N° 4527

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 octobre 2021.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES
SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2022 (n° 4482)

TOME XII

OUTRE-MER

PAR M. Max MATHIASIN

Député

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 Voir les numéros : 4482 et 4524 (Tome III, annexe 30).

 

 


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   SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION

PremiÈre partie : Le budget de la mission OUTRE-MER EST en lÉgÈre hausse en 2022

I. Les crédits du programme 138 « Emploi outre-mer » augmentent lÉgÈrement

1. Une diminution des crédits consacrés au soutien à l’emploi en trompel’œil : des dispositifs d’aide pérennisés et élargis

2. Les crédits de l’action n° 2 « Aide à l’insertion et à la qualification professionnelle » sont en hausse de 6,4 %

3. Le volume des crédits consacrés aux actions n° 3 « Pilotage des politiques des Outre-mer » et n° 4 « Financement de l’économie » demeure inchangé :

II. Les crédits du programme 123 : « Conditions de vie dans les Outre-Mer » font également l’objet d’une hausse modérée

A. L’enveloppe totale du programme 123 enregistre une hausse substantielle en crédits de paiement : + 91,4 millions d’euros.

B. Malgré des efforts visant à diminuer la sousconsommation récurrente des crédits du programme 123, une forte incertitude demeure SUR l’exécution 2021 dans le contexte de crise

Seconde partie : œuvrer en faveur De la diversification des productions AGRICOLES locales ultramarines

I. L’objectif d’une autonomie alimentaire d’ici à 2030 dans les Outre-mer semble encore difficilement accessible :

A. Selon les territoires ULTRAmarins, les taux de couverture alimentaire sont encore relativement faibles

1. Une économie caractérisée par une situation historique de dépendance alimentaire envers l’Hexagone

2. Des taux de couverture alimentaire relativement faibles dans les Outre-mer

3. Une balance commerciale alimentaire ultramarine qui continue de se dégrader sur la moyenne période

B. Malgré des efforts visant la diversification des filières, l’agriculture reste en partie structurée autour des deux grandes filières exportatrices que sont la banane et la canne

1. La production agroalimentaire ultramarine reste toujours structurée autour des deux grandes filières exportatrices historiques de la banane et du sucre

a. La filière banane

b. La filière de la canne à sucre aux Antilles et à La Réunion

2. Les filières dites de « diversification » souffrent pour le moment d’un manque de structuration qui compromet à terme l’objectif d’autonomie alimentaire des Outre-mer

a. Des filières de diversification encore peu structurées, à l’exception notable de l’île de La Réunion

b. Les freins à la meilleure structuration des filières sont encore nombreux

II. Pour tendre vers l’objectif d’autonomie alimentaire des outre-mer, il importe de conduire une stratÉgie multidimensionnelle de diversification des filières

A. Si La diversification des filières locales répond à une Vraie demande des populations locales, le défi est immense

1. Une demande locale de développement des filières de diversification renforcée par la crise sanitaire

2. Un défi immense eu égard à la surface agricole manquante afin d’atteindre l’autonomie alimentaire ultramarine

B. Le soutien public à la diversification des filières doit continuer à augmenter

1. L’agriculture ultramarine est soutenue à la fois par des aides nationales et européennes

2. Réorienter la structure des aides, pour mieux accompagner les petites exploitations

C. La diversification des filières agricoles doit se baser sur une meilleure prise en compte des agrosystèmes locaux et favoriser l’agro-transformation

1. L’outil des projets alimentaires territoriaux pour mieux structurer les filières de diversification et favoriser l’agro-transformation

2. Développer l’agro-transformation

3. Se rapprocher de l’objectif d’autonomie alimentaire en valorisant les agrosystèmes locaux

D. Renforcer l’attractivité de l’export pour les productions agricoles locales

1. De nombreux obstacles restent à lever pour favoriser l’export des productions agricoles locales

2. Que ce soit pour l’export ou le développement des marchés locaux, il importe de renforcer les labels qualité visant la réassurance et l’information des consommateurs locaux ou étrangers

examen en commission

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

 

INTRODUCTION

PremiÈre partie : Le budget de la mission OUTRE-MER EST en lÉgÈre hausse en 2022

I. Les crédits du programme 138 « Emploi outre-mer » augmentent lÉgÈrement

1. Une diminution des crédits consacrés au soutien à l’emploi en trompel’œil : des dispositifs d’aide pérennisés et élargis

2. Les crédits de l’action n° 2 « Aide à l’insertion et à la qualification professionnelle » sont en hausse de 6,4 %

3. Le volume des crédits consacrés aux actions n° 3 « Pilotage des politiques des Outre-mer » et n° 4 « Financement de l’économie » demeure inchangé :

II. Les crédits du programme 123 : « Conditions de vie dans les Outre-Mer » font également l’objet d’une hausse modérée

A. L’enveloppe totale du programme 123 enregistre une hausse substantielle en crédits de paiement : + 91,4 millions d’euros.

B. Malgré des efforts visant à diminuer la sousconsommation récurrente des crédits du programme 123, une forte incertitude demeure SUR l’exécution 2021 dans le contexte de crise

Seconde partie : œuvrer en faveur De la diversification des productions AGRICOLES locales ultramarines

I. L’objectif d’une autonomie alimentaire d’ici à 2030 dans les Outre-mer semble encore difficilement accessible :

A. Selon les territoires ULTRAmarins, les taux de couverture alimentaire sont encore relativement faibles

1. Une économie caractérisée par une situation historique de dépendance alimentaire envers l’Hexagone

2. Des taux de couverture alimentaire relativement faibles dans les Outre-mer

3. Une balance commerciale alimentaire ultramarine qui continue de se dégrader sur la moyenne période

B. Malgré des efforts visant la diversification des filières, l’agriculture reste en partie structurée autour des deux grandes filières exportatrices que sont la banane et la canne

1. La production agroalimentaire ultramarine reste toujours structurée autour des deux grandes filières exportatrices historiques de la banane et du sucre

a. La filière banane

b. La filière de la canne à sucre aux Antilles et à La Réunion

2. Les filières dites de « diversification » souffrent pour le moment d’un manque de structuration qui compromet à terme l’objectif d’autonomie alimentaire des Outre-mer

a. Des filières de diversification encore peu structurées, à l’exception notable de l’île de La Réunion

b. Les freins à la meilleure structuration des filières sont encore nombreux

II. Pour tendre vers l’objectif d’autonomie alimentaire des outre-mer, il importe de conduire une stratÉgie multidimensionnelle de diversification des filières

A. Si La diversification des filières locales répond à une Vraie demande des populations locales, le défi est immense

1. Une demande locale de développement des filières de diversification renforcée par la crise sanitaire

2. Un défi immense eu égard à la surface agricole manquante afin d’atteindre l’autonomie alimentaire ultramarine

B. Le soutien public à la diversification des filières doit continuer à augmenter

1. L’agriculture ultramarine est soutenue à la fois par des aides nationales et européennes

2. Réorienter la structure des aides, pour mieux accompagner les petites exploitations

C. La diversification des filières agricoles doit se baser sur une meilleure prise en compte des agrosystèmes locaux et favoriser l’agro-transformation

1. L’outil des projets alimentaires territoriaux pour mieux structurer les filières de diversification et favoriser l’agro-transformation

2. Développer l’agro-transformation

3. Se rapprocher de l’objectif d’autonomie alimentaire en valorisant les agrosystèmes locaux

D. Renforcer l’attractivité de l’export pour les productions agricoles locales

1. De nombreux obstacles restent à lever pour favoriser l’export des productions agricoles locales

2. Que ce soit pour l’export ou le développement des marchés locaux, il importe de renforcer les labels qualité visant la réassurance et l’information des consommateurs locaux ou étrangers

examen en commission

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

 

 


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   INTRODUCTION

Les crédits de la mission Outre-mer, qui représentent près de 12 % de l’effort budgétaire de l’État en faveur de l’Outre-mer, sont en légère progression dans le projet de loi de finances pour 2021. Si les autorisations d’engagement (AE) demandées dans le cadre du PLF pour 2022 sont en légère baisse, les crédits de paiement (CP) sont en hausse de 1,25 % par rapport aux crédits votés en loi de finances pour 2021.

Notamment, les crédits du programme 123 « Conditions de vie dans les Outre-mer » affichent une hausse de plus de 91 millions d’euros en crédits de paiement, ce dont votre rapporteur se félicite. Ce budget permettra de renforcer le déploiement du plan logement Outre-mer, de mieux accompagner les collectivités territoriales ultramarines dans le cadre des contrats de convergence et de transformation, ou encore de consacrer de nouveaux moyens budgétaires à l’accueil des jeunes mineurs « en errance » à Mayotte.

Votre rapporteur prend acte de cette légère hausse des moyens du budget de la mission, qui reste cependant très modérée, eu égard aux incertitudes actuelles pesant sur l’économie ultramarine, toujours très affectée par la crise sanitaire.

L’impact de la crise sanitaire dans les Outre-mer est un sujet de préoccupation constante pour votre rapporteur, qui avait déjà consacré la partie thématique de son rapport budgétaire de l’an dernier aux conséquences de la crise sur le secteur du tourisme. Cette année, votre rapporteur a choisi de mettre en lumière un sujet exacerbé par les confinements successifs : la diversification des filières agricoles ultramarines, dans une perspective d’autonomie alimentaire.

Lors d’un déplacement en octobre 2019 sur l’île de La Réunion, le Président de la République a fixé un objectif d’autonomie alimentaire dans les Outre-mer pour l’horizon 2030.

D’après le CIRAD (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement), l’autonomie alimentaire s’entend comme « la capacité des modèles agricoles à satisfaire au maximum et durablement les besoins alimentaires de leur population par leur propre production et ressources. Ces besoins doivent être couverts par des aliments en quantité et en qualité suffisante c’est-à-dire à même de fournir aux individus les apports nutritionnels recommandés ».

Transversale, la problématique de l’autosuffisance alimentaire implique de considérer à la fois l’offre (disponibilité, accès, innocuité, qualité), la demande (composition, déterminants, comportements) et les circuits qui les mettent en relation (marchés et soutiens publics). Elle intègre des préoccupations en termes d’environnement et de santé. Elle est ainsi intrinsèquement liée à la production (conditions, modes de production), à l’alimentation (régimes, pratiques de consommation) et aux politiques publiques qui les soutiennent.

Le changement de modèle agricole dans les départements et régions d’Outre-mer (DROM) représente un défi majeur. En effet, les contraintes pesant sur l’économie et l’agriculture des DROM sont diverses : d’ordre géophysique (petite dimension, aléas climatiques), économique (modèle de développement structuré autour de l’agro-exportation et d’une grande dépendance aux importations, social (inégalités de revenus, précarité, pauvreté), agronomique (disponibilité et qualité des sols, rendements), et enfin politique (centralité des transferts publics en provenance de l’Hexagone) etc.

Dans quelle mesure est-il réaliste de viser l’autosuffisance alimentaire dans des économies qui se sont construites sur la base d’une dépendance politique et économique ?

 

 


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   PremiÈre partie :
Le budget de la mission OUTRE-MER EST en lÉgÈre hausse en 2022

Les moyens de la mission Outre-mer augmentent sensiblement dans le projet de loi de finances pour 2022. Pour mémoire, les autorisations d’engagement votées dans le cadre de la loi de finances pour 2021 s’élevaient à 2,701 milliards d’euros. Si les autorisations d’engagement (AE) demandées dans le cadre du PLF pour 2022 sont en légère baisse, pour atteindre près de 2,628 milliards d’euros, les crédits de paiement de la mission (CP) augmentent de 2,436 milliards d’euros à 2,466 milliards d’euros, soit une hausse de 1,25 % par rapport aux crédits votés en loi de finances pour 2021.

La diminution apparente des autorisations d’engagement n’est que mécanique et conjoncturelle, en raison de l’impact de la crise sanitaire sur les compensations des exonérations de cotisations spécifiques à l’Outre-mer.

La structure de la mission, constituée des deux programmes « Emploi Outre‑mer » et « Conditions de vie dans les Outre-mer » demeure inchangée.

Le programme 138 « Emploi Outre-mer » est structuré en quatre actions, dont la principale (action n°1) concentre 93 % des crédits hors titre 2 du programme :

– action n° 1 « Soutien aux entreprises » qui concerne la compensation des exonérations des cotisations sociales patronales) ;

– action n° 2 « Aide à l’installation et à la qualification professionnelle » ;

– action n° 3 « Pilotage des politiques des Outre-mer » ;

– action n° 4 « Financement de l’économie ».

Le programme 123 « Conditions de vie Outre-mer » est quant à lui structuré en 8 actions :

– action n° 1 « Logement »

– action n° 2 « Aménagement du territoire » ;

– action n° 3 « Continuité territoriale » ;

– action n° 4 « Sanitaire, social, culture, jeunesse et sports » ;

– action n° 6 « Collectivités territoriales » ;

– action n° 7 « Insertion économique et coopération régionales » ;

– action n° 8 « Fonds exceptionnel d’investissement » ;

– action n° 9 « Appui à l’accès aux financements bancaires ».

I.    Les crédits du programme 138 « Emploi outre-mer » augmentent lÉgÈrement

Le programme 138 vise à encourager la création et la sauvegarde d’emplois durables dans le secteur marchand et à lutter contre l’exclusion du marché du travail des publics les plus éloignés de l’emploi par des actions de formation professionnelle adaptées.

Pour rappel, si le programme 138 est structuré en quatre actions, 93 % des crédits du programme sont concentrés dans l’action n° 1 « Soutien aux entreprises », qui traduit la compensation des exonérations des cotisations sociales patronales.

1.   Une diminution des crédits consacrés au soutien à l’emploi en trompe‑l’œil : des dispositifs d’aide pérennisés et élargis

Les compensations d’exonérations de cotisations sociales patronales visent à réduire les handicaps structurels des départements et collectivités d’Outre-mer. Elles améliorent la compétitivité des entreprises en baissant le coût du travail dans les secteurs économiques stratégiques : industrie, environnement, tourisme, agriculture, numérique, communication et recherche et développement. Ces compensations d’exonération ont fait l’objet d’une démarche de rationalisation ces dernières années. Un niveau de zéro cotisations sociales patronales est atteint au niveau du SMIC, qui est ensuite modulé selon les trois régimes d’exonérations définis dans les Outre-mer : régime de compétitivité, régime de compétitivité renforcée, et régime « innovation et croissance ». Aujourd’hui, près de 55 % des effectifs salariés sont concernés par ce dispositif.

Les crédits de l’action n° 1 « Soutien aux entreprises » ouverts en loi de finances initiale pour 2021 étaient de 1,56 milliard d’euros, contre 1,478 milliard d’euros d’autorisations d’engagement demandées pour l’année 2022, soit une diminution de 5,05 %. Les crédits de paiement relatifs à l’action n° 1 accusent la même baisse. Cette baisse est purement conjoncturelle : les mesures contra-cycliques prises par les DROM lors de la crise sanitaire et notamment le recours au chômage partiel ont réduit les compensations des exonérations de cotisations sociales patronales. En effet, lorsqu’un employeur a recours au dispositif de chômage partiel, les cotisations ne sont plus versées par l’employeur concerné, et il n’y a donc pas de compensation à apporter. Cette baisse ne reflète donc pas de désengagement des pouvoirs publics sur le sujet. Il convient de noter que les incertitudes actuelles sur l’emploi ultramarin, qui constitue le premier facteur d’évolution des exonérations, complexifient la prévision de consommation de l’enveloppe budgétaire affectée à l’action n° 1.

En 2022, les entreprises ultramarines disposeront en tout état de cause des mêmes dispositifs d’aide qu’en 2021. On peut même dire que le dispositif sera renforcé, puisqu’il sera étendu en 2022 au secteur de l’aéronautique.

2.   Les crédits de l’action n° 2 « Aide à l’insertion et à la qualification professionnelle » sont en hausse de 6,4 %

L’action n° 2 « Aide à l’insertion et à la qualification professionnelle » finance le service militaire adapté (SMA), qui est un dispositif militaire d’insertion professionnelle à destination des jeunes ultramarins les plus éloignés de l’emploi.

Depuis 2017, 6 000 jeunes ultramarins sont accueillis chaque année au sein des huit formations du SMA, avec un taux d’insertion satisfaisant : près de trois jeunes sur quatre sont durablement insérés à l’issue du parcours de formation. La hausse des crédits de l’action n°2 financera en 2022 une nouvelle dynamique de déploiement du SMA, dans le cadre du plan SMA 2025+, qui se traduira par la création, à Mayotte, d’une compagnie supplémentaire du SMA permettant l’accueil, dès 2022, d’une centaine de jeunes. Cette création d’une nouvelle unité correspondra à une augmentation des effectifs de 148 équivalents temps plein comprenant 28 cadres et 120 volontaires. La hausse des crédits financera également le renforcement des formations proposées aux jeunes mahorais (permis de conduire pour tous, accueil de mères célibataires, formation de cadres intermédiaires), ainsi que la création de davantage de postes de formateurs et encadrants (27 ETP), dans l’ensemble des territoires où le SMA est présent. Au total, en 2022, les effectifs du SMA vont augmenter de 202 ETP.

3.     Le volume des crédits consacrés aux actions n° 3 « Pilotage des politiques des Outre-mer » et n° 4 « Financement de l’économie » demeure inchangé :

Le volume des crédits demandés dans le PLF pour 2022 consacrés aux actions n°3 et 4 demeure inchangé, par comparaison avec les crédits votés en LFI pour 2021 : 2,1 millions d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement pour l’action n°3, et 24,3 millions d’euros en autorisations d’engagement pour l’action n°4 et près de 23 millions d’euros en crédits de paiement pour l’action n° 4.

L’action n° 4 « Financement de l’économie » permet traditionnellement de mettre en œuvre des dispositifs d’aides spécifiques (prêt de développement Outre‑mer (PDOM) mis en œuvre par BPI France, soutien au micro-crédit déployé par l’ADIE (Association pour le droit à l’initiative économique)), subventions d’investissement, ou aide au fret destinée à couvrir les surcoûts de transport de marchandises).

II.   Les crédits du programme 123 : « Conditions de vie dans les Outre-Mer » font également l’objet d’une hausse modérée

Le programme 123 « Conditions de vie Outre-mer » est mobilisé par le ministère des Outre-mer pour conduire des actions spécifiques en faveur des territoires ultramarins.

A.   L’enveloppe totale du programme 123 enregistre une hausse substantielle en crédits de paiement : + 91,4 millions d’euros.

Les huit actions relevant de ce programme budgétaire financent :

Il convient également de noter que le programme 123 fait l’objet de plusieurs mesures nouvelles visant des situations spécifiques :

●2,5 millions d’euros seront budgétisés afin d’accompagner les collectivités territoriales antillaises qui font face depuis plusieurs années au phénomène d’échouage des sargasses, afin de les aider dans les opérations de ramassage de ces algues ;

●1,4 million d’euros seront mobilisés pour mener, dans un cadre expérimental, une action d’accompagnement global des jeunes en errance à Mayotte (action n° 2 « Aménagement du territoire »). Une expérimentation sera menée en 2022 sur un périmètre restreint (une seule commune), et un nombre de bénéficiaires limité (60 enfants), autour de trois axes d’intervention : accueil de jour scolaire et éducatif, accueil de loisir, hébergement.

Par ailleurs, dans le cadre du PLF 2022, si aucune mesure de périmètre n’est envisagée sur le programme 123, une mesure de transferts est prévue : à partir du programme 123, l’action n° 8 « Volet territorialisé du plan national d'action chlordécone » du programme 162 « Interventions territoriales de l’État » de la mission « Cohésion des territoires » sera abondée à hauteur de 110 000 euros en AE et en CP, pour un total de 4 292 355 en AE et de 4 297 650 en CP, pour la contribution au plan chlordécone IV.

B. Malgré des efforts visant à diminuer la sous‑consommation récurrente des crédits du programme 123, une forte incertitude demeure SUR l’exécution 2021 dans le contexte de crise

Au 31 juillet 2021, le niveau de consommation des crédits ouverts tant en AE qu’en CP est en progression par rapport aux années antérieures, avec près de 494 millions d’euros dépensés en AE sur les 858 millions votés en LFI pour 2021. Sur l’ensemble de la mission, au 31 août 2021, la consommation des CP est de 390 millions d’euros, soit 55 % des crédits disponibles, et en volume, de + 117 millions d’euros et + 80 millions d’euros par rapport à la consommation respective des années 2019 et 2020.

Cependant, le rythme de consommation du programme demeure concentré sur le dernier trimestre disponible. Par ailleurs, la crise sanitaire complexifie l’activité des chantiers (cela concerne les trois principales lignes de dépense de ce programme, à savoir le logement social, les contrats de convergence et le fonds exceptionnel d’investissement), en raison non seulement des difficultés de mobilisation des personnels, mais aussi des difficultés d’approvisionnement actuellement rencontrées par les territoires ultramarins.

À ce stade de l’exercice, et compte tenu des incertitudes pesant sur la gestion 2021, il est relativement difficile pour les services ministériels de dégager une prévision d’exécution fiable. La situation doit faire l’objet d’un suivi très régulier avec pour objectif inchangé la consommation intégrale des crédits du programme.

 

 


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   Seconde partie :
œuvrer en faveur De la diversification des productions AGRICOLES locales ultramarines

I.   L’objectif d’une autonomie alimentaire d’ici à 2030 dans les Outre-mer semble encore difficilement accessible :

Lors d’un déplacement sur l’île de La Réunion en octobre 2019, le Président de la République a formulé l’objectif d’atteindre une autonomie alimentaire dans les Outre-mer d’ici à 2030, en visant notamment la contribution du secteur agricole à l’excellence environnementale, au développement économique et à l’emploi. La question de l’autonomie alimentaire a également été au centre des débats des États généraux de l’alimentation et des Assises de l’Outre-mer en 2017.

A.   Selon les territoires ULTRAmarins, les taux de couverture alimentaire sont encore relativement faibles

1.   Une économie caractérisée par une situation historique de dépendance alimentaire envers l’Hexagone

L’économie des DROM se caractérise par une spécialisation productive ancienne structurée autour du secteur agricole et les monocultures d’exportation (banane, canne). Cette modalité d’insertion dans la division internationale du travail est typique des économies dites « de plantation », liées organiquement avec la métropole, dans une relation asymétrique et coloniale de type centre/périphérie. Ce rapport de dépendance, historiquement présenté par la métropole comme un moteur vertueux de croissance, a illustré la théorie ricardienne des « avantages comparatifs » selon lequel les économies périphériques, c’est-à-dire les anciennes colonies, devaient se spécialiser dans la production de biens agricoles et leur métropole d’appartenance dans celle de biens industriels. Le modèle dans lequel s’inscrivaient à l’époque les anciennes colonies était l’export de produits exotiques par des bateaux qui revenaient ensuite chargés des produits d’importation fabriqués dans la métropole dans le cadre du commerce triangulaire. Dans un récent rapport consacré aux freins et leviers vers l’autosuffisance alimentaire dans les Outre-mer, les experts du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD) notent que « cette relation d’échange privilégiée assortie de dispositifs de protection marchands en faveur des économies périphériques a structuré un ordre économique non concurrentiel, transformant ces économies en marchés captifs (de type oligopolistique voire quasi-monopolistique pour certaines catégories de produits avec pour conséquence un niveau élevé de prix et une faible diversité de l’offre) et non compétitifs ».  

L’analyse économique de ce modèle agro-exportateur induit un développement tiré par une rente, dans une configuration classiquement qualifiée de « syndrome hollandais » (Corden and Neary 1982). Selon les théoriciens de la dépendance, ce phénomène se traduit par une irréversibilité productive empêchant toute dynamique de reconversion économique.

Aujourd’hui, le modèle économique ultramarin s’appuie sur les services publics ainsi que sur un secteur producteur de biens échangeables dépendant de subventions dont l’objectif est de maintenir sa compétitivité internationale. Cette priorisation sectorielle se fait au détriment des secteurs soumis à la concurrence internationale, mais non protégés, comme l’agriculture vivrière et les industries agricoles et alimentaires locales.

2.   Des taux de couverture alimentaire relativement faibles dans les Outre-mer

Le taux de couverture se définit comme la part de produits locaux dans la consommation totale, c’est à dire la couverture de ses besoins propres par le territoire. Les taux de couverture alimentaire ultramarins sont relativement disparates, selon les territoires concernés et les productions alimentaires visées. Ainsi :

La couverture des besoins en œufs est élevée pour l’ensemble des DROM, avec des taux de couverture supérieurs à 80 % en moyenne, et proche des 100 % pour la Martinique ;

● concernant les légumes, ces taux sont élevés pour la Guyane (90 % pour les produits bruts, 81 % pour l’ensemble des produits bruts et transformés), Mayotte (88 % pour les produits bruts, 72% pour l’ensemble des produits), et La Réunion (68 % pour les produits bruts, 48 % pour l’ensemble des produits) mais restent faibles aux Antilles (entre 26 et 39 % pour la Martinique et 43 et 55 % pour la Guadeloupe) ;

en ce qui concerne les viandes, les taux de couverture sont relativement faibles pour l’ensemble des DROM, si ce n’est à La Réunion, qui se distingue par des taux de couverture supérieurs pour la viande de volaille (95 %) et le porc (100 % à La Réunion, 80 % à la Guadeloupe), et la viande fraiche de lapin (100 %). De manière générale, les taux de couverture des filières bovines et caprines sont faibles, et plus élevés pour les filières volaille et porcine. Il convient toutefois de préciser que les aliments importés pour l’alimentation des animaux ne sont pas pris en compte dans ces estimations et que la capacité des agricultures ultramarines à produire ces aliments est quasiment nulle. Cela s’explique notamment par une absence quasi-totale de production de concentrés (céréales, oléo protéagineux) dans tout l’espace des DROM ;

● Enfin, pour le lait, les taux de couverture sont quasiment nuls dans les Antilles, tandis que Mayotte et La Réunion parviennent à couvrir respectivement 11 et 28 % de leurs besoins (estimation en produits bruts, 8 % dans ces deux territoires en estimation tous produits) ;

● Concernant les céréales, la production est quasi nulle dans les Outre-mer, alors que certaines céréales comme le riz constituent la base de l’alimentation dans certains territoires (Mayotte ou La Réunion).

Le potentiel de développement des productions locales en viandes, fruits et légumes frais, ou encore production laitière est donc relativement important. Toutefois, le développement des productions locales implique une vraie structuration et organisation des filières, qui pour le moment font défaut.

3.   Une balance commerciale alimentaire ultramarine qui continue de se dégrader sur la moyenne période

D’après les chiffres communiqués par l’Office de développement de l’économie agricole d’Outre-mer (ODEADOM), les DROM (hors Mayotte) importent chaque année en moyenne près de 1,2 million de tonnes de produits agricoles et alimentaires, pour une valeur de 2 milliards d’euros environ, soit environ 1 030 euros par habitant et par an, avec des variations allant de 505 euros pour La Réunion à 1 160 euros pour la Guadeloupe.

Sur la moyenne période, ces valeurs sont en hausse de 2010 à 2019, avec des importations globales (hors Mayotte) qui ont augmenté de 17 % en valeur et de 7 % en volume. Sur cette même période, les exportations diminuent de 17 % en valeur et 18 % en volume. Par conséquent, la balance commerciale des DROM s’est dégradée de 28 % en l’espace de dix ans. Tous les territoires sont concernés par cette évolution, avec des taux de détérioration de leur balance variant de 8 % pour la Guadeloupe à 48 % pour La Réunion.

Les experts auditionnés par votre rapporteur pointent le rôle négatif joué par les produits dits de « dégagement », ces produits européens arrivant sur les marchés ultramarins et déstabilisant l’organisation des marchés locaux, empêchant de facto toute structuration des filières de diversification. Dans cette configuration, et selon un exemple donné par un auditionné, les confitures importées en Guyane sont paradoxalement moins chères que celles produites localement. Ces produits constituent en effet des résidus de la production écoulée sur les marchés européens et hexagonaux, affichant une très bonne compétitivité-prix en raison notamment de la possibilité de bénéficier d’économies d’échelle dans le processus de production. De manière générale, on observe une concurrence déloyale des pays de l’environnement caribéen qui ont des mesures sanitaires, environnementales et sociales moins exigeantes que la France.

Le déficit commercial alimentaire continue de se dégrader malgré l’application dans les DROM de l’octroi de mer, qui s’assimile à une taxe sur la consommation frappant l’ensemble des productions importées. Compte tenu des désavantages concurrentiels que subissent les territoires ultramarins, cette taxe vise à protéger la production ultramarine et les industries tout en rétablissant la compétitivité des produits locaux. Cela se traduit par une taxation différenciée entre les produits importés et les produits fabriqués localement pour une liste de produits limitativement fixée, par territoire, par leur nomenclature tarifaire. Votre rapporteur appelle de ses vœux la stabilisation de l’octroi de mer sur les productions alimentaires et agricoles importées, dans la perspective d’autonomisation alimentaire des territoires d’Outre-mer. En effet, le développement de cultures vivrières, actuellement peu subventionnées, ne peut se faire sans une protection minimale vis-à-vis de concurrents ayant des conditions de productions sociales ou environnementales moins exigeantes que celles des DROM. Il est donc nécessaire de protéger ces activités par un outil comme l’octroi de mer, dont il faut améliorer la prévisibilité pour permettre aux acteurs privés de développer des stratégies à long terme.

B.   Malgré des efforts visant la diversification des filières, l’agriculture reste en partie structurée autour des deux grandes filières exportatrices que sont la banane et la canne

1.   La production agroalimentaire ultramarine reste toujours structurée autour des deux grandes filières exportatrices historiques de la banane et du sucre

Les filières de la canne et de la banane sont les deux filières historiques : ces dernières bénéficient d’une structuration ancienne et sont principalement orientées vers les marchés export.

a.   La filière banane

La professionnalisation et la structuration de la filière banane aux Antilles ont progressé sur les quinze dernières années. La filière banane a réussi à fédérer les planteurs au sein d’une seule organisation de producteurs (OP) par DROM : en Guadeloupe : la SICA LPG « Les Producteurs de Guadeloupe », créée en 2006, et en Martinique la SICA Banamart, créée en 2004. La commercialisation de la production est mise en œuvre par l’Union des groupements de producteurs de bananes de Guadeloupe et de Martinique (UGPBAN), qui fédère depuis 2003 ces deux OP des Antilles françaises. La filière comprend aussi son propre institut technique, l’ITT. Avec son entrée dans le marché commun européen en 1993, la filière banane Antilles bénéficie des mesures protectrices de l’Union européenne pour garantir sa compétitivité face aux bananes d’Amérique Latine.

La filière antillaise connaissait de grandes difficultés au début des années 2000. Outre la concurrence étrangère sur le marché européen, la filière était pénalisée par son éclatement entre de trop nombreux groupements de producteurs, multipliant les coûts de production. La création de l’UGPBAN s’est alors imposée afin de mutualiser les coûts, d’offrir un outil commun de commercialisation et défendre d’une voix unique le dossier de la banane au niveau national et européen. L’Union est ainsi l’acteur unique des négociations pour les achats d’intrants, les transports maritimes ainsi que les démarches bancaires. Cette structuration autour des OP permet également aux professionnels de la banane de bénéficier d’aides du Programme européen d’options spécifiques à l’éloignement et à l’insularité (POSEI) : en effet le secteur de la banane est récipiendaire d’une part non négligeable des soutiens publics à l’agriculture ultramarine, environ 23 %, soit 128 millions d’euros, qui sont versés aux producteurs martiniquais et guadeloupéens.

Aujourd’hui, le développement de la filière s’insère dans une stratégie de valorisation de l’origine par un programme européen de promotion et de mise en valeur de l’origine française sur le marché hexagonal. La filière antillaise se distingue également par son très bon niveau de technicité et l’accent sur la Recherche & Développement. Ainsi, la création de l’Institut technique tropical en 2008 par les professionnels de la banane a permis de vulgariser auprès des producteurs les itinéraires techniques induisant une réduction importante des intrants phytosanitaires.

b.   La filière de la canne à sucre aux Antilles et à La Réunion

La filière canne-sucre-rhum-énergie s’est structurée au gré des rapports de force entre syndicats agricoles et industriels, et en réaction à l’ouverture du marché. Elle jouit encore aujourd’hui d’un rôle économique structurant. C’est en effet le premier poste d’exportation en Guadeloupe, le deuxième en Martinique et à La Réunion. Il convient de noter que l’usine Sucrerie Rhumerie de Marie-Galante a subi un grave incident qui a très fortement perturbé la campagne sucrière 2021 en Guadeloupe. Un rapport des inspections générales des ministères des Finances, de l’Écologie et de l’Agriculture recommandant sa fermeture a fait l’objet de vives protestations ; l’avenir de l’usine est toujours incertain à ce jour et préoccupe tous les Guadeloupéens.

Dans ces trois territoires, la filière représente 33,9 % de la surface agricole utilisée (SAU) et 27 700 emplois directs et indirects, soit 4,92 % de la population active ([1]).

En 2017, la production et la commercialisation ultramarines de sucre à raffiner est mise en difficulté par la fin des quotas sucriers qui engendre l’effondrement des prix et la concurrence accrue du sucre de betterave d’Europe continentale. Elle subit également une très forte concurrence des sucres non destinés au raffinage, ou « sucres spéciaux », de pays tiers. La filière se restructure alors progressivement en faveur de la production de rhum traditionnel agricole ou de sucrerie et la valorisation de l’ensemble de ses coproduits. Ainsi, outre la production de sucre et de rhum, la culture de canne alimente la production d’électricité grâce à la combustion de la bagasse et contribue à l’amendement organique des sols avec la vinasse et les résidus de récolte tels que la paille. Par ailleurs, la culture de la canne permet la présence d’une filière industrielle et des unités de recherche sur le vivant qui lui sont associées. Enfin, la canne et le rhum participent au développement d’un tourisme à dimension patrimoniale autour des distilleries et des exploitations cannières.

La filière de la canne en Outre-mer s’est construite sur une opposition structurante entre les planteurs de canne et les industriels. Ces deux groupes d’acteurs se réunissent et négocient au sein de différentes instances de concertation, comme les commissions mixtes d’usine ou les comités d’interprofessions.

À La Réunion et aux Antilles, les interprofessions qui fédèrent les syndicats agricoles et industriels s’entendent autour d’un cadre stratégique partagé, comprenant des engagements de la part de chaque maillon de la filière, mais également de l’État, et matérialisé par les conventions « canne ». Celles-ci permettent notamment de fixer le prix d’achat de la canne par les industriels et l’écoulement de la production.

En 1996, la création d’un conseil interprofessionnel du rhum traditionnel avec l’adoption du nouveau régime de contingentement marque un tournant dans la construction de cette filière.

La filière reçoit également de nombreux soutiens financiers nationaux et européens.  Ainsi, le POSEI (Programme d’options spécifiques à l’éloignement et à l’insularité) et le FEADER (Fonds européen agricole pour le développement rural) sont autant d’outils qui favorisent le maintien et le développement de la filière. En 2020, la filière canne-sucre-rhum mobilise environ 34 % de l’ensemble des soutiens publics à l’agriculture, soit 189 millions d’euros, qui se répartissent principalement entre La Réunion et les Antilles. D’autres aides nationales viennent également compléter ces dispositifs en aidant les débouchés de la canne, à l’instar de la prime bagasse. Afin d’amortir le choc de la fin des quotas sucriers en 2017, une aide complémentaire de 38 M€ a été mise en place, pour une durée initiale de trois campagnes sucrières et ensuite prorogée pour deux campagnes supplémentaires.

Enfin, la filière bénéficie d’une fiscalité avantageuse sur le rhum produit dans les DROM via un mécanisme de droit d’accise réduit.

2.   Les filières dites de « diversification » souffrent pour le moment d’un manque de structuration qui compromet à terme l’objectif d’autonomie alimentaire des Outre-mer

De manière générale, les filières de diversification sont encore très faiblement structurées. C’est notamment le cas pour les filières fruits et légumes, tandis que selon les territoires, la structuration des filières est plus avancée pour les productions carnées.

a.   Des filières de diversification encore peu structurées, à l’exception notable de l’île de La Réunion

Le manque de structuration des filières est notamment observé dans les filières fruits et légumes frais, tous territoires ultramarins confondus. À la Martinique, seul un tiers de la production est regroupé dans une coopérative visant les marchés dits de « grandes et moyennes surfaces » (GMS), sur lesquels une régularité de production est de mise. Les deux autres tiers de la production sont dirigés vers les marchés locaux et les communes, échappant aux systèmes organisés de type coopératives. Le pourcentage de la production de fruits et légumes vendus via les coopératives et les organisations de producteurs est comparable à La Réunion (seulement 30 000 tonnes sur les près de 90 000 tonnes de fruits et légumes.). En Guadeloupe, il existe seulement quatre coopératives agricoles regroupant 80 producteurs de fruits et légumes frais, avec notamment une organisation de producteurs sur la filière melon quasiment exclusivement destinée à l’exportation.

Concernant les filières animales, les filières volaille et porcine pour lesquelles le taux de couverture alimentaire est relativement élevé, elles sont davantage structurées. En revanche, les filières de production bovine et caprine ne sont pas encore suffisamment organisées : beaucoup d’agriculteurs vendent leur viande directement auprès de bouchers locaux, en dehors des coopératives. Sur l’ensemble des filières animales guadeloupéennes, il existe actuellement neuf coopératives, concernant essentiellement les filières porcines, volaille, lapin ou miel. Une majorité de producteurs n’est toujours pas dans ces structures coopératives.

En Martinique, la production bovine locale est couverte à moitié par les coopératives, l’autre moitié étant directement vendue par les bouchers via des apporteurs individuels.

La Réunion fait figure d’exception ; l’élevage y est au contraire structuré en organisations de producteurs et en interprofessions à plus de 90 % des volumes produits sur l’île, et ce depuis une trentaine d’années. D’après la DAAF Réunion, les filières élevage connaissent une croissance de 10 % chaque année. La diversification des filières végétales y est également très dynamique.

En Guyane, les outils de structuration des filières sont relativement récents mais dynamiques, les filières végétales et animales étant au cœur de nombreux projets. Quant aux filières de diversification mahoraises, elles ne disposent pas encore d’outils collectifs stabilisés mais une dynamique voit le jour également.

b.   Les freins à la meilleure structuration des filières sont encore nombreux

De nombreuses filières ultramarines doivent encore se structurer afin de se rapprocher d’un objectif d’autonomie alimentaire de moyen-terme.

D’après la DAAF Guadeloupe, de nombreux agriculteurs refusent de rejoindre une organisation collective structurée pour des raisons interpersonnelles, ou par manque de formation en gestion des exploitations.

Un constat partagé par l’ensemble des DAAF, qui évoquent également parmi les facteurs expliquant le peu de structuration des filières de diversification le vieillissement de la population agricole locale, la cherté du foncier agricole, le mitage des terres agricoles, ou encore la petite taille des exploitations agricoles individuelles : par exemple, à La Réunion, la surface moyenne d’une exploitation est de six hectares, mais parfois ces surfaces peuvent être inférieures à deux hectares.

Dans ce contexte, les installations de jeunes exploitants agricoles sont rares, tandis qu’en raison de l’ultra-périphéricité des Outre-mer, le coût de la main d’œuvre agricole est très élevé.

En raison de l’étroitesse des marchés locaux et de l’éloignement des marchés d’exportation, deux facteurs limitant la possibilité de réaliser des économies d’échelle, il est difficile d’augmenter significativement la productivité des filières.

En outre, les nombreuses calamités agricoles frappant régulièrement les Outre-mer peuvent dissuader les agriculteurs ultramarins de changer l’échelle de leur production.

Les DAAF évoquent également le frein du taux de chômage élevé dans les DROM (20,5 % en Guadeloupe en 2019, et 30,1 % à Mayotte) comme une limite supplémentaire au développement des marchés locaux. Les consommateurs, fortement contraints par leur pouvoir d’achat, consomment davantage de produits importés, souvent moins chers que les produits fabriqués localement.

II.   Pour tendre vers l’objectif d’autonomie alimentaire des outre-mer, il importe de conduire une stratÉgie multidimensionnelle de diversification des filières

A.   Si La diversification des filières locales répond à une Vraie demande des populations locales, le défi est immense

1.   Une demande locale de développement des filières de diversification renforcée par la crise sanitaire

D’après la DAAF Guadeloupe, il existe une réelle demande pour les productions locales. On peut citer notamment l’exemple de l’ananas de Martinique, très plébiscité par les consommateurs martiniquais. Le consommateur ultramarin est avant tout un consommateur français, en phase avec les grandes tendances de consommation de l’Hexagone, désirant consommer davantage de produits locaux et biologiques. Mais le développement de la consommation locale se heurte à une insuffisance structurelle de l’offre.

Si la crise sanitaire a été l’occasion de développer à marche forcée les « drives » fermiers et les circuits courts, ce mouvement ne semble pas avoir survécu à la crise dans les Antilles. Pourtant, l’approvisionnement local a continué de fonctionner pendant le premier confinement, et selon la directrice de la DAAF Martinique, « les consommateurs ont compris qu’il y avait aussi une production locale ».

2. Un défi immense eu égard à la surface agricole manquante afin d’atteindre l’autonomie alimentaire ultramarine

Aujourd’hui, les DROM (hormis la Guyane) se caractérisent par une part relativement faible de la surface agricole utilisée (SAU) sur leur territoire : 33 % en moyenne, soit 19 points en dessous de la moyenne hexagonale.

Le caractère insulaire et souvent montagneux de ces territoires, pour la plupart densément peuplés, implique par ailleurs une proportion plus grande de surface non exploitable (sols artificialisés, côtes, roches, etc.). Toutefois, Mayotte se distingue des autres territoires ultramarins avec une SAU quasiment équivalente à celle de l’Hexagone, soit 53 % du territoire. La Guyane offre quant à elle un cas tout à fait atypique, puisque la surface boisée guyanaise représente plus de 89 % de sa surface totale, et sa SAU, a contrario, contribue à moins de 1 % de cette surface.

La SAU ultramarine est répartie de la façon suivante :

– environ 36 % de la SAU, soit 65 000 ha, est allouée aux surfaces fourragères et surfaces en herbes, dont 23 000 hectares sont des surfaces hors exploitation (collectifs et hors champs, zones pâturées, etc.) ;

– 38 %, soit 69 000 ha, correspondent à des surfaces destinées aux productions végétales hors canne et banane, à vocation locale (y compris les jardins et vergers familiaux des non-exploitants) ;

 26 %, soit 48 000 ha, sont des cultures de canne et de bananiers.

L’analyse des taux de couverture permet de mettre en évidence, pour chaque type de production, les quantités manquantes pour couvrir 100 % des besoins. La connaissance des rendements moyens permet d’établir une estimation théorique de la surface manquante pour produire ces quantités.

D’après les calculs de l’Odeadom, concernant les fruits et les légumes, la surface en production manquante pour couvrir l’ensemble des besoins en fruits et légumes frais est située entre 12 150 et 27 340 hectares selon les estimations, soit entre 7 et 15 % de la surface agricole ultramarine.

En ce qui concerne le développement des productions animales et laitières, cette méthode mobilisant les rendements surfaciques peut difficilement être répliquée en raison des disparités de surfaces nécessaires entre les différents élevages et les modes de production plus ou moins extensifs. Dans le cas des élevages de ruminants, des optimisations d’usage des surfaces fourragères peuvent sans doute se développer. Pour les filières essentiellement hors-sol (porcs, volailles), la problématique ne se pose pas en termes de surface.

Aussi, dans les conditions actuelles de densité de population et en tenant compte des surfaces agricoles utilisées existantes, l’autosuffisance alimentaire en produits frais des territoires ultramarins constitue un défi ambitieux. Si l’objectif d’autonomie alimentaire à l’horizon 2030 semble difficilement réalisable pour votre rapporteur, des marges de manœuvre peuvent cependant être dégagées, afin d’améliorer certains taux de couverture, notamment en fruits et légumes.

Ainsi, plusieurs leviers majeurs doivent être actionnés pour parvenir à développer substantiellement la production locale :

● l’accompagnement technique et administratif des agriculteurs, via notamment la collaboration avec les conseillers du réseau consulaire des chambres d’agriculture (ingénierie de projet), la facilitation de l’installation des jeunes agriculteurs, et la formation aux pratiques durables et agro˗écologiques ;

● mettre un terme à l’artificialisation des terres, pour préserver les terres agricoles et augmenter la surface agricole utilisée, en mobilisant les différents instruments de planification territoriales existants (schéma de cohérence territoriale, plans d’aménagement et de développement durable, plans locaux d’urbanisme) ;

●diminuer les surfaces insuffisamment cultivées ou laissées en friche malgré leur potentiel agricole, notamment en levant les verrous juridiques (indivision, occupations illégales, etc.) ;

● favoriser l’accès des producteurs locaux aux marchés publics, comme les marchés de la restauration collective, ce qui implique que les agriculteurs soient structurés afin de pouvoir remporter ce type d’appels d’offres. Cependant, beaucoup de producteurs ont abandonné ce type de marchés en raison de délais de paiement trop longs ;

● organiser le préfinancement des projets pour les agriculteurs voulant passer à un autre niveau de production. En effet, le secteur bancaire reste très frileux pour suivre les agriculteurs ultramarins dans leurs investissements. Or, ces derniers doivent souvent avancer les frais de leurs investissements, y compris pour toucher les aides du FEADER.

● repenser les circuits de commercialisation en favorisant les circuits courts ;

● mettre en œuvre une stratégie de promotion des produits frais et locaux et redonner confiance aux consommateurs, en particulier là où une certaine défiance s’est installée vis-à-vis des productions locales (cas de la banane antillaise suite au scandale du chlordécone), via des garanties de traçabilité et de typicité des produits ;

● intensifier écologiquement les systèmes de production en diversification végétale en favorisant les pratiques « agro-écologiques », qui fixent pour objectif de maintenir ou d’augmenter la production, tout en diminuant les intrants ;

● favoriser les rotations et les associations de cultures sur des surfaces actuellement uniquement destinées aux productions d’exportations (canne et banane). Sans néanmoins remettre en question ces dernières, de tels procédés agronomiques permettraient d’augmenter les quantités produites et commercialisées localement ;

● mettre en œuvre des actions d’éducation à l’alimentation, dans un contexte de prévalence accrue des maladies chroniques liées à l’alimentation. Cela favoriserait la (ré)appropriation culturelle des produits locaux, dans le cadre d’une alimentation plus saine.

L’ensemble de ces constats posés, votre rapporteur souhaite expliciter un certain nombre de leviers précédemment évoqués afin d’augmenter le potentiel des productions agricoles locales.

B.   Le soutien public à la diversification des filières doit continuer à augmenter

1.   L’agriculture ultramarine est soutenue à la fois par des aides nationales et européennes

Les crédits d’intervention européens sont mobilisés à travers le POSEI France. En 2020, les crédits européens mobilisés dans le cadre du POSEI ont augmenté, s’établissant à 293,9 millions d’euros, en raison d’une mobilisation accrue des crédits nationaux dans le cadre du programme européen. La programmation budgétaire pluriannuelle 2021-2027 a maintenu le niveau existant des crédits du programme POSEI France.

En parallèle, les agricultures ultramarines bénéficient également de soutiens publics nationaux, au travers des crédits dits « CIOM » (Comité interministériel de l’Outre-mer), un dispositif existant depuis 2009, articulé au programme POSEI, représentant autour de 45 millions d’euros par an et visant spécifiquement la diversification des filières agricoles. La hausse des crédits dits « CIOM » est plafonnée sur les grandes filières exportatrices (banane, canne). À terme, il importe de faire converger les crédits nationaux et européens pour tendre vers l’autonomie alimentaire.

L’ODEADOM verse les aides agricoles pour les Outre-mer, notamment les aides européennes dans le cadre du programme POSEI, mais aussi des aides nationales, soit articulées sur ce programme européen (aides dites « CIOM »), soit en appui aux démarches territoriales (6 M€/an), soit prenant en compte des problématiques particulières justifiant une action ad hoc (appui au secteur du sucre à La Réunion et en Guadeloupe pour 38 M€/an). Entre 2019 et 2021, l’enveloppe budgétaire consacrée aux crédits « CIOM » a augmenté pour atteindre près de 51 millions d’euros.

Au total, en 2020, les soutiens versés au secteur agricole et agroalimentaire ultramarin s’élèvent à 561 millions d’euros, à raison de :

– 318 millions versés au titre du POSEI (293,9 millions au titre des mesures en faveur des productions agricoles locales et 26,9 millions au titre du régime spécifique d’approvisionnement) ;

– 116 millions versés au titre du second pilier de la PAC ;

– 1 million versé au titre des organisations communes de marché (OCM) ;

– 126 millions versés au titre des aides nationales.

Le programme POSEI représente donc environ 57 % de l’ensemble des soutiens versés, contre 22 % pour les aides nationales, 21 % pour le second pilier de la PAC et 0,2 % pour les OCM.

Depuis 2016, l’ensemble des soutiens sont en hausse, tirés par la progression des programmes de développement régionaux et par la hausse des aides nationales, causée principalement par la mise en place de l’aide à la fin des quotas sucriers de 38 millions d’euros à partir de 2017.

En 2020, la filière canne-sucre-rhum mobilise environ 34 % de l’ensemble des soutiens publics à l’agriculture, qui se répartissent principalement entre La Réunion et les Antilles. La filière banane consomme également une part non négligeable des soutiens, environ 23 %, qui sont versés aux producteurs martiniquais et guadeloupéens. Les soutiens aux productions animales représentent quant à eux 15 % de l’ensemble des subventions, les soutiens aux productions de diversification végétale, 5 % et les aides transversales toutes filières confondues, versées notamment dans le cadre du second pilier, 23 %.

Depuis 2015, les montants versés à la filière banane et aux filières de diversification sont relativement stables, tandis que les aides à la filière canne-sucre-rhum ont, elles, augmenté de 20 % entre 2015 et 2020.

Les DROM producteurs de canne à sucre et de banane d’export – les Antilles et La Réunion – sont bénéficiaires de soutiens plus importants, comparés à la Guyane et à Mayotte. Ainsi, les montants totaux versés par DROM s’élèvent à 268 millions d’euros pour La Réunion, 144 millions pour la Martinique, 121 millions pour la Guadeloupe, 16 millions pour la Guyane et 9 millions pour Mayotte.

En 2019, les crédits relatifs aux actions d’animation et de gestion des filières d’élevage dans le cadre du programme POSEI ont représenté un montant total de 725 119 €, soit une hausse de 3,6 % par rapport à 2018. La Réunion est le principal bénéficiaire de l’aide avec 252 500 €, soit 34,8 % du montant total, suivi par la Guadeloupe (162 500 €, soit 22,4 % du montant total), la Guyane (160 880 € ; 22,2 %) et la Martinique (149 239 € ; 20,6 %).

Concernant le volet végétal, les crédits relatifs aux actions d’animation et de gestion ont représenté un montant de 305 901 € en 2019. Entre 2018 et 2019, on observe un repli de ce montant de 48,5%. Le principal bénéficiaire du dispositif est une nouvelle fois le département de La Réunion, qui concentre 51 % (157 030 €) de l’aide à l’animation et la gestion des filières végétales. Les territoires de la Guadeloupe et de Guyane représentent respectivement 26 % et 23 % des montants versés.

Votre rapporteur plaide pour une augmentation continue et régulière des crédits relatifs à la diversification des filières animales et surtout végétales, sans négliger la Guyane et Mayotte, afin que ces territoires puissent financer sur le moyen terme les investissements de diversification des filières.

2.   Réorienter la structure des aides, pour mieux accompagner les petites exploitations

Les aides aux cultures végétales, hors canne-à-sucre et banane, représentent respectivement 8 %, 3,8 %, 1,5 % et 5,6 % en Guadeloupe, Martinique, Guyane et à La Réunion.

Les aides concernent logiquement les exploitations agricoles déclarées. Elles laissent donc de côté les plus petites des exploitations, souvent informelles, parfois gérées par des populations immigrées en situation irrégulière dans certains territoires (Mayotte). Or, ces petites exploitations vivrières produisent principalement des cultures alimentaires destinée à la consommation locale.

Plusieurs types de leviers pourraient être mobilisés afin de soutenir ce type d’exploitations :

● Une meilleure (re)connaissance des très petites exploitations, souvent pluriactives. Il est nécessaire de mieux connaitre leurs performances productives, économiques, sociales et environnementales, afin d’adapter au mieux les dispositifs de soutien à leur contribution réelle à l’autosuffisance alimentaire du territoire dans lequel elles s’insèrent ;

● inventer de nouvelles formes de soutien ciblées sur des systèmes de production complexes (cultures associées, comme dans les jardins créoles mahorais) et orientées sur les actifs plutôt que sur des hectares de cultures pures. Cela suppose de sortir des logiques sectorielles de filières et de raisonner au niveau des exploitations. Le recours à des barèmes de nombre d’actifs par hectare de systèmes de production (cultures pures ou systèmes complexes qui seraient caractérisés) est un enjeu important. Cette évolution permettrait d’accompagner les exploitations spécialisées en canne-à-sucre ou banane dessert à se diversifier, et donc à être moins pénalisées par un rééquilibrage des aides des produits d’exports vers les produits vivriers.

C.   La diversification des filières agricoles doit se baser sur une meilleure prise en compte des agrosystèmes locaux et favoriser l’agro-transformation

1.   L’outil des projets alimentaires territoriaux pour mieux structurer les filières de diversification et favoriser l’agro-transformation

Le volet « Transition agricole, alimentation et forêt » du plan de relance vise notamment à augmenter la souveraineté alimentaire française. Dans ce cadre, de nombreux appels à projets ont été lancés pour structurer les filières agricoles locales, en s’appuyant notamment sur les projets alimentaires territoriaux. À l’échelle d’une commune, d’une communauté de communes ou d’agglomération ou d’un DROM, ils permettent de rapprocher producteurs et consommateurs, de susciter des dynamiques privées ou associatives pour valoriser productions et savoir-faire locaux et soutenir des politiques agricoles et alimentaires adaptées à chacun de ces territoires.

Ainsi, en Guadeloupe, près de 5 millions d’euros ont été engagés dans ce cadre sur les enjeux de l’agro-transformation, la restauration collective, et la transition alimentaire. La DAAF Guadeloupe a mis en place quatre projets alimentaires territoriaux et près de 37 dossiers ont été retenus. En Martinique, et à La Réunion, près d’une centaine de dossiers ont été retenus par les DAAF, autour des projets alimentaires territoriaux (PAT), de l’alimentation locale et solidaire, ou de projets de jardins partagés. La restauration scolaire est souvent au cœur de ces projets, qui ne sont viables qu’à condition que la production locale augmente en proportion des nouveaux débouchés.

Votre rapporteur plaide également pour un développement de l’agriculture urbaine (jardins partagés, ateliers d’échanges de savoirs, potagers scolaires, etc.). Cette dynamique permettrait à la fois de contribuer à une meilleure connaissance des cycles de la nature par les urbains, de développer l’autoconsommation, de diversifier la diète alimentaire par la culture de produits originaux, et de tisser des liens sociaux à une nouvelle échelle.

2.   Développer l’agro-transformation

L’objectif d’autonomie alimentaire des Outre-mer suppose, dans ces territoires, de développer les industries d’agro-transformation, capables de transformer les produits locaux.

Actuellement, l’agroalimentaire est un des premiers employeurs du secteur industriel dans les Outre-mer. Plus de 2 800 établissements emploient 12 600 salariés ([2]). Ainsi, dans chaque territoire, les salariés de l’industrie agroalimentaire (IAA) représentent entre un tiers et 44 % de l’emploi manufacturier. Si le secteur agroalimentaire contribue entre 2 et 6 % à la richesse locale créée selon les DROM (hors Mayotte), l’effet d’entraînement que peuvent avoir ces industries sur l’ensemble de l’économie locale en consommant d’autres biens et services, et notamment en s’approvisionnant en matières premières agricoles sur le territoire, est bien connu. D’après les données communiquées par le ministère des Outre-mer, l’évolution de l’emploi dans les IAA suit une pente croissante, qui s’accélère d’environ + 2,5 % par an. Ce dynamisme est bien supérieur à celui des autres secteurs d’activité de l’industrie, ce qui démontre, dans la plupart des territoires, la pleine capacité du secteur à augmenter sa capacité de transformation des produits agricoles.

Cependant, le développement de ce secteur est contraint par plusieurs facteurs : l’étroitesse du marché local, la concurrence des produits importés, la difficulté à trouver des équipements adaptés à des unités de petite taille, l’éloignement géographique par rapport à l’Hexagone, qui entraîne des surcoûts pour l’approvisionnement en matériel et en matières premières.

Des solutions peuvent être conçues, notamment grâce aux réseaux d’innovation et de transfert agricole (RITA), qui ont vocation à faire émerger des relations entre les différents secteurs de la production, de l’agro-transformation et les centres de recherche.

Votre rapporteur souligne que le développement de la multi-transformation agro-alimentaire de produits locaux est cruciale pour absorber les contraintes de la saisonnalité, valoriser les productions locales et générer des emplois stables.

Par ailleurs, il rappelle que les projets agroalimentaires dans les Outremer ont bénéficié du volet « territoires d’industrie » de France Relance. Ainsi, 14 projets ont été retenus dans ce cadre, pour un montant de 5,87 millions d’euros (au premier chef en Guyane, mais également à La Réunion, en Guadeloupe et en Polynésie française).

Focus : Un exemple de convention de financement pour la création d’une usine de transformation agro-industrielle en Guyane

Trois conventions de financement ont été signées le 6 mai 2021 entre l’AFD, le Crédit Agricole Martinique Guyane, la Banque des Territoires et la société Yana Wassaï, une entreprise guyanaise spécialisée dans la transformation de produits agroalimentaires, pour le financement d’un projet de construction d’une usine de transformation agro‑industrielle de plantes endémiques d’Amazonie (dont l’açaï) à Montsinery.

Ce financement, d’un total de 3,8 millions d’euros, dont 2,3 millions d’euros apportés par l’AFD, 900 000 euros par le Crédit Agricole Martinique-Guyane qui intervient également en préfinancement de subventions pour 2,5 millions d’euros et 585 000 euros de prêt participatif par la Banque des Territoires, servira à la construction de la première unité industrielle consacrée à la transformation du wassaï et d’autres plantes endémiques du continent.

Cette usine de 2000 m², intégrant des standards d’efficacité énergétique, transformera principalement le wassaï, l’awara et le cupuacu en jus, pulpe congelée ou en poudre, avec des débouchés en agroalimentaire et en cosmétologie. La production sera destinée au marché local et international et sera notamment labellisée Bio et Commerce équitable.

3.   Se rapprocher de l’objectif d’autonomie alimentaire en valorisant les agrosystèmes locaux

Augmenter les productions locales et favoriser la diversification des filières suppose de pouvoir compter sur une agriculture plus résiliente, en mesure de supporter un ensemble de chocs : pathologies, pression climatique.  Les agrosystèmes locaux doivent donc être valorisés.

L’audition par votre rapporteur d’une chercheuse issue du CIRAD Antilles-Guyane a mis en lumière les avantages du recours aux ressources génétiques locales, qu’elles soient animales ou végétales. Le CIRAD constate en effet que le développement des productions à base de bovins locaux est plus pertinent dans une perspective d’autonomisation alimentaire locale, car ces systèmes d’élevage sont moins dépendants aux intrants. Les ressources génétiques animales ou végétales historiquement présentes sur le territoire sont soumises à la pression de la sélection naturelle : leur génome, non sélectionné artificiellement, reste très ouvert et plastique, et donc adaptable à l’évolution du climat ou des modes de vie ultramarins.

Par exemple, les ovins martiniquais, dont le génome n’a pas été modifié ou sélectionné, résistent mieux aux parasites internes et ne nécessitent pas de traitements préventifs.

Afin de tendre vers un objectif d’autonomie alimentaire, il importe également de développer les ressources protéiques locales nécessaires à l’alimentation des élevages. À cet égard, la chercheuse du CIRAD auditionnée par votre rapporteur travaille actuellement sur une expérimentation en relation avec des agriculteurs de Grande-Terre en Guadeloupe, afin de fabriquer localement des granulés à base de pois locaux susceptibles de nourrir un élevage de poules pondeuses bio. Ces cultures sont parfaitement adaptées au climat de l’île, et pourraient s’inscrire dans des cycles de production courts et vertueux, la culture des pois d’angole étant par ailleurs connue pour enrichir les sols.

D.   Renforcer l’attractivité de l’export pour les productions agricoles locales

1.   De nombreux obstacles restent à lever pour favoriser l’export des productions agricoles locales

Votre rapporteur plaide également pour un développement des productions locales ultramarines à l’export, afin de rééquilibrer la balance commerciale alimentaire.

L’agriculture et le secteur agroalimentaire ultramarins ont un réel potentiel à l’export. Par exemple, la Guyane a un fort potentiel sur la pêche, avec des débouchés naturels vers la Floride, mais également grâce à des produits comme le wassaï, l’awara et le cupuacu (plantes endémiques).

D’après les équipes de la Team France Export, auditionnées par votre rapporteur, le pourcentage du chiffre d’affaires réalisé à l’export pour les entreprises des secteur alimentaire et agroalimentaire reste modeste. Le secteur « Agrotech » est celui où la proportion d’entreprises exportatrices est la plus faible (38 %).

Cette situation s’explique par les difficultés en matière de transport qu’implique l’exportation de produits parfois périssables vers l’étranger. En effet ; l’envoi de marchandises aux États-unis par fret maritime depuis les Antilles françaises implique souvent une expédition dans un premier temps vers l’Europe, avant une réexpédition groupée dans un second temps vers l’Amérique du Nord. En effet, les grandes compagnies internationales, en l’absence de quantités suffisantes de conteneurs à prendre en charge, pratiquent le groupage.

Votre rapporteur plaide donc pour la mise en place d’une plateforme logistique de fret maritime entre les Antilles et les États-Unis, qui offrirait, sur une base régulière, la possibilité d’effectuer des livraisons en groupage vers les États-unis sans passer par l’Hexagone ou l’Europe.

En outre, l’existence d’une compagnie de fret maritime antillaise permettrait de mieux relier les territoires de la Caraïbe entre eux, dans une optique d’export vers les bassins de proximité (logique de développement en cercles concentriques : zone Caraïbe, puis États-unis par exemple).

D’après une étude réalisée auprès des entreprises exportatrices ultramarines, les difficultés logistiques et de transport constituent l’obstacle structurel à l’export le plus souvent cité (pour 20 % des répondants). La complexité des démarches administratives est également citée par 17 % des entreprises. Dans une moindre mesure, d’autres obstacles ont été cités comme la barrière de la langue ou le manque de moyens financiers.

En outre, une grande majorité des entreprises qui pourraient exporter ou qui exportent déjà dans la zone Antilles-Guyane (89 %) ne disposent pas de personnes employées à temps plein sur l’activité export. De même, seul un quart des entreprises accompagnées par la Team France Export peuvent s’appuyer sur des salariés basés hors de leurs territoires d’origine. Les cadres intermédiaires formés aux techniques de l’export font par ailleurs encore défaut.

Cependant, l’export est le levier de croissance le plus souvent cité par les chefs d’entreprises (71 % des entretiens). Les équipes de la Team France Export constatent que les entreprises de Guadeloupe, Guyane et Martinique orientent en majorité leurs exportations vers leur environnement régional : la Caraïbe (pour 52 % des entreprises). L’Amérique du Nord ainsi que l’Amérique du Sud (38 %) figurent également en bonne place parmi les destinations des exportations antillo‑guyanaises suivies par l’Europe (25 %) et de façon plus marginale par l’Afrique et l’Asie (11 %).

Enfin, le développement d’une agriculture d’exportation est rendu plus difficile dans le contexte actuel de l’augmentation considérable du coût du fret maritime, qui pénalise l’ensemble de la chaîne agroalimentaire ultramarine.

2.   Que ce soit pour l’export ou le développement des marchés locaux, il importe de renforcer les labels qualité visant la réassurance et l’information des consommateurs locaux ou étrangers

Les labels sont encore assez peu développés dans les Outre-mer, bien qu’on note depuis quelques années beaucoup d’initiatives autour des produits dits « pays ». Il existe un intérêt certain des consommateurs locaux pour que les produits ultramarins soient clairement identifiés et distingués sur les étals. Aujourd’hui, les labels sont principalement utilisés par les grandes filières exportatrices, sur les marchés hexagonaux ou européens (canne, sucre).

Les produits ultramarins ne sont que peu concernés par les signes officiels d’identification de qualité et d’origine (SIQO), à l’exception toujours de quelques produits majeurs destinés à l’exportation : vanille de La Réunion, rhum AOC de Martinique et Rhum IGP de Guadeloupe. L’agriculture biologique se développe beaucoup (+ 200 % sur les deux dernières années), même si cette dernière ne représente encore que 0,5 % de la surface agricole utilisée. La mention valorisante « Haute valeur environnementale » est également de plus en plus développée, bien que la dynamique soit moins forte que celle en faveur de l’agriculture biologique.

Afin de permettre aux consommateurs ultramarins de mieux identifier les productions locales, il importe de développer en lien avec les collectivités territoriales ultramarines et les producteurs un cahier des charges rigoureux et exigent pour ces labels. Le comité de transformation agricole guadeloupéen, piloté par la DAAF Guadeloupe, constate également la nécessité de renouer une confiance entre les producteurs et les consommateurs, notamment dans le contexte sensible de la contamination des plantations de banane au chlordécone.

Par ailleurs, l’ODEADOM a attiré l’attention de votre rapporteur sur le fait que les produits ultramarins peuvent présenter le logo européen des régions ultrapériphériques (RUP) qui vise à faire reconnaître les produits agricoles, bruts ou transformés, de qualité provenant de ces régions. Le logo RUP, par son caractère officiel européen, par sa double garantie de qualité et d’origine ainsi que par sa capacité d’adaptation aux spécificités locales, constitue un outil pertinent pour valoriser les produits ultramarins de qualité sur les marchés intérieurs et extérieurs des départements et des régions d’Outre-mer. Toutefois, ce logo RUP reste encore trop méconnu des consommateurs.

En 2019, un rapport du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) a dressé un état des lieux de l’utilisation des logos de valorisation des produits agricoles et alimentaires en Outre-mer. Votre rapporteur reprend à son compte les conclusions de la mission conduite par le CGAAER, qui préconise de valoriser les dispositifs existants plutôt que de créer un nouveau label ou une marque pour les Outre-mer. Il conseille également de mettre davantage en lumière la mention valorisante « Produits pays » dont les réformes successives ont réduit la pertinence. Il invite par ailleurs à la mise en œuvre d’un plan d’action pour la promotion du logo RUP, comprenant la révision du cadre réglementaire, la définition d’un cadre de gestion clair, la mise en transparence des cahiers des charges et des opérateurs habilités, ainsi qu’une communication institutionnelle adaptée. Il suggère enfin de soutenir les structures locales de conseil et les réseaux d’échanges inter-DOM pour accompagner les porteurs de projets de valorisation dans la définition collective de leurs démarches et dans le montage de programmes d’information et de promotion.

 

 


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examen en commission

Au cours de sa réunion du mercredi 20 octobre 2021, la commission des affaires économiques a examiné les crédits de la mission « Outre-mer », sur le rapport de M. Max Mathiasin.

M. Max Mathiasin, rapporteur pour avis. Je salue l’augmentation des crédits de la mission Outre-mer, même si cette progression reste modeste au regard des enjeux puisque ce budget ne représente que 12 % de l’effort budgétaire de l’État en faveur des Outre-mer.

Si les autorisations d’engagement baissent légèrement, pour atteindre 2,628 milliards d’euros, les crédits de paiement augmentent de 1,25 %. Cette diminution des autorisations d’engagement, mécanique et conjoncturelle, s’explique par les conséquences de la crise sanitaire sur les compensations d’exonérations de cotisations sociales spécifiques à l’Outre-mer.

La mission reste constituée des programmes 138 Emploi Outre-mer et 123 Conditions de vie Outre-mer. Le programme 138 est structuré en quatre actions dont la principale, l’action n° 01 Soutien aux entreprises, concentre 93 % des crédits hors titre 2 du programme. En 2022, les entreprises ultramarines bénéficieront des mêmes dispositifs d’aide qu’en 2021 – voire plus, puisque la mesure d’exonération de cotisations sociales sera étendue au secteur de l’aéronautique.

Les crédits de l’action n° 02 Aide à l’insertion et à la qualification professionnelle, en hausse de 6,4 %, financeront une nouvelle dynamique de déploiement du service militaire adapté (SMA) dans le cadre du plan « SMA 2025+ », qui se traduira par la création, à Mayotte, d’une compagnie supplémentaire du SMA pour accueillir, dès 2022, une centaine de jeunes, et par l’ouverture de vingt-sept nouveaux postes en équivalent temps plein de formateurs et d’encadrants dans les territoires où le SMA est présent.

En revanche, je regrette que les crédits affectés aux actions n° 3 Pilotage des politiques des Outre-mer et n° 04 Financement de l’économie n’aient pas évolué. Alors que la flambée du coût du fret affecte les Outre-mer, nous aurions apprécié que le Gouvernement accroisse l’aide au fret destinée à couvrir les surcoûts de transport de marchandise.

Au sein du programme 123 Conditions de vie Outre-mer, je salue la légère augmentation (+ 10 millions d’euros en autorisations d’engagement) de l’enveloppe dédiée au déploiement du plan logement Outre-mer, appliqué dans les cinq départements et régions d’Outre-mer (DROM) – Guyane, Martinique, Guadeloupe, La Réunion et Mayotte.

Les crédits prévus dans le cadre des contrats de convergence et de transformation seront maintenus, tout comme les crédits destinés aux constructions scolaires à Mayotte et en Guyane. Le fonds exceptionnel d’investissement (FEI) sera reconduit à la même hauteur, tandis que la bonification des prêts accordés aux collectivités par l’intermédiaire de l’Agence française de développement (AFD) sera préservée.

Enfin, une nouvelle mesure destinée à soutenir la collectivité de Guyane est prévue dans le cadre d’un futur accord structurel qui vise à rétablir sa capacité d’autofinancement.

Le programme 123 fait l’objet de plusieurs mesures nouvelles qui concernent des situations spécifiques. Ainsi, 2,5 millions d’euros sont prévus pour accompagner les collectivités territoriales antillaises lors des opérations de ramassage des sargasses. Nous le demandions depuis longtemps.

De surcroît, 1,4 million d’euro sera mobilisé pour mener, dans un cadre expérimental, une action d’accompagnement global des jeunes en difficulté à Mayotte. Le dispositif est limité, mais il va dans le bon sens.

Pour toutes ces raisons et malgré certaines insuffisances, je vous invite à émettre un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Outre-mer.

J’en viens à la partie thématique de mon avis : l’autonomie alimentaire dans les Outre-mer, en particulier dans les DROM.

Lors d’un déplacement en octobre 2019 dans l’île de La Réunion, le Président de la République a fixé un objectif d’autonomie alimentaire en 2030 pour les Outre-mer. Le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD) définit l’autonomie alimentaire comme la capacité des modèles agricoles à satisfaire au maximum et durablement les besoins alimentaires de la population par leur propre production et ressources. Ces besoins doivent être couverts par des aliments en quantité et qualité suffisantes, à même de fournir aux individus les apports nutritionnels recommandés.

La problématique de l’autosuffisance alimentaire, aussi appelée autonomie alimentaire, implique de considérer l’offre – à savoir la disponibilité, l’accès et l’innocuité –, la demande – c’est-à-dire la composition, les déterminants et les comportements –, et les circuits qui les mettent en relation – c'est-à-dire les marchés et soutiens publics. Cette problématique intègre des préoccupations en matière d’environnement et de santé et est intrinsèquement liée aux politiques publiques relatives à la production et à l’alimentation.

Le changement de modèle agricole représente un défi majeur dans les Outre-mer, en raison des contraintes particulières d’ordre géographique, climatique, économique, social, agronomique et politique. Dans quelle mesure est-il réaliste de viser l’autosuffisance alimentaire dans des économies qui se sont construites sur la base d’une dépendance politique et économique, sur le modèle d’une économie de plantations ?

Dans les DROM, le taux de couverture alimentaire, à savoir la part de produits locaux qui permet de couvrir les besoins du territoire, est relativement faible mais dépend des territoires et des productions. Ainsi, s’agissant des œufs, le taux de couverture est assez élevé – 80 % en moyenne dans les DROM. Pour les fruits et légumes frais, il est faible – 43 % en Guadeloupe, 26 % en Martinique. Pour le lait, le taux de couverture est presque nul aux Antilles et atteint près de 28 % à La Réunion. Concernant la viande, les taux sont relativement faibles. Il atteint tout de même 80 % pour le porc en Guadeloupe, mais c’est La Réunion qui se distingue avec 95 % pour la volaille et 100 % pour le porc et la viande fraîche de lapin.

Le potentiel de développement des productions locales en viandes, fruits et légumes frais ou production laitière est donc assez important. Les DROM, en dehors de Mayotte, importent chaque année, en moyenne, près de 1,2 million de tonnes de produits agricoles et alimentaires. Leur balance commerciale s’est dégradée de 28 % en l’espace de dix ans, les taux de détérioration variant de 8 % pour la Guadeloupe à 48 % pour La Réunion.

Les experts auditionnés pointent le rôle négatif des produits dits « de dégagement ». Ces produits importés, souvent congelés et de qualité inférieure, arrivent sur les marchés ultramarins et déstabilisent les productions locales, empêchant toute structuration des filières de diversification.

Pour le moment, seules les grandes filières exportatrices – banane, canne, sucre, rhum – bénéficient d’une organisation bien structurée. Le vieillissement de la population locale, le coût du foncier, le mitage des terres agricoles, la petite taille des exploitations individuelles et les réticences personnelles expliquent le manque de structuration des filières de diversification.

Dans les DROM, hors Guyane, la part de la surface agricole utilisée est faible – 33 % en moyenne, soit dix-neuf points en dessous de la moyenne dans l’Hexagone – et une part plus grande de surface n’est pas exploitable. La surface qui manque pour couvrir l’ensemble des besoins en fruits et légumes frais représente entre 7 % et 15 % de la surface agricole.

S’il semble difficile d’atteindre l’objectif d’autonomie alimentaire en 2030, on peut améliorer certains taux de couverture, notamment pour les fruits et légumes. Il conviendrait ainsi de proposer aux agriculteurs, en collaboration avec les chambres d’agriculture, un accompagnement technique et administratif, de faciliter l’installation des jeunes et de former les agriculteurs aux pratiques durables et agroécologiques.

Il faudrait en outre mettre fin à l’artificialisation des terres en interdisant les nouvelles constructions sur les terres agricoles ou forestières, qui sont à l’origine de l’imperméabilisation des sols. Nous devons augmenter la surface agricole utilisée en mobilisant les différents instruments de planification territoriale.

Nous devrions également réduire les surfaces insuffisamment cultivées ou laissées en friche malgré leur potentiel agricole, notamment en levant les verrous juridiques.

L’accès des producteurs locaux aux marchés publics, comme ceux de la restauration collective, devrait être favorisé, mais cela implique que les agriculteurs soient structurés pour pouvoir remporter l’appel d’offres. Beaucoup de producteurs ont abandonné ces marchés en raison de la longueur des délais de paiement.

Il faudrait aussi organiser le préfinancement des projets pour les agriculteurs qui souhaitent passer à un autre niveau de production, favoriser les circuits courts, mener des campagnes d’éducation à l’alimentation – d’autant plus indispensables que les maladies chroniques liées à une mauvaise alimentation prévalent –, promouvoir les produits frais et locaux et redonner confiance aux consommateurs dans les productions locales en garantissant la traçabilité – je pense à la filière de la banane antillaise qui a souffert du scandale du chlordécone.

Enfin, il serait nécessaire de favoriser les pratiques agroécologiques ainsi que les rotations et les associations de cultures, sur le modèle des jardins créoles, et d’augmenter de manière continue et régulière les crédits relatifs à la diversification des filières animales et végétales.

L’autonomie alimentaire est un objectif pour le développement économique des territoires ultramarins et un enjeu environnemental qui répond aux attentes de nos concitoyens. Le budget doit permettre de mieux accompagner les entreprises et les collectivités qui investissent dans la relocalisation des productions alimentaires, la structuration des filières de diversification et qui créent des emplois.

M. Guillaume Vuilletet (LaREM). Votre travail sur l’autonomie alimentaire dans les DROM est très intéressant. Le premier texte relatif aux Outre-mer sur lequel j’ai été appelé à me pencher en tant que député fut la proposition de loi de notre collègue Serge Letchimy visant à faciliter la sortie de l’indivision successorale ; on avait à l’époque surtout insisté sur les conséquences en matière de logement, mais sans doute y en a-t-il d’autres.

Ce budget s’inscrit dans la poursuite des actions menées depuis le début de la législature, en particulier la signature des contrats de convergence à partir de 2018. Les crédits sont stables, de l’ordre de 2,5 milliards d’euros. Si l’on observe certaines variations, c’est essentiellement en raison de mesures exceptionnelles. Vous avez cité la Guyane, mais on peut y ajouter les contrats de redressement Outre-mer (COROM), dotés d’une enveloppe de 30 millions d’euros, la construction d’un lycée à Wallis et l’amélioration de la qualité du réseau de l’eau en Guadeloupe. En outre, dans la mesure où ce sont surtout les mesures de défiscalisation qui permettent de soutenir l’économie et l’emploi, il convient de prendre en considération les conséquences de la crise sanitaire sur l’activité économique. Enfin, certains projets ayant abouti, il est normal que les crédits de paiement diminuent dans certains secteurs, en particulier celui du logement.

Vous l’avez dit, le budget de cette mission ne constitue pas le seul effort de la nation pour l’Outre-mer. Celui-ci atteint près de 25 milliards d’euros si l’on ajoute les mesures indirectes et les dispositifs de fiscalité, sans oublier les mesures d’urgence pour faire face à la crise sanitaire – 6 milliards d’euros, soit près de 10 % du PIB des Outre-mer – et le déblocage de 1,5 milliard d’euros pour financer le plan de relance en Outre-mer.

Pour ce qui est du programme Conditions de vie Outre-mer, la priorité est donnée à la lutte contre les sargasses ainsi qu’aux actions éducatives. Un effort particulier est également consenti en faveur du logement – les autorisations d’engagement de la ligne budgétaire unique progressant de 4,45 % – et de la résorption de l’habitat précaire et indigne, ce que je tiens à saluer.

Le groupe La République en marche se prononcera en faveur de l’adoption de ces crédits.

M. David Lorion (LR). Le budget de l’Outre-mer est, avec celui dédié aux anciens combattants, le plus modeste de tous ceux du Gouvernement. Il est constitué de deux programmes. Le programme 138 Emploi Outre-mer, qui concentre la plus grande part des crédits, est destiné à compenser aux organismes sociaux les réductions de cotisations de sécurité sociale spécifiques à l’Outre-mer, qui visent à ce que le coût du travail y soit moins élevé qu’en métropole : ce n’est donc pas de l’argent versé directement aux Outre-mer. Le programme 123 Conditions de vie Outre-mer, qui correspond aux attributions historiques du ministère chargé de l’Outre-mer, a été réuni en une ligne budgétaire unique (LBU). Certes, cette ligne augmente de 10 millions d’euros cette année mais, depuis dix ans, elle est en baisse d’environ 70 millions d’euros, ce qui réduit les moyens alloués au logement social.

Or la situation de celui-ci en Outre-mer est catastrophique. Un premier plan logement pour l’Outre-mer (2015-2019) s’est traduit par un recul de la construction de logements sociaux, malgré la hausse des crédits. Dans le second plan (2019-2022), le logement social est, pour l’essentiel, financé non par la LBU, mais par la Caisse des dépôts et consignations, qui a pris en charge une part importante des actions menées par les différents bailleurs sociaux et par Action logement. Ces sommes restent cependant virtuelles, car elles n’ont pas encore été investies. Du reste, la délégation sénatoriale aux Outre-mer a regretté, dans son rapport, que la politique du logement Outre-mer ne soit pas territorialisée. Paris prend toutes les décisions et les logements programmés n’entrent pas dans les capacités des bailleurs sociaux, ne correspondent pas aux souhaits des collectivités et ne répondent pas aux besoins des populations. Vous pourrez toujours annoncer des milliards d’euros mobilisés, tant que la politique du logement ne sera pas territorialisée et que vous ne consulterez pas les maires, les bailleurs sociaux et les associations, vous échouerez. Pas moins de 8 000 logements ont été annoncés dans les Outre-mer, mais, en réalité, à peine 2 000 seront construits.

Enfin, on parle, haut et fort, d’un budget de 6 milliards d’euros pour l’Outre-mer : c’est une vaste plaisanterie ! Le budget de l’Outre-mer ne dépasse pas 2,4 milliards d’euros : 1,6 milliard d’euros d’exonérations de charges sociales et 800 millions d’euros pour améliorer les conditions de vie. Ces 6 milliards d’euros correspondent, en réalité, pour partie à la déclinaison ultramarine du plan de relance dont toute la France a bénéficié. Il faut revoir complètement le budget de l’Outre-mer, car il ne répond pas aux attentes et ne permet pas de mener une véritable politique de l’Outre-mer. J’aurais souhaité, à cet égard, que l’on parle de la France d’Outre-mer et non des Outre-mer, ce qui ne veut rien dire.

Ce budget est insignifiant. D’ailleurs, c’est l’Europe qui finance le développement agricole en Outre-mer.

M. Philippe Bolo (Dem). Les territoires ultramarins ont été particulièrement frappés par la crise sanitaire. Les conséquences économiques et sociales ont été terribles et la relance de ces territoires doit être l’une de nos priorités. Ainsi, 62 % des 2,41 milliards d’euros sont dédiés à l’amélioration de l’emploi et de la compétitivité des entreprises ultramarines. Une partie des crédits permet d’assurer la cohérence entre les différentes politiques ministérielles menées Outre-mer.

Hors compensation des exonérations de cotisations sociales patronales, dont le niveau est affecté par la crise sanitaire et les mesures de soutien à l’économie, les autorisations d’engagement sont stabilisées, tandis que les crédits de paiement progressent de 105 millions d’euros, ce qui représente une hausse de 13 % reflétant l’accélération des décaissements liés aux investissements engagés Outre-mer.

Enfin, les trois axes que suivent les crédits de la mission nous semblent pertinents : protéger les citoyens ultramarins dans leur quotidien, accompagner les projets d’investissement des collectivités locales dans les infrastructures publiques et bâtir un nouveau projet pour la jeunesse. Le groupe MODEM se prononcera donc en faveur de l’adoption de ces crédits.

J’aurai cependant deux questions.

Votre analyse de l’autonomie alimentaire est très instructive. Dans quelle mesure les projets alimentaires territoriaux permettraient-ils d’atteindre l’objectif d’autonomie alimentaire ? Ils sont, en tout cas, susceptibles de restaurer la confiance.

D’autre part, quelle place pourrait être réservée aux territoires ultramarins dans le plan France 2030, récemment présenté par le Président de la République ?

M. Philippe Naillet (SOC). Je remercie le rapporteur pour la qualité de son rapport, qui met en exergue tous les efforts que nous devons poursuivre pour parvenir à l’autonomie alimentaire. Si nous saluons tous le travail réalisé pour structurer les filières, en particulier les filières animales, n’oublions pas que, selon l’Agence de la transition écologique (ADEME), 85 % des produits que l’on retrouve dans le panier moyen des Réunionnais sont importés. Dans le même temps, le coût de la vie à La Réunion est supérieur de 7 % à celui en métropole et le revenu médian par unité de consommation y est inférieur de 30 %.

Bien sûr, il faut tendre vers l’autonomie alimentaire, pour améliorer l’emploi et, par conséquent, le niveau des revenus car, si le revenu moyen est aussi faible à La Réunion, c’est en raison du manque de revenus d’activité – 38 % des Réunionnais vivent en dessous du seuil de pauvreté. Nous sommes donc tous d’accord pour favoriser la production locale, pour des raisons tant écologiques qu’économiques, mais aucune réflexion n’est engagée autour des surfaces agricoles qui y seront dédiées.

Surtout, il faut sortir de nos territoires ces produits de dégagement dont vous ne voulez pas en Europe. Ces résidus qui arrivent chez nous déstabilisent la production locale. Ce serait un geste symbolique fort.

S’agissant du logement, j’abonderai dans le sens de notre collègue David Lorion. La LBU diminue. Les enjeux sont quantitatifs, puisque, selon l’Association régionale des maîtres d’ouvrage sociaux (ARMOS), il manquerait environ 30 000 logements, mais aussi qualitatifs, car nous aurons besoin de construire davantage de T2 pour les jeunes couples et les mères isolées et d’anticiper le vieillissement de la population. En effet, compte tenu de la réalité sociale, nos seniors ne vieilliront pas dans des établissements pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) ni dans des résidences spécialisées. Il faudra privilégier leur maintien à domicile et aménager les logements en conséquence, en remplaçant les baignoires par des douches ou en prévoyant l’installation d’un lit médicalisé dans la salle principale, par exemple.

Nous déplorons enfin la baisse des moyens accordés au programme Conditions de vie Outre-mer et un manque de lisibilité du fait de la dispersion des crédits entre une trentaine de missions. Le groupe Socialistes et apparentés se prononcera, par conséquent, contre l’adoption de ces crédits.

M. Max Mathiasin, rapporteur pour avis. Si j’ai choisi le thème de l’autonomie alimentaire, c’est parce que j’ai été frappé par le fait que, malgré le manque d’équipements, les initiatives locales allant dans le sens de l’agrotransformation étaient nombreuses et j’ai voulu étudier quelle relation pouvait s’établir entre la structuration d’une filière d’agrotransformation et nos agricultures. En effet, on parle depuis très longtemps de diversification agricole, mais nous nous trouvons toujours dans une économie canne-sucre-rhum-banane, fondée sur la monoculture.

C’est vrai, c’est l’Europe qui finance, en grande partie, notre agriculture mais nous ne sommes pas structurés. Or, les collectivités territoriales en sont, pour une part, responsables. Elles doivent faire des efforts pour mieux utiliser les crédits alloués par l’État ou l’Europe.

Pour les citoyens qui investissent dans l’agriculture, le problème ne tient pas tant au volume des crédits qu’à leur manque de suivi selon un véritable plan de développement. Par exemple, grâce au plan de relance, des moyens importants sont injectés dans l’économie, mais ce sont les mieux informés et les plus structurés qui peuvent répondre aux appels à projets et bénéficier de ces crédits. Quand nous aurons consommé les crédits de ce plan, nos économies seront toujours aussi déstructurées. Les filières « Canne » et « Banane » seront encore les mieux servies. Nous devons revenir à des projets de microdéveloppement, à l’échelon des communes, pour mieux allouer les fonds dont nous disposons. En effet, si le budget de la mission se chiffre à 2,45 milliards d’euros, l’effort global de l’État pour l’Outre-mer s’élève à 25 milliards d’euros.

Nous devons mieux nous organiser et planifier. Le Haut-Commissariat au plan pourrait nous y aider.

S’agissant des produits de dégagement, s’ils sont consommés en Outre-mer, c’est parce que le niveau de vie y est plus faible. La proportion de la population qui vit sous le seuil de pauvreté est élevée. Ce sont des produits de mauvaise qualité, invendus et qui se trouvent sur le marché depuis longtemps. La population a tendance à se précipiter sur eux parce qu’ils coûtent bien moins cher que les produits locaux. Il conviendrait sans doute de prévoir des aides spécifiques au développement et à la structuration de nos filières de production locale, de favoriser l’émergence de labels de qualité et d’aider les plus démunis à consommer des produits plus sains. Nous comptons en effet les taux les plus élevés de personnes atteintes de diabète ou souffrant d’obésité.

 

Article 20 et état B : Crédits du budget général

 

Amendement II-CE42 du rapporteur pour avis.

M. Max Mathiasin, rapporteur pour avis. Cet amendement tend à abonder de 100 000 euros les crédits consacrés au financement de l’économie Outre-mer.

Dans le projet de loi de finances pour 2019, le Gouvernement prévoyait d’affecter les économies obtenues par l’abaissement du plafond de l’avantage fiscal (70 millions d’euros) et par la suppression de la TVA non perçue récupérable (TVA NPR) [100 millions d’euros], soit 170 millions d’euros en tout, au Fonds exceptionnel d’investissement, action 08 du programme 123 Conditions de vie Outre-mer, et au financement de l’économie, action 04 du programme 138 Emploi Outre-mer, de la mission Outre-mer.

Or ces deux actions ne totalisent que 134 millions d’euros en autorisations d’engagement, ce qui est stable par rapport à la loi de finances initiale pour 2021, et 86 millions d’euros en crédits de paiement, en baisse de 5,56 %. Le redéploiement des crédits ainsi dégagés n’apparaît pas clairement.

Lors des débats budgétaires, en 2018, les parlementaires d’Outre-mer avaient alerté le Gouvernement quant au danger de voir disparaître les crédits économisés sur les contribuables et les entreprises. De fait, ceux-ci semblent ne pas avoir été intégralement consacrés au financement de l’économie. Aussi est-il proposé de rétablir la situation.

M. Guillaume Vuilletet. Cet amendement ressemble fort à un appel pour que le Gouvernement nous explique ce qu’il est advenu de ces 170 millions d’euros. C’est clair pour le FEI, dont les crédits sont passés de 40 millions à 110 millions d’euros. En revanche, les 100 millions d’euros qui restent n’ont pas été entièrement dédiés à l’autre action citée, mais répartis entre plusieurs.

Nous ne voterons pas pour cet amendement, car l’exécutif doit se prononcer sur la question.

M. David Lorion. L’amendement a beau être d’appel, cette question est sérieuse. Le FEI a été constitué grâce à la suppression de la TVA NPR et à la baisse des niveaux de défiscalisation. Ces sommes, initialement investies dans l’économie de La Réunion, ont permis de constituer le FEI, qui est à présent réduit de moitié. Nous sommes en droit de demander des comptes.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CE43 du rapporteur pour avis.

M. Max Mathiasin, rapporteur pour avis. Il s’agit d’abonder de 100 000 euros les crédits consacrés aux collectivités territoriales afin de développer leur ingénierie, pour qu’elles puissent mieux utiliser les crédits. En effet, le manque de capacité en ingénierie a été identifié à plusieurs reprises dans les annexes budgétaires comme une cause de la sous-consommation des crédits de la mission Outre-mer. Il est donc nécessaire de renforcer les capacités des collectivités ultramarines en ce domaine.

M. Guillaume Vuilletet. Le Gouvernement a débloqué des crédits importants pour soutenir l’ingénierie, à laquelle il prête une attention particulière. La signature des contrats COROM participe de cette démarche. Cet amendement d’appel, dont je ne conteste pas la légitimité, trouverait davantage sa place en séance publique. Le groupe LaREM votera contre.

M. David Lorion. Il est erroné de mettre sur le compte de l’ingénierie la sous-consommation des crédits. Il faut plutôt s’en prendre à l’absence de concertation et de territorialisation des politiques, en particulier pour le logement. D’ailleurs, la consommation des crédits a augmenté depuis que nous avons amélioré la concertation avec les collectivités. Nous ne vous demandons pas d’augmenter les moyens financiers pour remplacer les missions que doit accomplir l’État déconcentré dans les Outre-mer mais de mieux prendre en considération les attentes des collectivités locales dans les politiques du logement, en particulier pour adapter les logements à la réalité.

La commission rejette l’amendement.

 

La commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Outre-mer non modifiés.

 

Après l’article 44

 

Amendement II-CE35 du rapporteur pour avis.

M. Max Mathiasin, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à rassembler dans un rapport tous les éléments relatifs aux crédits des différentes missions du budget de l’État consacrés à l’aide aux collectivités territoriales pour la distribution d’eau potable et l’entretien des systèmes d’assainissement, de sorte que la représentation nationale puisse évaluer l’adéquation des moyens octroyés avec les besoins des territoires.

Le sujet de l’eau, crucial en Guadeloupe, a fait couler beaucoup d’encre. La création du syndicat mixte ouvert (SMO) de gestion de l’eau et de l’assainissement de Guadeloupe ne suffira pas à régler le problème. Des crédits importants ont été inscrits dans le plan de relance, mais nous souhaiterions qu’un véritable suivi soit prévu.

M. Guillaume Vuilletet. Le sujet est fondamental, mais il appartient au Parlement d’assurer ce contrôle. Vous connaissez notre réticence à l’égard des demandes de rapports. Une commission d’enquête a réalisé un gros travail, qui a abouti, notamment, à la création de ce SMO. Je ne suis pas certain que le Gouvernement ait vocation à produire des rapports en ce domaine.

M. Max Mathiasin, rapporteur pour avis. Certes, mais l’État s’est fortement impliqué dans le sujet. Il a conditionné son aide à la Guadeloupe à certaines obligations, en particulier celle de créer un organisme unique. La question est essentielle et nous aurions besoin d’un rapport pour évaluer la situation, au moins la première année. C’est une question politique majeure, d’ordre social et économique.

La commission rejette l’amendement.

 

La commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Outre-mer non modifiés.

 

 

 

 

 

 

 


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LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

ODEADOM

M. Jacques Andrieu, directeur

Mme Valérie Gourvennec, adjointe

Mme Le Doaré, en charge de l’observatoire de l’économie agricole des Outre-mer.

ACCIOM

Bernard Boullanger, élu à la CCI de Guyane

Pierre Dupuy, chargé de mission

Team France Export

M. Lorenzo Cornuault, directeur exécutif Réseau France

M. Johann Remaud, coordinateur Outre-mer & réseau France institutionnel

BELLATRIX, Guadeloupe

M. Richard Trèfle, créateur lunetier et fondateur

Mme Christelle Hoton, associée responsable marketing et développement

SOLAMAZ, Guyane

M. Philippe Byron, président

Audition commune :

Direction de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DAAF) de La Réunion

M. Bertrand Guizard, directeur adjoint

DAAF de la Martinique

Mme Sophie Bouyer, directrice

DAAF de la Guadeloupe

M. Sylvain Vedel, directeur

DDAF Mayotte

M. Philippe Gout, directeur

Institut national de la recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAe) Antilles-Guyane

Mme Nathalie Mandonnet, directrice de recherche

Cabinet du ministre et de la DGOM

Mme Camille Goyet, directrice de cabinet de la directrice générale des Outre-mer

Mme Jennifer Lormier, conseillère parlementaire

M. Marc Demulsant, sous-directeur de l’évaluation, de la prospective et de la dépense de l’État

M. Antonin Flament, adjoint au sous-directeur

Eurodom*

M. Benoît Lombriere, délégué général adjoint

Mme Maeva Brunfaut, consultante en charge des relations avec le Parlement français

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

*  Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire AGORA des représentants d’intérêts de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), qui vise à fournir une information aux citoyens sur les relations entre les représentants d’intérêts et les responsables publics lorsque sont prises des décisions publiques.

 

 

 


([1]) Perspectives de la filière canne-sucre-rhum-énergie en Outre-mer. Tomme 1 – Rapport et annexes I, II, VII et VII. Inspection générale des finances, Conseil général de lenvironnement et du développement durable. Conseil général de lalimentation, de lagriculture et des espaces ruraux.

([2]) Source : CLAP 2017