N° 1719

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 11 octobre 2023.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2024 (n° 1680)

TOME VIII

ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES

 

AFFAIRES MARITIMES

PAR M. Stéphane BUCHOU

Député

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 Voir les numéros : 1680, 1745 (Tome III, annexe 18).


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SOMMAIRE

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Pages

Introduction

premiÈre partie : un budget en hausse

I. le programme 205

A. L’action 1 « Surveillance et sÛRETÉ maritimes »

1. Surveillance du trafic maritime

2. Signalisation maritime

3. Système d’information « Surveillance maritime »

4. Capitainerie des ports

B. L’action 2 « Emplois et formations maritimes »

1. Financement de la formation initiale des marins

a. Subvention à l’ENSM

b. Lycées professionnels maritimes et autres centres de formation

2. Aide et protection du monde maritime

C. L’action 3 « Innovation et flotte de commerce »

D. L’action 4 « Action interministÉrielle de la mer »

E. L’action 5 « Soutien et systÈmes d’information »

F. L’action 7 « Pêche et aquaculture »

G. L’action 8 « Planification et Économie bleue »

H. L’action 43 DU programme 203

DeuxiÈme partie : la société nationale  de sauvetage en mer (SNSM)

I. Un modÈle Économique stable et ÉquilibrÉ À prÉserver pour assurer l’avenir d’une SNSM modernisÉe

A. La diversitÉ des recettes, un gage de robustesse pour la santÉ financiÈre de l’association

1. Le succès des collectes : un gain de visibilité pour les actions de l’association

2. Les subventions publiques

a. Les subventions des collectivités territoriales, partenaires incontournables des stations locales

b. Une subvention de l’État en hausse : la marque d’une revalorisation de l’obligation étatique du sauvetage en mer

B. Une prÉvisibilitÉ des ressources encore perfectible pour assurer le financement des investissements À venir

1. La volatilité structurelle des dons et legs

2. Les taxes affectées : un gage de prévisibilité face à la tendance inflationniste

II. L’avenir de la SNSM : maintenir l’attractivitÉ du bÉnÉvolat et moderniser SA Flotte

A. la SNSM, incarnation de la « solidaritÉ des gens de mer »

1. Son rôle central en matière de sauvetage en mer

2. Un fonctionnement en réseau de stations locales

3. Des demandes d’intervention en hausse

B. PrÉserver l’attractivitÉ du bÉnÉvolat

1. Un modèle atypique reposant essentiellement sur le bénévolat

2. Une offre de formation renouvelée pour s’adapter aux attentes nouvelles des bénévoles

3. Valoriser la place des stations locales et le rôle des bénévoles

C. Renouveler la flotte, gage de sÉcuritÉ et de qualitÉ des interventions

1. État des lieux de la flotte de la SNSM

2. Le plan « Nouvelle flotte », un succès en demi-teinte

a. Un plan de renouvellement de la flotte ambitieux

b. Un déploiement retardé entraînant une incompréhension sur le terrain

3. Une troisième voie est en train de se dessiner

a. Des investissements importants déjà engagés

b. Une nouvelle voie à l’essai

troisiÈme partie : les lycÉes professionnels maritimes

I. Atouts et dÉfis des lycÉes professionnels maritimes

A. Des atouts À prÉserver

1. Des effectifs réduits facilitant un suivi personnalisé des élèves

2. Des taux de réussite scolaire et d’insertion professionnelle très élevés

B. Des dÉfis d’attractivitÉ À relever

1. Les difficultés de recrutement d’enseignants techniques

2. Ouvrir davantage les LPM aux milieux non maritimes

3. Préserver le lien privilégié entre le personnel éducatif et l’administration

II. Les lycÉes professionnels maritimes dans le cadre de la rÉforme de la voie professionnelle

A. Une filiÈre dÉjÀ profondÉment rÉformÉe depuis deux dÉcEnnies

1. Historique de la création de la filière maritime secondaire

2. Réforme du baccalauréat professionnel de 2019

B. une modernisation À poursuivre tout en prÉservant les spÉcificitÉs de la filiÈre

1. Un besoin d’adaptation constant aux évolutions du secteur maritime

2. Les LPM dans la réforme de la voie professionnelle

examen en commission

liste des personnes auditionnées

 


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   Introduction

Présente sur tous les océans, la France est dotée d’un espace maritime d’une superficie de 10,2 millions de km2, ce qui fait d’elle la deuxième puissance maritime mondiale derrière les États-Unis d’Amérique. Ce territoire maritime, dont 97 % est situé en outre-mer, est source de nombreux atouts stratégiques, que ce soit d’un point de vue économique, commercial ou encore sécuritaire. Il est aussi source d’une grande responsabilité pour la France qui se doit d’être exemplaire dans l’usage de sa zone maritime à l’ère de la transition écologique et énergétique.

Le secteur maritime, qui contribue pour près de 3 % aux émissions de gaz à effet de serre au niveau mondial, n’a été que récemment pris en compte dans les stratégies internationale et européenne en faveur de la transition écologique. La France affiche ainsi une ambition forte de renforcer la place des mers et des océans, et plus largement de tout le secteur maritime, dans le nouveau modèle européen de croissance durable qu’elle appelle de ses vœux. Le One Ocean Summit, qui s’est tenu à Brest en février 2022 dans le cadre de la présidence française du Conseil de l’Union européenne, a contribué à l’engagement de 41 États pour une politique active en faveur des océans. Dans la prolongation du One Ocean Summit, l’année 2024 sera consacrée à la préparation de l’accueil en 2025 en France de la troisième conférence des Nations-Unies sur l’océan pour faire de 2025, « l’année des océans ».

Au niveau national, votre rapporteur pour avis tient à souligner que d’importantes étapes ont été franchies cette année en faveur de la transition écologique dans le secteur maritime. En janvier 2023, dans le cadre de la démarche France Mer 2030 portée par le Gouvernement pour la décarbonation du secteur maritime et pour la transition vers le « navire zéro émission », la feuille de route de décarbonation de la filière maritime a été présentée par la direction générale des affaires maritimes, de la pêche et de l’aquaculture (DGAMPA) et le cluster maritime français. Elle a pour vocation de fédérer tous les acteurs du secteur autour d’une stratégie commune pour atteindre les objectifs de décarbonation fixés en 2030 et en 2050 par l’Organisation maritime internationale (OMI). Une nouvelle stratégie nationale mer et littoral (SNML) pour la période 2023-2029 est par ailleurs en cours de finalisation. Elle servira de cadre de référence en matière d’économie bleue durable, de protection des océans et de politique littorale à horizon 2030.

La politique maritime de la France se veut à la fois protectrice de la biodiversité mais également soucieuse de développer une activité économique durable, comme en témoignent les grands axes du programme 205 « Affaires maritimes » qui sont détaillés dans le présent avis. Votre rapporteur pour avis a souhaité, par ailleurs, apporter un éclairage sur deux thématiques spécifiques :

– la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM), d’une part, pour faire état des évolutions depuis le dernier rapport parlementaire sur le sujet en 2019 ([1]) et, d’autre part, pour mettre en lumière les défis actuels auxquels fait face l’association dans un contexte de hausse de la pratique des loisirs nautiques et de fréquentation des littoraux ;

– sur l’enseignement professionnel maritime dans le contexte de la réforme de la voie professionnelle, annoncée à la rentrée scolaire 2022 à l’occasion d’une visite du Président de la République au lycée professionnel Éric Tabarly aux Sables-d’Olonne et mise en place à compter de la rentrée scolaire 2023/2024.

 


—  1  —

   premiÈre partie : un budget en hausse

I.   le programme 205

Le programme 205 permet de financer des actions relatives à la politique de sécurité et de sûreté maritimes civiles (actions 1 et 4), à la régulation sociale de l’emploi maritime (formation, hygiène, santé, conditions de travail), qui est au cœur de l’action préventive en matière de sécurité maritime (action 2), au soutien à la qualité et au développement du pavillon français (action 3), à la participation à la protection de l’environnement marin et littoral (action 4), à la mise en œuvre de la politique des pêches maritimes et de l’aquaculture (action 7) ainsi qu’à des politiques transversales (action 8).

Votre rapporteur pour avis se félicite que le programme 205 connaisse une hausse significative de 14 % de ses crédits de paiement dans le projet de loi de finances pour 2024, ce qui représente une augmentation de 34 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2023. Tous les crédits de paiement des actions du programme 205 sont en hausse, en particulier ceux de l’action 3 « Innovation et flotte de commerce » avec une revalorisation des crédits consacrés aux dispositifs d’exonération de charges de soutien de la flotte et ceux de l’action 4 « Action interministérielle de la mer » pour financer l’acquisition d’un nouveau patrouilleur hauturier des affaires maritimes.

A.   L’action 1 « Surveillance et sÛRETÉ maritimes »

Les crédits de l’action 1 représentent 13,6 % des crédits du programme 205. Ils sont en hausse de 19,5 % par rapport à 2023. Cette hausse s’explique par un renforcement des crédits d’investissement, notamment pour financer des travaux de rénovation d’une tour radar du centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage (Cross) sur l’île d’Ouessant et la constitution d’un guichet unique maritime et portuaire (Gump) pour satisfaire aux obligations déclaratives d’entrée et de sortie de port.

(En millions d’euros)

 

LFI 2023

PLF 2024

Évolution

AE

31,5

40,8

+ 29,5 %

CP

30,3

36,2

+ 19,5 %

Le budget de l’action 1 permet à la France d’exercer trois types de missions :

– en tant qu’État du pavillon, garantir le respect des normes internationales requises à bord des navires battant pavillon français ;

– en tant qu’État du port, contrôler les navires de commerce étrangers faisant escale dans ses ports ;

– en tant qu’État côtier, assurer l’organisation et la coordination de la recherche et du sauvetage maritimes le long des côtes françaises ainsi que la sécurisation des routes et des accès portuaires.

Cette dernière mission recouvre : l’organisation et la coordination de la recherche et du sauvetage maritime ; la surveillance de la circulation maritime dans les zones de séparation de trafic ; l’information des capitaines, patrons et skippers sur l’environnement et la situation nautique ; la sécurisation des routes et des accès portuaires avec le balisage maritime.

L’action 1 rassemble des crédits d’investissement (15,9 millions d’euros en autorisations d’engagement – AE – et 11,3 millions d’euros en crédits de paiement – CP) et des crédits de fonctionnement (13,4 millions d’euros en AE et CP). Elle porte également des crédits pour les dépenses d’intervention (11,5 millions d’euros en AE et CP). Ces crédits sont notamment destinés à la Société́ nationale de sauvetage en mer (SNSM) (10,5 millions d’euros en AE et CP).

1.   Surveillance du trafic maritime

La surveillance du trafic maritime, qui recouvre essentiellement le financement des sept Cross de métropole et d’outre-mer ainsi que des deux centres spécialisés du Pacifique, reçoit 4,39 millions d’euros en crédits de fonctionnement pour 2024. Ces crédits financent le maintien en état opérationnel du réseau public des quatre-vingts sites opérés par les Cross.

Les crédits d’investissement sont en hausse significative en 2024, comme mentionné ci-dessus. Cette augmentation s’explique principalement par le financement de la rénovation de la tour radar du Stiff sur l’île d’Ouessant qui constitue l’unique moyen de surveillance et de communication au large de la pointe du Finistère pour garantir la sécurité de la navigation (+ 5 millions d’euros en AE et + 2,5 millions d’euros en CP).

2.   Signalisation maritime

L’essentiel des crédits consacrés à la signalisation maritime finance le service d’armement des phares et balises (APB) qui assure l’ensemble des opérations de transport et de manutention pour les établissements de signalisation maritime (ESM) en mer.

Il s’agit en pratique de crédits de fonctionnement (7,84 millions d’euros en AE et CP) et de crédits d’investissement (7,63 millions d’euros en AE et 5,94 millions d’euros en CP).

Les crédits de fonctionnement financent notamment le maintien en conditions opérationnelles des 6 100 établissements de signalisation maritime ainsi que la formation des agents.

Les crédits d’investissement financent les travaux de « gros entretien », par exemple le carénage et la rénovation des motorisations. Par ailleurs, dans le cadre du plan de modernisation des affaires maritimes, des investissements sur des technologies d’avenir sont réalisés, comme par exemple le remplacement de dix‑sept unités par neuf navires polyvalents, plus performants sur les plans technique et environnemental.

3.   Système d’information « Surveillance maritime »

0,87 million euros de crédits de fonctionnement sont destinés à assurer le maintien en condition opérationnelle des systèmes d’information relatifs à la surveillance maritime, au suivi des matières dangereuses et à l’échange de données avec d’autres États.

4.   Capitainerie des ports

Avec la création en 2022 de la DGAMPA, l’organisation et le fonctionnement des capitaineries ont fait l’objet d’un transfert au profit de cette nouvelle direction. Les vingt-huit capitaineries concernées perçoivent 0,30 million d’euros de crédits de fonctionnement « métiers » pour financer leurs cent soixante‑dix-sept agents en charge des missions de sécurité et de police portuaire.

B.   L’action 2 « Emplois et formations maritimes »

Les crédits de l’action 2 représentent 11,6 % des crédits du programme 205 et leur montant est en légère baisse par rapport à la loi de finances initiale pour 2023, comme l’illustre le tableau ci-dessous :

(En millions d’euros)

 

LFI 2023

PLF 2024

Évolution

AE

38,5

34,8

- 10 %

CP

34,6

36,5

+ 6 %

Ils assurent le financement de la formation initiale des marins dispensée dans les lycées professionnels maritimes (LPM), dans les centres agréés en outre-mer et à l’École nationale supérieure maritime (ENSM). Ils financent aussi une action sociale et médicale en faveur des marins et futurs marins.

Sur le volet de la formation initiale des marins, votre rapporteur pour avis tient à ce que les crédits destinés à financer le personnel enseignant des LPM ne soient pas abaissés, en particulier au regard des difficultés de recrutement d’enseignants rencontrées. À ce titre, votre rapporteur pour avis défendra un amendement de crédits destiné à augmenter de 10 % la subvention destinée aux douze lycées professionnels maritime, soit une hausse de 160 000 euros par rapport à la subvention perçue en 2023.

1.   Financement de la formation initiale des marins

a.   Subvention à l’ENSM

L’École nationale supérieure maritime (ENSM) reçoit une subvention pour charges de service public de 25 millions d’euros, revalorisée de 800 000 euros par rapport à 2023, destinée essentiellement au financement de la masse salariale.

En sus de cette subvention, l’ENSM bénéficie d’une subvention d’investissement de 2 millions d’euros pour atteindre l’objectif de doublement du nombre d’officiers de la marine marchande fixé lors du Fontenoy du maritime. Votre rapporteur pour avis se satisfait que les moyens soient à la hauteur de l’atteinte de cet objectif, qui permet de répondre aux besoins des armateurs français et européens.

b.   Lycées professionnels maritimes et autres centres de formation

Les douze lycées professionnels maritimes reçoivent une subvention de 4,6 millions d’euros, notamment pour le financement de la mise en œuvre des stages professionnels destinés aux élèves et rendus obligatoires pour assurer la sécurité à bord des navires.

En complément de cette subvention, 1 million d’euros de crédits servira à financer la gratification des périodes de stage mise en place dans le cadre de la réforme des lycées professionnels à partir de la rentrée 2023.

Une aide aux élèves des LPM est également prévue à hauteur de 0,90 million d’euros pour financer les bourses qui leur sont attribuées. Le projet annuel de performances (PAP) sur le programme 205 précise que « Cette ligne de dépenses a été augmentée de 0,2 million d’euros en 2024 sous enveloppe. Cette augmentation est effective dès 2023 pour répondre au besoin et à la revalorisation des bourses à compter de la campagne 2023/2024 ([2]).»

2.   Aide et protection du monde maritime

Une part des crédits de l’action 2, à hauteur de 1,9 million d’euros en AE et 1,6 million d’euros en CP, est consacrée au financement du service de santé des gens de mer, qui assure la médecine de santé au travail des marins et qui a la responsabilité de délivrer les certificats d’aptitude pour embarquer. Elle assure aussi le soutien financier aux dispositifs d’aide pour les marins sans emploi.

C.   L’action 3 « Innovation et flotte de commerce »

Les crédits de l’action 3 représentent 35 % des crédits du programme 205. Ils sont en hausse de plus de 20 % dans le projet de loi de finances pour 2024, comme l’illustre le tableau ci-dessous :

(En millions d’euros)

 

LFI 2023

PLF 2024

Évolution

AE

86,4

105,3

+ 22 %

CP

86,4

105,3

+ 22 %

Les crédits de l’action 3 servent à financer :

– la contribution de l’État à la prise en charge des pensions et retraites de la Compagnie générale maritime et financière (CGMF) ;

– le dispositif de soutien à la flotte via des exonérations de cotisations patronales et le remboursement de cotisations salariales pour les entreprises employant des gens de mer affiliés à l’Établissement national des invalides de la marine (Enim) et le dispositif de soutien aux entreprises d’armement maritime (Seam) ([3])  effectuant du transport international de passagers ;

– depuis 2023, le contrôle des navires au titre de l’État du port (auparavant porté par l’action 1) doté de 0,9 million d’euros alloués aux centres de sécurité des navires (CSN) chargés d’inspecter les navires et de contrôler leur conformité à la réglementation en vigueur.

Votre rapporteur pour avis se félicite de l’adoption en juillet 2023 de la proposition de loi visant à lutter contre le dumping social sur le Transmanche ([4]) du député M. Didier Le Gac. Cette loi constitue une avancée importante en faveur de la défense du pavillon français et en matière de lutte contre la concurrence déloyale sur les liaisons maritimes régulières de passagers avec la France.

D.   L’action 4 « Action interministÉrielle de la mer »

Les crédits de l’action 4 représentent 12,5 % du programme 205 et sont en forte hausse dans le PLF pour 2014 par rapport à la LFI pour 2023, comme l’illustre le tableau ci-dessous :

(En millions d’euros)

 

LFI 2023

PLF 2024

Évolution

AE

12,6

38,8

+ 216 %

CP

11,9

18,1

+ 63%

Cette hausse significative s’explique par deux mesures nouvelles financées en crédits d’investissement sur la ligne budgétaire « Dispositif de contrôle et de surveillance ». Le dispositif de contrôle et de surveillance (DCS) participe à l’exercice des missions de police en mer. Les crédits sont utilisés pour les unités littorales des affaires maritimes des directions départementales des territoires et de la mer et pour les navires hauturiers des directions interrégionales de la mer.

Pour l’année 2024, 25 millions d’euros supplémentaires en AE et 5 millions d’euros supplémentaires en CP seront investis pour financer un nouveau patrouilleur des affaires maritimes pour remplacer le patrouilleur Iris désormais obsolète.

3,93 millions d’euros en crédits de paiement contribuent au financement du dispositif Polmar Terre qui est le volet terrestre du dispositif Polmar créé en 1978 pour lutter contre la pollution marine et renforcer la coordination entre les autorités publiques. Les crédits servent notamment à l’entretien des bâtiments et à l’acquisition de matériel.

E.   L’action 5 « Soutien et systÈmes d’information »

Les crédits de l’action 5 représentent 3,7 % du programme 205 et sont en hausse dans le projet de loi de finances pour 2024 comme l’illustre le tableau ci‑dessous :

(En millions d’euros)

 

LFI 2023

PLF 2024

Évolution

AE

8,8

11

+ 37 %

CP

9,4

11,6

+ 22 %

Ces crédits regroupent essentiellement le budget relatif au fonctionnement de l’administration centrale et des services déconcentrés.

Ils comprennent également des crédits pour les systèmes d’information. L’action participe au financement de la démarche de transformation numérique entamée en 2021. Celle-ci vise notamment à transformer les relations avec les usagers internes et externes grâce à la mise en place de l’espace numérique maritime.

Cette action porte également les crédits de fonctionnement du bureau enquête accident (BEA-mer), auparavant portés par l’action 1. Il s’agit d’un service à compétence nationale placé auprès de l’Inspecteur général des affaires maritimes. Ce service doit rechercher et déterminer les causes techniques des accidents, afin d’en tirer les enseignements pour l’amélioration de la sécurité maritime.

F.   L’action 7 « Pêche et aquaculture »

L’action 7, qui apparaît pour la deuxième fois dans le programme 205, représente 16,8 % des crédits. Elle est dotée de 50,5 millions d’euros en AE et de 47,2 millions d’euros en CP. Ces crédits sont quasiment stables par rapport à la LFI pour 2023.

Les crédits de l’action 7 financent l’acquisition de connaissance scientifiques et de données qui conditionnent la mise en œuvre de la politique commune de la pêche (PCP) ainsi que les moyens spécifiques au contrôle des pêches, en particulier en matière de systèmes d’information :

 près de 5 millions d’euros de crédits de fonctionnement sont consacrés à assurer le suivi des ressources halieutiques ;

– 6 millions d’euros de crédits servent également à financer les études scientifiques et les collectes de données réalisées par l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer) pour permettre à la France de s’appuyer sur des connaissances scientifiques actualisées pour mener les négociations au niveau européen ;

Votre rapporteur pour avis tient à rappeler que ces financements sont indispensables à la conduite de la politique des pêches et à la détermination de la position de la France dans le cadre des négociations européennes et internationales.

Par ailleurs, votre rapporteur pour avis plaide depuis plusieurs années pour que la détermination des quotas puisse être déterminée de manière pluriannuelle pour donner davantage de visibilité et de stabilité à nos professionnels de la pêche ;

– 7,8 millions d’euros de crédits financent le pilotage du contrôle des pêches par la DGAMPA, notamment les systèmes d’information de gestion des pêches et de l’aquaculture pour répondre aux obligations règlementaires en matière de connaissance et de suivi des stocks halieutiques.

G.   L’action 8 « Planification et Économie bleue »

L’action 8 représente 6,5 % du programme 205. Elle est dotée de 19,7 millions d’euros en AE et CP, en légère hausse par rapport à la LFI pour 2023.

16 millions d’euros sont attribués aux actions de coordination relatives à la mer et au littoral et permettent d’abonder le fonds d’intervention maritime (FIM) de 1 million d’euros supplémentaires par rapport à l’an passé.

Enfin, 1,1 million d’euros sont consacrés à la plaisance et au littoral. Les crédits servent notamment au financement de l’observatoire des ports de plaisance, du site du guichet unique fiscalité plaisance ou encore à la poursuite de la modernisation du système d’immatriculation des navires dans le cadre du portail « démarches plaisance ».

H.   L’action 43 DU programme 203

Si la plus grande partie du programme 203 n’entre pas dans le périmètre du présent avis car ce programme est surtout consacré aux infrastructures ferroviaires, routières et aéroportuaires, il convient toutefois d’évoquer ici les crédits de l’action 43, seule action relative aux ports, qui représentent 2,1 % des crédits du programme.

Ils baissent de 2 % et passent de 94,4 millions d’euros dans la loi de finances pour 2023 à 92,5 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2024.

L’essentiel des crédits de paiement de cette action sert à financer l’entretien des accès et des ouvrages d’accès des grands ports maritimes. L’augmentation de la dotation à partir de 2019 a permis de répondre au sous-financement chronique des opérations de dragage des grands ports maritimes.

Votre rapporteur pour avis tient à souligner la poursuite de l’effort d’investissement de l’État dans le cadre de la stratégie nationale portuaire adoptée en 2021, en faveur notamment de l’électrification à quai dans les ports qui participe à l’atteinte de l’objectif de décarbonation des transports maritimes.


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   DeuxiÈme partie : la société nationale
de sauvetage en mer (SNSM)

I.   Un modÈle Économique stable et ÉquilibrÉ À prÉserver pour assurer l’avenir d’une SNSM modernisÉe

A.   La diversitÉ des recettes, un gage de robustesse pour la santÉ financiÈre de l’association

Le budget de la SNSM, qui s’est élevé à 63,5 millions d’euros en 2022 ([5]), est abondé par des ressources de différentes provenances :

– les recettes collectées auprès du public sous la forme de dons, de legs ou par du mécénat, à hauteur de 35,7 millions d’euros ;

– les recettes issues des subventions publiques, à la fois de l’État et des collectivités territoriales, et des taxes affectées, à hauteur de 17,7 millions d’euros ;

– les recettes résultant des prestations réalisées ou de marchandises vendues, à hauteur de 10 millions d’euros.

1.   Le succès des collectes : un gain de visibilité pour les actions de l’association

La collecte de fonds auprès des particuliers a connu une forte hausse ces dernières années, notamment grâce aux initiatives prises par la SNSM pour accroître la visibilité de ses actions. L’association investit chaque année près de 6 millions d’euros de budget en prospection et en fidélisation des donateurs avec deux campagnes annuelles de collecte, une en été et une en hiver.

Alors que l’association avait connu des difficultés les années antérieures, depuis 2015, les dons des particuliers ont plus que triplé en passant de 5,8 millions d’euros en 2015 à 22,6 millions d’euros en 2022. Pour l’année 2022, les dons des particuliers et des entreprises ont continué de progresser de 3 millions d’euros par rapport à 2021. Les ventes de marchandises et de prestations, initiées principalement par les stations locales, progressent également de 2,7 millions d’euros.

Les collectes auprès du public représentent aujourd’hui 56,2 % des recettes de la SNSM. Cette ressource est donc essentielle pour assurer l’avenir financier de l’association.

2.   Les subventions publiques

La part des subventions publiques dans le budget de la SNSM représente un quart de ses ressources financières en 2022. Elles se composent, d’une part, des subventions des collectivités territoriales et, d’autre part, de la subvention de l’État.

a.   Les subventions des collectivités territoriales, partenaires incontournables des stations locales

La loi NOTRe du 7 août 2015 ([6]) a préservé la possibilité pour les collectivités territoriales de contribuer au financement d’activités de sécurité civile. C’est à ce titre que l’article L. 5314-13 du code des transports permet aux collectivités territoriales de soutenir financièrement la SNSM.

Le niveau de soutien financier des collectivités territoriales à la SNSM est resté globalement stable, en valeur absolue, depuis 2019, comme l’illustre le tableau ci-dessous :

(En millions d’euros)

 

2019

2020

2021

2022

Subvention des collectivités territoriales

1,9

1,9

1,9

2,4

Le soutien des collectivités territoriales passe également par la mise à disposition de locaux, de terrains et d’infrastructures pour la SNSM ainsi que par une participation aux investissements. Le rapport annuel de l’association pour l’année 2022 rappelle que la SNSM « sollicite systématiquement les collectivités (…) pour financer le foncier, le gros œuvre et le second œuvre » ([7]).

Focus : la surveillance des plages sous tension

Si les collectivités territoriales sont des partenaires incontournables de la SNSM en contribuant à l’équilibre de son financement, la SNSM est le partenaire indispensable des communes dans leur mission de surveillance des plages au titre de la police des baignades et des activités maritimes, qui incombe aux maires.

Selon le rapport d’activité de la SNSM pour l’année 2022, 139 collectivités territoriales ont employé des nageurs sauveteurs de l’association pour assurer la surveillance des plages. Pendant la période estivale, la SNSM assure ainsi la surveillance d’un tiers des plages du littoral français, sous la responsabilité des maires.

Lors de son audition, le président de la SNSM a alerté sur une tendance préoccupante de retrait des autorités publiques de leur mission de surveillance des plages, alors même que la fréquentation des plages et la pratique d’activités nautiques sont en hausse. Le retrait annoncé des CRS de 236 postes de surveillance des plages en raison de l’organisation des Jeux Olympiques d’été en 2024 est un facteur d’inquiétude supplémentaire. Votre rapporteur pour avis souhaite attirer l’attention des autorités sur la nécessité d’assurer la continuité du service public de surveillance des plages face au risque accru que pourraient courir les baigneurs l’été prochain, faute de postes de surveillance suffisants.

b.   Une subvention de l’État en hausse : la marque d’une revalorisation de l’obligation étatique du sauvetage en mer

La SNSM reçoit une subvention annuelle de l’État portée par l’action 1 « Sécurité et sûreté maritime » du programme 205 « Affaires maritimes » de la mission « Écologie, développement et mobilités durables ».

Comme l’avait souligné le rapport sénatorial de 2019 ([8]), cette subvention a connu une forte augmentation à partir de 2015. Alors que son niveau s’élevait à 2 millions d’euros par an au cours des années 2000, elle a augmenté à 3,5 millions d’euros en 2015.

Votre rapporteur pour avis se félicite que la tendance haussière constatée en 2019 se soit maintenue. Dans le cadre de la feuille de route partenariale signée le 11 décembre 2020 par Mme Annick Girardin, ministre de la mer, et M. Emmanuel de Oliveira, président de la SNSM, l’État s’est engagé à augmenter sa subvention de 4,5 millions d’euros. La convention triennale 2021-2023 traduit cet engagement en portant la subvention annuelle à 10,5 millions d’euros.

Même si le président de la SNSM, lors de son audition, s’est déclaré satisfait du montant actuel de la subvention étatique, celle-ci ne prend pas en compte l’inflation. Or, la tendance inflationniste observée pourrait à l’avenir peser sur l’équilibre financier du budget de la SNSM, alors que d’importants investissements sont d’ores et déjà engagés et programmés.

B.   Une prÉvisibilitÉ des ressources encore perfectible pour assurer le financement des investissements À venir

1.   La volatilité structurelle des dons et legs

D’une année à l’autre, le total des legs se caractérise par une grande variabilité et imprévisibilité, comme l’a rappelé le président de la SNSM lors de son audition. En 2016, par exemple, la SNSM n’avait reçu que 600 000 euros en legs, contre 5 millions d’euros perçus en 2021, son niveau le plus haut.

En 2022, les legs encaissés sont à nouveau en baisse de 2,1 millions d’euros par rapport à 2021. Comme en témoigne le rapport d’activité de la SNSM pour 2022, l’association a pourtant poursuivi son effort en matière de recherche de fonds en y consacrant 0,4 million d’euros supplémentaires par rapport à l’année précédente.

La SNSM formule donc des hypothèses prudentes sur le niveau des legs dans l’élaboration de son plan d’investissement. Elle retient une projection socle à 3,5 millions d’euros pour la période 2022-2026 ([9]).

2.   Les taxes affectées : un gage de prévisibilité face à la tendance inflationniste

La SNSM perçoit, en sus de la subvention annuelle versée par l’État, deux taxes affectées en rapport avec le domaine maritime :

– depuis 2021, la SNSM est éligible à percevoir une fraction du produit de la taxe annuelle sur les engins maritimes de plaisance (Taemp) jusqu’à un plafond de 4 millions d’euros, plafond qui serait atteint cette année pour la première fois selon la DGAMPA ;

– la SNSM perçoit également 5 % du produit de la taxe sur l’éolien en mer. Avec la mise en service en 2022 du parc éolien de Saint-Nazaire, après l’année de carence prévue par la loi, la SNSM s’attend à percevoir 400 000 euros en 2023. Pour les années à venir, 1,8 million d’euros de recettes sont prévus pour 2025 et une cible à 4 millions d’euros de recettes est fixée d’ici à 2030.

Alors que la SNSM anticipe une forte augmentation de ses dépenses de fonctionnement du fait du surcoût lié à l’inflation ([10]), le président de l’association a souligné l’importance du maintien de la perception d’une fraction du produit de ces taxes affectées pour contribuer à la stabilité du financement du sauvetage en mer. Votre rapporteur pour avis tient également à souligner que le maintien de l’affectation à la SNSM d’une partie du produit de ces taxes est indispensable pour sécuriser l’avenir financier de l’association.

II.   L’avenir de la SNSM : maintenir l’attractivitÉ du bÉnÉvolat et moderniser SA Flotte

A.   la SNSM, incarnation de la « solidaritÉ des gens de mer »

1.   Son rôle central en matière de sauvetage en mer

La Société nationale de sauvetage en mer est une association relevant de la loi de 1901 qui est née en 1967 de la fusion de plusieurs structures locales préexistantes de sauvetage en mer. Elle a été reconnue d’utilité publique en 1970. Ses activités se partagent entre la sécurisation des zones de plage et le sauvetage en mer.

L’organisation du sauvetage en mer en France

Deux conventions internationales ([11]), établies par l’Organisation maritime internationale (OMI), fondent le droit du sauvetage en mer en consacrant juridiquement le principe de solidarité des gens de mer qui impose à tout capitaine de navire et à une pluralité d’autres acteurs de porter secours à un navire ou à une personne en détresse en mer. Il est ainsi fait obligation aux États parties à ces conventions, à l’instar de la France, de mettre en place un service de recherche et de sauvetage en mer.

En France, le sauvetage en mer est de la compétence des préfets maritimes qui disposent à ce titre de sept centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (Cross) et de deux centres spécialisés à Nouméa et Tahiti. Les Cross sont chargés d’exercer une veille permanente et de répondre sans délai aux alertes de détresse pour coordonner les opérations de recherche et de sauvetage en mer. Ils peuvent faire appel pour cela à des navires privés sur zone, aux moyens aériens et nautiques des administrations de l’État, aux moyens nautiques des services départementaux d’incendie et de secours (Sdis) mais également aux moyens de la SNSM.

La SNSM est le seul organisme agréé par l’État en qualité d’organisme de secours et de sauvetage en mer, agrément récemment renouvelé par un arrêté du 2 novembre 2022. À ce titre, la SNSM est mobilisée par les Cross pour prendre part, avec ses moyens nautiques, aux opérations de recherche et de sauvetage en mer.

En 2022, la SNSM a réalisé 4 742 interventions en mer, soit près de la moitié des interventions coordonnées par les Cross, ce qui représente près de 10 000 personnes secourues en mer.

2.   Un fonctionnement en réseau de stations locales

La SNSM est organisée autour de 208 stations de sauvetage, dont 188 sont permanentes et 20 saisonnières, 32 centres de formation et d’intervention (CFI) et de 20 délégations départementales. Elle compte également un pôle national de formation à Saint-Nazaire, deux ateliers de réparation à Saint-Malo et à Palavas et un siège à Paris.

La répartition des stations locales sur le littoral français est décidée par la SNSM, en concertation avec la DGAMPA et les Cross, dans le but de garantir la continuité et l’efficacité du dispositif d’intervention en tout point du territoire maritime. Chaque station est dirigée par un président qui est accompagné par un trésorier et par un patron titulaire. Elle est autonome dans la gestion de son équipage, du recrutement à la formation, qui relève des attributions du président. Les stations disposent en général d’un équipage de dix à quarante bénévoles opérationnels.

Les auditions menées auprès de deux représentants de stations locales ont permis de prendre la mesure de l’importance des valeurs d’entraide et de soutien entre stations locales et entre bénévoles. Le témoignage de M. Nicolas Thiollent, patron suppléant à la station de Saint-Valéry-en-Caux, a insisté sur le rôle d’appui de sa station, petite en taille, aux deux autres stations voisines de Dieppe et de Fécamp, en mettant en avant la complémentarité de leurs interventions.

3.   Des demandes d’intervention en hausse

La tendance observée sur les dix dernières années, pour la recherche et le sauvetage en mer, témoigne d’une croissance annuelle moyenne de l’activité de l’ordre de 5 %.

L’effet « post-covid » a participé à un regain d’intérêt pour les activités en extérieur, notamment les activités nautiques et maritimes. En conséquence, une plus forte fréquentation des littoraux s’observe et un accès facilité aux activités nautiques, à travers de nouveaux modes de location ou de partage, pour tous les âges et tous les niveaux d’expérience, constituent autant de nouveaux défis pour la sécurité en mer assurée par la SNSM.

La SNSM en chiffres

 

 

 

 

 

 

 

 

Source : Rapport d’activité 2022

B.   PrÉserver l’attractivitÉ du bÉnÉvolat

1.   Un modèle atypique reposant essentiellement sur le bénévolat

Comme le rappellent les mots d’ouverture du président de la SNSM : « le bénévolat et la solidarité des gens de mer sont les fondements des Sauveteurs en Mer ([12]). La SNSM repose en effet sur un modèle unique qui dépend de la mobilisation de près de 9 000 bénévoles, dont 5 000 bénévoles embarqués, pour seulement 120 salariés. Or la crise du bénévolat, qui touche la France dans un contexte de montée de l’individualisme dans la société, n’est pas sans concerner la SNSM.

Le président de la SNSM, M. Emmanuel de Oliveira, a ainsi souligné lors de son audition, qu’afin que les bénévoles restent à la SNSM, il est impératif de leur fournir les meilleurs bateaux, le meilleur équipement et de meilleurs locaux pour faciliter leur engagement. Le plan « Cap 2030 », lancé en 2020 sur dix ans, s’est ainsi appliqué à valoriser le bénévolat et à faciliter l’engagement des bénévoles au quotidien. Pour rappel, les sauveteurs bénévoles de la SNSM ne perçoivent pas d’indemnité. Ils ne perçoivent qu’un défraiement forfaitaire mensuel de 20 euros, conditionné par la réalisation d’une intervention, au moins, dans le mois considéré.

Pour aider les bénévoles sur le terrain, la SNSM a ainsi recruté de nouveaux soutiens locaux salariés. Ils sont répartis en soutiens techniques, avec 11 salariés déployés pour 214 stations et environ 600 embarcations, et en soutiens de formation pour le suivi individualisé des bénévoles, avec 31 salariés en 2026 pour 9 000 bénévoles. Le rôle des soutiens techniques est d’accompagner les stations locales lors des contrôles de sécurité de leurs navires, dans un contexte où l’État s’est retiré de la prise en charge du contrôle de sécurité des navires pour en laisser la pleine responsabilité aux armateurs.

2.   Une offre de formation renouvelée pour s’adapter aux attentes nouvelles des bénévoles

Dans le cadre du plan « Cap 2030 », la SNSM conduit un ambitieux programme de formation qui a vocation à répondre à la sociologie changeante des bénévoles engagés auprès de l’association.

Historiquement, les bénévoles de la SNSM étaient essentiellement issus de la filière maritime, soit de la marine marchande, soit du secteur de la pêche. Or, depuis plusieurs années, les bénévoles proviennent désormais de divers secteurs professionnels, avec des compétences plus hétérogènes qu’auparavant. Les bénévoles issus des professions maritimes ne représentent plus que le quart des équipages de la SNSM.

Le patron suppléant de la station de Saint-Valéry-en-Caux a relayé cette réalité d’un profil plus varié des bénévoles dans sa station en Seine-Maritime. Alors qu’auparavant la majorité des bénévoles travaillaient et vivaient à Saint‑Valéry‑en‑Caux et étaient issus du monde de la mer, désormais, les bénévoles viennent des environs et travaillent dans des secteurs plus éloignés du milieu maritime, ce qui n’est pas sans conséquence sur leur disponibilité.

La SNSM a dû ainsi adapter son offre de formation à destination de ses bénévoles. Alors que par le passé, la formation des sauveteurs-bénévoles était essentiellement assurée par compagnonnage au sein de chaque station de sauvetage, désormais, la SNSM s’est dotée d’un pôle national de formation et de plusieurs centres de formation et d’intervention (CFI). Depuis juin 2023, trois formations internes à la SNSM ont été enregistrées et agréées par l’État au registre de France compétence. Votre rapporteur pour avis tient à souligner que l’effort engagé par la SNSM en matière de formation répond ainsi à l’une des recommandations formulées dans le rapport du sénateur M. Mandelli en 2019 ([13]).

Les auditions menées auprès de deux stations locales ont permis de mettre en lumière une autre demande relayée par certains bénévoles, en particulier les marins professionnels, en matière de reconnaissance et d’équivalence de diplômes et de brevets. Si d’importantes avancées ont été faites pour harmoniser et homologuer les formations délivrées par la SNSM, les bénévoles souhaiteraient également que leur expérience professionnelle puisse être reconnue et homologuée par la SNSM sans devoir repasser par le cursus entier d’une formation en interne. M. Christophe Monnereau, président de la station SNSM des Sables d’Olonne, a ainsi relayé auprès de votre rapporteur pour avis la situation d’un plongeur professionnel, bénévole à la SNSM, auquel il serait demandé de suivre une formation de plongée délivrée par la SNSM pour obtenir un brevet qu’il détient déjà.

3.   Valoriser la place des stations locales et le rôle des bénévoles

Depuis les recommandations formulées par le rapport sénatorial de 2019 en faveur d’un fonctionnement interne plus démocratique et impliquant davantage les stations locales dans les prises de décision, votre rapporteur pour avis souligne que d’importantes réformes ont été menées à la SNSM, répondant à une volonté d’une plus grande démocratie interne.

La révision des statuts de la SNSM a permis de renforcer la participation des bénévoles au sein de la direction de l’association. Les sauveteurs bénévoles, présents depuis au moins trois années dans une structure locale peuvent désormais voter à l’assemblée générale. Des commissions consultatives composées de bénévoles et de salariés de l’association sont sollicitées pour analyser les projets portés par la direction nationale et rendre un avis auprès du conseil d’administration de l’association.

Comme l’a mis en avant le patron suppléant de la station de Saint‑Valéry‑en‑Caux lors de son audition, des efforts ont également été faits pour améliorer la prise en charge des besoins en équipement des bénévoles et pour les accompagner du point de vue administratif et juridique, dans un contexte de judiciarisation accrue de la société.

Procès de la station de Ouistreham

Le remorquage du navire Breiz en janvier 2021 par le canot tous temps de la station de Ouistreham s’est terminé par un drame, avec le chavirement du navire remorqué et le décès des trois pêcheurs qui étaient à son bord. Après enquête, le BEA-Mer n’a relevé aucune erreur de la SNSM.

Une procédure pénale a toutefois été ouverte contre l’équipage de la station de Ouistreham, avec sa mise en garde à vue, dans des conditions qui ont provoqué une certaine indignation chez les bénévoles. Le patron d’équipage a été renvoyé devant le tribunal maritime et l’audience est prévue en octobre 2023.

Comme l’ont relayé les différentes personnes auditionnées et, en particulier, le président de la SNSM : « ces évènements ont fortement troublé les sauveteurs bénévoles et pourraient avoir des conséquences très importantes sur leur engagement futur. Si les sauveteurs sont des citoyens justiciables comme les autres, et pleinement responsables de leurs actes, la spécificité de leur activité bénévole de secours de la vie humaine en mer, au titre du service public, devrait pouvoir les préserver d’un acharnement judiciaire lorsque les fautes éventuelles ne sont pas détachables du service. Il y va de la survie et de la pérennité de notre modèle bénévole et associatif. »

C.   Renouveler la flotte, gage de sÉcuritÉ et de qualitÉ des interventions

1.   État des lieux de la flotte de la SNSM

La SNSM dispose d’une flotte de 781 embarcations de sauvetage et de formation, dont 339 canots, vedettes et semi-rigides pour le sauvetage en mer, ce qui en fait l’un des premiers armateurs en France. La gestion d’une telle flotte s’accompagne d’une lourde responsabilité d’entretien et de renouvellement de ces navires pour les maintenir en bon état de fonctionnement et en conformité avec les standards de sécurité attendus pour mener des opérations de sauvetage.

Or, comme l’avait déjà souligné le rapport sénatorial de 2019, la flotte de la SNSM est vieillissante. Selon ce même rapport, sans plan de renouvellement, il était prévu que 11 canots tous temps (CTT) sur les 41 dont disposait la SNSM et 15 vedettes type V2 sur les 69 de la flotte auraient plus de trente ans en 2020 et que le reste de la flotte des CTT atteindrait trente ans entre 2021 et 2023. L’accroissement du nombre d’interventions de la SNSM ces dernières années a par ailleurs conduit à une utilisation plus intensive de ces mêmes navires.

Comme l’a rappelé M. Emmanuel de Oliveira, président de la SNSM, la flotte est la clé de voûte opérationnelle de l’association. Le navire de sauvetage est la première garantie de sécurité pour les sauveteurs-bénévoles lors de leurs interventions en mer. Les auditions menées auprès de deux stations locales de la SNSM ont permis de mesurer la nécessité pour les sauveteurs d’avoir une confiance presque absolue dans la solidité et la fiabilité de leurs navires.

2.   Le plan « Nouvelle flotte », un succès en demi-teinte

a.   Un plan de renouvellement de la flotte ambitieux

Face au constat d’une flotte vieillissante et hétérogène, la SNSM a lancé en 2019 le plan « Nouvelle flotte », renommé depuis « Cap 2030 », dont le pari ambitieux était à la fois de répondre à l’urgence de fournir 140 navires neufs sur dix ans aux stations dont les canots et vedettes arrivaient à leur âge limite, tout en redéfinissant une nouvelle stratégie pour le renouvellement de la flotte.

Jusqu’alors, la SNSM faisait appel à plusieurs chantiers navals en fonction des besoins de construction de bateaux neufs pour les différentes stations de sauvetage. Cette démarche a fait connaître à la SNSM quelques errements par le passé. La conclusion de plusieurs contrats avec des chantiers différents dans un secteur très concurrentiel a entraîné pour l’association des coûts et des délais de prestations très importants. Un des objectifs du programme Nouvelle flotte a donc été de contracter avec un maître d’œuvre unique. Le chantier naval Couach a ainsi été retenu, en collaboration avec le cabinet d’architecture Barreau-Neumann.

Précisions sur le contenu du contrat de commande Couach

« Le contrat passé avec le chantier naval Couach pour une période de dix ans porte sur une première tranche ferme de l’ordre de 25 millions d’euros pour la fourniture de 35 navires sur cinq ans, puis sur une seconde tranche, optionnelle, d’un même montant pour le même nombre de navire et également sur cinq ans.

« Dans la mesure où les finances de la SNSM le permettraient, le contrat prévoit la mise à disposition de la SNSM d’une capacité industrielle de production lui permettant de satisfaire l’ensemble de ses besoins de renouvellement, à savoir 140 bateaux sur dix ans. »

Source : https://www.snsm.org/sites/default/files/2022-10/snsm-fiche-infos-cles-programme-nouvelle-flotte.pdf

Un autre objectif poursuivi est celui d’homogénéiser la flotte de la SNSM afin d’optimiser les coûts de maintenance et d’entretien des navires. La nouvelle flotte se compose ainsi de navires de sauvetage hauturiers (NSH), se substituant aux canots tous temps (CTT), et de navires de sauvetage côtiers (NSC), destinés à intervenir de façon très réactive dans la bande côtière.

Si le pari, audacieux, d’obtenir une flotte homogène auprès d’un chantier naval unique était pertinent pour permettre à la SNSM de peser sur un segment de marché très concurrentiel, le déploiement du contrat a rencontré un certain nombre de difficultés, alimentant une incompréhension grandissante sur le terrain face aux choix pris par la direction nationale avec le plan Nouvelle flotte.

b.   Un déploiement retardé entraînant une incompréhension sur le terrain

Alors que le contrat avec le chantier naval Couach a été signé le 17 octobre 2019, le constat qui est fait par les autorités de la SNSM à ce jour est que, quatre ans plus tard, aucun des navires commandés n’a encore été livré en étant immédiatement opérationnel sur l’eau.

Si les retards accumulés les deux premières années suivant la signature du contrat s’expliquent en grande partie par la situation sanitaire liée à la pandémie de la covid-19, le lancement de la production en 2021 aurait dû conduire à la livraison d’une partie des navires en 2022, selon les termes du contrat. Or, l’année 2022 et une partie de l’année 2023 ont été consacrées à des essais technico-opérationnels qui ne devaient durer que trois mois pour chacune des têtes de série de modèle de navire. La multiplication du nombre d’essais technico-opérationnels ne semble pas avoir contribué à accroître le degré de confiance dans ces nouveaux modèles de navires. Les auditions menées auprès de stations locales de la SNSM ont permis de mesurer l’attachement qu’ont les sauveteurs-bénévoles à « leur » navire de sauvetage qu’ils connaissent par cœur et dont la robustesse et la fiabilité ne sont plus à prouver : « on connaît notre bateau, on sait ce que ça vaut ! » a déclaré M. Christophe Monnereau, président de la station SNSM des Sables d’Olonne.

Outre les retards cumulés à la multiplication d’essais techniques successifs, l’incompréhension des bénévoles sur le terrain autour du plan Nouvelle flotte se cristallise sur le prix à l’unité de ces nouveaux navires. En 2023, 10 navires de type NSH1 ont été construits pour le prix de 2,5 millions d’euros l’unité, 8 navires de type côtiers de 1re classe au prix de 1,5 million d’euros l’unité et 35 navires de 6,6 mètres à 9 mètres pour un prix moyen de 200 000 euros à 300 000 euros. Le coût de revient du premier navire de la tête de série NSH1, qui a été livré à la station de l’Herbaudière à Noirmoutier, est estimé à près de 2,8 millions d’euros, après deux saisons passées dans le port et aujourd’hui placé au sec sans être opérationnel.

Si les bénévoles ont été associés au plan Nouvelle flotte au travers de la commission consultative flotte, votre rapporteur pour avis s’interroge sur l’avenir de ce plan et du contrat liant la SNSM avec le chantier naval Couach au regard de la réserve exprimée par certaines stations locales à la réception de ces nouveaux navires.

3.   Une troisième voie est en train de se dessiner

a.   Des investissements importants déjà engagés

En raison des retards importants du programme Nouvelle flotte, de nombreux investissements ont été reportés de deux ou trois ans, ce qui a conduit à une augmentation exceptionnelle de la trésorerie de la SNSM en 2022 et 2023. Celle-ci s’élèverait à environ 50 millions d’euros fin 2022. Toutefois, avec l’entrée en phase de production et l’achat des nouveaux navires, il est prévu que le niveau de trésorerie redescende autour des 500 000 euros en 2025.

Le programme d’investissements de la SNSM pour les années 2024-2027 s’élève à un total de 104 millions d’euros, sans compter les effets possibles de l’inflation. En 2022, la SNSM a ainsi dépensé 14,6 millions d’euros au titre des investissements, dont 70 % consacrés au renouvellement et à l’entretien de sa flotte, sachant que le financement du renouvellement de la flotte repose sur un schéma historique de financement qui doit être pris en compte. Le financement d’un nouveau navire obéit à la règle dite des 4/4. Un quart du coût du navire est financé par la station locale, auquel s’ajoutent 25 % de financement de la région, 25 % du département et 25 % de l’État.

b.   Une nouvelle voie à l’essai

La décision a été prise en 2023 de contracter avec d’autres chantiers navals pour produire le reste des navires manquants pour répondre au sentiment d’urgence chez les bénévoles de remplacer les navires vieillissants. Le contrat passé avec le chantier naval Couach ne portant, en tranche ferme déjà financée, que sur 35 navires, il a été décidé de contracter avec d’autres chantiers navals pour la seconde moitié du contrat qui n’a pas encore été engagée. Cette décision préfigure les contours d’une nouvelle stratégie dans le renouvellement de la flotte de la SNSM : celle de ne plus être captif d’un seul chantier naval.

Les chantiers navals de Gatto à Martigues et de Pors-Moro à Pont-L’abbé, vont ainsi construire les vedettes de 12 mètres que le chantier naval Couach ne peut livrer, au nombre de 7 pour 2023.

Votre rapporteur pour avis souhaite souligner à ce stade, compte tenu du « précédent Couach », l’impérieuse nécessité d’identifier les besoins et surtout de contractualiser avec des opérateurs capables de réaliser les navires en respectant en tout point le cahier des charges préalablement défini.

 


—  1  —

   troisiÈme partie : les lycÉes professionnels maritimes

La France est dotée d’un réseau de douze lycées professionnels maritimes ([14]), répartis sur l’ensemble du littoral, qui est complété par des centres de formation publics et privés agréés, présents notamment en outre-mer.

La formation secondaire professionnelle maritime prépare les élèves du certificat d’aptitude professionnelle (CAP) au brevet de technicien supérieur (BTS) aux métiers de la navigation dans les filières du commerce, de la pêche et de la plaisance ainsi qu’aux métiers des cultures marines.

I.   Atouts et dÉfis des lycÉes professionnels maritimes

A.   Des atouts À prÉserver

1.   Des effectifs réduits facilitant un suivi personnalisé des élèves

En 2023, 1 848 élèves ont fait leur rentrée scolaire dans l’un des douze lycées professionnels maritimes. Les effectifs des LPM sont ainsi en légère hausse de 15 % par rapport à la rentrée 2022. À titre de comparaison, 627 100 élèves sont inscrits dans les 2 080 lycées professionnels en 2023.

Avec une centaine d’élèves, en moyenne, par établissement, les LPM sont des structures de petite taille offrant un fort taux d’encadrement par élève en comparaison aux taux d’encadrement observés dans le reste des lycées professionnels. À titre d’exemple, au Guilvinec, le lycée professionnel maritime compte seulement 116 élèves en formation initiale.

Les représentants syndicaux et enseignants des lycées professionnels maritimes, auditionnés par votre rapporteur pour avis, ont tous mis en avant l’atout spécifique que représentent ces effectifs réduits des LPM pour assurer une prise en charge et un suivi personnalisés des élèves, clef de leur réussite scolaire et professionnelle.

Grâce à ce suivi personnalisé, les LPM offrent également une meilleure chance de promotion sociale aux élèves en difficulté scolaire ou issus de milieux défavorisés. En effet, près de la moitié des élèves en LPM sont boursiers, alors qu’ils ne représentent qu’un tiers des élèves à l’Éducation nationale.

2.   Des taux de réussite scolaire et d’insertion professionnelle très élevés

Chaque lycée professionnel maritime dispose de filières de baccalauréat professionnel (BP) en trois ans. Hormis trois LPM, ces lycées disposent également de classes de BTS.

L’organigramme de la formation maritime au sein des LPM

À tous les niveaux de diplômes, les lycées professionnels maritimes présentent d’excellents taux de réussite aux examens de fin d’année ([15]) :

– 94,3 % de réussite pour le CAP ;

– 83,9 % pour les baccalauréats professionnels ;

– 97,2 % pour les BTS.

Les élèves diplômés des lycées professionnels maritimes bénéficient également d’un très bon taux d’insertion dans le monde professionnel. 85 % des élèves trouvent un emploi dans les six mois suivant leur formation.

Ce taux d’insertion professionnelle élevé reflète, d’une part, un très bon ancrage des LPM dans les bassins d’emplois maritimes et, d’autre part, un secteur professionnel offrant de nombreux débouchés en raison d’une forte demande en marins formés.

Le monde maritime reste un secteur où l’ascenseur social continue de fonctionner. Comme tient à le souligner votre rapporteur pour avis, la formation professionnelle maritime est marquée par une tradition de promotion sociale à préserver : en partant d’un niveau de qualification de type matelot de pont (niveau CAP), il est encore possible de parvenir à des brevets de capitaine grâce à la formation continue.

B.   Des dÉfis d’attractivitÉ À relever

1.   Les difficultés de recrutement d’enseignants techniques

Votre rapporteur pour avis souhaite relayer une inquiétude parmi le personnel enseignant des lycées professionnels maritimes : la difficulté de recrutement d’enseignants pour les matières techniques. L’enseignement professionnel rencontre en effet d’importantes difficultés à attirer des marins et plus largement des professionnels du monde maritime pour venir enseigner dans les lycées professionnels.

Le premier obstacle serait lié au niveau de rémunération dans l’enseignement secondaire, qui est largement en-dessous des niveaux de salaires auxquels les professionnels du monde maritime peuvent prétendre dans leur secteur d’activité.

2.   Ouvrir davantage les LPM aux milieux non maritimes

En 2023, la majorité des élèves sont encore issus du milieu maritime, soit de familles de marins, soit par proximité géographique avec les lieux d’implantation des lycées maritimes. Or, l’enjeu actuel est d’attirer plus d’élèves en ayant un rayon plus large que le seul littoral pour attirer plus de profils d’élèves, que ce soit par leur origine géographique ou par leur milieu socioculturel.

L’effort de communication sur les débouchés professionnels offerts par l’enseignement maritime secondaire doit être poursuivi et le soutien financier aux lycées professionnels maritimes maintenu pour permettre aux établissements d’adapter ou d’agrandir leurs locaux pour accueillir davantage de nouveaux élèves en internat.

3.   Préserver le lien privilégié entre le personnel éducatif et l’administration

Historiquement, les enseignants dans les lycées professionnels maritimes étaient systématiquement consultés par l’administration, sous tutelle du secrétariat d’État chargé de la mer en collaboration avec l’Éducation nationale, sur l’écriture des référentiels pour l’élaboration des programmes scolaires.

Or, les syndicats du personnel enseignant dans les LPM, lors de leur audition, ont relayé une inquiétude émergente quant au recul du suivi des lycées professionnels maritimes au ministère de la transition écologique et l’absence de trajectoire proposée, notamment en raison du manque d’effectifs au ministère chargés de suivre spécifiquement l’enseignement maritime secondaire.

Si la « petite » taille des LPM reste un atout pour assurer la qualité de l’enseignement maritime secondaire et un suivi individualisé des futurs marins, votre rapporteur pour avis estime que les LPM doivent également pleinement s’inscrire dans la réforme de la voie professionnelle. Cette réforme est l’occasion de poursuivre la modernisation des LPM, de mettre en avant leurs atouts et de renforcer l’attractivité des métiers de la mer.

II.   Les lycÉes professionnels maritimes dans le cadre de la rÉforme de la voie professionnelle

A.   Une filiÈre dÉjÀ profondÉment rÉformÉe depuis deux dÉcEnnies

1.   Historique de la création de la filière maritime secondaire

Alors que la formation maritime est très contrainte par la mise en conformité des cursus aux règles internationales édictées par l’Organisation maritime internationale (OMI) pour que les brevets obtenus dans les établissements de formation en France soit reconnus à l’étranger, la filière a également dû s’adapter à une succession de réformes nationales d’ampleur.

En 1991, les premières classes de BEP sont ouvertes pour la filière de la formation professionnelle maritime, qui disparaîtront avec la réforme du baccalauréat professionnel de 2019. Les premiers baccalauréats professionnels sont créés en 2005, avant d’être réformés en 2009 pour passer d’un cursus en quatre ans à un cursus en trois ans et les premiers BTS sont ouverts en 2014, soit il y a moins de dix ans. L’ouverture de classes de BTS maritimes a participé à la diversification des formations dispensées et a constitué un tremplin pour les titulaires de baccalauréats professionnels maritimes vers l’enseignement supérieur, conformément au processus de Bologne.

2.   Réforme du baccalauréat professionnel de 2019

La réforme des baccalauréats professionnels et des certificats d’aptitude professionnelle, dite « réforme Blanquer », est entrée en vigueur à la rentrée scolaire 2019 pour les classes de seconde et les premières années de CAP :

– par la création d’une seconde professionnelle maritime « partagée », c’est‑à-dire commune à l’ensemble des filières garantissant un socle minimal de connaissances dans le domaine maritime ;

– par la rénovation des baccalauréats professionnels pour répondre aux nouvelles exigences de progressivité des diplômes et des formations professionnelles, favorisant la poursuite des études, et pour renforcer l’adéquation des formations avec les exigences internationales en matière de qualification, gage d’employabilité des élèves en sortie de formation.

Sur ce second volet de la réforme dans les LPM, si les syndicats d’enseignants, auditionnés par votre rapporteur pour avis, ont alerté sur des problèmes persistants d’articulation entre les baccalauréats professionnels rénovés et les BTS, source d’incertitude dans le parcours scolaire des élèves, la rénovation des cursus a aussi permis aux lycées professionnels maritimes de continuer à proposer des formations en adéquation avec les attentes du secteur.

B.   une modernisation À poursuivre tout en prÉservant les spÉcificitÉs de la filiÈre

1.   Un besoin d’adaptation constant aux évolutions du secteur maritime

Les lycées professionnels maritimes, pour maintenir l’attractivité de leur cursus de formation et des taux élevés d’insertion professionnelle pour leurs élèves, doivent constamment adapter leur programme et leur offre de formation aux évolutions du monde maritime.

Un exemple concret est celui de la création du BTS en mécatronique navale. Ce nouveau cursus, ouvert à la rentrée 2022, est le résultat d’un travail en étroite collaboration avec la Marine nationale. Cette formation, dispensée dans les lycées professionnels maritimes Pierre Loti de Paimpol et Jacques Cassard de Nantes, répond spécifiquement aux besoins du secteur maritime civil et de la Marine nationale.

Certains LPM ont aussi pris la voie de la transition écologique et énergétique en investissant dans la construction de bateaux-écoles avec propulsion innovante. Le lycée du Guilvinec, par exemple, a ouvert une option « transport de marchandises à la voile » au sein du baccalauréat professionnel « commerce et gestion des entreprises maritimes » (CGEM). Un tel investissement représente une prise de risque financier importante pour ces établissements, en raison du manque de visibilité quant aux technologies innovantes qui s’imposeront dans le futur.

Votre rapporteur pour avis souligne qu’il est important que les établissements continuent à être accompagnés et soutenus dans leur effort d’adaptation à l’enjeu de décarbonation du secteur maritime.

2.   Les LPM dans la réforme de la voie professionnelle

Dans l’objectif de garantir une meilleure employabilité des élèves issus de la formation professionnelle, les LPM sont également concernés par la mise en place de la réforme de la voie professionnelle dès la rentrée 2023-2024. Le projet de loi de finances pour 2024 prévoit, à ce titre, 1 million d’euros de crédits pour financer la gratification des périodes de formation en milieu professionnel prévue par la réforme.

Votre rapporteur pour avis tient à rappeler que le modèle des lycées professionnels maritimes est déjà très proche du modèle « terrestre » de l’apprentissage en termes d’encadrement et d’expérience en milieu professionnel. L’enjeu des prochaines années sera de tirer profit de cette proximité entre le milieu maritime professionnel et les lycées maritimes pour attirer plus d’élèves au regard du gisement de débouchés professionnels qu’offre ce secteur.


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   examen en commission

Après avoir auditionné M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, le 11 octobre 2023, et M. Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports, le 17 octobre 2023, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a examiné les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » le mardi 17 octobre 2023 soir et le mercredi 18 octobre 2023 matin et après-midi (voir tome XI de l’avis n° 1719 : https://assnat.fr/WqHsAM).

À l’issue de cet examen, elle a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission modifiés.

 

 


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   liste des personnes auditionnées

(par ordre chronologique)

Société nationale de sauvetage en mer (SNSM)

M. Emmanuel de Oliveira, président

Direction générale des affaires maritimes, de la pêche et de l’aquaculture

M. Christophe Lenormand, chef du service « Flottes et marins »

M. Vincent Denamur, sous-directeur « Sécurité, navigation et contrôle »

Comité national des pêches maritimes et des élevages marins *

M. Olivier Le Nezet, président

M. Philippe de Lambert des Granges, directeur général

Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires

M. Nicolas Trift, sous-directeur en charge des ports et du transport fluvial à la direction des services de transport de la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer

M. Christophe Monnereau, président de la station SNSM des Sables d'Olonne

Cluster maritime français *

M. Frédéric Moncany de Saint-Aignan, président

M. Grégoire Bur, collaborateur stagiaire

Fédération des industries nautiques *

M. Fabien Métayer, délégué général

M. Olivier Bougan, secrétaire général

Syndicat national de l’enseignement technique agricole public

M. Jean-François Albert

Mme Pascale Bozec

M. Philippe Le Bourdon

M. Gurvan Simon

M. Fabrice Cardon

Représentants des personnels des syndicats SNE-FSU et SNETAP-FSU

 

Table ronde des armateurs

 Armateurs de France *

M. Édouard Louis-Dreyfus, président et président de Louis Dreyfus Armateurs

M. Jean Philippe Casanova, délégué général

Mme Laurène Niamba, responsable « Relations institutionnelles et affaires juridiques »

Mme Cécile Rafat, responsable des affaires économiques, fiscales, statistiques

 Brittany Ferries

M. Jean Marc Roue, président du conseil de surveillance

M. Bruno Denoyelle, conseiller du président

 GEOGAS

M. Marc Etcheberry, directeur général et président du comité « Économie fiscalité »

Station SNSM Saint Valery en Caux

M. Nicolas Thiollent, patron suppléant de la station

 

 

 

 

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.


([1]) Rapport d’information n° 81 (2019-2020) de M. Didier Mandelli, fait au nom de la mission commune d’information sur le sauvetage en mer, Sénat (2019-2020).

([2]) p. 35 du PAP 2024.

([3]) Le Seam est une mesure gouvernementale de compétitivité et de soutien à l’emploi, mise en place pour trois ans (2022 à 2024) au bénéfice du secteur maritime.

([4]) Loi n° 2023-659 du 26 juillet 2023 visant à lutter contre le dumping social sur le transmanche et à renforcer la sécurité du transport maritime.

([5]) Rapport annuel de la SNSM pour l’année 2022.

([6]) Loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant sur la nouvelle organisation territoriale de la République.

([7]) P. 27 du rapport annuel pour l’année 2022

([8]) Rapport d’information n° 81 (2019-2020) de M. Didier Mandelli, fait au nom de la mission commune d’information sur le sauvetage en mer, Sénat (2019-2020).

([9]) Source : réponse au questionnaire budgétaire.

([10]) Sur la base d’une prévision d’inflation moyenne annuelle de + 4 %, l’association anticipe un surcoût de l’ordre de 8 à 10 millions d’euros dans le budget de fonctionnement pour 2027 par rapport à celui pour 2023.

([11]) Convention internationale de 1974 pour la sauvegarde de la vie humaine en mer, dite « Solas 74 » et convention internationale de 1979 sur la recherche et le sauvetage maritimes, dite « SAR 79 ».

([12]) Rapport d’activité 2022 de la SNSM.

([13]) Cf. proposition n° 5 : établir des équivalences et uniformiser les diplômes et formations.

([14]) LPMA de Bastia, LPM Boulogne/Le Portel, LPMA Daniel Rigolet-Cherbourg, LPM de Ciboure, LPMA d’Etel, LPM Anita CONTI-Fécamp, LPM du Guilvinec, LREMA de La Rochelle, LPM Jacques Cassard – Nantes, LPM Pierre Loti-Paimpol, LPM Florence Arthaud – Saint-Malo, Lycée de la Mer-Sète.

([15]) Chiffres de juin 2023.