N° 4502

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 29 septembre 2021.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT
DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2022 (n° 4482)

TOME I

PREMIÈRE PARTIE

PAR M. Jean-Marc ZULESI

Député

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 Voir le numéro : 4482


SOMMAIRE

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Pages

Introduction

COMMENTAIRES DeS ARTICLES DU PROJET DE LOI

Article 8 (article 39 decies C du code général des impôts) Extension du suramortissement favorisant le verdissement des navires

Article additionnel après l’article 8 (article 200 du code général des impôts) Réduction d’impôt accordée au titre des dons faits par les particuliers pour la protection, la conservation ou la mise en valeur du patrimoine des gares

Article additionnel après l’article 8 (article 235 ter ZF du code général des impôts) Suppression progressive de la taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires

Article additionnel après l’article 8 (article 238 bis du code général des impôts) Réduction d’impôt sur le revenu ou sur les sociétés accordée au titre des dons faits par les entreprises pour la protection, la conservation ou la mise en valeur du patrimoine des gares

Article additionnel après l’article 8 (articles 235 ter ZF et 302 bis ZC du code général des impôts) Suppression progressive de la contribution de solidarité territoriale

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. discussion générale

II. EXAMEN DES ARTICLES

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES


— 1 —

   Introduction

Après une année 2020 marquée par une crise sanitaire et économique sans précédent, l’année 2021 a été pour notre pays celle de la relance et de la résilience.

La relance tout d’abord, avec une année marquée par le déploiement, sur notre territoire, des 30 milliards d’euros du plan de relance dédiés à la transition écologique. La résilience ensuite, avec l’examen du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dit « Climat et résilience ».

Cette année en effet, le Parlement a participé à un exercice démocratique nouveau en examinant le projet de loi « Climat et résilience ». Ce texte, issu des travaux de la Convention citoyenne pour le climat, organe de démocratie participative inédit dans notre pays, a montré que notre démocratie pouvait se renouveler et que les citoyens étaient, eux-aussi, acteurs de la construction des lois qui vont impacter leur vie quotidienne. Le Parlement a rempli son rôle multiséculaire en débattant longuement, en amendant, puis en traduisant dans le marbre de nos lois des propositions initialement portées avec les 150 citoyens de la Convention citoyenne pour le climat. Votre rapporteur pour avis se réjouit de la réussite de cet exercice, symbole de la vitalité démocratique de notre pays.

Au travers de la loi « Climat et résilience » et de ses plus de 300 ambitieux articles, nous avons complété les moyens dont notre pays dispose pour tenir ses engagements pris auprès de l’Union européenne et dans le cadre de l’accord de Paris, ainsi que ses engagements nationaux, dont celui de réduire d’au moins 40 % ses émissions de gaz à effet de serre (GES) en 2030.

Cette loi a acté un grand nombre de changements pour notre pays dans tous les domaines de nos vies : consommer, produire et travailler, se déplacer, se loger, se nourrir et protéger l’environnement.

Le dernier titre de la loi prévoit que le Haut Conseil pour le climat se charge d’évaluer tous les ans la mise en œuvre des mesures prévues dans la loi « Climat et résilience » et, tous les trois ans, l’action des collectivités territoriales en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre et d’adaptation aux changements climatiques. Votre rapporteur pour avis salue ce dispositif qui est à la fois un outil précieux pour mieux adapter nos travaux parlementaires aux réalités locales et un premier pas vers une évaluation systématique de l’impact climatique des politiques publiques.

La pluralité de cette loi, adoptée en juillet, ainsi que les très nombreuses dispositions qu’elle met en place expliquent qu’à l’heure de l’examen de la première partie de ce budget pour 2022, notre commission ne soit saisie que d’un seul article, l’article 8, qui vise à encourager le verdissement de la flotte française.

Cet article est issu des concertations conduites par le Gouvernement dans le cadre du Fontenoy du maritime. Ce processus, qui a débuté à la fin de l’année 2020 avant de se clôturer en septembre 2021, visait à favoriser la compétitivité du pavillon français pour renforcer la place économique et industrielle maritime française.

L’article 8 est un dispositif essentiel pour le monde maritime. Il vise à la fois à favoriser la transition écologique de la flotte sous pavillon français et à garantir la compétitivité de ce pavillon durement impacté par la crise sanitaire et économique.

Cet article modifie l’article 39 decies C du code général des impôts, issu de la loi de finances pour 2019. Il s’inscrit dans la volonté du législateur de soutenir et d’accentuer la croissance bleue. Il met en place un système de déduction fiscale pour favoriser la réduction de la pollution causée par les moyens de propulsion. Le taux de ce dispositif, communément appelé « suramortissement », varie en fonction des biens concernés.

L’article 39 decies C du code général des impôts permet en particulier de déduire une somme égale à 105 % des coûts supplémentaires immobilisés, hors frais financiers, directement liés à l’installation d’équipements, acquis à l’état neuf, permettant l’utilisation du gaz naturel liquéfié comme énergie propulsive principale ou pour la production d’énergie électrique.

Le premier objectif de l’article 8 du projet de loi de finances pour 2022 est d’étendre la possibilité de bénéficier de ce suramortissement aux navires et bateaux utilisant le gaz naturel comprimé, l’ammoniac, le méthanol, l’éthanol ou le diméthyl éther comme énergie propulsive principale ou pour la production d’énergie électrique destinée à la propulsion principale.

L’article 39 decies C du code général des impôts prévoyait que, pour bénéficier du dispositif, il fallait effectuer un nombre minimal d’escales dans les ports français ou un temps de navigation minimal dans la zone économique exclusive française.

La suppression de cette condition est le deuxième pilier de l’article 8. Le dispositif devient ainsi plus attractif pour les armateurs car il est susceptible de concerner davantage de navires. Par ailleurs, il ne s’agit plus seulement d’un dispositif calibré pour lutter contre la pollution dans les ports ou près des côtes françaises. Il devient un outil permettant de lutter contre la pollution dans les zones maritimes au niveau mondial.

Enfin, l’article 8 pose des « garde-fous » pour éviter les « effets d’aubaine » : tout d’abord, il plafonne le montant des coûts éligibles au dispositif de suramortissement. Par ailleurs, il prévoit que, dans les situations de location avec option d’achat ou de crédit-bail, il n’est possible de bénéficier du suramortissement que s’il a été opté pour la taxe au tonnage. Cela doit permettre de garantir que l’aide fiscale aura bien des retombées nationales en termes économiques.

Pour renforcer l’efficacité de ce dispositif, la commission a adopté un amendement du rapporteur pour avis élargissant la liste des énergies propulsives ouvrant le droit au bénéfice du suramortissement fixé par l’article 8. Celle-ci semblait en effet trop restrictive du fait du caractère évolutif des technologies.

La commission a également adopté un amendement proposant que la propulsion auxiliaire décarbonée puisse bénéficier du suramortissement au taux de 105 % comme le gaz naturel liquéfié, un amendement précisant de manière claire que la déduction fiscale prévue par l’article 39 decies C est répartie sur une durée de huit ans, ainsi que deux amendements qui font bénéficier les équipements acquis en 2021 de l’élargissement du champ prévu par l’article 8.

Si la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire n’est saisie que de l’article 8, le rapporteur pour avis a considéré que ce dernier budget de notre mandature était également une dernière occasion de marquer tout notre soutien au ferroviaire, transport de masse plus vertueux en termes d’émissions de GES. Le ferroviaire est un atout structurant pour les territoires, capable de créer de la croissance et de l’emploi pour sa filière tout en favorisant les conditions de développement d’autres secteurs économiques, grâce à son impact sur l’aménagement durable du territoire. Grâce à l’action de notre commission depuis 2017, le ferroviaire est à nouveau vu comme une chance. C’est grâce à son concours que nous réussirons la transition énergétique et que nous nous désengagerons des énergies fossiles.

C’est pourquoi, dans la continuité de travaux de la commission depuis 2017, et notamment de la loi d’orientation des mobilités, le rapporteur pour avis a souhaité alléger la fiscalité pesant sur le transport ferroviaire en France. Ainsi, la commission a adopté la suppression progressive de la taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires (TREF) et de la contribution de solidarité territoriale (CST). Au-delà de l’engagement de longue date de notre commission pour le ferroviaire, ces suppressions sont conformes aux engagements pris par le Président de la République à l’occasion des 40 ans du TGV.

Dans le contexte de l’ouverture à la concurrence du transport de voyageurs, ces taxes perdent leur pertinence dans la mesure où leur maintien conduirait essentiellement la SNCF, et non ses concurrents, à en être redevable.

En outre, dans le prolongement de la loi « Climat et résilience », la suppression de ces taxes est logique afin d’encourager le développement du ferroviaire et de le rendre plus compétitif. La suppression de ces deux taxes entraînera un gain d’environ 230 millions d’euros par an, montant qui correspond peu ou prou à une baisse de TVA à 5,5 %, une mesure qui avait été largement débattue par le Parlement au printemps 2021.

Enfin, parce que certaines gares constituent un patrimoine historique riche, le rapporteur pour avis a souhaité créer un dispositif de défiscalisation des dons des particuliers et des entreprises à Gares & Connexions, ou aux organismes assurant la gestion des gares. Ce dispositif s’appliquera uniquement aux dons affectés à la protection, à la conservation ou à la mise en valeur du patrimoine de ces gares, qui seront alors défiscalisés sous un régime identique à celui du mécénat.

En conclusion, le rapporteur pour avis tient à souligner que depuis 2017, notre commission a pleinement joué son rôle et a acté de grandes avancées. Ce dernier budget de la mandature lui donne l’opportunité de réaffirmer ses engagements de longue date pour un développement durable qui accompagne nos concitoyens et pour un aménagement du territoire concerté.

Enfin, le rapporteur pour avis souhaite remercier l’ensemble des commissaires au développement durable et à l’aménagement du territoire pour nos débats, riches, et pour l’ambition nous avons portée ensemble depuis 2017.

 


— 1 —

   COMMENTAIRES DeS ARTICLES DU PROJET DE LOI

Article 8
(article 39 decies C du code général des impôts)
Extension du suramortissement favorisant le verdissement des navires

Avis favorable de la commission à une adoption avec modifications

I.   L’État du droit

L’article 39 decies C du code général des impôts a été créé par l’article 56 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019. Il vise, par une incitation fiscale, à favoriser le verdissement de la flotte française.

Son I prévoit que les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés ou à l’impôt sur le revenu selon un régime réel d’imposition peuvent déduire de leur résultat imposable des sommes dont le montant varie en fonction des équipements « verts » acquis (disposition appelée « suramortissement »).

Le 1° du I permet de déduire 125 % « des coûts supplémentaires immobilisés, hors frais financiers, directement liés à l’installation d’équipements, acquis à l’état neuf, permettant l’utilisation d’hydrogène ou de toute autre propulsion décarbonée comme énergie propulsive principale ou pour la production d’énergie électrique destinée à la propulsion principale des navires ». Ce dispositif peut notamment concerner les navires ou bateaux qui utilisent le vélique comme mode de propulsion principale.

Le 2° du I permet de déduire « une somme égale à 105 % des coûts supplémentaires immobilisés, hors frais financiers, directement liés à l’installation d’équipements, acquis à l’état neuf, permettant l’utilisation du gaz naturel liquéfié comme énergie propulsive principale ou pour la production d’énergie électrique ».

Le 3° du I permet de déduire « une somme égale à 85 % des coûts supplémentaires immobilisés, hors frais financiers, directement liés à l’installation des biens destinés au traitement des oxydes de soufre, oxydes d’azote et particules fines contenus dans les gaz d’échappement, qu’elles acquièrent à l’état neuf ». (Ces dispositifs sont plus communément appelés « scrubbers »). Pour obtenir le bénéfice de la déduction, il faut que l’équipement serve à améliorer le niveau d’exigence environnementale au regard d’au moins un des deux critères suivants :

– un niveau d’émission d’oxydes de soufre inférieur à celui fixé à la règle 14 de l’annexe 6 de la convention MARPOL ([1]) ou, lorsque le navire y est soumis, par la directive du 21 novembre 2012 ([2]) ;

–  un niveau d’émission d’oxydes d’azote inférieur à celui correspondant au niveau III tel que défini au paragraphe 5.1 de la règle 13 de l’annexe 6 de la convention MARPOL.

Le 4° du I permet de déduire « une somme égale à 20 % de la valeur d’origine, hors frais financiers, des biens destinés à l’alimentation électrique durant l’escale par le réseau terrestre ou au moyen de moteurs auxiliaires utilisant le gaz naturel liquéfié ou une énergie décarbonée ainsi que les biens destinés à compléter la propulsion principale du navire ou du bateau par une propulsion décarbonée, qu’elles acquièrent à l’état neuf ».

À la différence des 3° et 4° du I, applicables à tous les navires, le 1° et le  du I prévoient que seuls sont concernés par ces suramortissements les équipements pour les navires et bateaux de transport de marchandises ou de passagers et qui sont affectés à leur activité.

Le neuvième alinéa du I prévoit une autre condition restrictive pour bénéficier du dispositif : les navires armés au commerce doivent effectuer un nombre minimal d’escales dans les ports français (plus de 30 % par an) ou un temps de navigation minimal dans la zone économique exclusive (plus de 30 % par an).

Par ailleurs, les dispositifs prévus par les 1° à 4° du I ont une durée de vie limitée : il faut que le contrat d’acquisition des équipements ou de construction du navire ou l’achat de l’équipement soit réalisé entre 1er janvier 2020 et le 31 décembre 2024.

Le II de l’article 39 decies C prévoit que la déduction fiscale « est répartie linéairement à compter de la mise en service des biens sur leur durée normale d’utilisation ».

Le III de l’article 39 decies C constitue le « miroir » du I pour le cas d’acquisition dans le cadre d’un crédit-bail ou d’une location avec option d’achat. Il fixe les mêmes taux que ceux prévus par les 1° à 4° du I.

II.   Les dispositions du projet de loi de finances

A.   L’extension du champ du suramortissement à de nouvelles techniques de propulsion

Le 1° du A du I de l’article 8 du projet de loi de finances étend le champ du suramortissement d’un taux de 105 % prévu par le 2° du I de l’article 39 decies C du code général des impôts. Ce suramortissement vise désormais aussi les navires et bateaux utilisant le gaz de pétrole liquéfié, le gaz naturel comprimé, l’ammoniac, le méthanol, de l’éthanol ou le diméthyl éther comme énergie propulsive principale ou pour la production d’énergie électrique destinée à la propulsion principale.

Le b du 1° du B de l’article 8 complète le premier alinéa du III de l’article 39 decies C du code général des impôts. Il constitue, pour les cas où il est recouru au crédit-bail ou à la location avec option d’achat, la disposition miroir du 1° du A du I de l’article 8.

Pour les navires ou bateaux utilisant le gaz naturel liquéfié, il est possible de bénéficier du suramortissement lorsque le contrat d’acquisition des équipements ou de construction du navire ou du bateau est conclu entre le 1er janvier 2020 et le 31 décembre 2024. Pour les navires ou bateaux utilisant les nouveaux modes de propulsion, ce droit n’est ouvert que lorsque le contrat d’acquisition des équipements ou de construction du navire ou du bateau est conclu entre le 1er janvier 2022 et le 31 janvier 2024.

Toutefois, le II de l’article 8 prévoit que : « Le I, à l’exception du 1° du A et du 1° du B, s’applique aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2022 ». Cela signifie que le 1° du A et le 1° du B pourront s’appliquer aux exercices ouverts en amont de la date du 1er janvier 2022. Cela assouplit les conditions dans lesquelles les navires et bateaux peuvent bénéficier des extensions du suramortissement au taux de 105 % pour les navires et bateaux qui utilisent comme énergie propulsive principale ou pour la production d’énergie électrique destinée à la propulsion principale le gaz de pétrole liquéfié, le gaz naturel comprimé, l’ammoniac, le méthanol, l’éthanol ou le diméthyl éther.

B.   La suppression du critÈre d’escale ou de navigation dans la zone Économique exclusive

Le 3° du A du I de l’article 8 modifie le neuvième alinéa du I de l’article 39 decies C. Il supprime ainsi la condition de réalisation d’un nombre minimal d’escales dans les ports français ou d’un temps de navigation minimal dans la zone économique exclusive française.

En effet, ce dispositif était initialement calibré pour lutter contre la pollution dans les ports. Il pouvait donc intéresser des navires de services ou des ferries, secteur aujourd’hui en difficulté du fait de la crise du coronavirus. Selon les informations qui ont été communiquées à votre rapporteur pour avis, aujourd’hui, aucun navire n’a utilisé le dispositif de suramortissement. En supprimant la condition d’escale ou de temps de navigation minimale dans la zone économique exclusive française, le champ des navires concernés par le dispositif peut par exemple s’étendre aux porte-conteneurs.

Le dispositif devient ainsi plus attractif pour les armateurs. Il devient en même temps un outil permettant de lutter contre la pollution dans les zones maritimes, question qui n’est pas spécifiquement française mais mondiale.

C.   Les mesures prises pour ÉVITER les « effets d’aubaine »

Le 5° du A du I de l’article 8 complète le I de l’article 39 decies C pour plafonner le montant des coûts d’investissement supplémentaires éligibles à la déduction fiscale définie par l’article 39 decies C.

Ce plafonnement est de 15 millions d’euros par navire, lorsque les équipements acquis permettent l’utilisation d’une des sources d’énergie mentionnées au 2° du I de l’article 39 decies C du code général des impôts (gaz naturel liquéfié et, désormais également, gaz de pétrole liquéfié, gaz naturel comprimé, ammoniac, méthanol, éthanol et diméthyl éther). Le plafonnement est de 10 millions d’euros par navire pour les coûts supplémentaires immobilisés mentionnés au 3° du I de l’article 39 decies C, c’est-à-dire ceux liés à l’acquisition de « scrubbers ».

Le 3° du B du I de l’article 8 modifie le 1° du III de l’article 39 decies C pour limiter les cas de recours au dispositif de suramortisssement prévu à cet article dans les situations de location avec option d’achat ou de crédit-bail aux cas où il a été opté pour la taxe au tonnage. Cette taxe, définie par l’article 209-0 B du code général des impôts, est un régime d’imposition forfaitaire dont le bénéfice est ouvert aux « entreprises dont le chiffre d’affaires provient pour 75 % au moins de l’exploitation de navires armés au commerce » et qui exploitent « sous pavillon d’un État membre de l’Union européenne ou d’un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen une proportion de tonnage net au moins égale à 25 % », qu’elles s’engagent à maintenir ou à augmenter. La limitation du dispositif du suramortissement à ces cas doit permettre d’éviter des effets d’aubaine et de garantir que l’aide fiscale aura bien des retombées nationales en termes économiques.

D.   Les mises À jour de rÉfÉrences et les modifications de coordination

Les 2° et 4° du A du I de l’article 8 procèdent à des mises à jour de références juridiques.

Par ailleurs, le a du 1° du B, le 2° du B et le C du I de l’article 8 procèdent à des modifications de coordination au sein de l’article 39 decies C.

III.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission a adopté cinq amendements du rapporteur pour avis qui modifient l’article 8.

L’amendement CD17 modifie son alinéa 4 pour ouvrir davantage le champ des énergies propulsives susceptibles d’être concernées par le suramortissement. En effet, la liste prévue par l’alinéa 4 semble trop restrictive du fait du caractère évolutif des technologies. Plutôt que d’opter pour une liste fixe de carburants, cet amendement propose de faire référence aux « carburants dont les performances en matière d’émissions de CO2, d’oxydes de soufre, d’oxydes d’azote et de particules fines et ultra-fines sont au moins équivalentes à celles du gaz naturel liquéfié ». Cette rédaction a l’avantage de mettre en exergue la nécessité de réduire les émissions non seulement de particules fines mais aussi de particules ultra-fines.

L’amendement CD18 modifie lui aussi l’alinéa 4 de l’article 8 pour étendre la durée de l’extension du suramortissement prévue par l’article. La période fixée par l’article 39 decies C du code général des impôts pour les modes de propulsion actuellement concernés va du 1er janvier 2020 au 31 décembre 2024. Pour les nouveaux modes de propulsion ajoutés par l’article 8, elle serait comprise entre 1er janvier 2022 et le 31 décembre 2024, ce qui ne laisse que deux ans. Cela ne permet pas forcément de prendre en compte tous les contrats qui ont pu être passés en 2021 pour des navires ou bateaux utilisant ces nouveaux modes de propulsion. L’amendement CD21 (qui porte sur l’alinéa 18 de l’article 8) est le pendant de l’amendement CD18 pour les cas d’utilisation du crédit -bail et du contrat de location avec option d’achat.

L’amendement CD19 complète l’article 8 pour renforcer les aides à la propulsion décarbonée auxiliaire. Alors que la propulsion décarbonée principale fait l’objet d’un suramortissement dont le taux est de 125 % en application du 1° du I de l’article 39 decies C du code général des impôts, le 4° de ce même I prévoit que le taux n’est que de 20 % pour les modes de propulsion décarbonés auxiliaires. L’amendement CD19 leur accorde le taux de 105 % prévu par le 2° du I de l’article 39 decies C. En effet, il s’agit de solutions technologiques très prometteuses, notamment s’agissant du vélique qui fait l’objet de nombreuses recherches et de nombreux investissements.

Enfin, l’amendement CD20 modifie l’alinéa 13 de l’article 8 pour prévoir explicitement que la déduction fiscale définie par l’article 39 decies C est répartie linéairement à compter de la mise en service des biens sur une durée de huit ans. Cette durée correspond à la durée d’amortissement minimale fixée par le bulletin officiel des finances publiques BOI-BIC-AMT-20-40-60-10 relatif aux régimes particuliers des amortissements sur les biens industriels et commerciaux. Le II de l’article 39 decies C mentionne la « durée normale d’utilisation » et les consultations menées par votre rapporteur pour avis ont montré que la compréhension de ce terme n’était pas identique chez tous les acteurs du monde maritime. Il pourrait laisser penser qu’il s’agit de la durée d’utilisation du navire (qui est de plus de huit ans) et non de sa durée d’amortissement fiscal. De ce fait, il apparaît nécessaire de fixer clairement dans la loi la durée en question.

Article additionnel après l’article 8
(article 200 du code général des impôts)
Réduction d’impôt accordée au titre des dons faits par les particuliers pour la protection, la conservation ou la mise en valeur du patrimoine des gares

I.   L’État du droit

L’article 200 du code général des impôts dispose que les dons réalisés par des particuliers à certaines associations ou organismes ouvrent droit à une réduction d’impôt égale à 66 % des sommes versées, dans la limite de 20 % de leur revenu imposable.

Ouvrent par exemple droit à cette réduction d’impôt les dons réalisés au profit de fondations ou associations reconnues d’utilité publique, d’œuvres ou organismes d’intérêt général ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel ou artistique ou encore d’organismes publics ou privés dont la gestion est désintéressée et qui ont pour activité principale la présentation au public d’œuvres dramatiques, lyriques, musicales, chorégraphiques, cinématographiques, audiovisuelles et de cirque ou l’organisation d’expositions d’art contemporain, à la condition que les versements soient affectés à cette activité.

II.   Les travaux de la commission

Compte tenu de l’intérêt patrimonial des gares françaises et de leur importance pour l’aménagement de notre territoire, la commission a adopté l’amendement CD13 du rapporteur pour avis qui permet aux particuliers de bénéficier d’une réduction d’impôt sur le revenu de 66 %, dans la limite de 20 % de leur revenu imposable, pour les dons qu’ils effectuent à SNCF Gares & Connexions ou à tout autre organisme assurant la gestion de gares.

Afin de bénéficier de la réduction d’impôt, ces dons devront être affectés à la protection, à la conservation ou à la mise en valeur du patrimoine de ces gares.

Article additionnel après l’article 8
(article 235 ter ZF du code général des impôts)
Suppression progressive de la taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires

I.   L’État du droit

L’article 235 ter ZF du code général des impôts institue une taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires (TREF) due par les entreprises assurant des services de transport ferroviaire de voyageurs redevables de la contribution de solidarité territoriale (CST) et dont le chiffre d’affaires annuel des prestations assujetties à la CST est supérieur à 300 millions d’euros.

La taxe, due le 1er janvier de chaque année, est assise sur le résultat imposable à l’impôt sur les sociétés l’année précédente – ou, lorsqu’il s’agit d’une filiale d’une société-mère, sur le résultat qui aurait été imposable au nom de la filiale si elle avait été imposée séparément. Ce résultat, déterminé avant application des règles de déduction des déficits déductibles, est majoré des dotations aux amortissements de l’exercice, hors amortissements dérogatoires.

Si la loi précise que le taux de la TREF est compris entre 5 % et 25 %, celui-ci est fixé par arrêté conjoint des ministres chargés des transports, de l’économie et du budget. Un arrêté du 28 août 2020 ([3]) fixe ainsi son taux à 11,01201 %.

Le montant de la taxe est par ailleurs plafonné par l’article 235 ter ZF précité à 226 millions d’euros, plafond atteint en 2020 par le seul redevable de la taxe (SNCF Voyageurs).

Si cette taxe était auparavant affectée au compte d’affectation spéciale (CAS) « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs » (CAS‑TET), l’article 88 de la loi de finances pour 2021 a clos ce CAS au 1er janvier 2021, faisant suite aux recommandations réitérées de la Cour des comptes de le supprimer ([4]). Depuis le 1er janvier 2021, cette taxe est désormais affectée au budget général de l’État.

II.   Les travaux de la commission

Afin de traduire dans la loi les annonces du Président de la République du 17 septembre dernier, la commission a adopté l’amendement CD15 du rapporteur pour avis qui supprime progressivement la taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires. Ainsi cet amendement :

– abaisse le plafond de la TREF à 150 millions d’euros en 2022 ;

– abaisse le plafond de la TREF à 75 millions d’euros en 2023 ;

– supprime la TREF à compter du 1er janvier 2024.

Cette suppression, qui permettra d’encourager le développement du transport ferroviaire, se justifie pleinement dans le contexte de l’ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de voyageurs, puisque seul SNCF Voyageurs – et non ses concurrents – serait autrement redevable de la taxe, en raison du seuil de chiffre d’affaires – 300 millions d’euros – applicable aux entreprises redevables.

Cette suppression s’inscrit enfin dans le prolongement de la recommandation de la Cour des comptes qui considérait, en avril 2020, que la suppression du CAS-TET « devrait s’accompagner de la suppression des deux taxes ferroviaires, la [contribution de solidarité territoriale] et la TREF, qui conduisent de fait à faire financer l’essentiel de l’activité Intercités par l’exploitant ([5]) ».

Article additionnel après l’article 8
(article 238 bis du code général des impôts)
Réduction d’impôt sur le revenu ou sur les sociétés accordée au titre des dons faits par les entreprises pour la protection, la conservation
ou la mise en valeur du patrimoine des gares

I.   L’État du droit

L’article 238 bis du code général des impôts prévoit que les sociétés soumises à l’impôt sur le revenu ou à l’impôt sur les sociétés peuvent bénéficier d’une réduction d’impôt pour les dons qu’elles versent à des œuvres ou organismes d’intérêt général, à des fondations ou associations reconnues d’utilité publique, à des sociétés ou organismes de recherche ou encore à des organismes publics ou privés dont la gestion est désintéressée et qui ont pour objet la présentation au public d’œuvres artistiques.

Le montant de la réduction d’impôt est égal à 60 % du montant du don lorsque celui-ci est inférieur ou égal à deux millions d’euros. Si le montant du don est supérieur, la fraction supérieure ouvre droit à une réduction d’impôt au taux de 40 %. Cette réduction fiscale est toutefois plafonnée à 20 000 euros par an ou à 0,5 % du chiffre d’affaires annuel hors taxe, les versements excédant ce plafond pouvant cependant donner lieu à une réduction d’impôt au titre des cinq exercices suivants.

II.   Les travaux de la commission

Comme l’amendement CD13 concernant les dons des particuliers, la commission a adopté l’amendement CD14 du rapporteur pour avis qui permet aux entreprises de bénéficier d’une réduction d’impôt sur le revenu ou d’impôt pour les dons qu’elles effectuent à SNCF Gares & Connexions ou à tout autre organisme assurant la gestion de gares, lorsque ces dons sont affectés à la protection, à la conservation ou à la mise en valeur du patrimoine de ces gares. Le montant de la réduction est calculé suivant les règles de droit commun : 60 % du montant du don et 40 % pour la fraction supérieure à deux millions d’euros, dans la limite d’un plafond annuel de 20 000 euros ou de 0,5 % du chiffre d’affaires.

Article additionnel après l’article 8
(articles 235 ter ZF et 302 bis ZC du code général des impôts)
Suppression progressive de la contribution de solidarité territoriale

I.   L’État du droit

L’article 302 bis ZC du code général des impôts instaure une contribution de solidarité territoriale (CST), exigible le 1er janvier de chaque année, due par les entreprises ferroviaires qui assurent des services de transport ferroviaire de voyageurs.

La taxe est assise sur le chiffre d’affaires de l’année N-1 issu des prestations de transport ferroviaire de voyageurs effectuées entre deux gares du réseau ferré national ainsi que des prestations commerciales qui leur sont directement liées. En sont exclus les services de transport ferroviaire conventionnés (TER pour les régions, RER pour Île-de-France Mobilités et les trains d’équilibres du territoire au niveau national). L’unique redevable de la taxe est donc, à l’heure actuelle, SNCF Voyageurs.

Si la loi précise que le taux de la taxe est compris entre 0,1 % et 3 %, celui-ci est fixé par arrêté conjoint des ministres chargés des transports, de l’économie et du budget. Un arrêté du 28 août 2020 ([6]) fixe sont taux à 0,32057 %.

Le produit de la CST s’élevait, pour l’année 2020, à 16 millions d’euros.

Cette taxe, comme la TREF, était auparavant affectée au CAS « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs ». Suite à la clôture du CAS au 1er janvier 2021, résultant de l’article 88 de la loi de finances pour 2021, le produit de la CST est désormais affecté au budget général de l’État.

II.   Les travaux de la commission

Pour des raisons similaires à celles ayant conduit à l’adoption de l’amendement CD15 supprimant la TREF, la commission a adopté l’amendement CD16 du rapporteur pour avis qui supprime progressivement la contribution de solidarité territoriale. Ainsi cet amendement :

– plafonne la CST à 8 millions d’euros en 2022 ;

– supprime la CST à compter du 1er janvier 2023.

Cette suppression, soutenue par la Cour des comptes ([7]), se justifie tant par le contexte d’ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de voyageurs que par la volonté d’alléger la fiscalité du transport ferroviaire en France, alors même qu’il s’agit du mode de transport de masse le moins émetteur de CO2.


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   TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.   discussion générale

Lors de sa réunion du mercredi 29 septembre 2021, la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a examiné, pour avis, sur le rapport de M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis, la première partie du projet de loi de finances pour 2022.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert, présidente. Nous examinons pour avis la première partie du projet de loi de finances (PLF) pour 2022. La saisine pour avis porte sur l’article 8 du projet de loi. Nous examinerons également les amendements portant article additionnel, qui présentent un lien avec les matières sur lesquelles notre commission est compétente. Comme d’habitude, la recevabilité financière des amendements a été appréciée par le président de la commission des finances.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Notre commission s’est saisie pour avis de la première partie du projet de loi de finances pour 2022, dont j’ai l’honneur d’être le rapporteur pour avis. Cette année, seul un article de la première partie relève du champ de compétences de la commission : l’article 8, qui vise à encourager le verdissement de la flotte française. Il est issu des concertations conduites par le Gouvernement dans le cadre du Fontenoy du maritime. Le processus, qui a débuté à la fin de l’année 2020, visait notamment à renforcer la compétitivité du pavillon français ainsi que la place économique et industrielle du secteur maritime français. Je veux mettre en avant l’engagement de l’ensemble de nos collègues sur le sujet, notamment de Mme Sophie Panonacle, depuis le début de la législature.

L’article 8 contient un dispositif essentiel pour le monde maritime. Il vise à la fois à favoriser la transition écologique de la flotte sous pavillon français et à en garantir la compétitivité. Il modifie à cet effet l’article 39 decies C du code général des impôts, issu de la loi de finances pour 2019. Il s’inscrit donc dans la volonté de notre majorité de soutenir et d’accentuer la croissance bleue.

Son premier objectif est d’étendre la possibilité de bénéficier du suramortissement aux navires et bateaux utilisant le gaz naturel comprimé, l’ammoniac, le méthanol, l’éthanol ou le diméthyl éther comme énergie propulsive principale ou pour la production d’énergie électrique destinée à la propulsion principale.

En outre, l’article 39 decies C du code général des impôts prévoyait que, pour bénéficier du dispositif, il fallait effectuer un nombre minimal d’escales dans les ports français ou un temps de navigation minimal dans la zone économique exclusive française. Le deuxième pilier de l’article 8 consiste en la suppression de cette condition.

Le dispositif devient ainsi plus attractif pour les armateurs et est susceptible de concerner davantage de navires. Par ailleurs, il ne s’agit plus seulement d’un dispositif calibré pour lutter contre la pollution dans les ports ou près des côtes françaises : il devient un outil permettant de lutter contre la pollution dans les zones maritimes au niveau mondial.

Enfin, l’article 8 pose des garde-fous pour éviter les effets d’aubaine. Tout d’abord, il plafonne le montant des coûts éligibles au dispositif de suramortissement. Ensuite, il prévoit que, dans les situations de location avec option d’achat ou de crédit-bail, il n’est possible de bénéficier du suramortissement que s’il a été opté pour la taxe au tonnage. Cela doit permettre de garantir que l’aide fiscale aura bien des retombées nationales en termes économiques.

Pour renforcer l’efficacité du dispositif et marquer l’empreinte de notre commission sur ce sujet central, je défendrai un amendement élargissant la liste des énergies propulsives ouvrant le droit au bénéfice du suramortissement, fixée par l’article 8. La liste semble en effet trop restrictive du fait du caractère évolutif des technologies.

Je proposerai aussi que la propulsion auxiliaire décarbonée, notamment la propulsion vélique auxiliaire, puisse bénéficier du suramortissement au taux de 105 %, comme le gaz naturel liquéfié. Mme Sophie Panonacle avait travaillé sur ce sujet lors des précédentes lois de finances et nous en avions discuté lors du dernier débat budgétaire.

J’ai également déposé un amendement précisant que la déduction fiscale prévue par l’article 39 decies C est répartie sur une durée de huit ans, ce qui correspond à la durée d’amortissement minimale fixée par le Bulletin officiel des finances publiques.

En outre, je soutiendrai deux amendements qui font bénéficier les équipements acquis en 2021 de l’élargissement du champ prévu par l’article 8.

Vous connaissez mon attachement au développement du transport ferroviaire. J’en ai fait une priorité dans le cadre de mon mandat. C’est pourquoi je défendrai deux autres amendements, qui visent à alléger la fiscalité pesant sur le transport ferroviaire en France. Ils suppriment progressivement la taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires (TREF) et la contribution de solidarité territoriale (CST). Nous l’avions souhaité, notamment lors des discussions sur le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets. La proposition a été reprise par le Président de la République dans son discours pour fêter les 40 ans du TGV.

Enfin, considérant l’état et l’importance de nos gares dans nos territoires, j’ai souhaité ouvrir la possibilité de financer, par le mécénat, la rénovation de ces ouvrages.

Dans ce dernier débat budgétaire, j’ai souhaité présenter une vision ambitieuse et pragmatique, afin que notre commission puisse défendre une position toujours plus forte en matière de développement durable et d’aménagement du territoire.

M. Vincent Thiébaut (LaREM). Le projet de loi de finances pour 2022 est celui d’une croissance durable. Le dispositif du « quoi qu’il en coûte » et l’instauration de mesures d’urgence pendant la crise ont permis le maintien de l’économie ainsi que la protection des salariés, des entreprises et de leurs compétences. Une telle politique a permis de retrouver, dès 2021, le niveau d’activité économique d’avant la crise, avec un taux de chômage et un niveau de rétablissement similaires à ceux de 2019.

Le contexte de reprise économique permettra un rétablissement progressif des finances publiques, puisque la baisse du déficit public engagée en 2021 devra se poursuivre en 2022, de même que la baisse de la dépense publique, qui devrait atteindre 55,6 % du PIB, contre 60,8 % en 2020. L’objectif est désormais d’améliorer le niveau économique de la France, avec une économie plus forte, plus dynamique et plus respectueuse de l’environnement. Le PLF pour 2022 poursuit le déploiement du plan France relance et contiendra des crédits résolument tournés vers l’avenir. Notre commission s’est saisie pour avis de la première partie du texte, et plus spécifiquement de l’article 8, dédié au dispositif de déduction exceptionnelle en faveur des équipements permettant aux navires et bateaux de transport d’utiliser des énergies plus propres.

L’objectif est clair : réduire les émissions de gaz à effet de serre et la pollution atmosphérique. L’article 8 est la résultante des concertations conduites par le Gouvernement dans le cadre du Fontenoy du maritime afin de redynamiser et d’améliorer la compétitivité du pavillon français. L’enjeu est crucial : soutenir les acteurs qui s’engagent avec force dans la transition écologique. Le rapporteur pour avis nous proposera de compléter le dispositif, notamment sur la liste des énergies propulsives utilisées ou sur la durée effective du suramortissement.

Nous aurons par ailleurs la possibilité de discuter des crédits dédiés à l’environnement. Jamais la France n’a autant investi pour la transition écologique. Le budget augmentera de nouveau cette année, pour atteindre 49,9 milliards d’euros, en plus du plan de relance, soit une augmentation de 3 % par rapport à l’année dernière. Parmi les avancées les plus significatives, on peut noter l’allongement du dispositif MaPrimeRénov’, pour plus de 2 milliards d’euros, un soutien important au secteur ferroviaire, notamment au fret, et au développement des énergies renouvelables, ainsi que des crédits en nette hausse pour la prévention des risques naturels majeurs.

Le projet de loi de finances témoigne avec force de l’attention que le Gouvernement et notre majorité parlementaire accordent à la transition écologique. Dans le prolongement des nombreux textes déjà votés, nous avançons vers une société plus écologique, plus résiliente, plus juste et solidaire ; une écologie de l’action, à la fois responsable, ambitieuse, pragmatique et sociale. Notre action est cohérente, tant sur le plan législatif que budgétaire. Au cours de la législature, la France est devenue le premier pays du monde à mesurer l’incidence du budget de l’État sur l’environnement. Un tel budget vert est le signe du très fort engagement de la majorité pour la transition écologique. Le chantier n’est pas terminé, il est immense, mais nous avançons toujours plus, avec conviction et détermination, et je suis convaincu que vous nous accompagnerez.

M. Jean-Marie Sermier (LR). Je trouve surprenant que M. Vincent Thiébaut, pour lequel j’ai la plus grande estime, puisse pratiquer à ce point la méthode dite « Coué ». Pour ma part, je constate que le projet de loi de finances pour 2022 présente un problème de forme.

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire n’a à se prononcer que sur un seul article : soit elle s’est dégradée au fil du temps, soit le budget n’est pas à la hauteur de ce qui est attendu en matière d’environnement. Or j’ai le sentiment que notre commission fait son travail : j’en tire la conclusion que le budget présenté n’est vraiment pas à la hauteur.

D’abord, nous n’avons pas les crédits nécessaires pour assurer une vraie politique environnementale et une vraie politique bas-carbone. Ensuite, la fiscalité n’est pas adaptée, puisqu’elle se fonde toujours sur une écologie punitive et non incitative – hormis à l’article 8. Nous vous en donnons acte, cet article prévoit une incitation fiscale pour les navires qui auront un moyen décarboné de se déplacer. C’est une bonne chose. Il n’est toutefois pas clairement établi si l’ensemble des navires pourront bénéficier de l’avantage, y compris ceux qui, sous pavillon français, ne font aucun cabotage dans notre pays.

Par ailleurs, pourquoi ne pas élargir le dispositif à l’ensemble des transports ? Qu’en est-il pour le ferroviaire ? Il est bon d’en parler, mais il serait mieux d’agir. Quant au transport routier et aérien, on aurait pu imaginer une défiscalisation pour les énergies décarbonées, notamment l’hydrogène. Les bateaux à propulsion nucléaire bénéficieront-ils d’ailleurs de l’avantage, car ils sont entièrement décarbonés ?

On le voit, vous ne faites qu’un petit signe en la matière. C’est un peu comme si vous nous annonciez tout le parcours du Tour de France et que vous y mettiez fin à l’issue du prologue : on est loin du compte. Le transport maritime bénéficiera d’une certaine avancée mais pour le reste, nous attendons toujours.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert, présidente. Notre réunion est consacrée à la première partie du PLF. Il y aura davantage de matière à examiner dans la seconde partie.

M. Bruno Millienne (Dem). Aux grands soirs, nous préférons les victoires réalistes. Celle-ci en est une. Si des grands soirs avaient été possibles, monsieur Jean-Marie Sermier, vous les auriez accomplis depuis bien longtemps.

Notre commission se penche sur la première partie du projet de loi de finances, qui intervient dans un contexte très différent de l’an dernier, puisqu’après avoir maintenu et relancé l’économie en 2021, le Gouvernement s’oriente maintenant vers un budget de transition pour accompagner la sortie de crise et soutenir la croissance retrouvée.

Le groupe Mouvement démocrate et démocrates apparentés a pris connaissance du budget avec satisfaction, car il répond aux trois engagements pris en 2017 : améliorer la compétitivité de notre économie, redresser nos comptes publics et baisser massivement les impôts. Depuis 2017, nous avons ainsi baissé les impôts de 50 milliards d’euros ; nous dépasserons les 6 % de croissance en 2021 et atteindrons 4 % en 2022. Le taux de chômage devrait se rétablir à un niveau d’avant-crise, inférieur de 1,5 point à celui de 2017.

Nous sommes saisis plus spécifiquement de l’article 8 du PLF, lequel ouvre la possibilité pour les armateurs de déduire leurs investissements dans les navires ayant recours à une énergie propre. À l’origine, la loi de finances pour 2019 avait permis de créer une incitation fiscale visant à favoriser le verdissement de la flotte française de navires. Ainsi, les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés ou à l’impôt sur le revenu peuvent bénéficier d’un suramortissement, en déduisant de leur résultat imposable les montants dédiés aux équipements verts acquis.

En étendant et en aménageant le dispositif de la loi de finances pour 2019 pour le rendre plus efficace, l’article 8 concrétise un des engagements pris à l’issue du Fontenoy du maritime dévoilé en septembre 2020. Je salue les autres mesures annoncées à la suite de la concertation, comme la possibilité d’utilisation conjointe du crédit-bail pour faciliter l’acquisition d’un navire ou de la garantie d’État, lorsque les projets visent à recourir au pavillon français.

Si la décarbonation du secteur maritime est moins présente dans le débat public que celle du secteur routier ou aérien – pour lesquels il est faux de dire que l’on ne fait rien, monsieur Sermier – elle n’en est pas moins essentielle pour atteindre nos objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre. En effet, si le secteur maritime n’est responsable que de 2,5 % des émissions de gaz à effet de serre, la troisième étude de l’Organisation maritime internationale (OMI) prévoit une augmentation des émissions de ce secteur comprise entre 50 et 250 % d’ici à 2050, si rien n’est fait. Par ces nouvelles mesures fiscales d’accompagnement des professionnels dans la transition écologique, notre majorité confirme sa volonté tenace d’agir partout où c’est possible, avec le souci constant du soutien aux acteurs touchés, afin de ne laisser personne au bord de la route vers l’économie décarbonée. Au nom de mon groupe, je salue cette mesure d’écologie pragmatique et réaliste.

Mme Maina Sage (Agir ens.). Je m’associe à mes collègues pour me féliciter de cette mesure qui viendra améliorer le dispositif de suramortissement. Celui-ci, voté en 2015, a connu différentes applications, avec des modifications notamment en 2018, et est déjà ouvert au transport terrestre – camions, bus, autocars, camionnettes – ainsi qu’aux navires, avec des taux différents et des contraintes d’escale. Reste l’aérien, certes.

L’article 8 a donc pour objet d’assouplir le dispositif que nous avions déjà voté, qui n’a malheureusement pas fonctionné pour le transport maritime. Un bilan de l’application du suramortissement a-t-il pu être dressé dans d’autres domaines, notamment celui du transport terrestre ?

Nous soutiendrons ce dispositif car nous avons besoin d’accélérer la transition. Le transport maritime représente certes moins de 3 % de nos émissions anthropiques mondiales de CO2. Néanmoins, les perspectives ne sont pas bonnes : son impact pourrait être multiplié par 6 d’ici à 2050 et atteindre 17 % des émissions. Nous devons donc absolument changer de trajectoire. D’ailleurs, l’OMI nous pousse à le faire.

Lors de leur audition par le rapporteur pour avis, les armateurs demandaient à pouvoir disposer d’un système « one-shot », ce permettrait que la déduction fiscale se fasse en une seule fois et ne soit pas répartie sur plusieurs années. Qu’en pensez-vous, monsieur le rapporteur pour avis ?

Enfin, le texte soutient les navires à propulsion intégralement vélique. Qu’en est-il des navires hybrides, qui composent avec différents types d’énergie ? 20 % de vélique permettent une réduction de 20 à 40 % du carburant utilisé. Peut-on améliorer le taux du suramortissement en faveur du vélique hybride d’ici à la séance publique ?

M. Paul-André Colombani (LT). En mars dernier, le Fontenoy du maritime a été l’occasion de réaffirmer un objectif : faire de la France l’un des leaders du transport maritime. Les perspectives sont importantes, puisque le commerce mondial devrait croître de 45 % au cours de la décennie. Ce dessein ne doit pas pour autant nous détourner d’une autre ambition : engager le transport maritime dans la transition écologique. À cet égard, il faut veiller à ce que les compagnies de ferries assurant une délégation de service public entre le continent et la Corse soient intégrées au dispositif proposé. Je sais notre rapporteur pour avis très sensible à ce sujet.

Le Gouvernement a souscrit à de nombreux engagements lors du Fontenoy du maritime, dont certains trouvent leur traduction dans le projet de loi de finances. Je pense en tout premier lieu à la simplification des critères d’éligibilité au suramortissement vert prévu à l’article 8. Cette mesure vise à permettre aux armateurs d’accélérer leur transition écologique afin que la flotte française soit la plus verte du monde.

En ma qualité d’insulaire, je sais à quel point les navires polluants peuvent constituer une nuisance pour les habitants des villes portuaires. J’ai d’ailleurs interpellé à plusieurs reprises le Gouvernement sur la pollution de l’air provoquée par le transport maritime. Aussi suis-je favorable à toute mesure tendant à verdir les flottes. À ce propos d’ailleurs, le maire de Nice envisage d’appliquer une taxe de 60 euros par véhicule aux passagers qui se rendent en Corse en ferry. Ce n’est pas la bonne réponse : cela ne ferait que prendre en otage l’économie de la Corse en déplaçant le problème vers les ports de Gênes et, éventuellement, de Toulon.

Au-delà de la performance énergétique des navires, il me semble nécessaire de réfléchir aux moyens d’optimiser les flux de marchandises. L’innovation technologique a un rôle déterminant à jouer en la matière. Ainsi, on estime qu’on pourrait obtenir, à l’échelle de l’Union européenne, un gain d’efficacité de 10 à 30 % dans le secteur de la logistique grâce à la technologie numérique, qui permettrait de diminuer de 15 à 30 % les émissions de CO2. Un soutien renforcé à la numérisation et aux nouvelles technologies est donc lui aussi indispensable pour accroître l’efficacité des transports maritimes et aboutir à un verdissement du secteur. Ce point est, me semble-t-il, un angle mort de la politique actuelle.

M. Guy Bricout (UDI-I). Notre champ d’action est très limité pour ce qui est de la première partie du PLF puisque nous ne sommes saisis que de l’article 8. Celui-ci va dans le bon sens, puisqu’il vise à encourager l’usage, par les navires et les bateaux de transport de passagers ou de marchandises, d’équipements permettant de réduire les émissions de gaz à effet de serre ou la pollution atmosphérique.

À première vue, tout semble bien aller pour le budget de la transition écologique, qui augmentera de 3 % – soit 1,5 milliard d’euros – en 2022. Les annonces sont aussi ambitieuses que les chiffres affichés : 17,1 milliards pour le logement, 8 milliards pour les mobilités, 2 milliards pour le dispositif MaPrimeRénov’. Le développement du transport maritime et ferroviaire va connaître une accélération, et la biodiversité est placée au cœur des enjeux prioritaires. C’est Noël avant l’heure !

Il faut toutefois examiner ce dernier PLF de la législature à l’aune des quatre années écoulées. Depuis le début de notre mandat, avec nombre de collègues députés de tous les bords politiques, nous avons dû nous battre pied à pied pour obtenir la stabilité réglementaire et législative indispensable aux acteurs de la transition écologique. Qu’avons-nous récolté ? Aucun plan de financement pérenne pour le transport, un fret ferroviaire en détresse, un retard énorme en matière de rénovation énergétique. Par ailleurs, la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, apogée de cette politique des petits pas, ne répond en rien à l’urgence climatique : ce n’est pas moi qui le dis, mais les scientifiques, les experts du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) et du Haut Conseil pour le climat. Le Conseil d’État, pour sa part, dans une décision du 1er juillet dernier, a enjoint au Gouvernement de prendre, d’ici au 31 mars 2022, « toutes mesures utiles » pour atteindre l’objectif fixé par l’accord de Paris, tant les dispositifs actuels sont insuffisants.

Aujourd’hui, on voudrait nous faire croire que le budget 2022 est celui de tous les possibles… Espérons-le ! Mais penchons-nous, par exemple, sur le dispositif MaPrimeRénov’, réabondé massivement, à grands coups de communication. Il permet certes de faire du volume, mais sans réelle efficacité pour l’instant ; parallèlement, l’État est obligé d’augmenter, dans ce même budget, le montant du chèque énergie. De même, on nous annonce 8 milliards d’euros pour les mobilités : dont acte, mais quelle somme sera-t-elle réellement investie dans la rénovation du matériel roulant, devenue incontournable ? Par ailleurs, quant à la forme, il est évidemment très dérangeant que le plan d’investissement, qui devrait concerner un sujet aussi stratégique que l’hydrogène, ne figure pas dans le texte initial : c’est un vrai manque de visibilité.

Prenons garde à la politique de l’affichage. Il est indispensable de cibler les actions les plus pertinentes à mener au vu de l’urgence climatique. À notre sens, la priorité est d’aller plus loin dans la réduction du reste à charge pesant sur nos concitoyens, notamment les plus modestes, lorsqu’ils effectuent une rénovation énergétique réellement performante. S’agissant des mobilités et de l’aide à l’acquisition de véhicules propres, nous préconisons des mesures plus ambitieuses, comme la création d’un prêt à taux zéro.

Nous veillerons, au cours des prochains mois, à ce que les enveloppes affichées soient utilisées de manière à nous permettre d’atteindre enfin les objectifs de l’accord de Paris.

Mme Sophie Panonacle. Maillon crucial du commerce international, le transport maritime achemine 90 % des marchandises dans le monde et représente 76 % du commerce extérieur de l’Union européenne. Son importance économique et stratégique va de pair avec un impact environnemental qui n’est pas négligeable : près de 3 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. L’article 8 du PLF pour 2022 répond parfaitement à l’objectif de décarbonation du transport maritime et fluvial. Le Gouvernement réaffirme ainsi la volonté de redynamiser et d’améliorer la compétitivité du pavillon français exprimée lors des assises de la mer par le Président de la République. La ministre de la mer a défendu ce projet lors du Fontenoy du maritime. Je partage avec mes collègues de la « MariTeam » et de la commission du développement durable l’ambition de parvenir à une économie bleue compétitive et décarbonée. Je souhaite que nous poursuivions notre engagement en soutenant de manière encore plus forte, cette année, le transport vélique. Je remercie notre rapporteur pour avis, M. Jean-Marc Zulesi, pour les amendements qu’il va vous présenter et que je vous invite à adopter.

M. Matthieu Orphelin. Nous sommes à l’orée d’une nouvelle crise énergétique majeure, et c’est un sujet dont notre commission doit discuter à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances. Il faut faire en sorte que les gens puissent payer leurs factures, tout en accélérant la transition. Malheureusement, les leçons des crises passées ne sont pas tirées : on est toujours dans la réaction plutôt que dans l’anticipation. Le Gouvernement a fait un premier geste en augmentant le montant du chèque énergie. Il faut aller beaucoup plus loin, en élargissant le bénéfice de ce dispositif à 10 ou 15 millions de foyers supplémentaires lorsque le prix du pétrole et du gaz est très élevé, comme c’est le cas cette année. Il faut parallèlement accélérer l’adoption de mesures de soutien et d’encouragement à la transition écologique. Je pense notamment à la rénovation énergétique globale, mais aussi aux changements de véhicules. Des mesures sont prises, mais elles sont insuffisantes. Face à la crise énergétique, on doit aller beaucoup plus vite pour protéger le pouvoir d’achat des citoyens et mieux préparer et accompagner la transition.

M. Jimmy Pahun. J’approuve sans réserve les amendements du rapporteur pour avis. Je soutiens également la proposition de Mme Maina Sage de promouvoir le transport maritime à propulsion mixte : une solution intégralement vélique est inenvisageable. Il faut insister sur les efforts qu’accomplissent les armements et les ports français pour accomplir leur transition. Nous devons enfin défendre au niveau international une mesure proposée par le Président de la République lors du dernier G7 : la réduction de la vitesse des navires de transport des marchandises non urgentes, en vrac, qui réduirait les émissions de gaz à effet de serre de 40 millions de tonnes par an. C’est une mesure toute simple, mais qui dépend de décisions internationales.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Monsieur Jean-Marie Sermier, en supprimant la condition tenant à un nombre minimal d’escales, nous souhaitons placer l’ensemble des navires de commerce dans le champ de l’article 8. Vous estimez que nous avons une vision punitive de l’écologie, ce que je conteste, évidemment. Nous avons certes institué des malus – il en faut – mais aussi et surtout des bonus et des mesures d’accompagnement, par exemple pour changer de véhicule. Parmi les mesures prises, je pense par exemple à la prime à la conversion, aux bonus, à l’expérimentation d’un prêt à taux zéro votée dans la loi dite « Climat et résilience », ou encore aux surprimes. C’est une écologie qui, loin d’être punitive, accompagne les plus modestes.

Madame Maina Sage, je défendrai un amendement visant à faire passer le taux du suramortissement sur le transport vélique auxiliaire de 20 à 105 %. Cette proposition n’est pas nouvelle : vous faites partie de ceux qui, avec Mme Sophie Panonacle, M. Jimmy Pahun et les membres de « MariTeam », la défendent depuis quatre ans. Je continue à soutenir cette mesure nécessaire, avec beaucoup d’abnégation. Il ne s’agit pas de considérer que la voile constitue l’alpha et l’oméga, tout au moins comme mode de propulsion principal, mais de promouvoir un système hybride comportant une propulsion vélique secondaire. Nous continuerons à porter le fer sur ce sujet. Par ailleurs, je proposerai que le suramortissement porte, non sur la durée de vie du navire, mais sur une période de huit ans, afin de renforcer l’efficacité du système.

Le secteur de l’aviation n’a peut-être pas atteint le niveau de maturité technologique de l’industrie maritime. C’est pourquoi le plan de relance a affecté 1,5 milliard d’euros au développement d’un avion neutre en carbone. Certes, beaucoup de recherches sont engagées, notamment concernant les carburants alternatifs, mais elles ne sont pas assez avancées pour qu’un dispositif de suramortissement soit aussi efficace qu’il ne l’est pour les secteurs maritime et routier. Pour ce dernier, les effets du dispositif sont à ce point satisfaisants que la loi « Climat et résilience » en a étendu l’application jusqu’à 2030 : c’est le fruit du travail que nous avons mené avec les sénateurs lors de la commission mixte paritaire.


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II.   EXAMEN DES ARTICLES

Article 8 (article 39 decies C du code général des impôts) : Extension du suramortissement favorisant le verdissement des navires

Amendement I-CD17 du rapporteur pour avis.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Pour tenir compte de l’évolution des technologies, cet amendement vise à élargir la liste des énergies propulsives ouvrant droit au suramortissement. Il est proposé de prendre en considération les émissions de CO2, d’oxydes de soufre, d’oxydes d’azote et de particules fines et ultra-fines. Cela me donne l’occasion de saluer le travail accompli par notre collègue Jean-Luc Fugit sur la qualité de l’air, qui constitue un enjeu de taille pour notre pays.

Mme Frédérique Tuffnell. Je souscris sans réserve à cet amendement. Mais puisqu’il est question de la qualité de l’air, j’appelle votre attention aussi sur celle de l’eau. La plupart des navires concernés sont équipés d’un « scrubber », autrement dit d’une tour de lavage qui solubilise et absorbe les polluants tels que l’oxyde de soufre et les particules fines. L’eau de mer passe alors dans un circuit, qui peut être ouvert, dans la majorité des cas, ou fermé. Les scrubbers à boucle ouverte rejettent dans l’océan une eau à 30 ou 40 degrés et qui est mêlée de produits chimiques. Il pourrait être opportun d’utiliser l’article 39 decies C du code général des impôts pour enrayer le développement de ces scrubbers en circuit ouvert et favoriser les modèles à boucle fermée. Il me paraissait important d’évoquer ce sujet qui met en relation directe la qualité de l’air et de l’eau.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Votre remarque est tout à fait pertinente. Pour remédier à cette difficulté, j’ai entendu traiter le problème à la source, en me concentrant sur la motorisation. C’est en réfléchissant sur les technologies à venir, encore peu connues du grand public, et en accompagnant leur développement que l’on pourra progresser dans la lutte contre les particules fines et ultra-fines. Je suis à votre disposition, tout comme la « MariTeam », pour travailler sur ce sujet.

La commission adopte l’amendement.

Amendement I-CD18 du rapporteur pour avis.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à étendre la durée d’application de l’extension du suramortissement prévue par l’article 8 du PLF, et donc à toucher à un plus grand nombre de navires.

La commission adopte l’amendement.

Amendement I-CD19 du rapporteur pour avis.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à faire passer le taux du suramortissement sur la propulsion vélique secondaire de 20 à 105 %. Cela répond à la remarque de Mme Maina Sage.

La commission adopte l’amendement.

Amendement I-CD20 du rapporteur pour avis.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à ce que le suramortissement soit calculé non sur la durée d’utilisation du navire, qui nous semble trop longue, mais sur une période de huit ans. Cela renforcerait l’ambition de l’article et rendrait le dispositif beaucoup plus visible.

Mme Maina Sage. Je vous remercie d’avoir adapté et affiné le dispositif. Savez‑vous combien de navires pourraient en bénéficier et connaissez-vous le budget prévisionnel afférent ?

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Je pourrai vous communiquer la liste des navires par catégories : ferries, gaziers, porte-conteneurs… En l’état actuel, le dispositif concernerait entre vingt et vingt-cinq navires par an. Il pourrait tendre vers la trentaine de bateaux grâce aux amendements que nous proposons – « nous », car le dispositif émane aussi de vos propositions.

La commission adopte l’amendement.

Amendement I-CD21 du rapporteur.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Il est proposé d’étendre la période durant laquelle le suramortissement est appliqué aux nouveaux modes de propulsion prévus par l’article 8 du PLF à l’année 2021, avec effet rétroactif, afin de rendre le dispositif de l’article 8 plus ambitieux et plus attrayant.

La commission adopte l’amendement.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 8 modifié.

Après l’article 8

Amendement I-CD2 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. L’expérimentation de l’éco-prêt à taux zéro (éco-PTZ) pour le changement de véhicule est actuellement limitée aux zones à faibles émissions mobilité (ZFE‑m). Ce n’est absolument pas suffisant : il faut généraliser ce dispositif à tout le territoire le plus rapidement possible car nombre de ménages ne peuvent pas avancer l’argent pour changer de véhicule. De plus, chacun peut s’en rendre compte à la pompe, le prix du baril de pétrole s’établit désormais à 80 dollars. En 2018, nous nous étions beaucoup battus pour faire adopter des mesures d’accompagnement ; il faudra se battre à nouveau pour que le Gouvernement agisse dans ce domaine.

L’amendement a pour objet de rapprocher la fiscalité de l’essence et celle du diesel. Pour tenir compte de la situation actuelle, nous proposons une baisse très progressive de la fiscalité de l’essence, de l’ordre de 1 centime par an, et une montée très progressive pour le diesel – nous sommes donc bien loin des solutions qui auraient pu être décidées au début de la législature. Nous pourrions ainsi réduire cette niche fiscale en cinq ou sept ans.

M. Jean-Marie Sermier. Le groupe LR s’associera à cet amendement qui vise à aménager une phase de transition pour nos concitoyens, dont beaucoup n’ont pas la capacité financière de s’adapter. Cela répond parfaitement aux objectifs de l’écologie incitative, qui permet à chacun de participer à un élan, mais selon ses moyens financiers.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Cette proposition avait été mise de côté lors de la crise des gilets jaunes afin d’éviter d’exacerber les tensions sociales. Il ne me semble pas pertinent, en cette période, de revenir sur ce sujet. Nous avons fait le choix d’alourdir le malus CO2 et de créer le malus au poids plutôt que d’augmenter une nouvelle fois la fiscalité sur le gazole. Quant à l’éco-PTZ, il est certes limité aux zones à faibles émissions mobilité, mais nous prévoyons d’autres mesures d’accompagnement : primes à la conversion, bonus, surprimes, etc. Vous ne pouvez donc pas nous reprocher, monsieur Jean-Marie Sermier, de mener une politique punitive.

Par ailleurs, je lis dans l’exposé sommaire que le plan ferroviaire ne serait pas suffisamment ambitieux. Or aucune majorité n’a fait autant pour relancer les petites lignes et pour soutenir la SNCF ; je pense au pacte ferroviaire, à la reprise de la dette ou encore à la relance des trains de nuit. J’émets donc un avis défavorable à cet amendement.

M. Matthieu Orphelin. Nous commençons à avoir l’habitude du discours sur le thème : « Jamais aucun gouvernement n’en a autant fait. » Si vous en faisiez moins que les précédents, ce serait grave ! Je sais bien que vous n’avez pas obtenu les arbitrages nécessaires mais le Gouvernement doit en faire davantage pour aider les Français à faire face à la crise énergétique. Que cela vous plaise ou non, le seul enjeu qui compte, c’est de se mettre au bon rythme pour accélérer la transition et pour atteindre les objectifs. Vous ne pouvez pas vous contenter de comparer votre action à celle des gouvernements précédents.

M. Vincent Thiébaut. Le groupe La République en Marche ne soutiendra pas cet amendement. Outre les aides ayant permis de retirer plus d’un million de véhicules polluants du parc automobile français, nous avons prévu d’autres dispositifs pour accompagner le changement et pousser les ménages à opter pour des véhicules plus vertueux. La part du diesel dans les achats de véhicules neufs est en très nette baisse, au profit de l’essence et surtout des véhicules électriques, beaucoup moins polluants.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD3 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Je souhaite remercier mes collègues du groupe Les Républicains, ainsi que tous ceux qui ont voté pour le précédent amendement. Si vous avez passé du temps sur le terrain ce week-end, vous avez pu constater que les gens parlent beaucoup de leurs factures de gaz et de carburant.

Le bilan de notre agriculture en matière d’émissions de gaz à effet de serre n’est pas bon. Le présent amendement vise donc à créer une redevance pour pollution diffuse sur les engrais azotés. Nous avons déjà longuement discuté de cette proposition émanant de la Convention citoyenne pour le climat dans le cadre de la loi « Climat et résilience ». Vous l’avez refusée, vous contentant d’évoquer une simple possibilité de créer une redevance dans deux ans, si les progrès n’étaient pas assez importants ou si l’Europe n’était pas intervenue auparavant. C’est donc un dispositif que vous ne mettrez pas en place. Nous proposons à l’inverse un véritable accompagnement, beaucoup plus important et vertueux, de nos agriculteurs dans la transition agroécologique.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. À la suite du débat sur le projet de loi « Climat et résilience », un plan d’action national a été créé en vue de réduire les émissions d’ammoniac et de protoxyde d’azote liées aux usages d’engrais azotés minéraux. Il se fixe deux objectifs : réduire de 15 % les émissions de protoxyde d’azote en 2030 par rapport à 2015 et valoriser les agriculteurs qui s’engagent dans une démarche vertueuse de réduction des quantités d’engrais azotés, plutôt que de les taxer.

Ce qui me gêne dans votre amendement, c’est que vous proposez de taxer les agriculteurs, qu’ils s’engagent ou pas dans une démarche vertueuse de réduction de l’utilisation d’engrais azotés, étant rappelé que certaines cultures en ont besoin.

Avis défavorable, donc. Le rôle de l’Assemblée nationale sera de se montrer très vigilante dans l’application de ce plan d’action national.

M. Bruno Millienne. Contrairement à vous, monsieur Matthieu Orphelin, nous essayons d’accompagner et de récompenser les actions vertueuses permettant de lutter contre le réchauffement climatique. Vous savez aussi bien que nous que les agriculteurs ont besoin des engrais azotés car il n’y a pas suffisamment de produits azotés dans la nature pour nourrir les sols. Certes, il faut travailler à les accompagner vers l’agroécologie, mais pas en punissant tout le monde ! La dernière fois que nous avons voté une augmentation de la redevance pour pollution diffuse, certains agriculteurs n’ont pas compris, et je me mets à leur place. Accompagnons ceux qui « font bien le boulot », aidons ceux qui n’y arrivent pas, contractualisons les résultats vertueux : c’est une démarche nettement plus intéressante que de pénaliser.

M. Matthieu Orphelin. Monsieur Bruno Millienne, calmez-vous avec vos arguments caricaturaux sur l’écologie punitive ! Qui a proposé l’extension du chèque énergie à 2 millions de foyers supplémentaires ? Qui a défendu les primes au changement de véhicule, alors que le Gouvernement nous expliquait que « notre » transition écologique, comme il disait, serait d’autant plus rapide que le prix du pétrole serait élevé ? Il suffit de lire l’amendement et son exposé sommaire pour vérifier que nous proposons d’aider les agriculteurs à un niveau plus élevé que celui des recettes générées par la redevance. Nous proposons tout sauf une écologie punitive.

M. Michel Delpon. Il faudra revoir la technologie de fabrication des engrais azotés. Actuellement, ils sont produits à partir de l’azote de l’air et de l’hydrogène gris, c’est-à-dire du gaz naturel. Il conviendrait de privilégier l’hydrogène vert si l’on veut dépolluer et aller vers la neutralité carbone.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD6 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Il s’agit de permettre un cumul effectif du forfait mobilités durables et du remboursement des abonnements de transports en commun. Je sais que le rapporteur pour avis est particulièrement sensible à ce sujet. Voilà un amendement simple et qui, je l’espère, sera adopté à l’unanimité !

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. J’y suis d’autant plus sensible que cela fait partie des belles victoires obtenues lors de la commission mixte paritaire sur le projet de loi « Climat et résilience ». Nous avons en effet obtenu le cumul, à hauteur de 600 euros, du forfait mobilités durables avec le remboursement des frais de transport. Je souhaite lancer un appel auprès des chefs d’entreprise : appliquez ce forfait ! C’est une manière très vertueuse d’accompagner la transition écologique. Votre amendement est donc satisfait par la loi « Climat et résilience ».

M. Matthieu Orphelin. Beaucoup d’entreprises ne l’appliquent pas ; je m’associe donc à la volonté de suivre ce sujet de très près. Pouvez-vous nous préciser la date d’application de cette mesure ? Ce cumul est-il applicable dès maintenant ?

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. La loi ayant été promulguée, il n’y a pas de difficulté à pratiquer un tel cumul à hauteur de 600 euros.

L’amendement est retiré.

Amendement I-CD4 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Il s’agit d’adopter une modulation plus forte du remboursement des frais de déplacement déductibles de l’impôt sur le revenu en fonction des émissions de CO2 et du poids du véhicule concerné.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Nous avons longuement débattu de cette question lors de l’examen du dernier projet de loi de finances ; je défendais une proposition similaire à la vôtre. Plutôt que de moduler en fonction du poids, il a été décidé, dans un arrêté du 15 février 2021, de majorer de 20 % le montant des frais de déplacement lorsque le véhicule utilisé est électrique. Une modulation risquerait en effet d’entraîner une baisse du remboursement des frais pour des publics pouvant être modestes. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Article additionnel après l’article 8 (article 200 du code général des impôts) : Réduction d’impôt accordée au titre des dons faits par les particuliers pour la protection, la conservation ou la mise en valeur du patrimoine des gares

Amendement I-CD13 du rapporteur pour avis.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Il s’agit de permettre de financer la rénovation des gares, en particulier celles des villages qui font la beauté de nos paysages et contribuent à l’aménagement du territoire, par le mécénat de particuliers. C’est une proposition de bon sens.

La commission adopte l’amendement.

Article additionnel après l’article 8 (article 235 ter ZF du code général des impôts) : Suppression progressive de la taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires

Amendement I-CD15 du rapporteur pour avis.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Cet amendement est important car il pèse plusieurs millions d’euros. Lors des discussions sur le projet de loi « Climat et résilience », ont été formulées plusieurs propositions visant à baisser la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), en particulier sur les billets de train. Nous préférons opter pour une baisse de la fiscalité sur le ferroviaire. Notre volonté est de supprimer la taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires qui rapporte plus de 200 millions d’euros. Cette mesure a été annoncée par le Président de la République dans son discours pour la célébration des 40 ans du TGV. La suppression serait opérée en trois ans, à raison d’un tiers par an ; elle permettrait d’accroître la compétitivité du ferroviaire.

M. Jean-Marie Sermier. On ne peut pas comparer les deux dispositions, monsieur le rapporteur pour avis : la réduction de la TVA sur les titres de transport qui avait été demandée s’appliquerait directement auprès des usagers ; la suppression de la TREF que vous proposez vise à renforcer la compétitivité des entreprises de transport. Certes, l’État fait un effort financier dans les deux cas, mais les deux mesures sont complètement différentes.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Le problème est bien celui-là : nous n’avions pas la certitude que la baisse de TVA serait directement répercutée sur le prix des billets de train. C’est pourquoi nous avons préféré travailler avec la SNCF pour qu’elle harmonise ses grilles tarifaires, ce qu’elle a fait, de manière à les rendre plus lisibles, compréhensibles et visibles. En complément, nous proposons désormais une baisse globale de la fiscalité appliquée au secteur ferroviaire, qui lui permettra de gagner en compétitivité. Il s’agit de rendre le train accessible au plus grand nombre.

M. Jean-Marie Sermier. J’entends vos arguments, monsieur le rapporteur pour avis. Toutefois, avec ce qu’elle vient de vivre du fait de la crise sanitaire, la SNCF n’est pas une entreprise des plus compétitives, et son résultat n’est guère élevé. Par ailleurs, je ne suis pas sûr que la TREF soit à un niveau aussi important que cela. Concrètement, quelle est la baisse attendue du prix des billets à la suite de cette mesure ?

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Le produit de la TREF s’élève à 226 millions d’euros par an. Sa suppression se fera en trois ans, par tiers. Notre volonté est avant tout de limiter toute hausse du prix des billets, puis d’amorcer sa baisse. Les nouvelles grilles tarifaires nous permettront d’avancer sur le sujet. Nous sommes en pleine discussion, et je ne peux pas vous dire précisément, à ce stade, quelle sera, par exemple, la baisse du prix sur le trajet Marseille-Paris ou Paris-Nantes.

La commission adopte l’amendement.

Article additionnel après l’article 8 (article 238 bis du code général des impôts) : Réduction d’impôt sur le revenu ou sur les sociétés accordée au titre des dons faits par les entreprises pour la protection, la conservation ou la mise en valeur du patrimoine des gares

Amendement I-CD14 du rapporteur pour avis.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Complémentaire de l’amendement I‑CD13 que nous venons d’adopter, cet amendement vise à ouvrir la possibilité de financer la rénovation des gares grâce au mécénat des entreprises.

La commission adopte l’amendement.

Article additionnel après l’article 8 (articles 235 ter ZF et 302 bis ZC du code général des impôts) : Suppression progressive de la contribution de solidarité territoriale

Amendement I-CD16 du rapporteur pour avis.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Il s’agit de supprimer en deux ans, par moitié, la contribution de solidarité territoriale qui pèse sur la SNCF. La justification est double : la contribution est de faible rendement ; elle n’est plus pertinente à l’heure où l’on ouvre le secteur ferroviaire à la concurrence, dans la mesure où elle continuerait à s’appliquer à la SNCF mais ne concernerait pas forcément les nouveaux opérateurs.

La commission adopte l’amendement.

Après l’article 8

Amendements I-CD11 et I-CD12 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Ces deux amendements visent à moderniser le régime d’exonération de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) pour le rendre plus écologique et plus respectueux de la biodiversité et du climat.

L’amendement I-CD11 tend à recentrer l’exonération de l’IFI applicable aux propriétés de bois et forêts : l’exonération serait de 75 % lorsque le propriétaire s’engage à augmenter le puits de carbone ou à améliorer la conservation de l’habitat forestier, démarches véritablement en phase avec les beaux objectifs que notre pays s’est fixés en matière de préservation de la biodiversité.

L’amendement I-CD12 vise à étendre l’exonération de l’IFI aux propriétés non bâties situées dans une zone naturelle forestière et comportant des habitats naturels que le propriétaire se serait engagé à préserver. Il s’agit là aussi de mieux protéger la biodiversité, tant les enjeux sont nombreux en la matière.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Je comprends parfaitement l’objectif. L’idée me semble pertinente et il serait utile de travailler sur ce point en vue des discussions dans l’hémicycle. À ce stade, j’émets un avis défavorable sur les deux amendements, car les critères ouvrant droit à l’exonération me semblent assez « légers » – cela m’étonne venant de vous, monsieur Matthieu Orphelin. En effet, l’exonération serait applicable aux bois et forêts gérés conformément à « un document d’aménagement arrêté », à « un plan simple de gestion agréé » ou à « un règlement type de gestion approuvé » prévus à l’article L. 124-1 du code forestier. Or cette condition ne me semble pas assez stricte pour justifier une exonération de l’IFI. Néanmoins, votre démarche est louable, puisqu’il s’agit d’accompagner ceux qui s’engagent dans l’aménagement durable de nos territoires et la préservation de la biodiversité.

M. Matthieu Orphelin. C’est un plaisir, une fois n’est pas coutume, de se sentir léger ! Mais c’est le dispositif actuel qui est beaucoup trop léger, et tant mieux si la proposition que formulent les associations et que je relaie vous paraît trop peu ambitieuse, monsieur le rapporteur pour avis. Je serais heureux de travailler avec vous à la rédaction d’un amendement plus ambitieux qui serait déposé avant la fin de cette semaine pour être soumis à la commission des finances. Nous serons ravis de soutenir une telle mesure.

M. Vincent Thiébaut. Il existe déjà des mesures qui permettent d’accompagner la gestion durable des propriétés forestières. Je pense notamment au dispositif d’encouragement fiscal à l’investissement forestier (DEFI), que nous avons prorogé dans la loi de finances pour 2021. Je comprends le sens de votre proposition, monsieur Matthieu Orphelin, mais elle entrerait en contradiction avec ce dispositif.

M. Bruno Millienne. Concernant l’amendement I-CD11, monsieur Matthieu Orphelin, j’ai tendance à partager votre avis. Il faudrait néanmoins le revoir pour le rendre plus précis. L’idée paraît tout à fait intéressante, notamment à quelques semaines des assises des forêts et du bois. L’amendement I-CD12 soulève selon moi davantage de difficultés.

M. Matthieu Orphelin. Je retire l’amendement I-CD11. J’aurai grand plaisir à travailler sur la question avec le rapporteur pour avis et le groupe Modem, dont j’attends les propositions.

Je retire de même l’amendement I-CD12, que nous pourrions aussi retravailler, même si j’ai senti moins d’intérêt à cet égard.

Les amendements sont retirés.

Amendement I-CD5 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Cet amendement vise à moduler le tarif de la taxe spéciale sur les conventions d’assurance (TSCA) en fonction des émissions de CO2 et du poids du véhicule. Cette mesure assez simple et tout à fait vertueuse a été proposée par la Convention citoyenne pour le climat.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Nous avons mené tous ensemble, l’année dernière, un combat à ce sujet – lequel n’est pas sans rappeler celui de l’indemnité kilométrique. Cela a débouché sur l’article 153 de la loi de finances pour 2021, qui exonère de TSCA les assurances se rapportant aux véhicules électriques immatriculés à compter du 1er janvier 2021, y compris l’assurance en responsabilité civile. Je considère que l’amendement est satisfait par ce dispositif, dont je souhaite faire ici la promotion.

Nous n’avons pas voulu majorer la TSCA pour les véhicules les plus émetteurs de CO2. Loin de faire de l’écologie punitive, comme le pense M. Jean-Marie Sermier, nous encourageons les développements vertueux.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD8 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Un premier malus au poids est appliqué depuis cette année, mais il est presque symbolique, puisqu’il ne concerne que 2 % des véhicules. Cet amendement vise à le renforcer, afin que ce ne soit pas une simple opération d’affichage.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Ce n’est pas une opération d’affichage : ce malus au poids se cumulant avec le malus CO2, le malus total pourra atteindre 40 000 euros en 2022 et 50 000 euros en 2023 – certes pour les véhicules les plus polluants.

Par ailleurs, et c’est un principe, notre démarche doit être cohérente : il ne serait pas pertinent d’imposer aux véhicules électriques un malus au poids alors que nous encourageons leur acquisition par un bonus et une prime à la conversion. Mon avis est donc défavorable.

M. Matthieu Orphelin. Je suis d’accord avec vous, monsieur le rapporteur pour avis : les véhicules électriques ne doivent pas être concernés par ce malus. Le cas est prévu dans l’amendement.

Conformément aux engagements pris par les constructeurs et les annonceurs, les publicités en faveur des véhicules électriques et hybrides se multiplient à la télévision et dans d’autres médias. Toutefois, je vous alerte sur le fait que la majeure partie de ces publicités portent sur des véhicules gros ou très gros. Regardons les choses en face : le marché automobile n’évolue pas dans le bon sens. Il faut que le Gouvernement et la majorité s’intéressent au poids des véhicules, car cette question est de plus en plus prégnante. À défaut, on perdra avec l’augmentation du poids tout ce que l’on gagnera avec l’amélioration de l’efficacité des moteurs.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Dans l’amendement que vous proposez, il est notamment écrit : « Par dérogation au A, le tarif unitaire de la taxe à compter du 1er janvier 2022 est égal à 20 euros par kilogramme pour les véhicules dont la source d’énergie est exclusivement l’électricité […] » L’intention est donc bien d’imposer un malus aux véhicules électriques, ce qui ne serait pas pertinent à l’heure où ce marché se développe.

La commission rejette l’amendement.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de la première partie du projet de loi de finances pour 2022 modifiée.

 

 


— 1 —

   LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

(Par ordre chronologique)

 

Cabinet de Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Mme Marine Braud, conseillère « Société civile et Convention citoyenne »

M. Sylvain Durand, conseiller « Budget et relance »

M. Mehdi Mahammedi-Bouzina, conseiller parlementaire

Cabinet de M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué chargé des transports

Mme Claire Le Deuff, conseillère parlementaire

Services du ministère de la transition écologique

M. Laurent Michel, directeur général de l’énergie et du climat (DGEC)

M. Patrick Soulé, adjoint au directeur général de la prévention des risques (DGPR)

M. Étienne Dereu, sous-directeur du budget, du contrôle de gestion et des services (DGITM)

Mme Géraldine Cecconi, sous-direction financière, secrétariat général (DGAC)

M. François Théoleyre, directeur adjoint du transport aérien (DGAC)

Services du ministère de la mer

M. Christophe Lenormand, adjoint au directeur des affaires maritimes

Ministère de l’économie, des finances et de la relance – Direction de la législation fiscale

M. Christophe Pourreau, directeur de la législation fiscale

SNCF *

M. Jean-Pierre Farandou, président-directeur général

Armateurs de France *

M. Jean Marc Lacave, délégué général d’Armateurs de France

Mme Laurène Niamba, responsable « Relations institutionnelles et affaires juridiques » d’Armateurs de France

Mme Cécile Rafat, responsable des affaires économiques, fiscales, statistiques d’Armateurs de France

M. Benoît Dehaye, directeur général de la Méridionale

M. Jacques Gérault, conseiller institutionnel de CMA CGM

M. Christophe Mathieu, président du directoire de Brittany Ferries

 

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

 


([1])  La convention MARPOL est la convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires adoptée le 2 novembre 1973 par l’Organisation maritime internationale. L’annexe 6 fixe les règles relatives à la prévention de la pollution de l’atmosphère par les navires. Elle est entrée en vigueur le 19 mai 2005.

([2])  Directive 2012/33/UE du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 modifiant la directive 1999/32/CE en ce qui concerne la teneur en soufre des combustibles marins.

([3]) Arrêté du 28 août 2020 fixant le taux de la taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires pour l’année 2020.

([4]) Cour des comptes, note d’analyse de l’exécution budgétaire 2019 du compte d’affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs », avril 2020.

([5]) Cour des comptes, note d’analyse de l’exécution budgétaire 2019 du compte d’affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs », avril 2020.

([6]) Arrêté du 28 août 2020 fixant le taux de la contribution de solidarité territoriale pour l’année 2020.

([7]) Cour des comptes, note d’analyse de l’exécution budgétaire 2019 du compte d’affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs », avril 2020.