l’activité reprenne. C’est pourquoi, à la rentrée, pour soutenir la reprise d’activité des salles de spectacles et de cinéma, nous avons créé un fonds de compensation des pertes d’exploitation dues à l’obligation de distanciation physique. Cent millions ont été mobilisés, auxquels s’est ajoutée une enveloppe de 5 millions au titre des dettes de droits d’auteur accumulées au cours de l’année 2020.

La seconde vague de la pandémie ayant conduit à durcir les mesures sanitaires et à instaurer un couvre-feu, le Gouvernement a renforcé les mécanismes de soutien en additionnant mesures de reprise d’activité et mesures de sauvegarde. J’ai ainsi annoncé jeudi dernier des mesures complémentaires exceptionnelles. En tout, 115 millions sont mobilisés. D’une part, 85 millions d’euros iront au spectacle vivant, dont 60 millions pour la musique, 20 millions au théâtre et 5 millions aux intermittents qui ne sont pas pris en charge par d’autres dispositifs. D’autre part, 30 millions iront au cinéma pour soutenir producteurs, distributeurs et exploitants. Ces moyens exceptionnels doivent permettre aux salles de spectacles et de cinéma de maintenir leur programmation et de s’adapter pour continuer d’accueillir le public dans le respect des restrictions sanitaires.

De plus, le Gouvernement proposera par voie d’amendements au projet de loi de finances pour 2021 de prolonger jusqu’au 1er semestre 2021 l’exonération de la taxe sur les spectacles pour alléger les charges des entreprises du secteur. Enfin, j’ai veillé à ce que les auteurs bénéficient d’un soutien renforcé.

J’en reviens au budget du ministère de la culture pour 2021. Plus de 1,1 milliard d’euros de moyens exceptionnels issus du plan de relance s’additionneront, pour cette première année de mise en œuvre, aux crédits des missions « Culture » et « Médias et industries culturelles » que vous examinez aujourd’hui. Cela permettra d’amplifier l’action que je mène pour réparer et refonder nos politiques culturelles. Ne nous y trompons pas : la crise sanitaire marque un tournant pour le monde de la culture. Elle ne cesse de bouleverser les conditions de vie et de création des acteurs culturels tout comme les pratiques de nos concitoyens. Elle révèle et exacerbe aussi certaines fragilités structurelles préexistantes dues à des mutations profondes qu’il est désormais impératif de prendre en compte pour faire que notre modèle culturel reparte sur des bases plus solides.

Les résultats de l’enquête passionnante sur les pratiques culturelles des Français montrent qu’il faut œuvrer au décloisonnement de la culture patrimoniale et de la culture numérique pour rendre la culture et les arts dans toute leur diversité encore plus accessibles à tous les publics. Au-delà des mesures financées par les crédits budgétaires, c’est l’un des objectifs de la stratégie d’avenir pour nos industries culturelles et créatives, dotée de 400 millions sur cinq ans dans le cadre du 4ème programme d’investissements d’avenir (PIA). Nous relèverons ce défi en plaçant les territoires et leurs habitants au cœur de nos politiques culturelles, en abordant la culture dans ce qu’elle a de plus intime pour les artistes, les créateurs et les citoyens qui aiment la culture et qui, je l’espère, seront de plus en plus nombreux. Les moyens inscrits dans les deux missions budgétaires soumis à votre examen nous permettent d’œuvrer en ce sens.

Commençons par la mission « Culture », dont tous les programmes, hors dépenses de personnel, connaîtront en 2021 une forte augmentation : à périmètre constant, elle sera de 4,6 % par rapport à 2020. Le patrimoine bénéficiera d’un budget de 1,015 milliard d’euros, en hausse de 4,4 %, soit 43 millions, auxquels s’ajouteront 345 millions d’euros issus du plan de relance. En investissant dans le patrimoine, nous souhaitons développer l’économie et renforcer l’attractivité et la cohésion des territoires. C’est l’objectif du plan de rénovation des musées territoriaux, doté de 52 millions d’euros sur deux ans – dont 6 millions provenant du plan de relance – et du soutien renforcé aux archives et à l’archéologie dont bénéficieront les équipements patrimoniaux dans les territoires.

Nous mettons également en œuvre, dès 2021, un vaste « plan cathédrales ». La hausse des crédits budgétaires pérennes qui lui est consacrée portera le financement structurel annuel à 50 millions d’euros, auxquels s’ajouteront, en 2021 et en 2022, 40 millions chaque année issus du plan de relance – soit, en tout, 180 millions d’euros sur deux ans. Ces moyens permettront de réaliser les nécessaires travaux de mise en sécurité et en sûreté et d’accélérer les projets de restauration. Le plan de relance apportera également un soutien essentiel à de nombreux autres projets de restauration de monuments historiques, notamment de monuments protégés appartenant à des collectivités territoriales et à des propriétaires privés. Il permettra aussi d’accélérer le chantier de la Cité de la langue française et de la francophonie dans le château de Villers-Cotterêts.

Articulé au plan de relance, le projet de loi de finances prévoit des financements visant à garantir la réalisation du programme de travaux de certaines grandes institutions nationales telles que les Archives nationales, le Centre Pompidou et aussi le Grand Palais dont j’ai choisi de réorienter le projet de restauration pour mieux garantir la maîtrise des coûts et des délais.

De même, nos grands opérateurs de la création bénéficieront, grâce au plan de relance, d’un accompagnement exceptionnel, et 15 millions d’euros de mesures nouvelles permettront de poursuivre les grands projets engagés en 2019 tels le relogement du Centre national des arts plastiques à Pantin et les investissements visant à équiper les deux scènes de l’Opéra de Paris.

Le programme Création connaît également une forte augmentation de 4,5 %. Cet accroissement renforcera le soutien à la création, la production et la diffusion artistique dans le domaine du spectacle vivant et des arts visuels. À ces 37 millions d’euros de mesures budgétaires nouvelles s’ajouteront 320 millions issus du plan de relance. L’une des priorités est de mieux accompagner les établissements de création régionaux. Le budget 2021 consacre 15 millions d’euros à la restauration et à la consolidation des marges artistiques des labels et au soutien aux compagnies artistiques ; l’État atteint ainsi ses niveaux d’engagement aussi bien dans le domaine du spectacle vivant que pour les arts visuels. Les mesures du plan de relance soutiendront leur programmation et financeront des chantiers de rénovation dans ces établissements.

Le spectacle vivant sera également fortement soutenu grâce au renforcement des moyens du Centre national de la musique (CNM). Les 7,5 millions d’euros supplémentaires dans le programme 334 Livre et industries culturelles assurent le respect de la trajectoire triennale fixée l’an dernier pour cette nouvelle structure. En outre, le CNM recevra une dotation exceptionnelle de 200 millions d’euros dans le cadre du plan de relance, afin qu’il joue un rôle moteur dans la reprise de toute la filière musicale.

Les dispositifs fiscaux que vous avez votés – prorogation du crédit d’impôt spectacle vivant, dont les critères ont été assouplis, et création du crédit d’impôt théâtre qui approfondit le dispositif que vous aviez fait adopter dans le cadre du troisième projet de loi de finances rectificative – permettront aussi de soutenir l’activité des salles de spectacles.

Une autre priorité est de renforcer le soutien aux artistes et aux créateurs, en particulier ceux qui n’entrent pas dans le champ des dispositifs de soutien transversaux décidés en raison de la crise sanitaire. À cette fin, le projet de loi de finances complète les dispositifs du plan de relance, notamment le plan de commandes artistiques, doté de 30 millions d’euros.

Le Fonds national pour l’emploi pérenne dans le spectacle (FONPEPS) bénéficiera de 5 millions d’euros supplémentaires visant à réduire la précarité des artistes et des techniciens intermittents, et 2 millions d’euros seront mobilisés pour mettre en œuvre de premières mesures à destination des artistes-auteurs. Je mène les échanges lancés avec les organisations défendant les intérêts des artistes-auteurs afin de peaufiner la feuille de route que suivra le ministère pour mettre en œuvre des mesures tangibles.

La mission « Culture » contient également le nouveau programme 361 Transmission des savoirs et démocratisation de la culture. Reprenant les actions 1, 2 et 9 du programme 224, il concerne donc l’enseignement supérieur culturel, l’accès à la culture et la politique linguistique. À périmètre constant, ce programme bénéficiera en 2021 de 46 millions d’euros de crédits supplémentaires, soit une très forte hausse de 8,5 %. J’ai créé une nouvelle délégation au sein du ministère, qui sera chargée de ces moyens à dater du 1er janvier prochain ayant rang de direction d’administration centrale ; elle assurera le pilotage transversal de notre action en ce domaine. Cela renforcera nos liens avec les autres ministères, particulièrement les ministères chargés de la cohésion des territoires, de l’Éducation nationale et de l’enseignement supérieur.

L’année prochaine, nous amplifierons l’action que nous menons pour atteindre notre objectif du « 100 % éducation artistique et culturelle (EAC) », en partenariat avec le ministère de l’Éducation nationale, de la jeunesse et des sports et les collectivités territoriales. La hausse de 20 millions d’euros des crédits du Pass culture permettra de développer cet outil, qui devra évoluer pour mieux répondre à ses objectifs. Il faudra améliorer son articulation avec la fin du parcours d’EAC et favoriser la diversification des pratiques culturelles des jeunes gens qui s’y sont inscrits.

Notre politique d’accès à la culture dans tous les territoires bénéficiera également de moyens supplémentaires. Ils permettront notamment d’accompagner la première « Capitale française de la culture », qui sera désignée en 2021. Ce nouveau label, doté d’un million d’euros financés à parité par le ministère de la culture et par la Caisse des dépôts, distinguera tous les deux ans l’innovation artistique et l’attractivité d’une ville ou d’un groupement de collectivités de 20 000 à 200 000 habitants.

D’autre part, les États généraux des festivals que j’ai lancés il y a quelques semaines en Avignon et auxquels certains d’entre vous ont participé ont permis d’engager une concertation entre acteurs culturels visant à mieux accompagner ces manifestations qui jouent un rôle de premier plan dans la dynamisation de nos territoires. Les festivals bénéficieront également du prolongement du Fonds festival financé par le plan de relance.

Parce qu’il est essentiel de continuer d’accompagner les créateurs de demain, l’enseignement supérieur culturel sera aussi l’objet d’une attention particulière en 2021. Il bénéficiera d’une augmentation budgétaire importante
– 3,3 % – après des années de stagnation. Cette hausse vise à améliorer les conditions d’études et de vie des étudiants de ces écoles, renforcer les mesures d’accompagnement de la vie étudiante, favoriser l’insertion professionnelle. À ces mesures s’ajoutera un plan exceptionnel de modernisation des écoles de l’enseignement supérieur culturel ; doté de 70 millions d’euros, il est financé dans le cadre du plan de relance.

La hausse de 3,2 % des crédits de la mission « Médias et industries culturelles » a pour objectif, en complément du plan de relance, de consolider et de moderniser les filières culturelles dont les fragilités structurelles se sont révélées ou accusées en raison de la crise. Ainsi la presse bénéficiera-t-elle d’un très ambitieux plan de filière doté de 483 millions d’euros sur trois ans, dont le financement repose sur la troisième loi de finances rectificative pour 2020, le projet de loi de finances pour 2021, le projet de loi de finances pour 2022 et le plan de relance. Présenté fin août par le Président de la République, ce plan de développement et de modernisation prévoit également la création de nouvelles aides au pluralisme financées par des mesures budgétaires pérennes inscrites dans le budget 2021. Une aide destinée aux services de presse en ligne d’information politique et générale, à raison de 4 millions d’euros par an, et une aide destinée à la presse ultramarine, à hauteur de 2 millions par an, seront instituées.

Le secteur du livre bénéficiera d’un plan de 89 millions d’euros sur trois ans financé par la loi de finances rectificative et le plan France relance ; il permettra en particulier de soutenir l’activité des librairies et des bibliothèques. À ces moyens exceptionnels s’ajoutent les crédits inscrits dans le projet de loi de finances, qui permettront notamment de financer l’achèvement du chantier de restauration de la Bibliothèque nationale de France (BnF). L’ouverture de 30 millions d’euros en autorisations d’engagement permettra aussi à la BnF de lancer la construction d’un nouveau centre de stockage, qui devrait être utilisable d’ici 2027 ; les candidats sont nombreux.

Les filières cinématographique et audiovisuelle bénéficieront également, dans le cadre du plan de relance, d’un plan de 165 millions d’euros ; celui-ci vise à permettre la reprise et à engager la modernisation de l’ensemble de ces acteurs.

Le financement de l’audiovisuel public respectera la trajectoire engagée en 2018. L’effort d’économie de 80 millions demandé aux sociétés de l’audiovisuel public dans le cadre d’une ambitieuse stratégie de transformation a été réduit de 10 millions d’euros pour tenir compte de la prolongation jusqu’à l’été 2021 de la diffusion linéaire de France 4. La concordance des chiffres est une simple coïncidence, mais le plan de relance accordera à l’audiovisuel public un soutien financier exceptionnel de 70 millions d’euros pour compenser l’impact de la crise sanitaire et préserver sa capacité à investir dans la création.

Je sais que votre commission – singulièrement son président – porte une grande attention à l’avenir de la contribution à l’audiovisuel public (CAP), étant donné la suppression complète, à l’horizon 2023, de la taxe d’habitation, son support de collecte. Le rapport que vous avez sollicité à ce sujet mérite d’être plus abouti pour alimenter la réflexion collective que nous devons mener sur ce sujet d’extrême importance. Avec le ministre chargé des comptes publics, Olivier Dussopt, et votre président, nous proposons donc de lancer un travail parlementaire pour approfondir la question en étudiant les hypothèses envisageables et en mesurant l’impact et la faisabilité technique et politique de chacune.

Je salue les travaux déjà menés par le Parlement à l’occasion de la transposition de la directive Services de médias audiovisuels dans le cadre du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière. Ces travaux ne sont pas achevés, mais les votes sur l’article 24 ter du projet de loi montrent une volonté transversale unanime d’intégrer les plateformes numériques ciblant le public français à notre système de contribution à la création.

Parallèlement, les concertations avec les professionnels permettent de travailler aux modalités de mise en œuvre de cette réforme dans le cadre de la révision du décret sur les services de médias audiovisuels à la demande, qui devrait être achevée au début 2021. C’est la première étape, essentielle, du rééquilibrage de notre système de financement de la création. Il passera également par la révision du décret fixant la contribution des chaînes historiques à l’issue de négociations professionnelles, et par l’adaptation de la chronologie des médias, dans un enchaînement logique.

D’autres mesures figuraient dans le projet de loi relatif à l’audiovisuel que votre commission a examiné en mars dernier. Je souhaite que des dispositions prioritaires très attendues par le secteur fassent l’objet d’une traduction législative dès que cela sera possible, en particulier celles qui concernent la lutte contre le piratage et l’évolution de la régulation. Aussi ai-je proposé au Premier ministre d’élaborer un nouveau projet de loi très resserré, tenant compte du travail déjà effectué. Dans les circonstances actuelles, il n’est pas possible de reprendre l’ensemble des dispositions figurant dans l’ambitieux projet de loi initial, mais il est indispensable qu’un texte législatif nous permette d’adapter à la transformation rapide et de ses acteurs et des usages les règles qui encadrent ce secteur.

Telles sont les orientations qui guideront l’action de mon ministère au long de l’année prochaine et que reflète le budget soumis à votre examen. Doté de moyens nouveaux, ce budget est à la hauteur des attentes des professionnels de la culture et du grand public et tient compte des innombrables défis que nous devons relever. C’est un budget de responsabilité, construit en complémentarité avec le plan de relance afin de mettre en œuvre une action globale pour conforter et parfois sauver notre modèle culturel.

Mme Céline Calvez, rapporteure pour avis pour la mission « Médias, livre et industries culturelles ». La mission « Médias, livre et industries culturelles » et le compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public » ne font pas exception : le budget alloué à ces différents secteurs sera exceptionnel en 2021, car les circonstances le sont.

Avec 606,5 millions d’euros, la mission « Médias » est dotée de près de 20 millions d’euros supplémentaires par rapport à 2020. C’est indispensable, car la crise sanitaire a été un cataclysme pour l’ensemble des secteurs concernés.

La presse a subi de plein fouet une double crise. La crise sanitaire a entraîné la fermeture de nombreux points de vente et l’effondrement du chiffre d’affaires pour le papier. Le secteur a ensuite connu une crise de la distribution, avec la faillite de Presstalis, qui a déposé le bilan au mois d’avril. Une nouvelle structure dénommée France Messagerie lui a succédé, moyennant une réduction massive de ses effectifs et de son périmètre d’intervention. La combinaison de ces deux facteurs a été terrible.

C’est pour y faire face qu’un plan « filière presse » d’une ampleur sans précédent a été décidé, d’un montant de 483 millions d’euros d’ici à 2022. En 2021, 136 millions d’euros y seront consacrés, dont 70 millions d’euros au titre du plan de relance. C’est un plan complet qui aidera la presse à affronter les conséquences de l’épidémie, mais aussi à accélérer sa modernisation. Il prévoit des aides pour les services de presse en ligne, d’autres pour la modernisation des imprimeries de la presse régionale ou encore deux nouveaux fonds en faveur de la transition écologique du secteur et de la lutte contre la précarité.

S’y ajoute le crédit d’impôt abonnement, instauré dans la troisième loi de finances rectificatives pour 2020, qui a été notifié à la Commission européenne. Si l’estimation qui a été faite de son coût paraît élevée, à hauteur de 120 millions d’euros sur deux ans, ce dispositif devrait indéniablement permettre de soutenir la filière presse.

En définitive, nous avons pour la presse un budget de crise autant que de refondation, et je m’en félicite.

Par ailleurs, une évolution semble bien engagée concernant les aides au transport postal de la presse. À terme, il s’agirait de renforcer le soutien au portage, pour une meilleure qualité de service et un coût moindre pour la collectivité.

Certaines questions demeurent néanmoins en suspens, s’agissant des aides à la presse, et notamment des aides au pluralisme. La lumière doit être faite sur les critères d’attribution du label « information politique et générale » (IPG), son évaluation, son éventuel retrait, ainsi que sur les montants exacts accordés d’année en année à chaque titre. Madame la ministre, avez-vous des projets pour améliorer ces aides et renforcer leur évaluation ?

Ces aides sont en hausse, et de nouvelles conventions devraient être conclues d’ici à janvier entre l’État et les médias IPG. Comment intégrer des contreparties écologiques, sociales ou sociétales à ces aides ? Par exemple, un grand travail reste à faire pour améliorer la place des femmes dans les médias de presse écrite.

Le soutien aux médias de proximité est en nette hausse, avec 250 000 euros supplémentaires sur un budget total de 1,8 million d’euros en 2021. Ces médias, souvent nouveaux ou de petite taille, contribuent au lien social de proximité en agissant à destination des jeunes, des quartiers prioritaires de la politique de la ville ou des territoires ruraux.

La Compagnie internationale de radio et de télévision bénéficie d’une dotation de 1,6 million d’euros. L’utilisation de ces crédits pose question, ainsi que la pertinence de leur affectation à cette mission.

Le livre et les industries culturelles bénéficient, quant à eux, d’une hausse de 11,6 millions des crédits de paiement en 2021. Ces sommes permettront de réarmer le Centre national de la musique (CNM) qui, à peine né, a dû faire face à l’effondrement du secteur de la musique. Ses ressources se sont effondrées suite à notre décision d’exempter les spectacles des taxes dont il devait percevoir le montant, mais nous ne mettons pas le CNM en danger, puisque nous renforçons ses capacités à agir. C’est d’autant plus important qu’une décision de la Cour de justice de l’Union européenne relative aux « irrépartissables juridiques » constitue un autre coup de tonnerre, dont les conséquences pourraient s’avérer lourdes sur l’aide à la création dans notre pays. Nous avons tenté d’apporter une réponse à ce problème dans le projet de loi DDADUE.

Enfin, il serait intéressant de nous pencher, lors des prochains exercices, sur la mise à contribution des ventes de matériels d’écoute numériques au soutien à la création. Quel est votre avis sur la création d’une taxe affectée spécifique ?

L’année 2021 sera exceptionnelle pour le livre, avec un net renforcement des crédits de la Bibliothèque de France (BNF) dans le périmètre de la mission, et du Centre national du livre (CNL) dans la mission « Plan de relance ». Après une intervention d’urgence en faveur des auteurs, des éditeurs et des libraires, le CNL pourra poursuivre son soutien à une filière, très affectée par le confinement. C’est particulièrement nécessaire pour les libraires, qui attendent de voir leur chiffre d’affaires se rétablir avant de solliciter les aides pour la modernisation de leur commerce.

Au-delà de ces nouveaux moyens, je souhaite aborder le rabais de 9 % sur le prix des livres dont bénéficient les collectivités territoriales. Certaines d’entre elles souhaitent y renoncer pour mieux soutenir leurs librairies mais les dispositions combinées de la loi de 1981 sur le prix du livre et du code de la commande publique l’interdisent. Qu’envisagez-vous concernant ce rabais de 9 % ? Comment aider les collectivités qui souhaitent soutenir leurs librairies ?

Le cinéma bénéficie d’un soutien massif dans le plan de relance, avec 165 millions d’euros en faveur de toute la filière, auxquels s’ajoutent 50 millions d’euros à destination des salles de cinéma. Ce soutien est crucial, alors que le couvre-feu met une nouvelle fois en danger un secteur déjà lourdement touché par la crise. Vous avez d’ailleurs fait de nouvelles annonces la semaine dernière, notamment la création d’un bonus billetterie venant en soutien aux distributeurs, qui n’ont pas été épargnés par cette crise.

Le budget de l’audiovisuel public est globalement stable. Le compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public » diminue de 70 millions d’euros, mais 65 millions d’euros de crédits supplémentaires sont prévus dans la mission « Plan de relance ». La baisse de 70 millions d’euros est conforme à la trajectoire financière décidée en 2018, la contribution de l’audiovisuel public au redressement des finances publiques se poursuit donc bel et bien.

Les effets de la crise doivent toutefois être compensés, sinon la situation sera intenable pour les sociétés audiovisuelles publiques. Le plan de relance leur apporte 70 millions d’euros sur la période 2021‑2022, dont 65 millions en 2021. Sur ces 70 millions, 45 iront à France Télévisions et 20 à Radio France, qui ont été très fortement touchées par l’effondrement des recettes publicitaires. ARTE et l’INA bénéficieront chacune de 2 millions d’euros tandis que France Médias Monde et TV5 Monde seront dotées de 500 000 euros.

Les perspectives demeurent pourtant incertaines pour les années à venir. L’effet pour France Télévisions du report des Jeux olympiques de Tokyo, dont la retransmission représente un coût de 20 millions d’euros, suscite des interrogations.

La situation est également préoccupante pour ARTE, qui a procédé à de nombreuses réductions de coûts ces dernières années et doit faire face à la hausse des prix sur le marché des droits de production, en raison de l’activité importante des plateformes. Au-delà de son équilibre financier, c’est son modèle, tourné vers la coproduction d’œuvres originales, qui est menacé.

L’agenda sera également chargé pour Radio France avec la mise en œuvre de son plan social et la poursuite du chantier de la Maison de la radio.

En termes de contenus, l’année a été marquée par l’essor des offres numériques, dont le succès a été indéniable. Il faut favoriser les synergies pour offrir le meilleur du service public.

L’avenir de la contribution à l’audiovisuel public mérite toute notre attention. Vous avez déclaré que les parlementaires pourraient approfondir les réflexions à ce sujet, nous y sommes prêts. Au-delà de la question de son financement, quelle doit être la place de l’audiovisuel public dans notre société, et comment faire reconnaître sa contribution à la culture ?

J’invite notre commission à rendre un avis favorable à l’adoption de ces crédits.

Mme Marie-Ange Magne, rapporteure spéciale de la commission des finances pour les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles ». Les secteurs des médias, de la presse, du cinéma et de la musique ont tous été profondément affectés par la crise sanitaire. L’évolution de la situation laisse présager un début d’année 2021 très difficile pour le secteur artistique mais ce PLF 2021 traduit un engagement fort de l’État pour soutenir la reprise d’activité et accompagner la modernisation de l’ensemble de ces filières culturelles.

Le PLF 2021 s’inscrit dans la continuité du PLFR3, qui a prévu 384 millions d’euros pour la presse, le livre, la musique et le cinéma.

Concernant le soutien à la presse et les médias, Le programme 180 est en augmentation de 2,9 % pour atteindre 289 millions d’euros.

Le programme 363 du plan de relance prévoit une enveloppe de 70 millions d’euros en crédits de paiement pour la presse. Elle doit permettre la mise en œuvre d’un véritable plan de filière pour un secteur en crise structurelle, après le soutien apporté à Presstalis et sa transformation en France Messagerie. Ce plan prévoit un fonds de 8 millions d’euros pour encourager la transition écologique ; un fonds de 18 millions d’euros pour la transformation des imprimeries de la presse régionale ; la transformation du Fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP), qui doit structurer la modernisation de la filière ; et le soutien aux marchands de journaux. C’est un plan ambitieux qu’il faudra poursuivre dans la durée. Dans quelle mesure la transformation du FSDP permettra-t-elle de développer la filière ?

La reprise de l’activité des librairies en mai est une bonne nouvelle pour le livre et les industries culturelles. Un soutien est néanmoins nécessaire, et il faut profiter du plan d’urgence pour accélérer leur modernisation numérique. C’est un des axes du plan « filière livre », doté de 30 millions d’euros.

Concernant la musique, l’évolution de la situation sanitaire est inquiétante, mais l’État répond encore présent : le CNM recevra 200 millions d’euros en 2021. J’espère que le fonds de compensation de 100 millions d’euros, qui sera abondé de 55 millions d’euros supplémentaires, partagés avec le fonds de sauvegarde, sera pleinement utilisé. Cela signifiera que les lieux de spectacle vivant sont restés actifs, nous avons collectivement besoin d’eux.

Concernant le cinéma, le plan de 165 millions d’euros doit permettre de compenser les pertes fiscales du CNC pour 60 millions d’euros. Le reste constitue le plan de relance à proprement parler : son champ s’étend des écoles de cinéma au soutien à l’export en passant par l’accompagnement des exploitants les plus fragiles, en particulier les salles d’art et d’essai. Une enveloppe de 30 millions d’euros doit compenser les pertes dues au couvre‑feu. Si des mesures sanitaires plus drastiques devaient être prises, d’autres aides sont-elles envisagées, et faudra-t-il recalibrer celles du plan de relance ?

Concernant l’audiovisuel public, la trajectoire de baisse structurelle des concours publics se poursuit, avec une dotation pérenne en retrait de 70 millions d’euros environ, pour atteindre 3,64 milliards d’euros. Cette baisse est exceptionnellement compensée par une enveloppe de 70 millions d’euros allouée aux opérateurs dans le plan de relance, pour compenser les pertes liées à la crise sanitaire et sanctuariser les dépenses de création. Je suis particulièrement attentive aux différentes réformes et plans de départ mis en œuvre par France Télévisions et Radio France, et notamment à leurs effets sur les équipes en région des réseaux France 3 et France Bleu.

Mme Béatrice Piron. Le budget de la mission « Médias livre et industries culturelles » est exceptionnel à bien des égards. Il répond aux conséquences des crises sanitaire et économique sans précédent que nous traversons. Il s’inscrit dans la suite des mesures d’urgence décidées au cours de l’année, notamment les 384 millions d’euros du PLFR3.

Le budget de cette mission est en hausse de 20 millions d’euros, établissant les crédits de paiement à 606 millions d’euros.

Le programme 180 relatif à la presse et aux médias voit ses crédits augmenter de 8 millions d’euros afin de soutenir ces filières qui font face à une crise structurelle, à laquelle est venue s’ajouter la crise économique.

Les aides directes à la presse et le soutien aux médias de proximité augmentent, tout comme le soutien à l’expression radiophonique locale, pour faire face à une augmentation du nombre de radios autorisées à émettre en FM et DAB +. Je salue également l’augmentation de 43 % du soutien au pluralisme, qui se traduit notamment par 6 millions d’euros d’aide aux titres ultramarins d’information politique et générale et pour les services de presse en ligne.

Le PLFR3 prévoyait la création d’un fonds exceptionnel de 30 millions d’euros en faveur des radios privées des télévisions locales, pour soutenir la diffusion hertzienne et numérique. Certains amendements proposent d’abonder ce fonds exceptionnel, nous aimerions connaître les modalités de sa répartition.

Les crédits du programme 334, relatif au livre et aux industries culturelles, augmentent de plus de 11 millions d’euros. Ils reflètent bien l’ambition du Gouvernement pour le renouvellement et la diffusion de la création.

Les moyens du CNM, qui a démontré toute son utilité lors de sa première année d’existence et dans ce contexte de crise, sont renforcés. Nous poursuivons sa structuration en 2021 en lui allouant 7,5 millions d’euros supplémentaires.

Les crédits alloués à la HADOPI dans la lutte contre le piratage sont stables. Nous nous réjouissons de votre volonté d’inscrire au plus vite dans la loi certaines dispositions sur la régulation et la lutte contre le piratage. J’espère que ce futur projet de loi intégrera également d’autres enjeux essentiels, tels que le must-carry ou l’accessibilité de l’audiovisuel public.

Les économies demandées à l’audiovisuel public sont réduites de 10 millions d’euros, ce qui permet notamment de tenir compte de la continuation de la chaîne France 4, qui a montré toute son utilité pédagogique pendant le confinement.

Vous pouvez compter sur les députés de la majorité pour approfondir à vos côtés la réflexion sur la contribution à l’audiovisuel public. Nous travaillons à une réforme en profondeur de cette redevance, voire à son universalisation, alors que la suppression de la taxe d’habitation arrive à grands pas.

Ces crédits reflètent la volonté du Gouvernement de soutenir les filières du livre, de la presse, des médias et des industries culturelles, ainsi que notre audiovisuel public. Ce budget s’inscrit pleinement dans la démarche de relance de l’économie, à l’heure où les différentes filières ont été durement touchées. Les députés de La République en Marche voteront en faveur de ces crédits.

Mme Virginie Duby-Muller. Au nom du groupe Les Républicains, je tiens à saluer la qualité des travaux de nos rapporteures pour avis, et l’éclairage qu’elles nous apportent.

L’année 2021 sera évidemment une nouvelle année de bouleversements pour les médias. Céline Calvez a d’ailleurs évoqué les conséquences économiques cataclysmiques affectant ce secteur, durement touché par l’épidémie de la covid, qui a bouleversé nos cadres de vie.

Malheureusement, comme dans les lois de finances pour 2020, 2019 et 2018, le Gouvernement a encore choisi de raboter les dotations à l’audiovisuel public. Dans ce projet de budget pour 2021, la ventilation de ces efforts se traduit ainsi par un recul généralisé, de 60 millions d’euros pour France Télévisions, 8 millions d’euros pour Radio France, 2,1 millions d’euros pour ARTE et 0,6 million d’euros pour France Médias Monde. Seul le budget de TV5 Monde reste stable, et celui de l’Institut national de l’audiovisuel (INA) bénéficie d’une hausse de 1,6 million d’euros.

Pour mémoire, la loi de finances pour 2018 avait déjà acté une baisse de 30 millions d’euros et un retrait de 47 millions par rapport au contrat d’objectifs et de moyens (COM) ; celle pour 2019 prévoyait une baisse de 24 millions d’euros, et celle pour 2020, une diminution du budget de 62 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2019.

Un arbitrage gouvernemental, à l’été 2018, prévoyait qu’entre 2018 et 2022, les ressources publiques affectées à l’audiovisuel public reculent de 160 millions d’euros. En 2021, nous aurons dépassé cet objectif. Dès lors, à quoi ressemblera votre projet de budget 2022 pour le groupe France Télévisions ? Pouvez-vous dès aujourd’hui vous engager à ce qu’il ne baisse pas, pour suivre les engagements que le Gouvernement a pris en 2018 ?

J’en profite pour rappeler, comme je le fais désormais chaque année, le scandale de la taxe sur les opérateurs de communications électroniques, dite taxe Copé, définitivement déviée en 2019 vers le budget de l’État, au détriment de France Télévisions. Même François Hollande n’avait pas été aussi loin ! La taxe Copé échappe ainsi totalement à France Télévisions, alors qu’elle avait été justement créée en 2009 pour compenser la suppression de la publicité en soirée sur les chaînes de l’opérateur.

Ces baisses de budget s’inscrivent ainsi dans un contexte difficile, avec une crise sanitaire sans précédent et une réforme de l’audiovisuel public à l’arrêt, alors qu’elle devait voir l’apparition d’une holding France Médias et permettre aux chaînes de montrer davantage de publicité, y compris ciblée.

Madame la ministre, nous attendons encore davantage de précisions, concernant le futur budget de l’audiovisuel public français, qu’il s’agisse de sa forme administrative, de son budget, de son calendrier ou de ses ressources. Je souhaiterais également vous interroger sur l’avenir de France 4, qui a bénéficié d’un sursis tardif jusqu’en août 2021, après avoir fait preuve, s’il le fallait encore, de son utilité pendant le confinement en proposant des programmes éducatifs. Quel avenir pour cette chaîne ? De quoi dépendra votre décision, et selon quel calendrier sera‑t‑elle appliquée ?

France Ô n’a malheureusement pas eu la même chance. Je le regrette : c’était pourtant une chaîne utile, alors que les territoires ultramarins ne sont que très peu représentés à la télévision.

Pour ce qui concerne la presse, après une période de baisse, les aides à la presse augmentent, notamment par la création de deux nouveaux dispositifs : une aide spécifique au pluralisme des titres ultramarins, de 2 millions d’euros, et une aide aux services de presse en ligne, de 4 millions d’euros.

Je m’en réjouis car ce secteur est durement touché par la crise. J’avais néanmoins déposé un amendement visant à étendre le champ d’application du crédit d’impôt sur le revenu au titre du premier abonnement à un journal, à une publication périodique au plus mensuelle ou à un service de presse en ligne, à condition qu’ils présentent le caractère d’information politique générale. Ce crédit d’impôt exclut pour le moment la presse de la connaissance, du savoir et de l’emploi. L’amendement visait à étendre le champ d’application du dispositif aux abonnements à des publications telles que La France agricole, qui permet aux agriculteurs de s’informer. Je souhaitais donc recueillir votre avis sur cet amendement, qui a malheureusement été déclaré irrecevable.

Pour terminer, nous saluons la hausse du programme « Livres » et les crédits alloués au CNM.

Pour toutes les raisons que je viens d’exposer, nous avons décidé de nous abstenir.

Mme Michèle Victory. Je passerai rapidement sur ce qui semble bien fonctionner dans les crédits de cette mission, à savoir l’effort de l’État vers le secteur des médias, du livre et des industries culturelles.

L’abandon du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle à l’ère numérique à la suite de la crise sanitaire et le dessaisissement du Parlement au profit du Gouvernement afin de mener à bien ce qui restait de la réforme a entraîné inquiétude et frustration dans le monde des médias. Les enjeux de ce projet de loi étaient la régulation d’un marché numérique qui a vu ses bénéfices exploser au profit de plateformes gloutonnes ; la lutte contre le piratage, qui n’a pas encore les moyens européens de ses ambitions ; et la rémunération des œuvres et des artistes, qui est loin de rétablir un équilibre satisfaisant.

Des actions fortes doivent également être menées autour du livre et du CNL vers des éditeurs, des auteurs, des libraires, qui ont souffert de la crise et d’une concurrence difficile. C’est pour cela que nous défendrons un amendement visant à revenir de façon temporaire sur le rabais de 9 % accordé aux collectivités territoriales pour l’achat de livres. Ces crédits sont estimés à moins de 12 millions, mais ils pourraient être une respiration importante pour ce secteur – la rapporteure pour avis en a parlé.

Lire mieux et lire plus, c’est aussi ouvrir plus longtemps les bibliothèques en ville et à l’université. Il me semble avoir constaté qu’une heure d’ouverture représentait déjà plus de 20 millions d’euros. Nous devrons veiller à ce que cet objectif de favoriser l’accès aux bibliothèques atteigne son but. Nous doutons que les 2 millions ajoutés en 2021 au programme 224 de la mission « Culture » soient suffisants.

Tout aussi essentiel est le soutien aux radios commerciales et associatives locales, qui, par leur rôle de médiateur social et de proximité, ont contribué à maintenir le lien avec les populations depuis le début de cette crise, dans l’Hexagone et en outre-mer. Si le nombre de ces radios bénéficiant d’une aide sélective au titre du programme 180 a légèrement baissé, elles sont près de 700 sur l’ensemble du territoire à développer leurs actions. Il est important qu’un pourcentage de l’aide apportée par le ministère soit clairement identifié pour abonder les crédits de ces radios.

Le secteur du cinéma est aussi en difficulté avec la crise, même s’il résiste. Pour poursuivre en ce sens, nous avons besoin d’un Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) armé, en soutien.

Une question majeure demeure s’agissant de la stratégie du Gouvernement en matière d’audiovisuel public – plusieurs d’entre nous l’ont évoquée. Nous dénoncions déjà la stratégie du Gouvernement pour l’audiovisuel public dans les budgets précédents et les prémices du projet de loi audiovisuel. La cure d’austérité se poursuit cette année encore. Alors que les recettes publicitaires sont en chute libre, la perte du chiffre d’affaires publicitaire est estimée à 55 millions d’euros par rapport aux prévisions initiales. L’audiovisuel public doit en outre faire face à des coûts supplémentaires liés à la crise.

Compte tenu de l’inflation, une baisse de 2,63 % des crédits de paiement est prévue pour l’audiovisuel public en 2021, après une baisse de 3,36 % en 2020 et de 2,56 % en 2019. Radio France voit ses crédits baisser de 2,15 %, en tenant compte de l’inflation, après une baisse de 2,34 % l’année dernière. Quant à France Télévisions, ses crédits baissent de 3,23 % après une baisse de 3,9 % en 2020.

En pleine crise économique, le Gouvernement maintient ses objectifs de réduction d’emplois. Les effectifs de France Télévisions devront diminuer de près de 20 % jusqu’en janvier 2023. Tous les secteurs sont affectés par le double effet du plan de départ et de la crise sanitaire, le réseau régional de France 3 étant particulièrement touché.

Comment comprendre cette stratégie pour France Télévisions, alors qu’elle a pour objet d’être proche de la jeunesse, ambitieuse et accessible ? France 4, qui s’est révélée être un formidable outil pédagogique pendant le confinement, doit-elle être supprimée ? Quand la société doit être près de ses territoires et favoriser la proximité et l’inclusion, le Gouvernement a arrêté les programmes de France Ô. Alors qu’elle vise à soutenir la création française, les dépenses en faveur d’œuvres audiovisuelles européennes et de création originale française sont en baisse.

Nous sommes convaincus que tous ces objectifs ne peuvent être atteints que par une revalorisation des crédits de l’audiovisuel public. Pour ces raisons, nous ne voterons pas ce budget.

M. Pierre-Yves Bournazel. Les moyens de la mission « Médias, livre et industries culturelles », incluant le programme 180 « Presse et médias » et le programme 334 « Livre et industries culturelles », sont en hausse de 19 millions d’euros par rapport à 2020. Après une année très difficile pour l’ensemble des professionnels de ces filières, cette augmentation budgétaire est une excellente nouvelle. Ces chiffres sont à relier à l’effort de soutien du Gouvernement face à la crise sanitaire et aux différentes aides sectorielles associées au plan de relance.

Concernant la presse, l’épidémie est venue aggraver la situation du secteur, qui connaissait déjà de grandes difficultés. La transformation profonde des modes de consommation de l’information bouleverse l’équilibre de toute la filière de fabrication et de distribution de la presse imprimée. Elle vient fragiliser son modèle économique, quand, dans le même temps, les fausses informations de pseudo-experts se propagent partout sur les réseaux sociaux.

C’est dans ce contexte que nos politiques publiques ont un rôle décisif à jouer en faveur des médias. Il s’agit de protéger à tout prix leur socle économique, en assurant notamment un meilleur respect du droit voisin ainsi qu’un partage de la valeur plus juste entre les éditeurs de presse et les GAFAN – Google, Apple, Facebook, Amazon, Netflix.

Il est de notre devoir de les accompagner dans cette transformation inéluctable en veillant à leur indépendance, en préservant le pluralisme et en garantissant la liberté d’expression, qui est consubstantielle au débat démocratique et à notre vision du monde. Les récents événements nous ont montré à quel point il est important de sanctuariser, de chérir, de préserver ce droit fondamental si fragile qu’est la liberté d’expression.

Face à la crise, nous saluons le plan spécifique en direction de la presse qu’a annoncé le Président de la République en août dernier. Il permettra, nous l’espérons, de consolider la filière et de lui donner un nouvel élan. Ce sont 377 millions d’euros qui sont mis sur la table, en crédits nouveaux ainsi qu’en dépenses fiscales, afin de relancer l’investissement et d’amorcer les nécessaires transformations.

Au-delà de ces mesures indispensables à la survie du secteur, il nous faut également penser à l’avenir de la presse et de sa distribution. L’été dernier, la cessation de paiement de Presstalis a légitimement amené certains acteurs à s’interroger. Nous sommes nombreux ici à nous en faire le relais. Il y a en effet un enjeu majeur à augmenter les revenus de tous les acteurs du secteur, à revaloriser le travail des vendeurs, à renforcer l’accessibilité de la presse pour le public, et à réfléchir de nouveau à la réutilisation des invendus, afin de minimiser leur impact écologique. C’est toute une chaîne de valeur qu’il convient donc de repenser de manière globale.

C’est pourquoi nombre d’acteurs demandent l’organisation d’une large concertation visant à associer les éditeurs, les vendeurs ainsi que La Poste et les collectivités territoriales. Afin de garantir un cadre transparent et un traitement égal de la distribution à tous les éditeurs et vendeurs de presse, madame la ministre, cette initiative pourrait être placée sous l’égide de votre ministère.

Pour ce qui concerne l’effort de soutien à nos librairies, essentielles à la vie de nos quartiers et au dynamisme d’une vie culturelle de proximité, je voudrais insister sur les 89 millions d’euros investis entre 2020 et 2022. Le Gouvernement a été au rendez-vous.

Je souhaite aussi rappeler que l’audiovisuel public joue un rôle majeur en matière d’éducation, de diversité culturelle, de soutien à la création et de divertissement.

Enfin, je salue votre action en faveur du cinéma et de nos salles, que nous devons toujours aider davantage.

Madame la ministre, le groupe Agir ensemble sait combien le Président de la République et vous-même ont à cœur la protection de notre modèle d’exception culturelle dont participent l’ensemble de ces filières. Nous vous réitérons notre confiance pour relever ces défis et abordons ainsi favorablement l’examen des crédits de la mission « Médias, livres et industries culturelles ». Nous voterons donc pour.

M. Luc Geismar. Le groupe Mouvement Démocrate et Démocrates apparentés accueille favorablement la hausse importante des crédits alloués aux programmes qui composent cette mission. En 2021, avec plus de 288 millions d’euros, le programme « Presse et médias » connaît une augmentation de près de 3 % de ses crédits, tandis qu’avec plus de 336 millions d’euros, le programme « Livres et industries culturelles » progresse de 3,7 %.

Les crédits viennent ainsi augmenter les fonds dédiés au soutien à la presse, aux politiques du livre et à l’industrie culturelle en cette période de crise. La France, je le rappelle, a été un des rares pays de l’Union européenne à élaborer un plan de relance pour le secteur de la culture. De ce fait, et parce que nous sommes convaincus que la culture demeure un secteur au cœur de l’activité économique française et européenne, notre groupe, aux côtés de l’eurodéputée Laurence Farreng, défendra le principe d’une relance culturelle pour l’Europe.

Pour ce qui est de la France, par la hausse des crédits apportés à cette mission, le Gouvernement marque son attachement à la liberté de la presse et à son pluralisme. Nous saluons en particulier l’augmentation de 15,81 % à la fois en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, des crédits de l’action « Soutien aux médias de proximité ». Durant le confinement, la presse de proximité, une fois encore, a su prouver ses capacités d’adaptation et son immense utilité. Elle a aussi beaucoup souffert.

À ce titre, nous regrettons que la presse locale ne soit pas davantage soutenue et accompagnée, notamment dans sa transition numérique. Le groupe Mouvement Démocrate et apparentés défendra en conséquence un amendement pour mieux soutenir et accompagner la presse quotidienne et régionale (PQR) dans sa transition.

Nous sommes également particulièrement attentifs à l’objectif d’une diffusion, la plus large possible, du livre et des pratiques de lecture, notamment dans les territoires insuffisamment couverts. Nous en mesurons l’enjeu fondamental en termes de réussite scolaire, d’égalité des chances et d’éveil des consciences. L’augmentation des crédits du concours particulier de la dotation générale de décentralisation en faveur des bibliothèques est aussi à saluer, afin d’ouvrir celles-ci davantage. Ce vœu est cher au Président de la République.

Concernant le compte de concours financier « Avances à l’audiovisuel public », le plan de transformation du secteur, annoncé en juillet 2018, demeurera une priorité. Les moyens alloués en 2021 restent conformes à la trajectoire quinquennale définie en 2018, avec un effort d’économies de 80 millions d’euros, ramenés à 70 millions, pour permettre le maintien de la chaîne France 4 en 2021.

Par ailleurs, afin de compenser les impacts de la crise sur les comptes des entreprises du secteur, un soutien financier exceptionnel de 70 millions d’euros leur sera accordé dans le cadre du plan de relance. Il permettra aux sociétés de l’audiovisuel public de jouer pleinement leur rôle d’amortisseur face à la crise que traverse tout l’écosystème audiovisuel, artistique et culturel.

Pour ces raisons, notre groupe votera les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles ».

Mme Béatrice Descamps. Le groupe UDI et Indépendants salue l’augmentation des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles », notamment avec la pérennisation des aides pour la presse. Nous nous réjouissons particulièrement qu’une partie de ces aides concerne plus spécifiquement les territoires d’outre-mer. L’année 2020 aura été particulièrement difficile pour le secteur de la presse, avec la reprise en juillet de Presstalis au bord du dépôt de bilan.

Plus globalement, la crise a accentué les questions que l’on pouvait se poser sur le modèle économique du secteur de la presse. Si un tel soutien est normal, notamment en temps de crise, pourra-t-il être accordé durablement par l’État ? Ainsi, le crédit d’impôt sur les abonnements à la presse IPG, instauré cette année, sera renouvelé pour l’année suivante. A‑t‑il vocation à être pérennisé ?

Dans le même ordre d’idées, à la suite d’une décision de l’autorité de concurrence et des tribunaux français, Google est en passe de trouver un accord avec la presse française concernant l’instauration de droits voisins. Cela pourrait constituer une source de revenus non négligeables mais certaines questions méritent d’être soulevées. Ce type d’accord est-il respectueux de l’esprit des directives européennes que nous avons transposées ? Cette stratégie d’accord, pays par pays, comme le fait Google, est-elle souhaitable ?

Une aide est prévue pour le secteur de la presse en matière de transition écologique, notamment sur les questions d’impressions, mais elle ne semble pas exister pour le secteur du livre. Serait-elle nécessaire ou souhaitable ? Des avancées sont-elles imaginables sur ce point ?

Pour ce qui concerne l’audiovisuel public, je souhaiterais revenir sur le rôle crucial qu’a joué la chaîne France 4 durant le confinement, tant pour assurer la continuité pédagogique que pour fournir une explication simple et ludique de la crise que nous traversions. La chaîne a su prouver qu’elle pouvait se montrer utile et, surtout, attirer des téléspectateurs. La récente loi de programmation pluriannuelle de la recherche a été l’occasion de débattre de la place de la science dans la société. Le constat du manque d’informations scientifiques était partagé par tous.

Enfin, je souhaiterais aborder le problème de notre cinéma. Cette crise semble une spirale infernale pour ce milieu, tant pour la diffusion que pour la réalisation. La plupart des films les plus attendus de l’année ont été repoussés. Nous nous félicitons des 30 millions que vous avez récemment annoncés, madame la ministre, pour venir en aide au cinéma après les annonces sur le couvre-feu. Mais comment faire revenir les clients dans les salles obscures si la situation ne s’améliore pas ?

Malgré ces nombreuses interrogations, nous abordons cette mission budgétaire avec une approche favorable.

M. Michel Larive. Les médias doivent avoir les moyens suffisants pour accomplir leur œuvre d’information en toute liberté et en toute responsabilité, sans subir de pressions, qu’elles soient politiques ou économiques. L’augmentation des aides à la presse, prévue dans le programme 180 est insuffisante pour permettre un véritable pluralisme. Elle ne saurait compenser les baisses successives observées depuis l’exercice 2018. Au-delà de la question des montants alloués, c’est notre système d’aide à la presse qui montre ses limites car ces fonds subventionnent, sans contrepartie, quelques grands groupes et banques, qui possèdent aujourd’hui la plupart des titres de presses. Il faut repenser les aides à la presse, qui devraient s’accompagner de mesures en faveur du pluralisme et contre la concentration des médias.

Pour ce qui concerne le programme 334, nous déplorons le manque d’ambition du texte. La crise sanitaire et la crise économique ne doivent pas servir de prétextes pour retarder les décisions politiques dont les artistes auteurs ont besoin.

Par ailleurs, les crédits alloués au CNL restent constants. Celui-ci aurait pourtant besoin d’un soutien supplémentaire pour mener son action en faveur de la création littéraire.

Enfin, si nous sommes pour l’élargissement des horaires d’ouverture des bibliothèques, nous n’acceptons pas qu’il soit réalisé au détriment des bibliothécaires, qui sont de plus en plus fréquemment sollicités pour travailler le soir et le week-end.

En ce qui concerne le secteur audiovisuel public, vous proposez de poursuivre la cure d’austérité que vous avez lancée il y a deux ans, avec une baisse générale de 2,63 %, en tenant compte de l’inflation. Les conséquences, pour France Télévisions notamment, sont préoccupantes car, à la baisse des crédits proposés, s’ajoute une prévision de perte de chiffre d’affaires publicitaire de 55,1 millions d’euros par rapport aux prévisions initiales et d’importants surcoûts liés à la crise sanitaire. De nombreux emplois sont menacés. La Confédération générale du travail France Télévisions (CGT FTV) rapporte déjà une baisse de plus de 6,8 % des effectifs par rapport au 30 juin 2019. Il faut s’attendre à ce que les plans sociaux se poursuivent.

Les choix budgétaires de ce gouvernement paraissent en totale contradiction avec les orientations stratégiques présentées dans le projet annuel de performance. Comment faire de France Télévisions une référence en matière de fiabilité, de pédagogie et de mise en perspective des événements, sans lui fournir les moyens nécessaires pour financer le journalisme d’investigation, trop souvent sacrifié sur l’autel de l’immédiateté et du sensationnalisme ?

Si l’objectif affiché est de renforcer l’ancrage de France Télévisions auprès des jeunes publics, programmer l’arrêt de France 4 n’a pas de sens. Cette chaîne réalise en effet d’excellentes audiences auprès des jeunes.

Enfin, où se trouve la cohérence quand vous dites vouloir tripler le volume horaire consacré aux programmes régionaux à l’horizon 2022, mais que vous mettez fin à la diffusion des programmes de France Ô début septembre ?

Nous, députés du groupe La France insoumise, ne pouvons pas souscrire à un tel flot d’inepties. Le texte proposé ne répond absolument pas aux défis que nous devons relever et manque clairement d’ambition. Nous voterons contre.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture. Lors de l’examen des crédits de la mission « Culture », j’ai dit que la crise avait souvent révélé des désordres non seulement conjoncturels, mais structurels. La remarque concerne particulièrement la filière de la presse, pour laquelle la crise sanitaire a été une catastrophe que l’on pouvait prévoir de longue date.

Cette crise structurelle dure depuis fort longtemps. J’en veux pour preuve la baisse du chiffre d’affaires de l’ensemble de la presse d’un tiers en dix ans, de 11 milliards d’euros à moins de 7 milliards d’euros, à laquelle deux crises conjoncturelles se sont ajoutées – la crise sanitaire, et la crise de la distribution, avec la faillite de Presstalis.

Le plan de filière, que j’ai présenté lors d’une rencontre organisée par le directeur de L’Humanité, Patrick Le Hyaric, et dont vous avez rappelé l’ambition – 483 millions d’euros –, a rencontré l’adhésion des acteurs, qui ont salué l’effort du Gouvernement tel qu’il avait été annoncé par le Président de la République et moi-même le 28 août.

À travers les différents véhicules budgétaires, nous avons voulu répondre à la fois à l’urgence et à l’exigence structurelle du plan de relance. Sont prévus un fonds, doté de 31 millions d’euros, pour accompagner la restructuration du parc d’imprimerie de la presse, notamment – nombre d’entre vous l’ont souligné – pour la PQR ; le renforcement massif du Fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP), en soutien à l’investissement ; le doublement de l’aide à la modernisation des diffuseurs en investissement, à hauteur de 6 millions d’euros pendant deux ans ; l’aide, à hauteur de 8 millions d’euros pendant deux ans, à la réalisation de la transition écologique pour la presse, une exigence que Mme Calvez a soulevée ; le lancement d’un fonds de lutte contre la précarité de 18 millions d’euros en direction des métiers les plus fragilisés comme les pigistes, les photojournalistes ou les dessinateurs de presse.

En outre, ce plan de filière – sur lequel vous êtes revenus en abordant les mesures du projet de loi de finances – prévoit un crédit d’impôt pour un abonnement à la presse d’information politique et générale (IPG) et de nouvelles aides pour renforcer le soutien au pluralisme.

Le label IPG est attribué par la Commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP). La notion, jusque-là purement réglementaire, a été élevée au rang législatif lors de la récente révision de la loi relative au statut des entreprises de groupage et de distribution des journaux et publications périodiques, dite loi Bichet. Les décisions de la CPPAP peuvent être contestées devant le juge. Elles le sont d’ailleurs très fréquemment et la plupart de ses décisions sont confirmées. L’octroi du label IPG, qui est au cœur de la politique de défense du pluralisme, repose donc sur des critères objectifs et des procédures transparentes.

L’égalité femmes hommes vous tient à cœur, madame la rapporteure pour avis, et je veux vous féliciter du remarquable rapport que vous avez rédigé sur le sujet, qui est un outil à la fois d’analyse et de décision particulièrement précieux. La question est prise en compte dans les aides à la presse, puisqu’elle fait l’objet de 72 conventions cadres, qui ont été signées avec les éditeurs de presse. Afin d’en renforcer symboliquement l’importance et comme vous l’avez proposé dans votre rapport, l’article 2 du décret relatif au Fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP) sera modifié à l’occasion de la prochaine réforme, pour mentionner le respect de la parité entre les femmes et les hommes au sein des entreprises de presse dans les engagements fixés aux conventions cadre.

La Compagnie internationale de radio et de télévision (CIRT) apporte un soutien important à la radio franco-marocaine bilingue Médi1 à travers la mise à disposition de journalistes francophones. Depuis 1980, la CIRT contribue à la coopération diplomatique entre nos deux pays dans le domaine audiovisuel. Le niveau de dotations qui est sollicité pour 2021 – 1,67 million d’euros – est stable depuis 2017. Il permet d’assurer la couverture des coûts salariaux de ces journalistes francophones. La représentation de l’État au sein de l’assemblée générale de la société est assurée par le ministère de l’Europe et des affaires étrangères. La société transmet annuellement au ministère de la culture ses documents comptables ainsi que les informations relatives à ses charges de personnel. Après analyse, à la suite des questions que vous m’avez posées, tout cela m’est apparu transparent, au bon sens du terme, naturellement.

Pour revenir aux aides à la modernisation de la presse, une réforme du FSDP est en cours pour moderniser et simplifier. Les dispositifs d’aide sont renforcés, notamment en faveur des territoires ultramarins et de l’innovation en faveur de la transition écologique. La protection de la propriété intellectuelle et l’amélioration de la formation deviennent de nouveaux objectifs, avec un fonctionnement simplifié. Les taux d’aide devraient être augmentés, de façon transitoire, jusqu’en 2022, pour soutenir l’investissement des entreprises de presse, durement affecté par la crise. Cinq millions d’euros ont donc été votés en loi de finances rectificative pour l’année 2020. Le FSDP verra ses crédits abondés à hauteur de 45 millions d’euros supplémentaires – 22,5 millions d’euros en 2021, comme en 2022.

Je ne suis pas favorable à une modification du rabais maximum de 9 % que la loi Lang fixe pour les achats de livres non scolaires des collectivités locales. Celles-ci ne pourraient pas assumer un renchérissement du prix du livre sans réduire les achats de bibliothèques. Dans le cadre du plan de relance, nous accompagnerons les collectivités locales pour qu’elles puissent enrichir significativement les collections des bibliothèques en affectant 5 millions d’euros par an pendant deux ans. Ces achats bénéficieront mécaniquement aux libraires.

Les collectivités qui veulent soutenir les libraires disposent par ailleurs d’outils, qui ne sont ni assez connus ni assez employés aujourd’hui. Elles peuvent par exemple les exonérer totalement de leur part de fiscalité locale ou les dispenser des mesures de publicité et de mise en concurrence pour leurs marchés de livres non scolaires dont le montant est inférieur à 90 000 euros hors taxes – on peut acheter un grand nombre de livres avec une telle somme ! Je suis à l’écoute des collectivités sur toutes les pistes qui pourraient être envisagées pour augmenter leur marge de manœuvre vis-à-vis des librairies locales. On pourrait par exemple imaginer de relever ce seuil de 90 000 euros, ce qui pourrait être utile à certaines villes moyennes et d’intercommunalités.

La rémunération pour copie privée constitue non pas une taxe – je me bats pour qu’elle ne soit pas injustement considérée comme telle – mais une compensation équitable destinée à indemniser les auteurs, les artistes-interprètes et les producteurs de phonogrammes ou de vidéogrammes du préjudice causé par l’exception légale de copie privée, qui permet aux usagers de supports d’enregistrement de reproduire licitement les œuvres et prestations protégées à des fins de copie privée, sans solliciter l’autorisation des ayants droit concernés. En conséquence, aux termes du code de la propriété intellectuelle, seuls les supports d’enregistrement dotés d’une capacité de stockage, qui permettent la réalisation de copies, sont susceptibles d’être assujetties à la rémunération pour copie privée. Ce n’est donc pas le cas des enceintes bluetooth, qui ne permettent pas cette copie.

L’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) sur les aides des organismes de gestion collective est, si l’on peut dire, un coup de Jarnac car il pourrait remettre gravement en cause le système français de la rémunération équitable, qui permet de ne pas reverser des sommes perçues aux artistes et aux producteurs non européens en raison de l’absence de réciprocité. Ces sommes sont qualifiées « d’irrépartissables ». Elles sont considérables – environ 30 millions d’euros par an – et apportent une contribution remarquable à la production culturelle française. Une mauvaise rédaction de la législation européenne – les pays n’étaient pas nommément cités, mais qualifiés par défaut – a remis en cause le dispositif, dans un contexte déjà très difficile.

Je remercie Aurore Bergé pour son amendement au projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière, dite loi DDADUE, qui est venu sécuriser pour le passé le système français d’aides à la création et à la production musicale – c’est une première étape.

Une deuxième étape sera de sécuriser définitivement notre système. J’ai déjà fait part à la Commission européenne de ma préoccupation. Thierry Breton m’a assuré qu’il ne devrait pas être trop complexe, pour le législateur européen, de rétablir une rédaction convenable de ce dispositif. Attendons, car, pour avoir été députée européenne dans une vie antérieure, je sais que les procédures européennes ne sont pas faciles.

Venons‑en à la réforme de la contribution à l’audiovisuel public (CAP), un sujet cher à votre président de commission. Vous connaissez cela par cœur : la suppression complète de la taxe d’habitation en 2023 va priver cette contribution de son véhicule de prélèvement.

Différentes pistes de réforme ont été identifiées par le Gouvernement, qui devront faire l’objet d’un travail d’analyse approfondie. En tout état de cause, quel que soit le scénario retenu in fine, la réforme de la CAP devra permettre à l’audiovisuel public de disposer d’un financement pérenne et affecté. C’est la cathédrale conceptuelle qui doit prévaloir, car elle est indispensable à la visibilité pluriannuelle de la programmation budgétaire des entreprises du secteur ainsi qu’à la préservation de leur indépendance.

Par ailleurs, elle ne doit pas se traduire par la création d’un impôt nouveau, en cohérence avec la politique fiscale conduite par le Gouvernement depuis 2017. Le Président de la République s’est exprimé clairement sur le scénario de budgétisation, pour le rejeter. Tout est donc parfaitement clair en ce domaine. Ne faisons pas de faux procès, ce n’est pas cela qui est en cause.

Pour ce qui concerne l’année 2021, le rendement de la CAP combiné aux efforts d’économies demandées au secteur permet de ne pas augmenter son tarif pour les particuliers – 138 euros par foyer dans l’Hexagone, 88 en outre-mer.

Quant à la prorogation du fonds de soutien à la distribution hertzienne et numérique, elle m’apparaît aujourd’hui prématurée, pour plusieurs raisons. Tout d’abord, une reconduction à l’identique impliquerait que le bénéfice du fonds en 2021 soit conditionné à une baisse du chiffre d’affaires entre 2020 et 2021. Or, il y a de fortes chances que le chiffre d’affaires publicitaire des éditeurs soit en croissance en 2021 par rapport à 2020.

En outre, cela est plus gênant, une telle prolongation remettrait en cause l’argumentaire avancé auprès de la Commission européenne dans le processus de notification des dispositifs, toujours en cours à ce jour. Le dispositif a en effet été présenté comme une mesure d’urgence ponctuelle, destiné à pallier la forte baisse du chiffre d’affaires publicitaire de l’année 2020 par rapport à 2019. L’argument tombe : une prorogation remettrait en cause la nature exceptionnelle de l’aide et son caractère proportionné à l’objectif poursuivi. La Commission européenne portera une attention particulière au respect de notre argumentation et de nos engagements.

L’évolution de la crise sanitaire peut faire craindre que de nouvelles mesures soient prises ; elles seraient sans doute nécessaires, si les chiffres étaient confirmés. Il faudra alors – je me battrai pour cela – continuer de soutenir les acteurs culturels. Il est indispensable d’adopter des mesures sanitaires fortes : le combat sanitaire est absolument prééminent. Je ne peux vous en dire plus, sinon pour vous assurer de mon implication totale lorsqu’il s’agit d’accompagner le secteur ; je l’ai démontrée au cours des mois écoulés, et je poursuivrai ce combat.

Madame Duby-Muller, le Gouvernement a souhaité limiter à la presse IPG le bénéfice du crédit d’impôt sur les abonnements car c’est dans ce cadre que le pluralisme de la presse a été reconnu comme objectif de valeur constitutionnelle : c’est bien cette presse qui vise à éclairer le jugement du citoyen dans le débat public, ce dont nous avons bien besoin aujourd’hui. En outre, une extension de cette dépense fiscale aurait un coût élevé.

En ce qui concerne France Ô, on ne peut pas dire qu’elle rendait les outre‑mer visibles au sein de France Télévisions : son audience était très faible, y compris dans les territoires ultra-marins ou parmi les habitants ultra-marins de l’Hexagone. Depuis 2017, le Gouvernement a l’ambition d’améliorer la visibilité des outre-mer dans l’ensemble des offres de France Télévisions, qui a été accrue et est garantie par le pacte pour la visibilité signé en juillet 2019, ses vingt-cinq engagements et ses onze indicateurs, d’ailleurs issus de travaux de parlementaires. Le cahier des charges de France Télévisions intègre désormais un nouvel article dédié aux outre-mer qui reprend nombre des engagements du pacte, dont le comité de suivi a pu vérifier qu’ils avaient tous été mis en œuvre.

Peut-on amplifier et accélérer le mouvement ? Certainement. D’ores et déjà, les programmes ultra-marins occupent davantage de place sur les antennes nationales : leur nombre en première partie de soirée a triplé, la quantité de sujets liés à l’outre-mer dans les journaux télévisés de France 2 et France 3 a augmenté de 80 % et les premières audiences du portail numérique dédié, lancé le 3 juin dernier, sont encourageantes.

Toutes les conditions étaient donc réunies pour mettre France Ô – dont la part d’audience, je le rappelle, était de 0,3 % – à l’arrêt le 23 août dernier, ce qui a en outre permis le passage en qualité haute définition de la diffusion en outre-mer de la Première, qui, elle, est vraiment regardée dans les territoires ultra-marins. C’est bien mieux que de maintenir une chaîne ne correspondant aux besoins ni de la population qui y vit, ni des ultra-marins résidant dans l’Hexagone, ni de la population générale. Je suis le dossier de près avec le ministre des outre-mer.

Monsieur Geismar, nous soutenons bien sûr la presse quotidienne régionale : elle bénéficie pleinement des aides au pluralisme comme des aides à la modernisation dans le cadre du FSDP – doté de 50 millions d’euros par le plan de filière –, notamment pour ses investissements numériques. En outre, dans le cadre du plan de relance, la restructuration des imprimeries bénéficiera de 36 millions d’euros. Il me semble, en première analyse, que votre amendement conduirait à accroître les crédits destinés aux médias sociaux de proximité, déjà tout à fait suffisants et rehaussés de 250 000 euros dans le PLF, et non ceux alloués à la PQR.

J’en viens à France 4. De quoi avons-nous besoin ? D’une chaîne pour le confinement, qui supplée à l’impossibilité pour les enfants et les jeunes de se rendre à l’école ? Étant donné la variété des programmes, des filières, des publics considérés, ce serait un rêve absurde. D’une chaîne jeunesse ? Tirer argument de son utilisation pendant le confinement serait alors tout aussi absurde. D’une chaîne éducative ? Nous avons assurément besoin de médias éducatifs qui complètent l’enseignement en période de crise comme en période normale, mais cela suppose de réfléchir de manière globale aux pratiques des jeunes, qui ne regardent plus guère la télévision. Il faut donc se tourner vers d’autres médias, comme on l’a fait en développant l’offre sur smartphone et plus généralement sur internet, avec Okoo et Lumni. Cela permet un accompagnement beaucoup plus varié – Lumni propose déjà 10 000 programmes éducatifs.

Il n’est pas question de revoir les ambitions de France Télévisions en matière d’animation : l’accord que la société a conclu pour la période 2019-2022 avec les organisations représentatives du secteur audiovisuel garantit le maintien d’un haut niveau d’investissement – 32 millions d’euros – dans ce domaine et propose des conditions d’exploitation de ces programmes adaptées au lancement d’une offre numérique destinée aux enfants.

Plaçons-nous du point de vue des enfants et des enseignants. De quoi ont-ils besoin ? Qu’est-ce que nos enfants vont regarder ? De quels outils vont-ils se servir ? Je ne plaiderai pas pour une chaîne dont j’espère qu’elle va servir de moins en moins. On ne peut pas dédier une chaîne au confinement, c’est-à-dire au rôle d’outil éducatif nécessairement parcellaire.

J’ai voulu prolonger l’existence de France 4 pour que cette réflexion puisse avoir lieu autrement que dans l’urgence. Je serai évidemment attentive à vos observations. Mais adoptons une perspective dynamique, en nous demandant quelle sera l’évolution d’ici dix ou quinze ans.

M. Pascal Bois. Je suis particulièrement attaché au Centre national de la musique (CNM), ayant été à l’origine du rapport de préfiguration puis de la proposition de loi – votée à l’unanimité – qui ont débouché sur sa création le 1er janvier 2020. Il joue un rôle actuellement indispensable. Je profite de l’occasion pour féliciter ses équipes, qui, sous la responsabilité de Jean-Philippe Thiellay et de Romain Laleix, ont accompli un travail formidable et exemplaire pour s’adapter aux urgences.

À plus long terme, la viabilité du modèle économique du CNM est-elle hypothétique ? Vous avez déjà répondu à propos de la récente décision de la Cour de justice de l’Union européenne et des 25 millions d’euros d’« irrépartissables » qui financent la création par l’intermédiaire des organismes de gestion collective. Mais qu’en est-il de pistes de financement pérennes comme la fiscalité numérique sur Google et YouTube ou de nouvelles recettes sur les équipements audio ?

Mme Roselyne Bachelot, ministre. Merci de saluer la création du CNM et l’action de Jean-Philippe Thiellay – qui a fait ses classes à l’Opéra, c’est dire si c’est un homme de qualité ! En ce qui concerne la pérennité des moyens du CNM, on peut dire que nous l’avons garantie, cette année en tout cas, de façon grandiose – à la hauteur des enjeux et des besoins du secteur.

Je rappelle en effet que le plan de relance alloue au CNM 210 millions d’euros, dont 175 en 2021 et 35 en 2022, pour qu’il mette en œuvre un plan de soutien à la filière musicale. En mars 2020, le CNM a suspendu la perception de la taxe sur les spectacles et mobilisé l’intégralité de ses moyens pour constituer un fonds de secours destiné aux PME du spectacle vivant. En mai, le niveau d’intervention de ce fonds a été relevé et, grâce à une dotation d’1 million d’euros, un fonds de secours à la musique enregistrée et à l’édition musicale a été créé. En juillet, grâce à la dotation prévue en loi de finances rectificative, le CNM a pu bénéficier de 50 millions d’euros supplémentaires et étendre son périmètre d’action. Début octobre a été instauré un mécanisme de compensation des pertes d’exploitation liées aux contraintes de jauge, pour 42 millions d’euros. Les aides financières dispensées dans le cadre de ces fonds ont vocation à compléter les dispositifs de droit commun mis en œuvre par l’État.

Je ne me fais donc aucun souci quant aux moyens dont bénéficie le CNM : ils lui permettront de financer un secteur qui est en grande difficulté. Je vous renvoie à l’excellent article paru aujourd’hui dans Le Monde au sujet de la filière musicale.

Mme Sylvie Tolmont. Le projet de loi de finances pour 2021 a l’étrange particularité de réduire de 70 millions d’euros les crédits alloués aux entités de l’audiovisuel public, mais de doter ces derniers du même montant dans le cadre du plan de relance. Pourquoi ne pas assumer que la trajectoire budgétaire décidée par le Gouvernement en 2018 était une erreur et qu’il faut l’abandonner ?

S’agissant de la CAP, vous avez en partie répondu en nous expliquant qu’une réflexion était en cours à son propos au sein de votre ministère. Elle est indispensable à l’audiovisuel public, mais son fait générateur – le fait de posséder une télévision – est obsolète. Pouvez-vous nous donner des éléments de calendrier à ce sujet ?

Concernant France 4, nous restons opposés à sa fermeture. N’oublions pas que tous les enfants n’ont pas accès à tous les supports média ni à des outils payants.

Mme Roselyne Bachelot, ministre. Entre les 70 millions d’euros de la trajectoire budgétaire de l’audiovisuel public et les 70 millions d’euros du plan de relance, il n’y a rien d’autre qu’une coïncidence, dont je comprends qu’elle puisse être source de confusion. La trajectoire budgétaire de l’audiovisuel public, destinée à rationaliser les dépenses du secteur, prévoyait, à l’origine, une économie de 80 millions, que nous avons ramenée à 70 millions pour tenir compte du maintien de France 4. Puis est arrivée la catastrophe de la crise sanitaire : pour maintenir à flot les finances de l’audiovisuel public, sévèrement malmenées, comme celles de bien d’autres pans du secteur culturel, il a fallu lui allouer 70 millions. Il n’existe donc aucune corrélation entre ces deux mouvements : d’un côté, une trajectoire structurelle ; de l’autre, un sauvetage conjoncturel.

Mme Aurore Bergé. Le rapport au livre et à la lecture est probablement l’un des éléments les plus essentiels à l’émancipation, notamment des plus jeunes. Pourtant, 347 quartiers prioritaires de la politique de la ville restent dépourvus de bibliothèque. Ne devraient-ils pas être prioritaires dans le cadre d’un programme de construction de bibliothèques ?

Nous souhaitons, si les annonces que l’on a pu entendre devaient se confirmer au cours des prochains jours, que les librairies soient considérées comme un commerce essentiel. Je crois pouvoir dire que ce souhait est partagé.

Concernant enfin France 4, nous sommes très attentifs à son maintien, car nous croyons à la télévision, et à la télévision publique, pour préserver le lien avec les plus jeunes. Ne les habituons pas à aller dès l’âge le plus tendre vers d’autres écrans que ceux qui sont le support d’une diffusion linéaire susceptible de les protéger. Il existe une véritable complémentarité entre le linéaire et le non‑linéaire. En tout cas, nous croyons résolument en l’audiovisuel public.

Mme Roselyne Bachelot, ministre. Moi aussi !

Les 15 000 bibliothèques françaises constituent le premier équipement culturel du territoire. Elles sont engagées dans une transformation consistant à proposer de nouveaux services et à prolonger leur durée d’ouverture. Car la bibliothèque ne peut se réduire à un lieu statique où l’on entrepose des livres destinés à être loués pour un temps : ce doit être un lieu d’animation culturelle et de rencontres. La conception un peu poussiéreuse des bibliothèques doit évoluer pour qu’elles apportent quelque chose de plus que les services du numérique.

À la suite du rapport d’Erik Orsenna, le Gouvernement a lancé en 2018 le plan bibliothèques pour encourager cette dynamique. On peut déjà noter plusieurs améliorations. En ce qui concerne les horaires d’ouverture, on comptait, fin 2019, 343 projets aidés ayant conduit à accroître l’amplitude horaire de huit heures trente par semaine dans 623 collectivités. En 2021 et 2022, je poursuivrai la mise en œuvre de ce plan et j’amplifierai le soutien accordé par l’État aux collectivités territoriales pour leurs bibliothèques : grâce au plan de relance, 15 millions d’euros lui sont réservés en 2021, puis à nouveau en 2022, en particulier pour permettre la rénovation énergétique des bâtiments et poursuivre l’extension de leur durée d’ouverture ; ainsi, le soutien de l’État à l’investissement dans les bibliothèques territoriales dépassera pour la première fois 100 millions d’euros.

Pendant le confinement, les bibliothèques ont offert davantage de ressources numériques – parfois, je le reconnais, au détriment de l’imprimé. J’ai donc décidé de soutenir l’achat de livres par les bibliothèques ; 5 millions d’euros y seront consacrés en 2021 puis en 2022. Cela profitera à l’ensemble de la filière. En 2021, 2 millions supplémentaires seront consacrés aux contrats territoire-lecture (CTL), plébiscités par les collectivités et primordiaux pour ramener certains publics vers le livre papier, le vrai livre, de ceux qui vous poursuivent et vous guident toute votre vie – chacun de nous a dans sa bibliothèque un livre chéri, lu et relu, et ce n’est pas toujours Le Petit Prince !

M. le président Bruno Studer. Moi, c’était Le Comte de Monte-Cristo : « attendre et espérer »…

Merci, madame la ministre.

 

 

 

 

 


–  1  –

II.   EXAMEN DES CRÉDITS

La commission examine ensuite, pour avis, les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles ».

Article 33 et État B 

La commission est saisie des amendements II-AC79 de Mme Aurore Bergé et IIAC81 de M. Bruno Studer.

Mme Aurore Bergé. Nous souhaitons prolonger l’activité du fonds de soutien spécifique à la diffusion hertzienne et numérique en faveur des radios privées et des télévisions locales. Leurs recettes publicitaires ont chuté. Or elles constituent un écosystème important dans notre pays. Nous appelons le Gouvernement à prolonger son soutien en 2021.

M. le président Bruno Studer. Je n’ai rien à ajouter à l’excellente présentation de notre collègue Aurore Bergé.

Mme Céline Calvez, rapporteure pour avis des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles ». Vous souhaitez proroger le dispositif exceptionnel de soutien à la diffusion hertzienne, décidé dans le PLFR3.

Ce soutien est une excellente chose, mais deux arguments justifient la fin de ce dispositif. D’une part, le fonds de soutien est défini de telle sorte que pour en bénéficier, les revenus de 2021 devront être inférieurs à ceux de 2020, ce qui ne devrait pas être le cas. D’autre part, ce fonds de soutien a été présenté comme temporaire à la Commission européenne. Le prolonger pourrait remettre en cause l’appréciation de cette dernière.

Cela étant, nous comprenons bien la justification de ces amendements d’appel, la situation des radios privées et des télévisions locales étant très incertaine. Nous pourrons en débattre lors de l’examen du PLFR4 si nous constatons que leur situation est encore pire qu’en juillet, lorsque nous avions voté le PLFR3.

Mme Aurore Bergé. Je pense que nous serons amenés à en discuter dans le PLFR4, car je crains que la situation de nos médias ne s’améliore pas à brève échéance. J’accepte de retirer l’amendement II-AC79.

M. le président Bruno Studer. Je retire également l’amendement II-AC-81.

Les amendements sont retirés.

La commission est saisie de l’amendement II-AC49 de M. Michel Larive.

M. Michel Larive. Les crédits de paiement alloués à la HADOPI sont stables, à 8,65 millions d’euros, mais pour quel bilan ?

Le site Next Inpact révèle que la HADOPI a coûté mille fois plus cher qu’elle n’a rapporté à l’État français. En réalité, les usages se sont modifiés : le streaming illégal a remplacé le téléchargement ; les usagers utilisent facilement un réseau privé virtuel qui les localise à l’étranger et l’offre légale s’est développée.

Nous proposons donc de transférer les crédits alloués à la HADOPI à un fonds de soutien aux auteurs et aux créateurs. En effet, la concertation annoncée avec les auteurs et les créateurs sur leur protection sociale, leur régime fiscal et leur représentativité n’a abouti à aucune mesure concrète. Le rapport Racine a été remis au ministre de la Culture début janvier, et nous en sommes toujours à une phase de dialogue, alors que les difficultés des auteurs et des créateurs sont largement connues et que les solutions ont été exposées depuis des mois. Nous proposons donc de créer une ligne budgétaire en faveur des artistes et des créateurs.

Mme Céline Calvez, rapporteure pour avis. Vous appelez à la création d’un fonds de soutien aux artistes et aux créateurs. Le Gouvernement et cette majorité s’attachent à les soutenir par des mesures d’urgence et y consacrant une partie du plan de relance.

Mais votre amendement semble surtout avoir pour objet principal de supprimer la HADOPI. Vous estimez qu’elle a coûté mille fois plus cher qu’elle n’a rapporté : il est étonnant de juger de son utilité à l’aune des amendes qu’elle a perçues. Qui jugerait de l’utilité d’une autorité de police au montant des amendes qu’elle impose ? La HADOPI est utile, car les comportements illégaux cessent dans l’immense majorité des cas après le premier ou le deuxième avertissement. La supprimer nuirait à la lutte contre le piratage.

Nous avons d’ailleurs proposé au printemps la fusion du CSA et de la HADOPI, pour renforcer la lutte contre les différentes formes de piratage. Avis défavorable.

M. Michel Larive. Vous aidez les créateurs par des mesures d’urgence ; moi, je vous propose de créer un fonds pour les aider à long terme.

Par ailleurs, vous prétendez que la HADOPI obtient des résultats : j’aimerais bien les connaître. Qu’on nous les montre, nous pourrons en discuter.

Mme Céline Calvez, rapporteure pour avis. La HADOPI publie ses résultats chaque année et son président, Denis Rapone, saura se rendre disponible pour vous les présenter. J’espère d’ailleurs que nous aurons l’occasion de le revoir très vite pour faire évoluer le cadre de la régulation, puisque la ministre a fait part de sa volonté de présenter un projet de loi en ce sens.

La commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement II-AC69 de Mme Muriel Ressiguier.

M. Michel Larive. Le système actuel des aides à la presse ne garantit pas le pluralisme indispensable au fonctionnement de notre démocratie. Ces aides sont insuffisantes pour permettre le pluralisme car elles vont directement dans les comptes de milliardaires, de grands groupes et de banques qui possèdent la plupart des titres de presse.

Nous proposons donc la création d’un programme budgétaire intitulé « Pluralisme de la presse », dont les fonds sont prélevés sur ceux alloués à l’HADOPI.

Mme Céline Calvez, rapporteure pour avis. Par cet amendement d’appel, vous entendez dénoncer le système actuel des aides à la presse qui, selon vous, ne garantit pas le pluralisme indispensable à notre démocratie.

Nous sommes évidemment attachés au pluralisme, et il est toujours possible de le parfaire. Mais nous sommes loin de l’image que vous dépeignez : 110 millions d’euros sont consacrés aux aides à la presse, 88 millions aux aides au transport postal, et l’AFP bénéficie également d’un soutien. Ces dotations vont être dopées par le plan de relance, qui y consacre 483 millions d’euros jusqu’en 2022.

Ces aides avoisinent 22 % du chiffre d’affaires du secteur, c’est considérable. Et elles ne bénéficient pas prioritairement aux grands groupes de presse, comme vous le prétendez, à moins de considérer que l’Humanité en fait partie ! L’Humanité a reçu 3 millions d’euros d’aides directes en 2017. Avis défavorable, ou demande de retrait.

M. Michel Larive. Sachez que 90 % de la presse est détenue par neuf milliardaires, nous sommes loin de la pluralité.

Mme Aurore Bergé. Cette obsession de prendre le budget de la HADOPI revient à opposer les auteurs ou la presse à la lutte contre le piratage. Or s’il y a bien un objectif que nous devrions tous partager dans cette commission, c’est celui de lutter contre le piratage, qui est de fait un pillage des œuvres et des créateurs.

En outre, dans la ligne budgétaire créée, qui serait juge de la pluralité de la presse ? Aujourd’hui, les aides à la presse aident toute la presse, sans exclusivité. Cela est d’ailleurs parfois reproché car certains titres peuvent étonner une partie du public, mais ils montrent que c’est justement l’intégralité de la presse qui est soutenue.

Avec votre amendement, quel Politburo décidera de qui est éligible ou non au programme « Pluralisme de la presse » ? Qui aura le droit d’exister et qui ne sera pas soutenu parce qu’il ne serait pas dans la bonne ligne ?

Au contraire, c’est la manière actuelle dont les aides sont attribuées qui assure le pluralisme de la presse.

M. Gaël Le Bohec. Cher collègue, permettez-moi de mettre en doute les chiffres que vous avez cités. Ils sont probablement vrais au niveau international, mais nous sommes là pour voter le budget de la France. Aussi, j’aimerais les remettre sur le tapis et parler des tirages par jour. Le premier quotidien national, avec 800 000 tirages par jour, c’est Ouest France, une association. Dire que la majorité des tirages sont détenus par des acteurs privés, c’est oublier les lecteurs de ces exemplaires. La majorité des exemplaires français ne sont pas forcément détenus par des acteurs privés, comme vous le dites.

La commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement II-AC62 de M. Luc Geismar.

M. Luc Geismar. Cet amendement vise à soutenir la presse quotidienne régionale dans sa transformation vers une offre numérique. Celle-ci, nous le savons tous, a vécu des difficultés, que la crise du coronavirus et la liquidation de Presstalis ont exacerbées.

Afin d’assurer la vitalité, le pluralisme et le développement de la presse locale ainsi que son ancrage territorial, il est proposé de transférer les crédits du programme 334 Livre et industries culturelles vers l’action 5 « Soutien aux médias de proximité » du programme 180 Presse et médias.

Mme Céline Calvez, rapporteure pour avis. En allouant 500 000 euros supplémentaires au programme 180, l’amendement vise à soutenir la presse quotidienne régionale dans sa nécessaire transformation numérique. Je vous rejoins entièrement sur ce point. Néanmoins, quelques précisions sont nécessaires.

Ouest France, que M. Le Bohec a évoqué, a perçu 4,5 millions de l’État en 2017 – ce n’est pas rien –, tant dans l’aide au portage qu’au titre du Fonds stratégique de développement de la presse. La PQR est donc tout de même aidée. Le budget pour 2021 prévoit également des mesures importantes.

En outre, l’amendement prévoit d’abonder une ligne consacrée au soutien aux médias de proximité, qui s’adresse aux médias de quartier plutôt qu’à la PQR. La ministre l’a expliqué, lorsqu’elle a répondu à votre question. L’idée serait d’étudier davantage comment la PQR est aidée, pour lui permettre d’atteindre sa pleine extension dans le domaine du numérique. Nous pouvons y travailler.

Je vous suggère donc, monsieur Geismar, de retirer l’amendement. À défaut, j’y serai favorable.

M. Luc Geismar. Je le retire. Je souhaite toutefois en discuter avec la ministre en séance pour évoquer à nouveau le soutien à la numérisation de la presse quotidienne régionale.

L’amendement est retiré.

La commission émet ensuite un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » sans modification.

Puis elle examine, pour avis, les crédits du compte de concours financier « Avances à l’audiovisuel public ».

Article 35 et État D

La commission est saisie de l’amendement II-AC85 de Mme Sophie Mette.

Mme Sophie Mette. Véritable enjeu et atout de soft power, la francophonie doit être soutenue car elle est l’une des clés du rayonnement de la culture française à travers le monde. Il convient de mener une politique publique ambitieuse la concernant.

Le présent amendement, s’il affecte le financement de Radio France, dont la baisse de dotations est un écueil, vise bien à soutenir la francophonie et à marquer l’ambition d’une politique publique en la matière. Il a donc pour objet de redéployer une partie des crédits de paiement dévolus au programme 843 Radio France pour les affecter au programme 847 TV5 Monde.

Mme Céline Calvez, rapporteure pour avis. Nous sommes naturellement attachés à la francophonie, sur laquelle vous appelez notre attention. Les dirigeants de France Médias Monde et de TV5 Monde ont plusieurs fois exposé ici combien la francophonie guide leur action.

Dans cette perspective, il y a un peu plus d’un mois, TV5 a lancé la nouvelle plateforme TV5 Monde plus, dont les contenus ont été travaillés pour présenter une actualité de la francophonie et l’inscrire dans la création. En outre, France Médias Monde fournit de nombreux exemples de journaux ou de radios qui facilitent l’acquisition du français, quel que soit l’endroit d’où on les écoute ou les lit.

L’idée, je l’ai comprise, n’est pas de dépouiller Radio France. Elle contribue d’ailleurs aussi à la francophonie par ses émissions en direct et ses nombreux podcasts, qui enrichissent notre patrimoine francophone.

Aussi, madame Mette, je propose que vous retiriez l’amendement. À défaut, l’avis sera défavorable.

L’amendement est retiré.

La commission examine l’amendement II-AC70 de M. Michel Larive.

M. Michel Larive. La cure d’austérité pour tout l’audiovisuel public se poursuit cette année encore, alors que les recettes publicitaires sont en chute libre et que le secteur doit faire face à des coûts supplémentaires liés à l’épidémie de la covid-19. Face au cri d’alerte du secteur, le PLF pour 2021 ne prévoit rien. C’est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement d’appel, qui vise à dénoncer la politique de destruction du service public de l’audiovisuel que mène le Gouvernement.

Mme Céline Calvez, rapporteure pour avis. Vous appelez notre attention sur la défense de l’audiovisuel public. Nous défendons, nous aussi, les sociétés de l’audiovisuel public, non en proposant une nouvelle ligne budgétaire, mais en les dotant et en prenant en considération la crise qu’elles rencontrent. Le plan de relance, je le rappelle, prévoit 70 millions d’euros pour les conforter.

La trajectoire d’économies a été développée en 2018. On peut ne pas comprendre que chaque pan de l’action publique doive contribuer à l’effort de maîtrise de la dépense publique. Pourtant, nous devons tous agir en ce sens.

Cette trajectoire a été respectée, ce qui n’a jamais été le cas auparavant. On peut déplorer qu’elle soit à la baisse, mais elle a permis à l’ensemble des sociétés d’anticiper et d’établir leur stratégie. Ce n’est pas la disette, car les pouvoirs publics sont engagés financièrement auprès de ces sociétés. Mon avis sera donc défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle émet un avis favorable à l’adoption des crédits du compte de concours financier « Avances à l’audiovisuel public » sans modification.

 

 

 

 

 


  1  

   annexe :
Liste des personnes auditionnÉes par la rapporteure

(par ordre chronologique)

  Direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC)M. Jean-Baptiste Gourdin, directeur général, et Mme Juliana Nahra, cheffe du bureau du régime économique de la presse

  Ministère de l’économie et des finances – Direction du budget – M. Jean-Marc Oléron, sous-directeur de la huitième sous-direction, M. François Deschamps, chef de bureau 8BJM, et Mme Justine Vitte, du bureau 8BJM

  France Messagerie  M. Cédric Dugardin, directeur général, M. Sandro Martin, directeur général adjoint, et Mme Stéphanie de Haldat, chargée de communication

  Bibliothèque nationale de France (BNF) – Mme Laurence Engel, présidente, et M. Denis Bruckmann, directeur général

  La bibliothèque publique d’information (BPI) – Mme Christine Carrier, directrice, Mme Annie Brigant, directrice adjointe, et Mme Isabelle Antoine, secrétaire générale

  France Médias Monde (FMM) – Mme Marie-Christine Saragosse, Présidente-directrice générale, M. Victor Rocaries, directeur général en charge du pôle ressources, et Mme Fanny Boyer, adjointe au directeur en charge des relations institutionnelles

  Institut national de l’audiovisuel (INA) – M. Laurent Vallet, président, M. Jean-Marc Boero, secrétaire général, et Mme Agnès Chauveau, directrice déléguée à la diffusion et à l’innovation

  Agence France presse (AFP) – M. Fabrice Fries, président-directeur général, et Mme Dalila Zein, directrice générale

  Radio France (*) Mme Sibyle Veil, présidente-directrice générale, M. Xavier Domino, secrétaire général, et de Mme Marie Message, directrice des moyens et des ressources

  Centre national de la musique – M. Jean-Philippe Thiellay, président, et M. Romain Laleix, directeur général délégué

  France Télévisions (*)  Mme Delphine Ernotte Cunci, présidente directrice générale, et M. Christian Vion, directeur général adjoint en charge de la gestion, de la production et des moyens

  Table ronde relative au cinéma :

     Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) – M. Maxime Boutron, directeur juridique et financier

     Fédération nationale des cinémas français (FNCF) (*) – M. Marc Olivier Sebbag, délégué général

     Syndicat des producteurs indépendants (SPI) – M. Olivier Zegna Rata, délégué général

     Union des producteurs de cinéma (UPC) (*) – Mme Valérie Lépine Karnik, déléguée générale

     Société civile des Auteurs Réalisateurs Producteurs (ARP) – M. Pierre Jolivet, président

     Syndicat des distributeurs indépendants (SDI) (*) – M. Étienne Ollagnier, coprésident

     Distributeurs indépendants réunis européens (DIRE) M. Hugues Quattrone, délégué général

     Fédération nationale des éditeurs de films (FNEF) – Mme Hélène Herschel, déléguée générale

     Association des producteurs indépendants (API) (*) – Mme Hortense de Labriffe, déléguée générale

  Table ronde relative à la musique enregistrée :

     Syndicat national de l'édition phonographique (SNEP) (*) M. Alexandre Lasch, directeur général, et Mme Émilie Trébouvil, directrice des affaires publiques et réglementaires

     Fédération nationale des labels indépendants (FÉLIN) – Mme Céline Lepage, déléguée générale, et M. Mathieu Dassieu, gérant de Baco Records

     Société civile des producteurs de phonographiques (SCPP) – M. Marc Guez, directeur général gérant

     Syndicat des musiques actuelles (SMA) – Mme Aurélie Hannedouche, déléguée générale, et M. Guillaume Roche, label Accords croisés et élu au conseil national du SMA au titre des labels

     Union des Producteurs Phonographiques Français Indépendants (UPFI) – M. Stephan Bourdoiseau, président, et M. Guilhem Cottet, directeur général

     Société Civile des Producteurs de Phonogrammes en France (SPPF) – M. Jérôme Roger, directeur général

  Table ronde des éditeurs de presse :

     Alliance de la presse d’information générale (APIG) – M. Pierre Petillault, directeur général

     Syndicat de la presse indépendante d’information en ligne (SPIIL) (*)  M. Jean Christophe Boulanger, président, et Mme Cécile Dubois, secrétaire générale

     Fédération nationale de la presse d’information spécialisée (FNPS) (*) M. Laurent Bérard-Quélin, président

     Syndicat des éditeurs de la presse magazine (SEPM) (*) M. Alain Augé, président, et Mme Julie Lorimy, directrice générale

  Centre national du livre (CNL) – M. Vincent Monadé, président, et M. Thomas Hannebique, directeur général par intérim

  TV5 Monde – M. Yves Bigot, directeur général, M. Thomas Derobe, secrétaire général, et Mme Hélène Zemmour, directrice du Numérique

  Arte France (*) M. Bruno Patino, président, et M. Frédéric Bereyziat, directeur de la gestion et de la coordination, Mme Ingrid Libercier, directrice de la production, et Mme Elsa Comby, directrice du cabinet de la présidence

  Ministère de la culture – M. Jean-Baptiste Gourdin, directeur général des médias et des industries culturelles (DGMIC), M. Fabrice de Battista, chef du département des affaires générales et financières, Mme Juliana Nahra, cheffe du bureau du régime économique de la presse, et Mme Marie de La Taille, adjointe au chef du bureau du secteur audiovisuel public

  Table ronde des dirigeants de l’audiovisuel public :

     France Télévisions (*) M. Francis Donnat, secrétaire général

     Radio France (*) Mme Sibyle Veil, présidente-directrice générale, et M. Xavier Domino, secrétaire général

     Institut national de l’audiovisuel (INA) – M. Laurent Vallet, président, et M. Jean-Marc Boero, secrétaire général

     TV5 Monde – M. Yves Bigot, directeur général, et M. Thomas Derobe, secrétaire général

     France Médias Monde (FMM) – Mme Marie-Christine Saragosse, présidente-directrice générale, et M. Thomas Legrand-Hedel, directeur de la communication et des relations institutionnelles

  Audition commune :

     Conseil supérieur de l’Audiovisuel – M. Roch-Olivier Maistre, président, et M. Guillaume Blanchot, directeur général

     Haute Autorité pour la Diffusion des Œuvres et la Protection des droits sur Internet (Hadopi) M. Denis Rapone, président, Mme Pauline Blassel, secrétaire générale, et M. Nicolas Faucouit, chef de cabinet du président

  M. Emmanuel Giannesini, conseiller maître à la Cour des comptes, chargé par le Gouvernement d’un rapport sur la réforme des aides au transport postal de la presse

  Messageries Lyonnaises de Presse – M. José Ferreira, président

  Syndicat interprofessionnel des radios et télévisions indépendantes (SIRTI) (*) M. Kevin Moignoux, secrétaire général, et Mme Charlotte Gabarrot, responsable Affaires juridiques et Relations Institutionnelle

  Syndicat de la librairie française (SLF)Mme Anne Martelle, présidente, et M. Guillaume Husson, délégué général

 

 

 

 

(*) Ces représentants dintérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique sengageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de lAssemblée nationale.

 

 


([1])  70 millions d’euros pour la presse, 165 millions d’euros pour le cinéma, 29,5 millions d’euros pour le livre et 17,5 millions d’euros pour les industries culturelles et créatives.

([2])  Avis n° 2020-06 du 30 septembre 2020 relatif au rapport d'exécution pour l'année 2019 du contrat d'objectifs et de moyens conclu entre l'État et Radio France.

([3]) http://videos.assemblee-nationale.fr/video.9746624_5f9850ba156c9.commission-des-affaires-culturelles--mme-roselyne-bachelot-ministre-de-la-culture--projet-de-loi--27-octobre-2020

([4])  http://videos.assemblee-nationale.fr/video.9750632_5f987adeb3a45.commission-des-affaires-culturelles-et-de-l-education--mme-roselyne-bachelot-ministre-de-la-cultur-27-octobre-2020