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N° 286 rect.

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÉME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 5 octobre 2022

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2023 (n° 273)

TOME XI

ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES

COMPTES RENDUS

PAR MM. Damien ADAM, Antoine ARMAND, Stéphane DELAUTRETTE,
Mmes Aude LUQUET, Alexandra MASSON, Anne STAMBACH-TERRENOIR et M. David VALENCE

Députés

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 Voir le numéro : 273

 


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SOMMAIRE

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Pages

EXAMEN EN COMMISSION

I. Mercredi 19 octobre 2022 matin

II. Mercredi 19 octobre après-midi

III. Mercredi 19 octobre soir

 


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   EXAMEN EN COMMISSION

I.   Mercredi 19 octobre 2022 matin

Lors de sa réunion du mercredi 19 octobre 2022 matin, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a examiné les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » sur les rapports pour avis de M. David Valence sur les crédits relatifs aux transports terrestres et fluviaux, de M. Damien Adam sur les crédits relatifs aux transports aériens et de Mme Alexandra Masson sur les crédits relatifs aux affaires maritimes.

M. David Valence, rapporteur pour avis (Transports terrestres et fluviaux). Il me revient d’ouvrir cette série de présentations par le programme 203 « Infrastructures et services de transports », consacré aux transports terrestres et fluviaux. Comme dans certains sports, la présentation de ces rapports pour avis comporte des figures imposées et des figures libres. L’exercice imposé est l’examen du programme global, dont près de 90 % des crédits soutiennent le développement de mobilités décarbonées – le ferroviaire, mais aussi le fluvial, le portuaire, le transport combiné et les mobilités douces. La figure libre est un retour sur la situation du fret ferroviaire. Un an après le dévoilement de la stratégie nationale, ce mode regagne-t-il enfin du terrain ? Des articles récents lui sont consacrés dans la presse sur un mode plutôt pessimiste.

Deux phénomènes caractérisent les moyens publics alloués aux transports terrestres et fluviaux dans ce projet de loi de finances (PLF) : leur orientation à la hausse et leur répartition entre plusieurs programmes.

Les crédits budgétaires du programme 203 s’élèvent à près de 4,1 milliards d’euros, en légère augmentation par rapport à 2022 à périmètre constant. Cette hausse tient essentiellement à l’augmentation des concours ferroviaires versés à SNCF Réseau, à hauteur d’une centaine de millions d’euros, à l’action 41 du programme.

Le budget de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France) est particulièrement dynamique pour l’année 2023. Ses recettes prévisionnelles sont élevées et plus sécurisées que les années passées. Ses dépenses, en hausse continue depuis 2019, augmentent de 150 millions d’euros pour atteindre le niveau inégalé de 3,8 milliards d’euros.

La trajectoire d’investissements prévue par la loi d’orientation des mobilités (LOM) pour la période 2019-2023 a donc été respectée, et même dépassée. Ce fait mérite d’être souligné, tant le respect des engagements et trajectoires financiers d’investissement a parfois manqué, hélas ! avant 2017, en matière de transports et d’infrastructures.

L’addition du programme 203 et du budget de l’Afit France pour 2023 porte le budget global dédié aux transports terrestres et fluviaux à près de 9,3 milliards d’euros, en augmentation de 6 %. Les crédits alloués au secteur ferroviaire représentent plus de 60 % des crédits du programme 203 et pèsent pour un tiers du budget prévisionnel de l’Afit France.

Les engagements pour le secteur ferroviaire sont notables et signalés, même si l’effort de rattrapage reste pour partie devant nous après des décennies de sous-investissement. Le plan de relance a permis d’engager des opérations importantes pour les trains de nuit, les infrastructures de fret et les lignes de desserte fine du territoire. L’effort se poursuit dans le projet de loi de finances qui nous est proposé. En outre, SNCF Réseau a bénéficié d’une recapitalisation à hauteur de 4 milliards d’euros, dont le dernier versement aura lieu en 2023. L’État assume également 900 millions d’euros de charge d’intérêt liée à la dette reprise en 2020 et 2022.

Le programme 203 prévoit un nouveau plan Vélo doté d’une enveloppe sans précédent de 250 millions d’euros. Je recommande que les 200 millions d’euros d’aide à l’investissement soient consacrés pour moitié aux collectivités du bloc communal de moins de 100 000 habitants, où les projets sont nombreux et les efforts d’accompagnement en matière d’investissement restent à faire.

S’agissant du transport fluvial, le PLF traduit un effort soutenu, grâce au plan de relance, à hauteur de 175 millions d’euros. Le contrat d’objectifs et de performance signé au printemps 2021 entre Voies navigables de France (VNF) et l’État a fixé une trajectoire ambitieuse d’investissements en régénération et modernisation du réseau fluvial. Ces actions, auxquelles n’étaient consacrés en moyenne que 150 millions d’euros par an avant 2021, ont bénéficié de 230 millions d’euros en 2021 et 2022. Ce niveau sera maintenu en 2023, et la trajectoire ambitieuse s’accélérera à partir de 2026 et 2027.

J’ai déposé un amendement visant à relever le plafond d’emplois prévu dans ce PLF afin de stabiliser les effectifs de Voies navigables de France, car les efforts d’investissement accrus ont permis de rationaliser les effectifs les années précédentes. VNF a plutôt besoin d’une stabilisation, notamment en matière de volume de contractuels, pour les exercices budgétaires à venir. On pourrait aussi évoquer le relèvement du plafonnement de la redevance hydraulique, aujourd’hui fixé à 127 millions d’euros pour VNF.

J’ai souhaité faire, dans le cadre de cet avis, une figure libre sur la situation du fret ferroviaire en France en 2022. Le report modal en faveur du fret ferroviaire est une priorité écologique au regard de ses bénéfices environnementaux considérables. Par rapport à la route, le fret ferroviaire représente neuf fois moins d’émissions de gaz à effet de serre, six fois moins d’énergie consommée et huit fois moins d’émissions de particules nocives. Or sa part modale décline depuis des décennies sans que les différents plans annoncés par les gouvernements avant 2017 aient permis de redresser la situation. La part du transport routier de marchandises atteint plus de 85 %, un des niveaux européens les plus dégradés.

La loi « climat et résilience » a fixé un objectif de doublement de la part modale du fret ferroviaire d’ici à 2030, de 9 % à 18 %. Dans cette perspective, il y a un an, le ministre délégué chargé des transports de l’époque, M. Jean-Baptiste Djebbari, a dévoilé une stratégie nationale de développement du fret ferroviaire élaborée en concertation étroite avec les acteurs du secteur. Un an après son lancement, j’ai souhaité en faire le bilan.

Il ressort des auditions que la stratégie a permis d’amorcer un changement de culture au sein de SNCF Réseau, qui accorde un peu plus de place au fret en améliorant l’attribution des sillons et en aménageant ses travaux au bénéfice des circulations de fret, ce qui est un facteur décisif du développement du fret ferroviaire. Ce changement de culture ne fait que commencer puisqu’il date de l’année dernière.

Il y a lieu de se réjouir également du soutien financier sans précédent apporté au secteur. Les aides à l’exploitation des services fret, intégrées aux actions 41 et 45 du programme 203, ont été renforcées à hauteur de 170 millions d’euros par an pour les péages de fret, le wagon isolé et le transport combiné. Ces aides ont été déterminantes pour soutenir la compétitivité du fret ferroviaire par rapport à la route, et inciter les chargeurs au report modal. C’est la raison pour laquelle je proposerai, par un amendement, de faire un rapport sur la prolongation jusqu’en 2027 de ces aides, dont le terme est fixé à 2024. Combinées à la crise traversée par le mode routier, elles ont permis au fret ferroviaire de gagner des parts de marché et de se redresser nettement en 2021 et 2022, puisque la part modale du fret ferroviaire atteint désormais 10,7 %, contre 9 % en 2019. Je me félicite de ce redressement notable un an après le lancement de la stratégie.

En outre, un programme d’investissements doté de 1 milliard d’euros, cofinancé par l’État, les collectivités et l’Union européenne, et incluant une enveloppe de 250 millions d’euros issue du plan de relance, a également permis d’engager des opérations nécessaires à la régénération et au développement des infrastructures de fret. D’après les retours de SNCF Réseau, le rythme d’engagement des projets est bien avancé pour les capillaires de fret et les voies de service. C’est, en revanche, moins le cas pour les terminaux de transport combiné, la mise au gabarit et l’amélioration de l’accès au réseau pour les trains longs et lourds.

Ce programme d’investissements constitue une avancée majeure pour accroître les capacités du secteur. Il faut le saluer, même s’il ne suffira pas complètement à répondre aux besoins d’investissements et à accroître les capacités des infrastructures à l’horizon 2030. Je recommande d’accélérer le rythme des engagements sur l’enveloppe annoncée de 1 milliard d’euros et d’opérer un ciblage stratégique des investissements futurs. Par ordre de priorité, il ressort des auditions qu’il faudrait concentrer les investissements pour le fret sur les principaux terminaux de transport combiné et les gares de triage, ainsi que sur la desserte ferroviaire des grands ports – Dunkerque, Le Havre et Marseille –, actuellement sous-développée mais dont le potentiel de croissance est très important.

Les opérateurs de fret ont également besoin de renouveler leur matériel roulant. Il me paraît intéressant de leur permettre de recourir aux certificats d’économies d’énergie puisqu’il s’agit de décarboner le transport de marchandises.

Le fret ferroviaire apparaît donc lancé sur des rails meilleurs que par le passé mais encore fragiles. Les réformes restent en partie à opérer au sein de SNCF Réseau, en développant en priorité les capacités du secteur pour espérer doubler sa part modale à l’horizon 2030 et passer enfin d’une économie de la demande à une économie de l’offre.

Je conclus en vous invitant à reconnaître la réalité de l’effort budgétaire, poursuivi dans ce PLF2023, en faveur de la décarbonation des transports.

M. Damien Adam, rapporteur pour avis (Transports aériens). Je suis chargé de vous présenter les crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».

Le transport aérien sort d’une crise sans précédent liée à l’épidémie de la covid‑19. Le trafic aérien français a chuté de 70 % en 2020 et de 61 % en 2021 par rapport à 2019. En août dernier, il a retrouvé 90 % de son niveau enregistré en août 2019. Les mesures de soutien public mises en place par le Gouvernement dès le début de la crise sanitaire ont été indispensables à la survie du secteur.

Le projet de budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » s’inscrit dans ce contexte de sortie de crise. Les recettes pour 2023, qui dépendent largement du trafic aérien, devraient progresser de 34 % par rapport à 2022, pour atteindre 2,23 milliards d’euros. Le niveau d’emprunt se réduirait, mais la dette resterait élevée puisqu’elle devrait atteindre 2,6 milliards d’euros fin 2023.

L’action de la direction générale de l’aviation civile (DGAC) est marquée par trois priorités : le maintien d’investissements dynamiques pour moderniser la navigation aérienne et préparer le transport aérien de demain ; le désendettement du budget annexe grâce à la poursuite de la maîtrise des dépenses, l’objectif étant de ne plus recourir à l’emprunt à horizon 2027 ; le lancement d’une négociation collective avec les représentants du personnel, pour accompagner la reprise et les innovations du secteur dans les meilleures conditions.

Après deux années prioritairement dédiées à la survie économique du secteur, la décarbonation du transport aérien est plus que jamais d’actualité. J’y ai consacré la partie thématique de l’avis budgétaire.

Le transport aérien est responsable de près de 3 % des émissions de gaz à effet de serre dans le monde et de 5 % à 6 % de ces émissions en France. Dans le monde décarboné de demain, ce secteur, plus que n’importe quel autre, se doit de réussir sa transition écologique. C’est à cette condition que l’on pourra continuer de voler en 2050. Il n’existe pas aujourd’hui de solution unique qui suffirait à atteindre l’objectif de neutralité carbone du transport aérien en 2050 ; une panoplie d’outils doit être mobilisée.

Tout d’abord, le recours à des carburants durables d’aviation (SAF, pour Sustainable Aviation Fuel) doit être accru. Par rapport au kérosène, ces carburants durables permettent d’obtenir 80 % à 90 % de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Depuis le 1er janvier 2022, l’objectif d’incorporation est fixé à 1 % et doit progressivement augmenter. Or les compagnies aériennes peinent à s’approvisionner et sont contraintes de payer la taxe incitative relative à l’utilisation d’énergies renouvelables dans les transports (Tiruert). En outre, le coût des SAF est trop élevé – quatre à six fois plus que celui du kérosène.

Il est donc urgent d’accentuer le soutien public à la production de SAF afin de favoriser la structuration d’une filière viable et la massification de la production. En plus de participer à la décarbonation du secteur aérien, une telle filière créera des emplois et renforcera l’indépendance énergétique de la France. Des aides sont prévues, au travers des appels à projets lancés dans le cadre des plans France relance et France 2030.

Face à l’urgence, il convient à la fois d’accélérer les délais de mise en place des aides, et d’orienter ces aides non plus seulement vers la mise en place de démonstrateurs et d’études préindustrielles, mais aussi vers la construction d’usines de production prêtes à fonctionner.

L’optimisation des trajectoires de vol est intéressante puisqu’elle permet de réduire les émissions de gaz à effet de serre du transport aérien de 6 % à 10 % lors des phases de décollage, d’approche et d’atterrissage. Les services de la navigation aérienne de la DGAC cherchent à développer des trajets plus directs mais se heurtent à des difficultés sur le terrain. Les descentes continues, comparées à des descentes par palier, présentent un intérêt global : elles améliorent la situation de la grande majorité des populations habitant à proximité des aéroports en termes de réduction de la pollution et du bruit. Toutefois, l’impact est moins certain pour les habitations se situant au départ des trajectoires de descente des avions. Il convient donc d’aider toutes les personnes potentiellement touchées par l’attribution rapide d’aides à l’insonorisation. Ces aides sont financées par la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA), dont les recettes se sont effondrées en raison de la chute du trafic aérien. C’est pourquoi une avance de l’État, remboursable progressivement sur les recettes de la TNSA, doit être accordée.

Le développement des SAF et les progrès technologiques constituent les principales solutions pour décarboner le transport aérien. Toutefois, même avec des investissements massifs, cette transition ne peut se faire du jour au lendemain. Plusieurs années sont encore nécessaires avant que les avions verts deviennent majoritaires dans le ciel.

En attendant, les voyageurs doivent s’adapter. Chacun, à son échelle, doit prendre conscience de l’impact des trajets en avion sur le climat et, lorsque cela est possible, limiter ses voyages en avion.

Afin de sensibiliser et de responsabiliser les consommateurs, je propose la création d’une plateforme internet unique, également déclinée en application mobile, présentant le budget carbone aérien par an de chaque citoyen. Celui-ci pourrait suivre l’évolution de son budget carbone, ainsi que la consommation en carbone de chacun de ses trajets effectués en avion au départ ou à l’arrivée de France. Lorsque les données sont disponibles, il serait possible d’affiner la consommation en fonction des compagnies aériennes et du type d’avion.

Mais il ne suffit pas de sensibiliser les voyageurs aux émissions de gaz à effet de serre produites par le transport aérien, encore faut-il qu’ils puissent facilement remplacer leur voyage en avion par un moyen de transport moins polluant. Cela suppose d’encourager le report modal de l’aérien vers le ferroviaire.

La loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi « climat et résilience », interdit les liaisons aériennes lorsqu’il existe une solution ferroviaire sans correspondance d’une durée de moins de deux heures trente. D’après le projet de décret, trois liaisons seront interdites : celles reliant l’aéroport de Paris-Orly, d’une part, et ceux de Bordeaux, Nantes et Lyon, d’autre part. Je propose d’aller plus loin d’ici à la fin de la décennie en prévoyant d’interdire les trajets aériens lorsqu’il existe une solution en train de moins de trois heures, ce qui ajouterait Paris‑Marseille une fois développée la technologie du système européen de gestion du trafic ferroviaire ERTMS niveau 2, pour densifier le trafic, et Paris-Toulouse, après que la nouvelle ligne TGV sera en service. Cette interdiction ne concernerait pas les avions décarbonés à hydrogène ou électriques.

D’ici à la fin de la décennie, il faudra aussi intégrer à l’interdiction les vols en correspondance. Cela ne pourra se faire qu’en offrant un service équivalent en train, c’est‑à‑dire en investissant pour permettre à l’aéroport Charles-de-Gaulle d’être mieux relié aux gares françaises, notamment franciliennes, et en assurant le traitement des bagages dès la gare SNCF. Il convient également d’améliorer la connexion entre les aéroports et les gares parisiennes. Y contribueront notamment le prolongement de la ligne de métro 14 jusqu’à l’aéroport d’Orly, en 2024, puis la ligne 18, mais également le Charles-de-Gaulle Express, qui doit relier l’aéroport Charles-de-Gaulle à la gare de l’Est début 2027, ou encore la ligne de métro 17 qui doit desservir cet aéroport en 2030.

Enfin, le transport aérien est par essence mondial. C’est pourquoi les efforts entrepris au niveau national doivent s’accompagner d’une action renforcée aux niveaux européen et international.

À ce sujet, il faut saluer l’action de la France, qui joue un rôle clé en faveur d’une réforme ambitieuse du système européen d’échange de quotas d’émissions, en cours de négociation dans le cadre du paquet de propositions « Fit for 55 ». C’est en effet sous présidence française qu’une orientation générale a été adoptée en vue de prévoir la suppression progressive des quotas gratuits pour l’aviation entre 2024 et 2027.

J’en viens maintenant à une thématique plus spécifique, qui fait l’actualité et suscite des polémiques depuis cet été, celle des jets privés.

Le secteur de l’aviation privée est hétérogène. La majorité des jets qui circulent effectuent des vols commerciaux dont la prestation a été achetée par les passagers auprès de sociétés d’aviation. Les vols effectués par des propriétaires privés d’avions à des fins professionnelles ou personnelles sont plus rares. D’autres vols en jet privé effectuent du transport médical ou desservent des aéroports de province sans ligne commerciale, qui permettent à des sièges sociaux d’être implantés dans des territoires mal desservis par le train. Il serait donc économiquement et socialement dangereux de simplement interdire ces utilisations, mais une meilleure régulation est sans aucun doute nécessaire.

La majorité des vols sont intra‑européens et la moitié d’entre eux couvrent une distance inférieure à 500 kilomètres. Les émissions de CO2 de l’aviation privée sont, en moyenne et par passager, dix fois plus élevées que pour un vol classique. Si l’incidence des jets privés est écologiquement marginale – 0,5 % des émissions de gaz à effet de serre –, la charge symbolique est forte. Les utilisateurs de jets ne doivent pas donner le sentiment qu’ils ne contribuent pas suffisamment aux efforts demandés à l’ensemble des citoyens.

À cet égard, plusieurs mesures me paraîtraient bienvenues. En premier lieu, pour des raisons d’acceptabilité et de justice sociale, l’augmentation de la fiscalité sur les trajets effectués en jet privé, sous trois formes combinées afin de couvrir tous les types de trajets : l’augmentation de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) pour les vols non commerciaux ; l’assujettissement à la TICPE du kérosène utilisé pour les vols commerciaux effectués sur le territoire national ; la majoration de la taxe de solidarité sur les billets d’avion (TSBA) ou « taxe Chirac » pour l’ensemble des vols commerciaux.

Toutefois, la clientèle de l’aviation privée étant relativement peu sensible au prix, une augmentation de la fiscalité ne sera pas suffisante pour réduire les émissions de gaz à effet de serre provoquées par ces voyages. C’est pourquoi je propose, en second lieu, de fixer des objectifs plus ambitieux d’incorporation de carburants durables pour l’aviation privée. L’obligation d’incorporation de SAF pourrait être de 50 % pour les jets privés en France dès 2025. Cette obligation concernerait également la flotte de la République, qui doit être exemplaire.

En troisième lieu, il me semble souhaitable d’accroître la transparence sur les voyages d’affaires effectués en jet par le biais de la responsabilité sociale des entreprises (RSE). Les trajets effectués doivent faire partie des informations figurant dans la déclaration annuelle de performance extra-financière des entreprises. Chaque trajet devrait ainsi être justifié par l’absence d’une alternative raisonnable.

Mme Alexandra Masson, rapporteure pour avis (Affaires maritimes). La France est une grande nation maritime. Elle dispose du deuxième domaine maritime mondial, avec plus de 11 millions de kilomètres carrés de zone économique exclusive (ZEE). Les armateurs français sont présents sur l’ensemble du globe et sur l’essentiel des segments des transports et services maritimes. L’excellence de la formation maritime française est reconnue dans le monde entier.

En comparaison des enjeux, le budget des affaires maritimes semble faible. Toutefois, il permet d’apporter un soutien indispensable à un secteur clé pour la défense de la souveraineté de la France.

Les crédits de paiement de l’action 43 du programme 203 servent essentiellement à financer le dragage nécessaire pour assurer la compétitivité des grands ports maritimes. Ils représentent dans le projet de loi de finances un montant de près de 93 millions d’euros et ils restent stables dans le temps.

Les crédits de paiement du programme 205 affectés aux affaires maritimes concernent surtout la marine marchande. Ils représentent un peu plus de 190 millions d’euros et restent relativement stables par rapport à 2022. Cette stabilité est satisfaisante. Toutefois, au vu des défis que la France doit relever, il est nécessaire d’aller plus loin.

Au sein du programme 205, on recense trois principaux postes de dépenses.

Près de 16 % des crédits des affaires maritimes servent à financer l’action de l’État dans les domaines de la sécurité et de la sûreté maritimes. Ils contribuent notamment à financer, à hauteur de 10,5 millions d’euros, la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM) qui assure un peu plus de la moitié du sauvetage en France. Dans la majorité des cas, il s’agit de porter secours à des navires de plaisance.

Toutefois, lors de nos auditions, nous avons constaté que la pression des flux migratoires clandestins, qui connaît son paroxysme dans la Manche, vient perturber le fonctionnement de l’association. Dans le Pas-de-Calais, des traversées sont tentées dans des conditions dangereuses, à l’issue parfois mortelle, sur des embarcations totalement inadaptées. En 2021, 85 % de l’activité de la station de la SNSM de Calais a concerné ces opérations de secours. Une forte pression pèse sur les bénévoles, qui sont en nombre insuffisant et se retrouvent confrontés à des situations humaines très difficiles et dangereuses. Je m’inquiète de ce que la SNSM se voie détournée de ses missions traditionnelles de sauvetage. Pour régler cette situation difficile, l’État doit prendre ses responsabilités, avec des moyens régaliens. C’est pourquoi j’appelle le Gouvernement à augmenter les crédits alloués à la Marine nationale, qui fait déjà partie du dispositif d’intervention en mer mais qui ne réalise que 2 % des opérations de secours nécessitant des moyens nautiques sur l’ensemble de l’espace maritime français.

Le programme 205 contribue non seulement à financer les actions relatives à la sécurité et à la sûreté maritimes mais aussi à la formation maritime. Un peu plus de 18 % des crédits des affaires maritimes contribuent au financement de cette formation, notamment des lycées professionnels maritimes et de l’École nationale supérieure maritime

La marine marchande française a un besoin vital de recruter davantage d’officiers. Lors des assises de l’économie de la mer de 2021, l’État a confirmé ce besoin en annonçant que le nombre d’officiers sortant de l’École nationale supérieure maritime (ENSM) devait doubler d’ici à 2027. Si les crédits budgétaires semblent suffisants pour atteindre cet objectif, l’ENSM manque de ressources humaines. C’est pourquoi j’ai déposé un amendement tendant à augmenter le nombre d’équivalents temps pleins annuels travaillés (ETPT) de l’ENSM.

Un peu plus de 45 % des crédits des affaires maritimes servent à financer des dispositifs de soutien à la flotte de commerce, essentiels à la compétitivité du pavillon français. Ils financent notamment le dispositif d’exonération de cotisations sociales patronales dit netwage. L’arsenal législatif au service de la compétitivité du pavillon français comprend également un régime d’imposition forfaitaire dit « taxe au tonnage » et un dispositif de crédit-bail, qui facilite l’acquisition de nouveaux navires. Le registre international français (RIF) permet également de défendre le pavillon français dans le cadre d’une concurrence mondiale exacerbée.

La préservation de ces dispositifs est indispensable, car la marine de commerce joue un rôle crucial dans la protection des intérêts stratégiques de la France et la préservation de sa souveraineté. En particulier, elle garantit la sécurité des approvisionnements en produits manufacturés et en matières premières, en particulier en hydrocarbures.

De nouvelles problématiques émergent, auxquelles il est nécessaire de répondre au plus vite. En particulier, les lignes de ferries font face à un dumping social qui menace l’emploi français, l’économie maritime française et la souveraineté de la France. Il affecte depuis un certain temps les liaisons entre la Corse et le continent, indispensables à la garantie de la continuité territoriale. Corsica Linea et La Méridionale, les deux compagnies françaises opérant sur ces liaisons, utilisent des navires immatriculés au premier registre. Elles emploient donc des marins français auxquels les règles en matière d’emploi et de protection sociale françaises s’appliquent. En revanche, les navires de leur concurrent italien Corsica Ferries sont immatriculés au registre international italien, ce qui leur permet d’assurer les liaisons à moindre coût.

Les ferries qui assurent le lien entre le continent et la Corse n’ont pas le droit de bénéficier du dispositif de soutien aux entreprises d’armement maritime (Seam), au motif qu’ils opèrent dans le cadre d’une délégation de service public. Ce dispositif, financé par le programme 205, est mis en place pour trois ans, de 2022 à 2024. Il consiste en un reversement aux armateurs des montants versés au titre des cotisations personnelles des marins au régime d’assurance vieillesse, de la contribution sociale généralisée et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale. Il est indispensable d’étendre le Seam à ces navires pour lutter contre le dumping social sur les lignes entre la Corse et le continent.

La question se pose également pour les navires qui assurent la desserte Dieppe-Newhaven dans le cadre d’une délégation de service public. De manière plus générale, la situation des ferries transmanche est gravement mise en péril depuis un peu plus d’un an. Les deux compagnies françaises, qui exploitent des navires immatriculés au premier registre, affrontent désormais la concurrence agressive d’une compagnie irlandaise, Irish Ferries, et d’une compagnie anglaise, P&O Ferries. Cette dernière a licencié ses 800 marins et fait appel à une société de placement de marins basée à Chypre pour recruter des marins originaires d’États en développement peu formés, très peu rémunérés et soumis à une cadence de travail particulièrement intense.

Alors même que le secteur des ferries se remet difficilement de la crise du covid, son activité se voit à nouveau mise en péril. C’est pourquoi j’appelle les pouvoirs publics à prendre la situation en main pour défendre le modèle maritime français contre la concurrence intracommunautaire.

Pour défendre le pavillon français et garantir la souveraineté maritime de la France, il est également indispensable de reprendre le chantier de la flotte stratégique. Ses fondations ont été posées par la loi du 20 juin 2016 sur l’économie bleue, dite « loi Leroy ». Or les travaux de préparation des textes d’application sont à l’arrêt depuis plusieurs années. Cette situation est inacceptable dans un contexte où les crises politiques, sanitaires et environnementales se multiplient.

Par ailleurs, la plaisance m’est apparue comme étant loin de faire partie des priorités d’action du Gouvernement. Pourtant, elle joue un rôle économique moteur pour certains territoires littoraux, notamment dans la région Provence-Alpes-Côte d’Azur. Elle est pourvoyeuse d’emplois directs comme indirects, en particulier la plaisance professionnelle. L’ouverture du registre international français aux navires compris entre 15 et 24 mètres, due à la loi du 20 juin 2016, a permis d’immatriculer soixante-huit navires de cette longueur. Pour poursuivre et amplifier cette dynamique, je propose de permettre aux navires de plus de 12 mètres d’être immatriculés au RIF.

L’État doit aussi renforcer son action pour appuyer les ports de plaisance dans leur effort de transition écologique. Il ne faut pas opposer la protection de l’environnement et le développement du secteur maritime. Il est indispensable d’unir nos efforts pour que la mer, espace de liberté, soit un espace à la fois accueillant pour tous les usagers et protégé.

La stratégie maritime de la France est insuffisamment ambitieuse. Le budget demeure un instrument de gestion et non un programme d’action. Dans ces conditions, nous nous abstiendrons sur le vote des crédits de la mission.

M. le président Jean-Marc Zulesi. Nous allons maintenant entendre les orateurs des groupes.

M. Jean-Luc Fugit (RE). Cette année encore, les crédits consacrés aux transports font l’objet d’une attention particulière du Gouvernement, puisque le budget total dédié aux transports terrestres et fluviaux augmente de 6 % par rapport à 2022 pour atteindre plus de 9 milliards d’euros. Cette augmentation est nécessaire pour réduire les conséquences écologiques des transports terrestres, secteur responsable de près de 30 % des émissions de gaz à effet de serre en France et de deux tiers des émissions d’oxydes d’azote, polluant bien connu dans les secteurs urbains.

Le budget dédié aux transports terrestres et fluviaux pour 2023 participe au verdissement des infrastructures en donnant une nette priorité au développement des modes décarbonés. Les annonces du Président de la République, au Mondial de l’automobile, et de la Première ministre Mme Élisabeth Borne en sont la meilleure illustration : augmentation du bonus écologique à 7 000 euros pour l’achat d’un véhicule électrique, location de voitures électriques à 100 euros par mois pour les foyers les plus modestes dans le courant de 2023, 250 millions d’euros de budget pour un véritable changement de braquet du plan Vélo.

Vous avez mis l’accent sur le transport ferroviaire et le fret, deux thématiques sur lesquelles notre majorité s’est fortement engagée durant la législature précédente ; elle continuera à le faire. En 2021, à travers la stratégie nationale de développement du fret ferroviaire, nous nous fixions comme objectif de doubler la part modale du fret ferroviaire, pour la faire passer de 9 % à 18 % d’ici à 2030. Cela se traduit par un soutien financier conséquent au secteur et par de nouvelles aides à l’exploitation des services de fret ferroviaire, à hauteur de 170 millions d’euros supplémentaires par an jusqu’en 2024.

De plus, le budget présenté par le Gouvernement prévoit de continuer à investir massivement dans la relance des trains de nuit et des petites lignes, en dédiant une enveloppe de 650 millions d’euros à ces secteurs. C’est une bonne nouvelle.

M. David Valence (RE). Le budget des transports aériens traduit en actes deux priorités de notre majorité : d’une part, le soutien à l’activité économique et à la compétitivité de notre pays et, d’autre part, la nécessaire décarbonation des mobilités.

Le soutien à l’activité économique a été conforme au « quoi qu’il en coûte », puisque la dette de ce budget a été multipliée par quatre entre 2019 et 2022. L’État a apporté un soutien massif à ce secteur qui totalise plus d’un million d’emplois, avec pour résultats une reprise du trafic presque totale en 2022 et la décarbonation, celle-ci découlant de l’optimisation des trajectoires de vol et de l’utilisation de carburants durables d’aviation.

Notre collègue Damien Adam souligne le besoin d’un soutien public à cette filière de carburant durable d’aviation, dont il n’existe que trois sites de production en France. Il insiste sur les progrès technologiques pour lesquels notre majorité a décidé de mobiliser 400 millions d’euros dans le cadre du programme France 2030. Il ouvre également des perspectives intéressantes sur la mobilisation des délaissés aériens et leur utilisation pour produire des énergies propres.

Enfin, je souligne que l’amendement proposé par notre président de commission, visant à la hausse de la TICPE pour les jets privés et son alignement sur la TICPE en vigueur pour l’essence routière, permet d’atteindre certains objectifs formulés. C’est pourquoi, au nom du groupe Renaissance, je recommande l’adoption des crédits qui nous sont soumis.

Mme Christine Decodts (RE). Notre pays possède le deuxième domaine maritime mondial après les États-Unis. La politique maritime française est ambitieuse et les crédits programmatiques s’y rattachant restent stables pour soutenir l’activité maritime, protéger l’environnement et préserver la vie humaine. L’État n’agit pas seul mais aux côtés des collectivités et des nombreux acteurs dynamiques du monde maritime. Il s’agit de protéger l’environnement par l’appui aux ports de plaisance dans leur effort de transition écologique et en donnant une seconde vie aux bateaux en polyester.

La Société nationale de sauvetage en mer, au travers de ses bénévoles, a pour vocation de secourir les personnes en danger en mer. Par la force des choses, c’est aussi secourir des migrants. En tant que députée de Dunkerque, je ne le sais que trop bien et je ne conçois pas qu’on puisse appréhender la détresse migratoire en mer du Nord comme une nouvelle mission qui serait confiée par l’État à la SNSM. Ce n’est la volonté ni de l’un, ni de l’autre.

Saluons aussi la marine marchande et ses métiers exigeants, demandant de réels sacrifices pour les femmes et les hommes qui les exercent.

Les députés du groupe Renaissance ont pleinement conscience des besoins de formation dans notre pays par l’École nationale supérieure maritime. Nous savons que le Gouvernement a entamé de nombreuses négociations pour calibrer le nombre d’équivalents temps plein à développer dès 2023. Nous rejetterons donc l’amendement II-CD5.

Mme Annick Cousin (RN). Le projet de budget dédié aux transports terrestres et fluviaux est estimé à 9,3 milliards d’euros, en augmentation d’environ 6 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2022. Les investissements de l’État dans les infrastructures et services de transport par l’intermédiaire de l’Afit France, seraient de 3,8 milliards d’euros, en hausse de 300 millions. Cette année encore, de nombreux crédits de la mission « Plan de relance » ont permis d’engager des investissements d’envergure nécessaires en 2021 et 2022, au bénéfice de nombreuses infrastructures dans les domaines ferroviaire et fluvial, mais au prix d’un grossissement de la dette.

Sans surprise, on retrouve dans ce projet de budget un large volet – ou plan de communication – en faveur du verdissement des infrastructures de transport. L’aide au verdissement du parc automobile sera dotée de 1,3 milliard d’euros pour couvrir le bonus écologique, la prime à la conversion ou le développement des points de recharge. L’objectif est de dépasser les 100 000 bornes ouvertes au public au cours de cet exercice, contre un peu moins de 70 000 durant le précédent. À l’heure de la sobriété énergétique et alors que l’on envisage des coupures d’électricité ciblées, cela m’apparaît contradictoire.

Un énième plan Vélo et mobilités actives a été annoncé par la Première ministre, pour un budget de 250 millions d’euros pour la seule année 2023. Est-ce la priorité ? Permettez-moi d’en douter.

Finalement, ce projet de budget sans grande audace ressemble à celui de l’année passée, lequel ressemblait déjà à celui de l’année d’avant ; il ne fera pas réellement évoluer la situation.

M. Loïc Prud’homme (LFI-NUPES). L’organisation de cette mission est un « 49‑3 » permanent. Comme tous les ans, nous n’avons pas de visibilité sur la plupart des financements et, in fine, pas de débat démocratique puisque tout passe par l’Afit France, placée sous la houlette du ministre des transports. Comme le dit si bien la Cour des comptes, « Cette agence est un opérateur de l’État dont le rôle est limité à celui de caisse de financement gérée de facto […] par le ministère chargé des transports. Elle est, sur le plan administratif, une quasi-coquille vide ». C’est une exception démocratique scandaleuse que je dénonce régulièrement ici.

Pour ce qu’il en reste à discuter, ce budget global est largement insuffisant en matière d’investissements pour lutter contre la pollution de l’air et respecter nos engagements en matière de neutralité carbone. Il est dénué de réelle planification et de la moindre considération de justice sociale. Pourtant, nous savons tous l’urgence à agir pour le climat et la biodiversité et que les transports sont un levier déterminant pour relever ces défis.

Votre communication ne manque pas d’hypocrisie. Ce budget, dites-vous, est en augmentation pour les dépenses favorables à l’environnement. Laissez-moi préciser pour vous qu’est inclus dans cette augmentation le financement du bouclier tarifaire pour la remise sur les carburants, donc le soutien direct aux énergies fossiles. Ce bouclier tarifaire, qui disparaîtra prochainement, nous aura coûté 7,6 milliards d’euros d’argent public, donc des impôts des Français à qui il est destiné – le montant de cette ristourne sort directement de la poche du contribuable lui-même. C’est un choix politique de dépenser l’argent public plutôt que de faire payer ceux qui s’en mettent plein les poches, notamment les grands groupes pétroliers comme Total.

Le Président Macron fanfaronne, tel le chef Abraracourcix déambulant sur son bouclier porté par ses fidèles au milieu d’un village de Gaulois réfractaires. C’est bon pour flatter son ego, mais cela n’avance pas à grand-chose pour les Gaulois. De fait, il manque 7,6 milliards d’euros pour promouvoir des solutions pérennes et sobres en faveur de la mobilité ; 7,6 milliards d’argent public qui auraient pu servir à sortir collectivement de la dépendance à la voiture individuelle et aux énergies fossiles ; être investis à hauteur des besoins dans le ferroviaire, dans la réhabilitation des petites lignes et haltes ; être investis dans un plan Vélo ambitieux, avec la création d’infrastructures cyclables et d’emplois ; financer des aides aux transports en commun du quotidien, notamment leur gratuité. Autant de pistes de remplacement de la voiture individuelle que vous n’empruntez pas, aveuglés par l’illusion de la voiture électrique dont on nous rebat les oreilles mais qui ne réglera rien, comme le montre la crise énergétique.

Nos voisins européens font mieux : l’Espagne a financé quatre mois de train gratuit par la taxation des super profits et l’Allemagne a instauré un ticket unique à un prix modique ouvrant l’accès à tous les transports collectifs. Voilà quelques exemples de ce qu’aurait été un plan ambitieux que nous aurions pu soutenir.

M. Sylvain Carrière (LFI-NUPES). Le Gouvernement a prévu de financer le projet de liaison ferroviaire Lyon-Turin par le budget de l’État et l’Afit France, mais les informations figurant dans le document budgétaire sont floues et incomplètes. On n’en connaît pas le montant. Le ministre Clément Beaune est venu dire que le projet respectait les lois et règlements, alors qu’il n’a pas recueilli l’avis conforme du ministère de la santé. La loi interdit de forer et de percer des tunnels à l’intérieur des périmètres de protection rapprochée des captages d’eau, mais c’est bien ce qui est prévu sur le tracé. Monsieur le rapporteur, chers collègues, je vous demande de ne pas accepter de financer le projet de liaison Lyon-Turin tant qu’il ne respecte pas les lois de la République.

La ligne ferroviaire existante pourrait accueillir environ 150 trains par jour, contre 26 aujourd’hui. Le tunnel du Mont-Blanc est fermé pour travaux et il le sera à plusieurs reprises en 2023, ce qui fera subir aux habitants des vallées de Savoie le report d’un million de camions. C’est maintenant qu’il faut financer le report modal sur la ligne existante, pas en 2030 ou 2040. Ce faisant, nous mettrons nos projets en matière de fret ferroviaire en conformité avec la directive-cadre de 2000.

M. Antoine Vermorel-Marques (LR). Nous souhaitons appeler l’attention sur le multimodal, car nous considérons que les routes ne peuvent être le parent pauvre de la politique gouvernementale. Le rapport de la Cour des comptes de 2022 souligne le manque de vision globale, si bien qu’une information qui ne permet pas d’anticiper correctement les opérations à engager nous alerte particulièrement.

Le PDG de la SNCF a récemment réclamé au Gouvernement, par voie de presse, des moyens supplémentaires pour la modernisation du fret ferroviaire. Les besoins du secteur justifieraient, selon lui, une allocation supplémentaire de 1,5 milliard d’euros par an dès l’année prochaine, et un investissement global de 100 milliards d’euros d’ici à 2035. Le projet de budget pour 2023 ne prévoit rien de tel.

L’enjeu est pourtant essentiel. Avec 30 % de lignes considérées comme hors d’âge, l’état de notre réseau de desserte fine est dramatique, et c’est à un mur d’investissement que le gestionnaire sera confronté dans la décennie qui vient.

Le déploiement des technologies du futur accuse aussi un retard inquiétant. Nos quatre plus importantes gares de triage seraient toujours dans un état critique. Ne s’agit-il pas là d’une erreur d’anticipation majeure du Gouvernement ?

M. Jean-Yves Bony (LR). Dans le transport aérien aussi, l’ambition de décarbonation est louable et les enjeux sont importants. Il est d’ailleurs paradoxal que tant d’efforts soient déployés pour réduire la pollution imputable aux voitures individuelles, qui totalisent 16 % des émissions de gaz à effet de serre, quand si peu est entrepris pour les avions, qui en représentent 3 %. Aucune des pistes évoquées dans le rapport ne semble véritablement satisfaisante. Les carburants durables, dits SAF, représentent une part résiduelle de la consommation. Les compagnies seraient même tentées de recourir aux agrocarburants pour remplacer à moindre coût le kérosène – c’est déjà le cas aux États-Unis. Cela n’emporte‑t-il pas le risque de voir une partie de notre production agricole sacrifiée, alors même que notre souveraineté alimentaire redevient cruciale ? La taxe qui pèse sur les compagnies utilisant moins de 1 % de ces carburants durables n’est-elle pas qu’un moyen de ponctionner des recettes fiscales sur le secteur aérien ?

Les perspectives d’amélioration de la flotte étant incertaines, il est probable que l’effort d’ajustement sera encore supporté par les Français : utilisateurs, ils se verront interdire l’avion pour se déplacer vers les villes de province ; riverains, ils subiront les évolutions de trajectoires de vol et les travaux de réduction des nuisances sonores, lesquels grèveront un peu plus nos finances publiques.

La taxation des jets privés semble être une mesure intéressante quoiqu’un peu démagogique. Le véritable enjeu est de rendre plus attractif le remplacement par le train pour les trajets interrégionaux ou les correspondances entre gares et aéroports parisiens – et nous en revenons aux déboires du réseau ferré français…

M. Emmanuel Maquet (LR). Dans le secteur du transport maritime, Mme la rapporteure fait état d’une inquiétante concurrence déloyale de la part des compagnies européennes vis-à-vis des acteurs français, notamment sur les trajets transmanche. Les armateurs français sont confrontés à des difficultés bien réelles, mais notre sympathique commission du développement durable propose d’en rajouter avec des zones à faibles émissions (ZFE) portuaires, dont la création a été évoquée par nos collègues Bruno Millienne et Gérard Leseul dans le cadre de la présentation des conclusions de leur mission flash. Si leur travail a permis d’identifier d’intéressantes pistes d’adaptation du dispositif, je ne partage pas la logique punitive du calendrier des ZFE, qui mise sur les contraintes avant d’offrir à nos concitoyens des solutions optionnelles pour les aider à respecter les nouvelles obligations. Au lieu d’interdire, pourquoi ne pas soutenir les efforts de recherche et développement de la filière maritime, et inviter le Gouvernement à négocier au niveau européen la création d’un fonds océan pour la décarbonation du secteur, financé par les ressources du marché carbone ? Les besoins de financement sont immenses et aucune technologie ou énergie n’a encore fait ses preuves.

De même, il me paraît utile qu’avant d’interdire l’accès des ports aux navires les plus polluants, nos quais soient équipés en installations de recharge électrique pour permettre aux armateurs de se convertir sereinement à des modes de navigation plus vertueux.

Enfin, en tant que député d’une circonscription donnant sur le grand large, j’exprimerai mon scepticisme sur les moyens nouveaux accordés en 2023 au développement de l’éolien en mer. L’action 08 « Planification et économie bleue » du programme 205 affiche en 2023 des moyens supplémentaires pour le développement de l’éolien en mer ; 25 millions d’euros supplémentaires seront consacrés à la réalisation d’études d’implantation. Au regard de l’état incertain des connaissances en la matière, cette orientation n’est-elle pas contradictoire avec l’effort à poursuivre pour soutenir les acteurs français de la mer et de la pêche, qui ont tant de défis à relever ?

Notre groupe ne votera pas les crédits de la politique des transports.

Mme Chantal Jourdan (SOC). Le 5 octobre dernier, le groupe Socialistes et apparentés a présenté une proposition de sobriété solidaire concernant l’ensemble des secteurs d’activité, qui devrait pousser la France à prendre, dès cet automne, un grand virage en matière de mobilités, qu’il s’agisse du transport de personnes ou de marchandises, du ferroviaire, du fluvial, du routier ou de l’aérien.

Dans le domaine des mobilités du quotidien, l’État français vient une nouvelle fois d’être sanctionné pour n’avoir pas suffisamment amélioré la qualité de l’air. L’instauration de ZFE partout en France nécessite de développer des infrastructures et de rendre les moyens de transport bas-carbone accessibles à tous nos concitoyens. À cet égard, si nous nous réjouissons que le fonds mobilités actives soit doté d’un budget de 250 millions d’euros supplémentaires, on est encore loin des recommandations de l’Agence de la transition écologique (Ademe). Il faudrait planifier un investissement en faveur du vélo de 2,5 milliards d’euros pour doubler le réseau existant dans les cinq prochaines années. En outre, nous regrettons vivement l’absence d’incitations à l’utilisation des transports en commun par un billet au taux de TVA à 5,5 % ou une proposition de forfaits réduits, par exemple.

La politique du transport ferroviaire devrait être une priorité absolue. Selon M. Jean‑Pierre Farandou, président du groupe SNCF, « le seul report de 10 % de la part modale de fret et voyageurs de la route au rail atteindrait 22 % à 33 % de l’objectif de décarbonation des transports de la France ». Notre groupe considère qu’une politique très ambitieuse de l’État doit tendre vers l’objectif simple du report modal vers le ferroviaire. Or c’est le contraire qui semble acté par le Gouvernement dans le contrat de performance signé en juin dernier avec la SNCF : tous les acteurs l’estiment insuffisamment doté pour entretenir le réseau et a fortiori pour le développer. Nous demandons expressément la révision de ce contrat.

Le ferroviaire nécessite, au contraire, une vision à long terme, concrétisée par un grand plan d’investissement visant à doubler d’ici à 2030 la part du train en France. Nous proposerons d’ailleurs, par un amendement, d’organiser à l’Assemblée nationale un débat sur la politique ferroviaire, de fret et de passagers, qui pourrait déboucher sur une programmation pluriannuelle, à l’instar de ce qui existe pour l’énergie.

Ces vingt dernières années, des centaines de gares de fret et d’embranchement ont été fermées et le nombre de cheminots travaillant à Fret SNCF est descendu de 12 000 à 4 000. Pour enrayer cette évolution et atteindre l’objectif de 30 % de transport de marchandises par le ferroviaire avant 2030, nous proposons de stopper la privatisation de Fret SNCF, d’accorder un bonus aux entreprises réalisant 50 % de leur transport de marchandises par rail et de prélever 1 milliard d’euros par an sur les profits des sociétés d’autoroute afin d’investir dans le développement des infrastructures de fret ferroviaire.

Pour le transport fluvial, le Gouvernement se vante d’allouer des crédits supplémentaires à VNF, mais le PLF poursuit la trajectoire de réduction des postes – 40 ETPT perdus cette année. Nous proposons de doubler les financements alloués à Voies navigables de France, pour atteindre 400 millions d’euros.

Enfin, concernant l’aviation, les grands changements nécessaires sont abordés avec grande timidité : peu de sobriété recommandée, pas de taxe, notamment sur les jets privés, pas d’interdiction, pas d’incitation, pas d’investissement, un peu d’information, de la pédagogie. L’urgence commande pourtant des mesures significatives, cohérentes, des mesures de justice sociale et environnementale. Comment comprendre, après la crise des gilets jaunes et en période de tension de la disponibilité énergétique, que le kérosène soit exonéré de l’imposition sur les produits énergétiques ? La suppression de cette dépense publique néfaste pour le climat permettrait à la France d’économiser 3,6 milliards d’euros par an.

Autre défaut criant, l’absence de plan pour réorienter et former à d’autres métiers les travailleurs du secteur aérien. Le plus efficace pour réduire les émissions, c’est moins de vols sur les moins longues distances. Dès lors que le Gouvernement y encourage les citoyens, il doit prévoir une politique pour former les professionnels du secteur et leur trouver des débouchés.

Nous constatons néanmoins avec satisfaction que, pour les vols en jet privé, le rapporteur pour avis propose d’augmenter la fiscalité, notamment par l’assujettissement à la TICPE du kérosène, et la transparence. Ce sont des mesures de bon sens, comme l’interdiction de ces vols lorsqu’existe une autre solution de transport par le train. La loi « climat et résilience » l’impose déjà pour les autres vols. L’appel à réparer cet oubli malheureux est, pour nous, plus que bienvenu.

M. Vincent Thiébaut (HOR). La mission « Écologie, développement et mobilités durables » est essentielle pour accompagner nos citoyens dans les territoires, notamment dans certaines ZFE beaucoup plus contraignantes que la loi, qui ont été adoptées par des collectivités territoriales de manière nombriliste, sans prendre en considération les populations périphériques. Je salue donc le budget alloué à cette mission, en augmentation de 30 % par rapport à 2021, dans un contexte économique contraignant. Il traduit la volonté du Gouvernement de poursuivre les efforts engagés sous le précédent quinquennat et d’aller plus loin, plus vite dans les enjeux liés au développement durable – la décarbonation des transports, la transition énergétique de tous les secteurs.

Le budget alloué aux transports terrestres et fluviaux doit être salué, qui poursuit le verdissement des infrastructures : 80 % des crédits du programme 203 sont mobilisés pour le développement des modes décarbonés – ferroviaire, fluvial, portuaire, combiné et mobilités douces. Dans cette veine, le nouveau plan Vélo doté de 250 millions d’euros vient accélérer la transition vers des transports décarbonés.

L’investissement dans le fret, inscrit dès 2019 dans la LOM, se poursuit afin de tendre vers l’objectif fixé par la loi « climat et résilience » de doublement de la part modale du fret ferroviaire de 9 % à 18 % d’ici à 2030. La stratégie nationale pour le développement du fret ferroviaire annoncée en septembre 2021 réorganise ce mode de transport. En termes d’investissement, elle se traduit par le plan de soutien au fret ferroviaire à raison de 170 millions d’euros par an de 2021 à 2024 au moins. Le soutien financier indispensable au développement du fret ferroviaire est donc assuré dans le PLF pour 2023 et je m’en réjouis.

Compte tenu de l’importance du domaine maritime de la France – le deuxième au monde avec plus de 11 millions de kilomètres carrés –, le budget des affaires maritimes recouvre également des enjeux importants. Il est dédié au développement durable des activités maritimes, au plus près des usagers de la mer et des territoires fluviaux, ainsi qu’au développement de nos ports maritimes, afin de limiter le transit routier – une bonne partie de celui que nous subissons en Alsace provient des ports d’Amsterdam ou d’Anvers. Ce programme tend tout à la fois à concilier les différents usages dans un espace de plus en plus convoité, à protéger les ressources et milieux marins et à garantir la souveraineté maritime de la France.

Le transport aérien a un rôle majeur à jouer dans la décarbonation qui, deux ans après la crise de la covid-19, constitue un défi de taille. Elle passe par le recours aux carburants durables d’aviation, l’optimisation des trajectoires de vol, le renouvellement de la flotte par des avions moins consommateurs de kérosène. Elle passe surtout et encore, par le report modal vers des moyens de transport moins polluants, notamment le ferroviaire. Le Gouvernement a réinvesti dans ce secteur, notamment au travers du nouveau pacte ferroviaire de 2018, de la remise à niveau du réseau, de la relance des trains de nuit, qui offrent une bonne solution de remplacement aux transports aériens, et de la revitalisation des petites lignes ferroviaires qui a permis de pérenniser 6 000 kilomètres de lignes.

Il faut aller plus loin dans l’offre de solutions de remplacement de l’avion par le train et dans l’intermodalité, dans les efforts de décarbonation du secteur, dans la sensibilisation des consommateurs, et tout cela en agissant aux niveaux européen et international. Enfin, il convient de mieux réglementer l’utilisation des jets privés.

Le groupe Horizons soutiendra cette mission qui, à travers ces trois programmes ambitieux, poursuit l’effort de décarbonation.

Mme Aude Luquet (Dem). Le secteur des transports pèse pour près d’un tiers dans nos émissions de gaz à effet de serre, ce qui nous impose de nous affranchir des énergies fossiles par des financements à la hauteur. L’augmentation de 6 % du budget dédié au transport terrestre par rapport à la loi de finances initiale de 2022 fournit une réponse.

Le fret ferroviaire a été trop longtemps négligé, en sorte que nous sommes en retard et un des maillons faibles de l’Europe. La part modale du fret ferroviaire en France est de 10,5 %, contre 30 % en Autriche et 20 % en Allemagne. Pourtant, ses bénéfices environnementaux sont considérables. Hélas, le coût du transport demeure trop souvent la première motivation des entreprises, qui choisissent le plus souvent la route. C’est donc un des leviers sur lequel nous devons agir. Quelles sont encore les différences de coût au kilomètre entre le routier et le ferroviaire ? Quelles pistes sont envisagées pour les réduire ?

Plus largement, nous nous sommes engagés dans la revitalisation des petites lignes et à un retour des trains de nuit. Avez-vous de premières évaluations ? Les moyens mis en œuvre vous semblent-ils suffisants ?

Le soutien aux mobilités actives, et plus particulièrement au vélo, doit être poursuivi. Nous nous réjouissons que le périmètre des financements de l’Afit France soit élargi au développement des véloroutes. L’action est essentiellement tournée vers les villes et les centres urbains, et le maillage de nos territoires en pistes cyclables reliant les villages entre eux doit être renforcé. De nombreuses personnes pourraient ainsi s’affranchir de leur véhicule pour effectuer des distances ne dépassant pas bien souvent quelques kilomètres. Quels financements et actions sont spécifiquement dédiés au développement des véloroutes ?

Mme Florence Lasserre (Dem). Pour le secteur du transport aérien, sévèrement touché par les conséquences de la crise mondiale, 2022 n’est pas encore l’année du retour à la normale. Le bilan carbone des déplacements en avion est très critiqué, et une poignée de personnes fortunées voyageant en jet privé ajoutent à la caricature. Pourtant, ce secteur est très engagé dans la lutte contre le réchauffement climatique.

L’aviation civile française s’est engagée à atteindre la neutralité carbone en 2050, en développant des carburants aéronautiques durables et en renouvelant sa flotte. Au travers du plan de relance et du plan France 2030, les pouvoirs publics contribuent à l’effort financier nécessaire pour le développement de nouvelles technologies de propulsion à l’électricité ou l’hydrogène.

Afin d’accompagner les avancées industrielles vers la transition écologique, nous devons continuer d’envoyer un signal politique fort au secteur aérien. Puisque le renouvellement des flottes et l’incorporation de carburants durables sont les deux leviers de décarbonation dont il dispose, il faut mettre en place des mécanismes de soutien adaptés, notamment atténuer le surcoût du carburant durable par rapport au kérosène. Le signal fort attendu par les acteurs trouve-t-il une traduction concrète dans le budget de la France pour 2023 ?

M. Jimmy Pahun (Dem). Madame la rapporteure Masson, le sauvetage en mer n’est pas un droit, c’est un devoir régi par deux textes internationaux : la Convention internationale pour la sauvegarde de la vie humaine en mer (Solas) et la Convention des Nations unies sur le droit de la mer de 1982. Ne vous inquiétez pas pour nos sauveteurs en mer, soyons fiers de leur image auprès du grand public ! Ils ne font pas de politique et accomplissent courageusement leur devoir de marins. Notre Parlement avait aidé la SNSM au renouvellement de sa flotte.

Votre rapport n’évoque pas la décarbonation et il n’y est que peu question de transition écologique. Les armements français ont réussi à décarboner presque 30 % de leurs flottes et réalisent un effort important d’électrification des quais, en particulier à Marseille. J’ajoute que les autoroutes maritimes fonctionnent bien et que les compagnies maritimes vont investir dans le ferroviaire.

Quant à la plaisance, l’État prendra en charge, à compter du 1er janvier 2023, le transport des bateaux de plaisance vers leur lieu de déconstruction. C’est un gros effort, car les navires de plaisance sont presque immortels. J’aimerais aussi que l’on puisse introduire un peu de verdure dans nos ports de plaisance. En Bretagne Sud, la rénovation des ports de plaisance est très bétonnée, très minérale. J’espère que dans le prochain qui doit être réalisé à La-Trinité-sur-Mer, il y aura un peu d’arbres et de verdure.

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). D’ici à 2100, le réchauffement climatique pourrait être 50 % plus intense que prévu. La France pourrait voir sa température moyenne annuelle augmenter de près de 4 degrés par rapport à 1990, alertent le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et Météo-France. Cette alerte doit guider l’ambition du PLF pour définir des investissements propres à assurer notre sécurité alimentaire et énergétique, la dignité de chacun face aux chocs qui vont s’accélérer, l’accès aux droits et aux libertés dans des temps qui vont devenir de plus en plus troubles, et l’habitabilité de la Terre.

Dans le domaine des transports – terrestres, fluviaux, aériens et maritimes –, nous nous réjouissons de certaines avancées, obtenues grâce à la pression forte de nos concitoyens et d’associations, mais le sous-investissement reste massif. La volonté politique manque face aux intérêts économiques court-termistes perpétuant un modèle de transport inégalitaire et polluant. Tant de nos concitoyens, notamment dans les territoires ruraux, doivent renoncer à des déplacements, à leurs droits et à leurs libertés, faute de moyens pour payer un carburant au prix fort ; faute de pompistes parce qu’on a laissé se creuser les inégalités au sein même de nos fleurons industriels ; faute d’une politique crédible d’aménagement des territoires et de déploiement des services publics essentiels, qui oblige à faire toujours plus de kilomètres pour y accéder ; faute, bientôt, de carburant parce que, dans ce monde fini, le dogme de la croissance infinie a aveuglé les plus puissants, que tous les scientifiques ne sauraient raisonner.

La France s’est engagée dans la stratégie nationale bas-carbone et à atteindre l’objectif zéro artificialisation nette (ZAN) en 2050. Elle doit s’engager à laisser de la terre disponible pour l’installation agricole et tenir ses engagements climatiques pris dans l’accord de Paris. Aussi les amendements proposés par le groupe Écologiste auront-ils pour seule finalité de mettre le droit positif et les financements en cohérence avec les engagements pris par la France. Mi-août, le Conseil constitutionnel avait déjà lancé un avertissement au Gouvernement en rappelant, à la suite de la saisine de nombre d’entre nous, que la préservation de l’environnement doit être recherchée au même titre que les autres intérêts fondamentaux de la nation.

Concernant l’aviation, nous proposons de mettre un terme à la politique fiscale accommodante dont bénéficie le transport aérien, en rétablissant la TICPE sur le kérosène au moins pour les vols nationaux. Nous soutiendrons tous les amendements allant dans le sens de la limitation et de l’interdiction de l’usage des jets privés – symbole de la soustraction des plus riches à l’effort collectif pour le climat.

Le secteur des transports représente 31 % des émissions françaises, celles-ci allant augmentant. Le groupe Écologiste réaffirme la nécessité d’investir massivement dans des solutions de mobilité alternatives. Le tout-voiture est un non-choix et un piège pour la planète, mais aussi pour notre santé, notre bien-vivre et la liberté de nous mouvoir, à cause de la dépendance toujours plus grande aux énergies sales. Nous défendrons un moratoire sur la délivrance des permis de construire relatifs aux projets d’extension routière qui pullulent dans nos territoires et que l’État finance encore à hauteur de 13 milliards d’euros.

De son côté, le rail pâtit d’un sous-investissement chronique depuis plus de soixante ans. La France investit moins que la Suisse dans son réseau ferroviaire. Nous proposons une relance du rail en y affectant 3 milliards d’euros supplémentaires par an jusqu’en 2030, afin de revitaliser durablement le secteur et d’augmenter la part modale du train, tant pour les voyageurs que pour le fret. Nous proposons également d’investir massivement dans les trains de nuit, dont la plupart ont été démantelés entre 2007 et 2017, en dédiant 1,5 milliard d’euros à la commande de 600 voitures. Un véritable plan Vélo, à la hauteur de la nécessaire résorption de la fracture béante entre urbains et ruraux et du rattrapage du retard dramatique de sa part modale, se doit de prévoir des investissements dans des infrastructures sécurisées et l’intermodalité en territoire rural.

Nous soutiendrons tous les amendements visant à protéger le droit à la mobilité de chacun et de chacune, notamment là où les autres solutions sont trop faibles et où la dépendance à un mode de transport contraint qui pollue réduit les perspectives d’avenir.

S’agissant des crédits relatifs aux affaires maritimes, nous proposerons de financer la création d’un refuge marin pour les dauphins captifs du Marineland d’Antibes et de la cité marine de Planète sauvage, conformément aux dispositions relatives aux delphinariums figurant dans la loi contre la maltraitance animale du 30 novembre 2021. De plus, nous soutiendrons les mesures en faveur de l’aménagement d’un domaine public fluvial à énergie positive.

Nous avons la possibilité de rétropédaler pour mettre fin à des décennies d’inaction et de nous poser en champions du climat, de la santé, du bien-vivre, de la justice et du courage politique. Investissons et appliquons le « quoi qu’il en coûte » à l’essentiel !

M. Hubert Wulfranc (GDR-NUPES). On trouve en toile de fond du rapport de M. Valence le fameux contentieux entre le ministre des transports et le président de la SNCF au sujet des moyens.

Sans nier la prise en compte récente de l’enjeu du trafic ferroviaire – sur fond de casse de l’entreprise publique SNCF tout de même –, je considère que celui-ci est loin d’être suffisant en masse et souligne la nécessité de définir une trajectoire pluriannuelle de développement du rail. Après un laisser-aller imputable à tous les gouvernements précédents, le rebond que vous souhaitez impulser ne peut se limiter à des budgets annuels incertains.

Pour faire circuler des trains, il faut des voies en bon état ; or le programme de régénération n’est pas à la hauteur des besoins. Il est insuffisant pour enrayer le vieillissement du réseau – il manquerait environ 1 milliard d’euros par an.

Le retard pris en matière de commande centralisée et de digitalisation du réseau devrait se chiffrer à 10 milliards d’euros à échéance 2040, de 20 à 40 milliards supplémentaires à échéance de 2030 pour l’un et l’autre des dispositifs majeurs de modernisation. Ces deux exemples légitiment les propos que nous avons entendus de la bouche du président Farandou.

Le soutien au fret est maintenu mais sans engagement sur la pluriannualité, donc sur la pérennisation, malgré une légère amélioration de 10,4 millions. Les perspectives budgétaires dont nous avons besoin sont bien limitées.

Les terminaux multimodaux et la connectivité du réseau fret aux grands ports maritimes sont deux éléments majeurs de développement économique. L’état des uns et la faiblesse de l’autre traduisent un manque d’ambition en matière de multimodalité. Pour mon collègue Pierre Dharréville, élu du port de Fos, et pour moi-même, élu de l’Axe Seine, il y a là de quoi remettre en question le développement économique d’une région.

Pour faire plus, il faut une volonté politique, des recettes nouvelles. Des propositions ont été faites par les concessionnaires et les gestionnaires de l’agrégat tertiaire pour les gares et connexions, mais tout cela a été négligé.

M. David Taupiac (LIOT). Pour la majorité de nos concitoyens, la journée débute dans les transports. Entre le prix de l’essence – lorsqu’il y en a – qui grimpe, les centres-villes de plus en plus difficiles d’accès et les transports en commun perturbés, se déplacer relève parfois du parcours du combattant. Dans le cadre du prochain projet de loi de finances rectificative, la remise de 30 centimes par litre de carburant à la pompe sera prolongée jusqu’à mi-novembre. Encore faudra-t-il qu’il y ait de l’essence. À cette mesure conjoncturelle, non ciblée et coûteuse pour nos finances publiques, s’ajoutent dans ce projet de loi de finances des mesures plus structurelles.

Se voulant vert, ce budget met la priorité sur le développement du transport ferroviaire. Mais la hausse des crédits de 7,5 % reste faible au regard des enjeux pour le secteur.

À court terme, des mesures d’urgence s’imposent. Je pense à un mécanisme de compensation de la hausse de la facture d’électricité de la SNCF. Celle-ci devrait atteindre 1,7 milliard d’euros mais les régions ne pourront pas amortir cette dépense supplémentaire. Quant au fret ferroviaire, qui souffrait déjà d’un déficit de compétitivité par rapport au routier, miné par l’inflation, il nécessite également un coup de pouce.

À plus long terme, il faudra consolider les efforts en matière de régénération du réseau. Des moyens ont été dégagés pour assainir les finances de la SNCF et lui redonner des capacités d’investissement. La reprise par l’État de 35 milliards d’euros de dette et l’effort de recapitalisation du groupe SNCF à hauteur de 4,05 milliards d’euros allaient dans le bon sens. La trajectoire d’investissement définie dans la LOM était insuffisante, puisqu’elle prévoyait 2,8 milliards d’euros d’investissement par an. Selon le Conseil d’orientation des infrastructures (COI), il aurait fallu au minimum 1 milliard d’euros supplémentaire pour maintenir le réseau en l’état. Ce budget est donc largement insuffisant.

Le secteur du transport aérien subit régulièrement le feu des critiques en raison de ses retombées environnementales. C’est oublier que l’aérien contribue à la richesse de notre pays et qu’à la sortie d’une crise sanitaire sans précédent, l’urgence est de soutenir sa reprise. C’est oublier également les investissements de la filière en matière de décarbonation. Des avions de nouvelle génération permettent des gains de carburant significatifs, de 15 % à 25 %, et d’émissions de CO2. La filière continue d’investir pour développer l’avion du futur à hydrogène ou les carburants durables d’aviation. Ce sont autant de pistes à explorer pour diminuer l’empreinte environnementale du secteur.

La hausse des recettes du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » est une bonne nouvelle, puisqu’elle témoigne d’une reprise du trafic aérien. Reste que la dette de ce budget annexe a été profondément creusée pendant la crise sanitaire, en raison de la chute brutale du trafic aérien et des reports de paiement des taxes et redevances aériennes. Est-elle aujourd’hui à un niveau soutenable ?

Concernant la sécurité en mer, chacun se souvient du drame des Sables-d’Olonne en 2020, au cours duquel trois bénévoles de la SNSM ont trouvé la mort. Depuis, les crédits alloués à l’organisation ont été renforcés. Est-ce suffisant, sachant que les interventions sont en constante augmentation ?

En matière de formation maritime, quelles sont les pistes à explorer pour valoriser les métiers de la pêche, en déshérence ?

Quant aux enjeux de la transition écologique, le secteur pourra compter sur la mobilisation d’une partie des crédits du plan de relance, dont 32 millions d’euros consacrés au verdissement des ports et 44 millions destinés au renforcement de la performance environnementale et sociale de la filière pêche et aquaculture. S’ajouteront quelques crédits éparpillés au sein de la présente mission et une perspective réjouissante du côté méditerranéen : la mise en place, à compter de 2024, d’une zone à faibles émissions de soufre (ECA). Il faudra toutefois aller plus loin pour restreindre la pollution du fret maritime, en constante augmentation.

M. David Valence, rapporteur pour avis. Madame Cousin, en matière d’infrastructures de transport, la stabilité budgétaire est une vertu. Elle traduit la tenue d’une trajectoire définie dans la LOM et l’absence d’aléas liés à l’annualité budgétaire, que nous avons trop connus avant 2017 en matière de transports.

On ne peut parler d’un « énième » plan Vélo, puisqu’il s’agit du premier, lancé à l’époque par Mme Élisabeth Borne, ministre des transports. Il faut se réjouir des crédits alloués.

L’Afit France n’est pas une exception démocratique ; des dispositifs comparables existent dans nombre de pays voisins. Ils permettent simplement de sécuriser à long terme une partie des recettes allouées à la programmation des infrastructures et d’engager des programmes pluriannuels en disposant d’un étiage de financements, en dehors des concours publics complémentaires de l’État, des collectivités territoriales ou autres. C’est bien en ce sens qu’elle avait été conçue en 2006. Le ministre M. Christophe Béchu, ancien président de l’Afit France, a indiqué il y a quelques semaines que l’agence savait déjà ce qu’elle allait faire quasiment jusqu’en 2040. C’est la preuve que cet outil donne de la profondeur temporelle à nos investissements.

Quant aux orientations et aux priorisations des investissements de l’Afit France, je m’érige en faux contre cette vision d’un outil qui déciderait lui-même des programmes à financer. C’est bien le fait de représentants élus démocratiquement. Les crédits déployés par l’Afit France en matière de transports collectifs ont ainsi été votés dans le cadre de la LOM votée par ce Parlement.

Je précise que la prime sur les carburants fossiles ne figure pas dans le programme 203.

Prétendre que développer les transports collectifs suffirait à décarboner les mobilités, c’est écraser fortement les différences entre les territoires. En réalité, il y aura une différenciation des stratégies de décarbonation des déplacements selon les types de territoire. Globalement, il faudra prévoir des transports collectifs très denses dans les secteurs à caractère métropolitain ; du transport collectif sous toutes ses formes, routière et ferroviaire, depuis les villes moyennes vers les métropoles ; des intermodalités, des capacités de stationnement, des accès vélo jusqu’aux points d’accès aux transports collectifs dans les zones très peu denses, ce qui signifie d’abord une décarbonation des motorisations. On ne peut pas dire qu’on mettra du train ou du transport urbain devant la porte de chacun. C’est l’élu d’une circonscription rurale et de montagne qui le dit ; il faut se doter d’une stratégie réaliste.

S’agissant de la gratuité des transports collectifs, l’expérimentation qui s’est déroulée en Allemagne n’a duré que le temps de l’été. Les systèmes de transport collectif les plus performants, comme en Suisse et au Japon, sont très bien financés par l’usager, ce qui les met à l’abri des aléas de la volonté de quelque gouvernement ou quelque autorité organisatrice que ce soit d’apporter des concours publics ou des financements complémentaires. À mon avis, un financement du transport collectif dans lequel la part de l’usager serait réduite à néant est peut-être populaire, mais pas réaliste. Surtout, il n’en permet pas le développement à long terme.

Monsieur Carrière, le programme ferroviaire Lyon-Turin est un projet de report modal massif de transport de marchandises. Il faut s’en réjouir. Avec le projet de liaison Seine-Escaut, c’est l’un des plus gros investissements en infrastructures nouvelles de nature à décarboner le transport de marchandises. Le débat sur les voies d’accès a été en grande partie tranché par les accords signés entre la France et l’Italie ; vous voulez le rouvrir pour privilégier la voie existante Dijon-Modane. Le Conseil d’orientation des infrastructures, que je préside, aura l’occasion de revenir sur le sujet et de donner son avis à la fin de cette année, même si la France est liée par des accords internationaux.

Le sujet des routes ne doit pas être envisagé sous le seul angle de l’entretien, mais plus globalement sous celui du verdissement. Il n’est pas simplement question du trou dans la route, mais de l’évolution de celle-ci pour la rendre productrice d’énergie, favoriser l’accès aux bornes de rechargement électrique, etc. L’État ne peut pas y réfléchir seul ; tous les partenaires, autoroutiers et collectivités, doivent être réunis autour de la table pour couvrir tout le linéaire.

Monsieur Vermorel-Marques, le chiffre de 100 milliards d’euros avancé par Jean-Pierre Farandou ne concerne pas seulement le fret ferroviaire, il comprend aussi le transport de voyageurs. Au passage, plusieurs intervenants ont superposé les lignes de desserte fine du territoire et le capillaire de fret, ce qui constitue une confusion. Ce sont deux choses bien différentes, et les déplacements de voyageurs sont plutôt désignés par la première expression. En la matière, le Gouvernement a signé avec la quasi-totalité des régions françaises, sauf Auvergne-Rhône-Alpes, des accords qui dessinent des solutions et des perspectives réalistes pour sauver toutes les lignes présentant un intérêt en matière de mobilités du quotidien.

S’agissant des gares de triage, le projet de plateforme multimodale de Miramas mobilise 6 millions d’euros de l’État pour en augmenter la capacité. La gare de Woippy a bénéficié d’investissements très importants dans le cadre du plan de relance. On peut dire que la modernisation des grandes gares de triage a connu une accélération, et l’on aurait aimé que les gouvernements antérieurs à 2017 se mobilisent sur ce sujet avec autant de volontarisme.

Madame Jourdan, le contrat de performance est critiqué par certains acteurs des mobilités. Il prévoit tout de même un effort sans précédent de 2,8 milliards d’euros annuels pour la régénération et la modernisation du réseau.

On peut bien rêver d’égaler l’Autriche, mais l’objectif de 30 % de fret ferroviaire pour 2030 n’est pas réaliste, et l’irréalisme de l’objectif peut nuire à la conduite d’une démarche. Capter une partie de la rente autoroutière pour la redéployer sur le fret ferroviaire n’est pas juridiquement possible dans le cadre des concessions actuelles, mais c’est une piste.

Le concours de l’État aux liaisons fluviales, qui a été doublé et porté à 400 millions d’euros, ne constitue pas la seule recette de Voies navigables de France, qui dispose de recettes propres. L’accompagnement en investissement, bien supérieur à ce qui a été réalisé avant 2017, notamment grâce au plan de relance, doit lui permettre de dégager également des recettes supplémentaires. C’est davantage le plafonnement de la part des ressources issues de la redevance hydraulique revenant à VNF qui doit être mis en question qu’une augmentation sèche des concours.

En matière de qualité de l’air, on parle toujours du CO2 mais les externalités positives de la décarbonation des transports et du transfert modal vers le train incluent également les oxydes d’azote – M. Fugit a raison d’insister. La mise en parallèle, par plusieurs de nos collègues, des zones à faibles émissions et de la possibilité, dans au moins un cas sur deux, de développer des réseaux express métropolitains, est une perspective intéressante. Il faudrait rapprocher les calendriers d’ici à 2030.

Madame Luquet, en raisonnant de façon très sèche sur de courtes distances, le fret ferroviaire est peu compétitif car son coût est composé à 80 % de coûts fixes. Ce n’est plus vrai pour la longue distance, dans laquelle il reprend un avantage en raison du tonnage qui peut être emmené par le train. Selon les économistes des transports, au-delà de 400 kilomètres, sans concours public et dans les conditions actuelles du marché, il y a égalité de coût pour les chargeurs. C’est pour les capillaires de fret irriguant les grands flux de transfert vers le fret ferroviaire que le concours public est le plus précieux.

S’agissant de la revitalisation des petites lignes ferroviaires, je l’ai dit, les lignes de desserte fine, donc le transport de voyageurs, ont fait l’objet d’accords signés avec la plupart des régions françaises, à l’exception d’Auvergne-Rhône-Alpes et de la Bretagne – des négociations sont en cours avec cette dernière. Les lignes capillaires de fret ont bénéficié d’investissements conséquents dans le cadre du plan de relance et toutes les régions l’ont ressenti. Force est de reconnaître que la mobilisation des concours locaux est plus ou moins marquée. Certaines régions, telles Centre-Val de Loire et Grand Est, font beaucoup ; d’autres sont absentes des tours de table. Certes, cela ne relève pas strictement de leur compétence, mais c’est un sujet de développement économique. Il est prématuré de dresser un bilan de la revitalisation des capillaires de fret. Nous y verrons plus clair d’ici quelques années.

Madame Pochon, je serais curieux de savoir où vous trouvez dans ce projet de budget le chiffre de 13 milliards d’euros pour les extensions routières. Vous avez peut-être cumulé des aides pluriannuelles.

Vous comparez l’investissement de la France dans le réseau ferroviaire avec celui de la Suisse. Le ministre M. Christophe Béchu a indiqué qu’au rythme auquel la France investit dans ces infrastructures, nous commençons à rattraper le retard par rapport à l’Allemagne.

Il me semble que le sujet du train de nuit fait l’objet d’un surinvestissement au regard des problématiques réelles de déplacement. Reste que quatre-vingt-treize voitures ont été rénovées grâce au plan de relance et 100 millions d’euros ont été injectés.

Vous évoquez la nécessité de déployer le plan Vélo en zone rurale : j’ai proposé que la moitié de l’enveloppe de 200 millions d’euros consacrée au développement des infrastructures soit concentrée sur les collectivités du bloc communal de moins de 100 000 habitants. Encore faut-il qu’elles prennent l’initiative et que l’État puisse les accompagner en ingénierie.

M. Wulfranc a avancé la casse de l’entreprise publique SNCF comme explication à la décélération de la part modale du fret ferroviaire au cours des trente dernières années. Ce n’est pas ce qu’on observe ailleurs, aussi bien pour le transport de voyageurs que pour le fret. L’ouverture à la concurrence a souvent permis de gagner de nouveaux voyageurs. À en juger par le succès du trafic de fret et du trafic de voyageurs en Allemagne depuis 1998, bien menée, elle se traduit par une attractivité supplémentaire du mode ferroviaire.

L’intérêt principal d’ERTMS et de la commande centralisée du réseau est de pouvoir faire rouler plus de trains sur les mêmes itinéraires. De fait, la France a cumulé un grand retard puisque, au rythme actuel, le déploiement de la commande centralisée du réseau serait achevé en 2060, mais il faudra trouver des financements nouveaux en plus des concours d’État classiques.

M. Taupiac a signalé la tarification de l’électricité pratiquée par SNCF Réseau vis-à-vis des entreprises ferroviaires utilisatrices. C’est effectivement un des sujets de préoccupation relevés dans mon rapport. Il faudra envisager une mobilisation sous quelque forme que ce soit pour éviter un effet désincitatif. L’absence de réponse publique exposerait à un risque sérieux de report modal inversé.

M. Damien Adam, rapporteur pour avis. Monsieur Bony, il est faux de dire qu’on a peu fait pour le transport aérien : depuis le plan de relance, plus de 15 milliards d’euros ont été dédiés au secteur de l’aéronautique.

La concurrence potentielle entre agriculture et agrocarburants doit être regardée de près mais elle ne doit pas susciter d’inquiétude. Sur le territoire national et au niveau européen, on s’interdit d’utiliser des biocarburants de première génération entrant en concurrence directe avec l’agriculture. C’est tout à notre honneur et en conformité avec nos valeurs – les Américains n’ont pas les mêmes pudeurs de gazelle.

La taxe imposée aux compagnies aériennes qui ne respectent pas les normes fixées pour l’incorporation de biocarburants dans le kérosène ne traduit pas le souhait d’instaurer une taxe supplémentaire ; elle est censée inciter l’écosystème à développer leur utilisation dans le secteur aérien. Reste que la capacité de la filière pétrochimique à faire émerger les biocarburants ne répond pas forcément à l’obligation légale d’incorporation, même si la situation est différente suivant les territoires et les compagnies. Easyjet vient de signer avec une compagnie du Royaume-Uni un contrat pluriannuel qui lui permettra de pourvoir à ses besoins et de pas acquitter la taxe, tandis qu’Air France rencontre des difficultés d’approvisionnement.

Dans le cadre du plan France relance, 200 millions d’euros ont été dédiés à cette thématique. Un appel à projets a été lancé pour créer des démonstrateurs et faire émerger cette filière – les lauréats seront connus dans les prochaines semaines. Je propose d’aller plus vite et plus loin pour augmenter le volume du marché des biocarburants, en prévoyant des taux d’incorporation bien plus élevés, jusqu’à 50 % pour les jets privés. C’est l’histoire de l’œuf et de la poule : les compagnies aériennes peinent à s’approvisionner tandis que, sans idée claire des perspectives de marché, les acteurs de la pétrochimie hésitent à investir. Nous devons nous assurer que tout le monde suive la dynamique avec audace et ambition. Je rappelle que les biocarburants procurent 80 % à 90 % d’économie de CO2 par rapport à du kérosène classique.

L’amélioration des flottes est un sujet majeur. Tous les dix à quinze ans, chaque génération d’avion réalise 15 % à 20 % d’économie et d’optimisation par rapport à la précédente. La prochaine devrait être encore plus ambitieuse en cumulant les optimisations de moteurs.

Madame Jourdan, vous regrettez que la sobriété manque dans les discours et soit trop présente dans les actions. L’interdiction des vols intérieurs pour lesquels existe une solution ferroviaire de remplacement d’une durée inférieure à deux heures trente me semble bien une mesure de sobriété du secteur aérien.

Cet été, des destinations dans les outre-mer français ont fait de meilleurs scores qu’en 2019 quand d’autres régions du monde, comme les pays asiatiques et la Chine, n’ont pas retrouvé le trafic antérieur. Après une mise à jour intégrant les problématiques d’inflation, l’organisation Eurocontrol, qui prévoyait un retour à 100 % du trafic de 2019 en 2024, le renvoie potentiellement à 2025. C’est aussi une manière de respecter la sobriété puisque, tant que le trafic n’aura pas retrouvé le niveau de 2019, les émissions de gaz à effet de serre resteront stables ou baisseront grâce à l’emploi des biocarburants et à l’amélioration des flottes.

Je suis déçu que vous ne pensiez pas comme moi que le renforcement de la transparence et l’information des citoyens sur le budget carbone et les émissions de gaz à effet de serre de chaque trajet en avion pourraient les inciter à se poser les bonnes questions, à revoir leurs modes de déplacement, et puissent être de nature à susciter une amélioration collective.

Il faut savoir ce que l’on veut faire avec la taxation. Une taxation nationale n’aurait guère d’effet sur les vols commerciaux classiques puisque l’origine ou la destination de la plupart des trajets en avion est extérieure à nos frontières. L’échelle doit être plus large mais les règles du secteur aérien mondial empêchent toute action sur le kérosène, sauf au niveau national. Il faut convaincre les différents acteurs par l’intermédiaire de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) et au niveau européen. Je ne suis pas hostile à la taxation – je l’évoque dans mon rapport – mais l’échelle pertinente est européenne, voire internationale.

Dans le cadre des contrats de filière signés entre l’État et les différents secteurs industriels, les sujets liés à la formation professionnelle sont pris à bras-le-corps pour anticiper les besoins et l’évolution des effectifs. À l’échelle nationale, le secteur aérien représente plus de 100 000 emplois et les perspectives à long terme restent positives, car on a besoin de salariés compétents pour décarboner les avions.

Monsieur Thiébaut, vous invitez à pousser plus loin le report modal. Selon le président-directeur général (PDG) du groupe Aéroports de Paris (ADP), la gare SNCF de l’aéroport Charles-de-Gaulle deviendra dans quelques années la première gare française, avec un trafic supérieur à celui des gares parisiennes. Aujourd’hui, elle est bien reliée aux lignes TGV du nord de la France mais moins aux autres. Des travaux sont en cours pour développer le report modal. Pour prendre un vol international à Paris depuis Bordeaux ou Nice, on empruntera le train au lieu de l’avion. Dans le report modal, il y a aussi le traitement des bagages : il faut arriver à faire en sorte qu’on puisse déposer son bagage au point de départ pour le récupérer au point d’arrivée. L’avantage de la gare Charles­de‑Gaulle 2, c’est que les infrastructures de traitement des bagages se trouvent en dessous : il faudrait simplement investir pour développer le service. Si je renvoie à la fin de la décennie l’interdiction des vols avec correspondance lorsqu’il existe un trajet en train de moins de trois heures, c’est pour laisser le temps à la gare Charles‑de‑Gaulle 2 d’organiser un service de qualité, à la hauteur de ce qu’on est en droit d’attendre.

Madame Lasserre, le secteur est en effet très engagé dans la décarbonation : il s’est engagé à la neutralité carbone en 2050. De fait, alors que le trafic a quasiment doublé en quelques dizaines d’années, les émissions n’ont pas progressé en parallèle, grâce aux milliards d’euros investis dans la recherche d’optimisation des avions, des opérations et des trajectoires aériennes.

En évoquant le soutien au renouvellement des flottes, vous pensiez sans doute à une sorte de prime à la conversion. Les compagnies aériennes françaises sont déjà fortement engagées dans une politique de renouvellement des flottes. C’est le cas d’Air France depuis que Benjamin Smith en a pris la direction, et de la plupart des autres entreprises. Un accompagnement financier de la part de l’État n’est donc peut-être pas nécessaire, et cela d’autant moins qu’il risquerait d’entraîner un effet d’évitement, les compagnies aériennes françaises se débarrassant des flottes les plus anciennes, qui pourraient alors être réutilisées dans d’autres zones du monde.

Il conviendrait donc plutôt de définir une politique à l’échelle mondiale pour nous débarrasser des avions les plus anciens, âgés de plus de 15 ou 20 ans, en les sortant du marché pour les recycler et les démanteler dans les meilleures conditions environnementales. Cela permettrait de réduire les émissions de gaz à effet de serre du secteur, sachant que les constructeurs, qu’il s’agisse d’Airbus ou de Boeing, ont déjà du mal à répondre à la demande des compagnies aériennes.

Madame Pochon, ma réponse à Mme Jourdan répond aussi à votre question relative au rétablissement de la TICPE sur le kérosène. Mon avis budgétaire propose dans ce domaine des mesures, auxquelles je vous renvoie.

En matière de fiscalité, des mesures ont déjà été prises durant le mandat précédent, sous la forme d’une obligation pour les compagnies aériennes d’appliquer une compensation carbone au prix des billets, afin de limiter l’impact négatif des voyages pour la planète. Le prix moyen des billets d’avion connaît du reste une forte augmentation – de l’ordre de 30 % – par rapport à son niveau d’avant la crise de la covid-19, ce qui a un effet régulateur dans le secteur en entraînant une baisse de la demande.

Se développent, parallèlement, les carburants durables d’aviation, qui doivent actuellement être incorporés à hauteur de 1 %. Les discussions sur le paquet de mesures européennes intitulé Refuel EU prévoient une augmentation progressive de ce taux d’incorporation durant les prochaines années. Je propose, pour ma part, une accélération de ce mouvement à l’échelle nationale. Toutes ces mesures contribuent à la régulation du secteur aérien et à l’application d’une logique beaucoup plus vertueuse.

Monsieur Taupiac, vous avez raison de rappeler que le secteur aérien est une richesse pour notre pays, tant économiquement que socialement, car nos exportations d’avions profitent à notre balance commerciale et des dizaines de milliers d’emplois sont ainsi assurés. L’avion du futur fait l’objet d’investissements très importants : en ce moment même, Airbus a engagé des activités de recherche et développement consacrées à l’avion à hydrogène, à l’avion électrique et à toutes les solutions qui nous permettront de disposer demain d’avions neutres en carbone.

Pour ce qui est de la fiscalité du secteur public de l’aérien, la très forte baisse d’activité liée à la crise de la covid-19 a fait fondre les recettes affectées, remplacées par un endettement estimé aujourd’hui à 2,7 milliards d’euros. La DGAC, qui retient les mêmes scénarios de reprise du trafic qu’Eurocontrol, affirme être en mesure de se désendetter durant l’actuel quinquennat pour revenir à son taux d’endettement d’avant la crise de la covid-19, soit un montant de l’ordre de 1,1 milliard d’euros fin 2027, grâce à la combinaison d’un plan d’optimisation et des investissements nécessaires pour rester au niveau souhaitable.

Mme Alexandra Masson, rapporteure pour avis. Madame Decodts, je suis un peu surprise de votre réaction à ma proposition d’augmentation des effectifs de l’École nationale supérieure maritime, qui devrait, selon moi, faire plutôt l’unanimité. Plusieurs de vos collègues, que je ne citerai pas, m’ont appelée hier pour me dire que votre groupe même avait l’intention de déposer un amendement. Je suppose que vous avez eu des discussions qui vous ont fait changer d’avis, mais j’avoue ne pas comprendre ce changement ni vos critiques et l’absence de consensus.

Le Gouvernement lui-même a indiqué, voilà déjà plusieurs années, la nécessité d’augmenter les effectifs de cette école, dont l’excellence est reconnue dans le monde entier et pour laquelle son nouveau directeur, issu de ses rangs et que nous avons auditionné, a de grandes ambitions. J’espère donc que vous déposerez un amendement dans la journée ou que vous vous rallierez au mien. La mesure proposée favorisera, outre l’excellence de l’école elle-même, l’accroissement du nombre de navires sous pavillon français et de navires immatriculés au RIF.

Pour ce qui concerne la SNSM – et cette réponse s’adresse aussi à M. Pahun –, nous nous heurtons à un problème de compréhension : vous êtes hors sujet, car il faut distinguer la loi et l’esprit de la loi. Il ne viendrait à l’esprit de personne de remettre en cause la mission de la SNSM, association ancienne qui accomplit au long cours un travail extraordinaire que nombre d’associations nationales n’accomplissent plus. En effet, toutes les personnes présentes sur ses bateaux sont des bénévoles : sans les bénévoles, la SNSM ne pourrait pas fonctionner, et c’est du reste bien là que se situe le problème.

Lorsque j’ai auditionné le président de la SNSM, il s’est plaint de l’étroitesse de son budget, et c’est la raison pour laquelle j’en ai demandé l’augmentation, mais il est assez normal qu’une structure demande des augmentations budgétaires. Surtout, 85 % des sauvetages réalisés par la station de Calais dans la Manche concernent des rapatriements de bateaux et embarcations de migrants. Or les bénévoles ne sont souvent ni formés ni équipés pour ce type de sauvetage – ce sont eux-mêmes qui le disent. Il faut donc renforcer les moyens de la SNSM, mais ce n’est pas facile, en raison notamment des problèmes liés à la formation. En outre, les bénévoles de la SNSM ne disposent pas de pouvoirs de police, alors qu’ils doivent souvent fouiller les personnes qui montent à leur bord, qui sont souvent armées.

Je rappelle également que la SNSM réalise 53 % des sauvetages en mer nécessitant des moyens nautiques, tandis que 17 % sont réalisés par des particuliers, auxquels on ne peut évidemment pas transférer cette mission, 17 % par les services départementaux d’incendie et de secours, 3 % par les collectivités territoriales et 2 % par la marine nationale. J’ai donc proposé, après avoir beaucoup échangé avec les bénévoles de la SNSM, le transfert de crédits plus importants en direction du budget de la défense nationale afin que cette dernière puisse participer davantage au sauvetage, pour lequel elle dispose de moyens et d’une formation qui lui sont propres.

Nous avons à rendre un avis budgétaire, et non pas à entrer dans des polémiques sur le fond. Il s’agit d’assurer des crédits suffisants pour que la mission soit effectuée dans des conditions correctes, sans mettre en danger la vie des bénévoles – car des décès sont déjà survenus lors d’interventions de la SNSM, laquelle ne pourra, du reste, se substituer éternellement à d’autres organismes. Étant moi-même bénévole depuis quarante ans dans de nombreuses structures associatives, je respecte le travail des bénévoles et je ne veux surtout pas qu’ils puissent considérer que nous ne prenons pas ce problème à bras-le-corps.

Monsieur Maquet, vous avez raison d’être très prudent pour ce qui concerne l’application des ZFE aux ports de commerce, où elle me semble en effet très prématurée aujourd’hui. Un gros travail a déjà été effectué dans ce domaine, comme d’ailleurs, Monsieur Pahun, dans celui de la décarbonation. De très nombreux dispositifs étant déjà en vigueur, il ne me paraissait pas prioritaire d’examiner dans le cadre de cet avis un mécanisme déjà assez avancé au niveau des travaux.

Pour ce qui concerne les ZFE, l’électrification des quais commence dans les ports de commerce. Marseille, que je connais en tant que conseillère régionale de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, est ainsi très avancée en la matière, tandis que d’autres ports, comme Saint-Nazaire, progressent également. En outre, l’application progressive de règles internationales relatives aux carburants permettra de décarboner notamment les gros porte-conteneurs, ce qui est très positif. Je suis, en revanche, moins sceptique que vous à propos des ports de plaisance, où il ne serait pas inintéressant de créer des ZFE, par exemple en Occitanie. Gardons-nous donc d’un scepticisme absolu en la matière.

Monsieur Taupiac, de nombreux marins-pêcheurs ne trouvent aujourd’hui pas d’autres repreneurs que leurs enfants, lorsque du moins ceux-ci veulent reprendre leur activité. Nous possédons, dans le domaine maritime, des filières d’excellence : outre l’École nationale supérieure maritime, des lycées et des formations professionnelles pourraient être bien mieux valorisés. Les métiers de la mer sont très mal connus. Il faut donc valoriser ces filières et les faire connaître dans les structures éducatives. L’activité de pêche ne doit pas être reprise seulement par des enfants de marins-pêcheurs. Un travail important a été engagé en ce sens, et c’est la raison pour laquelle j’ai insisté, durant les auditions, sur l’importance de la communication.

Par ailleurs, les femmes sont peu nombreuses dans ces filières, alors que les navires de pêche sont souvent équipés de technologies leur permettant d’accéder davantage à ces métiers qu’il y a vingt ans. Un important travail de pédagogie est, là aussi, nécessaire à l’intention des femmes. J’ajoute que les métiers de la mer connaissent, de manière générale, très peu de chômage, ce qui invite à les valoriser aussi en termes d’emploi.

La question de Mme Pochon relative à un sanctuaire marin ne relève pas du budget des affaires maritimes mais du programme « Paysages, eau et biodiversité ». Par ailleurs, il serait utile que le principe du sanctuaire marin ne concerne pas seulement les cétacés. Ainsi, un Marineland que je connais bien, dans le département des Alpes-Maritimes, dont je suis élue, abrite de nombreuses autres espèces qui ne devraient plus être présentes dans de tels parcs, comme les manchots.

Pour conclure, je tiens à souligner combien il importe de disposer d’une flotte souveraine. Bien des initiatives en la matière n’ont pas pu voir le jour, alors que cette question est plus que jamais d’actualité, comme l’ont montré récemment les crises sanitaires et humanitaires. Plus que jamais, nous avons besoin d’une flotte indépendante et souveraine, qui puisse assurer notre ravitaillement en cas de crise.

Mme Sophie Panonacle (RE). Je ferai deux remarques à l’intention de Mme la rapporteure. Tout d’abord, la SNSM est une association dédiée au sauvetage de toutes les vies humaines, sans aucune hiérarchie. Cet organisme ne s’auto-mandate pas et n’intervient que sur ordre de l’État, en particulier des centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (Cross), dans des situations d’urgence. Les bénévoles de la SNSM sauvent ainsi les migrants de la noyade, mais ils n’accompagnent jamais aucune embarcation, et cela ne deviendra jamais l’une de leurs missions. La SNSM n’est pas une ONG, et le sauvetage des migrants représente 30 % de ses interventions en Manche, parce que l’État a engagé les moyens nécessaires pour lui éviter de devoir effectuer trop d’interventions de ce type. Par ailleurs, le renouvellement de la flotte permet à la SNSM d’assurer ces sauvetages en toute sécurité.

Seconde remarque, pour ce qui concerne l’augmentation du nombre d’équivalents temps plein affectés à l’ENSM, je n’ai pas déposé d’amendement identique au vôtre, comme vous me l’aviez proposé, pour la seule raison que le secrétaire d’État chargé de la mer, le directeur de l’école et le Gouvernement sont en train de définir le nombre d’ETP nécessaires cette année et dans les années à venir pour répondre aux exigences du Fontenoy du maritime.

Mme Alexandra Masson, rapporteure pour avis. Je souscris pleinement à l’idée que la SNSM ne doit pas devenir une ONG – ce n’est du reste pas sa volonté. Son objet social est de sauver toute vie humaine en mer. Je suis cependant surprise du chiffre de 30 % que vous avancez pour la part des sauvetages de migrants dans le total des interventions de la SNSM en Manche, car il est de 85 % sur la station de Calais.

La SNSM souffre cependant d’un réel manque de moyens et, puisqu’il est ici question d’un avis budgétaire, il faudra bien ajouter un budget pour la SNSM ou faire en sorte que le Cross, puisque c’est lui qui la missionne, n’appelle pas qu’elle en priorité.

M. le président Jean-Marc Zulesi. L’examen des amendements et articles se rapportant à la mission « Écologie, développement et mobilité durable » aura lieu à l’issue de la présentation de l’ensemble des avis budgétaires.

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II.   Mercredi 19 octobre après-midi

Lors de sa réunion du mercredi 19 octobre 2022 après-midi, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a poursuivi l’examen des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » sur les rapports pour avis de M. David Valence sur les crédits relatifs aux transports terrestres et fluviaux, de M. Damien Adam sur les crédits relatifs aux transports aériens, de Mme Alexandra Masson sur les crédits relatifs aux affaires maritimes, de M. Stéphane Delautrette sur les crédits relatifs à la protection de l’environnement et la prévention des risques, de Mme Aude Luquet sur les crédits relatif aux paysages, à l’eau et à la biodiversité, de M. Antoine Armand sur les crédits relatifs à la transition énergétique et de Mme Anne Stambach-Terrenoir sur les crédits relatifs aux politiques de développement durable.

M. le président Jean-Marc Zulesi. Nous débutons par l’examen des amendements se rapportant aux transports.

Article 27 et état B : Crédits du budget général

Amendement II-CD58 de M. Gérard Leseul.

Mme Chantal Jourdan (SOC). Nous proposons d’accorder 250 millions d’euros supplémentaires à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France). Cet amendement est pour nous une manière de souligner la fragilité du modèle de financement des infrastructures de transport, lié à des recettes qui peuvent être incertaines – elles ont connu une baisse significative pendant la crise sanitaire, par exemple. Au-delà de l’augmentation ponctuelle que nous sollicitons, il importe donc de mener une réflexion plus globale sur la question.

M. David Valence, rapporteur pour avis (Transports terrestres et fluviaux). La secrétaire générale de l’Afit France, que j’ai auditionnée en vue de la rédaction du rapport, m’a confirmé que les recettes étaient sécurisées pour l’exercice budgétaire 2023 : d’une part, la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) est en forte hausse et, d’autre part, pour la première année, l’agence bénéficiera à plein de l’écocontribution sur le secteur aérien. Du reste, le projet de loi de finances (PLF) prévoit déjà une augmentation de 150 millions d’euros. Je ne vois donc pas pourquoi nous augmenterions les ressources de l’agence pour l’année prochaine, mis à part pour créer de nouveaux programmes. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD48 de M. Gérard Leseul.

Mme Chantal Jourdan (SOC). Le PDG de la SNCF a chiffré le besoin d’investissements supplémentaires à 100 milliards d’euros sur quinze ans pour atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050 et doubler la part modale du ferroviaire. Nous proposons, pour contribuer à l’objectif, d’allouer 3 milliards d’euros supplémentaires au transport ferroviaire l’année prochaine.

M. David Valence, rapporteur pour avis. Le contrat de performance prévoit de consacrer 2,8 milliards d’euros par an à la régénération du réseau, soit 1 milliard de plus par rapport à ce qui était dépensé en moyenne avant 2017. Je vous rejoins s’agissant de la nécessité de faire porter l’effort sur le réseau de fret – car l’amendement, tel qu’il est rédigé, concerne surtout cette partie –, mais SNCF Réseau ne serait pas en mesure, de toute façon, de conduire les travaux aussi vite que vous le proposez.

Par ailleurs, il convient d’attendre le rapport du Conseil d’orientation des infrastructures (COI), où siègent des personnalités de la société civile et des élus d’obédiences politiques différentes. Ce rapport sera remis au mois de décembre. Il permettra d’objectiver les besoins en matière de régénération du réseau, d’où découleront des choix politiques. À ce stade, avis défavorable.

Mme Chantal Jourdan (SOC). L’objet de l’amendement est aussi d’augmenter le nombre de trains de nuit et de prêter une attention particulière aux petites lignes.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD172 de M. Loïc Prud’homme.

M. Loïc Prud’homme (LFI-NUPES). Nous proposons nous aussi d’engager un plan de relance de 3 milliards d’euros en faveur du transport ferroviaire.

Vous me disiez ce matin, monsieur le rapporteur pour avis, que c’était une bonne chose que l’usager paye le service, mais cela ne fonctionne pas. Nous nous sommes croisés il y a quelques jours dans une réunion organisée par Régions de France. Nous avons constaté à cette occasion que les régions, autorités organisatrices de la mobilité, cherchent par tous les moyens ne serait-ce qu’à maintenir les lignes de trains régionaux – il ne s’agit même pas de les développer. En matière de financement, les régions sont dans l’impasse : la péréquation n’existe plus, l’usager ne peut pas payer entièrement le service à travers le prix du billet et le coût de l’énergie s’envole, ainsi d’ailleurs que celui des sillons – car les libéraux ont découpé la SNCF en morceaux. Que le COI élabore des trajectoires, c’est très bien, mais quid, concrètement, du financement sur le terrain ? Si l’on ne change pas de paradigme et de lecture de cette infrastructure structurante, on n’y arrivera pas. L’État doit s’engager réellement ; tout le reste, ce ne sont que des vœux pieux. Tel est l’objet de mon amendement.

M. David Valence, rapporteur pour avis. Avis défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment : il serait parfaitement irréaliste d’injecter 3 milliards d’euros du jour au lendemain à SNCF Réseau en espérant que la conduite de travaux suive immédiatement. L’effort de rattrapage en faveur de la régénération du réseau ferroviaire doit être phasé. C’est exactement ce qui est fait, comme le reconnaissent tous les experts du domaine, y compris certains qui siègent ici et qui se sont exprimés.

En ce qui concerne la participation de l’usager, je ne voudrais pas que mes propos soient déformés : je disais tout simplement qu’il me paraissait déraisonnable de proposer la gratuité à un moment où le financement des transports publics est en tension. Je n’ai jamais dit que l’usager devait supporter seul le coût des transports. Du reste, ce n’est pas le cas : quand on emprunte un moyen de transport collectif de niveau national, on ne paye que 32 % de son coût réel.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD49 de M. Gérard Leseul.

Mme Chantal Jourdan (SOC). Il s’agit, une fois encore, d’investir davantage dans le ferroviaire, en particulier pour le développement du fret – ici, à hauteur de 1,5 milliard d’euros.

M. David Valence, rapporteur pour avis. Dans mon rapport, je souligne la nécessité d’investir davantage dans la rénovation du réseau, mais l’état de celui-ci et le niveau de l’investissement ne sont pas les raisons principales de la désaffection envers le ferroviaire quand il s’agit du transport de fret. Ce qui est en cause, c’est la fiabilité de l’offre : d’une part, la capacité de SNCF Réseau à construire des sillons, c’est-à-dire à commercialiser des moyens de circuler sur le réseau, et, d’autre part, la régularité – dans l’ensemble, 75 % des trains de marchandises arrivent à l’heure dite, mais c’est souvent moins. C’est ce qui explique la faible attractivité du ferroviaire.

Au reste, depuis l’an dernier et le début du plan de relance du fret ferroviaire, des moyens supplémentaires ont déjà été accordés : 1 milliard d’euros sont déployés. C’est encore le cas de l’enveloppe proposée pour 2023.

Enfin, comme je l’expliquais à l’instant, les travaux doivent être phasés. Même si je comprends le sens de cet amendement, je ne peux que le considérer comme un amendement d’appel : le réalisme me conduit à émettre un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD65 de Mme Alexandra Masson.

Mme Alexandra Masson (RN). Cet amendement a pour objectif de soutenir le fret ferroviaire, qui est indispensable au développement de la multimodalité et au report de la route vers le rail. C’est un élément primordial de la transition écologique.

Nous sommes conscients du fait que la baisse de la dotation de l’action 45 est due à un déplacement de crédits. Toutefois, son niveau aurait dû être maintenu pour renforcer l’effort consenti en faveur du fret.

M. David Valence, rapporteur pour avis. Merci d’avoir précisé l’esprit de cet amendement. Effectivement, l’action que vous voulez renforcer connaît en apparence une diminution, mais cela est dû au fait que 65 millions d’euros sont désormais inscrits dans l’action 41. Les aides au fret sont stables en 2023. Elles atteignent même un niveau qui n’avait jamais été atteint avant 2021, à savoir 170 millions d’euros pour leurs différentes composantes. D’ailleurs, le véritable enjeu n’est pas tant d’augmenter cette ligne que de prolonger l’effort au-delà de 2024. C’est ce que souhaitent les acteurs du secteur, et c’est l’objet de l’amendement que j’ai déposé pour demander un rapport. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD142 de Mme Marie Pochon.

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). Cet amendement vise à investir 1,5 milliard d’euros pour construire un parc de matériel roulant de nuit et déployer, à l’horizon de 2030, un véritable réseau de trains de nuit en France et vers l’Europe.

Cela permettrait de répondre aux recommandations du rapport sur les trains d’équilibre du territoire (TET) publié en mai 2021. Celui-ci faisait état d’un besoin de 600 voitures et de 60 locomotives, pour un investissement total de 1,5 milliard d’euros, en vue de rendre leur attractivité aux trains de nuit.

Un tel investissement aurait également pour mérite de tirer profit de tous les avantages des trains de nuit, à savoir la diminution des émissions polluantes et de la consommation d’énergie, ainsi que la réduction des coûts pour les passagers, lesquels n’auront plus à payer une nuit d’hébergement en plus de leur trajet. Les voies existantes seraient utilisées avec le maximum d’efficacité possible, ce qui limiterait les investissements. En outre, selon les études, relancer les trains de nuit pourrait créer jusqu’à 130 000 emplois. Enfin, cela permettrait de respecter le droit de chacun à la mobilité, que ce soit pour travailler loin de chez soi ou pour s’évader et s’ouvrir au monde sans l’abîmer.

M. David Valence, rapporteur pour avis. Cet amendement et les suivants se ressemblent : on y retrouve le chiffre de 1,5 milliard d’euros.

Je suis très défavorable à cet amendement. D’une part, il est gagé sur l’action 41, qui vise justement à financer d’autres opérations de régénération ferroviaire. D’autre part, il me semble tout à fait déraisonnable de prélever 1,5 milliard d’euros pour l’investir en intégralité, sur un seul exercice budgétaire, dans les trains de nuit.

Je ne méconnais pas l’importance des trains de nuit, notamment pour les territoires très éloignés de Paris et isolés. Du reste, l’accueil a déjà été amélioré dans certaines gares, notamment à Briançon. Par ailleurs, le Gouvernement a déployé des investissements importants pour rénover quatre-vingt-treize voitures. Cela dit, les trains du quotidien doivent être notre priorité.

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). Les parlementaires doivent gager les dépenses qu’ils proposent, mais, comme je l’ai indiqué dans l’exposé sommaire de l’amendement, je propose au Gouvernement de lever ce gage.

Sur le fond, les trains de nuit peuvent également avoir une utilité en tant que trains du quotidien. Dans la Drôme, par exemple, il y a deux lignes de trains de nuit qui, si elles fonctionnaient correctement, pourraient être empruntées par de nombreux usagers pour effectuer des trajets entre Crest et Die.

Enfin, le chiffre de 1,5 milliard d’euros provient de l’association « Oui au train de nuit ! », qui travaille pour protéger ces lignes.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques II-CD34 de M. Guy Bricout, II-CD127 de M. Hubert Wulfranc et II-CD164 de Mme Sandrine Rousseau, amendement II-CD175 de M. Loïc Prud’homme, amendement II-CD45 de M. Gérard Leseul (discussion commune).

M. David Taupiac (LIOT). L’amendement II-CD34 vise à créer un nouveau fonds de 1,5 milliard d’euros pour créer un parc de matériel roulant de nuit et le déployer à l’horizon de 2030. Pour répondre à la question de M. le rapporteur pour avis, c’est la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM) qui a évalué les besoins en la matière à 600 véhicules et 60 locomotives, soit 1,5 milliard d’euros par an pendant dix ans.

Cette somme serait prélevée sur le programme « Infrastructures et services de transports », mais nous proposons que le Gouvernement lève le gage.

M. Hubert Wulfranc (GDR-NUPES). Au-delà de la question du transport, ce projet de relance des trains de nuit aurait une dimension industrielle majeure, ce qui permettrait de soutenir l’industrie ferroviaire française, qui se caractérise par son excellence.

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). Le chiffre de 1,5 milliard d’euros vient effectivement d’un rapport de mai 2021 sur les trains d’équilibre du territoire, qui avait été validé par le Gouvernement. Nous proposons quant à nous un amendement très raisonnable : il s’agirait d’investir 800 millions d’euros dans les trains de nuit, conformément aux annonces faites par le ministère des transports quelques mois après la publication du rapport. Nous verrons plus tard pour les 600 millions restants, qu’il faudra évidemment finir par investir.

Mme Chantal Jourdan (SOC). L’amendement II-CD45 poursuit les mêmes objectifs que les autres amendements de la série, à ceci près qu’il vise à investir 150 millions d’euros seulement cette année : le besoin global de 1,5 milliard d’euros serait ainsi satisfait en dix ans.

M. David Valence, rapporteur pour avis. Le rapport relatif aux TET évoquait effectivement, à propos des trains de nuit, un montant de 1,5 milliard d’euros qu’il s’agissait d’étaler sur dix ans. On n’engage pas un programme industriel de production de TET – que l’on appelle souvent « rames Intercités » – du jour au lendemain : il faut organiser la réponse industrielle. Il me semble donc irréaliste de penser que l’on pourrait injecter 1,5 milliard d’euros, 800 millions ou même 150 millions d’un seul coup pour provoquer un électrochoc dans la filière et obtenir le matériel l’année suivante.

Qu’il faille produire des trains Intercités pour répondre au besoin de développement des trains de nuit à un horizon de dix ans, c’est une évidence. Mais provoquer un embouteillage ou un mur d’investissements ne me paraît pas la solution, car cela supposera des arbitrages. Mieux vaut investir progressivement, comme cela a déjà été le cas – le plan de relance a permis de doter de sommes importantes la régénération des trains de nuit –, et prendre le temps de construire la démarche avec les producteurs de matériel.

Je ne nie pas que les trains de nuit puissent contribuer à proposer une desserte de proximité, comme l’a indiqué la distinguée députée de la Drôme, mais cet effet bénéfique ne suffira pas non plus à mettre en route la production de trains de nuit d’un jour à l’autre.

Enfin, gager ces amendements sur d’autres programmes ferroviaires structurants me paraît déraisonnable. Avis défavorable.

M. Loïc Prud’homme (LFI-NUPES). Monsieur le distingué président du Conseil d’orientation des infrastructures, puisque vous considérez qu’il est irresponsable de notre part de proposer 800 millions d’euros d’investissements pour la construction de 300 voitures, je voudrais savoir comment est programmée la production du matériel roulant pour les trains de nuit. Combien de voitures sortiront l’année prochaine de nos usines et combien seront mises en service : deux, quatre, dix ? Sur combien d’années le programme s’échelonnera-t-il ? En tant que chantres de la planification – vocable qui, d’ailleurs, est désormais largement en usage dans vos rangs, ce qui montre que nous avons progressé ensemble –, nous avons besoin de visibilité.

M. David Valence, rapporteur pour avis. Monsieur le distingué député de Gironde, le besoin de renouvellement du matériel, qu’il s’agisse des trains de nuit ou plus globalement des trains d’équilibre du territoire, sera assez important au cours des dix prochaines années. Pour ce qui concerne le détail, je vous propose que nous interrogions la DGITM par écrit et que nous communiquions ses réponses à l’ensemble des commissaires.

Je comprends l’intention dont procèdent ces amendements, mais le gage me paraît très préoccupant. Par ailleurs, il s’agit plutôt d’amendements d’appel que de demandes véritablement fondées.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement II-CD170 de Mme Maud Gatel.

M. Mickaël Cosson (Dem). Cet amendement vise à créer une enveloppe de 800 millions d’euros à l’horizon de 2030 afin de transformer les paroles en actes. Nous l’avons rédigé avec le collectif « Oui au train de nuit ! ».

M. David Valence, rapporteur pour avis. Fixer l’horizon à 2030 est beaucoup plus réaliste. Vous saluerez donc de ma part la distinguée députée de Paris, Maud Gatel, première signataire de cet amendement. Je vous demanderai néanmoins de bien vouloir le retirer, pour les raisons que je viens d’exposer.

Quoi qu’il en soit, j’ai bien compris que la commission était très vigilante à la question des trains de nuit. Croyez bien que je m’en ferai l’écho. Des investissements dans ce domaine pourront être envisagés dans le cadre de la programmation pluriannuelle. Pour vous donner un ordre de grandeur, l’Afit France consacre 200 millions d’euros par an au renouvellement du matériel roulant des TET.

M. Pierre Vatin (LR). Votre remarque me conduit à évoquer la suppression des trains en journée. La SNCF, interrogée sur ce point, ne répond pas.

M. David Valence, rapporteur pour avis. Faites-vous référence à un mouvement de grève récent, ou bien parlez-vous des TET en général ?

M. Pierre Vatin (LR). Je fais référence au fait que la SNCF a oublié de former des conducteurs, ce qui entraîne la suppression de certains trains. Dans la région Hauts-de-France, 140 TER vont ainsi disparaître à compter du 24 octobre.

L’amendement est retiré.


Amendement II-CD174 de M. Loïc Prud’homme.

M. Loïc Prud’homme (LFI-NUPES). À travers cet amendement, nous souhaitons évoquer le grand projet du Sud-Ouest (GPSO), qui consiste à créer deux nouvelles lignes à grande vitesse (LGV) : l’une entre Bordeaux et Toulouse, l’autre entre Bordeaux et Dax. Nous proposons que l’État se désengage financièrement du projet, au profit des trains du quotidien, notamment de la rénovation des lignes de trains express régionaux.

Les deux projets en question sont pharaoniques, ne répondent pas à un besoin des populations et la quasi-totalité des élus y sont opposés. La ligne Bordeaux-Toulouse coûtera 14 milliards d’euros et fera gagner environ une minute de temps de trajet par milliard d’euros dépensé, ce qui est quand même un peu cher. Qui plus est, le projet entraînera la destruction de plusieurs milliers d’hectares de terres agricoles et de milieux naturels. Quant à la seconde branche, qui doit relier Bordeaux à Dax, cette ligne serait parallèle à une ligne existante. Là encore, elle n’est d’aucune utilité pour la population. Le seul argument avancé par le conseil régional, en particulier le vice-président en charge des transports, consiste à dire qu’il n’y a aucune raison pour que les Landes n’aient pas de LGV alors qu’il y en a ailleurs. Cela me paraît un peu court quand il s’agit d’engager 4 milliards d’euros.

L’amendement vise donc à réorienter massivement les financements vers d’autres lignes plus intéressantes. Je pense notamment à la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse (Polt), qui a, en plus, l’avantage de désenclaver le centre de la France.

M. David Valence, rapporteur pour avis. L’amendement relève de l’ordre du symbole dans la mesure où rien, dans la mission, ne concerne spécifiquement ce projet d’investissement.

Nous avons eu l’occasion d’évoquer ensemble le projet en question. Des discussions sont en cours et on est en droit, en effet, de se demander si le gain de temps justifie la dépense. Quoi qu’il en soit, l’amendement n’a pas sa place dans un débat budgétaire. Avis défavorable.

M. Loïc Prud’homme (LFI-NUPES). Il est bien dommage que vous trouviez l’amendement déplacé dans cette discussion budgétaire, car nous parlons d’écologie. Or le projet en question est parfaitement antiécologique.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD66 de Mme Alexandra Masson.

Mme Alexandra Masson (RN). Il est indispensable que l’État renforce les moyens de transport que les Français utilisent chaque jour pour aller travailler, en particulier les lignes de TER. Or 264 millions d’euros ont été attribués aux projets de lignes à grande vitesse, dont 127 millions d’euros pour la seule ligne Lyon-Turin, contre 93 millions d’euros pour les transports du quotidien.

Le présent amendement vise à augmenter les crédits engagés pour les infrastructures du quotidien en affectant 50 millions d’euros supplémentaires à l’action 41 « Ferroviaire » du programme 203. En compensation, nous réduisons de 50 millions d’euros les crédits de l’action 07 « Pilotage, support, audit et évaluations » du programme 217.

M. David Valence, rapporteur pour avis. Plus de 70 % des crédits de l’action 41 sont consacrés aux TER et à leur exploitation, notamment à travers la redevance d’accès, qui, en ce qui concerne les régions, est acquittée par l’État – ce qui n’est pas le cas en Île-de-France. Par ailleurs, l’État se mobilise aux côtés des régions pour le développement du capacitaire de ces lignes, notamment à travers les contrats de plan État-région (CPER). L’Afit France soutient ces investissements. Enfin, l’État s’est engagé à respecter une trajectoire pluriannuelle incluant les petites lignes ferroviaires, avec les accords relatifs aux lignes de desserte fine du territoire. Avis défavorable, même si je comprends votre préoccupation.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD173 de Mme Alma Dufour.

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). Cet amendement d’appel vise à alerter, une fois de plus, sur le manque d’investissements du Gouvernement dans les petites lignes ferroviaires. Alors que 90 % environ des Français habitent près d’une petite ligne ferroviaire et que nous traversons une crise énergétique et une crise écologique sans précédent, le ferroviaire pourrait apporter une solution. Cela suppose toutefois d’investir davantage, car l’âge moyen des lignes du réseau est de 29 ans, et même de 36,7 ans pour les petites lignes, ce qui est préoccupant.

M. David Valence, rapporteur pour avis. Je comprends votre intention, mais je rappellerai quelques éléments concernant les lignes de desserte fine du territoire qui montrent que le Gouvernement agit.

Le quinquennat précédent s’est caractérisé par une mobilisation sur la question. D’abord, une évaluation de l’état de ces lignes a été demandée au préfet Philizot. Ensuite, la classification a évolué. En effet, la dénomination « petites lignes » recouvre des situations très hétérogènes : certaines de ces lignes, très fréquentées, sont classées UIC 7 à 9 – en fonction du nombre de trains circulant sur la voie –, d’autres le sont moyennement, voire pas du tout. Certaines sont même suspendues, parfois depuis quelques années, comme la ligne Angoulême-Limoges.

Le Gouvernement a défini avec les régions un classement en trois catégories. La première rassemble les lignes reprises à 100 % en financement par SNCF Réseau, traitées comme des lignes UIC 1 à 6. C’était déjà le cas, par exemple, pour la ligne Rennes-Saint-Malo, en Bretagne, dans laquelle on investissait comme dans une ligne du réseau structurant. La deuxième catégorie est celle des lignes dans lesquelles l’État investit aux côtés des régions dans le cadre des CPER. La troisième concerne les lignes pour lesquelles les régions choisissent de se mobiliser à 100 %, parce que leur intérêt est surtout local, et demandent la délégation de gestion – ou pas, d’ailleurs. Les accords ont bien avancé.

La question des petites lignes a donc été prise à bras-le-corps par le Gouvernement. L’État leur a consacré 550 millions d’euros depuis février 2020, date du premier accord – signé dans mon département des Vosges –, dont 300 millions d’euros au titre du plan de relance. Les financements consacrés aux petites lignes ont triplé depuis 2020. Ces lignes seront de nouveau présentes dans les CPER 2023-2027. La question se résout donc en dialogue étroit avec les collectivités territoriales, qui connaissent parfaitement les besoins de mobilité dans leur territoire. Avis défavorable.

M. Loïc Prud’homme (LFI-NUPES). Il faut en effet prendre la question des petites lignes à bras-le-corps. Mes collègues et moi-même aimerions le faire avec la même expertise que vous : auriez-vous donc une photocopie du rapport Philizot, que vous citez ?

M. David Valence, rapporteur pour avis. Les bonnes feuilles en ont été publiées depuis longtemps dans la presse…

M. Loïc Prud’homme (LFI-NUPES). Les bonnes oui, mais les autres ?

M. David Valence, rapporteur pour avis. En examinant concrètement les accords signés région par région, on réussit à avoir une idée précise de l’état du réseau. Pour le reste, ce n’est pas à moi de parler de ce rapport.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques II-CD26 de M. Guy Bricout et II-CD180 de Mme Alma Dufour, amendement II-CD51 de M. Gérard Leseul (discussion commune).

M. David Taupiac (LIOT). L’amendement II-CD26 vise à instaurer un « ticket climat » permettant d’accéder à l’ensemble de l’offre de transports collectifs. Le tarif serait de 60 euros pour les actifs, la moitié étant prise en charge par l’employeur, et de 30 euros pour les autres.

M. Gabriel Amard (LFI-NUPES). Pour lutter contre la pollution dans les aires urbaines, l’amendement II-CD180 a pour objet d’encourager le report modal au profit des transports en commun en instituant une tarification unique symbolique – le coût résiduel pour l’usager serait de 1 euro par jour. L’expérience récente de tarification unique pour les trains et les transports du quotidien en Allemagne, grâce à laquelle 52 millions de billets ont été vendus, devrait nous inspirer.

Mme Chantal Jourdan (SOC). Issu du plan pour une sobriété solidaire présenté récemment par le groupe Socialistes et apparentés, l’amendement II-CD51 tend à expérimenter, jusqu’à la fin de l’hiver, un abonnement « mobilité climat » au tarif de 9 euros par mois, à l’instar de ce qu’ont instauré nos voisins allemands, espagnols et autrichiens.

M. David Valence, rapporteur pour avis. Ces amendements ont un double objectif. D’une part, la simplicité pour les usagers ; cette demande, qui ne relève pas d’un débat budgétaire, mérite d’être entendue dans le dialogue entre l’État, la SNCF et les autorités organisatrices de la mobilité.

D’autre part, les amendements cherchent à diminuer la part payée par l’usager afin d’inciter à utiliser les transports en commun. Or l’expérience allemande, qui n’a duré que le temps de l’été, montre que le report modal a été très faible – 10 %. On a plutôt observé un effet d’aubaine au profit de ceux qui se déplaçaient déjà en train.

En outre, tout le monde n’a pas un train en bas de chez soi. Vous risquez d’accentuer les inégalités au détriment des habitants des zones rurales très peu denses en subventionnant davantage un secteur qui est déjà financé à 68 % par le contribuable au plan national.

Enfin, la première condition de l’attractivité du transport public, c’est l’offre et sa densité. Les moyens disponibles doivent d’abord servir à faire rouler plus de trains.

Avis défavorable.

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). Lorsque nous l’avons auditionné, le ministre délégué chargé des transports, M. Clément Beaune, a jugé que le billet à 9 euros en Allemagne était une mesure socialement efficace mais très onéreuse et dont le coût carbone était très élevé.

L’utilité sociale devrait suffire à justifier l’instauration de la tarification unique en France. Mais lors de la formation destinée aux députés sur les enjeux climatiques, les intervenants ont rappelé qu’il sera plus coûteux de réparer les dégâts causés par le réchauffement climatique que d’investir en amont, ce que propose l’amendement.

M. Guy Bricout (LIOT). Outre son utilité sociale et sa simplicité, une telle mesure peut faire découvrir le train à certains et leur donner l’envie de l’adopter pour leurs déplacements.

La tarification n’est pas le seul frein à l’usage du train. Je citerai la sécurité autour des gares, l’intermodalité, ou encore le cadencement. Que trouve-t-on dans le budget pour faire aimer le train ?

M. Gabriel Amard (LFI-NUPES). Les expériences de gratuité des transports, à Aubagne ou à Châteauroux, montrent qu’une offre tarifaire attractive conduit à l’abandon de la deuxième voiture du foyer.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement II-CD50 de M. Gérard Leseul.

M. Stéphane Delautrette (SOC). Cet amendement vise à augmenter les crédits dédiés aux voies navigables. Avec 8 500 kilomètres de voies navigables, la France possède le plus long réseau d’Europe, qui en compte 38 000. Il nous paraît opportun d’exploiter un tel potentiel.

M. David Valence, rapporteur pour avis. Le rythme d’investissement dans le réseau fluvial s’est accéléré depuis 2017. Il est prévu d’y consacrer 127 millions d’euros dans la dotation de l’Afit France et le plan de relance a octroyé à Voies navigables de France (VNF) une enveloppe supplémentaire de 175 millions d’euros. Les autres ressources de VNF sont aussi dynamiques. J’émets donc un avis défavorable à la hausse des crédits d’investissement qui me semblent suffisants pour tenir la trajectoire de régénération et de modernisation du réseau fluvial.

En revanche, je vous rejoins sur le potentiel extraordinaire de la voie d’eau en France, notamment pour la logistique urbaine.

J’en conviens aussi, nous devons adresser un message rassurant à l’opérateur s’agissant des effectifs qui ont subi une forte diminution ces dernières années. J’ai déposé un amendement visant à garantir la stabilité du plafond d’emplois de VNF.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD59 de M. Dominique Potier.

Mme Chantal Jourdan (SOC). Il s’agit d’allouer 60 millions d'euros à l’aménagement d’un domaine public fluvial à énergies positives. Ce serait la première étape d’une programmation pluriannuelle permettant à VNF d'optimiser son potentiel de production d'énergies – hydroélectrique, géothermique, éolienne.

M. David Valence, rapporteur pour avis. Cet amendement est très intéressant. Je demande son retrait afin que nous puissions y travailler ensemble. Je crois savoir que l’auteur de l’amendement a récemment évoqué le sujet avec le ministre délégué chargé des transports.

L’utilisation de la chute d’eau par nos ouvrages hydrauliques est encore insuffisante et des investissements supplémentaires sont sans doute nécessaires. L’utilisation des délaissés de voies navigables, sauf intérêt logistique, par exemple pour l’installation de panneaux photovoltaïques, est une piste intéressante. La réflexion de VNF en la matière n’est pas encore mature mais il faut l’encourager.

Mme Chantal Jourdan (SOC). Nous vous remercions pour votre appréciation positive mais nous maintenons l’amendement.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CD64 de Mme Alexandra Masson.

Mme Alexandra Masson. La France compte encore trop de canaux de petit gabarit, inadaptés aux nouveaux bateaux de transport fluvial. Cette situation est d’autant plus problématique que le transport fluvial est particulièrement bien développé dans d’autres pays européens comme la Belgique ou les Pays-Bas, qui accueillent les ports du Range Nord. La construction du canal Seine-Nord Europe représente un important effort de modernisation, attendu de longue date, qui favorisera le dynamisme de l’hinterland du port de Dunkerque. Il profitera également aux ports du Range Nord. Il est donc indispensable de renforcer les infrastructures fluviales de l’axe Seine pour garantir leur compétitivité et cela, pas seulement par la construction de quelques écluses mais par des travaux importants.

Pour ce faire, l’amendement vise à augmenter de 25 millions d’euros les crédits de VNF, soit environ la moitié de la somme actuellement consacrée aux investissements de modernisation.

M. David Valence, rapporteur pour avis. Je partage votre préoccupation. L’axe Seine est en effet stratégique pour le report modal, en particulier pour les marchandises. Il faut l’arrimer au corridor entre mer du Nord et Méditerranée, principal corridor européen de transport de marchandises.

Des crédits devront être mobilisés à l’avenir pour passer en grand gabarit la Petite Seine entre Nogent-sur-Seine et Bray-sur-Seine dans le département de l’Aube.

Je suis toutefois défavorable à ce que je considère comme un amendement d’appel, sachant que VNF bénéficie déjà de moyens supplémentaires pour 2023.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD181 de M. Loïc Prud’homme.

M. Loïc Prud’homme (LFI-NUPES). Il s’agit encore d’augmenter les crédits alloués à VNF afin d’empêcher la suppression programmée de 40 équivalents temps plein (ETP). Il est temps d’arrêter l’hémorragie – plus de 400 ETP ont disparu depuis 2017.

VNF gère le réseau de voies navigables de l’État, qui est constitué de 6 700 kilomètres de voies navigables, connu sous le nom de réseau Freycinet. VNF gère aussi un volume d’eau potable non négligeable pour d’autres usages que la navigation.

Mon amendement est bien moins coûteux que celui de Mme Masson – 2 millions d’euros – et plus utile. Les ETP servent à entretenir le réseau Freycinet alors que le canal Seine-Nord Europe pose de nombreux soucis parmi lesquels la possibilité donnée aux mariniers belges et néerlandais de naviguer sur notre territoire au détriment de notre flotte nationale.

Je me surprends à présenter un amendement aussi raisonnable.

M. David Valence, rapporteur pour avis. Je partage votre constat sur l’évolution des effectifs. C’est la raison pour laquelle j’ai déposé un amendement sur le sujet.

Les ressources de VNF lui permettent de financer les 40 ETP nécessaires à la stabilité des effectifs sans dotation supplémentaire. L’opérateur me l’a confirmé à plusieurs reprises.

M. Guy Bricout (LIOT). Je suis favorable à l’amendement.

J’ai constaté que VNF n’hésite pas à solliciter les collectivités lorsque ses moyens sont insuffisants. La remise en navigation du canal de la Sambre à l’Oise a ainsi fait l’objet d’un accord financier avec les diverses collectivités concernées. Donnons à VNF les moyens d’assurer ses missions.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-CD133 de Mme Marie Pochon.

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). Cet amendement vise à augmenter de 350 millions d’euros le budget alloué au plan Vélo pour l’année 2023. En 2019, 80 % des déplacements quotidiens dans les territoires ruraux s’effectuaient en voiture, ce qui n’est pas sans répercussion sur la santé, la qualité de vie et le bilan carbone.

Si le vélo en milieu rural est parfois une réalité touristique, son usage au quotidien est peu développé en raison de l’absence d’aménagements de nature à garantir la sécurité des cyclistes mais aussi des longues distances entre les lieux de vie et les activités. Pourtant, selon l’Insee, entre 20 % et 30 % de nos déplacements portent sur une distance entre 2 et 10 kilomètres et peuvent donc être faits à vélo.

Le fait de continuer à soutenir le vélo en zone urbaine contribue à creuser un gouffre entre les urbains et les ruraux. Toutefois, la pratique augmente en zone rurale et c’est une bonne nouvelle.

Bien que les efforts des dernières années méritent d’être soulignés, les investissements actuels ne permettent pas d’atteindre l’objectif de 9 % de part modale. Avec un budget moyen de 8 euros par an et par habitant, la part modale du vélo représenterait 3,5 % en 2030 avec de très fortes disparités territoriales. Il nous faut donc multiplier l’effort d’investissement par dix.

M. David Valence, rapporteur pour avis. Nous avons fêté les trois ans du plan Vélo il y a quelques jours. Il était prévu initialement d’y consacrer 50 millions d’euros par an, une somme qui, contre toute attente, a été consommée rapidement.

Le nouveau plan annoncé en septembre par la Première ministre est doté de 250 millions d’euros pour la seule année 2023, soit une multiplication par cinq. L’ambition est donc forte.

Aujourd’hui, la priorité doit être le ciblage des crédits. Je souhaite que la moitié des 200 millions d’euros consacrés aux infrastructures soient fléchés, selon des modalités autres que l’appel à projets dont on sait qu’il est défavorable aux petites collectivités, vers les collectivités de moins de 100 000 habitants du bloc communal.

Nous devons veiller à faire du vélo le grand moyen de déplacement populaire rural et périurbain qu’il était il y a encore trente ou quarante ans, avant qu’il ne devienne l’apanage des grandes villes.

Avis défavorable.

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). Le ciblage est en effet important. Il n’empêche que les efforts financiers ne sont pas suffisants pour atteindre l’objectif fixé par le Gouvernement lui-même.

L’amendement reprend une proposition de la Convention citoyenne pour le climat, actualisée par les conclusions de l’étude économique de la direction générale des entreprises (DGE) et de l’Agence de la transition écologique (Ademe).

M. Vincent Thiébaut (HOR). La loi « climat et résilience », entre autres, a imposé aux collectivités des obligations en la matière – aménagement des parkings et des gares. Le développement de la part modale du vélo est aussi un choix de politique locale. Tout ne relève pas de l’État.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD46 de M. Gérard Leseul.

M. Stéphane Delautrette (SOC). À la faveur de la crise sanitaire, le vélo s’est installé dans la pratique de nos concitoyens, d’où la nécessité de renforcer le soutien à son développement. Tel est l’est l’objet de l’amendement.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD176 de M. Loïc Prud’homme.

M. Gabriel Amard (LFI-NUPES). Je reprends à mon compte ce qui a été dit. Le ciblage sur le bloc communal accélérera certainement le développement de l’usage du vélo dans la vie quotidienne.

L’amendement, suggéré par la Fédération française des usagers de bicyclettes (FUB), vise à octroyer 235 millions d’euros supplémentaires au plan Vélo.

En trois ans, 83 % de l’enveloppe initiale, pourtant abondée par le plan de relance, a été consommée.

Il est nécessaire de rehausser les crédits pour tenir les objectifs mais aussi répondre aux sollicitations du bloc communal.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD57 de M. Gérard Leseul.

Mme Chantal Jourdan (SOC). Cet amendement a pour objet de financer les réseaux associatifs impliqués dans le développement du vélo.

Les réseaux associatifs manquent aujourd’hui de ressources pour passer le cap de la professionnalisation et essaimer dans d’autres territoires. Parfois seules les associations acceptent de fournir un service aux habitants, notamment dans les zones rurales où le secteur lucratif ne trouve pas de modèle économique. Les services qu’elles offrent, tels que l’auto-réparation ou les vélo-écoles, contribuent largement à l’intérêt général et à la vie locale.

Pourraient être financées, d’une part, la création d’un fonds d’essaimage et de développement des projets associatifs en faveur du vélo, dans un souci d’aménagement du territoire et de présence dans les zones blanches de la mobilité ou à destination des publics les plus précaires face à la crise énergétique et les plus réticents à changer de comportement ; d’autre part, la structuration à l’échelon régional des associations d’usagers, sur le modèle des conventions passées entre l’Ademe, les régions et les collectivités en Île-de-France et en Pays de la Loire.

M. David Valence, rapporteur pour avis. Avis défavorable au nom de la subsidiarité. Le meilleur niveau pour accompagner financièrement les associations est celui des régions ou des intercommunalités. Ce n’est pas à l’État de distribuer des subventions de fonctionnement à ces associations.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD177 de Mme Alma Dufour.

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). Il s’agit d’un amendement d’appel et de bon sens visant à étendre les aides à l’acquisition de vélos à ceux issus du réemploi.

Un changement de paradigme économique est nécessaire : nous devons abandonner la vision capitaliste linéaire dans laquelle on puise dans les ressources à l’infini alors que notre environnement est fini. C’est la fin, si elle a commencé un jour, de l’abondance. Il nous faut donc entrer dans l’ère de l’économie circulaire.

M. David Valence, rapporteur pour avis. Je partage l’esprit, d’autant que ma circonscription accueille une junior entreprise qui recycle des vélos électriques de La Poste.

Pour que l’amendement puisse s’appliquer, il faudrait au préalable modifier l’article D. 251-2 du code de l’énergie qui est de nature réglementaire.

Je vous invite à retirer l’amendement et à le redéposer pour la séance afin que le Gouvernement se prononce sur la possibilité de modifier ledit article.

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). Je note votre suggestion mais je maintiens l’amendement malgré tout.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD184 de Mme Alma Dufour.

M. Loïc Prud’homme (LFI-NUPES). Cet amendement porte sur le covoiturage. J’ai une question pour vous qui s’y rapporte : MM. Emmanuel Macron et Jean Castex sont dans une voiture, ils s’arrêtent devant la RATP, qui descend ? Apparemment, c’est Jean Castex. Question subsidiaire, qui prend le métro pour aller jusqu’à l’Afit France pour remplacer Jean Castex dont nous avions approuvé la nomination il y a quelques semaines ?

M. David Valence, rapporteur pour avis. Votre énigme est moins difficile à résoudre que celle du sphinx.

Quant à l’amendement, je vous invite à le retirer et à le déposer pour la séance afin d’interroger le Gouvernement sur l’état d’avancement de la stratégie nationale de développement du covoiturage.

M. Loïc Prud’homme (LFI-NUPES). Nous maintenons l’amendement et nous examinerons d’ici à la séance les travaux sur la stratégie que vous mentionnez pour l’adapter si besoin.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD220 de Mme Aurélie Trouvé.

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). Cet amendement tend à étendre aux associations d’intervention sociale d’urgence le bouclier tarifaire.

Selon l’Insee, près de 8 millions de personnes ont recours à l'aide alimentaire. Or les associations sont aussi victimes de la crise énergétique par le biais des dépenses logistiques et de transport.

Nous devons soutenir ces associations qui pallient les défaillances de l’État pour venir en aide aux personnes en difficulté.

M. David Valence, rapporteur pour avis. Je ne me prononce pas sur le fond ; sur la forme, l’amendement n’a aucun rapport avec la mission que nous examinons.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD183 de Mme Alma Dufour.

M. Loïc Prud’homme (LFI-NUPES). Il s’agit d’un amendement d’appel ayant pour objet de financer un plan de reconversion pour les salariés des entreprises exploitant des jets privés.

Nous sommes favorables à l’interdiction de la circulation des jets privés dans l’espace aérien français, à l’exception – vous connaissez notre sens de la mesure – des vols d’évacuation sanitaire, de ceux qui concernent la sécurité nationale ou encore des vols militaires.

Alors que le Gouvernement appelle les Français à la sobriété énergétique, les ultra‑riches sont épargnés et continuent d’afficher en toute impunité un bilan carbone désastreux. Le symbole de ce mode de vie est bien sûr le jet privé.

D’après un rapport de l’organisation non gouvernementale Transport et Environnement, entre 2005 et 2019, les émissions de CO2 des jets privés en Europe ont augmenté de près d’un tiers ; l’usage d’un jet privé est entre cinq à quatorze fois plus polluant qu’un vol réalisé sur une ligne commerciale et cinquante fois plus polluant qu’un trajet en train.

En France, un avion sur dix qui décolle est un jet privé et près de 40 % des vols se feraient à vide. En 2019, ils ont émis près de 400 kilotonnes de CO2, soit autant que 180 000 voitures thermiques.

Cette situation est d’autant plus scandaleuse que des liaisons ferroviaires à grande vitesse existent sur 70 à 80 % des dix itinéraires de jets privés les plus populaires de notre pays.

Les salariés du secteur seraient certainement heureux de se reconvertir dans le ferroviaire ou dans une filière du vélo français sur lequel nous avons malheureusement perdu notre savoir-faire.

M. Damien Adam, rapporteur pour avis. Je salue votre cohérence puisque vous assortissez votre mesure d’interdiction des jets privés de la reconversion des salariés qui en sont affectés.

Nous avons débattu de ce sujet ce matin, et je l’évoque également dans mon avis budgétaire : je ne suis pas favorable à une interdiction des jets privés mais à une plus grande régulation de ce secteur. Je vous rejoins cependant sur le fait que les jets privés posent une question plus symbolique que véritablement écologique, qui concerne notre capacité à embarquer l’ensemble de la société dans la transition énergétique et écologique.

Pour ma part, je propose dans mon avis budgétaire une série de mesures visant à mieux encadrer l’usage des jets privés : l’augmentation de la fiscalité sur le kérosène et les billets ; la fixation d’un objectif d’incorporation de 50 % de carburants durables, contre 1 % actuellement pour les avions de ligne ; une plus grande transparence et une meilleure justification du recours aux jets privés par les entreprises.

Je donne à votre amendement un avis défavorable, mais j’espère que les propositions que je formule dans mon rapport recueilleront votre soutien.

La commission rejette l’amendement.

Article 28 et état C : Crédits des budgets annexes

La commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits du budget annexe Contrôle et exploitation aériens non modifiés.

Après l’article 42

Amendement II-CD182 de M. Loïc Prud’homme.

M. Loïc Prud’homme (LFI-NUPES). Nous demandons au Gouvernement de nous remettre un rapport sur le fonctionnement de l’Afit France.

Un rapport de la Cour des comptes dresse à ce sujet des constats alarmants que vous ne partagez pas tous ici – mais je ne désespère pas de vous en convaincre. L’Afit France est un opérateur de l’État dont le rôle est limité à celui de caisse de financement. M. Valence m’a répondu ce matin qu’elle permettait de sécuriser des financements sur le long terme. Dans ce cas, pourquoi ne pas étendre ce mode de fonctionnement à l’ensemble du budget de l’État ? Nous voterions le budget une fois tous les dix ans, ce qui permettrait de sécuriser des trajectoires sans nous demander notre avis !

Vous voyez donc tout l’amour que je porte à l’Afit France. Je me demande bien qui pourra prendre la tête de cette agence dans les prochaines semaines pour décider enfin sa suppression définitive.

M. David Valence, rapporteur pour avis. Une chose est sûre : ce ne sera pas un parlementaire, pour des raisons juridiques évidentes.

Comment les investissements en infrastructures sont-ils décidés et programmés dans notre pays ? Une liste d’opérations considérées comme prioritaires figure dans la loi d’orientation des mobilités (LOM) adoptée par le Parlement en 2019, qui fait office de loi de programmation même si elle ne prévoit pas de crédits. Cette sélection de programmes prioritaires a été décidée sur la base des analyses effectuées en 2018 par le COI, que présidait à l’époque Philippe Duron. La LOM prévoit une révision de ces objectifs et une actualisation de cette liste de projets, un nouveau rapport du COI devant être remis avant le mois de mai 2023. Entre-temps, le Gouvernement a introduit dans la liste un certain nombre de nouveaux projets, comme celui du transport en site propre de l’Ouest strasbourgeois (TSPO). Si l’Afit France déploie effectivement des crédits, ce n’est pas elle qui prend les décisions, mais bien le Parlement, lorsqu’il a voté la liste des projets considérés comme prioritaires, et le Gouvernement, lorsqu’il a complété cette dernière. On peut donc considérer l’Afit France comme un objet politique qui perçoit des recettes affectées – je ne crois pas que vous soyez hostile à ce principe, en tout cas ce n’est pas l’impression que j’ai eue lorsque je vous ai entendu débattre de la redevance audiovisuelle –, spécifiquement consacrées à des infrastructures de transport dans le cadre d’un programme d’investissements voté par le Parlement et corrigé par le Gouvernement. Je ne vois pas où est le problème de contrôle démocratique.

M. Loïc Prud’homme (LFI-NUPES). Pour ma part, je vois bien un problème de contrôle démocratique. Lorsqu’un nouveau projet est introduit par le Gouvernement, il bénéficie de fait des recettes affectées sans que le Parlement se soit prononcé. J’appelle cela le fait du prince. Nous devons décider des projets à financer et de la manière dont les trajectoires peuvent être corrigées en cours de route. Aujourd’hui, seul le Gouvernement peut le faire : c’est tout de même un petit problème. La crise climatique et énergétique nécessite un pilotage plus fin et des corrections de trajectoires bien plus fortes et rapides que ne le permet ce mode de fonctionnement.

M. David Valence, rapporteur pour avis. C’est un problème de contrôle du Gouvernement, plus que de l’Afit France. Je comprends votre obsession pour cet opérateur – cela change de vos discours habituels dans l’hémicycle – mais je ne peux être favorable à votre amendement. Il est utile d’avoir une agence de financement des infrastructures. D’autres pays européens procèdent d’ailleurs comme la France.

La commission rejette l’amendement.

Article additionnel après l’article 42 : Remise d’un rapport du Gouvernement sur la prolongation jusqu’en 2027 des aides à l’exploitation des services de fret ferroviaire

Amendement II-CD242 de M. David Valence.

M. David Valence, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à demander au Gouvernement un rapport sur la prolongation des aides à l’exploitation des services de fret ferroviaire jusqu’en 2027. Il s’agit d’obtenir du Gouvernement qu’il s’exprime publiquement sur cette reconduction qui était plus ou moins inscrite, en pointillé, dans la loi de programmation des finances publiques dont beaucoup d’articles ont malheureusement été rejetés par la coalition des oppositions. Une confirmation est attendue par l’ensemble des acteurs de la filière.

La commission adopte l’amendement.

Suspension de la réunion de seize heures trente-cinq à dix-huit heures quinze.

M. le président Jean-Marc Zulesi. Nous poursuivons l’examen des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». Nous abordons maintenant d’autres thématiques : protection de l’environnement et prévention des risques ; paysages, eau et biodiversité ; transition énergétique ; politiques de développement durable.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur pour avis (Protection de l’environnement et prévention des risques). Le champ du programme 181 est particulièrement large : il couvre la prévention de nombreux risques, qu’ils soient naturels, technologiques, industriels, nucléaires ou miniers. Ce programme apporte également un soutien à l’économie circulaire et au développement des énergies renouvelables à travers le financement de l’Ademe. Après une présentation des crédits du programme 181, mon intervention portera plus particulièrement sur le fonds pour l’économie circulaire et le fonds chaleur gérés par l’Ademe.

En 2023, le programme 181 sera doté de 1 141 millions d’euros d’autorisations d’engagement (AE) et de 1 143 millions d’euros de crédits de paiement (CP), soit une augmentation de 7,1 % en AE et de 6,6 % en CP par rapport à 2022. Cette augmentation était attendue et malheureusement rendue nécessaire par le changement climatique, qui tend à accroître les risques, notamment naturels. En outre, la densification des populations dans des zones exposées à de nombreux aléas augmente les coûts humains et économiques des catastrophes naturelles et technologiques.

La direction générale de la prévention des risques (DGPR), dont je tiens à saluer l’action, est chargée d’identifier, de prévoir et de prévenir ces différents risques. Si l’on déplore généralement peu d’accidents industriels graves en France, les risques n’en demeurent pas moins présents, comme nous l’a rappelé le grave accident industriel survenu en septembre 2019 au sein de l’entreprise Lubrizol de Rouen. Tout récemment, en août 2022, l’explosion d’une usine classée Seveso à Bergerac nous a rappelé la nécessité de contrôler ce type de site.

Je voudrais relayer des inquiétudes concernant la prévention des risques industriels et technologiques.

L’Institut national de l’environnement industriel et des risques (Ineris), qui joue un rôle central dans la connaissance de ces risques, fait face à une baisse régulière de ses moyens depuis plusieurs années. L’institut a été contraint de revoir son organisation en 2021 pour s’adapter à la baisse des subventions et des emplois publics. Cette évolution pourrait modifier, à terme, l’équilibre des recettes de l’Ineris en faveur du secteur privé.

Le risque nucléaire reste également d’actualité. S’il semble jusqu’à présent raisonnablement maîtrisé, il est aggravé par le changement climatique. Les épisodes de canicule et de sécheresse affectent également le fonctionnement des centrales en rendant le refroidissement des installations plus difficile. Plus que jamais, le nucléaire est confronté à des défis majeurs : on peut notamment citer les difficultés rencontrées par le réacteur pressurisé européen (EPR) de Flamanville, le problème non résolu du stockage des déchets, la question de la disponibilité du parc nucléaire en raison de la corrosion sous contrainte, ou encore la volonté du Gouvernement de créer six EPR de deuxième génération. Alors que les missions de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) sont amenées à s’accroître, je regrette que seuls quatorze ETP lui aient été accordés, pour la période 2023-2027, sur les vingt et un qu’elle réclamait. Cette demande non satisfaite par le Gouvernement était pourtant tout à fait justifiée.

J’en arrive aux risques naturels, qui tendent à devenir de plus en plus fréquents et sévères en raison du dérèglement climatique. Les inondations, mais également les tempêtes et les cyclones, qui touchent plus particulièrement les territoires d’outre-mer, occasionnent toujours plus de dégâts. Les incendies de forêt, quant à eux, ne se limitent plus au sud-est de la France et à la période estivale.

Vous le voyez, les actions de prévention des risques menées dans le cadre du programme 181 sont vastes et d’une importance cruciale. Elles concernent directement notre sécurité et notre santé.

À l’exception des agents de l’ASN, les effectifs chargés de mettre en œuvre les politiques de prévention des risques sont rattachés à l’action 16 du programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables ». Le plafond d’emplois prévu pour cette action s’établit à 3 246 équivalents temps plein travaillés (ETPT), soit une augmentation de 28 ETPT par rapport à la loi de finances pour 2022, mais il reste inférieur à son niveau de 2017.

La quasi-stagnation des effectifs chargés de la mise en œuvre du programme 181 pose problème. L’accroissement des risques suppose au contraire de renforcer les effectifs chargés de les prévenir. L’absence de nouveaux recrutements en l’espace de six ans est d’autant plus regrettable que le ministère de la transition écologique recourt massivement à des cabinets de conseil. Or je rappelle que les missions exercées par les services chargés de la prévention des risques comportent une forte composante technique et scientifique ; la capacité de leurs agents à fournir une expertise indépendante et de haut niveau sur des sujets de plus en plus complexes et nombreux doit être préservée.

J’en viens maintenant au thème qui a retenu plus particulièrement mon attention cette année : le fonds pour l’économie circulaire et le fonds chaleur de l’Ademe.

L’Ademe occupe une place à part au sein du programme 181 puisque sa mission ne concerne pas la prévention des risques. Elle bénéficie d’une subvention pour charges de service public qui devrait atteindre 700 millions d’euros en 2023.

L’agence apporte tout d’abord un soutien important à l’économie circulaire à travers le fonds du même nom. La loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (loi Agec) a fixé des objectifs ambitieux en termes d’économie circulaire, comme celui de tendre vers 100 % de recyclage des emballages en plastique à usage unique en 2025, ou encore la réduction de 15 % des quantités de déchets ménagers produits par habitant en 2030 par rapport à 2010. L’Ademe, via le fonds pour l’économie circulaire, joue un rôle essentiel d’accompagnement technique et financier des collectivités territoriales et des entreprises dans le déploiement de cette politique.

Les crédits dont bénéficie le fonds au titre du programme 181 passent de 164 millions d’euros en 2022 à 210 millions d’euros en 2023. Cette augmentation était attendue en raison de la quasi-extinction, en 2023, des crédits accordés au titre du plan de relance. Le fonds devrait en outre bénéficier, pendant une période de cinq ans, d’une enveloppe de 470 millions d’euros dans le cadre du plan France 2030.

Ce budget reste néanmoins trop limité pour espérer atteindre les objectifs fixés par le Gouvernement en matière de réduction des déchets. La quantité d’ordures ménagères produites par habitant – 583 kg en 2019 – est quasiment équivalente à celle produite il y a dix ans. L’Ademe nous a indiqué que de nombreux projets identifiés ne pourraient être pris en charge par le fonds. Pour répondre à l’ensemble des demandes d’aide, il conviendrait d’augmenter de 100 millions d’euros les crédits du fonds pour l’économie circulaire : c’est ce que je propose dans un amendement.

Il est en outre urgent de réorienter les crédits du fonds vers des projets portant sur la prévention des déchets, le réemploi et la réutilisation. En 2020, 28,9 millions d’euros ont été consacrés au recyclage et 25,7 millions d’euros aux investissements dans la filière des combustibles solides de récupération (CSR) et à l’incinération des déchets. Dans le même temps, seuls 30 millions d’euros étaient alloués à la prévention des déchets, qui comprend la réparation, le réemploi et la tarification incitative.

Plusieurs mesures doivent être mises en place ou renforcées afin de réduire la quantité de déchets produits : l’accélération du développement de la tarification incitative, qui devrait concerner 25 millions de nos concitoyens en 2025 ; l’amélioration du tri des biodéchets, qui représentent encore un tiers des ordures ménagères résiduelles, alors que seules 157 collectivités avaient mis en place une collecte séparée en 2019 ; la réduction à 5,5 % du taux de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) applicable aux activités de réemploi et de réparation afin de l’aligner sur le taux en vigueur pour les activités de collecte, de tri et de recyclage des déchets.

Par ailleurs, la présence de l’Ademe doit être renforcée sur le terrain. Il s’agit de faire de l’agence un véritable interlocuteur des collectivités territoriales et des entreprises, alors que certaines d’entre elles ont le sentiment que son rôle se limite de plus en plus à celui d’un simple instructeur de dossiers. Afin de renforcer cet accompagnement, les moyens humains de l’Ademe doivent être confortés au niveau de ses directions régionales, sur le long terme et non simplement par des contrats de courte durée en intérim.

Je termine mon intervention par quelques mots sur le fonds chaleur. Ce fonds, qui accompagne le développement de la chaleur renouvelable et de récupération, est particulièrement stratégique dans le contexte actuel, tant pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre que pour accroître la souveraineté énergétique de notre pays. La chaleur, qui représente près de la moitié de la consommation énergétique totale en France, reste en grande partie produite par des énergies fossiles importées et émettrices de gaz à effet de serre. La chaleur renouvelable ne couvre qu’à peine un quart de la consommation finale de chaleur.

Les dotations du fonds chaleur ont régulièrement augmenté depuis sa mise en place en 2008, pour atteindre 520 millions d’euros en mars 2022. Ce montant devrait stagner en 2023. Or tous les acteurs que j’ai auditionnés ont indiqué que les crédits dont bénéficiait le fonds chaleur étaient largement insuffisants. J’ai donc déposé un amendement visant à les augmenter de 200 millions d’euros.

Enfin, si l’ensemble des projets doivent être soutenus, je souhaite insister plus particulièrement sur les réseaux de chaleur renouvelable. Une étude récente de l’Ademe montre qu’un développement ambitieux de ces réseaux permettrait de décarboner l’énergie consommée pour les besoins de chaleur de l’équivalent de 9 millions de logements, soit près de 21 millions d’habitants en 2050. Ce développement soutiendrait entre 41 000 et 57 000 emplois directs et indirects en 2050 : il est donc primordial et ne doit pas être limité aux grandes villes, comme c’est trop souvent le cas. Les communes de plus petite taille ont parfois l’impression que ces réseaux ne les concernent pas alors que la présence de bâtiments municipaux, de logements sociaux ou d’activités économiques devrait les inciter à étudier leur mise en place.

Je conclus en rappelant les multiples avantages des réseaux de chaleur. Au-delà de leur intérêt financier en période d’augmentation du prix des énergies fossiles, ils contribuent à mieux protéger les ménages précaires, à réduire l’empreinte carbone et à améliorer la résilience et le développement économique des territoires.

Mme Aude Luquet, rapporteure pour avis (Paysages, eau et biodiversité). Mon avis budgétaire couvre deux des neuf programmes de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». Je vous présenterai d’abord le programme 113 « Paysages, eau et biodiversité », puis le programme 159 « Expertise, information géographique et météorologie ». Ces deux programmes bénéficient, comme l’ensemble de la mission, d’une augmentation notable de leurs crédits. Face au défi de la transition écologique et à la nécessité urgente d’accélérer la lutte contre le changement climatique et ses effets, cette augmentation est la bienvenue. Il nous faut poursuivre sur cette voie en écoutant les besoins des acteurs de terrain.

Le programme 113 bénéficiera en 2023 de 274 millions d’euros, en CP comme en AE, contre 244 millions d’euros en 2022. Cette augmentation de 30 millions d’euros représente une hausse de 13 % des crédits du programme. Depuis quelques années, ce dernier a été continuellement renforcé puisqu’il représentait moins de 200 millions d’euros en 2019.

Je note d’abord l’augmentation de 25 millions des crédits alloués à l’Office français de la biodiversité (OFB), lequel bénéficiera également de quinze postes supplémentaires correspondant principalement à la création d’une nouvelle équipe, au sein de la brigade mobile d’intervention « grands prédateurs terrestres », dédiée aux Pyrénées et au Massif central.

L’Office national des forêts (ONF) verra également ses crédits renforcés, à hauteur de 2,5 millions d’euros en 2023 puis de 5 millions d’euros en 2024 et 2025, au titre de sa mission d’intérêt général (MIG) de gestion des réserves naturelles. Ces MIG sont essentielles pour permettre à l’ONF de bénéficier de moyens en faveur de la protection de la biodiversité qui ne soient pas liés à la vente de bois. L’ONF demande ainsi la création d’une nouvelle MIG entièrement dédiée au renouvellement des peuplements forestiers. Par ailleurs, si l’office a connu et connaît encore des difficultés financières, la forte augmentation du prix du bois devrait lui permettre, dès cette année, de retrouver un budget excédentaire. En revanche, on peut regretter que cette augmentation des dotations soit associée à une poursuite de la diminution des effectifs, à hauteur de 95 ETP. Mais je vous rappelle que les emplois de l’ONF sont inscrits sur la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales », et non sur le programme 113.

Comme dans la loi de finances initiale pour 2022, le plafond de ressources des agences de l’eau est stabilisé à près de 2,2 milliards d’euros. Les effectifs des agences sont également maintenus à leur niveau antérieur. À cet égard, il convient de rappeler qu’entre 2020 et 2022, les politiques de l’eau et de la biodiversité se sont vu octroyer, dans le cadre du plan de relance, une enveloppe de 526 millions d’euros dont les premières bénéficiaires ont été les agences de l’eau. La totalité de ces crédits a été engagée à ce jour, et les crédits de paiement ont été consommés à hauteur de 47 % – leur décaissement devrait s’étaler jusqu’en 2026. Au sein de cette enveloppe globale, près de la moitié des dépenses concernent la modernisation des réseaux d’eau et d’assainissement de métropole ainsi que le plan Eau DOM, qui intéresse les départements d’outre-mer, pour 50 millions d’euros. Le reste est dédié à des opérations en faveur des aires protégées et de la restauration des milieux naturels.

Dans la continuité du plan de relance, le PLF pour 2023 prévoit la création d’un fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires, aussi appelé « fonds vert », à hauteur de 2 milliards d’euros. Sur cette somme, au moins 150 millions d’euros permettront de financer spécifiquement la stratégie nationale Biodiversité 2030, qui mobilisera 37,5 millions d’euros dès 2023. Les aires protégées, la trame verte et bleue, la lutte contre les espèces envahissantes et la dépollution bénéficieront aussi de crédits supplémentaires grâce à ce fonds. Ce dernier comprendra en outre des crédits spécifiquement dédiés à la renaturation des villes, un sujet sur lequel j’ai choisi de me pencher plus particulièrement dans mon rapport.

La nature en ville a des bienfaits multiples : elle constitue un refuge pour la biodiversité, contribue à la lutte contre les îlots de chaleur et les inondations, améliore la qualité de l’air et réduit les nuisances sonores. Elle est notre principal allié dans la lutte contre le changement climatique et ses effets. Nous ne pouvons plus la négliger ou la réduire à un simple obstacle dans les projets d’aménagement de nos territoires. Le fonds vert va permettre d’engager 100 millions d’euros en faveur de la nature en ville, dont 25 millions d’euros en crédits de paiement dès le PLF pour 2023. En effet, 92 % des Français estiment qu’il n’y a pas assez de nature en ville, et 63 % pensent qu’il est prioritaire d’accorder plus de place aux espaces verts et à la végétalisation dans le quartier où ils vivent. C’est aussi une question de justice sociale, puisque les quartiers les moins végétalisés sont aussi les plus pauvres.

Cependant, les opérations de renaturation coûtent cher – entre 100 et 400 euros le mètre carré. C’est pourquoi j’insiste sur la nécessité de privilégier la protection de la nature existante à la compensation. Je rappelle l’importance du triptyque éviter-réduire-compenser, qui doit guider notre action dans les projets d’aménagement du territoire. En conséquence, il faudra mieux accompagner les collectivités en institutionnalisant davantage les politiques de protection de la nature en ville. Cela passera par l’intégration de clauses spécifiques dans les plans locaux d’urbanisme (PLU), mais aussi par des mesures innovantes comme la nomination d’un référent « arbres » au niveau des intercommunalités. Il sera également nécessaire de soutenir les collectivités avec un fonds dédié.

Je soutiens la proposition de nombreuses associations que j’ai rencontrées, qui plaident pour la création d’un inventaire du patrimoine naturel remarquable sur le modèle des inventaires du patrimoine. En permettant de répertorier et de classer les arbres remarquables et les espaces verts, un tel outil serait utile pour les citoyens comme pour les élus. Mieux protéger, c’est d’abord connaître. Je défendrai tout à l’heure un amendement visant à renforcer les financements en la matière.

J’en viens au programme 159 « Expertise, information géographique et météorologie », qui finance les subventions pour charges de service public de trois opérateurs – Météo-France, l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) et le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema) – et comprend l’ensemble des moyens de fonctionnement du Commissariat général au développement durable (CGDD).

Le programme sera doté en 2023 de 483 millions d’euros, en AE comme en CP, contre 471 millions d’euros en 2022, ce qui représente une augmentation de 2,6 %. Cette évolution s’explique par une hausse de 10 millions d’euros des crédits alloués à Météo-France et de 2,5 millions des crédits destinés au CGDD. Les crédits alloués à l’IGN et au Cerema demeurent stables, malgré des coûts de fonctionnement plus élevés liés à l’augmentation des prix de l’énergie et à la revalorisation du point d’indice.

Tous les opérateurs bénéficient d’une stabilité de leurs effectifs, à l’exception de Météo-France qui gagne 6 ETP. Cette inflexion bienvenue des efforts demandés aux opérateurs marque une rupture par rapport aux années précédentes, qui avaient vu une forte baisse des effectifs de ces structures au point de menacer la pérennité de certaines d’entre elles – je pense notamment au Cerema. Face aux enjeux croissants de la transition écologique, il m’apparaît en effet que nous sommes arrivés au maximum de ce que nous pouvions faire en matière de réduction des effectifs au sein de l’administration centrale et des services déconcentrés. Alors que les missions se multiplient, la mise en œuvre de nos politiques publiques nécessite des ressources humaines à la hauteur des besoins. Dans les années à venir, nous devrons donc veiller à renforcer les effectifs au cas par cas, là où cela s’avérera indispensable.

Pour ce qui concerne Météo-France, les incendies de l’été dernier en Gironde ont montré que l’opérateur ne serait pas capable, faute de personnel suffisant, de gérer simultanément plusieurs situations de ce type. Il était donc nécessaire de lui permettre de recruter davantage d’élèves à la sortie de l’École nationale de météorologie. Par ailleurs, Météo-France doit prochainement accéder à la prochaine génération de supercalculateurs, ce qui va entraîner des dépenses d’investissement importantes dans les années à venir.

Enfin, je tiens à souligner que Météo-France et l’IGN s’engagent de plus en plus dans la voie de l’accès gratuit à toutes leurs données ainsi que dans la construction d’outils partagés avec le public, telle la géoplateforme de l’IGN. Ce double mouvement leur fait perdre des recettes tandis que la construction de nouveaux outils est source de dépenses d’investissement et de fonctionnement nouvelles. Il est donc important que l’État leur alloue des financements spécifiques pour poursuivre dans cette voie.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis (Transition énergétique). J’ai l’honneur de vous présenter les crédits du programme 174 « Énergie, climat et après-mines », qui susciteront des débats importants puisqu’ils concernent, entre autres, MaPrimeRénov’ le bonus écologique, la prime à la conversion automobile et le chèque énergie.

Avant d’évoquer ces trois sujets, j’aimerais dire quelques mots d’ordre général sur le programme 174. Le budget envisagé pour 2023 s’établit à un peu plus de 5 milliards d’euros en autorisations d’engagement et à 4,86 milliards d’euros en crédits de paiement. Le Gouvernement a prévu une hausse de 40 % des crédits par rapport à la loi de finances initiale pour 2022. Cette augmentation concerne essentiellement les dépenses d’intervention, c’est-à-dire les aides reversées aux ménages, afin de maintenir le haut niveau des crédits dévolus à MaPrimeRénov’, de financer le chèque énergie et de renforcer les aides à l’acquisition de véhicules propres.

L’action 01 « Politique de l’énergie » disposera d’une enveloppe, en très légère augmentation, de 117 millions d’euros. Elle finance essentiellement les travaux et les études nécessaires à notre politique énergétique, notamment pour le développement des énergies renouvelables. Elle permet également de financer les programmes mis en place pour la reconversion des territoires qui ont accueilli les dernières centrales à charbon et la centrale nucléaire de Fessenheim, pour lesquelles les trajectoires prévues sont respectées.

L’action 04 « Gestion économique et sociale de l’après-mines », qui concerne notamment l’Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs (ANGDM) et les prestations servies aux anciens mineurs, voit ses crédits baisser de manière régulière compte tenu de la diminution naturelle des populations bénéficiaires. Les crédits s’élèveront à 270 millions d’euros en 2023, soit une baisse cohérente d’un peu moins de 11 %.

L’action 05 « Lutte contre le changement climatique et pour la qualité de l’air » sera financée à hauteur de 56 millions d’euros. Cette augmentation de 19 % par rapport à 2022 s’explique par les chantiers importants à venir, à savoir la révision des plans de protection de l’atmosphère, celle du plan national de réduction des émissions de polluants atmosphériques et la mise en œuvre des nouvelles zones à faibles émissions mobilité.

Je défendrai un amendement de crédits visant à renforcer le budget des associations chargées de la surveillance de la qualité de l’air. En raison de l’extension de leurs missions de surveillance les années passées, des tâches supplémentaires qui vont leur incomber dans le cadre des politiques dont je viens de parler et de la hausse de différents coûts incompressibles, je suis convaincu qu’un effort budgétaire complémentaire doit être réalisé afin de maintenir l’excellence de cet outil de mesure indispensable.

J’en viens maintenant aux trois sujets principaux du programme.

MaPrimeRénov’ est désormais pleinement ancrée dans le paysage des politiques publiques. Depuis sa création en 2020, le dispositif a permis d’aider à la rénovation de près de 1,2 million de logements. Pour répondre à la demande, l’État prévoit 2,45 milliards d’euros en 2023 : c’est un haut niveau de financement, qui pérennise les efforts consentis dans le cadre du plan de relance.

Les principaux objectifs assignés à MaPrimeRénov’ ont été atteints. Le premier est la massification, puisque les Français se sont pleinement emparés des aides MaPrimeRénov’ : près de 650 000 logements en ont bénéficié en 2021 et déjà plus de 450 000 en 2022, malgré la conjoncture difficile. L’enjeu de la rénovation est désormais connu du grand public et les moyens d’information déployés sous la bannière France Rénov’, déjà importants, vont encore monter en puissance. Par ailleurs, du fait de la transformation du crédit d’impôt en prime, MaPrimeRénov’ a permis de réorienter l’argent public vers des travaux efficaces d’un point de vue énergétique grâce à un relèvement des exigences techniques et réglementaires. Enfin, le dispositif a permis de réorienter massivement les aides publiques en direction des ménages aux revenus modestes qui en sont maintenant, de loin, les principaux bénéficiaires. Pour l’année 2022, ce sont 83 % des montants de prime engagés qui reviennent ainsi aux ménages modestes et très modestes.

Ces trois améliorations sont incontestables, et je crois qu’il faut vraiment s’en féliciter. Il existe cependant un consensus sur les importantes marges de progrès du dispositif.

Il convient tout d’abord de mieux cibler les logements les plus énergivores, les fameuses passoires énergétiques. Nous pouvons légitimement considérer que le compte n’y est pas encore et que le rythme des rénovations est insuffisant pour venir à bout des 5 millions de passoires classées F et G d’ici à 2030. Nous devons tenir le calendrier d’interdiction à la location des passoires énergétiques car c’est surtout dans le parc locatif privé que se trouvent ces logements – là où l’on retrouve aussi le plus grand nombre de ménages en situation de précarité énergétique. Il faut continuer à inciter les bailleurs à rénover leurs biens, sachant qu’ils ont déjà accès à MaPrimeRénov’ et à MaPrimeSérénité comme n’importe quel propriétaire occupant.

Nous devons en outre améliorer les aides destinées aux plus modestes, en faisant évoluer les critères et les montants de MaPrimeRénov’ et en progressant encore plus vite que les annonces bienvenues du Gouvernement sur Mon Accompagnateur Rénov’ en matière d’accompagnement des ménages.

S’agissant enfin de la performance des rénovations, nous devons mieux articuler l’ensemble des mesures et des aides existantes. Par exemple, nous avons un problème avec les montants des aides MaPrimeRénov’ et des primes des certificats d’économies d’énergie (CEE) : leur cumul pour des travaux effectués séparément est parfois plus avantageux que les aides versées pour un projet global plus performant. Nous devons inverser cette situation, dans la mesure où les travaux isolés sont moins efficaces que des bouquets de travaux bien coordonnés. Dans le même temps, il faudra augmenter les montants des bonus délivrés en cas de rénovation performante pour mieux financer ces chantiers coûteux et mieux allouer l’argent public.

Ces différents points nous amènent à la question du financement de la rénovation énergétique.

Des auditions que j’ai menées, il ressort très largement que l’urgence est bien moins à l’augmentation des crédits budgétaires alloués à MaPrimeRénov’ par rapport à ce qui est inscrit dans le PLF qu’à l’amélioration de l’efficacité et de la qualité des rénovations engagées. Or, à l’heure actuelle, le réseau des professionnels est insuffisant pour répondre à la demande. Il y a un vrai problème d’effectifs, mais aussi de qualifications, car réaliser des rénovations performantes et globales suppose de posséder les compétences et savoir-faire nécessaires.

Se pose également le problème du ciblage des logements : comment aller à la rencontre des ménages qui habitent les passoires énergétiques si nous ne pouvons pas les localiser ? Seul un tiers des logements ont été soumis à un diagnostic de performance énergétique (DPE) ; or c’est à partir de ces DPE qu’est estimé l’état global du parc. Il faut donc augmenter le volume et améliorer la pertinence des données sur ce parc. Cela nous permettra ensuite de donner aux particuliers de la visibilité sur leurs besoins ainsi que sur l’utilité, la pertinence et la performance des rénovations à effectuer. Nous nous donnerons ainsi les moyens de bien piloter les stratégies de rénovation, au niveau global comme à l’échelle territoriale. Je défendrai d’ailleurs quelques amendements à ce sujet.

À ce stade, il me semble donc préférable de mieux dépenser les crédits actuels de MaPrimeRénov’ en les réorientant vers les ménages les plus modestes et en les fléchant vers les primes favorisant les rénovations performantes. Cela doit se faire parallèlement à la montée en puissance de l’accompagnement offert par France Rénov’ afin de maximiser l’efficacité des chantiers qui seront entrepris dans les prochains mois et années.

Le Gouvernement a déjà affirmé à de nombreuses reprises sa détermination à modifier le dispositif pour en améliorer l’attractivité et l’efficacité, ce que j’appelle aussi de mes vœux. Cela ira de pair avec la montée en puissance de l’accompagnement et la mise en œuvre d’une planification stratégique de la rénovation, qui trouvera toute sa place dans la planification écologique que nous devons établir pour notre pays.

J’en viens aux dispositifs introduits pour juguler la hausse des prix de l’énergie et pour faire face à la précarité énergétique. Le Gouvernement a engagé des sommes importantes pour réduire l’impact de la hausse des prix sur les Français et nous avons, globalement, fait mieux que nos voisins européens. Sans ces mesures, la hausse des prix du gaz et de l’électricité attendue pour 2023 ne serait pas de 15 %, mais de 120 %. La lutte contre la précarité énergétique ne doit pas se faire au détriment de la lutte pour la rénovation énergétique, c’est-à-dire de la sortie définitive et pérenne de la précarité énergétique.

Après le chèque énergie exceptionnel de la fin de l’année 2021, celui de 100 ou 200 euros qui sera distribué à 12 millions de ménages modestes d’ici la fin de l’année aura un impact important, comme le chèque fioul. Ils pourront être utilisés en 2022 ou en 2023 pour n’importe quelle énergie. Ils viennent compléter le dispositif classique du chèque énergie pour 2023. Concernant ce dernier, les crédits ouverts s’élèvent à environ 900 millions. Cette enveloppe est satisfaisante mais il conviendrait d’en adapter les paramètres d’attribution. La Cour des comptes propose une indexation automatique des tranches du barème sur l’évolution pluriannuelle du niveau des salaires. Enfin, je souhaite que toutes les pistes pour améliorer le taux d’utilisation du chèque soient explorées, à commencer par l’ouverture de son utilisation pour le paiement des charges incluant les frais de chauffage collectif.

En matière d’aides à l’acquisition de véhicules propres, le Gouvernement a prévu une enveloppe de près de 1,3 milliard d’euros pour financer le bonus écologique, la prime à la conversion et le futur dispositif de leasing social. Les aides existantes ont permis de renouveler 4,3 % du parc automobile depuis 2018. En plus de réduire les émissions polluantes, ces aides ont permis de soutenir notre industrie automobile dans la grande transformation technologique que représente le véhicule électrique.

Si le niveau de financement de ces aides est globalement satisfaisant, je recommande d’introduire une plus grande progressivité dans leur montant, au bénéfice des ménages les plus modestes. Il ne faut pas s'interdire de réfléchir à un seuil de revenu au-delà duquel ces aides ne seraient plus accessibles : cela permettrait d’éviter les effets d’aubaine et les sommes ainsi récupérées pourraient revenir aux ménages les plus précaires. Je vous proposerai des amendements en ce sens.

Il faut adapter les aides aux réalités territoriales de notre pays, notamment aux zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m). Les enjeux liés aux transports y sont très importants pour les ménages modestes. Cela pourrait passer par l’attribution sans condition de la surprime ZFE rattachée à la prime à la conversion ou à l’amélioration du dispositif de microcrédits véhicules propres. Enfin, il faut offrir aux ménages une solution juste de location longue durée ou avec option d’achat pour un véhicule électrique. Je pense que le budget actuel peut répondre à ces différents enjeux, s’il évolue favorablement pour s’adapter aux besoins des ménages modestes.

Je suis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilités durables ».

Mme Anne Stambach-Terrenoir, rapporteure pour avis (Politiques de développement durable). Je vous indique d’emblée que j’émettrai un avis défavorable sur l’adoption des crédits du programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables », du fait du gigantesque contraste entre le défi que nous avons à relever et l’atonie de l’action politique.

L’année 2022 a dépassé tous les records de canicule enregistrés en 2019. Plus forte et plus longue que toutes celles que nous avions connues jusque-là, elle s’est accompagnée d’une sécheresse sans précédent. À cela se sont ajoutés les incendies de forêts, qui ont ravagé la Gironde et sont apparus dans des aires géographiques où ils étaient rares, comme la Bretagne. Cette situation n’est pas propre à la France. L’Europe méridionale et centrale a été frappée par des incendies plus importants encore, la Californie continue de subir une sécheresse historique, tandis que le Pakistan a perdu un tiers de ses récoltes en raison d’inondations records. L’urgence climatique n’est pas qu’une expression : c’est une réalité que vit un nombre croissant de nos concitoyens.

En théorie, notre pays a une feuille de route : l’agenda européen. Nous pouvons former des vœux pour sa réussite, mais je rappelle que le Haut Conseil pour le climat a estimé, dans son rapport de 2021, que les politiques publiques étaient insuffisantes pour réussir la stratégie nationale bas-carbone.

Le contexte étant rappelé, j’en viens au programme 217. Je rappelle qu’il constitue le support de la mise en œuvre des politiques publiques du pôle regroupant le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, le ministère de la transition énergétique et les cinq ministères délégués et secrétariats d’État qui leur sont associés, ainsi que le secrétariat d’État à la mer. Il porte l’essentiel de la masse salariale des ministères précités et de trois autorités administratives indépendantes – l’Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (Acnusa), la Commission de régulation de l’énergie (CRE) et la Commission nationale du débat public (CNDP) –, ainsi que le financement des politiques transverses de fonctionnement et d’investissement nécessaires à la réalisation de ces politiques.

Les crédits de ce programme s’élèvent à 3,004 milliards en autorisations d’engagement et à 3,021 milliards en crédits de paiement, soit une hausse respective de 3,4 % et 4,3 % par rapport à l’année dernière – mais il faut tenir compte de l’inflation.

Le mot qui résume ce programme, c’est la stabilité, notamment celle des effectifs. Les ministères qui pilotent les transitions énergétique et écologique ont fait l’objet d’une quinzaine de réformes en vingt ans – restructurations, redéfinition de leur mission, transfert de compétences de l’échelon central à l’échelon départemental, etc. Alors que la réduction des effectifs de l’administration centrale a été une constante des dernières années, le Gouvernement nous présente cette stabilisation comme une victoire. Mes auditions ont pourtant montré que toute l’administration travaille à flux tendu pour accomplir ses missions.

La campagne électorale du Président de la République a été placée sous le signe de l’ambition écologique avec, entre autres, l’annonce de la création d’un secrétariat général à la planification écologique. Dont acte : je salue la reprise par M. Emmanuel Macron d’une idée exprimée par M. Jean-Luc Mélenchon dès 2012 ! Je rappelle que les crédits de ce secrétariat sont inscrits à ceux du Premier ministre, au programme 129, et qu’il est doté de quinze emplois. J’espère que cette structure donnera une impulsion à la politique du Gouvernement. Mais qui peut croire que la bifurcation écologique peut réellement changer de dimension avec un tel organe ?

On constate donc de la stabilité, là où il faudrait une impulsion, et de la continuité, là où il faudrait de l’ambition. Les crédits du programme 217 sont à peu près les mêmes qu’en 2020 et 2021, avec les mêmes problèmes de manque d’emplois au sein des autorités administratives indépendantes et les mêmes difficultés pour les écoles d’ingénieurs à investir et à former les cadres dont notre pays a tant besoin pour la bifurcation écologique. On ne voit pas non plus de crédits dégagés pour la politique de rénovation thermique des bâtiments du pôle ministériel.

Pourtant, des moyens budgétaires existent. J’en veux pour preuve le fait que le pôle ministériel a fait partie, ces dernières années, de ceux qui ont le plus recouru aux dépenses d’audit externe. De 2018 à 2021, les dépenses qu’il a engagées auprès de cabinets de conseil ont dépassé 114 millions d’euros, une somme qui aurait pu couvrir les besoins d’investissement des écoles d’ingénieurs ou permis d’augmenter le nombre d’emplois à l’ONF ou à l’OFB.

Le Gouvernement a beau déclarer qu’il rationalise le recours à ces cabinets, la commission d’enquête sénatoriale de Mme Éliane Assassi et M. Arnaud Bazin a montré qu’il n’était toujours pas au rendez-vous de la transparence. Lors d’une audition, il m’a ainsi été indiqué que, conformément à la circulaire du Premier ministre, le pôle ministériel devait respecter un objectif de réduction des dépenses d’audit, sachant toutefois que les études sur les éoliennes en mer – 69 millions d’euros – n’entraient pas dans cette trajectoire de diminution.

Je ne peux admettre que des sommes aussi importantes ne soient pas prioritairement consacrées à des investissements nécessaires et à l’emploi public. C’est donc pour une raison à la fois comptable et morale que j’émettrai un avis défavorable sur l’adoption des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », pour la partie qu’il m’est revenu d’examiner. J’ai par ailleurs déposé un amendement qui vise à aider les autorités administratives indépendantes à accomplir leurs missions, en majorant leur plafond d’emplois. Cet amendement n’ayant rien d’excessif, j’espère, chers collègues, qu’il suscitera votre adhésion.

M. le président Jean-Marc Zulesi. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

Mme Danielle Brulebois (RE). Le programme 181 vise à prévenir tous les types de risques – industriels, nucléaires ou naturels – liés aux défis climatiques et énergétiques.

Il voit ses crédits augmenter pour atteindre 1,14 milliard d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. Ce programme intègre également l’économie circulaire, le traitement des déchets, le fonds chaleur et les missions de l’Ademe. Les crédits de cette dernière augmentent de 17 % par rapport à l’année dernière et, en tant qu’opérateur, elle bénéficie aussi du plan d’investissement France 2030.

Mme Huguette Tiegna (RE). Les enjeux environnementaux, climatiques et de biodiversité sont plus que jamais une priorité dans la définition de nos politiques publiques. Les nombreuses alertes du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) nous imposent d’agir au plus vite, de concert avec les territoires et au plus près des acteurs de la transition : citoyens, entreprises, associations et élus. Nous nous réjouissons de l’augmentation des crédits du programme « Paysages, eau et biodiversité », notamment de ceux alloués à l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN), à Météo-France et à l’ONF.

M. Philippe Guillemard (RE). Ce projet de loi de finances traduit la volonté du Gouvernement de poursuivre la transition énergétique, par l’affectation inédite de crédits en faveur de celle-ci.

Elle ne pourra se faire sans une politique ambitieuse de rénovation thermique des bâtiments, laquelle a commencé au cours des cinq dernières années, via le dispositif MaPrimeRénov’. Il faut aller plus loin, en allégeant le reste à charge pour les ménages modestes et en encourageant les rénovations globales plutôt que partielles.

Une autre mesure essentielle pour les Français est le maintien du bouclier tarifaire pour le gaz et l’électricité. La hausse des prix sera contenue grâce à une prise en charge de l’État. La France, en contenant l’inflation à 6,2 %, est le pays le plus protégé d’Europe.

S’agissant du parc automobile, on va vers une mobilité plus propre et plus collective et vers un maillage plus dense de nos territoires. Lors de sa visite au Mondial de l’automobile, le Président de la République a annoncé de nouvelles mesures pour dynamiser la filière de la voiture électrique.

Mme Sandrine Le Feur (RE). Les moyens et les effectifs dédiés à notre politique de développement durable sont déterminants pour assurer son efficacité et surtout son adéquation avec nos objectifs nationaux et européens en matière d’atténuation et d’adaptation au dérèglement climatique, de préservation de la biodiversité et de nos ressources naturelles. Les crédits du programme 217 ont été stabilisés, après de trop nombreuses années de baisse. Notre groupe salue l’engagement gouvernemental en faveur de la planification écologique et votera les crédits de ce programme.

M. Emmanuel Taché de la Pagerie (RN). Le programme « Paysages, eau et biodiversité » est essentiel et structurant. Ses crédits passent de 244 à 274 millions d’euros, mais cette hausse est insignifiante au regard du péril climatique.

Malgré les calamités qui ont frappé notre pays cette année – incendies et inondations dévastateurs, mise en danger de nombreux parcs régionaux –, le PLF maintient la suppression de quatre-vingt-quinze équivalents temps plein pour l’ONF, qui a déjà vu ses effectifs diminuer année après année. Un seul agent de l’ONF doit désormais s’occuper de 1 700 hectares, contre 800 il y a vingt ans. L’ONF doit en outre remplir de nombreuses missions de police environnementale. Il aurait besoin de 40 millions d’euros supplémentaires par an.

Les agences de l’eau, quant à elles, sont mises à rude épreuve par le relèvement de 100 millions d’euros du plafond de dépenses, qui les contraint à prélever cette somme sur leur trésorerie. Les besoins globaux pour préserver la qualité de l’eau ont été estimés à 450 millions d’euros par France Nature environnement. Nos parcs nationaux sont également à l’abandon – les quarante ETP supplémentaires de 2022 sont largement en deçà des besoins –, tout comme Météo-France, qui a pourtant une mission structurante, dont dépendent de très nombreux secteurs d’activité. La hausse de 9 millions d’euros de son budget n’est qu’un trompe-l’œil.

Pour toutes ces raisons, nous voterons contre les crédits de ce programme.

M. Nicolas Dragon (RN). La prévention des risques est un enjeu majeur pour la France de demain, qui implique la prise en compte des défis environnementaux et énergétiques. Mais il n’y a pas de solution magique ou miraculeuse et le pragmatisme doit l’emporter si nous ne voulons pas basculer dans une écologie punitive et primitive. L’alourdissement des réglementations, alors que l’impact environnemental de la France est relativement modeste, risque d’aggraver la délocalisation des entreprises et la fuite des capitaux à l’étranger, comme ce fut le cas de Renault ou de PSA.

D’autre part, comment peut-on sérieusement parler de souveraineté énergétique, tout en augmentant de manière substantielle l’importation de gaz naturel liquéfié (GNL) en provenance des États-Unis ? Nous ne faisons que troquer une dépendance pour une autre. Au lieu de développer nos propres moyens, nous tombons dans une tiédeur mortelle, celle du court-termisme, hautement préjudiciable à notre souveraineté énergétique. Le rapport pour avis plébiscite l’économie circulaire, mais cela relève de l’illusion politique, à l’heure où les bienfaits de la mondialisation continuent de susciter l’adhésion.

La croissance verte restera une douce utopie dans un modèle ultraproductiviste, aggravé par les directives européennes qui contraignent les pouvoirs publics. Il en est de même pour la décarbonation, qui n’aura qu’un impact mineur sur le déficit abyssal de la balance commerciale. Pour prévenir les risques, il faut favoriser le local et tenir compte de la désertification rurale. Trop souvent, nos concitoyens ruraux ne voient pas la couleur des nouvelles mesures, rapidement happées par les grandes villes et les métropoles. Il faut se donner les moyens de ses ambitions et troquer la quantité pour la qualité. Un investissement massif dans les ressources humaines permettra de combler les lacunes de l’expertise de terrain. La mesure relative à la traçabilité des déchets et à la dématérialisation de leur bordereau est excellente. Elle illustre la tradition d’innovation française et trace la route vers un avenir radieux.

Mme Mathilde Paris (RN). La France traverse une crise énergétique sans précédent. Les ménages, les entreprises et les collectivités territoriales subissent de plein fouet les choix désastreux des gouvernements successifs en matière énergétique. Malheureusement, malgré quelques évolutions positives, le budget qui nous est présenté ne répond pas aux enjeux de cette crise énergétique.

Permettez-moi de relever quelques incohérences au sein de ce budget. Tout d’abord, alors que le programme « Fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires » se fixe comme objectif une réduction des émissions de gaz à effet de serre, rien n’est prévu pour réindustrialiser notre pays et favoriser les circuits courts. La moitié de nos émissions de gaz à effet de serre étant causées par les importations, il est urgent de freiner la mondialisation sauvage pour tenir nos engagements environnementaux, plutôt que de contraindre les Français, avec des mesures d’écologie punitive comme les ZFE-m ou la hausse de la TICPE.

Autre paradoxe : pour aider les ménages en situation de précarité, le Gouvernement propose, une fois encore, de distribuer des chèques. Pourtant, toutes les études, ainsi qu’un rapport accablant de la Cour des comptes, montrent que la politique du chèque est inefficace. Les Français attendent des mesures fortes et pérennes, comme la baisse de la TVA sur l’énergie, de 20 à 5,5 %. Cette mesure a connu un vrai succès en Pologne et en Italie.

Je ne m’attarderai pas sur les autres incohérences de ce budget, comme les crédits alloués à MaPrimeRénov’ que la Fédération française du bâtiment trouve très insuffisants. Votre opération de communication autour du col roulé et des doudounes ne suffira pas à dissimuler vos erreurs et votre manque de vision à long terme. Les Français peuvent compter sur notre groupe pour défendre la souveraineté énergétique de la France et promouvoir une transition énergétique qui ne pèse pas sur le pouvoir d’achat.

M. Pierre Meurin (RN). Une somme de 44 millions d’euros au premier semestre 2022 : c’est ce que le ministère de la transition écologique a dépensé auprès de cabinets de conseil. Ses commandes ont porté sur le déploiement de l’éolien en mer, le coût du nucléaire, le contrôle des certificats d’économies d’énergie, ou encore les mobilités. À quoi bon financer un ministère, s’il fait appel à des cabinets de conseil pour faire son travail ? C’est révoltant pour les Français.

En 2023, le ministère de la transition écologique et son personnel recevront plus de 3 milliards d’euros. L’augmentation de ses crédits est-elle justifiée ? Permettez-moi d’en douter. La question énergétique est une question de souveraineté. Confier sa gestion à des cabinets de conseil qui peuvent être étrangers, c’est abandonner la France à des intérêts qui peuvent être contraires à ceux des Français.

La prudence étant la mère des vertus, je proposerai de supprimer 88 millions d’euros aux crédits de cette mission, soit le montant approximatif que le ministère a dépensé en 2022 pour recourir à des cabinets de conseil.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Le premier mandat d’Emmanuel Macron a été marqué par la régression écologique. Ce fut un sans-faute : l’État a été affaibli, la France a été condamnée plusieurs fois et aucun objectif n’a été atteint. Pour cette saison 2 du macronisme, vous avez le mérite de la constance. Votre budget crée 120 fois moins de postes pour la transition énergétique que pour les armées et 240 fois moins que pour l’intérieur. Les centrales nucléaires ont l’âge de fermer, mais les moyens pour assurer leur sûreté et les démanteler ne sont toujours pas budgétés.

Votre projet de loi de finances ne prévoit aucun soutien budgétaire au développement des énergies renouvelables (ENR). Or, faute de planification, on a observé un recul de ces énergies entre 2020 et 2021 : la part des énergies renouvelables représentait 22,5 % de l’énergie électrique totale en 2021, contre 24,2 % en 2020. La France n’a qu’un seul parc éolien en mer en exploitation, celui de Saint-Nazaire.

Cette situation est le résultat de décennies de politique de casse industrielle. Je l’illustrerai avec deux exemples, en commençant par le photovoltaïque. Cette filière n’a pas résisté au dumping chinois et à l’absence de mesures protectionnistes. Depuis l’an 2000, la part des panneaux produits en Europe est passée de 30 % à 3 % seulement. La France a perdu 15 000 emplois et la quasi-totalité de sa chaîne de production. En 2018, l’assemblage de modules photovoltaïques de l’entreprise iséroise Photowatt a été délocalisé en Asie.

Le deuxième exemple, c’est la filière de l’éolien, qui a été détruite par Emmanuel Macron. La branche « énergies marines » d’Alstom a été cédée à General Electric, tandis que la branche éolienne offshore d’Areva a été cédée à Siemens. Résultat, on a appris hier la suppression de 570 postes en Europe dans la branche éolienne de General Electric. Le porte-parole de l’entreprise a déclaré : « Au cours des dernières années, l’activité éolienne terrestre de GE en Europe a été confrontée à une volatilité et à des défis importants. » Il a ajouté que « ce plan vise à rationaliser l’activité en fonction des réalités du marché ». Voici donc un représentant patronal qui nous confirme l’échec du marché. En matière d’énergie, vous lui laissez pourtant libre cours, alors que le climat, les travailleurs et les entreprises ont au contraire besoin de planification.

Un projet de loi pour le développement des énergies renouvelables est prévu pour la fin de l’année. Plutôt que de bricoler des mesures d’urgence, notre groupe vous propose d’inscrire dès maintenant dans le budget les moyens d’un développement réel des énergies renouvelables. Nous vous proposerons par ailleurs, au travers de plusieurs amendements, de renforcer les moyens du Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema) et de l’Ademe, afin de créer les conditions d’une accélération de la mise en œuvre des projets d’énergies renouvelables. Il nous faudra aussi reconstruire des filières industrielles françaises et créer un pôle public de l’énergie. Nous proposerons d’investir davantage dans la recherche, notamment sur l’hydrogène et les énergies marines. Nous proposerons aussi la nationalisation d’un certain nombre d’entités comme Engie, la branche « renouvelables » de TotalEnergies, ou encore GE Energies renouvelables.

Le groupe La France insoumise veut montrer qu’il existe, avec la NUPES, une alternative à ce piétinement du peuple et de la planète. Faisons mieux pour ce budget.

M. Pierre Vatin (LR). Les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » passent de 21,2 à 27,3 milliards d’euros. Il n’y a pas de quoi pavoiser, même si les différents boucliers tarifaires sont des pis-aller qui aident les Français temporairement – notamment le bouclier carburant, que l’on doit aux députés du groupe Les Républicains.

N’oublions pas que ce budget résulte des nombreux ratés du Gouvernement sur le dossier de l’énergie, en particulier de l’effondrement inédit de notre production d’électricité d’origine nucléaire. La vérité, c’est que notre pays a, depuis des années, négligé ses centrales au nom d’un objectif illusoire de diversification de son mix énergétique. Résultat, près de la moitié de notre parc est à l’arrêt à l’approche de l’hiver, ce qui fait craindre des difficultés économiques et sociales majeures. C’est pourquoi le groupe Les Républicains a décidé de demander une commission d’enquête sur les raisons de la perte de souveraineté et d’indépendance énergétique de la France.

De même, l’explosion des factures aurait largement pu être évitée. Pour cela, il aurait fallu négocier de manière plus ferme au niveau européen pour engager une réforme des mécanismes de fixation des prix du marché de l’électricité. Actuellement, l’électricité que nous produisons à 50 euros le mégawattheure, grâce au nucléaire, nous revient à 600 euros, tout simplement parce que son prix est aligné sur celui du gaz. Quant aux Français, ils se retrouvent punis par un gouvernement qui ne négocie pas un prix européen de l’électricité. Espérons que le débat sur la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) au début de l’année prochaine permettra de déterminer les responsabilités de chacun et de ne pas reproduire les mêmes erreurs, comme on s’apprête pourtant à le faire avec les énergies renouvelables.

J’en viens au marqueur écologique. L’engouement inexpliqué pour le dispositif MaPrimeRénov’, pourtant décrié, a un coût élevé pour des chantiers peu nombreux. On a appris ce matin que la Défenseure des droits a été saisie de près de 500 réclamations, les demandeurs étant seuls face à des dossiers complexes dont le traitement s’éternise.

Seules 2 500 passoires thermiques ont été rénovées en 2021, pour un objectif de 80 000. Nous dénonçons les effets d’aubaine et de seuil du dispositif, qui favorise les travaux ponctuels, alors que seules les rénovations globales ont un réel impact sur les économies d’énergie des logements. Notre groupe a fait adopter en commission des finances un amendement visant à interpeller le Gouvernement sur les erreurs et les ratés du dispositif MaPrimeRénov’. Il semblerait plus pertinent de rétablir le crédit d’impôt qui lui préexistait. Nous comptons sur le Gouvernement pour faire sienne cette proposition, y compris si ce texte est adopté en ayant recours à l’article 49, alinéa 3, de la Constitution.

Le bonus écologique et la prime à la conversion sont censés favoriser la transformation du parc automobile. Le rapporteur pour avis note qu’il ne faut pas brusquer les choses avec les habitants des zones rurales ou les gros rouleurs, qui n’ont pas de solution de transition abordable à court terme. La politique du Gouvernement prévoit pourtant une série de mesures contraignantes – ZFE, véhicules électriques – sans se poser la question du temps et des moyens nécessaires à la transition vers ces modes de déplacement. Nous vous suggérons une source de financement plus pérenne : la suppression de la TVA sur la TICPE.

Nombre des mesures qui ont été prises pour favoriser la transition écologique ont raté leur cible, imposé une charge de travail supplémentaire aux agents de l’État et abouti à un éparpillement néfaste des moyens financiers engagés par la puissance publique. La vraie question, c’est celle du périmètre d’intervention de l’État. Que doit-il faire ? Dans quel secteur doit-il agir ? Doit-il s’occuper de tout, ou au contraire se concentrer sur l’essentiel ? Nous avons évoqué la faible efficacité du dispositif MaPrimeRénov’ et des aides à la conversion des véhicules. Ce constat s’applique aussi aux agences de l’eau, à qui on confie de nouvelles missions en matière de biodiversité ou de renaturation des villes, et qui n’ont plus les fonds nécessaires pour faire leur métier, à savoir mener la politique de l’eau. Je pense aussi à la Commission nationale du débat public, à qui on inflige un nombre croissant de dossiers à suivre, notamment au sujet des éoliennes, et qui n’a plus assez d’effectifs pour encadrer correctement la tenue des consultations du public sur les grands projets d’avenir.

Je pense encore à l’Ademe ou à l’OFB, à qui l’on attribue de nouveaux programmes ambitieux sur la responsabilité élargie des producteurs ou la gestion des grands prédateurs, alors que l’effort de la puissance publique devrait plutôt porter sur la santé de notre parc nucléaire ou sur Météo-France, dont on a vu les fragilités à l’occasion des terribles orages de cet été en Corse. Nous vous appelons à plus de modestie dans vos intentions et à une plus grande sobriété bureaucratique.

M. Hubert Ott (Dem). Le groupe Démocrate est convaincu que l’adaptation au changement climatique et l’inversion de la tendance au réchauffement de la planète impliquent de laisser une place croissante à la nature, de veiller à sa régénération et à sa pérennité.

Je salue donc l’augmentation de 12,4 % des crédits du programme 113 « Paysages, eau et biodiversité ». Je me réjouis de l’augmentation des crédits destinés à lutter contre l’artificialisation des terres et de ceux de l’OFB. Cette police de la biodiversité surveille et protège notre patrimoine naturel et aura la charge cruciale d’appliquer la stratégie nationale de biodiversité 2030. Des efforts financiers importants sont faits aussi en faveur des agences de l’eau. Notre assemblée doit mener sans attendre un travail global sur la gestion, la préservation et la régénération de nos réserves en eau. Je veux saluer, enfin, la création d’un référent « arbres » dans les intercommunalités, car la valeur du patrimoine naturel, notamment des arbres, est trop souvent ignorée dans l’aménagement du territoire. Madame la rapporteure pour avis, selon vous, quelle place la nature doit-elle prendre en ville ?

M. Mickaël Cosson (Dem). La transition énergétique se mesure, non pas en euros d’investissements, mais en euros économisés dans le fonctionnement de nos bâtiments et de nos mobilités.

Trois points me semblent pouvoir être améliorés. Tout d’abord, le « décret tertiaire » ne concerne que les bâtiments de plus de 1 000 mètres carrés, qui ne représentent que 5 % du total. Les bâtiments de moins de 1 000 mètres carrés, destinés généralement à l’activité commerciale, continuent de se construire à la périphérie des villes, ce qui incite à l’utilisation de la voiture. Il faut prendre en compte ces bâtiments, qui vont subir de plein fouet le tsunami énergétique.

J’en viens, ensuite, à la question des mobilités. On encourage la conversion des voitures vers l’électrique, mais il ne faudrait pas passer du tout fossile au tout électrique. Il faut privilégier le mix énergétique et surtout l’énergie produite localement et durablement, à savoir le biocarburant ou le bioGNV. Ils peuvent contribuer à la création d’une boucle circulaire énergétique vertueuse. Il faut financer les boîtiers qui permettent de passer de l’essence au biocarburant. Il est utopique de penser que les transports en commun circuleront dans toutes les communes de France, sachant que 93 % d’entre elles comptent moins de 5 000 habitants. Les mobilités douces et les transports en commun sont une solution en milieu dense, dès lors que les collectivités disposent de l’accompagnement financier pour réaliser ces infrastructures.

Enfin, les bâtiments industriels seront bientôt alimentés par des énergies issues des déchets agricoles. Cela aura un impact environnemental et décarbonera les outils de production.

Mme Chantal Jourdan (SOC). Globalement, les crédits de la mission sont en augmentation par rapport à l’année dernière ; c’est une bonne dynamique. Malheureusement, ces augmentations sont insuffisantes dans le contexte inflationniste et face à l’ampleur des défis environnementaux. La rapporteure pour avis pour le programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l’écologie du développement et de la mobilité durables », programme support des politiques publiques du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires et du ministère de la transition énergétique le souligne : la stabilisation des effectifs intervient après des années de diminution due aux restructurations du ministère. Or, le changement climatique et les défis posés par la transition énergétique ont des conséquences sur la charge de travail des personnels du pôle ministériel, qui œuvrent de plus en plus en flux tendu, faute de disposer d’effectifs complémentaires. Nous ne pouvons donc nous satisfaire d’une stabilisation.

Nous saluons l’augmentation des crédits du programme « Paysages, eau et biodiversité », qui se traduisent notamment par la hausse des effectifs de l’OFB, indispensable, et la stabilisation des moyens des agences de l’eau. Mais, là encore, après des années de baisse d’effectifs, où il fallait « faire plus avec moins », cette légère amélioration n’est pas suffisante. Le budget de la biodiversité est très faible au regard des enjeux.

Les moyens alloués à l’ONF sont insuffisants et la suppression de 95 ETP va à contresens des besoins actuels. La forêt publique, en tant que bien commun, doit être préservée. L’ONF est affaiblie par une dette croissante et le manque de personnels. Tous les rapports et publications soulignent le sous-effectif, qui ne permet pas aux agents de remplir pleinement leurs missions, de plus en plus nombreuses en raison du dérèglement climatique. Les conditions de travail se détériorent et les souffrances au travail augmentent de façon très alarmante.

Pour répondre aux enjeux climatiques et faire face à la crise structurelle, entretenue par un sous-investissement chronique dénoncé par la Cour des comptes, il faut engager des investissements conséquents et sacraliser les effectifs. Nous proposerons une augmentation des effectifs.

Enfin, M. Stéphane Delautrette le souligne dans son avis sur le programme « Protection de l’environnement et prévention des risques », les crédits dont bénéficie le fonds pour l’économie circulaire de l’Ademe s’avèrent insuffisants pour atteindre les objectifs fixés par le Gouvernement en matière de réduction, de réutilisation et de recyclage des déchets puisque « certains budgets sont contraints, en particulier celui consacré au réemploi, à la réutilisation et à la réparation, trop limité au regard du portefeuille de projets identifiés. » Ce dispositif est important et il est nécessaire d’augmenter les crédits dédiés, dans un contexte où le déploiement des filières de réemploi, de réutilisation et de recyclage des déchets est une nécessité écologique et représente une opportunité économique non négligeable. Nous défendrons des amendements en ce sens.

Mme Anne-Cécile Violland (HOR). La forte augmentation des moyens accordés à la mission « Écologie, développement et mobilité durables » traduit la priorité de transition écologique et énergétique du Gouvernement. Le programme 113 « Paysages, eau et biodiversité », qui vise à restaurer et protéger les écosystèmes et à renforcer l’adaptation au changement climatique, bénéficie de 274 millions d’euros en crédits de paiement et en autorisations d’engagement, soit une augmentation de 12,4 %. Nous ne pouvons que nous réjouir de cette hausse. La préservation de la biodiversité, la qualité de l’eau et la résilience des territoires sont des enjeux prioritaires. L’eau est régulièrement au cœur de nos débats depuis le début de la législature. En gardant en tête l’urgence de la situation – la majorité des territoires a été confrontée cet été à la sécheresse et à des coupures –, je rappelle que nous nous sommes mobilisés et que le travail du Gouvernement a amélioré la réactivité et la coordination des politiques de l’eau. Ces mesures exceptionnelles ne suffisent plus et l’augmentation des crédits doit permettre de mieux anticiper et prévenir. Nous avions également souligné l’urgence de mieux former les agriculteurs à leur consommation en eau et nous réjouissons que 1,9 million d’euros supplémentaires visent à financer les mesures liées au Varenne agricole de l’eau et de l’adaptation au changement climatique.

L’action 10 « Prévention des risques naturels et hydrauliques » du programme 181« Protection de l’environnement et prévention des risques » concerne la connaissance, la surveillance, l’information du public, la sécurité des ouvrages hydrauliques, ainsi que la préparation à la gestion de crise. Cette action est créditée de 37,5 millions d’euros en 2023.

La stratégie nationale Biodiversité est financée à hauteur de 150 millions d’euros. Certains estimeront que c’est insuffisant. En tout état de cause, les investissements sont nécessaires.

Je finirai par le soutien aux agriculteurs. Une enveloppe budgétaire est allouée à l’indemnisation des dégâts provoqués par les grands prédateurs et à la protection des élevages. Alors qu’une réflexion est engagée avec le ministère de l’agriculture, cette nouvelle enveloppe est un signal positif pour préserver notre modèle d’agropastoralisme, menacé, et permettra de financer le Plan national d’actions 2018-2023 sur le loup et les activités d’élevage.

MaPrimeRénov’ a été renforcée pour accélérer et massifier la rénovation énergétique. Si l’effort est conséquent, soyons vigilants pour les foyers les plus modestes.

Avec le bouclier tarifaire, ces crédits visent également à protéger le pouvoir d’achat des Français.

Enfin, nous saluons la création du fonds vert à destination des collectivités, doté de 1,5 million d’euros. Adossé à de nombreux autres dispositifs mis en place par le Gouvernement, il devrait nous permettra d’atteindre nos objectifs de transition et de sobriété.

Notre groupe émet un avis favorable à l’adoption de ces crédits.

Mme Lisa Belluco (Écolo-NUPES). La préservation et la gestion des forêts doivent être une de nos priorités car ces dernières stockent plus de la moitié du carbone des terres émergées et jouent un rôle déterminant dans la régulation du CO2, et donc pour notre survie.

Le changement climatique, les risques croissants de feu et les difficultés sanitaires pesant sur les forêts françaises requièrent une gestion forestière de qualité dans les forêts publiques afin qu’elles perdurent. En conséquence, il faut doter l’ONF d’effectifs suffisants. Pourtant, 38 % de ses effectifs ont été supprimés au cours des vingt dernières années et les surfaces à gérer par agent ont donc fortement augmenté. La qualité de la gestion forestière publique, de la surveillance de départs de feu et du suivi sanitaire des peuplements ont également diminué et les conséquences pour les forêts publiques sont lourdes.

En 2023, 95 postes supplémentaires pourraient être supprimés à l’ONF. L’intersyndicale a pourtant souligné que le changement climatique et le dépérissement des forêts vont nécessiter de plus en plus de travail, afin d’assurer le suivi sanitaire et le renouvellement des peuplements forestiers. Les feux de forêt que nous avons subis cet été en témoignent : l’austérité budgétaire appliquée à l’ONF est irresponsable à l’heure du dérèglement climatique. Le groupe Écologiste plaide donc pour une hausse des crédits de l’ONF de 10 millions d’euros au sein du programme « Paysages, eau et biodiversité ».

Nous proposons aussi d’augmenter les moyens du réseau des conservatoires d’espaces naturels. Face à l’effondrement massif de la biodiversité, la préservation de ces espaces est un enjeu national car ils sont un levier de vitalité et de résilience des territoires face aux conséquences du changement climatique. Les dotations de fonctionnement cumulées des conservatoires d’espaces naturels et le budget alloué par l’État à la Fédération des conservatoires des espaces naturels atteignent 1,9 million d’euros. Notre groupe propose de passer à 3,5 millions, montant nécessaire à la pleine réalisation des missions du réseau.

La France est mauvaise élève en matière d’énergies renouvelables, d’autres l’ont dit avant moi. Elle accuse un net retard sur la trajectoire qu’elle s’est fixée et, parmi les vingt-sept États membres de l’Union européenne, elle est le seul pays à ne pas avoir atteint l’objectif fixé par directive. En 2020, la part des énergies renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie du pays n’atteignait que 19 %, bien loin des 23 % attendus. Face à ce retard, il est temps d’agir, en élargissant et en facilitant l’installation d’équipements d’autoconsommation, afin d’en diminuer le coût pour les particuliers et d’accélérer le développement des énergies renouvelables partout, en complément des projets d’ENR de grande ampleur, nécessaires mais pas suffisants.

Je salue la qualité de l’avis de M. Stéphane Delautrette sur le programme 181 « Protection de l’environnement et prévention des risques ». L’augmentation des moyens du programme reste faible au regard des enjeux : les conséquences des risques naturels vont s’aggraver et sont déjà plus graves du fait du dérèglement climatique, et les moyens consacrés à l’adaptation et à la réparation des dégâts vont devoir augmenter, qu’on le veuille ou non. Les assureurs alertent : ils ne seront sûrement plus capables de prendre en charge les réparations liées à ces dégâts dans les années à venir.

La quasi-stagnation des effectifs chargés de la mise en œuvre du programme 181, notamment des inspecteurs des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), est problématique. Si l’on veut réindustrialiser la France, si l’on veut accélérer le déploiement des énergies renouvelables, si l’on veut améliorer la sécurité des installations industrielles existantes dans un contexte de changement climatique, il faudra plus d’inspecteurs. En outre, il faut laisser le temps à ces agents de faire correctement leur travail. Un des objectifs et indicateurs de performance proposé dans le projet de loi de finances est le nombre de contrôles des installations classées réalisé par inspecteur chaque année. Cela incite à multiplier les petites visites au détriment de visites approfondies.

Dans un contexte de dérèglement climatique, prenant enfin au sérieux la prévention et la gestion des risques naturels ou technologiques, M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, a organisé le 13 octobre dernier une journée « Tous résilients face aux risques ». Malheureusement, le budget que nous étudions ne reflète pas cette volonté de se saisir, enfin, du sujet.

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). Nos positions convergent sur les crédits dévolus à l’Ademe. En effet, à peine 100 millions d’euros lui ont été versés pour financer l’accroissement des interventions d’opérateurs. Pourtant, depuis l’adoption de la loi Agec, et celle de la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi « climat et résilience », l’agence doit faire face à une nette augmentation du périmètre de ses missions. À ses compétences historiques s’ajoutent désormais l’accompagnement des collectivités dans la gestion de leurs déchets, l’affichage environnemental ou le suivi des filières à responsabilité élargie des producteurs (REP). Déjà, en 2017, la Cour des comptes appelait à faire évoluer les moyens de l’agence. Il aurait été judicieux de donner suite à cette recommandation.

S’agissant de la sûreté nucléaire, les changements climatiques – notamment l’assèchement des cours d’eau – imposent une vigilance accrue. Est-ce que 6 ETP supplémentaires à l’ASN seront vraiment suffisants ?

Concernant le programme « Paysages, eau et biodiversité », je souhaite vous alerter sur la prolifération des plantes invasives. La mission d’information sur la prolifération des plantes invasives et les moyens pour endiguer cette situation a rendu son rapport en 2021. On le constate dans nos territoires, ces plantes créent des déséquilibres nuisibles à la biodiversité. Le budget proposé n’est pas cohérent. Il était de 1,2 million d’euros en 2022 et nous pensions qu’il serait plus fortement abondé en 2023. Nous défendrons un amendement visant à le porter a minima à 3 millions d’euros.

Les 25 millions d’euros supplémentaires alloués à l’Office français de la biodiversité en 2023, 2024 et 2025 visent à couvrir l’augmentation du point d’indice des fonctionnaires et à résorber en grande partie le déficit accumulé depuis sa création en 2020. Même avec la création de 15 ETP, cela ne lui permettra pas vraiment d’accroître sa présence sur le terrain.

Météo-France gagne 6 ETP. Une broutille lorsque l’on sait que 499 postes ont été supprimés depuis 2016. Les défauts de prévision de cet été devraient pourtant nous alerter.

Alors que la crise énergétique a des conséquences sur le portefeuille des ménages, il est impératif de renforcer l’accompagnement des plus fragiles. Certes, le bouclier tarifaire limite la hausse des prix pour tous les Français, mais il acte tout de même une hausse de 15 % pour certains, qui sera difficile à encaisser. Le chèque énergie semble bien insuffisant. Notre groupe vous propose son évolution sur plusieurs points : sur les critères d’éligibilité, il faut aller au-delà des minima sociaux et penser aux familles modestes ; la valeur faciale devrait au minimum suivre l’inflation ; le taux de non-recours est encore très élevé ; enfin, il faut prévoir une modulation en fonction des zones climatiques.

Des doutes sont permis sur l’efficacité de MaPrimeRénov’. Selon la Cour des comptes, seulement 2 500 logements ont fait un saut d’étiquette. La lutte contre les passoires thermiques passe par une réflexion sur le reste à charge. Au cours de la précédente législature, nous vous avions proposé de financer la rénovation globale et performante des logements d’une part grâce à une subvention forfaitaire et, d’autre part, grâce à une avance remboursable au moment de la mutation du bien – vente ou succession. La Caisse des dépôts considère que nous avons déjà perdu trois ans.

Sur le soutien à l’électrification du parc automobile, vous proposez de porter le bonus pour l’acquisition d’une voiture électrique de 6 000 à 7 000 euros. C’est une belle avancée, mais que fait-on du reste à charge pour les familles modestes ? Pour le deuxième véhicule, ne faudrait-il pas s’orienter vers la location plutôt que l’acquisition ? Vous proposez un leasing social. Mais comment fonctionne le dispositif ? Qui seront les constructeurs associés ? Qui pourra en bénéficier ? Ne pensez-vous pas qu’une aide personnalisée à la mobilité, sur le modèle de l’aide personnalisée au logement, serait plus efficace car elle s’adapterait aux revenus des ménages ?

M. Stéphane Delautrette, rapporteur pour avis. Madame Brulebois, vous soulignez l’augmentation des crédits du programme 181. C’est une réalité. Vous saluez plus particulièrement l’augmentation de 17 % des crédits de l’Ademe et leur abondement par France 2030. Il faut nuancer : cette augmentation fait aussi suite à la disparition de certains crédits et le nombre de projets d’ores et déjà identifiés irait dans le sens d’un abondement plus important.

Madame Guetté, vous soulignez la nécessité de renforcer les moyens afin de développer les énergies renouvelables. Je partage votre constat. Nous avons nous aussi déposé des amendements en ce sens.

Monsieur Vatin, vous faites état de l’effondrement de la production d’électricité nucléaire et d’un parc à l’arrêt. Le sujet a été abordé lors de l’audition de l’ASN, qui a évoqué des problèmes de corrosion sous contrainte nécessitant des opérations de contrôle et de remise en état jusqu’en 2025.

Madame Jourdan, vous ne serez pas surprise que je partage votre analyse puisque vous citez mon avis ! J’insiste sur la nécessité d’augmenter les crédits en faveur de la filière du réemploi, de la réutilisation et du recyclage.

Mme Belluco, vous connaissez bien les ICPE. J’indique dans mon avis que le nombre de contrôles est passé de 25 000 à 18 000 en dix ans. Sans parler de la nécessité de contrôler d’éventuelles nouvelles installations, les services de contrôle des installations classées rencontrent déjà des difficultés. Et elles ne feront qu’augmenter si on développe de nouveaux projets, ce que nous souhaitons tous. Je partage donc votre analyse et propose un abondement des crédits afin de renforcer les effectifs.

Monsieur Bricout, nous avons déposé des amendements identiques concernant les moyens de l’Ademe. Je ne peux donc que partager votre analyse.

Vous avez raison, seuls 6 ETP ont été accordés à l’ASN. Lors des auditions, l’agence a insisté sur la nécessité d’aller au-delà – ils en avaient demandé 21 sur la période 2023‑2027 – et il y a matière à le leur accorder.

Mme Aude Luquet, rapporteure pour avis. Monsieur Taché de la Pagerie, mesdames Belluco et Jourdan, les effectifs de l’ONF dépendent de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » et non des programmes sur lesquels je rapporte. C’est pourquoi je ne peux pas répondre à vos interrogations sur ses effectifs.

Monsieur Taché de la Pagerie, le plafond de dépenses des agences de l’eau a été relevé de 100 millions d’euros ; ce n’est pas négligeable. En outre, elles disposent de la trésorerie pour assurer ces dépenses. Le programme « Paysages, eau et biodiversité » a bénéficié de 526 millions d’euros au titre du plan de relance, dont 300 millions d’euros pour les agences de l’eau.

Monsieur Ott, la renaturation en ville peut être financée par le fonds vert, qui dispose de 100 millions d’euros en autorisations d’engagement et 25 millions d’euros en crédits de paiement pour 2023. En outre, il faut agir auprès des collectivités, sur les PLU, par la mise en place d’un inventaire du patrimoine naturel remarquable et la nomination d’un « référent arbre ». C’est le bon échelon pour protéger les arbres.

Madame Jourdan, même si l’ONF a connu une situation financière difficile, il se redresse et son budget redevient excédentaire. Madame Belluco, la mission d’intérêt général (MIG) biodiversité de l’ONF est dotée de 25 millions d’euros. On pourrait imaginer une nouvelle mission d’intérêt général sur le renouvellement du peuplement forestier – c’est une demande de l’ONF.

Monsieur Bricout, l’enveloppe allouée aux plantes invasives est de 2,5 millions d’euros, et non 1,2 comme vous l’avez dit. En outre, dans le cadre du fonds vert d’accélération de la transition écologique, nous avons acté la création d’un fonds de 20 millions d’euros pour lutter contre les espèces exotiques invasives.

Météo-France comptera effectivement 6 ETP supplémentaires, mais bénéficiera également de 10 millions d’euros de crédits en plus, notamment pour investir dans les supercalculateurs. En outre, ses antennes régionales sont pérennisées, voire renforcées.

Mme Anne Stambach-Terrenoir, rapporteure pour avis. Madame Le Feur, vous avez salué la stabilisation des crédits du programme 217. Mais on ne peut s’en satisfaire, même si cela a été vécu comme un soulagement – je l’ai constaté au cours de mes auditions. Ce n’est pas à la hauteur des enjeux car, du côté des administrations ministérielles, l’État doit jouer un rôle de stratège et cela passe nécessairement par des moyens humains et, dans les autorités administratives indépendantes, cela entraîne une surcharge de travail très bien décrite par Mme Jourdan. Or l’activité de ces dernières va continuer à augmenter : l’Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires, à cause de la reprise du trafic aérien suite à la fin de la crise sanitaire ; la Commission de régulation de l’énergie à cause de la crise de l’énergie actuelle, sans précédent ; la Commission nationale du débat public, dont les missions se sont multipliées dès 2016 du fait du développement de l’éolien – M. Vatin l’a très justement souligné. Il y a deux ans, dans son avis, Mme Luquet soulignait déjà le manque de postes au sein de cette commission, tout comme M. Descoeur l’an dernier.

J’ai constaté les mêmes difficultés pour les écoles d’ingénieurs : ainsi, l’École nationale des ponts et chaussées et l’École nationale des travaux publics de l’État ne demandent qu’à former plus d’étudiants, mais elles manquent de moyens. Stratégiquement, il serait pourtant pertinent de former dès maintenant les cerveaux dont on sait qu’on a besoin.

Une stabilisation des crédits n’est pas sérieuse. Il faut avoir de l’ambition et augmenter les moyens.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Monsieur Guillemard, je partage votre préoccupation d’un reste à charge moindre et d’une rénovation globale. C’est le sens de mes préconisations et de mes amendements.

Monsieur Cosson, je partage votre souci du ciblage des bâtiments tertiaires. En l’état du droit, seuls les bâtiments de plus 1 000 mètres carrés sont ciblés pour des raisons d’efficacité. Il faut revoir le dispositif. En outre, même si cela ne relève pas d’un des programmes que nous examinons, nous devons améliorer la visibilité de la planification de la transition énergétique des bâtiments tertiaires, résidentiels ou de ceux des collectivités publiques. Je défendrai un amendement plaidant pour un document de politique transversale.

Madame Violland, vous avez raison, il faut accompagner les collectivités et c’est l’objectif du fonds vert.

Madame Paris, vous préférez une baisse de TVA entraînant, au mieux, une baisse de 10 à 20 points de la facture énergétique des particuliers, quand le bouclier tarifaire et le chèque énergie permettent de diviser la facture énergétique par dix.

Monsieur Vatin, n’est-il pas contradictoire de vouloir orienter les aides à la rénovation énergétique vers les plus modestes – c’est l’objet de MaPrimeRénov’ – tout en rétablissant le crédit d’impôt – vous l’avez voté – qui va davantage profiter aux ménages les plus aisés ?

Madame Belluco, vous nous interpellez sur les énergies renouvelables, dont les crédits ne figurent pas dans le programme 174. Mais, pour les exercices 2021 à 2023, au titre du mécanisme des tarifs d’achat, le Gouvernement verse environ 30 milliards d’euros pour les énergies renouvelables. En outre, dans le cadre de France 2030, les énergies renouvelables vont bénéficier d’investissements conséquents, qui se chiffrent en milliards d’euros. Dans les prochaines semaines, nous examinerons le projet de loi relatif à l’accélération de la production d’énergies renouvelables. Nous espérons pouvoir compter sur votre soutien.

Enfin, je ne suis pas sûr que la nationalisation d’un secteur économique émergent soit la meilleure solution pour le développer.

Monsieur Bricout, je salue votre implication en faveur de la rénovation énergétique. Vous avez évoqué ce qui est devenu le prêt avance rénovation, destiné à financer les travaux de rénovation énergétique, et remboursable à l’occasion de la mutation du bien.

En revanche, je m’étonne de vos propos sur les 2 500 rénovations ayant permis la sortie du statut de « passoire énergétique » relevé par la Cour des comptes, puisque le nombre réel de rénovations de ce type, au titre des différentes aides à la rénovation, est de 25 000. Le chiffre que vous mentionnez est issu d’une projection inscrite dans un bleu budgétaire.

Je partage votre analyse sur le bonus écologique et le reste à charge. C’est pourquoi nous plaidons pour une plus grande progressivité des aides et pour un système de location, plus favorable à la transition automobile.

M. le président Jean-Marc Zulesi. Nous reprendrons nos travaux à vingt et une heures pour l’examen des amendements.

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III.   Mercredi 19 octobre soir

Lors de sa réunion du mercredi 19 octobre 2022 soir, la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a poursuivi l’examen des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » sur les rapports pour avis de M. Stéphane Delautrette sur les crédits relatifs à la protection de l’environnement et la prévention des risques, de Mme Aude Luquet sur les crédits relatifs aux paysages, à l’eau et à la biodiversité, de M. Antoine Armand sur les crédits relatifs à la transition énergétique et de Mme Anne Stambach-Terrenoir sur les crédits relatifs aux politiques de développement durable.

Article 27 et état B : Crédits du budget général (suite)

Amendements II-CD35 de M. Guy Bricout et II-CD43 de M. Stéphane Delautrette (discussion commune).

Mme Nathalie Bassire (LIOT). L’amendement II-CD35 est défendu.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur pour avis (Protection de l’environnement et pévention des risques). Les deux amendements sont presque les mêmes, la seule différence portant sur la compensation financière. L’amendement II-CD43 propose de créer un nouveau programme en faveur de l’économie circulaire, du réemploi et de la réutilisation, doté de 230 millions d’euros en 2023. Les moyens consacrés à cette politique sont largement insuffisants, comme j’ai eu l’occasion de le rappeler dans mon avis budgétaire. Ils sont en inadéquation avec les objectifs ambitieux fixés par la loi n° 2020‑105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (« loi Agec »), comme la réduction de 15 % des quantités de déchets ménagers et assimilés produits par habitant en 2030 par rapport à 2010. Cet amendement contribue à la mise en œuvre de la stratégie « 3R » pour la réduction, le réemploi et le recyclage des emballages en plastique à usage unique d’avril 2022, qui évalue les besoins en investissement dans le réemploi des emballages à une somme comprise entre 1 et 2,3 milliards d’euros. Comme convenu avec M. Guy Bricout avant la séance, je lui propose de retirer son amendement au profit du mien.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement II-CD243 de M. Stéphane Delautrette.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à augmenter les crédits du fonds pour l’économie circulaire géré par l’Agence de la transition écologique (Ademe), à hauteur de 100 millions d’euros. En effet, ce fonds est doté de 210 millions d’euros en 2023, ce qui, là encore, n’est pas suffisant pour atteindre les objectifs de réduction et de recyclage des déchets prévus par la loi Agec.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD44 de M. Stéphane Delautrette.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à doter l’Ademe de 20 millions d’euros supplémentaires en faveur du soutien aux structures de l’économie sociale et solidaire spécialistes du réemploi et de la réutilisation. Comme je l’ai montré dans l’avis budgétaire, les crédits du fonds pour l’économie circulaire ne sont pas suffisamment orientés vers le réemploi et la réutilisation.

La commission rejette l’amendement II-CD44.

Amendement II-CD244 de M. Stéphane Delautrette.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur pour avis. Cet amendement propose d’augmenter de 200 millions d’euros les crédits du fonds chaleur de l’Ademe. En effet, lors des auditions que j’ai pu réaliser tout au long de l’élaboration de mon avis budgétaire, les différents acteurs ont fait état du manque de crédits du fonds, de l’inflation qui augmente le coût des travaux, mais aussi de la nécessité d’accroître les enveloppes budgétaires consacrées à des projets menés dans des collectivités territoriales de petite taille, qui sont souvent plus coûteux. Je ne vous rappelle pas les avantages de la chaleur renouvelable, que j’ai détaillés lors de la présentation de l’avis.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD205 de Mme Clémence Guetté.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Cet amendement vise également à abonder les crédits du fonds chaleur de l’Ademe, qui est sous-doté. Tous les acteurs économiques concernés le disent : même à la hausse, ces crédits ne sont pas suffisants pour couvrir les besoins d’installation et de production de chaleur renouvelable. Ce sujet est absolument essentiel, c’est pourquoi, suivant une proposition du syndicat des énergies renouvelables (SER), nous vous proposons d’augmenter ces crédits.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur pour avis. C’est un avis favorable, puisque je proposais tout à l’heure une augmentation des crédits du fonds chaleur d’un montant bien plus important.

Mme Danielle Brulebois (RE). Je ne peux pas laisser dire que rien n’est fait concernant le fonds chaleur. Celui-ci a bénéficié de 350 millions d’euros en 2021 et de près de 150 millions d’euros supplémentaires en 2022. Il est doté de 520 millions en 2023. Ce fonds a permis de réduire la consommation d’énergies fossiles de 39 térawatts-heure (TWh) par an en moyenne. La programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) fixe un objectif de production de chaleur renouvelable de 24 TWh en 2023 et de 31 à 36 TWh en 2028. Ces objectifs sont tenus.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Je souhaite rassurer ma collègue : nous n’avons pas dit que rien n’était fait concernant le fonds chaleur, mais que les crédits étaient insuffisants cette année encore. J’invite donc mes collègues à adopter cet amendement.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD52 de M. Gérard Leseul.

Mme Chantal Jourdan (SOC). Cet amendement vise à renforcer les crédits du fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), dit « fonds Barnier ». On constate une stagnation des crédits dont bénéficient les dispositifs dédiés spécifiquement à la prévention des risques technologiques ou naturels, ainsi qu’une baisse des crédits dédiés au FPRNM. Compte tenu de la multiplication des phénomènes climatiques extrêmes partout dans le monde, et notamment des incendies dévastateurs que nous avons connus en France cet été, nous estimons que l’État doit mieux anticiper les risques environnementaux. C’est pourquoi nous proposons une augmentation des crédits du FPRNM à hauteur de 180 millions d’euros.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur pour avis. En effet, la fréquence et l’intensité des risques naturels sont accrus par le changement climatique. Mme Jourdan en rappelait les différents épisodes, et notamment ceux, récents, survenus cet été. Pour réduire la vulnérabilité de certaines collectivités face à ces risques, le fonds Barnier a besoin de ressources supplémentaires. Je suis donc évidement favorable à cet amendement que j’ai cosigné.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD208 de Mme Clémence Guetté.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Cet amendement vise à abonder un fonds des énergies marines renouvelables piloté par l’Ademe, afin de répondre à une ambition industrielle que, je l’espère, nous partageons tous. Quand on parle des énergies renouvelables, on oublie beaucoup trop souvent les énergies marines alors qu’il s’agit d’un domaine clé pour le futur énergétique du pays. Je pense en particulier à l’énergie marémotrice, à l’énergie hydrolienne ou à l’énergie houlomotrice. Nous avons la chance de disposer d’une immense façade maritime et donc de pouvoir utiliser cette énergie. L’énergie hydrolienne représente d’ailleurs, à elle seule, un potentiel de 3 000 à 5 000 mégawatts supplémentaires pour le pays ; pourtant l’État s’est notamment désengagé du projet d’investissement dans l’usine d’hydroliennes de Cherbourg en 2018. Nous invitons donc le Gouvernement à prendre ses responsabilités dans ce secteur clé dont nous aurons l’occasion de reparler cette année, en abondant le fonds des énergies marines pour qu’il atteigne 500 millions d’euros.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur pour avis. Avis favorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD209 de Mme Clémence Guetté.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Cet amendement porte sur la conversion écologique des greens de golf, qui, j’en suis sûre, intéressera tout le monde. Le golf ne constitue plus une pratique sportive en phase avec les périls que nous connaissons sur le territoire national compte tenu de la crise climatique. La sècheresse qui a sévi cet été l’a illustré. Nous avons consommé des milliers de litres d’eau pour continuer à entretenir ces greens de golf, alors même que, dans le même temps, les agriculteurs ne pouvaient pas irriguer leurs cultures. Au-delà des nécessaires évolutions de la réglementation, il est temps pour les golfs de devenir vecteurs de la bifurcation écologique et de montrer l’exemple. Selon la fédération française de golf, il existe environ 16 000 hectares engazonnés de golfs en France, ce qui représente un potentiel foncier très important pour notre souveraineté énergétique. Je vous propose donc de créer un fonds de conversion écologique des golfs pour accompagner les propriétaires de terrains qui le souhaitent dans la mise en place de projets agro-écologiques ou d’énergies renouvelables sur les parties gazonnées de leur site, à partir du 1er janvier 2023. Nous prévoyons de doter ce fonds d’un budget conséquent.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur pour avis. Je partage tout à fait votre constat concernant l’impact environnemental des terrains de golf. Je m’interroge toutefois sur le financement public du dispositif : si j’ai bien compris, vous proposez une subvention intégrale de la reconversion. C’est la raison pour laquelle je donne plutôt un avis de sagesse à cet amendement.

Mme Danielle Brulebois (RE). Le golf est une activité sportive et de loisirs qui se démocratise aujourd’hui. C’est notamment le cas du swing-golf dans le Jura. Il s’agit d’un sport très familial et accessible à tout le monde. Outre ces aspects-là, les terrains de golf présentent un intérêt sur le plan environnemental. Ils permettent souvent de conserver une partie de milieux naturels et de limiter la périurbanisation. Ils font en outre office de couloir écologique ; certains possèdent des mares, des arbres et des bosquets. Le gazon et les prairies, enfin, remplissent un rôle de filtration et d’épuration de l’eau. Tout n’est donc pas négatif en ce qui concerne les golfs.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Sans être une spécialiste de la fréquentation sociale des golfs, il me semble que ce sport n’est pas encore extrêmement démocratisé. Concernant la biodiversité qui préoccupe ma collègue, nous proposons justement l’installation de projets agro‑écologiques sur ces greens de golf. Cette préoccupation me semble donc respectée par l’amendement que je vous invite à voter.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD212 de Mme Clémence Guetté.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Cet amendement a pour objet l’augmentation du soutien technique et financier de l’Ademe aux innovations pour le stockage de l’énergie, prévu aujourd’hui dans le cadre de son programme « Hydrogène ». Cet amendement fait évidemment référence à l’hydrogène vert. Il s’agit d’un secteur stratégique et déterminant puisqu’il permet de mieux piloter le système énergétique et de renforcer la sécurité d’approvisionnement en France, tout en éliminant notre dépendance aux énergies fossiles, une préoccupation que je pense nous partageons tous ici. Par ailleurs, nous devons nous battre pour que ces techniques nouvelles de stockage de l’énergie ne constituent pas pour les acteurs économiques le point d’appui à la poursuite du gaspillage énergétique, aujourd’hui indissociable du productivisme capitaliste. Dès lors, notre pays ne peut entrer dans la bifurcation écologique sans renforcer son intervention au sein de l’écosystème d’innovations pour le stockage de l’énergie. Nous proposons donc dans cet amendement d’abonder les crédits du programme « Hydrogène » de l’Ademe de manière à ce qu’ils atteignent 500 millions d’euros.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur pour avis. Nous connaissons tous l’importance des enjeux liés au stockage de l’énergie. Comme vous l’indiquez dans votre présentation, il est nécessaire de renforcer les moyens de l’Ademe pour faire émerger des solutions innovantes. Je donne donc un avis favorable à cet amendement.

La commission rejette l’amendement.


Amendement II-CD193 de Mme Anne Stambach-Terrenoir.

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). Cet amendement concerne l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (Ineris) qui, comme vous le savez, conduit des missions clés face à l’urgence écologique. Je rappelle qu’en plus de la surveillance industrielle, il effectue des missions de contrôle des pollutions, des travaux de prévention des risques naturels et de surveillance des impacts sanitaires des installations et zones sensibles. À l’heure où de plus en plus de composés chimiques dangereux sont manipulés, il est urgent qu’il dispose des moyens pour effectuer ces contrôles. Or l’Ineris a perdu 48 postes depuis 2017. En 2023, il est prévu une hausse de seulement deux équivalents temps plein travaillé (ETPT). Par cet amendement, nous proposons de rétablir le niveau d’emploi du début du quinquennat précédent en récréant les 46 postes supprimés.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur pour avis. J’ai eu l’occasion d’auditionner l’Ineris dans le cadre de l’élaboration de mon avis budgétaire et effectivement, les réductions de subventions et d’effectifs consacrés à l’institut ont été importantes ces dernières années. Ces baisses significatives ont été concomitantes à un accroissement des besoins de l’État dans le domaine de la maîtrise des risques technologiques. De ce fait, cette évolution pourrait modifier à terme l’équilibre des recettes de l’Ineris en faveur du secteur privé, et donc remettre en cause son indépendance. Avis favorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD134 de Mme Marie Pochon.

Mme Lisa Belluco (Écolo-NUPES). Cet amendement vise à créditer l’Ademe pour permettre la création et le déploiement de formations à l’utilisation de la méthode de l’évaluation « climat » des budgets des collectivités, telle que développée par l’institut de l’économie pour le climat (I4CE). Dans son rapport annuel de 2021, le Haut Conseil pour le climat a une nouvelle fois rappelé les insuffisances du pilotage des politiques publiques. Il nous semble donc essentiel d’encourager le déploiement de l’évaluation « climat » des budgets des collectivités territoriales en permettant la formation des agents territoriaux à cette méthodologie. Nous proposons de déployer cette formation auprès de toutes les collectivités territoriales, que ce soit celles ayant lancé un plan climat‑air‑énergie territorial (PCAET), les départements ou les régions.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur pour avis. Cette méthodologie des budgets verts, déjà mise en œuvre par l’État, s’est révélée utile pour identifier les dépenses favorables à l’environnement et pour accroître la transparence sur les dépenses qui, au contraire, sont néfastes pour l’environnement. Étendre cet exercice aux collectivités territoriales me semble utile. C’est la raison pour laquelle je suis favorable à cet amendement qui, tout en proposant un montant supérieur, va dans le même sens que celui déposé par mon collègue Gérard Leseul et que j’ai cosigné.

Mme Danielle Brulebois (RE). L’État, en réalisant le premier un budget vert, s’est fortement engagé et a montré la direction. Les collectivités sont également engagées. Le ministre de la transformation et de la fonction publiques a lancé un plan inédit de formation à la transition écologique pour tous les agents publics. L’Association des maires de France (AMF) et l’Institut national des études territoriales (INET) organisent aussi des formations. Les collectivités sont très volontaires et je ne pense pas qu’elles attendent qu’on leur organise des formations.

Mme Lisa Belluco (Écolo-NUPES). De plus en plus d’agents territoriaux se forment aux enjeux de la transition écologique. Mais nous faisons ici référence à une méthode d’évaluation spécifique, développée par le think tank I4CE reconnu par nous tous, qui doit permettre de mettre en place une analyse efficiente, sous le prisme du climat, des budgets des collectivités. Nous pensons donc que cette formation est nécessaire, en plus de ce qui est par ailleurs déjà mis en œuvre.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD54 de M. Gérard Leseul.

Mme Chantal Jourdan (SOC). Il s’agit du même amendement. Nous avons retenu un montant d’un million d’euros pour commencer. Comme mes collègues, je rappelle l’importance de l’enjeu de cette formation.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur pour avis. Je souhaite insister sur un point. Il s’agit de permettre le développement d’outils méthodologiques et d’accompagnement des collectivités dans la mise en œuvre de cette démarche. L’Ademe joue justement ce rôle central d’accompagnement des collectivités. Le choix de cet opérateur de l’État me paraît donc important. Avis favorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD140 de Mme Marie Pochon.

Mme Lisa Belluco (Écolo-NUPES). Il est nécessaire d’abonder les crédits de l’Ademe pour réaliser les missions évoquées précédemment. Cet amendement pourrait être un amendement de repli car il ne propose qu’un million supplémentaire pour les missions de l’Ademe dont nous venons de parler.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur pour avis. J’émets un avis favorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD194 de Mme Clémence Guetté.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Nous voulons augmenter les crédits alloués aux agences de l’eau. Elles ont subi, comme d’autres agences, des suppressions de postes : 171 postes supprimés entre 2017 et 2022 lors du mandat précédent de M. Emmanuel Macron. Pour 2023, aucune création de poste n’est envisagée. L’eau est une ressource stratégique. Cet été, 117 communes ont été privées d’eau potable. L’été a été particulièrement sec suite au manque de précipitations. Il nous faut renforcer les moyens des agences de l’eau qui ont des missions stratégiques quant à la ressource en eau. Nous vous proposons de prendre 8,55 millions sur l’action « Transport aérien », qui nous semble être un secteur qu’il faut revoir pour la bifurcation écologique, afin d’abonder le programme 113.

Mme Aude Luquet, rapporteure pour avis (Paysages, eau et biodiversité). Concernant les agences de l’eau, le PLF pour 2013 prévoit le maintien de la taxe affectée à hauteur de 2,2 milliards d’euros et un maintien des effectifs. Par ailleurs, le plan de relance leur dédie 300 millions d’euros supplémentaires, dont 50 millions pour les outre-mer. Les moyens supplémentaires, nous les avons déjà donnés ; j’émets donc un avis défavorable.

M. Pierre Cazeneuve (RE). Les positions prises sont dures, mais nous partageons la même analyse quant à l’intérêt du fond chaleur, ainsi que sur le sujet de l’adaptation. Il faut rappeler que l’année prochaine, nous examinerons la loi de programmation « énergie climat » et la loi de programmation pluriannuelle de l’énergie. Cela nous permettra d’aborder ces sujets en prenant le temps du débat et en dégageant des crédits sur le long terme. Il y a un besoin de planification, qui nous permettra de ne pas discuter année après année l’abondement de ces fonds, et donnera une vision de long terme.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Nous ne proposons pas le maintien des effectifs mais une augmentation. Cet été, nous avons vu que le phénomène est irréversible ; la question de l’eau sera cruciale dans les années à venir. Il faut, dès ce PLF pour 2023, prendre ce sujet au sérieux en augmentant les effectifs et ne pas attendre la PPE et la loi « énergie climat » ; l’urgence est déjà là. Nous devons augmenter les budgets de ces agences.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD202 de Mme Anne Stambach-Terrenoir.

Mme Anne Stambach-Terrenoir (Écolo-NUPES). Il s’agit d’augmenter les moyens accordés aux agences de l’eau. Depuis 2021, les redevances perçues par les agences sont plafonnées à près de 2,2 milliards d’euros par an. Nous estimons que ce plafonnement est trop bas et les moyens insuffisants. Je rappelle qu’on trouve des traces de pesticides dans 90 % des cours d’eau, et que nous ingérons l’équivalent d’une carte de crédit par semaine en microplastiques présents dans l’eau potable que nous buvons. Le mois dernier, le journal Le Monde indiquait que près de 12 millions de personnes ont été concernées par des dépassements de seuil de qualité de l’eau potable pour les pesticides et leurs métabolites en 2021. Cela soulève des enjeux écologiques et de santé publique. Nous proposons donc de transférer 8,5 millions d’euros aux agences de l’eau.

Mme Aude Luquet, rapporteure pour avis. Je vais compléter mon propos. Sur les 300 millions d’euros du plan de relance, 99 % ont déjà été engagés et 47 % ont été dépensés ; il reste donc 53 % qui vont être alloués aux agences de l’eau. J’émets donc un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD228 de M. Emmanuel Taché de la Pagerie.

M. Emmanuel Taché de la Pagerie (RN). Les milieux humides et aquatiques sont les seuls écosystèmes faisant l’objet d’une convention internationale, la convention de Ramsar. Aux frontières de la terre et de l’eau, ils sont en effet stratégiques par les nombreux services qu’ils rendent à la nature et à l’homme. Ces zones humides remplissent en effet de nombreuses fonctions ayant des incidences positives sur l’environnement et les activités humaines : des fonctions hydrologiques, comme la régulation du débit des cours d’eau, la prévention des inondations, ou encore la recharge des nappes souterraines. Elles exercent également des fonctions biologiques en tant que réservoirs de biodiversité, notamment végétale et ornithologique, mais aussi des fonctions économiques : production de sel, de végétaux, et pêche.

Malgré cette importance cruciale, de nombreuses zones humides, notamment la Camargue, sont dans un état critique, particulièrement en raison de la salinisation des sols. Je donne un exemple très concret : quand un litre d’eau contenait 10 grammes de sel en 2012, il en compte désormais plus de 66 grammes. Pour contrer ce phénomène, des investissements sont nécessaires. Dans le cadre de cette action faiblement dotée, une augmentation conséquente du budget aiderait l’État, les services déconcentrés ainsi que les associations de terrain travaillant spécifiquement sur la préservation et la gestion durable, à se doter d’outils pratiques pour mieux évaluer les besoins et appliquer les meilleurs standards de protection.

Mme Aude Luquet, rapporteure pour avis. Concernant les zones humides, un inventaire et une cartographie sont en cours. Par ailleurs, un plan d’actions pour 2022-2026 est soutenu à hauteur de 3 millions d’euros dans le PLF 2023. Enfin, la stratégie Biodiversité 2030 va déployer 37,5 millions d’euros pour la protection des milieux naturels. Votre amendement me semble satisfait ; j’émets donc un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD41 de Mme Chantal Jourdan.

Mme Chantal Jourdan (SOC). J’ai bien compris que la question des effectifs de l’Office national des forêts (ONF) ne doit pas être traitée dans le cadre de cette mission. Toutefois, mon amendement donne des moyens financiers supplémentaires pour l’ONF ; il a donc toute sa raison d’être. Cet amendement vise à créer 2 000 ETP au sein de l’ONF. Cela peut paraître important, mais l’ONF a perdu 4 000 emplois depuis vingt ans. La qualité de la gestion forestière publique s’est dégradée et les personnels connaissent un malaise profond suite au manque de valorisation de leur profession. Compte tenu du dérèglement climatique et des nouveaux enjeux climatiques, il faut élargir les missions des personnels forestiers et prévoir des effectifs plus importants. Cela signifie évoluer vers des pratiques sylvicoles plus écologiques, sur les nouveaux repeuplements, et expérimenter de nouvelles façon de faire.

Mme Aude Luquet, rapporteure pour avis. Vous avez indiqué que la mission sur laquelle je rapporte ce soir n’est pas le bon support. En effet, s’agissant des effectifs, ils relèvent de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ». L’action de l’ONF est importante ; des crédits supplémentaires lui sont alloués à travers les missions d’intérêt général (MIG) à hauteur de 2,5 millions d’euros. J’émets donc un avis défavorable.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-CD203 de Mme Clémence Guetté.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Nous proposons d’augmenter le budget de l’ONF de 25 millions d’euros. On ne peut pas faire plus avec moins. Depuis trente ans, l’ONF est passé de plus de 15 000 emplois en 1985 à 7 770 emplois en 2021. Un agent se charge en moyenne de 1 700 hectares, contre 800 il y a vingt ans. Le taux de suicide est également très important ; il traduit la souffrance éprouvée par les agents qui ne peuvent accomplir leurs missions. Je vous invite à voter ce second amendement.

Mme Aude Luquet, rapporteure pour avis. Même argument que pour l’amendement précédent. J’émets donc un avis défavorable.

M. Pierre Meurin (RN). Après plusieurs auditions sur les feux de forêts, Mme Bérangère Couillard prônait un investissement massif dans la surveillance technologique afin de prévenir les incendies. Je pense que la surveillance humaine des gardes forestiers est la plus efficace. Nous voterons tous les amendements qui proposent l’augmentation des budgets et des effectifs de l’ONF. Nous soutenons donc tous ces amendements.

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). Nous avons lancé une mission d’information sur l’adaptation de la politique forestière au dérèglement climatique. Nous avons débuté la première audition avec l’ONF, qui exprime un besoin de moyens techniques et humains pour pouvoir faire face aux effets du réchauffement climatique sur la dégradation de nos forêts. Je vous invite donc à voter cet amendement. 

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-CD138 de Mme Lisa Belluco.

Mme Lisa Belluco (Écolo-NUPES). Je suis gênée car je propose que les fonds versés à l’ONF soient augmentés de 10 millions d’euros. Il s’agissait d’un amendement de repli ; je retire donc cet amendement avant de le redéposer en séance par sécurité.

L’amendement est retiré.

Amendement II-CD185 de M. Emmanuel Taché de la Pagerie.

M. Emmanuel Taché de la Pagerie (RN). Je connais par avance la réponse de Mme la rapporteure. Je vais dans le sens de mes collègues du groupe socialiste et des autres groupes. Cet amendement vise à augmenter le budget alloué à l’ONF de 10 millions d’euros, pour les missions d’intérêt général prévues par le programme. Depuis 1985, le nombre d’agents travaillant pour l’ONF est passé de 15 000 agents à 8 000, pour gérer 11 millions d’hectares de forêts publiques. Un agent de l’ONF est donc en charge de 1 700 hectares contre 800 il y a vingt ans. Pour faire face à la crise structurelle, entretenue par un sous-investissement chronique dénoncé par la Cour des comptes, des investissements conséquents doivent être engagés et l’accroissement des effectifs doit être consacré. Cet amendement vient donc soutenir, en complément du budget prévu, l’ONF afin qu’il puisse supporter son déficit et remplir ses missions.

Mme Aude Luquet, rapporteure pour avis. Cet amendement est similaire aux précédents, j’émets donc un avis défavorable.

Mme Huguette Tiegna (RE). J’attire votre attention. Nous venons de voter un amendement qui abonde les crédits de l’ONF. Il faut être vigilant car on ponctionne ainsi les crédits du programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables ». Nous avons déjà augmenté le budget de l’ONF, il n’est donc pas nécessaire de voter cet amendement.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD42 de Mme Chantal Jourdan.

Mme Chantal Jourdan (SOC). Je retire cet amendement.

L’amendement est retiré.

Amendement II-CD192 de Mme Anne Stambach-Terrenoir.

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). Cet amendement vise à augmenter les crédits alloués à l’Office français de la biodiversité (OFB). Je rappelle qu’il est le résultat de la fusion entre l’Agence française pour la biodiversité (AFB) et l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS). Lors de la fusion de ces deux entités, nous avions alerté sur les risques qu’elle présentait en termes de suppressions de postes. Le signal politique envoyé l’année dernière était par ailleurs de mauvais augure, puisque vingt postes ont été supprimés lors du PLF pour 2022. Or, nous vivons une crise de la biodiversité sans précédent, avec la sixième extinction des espèces et un million d’espèces menacées directement. Pour 2023, le schéma d’emplois de l’office est de 2 727 postes, soit une hausse de 15 ETP par rapport à l’année dernière. Toutefois, nous ne retrouvons pas le nombre de postes de 2017, qui en comptait 13 de plus. Nous proposons, par cet amendement raisonnable, 13 postes supplémentaires.

Mme Aude Luquet, rapporteure pour avis. Je rappelle tout d’abord que le but de la fusion de l’ONCFS et l’AFB était également de mettre fin à un certain nombre de doublons dans les fonctions support. Ceci étant dit, dans le PLF pour 2023, la subvention pour charges de service public de l’OFB augmente de 25 millions d’euros et ses effectifs croissent de 15 ETP, principalement pour créer une nouvelle brigade mobile contre les grands prédateurs, mais aussi pour conforter les moyens de l’OFB et assurer la prise en compte de la revalorisation des salaires. Par ailleurs, je vous rappelle que l’OFB a bénéficié de 85 millions d’euros supplémentaires dans le cadre du plan de relance au cours des deux dernières années. Je donne donc un avis défavorable à votre amendement.

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). L’OFB joue également un rôle dans la régulation des cervidés. Il travaille aussi sur la protection et la replantation des jeunes pousses. Eu égard à son rôle dans la protection de notre forêt, nous avons intérêt à en renforcer les effectifs. 

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD7 de M. Guy Bricout.

Mme Nathalie Bassire (LIOT). Cet amendement a pour objet de donner des moyens à l’OFB pour la création d’aires marines protégées à visée éducative et locale en encourageant cette expérience à hauteur de 500 000 euros.

Mme Aude Luquet, rapporteure pour avis. J’entends tout l’intérêt de la proposition mais je pense que la création d’un label doit relever de la décision de l’OFB et de sa tutelle. Le cas échéant, les 25 millions d’euros d’augmentation du budget de l’OFB pourront certainement financer cette expérimentation. Je donne donc un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD151 de Mme Sandrine Rousseau.

Mme Lisa Belluco (Écolo-NUPES). Cet amendement, travaillé par les ONG Convergence Animaux Politique et Réseau-Cétacés vise à financer la création d’un refuge marin pour accueillir les dauphins captifs du Marineland d’Antibes et de la cité marine de Planète sauvage à Port-Saint-Père, conformément aux dispositions relatives aux delphinariums de la loi contre la maltraitance animale de 2021. Bien que les fins de la captivité des orques et des dauphins soient respectivement programmées en 2025 et 2027, pour le moment rien, n’a été engagé sur le devenir de ces cétacés après cette période.

Des solutions sont d’autant plus urgentes que les dirigeants des delphinariums ont tendance à envoyer leurs dauphins dans d’autres structures homologues dans d’autres pays, en Chine notamment.

Le groupe Écologiste propose donc d’apporter un financement pour créer un premier refuge dont le coût est estimé à 15 millions d’euros. Pour rappel, le refuge marin est une surface dédiée en mer, protégée et délimitée par des filets. Les animaux y sont nourris et soignés, mais ne sont plus soumis à des spectacles. Les bénéfices d’un tel projet sont à la fois d’ordre scientifique, avec un pôle d’études des dauphins ; pédagogique, avec l’accueil du public, y compris les scolaires ; et économique, avec la création d’emplois et le développement d’un tourisme responsable et respectueux de l’environnement.

Plusieurs refuges ont déjà vu le jour, en Islande ou à Bali. D’autres projets sont en cours en Grèce et en Italie. Nous proposons que la France ouvre le prochain refuge.

Mme. Aude Luquet, rapporteure pour avis. Je vous rappelle que nous avons voté, en novembre 2021, une loi contre la maltraitance animale qui a donné un délai de cinq ans pour permettre de placer ces animaux dans des sanctuaires. Il faudra certainement accompagner socialement et financièrement les parcs, sachant que les animaux leur appartiennent et qu’ils devront aussi prendre leur part. Dans le PLF pour 2023, un accompagnement est prévu à hauteur de 3,5 millions d’euros, à l’action 7 du programme 113, et un plan a été élaboré pour accompagner l’extension ou la création de refuges. Par ailleurs, les crédits ont été renforcés à la fois au sein du programme 113 mais aussi à travers le fonds vert pour étendre et consolider le réseau des aires naturelles protégées, notamment des aires marines destinées aux cétacés. Au regard de ces éléments, je donne un avis défavorable à votre amendement. 

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD188 de M. Nicolas Thierry.

Mme Lisa Belluco (Écolo-NUPES). Cet amendement vise à augmenter les moyens du réseau des conservatoires d’espaces naturels. Les espaces naturels sont un levier de vitalité et de résilience des territoires face aux conséquences du changement climatique. Avec l’érosion massive de la biodiversité, la préservation de ces espaces devient un enjeu national. L’action du réseau des conservatoires d’espaces naturels s’inscrit dans ce contexte. Ce réseau mène une multitude de projets en faveur de la biodiversité. Actuellement, les dotations de fonctionnement cumulées des conservatoires d’espaces naturels et le budget alloué par l’État à la fédération des conservatoires d’espaces naturels atteignent un montant total de 1,9 million d’euros. Ce montant reste insuffisant et nous proposons de le porter à 3,5 millions d’euros, cette augmentation étant nécessaire pour la pleine réalisation des missions du réseau des conservatoires d’espaces naturels.

Mme. Aude Luquet, rapporteure pour avis. Le soutien de l’État aux conservatoires a évolué de 1 million d’euros en 2020 à 2,5 millions d’euros en PLF 2023. L’enveloppe a donc plus que doublé en trois ans. Par ailleurs, des crédits complémentaires peuvent être attribués aux conservatoires dans le cadre des actions menées au titre de la gestion des sites Natura 2 000 ou de la mise en œuvre des plans de protection des espèces, ce qui sera le cas en 2023 avec des mesures spécifiques du fonds vert. Celui-ci prévoit également une enveloppe de 20 millions d’euros pour lutter contre les espèces exotiques envahissantes, dont une partie sera allouée aux conservatoires. Pour toutes ces raisons, je donne un avis défavorable à votre amendement. 

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-CD245 de Mme Aude Luquet, rapporteure pour avis.

Mme. Aude Luquet, rapporteure pour avis. Cet amendement vise à renforcer l’action 1 « Sites, paysages et publicité » du programme 113 qui recouvre les activités de protection et de valorisation des paysages et sites classés et des grands sites de France. Ces moyens servent également à la connaissance du paysage, notamment à travers les atlas de paysages. Ces atlas sont des outils importants d’aide à la décision et participent notamment à la protection du patrimoine naturel dans les villes. Si l’on veut pouvoir mieux protéger notre biodiversité, encore faut-il d’abord la connaître en détail sur nos territoires. Il apparaît donc inopportun aujourd’hui de réduire les financements dédiés à cette connaissance. En effet, les crédits de cette action sont en baisse de 12 % en PLF 2023, soit une minoration de 800 000 euros des crédits qui lui sont alloués. Je propose donc de restaurer les crédits de cette action à leur niveau de 2022.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-CD31 de M. Patrice Perrot.

Mme. Danielle Brulebois (RE). C’est un amendement de notre collègue Patrice Perrot qui avait été rapporteur, en 2020, d’une mission d’information relative à la lutte contre les espèces exotiques envahissantes afin de mieux contrôler leur introduction. La lutte contre ces espèces exotiques a un coût annuel moyen de 38 millions d’euros sur le territoire national. On pense notamment à la renouée du Japon ou à l’égérie dense.

Mme. Aude Luquet, rapporteure pour avis. Je salue l’engagement de M. Perrot sur la question des plantes invasives. En 2022, une enveloppe de 1,1 million d’euros a été affectée à cette thématique, et cette année, une enveloppe complémentaire de 1,4 million d’euros a été débloquée pour permettre le financement, via un appel à projets, d’actions de gestion de populations d’espèces exotiques envahissantes. En outre, une enveloppe de 20 millions d’euros destinée à la lutte contre les espèces exotiques envahissantes a été prévue dans le cadre du fonds d’accélération de la transition, qui viendra abonder les crédits dédiés à cette action au cours des prochaines années. Je pense donc que votre demande a été entendue et vous demande de retirer votre amendement. 

M. Jean-Louis Bricout (SOC). Nous connaissons aussi les espèces invasives dans ma circonscription, et je ne parle pas que du Rassemblement national. Cela porte sérieusement atteinte à la biodiversité et je pense qu’il faut davantage de crédits pour lutter contre ce phénomène.

M. Pierre Meurin (RN). J’entends que l’on puisse faire des plaisanteries à cette heure tardive, mais je ne suis pas certain que les électeurs qui ont voté pour nous apprécient ce genre de qualificatifs. Je vous remercie de bien vouloir retirer vos propos.

M. Jean-Louis Bricout (SOC). Je retire mes propos.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD32 de M. Patrice Perrot.

Mme. Danielle Brulebois (RE). C’est un amendement de repli qui prévoit de renforcer les crédits à hauteur de 1,5 million d’euros au lieu de 3 millions d’euros.

Mme. Aude Luquet, rapporteure pour avis. Même argumentaire que précédemment, je demande donc un retrait.

Mme. Danielle Brulebois (RE). Je le retire.

L’amendement II-C32 est retiré.

Amendement II-CD187 de M. Nicolas Thierry.

Mme Lisa Belluco (Écolo-NUPES). Cet amendement propose de renforcer les moyens de Météo-France, de l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) et du Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema), considérant que ces opérateurs publics participent à l’anticipation et à l’adaptation au changement climatique. Les catastrophes naturelles de l’été 2022 ont mis en lumière le rôle fondamental des opérateurs publics en matière d’anticipation et d’adaptation au changement climatique. Pourtant, ces opérateurs perdent de façon tendancielle des ressources humaines et financières et souffrent d’une logique comptable qui les prive de moyens : ‑ 602 emplois pour Météo-France, ‑ 254 emplois pour l’IGN et ‑ 633 emplois pour le Cerema. Cet amendement a pour objet de rétablir leurs subventions pour charges de service public à leur niveau de 2014.

Mme. Aude Luquet, rapporteure pour avis. Votre amendement prévoit d’augmenter les crédits du Cerema, de l’IGN et de Météo-France pour un total de 45 millions d’euros. Je rappelle donc que les crédits du programme sont déjà en augmentation de 13 millions d’euros par rapport à la LFI 2022. Cette augmentation profite essentiellement à Météo-France dont la dotation augmente de 10 millions d’euros et dont les effectifs progressent aussi de 6 ETP. Pour le Cerema et l’IGN, les crédits et les effectifs sont stabilisés à leur niveau de 2022. Ces opérateurs bénéficient aussi de crédits liés au plan de relance et au fonds vert, ainsi que de ressources provenant d’appels à projets. Je donne donc un avis défavorable à votre amendement. 

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD189 de Mme Anne Stambach-Terrenoir.

Mme. Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). Cet amendement concerne le Cerema, organisme d’expertise essentiel pour la bifurcation écologique et l’aménagement du territoire. Or, cet opérateur a perdu 404 postes depuis 2017 ! Fin juillet 2021, un rapport conjoint du Conseil général de l’environnement et du développement (CGEDD) et de l’inspection générale de l’administration (IGA) a mis en avant le modèle économique du Cerema qui « n’est pas soutenable ». Les rapporteurs soulignent même que « le pronostic vital de l’établissement apparaît aujourd’hui engagé ».

On peut noter la non-suppression de postes cette année pour le Cerema, mais elle entérine toutefois les suppressions de postes des années passées. En LFI 2017, il y avait 2 899 postes contre 2 495 dans le PLF 2023. Nous nous opposons à cette logique austéritaire et proposons de revenir sur les 404 postes supprimés.

Mme. Aude Luquet, rapporteure pour avis. Le Cerema a en effet été soumis à une forte pression au cours des dernières années, tant sur les emplois que sur les effectifs. Comme vous le soulignez dans votre amendement, un rapport conjoint de l’IGF et du CGDD signalait que la situation atteignait un point critique et qu’il fallait stabiliser les crédits et les effectifs de l’opérateur. C’est la voie qui a été choisie dans ce PLF 2023. En outre, le fonds d’accélération de la transition prévoit également des crédits supplémentaires d’accompagnement des collectivités dans des projets d’ingénierie, qui pourront bénéficier au Cerema. C’est pourquoi je donne un avis défavorable à votre amendement. 

Mme. Catherine Couturier (LFI-NUPES). Nous avons auditionné le Cerema récemment avec la délégation aux collectivités territoriales ; l’opérateur nous a fait part des efforts de réorganisation engagés. Il y a un enjeu à faire connaître le Cerema aux collectivités territoriales qui manquent souvent de moyens d’ingénierie, notamment les plus petites d’entre elles. Il y aurait donc un vrai avantage à renforcer les moyens humains du Cerema pour les accompagner.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD55 de M. Gérard Leseul.

Mme. Chantal Jourdan (SOC). Il s’agit d’un amendement similaire au profit du Cerema mais qui porte sur un montant inférieur.

Mme. Aude Luquet, rapporteure pour avis. Pour les mêmes raisons qu’évoquées précédemment, je donne un avis défavorable.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-CD191 de Mme. Clémence Guetté.

Mme. Clémence Guetté (LFI-NUPES). Cet amendement vise à renforcer les moyens de Météo-France. En effet, toutes les données climatiques que nous utilisons sont le fruit du travail de Météo-France qui s’avère être un opérateur extrêmement précieux pour modéliser et évaluer avec une grande précision la force de ces évènements. De plus, ces événements climatiques extrêmes aux conséquences dévastatrices vont se produire plus fréquemment à cause du changement climatique, comme nous l’a rappelé la première partie du sixième rapport du Giec publié le 9 août 2021. Or, seuls six postes doivent être créés en 2023, alors que des centaines ont été supprimées lors du premier quinquennat d’Emmanuel Macron. En effet, entre 2017 et 2022, 439 ETPT ont été supprimés à Météo-France. Nous proposons de les rétablir.

Mme. Aude Luquet, rapporteure pour avis. Météo-France a en effet été très sollicité pour faire de la veille climatique cet été, notamment par rapport aux grands incendies qui ont ravagé le sud-ouest. À cet égard, Météo-France est le seul opérateur du programme 159 à connaître une augmentation de 10 millions d’euros de sa subvention pour charges de service public, ainsi qu’une augmentation de ses effectifs à hauteur de 6 ETP. Cela va lui permettre de recruter près de 25 élèves à la sortie de l’École nationale de la météorologie en 2023, contre une dizaine les années précédentes. Il y a en effet un enjeu de renouvellement des cadres techniques. Par ailleurs, la baisse des effectifs des dernières années est aussi liée à un certain nombre de processus d’automatisation. Compte-tenu des efforts consentis cette année, je donne donc un avis défavorable à votre amendement. 

Mme. Clémence Guetté (LFI-NUPES). Vous l’avez dit, seuls six postes supplémentaires vont bénéficier à Météo-France en 2023. Cela laisse 433 emplois supprimés depuis 2017. Or il est absolument stratégique de les rétablir.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD77 de M. David Taupiac.

M. David Taupiac (LIOT). Cet amendement est similaire au précédent. Il concerne l’augmentation des moyens de Météo-France. Nous avons pu le constater cet été dans mon département du Gers ou en Corse, nous avons connu de nombreux aléas climatiques qui n’avaient pas été anticipés par Météo-France. Nous proposons de restaurer les moyens de cet opérateur, notamment humains, au-delà de 6 ETP, et donc d’allouer 20 millions d’euros supplémentaires à Météo-France.

Mme. Aude Luquet, rapporteure pour avis. C’est effectivement un amendement similaire à celui qui a été défendu précédemment ; mon avis est donc défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD63 de M. Gérard Leseul.

Mme Chantal Jourdan (SOC). C’est un amendement similaire qui porte sur le manque de moyens alloués à Météo-France, je ne reviendrai donc pas sur toute l’argumentation. J’ajouterai simplement que Météo-France ne comporte plus que 39 implantations, contre 115 en 2011. Je pense qu’il est nécessaire de re-territorialiser Météo-France. La différence par rapport aux autres amendements, c’est que nous proposons 5 millions d’euros pour commencer à améliorer la situation de l’opérateur.

Mme. Aude Luquet, rapporteure pour avis. Comme vous l’avez indiqué, Madame Jourdan, il s’agit effectivement d’un amendement similaire, donc même avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD190 de Mme Anne Stambach-Terrenoir.

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). Cet amendement vise à donner des postes à l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) qui a lui aussi subi de nombreuses suppressions de postes.

Ce projet de loi de finances ne prévoit pas de suppression, mais le Gouvernement entérine par là-même les suppressions passées, en proposant seulement la stabilisation des effectifs. En l’occurrence, dans le cadre des mandats d’Emmanuel Macron, 95 postes ont été supprimés à l’IGN.

Pour les mêmes raisons que pour le Cerema ou Météo-France, le Gouvernement a la responsabilité morale d’organiser la planification écologique dont le peuple français a besoin face aux défis qui sont devant nous. Et pourtant, on continue à ne pas donner de moyens suffisants. Le Giec a pourtant été très clair dans la première partie de son sixième rapport de cet été. L’ampleur des changements récents est sans précédent. Le seuil de +1,5 degrés sera atteint avant 2040. Si nous continuons sur cette lancée, l’humanité pourrait faire face à des évènements qu’il qualifie de « cataclysmiques ». Il est donc urgent de donner les moyens à cet acteur de terrain qu’est l’IGN. Cet amendement propose de compenser les suppressions passées par la réouverture de 95 postes.

Mme. Aude Luquet, rapporteure pour avis. Dans le PLF 2023, la subvention pour charges de service public versée à l’IGN est stable à 85,6 millions d’euros, ce qui représente 45 % du budget de cet opérateur, qui s’élève à près de 180 millions d’euros en 2022, avec 15 % de cette enveloppe qui provient de ressources commerciales et 40 % de ressources issues d’appels à projets. La stabilité des effectifs est aujourd’hui nécessaire ; nous nous y sommes engagés. C’est pour cette raison que je donne un avis défavorable à votre amendement.

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). J’ai bien compris qu’il y avait une stabilisation. Il s’agit du même enjeu que celui je soulevais dans le cadre de mon rapport, considérant qu’une stabilisation n’est pas du tout satisfaisante, compte tenu du contexte. Il faut, au contraire augmenter et en l’occurrence, restituer, ces postes supprimés.

La commission adopte l’amendement.

Amendements identiques II-CD16 de M. Guy Bricout et II-CD98 de Mme Anne Stambach-Terrenoir

M. Benjamin Saint-Huile (LIOT). Cet amendement vise à abonder à hauteur de 1,1 million d’euros les crédits de l’Agence nationale pour l’amélioration de l’habitat (Anah) pour permettre aux propriétaires les plus modestes d’avoir un accompagnement financier renforcé, et un reste à charge nul pour traiter les logements qui sont dans les catégories les plus marquées par les difficultés énergétiques. Il s’agit de permettre aux propriétaires les plus modestes de ne pas avoir de reste à charge.

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). Mon amendement vise à rendre concret l’objectif d’interdiction de location des passoires thermiques grâce à des aides à la rénovation atteignant le niveau « bâtiment basse consommation » (BBC).

Dans la pratique, les propriétaires bailleurs privés, en particulier les plus modestes, ont besoin d’un soutien financier et d’un accompagnement élevés. Il est indispensable de conditionner ce soutien à l’atteinte d’une rénovation au niveau BBC. La rénovation performante d’une maison de classe F ou G divise par quatre à huit les factures de chauffage, ce qui conduit à une sortie pérenne de la précarité énergétique pour les ménages. Il faut donc un financement intégral de leurs travaux de rénovation performante au niveau BBC ou équivalente, avec un reste à charge égal à zéro.

Je rappelle que les logements F seront classés comme indécents à partir de 2028. Si nous voulons rénover toutes les passoires thermiques concernées par ce classement avant cette échéance, il faudra y consacrer environ 5,3 milliards d’euros entre 2023 et 2027, soit 1,1 milliard d’euros par an. C’est pourquoi cet amendement propose de transférer des crédits d’un montant de 1,1 milliard d’euros pour le programme concerné.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis (Transition énergétique). Sur le principe, on ne peut qu’approuver la volonté d’éradiquer le plus vite possible les passoires énergétiques d’une part, et d’autre part, de cibler cette aide sur les ménages les plus modestes. Cependant, il me semble que cet amendement pose plusieurs problèmes de méthode assez dirimants.

Premièrement, ce type d’aide correspond à MaPrimeRénov’ Sérénité qui figure dans le programme 135. En abondant le programme 174 sur MaPrimeRénov’ sans changement réglementaire, vous risquez simplement de faire le contraire que ce que vous souhaitez, c’est-à-dire abonder un dispositif générique qui ne cible pas les rénovations performantes globales disposant d’un accompagnement approfondi.

Deuxièmement, cet amendement risque de provoquer un problème d’équité assez fort puisqu’il est ciblé sur les propriétaires bailleurs et non sur les propriétaires occupants, alors qu’on pourrait penser que l’urgence est inverse. C’est pour les propriétaires occupants que le besoin de sortir des passoires énergétiques est le plus important.

Troisièmement, je voudrais souligner le risque d’un reste à charge nul que l’on a déjà connu par le passé pour les chaudières à 1 euro. La qualité et la fiabilité des travaux risquent ne pas être totales, dès lors qu’on peut proposer un reste à charge nul alors qu’il existe des dispositifs, comme les prêts à taux zéro.

Pour toutes ces raisons et pour les raisons que j’ai déjà évoquées quant au besoin d’un accompagnement approfondi, j’émettrai donc un avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Amendement II-CD72 de M. Benjamin Saint-Huile.

M. Benjamin Saint-Huile (LIOT). Il s’agit de renforcer les crédits alloués à MaPrimeRénov’ à hauteur d’un milliard d’euro.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Les mêmes causes entrainant les mêmes effets, pour les raisons que j’ai évoquées, c’est-à-dire le besoin de renforcer d’abord l’accompagnement si l’on veut que les rénovations soient efficaces et pertinentes, j’émettrai un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD196 de Mme Anne Stambach-Terrenoir.

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). Par cet amendement, nous essayons, à nouveau, d’augmenter le budget de l’Agence nationale de l’habitat pour cette année. En effet, il est nécessaire, plus que jamais, d’augmenter les aides publiques à la rénovation énergétique car la politique actuelle de rénovation des logements menée par le Gouvernement est beaucoup trop lente.

Si nous voulons rénover toutes les passoires thermiques, au rythme actuel, c’est-à-dire 2 500 logements par an qui sortent du statut de passoire thermique, cela nous prendrait près de 2 000 ans. Il est donc urgent d’accélérer franchement. Une partie de la population n’a pas les moyens et cela s’accentue avec la crise actuelle de l’énergie : les gens ont froid l’hiver, chaud l’été et paieront plus cher leurs factures. C’est pourquoi cet amendement propose d’augmenter les crédits de l’Anah à une hauteur de 900 millions d’euros.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Au-delà des considérations de finances publiques et de bonne gestion des deniers publics, je voudrais insister sur le fait que si on ajoute aux 2,4 milliards d’euros de MaPrimeRénov’, les 560 millions de MaPrimeRénov’ Sérénité, les 80 millions de MaPrimeRénov’ Copropriétés, les 2 milliards d’euros correspondant au taux réduit de TVA pour les travaux de rénovation énergétique et les 3,5 milliards d’euros potentiels de financement par les certificats d’économies d’énergie, nous arrivons à des montants qui dépassent les 3,2 milliards d’euros qui permettent d’atteindre la cible de l’amendement. C’est donc un avis défavorable.

Mme Huguette Tiegna (RE). Je constate qu’à plusieurs reprises, les amendements retirent des crédits consacrés aux infrastructures de transports. Je rappelle que lors de l’examen des autres programmes, nous avons défendu les transports. C’est le but de notre commission. Nous sommes conscients que nos concitoyens doivent mieux se loger, mais rappelez-vous que dans les zones rurales, nous avons besoin de mettre en place des infrastructures. Il est important de ne pas systématiquement puiser les crédits au même endroit.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD197 de Mme Clémence Guetté.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Cet amendement propose d’augmenter le budget consacré à Ma Prime Rénov’ afin d’aider un grand nombre de ménages à sortir de la situation de précarité énergétique où il se trouvent grâce à la rénovation de leur logement. Or, le dispositif Ma Prime Rénov’ a été légèrement dévoyé puisqu’il est essentiellement utilisé pour des travaux simples et non plus des rénovations globales, alors que c’est l’objectif que nous devrions viser. Notre amendement permet donc d’augmenter les crédits disponibles à cette fin. Nous demandons également que les crédits transférés depuis l’action budgétaire consacrée au transport ferroviaire fassent l’objet d’une compensation budgétaire.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Premièrement, lors de mes différentes auditions, tous les acteurs entendus ont insisté sur le fait que l’enjeu principal pour améliorer la qualité des rénovations énergétiques était l’accompagnement humain, matériel et technique des ménages, et non le montant des crédits disponibles pour les aides publiques. Cet accompagnement permettrait par exemple de conseiller un ménage désireux d’effectuer un chantier simple pour l’amener à réaliser un diagnostic ou un audit énergétique de son logement, c’est-à-dire la première étape permettant d’envisager un bouquet de travaux plus efficace qu’un geste simple. Deuxièmement, je ne crois pas que Ma Prime Rénov’ ait été dévoyé. Le passage du crédit d’impôt pour la transition énergétique à ce dispositif a, au contraire, permis de cibler les plus modestes – 83 % des bénéficiaires sont des ménages modestes ou très modestes. Néanmoins, il n’en demeure pas moins que beaucoup de ménages n’ont pas les moyens d’engager une rénovation ambitieuse, notamment en raison du reste à charge important. Faut-il en conséquence revoir les barèmes règlementaires de Ma Prime Rénov’ pour concentrer encore plus les aides sur les ménages modestes ? C’est ce que j’appelle de mes vœux. Je suis donc en accord avec vous sur le principe, mais je ne crois pas que votre amendement soit le bon moyen pour y parvenir. Je vous propose donc de le retirer. Dans le cas contraire, j’émets donc un avis défavorable.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Ne serait-il pas possible de créer des postes d’accompagnateur destinés à suivre les ménages les plus modestes en abondant les crédits dédiés à Ma Prime Rénov’ ? Cela améliorerait la lisibilité et l’orientation du dispositif vers des rénovations globales nécessaires pour sortir les ménages de la précarité énergétique qui les étrangle.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Votre amendement viendrait renforcer des crédits dédiés à des dépenses d’intervention et ne pourrait servir au financement de postes d’accompagnateur.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Puisque vous semblez partager l’objectif d’améliorer l’accompagnement, seriez-vous prêt à soutenir des amendements visant à augmenter le nombre de postes d’accompagnateur ?

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. La question de l’accompagnement ne relève pas que des services ou des opérateurs de l’État. Un grand nombre de dispositifs d’accompagnement relèvent de différents niveaux de collectivités territoriales qui doivent aussi s’investir dans l’objectif visé. Il faut par ailleurs unifier les services proposés. Ce travail, d’une part, permettrait des gains de productivité à financement constant et, d’autre part, offrirait aux usagers un guichet unique où s’adresser lors d’un projet de rénovation.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement II-CD17 de M. Guy Bricout.

Amendement II-CD221 de M. William Martinet.

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). Cet amendement vise une augmentation des crédits de Ma Prime Rénov’ Sérénité de 250 millions d’euros, somme tout à fait raisonnable si l’on considère les bénéfices qui en seront tirés par les ménages les plus modestes d’un point de vue écologique et social, mais également d’un point de vue économique puisqu’investir maintenant, c’est économiser pour l’avenir.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Votre amendement vise à abonder les crédits de Ma Prime Rénov’ Sérénité’, qui sont cependant compris dans le programme budgétaire 135 et non dans le programme 174. Si votre amendement était adopté, ce seraient donc les crédits de Ma Prime Rénov’ qui en bénéficieraient, alors que ce dispositif fonctionne comme un guichet avec droit de tirage, à l’inverse de Ma Prime Rénov’ Sérénité qui dépend directement de l’Anah et qui est un dispositif intégrant un accompagnement personnalisé. Alors que votre amendement considère que le dispositif Ma Prime Rénov’ Sérénité est relativement plus efficace que Ma Prime Rénov’, constat que nous pouvons partager, l’adopter conduirait paradoxalement à renforcer le dispositif que vous considérez comme le moins efficace. En conséquence, je demande le retrait de l’amendement ; à défaut, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD199 de Mme Clémence Guetté.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Il s’agit d’un amendement d’appel dénonçant les mesures mises en place par le Gouvernement pour répondre à la hausse des prix de l’électricité, mesures trop insuffisantes à notre sens puisque, faute de bloquer les prix et les profits, le Gouvernement a choisi de piocher dans le Trésor public pour enrichir le trésor privé. Il le fait avec le bouclier tarifaire, qui ne protège par les Français. Ces derniers subissent en réalité une véritable envolée des tarifs. Dans le même temps, les profits enregistrés par les profiteurs de crise, comme le PDG de Total, M. Pouyanné, se sont envolés. Notre amendement vise donc à financer un programme pour aider les Français à faire face à cette hausse des prix de l’électricité, alors qu’ils sont financièrement étranglés et passeront difficilement l’hiver énergétique dans ces conditions.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. J’éprouve une certaine difficulté à vous laisser dire que le bouclier tarifaire ne protège pas nos concitoyens. Je rappelle un chiffre éloquent : sans le bouclier tarifaire et le chèque énergie, les prix du gaz et de l’électricité augmenteraient de 120 % pour nos concitoyens en 2023. Grâce aux mesures prises, ils n’augmenteront que de 15 %. Il est aisé de se représenter ce que ces augmentations représentent sur une facture de 100 euros. Vous jugez certainement que les protections sont insuffisantes. En réponse à cette critique, je vous rappelle que la Première ministre a justement annoncé un chèque énergie exceptionnel qui s’adressera aux 12 millions de ménages les plus modestes. Par ailleurs, si nous mettons en place un financement volontariste pour Ma Prime Rénov’ et les autres dispositifs en faveur de la rénovation énergétique, c’est dans le but de ne pas laisser les personnes dans la précarité énergétique, mais bien de les en sortir. Pour toutes ces raisons, j’émets un avis défavorable.

M. Pierre Cazeneuve (RE). En plus de ce qui a été dit sur le blocage des tarifs et le chèque énergie, il y a également la question de la récupération des profits dont vous parlez, notamment en ce qui concerne l’électricité. Je rappellerai l’initiative française sur ce sujet au niveau européen, qui a conduit à la mise en place du dispositif de plafonnement des revenus infra-marginaux de la production d’électricité. Ce dispositif permet de récupérer les profits au-delà de 180 euros par mégawatt-heure, soit près d’un milliard d’euros. Sur la question des superprofits tirés de la vente des hydrocarbures, j’ai déjà pu en débattre avec nombre d’entre vous dans l’hémicycle et en dehors. Total ne fait pas de profits en France, ce qui rendra difficile leur taxation, quand bien même vous le souhaiteriez. Vous avez bien déposé un projet de référendum sur ce sujet, mais vous savez ce que vous récupérerez : bien peu, et même moins que ce que nous allons récupérer grâce à notre proposition, qui s’inscrit également au niveau européen, c’est-à-dire la taxe sur la production d’hydrocarbures ou le raffinage. Elle devrait rapporter 200 millions d’euros. Nous n’avons pas eu le temps de l’étudier lors de l’examen en séance publique de la première partie du projet de loi de finances, mais elle sera bien retenue lors de la nouvelle lecture du texte à l’Assemblée nationale. Nous agissons donc sur les superprofits des énergéticiens, en complément des mesures prises pour protéger le pouvoir d’achat des Français qui ont été rappelées par le rapporteur pour avis.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). En effet, c’est bien l’insuffisance des mesures que nous déplorons, notamment leur caractère temporaire qui mettra les Français dans une situation impossible lorsque le mur des prix va revenir. Nous déplorons également que ce soient les Français qui paient le coût du bouclier tarifaire. Enfin, nous regrettons que la discussion sur les superprofits n’ait pu avoir lieu en séance publique en raison de l’application du troisième alinéa de l’article 49 de la Constitution, qui a mis fin précipitamment à vos débats.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD200 de Mme Anne Stambach-Terrenoir.

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). Cet amendement est un amendement d’appel qui concerne les prix du gaz. Nous estimons que les mesures prises par le Gouvernement sont insuffisantes. Faute de réel blocage des prix et des profits, le prix du gaz a grimpé de façon exponentielle. De nouvelles hausses de 15 % sont prévues au début de l’année 2023, ce qui aura pour conséquence d’augmenter en moyenne les factures des Français de 200 à 300 euros par an, voire plus, selon l’énergie utilisée et l’usage qui en est fait. Je rappelle également, en ce qui concerne Total, que cette société a réalisé 16 milliards d’euros de bénéfices en 2021 et que son PDG a augmenté de 52 % ses revenus en un an. Il y a donc bien de l’argent à récupérer grâce à la fiscalité, ce que permettraient nos propositions sur les superprofits. Or, on laisse les Français supporter le coût des hausses de prix. L’aide du chèque énergie est loin de suffire pour répondre aux hausses. Nous appelons le Gouvernement à investir les moyens nécessaires pour accompagner la population durant cette période inédite qui, malheureusement, devrait durer.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Mme Stambach-Terrenoir ayant indiqué qu’elle présentait les mêmes arguments que l’amendement précédent, j’aurai donc les mêmes également. Je rappellerai seulement que si les factures n’augmenteront que de 15 %, c’est bien grâce aux mesures prises par le Gouvernement. Avis défavorable.

M. Pierre Cazeneuve (RE). J’aimerais souligner que les prix du gaz explosent en raison de l’agression de la Russie contre le peuple ukrainien. Si nous subissons les conséquences économiques de cette guerre, il faut rappeler qui en est à l’origine et réitérer notre solidarité envers le peuple ukrainien. Face à cette situation, c’est l’action de l’État et la nôtre, notamment avec la loi de finances rectificative pour 2022, qui ont permis de limiter les hausses de prix et d’aider les plus précaires d’entre nous à les supporter. À propos des profits de Total, je rappelle que notre système fiscal actuel ne permet pas de taxer les profits réalisés à l’étranger. On peut envisager de réformer la fiscalité mondiale, mais cela ne pourra se faire par le biais d’un projet de loi de finances français. Ceux qui critiquent les profits de Total sont également ceux qui se plaignent du fait qu’Amazon ou Google ne paient pas d’impôt sur les bénéfices réalisés en France. Mais dans ce cas, il faut appliquer cette logique à Total, qui ne réalise pas ses bénéfices en France. C’est bien pourquoi nous portons des propositions pour que les entreprises paient des impôts là où elles réalisent ces bénéfices.

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). Notre amendement n’est pas une proposition de taxation des superprofits. Il illustre simplement le fait qu’il y a de l’argent disponible pour financer des aides à la hauteur d’une augmentation de 15 % du prix du gaz, qui nous semble bien trop importante.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD18 de M. Guy Bricout.

M. Benjamin Saint-Huile (LIOT). L’augmentation de la facture énergétique pour les ménages est certes contenue à un niveau de 15 % grâce au travail du Gouvernement, mais reconnaissons qu’elle a tout de même un impact non négligeable pour nombre d’entre eux. Sommes-nous capables d’aller collectivement plus loin pour les aider ? C’est le sens de notre proposition, qui augmente de 1,8 milliard d’euros les crédits du chèque énergie afin d’en rehausser la valeur faciale, ce qui éviterait aux ménages touchés par les hausses de prix de plonger un peu plus dans la précarité.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Je salue la remarque de M. Saint-Huile sur l’efficacité des mesures prises. Je déplore qu’à ce stade nous ne puissions pas faire davantage sur le chèque énergie, par souci de bonne gestion des deniers publics et de la nécessité de tenir nos engagements budgétaires, à l’inverse de plusieurs amendements présentés jusqu’ici. Au-delà des dispositifs de protection actuels, qui sont exceptionnels et temporaires, il faut d’abord orienter les ressources disponibles vers les solutions qui sortent durablement les ménages de la précarité énergétique plutôt que vers des dispositifs de chèque ponctuels. J’émets donc un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CD125 de M. Hubert Wulfranc.

M. Marcellin Nadeau (GDR-NUPES). Cet amendement propose d’abonder de 1,8 milliard d’euros les crédits consacrés au chèque énergie. Cette somme permettrait une augmentation du montant du chèque à hauteur des besoins. L’aide nécessaire pour sortir l’ensemble des ménages concernés par la précarité énergétique s’élève à 3,1 milliards d’euros par an, soit en moyenne près de 710 euros par logement et par an, auxquels s’ajoutent les 15 % d’augmentation prévus l’an prochain. Nous proposons en conséquence de fixer le budget total du chèque énergie à 3,6 milliards d’euros grâce à notre amendement.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Le mouvement de crédits de cet amendement étant identique au précédent, j’émets un avis défavorable.

M. Pierre Meurin (RN). La gauche propose donc une augmentation de 1,8 milliard d’euros des crédits du chèque énergie, Or, c’est en raison de son idéologie anti-nucléaire que nous en sommes réduits à une politique de chèques qui ruissellera négativement sur nos enfants. Je remercie les écologistes et ceux qui ont cédé à leur idéologie pour avoir causé cette situation de crise énergétique. Je propose en conséquence de rouvrir la centrale nucléaire de Fessenheim et de développer notre parc nucléaire au moyen d’EPR.

M. Marcellin Nadeau (GDR-NUPES). Je souhaite rappeler que si plusieurs députés communistes du groupe GDR-NUPES soutiennent la filière nucléaire, ce groupe accueille également des députés d’outre-mer qui peuvent avoir d’autres sensibilités politiques, notamment écologistes. Par ailleurs, le sujet qui nous occupe maintenant n’est pas la question nucléaire : il s’agit de sortir des familles de la précarité énergétique. Les autres interrogations sont pour le moment superfétatoires.

M. Pierre Cazeneuve (RE). J’aimerais rappeler qu’à côté de l’électricité, le gaz alimente une grande partie des systèmes de chauffage, ce qui explique les hausses de coût que nous subissons aujourd’hui et qui nous obligent à agir pour les familles en situation de précarité énergétique. La question n’est donc pas celle de la filière nucléaire.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD168 de M. Jean-Louis Bricout.

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). Face à la situation actuelle, nos concitoyens ont besoin d’un accompagnement social et le chèque énergie en fait partie. Je rappelais lors de la discussion générale que nous avons plusieurs problèmes avec ce dispositif. Tout d’abord, le taux d’utilisation est insuffisant. Il est par exemple de 66 % dans l’Aisne. Se pose ensuite la question de l’éligibilité au chèque, qui pour le moment ne concerne que les personnes aux minima sociaux, soit moins de 10 800 euros de revenu fiscal de référence. Notre amendement permet donc de répondre à ces deux points, puisqu’il permettra de relever le seuil d’éligibilité du chèque et sa valeur faciale, qui devrait au moins suivre l’augmentation du prix des énergies.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Je partage bien sûr votre souci quant à l’efficacité du chèque énergie. Je souhaite rappeler qu’au niveau national, son taux d’utilisation est de 88 %. Je vous crois volontiers sur le taux que vous mentionnez pour l’Aisne, mais il révèle sans doute des problèmes particuliers qui méritent d’être traités au niveau local. Si le taux national n’est que de 88 % – ce qui est beaucoup pour une aide mais reste encore insuffisant – c’est aussi dû à la question de l’habitat collectif et à l’impossibilité d’individualiser les charges de chauffage pour ce type de logement. Je rappelle enfin que le bouclier tarifaire a bien vocation à toucher l’ensemble de nos concitoyens, tandis que le chèque énergie, pour des questions budgétaires et d’efficacité, a, quant à lui, vocation à cibler un public donné. Sur la question de sa valeur faciale et des critères d’éligibilité, j’ai mentionné dans mon avis qu’il faudra poser la question de l’adaptation des seuils et de leur indexation pour éviter qu’un petit changement de revenus ne fasse sortir un ménage du dispositif. Ces adaptations étant d’ordre réglementaire, j’appelle l’attention du Gouvernement sur ces deux points. Demande de retrait, sinon avis défavorable.

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). Je regrette que le dispositif ne bénéficie que très peu aux ménages modestes et reste concentré sur les personnes aux minima sociaux. Il faut donc relever le seuil d’éligibilité.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Le chèque énergie exceptionnel touchera 12 millions de ménages. Il ne se limitera donc pas aux personnes aux minima sociaux.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD111 de M. Christophe Naegelen.

Mme Nathalie Bassire (LIOT). 1,5 million de foyers sont équipés de poêles ou chaudières à granulés. Or le prix de la tonne de granulés a doublé en raison d’une demande démesurée, deux à six fois supérieure à son niveau de 2021. Cet amendement propose donc de flécher 300 millions d’euros complémentaires sur l’action dédiée aux chèques énergie afin d’aider les foyers modestes et les classes moyennes face à cette envolée des prix.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Venant d’une circonscription montagnarde, je suis sensibilisé à la question du prix du bois et des pellets. Nombre de nos concitoyens nous rappellent qu’ils se trouvent actuellement dans des situations parfois très délicates, alors qu’ils ont été incités par le passé à s’équiper de systèmes de chauffage fonctionnant au bois. Je rappelle néanmoins que le chèque énergie, dont le chèque fioul voté cet été, peut être utilisé pour le paiement de tout type d’énergie, dont le bois ou les pellets. Il y a un travail de pédagogie à faire sur ce point. Par ailleurs, le Gouvernement a indiqué qu’il réfléchit à une aide spécifique pour le bois et les pellets, afin de répondre à cette situation qui est d’autant plus préoccupante qu’il ne s’agit pas a priori d’un problème de pénurie, mais bien d’une forme de montée spéculative des prix. Il faut surveiller ce point, sans pour autant en venir à bloquer les prix de ces produits.

M. Pierre Meurin (RN). Je comprends mal que l’aide votée pour le fioul puisse servir à l’achat de pellets. Je pense donc qu’il faut adopter cet amendement et consacrer l’aide votée lors de l’examen de la loi de finances rectificative pour 2022 au fioul seul.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Je me pose une question sur le choix de récupérer des crédits de l’action finançant le transport ferroviaire, même si cela ne remet pas en cause notre volonté de voter en faveur de cet amendement.

M. Benjamin Saint-Huile (LIOT). Ce choix n’a été fait que pour garantir la recevabilité de l’amendement. Notre souhait est bien que cette ponction soit compensée ultérieurement.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-CD171 de M. Jean-Louis Bricout.

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). Cet amendement propose de moduler le chèque énergie en fonction des zones climatiques. Depuis 2009, la réglementation thermique des bâtiments pour les constructions neuves prévoit une division du pays en régions climatiques auxquelles s’appliquent un coefficient spécifique. Ce coefficient permettrait de moduler le montant du chèque pour prendre en compte les différences climatiques entre les régions, par exemple entre le nord et le sud. Après paiement des factures d’énergie, le reste à vivre des ménages vivant dans le nord du pays est en effet moins important que celui des ménages vivant dans le sud.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Je souscris à l’objectif de mieux moduler les aides en fonction des contraintes des ménages, notamment les circonstances climatiques. Mais je vois deux obstacles méthodologiques dirimants. Tout d’abord, il y a un problème de complexité résultant de votre proposition, alors que l’un des facteurs de réussite du chèque énergie est sa simplicité en termes de gestion, qui permet un taux d’utilisation de 88 %. Votre proposition pourrait ensuite créer des situations inéquitables entre des ménages ayant des revenus équivalents. Si l’indicateur climatique établit que telle région est plus chaude qu’une autre alors que pendant une période donnée cette situation n’est pas avérée, les ménages concernés recevront donc une aide minorée par rapport à d’autres ménages uniquement en raison de l’inadaptation de l’indicateur. Demande de retrait ou avis défavorable.

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). Je conteste la complexité invoquée par le rapporteur pour avis, car il s’agit uniquement d’appliquer le coefficient climatique aux communes de résidence des bénéficiaires du chèque énergie. Quant aux valeurs différentes du coefficient climatique, elles correspondent à la réalité constatée sur le terrain, qui est prise en compte dans les modalités de construction entre les différentes régions. Il y a bien une différence de facture, de l’ordre de 500 euros, entre le nord et le sud.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD132 de M. David Taupiac.

M. David Taupiac (LIOT). Cet amendement propose d’indexer la valeur faciale du chèque énergie sur l’augmentation des tarifs réglementés de vente des énergies.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Le principe du chèque énergie exceptionnel est justement de s’aligner sur l’augmentation des prix de l’énergie à venir. Mon avis sera donc défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD222 de M. William Martinet.

M. Sylvain Carrière (LFI-NUPES). Cet amendement vise à vous alerter sur le fait que le bouclier tarifaire ne couvre pas toutes les consommations énergétiques des logements collectifs. C’est aussi un amendement de repli dans la mesure où le Gouvernement refuse de bloquer les prix des énergies, ce que nous proposons depuis plus d’un an désormais. Nous souhaitons donc que le bouclier tarifaire s’applique effectivement à l’ensemble des consommations énergétiques, notamment celles correspondant au chauffage des parties communes.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Le Gouvernement a déjà été interpellé sur ce sujet, qui fait écho à celui de l’utilisation du chèque énergie lorsqu’il n’y a pas d’individualisation des frais de chauffage dans l’habitat collectif. Toutefois, ce dernier problème n’empêche pas l’utilisation du chèque, puisqu’il peut être utilisé pour le paiement d’autres factures, comme celle de l’électricité. En ce qui concerne l’application du bouclier tarifaire aux cas de figure que vous évoquez, c’est un sujet réel sur lequel le Gouvernement est pleinement au travail. J’espère que nous aurons prochainement des réponses sur ce sujet. Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CD222.

Amendement II-CD186 de M. Nicolas Thierry.

Mme Lisa Belluco (Écolo-NUPES). Cet amendement d’appel permet d’évoquer la proposition de notre groupe pour protéger les Français de la hausse des prix du gaz et de l’électricité. Alors que le Gouvernent assure un plafonnement généralisé des prix de l’énergie, aussi bien pour les besoins vitaux des Français les plus modestes que pour les dépenses superflues des plus aisés, il faudrait envisager un dispositif plus ciblé. Notre proposition est de concentrer les aides publiques sur les premiers mégawatts-heure correspondant à la consommation moyenne d’un foyer français. Ce mécanisme de tarif différencié permettrait de concentrer l’effort sur les besoins incontournables et découragerait le gaspillage énergétique, ce qui serait plus juste et plus écologique. Cet amendement appelle le Gouvernement à envisager une telle alternative au boulier tarifaire en lui demandant, à charge publique équivalente, de faire évoluer le dispositif actuel vers l’alternative que nous défendons.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. L’augmentation des prix de l’énergie est telle que nos compatriotes des classes moyennes ne pourraient la supporter sans bouclier tarifaire. Il me semblerait difficile d’expliquer que seuls certains pourraient bénéficier de cette protection. Je rappelle que le chèque énergie assure le ciblage social que vous proposez puisqu’il a remplacé des tarifs sociaux peu utilisés au profit d’une aide simple d’utilisation, centrée sur les plus modestes. La méthodologique de votre proposition pose également un problème d’équité. En établissant un prix capé de l’énergie pour inciter les ménages à limiter leur consommation à l’essentiel, on fait fi de l’état du logement occupé. Ainsi, dans le cas d’un ménage habitant une passoire énergétique, qui doit dépenser beaucoup d’énergie pour se chauffer correctement, le volume d’énergie utilisé dépasserait nécessairement la consommation moyenne que vous évoquez et ne pourrait donc plus bénéficier des aides publiques. J’émets donc un avis défavorable.

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). Cet amendement me permet de revenir sur les tarifs sociaux de l’énergie, qui étaient corrélés à la consommation. Ils permettaient d’accompagner les besoins en énergie des ménages qui devaient utiliser plus d’énergie en fonction de leur situation, notamment eu égard à la région climatique dans laquelle ils se trouvaient. À l’inverse des tarifs sociaux, le chèque énergie ne permet plus ce type de modulation, ce que l’on peut regretter.

Mme Lisa Belluco (Écolo-NUPES). Notre proposition est simple, puisqu’elle aide tous les Français à payer les premiers kilowatts-heure consommés correspondant aux besoins vitaux. Ces derniers devront être évalués en fonction de la consommation moyenne d’un ménage, qui pourra d’ailleurs être modulée en fonction du critère de l’énergie utilisée pour le chauffage, par exemple le gaz ou l’électricité. Au-delà de cette consommation moyenne, le prix de l’énergie applicable serait celui du marché. Le bouclier tarifaire serait donc redéployé sur le financement de cette première tranche de consommation moyenne, établie d’après les consommations actuelles des Français.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. À la suite de votre explication, je comprends donc qu’il faudrait procéder à une déclaration annuelle de l’énergie utilisée au sein du foyer, ce qui pose un problème en termes d’efficacité et de simplicité. De plus, cela ne répond pas à la problématique de la passoire énergétique. Tant que nous ne pourrons pas associer une situation personnelle à la qualité énergétique du logement habité, nous ne serons pas en mesure de savoir si la consommation importante d’un ménage correspond à des besoins vitaux ou superflus. Enfin, votre amendement d’appel ne transfère qu’un euro pour financer votre proposition. On voit mal quel soutien il permettrait effectivement de mettre en œuvre. Je maintiens donc mon avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD230 de M. Antoine Armand, rapporteur pour avis.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Cet amendement d’appel porte sur la prime à la conversion. Comme vous le savez, le barème de la prime à la conversion est fixé de façon réglementaire. Des auditions que j’ai menées, il ressort un besoin de rendre cette prime à la conversion encore plus progressive pour qu’elle se concentre sur les ménages modestes. C’est un amendement d’appel ; j’insiste sur ce point, car nous le défendrons demain en commission des finances. L’adopter permettrait de montrer le soutien de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire à cette mesure.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-CD179 de M. Loïc Prud’homme.

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). C’est un amendement d’appel qui devrait plaire à tout le monde. Proposé par le Réseau action climat, il vise à renforcer la justice sociale concernant la prime à la conversion. Les aides ne permettent pas aux ménages les plus pauvres d’accéder à des véhicules électriques. Il s’agirait de revoir l’échelonnement des aides en fonction des revenus des ménages. Au‑delà d’un revenu fiscal supérieur à 18 000 euros, nous pourrions considérer que les ménages ont suffisamment d’argent pour s’acheter eux-mêmes un véhicule électrique. Pour les familles les plus modestes dont le revenu fiscal de référence est inférieur à ce seuil, sachant que les véhicules d’occasion électriques sur le marché coûtent environ 10 000 euros, le nouvel échelonnement permettrait de les faire bénéficier d’une aide de 7 000 euros, avec un reste à charge de 3 000 euros, ce qui reste important du reste. Nous vous proposons là un amendement de justice sociale et de bon sens.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. L’amendement que l’on vient d’adopter devrait donc vous satisfaire, car il porte la même idée pour un million d’euros. Je vous prierais donc de le retirer.

L’amendement est retiré.

Amendements II-CD47 de M. Gérard Leseul et II-CD178 de Mme Alma Dufour (discussion commune).

Mme Chantal Jourdan (SOC). Cet amendement vise à renforcer les aides au report modal, pour rendre plus attractives les alternatives à la voiture individuelle. Il s’agit de créer un budget « mobilité », notamment pour les ménages les plus modestes, afin de leur permettre d’accéder à des moyens de déplacement durables. En particulier, l’objectif serait d’encourager l’utilisation des primes à la conversion en faveur des vélos électriques.

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). Notre amendement poursuit le même objectif. Il s’agit d’encourager l’utilisation des primes à la conversion en faveur du vélo électrique dans un contexte où la lutte contre le réchauffement climatique et notamment le besoin de lutter contre la pollution de l’air, sont essentiels. Encourager les alternatives à la voiture individuelle est indispensable.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Je remercie Mme Couturier et Mme Jourdan d’avoir déposé ces amendements car, pour des raisons de suivi des amendements de crédit, nous avions d’abord examiné les amendements portant sur la prime à la conversion. Nous suggérions à tort que l’unique façon de décarboner les transports était la voiture électrique individuelle, alors que tout le travail notamment mené dans les zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m) consiste à diminuer les mobilités inutiles et développer les mobilités douces et actives, quelles qu’elles soient.

Néanmoins, je note que les deux amendements ici présentés correspondent à une hausse des bonus et primes qui ont coûté en 2021, environ 2 millions d’euros. Donc les montants proposés – 140 millions d’euros et 160 millions d’euros – correspondraient à une augmentation des dépenses de guichets de 700 % et 800 % respectivement. Si j’aimerais partager votre optimisme, ces montants me semblent disproportionnés par rapport à la trajectoire réelle ; ce sera donc un avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement II-CD79 de M. Jean-Louis Bricout.

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). Cet amendement porte sur les aides à l’acquisition de véhicules propres. Il y aurait apparemment une augmentation conséquente des budgets alloués, de 156 %. En revanche, on ne fait pas la distinction entre le bonus écologique, la prime à la conversion et le leasing social. L’amendement propose donc de favoriser le leasing social en le créditant de 500 millions d’euros.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Je vous rejoins sur l’intérêt de ce dispositif. Au regard des montants d’achat des véhicules électriques, l’achat peut être rédhibitoire. Développer une solution de mobilité moins onéreuse et qui n’engage pas forcément sur la même durée que celle d’un prêt avec un reste à charge conséquent est donc très intéressante.

Néanmoins, les crédits du programme 174 ont déjà été augmentés à due proportion pour intégrer le leasing social qui, comme vous l’avez peut-être vu dans les récentes annonces du Président de la République, n’interviendra pas avant le second semestre 2023, voire la fin de 2023, pour des raisons de faisabilité technique. Les crédits existants dans le programme 174 apparaissent suffisants, et en tout état de cause, la création d’une ligne ad hoc n’apparaît pas nécessaire.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CD62 de M. Hervé Saulignac.

Mme Chantal Jourdan (SOC). Cet amendement vise à dédier 220 millions d’euros à la création de chèques d’entretien et de réparation responsables. Il s’agit de viser les ménages modestes, qui ne peuvent entretenir régulièrement leur véhicule. L’objectif est de limiter les effets des véhicules mal entretenus sur la pollution de l’air.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Je ne peux que saluer cette démarche qui consiste à veiller à la sécurité de nos concitoyens, en particulier les plus modestes, qui parfois, on le sait, roulent dans des véhicules dangereux pour eux-mêmes et pour les autres. Néanmoins, l’idée même de prolonger l’utilisation d’un véhicule vieillissant, dangereux et émetteur, ne paraît pas cohérente avec l’objectif du programme, qui est d’aider les personnes à sortir de l’insécurité et la précarité, y compris routière. Ce sera une demande de retrait, ou à défaut, un avis défavorable.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Je viens en soutien aux amendements qui ont été déposés, car on sait que les accidents de la route affectent plus souvent les personnes des classes populaires, notamment en raison du mauvais entretien des véhicules. À mon avis, c’est un amendement de justice sociale et de sécurité routière. On sait, Monsieur le rapporteur pour avis, que tant qu’il n’y aura pas de quasi-don pour la conversion vers un véhicule propre, les ménages n’ont pas les moyens, en réalité, de passer à un autre véhicule.

Mme Huguette Tiegna (RE). J’aimerais avoir des statistiques d’accidentologie sur le fait que les personnes les plus modestes sont plus souvent victimes d’accidents de la route.

M. Stéphane Delautrette (SOC). Je voudrais intervenir en faveur de cet amendement parce qu’au‑delà de l’aspect sécuritaire, se pose aussi la question des émissions liées à la défaillance de l’entretien du véhicule. Un véhicule bien entretenu est un véhicule qui consomme moins et émet moins de particules et de gaz à effet de serre (GES). Cet amendement va dans un sens que nous partageons tous.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Je comprends l’idée de renforcer les aides à la conversion des véhicules, à l’achat de véhicules propres et les aides vélo, mais je pense qu’il faut cumuler les dispositifs qui existent : premièrement, en rendant la prime à la conversion beaucoup plus progressive ; deuxièmement, en développant les prêts à taux zéro ; troisièmement, en développant le micro-crédit – qui existe à titre expérimental – pour parvenir à un reste à charge proche de zéro, dans le cadre de politiques publiques qui ont vocation à être des politiques structurantes, de long terme, visant à décarboner les transports. Il faut que les deniers publics servent cet objectif. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD229 de M. Antoine Armand, rapporteur pour avis.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Cet amendement ne vous sera pas étranger puisqu’il concerne les associations agréées de surveillance de la qualité de l’air (AASQA), avec lesquelles j’ai eu l’occasion d’échanger dans le cadre de mon rapport pour avis. Je parlerai sous le contrôle bienveillant de mon collègue, M. Jean-Luc Fugit, expert en la matière. Il s’est avéré qu’étant donné les évolutions de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), le budget existant suffit à couvrir les besoins de fonctionnement de ces associations mais ne suffit pas – selon ces mêmes associations et c’est un point de vue que je défends à titre personnel – pour développer l’innovation sur les polluants nationaux émergents, notamment les particules ultrafines, et également l’investissement en faveur de nouveaux outils de travail. Il est important d’envoyer à la fois un signal et des moyens à ces agences.

Les moyens budgétaires des AASQA sont aussi fragilisés du fait d’un financement partagé entre l’État et les collectivités. Lorsque l’État n’abonde pas suffisamment, il peut y avoir de vraies pertes de moyens car les collectivités ne complètent pas à hauteur des besoins. C’est pourquoi je vous propose cet amendement de crédits de 6 millions d’euros.

M. Jean-Luc Fugit (RE). J’apporte mon soutien à cet amendement qui, j’espère, sera voté à l’unanimité des présents. Je souhaite simplement préciser que la surveillance réglementaire, opérée par les AASQA, mobilise souvent la majorité de leur budget. Il leur reste peu de moyens pour financer de la recherche. En soutenant ces associations, on soutient des études complémentaires à l’échelle des territoires pouvant porter, par exemple, sur les pesticides, les particules ultrafines ou encore le monoxyde de carbone. Cela permettra d’avoir des associations à la pointe de la recherche sur ces sujets. Ce sont des associations qui souffrent financièrement. Parfois, et je l’observe dans ma région, certaines régions les soutiennent très peu, voire leur retirent des moyens. Le soutien des AASQA est donc nécessaire. Cet amendement est largement bienvenu.

M. Pierre Meurin (RN). J’en suis désolé, mais je vais probablement abîmer cette unanimité.

M. le président Jean-Marc Zulesi. C’est la richesse du débat.

M. Pierre Meurin (RN). Nous voterons contre toute forme d’amendement ou de mesure qui permet le déploiement des ZFE. Je suis désolé, Monsieur Jean-Luc Fugit. Les AASQA sont des associations idéologiques qui militent en faveur de ce type de mesures, qui sont des mesures de casse sociale, d’injustice sociale et de restriction des libertés de circulation. Notre position est une position de méfiance préventive. Nous en discuterons sans doute plus longuement par la suite. Vous n’aurez pas nos voix ici.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Je ne suis pas pour l’unanimité à tout prix. J’aimerais toutefois insister : ce sont des associations agréées par l’État. Elles font de la surveillance de la qualité de l’air et développent des outils innovants, avec des preuves scientifiques à l’appui. Enfin, il s’agit bien d’une question de mesure de la qualité de l’air. Le problème, depuis des décennies, c’est bien un problème de mesure. La première préoccupation que l’on a ici, c’est d’être capable de mieux mesurer des polluants découverts encore très récemment, ou des particules dont on ne mesure pas tous les dangers et les risques. Il s’agit d’avoir les moyens de le faire. Il n’y a aucune corrélation, ni législative, ni réglementaire, entre les ZFE-m et les AASQA.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). J’opère une incise dans notre débat pour revenir à notre amendement précédent et répondre à notre collègue qui m’a interpellée. Le fait social que j’ai cité venait des travaux d’un chercheur qui s’appelle Mathieu Grossetête, chercheur au CNRS qui a travaillé sur l’enracinement social de la mortalité routière. Il a montré notamment que les ouvriers étaient surreprésentés parmi les personnes qui ont des accidents de la route et qu’à l’inverse, les cadres supérieurs, professions libérales et chefs d’entreprise étaient sous-représentés puisqu’ils représentent 2,9 % des morts et des blessés pour 8,4 % de la population.

Mme Huguette Tiegna (RE). En tant que scientifique, je pense que M. Grossetête a dû émettre des hypothèses et qu’il ne faut pas transposer cela. Les accidents de la route sont liés à d’autres problèmes comme la météo ou la qualité de la voiture. Il ne faut pas considérer cela comme un argument pour voter un amendement.

M. Benjamin Saint-Huile (LIOT). Je ne vais pas rentrer dans la discussion Autoplus... J’ai juste une question. Nous sommes très tentés de voter l’amendement. Quand les amendements sont bons, nous les votons. Mais vous retirez des crédits sur le programme « Service public de l’énergie ». Comment faites-vous ? Demandez-vous la levée du gage ? Parfois on sous-entend qu’on est moins bon gestionnaire que d’autres, qu’on est moins sérieux. Je ne doute pas du sérieux de la proposition du rapporteur pour avis. Je dois savoir ou aller chercher les crédits pour l’avenir.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. La question est trop bonne pour que j’y réponde. Je rappelle que ces amendements vont être examinés demain en commission des finances, avec un regard qui sera peut-être légèrement différent des commissaires de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire et il y aura donc une discussion. La vocation de l’amendement est que le Gouvernement abonde les crédits de 6 millions d’euros. C’est ce que je porterai. Il ne s’agit pas de déshabiller Paul pour habiller Jacques.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement II-CD201 de Mme Anne Stambach-Terrenoir.

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). Avec cet amendement d’appel, nous disons que la part des énergies renouvelables (ENR) dans le mix énergétique doit augmenter. Je rappelle d’une étude de RTE indique qu’un scénario avec 100 % d’ENR est possible à l’horizon 2050 et pour nous, c’est l’objectif à atteindre. La France est le seul pays européen à ne pas atteindre ses objectifs de développement des ENR. Le Haut Conseil pour le climat indique que le déploiement des ENR est insuffisant pour atteindre les objectifs pour 2030, qui seront renforcés par l’Union européenne.

Le retard de développement des ENR est dû, entre autres, à un manque de planification et à un financement trop important du nucléaire : en effet, les investissements dans le nucléaire se font au détriment des énergies renouvelables. Pourtant, le nucléaire comprend de nombreuses limites : problèmes de corrosion, indisponibilité actuelle du parc, accidents, dépendance pour l’approvisionnement de l’uranium, déchets, dangers renforcés avec le changement climatique.

Il est donc urgent et nécessaire d’investir davantage dans les énergies renouvelables. Par cet amendement d’appel, nous proposons de renforcer le financement des énergies renouvelables.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Je partage les constats, mais pas forcément l’analyse. L’amendement pose un problème technique. Il propose d’abonder le programme 345 « Service public de l’énergie », c’est-à-dire les crédits qui, en temps ordinaire, permettent de compenser la différence entre les prix de marché et le prix des ENR. Or, comme vous le savez, aujourd’hui, la situation est un peu différente. Il n’y a donc pas besoin de crédits budgétaires pour cette enveloppe. En abondant de cette somme cette ligne budgétaire, vous allez simplement immobiliser des crédits pour l’an prochain. Je formule donc une demande de retrait et donnerai sinon un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD206 de Mme Clémence Guetté.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Cet amendement a pour objet la création d’un fonds de sauvegarde et de développement de l’industrie éolienne piloté par la Banque publique d’investissement. Il s’inscrit dans le cadre des travaux d’une mission « flash » sur les ENR créée par la commission, que je mène avec deux de nos collègues. L’industrie des ENR doit être développée et la souveraineté industrielle de la filière est en jeu. Nous avons commis une erreur stratégique avec la délocalisation des usines dans le domaine du photovoltaïque entre les années 2000 et 2010. Nous pensons qu’il faut développer l’outil de production pour produire en France tous les systèmes éoliens qui seraient indispensables. Cela permettrait en outre de créer de l’emploi local. Nous proposons donc de créer le programme « Fonds de sauvegarde et de développement de l’industrie éolienne » et de l’abonder avec 72 millions d’euros.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Je ne peux qu’émettre un avis défavorable, eu égard à la part que prend le Gouvernement dans le soutien aux ENR, en particulier avec le milliard d’euros qui leur est consacré dans le plan France 2030. Celui-ci, je crois, satisfait votre demande. Je vous demande de retirer votre amendement. À défaut, je donnerai un avis défavorable.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). J’avoue que je n’ai pas encore regardé le plan France 2030 dans son détail, donc, dans le doute, je retire l’amendement et nous verrons pour la séance publique.

L’amendement est retiré.

Amendement II-CD207 de Mme Clémence Guetté.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Il s’agit d’un amendement qui crée un fond de sauvegarde et de développement pour le photovoltaïque, piloté lui aussi par la Banque publique d’investissement. Je vous ai parlé de la souveraineté industrielle de la France sur la question des équipements photovoltaïques. Il y a un dumping social très fort dans cette industrie. Je vous ai déjà parlé de l’entreprise iséroise Photowatt. La presse relaie très régulièrement les difficultés dans ce secteur. Cette fois-ci, nous proposons d’abonder de 72 millions d’euros un fonds pour le photovoltaïque.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Il s’agit du même amendement que le précédent, à la différence qu’au lieu de traiter des ENR en général, il traite du photovoltaïque. Mon avis sera donc le même.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Un soutien figure donc dans le plan France 2030 ?

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. France 2030 prévoit un milliard d’euros pour financer l’ensemble des ENR.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Y a-t-il dans France 2030 un fléchage des différents crédits par filière industrielle ?

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. France 2030 fonctionne par appel à projets. Il y a une fongibilité entre les ENR, hors nucléaire. En revanche, il n’y a pas, à ma connaissance, de fléchage plus fin. Nous pouvons nous renseigner sur le sujet. En tout état de cause, mon raisonnement sur cet amendement est le même que sur le précédent.

Mme Clémence Guetté. Je le maintiens et nous verrons pour la séance publique.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CD216 de Mme Clémence Guetté.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Cet amendement vise à alerter le Gouvernement sur le manque de moyens pour la recherche sur la sûreté nucléaire en créant un programme dédié. Dans un article d’octobre 2022, le magazine Alternatives économiques nous a alerté sur le fait que les dépenses en recherche et développement nucléaire relatives à la sûreté avaient diminué de plus de 30 % sur la période récente, passant de 435 millions d’euros par an en moyenne sur 2002-2008 à 246 millions d’euros sur 2014‑2020. C’est une problématique qui se fait d’autant plus prégnante que les réacteurs et les installations nucléaires avancent en âge. De nombreuses maintenances pour corrosion ont été faites ces derniers mois, ce qui a mis environ la moitié du parc nucléaire à l’arrêt. La question du démantèlement se profile aussi à l’horizon. Il nous semble important d’anticiper cela et d’augmenter les crédits relatifs à la sûreté nucléaire.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Il s’agit d’un sujet qui est évidemment d’une très grande importance mais qui ne trouve pas sa place dans la discussion. Peut-être aurait-il été plus opportun de l’évoquer lors des débats sur le rapport de notre collègue Vincent Descoeur, sur la recherche. Pour cette raison, je donnerai un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD213 de Mme Clémence Guetté.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Nous présentons une suite d’amendements proposant des nationalisations. Le premier concerne la création d’un pôle public de l’énergie par la nationalisation d’Engie, qui serait à même de garantir la maitrise démocratique du secteur de l’énergie et de réaliser la planification du développement des énergies renouvelables pour atteindre le mix énergétique composé à 100 % d’ENR que nous appelons de nos vœux et qui figure dans plusieurs scénarios, notamment un scénario de RTE et le scénario de NégaWatt. Nous proposons la nationalisation avec un gage et un mouvement budgétaire qui est évidemment symbolique.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis.  Si nous arrivons à racheter ces entreprises avec 72 millions d’euros, cela veut dire que vous avez des talents de négociatrice que nous n’avons pas ! Vous proposez de nationaliser un certain nombre d’entreprises. Nous pensons que ce n’est pas une bonne idée et que ça n’a pas la place dans la discussion sur le programme 345. Nous pensons que cela risque de freiner le développement d’un secteur émergent qui a besoin d’innovation et d’un écosystème compétitif. Je donnerai un avis défavorable et ce sera le même pour les amendements suivants.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Les raisons ne me paraissent pas si évidentes et je ne suis pas sûre de partager votre avis sur l’écosystème et toutes ses vertus. Je maintiens donc cet amendement et propose une nationalisation qui permettrait de maîtriser l’ensemble de ce secteur.

Mme Danielle Brulebois (RE). Sans soutenir la nationalisation, je pense que l’amendement soulève un problème important : l’énergie n’est pas un bien comme un autre. C’est un bien commun. Il va falloir que nous réfléchissions tous à ce sujet-là.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD214 de Mme Clémence Guetté.

M. Sylvain Carrière (LFI-NUPES). Puisque vous refusez la nationalisation d’Engie, nous proposons avec cet amendement la création d’un véritable pôle public de l’énergie par la nationalisation de TotalÉnergies renouvelables. Ce pôle public serait seul à même de garantir la maîtrise démocratique du secteur de l’énergie et de réaliser la planification du développement des énergies renouvelables avec l’objectif d’un mix énergétique composé à 100 % d’ENR. Le développement de ces énergies est le fait essentiel de porteurs de projets privés, dont TotalÉnergies renouvelables, ce qui peut conduire à des phénomènes de concentration de projets dans certains territoires et à un manque de concertation avec le public.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis.  Mon avis sur cet amendement est le même que sur l’amendement précédent.

Mme Huguette Tiegna (RE). À propos des nationalisations, il y a quand même un vrai problème avec la NUPES. On assiste à des grèves, il y a des négociations, des accords sont signés mais personne ne les respecte. De quel droit, nous, les parlementaires, allons-nous décider de la nationalisation d’une entreprise sans concertation avec les acteurs, les partenaires ? Un projet de loi va traiter de la nationalisation d’EDF, ce sera l’occasion de déposer des amendements et de faire d’autres propositions.

M. Vincent Thiébaut (HOR). Sans vouloir faire de commentaire particulier sur le fait qu’on va nationaliser TotalÉnergies avec 72 millions d’euros, je pense que le sujet que vous évoquez peut quand même interpeller. Je pense que la vraie question que l’on peut se poser est celle de la territorialisation et du partage de la valeur. Je pense que nous avons des outils, sur lesquels nous avons voté lors de la précédente législature. Il s’agit notamment des communautés d’énergie. Celles-ci ne sont peut-être pas assez connues. Elles permettent notamment à des collectivités, à des citoyens, de développer les énergies renouvelables sur notre territoire.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD215 de Mme Clémence Guetté.

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). Nous revenons cette fois-ci avec une proposition de nationalisation de GE Renewable Energy, toujours pour la modique somme de 72 millions d’euros. Nous vous appelons sincèrement à réfléchir au bénéfice d’une territorialisation de l’énergie. Nous devons répondre à une planification qui nous permette de conserver nos terres agricoles et de préserver la biodiversité sur le long terme. C’est quelque chose qui se planifie à l’échelle de l’État.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD210 de Mme Clémence Guetté.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Cet amendement a pour objet la transformation du nouveau fonds d’accélération de la bifurcation écologique dans les territoires en un fonds de planification écologique territoriale grâce à l’augmentation massive des crédits alloués. La bifurcation écologique nécessite des investissements locaux très importants, que les collectivités territoriales, qui souffrent actuellement, ont du mal à supporter : rénovation thermique du patrimoine bâti, notamment des équipements scolaires, sportifs et des logements des bailleurs sociaux, renaturation, développement des transports collectifs et des modes doux. La bifurcation écologique demande aussi une ingénierie territoriale et des capacités techniques opérationnelles dont les collectivités territoriales disposent très inégalement selon leur taille. Nous proposons donc de créditer davantage le fonds qui est aujourd’hui prévu par le Gouvernement pour prendre réellement la mesure de ce qu’il est nécessaire de faire en matière de bifurcation écologique.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Je lis dans l’exposé des motifs de votre amendement une protestation contre l’inefficacité de Ma Prime Rénov’, qui vous conduit à lui retirer 200 millions d’euros. Or vous avez proposé plusieurs amendements à Ma Prime Rénov. Je note une forme de contradiction dans les termes. Par ailleurs, je pense que votre amendement est satisfait par le fonds vert, qui est doté d’un milliard et demi d’euros et qui fonctionne par appel à projets. La Première ministre a clairement indiqué que, s’il fonctionnait, d’autres crédits pourraient ensuite être apportés. Je demanderai le retrait de cet amendement ou j’y serai défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD235 de M. Pierre Meurin.

M. Pierre Meurin (RN). Je propose 100 millions d’euros d’économie sur les ZFE-m avec cet amendement. Je suis constant dans mes combats. La récente mission « flash » sur les ZFE-m a reconnu avec lucidité que malgré les aides proposées, je cite, « le reste à charge moyen des ménages et des entreprises pour acquérir un véhicule propre électrique ou hybride est supérieur à 20 000 euros et atteint jusqu’à 40 500 euros en moyenne pour l’achat d’un véhicule hybride rechargeable » et même que « le reste à charge reste bien trop élevé pour les plus défavorisés qui remboursent encore leur véhicule actuel ».

C’est bien un aveu d’échec et je vois mal comment les ZFE-m se déploieront dans un proche avenir, sur fond de restriction des libertés. Il sera impossible aux gens normaux d’aller travailler en 306 tant qu’il n’existera pas d’alternative. Créons donc des parkings relais, organisons des dessertes en 15 minutes vers les centres-villes et avec bon sens, disons-nous qu’une ville avec des bouchons, c’est plus de CO2 ; une ville où on ne peut se garer, c’est également plus de CO2.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. En fait, Monsieur Meurin, vous êtes contre toute mesure d’amélioration de la qualité de l’air, dont la pollution provoque des milliers de morts chaque année Vous vous êtes prononcé contre les AASQA et maintenant, vous vous opposez aux ZFE-m. Le dispositif est certes imparfait, mais nous venons de faire une mission d’information avec deux corapporteurs qui proposent d’adapter leur déploiement et d’apporter des aides complémentaires pour résoudre un problème réel : que les ménages les plus précaires ne soient pas, bien au contraire, les premières victimes de la transition énergétique. Vous êtes contre toute mesure de lutte contre la pollution, mais rassurez-vous, la qualité de l’air s’améliore, pour les plus aisés comme pour les plus pauvres. Donc avis défavorable.

M. Pierre Meurin (RN). Merci d’éviter les caricatures. Je ne suis pas contre l’amélioration de la qualité de l’air, mais je dénonce l’écologie punitive. J’ai proposé des solutions comme la mise en place de parkings relais et de desserte vers les centres-villes. C’est une question de choix politique ; je maintiens ma position, en estimant qu’il est illusoire de mettre en place des ZFE-m à si court terme. On peut avoir un débat là-dessus, mais cela suppose que vous n’ayez pas une vision caricaturale de mes propos.

M. Vincent Thiébaut (HOR). En appui à notre rapporteur pour avis, je rappelle que la pollution de l’air provoque 70 000 morts prématurés par an. Il y a deux volets dans ce débat : d’une part, les objectifs et délais prévus par la loi que nous avons votée, d’autre part, la surenchère de certaines collectivités territoriales vers lesquelles, Monsieur Meurin, je vous suggère de vous tourner. Ces collectivités ont en effet pris des décisions sans tenir compte de la situation des communes limitrophes.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques II-CD6 de M. Guy Bricout et II-CD234 de Mme Violette Spillebout.

Mme Nathalie Bassire (LIOT). L’amendement II-CD6 vise à initier le déploiement d’un label « Villes à haute performance énergétique », sur le même principe que les « Villes fleuries », pour stimuler l’émulation entre villes sur l’efficacité et la sobriété énergétiques. Le coût d’une telle mesure pour l’État serait modéré, puisqu’il se limiterait aux frais de fonctionnement du comité d’évaluation, avant une montée en puissance du dispositif. Nous proposons d’abonder de 200 000 euros seulement le fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires.

Mme Violette Spillebout (RE). La maîtrise de la demande énergétique pour atteindre la neutralité carbone ne peut pas reposer uniquement sur l’amélioration de l’efficacité énergétique. Aussi le présent amendement propose qu’elle passe par un programme ambitieux des collectivités territoriales, tant pour l’efficacité que pour la sobriété énergétiques. Pour stimuler les actions des municipalités en termes d’efficacité et de sobriété, nous proposons la création d’un label « Villes à haute performance énergétique » sur le modèle des labels « Villes et Villages fleuris ». Sans émulation entre les villes, les objectifs du Gouvernement n’avanceront pas, comme on peut le constater avec le programme d’équipements solaires à Lille.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Je salue cette démarche d’incitation et d’émulation. Néanmoins est-ce une mission à confier au fonds vert, qui a déjà en charge la biodiversité et la rénovation énergétique, et est-ce indispensable d’y consacrer 200 000 euros ? Je propose que nous en reparlions tous ensemble au Gouvernement et que donc, dans l’immédiat, vous retiriez votre amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. Benjamin Saint-Huile (LIOT). Je propose que cet amendement soit maintenu et que nous le votions, avant de nous tourner vers le Gouvernement.

Mme Violette Spillebout (REN). Je suis d’accord avec cette méthode.

La commission rejette les amendements identiques.

Amendement II-CD53 de M. Gérard Leseul.

Mme Chantal Jourdan (SOC). Cet amendement du groupe Socialistes et apparentés vise à renforcer les moyens humains alloués à la prévention des risques industriels. Pour mémoire, en 2021, le bureau d’analyse des risques et pollutions industrielles (BARPI), qui dépend du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, a recensé 1 571 événements technologiques et 250 incidents ou accidents dans des établissements Seveso, dont 6 accidents majeurs.

Un peu plus de trois ans après l’accident de Lubrizol, et alors que le Gouvernement avait promis une augmentation de 50 % du nombre d’inspections d’installations classées d’ici la fin du quinquennat, les syndicats des secteurs concernés dénoncent surtout une diminution du temps consacré à chaque inspection et ainsi une détérioration des conditions de travail des inspecteurs. 50 inspecteurs seulement ont été recrutés sur un effectif de 1 600 personnes, soit une hausse de 2 %, ce qui est bien trop léger. En Normandie, les syndicats ont également dénoncé la récente annonce d’un projet de suppressions de postes au sein de la Dreal. Le Syndicat national des ingénieurs de l’industrie et des mines a réclamé à plusieurs reprises que l’augmentation promise des effectifs « post Lubrizol » soit suivie d’effets. D’où la majoration des crédits de 35 millions d’euros que nous proposons.

Mme Anne Stambach-Terrenoir, rapporteure pour avis. Cet amendement répond tout à fait à ce que je souhaite, à savoir un renforcement de l’emploi public. En l’espèce, la gravité de l’accident de l’usine Lubrizol milite pour un renforcement des effectifs d’agents se consacrant au contrôle des installations classées. Avis favorable.

Mme Sandrine Le Feur (RE). Les moyens accordés à la prévention des risques industriels sont une priorité du Gouvernement. Entre 2022 et 2023, ces moyens augmenteront de 12 millions d’euros, permettant d’abonder de 28 ETP l’administration centrale et les administrations déconcentrées. L’État a tiré les leçons de la grave catastrophe de l’usine Lubrizol et au regard de l’équilibre des finances publiques, nous ne pouvons abonder de 35 millions d’euros des crédits déjà majorés de 12 millions. Nous sommes défavorables, non parce que nous ne souhaitons pas l’augmentation des crédits consacrés à la prévention des risques industriels, mais parce que cet amendement est déjà satisfait.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD56 de M. Gérard Leseul.

Mme Chantal Jourdan (SOC). C’est un amendement de repli, avec un abondement de 10 millions d’euros.

Mme Anne Stambach-Terrenoir, rapporteure pour avis. Avis favorable, comme pour l’amendement précédent.

Mme Lisa Belluco (Écolo-NUPES). Je signale que la France compte 28 000 établissements comprenant au moins une installation soumise à autorisation et 15 000 soumis à enregistrement, pouvant faire l’objet d’inspection, auxquels s’ajoutent 450 000 établissements soumis à déclaration, dans lesquels des inspections peuvent survenir sans être pour autant obligatoires. Ce ne sont pas 28 ETP qui vont pallier ce manque d’effectifs.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD236 de M. Pierre Meurin.

M. Pierre Meurin (RN). Je propose d’économiser 88 millions d’euros. Le ministère de la transition écologique est l’un des champions du recours aux cabinets de conseil. Cet argent pourrait mieux servir au pouvoir d’achat des Français. Je considère en outre que les fonctionnaires du ministère sont tout à fait aptes à conduire des expertises et que la nature de ces cabinets, souvent anglo-saxons, pose un problème de souveraineté. Je pense que Mme la rapporteure pour avis donnera un avis favorable à cet amendement, compte tenu des positions en la matière de son groupe politique.

Mme Anne Stambach-Terrenoir, rapporteure pour avis. Mon avis est défavorable, pour une raison technique. Politiquement, je me suis prononcée contre le recours excessif aux dépenses d’audit externe, à la suite du rapport du Sénat, puis à la suite des auditions que j’ai conduites pour rédiger mon avis budgétaire.

Simplement, les crédits d’audit externe sont répartis sur plusieurs programmes et s’agissant du programme 217, ils sont inscrits à la sous-action 2 de l’action 7, pour un montant de 1,7 million d’euros. Si vous supprimez 88 millions d’euros sur le programme 217, vous mettez principalement en cause le versement des salaires des agents publics et des programmes d’investissement immobilier et mobilier. Donc avis défavorable.

Mme Lisa Belluco (Écolo-NUPES). Je m’oppose également à cet amendement mais j’ajoute que si nous voulons moins recourir aux cabinets de conseil, il nous faut des fonctionnaires bien formés et donc arrêter la fermeture de leurs centres d’enseignement, comme l’École nationale des techniciens de l’environnement, située à Valenciennes, qui fermera prochainement ses portes.

La commission rejette l’amendement.

Elle émet ensuite un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », modifiés.

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Article 33

Amendement II-CD33 de M. Jean-Félix Acquaviva.

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). Cet amendement vise à augmenter les moyens humains du Conservatoire du littoral de 12 ETP en 2023, contre une stagnation d’effectifs initialement prévue. Le conservatoire est confronté depuis plusieurs années à une stagnation de son plafond d’emplois, alors même que son domaine foncier protégé ne cesse de croître. Donnons-lui les moyens de travailler.

Mme Anne Stambach-Terrenoir, rapporteure pour avis. Avis favorable, car il s’agit de création d’emplois.

La commission rejette l’amendement.

Amendements II-CD5 de Mme Alexandra Masson et II-CD246 rect. de Mme Anne Stambach-Terrenoir, rapporteure pour avis (discussion commune).

Mme Alexandra Masson (RN). Pour former davantage d’officiers de la marine marchande, il faut davantage de formateurs. Il est donc indispensable d’augmenter le nombre d’ETPT de l’École nationale supérieure de la marine (ENSM). Bien évidemment, cette augmentation doit être progressive, pour accompagner la montée en puissance du dispositif. Les besoins sont estimés pour l’année 2023 à 5 ETPT.

Le Président de la République a lui-même reconnu ce besoin en annonçant que le nombre d’officiers sortant de l’ENSM devait doubler d’ici 2027. L’amendement que je présente, à 5 ETPT, est donc très raisonnable et j’espère qu’il rencontrera l’accord de la commission.

Mme Anne Stambach-Terrenoir, rapporteure pour avis. Mon amendement a pour objet de relever de 9 unités le plafond d’emplois de trois autorités administratives indépendantes relevant du programme 217, à savoir l’Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires, la Commission nationale du débat public et la Commission de régulation de l’énergie.

L’Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires est une petite structure, et avec la reprise du trafic aérien, elle a besoin d’un relèvement de son plafond d’emplois. De 11 agents, elle pourrait passer à 12. Il peut paraître curieux de présenter un amendement portant sur un emploi, mais l’Acnusa travaille en flux tendu et ce renfort lui permettrait de mieux travailler.

La Commission nationale du débat public est également une petite structure, qui a besoin d’un relèvement de son plafond d’emplois. Elle joue un rôle très important dans la participation du public aux décisions qui ont un impact sur l’environnement. Pour rappel, cette participation du public est d’ordre constitutionnel. Le relèvement du plafond d’emplois que je vous propose consiste à transformer un emploi provisoire, donc déjà financé, en emploi permanent. Il ne génère donc pas de dépense supplémentaire et permettra à la CNDP de mieux faire face à ses multiples missions. Avec le développement des projets d’énergie, notamment les éoliennes et le nucléaire, sa charge de travail sera considérable dans les prochains mois.

À la différence de la CNDP et de l’Acnusa, la CRE est une structure plus importante, qui dépasse la centaine d’agents. Depuis sa création au début des années 2000, le législateur lui a confié de nouvelles missions et elle a en charge, principalement, le bon fonctionnement du marché de l’énergie.

Mon groupe politique conteste le fait de livrer un domaine aussi stratégique que l’énergie à la concurrence. C’est pour nous une erreur tragique, et beaucoup de nos concitoyens s’en aperçoivent avec la hausse de leur facture de gaz et d’électricité. Par conséquent, l’organe qui surveille ces marchés est pour nous l’instrument d’une politique libérale que nous contestons. Néanmoins, la responsabilité du législateur est de donner à un organe les moyens de travailler lorsqu’il lui confie des missions. Le plafond des emplois de la CRE nécessite d’être relevé de 7 unités, ce que je propose par le présent amendement. Pour le reste, j’espère que l’Union européenne reviendra sur cette politique qui n’apporte rien au consommateur, qui fragilise les PME et les TPE et ne sécurise pas l’approvisionnement énergétique des États.

Mme Christine Decodts (RE). Je vous remercie d’avoir souligné l’effort qu’accomplit l’ENSM ainsi que l’engagement des femmes et des hommes de la marine marchande. Il est réellement nécessaire de soutenir cette école. Mais ainsi qu’indiqué ce matin, le Gouvernement réfléchit pour voir comment mieux définir ses besoins. Comme ce travail est en cours, nous proposons de rejeter cet amendement.

La commission rejette successivement les amendements.

Elle émet ensuite un avis favorable à l’adoption de l’article 33, non modifié.

Article additionnel après l’article 42 (article 15 de la loi n° 2019‑1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020) : Subordination de l’obtention des aides Ma Prime Rénov’ à la réalisation d’un diagnostic de performance énergétique (DPE) à l’issue des travaux de rénovation énergétique

Amendement II-CD233 de M. Antoine Armand, rapporteur pour avis.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Je propose par cet amendement de subordonner, à partir de janvier 2025, la délivrance des primes attribuées dans le cadre de Ma Prime Rénov’ à un diagnostic de performance énergétique (DPE) réalisé à l’issue des travaux. Le DPE devra donc être réalisé pour permettre la délivrance de la prime.

L’intérêt de cet amendement est triple : mieux connaître le parc immobilier pour faciliter le travail des acteurs publics au niveau national et local et donner une information aux propriétaires sur la qualité énergétique de leur bien ; inciter à conduire une réflexion générale et globale sur une rénovation ; enfin, inciter les entreprises à conduire des travaux de meilleure qualité, des associations nous ayant alertés sur le fait que les résultats des travaux de certaines entreprises n’étaient guère conformes aux objectifs d’efficacité énergétique.

La commission adopte l’amendement.

Article additionnel après l’article 42 (article L. 232‑3 du code de l’énergie) : Subordination de l’obtention des aides Ma Prime Rénov’ et Ma Prime Rénov’ Sérénité à la réalisation d’un DPE à l’issue de travaux correspondant à une rénovation énergétique performante ou globale

Amendement II-CD232 de M. Antoine Armand, rapporteur pour avis.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Cet amendement est complémentaire de l’amendement II-CD233 puisqu’il prévoit, pour les rénovations globales et performantes encadrées par un accompagnateur Rénov’, que le versement des aides publiques à la rénovation soit conditionné à la réalisation d’un DPE à l’issue des travaux. Je propose de le voter en prévision de la réunion, demain, de la commission des finances. Si l’amendement II‑CD233 n’était pas adopté, nous présenterions alors le présent amendement.

La commission adopte l’amendement.

Article additionnel après l’article 42 : Rapport du Gouvernement sur la progressivité de la prime à la conversion

Amendement II-CD231 de M. Antoine Armand, rapporteur pour avis.

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. Cet amendement est un amendement de repli par rapport à l’amendement sur la prime à la conversion que je vous ai présenté auparavant. Il demande un rapport au Gouvernement pour disposer de différentes hypothèses de travail sur la progressivité de la prime à la conversion, ce qui nous permettra d’évaluer les meilleures options concernant l’évolution du dispositif en faveur des ménages modestes qui sont disponibles pour le Gouvernement.

La commission adopte l’amendement.

Article additionnel après l’article 42 (article L. 121‑6 du code forestier) : Conditionnalité des aides publiques attribuées aux propriétaires forestiers

Amendement II-CD38 de M. Guy Bricout.

M. Benjamin Saint-Huile (LIOT). Cet amendement porte sur les aides dont bénéficient les propriétaires forestiers. En l’absence de conditionnalités suffisantes de ces aides, les propriétaires peuvent opter pour des pratiques sylvicoles qui peuvent être contraires aux objectifs internationaux de la France en matière de biodiversité et de climat. Cet amendement assure donc que les aides contribueront à la conservation de la biodiversité et au stockage de carbone. Il insiste particulièrement sur le rôle des sols forestiers dont la préservation est désormais reconnue d’intérêt général à la suite de l’adoption de la loi « climat et résilience ».

M. Antoine Armand, rapporteur pour avis. C’est un sujet important, mais ce sera un avis défavorable. Aujourd’hui la plupart des aides versées aux propriétaires forestiers le sont sur la base d’objectifs de développement durable : par exemple, toutes les aides du plan de relance, de l’ONF ou des agences de l’eau sont conditionnées à des plans de gestion durable des parcelles forestières privées et servent le plus souvent à soutenir ces plans.

La commission adopte l’amendement.

Article additionnel après l’article 42 : Rapport du Gouvernement sur les conditions de travail des inspecteurs des installations classées pour la protection de l’environnement et sur la mise en œuvre de recrutements

Amendement II-CD211 de Mme Clémence Guetté.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Il ne s’agit pas d’un amendement de crédits. Nous demandons un rapport au Gouvernement sur les conditions de travail des inspecteurs des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE). En effet, les recrutements annoncés pour les années 2020, 2021 et 2022 n’ont pas été suivis d’effet d’après une enquête de Libération, alors que les services d’inspection des ICPE sont confrontés à un manque structurel de moyens humains.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur pour avis. Cet amendement porte sur les conditions de travail des inspecteurs des ICPE, sujet que j’ai rappelé dans mon rapport et que notre collègue Damien Adam a abordé dans son rapport sur l’accident de l’usine Lubrizol, dans lequel il a montré que le nombre d’inspections de ces installations avait diminué. Cette demande de rapport me semble pertinente, donc avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Après l’article 42

Amendement II-CD195 de Mme Clémence Guetté.

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). Toute bonne application de la loi nécessite une évaluation. C’est pour cela que nous vous présentons un amendement demandant au Gouvernement un rapport, cette fois sur la préservation de la biodiversité, afin de constater, six mois après l’adoption du projet de loi de finances pour 2023, si les coupes budgétaires et la réduction des effectifs de la fonction publique ont un impact sur la conduite de la politique en faveur de la biodiversité.

Mme Anne Stambach-Terrenoir, rapporteure pour avis. J’émets évidemment un avis favorable.

La commission rejette l’amendement.

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