N° 1715

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 11 octobre 2023

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2024 (n° 1680),

 

TOME I

 

ACTION EXTÉRIEURE DE L’ÉTAT

 

Action de la France en Europe et dans le monde ;

Français à l’étranger et affaires consulaires

 

PAR M. Vincent Seitlinger

Député

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 Voir le numéro : 1680


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SOMMAIRE

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 Pages

Introduction

I. Les crÉdits relatifs À l’Action de la France en Europe et dans le monde et aux Français à l'Étranger et affaires consulaires pour 2024

A. l’Évolution des crÉdits, hors dépenses de personnel, des programmes 105 et 151 de la mission action extérieure de l’état

1. Le programme Action de la France en Europe et dans le monde (programme 105)

2. Le programme Français à l’étranger et affaires consulaires (programme 151)

B. L’ÉVOLUTION des dépenses de personnel du quai d’orsay

1. La masse salariale et les emplois du MEAE

2. L’allocation des moyens humains supplémentaires

II. l’action de notre outil diplomatique dans le cadre des opÉrations d’Évacuation

A. Le Centre de crise et de soutien, un acteur central au service de la protection de nos ressortissants

1. Le CDCS, un outil chargé de la veille, de l’anticipation, de l’alerte et de la gestion des crises dont l’importance n’a eu de cesse de se renforcer depuis sa création

a. Un dispositif agile permettant de réagir le plus rapidement possible face à diverses situations d’urgence

i. Les quatre grandes missions du CDCS au profit de la sécurité des Français à l’étranger

ii. La mise en œuvre opérationnelle des actions du CDCS

b. Le rôle spécifique du CDCS dans le cadre des opérations d’évacuation

i. Le déroulé des opérations à l’occasion d’une évacuation

ii. Les outils déployés pour faciliter les opérations d’évacuation

2. Des moyens qui n’ont eu de cesse de croître pour améliorer le service rendu à nos ressortissants

a. Les moyens humains du CDCS

i. Une augmentation constante des effectifs depuis sa création

ii. Des ressources humaines conséquentes mobilisables en cas de situation de crise

b. Les moyens financiers du CDCS

i. L’évolution des crédits dédiés au CDCS dans un monde de plus en plus exposé aux crises

ii. Les crédits prévus pour le CDCS dans le projet de loi de finances pour 2024

B. Une expertise française internationalement reconnue en matière d’opérations d’évacuation

1. Les récentes opérations d’évacuation ont fait la preuve de l’efficacité de notre outil diplomatique et militaire

a. Les opérations d’évacuation d’Afghanistan (2021)

b. Les opérations d’évacuation d’Ukraine (2022)

c. Les opérations d’évacuation du Soudan (2023)

d. Les opérations d’évacuation du Niger (2023)

2. Certains mécanismes de coopération et de soutien avec nos partenaires existent mais sont de fait limités

a. Une coopération opérationnelle européenne modeste

b. Un mécanisme de soutien financier européen pertinent

C. Le QUai d’orsay, un « ministère des crises » au service duquel œuvrent des agents aguerris et dévoués

1. Des agents formés aux situations de crise

a. La préparation des personnels aux opérations d’évacuation

b. La question de la protection des emprises et des matériels et données sensibles au moment de la survenance d’une crise

i. La protection des emprises en période critique

ii. Les plans de préparation de fermeture et de destruction technique

2. La question de l’évacuation et du maintien de certains personnels dans des environnements hostiles

a. L’évacuation des agents et le maintien des personnels indispensables

b. La question de l’évacuation des agents de droit local

3. Le nécessaire accompagnement des agents à la suite des opérations d’évacuation

a. L’accompagnement psychologique

b. La question de la réaffectation des agents évacués

i. Un traitement maintenu à leur retour en France après évacuation

ii. Le souci d’un accompagnement professionnel personnalisé en soutien aux agents évacués

c. La question de l’indemnisation des effets personnels perdus

Travaux de la commission

I. Audition de Mme catherine coloNna, ministre de l’Europe et des affaires étrangères

II. présentation de l’avis devant la commission des affaires étrangères et examen des crédits

Annexe : liste des personnes auditionnées par le rapporteur pour avis


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   Introduction

La mission budgétaire Action extérieure de l’État, qui regroupe les crédits de fonctionnement, numériques, d’investissement et de sécurité ainsi que les crédits d’intervention du ministère de l’Europe et des affaires étrangères – MEAE – (programme 105), les crédits consulaires (programme 151) et d’influence culturelle (programme 185) ([1]) mobilise l’essentiel des moyens octroyés au Quai d’Orsay pour assurer la mise en œuvre de ses missions.

En 2024, le budget du MEAE atteindra, 6 764,8 millions d’euros en crédits de paiement (hors pensions), en hausse de 4,5 % avec 293 millions d’euros supplémentaires par rapport à la loi de finances pour 2023. Ce budget comprend également une hausse des effectifs de 165 équivalents temps plein (ETP), après la hausse de 100 ETP lors du dernier exercice, fait notable pour un ministère qui depuis trente ans n’avait eu de cesse de voir ses effectifs baisser. Comme le président de la commission des affaires étrangères, M. Jean‑Louis Bourlanges, l’a souligné le 10 octobre 2023 à l’occasion de l’audition de la Mme Catherine Colonna, ministre de l’Europe et des affaires étrangères : en matière de ressources humaines pour le MEAE « nous étions véritablement audelà de l’os ».

Le projet de budget pour 2024 s’inscrit ainsi dans le sillage des annonces effectuées par le président de la République en clôture des états généraux de la diplomatie, le 16 mars 2023, qui visent un réarmement de notre diplomatie d’ici à 2027 avec une augmentation de 700 ETP des effectifs et une hausse de 20 % des crédits.

Ces moyens nouveaux pour notre outil diplomatique – que beaucoup considèrent en crise profonde, à l’intérieur comme à l’extérieur, du Quai d’Orsay – apparaissent comme une nécessité à une époque où les tensions à l’échelle mondiale ne cessent de se multiplier et de s’intensifier.

Cependant c’est de l’allocation de ces moyens nouveaux que dépendra effectivement le renouveau de notre diplomatie. Des priorités fixées pour le pilotage du MEAE et de son réseau dépendront le renforcement de la place de la France dans le concert des Nations, ainsi que l’affermissement de sa capacité à agir. Comme l’ensemble des acteurs de la diplomatie entendus dans le cadre de ses travaux, le rapporteur salue cette hausse inédite des moyens humains et financiers dédiés au Quai d’Orsay dans le projet de loi de finances pour 2024. Il appelle néanmoins à la plus grande vigilance sur leur utilisation, afin que les volontés politiques affichées ne demeurent pas de simples vœux pieux mais deviennent de réels outils au service du renforcement de l’action extérieure de notre pays.

En l’état, l’allocation imprécise de ces nouvelles ressources, s’agissant notamment des 165 ETP supplémentaires, constitue un élément d’inquiétude pour le rapporteur puisque les informations qui lui ont été transmises au cours de ses travaux sont demeurées particulièrement vagues en se bornant à indiquer qu’elles viendraient soutenir les priorités érigées par le président de la République lors de son discours en clôture des états généraux de la diplomatie. En conséquence, le rapporteur s’abstiendra sur le vote de ces crédits et appelle à en suivre l’exécution avec la plus grande attention.

Afin d’illustrer l’impérieuse nécessité d’assurer à notre diplomatie les moyens d’agir dans environnement international de plus en plus dégradé – que l’on pense à la guerre en Ukraine, à la situation en Afrique sahélienne ou encore aux évènements dramatiques qui se déroulent actuellement au Proche‑Orient, le rapporteur a fait le choix, pour la partie thématique, de ses travaux de se concentrer, cette année, sur les actions de notre outil diplomatique dans les situations d’urgence et plus particulièrement sur les opérations d’évacuation de nos ressortissants qui se sont multipliées, ces dernières années, en Afghanistan (2021), en Ukraine (2022), au Soudan (2023), au Niger (2023) et très récemment en Israël (2023).

La France, en la matière, dispose d’un savoir‑faire et d’une capacité d’action reconnus par tous qui la place souvent en première ligne pour mener à bien ces missions périlleuses au service de nos ressortissants mais également au bénéfice d’autres États partenaires. Pour y parvenir, elle peut compter sur des moyens militaires et civils conséquents, ainsi que sur des agents aguerris et dévoués disposant d’une réelle expertise, que le rapporteur a à cœur de saluer à l’occasion de la présentation de cet avis budgétaire sur les crédits des programmes 105 et 151 du projet de loi de finances pour 2024.



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I.   Les crÉdits relatifs À l’Action de la France en Europe et dans le monde et aux Français à l'Étranger et affaires consulaires pour 2024

A.   l’Évolution des crÉdits, hors dépenses de personnel, des programmes 105 et 151 de la mission action extérieure de l’état

1.   Le programme Action de la France en Europe et dans le monde (programme 105)

Le programme 105 regroupe les moyens de l’action diplomatique de la France en administration centrale et à l’étranger en vue de renforcer la sécurité internationale et celle des Français, de promouvoir le multilatéralisme et de construire l’Europe et d’assurer un service diplomatique efficient et de qualité.

Les crédits dédiés au programme 105 dans le projet de loi de finances pour 2024, hors rémunérations, progressent de 166,3 millions d’euros, dont 129,2 millions d’euros de hausse tendancielle et 37,1 millions d’euros de mesures nouvelles. Ainsi, le programme 105 augmente, de manière inédite depuis 2005, de 13 % par rapport à 2023 et s’établit à 1 474,5 millions d’euros.

Le programme 105 réunit 60 % des emplois et 31 % des crédits dévolus au MEAE pour la mise en œuvre de la politique étrangère de la France. Selon les priorités fixées par le Gouvernement, trois objectifs sont assignés à ce programme :

  1.      Renforcer la sécurité internationale et la sécurité des Français au travers d’actions de formation et de coopération de la direction de la coopération de sécurité et de défense (38,9 millions d’euros), d’actions en faveur de la sécurisation de l’ensemble des réseaux français à l’étranger et de la protection des communautés françaises assurée par le centre de crise et de soutien (5,1 millions d’euros), de la sécurisation des implantations françaises, qui relève de la direction de la sécurité diplomatique (79 millions d’euros) et de la direction de l’immobilier et de la logistique (142 millions d’euros) ;
  2.      Promouvoir le multilatéralisme et construire l’Europe via le financement de plus de quatre‑vingts organisations internationales et européennes ainsi que d’autres instruments internationaux ; 928 millions d’euros sont consacrés à cet objectif visant à affermir la position de la France comme acteur de premier plan en faveur du multilatéralisme et dans le traitement des questions globales (sécurité, environnement, commerce, énergie) ;
  3.      Assurer un service diplomatique efficient et de qualité via le financement des actions des directions conduisant notre diplomatie (directions politiques et direction de l’Union européenne) et des services qui soutiennent l’action diplomatique (notamment presse et communication, protocole), ainsi que toutes les fonctions support assurant la bonne articulation des ressources humaines et des moyens (administration générale, systèmes d’information et de télécommunications, politique immobilière, logistique diplomatique…). Le programme 105 assure ainsi le fonctionnement du réseau diplomatique (311,3 millions d’euros), indispensable pour relayer et mettre en œuvre les décisions prises par les plus hautes autorités de l’État.

2.   Le programme Français à l’étranger et affaires consulaires (programme 151)

Le programme 151 a pour objet de fournir aux Français établis hors de France ou de passage, des services essentiels et de participer à la définition et à la mise en œuvre de la politique en matière d’entrée des étrangers en France.

Les crédits dédiés au programme 151 dans le projet de loi de finances pour 2024, hors rémunérations, progressent de 24 millions d’euros par rapport à la loi de finances pour 2023, soit une hausse de 17 %, pour atteindre un montant de 165 millions d’euros.

Le réseau consulaire est constitué, en 2023, de 208 postes consulaires et de 493 agences consulaires qui accompagnent les communautés françaises à l’étranger, résidentes ou de passage.

Piloté par la direction des Français à l’étranger et de l’administration consulaire (DFAE), le programme 151 est constitué de trois actions couvrant toute l’activité consulaire :

L’action n° 1 (Offre d’un service public de qualité aux Français de l’étranger) comprend plusieurs volets et concerne l’Assemblée des Français de l’étranger (AFE), le service public consulaire, la modernisation de l’administration consulaire, les affaires sociales ainsi que les élections. Cette action regroupe ainsi les principaux services publics accessibles aux ressortissants français de l’étranger (état civil et services administratifs, titres d’identité et voyage, aide sociale, élections).

En 2024, se tiendront les élections européennes, dont le coût de l’organisation à l’étranger est estimé à 6 millions d’euros. À ce titre, le programme 151 bénéficiera d’une augmentation de 1,1 million d’euros de son enveloppe, laquelle sera complétée par un transfert de 4,4 millions d’euros en provenance du ministère de l’intérieur et des outre‑mer.

Les crédits alloués au service public consulaire ainsi qu’à la modernisation de l’administration consulaire augmentent de 2,8 millions d’euros afin d’améliorer la qualité des services rendus aux Français de l’étranger, notamment grâce à la poursuite du déploiement du service France consulaire, du vote électronique et de la finalisation du registre d’état civil électronique (RECE).

L’action n° 2 (Accès des élèves français au réseau AEFE et à la langue française) correspond à l’octroi de bourses scolaires en faveur des enfants des familles à revenus modestes, à l’accompagnement scolaire des élèves en situation de handicap (ASESH) et à l’instauration d’un Pass éducation langue française.

Les crédits consacrés à l’accès des élèves français au réseau scolaire de l’agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE) et à la langue française s’élèvent à 118 millions d’euros en 2024, soit une hausse de 14,8 millions d’euros par rapport à l’année précédente. Cette enveloppe, déléguée à l’AEFE, permettra de financer principalement les bourses scolaires des enfants français dans le réseau de l’enseignement français à l’étranger. Cette hausse doit permettre aux familles de faire face à l’accroissement des frais de scolarité en raison de l’inflation élevée. 1,5 million d’euros sont également alloués aux élèves en situation de handicap ayant besoin d’être accompagnés pour étudier dans les meilleures conditions. Enfin, 1 million d’euros financeront l’instauration du Pass éducation langue française devant permettre aux enfants de nos compatriotes scolarisés localement qui en ont besoin de se remettre à niveau en langue française.

L’action n° 3 (Instruction des demandes de visa), menée conjointement avec le ministère de l’intérieur, concerne l’instruction des demandes de visa, dont la gestion des frais de contentieux de refus de visa, depuis le 1er janvier 2022, ainsi que la réhabilitation de certains services visas ou d’actions d’audit et de formation.

B.   L’ÉVOLUTION des dépenses de personnel du quai d’orsay

1.   La masse salariale et les emplois du MEAE

Les dépenses de personnel du MEAE représentent 1 138,4 millions d’euros (hors contributions au compte d’affectation spéciale – CAS – Pensions), soit 16,8 % du budget total hors CAS, en hausse de 61,6 millions d’euros par rapport à la loi de finances pour 2023. Ce plafond intègre l’impact des mesures interministérielles prises en faveur du pouvoir d’achat (notamment la revalorisation de 1,5 % du point d’indice de la fonction publique à partir du 1er juillet 2023).

Après une première hausse de 100 ETP en 2023, les effectifs augmenteront en 2024 de 165 ETP. Au schéma d’emplois en hausse de 150 ETP en 2024, 5 ETP supplémentaires s’ajouteront pour la modernisation de la gestion des carrières des cadres supérieurs et dirigeants au sein de la nouvelle délégation ministérielle à l’encadrement supérieur, ainsi que 10 ETP pour les fonctions numériques. Le plafond d’emplois sera ainsi porté à 13 761 emplois équivalents temps plein travaillés (ETPT).

Le projet de loi de finances pour 2024 inclut un montant de masse salariale (titre 2) permettant le financement des ETP créés et la poursuite de la convergence des rémunérations entre agents contractuels et titulaires. Après la revalorisation des volontaires internationaux l’année dernière, une enveloppe est prévue en 2024 pour revaloriser les majorations familiales, afin de garantir la prise en charge des frais de scolarité de tous les enfants des agents à l’étranger.

La hausse des crédits se décompose plus précisément ainsi :

     44,5 millions d’euros au titre du « tendanciel », incluant :

-         31 millions d’euros au titre des effets‑prix (impact de l’inflation future sur la rémunération à l’étranger) permettant notamment un rattrapage du coût de la vie deux fois plus important pour les agents de droit local qu’en 2023 ;

-         10,3 millions d’euros au titre des mesures interministérielles prises en faveur du pouvoir d’achat des agents publics ;

-         3,2 millions d’euros au titre des autres facteurs d’évolution de la masse salariale (glissement vieillesse technicité « GVT », notamment) ;

     17,1 millions d’euros au titre des mesures nouvelles, dont :

-         10 millions d’euros de mesures catégorielles pour la poursuite de la convergence salariale entre contractuels et titulaires, au bénéfice de différentes catégories d’agents, notamment les vacataires et les agents B à l’étranger, pour le financement des majorations familiales, et enfin, le relèvement des cadres salariaux des agents de droit local ;

-         7,1 millions d’euros correspondant à la masse salariale supplémentaire pour les 165 ETP créés.

2.   L’allocation des moyens humains supplémentaires

Les 100 ETP supplémentaires attribués au MEAE par la loi de finances pour 2023 ont, selon les réponses transmises au rapporteur au cours de ses travaux préparatoires, permis de soutenir, en administration centrale comme à l’étranger, les priorités politiques suivantes :

- le renforcement de la présence française dans l’Indopacifique, ainsi que la capacité d’analyse politique dans nos directions et nos postes les plus exposés ;

- la sécurisation de nos emprises, qui demeure un sujet de première importance, notamment au regard de l’évolution de la situation dans certains pays d’Afrique ;

- la cyber‑sécurité et la lutte contre les manipulations de l’information ;

- l’appui aux services consulaires, notamment au travers d’un centre de soutien spécialisé ;

- la poursuite de l’effort en faveur des secrétariats généraux d’ambassades les plus sollicités ;

- le soulagement des directions et des postes où la charge de travail est devenue trop forte au point de peser sur la santé des agents.

À cela s’est ajouté un transfert de 6 ETP dans le cadre de la création de la délégation ministérielle à l’encadrement supérieur.

En outre, le MEAE a également obtenu les marges budgétaires nécessaires afin de pouvoir recruter, dans la perspective des Jeux olympiques et paralympiques 2024, des contrats occasionnels et des vacataires qui ne rentrent pas dans le plafond d’emplois.

Au total, de manière globale, le plafond d’autorisation d’emplois a connu en 2023 une hausse de 52 ETPT sur le programme 105, de 11 ETPT sur le programme 151, de 1 ETPT sur le programme 185 et de 4 ETPT sur le programme 209.

Au-delà de ces effectifs supplémentaires, le MEAE a été en mesure de créer 100 nouveaux postes grâce à une gestion dynamique de son réseau et à sa plasticité qui ont permis de redéployer une part non négligeable des effectifs afin de mieux les orienter en fonction des priorités de politique étrangère.

Les 165 ETP nouveaux annoncés dans le projet de finances pour 2024 représentent une bonne nouvelle pour notre outil diplomatique. Il faudra cependant veiller à en suivre l’allocation précise puisque les informations transmises au rapporteur au cours de ses travaux sont demeurées vagues, en se bornant à indiquer que leur répartition s’inscrirait dans le cadre des priorités érigées par le président de la République lors de son discours du 16 mars 2023 au Quai d’Orsay, en clôture des états généraux de la diplomatie.


II.   l’action de notre outil diplomatique dans le cadre des opÉrations d’Évacuation

A.   Le Centre de crise et de soutien, un acteur central au service de la protection de nos ressortissants

Le centre de crise et de soutien (CDCS) est un service du ministère de l’Europe et des affaires étrangères actif 24 heures sur 24 et sept jours sur sept. En cas de survenance d’une crise à l’étranger – que celle‑ci soit sécuritaire, climatique, humanitaire, politique, sanitaire –, il assure la protection des ressortissants français et coordonne l’action humanitaire d’urgence de l’État pour venir en aide aux populations locales.

1.   Le CDCS, un outil chargé de la veille, de l’anticipation, de l’alerte et de la gestion des crises dont l’importance n’a eu de cesse de se renforcer depuis sa création

Le centre de crise a été créé en 2008 à l’initiative du ministre des affaires étrangères Bernard Kouchner. Sa création répondait alors à une volonté de professionnaliser la réponse aux crises et d’optimiser le délai de réaction. En quinze ans d’existence, cette structure a prouvé son utilité et son efficacité face à des crises protéiformes (séismes en Haïti en 2010, pandémie de la Covid‑19 en 2020, invasion de l’Ukraine par la Russie en 2022, séismes en Turquie en 2023, etc.).

Initialement dédié à l’assistance aux Français en difficulté à l’étranger et à l’aide humanitaire, puis au suivi des familles et proches des victimes, les missions du CDCS se sont par la suite élargies à la stabilisation et à l’accompagnement de la sortie de crise.

a.   Un dispositif agile permettant de réagir le plus rapidement possible face à diverses situations d’urgence

i.   Les quatre grandes missions du CDCS au profit de la sécurité des Français à l’étranger

Pour assurer la protection de nos ressortissants à l’étranger, le CDCS a la charge de quatre missions principales.

Le CDCS opère une veille permanente sur la situation sécuritaire à l’étranger, en s’appuyant notamment sur une unité dédiée et sur le réseau diplomatique français, tant du point de vue de la stabilité politique et des conflits armés qu’en matière de risques naturels et épidémiologiques.

Le CDCS veille à la préparation et à la mise à jour des postes diplomatiques et consulaires de notre réseau, afin que tous soient dotés d’un plan de sécurité mis à jour. Il a, par ailleurs, la responsabilité d’équiper en réseaux radios et téléphones satellitaires sécurisés les postes dans le cadre de leur plan de sécurité mais également d’en assurer la maintenance, la modernisation et l’extension. Ces équipements de communication autonomes sont destinés à assurer la sécurité des emprises comme celle des communautés françaises.

Au 27 juillet 2023, le réseau compte 1 125 lignes téléphoniques satellitaires actives (plus 385 activables en urgence) et 104 réseaux radio installés dans nos postes, dont 86 numériques et 18 analogiques. Enfin, le CDCS assure la formation des agents, en poste en France et à l’étranger. Dans un certain nombre de postes où le risque est élevé, il prévoit le pré-positionnement de médicaments et de biens de première nécessité, ainsi que le matériel divers nécessaire à la gestion des crises.

Le CDCS assure une mission d’information et de prévention via notamment la publication de fiches Conseils aux voyageurs sur le site France Diplomatie. Ces fiches, dont l’élaboration est certifiée ISO 9001 depuis 2011, ont reçu en 2022, 39 millions de visites, ce qui constitue une nouvelle hausse par rapport à 2019, année pré-Covid. En 2021, en pleine pandémie, le niveau de consultation avait atteint un record, avec 63 millions de visites. Le nombre de modifications apportées aux fiches s’est élevé à 2 571 sur l’ensemble de l’année 2022 (73 % par rapport à 2019, année pré-Covid).

Le CDCS assure également cette mission au travers du service d’alerte Fil d’Ariane, qui permet l’envoi de messages d’alerte aux voyageurs et connaît un succès grandissant auprès des Français en déplacement à l’étranger et des professionnels du tourisme. Ainsi 348 073 comptes ont été créés en 2022 (238 600 en 2021) et 1 173 campagnes d’alertes diffusées.

Le CDCS est également mobilisé pour assurer le suivi des affaires individuelles les plus sensibles. Il traite notamment des morts violentes, des disparitions inquiétantes ou des enlèvements.

En 2022, sur les 6 887 décès de ressortissants français enregistrés par nos postes à l’étranger, 444 ont fait l’objet d’un signalement à l’unité des affaires individuelle du CDCS, dont 315 morts violentes (dont 138 accidents mortels, 62 suicides et 41 homicides, notamment). Dans ce cadre, le CDCS est notamment en charge de la relation avec les proches, qu’il accompagne dans leurs démarches et met en relation avec les différents services de l’État, ainsi que le tissu associatif.

Pour les cas d’enlèvements crapuleux, le CDCS s’appuie sur une cellule enlèvement constituée de 4 agents. Selon le contexte, elle met en place un dispositif de suivi dédié, afin notamment de conseiller les proches de la personne enlevée et le poste concerné.

En 2022, 9 ressortissants français ont été victimes d’un enlèvement à caractère crapuleux (contre 6 en 2021). Ils ont tous été libérés. Fait marquant cette année, le journaliste Olivier Dubois, victime d’un enlèvement terroriste au Nord Mali le 8 avril 2021, a été libéré le 20 mars 2023.

ii.   La mise en œuvre opérationnelle des actions du CDCS

S’agissant des situations de crise à l’étranger susceptibles de mettre en danger les communautés françaises et de nécessiter des opérations de sécurisation de nos compatriotes, notamment via des mesures d’évacuation, le CDCS, placé sous l’autorité directe de la ministre, est chef de file. Ce dispositif répond à une exigence d’agilité permettant de réagir le plus rapidement possible face aux situations d’urgence, qu’il s’agisse de la protection de nos ressortissants ou de la mise en œuvre de la réponse humanitaire d’urgence dont a la charge le centre des opérations humanitaires et de stabilisation au sein du CDCS.

Le CDCS dispose d’outils spécifiques et s’appuie sur son réseau diplomatique et consulaire, qui reste le premier répondant pour mettre en œuvre les opérations de mise en protection de nos communautés et pourvoir à leurs besoins sur place.

Lors de la survenance d’une crise mettant en danger nos communautés, qu’elle soit d’origine politique ou naturelle (séisme, accident collectif etc.), le CDCS, sous l’autorité directe de la ministre, peut activer une cellule de crise. Sont mobilisés en cellule de crise tous les agents du CDCS, ainsi qu’un vivier d’agents volontaires d’autres services du MEAE et des volontaires de la Croix rouge française, qui dispose d’un partenariat avec le CDCS depuis plusieurs années.

La cellule de crise coordonne notamment l’action des différentes directions du MEAE impliquées (directions géographiques, direction des Français de l’étranger, secrétariat général, direction de la sécurité diplomatique etc.) et les personnels des ambassades concernés par la crise. Des réunions interservices (RIS) présidées par le directeur de cabinet ou la ministre elle‑même sont organisées, qui réunissent tous les services du Quai d’Orsay concernés mais également les services des différentes administrations appelées à intervenir (ministère des armées, ministère de l’intérieur, cellules diplomatiques de l’Élysée et de Matignon).

Outre son étroite coopération avec le ministère des armées lors de la mise en œuvre des dispositifs d’évacuation, le Quai d’Orsay coopère également avec le ministère de la santé, notamment via le pôle médical du CDCS, pour la projection d’équipes médicales et pour les évacuations sanitaires diligentées dans le cadre d’une crise spécifique. Il collabore également avec le ministère de l’intérieur, par la projection d’équipes spécialisées (équipes médicales, sauveteurs, hôpital de campagne) d’une part, et pour le premier accueil des personnes rapatriées sur le territoire national, d’autre part.

b.   Le rôle spécifique du CDCS dans le cadre des opérations d’évacuation

i.   Le déroulé des opérations à l’occasion d’une évacuation

Décidées au plus haut sommet de l’exécutif, les opérations d’évacuation de nos compatriotes sont coordonnées et organisées par le MEAE et confiées aux CDCS. Ces opérations sont coordonnées étroitement avec le ministère des armées, qui dispose d’une planification opérationnelle en amont établie par le centre de planification et de conduite des opérations (CPCO).

Dès la survenance d’une crise, le CDCS ouvre une cellule de crise, composée de ses propres agents et d’agents volontaires du MEAE. La cellule de crise est composée de plusieurs pôles, dont notamment un pôle de réponse téléphonique, un pôle de réponse aux communautés françaises affectées, un pôle de direction. Cette cellule de crise va coordonner les opérations d’évacuations, lorsqu’elles sont décidées, en étroite coordination avec toutes les administrations concernées, et en premier lieu avec le ministère des armées s’il s’agit d’une évacuation par des moyens militaires français, comme cela a été le cas pour celles du Soudan ou celles du Niger en 2023.

La cellule de crise du CDCS conduit son action en étroite coordination avec le poste diplomatique ou consulaire concerné, qui reste le premier répondant sur le terrain pour nos compatriotes. Les postes diplomatiques et consulaires mettent en place également une cellule de crise à l’échelon local.

S’agissant des évacuations, la cellule de crise du CDCS, en lien avec le poste diplomatique et le ministère des armées, dimensionne et identifie les vecteurs à mettre en place et affrète les moyens nécessaires (avion civil, vol militaire, navire, autocar, etc.). La procédure d’affrètement est mise en œuvre par des agents du CDCS ayant reçu une formation spécifique, en particulier pour activer le mécanisme de protection de l’Union européenne (MPCU), qui vise à renforcer la coopération et la coordination entre l’Union européenne et les États membres dans le domaine de la protection civile (cf. infra).

Afin de conduire les opérations d’évacuation, les cellules de crise du CDCS et du poste diplomatique ou consulaire sont chargées de transmettre par tout moyen (SMS, appels téléphoniques, courriels, messages sur les réseaux sociaux) les informations utiles et les consignes aux ressortissants français pour leur permettre de rejoindre les points de regroupement ou d’évacuation préalablement identifiés et activés dans le pays. Il convient de noter que tous les postes diplomatiques disposent d’un plan de sécurité de la communauté française qui permet de localiser les ressortissants dans le pays et d’identifier les points de regroupement susceptibles d’être activés en situation de crise puis, le cas échéant, d’évacuer les communautés pour les mettre en protection.

La cellule de crise a la possibilité de projeter une équipe sur le terrain, lorsque les conditions le permettent, pour appuyer le poste diplomatique et coordonner les opérations d’évacuation. Cette équipe est composée d’agents du CDCS formés et expérimentés, éventuellement de médecins urgentistes qui appartiennent au pôle médical du CDCS.

L’équipe projetée du CDCS, en lien étroit avec les agents du poste, effectue notamment les contrôles documentaires avant le départ et veille à ce que les cas signalés soient bien pris en charge, sur le plan médical le cas échéant, au cours de l’évacuation et à l’arrivée. Cette équipe projetée est en lien constant avec la cellule de crise du CDCS, tout comme le poste diplomatique. Enfin, l’équipe projetée établit une liste des passagers, laquelle est transmise à la cellule de crise du CDCS à Paris, qui mettra en place le dispositif d’accueil adapté à l’arrivée en France.

Par ailleurs, l’accueil à l’arrivée sur le sol français se fait avec l’appui de partenaires (Croix rouge française, association France Horizon, cellule d’urgence médico‑psychologique), ainsi que d’une équipe du CDCS chargée de la supervision du dispositif sur le lieu d’arrivée. Les administrations concernées prennent ensuite le relais sur le territoire national.

ii.   Les outils déployés pour faciliter les opérations d’évacuation

À l’occasion d’une opération d’évacuation de nos ressortissants, le CDCS met en place une réponse téléphonique en parallèle de la cellule de crise, qui peut renseigner les ressortissants contactant le poste à l’étranger au sujet d’une éventuelle opération de ce type.

Lorsqu’une opération d’évacuation est décidée, la cellule de crise recense les ressortissants français à l’aide de deux listes issues des applications :

- le registre pour les Français vivant à l’étranger (cf. infra) ;

- le fil d’Ariane pour les Français de passage ayant déclaré leur voyage (cf. supra).

Ces listes se retrouvent alors répertoriées dans l’application Crisenet qui sert à déterminer la situation individuelle de chaque ressortissant français. Les agents de la cellule de crise communiquent par la suite avec eux par tous moyens à leur disposition (téléphone, SMS, courriels, Whatsapp ou autre messagerie instantanée en fonction des pays). Les postes ou la cellule de crise peuvent également utiliser l’application Isendpro qui est une application d’envoi de messages en masse.

Par ailleurs, les îlotiers, qui font le lien sur le terrain entre les postes et les ressortissants français sont équipés par le CDCS de radio UHF, VHF, FM, ainsi que de téléphones satellitaires le cas échéant.

Afin d’améliorer ces opérations, il est envisagé de procéder à l’acquisition d’une solution de communication multicanaux permettant, outre de sécuriser les échanges via l’application Whatsapp, de communiquer au sein de la même interface via SMS et courriels. Pour la gestion des radios, il est envisagé d’acquérir une solution de supervision de l’ensemble de la flotte déployée dans l’ensemble des pays.

La question de l’inscription de nos ressortissants au registre des Français établis hors de France

À l’occasion de leur audition, l’ensemble des acteurs œuvrant au cours des opérations d’évacuation (CDCS, ambassadeurs en poste, diplomates…) ont fait part des difficultés rencontrées au sujet de l’inscription consulaire de nos ressortissants au registre des Français établis hors de France, outil pourtant particulièrement utile au moment de la survenance d’une crise.

Il a été précisé au rapporteur que plus le pays était sûr, moins cette inscription était effectuée, nos ressortissants ne percevant pas nécessairement l’utilité d’y procéder ; de même pour l’inscription sur le fil d’Ariane pour les Français de passage. Or il est dans leur intérêt de s’enregistrer, afin de pouvoir être contactés en cas d’urgence et à plus forte raison à l’occasion du déclenchement d’une opération d’évacuation.

Pour répondre à cette difficulté, des campagnes de sensibilisation et d’information sont déployées par le MEAE et les postes consulaires auprès des communautés françaises et auprès des associations des Français de l’étranger pour les encourager à le faire et rappeler l’utilité d’une telle démarche. Parallèlement, la procédure d’inscription a été considérablement facilitée, avec la possibilité de s’inscrire en ligne depuis le portail Servicepublic.fr.

En outre, les postes consulaires invitent presque systématiquement les usagers français qui se rendent dans les consulats à renouveler leur inscription au registre lorsque celle-ci arrive bientôt à échéance ou est déjà échue.

En réponse à une interrogation du rapporteur concernant une éventuelle obligation d’inscription, il lui a été précisé qu’une telle contrainte serait très difficile à mettre en œuvre, compte tenu de la mobilité des Français de l’étranger. Elle soulèverait, par ailleurs, des difficultés pratiques et juridiques considérables : à partir de quelle durée de séjour rendre l’inscription obligatoire ? Comment l’appliquer aux ressortissants ne séjournant à l’étranger qu’une partie de l’année ? Comment sanctionner le non-respect de cette obligation ? Il semble, par ailleurs, n’exister aucune obligation de ce type chez nos partenaires pour leurs ressortissants établis à l’étranger.

Pour répondre à cette difficulté, le rapporteur appuie pleinement les dispositifs actuellement à l’étude visant à inciter fortement les Français de l’étranger à s’inscrire à ce registre. Ces incitations pourraient, par exemple, consister en des droits de chancellerie pour les démarches effectuées dans les consulats qui seraient significativement plus élevés pour les Français n’étant pas inscrits à ce registre, à l’exception des droits perçus dans le cadre de démarches d’assistance consulaire pour des ressortissants Français de passage. Ces incitations pourraient également, à l’avenir et lorsque les moyens d’identification électronique à distance seront disponibles, consister en des procédures dématérialisées et sans comparution personnelle accessibles uniquement aux Français inscrits à ce registre.

2.   Des moyens qui n’ont eu de cesse de croître pour améliorer le service rendu à nos ressortissants

a.   Les moyens humains du CDCS

i.   Une augmentation constante des effectifs depuis sa création

D’une trentaine d’agents à sa création en 2008, les effectifs totaux du CDCS sont passés, compte tenu de l’élargissement de ses missions, à 62 agents en 2014 (dont 6 agents détachés d’autres administrations). Au 25 juillet 2023, le centre s’appuyait désormais sur 104 agents, pris en charge sur 84,5 ETP du ministère complétés par 9 mises à disposition et 9 apprentis, 77 agents étant dédiés à la sécurité des communautés françaises à l’étranger.

ii.   Des ressources humaines conséquentes mobilisables en cas de situation de crise

Pour mener à bien une opération d’évacuation, la cellule de crise du CDCS dispose de ses propres ressources humaines : 66 agents participent aux astreintes du CDCS. Cette cellule peut également compter sur un vivier de volontaires, composé d’agents du MEAE et de volontaires de la Croix rouge française.

En fonction de l’ampleur et de la durée de la crise, tous les agents du centre de crise et de soutien, ainsi que les volontaires, sont susceptibles d’être mobilisés par rotation à la cellule de crise qui peut être ouverte 24 heures sur 24 et sept jours sur sept.

b.   Les moyens financiers du CDCS

i.   L’évolution des crédits dédiés au CDCS dans un monde de plus en plus exposé aux crises

Pour faire face à la multiplication des crises, les moyens budgétaires alloués à la protection des communautés françaises expatriées, sur le programme 105, ont très régulièrement augmenté ces dernières années, passant de 1,894 millions d’euros en 2013 à 3,793 millions d’euros en 2018, et puis à 4,693 millions d’euros en 2023, soit + 148 %.

Le tableau ci‑dessous retrace les dotations en projet de loi de finances depuis 2013, réserve de crise comprise.

Évolution des dotations du CDCS depuis 2013

 

P105

2013

2014

2015

2016

PLF

1,894 M€

2,815 M€

2,815 M€

2,815 M€

 

P105

2017

2018

2019

2020

PLF

4,755 M€

3,793 M€

3,793 M€

3,693 M€

 

P105

2021

2022

2023

2024

PLF

4,093 M€

4,093 M€

4,693 M€

5,15 M€

Source : MEAE

S’agissant de la réserve de crise, celle-ci est passée de 0,5 million d’euros en 2019 à 0,9 million d’euros en 2021, puis à 1,5 million d’euros en 2023, la répétition de crises importantes (opérations d’évacuation d’Afghanistan et d’Éthiopie, crise sanitaire liée à la Covid‑19 en 2020, opérations d’évacuation d’Ukraine en 2022…) ayant clairement montré l’insuffisance des montants projetés. Dans le cadre de la gestion 2023, 77 % de la réserve de crise de 1,5 million d’euros avaient déjà été consommés au 1er septembre 2023.

ii.   Les crédits prévus pour le CDCS dans le projet de loi de finances pour 2024

Dans le cadre du plan de sécurité et de lutte anti‑terroriste, le centre de crise et de soutien devrait bénéficier en 2024 d'une dotation budgétaire de 5,15 millions d’euros (+ 0,45 million d’euros par rapport à 2023 en fonctionnement et ligne relative à la gestion de crises stable à 1,5 million d’euros).

Cette dotation est composée d’un montant de base de 3,65 millions d’euros, complétée de 1,5 million d’euros de réserve de crise.

Sur le programme 105, ces moyens sont répartis de la manière suivante :

- 1,6 million d’euros pour le renouvellement et la maintenance des réseaux de communication de sécurité autonomes ;

- 0,35 million d’euros pour la constitution de stocks de sécurité pour les postes ;

- 0,5 million d’euros pour le renouvellement des dotations des postes en équipement projetable ainsi que la fourniture de consommables médicaux ;

- 0,4 million d’euros pour la formation à la gestion de crise ;

- 0,6 million d’euros pour les dépenses de fonctionnement courant du CDCS ;

- enfin des moyens de gestion de crise sont programmés à hauteur de 1,5 million d’euros.

Pour les subventions (titre 6), 0,2 million d’euros seront alloués aux associations de victimes et d’aide aux victimes : à France victimes (FV), à la Fédération nationale des victimes d’accidents collectifs (FENVAC), ainsi qu’à l’Association française des victimes du terrorisme (AFVT).

B.   Une expertise française internationalement reconnue en matière d’opérations d’évacuation

L’ensemble des acteurs de la diplomatie française entendus au sujet des opérations d’évacuation ont insisté sur le fait que la France bénéficiait en la matière d’une excellente réputation et œuvrait le plus souvent en Nation cheffe de file pour ses alliés et partenaires. Les exemples les plus récents attestent des capacités et de l’expertise de notre pays à mener à bien des opérations d’évacuation d’envergure dans des environnements parfois particulièrement hostiles.

1.   Les récentes opérations d’évacuation ont fait la preuve de l’efficacité de notre outil diplomatique et militaire

Chaque opération d’évacuation étant un cas particulier en fonction du contexte local et de l’intensité de la crise. Il apparaît pertinent de dresser un bilan sur les plus récentes opérations d’évacuation.

a.   Les opérations d’évacuation d’Afghanistan (2021)

Le contexte sécuritaire de l’été 2021 en Afghanistan avec le retour des Talibans au pouvoir a conduit la France à organiser, en deux temps, la réduction de ses effectifs comme le départ de la communauté française et des agents et partenaires de la France de nationalité afghane.

Sur recommandation de l’ambassadeur français en poste à Kaboul, le MEAE avait anticipé l’évacuation des ressortissants français avant la chute de la capitale afghane. 623 personnes ont ainsi été évacuées entre mai et juillet 2021. À la différence de la France, les autres États présents en Afghanistan ont dû évacuer tout à la fois, leurs ressortissants et les Afghans à mettre sous protection, après l’effondrement du régime, dans des conditions difficiles, à partir du 15 août 2021.

Durant l’opération APAGAN, qui s’est déroulée du 14 au 29 août, 2 805 personnes ont pu être mises en sécurité par la France dont 2 635 Afghans et près de 200 Français et ayants‑droits, qui étaient encore présents sur le sol afghan par le biais de vingt‑trois vols entre Kaboul et Abou Dhabi, aux Émirats arabes unis.

Le coût de cette opération d’évacuation s’est élevé à 293 000 euros. Elle n’était pas éligible au MPCU (cf. infra), les ressortissants évacués étant exclusivement français ou non européens, ce qui ne permettait pas ainsi d’ouvrir droit à ce financement particulier.

b.   Les opérations d’évacuation d’Ukraine (2022)

Suite à l’invasion de l’Ukraine par les forces armées russes, une cellule de crise a été ouverte au CDCS dès le 24 février 2022 pour l’évacuation de nos ressortissants. Bien que les équipes du centre de crise et de soutien aient anticipé la fermeture de l’espace aérien, l’évacuation par la route (location de cars) de nos ressortissants et de leurs ayants-droits initialement planifiée n’a pas pu aboutir. La mobilisation générale des hommes a, en effet, engendré une pénurie de conducteurs de bus, le CDCS a donc dû s’organiser avec des solutions alternatives comme le co-voiturage entre ressortissants.

Dans ce contexte, une structure de soutien a été mise en place dans les pays limitrophes de l’Ukraine (projection de missionnaires de renfort, opérations d’exfiltration du territoire ukrainien, prise en charge de la communauté protégée dès passage de la frontière notamment).

Quelque 1 500 Français et ayants-droits ont ainsi pu être évacués, une grande part de nos ressortissants ayant pu quitter l’Ukraine par la Pologne avant de bénéficier d’un rapatriement en France par des avions militaires puis civils.

Il est important de signaler que près de la moitié des ressortissants Français en Ukraine n’étaient pas inscrits au registre consulaire, ce qui a pu engendrer des difficultés (cf. supra). Des centaines de personnes se sont ainsi signalées après les premières frappes russes. Les services du Quai d’Orsay ont également dû faire face à des demandes d’évacuation de parents français partis en Ukraine pendant la guerre pour récupérer des nourrissons nés de gestation pour autrui (GPA).

Les dépenses associées à la gestion de cette crise se sont élevées à plus de 2,1 millions d’euros.

Selon notre ambassade à Kiev, il y a actuellement environ 1 000 Français et ayants‑droit en Ukraine.

c.   Les opérations d’évacuation du Soudan (2023)

Le conflit armé et le déchaînement de violences au Soudan qui opposent depuis le 15 avril 2023 les forces armées soudanaises du général Burhan aux milices paramilitaires du général Hemedti, ont eu des conséquences humanitaires majeures sur la population civile et sur la sécurité des ressortissants français et étrangers dans le pays.

Au regard des risques pesant sur la vie et la sécurité de nos compatriotes, le président de la République a décidé de déclencher une opération d’évacuation d’ampleur. Le MEAE et le ministère des armées ont travaillé étroitement ensemble, tant à Paris au sein de la cellule de crise du CDCS, que sur le terrain, à Khartoum en zone de guerre, et à Djibouti, afin de mettre en sécurité nos compatriotes, et les agents de l’ambassade de France à Khartoum qui ont travaillé sans relâche jusqu’à la fermeture de notre poste diplomatique.

L’opération d’évacuation de ressortissants au Soudan, s’est avérée d’une extrême complexité en raison d’un contexte sécuritaire extrêmement dégradé. De façon opérationnelle, le franchissement de ponts et de check-points s’est avéré complexe dans un environnement non-permissif. De plus la taille réduite de l’ambassade de France au Soudan n’a pas permis de mobiliser beaucoup de personnels pour la cellule de crise.

Les Français – ainsi que les Européens ou extra-Européens pris en compte – étaient dispersés dans la ville, Khartoum étant une ville très étendue, sans possibilité de se déplacer ou étaient très éloignés d’un éventuel point de regroupement. Fort heureusement, l’opération d’évacuation très complexe s’est in fine déroulée avec succès. Entre le 23 et le 28 avril 2023, la France a ainsi pu évacuer près de 1 000 personnes appartenant à près de soixante nationalités, dont 236 Français et ayants‑droit, ainsi que 174 ressortissants européens, par des moyens militaires aériens ou navals.

Le montant total des dépenses liées aux évacuations lors de la crise au Soudan est de 839 000 euros. La présence de passagers européens sur le principal vol civil d’évacuation au départ de Djibouti a permis d’actionner le mécanisme MPCU (cf. infra).

Selon les estimations du centre de crise et de soutien, il y aurait encore une trentaine de Français dans le pays.

d.   Les opérations d’évacuation du Niger (2023)

Après le coup d’État mené contre le président Mohamed Bazoum, et compte compte tenu de la situation au Niger et des violences qui ont eu lieu contre l’ambassade de France le 30 juillet 2023, le président de la République a décidé de déclencher une opération d’évacuation des ressortissants français et des ressortissants européens qui souhaitaient quitter le pays.

Les tensions avec la partie nigérienne ont considérablement compliqué les opérations au quotidien. En outre, peu de partenaires ont mis en œuvre des vols d’évacuation, ce qui a occasionné une forte attente de ces derniers vis-à-vis des opérations mises en place par la France.

Quelque 1 120 personnes, dont 665 Français, ont bénéficié des opérations d’évacuation organisées par la France du 1er au 4 août 2023 (cinq vols militaires français) ; 25 personnes ont pu bénéficier de vols mis en place par nos partenaires : 4 sur le vol allemand le 3 août, 8 sur le vol américain du 3 août, deux sur vol espagnol du 4 août et 11 sur les vols belges des 17 et 18 août ; 55 personnes ont bénéficié d’une assistance du MEAE pour rentrer en France par des vols mis en place par Air Algérie sur la période du 12 au 22 août 2023. Au total, au 22 août 2023, le MEAE a pris en charge l’évacuation de 1 200 personnes du Niger, dont 745 ressortissants français.

Le montant total des dépenses liées à l’évacuation s’élève à 2 747 163 euros. La présence de passagers européens sur ces vols a permis d’actionner le MPCU et donnera lieu à remboursement partiel (cf. infra).

2.   Certains mécanismes de coopération et de soutien avec nos partenaires existent mais sont de fait limités

a.   Une coopération opérationnelle européenne modeste

Les opérations d’évacuation donnent lieu à une coopération européenne, qui intervient à des degrés divers selon les crises, en fonction de la situation et du contexte local. Elle intervient tant au niveau local, qu’à Bruxelles, entre le Service européen d’action extérieure (SEAE) et les États membres de l’Union européenne.

Le SEAE dispose d’outils spécifiques, comme le Mécanisme de protection civile de l’Union européenne (MPCU), qui vise à renforcer la coopération entre l’Union et les États membres dans le domaine de la protection civile. Ce mécanisme, dont l’objectif est de rendre plus efficace la réaction de l’UE en cas de catastrophes naturelles ou d’origine humaine, en Europe ou dans le monde, a permis de développer une coopération plus systématique en matière d’évacuation, notamment par un partage des moyens.

Le SEAE a également créé un centre de crise (crisis response center) à la suite des évacuations en Afghanistan en 2021. Ce service a pour mission d’appuyer le travail du SEAE et des États membres dans la gestion des crises affectant les citoyens de l’Union européenne à l’étranger, à l’instar des évacuations ayant eu lieu lors du conflit au Soudan ou au Niger.

Durant ces crises, une plateforme d’échanges est utilisée par ce centre (plateforme COOL). Elle apporte une valeur ajoutée en matière de partage d’information, de coordination, notamment pour préparer et mettre en œuvre les dispositifs d’évacuation entre Européens. Cette plateforme permet notamment de connaître les moyens d’évacuation mis en place par chaque État membre, de collecter les points de contact des différents États et de rassembler les informations utiles sur les communautés concernées, dans la limite toutefois de la réglementation sur les données personnelles.

Il faut, par ailleurs, souligner que les moyens déployés par chacun des États membres diffèrent en fonction des contextes locaux et de l’importance en nombre des nationaux des différents États membres. La France assure une mobilisation généralement plus conséquente que d’autres partenaires, en raison de l’importance de notre réseau et de celle des communautés françaises à l’étranger, notamment en Afrique. En outre, la France dispose également de moyens que certains autres États membres ne possèdent pas : disponibilité potentielle de moyens militaires à proximité des théâtres d’opérations, développement d’une expertise propre en termes de capacité de réponse aux crises de notre réseau (plans de sécurité, planification, exercices de crise, formation des agents). La France assume ainsi le rôle d’État pilote en matière d’évacuation au niveau européen dans treize pays, dont onze en Afrique.

Comme le relevait M. Sylvain Itté, ambassadeur de France au Niger, à propos de nos partenaires : « tout le monde connaît le numéro de l’ambassade de France ». Ils sont tous conscients de notre compétence en la matière et semblent le plus souvent s’appuyer sur les efforts de la France dans ces situations de crise.

M. David Martinon, ancien ambassadeur de France en Afghanistan et actuel ambassadeur de France en Afrique du Sud, a précisé quant à lui au cours de son audition qu’une opération d’évacuation « est et demeure essentiellement une opération nationale ». Au‑delà de la solidarité européenne et des obligations qui en découlent les opérations d’évacuation impliquent une nécessaire autonomie.

b.   Un mécanisme de soutien financier européen pertinent

En octobre 2001, la Commission européenne a mis en place le Mécanisme de protection civile (MPCU). Ce dispositif vise à renforcer la coopération en matière de protection civile entre les pays de l’UE et neuf autres États membres participant au mécanisme, en vue d’améliorer la prévention, la préparation et la réaction aux catastrophes.

Lorsqu’un pays, en Europe ou ailleurs, est dépassé dans ses capacités de réponse par l’ampleur d’une catastrophe, il peut demander une assistance via le mécanisme. La Commission joue un rôle essentiel dans la coordination de la réponse à la situation d’urgence et contribue à au moins 75 % des frais de transport ou des coûts opérationnels des missions de déploiement.

Cette assistance doit être demandée avant la mise en œuvre opérationnelle des opérations d’évacuation et doit concerner, en plus des ressortissants français, d’autres ressortissants de pays participant à ce mécanisme.

Ainsi s’agissant des opérations d’évacuation du Soudan, la présence de passagers européens sur le principal vol civil d’évacuation au départ de Djibouti a permis à la France d’actionner le mécanisme MPCU. Un remboursement par l’Union européenne de 75 % du coût de ce vol, soit 329 858 euros est donc rendu possible. Il devrait être réalisé d’ici la fin de l’année 2023.

Concernant la crise Niger, le montant total des dépenses liées à l’évacuation de ressortissants européens par avion militaire est de 2 747 163 euros. Le mécanisme MPCU devrait ainsi permettre un remboursement de l’ordre de 2 060 372 euros, qui devrait être réalisé en 2024.

C.   Le QUai d’orsay, un « ministère des crises » au service duquel œuvrent des agents aguerris et dévoués

1.   Des agents formés aux situations de crise

a.   La préparation des personnels aux opérations d’évacuation

Comme cela a été précisé au rapporteur au cours de ses travaux par des diplomates, le ministère de l’Europe et des affaires étrangères est et demeure le « ministère des crises ». La préparation à la gestion de telles situations critiques est intégrée de longue date dans la culture du Quai d’Orsay et y occupe une place prééminente. Les formations ont un caractère pratique et opérationnel. Une actualisation régulière des modules de formation permet de les adapter à l’évolution de la typologie des crises et des risques encourus (terrorisme, criminalité, risques naturels, risque sanitaire, etc.). La plupart des formations sont organisées dans une dynamique collective en partenariat avec les différents services traitant de ces enjeux (CDCS, direction de la sécurité diplomatique direction du numérique, direction des ressources humaines).

Les formations préalables au départ en poste occupent une place spécifique. Les agents de tous statuts affectés dans les postes sensibles suivent notamment une semaine de formation dédiée. Ce module piloté par la direction de la sécurité diplomatique (DSD), en partenariat avec l’école pratique des métiers de la diplomatie (EDI), est organisé en lien avec les services spécialisés du ministère de l’intérieur, du ministère des armées et du groupe d’intervention de la Gendarmerie nationale (GIGN). L’EDI forme également les ambassadeurs (notamment les primo-partants) avec un volet approfondi sur la gestion de crise et la sécurité des emprises. L’EDI assure aussi en ce domaine la formation des numéros deux et des consuls généraux, en partenariat avec la DSD. Un focus « crise » est par ailleurs compris dans la formation des secrétaires généraux d’ambassade et des chefs de chancellerie (agents consulaires et chefs de section consulaires). Enfin, une sensibilisation est faite auprès des nouveaux agents, dès leur intégration au MEAE.

Parallèlement, tout au long de l’année, le CDCS forme, accompagne et appuie les postes pour la mise au point des procédures, l’établissement de fiches réflexe et le partage de bonnes pratiques. Le CDCS a mis en place un dispositif de « préparation systématique des postes diplomatiques et consulaires aux crises », qui prévoit l’adoption de procédures pour la mise en activation de cellules de crise, ainsi que l’organisation d’exercices annuels de mise en situation, à la fois en distanciel et en présentiel, avec l’appui éventuel de missions ponctuelles d’équipes du CDCS sur place. Ces missions ont lieu plusieurs fois par an, notamment dans les pays les plus exposés. La DSD a le projet d’accompagner les postes sensibles en effectuant un exercice de repli et de confinement, ainsi qu’un exercice d’évacuation en intégrant les procédures de destruction.

De façon plus générale, le MEAE organise des sessions de formation et de sensibilisation consacrées à la gestion du stress et à la prévention des risques psychosociaux. En outre, les conseils que peuvent leur dispenser les deux psychologues du MEAE permettent aux agents de se préparer à faire face aux situations complexes auxquelles ils seront potentiellement exposés dans le cadre de leurs affectations à l’étranger.

Enfin, tous les postes diplomatiques et consulaires sont dotés d’un plan de sécurité de la communauté française, qui intègre systématiquement un volet consacré aux procédures de regroupement et d’évacuation des communautés françaises. Ces mesures de sécurité sont élaborées sous l’autorité de l’officier de sécurité, traditionnellement le numéro deux du poste. Ces plans de sécurité sont intégrés dans un logiciel interne consultable par le CDCS et alimenté par les postes diplomatiques. Ils contiennent toutes les informations utiles sur les communautés françaises inscrites au registre des Français de l’étranger, mais aussi des informations sur les points de contacts locaux en cas de nécessité (hôpitaux, sécurité civile locale, numéros utiles, etc.).

Comme précisé au cours de son audition, par M. Sylvain Itté, ambassadeur de France au Niger, la sélection des bons profils pour les postes les plus stratégiques et exposés constitue un véritable impératif. Or ce ne sont pas, le plus souvent, hélas, les postes les plus attractifs du réseau diplomatique. Mais c’est sur ce type de postes que le MEAE doit affecter personnes les plus compétentes et les plus à même de faire face à des situations critiques. Le rapporteur appelle à la plus grande vigilance sur ce point.

b.   La question de la protection des emprises et des matériels et données sensibles au moment de la survenance d’une crise

i.   La protection des emprises en période critique

Dans la mesure du possible dès le début d’une crise et si possible en anticipation, le MEAE fait appel à des effectifs de sécurité (policiers ou gendarmes) supplémentaires en renfort pour être projetés sur place. Ces effectifs proviennent d’un vivier annuel, membres du GIGN ou de l’unité de recherche, d’assistance, d’intervention et de défense (RAID) de la Police nationale. L’objectif est d’augmenter la protection des agents et des emprises, d’améliorer la résilience collective, le temps de la décision politique et de la crise. La difficulté est de pouvoir disposer dans un temps rapide de l’assurance de formalités administratives possibles sur place (visa), principalement en fonction du vecteur de projection utilisé (voie aérienne civile ou militaire).

Les différentes emprises évacuées ont des traitements différents, en fonction de la cinétique de la crise et des prévisions de reprise ou non. Par exemple, celle du Yémen à Sana a été mise en sommeil depuis l’évacuation en 2015. Celle-ci est gardée depuis par une entreprise de services de sécurité et de défense (ESSD) française avec des effectifs locaux. Certains équipements de sécurité et moyens sont restés en place, avec les procédures adéquates, afin de permettre une reprise lorsque celle‑ci sera décidée. En Afghanistan, l’emprise est également surveillée depuis 2021 par des agents locaux employés par une ESSD française. Moyennant des opérations de remise en état lourdes, de vérification de nos moyens et systèmes de sécurité, une réinstallation serait possible.

Au Soudan, l’emprise principale a été complétement neutralisée du fait d’un maintien des combats à proximité immédiate de notre ambassade depuis plusieurs mois. Pour les mêmes raisons, il n’est pas possible de la faire surveiller par une entreprise de sécurité. Le gardiennage n’est donc plus assuré. Il est probable que cette emprise en location, ne soit pas réutilisable. Outre les destructions, difficiles à évaluer dans les circonstances actuelles, subies du fait de la guerre civile, l’agencement et la position géographique de la représentation française ont en effet révélé des vulnérabilités dans le cadre des opérations d’évacuation, la résidence et l’ambassade étant très éloignées l’une de l’autre. Sur ce point, le rapporteur appelle à une vigilance toute particulière s’agissant de l’installation de nos emprises dans les pays « sensibles ». Des reconfigurations visant à rassembler sur un seul et même site les services de l’ambassade et de la résidence pourraient, en effet, se révéler fort utile en cas de crise, afin de protéger plus facilement nos emprises et de faciliter le cas échéant les opérations d’évacuation.

La sécurité active de notre ambassade au Niger est actuellement assurée par des moyens militaires français en complément de nos gardes de sécurité diplomatiques à effectif réduit. Cet appui des forces armées est néanmoins limité dans le temps jusqu’au retrait de l’ensemble des forces armées françaises du pays. Parallèlement, l’absence de visa pour entrer sur le territoire nigérien en réciprocité des mesures de restrictions adoptées par la France empêche de nouveaux gendarmes de venir renforcer la sécurité de notre emprise diplomatique en remplacement de nos militaires. Depuis le déclenchement de la crise, la projection de renforts, notamment du GIGN, depuis Paris n’a pas pu se réaliser, faute d’un vecteur aérien militaire disponible. Les vigiles de la société locale employés par le poste sont toujours en place sous la supervision des gardes de sécurité diplomatique encore présents.

ii.   Les plans de préparation de fermeture et de destruction technique

Un plan complet de préparation de fermeture et de destruction technique par les postes et les détachements de sécurité existe et a été adressé aux ambassades.

Les récentes expériences ont mis en évidence la nécessité d’identifier un interlocuteur privilégié parmi les services d’administration centrale, pour accompagner les postes dans les diverses mesures de destruction de matériels (informatique, archives, véhicules blindés) en cas d’évacuation.

La DSD a ainsi été désignée comme cheffe de file pour élaborer le document d’instructions. Celui‑ci revêt un fort caractère de confidentialité et demeure sous la responsabilité de l’officier de sécurité de chaque ambassade. Une réflexion est actuellement en cours pour en élargir l’accès à d’autres personnels habilités en fonction dans les ambassades

2.   La question de l’évacuation et du maintien de certains personnels dans des environnements hostiles

a.   L’évacuation des agents et le maintien des personnels indispensables

À l’été 2021, notre ambassade à Kaboul fonctionnait avec un effectif réduit de 12 agents expatriés : six agents de catégorie A incluant l’ambassadeur, deux agents de catégorie B et quatre agents de catégorie C, tous en situation de célibat géographique compte tenu du risque sécuritaire. Tous les agents présents au poste à cette date ont été évacués le 27 août à destination de la base d’Abou Dhabi aux Émirats arabes unis avant de regagner Paris.

L’ambassade de France à Kaboul a été fermée le 15 août 2021.

Avant la guerre, l’ambassade à Kiev comptait 47 agents expatriés. La première vague de départ des agents expatriés et de leur famille (13 agents et 22 ayants‑droits) a eu lieu par vol commercial le 20 février 2022. 7 volontaires internationaux avaient déjà été instruits de regagner la France.

La deuxième vague a concerné les agents restés en poste, soit 26 agents expatriés dont 19 du ministère incluant deux renforts du CDCS. Ils ont quitté la capitale ukrainienne en convoi le 28 février 2022 jusqu’à la frontière roumaine. Une partie d’entre eux a ensuite rejoint la France par avion depuis l’aéroport de Bucarest. L’autre groupe est rentré par la route.

L’ambassadeur et le conseiller culturel ont été relocalisés à Lviv jusqu’au 13 avril 2022. Le format a ensuite été progressivement étoffé passant d’un noyau dur à Kiev de sept agents – affectés en rotation – pour se rapprocher, à partir de septembre 2022, de l’effectif antérieur. Le poste compte aujourd’hui 34 agents expatriés.

Les 13 agents présents au Soudan ont été rapatriés via Djibouti le 23 avril 2023, tout comme les agents expatriés des autres administrations et les personnels du détachement de sécurité et des services, ce qui représentait 26 personnes et une dizaine d’ayant‑droits.

L’ambassadrice de France au Soudan, Mme Raja Rabia, a par la suite effectué sa mission à distance depuis Paris, avec à ses côtés la première conseillère. Notre ambassade au Soudan est en voie de relocalisation en Éthiopie à Addis‑Abeba, avec uniquement 3 agents (ambassadrice, conseillère politique, un personnel de soutien).

Au Niger, 28 agents expatriés du MEAE ont été évacués début août. L’ambassadeur et deux membres de son équipe sont rentrés le 27 septembre 2023. La présence des familles dans le poste était résiduelle et seule une famille a été évacuée.

L’ambassadeur de France au Niger, M. Sylvain Itté, a vu sa mission maintenue à son retour à Paris à la demande du président de la République. Une réflexion est désormais ouverte s’agissant des différentes modalités envisagées pour l’exercer au mieux, depuis Paris ou un pays limitrophe. Le réarmement de notre ambassade au Niger sera fonction de l’évolution de la situation politique et sécuritaire sur place.

b.   La question de l’évacuation des agents de droit local

Lors de son audition, M. David Martinon, ancien ambassadeur de France en Afghanistan et actuel ambassadeur de France en Afrique du Sud, a insisté sur ce qui est désormais appelé au sein du Quai d’Orsay, « la jurisprudence Kaboul ». Celle‑ci consiste à évacuer avec nous les agents de droit local (ADL), en situation de danger, ayant œuvré avec dévouement au service de la France. Ne pas le faire serait, selon les propres termes de David Martinon, un « déshonneur ».

Les agents de droit local (au nombre de 50, dont 32 sous contrat avec l’ambassade) se sont vu proposer une évacuation avec leurs familles vers la France dès l’avancée des Talibans sur Kaboul, en avril 2021. La quasi‑totalité ont fait ce choix.

Lors de la fermeture de l’ambassade, il a été mis fin aux contrats des agents de droit local, avec versement d’une indemnité de fin de fonction assortie d’un pécule du même montant, calculés sur la base de l’ancienneté des intéressés pour un montant de 400 000 euros.

En février 2022 l’ambassade employait 20 agents de droit local et l’Institut français autant. Durant la période où l’activité de l’ambassade, repliée à Lviv, a été fortement réduite, les agents de droit local ont conservé leur contrat et leur salaire, payé par anticipation sur plusieurs mois. Dans la perspective de la reprise progressive des activités de notre ambassade à Kiev, une lettre de la ministre a été adressée le 19 mai 2022 aux agents de droit local ayant quitté l’Ukraine – 12 agents – leur offrant la possibilité de suspendre leur contrat ou de le rompre. Sur le total, trois agents ont choisi de démissionner, avec versement d’une indemnité de fin de fonctions (33 000 euros au total). Notre ambassade en Ukraine emploie aujourd’hui 19 agents de droit local.

Les agents de droit local au Soudan étaient au nombre de 53 (23 sous contrat avec l’ambassade, les autres avec l’Institut français du Soudan, Expertise France…). Parmi les agents sous contrat avec l’ambassade, huit ont été évacués en France avec leur famille, 15 ont quitté le Soudan pour un pays voisin. Lorsque la crise a éclaté, trois mois de salaire ont été versés par anticipation.

La perspective d’une réouverture de notre ambassade s’éloignant, il a été décidé en juillet 2023 de mettre fin aux contrats des agents de droit local afin de ne pas les laisser sans revenu (le paiement des salaires devenait difficile) ni perspective d’avenir. Le licenciement a été effectif le 1er septembre 2023 et des indemnités de fin de fonctions proportionnelles à l’ancienneté de chaque agent ont été versées (jusqu’à 100 000 euros pour les plus anciens).

Lors de l’évacuation de nos ressortissants du Niger au début du mois d’août 2023, les agents de droit local possédant la nationalité française qui le souhaitaient ont eu la possibilité d’être évacués vers la France, avec l’option de revenir au Niger lorsque la situation le permettrait. Sur les 29 ADL de l’ambassade, trois ont fait ce choix.

Compte tenu de la situation, il a également été proposé aux agents de droit local qui le souhaitaient de percevoir le paiement anticipé de leurs salaires d’août à octobre.

3.   Le nécessaire accompagnement des agents à la suite des opérations d’évacuation

a.   L’accompagnement psychologique

Deux psychologues cliniciens rattachés à la direction des ressources humaines (DRH) sont à l’écoute des agents et de leurs encadrants. Ils sont spécialistes de la gestion de crise et du stress post-traumatique. Lorsqu’une crise survient, les psychologues sont rapidement informés par la DRH et accompagnent le poste dans la mise en place de mesures visant à soutenir les agents sur le plan psychologique. Ils transmettent leurs coordonnées et font une proposition d’appui (une intervention au pic de la crise n’est pas toujours appropriée). Ils peuvent être consultés à distance par les agents avec la confidentialité requise et toujours sur une base volontaire. Les familles peuvent également faire appel à eux

Si les conditions sécuritaires le permettent, en tant que de besoin, ils se rendent en mission sur place durant la crise, ou le plus souvent à l’issue de celle‑ci, pour débriefer les équipes. Lors d’une évacuation d’ampleur impliquant les ressortissants français, ils peuvent être associés à une mission des équipes du CDCS et se consacrent aux agents impliqués dans la gestion de crise. Lors du retour en France des agents – à titre temporaire ou définitif – le suivi se poursuit individuellement ou collectivement.

Dans le cas particulier de l’évacuation groupée des agents de Kaboul, un sas de décompression de 48 heures a pu être organisé à Abou Dhabi aux Émirats arabes unis. Chaque agent a pu bénéficier d’un entretien individuel, afin notamment de préparer le retour en famille. Les psychologues étaient par ailleurs présents à l’aéroport pour accueillir les agents rentrés du Soudan et le noyau dur d’agents rentrés du Niger. De même, plusieurs consultations à distance et en présentiel au retour ont été consacrées aux agents en poste en Ukraine qui le souhaitaient. Les psychologues sont systématiquement associés aux réunions collectives d’information et de retour d’expérience organisées avec les équipes évacuées.

En outre, les psychologues conseillent la DRH sur les mesures à prendre en fonction de l’évaluation qu’ils font de l’état des agents : suggestion d’une période de décompression plus ou moins longue, congés, recommandation de suivi médical. Ils travaillent en étroite coordination avec les médecins du travail et les assistantes sociales qui accompagnent également nos personnels.

Le rapporteur insiste sur l’importance d’un tel dispositif, sur lequel plusieurs diplomates entendus au cours de ses travaux sont revenus, de telles expériences pouvant se révéler particulièrement éprouvantes pour les agents et leurs familles. Il s’interroge cependant sur le très modeste dimensionnement de la cellule de soutien psychologique qui ne comprend que deux psychologues cliniciens pour l’ensemble du ministère. Compte tenu de la multiplication des crises et des opérations d’évacuation, ces dernières années, il semblerait pertinent de la renforcer à l’avenir.

Enfin, l’accompagnement n’est pas limité au soutien psychologique mais revêt également des aspects concrets (cf. infra) relevant de différents services de la DRH comme l’appui à la recherche d’un logement d’urgence ou encore l’aide à la rescolarisation des enfants proposée par la délégation aux familles.

b.   La question de la réaffectation des agents évacués

i.   Un traitement maintenu à leur retour en France après évacuation

Les agents de retour en France du fait de l’évolution du contexte politique et sécuritaire dans leur pays d’affectation ont, dès leur retour, la possibilité de prendre des congés. Ils sont ensuite placés en position d’appel spécial conformément à l’article 22‑1 du décret 67‑290 du 28 mars 1967 fixant les modalités de calcul des émoluments des personnels de l’État et des établissements publics de l’État à caractère administratif en service à l’étranger.

Cette disposition permet aux agents concernés de conserver leur salaire de base et leur pleine indemnité de résidence à l’étranger (IRE) durant un mois. Le deuxième mois de l’appel spécial, leur IRE subit un abattement de 40 % et le troisième mois de 65 %. Durant cette période d’appel spécial les agents sont en position d’activité et restent à la disposition de l’administration qui peut les mobiliser en soutien à une direction en particulier ou au centre de crise. Cette disposition s’applique pour les agents titulaires et pour les agents contractuels.

S’il est décidé de mettre un terme au contrat d’un agent contractuel non titulaire de la fonction publique à raison de circonstances relevant de la force majeure, celui‑ci bénéficie de l’indemnité de fin de fonction prévue par l’article 11 du décret du 18 juin 1969, dans les conditions prévues à l’article 14 de ce même texte.

ii.   Le souci d’un accompagnement professionnel personnalisé en soutien aux agents évacués

La DRH du Quai d’Orsay s’attache à apporter aux agents évacués un accompagnement personnalisé. Lorsqu’un retour dans leur pays de résidence n’est pas possible, les vœux des agents titulaires concernant leur affection suivante sont traités avec toute la bienveillance possible afin de leur proposer un poste correspondant à leurs souhaits et à leurs compétences.

Selon la date de leur retour, qui intervient dans la plupart des cas en décalé par rapport au calendrier normal des mouvements (début septembre), ils peuvent se voir confier une mission de renfort en poste ou dans l’administration centrale dans l’attente de la libération du poste souhaité. En cas de retour possible et de réouverture du poste d’origine ou de relocalisation de celui‑ci dans un pays tiers, les agents sont consultés et peuvent décider de ne pas faire ce choix.

En ce qui concerne les agents contractuels, la DRH est également à l’écoute du souhait qu’ils expriment à leur retour en France. Un nouveau contrat peut leur être proposé (à l’étranger ou en administration centrale) à la double condition que la durée de service n’excède pas les limites prévues par la réglementation et qu’un poste correspondant aux compétences soit à pourvoir.

Les volontaires internationaux peuvent se voir proposer une nouvelle mission si la durée de volontariat qu’il leur reste à accomplir permet d’effectuer une nouvelle mission d’au moins une année.

c.   La question de l’indemnisation des effets personnels perdus

Le MEAE peut indemniser les agents dès lors qu’il a été établi que leurs biens ont été partiellement ou totalement détruits ou pillés à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions. Différents régimes juridiques permettent de couvrir l’ensemble des situations (responsabilité pour risque, protection fonctionnelle, force majeure).

Cela a notamment été le cas pour les agents évacués du Yémen en 2015 et de Libye en 2013 pour ne prendre que des exemples parmi les plus récents. En Afghanistan, aucune demande n’a été faite par les agents qui ne disposaient sur place que d’un minimum d’effets personnels (affectation sans famille, logement meublé au sein de l’emprise). S’agissant de l’Ukraine, les agents évacués ont finalement pu récupérer leurs biens qui avaient été mis en lieu sûr avant leur départ.

S’agissant des agents évacués du Soudan et du Niger, qui ont quitté ces pays en urgence et ne pourront revenir sur place, leurs effets personnels sont définitivement perdus. Une réflexion est en cours pour permettre la mise en œuvre du régime d’indemnisation le plus adapté possible à leur situation. Cependant une des difficultés qui a été remontée au rapporteur concerne la question de l’indemnisation sur factures, qui pour certains biens est tout simplement impossible. Le rapporteur estime qu’il y a nécessité à indemniser les agents au minimum de leur perte.

 


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   Travaux de la commission

I.   Audition de Mme catherine coloNna, ministre de l’Europe et des affaires étrangères

Lors de sa réunion du 10 octobre 2023, la commission a entendu Mme Catherine Colonna, ministre de l’Europe et des affaires étrangères, sur le projet de loi de finances pour 2024.

M. le président Jean-Louis Bourlanges. Notre ordre du jour vise à vous auditionner, Madame la ministre de l’Europe et des affaires étrangères, sur le projet de loi de finances (PLF) initiale pour 2024. Nous vous sommes reconnaissants de revenir devant nous, moins d’une semaine après votre audition sur d’importantes questions touchant à nos rapports à l’Afrique, pour un sujet lui aussi essentiel : les dotations budgétaires à votre ministère pour l’an prochain. Il s’agit de l’acte inaugural de l’examen par notre commission du PLF pour 2024. Nous abordons ce rendez-vous avec attention et vigilance, alors que des engagements forts ont été pris par le président de la République et par vous-même en faveur du « réarmement » de notre diplomatie.

Après une loi de finances pour 2023 plutôt satisfaisante, le PLF pour 2024 s’annonce sous des auspices prometteurs, puisque le budget du ministère de l’Europe et des affaires étrangères devrait s’établir à un peu moins de 6,8 milliards d’euros, soit une augmentation de 293 millions d’euros et de 4,5 % de ses crédits.

Dans cette épure, les crédits de la mission Action extérieure de l’État se monteront à un peu plus de 3,5 milliards d’euros, en hausse de 9 %. Pour mémoire, les dépenses de fonctionnement du ministère ne représentent que 17 % de cette enveloppe : il faut toujours rendre hommage à ce ministère, qui n’est pas un grand consommateur de crédits de fonctionnement.

Après une première hausse de 100 équivalents temps plein (ETP) lors de l’exercice budgétaire en cours, les effectifs de votre ministère augmenteront de 165 ETP en 2024, inscrivant ainsi dans la durée le nécessaire renversement de tendance amorcé en matière de ressources humaines. Nous avons toujours dit ici que s’il fallait peut-être moins de fonctionnaires dans les ministères qui en comptaient beaucoup, il fallait aussi reconnaître que le ministère de l’Europe et des affaires étrangères se trouvait « au-delà de l’os » : il est bon qu’il puisse faire face aux défis actuels avec des moyens nouveaux.

La hausse des crédits renforcera l’action de la France en Europe et dans le monde : les dotations du programme 105 vont ainsi progresser de 13 % et atteindre presque 1,5 milliard d’euros. L’accent est plus particulièrement mis sur notre soutien aux opérations de maintien de la paix et à l’Ukraine, ainsi que sur l’organisation d’événements importants comme le sommet de la francophonie à Villers-Cotterêts – saluons la mémoire du roi François Ier –, le quatre-vingtième anniversaire du débarquement ou le sommet des chefs d’État et de gouvernement lors des Jeux olympiques. Je me réjouis que des enveloppes en hausse soient également dévolues à l’accroissement de la sécurité des personnels et des ambassades et à l’amélioration des conditions d’expatriation. Les agents diplomatiques français sont exposés à des situations de plus en plus difficiles et de plus en plus dangereuses, qu’ils affrontent avec un courage et un sens de l’État auxquels notre commission ne peut que rendre hommage.

Les dotations allouées à l’action consulaire et à l’assistance aux Français à l’étranger, rassemblées dans le programme 151, ne sont pas oubliées : elles augmentent de 17 % pour atteindre 165 millions d’euros. L’essentiel de cette hausse concerne les bourses scolaires des enfants français scolarisés dans le réseau de l’enseignement français à l’étranger, ce qui est une très bonne chose.

Enfin, toujours dans le cadre de la mission Action extérieure de l’État, les crédits destinés à la diplomatie culturelle et d’influence, regroupés dans le programme 185, progresseront de 8 %, à 721,2 millions d’euros, afin de revaloriser les moyens des Instituts français et ceux du réseau culturel et de coopération dans les zones géographiques prioritaires : là encore, cet effort est tout à fait nécessaire.

Les dotations inscrites dans le programme 209 de la mission Aide publique au développement sont, quant à elles, stabilisées à un peu moins de 3,3 milliards d’euros. Ces crédits, qui représentent le principal outil d’aide publique au développement (APD) du Quai d’Orsay, placent la France au quatrième rang mondial des bailleurs en la matière.

Dans cette enveloppe, l’aide humanitaire représente 900 millions d’euros, dont près d’un tiers est destiné à la provision pour crises majeures. Le financement de la coopération bilatérale augmentera de 5 %, à un peu moins de 2,2 milliards d’euros, afin d’abonder notamment les instruments dont nos ambassades disposent directement : cette hausse, très attendue, avait été annoncée par le président de la République dans un discours à l’Élysée avant sa visite en Afrique. Seuls les moyens dédiés à la coopération multilatérale diminueront de 4 %, à 796 millions d’euros, en raison de l’effet mécanique de la fin de dépenses à caractère exceptionnel.

Le programme 370, qui représente le montant des cessions de biens mal acquis pour les restituer sous forme de coopération aux populations spoliées, bénéficiera d’un premier versement, certes modeste – 6 millions d’euros – mais symbolique, au profit de la Guinée équatoriale. Le Parlement, qui a beaucoup œuvré à cet égard, ne peut qu’accueillir avec satisfaction ce premier pas dans la bonne direction.

Ce panorama, par définition incomplet, me porte à croire, Madame la ministre, que vous êtes globalement satisfaite des arbitrages que vous avez obtenus et du contenu de ce budget pour 2024. Pour ma part, je constate de nombreux points positifs aux équilibres qui ont été trouvés.

Mme Catherine Colonna, ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Je suis heureuse de vous présenter le projet de budget du Quai d’Orsay pour la deuxième fois depuis ma prise de fonction, d’autant que les nouvelles sont positives.

En effet, ce budget offensif nous permettra, plus encore que l’année dernière, de mettre en œuvre les priorités fixées par le président de la République en mars dernier, lors de la clôture des états généraux de la diplomatie, lancés il y a un peu moins d’un an.

Si votre Assemblée l’adopte, ce projet de loi de finances nous donnera les moyens d’affirmer nos principes, nos intérêts et nos solidarités, pour reprendre le titre de la dernière conférence des ambassadrices et des ambassadeurs tenue à la fin du mois d’août.

Avant de vous présenter l’économie générale du projet de budget et ses principales priorités, je souhaiterais évoquer rapidement le contexte international dans lequel nous nous trouvons et qui nous impose de nous affirmer toujours davantage. Sans revenir sur le Proche-Orient, notre environnement est marqué par une brutalité accrue, dont la guerre en Ukraine est le signe le plus net depuis un an et demi, mais dont témoigne aussi l’effondrement sécuritaire au Sahel, du Mali au Soudan, ou l’accroissement des tensions en Asie de l’Est ; en découle notamment l’accroissement des flux migratoires vers les zones stables et prospères comme l’Europe. C’est un monde également marqué par le « chacun pour soi », c’est-à-dire que les cadres habituels de la régulation internationale sont remis en cause : divisions au sein du G20, gouvernance financière internationale contestée, difficultés à trouver des compromis, même sur le climat, et recul des droits de l’Homme dans un nombre croissant de pays. Enfin, c’est un monde marqué par la propagande et les manipulations de l’information, à une échelle décuplée par les réseaux sociaux : cette situation ne manque pas d’être préoccupante pour la démocratie.

Dans ce contexte, nous devons combiner trois lignes d’action.

La première est de continuer à jouer notre rôle de partenaires de confiance. Nous le faisons en participant activement à la résolution des crises internationales de sécurité et en affichant, quand cela est nécessaire, notre fermeté au Sahel, en Ukraine ou dans le Caucase : j’ai eu l’occasion de le faire la semaine dernière lors de mes déplacements en Ukraine et en Arménie, comme je vous le disais lors de mon audition du 4 octobre.

Le même principe vaut évidemment pour les enjeux globaux. La France est vue comme un leader en la matière, du fait de sa mobilisation sur tous les fronts : climat, biodiversité, océans, finance internationale. La mise en œuvre des conclusions du sommet de Paris de juin dominera notre agenda des prochains mois, comme nous avons commencé de le faire à l’Assemblée générale des Nations Unies.

L’un des instruments de notre action dans ce domaine sera notre politique de partenariats solidaires, confortée et rénovée lors du conseil présidentiel du développement et du comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID). Dans cette optique, la fin des critères de concentration géographique au profit de la poursuite d’objectifs nous permettra de piloter l’aide publique au développement de manière plus politique.

Dans le même temps, dans cette atmosphère du « chacun pour soi », nous devons défendre avec lucidité et vigueur nos intérêts. C’est ce que nous faisons en matière de diplomatie économique, l’action du ministre délégué Olivier Becht visant à aider nos entreprises à conquérir des marchés et à attirer des investisseurs dans nos territoires. C’est aussi notre objectif en développant des partenariats aussi structurants que celui que nous avons conforté avec l’Inde le 14 juillet dernier. De la même manière, nous assumons pleinement la défense de notre modèle énergétique, notamment du nucléaire civil, à l’international ; nous l’avons encore fait aujourd’hui en Allemagne et je l’avais déjà réalisé fin septembre en Finlande, en participant à l’inauguration du premier réacteur pressurisé européen (EPR) en fonctionnement sur le continent européen, lequel a été construit par EDF sur place : cet EPR fournit déjà 30 % de la consommation électrique de ce pays et contribue donc à son autonomie stratégique.

Enfin, pour mieux réguler, comme pour mieux défendre nos intérêts, rien n’est possible sans l’Europe, qui est notre levier de puissance le plus évident. Nous poursuivrons donc l’application de l’agenda de souveraineté de Versailles : souveraineté économique, défense, énergie et migrations. Nous avons beaucoup progressé dans la définition de solutions européennes.

Deuxièmement, notre projet de budget est offensif afin de nous adapter à un contexte de plus en plus difficile. Le projet de loi de finances consacre le « réarmement » – n’ayons pas peur des mots ! – de la diplomatie française, grâce à une hausse de ses moyens que l’on n’avait pas vue depuis des décennies : 165 ETP supplémentaires et une augmentation de 4,5 % de nos crédits par rapport à 2023, qui marquait déjà une première inflexion. D’ici à 2027, il y aura 700 ETP supplémentaires, sans compter les 100 ETP de 2023, et une hausse des crédits de 22 %. En 2024, le budget du ministère atteindrait ainsi, si le Parlement l’adopte, 6,7 milliards d’euros en crédits de paiement hors pensions, soit une hausse de 293 millions d’euros par rapport à l’année précédente. La mission Action extérieure de l’État se verrait attribuer 3,344 milliards d’euros en crédits de paiement hors pensions et le programme 209 Solidarité à l’égard des pays en développement, 3,42 milliards d’euros, hors pensions également.

Ce budget est novateur en ce qu’il renforce très substantiellement la mission Action extérieure de l’État pour nous donner les moyens de la transformation souhaitée par le président de la République, dans le prolongement des états généraux de la diplomatie. La mission connaîtrait ainsi sa plus forte hausse depuis 2005, avec 11 % d’augmentation.

Je voudrais me concentrer d’abord sur le programme 105, qui regroupe les moyens de notre action diplomatique et les crédits de fonctionnement des ambassades et consulats. Le budget de ce programme croîtrait de 13 % l’année prochaine. Ces nouveaux crédits nous permettront de moderniser et de transformer le ministère : en poursuivant nos investissements dans le domaine numérique pour installer des outils collaboratifs et moderniser le travail diplomatique, ainsi que nos capacités d’analyse et d’anticipation ; en investissant davantage dans l’immobilier, y compris dans l’efficacité énergétique de nos bâtiments en France et à l’étranger ; en renforçant certains services en France ou certains postes à l’étranger de manière à mieux adapter les moyens humains aux besoins. Cela concernera la direction de la communication et de la presse et les services de presse de nos ambassades mais aussi le protocole, qui a son rôle dans la conduite de notre diplomatie publique, la future académie diplomatique ou encore nos plus petites ambassades, les 25 postes de présence diplomatique (PPD), que nous souhaitons tous renforcer de quelques ETP supplémentaires, tant l’expérience montre qu’on les a trop réduits.

Ces crédits supplémentaires permettront également de porter une attention plus grande au quotidien des agents et de leurs familles, ce qui se traduira notamment par un effort supplémentaire en matière de logement social ou encore par une meilleure couverture des frais de scolarité à l’étranger.

Troisièmement, je voudrais insister sur quelques priorités qui me tiennent particulièrement à cœur, sans prétendre à l’exhaustivité.

Première priorité : les fonctions politiques, y compris les enjeux globaux. En 2024, le programme 209 bénéficierait d’un budget s’établissant, hors dépenses de personnel, à 3,265 milliards d’euros en crédits de paiement, ce qui permettra de faire face à tous nos engagements et à la France d’être le quatrième bailleur au monde. L’aide humanitaire, dont le caractère prioritaire a été réaffirmé par le CICID de juillet 2023, serait maintenue à près de 900 millions d’euros en 2024. Ce montant comprend la provision pour crises majeures, inaugurée en loi de finances initiale pour 2022, augmentée en 2023 et maintenue à 270 millions d’euros, pour répondre efficacement et rapidement en 2024 à de nouveaux engagements non anticipés.

Permettez-moi quelques mots supplémentaires sur cette provision. Elle nous a permis d’activer très rapidement, sans passer par de longs processus d’arbitrages budgétaires, des moyens d’aide humanitaire dans des pays touchés par des crises : l’Ukraine, bien entendu, mais aussi la Turquie frappée par un tremblement de terre en février, le Soudan en proie à la guerre civile, ainsi que les pays limitrophes qui reçoivent des réfugiés soudanais, la Libye après les inondations de septembre et, plus récemment, les populations fuyant le Haut‑Karabagh : nous avons augmenté notre aide humanitaire à l’Arménie pour plus de 12 millions d’euros. Je veille personnellement à ce que l’usage de cette provision reste conforme à son objet, avec des actions très ciblées et à fort impact. Le projet de loi de finances qui vous est proposé reconduit cette provision pour crises majeures, qui a donné à la France les moyens d’agir vite et bien partout où elle était attendue.

Nous consacrerions aussi 76 millions d’euros de plus qu’en 2023 aux mesures d’assistance à l’Ukraine, en partenariat avec les États membres de l’Union européenne. Nous devons prévoir d’être à ses côtés dans la durée. La Facilité européenne pour la paix deviendrait ainsi le bénéficiaire de notre plus importante contribution internationale en 2024.

La coopération bilatérale financée par le programme 209 serait quant à elle rehaussée de 109 millions d’euros, soit une augmentation de 5 %, s’établissant à 2,184 milliards d’euros en crédits de paiement. Ce renforcement de l’aide bilatérale abonderait significativement les outils à la disposition directe de nos ambassades. Ainsi, les moyens alloués aux Fonds de solidarité pour les projets innovants (FSPI), dont l’efficacité est saluée par tous, augmenteraient de 20 millions d’euros, atteignant 100 millions d’euros. Le Fonds équipe France (FEF) et le Fonds d’appui à l’entrepreneuriat culturel (FAEC), dispositifs d’aide bilatérale plus réactifs, visibles et lisibles créés en 2023, bénéficieraient quant à eux de 77 millions d’euros. Enfin, le don-ONG alloué à l’Agence française de développement (AFD) augmenterait de 7 millions d’euros en crédits de paiement, conformément à notre volonté de soutenir les organisations de la société civile.

Le montant des crédits consacrés à la coopération multilatérale baisserait légèrement pour s’établir à 796 millions d’euros en crédits de paiement. Cette contraction tient au fait que d’importantes dépenses réalisées en 2023 présentaient un caractère exceptionnel et ne seront pas renouvelées en 2024. Je pense par exemple à l’arriéré de contribution au Fonds mondial de lutte contre le syndrome d’immunodéficience active (SIDA), la tuberculose et le paludisme, pour 70 millions d’euros, et à la Facilité pour les réfugiés en Turquie, pour 20 millions d’euros. En réalité, ce niveau de 796 millions d’euros permettrait de consacrer des moyens pour de nouveaux engagements et de renforcer les contributions volontaires françaises dans les thématiques prioritaires du climat, de la santé, de l’égalité femme-homme ou de l’éducation. J’ajoute que l’extinction progressive du Fonds européen de développement (FED) jusqu’en 2027 libérera des marges pour financer de nouveaux projets à budget constant au titre du programme 209.

Deuxième priorité : l’influence. En 2024, la dotation du programme 185 hors dépenses de personnel croîtrait de 50 millions d’euros par rapport à 2023, s’établissant à 721,2 millions d’euros, soit une hausse de 8 %. Cette politique d’influence se structurerait autour de deux grands axes : d’une part, le développement d’un nouveau partenariat culturel et solidaire avec le continent africain ; d’autre part, la consolidation de l’attractivité française dans les autres pays prioritaires, notamment dans la zone indopacifique.

Un renforcement du réseau culturel est engagé. Les dotations aux établissements à autonomie financière, principalement les Instituts français et les Instituts français de recherche à l’étranger, augmenteraient de 8,2 millions d’euros par rapport à 2023.

De même, les crédits alloués au réseau des Alliances françaises augmenteraient de 1,5 million d’euros, soit une hausse de 20,8 %, pour financer leur sécurisation, leur transformation numérique et le renforcement de leur attractivité. Enfin, une hausse des crédits d’intervention de 24,3 millions d’euros, soit une progression de 60 % ciblant en priorité les postes, permettrait d’offrir de nouvelles marges d’action au réseau culturel et de coopération sur les géographies prioritaires, de renforcer le soutien aux industries culturelles et créatives – certains d’entre vous sont peut-être allés au forum Création Africa ce week-end – et de financer de nouveaux campus ou des résidences d’artistes.

Dans un contexte de compétition internationale accrue, la politique d’attractivité étudiante fera par ailleurs l’objet d’un investissement important, afin de maintenir le rang de la France. Les crédits alloués aux bourses pour les étudiants étrangers en France seraient portés à 70 millions d’euros, soit une augmentation de 6 millions par rapport à 2023 et une hausse de 9 %, notamment pour faire venir des profils qualifiés dans des secteurs en tension. De même, une augmentation de 2 millions d’euros, soit une hausse de 15 %, est prévue pour les échanges d’expertise et scientifiques, qui contribuent à la politique d’attractivité de la France.

Enfin, avec ces crédits, mon ministère continuera d’œuvrer pour renforcer la place de la France dans le système multilatéral, grâce à notre contribution aux opérations de maintien de la paix, de prévention et de médiation des conflits. En 2024, 6,5 millions d’euros de contributions supplémentaires à l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) sont prévus dans le sillage du sommet de Madrid, tandis que les versements aux différents organes des Nations Unies augmenteraient de 17 millions d’euros.

Troisième priorité : la communication et la diplomatie publique. En matière de communication et de presse, les moyens progresseraient de 2,2 millions d’euros. Ces crédits visent à accroître le rôle du ministère dans le pilotage de la communication de la France à l’étranger, ainsi que les capacités de nos ambassades dans les géographies prioritaires comme l’Afrique ou l’Indopacifique. La direction de la communication et de la presse continuera d’être renforcée en moyens humains et en outils de promotion et de riposte.

Nous souhaitons doter le ministère d’une nouvelle culture de la communication stratégique, selon deux axes principaux : la dynamisation et le renforcement de notre présence dans les médias et sur les réseaux sociaux, pour toucher de nouveaux publics, grâce à l’accroissement de nos capacités de production audiovisuelle, au décryptage de l’action diplomatique par le biais de nouveaux produits dédiés, aux vidéos diffusées sur les réseaux sociaux et à un travail avec les influenceurs ; le renforcement de nos capacités à lutter contre les manipulations, le développement de notre veille sur les réseaux sociaux, la mise en place d’un fonds d’innovation destiné à sélectionner et aider financièrement les projets des postes les plus pertinents, ainsi que le développement de mécanismes de coordination avec nos partenaires internationaux.

Enfin, une enveloppe de 600 000 euros est prévue au titre des Jeux olympiques et paralympiques de 2024 pour activer un programme spécifique d’invitation de journalistes et accompagner notre communication sur les Jeux.

Quatrième priorité : les Français de l’étranger. Le programme 151 regroupe les moyens de l’action consulaire et d’assistance aux Français à l’étranger. En 2024, il verrait ses crédits hors dépenses de personnel croître de 24 millions d’euros par rapport à 2023, soit une hausse de 17 %, pour atteindre un montant de 165,2 millions d’euros. En 2024, se tiendront les élections européennes, dont le coût de l’organisation à l’étranger est estimé à 6 millions d’euros. À ce titre, le programme 151 bénéficiera d’une augmentation de 1,1 million d’euros de son enveloppe, laquelle sera complétée par un transfert de 4,4 millions d’euros en provenance du ministère de l’intérieur et des outre-mer.

Les crédits consacrés à l’accès des élèves français au réseau scolaire de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE) et à la langue française s’élèveraient à 120,5 millions d’euros en 2024, soit une hausse de 14,8 millions d’euros par rapport à cette année. Cette enveloppe financera principalement les bourses scolaires des enfants français dans le réseau de l’enseignement français à l’étranger, pour permettre aux familles de faire face à l’accroissement des frais de scolarité en raison de l’inflation élevée. De plus, 1,5 million d’euros seraient alloués aux élèves en situation de handicap. Enfin, 1 million d’euros financeraient l’instauration du pass éducation en langue française, annoncé par le président de la République, pour permettre aux enfants de nos compatriotes scolarisés localement qui en ont besoin, de se remettre à niveau en langue française.

Les crédits alloués au service public consulaire ainsi qu’à la modernisation de l’administration consulaire augmenteraient de 2,8 millions d’euros, afin d’améliorer la qualité des services rendus aux Français de l’étranger, notamment grâce à la poursuite du déploiement du service France consulaire, du vote électronique et de la finalisation du registre d’état civil électronique (RECE).

Telles sont les principales informations que je souhaitais porter à votre attention dans le cadre du projet de loi de finances pour 2024. Comme vous pouvez le constater, ce deuxième budget du quinquennat reflète plus encore que l’année dernière l’importance accordée à notre diplomatie. Il ne s’agit, ni plus ni moins, que d’engager son réarmement complet jusqu’à 2027. Je tiens à vous remercier pour les efforts que vous avez déployés, afin d’offrir à notre diplomatie les moyens nécessaires.

M. le président Jean-Louis Bourlanges. C’est très satisfaisant, Madame la ministre, de constater une telle progression des effectifs. Nous sommes convaincus ici que les affaires du monde sont les affaires de tout le monde et non pas des affaires extérieures.

Je donne à présent la parole aux orateurs des groupes politiques.

Mme Amélia Lakrafi (RE). À mon tour, je tiens à exprimer notre profonde émotion et nos condoléances attristées aux civils victimes des terroristes du Hamas, aux victimes directes, israéliennes, et victimes indirectes, palestiniennes, dans ce drame qui remet en cause les accords de paix dans cette région sensible.

Je souhaite appeler votre attention sur le XIXe sommet de la francophonie, qui se tiendra en France, en novembre 2024. Ce sommet, le premier organisé en France depuis plus de trente ans, représente une occasion unique de renforcer les liens au sein de l’espace francophone. Cependant, il me semble important de souligner un paradoxe : alors que la francophonie représente un espace géopolitique et culturel majeur et que l’Assemblée parlementaire de la francophonie (APF) se félicitait de compter 22 millions de locuteurs supplémentaires en 2022, il est regrettable de constater un désintérêt réel ou supposé des citoyens et des responsables politiques français à son égard. J’ai dû faire ce constat préoccupant en tant que présidente déléguée de la section française de l’APF.

Dans ce contexte, Madame la ministre, pourriez-vous nous indiquer quels sont les objectifs stratégiques de la France pour ce sommet, notamment en matière de sensibilisation et d’engagement du public et des responsables politiques français ? Quels moyens humains, financiers et diplomatiques votre ministère compte-t-il mobiliser pour assurer le succès de cet événement et inverser la tendance du désintérêt ? Enfin, comment envisagez-vous d’utiliser ce sommet pour aborder les crises politiques qui affectent certains pays, notamment en Afrique ?

Je vous assure que je mettrai toute mon énergie, ainsi que celle de mes collègues de l’APF, pour contribuer à faire de ce sommet un succès. Je ne peux terminer mon intervention sans exprimer ma plus profonde gratitude à l’endroit de nos diplomates et agents dévoués sur le terrain, au Quai d’Orsay, ainsi qu’au centre de crise et de soutien du ministère, qui font un travail extraordinaire. Je salue enfin l’augmentation absolument inédite de 165 postes.

Mme Catherine Colonna, ministre. Je vous remercie, Madame la députée, des propos que vous avez tenus à l’égard des agents de mon ministère, qui y sont très sensibles et le méritent.

La France accueillera le prochain sommet de la francophonie, pour la première fois depuis trente-trois ans exactement. Nous avons pour ambition de faire vivre une francophonie attractive, ouverte, inclusive, comme on le dit désormais, et multiple. Nous voulons bien évidemment promouvoir la langue française et le plurilinguisme, les deux allant de plus en plus de pair, mais aussi défendre plusieurs grandes causes, notamment l’égalité entre les femmes et les hommes, l’éducation, l’employabilité, favorisée par le fait de parler le français. Nous mettrons en valeur la créativité du monde francophone, en particulier celle de la jeunesse qu’il faut encourager à avoir beaucoup d’idées et d’ambition. Je me rendrai prochainement à la Conférence ministérielle de la francophonie à Yaoundé, au Cameroun.

Quant au sommet, qui se tiendra au mois d’octobre 2024, il sera aussi l’occasion de mettre en lumière, et pour longtemps, la nouvelle Cité internationale de la langue française à Villers‑Cotterêts, en hommage au roi François Ier, qui sera inaugurée le 19 octobre par le président de la République. Ce sera un lieu d’exposition, dédié à la créativité francophone et ouvert à la diversité des expressions. Nous espérons aussi que ce sommet sera l’occasion d’évoquer des questions d’actualité et de réunir autant que possible les membres de la famille francophone autour des valeurs qui sont les leurs, au titre de la charte qu’ils ont signée.

Mme Marine Hamelet (RN). Madame la ministre, le budget de votre ministère ainsi que celui des missions dont il a la charge, sur l’aide au développement et l’action extérieure de l’État, ne sont pas suffisamment transparents pour répondre efficacement aux enjeux et aux bouleversements actuels. Nous sommes également frappés par le manque de sérieux de l’utilisation des fonds. Un seul exemple pris à la page 35 du projet annuel de performances de la mission Aide publique au développement : on y lit une dépense de 609,5 millions d’euros en autorisations d’engagement pour le continuum finances publiques, alors que le détail du calcul de tous les postes n’atteint que 300 millions d’euros. Pourriez-vous nous dire quels projets sont financés par cette somme ?

Ce manque de transparence est d’autant plus grave que les budgets augmentent. Le projet annuel de performances pour 2024 pour l’APD fait ainsi état d’une dynamique de hausse sans précédent des moyens publics consacrés à la politique de développement depuis 2017. Rappelons également que, la France aidant aussi indirectement en participant aux programmes européens, nous contribuons doublement.

S’agissant des bouleversements que nous traversons, j’ai eu l’occasion, Madame la ministre, de vous demander quels étaient les pays bénéficiaires de l’APD qui étaient désormais autonomes. Vous m’aviez répondu qu’il n’y en avait aucun. Est-ce toujours le cas ?

Vous pensez défendre les intérêts de la France, mais il faut aussi défendre les intérêts des Français, qui font de plus en plus de sacrifices et ont de plus en plus de difficultés. C’est pourquoi nous devons être d’autant plus vigilants. Nous demandons une simplification des organismes et le retour à une aide strictement bilatérale. Nous refusons en effet le multilatéralisme, par lequel le peuple français enrichit les organisations non gouvernementales (ONG), qui sont généreuses en notre nom.

Mme Catherine Colonna, ministre. Vous évoquez un prétendu manque de sérieux. Les équipes qui gèrent les fonds du ministère de l’Europe et des affaires étrangères s’appliquent à le faire avec le plus grand sérieux. Dans le domaine de l’aide publique au développement, des audits internes et externes sont menés. Si des fonds devaient être mal dépensés, des mécanismes de remboursement existent.

Je reviendrai vers vous pour ce qui est de la décomposition précise de l’usage des 609,5 millions d’euros d’autorisations d’engagement au sein de la mission Aide publique au développement.

Enfin, je vous confirme la réponse que je vous avais faite : notre aide au développement ne suffit pas à sortir des pays du sous‑développement. Il est néanmoins de notre intérêt de favoriser les progrès de ces pays et de faire sortir leur population de la pauvreté absolue. Si dans cette action, la France doit être épaulée par tous les autres pays, nous sommes l’un des rares dont l’aide publique au développement ait augmenté au point de faire de nous le quatrième bailleur mondial.

Mme Ersilia Soudais (LFI-NUPES). Pour porter une parole claire en faveur du dialogue et de la paix, la diplomatie a besoin d’importants moyens humains et financiers. À vous entendre, le ministère de l’Europe et des affaires étrangères est à même, grâce à un budget en hausse pour la deuxième année consécutive, de mener sa mission. Certes, le projet de loi de finances pour 2024 prévoit une hausse de 165 ETP, mais c’est un succès en trompe-l’œil, le Quai d’Orsay ne faisant finalement que retrouver son niveau d’avant 2018. Le désossement subi ces trente dernières années s’est par ailleurs accompagné de la suppression effective des corps diplomatiques, décision unilatérale et très contestée, suivie par des états généraux de la diplomatie dont les conclusions étaient connues d’avance.

Les Français de l’étranger sont les premiers à pâtir des effets de cette politique. Les délais de traitement des services consulaires continuent de s’accroître. Le délai d’obtention de visas de court séjour a été trois fois plus long que l’objectif fixé. Notre crédibilité sur la scène internationale souffre aussi des effets de cette politique, ce qui est fâcheux dans un contexte de multiplication des tensions internationales.

Vous dites, à propos de la situation israélo-palestinienne, que la France est toujours du côté de la paix. Je suis heureuse d’entendre ce mot, malheureusement absent des deux derniers communiqués du Quai d’Orsay. Mais, concrètement, que faites-vous ? Pour Denis Sieffert, spécialiste de ce conflit, il n’existe plus aucune alternative politique à la violence depuis l’échec de Camp David en juillet 2000. C’est ce qui a conduit au drame que nous savons.

Par ailleurs, si la France est du côté de la paix, comment expliquer qu’elle pratique le chantage à l’aide publique au développement en sanctionnant tel ou tel peuple au gré des alliances diplomatiques ? Ce n’est pas l’esprit de la loi de 2021, qui ne trie pas les peuples en fonction des régimes qui les gouvernent.

En outre, les budgets alloués à l’aide publique au développement destinée à soutenir les pays en difficulté économique ne répondront pas à l’ambition affichée en 2021. La France devait, en 2023, dédier 0,61 % de son revenu national brut (RNB) à l’APD ; elle ne l’a pas fait, comme elle n’atteindra pas les 0,66 % en 2024. La trajectoire place la France au quatrième rang mondial des contributeurs : au vu des autorisations d’engagement et des crédits de paiement, nous n’aurons pas maintenu ce rang en fin de quinquennat.

Pourquoi la France a-t-elle reculé son objectif de consacrer 0,7 % de son RNB à l’aide publique au développement ? La santé mondiale, notamment, paiera le prix de ces choix regrettables.

Mme Catherine Colonna, ministre. Les états généraux de la diplomatie se sont tenus parce que je l’ai proposé au président de la République et à la première ministre, et leurs conclusions n’étaient nullement connues d’avance. Consulter autant d’agents, de tous niveaux, de toutes catégories, en poste partout dans le monde, était un exercice inédit. L’augmentation budgétaire pluriannuelle que connaît le ministère, après trois décennies de déclin, n’était pas non plus connue d’avance.

Je ne reviens sur la réforme de la haute fonction publique que pour vous donner une information : 70 % des agents concernés ont déjà basculé vers le nouveau corps des administrateurs de l’État, le choix pouvant être exprimé jusqu’à la fin de l’année 2023.

Nos ressources connaissent une hausse sans précédent. La France consacre bien 0,55 % de son revenu national brut à l’aide publique au développement, ce qui n’était pas le cas jusqu’ici. Peu nombreux sont les pays à le faire.

Je ne parlerais pas comme vous le faites de suspensions punitives. Certains pays ont connu des coups d’État, parfois à plusieurs reprises. Nous ne pouvons pas prendre le risque que l’argent du contribuable finisse dans les mains de putschistes. Notre position est claire et conforme à nos valeurs : vous devriez vous en réjouir.

En ce qui concerne le Proche-Orient, nous serons difficilement d’accord, sauf sur un point : il faudra en effet restaurer un horizon politique, le moment venu. Nous nous y efforçons en prenant des contacts afin d’éviter l’embrasement et en rappelant cette perspective nécessaire.

M. Vincent Seitlinger (LR). Le groupe Les Républicains soutient Israël face à l’agression brutale et barbare survenue ce week-end.

En tant que rapporteur pour avis des crédits de l’action diplomatique et consulaire, j’ai constaté que la plupart des acteurs de la diplomatie se félicitent de la hausse inédite des moyens, après de nombreuses années de restriction : le réarmement de notre diplomatie est un impératif au moment où les crises se multiplient et s’intensifient.

Cependant, nous nous interrogeons sur l’allocation de ces moyens nouveaux. Des moyens humains supplémentaires étaient prévus dans la loi de finances pour 2023 : pourriez-vous dresser un bilan de leur usage ? Quelles sont les perspectives pour l’année prochaine, et à quelles actions précises seront destinés ces nouveaux moyens humains et financiers ?

La France est régulièrement cheffe de file dans les opérations d’évacuation, non seulement de nos compatriotes mais aussi de ressortissants de pays tiers, notamment européens. Pourriez-vous revenir sur le coût de ces opérations et sur le soutien logistique et financier apporté par les institutions européennes comme par nos alliés ? Les Européens ne devraient-ils pas être davantage mobilisés pour mener à bien de telles opérations ?

Vous avez évoqué la diplomatie d’influence et les crédits destinés à la communication. Quelles zones géographiques constituent vos priorités en la matière ?

Mme Catherine Colonna, ministre. Au cours de l’exercice 2023, un peu plus de la moitié des nouveaux emplois ont été affectés à notre réseau diplomatique, et le reste à la France. Ils ont soutenu nos priorités : renforcement de nos ambassades dans le Pacifique – vous avez suivi la tournée du président de la République au mois de juillet –, sécurisation de nos emprises, cybersécurité et lutte contre les manipulations de l’information.

En ce qui concerne les opérations d’évacuation, elles sont confiées au centre de crise et de soutien du ministère, toujours en étroite coordination avec le ministère des armées et la présidence de la République. Malheureusement, nous avons dû procéder à plusieurs opérations de ce type cette année. Nous avons ainsi évacué du Soudan 998 personnes, dont un peu plus d’un quart de Français ; mon ministère a déboursé 900 000 euros pour payer la projection des équipes, les vols civils… S’agissant du Niger, nous avons dû engager 2,8 millions d’euros mais un remboursement sera fait par le biais du mécanisme européen de protection civile, à hauteur de 75 % me semble-t-il.

S’agissant de l’influence, le temps qui m’est imparti pour vous répondre ne me permettra que de citer la zone indopacifique et l’Afrique comme priorités géographiques.

M. Frédéric Petit (Dem). Je ne reviens pas sur l’émotion qui nous saisit depuis deux jours.

Le groupe Démocrate salue avec moi ce budget en hausse. Il faut marteler que nos budgets augmentent car je rencontre encore des gens qui pensent le contraire.

Vous avez annoncé l’introduction du pass éducation en langue française. C’est le respect d’une promesse de campagne présidentielle. Nous souhaitons être associés à sa mise en place, afin d’éviter qu’il ne devienne une usine à gaz. Ce très vieux projet a été intégré au programme de campagne après des années d’efforts des élus locaux des Français à l’étranger, et il serait dommage que toutes les décisions soient prises dans un bureau parisien. Je vous en prie, appuyez-vous sur les élus locaux et les parlementaires pour que ce soit une réussite.

En tant que rapporteur du programme 185 Diplomatie culturelle et d’influence, je me réjouis de la hausse de ce budget. Je salue en particulier les diplomates, qui s’adaptent à de nouveaux outils comme le FSPI et qui travaillent en coordination. Je vois un extraordinaire engagement et une grande capacité de transformation des méthodes.

Je me félicite également de la consolidation de France Médias Monde.

Ma question porte sur le soutien que nous apportons aux ONG et aux organisations de la société civile (OSC). La loi du 4 août 2023 a créé les conditions d’une APD plus participative, plus transversale, plus transparente et mieux coordonnée. Dans le contexte des crises multiples que nous connaissons, pouvez-vous confirmer qu’il n’y aura pas d’annulations, mais des suspensions ? Pouvez-vous aussi confirmer qu’il y a bien du cas par cas mais pas de doctrine ? Comment ces choix seront-ils opérés pour être transparents et pour ne pas mettre en danger les équipes de terrain ? Comment entendez-vous maintenir l’esprit d’unanimité de la loi du 4 août 2021, malgré les fracas du monde ?

Mme Catherine Colonna, ministre. Le pass éducation en langue française est en effet un engagement du président de la République. Nous allons d’abord l’expérimenter et c’est bien volontiers que je vous associerai, ainsi que les élus locaux.

En ce qui concerne le programme 185, nous allons privilégier les fonds innovants, dont nous avons constaté qu’ils fonctionnent bien.

En matière d’aide publique au développement, nous préservons toujours l’aide humanitaire, en dialogue avec les ONG : il ne s’agit pas de pénaliser les populations. Afin de ne pas financer des régimes putschistes que nous condamnons et qui font une fort mauvaise utilisation de ces fonds, nous avons effectivement dû suspendre nos aides publiques au développement au Mali, au Burkina Faso et au Niger. L’avenir dépend du comportement de ces régimes et des calendriers de transition. Dans le cas du Niger, aucun processus de transition n’est prévu et le président Mohamed Bazoum n’a pas été libéré ; les putschistes n’ont montré aucun intérêt pour les différentes médiations et approches diplomatiques, de la part de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ou d’autres pays.

M. Alain David (SOC). Depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine, nous sommes vraisemblablement entrés dans une nouvelle ère des relations internationales, plus incertaine, plus violente. Les atrocités du week-end en Israël viennent, hélas, confirmer cette tendance. Notre discussion budgétaire est placée sous ces auspices inquiétants et il conviendra d’en tenir compte dans nos arbitrages, nos expressions et nos amendements.

L’Allemagne et l’Autriche notamment ont fait savoir qu’ils reconsidéraient l’attribution de leur aide au développement au Proche-Orient. Que vont décider la France et l’Europe ?

Notre stratégie d’influence est malmenée par les ambitions assumées de désinformation de pays comme la Russie, la Chine ou la Turquie. Je ne vous demande pas de dévoiler des informations secrètes mais notre travail est lié à ces événements : pouvez-vous nous éclairer sur la situation militaire en Ukraine, dont on ne parle plus guère depuis quelques jours ?

Mme Catherine Colonna, ministre. En ce qui concerne l’aide au développement, le président de la République s’est exprimé aujourd’hui même à Hambourg, lors de la conférence de presse qu’il a donnée avec le chancelier Scholz.

Pour ce qui est du volet bilatéral, notre aide s’élève à environ 95 millions d’euros, si l’on inclut les quelque 22 millions de notre contribution à l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNWRA). Les mécanismes de distribution sont précis et rigoureux, afin de nous assurer que les fonds parviennent bien aux populations ; nous agissons notamment beaucoup dans le domaine de l’éducation. Les garanties nous paraissent suffisantes pour ne pas prendre la décision de ne plus accorder cette aide. Ce serait même contre-productif et nombre de nos partenaires le comprennent.

En ce qui concerne l’aide européenne, nous avons regretté la confusion d’hier soir dans les prises de position au sein de la Commission, exprimées sans concertation même au sein du collège des commissaires, avec une série de propositions qui ont été précisées par la suite. Il n’y a pas non plus lieu de suspendre cette aide, qui obéit à des procédures tout à fait strictes. Nous pourrons vérifier précisément une nouvelle fois ce qu’il en est.

S’agissant de l’Ukraine, les vingt-sept étaient exceptionnellement réunis lundi dernier en Conseil des affaires étrangères à Kiev. Ils ont réaffirmé leur soutien militaire, économique et diplomatique, envisagé des mesures pour aider l’Ukraine à passer l’hiver et examiné les meilleurs moyens de demeurer aux côtés de ce pays, sur le plan militaire mais pas seulement, dans une guerre sans doute appelée à durer. Sur le terrain, je ne vous apprends rien en vous disant que la contre-offensive est difficile mais se traduit par des progrès, tandis que la Russie n’a pas atteint ses objectifs stratégiques et ne progresse plus. La Russie devra s’interroger sur cet échec stratégique.

Mme Stéphanie Kochert (HOR). Le groupe Horizons et apparentés se réjouit du fait que ce budget confirme l’engagement de la précédente loi de finances. Les crédits supplémentaires alloués à la mission Action extérieure de l’État sont bienvenus pour faire face à la montée des tensions internationales depuis le début de la guerre en Ukraine.

Pour nos compatriotes résidant hors de France, les dangers se multiplient ; ils doivent pouvoir compter sur notre diplomatie et notre réactivité en cas de crise. Je salue les agents du centre de crise et de soutien du ministère de l’Europe et des affaires étrangères, qui informent, rassurent et orientent nos ressortissants vingt-quatre heures sur vingt-quatre pendant les crises majeures. C’est en partie grâce à eux que des aides d’urgence ont pu être apportées, par exemple lors des séismes en Turquie et en Syrie ; ils s’occupent de l’acheminement de matériel médical vers l’Arménie face au nettoyage ethnique en cours au Haut-Karabagh ; ils ont permis les évacuations depuis le Niger ou le Soudan, avec l’appui des armées ; ils apportent leur soutien après les actes terroristes abominables qui ont frappé Israël.

Face à cette multiplication des crises, quelles évolutions peut-on attendre pour le centre de crise et de soutien en 2024 ?

Mme Catherine Colonna, ministre. Merci des mots que vous avez eus pour ces agents. Leur activité a été intense cette année. Les moyens destinés à la protection de nos communautés expatriées sont en augmentation de 5 millions d’euros. Le centre de crise et de soutien sera sans doute fort sollicité à nouveau dans les mois et les années à venir. Il travaille de façon admirable et avec une grande réactivité, dans des situations parfois dangereuses. Ainsi, dès demain, des agents seront déployés à Jérusalem et à Tel-Aviv. Ce service est relativement modeste, puisqu’il compte 104 agents, en grande majorité chargés de la sécurité de nos compatriotes. Au-delà du budget propre du centre, nous avons créé puis augmenté une provision pour crise, qui se révèle utile et efficace ; elle nous permet de réagir très vite.

Mme Sabrina Sebaihi (Écolo-NUPES). Mes pensées se dirigent vers les familles et les proches des victimes en Israël et dans la bande de Gaza. La paix n’est pas une option, c’est une impérieuse nécessité et notre diplomatie doit être à la hauteur de cette urgence. Le président de la République a exprimé le 16 mars dernier devant les états généraux de la diplomatie le souhait d’un réarmement complet de notre diplomatie. Dans ces discussions budgétaires, nous devons nous assurer que ce vœu se traduise dans des actions concrètes.

Avec la hausse des crédits alloués à la mission Action extérieure de l’État, nous avançons dans la bonne direction, mais nous devons aller plus loin. Ces augmentations font notamment suite à une longue grève menée par les diplomates, dans un contexte de démantèlement du ministère chargé des affaires étrangères, qui a perdu en trente ans la moitié de ses effectifs. Nous sommes donc encore bien loin du compte.

Alors que la guerre fait rage en Ukraine et que le Moyen-Orient s’enflamme à nouveau, les nations se réarment. Nous, écologistes, sommes partisans d’une stratégie d’équilibre : ouvrir d’importants crédits à nos armées – c’est nécessaire – sans en faire de même pour le Quai d’Orsay, c’est éloigner les perspectives de la paix. L’actualité nous rappelle les défis auxquels notre diplomatie est confrontée, notamment en Afrique où la désinformation et les narratifs antifrançais gagnent toujours davantage de terrain. Les coups d’État au Niger et au Gabon ont non seulement déstabilisé ces pays mais poussé la France à faire évoluer ses positions militaires sur le continent africain.

Il est légitime de s’interroger : si le Quai d’Orsay avait été doté de moyens plus conséquents au cours de la dernière décennie, aurions-nous pu jouer un rôle plus actif pour prévenir ces crises, en Afrique comme aux frontières Est de l’Europe ? Aurions-nous pu anticiper et peut-être atténuer les impacts des bouleversements politiques ? Alors que la désinformation joue un rôle crucial dans la déstabilisation des nations, il est impératif que notre diplomatie soit équipée pour contrer efficacement ces menaces. De quelles manières les crédits de la mission seront-ils mis au service de cet objectif ?

L’heure est grave et nos responsabilités sont immenses. Nous avons besoin d’une diplomatie robuste, agile et résolument tournée vers l’avenir, capable de répondre aux défis d’un monde en mutation.

Mme Catherine Colonna, ministre. Il serait erroné de parler de démantèlement de l’outil diplomatique alors que nous sommes en train d’augmenter fortement ses moyens. J’utilise volontiers le mot de réarmement, justement parce qu’il s’oppose au concept que vous avez utilisé. L’augmentation des moyens humains et budgétaires n’a rien de rhétorique : elle permet plus de sécurité, plus de communication stratégique, plus de capacité d’influence, plus d’aides, plus de capacités à gérer des crises. L’effort sur l’aide publique au développement est constant puisque celle-ci a crû de 50 % depuis 2017. Aurions-nous pu empêcher les désordres du monde ? J’aimerais le croire mais je me contenterai d’espérer que notre rôle peut être bénéfique.

Nous ne cessons d’appeler votre attention sur la communication stratégique car la désinformation et les manipulations masquent souvent une tentative d’atteinte au modèle démocratique lui-même. Ce sont des enjeux importants, sur lesquels nous pouvons nous réunir.

Nous avons beaucoup renforcé la direction de la presse et de la communication en 2022, puis en 2023. Avec 118 agents en administration centrale et un réseau de 480 personnes dans nos ambassades, cette direction pilote nos moyens de communication. France diplomatie s’exprime en six langues depuis Paris et cinquante depuis nos ambassades. Au total, nous avons 16 millions d’abonnés sur les réseaux sociaux et une centaine de millions de visites par an sur les sites du ministère et de nos ambassades. Nous continuerons à renforcer ces moyens en personnel et en actions.

M. Jean-Paul Lecoq (GDR-NUPES). Madame la ministre, nous avons des échos de problèmes de ressources humaines tant dans votre ministère qu’à l’AFD, les syndicats nous faisant remonter des problèmes de management. Le budget que vous nous présentez permettra-t-il d’améliorer les conditions de travail des salariés ?

La diplomatie, c’est la prévention, la science de l’anticipation pour prévenir le déclenchement de guerres et pour régler les conflits avant qu’ils ne dégénèrent. Je me demande si ce budget vous le permet, même si nous reconnaissons qu’il est en progression.

Les derniers événements en Israël et dans la bande de Gaza ont fait de nombreuses victimes. J’ai passé des années dans cette commission à alerter sur la situation dans cette région. La dernière fois que nous avons abordé ce sujet, c’était après l’opération Plomb durci – comme s’il fallait attendre qu’il y ait des victimes pour que nous en discutions. D’autres conflits méritent aussi l’attention de notre commission mais il semble que la diplomatie des affaires s’accommode mal du débat sur ce sujet. Or la confrontation d’idées a du sens et pourrait même, qui sait, aboutir à un dispositif de paix ou à une proposition d’amélioration. J’espère que votre budget vous permettra d’enclencher cette dynamique.

Mme Catherine Colonna, ministre. Nous sommes en dialogue régulier avec les syndicats au ministère ; je ne me prononcerai pas sur l’AFD, dont je connais moins le fonctionnement interne. Les moyens supplémentaires dont nous disposons dans le cadre d’un plan pluriannuel permettront d’aider les agents au quotidien, aussi bien à l’étranger qu’à Paris. En 2023, nous avons renforcé les directions les plus sollicitées grâce à des créations d’emplois : les premières depuis trente ans. J’ai évoqué les conditions de vie, de transport, de logement et de scolarisation des enfants pour ceux de nos agents qui vivent à l’étranger. Nous avons également renforcé des chancelleries politiques.

Il est essentiel d’augmenter nos capacités d’anticipation et d’analyse : je vous rejoins sur ce sujet. C’est pourquoi ces moyens humains nous étaient indispensables. Cela peut-il contribuer à la paix dans le monde ? Je veux le croire. En tout cas, notre mission est bien, en effet, d’apaiser les tensions, voire d’aider à faire la paix.

Je ne peux pas vous suivre totalement lorsque vous dites qu’on ne parle du Proche-Orient qu’en cas de crises ou de drames : il m’est arrivé d’en parler devant vous. Toutefois, je prends votre rappel de l’exigence de lucidité comme un signe positif.

Mme Estelle Youssouffa (LIOT). Notre groupe salue la hausse du budget du ministère et de l’action extérieure de l’État.

Madame la ministre, que fait votre ministère pour Mayotte, seul territoire français habité revendiqué par un voisin ouvertement hostile ? Que faites-vous pour faire plier les Comores ? Que faites-vous pour faire reconnaître Mayotte comme française par la communauté internationale ? Votre inertie nous indigne.

Lors de son discours aux Nations Unies, le mois dernier, le président Azali a encore une fois répété que Mayotte est comorienne, une hostilité claire : pas un mot du Quai d’Orsay.

Encore une fois, lors des Jeux des îles de l’océan indien, cet été, les athlètes mahorais n’ont pas eu le droit de défiler avec le drapeau tricolore, parce que les Comores s’y opposent. Comme des apatrides, nos athlètes ont arboré les couleurs des Jeux, avec un hymne ridicule à défaut de pouvoir chanter La Marseillaise : pas un mot du Quai d’Orsay.

Pendant l’opération Wuambushu, le président Azali a multiplié les interviews pour revendiquer Mayotte, pour contester au gouvernement français une opération de maintien de l’ordre sur son territoire et pour assumer son chantage migratoire en refusant de reprendre ses ressortissants en situation irrégulière : face à cette ingérence, pas un mot du Quai d’Orsay.

Je vous pose donc la question : qui ne dit mot consent ? Est-ce trop vous demander que de condamner enfin et sans ambages les propos du président Azali et d’exiger le respect de l’intégrité territoriale nationale ? Quand mobiliserez-vous vos services pour le respect des frontières de la République, à laquelle Mayotte appartient depuis 1841 ?

Vous êtes face à nous pour défendre le budget de votre ministère. Regardons donc comment vous dépensez cet argent pour financer un pays ouvertement hostile à la France. L’Agence française de développement annonce qu’elle a financé vingt-cinq projets aux Comores en engageant 150 millions d’euros sur dix ans, et 150 millions d’euros supplémentaires pour le récent plan de développement. Nous apprenons même que l’agence des Comores fait partie de la direction régionale océan indien de l’AFD, qui est chargée de la coopération régionale. De quelle coopération régionale voulez-vous parler ? De la Commission de l’océan indien (COI), financée par Paris mais sans Mayotte ?

Ces centaines de millions d’euros qui financent les Comores, en partie payés par les contribuables mahorais, sont une obscénité. Cet argent français aurait dû financer le territoire français de Mayotte, par exemple pour sa production en eau potable ou pour la piste longue. Les positions publiques d’Azali lors de l’opération Wuambushu le démontrent : cet argent n’a rien changé aux revendications comoriennes. Votre stratégie du carnet de chèques ne mène à rien. Le financement des Comores rappelle que, contrairement à vos déclarations, Paris soutient certains putschistes africains et leur déroule le tapis rouge. Dans le cas d’espèce, le président Azali, un général arrivé au pouvoir par un putsch en 1999, est reçu à l’Élysée.

M. le président Jean-Louis Bourlanges. Nombre de questions que vous avez posées s’adressent plutôt au ministre chargé de l’outre-mer, qui a d’ailleurs répondu en partie au sujet de l’enjeu de l’eau.

Mme Estelle Youssouffa (LIOT). Je n’ai pas posé de question sur l’eau, Monsieur le président ! C’était un constat ; mes questions s’adressent bien au Quai d’Orsay.

Mme Catherine Colonna, ministre. Mme la députée Youssouffa a l’habitude de critiquer la diplomatie française, en se montrant oublieuse de ce que celle-ci fait pour Mayotte et pour assurer sa place dans la République. Je ne peux pas vous laisser tenir de tels propos, Madame la députée. D’autre part, je veux vous assurer qu’il n’y a pas de divergence de points de vue et d’action au sein du Gouvernement.

La place de Mayotte dans la République est défendue par tous les ministères et la diplomatie française y prend toute sa part, notamment aux Nations Unies, où nous évitons, année après année, depuis plus de trente ans, que soient présentées à l’Assemblée générale des résolutions qui la remettraient en cause. Je voudrais au moins que vous nous en fassiez crédit.

Nous le faisons aussi lorsque nous travaillons à réduire la pression migratoire en provenance des Comores. C’est mon ministère qui a négocié l’accord de 2019, lequel permet d’opérer davantage de reconduites vers les Comores.

C’est également mon ministère qui défend l’intégration régionale de Mayotte dans son environnement. Nous avons obtenu l’accord des Comores et des autres États membres de la Commission de l’océan indien pour associer Mayotte à plusieurs projets de la COI. Je pourrais continuer cette énumération et contester point après point tout ce que vous avez dit sur la diplomatie française.

M. le président Jean-Louis Bourlanges. Nous en venons aux questions individuelles des autres députés.

Mme Éléonore Caroit (RE). Pour la deuxième année consécutive, le budget de votre ministère est en hausse : cette année, de 4,5 %, soit près de 300 millions d’euros. Cette augmentation permettra d’affecter 1 million d’euros à la création du pass éducation en langue française, promesse du président de la République. Je m’en réjouis car j’avais déposé un amendement en ce sens dans le projet de loi de finances pour 2023. Le pass facilitera l’accès à l’enseignement de la langue française aux enfants français résidant à l’étranger. Pourriez-vous nous préciser quand il pourra être lancé et s’il sera piloté par l’AEFE ?

Par ailleurs, les moyens de nombreux consulats dans ma circonscription, comme au Chili ou en Colombie, sont insuffisants. Pourriez-vous nous indiquer si les augmentations budgétaires prévues se traduiront par davantage de moyens pour les consulats, et donc pour les Français d’Amérique latine et des Caraïbes ?

Mme Catherine Colonna, ministre. Le pass éducation en langue française entrera en vigueur en 2024, si votre Assemblée approuve le projet de loi de finances. Il comportera une première phase d’expérimentation d’un dispositif d’apprentissage sous format numérique. Le pass s’adressera aux enfants inscrits au registre des Français établis hors de France mais non scolarisés dans un établissement français, qui ont donc potentiellement besoin d’être remis à niveau en français. Nous aurons le soutien de l’AEFE, du Centre national d’enseignement à distance (CNED) et du réseau Flam – Français langue maternelle –, qui est particulièrement utile et efficace.

Votre deuxième question portait sur les consulats. C’est très simple : oui, les moyens seront augmentés. Nous traitons de façon séparée la question des visas.

Mme Élise Leboucher (LFI-NUPES). La stagnation des crédits de la mission Aide publique au développement et le report à 2030 de l’atteinte de l’objectif de 0,7 % du RNB dédié à l’APD constituent un recul sans précédent, alors que la France a un rôle crucial à jouer pour la solidarité internationale. Les besoins n’ont jamais été aussi forts et le désengagement de l’APD française est une catastrophe pour les populations civiles.

La suspension de l’APD bilatérale française pour le Mali, le Burkina Faso et le Niger risque ainsi de précariser encore plus des populations particulièrement fragiles. Lors de mes auditions de rapporteure pour avis sur les crédits de l’APD, plusieurs acteurs m’ont alertée sur le recul des indicateurs de santé au Niger. Cette décision, qui n’influera pas sur le choix des élites au pouvoir, risque en revanche d’accroître l’hostilité d’une partie des sociétés civiles de ces pays à l’égard de la France et de défaire des années de travail des ONG, des associations et de l’AFD. La boussole de notre APD doit être le développement et la protection des biens communs.

Madame la ministre, garantissez-vous solennellement que notre aide publique au développement, qu’elle passe par les canaux bilatéraux, européens ou multilatéraux, sera maintenue et allouée selon les besoins des populations ? Il y a une nuance entre financer des putschistes, pour reprendre vos propos, et suspendre toute l’APD.

Mme Catherine Colonna, ministre. L’aide publique au développement a énormément progressé depuis 2017 : 50 % d’augmentation en cinq ans, c’est tout à fait considérable ! Cette progression tient également à une diminution des dépenses, puisque nous avons rattrapé les 70 millions d’euros d’arriérés du Fonds mondial de lutte contre le SIDA, la tuberculose et le paludisme, ainsi que 20 millions d’euros par ailleurs.

Concernant le Mali, le Burkina Faso et le Niger, nous maintenons l’aide humanitaire, qui passe par le canal des ONG. En revanche, pour le reste, nous n’envisageons pas de maintenir l’aide à des régimes qui utilisent fort mal l’assistance qui peut leur être donnée soit par leurs partenaires, soit par les institutions financières internationales. Le Mali, qui a apporté une aide aux putschistes du Niger, en est un exemple patent.

Mme Béatrice Piron (RE). L’actualité de ces derniers mois nous rappelle l’importance cruciale de l’audiovisuel extérieur de la France. Nos journalistes, qui risquent leur vie pour nous tenir informés, doivent bénéficier d’une plus grande considération et d’une protection renforcée. De plus, ces médias luttent activement contre la désinformation et tentent d’assurer au maximum une continuité d’information trop souvent menacée par des coupures d’ondes dans ces zones géographiques ébranlées politiquement.

Il est de notre devoir d’augmenter nos efforts budgétaires, afin d’assurer l’équilibre, la continuité et la fiabilité de cette information internationale. Le ministère chargé des affaires étrangères consacre une partie du budget de l’audiovisuel extérieur de la France au financement de divers projets audiovisuels locaux. Comment pérenniser et améliorer ce mode de financement indispensable à ces projets de proximité ? Envisagez-vous de simplifier les procédures d’appel à projets pour faciliter l’accès à ce financement ?

Mme Catherine Colonna, ministre. Il est indispensable que nos médias extérieurs conservent leur indépendance dans un contexte de concurrence brutale des pensées, je dirais même des visions du monde, s’éloignant bien souvent des valeurs démocratiques que nous défendons. La guerre informationnelle se joue à l’échelle mondiale ; il est important, à ce titre, de maintenir un bon niveau de capacité d’action, notamment pour France Médias Monde. Tel est le cas : après une dotation de 263 millions d’euros en 2023, ce groupe recevra 274 millions d’euros en 2024. Cela permet de financer des projets locaux tels que le hub que nous avons ouvert à Bucarest avec Radio France internationale (RFI), qui permet à des journalistes ukrainiens de diffuser dans la zone une information de qualité, ou encore le projet Afri’Kibaaru, qui diffuse en langue sahélienne.

M. Pierre-Henri Dumont (LR). De 2006 à 2015, la France a financé une station d’épuration dans le Nord de la bande de Gaza à hauteur de 16 millions d’euros. Depuis 2022, notre pays subventionne le réseau de distribution d’eau à partir de l’usine de dessalement de la bande de Gaza à hauteur de 10 millions d’euros. En 2019, le chef du Hamas dans la bande de Gaza a expliqué avoir à sa disposition « assez de tuyaux pour fabriquer des roquettes pour les dix prochaines années ». Il s’agit de tuyaux de distribution d’eau, comme j’ai pu le constater lors d’un déplacement à Sdérot, où les roquettes envoyées depuis Gaza sur les civils israéliens étaient exposées.

Pouvez-vous nous donner la garantie que les 26 millions d’euros donnés par la France à Gaza pour améliorer la distribution d’eau à la population gazaouie n’ont pas servi à envoyer des roquettes sur Israël ? Alors que la première ministre refuse de suspendre l’aide au développement à la Palestine, et donc à Gaza, quels moyens avez-vous de vous assurer que l’argent du contribuable français ne financera pas, demain, l’armement des terroristes du Hamas ?

Mme Catherine Colonna, ministre. Personne ne peut contester le fait que fournir de l’eau aux Palestiniens est une action utile. Je ne peux pas imaginer que vous pensiez qu’il faut les priver d’eau. Quant au fond du sujet, ce n’est pas la première ministre qui refuse ; je vous rappelle que le président de la République s’est exprimé et que nous nous sommes réunis dans un format européen sur ce sujet.

Nous souhaitons vérifier si toutes les procédures destinées à garantir que ce genre de choses ne se produit pas sont bien observées. Si elles devaient ne pas l’être, nous en tirerions les conséquences. Cela s’appelle une revue et c’est ce qui sera fait par la Commission européenne pour ce qui la concerne.

Nos procédures, à ma connaissance, sont suffisamment précises pour nous offrir des garanties.

M. Lionel Vuibert (RE). Le 31 août dernier, le Gouvernement a lancé le programme Osez l’export !, doté de 125 millions d’euros. Il vise à passer de 150 000 entreprises françaises exportatrices à 200 000 d’ici 2030, ce qui me paraît excellent. Ce plan se décline en treize mesures portant sur la formation, la communication et la promotion du savoir-faire français. Il s’agit de miser sur les nouveaux marchés de croissance, à la fois sur le plan marketing et sur le plan des zones géographiques. Entendez-vous amplifier ce plan dans le cadre du PLF pour 2024 ? Faut-il au contraire prévoir des inflexions ?

Mme Catherine Colonna, ministre. Olivier Becht vient de présenter ce plan, qui s’inscrit dans une trajectoire allant jusqu’à 2030. Je ne prévois pas de le modifier quelques semaines après sa présentation mais, si tout se passe comme nous le souhaitons, il faudra peut-être renforcer les mesures destinées à augmenter le nombre d’entreprises françaises exportatrices, insuffisantes si l’on compare avec d’autres pays.

Quatre priorités ont été définies pour aider les entreprises françaises : un renforcement de la visibilité et de la lisibilité des dispositifs publics de soutien et d’aide ; le maintien d’une information de qualité sur les marchés extérieurs ; une meilleure offre de formation en direction des petites et moyennes entreprises (PME) et des établissements de taille intermédiaire (ETI) ; le développement de services numériques. Nous sommes sûrs que ce plan donnera de bons résultats. Nous verrons ensuite s’il faut le faire progresser.

M. Jérôme Buisson (RN). Le commissaire européen à l’élargissement et à la politique européenne de voisinage, Olivér Várhelyi, a annoncé hier vouloir suspendre le versement des 691 millions d’euros d’aide publique au développement que verse l’Union européenne à la Palestine, avant de reculer face au refus de plusieurs pays membres. Il a non seulement demandé la suspension des versements mais aussi que les projets financés soient réétudiés. Au regard de la confusion provoquée par ses déclarations, le doute est désormais permis et vos affirmations, Madame la ministre, ne suffisent pas à assurer une plus grande transparence dans l’attribution de l’aide au développement de l’Union européenne. Il est primordial que les peuples des États membres soient assurés que leur argent ne finance pas les organisations terroristes.

Mme Catherine Colonna, ministre. Nous nous rejoignons sur cet objectif. Je précise toutefois que si le commissaire a modifié sa déclaration, cela tient non pas à l’opposition des États membres mais au fait qu’il n’en avait informé ni le collège des commissaires, ni la présidente de la Commission. Je ne suis d’ailleurs pas certaine qu’il était dans ses pouvoirs de décider d’une telle suspension. La situation a été clarifiée hier soir, après un moment tout à fait inutile de flottement et d’interrogations.

M. le président Jean-Louis Bourlanges. Je vous remercie, Madame la ministre, d’avoir répondu à toutes les questions, rapidement, fortement et sans biaiser. Vous avez eu la partie heureuse de défendre un budget dynamique mais c’est l’aboutissement public de l’action de longue haleine que vous avez entreprise au sein de votre ministère.

 


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II.   présentation de l’avis devant la commission des affaires étrangères et examen des crédits

Au cours de sa réunion du mercredi 18 octobre 2023, la commission examine le présent avis budgétaire.

M. le président Jean-Louis Bourlanges. Les deux premiers avis budgétaires inscrits à notre ordre du jour portent sur la mission Action extérieure de l’État, sur le rapport de MM. Vincent Seitlinger et Frédéric Petit.

Les crédits de la mission Action extérieure de l’État s’élèvent à 3,5 milliards d’euros, en hausse de 9 %. Parmi les points saillants dont nous avons débattu avec la ministre Catherine Colonna, lors de son audition, figure notamment la création nette de 165 équivalents temps plein (ETP) pour répondre aux besoins prioritaires : présence dans l’Indopacifique, capacité d’analyse politique dans les postes sensibles, sécurisation des emprises diplomatiques, cybersécurité, etc. Il s’agit d’une confirmation de l’inversion de tendance amorcée l’an passé, que je qualifierai plutôt de « remise à niveau » que de « réarmement » de notre diplomatie.

M. Vincent Seitlinger a décidé d’insister plus particulièrement sur les opérations d’évacuation et de gestion des situations de crise, en s’appuyant sur les cas récents : Afghanistan, Soudan et Niger. L’action du centre de crise et de soutien (CDCS) du Quai d’Orsay sera au cœur de son analyse.

M. Frédéric Petit a quant à lui porté son attention sur l’action culturelle et la coopération françaises en Algérie, un sujet sensible et fondamental.

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis (Action de la France en Europe et dans le monde ; Français à l’étranger et affaires consulaires). Nous examinons, pour avis, les crédits des programmes 105, Action de la France en Europe et dans le monde, et 151, Français à l’étranger et affaires consulaires de la mission Action extérieure de l’État. Les crédits de ces deux programmes regroupent les moyens de fonctionnement, numériques, d’investissement et de sécurité, les moyens d’intervention du ministère de l’Europe et des affaires étrangères, ainsi que les crédits relatifs aux actions consulaires. Ces programmes représentent, avec le programme 185, Diplomatie culturelle et d’influence, l’essentiel des moyens octroyés au Quai d’Orsay pour assurer la mise en œuvre de ses missions.

En 2024, le budget du ministère de l’Europe et des affaires étrangères atteindra 6,764 milliards d’euros en crédits de paiement, hors pensions, soit une hausse de 293 millions – 4,5 % – par rapport à la loi de finances pour 2023. Ce budget est également marqué par une hausse des effectifs, avec 165 nouveaux ETP, qui s’ajoutent aux 100 ETP créés lors du dernier exercice : c’est un fait notable pour un ministère qui, depuis trente ans, voyait ses effectifs baisser. Comme le président Bourlanges l’a souligné lors de l’audition de la ministre, le Quai d’Orsay était vraiment « au-delà de l’os » en matière de ressources humaines.

Le PLF pour 2024 s’inscrit ainsi dans le sillage des annonces faites par le président de la République en clôture des états généraux de la diplomatie, le 16 mars 2023, qui visent un « réarmement » de notre diplomatie d’ici à 2027, avec la création de 700 ETP et une hausse des crédits de 20 %. Ces moyens nouveaux pour notre outil diplomatique, que beaucoup considèrent en crise profonde, à l’intérieur comme à l’extérieur du Quai d’Orsay, apparaissent comme une nécessité à une époque où les tensions à l’échelle mondiale ne cessent de se multiplier et de s’intensifier.

Cependant, c’est de l’allocation de ces moyens nouveaux que dépendra le renouveau effectif de notre diplomatie. Des priorités fixées pour le pilotage du ministère et de son réseau dépendront le renforcement de la place de la France dans le concert des nations et l’affermissement de notre capacité d’action. Si je salue la hausse des moyens humains et financiers dédiés au Quai d’Orsay pour 2024, j’appelle néanmoins à la plus grande vigilance sur leur utilisation, afin que la volonté politique affichée ne soit pas un vœu pieux mais qu’elle devienne un réel outil au service du renforcement de l’action extérieure de notre pays.

À mes yeux, l’allocation imprécise de ces nouvelles ressources, notamment des 165 ETP supplémentaires, constitue un motif d’inquiétude. Pour l’heure, on m’a seulement indiqué que ces ressources viendraient soutenir les priorités érigées par le président de la République. En conséquence, je m’abstiendrai sur le vote de ces crédits et j’appelle la commission à en suivre l’exécution avec la plus grande attention.

Pour illustrer combien il importe de garantir à notre diplomatie les moyens d’agir dans un environnement international de plus en plus dégradé – avec la guerre en Ukraine, la situation en Afrique sahélienne et les évènements dramatiques qui se déroulent au Proche‑Orient –, j’ai fait le choix de consacrer la partie thématique de mes travaux aux actions de notre outil diplomatique dans les situations d’urgence, plus particulièrement aux opérations d’évacuation de nos ressortissants qui se sont multipliées ces dernières années : en Afghanistan en 2021, en Ukraine en 2022, au Soudan et au Niger en 2023, et, ces derniers, jours en Israël.

La France dispose en la matière d’un savoir‑faire et d’une capacité d’action reconnus par tous, qui la placent souvent en première ligne pour mener à bien ces missions périlleuses au service de nos ressortissants mais aussi au bénéfice des ressortissants d’autres États partenaires. Pour y parvenir, la France peut compter sur des moyens militaires et civils, ainsi que sur des agents aguerris et dévoués disposant d’une réelle expertise. Je pense notamment aux équipes qui étaient en poste dans les pays concernés, ainsi qu’aux agents du centre de crise et de soutien, qui est actif 24 heures sur 24 et sept jours sur sept. Lorsqu’une crise survient à l’étranger – qu’elle soit sécuritaire, climatique, humanitaire, politique ou sanitaire –, ils assurent la protection de nos ressortissants.

Je présente dans mon rapport la mise en œuvre opérationnelle des évacuations et je fais un bilan des dernières opérations, attestant de l’expertise de notre pays en la matière et soulignant aussi parfois, en creux, le faible investissement de nos partenaires, notamment européens. Je reviens également sur les difficultés rencontrées dans ces moments critiques, notamment sur le fait que nombre de nos ressortissants ne sont pas inscrits au registre des Français établis hors de France, qui est pourtant un outil essentiel lorsque survient une crise. J’aborde enfin la question de la formation et de l’accompagnement professionnel, indemnitaire et psychologique des agents du ministère de l’Europe et des affaires étrangères face à ces situations de crise. Je pourrai revenir, si vous le souhaitez, sur la préparation, la gestion et le coût de ces opérations d’urgence, qui font partie depuis longtemps de la culture du Quai d’Orsay et qui y occupent une place prééminente. Le ministère de l’Europe et des affaires étrangères reste bien le ministère des crises.

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis (Diplomatie culturelle et d’influence ; Francophonie). Je vais vous présenter, pour la septième fois, un rapport sur le programme Diplomatie culturelle et d’influence. À cet intitulé, je préfère l’expression « diplomatie des sociétés civiles » ou « diplomatie non institutionnelle ». Je ferai quatre remarques : deux sur la partie générale et deux sur la partie thématique.

Tout d’abord, nous avons là un bon budget. Les moyens de cette diplomatie ont augmenté depuis 2017, notamment ceux de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE), mais la hausse de cette année – 62 millions d’euros, hors personnels – est vraiment considérable. C’est la première fois que je vois une telle hausse et l’on sent que la répartition des crédits entre les différentes actions a vraiment été bien pensée.

Par ailleurs, l’administration diplomatique poursuit sa mue et sort de la logique des silos. J’avais présenté des rapports très critiques sur ce que j’appelais la « diplomatie du dessert » ou la « diplomatie qu’on fait quand on a le temps », se caractérisant par des actions très éclatées et incontrôlables. Or il y a eu une vraie évolution de ce point de vue : désormais, les outils diplomatiques procèdent d’une même volonté et témoignent de la cohérence de notre action à l’extérieur. J’appelle votre attention sur le fonds de solidarité pour les projets innovants (FSPI), un outil budgétaire transversal très performant que nos ambassades utilisent beaucoup et qui permet de sortir des silos de notre administration publique un peu rigide.

J’en viens à la partie thématique. Si j’ai choisi d’aller en Algérie – dans le prolongement de mes missions au Liban, en Israël et en Palestine –, c’était pour réfléchir à la notion de « guerre des mémoires », que je n’aime pas. Il y a des confrontations, des choses à régler entre les mémoires, mais je crois que c’est une erreur de parler de guerre à propos d’actions qui visent à la dépasser. La commission mixte d’historiens français et algériens sera un outil utile pour apaiser les tensions mais elle ne va pas révolutionner la connaissance scientifique de l’histoire de la colonisation et de la décolonisation. Des historiens ont déjà fait ce travail scientifique : des Français, des Algériens, des Franco-Algériens, mais aussi des historiens d’autres nationalités. L’intérêt de cette commission mixte est diplomatique et pas scientifique.

J’aimerais par ailleurs revenir sur la place de la langue française en Algérie. Ce que je peux vous dire, c’est qu’on a soif de français en Algérie. Toutes les personnes que j’ai rencontrées, qui avaient des statuts et des histoires très différents, m’ont dit que l’Algérie resterait quadrilingue – avec le darja, l’arabe, le tamazight et le français –, que cela fait partie de leur manière de vivre. Au lycée français d’Alger, il y a une place pour soixante-dix demandes. Les mesures étatiques prises pour essayer de sortir du français ne me font pas peur. Il faut que nous nous battions avec des outils diplomatiques culturels – que l’on peut aussi qualifier de « soft » ou de « non-étatiques » –, sous les radars, en veillant à ne pas recréer de conflit. Il est inutile de publier des tribunes pour dire que l’État algérien se trompe. La diplomatie dont je parle relève de la société civile. Il faut travailler avec elle et non chercher à toute force à s’opposer à des mesures officielles qui, de toute façon, n’atteindront pas leur but.

Je voudrais saluer la très grande capacité d’adaptation et d’évolution de notre personnel diplomatique. Si l’on est sorti des silos, c’est parce que nos agents ont su changer leur manière de travailler et se remettre en question. À Alger, un chef de poste m’a dit qu’il mettait au-dessus de la pile les dossiers relatifs au lycée français et aux bourses André Mandouze, parce qu’il les considère comme prioritaires.

Parce que nombre d’amendements déposés ce matin portent sur les lycées français à l’étranger, je vous rappelle qu’à de rares exceptions près, qui tiennent à des raisons historiques, ils ne sont pas gérés par l’État français mais sont avant tout des institutions de droit local. Ce qui fait un lycée français à l’étranger, c’est un agrément, une homologation de l’Éducation nationale française. Le fait que nous gérions soixante de ces lycées de façon centralisée à Paris n’a rien à voir avec l’avenir de ce réseau de 580 lycées, dont l’immense majorité relève d’une gestion locale. L’État n’intervient que par l’envoi de personnel pour les développer, les aider et contrôler l’excellence de ce qui y est enseigné, en particulier la langue française.

M. le président Jean-Louis Bourlanges. Je vous remercie, messieurs les rapporteurs pour avis. La parole est à présent aux orateurs des groupes.

M. Vincent Ledoux (RE). Je n’ai pas cessé de dire, lorsque j’étais rapporteur spécial de la commission des finances sur ces questions, que l’outil diplomatique était à l’os. Désormais, nous sommes plutôt dans une phase ascendante, avec des investissements dans tous les domaines : ressources humaines, immobilier, contributions internationales, plans d’urgence, etc. L’enjeu a été défini par le président de la République : il ne s’agit pas de rebâtir ou d’être « au service d’une nostalgie », mais de se donner les moyens d’une action nouvelle, ce qui implique une adaptation de l’outil diplomatique. La réforme du corps diplomatique, qui faisait un peu figure d’épouvantail il y a quelques mois, est entrée dans les mœurs et une large majorité de diplomates ont fait le choix de rejoindre le nouveau corps interministériel sans que cela affaiblisse leur lien au ministère.

Monsieur Seitlinger, vous soulignez dans votre rapport l’importance du CDCS, qui s’est illustré à plusieurs reprises. Vous évoquez également le mécanisme européen de protection civile, qui permet une prise en charge partielle par l’Union européenne. Lors de contrôles budgétaires réalisés à l’occasion de la crise sanitaire, j’avais constaté des difficultés ponctuelles pour valider les remboursements par la Commission européenne, qui exige des parts minimales de ressortissants des autres États. Avez-vous observé le même type de difficulté ? Les critères actuels mériteraient-ils d’être revus ?

Monsieur Petit, comment renforcer la mobilité étudiante en direction de la France, qui achoppe parfois sur la politique des visas ? Par ailleurs, comment booster la création d’écoles nouvelles à l’étranger tout en garantissant l’excellence française ?

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. Les représentants du ministère que nous avons auditionnés n’ont pas fait état de difficultés de cet ordre : lors des dernières opérations d’évacuation, au Niger ou au Soudan, le nombre de ressortissants d’autres pays était respecté. Le seul bémol, c’est que nos partenaires européens ne sont pas aussi engagés que nous dans ce genre d’opérations d’évacuation.

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Les hausses de crédits concernent aussi les programmes budgétaires de la mission Aide publique au développement, ainsi que le compte d’affectation spéciale 723, Opérations immobilières et entretien des bâtiments de l'État : lors de nos déplacements, nous voyons que les ambassades font l’objet d’investissements.

Le Gouvernement soutient deux politiques publiques qui peuvent sembler contradictoires : l’une vise à faire passer de 400 000 à 500 000 le nombre d’étudiants étrangers en France ; l’autre vise à éviter l’utilisation détournée des visas étudiants. Il peut arriver que deux politiques publiques soient difficiles à harmoniser mais ce qui me choque, c’est que la décision finale revienne finalement à la personne qui est derrière le guichet, à Marrakech ou au Soudan. Je me bats pour que la conciliation de ces deux politiques publiques soit coordonnée au plus haut niveau et que des consignes claires soient données à nos agents.

Pour booster les écoles françaises à l’étranger, l’agence a enfin défini onze pays prioritaires. L’essentiel est de trouver les partenaires locaux capables de promouvoir les projets : communauté française, entreprises, lycées locaux. Le lycée français de Tel-Aviv est un lycée de droit israélien, qui accueille une filière homologuée par le ministère français.

Mme Laurence Robert-Dehault (RN). Le Rassemblement national salue l’augmentation des crédits alloués à l’action diplomatique de la France dans le monde, même si cette hausse, de 4,5 %, doit être relativisée du fait d’une inflation estimée par la Banque de France à 2,8 %.

Une partie de ces augmentations pourrait être mieux ventilée, en particulier celles concernant les contributions de notre pays au mécanisme de facilité européenne pour la paix. Nous sommes opposés au transfert de souveraineté à l’Union européenne dans les domaines constitutifs de notre État et de notre identité que sont la politique étrangère et la défense nationale. Les échecs des tentatives d’établissement d’une politique européenne de défense ou d’une politique étrangère commune ne sont que les conséquences d’un fait universel : les nations ont des intérêts qui leur sont propres.

Ces crédits pourraient financer les actions diplomatiques menées par la France en son nom. En effet, la décrédibilisation et la montée d’un sentiment antifrançais, en particulier en Afrique, ont souligné la nécessité de renforcer nos actions diplomatiques, ainsi que la promotion du français et de notre culture. La francophonie est un atout dont la France s’est détournée. Elle est l’expression de notre culture mais aussi une arme économique que l’on n’a pas voulu développer. Nous militons par ailleurs pour la création d’une union francophone fondée sur des partenariats égalitaires, économiques et culturels.

Le projet de loi indique que les crédits supplémentaires sont destinés en priorité au renforcement du réseau culturel, principalement en Afrique et en Indopacifique, avec pour objectif de promouvoir la francophonie et particulièrement le développement de l’apprentissage du français. Ce modèle d’intervention de la France à l’étranger, fondé sur l’échange et la coopération culturelle et scientifique, nous paraît être un bon levier pour conserver et développer l’influence de la France dans le monde.

Pour toutes ces raisons, et parce que nous considérons comme nécessaire de mettre notre diplomatie au cœur de notre action internationale, nous serons particulièrement attentifs au débat qui s’ouvre.

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. La montée en charge du mécanisme de facilité européenne pour la paix est due à la guerre en Ukraine et au soutien de l’Union européenne aux Ukrainiens. Je crois que nous sommes tous d’accord pour dire qu’il importe de soutenir l’Ukraine dans cette guerre.

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Je remarque que vous saluez des hausses de crédits que vos amendements tendent à détruire.

Je suis surpris de vos remarques car ce budget soutient l’Organisation internationale de la francophonie. Celle-ci fait déjà de la coopération économique et scientifique ; elle fonctionne bien et a sa propre agence universitaire, qui est présente non seulement dans les pays d’Afrique mais aussi dans tous les pays d’Europe.

Je rappelle par ailleurs que la francophonie, ce n’est pas la France, mais ceux qui parlent français. La chaîne TV5 Monde n’est pas gérée par le gouvernement français mais par l’ensemble des pays francophones. Dans un très beau discours prononcé à Ouagadougou en 2017, le président de la République a rappelé que la francophonie, c’est le plurilinguisme. Dans ma circonscription, des enfants et des collègues parlent deux ou trois langues et je considère que c’est une force. L’esprit de la francophonie, c’est de sortir du côté colonialiste pour aller vers le coopératif.

Mme Nadège Abomangoli (LFI-NUPES). La diplomatie française a longtemps été le parent pauvre des budgets successifs : moyens réduits à peau de chagrin, fermeture de consulats et dégradation continue des services aux Français de l’étranger, détricotage continu du tissu diplomatique et influence décroissante de la France à l’international, à mesure qu’elle se fourvoyait, à nos yeux, dans sa politique étrangère et renonçait au non-alignement.

La progression des crédits alloués à l’action extérieure de la France, actée par l’Exécutif pour les années à venir, est donc une bonne nouvelle – à relativiser au regard de l’inflation –, même si les montants en hausse ne compenseront pas trente années d’abandon. Rappelons les faits, qui sont terribles : diminution continue du budget de fonctionnement et suppression de 50 % de l’effectif du ministère. Dès lors, l’effectif destiné à l’action extérieure de l’État ne fait que retrouver son niveau de 2015 et, surtout, s’accompagne d’un coup terrible : la suppression du corps diplomatique. La France deviendra donc, en 2024, le seul pays du Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations Unies (ONU) sans diplomatie de métier.

Les indicateurs de ce PLF montrent également l’insuffisance des moyens des consulats. En cinq ans, le délai de traitement des demandes de passeport a été multiplié par deux, tandis que le nombre des demandes de visas de court séjour a été multiplié par quatre.

Enfin, on constate une surpolitisation inquiétante de la diplomatie culturelle. Comme pour l’aide publique au développement (APD), les milieux culturels semblent soumis aux alliances de circonstance de la France. Dernièrement, les artistes du Mali, du Burkina Faso et du Niger ont été menacés de boycott, à cause du pays figurant sur leur passeport. C’est un coup immense porté à l’image de la France dans la région, qui risque de façonner durablement la perception de nos relations pour les années à venir. Compte tenu de ces éléments, nous voterons contre ces crédits, à moins de voir nos amendements acceptés.

Monsieur Seitlinger, le centre de crise et de soutien est souvent pris en exemple pour ses opérations d’évacuation mais, alors que les crises sont amenées à se multiplier en raison des conflits et du changement climatique, et que les crédits qui lui sont alloués ne cessent d’augmenter, ce modèle est-il soutenable à long terme ?

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. S’agissant des ressources humaines du Quai d’Orsay, la création de 165 ETP représente un effort considérable. Il est encore difficile de mesurer l’incidence de la suppression du corps diplomatique. Il faudra attendre quelques années pour l’apprécier.

Il y a une vraie volonté de réduire les délais de traitement des demandes de visas : une cellule d’appui a été créée au ministère pour soutenir les postes les plus en difficulté.

Il est vrai que le CDCS connaît depuis quelques mois une montée en charge qui pourrait malheureusement s’accentuer dans les prochains mois mais les choses se passent relativement bien. En cas de crise majeure, des appels sont lancés au sein du ministère et des personnes se portent volontaires pour rejoindre le CDCS de façon ponctuelle.

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Supprimer un corps ne veut pas dire que l’on supprime un métier. Du reste, 70 % des diplomates ont choisi de passer à la nouvelle formule : c’est donc qu’ils l’ont acceptée.

Je suis choqué par vos propos au sujet des artistes maliens : ce que vous dites est faux et il n’y a eu aucune restriction de cet ordre. Si certains artistes n’ont pas obtenu de visa, c’est parce qu’on ne peut pas en délivrer quand l’ambassade de France est caillassée et qu’on lui coupe l’eau. Les artistes maliens sont toujours bien accueillis. Je suis désolé de vous le dire mais c’est vous qui portez un coup à la France par de telles affirmations.

M. Michel Herbillon (LR). Au nom du groupe Les Républicains, je veux saluer et remercier l’ensemble des agents du Quai d’Orsay, plus spécifiquement ceux du centre de crise et de soutien. C’est grâce à leur mobilisation sans faille au service de nos concitoyens et à leur savoir-faire que plusieurs milliers de nos ressortissants, ainsi que ceux de nos partenaires, ont été mis en sécurité lors de différentes crises. Cela démontre l’excellence des agents du Quai d’Orsay mais également de nos armées.

Monsieur Seitlinger, avez-vous identifié des difficultés que le CDCS aurait rencontrées dans le cadre des opérations d’évacuation ? Quelles leçons tirer des dernières crises ayant touché nos postes et les ressortissants français à l’étranger ?

Les députés Les Républicains prennent acte de la nouvelle augmentation des crédits alloués à la mission Action extérieure de l’État. Certes, cela vient mettre fin à l’érosion des crédits dont a souffert ce ministère pendant des années. Toutefois, nous sommes encore loin du temps du réarmement de notre diplomatie, annoncé par la ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Face à l’ampleur des enjeux, dans un contexte international particulièrement dangereux, comment ces moyens nouveaux vont-ils être répartis ? On nous dit que cette répartition se fera dans le cadre des priorités érigées par le président de la République, sans plus de précision.

Pendant ce temps, nous assistons à l’affaiblissement de la France sur la scène internationale, en Afrique, au Moyen-Orient et en Europe orientale. Très souvent, notre pays se voit relégué, malgré des discours grandiloquents et volontaristes. Au-delà des moyens, il est urgent de redéfinir une politique diplomatique claire et audacieuse, capable de redonner à notre pays le rôle qui a été le sien et qui doit être le sien. Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe Les Républicains s’abstiendra sur les crédits de cette mission.

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. S’agissant des opérations d’évacuation, l’une des difficultés tient au fait que tous nos compatriotes ne sont pas inscrits au registre des Français établis hors de France, ce qui complique le travail des ambassades. La deuxième difficulté tient à la localisation et à l’état de nos emprises immobilières– ambassades ou résidences –, qui ne se prêtent pas toujours à des opérations d’évacuation. Enfin, ce ne sont pas forcément les diplomates les plus expérimentés qui se trouvent dans ces pays, alors qu’il faudrait justement des profils aguerris pour affronter ces situations extrêmes. Mais les gens ne se bousculent pas pour occuper ces postes difficiles...

Quant aux ETP créés, il faut effectivement qu’ils soient affectés à des missions opérationnelles, comme la délivrance de visas.

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Il faudra effectivement contrôler la manière dont ces moyens supplémentaires seront utilisés.

On peut aussi se dire que si notre administration n’est pas tout à fait prête et a du mal à exposer clairement la manière dont ces nouveaux ETP seront répartis, c’est aussi parce que sa manière de travailler évolue énormément et que certains postes restent à inventer.

Un autre signe encourageant est le fait que notre diplomatie se construit par pays. Dans de nombreux domaines, tels que le développement, l’enseignement ou l’environnement, nous avons des plans pays. L’ambassadeur n’arrive plus avec sa feuille de route mais construit son plan pays en partant du terrain. Définir précisément ce que nous allons faire prend du temps mais on peut y voir le signe d’une évolution sincère.

M. Frédéric Zgainski (Dem). Dans un contexte international instable, alors que les crises se multiplient et menacent la sécurité et la paix mondiales, la France doit faire entendre sa voix et promouvoir ses valeurs. Dès lors, comment ne pas se réjouir de la hausse significative de 289 millions d’euros des crédits de la mission Action extérieure de l’État ? Il s’agit de la plus forte hausse depuis l’entrée en vigueur complète et définitive de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), en 2005. En se donnant les moyens d’agir, de se transformer et de moderniser les services rendus à nos compatriotes vivant à l’étranger, le ministère de l’Europe et des affaires étrangères pourra ainsi promouvoir le multilatéralisme et valoriser l’image de la France.

Le programme 105 connaît une augmentation inédite de ses crédits, en hausse de 13 % par rapport à 2023. Alors que la guerre est de retour en Europe et que le Moyen-Orient s’enflamme, la majeure partie des crédits que nous examinons est consacrée au renforcement de l’influence de la France dans le monde et au retour à la paix. Je veux souligner l’augmentation de 98,6 millions d’euros des crédits consacrés aux contributions internationales et aux opérations de maintien de la paix et celle de 76 millions d’euros pour la contribution au mécanisme de facilité européenne pour la paix, destiné à renforcer les mesures d’assistance, notamment à l’Ukraine. Il est également prévu une contribution supplémentaire de 6,5 millions d’euros à l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) et 17 millions d’euros de versements supplémentaires aux différents organes des Nations Unies.

Je me réjouis de la priorité donnée à l’influence française en vue de construire un nouveau partenariat culturel et solidaire avec le continent africain, à l’heure où les régimes connaissent des coups d’État encouragés par des puissances étrangères. Cette influence se concrétisera également par une diplomatie renforcée dans les zones indopacifique et européenne, au travers de bourses de mobilité étudiantes, d’échanges scientifiques et du soutien aux Alliances et Instituts français. Nous renforcerons également cette influence par la création de 165 ETP en 2024. Le groupe Démocrate votera donc en faveur de ces crédits.

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. Vous avez raison de noter que les contributions européennes et internationales de la France continuent d’augmenter.

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. On améliore la cohérence entre la diplomatie culturelle d’influence et la réaction en cas de crise. En Algérie – et c’est peut-être ce qu’il faudrait faire en Israël, en Palestine ou en Arménie –, le corps diplomatique commence à utiliser des outils diplomatiques qui n’étaient pas considérés comme « nobles » pour faire ce qu’on doit faire et promouvoir notre image.

M. Guillaume Garot (SOC). Je salue l’augmentation des crédits du programme 105, inédite depuis 2017. On peut considérer qu’il ne s’agit que d’un rattrapage mais, quand cela va dans le bon sens, il faut le reconnaître. Ce que nous espérons, c’est qu’il ne s’agit pas que d’un soubresaut mais que l’on s’engage bien dans une action durable : c’est à cela aussi que l’on juge l’efficacité d’une politique et d’une diplomatie. Nous sommes préoccupés par la suppression du corps diplomatique : nous doutons que ce soit un gage d’efficacité.

J’aimerais dire un mot de la philosophie de nos amendements. Nous estimons que la dimension sociale de l’action de l’État doit être davantage prise en considération. Je pense au soutien aux familles d’élèves lorsque les droits de scolarité augmentent et que le périmètre des bourses reste inchangé. Nous devons aussi renforcer notre soutien aux étudiants et aux chercheurs étrangers qui viennent en France, afin de renforcer l’attractivité et l’influence de notre pays. Enfin, la diplomatie de l’alimentation et de la gastronomie n’est pas suffisamment active, alors qu’elle est utile pour faire entendre la voix de la France partout dans le monde.

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Merci de reconnaître que des évolutions positives sont intervenues depuis 2017. Je rappelle que la dotation de l’AEFE est passée de 353 millions à 450 millions d’euros depuis 2017 et que le nombre de bourses accordées aux enfants français à l’étranger augmente, alors qu’il avait chuté de manière vertigineuse entre 2012 et 2017.

S’agissant des étudiants, il y a un problème d’ordre technique et administratif. Quand nous ouvrons une autorisation d’engagement pour une bourse étudiante à l’étranger, d’un montant d’ailleurs assez faible, l’ingénierie est assurée par un autre opérateur. Depuis quelques années, nous travaillons avec Campus France pour fluidifier ce travail administratif complexe. Il ne servirait à rien d’augmenter ces crédits, tant que ce système n’est pas plus fluide.

S’agissant de la gastronomie et de la diplomatie de l’alimentation, l’opération Goût de / Good France est maintenue. Nous soutenons nos restaurateurs à l’étranger. Dans ma circonscription, Baguette Jeanette ouvre son deuxième magasin à Francfort, ce dont je suis fier. Par ailleurs, dans les écoles et les lycées français, la cantine est un outil de la diplomatie.

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. La création de 165 ETP est une bonne chose mais il faut effectivement que cette évolution se poursuive. L’engagement de financer 700 ETP supplémentaires sur les quatre années à venir a été pris et on peut espérer qu’il sera tenu.

La dimension sociale doit être prise en compte, non seulement pour nos ressortissants mais aussi pour nos agents sur place. Dans certains postes, ils ont du mal à scolariser leurs enfants parce que les frais de scolarité sont très élevés.

La diplomatie de la gastronomie est un sujet très important. Le délai d’obtention des visas peut parfois bloquer les échanges avec certains pays ; on ne peut qu’espérer qu’il soit raccourci.

Mme Stéphanie Kochert (HOR). Je salue à mon tour l’augmentation significative du budget de la mission Action extérieure de l’État, dont l’objectif premier est le réarmement de la diplomatie française, comme le chef de l’État l’annonçait en mars 2023, lors des états généraux de la diplomatie.

Cette augmentation du budget de la mission est encore plus indispensable lorsque l’on constate la multiplication des crises, la montée des tensions internationales ou le retour des logiques de confrontation entre puissances. Pour servir nos intérêts, étendre notre influence et protéger les Français dans le monde, la diplomatie doit être au niveau. Grâce à ce budget, notre action en Europe et dans le monde est renforcée. Il permettra d’augmenter les investissements qui renforceront notre sécurité commune avec nos partenaires européens et celle de nos alliés. Dans le même temps, notre soutien à l’Ukraine est pérennisé, notamment par des contributions plus importantes à l’OTAN ou au profit de la facilité européenne pour la paix.

Nous renouvelons aussi notre engagement en faveur du multilatéralisme en apportant un soutien renforcé aux différents organes des Nations Unies. La politique d’influence de la France profitera également de financements importants.

Parce que la France doit rester un acteur majeur de la francophonie, de la promotion de notre culture et de l’enseignement du français dans le monde, nous saluons la stabilité de nos subventions pour charges de service public à l’Institut français. Quant à notre diplomatie économique, elle bénéficiera également de cette mission car la France doit rester la première destination des investissements étrangers en Europe. Enfin, pour nos compatriotes établis ou de passage hors de France, nous pouvons nous féliciter des moyens supplémentaires accordés à nos services, notamment par le renforcement de l’action du centre de crise et de soutien.

Vous l’aurez compris, le groupe Horizons et apparentés votera en faveur des crédits de la mission Action extérieure de l’État.

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. L’Institut français de Paris s’est réformé depuis 2018. Il y a désormais une direction du réseau et un lien beaucoup plus direct avec les quatre-vingt-seize Instituts français dans le monde, de sorte que les moyens attribués vont réellement aider les gens sur le terrain.

M. Jean-Paul Lecoq (GDR-NUPES). Nous examinons le budget de la diplomatie française à un moment où le monde va mal. Peut-être que le désarmement de notre diplomatie nous a empêchés de voir les choses arriver.

Nous prétendons être une démocratie et nous sommes tous derrière un seul homme, qui décide seul des orientations politiques en matière diplomatique. Or le président de la République devrait être le porte-parole d’une diplomatie co-construite par le Parlement, le Gouvernement et le président lui-même.

Vous dites que ce budget marque un réarmement de la diplomatie. Il y a eu un réarmement de l’armée, grâce à une loi de programmation militaire, assortie de budgets colossaux. Là, on note la création d’un peu plus de 100 ETP : j’aurais préféré une loi de programmation du réarmement de la diplomatie sur plusieurs années, co-construite avec le président de la République et le Gouvernement, en fonction d’objectifs politiques.

On aurait pu évoquer la question des emplois de droits locaux : jusqu’à quel niveau est-ce compatible avec une œuvre diplomatique ? Certes, c’est bon pour le budget : ça coûte moins cher et ça fait travailler des gens localement, mais où placer le curseur entre les diplomates et les agents de droit local ? Combien sont payés nos diplomates ? Quelles sont leurs conditions de travail ?

Concernant le patrimoine, Bernard Kouchner voulait vendre la plupart des biens français et installer les ambassades dans de grands immeubles. Heureusement, cette politique a été interrompue mais où en est-on ? Combien faudrait-il investir pour améliorer les conditions de vie de nos agents à l’étranger ?

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Je crois effectivement qu’il vaut mieux parler de remise à niveau que de réarmement de notre diplomatie.

Certains de mes amendements concernent des thèmes que vous avez évoqués : la nécessité d’une loi de programmation et d’une participation accrue des parlementaires aux décisions importantes.

On a peu parlé du compte d’affectation spéciale 723, Opérations immobilières et entretien des bâtiments de l’État, dont les crédits augmentent et qui permet de réinvestir dans les ambassades.

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. Chaque réseau diplomatique possède des agents de droit local. Il faut évidemment veiller à ce que les fonctions un peu sensibles, comme la délivrance de visas, soient toujours supervisées par des agents français.

On ne peut tous qu’être d’accord pour que le Parlement tienne une plus grande place dans la conduite de notre diplomatie mais le processus parlementaire est parfois long et complexe. Dans certains cas, comme les opérations d’évacuation, seul le président de la République peut prendre la décision, parce qu’il faut agir dans l’urgence.

Enfin, des efforts ont déjà été faits, s’agissant de notre patrimoine immobilier, mais il faut les poursuivre car certaines de nos emprises, notamment en Afrique, ne sont plus adaptées au contexte sécuritaire.

M. Bertrand Pancher (LIOT). Les crédits dédiés à la mission Action extérieure de l’État ont augmenté de 300 millions d’euros, en hausse de 9 % par rapport à l’année précédente. Le budget total alloué à cette mission est de 3,5 milliards d’euros. On peut saluer une hausse supérieure à l’inflation, ce qui n’est pas le cas de toutes les missions du budget de l’État. L’an prochain, ces crédits devront soutenir les opérations de maintien de la paix, les négociations multilatérales, l’enseignement du français à l’étranger, l’aide sociale aux expatriés et permettre une accélération de l’instruction des demandes de visas.

Je regrette néanmoins que les conséquences de la réforme du corps diplomatique sur les compétences et la fidélisation des personnels ne soient pas abordées, surtout après qu’une logique d’économies de bouts de chandelles a beaucoup affaibli le ministère de l’Europe et des affaires étrangères et, par là même, la place de la France dans le monde. Nous nous abstiendrons sur les crédits de cette mission car le mal est encore loin d’être résorbé.

S’agissant du centre de crise et de soutien, je salue le travail réalisé pour la libération du journaliste Olivier Dubois, en mars dernier, qui était longtemps resté le dernier otage français dans le monde. La centaine d’agents du CDCS a une importance stratégique pour les opérations d’évacuation. À cet égard, l’application Ariane et le registre des Français vivant à l’étranger présentent un intérêt tout particulier. Avec au moins une opération par an – l’Afghanistan en 2021, l’Ukraine en 2022, le Soudan et le Niger en 2023 –, l’utilité et l’efficacité de ce centre ne sont plus à démontrer. Il est actuellement mobilisé au Moyen-Orient.

On a beaucoup parlé de la nécessité d’évacuer nos compatriotes présents en Israël mais beaucoup moins des éventuels Français présents en Palestine. Un plan d’évacuation de ces derniers est-il prévu ? Des agents de droit local palestinien pourraient-ils être concernés par une évacuation au titre de la jurisprudence de Kaboul ? Je pense notamment au personnel de l’Institut français qui est le seul centre étranger présent à Gaza.

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. La suppression du corps diplomatique était au cœur de mon rapport l’année dernière. C’est une réforme dont on ne pourra réellement apprécier les conséquences que dans quelques années.

Concernant les opérations d’évacuation en Palestine, nous avons auditionné les représentants du CDCS avant le début du conflit. Dans la mesure où la France a, dans ce domaine, une expertise unique en Europe, on peut penser que le CDCS sera de nouveau mobilisé pour évacuer des ressortissants français, mais aussi d’autres pays, dans les territoires palestiniens et en Israël.

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. En 2019, pour un précédent rapport, je suis allé en Israël et en Palestine. J’ai voulu me rendre à l’Institut français de Gaza mais les autorités israéliennes m’en ont empêché pour de prétendues raisons de sécurité. Le fait que nous ayons un Institut français à Gaza est un acte de diplomatie très fort.

Je suis tout à fait d’accord avec votre analyse de la jurisprudence Kaboul. Être un bon employeur local, ce n’est pas uniquement bien pour les familles concernées, c’est un acte diplomatique. Par exemple, si nous aidons les enfants du chauffeur de l’ambassadeur à aller au lycée français, ce n’est pas bon uniquement pour eux, c’est un acte diplomatique consistant à dire que notre lycée français est bien pour tout le monde.

Je rêve d’un lycée français à Gaza, comme je rêve d’un lycée français dans la plaine de la Bekaa. Nous avons développé un nouveau lycée français à Oran malgré nos difficultés avec l’État algérien. Ces décisions ont une très haute valeur diplomatique.

M. le président Jean-Louis Bourlanges. Nous en venons à présent aux questions individuelles des collègues inscrits à cet effet.

M. Jérôme Buisson (RN). Monsieur le président, vous avez dit vous-même à la ministre de l’Europe et des affaires étrangères, à propos des ressources humaines de son ministère, que nous étions « au-delà de l’os ».

Bien que nous la saluions, la hausse des moyens prévue pour 2024 demeure insuffisante au regard des années de disette budgétaire qu’a connues notre diplomatie. Cette hausse de 4,5 % est à relativiser, dans la mesure où l’inflation pourrait être de 2,8 % en 2024. Cette hausse, qui reste modeste, pourrait donc devenir un trompe-l’œil. Croyez-vous réellement que ce budget en hausse modeste pourra permettre le réarmement promis de notre diplomatie ?

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. Certes, l’augmentation pourrait être supérieure mais il faut tout de même saluer la création de 165 ETP. En outre, il serait difficile d’en créer beaucoup plus en un seul exercice budgétaire car le ministère doit organiser des campagnes de recrutement et des concours. Il ne serait dans l’intérêt de personne de créer tout d’un coup trop de postes. Il vaut mieux créer chaque année une centaine d’ETP pour que, d’ici à cinq ans, ce ministère soit vraiment réarmé.

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Je vous invite à examiner ce budget dans le détail et à aller au-delà des moyennes : les Alliances françaises voient leurs crédits augmenter de 23 %. Que la dotation de l’AEFE soit passée à 450 millions d’euros et celle des bourses à 120 millions sont des éléments qui marquent les gens et le terrain.

Mme Marine Hamelet (RN). Je souhaite revenir sur la hausse importante – 9 % – des crédits alloués aux bourses pour les étudiants étrangers en France et appeler votre attention sur la formation des médecins étrangers. Présidente du groupe d’amitié France-République centrafricaine, j’ai échangé à maintes reprises avec l’ambassadeur. Quand on sait qu’un médecin africain perçoit environ 10 000 euros par an et que la rémunération annuelle moyenne d’un médecin en France est de 80 000 euros, on se demande ce qui pourrait pousser ces médecins à repartir dans leur pays. N’y a-t-il pas une hypocrisie à profiter d’une fuite des cerveaux ? Nous pensons que l’élite africaine doit retourner et rester en Afrique. C’est la meilleure aide qu’on puisse lui offrir. Quelle est la répartition de ces bourses par continent ?

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Je crois que vous faites une confusion : ces bourses servent à développer notre armement académique ; elles ne financent pas la formation continue de professionnels.

Pour inscrire l’université française dans la science mondiale, nous avons besoin de passer de 400 000 à 500 000 étudiants étrangers. Or, il n’y a que 5 000 bourses pour études longues : tous les autres viennent avec leurs propres moyens. Si un étudiant ou un membre de l’élite d’un pays veut venir se former à la médecine en France, il paie. Les bourses sont du ressort de l’établissement public Campus France et des postes diplomatiques qui examinent les candidatures. Nous avons besoin de réarmer cette action. Tous les députés n’ont pas le même avis sur les rapports entre le politique et l’académique. Je suis de ceux qui pensent que le monde académique doit être libre et qu’il est sain qu’il y ait des conflits dans le monde académique. Ce n’est pas à nous de trancher les débats ; c’est à nous de les écouter. Ces bourses sont un accompagnement lié à une politique de l’ambassade dans certains pays et ne doivent pas être confondues avec la stratégie Bienvenue en France. L’immense majorité des gens paient leurs études.

*

Article 35 et état B : Crédits du budget général

M. le président Jean-Louis Bourlanges. Notre commission a été saisie de cinquante-quatre amendements. Les amendements II-AE85 et II-AE86 ont été déclarés irrecevables au titre de l’article 40 de la Constitution.

Amendement II-AE93 de M. Jérôme Buisson 

M. Jérôme Buisson (RN). La Facilité européenne pour la paix (FEP) finance des opérations militaires communes aux pays membres de l’Union européenne (UE) et des projets industriels de défense développés en commun. Sa dotation augmente de façon constante. En 2024, elle coûtera aux Français près de 150 millions d’euros. Pourtant, les États membres de l’UE ont des intérêts divergents. Leurs coopérations dans l’industrie de défense piétinent.

Au Rassemblement national, nous dressons le constat suivant : la défense nationale relève de l’intime pour les nations. Nous proposons de baisser de 100 millions d’euros la contribution française à la FEP, qui nous semble être une chimère dispendieuse.

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. Avis défavorable. La FEP est montée en puissance en raison de la guerre en Ukraine et du soutien de l’UE aux Ukrainiens.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE89 de Mme Laurence Robert-Dehault 

Mme Laurence Robert-Dehault (RN). Le projet de loi de finances pour 2024 accorde une augmentation de crédits de 13 millions d’euros à la sous-action Bourses de l’action 04 Enseignement supérieur et recherche du programme 185 Diplomatie culturelle et d’influence. Ces crédits sont destinés à renforcer l’attractivité de la France dans les domaines universitaires et de la recherche, et à permettre de mobiliser des financements dans le cadre de partenariats locaux et d’échanges scientifiques.

Nous saluons ce modèle de coopération scientifique et culturel, basé sur l’échange. Toutefois, d’après les documents budgétaires, seule une partie de cette augmentation semble justifiée. Elle est notamment due à un chantier technique d’envergure de modernisation numérique, dont le coût est d’environ 1,5 million d’euros.

Cet amendement d’appel vise à obtenir des éclaircissements sur la vocation des crédits, dont l’augmentation n’est pas justifiée.

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Avis défavorable.

Cette petite augmentation, de 10 à 13 millions, vise à financer la réforme informatique réussie de Campus France, le développement du Campus franco-indien et le nouveau Campus franco-australien. Un travail préalable d’accompagnement en administration centrale est nécessaire avant la mise en œuvre sur le terrain, à l’exemple de ce qui a été fait pour le Campus franco-sénégalais, qui fonctionne.

Ces crédits sont indispensables pour continuer à développer la coopération scientifique.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE87 de Mme Laurence Robert-Dehault

Mme Laurence Robert-Dehault (RN). La situation des étudiants français est précaire : 36 % d’entre eux déclarent sauter des repas régulièrement, un étudiant sur quatre éprouve des difficultés à se loger, notamment en raison d’un parc immobilier de logement universitaire insuffisant, et un quart des étudiantes sont contraintes de renoncer au moins occasionnellement à l’achat de protections hygiéniques, faute d’argent.

Cette situation préoccupante est aggravée par l’inflation persistante sur les produits alimentaires et de première nécessité. À la publication du projet de loi de finances pour 2024, le président de France Universités a sonné l’alarme devant la commission des affaires culturelles sur la situation de l’enseignement supérieur en France, estimant que le budget 2024 ne parviendra pas à compenser les déficits des universités dus aux revalorisations de salaires, ni la hausse des charges due à l’inflation. Le président de l’université de Bordeaux s’est également exprimé en ce sens. Il s’inquiète de la pression financière qui pèse sur les universités.

Le sous-financement des universités françaises risque de mettre à mal le principe d’autonomie des universités et pourrait se traduire par une réduction du nombre d’étudiants accueillis. Dans ce contexte, le budget devrait donner la priorité à l’amélioration des conditions de vie étudiante en France avant de revaloriser les bourses destinées aux étudiants étrangers. L’amendement vise à revenir sur les 5,6 millions d’euros supplémentaires alloués à ces bourses.

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Avis défavorable. Votre amendement n’est pas construit comme vous l’avez dit. Il ne se borne pas à réattribuer les crédits destinés aux bourses mais il les réduit.

Par ailleurs, attribuer des bourses à 5 000 étudiants, c’est régler le problème au moins pour eux. Il ne faut pas confondre deux politiques publiques très différentes, celle visant à l’amélioration générale des conditions étudiantes et celle visant à accompagner des étudiants d’excellence, ce qui renforce les universités. C’est un coût effacé pour elles, car sans ces bourses, des milliers d’étudiants ne vivraient pas dans de bonnes conditions. Techniquement, le sens de cet amendement m’échappe.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE88 de Mme Laurence Robert-Dehault

Mme Laurence Robert-Dehault (RN). Les dernières décennies sont marquées par l’augmentation des manifestations antifrançaises en Afrique centrale et au Sahel. Les narratifs antifrançais dans le Sahel finissent par déborder et se répandre dans le reste de l’Afrique francophone, notamment au Gabon, en République démocratique du Congo ou en Côte d’Ivoire.

Malgré ces bouleversements, l’action française est encore présente parmi nos partenaires de l’Afrique francophone. Nous continuons à participer à leur formation et à leur encadrement dans les domaines de la sécurité et de la défense, dans le cadre des écoles nationales à vocation régionale (ENVR), notamment au Sénégal, en Côte d’Ivoire, au Cameroun et au Gabon. Des formations y sont dispensées à leurs militaires dans les domaines du maintien de la paix, de l’État de droit, de la sécurité maritime et de la protection civile.

Par ailleurs, des experts sont mis à disposition du ministère des armées pour faire bénéficier nos partenaires des savoir-faire français en matière de lutte contre le terrorisme, de lutte contre le narcotrafic, de renforcement de la police aux frontières et de maintien de l’ordre public. La maîtrise de ces domaines d’intervention est indispensable à nos partenaires pour leur permettre d’atteindre et de conserver la stabilité politique.

Cet amendement vise à renforcer les crédits alloués à cette politique, en affectant 3 millions d’euros à la sous-action Formations en sécurité-défense-développement de l’action 05 Coopération de sécurité et de défense du programme 105 Action de la France en Europe et dans le monde et 500 000 euros à la sous-action Ingénierie et expertise sécurité-défense-développement, et en réduisant les crédits de la sous-action 03 Bourses de l’action 04 Enseignement supérieur et recherche du programme 185 Diplomatie culturelle et d’influence, dont les crédits augmentent de 5,6 millions d’euros.

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. Avis défavorable. Le financement des bourses pour étudiants étrangers est un outil d’influence pour notre pays. Par ailleurs, les politiques de formation destinées aux pays africains ne sont pas sous-financées.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE44 de M. Frédéric Petit

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Je souhaite que l’organisation de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE) soit davantage structurée autour de ses deux missions principales, qui sont bien distinctes.

La première est la gestion quotidienne d’une soixantaine de lycées qui sont des établissements en gestion directe (EGD). S’il faut déboucher des toilettes au lycée français de Tunis, la décision est prise place de Catalogne, à Paris.

Sa deuxième mission est de développer le réseau, promouvoir l’enseignement du français, contrôler les lycées homologués et ceux qui ont vocation à l’être, contrôler le LabelFrancÉducation et développer le dispositif Français langue maternelle (Flam). Ce travail de réseau à l’échelle mondiale exige des compétences distinctes de celles exigées par la première mission.

L’amendement vise à faire en sorte que le Parlement ait une vision de la répartition de la subvention qu’il attribue, afin que celle-ci ne soit plus une boîte noire, dotée cette année de 450 millions d’euros. Pour ce faire, je transférer ces crédits au sein du programme 105 Action de la France en Europe et dans le monde, où le Gouvernement pourra créer une action dédiée à l’administration des EGD par l’AEFE et dotée de 310 millions, le reste de la dotation restant inscrit au programme 185.

Ainsi, lorsque je ferai mon travail de contrôle, je pourrai identifier, de même que je suis le financement des aides à la scolarité des élèves français du programme 151 Français à l’étranger et affaires consulaires, qui sont gérées par l’AEFE, ce que celle-ci a donné pour gérer les EGD, ce qu’elle a donné pour le réseau et ce qu’elle a donné pour les bourses.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AE52 de Mme Nadège Abomangoli

Mme Ersilia Soudais (LFI-NUPES). Notre groupe souhaite augmenter les moyens alloués à la rénovation thermique des bâtiments de l’État à l’étranger. Ni les ambassades, ni les consulats, ni les bâtiments de l’AEFE ne bénéficient d’une politique ambitieuse de rénovation thermique, alors que le plan de relance pour la rénovation thermique des bâtiments publics sur le territoire national dispose d’une enveloppe de près de 4 milliards d’euros.

Cette question est d’autant plus cruciale que certains de ces bâtiments sont situés dans des pays particulièrement affectés par de fortes hausses des températures, dues au réchauffement climatique. Cette politique est d’autant plus impérieuse que certains de ces bâtiments accueillent des élèves. Le Gouvernement a la mission de leur garantir des conditions d’étude optimales.

La direction des immeubles et de la logistique (DIL) du ministère de l’Europe et des affaires étrangères a estimé les besoins à 15 millions d’euros. Nous abondons en ce sens.

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. Avis défavorable. Une enveloppe budgétaire est consacrée à la rénovation lourde de nos emprises dans les postes diplomatiques, notamment à la rénovation énergétique des bâtiments. Il n’est pas nécessaire de l’augmenter.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE57 de Mme Nadège Abomangoli

Mme Nadège Abomangoli (LFI-NUPES). Il s’agit de soulever la question du poids de la France dans de nombreuses organisations internationales. La France recule dans le classement des principaux contributeurs, ce qui entraîne une perte d’influence.

Pourtant les conflits en Ukraine, en Palestine et en Israël témoignent de la nécessité d’une diplomatie au service de la paix. Pour construire la paix, il faut se doter de moyens. L’ONU est la seule organisation universelle reconnaissant l’égalité entre les États et les peuples. Elle devrait être la seule à même de résoudre les conflits. Notre groupe appelle à un renforcement du financement de l’ONU et de ses agences pour permettre la construction de solutions au service de la paix, fréquemment menacée.

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. Avis défavorable. La diminution de la contribution obligatoire de la France est due à la diminution de son poids relatif en matière démographique et économique. Les contributions volontaires sont en légère augmentation. L’amendement est donc en partie satisfait.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE66 de M. Alain David

M. Alain David (SOC). Cet amendement vise à ouvrir les crédits prévus dans le projet de loi de finances pour 2024 au titre de la FEP à l’Arménie et à la gestion de crise dans ce pays, dans la mesure où la FEP a vocation à aider potentiellement tout pays sur la scène internationale. Il s’agit de placer le Gouvernement, qui a proposé une telle mesure à l’échelon européen, face à ses responsabilités.

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. Avis défavorable. L’attribution des crédits de la FEP est décidée à l’échelon européen et dépasse le cadre de notre commission, dont le soutien à l’Arménie n’est pas en cause.

M. Jean-Louis Bourlanges (Dem). J’ai exprimé le souhait que l’Arménie bénéficie de la FEP.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE94 de M. Jérôme Buisson

M. Jérôme Buisson (RN). Notre pays fait face à une offensive informationnelle sur le continent africain, notamment au Mali, au Burkina Faso et au Niger. Cette opération de dénigrement de la France par des narratifs fallacieux a des effets concrets et dévastateurs sur nos relations avec les pays africains.

Le budget prévoit une dotation de 3 millions d’euros pour la constitution d’un réseau de veilleurs en poste permettant d’assurer une veille linguistique globale, afin de faire face à la menace que constitue la désinformation. Nous proposons de renforcer les moyens alloués à la lutte informationnelle en abondant cette dotation de 5 millions supplémentaires.

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. Les crédits visés augmentent de façon significative, passant de 2,8 millions à 5,3 millions d’euros, ce qui devrait apaiser vos inquiétudes.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE70 de M. Alain David

M. Alain David (SOC). Cet amendement vise à alimenter les crédits du ministère de l’Europe et des affaires étrangères alloués à la coopération de sécurité et de défense, afin de faire face au nouveau contexte stratégique. Leur renforcement s’inscrit directement dans l’évolution de la stratégie française de redéploiement de notre dispositif militaire et de notre présence en Afrique, qui privilégie désormais des actions de soutien et de formation, visant notamment à maintenir des relations de proximité et de confiance avec les États de ce continent avec lesquels la France entretient une longue relation, et à tisser des liens avec de nouveaux partenaires.

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. Des actions sont prévues dans le domaine de la coopération de sécurité et de défense avec les pays africains, notamment le projet de formation Afrique autrement, financé par le budget 2024.

L’amendement est satisfait. Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE74 de M. Guillaume Garot

M. Guillaume Garot (SOC). Il s’agit de renforcer la capacité d’action de la France face à la désinformation. Nous proposons d’investir internet et les réseaux sociaux de façon plus affirmée et d’en faire une priorité de l’action de notre pays dans le monde.

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. Il importe d’être présents et actifs sur les réseaux sociaux. L’actualité récente nous a rappelé que nous ne le sommes pas assez. Le budget 2024 prévoit la création de 25 ETP dédiés à la communication stratégique. La création d’une cellule de veille et de production de contenus 24 heures sur 24 et sept jours sur sept nous permettra d’être très réactifs, s’agissant notamment de l’Afrique.

L’amendement est en partie satisfait. Demande de retrait ou avis défavorable.

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Nous avons examiné la semaine dernière le budget en hausse de France Media Monde (FMM), qui travaille énormément sur ces sujets, de façon professionnelle, et assure des formations à la désinformation au travers de sa filiale Canal France International (CFI), opérateur de la coopération dans le domaine des médias.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE63 de Mme Nadège Abomangoli

Mme Nathalie Oziol (LFI-NUPES). Nous souhaitons augmenter la part des EGD de l’AEFE. Nous refusons, dans l’éducation, la mise en concurrence des secteurs privé et public, qui procède d’une vision néfaste de l’enseignement, à rebours de la vision républicaine. Le secteur privé vise toujours à tirer profit de son activité. À nos yeux, cette philosophie et ce mode de fonctionnement sont en contradiction avec les principes qui devraient régir nos politiques éducatives.

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Les EGD ne sont pas en concurrence avec les établissements en gestion locale. À Bucarest, dans ma circonscription, les deux établissements sont homologués par le ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse et ils ne sont nullement en concurrence.

Ce que vous appelez « privé » relève du monde associatif, des organisations non gouvernementales (ONG) et de l’État local. Les lycées français de Tel Aviv et de Berlin sont des établissements publics de l’État local. Les salariés qui travaillent dans ces établissements ne sont pas des gens du CAC40. La qualité de l’enseignement est identique dans les lycées français en gestion locale, qui représentent 80 % du réseau, et les EGD. Les écolages y sont en moyenne moins élevés en raison de charges administratives moindres, surtout dans les pays pauvres comme Madagascar.

Par ailleurs, ce que vous proposez de faire est juridiquement impossible. Comment nationaliser des structures locales de pays tiers, par exemple le lycée français de Budapest, co-géré par les parents dans le cadre d’une convention conclue avec l’État hongrois ? Votre amendement est surréaliste.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE64 de Mme Nadège Abomangoli

Mme Nathalie Oziol (LFI-NUPES). Il s’agit ici de résidentialiser les titulaires non-résidents des établissements de l’AEFE et de mettre fin à la généralisation des contrats de droit local.

Ces contrats précarisent énormément les professeurs. Leur salaire de contractuel est souvent très insuffisant, notamment dans des pays en voie de développement. De plus, ils n’ont droit à aucun avancement. La généralisation de ces contrats va à l’encontre des principes qui devraient guider notre politique éducative. Elle s’inscrit dans une logique néolibérale de destruction du statut de fonctionnaire.

À la France insoumise, nous pensons que ces personnels doivent être fonctionnaires et bénéficier des droits afférents à la fonction publique.

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Selon une confusion relevée précédemment, vous voulez que tous les enseignants du réseau soient fonctionnaires français. Le réseau compte 40 000 enseignants. Tous sont agréés par le ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse et exercent leur activité dans un cadre homologué.

Seuls 5 000 relèvent de la situation dont vous parlez. Tous sont très heureux. Ils ne sont pas contractuels de l’AEFE mais fonctionnaires, par exemple du Land de Berlin ou de l’État israélien.

Avis défavorable à cet amendement surréaliste.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE72 de M. Guillaume Garot

M. Guillaume Garot (SOC). Cet amendement vise à doubler l’augmentation des crédits alloués aux bourses d’enseignement et de recherche des étudiants étrangers. S’agissant d’un formidable outil d’influence pour notre pays, favorable à son rayonnement, nous considérons ces 6 millions d’euros moins comme une dépense que comme un investissement nécessaire.

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. L’amendement aurait pour effet de créer des crédits non utilisés. L’augmentation de 6 millions d’euros prévue au budget est un bel effort. La doubler ne servirait à rien, parce que la tuyauterie ne suivrait pas et nous aurions 6 millions non utilisés à la fin de l’année prochaine.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE73 de M. Olivier Faure

M. Alain David (SOC). Cet amendement vise à doubler les dotations pour opérations aux établissements de l’Institut français et aux autres établissements à autonomie financière (EAF). Il prévoit d’abonder les fonds destinés à ces institutions à hauteur de 4 millions d’euros.

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Les dotations visées augmentent de 23 %. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE67 de M. Guillaume Garot

M. Guillaume Garot (SOC). Créer en Ukraine, à Kiev, un institut culturel franco-allemand serait un signe fort adressé au peuple ukrainien pour construire un avenir en commun et dialoguer sur le plan culturel. Il s’agirait d’un investissement utile et approprié.

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Cet amendement me touche mais il est inutile. À Kiev, un Institut français vient de rouvrir. Il fonctionne très bien malgré la guerre. Il collabore avec un Institut Goethe, qui lui aussi fonctionne très bien.

Un institut franco-allemand, au sens du traité d’Aix-la-Chapelle, n’est rien d’autre qu’un Institut français et un Institut Goethe travaillant ensemble. Certes, il faut prolonger, approfondir, en faire encore plus, comme toujours s’agissant du franco-allemand qui s’exporte. Nous suivons la question à l’Assemblée parlementaire franco-allemande (APFA). L’outil budgétaire n’est pas le bon pour aller aussi loin que nous le souhaitons.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE49 de Mme Nadège Abomangoli

Mme Ersilia Soudais (LFI-NUPES). Notre groupe souhaite revenir sur la décision funeste du Gouvernement de mettre fin aux politiques de soutien aux artistes maliens, burkinabés et nigériens.

Cette décision fait honte à notre diplomatie. Les artistes et autres populations civiles du Mali, du Niger et du Burkina Faso ne sont pas comptables des conflits entre leurs gouvernements de fait et le gouvernement français. Par son action, le Gouvernement a donné raison aux discours d’hostilité envers la France car il fait le choix de rompre le dialogue et d’appliquer des sanctions contre-productives à l’encontre des acteurs, qui paient un lourd tribut à l’instabilité démocratique de leur État.

L’ingérence dans les programmations culturelles a-t-elle jamais produit quelque effet viable et pérenne ? Les milieux culturels ne peuvent être soumis aux alliances de circonstance de la France. L’intérêt général humain doit demeurer notre principale boussole dans la définition de notre politique étrangère.

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Si quelque chose fait honte, c’est la répétition de ces erreurs et de ces mensonges au sein du Parlement. Rien de ce que vous dites n’est vrai. Parler d’ingérence est une mécompréhension de ce que ces financements apportent. Les Instituts français ne font pas d’ingérence dans les milieux culturels locaux. Prétendre le contraire est absurde.

Les artistes maliens, les artistes nigériens et les artistes algériens – j’en ai rencontrés – sont éligibles à toutes nos aides, à la restriction près que nous ne pouvons pas délivrer des visas dans une ambassade caillassée. Ceux qui en ont un peuvent venir. Ils sont soutenus, sous les radars, par des diplomates qui prennent des risques et font face avec brio.

Que vous répétiez ces mensonges depuis deux mois me fait honte. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE71 de M. Alain David

M. Alain David (SOC). Cet amendement vise à encourager l’enseignement du français à l’étranger et le développement de la francophonie dans toutes ses dimensions : politique, culturelle, scientifique et linguistique. Il vise à augmenter les crédits de manière suffisante pour que l’objectif de doublement des effectifs d’élèves scolarisés en langue française d’ici à 2030 soit effectivement atteint.

M. Frédéric Petit, rapporteur. Demande de retrait ou avis défavorable. Deux actions, dont l’amendement tient insuffisamment compte, bénéficient de crédits largement supérieurs à ceux que vous proposez. Des crédits sont fléchés vers l’apprentissage du français dans les Instituts français, à hauteur de 1 million d’euros, vers les Alliances françaises, à hauteur de 1,5 million d’euros, vers les interventions en administration centrale pour aider à l’apprentissage du français par les administrations locales, à hauteur de 5 millions d’euros, et vers l’AEFE, à hauteur de 8 millions d’euros.

M. Arnaud Le Gall (LFI-NUPES).  Nous avons des échanges de mails qui disent le contraire.

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Des échanges de mails ne constituent pas des mesures de l’État français.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE62 de Mme Nadège Abomangoli

Mme Nadège Abomangoli (LFI-NUPES). Nous souhaitons élargir l’accès à la protection universelle maladie aux Français de l’étranger. Nos ressortissants habitent souvent des pays ne disposant pas de sécurité sociale universelle ou dans lesquels l’accès aux services de santé de qualité est réservé à une frange privilégiée de la société car il faut avancer des frais élevés. Certains sont confrontés à une précarité grandissante en raison de la crise inflationniste.

Les ressortissants français à l’étranger n’ont pas tous des revenus élevés, contrairement à une image d’Épinal répandue. Il est de notre responsabilité de garantir un accès à la protection de santé à tous les Français.

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. Nous sommes conscients des difficultés rencontrées par certains Français vivant à l’étranger en matière de soins. Les 100 millions d’euros prévus par cet amendement sont très insuffisants pour financer la mesure proposée.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE69 de M. Olivier Faure

M. Guillaume Garot (SOC). Il s’agit ici d’abonder le budget d’aide à la scolarité des enfants français inscrits dans les établissements de l’AEFE. L’inflation est mondiale, le besoin d’augmenter les bourses aussi, d’autant que le taux de change est défavorable et que certains frais de scolarité augmentent de façon significative. L’augmentation de crédits proposée, qui vise à accompagner les familles en difficulté, est donc pleinement justifiée.

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. Dans le projet de loi de finances pour 2024, les crédits visés sont en hausse de 13,6 millions d’euros, ce qui représente un effort important. Il n’est pas nécessaire de les augmenter, d’autant qu’ils ne sont pas intégralement exécutés.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE59 de Mme Nadège Abomangoli

Mme Nadège Abomangoli (LFI-NUPES). Cet amendement vise à augmenter les bourses scolaires pour favoriser l’accès des élèves français au réseau AEFE, dans un contexte de forte inflation et de hausse des frais de scolarité dans de nombreux établissements.

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Je rends hommage aux élus locaux de la République française dans les pays étrangers, qui siègent, dans cette période, au sein des commissions d’attribution de bourses rattachées aux services consulaires.

L’amendement aurait pour effet de créer de la soulte, c’est-à-dire des crédits inutilisés. En 2024, les crédits visés s’élèveront au niveau historique de 118 millions d’euros, soit près de 30 millions de plus que lorsque nous sommes arrivés aux affaires. Nous avons utilisé 115 millions d’euros cette année. Faire correspondre les principes de répartition des bourses et les montants affectés est un travail de dentellerie.

Avis défavorable à cet amendement inutile.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE47 de Mme Nadège Abomangoli

Mme Nadège Abomangoli (LFI-NUPES). Cet amendement vise à revaloriser les aides accordées par les conseils consulaires pour la protection et l’action sociale (CCPAS).

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. Avis défavorable. De nombreuses demandes d’aide ont été déposées pendant la crise de la Covid. Depuis quelques mois, leur nombre diminue légèrement. Le montant prévu par le projet de loi de finances pour 2024 est suffisant.

La commission rejette l’amendement

Amendement II-AE48 de Mme Nadège Abomangoli

Mme Nadège Abomangoli (LFI-NUPES).  Nous voulons mettre fin à ce que nous considérons comme une anomalie dans la délivrance de l’allocation aux adultes handicapés (AAH). Les CCPAS demandent un taux d’incapacité de 80 % pour en accorder le bénéfice, alors que, dans l’Hexagone, ce taux peut être de 50 % si le handicap empêche de travailler suffisamment.

Nous y voyons une forme de rupture d’égalité entre les citoyens, selon qu’ils vivent à l’étranger ou non, et un refus de prise en compte du handicap, alors même que la détection du handicap fait des progrès et que nous assistons, depuis plusieurs années, à une augmentation des cas de maladies chroniques susceptibles de provoquer des handicaps. Il convient de rectifier cette inégalité dans la délivrance de l’AAH.

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. Certes, les modalités d’attribution de l’AAH varient entre les Français vivant sur le territoire national et ceux vivant à l’étranger. La mesure proposée provoquerait un surcoût considérable, que le programme 151 ne peut absorber.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE51 de Mme Nadège Abomangoli

M. Carlos Martens Bilongo (LFI-NUPES). Nous souhaitons revenir sur le désinvestissement de l’État du financement du dispositif d’aide d’accès à la couverture santé des caisses des Français de l’étranger (CFE). En 2012, l’État en finançait 50 % ; il en finance 10 % aujourd’hui.

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. Les CFE disposent de réserves qui leur permettent d’absorber cette charge. Par ailleurs, elles travaillent à une revalorisation tarifaire visant à augmenter leurs ressources propres. Les subventions de l’État ne sont qu’une partie de leur budget, la majeure partie étant constituée des cotisations des adhérents.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE61 de Mme Nadège Abomangoli

Mme Ersilia Soudais (LFI-NUPES). Nul ne peut ignorer que le contexte inflationniste mondial encouragé par les pratiques spéculatives plonge nos compatriotes dans une grande précarité économique. Parmi les plus vulnérables, près de 4 000 personnes à très faibles revenus, âgées de plus de 65 ans ou en situation de handicap, ont bénéficié des aides versées par les CCPAS.

Cette enveloppe, qui permet de verser des aides mensuelles ou ponctuelles à nos compatriotes en difficulté, parmi lesquels on compte des enfants en détresse, est insuffisante. Le contexte inflationniste appelle un effort de solidarité nationale redoublé. Seule une hausse substantielle de cette enveloppe permettra de mieux soutenir nos compatriotes les plus vulnérables.

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. Avis défavorable. Pendant la crise de la Covid, les demandes ont été nombreuses. Leur nombre ayant diminué, le budget alloué aux CCPAS est suffisant.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE68 de M. Olivier Faure

M. Alain David (SOC). Cet amendement vise à augmenter les crédits de l’action sociale des CCPAS en faveur de nos compatriotes les plus démunis vivant à l’étranger. Cette enveloppe permet de verser des aides mensuelles à nos compatriotes à très faibles revenus âgés de plus de 65 ans ou handicapés.

Suivant l’avis des rapporteurs pour avis, la commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE50 de Mme Nadège Abomangoli

Mme Nadège Abomangoli (LFI-NUPES). Par le biais de cet amendement d’appel, nous souhaitons clarifier notre modèle de prise en charge des frais des consuls honoraires, qui assurent des missions de service public permettant le bon fonctionnement de notre réseau consulaire. Ils ne sont pas rémunérés mais les frais inhérents à leur mission sont pris en charge par l’État.

Ce modèle soulève des difficultés. En raison des retards de remboursement, les consuls honoraires sont souvent contraints d’avancer les sommes sur leurs deniers personnels. Au Laos, un consul honoraire m’a dit que ses billets de train ne lui sont pas toujours remboursés. D’autres États, comme les Pays-Bas, ont choisi un modèle d’indemnité forfaitaire pour éviter de telles avances. Nous souhaitons que des pistes de réforme soient étudiées.

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Dans le réarmement et la réorganisation de nos services consulaires, le statut de consul honoraire est une zone grise. J’en connais qui sont ravis de payer de leur poche et agissent pour leur influence personnelle. Nous utilisons mal les consuls honoraires. J’émets un avis défavorable à cet amendement d’appel, dont l’aspect financier est anecdotique, mais je suis favorable à l’ouverture d’une réflexion sur la réorganisation de nos services consulaires.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE53 de Mme Nadège Abomangoli

Mme Ersilia Soudais (LFI-NUPES). Nous souhaitons donner l’alarme sur le fonctionnement du traitement des visas, dont une part belle est attribuée aux prestataires privés. Non rémunérés par les consulats, ils le sont directement par les demandeurs, par le biais de frais de service qui s’ajoutent aux frais de visa.

Non seulement cette politique d’externalisation affecte directement les usagers, en leur demandant d’assumer des charges supplémentaires, mais elle met dans la main du privé les données personnelles de millions d’usagers, ce qui est totalement irresponsable. Les missions de service public doivent être assurées par le service public.

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. Les prestataires privés sont efficaces. Les problèmes de délai se posent surtout dans les consulats.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement

M. le président Jean-Louis Bourlanges. Nous allons passer au vote sur les crédits de la mission budgétaire Action extérieure de l’Etat. J’invite les rapporteurs à nous rappeler leur avis.

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. J’émets un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Action extérieure de l’Etat.

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. Pour ma part, je m’abstiendrai.

La commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Action extérieure de l’État modifiés.

Article 38 et état G : Objectifs et indicateurs de performance

Amendement II-AE97 de M. Mansour Kamardine

M. Michel Herbillon (LR). Il s’agit, par cet amendement, d’obtenir la reconnaissance internationale de l’appartenance de Mayotte à la France. Cet objectif, me semble-t-il, peut nous réunir.

L’amendement II-AE97 vise à créer un indicateur de performance permettant de connaître l’état de la reconnaissance internationale de la souveraineté de la France sur Mayotte et son évolution, notamment par les États membres de l’Union africaine (UA), et d’adapter et d’améliorer en conséquence l’efficience de l’action extérieure portée par la diplomatie française.

L’indicateur donnerait, au 1er janvier 2024 et selon une fréquence annuelle, sur la base des données du ministère de l’Europe et des affaires étrangères, le nombre de pays membres de l’UA ayant contracté avec la République française, au niveau étatique ou infra-étatique, des conventions ou des accords de coopération relatifs à Mayotte.

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. Avis favorable. L’amendement permet d’exprimer notre soutien à Mayotte, dans la continuité de l’opération lancée sur l’île par le ministre de l’intérieur il y a quelques semaines.

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Je suis très favorable à la réflexion sur les indicateurs, qui est proprement un travail de parlementaire et qui nous permet de travailler de façon plus rapide et plus systématique sur les budgets.

Sur l’amendement, je m’abstiens, faute d’en saisir l’implication concrète.

M. Vincent Ledoux (RE). Le groupe Renaissance ne votera pas l’amendement.

M. Michel Herbillon (LR). Pour ma part et au nom de M. Kamardine, j’aimerais que nos collègues du groupe Renaissance expliquent leur vote, qui est très surprenant compte tenu de l’engagement fort et clair du Gouvernement, notamment du ministre de l’intérieur, envers Mayotte. S’agissant du sujet capital de la reconnaissance internationale de l’appartenance de Mayotte à la République française, je regrette que le groupe majoritaire de la majorité n’exprime pas son point de vue.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE58 de Mme Nadège Abomangoli

Mme Nadège Abomangoli (LFI-NUPES). Cet amendement vise à ajouter, parmi les objectifs de l’action Accueil des élèves français du réseau AEFE, celui de favoriser l’inclusion des élèves en situation de handicap et, pour ce faire, l’assortit de l’indicateur des parts d’heures d’accompagnement attribuées.

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Cet amendement peut être retravaillé en vue de l’examen du texte en séance publique.

L’AEFE inclut un observatoire pour les élèves à besoins éducatifs particuliers (OBEP), auquel contribuent des accompagnants des enfants en situation de handicap (AESH) et les parents. Cet énorme travail est ponctué de réunions mensuelles partout dans le monde. Nous sommes le seul réseau international à le faire et nous le faisons très bien. L’activité de l’OBEP est suivie par des indicateurs tels que le nombre d’élèves et d’AESH, qui permet une amélioration constante de son action.

Peut-être pourrions-nous faire en sorte, par voie d’amendement, que ces indicateurs cantonnés au budget de l’AEFE en soient extraits à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances. Par ailleurs, l’amendement mentionne les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), qui n’ont rien à voir avec l’OBEP.

Demande de retrait ou avis défavorable.

Mme Nadège Abomangoli (LFI-NUPES).  Je le maintiens.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’article 38 non modifié.

Après l’article 49 :

Amendement II-AE45 de M. Frédéric Petit

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Cet amendement, que je présente régulièrement, vise à préciser la définition des EGD par l’AEFE, en y incluant les ressources des familles, oubliées par la loi il y a trente ans mais qui constituent l’essentiel des ressources, et en les rassemblant au sein d’un comité d’administration des EGD.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AE46 de M. Frédéric Petit

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Si nous ne pouvons modifier les contrats d’objectifs et de moyens (COM) et les contrats d’objectifs et de performances (COP), nous pouvons demander au Gouvernement d’étudier l’harmonisation de leur temporalité s’agissant des opérateurs dans un domaine donné, pour mettre un terme à une forme de cacophonie. En outre, les approuver, les passer en revue un an plus tard et les analyser un an avant leur terme pourrait servir de base à une loi de programmation de notre action extérieure, que beaucoup d’entre nous appellent de leurs vœux, coïncidant avec leur exécution et assurant l’engagement de Bercy, que je demande en vain depuis six ans.

Cet amendement d’appel permet de placer notre éternelle discussion sur les COM et les COP au bon niveau en vue de progresser dans cette législature.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AE54 de Mme Nadège Abomangoli

Mme Nathalie Oziol (LFI-NUPES). La dégradation des relations entre la France et le Burkina Faso, le Mali et le Niger a des conséquences importantes sur les établissements de l’AEFE qui s’y trouvent. Plusieurs familles françaises ont quitté ces pays. Leurs finances en sont d’autant plus détériorées. Il en résulte un risque de hausse des frais de scolarité pour les élèves restants. Le groupe La France insoumise demande un état des lieux financier des établissements et les moyens mis en œuvre pour éviter des frais de scolarité prohibitifs.

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Avis défavorable.

Notre commission a déjà ces informations. Deux de ses membres siègent au conseil d’administration de l’AEFE ; votre rapporteur fait son travail. Les budgets de l’AEFE figurent dans mes rapports pour avis depuis sept ans. Nous disposons, dans le cadre de notre mission de contrôle de l’action du Gouvernement, des budgets de chaque lycée géré par l’AEFE. Demander au Gouvernement de rédiger les rapports que nous devons faire nous-mêmes me surprend toujours. C’est à chacun de nous de faire ce travail. Nul ne nous en empêche.

Par ailleurs, un seul des six établissements auxquels vous faites allusion est un EGD. Les cinq autres sont des établissements en gestion locale. L’État français ne peut se prévaloir d’aucune autorité pour demander la comptabilité d’un organisme de droit malien ou de droit burkinabé.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE55 de Mme Nadège Abomangoli

Mme Ersilia Soudais (LFI-NUPES). Cette demande de rapport vise à alerter sur la multiplication du recours à la dématérialisation dans les services consulaires. Dans un rapport publié en janvier 2019, la Défenseure des droits sonnait l’alarme sur les risques d’inégal accès au droit et d’exclusion auxquels expose le développement de la dématérialisation des services publics. Il en résulte une rupture d’accès aux droits pour de nombreuses personnes âgées, étrangères et en situation de précarité, mais aussi pour un jeune sur quatre.

La dématérialisation ne palliera jamais le manque de moyens humains. Les usagers ne parviennent pas à trouver des créneaux pour des demandes de visas ou de documents car nous manquons de personnes pour les accueillir. Le manque de moyens et la dématérialisation créent une telle complexité que des commerces parallèles de prise de rendez-vous émergent dans plusieurs pays, ce qui ne peut être toléré.

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. Certes, la dématérialisation des services pose des problèmes, notamment aux publics les plus éloignés du numérique. Toutefois, s’agissant des Français de l’étranger, dont le domicile est souvent éloigné de leur consulat, elle permet de faciliter les démarches.

Avis de sagesse.

M. Frédéric Petit, rapporteur pour avis. Il ne faut pas avoir peur de la numérisation, qui se passe plus ou moins bien selon les consulats. Ce qui s’impose, c’est une réorganisation fondamentale et commune des services consulaires, par le biais notamment d’échanges de bonnes pratiques.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE56 de Mme Nadège Abomangoli

Mme Ersilia Soudais (LFI-NUPES). Nous appelons l’attention sur l’accroissement des délais de délivrance des visas de court séjour par les services consulaires français. En 2021, le délai de délivrance était de presque sept jours. En 2023, l’objectif de trois jours n’a pas été atteint. En 2024, on baisse les bras et on passe à une cible de neuf jours. Outre ces délais de traitement, obtenir un rendez-vous pour déposer une demande de visa est très difficile. La situation est telle que, dans plusieurs pays, un commerce parallèle de facilitateur de prise de rendez-vous se développe, multipliant par deux ou trois les dépenses engagées par les demandeurs. Nous demandons un rapport pour faire la lumière sur cette situation.

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. Avis défavorable. Plusieurs mesures ont récemment été prises pour réduire les délais. Par ailleurs, un rapport d’information à ce sujet a été rédigé il y a deux ans.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE60 de Mme Nadège Abomangoli

Mme Nadège Abomangoli (LFI-NUPES). Nous appelons l’attention sur la multiplication des recours à des prestataires dans la réalisation de nos missions de service public. Depuis plusieurs années, les millions de Français et d’étrangers qui dépendent des réseaux consulaires constatent une baisse générale de la qualité des services publics consulaires. Les interlocuteurs sont de moins en moins identifiables. Les délais de prises de rendez-vous et de délivrance ne cessent de croître. La situation est telle que, dans plusieurs pays, des commerces parallèles, parfois à proximité de nos établissements, se multiplient pour proposer des prises de rendez-vous. Au Sénégal par exemple, contre l’équivalent d’un salaire minimum (SMIC), un prestataire privé obtiendra un rendez-vous à votre place. Cette situation n’est pas tolérable. Elle est une honte pour notre pays. Nous demandons un rapport pour faire la lumière sur cette dégradation des services consulaires.

M. Vincent Seitlinger, rapporteur pour avis. Les abus que vous décrivez ne sont pas acceptables. Toutefois, les prestataires privés permettent d’obtenir des délais de délivrance de visas raisonnables.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

M. le président Jean-Louis Bourlanges. Nous en avons terminé avec le débat sur la mission Action extérieure de l’État. Je remercie nos rapporteurs et tous les participants pour leur contribution à ces échanges.

 

 

 


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   Annexe :
liste des personnes auditionnées
par le rapporteur pour avis

Directions du ministère de l’Europe et des affaires étrangères :

Ambassadrice et ambassadeurs :

Centre de crise et de soutien (CDCS) :

 

 

 

 

 

 

Table-ronde réunissant les représentants des organisations syndicales et des associations professionnelles du ministère de l’Europe et des affaires étrangères :

 


([1])  M. Frédéric Petit est le rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères sur les crédits du programme 185 relatif à la diplomatie culturelle et d'influence de la France.