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N° 4527

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 octobre 2021.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES

SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2022 (n° 4482)

TOME XIII

RECHERCHE ET
ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

GRANDS ORGANISMES DE RECHERCHE

PAR M. CÉDRIC VILLANI

Député

——

 

 

 

 

 Voir les numéros : 4482 et 4524 (Tome III, Annexe 33).


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SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION

première partie :   un effort budgétaire en faveur de la recherche qui doit encore être confirmé en 2022

I. L’exigence d’accélération de la mise en œuvre de la loi de programmation de la recherche (LPR) en 2022

A. Une trajectoire d’évolution globalement conforme aux orientations de la LPR

B. les perspectives de dynamisation du financement de la recherche par projets

II. Le panorama des grands organismes de recherche : une situation budgétaire de nouveau contrastée

A. Les organismes dotés de manière relativement satisfaisante : INRAe, CNRS et INSERM

1. L’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAe)

2. Le Centre national de la recherche scientifique (CNRS)

3. L’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM)

B. Des organismes marqués par des circuits de financement de moins en moins transparents et pérennes : CEA et CNES

1. Le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA)

2. Le Centre national d’études spatiales (CNES)

C. Des organismes en grande difficulté : IFP-EN et IPEV

1. IFP-Énergies nouvelles (IFP-EN)

2. L’Institut polaire français Paul-Émile Victor (IPEV)

seconde partie :   LE TRAITEMENT DES DÉCHETS D’ACTIVITÉS DE SOINS À LA RECHERCHE D’UN MODÈLE D’INNOVATION

I. Les déchets d’activités de soins recouvrent une réalité complexe et se répartissent en fonction de leur niveau de risque

1. Le périmètre extrêmement large des « déchets d’activités de soins », catégorie intrinsèquement hétérogène et difficile à appréhender

2. La notion de « risque infectieux » au cœur des critères de répartition des déchets d’activités de soins

II. Le traitement des flux de déchets d’activités de soins est loin de répondre aux enjeux d’une véritable Économie circulaire

1. Les difficultés rencontrées par les établissements de santé dans le tri à la source

2. Les limitations apportées par la réglementation et la technologie au traitement des déchets d’activités de soins à risque infectieux (DASRI)

III. Une impulsion doit être donnée au niveau national afin d’améliorer le tri des Déchets d’activités de soins et de favoriser le recyclage des DASRI

1. L’émergence de nouvelle filières REP régissant les déchets d’activités de soins

2. La remise en cause du tabou de l’usage unique des dispositifs médicaux

3. Le déverrouillage des activités de recherche portant sur la banalisation des DASRI en vue de leur recyclage

EXAMEN EN COMMISSION

LISTE DES PERSONNES auditionnées


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   INTRODUCTION

« Non seulement l’Australie n’achètera pas de sous-marins à la France, mais en plus, ses chercheurs sont sur le point de passer devant les nôtres en termes de productivité ». Ces propos polémiques, tenus par David Larousserie, journaliste scientifique dans une tribune publiée dans le journal Le Monde le 28 septembre dernier, ne font que refléter une triste réalité, dénoncée à mots couverts depuis plusieurs années et reconnue par le Gouvernement lui-même lors de la présentation, l’an dernier, du projet de loi de programmation pluriannuelle de la recherche ([1]).

Certes, selon l’Indice mondial de l’innovation publié par l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI), la France se situait encore en 2018 au 7ème rang des publications scientifiques. Néanmoins, deux ans plus tard, elle est au 12ème rang derrière, notamment, la Suisse, l’Allemagne et même Singapour ([2]). On rappellera également que ce n’est pas la France, le pays de Pasteur, qui a conçu un des vaccins contre le Covid-19, mais trois entreprises respectivement allemande (BioNTech), américaine (Moderna) et suédo-britannique (Astra Zeneca).

Le « déficit d’investissement chronique ([3]) » des Français dans la recherche, qu’elle soit publique ou privée, explique assez largement le décrochage français en cours. Les dépenses intérieures de recherche et de développement (DIRD) de la France, qui mesurent l’effort de recherche de l’ensemble des acteurs, ne représentaient que 2,19 % du produit intérieur brut (PIB) en 2017, contre 2,28 % en 2014. L’objectif de 3 % fixé dans la lignée de la stratégie dite « de Lisbonne » en mars 2002 ([4]) est encore loin d’être atteint.

Précisons, à titre d’illustration, que l’organisme américain spécialisé dans la recherche médicale a sollicité pour 2022 un budget de 52 milliards de dollars, alors que son pendant français ([5]) prévoit pour cette année un montant total de dépenses inférieur à 1 milliard d’euros. Il suffit de se rappeler que le PIB des États-Unis est huit fois supérieur à celui de la France pour se rendre compte de la disproportion de l’effort budgétaire consenti.

Face à cette situation, l’État a réagi en faisant voter, l’an dernier, une loi de programmation ([6]) qui, malgré les controverses entourant certaines de ses dispositions, a eu le grand mérite de repenser la question de l’investissement public en faveur de la recherche.

Votre rapporteur, qui s’était investi dans les travaux préparatoires à l’élaboration de la LPR, reconnaît tout le potentiel qui s’attache aux orientations inscrites dans le texte finalement adopté, qui prévoit de porter en 2030 le montant des crédits alloués aux principaux programmes concernés par la recherche publique à un niveau supérieur de plus de 5 milliards d’euros à celui figurant dans la loi de finances pour 2020. Il importe, désormais, de donner à la LPR toute son effectivité alors que la compétition mondiale, dans un contexte de reprise économique, repart à un rythme effréné.

Sur ce point, les auditions menées dans le cadre de la rédaction du présent rapport ont montré que l’époque, encore récente, où le taux de succès n’était que de 16 % pour des projets déposés à l’Agence nationale de la recherche et où les grands organismes publics en étaient à financer leur glissement vieillesse technicité (GVT) par des baisses de recrutements ou d’investissements est désormais sur le point d’être révolue. De nombreux organismes de recherche, notamment l’INSERM, le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAe), peuvent désormais se projeter plus sereinement vers des projets d’avenir.

 On peut regretter, toutefois, que le Gouvernement ait, comme l’an dernier, multiplié dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2022 les circuits de débudgétisation des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » vers la mission « Plan de relance ». Non seulement ces pratiques nuisent à la crédibilité du plan de relance, mais surtout elles fragilisent des organismes de recherche dont la situation financière dépend d’une mission par nature temporaire. Par ailleurs, de tels allers-retours témoignent du peu de considération qui est accordée aux exigences de transparence et de lisibilité du débat budgétaire.

Enfin, le desserrement des contraintes budgétaires globales rend d’autant moins compréhensible le maintien dans une situation critique de certains organismes de recherche. C’est le cas de l’Institut polaire Paul-Émile Victor (IPEV), dont le budget, inférieur à celui accordé par l’Italie dans ce domaine, ne permet même pas de financer la construction d’un camp de secours pour les Français de la station Concordia en Antarctique. Votre rapporteur éprouve le même sentiment d’inquiétude face à la dotation d’IFP-Énergies nouvelles (IFP-EN), dont la progression est infime au regard de la chute brutale de ses ressources propres et de sa trésorerie, pourtant anticipée depuis l’an dernier. Cet état de fait est d’autant plus regrettable que ces deux établissements sont particulièrement en pointe dans les questions de recherche environnementale (cf. partie I infra).

À cet égard, le présent rapport aborde, cette année, la question des besoins d’innovation dans le recyclage et le traitement des déchets d’activités de soins (DAS). En termes de masses, c’est une part minime de l’ensemble des déchets, mais qui est devenue particulièrement emblématique en cette période de crise sanitaire. La question des masques vient, évidemment, à l’esprit, notamment au vu des résultats d’une étude indépendante ([7]) qui établissent que 3,4 milliards de protections individuelles sont jetées chaque jour dans le monde. Mais tous les équipements utilisés par les professionnels de santé génèrent également des volumes de déchets non négligeables, parmi lesquels les « déchets d’activités de soins à risque infectieux » (DASRI) représenteraient plusieurs dizaines, voire centaines, de milliers de tonnes.

La pandémie de Covid-19, au cours de laquelle les réflexes de tri se sont quelque peu perdus, a fait l’effet d’un révélateur des insuffisances qui entravent la diffusion de la logique de l’économie circulaire dans les établissements de santé. Elle a montré également toute la lourdeur du dispositif réglementaire mis en place en France, année après année, pour garantir au patient une protection optimale contre les infections nosocomiales. Sans pour autant tout balayer d’un revers de main, le présent rapport appelle à la remise en question de certains tabous, en particulier celui de la non‑réutilisation du matériel médical à usage unique, et souhaite que l’État s’engage plus avant dans la recherche en matière de recyclage des DASRI, comme cela se fait déjà dans d’autres pays (cf. partie II infra).

* * *

Dès lors, en dépit d’une certaine progression (+ 1,2 % en  AE et + 3 % en CP) des crédits alloués globalement aux trois principaux programmes irriguant les grands organismes de recherche (172, 190 et 193 ([8])), le projet de budget pour la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur » (MIRES) pour 2022 n’apparaît ni équilibré au vu des efforts parfois disproportionnés demandés à certains organismes, ni satisfaisant au regard des exigences de lisibilité qui doivent régir l’élaboration des documents budgétaires.

AUTORISATIONS D’ENGAGEMENT ET CRÉDITS DE PAIEMENT DE LA MISSION « RECHERCHE ET ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR »

(en milliers d’euros)

 

LFI 2021

PLF 2022

Évolution

(%)

Autorisations d’engagement

28 606 736 805

29 245 652 274

+ 2,23 %

Crédits de paiement

28 475 676 950

29 235 552 299

+ 2,67 %

Source : PLF 2022.

Aussi, votre rapporteur vous propose de donner un avis défavorable à l’adoption des crédits pour 2022 des grands organismes de recherche sur les programmes 172, 190 et 193 et, plus généralement, des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ». Cet avis est motivé particulièrement par le traitement réservé par ce PLF à IFP-EN et l’IPEV.

 


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   première partie :

un effort budgétaire en faveur de la recherche qui doit encore être confirmé en 2022

Le projet de loi de finances pour 2022 se caractérise par une forte progression (+ 405,2 millions d’euros en AE et + 320,3 millions d’euros en CP) des crédits du programme 172, ce qui représente une hausse respective de 5,5 % et de 4,5 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2021. L’évolution est moins marquée pour les deux autres programmes, à l’exception des autorisations d’engagement du programme 190, en forte baisse (- 300 millions d’euros, soit - 15,7 %) en raison de la prise en charge par la mission « Plan de relance » des crédits de l’action n° 14 consacrés au soutien à la recherche et au développement dans l’industrie aéronautique.

(en milliers d’euros)

Programmes

LFI 2021

PLF 2022

AE

CP

AE

CP

172

7 315 288

7 163 123

7 720 460

7 483 388

Dont crédits aux opérateurs

6 639 389

6 487 746

6 969 874

6 792 019

Part (%)

90,8 %

90,6 %

90,3 %

90,8 %

193

1 635 886

1 635 886

 1 662 286

 1 662 286

Dont crédits aux opérateurs

1 635 886

1 635 886

 1 662 286

 1 662 286

Part (%)

100 %

100 %

100 %

100 %

190

1 914 122

1 755 421

1 614 122

 1729 121

Dont crédits aux opérateurs

1 630 849

1 630 849

1 597 899

1 597 899

Part (%)

85,2 %

92,9 %

90 %

92,4 %

Source : Analyse du PLF 2022.

Comme chaque année, les trois programmes (172, 193 et 190) financent pour une part importante (entre 90 % et 100 %) les dotations allouées aux opérateurs. S’agissant du programme 172, les dotations progressent globalement de 330,5 millions d’euros (AE) et de 304,3 millions d’euros (CP), l’augmentation se concentrant, pour l’essentiel, sur cinq organismes : l’Agence nationale de la recherche (ANR), le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) et l’Institut national de la recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAe) – cf. graphique infra.

Source : Analyse du PLF 2022.

Le programme 193, pour sa part, enregistre une progression plus mesurée (+ 26,4 millions d’euros en AE/CP), essentiellement imputable au relèvement des crédits alloués au Centre national d’études spatiales (CNES). Quant au programme 190, la baisse des dotations aux opérateurs (- 33 millions d’euros en AE/CP, soit - 2 %) est générale, à l’exception notable d’IFP-EN, dont les crédits s’accroissent légèrement (+ 0,5 %) mais de manière largement insuffisante (cfinfra).

I.   L’exigence d’accélération de la mise en œuvre de la loi de programmation de la recherche (LPR) en 2022

A.   Une trajectoire d’évolution globalement conforme aux orientations de la LPR

Dans la lignée des propositions formulées en 2019 par les trois groupes de travail, composés de personnalités françaises ([9]) et étrangères, sur le renforcement de l’effort de recherche français, la LPR du 24 décembre 2020, poursuit comme principaux objectifs :

1/ La revalorisation des « rémunérations des scientifiques » au travers de la mise en place d’un nouveau régime indemnitaire articulé autour de trois composantes (un socle « revalorisé », une « composante correspondant à une mission renforcée » et un volet de primes individuelles ([10])) ;

2/ L’ouverture de « nouvelles voies de recrutement ([11]) » en complément des recrutements statutaires (mise en place, en particulier, de « chaires de professeur junior » permettant à des docteurs d’être recrutés par une voie de « pré‑titularisation » d’une durée comprise entre trois et six ans et par des « contrats à durée indéterminée de mission scientifique ») ;

3/ Le renforcement des moyens alloués aux laboratoires (+ 10 % dès 2021, + 25 % à partir de 2023 ([12])) ;

4/ La redynamisation des mécanismes de financement de la recherche par projets au travers d’une élévation considérable des moyens alloués à l’ANR (1,7 milliard d’euros à compter de 2027, soit 1 milliard d’euros de plus en AE par rapport à la loi de finances 2020 ([13])) ;

5/ La mise à niveau du mécanisme de prise en charge des coûts indirects supportés par les établissements porteurs ou hébergeurs des projets financés (« préciput »).

En application des dispositions de l’article L. 329-5 du code de la recherche, le règlement financier de l’ANR prévoit deux mécanismes relatifs aux bénéficiaires de financements « à coût marginal ([14]) » :

– la possibilité pour les établissements gestionnaires des contrats de prélever une partie des aides attribuées au titre des frais généraux de gestion sans justificatifs ;

– le versement à l’établissement hébergeur d’une aide complémentaire et forfaitaire dénommée « préciput » dont les conditions d’utilisation sont encadrées.

La LPR prévoit de porter progressivement le taux d’aide, bloqué à 19 % ([15]) pendant de nombreuses années, à 40 % en 2027.

Afin de donner à ces mesures toute leur effectivité, une trajectoire d’évolution des crédits des programmes 172 et 193 ([16]) à compter des crédits de paiement de la loi de finances initiale pour 2020 est définie au I de l’article 2 de la loi :

 

2020

Évolution par rapport à 2020

2021 (prév.)

Évolution par rapport à 2020

2022 (prév.)

 

CP

CP

CP

P172

6 941 119 469 €

     224 000 000 €

7 165 119 469 €

       559 000 000 €

7 724 119 469 €

P193

632 616 716 €

     - 32 000 000 €

600 616 716 €

         44 000 000 €

644 616 716 €

Source : Analyse du PLF 2022.

L’exercice 2021, première année de mise en œuvre de la LPR, est marqué par la montée en puissance progressive des nouveaux outils mis en place.

La plupart des représentants des organismes auditionnés ont, ainsi, souligné l’intérêt des nouveaux contrats de recrutement mis en place.

Le dispositif des « chaires de professeur junior » (CPJ) devrait être utilisé dans les limites fixées par la loi ([17]) avec une implication de l’ANR, chargée du financement de l’enveloppe prévue par recrutement (200 000 euros pour un contrat d’une durée située entre trois et six ans). On notera que le CNRS a souhaité mettre en place un dispositif d’abondement complémentaire de 150 000 euros par chaire à condition que le titulaire soit rattaché administrativement à une université et que les fonds permettent, notamment, le recrutement d’un doctorant par l’organisme de recherche ([18]). S’agissant des carrières, les premiers contours du décret portant mise en place du nouveau « régime indemnitaire des personnels enseignants et chercheurs » (RIPEC) ont été présentés en comité technique ministériel aux organisations représentatives du personnel en juin dernier. Le dispositif devrait produire ses pleins effets en 2022.

D’un point de vue budgétaire, l’analyse des crédits du programme 172 montre une évolution réelle des crédits en 2021 et dans le PLF 2022 conforme à la trajectoire de la LPR (cf. graphique infra).

Source : Analyse de la LPR et du PLF 2022

Si cette réévaluation des crédits a, en premier lieu, profité à l’ANR (cfinfra), elle a également permis de mettre en œuvre au profit de plusieurs organismes (notamment l’INRAe, le CEA et le CNRS) le volet de la LPR consacré au renforcement de la dotation des laboratoires. On peut regretter, cependant, que la trajectoire de la LPR n’ait pas été respectée s’agissant du programme 193, dont les dotations hors contributions à l’Agence spatiale européenne sont en-deçà des objectifs affichés :

 

Source : Analyse de la LPR et du PLF 2022.

B.   les perspectives de dynamisation du financement de la recherche par projets

Comme envisagé dans la LPR, l’Agence nationale de la recherche (ANR) est la grande bénéficiaire de la réforme. Hors crédits du programme d’investissements d’avenir (PIA) et hors plan de relance, la situation budgétaire de l’Agence sur la période 2020-2022 se présente comme suit :

(en milliers d’euros)

 

LFI 2020

Réalisé 2020

LFI 2021

PLF 2022

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Dotation P172 ANR

766 361

738 046

811 443

780 061

924 674

773 031

1 062 206

884 351

 dont dotation P172 avant mise en réserve

766 361

738 046

 

 

924 674

773 031

1 062 206

884 351

 Dotation après mise en réserve

 

726 200

 

770 213

 

1 026 440

 

 

Résultat budgétaire

 

+ 1 290

 

+ 39 715

 

+ 210 771

 

 

 Dépenses

 

762 380

819 156

776 514

 

851 669

 

 

 Recettes

 

763 670

 

816 229

 

1 062 440

 

 

Sources : Analyse du rapport annuel de performances 2020, PLF 2022 et ANR.

La dotation allouée à l’ANR par le programme 172 dans le PLF 2022 (1,06 milliard d’euros en AE) est, supérieure de près de 300 millions d’euros à celle de la LFI 2020 (766,4 millions d’euros). En intégrant les effets de la dotation exceptionnelle de 428 millions d’euros allouée par la mission « Plan de relance » en 2021 ainsi que de la revalorisation opérée au titre du programme 172 sur cet exercice, la progression totale (882,2 millions d’euros sur deux ans) est proche de la trajectoire d’évolution inscrite à l’article 2 de la LPR (+ 903 millions d’euros).

Cette réévaluation devrait donner les moyens à l’ANR d’accroître le taux de succès des projets déposés conformément aux orientations fixées par la LPR (30 % en 2027 ([19])) : lors de leur audition, les représentants de l’Agence ont indiqué qu’au 1er septembre 2021, 400 projets de plus que sur l’ensemble de l’année précédente avaient été soutenus, ce qui laisse présager un taux de succès de l’appel à projets générique proche de 23 % dès 2021 (contre 17 % en 2020).

L’ANR a également réformé son règlement financier le 1er juillet dernier de façon à porter à 25 % ([20]) (contre 19 % auparavant) le taux global de couverture des frais indirects découlant de la mise en œuvre des projets financés (« préciput »).

Votre rapporteur se félicite des évolutions envisagées, qui sont cohérentes avec les recommandations du groupe de travail n° 1 précité, auquel il avait participé. Il appelle l’ANR à amplifier le mouvement en 2022 et au cours des années suivantes de façon, notamment, à porter le préciput à 40 % en 2027, tel que recommandé par la LPR.

II.   Le panorama des grands organismes de recherche : une situation budgétaire de nouveau contrastée

Comme l’an dernier, l’accroissement global des crédits des programmes 172 et 193 ne s’est pas nécessairement traduit par une réévaluation généralisée des subventions allouées aux grands organismes de recherche : ainsi, si l’INRAe et l’INSERM ainsi que, dans une moindre mesure, le CNRS, ont été relativement bien dotés, des incertitudes demeurent s’agissant des crédits alloués au CEA et au CNES, dont les circuits de financement s’avèrent de plus en plus tortueux et de moins en moins pérennes en raison de mouvements de débudgétisation en direction de la mission « Plan de relance ». Deux organismes apparaissent, par ailleurs, en grande difficulté : l’Institut polaire français Paul-Émile Victor (IPEV) et IFP-Énergies nouvelles (IFP-EN), établissement financé sur le programme 190. L’absence de soutien est d’autant plus regrettable que la qualité des organismes concernés est incontestable. S’agissant d’IFP-EN, votre rapporteur avait attiré, sans succès, l’attention du Gouvernement sur sa situation critique lors des auditions du « Printemps de l’évaluation » consacrées à l’examen de la loi de règlement de l’exercice 2020.

A.   Les organismes dotés de manière relativement satisfaisante : INRAe, CNRS et INSERM

1.   L’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAe)

L’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAe) est un établissement public à caractère scientifique et technologique (EPST) né le 1er janvier 2020 de la fusion entre l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) et de l’Institut  national de recherche en sciences et technologies pour l’environnement et l’agriculture (IRSTEA).

Fin 2020, les effectifs de l’INRAe s’élevaient à 10 547 équivalents temps plein travaillé (ETPT), dont 2 260 emplois sous contrat à durée déterminée. Dans les lois de finances, le nouvel établissement est financé à titre principal par les programmes 172 et 142 « Enseignement supérieur et recherche agricoles ».

La situation budgétaire cumulée du nouvel établissement entre 2020 et 2022 se présentent comme suit :

(en milliers d’euros)

 

LFI 2020

Réalisé 2020

LFI 2021

PLF 2022

 

AE

AE

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Dotation P172- 142 et autres

803 160

803 160

806 853

805 996

807 650

807 608

828 848

829 548

 Dont SCSP tous programmes avant mise en réserve

802 560

802 560

 

 

805 943

805 943

828 168

828 288

 SCSP tous programmes après mise en réserve

 

794 881

 

794 474

 

806 033

 

 

Résultat budgétaire

 

+ 3 100

 

+ 32 106

 

- 8 430

 

 

 Dépenses

 

1 023 994

 

967 002

 

1 049 142

 

 

 Recettes

 

1 027 094

 

999 108

 

1 040 713

 

 

Sources : Analyse du rapport annuel de performances 2020, PLF 2022 et INRAe.

Dans la lignée du processus de fusion entre l’INRA et l’IRSTEA mené avec succès en 2020, le nouvel établissement a pu déployer sa nouvelle stratégie de recherche ([21]) : lors de leur audition, les représentants de l’INRAe ont indiqué qu’à ce jour, plus de la moitié des départements scientifiques avaient vu leur périmètre évoluer, ce qui témoigne des progrès réalisés dans la constitution d’une culture scientifique commune.

 

 

 

Conformément aux engagements pris, le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche a tenu ses engagements en matière d’accompagnement de la réforme. En contrepartie d’efforts d’économies, estimées par l’organisme à 2 millions d’euros, la dotation d’État a été revalorisée en 2020 et en 2021 afin de permettre la prise en charge des coûts liés à l’alignement scientifique et à la mise à niveau des régimes indemnitaires (respectivement 3,1 millions d’euros et 2,5 millions d’euros par an).

L’INRAe a pu également bénéficier d’abondements importants liés à la mise en œuvre de la LPR, notamment au titre du renforcement des moyens des laboratoires. Enfin, l’organisme s’est engagé dans une campagne de recrutements destinée à stabiliser la part des effectifs permanents après une période où les deux organismes avaient vu leurs effectifs se réduire de 10 % depuis 2012. Au total, la subvention allouée en 2021 (806 millions d’euros) s’accroît de près de 12 millions d’euros par rapport à 2020 (794,5 millions d’euros) et est même légèrement supérieure à la dotation prévue en loi de finances initiale avant mise en réserve (805,9 millions d’euros).

L’accompagnement de l’INRAe devrait se poursuivre de manière satisfaisante en 2022, puisque la subvention budgétée (en CP) s’élève à 828,3 millions d’euros, en progression de plus de 22 millions d’euros par rapport à 2021.

Comme l’an dernier, votre rapporteur salue la gouvernance de l’établissement, qui a permis de consolider un acteur essentiel dans la conduite de la transition écologique en France. Il se félicite également de la constance du Gouvernement dans son accompagnement financier, qui se confirme une fois encore en 2022.

2.   Le Centre national de la recherche scientifique (CNRS)

Le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) est un établissement public à caractère scientifique et technologique (EPST) fondé en 1939. Avec 32 000 employés répartis sur l’ensemble du territoire national, le CNRS exerce son activité dans tous les champs de la connaissance et s’appuie, à cette fin, sur plus de 1 100 unités de recherche et de service. Dans les lois de finances, l’établissement est financé à titre principal par le programme 172.

La situation budgétaire du CNRS sur la période 2020-2022 se présente comme suit :

 

 

 

 

(en milliers d’euros)

 

LFI 2020

Réalisé 2020

LFI 2021

PLF 2022

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Dotation P172-113-150

2 732 109

2 733 891

2 729 453

2 728 567

2 808 463

2 808 463

2 901 251

2 901 256

 dont SCSP P172-150 avant mise en réserve

2 673 056

2 673 056

 

 

2 741 463

2 741 463

2 825 218

2 825 218

 SCSP après mise en réserve

 

2 638 145

 

2 641 305

 

2 748 401

 

 

Résultat budgétaire

 

- 67 953

 

+ 105 171

 

- 79 021

 

 

 Dépenses

 

3 563 168

 

3 380 357

 

3 692 956

 

 

 Recettes

 

3 495 216

 

3 485 528

 

3 613 935

 

 

Sources : Analyse du rapport annuel de performances 2020, PLF 2022 et CNRS.

En 2021, le CNRS a pu bénéficier d’une subvention pour charges de service public de 2 748,4 millions d’euros, supérieure de près de 7 millions d’euros à la dotation théorique inscrite dans la loi de finances initiale au titre des programmes 150 et 172 (2 741,5 millions d’euros) sous le double effet de la LPR (revalorisation salariale et abondement des laboratoires) et, surtout, de la mission « Plan de relance » (41 millions d’euros obtenus au titre de la mesure de préservation de l’emploi en recherche et développement de l’action n° 02 du programme 363 « Compétitivité »).

La subvention prévue dans le projet de loi de finances pour 2022 progresse de nouveau (+ 84 millions d’euros ([22])) pour s’établir à 2 825,2 millions d’euros.

La hausse envisagée (+ 3,06 %) traduit une légère accélération par rapport à l’exercice précédent (+ 2,56 % entre les LFI 2020 et 2021) sans pour autant garantir à l’établissement qu’il pourra couvrir les surcoûts liés à la poursuite de la mise en œuvre de la LPR. On rappellera, à cet égard, que le CNRS a décidé d’apporter aux doctorants recrutés sur des « chaires de professeur junior » un abondement de 150 000 euros qui s’ajoute aux 200 000 euros alloués via l’ANR et que les contours du futur régime indemnitaire des enseignants chercheurs et des chercheurs (RIPEC) ne sont pas encore fixés (cf. supra).

3.   L’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM)

Créé en 1964, l’INSERM est un établissement public à caractère scientifique et technologique (EPST) placé sous la double tutelle du ministère chargé de la recherche et du ministère de la santé. Il assure la coordination stratégique et scientifique de la recherche biomédicale en France. En 2020, près de 14 000 personnes travaillaient au sein de structures dépendantes ou associées à l’INSERM, dont 5 047 personnels statutaires, 3 257 contractuels et 5 499 hospitalo-universitaires associés. Dans les lois de finances, l’établissement est financé à titre principal par le programme 172.

La situation budgétaire de l’INSERM sur la période 2020-2022 se présente comme suit :

(en milliers d’euros)

 

LFI 2020

Réalisé 2020

LFI 2021

PLF 2022

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Dotation P172

(et autres)

639 753

639 753

660 858

660 596

644 949

644 949

677 781

677 781

 dont SCSP P172 avant mise en réserve

634 033

634 033

 

 

651 981

651 981

677 781

677 781

 SCSP P172 après mise en réserve

 

 

 

657 700

 

 

 

 

Résultat budgétaire

 

- 17 662

 

+ 101 308

 

- 2 441

 

 

 Dépenses

 

944 929

 

891 524

 

969 801

 

 

 Recettes

 

927 267

 

992 832

 

967 360

 

 

Sources : Analyse du rapport annuel de performances 2020, PLF 2022 et INSERM.

L’émergence de la crise sanitaire, en 2020, a paradoxalement permis de mettre un terme à la situation de blocage qui entravait les moyens de l’établissement depuis de nombreuses années : la subvention pour charges de service public (SCSP), qui avait été budgétée à 634 millions d’euros, a été portée à 657,7 millions d’euros (+ 23,7 millions d’euros). Sur cette hausse, les trois quarts (17,9 millions d’euros) étaient liés à la lutte contre la pandémie de la Covid-19, notamment la réalisation de l’enquête EPICOV ([23]) (3,9 millions d’euros) et le lancement de la plateforme COVIREIVAC d’expérimentation des nouveaux vaccins (5,3 millions d’euros).

L’approfondissement de la crise sanitaire a logiquement abouti à une situation budgétaire analogue pour l’INSERM en 2021 : la SCSP, prévue à 652 millions d’euros en début d’exercice, devrait être portée à environ 689,8 millions d’euros en raison, pour une large part, d’une dotation de 17 millions d’euros allouée via l’INSERM à la nouvelle Agence sur les maladies infectieuses émergentes ([24]) pour des projets initiés sous l’égide du comité ad hoc de pilotage national des essais thérapeutiques et autres recherches sur la Covid‑19 (CAPNET) ([25]) : prévention des complications chez les sujets à risque (COCOPREV), étude de la vaccination chez certaines populations (COVPOPART), déterminants des formes prolongées de la Covid-19 (COPER). Les autres compléments correspondent à des abondements au titre de la mission « Plan de relance ([26]) ».

L’hypothèse d’une résorption de l’épidémie en 2022 ne saurait pour autant signifier un retour aux verrous budgétaires antérieurs. Les abondements issus des appels à projets financés par l’Agence nationale de la recherche (ANR) au travers du « préciput » (cf. supra) et les perspectives de financements alloués pour permettre la réévaluation du régime indemnitaire des chercheurs dans le sillage de la LPR ne sauraient suffire à doter l’établissement d’une véritable « force de frappe » en matière de recherche en santé publique.

Lors de leur audition, les représentants de l’INSERM ont rappelé que leurs démarches tendant à la création d’un fonds de recherche en santé humaine financé par les crédits alloués à la recherche clinique ([27]) n’avaient pas pu aboutir en raison des dispositions de l’article L. 162-22-13 du code de la sécurité sociale qui limitent aux seuls « établissements de santé » le bénéfice de la « dotation nationale de financement des missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation » (MIGAC). Cette étanchéité des crédits pose problème dans de nombreux domaines : elle a ainsi limité fortement la mise à disposition par le ministère de la santé des crédits nécessaires à la mise en œuvre des projets du CAPNET précités en 2021 (20 millions d’euros sur une enveloppe totale de 51 millions d’euros).

Votre rapporteur estime que la pandémie de la Covid-19 a montré l’importance de l’INSERM dans la lutte contre les menaces sur la santé humaine, qui sont vouées à se multiplier dans un avenir plus ou moins proche. À ce titre, il se félicite de la réévaluation significative des moyens alloués à l’établissement au titre de sa dotation pérenne dans le PLF 2022 (677, 8 millions d’euros, soit + 32,8 millions d’euros par rapport au PLF 2021).

S’agissant de la nouvelle Agence sur les maladies infectieuses émergentes, il appelle à un déblocage rapide des fonds promis par le ministère de la santé.

Au cas où les difficultés juridiques persisteraient, une réforme de l’article L. 16222-13 précité du code de la santé publique pourrait être envisagée au travers du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2022 afin de désigner les organismes de recherche en santé humaine comme bénéficiaires potentiels de la dotation précitée des MIGAC.

***

 

L’INSERM DANS LA RECHERCHE EN PHAGOTHÉRAPIE

À l’occasion de l’audition de l’INSERM, votre rapporteur a souhaité évoquer avec les intervenants les progrès de la recherche sur les thérapies anti‑bactériennes utilisant des virus bactériophages (« phages »). Selon les éléments communiqués par l’établissement, le sujet est en train d’émerger au niveau mondial : on dénombre entre 210 et 375 publications par an entre 2017 et 2021, avec un accroissement du nombre de citations (5 800 en 2021, contre 200 en 2017). Pour l’instant, la France reste légèrement en retrait dans ce total (84 publications sur la période 2017‑2021, dont 25 pour l’INSERM).

Le positionnement de notre pays devrait s’améliorer rapidement grâce au projet PHAGONE de plateforme d’identification, de production et d’application clinique de phages à usage thérapeutique contre trois espèces de bactéries identifiées comme particulièrement résistantes aux antibiotiques (Staphylococcus aureus, Staphylococcus epidermidis et Escherichia coli ([28])). Le projet, porté par le Centre international de recherche en infectiologie de Lyon, a pu bénéficier d’un financement dans le cadre du programme prioritaire de recherche (PPR) sur l’antibiorésistance ([29]).

Votre rapporteur salue cette initiative et appelle la France à s’engager plus avant dans le développement des technologies susceptibles de réduire notre dépendance aux antibiotiques. À cet égard, il rappelle que l’OPECST, dans une note scientifique du 4 mars dernier ([30]), a plaidé en faveur de la mise en place d’un cadre juridique adapté permettant de relancer la phagothérapie en France.

B.   Des organismes marqués par des circuits de financement de moins en moins transparents et pérennes : CEA et CNES

1.   Le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA)

Créé en 1945, le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) est un établissement de recherche à caractère scientifique, technique et industriel relevant de la catégorie des établissements publics industriels et commerciaux (EPIC). Il est placé sous la quintuple tutelle des ministères chargés de la recherche, de l’énergie, de la défense, de l’industrie et des finances. Il intervient dans quatre grands domaines : les énergies « bas carbone » (énergies nucléaire et renouvelables), les technologies pour l’information, les technologies pour la santé, la défense et la sécurité globale. Dans les lois de finances, l’établissement est financé à titre principal par les programmes 172 et 190 « Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables ».

La situation budgétaire hors plan de relance du secteur civil du CEA sur la période 2020-2022 se présente comme suit :

(en milliers d’euros)

 

LFI 2020

Réalisé 2020

LFI 2021

PLF 2022

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Dotation P172-190-191 et autres

1 975 499

1 985 341

2 072 873

2 045 591

1 949 854

1 949 854

1 943 218

1 943 218

 dont dotation démantèlement

740 000

740 000

740 000

740 000

740 000

740 000

740 000

740 000

dont dotation ITER

148 900

148 900

153 100

153 100

152 000

152 000

152 000

152 000

dont dotation hors démantèlement, hors ITER et avant mise en réserve

1 088 246

1 088 246

 

 

1 049 244

1 049 244

1 042 967

1 042 967

Dotation après mise en réserve

 

1 061 700

 

1 061 900

 

1 058 600

 

 

Résultat budgétaire

 

+ 0

 

+ 227 477

 

- 32 900

 

 

 Dépenses

 

2 856 300

 

2 607 300

 

2 885 100

 

 

 Recettes

 

 2 856 300

 

2 834 800

 

 2 852 200

 

 

Sources : Analyse du rapport annuel de performances 2020, PLF 2022 et CEA.

Comme l’an dernier, le montant de la dotation de l’État au CEA est difficile à retracer en raison des débudgétisations et des mouvements intervenus en cours de gestion. Si l’on ne considère que les programmes de financement traditionnels (172, 190 et 191), les crédits alloués hors « fonds dédiés ([31]) » et après mise en réserve (1 058,6 millions d’euros) en 2021 apparaissent en légère baisse (- 3,3 millions d’euros) par rapport à 2020 (1 061,9 millions d’euros). Pour autant, ce montant est supérieur à celui initialement prévu en 2021 (1 049,2 millions d’euros) grâce à de multiples compléments obtenus au titre du programme 172 pour financer, notamment, le projet de réacteur Jules Horowitz (2 millions d’euros) et le renforcement des laboratoires en application de la LPR (2,6 millions d’euros).

Les montants ainsi recalculés sont encore en-deçà de la réalité, car le CEA a également perçu au titre de la mission « Plan de relance » 22,3 millions d’euros au titre de l’action n° 02 du programme « Compétitivité » ([32]) ainsi que 30 millions d’euros au titre de la « rénovation d’installations d’expérimentation nucléaire » (action n° 08 du programme « Écologie »). Au total, la dotation au CEA s’est donc élevée à 1 100,9 millions d’euros en 2021 (+ 49 millions d’euros par rapport à 2020).

Les mêmes phénomènes de débudgétisation devraient se poursuivre en 2022. La dotation hors « fonds dédiés », hors plan de relance et avant mise en réserve s’élève à 1 043 millions d’euros.

Compte tenu de la quasi-reconduction de l’enveloppe allouée au titre du programme « Compétitivité » (21,3 millions d’euros) et d’un nouvel abondement de 9 millions d’euros au titre du programme « Écologie », la dotation après retraitement s’élève à 1 073,3 millions d’euros en 2022, en baisse de 37,6 millions d’euros par rapport à 2021.

Là encore, cette baisse n’est probablement qu’apparente, car les représentants du CEA ont indiqué à l’occasion de leur audition que des abondements complémentaires étaient attendus dans le cadre du « Plan de relance » au titre de la mesure de préservation de l’emploi en recherche et développement de l’action n° 02 du programme « Compétitivité » (12 millions d’euros attendus en 2021) et de l’action n° 01 du programme « Écologie » consacrée à la rénovation thermique des bâtiments publics (10 millions d’euros attendus en 2021, probablement 30 millions d’euros attendus pour 2022).

Votre rapporteur estime regrettable que le financement du CEA s’effectue par des voies aussi tortueuses, au demeurant non pérennes compte tenu de la nature provisoire du Plan de relance. Il appelle à un retour, dès 2023, à des modes de présentation des crédits plus transparents et, en particulier, au réabondement du CEA sur le programme 191.

Au cours de leur audition, les représentants du CEA ont également exprimé leurs craintes face aux perspectives de suppression, au 1er janvier 2022, du dispositif de doublement de l’assiette du crédit impôt recherche (CIR) en cas de collaboration avec des laboratoires publics (cf. infra). L’impact en termes de recherche collaborative et, consécutivement, en termes de ressources pour le CEA est estimé par l’établissement à au moins 40 millions d’euros sur un total de recettes externes situé aux alentours de 800 millions d’euros chaque année (801,7 millions d’euros perçus en 2020).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

LE DISPOSITIF DE DOUBLEMENT DE L’ASSIETTE DU CIR

Le dispositif est issu du a du 2° du C du I de l’article 87 de la loi de finances pour 2004 (codifié au d du II de l’article 244 quater B du code général des impôts). Les dépenses de recherche exposées pour la réalisation d’opérations confiées à « des organismes de recherche publics » ouvrent ainsi droit au crédit d’impôt « pour le double de leur montant » à condition, naturellement, qu’il n’y ait pas lien de dépendance entre les deux entités.

Le mécanisme, qui représente un coût annuel de 900 millions d’euros annuel pour les finances publiques, a été supprimé par la loi de finances pour 2021 en son article 35. Le Gouvernement précise dans son exposé des motifs que la mesure « vise à sécuriser le CIR au regard de la réglementation européenne en matière d’aides d’État », à « simplifier le dispositif » et à « mieux maîtriser son coût pour les finances publiques. » Une entrée en vigueur différée en 2022 est prévue.

Votre rapporteur s’inquiète des effets pervers d’une telle mesure, dont les fondements juridiques sont contestés par les établissements publics de recherche, qui estiment que la réglementation européenne ne fait pas obstacle à ce que des dépenses de recherche collaborative, effectuées en toute indépendance des entreprises privées, échappent au caractère « d’activité économique » et donc aux interdictions relatives aux aides d’État ([33]).

Afin de continuer à encourager les acteurs privés à s’engager dans des projets collaboratifs avec les organismes publics de recherche, une atténuation de la réforme votée l’an dernier s’impose. Il pourrait être envisagé, notamment, d’élargir le champ du dispositif aux opérations confiées à des « organismes » (privés ou publics) dont le cœur de métier est la recherche. Selon les éléments communiqués en audition, il semblerait que certains États membres de l’Union européenne aient mis en place des dispositifs similaires sans ce que ceux-ci aient été jugés contraires au droit applicable aux aides d’État.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

2.   Le Centre national d’études spatiales (CNES)

Institué en 1961, le Centre national d’études spatiales (CNES) est un établissement public industriel et commercial placé sous la double tutelle du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche et du ministère de la défense. Chargé de proposer au Gouvernement et de mettre en œuvre la politique spatiale de la France en Europe, le CNES est à la fois une agence de programmes et un centre technique dont l’activité s’inscrit dans un cadre multinational, notamment en partenariat privilégié avec l’Agence spatiale européenne (ASE/ESA), où il représente la France. Les effectifs du CNES sont d’environ 2 300 collaborateurs (2 349 à fin 2020, dont la quasitotalité en CDI). Son président, M. Philippe Baptiste, a été nommé cette année après avoir été auditionné par les commissions des affaires économiques des deux assemblées le 7 avril dernier en application de l’article 13 de la Constitution.

Dans les lois de finances, l’établissement est financé à titre principal par le programme 193, la mission « Plan de relance » et, à titre subsidiaire, par le programme 146 « Équipement des forces » ([34]).

La situation budgétaire du CNES hors plan de relance sur la période 2020‑2022 se présente comme suit :

 (en milliers d’euros)

 

LFI 2020

Réalisé 2020

LFI 2021

PLF 2022

 

AE

AE

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Dotation P193 et autres

2 105 765

2 105 765

2 075 924

2 075 994

1 666 872

1 666 872

1 600 786

1 600 786

 dont transfert ASE/ESA

1 401 009

1 401 009

1 401 009

1 401 009

1 075 317

1 075 317

1 129 236

1 129 236

 Dont dotation d’investissement P191

91 141

91 141

86 539

86 539

0

0

0

0

 Dont SCSP avant mise en réserve

613 615

613 615

 

 

591 555

591 555

 

 

 SCSP après mise en réserve

 

596 052

 

588 060

 

608 468

 

657 150 ([35])

Résultat budgétaire*

 

- 115 237

 

- 101 191

 

- 67 312

 

 

 Dépenses

 

1 395 983

 

1 227 660

 

1 362 637

 

 

 Recettes

 

1 280 746

 

1 126 469

 

1 295 325

 

 

(*) Hors transferts à l’Agence spatiale européenne (ASE/ESA)

Sources : Analyse du rapport annuel de performances 2020, PLF 2022 et CNES.

Les crédits alloués par l’État au CNES, autrefois faciles à suivre au travers des programmes 191 « Recherche duale » et 193 « Recherche spatiale », empruntent aujourd’hui des circuits budgétaires de plus en plus complexes. Si l’on ne tient pas compte de la contribution française à l’Agence spatiale européenne (1 075,3 millions d’euros en 2020 ([36])), la dotation allouée in fine en 2021 (608,5 millions d’euros) est supérieure à celle envisagée au titre des seuls programmes 193 et 146 « Équipement des forces ([37]) » dans la loi de finances initiales (591,6 millions d’euros).

La mission « Plan de relance » est, en effet, venue renforcer les crédits du CNES de multiples façons : complément de subvention de 38 millions d’euros (avant mise en réserve), compensation sur la même action du même programme ([38]) de la dotation en fonds propres (90 millions d’euros) autrefois allouée au titre du programme 191, celui-ci ayant été ramené à zéro, abondement de recettes fléchées pour des actions spatiales nationales (102 millions d’euros) et supplément de contribution à l’Agence spatiale européenne (100 millions d’euros) afin d’accélérer le déploiement de la fusée Ariane 6.

S’agissant de l’exercice 2022, on peut constater une diminution des crédits alloués par le programme 193 (2021 : 491,6 millions d’euros ; 2022 : 471,6 millions d’euros), évolution compensée par le même type de compensations et débudgétisations. Le tableau ci‑après récapitule l’évolution entre 2021 et 2022 des différents postes de recettes, en loi de finances initiale (avant mise en réserve) :

 

2021

2022

Contribution ASE/ESA (P193)

1 075 317 000 €

1 129 236 000 €

Contribution ASE/ESA (Plan de relance)

100 000 000 €

65 000 000 €

Programme 191 (fonds propres)

-   €

-   €

Plan de relance (fonds propres)

90 000 000 €

83 100 000 €

 

 

 

Programme 193 (SCSP)

491 550 000 €

471 550 000 €

Programme 146 (SCSP)

100 000 000 €

150 000 000 €

Programme 191 (SCSP)

- €

- €

Plan de relance (SCSP)

38 000 000 €

35 600 000 €

Plan de relance (recettes fléchées)

102 000 000 €

100 000 000 €

Total hors ASE/ESA et hors fonds propres

731 550 000 €

757 150 000 €

Sources : Analyse du PLF 2022 et CNES.

Ainsi, la dotation s’accroît d’une année sur l’autre (+ 25,6 millions d’euros, soit + 3,5 %) au prix d’un manque de lisibilité et de transparence. Votre rapporteur appelle le Gouvernement à revenir à une présentation plus claire des crédits du CNES, notamment au travers du programme 193, dont les montants étaient censés progresser de 44 millions d’euros (en CP) en 2022 par rapport à la LFI 2020 (et donc de 76 millions d’euros par rapport à 2021) en application de la LPR (cfsupra).

 


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C.   Des organismes en grande difficulté : IFP-EN et IPEV

1.   IFP-Énergies nouvelles (IFP-EN)

IFP-Énergies nouvelles (IFP-EN), né initialement en 1919 sous le nom « d’Institut français du pétrole », est un établissement public industriel et commercial placé sous la double tutelle du ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, et du ministère de l’économie et des finances. Ses trois priorités en matière de recherche portent sur les domaines de la « mobilité durable », des « énergies nouvelles » et des « hydrocarbures responsables ».

L’organisme dispose, par ailleurs, d’un important portefeuille de participations industrielles (AXENS : procédés de raffinage, pétrochimie et catalyseurs, BeicipFranlab : conseil et logiciels en géoscience, start-ups de transition énergétique, etc.). En 2020, l’Institut disposait d’un effectif de 1 846 personnes en équivalents temps plein travaillé (ETPT).

La situation budgétaire d’IFP-EN ([39]) sur la période 2020-2022 se présente comme suit :

 (en milliers d’euros)

 

LFI 2020

Réalisé 2020

LFI 2021

PLF 2021

 

AE

AE

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Dotation P190 et autres

122 745

122 745

120 541

120 556

122 745

122 745

123 335

122 335

 dont SCSP P190 avant mise en réserve

122 745

122 745

 

 

122 745

122 745

123 335

123 335

 SCSP P 190 après mise en réserve

 

121 100

 

120 541

 

120 200

 

 

Résultat budgétaire

 

+ 2428

 

- 36 492

 

- 40 800

 

 

 Dépenses

 

286 796

 

303 533

 

295 900

 

 

 Recettes

 

289 224

 

267 041

 

255 100

 

 

Source : Analyse du rapport annuel de performances 2020, PLF 2022 et IFP-EN.

L’an dernier, votre rapporteur avait alerté, sans succès, la Représentation nationale sur la situation financière de cet organisme, selon lui en grande difficulté. Contrairement aux autres organismes de recherche, IFP-EN est extrêmement dépendant de ses ressources propres (produits des brevets et dividendes sur filiales), qui représentent chaque année plus de la moitié des recettes (146,6 millions d’euros en 2020, soit 54,9 %).

Or, ces ressources propres sont sujettes par nature aux fluctuations de l’activité économique et la crise financière survenue en 2020 a eu des effets dévastateurs sur les acteurs du marché de l’énergie susceptibles d’être intéressés par les brevets d’AXENS. Les recettes issues des redevances ont ainsi été ramenées à 48,9 millions d’euros en 2020, contre 59,2 millions d’euros en 2019 (- 17,4 %). Lors de leur audition, les représentants d’IFP-EN ont indiqué qu’ils n’espéraient pas d’amélioration sur ce point avant 2022. L’effondrement des cours du pétrole en 2020 ([40]) a également affecté la valorisation boursière des filiales d’IFP-EN : les dividendes en ont été mécaniquement réduits avec un effet différé au printemps 2021 pour l’exercice 2020 ([41]) : les versements ont ainsi été réduits de 16,8 % pour s’établir à 33,6 millions d’euros en 2021 (contre 40,4 millions d’euros en 2020).

Face à l’urgence de la situation, l’organisme s’est engagé dans un plan d’économies drastiques en réduisant sensiblement ses investissements (2020 : 24,3 millions d’euros ; 2021 : 20,3 millions d’euros, soit - 16,3 %) et en gelant la quasitotalité de ses recrutements : 109 ETPT ont ainsi été supprimés entre la fin 2019 (1858) et les prévisions pour la fin de l’année 2021 (1749). En dépit de ces efforts, la trésorerie de l’établissement a dû être sollicitée : le fonds de roulement s’élève aujourd’hui à 13,7 millions d’euros, contre 24,6 millions d’euros en 2020 (- 44,3 %).

Contrairement à ce qu’indiquait le Gouvernement en réponse à une des interventions de votre rapporteur en séance publique le 26 octobre dernier, la situation financière d’IFP-EN est loin d’être « saine ».

Il paraît d’autant plus injuste de pénaliser cet organisme que celui-ci poursuit ses efforts de recherche en matière de mobilité durable. Selon une étude menée conjointement par l’Office européen des brevets (OEB) et l’Agence internationale de l’énergie (AIE), IFP-EN se situe au 4ème rang mondial des instituts de recherche publique en termes de dépôts de brevets dans le domaine de l’énergie bas‑carbone, derrière le CEA (1er rang) et devant le CNRS (7ème rang). Au cours de leur audition, les dirigeants de l’établissement ont également évoqué le succès remporté récemment par les équipes du centre de Solaize (69) dans l’élaboration d’un moteur thermique fonctionnant directement à l’hydrogène ([42]).

VISITE DU SITE D’IFP-EN À SOLAIZE (69)

Au cours d’une visite du centre de recherches d’IFP-EN de Solaize, près de Lyon, votre rapporteur a été particulièrement impressionné par la qualité des projets de recherche menés, qui sont en parfaite adéquation avec les défis environnementaux contemporains (recyclage du plastique, mobilité à l’hydrogène, etc.). La France dispose ici d’un acteur de la recherche exemplaire, qui obtient d’excellents résultats en dépit des multiples contraintes budgétaires qui s’imposent à lui.

 

La dotation inscrite dans le PLF pour 2022 s’avère encore largement insuffisante : elle augmente de 0,6 million d’euros pour s’établir à 123,3 millions d’euros (+ 0,48 %). Cet appui symbolique est sans commune mesure avec l’ampleur des difficultés que traverse l’établissement.

Votre rapporteur appelle donc le Gouvernement à corriger le tir et à relever la dotation d’IFP‑EN de 5 millions d’euros dès 2022 de façon à l’aider à rétablir ses effectifs et à reprendre ses investissements.

2.   L’Institut polaire français Paul-Émile Victor (IPEV)

L’Institut polaire Paul-Emile Victor (IPEV) est un groupement d’intérêt public (GIP) issu en 1992 de la fusion des Expéditions polaires françaises (EPF), créées le 28 février 1947 à l’intitiative de Paul-Émile Victor, et des missions de recherche des Terres australes et antarctiques françaises (TAAF). Selon la convention en vigueur, approuvée par un arrêté du ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche du 5 février 2014 jusqu’en 2026, le groupement a, notamment, pour mission de « sélectionner, coordonner, soutenir et mettre en œuvre, en qualité d’agence de moyens et de compétences, des projets scientifiques et technologiques nationaux et internationaux » et « d’organiser et d’animer des expéditions scientifiques ».

Les personnes morales membres du GIP sont l’État (50 % des voix statutaires), le CNRS (36 % des voix) et, à titre résiduel, l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (IFREMER), le CEA, le CNES, Météo-France et les TAAF. Fin 2019, les effectifs rémunérés par l’IPEV s’élevaient à 47 ETPT (uniquement des contractuels). Le groupement bénéficie également de l’appui d’une vingtaine de personnels mis à disposition par la CNRS et l’IFREMER. Dans les lois de finances, l’IPEV est intégralement financé par le programme 172.

La situation budgétaire de l’IPEV sur la période 2020-2022 se présente comme suit :

(en milliers d’euros)

 

LFI 2020

Réalisé 2020

LFI 2021

PLF 2022

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Dotation P172

14 391

14 391

14 119

14 119

14 391

14 391

14 691

14 691

 SCSP P172 après mise en réserve

 

13 971

 

14 046

 

14 226

 

 

Résultat budgétaire

 

- 2 223

 

- 4 603

 

- 2 773

 

 

 Dépenses

 

18 237

 

19 831

 

18 726

 

 

 Recettes

 

16 014

 

15 228

 

15 953

 

 

Sources : Analyse du rapport annuel de performances 2020, PLF 2022 et IPEV.

 

Le poids de la dotation allouée à l’IPEV au sein du programme 172 (0,22 % en 2021 ([43])) est inversement proportionnel au prestige que la France a acquis au cours de son histoire dans l’exploration des pôles. On peut rappeler, à cette occasion, qu’à l’époque où le Britannique James Cook préparait sa deuxième expédition australe, le Français Yves Joseph de Kerguelen découvrait en 1772 les îles dites de la « Désolation », qui portent aujourd’hui son nom. La base antarctique française Dumont d’Urville, inaugurée en 1956 et gérée par l’IPEV, porte le nom de l’illustre navigateur qui découvrit la Terre Adélie ([44]) en 1840. Plus récemment, c’est un membre des Expéditions polaires françaises (Jean Malaurie) qui fut, avec l’Inuit Kutsikitsoq, le premier être humain à atteindre le pôle nord géomagnétique en 1951.

Au travers de ces expéditions, la France exprimait ainsi l’idéal d’un progrès scientifique au service de l’humanité.

Cet héritage historique permet à notre pays d’afficher de grandes ambitions sur ces territoires extrêmes marqués par la persistance de revendications géostratégiques et l’émergence de rivalités sur le plan économique ([45]). La recherche polaire s’avère également essentielle pour comprendre le réchauffement climatique, les calottes glaciaires étant les mémoires du climat passé et, en particulier, des alternances des périodes chaudes et froides qui ont accompagné le développement de notre planète. Malheureusement, comme l’indiquait l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) dans un rapport publié le 27 mai dernier, « la recherche polaire française n’a plus les moyens de ses ambitions ([46]) ». Le budget de l’opérateur, à périmètre comparable ([47]), est inférieur à la plupart de ses partenaires européens intervenant dans la région : 16 millions d’euros pour l’IPEV, contre 18 millions d’euros pour l’agence italienne UTA ([48]) et 53 millions d’euros pour l’Alfred Wegener Institute (AWI) allemand.

Un tel budget est, de toute évidence, largement insuffisant pour permettre au groupement de moderniser ses installations. La station Dumont d’Urville qui, selon les termes mêmes employés par l’OPECST dans un rapport datant de 2007 ([49]), s’apparente de plus en plus à « une suite désorganisée de bâtiments délabrés », nécessiterait une véritable rénovation, estimée par l’IPEV à un minimum de 70 millions d’euros sur trente ans, dont 30 à 40 millions d’euros sur la période 2022-2027.

Au titre des moyens océanographiques, la mise au rebut en 2017 de l’ancien navire brise-glace Astrolabe ([50]) a privé l’Institut d’un outil d’exploration maritime. Le nouvel Astrolabe, affrété en 2017 par la Marine nationale, permet toujours de ravitailler la base antarctique, mais est surtout utilisé par la France pour réaffirmer sa souveraineté sur les TAAF au détriment des campagnes scientifiques. Au cours de son audition, M. Jérôme Chappellaz, directeur de l’IPEV, a exprimé le souhait que notre pays se dote d’un navire « à capacité glace » utilisé exclusivement pour des missions d’exploration scientifique. Le coût du déploiement d’un tel bâtiment est estimé par l’IPEV à 35 millions d’euros.

Le montant de la dotation de l’État, stabilisé autour de 14 millions d’euros depuis 2019, rend de facto le financement de ces projets en interne impossible. On peut ajouter que la faiblesse des moyens de fonctionnement courant de l’IPEV l’empêche de constituer l’apport nécessaire à des dispositifs susceptibles d’être cofinancés par l’Agence nationale de la recherche, ce qui explique la part infime des recettes propres dans les ressources du groupement (403 000 euros en 2020, soit 2,65 % du total des produits perçus en 2020). Assez logiquement, l’IPEV se montre « pragmatique » dans le financement de ses grands projets. M. Chappellaz a, ainsi, précisé que l’Institut avait utilisé une partie des fonds alloués par l’Union européenne dans le cadre du programme Beyond EPICA ([51]) (1 million d’euros sur un total de 2,6 millions d’euros) pour créer un camp de secours ([52]) des scientifiques de la station franco-italienne Concordia, actuellement inexistant.

Cette situation ne peut pas durer éternellement, sauf à remettre en cause la présence française dans les pôles. Selon M. Chappellaz, les équipes sur place sont « à bout » et les cas d’épuisement professionnel se multiplient. L’année 2022 s’annonce difficile en raison du nombre considérable de projets scientifiques reportés depuis l’an dernier en raison de la crise sanitaire (45 projets sur un total de 115 engagés).

Afin que la France puisse « revenir dans la cour des grands » pour reprendre le titre du rapport de l’OPECST précité du 27 mai dernier, il est urgent que l’État s’engage dès à présent dans le renforcement des moyens alloués à l’IPEV.

Votre rapporteur appelle donc le Gouvernement à procéder, dès 2022, au relèvement de la SCSP allouée à l’IPEV au titre du programme 172 de 7 millions d’euros, ce qui permettra au groupement d’engager la première phase de la rénovation de la station Dumont d’Urville et de relever en conséquence son plafond d’emplois (actuellement limité à 17 ETPT).

Le renouveau des capacités d’exploration océanographiques de l’IPEV pourrait être obtenu, par exemple, au travers du second appel à projets prévu pour 2023 dans le cadre du programme prioritaire de recherche (PPR) « Océan et Climat » ([53]).

 


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   seconde partie :

LE TRAITEMENT DES DÉCHETS D’ACTIVITÉS DE SOINS À LA RECHERCHE D’UN MODÈLE D’INNOVATION

Les typologies retenues par les pouvoirs publics pour classer les déchets se fondent sur la composition du déchet (métal, papier, bois, etc.) ou sur la nature économique de son producteur (industrie, construction, tertiaire, ménages, etc.). La classification des déchets issue de la directive  européenne n° 2008/98/CE du 19 novembre 2008 ([54]) adopte une approche par activité : déchets provenant de l’activité minière (code 01), de l’agriculture (code 02), des industries textiles (code 04), etc.

La notion de « déchets d’activités de soins » (DAS) renvoie à la définition donnée par le code de la santé publique en son article R. 1335-1, elle-même découlant de la classification européenne (code 18) : il s’agit des « déchets issus des activités de diagnostic, de suivi et de traitement préventif, curatif ou palliatif, dans les domaines de la médecine humaine et vétérinaire ».

Au regard de cette définition, les DAS peuvent être produits par un établissement de santé, un médecin libéral, une pharmacie, un laboratoire d’analyses médicales, une clinique vétérinaire, un laboratoire de recherche et même par des personnes physiques (patients en auto-traitement). Selon le ministère de la santé, les DAS se répartissent en trois grandes catégories : les déchets assimilables aux ordures ménagères (DAOM), les déchets à risque (chimique, radioactif, infectieux) ainsi que les pièces anatomiques, d’origine humaine ou animale ([55]). Certains déchets relèvent de sous-catégories spécifiques, tels que les déchets d’équipements électriques ou électroniques (DEEE) qui font partie des DAOM ou, en présence d’un risque de contamination, les « déchets d’activités de soins à risque infectieux » (DASRI) consubstantiels à l’activité médicale.

I.   Les déchets d’activités de soins recouvrent une réalité complexe et se répartissent en fonction de leur niveau de risque

1.   Le périmètre extrêmement large des « déchets d’activités de soins », catégorie intrinsèquement hétérogène et difficile à appréhender

En dépit de son caractère officiel, la notion de « déchets d’activités de soins » semble peu appréhendée en tant que telle par les acteurs concernés. Selon les termes mêmes de la Fédération hospitalière de France (FHF), « le terme DAS est rarement utilisé dans les établissements de santé ».

Les données statistiques disponibles se limitent, soit à des études ponctuelles portant sur une seule catégorie de producteurs, notamment les établissements de santé, soit aux recensements réguliers effectués dans le cadre de filières de traitement spécifiques : médicaments non utilisés par les ménages, déchets à risque, etc.

Comme l’a souligné M. Rossignol, président de la Fédération nationale des activités de la dépollution et de l’environnement (FNADE), la part des DAS au sein de la masse des déchets produits en France est « toute petite » : selon des travaux effectués par l’Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé (ANAP) en 2010 ([56]), les DAS produits par les hôpitaux publics et les cliniques privées représentaient à cette époque une masse de 700 000 tonnes, soit 0,2 % du total des déchets produits en France toutes catégories confondues la même année (355 millions de tonnes ([57])).

L’hôpital, à la fois lieu de soins et lieu de vie, concentre à lui seul toute la diversité des déchets d’activités de soins : il produit des résidus alimentaires, des déchets d’emballages (cartons, films plastiques, etc.), des déchets issus de matériels de protection (blouses, masques, etc.), de matériels de soins (bandes, compresses, etc.) ou de matériels piquants ou coupants (seringues, ciseaux, bistouris, etc.), des médicaments non utilisés, des déchets chimiques ou toxiques (amalgames dentaires, thermomètres au mercure, etc.) ainsi que des déchets d’équipements électriques ou électroniques (tensiomètres, tubes cathodiques, etc.). Chaque établissement de santé est donc confronté à la difficulté qui s’attache à la gestion de déchets éminemment hétérogènes, dont les coûts de traitement moyen à la tonne s’étalent de 50 euros pour un carton à 750 euros pour un déchet à risque infectieux ([58]).

Paradoxalement, les DAS produits par les ménages bénéficient d’un suivi plus précis, car ils sont pris en charge dans des filières spécifiques organisées autour du principe de la responsabilité élargie du producteur (REP).

 

 

 

 

 

 

LES FILIÈRES « REP » EN FRANCE

La loi n° 75-633 du 15 juillet 1975 relative à l’élimination des déchets et à la récupération des matériaux consacre le principe de responsabilité élargie du producteur (REP) en son article 6 : « Il peut être fait obligation aux producteurs, importateurs et distributeurs de ces produits ou des éléments et matériaux entrant dans leur fabrication de pourvoir ou de contribuer à l’élimination dès déchets qui en proviennent ».

Le dispositif est aujourd’hui intégré au code de l’environnement en son article L. 541-10. La prise en charge de la collecte et du traitement des déchets d’une catégorie donnée peut s’effectuer, soit de manière individuelle, soit de manière collective au travers d’une structure à but non lucratif (éco-organisme agréé par l’État), qui assure ces tâches moyennant une contribution (éco-contribution souvent supportée par le consommateur).

Depuis la première filière mise en place en France en 1992 (emballages), il existe désormais une quinzaine de filières REP (piles et accumulateurs, déchets d’équipements électriques et électroniques, pneumatiques, textiles d’habillement pour les particuliers, etc.). Leur nombre est destiné à s’accroître dans le cadre de la mise en œuvre de la loi n° 2020-105 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire du 10 février 2020 (loi « AGEC »).

L’une des filières les plus connues du grand public est celle gérée par l’éco‑organisme CYCLAMED, chargé de collecter auprès des pharmacies les médicaments non utilisés (MNU) par les particuliers et de les traiter selon le circuit écologiquement et socialement le plus vertueux ([59]). En 2020, les MNU collectés par CYCLAMED représentaient un total de 9 953 tonnes, ce qui constituait un taux de collecte de 50 % par rapport au gisement de MNU estimé (près de 20 000 tonnes) ([60]).

Une autre filière REP, moins connue, a été mise en place pour collecter et traiter les déchets d’activités de soins à risque infectieux (DASRI – cf. infra) perforants des patients en autotraitement, essentiellement les dispositifs médicaux des personnes atteintes de diabète, ainsi que les utilisateurs d’autotests. Selon l’éco‑organisme compétent (DASTRI), auditionné le 9 septembre dernier, 803 tonnes de déchets ont été collectées à ce titre, soit environ 80 % du gisement total estimé (près de 1 000 tonnes).


Le tableau ci-après récapitule les quantités de DAS produites chaque année selon le type de producteur :

 

Établissements de santé

Ménages

Autres producteurs de DAS

Médicaments non utilisés

Environ 750 tonnes ([61])

Environ 20 000 tonnes

N.C

DAOM

N.C

Négligeable

N.C

DASRI ([62])

Environ 150 000 tonnes

1 000 tonnes

10 000 tonnes

Autres déchets à risque

N.C

Négligeable

N.C

Total

700 000 tonnes

Environ 21 000 tonnes

N.C

2.   La notion de « risque infectieux » au cœur des critères de répartition des déchets d’activités de soins

Au-delà de la variété des déchets produits, le milieu médical se singularise par une catégorie de DAS qu’il est le seul à produire : les déchets d’activités de soins à risque infectieux (DASRI).

Comme le ministère chargé de la santé l’expliquait dans sa brochure mentionnée supra éditée en 2009, « les activités de soins génèrent une quantité croissante de déchets entraînant des sujétions particulières liées notamment à leur caractère infectieux. La gestion de ces déchets s’inscrit dans la politique d’amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins. Elle contribue également à prévenir les évènements indésirables liés aux activités des établissements de santé, notamment la prévention des infections nosocomiales ([63]) ». Il s’agit donc de protéger la santé des personnes susceptibles d’entrer en contact avec ces déchets : personnels soignants, patients, visiteurs, personnels techniques, notamment ceux en charge de la collecte et du transport, etc.

La notion de « risque infectieux » est le critère central de définition fixé par la réglementation : il suffit que des déchets « contiennent des microorganismes viables ou leurs toxines, dont on sait ou dont on a de bonnes raisons de croire qu’en raison de leur nature, de leur quantité ou de leur métabolisme, ils causent la maladie chez l’homme ou chez d’autres organismes vivants ([64]) » pour qu’ils soient considérés comme des DASRI. Tout matériel médical ordinaire jugé « contaminé » a vocation à être traité comme tel : pansements, cotons, matériel de perfusion, équipements de production individuelle (EPI ([65])), etc.

Au titre du risque de blessure ou, tout simplement, du risque « psychoémotionnel » lié au contact, les déchets suivants sont également assimilés aux DASRI même en l’absence de contamination avérée : les matériels piquants ou coupants « destinés à l’abandon » (aiguilles, seringues, bistouris, lames, etc.), les produits sanguins à usage thérapeutique périmés et les déchets anatomiques humains non identifiables ([66]).

Les DASRI représentent un enjeu non négligeable pour leurs producteurs, tant en termes de volumétrie que de modes de collecte. Leur masse globale était estimée à 166 000 tonnes en 2011 par l’ADEME ([67]), réparties en trois ensembles : les DASRI des établissements de santé (environ 155 000 tonnes, soit 93 % du total et plus de 22 % des DAS produits toutes catégories confondues), les DASRI des professionnels de santé libéraux et des laboratoires de biologie médicale, dits « DASRI diffus », (environ 10 000 tonnes, soit 6 % du total) et les DASRI des patients en autotraitement (environ 1 000 tonnes, soit moins de 1 % du total).

Dans les établissements de santé, la variété des risques associés aux DASRI a conduit à la mise en place de circuits de collecte distincts selon le type d’objet concerné.

Source : Société Take A Waste (audition du 8 septembre 2021)

S’agissant des patients en autotraitement, l’éco-organisme DASTRI (cfinfra) recommande l’utilisation de « boîtes à aiguilles » destinées à recueillir les seringues et à être ramenées en pharmacie.

II.   Le traitement des flux de déchets d’activités de soins est loin de répondre aux enjeux d’une véritable Économie circulaire

1.   Les difficultés rencontrées par les établissements de santé dans le tri à la source

Le dispositif de traitement des DAS s’articule autour du tri à la source par le producteur en application des dispositions de l’article R. 1335-5 du code de la santé publique ([68]). La sélection opérée dès le départ conditionne la mise en œuvre du processus de traitement applicable.

Tri à la source

Type de DAS

Conditionnement

Type de traitement

Déchets assimilables aux ordures ménagères

Ordinaire

Incinération ou stockage.

Recyclage en filière REP (déchets d’équipements électriques ou électroniques - DEEE, par exemple).

Déchets à risque

DASRI

Incinération ou prétraitement par désinfection.

Risque chimique ou radioactif

Stockage ou incinération pour valorisation,

 

 

Stockage ou gestion locale par décroissance radioactive.

Pièces anatomiques d’origine humaine

Spécifique

Incinération en crématorium.

À l’exception des déchets dont la nature est évidente (pièces anatomiques, produits sanguins, matériels coupants ou piquants), le classement en DAOM ou en DASRI dépend donc étroitement de l’appréciation du producteur des déchets concernés. Sur ce point, la formation du personnel soignant au geste de tri s’avère d’autant plus essentielle qu’il n’existe, à ce jour, que des recommandations générales quant à l’évaluation du potentiel infectieux d’un DAS ([69]). Les actions de sensibilisation effectuées au cours des dernières années dans les établissements de santé, notamment dans une optique de réduction des coûts ([70]), ont apparemment porté leurs fruits, la production globale de DASRI ayant été ramenée à environ 150 000 tonnes en 2019 ([71]) (- 9,6 % par rapport à 2011).

Cette situation reste fragile dans la mesure où il suffit d’un facteur de déstabilisation exogène pour inverser la tendance. Selon les acteurs auditionnés (FNADE et FHF), la crise sanitaire a eu un impact à la hausse sur la production de DASRI. Les données issues des unités d’incinération ([72]) montrent ainsi une phase de rebond en 2020 (127 447 tonnes, soit + 7,4 % par rapport à 2019). Le premier trimestre de l’année 2021 semble confirmer cette tendance (+ 23 % en rythme annuel).

Selon la FNADE, la hausse tendancielle est encore plus forte si l’on recense les DASRI en litres (volumes) plutôt qu’en masses (tonnes). Dans une communication au Haut Conseil de la santé publique pour un avis rendu le 23 avril 2021, elle précise que, depuis avril 2020, « le volume de DASRI collectés, en lien avec le nombre d’équipements de protection individuelle, et non la masse, a subi une augmentation de 10 % en moyenne […] ([73]) ».

Outre les erreurs d’aiguillage liées aux tensions pensant sur les soignants en période de crise, il y aurait eu surtout une prédisposition accrue au classement en DASRI des dispositifs médicaux pour des raisons tenant au principe de précaution. On notera, à ce sujet, que le Haut Conseil à la santé publique (HCSP) a expressément recommandé l’an dernier l’élimination par la filière des DASRI non perforants  des EPI des soignants, des patients et du personnel de nettoyage ainsi que du linge à usage unique utilisés dans les secteurs Covid‑19 des établissements de santé ([74]).

2.   Les limitations apportées par la réglementation et la technologie au traitement des déchets d’activités de soins à risque infectieux (DASRI)

Le bilan environnemental d’un DASRI est indéniablement négatif, dans la mesure où la réglementation ne prévoit que deux modalités de traitement : l’incinération et le prétraitement par désinfection ([75]).

L’incinération pure et simple consiste à acheminer les DASRI dans des unités de valorisation énergétique (UVE) classiques où des fours seront amenés à les brûler jusqu’à les transformer en cendres ([76]). L’incinération produit des mâchefers et des résidus d’épuration des fumées. Selon les données fournies par les représentants de la FHF à l’issue de leur audition, une tonne de DASRI incinérée produirait une tonne de dioxyde de carbone.

Le prétraitement par désinfection (ou « banalisation ») consiste à modifier l’apparence des déchets, le plus souvent par broyage, et à réduire la contamination microbiologique par une élévation de la température (vapeur, micro‑ondes). Les DASRI « banalisés » sont ainsi rendus assimilables aux déchets ménagers et traités comme tels (incinération ou stockage). Selon la FNADE, il y a en France 20 centres de banalisation en activité (contre 25 UVE susceptibles d’accueillir des DASRI).

À ce jour, selon les données communiquées par la FNADE, l’incinération reste encore le mode de traitement le plus utilisé par les établissements de santé : en 2019, les DASRI acheminés en UVE représentaient encore 79 % de la production nationale. Une telle préférence s’explique assez largement par des considérations pratiques, dans la mesure où la réglementation oblige tout producteur de DASRI à s’en débarrasser dans un délai de 72 heures ([77]). Il peut donc paraître plus simple et plus économique pour un établissement d’acheminer ses DAS, quelle que soit leur nature, dans un seul et même endroit (UVE).

Lors de la visite par votre rapporteur de l’hôpital d’Orsay (Groupe hospitalier Nord‑Essonne), le 1er octobre dernier, le prestataire en charge du traitement des DASRI (PROSERVE) a indiqué que certains établissements de santé pouvaient être amenés à préférer l’incinération en dépit de la proximité d’un centre de banalisation situé à proximité. Le coût des opérations entre en ligne de compte : en raison des volumes en jeu et des contraintes de broyage, le coût de la banalisation peut être 25 % plus élevé que celui de l’incinération. Certains de nos voisins européens, notamment l’Espagne, privilégieraient, en revanche, la banalisation à l’incinération.

Par ailleurs, on peut préciser que le choix de la banalisation ne signifie pas pour autant que le déchet désinfecté puisse être réutilisé d’une façon ou d’une autre. Après désinfection, un DASRI banalisé doit être stocké ou incinéré : aucun recyclage n’est possible. Actuellement, certains acteurs économiques s’interrogent sur le potentiel économique du recyclage de certaines parties des DASRI : ainsi l’entreprise COSMOLYS, basée à Avelin (59), a-t-elle obtenu du Gouvernement en 2019 la mise en place à titre expérimental ([78]) d’un système de production de polypropylène à partir de DASRI banalisés. La société espère ainsi parvenir à une capacité de valorisation de 3 500 tonnes de polypropylène à la fin de l’expérimentation, prévue le 31 janvier 2022 ([79]).

 

DIFFICULTÉS RENCONTRÉES DANS LE RECYCLAGE DES DASRI

Selon la FNADE, les techniques de banalisation des DASRI autorisées en France, notamment la décontamination par vapeur, aboutissent à des déchets globalement plus humides, ce qui rend plus difficile la séparation des éléments lourds (polypropylène) de la partie légère par tri aéraulique (technique de séparation par des flux d’air concentrés). Le plastique issu d’un DASRI banalisé serait ainsi susceptible de contenir des impuretés. La France pourrait, selon la FNADE, expérimenter de techniques de décontamination garantissant la banalisation à sec (utilisation d’ozone, par exemple).

La société Take A Waste, pour sa part, rappelle que la mise en place d’un processus de recyclage ne remet nullement en cause l’obligation de broyer et décontaminer les DASRI au préalable, ce qui renchérit corrélativement le coût de l’opération au regard du circuit traditionnel de traitement par incinération.

III.   Une impulsion doit être donnée au niveau national afin d’améliorer le tri des Déchets d’activités de soins et de favoriser le recyclage des DASRI

1.   L’émergence de nouvelle filières REP régissant les déchets d’activités de soins

Traditionnellement, le meilleur moyen d’organiser la prévention et la gestion d’une catégorie de déchets consiste à ériger la chaîne de traitement, depuis la vente des matériels concernés par un « metteur en marché » jusqu’à la collecte des déchets résultant de l’utilisation de ces matériels, en filière REP. Selon le site internet de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME), la mise en place d’une filière REP vise précisément à « économiser les ressources en développant le recyclage [des] déchets » et à « augmenter la performance de recyclage de ces déchets ».

Au vu des volumes en jeu, il est assez paradoxal que ce soient les plus petits producteurs de DAS, à savoir les ménages et les patients en autotraitement, qui bénéficient le plus du dispositif de la REP au travers des éco-organismes CYCLAMED et DASTRI (cf. supra). À l’exception des déchets non spécifiques, tels que les emballages, les piles et accumulateurs et les déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE), les établissements de santé sont, à ce jour, peu couverts en tant que tels par la REP.

La FHF, interrogée sur ce point, a indiqué qu’elle était favorable à la mise en place de « filières REP spécifiques aux activités de soins ». À ce titre, elle a rappelé en audition que le dispositif « CYCLAMED » ne s’appliquait qu’aux médicaments non utilisés (MNU) par les particuliers et a souhaité qu’il fût ainsi étendu à ceux des établissements de santé. Une telle extension a été également mentionnée par M. Jean-Charles Caudron, directeur chargé de la supervision des filières REP à l’ADEME, lors de son audition.

 

La question d’une extension du dispositif « CYCLAMED » n’est pas nouvelle. Son application aux médicaments à usage vétérinaire a été préconisée par un rapport parlementaire en 2013 ([80]) au motif que les détenteurs de ces médicaments étaient « identiques » et que leur circuit de commercialisation était « similaire ». Sa généralisation aux établissements de santé, dont les besoins et les usages sont différents des particuliers, nécessiterait probablement la mise en place d’un circuit de collecte spécifique et un ajustement des modes d’intervention de l’éco‑organisme. En tout état de cause, les volumes en jeu restent faibles : selon une étude de l’ADEME publiée en 2017, le gisement des MNU des établissements de santé s’élevait à 742 tonnes en 2016, soit vingt fois moins que le gisement des particuliers ([81]).

L’une des autres pistes également évoquées par le représentant de l’ADEME a trait aux « textiles sanitaires à usage unique », qui seront soumis au principe de la REP à compter du 1er janvier 2024 en application du nouvel article L. 541-10-1 du code de l’environnement, issu de la loi AGEC. Selon M. Caudron, on peut légitimement s’interroger sur l’application de cette nouvelle filière REP à certains EPI des personnels soignants et des patients dans les établissements de santé, en particulier les blouses, les charlottes et les masques.

Dans cette hypothèse, il conviendra d’éviter que cette nouvelle filière n’entre en concurrence avec la filière de traitement des DASRI, c’est-à-dire n’aboutisse à intégrer des équipements contaminés dans un circuit de recyclage. La notion de « risque infectieux », consubstantielle à la définition d’un DASRI, devra faire l’objet d’un meilleur encadrement au niveau national. On rappellera, sur ce dernier point, l’exemple des dispositifs pour patients diabétiques dotés d’une composante électronique, dont le développement récent sur le marché a suscité des difficultés de classement en raison même de l’absence de critères de définition précis du « risque infectieux », ce qui a conduit le pouvoir réglementaire à reporter la responsabilité de la distinction sur les producteurs eux-mêmes.

Votre rapporteur estime nécessaire d’entamer au niveau national une réflexion avec les acteurs du système de soins et les industriels de façon à établir une « cartographie » détaillée de l’ensemble des dispositifs médicaux permettant de déterminer facilement le mode de traitement des déchets générés. S’agissant du critère de « contamination », il appelle à une plus grande implication du Haut Conseil à la santé publique, dont l’expertise devrait être sollicitée de manière plus systématique.

 

 

COORDINATION ENTRE FILIÈRES REP : L’EXEMPLE DES DASRI ÉLECTRONIQUES

Le développement sur le marché des traitements pour diabétiques d’équipements électroniques de mesure de la glycémie ou d’injection d’insuline a posé la question du classement des déchets issus de ces matériels dès lors qu’ils peuvent être pris en charge par deux filières REP différentes (DEEE ou DASRI).

La loi AGEC a partiellement répondu à cette interrogation en intégrant explicitement à la filière des DASRI les équipements électroniques « associés » aux dispositifs médicaux perforants utilisés par les patients en autotraitement ([82]). Les déchets qu’ils génèrent ne pourront être considérés comme des DEEE que si le fabricant de l’équipement établit que les déchets qui en découlent ne peuvent avoir aucun « risque infectieux ou perforant ([83]) ». La complexité du dispositif actuel peut être résumée au travers du schéma suivant :

     Source : DASTRI (contribution du 13 septembre 2021)

2.   La remise en cause du tabou de l’usage unique des dispositifs médicaux

D’un point de vue plus général, comme l’a souligné en audition M. Vincent Coissard, sous-directeur à la direction générale de la prévention des risques (DGPR), notre pays est peut-être allé trop loin dans la systématisation de l’usage unique en milieu médical. La plupart des établissements hospitaliers ont progressivement renoncé aux filières classiques de réutilisation des dispositifs médicaux et les ont remplacées par des filières jetables, où le plastique domine. Cette évolution tient, tout d’abord, à une conception extensive du principe de précaution, mais aussi aux avantages pratiques découlant d’une simplification de la gestion des stocks.

 

Dans une optique analogue, c’est une perception aigüe du risque « psychoémotionnel » qui justifie que la plupart des instruments chirurgicaux piquants ou coupants aient vocation à être immédiatement jetés dans le sac d’évacuation des DASRI après une seule utilisation. Les raisons, essentiellement hygiénistes, qui ont contribué à cette généralisation se heurtent aujourd’hui aux impératifs environnementaux, portés par les récentes lois de promotion de l’économie circulaire. On peut ajouter que la complexité du dispositif juridique constitue un facteur de blocage non négligeable des initiatives privées.

Les auditions menées ont montré une volonté des acteurs de la santé de développer les opportunités de réutilisation des dispositifs médicaux.

S’agissant des dispositifs réutilisables, le réseau associatif ENVIE Autonomie, auditionné le 9 septembre dernier, développe depuis 2015 des actions de coopération avec les établissements de santé afin de collecter des aides techniques inutilisées (fauteuils roulants, lits médicalisés, etc.), d’en reconditionner une partie grâce à des salariés en parcours d’insertion, puis à les distribuer à prix solidaire. Ses activités ont bénéficié en 2020 du soutien financier de l’ADEME au travers du contrat à impact « économie circulaire » ([84]). On notera l’évolution positive apportée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 qui, en son article 39, autorise explicitement la « remise en bon état d’usage » de certains dispositifs médicaux à usage individuel ([85]) et ouvre la voie à une prise en charge financière de leur réutilisation par l’Assurance maladie.

Une seconde voie a été évoquée en audition par la FHF : le retraitement des dispositifs médicaux à usage unique, y compris ceux qui ont vocation à être éliminés en tant que DASRI : cathéters, ciseaux, etc. Il s’agirait, en l’occurrence, de permettre une réutilisation après désinfection de ces équipements.

La pratique est formellement interdite par la réglementation française ([86]). Elle est autorisée sous conditions dans plusieurs pays européens, notamment en Allemagne, qui n’effectue pas de distinction selon l’usage unique ou multiple de l’appareil, mais ajuste le niveau de contrainte à la hausse pour les dispositifs médicaux « critiques », c’est-à-dire ceux qui ont été en contact avec le sang, les tissus internes ou les organes et ont donc été souillés ([87]). Le droit de l’Union européenne se contente, pour sa part, de renvoyer aux législations nationales ([88]).

La question d’une éventuelle réforme a été soulevée par l’ensemble des fédérations françaises des établissements de santé publics et privés (FHF comprise) dans deux courriers adressés au ministre chargé de la santé, le 18 juin 2018 et le 14 janvier 2020. Aucune réponse concrète n’a, pour le moment, été apportée à ces démarches. Il suffit d’adopter une perspective historique pour se rendre compte à quel point le sujet est sensible en France. Dès l’année 1986, le ministère des affaires sociales rappelait l’interdiction de toute forme de « restérilisation » du matériel médico-chirurgical non réutilisable « compte tenu des risques inhérents à cette pratique » ([89]).

En 1994, une nouvelle circulaire ([90]) est publiée afin d’attirer l’attention des établissements sur « ce grave enjeu de santé publique ». Les arguments invoqués sont la persistance d’un risque infectieux pour les patients sur lesquels le matériel sera réutilisé, les possibilités d’altération de l’efficacité du dispositif médical du fait même du retraitement ainsi que le risque d’une contamination chimique du matériel liée au processus de décontamination en tant que tel. Pour autant, les exemples étrangers montrent qu’il est possible d’autoriser des procédures de retraitement sans pour autant mettre en danger la vie des patients : on peut rappeler, sur ce point, qu’une étude du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC) réalisée sur la période 2011-2012 avait établi que le taux de prévalence des infections nosocomiales était de 5 % en Allemagne. La France, avec un taux de 4,9 %, ne faisait guère mieux ([91]).

La visite par votre rapporteur de l’hôpital Trousseau (Paris), le 7 octobre dernier, a permis de constater qu’il était possible de mettre en place des protocoles de réutilisation des équipements médicaux : en recourant systématiquement à des outils métalliques pouvant être intégralement décontaminés, l’établissement n’emploie pas à proprement parler de dispositif à usage unique. Dans ce cas, la « stérilisation » est possible au sens de l’article R. 6111-21 du code de la santé publique. L’hôpital a ainsi pu réduire considérablement sa production de DASRI (8 % du total des DAS produits en 2020) jusqu’à retirer la poubelle consacrée de ses salles opératoires.

Votre rapporteur appelle la direction générale de la santé à s’engager dans la voie d’une réflexion visant à permettre la réutilisation en France, après désinfection ou décontamination, des dispositifs médicaux à usage unique, même coupants et perforants. Il pourrait être décidé de s’en tenir, dans un premier temps, aux dispositifs n’ayant pas été en contact direct avec le patient ou ayant eu simplement un contact léger (avec une peau non lésée, par exemple).

3.   Le déverrouillage des activités de recherche portant sur la banalisation des DASRI en vue de leur recyclage

La volonté des acteurs du monde médical de réduire la production de DAS, au travers de techniques de désinfection adaptées, de développer des modes de traitement plus vertueux de ces déchets sur le plan environnemental, voire de systématiser leur recyclage, aurait pu aboutir à la mobilisation des acteurs publics et privés de la recherche sur cette question. Malheureusement, les auditions menées dans le cadre du présent rapport ont permis de constater que les efforts engagés sont loin d’être à la hauteur des enjeux. L’INSERM, qui fait lui-même partie des producteurs de DAS, a reconnu qu’il n’avait pas engagé de projet de recherche dans ce domaine.

Le CNRS a indiqué, pour sa part, qu’il soutenait les activités de recherche du groupement d’intérêt public (GIP) ARRONAX ([92]) visant à améliorer les modes de traitement des  isotopes radioactifs utilisés dans le domaine médical. Les problématiques abordées sont, néanmoins, très éloignées de la question des DASRI, les déchets issus des cyclotrons ayant vocation à être gérés par l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA). L’ANR, quant à elle, a apporté un soutien financier à plusieurs projets de recherche partenariale consacrés à la mise en place de moyens innovants de détection des polluants et contaminants dans les eaux usées. Le projet POLPHARMA, initié en 2015 par un consortium associant le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), le Centre de recherche et d’enseignement de géosciences de l’environnement (CEREGE), Sorbonne Université ainsi que les groupes SOLVAY et SUEZ, consiste à expérimenter l’usage des nanotechnologies dans la caractérisation et le traitement des eaux usées issues, notamment, des établissements de santé. L’an dernier, l’Institut de recherche pour le développement (IRD) et le CNRS ont mis en place un dispositif de surveillance des eaux usées urbaines en Guyane française afin de détecter la présence d’une éventuelle contamination au SARS-COV-19.

Dans les deux cas, les sujets de recherche n’abordent pas spécifiquement la question des déchets d’activités de soins et les financements apportés par l’ANR, sans être négligeables (respectivement 750 000 euros et 150 000 euros), ne sont pas exceptionnels au regard du budget d’intervention de l’Agence (725 millions d’euros en AE en 2019).

Au cours de leur audition, les représentants de la FNADE ont indiqué qu’à leurs yeux, il n’y avait « pas de soutien » accordé au secteur privé par le secteur public dans le domaine de la recherche sur le traitement des déchets d’activités de soins à risque infectieux. Ils ont salué, toutefois, le dispositif d’aide à l’acquisition d’appareils de banalisation des DASRI mis en place par l’ADEME dans le cadre du plan de relance l’an dernier et doté d’un financement significatif (10 millions d’euros).

DISPOSITIF DE SOUTIEN À L’ACQUISITION DE BANALISEURS

Au sein de la mission « Plan de relance », l’action n° 04 « Économie circulaire et circuits cours » du programme 362 « Écologie », dotée de 500 millions d’euros d’autorisations d’engagement (AE) et de 84 millions d’euros de crédits de paiement (CP) en 2021, vise à abonder le « fonds économie circulaire » de l’ADEME.

À ce titre, l’ADEME a initié en 2021 l’appel à projets « Investissements dans les équipements de désinfection des déchets d’activités de soins à risques infectieux » destiné à aider les producteurs de DASRI ainsi que les prestataires en charge du traitement de ces déchets à acquérir des dispositifs in situ de prétraitement par désinfection. L’appel à projets, doté de 10 millions d’euros au total, garantit aux candidats sélectionnés un cofinancement à hauteur de 45 % du montant des investissements réalisés.

Lors de son audition, M. Vincent Coissard (DGPR) a précisé que cet appel à projets avait été conçu dans une optique d’amélioration du bilan environnemental de la banalisation des DASRI. Très clairement, les dispositifs permettant d’aboutir à une banalisation sans incinération, voire au recyclage des DASRI prétraités, seront favorisés. La première vague de l’appel à projets est en cours (clôture prévue le 15 octobre).

Pour nécessaire qu’il soit, ce type de dispositif ne saurait être suffisant pour aboutir à une réduction d’ampleur des DASRI envoyés en centre d’incinération. Les principaux acteurs auditionnés (FNADE et FHF) ont tous mis en avant les enjeux économiques qui s’attachent à l’utilisation d’une filière de traitement plutôt que d’une autre. Le développement de la filière de recyclage du carton et du papier, par exemple, s’explique assez largement par une collecte efficace (64 % du gisement collecté et recyclé en 2020 ([93])), un prix du traitement raisonnable pour le producteur de déchets (50 euros par tonne en moyenne ([94])) et le maintien d’une demande significative de papier recyclé sur le marché (autour de 5 millions de tonnes par an ([95])).

S’agissant des DASRI, le principal obstacle à la réduction des coûts de traitement et à l’amélioration des techniques de banalisation est d’origine réglementaire. Ce sont les dispositions de l’article R. 1335-8 du code de la santé publique précité qui interdisent le recyclage des déchets issus du prétraitement et imposent une « modification de l’apparence » des DASRI, notamment par broyage, avant désinfection. Ces contraintes limitent fortement les efforts de recherche dans ce domaine.

Dès lors, votre rapporteur appelle le Gouvernement à mettre en place une stratégie nationale de recherche en matière de recyclage des DASRI qui s’appuierait au préalable sur une réforme de la réglementation afin de permettre, de manière permanente, les activités de recherche portant sur la réutilisation des DASRI « décontaminés ».

Il serait, dans ce cas, explicitement envisagé que l’opérateur puisse s’affranchir de l’obligation de « modifier l’apparence » des déchets avant leur désinfection.

Des appels à projets spécifiques pourraient être mis en place au niveau de l’ANR de façon à inciter les organismes de recherche et les universités à collaborer avec les industriels. Un financement pourrait être trouvé sur ce point au travers de la mission « Plan de relance » sur la même ligne budgétaire que celle qui a financé les acquisitions de banaliseurs (action n° 04 du programme 362 – cf. supra).

À terme, selon les résultats des expérimentations, le traitement des DASRI par banalisation pourrait devenir obligatoire et l’option de l’incinération réduite aux seuls éléments non recyclables.

RÉCAPITULATIF DES RECOMMANDATIONS

1/ Autoriser, après étude, les établissements de santé à réutiliser les dispositifs médicaux à usage unique, même coupants et perforants, après décontamination ou désinfection.

2/ Aider les établissements de santé à distinguer précisément, au travers d’une « cartographie » nationale, les DASRI des autres déchets et favoriser une implication plus forte du Haut Conseil à la santé publique (HSCP) dans la définition du risque infectieux affectant du matériel médical usuel.

3/ Intégrer les équipements de protection individuelle (EPI) des personnels soignants à la future filière REP consacrée par la loi AGEC aux « textiles sanitaires à usage unique » et élargir le dispositif CYCLAMED aux médicaments non utilisés (MNU) dans les établissements de santé.

4/ Modifier l’article R. 1335-8 du code de la santé publique afin de permettre de manière permanente les activités de recherche portant sur la réutilisation des DASRI prétraités par simple décontamination et, sur ce fondement, impulser au travers de la mission « Plan de relance » une sous-action consacrée au soutien à la recherche partenariale dans ce domaine. À terme, envisager de rendre obligatoire le traitement des DASRI par banalisation.

 


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  EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du mercredi 13 octobre 2021, la commission des affaires économiques a examiné pour avis, sur le rapport de M. Cédric Villani, les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

M. Cédric Villani, rapporteur pour avis. À l’ouverture de la dernière Exposition universelle, ce 1er octobre, la France a choisi de mettre à l’honneur ses activités de recherche polaire dans un pavillon immersif dénommé « Antarctique, un laboratoire du futur ». Excellent choix, à l’heure où la recherche polaire est l’objet de toutes les attentions !

C’est dans les glaces antarctiques que l’on trouve les mémoires du climat passé ; de célèbres figures de la recherche française, telles que M. Jean Jouzel et Mme Valérie Masson‑Delmotte, ont bouleversé la climatologie sur cette base. La recherche polaire, c’est aussi la compréhension de l’influence de la fonte des glaces et de l’évolution des circulations océaniques, l’étude de populations animales particulièrement diverses et fragiles et le développement de technologies innovantes motivé par les conditions climatiques extrêmes. C’est en Antarctique que les biologistes ont expérimenté la puce RFID pour étudier les populations animales et qu’a été découverte la sphéniscine, cette substance pleine de promesses médicales, qui permet aux manchots de conserver un bol alimentaire à 38 degrés Celsius dans leur estomac sans qu’il soit digéré.

La France est l’une des nations pionnières de l’exploration scientifique de l’Antarctique, depuis près de 200 ans. C’est à bord du célèbre vaisseau français L’Astrolabe que l’Antarctique fut découvert en 1840 par le navigateur Jules Dumont d’Urville, qui laissa son nom à la station française de recherche en Antarctique ainsi qu’à l’un des plus grands lycées de France. Une glorieuse histoire de recherche, qui est aussi une glorieuse histoire française : un choix parfait pour l’Exposition universelle !

Or, derrière cette vitrine, nos équipes de chercheurs font face, sur le terrain, aux problèmes quotidiens causés par le manque de moyens. Selon un rapport de la Cour des comptes publié en 2007, la base Dumont-d’Urville s’apparente à « une suite désorganisée de bâtiments délabrés ». Elle n’a même pas les moyens de mettre en œuvre les protocoles de recyclage et de minimisation d’empreinte environnementale que la France a imposés sur le continent blanc. Les Français qui participent aux activités de la base franco-italienne Concordia, en Antarctique, ne disposent pas encore d’un camp de secours digne de ce nom, ce qui les expose à des risques majeurs en cas d’incident en période hivernale.

Cet exemple illustre bien ce qu’a été l’état de la recherche française pendant de nombreuses années. Héroïques, nos fleurons se sont accommodés de dotations budgétaires allouées au compte-gouttes, de procédures administratives toujours plus lourdes, de plans de rattrapage complexes et chiches. Or, sur le long terme, le succès d’un pays en matière de recherche ne peut faire l’économie d’un véritable effort financier. Nous en avons eu le cruel rappel à l’occasion du développement des vaccins contre la covid. L’investissement américain par habitant était plus de six fois l’investissement français par habitant, contribution européenne comprise. L’organisme américain spécialisé dans la recherche médicale, le National Institute of Health, a sollicité, pour 2022, un budget de 52 milliards de dollars ; son équivalent français, l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), prévoit un montant total de dépenses cinquante fois moindre – dix fois moindre si on le rapporte aux populations respectives.

L’État a réagi en faisant voter, l’an dernier, la loi de programmation pour la recherche (LPR) 2021-2030. Je me suis investi dans ses travaux préparatoires et dans son élaboration. Elle prévoit une augmentation de 5 milliards d’euros, de 2020 à 2030, du montant annuel des crédits alloués aux principaux programmes de recherche publique. Je ne reviendrai pas ici sur les débats que nous avons eus sur l’ampleur, le calendrier et le périmètre de cette loi, ayant eu l’occasion de formuler mes motifs de satisfaction et mes critiques. Quoi qu’il en soit, cette loi a eu le grand mérite de mettre en lumière le sous-investissement chronique de la France en matière de recherche et de faire bouger les lignes de son budget pour la première fois depuis des décennies. Il importe désormais de donner à ce premier rattrapage budgétaire toute son effectivité, tandis que nos chercheurs et nos chercheuses ont plus que jamais besoin de soutien, et que la compétition mondiale repart à un rythme effréné.

Dans ce contexte, le projet de loi de finances pour 2022 soumis à l’aval de notre assemblée me semble, comme le précédent, assez paradoxal. À première vue, les crédits alloués aux trois programmes de la mission Recherche et enseignement supérieur axés sur la seule recherche, qui sont les programmes 172, 190 et 193, progressent sensiblement d’une année à l’autre, de 132 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 320 millions d’euros en crédits de paiement.

Dans cet ensemble, le programme 172 est le plus important pour les organismes de recherche, notamment l’Agence nationale de la recherche (ANR), le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), l’INSERM, l’Institut national de la recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAe), l’Institut de recherche pour le développement (IRD), l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (IFREMER) et l’Institut national de recherche en informatique et en automatique (INRIA). Ses dotations connaissent une nouvelle progression, de 405 millions d’euros en AE et de 320 millions d’euros en CP, en parfaite cohérence avec les orientations de la LPR 2021-2030. Citons en particulier l’augmentation considérable des moyens de l’ANR, qui permet un relèvement du taux de succès des demandes de financement, lequel pourrait atteindre 23 % dès cette année, contre 17 % l’an dernier.

Des années durant, les chercheurs français se sont détournés de l’ANR par découragement. Cette situation est bien triste ; aussi nous réjouissons-nous que le problème semble en passe d’être résolu.

S’agissant des autres opérateurs du programme 172, les situations sont diverses. L’INRAe, l’INSERM et, dans une moindre mesure, le CNRS ont été relativement bien dotés. En revanche, des incertitudes demeurent quant aux crédits alloués au CEA et au Centre national d’études spatiales (CNES), dont les circuits de financement sont de plus en plus tortueux et de moins en moins pérennes, en raison de transferts budgétaires vers la mission Plan de relance.

Je prendrai pour exemple la situation du CNES. Si l’on retire du programme 193 la contribution française à l’Agence spatiale européenne, le budget alloué à cet établissement semble diminuer de quelque 20 millions d’euros. En réalité, si l’on prend en compte les réallocations de crédits depuis le programme 146 et la mission Plan de relance, on constate que la dotation du CNES hors fonds propres augmente de 26 millions d’euros. Le choix du Gouvernement d’intégrer à la mission Plan de relance des dépenses qui auraient pu être retracées sur le programme d’origine nuit sensiblement à la lisibilité des documents budgétaires et, par là même, à la qualité du travail parlementaire. En outre, on peut s’interroger sur la pérennité de ces financements le jour où la mission Plan de relance, par nature temporaire, disparaîtra.

Le principal point d’avertissement de mon rapport concerne la situation de deux organismes emblématiques particulièrement peu dotés par le présent projet de loi de finances. L’Institut Paul-Émile Victor (IPEV) et l’Institut français du pétrole Énergies nouvelles (IFP‑EN) sont des établissements à faible budget – on ne parle plus en milliards, mais en millions – mais à très forte renommée.

L’IPEV, cet institut polaire groupement d’intérêt public chargé de la supervision de la présence française dans les pôles, s’avère de plus en plus incapable d’assurer ses missions et de garantir le rayonnement de notre pays dans cette région du monde hautement stratégique, d’un point de vue tant scientifique que géopolitique. Son budget annuel de 16 millions d’euros est inférieur à celui de la plupart de nos partenaires européens dans la zone – l’institut allemand est doté de 53 millions, l’institut italien de 18 millions. Dans un rapport du 27 mai dernier, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) soulignait qu’un tel budget était largement insuffisant pour permettre au groupement de moderniser ses installations, en particulier la station Dumont‑d’Urville, en terre Adélie, qui est en grande détresse et dont les représentants de l’IPEV ont estimé le coût d’une rénovation complète à 70 millions d’euros sur trente ans. De toute évidence, l’enveloppe de 14,7 millions allouée par le programme 172 pour l’année 2022 ne permettra pas d’envisager quoi que ce soit en matière de rénovation.

Alors que la France ne finance pas le début de ce plan de rénovation de 70 millions d’euros, la Nouvelle-Zélande investit 200 millions dans sa propre base, la Norvège 150 à 200 millions et l’Australie 300 millions. Quant à l’Allemagne, elle envisage un investissement de plus de 800 millions d’euros pour son navire brise-glace d’exploration. La France, quant à elle, ne dispose plus de navire brise-glace destiné à l’exploration scientifique depuis 2017. C’est un comble pour un pays comme le nôtre, dont l’histoire regorge de navigateurs prestigieux – La Pérouse, Kerguelen, Dumont d’Urville ou encore Malaurie. Alors que de nombreux pays s’équipent massivement dans ce domaine, la France ne saurait rester inerte ; c’est pourquoi nous devons apporter un soutien décisif à l’IPEV. L’amendement que j’ai déposé, en parfaite coordination avec notre collègue Francis Chouat, de la commission des finances, vise à appliquer au budget de cet établissement une modeste rustine, en attendant davantage.

S’agissant de l’IFP-EN, je ne peux que renouveler les vives inquiétudes que j’avais exprimées sans succès l’an dernier puis, il y a quelques mois, dans le cadre du Printemps de l’évaluation. La réponse rassurante que m’avait alors apportée le ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation a été démentie par les faits : le PLF 2022 prévoit certes une hausse de 0,5 % de la dotation de l’État, mais le relèvement prévu, à peine supérieur à 500 000 euros, est sans commune mesure avec l’ampleur des difficultés que traverse l’établissement. En effet, les ressources propres de l’IFP-EN, composées des redevances obtenues sur brevets et des dividendes de ses filiales, se sont effondrées en 2020 et 2021 sous l’effet de la crise économique. Les pertes, évaluées à plus de 10 millions d’euros en 2020, devraient se révéler plus importantes encore en 2021 en raison de l’effet différé de la crise sur la valorisation boursière des filiales. Face à l’urgence de la situation, l’organisme s’est engagé dans un plan d’économies drastique en réduisant sensiblement ses investissements, à contre-courant du contexte actuel, et en gelant la quasi-totalité de ses recrutements. En un an et demi, il a procédé à des réductions d’effectifs considérables, supprimant 109 équivalents temps pleins sur un effectif inférieur à 1 800 personnes.

Il paraît d’autant plus injuste de pénaliser cet organisme que celui-ci poursuit de plus belle ses efforts de recherche en matière de mobilité durable. Selon une étude internationale indépendante, l’IFP-EN se classe au quatrième rang mondial des instituts de recherche publics en termes de dépôts de brevets dans le domaine de l’énergie bas-carbone – derrière le CEA, mais devant le CNRS. L’OPECST a récemment eu l’occasion de recourir aux services de l’IFP-EN, dont nous avons pu apprécier le professionnalisme, en soutien de la mission Tiegna‑Piednoir sur la transition vers la mobilité bas-carbone. Il y a quelques jours, lors d’une visite du centre de recherche de l’IFP-EN à Solaize, j’ai été particulièrement impressionné par la qualité des projets de recherche menés, en parfaite adéquation avec les défis environnementaux contemporains. Les chercheurs sur place nous ont fièrement présenté leur prototype de moteur thermique fonctionnant directement à l’hydrogène, une technologie remarquablement originale et prometteuse pour laquelle l’IFP-EN est, à coup sûr, dans le peloton de tête de la recherche européenne. L’Institut est, par ailleurs, leader en France s’agissant des projets de recyclage du plastique, d’organisation des centres d’énergies renouvelables ou de modélisation des mobilités.

Afin d’aider cet organisme de recherche de très haut niveau et en grande fragilité, je vous proposerai, comme l’an dernier, de procéder à une réallocation significative de ses moyens. Cela ne concernera qu’une toute petite portion de l’ensemble du budget dont nous discutons ici.

J’en viens maintenant au sujet que j’ai plus particulièrement choisi d’explorer cette année dans le cadre de mon avis budgétaire. Il s’agit d’un thème original, mais dans l’air du temps. Dans le domaine de la recherche en matière environnementale, je me suis penché sur l’innovation dans le recyclage et le traitement des déchets d’activités de soins (DASS). Certes, cela ne concerne, en termes de masses, qu’une part minime de l’ensemble des déchets produits en France, mais en cette période de crise sanitaire, ce segment de déchets est devenu emblématique. Par ailleurs, il s’agit de déchets de produits particulièrement stratégiques, à haute valeur ajoutée, qui sauvent des vies et méritent toute l’attention de notre société.

La question des masques nous vient d’abord à l’esprit, notamment au vu d’une étude indépendante établissant que plus de 3 milliards de protections individuelles sont jetées chaque jour dans le monde. Mais tous les équipements utilisés par les professionnels de santé engendrent également des volumes de déchets non négligeables, parmi lesquels les déchets d’activités de soins à risque infectieux (DASRI) représenteraient plusieurs centaines de milliers de tonnes en France. La pandémie de la covid-19, au cours de laquelle les réflexes de tri se sont quelque peu perdus, a mis en lumière certains obstacles à la progression de l’économie circulaire dans les établissements de santé. Elle a montré, en particulier, toute la lourdeur du dispositif réglementaire mis en place par la France, année après année, pour garantir aux patients une protection optimale contre les infections nosocomiales.

À l’occasion de déplacements effectués dans deux établissements de santé, notamment dans l’Essonne, j’ai pu constater la pression qui s’exerce sur le corps médical pour recourir à des outils non réutilisables, c’est-à-dire destinés à être jetés très vite dans la poubelle jaune des DASRI. Cette pression n’est pas motivée par le soin, le bien-être ou la santé des patients, mais par des raisons économiques. Les DASRI doivent être broyés avant toute opération de désinfection ; en l’occurrence, cette procédure a été imposée pour des motifs sanitaires mais elle est, dans bien des cas, contre-productive. Ainsi, 80 % de ces déchets partent en déchetterie pour être incinérés, tandis que certains de nos voisins parviennent, au contraire, à un taux de 80 % de recyclage et de réemploi sans que la santé de leurs ressortissants en pâtisse. Quelques établissements se sont organisés pour limiter ce gâchis. Ainsi, l’hôpital Trousseau, à Paris, s’efforce d’employer autant que possible des dispositifs en métal réutilisables ; à force d’efforts d’organisation et d’inventivité, il est parvenu à retirer la poubelle des DASRI de ses salles opératoires, sauf besoins spécifiques, et continue à être moteur dans ce domaine.

Un bidon qui, dans certains pays, sera désinfecté pour être réutilisé, devra d’abord être broyé pour être réincorporé dans la matrice d’un nouveau bidon en France. Ce broyage systématique, qui n’existe que dans notre pays, augmente le coût de la banalisation et entrave l’établissement de filières économiques appropriées.

Sans pour autant balayer d’un revers de main toutes les procédures hygiéniques mises en place au cours des dernières décennies, mon rapport appelle à la remise en question de certains tabous, en particulier celui de la non-réutilisation du matériel médical à usage unique. Je souhaite que l’État s’engage plus avant dans la recherche en matière de recyclage des DASRI, comme cela se fait déjà dans d’autres pays comme l’Allemagne et l’Espagne.

Je vous ai donc exposé les points forts de ce projet de budget des organismes de recherche, en particulier pour l’ANR, l’INSERM, l’INRAe et le CNRS. Je le répète, le traitement infligé à l’IPEV et à l’IFP-EN n’est pas digne de nos ambitions et laisse à penser que la LPR ferait des gagnants et des perdants, ce qui n’est pas acceptable. Pour ces raisons, je donne un avis défavorable à l’adoption des crédits de la mission Recherche et enseignement supérieur.

Mme Christine Hennion (LaREM). Je vous félicite pour l’énergie et l’enthousiasme avec lesquels vous avez défendu votre avis budgétaire. Votre rapport aborde bien d’autres sujets que ceux sur lesquels vous vous êtes focalisé. Je salue aussi votre réflexion sur le thème du traitement des déchets de soins médicaux, qui pourrait paraître secondaire mais que la crise sanitaire a contribué à mettre en lumière.

Les programmes 172 et 190 à 193 regroupent les lignes budgétaires allouées aux grands organismes de recherche. Comme vous l’indiquez dans votre rapport, ce budget s’inscrit, dans ses grandes masses, dans la trajectoire votée dans la LPR, sur laquelle vous avez également travaillé. Mes chiffres sont un peu différents des vôtres car nous ne nous référons sans doute pas au même périmètre : après une augmentation de 400 millions d’euros votée l’année dernière, les organismes de recherche et la recherche universitaire bénéficient à nouveau cette année de 500 millions d’euros supplémentaires, auxquels s’ajoute la création de 650 postes. La LPR prévoit une dépense cumulée de 25 milliards d’euros jusqu’en 2030.

Comme vous l’avez indiqué, l’ANR est la grande bénéficiaire de ces budgets. Cette année, le taux de succès des demandes de financement présentées par les chercheurs sera de 23 %, ce qui représente une augmentation significative. Si vous avez regretté la confusion suscitée par l’inscription de certains crédits dans le cadre du plan de relance, vous reconnaissez tout de même que l’équation a été globalement favorable aux organismes concernés. Ainsi, le CEA a été doté en 2021 de 49 millions d’euros de plus qu’en 2020, et il en sera de même en 2022. Un mécanisme similaire a été mis en place pour le CNES.

Au vu de tous ces points positifs, le groupe La République en Marche donnera un avis favorable à ce budget de la recherche.

Je souhaite poser deux questions touchant à des sujets abordés dans votre rapport.

Hier, le Président de la République a annoncé un plan d’investissement de 30 milliards d’euros en faveur des innovations industrielles. Ces dernières doivent s’articuler en amont avec la recherche, et Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée chargée de l’industrie, a annoncé ce matin sur France Inter que 1 milliard d’euros d’investissements étaient prévus pour la recherche dans le domaine de la santé. Avez-vous pu commencer à étudier ces sujets ? Les mesures annoncées permettront-elles de combler les déficits et de régler les problèmes rencontrés par l’IPEV et l’IFP-EN ?

Lors des débats sur la LPR, nous avions évoqué la question de l’attractivité des métiers de la recherche et soulevé la difficulté à recruter de nouveaux doctorants, notamment français et européens. Avez-vous pu aborder ce sujet très important au cours de vos auditions ? Pouvez-vous dresser un premier bilan des actions de revalorisation décidées dans le cadre de cette loi ?

M. Philippe Bolo (Dem). J’ai l’impression que le mathématicien s’est muté en un biologiste qui a disséqué méthodiquement les crédits et le sujet des déchets médicaux.

La crise sanitaire a mis en lumière les besoins d’investissement de la recherche française. Le retard accumulé nous a coûté cher : les réactions doivent donc être à la hauteur des défis qu’il nous faut affronter. Je salue le respect, par ce PLF, de la trajectoire fixée par la LPR, qui se traduit par une augmentation de 500 millions d’euros des crédits affectés à la recherche en 2022. Cette somme vient s’ajouter aux 400 millions déjà obtenus en 2021. Globalement, les moyens de la mission augmentent de près de 800 millions d’euros par rapport à 2021, soit une hausse de presque 3 %. Certains crédits seront directement destinés aux personnels de recherche ; à cet égard, nous saluons les revalorisations indemnitaires à hauteur de 92 millions d’euros, qui s’ajoutent à celles déjà engagées par la loi de finances de 2021.

L’ensemble de ces mesures doivent nous permettre de mettre la France en conformité avec ses engagements européens. En vertu de la stratégie de Lisbonne, la part du PIB consacrée à la recherche et au développement doit en effet atteindre 3 %, et nous n’y sommes malheureusement pas encore parvenus. Votre démonstration est éclairante : rapportées à la population des deux pays, les ressources de l’organisme français de recherche en santé sont dix fois moindres que celles de son homologue américain.

N’oublions pas que les crédits de la mission seront complétés par les moyens prévus dans le cadre du plan de relance et par le quatrième programme d’investissements d’avenir (PIA4). Grâce à ces dispositifs complémentaires, 4,6 milliards d’euros seront investis au cours des trois prochaines années sur le périmètre strict de la recherche – cette somme dépasse 6 milliards d’euros si l’on regarde le périmètre des opérateurs concernés par la LPR. Si ces investissements doivent être salués, nous veillerons à ce qu’ils soient poursuivis et à ce que les organismes de recherche ne soient pas fragilisés par le caractère temporaire de la mission Plan de relance.

Le Président de la République a annoncé hier un plan d’investissement massif dénommé France 2030 et doté de 30 milliards d’euros. Ce plan tire les leçons de la crise sanitaire en matière de dépendance et de puissance de l’innovation ; en outre, il tient compte des transitions écologiques et démographiques à l’œuvre. Il met en évidence un certain nombre d’enjeux en lien avec la recherche : ainsi, le Président de la République a souhaité « faire émerger en France, d’ici à 2030, des réacteurs nucléaires de petite taille », « devenir leader de l’hydrogène vert en 2030 », « produire en France le premier avion bas-carbone », ou encore « avoir au moins vingt biomédicaments contre les cancers, les maladies émergentes et les maladies chroniques ». Ces objectifs soulignent et réaffirment le besoin de soutenir la recherche.

Monsieur le rapporteur pour avis, vous êtes aussi le président de l’excellent OPECST. Cet office a produit des notes très précises relatives aux moyens et aux outils disponibles pour lutter contre la covid. En quoi ces notes mettent-elles en évidence les points de vigilance sur lesquels nous devons nous appuyer pour concrétiser les objectifs de la mission ? Vous avez parlé d’effectivité, je parle de concrétisation. Comment pouvons-nous nous nourrir de l’expérience de la covid pour nous assurer que nous atteindrons bien les objectifs que nous nous fixons ?

M. Olivier Falorni (LT). En pleine épidémie de la covid-19, la France s’est lancée dans la course aux vaccins avec de bons espoirs de réussite. Or l’abandon rapide du principal projet de l’Institut Pasteur puis l’arrêt récent des travaux de Sanofi sur son vaccin à ARN ont sonné, dans nos débats, comme une énième preuve du recul de la recherche française sur la scène mondiale. Soyons plus nuancés : ces échecs ne peuvent être uniquement imputés aux capacités, notamment financières, de la recherche française. Toutefois, la crainte d’un déclin français dans ce domaine est une préoccupation légitime ; le décrochage de la France s’est accéléré ces dernières années. Dans le classement du volume des publications scientifiques, la France se retrouve désormais à la limite de l’exclusion des dix premières places, devancée par le Canada, l’Espagne et l’Australie, alors qu’elle était classée sixième en 2009. Sa productivité baisse. Pire encore, notre pays n’arrive qu’à la seizième place d’un classement basé sur un indicateur de qualité élaboré par l’Observatoire des sciences et techniques, qui s’appuie sur les publications les plus citées.

Il est encore trop tôt pour évaluer l’effet de la LPR votée en novembre dernier, mais notre groupe avait déjà regretté, lors de l’examen du texte, une montée en charge trop lente. Depuis 2000, nous nous fixons un objectif de dépenses de recherche équivalent à 3 % du PIB ; pourtant, nous stagnons à 2,2 %. Nous aurions pu être plus ambitieux.

S’agissant des grands organismes de recherche, nous exprimons notre satisfaction. Les crédits du programme 172, qui finance ces grands établissements, augmentent en 2022, dépassant la barre des 7 milliards d’euros, sous l’effet de la LPR. Toutefois, je regrette comme vous, Monsieur le rapporteur pour avis, que l’accroissement global des crédits ne se soit pas traduit par une réévaluation généralisée des subventions allouées aux grands organismes de recherche. Ainsi, l’INRAe, l’INSERM et, dans une moindre mesure, le CNRS ont été relativement bien dotés, tandis que des incertitudes demeurent s’agissant des crédits alloués au CEA et au CNES. Vous nous alertez à raison sur la situation de l’IFP-EN et de l’IPEV. Comment le Gouvernement justifie-t-il leur sous-dotation patente, dont nous nous inquiétons, comme vous ?

M. Cédric Villani, rapporteur pour avis. Les thèmes du nouveau plan de relance annoncé par le Président de la République vont incontestablement dans des directions très intéressantes pour la recherche et pour l’avenir. Cependant, je ne connais pas la durée pour laquelle ces investissements sont annoncés, et je suis incapable de déterminer leur effet sur les budgets que nous examinons ce matin. On a déjà vu que la concomitance de la montée en charge de la LPR et du plan de relance mis en œuvre par suite de la crise de la Covid avait donné lieu à certains transferts budgétaires, de sorte que les crédits supplémentaires n’étaient pas égaux à la somme des crédits annoncés dans chacun de ces deux cadres, mais étaient quand même supérieurs à ce que prévoyait une application stricte de la LPR. Dans les années à venir, les changements de périmètres compliqueront encore la tâche des rapporteurs pour avis !

Je suis tout aussi incapable de distinguer, dans les annonces faites par le Président de la République, ce qui ira à la recherche fondamentale – le CNRS est plutôt bon dans ce domaine – de ce qui sera destiné aux développements industriels. Contrairement aux crédits prévus dans la LPR, les investissements annoncés ne correspondent pas non plus nécessairement à un budget récurrent. Ce matin, au cours d’un petit-déjeuner organisé par l’OPECST, nous avons évoqué certaines techniques très importantes et prometteuses qui ont été mises à l’honneur lors de la crise de la covid et qui touchent à l’ARN messager. Depuis la découverte de ce concept, en 1961, par François Jacob et Jacques Monod, deux chercheurs français qui ont reçu le prix Nobel, de nombreux efforts ont dû être réalisés et d’extraordinaires innovations ont dû être développées avant que soient mis au point non seulement des vaccins utilisant cette technologie, mais également des protocoles thérapeutiques très intéressants susceptibles de traiter certains cancers ou certains diabètes. Les chercheurs de l’Académie des sciences et de l’Académie de médecine qui nous ont présenté ces exposés de haut vol ont insisté sur le fait que la recherche devait être résolument pluridisciplinaire et s’effectuer dans des unités mixtes permettant à des chercheurs originaires d’instituts variés – du CNRS et de l’INSERM, par exemple – de travailler ensemble. Ils ont également insisté sur l’importance d’un soutien budgétaire récurrent et des financements durables, non orientés, y compris dans la recherche fondamentale. Il faudra y être très attentif au cours des prochaines années.

La France a historiquement – et garde encore à ce jour – une plus grande force dans la recherche amont que dans la recherche aval. Nous sommes meilleurs dans tout ce qui est théorique, dans la recherche universitaire, avec les risques que cela comporte de ne rien trouver d’intéressant du point de vue de l’exploitation. En revanche, nous sommes moins bons en recherche et développement (R&D) et en recherche industrielle. Lors de la crise de la covid, nos institutions de recherche fondamentale se sont fort bien comportées, puisque des chercheurs du CNRS, de l’Institut Pasteur et de l’INSERM ont apporté assez tôt des contributions importantes à la connaissance du coronavirus, tandis que nous avons fait preuve d’un manque d’ambition, par rapport à d’autres pays, en matière de développement industriel. Une grande partie de nos entreprises et de nos start-up les plus prometteuses dans ce domaine ont préféré s’expatrier. L’exemple du chercheur français Stéphane Bancel est spectaculaire : après avoir travaillé pour BioMérieux, il est parti à la recherche de modes de financement plus agiles, tant dans le public que dans le privé, et a fondé Moderna aux États-Unis.

S’agissant de l’attractivité de nos métiers, je suis convaincu que les nouveaux contrats, les rattrapages de salaires et toutes les nouvelles formules inscrites dans la LPR vont dans la bonne direction. Je l’ai dit à plusieurs reprises, les critiques faites à la LPR au motif qu’elle augmenterait la précarité des emplois sont injustifiées, puisque les emplois qu’elle crée sont plus pérennes que les emplois très précaires qu’elle entend remplacer. Cependant, il va falloir attendre de longues années avant de voir la mise à niveau des conditions de travail et de l’attractivité des métiers de la recherche. Cela concerne les salaires, l’environnement de recherche, l’environnement administratif – dont la lourdeur actuelle en fait un dragon très décrié par nos chercheurs –, mais aussi la possibilité de prendre des risques et de financer des recherches dont l’aboutissement n’est pas certain, tant dans le secteur public que dans le secteur privé. J’insiste, ni le public, ni le privé ne peuvent tout faire à eux tout seuls.

À ma connaissance, le Gouvernement ne justifie pas le faible niveau des crédits alloués à l’IFP-EN et à l’IPEV. Je n’ai obtenu d’explications ni lorsque j’ai interpellé la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation dans le cadre du Printemps de l’évaluation, ni en discutant avec les membres de son cabinet. Je sais que nos collègues Jimmy Pahun et Francis Chouat sont retournés à la charge auprès des ministères, en particulier sur le sort de l’IPEV, sans obtenir de garanties à ce jour. Nous parlons pourtant de quelques petits millions d’euros au sein de budgets qui se comptent en centaines de millions, voire en milliards si l’on tient compte des prévisions de la LPR. Je ne vois vraiment aucune justification à ce chipotage sur les petites sommes dont ont besoin ces instituts de très haut vol, qui font la fierté de la France. C’est pourquoi j’insiste sur le bien-fondé des deux amendements que je m’apprête à vous présenter.

 

 

Article 20 et état B : Crédits du budget général

 

Amendement II-CE8 et II-CE7 du rapporteur pour avis.

M. Cédric Villani, rapporteur pour avis. L’amendement II-CE8 concerne l’Institut Paul-Émile Victor, groupement d’intérêt public (GIP) résultant, en 1992, de la fusion des Expéditions polaires françaises, créées à l’initiative de Paul-Émile Victor en février 1947, et des missions de recherche des Terres australes et antarctiques françaises (TAAF). En qualité d’agence de moyens et de compétences, ce groupement a pour mission de sélectionner, coordonner, soutenir et mettre en œuvre des projets scientifiques et technologiques, nationaux et internationaux, ainsi que d’organiser et d’animer des expéditions scientifiques.

À périmètre comparable, le budget de l’opérateur est inférieur à celui de la plupart de ses partenaires européens intervenant dans la région et il est largement insuffisant pour lui permettre de moderniser ses installations. Il donne une image honteuse de la France, non seulement par rapport à ses voisins et partenaires, mais aussi au regard de sa glorieuse histoire de nation pionnière dans l’exploration des pôles, en particulier des terres antarctiques. Les bâtiments de la station Dumont‑d’Urville sont délabrés et ne permettent plus de suivre convenablement les procédures. Le rapport présenté à l’OPECST par la députée Huguette Tiegna et la sénatrice Angèle Préville s’intitulait « La recherche française en milieu polaire : revenir dans la cour des grands ». Aujourd’hui, en Antarctique, la France joue dans la cour des petits et la situation est inacceptable.

L’amendement II-CE8 vise donc à abonder de 7 millions d’euros le budget de l’IPEV en prélevant dans les grosses masses budgétaires de la mission, là où la perte sera la moins sensible.

L’amendement II-CE7 est très similaire dans son esprit et concerne cette fois l’IFP‑EN, issu de l’Institut français du pétrole créé en 1919. Cet établissement public industriel et commercial (EPIC) est chargé des activités de recherche dans les domaines scientifique et technique en vue du développement des technologies et matériaux du futur dans les domaines de la mobilité durable et des énergies nouvelles. On y pratique la chimie, la physique, l’informatique.

Cet organisme a développé une expertise très solide sur bien des sujets et ses résultats sont extrêmement prometteurs et originaux en matière de moteur à combustion à l’hydrogène. Il ne s’agit pas d’une pile à combustion dans laquelle l’hydrogène alimente un moteur électrique, mais d’un moteur thermique alimenté à l’hydrogène et calibré en conséquence. Une telle technologie permettrait d’adapter des voitures et des camions déjà en circulation.

Enfin, l’IFP-EN se situe au quatrième rang mondial des instituts de recherche publique pour son nombre de brevets dans le domaine de la mobilité durable. Il n’y a donc aucune raison pour le laisser mourir sous nos yeux. Déjà l’an dernier, l’Institut a dû prendre des mesures drastiques pour faire face à la diminution de ses ressources propres du fait de la crise – fin des contrats à durée déterminée, non-remplacement des départs à la retraite. La prochaine étape, ce sera le plan social… Il est donc urgent de lui transférer 5 millions d’euros.

Mme Michèle Crouzet. Sur le fond, le groupe MODEM est favorable aux deux amendements. Sur la forme, nous souhaiterions qu’ils soient examinés par la commission des finances. Nous allons donc nous abstenir.

La commission rejette successivement les amendements.

Contre l’avis du rapporteur pour avis, la commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Recherche et enseignement supérieur non modifiés.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


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   LISTE DES PERSONNES auditionnées

Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (en visioconférence)

M. Jean-Charles Caudron, directeur en charge de la supervision des filières REP

Agence nationale de la recherche (ANR)

M. Thierry Damerval, président

Mme Cécile Schou, chargée de mission auprès de la direction générale

Centre national d’études spatiales (CNES) *

M. Philippe Baptiste, président

M. Pierre Tréfouret, directeur de cabinet du président

M. Antoine Seillan, directeur de la programmation et des finances

Centre national de la recherche scientifique (CNRS)

M. Antoine Petit, président-directeur général

M. Thomas Borel, chargé des relations avec le Parlement

Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) * (en visioconférence)

M. François Jacq, administrateur général

Mme Marie-Astrid Ravon-Berenguer, directrice financière

Direction générale de la prévention des risques (DGPR)

M. Vincent Coissard, sous-directeur en charge des déchets et de l’économie circulaire

Éco-organisme DASTRI *

Mme Laurence Bouret, déléguée générale

M. François-Xavier Heurton, directeur administratif et financier

M. Etienne de Crouy-Chanel, directeur du cabinet de conseil Comfluence

Éco-organisme Ecosystems *

Mme Nathalie Yserd, directrice générale

Mme Chloé Brumel - Jouan, responsable des affaires publiques

M. Antoine Baudouin, consultant au cabinet de conseil Rivington

 

Fédération Envie Autonomie

M. Philippe Robin, directeur général

Fédération hospitalière de France (FHF)

Mme Cécile Chevance, responsable du pôle Offre de soins 

M. Aurélien Soudille, responsable adjoint du pôle Offre de soins

M. Rudy Chouvel, directeur adjoint au centre hospitalier de Moulins-Yzeure

M. Jean-François Husson pharmacien hospitalier, chargé de mission

Fédération nationale des activités de la dépollution et de l’environnement (FNADE) * (en visioconférence)

M. Fabrice Rossignol, président

Mme Muriel Olivier, déléguée générale

Hôpital Armand Trousseau (Assistance publique Hôpitaux de Paris APHP - Sorbonne Université) (dans le cadre d’un déplacement effectué le 7 octobre 2021)

M. Renaud Pellé, directeur de l’établissement, secrétaire général du groupe hospitalier APHP Sorbonne Université

Mme Geneviève Clouard, directrice des achats, du développement durable et de la logistique du groupe hospitalier

Docteur Sonia Delaporte-Cerceau, anesthésiste réanimateur au département d’anesthésie et de réanimation

Mme Valérie Poirier-Burtin, responsable coordinatrice logistique

Mme Annick Marie-Louise, cadre supérieur du bloc opératoire

IFP-Énergies nouvelles (IFP-EN) *

M. Pierre-Franck Chevet, président

M. Éric Lafargue, directeur général adjoint

Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAe)

M. Philippe Mauguin, président-directeur général

M. Louis-Augustin Julien, directeur des finances et des achats

M. Marc Gauchée, conseiller du PDG pour relations institutionnelles

Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) (en visioconférence)

M. Gilles Bloch, président-directeur général

M. Damien Rousset, directeur général délégué

Mme Anne-Sophie Etzol, chargée des relations institutionnelles

Institut polaire français Paul-Émile Victor (IPEV) (en visioconférence)

M. Jérôme Chappellaz, directeur

Take a Waste (start-up) (en visioconférence)

M. Alexis Lemeillet, président

M. Mathieu Labro, directeur général

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

*  Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.

 


([1]) L’exposé des motifs parle même d’un « décrochage » de la France.

([2]) https://www.wipo.int/edocs/pubdocs/en/wipo_pub_gii_2020-intro4.pdf

([3]) Termes repris de l’exposé des motifs du projet de loi de programmation de la recherche

([4]) Conclusions du conseil européen de Barcelone (mars 2002) élaborées en référence au conseil européen de Lisbonne de mars 2000.

([5]) L’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM)

([6]) Loi n° 2020-1674 du 24 décembre 2020 de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à la recherche et à l’enseignement supérieur

 

([7]) COVID pollution: impact of COVID-19 pandemic on global plastic waste footprint (N. Benson, D. Bassey, T. Palanisami

([8]) Recherche scientifiques et technologiques pluridisciplinaires (172), Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables (190), Recherche spatiale (193)

([9]) Notamment trois députés : votre rapporteur (groupe 1 sur le financement de la recherche par projets), Philippe Berta (groupe 2 sur l’attractivité des emplois) et Francis Chouat (groupe 3 sur la recherche partenariale).

([10]) A du II du rapport annexé à la LPR.

([11]) 1 du D du même II.

([12]) 1 du A du III du rapport annexé à la LPR

([13]) II de l’article 2 de la LPR

([14]) Les organismes publics (sauf les établissements publics industriels et commerciaux dans le cadre de projets menés en collaboration avec une société commerciale) sont financés à hauteur des seuls coûts marginaux générés par le projet de recherche (point 2.4.1 du règlement financier).

([15]) 8 % pour l’établissement gestionnaire et 11 % pour l’établissement hébergeur.

([16]) Hors contribution française à l’Agence spatiale européenne

([17]) 15 % des recrutements annuels maximum dans les universités et 20 % dans les organismes de recherche

([18]) Dispositif en cours de validation au niveau ministériel

([19]) A du III du rapport annexé à la LPR.

([20]) 10 % pour l’établissement gestionnaire au titre des frais généraux, 13 % pour l’établissement hébergeur et 2 % pour les laboratoires.

([21]) Plan « INRAe 2030 », validé en décembre 2020.

([22]) Entre la dotation inscrite en 2021 (avant mise en réserve) et celle budgétée en 2022 (avant mise en réserve).

([23]) Épidémie et conditions de vie sous la Covid-19

([24]) Agence née le 1er janvier 2021 de la fusion de l’Agence nationale de recherche sur le SIDA et les hépatites virales (ANRS) et le consortium REACTing de lutte contre les maladies émergentes

([25]) Instance de concertation composée de différents acteurs de la recherche impliquant la personne humaine dont la mission est de réguler les études cliniques et précliniques portant sur la Covid-19 afin d’accélérer celles qui entrent dans le champ des priorités nationales et sont les plus prometteuses

([26]) Rénovation thermique des bâtiments et préservation de l’emploi en recherche et développement

([27]) Via l’Objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM)

([28]) Les deux premières bactéries sont des staphylocoques, responsables de diverses infections nasales, cutanées ou urinaires, tandis que la troisième cause de nombreux troubles digestifs chez l’être humain.

([29]) Dispositif mis en place dans le cadre du PIA 3

([30]) Note n° 24 présentée par Mme Catherine Procaccia, sénateur

([31]) Le premier fonds est consacré aux opérations d’assainissement et de démantèlement des installations nucléaires (740 millions d’euros par an depuis 2016). Le second fonds est lié à la participation de la France au projet de réacteur de recherche civil à fusion nucléaire ITER (152 millions d’euros en 2021).

([32]) En compensation de la mise à zéro des crédits alloués au titre du programme 191 « Recherche duale »

([33]) Encadrement des aides d’État à la recherche, au développement et à l’innovation (2014/C 198/01) - 2.1.1.

([34]) Au titre de la participation du CNES au commandement militaire de l’espace

([35]) Montant modifié par rapport au PAP en raison d’une erreur probable au niveau de la dotation du P146 (150 millions d’euros)

([36]) Avant mise en réserve

([37]) Au titre de la participation du CNES au commandement militaire de l’espace.

([38]) Action n° 02 (Souveraineté technologique et résilience) du programme « Compétitivité ».

([39]) Les dépenses présentées dans le tableau ci-dessous ne comprennent pas les charges non décaissables (amortissements et dépréciations d’actifs).

([40]) En moyenne, le cours du baril de Brent s’élève à 42 dollars en 2020, contre 64 dollars l’année précédente.

([41]) Les dividendes ne peuvent être versés aux actionnaires que si le résultat de l’exercice est connu et certifié, soit généralement au début de l’année n + 1.

([42]) Un tel moteur permettrait de s’affranchir des piles à combustibles, traditionnellement utilisées pour convertir l’hydrogène en énergie électrique.

([43]) Ratio effectué sur les crédits de paiement

([44]) La Terre Adélie, nommée en hommage à l’épouse de Dumont d’Urville (Adèle), est un des districts des TAAF. Ce territoire, situé sur le continent antarctique, s’étend sur une aire de 432 000 kilomètres carrés.

([45]) Les pôles sont une zone de contact entre l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN) et la Russie. La Chine, aujourd’hui, déploie des bases en Antarctique en dehors de tout cadre international et offre à de plus en plus de ses concitoyens des prestations de « tourisme polaire ».

([46]) Rapport de Mmes Huguette Tiegna et Angèle Préville publié à l’Assemblée nationale sous le n° 4202 « La recherche française en milieu polaire : revenir dans la cour des grands » (page 23).

([47]) C’est-à-dire en le limitant aux seules dépenses de gestion des infrastructures et de logistique

([48]) Unita Tecnica Antardide (Unité technique antarctique) de l’Agence italienne pour les nouvelles technologies, l’énergie et le développement durable (ENEA).

([49]) Rapport de M. Christian Gaudin publié à l’Assemblée nationale sous le n° 3702 « La place de la France dans les enjeux internationaux de la recherche en milieu polaire : le cas de l’Antarctique ».

([50]) Navire d’exploration océanographique et de ravitaillement exploité entre 1986 et 2017. Le nom du bâtiment est celui donné par le Comte de La Pérouse à l’un de ses deux navires disparus dans la mer de Corail en 1788 et par Jules Dumont d’Urville à son propre navire d’exploration.

([51]) European Project for Ice Coring in Antarctica : projet consistant à effectuer des carottages dans la calotte glaciaire afin d’étudier les transitions climatiques préhistoriques.

([52]) Le camp de secours permet aux membres d’une base d’avoir un refuge en cas de destruction du camp de base et d’impossibilité de rapatriement (cas fréquent en période hivernale).

([53]) PPR mis en place fin 2019 dans le cadre du PIA3 et confié au CNRS et à l’IFREMER. Doté de 40 millions d’euros, le programme comporte un premier appel à projets « Un océan de solutions » qui doit être clôturé en novembre prochain.

([54]) Décision n° 2014/955/UE du 18/12/14 modifiant la décision 2000/532/CE établissant la liste des déchets, conformément à la directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil.

([55]) Brochure « Déchets d’activités de soins à risques : comment les éliminer » (ministère de la santé, 2009)

([56]) Organisation de la production de déchets (20 octobre 2010)

([57]) Bilan 2012 de la production de déchets en France (CGDD - mars 2015)

([58]) Chiffres donnés en audition par la FHF. Les données n’intègrent pas les coûts d’enlèvement et de transport

([59]) Redistribution aux associations si les MNU sont encore utilisables. Dans le cas contraire, les emballages sont recyclés et les médicaments en tant que tels sont incinérés.

([60]) Rapport d’activité CYCLAMED 2020 (page 26)

([61]) Cf. 1 du III infra

([62]) Cf. 2 du I infra

([63]) Brochure précitée (cf. note n° 2 en bas de la page 29)

([64]) Article R. 1335-1 du code de la santé publique

([65]) Blouses, masques, etc.

([66]) Art. R. 1335-1 du code de la santé publique précité

([67]) ADEME : étude sur le bilan du traitement des déchets d’activités de soins à risques infectieux en France (année 2011 et perspectives 2012)

([68]) « Les déchets d’activités de soins et assimilés définis à l’article R. 1335-1 doivent être, dès leur production, séparés des autres déchets. »

([69]) Annexe 2 au guide du ministère de la santé de 2009 (précité)

([70]) Le centre hospitalier de Moulins Yzeure (03) a, ainsi, mis en place un jeu de cartes pour aider les personnels à bien identifier les DASRI.

([71]) Données publiées par le Haut Conseil de la santé publique en 2020

([72]) Unités traitant environ 80 % des DASRI produits (cf. infra)

([73]) Avis relatif aux modalités d’incinération des déchets d’activités de soins à risques infectieux (DASRI) et à la rationalisation des DASRI dans le contexte de l’épidémie de Covid-19

([74]) Avis rendu relatif à la gestion des déchets d’activités de soins dans le cadre de l’épidémie de Covid-19 du 12 novembre 2020

([75]) Article R. 1335-8 du code de la santé publique

([76]) Il est précisé que, pour des raisons de sécurité, les DASRI acheminés dans une UVE ne peuvent représenter plus de 10 % du total des déchets traités.

([77]) Pour une production de DASRI de plus de 100 kilogrammes par semaine (arrêté du 7 septembre 1999 relatif aux modalités d’entreposage des déchets d’activités de soins à risques infectieux et assimilés et des pièces anatomiques)

([78]) Dans le cadre du dispositif France Expérimentation

([79]) Arrêté du 28 mars 2019 relatif à la mise en œuvre d’une expérimentation portant sur la valorisation des déchets issus du prétraitement par désinfection des déchets d’activités de soins à risques infectieux et assimilés

([80]) Rapport d’information n° 1347 de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire (Assemblée nationale) du 10 septembre 2013.

([81]) Gestion des médicaments non utilisés (MNU) des établissements de santé et médico-sociaux avec pharmacie à usage intérieur (PUI) et des centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA) (novembre 2017).

([82]) 9° de l’article L. 541-10-1 du code de l’environnement

([83]) Article R. 1335-8-1 du code de la santé publique, issu du décret n° 2021-1176 du 10 septembre 2021

([84]) Les contrats à impact sont des appels à manifestation d’intérêts initiés et financés par l’ADEME en application de l’article 15 de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire.

([85]) Art. L. 5212-1-1 du code de la sécurité sociale, issu de la LFSS 2020

([86]) Art. R. 6111-21 du code de la santé publique : « les dispositifs médicaux à usage unique ne sont pas réutilisés ».

([87]) Recommandation de l’Institut Robert Koch et de l’Institut fédéral pour les médicaments et les dispositifs médicaux (Règles d’hygiène à suivre pour le retraitement des dispositifs médicaux – 2001)

([88]) Article 17 du règlement (UE) 2017/745 du 5 avril 2017

([89]) Circulaire n° 669 du 14 avril 1986 relative à l’interdiction de restériliser la matériel médico-chirurgical non réutilisable dit « à usage unique »

([90]) Circulaire DGS/SQ 3, DGS/PH 2 - DH/EM 1 n° 51 du 29 décembre 1994 relative à l’utilisation des dispositifs médicaux stériles à usage unique dans les établissements de santé publics et privés

([91]) Point prevalence survey of healthcare-associated infections and antimicrobial use in European acute care hospitals 2011–2012 (juillet 2013)

([92]) Accélérateur pour la Recherche en Radiochimie et Oncologie à Nantes Atlantique (GIP basé à Nantes)

([93]) Rapport 2020 de l’éco-organisme concerné (CITEO)

([94]) Selon la FHF (cf. supra)

([95]) Rapport 2020 de la Confédération française de l’industrie des papiers, cartons et celluloses (COPACEL)