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N° 1719

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 11 octobre 2023.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2024 (n° 1680)

TOME I

PREMIÈRE PARTIE

PAR M. Jean-Luc FUGIT,

Député

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 Voir le numéro : 1680.


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SOMMAIRE

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Pages

introduction

COMMENTAIRES DeS ARTICLES DU PROJET DE LOI

Article 5 Instauration d’un crédit d’impôt au titre des investissements dans l’industrie verte

Article additionnel après l’article 5 Étendre le dispositif de suramortissement aux véhicules rétrofités

Article additionnel après l’article 5 Exonération d’impôt sur le revenu des personnes physiques qui vendent de l’électricité produite à partir d’installations photovoltaïques d’une puissance n’excédant pas 9 kWc

Article additionnel après l’article 5 Possibilité pour les ménages de financer une installation solaire photovoltaïque grâce à l’éco-prêt à taux zéro

Article additionnel après l’article 5 Augmentation du plafond et de la durée de l’éco-prêt à taux zéro

Article additionnel après l’article 5 Conditionnement des aides à l’acquisition et à l’installation de systèmes de chauffage à une rénovation énergétique performante dans le cadre de l’écoprêt à taux zéro

Article additionnel après l’article 5 Taux réduit de TVA pour les réseaux de froid justifiant d’un taux d’énergie renouvelable et de récupération supérieur à 50 %

Article additionnel après l’article 5 Taux réduit de TVA pour la livraison et l’installation d’équipements de production d’électricité utilisant l’énergie radiative du soleil d’une puissance inférieure ou égale à 9 kWc

Article additionnel après l’article 5 Exonération de taxe foncière pour les propriétaires qui équipent leur logement d’installations photovoltaïques

Article additionnel après l’article 5 Avantage fiscal accordé aux entreprises qui investissent dans des matériels de recyclage de métaux ferreux et non ferreux

Article additionnel après l’article 5 Changement d’affectation des casiers des installations de stockage de déchets pour faciliter l’implantation de projets d’énergie renouvelable photovoltaïque

Article 12 Réduction progressive de dépenses fiscales défavorables à l’environnement

Article additionnel après l’article 12 Exonération de taxe foncière sur les propriétés non bâties des zones humides

Article additionnel après l’article 12 Modification du taux d’imposition forfaitaire sur les installations photovoltaïques en milieu naturel

Article additionnel après l’article 12 Taxe foncière sur les ombrières utilisant l’énergie solaire

Article additionnel après l’article 12 Exonération de taxes sur les réseaux de chaleur alimentés par des énergies renouvelables ou de récupération

Article additionnel après l’article 12 Exonération de TGAP du gaz produit à partir de combustibles solides de récupération

Article additionnel après l’article 12 Exclusion du carburant des navires de croisière du tarif réduit d’accise

Article 13 Renforcement des incitations fiscales à l’utilisation d’énergie renouvelable dans les transports

Article additionnel après l’article 13 Instaurer une taxe incitative relative à la réduction de l’intensité d’émission de gaz à effet de serre dans les transports

Article 14 Renforcement du caractère incitatif à la transition énergétique de la fiscalité applicable aux véhicules

Article additionnel après l’article 14 Tarif réduit de l’accise sur l’électricité en cas de valorisation par les industriels de la chaleur fatale vers un réseau de chaleur ou de froid

Article 15 Taxe sur l’exploitation des infrastructures de transport de longue distance

Article additionnel après l’article 15 Instauration d’une taxe sur les émissions des avions privés

Article additionnel après l’article 15 Assujettissement de l’aviation d’affaires au tarif de solidarité

Article 16 Réforme des redevances des agences de l’eau

travaux de la commission

I. discussion générale

II. examen des articles

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

 

 


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   introduction

Avec le projet de loi de finances pour 2024, le Gouvernement poursuit sa politique de transition écologique. C’est une politique à la fois ambitieuse et difficile, qui exige d’agir sur plusieurs leviers technologiques et d’entraîner l’adhésion progressive de tous les secteurs de notre société.

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire se saisit pour avis depuis plusieurs années d’articles de la première partie du projet de loi de finances, afin d’examiner si la fiscalité peut participer à la transition écologique. Elle s’est saisie pour avis, pour l’exercice 2024, des articles 5, 12, 13, 14, 15 et 16.

Conformément aux annonces faites lors de la présentation du projet de loi relatif à l’industrie verte, qui vient d’être définitivement adopté par le Parlement, l’article 5 instaure un crédit d’impôt au titre des investissements dans l’industrie verte (C3IV) qui contribuent au développement des secteurs stratégiques pour la transition vers une économie décarbonée, à savoir la production de batteries, de panneaux solaires, de turbines éoliennes et de pompes à chaleur.

Cet article est conforme à l’encadrement temporaire de crise et de transition que la Commission européenne a adopté le 9 mars 2023. Il offre aux États membres de l’Union européenne des possibilités supplémentaires d’octroyer des aides qui soutiennent directement les investissements productifs dans des biens stratégiques nécessaires à la transition. Ce soutien est circonscrit à six domaines stratégiques définis, dont les quatre domaines visés par l’article, ainsi que l’hydrogène et les technologies de capture de carbone, qui ne figurent pas à ce stade dans l’article.

Pour bénéficier du crédit d’impôt prévu, les entreprises devront déposer un dossier au ministère de l’économie et à l’Agence de la transition écologique (Ademe), qui le valideront, pour plus de sécurité juridique.

Selon l’étude d’impact présentée par le Gouvernement, le C3IV devrait permettre de générer environ 23 milliards d’euros d’investissements et la création d’environ 40 000 emplois directs sur le territoire national d’ici à 2030. Le C3IV entraînerait une dépense fiscale comprise entre 2,9 et 3,6 milliards d’euros, soit environ 500 millions d’euros par an. Par la relocalisation ou la localisation en France d’activités industrielles vertes, le C3IV pourrait permettre d’éviter, selon les premières estimations, l’émission de 50 millions de tonnes équivalent CO2. C’est donc une mesure utile sur le plan environnemental comme sur le plan économique.

L’article 12 regroupe des mesures d’ordre technique qui concernent principalement deux secteurs : ceux de l’agriculture et du bâtiment et des travaux publics. Les professionnels de ces secteurs bénéficient actuellement pour leurs engins de travaux agricoles et de chantier de tarifs réduits sur le gazole non routier, très éloignés des tarifs payés par les transporteurs routiers.

Pour inciter ces deux secteurs à mettre en œuvre leur décarbonation, l’article 12 prévoit le relèvement progressif des tarifs du gazole que les professionnels acquittent, à compter de 2024 et jusqu’en 2030. Il s’agira donc d’un relèvement en sept étapes, avec pour objectif, par un signal-prix, d’inciter les entreprises à investir dans des matériels moins émetteurs de gaz à effet de serre.

Pour que le dispositif fonctionne, il conviendra que les équipementiers mettent sur le marché une offre croissante d’engins de travaux décarbonés. L’offre existe, mais elle doit se développer. À la différence des automobilistes qui recherchent une autonomie en distance, les professionnels de ces deux secteurs ont besoin de machines qui délivrent de la puissance, pour lever des charges ou travailler les sols.

En contrepartie, les exploitants agricoles bénéficient de dispositifs de compensation, avec l’élargissement des possibilités de déduction offertes en cas d’épargne de précaution et de plus-values professionnelles. Cela devrait leur permettre de dégager plus de trésorerie pour investir dans de nouveaux matériels.

Enfin, plusieurs députés de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire ont relevé une disposition étrange, à savoir l’alourdissement de la fiscalité pesant sur les véhicules des services et associations qui se consacrent à la prévention et à la lutte contre les incendies de forêts. Ce dispositif va à l’encontre de la volonté du Parlement, exprimée lors des débats sur la loi n° 2023-580 du 10 juillet 2023 visant à renforcer la prévention et la lutte contre l’intensification du risque incendie. La puissance publique a le devoir d’aider les femmes et les hommes qui protègent nos forêts, et non d’entraver leur action. Aussi la commission a proposé la suppression de ce dispositif maladroit.

L’article 13 vise à décarboner progressivement le secteur des transports pour atteindre l’objectif européen de 14 % de consommation d’énergie produite à partir de sources renouvelables dans les transports.

Il modifie à cette fin la taxe incitative relative à l’utilisation d’énergie renouvelable dans les transports, la Tiruert. Il s’agit d’un mécanisme permettant d’assurer un pourcentage minimum d’énergie renouvelable au sein des essences, gazoles et carburéacteurs. La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire avait déjà travaillé sur ce sujet lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2023.

Le Gouvernement propose dans le présent projet de loi de finances des objectifs d’incorporation de biocarburants plus ambitieux et modifie en conséquence les plafonds d’incorporation de certaines matières premières. Il supprime également la possibilité de double compte pour les carburéacteurs, qui devront désormais être comptabilisés selon leur incorporation réelle. Pour maintenir l’incitation fiscale sur les carburéacteurs et éviter l’exportation de biocarburants produits en France vers d’autres pays, le tarif de la taxe est augmenté.

L’article 14 cible pour sa part le verdissement du parc automobile des particuliers et des entreprises. Le Gouvernement souhaite renforcer les dispositifs existants de malus pour les véhicules et inciter davantage à la transition vers des véhicules peu émetteurs ou décarbonés.

Ainsi, le seuil de déclenchement du malus CO2 à l’immatriculation est revu à la baisse pour l’année 2024 et son tarif augmente. Le seuil du « malus masse » passe de 1,8 à 1,6 tonne. Pour les véhicules d’entreprise, la taxe CO2 annuelle est révisée selon une trajectoire pluriannuelle plus ambitieuse. La taxe annuelle sur l’ancienneté est remplacée par une taxe sur les émissions de polluants atmosphériques, qui se base sur des catégories de véhicules en accord avec les vignettes Crit’air.

Enfin, face aux émissions de dioxyde de carbone des véhicules hybrides, l’exonération dont ceux-ci bénéficient est supprimée en faveur d’abattements spécifiques.

L’article 15 est sans doute, de tous les articles du projet de loi de finances pour 2024, celui qui a fait l’objet de la plus large couverture de presse. Il est vrai que des millions de nos concitoyens empruntent chaque jour les autoroutes et acquittent un péage.

Pour résumer, il existe d’un côté un impératif politique, affirmé par le Conseil d’orientation des infrastructures, à savoir dégager autour de 175 milliards d’euros d’ici à 2032, pour rénover et développer nos transports ferroviaires de proximité comme de longue distance.

La Première ministre a suivi les préconisations du conseil en lançant le 24 février 2023 un plan d’action de 100 milliards d’euros et en précisant que les secteurs les plus émetteurs de gaz à effet de serre, autoroutes et transport aérien, devraient y contribuer.

De l’autre côté, les clauses des contrats autoroutiers rendent difficile un alourdissement de la fiscalité spécifiquement applicable aux sociétés d’autoroutes sans qu’il y ait pour elles une compensation. Et le plus souvent, cette compensation se traduit par l’augmentation des péages. Le Conseil d’État, dans ses avis du 8 juin dernier, n’a pas dénié le droit au Gouvernement de taxer les autoroutes, mais il l’a mis en garde sur les conditions juridiques à respecter.

Le Gouvernement propose donc d’instaurer une taxe dont l’assiette est large, à savoir tous les exploitants d’infrastructures de transport de longue distance, autoroutes, gares, ports et aéroports, puis de fixer les conditions dans lesquelles la taxe est exigible : un minimum de 120 millions d’euros de revenus d’exploitation et une rentabilité de 10 % lissée sur sept ans. Ces deux critères limitent la perception de la taxe à de grands contributeurs : en pratique, huit sociétés d’autoroutes et quatre aéroports, Lyon, Marseille, Nice et Paris, pour un rendement annuel de 600 millions d’euros, qui sera affecté à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France. 80 % de ce rendement proviendra des autoroutes, selon les prévisions du ministère chargé du budget, et 20 % des aéroports.

Il ne fait nul doute que les sociétés concessionnaires d’autoroutes (SCA) contesteront juridiquement ce dispositif, au-delà de la perte de confiance des investisseurs envers l’État qu’elles avancent. Vu sous l’angle de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire dont le travail est de faire progresser toute action qui favorise la décarbonation de notre société, la mesure présente l’intérêt de garantir au transport ferroviaire des ressources nouvelles, donc une visibilité sur son avenir. Au-delà de ses effets juridiques et financiers, ce dispositif est symbolique des efforts que chaque secteur doit accomplir pour la transition écologique.

Enfin, l’article 16 vient acter une réforme des redevances versées aux agences de l’eau qui était attendue depuis plusieurs années.

Les redevances posent en effet deux problèmes principaux : d’une part, les taxes et redevances payées par les particuliers représentent près de 83 % des recettes des agences de l’eau, contre seulement 6 % pour l’industrie et 6 % pour l’agriculture, alors que les ménages consomment seulement 20 % de l’eau en France.

D’autre part, le principe pollueur-payeur apparaît insuffisamment établi dans la fiscalité de l’eau. La redevance pour pollution de l’eau d’origine domestique, assise sur les volumes d’eau facturés à l’abonné, s’inscrit en effet dans une logique fiscale de rendement plutôt que de taxation environnementale. La proposition qui est faite est que ce soit désormais la collectivité territoriale, maître d’ouvrage du système d’assainissement, qui soit le redevable de la redevance pour pollution de l’eau d’origine domestique et non plus l’usager domestique. Il s’agit ainsi de transférer la charge vers l’acteur qui a une capacité d’action directe pour appliquer le principe pollueur-payeur.

L’article vise également une hausse de la redevance pour pollutions diffuses qui rapportera 36 millions d’euros supplémentaires.

Enfin, la redevance pour prélèvement sur la ressource en eau sera modifiée et rééquilibrée en profondeur, pour procurer 132 millions d’euros supplémentaires. La répartition des coûts supplémentaires pour les assujettis est la suivante : moins de 1 million d’euros pour les collectivités, 11 millions d’euros pour les agriculteurs, 20 millions d’euros pour les industriels et 100 millions d’euros pour les énergéticiens. Ceux-ci paieront le plus par rapport à l’eau prélevée pour le refroidissement des centrales.

Au total, la recette supplémentaire pour les agences de l’eau sera d’environ 168 millions d’euros, soit près de la moitié des 325 millions d’euros d’augmentation de leur budget. Le reste sera fonction des modulations des redevances décidées par chaque agence sur les territoires.

L’article 16 permet donc d’accroître le « signal prix » sur les prélèvements et la pollution, et d’opérer un rééquilibrage de l’effort entre usagers, conformément aux annonces du « Plan eau » par le Président de la République en mars 2023. Cela permettra aux agences de l’eau de bénéficier de ressources supplémentaires utiles dans un contexte de tensions sur la ressource en eau.

 


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   COMMENTAIRES DeS ARTICLES DU PROJET DE LOI

Article 5
Instauration d’un crédit d’impôt au titre des investissements
dans l’industrie verte

Avis favorable de la commission à une adoption avec modifications

 

Conformément aux annonces faites lors de la présentation du projet de loi relatif à l’industrie verte, en cours d’examen au Parlement, le présent article prévoit la création d’un crédit d’impôt au titre des investissements dans l’industrie verte (C3IV) qui contribuent au développement des secteurs stratégiques pour la transition vers une économie décarbonée, à savoir la production de batteries, de panneaux solaires, de turbines éoliennes et de pompes à chaleur. Il introduit à cet effet un nouvel article 244 quater I au sein du code général des impôts (CGI) et modifie d’autres articles du même code.

I.   l’ÉTAT du droit

L’Union européenne (UE) s’est engagée à adopter la neutralité carbone d’ici 2050, avec un objectif intermédiaire de réduction des émissions de l’UE pour 2030 de 55 % par rapport à 1990, dans le cadre du paquet « Fit For 55 » négocié par la France lors de sa présidence de l’UE au premier semestre 2022. Pour atteindre cet objectif, le projet de loi relatif à l’industrie verte, en cours d’examen au Parlement, comporte des mesures visant à faciliter et accélérer l’implantation de sites industriels en France, à financer l’industrie verte par la mobilisation des fonds publics et privés, à favoriser les entreprises vertueuses et à former aux métiers de l’industrie verte.

Il n’existe actuellement aucun dispositif d’incitation fiscale aux investissements dans les capacités de production des secteurs de l’énergie solaire photovoltaïque, des éoliennes à terre et en mer, des batteries et des pompes à chaleur. Dans le cadre général, c’est-à-dire hors procédure de notification individuelle auprès de la Commission européenne, le soutien à l’investissement dans les industries vertes prend la forme de subventions à travers des appels à projets s’appuyant sur des régimes de droit commun en matière d’aides d’État. Ces régimes ne permettent pas d’accompagner les entreprises avec un niveau d’aide satisfaisant au regard des montants d’investissement engagés et de la concurrence d’autres programmes déployés dans des pays tiers de l’UE. Aux États‑Unis, l’Inflation Reduction Act (IRA), promulgué le 16 août 2022, prévoit notamment plusieurs mesures fiscales qui couvrent tous les pans de la filière des énergies dites « propres ».

C’est dans cette perspective que la Commission européenne a adopté, le 9 mars 2023, la section 2.8 de l’encadrement temporaire de crise et de transition (« Temporary Crisis and Transition Framework » - TCTF), qui fournit aux États membres de l’UE des possibilités supplémentaires d’octroyer des aides qui soutiennent directement les investissements productifs dans des biens stratégiques nécessaires à la transition vers une économie à zéro émission nette.

Afin de préserver les objectifs généraux d’intégrité du marché intérieur et de cohésion au sein de l’UE, la Commission européenne a strictement encadré le soutien que les États membres sont autorisés à mettre en œuvre. Ce soutien est circonscrit aux seuls domaines stratégiques définis dans le TCTF, limité dans le temps (jusqu’au 31 décembre 2025) et dans ses montants, et garantit des incitations suffisantes pour atteindre les objectifs de cohésion. Dans le respect de ce cadre temporaire, le présent article prévoit la création d’un crédit d’impôt pour les investissements dans l’industrie verte (C3IV), dont le but est de soutenir les investissements de grande ampleur qui contribuent à l’implantation et au développement de capacités de production, dans les secteurs des batteries, des panneaux photovoltaïques, des éoliennes et des pompes à chaleur.

II.   les dispositions du projet de loi de finances

A.   le dispositif envisagé

Le présent projet d’article est codifié à l’article 244 quater I du code général des impôts (CGI), créé à cet effet. Le crédit d’impôt créé par cet article s’adresse aux sociétés redevables de l’impôt sur les sociétés. Outre le respect par l’entreprise de ses obligations fiscales et sociales, de dépôt de ses comptes annuels et de la législation environnementale, l’éligibilité au dispositif est notamment conditionnée au respect des conditions cumulatives suivantes, dans le respect du droit de l’Union européenne :

– afin d’éviter une concurrence fiscale entre États membres, le projet d’investissement réalisé en France ne résulte pas d’une délocalisation depuis le territoire de l’Union européenne et l’aide est reprise si une délocalisation a lieu dans les deux ans de la mise en exploitation ;

– l’entreprise s’engage à exploiter pendant au moins cinq ans à compter de leur mise en service (trois ans pour les PME) les investissements qui ont ouvert droit au crédit d’impôt.

Le crédit d’impôt porte sur les dépenses d’investissement, autres que de remplacement, engagées pour les activités contribuant à la production de batteries, de panneaux solaires, d’éoliennes ou de pompes à chaleur. Les filières ciblées par le C3IV sont les filières stratégiques de la transition énergétique, où les dispositifs d’aide précédemment mis en œuvre ne permettent plus de faire face à la concurrence internationale en matière d’aides publiques et dont les technologies bénéficient d’une maturité suffisante pour permettre l’industrialisation dans les délais d’application du TCTF.

D’autres filières, telle que la filière hydrogène, bénéficient actuellement de certaines aides spécifiques à la production et à l’installation. Votre rapporteur pour avis estime toutefois qu’il pourrait y avoir un élargissement de ce crédit d’impôt à la production d’électrolyseurs nécessaires dans le domaine de l’hydrogène.

Le champ du dispositif concerne pour l’instant la production des équipements, la fabrication des composants et des sous-composants nécessaires à leur production, ainsi que la production et la valorisation des matières premières critiques, dans les quatre domaines cibles. Le II du nouvel article 244 quater I du code général des impôts précise les investissements visés. Les équipements, sous-composants et matières premières utilisés dans le cadre des activités ouvrant droit au crédit d’impôt seront déterminés par arrêté conjoint des ministres chargés de l’économie et de l’industrie. Ouvriront également droit au crédit d’impôt les dépenses engagées en vue de la production ou de l’acquisition d’actifs corporels (terrains, bâtiments, installations, équipements et machines) ou incorporels (droits de brevet, licences, savoir-faire et autres droits de propriété intellectuelle) permettant de produire les quatre technologies visées par l’article. En revanche, les aides publiques reçues à raison des dépenses ouvrant droit au crédit d’impôt sont déduites des bases de calcul de ce crédit d’impôt.

Les taux retenus sont les taux maxima permis par le TCTF, à savoir le taux de 20 % prévu pour les aides sous forme d’avantage fiscal et les taux majorés de 25 % et 40 % respectivement pour les investissements réalisés dans les zones d’aide à finalité régionale (ZAFR) ou dans les régions ultrapériphériques. Ces taux sont majorés de 10 points pour les moyennes entreprises et de 20 points pour les petites entreprises.

De la même manière, les plafonds de montant de C3IV correspondent aux maximas prévus par le TCTF (plafond de droit commun de 150 millions d’euros, porté à 200 millions d’euros et 350 millions d’euros pour les investissements réalisés dans les ZAFR ou dans les régions ultrapériphériques).

Le crédit d’impôt s’appliquera par fraction au titre des exercices ou des années au cours desquels les dépenses du plan d’investissement sont exposées, en appliquant à ces dépenses le taux de crédit d’impôt mentionné dans la décision d’agrément.

En effet, le bénéfice du crédit d’impôt sera conditionné à la délivrance d’un agrément préalable du ministre chargé du budget dans les conditions prévues à l’article 1649 nonies du code général des impôts, pris après avis conforme de l’établissement public mentionné au I de l’article L. 131-3 du code de l’environnement, c’est-à-dire de l’Agence de la transition écologique (ex-Ademe).

Cet établissement public attestera que les activités exposées dans la demande d’agrément entrent dans le champ des activités éligibles. La création d’un crédit d’impôt sous agrément préalable permet à l’administration de s’assurer du respect des conditions d’éligibilité qui découlent du TCTF et de sécuriser les entreprises dans leurs investissements. Il confère aux investisseurs une meilleure sécurité juridique. En effet, les investissements qui seront soutenus par le C3IV sont des investissements de grande ampleur, dont les montants peuvent atteindre des dizaines ou des centaines de millions d’euros. En l’absence d’agrément, dans l’hypothèse où une entreprise ne serait finalement pas éligible au crédit d’impôt, les conséquences financières pourraient lui être très préjudiciables.

Un délai maximum de délivrance de la décision d’agrément de trois mois est prévu, à l’instar du mécanisme actuellement prévu en matière de rescrit général (1° de l’article L. 80 B du livre des procédures fiscales). Le contribuable ne pourrait toutefois pas se prévaloir d’un agrément tacite dans le cas où l’administration n’aurait pas été en mesure de statuer sur sa demande d’agrément dans ce délai.

Il appartiendra à la direction générale des finances publiques (DGFiP) de s’assurer du respect des autres conditions d’éligibilité au crédit d’impôt et de fixer le montant des dépenses éligibles et du crédit d’impôt. Le non-respect des conditions d’éligibilité au crédit d’impôt entraînera le retrait de l’agrément et la déchéance des avantages qui y sont attachés selon les modalités de droit commun prévues par le code général des impôts pour les régimes sous agrément. Afin d’assurer le traitement des demandes d’agrément, est prévue la mobilisation de deux équivalents temps plein supplémentaires (ETP) à la DGFiP et d’un ETP à l’Ademe.

Le présent dispositif a été prénotifié à la Commission européenne par le Gouvernement. Il fera l’objet d’une notification formelle et d’échanges avec la Commission européenne concernant les paramètres retenus afin d’assurer sa compatibilité avec l’encadrement retenu. Enfin, un décret fixera la date d’entrée en vigueur du dispositif, qui ne pourra pas être postérieure de plus de trois mois à la date de réception par le Gouvernement de la réponse de la Commission européenne permettant de le considérer comme conforme au droit européen en matière d’aides d’État. Toutefois, les dossiers peuvent d’ores et déjà être déposés auprès du « guichet » pour gagner du temps. Seul l’agrément ne pourra pas être délivré avant l’autorisation de la Commission européenne.

L’agrément permettra, dans le respect du bornage temporel prévu par la section 2.8 du TCTF, de rattacher à une décision d’octroi d’aide antérieure au 31 décembre 2025, des dépenses engagées par les investisseurs postérieurement à cette date. Le bénéfice des aides pourra ainsi se matérialiser après cette date. Toutefois, tout agrément octroyé après le 31 décembre 2025 serait constitutif d’une aide d’État illégale.

B.   les effets sociaux, Économiques et environnementaux attendus

Selon l’étude d’impact présentée par le Gouvernement, le C3IV devrait permettre de générer environ 23 milliards d’euros d’investissements et la création d’environ 40 000 emplois directs sur le territoire national d’ici 2030. Le C3IV entraînerait une dépense fiscale comprise entre 2,9 et 3,6 milliards d’euros, répartie entre 2025 et 2031. Sur la base de ce scénario optimiste sur le plan industriel, le coût du dispositif est estimé à 1,4 milliard d’euros sur la période 2024‑2027 (moins de 500 millions d’euros par an).

Par la relocalisation ou la localisation en France d’activités industrielles vertes, le C3IV pourrait permettre d’éviter, selon les premières estimations, l’émission de 50 millions de tonnes équivalent CO2 (MtCO2eq) sur les dix prochaines années, soit une réduction cumulée de - 34,6 MtCO2eq de l’empreinte carbone de la France sur la durée du dispositif.

III.   les travaux de la commission

La commission a adopté seize amendements portant sur l’article 5.

Elle a d’abord adopté deux amendements identiques I-CD13 de M. Vincent Descoeur et I-CD155 de M. Stéphane Delautrette, contre l’avis du rapporteur pour avis, qui prévoient d’ajouter le recyclage, le réemploi et la réutilisation des équipements et des composants d’équipements mentionnés dans l’article à la liste des usages qui bénéficient du crédit d’impôt.

La commission a ensuite adopté l’amendement I-CD449 du rapporteur pour avis, qui prévoit d’élargir le crédit d’impôt au titre des investissements dans l’industrie verte à la fabrication des composants (incluant l’approvisionnement en matières premières critiques liées) nécessaires au développement d’une industrie manufacturière française sur les technologies clés de l’hydrogène : électrolyseurs et piles à combustible.

La commission a également adopté, contre l’avis du rapporteur pour avis, un amendement I-CD312 de M. Charles Fournier et des membres du groupe Écologiste-NUPES qui prévoit d’étendre le délai minimum d’exploitation des investissements verts sur le territoire national à au moins dix ans.

La commission a ensuite adopté un amendement I-CD318 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert qui intègre l’industrie du solaire thermique dans le C3IV, au même titre que les autres secteurs bénéficiaires de ce crédit d’impôt, puis trois amendements identiques I-CD448 du rapporteur pour avis, I‑CD453 de M. Stéphane Delautrette et des membres du groupe Socialistes et apparentés et I‑CD456 de M. Jean-Louis Bricout, qui prévoient d’élargir la liste des équipements éligibles au crédit d’impôt en matière d’éoliennes.

La commission a ensuite adopté les amendements I-CD445, I-CD446 et I‑CD447 (identique à l’amendement I‑CD153 de M. Stéphane Delautrette et des membres du groupe Socialistes et apparentés) du rapporteur pour avis qui étendent le crédit d’impôt aux opérations de montage et de démontage, ainsi qu’à la réalisation d’études de faisabilité en matière d’éoliennes.

Elle a ensuite adopté deux amendements identiques I-CD154 de M. Stéphane Delautrette et des membres du groupe Socialistes et apparentés et I‑CD319 de M. Jean-Louis Bricout, qui prévoient d’élargir le crédit d’impôt aux travaux d’aménagements portuaires afférents à l’installation d’éoliennes offshore.

Enfin, la commission a adopté un amendement I-CD243 de M. Jean‑Louis Bricout, qui prévoit d’ouvrir la majoration du crédit d’impôt à tous les territoires ultramarins de la République et pas seulement à ceux situés dans les zones d’aide à finalité régionale.

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Article additionnel après l’article 5
Étendre le dispositif de suramortissement aux véhicules rétrofités

La commission a adopté deux amendements identiques I-CD443 du rapporteur pour avis et I-CD235 de M. Anthony Brosse visant à étendre le dispositif de suramortissement, actuellement prévu pour les véhicules neufs utilisant des énergies peu polluantes, aux véhicules rétrofités.

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Article additionnel après l’article 5
Exonération d’impôt sur le revenu des personnes physiques qui vendent de l’électricité produite à partir d’installations photovoltaïques d’une puissance n’excédant pas 9 kWc

La commission a adopté l’amendement I-CD320 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert qui prévoit que les personnes physiques qui vendent de l’électricité produite à partir d’installations photovoltaïques non affectées à l’exercice d’une activité professionnelle, d’une puissance n’excédant pas 9 kilowatts-crête (kWc), sont exonérées de l’impôt sur le revenu sur le produit de ces ventes.

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Article additionnel après l’article 5
Possibilité pour les ménages de financer une installation solaire photovoltaïque grâce à l’éco-prêt à taux zéro

La commission a adopté les amendements identiques I-CD219 de M. Stéphane Delautrette et I-CD241 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert, qui prévoient d’ouvrir la possibilité pour les ménages de financer une installation solaire photovoltaïque d’une puissance inférieure ou égale à 9 kilowatts-crête grâce à l’éco-prêt à taux zéro (éco-PTZ).

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Article additionnel après l’article 5
Augmentation du plafond et de la durée de l’éco-prêt à taux zéro

La commission a adopté l’amendement I-CD233 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert, qui prévoit d’augmenter le plafond de l’avance remboursable versée dans le cadre de l’éco-PTZ, uniquement pour les travaux finançant des rénovations performantes (gain énergétique de 35 %), à 60 000 euros (au lieu de 50 000 euros aujourd’hui). Il étend également la durée maximale de remboursement de l’avance à vingt-cinq ans (au lieu de vingt ans).

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Article additionnel après l’article 5
Conditionnement des aides à l’acquisition et à l’installation de systèmes de chauffage à une rénovation énergétique performante dans le cadre de l’écoprêt à taux zéro

La commission a adopté l’amendement I-CD234 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert, qui prévoit de coupler l’installation d’un système de chauffage, dont les pompes à chaleur, à la réalisation d’une rénovation performante pour les logements énergivores (classes E, F et G). Cette mesure est cohérente avec la réforme de MaPrimeRénov’ envisagée pour 2024 puisque le pilier « Efficacité » ne devrait plus permettre de financer de changement de chaudière pour les logements énergivores.

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Article additionnel après l’article 5
Taux réduit de TVA pour les réseaux de froid justifiant d’un taux d’énergie renouvelable et de récupération supérieur à 50 %

La commission a adopté les amendements identiques I-CD236 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert et I-CD335 de M. Jean-Louis Bricout, qui proposent, conformément au droit européen fixé par la directive 2022/542 du Conseil du 5 avril 2022 modifiant les directives 2006/112/CE et (UE) 2020/285 en ce qui concerne les taux de taxe sur la valeur ajoutée, d’appliquer un taux réduit de TVA aux réseaux de froid justifiant d’un taux d’énergie renouvelable et de récupération supérieur à 50 %.

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Article additionnel après l’article 5
Taux réduit de TVA pour la livraison et l’installation d’équipements de production d’électricité utilisant l’énergie radiative du soleil d’une puissance inférieure ou égale à 9 kWc

La commission a adopté deux amendements identiques I-CD444 du rapporteur pour avis et I-CD213 de M. Stéphane Delautrette, qui instaurent un taux réduit de TVA pour la livraison et l’installation d’équipements de production d’électricité utilisant l’énergie radiative du soleil d’une puissance inférieure ou égale à 9 kWc, dans le cadre de solutions d’autoconsommation.

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Article additionnel après l’article 5
Exonération de taxe foncière pour les propriétaires qui équipent
leur logement d’installations photovoltaïques

La commission a adopté l’amendement I-CD298 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert qui ouvre la possibilité d’exonération de 50 % à 100 % de la taxe foncière, par les communes et les établissements de coopération intercommunale dotés d’une fiscalité propre, pour les propriétaires qui équipent leur logement d’installations photovoltaïques d’une puissance inférieure ou égale à 9 kWc.

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Article additionnel après l’article 5
Avantage fiscal accordé aux entreprises qui investissent dans des matériels de recyclage de métaux ferreux et non ferreux

La commission a adopté l’amendement I-CD12 de M. Vincent Descoeur, dans une version sous-amendée par le rapporteur pour avis, pour prévoir l’instauration d’un dispositif de suramortissement pour les entreprises du recyclage des métaux ferreux et non ferreux. Les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés ou à l’impôt sur le revenu selon un régime réel d’imposition peuvent déduire de leur résultat imposable une somme égale à 15 % (40 % avant le sous-amendement du rapporteur pour avis) de la valeur d’origine des matériels destinés à la collecte, au tri et au recyclage des déchets métalliques ferreux et non ferreux, hors frais financiers.

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Article additionnel après l’article 5
Changement d’affectation des casiers des installations de stockage de déchets pour faciliter l’implantation de projets d’énergie renouvelable photovoltaïque

La commission a adopté l’amendement I-CD220 de M. Stéphane Delautrette qui prévoit de faciliter le changement d’affectation des casiers des installations de stockage de déchets pour l’implantation de projets d’énergie renouvelable photovoltaïque, par un ajustement de la détermination de la valeur locative des propriétés qui comprennent de tels équipements.

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Article 12
Réduction progressive de dépenses fiscales défavorables à l’environnement

Avis favorable de la commission à une adoption avec modifications

 

Le présent article traduit les engagements de l’État en faveur de la transition écologique en supprimant graduellement des avantages fiscaux incompatibles avec la décarbonation de l’économie. Il modifie à cette fin le code des impositions sur les biens et services (paragraphe II). En contrepartie, l’un des secteurs concernés, l’agriculture, bénéficie de mesures fiscales lui permettant d’effectuer plus facilement cette transition (paragraphe I).

Le Gouvernement, par la voix de M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, avait annoncé une première fois le 19 juin dernier son intention d’augmenter progressivement la fiscalité du gazole des professionnels pour l’aligner par étapes, en plusieurs années, sur celle des automobilistes. « Nous ne pouvons pas d’un côté financer la transition énergétique et de l’autre conserver des avantages fiscaux pour les énergies fossiles » avait-il déclaré. Il a confirmé le 7 septembre dernier que cette mesure concernerait les agriculteurs et les entreprises de bâtiment et de travaux publics et avait pour objectif de « valoriser les investissements verts ».

Cette politique sera échelonnée dans le temps, de 2024 à 2030, afin de permettre aux entreprises de s’y adapter, et non en une seule fois, comme le Gouvernement l’envisageait initialement. Le contexte économique, avec une inflation qui certes ralentit mais persiste, permet difficilement une modification brutale des règles fiscales.

I.   L’État du droit

La fiscalité de l’électricité, des produits gaziers et des produits pétroliers relève de directives européennes, en particulier des directives (UE) 2020/262 du 19 décembre 2019 encadrant les accises (énergies, alcools et tabacs) et 2003/96/CE du 27 octobre 2003 relative à la taxation de l’énergie, transposées en droit français. Afin d’assurer une meilleure lisibilité de ce régime fiscal, l’ordonnance n° 2021‑1843 du 22 décembre 2021 a inséré au sein du nouveau code des impositions sur les biens et services (CIBS) les dispositions relatives aux accises aux articles L. 312-1 à L. 312-107.

En application de l’article L. 312-21 du CIBS, les énergies taxables sont réparties en trois catégories fiscales : carburant, combustible et électricité.

L’accise sur les énergies est due pour les usages en tant que, d’une part, de carburant, d’autre part, de combustible de divers produits. Il existe cinq fractions de l’accise sur les énergies (le terme de fraction étant la nouvelle dénomination d’anciennes taxes) :

Les fractions se répartissent entre des tarifs normaux et des tarifs réduits pour certains usages. Il en est ainsi du gazole utilisé pour le fonctionnement de moteurs d’engins de travaux ou pour des travaux agricoles et forestiers. Par ailleurs, les entreprises grandes consommatrices d’énergie, dont les activités relèvent du système d’échange de quotas de gaz à effet de serre (SEQE) dans l’Union européenne, disposent également de tarifs réduits.

Gazole non routier :

Le gazole non routier (GNR), utilisé pour le fonctionnement de moteurs d’engins de travaux, mais non pour la propulsion des véhicules sur route, bénéficie d’un tarif spécifique d’accise, fixé depuis le 1er janvier 2023 à 18,82 euros par mégawattheure, à comparer à 59,40 euros pour les gazoles utilisés par le transport routier (article L. 312-35 du CIBS). Ce tarif s’applique directement lors de la mise à la consommation du produit et est donc intégré dans son prix d’acquisition.

Pour rappel, le GNR s’apparente au fioul domestique, mais avec moins de soufre, ce qui rend sa combustion moins polluante. Il est obligatoirement utilisé par certains engins mobiles non routiers, dont les tracteurs agricoles et forestiers, et est également utilisé dans le secteur du bâtiment et des travaux publics. Son prix est étroitement dépendant de deux taxes : la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) précitée, dont le taux applicable au GNR est réduit.

À titre de comparaison, les autres tarifs fixés par l’article L. 312-35 précité s’élèvent à 59,481 euros pour les carburéacteurs, à 76,826 euros pour les essences, à 16,208 euros pour les gaz de pétrole liquéfiés carburant et à 5,23 euros pour les gaz naturels carburant.

Les utilisateurs de GNR se répartissent pour moitié dans les professions agricoles et forestières, et pour moitié dans différentes industries, ainsi ventilées : 37 % dans le secteur du bâtiment, 6 % dans le transport ferroviaire non électrifié et 57 % dans des secteurs comme les industries extractives ou le commerce.

Gazole pour travaux agricoles ou forestiers :

Le tarif du gazole utilisé pour les besoins de travaux agricoles ou forestiers s’établit à 3,86 euros par mégawattheure depuis 2022, en application de l’article L. 312-60 du CIBS. Pour mémoire, l’ensemble des carburants prévus à cet article, pour les catégories de travaux agricoles (travaux, déshydratation de légumes et aménagement et entretien de pistes et de routes dans les massifs montagneux), fait l’objet de tarifs réduits.

Entreprises grandes consommatrices d’énergie relevant du SEQE :

Les tarifs réduits applicables aux entreprises grandes consommatrices d’énergie pour les activités relevant du SEQE sont prévus par les articles L. 312-75 à L. 312-78 du CIBS. Ils portent sur les charbons, fiouls lourds, fiouls domestiques, pétroles lampants, gaz de pétrole liquéfiés combustible et gaz naturels combustibles. D’autres tarifs sont fixés sur ces sources d’énergie par le même article, qui s’appliquent aux installations intensives en énergie ([1]) exposées à la concurrence internationale, ainsi que sur des installations de valorisation de la biomasse. S’agissant plus particulièrement du charbon, le droit à un tarif réduit est conditionné à la soumission au SEQE ou à un accord conclu par l’entreprise exploitante avec l’autorité administrative permettant d’atteindre des objectifs de protection de l’environnement ou d’efficacité énergétique (article L. 312-78 du CIBS).

II.   Les dispositions du projet de loi de finances

Le Gouvernement a souhaité à plusieurs reprises, tant pour des considérations écologiques que financières (suppression d’une « niche fiscale ») supprimer ces tarifs réduits de TICPE. L’importance du poids des taxes dans le prix final à la consommation modifie le signal prix, pour reprendre l’expression des économistes, et est susceptible d’orienter les choix d’investissement des entreprises vers des solutions moins énergivores et moins émettrices de gaz à effet de serre. La taxation plus forte des énergies fossiles permet de diminuer des dépenses fiscales défavorables à l’environnement et vient en soutien de la politique de transition écologique.

L’article 60 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 prévoyait la suppression du tarif réduit d’accise de manière échelonnée, du 1er janvier 2020 au 1er janvier 2022, en excluant toutefois les usages agricoles, les opérations de damage et de déneigement des pistes en montagne, le transport ferroviaire, les segments des industries extractives fortement exposées à la concurrence internationale et la manutention portuaire. Les secteurs inclus dans le champ de la mesure bénéficiaient en contrepartie de mesures d’accompagnement. Les entreprises de bâtiment et de travaux publics (BTP) avaient le droit de majorer les prix de contrats en cours de longue durée ; celles du transport routier pouvaient indexer leurs prix sur le coût du GNR ; et des dispositifs de suramortissement permettaient aux entreprises entrant dans le champ de la loi d’acquérir de nouveaux équipements.

Cette réforme a été reportée à plusieurs reprises :

Ces circonstances particulières, qui fragilisaient les entreprises agricoles et industrielles, ont disparu. Certes, la situation géopolitique depuis l’invasion de l’Ukraine en février 2022 altère le fonctionnement de l’économie mondiale, mais votre rapporteur pour avis observe qu’elle n’a pas empêché la France d’enregistrer un rebond de son économie. Parallèlement, le dérèglement climatique s’accélère plus rapidement que prévu. Aussi est-il justifié que le Gouvernement présente à nouveau une réforme des tarifs des accises sur certaines énergies fossiles.

Cette réforme est de nature technique ; elle ne vise pas l’ensemble des utilisateurs des énergies précitées car les technologies permettant de s’en passer n’existent pas dans tous les secteurs. Elle porte principalement sur le secteur agricole et du BTP, et plus marginalement sur les industries entrant dans le champ du SEQE, car celles-ci n’ont désormais recours qu’à un nombre réduit de combustibles.

A.   Des mesures techniquement ciblées

Un premier point est à noter : le présent article ne constitue pas une réforme d’ensemble de la fiscalité sur les énergies fossiles. Il vise à inciter certaines catégories d’entreprises à investir dans des équipements plus respectueux de l’environnement.

Le transport routier n’entre pas dans le champ du présent article, comme le Gouvernement l’avait envisagé au printemps, alors qu’il représentait 8 % des émissions de gaz à effet de serre en France en 2020. La Fédération nationale du transport routier (FNTR) avait indiqué dans un communiqué du 19 juillet 2023 que l’offre de véhicules utilisant des énergies alternatives au diesel était insuffisante et que toute modification de fiscalité ayant des répercussions sur la compétitivité des entreprises françaises devait s’accompagner de réformes similaires dans les pays limitrophes ou recourant au cabotage en France. Si des modèles de poids lourds électriques sont apparus sur le marché, les accès aux recharges demeurent problématiques, alors qu’il faudrait lancer sur le territoire de l’Union européenne 10 000 camions électriques de moyen tonnage (3,5 à 16 tonnes) et 30 000 de fort tonnage (16 tonnes et plus), d’après l’Association des constructeurs automobiles européens. Ce secteur dépend autant de mutations technologiques et du déploiement d’infrastructures électriques pour décarboner son activité que d’incitations législatives.

Le champ de l’article inclut essentiellement les entreprises utilisant du gazole non routier et du gazole aux fins de travaux agricoles ou forestiers, ainsi que, comme indiqué précédemment, les entreprises entrant dans le champ du SEQE.

Le cœur du dispositif consiste à relever, à l’article L. 312-35 du code des impositions des biens et des services, le tarif du gazole non routier. Ce relèvement sera progressif, avec une majoration de 5,99 euros par mégawattheure et par an chaque année au 1er janvier, de 2024 à 2030. Actuellement de 18,82 euros, ce tarif s’élèvera à 54,76 euros au 1er janvier 2030, soit une augmentation de 190,97 % en six ans. L’échelonnement de ce relèvement a évidemment pour objet de laisser du temps aux entreprises pour investir dans de nouveaux équipements.

Le dispositif est analogue pour les gazoles utilisés pour les travaux agricoles et forestiers. Le tarif prévu à l’article L. 312-60 du CIBS, de 3,86 euros par mégawattheure actuellement, sera majoré de 2,85 euros chaque 1er janvier jusqu’en 2030, pour atteindre 23,81 euros, soit une variation de 516,84 % en six ans.

Concernant les entreprises grandes consommatrices d’énergie et relevant du SEQE, le présent article procède à une simplification du droit. La multiplicité des tarifs réduits, au nombre de 13 mais dont certains n’ont plus de bénéficiaire, constitue un facteur inutile de complexité. En outre, certains de ces tarifs sont inchangés depuis leur instauration et ne contribuent donc pas à une politique de décarbonation. Les tarifs réduits applicables aux fiouls lourds, fiouls domestiques, pétroles lampants et gaz (naturels comme de pétroles liquéfiés) sont donc supprimés.

Enfin, parmi les mesures diverses prévues par le présent article, votre rapporteur pour avis note la suppression de la réduction de malus à l’immatriculation sur les émissions de CO2 et de l’exonération de la taxe sur la masse en ordre de marche (articles L. 421-70-1 et L. 421-81-1 du CIBS) des véhicules des services déconcentrés de l’État chargés de la forêt, de l’Office national des forêts, des services des collectivités territoriales et de leurs groupements, des associations syndicales de propriétaires et des réserves communales de sécurité civile, pour leurs missions opérationnelles de prévention, de surveillance et de lutte contre les incendies. Ces réductions et exonération ont été introduites par la loi n° 2023-580 du 10 juillet 2023 visant à renforcer la prévention et la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie. Cette mesure lui apparaît regrettable, moins de quatre mois après le vote du Parlement sur ce sujet, et se doit d’être révisée.

B.   un dispositif d’accompagnement pour le secteur agricole

Le dispositif du présent article n’était pas soumis à des consultations obligatoires, mais il a fait l’objet d’une concertation avec les organisations professionnelles représentatives du secteur du bâtiment et des travaux publics et du secteur agricole. Ce dernier a négocié avec le Gouvernement les contreparties dont il bénéficie.

Le paragraphe I du présent article prévoit, pour les entreprises agricoles, un dispositif d’accompagnement afin d’atténuer la charge fiscale supplémentaire représentée par le relèvement du tarif des accises sur le gazole pour travaux agricoles et forestiers. Ce dispositif porte sur la déduction pour épargne de précaution, sur l’exonération des plus-values agricoles à l’occasion de cession d’actifs et sur le régime d’imposition des micro-exploitations.

L’article 51 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 a réformé les aides fiscales en faveur de la gestion des risques et des investissements agricoles, en instaurant un régime de déduction pour épargne de précaution (DEP). Il permet aux exploitants agricoles de déduire chaque année de leur résultat imposable une somme constituée en vue de faire face aux risques climatiques et environnementaux.

La DEP est plafonnée en fonction du montant du bénéfice imposable, les plafonds pouvant être modifiés par décret en fonction de la variation de l’indice des prix à la consommation (le dernier en date étant le décret n° 2023-422 du 31 mai 2023). En application de l’article 73 du code général des impôts, la déduction est égale à 100 % du bénéfice imposable si celui-ci est inférieur à 28 612 euros. Elle est ensuite dégressive lorsque le bénéfice imposable atteint des montants supérieurs, répartis en quatre tranches.

Le présent article majore les plafonds de DEP, afin de permettre aux exploitants agricoles de déduire une part plus importante de leurs bénéfices, qu’ils pourront consacrer à l’acquisition d’équipements moins émetteurs de gaz à effet de serre. Le plafond de déductibilité totale passe ainsi de 28 612 euros à 32 608 euros. Pour les tranches suivantes, le montant des sommes déductibles et les plafonds de déduction sont également majorés. Ainsi, pour la tranche maximale, la somme déductible de 43 872 euros pour un bénéfice supérieur ou égal à 105 970 euros est portée à 50 000 euros, pour un bénéfice supérieur ou égal à 120 771 euros.

L’intérêt de ce dispositif est d’encourager les agriculteurs à s’équiper en machines moins polluantes. Il ne trouvera toutefois son plein effet que si une offre technique se développe. La mise sur le marché de tracteurs électriques est par exemple encore restreinte et à la différence des véhicules pour les particuliers, les agriculteurs ne recherchent pas seulement une autonomie sur la distance parcourue, mais surtout une puissance pour des travaux comme les labours.

S’agissant des plus-values professionnelles dégagées par les exploitants agricoles à l’occasion de cession, l’article 151 septies du code général des impôts prévoit actuellement leur exonération en totalité sous condition – notamment que l’activité ait été exercée au moins pendant cinq ans – lorsque les recettes annuelles sont inférieures ou égales à 250 000 euros. Le présent article porte le plafond d’exonération à 350 000 euros, avec le même objectif que le relèvement de plafond de DEP. Le dispositif s’applique à toute cession d’actifs professionnels, y compris les plus-values sur les actifs immobiliers.

La troisième mesure d’accompagnement concerne le seuil d’application du régime d’imposition des micro-exploitations soumises aux bénéfices agricoles. Ce seuil, fixé par l’article 69 du code général des impôts, est actuellement de 91 000 euros (il s’agit d’une moyenne triennale de recettes). Il permet de déterminer le bénéfice imposable de leur exploitation, soumise à l’impôt sur le revenu, en appliquant à ces recettes un abattement forfaitaire représentatif de charges égal à 87 %. Ce régime allège en outre les obligations comptables et fiscales des contribuables. Le présent article n’en modifie pas le mécanisme mais porte ce seuil à 120 000 euros, ce qui doit permettre aux plus petits exploitants de disposer de ressources supplémentaires pour investir dans de nouveaux matériels.

III.   les travaux de la commission

La commission a adopté douze amendements qui modifient cet article.

La commission a adopté les amendements identiques I-CD18 de M. Vincent Descoeur, I-CD107 de M. Jean-Yves Bony, I-CD185 de Mme Annick Cousin et I‑CD408 de M. Jean-François Lovisolo tendant à pérenniser la déduction pour épargne de précaution. Ce dispositif est apparu comme l’outil idoine pour permettre aux agriculteurs de gérer leurs risques avec une vision de long terme.

Elle a ensuite adopté l’amendement I-CD126 de M. Vincent Descoeur visant à exonérer de TICPE le biopropane, cette exonération pouvant favoriser le développement de logiques locales de production et de consommation d’énergie ; puis elle a adopté l’amendement I-CD242 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert, exonérant de taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TIFCE) la part d’électricité produite pour les projets d’autoconsommation collective.

Elle a enfin adopté les amendements identiques I-CD439 du rapporteur pour avis, I-CD4 de M. Dino Cinieri, I-CD36 de M. Vincent Descoeur, I-CD37 de M. Anthony Brosse, I-CD171 de M. Stéphane Delautrette et I-CD361 de M. Jean‑Louis Bricout, rétablissant l’exonération de TICPE pour les carburants des véhicules opérationnels et de surveillance des services d’incendie et de secours ainsi que l’exonération de malus sur ces véhicules, que le paragraphe O du présent article supprimait, réaffirmant ainsi la volonté exprimée par le Parlement avec le vote de la loi n° 2023-580 du 10 juillet 2023 visant à renforcer la prévention et la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie.

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Article additionnel après l’article 12
Exonération de taxe foncière sur les propriétés non bâties des zones humides

La commission a adopté l’amendement I-CD80 de Mme Lisa Belluco, exonérant de taxe foncière sur les propriétés non bâties les zones humides, considérant que cet amendement portait la question importante des services rendus par la nature.

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Article additionnel après l’article 12
Modification du taux d’imposition forfaitaire sur les installations photovoltaïques en milieu naturel

La commission a adopté l’amendement I-CD163 de M. Stéphane Delautrette rétablissant un taux plein d’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux, à 8,16 euros par kilowattheure de puissance électrique pour les installations photovoltaïques au sol sur les terres agricoles, naturelles et forestières.

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Article additionnel après l’article 12
Taxe foncière sur les ombrières utilisant l’énergie solaire

La commission a adopté l’amendement I-CD221 de M. Stéphane Delautrette clarifiant le dispositif d’exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties et de la cotisation foncière des entreprises pour les structures porteuses des ombrières utilisant l’énergie solaire photovoltaïque.

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Article additionnel après l’article 12
Exonération de taxes sur les réseaux de chaleur alimentés par des énergies renouvelables ou de récupération

La commission a adopté l’amendement I-CD70 de Mme Christelle Petex-Levet permettant aux collectivités territoriales qui le souhaitent d’exonérer de taxe foncière et de cotisation foncière des entreprises les bâtiments et installations affectés à l’exploitation de réseaux de chaleur alimentés à plus de 50 % par des énergies renouvelables ou de récupération.

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Article additionnel après l’article 12
Exonération de TGAP du gaz produit à partir de combustibles solides de récupération

La commission a adopté l’amendement I-CD217 de M. Stéphane Delautrette exonérant de taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) le gaz produit à partir de combustibles solides de récupération, qui sont des déchets non recyclables issus des refus de tri.

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Article additionnel après l’article 12
Exclusion du carburant des navires de croisière du tarif réduit d’accise

La commission a adopté l’amendement I-CD260 de M. Hendrik Davi, excluant du tarif réduit d’accise le carburant utilisé par les navires de croisière.

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Article 13
Renforcement des incitations fiscales à l’utilisation d’énergie renouvelable dans les transports

Avis favorable de la commission à une adoption avec modifications

 

Le présent article traduit l’objectif de décarbonation progressive du secteur des transports en favorisant l’utilisation d’énergie renouvelable dans les transports. Il modifie à cette fin l’article 266 quindecies du code des douanes.

I.   L’État du droit

Le mécanisme fiscal de la taxe incitative relative à l’utilisation d’énergie renouvelable dans les transports (Tiruert) vise à assurer la présence d’un pourcentage minimum d’énergie renouvelable au sein des quantités totales d’essences, gazoles et carburéacteurs que les entreprises du secteur pétrolier mettent à la consommation.

Ce mécanisme incitatif participe à l’atteinte de l’objectif de 14 % de la consommation finale d’énergie produite à partir de sources renouvelables dans le transport en 2030, conformément à l’article 25 de la directive (UE) 2018/2001 (directive « ENR » ou « RED II ») du 11 décembre 2018, relative à la promotion de l’utilisation d’énergie produite à partir de sources renouvelables.

La Tiruert constitue une taxe à finalité spécifique, telle que prévue au 2 de l’article premier de la directive 2020/262/CE relative au régime général d’accise. Elle est due en France métropolitaine et ne s’applique pas dans les départements d’outre-mer. Les redevables de la Tiruert sont les personnes physiques et morales acquittant l’accise sur les énergies, mentionnée à l’article L. 312-1 du code des impositions sur les biens et les services. Cette accise est perçue sur les produits relevant des catégories fiscales des essences, gazoles et carburéacteurs, définis à l’article L. 312-22 du même code.

L’article 266 quindecies du code des douanes prévoit les conditions de mise en œuvre de la Tiruert et définit notamment les tarifs et les seuils applicables aux différents carburants.

L’assiette de la Tiruert correspond au volume total des essences, des gazoles et des carburéacteurs mis à la consommation au cours d’une année civile, déterminée séparément pour chaque carburant. Le redevable doit acquitter une taxe égale au produit de l’assiette et du tarif auquel est appliqué un coefficient. Ce dernier représente l’écart entre le pourcentage national cible d’incorporation d’énergie renouvelable et la proportion d’énergie renouvelable contenue dans le carburant routier ou aérien qu’il commercialise, ou sous la forme d’électricité renouvelable fournie pour l’alimentation de véhicules au moyen des bornes de recharge publiques, ou sous la forme d’hydrogène renouvelable ou, à partir de 2024, d’hydrogène bas carbone. Si le taux d’incorporation est atteint (logique de plancher), le montant de taxe à payer est nul. Le montant de la Tiruert est donc diminué à proportion de la part d’énergie renouvelable des produits éligibles contenus dans les carburants mis à la consommation.

Le IV de l’article 266 quindecies du code des douanes fixe les tarifs de la Tiruert : le tarif est de 140 euros par hectolitre pour les essences et les gazoles et de 168 euros pour les carburéacteurs.

Les matières premières utilisées afin de produire les biocarburants doivent respecter certaines conditions. Seuls les biocarburants répondant aux critères de durabilité et de réduction de gaz à effet de serre peuvent être pris en compte pour le calcul de la réduction du taux de la taxe, conformément à l’article L. 661-2 du code de l’énergie. Par ailleurs, des plafonds d’utilisation de matières premières sont présents et limitent par exemple l’usage de matières premières issues de cultures destinées à l’alimentation humaine ou animale à 7 % ou interdisent les produits à base d’huile de soja et d’huile de palme. D’autres plafonds existent pour les matières premières telles que des égouts pauvres (issus des plantes sucrières), des amidons résiduels (issus des plantes riches en amidon), le tallöl (résine issue du bois de pin), ou les graisses et huiles usagées.

Les matières premières considérées comme « avancées » sont mentionnées aux parties A et B de l’annexe IX de la directive RED II, et présentent des impacts environnementaux faibles. Ces matières premières avancées sont comptabilisées pour le double de leur valeur réelle dans le calcul de pourcentage d’incorporation, ainsi que les graisses et huiles usagées, l’électricité et l’hydrogène renouvelable. Au-delà d’un certain seuil, ces matières premières sont cependant comptabilisées à leur valeur réelle.

Cette taxe est ainsi incitative et vise la modification du comportement des redevables. Elle ne produit donc que des recettes budgétaires marginales.

II.   Les dispositions du projet de loi de finances

L’article 13 vise à renforcer les incitations fiscales relatives à l’utilisation d’énergie renouvelable dans les transports via l’évolution des objectifs d’incorporation d’énergie renouvelable et la suppression du double compte des carburéacteurs pour atteindre ces objectifs.

A.   des Objectifs d’incorporation plus ambitieux

Le b du 1° du I de l’article 13 augmente les pourcentages nationaux cibles d’incorporation d’énergie renouvelable dans les transports. À partir du 1er janvier 2025, le pourcentage cible passe de :

Le a du 2° du I de l’article 13 propose une révision des seuils à partir desquels les quantités d’énergie issues de certaines matières premières ne peuvent pas être prises en compte dans le pourcentage d’incorporation. Ces plafonds sont relevés pour les essences de 1,1 % à 1,2 % pour l’utilisation d’égouts pauvres et amidons résiduels, et de 0,9 % à 1,1 % pour l’utilisation de graisses et huiles usagées. Pour les gazoles, le plafond d’utilisation des graisses et huiles usagées est rehaussé de 1,1 % à 1,2 %.

Par ailleurs, des précisions sont apportées sur la prise en compte des égouts pauvres (issus de plantes sucrières) pouvant relever à la fois de cultures destinées à l’alimentation et de matières premières avancées. À partir du 1er janvier 2024, il sera possible de prendre en compte à hauteur de 60 % le contenu énergétique des égouts pauvres aux fins de la catégorie 2 « égouts pauvres » et 40 % aux fins de la catégorie 1 « cultures destinées à l’alimentation humaine ou animale ». Actuellement, les pourcentages sont de 50 % pour chaque catégorie. Ces pourcentages seront déterminés par voie réglementaire à compter du 1er janvier 2025, pour répondre plus rapidement et facilement aux nécessités de mise à jour de ces pourcentages suivant l’évolution de la filière.

Le b du 2° du I de l’article 13 précise les nouveaux seuils d’incorporation minimale de matières premières avancées, à partir du 1er janvier 2025, fixés à 1,8 % au lieu de 1,3 % pour les essences et 0,7 % au lieu de 0,5 % pour les gazoles.

Le c du 2° du I de l’article 13 modifie le seuil à partir duquel les quantités d’énergie sont comptabilisées à leur valeur réelle et ne sont plus comptées double. Ainsi, le plafond d’incorporation des graisses et huiles usagées comptées double est augmenté de 0,2 % à 0,4 % pour les essences.

Les modifications apportées par les a, b et c du 2° du I de l’article 13 ont pour but d’atteindre l’objectif rehaussé des pourcentages nationaux cibles d’incorporation d’énergie renouvelable dans les transports prévus par le 1° du I de l’article 13.

B.   Suppression du double compte pour les carburÉacteurs

Le c du 2° du I de l’article 13 supprime le double compte pour les carburéacteurs. Actuellement, toute utilisation d’énergie issue de matières premières avancées, de graisses et huiles usagées, d’électricité ou d’hydrogène renouvelable était comptée double sans plafond pour atteindre le pourcentage cible d’incorporation d’énergie renouvelable des carburéacteurs. Lors de l’audition du ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, il a été précisé que seuls des biocarburants avancés sont incorporés dans les carburéacteurs, ce qui n’est pas le cas dans les filières gazole ou essence. Le double compte n’apporte donc pas d’incitation supplémentaire à l’utilisation de biocarburants avancés. La suppression du double compte a ainsi pour but d’encourager les redevables à l’incorporation réelle de biocarburants aux impacts environnementaux plus faibles.

Le a du 1° du I de l’article 13 modifie le tarif de la taxe. À partir du 1er janvier 2025, le tarif de la taxe pour les carburéacteurs augmente de 168 euros par hectolitre à 280 euros par hectolitre. L’augmentation de ce tarif permettrait de maintenir l’incitation fiscale pour les redevables, suite à la suppression du double compte. Ce tarif a été calculé en prenant en compte les réglementations applicables dans les autres États membres et le risque lié d’exportation des biocarburants produits en France vers d’autres pays.

III.   les travaux de la commission

La commission a adopté l’amendement I-CD440 du rapporteur pour avis, visant à introduire le double compte de l’hydrogène bas-carbone pour le calcul du pourcentage d’incorporation de biocarburant, au même titre que les matières premières avancées, les graisses et huiles usagées ainsi que l’hydrogène renouvelable.

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Article additionnel après l’article 13
Instaurer une taxe incitative relative à la réduction de l’intensité d’émission de gaz à effet de serre dans les transports

La commission a adopté l’amendement I-CD441 du rapporteur pour avis, instaurant une taxe incitative relative à la réduction de l’intensité d’émission de gaz à effet de serre dans les transports. Elle a pour objectif de promouvoir l’utilisation d’énergies renouvelables moins émettrices de gaz à effet de serre, notamment le biogaz renouvelable.

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Article 14
Renforcement du caractère incitatif à la transition énergétique de la fiscalité applicable aux véhicules

Avis favorable de la commission à une adoption avec modifications

 

Le présent article vise à inciter au verdissement du parc automobile des particuliers et des entreprises. Il modifie à cette fin le chapitre Ier du titre II du livre IV du code des impositions sur les biens et services.

I.   L’État du droit

Le chapitre Ier du titre II du livre IV du code des impositions sur les biens et services définit les taxes applicables aux véhicules et les conditions de leur mise en œuvre : taxes sur l’immatriculation, sur l’affectation des véhicules à des fins économiques, sur le renouvellement du permis de conduire ou sur les autoroutes concédées. L’article 14 du projet de loi de finances ne vient modifier que les dispositions relatives aux taxes sur l’immatriculation des véhicules de tourisme et sur les véhicules affectés à des fins économiques (véhicules de sociétés).

A.   Taxes applicables aux véhicules de tourisme

Les véhicules de tourisme regroupent les véhicules de la catégorie M1 (voitures particulières autres que les véhicules à usage spécial et accessibles en fauteuil roulant) et de la catégorie N1 (utilitaires légers conçus pour le transport de marchandises) conformément à l’article L. 421-2 du code des impositions sur les biens et services. Les véhicules de la catégorie N1 concernés sont les véhicules de type « Camion pick-up » comportant au moins cinq places assises et qui ne sont pas affectés exclusivement à l’exploitation des remontées mécaniques et des domaines skiables, et « Camionnette » comportant au moins deux rangs de places assises et affectés au transport de personnes.

Les véhicules de tourisme doivent s’acquitter de deux taxes au moment de leur immatriculation : la taxe sur les émissions de dioxyde de carbone (CO2), aussi appelée « malus CO2 à l’immatriculation » (articles L. 421-58 à L. 421-70-1 du code des impositions sur les biens et services) et la taxe sur la masse en ordre de marche, aussi appelée « malus masse » (articles L. 421-71 à L. 421-81-1 du même code).

Le montant de la taxe sur les émissions de dioxyde de carbone, « malus CO2 à l’immatriculation », est déterminé en fonction des émissions de dioxyde de carbone calculées selon les méthodes WLTP ou NEDC, ou en fonction de la puissance administrative (en chevaux administratifs) avec des barèmes spécifiques selon l’année de première immatriculation. La méthode WLTP recourt à une procédure d’essai mondiale harmonisée pour les véhicules légers, définie à l’annexe XXI du règlement européen (UE) 2017/1151, et prend en compte notamment les normes d’émissions de polluants EURO 5 et 6. Cette méthode est applicable aux véhicules M1 et N1 ayant une date de première immatriculation à partir du 1er mars 2020. La méthode NEDC permet la détermination des émissions des véhicules par les versions successives de la directive 70/220/CEE du Conseil du 20 mars 1970 pour les véhicules immatriculés depuis le 1er juin 2004. La norme WLTP permet donc de mesurer les émissions polluantes des véhicules dans des conditions plus proches des conditions réelles de conduite que le dispositif NEDC. Si le véhicule n’est concerné ni par la méthode WLTP, ni par la méthode NEDC, c’est-à-dire qu’il n’a pas fait l’objet d’une réception européenne, le montant de la taxe est alors déterminé par la puissance administrative.

Au sein du barème WLTP, pour les années à compter de 2023, la taxe est nulle pour tout véhicule dont les émissions de CO2 sont inférieures à 123 grammes par kilomètre. Pour chaque gramme supplémentaire, le tarif augmente. Au-delà du seuil de 225 grammes par kilomètre, le tarif atteint 50 000 euros. De même, pour le barème NEDC, la taxe est nulle pour les émissions de CO2 inférieures à 110 grammes par kilomètre et atteint 20 000 euros au-delà du seuil de 184 grammes par kilomètre. Pour le barème en puissance administrative, la taxe est nulle pour une puissance inférieure à 4 chevaux administratifs (CV), et atteint 50 000 euros pour 28 CV. Ces barèmes ont été revus à la hausse à plusieurs reprises, notamment par la loi de finances pour 2021, avec une trajectoire pluriannuelle.

Un plafonnement du montant de cette taxe a été mis en place par la loi de finances pour 2021 et s’applique depuis le 1er janvier 2022. Conformément à l’article L. 421-61 du code des impositions sur les biens et services, pour les véhicules de première immatriculation à compter du 1er janvier 2022, le montant de la taxe « malus CO2 à l’immatriculation » est plafonné à 50 % du prix d’acquisition du véhicule.

La masse d’un véhicule a une incidence importante sur la consommation d’énergie de ce dernier et son impact sur l’environnement. En effet, l’empreinte carbone du véhicule dépend de son cycle de vie, notamment des matériaux utilisés lors de la fabrication du véhicule et des carburants utilisés. Plus un véhicule est lourd, plus il a un impact sur l’environnement. Face à l’augmentation du poids des véhicules proposés à la vente, la taxe sur la masse en ordre de marche a été instaurée depuis le 1er janvier 2022. Le montant de la taxe sur la masse en ordre de marche, le « malus masse », est le produit du tarif unitaire par la fraction de la masse en ordre de marche, selon la première année d’immatriculation du véhicule. Cette taxe n’est applicable que pour les dates de première immatriculation à compter de 2022 et pour les véhicules de plus de 1 800 kilogrammes. À compter de 2022, le tarif unitaire est de 10 euros par kilogramme au-delà du seuil de 1 800 kilogrammes.

Les exonérations et abattements pour les « malus CO2 à l’immatriculation » et « malus masse » sont définis respectivement aux articles L. 421-65 à L. 421‑10‑1 et L. 421-76 à L. 421-81-1 du code des impositions sur les biens et services, avec notamment :

– une exonération des véhicules dont la source d’énergie est exclusivement l’électricité, l’hydrogène ou une combinaison des deux ;

– pour le « malus CO2 à l’immatriculation », des abattements lorsque la source d’énergie du véhicule comprend le superéthanol E 85. L’abattement est de 40 % des émissions de dioxyde de carbone, sauf lorsque ces émissions dépassent 250 grammes par kilomètre, et de 2 chevaux administratifs pour la puissance administrative, sauf lorsque cette dernière excède 12 chevaux ;

– pour le « malus masse », une exonération des véhicules hybrides électriques rechargeables de l’extérieur dont l’autonomie équivalente en mode tout électrique en ville est supérieure à 50 kilomètres ;

– un abattement pour les familles nombreuses, appliqué a posteriori par une demande de remboursement ;

– une réduction de 10 % du montant de la taxe par année entamée depuis la date de la première immatriculation, pour les véhicules importés d’occasion.

B.   Taxes applicables aux vÉhicules affectÉs à des fins Économiques

Les véhicules affectés à des fins économiques concernent les véhicules détenus par une entreprise immatriculée en France, ou circulant sur des voies publiques pour la réalisation de l’activité économique ou grâce aux frais engagés par une entreprise.

Afin d’inciter au renouvellement du parc automobile des entreprises, les véhicules de tourisme affectés à des fins économiques sont actuellement soumis à deux taxes : une taxe annuelle sur les émissions de dioxyde de carbone, aussi appelée « taxe CO2 annuelle », et une taxe sur l’ancienneté. Les taxes annuelles sur les émissions de dioxyde de carbone et sur l’ancienneté ont remplacé, depuis le 1er janvier 2022, les deux composantes de l’ancienne taxe sur les véhicules de société (TVS).

Le montant de ces taxes est égal au produit du tarif annuel et du pourcentage d’utilisation du véhicule sur une année.

Pour la « taxe CO2 annuelle », le tarif annuel dépend des émissions de dioxyde de carbone calculées selon les méthodes WLTP ou NEDC, ou en fonction de la puissance administrative (en chevaux administratifs). Pour la méthode WLTP et la méthode NEDC, aucune taxe ne doit être acquittée pour des émissions de CO2 inférieures à 21 grammes par kilomètre. Au-delà du seuil de 269 grammes par kilomètre (WLTP) et de 250 grammes par kilomètre (NEDC), le tarif unitaire de 29 euros s’applique pour chaque gramme par kilomètre. Pour la méthode en puissance administrative, le tarif annuel évolue entre 750 euros pour les véhicules de moins de 4 chevaux administratifs à 4 500 euros pour 15 chevaux administratifs ou plus.

Le tarif annuel de la taxe annuelle sur l’ancienneté dépend de l’année de première immatriculation du véhicule et de la source d’énergie utilisée (assimilée au gazole ou non). La source d’énergie est assimilée au gazole lorsque la source d’énergie est exclusivement le gazole ou une combinaison du gazole et d’un autre produit dépassant des seuils d’émissions de dioxyde de carbone (120 grammes par kilomètre selon la méthode WLTP, 100 grammes par kilomètre selon la méthode NEDC, ou moins de 6 chevaux administratifs). Le tarif est plus important lorsque la source d’énergie est assimilée au gazole : il évolue de 600 euros pour une première immatriculation jusqu’à l’année 2000, à 40 euros pour une première immatriculation à partir de 2015. Pour les sources d’énergie non assimilées au gazole, ce montant varie entre 20 et 70 euros.

Les exonérations et abattements de la « taxe CO2 annuelle » et de la taxe annuelle sur l’ancienneté sont définis respectivement aux articles L. 421-123 à L. 421-132 et L. 421-136 à L. 421-144 du code des impositions sur les biens et service, avec notamment :

– une exonération des véhicules dont la source d’énergie est exclusivement l’électricité, l’hydrogène ou une combinaison des deux ;

– pour la « taxe CO2 annuelle », une exonération des véhicules hybrides électriques ou hybrides de sources non renouvelables (d’une part, gaz naturel ou gaz de pétrole liquéfié, et d’autre part, essence ou superéthanol E85).

II.   Les dispositions du projet de loi de finances

A.   Renforcement des taxes sur les vÉhicules de tourisme

1.   Renforcement du « malus CO2 à l’immatriculation »

Le « malus CO2 à l’immatriculation » est modifié régulièrement, pour chaque année de première immatriculation, afin d’atteindre les objectifs nationaux ou européens de décarbonation des transports et favoriser l’achat de véhicules neufs peu polluants.

Dans son article 103, la loi « climat et résilience » ([2]) fixe l’objectif, pour 2030, de fin de ventes des voitures particulières neuves émettant plus de 123 grammes de dioxyde de carbone selon la norme WLTP et 95 grammes de dioxyde de carbone par kilomètre selon la norme NEDC, pour 95 % du marché des ventes de véhicules neufs. Actuellement, dans le « malus CO2 à l’immatriculation », le seuil de déclenchement, en-dessous duquel la taxe est nulle est 123 grammes par kilomètre. La révision des barèmes WLTP et de puissance administrative est donc proposée aux 3° et 5° du C de l’article 14 du projet de loi de finances pour renforcer l’incitation et atteindre cette cible à terme. Cependant, le barème NEDC n’a pas été modifié, prenant en compte l’interdiction depuis 2021 d’immatriculer des véhicules neufs sous la norme NEDC. Pour les véhicules d’occasion, le barème indiqué dans le code des impositions sur les biens et services reste applicable.

Il est donc proposé, pour le barème WLTP, d’abaisser le seuil de déclenchement de 123 grammes par kilomètres à 118 grammes par kilomètre au 1er janvier 2024. De même, le seuil d’atteinte du plafond passe de 226 à 194 grammes par kilomètre. Le montant maximal du barème du tarif passerait de 50 000 à 60 000 euros. Pour le barème en puissance administrative, le tarif augmenterait dès 4 chevaux administratifs de 500 à 1 000 euros, jusqu’à atteindre 60 000 euros à partir de 15 chevaux, contre 50 000 euros à partir de 28 chevaux en 2023. Ces modifications ont un impact limité pour les véhicules faiblement émetteurs et plus important pour les véhicules plus pollueurs.

Au sein des barèmes NEDC et en puissance administrative, l’année de première immatriculation en 2013 a été supprimée. Seuls les véhicules thermiques immatriculés à partir de 2014 seront désormais soumis à la taxe sur les émissions de dioxyde de carbone. Cette disposition prend en compte la réduction de 10 % par an du montant de la taxe pour les véhicules d’occasion, qui implique qu’au bout de dix ans, la taxe est nulle.

Par ailleurs, l’article relatif au plafond de la taxe à 50 % du prix d’acquisition du véhicule, applicable depuis le 1er janvier 2022, est abrogé par le 2° du C de l’article 14 du projet de loi de finances. En effet, ce plafonnement aurait touché un nombre limité de véhicules très polluants, dont le prix de vente est particulièrement élevé. Des difficultés spécifiques de mise en œuvre pour vérifier les prix de référence des véhicules auraient également été constatées.

2.   Renforcement du « malus masse »

La taxe sur la masse en ordre de marche a actuellement un seuil de déclenchement de 1 800 kilogrammes et ne vise réellement qu’un nombre restreint de véhicules (environ 2 % des véhicules neufs thermiques). Il est ainsi proposé aux 1° et 3° du D de l’article 14 du projet de loi de finances de baisser ce seuil à 1 600 kilogrammes. Cette révision du seuil cherche à toucher davantage de véhicules consommateurs en énergie et rendre le dispositif plus efficace.

À partir de 2024, les véhicules de masse inférieure à 1 600 kilogrammes seront exemptés de taxe. Le barème est ensuite graduel tous les 100 kilogrammes entre 1 600 et 2 100 kilogrammes, et le tarif marginal commence à partir de 10 euros. Au-delà du seuil de 2 100 kilogrammes, le montant du tarif marginal est de 30 euros. Pour comparaison, en 2022 et 2023, à partir de 1 800 kilogrammes, le tarif marginal était de 10 euros.

B.   Inciter au renouvellement du parc automobile des entreprises

1.   Renforcement de la « taxe CO2 annuelle »

Afin de mobiliser davantage les entreprises et les orienter vers des véhicules peu émetteurs, la « taxe CO2 annuelle » est revue à la hausse, de manière pluriannuelle. Ces modifications ont un impact limité pour les véhicules faiblement émetteurs et plus important pour les véhicules plus pollueurs.

Pour les barèmes WLTP et NEDC, une révision des seuils des fractions des émissions de CO2 ainsi que du tarif marginal est proposée aux a à e du 2° du E de l’article 14 du projet de loi de finances. À partir du 1er janvier 2024, tous les seuils de déclenchement de ces barèmes diminuent.

Le barème WLTP commence à s’appliquer aux véhicules émettant plus de 15 grammes par kilomètre, pour lesquels le tarif marginal est fixé à 1 euro (soit 15 euros annuels). Le tarif marginal augmente ensuite en fonction de la fraction des émissions de CO2. Au-delà du seuil de 176 grammes par kilomètre, le tarif marginal atteint 65 euros (soit 11 440 euros annuels). Pour comparaison avec l’année 2023, le barème s’appliquait à partir de 21 grammes par kilomètre avec un tarif annuel de 17 euros et le dernier seuil était de 269 grammes par kilomètre pour un tarif annuel de 7 747 euros.

Pour le barème NEDC, le seuil de déclenchement passe de 21 à 13 grammes par kilomètre et le seuil plafond de 250 à 146 grammes par kilomètre avec un tarif marginal de 65 euros au lieu de 29 euros de tarif unitaire annuel.

Afin de maintenir l’incitation de verdissement de la flotte et la renforcer, le seuil de déclenchement des barèmes WLTP et NEDC diminue chaque année jusqu’au 1er janvier 2027. À partir de cette date, il n’existe plus de tarif marginal nul. Cela signifie donc que tout véhicule affecté à des fins économiques émettant du CO2 devra s’acquitter d’une taxe annuelle sur les émissions de CO2 à hauteur de ses émissions.

Pour le barème en puissance administrative, le tarif annuel associé aux chevaux administratifs est augmenté pour l’année 2024 de 750 à 1 500 euros pour la puissance administrative la plus basse, et de 4 500 à 6 000 euros pour les puissances les plus importantes (supérieures à 15 chevaux administratifs). Le tarif marginal de ce barème augmente de manière linéaire chaque année jusqu’à 2027. À compter du 1er janvier 2027, il atteint 2 250 euros pour les puissances les plus basses et 6 750 euros pour les puissances les plus hautes.

2.   Remplacement de la taxe annuelle sur l’ancienneté par une taxe sur les émissions de polluants atmosphériques

La taxe annuelle sur l’ancienneté, basée sur l’utilisation du gazole, n’atteint pas son objectif d’incitation au renouvellement vers un parc automobile d’entreprise décarboné. En effet, le tarif est considéré comme particulièrement faible pour les véhicules immatriculés depuis 2015.

Aux 3° et 4° du E de l’article 14 du projet de loi de finances, il a été choisi de réécrire les articles L. 421-34 et L. 421-35 du code des impositions sur les biens et services, relatifs à la taxe sur l’ancienneté, pour créer un nouveau barème visant les émissions de polluants atmosphériques. Cette modification a pour but de verdir la flotte de véhicules d’entreprise via un barème plus efficient et à meilleur rendement.

Le véhicule affecté à des fins économiques devra acquitter une taxe en fonction de la catégorie d’émissions de polluants à laquelle il appartient. Ces catégories reprennent les catégories déjà existantes dans le cadre des vignettes Crit’Air :

– Catégorie E : véhicule électrique, à hydrogène ou combinaison des deux ;

– Catégorie 1 : véhicules essence respectant les normes EURO 5 et 6 ;

– Véhicules les plus polluants n’entrant ni dans la catégorie E ou 1.

Un tarif est associé à chacune de ces catégories. Ainsi, les véhicules de catégorie E n’auront aucune taxe à payer, les véhicules de catégorie 1 devront s’acquitter de 100 euros annuellement selon le nombre de jours d’utilisation, et le montant du tarif annuel pour les véhicules les plus polluants atteint 500 euros.

Actuellement, au b du 3° du E du projet de loi de finances, une erreur figure sur le type de véhicule concerné par la catégorie 1 avec la mention « qui ne sont pas alimentés par un moteur thermique à allumage commandé ». Un moteur thermique à allumage commandé désigne un moteur à essence. Ce point, confirmé lors de l’audition avec le ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, pourra être corrigé par un amendement.

C.   Révision des exonérations et des abattements

1.   Suppression des exonérations dont bénéficient les véhicules hybrides

Les véhicules hybrides sont émetteurs de dioxyde de carbone. Afin de prendre en compte leur impact sur l’environnement, les exonérations dont ils bénéficient pour la taxe sur la masse en ordre de marche et la taxe annuelle de CO2 seront supprimées à compter du 1er janvier 2025. Cette suppression est introduite par le 4° du D et le g du 2° du E de l’article 14 du projet de loi de finances. Elle concerne donc les véhicules de tourisme et les véhicules à des fins économiques.

Cependant, la suppression de l’exonération s’accompagne de mesures d’abattement spécifiques à ces deux taxes :

– Pour le « malus masse », un véhicule hybride électrique rechargeable de l’extérieur dont l’autonomie en ville est supérieure à 50 kilomètres, bénéficie d’un abattement de 200 kilogrammes, correspondant forfaitairement au poids d’une batterie ;

– Pour la « taxe CO2 annuelle », un abattement de 40 % des émissions de CO2 ou de 2 chevaux administratifs, sous respect de plafonds prédéfinis, est accordé aux véhicules hybrides utilisant du superéthanol E85. Cette disposition reprend un abattement déjà applicable au « malus CO2 à l’immatriculation ».

2. Prise en compte du retour d’expérience pour mieux cibler les taxes

Afin d’élargir à d’autres types de véhicules les taxes sur les véhicules de tourisme, le champ attribué à la catégorie N1 (véhicules utilitaires) a été modifié par le 1° du A de l’article 14 du projet de loi de finances. Jusqu’à présent, la catégorie N1 comportait les véhicules « camion pick-up » et « camionnette » avec des conditions spécifiques sur les places assises (respectivement 5 places assises et deux rangées de places assises), ou leur utilisation (transport de personnes). La liste des véhicules de la catégorie N1 assimilés à des voitures particulières sera désormais déterminée par voie réglementaire. Cette liste permettra ainsi de soumettre aux taxes les véhicules de tourisme comportant moins de cinq places, par exemple les véhicules « pick-up » comportant quatre places ou plus, et le « camion hors route » (transport de marchandises de moins de 3,5 tonnes avec usage hors route). En effet, seul un nombre très restreint des véhicules « pick-up » en circulation serait effectivement soumis aux taxes.

Les véhicules importés d’occasion bénéficient d’une réduction de 10 % du montant de la taxe par année entamée depuis la date de la première immatriculation. Tout véhicule importé d’occasion immatriculé pour la première fois il y a dix ans ou plus est donc totalement exonéré de malus. Diminuer de 10 % à 5 % cette réduction de taxe permettrait de prendre en compte les émissions de polluants de ces véhicules d’occasion et d’inciter à la transition vers un parc automobile d’occasion décarboné. À cette fin, le a du 1° du C et le a du 2° du D de l’article 14 du projet de loi de finances modifient le coefficient de vétusté pour le fixer à 5 % pour le « malus CO2 à l’immatriculation » et le « malus masse ».

Le code des impositions sur les biens et services prévoit des abattements spécifiques pour les familles nombreuses pour les « malus CO2 à l’immatriculation » et le « malus masse ». Ainsi, une personne détenant un véhicule acheté ou loué pour une longue durée, et assumant la charge d’au moins trois enfants, peut bénéficier d’un abattement selon le nombre d’enfants, dans la limite d’un véhicule d’au moins cinq places par foyer. La réduction au bénéfice des familles nombreuses n’est pas appliquée au moment du calcul de la taxe à payer, mais donne lieu à remboursement ultérieur sur demande. Suite au retour d’expérience de la mise en œuvre de ce remboursement, les 6° du C et 5° du D de l’article 14 du projet de loi de finances introduisent une condition supplémentaire pour en bénéficier : le remboursement est limité à une fois par période de deux ans. Cet ajout fait suite à des cas suspectés de fraude. Certains usagers auraient bénéficié à plusieurs reprises et à intervalles rapprochés de ce remboursement après cession de leur véhicule.

III.   les travaux de la commission

La commission a adopté l’amendement I-CD442 du rapporteur pour avis, corrigeant une erreur matérielle présente dans le projet de loi de finances initial, sur la définition de la catégorie 1 des véhicules concernés par la taxe sur les polluants atmosphériques.

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Article additionnel après l’article 14
Tarif réduit de l’accise sur l’électricité en cas de valorisation par les industriels de la chaleur fatale vers un réseau de chaleur ou de froid

La commission a adopté les amendements identiques I-CD69 de Mme Christelle Petex-Levet et I-CD239 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert appliquant un tarif réduit d’accise à l’électricité consommée par les industriels qui valorisent la chaleur fatale générée par leur activité en la fournissant à un réseau de chaleur ou de froid.

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Article 15
Taxe sur l’exploitation des infrastructures de transport de longue distance

Avis favorable de la commission à une adoption sans modification

 

Le présent article instaure à compter du 1er janvier 2024 une taxe sur l’exploitation d’infrastructures de transport de longue distance, dont le rendement attendu pour la première année est de 600 millions d’euros. Cette somme a vocation à financer des infrastructures, principalement ferroviaires, afin de favoriser la mobilité de nos concitoyens et d’en réduire l’impact sur l’environnement.

I.   les raisons de l’instauration d’une nouvelle taxe

La taxe prévue par le présent article répond indéniablement à un impératif d’action publique, mais le dispositif retenu vise essentiellement à prévenir un problème juridique.

A.   Assurer les investissements en faveur des transports collectifs

L’impératif d’action publique a été mis en lumière par le rapport du Conseil d’orientation des infrastructures (COI), rendu public le 24 février 2023, « Investir plus et mieux dans les mobilités pour réussir leurs transitions ». Instance consultative placée auprès du ministre chargé des transports, le COI a indiqué dans son rapport que les transports devaient faire l’objet en France d’une loi de programmation donnant une visibilité précise, au minimum pour dix ans, et éclairant les stratégies poursuivies sur vingt ans. La priorité devrait être donnée aux services répondant aux besoins de la population et à un usage collectif, partagé et plus sobre en énergie. Cette politique se place dans un contexte de dérèglement climatique auquel il est plus qu’urgent de réagir.

Selon le scénario de planification écologique retenu par le COI, l’effort collectif de l’État, des autorités organisatrices de la mobilité et des entreprises de transport (et de toutes les parties prenantes des politiques de mobilité) devrait être porté à 175 milliards d’euros de 2022 à 2032, et il mobiliserait plus de 55 milliards d’euros d’engagement de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France). Comme l’indiquait M. David Valence, député et président du COI dans l’avant-propos du rapport précité, il s’agit « d’un scénario de transition des infrastructures tout autant que de transition écologique ».

En réponse aux préconisations du COI, le Gouvernement a présenté son Plan d’avenir pour les transports. Mme Elisabeth Borne, Première ministre, a annoncé que l’État souhaitait s’engager, « aux côtés de la SNCF, de l’Union européenne et des collectivités locales, pour réussir une nouvelle donne ferroviaire, de l’ordre de 100 milliards d’euros d’ici 2040 ». Le transport ferroviaire n’est pas la seule piste d’action du Gouvernement, qui souhaite intensifier le recours aux transports individuels et collectifs décarbonés, mais il est destinataire de la plus grande partie des investissements futurs.

Le Gouvernement a suivi les préconisations du COI et doit donc assurer pour deux décennies le financement de la modernisation et de l’extension des transports collectifs. Les enjeux sont considérables, avec l’amélioration de la vie quotidienne de nos concitoyens – 73 % d’entre eux utilisent chaque jour les transports en commun – et la décarbonation du secteur des transports. Rappelons qu’il représentait en 2020, tous modes confondus, 31 % des émissions de gaz à effet de serre de notre pays (transports, industries et bâtiments concentrent les deux tiers de l’effort pour réduire d’ici à 2030 les émissions de 138 millions de tonnes de CO2).

Dès le 24 février 2023, Mme Elisabeth Borne, Première ministre, avait annoncé qu’elle souhaitait mettre à contribution « les secteurs les plus émetteurs de gaz à effet de serre, comme l’aérien, et ceux qui dégagent des profits importants, comme les sociétés d’autoroutes ».

Il n’existe pas de taxe spécifique sur l’ensemble des infrastructures de transport, mais quelques taxes, dont deux sont assises sur les sociétés d’autoroutes. Le transport aérien est également, de longue date, soumis à des prélèvements fiscaux mais leur fondement est de contribuer au financement de services spécifiques (sûreté, sécurité, incendie et sauvetage, péril animalier). Outre la TVA, ce secteur acquitte la taxe de l’aviation civile, la taxe d’aéroport, la taxe sur les nuisances sonores aériennes et la taxe de solidarité.

Alors que le contexte budgétaire est tendu, le Gouvernement a besoin d’investir dans les infrastructures ferroviaires, tant de proximité que de longue distance. La régénération d’un réseau qui vieillit nécessite de dégager 1 milliard d’euros par an ; 500 millions d’euros doivent être ajoutés pour sa modernisation. La transition écologique ne réussira cependant que si les transports en commun se substituent de manière croissante aux véhicules individuels, ce qui induit de lancer de nouveaux réseaux, comme les RER métropolitains. Pour atteindre cet objectif, qui répond aux engagements de politique climatique de notre pays, le Gouvernement souhaite recourir à de nouvelles ressources budgétaires.

Le Gouvernement a réfléchi initialement à deux options : soit viser l’ensemble des infrastructures de transport, soit soumettre à taxation les exploitants d’infrastructures disposant d’une forte assise financière, en pratique les sociétés d’autoroutes. Il a combiné les deux options, en axant néanmoins son dispositif sur l’effort contributif des exploitants dont les revenus d’activité sont importants. Il ne pouvait l’axer exclusivement sur les sociétés concessionnaires d’autoroutes (SCA) et sur les sociétés d’économie mixte concessionnaires d’autoroutes (SEMCA) car s’il est indéniable que le montant de leurs revenus d’exploitation et de leurs bénéfices respectifs (déjà soumis à l’impôt sur les sociétés) constitue une base taxable, les dispositions de leurs contrats de concession réduisent la possibilité d’une mesure qui en modifierait substantiellement l’équilibre.

B.   Les bénéfices importants des sociétés concessionnaires d’autoroutes

L’Autorité de régulation des transports (ART), qui contrôle et régule une partie de l’activité des SCA, a indiqué en février 2023 le montant des bénéfices de ces sociétés en 2021, à savoir 3,9 milliards d’euros, soit 430 000 euros de moyenne sur chaque kilomètre, pour un réseau qui en compte 9 117. Il existe évidemment de fortes disparités selon les réseaux.

Ce constat a été rendu public au moment où, comme chaque année, au 1er février, les SCA sont autorisées à augmenter leurs tarifs. La procédure, encadrée par l’État, tient compte de nombreux facteurs, comme l’inflation, les prévisions de trafic, le montant des travaux réalisés… Les péages ont augmenté en moyenne de 4,75 % en 2023, ce qui a alimenté à nouveau la polémique sur cette hausse concomitante à des profits qualifiés d’excessifs des SCA et de la question de leur nationalisation. Auditionnés par la commission des finances et la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale le 22 mars 2023, MM. Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et M. Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports, ont expliqué au Parlement les raisons de cette situation, qui provient de la nature des contrats de concession. En 2020, le sénateur M. Vincent Delahaye, rapporteur d’une commission d’enquête du Sénat, avait souligné la progression plus rapide que prévu des bénéfices des SCA. ([3])

Le Gouvernement a avancé à plusieurs reprises un effet d’aubaine qu’il évalue de 5 à 6 milliards d’euros – qui permet aux SCA d’augmenter leurs résultats financiers par l’effet cumulé de plusieurs facteurs : réduction de moitié, puis suppression de la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises, baisse du taux de l’impôt sur les sociétés, entre autres, au moment où les contrats de concession sont proches de la phase finale de leur exécution et que les investissements, facteurs de risque pour ces sociétés, sont remboursés. Aussi a-t-il recherché ces derniers mois les voies de leur taxation.

C.   Le risque de remise en cause de l’équilibre des contrats

Le Gouvernement a interrogé à deux reprises le Conseil d’État sur les moyens de taxer les SCA. Une première saisine, en date du 7 avril 2023, portait sur l’appréciation de la rentabilité d’un concessionnaire, sur la base de laquelle une décision unilatérale de réduction d’une concession pourrait être prise ; sur la manière dont une rémunération pourrait être jugée excessive et enfin, au cas où une telle rémunération serait identifiée, sur les modalités juridiques que devrait respecter l’État pour résilier par anticipation une concession autoroutière. Une seconde saisine, également le 7 avril 2023, portait d’une part, sur la sécurité juridique des différents scenarii mettant à contribution soit les titulaires des contrats de concession, soit les seules sociétés d’autoroutes ; d’autre part, sur la possibilité d’éviter que l’effet des mesures envisagées soit neutralisé par le mécanisme contractuel de compensation des hausses de fiscalité spécifique aux SCA, prévu par l’article 32 de leurs cahiers des charges.

Le Gouvernement a rendu public les réponses du Conseil d’État, en date du 8 juin 2023. Dans son avis sur la première saisine, le Conseil a indiqué, s’agissant de l’appréciation d’un taux de rentabilité, que plusieurs approches existaient en analyse financière, mais que l’utilisation d’indicateurs devait tenir compte dans le cas des concessions autoroutières, de leur modèle économique particulier. Celui-ci est fondé sur l’existence d’une période déficitaire, suivie d’une phase excédentaire, à partir de laquelle les comptes sont rééquilibrés. Les flux doivent donc s’analyser sur l’ensemble de la durée d’une concession. Ainsi, le bénéfice enregistré en 2021 doit-il être mis en balance avec les déficits enregistrés les années précédentes. Quant à une résiliation unilatérale d’une concession sur la base d’une rémunération jugée excessive, la juridiction administrative a rappelé que les éléments essentiels d’un contrat de concession sont réputés avoir été négociés entre les parties de façon à permettre au cocontractant de la personne publique de financer les biens qu’il est tenu d’affecter au service. L’équation financière de la concession « est acceptée par le concessionnaire comme lui assurant la couverture de ses dépenses, une rémunération raisonnable et un bénéfice normal. Les deux termes de l’équation sont réputés se faire équilibre au moment fixé par les parties contractantes ». Le Conseil d’État rappelle que dans un contrat de concession, le concessionnaire accepte un risque financier et économique, qui tient à des facteurs exogènes, peu prévisibles à l’avance, comme l’évolution des taux d’intérêt et de l’inflation, l’évolution des coûts des matériaux de construction, de l’énergie et des matières premières… S’il doit assumer ce risque dans le cas d’une crise économique, il doit également retirer les bénéfices d’une conjoncture favorable. Le Conseil conclut que « la seule circonstance que le concessionnaire ait optimisé le financement de sa dette en raison de taux historiquement bas, voire négatifs… ou qu’une baisse des coûts de construction et d’entretien, corrélée à une inflation particulièrement faible, lui ait procuré des bénéfices importants, ne pourrait suffire à fonder légalement une résiliation pour motif d’intérêt général… ».

S’agissant des modalités juridiques d’une résiliation des contrats de concession, la juridiction administrative a principalement attiré l’attention du Gouvernement sur le fait qu’au regard de l’intérêt à maintenir la continuité d’un service public, toute résiliation implique que le concédant (en l’espèce, l’État) ait préalablement envisagé l’organisation future de ce service.

Dans son avis sur la seconde saisine, le Conseil d’État confirme que le législateur peut imposer les sociétés titulaires de contrats de concession dès lors que l’imposition n’entraîne pas de rupture d’égalité devant les charges publiques, mais il insiste sur la nécessité pour l’État de tenir compte de l’article 32 du cahier des charges des SCA. Cet article, issu du protocole d’accord du 9 avril 2015 entre l’État et les sociétés APRR, AREA, Escota, SANEF et SAPN, stipule « qu’en cas de modification, de création ou de suppression d’impôt, de taxe ou de redevance… spécifique aux sociétés d’autoroutes, les parties se rapprocheront… pour examiner si cette modification, création ou suppression est de nature à dégrader ou améliorer l’équilibre économique et financier de la concession… Dans l’affirmative, les parties arrêtent dans les meilleurs délais les mesures de compensation, notamment tarifaires, à prendre en vue d’assurer, dans le respect du service public, des conditions économiques ni détériorées ni améliorées ». L’article 32 du cahier des charges de la société Cofiroute prévoit pour sa part des compensations pour assurer « la neutralité » des modifications fiscales. Dès lors, après avoir écarté les motifs d’intérêt général que le Gouvernement avance pour que l’article 32 précité ne soit pas invoqué, le Conseil d’État lui rappelle qu’il « lui semble devoir être regardé, au regard de la jurisprudence constitutionnelle, comme un élément essentiel de l’économie des contrats… », ce qui exclut sa « neutralisation » par voie législative. Il y voit un risque élevé « d’être regardé par le juge constitutionnel comme portant (une) atteinte manifestement disproportionnée au droit au maintien des conventions légalement conclues ».

Se trouvant dans l’impossibilité de taxer uniquement les SCA sans mettre en œuvre une démarche d’éventuelle compensation, le Gouvernement a opté pour l’instauration d’une taxe sur l’exploitation des infrastructures de transport de longue distance, dont le champ s’étend à toutes les personnes morales exploitant des infrastructures de transport.

II.   L’État du droit

Les SCA sont soumises à des prélèvements fiscaux spécifiques et ainsi que le rappelle la commission d’enquête précitée du Sénat, ceux-ci sont essentiels car ils constituent « le seul moyen par lequel l’État peut capter une partie de la valeur ajoutée créée par les concessions autoroutières ». Dans les grandes lignes, sur 10 euros de péage, 4 euros sont constitués d’impôts et de taxes.

Le code des impositions sur les biens et services (CIBS) prévoit en premier lieu aux articles L. 421-175 à L. 421-180 une taxe sur la distance parcourue sur le réseau autoroutier concédé, et, en deuxième lieu, aux articles L. 421-181 à L. 421‑185, une taxe sur les recettes de l’exploitation du réseau autoroutier concédé. Enfin, le code de la voirie routière dispose à l’article R. 122-48 que les SCA versent annuellement à l’État une redevance pour occupation du domaine public, dite redevance domaniale.

Instaurée par l’article 47 de la loi n° 94-1162 du 29 décembre 1994 de finances pour 1995, la taxe due par les concessionnaires d’autoroutes, appelée également taxe d’aménagement du territoire, avait à l’origine pour objet d’alimenter le compte d’affectation spéciale Fonds d’investissement des transports terrestres et des voies navigables (FITTVN). Régis par le code général des impôts, son assiette, son tarif et ses modalités de recouvrement sont désormais prévus par le CIBS, en application de l’ordonnance n° 2021-1843 du 22 décembre 2021, qui a également modifié son intitulé en taxe sur la distance parcourue sur le réseau autoroutier concédé. Le FITTVN a été supprimé par la loi de finances pour 2001 mais la taxe est restée en vigueur. Elle est due par les concessionnaires d’autoroute et assise sur le nombre de kilomètres parcourus par les usagers, ce nombre résultant du produit des trafics enregistrés en gare de péage par les longueurs des trajets parcourus correspondants.

Du 1er janvier 1995 au 31 décembre 2010, le tarif de la taxe a été fixé à 6,86 euros pour 1 000 kilomètres parcourus. La loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 l’a porté à 7,32 euros. Cette hausse avait pour objet de financer le compte d’affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs » qui verse une subvention à la SNCF pour compenser une partie du déficit d’exploitation des trains d’équilibre du territoire. Une seconde augmentation, intervenue en application de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020, tenant compte de l’indice des prix à la consommation, répondait à l’objectif d’abonder les ressources de l’Afit France pour financer la contribution de l’État au canal Seine Nord-Europe.

Le produit de la taxe est réparti actuellement entre le compte d’affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs » précité et l’Afit France, celle-ci en percevant la majeure partie.

Le tarif de la taxe, fixé à l’article L. 421-178 du CIBS, a évolué comme suit ces dernières années :

 

Année

Tarif pour 1 000 km(en euros)

2019

7,32

2020

7,36

2021

7,36

2022

7,50

2023

7,83

Le produit de la taxe était de 539 millions d’euros en 2010, 577 millions en 2011, 574 millions en 2015, 613 millions en 2018, 628 millions en 2020 et 680 millions en 2023.

La taxe sur les recettes de l’exploitation du réseau autoroutier concédé, prévue par les articles L. 421-181 à L. 421-185 du CIBS, a un produit plus réduit, de l’ordre de 100 millions d’euros par an.

La redevance domaniale applicable aux SCA rapporte à l’État une somme en constante augmentation : 156 millions d’euros en 2005, 186 millions en 2010, 326 millions en 2015 et 357 millions en 2020. Le produit de la redevance est intégralement affecté à l’Afit France.

On notera enfin que par le protocole du 9 avril 2015 signé par l’État et les SCA, celles-ci se sont engagées à contribuer volontairement au financement de l’Afit France. Elles ont versé 100 millions d’euros en 2015, 2016, 2018, et 60 millions en 2019 et 2020. Elles n’ont en revanche rien versé en 2021 et 2022, considérant que la clause de stabilité fiscale du protocole précité n’avait pas été respectée.

Outre ces taxes et contribution volontaire, les SCA acquittent une taxe pour frais de contrôle (article 1609 septtricies du code général des impôts) versée au budget général de l’État. Elles sont également soumises à l’impôt sur les sociétés et ont acquitté à ce titre 14,56 milliards d’euros sur la période allant de 2006 à 2018, et 5,65 milliards de 2019 à 2022 inclus. Leur forte capacité contributive est toutefois minorée par la déductibilité illimitée de leurs intérêts d’emprunt, avec un encours de dette financière qui représentait 33,6 milliards d’euros au 31 décembre 2018 et 33,05 milliards au 31 décembre 2022. D’après l’Autorité de la concurrence, cette déductibilité représenterait un avantage de l’ordre de 430 millions d’euros par an. Les SCA considèrent que ce dispositif est fondamental pour l’équilibre financier de leurs contrats et ont obtenu son maintien dans la négociation du protocole de 2015 précité. Toute modification du régime de déductibilité entraînerait une compensation intégrale.

III.   Les dispositions du projet de loi de finances

Le présent article abroge la taxe sur les recettes de l’exploitation du réseau autoroutier concédé (articles L. 421-175 à L. 421 -180 du CIBS) et instaure au sein du CIBS un chapitre V au titre II du livre IV, intitulé « Taxes communes à plusieurs modes de transports » comprenant les articles L. 425-1 à L. 425-19. Ces articles déterminent l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement d’une nouvelle taxe, assise sur l’exploitation des infrastructures de transport de longue distance.

A.   le champ de la taxe

La taxe est assise sur les infrastructures de transport dit de longue distance ; elle exclut donc celles qui servent aux transports urbains.

Les exploitants qui acquittent la taxe sont ceux qui gèrent une infrastructure de transport, quel que soit le mode de gestion de celle-ci : régie, concession, etc. Les infrastructures soumises à la taxe comprennent en conséquence l’ensemble des modes de transport, routier, ferroviaire, maritime et aérien, dès lors qu’ils sont opérés sur de longues distances, à savoir les trajets qui ne ressortent pas d’une même autorité organisatrice de la mobilité ou de la région Île-de-France.

Sont donc juridiquement assujettis à la taxe les exploitants d’autoroutes, de gares, de ports et d’aéroports dès lors que deux conditions sont remplies :

– un revenu d’exploitation excédant 120 millions d’euros, constaté sur une année civile ;

– et un niveau moyen de rentabilité excédant 10 %, constaté sur les sept derniers exercices comptables achevés, en excluant les deux exercices pour lesquels ce niveau est le plus élevé et les deux pour lesquels il est le plus faible.

Les revenus de l’exploitation de transport s’entendent de l’ensemble de ceux que perçoit l’exploitant ou qu’il génère au titre de l’activité de transport. Le présent article exclut en conséquence du champ de la taxe les revenus tirés d’activités qui ne sont pas liées aux transports et qui ne sont pas réalisées au moyen de l’infrastructure ; il exclut également la vente d’électricité aux personnes autres que les usagers desdites infrastructures ainsi que les versements des collectivités publiques pour couvrir des coûts assurés par l’exploitant au titre de missions régaliennes.

En pratique, les revenus d’exploitation des SCA et des SEMCA sont principalement constitués des péages acquittés par les usagers, des redevances perçues sur les exploitants des aires de service et de celles versées par des opérateurs de télécommunications.

La partie taxable du revenu d’exploitation est celle qui excède 120 millions d’euros. Si un revenu d’exploitation est de 140 millions d’euros, la taxe est assise sur 20 millions d’euros, à un taux de 4,6 % fixé par le présent article.

Compte tenu de ces conditions, entreront en pratique en 2024 dans le champ de la taxe les exploitants des infrastructures suivantes :

Sociétés d’autoroutes : Autoroutes Paris-Rhin-Rhône (APRR), Association pour la réalisation et l’exploitation des autoroutes (AREA), Atlandes, Autoroutes et tunnel du Mont-Blanc(ATMB), Cofiroute, Escota, Société des autoroutes du Nord et de l’Est de la France (SANEF) et Société des autoroutes Paris-Normandie (SAPN). ([4])

Aéroports : Aéroports de Lyon, Marseille, Nice et Paris.

Le rendement de la taxe est évalué à 600 millions d’euros en 2024. 80 % de ce produit (soit 480 millions) proviendraient des SCA et 20 % (120 millions) des aéroports. En application de l’article L. 425-10 du CIBS instauré par le présent article, le produit de la taxe sera affecté à l’Afit France.

B.   Les réactions des exploitants d’infrastructures

Dans le secteur du transport aérien, le groupe Aéroports de Paris (ADP) a pris acte du dispositif proposé par le présent article et a estimé dans un communiqué de presse en date du 27 septembre dernier que l’impact de la nouvelle taxe aurait été de 100 millions d’euros sur ses comptes si elle avait été instaurée pour l’exercice de 2022, diminuant d’autant son excédent brut d’exploitation.

Conformément au code des transports et sous réserve de l’homologation annuelle des tarifs et redevances par l’Autorité de régulation des transports, ADP envisage de répercuter l’effet de cette taxation dans le tarif des redevances qu’il perçoit sur les compagnies aériennes, en échelonnant toutefois cette augmentation sur deux à trois ans. La première hausse couvrirait en 2024 la moitié de l’impact de la taxe. Les redevances acquittées par les compagnies évolueraient ainsi de manière progressive.

Votre rapporteur pour avis écarte le risque d’une fuite du trafic aérien vers des aéroports étrangers, compte tenu de la place que tient ADP dans le réseau aéroportuaire européen. La reprise du trafic de passagers est très soutenue en France et a quasiment retrouvé son niveau d’avant la pandémie de covid-19. En revanche, comme seules quatre plateformes aéroportuaires entrent dans le champ de la taxe, l’ensemble des compagnies du groupe Air France vont se trouver en concurrence avec les compagnies à bas coût qui opèrent à l’aéroport de Beauvais. L’effet d’éviction de passagers sur les vols court courrier vers l’Europe pourrait être réel, car les consommateurs sont sensibles aux variations de prix des opérateurs. Le transport aérien est structurellement une activité de grands volumes à faibles marges, et toute diminution du nombre de passagers affecte les comptes des compagnies aériennes.

La réaction des exploitants d’autoroutes, auditionnés par votre rapporteur pour avis, est d’un autre ordre. Le présent article représente pour eux une nouvelle étape dans un conflit qui les oppose depuis plusieurs années à l’État et qui s’est accentué ces derniers mois. Ils voient surtout dans cet article la remise en cause de l’équilibre des contrats de concession et le risque d’une perte de confiance dans la parole de l’État. Plusieurs de ces exploitants appartiennent à des sociétés cotées sur les marchés financiers, avec une part d’actionnariat étranger, et investissent également à l’étranger. Vinci vient ainsi d’acquérir une concession autoroutière au Brésil, dans l’État de Sao Paulo. Ils estiment que la taxation altère leurs capacités de croissance et créera une crise de confiance entre les investisseurs et l’État.

IV.   les travaux de la commission

La commission a émis un avis favorable à l’adoption de l’article 15 sans modification.

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Article additionnel après l’article 15
Instauration d’une taxe sur les émissions des avions privés

La commission a adopté l’amendement I-CD169 de Mme Chantal Jourdan et des membres du groupe Socialistes et apparentés instaurant une taxe sur l’utilisation des avions privés en fonction de leurs émissions de dioxyde de carbone, dont le produit sera affecté à l’Agence de la transition écologique (Ademe), l’Agence de financement des infrastructures de France (Afit France) et l’IFP Énergies nouvelles.

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Article additionnel après l’article 15
Assujettissement de l’aviation d’affaires au tarif de solidarité

La commission a adopté l’amendement I-CD158 de M. Gérard Leseul et des membres du groupe Socialistes et apparentés assujettissant les avions d’affaires de moins de dix-neuf passagers au tarif de solidarité sur les billets d’avion, dit « taxe Chirac », afin d’égaliser les niveaux de taxation entre aviation d’affaires et aviation commerciale.

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Article 16
Réforme des redevances des agences de l’eau

Avis favorable de la commission à une adoption avec modifications

 

Le présent article modifie, à compter du 1er janvier 2025, les taxes relatives à la pollution et à la raréfaction de la ressource en eau. Il vise à renforcer les principes de pollueur-payeur et préleveur-payeur, tout en rééquilibrant la charge fiscale sur l’eau pesant sur les différentes catégories de redevables.

  1.   l’ÉTAT du droit

A.   les insuffisances des redevances existantes du point de vue de l’efficacité environnementale et de l’équité fiscale

Le cadre fiscal actuel relatif à l’eau repose sur la loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l’eau et les milieux aquatiques. Ce cadre comprend l’existence de sept redevances, dont le régime est défini aux articles L. 213-10 à L. 213-10-12 du code de l’environnement. Ces redevances sont les suivantes :

– la redevance pour pollution de l’eau d’origine domestique ;

– la redevance pour pollution de l’eau d’origine non domestique ;

– la redevance pour modernisation des réseaux de collecte ;

– la redevance pour pollutions diffuses ;

– la redevance pour prélèvement sur la ressource en eau ;

– la redevance pour stockage d’eau en période d’étiage ;

– la redevance pour protection du milieu aquatique.

Ces redevances correspondent à des taxes environnementales perçues auprès des usagers, à savoir les acteurs domestiques et économiques. Elles constituent le socle de financement des agences de l’eau, pour un budget de 2,2 milliards d’euros annuels, mais ces redevances ont également une visée comportementale devant permettre d’éviter de gaspiller ou de polluer la ressource en eau.

Les redevances pour pollution de l’eau d’origine domestique et pour modernisation des réseaux de collecte constituent à elles seules les trois-quarts des recettes totales fournies par les redevances. Cette répartition inégale des prélèvements est un objet récurrent de critiques concernant la fiscalité de l’eau. En effet, la part des taxes et redevances pour l’usage domestique prélevées dans le prix de l’eau potable représente près de 83 % des recettes des agences de l’eau (6 % pour l’industrie, 6 % pour l’agriculture…) alors que les services publics d’eau et d’assainissement ne sont bénéficiaires que de seulement 31 % des dépenses en retour et que les ménages consomment seulement 20 % de l’eau en France.

Le principe pollueur-payeur apparaît également insuffisamment établi concernant la fiscalité de l’eau. La redevance pour pollution de l’eau d’origine domestique, assise sur les volumes d’eau facturés à l’abonné, s’inscrit en effet dans une logique fiscale de rendement plutôt que de taxation environnementale. Il existe donc un enjeu à faire évoluer la fiscalité de l’eau de manière à l’asseoir davantage sur la quantité de pollution rejetée dans le milieu naturel.

Le présent article vise donc à améliorer la lisibilité des redevances, à accroître le « signal prix » sur les prélèvements et la pollution, à opérer un rééquilibrage de l’effort entre usagers ainsi qu’à répondre à la nécessité de trouver 325 millions d’euros de recettes supplémentaires pour les agences de l’eau, conformément aux annonces du « Plan eau » par le Président de la République en mars 2023. Le plafond de dépenses des agences de l’eau va en effet être augmenté de 475 millions d’euros pour les prochaines années, auxquels il convient de retrancher 150 millions d’euros liés à la disparition du versement de la prime versée jusqu’à présent pour performance épuratoire par les agences de l’eau.

B.   les redevances visées par la réforme

La principale taxe visée par le présent article est la redevance intitulée « pollution de l’eau d’origine domestique », établie à l’article L. 213-10-3 du code de l’environnement. Cette redevance est due par toute personne abonnée à un service d’eau potable et est calculée sur la base du volume d’eau consommé. En cas de prélèvement dans le milieu naturel, le volume d’eau prélevé est ajouté au calcul. Cette redevance génère actuellement 1,1 milliard d’euros de recettes fiscales.

Le présent article modifie également quatre autres redevances :

– la redevance pour la modernisation des réseaux de collecte. Établie à l’article L. 213-10-6 du code de l’environnement, elle est due par toute personne acquittant la redevance pour pollution de l’eau d’origine domestique et soumise à la taxe d’assainissement public (donc usagers domestiques et industriels confondus). Elle est calculée sur la base des volumes soumis à la taxe d’assainissement. Cette redevance rapporte actuellement 450 millions d’euros de recettes fiscales ;

– la redevance pour les pollutions diffuses liées aux produits pharmaceutiques. Établie à l’article L. 213-10-8 du code de l’environnement, elle est due par toute personne qui acquiert en France des produits phytopharmaceutiques ou des semences traitées au moyen de ces produits ou qui commande une prestation de traitement de semences au moyen de ces produits. Son calcul est basé sur la masse des substances actives dangereuses pour la santé ou pour l’environnement contenues dans les produits phytopharmaceutiques. Le tarif d’imposition diffère selon le niveau de dangerosité de ces substances, distinguées en quatre classes. Le rendement de cette taxe est aujourd’hui d’environ 180 millions d’euros ;

– la redevance pour prélèvement sur la ressource en eau, établie selon les dispositions de l’article L. 213-10-9 du code de l’environnement, qui concerne « toute personne dont les activités entraînent un prélèvement sur la ressource en eau » et porte donc sur le volume brut d’eau prélevé dans le milieu naturel. Les tarifs d’imposition sont fixés par les agences de l’eau dans la limite de plafonds qui diffèrent selon la catégorie des ressources en eau prélevées (zone de tension quantitative ou non) et selon l’usage auquel donne lieu le prélèvement ;

– enfin, la redevance pour pollution de l’eau d’origine non domestique prévue à l’article L. 213-10-2 du code de l’environnement, est due par toute personne, autre que les usagers domestiques et assimilés abonnés au service d’eau potable, à raison du rejet dans le milieu naturel, directement ou par un réseau de collecte, d’un élément constitutif de pollution (azote, phosphore, métox…). Le tarif d’imposition est fixé par l’agence de l’eau et son calcul est différencié pour les activités d’élevage, avec un tarif unique.

II.   les dispositions du projet de loi de finances

Le présent article modifie plusieurs taxes affectées aux agences de l’eau.

A.   Substitution À la redevance pour pollution d’origine domestique et À la redevance pour modernisation des réseaux de collecte de trois redevances

En premier lieu, il procède au remplacement de la redevance pour pollution d’origine domestique et de la redevance pour modernisation des réseaux de collecte par une redevance sur la consommation d’eau potable et deux redevances pour la performance des réseaux d’eau potable et des systèmes d’assainissement collectif. En effet, les redevances actuelles pour pollution d’origine domestique et pour modernisation des réseaux de collecte sont assises sur des volumes d’eau, sans tenir compte ni de la pollution effectivement générée, ni de l’intensité des prélèvements exercés sur le milieu naturel.

Ces limites étaient, en partie, compensées par l’existence de primes pour performance épuratoire fondées sur la pollution éliminée par le système d’assainissement collectif et modulées selon les performances de ce système. Le montant des primes pour performance épuratoire s’élève, en moyenne, à 150 millions d’euros par an au niveau national. Leur suppression a été décidée à l’issue des onzièmes programmes d’intervention des agences de l’eau 2019-2024, compte tenu de leur caractère d’aide au fonctionnement au profit des services « assainissement » des communes. Dès lors que ces primes donnaient corps au principe « pollueur-payeur », il apparaît nécessaire de substituer aux redevances pour pollution d’origine domestique et pour modernisation des réseaux de collecte de nouveaux prélèvements sur l’eau, plus lisibles et adaptés aux enjeux environnementaux.

Le présent article propose ainsi une assise plus simple et plus lisible qui accroît l’incitation à la performance des services publics d’eau potable et d’assainissement (SPEA). La proposition qui est faite est que ce soit désormais la collectivité territoriale, maître d’ouvrage du système d’assainissement, qui soit le redevable de la redevance pour pollution de l’eau d’origine domestique et non plus l’usager domestique. Il s’agit ainsi de transférer la charge vers l’acteur qui a une capacité d’action directe pour appliquer le principe pollueur-payeur.

Le montant serait assis sur les mètres cubes d’eau facturés aux usagers raccordés à l’assainissement collectif (et non plus sur la consommation d’eau potable). Le taux serait modulé en fonction de la bonne gestion et de la performance du système d’assainissement. Les collectivités répercuteront ensuite cette charge entre les usagers domestiques et industriels raccordés au réseau d’assainissement collectif. Pour ce faire, le présent article conduit à une réécriture de l’article L. 213‑10‑5 du code de l’environnement.

Deux coefficients sont introduits pour moduler la redevance (alinéas 82 et 83 du présent article) :

– le coefficient de performance, modulé entre 0 et 0,55, déterminé en fonction de la somme des pertes par fuites et des volumes d’eau consommés sur le réseau de distribution qui ne font pas l’objet d’un comptage rapporté, le cas échéant, à la longueur du réseau de distribution et de la densité d’abonnés ;

– le coefficient de gestion patrimoniale, modulé entre 0 et 0,25, déterminé en fonction du niveau de connaissance du réseau d’eau potable et de la programmation d’actions visant à améliorer et pérenniser ses performances.

Les communes ou leurs établissements publics compétents en matière d’assainissement des eaux usées mentionnés à l’article L. 2224-10 du code général des collectivités territoriales sont également assujettis à une nouvelle redevance sur la performance des systèmes d’assainissement collectif. Cette redevance est inscrite dans une nouvelle rédaction de l’article L. 213-10-6 du code de l’environnement (aliénas 87 à 103 du présent article). La base d’imposition de la redevance est le volume d’eau pris en compte pour le calcul de la redevance d’assainissement. Le tarif est fixé par l’agence de l’eau, qui applique un coefficient de modulation de chaque système d’assainissement collectif. Ce coefficient repose sur trois éléments :

– le coefficient d’autosurveillance, modulé entre 0 et 0,3, déterminé en fonction de la validation de l’autosurveillance du système d’assainissement collectif, établie à partir de critères adaptés à la taille de ce système ;

– le coefficient de conformité réglementaire, modulé entre 0 et 0,5, déterminé en fonction de la conformité réglementaire du système d’assainissement collectif, appréciée à partir de critères adaptés aux prescriptions techniques applicables à ce système ;

– le coefficient d’efficacité, modulé entre 0 et 0,2, déterminé en fonction du fonctionnement du système d’assainissement collectif, apprécié à partir de critères adaptés à la taille de ce système.

Au final, l’article conduit à une modification du couplage des taux afin de procéder à un léger rééquilibrage des prélèvements entre usagers domestiques (- 30 millions d’euros) et industriels (+30 millions d’euros). En effet, tous les industriels raccordés au réseau d’eau potable seront désormais soumis à cette redevance, procurant une recette supplémentaire. Néanmoins, l’objectif est de maintenir constant le rendement par rapport au dispositif actuel (de l’ordre de 1,45 milliard d’euros), ce qui devrait se traduire par une moindre taxation des usagers domestiques.

B.   Renforcement de la redevance pour pollutions diffuses

Cette redevance est la seule dont le taux est directement établi au niveau national, dans la loi de finances. Elle est inscrite à l’article L. 213-10-8 du code de l’environnement et sa modification par le présent article repose sur les alinéas 107 à 118.

Fondée sur le principe pollueur-payeur, la redevance pour pollutions diffuses mérite d’être renforcée pour atteindre pleinement son objectif de réduction de l’utilisation de produits phytosanitaires en France. En effet, les tarifs prévus pour les substances qui sont particulièrement dangereuses pour la santé en raison de leur cancérogénicité, de leur mutagénicité sur les cellules germinales ou de leur toxicité pour la reproduction, ainsi que ceux prévus pour les substances présentant une toxicité aiguë ou chronique pour certains milieux aquatiques, sont sensiblement sous-évalués.

La dernière modification de cette redevance est intervenue par la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019, qui a permis d’imposer davantage les substances les plus dangereuses et d’augmenter le tarif applicable aux substances dont la substitution est, à terme, envisagée en raison de leur particulière nocivité.

Néanmoins, l’application du principe pollueur-payeur via cette hausse de la redevance pour pollutions diffuses demeure largement perfectible. Dans le cadre du présent article, il est prévu de l’augmenter de 20 %, pour un volume de recettes supplémentaires d’environ 36 millions d’euros en 2024 (180 millions d’euros à l’heure actuelle). Pour ce faire, le présent article procède à un relèvement de la taxe prévue pour les substances dites « candidates à substitution » et du tarif associé aux substances les plus dangereuses pour la santé ou les plus toxiques pour le milieu aquatique. En effet, les tarifs d’imposition de la redevance pour pollutions diffuses distinguent quatre classes de substances en fonction du danger de la substance active et deux modalités de taxation additionnelle selon que la substance active est dotée d’un caractère dit « exclusion » ou « candidate à substitution ». La quasi-totalité des taux fixés pour chacun des types de pollution fait l’objet d’un relèvement.

Le Gouvernement a finalement renoncé à introduire une taxe sur les micro-plastiques issus des détergents, cosmétiques et produits phytosanitaires en raison d’une traçabilité insuffisante de ces produits.

C.   Réforme de la redevance pour prélèvement sur la ressource en eau

Les épisodes de sécheresse qui se généralisent sur l’ensemble du territoire national entraînent des conséquences sur la ressource en eau. Fondée sur le principe « préleveur-payeur », la redevance pour prélèvement sur la ressource en eau constitue, en principe, le levier fiscal permettant d’envoyer aux différents usagers un signal-prix relatif à la raréfaction de l’eau. Elle est codifiée à l’article L. 213‑10‑9 du code de l’environnement, qui est modifié par les alinéas 119 à 152 du présent article.

À l’heure actuelle, les modalités de calcul de cette redevance peuvent atténuer sa portée environnementale en permettant l’application d’assiettes forfaitaires, d’exonérations ou de tarifs préférentiels. Dès lors, dans un contexte de raréfaction de la ressource en eau, il apparaît nécessaire de garantir la mise en œuvre du principe préleveur‑payeur de cette redevance en renforçant le signal-prix, en fiabilisant la mesure des volumes d’eau prélevés et en autonomisant la finalité relative à la bonne gestion patrimoniale des réseaux d’eau potable, laquelle sera l’objet de la nouvelle redevance sur la performance des réseaux d’eau.

La réforme de la redevance pour prélèvement sur la ressource en eau a également pour objectif un rééquilibrage de l’effort relatif de financement de la politique de l’eau entre catégories d’usagers. Dans ce cadre, les tarifs d’imposition, fixés par les agences de l’eau dans la limite de plafonds qui varient selon la catégorie des ressources en eau prélevées (zone géographique de tension quantitative ou non) et selon l’usage auquel donne lieu le prélèvement, vont faire l’objet d’un relèvement des tarifs plafonds. Des seuils minimums de fixation des tarifs d’imposition sont également instaurés. Par conséquent, le tarif relatif à chaque usage, autre que l’hydroélectricité, auquel donne lieu le prélèvement est désormais déterminé entre les minima et maxima suivants exprimés en centimes d’euros par mètre cube :

 

Usages

Catégorie 1

Catégorie 2

Minimum
(en centimes d’euros par m3)

Maximum
(en centimes d’euros par m3)

Minimum
(en centimes d’euros par m3)

Maximum
(en centimes d’euros par m3)

Irrigation autre que l’irrigation gravitaire

1,410

5,040

2,820

10,080

Irrigation gravitaire

0,200

0,700

0,400

1,400

Alimentation en eau potable

2,820

10,080

5,640

20,160

Alimentation d’un canal

0,012

0,0420

0,0240

0,084

Refroidissement industriel conduisant à une restitution supérieure à 99 %

0,530

0,950

1,060

1,900

Autres usages économiques

1,970

7,560

3,930

15,120

Source : PLF 2024, article 16

La répartition des coûts supplémentaires pour les assujettis, pour un total de 132 millions d’euros, est la suivante : moins de 1 million d’euros pour les collectivités, 11 millions d’euros pour les agriculteurs, 20 millions d’euros pour les industriels et 100 millions d’euros pour les énergéticiens. Ajoutée aux 36 millions d’euros supplémentaires induits par la hausse de la redevance pour pollutions diffuses, la recette supplémentaire pour les agences de l’eau sera d’environ 168 millions d’euros, soit près de la moitié des 325 millions d’euros d’augmentation du budget des agences de l’eau. Le reste sera fonction des modulations des redevances décidées par chaque agence sur les territoires.

La réforme prévue par cet article vise ainsi directement à faire contribuer davantage les énergéticiens, et en particulier les exploitants de centrale nucléaire, à l’effort de financement de la politique de l’eau. On rappellera à cet effet que le refroidissement des centrales nucléaires représente la moitié de l’eau prélevée en France mais seulement 12 % de la consommation, la ressource étant majoritairement, hors évaporation, restituée aux cours d’eau après usage.

D.   Révision de la redevance pour pollution de l’eau d’origine non domestique

La redevance pour pollution de l’eau d’origine non domestique des industriels non raccordés au réseau public de collecte des eaux usées pour tout ou partie de leurs rejets est définie à l’article L. 213-10-2 du code de l’environnement que le présent article modifie par ses alinéas 10 à 39. La redevance ne s’applique pas aux propriétaires et occupants d’immeubles à usage principal d’habitation et aux abonnés au service d’eau potable dont les activités impliquent des utilisations de l’eau assimilables à celles prévues au I de l’article L. 213-10-3 ou à l’article L. 214-2, auxquels le présent article ajoute les personnes qui épandent du digestat issu de méthanisation au titre de cette activité.

Pour assurer la cohérence d’ensemble de la réforme, seuls les industriels qui rejettent directement dans le milieu naturel des éléments constitutifs de pollution seront donc assujettis à la redevance pour pollution de l’eau d’origine non domestique. Les industriels raccordés à des réseaux d’évacuation d’eau polluée, nouvellement imposés par ailleurs, n’en seraient plus redevables. En outre, le présent article prévoit également de renforcer le suivi de l’activité de pollution de l’eau et prévoit une majoration de la redevance en cas de suivi défaillant. Toutefois, l’inscription dans la loi d’une majoration de 40 % lorsque le niveau théorique de pollution lié à l’activité est supérieur au seuil fixé ou que le contribuable ne met pas en place un suivi régulier des rejets n’a pas d’impact financier significatif.

Le rapporteur pour avis souhaite cependant souligner le problème des substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS) qui n’est pas encore assez traité. Il proposera donc un amendement visant à les ajouter à la liste des substances assujetties à la redevance pour pollution de l’eau d’origine non domestique. En effet, les PFAS étant des molécules très persistantes, celles-ci se retrouvent dans les déchets générés en fin de vie par les produits de consommation, et donc potentiellement dans certaines filières de traitement des déchets. À travers les rejets notamment industriels, elles se retrouvent dans tous les milieux de l’environnement : l’air, les sols et l’eau et sont facilement transportées dans l’environnement sur de longues distances, loin de leur source d’émission. Ainsi, en application du principe de prévention et du principe de réparation des dommages à l’environnement (le principe pollueur-payeur), l’intégration des PFAS à la liste des substances assujetties à redevance à l’agence de l’eau est tout à fait cohérente et permet de mieux sensibiliser les entreprises à participer à diminuer leurs rejets de PFAS dans la nature, au profit de la santé et de la biodiversité.

Par ailleurs, la rédaction retenue pour le dispositif des redevances pour pollution de l’eau non domestique et pour pollution de l’eau par les activités d’élevage mérite d’être rationnalisée et rendue plus lisible. Ainsi, les activités d’élevage, selon la nouvelle rédaction proposée pour l’article L. 213‑10-3 du code de l’environnement, s’entendent de celles portant sur des animaux au sens de l’article 3 du règlement (CE) n° 1069/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant des règles sanitaires applicables aux sous-produits animaux et produits dérivés non destinés à la consommation humaine, dont le chargement est supérieur à 1,4 unité de gros bétail par hectare de surface agricole. Le tarif demeure fixé à 3 euros par unité de gros bétail. Ces mesures n’ont donc pas d’impact financier.

III.   les travaux de la commission

La commission a adopté un amendement I-CD450 du rapporteur pour avis qui ajoute les substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS) à la liste des substances assujetties à la redevance pour pollution de l’eau d’origine non domestique.

 

 


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   travaux de la commission

I.   discussion générale

Lors de sa réunion du lundi 9 octobre 2023, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a examiné, pour avis, sur le rapport de M. Jean-Luc Fugit, les articles 5, 12, 13, 14, 15 et 16 de la première partie du projet de loi de finances pour 2024 (n° 1680).

M. le président Jean-Marc Zulesi. Notre réunion est consacrée à l’examen pour avis de la première partie du projet de loi de finances (PLF) pour 2024.

Nous sommes saisis pour avis des articles 5, 12, 13, 14, 15 et 16. Comme les années précédentes, nous aurons aussi à discuter de nombreux amendements visant à créer des articles additionnels, en lien avec les matières sur lesquelles notre commission est compétente. Il nous faudra avoir achevé l’examen de l’ensemble des amendements ce soir, pour permettre à la commission des finances de discuter, dès demain, des amendements adoptés par notre commission.

Avant de laisser la parole au rapporteur pour avis, M. Jean-Luc Fugit, je tiens à lui adresser mes remerciements, ainsi qu’à son équipe, pour son travail, réalisé dans des temps contraints.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Concernant l’organisation de nos travaux, il me semble que nous devrions protester à titre collectif : il n’est agréable pour personne de travailler dans des délais aussi contraints. Les 300 et quelques amendements à examiner vont vraisemblablement nous amener à siéger une partie de la nuit. À cet égard, avez-vous protesté en notre nom, Monsieur le président ?

M. le président Jean-Marc Zulesi. Sans parler de protestations, je ferai remonter des propositions constructives, afin d’anticiper et de respecter le travail législatif et tous les acteurs qui participent, en notre sein, à l’élaboration budget de la nation.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Avec le projet de loi de finances pour 2024, le Gouvernement poursuit le déploiement de sa politique de transition écologique : ambitieuse, elle exige d’agir sur plusieurs leviers technologiques et d’entraîner l’adhésion progressive de tous les secteurs de notre société. Depuis plusieurs années, notre commission se saisit d’articles de la première partie du PLF, afin d’évaluer la participation de la fiscalité à la transition écologique. Cette année, elle s’est saisie des articles 5, 12, 13, 14, 15 et 16. Je reviendrai brièvement sur chacun d’entre eux.

Conformément aux annonces faites lors de la présentation du projet de loi relatif à l’industrie verte – en cours d’examen –, l’article 5 prévoit la création d’un crédit d’impôt au titre des investissements en faveur de l’industrie verte, le C3IV. Son objectif est de contribuer au développement des secteurs stratégiques pour la transition vers une économie décarbonée – production de batteries, de panneaux solaires, de turbines éoliennes et de pompes à chaleur.

Cet article s’inscrit dans le cadre de l’encadrement temporaire de crise et de transition adopté par la Commission européenne le 9 mars dernier. Il donne aux États membres de l’Union européenne la possibilité d’octroyer des aides supplémentaires, soutenant directement les investissements productifs dans des biens stratégiques nécessaires à la transition. Ce soutien est circonscrit à six domaines stratégiques : quatre d’entre eux figurent dans l’article 5, à l’exception de l’hydrogène et des technologies de capture de carbone. Pour bénéficier de ce crédit d’impôt, les entreprises devront faire valider leur dossier auprès du ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, et de l’Agence de la transition écologique (Ademe).

Selon l’étude d’impact présentée par le Gouvernement, le C3IV devrait permettre de générer environ 23 milliards d’euros d’investissements et de créer environ 40 000 emplois directs sur le territoire national, d’ici 2030. La dépense fiscale générée par le C3IV serait comprise entre 2,9 et 3,6 milliards d’euros, soit environ 500 millions d’euros par an. Grâce à la relocalisation ou la localisation en France d’activités industrielles vertes, le C3IV permettrait, selon les premières estimations, d’éviter l’émission de 50 millions de tonnes équivalent CO2. Il s’agit donc d’une mesure utile, tant sur le plan environnemental qu’économique : cela doit collectivement nous réjouir.

J’en viens à l’article 12. Il regroupe des mesures d’ordre technique, concernant principalement deux secteurs : l’agriculture et le bâtiment ; les travaux publics. Les professionnels de ce secteur bénéficient actuellement, pour leurs engins de travaux agricoles et de chantier, de tarifs réduits sur le gazole non routier (GNR), très éloignés de ceux payés par les transporteurs routiers. Pour inciter ces deux secteurs à procéder à leur décarbonation, l’article 12 prévoit le relèvement progressif des tarifs du gazole que les professionnels acquittent, à compter de 2024 et jusqu’en 2030. Ce relèvement se fera en sept étapes et aura pour objectif – par un signal prix – d’inciter les entreprises à investir progressivement dans des matériels moins émetteurs de gaz à effet de serre.

Pour que le dispositif fonctionne, il conviendra que les équipementiers mettent sur le marché une offre croissante d’engins de travaux décarbonés : si l’offre existe, elle doit impérativement se développer. À la différence des automobilistes, qui recherchent une autonomie à une distance, les professionnels de ces secteurs ont surtout besoin de puissance, pour lever des charges ou travailler les sols.

En contrepartie, les exploitants agricoles bénéficient de dispositifs de compensation, avec l’élargissement des possibilités de déductions offertes en cas d’épargne de précaution et de plus-values professionnelles. Cela devrait leur permettre de dégager plus de trésorerie pour investir dans de nouveaux matériels.

L’article 12 procède également à une mise à jour législative s’agissant des entreprises relevant du système européen d’échange de quotas de gaz à effet de serre. Ces entreprises – de grandes consommatrices d’énergie opérant dans les domaines de la sidérurgie, la métallurgie ou encore la chimie – avaient recours, dans le passé, à plus d’une douzaine de combustibles dérivés du pétrole et du gaz ; elles ont cessé, depuis plusieurs années, d’utiliser certains d’entre eux, comme le fioul lourd. Il est donc logique de supprimer les tarifs réduits sur ces combustibles.

Enfin, plusieurs d’entre nous ont relevé une disposition étrange : l’alourdissement de la fiscalité pesant sur les véhicules des services et associations qui se consacrent à la prévention et à la lutte contre les incendies de forêt. Ce dispositif va à l’encontre de la volonté du Parlement, exprimée en juillet dernier, lors des débats sur la prévention des incendies de forêt. Nous devons aider les femmes et les hommes qui contribuent à protéger nos forêts, et non entraver leur action. Je propose donc, avec d’autres collègues issus de plusieurs groupes, la suppression de ce dispositif malvenu.

L’article 13 vise à décarboner progressivement le secteur des transports, pour atteindre l’objectif européen de 14 % de consommation d’énergie produite à partir de sources renouvelables dans les transports. Pour cela, il modifie la taxe incitative relative à l’utilisation d’énergies renouvelables dans les transports (Tiruert). Il s’agit de mécanismes incitatifs permettant d’assurer un pourcentage minimum d’énergies renouvelables, face à l’essence, au gazole et au carburéacteur. Notons que notre commission avait déjà émis un avis sur ce point lors du précédent PLF.

Dans le PLF pour 2024, le Gouvernement propose des objectifs d’incorporation de biocarburants plus ambitieux, et modifie en conséquence les plafonds d’incorporation de certaines matières premières. Il supprime également la possibilité de double compte pour les carburéacteurs : ils devront désormais être comptabilisés selon leur incorporation réelle. Pour maintenir l’incitation fiscale sur les carburéacteurs et éviter l’exportation de biocarburants produits en France vers d’autres pays, le tarif de la taxe est augmenté.

J’en arrive à l’article 14, qui cible le verdissement progressif du parc automobile des particuliers et des entreprises, dans l’esprit de la trajectoire inscrite dans la loi d’orientation des mobilités de 2019 et la loi « climat et résilience » de 2021 ; elle prévoit, en France, la fin de la vente de véhicules neufs à énergies fossiles d’ici à 2040. Pour 2024, le Gouvernement souhaite renforcer les dispositifs de malus existants pour les véhicules et inciter davantage à la transition vers des véhicules peu émetteurs de CO2 et de polluants de proximité. Ainsi, le seuil de déclenchement du malus CO2 à l’immatriculation sera revu à la baisse – le seuil du « malus masse » passera de 1,8 à 1,6 tonne –, tandis que son tarif augmentera. Pour les véhicules d’entreprise, la taxe annuelle sur les émissions de CO2 sera révisée, avec une trajectoire pluriannuelle plus ambitieuse. La taxe annuelle sur l’ancienneté des véhicules sera remplacée par une taxe sur les émissions de polluants atmosphériques – particules fines et oxyde d’azote –, basée sur des catégories de véhicules en accord avec les vignettes Crit’Air. Enfin, au regard des émissions de dioxyde de carbone des véhicules hybrides, l’exonération dont ils bénéficient sera supprimée au profit d’abattements spécifiques.

J’en viens à l’article 15. D’une part, il vise à répondre à l’impératif politique affirmé par le Conseil d’orientation des infrastructures (COI), présidé par notre collègue député David Valence : dégager environ 175 milliards d’euros d’ici à 2032, pour rénover et développer nos transports ferroviaires, de proximité comme de longue distance. La Première ministre a suivi les préconisations du COI, en lançant, le 24 février dernier, un plan d’action de 5 milliards d’euros d’ici à 2040, en précisant que les secteurs les plus émetteurs de gaz à effet de serre – autoroutes et transport aérien – devraient y contribuer.

D’autre part, les clauses des contrats autoroutiers rendent difficile un alourdissement de la fiscalité sur les sociétés d’autoroutes sans leur attribuer de compensation. Or celle-ci se traduit le plus souvent par l’augmentation des péages, au détriment du pouvoir d’achat de nos concitoyens. Dans son avis du 8 juin dernier, le Conseil d’État n’a pas dénié le droit au Gouvernement de taxer les autoroutes, mais l’a mis en garde sur les conditions juridiques à respecter. Le Gouvernement a donc préféré instaurer une taxe à l’assiette élargie à tous les exploitants d’infrastructures de transport de longue distance – autoroutes, gares, ports et aéroports. Il fixe ensuite les conditions d’exigibilité de la taxe, soit un minimum de 120 millions d’euros de revenus d’exploitation et une rentabilité de 10 %, lissée sur sept ans, deux critères permettant de limiter la perception de la taxe à de grands contributeurs – huit sociétés d’autoroute et les quatre aéroports de Lyon, Marseille, Nice et Paris. Le Gouvernement prévoit un rendement annuel de 600 millions d’euros – dont 80 % en provenance des autoroutes et 20 % des aéroports –, affectés à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France). Il ne fait nul doute que les sociétés concessionnaires d’autoroutes, qui anticipent une perte de confiance des investisseurs envers l’État, contesteront ce dispositif d’un point de vue juridique.

Le rôle notre commission est de faire progresser toute action qui favorise la décarbonation de nos activités. La mesure proposée altère bien évidemment la rentabilité des autoroutes comme celle des aéroports concernés, sans pour autant générer un déficit d’exploitation important. Surtout, cette mesure présente l’intérêt de garantir aux transports ferroviaires des ressources nouvelles, donc une visibilité supplémentaire sur l’avenir. Au-delà de ses effets juridiques et financiers, ce dispositif symbolise les efforts que chaque secteur doit accomplir, pour une transition écologique effective.

Enfin, l’article 16 acte une réforme des redevances versées aux agences de l’eau, attendue depuis plusieurs années. Les redevances posent en effet deux problèmes principaux. D’une part, les taxes et redevances payées par les particuliers, qui consomment seulement 20 % de l’eau en France, représentent près de 83 % des recettes des agences de l’eau, contre seulement 6 % pour l’industrie et 6 % pour l’agriculture. D’autre part, le principe du pollueur-payeur semble être insuffisamment établi, s’agissant de la fiscalité de l’eau. La redevance pour pollution de l’eau d’origine domestique, assise sur les volumes d’eau facturés à l’abonné, s’inscrit en effet dans une logique fiscale de rendement, plutôt que de taxation environnementale. Il est proposé que soit désormais redevable de cette redevance la collectivité territoriale maître d’ouvrage du système d’assainissement, et non plus l’usager domestique. Il s’agit ainsi de transférer la charge vers l’acteur qui a une capacité d’action directe pour appliquer le principe du pollueur-payeur.

L’article 16 prévoit également une hausse de la redevance pour pollution diffuse, qui rapportera 36 millions d’euros supplémentaires. Enfin, la redevance pour prélèvement sur la ressource en eau sera modifiée et rééquilibrée en profondeur, pour procurer 132 millions d’euros supplémentaires. Les coûts supplémentaires pour les assujettis seront répartis à hauteur d’au moins 2 millions d’euros pour les collectivités, 11 millions d’euros pour les agriculteurs, 20 millions d’euros pour les industriels et 100 millions d’euros pour les énergéticiens. Ce sont donc les énergéticiens qui paieront le plus, par exemple pour le refroidissement des centrales nucléaires.

Au total, la recette supplémentaire pour les agences de l’eau sera d’environ 168 millions d’euros, soit près de la moitié des 325 millions d’euros d’augmentation du budget de ces opérateurs. Le reste sera fonction des modulations et des redevances décidées par chaque agence sur le territoire. L’article 16 permet donc d’accroître le signal prix sur les prélèvements et la pollution, et d’opérer un rééquilibrage de l’effort entre usagers, conformément aux annonces du Président de la République en mars dernier, dans le cadre du plan Eau. Cela permettra aux agences de l’eau de bénéficier de ressources supplémentaires utiles, dans un contexte de tensions sur la ressource en eau.

M. le président Jean-Marc Zulesi. Nous en venons aux orateurs des groupes.

M. Anthony Brosse (RE). Saisie sur six articles pour avis, notre commission a l’opportunité d’agir pour verdir le budget de la France. L’un des engagements du projet de loi pour l’industrie verte trouve sa traduction dans le projet de loi de finances, avec l’ambition de générer près de 23 milliards d’euros d’investissements d’ici à 2028, en créant plus de 4 000 emplois directs. Ce crédit d’impôt – il figure à l’article 5 – doit nous permettre de produire sur notre sol des batteries, des panneaux photovoltaïques, des éoliennes ou encore des pompes à chaleur. Une telle réindustrialisation, avec des investissements dans les technologies d’avenir, est essentielle pour garantir notre souveraineté énergétique.

Ce PLF vise également à réduire les dépenses fiscales dites brunes. La fin progressive des avantages fiscaux sur le gazole non routier, dans les secteurs du bâtiment et travaux publics (BTP), de l’agriculture ou de la sylviculture, permettra une transition des engins utilisés par les entreprises concernées. Ces annonces, difficiles pour des secteurs économiques en tension, sont néanmoins comprises et acceptées. Il ne faut toutefois pas les mettre en difficulté – je pense notamment aux services d’incendie et de secours, qui doivent être en capacité d’investir dans de nouveaux matériels. C’est pourquoi je défendrai, au nom du groupe Renaissance, un amendement pour garantir l’exonération de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) et de malus écologique, pour les véhicules achetés et utilisés par nos sapeurs-pompiers.

Parallèlement, nos transports collectifs doivent encore plus se verdir. Au-delà des incitations fiscales pour les secteurs émetteurs, qui devront aider au financement de cette transition collective, les véhicules les plus polluants se verront appliquer un malus, tandis que les exploitants d’infrastructures de transport de longue distance devront s’acquitter d’une nouvelle taxe, qui ne saurait toutefois les mettre en péril.

Enfin, les gestionnaires de notre bien commun, de notre source de vie, verront leur budget augmenter, via une réforme de la redevance des agences de l’eau, afin de permettre des investissements majeurs pour garantir la performance des réseaux et assurer un meilleur pilotage de la ressource. Vous l’aurez compris, notre groupe se tiendra aux côtés du Gouvernement pour améliorer ce budget pour 2024.

M. Pierre Meurin (RN). « Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement, et les mots pour le dire arrivent aisément. » Non seulement votre budget se conçoit mal, mais vous avez eu du mal à trouver les mots, pour aboutir à une véritable bouillie technocratique, mâtinée d’arbitrages ministériels de bouts de ficelle. Quel en est le résultat ? C’est un budget qui a doublé de volume par rapport à l’an dernier : vous meublez, pour cacher le vide abyssal de votre politique et une absence totale de trajectoire de redressement de nos finances publiques. Pire encore, pour financer vos gabegies et votre capacité d’endettement sur les marchés financiers, sur le dos des Français, vous accueillez avec gourmandise les quelque 14 milliards d’euros de recettes fiscales que l’inflation vous permettra de prendre dans la poche des Français en 2024.

Nous, nous voulons rendre cet argent aux Français. Alors que vous ne proposez pas grand-chose pour endiguer les 3 000 milliards d’euros de dette, les 7,8 milliards d’euros de déficit commercial ou les 125 milliards d’euros de déficit public annuel, nous sommes aujourd’hui saisis de six articles. Sans surprise, vous allez pénaliser les usagers de la route – avec le renforcement des malus écologiques –, les agriculteurs – avec l’augmentation des taxes sur l’eau et la fin du tarif réduit sur le GNR –, bref, vous pénalisez encore les Français avec votre écologie punitive.

Alors que le Gouvernement est faible sur la taxation des superprofits autoroutiers ou avec les grands distributeurs, comme l’a montré le fiasco de la vente à perte des carburants, vous décidez, comme à votre habitude, de faire les poches des honnêtes gens pour que les superprofiteurs conservent leurs privilèges. Finalement, il n’existe qu’une chose qui se conçoit bien : le 49.3 viendra anéantir le travail des oppositions, donc rayer d’un trait de plume la démocratie parlementaire, pour entériner le budget d’un pouvoir sans idées.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). En Inde, la semaine dernière, plus de quarante personnes sont mortes à cause de pluies torrentielles. En Libye. la tempête Daniel a causé 4 000 morts et plus de 9 000 disparus. Au Canada, cet été, 13,7 millions d’hectares de forêts ont brûlé. En cause, partout, le réchauffement climatique. En France, nous sommes aussi « particulièrement exposés aux conséquences du réchauffement climatique, mais pas prêts à y faire face », selon le dernier rapport du Haut Conseil pour le climat. Au vu du budget que nous examinons, il semblerait que vous n’avez non seulement pas tenu compte de leurs recommandations, mais que vous n’avez même pas lu le titre de ce rapport : « Acter l’urgence, engager les moyens ».

Le 49.3 étant déjà prévu, critiquer ce budget est un peu vain, même s’il est important pour nous d’affirmer que nous faisons face, cette année encore, à une forfaiture antidémocratique et climaticide, au service des plus riches et des grandes entreprises. On peut ainsi compter 205 milliards d’euros d’aides publiques aux entreprises, très largement captées par les plus grosses d’entre elles, et par les plus émettrices de gaz à effet de serre. Vous instaurez essentiellement cela par des niches fiscales, des exonérations de cotisations et la baisse continue des impôts de production. Tour de force, vous réussissez à ajouter 600 millions d’euros, au titre d’une fumeuse compétitivité verte.

À l’inverse, un exécutif rationnel gouvernerait par les besoins, en mettant l’argent nécessaire sur la table. Le très modéré conseiller d’Emmanuel Macron – M. Pisani-Ferry – évoque ainsi un besoin de 34 milliards d’euros pour la transition écologique. Sur la façon d’augmenter les recettes, il converge avec les très raisonnables Jean-Paul Mattei, président du groupe Démocrate, et Nicolas Sansu, qui proposent un prélèvement de 5 % sur le patrimoine des 10 % les plus riches pendant trente ans. Mais pour Emmanuel Macron, faire payer des impôts aux riches est « un piège à la con ». Nous combattrons donc cette imposture dogmatique par le sérieux pragmatique, avec nos amendements à ce budget : en un mot, pour les pollueurs, pas d’aide sans condition, pas de superprofits sans taxation.

M. Jean-Yves Bony (LR). Avec 7 milliards d’euros supplémentaires dans ce PLF, en 2024, l’écologie ne pèsera plus 7 %, mais 8 % du budget. Le Gouvernement s’en satisfait, alors qu’il en attendra le double des collectivités, des ménages et des entreprises ; en outre, il n’a ni financé, ni prévu de programmation pour son plan au-delà de l’année prochaine. Avec un budget prévisionnel en déficit de 4,4 %, l’État compte essentiellement sur des recettes de TVA gonflées par l’inflation et la sortie du bouclier tarifaire pour financer sa transition écologique ; ainsi, il a peu de mesures d’économies structurelles.

Alors que ses marges de manœuvre sont devenues minimes avec l’explosion des charges financières, Emmanuel Macron a dit qu’il fallait dépenser plus pour l’écologie. Est-ce bien raisonnable, quand l’État pratique déjà un tel niveau de fiscalité confiscatoire, gaspillant – article 5 – sur quelques industries vertes très résiduelles un argent qu’il aurait pu économiser en se réformant et en recentrant ses priorités ?

Avec la hausse du bonus sur les véhicules, l’augmentation des redevances sur l’eau et la création d’une nouvelle taxe sur les autoroutes et les grands aéroports – elle retombera sur l’usager à travers les péages et les billets d’avion –, c’est la promesse illusoire d’une baisse des impôts du Gouvernement qui s’envole, aux articles 14, 15 et 16. Reste l’article 12, où l’imagination fiscale de Bercy a encore fait des siennes, avec la fin de l’avantage sur le GNR, sur le dos des petites exploitations, alors qu’une approche ne se limitant pas à un seul levier budgétaire aurait été plus pertinente. En finançant par la dette et les taxes, et non par la croissance, ces dépenses pharaoniques, le Gouvernement fomente en réalité l’inflation d’aujourd’hui et les impôts de demain, au détriment du pouvoir d’achat des Français. Notre groupe appelle au contraire à un vrai plan de réduction des prélèvements obligatoires, formulant pour 10 à 12 milliards d’euros de propositions, dont la baisse du prix des carburants via la TICPE, devenue une vraie bombe sociale à retardement.

M. Jimmy Pahun (Dem). Le groupe Démocrate valide ce budget pour 2024 : il acte un virage écologique visible et efficace de notre politique fiscale. Le crédit d’impôt en faveur des investissements dans l’industrie verte permet de transcrire cette ambition écologique de notre pays, qui doit se bâtir sur les technologies durables de demain, à l’image des 7 milliards d’euros supplémentaires qui seront dépensés pour la transition environnementale. Ce budget va plus loin, en actant enfin une feuille de route pour la sortie progressive des avantages fiscaux sur le GNR, dont nous veillerons à ce qu’elle soit juste et efficace.

Alors que le secteur du transport représente encore plus d’un quart des émissions de CO2 sur notre territoire, nous devons mener une politique offensive favorisant les moyens les plus sobres en carbone, en les rendant accessibles à tous. Je salue ainsi les mesures prises à l’article 14 qui amplifient cette politique favorable aux véhicules propres et sobres, notamment l’abaissement du seuil du malus masse, qui doit nous encourager à privilégier des voitures plus légères.

Enfin, j’appelle votre attention sur l’importance de l’article 16, qui acte de profondes modifications des redevances pour les agences de l’eau : à l’heure où les sécheresses se font de plus en plus fréquentes et de plus en plus intenses, le rôle de ces agences s’annonce crucial dans la mise en application du plan Eau. Nous devons lutter contre le gaspillage et les pollutions, afin que chacun prenne conscience de l’importance de cette ressource, amenée à se raréfier. Chers collègues, les Français le savent, de plus en plus, pour atteindre nos objectifs environnementaux, nous devrons modifier en profondeur nos modes de vie. La politique fiscale de notre pays doit les y inciter, sans laisser personne de côté. Le groupe Démocrate soutiendra cette transition juste, poursuivie dans ce budget.

M. Gérard Leseul (SOC). À la suite de la récente audition de la présidente du Haut Conseil pour le climat, je citerai le dernier rapport de cette instance : « Les émissions de gaz à effet de serre ont baissé en 2022 en France, mais cette baisse reste insuffisante face aux objectifs du pays. » Pour parvenir à nos objectifs environnementaux, il est donc nécessaire que tous les secteurs s’engagent encore plus fortement dans la décarbonation. Pour cela, l’État doit être une force motrice et régulatrice. Le levier fiscal est selon nous un outil extrêmement important pour réguler et modifier, progressivement mais durablement, les comportements, nos modes de production et de consommation et nos modes de vie. Le levier fiscal est aussi notre principal instrument collectif, pour assurer une juste répartition des richesses et une juste contribution à la transition écologique.

Les membres du groupe Socialistes et apparentés défendront des amendements de justice sociale et environnementale, visant à mettre à contribution les secteurs les plus polluants, tout en veillant à la justice sociale. Pour le secteur du transport, nous proposons de renforcer le malus poids des véhicules, pour limiter la « SUVisation » du parc automobile. Si le secteur aérien constitue une ouverture formidable sur le monde et est un outil de désenclavement, il est aussi un moyen de transport particulièrement carboné et socialement sélectif. Nous défendons donc une plus grande mise à contribution de l’aviation d’affaires et de l’aviation commerciale, pour la décarbonation.

Pour notre transition énergétique, nous proposons des dispositifs pour encourager le déploiement des énergies renouvelables, essentielles pour assurer notre indépendance énergétique et réduire l’ensemble de nos émissions de gaz à effet de serre. Pour l’industrie, nous porterons des amendements visant à changer durablement nos modes de production, avec l’extension du crédit d’impôt au titre des investissements dans l’industrie verte : verdir notre industrie ne doit pas être qu’un slogan. Nous vous proposerons d’autres amendements, mais il nous semble important que l’heure soit au renforcement des moyens budgétaires.

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). Qui aurait pu prédire le défi devant nous ? Des milliers de scientifiques, des rapports du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) qui s’entassent, des militants écologistes depuis quarante ans, même les doléances des gilets jaunes ont rappelé l’urgence d’agir par une fiscalité écologique juste. Telle est, chers collègues, la grande question que nous devrions à chaque instant nous poser : qui va payer le prix de la transition écologique ? Seront-ce les habitants des zones rurales, à qui on ne promet que d’immenses zones commerciales, des projets routiers avec un carburant à 2 euros le litre et des prix du train qui explosent ? Seront-ce les Français qui habitent près des zones industrielles, des périphériques et de l’agro-industrie ? Ou bien ferons-nous le choix – courageux mais le seul nécessaire et possible – de faire payer la transition à ceux qui sont responsables du désastre ?

Nous y répondrons dans les heures à venir, en examinant les moyens dédiés à la transition écologique du projet de loi de finances, à l’heure des choix. S’il est bien de faire des dépenses vertueuses pour le climat et la biodiversité, le groupe Écologiste-NUPES demande, avec bon sens, de mettre fin aux dépenses fiscales qui leur sont défavorables. En matière de transports, nous défendrons notamment la suppression de la subvention honteuse dont bénéficie le secteur aérien, et indirectement les plus riches de notre pays, pour polluer, pendant que les Français paient le train de plus en plus cher. Sur les voitures, nous défendrons la mise en place d’un seuil de « malus poids » plus bas que 1,6 tonne, qui ne concerne absolument personne, alors que le nombre de SUV explose, que le prix de l’essence augmente et que les services publics de transport manquent dans les territoires ruraux. Nous proposerons également de cesser tout accaparement et pollution de notre eau, en laissant tomber les projets de mégabassines et en mettant les moyens contre l’épandage d’intrants sur nos captages. Nous espérons qu’en accord avec les hautes ambitions promises avec la planification écologique, vous ferez ici, dans les prochaines heures, les bons choix, afin que l’écologie à la française ne soit pas celle qui, à coups de 49.3, punit les plus vulnérables et soustrait les plus puissants.

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). Cette année, comme les deux années qui l’ont précédée, le budget nous est présenté comme étant le plus vert de notre histoire. Si je reconnais bien volontiers des progrès, comme les dernières années, ce projet de loi de finances est surtout riche de ses omissions, de ses contradictions et, certainement, de ses insuffisances. Sur la question des effectifs, le Gouvernement revendique 760 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires, pour la première fois depuis vingt ans : c’est oublier qu’il a lui-même contribué à la longue hémorragie des effectifs dans les services des ministères, comme dans les agences qui en dépendent.

Négligé aussi, le rôle clé des collectivités territoriales dans la lutte contre le dérèglement climatique : comment parviendront-elles à faire face à leurs besoins d’investissement dans la neutralité carbone, avec un budget restreint et dans un contexte inflationniste ? Quant au pari fait par le Gouvernement d’un désendettement vert, il nous semble hasardeux : les investissements dans la transition écologique demandent des moyens plus conséquents, quitte à recourir à l’endettement.

Je terminerai avec quelques commentaires sur les articles dont notre commission s'est saisie pour avis. Tout d’abord, la création d’un crédit d’impôt pour l’industrie verte est une bonne idée ; nous proposerons quelques amendements pour en compléter le champ, dont nous souhaitons surtout nous assurer qu’il s’applique bien à l’ensemble des outre-mer. Il faudrait également envisager de l’étendre à l’ensemble des territoires et dans les zones de revitalisation rurale (ZRR). Si nous sommes favorables au durcissement du malus écologique, n’oublions pas pour autant le volet relatif à l’accompagnement, notamment des plus modestes, dans leur changement de véhicule ; à ce titre, nous attendons toujours des éclaircissements sur le leasing social. Concernant la taxation des aéroports, il est légitime que le transport aérien paye enfin une partie de son dû à la transition écologique ; une inquiétude néanmoins, pour les outre-mer, la Corse et les insulaires : devront-ils s’acquitter deux fois du prix de leur isolement ? Quant à la réforme des redevances perçues par les agences de l’eau, elle ne nous semble pas à la hauteur des enjeux liés à l’eau ; le PLF opère, certes, un rééquilibrage, en faisant contribuer les usagers économiques, mais trop de polluants échappent toujours à une contribution, et les collectivités n’ont plus les moyens d’assurer seules une bonne qualité de l’eau.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Monsieur Meurin, vous avez fait un discours général pour la commission des finances, en parlant de « bouillie ». Il ne s’agit pas de votre budget, je l’avais bien compris. Vous dites que c’est le budget d’un pouvoir sans idée, tout en remettant en cause tout ce qui est proposé dans ce budget, donc ne prétendez pas qu’il n’y a pas d’idées, mais simplement que vous n’êtes pas d’accord avec ces idées ! Un certain nombre de groupes ont d’ailleurs relevé la cohérence de ce budget et la possibilité de jouer sur le levier fiscal, avec une nouvelle politique fiscale, pour accompagner la transition écologique. S’il y a un problème de cohérence, il se situe dans vos propos.

Madame Guetté, votre propos était tellement direct qu’il n’appelle pas énormément de commentaires de ma part. Nous trouverons difficilement des points de convergence et mieux vaut consacrer du temps à discuter des amendements.

Monsieur Bony, je vous ferai juste une remarque sur le secteur agricole. La fin de l’avantage sur le GNR, initialement prévue au 1er janvier prochain, va être étalée sur sept ans ; l’accord qui a été trouvé résulte d’une discussion avec le monde agricole. Il faudra donc tempérer les choses, en lui rappelant sa participation à l’élaboration de la solution.

Certains d’entre vous ont relevé que le budget était de plus en plus vert, se traduisant par des leviers d’action de plus en plus importants. Vous avez rappelé qu’il y avait plusieurs milliards d’euros supplémentaires. Nous ne pouvons que nous en réjouir, même si j’ai bien noté que beaucoup d’entre vous souhaitaient un renforcement des moyens – M. Leseul a notamment évoqué la force motrice de l’État – et des mesures plus justes. Nous allons en discuter avec les amendements.

Ne présageons pas l’examen en séance des travaux de la commission ; nous avons 339 amendements à discuter ; étudions-les pour enrichir au mieux le projet de loi.

II.   examen des articles

Article 5 : Instauration d’un crédit d’impôt au titre des investissements en faveur de l’industrie verte

Amendement I-CD373 de M. Antoine Villedieu

M. Emmanuel Blairy (RN). Cet amendement vise à rendre éligibles au crédit d’impôt au titre des investissements en faveur de l’industrie verte (C3IV) les entreprises créées entre 2011 et 2023 dans les ZRR, les zones de revitalisation rurale. Trop souvent oubliées, ces zones connaissent des taux de chômage record : elles doivent bénéficier de tous les dispositifs à même de relancer une dynamique industrielle et commerciale.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Le taux retenu pour le crédit d’impôt est le plus élevé possible en application du TCTF, l’encadrement temporaire de crise et de transition : 20 %, porté à 25 % pour les investissements réalisés dans les zones d’aide à finalité régionale (ZAFR), et à 40 % dans les régions ultrapériphériques. Les moyennes entreprises bénéficient d’une majoration de dix points, les petites de vingt points. Les ZAFR sont définies par décret, après approbation de la Commission européenne. Souvent, elles correspondent aux ZRR. Votre amendement est satisfait : je vous propose de le retirer ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques I-CD13 de M. Vincent Descoeur et I-CD155 de M. Stéphane Delautrette

M. Vincent Descoeur (LR). Ces amendements visent à ouvrir le dispositif aux entreprises qui investissent dans le recyclage, le réemploi et la réindustrialisation des équipements et composants d’équipements, afin d’économiser les matériaux tout en développant l’économie circulaire.

Mme Chantal Jourdan (SOC). Il s’agit effectivement d’encourager le recyclage et l’économie circulaire.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L’article prévoit que la valorisation des matières premières nécessaires pour produire les équipements et leurs composants ouvre droit au crédit d’impôt. Le ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique m’a assuré que le recyclage et le réemploi y participaient. Le dispositif concerne toute la chaîne de production de valeur. Vos amendements sont satisfaits, je vous propose donc de les retirer ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. Vincent Descoeur (LR). Je le maintiens : M. le ministre pourra nous confirmer ce point.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, les amendements I-CD369 et I-CD371 de M. Pierre Vatin ainsi que l’amendement I-CD202 de M. Jorys Bovet tombent.

Amendements I-CD397 de M. Pierre Meurin et I-CD449 du rapporteur pour avis (discussion commune)

M. Pierre Meurin (RN). Monsieur le rapporteur pour avis, nous avons eu la même idée – vous un peu après moi –, ce dont je me réjouis. Comme beaucoup d’entre nous, j’ai beaucoup travaillé sur l’examen du projet de loi relatif à l’industrie verte. Il s’agit ici d’en transcrire les conséquences financières. Le ministre avait annoncé que le crédit d’impôt serait élargi à l’hydrogène décarboné, or la mesure n’apparaissait pas dans le projet de loi de finances.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L’amendement I-CD449 vise à élargir le crédit d’impôt à la fabrication des composants nécessaires au développement d’une industrie manufacturière française dans le secteur essentiel de l’hydrogène. Dans le cadre de la stratégie nationale pour le développement de l’hydrogène décarboné, l’État soutient l’essor de cette chaîne de valeur : avec la première vague du Piiec – projet important d’intérêt européen commun –, il consent des aides directes à des gigafactories, ou usines géantes, d’électrolyseurs et de piles à combustible. Or il est nécessaire de soutenir également les filières situées en amont des usines concernées, car elles connaîtront dès 2030 de fortes difficultés d’approvisionnement, notamment en platine et en iridium, deux matériaux stratégiques. Ce soutien doit par ailleurs favoriser une meilleure implantation en France de la chaîne de valeur, en particulier s’agissant des activités de transformation et de recyclage des matières premières critiques.

Cet amendement est cohérent avec les négociations en cours au niveau de l’Union européenne, qui visent notamment à définir les platinoïdes comme des matières premières critiques stratégiques.

Monsieur Meurin, je vous propose de retirer votre amendement au profit du mien, plus précis. À défaut, j’y serai défavorable.

M. Pierre Meurin (RN). L’amendement du rapporteur pour avis est bien mieux rédigé : je retire le I-CD397. Je me réjouis que nous fassions des progrès en matière d’hydrogène, après avoir pris trop de retard ces vingt dernières années. Nous espérons que l’hydrogène deviendra l’énergie capable de nous faire sortir des énergies fossiles – nous aurons l’occasion de reparler de l’électrification des véhicules.

L’amendement I-CD397 est retiré.

La commission adopte l’amendement I-CD449.

Amendements I-CD396 de M. Pierre Meurin et I-CD48 de M. Daniel Grenon (discussion commune)

M. Pierre Meurin (RN). Il ne s’agit pas de rouvrir le débat sur les énergies renouvelables, mais nous répétons que les éoliennes ne sont pas des outils efficaces pour mener à bien la transition énergétique : leur production est intermittente et leur développement conduit à affaiblir notre souveraineté, puisque nous ne maîtrisons ni l’extraction des matières premières nécessaires à leur fabrication, ni leur construction.

Développons le secteur nucléaire, notamment en appliquant la loi du 22 juin 2023 relative à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes, mais n’investissons pas dans les éoliennes : le contribuable ne doit pas être tenu de financer leur installation, qui abîme nos paysages, en particulier dans les territoires ruraux.

À cause du développement des énergies intermittentes, nous avons été l’an dernier obligés d’importer de l’électricité d’Allemagne, où elle est produite par des centrales à charbon. Faisons les bons choix politiques : arrêtons d’investir l’argent du contribuable dans l’éolien, alors que nos centrales nucléaires sont des bijoux.

M. Daniel Grenon (RN). Le présent amendement vise à exclure du champ du dispositif les dépenses d’investissement engagées pour la production d’éoliennes, lesquelles détruisent la biodiversité, à l’échelle locale et hors de nos frontières, puisque leur fabrication requiert du balsa et participe de ce fait à la déforestation de l’Amazonie. Incapables de produire de l’électricité lorsque la vitesse du vent est inférieure à 15 kilomètres par heure ou supérieure à 90 kilomètres par heure, elles ne fonctionnent que par intermittence. Pourquoi s’obstiner dans cette voie alors que de nombreuses autres méthodes de production ont un rendement constant ? La durée de fonctionnement des éoliennes est faible – vingt-cinq ans pour celles installées sur terre, trente ans pour celles en mer – et leur remplacement nécessite toujours plus de matériaux, car leur taille ne cesse d’augmenter. Le consommateur fait les frais de leur financement, en s’acquittant de la contribution au service public de l’électricité (CSPE), qui a augmenté de 650 % depuis sa création en 2003. Enfin, elles imposent une nuisance visuelle et sonore. À terme, il faut sortir les éoliennes du mix énergétique.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Nous avons déjà largement débattu des éoliennes. La programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) fixe des objectifs, notamment en matière de décarbonation ; pour les atteindre, nous devons utiliser tous les outils de la transition énergétique. Ne vous en déplaise, les éoliennes ont leur place dans le mix énergétique. Leur installation est encadrée et étudiée ; grâce aux dispositions de la loi du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, leur déploiement se fera sous l’autorité des préfets et des élus locaux.

Depuis quelques mois, la France exporte à nouveau de l’électricité. Le secteur des énergies renouvelables est un autre bijou ; comme le nucléaire, il faut le soutenir. J’émets un avis très défavorable sur ces deux amendements.

M. Pierre Meurin (RN). Il faut renouveler la PPE. L’an dernier, vous avez saucissonné la politique de l’énergie, en présentant d’une part un texte sur les énergies renouvelables, que la gauche pouvait voter, d’autre part un texte sur le nucléaire, que la droite pouvait voter. C’est une tactique compréhensible, mais elle nous prive de toute vision globale du mix énergétique. Or la PPE arrive à échéance ; nous en attendons une nouvelle, mais vous la retardez. Nous demandons une loi de programmation énergie-climat. Les éoliennes sont une gabegie énergétique ; le balsa, par exemple, utilisé pour leur fabrication, est extrait en Amazonie, contribuant à sa déforestation : la transition écologique, c’est bien, à condition d’être conscient des implications des choix que l’on fait. Par pitié, remettons en cause cette idéologie inepte qui pourrit les paysages des zones rurales.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il n’y a pas d’« idéologie éolienne ». Je serais étonné que malgré tous les discours, les débats et les travaux menés en commission du développement durable et dans l’hémicycle, vous n’ayez pas compris notre stratégie énergétique. Elle consiste à tendre vers l’efficacité et la sobriété, en développant les énergies renouvelables et en relançant la filière nucléaire. Certains la critiquent, preuve qu’elle n’est pas si confuse.

L’objectif est de s’attaquer aux énergies fossiles et de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Les éoliennes contribuent à l’atteindre. Je le répète : il ne s’agit pas d’en installer partout.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement I-CD325 de M. Emmanuel Blairy

M. Emmanuel Blairy (RN). La transition énergétique passera par l’innovation. L’énergie osmotique est prometteuse : à terme, elle pourrait produire annuellement 1 700 térawattheures d’électricité au niveau mondial, quand l’énergie nucléaire en produit 2 700. Il s’agit d’une énergie renouvelable, produite par le mouvement des molécules qu’entraîne la différence de salinité entre l’eau douce et l’eau de mer. Nous proposons donc d’élargir les dispositifs du crédit d’impôt aux centrales osmotiques.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Le 9 mars, la Commission européenne a adopté le TCTF, qui autorise les aides aux investissements productifs dans des biens stratégiques nécessaires à la transition vers une économie zéro émission nette. Les équipements liés à la production d’énergie osmotique ne sont pas éligibles : la faire entrer dans le champ du dispositif entraînerait la requalification du C3IV en aide d’État illégale. J’émets donc un avis défavorable. Il en ira de même pour les prochains amendements relatifs à d’autres productions étrangères à la liste, comme la biomasse et la chaleur fatale.

Lors de l’examen du projet de loi « énergies renouvelables », j’ai défendu un amendement visant à inscrire l’énergie osmotique au nombre des énergies renouvelables, dans le code de l’énergie ; il a été adopté. Elle bénéficie déjà de soutiens et une association promeut son développement au niveau européen.

La commission rejette l’amendement.

Les amendements I-CD339, I-CD340, I-CD341, I-CD346, I-CD347, ICD344 et I-CD343 de M. Nicolas Dragon sont retirés.

Amendements I-CD311 de M. Charles Fournier et I-CD375 de M. Antoine Villedieu (discussion commune)

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). Le texte prévoit que les entreprises ne peuvent procéder au transfert à l’étranger des investissements ayant bénéficié d’un crédit d’impôt au cours des deux exercices suivant celui de leur mise en service. Cette durée nous semble trop faible, au regard du risque de délocalisation dans des pays où les coûts de production et de main-d’œuvre sont moins élevés. Le présent amendement vise à porter cette durée à dix exercices. Nous partageons les objectifs de souveraineté et de reconquête industrielles, dans l’esprit du projet de loi relatif à l’industrie verte ; il serait absurde que les entreprises délocalisent les investissements ayant reçu des subventions publiques. Nous pensons à Photowatt, qui appartient à EDF : à l’heure où la Chine inonde le marché, il est le dernier fabricant de panneaux solaires en France.

M. Emmanuel Blairy (RN). L’alinéa 10 prévoit que l’entreprise bénéficiaire du crédit d’impôt ne peut délocaliser les investissements pendant les deux années qui suivent leur mise en service. L’alinéa 11 dispose qu’elle les exploite pendant cinq ans. Nous comprenons mal la logique consistant à consentir un crédit d’impôt à une entreprise pour exploiter pendant cinq ans des installations industrielles qu’elle délocaliserait après deux ans. Le présent amendement vise à rétablir une cohérence en portant à cinq ans l’obligation de maintenir les investissements dans le territoire national.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il s’agit de nouvelles mesures, issues du projet de loi relatif à l’industrie verte. Le dispositif doit rester souple afin que les entreprises puissent revendre les équipements concernés, seuls visés à l’alinéa 10, à d’autres entreprises, implantées ailleurs, sans se délocaliser elles-mêmes. J’émets donc un avis défavorable sur ces deux amendements.

Néanmoins, il faudra évaluer les effets de la loi « industrie verte » et, le cas échéant, en corriger certains aspects ; mais il est encore trop tôt.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement I-CD312 de M. Charles Fournier

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). Cet amendement vise à porter de cinq à dix ans le délai minimum d’exploitation dans le territoire national des investissements verts ayant bénéficié du crédit d’impôt. La durée prévue est trop courte au regard des enjeux de décarbonation de l’industrie française : elle est responsable de 18 % de nos émissions de gaz à effet de serre, ce qui en fait le troisième secteur le plus émetteur, selon le dernier bilan annuel du Haut Conseil pour le climat (HCC). Il s’agit d’éviter qu’après cinq exercices, les entreprises éligibles ne cessent d’exploiter les investissements ayant bénéficié d’aides publiques. Il faut soutenir les technologies utiles à la transition énergétique et écologique ; toutefois, les investissements consentis doivent s’inscrire dans le temps long, dans le cadre d’une planification écologique maîtrisée, à même d’aboutir.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Mieux vaut faire le pari de juger a posteriori et laisser le temps à ce nouveau dispositif de faire ses preuves. Il ne faut pas contraindre excessivement les entreprises qui voudraient renouveler leur matériel après quelques années. Avis défavorable.

La commission adopte l’amendement.

Amendement I-CD310 de M. Charles Fournier

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). Cet amendement vise à conditionner le C3IV à des engagements climatiques ambitieux. En 2019, le montant des aides publiques aux entreprises a atteint 160 milliards : il s’agit désormais du premier poste de dépenses de l’État. Il est impératif que ces milliards servent l’intérêt général, notamment en finançant la transition écologique à la mesure de l’urgence, de manière à atteindre nos objectifs. Le projet de loi de finances pour 2023 prévoyait plus de 67 milliards d’euros de dépenses néfastes pour le climat et la biodiversité.

Afin de décarboner et de réindustrialiser, les membres du groupe Écologiste-NUPES soutiennent le développement des filières industrielles vertes. Toutefois, la réindustrialisation ne saurait prendre la forme d’un développement anarchique de méga-usines, sans considération pour l’écologie ni les conséquences sociales. L’article 5 ne prévoit aucune contrepartie écologique au soutien public consenti aux industries vertes. De nombreux membres de la majorité sont désormais favorables au principe d’écoconditionnalité, que les écologistes défendent de longue date. Nous voulons imposer aux entreprises éligibles au crédit d’impôt des engagements annuels en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre : publier au plus tard le 1er avril un rapport présentant le bilan de leurs émissions directes et indirectes au cours de l’exercice clos ainsi que leur stratégie de réduction, assortie d’un plan de transition.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L’article 5 définit le crédit d’impôt au titre des investissements en faveur de l’industrie verte. Il s’agit de faciliter le lancement de chaînes de fabrication d’équipements pour la production d’énergies renouvelables, dans des secteurs ciblés. Par définition, les entreprises visées ne sont pas les plus polluantes.

Néanmoins je comprends votre volonté de contrôler l’incidence climatique des investissements concernés. L’alinéa 12 dispose justement que les entreprises « exploitent les investissements éligibles dans le cadre d’une activité ayant obtenu les autorisations requises par la législation environnementale, et [que] l’exploitation de ces investissements est conforme à cette législation ». L’ajout d’une condition de réduction des émissions de gaz à effet de serre rendrait d’autant plus complexe l’application du dispositif qu’il n’existe pas d’obligations légales en ce domaine.

Avis défavorable.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert (RE). L’idée est intéressante mais je crains que les petites entreprises ne disposent pas d’une comptabilité carbone analytique. Il faut éviter de freiner celles qui voudraient investir dans la recherche et le développement de ce secteur. Conditionner un engagement vert à un autre pourrait se révéler contre-productif ; il est plus intéressant de réserver les écoconditionnalités aux entreprises qui ne sont pas dans cette dynamique.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD327 de M. Emmanuel Blairy

M. Emmanuel Blairy (RN). L’industrie verte comporte notamment les filières de production de batteries, d’énergie éolienne et photovoltaïque, et de pompes à chaleur. Les moyens déployés sont ambitieux, pour atteindre un objectif vertueux – à condition de respecter les principes de l’économie circulaire. À lui seul, le secteur du bâtiment produit annuellement 42 millions de tonnes de déchets, autant que les ménages. La loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (Agec) prévoit ainsi la création de filières REP, à responsabilité élargie des producteurs, pour les produits et les matériaux de construction du secteur du bâtiment.

Je vous propose d’astreindre les acteurs de l’industrie verte à la même logique de responsabilité. Le présent amendement tend à encourager la filière à la responsabilité, en utilisant des matériaux recyclés, en recyclant les déchets et en ne produisant pas de déchets ultimes, afin qu’elle ne devienne pas un fardeau pour l’environnement.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Aux termes de l’article, le crédit d’impôt concernera justement l’ensemble des opérations de valorisation des matières premières critiques nécessaires à la fabrication des équipements, y compris les matières recyclées. Les entreprises auront donc tout intérêt à y recourir, sans qu’il soit nécessaire de le préciser, ce qui pourrait être source de contentieux. Je vous propose de retirer votre amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD451 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert

Mme Marjolaine Meynier-Millefert (RE). Mon amendement vise à élargir le champ du C3IV aux investissements industriels dans toute la chaîne de valeur, de la production de matières premières, y compris celles issues du recyclage, aux technologies de recyclage des équipements et produits en fin de vie. Or le spectre prévu ne prend pas en considération les industries de recyclage.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Votre amendement est doublement satisfait : par le texte et par l’adoption des amendements identiques de MM. Descoeur et Delautrette. Je vous propose de le retirer ; à défaut, l’avis sera défavorable.

L’amendement est retiré.

Amendement I-CD318 de Mme Marjorie Meynier-Millefert

Mme Marjolaine Meynier-Millefert (RE). Cet amendement vise à élargir le dispositif à la fabrication de capteurs solaires thermiques : les énergies renouvelables thermiques doivent participer à la décarbonation.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Cela va dans le sens de l’article. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Amendement I-CD302 de Mme Marjorie Meynier-Millefert

Mme Marjolaine Meynier-Millefert (RE). L’amendement vise à inclure le recyclage des batteries dans le champ du crédit d’impôt.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Le recyclage étant une opération de valorisation, il est déjà inclus. Avis défavorable.

L’amendement est retiré.

Amendements identiques I-CD49 de M. Daniel Grenon et I-CD199 de M. Matthieu Marchio

M. Daniel Grenon (RN). Dans le même esprit que le précédent et pour les différents motifs exposés, l’amendement I-CD49 vise à écarter du dispositif de crédit d’impôt les entreprises industrielles et commerciales engagées dans la production d’éoliennes. Au-delà de la suppression du crédit d’impôt, les éoliennes doivent, à terme, être retirées du mix énergétique de notre pays. Doivent ainsi être institués un moratoire sur toute nouvelle construction d’éoliennes et une fin des subventions pour aboutir enfin à un démantèlement progressif, comme le propose le Rassemblement national.

M. Matthieu Marchio (RN). L’éolien est un peu la marotte des macronistes. Vous en avez fait pendant plusieurs années l’une des seules options de production d’énergie, au détriment du nucléaire, et vous vous obstinez à en faire la promotion au moyen de crédits d’impôt pour la production d’éoliennes. L’éolien n’est pourtant ni écologique ni économique, car la fabrication, le transport et la maintenance des éoliennes ont un impact environnemental et les périodes de faible vent ou d’absence de vent peuvent entraîner une réduction de la production d’énergie, ce qui nécessite des solutions de stockage coûteuses ou la disponibilité d’autres sources d’énergie de secours.

Nous souhaitons donc la suppression des alinéas qui accordent des crédits d’impôt pour la production d’éoliennes.

Les éoliennes, nous n’en pouvons plus ! Chez moi, dans les Hauts-de-France, elles pourrissent nos paysages. Ça suffit ! Un moratoire sur l’éolien est donc nécessaire.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Le débat a déjà eu lieu et mon avis reste largement défavorable. Les macronistes, que vous avez interpellés, n’opposent pas les énergies renouvelables au nucléaire ni entre elles, et nous n’opposons pas les molécules aux électrons. Nous continuons à avancer sur le renouvelable et le nucléaire, mais nous nous opposons aux énergies fossiles.

La commission rejette les amendements.

Suivant la position du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement I-CD377 de M. Antoine Villedieu.

Amendements identiques I-CD448 du rapporteur pour avis, I-CD453 de M. Stéphane Delautrette et I-CD456 de M. Jean-Louis Bricout

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L’amendement I-CD448 propose d’élargir le champ d’application de l’article 5 afin que le crédit d’impôt puisse bénéficier, en complément des dépenses d’investissement déjà prévues, aux équipements liés à différentes opérations dans le domaine de l’éolien en mer, dont les câbles d’export, la fabrication et l’installation de lignes d’ancrage, ainsi qu’aux opérations de démontage et de démolition du parc.

M. Gérard Leseul (SOC). Il faut en effet élargir le champ du crédit d’impôt aux différents équipements relatifs aux éoliennes en mer, comme l’a dit le rapporteur pour avis. Cet amendement, déposé par plusieurs groupes, a été travaillé avec le SER, le Syndicat des énergies renouvelables – énergies auxquelles nous croyons, nonobstant ce qui peut en être dit par ailleurs.

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). Les dépenses d’investissement liées aux travaux d’aménagement des infrastructures et à tout ce qui se rapporte à l’éolien en mer doivent pouvoir bénéficier du crédit d’impôt.

M. Pierre Meurin (RN). Cette incitation supplémentaire à l’éolien est un très mauvais signal. Contrairement à d’autres groupes, nous ne nous associerons donc absolument pas à cet amendement. Le fait qu’il ait été, en outre, travaillé avec le Syndicat des énergies renouvelables montre qu’il s’agit d’une histoire de gros sous, pour favoriser une activité qui n’est absolument pas bénéfique dans le mix énergétique.

Vous n’avez, du reste, pas répondu à toutes nos questions, notamment à propos du balsa extrait d’Amazonie, du recyclage ou de l’enfouissement des pales d’éoliennes, ou du fait que ces équipements sont implantés dans des zones rurales et que certains territoires sont pourris par les éoliennes, ce qui pose un vrai problème d’acceptabilité sociale. Vous avancez à marche forcée pour ce qui concerne l’éolien, dont tout le monde a compris que cela marche très mal et très peu.

Cet amendement est donc un très mauvais signal pour ce qui est d’un mix énergétique qui nous permettrait de sortir des énergies fossiles. L’argent consacré à l’éolien ne sera pas consacré à la sortie des énergies fossiles car, je le répète, les éoliennes, non pilotables et intermittentes, nous font dépendre du climat. Or, pour sortir des énergies fossiles, nous avons besoin d’énergies pilotables, et l’éolien ne répond absolument pas à ce besoin.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Monsieur Meurin, les questions énergétiques appellent une approche très complète et, qu’il s’agisse du renouvelable, du nucléaire ou du fossile, il faut raisonner en cycle de vie. Selon le principe de Lavoisier, le pire sera évidemment les énergies fossiles. Nous agissons donc pour renforcer les énergies renouvelables et le nucléaire qui, comme toutes les énergies, ont à la fois des avantages et inconvénients.

Je vous invite également à examiner les travaux que produit régulièrement l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst), notamment sur les questions énergétiques. Il faut également avoir confiance dans les travaux de nos chercheurs et dans les progrès technologiques. Dans le domaine du renouvelable comme dans celui du nucléaire, nous observons en effet de belles avancées, et l’énergie osmotique, que nous évoquions tout à l’heure, a elle-même des avantages et des inconvénients. Nous nous efforçons de réduire les inconvénients et de développer les avantages, ce qui nécessite des évolutions technologiques. Il en va de même pour l’éolien et le photovoltaïque. Peut-être pourriez-vous être un peu moins « borné » à propos de l’éolien, que je vous invite à soutenir, car il faut faire la somme des énergies renouvelables.

La commission adopte les amendements.

Amendement I-CD445 du rapporteur pour avis, amendements identiques ICD454 de M. Stéphane Delautrette et I-CD457 de M. Jean-Louis Bricout (discussion commune)

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Dans le même esprit, l’amendement I-CD445 vise à élargir le champ d’application de l’article 5, afin que le crédit d’impôt puisse bénéficier, en complément des dépenses d’investissement déjà prévues, aux équipements et dépenses liés aux différentes opérations d’éolien en mer. Je propose par ailleurs le retrait des amendements identiques I-CD454 et I‑CD457 au profit du mien, plus complet d’un point de vue légistique.

Les amendements I-CD454 et I-CD457 sont retirés.

La commission adopte l’amendement I-CD445.

Amendements I-CD378, I-CD379 et I-CD380 de M. Antoine Villedieu (discussion commune)

M. Emmanuel Blairy (RN). Avec 800 tonnes de béton, 25 tonnes d’acier, une durée de vie de quinze ans et des pales de 45 mètres de haut, voilà la nouvelle silhouette qui défigure les paysages de notre belle France. Dessinées par des fanatiques écologistes et subventionnées avec l’argent des Français, les éoliennes ne représentent une richesse que pour les promoteurs de l’éolien, comme l’a rappelé tout à l’heure mon collègue Pierre Meurin. Déjà opposés aux éoliennes pour la loi du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables ou le projet de loi relatif à l’industrie verte, nous le sommes de nouveau aujourd’hui pour le projet de loi de finances, et nous nous y opposerons chaque fois que vous demanderez aux Français de payer pour cette aberration écologique, économique, énergétique et humanitaire.

Suivant la position du rapporteur pour avis, la commission rejette successivement les amendements I-CD378, I-CD379 et I-CD380.

Amendements I-CD446 du rapporteur pour avis, amendement I-CD452 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert, amendements identiques I-CD455 de M. Stéphane Delautrette et I-CD458 de M. Jean-Louis Bricout (discussion commune)

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L’amendement I-CD446 vise à élargir le champ d’application de l’article 5 afin que, pour ce qui concerne les éoliennes en mer, le crédit d’impôt puisse bénéficier, en complément des dépenses d’investissement déjà prévues, aux équipements et dépenses liés aux opérations de valorisation et de recyclage des matières premières critiques nécessaires à la production des équipements et des composants d’équipements, ainsi qu’à la valorisation et au recyclage des équipements et composants d’équipements mentionnés dans l’article.

M. Gérard Leseul (SOC). Bien qu’ayant une rédaction différente, les deux amendements identiques visent eux aussi à élargir le crédit d’impôt à différents équipements relatifs aux éoliennes en mer et à l’assemblage de ces dernières.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Mon amendement I-CD446 étant plus précis, je demande le retrait des amendements identiques.

Les amendements I-CD452, I-CD455 et I-CD458 sont retirés.

La commission adopte l’amendement I-CD446.

Amendements identiques I-CD447 du rapporteur pour avis, I-CD153 de M. Stéphane Delautrette et I-CD304 de M. Jean-Louis Bricout

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Cet amendement tend à élargir le champ d’application de l’article 5 afin que le crédit d’impôt puisse bénéficier, dans le domaine des éoliennes, à la réalisation des études de levée des risques et de caractérisation du cycle d’implantation d’un projet de parc éolien en mer, aux études de suivi des impacts, ainsi qu’aux études portant sur les opérations de démantèlement et de remise en état du site d’implantation. Il existe donc bien une préoccupation environnementale lorsqu’on s’intéresse aux éoliennes, comme c’est le cas, entre autres, pour les centrales nucléaires. Une volonté très rigoureuse s’exprime donc en la matière, Monsieur Meurin, toujours fondée sur le principe de Lavoisier.

La commission adopte les amendements.

Amendements identiques I-CD154 de M. Stéphane Delautrette et I-CD319 de M. Jean-Louis Bricout

M. Gérard Leseul (SOC). L’amendement I-CD154 vise à inclure les dépenses d’investissement liées aux travaux d’aménagement des infrastructures portuaires pour la production d’éoliennes en mer, car l’utilisation des ports est essentielle aux projets d’éolien flottant ou posé, qui peuvent nécessiter le renforcement des sols, des remblais, du dragage et la construction de nouveaux espaces ou de nouveaux quais.

M. Jean-Louis Bricout (LR). L’amendement I-CD319 vise à inclure dans le champ du crédit d’impôt les dépenses d’investissement liées aux travaux d’aménagement des infrastructures portuaires pour la production d’éoliennes en mer.

Suivant la position du rapporteur pour avis, la commission adopte les amendements.

Amendement I-CD16 de M. Emmanuel Blairy

M. Emmanuel Blairy (RN). Des solutions simples existent parfois pour régler des problèmes complexes et il serait dommage de les négliger. Parmi les récentes innovations, il faut citer la VMC – ventilation mécanique contrôlée  double flux, qui permet de renouveler l’air vicié d’un logement ou d’un bâtiment par de l’air neuf venant de l’extérieur. Alors qu’en hiver, l’air neuf froid vient diminuer la température intérieure du logement, ce qui induit une surconsommation de chauffage, la VMC double flux réchauffe l’air neuf par les calories contenues dans l’air vicié extrait. Ce faisant, on gagne quelques degrés pour l’air entrant, ce qui est autant d’économisé pour les occupants. Nous proposons ainsi d’ajouter cette technologie à celle de la pompe à chaleur, qui récupère les calories de l’air extérieur ou du sol pour assurer le chauffage des bâtiments, ces deux solutions étant d’ailleurs parfois combinées.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Les systèmes étant combinés, les VMC double flux sont déjà incluses dans la catégorie des pompes à chaleur et il n’est donc pas nécessaire de le préciser ici. Je demande le retrait de l’amendement.

La commission rejette l’amendement.

À la demande du rapporteur pour avis, l’amendement I-CD308 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert est retiré.

Suivant la position du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement I-CD381 de M. Antoine Villedieu.

Amendement I-CD243 de Mme Nathalie Bassire

M. Jean-Louis Bricout (LR). Les collectivités de Mayotte, de Saint-Pierre-et-Miquelon, de Saint-Barthélemy, de la Polynésie française et de la Nouvelle-Calédonie étant exclues de la bonification du crédit d’impôt, l’amendement tend à remédier à cet oubli en ouvrant le dispositif du C3IV à tous les tous les territoires ultramarins de la République.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. La liste étant définie par décret et validée par la Commission européenne, il faudrait que le Gouvernement demande à cette dernière de pouvoir modifier ce décret. Nous ne pouvons rien faire à ce stade. Avis défavorable, donc.

M. Jean-Louis Bricout (LR). La question s’apparente à celle qui se pose pour les ZRR, à propos desquelles votre réponse m’a laissé sceptique. En effet, certains territoires sont classés en ZAFR sans l’être pour autant en ZRR, et vice versa, ce qui se traduit pour eux par un préjudice.

M. Vincent Descoeur (LR). Adopter cet amendement encouragerait le Gouvernement à obtenir gain de cause au niveau européen.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Cela nous mettrait en porte-à-faux avec le droit européen. Mieux vaudrait retirer l’amendement et travailler sur cette question avec le Gouvernement pour lui permettre d’agir.

M. Jean-Louis Bricout (LR). Pourrions-nous déposer un amendement visant à inclure tous les outre-mer ?

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Nous pourrions examiner cette question d’ici à l’examen du texte en séance publique, mais je ne peux garantir l’issue de cette démarche. Mieux vaut, je le répète, travailler sur cette question avec le Gouvernement.

M. Jean-Louis Bricout (LR). On ne peut ignorer totalement une partie des outre-mer ni les territoires ruraux ou les ZRR, car il s’agit bien ici de l’implantation des entreprises sur notre territoire. Les ZAFR bénéficient déjà d’aides à l’investissement, mais pas les ZRR.

La commission adopte l’amendement.

Amendement I-CD245 de Mme Charlotte Leduc

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Cet amendement vise à conditionner le crédit d’impôt à la publication d’un reporting fiscal établi pays par pays. Il s’agit donc d’une mesure de transparence fiscale visant à exclure du bénéfice des aides d’État les entreprises dont des filiales ou établissements sont établis dans des États ou territoires non coopératifs. On sait qu’une suspicion démocratique majeure vise l’évasion et la fraude fiscales, documentées notamment par les Pandora Papers ou par un article du journal Le Monde indiquant qu’une note de Bercy montrait que la France avait tenté d’affaiblir la directive européenne prévue pour la transparence fiscale.

La mesure permettrait de rétablir un peu de confiance en nous assurant que ces entreprises ne pratiquent pas d’évasion ou de fraude fiscale. On sait aujourd’hui qu’il existe des paradis fiscaux qui ne figurent pas sur cette liste – le Luxembourg, les Pays-Bas ou l’Irlande. L’économiste Gabriel Zucman a montré que 80 % de l’évasion fiscale des entreprises en France s’opèrent par d’autres pays de l’Union européenne. Il importe donc que le crédit d’impôt ne puisse pas bénéficier à des entreprises qui agissent de la sorte.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L’article prévoit déjà que les entreprises doivent respecter, au titre de chaque exercice auquel le crédit d’impôt est imputé, leurs obligations fiscales et sociales et l’obligation de dépôt de leurs comptes annuels, selon des modalités prévues par le code du commerce.

Par ailleurs, l’article 223 quinquies C du code général des impôts introduit une présentation pays par pays des résultats économiques, comptables et fiscaux qui doivent être télédéclarés par les entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse 750 millions d’euros afin de lutter contre l’optimisation et la fraude fiscales. Votre amendement, qui abaisse ce seuil, ne vise que les entreprises éligibles à ce crédit d’impôt, ce qui poserait un problème d’équité entre les entreprises. En outre, la lutte contre l’évasion fiscale suppose un dispositif qui s’applique à toutes les entreprises. Pour l’ensemble de ces raisons, avis défavorable.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Je comprends donc, Monsieur le rapporteur pour avis, que si nous proposons dans le cadre du projet de loi de finances, en matière de transparence et de lutte contre la fraude fiscale, un amendement plus global visant toutes les entreprises, et non pas seulement celles qui sont concernées par le crédit d’impôt, vous le voterez !

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Nous verrons…

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD250 de M. David Guiraud

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). Cet amendement vise à inciter les entreprises à s’engager en faveur de la protection de la biodiversité, afin d’inviter le secteur économique à effectuer une transition écologique en ce sens. Il propose donc de conditionner l’obtention du crédit d’impôt à la mise en place d’une stratégie concrète de protection de la biodiversité dans les entreprises concernées – par exemple l’adaptation d’une stratégie financière de l’entreprise, avec des placements financiers et des investissements favorables à la biodiversité, ou l’évaluation et la réduction des impacts sur la biodiversité des produits et services proposés par l’entreprise.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Même si on peut le regretter, il n’existe pas, en matière de biodiversité, d’indicateurs précis ayant une valeur législative. Cet amendement pourrait donc être source de contentieux. Avis défavorable.

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). Ce qui est proposé est la mise en place d’une stratégie, qui ne suppose pas de facteur d’évaluation de l’impact sur la biodiversité. Il n’y a donc pas de critère qui pourrait donner matière à contentieux.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il n’existe pas d’indicateur de nature législative que nous pourrions inscrire dans le texte.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD244 de M. David Guiraud

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). L’amendement vise à conditionner le crédit d’impôt à des engagements climatiques contraignants de la part des entreprises. Dans le contexte de la crise du covid-19 et des conséquences de la guerre en Ukraine, l’État français a débloqué des aides financières inédites, nécessaires pour la préservation des activités économiques et des emplois, mais qui ne sauraient être attribuées sans contrepartie, notamment en matière écologique. De même, les aides pérennes doivent elles aussi être conditionnées à des engagements climatiques contraignants pour les grandes entreprises.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Le dispositif du crédit d’impôt établi par cet article vise à faciliter le lancement de chaînes de production d’équipements dans le domaine de l’énergie renouvelable dans les secteurs ciblés. Par définition, ces entreprises ne sont pas plus polluantes que les autres et visent à fournir des équipements décarbonés.

Je comprends votre volonté de contrôler l’impact climatique de ces investissements. Le texte prévoit d’ailleurs que ces entreprises doivent exploiter des investissements éligibles dans le cadre d’une activité ayant obtenu les autorisations requises par la législation environnementale et que l’exploitation de ces investissements doit être conforme à cette législation. Rajouter une condition de réduction des émissions de gaz à effet de serre à des activités a priori peu carbonées pourrait se révéler difficile, d’autant plus qu’il n’existe pas d’obligation légale dans ce cadre. Avis défavorable.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). L’expression « a priori décarbonées » est un peu vague. Pouvez-vous préciser ?

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il s’agit d’entreprises dont la production se situe dans ce domaine, et qui sont donc déjà dans une démarche de décarbonation, puisque les mesures ciblent des secteurs stratégiques de la transition écologique. Nous souscrivons à l’esprit de votre amendement, mais il serait difficile à mettre en œuvre.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD248 de M. David Guiraud

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). Afin d’encourager de manière efficace les entreprises du secteur énergétique à sortir des énergies fossiles, nous proposons de conditionner l’obtention du crédit d’impôt à un minimum d’investissements dans les énergies renouvelables. Cette fois, il est précisé que le niveau de ces investissements et leurs modalités seront fixés par décret en Conseil d’État. Il n’y a donc pas de risque de contentieux.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je ne vois pas les choses de cette manière. Ce crédit d’impôt vise précisément à accroître les investissements dans les énergies renouvelables. Le conditionner à un certain volume d’investissements en la matière revient à décourager certaines entreprises de s’engager dans cette voie. Votre amendement ajouterait de la complexité au dispositif. Prévoir autant de contraintes d’entrée de jeu va rendre les choses plus difficiles pour les entreprises.

Encore une fois, il faut commencer par appliquer le dispositif prévu par cet article, puis en évaluer les effets avant, le cas échéant, de le modifier.

Avis défavorable.

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). Nous n’avons pas besoin d’évaluation pour savoir d’ores et déjà que le dispositif proposé comporte un biais. On peut bénéficier de ce crédit d’impôt en n’investissant que très peu dans les énergies renouvelables. Vous n’encouragez donc en rien les entreprises à développer cette filière. C’est la raison pour laquelle nous proposons de prévoir un niveau minimum d’investissements pour bénéficier du dispositif.

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). L’amendement déposé par nos collègues du groupe La France insoumise a pour objet de prévoir un seuil, afin d’éviter par exemple qu’une entreprise comme TotalEnergies bénéficie du crédit d’impôt alors qu’elle a décidé d’accroître pour les deux années à venir ses investissements dans les énergies fossiles – lesquels représentent entre 70 et 80 % de ses investissements. Ce crédit d’impôt est constitué par de l’argent public et l’accorder à cette entreprise reviendrait à ce que l’État lui donne un feu vert pour l’ensemble de ses activités. Cela semble un peu étrange à l’heure actuelle.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert (RE). Je trouve cet amendement intéressant, mais je ne le voterai pas car, à ce stade, je ne sais pas quels pourraient être ses effets secondaires non désirés. Je l’étudierai avec attention d’ici à la séance.

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). L’amendement prévoit que les modalités précises seront fixées par décret, ce qui ménage une grande marge de manœuvre.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Vous avez pris pour cible TotalEnergies, en estimant que cette entreprise n’en fait pas assez.

Ce texte concerne les nombreuses entreprises qui n’investissent peut-être pas suffisamment dans les énergies renouvelables, afin de les inciter à le faire. Si l’on fixe un plancher d’investissements, on risque de les détourner de l’objectif. En disant cela, je ne prends pas la défense de TotalEnergies. Mais il s’agit de pousser le maximum d’acteurs à participer à la transition écologique. Il n’est donc pas opportun de freiner ce processus et de rendre le dispositif plus complexe.

Il faut rejeter ce type d’amendement : mieux vaut appliquer le dispositif pendant, par exemple, deux ans, l’évaluer et l’adapter éventuellement en prévoyant alors des mesures complémentaires ou des seuils.

Au demeurant, pour que ce crédit d’impôt soit mis en place, il faut au préalable adopter le projet de loi relatif à l’industrie verte. Je compte bien entendu sur vous.

M. le président Jean-Marc Zulesi. Rendez-vous à vingt heures pour la commission mixte paritaire (CMP).

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Je veux bien croire que vous êtes convaincu par le dispositif, mais ce PLF va faire l’objet d’un 49.3. Il faut que notre commission se prononce de manière forte et consensuelle en faveur d’amendements qui sont en réalité minimalistes. Il s’agit en l’occurrence seulement de ne pas faire profiter les entreprises du secteur énergétique du crédit d’impôt au titre des investissements dans l’industrie verte.

Vous ne pouvez pas faire de grandes phrases et prétendre que ce budget est le plus vert tout en permettant à une entreprise comme TotalEnergies de bénéficier de ce crédit d’impôt. On sait que cette dernière a touché une subvention de 5 millions d’euros versée par l’Ademe.

Nous demandons seulement que soient fixés des objectifs minimaux en matière de production d’énergie renouvelable. Il y a urgence. On ne peut pas se permettre de prévoir un dispositif et d’attendre trois ans pour que vous nous refusiez une demande de rapport sur son application. Nous perdons trop de temps et le sujet est trop important. Je peux comprendre que vous vous soyez opposé à nos amendements précédents, qui visaient l’ensemble des entreprises. Mais j’ai du mal à saisir la cohérence de vos arguments sur celui dont nous discutons.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert (RE). Je ne comprends pas du tout votre amendement de la manière dont vous le présentez. Vous prévoyez de mettre en place un seuil minimum de production d’énergie renouvelable. Cela ne fonctionne pas. Si une entreprise qui produit seulement ce type d’énergie n’atteint pas le plancher fixé, elle ne pourra pas bénéficier du crédit d’impôt destiné à soutenir son développement.

Je crains que la rédaction de l’amendement ne corresponde pas à votre intention – que je comprends par ailleurs – qui consiste à éviter que le dispositif bénéficie à des entreprises qui investissent massivement à l’échelle internationale dans la production d’énergie fossile.

Mme Chantal Jourdan (SOC). Notre groupe soutient cet amendement de bon sens, qui s’inscrit dans une vision de l’avenir. On ne doit pas attendre.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je m’interroge vraiment. Si le seuil est par exemple fixé à 20 %, cela pourrait décourager des entreprises qui envisageaient de passer leurs investissements à 10 %. Mme Guetté me taquine en disant que je fais de grandes phrases, mais je suis précis lorsque je dis que je ne souhaite pas que l’on dissuade certaines entreprises qui veulent avancer en prévoyant un plancher d’investissements difficile à atteindre.

Il faut attendre de voir quels seront les effets de la loi relative à l’industrie verte et discuter avec toutes les entreprises.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD249 de Mme Charlotte Leduc

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Toujours dans la même logique, cet amendement propose de conditionner le crédit d’impôt au respect de trajectoires d’émission de gaz à effet de serre compatibles avec l’accord de Paris. Je pense que vous conviendrez que les entreprises doivent respecter ce dernier.

Je reviens sur l’amendement précédent. Nous allons en vérifier la rédaction d’ici à l’examen en séance, car je n’ai pas la même lecture que vous des effets du dispositif que nous proposons.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Le dispositif qui figure dans l’amendement I-CD249 est inopérant, car les trajectoires de réduction des gaz à effet de serre sont définies par secteur et non par entreprise. Même si on peut le regretter, il n’existe pas de trajectoire de réduction obligatoire pour les entreprises. Avis défavorable.

M. Gérard Leseul (SOC). J’invite nos collègues de La France insoumise à rédiger de nouveau l’amendement précédent, pour qu’il soit plus clair et acceptable par tout le monde.

Depuis tout à l’heure, nous débattons de la conditionnalité des crédits d’impôts. Nous avons dit à de nombreuses reprises qu’il n’est pas raisonnable qu’une entreprise en bénéficie quel que soit son comportement. J’entends la distinction faite par le rapporteur pour avis entre secteurs d’activité et entreprises. Mais une entreprise intervient dans un secteur d’activité et se fixe des objectifs dans sa déclaration de performance extra-financière.

L’amendement défendu par Mme Guetté me semble tout à fait acceptable et nous le soutiendrons.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je le répète, cet amendement est inopérant. Je n’en vois donc pas l’intérêt.

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). Cet amendement est efficace car il impose aux grandes entreprises donneuses d’ordres d’exercer leur devoir de vigilance en leur demandant de respecter des engagements en matière climatique.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD247 de Mme Charlotte Leduc

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). La transition vers une industrie verte ne se fera pas sans emplois. Or, en 2021, les entreprises du CAC40 ont rémunéré leurs actionnaires à hauteur de 80 milliards d’euros, alors même qu’elles ont procédé à 62 500 suppressions d’emplois. Ces entreprises ont toutes bénéficié d’aides, et ce sans contrepartie en matière d’emploi.

Nous proposons donc de conditionner le crédit d’impôt à l’absence de licenciements non justifiés pendant la crise, afin que le développement de l’industrie aille de pair avec celui de l’emploi.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Le crédit d’impôt va précisément permettre de créer de l’emploi en France. L’étude d’impact indique qu’avec une dépense fiscale de 3 milliards d’euros, ce dispositif va engendrer 23 milliards d’investissements et permettre de créer 40 000 emplois d’ici à 2030. Soyons optimistes.

Avis défavorable.

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). Nous n’accordons pas la même confiance que vous aux grandes entreprises en ce qui concerne leur utilisation de l’argent public. Pendant la crise de la covid, certaines ont bénéficié d’aides publiques très importantes et ont pourtant procédé dans le même temps à des réductions d’effectifs. Il est inacceptable que cet argent serve davantage aux actionnaires qu’à défendre l’emploi.

On ne cesse de répéter que la transition vers l’industrie verte constitue aussi une opportunité pour créer des emplois. Nous devons agir dans ce sens et ne pas accorder d’aides publiques à des entreprises qui suppriment des emplois sans justification en période de crise.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD50 de M. Daniel Grenon

M. Daniel Grenon (RN). Cet amendement vise à insérer un alinéa interdisant tout plan de licenciement aux entreprises qui bénéficient du crédit d’impôt, lequel est destiné à assurer le développement de la production d’énergie sur notre territoire. Cela ne peut être envisagé sans prendre en considération le volet social, qui constitue l’un des trois piliers fondamentaux du développement durable. Tel est l’objet de l’amendement, qui vise en pratique à protéger nos concitoyens des plans de licenciement, et ainsi à pérenniser les emplois créés dans l’industrie verte et à empêcher tout abus de la part des entreprises.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L’objectif du crédit d’impôt est de créer de l’activité et donc de l’emploi, comme le montre l’étude d’impact. S’il apparaissait par la suite que de nombreuses entreprises ont licencié alors qu’elles ont bénéficié de ce crédit d’impôt, nous pourrions ajuster le dispositif. Mais faisons confiance aux chefs d’entreprise qui vont investir dans la transition écologique, sans exercer sur eux une pression exagérée qui les freinerait alors même que le dispositif se met en place. Encore une fois, l’objectif est d’inciter le plus grand nombre d’entreprises à participer à cette transition.

M. Pierre Meurin (RN). Les amendements dont nous discutons – qui n’émanent pas seulement de notre groupe – reviennent à dire qu’on ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre, c’est-à-dire la liberté totale de licencier et de ne pas décarboner tout en bénéficiant d’un crédit d’impôt.

Il est de notre responsabilité d’encadrer ce dernier et de soumettre son obtention à des conditions. Je ne comprends pas vos réticences. Trois ans sans plan de licenciement, cela me paraît être une condition raisonnable. On pourrait même durcir ce dispositif.

La Macronie n’est pas la seule responsable des délocalisations et des plans de licenciement qui ont marqué les quarante dernières années. Le pays a fait face à des situations sociales très violentes et certains territoires ont été totalement désindustrialisés.

Il revient au Parlement de mettre en place des garde-fous solides afin que de telles situations ne se répètent pas. On ne peut pas balayer cela d’un revers de la main. Nous examinons le budget de l’État, financé par des contribuables qui sont aussi les personnes qui pourraient être licenciées. Compte tenu des expériences passées, nous souhaitons encadrer étroitement ce crédit d’impôt et conditionner son octroi à un comportement social des entreprises le plus vertueux possible.

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). Je suis un peu surpris parce qu’il me semble que dans les ZAFR, l’octroi des aides à l’investissement industriel est conditionné par la création d’emplois. Je ne vois pas pourquoi le respect de ce critère serait exigé dans ce dernier cas et ne le serait pas pour le crédit d’impôt prévu par cet article, qui peut concerner le même investissement. Ce qui est proposé par l’amendement paraît logique.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Monsieur Meurin, je vous invite à ne pas balayer d’un revers de la main le fait que ces dernières années, nous avons relocalisé des entreprises, réindustrialisé et créé des emplois. La France bénéficie de beaucoup d’investissements ; tout cela va dans le bon sens. Vous avez dû remarquer ces évolutions positives dans votre région et j’espère que vous vous en réjouissez.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD246 de M. David Guiraud

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). L’amendement tend à conditionner le crédit d’impôt à l’absence de versement de dividendes.

En 2021, les entreprises du CAC40 en ont distribué à hauteur de 80 milliards d’euros. Ce record sera vraisemblablement battu en 2022 et en 2023, alors même que les suppressions d’emplois continuent dans ces très grands groupes – que vous continuez d’arroser d’aides publiques dont ils n’ont de toute évidence pas besoin.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Ce débat sur les dividendes relève davantage de la compétence de la commission des finances.

Nous demandons aux entreprises d’investir et nous les aidons à le faire. Les petites entreprises peuvent aussi distribuer des dividendes et je trouverais regrettable qu’on ne permette pas un complément de rémunération pour ceux qui participent au développement des PME. Je ne vois pas en quoi il serait gênant qu’une entreprise participant à la transition écologique réussisse.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD251 de Mme Charlotte Leduc

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). Nous proposons d’exclure du crédit d’impôt les entreprises ayant enfreint certaines lois, notamment relatives aux discriminations et aux droits des salariés. L’article L. 2141-4 du code de la commande publique prévoit déjà que ces entreprises sont exclues de la passation de marchés publics. Ce que nous proposons n’est donc pas farfelu. Comme l’a indiqué notre collègue Gérard Leseul, il est nécessaire de conditionner l’obtention des crédits d’impôts afin d’obtenir des améliorations de notre société.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L’amendement est satisfait. Les entreprises qui déposent un dossier de demande de crédit d’impôt doivent respecter des obligations fiscales et sociales. Demande de retrait.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD134 de M. Pierre Meurin

M. Pierre Meurin (RN). Cet amendement vise à encourager les entreprises dont la toiture est constituée de plaques fibrocimentées amiantées à procéder à une rénovation en installant une toiture en bac acier, sur laquelle reposeraient des panneaux photovoltaïques. Lors de l’examen du PLF 2023, j’avais déjà évoqué cette question sanitaire, écologique et de rentabilité des entreprises – notamment des PME. Le crédit d’impôt que nous proposons permettrait à nombre d’entre elles d’investir dans le photovoltaïque pour leur propre consommation, et probablement d’en sauver un certain nombre de la faillite compte tenu de l’explosion de leur facture d’électricité.

Le chantier est titanesque et mériterait d’être piloté dans le cadre d’une stratégie nationale. Comme vous le voyez, nous ne sommes pas hostiles par principe aux énergies renouvelables et notre proposition mérite de recueillir un large consensus.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Ce que vous proposez dépasse le champ d’intervention de l’article.

En mars 2023, la Commission européenne a accordé aux États membres la possibilité d’octroyer des aides supplémentaires pour soutenir les investissements productifs dans des biens stratégiques nécessaires à la transition vers une économie à zéro émission nette. Cela concerne notamment la production de batteries, de panneaux solaires et d’éoliennes. Mais le remplacement des plaques fibrocimentées n’est pas mentionné. Le droit européen ne permet pas d’étendre le bénéfice du crédit d’impôt à cette activité. Si nous le faisions, cela pourrait être qualifié d’aide d’État illégale.

Avis défavorable.

M. Pierre Meurin (RN). Encore un sujet sur lequel le droit européen ne nous aide pas. Que ce qui peut faire l’objet du soutien de l’État soit décidé arbitrairement au niveau européen constitue tout de même une véritable difficulté. Nous devrions pouvoir en décider souverainement.

Le professeur Fugit est un grand défenseur des zones à faibles émissions (ZFE). En l’occurrence, nous discutons d’une autre question de santé publique. Le fibrociment, c’est de l’amiante. Si on obéit à l’Union européenne lorsqu’elle ne permet pas d’aider à déposer les toitures obsolètes en fibrociment, on le fait au détriment de la santé des Français.

Nous pouvons faire des choix souverains et engager un bras de fer avec la Commission européenne. Sinon, les Français risquent de considérer que vous êtes relativement impuissants face à l’Union européenne.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert (RE). Vous faites surtout une plaidoirie contre l’Europe, décalée par rapport au PLF. Cet article prévoit de trouver des solutions industrielles qui participent à la transition écologique. Il est intéressant de travailler sur le problème de l’amiante, mais il faut le faire dans un autre cadre.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Comme je l’ai déjà dit, ce que vous proposez ne correspond pas au champ de cet article.

Être défavorable à votre amendement ne veut pas dire que l’on ne s’intéresse pas au sujet de santé publique que vous évoquez. Simplement, ce projet n’est pas le bon texte pour l’aborder.

Et n’oubliez pas, Monsieur Meurin, qu’il convient de parler de zones à faibles émissions « mobilité » (ZFE-m). C’est très important.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert (RE). Vous proposez un crédit d’impôt qui concerne la rénovation des bâtiments, alors que l’article en prévoit un destiné aux investissements industriels. Ce n’est pas le même sujet.

La commission rejette l’amendement.

Suivant la position du rapporteur pour avis, elle rejette l’amendement ICD398 de M. Pierre Meurin.

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 5 modifié.

Après l’article 5

Amendement I-CD314 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert

Mme Marjolaine Meynier-Millefert (RE). Afin de donner de la visibilité aux entreprises, cet amendement vise à étendre jusqu’en 2026 le dispositif de suramortissement pour le remplacement d’engins non routiers polluants par des engins peu polluants – c’est-à-dire qui ne fonctionnent pas grâce à des énergies fossiles. Le renouvellement des flottes d’engins professionnels ne doit pas se limiter au remplacement des poids lourds, mais également prendre en compte le verdissement des engins de manutention. Il s’agit donc de soutenir les industriels qui produiront ces véhicules professionnels bas-carbone.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Cet amendement tend à instaurer un dispositif de suramortissement entre le 1er janvier 2024 et le 31 décembre 2026 pour les engins non routiers fonctionnant grâce à l’énergie électrique ou hydraulique. Il semble créer une niche fiscale en faveur d’une filière encore peu développée. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Article additionnel après l'article 5 : Étendre le dispositif de suramortissement aux véhicules rétrofités

Amendements identiques I-CD443 du rapporteur pour avis et I-CD235 de M. Anthony Brosse, amendement I-CD104 de M. Jean-Yves Bony (discussion commune)

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Le rétrofit, qui consiste à remplacer un moteur thermique par un système électrique à batterie ou à pile à combustible à hydrogène, contribue à répondre à l’enjeu de la décarbonation du parc automobile, en permettant d’aller progressivement, d’ici aux années 2035-2040, vers la fin des véhicules à énergie fossile.

Les entreprises peuvent actuellement bénéficier d’une déduction fiscale pour l’achat de véhicules neufs fonctionnant exclusivement avec des sources d’énergie électrique, de l’hydrogène, du B100, de l’ED95, du gaz naturel et du biométhane, sous condition de poids du véhicule. Je propose d’étendre la déduction fiscale aux véhicules rétrofités.

M. Jean-Yves Bony (LR). L’amendement I-CD104 vise à élargir la déduction fiscale exceptionnelle réservée aux véhicules à motorisation électrique ou à pile à hydrogène en l’appliquant aussi aux véhicules rétrofités, qui constituent un levier important pour la transition vers des véhicules propres.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Les amendements I-CD443 et I‑CD235 concernent une liste plus complète d’énergies. Votre amendement présentant des lacunes sur ce plan, Monsieur Bony, je vous propose de le retirer.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert (RE). J’ai l’impression que les amendements I-CD443 et I-CD235 permettront d’apporter un soutien aux industriels qui font du rétrofit, y compris pour les engins non routiers dont nous avons parlé. Est-ce exact ?

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il s’agit, en effet, de donner un coup de pouce supplémentaire au rétrofit, et le secteur que vous venez d’évoquer est naturellement inclus.

L’amendement I-CD104 est retiré.

La commission adopte les amendements I-CD443 et I-CD235.

Après l'article 5

Amendements identiques I-CD15 de M. Vincent Descoeur et I-CD156 de M. Bertrand Petit

M. Vincent Descoeur (LR). Nous souhaitons l’instauration d’un dispositif de suramortissement pour l’acquisition par les entreprises de recyclage de poids lourds peu polluants. Un rapport de la Federec, la Fédération professionnelle des entreprises du recyclage, produit à l’occasion de la création des zones à faibles émissions, a mis en évidence les difficultés rencontrées par ces entreprises pour faire circuler leurs poids lourds et super poids lourds, mais aussi leurs véhicules utilitaires légers, ce qui risque de remettre en cause la continuité du service de collecte. Comme le renouvellement des véhicules n’est, pour l’heure, que partiel, l’idée est d’accélérer la transition écologique dans ce secteur en apportant un soutien aux entreprises de recyclage.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Cet amendement tend à décaler de 2030 à 2040 la fin de la date d’acquisition des véhicules neufs utilisant des énergies moins polluantes qui peuvent faire l’objet d’une déduction fiscale, à hauteur de 60 % entre 3,5 tonnes et 16 tonnes, et de 20 % entre 2,6 tonnes et 3,5 tonnes.

Vous avez indiqué dans l’exposé sommaire qu’il s’agissait d’inciter à l’acquisition de poids lourds peu polluants, mais ce n’est que partiellement cohérent avec l’amendement. Un véhicule est généralement considéré comme étant un poids lourd à partir de 3,5 tonnes et le lien avec les services de collecte des déchets n’est pas évident. De plus, il me paraît un peu prématuré de décaler la date, actuellement fixée au 31 décembre 2030 : il vaudrait mieux commencer par observer l’évolution du marché dans les prochaines années. Il ne faudrait pas qu’un décalage dans le temps retarde les ambitions en matière de renouvellement des véhicules. Par conséquent, avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Article additionnel après l'article 5 : Exonération d’impôt sur le revenu des personnes physiques qui vendent de l’électricité produite à partir d’installations photovoltaïques d’une puissance n’excédant pas 9 kwc

Amendement I-CD320 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert

Mme Marjolaine Meynier-Millefert (RE). Nous proposons de relever, de 3 à 9 kilowatts-crête, le seuil de puissance des installations solaires à partir duquel les particuliers sont exonérés de l’impôt sur le revenu pour le produit de la vente de l’électricité produite.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je suis favorable à cet amendement, qui est cohérent avec la baisse de la TVA sur la pose des panneaux solaires que je défendrai tout à l’heure.

La commission adopte l’amendement.

Article additionnel après l'article 5 : Possibilité pour les ménages de financer une installation solaire photovoltaïque grâce à l’éco-prêt à taux zéro

Amendements identiques I-CD218 de M. Stéphane Delautrette et I-CD240 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert, amendements identiques I-CD219 de M. Stéphane Delautrette et I-CD241 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert (discussion commune)

M. Stéphane Delautrette (SOC). Dans la continuité de ce bel élan de soutien à la production d’énergie solaire, l’amendement I-CD218 tend à élargir l’éco-prêt à taux zéro – éco-PTZ – aux travaux permettant l’installation d’équipements d’autoconsommation. Il existe déjà des aides à l’acquisition, notamment dans le cadre de MaPrimeRénov’, mais elles sont loin de permettre, pour les plus modestes, de financer l’installation d’équipements de ce type, qui aident, par ailleurs, à mieux piloter la consommation.

Dans certaines situations, le petit éolien peut aussi être une solution, et c’est pourquoi nous proposons de l’inclure également dans le champ d’application de l’éco-prêt à taux zéro.

Notre amendement suivant est de repli : il limite l’extension de l’éco-prêt à taux zéro aux seules solutions faisant appel à l’énergie solaire.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert (RE). Nous faisons les mêmes propositions.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Avis favorable aux amendements I‑CD219 et I-CD241, qui encouragent le développement de solutions d’autoconsommation d’énergie tout en prévoyant un plafond. Je propose de retirer les deux autres amendements.

Les amendements I-CD218 et I-CD240 sont retirés.

La commission adopte les amendements I-CD219 et I-CD241.

Article additionnel après l'article 5 : Augmentation du plafond et de la durée de l’éco-prêt à taux zéro

Amendement I-CD233 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert

Mme Marjolaine Meynier-Millefert (RE). Nous avons repris une proposition figurant dans le rapport de la mission d’information sur la rénovation énergétique des bâtiments, qui relève une faible distribution de l’éco-prêt à taux zéro (éco-PTZ) dans le cadre du financement de travaux de rénovation énergétique. Le rapport suggère donc de conforter le caractère rémunérateur du dispositif en relevant le crédit d’impôt auquel peuvent prétendre les établissements bancaires lorsqu’ils accordent un éco-PTZ.

Concrètement, il s’agit de conjuguer une augmentation du plafond de l’avance remboursable pour les travaux permettant des rénovations performantes et une hausse de la durée maximale du remboursement, combinaison qui augmentera automatiquement le taux d’intérêt normalement dû au prêteur, lequel sert de base pour le calcul du crédit d’impôt.

En plus de rendre l’éco-PTZ plus attractif pour les banques et de cibler davantage les rénovations globales, cet amendement permettra de s’adapter aux situations économiques telles que celle que nous traversons, dans laquelle les taux d’intérêt cassent les achats et ventes de logements – en période de ralentissement des transactions immobilières, cet amendement dynamisera les métiers de la rénovation.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Votre amendement vise en effet à augmenter le plafond et la durée de l’éco-PTZ, conformément aux préconisations de la mission d’information sur la rénovation énergétique des bâtiments, dont vous étiez la rapporteure, chère collègue, avec Jean-Louis Bricout. Avis favorable.

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). Nous soutiendrons, évidemment, cet amendement qui vise à favoriser le recours à l’éco-PTZ en augmentant le plafond.

La commission adopte l’amendement.

Article additionnel après l'article 5 : Conditionnement des aides à l’acquisition et à l’installation de systèmes de chauffage à une rénovation énergétique performante dans le cadre de l’éco-prêt à taux zéro

Amendement I-CD234 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert

Mme Marjolaine Meynier-Millefert (RE). Plusieurs études scientifiques et techniques soulignent qu’une pompe à chaleur (PAC) ne peut pas fonctionner d’une manière efficace et optimale dans le cas où les logements sont mal isolés. Ainsi, il est nécessaire d’ordonnancer correctement les travaux de rénovation en couplant PAC et rénovation performante. Cet amendement propose d’amorcer une telle réorientation en introduisant dans le dispositif de l’éco-PTZ la condition d’un couplage entre l’installation d’un système de chauffage, dont les PAC, et la réalisation d’une rénovation performante pour les logements très énergivores, de classes E, F et G. Cette mesure est cohérente avec l’évolution de MaPrimeRénov’ envisagée pour 2024 quant au pilier « efficacité », qui ne devrait plus permettre de financer un changement de chaudière dans les logements énergivores.

Suivant la position du rapporteur pour avis, la commission adopte l’amendement.

Article additionnel après l'article 5 : Taux réduit de TVA pour les réseaux de froid justifiant d’un taux d’énergie renouvelable et de récupération supérieur à 50 %

Amendements identiques I-CD236 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert et ICD335 de M. Jean-Louis Bricout, amendements I-CD180 et I-CD183 de M. Matthieu Marchio (discussion commune)

Mme Marjolaine Meynier-Millefert (RE). Le recours croissant aux climatiseurs individuels pose des problèmes à terme – il est déjà responsable de près de 5 % des émissions de CO2 dans le secteur du bâtiment. Il est possible, pour y remédier, de s’appuyer sur des réseaux de froid urbains qui permettent de valoriser les ressources durables et locales de nos territoires – les lacs, les rivières, les nappes phréatiques, les mers et même le sol. Le présent amendement propose donc, conformément à la directive européenne 2022/542, d’appliquer un taux réduit de TVA aux réseaux de froid justifiant d’un taux d’énergie renouvelable et de récupération supérieur à 50 %.

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). La climatisation est effectivement responsable de près de 5 % des émissions de CO2 dans le secteur du bâtiment.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Favoriser, par un taux réduit de TVA de 5,5 %, la production de froid renouvelable pourrait permettre de remplacer les climatiseurs traditionnels, dont les effets néfastes sur l’environnement sont maintenant bien connus. L’Union européenne a d’ailleurs placé le froid renouvelable dans la liste des prestations pouvant faire l’objet d’un taux réduit de TVA.

Avis favorable aux amendements I-CD236 et I-CD335. Je demande, en revanche, le retrait des amendements I-CD180 et I-CD183, car ils posent des conditions supplémentaires qui paraissent inutiles ; sinon, avis défavorable.

La commission adopte les amendements I-CD236 et I-CD335.

En conséquence, les amendements I-CD180 et I-CD183 tombent.

Après l'article 5

Amendement I-CD238 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert

Mme Marjolaine Meynier-Millefert (RE). Il s’agit d’étendre le taux réduit de TVA aux réseaux de chaleur alimentés par des pompes à chaleur géothermiques, afin d’encourager le recours à des systèmes urbains de chauffage et de refroidissement vertueux sur le plan environnemental, ainsi qu’aux réseaux de chaleur directement alimentés par des systèmes de production d’électricité renouvelable, pour encourager les opérateurs de chaleur à utiliser ce système énergétique afin d’alimenter leurs systèmes. Cet amendement a fait l’objet d’un travail avec la Fedene, la Fédération des services énergie et environnement.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je propose d’attendre le plan Chaleur, qui prévoit 300 millions d’euros d’investissement, en plus du crédit d’impôt pour l’industrie verte. Avis défavorable.

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). Nous avons vraiment besoin de développer les réseaux de chaleur, ce qui ne se fera pas sans les collectivités. Il faut aller vers une massification, avec des rénovations par quartiers. Il ne serait donc pas plus mal d’encourager le recours à ces solutions.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je rappelle que le plan Chaleur prévoit de mobiliser 300 millions d’euros.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert (RE). Ce plan va-t-il bien démarrer maintenant ?

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Tout à fait.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert (RE). Dans ces conditions, je vais retirer mon amendement, puisqu’il y aura un autre financement.

L’amendement est retiré.

Article additionnel après l'article 5 : Taux réduit de TVA pour la livraison et l’installation d’équipements de production d’électricité utilisant l’énergie radiative du soleil d’une puissance inférieure ou égale à 9 kwc

Amendement I-CD214 de M. Stéphane Delautrette, amendements identiques I-CD444 du rapporteur pour avis et I-CD213 de M. Stéphane Delautrette, amendements I-CD215 et I-CD216 de M. Stéphane Delautrette (discussion commune)

M. Stéphane Delautrette (SOC). L’amendement I-CD214 vise, une fois encore, à soutenir la filière solaire chez les particuliers, par l’instauration d’une TVA à taux réduit, de 5,5 %, pour les installations dont la puissance n’excède pas 9 kilowatts-crête. Nous mettrons ainsi fin à un effet de seuil qui pourrait inciter les particuliers à sous-dimensionner leurs installations – la puissance est actuellement limitée à 3 kilowatts-crête – et donc à limiter l’installation de nouvelles capacités de production solaire.

Si on table sur 100 000 nouvelles installations en 2023, cette mesure représenterait une baisse de recettes fiscales de l’ordre de 85 millions d’euros, ce qui n’est rien par rapport aux 45 milliards d’euros du bouclier tarifaire pour la seule année 2023. Je précise également que cet amendement a été travaillé avec le Syndicat des énergies renouvelables (SER).

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je propose pour ma part d’appliquer le taux réduit de TVA de 5,5 % à la fourniture et à la pose des installations d’autoconsommation jusqu’à 9 kilowatts-crête. À ce stade, le niveau de fiscalité appliqué en France contribue à une sous-exploitation du gisement et freine l’essor du photovoltaïque résidentiel dans le mix énergétique français, ce qui ne permet pas à ce secteur de contribuer pleinement à l’atteinte des objectifs fixés dans la stratégie pour l’énergie et le climat.

La baisse de la TVA permettrait de développer le solaire résidentiel en répondant à l’enjeu de la réduction du coût des technologies. L’application d’un taux réduit de TVA sur l’ensemble des installations solaires jusqu’à un plafond de 9 kilowatts-crête relèverait, par ailleurs, le seuil actuel, qui ne correspond plus à la réalité du marché, notamment en raison de l’augmentation de la productivité des installations photovoltaïques et du développement des outils de stockage et de pilotage de la consommation électrique. Nous mettrons ainsi un terme à un effet de seuil qui incite les particuliers à sous-dimensionner leurs installations et limite donc l’installation de nouvelles capacités de production solaire, alors que nous avons besoin d’une amplification et d’une accélération en la matière.

M. Stéphane Delautrette (SOC). La différence entre les amendements I‑CD214 et I-CD213 est que le premier ne fait pas référence à la seule autoconsommation : il vise les installations de production d’électricité à partir de l’énergie solaire dans le cadre de l’autoconsommation comme de la revente. L’amendement I-CD213 est donc de repli.

L’amendement I-CD215 porte plus spécifiquement sur les travaux de rénovation énergétique.

Enfin, l’amendement I-CD216 vise à mettre la législation fiscale en cohérence avec la volonté politique forte du Gouvernement de favoriser l’accélération de la transition écologique grâce aux énergies nouvelles, combinées au stockage. Nous proposons ainsi de porter de 3 à 9 kilowatts-crête le seuil d’application du taux de 10 % de TVA, dans le cadre d’une installation d’autoconsommation avec revente de surplus. C’est aussi un amendement de repli, au cas où l’application du taux de 5,5 % jusqu’à 9 kilowatts-crête ne serait pas acceptée.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je demande le retrait des amendements I-CD214, I-CD215 et I-CD216 au profit des amendements I-CD444 et I‑CD213, qui visent le même objectif mais sont plus simples. Les autres amendements prévoient des conditions supplémentaires qui n’ont pas nécessairement à figurer dans la loi : ils peuvent relever de mesures prises par décret. Ne figeons pas trop les choses.

Les amendements I-CD214, I-CD215 et I-CD216 sont retirés.

La commission adopte les amendements I-CD444 et I-CD213.

Article additionnel après l'article 5 : Exonération de taxe foncière pour les propriétaires qui équipent leur logement d’installations photovoltaïques

Amendement I-CD298 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert

Mme Marjolaine Meynier-Millefert (RE). Nous proposons d’ouvrir la possibilité d’une exonération de la taxe foncière, allant de 50 % à 100 %, par les communes et les EPCI – les établissements publics de coopération intercommunale – dotés d’une fiscalité propre pour les propriétaires qui équipent leur logement d’installations photovoltaïques d’une puissance inférieure ou égale à 9 kilowatts-crête. Cela complétera des dispositifs qui existent déjà au niveau communal pour aider les habitants.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Votre amendement laisserait aux communes la faculté d’exonérer de taxe foncière les habitations dotées d’installations photovoltaïques d’autoconsommation. Je suis favorable à cette incitation à développer le renouvelable.

La commission adopte l’amendement.

Après l'article 5

Amendement I-CD31 de M. Vincent Descoeur

M. Vincent Descoeur (LR). Certaines entreprises achètent à bas coût des tonnes d’émissions de carbone évitées mais non labellisées. Cet amendement vise à accompagner financièrement des entreprises qui s’inscrivent, au contraire, dans une démarche volontaire de soutien aux méthodes de captation de carbone et de maintien de la diversité labellisées bas-carbone, ce qui aurait un véritable impact dans nos territoires.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Les entreprises ayant le label bas‑carbone mettent en œuvre des pratiques de réduction des émissions de gaz à effet de serre qui bénéficient déjà d’avantages fiscaux, notamment de crédits d’impôt, comme la rénovation énergétique. Votre amendement ajouterait donc un avantage fiscal à d’autres. À ce stade, je vous propose un retrait ; sinon, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques I-CD17 de M. Vincent Descoeur et I-CD106 de M. Jean-Yves Bony

M. Vincent Descoeur (LR). La certification label bas‑carbone a un coût significatif pour les agriculteurs. Ainsi, l’instauration d’un crédit d’impôt constituerait un levier d’action efficace pour inciter le plus grand nombre à s’engager dans cette démarche vertueuse.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Pour bénéficier du label bas-carbone, les projets agricoles doivent se référer à l’une des six méthodes approuvées par le ministère de l’agriculture. Créer un crédit d’impôt pour les entreprises agricoles produisant des crédits carbone ne semble pas justifié, d’autant que ce label n’a fait l’objet d’aucun bilan depuis sa création en 2018. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Amendement I-CD313 de M. Charles Fournier

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). Notre amendement d’appel vise à proposer une réécriture du crédit d’impôt recherche (CIR), afin de conditionner son bénéfice aux projets compatibles avec la transition écologique, sur la base des critères de la taxonomie verte. La transformation de cette niche fiscale, dont bénéficient quelque 20 000 entreprises pour un coût estimé à 7 milliards d’euros selon la loi de finances pour 2023, est fréquemment recommandée. D’une part, il pénalise les PME qui en constituent 91 % des bénéficiaires mais ne représentent que 32 % de la créance fiscale. D’autre part, il ne contribue qu’à hauteur de 10 % au financement de la recherche environnementale.

Nous souhaitons rappeler l’urgence de conditionner les dépenses du CIR à des activités satisfaisant des objectifs écologiques. Les critères de la taxonomie verte peuvent constituer des critères écologiques communs au large spectre des secteurs d’activité des entreprises bénéficiaires. Aussi, nous proposons de conditionner le CIR à l’atteinte de l’un des six objectifs environnementaux présentés par la taxonomie verte européenne, à l’exclusion de la recherche en lien avec les énergies gazières et nucléaires.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L’idée de faire du CIR un outil écologique me paraît intéressante : soit en conditionnant l’octroi des créances à l’absence d’incidences néfastes sur l’environnement d’un projet de recherche, soit en introduisant un taux majoré du CIR pour les recherches en faveur de l’environnement. Le Gouvernement a choisi un nouveau crédit, le crédit d’impôt au titre des investissements en faveur de l’industrie (C3IV), qui cible les investissements dans les technologies vertes. Il faut également déterminer quel serait le bon rythme pour introduire un tel changement, voir comment éviter le green washing et réfléchir aux exemptions. En attendant de trouver des leviers efficaces pour le verdissement du CIR, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette successivement les amendements I-CD254 et I-CD255 de Mme Charlotte Leduc.

Amendements I-CD170 de Mme Chantal Jourdan et I-CD256 de Mme Charlotte Leduc (discussion commune)

Mme Chantal Jourdan (SOC). Mon amendement vise à demander la taxation des superprofits des entreprises du transport maritime. La CMA-CGM a fait 23 milliards d’euros de profits en 2022. Ils étaient de 17 milliards en 2021, et de l’ordre de 500 millions d’euros les années précédant la crise sanitaire. Les réductions de tarifs de fret accordées par CMA-CGM l’année dernière s’élèveraient en tout à un effort d’à peine 300 millions d’euros, soit un montant dérisoire, alors que l’entreprise doit ses profits records à des tarifs extravagants, qui se répercutent dans le prix des produits en rayon, mais aussi à la niche fiscale résultant de la taxe au tonnage, qui permet un taux effectif d’imposition d’environ 2 % et qui est l’une des plus coûteuses pour l’État – 3,8 milliards d’euros en 2023.

L’amendement propose une contribution additionnelle sur les sociétés de transport maritime de marchandises, graduée pour une période de deux ans, après laquelle elle sera évaluée.

M. Gabriel Amard (LFI-NUPES). Avec ses trois paliers de contribution additionnelle, cet amendement de repli vise les producteurs de gaz, de pétrole et les sociétés de transport maritime de marchandises, dans un contexte de profits exorbitants.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il est aussi intéressant de savoir comment les superprofits sont réinvestis et redistribués. Les articles 12 et 15 du projet de loi de finances (PLF) prévoient des dispositions fiscales pour les entreprises, notamment autoroutières ou les grands aéroports. La prévision d’impôt sur les sociétés augmentera de 10,9 milliards d’euros pour atteindre 72,2 milliards d’euros, en raison d’un fort dynamisme. Il serait à mon sens plus intéressant d’étudier des taxes ciblées. Avis défavorable.

M. Gabriel Amard (LFI-NUPES). Nous avons ciblé des secteurs d’activité précis. La contribution additionnelle serait due lorsque le résultat imposable de la société pour l’exercice considéré au titre de l’impôt sur les sociétés précité serait supérieur ou égal à 1,25 fois la moyenne de son résultat imposable des exercices 2017, 2018 et 2019. Il y aurait trois taux progressifs. Il est temps d’envoyer le signal que tout n’est pas permis.

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). Je soutiens cet amendement visant à taxer les surprofits. Monsieur le rapporteur pour avis, si on les taxe un peu, nous pourrons nous charger nous‑mêmes de redistribuer pour donner du pouvoir d’achat à nos concitoyens.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement I-CD189 de M. Matthieu Marchio

M. Matthieu Marchio (RN). Cet amendement vise à obliger le Gouvernement à remettre un rapport au Parlement concernant le respect de leurs obligations fiscales et sociales par les entreprises bénéficiaires des crédits d’impôt.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il existe déjà de nombreux rapports sur ce sujet, faits par les inspections, le Gouvernement ou la Cour des comptes. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD388 de M. Matthieu Marchio

M. Matthieu Marchio (RN). Cet amendement vise également à obliger le Gouvernement à remettre un rapport au Parlement afin d’évaluer l’efficacité des incitations fiscales dans la lutte contre le changement climatique.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Le Gouvernement a prévu l’octroi d’un agrément accordé par Bercy et par l’Agence de la transition écologique (Ademe), qui en feront une évaluation. Demande de retrait.

L’amendement est retiré.

Article additionnel après l’article 5 : Avantage fiscal accordé aux entreprises qui investissent dans des matériels de recyclage de métaux ferreux et non ferreux

Amendement I-CD12 de M. Vincent Descoeur et sous-amendement I-CD459 du rapporteur pour avis, amendement I-CD309 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert (discussion commune)

M. Vincent Descoeur (LR). L’amendement vise à instaurer un dispositif de suramortissement pour les entreprises du recyclage, qui ont investi pendant trois ans plus de 1,5 milliard d’euros dans leur outil productif, alors qu’elles sont confrontées à la hausse du prix de l’énergie et à un tâtonnement dans le déploiement des filières REP.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. La disposition permet d’encourager la filière du recyclage des métaux en accordant une déductibilité importante sur l’impôt sur les sociétés. Une mission d’évaluation de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, dite AGEC, sera bientôt lancée. Il serait utile de disposer de ses conclusions. Par ailleurs, le taux de 40 % semblant particulièrement élevé, je vous propose de le réduire à 15 %, ce qui représente déjà une incitation suffisante.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert (RE). C’est le même amendement, avec un gage différent.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je vous suggère de le retirer au profit de l’amendement de M. Descoeur.

M. Stéphane Delautrette (SOC). Pourquoi proposer un dispositif d’amortissement seulement pour les métaux ferreux et non ferreux, alors leur recyclage ne pose aucun problème ?

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. En discutant avec les acteurs du domaine, on sent qu’il faut renforcer le recyclage. Mais j’attends beaucoup de la mission d’évaluation de la loi AGEC. Ce dispositif sera également évalué.

L’amendement I-CD309 est retiré.

La commission adopte le sous-amendement I-CD459.

Elle adopte l’amendement I-CD12 sous-amendé.

Article additionnel après l’article 5 : Changement d’affectation des casiers des installations de stockage de déchets pour faciliter l’implantation de projets d’énergie renouvelable photovoltaïque

Amendements I-CD365 de M. Matthieu Marchio et I-CD220 de M. Stéphane Delautrette (discussion commune)

M. Matthieu Marchio (RN). Les installations de stockage de déchets (ISD) sont conçues pour traiter des déchets ménagers ou d’activités économiques dans des casiers aménagés à cet effet, dans des conditions optimales de sécurité pour l’environnement. Les casiers fermés constituent ainsi des surfaces disponibles pour d’autres usages sous réserve que ces derniers soient conformes aux servitudes d’utilité publique affectant l’utilisation des sols. L’amendement vise à permettre une modification de l’évaluation foncière casier par casier et non à l’échelle de l’ensemble du site, lorsque des casiers fermés accueillent des panneaux photovoltaïques, afin d’accélérer le déploiement de ces projets.

M. Stéphane Delautrette (SOC). Mon amendement a été travaillé avec le Syndicat des énergies renouvelables, afin d’utiliser au mieux les capacités qu’offrent les installations de stockage de déchets pour le déploiement du photovoltaïque. Selon la rédaction actuelle du code général des impôts, il faut attendre la fin totale de l’exploitation du site pour utiliser les surfaces rendues disponibles.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. C’est un sujet technique, qui relève néanmoins d’une forme de bon sens. Je vous suggère, Monsieur Marchio, de retirer votre amendement au profit de celui de M. Delautrette, qui ne mentionne pas de conditions d’évaluation.

La commission rejette l’amendement I-CD365.

Elle adopte l’amendement I-CD220.

Article 12 : Réduction progressive de dépenses fiscales défavorables à l’environnement

Amendements identiques I-CD18 de M. Vincent Descoeur, I-CD107 de M. Jean-Yves Bony, I-CD185 de Mme Annick Cousin et I-CD408 de M. Jean-François Lovisolo

M. Vincent Descoeur (LR). Mon amendement vise à supprimer la référence au 31 décembre 2025 pour favoriser le pilotage économique des exploitations agricoles et encourager la constitution d’une épargne permettant de couvrir les dépenses liées à la décarbonation.

Mme Annick Cousin (RN). Ces dernières années, les événements climatiques imprévisibles se sont multipliés. La déduction pour épargne de précaution (DEP), qui est un élément central dans la gestion des risques à long terme des exploitations agricoles, est désormais un outil crucial pour les agriculteurs.

Mme Laurence Heydel Grillere (RE). La déduction pour épargne de précaution est un excellent dispositif, et l’augmentation de son plafond une très bonne chose. Il faut aller encore plus loin en le rendant pérenne.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Face aux effets du changement climatique, la DEP présente le double avantage de responsabiliser les agriculteurs tout en leur laissant la liberté de déterminer leurs investissements en fonction des menaces climatiques. Avis favorable.

La commission adopte les amendements.

Amendement I-CD23 de M. Vincent Descoeur

M. Vincent Descoeur (LR). L’amendement vise à augmenter les plafonds de la déduction pour épargne de précaution, tout en les rendant plus progressifs, afin de répondre au mieux aux besoins des exploitants agricoles.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je comprends sans peine l’objet de l’amendement mais les trois mesures de compensation en faveur de l’agriculture, prévues par l’article 12, représentent pour l’État un coût de 60 millions d’euros. Dans la situation budgétaire actuelle, il me paraît difficile de demander à l’État un effort supplémentaire.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD382 de M. Antoine Villedieu

M. Antoine Villedieu (RN). Nous sommes tous d’accord pour reconnaître que nos agriculteurs souffrent. Face à vos propositions, ce sont nos éleveurs qui deviennent des vaches à lait. Le prix des matières premières a explosé, celui des énergies s’est envolé. Appliquer une augmentation idéologique, même progressive, de l’accise sur le gazole non routier (GNR) ressemble à de l’acharnement. Cet hiver, vous avez demandé aux éleveurs de couper l’électricité dont ils ont besoin pour s’occuper de leurs animaux. L’été, vous leur demandez de diminuer leur consommation d’eau. Aujourd’hui, vous vous en prenez à leurs véhicules. Vous décidez d’appliquer les augmentations du tarif d’accise sur le GNR en période de crise des prix, alors qu’il suffirait de les geler jusqu’à ce que la situation économique se stabilise. L’amendement vise à supprimer toutes les augmentations du tarif d’accise appliqué au GNR.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Cet amendement porte un choix politique, celui du statu quo. Je comprends qu’on ne veuille pas alourdir les charges des agriculteurs, mais aucun secteur ne peut échapper aux efforts de la transition écologique. Nous venons de vivre le mois de septembre le plus chaud de l’histoire de France ; des départements connaissent une sécheresse historique. Le Gouvernement propose un dispositif équilibré, progressif, sur sept années, qui a été négocié avec les agriculteurs eux-mêmes en juin dernier. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD403 de M. Julien Bayou

M. Julien Bayou (Écolo-NUPES). L’amendement vise à doubler les taxes sur le carburant des vols privés, qui, certes, ont déjà fait l’objet d’une augmentation. En avril, quand je vous avais proposé d’interdire les vols en jet privé, on m’avait répondu que c’était folie. Le rapporteur pour avis vient de nous rappeler que nous venons de passer le mois de septembre le plus chaud de l’histoire. La folie, c’est d’autoriser ces vols caprices comme il en existe entre Nice et Cannes ou Paris et Villacoublay. Vous aviez également refusé le compromis que je vous avais proposé, d’aligner le régime des jets privés sur celui des Français moyens : interdire les vols quand il existe une liaison en TGV de moins de deux heures trente. Je vous propose, en attendant, un petit pas. Ce n’est pas parce qu’on ne peut pas tout faire d’un coup qu’il faut ne rien faire du tout.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Une augmentation a déjà eu lieu en loi de finances pour 2023. Je mesure le côté symbolique de votre amendement. Mais il risque de provoquer un effet d’éviction et, sur un vol international, les gestionnaires de jet pourraient faire le plein à l’étranger. L’amendement I-CD169 de Mme Jourdan me paraît plus pertinent. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

M. Julien Bayou (Écolo-NUPES). Si un gestionnaire de jet peut faire un plein au Luxembourg pour un vol entre Nice et Cannes, on touche à l’absurdité du système. Dans ce cas, il vaut peut-être mieux interdire tout court de tels vols.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD206 de M. Jorys Bovet

Mme Annick Cousin (RN). Nous souhaitons que le tarif normal d’accise sur les gazoles consommés par les moteurs pour les travaux statiques ou la propulsion d’engins qui ne circulent pas habituellement sur la voie publique reste à 18,82 euros. L’augmentation progressive de ce tarif avantageux conduira les agriculteurs notamment à voir leur facture de carburant multipliée chaque année. La situation fragile de bon nombre d’exploitations agricoles nous interdit de les mettre davantage en danger.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Même avis que sur l’amendement I‑CD382 de M. Villedieu.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD257 de Mme Charlotte Leduc

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). L’amendement vise à supprimer réellement l’avantage fiscal du gazole non routier. Le gazole, ce n’est pas que le monde agricole, c’est aussi le transport. Cela fait plusieurs années que l’on nous promet la sortie du gazole.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il s’agit bien de gazole non routier. Si l’on veut faire accepter la transition écologique, il faut y aller progressivement dans les dispositifs de décarbonation. Une mesure brutale comme celle que vous proposez est de toute manière inutile, car l’offre d’engins de travaux décarbonés n’est pas assez large. Avec le signal donné par le PLF, les professionnels savent qu’ils disposent de sept ans pour accomplir leur transition. Les PME et les TPE n’ont pas la trésorerie pour faire face à un choc fiscal brutal. Avis très défavorable.

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). Brutal peut-être, mais la nécessité d’une planification écologique ne date pas d’aujourd’hui. Le Gouvernement la prend en compte trop tard et sans mesures concrètes.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD258 de M. David Guiraud

M. Gabriel Amard (LFI-NUPES). L’amendement vise à supprimer progressivement le remboursement de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) sur le gazole applicable au secteur du transport routier de marchandises afin de respecter nos engagements écologiques.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Deux ans ! Nous n’avons pas la même définition du mot « progressivement ». Cette mesure aurait un effet tel qu’elle ne peut être adoptée sans négociation avec la profession, d’autant qu’il n’existe pas d’offre crédible à des prix raisonnables de camions décarbonés. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques I-CD181 de M. Vincent Descoeur et I-CD385 de M. Antoine Villedieu

M. Vincent Descoeur (LR). Nous proposons que les entreprises utilisant des véhicules agricoles affectés au transport public de marchandises puissent bénéficier du remboursement partiel de la TICPE.

M. Antoine Villedieu (RN). L’amendement devrait vous faire plaisir, monsieur le rapporteur pour avis, puisqu’il répond à Emmanuel Macron qui souhaite favoriser notre souveraineté alimentaire. Élaboré en collaboration avec la fédération des entrepreneurs des territoires de la région Bourgogne Franche-Comté, il prévoit de rendre éligibles au remboursement partiel de la TICPE les véhicules agricoles affectés au transport public de marchandises.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Ces amendements vont à l’encontre de toute politique de décarbonation. Si les attentes avaient été aussi fortes que vous le dites, nous aurions été saisis de ces questions, mais aucun acteur ne les a mentionnées. Vous n’avez pas le monopole de la connaissance de ces secteurs.

La décarbonation ne doit pas être trop brutale mais il faut tout de même agir, en trouvant un équilibre. Or les amendements vont tantôt d’un côté, tantôt de l’autre. Avis défavorable.

M. Antoine Villedieu (RN). Nous parlons du transport agricole, qui est principalement national ou régional, quand la majorité favorise l’importation de biens provenant de Chine ou de Nouvelle-Zélande. Si vous voulez agir sur l’écologie, renationalisez des entreprises et arrêtez d’importer de l’autre bout du monde des ovins, des bovins ou des produits laitiers que nous pouvons fabriquer en France !

M. Vincent Descoeur (LR). Je ne crois pas avoir revendiqué un quelconque monopole. Quant aux entreprises concernées, elles m’ont bien saisi de cette préoccupation.

La commission rejette les amendements.

Amendement I-CD102 de Mme Lisa Belluco

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). Cet amendement vise à supprimer le taux réduit d’accise sur les gazoles consommés pour le transport d’animaux vivants. Cette niche fiscale nuit au climat : elle finance directement la combustion d’énergies fossiles. Nous préférons que l’argent public soutienne l’abattage à la ferme, pour éviter aux animaux d’être transportés vivants et d’en pâtir, pour assurer la production d’une viande de meilleure qualité, pour garantir la provenance de nos produits et pour que nos éleveurs puissent accompagner les animaux du début à la fin de leur vie. Ainsi, ce modèle deviendra plus compétitif. Depuis un an, des députés de tous les groupes ont posé des questions écrites au Gouvernement sur cette question.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Si nous adoptons cette disposition, des véhicules d’autres pays remplaceront nos camions. Le transport d’animaux tombe sous le coup d’une réglementation européenne. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD103 de Mme Lisa Belluco

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Avis défavorable, pour les mêmes raisons. En 2020, l’Union européenne exportait 2,5 millions de moutons vers la Turquie, la Libye, le Liban, l’Arabie Saoudite, soit moins de 1 % du cheptel européen. La France entre pour 16 % dans ces exportations, en concurrence avec l’Allemagne, la Pologne et la Hongrie. Si nous augmentons nos coûts, nous perdrons des marchés.

M. Pierre Meurin (RN). Supprimer cet avantage fiscal revient à favoriser l’élevage intensif dans les autres pays. Ceux-ci disposent de filières bien plus intensives et moins vertueuses que les nôtres pour inonder nos marchés. En réalité, les amendements I-CD102 et I-CD103 détruiraient notre filière d’élevage.

Quant à l’abattage de proximité, il nécessite aussi des camions. Ces amendements d’apprentis sorciers sont déconnectés de la réalité. Pour les déposer, il faut n’avoir jamais visité d’exploitation agricole.

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). Mme Pochon a défendu un amendement qui vise notamment le transport de veaux vers l’Italie : ces animaux partent à l’engraissement dans des conditions dramatiques. Sa proposition mérite d’être respectée, non caricaturée.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD259 de Mme Charlotte Leduc, amendements identiques I-CD146 de M. Gérard Leseul et I-CD404 de Mme Eva Sas, amendement I-CD402 de M. Julien Bayou (discussion commune)

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). L’amendement I-CD259 de Mme Leduc tend à supprimer la niche fiscale sur le kérosène aérien. Aujourd’hui, un litre d’essence pour une voiture coûte plus cher qu’un litre de kérosène, alors que l’avion est le moyen de transport le plus polluant. Selon l’Institut de l’économie pour le climat (I4CE), les niches fiscales sur la taxation des énergies fossiles représentent 16 milliards d’euros, dont une part importante est due à la niche sur le kérosène aérien. La transition écologique passe par sa suppression.

M. Gérard Leseul (SOC). Le kérosène utilisé par les avions est exonéré de la TICPE alors qu’il émet beaucoup de gaz à effet de serre et de dioxyde de carbone. Il apparaît incroyable que l’on puisse maintenir cette exonération, qui concurrence le rail, pour les vols domestiques. Si nous voulons décarboner nos mobilités, nous devons la supprimer, au moins pour ces vols. Par cet amendement de repli, I-CD146, nous pourrions récupérer 500 millions d’euros chaque année pour la transition écologique. Afin de tenir compte du risque d’enclavement, la Corse et les territoires d’outre-mer n’entreraient pas dans le champ d’application de la disposition.

M. Julien Bayou (Écolo-NUPES). Mon amendement I-CD402 tend à mettre fin à l’exonération de taxe sur les carburants pour les entreprises offrant des services aériens non réguliers, c’est-à-dire les jets privés. Nous avons compris que vous ne souhaitiez ni les interdire, ni aligner leur régime sur celui des Français, qui ne peuvent pas prendre l’avion lorsqu’une liaison ferroviaire de moins de deux heures trente existe. Il faut supprimer cette niche fiscale, d’abord pour des raisons de justice sociale : le carburant de nos concitoyens est taxé alors que celui des riches, responsable de beaucoup plus de CO2 et de pollutions sonores, ne l’est pas. Nous proposons de flécher les recettes vers le déploiement d’une offre Interrail en Europe pour tous les jeunes de dix-huit ans. Le dispositif a été testé avec succès dans d’autres pays européens.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. En vous écoutant, on peut croire que les partisans de l’avion s’opposent à ceux du train. Il ne faut pas tout mélanger. La loi « climat et résilience » comprend des mesures visant à favoriser le train au détriment de l’avion. L’usager se détermine entre ces deux modes en fonction de la durée du trajet et du prix. Une ligne TGV sur un trajet de moins de trois heures constitue un concurrent sérieux pour les aéroports – ceux de Lyon, Marseille ou Bordeaux peuvent en témoigner. Un des moyens de réduire l’impact de l’avion est de développer le train. Nous y reviendrons à l’article 15 avec les taxes sur les aéroports.

On a parfois l’impression que le transport aérien est devenu un bouc émissaire commode. En juillet dernier, la direction générale de l’aviation civile a pourtant rappelé que les émissions de gaz à effet de serre du transport aérien français ne représentent que 3,8 % des émissions du secteur des transports et environ 1 % des émissions pour le seul trafic intérieur.

Un plan est par ailleurs lancé pour verdir les carburants de l’aviation. Nous souhaitons que les compagnies aériennes investissent dans des avions plus sobres et dans l’écoconduite, en faisant évoluer les modes de pilotage. Nous savons qu’elles seront fortement décarbonées dans les décennies qui viennent : l’idée est de ne pas assécher leur trésorerie par une fiscalité excessive, afin qu’elles puissent réaliser des investissements durant la phase de transition. Il ne s’agit donc pas d’interdire les jets privés – je ne suis d’ailleurs pas certain qu’ils soient nombreux entre Cannes et Nice.

Je vous suggère donc de retirer les amendements ; à défaut, avis défavorable.

M. Gérard Leseul (SOC). En effet, il ne faut pas tout mélanger mais on doit quand même tenter de répondre à la question : pourquoi maintenir un traitement différencié ? Il ne s’agit pas de savoir si le transport aérien est un peu plus vertueux. Une telle exonération n’a pas de sens au regard de la concurrence des autres modes de transport.

M. Julien Bayou (Écolo-NUPES). Effectivement, 40 % des vols au départ de Nice s’effectuent en jet privé. Vous n’ignorez pas qu’une demande d’extension de l’aéroport a été déposée, qui posera de graves problèmes climatiques et environnementaux. Si les jets privés étaient mieux régulés, cette extension ne serait pas nécessaire. Quant aux vols entre Cannes et Nice, ils existent bien : Nice-Matin a montré que ces avions sont obligés d’effectuer un grand détour au-dessus de la Méditerranée car la distance entre les deux villes est trop courte. C’est absurde !

Je ne comprends pas que l’on puisse encore utiliser l’argument selon lequel on ne fait rien car le segment ne représente que 1 % des émissions. Vous ne vous attaquez pas aux responsables des 30 %, 20 % ou 10 % des émissions : prenez au moins des mesures pour ce 1 % ! Je préfèrerais de loin que vous disiez que vous n’avez pas envie de réguler les jets privés et de toucher à cette niche fiscale.

M. Damien Adam (RE). Ayant été désigné l’année dernière rapporteur pour avis sur les crédits relatifs aux transports aériens, je veux rappeler certains chiffres. Selon l’Ademe, l’Agence de la transition écologique, une voiture à essence émet 217,60 grammes de CO2 par kilomètre et par personne, contre 229,97 grammes pour l’avion, en classe économique. L’écart n’est donc pas considérable.

L’avion doit incontestablement se décarboner, mais ces amendements visant à supprimer l’exonération de TICPE ne sont pas nécessairement les plus adaptés. Depuis de nombreuses années, nous essayons de renforcer la fiscalité de ceux qui paient le moins d’impôt, notamment l’aviation d’affaires – nous avons fait un pas en ce sens dans le PLF pour 2023. D’autres solutions sont sur la table cette année. Je ne doute pas que nous aboutissions à des mesures d’ici au vote définitif du PLF mais, en l’état, ces amendements ne sont pas recevables.

M. Gérard Leseul (SOC). La taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques doit s’appliquer à tout mode de mobilité qui consomme des produits énergétiques. Rien ne justifie une telle exonération, d’autant que vous avez rappelé que différents modes de mobilité disposent de consommations sensiblement identiques. Pour la voiture, il n’y a pas d’exonération.

La commission rejette successivement les amendements I-CD259, I-CD146 et ICD404, ainsi que I-CD402.

Amendements identiques I-CD53 de M. Vincent Descoeur, I-CD132 de M. Jean-Yves Bony, I-CD204 de M. Jorys Bovet, I-CD329 de M. Emmanuel Blairy et I-CD399 de M. Pierre Meurin

M. Vincent Descoeur (LR). Par l’amendement I-CD53, nous proposons de renoncer à toute mesure de suppression de la défiscalisation du gazole non routier (GNR) pour les agriculteurs. Le moment est mal venu car les agriculteurs doivent faire face à une augmentation de leurs charges dans cette période d’inflation et à l’explosion du coût des matières premières.

M. Jean-Yves Bony (LR). L’amendement I-CD132 vise à maintenir les dispositions fiscales relatives au GNR. La suppression du tarif réduit appliqué au GNR inquiète la profession agricole et les entrepreneurs de la filière bois, d’autant qu’il n’existe aucune solution de remplacement crédible et viable.

Mme Annick Cousin (RN). Dans un contexte d’inflation généralisée, nombre d’agriculteurs ont, plus que d’habitude, la tête sous l’eau. Va-t-on continuer à leur tendre la perche de l’avantage sur les carburants ou leur donner le coup de grâce ? La compensation que vous proposez, en augmentant les plafonds de la déduction pour épargne de précaution, semble une bonne idée pour faire face à l’inflation, mais les agriculteurs déjà dans le rouge n’en bénéficieront pas.

Il est de plus paradoxal de demander aux agriculteurs d’utiliser moins de produits phytosanitaires, ce qui les conduit à privilégier les leviers agroéconomiques comme le travail mécanique du sol, donc à rouler davantage et à consommer plus de carburant qu’ils paieront plus cher.

M. Emmanuel Blairy (RN). La France est le premier pays touristique au monde, par la qualité de ses assiettes et la beauté de ses paysages. Tout cela, elle le doit aux agriculteurs. Sous couvert d’un verdissement de notre économie, vous leur demandez encore plus d’efforts. Depuis dix ans, 100 000 exploitations ont fermé ; un suicide est constaté tous les deux jours. Vous disiez que des concertations avaient été menées avec tout le monde. C’est faux : dans ma circonscription, la plus grande circonscription rurale de France, aucun agriculteur n’est d’accord avec cette mesure, même si elle a été modifiée.

C’est pourquoi je propose de la supprimer. Il y va de la survie des agriculteurs, au moment où l’on parle de la souveraineté alimentaire, du bien-être des Français et des diverses crises. Ces gens ont fait la France : il faut les respecter et supprimer cette ineptie.

M. Pierre Meurin (RN). Je vous en supplie, ne supprimez pas l’avantage fiscal pour le gazole non routier. Cela entraînera une explosion de charges pour les agriculteurs, déjà étranglés par leur budget carburant. Les agriculteurs travaillent soixante-dix heures par semaine ; ils se tuent à la tâche. Sous prétexte d’idéologie, vous leur assénez le coup de grâce, si j’ose dire.

Et, du fait du libre-échange, nous serons inondés de produits étrangers de moins bonne qualité sanitaire, sociale et environnementale. Oui, il faut sortir des énergies fossiles, mais cela ne se fera pas d’un coup, en cinq ans. Avec cette mesure, notre souveraineté alimentaire et notre sécurité alimentaire vont trinquer.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Nous en avons débattu tout à l’heure : nous sommes là au cœur du dispositif de l’article 12. Je rappelle que la suppression s’effectue de manière progressive. Une concertation a été menée – vous pouvez le contester mais elle a eu lieu. Quant aux dispositifs de compensation, ils peuvent ne pas vous satisfaire ni convenir à l’ensemble des agriculteurs, mais ils existent.

Nous sommes nombreux à défendre le monde agricole. Avant de dire que les députés de la majorité ne le défendent pas, vous devriez vous renseigner sur les relations que chacun entretient dans son territoire. Vous n’avez pas le monopole de la défense du monde rural et du monde agricole. On peut avoir des visions différentes de l’agriculture ou des considérations divergentes sur les produits phytosanitaires.

Lors de la précédente législature, en tant que corapporteur de la mission d’information commune sur le suivi de la stratégie de sortie du glyphosate, j’ai travaillé sur des textes complexes, en étant toujours à l’écoute du monde agricole. Par exemple, pour réduire les émissions de CO2 liées au travail, nous avons pu trouver des moyens de favoriser l’agriculture de conservation. Dans les PLF précédents, cette majorité a fait voter des crédits d’impôt pour que les agriculteurs puissent investir dans les équipements nécessaires. Cultiver du maïs selon ces méthodes permet d’émettre trois fois mois de dioxyde de carbone car on travaille moins la terre et on préserve la biodiversité.

Vous avez dit qu’il ne faut pas aller trop vite, et je partage votre avis. C’est pourquoi le dispositif est progressif : il s’étend sur sept ans et sera évalué de manière annuelle. Nous nous tenons à l’écoute du monde agricole dans nos circonscriptions comme à l’échelle nationale. Personne n’a envie de fermer les yeux sur le devenir de celles et de ceux qui nous nourrissent. Ces entrepreneurs du vivant savent qu’ils peuvent compter sur nous.

J’émets donc un avis défavorable sur l’ensemble des amendements.

Je m’excuse d’avoir été un peu long, monsieur le président, mais, chacun présentant sa vidéo, il ne faudrait pas donner l’impression que seuls certains sont capables de défendre le monde agricole.

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). Je n’ai pas besoin de vidéos car j’ai participé, avec l’ensemble des organisations syndicales, à un débat d’une heure et demie sur les questions agricoles la semaine dernière dans mon département.

De quels agriculteurs parle-t-on ? Ceux qui bénéficient des niches fiscales ou qui profitent le plus des déductions sont les gros propriétaires et les grands groupes financiers qui possèdent beaucoup d’hectares, notamment dans la Beauce, et dont les ouvriers ne sont pas toujours bien payés. Il serait intéressant de parler du revenu des agriculteurs en grande difficulté, ceux qui ont besoin de prix planchers assurés et de marges correctes, alors que la grande distribution et l’industrie agroalimentaire nuisent à leur juste rémunération.

Ces amendements ne pourront pas satisfaire le monde paysan tel que je le connais.

M. Emmanuel Blairy (RN). Je ne pensais pas que l’on tomberait aussi bas dans la caricature. C’est vous, monsieur le rapporteur pour avis, qui avez le monopole de la vidéo, puisque vous pouvez prendre la parole autant que vous le souhaitez. Nous sommes là pour défendre nos territoires. Bien sûr, chacun défend le monde paysan avec son angle de vue.

Vous dites qu’il y aura une compensation par des aides mais, je le répète, les agriculteurs veulent vivre de leur production, non d’aides. Ils souhaitent une vision, sur le long terme, pour perpétuer ce qu’ils font depuis 1 500 ans. Cela, vous ne le comprenez pas.

On a supprimé les néonicotinoïdes ; des sucreries ferment. Avec des décisions comme les vôtres, on ira chercher notre sucre en Allemagne, et jusqu’en Amérique. Et vous parlez de vidéos ! Finalement, cela ne me surprend pas : vous êtes totalement hors sol. C’est désolant !

M. le président Jean-Marc Zulesi. Vous voyez que vous avez pu parler autant que vous le désiriez.

La commission rejette les amendements.

Amendement I-CD400 de M. Pierre Meurin

M. Pierre Meurin (RN). Nous ne remettons absolument pas en cause la façon dont vous présidez les débats. En revanche, je m’associe aux remarques qu’ont formulées mes collègues en début de réunion : nous avons envie de débattre et il n’est pas respectueux de miser sur notre épuisement pour achever l’examen du texte.

Cet amendement de repli va dans le même sens que les précédents. Les agriculteurs disparaissent, ce qui est très inquiétant, puisque la France a toujours été une nation puissante sur le plan agricole. Ces quarante ou cinquante dernières années, nous avons méthodiquement détruit notre agriculture. Tous les agriculteurs estiment qu’il faut maintenir l’exonération fiscale pour le gazole non routier.

Une telle déconnexion est étonnante : la mesure a dû être proposée par un consultant de McKinsey, qui pensait récupérer de l’argent pour les caisses de l’État sur le dos des agriculteurs. Politiquement, elle est difficile à assumer parce que vous devrez la présenter aux agriculteurs.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je me suis longuement exprimé sur la question. L’amendement va à l’encontre du dispositif progressif qui est proposé. Diminuer les tarifs de l’accise n’incitera pas le monde agricole à évoluer.

Vous avez estimé que j’étais hors sol : c’est oublier que, fils d’agriculteurs, j’ai grandi dans une ferme.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, elle rejette l’amendement I-CD328 de M. Emmanuel Blairy.

Amendement I-CD52 de M. Vincent Descoeur

M. Vincent Descoeur (LR). Le présent amendement, suggéré par l’Association nationale des élus de la montagne (Anem), vise à rétablir l’exonération du tarif d’accise sur le gazole pour certaines activités vitales comme la collecte du lait dans les exploitations agricoles situées en zone de montagne. Celle-ci sera durement touchée par l’augmentation des tarifs.

La question a été évoquée lors de l’examen de la loi « montagne » en 2016, laquelle prévoyait une exonération de TICPE qui n’a pas été instaurée, faute de décret d’application.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Les camions qui effectuent la collecte du lait utilisent-ils du GNR, plutôt que du gazole routier ?

M. Vincent Descoeur (LR). Si l’Anem suggère un tel amendement, c’est de toute évidence que la collecte du lait en montagne peut être victime des dispositions prévues dans le PLF. Votre question est légitime, et je dois regarder ce point plus en détail.

Mme Pascale Boyer (RE). La majorité n’a pas déposé cet amendement, qui vise à exonérer les activités de collecte de lait en montagne de telles taxes car les engins agricoles et de collecte peuvent rouler au GNR. L’exonération avait été prévue mais elle n’a jamais été appliquée.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il me paraît difficile de se prononcer en l’état. Je vous invite à retirer l’amendement afin de le clarifier en vue de la séance.

M. Vincent Descoeur (LR). Je le retire pour le revoir à tête reposée.

L’amendement est retiré.

Amendement I-CD262 de Mme Charlotte Leduc

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). L’amendement, rédigé en collaboration avec la Confédération paysanne, vise à restreindre la niche fiscale sur les serres chauffées.

Depuis 2020, le déplafonnement du remboursement partiel de la taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel (TICGN) permet, le plus souvent aux plus grandes exploitations, de bénéficier d’une aide de 25 000 euros environ par hectare pour la production de légumes hors saison.

Le retour à la situation antérieure est une manière d’encourager les productions de saison et d’assurer une meilleure allocation des ressources publiques, par exemple pour isoler les serres. Vous connaissez toutefois notre opposition de principe aux niches fiscales.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. D’une part, les agriculteurs sont libres de produire ce qu’ils veulent. D’autre part, les serres chauffées permettent aussi de maintenir une température minimale la nuit afin de protéger les cultures de saison lors des épisodes de gel.

Par ailleurs, les évolutions technologiques offrent des alternatives aux combustibles pour chauffer les serres – les pompes à chaleur, le système économe de gestion climatique des cultures sous serre développé par AirGaïa.

Je ne condamnerai donc pas les serres chauffées comme vous le faites, encore moins sans concertation avec l’ensemble de la profession. Je demande le retrait de l’amendement, sinon avis défavorable.

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). S’il faut l’accord de la FNSEA, demandons-lui !

Saisissons les chances qu’offrent les nouvelles technologies et soutenons, par le biais de la fiscalité, leur installation.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, elle rejette l’amendement I-CD387 de M. Pierre Vatin.

Amendement I-CD105 de Mme Lisa Belluco

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). Il s’agit de supprimer la niche fiscale au profit des centres de stockage, de traitement, de transport et de diffusion de données numériques. En dépit des règles environnementales qui l’encadrent, cette niche va à l’encontre de l’objectif de sobriété énergétique. Parmi ses multiples effets sur l’environnement, le numérique émet aujourd’hui 4 % des gaz à effet de serre dans le monde ; sa consommation énergétique augmente de 9 % par an. La fiscalité doit donc être repensée pour lutter contre cette pollution croissante.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Le tarif réduit de l'accise vise à encourager l’implantation de centres de données sur notre territoire en assurant un tarif attractif de l'électricité, laquelle est leur premier poste de dépenses.

On estime qu’entre 2010 et 2018, ces centres ont réduit de 20 % leur intensité énergétique. Il me paraît inopportun, sans concertation avec la profession ni évaluation sérieuse de la pollution liée au numérique, d’alourdir la fiscalité sur un secteur qui a amélioré son bilan carbone. On pourrait aussi s’interroger sur la pollution engendrée par les tablettes et les smartphones, compte tenu du nombre de leurs utilisateurs.

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). Il n’est pas question d’interdire les centres de données mais de supprimer un avantage fiscal. C’est le rôle des décideurs publics d’inciter à ne pas surconsommer l’énergie.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD126 de M. Vincent Descoeur

M. Vincent Descoeur (LR). Afin d’appeler l’attention sur les PME et PMI en marge des réseaux de gaz naturel ou ayant recours à des processus industriels non électrifiables, il est proposé une exonération de TICPE sur le biopropane.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je suis sensible à l’argument de l’autonomie énergétique développé dans l’exposé sommaire. S’il convient d’être vigilant sur les certifications délivrées pour distribuer ce type de gaz, mon avis est néanmoins favorable.

La commission adopte l’amendement.

M. Gérard Leseul (SOC). Je reviens sur le vote sur l’amendement précédent. Toutes les mains se sont levées dans les rangs de l’opposition pour voter en faveur de l’amendement tandis que certaines sont restées baissées dans la majorité. Votre décompte n’était pas conforme à la réalité.

M. le président Jean-Marc Zulesi. Je vous remercie de remettre en cause ma présidence. J’ai bien compté.

Amendement I-CD242 Mme Marjolaine Meynier-Millefert

Mme Marjolaine Meynier-Millefert (RE). L’amendement tend à exonérer de taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE) la part d’électricité autoproduite par les projets d’autoconsommation collective, au même titre que pour l’autoconsommation individuelle.

La directive européenne 2003/96, dans son article 15, autorise les États membres à appliquer des exonérations totales ou partielles ou des réductions de taxation de l'électricité d'origine solaire.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission adopte l’amendement.

Amendements I-CD178 de M. Vincent Descoeur, I-CD383 de M. Antoine Villedieu et I-CD179 de M. Vincent Descoeur (discussion commune)

M. Vincent Descoeur (LR). Il s’agit de verser les avances de TICPE pour les entreprises de travaux agricoles à un rythme mensuel dans mon premier amendement, et trimestriel dans le second.

M. Antoine Villedieu (RN). Les entreprises de travaux agricoles, forestiers et ruraux emploient près de 100 000 personnes. Le montant du remboursement de la TICPE qu’elles perçoivent varie entre 4 000 et 50 000 euros.

Afin d’éviter les chocs de trésorerie et de sauvegarder de nombreux emplois, l’amendement a pour objet de porter de trois à six le nombre d’avances de TICPE par an.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Demande de retrait, sinon avis défavorable.

D’une part, c’est moins le nombre d’avances que leur montant qui importe. D’autre part, il sera difficile – inenvisageable pour le 1er janvier 2024 – pour les services de la comptabilité publique d’instaurer un remboursement mensuel.

M. Vincent Descoeur (LR). Je retire l’amendement I-CD178.

La commission rejette successivement les autres amendements.

Amendements identiques I-CD439 du rapporteur pour avis, I-CD4 de M. Dino Cinieri, I-CD36 de M. Vincent Descoeur, I-CD137 de M. Anthony Brosse, I-CD171 de M. Stéphane Delautrette et I-CD361 de M. Jean-Louis Bricout

M. Jean-Luc Fugit (RE). L’amendement a pour objet d’annuler la suppression par les alinéas 80 et 81 d’une disposition issue de la loi visant à renforcer la prévention et la lutte contre l'intensification et l'extension du risque incendie. C’est un mauvais signal envers les personnels qui se dévouent, parfois au risque de leur vie, pour la défense de nos forêts.

M. Dino Cinieri (LR). Dans la loi précitée, les parlementaires ont décidé de soutenir les sapeurs-pompiers en exonérant totalement leurs véhicules du malus écologique et de la taxe sur les carburants.

Or les alinéas 80 et 81 remettent en cause ces exonérations. C’est incompréhensible tant elles répondaient à des attentes légitimes des services départementaux d’incendie et de secours (Sdis). Nous devons doter les sapeurs-pompiers des moyens d’accomplir leurs missions au service des populations.

Lors des questions au Gouvernement, mardi dernier, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires s’est engagé à corriger ce qu’il a qualifié de « coquille ».

M. Vincent Descoeur (LR). Je souscris pleinement à la présentation du rapporteur pour avis.

M. Stéphane Delautrette (SOC). M. Christophe Béchu l’a dit clairement, il s’agit d’une coquille que l’amendement tend à corriger.

Nous avions obtenu une belle victoire à l’issue d’un riche débat lors de l’examen de la loi sur la lutte contre les incendies. Le maintien du texte en l’état serait à la fois un retour en arrière pour les Sdis et un affront fait aux députés.

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). Il s’agit de respecter le vote des parlementaires en conservant les dispositions qu’ils ont adoptées.

La commission adopte les amendements identiques.

Amendement I-CD26 de M. Vincent Descoeur

M. Vincent Descoeur (LR). L’amendement a pour objet de rendre applicables dès le 1er janvier 2024 les mesures destinées à compenser la hausse de la fiscalité sur le GNR.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L’amendement aurait pour effet de creuser le déficit budgétaire de 40 à 60 millions d’euros. L’État accorderait aux agriculteurs une avance de trésorerie peu compatible avec une gestion rigoureuse des finances publiques.

La commission rejette l’amendement.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 12 modifié.

Après l’article 12

Amendement I-CD263 de M. David Guiraud

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). L’amendement tend à fixer une échéance claire – 2025 – pour mettre fin aux niches fiscales défavorables à l’environnement. Selon l’Inspection générale des finances (IGF) et le Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) qui les ont recensées, elles concernent essentiellement les domaines de l’énergie et des transports. L’amendement reprend la liste établie par ces deux instances bien que nous en contestions les choix restrictifs.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. En fixant une échéance aussi proche, vous risquez de mettre en péril l’activité des chauffeurs de taxi ou des chauffeurs routiers en diminuant leurs revenus. L’approche progressive retenue par le Gouvernement, qui permet au secteur d’absorber la nouvelle donne fiscale et aux équipementiers d’élargir leur offre de véhicules propres, me paraît préférable. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD24 de M. Vincent Descoeur

M. Vincent Descoeur (LR). Il s’agit de rehausser le plafond pluriannuel de la déduction pour épargne de précaution à 250 000 euros.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Défavorable, car les mesures prévues dans le PLF coûteront déjà 60 millions d’euros à l’État en 2024.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques I-CD176 de M. Vincent Descoeur et I-CD384 de M. Antoine Villedieu

M. Antoine Villedieu (RN). L’amendement vise à rendre les entreprises de services et de travaux agricoles, ruraux et forestiers éligibles au crédit d’impôt destiné à encourager la sortie du glyphosate. Je sais que le sujet est polémique mais profitons de l’occasion – elle est rare – de faire de l’écologie incitative et non punitive.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L'amendement est trop large. Il vise les 21 000 entreprises de travaux agricoles, ruraux et forestiers, dont les tâches sont très variées. Elles interviennent souvent dans le cadre de la sous-traitance, dans lequel c’est le client qui décidera in fine d’utiliser ou non du glyphosate.

L'extension du dispositif ne me semble pas appropriée pour mettre fin à l’usage de cette substance. Il faut privilégier la voie de la réglementation.

La commission rejette les amendements.

Amendement I-CD265 de Mme Charlotte Leduc, amendements identiques I-CD19 de M. Vincent Descoeur, I-CD108 de M. Jean-Yves Bony, I-CD186 de Mme Annick Cousin et ICD409 de M. Jean-François Lovisolo, amendement I-CD208 de M. Jean-François Lovisolo, amendements identiques I-CD20 de M. Vincent Descoeur, I-CD109 de M. Jean-Yves Bony, ICD187 de Mme Annick Cousin et I-CD410 de M. Jean-François Lovisolo (discussion commune)

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). Nous demandons la suppression du crédit d’impôt pour les exploitations certifiées « Haute valeur environnementale » (HVE).

Un récent rapport de la Cour des comptes conclut que ce label n’est pas suffisamment exigeant et n’incite pas à changer les pratiques agricoles. Un autre rapport de l’Office français de la biodiversité (OFB) dresse le même constat. Enfin, Le Monde révélait en 2022, en s’appuyant sur une note remise au ministère de l'agriculture fin 2020, que, pour obtenir le label, l’achat des intrants tels que les pesticides ne devait pas dépasser 30 % du chiffre d’affaires. La moyenne étant de 14 % pour les exploitations viticoles et de 26 % pour les exploitations maraîchères, on est loin d’un label incitatif !

Les spécialistes que nous avons rencontrés dans le cadre de la mission d’information en cours sur les dynamiques de la biodiversité dans les paysages agricoles et l’évaluation des politiques publiques associées confirment que le label HVE n’encourage pas les transitions vers des pratiques plus écologiques. En outre, il crée une concurrence néfaste avec l’agriculture biologique.

80 à 95 % des aides publiques sont aujourd’hui tournées vers le modèle de l’agrobusiness. Il faut les réorienter vers l’agriculture biologique qui a vu le soutien public s’amenuiser ces dernières années. Commençons par lui affecter les crédits tirés par la suppression du crédit d’impôt HVE.

M. Vincent Descoeur (LR). Mon amendement vise au contraire à pérenniser le crédit d’impôt HVE afin d’alléger le coût de la certification qui peut être un frein pour les petites exploitations.

Mme Annick Cousin (RN). L’amendement a pour objet de garantir la pérennité du crédit d'impôt qui a joué un rôle crucial dans l’adoption de la norme HVE en permettant d’abaisser les coûts de la certification.

Je conteste l’idée selon laquelle le label ne se traduit pas par des progrès environnementaux. Les agriculteurs doivent réaliser des investissements importants pour l’obtenir. En outre, en juillet 2023, un nouveau référentiel HVE, plus exigeant et ambitieux, a été adopté.

Mme Laurence Heydel Grillere (RE). Les amendements I-CD409 et I-CD208 visent respectivement à pérenniser et à proroger d’un an le dispositif.

Mme Annick Cousin (RN). La meilleure manière de promouvoir une agriculture plus durable tout en maintenant notre compétitivité est de soutenir les agriculteurs en les encourageant à investir dans des transitions agricoles.

La hausse des taxes se répercute immédiatement sur la compétitivité de nos productions agricoles et sur le pouvoir d’achat des consommateurs, sans apporter de bénéfices environnementaux concrets.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il faut prendre en considération les doutes émis dans certains rapports récents sur le label HVE – contrôles insuffisants, interprétations variables selon les filières agricoles, usage de pesticides.

À ce stade, il me semble que le Parlement aurait intérêt à évaluer à son tour le dispositif. Notre commission et la commission des affaires économiques, compétente sur l’agriculture, pourraient s’en saisir. C’est la raison pour laquelle j’émets un avis défavorable sur l’ensemble des amendements, qu’ils prônent aussi bien la suppression que la prorogation du dispositif.

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). Je vous lis un extrait du rapport de la Cour des comptes qui « alerte les pouvoirs publics sur le manque de communication sur les impacts bénéfiques du bio et sur l’illisibilité des labels qui contribue à la baisse des achats d’aliments bio en 2021 face à la concurrence croissante de labels moins exigeants, comme la mention valorisante Haute valeur environnementale (HVE) ».

Je rejoins M. le rapporteur pour avis sur la nécessité d’une réflexion approfondie sur le label HVE. Mais c’est précisément l’un des sujets que la mission d’information traite.

Puisque nous connaissons les conclusions des deux rapports et les premiers enseignements de la mission d’information, nous pouvons voter sans état d’âme l’amendement de suppression, compte tenu de la concurrence délétère que subissent les agriculteurs en bio. Nous devons cesser de promouvoir le label HVE qui relève davantage du greenwashing que de la transition écologique.

M. Vincent Descoeur (LR). Qu’advient-il des 37 000 exploitations qui sont aujourd’hui labellisées ?

M. Damien Adam (RE). Sans suppression ni prorogation, que se passe-t-il, notamment pour ceux déjà certifiés ? Je confesse ma méconnaissance du sujet, mais peut-être le crédit d’impôt pourrait-il être recentré sur la certification de niveau 3 ?

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). Le cours de la viande bio est désormais inférieur à celui de la viande HVE et le prix du lait en bio, inférieur à celui du lait en agriculture conventionnelle. Le label HVE est en train de tuer la filière bio sans atteindre pour autant les objectifs qui lui avaient été fixés : une agriculture plus raisonnable, soucieuse de l’environnement, du bien-être animal et de la santé des consommateurs. Aujourd’hui, les agriculteurs qui avaient fait le choix du bio y renoncent et reviennent à l’agriculture conventionnelle car les cours s’effondrent.

En attendant la future loi d’orientation agricole, supprimons le crédit d’impôt.

Mme Laurence Heydel Grillere (RE). Il est dommageable d’opposer les agricultures entre elles. Je doute que l’affaissement des cours de l’agriculture biologique soit lié à l’expansion de l’agriculture HVE, compte tenu du faible nombre d’exploitations concernées par ce label – nous sommes encore loin de l’objectif de 50 000 exploitations. En outre, depuis juillet 2023, la certification est plus exigeante et seul le niveau 3 est désormais éligible au crédit d’impôt.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Plutôt qu’à la suppression ou à la prorogation du dispositif, je suis favorable à la stabilité fiscale. Après les rapports de la Cour des comptes et de l’OFB, le sujet mérite d’être approfondi et, à cet égard, Madame Meunier, nous attendrons avec intérêt les conclusions de la mission d‘information.

Les 37 000 exploitations certifiées continueront à bénéficier du dispositif en 2024.

Enfin, je n’entre pas dans le débat sur le cours du bio, mais la loi de l’offre et de la demande me semble aussi expliquer les difficultés actuelles.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendements identiques I-CD21 de M. Vincent Descoeur, I-CD118 de M. Jean-Yves Bony et I-CD411 de M. Jean-François Lovisolo

M. Vincent Descoeur (LR). Le crédit d’impôt HVE peut déjà être multiplié par le nombre d’associés dans le cadre d’un groupement agricole d’exploitation en commun (Gaec). Par souci de cohérence, nous proposons d’étendre cette possibilité aux associés d’une exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL).

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Par cohérence avec nos votes précédents, demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Amendement I-CD368 de M. Aymeric Caron

M. Aymeric Caron (LFI-NUPES). Depuis environ deux ans, les refuges animaliers sont débordés par l’explosion des abandons. Du fait de la très forte inflation, ils ont de plus en plus de mal à payer leurs charges. Je propose donc de leur accorder, de même qu’aux associations de protection animale, une exonération de TVA sur les produits d’alimentation et d’hygiène animale tels que les litières ainsi que sur les prestations vétérinaires.

La Société protectrice des animaux (SPA) a recueilli, au premier trimestre 2023, 15 % d’animaux de plus qu’à la même période en 2022. La France est le pays européen qui déplore le plus d’abandons – 100 000 chaque année, selon la Fondation 30 millions d’amis. Or les coûts liés à l’alimentation et aux soins vétérinaires augmentent, tandis que le contexte économique difficile a fait baisser le nombre des adoptions. Dans ce contexte, mon amendement permettrait de sauver davantage d’animaux. Je n’imagine pas qu’une seule personne dans cette salle y soit opposée.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il existe déjà des dispositions permettant d’aider les refuges et associations de protection animale : je pense notamment aux aides à l’investissement, à la stérilisation des animaux errants – les chats en métropole, les chiens et les chats dans les outre-mer – et aux facilités d’accès aux soins vétérinaires pour les animaux des personnes démunies. L’ensemble de ces dispositifs me semblent plus efficaces qu’une exonération de TVA sur les produits d’alimentation et d’hygiène animale, qui se verraient taxés différemment selon qu’ils sont achetés par un particulier ou par un refuge. Il n’est pas nécessaire de créer une nouvelle niche fiscale, que votre groupe combat d’ailleurs par principe, si j’ai bien compris ce que Mme Couturier a dit tout à l’heure. J’imagine donc que vous retirerez votre amendement ; à défaut, je lui donnerai un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD353 de M. Aymeric Caron

M. Aymeric Caron (LFI-NUPES). Il s’agit de ramener de 20 % à 5,5 % le taux de TVA applicable aux produits d’alimentation et d’hygiène destinés aux animaux dits de compagnie, afin notamment de lutter contre des abandons de plus en plus fréquents. Le budget que les ménages consacrent à leurs animaux est très important et a explosé du fait de la hausse de l’inflation : entre mars 2022 et mars 2023, le prix des produits pour animaux a ainsi augmenté de 15 % en moyenne, une hausse qui s’établit même à 18 % s’agissant des croquettes pour chats et chiens. (Brouhaha.) Mais je sens que cela n’intéresse pas grand monde… Savez-vous que de très nombreuses personnes ont beaucoup de mal à boucler leur budget à cause de leurs animaux de compagnie ? Ce serait sympa que vous soyez un peu plus attentifs !

M. Pierre Meurin (RN). Nous sommes là depuis que la discussion a commencé à dix-sept heures, contrairement à vous qui venez d’arriver !

M. Aymeric Caron (LFI-NUPES). Pas de démagogie ! Il faut partir si vous êtes fatigués ou si vous n’êtes plus capables d’écouter !

Selon une étude de l’Ifop, le budget annuel pour un animal de compagnie peut atteindre 1 000 euros. Vous comprendrez donc tout l’intérêt de mon amendement.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Le taux de TVA applicable aux aliments pour animaux ayant vocation à servir de denrées alimentaires a été ramené à 5,5 % au 1er janvier 2023. Les animaux de compagnie ne participent pas de cet enjeu d’indépendance alimentaire : je ne suis donc pas certain qu’il faille adopter une nouvelle niche fiscale. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD323 de M. Aymeric Caron

M. Aymeric Caron (LFI-NUPES). Je propose de supprimer le taux de TVA réduit pour les produits carnés destinés à la consommation humaine, puisqu’il ne s’agit pas de produits de première nécessité. La viande présentant de nombreux désavantages, il est incompréhensible qu’un taux de TVA préférentiel, qui encourage sa consommation, lui soit appliqué.

Dans un rapport publié en novembre 2021, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) estimait à 2,4 millions le nombre de décès imputables à la consommation de viande en 2020. Il faut rappeler que la viande rouge favorise le développement de cancers et de maladies cardiovasculaires. La production de viande est également responsable de 15 % des émissions de gaz à effet de serre ; par ailleurs, les élevages sont très gourmands en eau et en céréales. Pour toutes ces raisons, l’ensemble des scientifiques et des organisations sérieuses proposant des solutions pour lutter contre le réchauffement climatique recommandent de diminuer fortement la production et la consommation de viande – selon certains scénarios, il conviendrait même de diminuer de 70 % la consommation de ce produit. L’application d’un taux de TVA non réduit permettrait d’aller dans ce sens. Une telle mesure est une nécessité tant sanitaire qu’environnementale.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je le disais tout à l’heure, le taux réduit de 5,5 % s’applique depuis le 1er janvier 2022 à l’ensemble des denrées destinées à l’alimentation humaine et aux produits normalement destinés à entrer dans la fabrication de ces denrées. En d’autres termes, il s’applique tout au long de la chaîne de production alimentaire. C’est un choix que nous avons fait pour défendre l’indépendance alimentaire de la France.

Vous êtes donc favorable à l’augmentation du prix de la viande pour nos concitoyens, y compris pour ceux donc les revenus sont les plus modestes. Ce n’est pas très sympathique pour leur pouvoir d’achat ! Je trouve cela curieux, et je ne suis pas sûr que tous les collègues de votre groupe soient d’accord avec vous. Avis très défavorable.

M. Pierre Meurin (RN). Je souscris entièrement aux propos de M. le rapporteur pour avis.

Monsieur Caron, alors que vous n’avez pas été très présent depuis quelques heures, vous nous demandez maintenant de porter un maximum d’attention à votre personne. Vous êtes peut-être la star de cette commission… Non, les stars, ce sont évidemment le président et le rapporteur pour avis !

M. le président Jean-Marc Zulesi. Il n’y a pas de star dans notre commission.

M. Pierre Meurin (RN). Plus sérieusement, votre amendement pénaliserait le pouvoir d’achat des Français, qui n’ont déjà plus les moyens de se nourrir en viande comme ils le souhaiteraient. Cela vous fait peut-être plaisir d’être le meilleur promoteur de Xavier Niel et de ses steaks de soja. Vous êtes l’homme des superprofiteurs de la viande artificielle, qui n’a fait l’objet d’aucune étude d’impact sanitaire. Vous jouez ici à l’apprenti sorcier sur fond de spectacle… Vous étiez mieux chez Ruquier ! Faites du spectacle mais ne venez pas en commission, où nous travaillons !

M. Aymeric Caron (LFI-NUPES). Je reconnais là toute la subtilité du Rassemblement national qui, à court d’arguments, ne peut plus recourir qu’aux attaques ad personam. C’est plus simple que de dérouler des arguments ! Vos prises de parole ne sont pas dignes, elles ne sont pas à la hauteur d’une assemblée comme la nôtre. Ne venez surtout pas nous donner des leçons de comportement ! Arrêtez votre cirque, cela nous fera du bien à tous !

M. le président Jean-Marc Zulesi. Veuillez conclure en revenant au fond de votre amendement, Monsieur Caron.

M. Aymeric Caron (LFI-NUPES). Je comprends, monsieur le président, que vous soyez agacé par ce genre d’intervention – non pas par la mienne, mais par celle de M. Meurin.

Effectivement, Monsieur le rapporteur pour avis, il peut sembler contre-intuitif d’augmenter le taux de TVA applicable à un produit comme la viande. On pourrait imaginer que nous voudrions nous en prendre au pouvoir d’achat des plus modestes, et il est indéniable qu’une telle mesure grèverait le pouvoir d’achat de nos concitoyens sur ce point extrêmement précis. Mais on le fait déjà pour d’autres produits dont on ne cesse d’augmenter le prix, comme les cigarettes, sans que cela suscite autant de débats ! Or de nombreux scientifiques démontrent que la viande n’est pas un produit anodin. Elle n’est pas davantage un produit de première nécessité. Il existe aujourd’hui un grand nombre de substituts végétaux qui nous permettent de nous procurer absolument toutes les protéines dont nous avons besoin, et dont les effets sur la santé et l’environnement sont bien meilleurs – et je ne vous parle même pas du bien-être animal.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD363 de M. Aymeric Caron

M. Aymeric Caron (LFI-NUPES). Dans la même logique, je propose de ramener à 5,5 % le taux de TVA applicable aux produits végétaux de substitution aux produits carnés, afin de promouvoir une alimentation plus saine, durable, respectueuse de l’environnement et des droits des animaux. Une telle mesure aurait notamment pour effet de diminuer la quantité de souffrance animale liée aux élevages.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Encore une fois, votre amendement est satisfait : j’ai rappelé tout à l’heure que le taux de 5,5 % s’appliquait, depuis le 1er janvier 2022, à l’ensemble des denrées destinées à l’alimentation humaine et aux produits normalement destinés à entrer dans la fabrication de ces denrées. Demande de retrait.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD366 de M. Aymeric Caron

M. Aymeric Caron (LFI-NUPES). Il s’agit cette fois de baisser le taux de TVA applicable aux produits végétaux de substitution aux produits laitiers. Je précise que la production de lait est directement liée à celle de la viande.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Le fils de producteur laitier que je suis vous remercie de ce rappel. À vous entendre, dans cette commission, nous n’y connaissons rien.

M. Aymeric Caron (LFI-NUPES). Vous ne faites que des attaques personnelles ce soir ?

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il faut bien reconnaître que le ton que vous utilisez est parfois un peu agaçant.

Je le répète : depuis le 1er janvier 2022, le taux de 5,5 % s’applique à l’ensemble des denrées alimentaires, qu’il s’agisse des produits finis ou de ceux entrant dans leur processus de fabrication. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement, qui est satisfait.

M. Aymeric Caron (LFI-NUPES). Compte tenu du ton que vous employez à mon égard, je ne le retirerai pas.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, elle rejette l’amendement I-CD389 de M. Pierre Vatin.

Amendements identiques I-CD35 de M. Jean-Yves Bony et I-CD356 de M. Matthieu Marchio

M. Jean-Yves Bony (LR). L’application d’un taux de TVA réduit à certains composants de véhicules permettrait d’amorcer une démarche nouvelle et ambitieuse de réutilisation et de valorisation de ces produits.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. À l’initiative de notre ancien collègue Damien Pichereau, à qui je veux rendre hommage, la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite « climat et résilience », a déjà supprimé le monopole sur les pièces détachées afin d’accentuer la baisse des prix. Attendons de pouvoir mesurer les effets de cette mesure. Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Amendement I-CD392 de M. Aymeric Caron

M. Aymeric Caron (LFI-NUPES). Cet amendement est original, pour ne pas dire révolutionnaire. Il consiste à traduire dans la loi une situation que beaucoup d’entre vous expérimentent ou ont déjà expérimentée, à savoir le fait que nos animaux de compagnie, en particulier nos chiens et nos chats, sont devenus des membres de notre famille. Vous pouvez sourire, monsieur le président, mais c’est une réalité pour beaucoup de Français.

M. le président Jean-Marc Zulesi. Vous aviez dit que j’étais agacé. Vous voyez bien que ce n’est pas le cas !

M. Aymeric Caron (LFI-NUPES). Je n’ai jamais prétendu que vous étiez agacé par moi-même.

De nombreux Français ont donc noué un lien très étroit avec leur animal de compagnie. Cela peut se manifester par les soins qu’ils lui apportent, par la souscription d’une assurance, par l’organisation d’obsèques après son décès, et évidemment par le chagrin qu’ils ressentent à sa disparition après dix ou quinze ans de vie commune.

Je propose de rénover le quotient familial en attribuant aux foyers fiscaux un huitième de part supplémentaire pour un certain nombre d’animaux de compagnie, par exemple pour les chiens et chats inscrits au fichier national d’identification Icad. J’ai déjà évoqué le coût que représentent ces animaux pour les familles qui les recueillent, qui les adoptent, avec lesquelles ils cohabitent. Parmi les nombreux intérêts de cet amendement, je veux donc souligner celui de permettre aux familles de mieux supporter le coût des animaux qui en sont membres et qui font désormais partie de leur intimité.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. J’ai pu vérifier que les poissons rouges figuraient sur la liste des animaux domestiques. Ainsi, un couple possédant quatre poissons rouges bénéficierait d’une demi-part fiscale supplémentaire et serait donc traité de la même façon que s’il avait son premier enfant. Avis défavorable.

M. Pierre Meurin (RN). L’argumentaire lapidaire de M. le rapporteur pour avis est d’une efficacité redoutable. Pourquoi ne pas inscrire ces poissons rouges à l’état civil ou en faire la source de multiples exonérations fiscales ? Pourquoi ne pas affecter une part de TVA aux moustiques qui tournent autour de nous en été ? On peut envisager beaucoup de choses avec M. Caron, mais cela représente beaucoup d’argent qui sort des caisses de l’État. Je ne suis pas le dernier à considérer que le budget doit être utilisé dans une perspective sociale, mais je suis tout de même vaguement préoccupé par l’équilibre de nos finances publiques… C’est à du trolling que M. Caron se livre depuis vingt bonnes minutes. Il aurait vraiment davantage sa place sur les plateaux de télévision ou dans les médias que dans notre commission, où nous nous devons de travailler sérieusement.

M. Aymeric Caron (LFI-NUPES). Je suis très heureux de recevoir tous ces compliments venant de représentants du Rassemblement national. Lorsque j’intervenais sur les plateaux de télévision, ils ne m’en adressaient jamais aucun : j’étais constamment « trollé » par des membres ou des sympathisants de leur camp politique qui détestaient mes prises de parole. Je me réjouis d’entendre que vous me regrettez dans cet exercice mais, je suis désolé, c’est ici que vous devez maintenant me supporter.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD332 de M. Aymeric Caron

M. Aymeric Caron (LFI-NUPES). On peut rire de mes amendements et considérer que tout cela n’a pas d’importance, que je fais du trolling, mais je vous assure que la place occupée par les animaux dits de compagnie dans nos familles est une vraie question de société, s’agissant tant du lien que nous nouons avec eux que du coût économique qu’ils représentent. C’est la raison pour laquelle je propose une réduction d’impôt liée à l’alimentation des animaux domestiques, qui serait fixée à 30 euros par chien ou par chat et à 15 euros pour toute une autre catégorie d’animaux. Mon but n’est pas de faire du spectacle, mais de proposer de vraies pistes de réflexion sur un sujet qui va s’imposer dans les prochaines années.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. En ce qui concerne l’alimentation humaine, vous proposez d’augmenter la TVA sur la viande, mais vous voulez instaurer un crédit d’impôt pour l’alimentation des animaux inscrits au registre des animaux carnivores domestiques. Les bras m’en tombent ! Avis défavorable.

Mme Laurence Heydel Grillere (RE). Le secteur qui rencontre le plus de succès sur le marché du bio a toujours été celui du « pet food ». Le fait que l’on choisisse d’abord et avant tout de nourrir des animaux avec des produits bio doit nous amener à réfléchir.

M. Aymeric Caron (LFI-NUPES). Je comprends votre étonnement, Monsieur le rapporteur pour avis, mais certains animaux sont carnivores, ce qui signifie qu’ils n’ont pas d’autre choix que de manger de la viande. Quant à nous, nous sommes omnivores : nous avons le choix.

La commission rejette l’amendement.

Amendements I-CD98 et I-CD99 de Mme Lisa Belluco (discussion commune)

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). L’amendement I-CD98 vise à réformer la taxe sur les surfaces commerciales (Tascom) afin d’en faire un outil de lutte contre l’artificialisation des sols.

Pour ce faire, nous proposons tout d’abord que soient imposées au titre de la Tascom les surfaces dédiées au e-commerce. Pour l’heure, en effet, les entrepôts de e-commerce ne sont pas considérés comme des établissements commerciaux et ne sont donc pas soumis à cette taxe. Cela n’incite pas les entreprises du secteur à faire preuve de sobriété foncière, sans parler de la distorsion de concurrence dont elles bénéficient par rapport au commerce classique, qui est assez injuste.

Nous proposons en outre une modulation de la taxe. Il nous semble nécessaire d’imposer davantage les surfaces commerciales en dehors des centres-bourgs que celles situées dans les centres-villes et les bourgs, où les petits commerces subissent la dure concurrence des immenses zones commerciales qui défigurent les paysages, altèrent la qualité de vie, font obstacle à l’infiltration de l’eau dans les sols et contraignent nos concitoyens à utiliser la voiture.

Nous proposons enfin que le produit de cette taxe soit affecté aux départements au titre de leur compétence en matière d’espaces naturels sensibles. Ils pourront utiliser ces recettes pour protéger nos terres et renaturer celles qui ont été dégradées.

L’amendement I-CD99 est un amendement de repli visant à diminuer le taux de la Tascom pour les implantations intra-urbaines et à l’accroître nettement pour les installations périurbaines. Là encore, il s’agit d’inciter les acteurs du commerce à investir les centres-villes et à arrêter de bétonner les campagnes alentour. J’ajoute qu’une telle mesure permettrait de faire écho aux annonces gouvernementales relatives à l’embellissement des zones commerciales.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Vous avez évoqué le sujet très important de l’artificialisation des sols, qui relève des compétences de notre commission. La commission des affaires économiques serait également intéressée par votre mesure relative à la répartition des commerces en centre-ville et en périphérie.

Prenons garde de ne pas trop simplifier le débat. Les entrepôts utilisés pour le e-commerce sont souvent mixtes. Par ailleurs, des millions de nos concitoyens vivent en périphérie : pour eux, les commerces de périphérie sont des commerces de proximité. Le rapport rendu en février 2022, à la fin de la précédente législature, par notre collègue Sandra Marsaud montre bien la complexité de ce problème.

En matière de revitalisation des petits commerces dans les cœurs de village et les centres-villes, le plan Action cœur de ville et le programme Petites villes de demain paraissent plus efficaces que ce type de mesure fiscale.

Enfin, il n’y a pas eu assez de concertation avec les très nombreuses fédérations professionnelles du secteur.

Avis défavorable, donc.

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). Nous soutiendrons ces deux amendements, qui visent l’objectif du zéro artificialisation nette (ZAN) dont nous avons déjà parlé. En plus d’être inutiles et inadaptés aux besoins des territoires, les grands projets de zones commerciales qui fleurissent un peu partout vont à l’encontre de la loi visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols et à renforcer l’accompagnement des élus locaux, alors même que le texte promulgué était moins ambitieux que la proposition initiale, notamment du fait de reculs actés lors de la commission mixte paritaire.

Ces deux amendements visent donc à répondre aux enjeux de l’artificialisation des sols dont nous n’avons pas encore débattu. À l’instar du plan Action cœur de ville et du programme Petites villes de demain, ils contribueront peut-être à redynamiser nos centres-bourgs et à y maintenir les commerces plutôt que de favoriser l’essor de la grande distribution en périphérie.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement I-CD78 de Mme Lisa Belluco

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). Les propositions comme celle dont nous venons de discuter visent précisément à encourager les actions comme celles des programmes Petites villes de demain et Villages d’avenir, ainsi qu’à respecter l’objectif du ZAN adopté récemment. Il est regrettable que les dispositions fiscales en vigueur soient contradictoires avec les objectifs que nous nous sommes fixés.

J’en viens à l’amendement I-CD78. Il existe des facilités pour obtenir un prêt finançant l’achat ou la construction de logements neufs : je pense au 1 % logement, à des réductions d’impôts ou encore à des taux de TVA réduits. Ces dispositifs incitent à construire, y compris dans les espaces protégés tels que les parcs naturels nationaux, les espaces boisés, les espaces naturels sensibles et les espaces de continuité écologique. La loi est donc schizophrène : d’un côté, elle nous invite à diviser par deux le rythme de l’artificialisation des sols en l’espace d’une décennie ; de l’autre, elle nous encourage à bétonner des sols jusque dans les espaces les plus précieux pour la préservation de la biodiversité. En juin dernier, le ministre de la transition écologique s’est engagé à mener un travail en vue d’aligner notre cadre fiscal sur l’objectif du ZAN. Dans cette perspective, notre amendement vise à supprimer les subventions aux constructions neuves dans les espaces protégés et les sites inscrits tout en maintenant la possibilité d’aides publiques pour la rénovation et la restauration des bâtiments existants à l’intérieur même de ces espaces. Les constructions sans subventions ne sont pas visées. L’idée n’est pas de supprimer totalement ces niches fiscales mais de montrer symboliquement, trois mois après avoir voté une loi visant à mettre en œuvre le ZAN, que nous ne pouvons plus inciter à construire dans les espaces naturels et protégés.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je comprends votre amendement, mais c’est par les plans locaux d’urbanisme (PLU) et les plans locaux d’urbanisme intercommunaux (PLUI) que l’on combat l’artificialisation des sols. Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Article additionnel après l’article 12 : Exonération de taxe foncière sur les propriétés non bâties des zones humides

Amendement I-CD80 de Mme Lisa Belluco

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). Il s’agit d’instituer une exonération de taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPNB) pour les zones humides, qui sont vitales pour la biodiversité et la recharge des nappes phréatiques.

Plusieurs travaux montrent non seulement qu’il existe une forte incitation fiscale à l’artificialisation, mais aussi que le foncier non artificialisé est largement taxé. Un rééquilibrage est donc nécessaire si nous voulons tenir l’objectif du ZAN fixé dans la loi « climat et résilience ». Auditionnés par notre commission le 3 mai dernier au sujet du plan Eau, les ministres de l’agriculture et de la transition écologique se sont dits favorables à une forte protection des zones humides. Cela passe aussi par une politique fiscale incitative.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. J’ai envie de donner un avis favorable à votre amendement, qui soulève la question de la rémunération des services rendus par la nature. Les milieux humides jouent un rôle incontestable pour la biodiversité et dans la lutte contre le réchauffement climatique. Je crains cependant que le ministère des comptes publics nous objecte que la TFPNB est un impôt sur la propriété. Par ailleurs, le fait d’exonérer ces terrains ne garantira pas qu’aucun investisseur ne voudra jamais les assécher et les bâtir pour en tirer profit. Il vaut donc mieux s’en remettre aux textes relatifs à la protection des milieux naturels et des zones humides.

J’estime néanmoins que cette question mérite d’être débattue en commission des finances et en séance publique. Je donne donc à votre amendement un avis de « sagesse positive » : si l’ensemble de la commission y voit un intérêt politique, elle doit l’adopter.

La commission adopte l’amendement.

Après l’article 12

Amendement I-CD114 de Mme Lisa Belluco

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). Les routes nationales sont explicitement exonérées de TFPNB : c’est une aberration écologique, à laquelle cet amendement entend remédier. En juin dernier, le ministre de la transition écologique s’est engagé à mener un travail en vue d’aligner notre cadre fiscal sur l’objectif du ZAN. Cela passe par la suppression de niches fiscales favorables à l’artificialisation des sols telles que celle-ci. Seules les routes gérées par des collectivités doivent rester exonérées.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Une telle mesure renchérirait le transport par la route ; or beaucoup de nos concitoyens n’ont que l’automobile pour se déplacer. Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, elle rejette l’amendement I-CD110 de Mme Lisa Belluco.

Article additionnel après l’article 12 : Modification du taux d’imposition forfaitaire sur les installations photovoltaïques en milieu naturel

Amendement I-CD163 de M. Stéphane Delautrette

M. Stéphane Delautrette (SOC). Lors de la discussion de la loi relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables (ENR), un consensus s’était établi pour protéger nos terres agricoles. Nous vous proposons donc de restreindre la niche fiscale sur les installations photovoltaïques au sol sur terres agricoles, naturelles et forestières, et de réinstaurer un taux plein d’imposition forfaitaire des entreprises de réseaux. Cela permettrait de prioriser les installations photovoltaïques sur les friches et les surfaces déjà artificialisées ainsi que sur les bâtiments existants, de même que cela redonnerait des moyens aux collectivités pour investir dans la transition énergétique et écologique.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je suis favorable à la fin de cette niche fiscale pour pousser les entreprises à installer leurs panneaux solaires sur des bâtiments existants.

La commission adopte l’amendement.

Après l’article 12

Amendement I-CD162 de Mme Chantal Jourdan

Mme Chantal Jourdan (SOC). Cet amendement vise à lutter contre l’artificialisation des terres agricoles en augmentant la taxe sur la cession à titre onéreux de terrains nus devenus constructibles.

Pour limiter l’artificialisation, l’arsenal juridique dispose d’outils intéressants mais insuffisants : une taxe communale, facultative, et une taxe nationale, dont la Cour des comptes réclame d’ailleurs la remise à plat en ne retenant que l’objectif de lutte contre l’artificialisation. Pour renforcer ce dispositif de taxation et rendre moins attractifs le classement et la vente de terres agricoles en tant que terrains constructibles, il conviendrait de majorer la taxation des plus-values foncières que réalisent les propriétaires fonciers, liées aux changements d’usage ou aux modifications des infrastructures publiques. La taxe sur la cession à titre onéreux des terrains nus ou des droits relatifs à des terrains nus rendus constructibles doit être étendue à toutes les plus-values foncières sur valeur déclarative, comme l’impôt sur la fortune immobilière, que l’administration fiscale pourra vérifier sur les terrains naturels, agricoles et forestiers devenus constructibles. Elle doit être portée à 70 %, conformément à l’avis du Conseil économique, social et environnemental (Cese) rendu en janvier 2023, soit un taux réellement dissuasif mais non confiscatoire selon le Conseil constitutionnel.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. À mes yeux, la protection contre l’artificialisation des sols relève de la planification territoriale. L’élément essentiel du coût du logement est le prix du foncier. Si vous renchérissez celui-ci, celui-là augmente. Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD100 de Mme Lisa Belluco

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). Au mois de juin, le ministre de la transition écologique s’est engagé à travailler à l’alignement de notre cadre fiscal sur l’objectif ZAN. En l’état, sont exonérés de 50 % de la taxe d’aménagement les locaux à usage industriel et leurs annexes, les entrepôts et hangars non ouverts au public faisant l’objet d’une exploitation commerciale et les parcs de stationnement couverts faisant l’objet d'une exploitation commerciale.

Vous construisez, vous détruisez des terres agricoles et vous bénéficiez d’une imposition réduite ! De surcroît, il n’y a pas de conditionnalité quant à la nature des activités industrielles ou artisanales.

France Stratégie propose également de financer la renaturation en ajoutant une composante « artificialisation » à la taxe d’aménagement.

Tant que cette niche fiscale existe, nous faisons l’inverse.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Ce que vous appelez niches fiscales relève en fait de mesures générales de soutien à des activités industrielles ou commerciales. Cela n’a rien à voir avec l’artificialisation des sols. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, elle rejette l’amendement I-CD79 de Mme Lisa Belluco.

Article additionnel après l’article 12 : Taxe foncière sur les ombrières utilisant l’énergie solaire

Amendement I-CD221 de M. Stéphane Delautrette

M. Stéphane Delautrette (SOC). Cet amendement vise à clarifier et à harmoniser l’exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) et de la cotisation foncière des entreprises (CFE) pour les structures porteuses des ombrières utilisant l’énergie solaire photovoltaïque car, d’un service fiscal à l’autre, les interprétations diffèrent.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission adopte l’amendement.

Après l’article 12

Amendement I-CD222 de M. Stéphane Delautrette

M. Stéphane Delautrette (SOC). La loi « ENR » impose l’installation d’ombrières sur les surfaces de parkings extérieurs de plus de 1 500 mètres carrés. Selon les dispositions fiscales en vigueur, ces installations transforment ces parkings extérieurs en parkings couverts, ce qui implique une valeur locative différente, donc, une fiscalité différente. Or, il convient de ne pas pénaliser les gestionnaires de parcs de stationnement.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Demande de retrait ou avis défavorable.

La loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite « climat et résilience », a prévu que les parkings devaient être ombragés soit par des ombrières produisant de l’électricité photovoltaïque, soit par des arbres, avec des efforts de perméabilisation des sols. Plusieurs opérateurs ont choisi de s’équiper d’ombrières photovoltaïques et dès lors, c'est à bon droit que l’administration fiscale considère que ces ombrières forment une protection contre les intempéries.

La commission rejette l’amendement.

Article additionnel après l’article 12 : Exonération de taxes sur les réseaux de chaleur alimentés par des énergies renouvelables ou de récupération

Amendement I-CD70 de Mme Christelle Petex-Levet

M. Vincent Descoeur (LR). Cet amendement vise à permettre aux collectivités territoriales, dans certaines conditions, d’exonérer certains réseaux de chaleur.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il permet en effet aux collectivités territoriales qui le souhaitent d’exonérer les bâtiments et installations affectés à l’exploitation de réseaux de chaleur alimentés à plus de 50 % par des énergies renouvelables ou de récupération, pour une énergie délivrée de moins de 10 gigawattheures. Ces exonérations portent sur la taxe foncière et la cotisation financière des entreprises. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Après l’article 12

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette successivement les amendements I-CD117 de Mme Lisa Belluco et I-CD173 de M. Nicolas Thierry.

Article additionnel après l’article 12 : Exonération de TGAP du gaz produit à partir de combustibles solides de récupération

Amendement I-CD217 de M. Stéphane Delautrette

M. Stéphane Delautrette (SOC). Les combustibles solides de récupération (CSR) destinés à la production de chaleur ou d’électricité sont exonérés de taxe générale sur les activités polluantes (TGAP). Cet amendement vise à étendre le champ de cette exonération dès lors que les CSR sont de plus en plus utilisés, notamment pour la production de gaz renouvelables ou bas-carbone.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Cet amendement, qui a été travaillé avec le Syndicat des énergies renouvelables, favorise la valorisation des déchets pour produire de l’énergie. Avis favorable, mais il conviendra d’évaluer le coût de la mesure.

La commission adopte l’amendement.

Article additionnel après l’article 12 : Exclusion du carburant des navires de croisière du tarif réduit d’accise

Amendement I-CD260 de M. Hendrik Davi

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Cet amendement vise à exclure des produits bénéficiant du tarif réduit d’accise sur les énergies prévues pour la navigation maritime à des fins commerciales, le carburant utilisé par les navires de croisière. Ces navires géants sont responsables de 15 % de la pollution des océans et contribuent à une consommation excessive de fuel et de gazole.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Nous connaissons en effet les incidences des navires de croisière sur l’environnement et le type de tourisme qu’ils génèrent. Ce secteur, par ailleurs, emploie 16 000 personnes.

Un navire de croisière fait du cabotage et peut jeter l’ancre dans un port différent chaque jour. Si le carburant est trop cher en France, il se fournira dans un port étranger et l’État perdra des recettes fiscales. Je suggère donc de mener ce combat sur le plan européen. Demande de retrait, sinon avis défavorable.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Le système capitaliste parviendra toujours à générer des profits à partir de ressources naturelles limitées et de pratiques polluantes. L’argument économique n’est pas recevable.

Les parlementaires que nous sommes devraient adopter une telle mesure pour que nous puissions ensuite agir sur un plan européen et international afin que les autres pays nous rejoignent.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je vous suggère de vous rapprocher de nos collègues de l’Union pour la Méditerranée.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Il me semble qu’un avis de sagesse serait plus conforme à vos propos.

La commission adopte l’amendement.

Après l’article 12

Amendement I-CD167 de M. Bertrand Petit

M. Gérard Leseul (SOC). Cet amendement propose la création d’une taxe sur l’utilisation des navires de croisière sous contrat effectuant des liaisons irrégulières dans nos eaux territoriales en fonction des émissions de dioxyde de carbone. Son tarif est fixé à 100 euros par tonne de CO2.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Cet amendement reprend la disposition de la proposition de loi de M. Mickaël Bouloux visant à établir une taxe sur l’utilisation des navires de croisière. Je ne suis pas hostile à une telle idée, mais elle doit être retravaillée en vue de la séance publique.

Pourquoi affecter la taxe au Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres plutôt qu’à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France afin de renforcer les investissements pour les modes de transport décarbonés ? Pourquoi ne pas affecter cette taxe à un fonds qui financerait la décarbonation du secteur maritime ? Les navires de croisière ne sont pas les seuls responsables des émissions de gaz à effet de serre : les navires de fret le sont également et 90 % du commerce mondial transitent par eux.

Par ailleurs, la référence dans le paragraphe III n'est pas la bonne.

Demande de retrait, sinon avis défavorable.

M. Gérard Leseul (SOC). Je le retire mais à condition que vous indiquiez l’affectation précise de la taxe ! Je retravaillerai ainsi l’ensemble de l’amendement.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je suis certain que vous userez pertinemment de votre liberté d’amendement !

L’amendement est retiré.

Amendement I-CD168 de Mme Chantal Jourdan

Mme Chantal Jourdan (SOC). Cet amendement vise à instaurer une taxe sur l’utilisation des yachts d’une longueur de coque supérieure ou égale à 20 mètres et d’une puissance propulsive nette maximale supérieure ou égale à 750 kilowatts en fonction des émissions de dioxyde de carbone. Son affectation peut être débattue.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Avis défavorable.

L’article L. 423-25 du code des impositions sur les biens et les services dispose d’une taxation des navires de plaisance de 30 à 70 mètres de longueur de coque et tenant compte de la puissance de leurs moteurs. Une taxation supplémentaire risquerait d’affaiblir l’activité d'un secteur qui globalement, crée 8 milliards d’euros de richesse nationale et assure des milliers d’emplois.

Mme Chantal Jourdan (SOC). L’impératif climatique n’est pas négociable.

La commission rejette l’amendement.

Article 13 : Renforcement des incitations fiscales à l’utilisation d’énergie renouvelable dans les transports

Amendements I-CD268 et I-CD270 de M. David Guiraud

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). Nous souhaitons prévenir l’augmentation du taux d’huiles alimentaires usagées dans les carburants, qui est brandie comme un totem. Qui croit encore à l’avion sobre ? Je vous invite à consulter le rapport de 2022 de l’Agence de la transition écologique, qui fait état de trois scénarios. Le plus efficace et le plus sûr pour limiter les conséquences du changement climatique et pour favoriser la transition écologique du secteur aérien consiste à modérer le trafic, ce qui suppose des solutions politiques fortes et non des solutions technologiques ou alternatives, beaucoup moins efficaces.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. La hausse du taux de graisses et d’huiles usagées est de 0,2 % pour les essences et de 0,1 % pour les gazoles. Elle permet notamment d’atteindre le pourcentage cible d’incorporation. Les huiles de palme et à base de soja sont déjà interdites.

Cette hausse, qui permet d’atteindre le pourcentage cible d’incorporation de biocarburants, contribue à accélérer la décarbonation de notre économie.

Les cultures destinées à l’alimentation humaine ou animale ne peuvent déjà pas être prises en compte pour le calcul du pourcentage d’incorporation de biocarburant pour les carburéacteurs, y compris les huiles de palme ou de soja.

Pour les carburéacteurs, le tallol, une résine issue du bois de pin, peut être utilisé avec un plafond de 0,1 %. Les égouts pauvres issus de plantes sucrières et les graisses et huiles usagées peuvent être utilisés sans plafond. Instaurer un plafond à 0 % pour les graisses et huiles usagées pourrait porter atteinte à l’objectif d’incorporation de biocarburant. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement I-CD440 du rapporteur pour avis

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il convient de renforcer l’incitation fiscale en faveur de l’hydrogène bas-carbone dans les transports et de soutenir le développement de cette filière de décarbonation de la mobilité.

Cet amendement vise à permettre le double compte de l’hydrogène bas-carbone, comme cela est le cas pour les matières premières avancées – qui ne sont pas en concurrence avec l’alimentaire –, les graisses et huiles usagées, l’électricité et l’hydrogène renouvelable.

La commission adopte l’amendement.

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 13 modifié.

Après l’article 13

Amendement I-CD269 de Mme Charlotte Leduc

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). Il convient de mettre fin progressivement aux biocarburants de première génération, qui sont nocifs. Nous ne pouvons pas nous limiter à un plafonnement à 7 % dans le mix énergétique. Nous proposons de fixer une réduction intermédiaire de l’objectif d’incorporation à 3,5 % en 2025 et une exclusion complète en 2030.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Le seuil de 7 % permet d’atteindre les objectifs d’incorporation de biocarburant dans les transports. Son abaissement supposerait une compensation par l’augmentation d'autres plafonds d’utilisation de matières premières ou de disposer d’une quantité suffisante de matières premières avancées. La proposition du Gouvernement est équilibrée. Avis défavorable.

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). Nous devons favoriser le développement d’autres modes énergétiques. Si nous ne fixons pas d’objectifs, nous n’y arriverons jamais.

La commission rejette l’amendement.

Article additionnel après l’article 13 : Instaurer une taxe incitative relative à la réduction de l’intensité d’émission de gaz à effet de serre dans les transports

Amendement I-CD441 du rapporteur pour avis

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à instaurer une taxe incitative relative à la réduction de l’intensité d’émission de gaz à effet de serre dans les transports à partir du 1er janvier 2025. Elle permettra de promouvoir l’utilisation d’énergies renouvelables moins émettrices de gaz à effet de serre, notamment, du biogaz renouvelable. Elle est incitative et a le même fonctionnement que la taxe incitative relative à l’utilisation d’énergies renouvelables dans les transports – Tiruert. Elle ne repose pas sur l’utilisation du carburant, mais sur les émissions liées à ces carburants.

Elle est due par les personnes qui mettent à la consommation les essences et gazoles. Celles-ci devront s’acquitter d’un montant égal au total des émissions résultant de l’utilisation des carburants multiplié par le tarif de 100 euros par tonne de CO2 non évitée, minoré par la proportion de réduction d’intensité d’émission de gaz à effet de serre. Si la proportion de réduction des émissions est supérieure au pourcentage national cible, alors la taxe est nulle.

Je propose de fixer le pourcentage national cible de réduction de l’intensité d’émissions de gaz à effet de serre à 5 % en 2025.

Cet amendement a été travaillé en collaboration avec France Gaz et le ministère de la transition énergétique.

La commission adopte l’amendement.

Article 14 : Renforcement du caractère incitatif à la transition énergétique de la fiscalité applicable aux véhicules

Amendement de suppression I-CD386 de M. Antoine Villedieu

Mme Annick Cousin (RN). Dans un contexte où les prix de l’essence, de l’énergie, des produits alimentaires, de l’immobilier sont à leurs plus hauts niveaux et où l’inflation est galopante, il n'est pas envisageable d’instaurer de nouveaux malus idéologiques pour punir une classe moyenne étrillée, qui n’a pas d’autre choix que d’utiliser la voiture pour vivre et travailler et pour laquelle la voiture électrique est au mieux inappropriée, au pire, inabordable.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Cet article vise à favoriser le verdissement du parc automobile des particuliers et des entreprises et à atteindre les objectifs nationaux et européens de décarbonation. En outre, les enjeux de santé publique sont réels. Votre amendement va à l’encontre de la trajectoire politique de verdissement progressif qui a été décidée majoritairement depuis la loi d’orientation des mobilités de 2019. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement I-CD91 de M. Pierre Meurin.

Amendement I-CD81 de M. Pierre Meurin

M. Pierre Meurin (RN). Je comprends le caractère progressif du verdissement du parc automobile mais, sauf erreur de ma part, les malus écologiques vont tripler dans un certain nombre de cas. Les voitures neuves, qui coûtent déjà cher, sont néanmoins plus vertueuses en termes écologiques. Une telle augmentation me semble donc inappropriée. Cet amendement vise à défendre le pouvoir d’achat des Français.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. La révision du malus CO2 à l’immatriculation permet de renforcer l’incitation à l’achat de véhicules moins polluants et d’atteindre les objectifs nationaux. Le maintien du barème actuel de malus est donc contraire à la politique de la majorité visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre.

La question des personnes en situation de handicap, évoquée dans l’exposé sommaire de votre amendement, est en effet importante. Les véhicules accessibles en fauteuil roulant sont exonérés du malus CO2 à l’immatriculation, conformément à l’article L. 421-65 du code des impositions sur les biens et les services, du malus masse, de la taxe CO2 annuelle et de la taxe sur l’ancienneté.

Avis défavorable.

M. Pierre Meurin (RN). Les ruptures sociétales ne dépendent pas de tableaux excel dans un projet de loi de finances. Les conséquences de cette disposition seront très lourdes pour de nombreuses familles et grèveront leur pouvoir d’achat. Des PME qui ont besoin d’acheter des véhicules seront également touchées.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD394 de M. Vincent Thiébaut, amendements identiques I-CD413 de M. Vincent Thiébaut et I-CD424 de M. Pierre Vatin, amendements I-CD82 et I-CD83 de M. Pierre Meurin et amendement I-CD232 de M. Damien Adam (discussion commune)

M. Vincent Thiébaut (HOR). Le projet de loi de finances prévoit d’abaisser le seuil de déclenchement du malus automobile à 118 grammes de CO2 émis par kilomètre dès 2024 et de rehausser le tarif par gramme.

Lors de la dernière augmentation de malus CO2, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2021, une trajectoire pluriannuelle permettait à l’ensemble des acteurs d’avoir une meilleure visibilité et de mieux se préparer.

Un lissage dans le temps s’impose. L’amendement I-CD394 vise à diminuer le seuil de déclenchement du malus CO2 sur les véhicules de 5 grammes CO2/km contre 3 grammes dans le PLF. L’amendement I-CD413 propose de maintenir l’objectif de 3 grammes pour 2024, mais dans le cadre d’un lissage pluriannuel.

M. Damien Adam (RE). Mon amendement vise à réduire le seuil de déclenchement du malus CO2 sur les véhicules de 5 grammes de CO2/km chaque année jusqu’à la fin du quinquennat.

La trajectoire pluriannuelle que nous avions engagée a permis de donner de la visibilité aux constructeurs automobiles mais aussi aux particuliers et aux entreprises. Je rappelle que 50 % des véhicules neufs sont acquis par ces dernières. Le malus ne touche pas principalement les ménages et la classe moyenne.

Les citoyens doivent être encouragés à utiliser les véhicules les plus propres. L’année prochaine, le renforcement du bonus écologique sur les véhicules électriques pour les ménages les plus modestes et le leasing social permettront d’aller en ce sens.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Les trajectoires et les seuils du barème du CO2 à l'immatriculation sont revus régulièrement. Ainsi la trajectoire pour les prochaines années sera-t-elle peut-être modifiée lors de prochaines lois de finances.

À ce stade, il est difficile d’avoir une visibilité précise sur ce malus pour les années 2025-2026. De surcroît, nous avons l’ambition de mettre un terme à l’utilisation de ce que j’appelle les véhicules à énergie fossile d’ici à 2040.

Contrairement à ce qui a été dit, l’amendement I-CD413 ne maintient pas le barème prévu par le PLF, puisqu’il propose un seuil moins ambitieux.

Avis défavorables.

La commission rejette successivement les amendements.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette successivement les amendements I-CD84 et I-CD85 de M. Pierre Meurin.

Amendements I-CD315 de M. Charles Fournier, I-CD273 de Mme Alma Dufour et ICD145 de M. Gérard Leseul (discussion commune)

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). Clément Beaune, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports, a récemment exprimé sa volonté de prendre des mesures pour réduire le poids des véhicules dans un souci écologique. L’enjeu est de taille, puisque les émissions du secteur des transports ont fléchi de 1,5 % début 2023.

Cet amendement vise à ajuster le barème de la taxe sur la masse en ordre de marche – malus poids – afin de le conformer à l’objectif poursuivi de diminution du poids moyen des modèles commercialisés. Les ventes de SUV explosent. Entre 2010 et 2022, les parts de marché sont passées de 12 % à 44 % des ventes de voitures neuves. Les SUV consomment environ 20 % de plus de carburant et émettent donc plus de CO2. Nous devons stopper cette « SUVification », alors que la France est engagée dans la course à l’électrification du marché automobile pour atteindre ses objectifs climatiques. Or, le malus poids s’impose uniquement aux véhicules de plus de 1,8 tonne, soit 2,2 % des SUV commercialisés. Ce mécanisme, qui va dans le bon sens, reste très peu incitatif et touche moins de 10 % des ventes. Nous proposons donc de réajuster les paramètres du malus poids autour d’un seuil de 1 300 kilos et d’un barème plus progressif dans les tranches basses et plus agressif dans les tranches hautes. Selon le chiffrage du World Wide Fund for Nature – WWF – ce nouveau barème génèrera pour l’État près de 2 milliards d’euros de recettes fiscales au titre de 2024.

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). Mon amendement a le même objectif, d’ailleurs soutenu par la Convention citoyenne pour le climat.

M. Gérard Leseul (SOC). Il convient en effet d’augmenter le malus poids dans un triple objectif : la baisse des émissions de CO2, la justice fiscale et le financement de la transition écologique. Le seuil que nous proposons, de 1,3 tonne, est au-dessus du poids d’une Clio ou d’une Mégane. Il n’est pas question de pénaliser la classe moyenne mais de lutter contre la « SUVification » de la flotte automobile. J’ajoute que 50 % des véhicules neufs sont en effet achetés par les entreprises et que nous devons également faire en sorte que celles-ci participent à la réduction d’ensemble des émissions.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Le PLF répond au souhait du ministre délégué d’abaisser le seuil du déclenchement de masse en le portant de 1 800 à 1 600 kilos.

Le malus masse est plafonné par la différence entre le montant maximal d’un barème du malus CO2 à l'immatriculation et le montant du malus CO2 à l’immatriculation. Ainsi, avec les nouveaux barèmes pour 2024 portés à 60 000 euros, la somme malus masse + malus CO2 à l’immatriculation sera inférieure ou égale à 60 000 euros mais ne pourra pas la dépasser. Le PLF est équilibré en permettant de lutter contre l’augmentation actuelle du poids des véhicules neufs tout en maîtrisant les conséquences financières sur les ménages.

S’agissant de l’amendement I-CD273, le point 3° semble faire référence à l’article 1012 ter du code général des impôts, abrogé par l’ordonnance n° 2021-1843 du 22 décembre 2021 et qui n’est donc pas applicable. Le V du point 3° semble être une erreur, n’étant pas cohérent avec la numérotation des différents textes.

Avis défavorables.

M. Gérard Leseul (SOC). L’équilibre que vous soulignez est très peu ambitieux. Le pourcentage de véhicules concernés par l’abaissement du seuil de 1,8 à 1,6 tonne passera de 2 % à 8 % ou 9 %. Nous ne proposons pas de pénaliser les Français mais de les inciter fortement à acheter des véhicules moins lourds, donc, à réduire l’ensemble des émissions. Je serais prêt à concéder un abaissement à 1,4 tonne si M. le rapporteur pour avis faisait un effort !

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). Plus de 40 % des ventes concernent les SUV. Il y a urgence à agir.

La commission rejette successivement les amendements.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette successivement les amendements I-CD86, I-CD87 et I-CD88 de M. Pierre Meurin.

Amendement I-CD330 de M. Emmanuel Blairy

M. Emmanuel Blairy (RN). Le Gouvernement est persuadé que les véhicules électriques et à hydrogène sont la solution pour sauver la planète. Il y va à marche forcée. Peu importe ceux qui ont un avis contraire ou qui n’ont pas les moyens de remplacer leur véhicule thermique par des véhicules électriques ou à hydrogène : ils seront frappés au portefeuille. Nous sommes dans une dictature de la pensée, dans laquelle il y a ceux qui savent, et les autres.

La transition écologique et la préservation de la qualité de notre environnement sont essentielles et méritent mieux que l’instauration de taxes. Le petit patron qui remplace une Golf de 2004 Crit’Air 2, sur laquelle il payait une taxe de 400 euros, par une Renault Mégane de 2023 Crit’Air 2, sur laquelle il paie une taxe de 40 euros, sera soumis en 2024 à cette nouvelle taxe de 500 euros.

Initialement créée pour renouveler le parc de véhicules polluants, la taxe se transforme en taxe sur les véhicules thermiques. Vous modifiez ainsi sa base afin de vous assurer du maintien de la recette fiscale. Doit-on s’attendre à une nouvelle accise fondée sur la puissance des véhicules électriques ?

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Nous n’avons pas engagé une marche forcée mais une marche progressive, que Mme Pochon considère d’ailleurs trop lente.

Le remplacement de la taxe sur l’ancienneté par la taxe sur les polluants atmosphériques contribue au verdissement du parc automobile des entreprises.

Pour l’accompagnement de la transformation de la flotte des véhicules face à l’incitation fiscale, des aides sont proposées par le Gouvernement : bonus écologique et prime à la conversion notamment. Il existe des barèmes spécifiques pour les entreprises et les personnes morales.

Le maintien de la taxe sur l’ancienneté est donc contraire à la politique de la majorité visant à réduire progressivement les émissions de gaz à effet de serre. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement I-CD89 de M. Pierre Meurin.

Amendement I-CD442 du rapporteur pour avis

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Cet amendement corrige une erreur. Les véhicules concernés par la catégorie 1 sont les véhicules à essence respectant les normes Euro 5 et 6. Les termes « moteur thermique à allumage commandé » visant les moteurs à essence, il faut supprimer la négation prévue à l’alinéa 96.

La commission adopte l’amendement.

Amendement I-CD90 de M. Pierre Meurin

M. Pierre Meurin (RN). Cet amendement vise à interpeller le Gouvernement sur le recours à l’appellation des « normes antipollution Euro 5 ou 6 » alors même que dans les politiques de zone à faibles émissions mobilité, ce sont les normes Crit’Air qui sont utilisées. Cela s’apparente à une usine à gaz. Pourquoi ne pas attendre la norme Euro 7 ? Les suspensions et les pneus produisent 70 % des particules fines, ce qui invalide le système Crit’Air.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Avis défavorable à un amendement qui remettrait en cause les objectifs que nous nous sommes fixés.

L’amendement est retiré.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement de repli I-CD331 de M. Emmanuel Blairy.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 14 modifié.

Après l’article 14

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement I-CD261 de Mme Alma Dufour.

Amendement I-CD115 de Mme Lisa Belluco

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). Les émissions de gaz à effet de serre dus aux déplacements en voiture individuelle représentent plus de la moitié des émissions liées au transport et 16 % des émissions totales de notre pays. Ainsi, 70 % des 23 millions de salariés habitant et travaillant en France utilisent leur voiture entre leur domicile et leur travail. Les véhicules les plus lourds sont les plus consommateurs de carburant et, partant, les plus émetteurs. Nous proposons de les rendre moins attractifs pour en réduire le nombre.

Réduire la masse des véhicules est également l’une des priorités pour de nombreuses associations environnementales. C’est aussi une mesure de justice sociale, puisque ce sont souvent les véhicules les plus chers qui sont aussi les plus volumineux et les plus lourds. Près de la moitié des véhicules vendus actuellement sont des SUV. L’amendement vise à moduler le remboursement des frais de déplacement déductibles de l’impôt sur le revenu en fonction des émissions de CO2 et du poids du véhicule.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Actuellement, ce remboursement dépend de la puissance administrative du véhicule, jusqu’à sept chevaux, du type de motorisation et de la distance parcourue. Les conditions sur la puissance administrative et le type de motorisation seraient supprimées. Cela s’appliquerait par ailleurs uniquement dans le cas où le bénéficiaire opte pour le régime des frais réels.

Je ne suis pas favorable à la suppression des conditionnalités liées à la puissance administrative et au type de motorisation du véhicule. Je m’interroge également sur les conséquences financières pour ceux qui choisissent le régime des frais réels. Les personnes ayant acheté un véhicule n’auront pas forcément les moyens de le renouveler, et cela peut porter atteinte à leur pouvoir d’achat, créant une mesure injuste socialement. Cette mesure pénaliserait le milieu rural notamment, aussi bien dans la Drôme que dans mon Aveyron natal. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CD116 de Mme Lisa Belluco

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). Dans la Drôme, monsieur le rapporteur pour avis, on a de petites voitures pour rouler en montagne.

Nous proposons de moduler le tarif de la taxe spéciale sur les contrats d’assurance, en fonction des émissions de CO2 et du poids du véhicule. Cet amendement cible prioritairement les SUV qui sont particulièrement inadaptés au milieu urbain. Ils représentent autour de 40 % des véhicules vendus. Depuis dix ans, nos voitures prennent tous les deux ans un centimètre et 10 kilos par an. En cinquante ans, elles ont pris 500 kilos. Un SUV consomme environ 15 % de plus qu’une voiture classique. Il apparaît évident que la progression des ventes de SUV est incompatible avec la réalisation de nos objectifs climatiques à l’horizon 2030. Les SUV sont aussi plus chers à l’achat et à l’entretien. Le surcoût pour les ménages est d’environ 408 euros par an. Mauvais pour le climat et pour le pouvoir d’achat, le nombre de SUV doit diminuer. En outre, en réduisant le barème de 30 kilos par an, l’amendement permet à l’industrie automobile de planifier une réduction progressive de la masse des véhicules.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je comprends tout à fait l’esprit de votre amendement. Cependant, le poids proposé n’est pas cohérent avec les valeurs du malus masse pour les véhicules dans le projet de loi de finances, d’autant que vous proposez de diminuer chaque année les masses de 30 kilogrammes. Par ailleurs, existe le risque d’un maintien des prix des contrats d’assurance par les assureurs, ce qui réduirait les recettes de l’État, sans incitation pour le bénéficiaire du contrat d’assurance. Demande de retrait, afin que cet amendement puisse être réétudié, notamment grâce à une étude d’impact ; sinon avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Article additionnel après l’article 14 : Tarif réduit de l’accise sur l’électricité en cas de valorisation par les industriels de la chaleur fatale vers un réseau de chaleur ou de froid

Amendements identiques I-CD69 de Mme Christelle Petex-Levet et I-CD239 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert

M. Vincent Descoeur (LR). L’amendement vise à encourager fiscalement les industriels qui valorisent la chaleur fatale produite par leur activité en la fournissant à un réseau de chaleur ou de froid.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Inciter les industriels à valoriser la chaleur fatale répond à un objectif de décarbonation, selon le principe de Lavoisier. Avis favorable.

La commission adopte les amendements.

Article 15 : Taxe sur l’exploitation des infrastructures de transport de longue distance

Amendements I-CD111, I-CD112 et I-CD113 de M. Pierre Meurin (discussion commune)

M. Pierre Meurin (RN). Notre groupe n’a pas encore arrêté sa position de vote sur l’article 15 mais les récentes déclarations des sociétés autoroutières, selon lesquelles la nouvelle taxe va faire augmenter le prix des péages, nous ont inquiétés. Nous croyons assez peu le Gouvernement, qui prétend qu’il n’y aura pas de répercussions sur le prix des péages. Au bout du compte, ce sont les automobilistes qui risquent de trinquer. Nous devons nous saisir de la question de la rentabilité des superprofiteurs, en l’occurrence des sociétés concessionnaires d’autoroutes. Ce sont des amendements d’appel symboliques. L’idée de plafonner à 6 % la rentabilité des sociétés d’autoroutes devrait trouver un écho à gauche.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L’amendement I-CD111 réduit le rendement de la taxe. Par ailleurs, il est mal rédigé, puisqu’il en supprime l’assiette. Même avis pour le I-CD112. S’agissant de l’amendement I-CD113, il n’y a pas de risque d’augmentation des péages, dans la mesure où la taxe a un caractère général et qu’en application des contrats de concession, seule la fiscalité spécifique aux sociétés autoroutières leur permet de les augmenter. Avis défavorable.

M. David Valence (RE). C’est un sujet qu’il faut aborder sans excès – souvenons‑nous des termes employés par le Rassemblement national lors de l’audition des sociétés autoroutières. L’amendement témoigne d’une méconnaissance du mécanisme concessif, selon lequel il est normal d’avoir un niveau de rentabilité croissant, ainsi que des dispositions sur la fixation des prix des péages qui se font en concertation avec l’État. Enfin, il est absurde, puisque définir un niveau de rentabilité maximal empêcherait les sociétés concessionnaires d’optimiser leur fonctionnement.

La commission rejette successivement les amendements.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette successivement les amendements I-CD131 et I-CD93 de M. Pierre Meurin et I-CD143 de M. Jean-Philippe Tanguy.

Amendement I-CD305 de Mme Christine Arrighi

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). Depuis des années, les sociétés concessionnaires d’autoroutes accumulent les profits records. En 2021, selon l’Autorité de régulation des transports (ART), le bénéfice net des sociétés autoroutières frôlait les 4 milliards d’euros, un résultat s’expliquant notamment par le cadeau fiscal du Gouvernement, qui a fait baisser l’impôt sur les sociétés (IS). Ce sont 3,3 milliards d’euros de dividendes qui ont été versés aux actionnaires en 2021. D’après l’ART, la baisse de l’impôt sur les sociétés fera gagner à ces sociétés près de 8 milliards d’euros sur la durée des concessions. L’Inspection générale des finances pointe également, dans son dernier rapport, cette surrentabilité et révèle que les deux principaux opérateurs, Vinci et Eiffage, pourraient réaliser 55 milliards d’euros de profits d’ici au terme des concessions dont ils sont titulaires. Cet argent doit être rendu aux Français. L’amendement vise à garantir que les sociétés ne répercutent pas le coût de la taxe sur les usagers.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Votre amendement est satisfait par le droit. La modification des tarifs de péage en raison d’un changement de fiscalité ne vaut que pour la fiscalité spécifique aux autoroutes, puisque, en tel cas, les contrats de concession contiennent une clause de révision des tarifs. Ce n’est pas le cas pour cette taxe à portée générale. En audition, les sociétés concessionnaires nous ont dit qu’elles useraient de toutes les voies de recours, ce qui signifie qu’elles contesteront le caractère général de la taxe. Ce sera sans doute au juge constitutionnel de trancher mais, en l’état du projet de loi, votre amendement n’a pas d’utilité.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette successivement l’amendement ICD300 de Mme Alexandra Masson et les amendements I-CD138, I-CD139, I-CD207, ICD142 et I-CD140 de M. Jean-Philippe Tanguy.

Amendement I-CD276 de M. Éric Coquerel, amendements identiques I-CD194 de M. Kévin Mauvieux, I-CD277 de M. Éric Coquerel et I-CD324 de Mme Christine Arrighi, amendements I-CD195 de M. Kévin Mauvieux, I-CD278 de M. Éric Coquerel, I-CD193 de M. Kévin Mauvieux et I-CD279 de M. Éric Coquerel (discussion commune)

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Je défends tous les amendements de M. Coquerel, le premier étant un amendement de principe, les suivants de repli. Nous voulons augmenter le taux de la nouvelle taxe sur l’exploitation des infrastructures de transport de longue distance. Nous pensons que la privatisation de certaines des infrastructures de transport de longue distance, en particulier des autoroutes, a été une très mauvaise affaire pour l’État. Selon la Cour des comptes, l’État a touché moins de 17 milliards d’euros lors de la vente des autoroutes, alors que leur prix était estimé à 27 milliards. L’exploitation de ces infrastructures est également extrêmement rentable pour les entreprises privées puisqu’en 2021, les profits des sociétés exploitantes ont augmenté de 47 % en moyenne.

Les entreprises en question menacent toujours les utilisateurs des péages d’augmenter leurs tarifs, alors que les profits ne sont pas nécessaires pour investir dans le développement des réseaux. Un rapport de l’Inspection générale des finances rédigé en 2021 a montré qu’il était possible de réduire de moitié le prix des péages sans mettre en danger la stabilité financière des sociétés. Il est donc tout à fait envisageable de taxer plus fortement ces profits sans que le prix des péages ne doive augmenter. C’est pourquoi nous proposons de porter le taux de cette taxe à 15 % dans le premier amendement, puis à 10 %, 7 % et 5 % dans les suivants.

Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES). En France, prendre le train coûte en moyenne 2,6 fois plus cher que l’avion. Pour certains trajets, le fossé se creuse encore davantage : un Barcelone-Londres coûte jusqu’à trente fois plus cher par le réseau ferroviaire. Alors que les effets du train sur le climat sont jusqu’à cent fois moins importants que ceux de l’avion, notre système fiscal encourage toujours à utiliser l’avion plutôt que le train et le Gouvernement refuse de s’attaquer à cette question. Il y est contraint par de tout petits pas, notamment cette taxe que nous soutenons volontiers, même si elle n’est pas de nature à changer les choses, tant que la niche fiscale sur le kérosène, qui représente un gain cinquante fois plus important pour le secteur, existera. Si l’avion coûte aujourd’hui 50 et le train 100 et que demain, l’avion coûte 51 et le train 100, cela ne changera rien. Ce qu’il faut, c’est que le train coûte 75 et l’avion 100. C’est pourquoi les écologistes soutiendront la suppression de la niche fiscale pour le kérosène. Notre amendement vise à renforcer le taux de la taxe envisagée pour qu’elle ne soit pas que cosmétique.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Le taux de 4,6 % vise des recettes de 600 millions d’euros au profit du ferroviaire. Vous proposez de doubler ou tripler ce taux, voire de le modifier très légèrement, à 5 %, ce qui signifie en fin de compte que vous êtes d’accord avec la proposition.

La taxe entraîne des crispations pour les acteurs concernés, notamment les sociétés d’autoroutes. Il faut qu’elles aient le temps de s’y adapter.

Surtout, ces entreprises doivent réaliser des investissements pour la transition écologique – bornes pour les véhicules électriques, stations de ravitaillement en hydrogène. Les aéroports doivent aussi mener la transition énergétique de leurs matériels au sol : leur personnel respire un air très dégradé, en raison des émissions de CO2 et des polluants de proximité. Une taxe trop élevée pourrait réduire leurs capacités d’investissement pour la transition énergétique. Il importe d’évaluer ses effets lors de la première année.

C’est pourquoi je donne un avis défavorable à l’ensemble des amendements.

M. David Valence (RE). Le niveau de la taxation est susceptible de créer une forte insécurité juridique. Le Conseil constitutionnel pourrait estimer qu’une taxe abrupte, de 15 % par exemple, dénature l’équilibre financier des contrats, en particulier en fin de concession.

Le produit fiscal dégagé sera affecté entièrement à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France), principalement pour des projets ferroviaires et fluviaux. On a suffisamment entendu ici que le produit de certaines taxes, notamment la TICPE, n’était pas fléché vers la décarbonation des transports pour s’en féliciter.

Enfin, parmi les sociétés concessionnaires d’autoroutes, il reste deux sociétés d’économie mixte publiques – Autoroutes et tunnel du Mont-Blanc et Société française du tunnel routier du Fréjus : ce sont elles qui ont le taux de rentabilité le plus élevé.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Monsieur le rapporteur pour avis, vous ne pouvez pas dire que la taxe menace la capacité à investir des sociétés d’autoroutes. Leurs profits continueront d’augmenter : les prévisions sont optimistes jusqu’à la fin des contrats de concession, en 2036. Selon l’ART, l’Autorité de régulation des transports, elles toucheront des profits de 30 à 35 milliards d’euros, supérieurs à ceux escomptés. Elles auront donc de quoi investir.

Un des problèmes est que ces sociétés peuvent investir à l’étranger. Vinci a par exemple utilisé ses profits exceptionnels de 2022 pour acquérir 1,1 milliard de dollars d’actifs du groupe brésilien Petrobras et prendre des parts dans onze concessions de champs de pétrole et de gaz.

Je n’ai rien contre le fait que la taxe soit affectée. Au contraire, c’est pour cela que nous proposons de l’augmenter.

Quant à l’amendement I-CD279, il permet d’éviter le choc fiscal et le risque que la mesure soit retoquée par le Conseil constitutionnel : en acceptant d’augmenter la taxe de 4,6 % à 5 %, vous pourriez montrer votre compréhension des enjeux climatiques et des enjeux relatifs au partage des richesses pour mener à bien la transition écologique. Au lieu de ces incantations perpétuelles, il faut montrer qu’en tant que législateur, nous pouvons agir sur la situation.

La commission rejette successivement l’amendement I-CD276, les amendements identiques I-CD194, I-CD277 et I-CD324 ainsi que les amendements I-CD195, I-CD278, ICD193 et I-CD279.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, elle rejette successivement les amendements I-CD141 et I-CD144 de M. Jean-Philippe Tanguy.

Amendements I-CD281 de M. Gabriel Amard et I-CD280 de Mme Clémence Guetté (discussion commune)

M. Gabriel Amard (LFI-NUPES). Les péages ont été augmentés au 1er février dernier. Or nous entendons que les sociétés menacent de répercuter la taxe sur l’exploitation des infrastructures de transport sur les usagers des autoroutes. Vous nous renvoyez à un hypothétique dénouement, peut-être après un recours ou un contentieux. Face à ce message politique, nous devons montrer que nous ne nous laisserons pas faire. Par l’amendement I-CD281, nous proposons une taxe additionnelle, pour montrer qu’il n’est pas envisageable de répercuter sur les usagers cette taxe de portée générale.

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). L’amendement I-CD280 vise à graver dans le marbre de la loi que le montant de la taxe ne pourra être ni reporté, ni couvert par le péage. Vous avez dit que cela ne pose pas de problème, mais il est bon de l’écrire.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L’amendement I-CD280 est satisfait et l’amendement I-CD281 aussi, pour partie. Nous l’avons déjà évoqué, la modification des tarifs de péage en raison de changements de fiscalité ne vaut que pour la fiscalité spécifique aux autoroutes. C’est le droit. Dans les faits, les contrats de concession contiennent une clause de révision des tarifs. La taxe, qui n’est pas spécifique aux autoroutes, n’entre pas dans son champ d’application car elle est de portée générale. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

La seconde partie de l’amendement I-CD281 porte sur la contribution additionnelle sur les bénéfices exceptionnels des grandes entreprises, une question de fiscalité générale dont la commission des finances pourra débattre.

Je vous propose donc de retirer ces deux amendements. À défaut, j’y serai défavorable.

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). Dès lors que les sociétés exploitant les autoroutes ont menacé de répercuter cette nouvelle taxe, pourquoi ne pas le préciser ? Les choses seraient alors claires.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. D’un point de vue légistique, on ne peut pas répéter une disposition de la loi.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement I-CD37 de M. Vincent Descoeur

M. Vincent Descoeur (LR). Le présent amendement, rédigé avec l’Assemblée des départements de France, a pour objet de rediriger une partie de la taxe vers les départements. Ceux-ci assurent la gestion et l’exploitation de 380 000 kilomètres de routes, représentant près de 90 % de la mobilité des personnes et des biens.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je comprends l’intérêt de votre amendement, mais notre choix politique est de développer le rail ou le fluvial, des modes de transport décarbonés. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

M. Vincent Descoeur (LR). Nous pouvons nous rejoindre sur cette analyse : dans le Cantal, le rail fonctionne essentiellement au diesel. Et quand on voit l’état de la nationale, on se dit que l’on peut investir dans les routes.

La commission rejette l’amendement.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 15 non modifié.

Après l’article 15

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette successivement l’amendement I-CD40 ainsi que les amendements I-CD38 et I-CD39 de M. Vincent Descoeur, en discussion commune.

Article additionnel après l’article 15 : Instauration d’une taxe sur les émissions des avions privés

Amendement I-CD169 de Mme Chantal Jourdan

Mme Chantal Jourdan (SOC). Cet amendement instaure une taxe sur les jets privés, en fonction des émissions de dioxyde de carbone. Fixée à 100 euros par tonne de CO2 émise, elle sera destinée à l’Ademe, à Afit France et à l’Ifpen (IFP Énergies nouvelles).

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Nous avions évoqué cet amendement à l’article 12 avec l’amendement de M. Bayou. Avis favorable, il sera intéressant d’évaluer les effets du dispositif et ses conséquences sur le trafic.

La commission adopte l’amendement.

Après l’article 15

Amendement I-CD147 de Mme Chantal Jourdan

Mme Chantal Jourdan (SOC). Le présent amendement, issu d’une proposition de la Convention citoyenne pour le climat, vise à fixer des niveaux de taxe sur les billets d’avion plus cohérents avec l’engagement pris par la France de réduire ses émissions de gaz à effet de serre dans le cadre des accords de Paris. Le montant de la contribution, perçue en fonction de la destination finale du passager, est fixé à 30 euros pour chaque passager embarqué pour une destination à moins de 2 200 kilomètres et à 60 euros, au-delà. Ces tarifs sont portés, respectivement, à 180 et 400 euros pour un vol national européen et un vol international lorsque le passager est en classe affaires ; ainsi qu’à 360 et 1 200 euros, lorsqu’il a recours à un avion dit d’aviation d’affaires, tels que les jets privés.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Avis défavorable, pour des raisons techniques. Le tarif de l’aviation civile mentionné par l’amendement, sur lequel vous basez une nouvelle taxe additionnelle, est indexé sur l’inflation. Son produit peut donc augmenter. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendements I-CD159 et I-CD160 de M. Gérard Leseul (discussion commune)

M. Gérard Leseul (SOC). L’amendement I-CD159 vise à relever le barème du tarif de solidarité pour compenser les exonérations fiscales dont bénéficie le secteur aérien – TVA à 0 % sur les vols européens et internationaux et 10 % sur les vols domestiques ; exonération de la TICPE sur le kérosène, etc. Ces exonérations conduisent à des manques à gagner considérables. Il s’agit à la fois de régler un problème budgétaire et de justice fiscale et d’aller vers une décarbonation du secteur aérien.

L’amendement de repli I-CD160 a pour objet d’aligner le tarif de solidarité sur la taxe sur les billets du Royaume-Uni.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Alors que l’article 15 augmente déjà les prélèvements sur l’aviation civile, vous proposez de majorer de vingt fois la limite supérieure du tarif de solidarité. Ce serait un choc fiscal sans précédent pour les compagnies aériennes. Avis défavorable sur les deux amendements.

Je regrette que le groupe Socialistes et apparentés n’ait pas manifesté la même volonté lorsqu’il était majoritaire dans notre assemblée.

M. Gérard Leseul (SOC). Je partage le regret du rapporteur pour avis. J’aurais souhaité qu’il prenne de telles initiatives à l’époque.

L’amendement de repli vise simplement à aligner le tarif de solidarité sur la taxe sur les billets d’avion britannique.

La commission rejette successivement les amendements.

Article additionnel après l’article 15 : Assujettissement de l’aviation d’affaires au tarif de solidarité

Amendements I-CD158 de M. Gérard Leseul et I-CD231 de M. Damien Adam (discussion commune)

M. Gérard Leseul (SOC). L’amendement a pour objet d’harmoniser le régime fiscal de l’aviation d’affaires commerciale et celui de l’aviation d’affaires non commerciale, laquelle est assujettie à la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE).

M. Damien Adam (RE). Il s’agit d’un amendement presque identique. Dans le dernier PLF, la TICPE avait été augmentée pour l’aviation d’affaires non commerciale pour parvenir à un prix du carburant identique à celui payé par l’automobiliste à la pompe. L’amendement a pour but cette fois d’assujettir l’aviation d’affaires commerciale à la TICPE afin d’harmoniser la fiscalité applicable à ce secteur.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. En dépit de certaines réserves, je m’en remets à la sagesse de la commission sur ces amendements intéressants.

La commission adopte l’amendement I-CD158.

En conséquence, l’amendement I-CD231 tombe.

Après l’article 15

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement I-CD177 de M. Matthieu Marchio.

Amendements I-CD148 de M. Stéphane Delautrette, I-CD164 de Mme Chantal Jourdan et I-CD149 de M. Stéphane Delautrette (discussion commune)

M. Stéphane Delautrette (SOC). Mon amendement vise à accélérer le déploiement de la tarification incitative en matière de déchets sur l’ensemble du territoire. Celle-ci concourt à la réduction des déchets et, par la même occasion, à la baisse des émissions de gaz à effet de serre en favorisant le tri.

Nul besoin de rappeler le retard que nous avons pris pour atteindre les objectifs que la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (AGEC) avait assignés – vous ne manquerez pas, Monsieur le rapporteur pour avis, de faire valoir la prochaine mission d’évaluation de l’impact de ladite loi.

La tarification incitative est un levier efficace pour améliorer le taux de collecte des produits recyclables. Le rapport de la Cour des comptes « Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers : une ambition à concrétiser », publié le 27 septembre 2022, le confirme – elle permet de « réduire de 41 % la quantité d’ordures ménagères résiduelles, d’augmenter à due concurrence la collecte des recyclables et de réduire de 8 % les déchets ménagers et assimilés » – et encourage son développement.

L’amendement vise à autoriser la différenciation territoriale, sans laquelle plusieurs démarches engagées – à Grenoble, Bordeaux, Montpellier, Versailles, Caen – pourraient ne pas aboutir. Alors que la tarification incitative est plus ou moins difficile à mettre en œuvre selon les territoires, l’obligation d’harmonisation est un frein à son déploiement.

J’insiste sur l’utilité de ces amendements qui ont été rédigés en collaboration avec Citeo.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Les amendements présentent un intérêt indéniable mais aussi un inconvénient gênant : ils n’ont pas été travaillés avec les collectivités territoriales. Je vous invite donc à les retirer et à en déposer un nouveau, prévoyant une expérimentation et auquel les collectivités auront été associées.

M. Stéphane Delautrette (SOC). J’ai cité Citeo mais, je vous rassure, ces amendements sont aussi défendus par le réseau Amorce qui regroupe les territoires engagés dans la transition écologique, ainsi que par l’Association des maires de France.

La commission rejette successivement les amendements.

Article 16 : Réforme des redevances des agences de l’eau

Amendements de suppression I-CD188 de Mme Annick Cousin et I-CD436 de M. Pierre Vatin

Mme Annick Cousin (RN). Il s’agit de revenir sur la hausse de la redevance pour les pollutions diffuses. La meilleure manière de promouvoir une agriculture plus durable est de maintenir la compétitivité et de soutenir les agriculteurs. L’augmentation des taxes n’apporte pas de bénéfices environnementaux.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Le principe pollueur-payeur n’est pas suffisamment établi en matière de fiscalité de l’eau. La redevance pour pollution de l’eau d’origine domestique, assise sur les volumes d’eau facturés à l’abonné, s’inscrit dans une logique fiscale de rendement plutôt que de taxation environnementale. Il y a donc une nécessité de faire évoluer la fiscalité de l’eau de manière à l'asseoir davantage sur la quantité de pollution rejetée dans le milieu naturel. C'est l’objet de l’article 16. Je suis donc très défavorable à sa suppression.

La commission rejette les amendements.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement I-CD372 de M. Philippe Schreck.

Amendements I-CD337 de M. Nicolas Dragon et I-CD359 de M. Christophe Barthès (discussion commune)

Mme Annick Cousin (RN). L’amendement vise à exclure l’élevage du champ d’application de la redevance pour pollution de l’eau. Les éleveurs sont déjà submergés par les taxes, les dépenses et les dettes. Il est temps de desserrer l’étau des charges et redevances pesant sur eux et de favoriser l’épanouissement d’une profession qui contribue à nos paysages et à notre fierté agricole.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. En matière d’élevage, le tarif demeure fixé à 3 euros par unité de gros bétail. L’article clarifie la définition de l’élevage et n’a donc pas d’impact financier. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement I-CD172 de M. Lionel Tivoli.

Amendements I-CD450 du rapporteur pour avis et I-CD291 de M. Gabriel Amard (discussion commune)

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il est proposé d’ajouter les substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS) à la liste des substances assujetties à la redevance pour pollution de l’eau d’origine non domestique.

En application du principe de précaution et du principe pollueur-payeur, l’assujettissement de ces molécules très persistantes à la redevance est tout à fait cohérent et permet de mieux sensibiliser les entreprises à la diminution de leurs rejets de PFAS dans la nature, au profit de la santé et de la biodiversité.

L’identification de ces substances et de leur toxicité étant particulièrement difficile compte tenu des connaissances métrologiques, il est proposé de limiter la taxation aux substances listées par la directive du 16 décembre 2020 relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine, substances qui servent également de référence dans l'arrêté du 20 juin 2023 relatif à l’analyse des substances per- et polyfluoroalkylées dans les rejets aqueux des installations classées pour la protection de l’environnement relevant du régime de l’autorisation. Cet arrêté prévoit une obligation d'identification desdites substances par les industriels dans leurs rejets, ce qui rend la taxation plus effective.

J’insiste sur les limites actuelles des connaissances métrologiques. Ne faisons pas de démagogie sur le sujet.

M. Gabriel Amard (LFI-NUPES). À défaut de pouvoir appliquer d’emblée un principe de précaution sanitaire, en interdisant les PFAS – notamment dans le domaine de la cosmétique, des ustensiles de cuisine ou des textiles –, nous vous proposons de fixer un seuil de dangerosité à partir duquel la pollution donne lieu à une redevance. Cela concerne uniquement les molécules identifiées par l’Union européenne dans le cadre de la directive-cadre sur l’eau. C’est bien dommage, mais c’est un début.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je partage votre objectif. Cependant, l’identification des PFAS est difficile : c’est pourquoi je propose de limiter la taxation aux substances énumérées par la directive de 2020 relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine. Un arrêté du 20 juin 2023 impose aux industriels d’identifier ces substances dans leurs rejets, ce qui rendra la taxation plus effective. Je vous invite donc à retirer votre amendement au profit du mien, qui me semble plus opérant au vu des connaissances métrologiques actuelles.

La commission adopte l’amendement I-CD450.

En conséquence, l’amendement I-CD291 tombe.

Amendements identiques I-CD34 de M. Vincent Descoeur et I-CD355 de M. Christophe Barthès

Mme Annick Cousin (RN). L’article L. 213-10-2 du code de l’environnement précise les modalités de calcul de la redevance pour pollution de l’eau attribuée aux activités d’élevage. En supprimant la reconnaissance du caractère spécial de ces activités, l’article 16 du présent PLF les soumet au même mode de calcul de l’assiette que les industriels non raccordés au réseau public de collecte des eaux usées. Un tel changement ne nous paraît pas souhaitable. En cohérence avec nos amendements précédents, nous avons donc déposé cet amendement d’appel visant à supprimer l’alinéa 37.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette les amendements.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, elle rejette successivement les amendements I-CD201 et I-CD205 de M. Jorys Bovet ainsi que l’amendement I-CD348 de M. Christophe Barthès.

Amendements identiques I-CD67 de M. José Beaurain, I-CD119 de M. Jean-Yves Bony et I-CD345 de M. Nicolas Dragon

M. Jean-Yves Bony (LR). Nous entendons supprimer la hausse de la redevance pour pollutions diffuses. Plutôt que de punir les agriculteurs en augmentant les taxes, ce qui nuirait à la compétitivité des productions comme au pouvoir d’achat des consommateurs, il nous semble plus opportun de les accompagner pour faire face aux défis actuels et futurs, en les aidant à investir afin d’évoluer vers des pratiques plus durables tout en restant compétitifs.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Fondée sur le principe pollueur-payeur, la redevance pour pollutions diffuses mérite d’être progressivement renforcée pour atteindre pleinement son objectif de réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires en France. En effet, les tarifs prévus pour les substances particulièrement dangereuses pour la santé en raison de leur cancérogénicité, de leur mutagénicité sur les cellules germinales ou de leur toxicité pour la reproduction, ainsi que ceux prévus pour les substances présentant une toxicité aiguë ou chronique pour certains milieux aquatiques, sont sensiblement sous-évalués. L’article 16 augmente donc cette redevance de 20 %. Notre agriculture doit être accompagnée pour devenir de plus en plus responsable, vertueuse et compétitive. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Amendement I-CD292 de Mme Charlotte Leduc

M. Gabriel Amard (LFI-NUPES). Nous souhaitons que les redevances des agences de l’eau soient vraiment progressives et tiennent compte, sans plafond, de la consommation et des captages réalisés par les différents acteurs.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L’article 16 relève les tarifs plafonds et instaure des seuils, ce qui permettra aux agences de l’eau de moduler la taxation en fonction de la spécificité des territoires. Si les plafonds étaient remplacés par des seuils, l’imposition pourrait être illimitée. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 16 modifié.

Après l’article 16

Amendement I-CD289 de M. Gabriel Amard

M. Gabriel Amard (LFI-NUPES). En mars dernier, le chef de l’État a souhaité que soit menée une réflexion, en lien avec les collectivités, en vue de l’instauration d’une tarification différenciée de l’eau en fonction des usages. Dont acte. Or les plus gros consommateurs, qui bénéficient la plupart du temps d’une tarification dégressive, sont les personnes morales, notamment les entreprises assujetties à l’impôt sur les sociétés. Nous proposons donc que les dépenses d’eau potable ne soient plus déductibles des charges avant calcul de l’impôt sur les sociétés : c’est ainsi que les entreprises pourront voir l’effet financier de la tarification progressive que nous mettrons un jour en place. Sinon, ce sont les ménages qui feront les frais de la progressivité, tandis que les professionnels continueront de déduire ces dépenses de leurs impôts.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je comprends votre amendement du point de vue de la sobriété hydrique, mais le fait de traiter l’eau différemment des autres charges telles que l’électricité, le chauffage ou le mobilier risquerait de soulever quelques difficultés. En outre, ce sont essentiellement les usages agricoles et industriels de l’eau qui posent problème – ce n’est pas une critique mais un constat –, et je pense que l’article 16 y répond déjà largement. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, elle rejette successivement les amendements I-CD285 et I-CD286 de M. Gabriel Amard.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’ensemble des dispositions dont elle est saisie, modifiées.

 

 


   LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

(Par ordre chronologique)

 

M. Matthieu Deconinck, sous-directeur en charge de la fiscalité des transactions, de la fiscalité énergétique et environnementale et de la fiscalité environnementale au ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique

Table ronde réunissant des représentants des sociétés d’autoroutes

M. Christophe Boutin, délégué général de l’Association des sociétés françaises d’autoroutes *

M. Pierre Coppey, directeur général adjoint de Vinci et président de Vinci Autoroutes

M. Erwan Le Bris, directeur général de la Société des autoroutes et du tunnel du Mont-Blanc (ATMB)

M. Philippe Nourry, président des Autoroutes Paris-Rhin-Rhône (APRR) et de l’Association pour la réalisation et l’exploitation des autoroutes (AREA) *

M. Arnaud Quémard, directeur général de la Société des autoroutes du Nord et de l’Est de la France (SANEF) et président-directeur général de Société des autoroutes Paris-Normandie (SAPN)

M. Olivier Quoy, directeur général d’Atlandes *

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

 

 


([1]) L’article L. 312-76 du CIBS précise que le niveau d’intensité énergétique doit être au moins égal à 3 % en valeur de production ou 0,5 % en valeur ajoutée.

([2]) Loi « climat et résilience » : loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

([3]) Rapport n° 709 de la commission d’enquête du Sénat sur le contrôle, la régulation et l’évolution des concessions autoroutières (2020).

([4]) La majorité du réseau concédé est concentrée sur trois groupes : Vinci (Arcos, Arcour, Autoroutes du Sud de la France, Cofiroute et Escota, soit 4 450 km en 2020), Eiffarie, co-entreprise d’Eiffage et de Macquarie (Adelac, Aliae, Aliénor, APRR, AREA, CEVM, soit 2 460 km) et Abertis (SANEF et SAPN, soit 1 760 km).