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N° 285

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 5 octobre 2022.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES
SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2023 (n° 273)

TOME IX

ÉCONOMIE

ENTREPRISES

PAR M. Xavier Albertini

Député

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 Voir les numéros : 273 (Tome III, Annexe 21).


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SOMMAIRE

Pages

introDuction

premiÈRE PARTIE : Une programmation expansive marquant l’engagement de l’ÉTAT AUPRÈS DES ENTREPRISES dans une conjoncture difficile

I. UN RENFORCEMENT DÉTERMINANT DES CRÉDITS ALLOUÉS À la compÉtitivitÉ daNs le cadre de L’action 23

A. Un relÈvement massif des crÉdits d’intervention pour la compensation carbone

B. Une action 23 confortÉe par des mesures de pÉrimÈtre et une revalorisation des dÉpenses d’intervention

II. des financements accrus ou renouvelÉs POUR D’autres dispositifs contribuant À soutenir l’Économie

A. Une progression contenue de l’action 04 dans un cadre stabilisÉ

1. Un financement de certaines prestations de La Poste ayant atteint un rythme de croisière

2. Une progression mineure des autres postes de dépenses

B. Une revalorisation des dispositifs de soutien À l’export de l’action 07

C. Une rÉduction du volume global des dÉpenses fiscales en consÉquence de l’extinction de dispositifs

III. la prÉservation des capacitÉs d’action des ORGANISMES de rÉgulation par une consolidation des ressources

A. L’AutoritÉ de rÉgulation des communications Électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP)

B. L’AutoritÉ de la concurrence

C. La Direction gÉnÉrale de la concurrence, de la consommation et de la rÉpression des fraudes (DGCCRF)

seconde partie : le soutien public aux industries Électro-intensives

I. un soutien public par des outils financiers qui semble trouver ses limites face À une conjoncture exceptionnelle

A. des dispositifs assez ÉtoffÉs visant À prÉserver la compétitivite des ei et hei

1. Des mesures fiscales destinées à atténuer les charges inhérentes à une consommation importante d’électricité

2. Un mécanisme de compensation du coût carbone

3. Une aide conjoncturelle face aux répercussions de la guerre en Ukraine

B. une protection des Électro-intensifs amoindrie par les dÉrÈglements du marchÉ de l’ÉLECTRICITÉ

1. Une envolée des cours de l’électricité potentiellement source de désavantages comparatifs

2. Une capacité de résorption des coûts très largement relativisée

II. un nécessaire appui au renouvellement des conditions d’approvisionnement et de consommation des ei et des hei

A. des mÉcanismes À concevoir afin d’assurer une certaine rÉgulation sur le marchÉ de l’ÉlectricitÉ

1. Favoriser un découplage entre prix de l’électricité et prix du gaz ?

2. Contribuer au développement d’instruments de couverture en France

3. Exploiter pleinement l’énergie fournie par le parc nucléaire français

B. les CONTRATS À LONG TERME : une autre voie pour la sÉcurisation de la fourniture d’ÉlectricitÉ aux ei et hei

1. Des leçons à tirer du consortium Exeltium

2. Une diversité de montages envisageables

C. appuyer les efforts de SOBRIÉTÉ ÉNERGÉTIQUE

1. Accompagner le renouvellement des modes de production

2. Mieux récompenser les services rendus au réseau électrique

EXAMEN EN COMMISSION

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES


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introDuction

Le programme 134 « Développement des entreprises et Régulations » constitue le cadre budgétaire de gestion des ressources humaines, des moyens matériels et financiers consacrés aux politiques publiques ayant deux objets : d’une part, le développement de la compétitivité des entreprises et l’établissement d’un environnement économique propice à la croissance et à l’emploi ; d’autre part, la régulation et la sécurisation des marchés économiques, ainsi que la protection des consommateurs.

Comme il a pu être observé, la maquette du programme 134 ne porte pas l’ensemble des dispositifs ayant pour objet le soutien des entreprises françaises. En pratique, son périmètre comprend en effet trois types d’actions : en premier lieu, des actions dévolues au financement du soutien au développement des entreprises à l’échelle nationale et internationale (actions 07, 08 et 23) ; en second lieu, des actions destinées à porter les moyens des autorités administratives et des services ministériels chargés de missions de régulation (action 13, 15, 24) ; en dernier lieu, une action spécifique pour le développement des postes, des télécommunications et du numérique (action 04).

Toutefois, c’est à l’aune de la contribution apportée à la réalisation de cet objectif fondamental que doit être appréciée la pertinence de la programmation présentée au Parlement. De ce point de vue, face à une hausse des prix qui bouleverse les repères et pèse sur les ressources des entreprises et des particuliers, la programmation pour 2023 comporte des mesures dont nul ne pourra contester l’utilité : en premier lieu, elle renforce de manière très substantielle le financement de la compensation carbone dont bénéficient les industries électro-intensives ; en second lieu, elle veille à assurer le fonctionnement du service postal universel et l’exercice des missions d’aménagement du territoire confiée au groupe La Poste ; en troisième lieu, elle consolide les ressources attribuées aux autorités administratives indépendantes et aux services ministériels chargés de régulation et de la sécurisation des marchés économiques, ainsi que la protection des consommateurs.

C’est la raison pour laquelle le rapporteur émet un avis favorable à l’adoption des crédits et emplois inscrits au programme 134 de la mission « Économie ». Un tel satisfecit ne doit cependant pas conduire à mésestimer les enjeux que recèle, pour certaines industries, la conjoncture exceptionnelle provoquée par la hausse des prix de l’énergie et des coûts de production.

Dans cette optique, le rapporteur a choisi de consacrer la seconde partie de son avis au soutien public aux industries électro-intensives.


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   premiÈRE PARTIE :
Une programmation expansive marquant l’engagement de l’ÉTAT AUPRÈS DES ENTREPRISES dans une conjoncture difficile

Le projet de loi de finances initiale pour 2023 (PLF) propose d’allouer au programme 134 près de 2 273,48 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 2 279,01 millions d’euros en crédits de paiement (CP).

Par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2022, le montant des AE connaît une hausse de 26,98 %, tandis que la croissance des CP atteint 26,95 %, soit à un rythme à peine moins soutenu qu’entre les exercices 2021 et 2022. Nonobstant les effets de périmètre, la programmation proposée pour l’exercice 2023 repose sur un niveau de dépense inégalé. Ainsi que le montre le tableau ci-après, le montant total des crédits demandés au titre du programme 134 aura plus que doublé par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2019, tant en autorisations d’engagement (+ 153,11 %) qu’en crédits de paiement (149,82 %).

● Comme observé pour la précédente programmation budgétaire, la dynamique des crédits demandés procède avant tout de l’évolution des crédits pour dépenses d’intervention : portés à, respectivement, 1 591,49 millions d’euros et 1 593,53 millions d’euros, les AE et CP demandés sur le titre VI enregistrent une hausse de 33,25 % et de 33,17 % par rapport au PLF 2022, du fait des montants inscrits à l’action 23 (+ 33,17 % en CP). S’élevant à un peu plus de 283,21 millions d’euros, les crédits de paiement pour dépenses de fonctionnement (titre III) bénéficient d’une hausse comparable (+ 35,69 %), en conséquence des ressources prévues à l’action 07 « Développement international des entreprises et attractivité du territoire » et à l’action 23. Quoiqu’en très forte progression (+ 685,34 % en CP), les crédits pour dépenses d’investissement (titre V) conservent un caractère on ne peut plus secondaire à l’échelle du programme 134 (avec 4,53 millions d’euros en AE et 4,55 millions d’euros en CP).

Le déterminant quasi exclusif du poids atteint par le programme 134 réside dans le renforcement très spectaculaire du financement de l’action 23 « Industrie et services ». Contrairement au PLF 2022, le montant des crédits demandés pour l’action 04 ne constitue qu’un facteur secondaire de la progression des crédits.

● Sur le plan des dépenses de personnel (titre II), la programmation pour 2023 se distingue de celle de l’exercice 2022 par une hausse des crédits demandés de 2,96 % : ceux-ci passent d’un peu plus de 386,25 millions d’euros à 397,69 millions d’euros (en AE et CP), pour l’essentiel du fait des ressources allouées à l’action 24 « Régulation concurrentielle des marchés, protection économique et sécurité du consommateur » et, à un moindre degré, à l’action 23.

Après la baisse prévue par le PLF 2022, le mouvement correspond pour l’essentiel au relèvement du plafond d’emplois, porté de 4 448 équivalents temps plein travaillés (ETPT) à 4 478 ETPT (+ 30), avec un schéma d’emploi positif de 105 ETP. À l’échelle du programme, l’effectif maximal autorisé par le Parlement demeure toutefois en deçà de celui fixé par la LFI 2021 (soit 4 532 ETPT). À un moindre degré, la progression des crédits de titre II reflète l’impact de la revalorisation du point d’indice de la fonction publique, dont le coût peut être estimé à 3,55 millions d’euros d’après les réponses au questionnaire budgétaire.

ÉVOLUTION DES crÉdits dU PROGRAMME 134 « dÉveloppements des entrepriseset rÉgulatons » ENTRE LES PLF 2020 ET 2023

(En millions d’euros)

ACTIONS

 

 

LFI

2019

LFI

2020

LFI

2021

LFI

2022

 

PLF

2023

▲PLF

2023/LFI 2022

04- Développement des postes, des télécommunications et du numérique

AE

176,41

167,95

243,50

715,16

738,62

+ 3,28 %

CP

181,39

167,95

243,50

715,16

738,62

+ 3,28 %

07- Développement international des entreprises et attractivité du territoire

AE

149,93

143,80

140,22

135,66

184,88

+ 36,28 %

CP

149,93

143,80

140,22

135,66

184,88

+ 36,28 %

08- Expertise, conseil et inspection

AE

18,80

18,03

17,77

16,65

16,28

 2,22 %

CP

18,80

18,03

17,77

16,65

16,28

 2,22 %

13- Régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP)

AE

20,64

21,06

21,52

21,86

22,20

+ 1,56 %

CP

22,48

22,90

23,36

23,90

24,24

+ 1,42 %

15- Mise en œuvre du droit de la concurrence (Autorité de la concurrence)

AE

21,44

21,76

22,55

22,86

22,99

+ 0,57 %

CP

22,54

23,06

23,85

24,16

24,39

+ 0,95 %

22- Contrats à impact social

AE

0,070

0,03

SO

SO

SO

SO

CP

0,019

0,04

SO

SO

SO

SO

23- Industrie et services

AE

278,75

435,26

553,48

637,45

1 041,69

+ 63,42 %

CP

286,47

444,93

558,60

639,72

1 043,73

+ 63,15 %

24- Régulation concurrentielle des marchés, protection économique et sécurité du consommateur

AE

232,19

226,02

235,38

240,76

246,84

+ 2,53 %

CP

230,64

226,72

235,45

239,43

246,88

+ 3,11 %

25- Mesures exceptionnelles dans le cadre de la crise sanitaire

AE

SO

SO

SO

0

SO

SO

CP

SO

SO

SO

0

SO

SO

TOTAL

AE

898,23

1 033,90

1 234,41

1 790,40

2 273,50

+ 26,98 %

CP

912,27

1 047,43

1 242,74

1 795,13

2 279,02

+ 26,96 %

Source : projets annuels de performances pour 2020, 2021 et 2023.

 

 

 

I.   UN RENFORCEMENT DÉTERMINANT DES CRÉDITS ALLOUÉS À la compÉtitivitÉ daNs le cadre de L’action 23

De fait, la hausse des crédits du programme 134 découle pour l’essentiel d’un abondement massif des crédits de l’action 23 « Industrie et services ». En effet, la programmation pour 2023 comporte l’inscription de près de 1 041,69 millions d’euros en AE et de 1 043,73 millions d’euros en CP (contre, respectivement, 637,45 millions et 639,72 millions d’euros en LFI 2022). Ces montants représentent une hausse de 63,42 % des autorisations d’engagement et de 63,15 % pour les crédits de paiement, soit une nouvelle hausse substantielle après l’envolée des financements demandés en 2022. Toutefois, ainsi que le montre le tableau ci-dessus, il s’agit là d’un nouveau sommet par rapport aux crédits inscrits au titre de l’action 23 depuis la LFI pour 2019.

Dans ce mouvement, l’augmentation des crédits d’intervention destinés à compenser la charge du prix du CO2 accapare une part prépondérante des ressources nouvelles demandées. Pour le reste, la programmation repose sur des ajustements relativement secondaires du périmètre et des dépenses de l’action 23.

A.   Un relÈvement massif des crÉdits d’intervention pour la compensation carbone

Au titre du du PLF pour 2023, il est proposé plus qu’un doublement du financement de la compensation carbone des sites très électro-intensifs : le montant des crédits demandés sur le titre VI est porté de 344,21 millions d’euros à 856 millions d’euros en AE et CP (soit une hausse de 148,69 %).

Régi par l’article L. 122-8 du code de l’énergie, le dispositif s’adresse aux entreprises électro-intensives (aluminium, sidérurgie, papier, carton, chimie, etc.) exposées à un risque significatif de délocalisation, à raison des prix du CO2 qui résulte du système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre répercutés sur les prix de l’électricité. La compensation donne lieu au versement d’une aide destinée à couvrir en partie le cours du carbone inclus dans le prix de l’électricité.

D’après les documents budgétaires, le montant des crédits demandés pour 2023 correspond :

– à la compensation des coûts indirects supportés au titre de l’exercice 2022 (à hauteur de 75 %) ;

– au versement d’une avance sur une partie des coûts indirects supportés en 2023.

Les montants suivant la hausse progressive du cours du carbone.

B.   Une action 23 confortÉe par des mesures de pÉrimÈtre et une revalorisation des dÉpenses d’intervention

● Sur le plan des crédits pour dépenses d’intervention et de fonctionnement, la nouveauté majeure de la programmation budgétaire pour 2023 réside dans les crédits affectés pour le financement des dispositifs de soutien au tourisme (pour un total de 35,49 millions d’euros).

Cette enveloppe provient du programme 185 « Diplomatie culturelle et d’influence » de la mission « Action extérieure de l’État ». Elle traduit au plan budgétaire le transfert de la compétence « tourisme » au ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique à compter de 2023 ([1]). La somme transférée au titre de l’exercice 2023 correspond :

– à la subvention pour charges de services publics versée à l’opérateur Atout France ([2]) (28,7 millions d’euros en AE et CP sur le titre III) ;

– au financement de la mise en œuvre du plan « Destination France » ([3]) (8,05 millions d’euros en AE et 10,05 millions d’euros en CP sur le titre VI) : les crédits ont notamment pour objet des actions consacrées à la valorisation et au renforcement d’une offre d’ingénierie touristique pour les territoires, ainsi que la poursuite des actions de la « Tourisme tech ».

Les autres postes de dépenses de l’action bénéficient d’une relative stabilité de leurs ressources. Il en va ainsi en ce qui concerne le financement :

– du soutien à la gouvernance des pôles de compétitivité (avec une ligne de 9 millions d’euros en AE et CP, stable par rapport à la LFI 2022 ) : d’après la secrétaire générale de la direction générale des entreprises (DGE), la stabilité des crédits vise à maintenir l’engagement de l’État au sein des pôles, même si les régions y jouent désormais un rôle de premier plan en raison de leurs compétences ; la nouvelle période de quatre ans ouverte en 2023 aura pour enjeu une meilleure coordination entre les priorités régionales et nationales ;

– des centres techniques industriels et organismes assimilés (7,23 millions d’euros en AE et CP contre 6,38 millions d’euros en LFI pour 2022) : d’après le projet annuel de performances pour 2023, devraient bénéficier de la subvention l’Institut français de la mode, l’Institut français du textile et de l’habillement (IFTH) et le Centre technique de la teinturerie et du nettoyage (CCTN) ;

– de la subvention à l’Association française de normalisation (6,43 millions d’euros en AE et en CP).

● Sur le plan des dépenses de personnel (titre II), la programmation budgétaire 2023 se caractérise par une progression de 3,80 % des crédits demandés en AE et CP (114,76 millions d’euros contre 110,57 millions d’euros en LFI pour 2022). Cette hausse constitue la conséquence d’un relèvement du plafond d’emploi de la direction générale des entreprises, porté à 1 174 ETPT (avec la création de 19 ETP). D’après les perspectives tracées par Mme Barbara Siguret, secrétaire générale de la DGE, les postes supplémentaires devraient servir à conforter les ressources humaines affectées à la réalisation de trois objectifs stratégiques en 2023:

– le soutien à l’économie de proximité ;

– la transition écologique ;

– la transition numérique et le soutien à la French Tech.

II.   des financements accrus ou renouvelÉs POUR D’autres dispositifs contribuant À soutenir l’Économie

A.   Une progression contenue de l’action 04 dans un cadre stabilisÉ

L’action 04 du programme 134 se voit accorder la somme de 738,62 millions d’euros (en autorisations d’engagement et en crédits de paiement), soit une dotation en hausse de 3,28 % par rapport à la LFI pour 2022. Ce chiffre traduit une nette décélération par rapport à la croissance spectaculaire observée dans le cadre de la LFI pour 2022 (+ 187,99 % en AE et en 188,18 % en CP). À l’échelle du programme 134, l’action 04 ne constitue plus le premier facteur d’accroissement des crédits demandés et occupe désormais le second rang en termes de financements. Cette évolution procède de deux facteurs.

1.   Un financement de certaines prestations de La Poste ayant atteint un rythme de croisière

Cette stabilité peut être observée à propos de deux lignes budgétaires visant le maintien d’activités d’intérêt général confiées au groupe La Poste :

– le financement du service postal universel, maintenu à 520 millions d’euros en AE et CP (crédits de titre VI) : établie dans le PLF pour 2022, cette dotation vise à accompagner la mutation de cette mission, de garantir sa pérennité et son caractère abordable ; son montant pour 2023 répond aux spécifications de l’avenant au contrat d’entreprises signé entre l’État et La Poste le 16 janvier 2022 ; celui-ci prévoit que la dotation budgétaire versée en 2023 au titre de l’exercice 2022 pourra varier, entre 2021 et 2025, dans une fourchette comprise entre 500 millions et 520 millions d’euros, selon un barème fondé le taux de lettre verte effectivement livrée en J + 2 ; on notera que le financement du service postal universel intègre désormais les crédits jusque-là attribués au dispositif de la « franchise postale » ;

– la mission d’aménagement du territoire de La Poste (74 millions d’euros en AE et CP – crédits de titre VI) : la programmation 2023 reconduit cette ligne budgétaire à un montant identique à celui prévu dans le cadre de la LFI pour 2022 ; le financement prend la forme d’une subvention accordée par l’État depuis 2020, afin de remédier à l’insuffisance des ressources fiscales allouées au Fonds postal national de péréquation territoriale (FPNPT).

En revanche, le financement de la mission de transport et de distribution de la presse assumée par La Poste fait l’objet d’un abondement notable par rapport à la programmation 2022 : d’après le projet annuel de performances, le montant des crédits prévus atteint 40 millions d’euros en AE et CP (contre 16,1 millions programmés en 2022). L’évolution de la dotation participe de la mise en œuvre du protocole d’accord signé le 14 février 2022 entre l’État et La Poste, lequel vise à réaliser une réforme globale de la distribution de la presse.

2.   Une progression mineure des autres postes de dépenses

De fait, la subvention pour charges de service public versée à l’Agence nationale des fréquences (ANFR) affiche une quasi stabilité : le montant des crédits prévus en 2023 est fixé à 41,55 millions d’euros en AE et CP, contre 40,05 millions d’euros dans le cadre de la programmation 2022. D’après les documents budgétaires, cette hausse doit répondre à deux besoins : en premier lieu, soutenir l’agence dans la préparation des Jeux olympiques et paralympiques organisés en 2024 à Paris ; en second lieu, améliorer la surveillance du marché des équipements de dispositif de contrôle parental.

Au-delà, le seul véritable apport significatif à l’échelle de l’action réside dans la reprise du financement du programme « French Tech Tremplin » ([4]). Relevant initialement du Plan « Investissements d’avenir 3 » (PIA 3), le programme intègre le programme 134 avec une ligne prévue de 13 millions d’euros, d’après le projet annuel de performances.

B.   Une revalorisation des dispositifs de soutien À l’export de l’action 07

Le projet annuel de performances pour 2023 prévoit de doter l’action 07 de près de 184,88 millions d’euros en AE et CP. Par rapport à la LFI pour 2022, le montant des crédits demandés augmente de 36,28 % (après une baisse de 3,25 % pour l’exercice 2022). La revalorisation très nette des ressources allouées reflète l’évolution de deux principaux postes de dépenses.

● En premier lieu, la programmation 2023 repose sur une forte hausse des crédits alloués à la rémunération de BPIfrance Assurance Export au titre des prestations accomplies pour le compte de l’État ([5]).

Le projet annuel de performances prévoit une ligne budgétaire de 78,1 millions d’euros en AE et CP, soit un montant en progression de 30,91 millions d’euros. D’après les documents budgétaires, la mesure poursuit plusieurs objectifs :

– couvrir les coûts directs du transfert des missions financières jusque-là accomplies par Natixis à compter du 1er janvier 2023 et assurer le portage de ces nouvelles missions ;

– renforcer les capacités propres de BPIfrance AE (surtout en termes de gestion des sinistres et de recouvrement) ;

– financer l’assujettissement à la TVA au taux normal, à compter du 1e janvier 2023, de l’ensemble de prestations réalisées par BPIfrance AE.

● En second lieu, la programmation pour 2023 intègre une hausse substantielle de la subvention pour charges de service public à Business France, établie à 100,7 millions d’euros en AE et CP (contre 85,12 millions d’euros en 2022). D’après les réponses au questionnaire budgétaire, la révision s’inscrit dans la poursuite de la réforme engagée des dispositifs de soutien à l’exportation et se veut conforme au contrat d’objectifs et de moyens (COM) applicable pour la période 2023-2028.

Accessoirement, on notera que l’action 07 finance la participation de la France à la future exposition universelle d’Osaka-Kansaï en 2025. À cet effet, le projet annuel de performances prévoit 5,4 millions d’euros en AE et CP.

C.   Une rÉduction du volume global des dÉpenses fiscales en consÉquence de l’extinction de dispositifs

Le projet annuel de performances recense soixante-dix dispositifs en vigueur pour un montant global de 10,046 milliards d’euros en 2023, contre 18,636 milliards d’euros estimés pour l’exercice 2022. Les dispositifs portés par le programme 134 visent notamment à soutenir :

– le tourisme et la restauration, par le biais de quatre dispositifs : le taux réduit de TVA de 10 % sur les campings (246 millions d’euros en 2022), le taux réduit de TVA de 10 % sur les nuits d’hôtel (520 millions d’euros en 2022) ; l’exemption de l’assiette d’impôt sur le revenu de la part des chèques vacances payés par les entreprises (94 millions d’euros prévus en 2022) ;

– les industries électro-intensives, par 4 dispositifs prenant la forme de réductions et d’exemptions d’accise sur l’électricité (118 millions d’euros estimés en 2022) ;

– le développement des fonds propres des entreprises et le développement des jeunes entreprises, par le biais de 10 dispositifs (593 millions d’euros attendus en 2023) ;

– l’action en faveur des impatriés (200 millions d’euros prévus en 2022).

Ainsi que le montre le tableau ci-après, l’évolution des dépenses fiscales se caractérise par une assez grande disparité suivant les politiques publiques auxquelles elles contribuent.

Les dÉpenses fiscales par politique publique en 2023

Source : réponses au questionnaire budgétaire pour le projet de loi de finances initiale 2023.

La baisse du volume globale de dépenses fiscales résulte de l’extinction attendue pour 2023 de près de douze dispositifs, certains destinés à contrecarrer les effets de la crise sanitaires ou participant à la mise en œuvre du plan de relance de l’économie, d’autres revêtant un caractère plus structurel. Parmi ceux-ci, contribuent particulièrement à la baisse des dépenses fiscales :

– la transformation du crédit d’impôt pour la compétitivité et emploi (CICE), en baisse de charges pérenne (processus engagé en 2019) ([6]) ;

– l’extinction du crédit d’impôt pour les maîtres restaurateurs ;

– la déduction exceptionnelle d’impôt sur les sociétés à 40 % du prix de revient de certains biens limitativement énumérés, pratiqués sur la durée normale d’utilisation du bien ([7]).

III.   la prÉservation des capacitÉs d’action des ORGANISMES de rÉgulation par une consolidation des ressources

A.   L’AutoritÉ de rÉgulation des communications Électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP)

Adossée à l’action 13, l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) se présente comme l’autorité administrative indépendante chargée aujourd’hui d’assurer, pour le compte de l’État, la régulation des secteurs des communications électroniques et des postes, ainsi que de la distribution de la presse.

La programmation budgétaire pour 2023 prévoit d’allouer à l’autorité près de 22,20 millions d’euros en AE et un peu moins de 24,24 millions d’euros en CP (contre 21,86 millions et 23,90 millions d’euros en LFI 2022). La dotation budgétaire bénéficie ainsi d’une revalorisation limitée par rapport à la LFI pour 2022 (+ 1,53 % en AE et +1,40 % en CP). Ce mouvement reflète pour l’essentiel :

● un quasi gel des crédits prévus en fonctionnement (5,36 millions d’euros en AE et 7,40 millions d’euros en CP), en conséquence d’une progression infime des dépenses prévisionnelles relatives à la gestion du site, (0,85 million d’euros en AE et 2,78 millions d’euros en CP) et de la reconduite des crédits alloués aux systèmes d’information (1,72 million d’euros en AE et 1,75 million d’euros en CP) ; la même stabilité prévaut pour les crédits relatifs à l’organisation du débat public ou de concertation, ainsi que de groupes de travail européens.

● une augmentation non significative des crédits pour dépenses de personnel (de 16,36 millions d’euros à 16,62 millions d’euros en AE et CP), en rapport avec le maintien du plafond d’emplois à 185 équivalents temps plein (ETPT), après le relèvement opéré dans le cadre de la LFI pour 2022 (+ 4 ETPT).

En soi, une telle programmation peut être jugée pertinente dans la mesure où d’après les éléments recueillis par le rapporteur, l’autorité se trouve engagée dans l’approfondissement des chantiers ouverts depuis deux ans et dans l’approfondissement de l’exercice des compétences confiées par le législateur, notamment en application du code des communications électroniques européen ([8]).

D’après les réponses au questionnaire budgétaire et l’état des lieux dressé par la Présidente de l’Arcep, l’exercice 2023 devrait être consacré notamment aux actions suivantes :

– dans le domaine de la téléphonie, la poursuite des travaux relatifs à l’établissement et à la publication des cartes prévisionnelles, à partir d’informations fournies par les opérateurs et les collectivités et l’enrichissement du site « monréseaumobile.arcep.fr » : l’Arcep se fixe notamment pour objectif de travailler à l’enrichissement des cartes de couverture pour les services de données et à l’amélioration régulière des documents « clef en main » déjà publiés (cartes départementales de couverture 4 G, observatoire de l’ouverture commerciale de la 5G) ;

– sur le plan de la qualité des réseaux de fibre optique, la surveillance de la mise en œuvre des engagements pris par les opérateurs sur la qualité des interventions, le renforcement de la formation des techniciens et la reprise des infrastructures dégradées ([9]) : l’Arcep devrait par ailleurs poursuivre le suivi des différentes expérimentations en cours chez les opérateurs (à propos des processus et des matériels) et destinés à améliorer la qualité de l’exploitation ;

– dans la régulation concurrentielle des réseaux fixes, la préparation des décisions qu’appelle le nouveau cycle d’analyse des marchés fixes (2023-2028) ;

– le suivi et l’encadrement de la mise en œuvre du plan de fermeture du cuivre : l’Arcep veillera à ce que la fermeture du réseau cuivre soit réalisée à un rythme et suivant des modalités qui préservent l’intérêt de tous les utilisateurs (entreprises et salariés) et qui garantissent une concurrence effective et loyale entre les opérateurs au bénéfice des utilisateurs ;

– dans le cadre du déploiement de la 5G et de la mise en œuvre du New Deal Mobile, le contrôle des obligations découlant des fréquences attribuées : l’Arcep devrait approfondir aussi le suivi du déploiement des fréquences et la préparation des procédures d’attribution de fréquences des bandes 700 MHz, 900 MHz, 2,1 Ghz et 3,5 GHz dans les territoires ultramarins ;

– dans l’exercice des compétences sur l’empreinte environnementale du numérique, la publication d’une deuxième édition de son enquête Pour un numérique soutenable, ainsi que la mise en œuvre des dispositifs prévus par la loi n° 2021-1755 du 23 décembre 2021 visant à renforcer la régulation environnementale du numérique par l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse ;

– dans l’exercice des missions relatives au secteur postal, l’évaluation de la nouvelle gamme de service universel mise en place par La Poste à compter du 1er janvier 2023, l’Arcep étant chargée par la loi de veiller à ce que La Poste respecte ses objectifs de qualité de service et d’encadrer les tarifs du service universel ;

– dans la supervision du marché des colis, un travail d’identification des éventuels dysfonctionnements et sources d’insatisfaction des consommateurs dans la livraison de colis, préalable à d’éventuelles propositions afin d’y remédier.

Notons cependant que jusqu’à présent, l’élargissement progressif des missions de l’Arcep a été réalisé à périmètre d’emplois quasi constant, par des redéploiements internes. Dans ces conditions, il conviendra sans doute de s’interroger à l’avenir sur le niveau du plafond d’emplois et sur le niveau des crédits pour dépenses de personnel.

B.   L’AutoritÉ de la concurrence

Les moyens budgétaires de l’Autorité de la concurrence font l’objet de l’action 15 du programme 134. Elle se présente comme l’autorité administrative indépendante chargée de veiller au libre jeu de la concurrence et d’apporter son concours au fonctionnement concurrentiel des marchés aux échelons européen et international.

La programmation budgétaire pour 2023 se caractérise par une stabilité des moyens affectés à l’autorité.

Sur le plan des crédits, le projet annuel de performances prévoit une dotation budgétaire de près de 22,99 millions d’euros en AE et de 24,39 millions d’euros en CP. Par rapport au dernier projet de loi de finances initiale, il s’agit là de montants en hausse de 0,55 % en AE et de 0,93 % en CP.

● Ce quasi gel des crédits demandés a pour déterminant essentiel la progression infime des crédits pour dépenses de personnel, fixés à près de 18,89 millions d’euros en AE et CP, contre près de 18,77 millions d’euros en LFI pour 2022 (+ 0,61 %). Du point de vue des effectifs, le plafond d’emplois demeure fixé à 205 ETPT, faisant suite à la hausse décidée dans le cadre de la LFI pour 2022 (+ 3 ETP).

● En dehors de la stabilité du plafond d’emplois, la programmation pour 2022 poursuit un ajustement à la baisse des crédits pour dépenses de fonctionnement, avec une ligne de 3,475 millions d’euros en AE et 4,845 millions d’euros en CP. En pratique, le projet annuel de performances fait état d’une diminution des ressources allouées à l’ensemble des postes de dépenses, avec des revalorisations très limitées. Il en va notamment ainsi sur le plan des dépenses immobilières d’entretien et de prestations générales et, à un moindre degré, des dépenses d’informatique et de téléphonie.

● Même si les crédits demandés au titre de l’investissement conservent un caractère très marginal (0,625 million d’euros en AE et 0,655 million d’euros en CP), leur montant continue de croître à un rythme soutenu (+ 45,35 % en AE et + 52,33 % en CP). D’après le projet annuel de performances, les ressources dégagées doivent financer en 2023 des travaux de rénovation du système de chauffage et de climatisation du bâtiment domanial qui abrite l’Autorité de la concurrence. La programmation 2023 comporte par ailleurs la mise en place d’un plan de continuité informatique.

● Outre la poursuite des missions confiées par le législateur, l’Autorité de la concurrence apparaît confrontée à plusieurs enjeux en 2023 :

– en premier lieu, l’évolution de son niveau d’activité : suivant les statistiques communiquées par le Président de l’Autorité de la concurrence, 182 décisions ont déjà été rendues depuis le début de 2022 dans le seul champ du contrôle des concentrations ; en ce domaine, l’autorité pourrait battre le record de 2021 (soit 272 décisions sur l’ensemble de l’exercice ([10])).

– en second lieu, les développements potentiels des nouvelles compétences conférées par la directive (UE) 2019/1 du 11 décembre 2018 (dite « Directive ECN+ »), notamment dans l’approfondissement de la coopération entre autorités nationales de la concurrence au sein du Réseau européen de concurrence : d’après les réponses au questionnaire budgétaire, l’Autorité de la concurrence devra porter une attention toute particulière aux implications des dispositions relatives à l’assistance mutuelle en matière de notification des actes de procédure et de recouvrement du montant des sanctions ;

– en troisième lieu, l’exercice de la fonction dévolue en application de la loi n° 2022-401 du 21 mars 2022 visant à améliorer la protection des lanceurs d’alerte : suivant un projet de décret évoqué dans les réponses au questionnaire budgétaire, l’Autorité de la concurrence se verrait confier la mission de recueillir et de traiter les signalements des lanceurs d’alerte à propos des pratiques anticoncurrentielles, d’entente dans les marchés publics mais aussi au titre des aides d’État ; l’enjeu sera de mettre en place des outils de nature à permettre qu’il soit donné suite aux signalements de manière pertinente et dans des délais appropriés à la nature des alertes.

– en dernier lieu, les implications de l’entrée en vigueur de la législation européenne sur les marchés numériques (« Digital Markets Act » – DMA ([11])) : prévue pour octobre 2023 ; l’application de ce règlement conférera à l’autorité le pouvoir d’enquêter de sa propre initiative sur la violation des obligations qu’il édicte ; elle sera également tenue de prêter assistance à la Commission européenne dans l’exécution du règlement, en particulier lors de la réalisation des enquêtes de marché prévues par ce texte mais aussi dans la mise en œuvre des mesures d’enquête prises par la Commission ; d’après les réponses aux questionnaires budgétaires, le nouveau cadre européen pourrait nécessiter le développement de capacités de veille économique, en vue d’identifier en temps utile, hors de toute mécanisme de notification, les projets d’acquisition ou de fusion d’entreprises qui justifierait l’exercice de ces nouvelles prérogatives.

C.   La Direction gÉnÉrale de la concurrence, de la consommation et de la rÉpression des fraudes (DGCCRF)

Les ressources de direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (Dgccrf) procèdent des crédits et emplois inscrits à l’action 24 « Régulation concurrentielle des marchés, protection économique et sécurité du consommateur ».

Pour l’exercice 2023, le montant des crédits demandés est fixé à près de 246,84 millions d’euros en AE et à 246,88 millions d’euros en CP (contre, respectivement, près de 240,76 millions et 239,43 millions en LFI pour 2022). Ces montants correspondent à une augmentation de la dotation budgétaire de 2,52 % en AE et de 3,11 % en CP. Ce faisant, la programmation budgétaire poursuit le renforcement des ressources affectées à la Dgccrf et les porte à un niveau inédit.

 Compte tenu du poids prépondérant de ce poste en termes de crédits, ce mouvement s’explique presque exclusivement par l’augmentation des crédits pour dépenses de personnel, fixés à près de 231,24 millions d’euros en AE et CP (LFI pour 2022). Par rapport aux inscriptions de la loi de finances initiale pour 2022 (soit 223,99 millions d’euros, les crédits sur titre II enregistrent une augmentation de 3,23 % (contre une revalorisation de 1,70 % en 2022).

Les chiffres traduisent au plan budgétaire un relèvement très significatif du plafond d’emplois, fixé à 2 789 ETPT. La programmation pour 2023 repose sur l’application d’un schéma d’emploi en augmentation de 84 équivalents temps plein (ETP), dont :

– 50 ETP affectés de manière pérenne afin de permettre à la Dgccrf d’assumer la nouvelle mission de contrôle relative à l’accessibilité des biens et services pour les personnes porteuses de handicap, en application de la directive européenne du 17 avril 2019 fixant des exigences minimales d’accessibilité de certains produits et services aux personnes ([12]) ;

– 34 ETP recrutés à titre temporaire afin de mener les contrôles nécessaires à l’occasion de l’organisation et du déroulement des Jeux olympiques et paralympiques organisés à Paris en 2024 : d’après les éléments recueillis par le rapporteur, l’intérêt de la mesure résiderait dans la capacité donnée aux services de mener dès 2023 des actions de prévention de la contrefaçon, de surveillance des produits dérivés et à l’égard de certains secteurs impliqués dans l’accueil du public et l’organisation des manifestations (par exemple, la sécurité).

Accessoirement, l’évolution des dépenses de personnel intègre :

– le transfert en 2023 de 60 ETPT à la direction générale de l’alimentation (DGAL) relevant du ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire : le mouvement participe de la création d’une police unique chargée de la sécurité alimentaire des aliments ([13]) ;

– une mesure catégorielle de 1 million d’euros destinée à accompagner la mise en œuvre du plan stratégique 2020-2025 : d’après les réponses au questionnaire budgétaire, cette somme, reconductible en 2024, vise à récompenser l’investissement important exigé des agents en termes d’évolution des pratiques professionnels, de niveau d’expertise, de diversification des missions et de formation.

● À l’instar de la programmation budgétaire pour 2022, les crédits demandés pour les dépenses de fonctionnement connaissent une évolution contrastée entre des AE en baisse (9,71 millions d’euros, soit un montant inférieur à celui prévu dans la programmation 2021) et des CP en augmentation (à un peu plus de 9,71 millions d’euros contre 9,62 millions d’euros). En soi, le projet annuel de performances ne permet pas d’établir précisément les motifs de cette budgétisation. Celle-ci semble en rapport avec l’état d’avancement des grands projets informatiques de la Dgccrf.

D’après les réponses au questionnaire budgétaire, la programmation budgétaire comporte une dotation supplémentaire de 1,33 million d’euros (en AE et CP) pour le financement, en 2023, des projets informatiques développés dans le cadre du plan stratégique de la Dgccrf 2020-2025. Ces ressources auraient pour objet la poursuite des investissements réalisés et le maintien en condition opérationnelle.

Il convient en dernier lieu de prendre en considération l’effet, au plan budgétaire, du transfert au programme 354 « Administration territoriale de l’État » de crédits ayant pour objet le financement des dépenses immobilières et des moyens de fonctionnement courant :

– des agents affectés aux missions de la Dgccrf au sein des Dreets ([14]) et des Deets ([15]) ;

– des agents des services à compétence nationale (SCN) « Service national d’enquêtes » et « Services informatique » hébergés au sein des DREETS.

● Les éléments recueillis par votre rapporteur ne permettent pas d’établir l’existence de besoins de financement insatisfaits. Il conviendra d’apprécier la pertinence de la programmation des ressources allouées à la Dgcrrf au regard des grandes priorités déterminées par la direction. D’après les réponses au questionnaire budgétaire, dans le champ de la protection du consommateur, la direction inclurait parmi ses objectifs :

– la lutte contre la « réduflation » ou « shrinkflation » ([16]) : les agents de la Dgccrf vérifieront que le poids indiqué sur le préemballage correspond bien à la quantité réelle de produit et que l’affichage en rayon du prix à l’unité de mesure correspond à la quantité vendue ;

– le contrôle sur les annonces de réduction de prix : afin de lutter contre les faux rabais, la Dgccrf poursuivra le contrôle de la bonne application des dispositions issues de l’ordonnance n° 2021-1734 du 22 décembre 2021 transposant la directive européenne dite « Omnibus » entrées en vigueur le 28 mai 2022 ;

– le contrôle de l’interdiction de l’impression et de la distribution systématiques des tickets de caisse dans les surfaces de vente et dans les établissements recevant du public ainsi que l’impression et la distribution systématiques des tickets de carte bancaire ([17])  : il s’agirait de vérifier que les consommateurs sont bien  informés de la possibilité qui leur est reconnue de ne pas demander l’impression et la remise de tickets de caisse et de carte bancaire.

– la mise en œuvre des dispositions de la récente loi sur le pouvoir d’achat ([18]) destinées à faciliter la résiliation des contrats en ligne, sous réserve de la publication d’un décret d’application qui doit intervenir avant le 1er juin 2023 ;

– la lutte contre le démarchage téléphonique abusif et le contrôle du respect du dispositif d’opposition au démarchage téléphonique (Bloctel).

Dans le champ de la transition écologique, la Dgccrf aura à mettre en œuvre les décrets d’application des lois « AGEC » ([19]) et « Climat et résilience » ([20]), en veillant en particulier au respect des obligations relatives à :

– aux produits reconditionnés ou encore à la commercialisation des pièces détachées pour les produits électriques et électroniques ;

– au respect des droits des consommateurs en matière d’étiquetage énergétique, de durabilité des produits, et d’indice de réparabilité.

Dans le champ de l’économie numérique, la Dgccrf approfondira son action sur les axes suivants :

– la loyauté des communications à caractère commercial diffusées par les influenceurs, l’objectif des enquêtes étant de s’assurer que celles-ci ne cachent pas une intention commerciale et ne se révèlent pas erronées ou de nature à induire le consommateur en erreur ;

– la lutte contre les pratiques abusives susceptibles d’entourer le « dropshipping » ([21]) (défaut d’information précontractuelle, indisponibilité des produits ou défaut récurrent de livraison, activités de formation ou de prestations web) ;

– la surveillance des sites monétisant les démarches administratives, avec une attention particulière à l’égard des professionnels qui détourneraient ou utiliseraient de manière illicite des marques déposées par l’État ;

– une grande enquête nationale destinée à vérifier, dans différents secteurs d’activité, le respect des obligations qui incombent aux opérateurs de plateformes numériques au titre du code de la consommation.


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   seconde partie :
le soutien public aux industries Électro-intensives

Les industries électro-intensives désignent des entreprises dont l’activité nécessite la consommation d’un important volume d’électricité. Pour l’application de dispositions d’ordre fiscal ou de régimes d’aide, l’appartenance à la catégorie juridique est appréciée au regard de quatre principaux critères énoncés par le code de l’énergie ([22]) :

– le rapport entre la quantité d’électricité consommée et la valeur ajoutée produite par l’entreprises ou par le site, définie aux articles 1586 ter à 1586 sexies du code général des impôts ;

– le degré d’exposition à la concurrence internationale ;

– le volume annuel de consommation d’électricité ;

– les procédés industriels mis en œuvre.

Aux termes de l’article D. 351-1 du code, relèvent du champ des entreprises fortement consommatrices d’électricité les entreprises dont la consommation annuelle d’électricité excède 10 térawatt-heure (TWh). À partir d’une tel critère, on distingue de manière courante les entreprises électro-intensives (EI) des entreprises hyper électro-intensives (HEI) caractérisées par une consommation totale annuelle égale ou supérieure à 20 TWh ([23]).

En pratique, on dénombre aujourd’hui en France une cinquantaine de sites pour chacune de ces deux catégories. Il s’agit au total de près de 500 entreprises industrielles qui présentent la caractéristique d’occuper un rôle fondamental dans les chaînes de valeur et d’appartenir à des secteurs industriels fortement exposés à la concurrence internationale dans leur domaine d’activités. Parmi celles-ci, il convient de citer : l’aluminium ; les ciments, les plâtres et la chaux ; les métaux non ferreux ; la sidérurgie, la chimie et les gaz industriels, les engrais ; le papier-carton ; dans une moindre mesure le sucre, la plasturgie et la production d’hydrogène décarboné.

Compte tenu de leur importance stratégique, les EI et HEI font depuis longtemps l’objet d’une attention particulière de l’État, qui se matérialise par l’apport d’un soutien financier. Toutefois, l’intervention publique semble aujourd’hui trouver ses limites, ce qui conduit nécessairement à reconsidérer l’efficacité des instruments employés et, au-delà, le cadre de l’approvisionnement en électricité et de la consommation des EI et HEI.

I.   un soutien public par des outils financiers qui semble trouver ses limites face À une conjoncture exceptionnelle

Le propos n’est pas ici de mettre en cause l’utilité de dispositifs conçus et développés depuis 2014 afin de préserver la compétitivité des industries françaises. De fait, l’ensemble des acteurs auditionnés manifestent un certain attachement au maintien de ce que l’on appelle communément « la boite à outils ». Par ailleurs, les éléments d’évaluation communiqués au rapporteur donnent à penser que l’intervention publique contribue à atténuer le poids que peut représenter la consommation d’électricité dans le modèle économique des entreprises électro-intensives.

Cela étant, les résultats obtenus paraissent devoir être relativisés au regard des conséquences très nocives du renchérissement de l’électricité observée depuis 2021, en conséquence de dérèglements de l’offre et de la demande sur le marché.

A.   des dispositifs assez ÉtoffÉs visant À prÉserver la compétitivite des ei et hei

À bien des égards, la France se distingue en Europe par la variété des instruments utilisés afin de réduire le risque, pour les industries électro-intensives et hyper électro-intensives, d’un désavantage comparatif à raison des volumes d’électricité consommés. La poursuite de cet objectif repose sur la mise en œuvre d’instruments destinés à couvrir de manière assez large les coûts inhérents aux activités de production. Elle donne également lieu, depuis 2021, à la mise en œuvre d’un mécanisme de soutien ponctuel dans le cadre d’une dérogation temporaire au régime des aides d’État.

1.   Des mesures fiscales destinées à atténuer les charges inhérentes à une consommation importante d’électricité

● Le soutien aux EI et HEI comporte, en premier lieu, l’application de taux réduits d’accise sur l’électricité dans le cadre de la contribution au service public de l’électricité (CSPE). Conformément au cadre fixé par la directive 2003/96 du 27 octobre 2016 sur la taxation de l’énergie ([24]), la contribution s’élève à 0,5 €/MWh pour les HEI et entre 1 et 7,5 €/MWh pour les EI. La France applique déjà les réductions minimales autorisées par le droit européen.

Au plan budgétaire, la mesure relève de dépenses fiscales portées par le programme 134 « Développement des entreprises et régulations » de la mission « Économie ». Celles-ci correspondent à l’application de taux réduits sur l’électricité :

– consommée par les installations industrielles électro-intensives exposées à un risque important de fuite carbone ;

– pour les centres de stockage de données numériques exploitées par une entreprise ;

– consommée par les installations hyper électro-intensives (HEI) ;

– consommée sur des sites industriels électro-intensifs où sont exploitées des installations industrielles et pour l’électricité.

D’après les réponses au questionnaire budgétaire, l’application de ces taux réduits occasionnerait une dépense de l’ordre de 118 millions d’euros en 2022. En revanche, on ne dispose pas à ce jour de chiffrage pour l’exercice 2023.

Les tarifs rÉduits d’accise sur l’ÉlectricitÉ du programme 134

Source : Projet de loi de finances pour 2023, tome II des voies et moyens.

Il convient par ailleurs de noter que certaines entreprises bénéficient d’une exemption totale d’accise à raison de l’intensité de leur consommation d’électricité. Entrent dans le périmètre de la mesure :

– les secteurs de l’électrolyse, de la réduction chimique et des procédés métallurgiques ;

– la fabrication de minéraux non-métalliques ;

– les entreprises pour lesquelles les coûts de l’électricité représentent plus de 50 % des coûts.

● En second lieu, les EI et HEI bénéficient d’un abattement sur le tarif d’utilisation du réseau public d’électricité (Turpe). ([25])

 

Aux termes de l’article L. 341-4-2 du code de l’énergie, le dispositif s’applique aux sites fortement consommateurs d’électricité qui présentent un profil de consommation prévisible et stable ou anticyclique. Fixés par décret, les taux d’abattement peuvent varier de 50 % à 81 %, soit une réduction de 3 à 8 €/MWh. Le décret n° 2021-420 du 10 avril 2021 ([26]) contribue aujourd’hui à élargir le champ des entreprises éligibles, dans la mesure où il supprime les critères d’électro-intensivité parmi les critères qui conditionnent le bénéfice du dispositif. Par ailleurs, le décret révise les modalités de calcul, ainsi que les modalités d’application des taux d’abattement du Turpe pour les sites éligibles, en ménageant la possibilité d’une évolution à chaque révision quadriennale du tarif.

Notons que la réduction sur le Turpe revêt un caractère conditionnel dans la mesure où son octroi suppose l’élaboration d’un plan de performance énergétique et la mise en œuvre d’un système de gestion de l’énergie ([27]).

2.   Un mécanisme de compensation du coût carbone

Régi par l’article L. 122-8 du code de l’énergie, le dispositif de compensation carbone s’adresse aux entreprises « exposées à un risque significatif de fuite de carbone en raison de la répercussion des coûts du système européen d’échange de quotas d’émissions de gaz à effet de serre sur les prix de l’électricité ».

Il donne lieu au versement d’une subvention aux entreprises à titre de remboursement d’une partie des coûts indirects inhérents au paiement de la « taxe » carbone qui se répercute sur les prix de l’électricité. Les crédits destinés à son financement figurent à l’action 23 du programme 134 « Développement des entreprises et régulations ». Dans le cadre de la programmation budgétaire pour 2023, la compensation carbone représente une dépense de 856 millions d’euros (en autorisations d’engagement et en crédits de paiement), montant en très nette hausse par rapport à la loi de finances initiale pour 2022.

D’après les éléments recueillis par le rapporteur, plus de 300 sites en bénéficient chaque année depuis 2015. Dans ses réponses écrites, la Commission de régulation de l’énergie (CRE) indique que dans les conditions de prix du CO2 de 2021, l’aide versée représentait de l’ordre de 11 €/MWh, pour environ 35 TWh de consommation éligible.

 

 

Aujourd’hui, les effets de la mise en œuvre du dispositif comportent une part d’incertitude, en raison de l’entrée en vigueur de nouvelles lignes directrices européennes ([28]). Applicables à la période 2022-2030, ces dernières devraient donner lieu à des inflexions en ce qui concerne les modalités de calcul des aides versées ([29]). Elles ont suscité un profond désaccord entre la France et la Commission européenne sur deux éléments : le facteur d’émission de l’électricité consommée en France ; le facteur prix à terme des quotas. À défaut d’acceptation par la Commission du dispositif notifié par la France dès juin 2021, l’État n’a pu procéder au versement des aides prévues dans le cadre de la LFI pour 2022 ([30]).

D’après les réponses au questionnaire budgétaire, le rapprochement des positions à propos du facteur d’émission ouvrirait la voie à la notification du dispositif d’aide français à la mi-octobre 2022. Après la prise d’un décret en Conseil d’État, l’établissement des arrêtés relatifs aux conditions de gestion opérationnelle du dispositif rendrait possible une ouverture de guichet à la fin novembre 2022 et le versement des premières aides pour les dossiers les plus signalés avant la fin de l’exercice 2022.

Le rapporteur ne peut qu’encourager le Gouvernement à mettre tout en œuvre afin de tenir ce calendrier, au regard des difficultés de trésorerie que peuvent éprouver certaines entreprises et de la prévisibilité que pourraient exiger certains projets d’investissement. Dans son esprit, la mise en place du dispositif de compensation carbone n’implique pas que la France renonce à poursuivre les discussions sur l’application des lignes directrices. En effet, les décisions prises par la Commission européenne comportent le grave inconvénient de permettre l’application de critères distincts entre économies de la région centre-ouest de l’Europe, ce qui peut aboutir à un équilibre de la concurrence faussé.

Recommandation n° 1 : Favoriser une mise en place rapide du dispositif de compensation carbone sur le fondement des nouvelles lignes directrices européennes. Évaluer l’impact des nouveaux critères de calcul sur l’équilibre de la concurrence entre la France et ses partenaires.

3.   Une aide conjoncturelle face aux répercussions de la guerre en Ukraine

Le décret n° 2022-967 du 1er juillet 2022 ([31]) a établi un régime d’aide destiné à compenser la hausse des coûts d’approvisionnement en électricité, dans le contexte créé par l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Peuvent y prétendre les entreprises qui justifient :

– avoir réalisé des achats de gaz et/ou d’électricité qui atteignent au moins 3 % de leur chiffre d’affaire en 2021 ;

– avoir subi un doublement du prix du gaz et/ou de l’électricité sur la période éligible par rapport à une moyenne de prix sur l’année 2021.

En fonction des dépenses et des pertes opérationnelles subies, le décret permet de couvrir :

– 30 % des coûts éligibles avec un plafond de 2 millions d’euros, pour les entreprises qui subissent une baisse d’excédent brut d’exploitation (EBE) de 30 % par rapport à 2021 ou ayant un EBE négatif ;

– 50 % des coûts éligibles avec un plafond de 25 millions d’euros, pour les entreprises dont l’EBE est négatif et dont l’augmentation des coûts éligibles s’élève à au moins 50 % de la perte d’exploitation ;

– 70 % des coûts éligibles avec un plafond à 50 millions d’euros, pour les entreprises qui respectent les critères de l’aide plafonnée à 25 millions d’euros et qui exercent leur activité principale dans un ou plusieurs secteurs/sous-secteurs figurant dans une liste annexée au décret.

Le dispositif de soutien s’applique de manière rétroactive, à compter de mars 2022, pour l’ensemble de l’exercice 2022 ([32]). Sous réserve de textes réglementaires en cours d’élaboration, sa mise en œuvre pourrait être prolongée à l’exercice 2023. D’après la présentation réalisée par Mme Oriane Chenain, sous‑directrice à la direction générale des entreprises (DGE), elle mobilise aujourd’hui une équipe de 30 personnes, avec pour perspective de porter les effectifs à près de 50 personnes.

Si l’on peut se féliciter de la création du dispositif, les conditions de la mise en œuvre du régime d’aide établi par le décret n° 2022-967 du 1er juillet 2022 se révèlent perfectibles. L’ensemble des éléments recueillis par le rapporteur met en relief la nécessité d’une simplification de l’accès à l’aide et à assouplissement des critères d’éligibilité.

De fait, d’après les chiffres fournis par la DGE, on ne recense que 500 demandes pour la période courant de mars à mai 2022 ; le montant des aides distribués s’élève à 50 millions d’euros. Les montants distribués vont de 500 à 1 million d’euros.

Ces chiffres peuvent s’expliquer en partie par la non-conformité des demandes présentées : d’après les statistiques évoquées au cours des auditions, près de 90 % des dossiers auraient été écartés pour la période évoquée, notamment à défaut de pièces justificatives ou de réponse aux relances de l’administration. Toutefois, il semble établi que le dispositif d’aide d’urgence n’a pas trouvé son public.

Le Gouvernement travaille actuellement à une amélioration du dispositif, par le biais notamment de l’allègement de certains critères. Par ailleurs, la France plaiderait auprès de la Commission européenne en vue d’une évolution des critères d’examen de l’éligibilité à l’aide (sur le seuil de déclenchement de l’aide, sur la prise en compte de la baisse de l’EBE sans avoir à démontrer un lien entre hausse du cours de l’énergie et pertes opérationnelles, sur une analyse des critères à l’échelle des sites).

Le rapporteur se félicite de ces démarches et appelle à une simplification de l’aide d’urgence.

Recommandation n° 2 : Poursuivre la simplification de l’aide d’urgence créée par le décret n° 2022-967 du 1er juillet 2022 afin de faire face aux conséquences de l’invasion de l’Ukraine.

B.   une protection des Électro-intensifs amoindrie par les dÉrÈglements du marchÉ de l’ÉLECTRICITÉ

Au-delà des contraintes pesant sur les finances publiques, la question se pose désormais de la capacité des mesures financières prises par l’État à atténuer la charge que peut représenter une forte consommation d’électricité pour les EI et HEI. De fait, l’efficacité du soutien public apparaît assez sensiblement relativisée dans une conjoncture exceptionnelle où la hausse des prix de l’énergie fragilise l’ensemble du tissu économique.

1.   Une envolée des cours de l’électricité potentiellement source de désavantages comparatifs

Ainsi que le montrent les graphiques ci-après, le prix de l’électricité sur les marchés de gros connaît une hausse spectaculaire depuis novembre 2021. Il a atteint des niveaux inédits en août et septembre 2022, avec un cours dépassant les 1 120 €/MWh au titre des livraisons pour 2023. Le même mouvement peut être observé sur les cours à terme pour les trois exercices suivants.

Une telle dynamique tranche avec la situation qui prévalait antérieurement. Ainsi que l’ont rappelé les représentants de l’Union des industries utilisatrices d’énergie (Uniden), le prix de l’électricité était tombé au plus bas en 2017, avec un cours de 30 €/MWh. Il évoluait dans la fourchette de 40-45 €/MWh en 2019, soit un niveau moyen de long terme, avant un nouvel affaissement dans la conjoncture créée par la crise sanitaire due au covid-19. En septembre 2021, le cours de l’électricité a franchi pour la première fois du seuil des 100 €/MWh.

Suivant un constat assez unanime, les cours se caractérisent aujourd’hui par une assez grande volatilité, qui se traduit par des évolutions d’une certaine amplitude sur des périodes courtes. Le 12 août, le prix de l’électricité en France s’élevait à 617,34 €/MWh pour les livraisons en 2023. Sur la journée, les prix sur le marché de gros en France peuvent, par exemple, passer de 193 €/MWh à 350 €/MWh au 13 octobre 2022 ([33]). Toutefois, d’après les analyses développées devant le rapporteur, il parait peu vraisemblable d’anticiper le retour au niveau des prix antérieurs à brève échéance.

Évolution du prix de l’ÉlectricitÉ

pour la livraison sur les annÉes 2023, 2024 et 2025 (au 30 septembre 2022)

Source : www.énergiedev.fr

Comme observé dans le cadre d’autre travaux de la commission des affaires économiques ([34]), l’emballement des prix de l’électricité résulte de deux facteurs déterminants.

Le premier facteur réside dans les répercussions de la forte hausse du prix du gaz sur le marché de l’électricité au cours de la même période. Ce renchérissement très significatif constitue la conséquence de la forte reprise de l’activité mondiale à l’issue de la crise sanitaire (avec en particulier une forte demande en Asie), puis des restrictions dans l’approvisionnement du marché qu’occasionne la crise internationale suscitée par l’invasion de l’Ukraine en février 2022.

L’indisponibilité d’une partie des capacités de production françaises constitue le second facteur de la hausse du prix de l’électricité.

En l’occurrence, l’approvisionnement en électricité du marché français pâtit de la baisse de la production du parc nucléaire national subie depuis le début de l’exercice 2022. D’après des éléments publics réitérés au cours des auditions par les représentants d’Électricité de France (EDF), 25 des 56 réacteurs installés sur le territoire national se trouvaient à l’arrêt au 22 septembre 2022. Cette situation peut s’expliquer par trois causes :

– premièrement, le rééchelonnement des travaux de maintenance du parc nucléaire, compte tenu des contraintes inhérentes aux restrictions observées pendant la crise du covid-19 ;

– deuxièmement, la réalisation d’un programme de contrôle et d’expertise sur 12 réacteurs, à la suite de la découverte de phénomènes de « corrosion sous contrainte » sur des portions de tuyauterie à la fin de l’exercice 2021 : ces travaux conduisent à l’arrêt de certaines unités ;

– troisièmement, l’impact des épisodes caniculaires et de sécheresse survenus depuis le printemps 2022, qui restreignent la capacité de production (du fait des nécessités de la limitation de la température des eaux rejetées dans les fleuves pour le refroidissement des réacteurs et de la réduction des stocks hydro‑électriques).

D’après les réponses au questionnaire budgétaire, EDF envisagerait un redémarrage progressif de l’ensemble du parc d’ici à février 2023.

Si les conditions présentes de l’approvisionnement du marché en électricité nucléaire relèvent de contingences nationales, elles n’en exposent pas moins les EI et les HEI à un affaiblissement de leur compétitivité.

Ainsi que l’ont souligné l’ensemble des acteurs, la crise énergétique constitue un « phénomène européen » et n’affecte pas ou peu le reste du monde. En outre, il s’avère qu’en l’état, le niveau moyen des prix français de l’électricité atteint un niveau élevé par comparaison à ceux applicables dans des économies partenaires au sein et en dehors de l’Union européenne. L’Allemagne offre ainsi aux EI et aux HEI des prix de l’électricité plus compétitifs qu’en France d’après les éléments fournis par l’Uniden (de l’ordre de 20 %). Or, la concurrence que doivent soutenir les EI et HEI provient aussi du reste du monde : suivant le secteur d’activité, elle peut être le fait d’entreprises implantées en Norvège, en Islande, en Chine, en Inde, au Canada, aux États-Unis, voire dans les Pays du Golfe arabo‑persique. D’après les statistiques évoqués par l’Uniden, les prix de l’électricité continueraient d’évoluer dans une fourchette comprise entre 25 €/MWh et 35 €/MWh chez nos principaux concurrents.

Dès lors, l’envolée des prix du marché de l’électricité comporte le risque d’une remise en cause du modèle d’affaires des EI et HEI à plus ou moins brève échéance, au fil du renouvellement ou de l’évolution des contrats souscrits pour la fourniture en électricité à partir de 2023.

2.   Une capacité de résorption des coûts très largement relativisée

Certes, la mise en œuvre des dispositifs relevant de la « boîte à outils » permet de parvenir à une réduction des charges inhérentes à une forte consommation d’électricité par les entreprises.

L’Uniden évalue ainsi la baisse obtenue sur le prix du mégawatt heure dans une fourchette comprise entre 15 euros et 20 euros quand le prix du marché s’établit à 50 €/MWh. Cet ordre de grandeur correspond à celui estimé par M. Guillaume de Goys, président d’Aluminium France au cours de son audition (de 18 à 23 €/MWh). Du point de vue de France Chimie, la « boite à outils » aura permis aux industriels électro-intensifs de bénéficier de niveaux de prix comparables à ceux de la concurrence, en particulier au regard de ceux constatés en Allemagne où les entreprises peuvent tirer parti de la cogénération gaz à prix subventionnés. D’après ses estimations, ceux-ci pouvaient atteindre de l’ordre de 40 à 50 €/MWh pour les hypers électro-intensifs, de 50 à 65 €/MWh pour les électro-intensifs et entre 60 et 85 €/MWh pour les autres entreprises.

Cependant, l’effet modérateur de ces instruments revêt aujourd’hui un caractère guère plus significatif, à mesure le prix de l’électricité augmente et renchérit les coûts de production des EI et HEI.

D’après les chiffres communiqués par EDF, le poids de l’électricité dans la structure de coût peut varier très sensiblement d’une activité à l’autre. Il représente 35 % dans le secteur de l’aluminium, moins de 3 % pour la production d’acier par haut fourneau, environ 8 % pour la production d’acier par four à arc, 10 % pour le papier, 12 % pour la chimie dans son ensemble. Il peut atteindre 70 % des charges pour les HEI (par exemple, dans le secteur du chlore).

Depuis la poussée inflationniste, le poids de ce poste de dépense a cru de manière très significative jusqu’à grever les marges des entreprises. Selon M. Nicolas de Warren, président de l’Uniden, ce qui pèse aujourd’hui sur leur bilan, c’est le coût de l’électron et le prix du carbone.

Il en va ainsi dans la filière de la sidérurgie et de la métallurgie. Suivant l’état des lieux dressé par M. Stéphane Delpeyroux, président de l’Alliance des minerais, minéraux et métaux (A3M), le coût de l’électricité pourrait être multiplié par 5 alors que le coût de la consommation représente de 9 % à 30 % du chiffre d’affaires. Dans le secteur du papier carton, une situation analogue semble prévaloir dans la mesure où d’après les représentants du secteur reçus dans le cadre des auditions, les dépenses relatives à la consommation d’électricité comptent désormais pour 4 % du chiffre d’affaires, pour un résultat opérationnel de 6 % en moyenne.

Un tel diagnostic fait écho aux analyses des représentants de la direction générale des entreprises qui, devant le rapporteur, ont estimé que la part de l’énergie pouvait désormais atteindre 8 % à 10 % du chiffre d’affaires, ce qui équivaut à la marge opérationnelle dans certains secteurs industriels.

Si les contrats d’approvisionnement conclus avant la poussée inflationniste peuvent procurer une relative protection, beaucoup de signes donnent à penser que la hausse de l’électricité affecte d’ores et déjà le dynamisme et la compétitivité des EI et HEI français.

Les représentants de France Chimie attribuent ainsi à la crise énergétique la dégradation de la compétitivité de la filière mesurée par le recul de la production dans les secteurs de l’ammoniac (- 60 %) et ou du chlore, ainsi que par l’arrêt de capacités de production et une forte hausse des importations (multipliées par 15 pour l’ammoniac ou 4 pour le PVC). Pour ce qui concerne la sidérurgie et la métallurgie, les représentants de France Aluminium font état d’une réduction de 30 % de la production française depuis l’été 2022, en rapport vraisemblablement avec l’émergence d’une concurrence espagnole. D’après le bilan communiqué pendant les auditions, sept sites auraient déjà cessé leur activité en 2022.

II.   un nécessaire appui au renouvellement des conditions d’approvisionnement et de consommation des ei et des hei

En soi, la portée désormais relative des instruments financiers conçus pour soutenir les EI et HEI invite à évaluer la possibilité de réformes systémiques. Au‑delà, la présente crise montre sans doute la nécessité d’une évolution des modèles et ouvre la perspective de besoins nouveaux en énergie.

Dès lors, préserver la compétitivité de ces entreprises et leur accès à l’énergie électrique dans des conditions raisonnables implique d’envisager des mesures sur trois axes essentiels : en premier lieu, le fonctionnement du marché de l’électricité ; en second lieu, l’établissement de contrats de long terme ; en dernier lieu, l’incitation à la sobriété énergétique.

A.   des mÉcanismes À concevoir afin d’assurer une certaine rÉgulation sur le marchÉ de l’ÉlectricitÉ

La modération du prix de l’énergie consommée constitue aujourd’hui la condition fondamentale de la pérennité et du développement des électrointensifs en France. Un tel objectif suppose que le fonctionnement du marché de l’électricité en France et en Europe aboutisse à un équilibre de l’offre et de la demande rationnel, en rapport avec l’état de la production et de la consommation.

Dès lors, au-delà du rétablissement des capacités de production du parc nucléaire et de l’apport d’autres sources d’énergie, l’efficacité du soutien public aux EI et HEI exige d’appréhender trois questions : en premier lieu, les modalités de formation des prix sur le marché ; en second lieu, l’existence de mécanismes de couverture contre les aléas ; en dernier lieu, assurer la pleine exploitation de l’énergie fournie par le parc nucléaire.

1.   Favoriser un découplage entre prix de l’électricité et prix du gaz ?

La première question soulevée par la crise énergétique actuelle dont souffrent les EI et HEI porte en effet sur les mécanismes de fixation des prix sur le marché de l’électricité.

Comme précédemment indiqué, le cours de l’électricité suit en Europe l’évolution du prix du gaz. Une telle situation résulte de l’application du principe du merit order, qui consiste à appeler les centrales disponibles sur le réseau de la moins coûteuse à la plus coûteuse jusqu’à ce que la demande soit satisfaite. Aussi, le prix final sur chaque marché national dépend en pratique du coût marginal de production de la dernière centrale appelée, sous réserve des capacités d’interconnexion en Europe. Dès lors que les centrales à gaz fournissent souvent les dernières unités de production disponibles, le prix de l’électricité tend à subir un alignement sur celui du gaz.

Si ce modèle possède une certaine rationalité économique et participe à l’objectif de la construction d’une « Europe de l’énergie », il n’apparaît pas exempt de défauts.

D’une part, les mécanismes de formation des prix ne permettent pas nécessairement de faire bénéficier les consommateurs des coûts moyens plus avantageux par rapport au prix du gaz, suivant la disponibilité des unités de production. Le problème se pose en particulier du point de vue de l’énergie nucléaire dans un contexte marqué par l’indisponibilité d’une partie du parc national.

D’autre part, le marché de l’électricité privilégie des anticipations de court terme et ne permet pas d’offrir une visibilité au-delà. En pratique, son fonctionnement vise exclusivement à assurer l’équilibre entre l’offre et la demande d’électricité à chaque instant pour la pérennité du réseau. En soi, il ne dégage pas des signaux utiles pour des investissements de long termes, tels que ceux rendus nécessaires par l’objectif de décarbonation.

Il n’intègre pas non plus nécessairement les coûts complets moyens de la production d’électricité en tant que tels. Rappelons que sans conclure à des menées spéculatives, la Commission de régulation de l’énergie (CRE) a estimé ([35]) que les prix de l’électricité « sont extrêmement élevés et ne correspondent plus à une anticipation moyenne des prix spot telle que modélisée historiquement. Ils reflètent soit des anticipations de forte pénurie, soit une prime de risque élevée sur le marché de l’électricité français, et vraisemblablement la conjonction des deux ». En soi, un tel constat caractérise dans le fonctionnement du marché un biais inflationniste et amplificateur.

Ces limites incitent certains observateurs à estimer que le marché européen de l’électricité ne possède pas la capacité de répondre à des situations de crise telles que celles que nous vivons et ne vaut que pour l’organisation des échanges en période d’abondance.

Du point de vue du rapporteur, la présente crise énergétique ne condamne pas en lui-même le principe du marché européen de l’électricité. En revanche, elle tend à mettre en cause la corrélation établie en pratique entre les cours du gaz et de l’électricité. Si elle présentait un caractère opportun dans une conjoncture marquée par des prix faibles, cette dernière comporte désormais le risque d’une inflation des coûts préjudiciables à nos entreprises en général, et aux EI et HEI en particulier.

Dans cette optique, le rapporteur réitère ici la préconisation d’une réforme du marché de l’organisation du marché de l’électricité qui aboutirait à limiter la corrélation des prix avec le cours du gaz ([36]).

Cette piste correspond à la position que le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique affirme vouloir défendre auprès de ses homologues du Conseil des finances de l’Union européenne ([37]). Elle semble aujourd’hui faire l’objet d’un accueil plus favorable de la part de plusieurs États membres, voire de la Commission européenne.

Dans cette perspective, le rapporteur juge qu’il pourrait être utile d’évaluer les avantages et inconvénients de la mesure adoptée par l’Espagne et le Portugal en réponse au renchérissement du coût de l’électricité sur leurs marchés nationaux.

Le dispositif tend à abaisser les coûts des intrants utilisés dans les centrales électriques alimentées par des combustibles fossiles afin de réduire leur coût de production et, en dernier ressort, le cours de l’électricité sur le marché de gros ibérique (Mibel). Il donne lieu au versement d’une somme assimilée à une subvention directe aux producteurs d’électricité. Applicable jusqu’au 31 mai 2023, la mesure a fait l’objet d’une autorisation de la Commission européenne dès lors qu’elle relevait du régime des aides d’État ([38]).

Il s’agit de déterminer si une telle mesure pourrait être applicable à l’échelle de l’Union européenne ou, à tout le moins, au sein des États membres avec lesquels la France possède des interconnexions. De fait, le prix de l’électricité échangé par ce biais affecte nécessairement le cours sur le marché, en particulier dans les périodes où la France importe de l’énergie. Dès lors, une mesure unilatérale ne va pas de soi.

Recommandation n° 3 : Réformer le fonctionnement du marché de l’organisation du marché de l’électricité afin de limiter la corrélation des prix avec le cours du gaz. Évaluer la pertinence de la mesure adoptée par l’Espagne et le Portugal en réponse au renchérissement du coût de l’électricité sur leurs marchés nationaux.

2.   Contribuer au développement d’instruments de couverture en France

Complémentaire de l’établissement d’une certaine régulation sur le marché de l’électricité, le développement de produits de couverture peut en effet être conçu comme un outil de sécurisation des échanges face à la volatilité des cours. Dans une certaine mesure, cette voie reste à explorer en France.

En dehors de l’accès régulé à l’énergie nucléaire historique (Arenh), il existe actuellement plusieurs produits dont les caractéristiques varient suivant les besoins couverts. Ces produits peuvent être échangés sur des marchés avec un prix transparent ou être établis de gré à gré. Citons notamment :

– les contrats avec livraison à terme ;

– les contrats financiers de couverture contre la variation du prix spot (par exemple par le biais d’un contrat pour différence ([39])) ;

– les options (pouvant être exercées si le prix spot excède une valeur donnée et agissant ainsi comme un plafond de prix).

De l’ensemble des éléments recueillis par le rapporteur, il ressort que de tels instruments demeurent relativement peu utilisés en France. Cette situation peut s’expliquer par :

– l’existence de l’Arenh, qui limite l’intérêt pour les entreprises consommatrices de couvrir leur approvisionnement dans la durée, dans la mesure où elles peuvent obtenir l’accès par ce biais à un volume d’électricité à un prix compétitif ;

– l’apport des dispositifs de soutien public aux énergies renouvelables (EnR), lesquels peuvent limiter les besoins de recourir au marché afin de vendre leur production sur le long terme ;

– les caractéristiques des produits : suivant un constat partagé par les personnes auditionnées, il n’existe pas en France d’instruments qui permettent de se couvrir sur les marchés au-delà de 3 ans, alors que d’autres marchés européens proposent des échéances de couverture jusqu’à 6 ans (en Allemagne et en Espagne, par exemple).

Suivant l’analyse des représentants de l’Uniden, le marché allemand possède pour sa part une réelle profondeur et offre des produits qui reposent sur des sous-jacents solides, compte tenu notamment du tissu industriel du pays.

Même si l’Arenh ouvre la possibilité d’arbitrages différents pour les EI et HEI, il conviendrait peut-être de travailler au développement de titres de couverture sur le marché de l’électricité français. L’objectif pourrait être par exemple d’encourager l’émergence d’une gamme de produits offrant des possibilités de couverture sur des échéances allant de 3 à 15 ans.

Recommandation n° 4 : Travailler au développement de produits de couverture sur le marché de l’électricité français.

3.   Exploiter pleinement l’énergie fournie par le parc nucléaire français

Le rapporteur n’entend pas ici trancher les débats légitimes qui entourent l’usage de l’énergie atomique, au regard de ses implications environnementales et sanitaires. Un constat s’impose cependant : depuis plusieurs décennies, les capacités de production nucléaire développées par la France tendent à lui procurer des avantages comparatifs dans la production d’électricité et à couvrir l’intégralité de ses besoins à des prix réduits. Dès lors, sans préjuger du rôle que pourraient jouer demain les énergies renouvelables (EnR) dans le mix énergétique, la disponibilité de l’énergie produite par le parc nucléaire constitue un objectif pour la pérennité des EI et des HEI.

Plus que le niveau de production des centrales, l’enjeu porte sur l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (Arenh).

Institué par la loi n° 2010-1488 du 7 décembre 2010 (dite « loi NOME ») ([40]), l’Arenh donne la possibilité à tout fournisseur d’électricité de s’approvisionner auprès d’EDF, dans la limite d’un volume et d’un tarif définis par l’État. Longtemps fixé à 100 TWh par an, le plafond de l’Arenh a été porté à 120 TWh jusqu’en 2025, aux termes de la loi du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat ([41]). Par ailleurs, le texte a relevé le prix plancher du mégawattheure vendu aux fournisseurs d’électricité concurrents d’EDF, porté à 49,50 €/MWh (contre 42 €/MWh).

Conformément aux engagements pris auprès de la Commission européenne en 2012 ([42]), l’Arenh devrait cesser d’exister à compter du 31 décembre 2025. Il avait été conçu comme un mécanisme transitoire résultant d’un compromis, alors que la France se voyait contrainte de supprimer les tarifs réglementés et transitoires d’adaptation au marché (TarTAM), du fait de leur requalification en aides d’État. La mise en place de l’Arenh poursuivait deux objectifs : d’une part, promouvoir une certaine concurrence à la commercialisation à EDF ; d’autre part, remplacer le dispositif des tarifs réglementés afin de permettre aux consommateurs français, notamment industriels, de bénéficier de la « rente nucléaire ».

La question se pose désormais des suites que la Commission et la France donneront à l’expiration du délai de validité du dispositif.

En toute vraisemblance, le sujet fait partie des discussions que le Gouvernement français mène depuis plusieurs années à propos d’EDF et de sa réorganisation. À ce jour, aucune option ne parait pouvoir être écartée entre une suppression de l’Arenh, sa prorogation ou son remplacement par un autre dispositif. Au cours de l’audition des représentants de la direction générale de la concurrence de la Commission européenne, Mme Anna Colucci, directrice chargée de la section Marchés et cas Énergie et Environnement, a ainsi estimé que la décision appartenait pour l’essentiel aux autorités françaises. De son point de vue, la Commission pourrait se prononcer d’abord en considération des risques de fermeture du marché de l’électricité ou de restrictions à la concurrence, compte tenu du poids prédominant que conserve l’opérateur historique.

À bien des égards, une telle incertitude se révèle préjudiciable pour les EI et les HEI. À l’instar des représentants de Copacel, des responsables de filières signalent en effet une propension à l’attentisme de certaines entreprises.

Ainsi que l’ont souligné de nombreux intervenants, l’Arenh représente un dispositif fondamental pour les industries. Selon M. Guy Lecerf, président de l’Association française indépendante de l’électricité et du gaz (Afieg), le dispositif peut couvrir en moyenne 90 % de l’approvisionnement des électro-intensifs, compte tenu du profil « plat » de leur consommation. Il permet aux EI et HEI, comme à tous les autres consommateurs, de bénéficier d’un prix de l’électricité qui se rapproche du prix moyen de production de l’électricité en France.

L’impact sur la structure des coûts paraît aujourd’hui documenté. Des éléments communiqués par la Commission de régulation de l’énergie, il ressort ainsi qu’un relèvement du plafond de l’Arenh engendrerait une économie d’environ 30 €/MWh si le volume d’électricité fournie est fixé à 110 TWh. L’instauration du plafond à 120 TWh permettrait de réduire la facture d’électricité de 60 €/MWh.

Dans une certaine mesure, malgré des aléas inhérents aux procédures d’écrêtement mis en œuvre en cas de demande supérieure à l’offre, l’Arenh fait partie des paramètres de l’activité des électro-intensifs. De fait, l’ensemble des représentants des filières auditionnées ont plaidé devant le rapporteur pour un accroissement des volumes fournis.

De son point de vue, le devenir de l’Arenh importe moins que la garantie apportée sur la disponibilité, au-delà de 2025, de l’électricité produite par le parc nucléaire. C’est la raison pour laquelle le rapporteur invite les pouvoirs publics à examiner au plutôt l’ensemble des mesures qui permettraient d’atteindre cet objectif et d’assurer aux électro-intensifs la visibilité nécessaire à leurs investissements.

B.   les CONTRATS À LONG TERME : une autre voie pour la sÉcurisation de la fourniture d’ÉlectricitÉ aux ei et hei

La garantie d’un approvisionnement en électricité représente le second impératif pour les électro-intensifs. Dans une certaine mesure, le monopole confié à EDF et l’organisation d’un système de tarifs réglementés, puis l’établissement de l’Arenh, ont longtemps permis de répondre à ce besoin. Alors que l’application du droit de la concurrence fait peser des incertitudes sur le maintien d’un tel dispositif, ainsi que sur le rôle que l’opérateur historique peut jouer au regard des positions conservées sur le marché, les contrats à terme ouvrent une nouvelle perspective.

Du point de vue du rapporteur, le soutien public aux électro-intensif ne saurait négliger l’intérêt d’un cadre qui permette aux acteurs de prendre des engagements de nature à remplir des objectifs d’intérêt général. C’est la raison pour laquelle, il estime qu’il convient de tirer les leçons de la mise en place du consortium Exeltium et de favoriser le développement de montages adaptés aux besoins des entreprises consommatrices.

1.   Des leçons à tirer du consortium Exeltium

De fait, le consortium Exeltium demeure à ce jour la seule initiative véritablement significative pour la réflexion sur le développement des contrats à long terme. Sa création en 2006 faisait suite à un renchérissement du prix de l’électricité sur le marché de gros jugé important à cette date. Cette alerte avait motivé l’établissement d’un rapport d’enquête du conseil général des Mines et de l’Inspection générale des finances sur les prix de l’électricité ([43]) et la tenue une table ronde des électro‑intensifs lancée en février 2005 sous l’égide du Gouvernement.

Associant six membres fondateurs ([44]), le consortium vise à assurer la compétitivité à long terme des sites industriels de ses membres par le biais d’un contrat de partenariat industriel signé en 2008 avec EDF. Il compte 27 actionnaires-clients, qui représentent 100 sites industriels.

L’accord initial prévoyait la fourniture par l’opérateur historique de 311 TWh sur la période 2011-2034. En contrepartie, les membres du consortium s’engageaient à verser une avance-en-tête à titre d’investissement dans les capacités de production nécessaires à la fourniture de l’énergie, d’un total de 3,8 milliards d’euros. Du fait des répercussions de la crise financière déclenchée en 2007 par la faillite de Lehman Brothers, les membres du consortium n’ont pu réunir les fonds nécessaires au règlement de cette somme. En conséquence, le volume de l’électricité à fournir sur l’ensemble de la période d’exécution de l’accord se réduit aujourd’hui à 148 TWh. Le contrat a donné lieu au versement initial à EDF de près de 1,8 milliard d’euros. En outre, Exeltium s’acquitte auprès de l’électricien de paiements proportionnels à raison des volumes livrés, dont le montant intègre des éléments de prix qui varient tous les ans ([45]).

Dans l’ensemble, le bilan du consortium fait l’objet d’appréciations assez mitigées, pour ne pas dire critiques.

Les réserves portent, en premier lieu, sur le prix obtenu par les membres d’Exeltium. Suivant les analyses développées par l’ensemble des intervenants, le prix Exeltium ne présente qu’un intérêt limité et ne correspond pas à l’objectif initial d’un tarif préférentiel ([46]). Longtemps équivalent à celui pouvant être obtenu dans le cadre de l’Arenh, il a subi une hausse importante (de l’ordre de 70 %) qui le place très nettement désormais au-dessus de ce niveau. Ceci résulte de l’introduction d’une clause d’indexation sur les cours du marché de gros de l’électricité en 2014. Il explique les demandes de révisions tarifaires qui font l’objet de discussions régulières avec EDF.

En second lieu, la plupart des observateurs soulignent que le fonctionnement du consortium ne favorise pas, par sa complexité, l’alignement des intérêts.

La question posée est celle de la durée des engagements souscrits dans la cadre d’Exeltium. D’après les éléments transmis par M. Jean-Paul Aghetti, président du consortium, la plupart des membres possèdent un contrat de 15 ans ; certains engagements vont jusqu’à 20 ans, en fonction des demandes initiales de chacun des actionnaires-clients. Cette disparité ne contribue pas à une convergence durable des intérêts, dès lors que les engagements n’exposent pas les actionnaires aux mêmes risques sur la durée d’existence du consortium.

De ce point de vue, la faculté reconnue aux membres du consortium d’exercer tous les cinq ans une option de sortie sans frais peut être jugée problématique. L’existence d’une telle clause trouve son origine dans la décision rendue par la Commission européenne afin d’autoriser l’existence du consortium. Elle paraît motivée par la volonté de prévenir tout risque de verrouillage du marché par le biais d’un contrat qui mettrait EDF en position de se poser en fournisseur exclusif d’une partie des entreprises fortement consommatrices d’électricité. Elle n’en comporte pas moins l’inconvénient de fragiliser le consortium, en restreignant la portée des engagements pris et en créant des incertitudes autour des capacités de consommation et de financement.

En soi, l’expérience d’Exeltium ne saurait conduire à dénier tout intérêt à l’établissement de consortiums. Ainsi que l’ont observé certains intervenants, si les grosses sociétés industrielles peuvent contracter de manière bilatérale avec les développeurs eu égard à leur taille critique, un tel montage conserve tout son sens pour les ETI ou PME. En effet, il paraît de nature à permettre une densification des volumes, une optimisation des coûts de négociation et de développement et une agrégation des moyens de production. Il reste cependant à définir des instruments plus simples susceptibles d’offrir un cadre adapté aux besoins des EI et des HEI.

2.   Une diversité de montages envisageables

Les éléments recueillis par le rapporteur portent à conclure qu’il n’existe pas d’obstacles juridiques à un rapprochement entre grands consommateurs.

Seuls pourraient prêter à contentieux des accords dans le cadre desquels des concurrents bénéficiaires d’un rapprochement se concerteraient afin d’imposer le contenu du prix de l’électricité du consortium sur le marché aval, soit les produits fabriqués par des usines concurrentes. Ainsi que l’a d’ailleurs rappelé Mme Anna Colucci, directrice à la direction générale de la concurrence, la Commission européenne n’est amenée à se prononcer sur les contrats signés entre personnes privées que si leur application semble de nature à mettre en cause la concurrence sur le marché.

Dès lors, le développement des contrats à long terme de fourniture d’électricité se heurte moins à des contraintes juridiques qu’à des considérations d’opportunité.

Les éléments communiqués par M. Philippe Darmayan, ancien président de l’Alliance industrie du futur, chargé d’une mission sur l’établissement de contrats de long terme pour les électro-intensifs, tendent en effet à montrer que, sous réserve d’une conformité au droit de la concurrence, de nombreux schémas paraissent concevables suivant les besoins. M. Darmayan évoque notamment :

– l’intégration verticale entre producteur/fournisseur et entreprise consommatrice, sous la forme d’une co-entreprise ou d’un partenariat industriel : la structure créée a pour objet le développement de capacités de production et la fourniture d’électricité au bénéfice d’un partenaire client (à l’exemple du schéma utilisé pour la construction d’EPR sur le site Olkiluoto 3 en Finlande, ou sur celui d’Hinkley Point au Royaume-Uni) ;

– l’association à l’activité d’une unité de production : ce procédé peut prendre la forme d’un droit de tirage sur la production d’électricité (à l’exemple des droits que possèdent les fournisseurs alternatifs dans certaines centrales d’EDF) ; elle peut également consister en un accord de fourniture sur le modèle du consortium Exeltium.

Toutefois, les contrats conclus de gré à gré par des producteurs et des consommateurs (ou des fournisseurs) conservent un caractère insignifiant en France. En dehors d’Exeltium, seul le contrat d’achat d’électricité sur le site Trimet à Saint-Jean de Maurienne a pu être évoqué au cours des auditions ([47]). Les éléments d’analyse développés devant le rapporteur peuvent donner à penser que, s’agissant de l’électricité nucléaire, l’Arenh limite l’intérêt de ce type d’instruments, tant pour les entreprises fortement consommatrices que pour EDF.

Dans une certaine mesure, la nécessité de leviers pour le développement des énergies renouvelables (EnR) modifie quelque peu les termes de l’équation.

Comme observé par plusieurs intervenants, la conclusion de contrats d’achat d’électricité (ou power purchase agreement – PPA) n’était pas privilégiée jusqu’alors par les développeurs des EnR pour deux motifs : d’une part, l’existence de dispositifs de soutien public permettant de sécuriser leur financement ; d’autre part, la possibilité de valoriser une partie de la production sur le marché de gros.

Par ailleurs, la question peut se poser des garanties qui entourent l’exécution des contrats, du point de vue des contreparties que peuvent offrir les développeurs d’EnR en termes de capacités de production mais aussi de la solidité financière de certaines entreprises fortement consommatrices d’électricité. Cette incertitude peut contrarier l’investissement d’EDF mais également des fournisseurs alternatifs et des développeurs d’EnR.

Aussi importe-t-il de sécuriser le cadre contractuel dans lequel peuvent être conclus des contrats d’achats d’électricité de long terme par les EI et les HEI.

D’après les réponses au questionnaire budgétaire, des travaux sont en cours afin de mettre en place un cadre permettant, par rapport aux soutiens publics existants, de crédibiliser le développement des EnR par le biais de contrats d’approvisionnement de long terme entre un développeur d’un parc EnR et un consommateur industriel. Il s’agit également d’identifier les voies et moyens de développement des contrats de long terme avec l’opérateur historique. Il pourrait s’agir de consortium, mais aussi de contrats bilatéraux. Le rapporteur ne peut que souscrire à cette démarche.

Au-delà du cadre juridique, il estime que pourrait être également examinée la proposition tendant à apporter une garantie publique à des contrats de long terme en matière d’achat d’électricité et destinée à garantir des défaillances structurelles des entreprises consommatrices. Si les modalités restent à définir, la France pourrait sans doute évaluer le dispositif existant en Norvège (« système GIEK ») ou le dispositif en cours de conception en Espagne (« système FERGEI »).

Recommandation  5 : sécuriser le cadre contractuel dans lequel peuvent être conclus des contrats d’achats d’électricité de long terme par les EI et les HEI. Envisager la possibilité d’une garantie publique pour inciter les producteurs/fournisseurs d’énergie renouvelable à souscrire des contrats de long terme.

C.   appuyer les efforts de SOBRIÉTÉ ÉNERGÉTIQUE

La participation à la maîtrise des dépenses d’énergie représente l’ultime défi auquel devront répondre les industries électro-intensives. D’après un scénario de référence élaboré par Réseau de transport d’électricité (RTE), la consommation électrique des EI et des HEI devrait croître de 66 % entre 2019 et 2050 (de 60 TWh à 100 TWh) hors hydrogène et de 170 % avec hydrogène. Les EI et HEI représenteraient alors près des deux tiers de la consommation industrielle.

Dans cette perspective, l’action publique doit nécessairement aborder deux questions : d’une part, l’accompagnement du renouvellement des modes de production ; d’autre part, la participation à la préservation du réseau électrique.

1.   Accompagner le renouvellement des modes de production

Les chiffres de consommation établis par RTE reflètent une évolution fondamentale de l’activité des EI et HEI, à savoir l’électrification croissante des processus industriels. Suivant les secteurs, le mouvement reflète des efforts de rationalisation dans la consommation d’énergie destinés à préserver la viabilité des entreprises face à la contrainte renouvelée de l’efficacité énergétique.

Il peut également constituer la conséquence du développement d’innovation. Il en va ainsi dans le secteur de la chimie. Suivant l’état des lieux dressé par France Chimie, la mise en œuvre de nouvelles technologies moins émettrices de gaz à effet de serre pourrait conduire à une augmentation de la consommation d’énergie/d’électricité. Par exemple, la production d’hydrogène ou d’ammoniac fondée sur l’électrolyse de l’eau, plutôt que le vaporeformage de gaz naturel, consomme 10 % d’énergie en plus. Dans ces conditions, l’évolution des procédés peut dégrader à court terme l’efficacité énergétique des secteurs.

La décarbonation n’en constitue pas moins une nécessité. Dès lors, il peut paraître souhaitable qu’au-delà du maintien de la compensation carbone portée par le programme 134, l’État mobilise de nouvelles ressources pour le financement de la modernisation des outils de production des EI et HEI.

Sous réserve d’inventaire, cet effort pourrait reposer sur le renouvellement des financements accordés à l’Ademe dans le cadre du Plan de relance (par exemple au titre du fonds décarbonation de l’industrie ([48])). Il s’agirait également d’exploiter pleinement les possibilités offertes par les lignes directrices concernant les aides d’État au climat, à la protection de l’environnement et à l’énergie (les «Ceeag»), adoptées par la Commission le 27 janvier 2022.

Recommandation n° 6 : Soutenir financièrement les investissements contribuant à la décarbonation et à la modernisation des outils de production des industries électro-intensives.

2.   Mieux récompenser les services rendus au réseau électrique

Outre la réduction du Turpe, le droit français peut inciter les électro‑intensifs à modérer la consommation d’énergie dans l’objectif spécifique d’assurer la pérennité du réseau de transport d’électricité. Ces incitations procèdent de la mise en œuvre des dispositifs suivants :

– l’interruptibilité ([49]) : applicable à un nombre restreint de sites HEI et représentant un volume limité (1,4 GW), la procédure donne lieu au versement d’une rétribution pouvant aller jusqu’à 12 €/MWh en 2021 ;

– l’effacement ([50]) : la rétribution était comprise entre 0,5 à 3 €/MWh en 2021 ;

– la participation aux réserves (primaire, secondaire et tertiaire) ([51]) et l’ajustement ([52]) donne lieu à une rémunération de l’ordre de 0 à 2 €/MWh selon la capacité mobilisable.

Certes, aucun des éléments communiqués au rapporteur ne permet de caractériser des impossibilités techniques ou de coûts d’exploitation dus à la mise en œuvre de ces dispositifs. Toutefois, afin de renforcer leur caractère incitatif, il pourrait être utile d’évaluer la pertinence des rémunérations procurées au titre des services rendus au réseau, dans la mesure où elle participe indirectement à l’effort de sobriété énergétique. Cette évaluation pourrait être réalisée au regard des standards qui prévalent dans d’autres États de l’Union européenne.

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EXAMEN EN COMMISSION

 

Au cours de sa réunion du mardi 18 octobre 2022, la commission des affaires économiques a examiné pour avis, sur le rapport de M. Xavier Albertini, les crédits de la mission « Économie », en ce qui concerne les entreprises.

M. le président Guillaume Kasbarian. Chers collègues, nous achevons cet après‑midi l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances (PLF) pour 2023. Nous avons étudié neuf avis budgétaires, dont quatre se rattachant à la mission Économie : le commerce extérieur, les communications électroniques et l’économie numérique, l’économie sociale et solidaire et le tourisme. Il nous reste à discuter d’un cinquième et dernier avis relevant de la mission Économie, celui relatif aux entreprises, sur le rapport de M. Xavier Albertini.

Notre rapporteur s’est particulièrement intéressé cette année au soutien public aux industries électro-intensives (EI). Je précise que le vote sur les crédits de la mission Économie aura lieu à l’issue de l’examen de cet avis. Je rappellerai préalablement les avis donnés par les quatre autres rapporteurs ayant eu à se prononcer sur les crédits de cette mission.

M. Xavier Albertini, rapporteur pour avis. L’avis budgétaire que je vous présente cet après-midi porte sur le programme 134 Développement des entreprises et régulation.

La programmation budgétaire pour 2023 propose de porter le montant des crédits de paiement à 2,279 milliards d’euros, soit une augmentation des ressources de 26,95 %.

Le principal déterminant de cette dynamique réside dans le renforcement des crédits d’intervention consacrés à la compensation carbone pour les industries électro-intensives, financée par l’action 23 Industrie et services. En l’occurrence, le dispositif devrait mobiliser 856 millions d’euros. La mesure répond à deux objectifs : d’une part, assurer la compensation des coûts indirects supportés au titre de l’exercice 2022 ; d’autre part, financer le versement d’une avance sur une partie des coûts indirects supportés par les entreprises en 2023. Sur le plan des effectifs, il convient de signaler le relèvement du plafond d’emploi de la direction générale des entreprises (DGE), avec l’apport de dix-neuf équivalents temps plein (ETP).

Le second déterminant de la progression des ressources du programme 134 tient à la revalorisation des dispositifs de soutien à l’export de l’action 07. En l’occurrence, il est prévu une forte hausse de la rémunération de BPIfrance assurance export, au titre des prestations réalisées pour le compte de l’État. On notera aussi le relèvement de la subvention pour charge de service public versée à Business France dans le cadre de la réforme des dispositifs de soutien à l’exportation.

Le niveau des ressources allouées au programme 134 reflète par ailleurs le rythme de croisière atteint par le financement de certaines prestations de La Poste. L’action 04 enregistre le maintien de la dotation budgétaire créée en 2022 au titre de la compensation des charges du service postal universel. L’enveloppe demeure fixée à 520 millions d’euros, conformément aux spécifications de l’avenant au contrat d’entreprises signé entre l’État et La Poste le 16 janvier 2022. La même stabilité prévaut en ce qui concerne les crédits relatifs à la mission d’aménagement du territoire assumée par La Poste. En revanche, la mission de transport et de distribution de la presse fait l’objet d’un abondement notable par rapport à 2022.

En dernier lieu, la programmation pour 2023 assure la préservation de la capacité d’action des organismes de régulation par la consolidation de leurs ressources. Pour ce qui concerne l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) et l’Autorité de la concurrence, elle propose en effet une augmentation modérée des crédits de fonctionnement, ainsi qu’un maintien des plafonds d’emplois. S’agissant de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), le PLF pour 2023 accorde des effectifs supplémentaires de l’ordre de quatre-vingt-quatre ETP, dont trente-quatre recrutés à titre temporaire, afin de mener les contrôles nécessaires à l’occasion de l’organisation et du déroulement des Jeux olympiques et paralympiques organisés à Paris en 2024.

De mon point de vue, il s’agit là d’autant de mesures utiles face à une hausse des prix qui bouleverse les repères et pèse sur les ressources des entreprises et des particuliers. J’émettrai donc un avis favorable à l’adoption des crédits du programme 134.

Pour la partie thématique de mes travaux, j’ai choisi d’examiner l’efficacité du soutien public aux industries électro-intensives. Comme vous le savez, de manière courante, on distingue les électro-intensifs (EI) des hyper électro-intensifs (HEI). Ces deux catégories regroupent au total plus de 500 entreprises et emploient plus de 90 000 personnes. Elles ont ceci en commun de jouer un rôle fondamental dans les chaînes de valeur et d’être fortement exposées à la concurrence internationale. Je pense à des secteurs comme ceux du ciment, des plâtres et de la chaux, des métaux non ferreux, de la sidérurgie, de la chimie, des engrais, du papier carton, de l’aluminium.

Compte tenu de leur positionnement stratégique, elles bénéficient depuis plusieurs décennies d’un soutien de la puissance publique. Je crois cependant que nous ne pouvons plus nous en tenir à des dispositifs conçus pour des temps ordinaires. Au terme de mes travaux, je tiens en effet à formuler deux constats.

Le premier constat porte sur l’efficacité désormais très relative des instruments financiers employés face aux dérèglements d’une conjoncture exceptionnelle. Le soutien public aux EI et HEI fait appel, tout d’abord, à des mesures fiscales destinées à atténuer les charges inhérentes à une consommation importante d’électricité. Je fais référence, en premier lieu, à l’application de taux réduits d’accise sur l’électricité dans le cadre de la contribution au service public de l’électricité (CSPE) et, en second lieu, à l’abattement sur le tarif d’utilisation du réseau public d’électricité (TURPE). D’autre part, le soutien public repose sur la mise en œuvre du dispositif de la compensation carbone. Plus de 300 sites en bénéficient chaque année depuis 2015.

À ces dispositifs qui forment ce que l’on appelle communément la « boîte à outils », s’ajoute depuis juillet 2022 une aide d’urgence destinée à compenser la hausse des coûts d’approvisionnement en électricité, dans le contexte créé par l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Sous réserve de critères relatifs aux achats d’électricité et aux pertes engendrées par la hausse des cours de l’énergie, les entreprises peuvent prétendre à la couverture de 30 à 70 % de certains coûts éligibles. Les montants font l’objet de plafonds s’échelonnant de 2 à 50 millions d’euros.

Mon propos n’est pas de minorer l’intérêt de l’ensemble de ces dispositifs. Suivant un constat partagé, ils auront permis aux entreprises françaises de conserver des prix en rapport avec ceux pratiqués par la concurrence. L’ensemble des filières d’électro-intensifs réclament d’ailleurs le maintien de la boîte à outils. Elles plaident aussi pour un renouvellement rapide du dispositif de compensation carbone.

Les éléments que j’ai pu recueillir ne me portent pas à livrer un autre diagnostic. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle, sur ces dispositifs, deux de mes recommandations appellent à des éclaircissements et à des simplifications.

Il en va ainsi de l’aide d’urgence mise en place pour remédier aux répercussions de l’invasion de l’Ukraine. À l’évidence, avec 50 millions d’euros accordés à la mi-septembre 2022, le dispositif peine à trouver son public, malgré les moyens dégagés pour l’accompagnement des demandeurs. C’est pourquoi j’appelle le Gouvernement à poursuivre ses efforts de simplification, en concertation avec la Commission européenne.

Dans un même souci d’efficacité, il conviendra de travailler à l’actualisation rapide de la compensation carbone, dans le cadre fixé par les nouvelles lignes directrices de la Commission européenne pour la période 2022-2030. Leur mise en œuvre a suscité des appréciations divergentes sur des critères essentiels pour le calcul de l’aide versée. L’accord trouvé entre Paris et Bruxelles doit entrer en vigueur mais cela ne nous exonère pas d’une évaluation afin de prévenir toute distorsion de concurrence avec nos partenaires.

En vérité, la protection offerte aux EI et HEI français trouve ses limites face à l’envolée des cours de l’électricité. La conjoncture présente résulte de deux facteurs : d’une part, les répercussions de la forte hausse du prix du gaz sur le marché de l’électricité ; d’autre part, l’indisponibilité d’une partie substantielle du parc nucléaire français. Il en résulte que le prix de l’électricité menace d’atteindre un niveau prohibitif à partir de 2023. D’ores et déjà, des EI et HEI voient la part de l’énergie consommée dans leur chiffre d’affaires atteindre un niveau exorbitant et de nature à grever la marge opérationnelle dans certains secteurs industriels. Suivant la DGE, la part de l’énergie pourrait désormais atteindre 8 à 10 % du chiffre d’affaires. De surcroît, la compétitivité se dégrade et mon rapport fait état de productions en recul, voire d’arrêts d’usine.

De fait, les instruments de la boîte à outils n’exercent plus d’effet modérateur significatif. Pour les EI et les HEI, ce qui pèse désormais, c’est le coût de l’électron et le cours du carbone. D’où mon second constat, sur la nécessité d’un appui au renouvellement des conditions d’approvisionnement et de consommation des industries électro-intensives.

En premier lieu, il importe de concevoir des mécanismes de nature à favoriser une certaine régulation sur le marché de l’électricité. Nous mesurons tous les inconvénients que pouvait comporter l’alignement de l’évolution des prix de l’électricité sur celui du gaz. Les mécanismes de formation des prix ne permettent pas de faire bénéficier les consommateurs des coûts moyens les plus avantageux par rapport au prix du gaz. Ils ne contribuent pas à donner les signaux nécessaires à des investissements de long terme. Je réitère donc la proposition d’une réforme de l’organisation du marché de l’électricité, qui aboutirait à limiter la corrélation des prix avec le cours du gaz. Dans cette optique, je recommande d’évaluer la mesure adoptée par l’Espagne et le Portugal. Le dispositif vise à abaisser les coûts des intrants utilisés dans les centrales électriques alimentées par des combustibles fossiles afin de réduire leur coût de production et, en dernier ressort, le cours de l’électricité sur le marché de gros ibérique.

Il faut également veiller à la sécurité et à la constance de l’approvisionnement en énergie de nos EI et HEI. D’ici à ce que les énergies renouvelables (EnR) atteignent un stade de développement suffisant, cette exigence pose la question des conditions d’exploitation de l’énergie du parc nucléaire.

Vous le savez, l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (Arenh) devrait cesser d’exister à compter du 31 décembre 2025. Or il permet aux électro‑intensifs de bénéficier d’un prix de l’électricité qui se rapproche du coût moyen de l’électricité en France. Malgré des aléas inhérents aux procédures d’écrêtement mises en œuvre en cas de demande supérieure à l’offre, l’Arenh fait partie des paramètres de l’activité des électro-intensifs. De fait, l’ensemble des représentants des filières auditionnées a plaidé devant le rapporteur pour un accroissement des volumes fournis.

Cette mesure ne va pas de soi. Elle comporte de multiples implications qui touchent à l’organisation de la fourniture d’électricité et au rôle d’EDF. Toutefois, l’incertitude paraît préjudiciable pour les électro-intensifs et les pouvoirs publics devront offrir une certaine visibilité quant aux options qui pourront être retenues.

En second lieu, il nous faut favoriser le développement des contrats à long terme afin de sécuriser la fourniture d’électricité aux EI et HEI. À ce jour en effet, le consortium Exeltium demeure la seule initiative véritablement significative pour la réflexion sur le développement des contrats à long terme. Le consortium lie aujourd’hui vingt-sept actionnaires-clients à EDF en vue de la fourniture d’électricité à tarif préférentiel sur la période 2011-2034. Ainsi que le montre l’avis, Exeltium a pu pâtir de difficultés de financement, ainsi que de clauses contractuelles ne contribuant pas à une convergence des intérêts. Il suscite des appréciations plus que mitigées du point de vue des tarifs obtenus. L’expérience d’Exeltium ne saurait conduire à dénier tout intérêt à l’établissement de consortiums, pas plus qu’à la conclusion de contrats de long terme.

Si l’on dénombre aussi peu de conventions, ce n’est pas du fait des contraintes juridiques, mais du calcul d’opportunité. S’agissant de l’électricité nucléaire, l’Arenh limite l’intérêt de ce type d’instrument, tant pour les entreprises fortement consommatrices que pour EDF. Dans une certaine mesure, le développement des énergies renouvelables modifie quelque peu les termes de l’équation. Des initiatives émergent par le biais de contrats d’achats d’électricité. Or, la question se pose des garanties qui entourent l’exécution des contrats, du point de vue des contreparties que peuvent offrir les développeurs d’énergies renouvelables en termes de capacités de production. Il existe aussi parfois des interrogations sur la solidité financière de certaines entreprises fortement consommatrices d’électricité. Cette incertitude peut contrarier l’investissement d’EDF, mais également des fournisseurs alternatifs et des développeurs d’ENR.

Il nous faut remédier à cette difficulté en sécurisant les dispositifs au plan juridique, mais aussi au plan financier. Je propose donc d’examiner la possibilité pour l’État d’apporter une garantie publique destinée à garantir des défaillances structurelles des entreprises consommatrices à des contrats de long terme en matière d’achat d’électricité.

En dernier lieu, il nous faut appuyer les efforts de sobriété énergétique des industries électro-intensives. Je rappelle que, d’après un scénario de référence élaboré par Réseau de transport d’électricité (RTE), la consommation électrique des EI et des HEI devrait croître de 66 % entre 2019 et 2050. Cette perspective impose deux choses. La première est d’accompagner la modernisation des outils de production, afin de favoriser la décarbonation. L’avenir est à l’électrification de la production et cet investissement a un coût. Je recommande donc de soutenir les investissements contribuant à la décarbonation et à la modernisation des outils de production des industries électro-intensives. La seconde est de mieux rémunérer la participation aux procédures destinées à assurer la pérennité du réseau électrique.

J’émets un avis favorable à l’adoption des crédits du programme 134.

 

M. le président Guillaume Kasbarian. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Stéphane Vojetta (RE). Déjà déstabilisées par une crise sanitaire sans précédent, nos entreprises souffrent désormais d’une augmentation du prix des matières premières, notamment de l’énergie, à la suite de l’agression russe contre l’Ukraine. Les ménages en souffrent aussi.

Certains de nos collègues exigent une augmentation générale des salaires et 30 000 personnes ont manifesté en ce sens à Paris ce week-end. Pourtant, nous savons bien qu’une hausse générale des salaires ne se décrète pas. Nos entreprises, en effet, ne sont pas toutes dans la même situation. Certaines réalisent des profits et peuvent les partager avec leurs employés sous la forme de primes ou d’augmentations de salaires. D’autres doivent être aidées par l’État : c’est le cas des entreprises électro-intensives, avec la compensation carbone. L’État ne peut pas imposer une augmentation salariale à toutes les entreprises ; il risquerait de porter atteinte à la compétitivité de notre économie et au dialogue social.

Ma question sera double. D’abord, estimez-vous que les aides apportées par l’État à nos entreprises constituent une réponse adaptée aux défis actuels et à la nécessité indirecte de protéger le pouvoir d’achat des Français ? Ensuite, puisque vous suggérez d’appliquer la recette espagnole de plafonnement des prix du gaz, je rappellerai qu’en Espagne et au Portugal, s’il est vrai que ce plafonnement a eu un impact direct sur le prix de gros du gaz, en revanche, pour les particuliers, ce mécanisme n’a pas pu empêcher une très forte augmentation des factures de gaz et d’électricité. Avez-vous pris en compte toutes ces données pour aboutir à cette recommandation ?

M. Xavier Albertini, rapporteur pour avis. Même si les mesures d’accompagnement – la « boîte à outils » – ont porté leurs fruits pendant un certain temps, il me paraît important d’adapter les dispositifs à l’évolution de la situation énergétique. Vous m’interrogez sur la situation des ménages, mais ce n’est pas l’objet de ce rapport.

Les entreprises espagnoles et portugaises ont tiré profit des mesures prises : leur compétitivité s’est accrue et, surtout, elles ont gagné des parts de marché, au détriment des entreprises françaises, ce qui peut avoir des effets à long terme sur le marché international.

M. Nicolas Meizonnet (RN). Le programme 134 doit permettre d’instaurer les conditions idéales pour, d’une part, favoriser la compétitivité des entreprises, et, d’autre part, garantir l’établissement d’un environnement propice à la croissance et à l’emploi.

L’industrie est un secteur clé pour notre pays et nous devrions tout mettre en œuvre pour la sauver. Les quelques mesures prévues dans ce PLF paraissent insuffisantes, compte tenu des menaces qui pèsent sur l’industrie française. Ce PLF semble reléguer au second plan la question industrielle, alors que cette dernière devrait être au cœur des débats.

Le coût de l’énergie était, jusqu’à présent, l’un de nos rares avantages compétitifs, mais nous l’avons perdu en quelques années. Le manque d’investissements dans le parc nucléaire français, auquel s’ajoutent les conséquences ravageuses du marché de l’électricité interconnecté au niveau européen, a porté un coup terrible à nos acteurs industriels français. Nous sommes déjà l’un des pays les plus désindustrialisés d’Europe, ce qui n’empêche pourtant pas les délocalisations de se multiplier. Les gouvernements qui se succèdent depuis une trentaine d’années font preuve d’un criant manque de lucidité et j’ai bien peur que ce budget soit dans le prolongement de cette dynamique négative.

En face, nos concurrents font preuve de beaucoup plus de pragmatisme. L’Allemagne est sur le point d’enclencher un plan de 200 milliards d’euros pour sauver ses usines. La Chine et les États-Unis, qui sont bien moins touchés par la montée des prix des énergies, vont devenir encore plus attractifs pour les industriels présents en France qui souhaitent se délocaliser. L’industrie doit avoir une place centrale dans un pays comme le nôtre. Elle est essentielle pour redynamiser nos territoires, pour créer de l’emploi et pour ajuster notre balance commerciale.

Comparativement à d’autres pays, comme l’Allemagne, notre Gouvernement a-t-il bien fait le maximum pour sauver notre industrie ? La santé économique de notre pays ne s’améliorera pas sans réindustrialisation. Or j’ai malheureusement le sentiment que jamais le made in France n’a été autant en danger.

M. Xavier Albertini, rapporteur pour avis. J’ai posé une question au Gouvernement relative à la désindustrialisation aujourd’hui même. Le ministre chargé de l’économie a rappelé les mesures prises en faveur de la réindustrialisation depuis cinq ans : la baisse des impôts de production, la réduction de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), le plan de relance et, surtout, le plan France 2030.

S’agissant des aides, j’ai rappelé qu’une enveloppe de 50 millions d’euros a bénéficié à 500 entreprises, environ. On m’a fait part, au cours des auditions, de difficultés d’accès ou d’éligibilité à un certain nombre d’aides. Une nouvelle enveloppe, avec des conditions d’éligibilité différentes, sera disponible au dernier trimestre 2022.

Mme Sophia Chikirou (LFI-NUPES). Ce Gouvernement est au service des grandes entreprises, il prend des milliards dans la caisse publique pour servir les intérêts privés des actionnaires et de quelques dirigeants qui bénéficient de subventions publiques directes et de réductions fiscales massives. D’après une étude du centre lillois d’études et de recherches sociologiques, les grandes entreprises reçoivent 157 milliards d’euros de la part de l’État chaque année. L’éducation et la santé auraient besoin que leurs crédits augmentent autant que ceux de la mission Économie – à hauteur de 27 %.

Du reste, contrairement au discours officiel, l’augmentation des crédits de la mission Économie ne permettra ni de créer des emplois, ni de faire progresser nos entreprises dans la voie de la bifurcation écologique, ni même de les rendre plus compétitives. Les organismes en charge des contrôles et de l’application des lois bénéficient à peine de quelques augmentations : entre 1,4 % pour l’Arcep et 3 % pour la DGCCRF. Une part massive des crédits supplémentaires alloués à la mission Économie va servir à la « compensation carbone des sites très électro-intensifs », c’est-à-dire aux EI et aux HEI. Au total, 856 millions d’euros financeront 300 sites.

Cela pose deux problèmes majeurs. D’abord, nous ne sommes pas d’accord pour que l’État compense la taxe carbone due par des entreprises qui ont un impact écologique négatif. Cette prise en charge est contraire au principe de responsabilité environnementale. Ensuite, nous n’acceptons pas que cette aide de l’État suive le cours de la tonne carbone, qui s’élève désormais à près de 90 euros : c’est la seule hausse de prix qui est entièrement compensée par l’État. Comment est-il possible que l’on prévoie encore de telles sommes, dans le PLF pour 2023, pour garantir l’irresponsabilité environnementale des entreprises les plus polluantes ?

On est à la fois dans l’indécence et le double discours, et surtout dans l’absence totale de volonté politique d’agir pour la planification écologique. Le système, la « boîte à outils », comme vous l’appelez, est absurde. Il est coûteux en argent public et met en péril les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Vos recommandations vont dans le bon sens : il importe effectivement de repenser tout le système, dans la durée. Or ce n’est pas ce que fait ce PLF, où l’austérité s’applique à tout le monde, sauf à ceux qui peuvent continuer de polluer en toute impunité.

M. Xavier Albertini, rapporteur pour avis. Vous dites que les aides de l’État bénéficient à l’actionnariat privé mais, en réalité, ce sont 500 entreprises qu’elles soutiennent, et 90 000 salariés. Si ces entreprises ne bénéficiaient pas de cet accompagnement, cela aurait des conséquences non négligeables en matière de salaire. Il semble donc nécessaire, dans des limites acceptables, de soutenir la compétitivité de ces entreprises.

Vous évoquez des difficultés dans ces secteurs, mais ces activités, qui créent de l’emploi, ont contribué à faire baisser significativement le chômage, qui a été ramené à 5,5 % et elles connaissent une croissance globale de 7 %, en rattrapage de 2021 sur 2020. Enfin, nous avons vraiment la volonté de moderniser ces EI et ces HEI, et de les décarboner, mais cela ne se fait pas en un jour, dans la mesure où c’est relativement complexe et coûteux. Voilà pourquoi il m’apparaît nécessaire de les soutenir.

M. Julien Dive (LR). Vous dites qu’il importe de maintenir la compensation carbone au maximum. Pourtant, l’envolée du prix du CO2 n’est pas sans poser des problèmes. Cette compensation carbone est votée chaque année en PLF et son montant s’accroît, alors qu’on est dans un contexte de rigueur budgétaire. Elle est régulièrement contestée, au titre des aides aux énergies fossiles. Enfin, son versement n’étant pas anticipé, elle fait peser une lourde contrainte sur la trésorerie des entreprises bénéficiaires. La mise en place du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières de l’Union européenne vise sa diminution progressive jusqu’à sa suppression en 2030. Si la politique énergétique avait été différente sous le précédent quinquennat, la compensation carbone serait moins lourde.

J’en viens aux moyens attribués à l’accompagnement des entreprises. Le plafond des ressources affectées aux chambres de commerce et d’industrie (CCI) a été amputé de 350 millions d’euros en 2017. Alors qu’en 2012 le réseau connaissait une baisse significative et régulière de ses ressources fiscales, ce plafond était alors de 1,38 milliard. Il a été réduit à 575 millions en 2020 et à 400 millions en 2022. Quelles initiatives le Gouvernement compte‑t‑il prendre pour renouer le dialogue avec les CCI ? Comment leur donner une visibilité sur leurs moyens budgétaires à long terme ?

Enfin, le fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce (Fisac), qui permettait d’accompagner les artisans et les commerçants de proximité, a été supprimé sous le précédent quinquennat, alors qu’il était extrêmement utile. L’été 2022 a été ravageur et a vu un grand nombre de fermetures d’entreprises. Ne considérez-vous pas que supprimer le Fisac a été une erreur et qu’il serait intéressant de créer un outil similaire ?

M. Xavier Albertini, rapporteur pour avis. Les CCI ne relèvent pas du programme 134, au sens strict, pas plus que le plan Action Cœur de ville, qui a le même objet que le Fisac.

Au cours de l’été 2022, les tribunaux de commerce ont plutôt constaté une forte diminution des dépôts de bilan.

Enfin, je préconise dans mon rapport d’améliorer le versement de certains dispositifs d’aides : nous nous retrouvons sur ce point.

Mme Louise Morel (Dem). L’hiver à venir suscite des inquiétudes, relatives à nos capacités de production d’énergie et au coût de celle-ci. Si toutes les entreprises sont touchées par cette crise énergétique et inflationniste, les entreprises électro-intensives le sont particulièrement.

La France en compte plus de 500, dans des secteurs stratégiques : la sidérurgie, la fonte, le papier carton, mais aussi la chimie, les matières plastiques, les panneaux de bois ou encore les fibres textiles. Elles fournissent elles-mêmes des secteurs sensibles, comme la défense ou la santé.

Or, malgré les aides déjà introduites par l’État, de nombreux industriels s’interrogent sur l’hiver à venir : vaut-il mieux continuer à produire ou s’arrêter ? Et s’il faut s’arrêter pour économiser de l’énergie, pour combien de temps ? On ne redémarre pas aussi facilement des fours de fusion que des voitures. Toutes ces inquiétudes soulèvent, par ricochet, de nombreuses autres interrogations sur la possibilité de recruter, de maintenir des équipes, de réaliser des investissements.

Ma question concerne les entreprises qui n’ont pas encore signé de contrat pour l’année 2023. De quel soutien bénéficieront-elles ? Que faire pour aider nos entreprises exposées à la concurrence internationale, notamment américaine et chinoise, alors que ces pays ne connaissent pas la même explosion des coûts de l’énergie ?

Notre groupe votera les crédits de cette mission essentielle pour l’avenir de notre souveraineté et de notre indépendance industrielle.

M. Xavier Albertini, rapporteur pour avis. Nous sommes dans une période de transition. L’arrêt de certaines productions peut conduire, je l’ai dit, à des pertes de marges, voire à un arrêt de l’activité. Vos interrogations sont légitimes.

Plusieurs dispositifs sont encore en vigueur : la « boîte à outils », l’Arenh et l’accélération de la compensation carbone dans les meilleures conditions pour l’ensemble des entreprises. Mais nous sommes dans une phase de transition. Il importe de sécuriser notre approvisionnement électrique sur le long terme.

Mme Marie-Noëlle Battistel (SOC). Depuis 2020 et la pandémie, nos entreprises vont de crise en crise. Nombre d’entre elles sont très affaiblies, au moment où il faut faire face à une augmentation du coût de l’énergie. Les EI et les HEI sont les plus exposées. Vous avez rappelé les dispositifs d’aide existants, notamment la compensation carbone et le dispositif conjoncturel mis en œuvre par le Gouvernement pour celles dont l’excédent brut d’exploitation (EBE) est particulièrement impacté. Mais force est de constater que cela ne suffit pas, comme mon groupe a pu l’évoquer à propos de la société Arc International, par exemple. Il nous faut donc aller plus loin, notamment pour les secteurs les moins aidés.

J’ai eu l’impression que vous dénonciez, comme nous, l’absurdité de la formation des prix sur le marché de l’électricité. Ce sujet est d’abord européen, mais est urgent que le Gouvernement prenne cette question à bras-le-corps.

Concernant les mécanismes de maîtrise des prix, qu’il semble nécessaire de privilégier, comment envisagez-vous la fin de l’Arenh ? L’Arenh ne mériterait-il pas d’être fléché différemment ? Ne faudrait-il pas en faire sortir les entreprises qui n’ont absolument pas besoin d’être aidées et venir davantage en aide aux petites entreprises et aux collectivités ? Dans l’immédiat quels sont les outils qui vous semblent les plus adaptés pour soutenir les entreprises qui ne sont ni EI, ni HEI ?

 

M. Xavier Albertini, rapporteur pour avis. Je n’ai pas évoqué « l’absurdité de la formation des prix », j’ai simplement noté que l’évolution de la structuration du prix ne répondait plus à la situation exceptionnelle que nous connaissons. Des changements s’imposent. S’agissant de la fin de l’Arenh, j’ai évoqué l’expérience d’Exeltium, qui peut être une piste. En tout cas, toutes les options sont sur la table. Avec notre parc nucléaire, nous pouvons aboutir à un mix énergétique qui garantisse la stabilité, la visibilité et la sécurisation de notre approvisionnement en électricité. La composition du prix se fera en conséquence.

M. Paul Molac (LIOT). Il n’a pas été question de La Poste, qui joue pourtant un rôle essentiel dans la structuration de l’aménagement du territoire dans de nombreuses régions de France.

Le marché de l’énergie ne fonctionne pas comme il faut. Il favorise les situations oligopolistiques et la spéculation. Si nous voulons mettre un peu d’ordre, nous devrons le faire au niveau européen, mais il ne faut pas tarder. J’ai l’impression que l’État français essaie de faire au mieux pour boucher les voies d’eau dans le navire, mais il prend encore l’eau.

La politique que nous menons consiste à soutenir nos entreprises, parce que nous n’avons pas le choix. Nous n’allons pas les laisser disparaître, ni laisser nos concurrents étrangers prendre les marchés. Toutefois, cette politique ne me semble pas durable à moyen terme pour nos finances publiques, avec un budget en déficit de 150 milliards d’euros. Il va falloir, à un moment donné, faire autrement. Vous avez parlé de la production d’électricité, des EnR, mais quelle est la porte de sortie ?

M. Xavier Albertini, rapporteur pour avis. S’agissant du marché de l’énergie, l’équation est complexe. M. Bruno Le Maire a évoqué en septembre une rencontre avec ses homologues européens ; il faudra un peu de temps pour parvenir à un consensus, puisque nous devons suivre des règles européennes. S’agissant du mix énergétique, je me garderai de toute préconisation, ce sujet étant éminemment complexe.

M. le président Guillaume Kasbarian. Nous en venons aux questions individuelles.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Pour prolonger le débat qui a eu lieu dans l’hémicycle, que pensez-vous de l’idée qui circule de plafonner les revenus des producteurs d’électricité à 180 euros par mégawattheure ? Ce dispositif pourrait aider à la fois les particuliers et les entreprises. Mais sans doute cette question est-elle extérieure au champ de votre rapport.

M. Xavier Albertini, rapporteur pour avis. En effet. Pour revenir à la question que vous m’avez posée au sujet des aides dont peuvent bénéficier les entreprises qui ne sont ni EI, ni HEI, les dispositifs d’aides exceptionnelles que j’ai évoquées les concernent aussi. La vraie question est la capacité d’accès à ces aides et leurs conditions d’éligibilité.

M. le président Guillaume Kasbarian. Nous allons procéder au vote sur les crédits de la mission Économie. Je rappelle les avis émis par les quatre autres rapporteurs pour avis : Mme Virginie Duby-Muller (Tourisme) a émis un avis de sagesse ; Mme Sophia Chikirou (Économie sociale et solidaire), un avis défavorable, MM. Hervé de Lépinau (Commerce extérieur) et Aurélien Lopez‑Liguori (Communications électroniques et économie numérique), un avis favorable.

 

La commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Économie modifiés.

 


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   LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Audition conjointe :

Union des industries utilisatrices d’énergie (UNIDEN) *

M. Nicolas de Warren, directeur des relations institutionnelles d’Arkema, président de l’UNIDEN

M. Fabrice Alexandre, Président de Communication & Institutions

Groupement des industriels hyper électro-intensifs (HEI)

M. Luc Baud, président

Mme Justine Journaix, consultante chargée des affaires publiques, du plaidoyer et de la concertation au cabinet KOOZ

Conseil général de l’économie (ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique)

M. Luc Rousseau, vice-président

M. Serge Catoire, ingénieur général des mines, président du comité d’inspection

M. Pascal Dupuis, ingénieur général des mines, membre

Audition conjointe :

Union française des industries des cartons, papiers et celluloses (Copacel)*

M. Paul-Antoine Lacour, délégué général

M. Olivier Riu, responsable énergie

Carton ondulé de France *

M. Philippe Durand, président

Mme Kareen Desbouis, déléguée générale

Fédération française du cartonnage et articles de papeterie

M. Philippe de Boisgrollier, délégué général

France Chimie *

Mme Magali Smets, directrice générale

M. Sylvain Le Net, responsable « énergie et changement climatique »

M. Matthias Girard, directeur des affaires publiques

Mme Juliette Judel, chargée de mission en affaires publiques

M. Gildas Barreyre, secrétaire général du groupe Seqens

Audition conjointe :

Industrie des Alliages, Métaux, Minerais et Minéraux, responsable et innovante (A3M) *

M. Stéphane Delpeyroux, président

M. Bruno Jacquemin, délégué général, délégué permanent du CSF
Mine & Métallurgie

Mme Mélisande Couespel, responsable Énergie - Changement climatique

Aluminium France *

M. Guillaume de Goys

M. Cyrille Mounier, délégué général

Exeltium (consortium regroupant une partie des entreprises électro-intensives) *

M. Jean-Paul Aghetti, président

Audition conjointe :

Association nationale des opérateurs détaillants en énergie (Anode) *

Mme Naima Idir, présidente

Mme Marion Brulé, chargée des affaires réglementaires et européennes d’Eni

M. Yohann Desfoux, chargé des affaires publiques de Total énergie

Association française indépendante de l’électricité et du gaz (Afieg) *

M. Géry Lecerf, président

Électricité de France *

M. Stanislas Landry, directeur grands comptes

M. Mathieu Chaouat, directeur des Ventes Industries Amont

Mme Véronique Loy, directrice adjointe des affaires publiques

Direction générale des entreprises (DGE)

Mme Orianne Chenain, administratrice de l’État hors classe, sous-directrice des matériels de transport, de la mécanique et de l’énergie

M. Adrien Thirion, directeur du projet Transition énergétique et compétitivité, référent structurel énergie

Direction générale de l’Énergie et du Climat (DGEC)

M. Timothée Furois, ingénieur des ponts, des eaux et des forêts, sous-directeur des Marchés de l’Énergie (SD1)

M. Philippe Darmayan, ancien président de l’Alliance industrie du futur, chargé d’une mission sur l’établissement de contrats de long terme pour les électro‑intensifs

Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep)

Mme Laure de La Raudière, présidente

Mme Cécile Dubarry, directrice générale

Mme Virginie Mathot-de Raincourt, conseillère de la présidente

Direction générale de la concurrence de la Commission européenne

Mme Anna Colucci, directrice chargée de la section Marchés et cas
Énergie & Environnement

M. Jan Papsch, chef d’unité adjoint aides d’état

M. Flavien Christ, chargé de dossiers aides d’état

M. Rodrigo Pedduzzi, chargé de dossiers aides d’état

Mme Héloïse Auplat, chargée de dossiers aides d’état

Autorité de la concurrence

M. Benoît Cœuré, président

M. Maël Guilbaud-Nanhou, secrétaire général

Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (Dgccrf – ministère de l’économie des finances et de la souveraineté industrielle et numérique)

Mme Virginie Beaumeunier, administratrice générale, directrice générale

M. André Schwob, ingénieur général des mines, chef du service du soutien au réseau

M. Arnaud Goddat, chef de bureau des affaires budgétaires et financières

M. Rémy Slove, directeur de cabinet

Direction générale des entreprises (DGE – ministère de l’économie des finances et de la souveraineté industrielle et numérique)

Mme Barbara Siguret, secrétaire générale

Mme Élodie Morival, sous-directrice du pilotage, de la stratégie et de la performance

M. Jean Tato Oviedo, chef du bureau des affaires budgétaires

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.


([1]) Décret n° 2022-826 du 1er juin 2022 relatif aux attributions du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

([2]) Depuis mai 2009, Atout France est l’unique opérateur de l’État dans le secteur du tourisme, l’agence de développement touristique de la France.

([3]) Lancé en 2021, le plan « Destination France » vise à renforcer le secteur du tourisme et garantir la place de la France parmi les premières destinations mondiales. Le plan fixe à 10 ans une trajectoire de rebond et de transformation du secteur touristique.

([4]) Porté par la mission « French Tech » au sein du ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, le programme French Tech Tremplin s’adresse aux personnes éloignées de l’écosystème entrepreneuriat et a pour objectif de les accompagner dans la création et le développement de leur start-up.

([5]) BPIfrance Assurance Export assure notamment la gestion des garanties publiques et d’autres outils de soutien financier à l’export.

([6]) Le crédit d’impôt pour la compétitivité et emploi (CICE) ne demeurera applicable qu’à Mayotte. Les entreprises qui n’ont pas utilisé tout leur CICE avant cette transformation conservent le droit de s’en servir pour le paiement des impôts de 2019 à 2021.

([7]) La mesure visait à accompagner la transformation des entreprises industrielles en encourageant l’investissement.

([8]) Directive (UE) 2018/1972 établissant le code des communications électroniques européen.

([9]) D’après les informations communiquées par l’ARCEP, les opérateurs ont fait des annonces à l’été 2022 à propos de la labellisation des intervenants et du renforcement des contrôles sur le terrain (grâce notamment à la transmission des plannings d’intervention).

([10]) Dans le domaine de la lutte contre les pratiques anticoncurrentielles, l’Autorité a rendu 30 décisions et prononcé 873,70 millions d’euros d’amendes (contre une moyenne de 720 millions d’euros). Dans l’exercice de ses missions consultatives, elle a rendu 17 avis en 2021 et 6 avis en 2022.

([11]) Règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux marchés contestables et équitables dans le secteur numérique et modifiant les directives (UE) 2019/1937 et (UE) 2020/1828 (règlement sur les marchés numériques) du 5 juillet 2022.

([12]) Directive (UE) 2019/882 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 relative aux exigences en matière d’accessibilité applicables aux produits et services (Texte présentant de l’intérêt pour l’EEE).

([13]) Au plan budgétaire, le mouvement donne lieu à un transfert de crédits vers les programmes 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation »  et 215 « Conduites et pilotage des politiques de l’agriculture » de la mission «  Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ».

([14]) Directions régionales de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités.

([15]) Directions de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités.

([16]) Ces pratiques consistent à réduire la quantité de produit vendu tout en conservant le même conditionnement et le même prix. On observe le développement du phénomène depuis la poussée inflationniste affectant les prix des produits de consommation et des matières premières depuis le second semestre 2021.

([17]) Article 49 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire.

([18]) Loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat

([19]) Loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire.

([20]) Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

([21]) Appelé également « livraison directe », le drop shopping désigne une vente sur internet dans le cadre de laquelle le vendeur ne se charge que de la commercialisation et de la vente du produit. C’est le fournisseur du vendeur qui expédie la marchandise au consommateur final.

([22]) Article L. 351-1 du code de l’énergie.

([23]) Dans sa version applicable jusqu’à l’ordonnance n° 2021-1843 du 22 décembre 2021, le code des douanes appliquait la qualification d’entreprise électro-intensive sur la base d’un ratio de 0,22 Kwh/ euros de valeur ajoutée. L’article L. 312-65 du code des impositions sur les biens et services énonce de nouvelles valeurs, en distinguant les entreprises ayant une activité industrielle et les installations industrielles relevant de certains secteurs d’activité exposés à la concurrence internationale.

([24]) Directive 2003/96/Ce du Conseil du 27 octobre 2003 restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l’électricité.

([25]) Le tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité (Turpe) a pour objet le financement de l’acheminement de l’électricité des lieux de production à ceux de consommation, à savoir les entreprises, les collectivités ou chez les particuliers.

([26]) Décret n° 2021-420 du 10 avril 2021 modifiant la partie réglementaire du code de l’énergie relative aux dispositions relatives à la réduction de tarif d’utilisation du réseau public de transport accordée aux sites fortement consommateurs d’électricité.

([27]) Article L. 341-4-2 et D. 341-9 du code de l’énergie.

([28]) Communication de la Commission sur les lignes directrices concernant certaines aides d’État dans le contexte du système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre après 2021 2020/C 317/04, 25 septembre 2020.

([29]) Le calcul des aides versées au titre de la compensation carbone intègre quatre critères : le taux d’aide (fixé à 75 % jusque-là) ; un facteur d’émission de CO2 par kilowatt-heure d’électricité (soit 0,59 tCO2/MWh pour la compensation versée en 2022, 2023 et 2024, contre 0,76 tCO2/MWh précédemment) ; le périmètre des secteurs éligibles à la compensation carbone ; le coût des émissions indirectes supportées par les entreprises des secteurs éligibles à la compensation carbone (en % de leur valeur ajoutée).

([30]) La loi de finances initiale pour 2022 prévoit le versement d’une avance sur la subvention attribuée au titre de la compensation carbone. L’avance porte sur une partie des crédits publics alloués au dispositif qui seraient versés en 2023 au titre des coûts supportés par les industriels au cours de l’exercice 2022.

([31]) Décret n° 2022-967 du 1er juillet 2022 instituant une aide visant à compenser la hausse des coûts d’approvisionnement de gaz naturel et d’électricité des entreprises particulièrement affectées par les conséquences économiques et financières de la guerre en Ukraine. Le décret s’appuie sur la décision de la Commission européenne du 30 juin 2022, notifiée sur le fondement de l’article 107.3 b du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

([32]) Décret n° 2022-1279 du 30 septembre 2022 modifiant le décret n° 2022-967 du 1er juillet 2022 instituant une aide visant à compenser la hausse des coûts d’approvisionnement de gaz naturel et d’électricité des entreprises particulièrement affectées par les conséquences économiques et financières de la guerre en Ukraine.

([33]) https://www.rte-france.com/eco2mix/les-donnees-de-marche.

([34]) Voir la communication de Mme Aurélie Trouvé et de M. Xavier Albertini, au titre des travaux du groupe de suivi sur l’inflation des prix, juillet 2022, pp. 9-10, https://www2.assemblee-nationale.fr/deputes/fiche/OMC_PA795164.

([35]) Commission de régulation de l’Énergie, Les prix à terme de l’électricité pour l’hiver 2022-2023 et l’année 2023, rapport annuel, juillet 2022.

([36]) Voir la recommandation n° 13 de la communication de Mme Aurélie Trouvé et de M. Xavier Albertini, au titre des travaux du groupe de suivi sur l’inflation des prix, juillet 2022, pp. 19-20, https://www2.assemblee-nationale.fr/deputes/fiche/OMC_PA795164.

([37]) https://www.latribune.fr/entreprises-finance/industrie/energie-environnement/bruno-le-maire-veut-reformer-le-marche-unique-de-l-electricite-juge-obsolete-et-aberrant-893078.html.

([38]) La décision s’inscrit dans la mise en œuvre de la communication de la Commission du 18 mai 2022 sur les interventions à court terme sur le marché de l’énergie et les améliorations à long terme de l’organisation du marché de l’électricité. Le montant de l’aide autorisée s’élève à 6,3 milliards d’euros pour l’Espagne et 2,1 milliards d’euros pour le Portugal.

([39]) Les « contrats pour différence » (ou contract for différence – CFD) se présentent comme des instruments financiers à terme : la transaction porte sur la différence entre le cours prévu et le cours effectif.

([40]) Loi n° 2010-1488 du 7 décembre 2010 portant nouvelle organisation du marché de l’électricité.

([41]) Article 39 de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat.

([42]) Décision de la Commission du 12 juin 2012 concernant l’aide d’État n° SA. 21918 (C 17/2007) mis à exécution par la France sur les tarifs réglementés de l’électricité en France.

([43]) Inspection générale des finances, conseil général des Mines, Rapport d’enquête sur les prix de l’électricité, octobre 2004.

([44]) Alcan, Air Liquide, Arcelor-Mittal, Arkema, Rhodia, Solvay.

([45]) En fonction du cours de l’uranium, de la taxe sur les installations nucléaires de base, du niveau des salaires, de l’inflation, de la capacité nucléaire, du productible nucléaire, de modulation de prix.

([46]) D’après les réponses écrites apportées par M. Jean-Paul Aghetti, au cours de la table ronde des électro‑intensifs réunie en 2005, avait été évoqué l’objectif d’un prix cible de 30 à 35 €/MWh.

([47]) Portant sur la période 2014-2023, le contrat visait à soutenir la compétitivité d’une usine d’électrolyse d’aluminium et d’éviter sa fermeture. Il présente la particularité d’une prise de participation par EDF de 35 % du capital de Trimet France par EDF.

([48]) Doté de 1,2 milliard d’euros et affecté à l’Ademe et à l’Agence des services de paiements (ASP) dans le cadre du Plan de relance, le Fonds de décarbonation de l’industrie a pour objet le financement des investissements industriels dans les domaines de l’efficacité énergétique, de l’électrification et de l’adaptation de procédés pour réduire les émissions de CO2. Entrent dans le champ des subventions du dispositif les investissements supérieurs à 3 millions d’euros. Les subventions peuvent atteindre au maximum 40 % des dépenses éligibles de ces investissements pour les grandes entreprises et 60 % pour les petites entreprises.

([49]) L’interruptibilité permet de réduire de manière quasiment immédiate la puissance perçue d’un site rattaché au réseau électrique afin d’assurer l’équilibre de l’offre et de la demande.

([50]) L’effacement consiste, en cas de déséquilibre offre-demande d’électricité, à provisoirement réduire la consommation physique d’un site donné.

([51]) Les réserves primaire, secondaire et tertiaire regroupent des producteurs d’électricité s’étant engagés auprès du gestionnaire à mobiliser leurs capacités de production afin de rétablir l’équilibre entre offre et demande sur le réseau. L’appartenance à l’une des réserves dépend du volume d’énergie pouvant être fourni et des délais dans lesquels les producteurs peuvent être appelés.

([52]) Le mécanisme d’ajustement permet au gestionnaire de réseau de moduler les niveaux de la production, de la consommation et des échanges pour assurer en permanence l’équilibre entre l’offre et la demande d’électricité. Il est fondé sur des offres faites par les acteurs d’ajustement, sélectionnées selon la préséance économique au regard du besoin identifié.