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N° 1719

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÉME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 11 octobre 2023.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2024 (n° 1680)

TOME XI

ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES

COMPTES RENDUS

PAR M. Jean-Louis BRICOUT, Mme Danielle BRULEBOIS,
MM. Stéphane BUCHOU, Emmanuel MAQUET,
Mme Alexandra MASSON, MM. Pierre MEURIN, Marcellin NADEAU,
Députés

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 Voir les numéros : 1680, 1745.

 


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SOMMAIRE

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Pages

EXAMEN EN COMMISSION

I. réunion du mardi 17 octobre 2023 soir

II. réunion du Mercredi 18 octobre matin

III. Réunion du Mercredi 18 octobre 2023 après-midi

 

 


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   EXAMEN EN COMMISSION

I.   réunion du mardi 17 octobre 2023 soir

Lors de sa réunion du mardi 17 octobre 2023 soir, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a examiné les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » sur les rapports pour avis de Mme Danielle Brulebois sur les crédits relatifs aux transports terrestres et fluviaux, de M. Stéphane Buchou sur les crédits relatifs aux affaires maritimes, et de Mme Alexandra Masson sur les crédits relatifs aux transports aériens et ceux du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis (Transports terrestres et fluviaux). J’ai l’honneur d’inaugurer l’examen de cette mission par la présentation des crédits du programme 203, Infrastructures et services de transports.

Les équilibres de ce programme sont conformes au scénario de la planification écologique retenu par la Première ministre lors de la remise du rapport du Conseil d’orientation des infrastructures (COI), le 24 février dernier. Nous partions de très loin mais, dès 2018, la loi d’orientation des mobilités (LOM) a pérennisé le COI. Je félicite M. David Valence, son président, et ses équipes, pour leur travail responsable et ambitieux. L’investissement dans nos infrastructures est une nécessité qui ne doit pas être perçue sous le seul angle du coût, mais comme un catalyseur de croissance, de services et de cohésion de la société.

Le programme 203 est stratégique pour améliorer nos services de transport au bénéfice des usagers comme pour atteindre les objectifs de décarbonation du secteur, aujourd’hui responsable de plus du tiers des émissions de gaz à effet de serre du pays.

Conformément aux engagements du Gouvernement, ce budget est en hausse : doté de près de 4,4 milliards d’euros, le programme 203 augmente de plus de 300 millions par rapport à la loi de finances pour 2023 ; il donne une nette priorité aux modes décarbonés, en particulier au ferroviaire et aux transports collectifs.

Le budget de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France) s’élève à 4,6 milliards d’euros en 2024, en hausse de 800 millions d’euros par rapport à 2023 grâce à une nouvelle taxe sur les concessions autoroutières et les aéroports. Ce projet de taxe vise à mettre à contribution les secteurs autoroutier et aérien, c’est-à-dire les modes de transport les plus émetteurs de gaz à effet de serre, au bénéfice des modes décarbonés et moins polluants. Nous l’avons adopté sans modification en commission lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances (PLF).

La hausse de 13 % des crédits relatifs aux transports sur le périmètre du programme 203 et de l’Afit bénéficiera essentiellement au ferroviaire, aux transports collectifs, aux transports combinés et aux infrastructures cyclables. L’ensemble de ces modes représentera ainsi 59 % des investissements de l’Afit en 2024.

En contrepartie, les crédits dédiés à la route sont stabilisés. La priorité est donnée à l’entretien et à la régénération du patrimoine routier existant plutôt qu’au financement de nouveaux projets routiers. Je précise que cette orientation est pertinente à l’échelle de la France métropolitaine, mais pas dans certains territoires d’outre-mer qui rencontrent des difficultés spécifiques – je pense notamment à la Guyane, qui a besoin de développer son réseau de routes.

Les mandats de négociation des nouveaux contrats de plan État-région (CPER) reflètent également ces nouvelles priorités. La part de l’État sera intégralement financée par l’Afit, à hauteur de 8,6 milliards d’euros entre 2023 et 2027. Les deux tiers de l’enveloppe sont fléchés vers les transports ferroviaires et collectifs. En particulier, 700 millions d’euros seront consacrés au lancement des projets de services express régionaux métropolitains (Serm), avec le financement de premières études de préfiguration. De plus, 750 millions iront à la remise en état de lignes de desserte fine du territoire, plus communément appelées « petites lignes ». Cet effort s’inscrit dans la continuité des financements du plan de relance. Il appartiendra aux régions de choisir les projets qui seront financés entre 2024 et 2027. Le fret ferroviaire recevra 500 millions, afin notamment de remettre en état des lignes capillaires de fret. Enfin, 500 millions financeront la mise en accessibilité des gares ferroviaires.

L’enveloppe pour le financement de nouveaux projets routiers a été réduite de moitié par rapport aux précédents CPER.

Un mot également sur le vélo, qui bénéficie d’un soutien renforcé dans le cadre du nouveau plan Vélo et mobilités actives 2023-2027, lancé l’année dernière par la Première ministre. Pour la seule année 2023, plus de 200 millions d’euros seront versés aux collectivités pour des aménagements cyclables dans le cadre du sixième appel à projets du fonds Mobilités actives. Par comparaison, c’était 365 millions d’euros au total pour les cinq premiers appels à projets !

Le développement de nos infrastructures cyclables et de la pratique du vélo est très encourageant : les ventes de vélos à assistance électrique progressent fortement, grâce aux aides ; les aménagements cyclables sécurisés se multiplient ; la part modale du vélo pour les déplacements entre le domicile et le travail augmente sensiblement.

Le nouveau plan Vélo fait par ailleurs une priorité de l’accompagnement des territoires ruraux moyennement et peu denses. Je m’en réjouis car le vélo a là toute sa place, contrairement aux idées reçues.

Concernant le volet fluvial, Voies navigables de France (VNF) tient la trajectoire ambitieuse prévue par son contrat d’objectifs et de performance (COP) en matière de modernisation et de régénération de son réseau grâce à des ressources dynamiques. La remise en état du réseau fluvial est d’autant plus cruciale que celui-ci est affecté par le réchauffement climatique et par des épisodes de sécheresse accrue. Il faut aujourd’hui veiller à préserver cette dynamique positive issue du COP et du plan de relance.

À la suite du dernier rapport du COI, et du choix du scénario le plus ambitieux, il est plus que jamais nécessaire de nous doter d’une programmation pluriannuelle des investissements pour les infrastructures de transport, grâce à un schéma directeur qui repose sur des ressources fléchées et affectées, afin de tracer des perspectives et d’assurer une meilleure visibilité à un secteur qui fonctionne sur le temps long.

Comme l’a dit le président de notre commission, le Parlement doit prendre toute sa place dans les choix d’orientation et des financements de nos infrastructures de transport, comme c’est déjà le cas pour la programmation militaire par exemple.

C’est tout particulièrement nécessaire pour le ferroviaire qui requiert une vision à long terme : les décisions d’investissement en faveur du rail entraînent des conséquences pour plusieurs décennies.

En cohérence avec nos ambitions partagées pour ce secteur, la Première ministre a annoncé le 24 février dernier un plan de 100 milliards d’euros pour le ferroviaire à l’horizon 2040, avec un investissement renforcé pour la régénération et la modernisation de l’ordre de 1,5 milliard d’euros supplémentaires d’ici à la fin du quinquennat. L’ensemble des personnes auditionnées pour cet avis ont salué cet engagement historique pour une nouvelle donne ferroviaire, de même que la priorité donnée à l’état du réseau.

Les travaux du COI, et plus récemment de l’Autorité de régulation des transports (ART), confirment en effet que l’état vieillissant du réseau ferroviaire et le retard accumulé par rapport à nos voisins européens pour le déploiement de la commande centralisée de réseau et du système européen de gestion de trafic des trains (ERTMS) constituent des freins majeurs au report modal et à la croissance attendue des trafics ferroviaires. Dans un rapport publié cet été, l’Autorité de régulation des transports a estimé qu’à niveau d’investissement constant, la dégradation du réseau pourrait conduire jusqu’à 13 % de pertes de trafic à l’horizon 2030.

Les annonces de la Première ministre vont donc dans le bon sens. Toutefois, à ce jour, les détails de ce plan – en particulier les modalités de financement des 1,5 milliard d’euros supplémentaires annoncés pour le réseau ferré à l’horizon 2027, conformément aux recommandations du rapport du COI – ne sont pas communiqués. C’est pourquoi je vous proposerai d’adopter une demande de rapport au Parlement sur ce sujet.

En ce qui concerne les services express régionaux métropolitains, je voudrais remercier notre président et saluer le travail de notre commission sur ce sujet. Les auditions de Régions de France, de la Société du Grand Paris et de la SNCF ont confirmé que ces projets pourront être correctement amorcés dans le cadre des nouveaux CPER. Fondés sur un haut niveau d’intermodalité, les Serm répondent tout autant à nos objectifs de décarbonation qu’aux besoins d’amélioration de la desserte entre les zones périphériques des grandes agglomérations. La plupart des projets n’émergeront pas avant la fin de la décennie 2030 ; nous n’en sommes qu’aux prémices, mais la dynamique est lancée.

J’ai déposé un amendement pour relever le plafond d’emplois de la Société du Grand Paris. Ses missions devraient être élargies par la proposition de loi adoptée par notre assemblée et en cours d’examen au Sénat ; or, son plafond d’emplois n’évolue pas en conséquence dans le PLF pour 2024.

Je défendrai deux autres amendements, l’un visant à relever la dotation budgétaire allouée à l’ART, qui n’a pas augmenté en proportion de l’élargissement de ses missions depuis 2015, le second visant à renforcer l’équipe dédiée aux trains d’équilibre du territoire (TET), dont l’État est autorité organisatrice, conformément à une recommandation du rapport d’évaluation de MM. Valence et Maquet.

M. Stéphane Buchou, rapporteur pour avis (Affaires maritimes). La France est une grande puissance maritime. Avec ses 10,2 millions de kilomètres carrés de zone économique exclusive (ZEE), dont 97 % situés outre-mer, elle possède le deuxième domaine maritime mondial derrière les États-Unis. Il nous revient dès lors de jouer un rôle majeur pour relever les défis de la transition écologique et affronter les questions stratégiques, sociales et économiques posées par cet espace. La stratégie nationale Mer et littoral, dont la mise au point s’achève, doit dessiner plus précisément les contours de nos politiques, ainsi que des moyens qui leur seront alloués.

Une partie des réponses se trouve dans le budget du programme 205, Affaires maritimes, pêche et aquaculture, qui finance l’action de l’État concernant la mer, les politiques marines, les navires et les ressources. Ce programme comprend les crédits de la politique de sûreté et de sécurité maritimes civiles, la régulation sociale de l’emploi maritime – avec la formation, l’hygiène, la santé, les conditions de travail –, le soutien à la qualité et au développement du pavillon français, la participation à la protection de l’environnement marin et littoral, la politique des pêches maritimes, de l’aquaculture… Il faut lui adjoindre l’action 43 du programme 203, Ports, qui représente 2,1 % des crédits consacrés à l’entretien des accès et des ouvrages d’accès des grands ports maritimes.

Je me concentrerai sur la surveillance et la sûreté maritimes et sur la formation.

Les autorisations d’engagement du programme 205 s’élèvent à près de 300 millions d’euros, une hausse significative de près de 22 % par rapport à l’an dernier. Les crédits de paiement sont en hausse de 14 %, soit 34 millions d’euros supplémentaires. Toutes les actions sont concernées. Je me félicite de ces orientations qui permettront de financer un dispositif d’exonération de charges, l’acquisition d’un nouveau patrouilleur hauturier des affaires maritimes, la création d’un guichet maritime et portuaire, la gratification des périodes de formation en milieu professionnel ou encore les projets retenus dans le cadre du fonds d’intervention maritime.

Près de 5 millions d’euros sont consacrés au suivi des ressources halieutiques. C’est indispensable pour le bon accompagnement de nos marins pêcheurs dans le cadre des négociations sur les quotas qui se tiennent à Bruxelles chaque fin d’année. Sans données scientifiques sérieuses et objectives, un outil qui n’existe pas vraiment aujourd’hui, la pêche sert malheureusement régulièrement de variable d’ajustement. Il y va pourtant de la survie de ces activités essentielles à notre souveraineté alimentaire, maillons forts de l’économie de nos territoires et dont les ports ont façonné nos paysages.

Je redis mon souhait que la réunion annuelle européenne décide de taux admissibles de captures et de quotas pluriannuels, comme la France en fait la demande depuis plusieurs années.

J’en viens à l’action 43 du programme 203. Elle finance essentiellement le dragage des grands ports maritimes. Bien qu’en légère baisse de 2 % cette année, elle demeure à un niveau très satisfaisant de 92,5 millions d’euros.

Mon avis comportera deux parties thématiques.

La première concerne la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM). À la suite du terrible accident de 2019 aux Sables-d’Olonne, dans ma circonscription, l’État a porté sa subvention à 10,5 millions d’euros. En 2022, le budget de la SNSM s’élevait à 63,5 millions d’euros, dont 45,7 millions provenaient de collectes auprès du public – dons, legs, mécénat –, de la réalisation de prestations et de la vente de marchandises. Seul organisme agréé par l’État en qualité d’organisme de secours et de sauvetage en mer, la SNSM a reçu des subventions de l’État et des collectivités territoriales pour 17,7 millions d’euros. J’ai auditionné le président de la SNSM, M. Emmanuel de Oliveira, et les présidents de deux stations locales : la subvention de l’État semble être à la hauteur des besoins, même si la vigilance est de mise face à l’inflation. La trésorerie de l’association est à un niveau record, mais de lourds investissements l’attendent. En raison de la volatilité de la principale source de financement, le président de Oliveira a insisté sur l’importance du fléchage d’une partie de la taxe annuelle sur les engins maritimes de plaisance comme sur celle de la taxe sur l’éolien en mer.

Pour pérenniser le modèle unique de la SNSM, auquel nous sommes tous très attachés, nous devons porter attention à trois sujets.

Le premier, c’est le bénévolat : avec près de 9 000 bénévoles, dont 5 000 embarqués, pour 120 salariés, la crise du bénévolat pourrait l’affecter à court terme, et ce malgré le développement du plan Cap 2030, qui va dans le bon sens.

Le deuxième, c’est la surveillance des plages : la SNSM est le partenaire indispensable des communes. En 2022, 139 collectivités territoriales ont employé des nageurs-sauveteurs de l’association pour assurer cette mission. Le retrait annoncé des CRS de 236 postes de surveillance des plages en raison de l’organisation des Jeux olympiques en 2024 inquiète.

Le troisième, peut-être le plus alarmant, c’est le renouvellement de la flotte – ou plus exactement l’impasse dans laquelle se trouve l’association sur ce dossier. La SNSM dispose d’une flotte de 781 embarcations de sauvetage et de formation, dont 339 canots, vedettes et semi-rigides pour le sauvetage en mer. Or, comme le soulignait un rapport sénatorial en 2019, la flotte a vieilli et doit être renouvelée. Concrètement, 11 des canots tous temps parmi les 41 dont dispose la SNSM, et 15 vedettes type V2 parmi les 69 de la flotte atteignaient les trente ans ; le reste de la flotte des canots tous temps franchit le cap des trois décennies entre 2021 et 2023. La SNSM a donc lancé le programme Nouvelle flotte, visant à fournir 140 navires neufs sur dix ans aux stations dont les canots et vedettes arriveraient à leur âge limite. Un contrat a été passé il y a quatre ans avec le chantier naval Couach, en collaboration avec le cabinet d’architecture Barreau-Neuman ; pourtant, aucun des navires commandés n’a été livré en état immédiatement opérationnel sur l’eau. Je m’inquiète vivement de cette situation de nature à mettre en difficulté l’association : elle amplifie l’incompréhension voire la défiance sur le terrain et envenime les relations entre le siège et les stations locales.

Concernant enfin la formation maritime, elle est principalement assurée par les douze lycées professionnels maritimes et l’École nationale supérieure maritime (ENSM), qui reçoivent environ 34 millions d’euros. Une grande partie de ces crédits va à l’ENSM : 25 millions pour charges de service public, essentiellement pour la masse salariale, et 2 millions pour atteindre l’objectif – fixé par le Président de la République – de doubler le nombre d’officiers de la marine marchande d’ici à 2027. Les personnes auditionnées ont estimé que, compte tenu des besoins en recrutement, ces subventions sont indispensables.

Concernant les lycées professionnels maritimes, ils reçoivent 4,6 millions d’euros, auxquels s’ajoute 1 million pour financer la gratification des périodes de stage mises en place dans le cadre de la réforme des lycées professionnels à la rentrée 2023. Je m’en réjouis. Ces lycées, qui préparent les élèves du CAP au BTS, présentent d’excellents taux de réussite aux examens, mais surtout un excellent taux d’insertion professionnel : 85 % des élèves trouvent un emploi dans les six mois suivant la fin de leur formation.

Les auditions ont cependant mis en lumière les difficultés de recrutement des professeurs, en particulier pour l’enseignement des matières techniques. J’ai donc déposé un amendement tendant à augmenter de 10 % les crédits alloués aux lycées professionnels maritimes.

Quelques mots enfin de la marche vers la décarbonation, qui se traduit concrètement dans la démarche France mer 2030, destinée à fédérer les secteurs public et privé pour atteindre l’objectif Navire zéro émission. Tous les segments de la flotte sont concernés : commerce, pêche, plaisance ; les activités à terre de construction, de fourniture énergétique, de retrofitting et de déconstruction sont également concernées. La France doit être pionnière, ambitieuse et innovante. Nous y veillerons.

Mme Alexandra Masson, rapporteure pour avis (Transports aériens ; Contrôle et exploitation aériens). Le trafic aérien a connu ces dernières années la plus grosse crise de son histoire. La pandémie de covid-19 et les restrictions qui l’ont accompagnée ont durablement endommagé la situation économique de l’écosystème du secteur aérien, qui ne devrait retrouver son niveau d’avant-crise qu’en 2024.

Le projet de budget annexe Contrôle et exploitation aériens s’inscrit dans ce contexte. Les recettes pour 2024, qui dépendent largement du niveau de trafic, devraient progresser de 8 % par rapport à 2023, pour atteindre 2,4 milliards d’euros, hors emprunt.

La trajectoire de désendettement du budget annexe a été amorcée en 2023, et le niveau d’emprunt devrait continuer de se réduire. La dette restera toutefois élevée, puisqu’elle devrait atteindre 2,4 milliards d’euros à la fin de l’année 2024.

L’action de la direction générale de l’aviation civile (DGAC) est marquée par trois priorités pour 2024 : le maintien de la trajectoire de désendettement amorcée en 2023 et qui doit se poursuivre jusqu’en 2027, voire au-delà ; une hausse des dépenses d’investissement afin de soutenir la modernisation de la navigation aérienne et de respecter les standards européens en matière d’environnement et de qualité du service rendu ; le financement du protocole social pour les années 2023 à 2027, afin d’accompagner la reprise du transport aérien dans les meilleures conditions de sécurité, de sûreté et d’environnement.

Les transports aériens sont abordés sous l’angle de la critique, voire de la culpabilisation des voyageurs. L’aviation ne représente qu’environ 2,5 % des émissions de gaz à effet de serre mondiales. Il est néanmoins nécessaire de réfléchir à la meilleure façon de réduire l’empreinte carbone de ce secteur et de l’aider à réaliser sa transition énergétique.

Il faut toutefois prendre aussi en compte le poids économique du secteur, les emplois qu’il représente et les liens qu’il tisse sur notre territoire. La France est une nation phare de l’aviation, dont l’excellence est reconnue dans le monde entier.

L’aviation civile, construction aéronautique incluse, contribue ainsi pour 4,3 % au PIB national. Avec une balance commerciale excédentaire de 22,8 milliards d’euros en 2022, l’aéronautique est toujours le premier contributeur positif à la balance commerciale française. Le groupe Airbus nous a indiqué qu’à la fin du mois d’août 2023, son carnet de commandes comprenait plus de 8 000 avions.

Cette filière représente plus de 320 000 emplois directs en France : son poids économique est majeur. Le groupe Air France-KLM est le premier employeur privé de la région Île-de-France. C’est un secteur qui recrute massivement, et demeurera un vivier d’emplois dans les années à venir.

Par ailleurs, l’avion est également un outil majeur pour relier les territoires à des prix abordables pour les usagers, alors que les prix des billets de train sont souvent excessifs. La desserte de certains territoires enclavés ou insulaires – les outre-mer, la Corse ou certaines destinations métropolitaines comme Aurillac, Carcassonne, Perpignan ou Pau – repose largement sur l’avion.

Le secteur des transports aériens représente donc un actif stratégique pour la souveraineté française : il faut le préserver et l’accompagner vers la transition énergétique. Les acteurs du secteur sont déjà très engagés dans le processus de décarbonation.

Beaucoup de compagnies aériennes investissent ainsi des sommes importantes dans le renouvellement de leurs flottes. Le groupe Air France-KLM nous a indiqué investir 1 milliard d’euros par an dans le renouvellement de sa flotte, et 500 millions d’euros par an dans celle de Transavia. L’investissement va aussi à la recherche et développement, dans le but de construire un avion totalement décarboné : Airbus a ainsi investi plus de 3 milliards d’euros en 2022 dans la recherche sur la décarbonation de ses aéronefs, et le montant sera encore supérieur en 2023.

Sur le plan des carburants d’aviation durables (SAF), les compagnies aériennes sont aussi très engagées. Air France va au-delà du mandat d’incorporation obligatoire de SAF de 6 % fixé par le règlement européen, et intégrera dès 2030 10 % de SAF dans les réservoirs de ses avions. Cela représente un surcoût conséquent, estimé à 1,4 milliard d’euros.

Les trajectoires de vol sont de plus en plus souvent optimisées pour réduire les émissions. La DGAC modernise en ce sens ses systèmes de navigation aérienne. La décarbonation des opérations au sol est aussi un levier important : le groupe Aéroports de la Côte d’Azur nous a par exemple expliqué avoir électrifié toutes ses opérations au sol.

Il paraît donc indispensable de développer une vraie filière française de SAF, inexistante aujourd’hui : les compagnies aériennes vont se fournir à l’étranger. L’investissement actuel dans le développement de la filière est largement insuffisant, y compris en prenant en compte l’enveloppe de 200 millions d’euros récemment annoncée. Le levier des SAF étant le plus prometteur à court terme pour décarboner l’aviation, il est nécessaire de réduire le coût de ces carburants, aujourd’hui trois à cinq fois supérieur à celui du kérosène, et de simplifier les procédures administratives pour mettre en place les infrastructures nécessaires au ravitaillement en SAF dans les aéroports. Enfin, les carburants durables étant convoités par de nombreux secteurs économiques, nous devons nous assurer que l’aviation se verra garantir une quantité suffisante pour réaliser sa transition énergétique.

Le renouvellement des flottes aériennes est également une piste à encourager, qui doit être soutenue financièrement par l’État. D’une génération à l’autre d’appareils, les gains en carburant et donc en émission de CO2 peuvent être de 15 % à 25 %, et jusqu’à 30 % pour la prochaine génération. Or, seulement 25 % de la flotte mondiale actuellement en service est de dernière génération : le renouvellement des flottes coûte très cher.

Enfin, il me semble indispensable de ne pas pénaliser le secteur avec davantage de taxes ou d’obligations et d’harmoniser la législation en vigueur à l’échelle internationale. Les taxes qui pèsent directement ou indirectement sur les compagnies aériennes diminuent leur trésorerie, rendant difficile l’achat de nouveaux appareils plus propres. Toute nouvelle taxe ou tout surcoût pour les acteurs du transport aérien revient en réalité à réduire leur capacité d’investissement dans la décarbonation.

De plus, le transport aérien est, par définition, une industrie mondiale, et le prix est déterminant dans le choix des clients. Les taxes étant le plus souvent répercutées sur le prix des billets d’avion, elles nuisent à la compétitivité du secteur aérien français, en introduisant une distorsion de concurrence vis-à-vis des acteurs étrangers.

Ainsi, l’obligation d’incorporer un certain pourcentage de SAF dans les réservoirs des avions ne s’applique qu’aux vols au départ ou à l’arrivée de l’Union européenne. Cela induit un surcoût sur les billets d’avion concernés, ce qui conduira inévitablement les passagers à choisir des vols passant par des aéroports situés en dehors de l’Union européenne, comme Istanbul ou Dubaï.

Le projet de loi de finances pour 2024 prévoit l’instauration d’une taxe sur l’exploitation des infrastructures de transport de longue distance. Les acteurs du secteur sont unanimes pour estimer que ce coût supplémentaire sera répercuté sur les tarifs proposés par les aéroports aux compagnies aériennes, et donc sur le prix des billets. Les compagnies privilégieront l’ouverture de lignes desservant des aéroports étrangers, qui proposent des tarifs moins élevés, au détriment des aéroports français. Ainsi, l’aéroport de Milan-Linate pourrait être privilégié par rapport à celui de Nice-Côte d’Azur, première destination française après les aéroports de Paris. Cette situation est dommageable tant sur le plan économique qu’environnemental, puisqu’elle ne permet pas de réduire les émissions de CO2 de l’aviation, mais pousse seulement à les déplacer. Il est donc nécessaire de s’assurer à tout le moins que tous les acteurs du secteur jouent selon les mêmes règles et de ne pas désavantager les entreprises françaises, ce qui pourrait leur faire perdre leur position de leader technologique et stratégique.

Il semble important de ne pas tenir un discours incohérent qui d’une part, pousserait les acteurs du transport aérien à se décarboner et d’autre part, les pénaliserait économiquement, à la fois en introduisant des distorsions de concurrence vis-à-vis de leurs concurrents étrangers et en réduisant leur capacité d’investissement.

Taxer le secteur aérien pourrait être contre-productif et pousser les voyageurs à se reporter vers des plateformes de correspondance situées à l’étranger, voire vers leur voiture, faute de billets de train abordables.

Il est plus que jamais nécessaire de travailler avec le secteur aérien et non pas contre lui.

Un dernier mot, car je viens tout juste d’apprendre une nouvelle choquante. Lorsque nous avons auditionné Air France, le 3 octobre, nous avons longuement évoqué la ligne Paris‑Orly-Nice, l’une de celles qui ne sont pas concurrencées par le train – une heure dix de vol contre cinq heures trois quarts en train, quand il n’y a pas de retard, ce qui est de plus en plus rare. Or, la présidente d’Air France-KLM, Mme Anne-Marie Couderc, vient d’annoncer la fermeture de cette ligne, alors qu’il n’en a été question à aucun moment lors de l’audition. Je suis stupéfaite de ce manque de transparence.

M. le président Jean-Marc Zulesi. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Damien Adam (RE). Ce budget 2024 intervient à un moment marquant en matière de transition : celui de la mise en œuvre de la planification écologique. Pour la première fois, nous avons travaillé, sous l’impulsion du Président de la République et avec la majorité présidentielle, à une véritable planification en identifiant cinquante-deux leviers d’action qui nous permettront d’accélérer la transition et de respecter nos objectifs climatiques pour 2030 ; nous y avons intégré les dimensions de biodiversité, de limitation des ressources, d’adaptation ainsi que le sujet de la santé. Cette planification se traduit concrètement, dans le budget de la transition écologique pour 2024, par une hausse inédite de 7 milliards d’euros, soit 21 %, et même de 10 milliards en crédits de paiement. Cette augmentation s’inscrit dans la trajectoire proposée par le rapport Pisani-Ferry, l’objectif étant d’atteindre, d’ici à 2030, 67 milliards d’euros de moyens supplémentaires issus du public – État et collectivités – et du privé.

S’agissant des transports terrestre et fluvial, les députés du groupe Renaissance saluent l’augmentation du budget de 12 % proposée par le Gouvernement. Mais concrètement, que veulent les Français en matière de transports ? C’est à cette question que nous devons répondre ce soir en examinant les crédits relatifs aux transports et aux mobilités. Pour ma part, lorsque j’écoute les Français, j’entends trois priorités.

Tout d’abord, priorité doit être donnée au ferroviaire. Les Français souhaitent avant tout avoir des trains à l’heure. Cela nécessite notamment d’entretenir et de régénérer les rails, les aiguillages et les caténaires : nous y consacrerons 300 millions d’euros l’année prochaine. Il convient également de développer l’offre de fret et les trains de nuit : pour ce faire, une enveloppe de 400 millions est prévue en 2024. Il faut enfin développer l’offre de transport de voyageurs afin que nos concitoyens puissent se passer de leur voiture individuelle dans les nombreux territoires pouvant être reliés par des réseaux ferrés. Je pense notamment aux Serm, que Mme Brulebois a cités tout à l’heure et dont le développement doit beaucoup à l’adoption d’une proposition de loi de notre président Jean-Marc Zulesi. Nous avons prévu 700 à 800 millions d’euros, intégrés dans les CPER, pour poursuivre cette dynamique.

La deuxième priorité des Français est évidemment la route, qui restera toujours indispensable même si nous faisons le maximum en faveur des autres vecteurs de transport. Il convient en premier lieu de développer le vélo, auquel 250 millions seront dédiés l’année prochaine. Nous devons également changer les véhicules et les motorisations : nous y consacrerons 200 millions, qui serviront notamment à développer la prime à la conversion ainsi que l’offre de véhicules à 100 euros par mois qui sera proposée dès l’année prochaine. Permettez-moi à ce titre de mettre en avant Citroën, qui vient d’annoncer que son nouveau véhicule électrique, la ë-C3, sera proposé à moins de 20 000 euros, hors bonus, dans les prochains mois. Enfin, nous aurons évidemment besoin de nouvelles infrastructures : c’est tout le sens du financement accordé à l’Afit France, l’agence chargée de la construction de nouvelles routes, dont les moyens n’augmenteront cependant pas l’année prochaine.

La troisième priorité des Français concerne le transport aérien. Il s’agit tout d’abord de désenclaver les territoires qui n’ont pas la chance d’être reliés à Paris ou aux autres grandes villes de notre pays par des lignes ferroviaires : nous y avons consacré des moyens ces dernières années et nous continuerons de le faire en 2024. Un autre enjeu est celui de la décarbonation du secteur aérien : nous devons favoriser le développement de carburants d’aviation durables, auxquels nous dédions 200 millions d’euros, ainsi que les innovations technologiques qui permettront aux avions de devenir plus verts et plus respectueux de la planète. Madame Masson, consacrer de l’argent public au renouvellement des flottes n’aurait aucun impact en termes de décarbonation à l’échelle mondiale : les avions ne seraient pas détruits, ils seraient simplement transférés dans d’autres régions du monde. Ce serait donc une mauvaise politique, une mauvaise dépense publique.

Ce budget illustre donc notre responsabilité en matière de transition écologique : les 40 milliards d’euros engagés l’année prochaine en ce sens sont ceux de la cohérence. Avec ce budget historique, la majorité présidentielle prouve une nouvelle fois son engagement en faveur de la décarbonation des transports. J’appelle l’ensemble des groupes à soutenir cet effort en votant ces crédits.

M. Daniel Grenon (RN). Le projet de loi de finances pour 2024 prévoit 7 milliards d’euros consacrés aux transports, répartis entre le ministère de la transition écologique et celui de la transition énergétique.

Il est absolument nécessaire d’augmenter le budget de l’Afit France pour assurer l’entretien des voies ferroviaires et navigables existantes.

Différents acteurs du secteur ferroviaire ont estimé à 3 milliards d’euros le montant nécessaire au maintien en l’état des voies existantes. Mon collègue Matthieu Marchio a donc déposé un amendement visant à augmenter l’effort budgétaire pour la rénovation du réseau actuel : je ne doute pas qu’il sera accueilli avec toute la bienveillance et l’attention qu’il mérite et qu’il sera adopté. Le retard accumulé est énorme et les chantiers colossaux. En outre, la ruralité est trop souvent la grande oubliée de vos politiques.

Nous regrettons aussi le peu d’efforts que vous consentez en faveur du transport fluvial, qui reste sous-développé. J’ai alerté le ministre de la transition écologique sur l’état des voies navigables. Sur les 8 500 à 10 000 kilomètres de voies que compte notre pays, seuls 5 000 sont véritablement exploitables, car le manque d’entretien favorise la prolifération de plantes aquatiques qui empêchent la navigation.

Si nous pouvons nous satisfaire de l’augmentation des budgets, la répartition des enveloppes nous laisse toutefois dubitatifs. S’agissant par exemple de la Société du Grand Paris (SGP), l’équilibre entre budget d’investissement et ressources humaines n’est pas cohérent. Certes, il faut consacrer des crédits à ce projet, mais il faut aussi prévoir les moyens humains qui permettront de le réaliser. Les représentants de la SGP que nous avons auditionnés ont eux-mêmes reconnu que le manque de moyens humains poserait des difficultés pour mener à bien plusieurs projets de façon simultanée.

Nous sommes fermement opposés à l’instauration d’une taxe sur les autoroutes et les grands aéroports. Dans un contexte d’inflation galopante, alors que les prix de l’énergie explosent – le litre d’essence a atteint la barre des 2 euros – et que ceux des matières premières sont encore très élevés, vous décidez d’alourdir encore la facture des Français, pour des raisons idéologiques. Les concessionnaires comme Vinci et ceux des grands aéroports ont déjà prévu de répercuter, à plus ou moins long terme, cette charge sur le tarif des péages et le prix des billets d’avion : les Français seront donc les seuls pénalisés par cette taxe.

Du reste, le report modal qu’elle est censée favoriser est une vue de l’esprit. Ainsi, elle ne concernera que les vols long-courriers : je suis très curieux de voir comment vous expliquerez aux voyageurs embarquant dans un vol Paris-New York qu’ils devraient se reporter sur le train !

Pour ce qui est des péages, les Français qui empruntent tous les jours l’autoroute ne le font pas pour partir en vacances mais pour aller travailler : s’ils prennent la voiture, c’est par obligation, pas par choix. Les contrats de concession autoroutière ont été tellement mal négociés par vos prédécesseurs que nous n’avons aucun moyen d’empêcher les sociétés concessionnaires de répercuter la taxe sur les usagers. Ces contrats arriveront bientôt à terme : les Français attendent que vous fassiez preuve de fermeté et que vous les protégiez des abus des sociétés autoroutières.

Nous accueillons favorablement l’augmentation de 1 million d’euros des subventions dédiées à l’Autorité de régulation des transports (ART). Après des années sans hausse, cette progression devra se poursuivre dans les années à venir afin que l’ART soit en mesure de relever les défis de la renégociation des contrats de concession d’autoroute et de la libéralisation des transports ferroviaires. Son expertise permet à l’État de faire chaque année de très nombreuses économies, ce qui rentabilise largement les dépenses votées en sa faveur.

M. Sylvain Carrière (LFI-NUPES). Nous voici de nouveau réunis pour débattre du budget de l’État. L’an dernier, nos discussions s’étaient soldées par un échec, du fait de la prévalence de logiques partisanes et de la volonté de contrôle absolu des débats de la minorité présidentielle. J’espère qu’il en sera autrement cette année, tant l’urgence est palpable. Mais je ne me fais pas d’illusions car les passages en force sont devenus courants dans le fonctionnement de notre assemblée.

Alors que l’année 2023 est en passe d’être la plus chaude jamais enregistrée à l’échelle planétaire, les transports représentent un tiers de nos émissions de gaz à effet de serre. Nous devons faire mieux, nous pouvons faire mieux. Mais pour cela, il faut commencer par reconnaître nos erreurs et prendre des décisions fortes quant à l’avenir des transports.

Dans un premier temps, il est urgent de revenir sur la libéralisation de Fret SNCF, qui constitue un massacre social et une véritable faute en matière d’environnement et de souveraineté. Depuis l’ouverture à la concurrence, 2 millions de camions supplémentaires circulent chaque année sur nos routes, alors que 25 % des émissions liées aux transports sont directement imputables à ces véhicules. Le saccage d’une telle entreprise publique et le transfert des tronçons les plus rentables, comme Rungis-Perpignan, à ses concurrents privés témoignent d’une absence de vision de long terme.

Aucun système ferroviaire de transport de marchandises au monde n’est rentable car le rail est en concurrence directe avec la route sans qu’aucune externalité ne soit prise en compte. Les 40 000 morts par an imputables au mode routier, le manque de visibilité économique, la congestion et l’entretien du réseau routier sont pourtant bien des charges publiques.

Il est donc urgent de subventionner massivement le transport ferroviaire. Surtout, il faut faire fléchir Bruxelles à ce sujet. L’Allemagne subventionne bien sa branche de fret privé par le biais de son pôle public ferroviaire… Jamais il ne lui serait venu à l’idée de céder gratuitement son outil de production ! Cela lui réussit bien : la part modale du fret ferroviaire est de 18 % pour le transport de marchandises. Ce n’est donc vraiment pas le moment de couper les vivres à Fret SNCF.

De même, il faut en finir avec la politique du tout-routier. Pour nombre de nos concitoyens vivant dans des territoires ruraux enclavés, la voiture est certes le seul moyen de déplacement possible, mais ce n’est pas la construction d’autoroutes payantes et d’axes nouveaux à tout va qui améliorera leur mobilité. En effet, les prix de l’énergie augmentent : ceux du diesel et du sans-plomb ont subi depuis 2020 une hausse de 40 %, aux deux tiers imputable aux superprofits des distributeurs. Ainsi, 13,3 millions de Français sont en « précarité mobilité » ; au vu de l’inflation, combien seront-ils demain ? Verra-t-on de jolies routes désertes, construites selon un modèle économique qui ne tient pas, et des Français sans solution de mobilité ? C’est toute l’économie qui en pâtira.

Les transports en commun et le réseau ferroviaire ne sont pas à la hauteur de ce que l’on pourrait attendre de la France, le pays des chemins de fer. En témoigne le niveau d’acceptation des zones à faibles émissions (ZFE), qui suscitent un tollé dans l’ensemble du territoire. Seuls 14 % des Français y sont favorables – mais 67 % de nos concitoyens disposant d’un moyen de mobilité efficace autre que la voiture individuelle soutiennent cette mesure. Vous mettez encore une fois la charrue avant les bœufs : d’abord des ZFE et des amendes de 68 euros pour ceux qui n’ont pas de véhicule récent, ensuite – dans dix ans peut-être – des RER métropolitains. Il faut donc interrompre le déploiement des ZFE et donner la priorité, par des investissements majeurs, au développement des réseaux ferrés dans toutes les métropoles et, surtout, vers les zones périurbaines. Il faut également remettre en état les petites lignes ferroviaires abandonnées et garantir un service public de la mobilité pour tous les habitants des territoires ruraux et périurbains.

J’aimerais enfin dire quelques mots au sujet des 12 millions de Français en situation de handicap. L’accessibilité reste le maillon faible de toutes les politiques de mobilité, tous moyens de transport confondus. Moins de 10 % des gares sont accessibles, le mobilier urbain comme les trottoirs ne permettent pas de se déplacer convenablement, et les Serm ne visent pas l’efficacité d’accès mais uniquement une meilleure accessibilité – mieux que 10 %, donc… Quel progrès !

Pour des raisons tant sociales qu’environnementales et de souveraineté, il est donc urgent de mener une politique des transports ambitieuse. Nous ne pouvons pas nous satisfaire d’une hausse de 12 % du budget alloué. Il nous faut penser réellement les mobilités de demain, pour toutes et pour tous.

M. Jean-Pierre Taite (LR). Dans la droite ligne du rapport du Conseil d’orientation des infrastructures, l’avis sur les crédits relatifs aux transports terrestres rappelle l’impérieuse nécessité de réinvestir dans le ferroviaire. Avec un réseau dont l’âge moyen dépasse vingt‑huit ans – contre vingt-et-un ans en Allemagne –, la France est le mauvais élève de l’Europe. Le maintien du niveau actuel d’investissements conduirait à la perte d’un quart du trafic en 2042, malgré des surcoûts d’entretien d’environ 20 %.

Le Gouvernement avait annoncé un plan séduisant de 100 milliards d’euros supplémentaires pour le rail d’ici à 2040. Votre rapport nous apprend malheureusement qu’il ne bénéficiera d’aucun financement nouveau. Vous le dites vous-même, les modalités de financement de ces investissements restent méconnues et même absentes du PLF pour 2024 : la trajectoire budgétaire continuera de reposer exclusivement sur les fonds de SNCF Réseau, à savoir les recettes des péages ferroviaires, sans concours public supplémentaire dédié. Pire, les 300 premiers millions d’euros promis pour la modernisation et la régénération du réseau en 2024 viendront d’un abondement supplémentaire du fonds de concours du groupe SNCF : ce n’est donc pas l’État, mais des ressources internes à la SNCF qui financeront le plan du Gouvernement. Nous vous rejoignons lorsque vous affirmez courageusement qu’il faudra mobiliser des concours publics supplémentaires pour respecter la trajectoire d’investissement en faveur du réseau ferré annoncée par la Première ministre. Il est d’ailleurs déplorable que cette relance hésitante du ferroviaire entraîne un gel des crédits destinés aux infrastructures routières, alors que le plan Vélo bénéficiera d’une enveloppe de 2 milliards d’euros d’ici à la fin du quinquennat.

Alors que la plupart des recettes de l’Afit France proviennent de la route, à travers les taxes sur les carburants et sur les autoroutes, elles ne profitent que très peu à ce mode de transport qui est pourtant le plus utilisé par les Français. En divisant par deux les crédits prévus au titre des futurs CPER, en n’augmentant plus les dépenses ou en les limitant à un entretien de plus en plus catastrophique, le Gouvernement assume pleinement l’abandon du réseau national. Certes, nous voulons encourager le ferroviaire, mais celui-ci ne remplacera jamais la route, malgré les milliards investis. C’est par la route que continueront de se faire 80 % des déplacements des Français, et pour longtemps encore. Ne la sacrifions pas !

Le soutien aux modes de mobilité décarbonés serait sain s’il ne se faisait pas au détriment de moyens de déplacement tout aussi utiles, comme peut-être l’avion. Comme vous, madame Masson, nous considérons que le secteur aérien est injustement décrié au regard de son poids réel dans les émissions de CO2 et de ses atouts, tant pour notre économie que pour les usagers. Même The Shift Project, que pilote le grand pourfendeur de l’aérien Jean‑Marc Jancovici, reconnaît que l’offre ferroviaire n’est pas toujours suffisante pour proposer un autre choix que l’avion vers certaines destinations. Interdire ou limiter l’aviation reviendrait à priver des territoires entiers de tout espoir de désenclavement et de développement économique.

Au-delà des incertitudes juridiques qui pèsent sur elle, la nouvelle taxe sur les infrastructures de transport de longue distance sera forcément répercutée sur les clients. Elle obérera la capacité du secteur à investir pour sa décarbonation. Pire : elle créera une distorsion de concurrence au détriment des acteurs français et au profit d’opérateurs low cost étrangers privilégiant les plateformes secondaires. En voulant punir l’aérien, on déplacera les émissions hors du pays au lieu de les éradiquer. Arrêtons de taxer le secteur aérien en suivant la seule logique du rendement ; privilégions une fiscalité plus incitative fondée sur le principe pollueur-payeur, qui récompenserait les compagnies qui renouvellent leur flotte et utilisent des carburants durables, sources d’innovation et de maintien de compétitivité pour ce secteur économique essentiel.

S’il continue d’alourdir la fiscalité pour tenter de relever le pari perdu d’avance de doubler la part modale du rail et des transports collectifs d’ici à 2030, le Gouvernement risque malheureusement de nous faire rater à la fois le train, la route et l’avion. Sur la route, dans les airs ou en mer, il manque des moyens de mobilité qui inciteraient vraiment à la décarbonation. Nous nous félicitons de l’inscription de crédits visant à préserver la compétitivité du pavillon français assailli par le dumping déloyal des compagnies étrangères, mais les carburants verts susceptibles de remplacer le fioul lourd sont-ils produits en quantité suffisante ? L’investissement dans la recherche de solutions industrielles est-il utile en l’absence de soutien public pour l’amorcer ? Dans les secteurs maritime et aérien, c’est l’existence de solutions technologiques approuvées, à des coûts abordables, ainsi que l’adoption d’une fiscalité incitative ne dégradant pas la compétitivité de nos filières qui conditionneront la réussite de la transition.

M. Jimmy Pahun (Dem). Nous nous félicitons des moyens donnés au ferroviaire et des efforts réalisés en matière de transport aérien, s’agissant notamment des nouvelles motorisations. Cependant, si ces avancées se combinent à un triplement du nombre d’avions dans le ciel, la consommation totale de carburant restera inchangée.

Permettez-moi de concentrer mon intervention sur le budget des affaires maritimes. Vous l’avez dit, la France est une grande nation maritime. Nous en reparlerons en 2025 à l’occasion de la conférence des Nations Unies sur les océans, l’Unoc, pour soutenir la réalisation de l’objectif de développement durable n° 14.

Nous devons travailler à la concrétisation de trois beaux projets. Le premier est la ratification du traité international pour la protection de la haute mer et de la biodiversité marine (BBNJ) signé à New York l’été dernier. En outre, nous devons continuer les négociations en vue de définir des aires marines protégées. Il est question de classer 30 % des écosystèmes en aires protégées, dont 10 % sous protection forte. Il faudrait aussi réfléchir à la création de zones de cantonnement, où l’on ne ferait rien afin de laisser la nature reprendre ses droits ; ces zones deviendraient, en quelque sorte, des nurseries pour la pêche.

Vous avez évoqué la stratégie nationale pour la mer et le littoral ; cela m’a fait penser à notre objectif de produire 40 gigawatts d’électricité grâce à l’éolien en mer d’ici à 2050. C’est en effet en mer que la production d’énergie éolienne est la plus performante, parce qu’il y a 30 % de vent en plus et que les parcs éoliens peuvent être éloignés des côtes. Je suis persuadé que le dialogue entre les pêcheurs, la marine nationale, les acteurs du trafic maritime et les plaisanciers permettra de trouver les zones où l’implantation d’éoliennes offshore affectera le moins les activités des uns et des autres. Par ailleurs, il conviendra peut-être de regrouper les parcs éoliens : il ne sert à rien d’en avoir vingt ou trente alors que quinze, seize ou dix-sept parcs plus compacts suffiraient.

Vous avez aussi parlé de la rénovation de la flotte de la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM), qui est effectivement nécessaire. Il est regrettable que ces rénovations soient toujours décidées après une catastrophe : sauf erreur de ma part, la dernière a eu lieu en 1986, après le drame de l’Aber Wrac’h, et nous sommes maintenant encore marqués par le naufrage d’un canot de la SNSM aux Sables-d’Olonne. Le chantier dont il a été question tout à l’heure a du mal à démarrer : nous devons donc encourager une véritable planification de la rénovation des navires.

J’en viens au sujet de la formation. Vous avez évoqué l’objectif de doublement du nombre d’officiers de marine marchande diplômés d’ici à 2027 : un colloque organisé par l’École nationale supérieure maritime (ENSM) se tiendra justement la semaine prochaine au Havre afin d’inciter des jeunes à découvrir les métiers de la mer. Je remarque que les professeurs sont parfois d’anciens marins. Le métier de marin, en particulier de marin pêcheur, paie bien mais est très difficile ; aussi ceux qui l’ont choisi pour vite et bien gagner leur vie peuvent-ils ressentir, vers 40 ou 45 ans, une certaine fatigue due au travail, aux nuits, aux marées. C’est alors qu’ils sont les bienvenus dans les lycées maritimes, où ils peuvent apporter leur expertise.

S’il y a un secteur où la décarbonation est en cours, c’est bien celui de la marine commerciale. De plus en plus de navires fonctionnent au gaz naturel liquéfié (GNL). Par ailleurs, de nombreux projets de navigation à la voile sont en train d’être élaborés. Je vous invite par exemple à vous intéresser au projet Canopée, dont j’ai parlé tout à l’heure à M. le ministre délégué chargé des transports : il est fantastique de voir ce bateau lourd naviguer à près de 20 kilomètres à l’heure en n’utilisant que sa voile. Les autres navires doivent peut-être consommer moins de gaz, ralentir leur vitesse et accepter de rester une nuit de plus en mer. La décarbonation sera probablement plus difficile dans le secteur de la pêche, où les bateaux ont besoin de beaucoup de puissance.

M. Vincent Thiébaut (HOR). Avec 30 % des émissions de gaz à effet de serre, les transports sont au cœur des préoccupations de la transition écologique. Nous devons faire montre d’ambition et, dans cette optique, je me félicite de l’enveloppe de 13,3 milliards d’euros qui y est consacrée, en hausse de 1,5 milliard et de 12 % par rapport à 2023, et de 30 % par rapport à 2022. La ventilation des crédits est la suivante : 8 milliards pour les mobilités vertes, 2 milliards pour le verdissement de l’aérien et près de 2 milliards pour la modernisation du réseau routier. En outre, nous nous félicitons que le ferroviaire soit une priorité car celui-ci représente la meilleure alternative à la route.

Un soutien supplémentaire de 700 millions d’euros sera octroyé aux infrastructures, comprenant, entre autres, des investissements pour les trains du quotidien, les trains d’équilibre du territoire (TET) et les treize projets déjà décidés, qui bénéficient de 800 millions destinés notamment à financer les études de phase des services express régionaux métropolitains. Néanmoins, nos compatriotes continueront d’emprunter leur voiture et nous devons les accompagner dans leur transition vers une mobilité plus propre et plus durable : je me félicite, à ce titre, du renforcement du bonus écologique pour les véhicules verts et des installations des bornes rechargeables, qui participeront à la modernisation du réseau routier. Il nous faut également décarboner des mobilités qui émettent trop de gaz à effet de serre : ainsi, 1,5 milliard d’euros seront investis pour développer, moderniser et décarboner le transport aérien. Enfin, le budget renforce le plan Vélo pour les mobilités du quotidien et de proximité.

Vous l’avez bien compris, ce budget répond aux ambitions que nous nous sommes fixées ; pour certains, nous n’allons pas assez vite, mais nous devons respecter la population en l’accompagnant ; pour d’autres, au contraire, nous allons trop loin, mais ces critiques en viennent à dénier la réalité du changement climatique.

M. Gérard Leseul (SOC). Le programme 203 revêt une importance particulière cette année, dans la mesure où nous devons amorcer un virage en faveur des mobilités décarbonées pour répondre aux urgences environnementales et aux attentes des Français.

Je rappelle les mots de notre Première ministre, le 24 février dernier : « C’est à partir du scénario de planification écologique du Conseil d’orientation des infrastructures que nous conduirons nos échanges avec les collectivités. C’est grâce à ces orientations que nous construirons, d’ici l’été, la déclinaison opérationnelle de notre plan d’avenir pour les transports. » Nous devrions trouver des éléments tangibles du plan de 100 milliards d’euros annoncé par la Première ministre et du lancement des services express régionaux métropolitains, pour lesquels les montants d’amorçage prévus semblent bien insuffisants ; en outre, des modalités de renforcement du versement mobilité auraient dû figurer dans ce PLF.

On le sait, les finances des collectivités locales sont extrêmement contraintes et ont besoin de ressources complémentaires. Cette année, les crédits du programme 203 Infrastructures et services de transports sont en hausse d’environ 6 %, en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement. Cette progression, supérieure au taux d’inflation retenu de 4,9 %, n’est cependant pas spectaculaire ; les crédits mobilisés sont insuffisants pour tenir les engagements pris par Mme Borne. L’examen précis de l’action 41 Ferroviaire nous inquiète particulièrement.

Le COI recommande dans son rapport de faire passer l’effort de régénération du réseau financé par l’État de 2,8 milliards d’euros par an à 3,5, puis à 4,2, soit 1,4 milliard d’euros de plus d’ici à 2040. Cela permettrait de rajeunir les voies principales du réseau. Au total, il faudrait consacrer 20 milliards d’euros à cette tâche. Les besoins annuels de régénération estimés par SNCF Gares & Connexions s’élèvent à 25 millions d’euros pour la rénovation des grands halls accueillant des voyageurs, à un montant compris entre 40 et 50 millions pour les actifs transférés par SNCF Réseau – quais, abris filants, marquises, auvents, etc. –, à une somme comprise entre 50 et 60 millions pour les bâtiments historiques. Ces évaluations n’incluent pas les investissements nécessaires pour rendre les gares accessibles ou les retards exposant l’État à des poursuites. Selon le COI, il manque 500 millions d’euros de financement sur dix ans. Nous partageons les regrets qu’exprime le COI sur ce budget et nous demanderons, par voie d’amendement, des investissements supplémentaires dans le ferroviaire.

Nous souhaitons également instaurer un moratoire sur la fermeture des petites lignes, développer le fret ferroviaire et stabiliser les ressources de l’Afitf, elle qui se trouve dans une instabilité financière permanente ; cette situation est d’autant plus regrettable qu’elle est amenée à jouer un rôle de plus en plus grand dans le cadre du développement du ferroviaire mais également du fluvial et du vélo, comme alternatives à des mobilités plus polluantes. À ce titre, nous aurions aimé disposer d’informations sur la renégociation des contrats autoroutiers et trouver dans ce budget des éléments financiers issus de ces renégociations.

Nous attendons également des précisions sur l’offre de location de voitures à 100 euros, dont nous parlons depuis bientôt un an. Nous nourrissons les mêmes regrets pour les véhicules électriques, dont le reste à charge est beaucoup trop élevé pour nombre de nos concitoyens : nous attendions des engagements budgétaires dans ce domaine.

Enfin, le développement du transport ferroviaire mériterait l’instauration d’un abonnement climat, à l’instar du dispositif allemand : il s’agit du pass rail que nous vous proposons depuis plusieurs mois et que nous regrettons de ne pas voir dans le texte, d’autant que le déclenchement imminent du 49.3 rendra vaine toute amélioration du PLF en commission.

M. Nicolas Thierry (Écolo-NUPES). Malgré la « nouvelle donne ferroviaire » annoncée en fanfare, le Gouvernement et la majorité n’ont toujours pas compris l’urgence d’investir dans les trains du quotidien et continuent de gaspiller l’argent public dans de grands projets inutiles ou dans le développement d’infrastructures routières destructrices pour l’environnement.

Le train pollue soixante-cinq fois moins que l’avion, vingt-six fois moins que la voiture thermique et douze fois moins que la voiture électrique : il s’agit d’une alternative évidente dans laquelle nous devons investir. La France a pourtant accumulé les retards et dispose d’un réseau ferroviaire trois fois moins développé que celui de l’Allemagne. Après plusieurs décennies de sous-investissement, notre réseau est vieillissant – vingt-neuf ans contre dix-sept en moyenne en Europe – et l’un des moins empruntés avec des péages pourtant deux fois plus élevés que la moyenne européenne. En l’état actuel des investissements, il nous sera impossible d’atteindre les objectifs fixés dans la LOM.

La régénération du réseau nécessite entre 1 et 2 milliards d’euros supplémentaires par an, selon l’aveu même du ministre délégué M. Clément Beaune. Nous en sommes loin, et le rapport de Mme Brulebois souligne à raison que les modalités de financement des investissements supplémentaires annoncés en faveur de la régénération et de la modernisation du réseau ferroviaire d’ici à la fin du quinquennat restent à déterminer et à programmer. Les membres du groupe Écologiste-NUPES appellent donc à accélérer ce chantier, afin d’augmenter fortement l’offre.

À cette priorité s’ajoute le besoin d’investir dans les petites lignes, le fret et les trains de nuit. La plupart des trains de nuit français ont été démantelés entre 2016 et 2017 : nous proposons d’investir 1,5 milliard d’euros pour construire un parc de matériels qui permettra, d’ici à 2030, le développement ambitieux d’un réseau de trains de nuit à travers la France et l’Europe.

Où est l’argent qui manque aux trains du quotidien ? Comme nous le dénonçons depuis des années, vous privilégiez les grands projets inutiles et routiers. Ce PLF offre deux exemples de cette politique. Le premier est le Charles-de-Gaulle (CDG) Express, qui bénéficie de 367 millions d’euros, soit quatre fois plus que le fonds destiné à accompagner la mobilité durable dans le plan France ruralités : les priorités du Gouvernement apparaissent clairement. Le projet CDG Express est celui d’une ligne inutile entre l’aéroport de Roissy et la gare de l’Est, destinée à des touristes fortunés : ce projet a reçu un avis accablant de l’Autorité environnementale. Toute ressemblance avec un autre projet actuellement contesté n’est pas fortuite : les mêmes causes produisent les mêmes effets, et vous reproduisez sans cesse les mêmes erreurs.

Le deuxième exemple est le maintien de l’investissement massif dans le routier, alors que les scientifiques nous alertent chaque jour sur la nécessité d’encourager le report modal. Le budget du Gouvernement prévoit d’augmenter les fonds de concours du développement routier de 114 millions d’euros, portant la dépense totale à près de 1 milliard d’euros pour le PLF pour 2024.

Il y a donc beaucoup d’argent disponible, mais celui-ci n’est pas investi là où il devrait l’être.

Enfin, le rapport de Mme Masson sur le transport aérien est désolant, tant ses recommandations se situent à l’opposé des conclusions scientifiques. On peut lire dans votre rapport que la transition énergétique de l’aérien doit passer par l’investissement massif dans les technologies de décarbonation plutôt que par la pénalisation du secteur et de ses usagers, ou encore que l’utilisation de carburants d’aviation durables constitue le levier le plus prometteur pour la décarbonation. J’espère qu’une majorité d’entre nous en a conscience, mais je préfère le répéter pour m’en assurer : la priorité des priorités pour décarboner le secteur aérien réside dans la réduction du trafic.

Pour conclure, je rappellerai les priorités des écologistes, qui sont également celles des scientifiques et des citoyens et qui devraient donc être les vôtres : mettre un coup d’arrêt aux nouveaux projets routiers et faire contribuer les géants autoroutiers à la transition écologique ; pénaliser l’avion par rapport au train et taxer le kérosène car les plus pauvres n’ont pas à payer pour les loisirs des plus riches ; sortir, au profit de tous, des grands projets inutiles comme le CGD Express, l’A69, le grand projet ferroviaire du Sud-Ouest (GPSO) ou la ligne entre Lyon et Turin, qui détournent l’argent public de la régénération et de la modernisation du réseau classique ; investir davantage dans le fret ferroviaire et fluvial ; rehausser l’ambition sur les petites lignes et les trains de nuit ; enfin, investir massivement dans la multimodalité et dans les infrastructures cyclables.

M. Guy Bricout (LIOT). Le principal défi des mobilités de demain réside dans la conciliation des enjeux sociaux, environnementaux et économiques. Il est donc plus que temps que les intentions gouvernementales soient suivies d’effet. Ce nouveau budget le permettra-t-il ? Sous couvert d’un verdissement sans précédent, les moyens sont-ils au rendez-vous ?

Nous notons quelques signaux positifs, puisque les crédits dévolus aux transports, en hausse de 13 % par rapport à l’année dernière, privilégient le ferroviaire à la route et à l’aérien. Nous saluons plusieurs avancées : l’augmentation de la prime à la conversion, le malus renforcé sur les voitures thermiques et une enveloppe de 200 millions d’euros pour l’installation de bornes de recharge. Ce verdissement affiché ne doit néanmoins pas faire oublier les trop nombreuses lacunes et incertitudes d’importance qui continuent de planer. Ainsi, l’augmentation des crédits en faveur du ferroviaire reste particulièrement faible compte tenu des multiples enjeux auxquels le secteur est confronté. Par ailleurs, la répartition des investissements entre secteurs et acteurs reste très floue.

Qui financera et à quel niveau la nouvelle donne ferroviaire de 100 milliards d’euros d’ici à 2040, annoncée par la Première ministre ? Le rapport du COI souligne que les crédits européens seront moins mobilisables entre 2024 et 2027 : ce budget en tient-il compte ? Quelle part des investissements prévus reviendra-t-elle au Serm ? Restera-t-il une part raisonnable pour régénérer l’ensemble du réseau existant, notamment celui des territoires les plus enclavés ? Si les Serm produisent de nouvelles inégalités territoriales, à quoi bon les déployer ?

Quid des futurs CPER ? Les régions attendent de l’État une mobilisation beaucoup plus importante pour les études, mais aussi pour les travaux sur les infrastructures. Si nous voulons produire un vrai choc d’offre en faveur du train et des mobilités décarbonées, l’État devra y prendre toute sa part.

Le Gouvernement s’est engagé à doubler la part modale du fret ferroviaire d’ici à 2030 : ce budget dégage-t-il les investissements nécessaires, notamment pour le renouvellement du matériel roulant ? L’alliance 4F – fret ferroviaire français du futur – a rappelé, à la suite du rapport du COI, la nécessité d’un plan d’investissement spécifiquement dédié au fret, qu’elle estime à 3,5 milliards d’euros ; elle a regretté que le fret ferroviaire apparaisse dilué dans le plan présenté par la Première ministre : force est de constater qu’il l’est tout autant dans ce budget.

Mes inquiétudes sont encore plus vives sur le sort réservé aux petites lignes et aux trains de nuit. Votre rapport indique que « la programmation détaillée des investissements supplémentaires annoncés par la Première ministre en faveur de la régénération et de la modernisation du réseau ferroviaire à l’horizon 2037 reste méconnue et absente du présent projet de loi de finances pour 2024. » Encore une lacune inquiétante !

L’intermodalité constitue un autre pilier de nos transports de demain. Le secteur fluvial, notamment le canal Seine-Nord Europe, m’intéresse tout particulièrement. Dans son rapport, le COI a insisté sur la nécessité de boucler le projet de mise au gabarit européen de l’Oise (Mageo) et de trouver les financements nécessaires à l’engagement des travaux entre 2023 et 2027. Le budget tient-il compte de cette priorité ? Je relève par ailleurs dans votre rapport que Voies navigables de France (VNF) s’inquiète des conséquences des coupes que l’établissement a subies dans ses moyens humains ces dernières années : pourra-t-il remplir les nombreuses missions qui lui sont confiées ?

Il n’y a pas lieu de stigmatiser le routier et l’aérien à tout-va. Ne nous cachons pas derrière notre petit doigt, notre pays a tellement sacrifié le rail ces dernières décennies que beaucoup de nos concitoyens n’ont d’autre choix que de prendre leur voiture quotidiennement pour aller travailler, pour emmener leurs enfants à l’école, pour se faire soigner, etc. Par ailleurs, votre rapport rappelle, s’il en était besoin, que l’aérien demeure le seul moyen de désenclaver de nombreux territoires de notre pays, tels que la Corse, l’outre-mer ou certaines villes comme Aurillac, Perpignan ou Pau. Vous soulignez fort justement que l’aérien représente un fleuron de notre industrie et un pilier de notre économie qu’il convient de protéger. Aussi, pouvez-vous indiquer la place accordée par ce budget à l’entretien des routes nationales non concédées ? S’agissant de l’aérien, le PLF dégage-t-il les moyens nécessaires aux recherches technologiques permettant d’accompagner et d’accélérer la décarbonation ?

Article 35 et état B : Crédits du budget général

Amendement II-CD43 de M. Loïc Prud’homme

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). Nous nous opposons au financement par l’État du projet GPSO et nous demandons que les sommes déjà budgétées soient allouées à la rénovation des lignes de transports express régionaux (TER) de Nouvelle-Aquitaine et d’Occitanie, ainsi qu’au chantier de modernisation de la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse (Polt) – train que nous sommes nombreux à emprunter ici, du moins lorsqu’il roule. Le projet GPSO consiste en la création de deux nouvelles lignes à grande vitesse entre Bordeaux, d’une part, Toulouse et Dax, de l’autre. Les objectifs proclamés sont le rapprochement des villes du grand Sud-Ouest entre elles – mais toutes les villes de cette grande région ne sont pas concernées –, la création d’une alternative au transport aérien pour le trajet Paris-Toulouse et l’ouverture d’une liaison ferroviaire à grande vitesse avec l’Espagne.

L’État s’est engagé à financer la première étape du projet à hauteur de 40 %, soit 4,1 milliards d’euros. Les collectivités territoriales vont devoir contribuer, de même que l’Union européenne ; or, au-delà de la situation financière peu reluisante des collectivités, une majorité d’élus locaux rejette ce projet, tout comme les associations du territoire, notamment celles qui défendent l’environnement et les usagers des transports.

Il faut dire que le GPSO est un non-sens économique, puisque son coût final a été estimé à 14,3 milliards d’euros alors que la modernisation des lignes du quotidien aurait été beaucoup plus pertinente. La mobilisation des associations d’usagers a néanmoins permis d’obtenir des engagements, qui ont été réaffirmés hier, sur la régénération de la ligne Polt.

Comme l’A69, le GPSO est une aberration écologique qui induit l’artificialisation de milliers d’hectares de terres agricoles, de forêts ou milieux naturels.

Enfin, ce projet ne règle pas les problèmes de mobilités auxquels est confronté le Grand Sud-Ouest. Les lignes du quotidien ne sont plus entretenues dans de nombreux départements, d’autant que les moyens humains manquent pour faire circuler les quelques trains qui subsistent dans ces territoires.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Nous pourrions longuement débattre de l’utilité et de l’impact environnemental du GPSO, mais cette discussion dépasserait largement l’examen de ces crédits budgétaires. En effet, le programme 203 ne comporte aucun financement de ce projet. Je vous demande donc de retirer l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD40 de M. Sylvain Carrière

M. Sylvain Carrière (LFI-NUPES). Depuis l’examen du PLF pour 2023, il n’y a pas eu d’avancée notable pour le ferroviaire français. Nous avons voté 3 milliards d’euros supplémentaires pour la régénération et la modernisation du réseau ferré, ainsi que le renouvellement du matériel roulant : las, les nombreux 49.3 ont balayé ces avancées. Pourtant, le transport routier émet 30 % des gaz à effet de serre, selon le Haut Conseil pour le climat (HCC), alors que le ferroviaire représente un levier formidable contre le changement climatique, pour le développement de nos territoires ruraux, pour notre souveraineté énergétique car il diminue notre dépendance au pétrole étranger, pour la réindustrialisation grâce au système du wagon isolé et à la réhabilitation de gares de triage actuellement laissées à l’abandon, et pour le désenclavement grâce aux 30 000 kilomètres du réseau ferré français.

Pourtant, la voiture et le tout-camion lui sont préférés pour des logiques de rentabilité économique : ne soyons pas dupes, pour comparer, il faut prendre tous les coûts en compte et pas uniquement le prix de la tonne transportée au kilomètre. Ainsi, la pollution atmosphérique, qui tue 40 000 personnes tous les ans, la congestion, qui ralentit l’activité économique, et l’usure accélérée des routes, qui nécessite d’imposer nos concitoyens pour les restaurer, ne sont pas répercutées dans le coût de la route.

L’amendement ne vise donc pas à créer des dépenses mais à dégager des économies. Nous demandons de développer massivement les infrastructures dans les lignes du quotidien comme dans le transport de marchandises.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Vous évoquez un désengagement de l’État alors que celui-ci consent un effort historique en faveur du ferroviaire. SNCF Réseau a investi depuis 2021, grâce au soutien financier de l’État, près de 2,8 milliards d’euros pour la régénération du réseau : l’effort est sans précédent ! Le Gouvernement a annoncé une augmentation progressive des investissements d’ici à la fin du quinquennat et jusqu’en 2040. Dès l’année prochaine, 300 millions d’euros supplémentaires seront investis grâce au renoncement de l’État aux dividendes de la SNCF. Les investissements doivent être progressifs car ils nécessitent des personnels et des processus industriels. L’avis est défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD67 de M. Guy Bricout

M. Guy Bricout (LIOT). La Première ministre, dans le cadre de son annonce d’une nouvelle donne ferroviaire, a affirmé que l’État s’engagerait aux côtés de la SNCF, des collectivités territoriales et de l’Union européenne – même si les crédits vont certainement diminuer – pour répondre à cette ambition, chiffrée à 100 milliards d’euros d’ici à 2040. Les nouveaux investissements devraient rajeunir, moderniser et développer le réseau. La régénération et la modernisation de celui-ci bénéficieront respectivement de 1 milliard et de 500 millions d’euros chaque année d’ici à la fin du quinquennat. À ce jour, le Gouvernement n’a cependant pas clairement défini les différentes sources de financement.

L’amendement vise non seulement à accroître les investissements dans la modernisation et la régénération du réseau ferroviaire, mais également à inviter le Gouvernement à préciser les financements de la nouvelle donne ferroviaire.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Je vous rejoins sur la nécessité de clarifier et de détailler le plan annoncé de 100 milliards d’euros pour le ferroviaire, et j’ai déposé un amendement demandant l’élaboration d’un rapport sur la question. Toutefois, augmenter les crédits de 1,5 milliard d’euros comme votre amendement le propose n’est pas raisonnable : la hausse des crédits sera progressive jusqu’en 2027, cette approche graduelle étant essentielle pour laisser aux gestionnaires d’infrastructures le temps de planifier et de conduire les travaux. En outre, l’État ne financera vraisemblablement pas toute l’enveloppe supplémentaire. Je vous demande de retirer l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD49 de M. Thomas Portes

M. Thomas Portes (LFI-NUPES). Nous avons déjà débattu de la faiblesse des investissements dans les RER métropolitains. Un montant de 700 millions d’euros est fléché pour treize Serm, alors qu’un seul RER métropolitain coûte déjà 700 millions ; un rapport du Sénat a estimé que 15 à 20 milliards d’euros seraient nécessaires pour les treize RER. Nous sommes favorables au développement des RER de proximité et métropolitains, mais nous estimons que l’État doit s’engager à un plus haut niveau, afin de ne pas faire peser le besoin de financement sur des collectivités déjà exsangues. Nous sommes enfin opposés à ce que la société du Grand Paris (SGP) soit désignée maître d’œuvre, car elle pratique une sous-traitance en cascade, marquée par de nombreux accidents du travail ayant conduit à un décès. L’amendement vise à allouer plus d’argent à un outil utile à la transition écologique.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Les projets de Serm mettront plusieurs années à se concrétiser et la plupart de ceux qui ont été annoncés ne seront pas opérationnels avant 2040. L’enveloppe de 800 millions d’euros dégagée par l’État correspond à des crédits d’amorçage, qui permettront de lancer les premières études détaillées. Il ne s’agit pas de mettre 15 milliards d’euros sur la table dès 2024.

La SGP, dont on connaît l’expertise en la matière, a estimé que le montant de l’enveloppe était cohérent et que le fonds d’amorçage permettait le démarrage des projets. L’avis est défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD193 de M. Stéphane Delautrette

M. Stéphane Delautrette (SOC). Cet amendement du groupe Socialistes et apparentés vise à vous alerter sur la nécessité d’instaurer un moratoire sur la fermeture des petites lignes ferroviaires ainsi que sur toute réorganisation pouvant conduire à une détérioration du niveau de service de ces lignes.

Inutile de rappeler que la voiture reste bien souvent un mode de transport subi, utilisé à cause de l’absence de solutions alternatives de transport collectif ou de l’insuffisance de l’offre lorsque celle-ci existe. Ni les véhicules électriques, à l’autonomie trop limitée et au coût d’acquisition trop élevé, ni le covoiturage, ni, encore moins, la trottinette électrique ou le vélo ne constituent actuellement des solutions alternatives suffisantes. Seul le maintien des petites lignes ferroviaires existantes, le développement d’une offre nouvelle et renforcée autour des heures de pointe, et une politique tarifaire attractive sont susceptibles d’offrir une alternative crédible et effective à nos concitoyens.

Nous proposons d’augmenter de 300 millions d’euros l’action 41 Ferroviaire, afin de mener à bien une réflexion globale sur le réseau à développer dans chaque territoire. La recevabilité budgétaire nous oblige à prévoir une compensation financière ; voilà pourquoi nous invitons le Gouvernement à lever le gage.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Nous partageons vos remarques sur la fermeture des petites lignes ferroviaires qui touche de nombreux territoires, dont le mien. Depuis 2020, nous disposons d’une vue globale du sujet grâce au rapport Philizot. Les régions ont depuis identifié avec la SNCF les lignes à remettre à niveau et ont signé avec l’État des accords de financement. Les mandats de négociation des nouveaux CPER prévoient un apport de l’État de 750 millions d’euros entre 2023 et 2027. La liste des projets financés par cette enveloppe est en train d’être dressée dans les régions. Je vous demande de retirer l’amendement.

M. David Valence (RE). Tous les intervenants se sentent obligés d’évoquer les petites lignes ferroviaires, les UIC 7 à 9 dans la catégorisation de l’Union internationale des chemins de fer. Il faut tout d’abord circonscrire le débat aux lignes circulées, car si on prend en compte les lignes abandonnées depuis trente, quarante ou cinquante ans, nous ne parviendrons jamais à restructurer le réseau. Or la stratégie d’investissement est à la limite plus définie pour ces lignes que pour les lignes structurantes. En effet, depuis février 2020, des accords ont été signés par le gouvernement d’Édouard Philippe avec les régions, lesquels donnent des clefs de répartition des financements pour chacune des petites lignes circulées et fournissent des calendriers de réalisation des investissements : ces éléments sont actuellement déclinés dans les CPER. Dans toutes les régions ayant signé ce type d’accord, à savoir la majorité d’entre elles, nous savons très bien où nous allons pour les lignes UIC 7 à 9, mais tout le monde fait comme si tel n’était pas le cas. À l’inverse, nous pouvons discuter de la manière dont sont financées la régénération et la modernisation du réseau structurant, car la situation n’est pas figée.

M. Stéphane Delautrette (SOC). Nous savons effectivement où nous allons, mais dans un cadre budgétaire donné. Si l’État accordait plus de moyens à l’accompagnement des régions dans le volet des CPER consacré aux mobilités, les investissements régionaux soutiendraient davantage de lignes.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD42 de M. Sylvain Carrière

M. Thomas Portes (LFI-NUPES). Il s’agit d’un amendement d’appel sur le manque d’investissements dans les petites lignes ferroviaires. Monsieur Valence, vous n’évoquez que le réseau encore utilisé et vous laissez de côté celui qui a été abandonné depuis trente ou quarante ans. Nous devons pourtant relancer les lignes ferroviaires qui ne sont plus utilisées depuis des décennies. En Occitanie, entre 60 % et 65 % du réseau est constitué de petites lignes UIC 7 à 9, pour lesquelles un effort d’investissement est nécessaire. Plutôt que de ne mettre de l’argent que sur les lignes à grande vitesse (LGV), il faut investir dans le transport de proximité.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Je ne vais pas reprendre les propos de notre collègue David Valence qui a rappelé que huit régions avaient signé un accord d’investissement pour les petites lignes

M. Vincent Thiébaut (HOR). L’Assemblée a adopté l’un de mes amendements à la proposition de loi relative aux services express régionaux métropolitains, visant à ce que les projets de LGV soient précédés d’une étude portant sur l’opportunité de développer des lignes intermédiaires – sur lesquelles les trains peuvent rouler jusqu’à 250 kilomètres par heure –, voie empruntée par certains de nos partenaires européens, comme l’Espagne et l’Italie. Ces lignes sont bien moins coûteuses que les LGV pour leur aménagement comme pour leur entretien.

Nous comptons tous des lignes abandonnées dans nos territoires ; l’une des solutions est de réfléchir à une utilisation alternative de ces lignes, comme la circulation d’un bus à hydrogène ou électrique. Il convient d’examiner ces options de mobilité propre. Ce sujet figure dans la proposition de loi relative aux Serm, actuellement en discussion au Sénat et dont nous espérons rapidement l’adoption définitive.

La commission rejette l’amendement.

Amendements II-CD44 de M. Thomas Portes et II-CD138 de Mme Marie Pochon (discussion commune)

M. Thomas Portes (LFI-NUPES). Cet amendement vise à augmenter le financement des trains de nuit, notamment le matériel roulant permettant de relancer ces trains. Les trains de nuit de qualité circulant à des horaires intéressants pour les usagers sont remplis. Nous avons actuellement besoin d’un nouveau matériel roulant : la direction générale des infrastructures, des transports et des mobilités (DGITM) a estimé le besoin de matériels roulants à 600 voitures et 60 locomotives, ce qui représente un coût de 1,5 milliard d’euros en dix ans.

Depuis des décennies, la SNCF a choisi, avec l’aval de l’État, de sacrifier les trains de nuit : il convient de rompre avec cette stratégie.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Le bilan des dernières années est très positif en matière de trains de nuit : plusieurs lignes ont été remises en service, dont Paris-Nice et Paris-Lourdes depuis 2021 ; la ligne Paris-Tarbes a été prolongée jusqu’à Hendaye à l’été 2022 ; enfin, les lignes Paris-Aurillac et Paris-Berlin devraient être mises en service d’ici à la fin de l’année. En outre, 129 voitures de nuit ont été rénovées et plusieurs aménagements ont été réalisés dans les principales gares accueillant les voyageurs empruntant des trains de nuit, notamment Paris-Austerlitz, Toulouse et Marseille. Il n’est donc pas possible de dire que nous ne faisons rien.

Vous avez raison de souligner le dynamisme de la demande, puisque la fréquentation a progressé de 77 % entre 2019 et 2022. Les représentants de la SNCF nous ont fait part du véritable engouement qu’ils constataient pour les trains de nuit, même dans les périodes hors vacances scolaires et les week-ends ; une clientèle professionnelle se développe actuellement pour ces trains.

Le renouvellement du matériel roulant des trains de nuit se poursuivra en 2024 grâce à des financements de l’Afitf. L’avis est défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement II-CD41 de M. Thomas Portes

M. Thomas Portes (LFI-NUPES). Il s’agit d’un amendement important, qui porte sur le développement du fret ferroviaire. Une commission d’enquête de l’Assemblée nationale travaille actuellement sur la liquidation de Fret SNCF. Le fret ferroviaire est un outil majeur et indispensable pour lutter contre le réchauffement climatique. Actuellement, entre 9 % et 10 % du transport de marchandises est effectué par rail, alors que la moyenne européenne se situe à 18 % – certains pays, comme l’Autriche, ont même une longueur d’avance puisque la part y atteint 30 %.

La politique publique de fret ferroviaire n’est pas à la hauteur ; nous regrettons la décision du ministre délégué chargé des transports de liquider Fret SNCF et de lancer une procédure de discontinuité, car elle sacrifiera les vingt-trois trafics les plus rentables : ce choix jettera des millions de camions sur les routes. La circulation d’un train de trente-cinq wagons enlève cinquante-cinq camions de 32 tonnes des routes. Voilà l’impact du fret ferroviaire public, instrument indispensable dans la lutte contre le réchauffement climatique.

Nous proposons donc de mettre 1,5 milliard d’euros sur la table pour passer des annonces du Gouvernement aux actes concrets. Les usagers de la route n’en peuvent plus des camions qui circulent sur les autoroutes, les salariés de Fret SNCF attendent des annonces fortes et les citoyens de ce pays ne veulent plus mourir de la pollution en raison d’absence de choix politiques.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Permettez-moi de faire une réponse globale pour cet amendement et les deux suivants, II-CD172 et II-CD143.

Le fret ferroviaire est incontournable pour décarboner le transport de marchandises : il présente des bénéfices environnementaux majeurs par rapport au routier, puisqu’il émet environ neuf fois moins de carbone et huit fois moins de particules nocives. Voilà pourquoi un soutien financier important est apporté au secteur depuis 2021, dans le cadre de la stratégie nationale pour le développement du fret ferroviaire qui vise à doubler la part modale du fret ferroviaire à l’horizon de 2030.

L’ensemble des aides à l'exploitation du fret ferroviaire, augmentées en 2021, ont été reconduites dans le PLF pour 2024. Le ministre délégué chargé des transports s'est engagé, encore aujourd’hui, à les porter à hauteur de 330 millions d'euros d'ici à 2026 ; s'ajoute à ces aides une enveloppe de l’État de 500 millions d'euros pour le réseau capillaire du fret dans les nouveaux CPER : les moyens sont donc là. L’avis est défavorable.

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). Presque aucun train de marchandises ne circule sur la ligne Polt. Pour combattre le gel l’hiver, des trains dégivreurs empruntent la ligne et, par conséquent, l’encombrent et causent des retards. Face à cette situation que nous avons vécue l’hiver dernier, il faudrait un trafic fret et des trains de nuit. Sommes-nous conscients de la nécessité de mettre des marchandises actuellement transportées par camion dans des trains ?

M. David Valence (RE). L’ensemble des acteurs du fret reconnaissent que les investissements et la mobilisation sont incontestables : Thomas Portes le sait, car il a été assidu aux réunions de la commission d’enquête sur la libéralisation du fret ferroviaire. Au total, ce sont 930 millions d’euros de crédits d’État qui sont dégagés, alors qu’il n’y avait rien sur le fret dans la plupart des CPER précédents : maintenant, ce sont 4 milliards d’euros annoncés sur deux générations de CPER. Les mandats aux préfets de région sont partis, il n’y a aucun attentisme.

Quant aux crédits dédiés à l’accompagnement de l’exploitation du fret ferroviaire, ils sont passés de 130 millions en 2020 et 2021 à 330 millions annoncés, 240 millions étant déjà mobilisés en dépenses annuelles. Ces montants correspondent aux demandes des acteurs de l’alliance 4F.

Nous pouvons tous nourrir des inquiétudes sur la situation actuelle du secteur, parfois pour des raisons différentes, mais l’augmentation des crédits publics connaît une concrétisation réelle, plus avancée que pour d’autres chantiers.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD172 de M. Gérard Leseul

M. Gérard Leseul (SOC). Je n’arrive pas à retrouver les 930 millions d’euros annoncés, cher collègue Valence, puisque l’enveloppe de 330 millions vaut jusqu’en 2026. Quels sont les engagements précis pour 2024 ? Je maintiens mon amendement, qui est ambitieux.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. On n’a jamais fait autant qu’aujourd’hui pour le fret ferroviaire. Il y a 170 millions d’euros par an dans le plan fret depuis 2021 : le ministre délégué chargé des transports s’est engagé à porter ce montant à 330 millions d’ici à 2026. L’enveloppe de l’État se monte à 500 millions d’euros dans les CPER. Notre objectif, inscrit dans la LOM, est de doubler la part modale du fret : nous parviendrons à l’atteindre, même si nous partions de très loin. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis de la rapporteure pour avis, la commission rejette l’amendement IICD143 de M. Matthieu Marchio.

Amendement II-CD47 de M. Sylvain Carrière

M. Sylvain Carrière (LFI-NUPES). Cet amendement vise à défendre les investissements dans le transport combiné de marchandises, particulièrement entre le fluvial et le ferroviaire. L’intermodalité se trouve au cœur de la politique des transports des années à venir. Il faut changer de mécanique et donner la priorité aux modes de transport émettant moins de gaz à effet de serre, notamment le ferroviaire, neuf fois moins émetteur que le routier, puis le fluvial, quatre à cinq fois moins émetteur, enfin le camion, en ultime recours et pour les derniers kilomètres.

Cette politique nécessite des infrastructures : des chemins de fer desservant des voies navigables françaises ou les grands ports, puis des trains de fret allant jusqu’à des lieux de débarquement, enfin des camions qui viennent récupérer la marchandise. Vous avez refusé d’adopter des amendements visant à augmenter les moyens du ferroviaire et du fret, désavantagés par rapport à la route en termes de coûts ; il faut pourtant investir davantage dans les installations afin de rendre le transport combiné plus attractif. L’amendement a pour objet de débloquer 33 millions d’euros annuels supplémentaires pour cette politique.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Le transport combiné représente effectivement un potentiel important pour le développement du fret ferroviaire. Il est déjà soutenu par une enveloppe dédiée et renforcée de 47 millions d'euros depuis 2021 : cette aide est essentielle au maintien de la compétitivité du transport combiné. La priorité actuelle est de pérenniser cette aide sur le temps long et de donner de la visibilité au secteur sur sa reconduction jusqu'en 2027 : c’est plus important que d’augmenter le montant de ce soutien. L’avis est défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD46 de M. Thomas Portes

M. Thomas Portes (LFI-NUPES). Cet amendement a pour objet d’augmenter l’enveloppe allouée au wagon isolé. Cet outil est utile au développement du fret ferroviaire ; il dessert des entreprises de proximité qui n’ont pas les moyens « d’acheter un train complet », comme on dit dans le jargon du fret ferroviaire. Quand j’entends les représentants de la majorité, j’ai l’impression que tout va bien : j’ai conscience que l’investissement augmente, mais on partait de tellement loin qu’il n’est pas difficile de faire plus. À Fret SNCF, le nombre de cheminots est passé de 15 000 à moins de 5 000, et l’activité a été fracassée.

Tout le monde souhaite doubler la part modale, mais comment y parvenir avec une entreprise ferroviaire qui va perdre 10 % de ses effectifs et vingt-trois trafics parmi les plus rentables ? Redonnons-nous les moyens de relancer le fret ferroviaire, notamment au travers du wagon isolé, spécificité de la SNCF recherchée par de nombreux chefs d’entreprise de proximité, qui démarchent la SNCF pour avoir accès à ce service.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Les services de wagon isolé font déjà l’objet d’un soutien spécifique de 70 millions d’euros par an. Cette aide, qui bénéficie très largement à Fret SNCF, est reconduite dans le PLF pour 2024. Elle a permis de relancer le wagon isolé. Dans ce contexte, l’important n’est pas tant l’aide directe au wagon isolé que le soutien indirect à la remise en état des gares de triage. L’avis est défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement IICD179 de M. Bertrand Petit

Mme Chantal Jourdan (SOC). Cet amendement vise à accorder un budget supplémentaire de 250 millions d’euros à l’Afit France. En effet, le modèle de financement des infrastructures est fragile. Il repose en grande partie sur l’Afit, dont les recettes ont diminué de façon significative pendant la crise sanitaire. Il nous semble nécessaire de renforcer le budget de cette agence, dont le rôle est de plus en plus important dans le développement du ferroviaire, du fluvial et du vélo.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Demande de retrait. Vos attentes ont été dépassées, puisque le budget de l’Afit est en forte hausse en 2024, avec une augmentation de 800 millions d’euros par rapport à 2023, notamment grâce au projet de nouvelle taxe sur les concessions autoroutières et les aéroports. Cette hausse bénéficiera essentiellement au ferroviaire et aux transports collectifs. Les ressources de l’Afit sont également moins volatiles qu’il y a quelques années.

La commission rejette l’amendement.

Amendement IICD142 de M. Matthieu Marchio

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. C’est vrai, les moyens de l’ART n’ont pas été augmentés proportionnellement à l’élargissement de ses missions depuis 2015 et à la hausse de son plafond d’emploi. Je vous invite à vous rallier à mon amendement, II‑CD216, qui va dans le même sens que le vôtre mais me semble plus raisonnable. Demande de retrait.

La commission rejette l’amendement.

Amendement IICD216 de Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Il s’agit donc d’augmenter la dotation de l’ART de 1 million d’euros, ce qui la porterait à 16 millions d’euros pour 2024. Le secrétaire général nous a parlé de moyens déconnectés des besoins. L’action de l’ART bénéficie largement aux usagers : en 2022, son action aura par exemple permis de réduire de 28 millions d’euros les hausses de péages autoroutiers.

La commission adopte l’amendement.

Amendements identiques IICD45 de M. Sylvain Carrière et IICD174 de M. Gérard Leseul, amendement IICD175 de Mme Chantal Jourdan (discussion commune)

M. Gérard Leseul (SOC). Notre amendement vise à mettre en place un abonnement climat à 49 euros pour le transport ferroviaire. Des expériences en ce sens ont été menées et pérennisées en Allemagne et en Autriche. Si nous voulons développer le transport collectif et éviter l’usage de la voiture, nous devons au moins lancer cette expérimentation.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Le ticket climat est une idée qui fait son chemin. Le PLF pour 2024 finance d’une part le titre unique, qui vise à encourager le recours aux transports collectifs en simplifiant les démarches grâce à un billet commun à plusieurs modes de transports collectifs, d’autre part le pass rail, annoncé par le Président de la République en septembre, qui prendrait la forme d’un abonnement mensuel ouvrant droit à un accès illimité aux transports de proximité. Ces dispositifs sont coûteux, comme le montrent les expériences allemande et autrichienne, et l’impact en termes de report modal et de décarbonation doit être évalué avant toute généralisation.

Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement IICD50 de M. Sylvain Carrière

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). Cet amendement vise à augmenter les investissements de l’État en faveur des infrastructures cyclables, en complément de ceux des collectivités territoriales. Des efforts sont consentis, c’est vrai, mais ils ne sont pas à la hauteur des enjeux : le retard pris rend indispensables des moyens supplémentaires. De plus, les collectivités territoriales font ce qu’elles peuvent, mais elles rencontrent souvent des problèmes budgétaires.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Avis défavorable. Notre politique a déjà permis un important développement de la pratique du vélo. Le nouveau plan Vélo est doté de 2 milliards d’euros pour les années 2023 à 2027, dont 250 millions par an pour les collectivités : l’effort budgétaire est sans précédent. Les financements n’iront pas qu’aux grands centres urbains et aux métropoles, mais aussi aux territoires moyennement et peu denses. Le dernier appel à projets a permis de financer 600 projets, en particulier dans les départements ruraux.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure pour avis, la commission rejette l’amendement IICD53 de M. Thomas Portes.

Amendement IICD51 de M. Thomas Portes

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Je trouve cet amendement, qui propose que les aides à l’achat pour les vélos et les vélos à assistance électrique concernent aussi les vélos d’occasion, très intéressant. L’idée mérite d’être évaluée. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure pour avis, la commission rejette l’amendement IICD63 de Mme Alma Dufour.

Amendement IICD147 de M. Pierre Meurin

M. Pierre Meurin (RN). J’ai toujours pensé qu’on arrivait très bien à faire du vélo, hier comme aujourd’hui… Je préférerais pour ma part mieux soutenir les autorités organisatrices de la mobilité en milieu rural. Nous proposons donc de transférer 1 million d’euros du plan Vélo vers le programme 380, Fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires, et spécifiquement vers l’action 03, Amélioration du cadre de vie.

Nous en avons largement débattu à propos des Serm : je suis un grand défenseur du désenclavement des zones rurales, quel que soit le mode de transport utilisé, y compris la route – je n’ai pas d’idéologie antiroute, contrairement à beaucoup de mes collègues de gauche.

J’invite donc le Gouvernement et la majorité à faire un geste.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Il est tout à fait louable de se préoccuper des zones rurales, mais nous avons déjà énuméré les actions menées en leur faveur : on ne peut pas dire que ces territoires soient oubliés dans ce PLF.

Votre amendement évoque une moindre espérance de vie en milieu rural, mais je ne crois pas qu’un lien ait été démontré entre la mobilité et l’espérance de vie. Avis défavorable.

M. Pierre Meurin (RN). La différence d’espérance de vie entre les Français vivant en zone rurale et ceux vivant en zone urbaine s’est accrue depuis les années 1990. Je ne dis pas que seules les mobilités sont en cause, mais les difficultés d’accès aux soins et à tous les services sont réelles. Je lance l’alerte : un effort particulier doit être consenti en faveur des zones rurales, car la métropolisation à outrance a entraîné une concentration des services dans les zones urbaines et une désertification des zones rurales. C’est un constat, ne voyez là aucune polémique. Je ne dis pas que vous ne faites rien, mais qu’un investissement majeur est nécessaire : nous avons beaucoup donné à la politique de la ville, aux banlieues, mais nos zones rurales souffrent et l’adoption de cet amendement enverrait un signal favorable, quoique modeste, aux Français ruraux.

Mme Huguette Tiegna (RE). Je vis dans le Lot, et c’est le département qui compte le plus de personnes âgées de plus de 75 ans ; en revanche, il y a dans les métropoles un taux de mortalité élevé, en raison de la pollution. Je m’étonne donc de la corrélation que vous établissez entre espérance de vie et mobilité. Ne dénigrez pas les zones rurales : dans le Lot, on vit très bien !

La commission rejette l’amendement.

Amendement IICD54 de Mme Alma Dufour

M. Thomas Portes (LFI-NUPES). Il est nécessaire de renforcer les politiques en matière de covoiturage et d’autopartage. C’est un moyen de réduire la consommation de carburant ; or, malgré les demandes très peu musclées de Bruno Le Maire, le prix des carburants continue de s’envoler, ce qui rend plus difficile le quotidien de nos concitoyens. Cela permet aussi de réduire notre empreinte carbone et d’avoir moins de voitures sur les routes, donc moins de dangers.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Je vous rejoins sur l’importance du covoiturage et de l’évolution des usages. Augmenter le taux d’occupation des véhicules, qui est en moyenne de seulement 1,4 pour les mobilités locales, est essentiel. Un plan national Covoiturage du quotidien a été lancé en décembre 2022 pour la période 2023-2027 : la dynamique est là. Des voies réservées au covoiturage sont développées pour l’accès aux agglomérations, car il faut créer des incitations autres que financières au covoiturage. Les collectivités comme les entreprises prennent des initiatives ; ainsi, l’axe de covoiturage de Lyon à Bourgoin-Jallieu est une réussite. Le sujet est pris au sérieux, mais il faut du temps pour changer les habitudes. Avis défavorable.

M. le président Jean-Marc Zulesi. J’appelle d’ailleurs toutes les entreprises à appliquer le forfait mobilités durables décidé ici même.

La commission rejette l’amendement.

Amendement IICD152 de M. Pierre Meurin

M. Pierre Meurin (RN). Cet amendement vise à affecter 25 millions d’euros à l’entretien de notre réseau routier secondaire – c’est un point que j’ai soulevé lors de l’audition du ministre. Nous sommes passés du premier au dix-huitième rang mondial pour la qualité de nos routes, et le réseau est en état de délabrement. Il y a de grands investissements dans les autoroutes, mais le réseau secondaire est celui du quotidien. En outre, la dégradation des infrastructures est un facteur dans 30 % des accidents graves. C’est donc un enjeu de désenclavement, mais aussi de sécurité. Les collectivités locales, notamment les départements, n’ont plus les moyens d’assurer ces financements : l’État doit intervenir.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Avis défavorable. L’entretien du patrimoine routier est en effet une question de sécurité, et c’est pourquoi le PLF pour 2024 donne la priorité à l’entretien du réseau, en lui consacrant 1 milliard d’euros, plutôt qu’à de nouveaux projets routiers. On ne peut pas dire que les départements délaissent les routes qui leur sont confiées ; ils assurent l’entretien de ce réseau, notamment grâce à une dotation de l’État pour cela.

La commission rejette l’amendement.

Amendement IICD56 de M. Thomas Portes

M. Gabriel Amard (LFI-NUPES). Nous dénonçons les grands projets autoroutiers du Gouvernement, notamment celui d’A69 entre Castres et Toulouse.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Avis défavorable. Les crédits pour les projets autoroutiers sont en baisse dans le PLF pour 2024.

Concernant l’A69, le Gouvernement a récemment renouvelé son engagement pour ce projet qui est soutenu par la majorité des élus locaux et qui a beaucoup évolué sur le plan environnemental depuis 2018.

La commission rejette l’amendement.

Amendement IICD60 de M. Sylvain Carrière

M. Sylvain Carrière (LFI-NUPES). Nous demandons l’augmentation des crédits alloués à Voies navigables de France et le rétablissement du plafond d’emplois à son niveau de 2017. Depuis cette date, 443 postes ont été supprimés : ce sont autant de personnes qui manquent pour développer le transport combiné, pour améliorer la gestion de la ressource en eau, à l’heure des grandes sécheresses, pour anticiper les grandes inondations et leurs possibles ravages, pour ne pas laisser les épaves s’accumuler, comme c’est le cas dans le canal du Rhône à Sète. Ces épaves polluent nos eaux et sont des gîtes pour les moustiques, premiers vecteurs de maladies mortelles pour l’homme comme la dengue. À La Réunion, le chikungunya a infecté 40 % de la population au début des années 2000 ; le moustique tigre, qui le véhicule, se développe de manière exponentielle : soixante et onze départements sont aujourd’hui en vigilance rouge alors qu’il n’y en avait aucun dans l’Hexagone en 2003.

Il est urgent de réinvestir massivement dans la fonction publique qui gère nos voies navigables. Ces agents sont les premiers à intervenir, mais aussi les premiers observateurs. Pourtant, ils manquent de moyens et sont surchargés de travail. L’électrification des berges est un enjeu majeur : certains territoires ont besoin des voies navigables pour être désenclavés.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Cette commission a souvent alerté sur la baisse du plafond d’emplois de Voies navigables de France. Cependant, pour la première fois depuis plusieurs années, ce plafond a été stabilisé à hauteur de 4 028 équivalents temps plein (ETP). L’opérateur, que nous avons auditionné, se satisfait de la stabilisation de la trajectoire des emplois. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement IICD144 de Mme Alexandra Masson, rapporteure pour avis

Mme Alexandra Masson (RN). Il s’agit d’augmenter les crédits alloués à VNF afin de favoriser la modernisation du réseau. Nous pensons surtout à la construction du canal Seine-Nord Europe, important effort attendu de longue date, qui favorisera l’hinterland du port de Dunkerque comme les ports du range nord-européen. Il est indispensable de renforcer les infrastructures de l’axe Seine pour garantir leur compétitivité.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. La modernisation du réseau fluvial est en effet essentielle pour améliorer sa fiabilité et sa productivité comme pour créer les conditions d’un report modal vers le fluvial. Toutefois, les dépenses de modernisation sont d’ores et déjà plus élevées que ce que vous inscrivez dans l’exposé des motifs de votre amendement : il est prévu que l’enveloppe soit portée à 70 millions d’euros à compter de 2024.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD62 de M. Hendrik Davi

M. Stéphane Buchou, rapporteur pour avis. Vous proposez la création d’un fonds visant à accompagner les collectivités territoriales dans l’électrification à quai des ports maritimes. Il s’agit en effet d’un axe prioritaire de la transition écologique portuaire : ainsi, dans le cadre de la stratégie nationale portuaire adoptée en 2021, l’État soutient financièrement les investissements visant au déploiement de l’offre d’électricité à quai dans les grands ports maritimes.

Le programme Écologie de la mission Plan de relance traduit l’engagement budgétaire de l’État : une enveloppe de 175 millions d’euros est dédiée aux interventions cofinancées par les ports, les collectivités territoriales ou l’Union européenne. Dès 2021, l’État a ainsi soutenu l’électrification des quais, et cette action continuera d’être déployée en 2024 au regard de la durée de tels travaux d’investissement. En outre, les CPER prévoient des actions dont le financement mêle crédits de l’État et crédits des régions. Par exemple, 10,8 millions d’euros de crédits du plan de relance sont consacrés à l’électrification à quai des navires dans le grand port maritime de Marseille.

L’engagement financier de l’État, qui doit être maintenu, nous apparaît à la hauteur de l’enjeu. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD149 de M. Pierre Meurin

M. Pierre Meurin (RN). Il s’agit de faire un geste en faveur des pêcheurs affectés par l’installation de parcs éoliens en mer.

M. Stéphane Buchou, rapporteur pour avis. La situation des pêcheurs est effectivement un sujet crucial. Votre amendement me donne l’occasion de rappeler que l’État se trouve à leurs côtés pour les aider à faire face à des difficultés que je ne minimise pas.

Lors de la crise du carburant, une aide au gazole a été mise en place dès mars 2022. Dans ce cadre, 75 millions d’euros ont été engagés. Le Gouvernement a d’ailleurs décidé de prolonger cette aide de 20 centimes par litre jusqu’au 4 décembre prochain ; elle sera ramenée à 13 centimes par litre à compter du 1er janvier 2024.

Notre pays a également obtenu de la Commission européenne un relèvement de 30 000 à 40 000 euros du plafond des aides de minimis pour le secteur de la pêche. Aucun autre État de l’Union européenne n’a autant soutenu ses pêcheurs que la France.

En outre, une partie du produit de la taxe sur les éoliennes maritimes est fléchée vers les pêcheurs, qui bénéficieront à ce titre de quelque 450 millions d’euros lors des dix années à venir. Autant dire que les effets de l’installation de parcs éoliens en mer seront largement compensés ! J’ajoute que les pêcheurs veulent vivre de leur métier, et non de subventions qui ont pour conséquence de laisser les bateaux à quai.

La planification est un élément central pour déterminer les zones d’implantation des parcs éoliens offshore et concilier l’activité des pêcheurs avec le nécessaire déploiement des énergies marines renouvelables – Jimmy Pahun a évoqué ce sujet tout à l’heure.

Enfin, votre amendement vise à abonder les crédits l’action 07 du programme 205, qui concerne principalement le système d’information sur les ressources halieutiques et le pilotage du contrôle des pêches par la direction générale des affaires maritimes, de la pêche et de l’aquaculture (DGAMPA). Les pêcheurs n’en bénéficieraient donc pas.

Même si je partage votre souhait d’accompagner les professionnels de la mer, je donne à votre amendement un avis défavorable compte tenu des arguments que je viens d’avancer.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD61 de M. Matthias Tavel

M. Gabriel Amard (LFI-NUPES). Cet amendement, assez modeste, vise à augmenter de 10 équivalents temps pleins les effectifs de l’ENSM.

M. Stéphane Buchou, rapporteur pour avis. Depuis que le Président de la République a annoncé, en 2021, le doublement du nombre d’officiers sortant de l’ENSM d’ici à 2027, le budget de cette école est en hausse constante. La subvention pour charges de service public qu’elle reçoit est passée de 18,25 millions d’euros en 2021 à 27 millions pour 2024, dont 2 millions de subvention d’investissement visant spécifiquement à atteindre l’objectif de doublement du nombre d’officiers. En outre, en 2023, le plafond des emplois de l’ENSM a été relevé de 232 à 237 ETP, un chiffre maintenu dans le PLF pour 2024. L’effort financier est donc à la hauteur de notre ambition pour cette école. Cela nous a d’ailleurs été confirmé lors des auditions. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD207 de M. Stéphane Buchou

M. Stéphane Buchou, rapporteur pour avis. Lors des auditions que j’ai menées, les enseignants et représentants des lycées professionnels maritimes m’ont fait part de plusieurs difficultés rencontrées sur le terrain. L’une d’elles concerne le recrutement du personnel enseignant dans les matières techniques, souvent compliqué par le niveau de rémunération trop faible. Je propose donc une augmentation de 460 000 euros, soit 10 %, de la subvention destinée à ces établissements en 2024.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-CD58 de M. Sylvain Carrière

M. Thomas Portes (LFI-NUPES). Cet amendement vise à abonder de 200 millions d’euros un nouveau programme intitulé Plan de reconversion pour les salariés travaillant dans le secteur des jets privés.

Il est urgent de lutter contre l’utilisation des jets privés, qui sont une « bombe climatique ». Selon un rapport de l’ONG Transport & Environment, les émissions de CO2 de ces appareils en Europe ont augmenté de près d’un tiers entre 2005 et 2019. L’usage d’un jet privé est cinq à quatorze fois plus polluant qu’un vol réalisé sur une ligne commerciale et cinquante fois plus polluant qu’un trajet en train. En une seule heure de vol, un jet privé émet jusqu’à deux tonnes de CO2, ce qui correspond au maximum que chaque Français devrait émettre pour maintenir le réchauffement climatique en dessous de 2 degrés. Alors que certains se plaisent à remercier Bernard Arnault, l’utilisation de jets privés par ce dernier – ne serait-ce que pour traverser d’est en ouest la ville de Londres, comme le 28 mai dernier – constitue une véritable catastrophe écologique. De tels comportements mettent la population en danger. Toutefois, les salariés de ce secteur ne sont pas responsables de l’usage de ces outils : il faut donc les protéger et les préparer à travailler dans des secteurs d’intérêt général et utiles à la bifurcation écologique tels que le ferroviaire, la rénovation thermique ou les énergies renouvelables.

Mme Alexandra Masson, rapporteure pour avis. L’interdiction de l’aviation privée est votre grand dada. Je suis, pour ma part, favorable à ce secteur d’activité. La « bombe », c’est vous ! Votre discours est une bombe idéologique, dogmatique : vous ne prenez aucun recul sur ce qui se passe sur la planète.

L’aviation privée n’est à l’origine que de 0,04 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre ; les vols réalisés en France ne sont, quant à eux, responsables que de 0,001 % des émissions de dioxyde de carbone à l’échelle de la planète. Au-delà des grands discours, ce mode de transport permet à de nombreuses entreprises des secteurs industriel et tertiaire des gains de temps importants lors des déplacements professionnels, notamment pour des liaisons non desservies par des lignes commerciales – les exemples que vous aimez citer ne correspondent en rien à la réalité.

Il est plus pertinent d’aider l’aviation privée à se décarboner que de l’interdire. Lors d’un déplacement au Bourget, nous avons d’ailleurs pu constater les énormes efforts consentis par le secteur aérien dans ce domaine, malgré les taxes de plus en plus importantes auxquelles il est soumis et dont le produit ne lui est même pas destiné – nous avons vu tout à l’heure que ces taxes allaient à l’Afit France, qui ne reverse rien à l’aérien mais tout au ferroviaire. Autrement dit, le secteur aérien est contraint d’autofinancer sa décarbonation, et il le fait plutôt bien.

Vous avez cru utile de préciser, dans l’exposé sommaire, que l’interdiction ne concernerait pas les vols d’évacuation sanitaire. Or, lors des auditions menées en amont de l’examen de la proposition de loi de Julien Bayou visant à interdire les vols en jets privés, le Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (Gifas) a indiqué qu’il était impossible de distinguer les vols d’affaires des vols sanitaires, d’autant qu’un vol peut assurer plusieurs missions au cours d’un même aller-retour.

Les acteurs de l’aviation privée investissent déjà énormément pour développer des avions bas-carbone. L’argent public doit servir à favoriser l’émergence d’une filière française de carburants durables d’aviation, dits SAF (Sustainable Aviation Fuel). Nous importons en effet ces carburants alors que nous avons en France les brevets pour les produire, comme on nous l’a expliqué lors des auditions. Alors que la loi européenne prévoit que les vols au départ d’un aéroport de l’Union devront incorporer au moins 6 % de SAF d’ici à 2030, toutes nos compagnies se sont engagées à mettre au moins 10 % de ces carburants dans les réservoirs de leurs avions.

Avis défavorable, donc.

M. Thomas Portes (LFI-NUPES). Il y a aussi un impératif d’exemplarité. Comment pouvons-nous demander à nos concitoyens d’avoir des comportements écoresponsables et de limiter leurs déplacements en voiture alors qu’ils n’ont pas forcément accès à des transports de proximité quand, dans le même temps, nous exonérons une petite minorité de ces efforts en lui permettant de traverser le pays en jet privé pour satisfaire des désirs personnels et de polluer ainsi davantage que des milliers de gens réunis ? Les 10 % de Français les plus riches polluent énormément et il est de notre responsabilité politique que de leur envoyer un signal.

Vous prétendez qu’un jet privé peut effectuer une mission sanitaire en même temps qu’il vole pour affaires. J’aimerais savoir combien de fois Bernard Arnault a utilisé son jet pour un motif sanitaire plutôt que pour effectuer de petits déplacements privés, de loisir. Mais encore une fois, quand il s’agit de s’attaquer aux plus riches et à ceux qui piétinent l’écologie, vous vous placez du côté des puissants. Vous révélez une fois de plus votre vrai visage, celui d’une extrême droite qui se montre complaisante avec les plus riches et dessert les intérêts du peuple.

M. Pierre Meurin (RN). Monsieur Portes, j’aimerais relever la condescendance de l’exposé sommaire de votre amendement. Vous avez dit tout à l’heure que les salariés n’étaient pas responsables des activités de leur entreprise. Or il me semble qu’ils sont liés à leur employeur par une relation contractuelle : on peut donc imaginer qu’ils ont choisi de travailler pour le secteur aérien par conviction. Votre position idéologique vous coupe complètement des réalités.

Au-delà des jets privés, l’avion n’est pas un moyen de transport utilisé uniquement par les riches. Vous n’êtes pas forcément les mieux placés, à gauche, pour parler d’exemplarité. Puisque vous êtes un grand donneur de leçons de morale, j’aimerais vous interroger sur le coût carbone des baskets Nike que vous portez régulièrement.

Mme Huguette Tiegna (RE). Je ne veux pas alimenter la polémique : mes propos se borneront donc à des aspects technologiques.

Le meilleur moyen de décarboner le secteur aérien est de miser sur les technologies du futur. Dans le Lot, la grande entreprise aéronautique Ratier Figeac, qui recrute actuellement, construit des pales permettant aux avions d’économiser de l’énergie. L’État investit dans la recherche en faveur de carburants émettant moins de CO2. J’ai également eu l’occasion de découvrir certaines solutions technologiques lors du récent congrès national des sapeurs-pompiers à Toulouse. Chacun a bien sûr le droit de défendre ses convictions, mais je vous suggère de vous intéresser à ces avancées technologiques plutôt que de proposer systématiquement des taxes ou des interdictions.

Mme Alexandra Masson, rapporteure pour avis. J’apprécie le discours de sagesse que je viens d’entendre. Les auditions que nous avons organisées visaient précisément à mettre en avant les nouvelles technologies de décarbonation et les filières françaises. Le problème est que certains de nos collègues éprouvent une telle haine envers les entreprises et les gens qui font avancer notre pays qu’ils ne voient pas tout ce que les grandes entreprises françaises font de bien. Il est un peu désolant de constater qu’ils restent enfermés dans leur idéologie plutôt que de regarder la réalité telle qu’elle est.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD151 de M. Pierre Meurin

M. Pierre Meurin (RN). Nous quittons le secteur spécifique des jets privés pour affirmer, à rebours de l’idéologie de la NUPES et de l’extrême gauche, notre soutien général au transport aérien.

Nous voulons tout d’abord démonter une idée reçue : l’avion n’est pas l’apanage des riches. Ce moyen de transport est aussi utilisé par des gens qui partent en vacances une fois tous les trois ou quatre ans et offrent un voyage à leur femme et leurs enfants. Nous devons donc faire en sorte que le prix des billets n’augmente pas. Lorsque la civilisation progresse, les prix doivent baisser et les biens et services devenir plus accessibles. C’est ainsi que le low cost a été une formidable avancée pour permettre aux classes populaires et aux Français les plus modestes de partir en vacances et de découvrir d’autres pays.

Ainsi, nous proposons d’abonder de 15 millions d’euros les crédits de l’action Transport aérien, qui ont connu ces dernières années une baisse de 13 %. Nous reviendrions ainsi au montant inscrit dans le PLF pour 2023, ce qui nous permettrait d’éviter une augmentation du prix des billets d’avion, y compris pour les Français les plus modestes qui ont aussi grand besoin de partir en vacances.

Mme Alexandra Masson, rapporteure pour avis. Avis favorable : il faut évidemment soutenir l’aérien et l’aéronautique en France. Être exemplaire, cela ne veut pas dire se suicider. Selon les pronostics des organismes les plus traditionnels qui connaissent ce secteur, l’augmentation du trafic aérien mondial sera de 3,6 % par an. La France peut compter sur des constructeurs comme Airbus, Dassault et Bombardier, qui figurent parmi les plus importants au monde si l’on met de côté les Américains, qui sont numéro un. Suivre la pente de la décroissance serait mettre à mal ces fleurons français.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD28 de M. Julien Rancoule

M. Christophe Barthès (RN). Cet amendement d’appel vise à interpeller le Gouvernement au sujet de l’ouverture de la ligne aérienne Carcassonne-Paris Orly. Alors que l’Aude est l’un des départements les plus enclavés et les plus éloignés de Paris, ce projet, qui répond à une urgence, doit être accéléré. L’ouverture de cette ligne aérienne, validée par la DGAC en janvier 2022, est indispensable pour désenclaver l’Aude et assurer son développement économique ; elle viendra compenser l’absence de ligne à grande vitesse traversant le département, les travaux de construction de cette dernière n’étant prévus qu’à partir de 2035.

Mme Alexandra Masson, rapporteure pour avis. Avis favorable. Lorsque le ferroviaire est de meilleure qualité que l’aérien, il n’y a évidemment aucune raison de valoriser le second, mais pour des liaisons comme celle que vous avez évoquée, nous avons tout intérêt à le faire. Cela étant, la suppression par Air France de la ligne Nice-Orly en 2026, que je viens d’apprendre ce soir, me fait craindre que la ligne aérienne que vous appelez de vos vœux ne soit pas près d’ouvrir. Et comme la ligne ferroviaire n’existera pas non plus, j’ai bien peur que l’Aude reste enclavée très longtemps.

La commission rejette l’amendement.

M. le président Jean-Marc Zulesi. Mes chers collègues, je vous rappelle que le vote sur les crédits de la mission Écologie, développement et mobilité durables aura lieu demain, à l’issue de l’examen des crédits relatifs à la protection de l’environnement et à la prévention des risques, à la transition énergétique, aux paysages, à l’eau et la biodiversité, ainsi qu’aux politiques de développement durable.

Article 36 et état C : Crédits des budgets annexes

La commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits du budget annexe Contrôle et exploitation aériens non modifiés.

Article 40 : Plafond des autorisations d’emplois de l’État

Amendement II-CD215 de Mme Danielle Brulebois

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Cet amendement est issu d’une recommandation du rapport d’évaluation de la loi du 2 juin 2018 pour un nouveau pacte ferroviaire présenté en mai 2023 par MM. David Valence et Emmanuel Maquet. Ce rapport a mis en évidence la faiblesse des moyens humains dévolus au renouvellement du matériel roulant des trains d’équilibre du territoire – les Intercités – et à l’organisation des appels d’offres pour ces lignes. Seuls 5 à 7 ETP seraient affectés à ces missions, ce qui paraît très insuffisant au regard des enjeux. Je vous propose donc de renforcer de 10 ETPT l’équipe dédiée aux lignes de TET au sein du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

La commission adopte l’amendement.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 40 modifié.

Après l’article 52

Suivant l’avis de la rapporteure pour avis, la commission rejette l’amendement IICD59 de M. Thomas Portes.

Amendement II-CD48 de M. Gabriel Amard

M. Gabriel Amard (LFI-NUPES). Nous demandons au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport dressant un état des lieux précis des financements prévus pour le projet de nouvelle ligne ferroviaire Lyon-Turin. Il s’agit, je le rappelle, d’un projet écocidaire d’ampleur impliquant l’artificialisation de 1 500 hectares de zones agricoles et naturelles ainsi que le drainage de 100 millions de mètres cubes d’eau souterraine chaque année.

Au lieu de s’enliser dans la construction d’une seconde ligne coûteuse – 30 milliards d’euros pour 300 kilomètres de tunnels –, l’État devrait privilégier l’utilisation de la ligne existante. Ce serait le seul moyen de développer rapidement le fret ferroviaire et de supprimer l’équivalent d’un million de camions sur les routes entre la France et l’Italie, alors que le projet de seconde ligne n’affiche comme ambition qu’une baisse de trafic de 350 000 camions. Pour ce faire, il faudrait cependant commencer par protéger la voie ferroviaire – comme la voie routière, d’ailleurs – de tout risque d’éboulement. Ce risque est connu depuis la publication d’un rapport du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) en 1975, mais mieux vaut tard que jamais.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Ce projet a fait l’objet d’engagements publics répétés à travers plusieurs accords internationaux et son inscription dans la loi d’orientation des mobilités. Des échanges sont en cours avec les collectivités pour fixer les modalités de cofinancement et lancer les études d’avant-projet détaillé en 2024. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Article additionnel après l’article 52 : Rapport sur les modalités de financement de la régénération et la modernisation du réseau ferroviaire

Amendement II-CD209 de Mme Danielle Brulebois

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. La Première ministre a annoncé en février dernier un investissement supplémentaire de 1 milliard d’euros pour la régénération et 500 millions pour la modernisation du réseau ferré d’ici à la fin du quinquennat. Cet effort budgétaire, essentiel pour réussir la « nouvelle donne ferroviaire » annoncée, manque toutefois de précision. Je propose donc que le Gouvernement nous remette, dans les six mois suivant la promulgation de la loi de finances pour 2024, un rapport explicitant les modalités de financement envisagées dans le périmètre du programme 203 ou du budget de l’Afit France.

La commission adopte l’amendement.

Article additionnel après l’article 52 : Rapport sur le maillage des lignes ferroviaires existantes

Amendement II-CD145 de Mme Danielle Brulebois

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Je demande la remise d’un autre rapport qui cartographie les lignes ferroviaires, en mettant notamment en avant les lignes de desserte fine supprimées ou suspendues.

La commission adopte l’amendement.

Après l’article 52

Suivant l’avis de la rapporteure pour avis, la commission rejette l’amendement IICD55 de M. Sylvain Carrière.

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II.   réunion du Mercredi 18 octobre matin

Lors de sa réunion du mercredi 18 octobre 2023 matin, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a poursuivi l’examen des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », sur les rapports pour avis de M. Marcellin Nadeau sur les crédits relatifs à la protection de l’environnement et la prévention des risques, de M. Jean-Louis Bricout sur les crédits relatifs à la transition énergétique, de M. Emmanuel Maquet sur les crédits relatifs aux paysages, à l’eau et à la biodiversité, et de M. Pierre Meurin sur les crédits relatifs aux politiques de développement durable.

M. Marcellin Nadeau, rapporteur pour avis (Protection de l’environnement et prévention des risques). Je voudrais tout d’abord remercier le président Zulesi qui a permis que les auditions que j’ai conduites puissent aussi avoir lieu aux Antilles, et singulièrement à la Martinique.

C’est d’autant plus remarquable que nous débattons souvent de textes importants qui concernent l’accélération de la production des énergies renouvelables, l’industrie verte ou la biodiversité sans que ces derniers comprennent un volet consacré à l’outre-mer. Celui-ci représente pourtant 97 % de la biodiversité et 96 % de l’espace maritime français. Ces territoires sont en outre très exposés aux risques naturels. On peut dire que l’outre-mer est un impensé national.

Je voudrais également remercier les députés MM. Jean-Philippe Nilor et Jean-Victor Castor d’avoir participé activement aux auditions, tant à la Martinique qu’à Paris, ainsi que mon collaborateur. Je salue l’administratrice qui m’a accompagné dans mon travail et qui est allée vers l’outre-mer compliqué – pour paraphraser le général de Gaulle –, avec des idées simples mais sans a priori, et où elle a pu découvrir une réalité rude et difficile, une pauvreté indigne de la République et des problèmes nouveaux qui amènent à se poser des questions sur les décisions qui sont ou non prises à Paris et sur la manière de les appliquer.

On ne fait pas une politique publique sans parler de la réalité des besoins. L’analyse du programme 181 Prévention des risques permet de le montrer.

Ce programme est consacré à la prévention de très nombreux risques, qu’ils soient naturels, technologiques, industriels, nucléaires ou miniers. Il apporte également un soutien à l’économie circulaire et au développement des énergies renouvelables à travers le financement de l’Agence de la transition écologique (Ademe).

Le risque industriel est présent sur l’ensemble du territoire, comme en témoignent l’explosion de l’usine AZF de Toulouse en septembre 2001 et, plus récemment, l’incendie de l’usine Lubrizol à Rouen en septembre 2019 ou l’explosion d’une usine classée Seveso à Bergerac en août 2022. Tout cela nous rappelle, s’il en était besoin, la nécessité de contrôler ce type d’installations pour éviter que surviennent des événements préjudiciables à la fois à la santé et à l’environnement.

Le changement climatique tend à accroître la fréquence et l’intensité des risques naturels, alors que la densification de la population sur les littoraux et plus généralement dans les zones potentiellement exposées à des aléas augmente les coûts humains et économiques des catastrophes naturelles. En septembre 2020, la tempête Alex a provoqué la mort d’au moins dix personnes et des dégâts matériels importants dans plusieurs vallées montagneuses des Alpes-Maritimes. Depuis plusieurs années déjà, la sécheresse et les nombreux épisodes de canicule ont des conséquences négatives sur les milieux aquatiques, l’agriculture et le niveau des nappes phréatiques.

En raison de la diversité des risques qu’il entend identifier et prévenir, le programme 181 est une source de financement essentielle en matière de transition écologique. Je l’ai analysé au regard des enjeux vitaux que cette nécessaire transition recouvre ainsi que du réchauffement climatique afin de vérifier si les réponses qu’il apporte sont à la hauteur des défis actuels et futurs et s’il correspond au discours gouvernemental qui présente cette transition comme une priorité absolue.

De ce point de vue, les crédits du programme 181 connaissent une hausse indéniable par rapport à la loi de finances de 2023. Ils passent de 1 141,51 millions à 1 326,60 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE), soit une augmentation de 16,21 %. Les crédits de paiement (CP) passent, quant à eux, de 1 143,15 millions à 1 328,23 millions d’euros, soit une progression de 16,02 %. Il faut donc s’en féliciter.

Néanmoins, il faut noter que l’augmentation des CP résulte essentiellement d’un accroissement de 179 millions d’euros de la subvention versée à l’Ademe, de 2 millions de celle destinée à l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (Ineris) ou encore de la progression de 6,04 % des dépenses de personnel de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN).

Comme toujours, le diable se cache dans les détails. La hausse des crédits doit être grandement relativisée puisqu’elle concerne pour l’essentiel des dépenses de fonctionnement et qu’elle est destinée à pallier les conséquences de réductions brutales d’effectifs enregistrées durant les années passées dans le domaine de la sûreté nucléaire, à Météo-France, au Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) et surtout à l’Ademe. Ainsi, le plafond d’emplois de l’ASN atteint 470 équivalents temps plein travaillé (ETPT) dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2024, contre 457 en 2023. Mais la réalisation de cet objectif est lissée sur cinq ans, ce qui ne lui permet pas de faire face aux enjeux auxquels elle est confrontée.

Cette situation à des effets pervers, car elle oblige nombre d’établissements à aller à la « pêche aux financements » dans d’autres programmes budgétaires pour assurer leurs missions ô combien importantes de protection des populations. C’est le cas pour le BRGM, Météo-France, le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema) ou le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), qui financent l’Institut de physique du Globe de Paris (IPGP), chargé de la recherche sur les volcans à Mayotte, aux Antilles et à La Réunion et donc de la prévention des risques. Mais les opérations de ce dernier sont financées par le biais d’autres programmes que le programme 181. Un résultat très concret de cette situation est, par exemple, que les astreintes assurées par des personnels de l’IPGP ne sont pas rémunérées. On fait dépendre la protection de la population de la bonne volonté d’agents et de chercheurs, que je tiens à remercier.

Il en ressort l’impression d’une politique de gribouille, un peu désordonnée, qui manque de cohérence et qui n’est pas mutualisée. Cette situation peut surtout être préjudiciable en cas de risque accru – comme actuellement – ou en cas de conjonction des risques. Un risque sismique ou volcanique peut en effet aussi entraîner des risques de submersion et d’inondations.

La politique de prévention englobe de nombreux risques : risques naturels et hydrauliques, liés aux anciens sites miniers, dispositif de contrôle des installations nucléaires, risques technologiques et pollutions. Cette politique comprend aussi l’action du Gouvernement en matière de santé environnementale. Pour assurer ces missions, la politique de prévention s’appuie sur différents organismes tels que l’ASN, l’Ineris, le groupement de gestion de l’après-mine et des travaux de mise en sécurité (Geoderis), le BRGM, Météo‑France, l’IPGP, le CNRS, le département de prévention de sécurité maritime, le Cerema et surtout l’Ademe – dont on peut se féliciter qu’elle retrouve un budget en progression, après avoir vu ses effectifs réduits de 20 % en quatre ans. Cette grande diversité devrait inciter à mener une politique de mise en cohérence de ces structures et de leurs actions.

Divers fonds interviennent également, comme le fonds de prévention des risques naturels majeurs, dit « fonds Barnier », le fonds pour l’économie circulaire, le fonds chaleur, le fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires, ou « fonds vert », et le fonds pour la résorption des décharges littorales. Bref, il y a matière à mutualiser et à renforcer les financements pour plus d’efficacité, en prévoyant des moyens suffisants, en clarifiant les démarches et les appels à projets, en améliorant la traçabilité de ces derniers et en accélérant la mise en réseau de tous ces éléments. Le Gouvernement aurait d’ailleurs intérêt à consacrer des moyens accrus pour être à la hauteur de ces défis.

Ce qui est vrai en général l’est encore plus outre-mer.

Tous les risques y sont présents : technologiques et industriels, cycloniques et sismiques, de submersion marine comme de glissements de terrain, d’inondations ou de tsunamis. Leur ampleur appelle un autre niveau de réponse publique. Les politiques de prévention, souvent sectorielles, devraient être mutualisées en raison de la multiplicité et de la concomitance des phénomènes. Une véritable culture du risque devrait être développée, en intégrant les associations de protection et de défense de l’environnement. En outre, l’insularité modifie sensiblement l’appréhension de la question des risques. Cette caractéristique est insuffisamment prise en compte et on peut par exemple regretter que l’érosion côtière ne soit pas comprise dans les actions du programme 181, car elle n’est pas reconnue comme étant un risque naturel.

Comme l’ont indiqué des architectes et des ingénieurs entendus en Martinique, les politiques d’aménagement du territoire et de construction dans les Antilles doivent particulièrement promouvoir le respect des normes parasismiques et intégrer les risques naturels. Les différents aléas surviennent dans des territoires relativement petits et densément peuplés, dans lesquels les espaces disponibles pour l’aménagement sont de plus en plus rares et où une grande partie de la population habite à proximité du littoral. Il faut donc veiller à localiser les habitations et les activités économiques en fonction des risques naturels.

Il faut aussi développer les connaissances sur les risques outre-mer. C’est le rôle des observatoires qui relèvent de l’IPGP, du BRGM et des directions interrégionales de Météo‑France. Des acteurs ont insisté sur la nécessité de mettre en place à l’échelle régionale des espaces qui permettent de mutualiser la production et la diffusion des connaissances – tant il est vrai qu’elles sont indispensables pour mieux prévenir les risques.

Je souhaite aborder d’autres sujets qui concernent les outre-mer, et d’abord le stockage de l’eau. On sait que le séisme survenu à Haïti en 2010 n’était pas responsable de la plupart des décès enregistrés, mais bien la crise sanitaire qui a suivi en raison du manque d’eau potable. En Martinique, seulement 5 châteaux d’eau sur un total de 255 sont conformes aux normes parasismiques. On peut donc se poser des questions.

Une affaire très importante est également à régler, qui concerne le littoral : le transfert de la gestion de la zone des cinquante pas géométriques aux collectivités territoriales. Cette zone est dangereuse et les personnes qui y sont installées sont très exposées. Ce transfert n’est pas accompagné des moyens correspondants, alors qu’il faudra mettre en œuvre de très importants projets de recomposition urbaine et spatiale.

Pour conclure, les politiques de prévention devraient être mutualisées, leurs moyens renforcés et l’anticipation devrait être de mise. Le fonds vert et le fonds Barnier sont insuffisants pour permettre aux communes littorales d’engager les nécessaires politiques de protection des populations, très denses dans ces zones.

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis (Transition énergétique ; articles 50 et 51). Réussir la transition énergétique suppose d’engager la transformation des deux secteurs les plus énergivores en France : le bâtiment, qui a représenté 44 % de la consommation énergétique finale et 18,1 % des émissions de gaz à effet de serre en 2021, et les transports, qui ont consommé 31,3 % de l’énergie finale et émis 30,8 % des gaz à effet de serre, dont plus de 94 % au titre du seul transport routier. Le programme 174 Énergie, climat et après-mines entend agir sur ces deux secteurs sur lesquels je concentrerai mon propos, car ils représentent plus de 90 % des crédits.

S’agissant du bâtiment, j’ai pour habitude de dire que rénover les logements est bon pour l’environnement, pour l’économie et pour le pouvoir d’achat. L’action 02 Accompagnement transition énergétique du programme 174 fait la synthèse de ces trois enjeux à travers le financement de MaPrimeRénov’ et du chèque énergie.

Le dispositif MaPrimeRénov’ est réformé en 2024. Cette prime sera déclinée en deux piliers. Un pilier « performance » ciblera les projets de rénovation globale – avec au moins deux sauts de classe du diagnostic de performance énergétique (DPE) – et un pilier « efficacité » visera à remplacer les modes de chauffage carbonés. L’aide forfaitaire ne sera plus accessible notamment aux propriétaires de logements énergivores, qui relèvent en fin de compte du pilier « performance ». Ce rééquilibrage des aides va dans le bon sens. Il faut bien évidemment isoler un bâtiment avant de décarboner sa consommation énergétique – particulièrement dans un contexte d’explosion des prix de l’énergie.

Les crédits consacrés à MaPrimeRénov’ sont répartis entre plusieurs programmes : le programme 174, qui fait l’objet de cet avis, le programme 135 Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat – rattaché à la mission Cohésion des territoires – et le programme 362 Écologie de la mission Plan de relance. Si l’on additionne les crédits retracés par ces trois programmes, le financement s’élève à 3,7 milliards d’euros pour 2024, soit une hausse conséquente de 916,3 millions d’euros en AE et de 134,3 millions d’euros en CP.

Cela mérite d’être salué, mais cette progression ne correspond pas à l’annonce par le Gouvernement d’une augmentation globale de 1,6 milliard d’euros. J’ai interrogé l’administration pour savoir où se trouvaient les crédits qui manquent. La réponse qui m’a été donnée est pour l’instant très incomplète.

Deux remarques à ce stade.

Premièrement, ces crédits manquent de lisibilité.

Deuxièmement, le budget consacré à MaPrimeRénov’ me paraît insuffisant si l’on considère les objectifs de la stratégie nationale bas-carbone et la crise énergétique actuelle. En 2022, seulement 65 000 rénovations globales ont été réalisées et leur nombre devrait être comparable en 2023. Or le Gouvernement prévoit de tripler ces rénovations en l’espace d’une seule année. Cet objectif ne pourra pas être atteint sans une véritable massification des aides. Le Haut Conseil pour le climat considère qu’il faudrait effectuer 370 000 rénovations globales par an dès maintenant et 700 000 par an à partir de 2030.

Outre les aspects budgétaires, la rénovation énergétique des bâtiments se heurte à plusieurs difficultés. Cet avis propose plusieurs pistes pour les résoudre.

Premièrement, il faut renforcer l’accompagnement personnalisé et la confiance des ménages. Les besoins sont réels en la matière, tant en raison de la complexité des aides que des risques de fraude. Le déploiement des espaces et des accompagnateurs France Rénov’ dans les intercommunalités me paraît plus que nécessaire. Il y a lieu de proposer un accompagnement à la fois technique, administratif, financier et même parfois social tout au long des travaux. Les accompagnateurs France Rénov’ doivent avoir des compétences particulièrement variées, allant de la délivrance de conseils sur les projets à l’élaboration d’un plan de financement. Ils doivent être clairement identifiés et, surtout, présents sur l’ensemble du territoire. Leur parcours doit apporter des garanties suffisantes d’indépendance.

Deuxièmement, il convient de rendre plus fiable le DPE. Cet outil doit devenir incontestable, ce qui n’est malheureusement pas encore le cas. C’est d’autant plus nécessaire que l’accès à certaines aides dépendra du DPE. Il faut homogénéiser les pratiques des diagnostiqueurs et renforcer leur formation.

Troisièmement, il convient de lutter contre la fraude et le démarchage agressif – avec des pratiques commerciales quelquefois trompeuses, y compris de la part d’entreprises disposant du label Reconnu garant de l’environnement (RGE), qui n’est malheureusement pas toujours une garantie. Le secteur est marqué par l’ampleur des tentatives de fraude. Il est nécessaire de donner à l’Agence nationale de l’habitat (Anah) et à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) les moyens de renforcer les contrôles aléatoires et de sanctionner ces pratiques.

Quatrièmement, il faut se préoccuper du reste à charge pour les personnes et les ménages modestes, qui reste de l’ordre de 50 %. Il y a donc un décalage entre les objectifs de rénovation énergétique et la réalité des capacités financières des ménages. Les prêts montrent leurs limites, qu’il s’agisse de l’éco-prêt à taux zéro ou du prêt avance rénovation. Je propose de transformer ce dernier en une avance remboursable dont le montant sera indexé sur la valeur du bien.

L’action 02 Accompagnement transition énergétique du programme 174 finance également le chèque énergie, dont les crédits sont stables par rapport à 2023, avec près de 900 millions d’euros en AE et de 800 millions d’euros en CP. Ce chèque n’est attribué qu’aux ménages très modestes, avec un montant moyen de 148 euros cette année – soit à peine 10 % des dépenses énergétiques. Il est pourtant reconduit à l’identique en 2024, ce qui constitue un choix difficilement compréhensible.

J’ai donc déposé un amendement qui propose de revaloriser le montant de ce chèque en augmentant le plafond de revenus des ménages éligibles. Les travailleurs pauvres doivent pouvoir bénéficier de ce dispositif dont ils sont actuellement exclus.

Enfin, contrairement aux tarifs sociaux de l’énergie, le chèque énergie n’est pas lié à la consommation énergétique des ménages. Pourtant, les écarts de consommation – et donc de facturation – peuvent aller jusqu’à 500 euros suivant les zones. Je propose de réfléchir à une modulation en fonction de l’indice climatique des régions.

J’en viens au verdissement des transports.

La transition vers un parc automobile décarboné ou peu polluant est inévitable, afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre et d’assurer une bonne qualité de l’air. D’où l’action 03 Aides à l’acquisition de véhicules propres. Il s’agit de financer divers dispositifs pour aider les particuliers et les entreprises à renouveler leurs véhicules. Les crédits portent sur le bonus écologique, la prime à la conversion, le dispositif de leasing social, l’appel à projets « écosystèmes des véhicules lourds électriques » et le soutien au déploiement de bornes de recharge. L’enveloppe prévue est de 1,5 milliard d’euros, soit 200 millions de plus que l’année dernière. Je note que nous manquons de visibilité sur la répartition prévisionnelle de ces crédits, qui n’est pas encore connue.

En 2022, 325 000 bonus écologiques ont été attribués, pour 1,16 milliard d’euros. Je salue l’entrée en vigueur, fin 2023, d’un nouveau critère d’éligibilité : le score environnemental, qui prendra en compte l’empreinte carbone du véhicule depuis la production de la matière première jusqu’au transport de ce dernier sur son lieu de distribution.

La prime à la conversion favorisera le basculement du parc vers des véhicules peu polluants, électriques, à hydrogène, classés Crit’Air 1. Les véhicules rétrofités et les vélos à assistance électrique sont également inclus. En 2022, près de 92 000 primes ont été attribuées pour environ 250 millions d’euros. Une surprime, allouée aux zones à faibles émissions mobilité et en outremer, renforce la dimension sociale de cette aide attribuée sous condition de ressources.

La transformation du parc automobile nécessite l’accès de tous aux véhicules électriques, avec une présence suffisante de bornes de recharge à un tarif compétitif et sur l’ensemble du territoire. Les mesures en faveur de leur développement doivent se poursuivre.

Concernant les bornes privées –1,4 million de points de recharge –, les crédits d’impôts, la réduction de TVA, le programme Advenir financé par les certificats d’économies d’énergie (C2E) permettent l’accompagnement des particuliers et des entreprises. Ce sont 100 000 points de recharge qui sont ouverts au public, loin des 400 000 prévus par le Gouvernement d’ici à 2030.

Par ailleurs, pour assurer la transition vers l’électrique, la tarification de l’électricité doit rester compétitive par rapport aux énergies fossiles. À ce titre, les prix élevés des recharges électriques dans les grandes surfaces ou sur les aires d’autoroutes ne laissent pas d’interroger.

Enfin, qui dit accès de tous aux véhicules propres dit, là aussi, accompagnement des foyers à revenus modestes. Parce que le coût de l’acquisition est rédhibitoire, il est proposé de financer le leasing social dès le 1er janvier 2024, une location de véhicule électrique au score environnemental minimal dès 100 euros par mois. Je pense qu’il faut aller plus loin. Je vous proposerai par voie d’amendement la création d’une « aide personnalisée à la mobilité » (APM), calquée sur l’aide personnalisée au logement (APL), dont le montant serait progressif, sur critères sociaux, géographiques – les zones à faibles émissions (ZFE) notamment – et sur critères d’usage.

M. le président Jean-Marc Zulesi. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert (RE). Les crédits des programmes budgétaires consacrés à l’adaptation, au changement climatique et à la prévention des risques sont en progression et s’articulent avec une politique de planification écologique de plus en plus structurée et ambitieuse.

Dans les programmes relatifs à la transition énergétique, figure d’abord le financement de MaPrimeRénov’, à laquelle l’État consacrera 3,73 milliards d’euros en AE, ce qui représente une hausse de 32 % par rapport à l’année dernière. Cette enveloppe fait partie des 5 milliards d’euros dont dispose l’Anah pour financer l’ensemble des aides à la rénovation énergétique.

Ce PLF permettra de concrétiser l’une des mesures les plus importantes issues du Conseil national de la refondation (CNR) logement : la refonte de MaPrimeRénov’ à partir de deux piliers, dont l’un sera ciblé sur des projets de rénovations globales et performantes et accessibles à tous les propriétaires de logement, sans condition de ressources. Une telle orientation va dans le bon sens, car il convient d’isoler le bâtiment avant de décarboner sa consommation énergétique. Cette nouvelle dynamique nous semble donc cohérente avec l’interdiction progressive de la location des passoires thermiques. Nous nous félicitons que tout soit mis en œuvre pour que le calendrier soit tenu.

Le programme Transition énergétique a pour objectif d’inciter davantage au verdissement du parc automobile. Le PLF propose d’insérer un nouveau critère d’éligibilité pour l’octroi du bonus écologique, outil d’accompagnement destiné aux acquéreurs de véhicules électriques par une aide à l’achat ou à la location de longue durée. Ce bonus sera conditionné à l’atteinte d’un score environnemental minimal pour les voitures particulières électriques neuves afin de prendre en compte l’empreinte carbone du véhicule sur toutes les étapes de son cycle de vie avant son utilisation sur route.

Le programme Prévention des risques augmente de plus de 16 % par rapport à l’année dernière, pour atteindre 1,3 milliard d’euros. Les crédits alloués à l’Agence de la transition écologique, anciennement Ademe, augmenteront de plus de 25 % et représenteront deux tiers des crédits totaux du programme. Cette trajectoire est bienvenue car l’Ademe contribue à la réalisation des objectifs du plan climat, à travers notamment le fonds chaleur et la feuille de route pour l’économie circulaire, avec un fonds dédié. Le renforcement des enveloppes budgétaires allouées à l’Ademe lui permettra de garantir ses interventions sur les sites et les sols pollués.

S’agissant du volet relatif à la prévention des risques technologiques et des pollutions, le PLF augmente la subvention de l’Ineris de 2 millions d’euros. Elle permettra de poursuivre la réalisation de son contrat d’objectifs et de performance 2021-2025, qui prévoit en 2024 la poursuite du déploiement des dispositifs d’analyse et de mesure de polluants émis lors d’un accident et de répondre à une demande croissante d’expertise en matière de risques technologiques, en lien notamment avec les transitions énergétiques et numériques, la réindustrialisation et les préoccupations croissantes en matière de santé environnementale.

Le groupe Renaissance votera évidemment en faveur de ces programmes.

M. Matthieu Marchio (RN). Face à l’enjeu climatique, la transformation de nos modes de production et de consommation d’énergie est devenue un défi essentiel des politiques publiques. Les multiples possibilités de la politique énergétique soulèvent la question des objectifs du point de vue de la production et d’un usage plus sobre de l’énergie. Toutefois, la société peut-elle seulement consommer moins ?

Le dernier rapport du Haut Conseil pour le climat dresse un sombre tableau des douze derniers mois. Des températures exceptionnellement élevées ont été constatées en 2022 et les faibles précipitations ont entraîné la sécheresse des sols. Conséquence : une baisse de la production agricole, jusqu’à 30 % pour certaines filières. Malgré les dispositifs de prévention et de gestion de crise, les effets des événements climatiques n’ont pas été évités. Plusieurs milliers de communes sont confrontées à de fortes incertitudes pour leur approvisionnement en eau potable et, suite à la sécheresse, de nombreux bâtiments ont subi des dommages, comme dans ma circonscription, avec le phénomène de retrait-gonflement des sols argileux.

La mission Écologie, développement et mobilité durables représente 20,7 milliards d’euros, en hausse de 2,3 milliards d’euros. Des actions sont prévues pour la rénovation énergétique des logements, une mobilité plus propre ou la reconduction du fonds vert, tourné vers les collectivités. Mais voilà, les implications sociales et économiques de la transition énergétique mises en relief par la hausse brutale des prix de l’énergie nous obligent à réfléchir aux moyens les mieux adaptés pour garantir une transition efficace et acceptable.

Comment engager et planifier les transformations de crise ? Quel en sera le prix pour nos concitoyens ? Votre rapport prône un renfort et une simplification de la rénovation énergétique des logements grâce à MaPrimeRénov’. Or ce dispositif relève pour beaucoup du parcours du combattant, d’une belle promesse pour les mandataires, lesquels devaient faire en sorte que des propriétaires puissent réaliser leurs travaux de rénovation en avançant à leur place le montant des subventions, puis en récupérant la somme auprès de l’Anah tout en se rémunérant par le biais d’une commission. Cette promesse s’effondre, aussi bien pour les particuliers que pour les mandataires. Deux ans et demi après son lancement, de nombreux dossiers restent en souffrance, avec des paiements qui tardent à être versés.

Face au grand nombre d’arnaques, l’Anah a décidé d’introduire en 2021 une procédure de contrôle : le recueil du consentement. On demande aux particuliers de répondre à une série de questions sur les travaux, mais cette prise de contact intervient parfois dix mois après ces derniers.

Autre démarche qui entraîne des blocages : les contrôles des travaux imposés. Le syndicat patronal de l’artisanat du bâtiment s’inquiète. Des artisans sont inscrits en tant que mandataires mais, le versement des aides ayant pris beaucoup de retard, les chantiers s’accumulent et ils se retrouvent avec des problèmes de trésorerie.

MaPrimeRénov’ est destinée aux ménages les moins aisés mais ce dispositif pourrait bien se transformer en cauchemar pour eux s’ils doivent rembourser plusieurs milliers d’euros au mandataire. La rénovation énergétique des logements, destinée à lutter contre les passoires thermiques, se transforme en piège pour ces petits propriétaires. Le ministre de l’économie a mis lui-même en lumière ces difficultés. La rénovation des passoires thermiques, sous peine de ne plus pouvoir les louer, est intenable. Il aura fallu un an et des alertes incessantes pour enfin s’en rendre compte et remettre en cause les échéances prévues, avant une nouvelle rétractation. La situation est donc loin d’être réglée.

L’heure n’est plus à l’écologie triomphante et punitive. Nos concitoyens sont conscients du changement à opérer mais le Gouvernement n’a aucune idée de leurs difficultés quotidiennes et refuse de les entendre.

M. Gabriel Amard (LFI-NUPES). Ce PLF semble entériner la volonté du Gouvernement de promouvoir un monde révolu. Il paraît s’enliser dans le modèle moribond du nucléaire, à l’heure où de graves crises politiques démontrent que cette énergie ne peut être synonyme d’indépendance.

Nous nous interrogeons face au refus du Gouvernement d’accorder à l’ASN vingt-neuf équivalents temps plein d’ici à 2026, afin que celle-ci puisse remplir ses missions, alors qu’il lance un programme de construction de nouveaux réacteurs.

Nous dénonçons le dangereux plan de fusion de l’ASN et de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) et le Gouvernement met au cœur du PLF la relance du nucléaire en faisant fi de la sûreté nucléaire ! Nous condamnons cette prise de risque alors que la centrale du Bugey, doyenne européenne, est toujours en activité et a été choisie pour accueillir deux nouveaux réacteurs EPR 2 et que, depuis quarante ans, elle a accumulé des dizaines d’avaries, de pannes, de fuites et d’incidents. Nous nous associons à l’appel de Greenpeace du 22 octobre visant à sortir du nucléaire et aux dizaines d’actions qui dénonceront les conséquences de l’industrie nucléaire sur nos ressources, notamment, en eau.

Rien ne semble indiquer une volonté de faire de Météo-France un acteur clé pour faire face aux bouleversements climatiques, alors que cet opérateur a déjà dû faire face en dix ans à la suppression de 600 postes et à une diminution de 20 % de la subvention de l’État.

Nous nous associons aux craintes formulées par le rapporteur pour avis Jean-Louis Bricout. Alors que le Gouvernement affirme sa volonté de tripler le nombre de rénovations performantes en une seule année, le budget consacré à la rénovation énergétique est loin d’être multiplié par trois. Au rythme gouvernemental, il faudrait près de deux millénaires pour rénover l’ensemble des passoires thermiques. L’urgence climatique nous oblige à un changement d’échelle immédiat. Tel est le sens de la proposition que nous défendons avec M. Coulomme. Nous pouvons financer 100 % des travaux permettant de diminuer la consommation d’énergie de 25 millions de passoires thermiques à travers un mécanisme de prêts hypothécaires que l’État récupère à la mutation du bien.

Alors que la précarité s’installe partout et que la flambée des prix du gaz et de l’électricité s’étend à l’ensemble des foyers, le Gouvernement s’enlise dans la politique des chèques et des ristournes. Nous condamnons l’hypocrisie d’un mécanisme inefficace comme le chèque énergie. La Cour des comptes souligne d’ailleurs que, parmi les 3,7 millions de ménages en situation de précarité énergétique, 25 % n’en bénéficient pas. Un seul mécanisme serait à la hauteur : le blocage des prix.

Ce PLF nie les bouleversements qui se présentent devant nous. Malgré les rapports du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) et les condamnations successives du Gouvernement pour inaction climatique, celui-ci s’obstine dans la relance dangereuse du nucléaire et dans des mesurettes d’apparence. Le monde nous regarde : nous devons être à la hauteur.

M. Pierre Vatin (LR). Nous sommes sceptiques à l’endroit de MaPrimeRénov’, dispositif dont les crédits feront l’objet d’une nouvelle rallonge de 1,6 milliard d’euros, bien que ce montant semble introuvable dans le PLF.

Le rapporteur pour avis a exprimé ses doutes sur la possibilité de tripler les rénovations performantes sans que le Gouvernement triple les aides. Cette logique d’incitation à la dépense va un peu loin, surtout pour un dispositif dont il dénonce lui-même les limites : délais de paiement excessifs, tracasseries paperassières, enfer bureaucratique. MaPrimeRénov’ est un cas d’école de complexité, comme sait si bien les multiplier notre administration. Ces contraintes s’aggraveront encore avec l’obligation d’engager un conseiller agréé par l’Anah pour les rénovations globales et la fin des aides aux petits travaux et de certaines d’entre elles pour les propriétaires de vieux logements.

Avec le recours systématique à la procédure illisible et peu fiable du diagnostic de performance énergétique (DPE) et la consécration du label RGE, pourtant un frein évident au démarrage des chantiers, nous continuerons de financer à grands frais un système complexe et coûteux, dont l’exécutif n’a même pas conscience qu’il manque sa cible tant sont nombreux les ménages pour qui le reste à charge demeure trop important.

Ces mêmes travers se retrouvent s’agissant de la voiture électrique, le Gouvernement ignorant que les plafonds qu’il propose – 5 000 euros pour un véhicule neuf – sont sans rapport avec la réalité des prix, ce qui explique sans doute la baisse des bonus écologiques accordés en 2023, avec dix mille aides distribuées en moins.

La politique de reste à charge 0 que vous préconisez est-elle défendable compte tenu de l’état de nos finances publiques et du peu d’économies que le Gouvernement a bien voulu consentir cette année ? Nous ne le croyons pas. Nous considérons que la massification de la rénovation ne passera pas par une massification des aides mais par une massification des bénéficiaires. Au lieu de réduire inutilement des soutiens à des familles qui n’auront jamais les moyens ni l’envie de boucler un financement, il serait préférable de rompre avec les effets de seuil pervers qui privent nos classes moyennes de l’accès aux aides publiques et les exclut injustement de l’aventure de la transition écologique.

C’est aussi pourquoi nous dénonçons le principe du chèque carburant, limité à une minorité de rouleurs qui recevront un chèque de 100 euros pour payer des taxes sur le carburant et mieux les reverser dans la poche de l’État. Nous défendons, au contraire, une baisse de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) pour tous, y compris pour ces classes moyennes qui paient tout le temps mais qui ne bénéficient de rien.

S’agissant du rapport de M. Nadeau, nous saluons l’effort en faveur des effectifs d’inspecteurs d’installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) et de l’ASN, dont l’activité augmentera sensiblement avec le démarrage du programme de construction des nouveaux réacteurs, le chantier des visites décennales et le grand carénage.

Le montant des recettes attendues provenant des énergies renouvelables, initialement évalué à 32 milliards d’euros, sera finalement de 13 milliards d’euros d’après un calcul de la Commission de régulation de l’énergie (CRE). Une différence de 20 milliards d’euros, ce n’est pas rien, même pour ceux qui se réjouissent un peu vite que l’éolien financerait désormais à lui seul notre politique énergétique.

Soucieux des difficultés d’application de la politique de prévention des risques dans les Antilles, dont le rapporteur pour avis témoigne, nous nous inquiétons également d’un budget en trompe-l’œil, très centré autour de l’augmentation des crédits de l’Ademe, dont nombre de Français ne saisissent pas toujours l’utilité. Le pouvoir important de cette agence, notamment pour la ventilation des 8,2 milliards d’euros de crédits d’investissement prévus au titre de France 2030, doit nous inciter encore plus à nous assurer de la neutralité politique de ses avis, un lobbying antinucléaire fort ayant historiquement toujours prévalu en son sein.

M. Mickaël Cosson (Dem). Je salue l’effort financier mené par le Gouvernement s’agissant de la protection de l’environnement et de la prévention des risques. Les crédits sont désormais à la hausse. Compte tenu des enjeux climatiques, nous pouvons être néanmoins dubitatifs quant à leur montant bien qu’ils permettent d’engager des actions fortes en matière de prévention des incendies. Il importe également de déployer les dispositifs contre les risques d’inondation et de veiller à la gestion des traits de côte, dont les conséquences seront importantes en termes d’aménagement.

Je salue également les avancées pour prévenir les risques de sécheresse et l’augmentation des moyens des agences de l’eau. Les 475 millions d’euros annuels doivent permettre de parvenir à une réduction des prélèvements de 10 % d’ici à 2030. La réforme de la fiscalité de l’eau permettra de mieux responsabiliser ceux qui polluent et qui prélèvent le plus d’eau.

Toutes les collectivités dépendent de délégataires, dont la rémunération dépend de la quantité d’eau vendue. Nous devons saluer tous ceux qui, auprès des collectivités, interviennent pour faire en sorte que les particuliers réalisent des économies d’eau. Il importe donc de réformer le code des marchés publics.

Le fonds vert subventionne les collectivités pour leurs investissements dans la transition écologique et pour l’adaptation au changement climatique. Son enveloppe s’accroît de 500 millions d’euros et s’élèvera au total à 2,5 milliards d’euros.

Le budget consacré aux aides au verdissement du parc automobile augmentera de 200 millions d’euros, pour atteindre 1,5 milliard, ce qui représente une hausse de 15 %. Néanmoins, nous sommes bien conscients qu’une partie de la population n’a pas les moyens d’aborder la transition énergétique. Je salue la proposition du rapporteur pour avis Jean-Louis Bricout visant à déployer une aide à la mobilité, meilleur moyen pour que des ménages modestes puissent disposer d’un véhicule propre. Un chèque carburant ne résoudra pas leurs problèmes.

Les crédits de MaPrimeRénov’ sont majorés, pour atteindre près de 5 milliards d’euros. Nous devrons toutefois disposer de moyens plus importants pour accompagner les ménages et faciliter leur accès à ce type d’aides. Nous devrons également veiller à ce que le budget consacré à la transition énergétique soit investi au moment de la vente des biens et non à travers une avance, qui rebute les ménages.

M. Gérard Leseul (SOC). Le programme 181 est vaste puisqu’il concerne à la fois la prévention des risques technologiques et des pollutions, le contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection, la prévention des risques naturels et hydrauliques ou le fonds de prévention des risques naturels majeurs.

Force est de constater que les sites classés Seveso vieillissent et nécessitent une surveillance spécifique renforcée ainsi que des contrôles réguliers. Outre la surveillance et l’inspection des installations classées, les directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal) doivent élaborer et appliquer les politiques de l’État concernant l’offre de logement, la rénovation urbaine, la lutte contre l’habitat indigne, tout en assurant la promotion de la participation citoyenne dans l’élaboration des projets relatifs à l’environnement et à l’aménagement du territoire. En leur sein, la sécurité des sites présentant un risque important pour l’environnement est noyée au milieu des autres missions et considérée au même titre que les installations classées à faible risque.

Par exemple, les agents doivent contrôler les parcs éoliens, autour desquels les contentieux sont nombreux, alors que ce ne sont pas les installations qui présentent le plus de risques. Cela engendre des rapports et des inspections supplémentaires qui alourdissent le travail des inspecteurs. En plus de la procédure du cas par cas pour les études d’impact afférentes aux dossiers de demande d’autorisation, les mêmes services sont chargés de surveiller et d’inspecter quelque 500 000 installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), dont font partie les 1 362 sites classés Seveso.

La conséquence est simple : il y a de moins en moins d’inspections sur le terrain.

Quatre ans après l’incendie des sites de Lubrizol, force est de constater que le budget dédié à la prévention des risques technologiques et des pollutions est en légère baisse par rapport à la loi de finances pour 2023. Le Gouvernement a beau mettre en avant la création de trente postes d’inspecteur des installations classées en 2021, puis de vingt postes en 2022 et encore de vingt-cinq autres en 2023, ces moyens budgétaires et humains permettront difficilement d’atteindre l’objectif affiché en son temps par la ministre Barbara Pompili d’augmenter de 50 % les contrôles sur le terrain d’ici à la fin du quinquennat.

S’agissant de la question légitimement très sensible de la sûreté nucléaire, les 5 ETP supplémentaires paraissent insuffisants au vu de la montée en charge des missions de l’ASN ces prochaines années, qu’il s’agisse de la réalisation du grand carénage ou du programme Nouveau Nucléaire France. La sûreté nucléaire doit être une priorité nationale, et toutes les actions nécessaires doivent être mises en œuvre pour renforcer les contrôles au cours des prochaines années. Entre la poursuite du grand carénage pour les centrales existantes et la perspective du programme Nouveau Nucléaire France, l’ASN devrait au moins pouvoir bénéficier d’un renforcement de ses effectifs de l’ordre de 20 ETP par an dans le cadre d’un programme pluriannuel de cinq ans – c’est une proposition que nous défendrons par amendement.

Le 19 juillet 2023, à l’issue d’une réunion du Conseil de politique nucléaire, la ministre de la transition énergétique a été chargée de préparer, d’ici à l’automne, un projet de loi visant à fusionner l’IRSN et l’ASN. Cette proposition, déjà rejetée par le Parlement au printemps dernier, sera donc de retour dans quelques semaines. Cela rouvre une période d’incertitude quant à l’organisation de la sécurité nucléaire, qui risque d’être déstabilisée. Nous veillerons scrupuleusement à ce que les autorités de l’État chargées de cette mission soient bien indépendantes des exploitants nucléaires, en vertu du principe de séparation entre juge et partie.

Enfin, la dotation du fonds de prévention des risques naturels majeurs stagne alors que les risques liés aux effets du changement climatique se font de plus en plus présents.

M. Vincent Thiébaut (HOR). Si l’on fait abstraction des effets de la réduction du bouclier tarifaire, les moyens financiers de la mission Écologie, développement et mobilité durables sont en forte augmentation, d’environ 15 %. Cette hausse témoigne de la priorité politique donnée à cette mission budgétaire.

Les plafonds d’emplois des ministères chargés de l’écologie et de la transition énergétique, préservés en 2023, augmenteront en 2024 après plus de vingt ans de baisse. Cette évolution des effectifs ministériels au cours du quinquennat permettra de réorienter les moyens vers les équipes chargées de la gestion des approvisionnements stratégiques et de la mise en œuvre de l’ambitieux programme de nouveaux réacteurs nucléaires, le plus vaste programme industriel lancé en France depuis plus de trente ans. Sur le terrain, se poursuivra le réarmement des effectifs dédiés à la prévention des risques, à l’instruction des projets d’énergies renouvelables, à la préservation de la biodiversité et à la rénovation énergétique.

Nous nous félicitons de l’augmentation de la dotation du fonds vert, à hauteur de 2 milliards d’euros, notamment pour accompagner les collectivités territoriales et les aider à réussir leur transition écologique.

J’en viens plus spécifiquement au programme 181, qui nous intéresse ce matin. Je me réjouis de l’augmentation des crédits, même si j’entends les critiques. Nous avons besoin de faire de la prévention des risques, notamment technologiques, alors que de nouvelles techniques seront bientôt mises en œuvre – par exemple, la géothermie profonde, à laquelle je suis particulièrement attaché. La France conduit des actions résolues pour maîtriser les risques technologiques, gérer, résorber, contrôler et prévenir les facteurs environnementaux susceptibles d’affecter la santé des générations actuelles et futures.

Le programme 174 vise à lutter contre le changement climatique et à accompagner la transition énergétique. On y retrouve les principales aides à destination des ménages, notamment MaPrimeRénov’, la prime à la conversion et le bonus écologique. Nous nous félicitons, là encore, de l’augmentation des crédits, notamment de ceux dédiés à MaPrimeRénov’, portés à 3,7 milliards d’euros, soit une augmentation de 36 %. Nous devons afficher clairement notre ambition de passer de 60 000 à près de 200 000 rénovations énergétiques, et même aller plus loin. Nous nous réjouissons de l’augmentation des effectifs de l’Anah, qui va pouvoir centraliser les dossiers, gagner en visibilité et en lisibilité, œuvrer en faveur de la simplification des actions menées et atteindre ses objectifs.

De manière globale, nous nous félicitons donc du budget alloué à ces deux programmes. Cela nous permettra de répondre aux enjeux et de remplir nos objectifs en matière de transition énergétique, de transition écologique et surtout d’accompagnement des citoyens et des territoires.

Mme Lisa Belluco (Écolo-NUPES). La crise écologique que nous traversons est coûteuse : elle nous oblige à investir pour réduire sa portée et nous y adapter. Je citerai une nouvelle fois le rapport Pisani-Ferry, qui évalue l’investissement nécessaire à 67 milliards d’euros par an ; or, dans ce PLF, le Gouvernement n’annonce que 7 milliards.

Malgré ce manque général de moyens, quelques organismes font figure de rescapés, tels que l’Ademe, qui voit ses autorisations d’engagement et crédits de paiement augmenter de 25 %. Au lieu d’être la règle, cette hausse reste une exception, notamment en matière de prévention des risques naturels et industriels. Les autres financements stagnent, en dépit de l’inflation, alors que les risques ne vont qu’en s’aggravant, sous l’effet du changement climatique et de la réindustrialisation.

Prenons le risque industriel, auquel une commune sur deux est exposée. Depuis vingt-cinq ans, on compte en moyenne quatre incidents par jour sur le territoire national : il s’agit là de dégradations de l’environnement et de menaces pour la santé de nos concitoyens. Puisque nous voulons tous mener une politique de réindustrialisation, ces risques vont s’accroître ; or si nos concitoyens ne font pas confiance à nos institutions, ils n’accepteront pas l’implantation de nouvelles industries polluantes et la réindustrialisation échouera. Il faut donc accorder à l’inspection des installations classées toutes les garanties pour qu’elle puisse effectuer correctement son travail et assurer la sécurité de nos concitoyens, auxquels nous devons éviter un nouvel AZF ou un nouveau Lubrizol.

Concrètement, cela signifie qu’il faut donner plus de moyens aux Dreal. En juillet dernier, alors que nous examinions le projet de loi relatif à l’industrie verte, le ministre délégué chargé de l’industrie avait pris un engagement devant l’Assemblée nationale : « Nos discussions avec le ministre de la transition écologique nous ont conduits à observer que les Dreal ne disposaient pas de moyens suffisants. Nous allons donc les accroître – cela se retrouvera dans le PLF – afin de nous assurer de l’effectivité du texte. » Pourtant, nous ne voyons dans le PLF qu’une augmentation de 13 ETP pour la prévention des risques, dont la moitié concernerait l’ASN. Où sont les moyens supplémentaires promis pour renforcer la sécurité industrielle de notre pays ?

En matière de transition énergétique, le constat est le même : les augmentations de moyens ne permettent pas de répondre aux défis qui sont les nôtres. Il y a quelques jours, nos collègues Mmes Julie Laernoes et Marjolaine Meynier-Millefert présentaient justement un rapport d’information sur la rénovation énergétique des bâtiments, qui pointe plusieurs insuffisances de notre politique dans ce domaine. Pour atteindre nos objectifs en matière de climat, il faudrait rénover 370 000 logements par an d’ici à 2030, mais MaPrimeRénov’ reste un dispositif opaque : les rénovations sont trop partielles, le reste à charge colossal et le compte n’y est pas. Le reste à charge pour une rénovation globale peut atteindre 29 000 euros, soit près d’un an de salaire pour un ménage qui gagne 2 500 euros par mois. Comment voulez-vous économiser assez pour sortir de la précarité énergétique ? Nous avons besoin d’un soutien plus fort de l’État, qui devrait consacrer à cet objectif 1,5 milliard d’euros par an et non 1,2 milliard sur trois ans comme l’a annoncé le ministre.

Le problème est similaire concernant l’achat de véhicules peu polluants, qu’il s’agisse de vélos ou de voitures. Pour ces dernières, les aides doivent permettre de mieux cibler les petits véhicules légers qui remplissent la même fonction que les gros mais en consommant moins d’énergie, moins de matériaux et en émettant moins de polluants. Les gens ont besoin de se déplacer, pas de conduire un gros SUV.

Tout n’est pas à jeter dans ce projet de loi de finances, mais le texte ne prend pas encore la mesure de la crise écologique que nous traversons. C’est inquiétant.

M. Hubert Wulfranc (GDR-NUPES). Mon collègue socialiste Gérard Leseul, comme moi député de Seine-Maritime, a bien décrit les préoccupations de notre département industriel, doté de l’armature nucléaire que vous connaissez, et de plus en plus sensible aux problèmes liés au littoral.

S’agissant des installations classées, il a rappelé que nous étions toujours marqués par plusieurs traumatismes causés par des accidents dans des sites Seveso. Alors que les industries chimiques ne respectent pas certaines règles en matière de prévention des risques, que ce soit pour la fabrication ou pour le transport de produits dangereux, le fait que les moyens d’inspection ne soient toujours pas à la hauteur des besoins – ce que la ministre Barbara Pompili avait reconnu à la suite de l’accident de Lubrizol – est pour nous une source de préoccupation légitime.

Vous connaissez la position du groupe GDR-NUPES et des députés communistes concernant le recours à l’énergie nucléaire. Il n’en reste pas moins que cette politique doit s’accompagner d’une vigilance majeure des services de l’État et des autorités indépendantes en matière de surveillance des installations, dans la perspective de leur modernisation et de leur développement.

Enfin, Gérard Leseul a eu raison d’indiquer que les problèmes spécifiques aux zones littorales étaient de plus en plus prégnants dans un département comme le nôtre. La Normandie en général et la Seine-Maritime en particulier voient leurs falaises s’effondrer. La Seine elle-même présente des fragilités, comme en témoigne son étiage de plus en plus bas. Des travaux sont menés pour évaluer les risques naturels liés à ces accidents tant littoraux que fluviaux. Au regard des réalités du terrain, là encore, les moyens accordés à l’ensemble des opérateurs ne nous semblent pas au niveau en matière de prévention des risques.

Mme Nathalie Bassire (LIOT). Les étés caniculaires, les épisodes de grêle, les crues et les tempêtes vont se multiplier au cours des prochaines décennies. À cela vont s’ajouter des bouleversements climatiques que nos territoires n’ont encore jamais subis. Nous n’y sommes pas prêts. Alors que nous devrions accroître notre résilience face au dérèglement climatique, nous nous contentons de réagir aux crises. Les politiques publiques ne semblent pas anticiper l’ampleur des événements à venir, et ce projet de loi de finances ne fait pas exception.

Je reconnais certaines avancées. Les crédits dédiés à l’Ademe progressent enfin, mais est-ce bien suffisant ? Depuis la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (Agec) et la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (loi « climat et résilience »), l’agence fait face à une augmentation constante du périmètre de ses missions. À ses compétences historiques s’ajoutent désormais l’accompagnement des collectivités territoriales dans la gestion de leurs déchets, des travaux sur l’affichage environnemental ou encore le suivi des filières à responsabilité élargie du producteur (REP). Les 179 millions d’euros supplémentaires qui lui sont accordés correspondent davantage à un rattrapage qu’à une véritable inflexion en faveur du développement durable.

Il en va de même concernant la prévention des catastrophes naturelles. Voilà deux ans que les crédits alloués au fonds Barnier stagnent à 205 millions d’euros. Pourtant, les collectivités auront besoin, dans un futur proche, de moyens additionnels pour réduire leur vulnérabilité face aux risques environnementaux.

Quant à l’augmentation des moyens de l’ASN, elle est largement insuffisante, voire irréaliste au regard du programme de construction de nouveaux réacteurs nucléaires acté par le Président de la République.

S’agissant des crédits dédiés à la transition énergétique, je rejoins mon collègue Jean‑Louis Bricout : c’est trop peu et trop flou pour faire baisser les émissions de gaz à effet de serre des deux principaux secteurs contributaires, le logement et le transport.

Prenez le dispositif MaPrimeRénov’. Alors que le Gouvernement revendique 1,6 milliard d’euros d’autorisations d’engagement supplémentaires en 2024, je n’en ai trouvé, pour ma part, que 900 millions dans la maquette budgétaire. Où sont les 700 millions d’euros manquants ? Quant aux nouveaux contours de la prime, ils vont dans le bon sens en décourageant les monogestes et en favorisant les travaux de rénovation d’ampleur. Demeure toutefois la question du reste à charge pour les plus modestes. Un foyer disposant de 25 000 euros de ressources annuelles ne s’engagera pas dans des travaux d’ampleur générant un reste à charge de 10 000 euros, même s’il peut les financer par un prêt à taux zéro (PTZ). Et quid des autres ménages ? Est-il raisonnable de penser que des ménages aux revenus intermédiaires vont pouvoir avancer le montant des aides qui leur seront accordées pour des rénovations d’ampleur, lorsque celui-ci correspond à leurs ressources annuelles, autour de 40 000 euros ?

Le PLF prévoit de donner à l’Anah la possibilité de valoriser elle-même les aides octroyées au titre des certificats d’économies d’énergie sans démarche de la part des ménages. C’est un premier pas vers la simplification du parcours de financement, mais pourquoi ne pas aller plus loin et faire suite à la brillante idée de mon collègue Jean-Louis Bricout de créer une banque de la rénovation qui pourrait centraliser l’ensemble des financements ?

S’agissant enfin de l’électrification du parc de véhicules, le bonus écologique et la prime à la conversion évoluent dans le bon sens. Cependant, il faut être réaliste : les véhicules électriques restent trop chers pour une grande partie des ménages. Le leasing social est une solution intéressante mais nous ne connaissons toujours pas les contours de cette aide. La majorité nous demande de voter des crédits sans que l’on sache exactement combien coûtera le dispositif au total, qui pourra en bénéficier et à quelles conditions.

M. Marcellin Nadeau, rapporteur pour avis. La plupart des groupes ont exprimé deux inquiétudes principales relatives à la sécurité des sites classés, notamment Seveso, d’une part, et à la sûreté nucléaire, d’autre part. Je partage entièrement ces préoccupations.

Les effectifs d’inspecteurs ayant été renforcés, il me semble légitime d’augmenter aussi le nombre d’inspections, compte tenu des risques que nous rappellent encore quelques incidents récents. Dans ce domaine, l’objectif n’est pas atteint.

En matière de sûreté nucléaire, un petit effort a également été réalisé s’agissant des effectifs de l’ASN. Cependant, la demande était de 19 ETPT supplémentaires : nous sommes donc toujours loin du compte ! Au vu du programme de construction de nouveaux réacteurs et des nécessaires opérations de maintenance, notamment au niveau des soudures, l’ASN a évidemment besoin de moyens bien plus importants.

Le fonds vert ne suffira pas à financer toutes les opérations nécessaires dans les zones côtières exposées aux risques littoraux. Certains préfets ont dit très clairement qu’ils auraient besoin du double des crédits dont ils disposent à ce titre.

Je rejoins enfin M. Vatin et Mme Bassire sur un point : il est vrai que la dotation du fonds Barnier est stabilisée. Bien que sa consommation pose parfois quelques difficultés, en particulier aux Antilles, ce fonds de prévention des risques naturels majeurs s’avère désormais largement insuffisant, compte tenu notamment du changement climatique.

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Comme vous, madame Meynier-Millefert, je me félicite de la planification opérée dans ce budget. Elle me semble indispensable. On perçoit bien, sur le marché de la rénovation, ce besoin de visibilité, de lisibilité et de programmation de l’utilisation des moyens alloués.

J’ai eu le plaisir de travailler avec vous, ainsi qu’avec Mme Julie Laernoes, dans le cadre d’une mission d’information commune sur la rénovation énergétique des bâtiments. Bon nombre de questions posées aujourd’hui recoupent les propositions que nous avons formulées en vue de lever les inquiétudes qui s’expriment. Je résumerai nos travaux en soulignant quelques points essentiels.

Nous voulons, tout d’abord, mettre l’accompagnateur France Rénov’ au cœur du dispositif. Plusieurs orateurs ont relevé que le marché était quelque peu anxiogène, qu’il manquait de fluidité et que l’obtention des aides pouvait se heurter à certains blocages : aussi l’accompagnateur doit-il être visible, présent si possible dans un lieu public, bien identifié et rassurant, puisque son rôle est de répondre aux inquiétudes susceptibles de s’exprimer autour de la fraude et des difficultés techniques, administratives ou sociales que l’on peut rencontrer tout au long du parcours. Il devra travailler en lien avec les territoires, eux aussi au cœur du dispositif, car ils sont des acteurs essentiels de la dynamique de transition – je pense, par exemple, aux rénovations par quartier et à la création de réseaux de chaleur. Toutes ces exigences relatives à l’accompagnateur peuvent susciter beaucoup de questions s’agissant notamment de ses compétences, des missions qui lui seront confiées ou de son recrutement. Il devra être parfaitement neutre et à l’abri de tout conflit d’intérêts avec les entreprises du secteur.

Le deuxième point du rapport concerne le problème du reste à charge. On aura beau accompagner au mieux les ménages et les faire bénéficier de toutes les subventions possibles, ce problème sera toujours susceptible de se poser. Le PTZ n’est peut-être pas distribué et promu par le réseau des banques traditionnelles autant qu’il le faudrait ; pour autant, il ne s’agit que d’un prêt, que certaines familles, notamment les plus modestes, auront peut-être du mal à rembourser. De même, le prêt avance rénovation – l’ancien prêt avance mutation –, qui est un prêt hypothécaire, n’est en fin de compte qu’une avance d’argent, mais c’est peut-être la solution ultime pour les gens incapables de payer des mensualités parce qu’ils n’ont pas beaucoup de revenus et pas du tout de trésorerie. Il permet, en quelque sorte, un roulement budgétaire qui atténue les effets de la dépense. Il faut sans doute en mesurer les risques, mais nous aurons l’occasion d’en reparler.

Afin d’assurer le bouclage financier des dossiers, nous aimerions créer une banque de la rénovation, spécialisée dans ce genre de projets, qui aurait une vision plus complète de la situation et permettrait d’avancer dans la résolution de ce gros problème de reste à charge.

Cela répond un peu aux doutes exprimés par notre collègue Matthieu Marchio. Effectivement, MaPrimeRénov’ est source de nombreuses déconvenues. C’est ce qui se passe dans tous les territoires : les gens ont tellement besoin d’être rassurés qu’ils appellent l’artisan local, qui prend en charge la gestion des différentes aides proposées, que ce soient les CEE ou MaPrimeRénov’, avec toutes les difficultés qu’elles entraînent. Ainsi, dans ma circonscription, j’ai été saisi par la Maison des entreprises de Thiérache et de la Serre (METS) de problèmes de trésorerie rencontrés par des entreprises confrontées aux délais très longs pour obtenir la prime.

La possibilité pour l’Anah d’absorber les certificats d’économies d’énergie pour abonder MaPrimeRénov’ est une simplification importante et bienvenue, la réunion des deux dispositifs en une prime unique facilitant, en outre, les contrôles. Ceux-ci sont, en effet, actuellement de deux types, effectués au titre du C2E pour les uns et de MaPrimeRénov’ pour les autres. Nous avons tous constaté sur nos territoires que, dans le cadre des C2E, de nombreux dispositifs ont contribué à insécuriser le marché, non pas du côté des bailleurs sociaux et des collectivités, où les relations ont un caractère professionnel, mais sur le marché résidentiel, où une sécurisation est nécessaire.

Au centre du dispositif, Mon Accompagnateur Rénov’ aidera l’Anah à instruire les dossiers MaPrimeRénov’, ce qui permettra de s’assurer que toutes les pièces sont bien réunies et d’éviter des surprises, comme les fraudes à l’identité.

Monsieur Amard, nous partageons le volontarisme du Gouvernement, mais les objectifs sont encore bien lointains. De fait, alors que notre objectif est actuellement de 200 000 rénovations, le Haut Conseil pour le climat vise des chiffres de 370 000 à partir de 2024 et de 700 000 à partir de 2030. La marche est donc très haute.

Pour ce qui est du prêt hypothécaire, je suis très favorable à cet instrument, qui est au cœur du système d’avance remboursable. Aujourd’hui, toutefois, ce prêt est mal connu, mal distribué et mal promu, et il génère, du fait même de sa nature hypothécaire, d’importants frais notariaux. Une deuxième question est de savoir ce que deviendra cette avance remboursable au fil des années jusqu’à la mutation, et comment elle sera réévaluée. J’aurai des propositions à formuler à cet égard et nous aurons certainement l’occasion d’en reparler.

Vous condamnez le chèque énergie qui n’est certes pas la solution idéale philosophiquement, car il serait préférable que les gens rénovent leur logement et puissent payer leurs factures, mais il répond à des situations dramatiques que connaissent certaines familles qui ont des factures en souffrance. Mieux vaut donc accompagner une transition avec des prestations que réparer les dégâts qui affecteraient ces familles si nous ne le faisions pas.

Monsieur Vatin, je sais que la mise en œuvre de MaPrimeRénov’ fait l’objet de fortes critiques, mais on ne peut pas être opposé à un système de subventions nécessaires pour aider les ménages. Le tout, c’est que les dossiers soient assez simples pour fluidifier le parcours de rénovation.

L’exonération de la TICPE que vous proposez pour soulager les classes moyennes face à l’augmentation du coût de l’énergie, n’est pas la mesure la mieux ciblée vers les ménages modestes, qui en ont le plus besoin, et profiterait surtout aux ménages les plus riches.

Monsieur Cosson, pour ce qui est de l’aide personnalisée à la mobilité, le leasing social peut permettre aux familles les plus modestes de rouler avec un véhicule propre. L’APM est un dispositif inspiré de la situation qui prévaut dans le secteur du logement : quand on ne peut pas acheter son logement, on le loue, et quand on a des difficultés pour le louer, on reçoit une aide sous la forme de l’APL. La location assortie d’une aide sociale est le meilleur moyen de massifier la mutation du parc de véhicules vers l’électrique. Cette formule a tous les intérêts : elle constitue une économie de proximité, car la perspective de la location induit des choix en termes de conception des modèles, dans un esprit de sobriété et de réparabilité. On peut même aller plus loin en intégrant une notion de réutilisation ou de recyclage, afin de proposer à la location des produits dans un état proche du neuf. C’est ce qui s’est produit, par exemple, pour les photocopieurs obsolètes qui encombraient les couloirs des mairies, désormais remplacés par des appareils en location qui, dans une logique d’usage, tombent beaucoup moins souvent en panne.

Par ailleurs, alors que le leasing social, géré par les banques, laisse toujours craindre que ces dernières ne captent une partie des aides publiques, l’aide personnalisée à la mobilité est un système beaucoup plus performant, parce que plus modulable en termes tant de moyens alloués que de critères d’attribution – qu’il s’agisse de critères d’usage, de critères sociaux, de critères liés au besoin de se déplacer pour les familles les plus modestes ou de critères géographiques.

Dans l’idéal, il faudrait, pour diminuer le prix de la location à l’usage, constituer un consortium de marques françaises, voire européennes, visant à concevoir un modèle vraiment accessible à tous. Nous n’inventons rien : c’est ce qu’a fait Volkswagen dans l’après-guerre avec la Coccinelle, modèle économique qui permettait à chacun d’avoir son véhicule. Je vous remercie donc de soutenir cette mesure.

Monsieur Leseul, vos questions portaient plutôt sur la sécurité. Nous avons souvent travaillé ensemble par le passé, notamment à propos de Ma Prime Climat, qui proposait déjà une avance remboursable.

On voit bien que, dans une perspective écologique, ce budget manifeste la volonté commune de favoriser des rénovations globales et performantes, ce qui signifie que l’assiette de travaux sera énorme. Ce sera encore plus vrai du reste à charge. Vous évoquez à ce propos un chiffre de 29 000 euros. Des outils comme le prêt à taux zéro et le prêt d’avance à la mutation du bien peuvent être des réponses appropriées s’ils sont toilettés et font l’objet d’une promotion et d’une défense adéquates.

Madame Bassire, il est vrai qu’en additionnant les différentes lignes budgétaires, on ne retrouve pas le montant annoncé de 1,6 milliard d’euros supplémentaire, mais seulement 900 millions environ. Le ministère, que nous avons interrogé avec insistance à ce propos, m’indiquait hier encore qu’un montant de 700 millions d’euros destiné à l’Anah correspondait à la vente de quotas carbone, mais cette somme n’est pas totalement fléchée sur des autorisations d’engagement.

Quant à la banque de la rénovation, il s’agit en effet de l’outil public qui manque à nos dispositifs.

M. Emmanuel Maquet, rapporteur pour avis (Paysages, eau et biodiversité). J’interviens en tant que rapporteur des programmes 113 Paysage, eau et biodiversité, et 159 Expertise, information géographique et météorologie, que je présenterai successivement.

Le programme 113 est doté de 578 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 512 millions d’euros en crédits de paiement dans le projet de loi de finances pour 2024, contre 274 millions en CP et en AE dans la loi de finances initiale de 2023, soit une augmentation respective de 111 % pour les AE et de 87 % pour les CP. Il s’agit là d’une dérogation conséquente, voire historique, aux discours et aux objectifs du Gouvernement en matière de maîtrise des dépenses publiques.

Si les acteurs que nous avons auditionnés en sont globalement satisfaits, il est de notre devoir de députés d’examiner avec la plus grande attention et sur la durée l’efficacité et la performance de ces dépenses.

Les acteurs concernés par ces deux programmes sont des réservoirs impressionnants d’expertise et de compétences. Je pense, pour le programme 113, à l’Office français de la biodiversité (OFB), aux agences de l’eau, aux parcs naturels et conservatoires et, pour le programme 159, à Météo-France, au Cerema et à l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN). Leurs projets et leurs perspectives d’investissement sont ambitieux et mobilisent une intelligence et des technologies considérables. Il sera néanmoins crucial que ces efforts soient tendus vers des gains chiffrés, car toute cette réflexion et tous ces projets donnent parfois le sentiment d’être davantage motivés par la passion des agents pour leurs projets que par une analyse du rapport coût-bénéfices.

Cette augmentation inédite des crédits s’inscrit dans le cadre de la stratégie nationale pour la biodiversité (SNB) 2030 annoncée en juillet dernier. Elle est aussi à mettre en lien avec les engagements pris par la France en matière de biodiversité et de consolidation des moyens des opérateurs de la transition écologique. Parmi les mesures nouvelles à souligner, hors SNB, les missions d’intérêt général exercées par l’Office national des forêts (ONF) en faveur de la biodiversité sont augmentées de 2,5 millions d’euros en 2024 et pour les années suivantes et, pour le programme 113, portent également sur le plan triennal « gibier » pour 20 millions d’euros par an dès 2024.

La subvention pour charges de service public de l’OFB est également augmentée de 24 millions d’euros en 2024, afin de résorber le reliquat du déficit budgétaire lié au financement des emplois depuis la fusion qui a donné naissance à l’OFB et de financer les 47 emplois supplémentaires alloués à l’office en 2024. Les parcs nationaux bénéficieront également de 15 équivalents temps plein (ETP) et de 5 millions d’euros supplémentaires par rapport à la LFI pour 2023.

Enfin, une mesure nouvelle concernant le bien-être animal est dotée de 8 millions d’euros. Elle a vocation à accompagner les entreprises circassiennes et les professionnels affectés par cette mesure pour ce qui est du devenir des animaux.

S’il semble stratégique d’effectuer un soubresaut pour nos infrastructures d’assainissement et de mettre l’accent sur un système où « l’eau paie l’eau », je vous appelle à la plus grande vigilance face à l’augmentation de ces redevances. Dans le contexte d’inflation et de recettes publiques record que nous connaissons, même limitées à 10 euros par foyer, ces augmentations ne pourront qu’être interprétées par les ménages comme une nouvelle hausse des prélèvements obligatoires.

Le programme 159 Expertise, information géographique et météorologie finance les subventions pour charges de service public des trois opérateurs que sont Météo-France, l’IGN et le Cerema, ainsi que l’ensemble des moyens de fonctionnement du Commissariat général au développement durable (CGDD). Il est doté de 516,4 millions d’euros en AE et en CP dans le PLF pour 2024, contre 499,7 millions d’euros en AE et en CP en LFI 2023, ce qui représente une augmentation de 3,34 % des crédits.

Pour l’action 10, les crédits du CGDD augmentent de 1,2 million d’euros pour mettre en œuvre et planifier les politiques de développement durable, notamment la SNB.

Pour l’action 11, les crédits du Cerema augmentent de presque 4 millions d’euros et le plafond d’emplois croît de 10 ETP. Le Cerema m’a fait part de son besoin de souplesse en matière de plafond d’emplois pour pouvoir recruter des ingénieurs contractuels sous plafond pour répondre à la demande croissante des collectivités territoriales.

Pour l’action 12, qui concerne l’IGN, les crédits augmentent de 3,4 millions d’euros dans le PLF pour 2024, tandis que le schéma d’emplois est négatif de 25 ETP. Cette diminution du schéma d’emplois intervient après une année 2023 marquée par une stabilisation, alors qu’une nouvelle stabilisation à zéro est prévue en 2025. Cela s’inscrit dans le cadre d’une contractualisation pluriannuelle qui sera amenée à être renégociée pour la prochaine période 2025 à 2029.

Concernant Météo-France, la subvention pour charges de service public augmente de 8 millions d’euros et les effectifs de 25 ETP. Les interrogations portent essentiellement sur les investissements qui devront être réalisés dans les années à venir pour la modernisation des équipements et pour le renouvellement des moyens de calcul intensif de l’établissement à l’horizon 2026.

M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis (Politiques du développement durable). Le programme 217 concerne le financement du pôle ministériel, de trois autorités admiratives indépendantes – l’Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires (Acnusa), la Commission nationale du débat public (CNDP) et la Commission de régulation de l’énergie (CRE) –, ainsi que d’écoles d’ingénieurs, notamment l’École nationale des travaux publics de l’État et l’École nationale des ponts et chaussées.

Ce programme a vu son budget augmenter de 4,35 %, avec une augmentation du plafond d’emplois de 311 unités au sein du pôle ministériel. Ce chiffre doit cependant être tempéré, car il ne s’agit pas d’une création nette de 311 emplois, étant donné que des transferts en équivalent temps plein travaillés sont prévus et risquent de minorer l’impact attendu de ces créations, lesquelles sont donc en trompe-l’œil et ne répondent pas aux enjeux du moment.

Ce rapport me permettra de formuler plusieurs critiques à l’encontre du budget que nous allons voter.

Tout d’abord, ce budget ne répond pas, en termes stratégiques, à l’une des attentes les plus fortes des Français : le rapprochement de l’État et des citoyens. La fonction publique est largement déconsidérée par les Français, qui perçoivent l’État comme un empêcheur d’innovation, un empêcheur d’entreprendre, dont les délais de réponse et de traitement des dossiers sont très longs, provoquant de nombreuses difficultés. On observe donc, assez logiquement, une crise de confiance. La superposition de l’administration centrale et des différents services de l’État – préfecture, Dreal, direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), direction départementale des territoires (DDT), direction départementale de l’équipement (DDE) et commission départementale d’aménagement commercial (CDAC) – impatiente nos concitoyens, qui ne comprennent pas qui fait quoi et subissent des délais de réponse très longs, les services de l’État se renvoyant mutuellement la responsabilité. Les petites communes et les Français, en particulier les porteurs de projets, sont perdus dans cet imbroglio administratif. Nous devons nous emparer de cette crise de confiance pour répondre à une attente légitime des Français, qui veulent comprendre qui sont les interlocuteurs auxquels ils peuvent se référer.

Que dire des autorités administratives parfaitement inconnues du grand public, telle la Commission nationale du débat public, financée à hauteur de plus de 4 millions d’euros alors que sa notoriété est nulle. Sortons la tête du sable : faites donc un peu de porte-à-porte dans vos circonscriptions, et vous constaterez que personne ne connaît la CNDP, hormis quelques associations militantes écologistes qui l’utilisent pour faire pencher la balance en faveur de projets antinucléaires et pro-éolien. Ajoutons à cela que le président de ladite Commission, que j’ai auditionné et qui est au demeurant particulièrement sympathique, perçoit tout de même une rémunération mensuelle de 15 000 euros, comme je l’avais indiqué en séance voilà quelques mois. En ces temps de crise du pouvoir d’achat, une telle situation est difficilement acceptable pour les Français.

Il en va de même – et c’est là un sujet plus politique – pour la présidente de la Commission de régulation de l’énergie, Mme Emmanuelle Wargon. Comment accepter qu’une ancienne ministre du logement, battue aux élections législatives, soit recasée à la tête de cette commission, alors que les questions énergétiques n’occupent guère de place dans son CV, pour un salaire mensuel de 15 000 euros ? La gouvernance doit changer et ces méthodes de recasage doivent cesser. Je rappelle en outre qu’Emmanuelle Wargon avait été mise en minorité lorsque nous l’avions auditionnée en vue de sa nomination : cette nomination étant « protégée » par la Constitution, la Macronie est passée en force. Surtout, je m’interroge sur le montant de son salaire de 15 000 euros mensuels, difficilement supportable pour nos concitoyens qui ne savent même pas comment remplir leur caddie.

Pour ce ministère, les financements critiquables sont très nombreux. Je pense aussi aux subventions qu’il a accordées entre 2022 et 2023, parmi les bénéficiaires desquelles on trouve par exemple Réseau action climat, pour 90 000 euros par an. Il est assez difficile de comprendre que l’État finance cette association militante antinucléaire alors que nous avons voté la relance du nucléaire. De fait, il n’est pas acceptable que l’État et les ministères financent des associations militantes écologistes. Il en va de même pour Les Amis de la Terre et France nature environnement. Les Amis de la Terre, par exemple, a reçu 45 000 euros en 2023, alors que cette association promeut des actions de désobéissance civile, voire des actions illégales. Il est regrettable que l’État finance de telles actions.

Ce budget aurait pu être dépensé différemment en renforçant les écoles d’ingénieurs que la France finance et qui sont indispensables pour la réindustrialisation de notre pays, à la suite, par exemple, du projet de loi relatif à l’industrie verte. Cette demande est criante de la part de l’École nationale des ponts et chaussées et j’ai d’ailleurs déposé plusieurs amendements à cet égard, visant notamment à permettre à cette école de former jusqu’à 350 ingénieurs.

En conclusion, ce budget ne comporte aucune stratégie visant à réinvestir dans la proximité avec nos concitoyens. L’augmentation du nombre des ETP et des crédits, après des baisses d’effectifs opérées ces dernières années, est un signal positif, mais aucune stratégie ne se dégage dans le sens d’un retour à une proximité de l’État pour nos concitoyens, les petites communes, les porteurs de projets et les élus locaux. Depuis la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (Notre) et la loi « climat et résilience », toutes les lois ont été un nid à normes inextricables, sans pédagogie ni suivi de la part de l’État.

Ce programme ne répond pas, selon moi, à l’enjeu consistant à rendre l’État accessible et désirable pour nos concitoyens.

M. le président Jean-Marc Zulesi. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

Mme Laurence Heydel Grillere (RE). L’urgence climatique n’est plus un débat. Elle s’observe directement et influence concrètement le quotidien des Français. De plus en plus, notre biodiversité est menacée et la pression exercée par nos activités s’inscrit directement dans nos paysages. Dans le même temps, la raréfaction de nos ressources en eau affecte déjà nombre de nos territoires. Ainsi, cet été, 1 000 communes se sont trouvées en rupture d’eau et 2 000 en tension.

Dans ce contexte, les programmes 113 et 159 sont la fondation, le support sur lequel s’érigent nos politiques, qui nous permettent de développer des outils et d’agir contre le changement climatique. Nous nous réjouissons donc que soit proposée, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2024, une très forte hausse des crédits pour le programme 113, avec une augmentation de 111 % entre la loi de finances initiale pour 2023 et le projet de loi finances pour 2024 en AE et de 87 % en CP, afin de décliner deux chantiers majeurs : la stratégie nationale pour la biodiversité 2030 et le plan Eau. Un ensemble d’objectifs prioritaires est décliné en leur sein. Il s’agit de l’objectif de zéro artificialisation nette (ZAN), de la restauration de la biodiversité – avec vingt nouveaux programmes d’action à destination des espèces menacées –, de l’appui aux cinquante-trois mesures du plan Eau, qui vise à davantage de sobriété dans les usages de l’eau, à optimiser toutes les ressources et à restaurer la qualité de l’eau.

Les crédits du programme 159 augmentent, quant à eux, de plus de 1,2 % dans le PLF 2024. Cela permet d’accompagner notamment le Commissariat général au développement durable, de poursuivre la meilleure utilisation des données au service de l’accélération de la transition écologique et d’assurer une meilleure information de tous au sujet des enjeux environnementaux. Il s’agit aussi de permettre à Météo-France de disposer d’un système performant de prévisions et d’avertissement en matière de risques météorologiques.

C’est grâce à ces politiques que nous contribuerons à restaurer et protéger les écosystèmes et paysages emblématiques, afin de préserver le cadre de vie des Français, de renforcer l’adaptation au changement climatique et d’atténuer les effets de ce dernier.

Ces objectifs ambitieux nécessitent des effectifs adaptés aux enjeux de développement durable. C’est tout l’objet du programme 217, dont nous saluons la progression des crédits, avec plus 4,33 % en AE et plus 3,51 % en CP. Cela correspond à la volonté d’augmenter la masse salariale du pôle ministériel qui regroupe les ministères de la transition écologique, de la cohésion des territoires, de la transition énergétique ainsi que les cinq ministères délégués et secrétariats d’État qui leur sont associés. Il s’agit de mettre en œuvre les politiques écologiques et énergétiques prioritaires, dont notamment celles prévues par le projet de loi relatif à l’industrie verte, les politiques de l’énergie, de l’eau et de la biodiversité. Il est aussi prévu d’internaliser de nouveau des moyens numériques qui avaient été externalisés.

Les défis imposés par la transition écologique et énergétique ont des conséquences directes sur la charge de travail des personnels de ce pôle ministériel. Afin de mieux répartir les tâches et de contribuer au bien-être au travail, il est prévu de créer 311 ETPT supplémentaires. Les crédits permettront aussi de poursuivre la simplification et l’accélération des procédures, la transformation numérique du pôle ministériel ou encore la réduction de la consommation d’énergie finale dans les bâtiments à usage tertiaire.

Le groupe Renaissance partage bien entendu les ambitions du Gouvernement et votera pour les crédits de ces programmes.

M. Jorys Bovet (RN). Contrairement à d’autres, le programme 113 Paysages, eau et biodiversité a eu la chance de voir ses crédits doubler par rapport à 2023. L’augmentation des effectifs prévue dans ce programme ainsi que dans le programme 217 Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables doit être considérée avec vigilance compte tenu des transferts entre programmes.

L’abondance des crédits consacrés à la stratégie nationale pour la biodiversité 2030 et au plan Eau montre la priorité que le Gouvernement accorde à ces enjeux. Un travail énorme doit être mené sur la ressource en eau, comme le prouve la répétition des épisodes de sécheresse. Il est indéniable également qu’un travail de protection de la biodiversité de tous les milieux doit être réalisé. Les programmes lancés sont conséquents et les opérateurs sont prêts à se mobiliser pour répondre aux objectifs.

Ce PLF prévoit des augmentations d’effectifs, mais seront-elles suffisantes ? Un certain nombre d’acteurs craint que les plafonds d’emplois ne soient pas adaptés, ce qui pourrait les contraindre à différer certaines réalisations. C’est notamment le cas pour le Cerema, dont les diverses missions augmentent mais qui ne sera pas en mesure de recruter suffisamment d’ingénieurs pour accompagner les collectivités comme il le souhaiterait. On observe le même problème à Météo-France, qui compte des étudiants parmi ses emplois sous plafond.

Parlons maintenant du fond. La France souhaite se doter d’une grande stratégie nationale en faveur de la biodiversité, mais certaines actions mises en œuvre vont à l’encontre de cet objectif. On estime qu’un hectare de prairie permanente permet de stocker 110 kilogrammes de carbone par an. En 2022, on comptait 11,5 millions d’hectares de telles prairies en France, ce qui a contribué à capter 1,25 million de tonnes de carbone. Par ailleurs, il n’est pas tenu compte de la biodiversité, de la faune et de la flore de ces prairies. Chaque décision prise pour affaiblir l’élevage en France a donc un effet négatif sur l’environnement – je pense notamment à la taxation des éleveurs prévue par le PLF au nom du principe pollueur-payeur.

Autre incohérence majeure, la politique nationale du paysage financée par le programme 113 a pour objectif d’inciter les acteurs concernés par la conservation et la préservation des sites et paysages à adopter des mesures de protection ou de gestion. Mais, dans le même temps, il faut développer une méthode qui permette une meilleure acceptation locale des projets d’énergies renouvelables. Peut-on dire que l’on préserve les paysages exceptionnels lorsque l’on met en avant le motif de l’intérêt public majeur pour construire des éoliennes ?

On pourrait aussi parler de la volonté de s’occuper du bien-être animal, avec 8 millions d’euros de crédits supplémentaires. Le ministre de l’agriculture ne souhaite pas changer de position sur la question de la souffrance des animaux transportés en dehors de l’Union européenne.

Nous nous interrogeons aussi sur certains points.

Nous souhaitons savoir comment seront définies les futures zones de protection forte et quels seront leurs effets sur les activités économiques.

On peut craindre que l’augmentation de 10 euros par foyer des redevances perçues par les agences de l’eau soit très mal perçue, particulièrement dans le contexte d’inflation générale. Faut-il craindre une augmentation qui serait supérieure à ce montant ?

L’accélération de la destruction de la biodiversité est un sujet bien trop important pour passer sous silence les incohérences de ce Gouvernement, malgré la bonne volonté affichée dans ce PLF. Il faut favoriser la recherche pour trouver des outils qui permettent de faire accepter la transition agroécologique.

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). Le Gouvernement se félicite d’une augmentation inédite de plus de 86,5 % des crédits destinés à la protection des milieux et de la biodiversité. « Make our planet great again », nous y sommes !

Mais parlons un peu des montants rapportés aux enjeux – au bout du compte, il s’agit de préserver les conditions de notre survie : 512 millions d’euros sont inscrits pour l’eau et la biodiversité – c’est-à-dire pour le vivant – quand 700 millions d’euros sont investis pour les nouveaux projets routiers – donc en faveur de l’artificialisation.

Les scientifiques nous mettent en garde. Nous vivons une crise d’extinction massive des animaux et des plantes, la première depuis la disparition des dinosaures. On constate, par exemple, une reproduction faible ou anormale des oiseaux d’eau et des amphibiens, tandis que les insectes disparaissent à toute vitesse. Notre maison brûle et on investit un peu, tout en menant une politique incohérente.

Lors de la COP15, Emmanuel Macron s’est vanté d’avoir déjà classé 33 % du territoire français en aires protégées. Mais protégées de quoi ? Dans ces aires, sont inclus les parcs naturels régionaux, dans lesquels l’agriculture intensive et les coupes rases sont permises. La pêche industrielle est autorisée dans les aires marines protégées, alors qu’elle est en train de vider nos océans.

Rien n’est dit dans la stratégie nationale pour la biodiversité au sujet de l’agriculture intensive, alors que ses effets sur la biodiversité sont considérables. Le nombre d’oiseaux des champs a diminué de 60 % en quarante ans. En mai dernier, une étude a montré que la principale cause de ce phénomène était l’agriculture intensive, qui fait un usage massif des intrants de synthèse que sont les pesticides et les engrais. Interdit-on les pesticides ? Non. On recule même encore une fois au sujet du plus dangereux d’entre eux, le glyphosate.

C’est malheureusement la même chose en ce qui concerne la politique de l’eau. Le rehaussement du plafond de recettes des agences de l’eau va dans le bon sens, mais il faut surtout en finir avec le « plafond mordant » qui limite leurs ressources.

Le plan Eau du Gouvernement ne prévoit aucune participation du secteur agricole aux efforts de sobriété en matière de consommation d’eau. Pourtant, l’agriculture représente 45 % de l’eau utilisée en France. On ne change rien, alors que nous avons connu l’an dernier une sécheresse hivernale inédite et qu’au 1er août, le niveau de 72 % des nappes phréatiques était inférieur à la normale. À Toulouse, la Garonne est à un niveau historiquement bas. Il n’est prévu aucun effort pour végétaliser notre alimentation, alors qu’il faut 15 500 litres d’eau pour produire un kilogramme de viande de bœuf. Cerise sur le gâteau, M. Fesneau veut décréter que les méga-bassines qui pompent dans les nappes sont d’intérêt public majeur.

Enfin, rien n’est prévu pour améliorer la qualité de l’eau, alors que 90 % de nos cours d’eau sont pollués par les pesticides, que l’eau potable contient des microplastiques et qu’en mai dernier, une enquête du journal Le Monde avait pointé la présence massive de substances polyfluoroalkylées ou perfluoroalkylées (PFAS) – qui sont des polluants éternels.

Les moyens annoncés pour lutter contre les fuites dans les canalisations ne sont pas non plus à la hauteur. M. Béchu a pourtant lui-même annoncé que ce taux de fuite allait de 5 % à 70 %. La situation est urgente dans les outre-mer. À Mayotte, il n’y a l’eau courante qu’un jour sur trois.

Voilà ce à quoi nous devons faire face. La préservation de l’eau va être le défi majeur du XXIe siècle. Il faut donc des investissements massifs, mais aussi des personnels pour mettre en place des politiques ambitieuses et efficaces. Soixante-six postes supplémentaires pour les agences de l’eau, c’est une excellente nouvelle. Mais il en manque encore 105 pour revenir au niveau de 2017. Le PLF prévoit 10 postes supplémentaires pour le Cerema, qui joue un rôle capital pour la mise en place à l’échelle locale des politiques publiques écologiques. Or il a perdu 394 postes depuis 2017. Pire encore, l’IGN qui observe, décrit et cartographie les habitats naturels ou encore les parcelles agricoles, perd 25 postes cette année, soit 120 en tout depuis le premier quinquennat Macron. Comment justifier cela en cette période d’urgence climatique et écologique ?

Déjà condamné deux fois pour inaction climatique, le Gouvernement l’a été une nouvelle fois en juin dernier pour manquement à ses obligations de protéger la biodiversité. Cela devrait être une alerte rouge. Au-delà des mots, il faut des actes et des investissements autrement plus ambitieux que ceux annoncés dans ce PLF.

Nous faisons face à la sixième extinction de masse des espèces. La vie n’a pas de prix.

M. Nicolas Ray (LR). Messieurs les rapporteurs pour avis, vos deux rapports font état d’augmentations de crédits en faveur de services et d’opérateurs historiques des politiques publiques du développement durable. On peut citer Météo-France, l’IGN, le Cerema, l’Office national des forêts (ONF) et les parcs nationaux. Cette hausse est certainement bienvenue pour de nombreux services. Mais, comme l’a dit mon collègue Emmanuel Maquet, nous devons aussi nous interroger sur la performance de la dépense publique. Notre pays atteint des records en matière de taux de prélèvements obligatoires et de dépense publique, situés respectivement à 45,4 % et 55,4 % du PIB. Le déficit va rester massif, à 4,4 % du PIB – bien au-dessus des 3 %. La charge de la dette va exploser, avec 84 milliards d’euros en 2027, contre 31 milliards en 2021, et un endettement record de plus de 3 000 milliards d’euros.

Tout n’est pas affaire de moyens ; le facteur humain compte aussi beaucoup. Ainsi, le recours excessif aux procédures dématérialisées et l’éloignement des services publics qui en découle pour l’administré font peser un risque majeur de désamour des Français pour la transition écologique. Ce problème est illustré par les difficultés de traitement de nombreux dossiers de MaPrimeRénov’.

Comme l’a relevé M. Meurin, la multiplication des lois et des règlements a rendu les procédures largement plus complexes. Le volume du code de l’environnement a été multiplié par dix en à peine vingt ans, et rien qu’en six mois, nous avons examiné trois textes majeurs relatifs aux énergies renouvelables, au nucléaire et à l’industrie verte.

Dans le passé, les anciennes directions départementales de l’équipement et directions départementales de l’agriculture se faisaient fort de répondre dans des délais raisonnables aux usagers et aux élus, qu’elles cherchaient à accompagner dans leurs actions. Il est primordial que l’administration redevienne un facilitateur et cesse d’être seulement un prescripteur de normes. Nous devons retrouver une relation pragmatique et de confiance avec les administrations territorialisées.

L’accumulation des milliards prévus pour cette mission n’a d’intérêt que si nous disposons de l’ingénierie nécessaire dans nos territoires, d’où la nécessité de soutenir les écoles d’ingénieur.

S’agissant du programme 113, le rapporteur pour avis a constaté une augmentation importante des crédits en faveur de la biodiversité ; nous nous en réjouissons, même s’il faut porter une attention particulière à la maîtrise des dépenses publiques. Cette hausse de 238 millions d’euros doit toutefois être nuancée, puisque 150 millions d’euros sont issus d’un basculement de crédits du fonds vert, dont il n’est pas certain qu’ils restent destinés à la protection des espaces et des espèces.

Le rapporteur pour avis nous alerte également sur les réalités de la révision des redevances sur l’eau et de l’augmentation de 325 millions d’euros des recettes des agences de l’eau. Ces dernières sont censées reposer à hauteur de 168 millions d’euros sur le versement d’une nouvelle redevance par les collectivités territoriales. Cela signifie que l’usager, qui finance déjà à hauteur de 80 % le service public de l’eau et de l’assainissement, supportera au moins la moitié de l’augmentation des recettes des agences de l’eau, ce qui représente en moyenne 10 euros par ménage et par an. Il faut rappeler que l’eau est un produit de première nécessité. Pire encore, la part payée par les collectivités au titre de la qualité des réseaux et de la ressource sera probablement répercutée sur la facture du client final. Dans ce cas, les Français paieraient 100 % du plan Eau du Gouvernement. La promesse de stabilité fiscale n’est donc pas tenue.

Mme Aude Luquet (Dem). Selon nombre d’études internationales, la France fait partie des pays les mieux préparés à un avenir vert. Réduction des émissions de CO2, développement des énergies propres, innovation dans les secteurs durables, protection de l’environnement et de la biodiversité, politique climatique sont autant d’indicateurs dont la prise en compte démontre que nous sommes pleinement engagés dans la réalisation de ces objectifs. Nous avons des ambitions et nous menons des actions. Ce PLF le prouve.

Nous nous donnons les moyens de réussir grâce à une hausse conséquente de 7 milliards d’euros des crédits en faveur de la transition écologique. Cela fait 40 milliards d’euros au total pour la planification écologique. C’est inédit.

Le programme 113 est porteur de deux grandes ambitions : la mise en œuvre de la stratégie nationale pour la biodiversité 2030 et celle du plan Eau.

Les objectifs de la SNB sont incontournables. Le renforcement de la stratégie des aires protégées, la restauration écologique, la protection des espèces, de la biodiversité, des milieux forestiers et des milieux marins ou encore l’accompagnement de la restauration des sols : tout cela demande des moyens. Alors que les crédits progressaient de 13 % par an en moyenne depuis 2018, ils augmenteront de manière inédite de 111 % en 2024.

Une augmentation sensible des effectifs est également prévue pour l’OFB, les parcs naturels nationaux ou encore le conservatoire du littoral. Cela montre notre détermination.

Tout cela rejoint les enjeux liés à l’objectif zéro artificialisation nette des sols, qui est un engagement indispensable pour préserver notre environnement d’une artificialisation déraisonnée et déraisonnable.

Je pense aussi aux enjeux de renaturation des villes. Il nous faut accélérer face à la multiplication des phénomènes extrêmes liés au changement climatique et à ses conséquences. Planter des arbres et renaturer des sols artificialisés constitue une réponse concrète face aux inondations, aux îlots de chaleur ou encore à la pollution. Pour cela, il faut renforcer l’accompagnement des collectivités. La réussite de la transition écologique passera par les territoires. C’est incontournable. On peut donc se féliciter de l’augmentation de 2,5 milliards d’euros du fonds vert. Il reste à sensibiliser les élus pour mieux leur faire connaître les possibilités d’accompagnement.

La mise en œuvre du plan Eau constitue l’autre engagement majeur de ce PLF. Elle est fondamentale pour affronter la multiplication des sécheresses, en organisant une gestion plus rigoureuse et raisonnée de nos ressources. Plus que jamais, les agences de l’eau ont un rôle déterminant à jouer – ce qui demande, là encore, des moyens supplémentaires. Ce PLF 2024 les apporte, avec une augmentation de 475 millions d’euros du plafond de dépenses et la création de 70 ETP supplémentaires.

Qui dit politique ambitieuse dit aussi portage au niveau ministériel, mais surtout dans les territoires, à travers notamment les services déconcentrés et les opérateurs présents sur le terrain. Pour réussir, nous avons besoin de personnels qualifiés et motivés. D’où l’importance du programme 217. Après des années d’optimisation et de mutualisation, qui étaient nécessaires pour gagner en efficacité, nous accueillons favorablement l’augmentation du plafond d’emplois. C’était essentiel pour faire face à la multiplication des missions et au relèvement de nos ambitions.

On peut cependant regretter que les effectifs de l’ONF stagnent, alors que de nombreuses nouvelles missions lui sont confiées et qu’il joue un rôle accru face aux changements climatiques et aux pressions qui s’exercent sur les forêts.

Pour terminer, je salue le doublement des moyens apportés à la réalisation de l’atlas des paysages dans les départements.

Le groupe Démocrate votera en faveur de ces programmes.

Mme Chantal Jourdan (SOC). Le périmètre du programme 113 Paysages, eau et biodiversité est primordial dans la lutte contre le réchauffement climatique et la prise en compte de ses conséquences. Nous saluons l’augmentation des crédits, qui s’élève à 111 % en AE ; nous la demandions depuis plusieurs années.

Cette augmentation résulte notamment de la mise en œuvre de la stratégie nationale pour la biodiversité et du plan Eau. Les augmentations du plafond de dépenses et des effectifs des agences de l’eau, avec 66 ETP supplémentaires, ainsi que celle des effectifs de l’OFB et des parcs naturels nationaux, avec respectivement plus 47 et plus 15 ETP, sont les bienvenues ; cette dynamique doit absolument se poursuivre.

Toutefois, nous devons faire part de notre incompréhension face à la stagnation des effectifs de l’ONF. De nombreux rapports et publications montrent que les sous-effectifs ne permettent pas aux agents de remplir pleinement des missions qui s’élargissent. Les conditions de travail se détériorent et la souffrance au travail augmente de façon très alarmante. Cela était déjà apparu très clairement et de manière transpartisane à l’occasion de nos débats l’an dernier. Pour 2024 et les années suivantes, les crédits destinés aux missions d’intérêt général en faveur de la biodiversité exercées par l’ONF augmentent de 2,5 millions d’euros. Comment pourront-ils être utilisés si les personnels ne sont déjà pas suffisamment nombreux pour assurer correctement les missions actuelles ?

Le programme 159 voit ses crédits augmenter de seulement 1,2 %. Cela est largement insuffisant eu égard au contexte climatique que nous connaissons et au besoin corollaire de données scientifiques et d’accompagnement territorialisé.

Je pense au Cerema, qui dispose d’une expertise pour accompagner les collectivités dans leur transition écologique et qu’il convient de développer, comme l’indique le rapporteur pour avis. Le Cerema estime ainsi avoir besoin d’une augmentation d’une trentaine d’ETP par an pour répondre efficacement aux demandes de l’État et des collectivités. Or, depuis la création de cet établissement, il a subi soixante-cinq suppressions de postes. Les dix ETP supplémentaires prévus pour 2024 sont insuffisants.

Je pense également à Météo-France, dont la mission première de sécurité météorologique des personnes et des biens est essentielle et qui se voit confier des missions nouvelles du fait du dérèglement climatique. La subvention pour charges de service public versée à Météo-France connaît une très légère augmentation dans le PLF 2024. Cela permettra de couvrir la hausse des coûts de l’énergie qui affecte particulièrement Météo-France du fait de la consommation des supercalculateurs. Mais cette augmentation n’est pas suffisante au regard de l’élargissement des missions et des sollicitations. Nous plaidons pour une augmentation des moyens qui permette de renforcer le maillage territorial et de resserrer les liens avec les collectivités.

Enfin, le programme 217 Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables est le support de la mise en œuvre des politiques publiques du pôle ministériel qui regroupe les ministères de la transition écologique, de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales ainsi que le secrétariat d’État à la mer. Les crédits pour 2024 progressent de 4,33 % et ils sont accompagnés d’une augmentation du plafond d’emplois qui ne permettra pas pour autant de compenser des années de baisses d’effectifs. Les services publics s’en sont trouvés éloignés de nos concitoyens, et cela à un moment où ces services sont plus que nécessaires pour répondre aux défis sociaux et climatiques qui sont devant nous, ainsi qu’au besoin de cohésion sociale.

Enfin, nous ne sommes pas d’accord avec la proposition de suppression de la CNDP. Nous estimons, au contraire, que le dispositif doit être renforcé et décliné dans tous les territoires.

Mme Lisa Belluco (Écolo-NUPES). Comme je l’ai déjà dit, la crise écologique est coûteuse. Le Gouvernement annonce 7 milliards d’euros supplémentaires pour la transition écologique. Cette augmentation permet de financer enfin certaines politiques environnementales, comme la politique de l’eau. La canicule de 2022 n’avait pas convaincu le Gouvernement d’augmenter les moyens des agences de l’eau ou de l’OFB, pas plus que nos amendements l’an passé ou que les mobilisations de longue date pour la préservation de l’eau. Ce sont malheureusement les événements de Sainte-Soline qui l’ont fait, obligeant le Président à proposer enfin un plan Eau : même s’il ne s’attaque pas aux vrais problèmes, il a le mérite d’exister.

Quoi qu’il en soit, l’augmentation de 325 millions d’euros pour les agences de l’eau est la bienvenue – je retranche des 475 millions d’euros annoncés, 150 millions liés à la disparition du versement de la prime de performance épuratoire. Ce n’est visiblement pas votre avis, monsieur le rapporteur pour avis, puisque vous déplorez une hausse de la dépense publique et, ce faisant, de la dette. Or la seule dette réelle et intangible, c’est la dette écologique. La dette économique se refinance, se négocie et se rembourse ; la dette écologique est irrémédiable, car les ressources consommées et les écosystèmes détruits ne reviendront pas, de même que les pollutions ne disparaîtront pas – à l’image des PFAS, autrement appelés polluants éternels.

Si vous voulez faire des économies, j’ai une piste pour vous : les méga-bassines. Elles profitent à quelques irrigants, qui assèchent un territoire et privent la très grande majorité des paysans de l’eau ainsi retenue. Le coût de chacune de ces installations représente plusieurs millions d’euros, qui peuvent être financés jusqu’à 80 % par les agences de l’eau – de l’argent public. Voilà vraiment de quoi faire de grosses économies !

Vous déplorez également une hausse des redevances, donc des impôts. L’enjeu est surtout de rendre ces redevances justes. Les financements de l’agence de l’eau Loire-Bretagne proviennent ainsi pour 76 % des redevances sur les particuliers, contre 13 % pour l’agriculture et 11 % pour l’industrie. Les centrales énergétiques et les agriculteurs irrigants sont pourtant les premiers consommateurs, mais ce sont nos concitoyens qui payent très majoritairement l’eau. Le système de redevance est injuste et tout l’enjeu est là.

Outre ces quelques hausses, certains dossiers ne sont pas couverts, notamment celui de l’IGN, dont le nombre de postes diminue alors que celui-ci doit produire et diffuser des données relatives à la connaissance du territoire national et des forêts, tâche indispensable en période de changement climatique. Il en est de même du Cerema, dont le nombre de postes stagne alors que les collectivités se tournent de plus en plus vers son expertise. Ces plafonds d’emplois doivent être rehaussés.

Alors que nous avons voté une loi pour inciter les maires à renaturer les sols, la renaturation, technique longue et coûteuse, demeure trop peu financée.

Toutes les lois que le Gouvernement fait voter en matière d’aménagement, depuis un an, visent à limiter le débat public – consulter les gens, connaître leur avis, coconstruire des projets, c’est trop long ! Or les moyens de la Commission nationale du débat public doivent être renforcés pour s’assurer au minimum que nos concitoyens puissent participer aux décisions d’aménagement qui les concernent.

L’Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires montre que, parfois, les autorités administratives indépendantes réussissent mieux que les services de l’État. Selon des juristes, leur indépendance favorise un meilleur respect du droit et assure une certaine transparence dans le contrôle et la sanction des opérateurs privés qui ne respectent pas les normes environnementales. Nous avons besoin de créer une institution de ce type en matière de sécurité industrielle afin d’améliorer la confiance de nos concitoyens dans la réindustrialisation.

La mission Écologie, développement et mobilité durables et le programme Paysages, eau et biodiversité ne sont pas à la hauteur de la crise écologique.

Mme Nathalie Bassire (LIOT). Trop souvent, la lutte contre le réchauffement climatique a pris le pas sur la préservation de la biodiversité. Pourtant, les deux sont liées et nous ne parviendrons pas à diminuer nos émissions de gaz à effet de serre si nous continuons à détruire nos écosystèmes.

La majorité revendique quelques améliorations avec, d’une part, l’augmentation des effectifs du ministère de la transition écologique et de ses opérateurs et, d’autre part, la pérennisation du fonds vert, à destination des collectivités locales. Le Gouvernement met en avant 760 ETP supplémentaires pour la première fois depuis vingt ans. C’est oublier que lui-même a contribué à la longue hémorragie des effectifs dans les services des ministères, comme dans les agences qui en dépendent. Nous n’oublions pas, notamment, les destructions d’emploi massives au sein de l’ONF, lequel a perdu un tiers de ses effectifs en vingt ans. Le nouveau contrat d’objectifs et de performance 2021-2025 prévoit de poursuivre sur cette lancée, avec la suppression de 475 postes supplémentaire. Certes, des dérogations à ce contrat à peine signé sont annoncées ainsi qu’un gel des effectifs, mais jusqu’à quand ? L’OFB peut, quant à lui, compter sur 47 ETP supplémentaires, mais il faut lui donner les moyens d’appliquer la stratégie nationale pour la biodiversité. Des hausses sont également bienvenues pour Météo-France, qui doit renforcer ses compétences en matière d’analyse des conséquences du changement climatique dans les territoires d’outre-mer. Bref, la tendance à la baisse des effectifs s’estompe, mais il y a loin de la coupe aux lèvres.

Le fonds vert est abondé à hauteur de 2,5 milliards d’euros, ce qui serait une heureuse nouvelle si les finances de nos collectivités territoriales n’étaient pas érodées par l’inflation et les attaques en règle du Gouvernement, avec la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), la non-indexation de la dotation globale de fonctionnement (DGF) sur l’inflation ou la suppression de la taxe d’habitation. Les capacités d’investissement des collectivités territoriales dans la transition écologique sont en chute libre.

S’agissant du plan Eau, en l’absence d’interdiction de certaines substances à l’échelle nationale ou européenne, les collectivités sont contraintes d’investir dans des solutions techniques nécessitant de très importants moyens financiers alors que leurs budgets sont contraints. Elles ont donc besoin de ressources financières supplémentaires allouées par l’État et les agences de l’eau. À défaut, les factures des usagers risquent de s’envoler. La transition écologique ne sera pas possible sans agents sur le terrain, donc, sans moyens financiers massifs.

Mme Anne-Cécile Violland (HOR). Le programme 113 vise à restaurer et à protéger les écosystèmes et paysages emblématiques afin de préserver le cadre de vie des Français, de renforcer l’adaptation au changement climatique et d’atténuer ses effets dès lors que des écosystèmes en bonne santé ont une meilleure capacité à stocker le carbone. Chaque année depuis 2018, il augmente de 13 %.

Pour répondre aux priorités que la France s’est fixées en matière de préservation de la biodiversité et de la ressource en eau, les moyens de ce programme doubleront en 2024 pour atteindre plus de 500 millions d’euros en AE et en CP. Le plafond de recettes des taxes affectées aux agences de l’eau est substantiellement élevé.

Avec ces moyens inédits, le programme interviendra sur deux grands chantiers.

La stratégie nationale pour la biodiversité, annoncée le 20 juillet 2023, comprend des mesures prioritaires pour atteindre les objectifs internationaux, européens et nationaux réaffirmés en décembre 2022 lors de la COP15 dans l’accord de Kunming-Montréal. Alors qu’en 2023, cette stratégie reposait sur le fonds vert, elle dépend désormais du programme 113, rehaussé de 264 millions d’euros afin notamment de renforcer la stratégie des aires protégées, la restauration écologique, la protection des espèces, la biodiversité des milieux forestiers et marins ou encore l’accompagnement de la restauration des sols. Ils s’ajoutent à la pérennisation des mesures du fonds « friches » et de renaturation du fonds vert, au renouvellement forestier, dans le cadre de l’agenda France 2030, ainsi qu’à la résorption des décharges littorales.

Le plan Eau, annoncé le 30 mars par le Président de la République, est le premier chantier pour la planification écologique et vise une gestion plus résiliente et plus sobre face aux tensions quantitatives et aux dégradations de la qualité des eaux. Il définit les leviers qui seront mobilisés d’ici à 2027, avec notamment un relèvement des dépenses des agences de l’eau de 475 millions d’euros d’ici à 2025.

Les orientations de ce programme, comme tous ceux de la mission, ne seraient rien sans le travail et l’investissement liés à l’application des politiques publiques du pôle ministériel regroupant le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, celui de la transition énergétique et les cinq ministères délégués et secrétariats d’État qui leur sont associés, ainsi que le secrétariat d’État chargé de la mer. Tel est l’objet du programme 217, qui finance les effectifs du pôle ministériel et les crédits de fonctionnement et d’investissement de l’administration centrale pilotée par le secrétariat général du pôle. Ce programme, revalorisé à hauteur de 100 millions d’euros, comprend également dans ses trois dernières actions les emplois et les crédits de trois autorités administratives indépendantes : la Commission nationale du débat public, l’Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires et la Commission de régulation de l’énergie.

Les emplois des ministères chargés de l’écologie et de la transition énergétique, préservés en 2023, augmenteront après plus de vingt ans de baisse. Cette évolution permettra de réorienter les moyens vers les équipes chargées de la gestion des approvisionnements stratégiques ou de l’application du programme des nouveaux réacteurs nucléaires.

Sur le terrain, le renforcement des effectifs consacrés à la prévention des risques, à l’instruction des projets d’énergies renouvelables, à la biodiversité et à la rénovation énergétique des logements se poursuivra.

Plus de 17 000 dossiers ont été déposés dans le cadre du fonds vert. Ce déploiement, rapide et efficace, concerne l’ensemble des territoires. L’État et ses services témoignent ainsi de leur agilité et de leur réactivité pour accompagner tous les territoires. Les Maisons France services constituent un autre exemple de réussite.

Notre groupe votera en faveur de ces programmes.

M. Emmanuel Maquet, rapporteur pour avis. J’aurai l’occasion d’évoquer à nouveau les différents sujets lors de la discussion des amendements.

Vous avez souligné le changement d’état d’esprit ressorti des auditions des responsables des établissements publics de l’État. Nous leur avons réaffirmé notre confiance et ils nous ont fait passer un message fort. Les efforts budgétaires accomplis sont réels. Même si la performance de ces établissements ne saurait être mesurée à cette seule aune, il faut replacer ces efforts dans la trajectoire de nos finances publiques et rappeler que ce budget impliquera des contraintes pour les générations futures, même si cette dette est purement budgétaire et non écologique.

M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Je partage le point de vue de M. Ray à propos des procédures dématérialisées, des durées de traitement et de l’inaccessibilité de l’administration que perçoivent, légitimement ou non, nos concitoyens.

Je ne vois pas de stratégie gouvernementale pour faire en sorte que les services publics soient vraiment accessibles. Les élus locaux, les porteurs de projet et les citoyens sont quasiment unanimes à ce sujet et pointent la dématérialisation ou la complexification des normes. Ces 300 ETP en trompe-l’œil ne me paraissent pas inverser une telle tendance et ces programmes ne répondent pas à de tels enjeux. Le service public doit redevenir désirable et accessible.

J’admets que des efforts sont consentis dans ce budget, mais nous avons besoin d’un choc de simplification administrative, de pédagogie et d’accessibilité. Les Français sont défiants. Pire, l’indispensable transition écologique se traduit par de nouvelles normes, parfois très mal comprises. Les porteurs de projet, les citoyens et les élus locaux ont le sentiment qu’elle se fait contre eux, au point de s’en détourner.

En raison des délais de réponse de l’administration et de la dématérialisation des procédures, les Français constatent une forme de « gel de l’activité ». Il faut parvenir à les entraîner dans cette transition écologique sans pour autant geler toutes les initiatives. Nous atteindrons la neutralité carbone non à marche forcée, mais en cherchant l’assentiment de nos concitoyens, des corps intermédiaires, des collectivités territoriales et des acteurs économiques. L’acceptabilité sociale doit être totale, sans rupture d’égalité sociale ou territoriale.

À quel moment la Commission nationale du débat public doit-elle arrêter un débat sur le nucléaire, alors que l’opinion publique est favorable à ce secteur ? Le décalage est flagrant entre les travaux de la CNDP et les Français. Cette commission étant inaccessible aux citoyens, j’en préconise la suppression, quoique je sois preneur de toute proposition visant à la décentraliser et à la rendre accessible. En l’état, elle sert surtout de relais aux associations anti-nucléaire un peu has been.

Article 35 et état B

Amendement II-CD91 de M. Hendrik Davi

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Cet amendement vise à augmenter la subvention de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) afin de financer des études biostatistiques sur les effets de la pollution générée par les navires de croisière en matière sanitaire. Selon une étude réalisée par un laboratoire marseillais, elle est responsable de graves pathologies. Nous savons, en outre, que certains indicateurs de l’agence régionale de santé (ARS) sont inadaptés en prenant en compte les seules maladies qui nécessitent une hospitalisation.

Nous demandons que le Gouvernement compense le transfert budgétaire que nous proposons.

M. Marcellin Nadeau, rapporteur pour avis. Le programme 181 contribue au financement d’études de l’Anses. Cette question de la pollution issue des navires de croisière est bien réelle. Avis favorable, mais n’oublions pas pour autant combien le trafic maritime est également important dans les territoires d’outre-mer et pas seulement dans les ports hexagonaux.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD165 de M. Pierre Meurin

M. Marcellin Nadeau, rapporteur pour avis. Le programme 181 ne finance qu’à hauteur de 28 millions d’euros le Bureau de recherches géologiques et minières sur un budget de 150 millions d’euros. Si la question de l’étude des masses d’eau est importante, je suis néanmoins opposé au mouvement de crédits proposé. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD92 de M. Hendrik Davi

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). Des installations autrefois classées pour la protection de l’environnement ont été déclassées alors qu’elles font encore peser des risques de pollution, laquelle est l’une des premières causes de la disparition de la biodiversité. Cet amendement vise donc à renforcer la subvention pour charges de service public de l’Ineris afin de financer une évaluation de la pollution générée par de telles installations.

M. Marcellin Nadeau, rapporteur pour avis. La pollution de l’air n’est pas seulement due aux émissions des ICPE. Des études d’ampleur sur la détection des polluants émis par des activités qui ne font pas l’objet d’une surveillance particulière seraient utiles. C’est notamment le cas des ateliers de réparation et d’entretien de véhicules à moteurs. Avis favorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD78 de M. Matthias Tavel

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). L’Ineris exerce des missions essentielles dans un contexte d’urgence écologique. En plus de la surveillance industrielle, il procède à des opérations de contrôle des pollutions et des travaux de prévention des risques naturels et de surveillance des impacts sanitaires des installations et zones sensibles. Or la pollution des eaux, des sols et de l’air ne cesse de s’aggraver et les événements climatiques extrêmes se multiplient. L’Ineris a donc besoin de moyens humains renforcés, en adéquation avec l’augmentation évidente de sa charge de travail.

Cette année, l’institut bénéficie de 2 petits ETP supplémentaires. C’est une maigre hausse qui ne compense pas les baisses d’effectifs subies depuis 2017. Entre 2017 et 2024, l’Ineris a ainsi perdu 44 postes, passant de 533 à 489 ETP. Parce que la logique austéritaire et les suppressions de postes sont à nos yeux incompatibles avec l’urgence écologique, nous proposons d’augmenter les crédits alloués à cette instance afin de lui permettre de rouvrir les 44 postes supprimés.

M. Marcellin Nadeau, rapporteur pour avis. L’Ineris se penche effectivement sur des sujets nombreux et essentiels pour notre avenir. Nous avons rencontré le président de cet organisme, qui a souligné l’augmentation des coûts qu’il subissait, notamment dans le cadre de la réalisation des tests relevant de sa mission ; il a également salué la hausse de la subvention pour charges de service public prévue par le programme 181. Cependant, le rehaussement du plafond d’emplois de l’Ineris est malheureusement impossible par le seul biais de l’augmentation de cette subvention. Autrement dit, votre amendement me paraît inefficace. Sagesse ou avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD153 de M. Pierre Meurin

M. Pierre Meurin (RN). Nous avons adopté cette année une loi visant à accélérer la construction de nouveaux réacteurs nucléaires. Dans ce contexte, je propose de donner un peu d’argent à l’ASN pour qu’elle soit réactive, efficace et qu’elle puisse effectuer son travail avec un maximum de moyens.

M. Marcellin Nadeau, rapporteur pour avis. J’admets que l’ASN connaît une activité croissante et qu’elle a besoin d’un budget à la hauteur de ses besoins. Cependant, je suis foncièrement opposé à une diminution des crédits alloués à l’action Aides à l’acquisition de véhicules propres. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD192 de M. Gérard Leseul

M. Gérard Leseul (SOC). La sûreté nucléaire doit être une priorité nationale, et tout doit être fait pour renforcer les contrôles au cours des prochaines années. Aussi notre amendement vise-t-il à renforcer les moyens humains de l’ASN. Entre la poursuite du grand carénage pour les centrales existantes et la perspective du programme Nouveau Nucléaire France, cette autorité devra bénéficier d’une augmentation de ses effectifs. Nous estimons le besoin à au moins 20 ETP supplémentaires par an dans le cadre d’un programme pluriannuel de cinq ans.

M. Marcellin Nadeau, rapporteur pour avis. Dans l’absolu, je suis évidemment favorable à cette augmentation des crédits. Ce qui me gêne, c’est que vous proposez de prélever ces 2 millions d’euros sur l’action 11 Soutien dans les zones non interconnectées au réseau métropolitain, qui concerne les territoires d’outre-mer : vous allez donc appauvrir un parent déjà pauvre. Vous voulez, en quelque sorte, déshabiller saint Paul pour habiller saint Pierre.

M. Gérard Leseul (SOC). Il n’est pas question de déshabiller saint Paul, saint Pierre ou saint Jacques. J’entends très bien votre remarque tout à fait pertinente : nous avons l’intention de demander au Gouvernement de lever le gage.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD86 de Mme Alma Dufour

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). Cet amendement va dans le même sens que celui de notre collègue Gérard Leseul.

Il nous paraît urgent de sortir du nucléaire et d’investir massivement dans les énergies renouvelables, mais puisque le Gouvernement a décidé de foncer tête baissée dans le renforcement de ce modèle dépassé et non résilient au changement climatique, il nous semble capital d’investir dans la sûreté nucléaire et donc d’accorder à l’ASN tous les moyens, notamment humains, dont elle a besoin. Nous proposons ici d’augmenter ses effectifs de 30 ETP, conformément à la demande qu’elle a exprimée. Une telle mesure est d’autant plus urgente que notre parc nucléaire a récemment connu de nombreux problèmes – je pense notamment au retard des maintenances décennales dû au covid et à la découverte d’une épidémie de corrosion sous contrainte.

J’en profite pour réitérer notre opposition au projet de fusion de l’ASN et de l’IRSN que prépare le Gouvernement. Tout le monde comprend qu’indépendance et transparence sont absolument nécessaires pour les scientifiques, et que la remise en cause de ces principes fait courir un véritable risque non seulement à toute la population française, mais également aux habitants d’autres pays puisqu’un accident nucléaire aurait des répercussions bien au-delà de notre territoire.

Nous proposons de financer l’augmentation d’effectifs par un transfert de crédits tout à fait formel, puisque nous demanderons évidemment au Gouvernement de lever le gage.

M. Marcellin Nadeau, rapporteur pour avis. Sagesse. Même si je comprends bien votre intention de demander la levée du gage, la mesure que vous proposez doit absolument passer par le relèvement du plafond d’emplois, ce que ne permet pas l’abondement d’une ligne budgétaire.

M. Gérard Leseul (SOC). Je vous remercie de votre avis de sagesse. Nous soutiendrons cet amendement, qui est un peu en deçà de celui que j’ai défendu tout à l’heure : il est donc encore plus acceptable. Indépendamment du texte que le Gouvernement nous présentera tôt ou tard sur le rapprochement entre l’ASN et l’IRSN, il est nécessaire de renforcer les moyens humains de l’autorité.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD183 de M. Gérard Leseul

M. Gérard Leseul (SOC). Nous proposons la création d’une autorité de sûreté des sites Seveso. J’ai déjà évoqué cette idée tout à l’heure, dans le cadre de la discussion générale. Du reste, nous avons déposé en mars 2020 une proposition de loi renforçant le contrôle et la sécurité des sites industriels, dont les dispositions ont été reprises depuis dans de nombreux amendements.

Mon collègue Hubert Wulfranc a rappelé que nous étions tous les deux élus d’un département traumatisé par plusieurs événements : après avoir été ébranlés par l’incident de Lubrizol – d’autres départements l’avaient été précédemment par l’accident d’AZF –, nous avons de nouveau été frappés par l’incendie d’un hangar de Bolloré Logistics. Nous estimons donc qu’il est nécessaire de créer une autorité indépendante, à l’image de l’ASN, dotée d’un budget propre et d’un pouvoir de sanction. Cela permettrait de concentrer des moyens sur le sujet spécifique des sites Seveso et, ce faisant, de dégager du temps et des ressources au sein des Dreal, dont j’ai rappelé tout à l’heure qu’elles étaient très occupées par d’autres missions importantes qui les empêchent de consacrer l’énergie nécessaire à la question des risques Seveso.

Cette nouvelle autorité, indépendante du Gouvernement, disposerait d’inspecteurs dédiés. La nomination de son président, pour un mandat non reconductible, serait soumise à l’approbation des deux assemblées. Tous ses rapports et injonctions seraient rendus publics. Ses effectifs ne seraient pas soumis à un plafond d’emplois, comme l’a d’ailleurs recommandé tout à l’heure notre rapporteur pour avis.

M. Marcellin Nadeau, rapporteur pour avis. Le principe même de la création d’une autorité indépendante me paraît intéressant, a fortiori dans un contexte où la charge de travail des Dreal est importante. Je suis donc plutôt favorable à cette proposition.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD122 de Mme Alma Dufour

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). La prévention ne peut se limiter à des intentions ou à des déclarations : il faut la rendre concrète par des actes, en se donnant notamment les moyens de procéder à des contrôles, comme l’ont expliqué de nombreux orateurs ainsi que le rapporteur pour avis. L’État s’est donné pour mission d’assurer la prévention des risques ainsi que la maîtrise des effets des processus industriels, des produits et des déchets sur l’environnement et la santé. Or nous constatons malheureusement tous, dans nos territoires, une dégradation des données sanitaires et une augmentation de la prévalence des cancers. Cela corrobore la nécessité d’accorder plus de moyens à la prévention et à la recherche, car il faudrait trouver la cause de cette évolution inquiétante. Aussi notre amendement, qui vise à abonder de 100 millions d’euros les crédits de l’action Prévention des risques technologiques et des pollutions, devrait-il faire l’unanimité. Il en va de la santé de nos concitoyens, qui sont aussi nos électeurs.

M. Marcellin Nadeau, rapporteur pour avis. Je déplore comme vous la baisse des crédits de l’action 01 du programme 181. Il n’empêche que mon avis est quelque peu réservé : cet abondement de 100 millions d’euros me paraît légitime, mais vous n’en précisez ni l’objectif, ni les bénéficiaires. Je m’en remets donc à la sagesse de notre commission.

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). Si le Gouvernement n’engage pas sa responsabilité à l’ouverture des débats en séance, nous pourrons peut-être défendre une version modifiée de cet amendement dans l’hémicycle.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD123 de M. Hendrik Davi

Mme Sylvie Ferrer (LFI-NUPES). La consommation de bonbonnes de protoxyde d’azote est en très forte hausse. Initialement utilisées à des fins industrielles ou alimentaires, elles sont désormais très prisées par certains jeunes qui en font un usage détourné, les utilisant comme gaz euphorisant. Malgré l’interdiction de la vente de ce gaz aux mineurs et la sensibilisation sur les risques sanitaires de sa consommation, de multiples bonbonnes se retrouvent un peu partout. Or, dans les usines de traitement des déchets, le gaz encore présent à l’intérieur explose sous l’effet de la chaleur. Si toutes les explosions ne portent pas à conséquence, certaines endommagent les fours. Ces dégâts mettent en danger les personnels qui travaillent dans les déchetteries, présentent un coût élevé et entraînent la fermeture de lignes, ce qui emporte de lourdes conséquences pour les particuliers. La Fédération des services Énergie Environnement (Fedene) alerte sur l’ampleur du phénomène à l’échelle nationale : dans les quelques usines qui ont fait remonter leurs chiffres, 750 heures d’arrêt ont été recensées lors du seul mois de juin dernier.

Il est donc urgent de légiférer à ce sujet. Nous demandons l’élaboration d’un plan spécifique de traitement des déchets que constituent ces bouteilles de protoxyde d’azote, prévoyant l’investissement dans un outil national de recensement des phénomènes d’éclatement, une campagne de sensibilisation au tri des déchets dangereux, le renforcement de l’équipement des grilles qui composent les fours, le recrutement de personnels supplémentaires chargés du tri préalable à l’entrée des déchets dans ces fours, ainsi que la création d’une filière spécialisée à même d’assurer le bon traitement de ces bonbonnes.

Notre amendement vise à opérer un transfert de crédits, mais nous souhaitons que le Gouvernement lève le gage.

M. Marcellin Nadeau, rapporteur pour avis. Il est vrai que le traitement de ces bouteilles de protoxyde d’azote présente un risque, mais il me semble plus opportun d’engager une action spécifique dans le cadre de l’Ademe que d’abonder de 50 millions d’euros l’action 01 du programme 181, en dehors de tout cadre législatif ou réglementaire. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD133 de M. Nicolas Thierry

M. Nicolas Thierry (Écolo-NUPES). Cet amendement vise à augmenter le budget alloué à la prévention des risques liés à la pollution aux substances polyfluoroalkylées ou perfluoroalkylées, aussi appelées PFAS ou polluants éternels. Nous avons déjà eu l’occasion d’évoquer à de multiples reprises ces composés largement utilisés dans l’industrie, à l’origine d’une pollution majeure et persistante, d’une déstabilisation de l’environnement et de risques sanitaires très graves. Certains territoires français n’ont déjà plus accès à l’eau potable en raison de la présence de PFAS.

La prévention de ces risques devrait constituer une priorité politique des prochaines années. Plusieurs domaines cruciaux mériteraient un effort de recherche particulier : les techniques de dépollution, la recherche de substituts aux PFAS, les effets « cocktail » liés à l’exposition à plusieurs polluants, la mesure de la présence de ces substances dans l’eau ou dans les sols, l’identification des sites les plus pollués.

Ces priorités s’inscrivent en partie dans l’action 01 Prévention des risques technologiques et des pollutions du programme Prévention des risques. Or, comme l’a souligné M. le rapporteur pour avis, le Gouvernement prévoit une légère baisse des crédits de paiement alloués à cette action. C’est pourtant cette ligne budgétaire qui financera le plan PFAS lancé par le Gouvernement en janvier 2023. Comment imaginer que l’on diminue les ressources disponibles pour un tel sujet ? Nous proposons donc d’abonder de 10 millions d’euros les crédits de l’action 01 pour nous donner les moyens d’agir contre cette pollution très grave et préoccupante.

M. Marcellin Nadeau, rapporteur pour avis. Je suis très favorable à cet amendement portant sur un sujet très important, relativement nouveau. De nombreuses études ont montré que la pollution aux PFAS était considérable, notamment dans l’eau. Il est donc nécessaire de développer la recherche pour détecter ces substances et étudier leurs effets sur l’environnement et la santé.

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). Je soutiens cet excellent amendement. Selon une enquête publiée par Le Monde au printemps dernier, la France compterait au moins 900 sites contaminés par les PFAS, dont 108 hotspots où la situation serait dangereuse pour la santé humaine, ces chiffres étant selon toute vraisemblance sous-estimés. La consommation des œufs de poule a été interdite dans la région lyonnaise. Il est vraiment urgent d’agir.

Si l’on parle de polluants éternels, c’est parce qu’ils ne peuvent absolument pas se détruire tout seuls. Tant qu’on ne fait rien, on continue de les accumuler dans nos organismes, avec tous les risques que cela fait courir à notre santé – on sait notamment que ce sont des perturbateurs endocriniens et des substances cancérogènes, qui diminuent également la réponse immunitaire.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-CD118 de Mme Anne Stambach-Terrenoir

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). Alors que la loi Agec est restée lettre morte dans nos finances publiques, dans la mesure où elle ne s’est pas traduite par des moyens financiers alloués à l’économie circulaire, nous proposons l’élaboration d’un plan d’investissement national pour le réemploi des emballages.

La stratégie « 3R » pour la réduction, le réemploi et le recyclage des emballages en plastique à usage unique d’avril 2022 a évalué les besoins en investissements pour le réemploi des emballages entre 1 et 2,3 milliards d’euros. Nous proposons, pour notre part, de doter le nouveau plan d’une enveloppe de 230 millions d’euros pour l’année 2023, qui serait reconduite chaque année pendant toute la durée du quinquennat, ce qui permettrait de couvrir la moitié des besoins d’investissements identifiés. Ces moyens historiquement importants resteraient cependant bien en deçà des estimations de la Commission européenne, qui attend des investissements importants en faveur de l’économie circulaire de la part des États membres.

Nous proposons un transfert de crédits en provenance de l’action 41 du programme 203, mais il va de soi que nous ne souhaitons pas déshabiller le ferroviaire pour habiller l’économie circulaire : comme d’habitude, nous appellerons le Gouvernement à lever le gage pour permettre le lancement de ce plan d’investissement.

M. Marcellin Nadeau, rapporteur pour avis. Je n’ai rien contre le développement de l’économie circulaire et le renforcement des moyens financiers qui lui sont dédiés – au contraire ! Cependant, du point de vue technique, votre amendement revient à créer une nouvelle ligne de crédits. Je m’en remets donc à la sagesse de la commission.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD17 de M. Guy Bricout

Mme Nathalie Bassire (LIOT). L’Ademe estime que les projets financés par son fonds pour l’économie circulaire ont permis d’éviter l’enfouissement de 800 000 tonnes de déchets. En y intégrant l’impact des projets soutenus par le plan de relance en faveur de l’augmentation des capacités et de la modernisation des centres de tri, ce chiffre atteindrait près de 2,6 millions de tonnes. Si ce fonds a été augmenté en 2023 et est à présent doté de 300 millions d’euros, il demeure insuffisant pour atteindre les objectifs ambitieux de réduction, de réutilisation et de recyclage des déchets fixés par la loi Agec.

L’Ademe entend valoriser 1,5 million de tonnes de déchets d’ici à 2025. Aussi notre amendement vise-t-il à abonder de 200 millions d’euros la dotation du fonds pour l’économie circulaire, qui serait alors portée à 500 millions d’euros, afin d’accompagner concrètement les entreprises dans leurs investissements de recyclage, de valorisation et de réemploi des déchets.

Pour respecter les règles imposées par l’article 40 de la Constitution, nous proposons de compenser cette augmentation des crédits du fonds pour l’économie circulaire, rattachés à l’action 12 du programme 18, par une diminution des crédits de l’action 03 du programme 174 Énergie, climat et après-mines. Cette diminution a pour seul but de se conformer aux exigences de la loi organique relative aux lois de finances (Lolf), car nous ne souhaitons en aucun cas minorer les crédits dédiés à l’acquisition de véhicules propres.

M. Marcellin Nadeau, rapporteur pour avis. Malgré l’importance que j’accorde à l’augmentation des moyens de ce fonds, le prélèvement sur les crédits de l’électromobilité me gêne beaucoup. Sagesse.

Mme Huguette Tiegna (RE). Les enjeux de l’économie circulaire sont importants, et son financement aussi. Des fonds de France Relance ont certes contribué à mettre en œuvre dans les territoires des projets d’économie circulaire et je sais combien l’Ademe a besoin de notre soutien. Pour ce qui est des combustibles solides de récupération (CSR), il faudrait que nous puissions approfondir la question. Certains départements, comme ceux de l’outre-mer, ont un besoin urgent de trouver des solutions en ce sens, mais il ne faut pas que les CSR deviennent la règle. Trouvons plutôt des solutions qui vont dans le sens de la transition écologique.

Nous aurons à reparler des investissements dans l’économie circulaire et mieux vaudrait peut-être attendre ces discussions avant d’adopter un amendement qui opère des prélèvements sur le budget consacré à l’acquisition de véhicules propres, car nos concitoyens ont besoin de ces aides. Nous pouvons trouver d’autres solutions.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD119 de M. Matthias Tavel

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). Cet amendement, qui vise à soutenir la création et le développement d’infrastructures dédiées à l’économie sociale et solidaire, répond à un problème soulevé par le réseau des ressourceries et recycleries.

Il est temps de changer de logiciel et de sortir d’un modèle dans lequel on consomme un maximum de ressources et crée un maximum de déchets. Il ne s’agit pas de produire plus de produits verts, mais de convertir au vert les produits existants : c’est ce qu’on appelle l’économie circulaire, qui permet d’économiser les ressources, conformément à ce que nous conseille le monde scientifique.

Il existe déjà des associations et organismes porteurs de telles initiatives, comme Véli-Vélo à Limoges et en Haute-Vienne, qui organise des ateliers de réparation de vélos à destination de tous, contribuant ainsi à une mobilité plus écologique. Il est indispensable que l’enveloppe de 20 millions d’euros que nous proposons dans cet amendement soit effectivement reversée à ces réseaux de ressourceries et recycleries pour favoriser ces initiatives.

M. Marcellin Nadeau, rapporteur pour avis. Je suis favorable à cette augmentation du budget de l’Ademe, qui est compétente, à côté de l’État, en matière de politiques de prévention des déchets. Nous devons encourager le réemploi et la réutilisation dans tous les domaines où c’est possible. Pour ce faire, il est important de soutenir notamment les projets de petites entreprises qui s’engagent, qui sont souvent des structures de l’économie sociale et solidaire. Cet ajout de 20 millions d’euros me semble bienvenu en ce sens. Avis favorable.

M. Gérard Leseul (SOC). Il est indispensable d’aider l’émergence de ces initiatives et je vous remercie d’avoir cité les entreprises car l’ensemble des initiatives de l’économie sociale sont de nature entrepreneuriale. Nous devons donc réduire les consommations d’énergie et, en l’occurrence, de matériel grâce au recyclage, et faire en sorte que l’ensemble des initiatives entrepreneuriales de l’économie sociale aient les moyens de ce recyclage. Je rappelle en effet que la plupart des gens qui consomment ces produits recyclés ont de faibles revenus. On voit bien dans les magasins Envie que l’électroménager reconditionné est remis dans le circuit de commercialisation à faible coût pour des personnes qui n’ont pas la possibilité d’accéder à du matériel neuf. Je demande donc à l’ensemble des groupes politiques de soutenir cet amendement.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques II-CD124 de Mme Alma Dufour et II-CD154 de Mme Marie Pochon

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). Il s’agit d’abonder l’Ademe pour permettre la création et le déploiement de formations à l’utilisation de la méthode développée par l’Institut de l’économie pour le climat (I4CE) pour l’évaluation « climat » des budgets des collectivités. Cette méthodologie permettant d’évaluer les budgets locaux par le prisme des enjeux climatiques a été coconstruite par I4CE avec des collectivités et des associations de collectivités. Il s’agit d’une déclinaison de la démarche de budget vert, mise en œuvre par l’État, pour le budget des collectivités.

Le rapport annuel 2021 du Haut Conseil pour le climat a rappelé une nouvelle fois les insuffisances du pilotage des politiques publiques. La formation des agents territoriaux à cette méthodologie serait donc un excellent outil pour orienter le mieux possible les dépenses vers la transition climatique et écologique.

Mme Lisa Belluco (Écolo-NUPES). La construction puis le vote du budget sont des moments-clés, où s’incarne concrètement la politique climatique d’une collectivité territoriale. Analyser un budget à travers le prisme du climat permet de nourrir les débats budgétaires et de questionner les dépenses pour les orienter le plus possible vers la transition climatique.

Ces formations doivent être développées et proposées auprès de toutes les collectivités territoriales ayant des leviers d’action pour lutter contre le dérèglement climatique, que ce soit auprès des 707 collectivités ayant lancé un plan climat-air-énergie territorial ou des régions et des départements, en touchant à la fois les agents chargés des politiques climatiques et les autres services de la collectivité.

M. Marcellin Nadeau, rapporteur pour avis. La méthodologie des budgets verts, déjà mise en œuvre par l’État, s’est révélée très utile pour identifier les dépenses favorables à l’environnement et pour accroître la transparence sur les dépenses néfastes à l’environnement. Il est donc tout à fait pertinent d’étendre cet exercice aux budgets des collectivités territoriales. Pour cela, les collectivités ont effectivement besoin d’être formées à la méthodologie. Ce rôle peut être confié à l’Ademe, qui dispose d’une expertise en la matière et accompagne déjà les collectivités pour leur permettre de réussir la transition écologique. Je suis donc pleinement favorable à ces amendements.

La commission rejette les amendements.

Amendement II-CD155 de Mme Marie Pochon

Mme Lisa Belluco (Écolo-NUPES). Cet amendement d’appel vise à abonder le budget de l’Ademe de 1 million d’euros.

L’Ademe est un établissement public industriel et commercial (Epic) qui participe à la mise en œuvre des politiques publiques dans les domaines de l’environnement, de l’énergie et du développement durable. Ainsi, l’Ademe contribue pleinement à la poursuite de notre objectif commun de neutralité carbone en 2050. Cette agence compte plus de 1 000 collaborateurs, vingt-six implantations sur tout le territoire et trois représentations en outre-mer.

Le plan France Relance a confié à l’Ademe plusieurs milliards d’euros de crédits pour soutenir la décarbonation de l’industrie, l’économie circulaire, la rénovation énergétique, le tourisme vert et le recyclage des friches polluées, mais cela ne semble pas suffisant eu égard aux tâches diverses de l’agence et à l’absence d’agents publics.

M. Marcellin Nadeau, rapporteur pour avis. Je suis favorable à cette augmentation des moyens de l’Ademe pour lui permettre de mener ses actions, à la fois salutaires et vertueuses.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD105 de Mme Clémence Guetté

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Cet amendement vise à augmenter substantiellement les crédits de l’État alloués au fonds chaleur. Les besoins en matière d’installations de production de chaleur renouvelable, de récupération et de réseaux de chaleur sont bien supérieurs à ce que permet aujourd’hui ce fonds. Le Syndicat des énergies renouvelables (SER) estime ainsi les besoins supplémentaires à 210 millions d’euros et l’association de collectivités Amorce, à 400 millions d’euros.

Malgré le bouclier énergétique, les collectivités sont en grande difficulté du fait notamment de la hausse des prix de l’énergie et nous devons donc les accompagner pour les aider à se défaire de la dépendance aux énergies fossiles.

Dans ma circonscription – très urbaine, avec les communes de Créteil, Choisy-le-Roi et Orly – comme dans beaucoup d’autres, durant les périodes de canicule, il fait toujours beaucoup plus chaud que dans d’autres milieux offrant un meilleur accès à la végétation. Il faut donc pouvoir accompagner la multiplication des réseaux de froid renouvelable sur les crédits du fonds chaleur. Ce sont toujours les plus précaires qui ont le moins accès à des îlots de fraîcheur, or les canicules sont des épisodes climatiques extrêmes qui se multiplieront.

Nous invitons le Gouvernement à lever le gage.

M. Marcellin Nadeau, rapporteur pour avis. Le fonds chaleur nous semble en effet être un outil très efficace pour financer un grand nombre de projets qui permettent de réduire notre consommation d’énergie fossile. Le budget du fonds chaleur a augmenté au cours des dernières années, mais cela reste en effet insuffisant pour atteindre notamment les objectifs de la programmation pluriannuelle de l’énergie. Il est donc nécessaire d’augmenter les crédits de l’action 12 du programme 181 constituant la subvention destinée à l’Ademe, au-delà de l’augmentation déjà prévue de 179 millions d’euros. Avis favorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD166 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert

Mme Huguette Tiegna (RE). Cet amendement vise à financer la création d’un fonds de garantie à hauteur de 50 millions d’euros, hors dotation du fonds chaleur, pour encourager la valorisation de la chaleur fatale.

Il s’agit d’éviter la situation actuelle des projets très peu nombreux développés dans ce domaine au moyen d’un fonds de garantie réservé aux projets soutenus par l’Ademe. Les 50 millions d’euros proposés pour l’abonder permettraient de couvrir trois années de risques et d’amorcer son financement, qui sera ensuite complété par une contribution de l’État et des porteurs de projets.

M. Marcellin Nadeau, rapporteur pour avis. Avis défavorable, car tout figure déjà dans le programme de l’Ademe et il est inutile d’ajouter une ligne supplémentaire.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-CD180 de Mme Chantal Jourdan

Mme Chantal Jourdan (SOC). Cet amendement vise à renforcer les crédits du Fonds de prévention des risques naturels majeurs, qui stagnent cette année par rapport à l’an passé, mais qui ont surtout baissé fortement au cours des précédents exercices.

Les phénomènes climatiques extrêmes se multiplient. En particulier, la situation d’extrême urgence que connaît Mayotte, où l’anticipation des situations de sécheresse et l’absence de précipitations privent la population d’eau deux jours sur trois, doit nous interpeller. Un renforcement de ce fonds permettrait de prévenir des risques et de prévoir les aides à apporter à la population. Afin donc de mieux anticiper les risques environnementaux, nous proposons d’abonder le fonds de 180 millions d’euros.

M. Marcellin Nadeau, rapporteur pour avis. Lorsque Mme Bassire avait évoqué la stabilité des crédits du fonds Barnier et la nécessité de les augmenter, j’avais souligné le fait que, dans certaines régions au moins, ce fonds pouvait être sous-utilisé. Toutefois, par rapport aux objectifs liés à la nécessaire adaptation au changement climatique, il me semble pertinent d’accepter le principe de cette augmentation de crédits. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-CD121 de Mme Alma Dufour

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). Cet amendement vise à augmenter les crédits du Fonds de prévention des risques naturels majeurs de 100 millions d’euros, à orienter vers les risques littoraux. Le réchauffement climatique entraînera un changement de démarcation des frontières, qui affectera les littoraux. Des fonds sont actuellement attribués à la réalisation de nouvelles cartographies permettant d’envisager ces modifications, mais pas aux réaménagements de territoire à entreprendre en conséquence, prenant en compte les risques associés à ce changement de ligne littorale. Dans un souci de prévention de ces risques et de protection des populations qui habitent sur le littoral, je vous invite à adopter cet amendement

M. Marcellin Nadeau, rapporteur pour avis. Nous sommes d’accord sur le principe d’un abondement du fonds Barnier, mais après le vote de l’amendement précédent, j’émettrai un avis de sagesse.

Mme Sophie Panonacle (RE). Le Comité national du trait de côte travaille actuellement, et jusqu’au PLF pour 2025, sur l’adaptation de notre territoire au changement climatique, à l’érosion côtière, à la submersion et à l’élévation du niveau de la mer. Le résultat de ses travaux arrivera pour le prochain PLF, dans le cadre du soutien financier à l’ensemble des collectivités locales de l’Hexagone et des territoires ultramarins. Le temps de terminer nos travaux, et je m’engage à ce que les communes soient financées d’ici à un an.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD65 de Mme Nathalie Bassire

Mme Nathalie Bassire (LIOT). J’ai voté tout à l’heure contre l’amendement de Mme Jourdan, qui a été adopté, mais qui représente un coût de 180 millions d’euros pour les zones non interconnectées, dont nos territoires font partie. Si le gage n’est pas levé, nous serons en difficulté. J’aurais préféré, du reste, qu’il soit pris sur l’action 41, qui concerne le ferroviaire, puisqu’il n’y a plus de train dans mon territoire.

M. Marcellin Nadeau, rapporteur pour avis. Si j’étais favorable à l’amendement de 180 millions d’euros, c’était en pensant à nos territoires, qui connaissent des difficultés dans l’application du plan séisme Antilles, financé par le fonds Barnier, et où 60 % des écoles demeurent vulnérables. Compte tenu de l’article 40 de la Constitution, j’étais initialement plutôt favorable à cet amendement à 50 millions d’euros, bien que son montant soit inférieur, mais maintenant que l’autre amendement a été voté, je propose le retrait de celui-ci.

L’amendement est retiré.

Amendement II-CD110 de Mme Clémence Guetté

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Il vise à créer un fonds pour la souveraineté dans le pilotage de la transition énergétique. Nous souhaitons que les moyens alloués à ce fonds permettent l’entrée de l’État au capital de TotalEnergies et de General Electric, ainsi que l’augmentation de sa participation au capital d’Engie.

C’est là une question de souveraineté industrielle très importante et, dans le cadre de la planification écologique, si nous ne nous donnons pas les moyens industriels de maîtriser nos outils de production, nous irons droit dans le mur. Je rappelle que Total emploie 37 000 personnes en France. Des désaccords se sont fait jour entre actionnaires majoritaires et minoritaires à propos de certains projets de forage et la participation de l’État permettrait donc aussi d’entrer dans ce débat. Vous connaissez par ailleurs très bien l’historique de General Electric, qui emploie 13 000 salariés en France. Quant à Engie, dont l’État est déjà actionnaire, nous proposons d’augmenter sa part, pour un coût que nous estimons à 1,9 milliard d’euros pour les finances publiques.

D’une manière générale, nous considérons qu’en matière d’énergie, notamment du point de vue industriel, la souveraineté de l’État est une donnée majeure et qu’il nous faut donc prendre des mesures en vue de la maîtrise de notre outil industriel et de la création potentielle de milliers d’emplois dans ces différents groupes. Nous appelons le Gouvernement à lever le gage.

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Je souscris à plusieurs de vos constats. La transition énergétique reste en effet largement pilotée par le secteur privé sur le marché de l’énergie, avec une recherche de rentabilité qui peut déterminer la localisation de projets d’énergies renouvelables que nous regrettons parfois et qui sont le fruit d’un travail de lobbying qui s’exerce sur les territoires. La participation citoyenne doit elle aussi être renforcée pour une meilleure acceptabilité sociale des projets, ce qui est parfois antinomique avec les enjeux économiques.

La France est en retard par rapport à ses objectifs de consommation finale d’énergies non renouvelables. Je suis donc également sensible aux arguments relatifs à la souveraineté énergétique, au renforcement du rôle de l’État dans la planification écologique et à la volonté d’adopter davantage une approche de responsabilité environnementale et sociale. Ce débat philosophique est plutôt intéressant. En revanche, je m’interroge sur la fiabilité des chiffres que vous avancez. La mesure proposée est-elle réalisable ? Seriez-vous plutôt favorable, pour des raisons d’efficacité, à des investissements directs de l’État pour les montants annoncés ?

Je propose que nous travaillions davantage sur cette question pour préciser les chiffres, avant de prononcer une autre issue à l’amendement, qui est, pour l’heure, un avis de sagesse.

Mme Clémence Guetté (LFI-NUPES). Nous avons repris les chiffres de l’Agence des participations de l’État. Compte tenu de votre avis de sagesse et du fait que plusieurs groupes peuvent être réceptifs à cette idée, ce pourrait être l’occasion pour notre commission d’envoyer un signal positif pour montrer que la question écologique ne doit pas être décorrélée de la question industrielle – bien au contraire, car les enjeux sont intrinsèquement liés.

Par ailleurs, j’ai peu d’espoir que le recours au 49.3 nous laisse le temps d’aborder ces questions dans le cadre de l’examen du PLF dans l’hémicycle, si bien qu’il faudra cranter de nombreux points durant le débat en commission, c’est-à-dire maintenant.

La commission rejette l’amendement.

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III.   Réunion du Mercredi 18 octobre 2023 après-midi

Lors de sa réunion du mercredi 18 octobre 2023 après-midi, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a poursuivi l’examen des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

Article 35 et État B (suite) : Crédits du budget général

Amendement II-CD106 de Mme Clémence Guetté

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). L’amendement vise à créer un fonds de sauvegarde et de développement de l’industrie éolienne, piloté par la Banque publique d’investissement, BPIFrance.

L’erreur stratégique qui avait conduit à la délocalisation des usines photovoltaïques européennes au cours des années 2000 et 2010 ne doit pas se répéter. La souveraineté industrielle est un enjeu clé de cette filière : les pouvoirs publics doivent tout mettre en œuvre pour protéger et développer l’outil de production des systèmes éoliens au service de l’emploi local. La Banque publique d’investissement constitue déjà un acteur déterminant de l’actionnariat de la filière de l’assemblage des systèmes éoliens : le fonds de sauvegarde et de développement de l’industrie éolienne doit permettre de renforcer son poids auprès des entreprises du secteur. Il s’agit d’intensifier le soutien public à l’éolien et de développer la capacité des pouvoirs publics à planifier son développement.

Tel est l’objet de l’amendement, pour lequel nous invitons le Gouvernement à lever le gage.

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis (Transition énergétique). Je partage l’idée que nous devons soutenir les industries éoliennes et photovoltaïques, ainsi que les énergies marines renouvelables, afin de disposer de meilleures capacités de production en Europe pour ces secteurs stratégiques. La Banque publique d’investissement intervient déjà dans le financement et l’accompagnement de ces secteurs.

Est-il toutefois question de nationaliser ces filières ou d’aider au développement des énergies renouvelables par des aides publiques renforcées ? Il me semble que l’État joue davantage un rôle de pilote que d’investisseur. Le marché de l’éolien terrestre a déjà atteint sa rentabilité. La question est maintenant de canaliser les investissements pour le rendre acceptable dans les territoires.

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). L’amendement vise à ce que l’État joue tout son rôle dans le développement des filières industrielles, si nécessaires à la transition énergétique que nous souhaitons.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD107 de Mme Clémence Guetté

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). Là encore, nous proposons de créer un fonds de sauvegarde et de développement, piloté par la Banque publique d’investissement, cette fois pour l’industrie photovoltaïque.

En 2018, le dumping social international a conduit à la délocalisation en Asie de l’assemblage de modules photovoltaïques de l’entreprise iséroise Photowatt : la France a alors perdu sa souveraineté industrielle sur la filière photovoltaïque. Les pouvoirs publics doivent tout mettre en œuvre pour sauvegarder et développer l’outil industriel existant, notamment Photowatt, au service de la souveraineté énergétique nationale.

Comme pour l’éolien, la Banque publique d’investissement est déjà un financeur de la recherche et développement dans le secteur de l’énergie photovoltaïque. Le fonds de sauvegarde et de développement doit permettre de renforcer la capacité de BPIFrance à investir dans les entreprises innovantes du secteur, et aux pouvoirs publics, de développer leur capacité à planifier son développement.

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Mêmes arguments que pour l’amendement précédent. On peut se poser des questions sur la nécessité de renforcer l’investissement public dans la filière photovoltaïque quand les investissements privés sont déjà au rendez-vous. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD108 de Mme Clémence Guetté

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). Cet amendement vise à créer un fonds des énergies marines renouvelables, piloté par l’Ademe, l’Agence de la transition écologique. Ces énergies recouvrent l’énergie marémotrice – énergie des marées –, l’énergie hydrolienne – énergie des courants marins –, l’énergie houlomotrice – énergie des vagues –, l’énergie thermique et l’énergie osmotique utilisant le gradient de salinité à l’embouchure des fleuves. La souveraineté industrielle est un enjeu clé de cette filière émergente prometteuse, compte tenu de notre grand territoire marin. Notre pays ne peut laisser se répéter pour les énergies sous-marines l’erreur stratégique qui avait conduit à la délocalisation des usines photovoltaïques européennes au cours des années 2000 et 2010. Dans la compétition internationale, les pouvoirs publics doivent tout mettre en œuvre pour protéger et développer l’outil de recherche et développement et de production des systèmes d’énergies sous-marines, notamment des hydroliennes, au service de l’emploi local et de la souveraineté énergétique nationale.

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Nous partageons cette philosophie, pour un secteur moins mature que l’éolien terrestre. La vraie question sera de déterminer si EDF atteindra son seuil de rentabilité et pourra couvrir ses investissements. Pour le parc prévu en Normandie, il est par exemple question que le prix d’achat de l’électricité soit fixé à 45 euros le mégawattheure. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD116 de Mme Alma Dufour

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). Cet amendement a pour objet d’abonder le fonds vert de 3 milliards d’euros, afin de soutenir les collectivités face à la crise énergétique et à la nécessaire planification écologique.

Les collectivités ont besoin de visibilité concernant leurs capacités financières, pour un temps long, afin de s’engager dans les actions incontournables pour faire face à l’urgence climatique et sociale. L’État doit garantir une stabilité pour les collectivités : annoncer à 3 400 communes et intercommunalités qu’elles devront rembourser une partie des aides versées par l’État au titre du « filet de sécurité » n’aide pas à la stabilité de leurs prévisions.

Nous ne rejetons pas le fonds vert mais pointons son insuffisance – selon l’Institut de l’économie pour le climat (I4CE), les besoins réels pour la transition dans les territoires s’élèvent à 7,5 milliards d’euros par an pour le bloc communal et à 10 milliards d’euros pour l’ensemble des collectivités.

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Je partage votre avis sur l’insuffisance du fonds vert, même s’il doit être abondé de 500 millions d’euros, notamment pour les écoles. Un abondement de 3 milliards me semble toutefois trop élevé.

Nous avons déjà parlé du rôle des collectivités dans la dynamique que l’on peut créer en matière de rénovation thermique : elles seront nécessaires pour développer des logiques de rénovation par quartier, qui inclurait des bâtiments publics.

Je vous suggère de retirer votre amendement au profit de l’amendement II‑CD115, qui vise à augmenter les crédits du fonds vert de 2 milliards d’euros ; à défaut, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD115 de Mme Clémence Guetté

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). Cet amendement tend à faire du fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires un véritable fonds de planification écologique territoriale grâce à l’augmentation des crédits alloués. La transition écologique nécessite des investissements locaux très importants, que les collectivités locales peinent à supporter alors qu’avec la crise de l’énergie, elles sont touchées de plein fouet par la hausse de leurs dépenses de fonctionnement, notamment celles liées à la rénovation thermique du patrimoine bâti – équipements scolaires et sportifs, par exemple. Elle nécessite également une ingénierie territoriale et des capacités techniques opérationnelles dont les collectivités territoriales disposent très inégalement selon leur taille.

L’enquête prospective sur les emplois, menée par France Stratégie en 2022, montre par ailleurs que la transition écologique constitue l’un des principaux viviers d’emplois pour les prochaines décennies. D’ici à 2030, les besoins en emplois seront particulièrement importants dans le bâtiment, avec l’augmentation du volume de rénovations thermiques du bâti, dans l’agriculture, dans la recherche et développement, ainsi que dans les activités juridiques.

Il importe de garantir un vrai fonds de planification écologique car le fonds vert prévu par le Gouvernement est crédité de sommes trop faibles pour satisfaire tous les besoins liés à la transition écologique. Nous proposons de l’abonder de 2 milliards d’euros, transférés d’autres budgets. Nous invitons là encore le Gouvernement à lever le gage.

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Avis favorable, eu égard aux difficultés que les collectivités territoriales rencontrent pour payer leurs charges de fonctionnement – certaines ont pris la décision de couper l’éclairage dans les bâtiments publics. Le besoin d’investir est grand : il faut créer une dynamique des collectivités pour accélérer la rénovation globale et performante, par quartier.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD93 de Mme Anne Stambach-Terrenoir

M. Gabriel Amard (LFI-NUPES). Par cet amendement, nous souhaitons lancer un véritable plan de rénovation globale des passoires et bouilloires thermiques. Au rythme actuel de MaPrimeRénov’, il faudrait quelques millénaires pour espérer avoir réglé le problème, alors que la question du changement climatique se pose maintenant.

Nous ne souscrivons pas au dispositif actuel de subventions, dont le reste à charge pour nos concitoyens est monumental, notamment dans le patrimoine particulier bâti. C’est pourquoi nous proposons d’abonder de 12 milliards d’euros le dispositif existant – bien que cette somme soit élevée, il s’agit pourtant d’un amendement de repli par rapport à l’ambition que nous nous sommes fixée. Nous demanderons au Gouvernement de lever le gage, le moment venu.

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Je partage la nécessité d’accélérer massivement la rénovation énergétique. Le budget prévu pour le projet de loi de finances (PLF) pour 2024 est très en deçà de celui qui serait nécessaire pour atteindre les objectifs. Le Haut Conseil pour le climat, notamment, prévoit que 370 000 rénovations devraient être réalisées à partir de 2022, et 700 000 dès 2030, quand 65 000 logements environ font aujourd’hui l’objet d’une rénovation globale. La marche est haute, et des moyens sont nécessaires. La crise énergétique actuelle renforce la nécessité d’accélérer la transition écologique, puisque le secteur du bâtiment représente 44 % des énergies consommées et 18 % des émissions de gaz à effet de serre.

Toutefois, quand bien même votre amendement serait adopté par notre commission, je doute fort qu’il survive au 49.3. C’est pourquoi je vous propose de le retirer au profit des amendements, certes moins ambitieux mais plus réalistes, que j’ai déposés.

M. Gabriel Amard (LFI-NUPES). Je maintiens l’amendement : rénover 25 millions de bâtiments hors logements sociaux représente 1 000 milliards d’euros de dépenses. L’enjeu auquel nous sommes confrontés mérite une exigence accrue. Pour nos concitoyens, le reste à charge de ces rénovations reste un mur indépassable. Plus un amendement abondera les mécanismes de subventions financés par les crédits inscrits à l’état B, plus nous y serons favorables, mais nous serons également attentifs à toute proposition plus modeste qui irait dans le bon sens.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD188 de M. Stéphane Delautrette

M. Gérard Leseul (SOC). Cet amendement de mon collègue Stéphane Delautrette vise à doubler le montant des aides à la rénovation énergétique du patrimoine des collectivités, et à rendre accessibles ces fonds supplémentaires par l’intermédiaire du fonds pour l’accélération de la transition écologique des territoires, en complément de l’enveloppe déjà prévue et des autres financements disponibles, par exemple la DSIL, la dotation de soutien à l’investissement local.

La rénovation du patrimoine public doit être placée au rang des enjeux majeurs à court terme pour réussir la transition écologique. Celle-ci n’est possible qu’avec une aide renforcée. C’est pourquoi vous avez émis un avis favorable pour un amendement à 2 milliards d’euros. J’espère un avis très favorable pour cet amendement à 1 milliard d’euros.

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Je partage l’intérêt de sauvegarder notre patrimoine. Le rapport de Jean Pisani-Ferry et Selma Mahfouz souligne la nécessité d’un plan ambitieux de rénovation des bâtiments publics, compatible avec la directive « efficacité énergétique » aux termes de laquelle les États membres sont tenus de rénover chaque année au moins 3 % de la surface totale au sol des bâtiments appartenant à des organismes publics. Ces rénovations de grande ampleur demandent des investissements considérables, qui peuvent être financés par la DSIL ou le FSIL – fonds de soutien à l’investissement local. La seule différence est que l’on n’utilise pas les crédits du fonds vert. Avis favorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD163 de Mme Aude Luquet

Mme Aude Luquet (Dem). Cet amendement a pour ambition de soutenir le déploiement d’un label « Villes à haute performance énergétique » sur le modèle du label « Villes fleuries », afin de mettre en valeur les villes vertueuses et d’entraîner une dynamique positive pour celles qui s’investissent ou souhaiteraient s’investir pleinement dans la transition écologique et énergétique. Un comité d’experts en définirait les critères ; 200 000 euros viendraient amorcer sa création.

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. L’amendement abonde le fonds vert de 200 000 euros pour créer un label « Villes à haute performance énergétique ». L’idée paraît intéressante : un tel label pourrait encourager les villes à améliorer la performance énergétique, en créant une dynamique positive. Toutefois, il ne faudrait pas qu’il favorise les communes qui ont déjà des facilités financières à investir pour la transition énergétique, au détriment de celles qui doivent être davantage soutenues. Pour cette raison, je donne un avis de sagesse.

La commission adopte l’amendement.

Amendements II-CD213 et II-CD210 de M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis, amendement IICD66 de Mme Nathalie Bassire (discussion commune)

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Nous avons déjà évoqué l’amendement II-CD213, qui vise à augmenter de 1 milliard d’euros les crédits consacrés au dispositif d’aide MaPrimeRénov’. Les crédits actuels ne sont pas à la hauteur de l’enjeu d’accélération de la transition écologique, qui suppose une véritable massification des aides. Selon le Haut Conseil pour le climat, il conviendrait de réaliser 370 000 rénovations globales par an à compter de 2022 et 700 000, dès 2030. Or le nombre de rénovations stagne, à 65 000.

Les rénovations globales et performantes sont plus coûteuses et supposent une massification des aides pour réduire le reste à charge et lever les obstacles financiers que rencontrent les ménages les plus modestes. Dans une logique de rénovation globale, l’assiette des travaux augmente, donc le reste à charge.

L’amendement II-CD210, de repli, prévoit 700 millions d’euros pour le dispositif MaPrimeRénov’. Le Gouvernement avait annoncé une hausse du budget de MaPrimeRénov’ de 1,6 milliard d’euros en 2024. Pourtant, si l’on additionne les crédits budgétaires supplémentaires consacrés aux dispositifs prévus par le programme 174 Énergie, climat et après-mines, le programme 135 Cohésion des territoires, et le programme 362 Plan de relance, la hausse n’est que de 916 millions d’euros en autorisations d’engagement. Le Gouvernement a évoqué des recettes de quotas carbone de 700 millions d’euros : en aucun cas il ne s’agit d’argent supplémentaire. L’amendement vise donc à rendre le niveau de crédits consacrés à MaPrimeRénov cohérent avec les objectifs annoncés.

Mme Nathalie Bassire (LIOT). Je retire mon amendement II-CD66 au profit de l’amendement II-CD210.

L’amendement II-CD66 est retiré.

La commission rejette successivement les amendements II-CD213 et II-CD210.

Amendements identiques II-CD95 de Mme Anne Stambach-Terrenoir et IICD184de M. Stéphane Delautrette

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). L’amendement II-CD95 a pour objectif de lutter contre les passoires thermiques, les logements classés F ou G, grâce à des aides à la rénovation ciblées sur les propriétaires bailleurs privés les plus modestes. Les aides seraient versées par un mécanisme de primes supplémentaires attribuées par l’Agence nationale de l’habitat (Anah) pour que les ménages modestes puissent rénover leur logement de manière performante. Il y a urgence à avancer, eu égard au changement climatique et à la situation sociale des familles.

M. Gérard Leseul (SOC). L’amendement II-CD184 a pour objectif de rendre opérationnelle l’interdiction de location des passoires thermiques.

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Je comprends la philosophie de ces amendements qui visent à cibler des aides sur les propriétaires bailleurs, en raison de l’interdiction progressive de la location des passoires thermiques. Je vous rejoins sur le principe : il faut trouver une solution financière pour accélérer ces rénovations thermiques et éviter la réduction de l’offre disponible pour les locataires.

Les amendements semblent cependant poser un problème d’équité entre les propriétaires bailleurs et les propriétaires occupants. Dans mon rapport, je propose une réforme du prêt avance mutation, qui serait accessible à tous les propriétaires, bailleurs et occupants. Avis de sagesse.

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). Il ne s’agit pas d’opposer les propriétaires occupants et les bailleurs. Nous avons proposé certains amendements qui ciblent les passoires thermiques – elles représentent 60 % de l’habitat dans mon département. Ces amendements visent les bailleurs, pour aller plus loin, augmenter les moyens de MaPrimeRénov’ et fournir des outils adaptés.

La commission rejette les amendements.

Amendement II-CD186 de M. Stéphane Delautrette

M. Gérard Leseul (SOC). Cet amendement vise à financer le service public de la rénovation de l’habitat, incarné notamment par l’ensemble des espaces conseil France Rénov’, à hauteur de 270 000 euros. Le financement devrait abonder l’Anah, chargée de ce service.

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Avis favorable. Une révolution des espaces France Rénov’ est en cours – les accompagnateurs France Rénov’ y prennent une place essentielle. Il faut financer ces espaces pour rassurer le marché et les porteurs de projet. Ce financement s’effectuait auparavant par le programme Sare – service d’accompagnement pour la rénovation énergétique – par le biais des certificats d’économies d’énergie (CEE), avec les collectivités comme partenaires. Ces 270 millions seraient bienvenus.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD185 de M. Stéphane Delautrette et II-CD96 de M. Matthias Tavel (discussion commune)

M. Sylvain Carrière (LFI-NUPES). L’amendement II-CD96, d’appel, vise à dénoncer les manquements du dispositif MaPrimeRénov’. Le Gouvernement en fait un axe majeur de ses budgets, mais l’absence de planification et d’investissement massif dans la rénovation thermique des logements ne permet pas d’atteindre les objectifs et place des millions de Françaises et de Français dans une situation invivable. Selon l’Observatoire national de la rénovation énergétique, une résidence principale sur six est considérée comme une passoire thermique.

MaPrimeRénov’ n’est plus destinée en priorité aux ménages les plus modestes. Le coût des rénovations thermiques globales est par ailleurs prohibitif pour de nombreux foyers. Enfin, le dispositif est majoritairement utilisé pour des travaux simples. Nous proposons de financer davantage les rénovations globales et performantes, tout en amorçant l’arrêt progressif des financements pour les gestes d’isolation.

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Je partage la nécessité de financer davantage les rénovations globales et performantes. Le budget va d’ailleurs dans le bon sens, avec les piliers « performance » et « efficacité ». Les politiques de rénovation ne doivent pas se limiter à des gestes simples de changement de chaudières – on a vu des situations scandaleuses, où l’on changeait les chaudières sans se préoccuper de l’enveloppe. Or les enjeux de sobriété ne doivent pas faire oublier la décarbonation.

Cependant, vous supprimez progressivement la logique de rénovation par gestes, pour des logements qui s’approchent du label bâtiment basse consommation (BBC). De plus, un ménage dont la chaudière tombe en panne a tout de même besoin d’être aidé pour la remplacer rapidement. En conséquence, je vous demande de retirer les amendements.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement II-CD168 de Mme Marie Pochon

M. Nicolas Thierry (Écolo-NUPES). Cet amendement, issu du rapport dit « Firéno » – Financer la rénovation énergétique performante des logements – publié par l’Ademe, vise à augmenter le budget de l’Anah de 545 millions d’euros afin de financer une évolution de l’aide MaPrimeRénov’ Copropriété, qui permet de financer les travaux de rénovation énergétique sur les parties communes des copropriétés. Cette évolution consiste à conditionner l’obtention de l’aide à la réalisation d’une rénovation performante, conformément à la définition légale, en atteignant les classes A ou B du DPE – diagnostic de performance énergétique – ou à l’achèvement de tous les travaux réalisables sur les parties communes des bâtiments, en traitant les six postes de travaux mentionnés dans la loi. Il s’agit aussi de rehausser significativement le bonus BBC, en le multipliant par dix, pour que la réalisation d’une rénovation performante devienne réellement incitative.

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Je partage cette philosophie. Les aides MaPrimeRénov’ font l’objet d’une réforme d’ampleur en 2024, pour être restructurées autour d’un parcours « efficacité » et d’un parcours « performance », qui vise les rénovations globales. Selon l’Anah, les modalités exactes de la réforme sont encore en cours de définition et seront détaillées prochainement par le Gouvernement. L’aide MaPrimeRénov’ Copropriété devrait être intégrée au pilier « performance ». Le montant de l’aide dépendra des rénovations, sans que l’on en connaisse précisément les contours, notamment pour les copropriétés.

Je partage votre volonté d’augmenter le plafond des travaux subventionnés, de relever le bonus BBC et de bonifier l’aide pour les ménages à revenus modestes. Toutefois, cette aide devant être refondue en 2024, l’amendement paraît inopérant. Demande de retrait.

M. Stéphane Delautrette (SOC). J’entends beaucoup de conditionnels dans les explications du rapporteur pour avis. Certes, nous partageons les objectifs du Gouvernement, mais nous sommes suspendus à des éléments qui se traduiraient, éventuellement, par des évolutions à venir, dont on ne sait pas comment elles se matérialiseront. Le récent rapport de la mission d’information commune sur la rénovation énergétique des bâtiments a mis en évidence la nécessité d’accélérer les choses. C’est le sens de tous les amendements qui viennent d’être présentés.

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Tout le monde partage la volonté d’aller vers une rénovation globale et performante, ainsi que le principe des deux piliers. Dans le détail, de nombreuses inconnues subsistent. Nous l’avons rappelé, le budget contient des incertitudes, s’agissant notamment des autorisations d’engagement fléchées sur MaPrimeRénov’. Nous attendons des explications du Gouvernement sur cette question ainsi que des précisions sur le contour des aides, pour offrir de la lisibilité aux acteurs.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD97 de M. William Martinet

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). Nous souhaitons augmenter le budget de MaPrimeRénov’ Sérénité de 250 millions d’euros – selon une proposition de la Fondation Abbé Pierre que nous avions déjà défendue l’an dernier. Nous soutenons, en effet, ce dispositif destiné aux ménages modestes et très modestes, dont le montant d’aide varie en fonction des ressources et qui présente aussi l’avantage de concerner les rénovations permettant de réaliser un gain énergétique d’au moins 35 %. Douze millions de personnes vivent actuellement dans une situation de précarité énergétique : elles ont passé l’été dernier dans de véritables bouilloires thermiques et elles auront froid cet hiver. Or le coût des rénovations thermiques globales est prohibitif pour de nombreux foyers, et la Cour des comptes a conclu dans son audit flash du 30 septembre 2021 que les aides de MaPrimeRénov’ ne visaient pas prioritairement à réduire la précarité énergétique des propriétaires très modestes, mais à soutenir plus largement la rénovation énergétique. Le dispositif MaPrimeRénov’ Sérénité, quant à lui, est prévu pour les ménages modestes et très modestes. C’est pourquoi nous proposons de renforcer ses crédits.

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Je partage votre position sur de nombreux points. Le montant du chèque énergie me paraît très bas, de même que le plafond de revenu – j’ai donc proposé, par amendement, d’essayer d’améliorer ce dispositif. Pour votre part, vous demandez quasiment une multiplication par trois des crédits qui lui sont consacrés. Il me semble qu’il est préférable de mieux répartir les moyens supplémentaires entre le chèque énergie, qui a une vocation purement sociale, même s’il permet aussi d’investir, et les aides à la rénovation des logements, qui s’inscrivent dans une dimension plus durable et visent notamment à aider les familles modestes à sortir rapidement de la précarité énergétique, donc à ne plus avoir à demander des chèques énergie.

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). Vous l’avez dit vous-même : cet amendement concerne une mesure qui s’inscrit dans le long terme puisqu’elle aide à sortir de la précarité de manière durable. En matière d’urgence sociale, je fais confiance à la Fondation Abbé Pierre.

La commission rejette l’amendement.

À la demande du rapporteur pour avis, l’amendement II-CD33 de M. Hubert Wulfranc est retiré.

Amendement II-CD211 de M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Voici mon amendement visant à élargir l’assiette des bénéficiaires du chèque énergie et à augmenter son montant. Le plafond de revenu s’élève à 11 000 euros par an, ce qui exclut nombre de ménages aux revenus modestes qui sont confrontés à des difficultés financières pour chauffer leur logement. Selon la Cour des comptes, 25 % des 3,7 millions de ménages en situation de précarité énergétique ne bénéficient pas du chèque énergie. Nous voyons tous dans nos circonscriptions, par exemple quand on va acheter de l’essence, que les fins de mois sont vraiment difficiles – beaucoup ne font plus le plein. Il faudrait donc que le chèque énergie soit plus largement accessible aux travailleurs modestes et même, peut-être, aux classes moyennes.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD212 de M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. J’espère que vous me pardonnerez de faire un peu de localisme – je sais que tout le monde est solidaire avec les gens du Nord. Comme il y fait un peu plus froid que dans le Sud, les factures de chauffage sont plus élevées : l’écart est d’à peu près 500 euros par an, ce qui n’est pas rien pour les ménages.

C’est pourquoi je propose de moduler le montant du chèque énergie, qui sert à améliorer le reste à vivre une fois les factures d’énergie payées, en utilisant le système du coefficient climatique prévu dans le cadre de la réglementation thermique RT 2012 en matière de construction. Dans les Hauts-de-France, par exemple, où le coefficient est de 1,3, on ne toucherait pas un chèque énergie de 200 euros, mais de 260 euros, ce qui paraît légitime.

Dans le cadre des tarifs sociaux de l’énergie, l’aide dépendait en fin de compte de la consommation. Désormais, elle ne dépend que de la composition du ménage et de ses revenus. Mon amendement permettrait de rétablir un lien avec la consommation et de rétablir un peu de justice entre les gens du Nord et ceux du Sud.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD176 de M. Gérard Leseul

M. Gérard Leseul (SOC). Cet amendement est issu de l’excellent rapport de la mission flash sur les mesures d’accompagnement de la création des ZFE – zones à faibles émissions –, dont j’étais le rapporteur avec M. Millienne. L’une de nos conclusions était qu’il fallait renforcer, élargir et en même temps mieux cibler les aides à l’acquisition de véhicules moins émetteurs de gaz à effet de serre, dans un objectif de justice sociale. Cette idée a ensuite été reprise dans une proposition de loi.

L’absence de conditions de ressources, ou leur insuffisance, pour les aides à l’acquisition d’un véhicule moins polluant ne semble pas pertinente, d’autant que la prime à la conversion doit devenir un dispositif à vocation sociale. Il faut recentrer les aides sur les personnes qui en ont le plus besoin, au lieu de les faire fonctionner à guichet ouvert. Par ailleurs, il nous paraît très souhaitable d’élargir les types de véhicules concernés par les dispositifs de soutien, en fonction de l’offre des constructeurs, actuellement trop réduite, notamment pour l’entrée de gamme, et des calendriers d’interdiction.

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Nous avons la même ambition d’aider un peu plus les gens les plus modestes. Cet amendement, qui tend à abonder de 500 millions d’euros le programme 174, vise ainsi à élargir le champ des véhicules éligibles à la prime à la conversion à ceux d’occasion relevant de la catégorie Crit’Air 2 – voitures essence Euro 4 et voitures diesel Euro 5 et 6. Cette prime est actuellement limitée aux véhicules propres ou peu émetteurs, de type Crit’Air 1.

Je suis très sensible – donc favorable – à cet amendement qui peut servir à répondre à une question liée à la mise en place des ZFE et qui appelle le Gouvernement à revoir les dispositions réglementaires pour mieux cibler les aides, la prime à reconversion et le bonus écologique sur les ménages les plus modestes.

M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis (Politiques de développement durable). Je suis également très sensible à cet amendement grâce auquel la prime pourra enfin être élargie aux véhicules Crit’Air 2 d’occasion. Cela permettra non seulement de réduire les coûts pour le budget de l’État, mais aussi de miser sur un renouvellement naturel, qui sera un peu accéléré, du parc automobile. Du point de vue de l’amélioration de la qualité de l’air, c’est tout à fait positif. Même si le dispositif des ZFE reste parfaitement antisocial et abscons, merci pour cet amendement de bon sens, que je vous invite tous à adopter.

M. Vincent Thiébaut (HOR). « Antisocial » : vous perdez votre sang-froid !

Par ailleurs, je rappelle qu’un dispositif – la prime à la conversion – est déjà applicable aux voitures d’occasion Crit’Air 2, depuis la loi de finances pour 2018.

M. Damien Adam (RE). Pour ce qui est du bonus écologique, les ménages les plus modestes ont droit à 7 000 euros, et non 5 000, pour l’acquisition d’un véhicule électrique. En parallèle, des offres à des prix très accessibles voient de plus en plus le jour. Citroën a ainsi annoncé hier le lancement de la ë-C3, qui coûtera moins de 20 000 euros hors bonus, lequel permettra d’arriver au même prix que pour un véhicule thermique.

J’ajoute, avec un peu de malice, que M. Leseul appartient à un groupe politique qui dirige la métropole de Rouen, laquelle n’a pas du tout mis en œuvre, dans le territoire dont il est le député, l’aide qu’il propose. On demande donc à l’État ce qu’on n’est pas capable de faire à l’échelle locale… Si la mesure demandée était vraiment utile sur le plan écologique, elle serait peut-être appliquée au niveau local.

Pour ma part, je ne pense pas du tout que ce soit la bonne démarche : il faut orienter les ménages, notamment les plus modestes, vers l’acquisition des véhicules les plus propres possible, qui sont aussi, on le sait, ceux qui coûtent le moins cher au quotidien.

M. Gérard Leseul (SOC). Je n’ai pas voté le dispositif concernant la mise en place des ZFE. En revanche, à partir du moment où les collectivités locales sont obligées de l’appliquer, j’essaie d’apporter des améliorations. Vous avez, quant à vous, monsieur Adam, voté ce dispositif alors que vous dézinguez sa mise en place dans la métropole de Rouen. Je vous demande de faire preuve d’un peu de décence.

M. Damien Adam (RE). C’est le calendrier qui est en cause.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-CD73 de M. Damien Adam

M. Damien Adam (RE). Mon amendement, qui a deux roues, un petit moteur et une petite batterie, permettra aux Français d’aller au travail avec le sourire. La majorité présidentielle a une grande ambition pour le développement de l’usage du vélo. Nous avons fortement augmenté les moyens publics prévus en la matière, afin d’arriver, notamment, à 100 000 kilomètres de pistes cyclables en 2030, soit un doublement par rapport à aujourd’hui, et à 90 000 stationnements sécurisés dans les gares, ce qui représente une multiplication par quatre. Nous avons également instauré une aide à l’acquisition de vélos pour de nombreux Français. S’agissant des vélos à assistance électrique, une aide de 300 euros est prévue pour les personnes dont le revenu fiscal de référence (RFR) va jusqu’à 14 089 euros – cela correspond à un revenu réel inférieur à 1 314 euros par mois. Je propose de faire passer le seuil à 22 983 euros de RFR pour inclure une partie de la classe moyenne inférieure, jusqu’à 2 000 euros de revenu par mois.

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Votre amendement tend à abonder, à hauteur de 5 millions d’euros, l’action 03 Aides à l’acquisition de véhicules propres du programme 174. Le montant du bonus pour un vélo à assistance électrique, qui est de 40 % du coût d’acquisition, est actuellement plafonné à 400 euros pour les ménages dont le revenu fiscal de référence est inférieur ou égal à 6 358 euros, et le plafond est de 300 euros entre 6 358 euros et 14 089 euros de revenu fiscal de référence. Porter ce dernier plafond à 22 983 euros, comme vous le proposez, permettrait d’aider davantage de familles de travailleurs dans leur transition vers des moyens de transport décarbonés. Je donne un avis favorable à cette mesure plus que nécessaire.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-CD160 de Mme Pascale Boyer

Mme Huguette Tiegna (RE). Confrontées au double défi de la transition écologique et de l’accessibilité financière des mobilités, les collectivités territoriales doivent pouvoir être accompagnées dans la mise à disposition de solutions de mobilité décarbonées pour tous. Le présent amendement propose ainsi d’expérimenter, pendant trois ans, un dispositif financé par le fonds vert dans le cadre duquel les ménages mettant au rebut leur véhicule recevront des crédits pour l’utilisation de solutions de mobilité partagées alternatives : location, de courte durée ou en autopartage, de véhicules peu émetteurs de gaz à effet de serre – électriques, à hydrogène, hybrides rechargeables, Crit’Air 1 ou Crit’Air 2 – et produits au sein de l’Union européenne, covoiturage, scooters électriques, trottinettes, etc. Ces crédits, allant de 3 000 à 4 500 euros, se matérialiseraient sous la forme d’une carte de paiement, physique ou électronique.

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Je trouve cette proposition formidable : elle permettra vraiment d’apporter une réponse aux difficultés qu’on peut rencontrer pour passer d’un véhicule polluant à un véhicule propre. La mise au rebut d’un véhicule polluant donnera des crédits qui pourront servir à financer d’autres solutions de mobilité – location de courte durée de véhicules peu émetteurs, autopartage ou encore usage des transports en commun. Avis très favorable.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-CD161 de Mme Pascale Boyer

Mme Danielle Brulebois (RE). Par cet amendement je propose, de la même façon, une expérimentation d’une durée de trois ans dans les agglomérations concernées par la mise en place des ZFE. Nous pourrons ainsi apporter une réponse aux défis de la transition écologique dans les transports, en particulier pour les ménages les plus modestes.

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Nous venons d’adopter un amendement similaire. Le retrait du vôtre me semblerait d’autant plus bienvenu que vous ne feriez que transférer un euro d’une ligne budgétaire à une autre.

L’amendement est retiré.

Amendements II-CD32 de M. Hubert Wulfranc et II-CD57 de M. Thomas Portes (discussion commune)

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Ces amendements proposent la création d’une garantie de l’État, à hauteur de 75 %, pour le prêt à taux zéro mobilité. Une expérimentation de deux ans de ce prêt à taux zéro a été lancée le 1er°janvier 2023 dans les zones à faibles émissions mobilité. D’après la direction générale de l’énergie et du climat, la mise en place réglementaire du dispositif est intervenue de manière effective le 12 juin 2023 avec la publication des derniers arrêtés. Nous n’avons donc pas beaucoup de recul.

Je suis favorable à la mise en place d’une garantie d’État qui faciliterait l’accès au prêt à taux zéro, la solution alternative étant actuellement de se tourner vers le microcrédit. Je tiens néanmoins à souligner le risque d’un effet pervers pour les ménages modestes en matière de solvabilité : il faudra peut-être travailler sur ce point dans le cadre d’une expérimentation plus longue.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement II-CD52 de M. Sylvain Carrière

M. Gabriel Amard (LFI-NUPES). Nous proposons d’abonder, à hauteur de 140 millions d’euros, une nouvelle ligne budgétaire Prime à la mobilité durable, qui vise à favoriser et à accélérer la conversion au vélo électrique en réduisant le reste à charge pour nos concitoyens. Nombre de collectivités se sont mobilisées dans ce domaine, mais cela crée des disparités territoriales. L’État pourrait contribuer à une harmonisation des dispositifs afin de réduire les inégalités d’accès aux aides.

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Votre amendement tend à encourager l’utilisation de la prime à la conversion en faveur du vélo électrique en créant un programme spécifique, doté de 140 millions d’euros. Vous proposez également de porter le plancher de la prime à 2 500 euros, c’est-à-dire à la hauteur de ce qui est prévu pour l’achat d’un véhicule électrique ou moins polluant. Or, depuis août 2022, le montant de la prime à la conversion pour les vélos à assistance électrique a été porté à 3 000 euros dans le cas des ménages relevant des deux premiers déciles de revenu et dans le cas des personnes en situation de handicap. Pour les ménages les plus modestes, l’aide actuelle dépasse déjà ce que vous demandez. Par ailleurs, la prime à la conversion est incluse dans l’action 03 Aides à l’acquisition de véhicules propres du programme 174. Pour des raisons de lisibilité budgétaire, il ne me semble pas judicieux de créer un nouveau programme dédié au vélo. Par conséquent, demande de retrait ; sinon, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD31 de M. Hubert Wulfranc

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à nous alerter sur la nécessité de mieux calibrer le dispositif de la prime à la conversion. Il nous est proposé de porter le plafond de la prime à 6 000 euros pour les ménages dont le revenu fiscal de référence se situe entre 6 358 et 14 089 euros.

À l’heure actuelle, le plafond est de 2 500 euros pour ces ménages – exception faite des « gros rouleurs » – en cas d’acquisition de voitures utilisant l’électricité ou l’hydrogène ou une combinaison des deux. Pour les véhicules Crit’Air 1, la prime peut monter jusqu’à 4 000 euros sous conditions de ressources et de distance domicile-travail, ou sinon jusqu’à 1 500 euros.

Avis favorable à cet amendement qui va dans le bon sens pour les ménages modestes.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD64 de M. Sylvain Carrière

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). La révision du barème de la prime à la conversion que nous demandons vise à assurer plus de justice sociale en aidant davantage les ménages les plus pauvres et un peu moins ceux qui ont le plus de moyens. Nous favoriserons ainsi une conversion effective vers des véhicules fonctionnels qui permettront de se déplacer dans les futures ZFE.

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Avis favorable à votre proposition d’une superprime à la conversion de 2 000 euros.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-CD156 de Mme Pascale Boyer

Mme Danielle Brulebois (RE). Le Gouvernement a déjà pris des mesures pour renforcer les incitations financières en faveur du rétrofit, mais il convient d’aller plus loin sur ce plan. Le rétrofit permet de donner une seconde vie, plus vertueuse, à des véhicules au lieu de les mettre au rebut – c’est vraiment de l’économie circulaire – et il abaisse le coût d’entrée dans l’électromobilité. Nous proposons d’aligner la prime au rétrofit sur le bonus et la prime à la conversion – il existe actuellement une différence assez importante – et de rendre éligibles tous les types de véhicules, y compris ceux industriels et commerciaux.

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Le montant de la prime au rétrofit est actuellement de 80 % du coût de la transformation, dans la limite de 6 000 euros lorsque le revenu fiscal de référence est inférieur ou égal à 6 358 euros – ou à 14 089 euros pour les « gros rouleurs ». Sinon, la prime est de 2 500 euros. Le montant de la prime au rétrofit est déjà aligné sur celui de la prime à la conversion pour un véhicule électrique ou à hydrogène. Par conséquent, demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-CD181 de M. Stéphane Delautrette

M. Stéphane Delautrette (SOC). Notre amendement vise à permettre le financement du déploiement de bornes de recharge électrique chez les professionnels du stationnement. Il est inutile de rappeler que la France a du retard en la matière : il a fallu attendre mai 2023 pour atteindre l’objectif de 100 000 bornes fixé pour la fin 2021. La filière du stationnement a un rôle à jouer dans le déploiement des bornes de recharge, qui est une condition sine qua non pour le développement des véhicules électriques. Compte tenu du coût total des travaux nécessaires, nous demandons un soutien financier pour cette filière.

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Vous proposez de créer un nouveau programme doté de 120 millions d’euros pour financer le déploiement de bornes de recharge électrique chez les professionnels du stationnement. Je suis favorable à cet amendement qui permettra d’améliorer la présence de points de recharge sur le territoire, hors du domicile ou du lieu de travail des utilisateurs.

Je souligne au passage que recharger une voiture électrique peut coûter assez cher en dehors de chez soi et des heures creuses, ce qui constitue un frein. La régulation des tarifs, par exemple dans les grandes surfaces ou au bord des autoroutes, est aussi une question qui se pose.

M. Bruno Millienne, président. J’ajoute que les bornes de recharge gagneraient à être pilotables, mais je suis également favorable à l’amendement.

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). Notre groupe s’abstiendra : tout le monde n’est pas à égalité dans cette filière – elle compte certes des collectivités, mais aussi des sociétés qui réalisent d’importants bénéfices grâce à l’argent collecté sur le stationnement. Sans remettre en cause le développement des bornes de recharge, il nous semble que ce n’est pas nécessairement cette filière qu’il faut aider. S’agissant de Veolia, par exemple, je ne suis pas convaincue.

M. Bruno Millienne, président. Il est tout de même dommage que de tels raisonnements empêchent d’aller plus vite.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD39 de Mme Nathalie Bassire

Mme Nathalie Bassire (LIOT). Cet amendement d’appel vise à créer un programme spécifiquement dédié au leasing social afin de clarifier les crédits qui seront consacrés au nouveau dispositif prévu dans ce domaine. En effet, si les crédits de l’action Aides à l’acquisition de véhicules propres doivent augmenter de 15 %, les montants qui iront au bonus écologique, à la prime à la conversion et aux mesures pour le leasing social ne sont pas détaillés. Nous considérons que le Gouvernement doit clarifier l’impact financier et les contours du futur dispositif avant de demander au Parlement de valider les crédits qui lui seront alloués. Nous proposons, pour notre part, de flécher 500 millions d’euros vers un programme intitulé Leasing social, en prenant la même somme, pour garantir la recevabilité financière de l’amendement, sur l’action Aides à l’acquisition de véhicules propres.

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Je vous rejoins complètement en ce qui concerne la création d’un programme spécifique au leasing social, à savoir la location de véhicules électriques pour 100 euros par mois. Les crédits associés à l’action Aides à l’acquisition de véhicules propres n’ont pas été communiqués dans le cadre du projet annuel de performances, et la direction générale de l’énergie et du climat a indiqué début octobre que les discussions sur la répartition des montants étaient en cours. S’agissant du principe, avis favorable. J’ai toutefois un léger doute : un montant de 500 millions d’euros me paraît élevé.

M. Bruno Millienne, président. Si je peux compléter votre réponse, il est prévu que le premier loyer sera intégralement pris en charge grâce à l’aide de l’État, étant entendu que les véhicules concernés doivent bénéficier d’un doublement du bonus écologique.

L’amendement est retiré.

Amendement II-CD150 de M. Pierre Meurin

M. Pierre Meurin (RN). Cet amendement vise à supprimer 10 000 euros de l’action 05 Lutte contre le changement climatique et pour la qualité de l’air, car ils sont consacrés à des actions d’accompagnement pour le renforcement du déploiement des ZFE. Alors que le Gouvernement recule sur ce sujet, il convient de ne pas encourager la mise en place de ce dispositif qui est une véritable bombe sociale.

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis. Il existe aussi une bombe sanitaire : les polluants atmosphériques sont en effet à l’origine d’une surmortalité et d’une baisse de l’espérance de vie. En France, plus de 40 000 décès prématurés sont imputables chaque année aux particules fines et 7 000 décès aux oxydes d’azote. La France est par ailleurs visée par trois procédures contentieuses pour non-respect des objectifs européens de valeur limite pour le dioxyde d’azote et les particules PM10.

Les enjeux sanitaires sont tels que nous ne pouvons pas rester sans rien faire. Les ZFE constituent l’une des mesures d’amélioration de la qualité de l’air. Elles ne doivent toutefois pas devenir des zones interdites à ceux qui n’ont pas les moyens d’accéder à un véhicule propre.

M. Vincent Thiébaut (HOR). Le contrôle de la qualité de l’air joue un rôle essentiel dans le déclenchement des ZFE en cas de dépassement de seuils de pollution. Je ne comprends pas bien quel signal on veut envoyer en supprimant des crédits à cette action.

M. Pierre Meurin (RN). Toutes les activités humaines ont potentiellement des impacts sur la santé : le risque zéro n’existe pas. Ainsi, les centrales à charbon ont peut-être provoqué des cancers, mais elles ont aussi permis de ne plus mourir de froid.

M. le président Millienne nous avait annoncé, lors du débat sur les services express régionaux métropolitains, que la qualité de l’air s’améliorait dans les métropoles. Or cette bonne nouvelle était la conséquence non pas des ZFE – les métropoles ne les appliquent que de façon marginale – mais du renouvellement naturel du parc automobile. On ne peut pas engager des transformations sociétales par la contrainte. La ZFE, c’est la fausse bonne idée du siècle car elle est antisociale.

M. Bruno Millienne, président. Ma remarque, lors du débat sur les services express régionaux métropolitains, visait simplement à constater un changement de comportement des gens face à la menace de déclenchement d’une ZFE. Celle-ci n’étant mise en place que si les taux de pollution sont dépassés, les Français ont pris conscience qu’il y avait un vrai problème de pollution atmosphérique et un vrai danger pour leur santé.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD127 de Mme Anne Stambach-Terrenoir

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). Mon amendement a pour objet d’augmenter les crédits alloués à l’Office national des forêts (ONF) afin de créer 4 000 postes supplémentaires. En effet, sur les vingt dernières années, 38 % de ses effectifs ont été supprimés, avec pour conséquence une diminution de la qualité de la gestion forestière publique et un travail de plus en plus difficile pour les agents.

La création de 4 000 postes est adaptée aux circonstances climatiques actuelles. Elle permettra d’éviter de fortes dépenses en gestion de crise en cas d’incendie ou d’épidémie sanitaire. Nous proposons que le recrutement porte à 55 % sur des fonctionnaires et à 45 % sur des ouvriers forestiers.

M. Emmanuel Maquet, rapporteur pour avis (Paysages, eau et biodiversité). Les crédits de l’ONF sont principalement prévus dans la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales et non dans la présente mission. C’est donc sur cette mission qu’il faudrait déposer vos amendements.

Toutefois, le programme 113 contribue aussi au budget de l’ONF s’agissant des missions d’intérêt général dédiées à la biodiversité, en hausse de 2,5 millions d’euros en 2024. Par ailleurs, 3 millions d’euros supplémentaires seront ajoutés au titre de la SNB – stratégie nationale pour la biodiversité – 2030, ce qui représente 6 millions d’euros d’augmentation de crédits en 2024 au titre des missions en matière de biodiversité de l’ONF. De plus, 20 ETP – équivalents temps plein – supplémentaires sont créés sur cette mission de régénération des forêts, dans un contexte de changement climatique.

Après plusieurs années difficiles, la situation financière de l’ONF se redresse, notamment sous l’effet de l’augmentation des prix du bois qui améliore ses recettes commerciales. Même si sa dette demeure importante, elle a été réduite de 20 % en 2023, soit 60 millions d’euros. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD128 de M. Matthias Tavel

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). Cet amendement de repli vise à créer 2 000 postes supplémentaires à l’ONF. La prise de conscience de la nécessité de protéger la forêt est de plus en plus importante chez nos concitoyens et chez les élus locaux. Nous avons tout intérêt à renforcer les moyens de l’ONF pour mieux gérer la forêt au regard du changement climatique.

Suivant la préconisation du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD126 de M. Matthias Tavel

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). Cet amendement vise à augmenter de 100 millions d’euros les crédits versés à l’ONF. Celui-ci, du fait de la diminution de sa dotation, est de plus en plus contraint à exploiter la forêt et à vendre du bois pour équilibrer ses comptes. Il faut arrêter ce massacre car ce mode de gestion ne va pas dans le bon sens.

Suivant la préconisation du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD129 de Mme Anne Stambach-Terrenoir

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). Cet amendement de repli a pour objet la création de 1 000 postes supplémentaires. Le changement climatique va entraîner la modification des essences forestières et nécessite une véritable stratégie pour la préservation et l’adaptation des forêts. L’ONF a suffisamment souffert ces dernières années des suppressions de postes : il est temps de lui envoyer un signal fort.

Suivant la préconisation du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement.

Suivant la position du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement II-CD162 de Mme Marie Pochon.

Amendement II-CD75 de M. Matthias Tavel

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). Notre amendement a pour objet de revenir sur la suppression de 25 postes à l’IGN, l’Institut national de l’information géographique et forestière. Nous voulons le rétablissement des effectifs de cet institut à son niveau de 2017, ce qui nécessite la création de 120 postes. Austérité et urgence climatique ne sont absolument pas compatibles.

M. Emmanuel Maquet, rapporteur pour avis. La subvention pour charges de service public versée à l’IGN augmente de 3,8 %, passant à 92,29 millions d’euros contre 88,9 millions dans la loi de finances pour 2023. De plus, l’IGN a fait l’objet d’une contractualisation avec l’État jusqu’en 2025, qui intègre une trajectoire concernant les emplois. Une nouvelle négociation aura lieu en 2025, qui pourra aborder la question de la création de postes. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD74 de Mme Anne Stambach-Terrenoir

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). L’amendement vise à augmenter les crédits alloués au Cerema, le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement. Depuis 2017, 394 postes ont été supprimés. Le PLF prévoit certes 10 postes supplémentaires, mais il ne revient pas sur les suppressions passées.

M. Emmanuel Maquet, rapporteur pour avis. La subvention pour charges de service public du Cerema augmentera de 1,99 %, passant de 194 millions d’euros en 2023 à 197,9 millions en 2024. Par ailleurs, le schéma d’emplois prévoit 10 ETP supplémentaires.

Le Cerema m’a fait part de son besoin non pas tant de moyens budgétaires supplémentaires que d’augmenter son plafond d’emplois afin de pouvoir recruter des ingénieurs sous plafond pour répondre à la demande croissante des collectivités locales. Demande de retrait ; sinon, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD76 de Mme Anne Stambach-Terrenoir

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). Nous souhaitons allouer davantage de fonds à Météo-France. Le bleu budgétaire précise que cet opérateur joue un rôle essentiel dans la compréhension du réchauffement climatique et dans la lutte contre l’effet de serre. Pourtant, le Gouvernement a supprimé 381 postes depuis 2017. Ce sont ces postes que nous souhaitons rétablir.

M. Emmanuel Maquet, rapporteur pour avis. La subvention pour charges de service public de Météo-France passera de 199,07 millions d’euros en 2023 à 207,26 millions en 2024. Par ailleurs, le schéma d’emplois prévoit 25 ETP supplémentaires sur un effectif total de 2 583 ETP, avec un plafond d’emplois de 2 632 ETP, en augmentation de 18 ETP. Ce changement de cap du Gouvernement est important mais doit être conjugué avec un effort d’économies budgétaires, qui est nécessaire. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD83 de M. Matthias Tavel

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). Cet amendement vise à augmenter les fonds alloués au BRGM – Bureau de recherches géologiques et minières – de 5 millions d’euros. Son rôle est fondamental puisqu’il est notamment chargé de la surveillance des nappes phréatiques.

M. Emmanuel Maquet, rapporteur pour avis. Le BRGM a signé avec l’État, le 31 mars 2023, son nouveau contrat d’objectifs, de moyens et de performance 2023-2027. Pour la première fois, ce contrat se dote d’un engagement de moyens de la part de l’État. Ainsi, la subvention pour charges de service public du BRGM augmentera progressivement d’une dizaine de millions d’euros d’ici à 2027. En 2024, elle sera déjà en hausse de 2,6 millions d’euros à travers les abondements de différents programmes, ainsi que des agences de l’eau. Ce contrat venant d’être signé, il me paraît prématuré d’en changer l’équilibre. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD77 de Mme Anne Stambach-Terrenoir

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). Cet amendement vise à augmenter les crédits alloués à l’OFB, l’Office français de la biodiversité, afin de renforcer les effectifs chargés de la police de l’eau. Les difficultés d’approvisionnement en eau, notamment en outre-mer, justifient que l’on intensifie les contrôles sur la qualité de l’eau et son utilisation. Nous proposons donc la création de cinquante postes, soit moins d’un par département : j’ose espérer que cet amendement sera adopté.

M. Emmanuel Maquet, rapporteur pour avis. Votre amendement est satisfait car la subvention pour charges de service public de l’OFB, fixée à 78,5 millions d’euros en LFI pour 2023, évolue à 102,6 millions d’euros en PLF 2024. Cette augmentation importante s’accompagnera de 264 millions d’euros supplémentaires dans le cadre de la SNB 2030, dont une part importante sera affectée à l’OFB. Enfin, ce dernier bénéficiera de 47 ETP supplémentaires. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). La mission de police de l’eau assurée par l’OFB est essentielle au regard du manque d’eau dramatique et des restrictions dans certains départements.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD80 de M. Matthias Tavel

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). Nous proposons d’augmenter de 300 millions d’euros les crédits alloués aux agences de l’eau.

M. Emmanuel Maquet, rapporteur pour avis. Les agences de l’eau bénéficieront de 66 ETP supplémentaires en 2024 mais surtout d’une augmentation de leur plafond de recettes à hauteur de 325 millions d’euros entre 2024 et 2025. En outre, leur plafond de dépenses est supprimé, ce qui répond à une attente de longue date des agences. Par conséquent, j’estime qu’il vaut mieux attendre d’évaluer les actions permises par ce renforcement des moyens et des effectifs avant de rajouter de nouvelles dépenses. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD79 de Mme Anne Stambach-Terrenoir

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). La hausse de 66 ETP prévue dans le PLF pour 2024 pour les agences de l’eau ne suffit pas à compenser les 105 suppressions de postes effectuées depuis 2017. Il nous paraît urgent de renforcer leurs moyens, raison pour laquelle nous proposons d’augmenter les crédits qui leur sont alloués.

M. Emmanuel Maquet, rapporteur pour avis. Pour les mêmes raisons que précédemment, j’émets un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD189 de M. Bertrand Petit

Mme Chantal Jourdan (SOC). Cet amendement vise à créer une indemnité compensatoire des surcoûts liés à l’exploitation de prairies situées sur une zone humide de valeur internationale au sens de la convention de Ramsar. La France compte 150 000 hectares de prairies en zones humides. Alors que les surcoûts sont estimés à 500 euros par hectare et par an, il reste à la charge des exploitants environ 150 euros. Cette indemnité aura un effet incitatif pour poursuivre leurs actions en faveur de la conservation des zones humides.

M. Emmanuel Maquet, rapporteur pour avis. Plusieurs plans nationaux d’action pour les zones humides ont été mis en œuvre, le quatrième couvrant la période 2022‑2026. Il se donne notamment pour objectif de doubler la superficie des zones humides sous protection forte en métropole d’ici à 2023 et de créer un parc national de zones humides. Des moyens supplémentaires seront également déployés dans la SNB s’agissant des zones humides. En l’absence d’une vision précise de ce qui sera proposé, je pense qu’il ne faut pas rajouter de nouvelles dépenses. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD190 de M. Bertrand Petit

Mme Chantal Jourdan (SOC). Le présent amendement, comme le précédent, vise à créer une indemnité compensatoire des surcoûts liés à l’exploitation de maraîchers situés dans une zone humide de valeur internationale.

M. Emmanuel Maquet, rapporteur pour avis. Pour les mêmes raisons que précédemment, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD71 de M. Daniel Grenon

M. Daniel Grenon (RN). Mon amendement a pour objet d’abonder les crédits de l’action 01 Sites, paysages, publicité du programme 113 de 1 million d’euros. Notre territoire est doté d’une variété extraordinaire de paysages qui en font sa richesse, son identité et son histoire. Il est donc primordial de les préserver par des investissements suffisants.

M. Emmanuel Maquet, rapporteur pour avis. L’action 01 du programme 113 est dotée de 10,1 millions d’euros pour 2024, en hausse de 4,4 millions d’euros par rapport à 2023. Cette augmentation vise à renforcer les atlas de paysages, la politique des sites inscrits et classés ainsi que l’appui au classement au patrimoine mondial de l’Unesco. Votre amendement est donc satisfait. Demande de retrait et, à défaut, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD130 de Mme Anne Stambach-Terrenoir

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). Nous souhaitons renforcer la dotation de fonctionnement des conservatoires d’espaces naturels (CEN), qui font un travail remarquable de protection et de gestion des espaces naturels et doivent continuer à développer les compétences indispensables à la gestion des espaces naturels.

M. Emmanuel Maquet, rapporteur pour avis. Le Conservatoire bénéficie depuis 2006 de l’affectation de la taxe annuelle sur les engins maritimes à usage personnel. Cette ressource, qui constitue la recette principale de l’établissement, est plafonnée à 40 millions d’euros depuis la LFI 2022. Le PLF 2024 laisse le plafond inchangé, mais le Conservatoire bénéficiera également de 2,8 millions d’euros pour développer les acquisitions foncières dans le cadre de la mise en œuvre de la SNB, la stratégie nationale pour la biodiversité, et de 2,5 millions d’euros pour cofinancer le projet Life Adapto +. Le plafond d’emplois est fixé à 170 ETPT – équivalents temps plein travaillés –, soit une hausse de 22 ETPT par rapport à la LFI pour 2023. Les moyens du Conservatoire sont donc renforcés et le seront davantage encore lors du versement des crédits supplémentaires de la SNB. Avis défavorable

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD191 de M. Bertrand Petit

Mme Chantal Jourdan (SOC). Cet amendement vise à apporter une aide directe et forfaitaire de 200 000 euros à l’animation de la tête de réseau Man and the Biosphere (MAB) France, notamment pour l’élaboration, en cours, du programme Life. La France compte seize réserves de biosphère désignées par l’Unesco, qui couvrent près de 7 millions d’hectares et plus de 2 500 communes, où vivent 3,2 millions de personnes. Ces réserves ne bénéficient d’aucun soutien financier spécifique, que ce soit de l’Unesco ou du Gouvernement. Seul le réseau national MAB France a conclu un contrat avec l’Office français de la biodiversité (OFB).

M. Emmanuel Maquet, rapporteur pour avis. L’ONG MAB France travaille sur les réserves de biosphère en lien avec l’Unesco, l’OFB et différentes structures, dont les parcs nationaux. D’après ce que je comprends, ces structures procurent aux réserves un appui matériel et logistique pour leur travail de recherche. S’il fallait davantage les aider, il me semble qu’il faudrait se tourner vers l’OFB ou les parcs nationaux, qui bénéficieront d’un abondement de plusieurs dizaines de millions dans le cadre de la SNB. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD68 de M. Stéphane Lenormand

Mme Nathalie Bassire (LIOT). Les outre-mer renferment près de 80 % de la biodiversité française. Sur une surface totale plus de quatre fois moindre que celle de la France hexagonale, les territoires d’outre-mer hébergent globalement plus d’espèces pour tous les groupes. Or cette biodiversité est menacée car elle est en première ligne face aux effets catastrophiques du changement climatique, tels que la montée du niveau de la mer, la fréquence et l’intensité croissantes des catastrophes naturelles ou les épisodes de sécheresse dramatiques.

Il serait logique que 80 % des crédits de l’action 07 Gestion des milieux et biodiversité du programme 113 Paysages, eau et biodiversité, de la mission Écologie, développement et mobilité durables soient fléchés vers une nouvelle ligne de crédit. Celle-ci, intitulée Biodiversité en outre-mer, serait abondée de 446 586 317 euros en AE et de 394 433 467 euros en CP.

M. Emmanuel Maquet, rapporteur pour avis. Les 265 millions d’euros supplémentaires de la SNB 2030 abonderont plusieurs actions outre-mer, comme la préservation des récifs coralliens et la protection des écosystèmes terrestres et des milieux humides en Guyane et dans les départements et territoires d’outre-mer. Avis de sagesse.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-CD37 de M. Jean-Louis Bricout

Mme Nathalie Bassire (LIOT). La stratégie nationale pour les aires protégées (Snap) vise à ce que 30 % du territoire national soit couvert par un réseau d’aires protégées, d’ici à 2030, et à ce que 10 % du territoire national soit placé sous protection forte. Elle met également l’accent sur une gestion efficace et adaptée du réseau d’aires protégées. Si l’objectif des 30 % est déjà atteint, ceux tenant à la protection forte et à la qualité de gestion ne le sont pas encore. En conséquence, cet amendement vise à abonder les crédits du programme Paysage, eau et biodiversité, qui finance la stratégie nationale pour la biodiversité conformément aux moyens identifiés par l’IGF – Inspection générale des finances – et l’Igedd – Inspection générale de l’environnement et du développement durable. Il est proposé d’augmenter de 200 millions d’euros les AE et les CP de l’action 07 Gestion des milieux et biodiversité du programme 113 Paysages, eau et biodiversité et de diminuer d’un même montant les AE et les CP de l’action 42 Voies navigables, du programme 203 Infrastructures et services de transports.

M. Emmanuel Maquet, rapporteur pour avis. Les crédits du programme 113 ont quasiment doublé cette année, puisqu’ils passent de 270 à 512 millions d’euros. Cette augmentation inédite, qui s’inscrit dans le cadre du financement de la SNB pour 2030, suit les recommandations du rapport de l’Igedd et de l’IGF que vous mentionnez. Dans le détail, ce sont 264 millions d’euros supplémentaires en autorisations d’engagement qui vont bénéficier à la politique de biodiversité, dont 200 millions d’euros pour les écosystèmes terrestres. Votre amendement me semble donc satisfait. Demande de retrait et, à défaut, avis défavorable.

L’amendement est retiré.

Amendement II-CD72 de M. Jorys Bovet

M. Emmanuel Maquet, rapporteur pour avis. Dans le cadre de la SNB, 264 millions d’euros sont engagés pour financer des interventions supplémentaires qui permettront notamment d’accompagner les actions de restauration des sols. En outre, l’IGN – Institut national de l’information géographique et forestière – bénéficie de crédits supplémentaires, à hauteur de 3 millions d’euros, notamment pour compléter son atlas des sols. Des actions sont actuellement menées sur ce sujet, qui est bien identifié. D’un point de vue opérationnel, votre amendement aurait dû, me semble-t-il, viser les crédits de l’IGN, donc l’action 11 et non la 10, qui a plus une vocation de supervision et d’organisation des politiques que de recherche sur le terrain. Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD164 de Mme Aude Luquet

Mme Aude Luquet (Dem). Cet amendement a pour objet de remettre de la nature en ville pour lutter contre les îlots de chaleur, améliorer l’écoulement et le drainage des sols, dépolluer l’air et faire revenir la biodiversité là où elle a disparu. Il faut engager des moyens substantiels car la renaturation des sols artificialisés est coûteuse. Selon France Stratégie, le prix de la dépollution, de la désimperméabilisation et de la construction d’un technosol s’échelonne entre 95 et 390 euros le mètre carré, sans compter les coûts éventuels de déconstruction. L’amendement vise à augmenter les sommes déjà débloquées pour soutenir la renaturation, ce qui permettra d’économiser plusieurs milliards d’euros de dépenses à l’avenir.

M. Emmanuel Maquet, rapporteur pour avis. Un fonds de 500 millions d’euros, destiné à soutenir les collectivités locales volontaires, finance depuis 2022 un programme de renaturation des villes et des centres-villes. Depuis, cette somme a été intégrée au fonds vert, dont les crédits augmenteront de 500 millions d’euros en 2024, pour atteindre 2,5 milliards d’euros. Les actions en faveur de la renaturation figurent toujours en bonne place dans les dispositifs financés par ce fonds. Il me semble donc que votre amendement est satisfait. Demande de retrait.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-CD111 de M. Gabriel Amard

Mme Sylvie Ferrer (LFI-NUPES). Par cet amendement, nous proposons de lancer un plan d’investissement en faveur du patrimoine de production d’eau et du renouvellement des canalisations. Le réseau de canalisations françaises, long de 850 000 kilomètres et dont dépend la qualité de l’eau et de l’environnement, est très vétuste. Les fuites représentent l’équivalent de la consommation annuelle de 18 millions d’habitants. Jusqu’à 340 000 kilomètres de canalisations en PVC, vieilles de plus de quarante ans, sont susceptibles de se décomposer et de propager un cancérogène avéré dans l’eau potable, ce qui pourrait affecter 600 000 personnes. Il est donc urgent de lancer un plan d’investissement. À cette fin, l’amendement vise à abonder de 1,5 milliard d’euros le programme, nouvellement créé, Plan d’investissement pour les canalisations d’eau. Les règles de recevabilité nous obligent à prévoir un gage, que nous appelons le Gouvernement à lever.

M. Emmanuel Maquet, rapporteur pour avis. Les agences de l’eau vont bénéficier de 66 ETP supplémentaires en 2024 mais surtout d’une augmentation de leur plafond de recettes à hauteur de 325 millions d’euros entre 2024 et 2025. En outre, leur plafond de dépenses est supprimé, ce qui répond à une attente qu’elles manifestaient de longue date. Par conséquent, il me paraît préférable d’attendre l’évaluation des actions permises par le renforcement des moyens et des effectifs, notamment pour la rénovation des réseaux d’eau, avant d’envisager de nouvelles dépenses. Sagesse.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD117 de Mme Catherine Couturier

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). Cet amendement se rapproche de l’amendement de Mme Luquet que nous avons voté à une nette majorité. Il a pour objet d’accroître la DETR – dotation d’équipement des territoires ruraux – pour aider les petites communes rurales, en particulier celles qui ont peu artificialisé, à rénover leur centre-bourg dans le cadre fixé par l’objectif « zéro artificialisation nette » (ZAN). Les outils institués par le plan France Ruralités ne sont pas à la hauteur des besoins et placent souvent les communes en concurrence. Celles-ci ne répondent pas toutes aux critères fixés et n’ont parfois pas les moyens techniques de déposer un dossier en temps et en heure.

M. Emmanuel Maquet, rapporteur pour avis. Vous entendez alerter, par cet amendement d’appel, sur la nécessaire augmentation de la DETR pour les petites communes, confrontées à l’application du ZAN. L’aide que leur procurent les outils financiers pourrait être améliorée, malgré le succès de certains dispositifs comme le fonds friches, désormais intégré au fonds pour l’accélération de la transition écologique dans les territoires, dit fonds vert. Je vous invite à consulter le rapport de notre collègue sénateur Jean-Baptiste Blanc, rendu en juin 2022, qui formule de nombreuses propositions. Bien que ce soit un amendement d’appel, j’émets un avis de sagesse.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD182 de M. Gérard Leseul

M. Gérard Leseul (SOC). Cet amendement vise à renforcer les moyens humains nécessaires à la prévention des risques industriels. En 2021, le Bureau d’analyse des risques et pollutions industriels (Barpi), qui dépend du ministère de la transition écologique, a recensé 1 571 événements technologiques et 250 incidents ou accidents dans des établissements Seveso, dont 6 accidents majeurs. C’est encore beaucoup trop. Les explosions qui se sont produites en août dernier sur un site classé à Bergerac, en Dordogne, ont rappelé que des accidents arrivent régulièrement sur les sites industriels Seveso, dont le nombre excède le millier.

Un peu plus de trois ans après l’accident de Lubrizol, et alors que le Gouvernement avait promis une augmentation de 50 % du nombre d’inspections d’installations classées d’ici à la fin du quinquennat, les syndicats des secteurs concernés dénoncent une diminution du temps consacré à chaque inspection et une détérioration des conditions de travail des inspecteurs. Seuls 50 inspecteurs ont été recrutés, sur un effectif de 1 600 personnes, ce qui représente une hausse, très insuffisante, de 2 %.

En Seine-Maritime, les syndicats ont également dénoncé la récente annonce d’un projet de suppression de postes au sein de la Dreal, la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement. Le Syndicat national des ingénieurs de l’industrie et des mines (Sniim) a réclamé à plusieurs reprises que l’augmentation promise des effectifs « post Lubrizol » soit suivie d’effets. Nos citoyens ont besoin d’être rassurés. Aussi cet amendement vise-t-il à renforcer fortement les missions de contrôle.

M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis (Politiques de développement durable). Je suis sensible aux risques induits par le vieillissement des installations Seveso. Rien ne s’oppose, à mon sens, à l’adoption de cet amendement. Avis favorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD89 de Mme Alma Dufour

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). Après l’accident de Lubrizol, le Gouvernement s’était engagé à ce que le nombre d’inspections classées augmente de 50 % d’ici à la fin du quinquennat. Or la hausse s’est limitée à 2 %, ce qui est largement insuffisant. Par ailleurs, des accidents surviennent régulièrement sur les quelque 1 000 sites industriels classés Seveso. Le Barpi a recensé en 2021 1 580 évènements technologiques, 250 incidents ou accidents sur des sites Seveso, dont 6 accidents majeurs. Cela entraîne des risques humains, sanitaires, environnementaux et économiques majeurs mais qui demeurent mal estimés. Il est donc primordial de les prévenir. Aussi proposons-nous de faire correspondre le nombre d’ETP supplémentaires d’inspecteurs à la volonté louable qu’avait manifestée le Gouvernement, ce qui se traduirait par la création de 600 ETP.

M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Cet amendement de repli vise, comme le précédent, à prévenir les risques industriels. Avis favorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD90 de Mme Alma Dufour

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). Cet amendement de repli vise à augmenter les effectifs des inspecteurs d’installations classées à hauteur de 300 ETP.

M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Avis favorable, pour les raisons précédemment exposées.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD198 de M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis

M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à augmenter la subvention accordée à l’École des Ponts ParisTech, pour lui permettre de former près de 300 élèves supplémentaires. Cela répond à un besoin exprimé par l’établissement lors de son audition. Notre pays doit disposer de compétences d’ingénierie adaptées pour conduire la transition énergétique et écologique et mener une politique de grands travaux. Il est proposé, à cette fin, d’affecter 15 millions d’euros à l’action 07 Pilotage, support, audit et évaluations du programme 217 Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD199 de M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis

M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à supprimer la Commission nationale du débat public (CNDP). Je ne nie pas l’implication des personnels de la CNDP, l’énergie qu’ils mettent dans l’exercice de leurs fonctions ni le travail qu’ils accomplissent, mais il faut revoir l’organisation du débat public. Le débat sur le nucléaire s’est par exemple enlisé, puis interrompu, alors qu’il s’agit d’une question fondamentale pour nos concitoyens. En outre, peu de citoyens interagissent avec la CNDP. Il s’agit surtout d’ONG militantes et de corps intermédiaires qui se servent d’elle pour faire passer leurs idées. La CNDP est une technostructure administrative qui tourne, à mon sens, à vide. Elle n’influe sur rien, mais mobilise des crédits qui pourraient être consacrés à d’autres actions publiques, comme la relocalisation des services de l’État au plus près de nos concitoyens.

M. David Valence (RE). Je m’étonne de cette rage à casser les autorités administratives indépendantes, qui semble être à la mode. Les gens qui y travaillent sont très attachés à l’intérêt général et au service public. Dans un système politique dont on reproche parfois la verticalité, elles constituent des contre-pouvoirs utiles. Il pourrait être envisagé d’en rapprocher certaines, à l’image de l’Arcom, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique, née de la fusion du CSA, le Conseil supérieur de l’audiovisuel, et de la Hadopi, la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet, mais c’est un autre sujet. L’hostilité envers les autorités administratives indépendantes est en réalité dirigée contre ceux qui les saisissent, à savoir les corps intermédiaires. Étant un libéral, je n’éprouve pas de méfiance envers ces derniers. Je ne considère pas qu’un dialogue direct entre l’exécutif et les citoyens soit un idéal à atteindre en matière de fonctionnement du pouvoir. Tout ce qui nourrit le dialogue et le débat public sur le terrain me paraît utile, à l’instar de la CNDP.

M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Monsieur Valence, ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit : je ne suis pas opposé aux autorités administratives indépendantes, bien au contraire. Je conteste simplement l’utilité de l’une d’elles : la CNDP. On assiste à une crise de confiance de nos concitoyens à l’égard des élites. Les Français se dessaisissent de leur faculté à participer à la décision publique, y compris par l’abstention électorale. La CNDP devrait offrir la possibilité aux citoyens de se saisir massivement d’un certain nombre de sujets, ce qui n’est absolument pas le cas ; ils ne savent d’ailleurs pas ce qu’est cette institution. Je n’ai rien contre les corps intermédiaires, mais certains d’entre eux, à l’exemple d’associations et d’ONG très militantes, en particulier écologistes, comme le Réseau Action climat, se servent de la CNDP pour influer sur des décisions et des projets dans un sens contraire à l’opinion publique. Pour sortir de l’entre-soi militant, il faut décentraliser le débat public.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD197 de M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis

M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Il s’agit, par cet amendement, de mettre en question une pratique du Président de la République, qui a tendance à recaser d’anciens ministres à la tête d’autorités administratives indépendantes, alors que leur CV ne correspond pas toujours au domaine d’activité de l’institution. Ainsi Mme Wargon, ancienne ministre du logement, a-t-elle été placée, à la suite de sa défaite aux législatives, à la tête de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) alors qu’elle avait été mise en minorité lors du vote des commissions des affaires économiques de l’Assemblée nationale et du Sénat.

Cet amendement qui est, dans une certaine mesure, un amendement d’appel, a pour objet de ramener le salaire de Mme Wargon au niveau de l’indemnité parlementaire de base. En effet, son salaire actuel, qui s’élève à 15 000 euros, me semble relativement indécent et aggrave la défiance que nourrissent nos concitoyens à l’égard des élus. Les Français savent pertinemment que le Président de la République mène une politique de recasage de ses fidèles.

La commission rejette l’amendement.

Amendements II-CD84 et II-CD85 de Mme Alma Dufour (discussion commune)

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). Ces amendements visent à renforcer les moyens des services déconcentrés des directions départementales des territoires (DDT). Chacun connaît les difficultés qu’éprouvent un certain nombre de collectivités pour élaborer leurs documents d’urbanisme et leurs permis de construire. Les dossiers de demande de dotations doivent parfois être rendus dans des délais très courts. Sur les questions écologiques, par exemple, les élus locaux se rapprochent souvent des DDT. Or, les préfectures nous disent qu’elles ne disposent pas des moyens suffisants pour répondre à chacun dans les délais requis. Les associations d’élus témoignent souvent de ces difficultés auprès de la Délégation aux collectivités territoriales. Nous proposons donc, par l’amendement II-CD84, de créer 900 postes au sein des DDT dans toute la France. L’amendement II-CD85 vise, lui, à créer 300 postes.

M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Il me paraît peu utile de créer des postes de chargés de projet spécialisés dans la bifurcation écologique, car ce travail peut être réalisé par les corps d’ingénieurs existants. En outre, l’administration est déjà largement sensibilisée à la transition écologique. Il n’est nul besoin de créer une espèce de corps spécialisé, ce qui risquerait d’ajouter à la complexité administrative. Ce qu’il faudrait, en revanche, c’est accroître le nombre d’ingénieurs que nous formons, pour les mettre au service de nos territoires. Avis défavorable sur les deux amendements.

Mme Catherine Couturier (LFI-NUPES). Nous ne précisons pas, dans l’amendement, les corps qui devraient être renforcés : nous parlons de postes de chargés de projet. Les élus locaux connaissent le rôle des chargés de projet dans les collectivités et les services de l’État. Un chargé de projet peut avoir un grade de technicien comme d’ingénieur. L’essentiel est d’avoir les moyens humains de répondre aux collectivités territoriales, qui n’ont plus la capacité financière de recruter des personnes ayant le niveau de compétences suffisant.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement II-CD87 de Mme Alma Dufour

Mme Manon Meunier (LFI-NUPES). Cet amendement vise à augmenter les effectifs des agents des Dreal, qui jouent un rôle essentiel pour contrôler l’adéquation entre les projets d’énergies renouvelables et la préservation de la biodiversité. Les Dreal vérifient, au vu de l’étude d’impact sur l’environnement, que les risques du projet pour la biodiversité n’excèdent pas ses bénéfices pour le climat. L’accroissement de leurs effectifs permettrait de réduire les délais de traitement des dossiers.

M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. L’audition des Dreal que j’ai menée a en effet révélé les besoins de recrutement de ces directions, qui sont dus à l’accroissement des missions qui leur sont confiées. Votre amendement est quasiment identique à celui que j’ai déposé sur l’article 41 : je propose la création de 95 emplois, conformément aux besoins dont m’ont fait part les Dreal, tandis que vous suggérez le recrutement de 100 agents. J’émets donc un avis favorable sur votre amendement en espérant que, dans l’hypothèse où il ne serait pas adopté, vous vous prononciez en faveur du mien.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD217 de M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis

M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Le ministère de la transition écologique finance des associations écologistes militantes qui promeuvent la désobéissance civile, c’est-à-dire des actions illégales. Il se tire peu ou prou une balle dans le pied en finançant ces associations d’extrême gauche, alors même que l’on vient de voter une loi pour l’accélération du nucléaire. Cet amendement vise à réduire de 700 000 euros les crédits de l’action 07 Pilotage, support, audit et évaluations du programme 217, qui subventionnent lesdites associations. Il s’agit, en particulier, de supprimer l’aide budgétaire de l’État à trois associations opposées à l’énergie nucléaire ou prônant des actions de désobéissance civile : le Réseau Action climat, Les Amis de la Terre et France nature environnement.

La commission rejette l’amendement.

Elle émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Écologie, développement et mobilité durables modifiés.

Article 41 : Plafond des emplois des opérateurs de l’État

Amendements II-CD200 de M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis, et II-CD69 de Mme Lisa Belluco (discussion commune)

M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis (Politiques de développement durable). J’ai donné un avis favorable à un amendement très proche de celui-là, qui vise à augmenter le plafond d’emplois des directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal) de 95 ETP supplémentaires. Une telle proposition devrait être consensuelle.

M. Emmanuel Maquet, rapporteur pour avis (Paysages, eau et biodiversité). Les effectifs de l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) sont restés stables en 2023 et le resteront en 2025. L’année prochaine, la baisse de 25 ETP correspond à l’application du précédent schéma d’emplois, qui s’achève en 2025. Cette année-là, l’IGN négociera son contrat d’objectifs et de performance (COP) pour les trois années suivantes. Il n’y a pas lieu d’anticiper ici une négociation qui se tiendra dans deux ans. Avis de sagesse.

La commission rejette successivement les amendements.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 41 non modifié.

Après l’article 51

Amendement II-CD214 de M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis

M. Jean-Louis Bricout, rapporteur pour avis (Transition énergétique). L’amendement a pour objet de demander la remise d’un rapport portant sur la création d’une aide personnalisée à la mobilité, sur le modèle de l’aide personnalisée au logement (APL). Elle pourrait être déployée en parallèle du leasing social, dont on espère une clarification des contours.

L’accompagnement social est nécessaire pour toutes les transitions, quelles qu’elles soient. Le reste à charge pour l’acquisition de véhicules propres est souvent trop élevé pour les ménages modestes. L’autre voie, celle du leasing social, n’est pas sans risque car ce type d’instrument est adossé aux banques, qui peuvent capter la prestation sociale.

Je privilégie l’allocation à l’acquisition du véhicule pour conduire la transformation massive du parc : l’allocation à l’usage est synonyme de sobriété et certains achats sont également assis sur l’usage. L’allocation implique que les loueurs proposent des véhicules bien plus facilement réparables.

Cette prestation, équivalente de l’APL pour la mobilité, doit comporter une certaine souplesse : on peut choisir le budget que l’on y consacre et la population concernée, en arrêtant des critères sociaux, géographiques – avec les ZFE, les zones à faibles émissions – et d’usage du véhicule.

La commission rejette l’amendement.

Après l’article 52

Amendement II-CD131 de Mme Lisa Belluco

M. Emmanuel Maquet, rapporteur pour avis (Paysages, eau et biodiversité). Les agences de l’eau peuvent financer des retenues de substitution lorsque celles-ci s’inscrivent dans un projet de territoire et font l’objet d’autorisations administratives. L’impact environnemental et social des projets est étudié ; les préfets jouent un rôle déterminant dans l’autorisation des projets : ils pilotent la concertation et la signature du protocole d’accord entre les différentes parties prenantes. Lors du remplissage des bassines, entre novembre et mars, les préfets déterminent également le seuil à ne pas dépasser ; lorsque les projets sont autorisés, il n’y a pas de raison d’interdire par principe aux agences de l’eau de les financer. L’avis est donc défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CD81 de M. Matthias Tavel

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NUPES). Cet amendement vise à demander la remise d’un rapport sur les conséquences de la baisse des effectifs du ministère chargé de l’écologie et de ses opérateurs, notamment de l’impact de la perte de compétences et de savoir-faire sur la conduite de la bifurcation écologique au service de l’intérêt général.

Selon nous, l’État ne possède plus les outils nécessaires à son ambition et ne se donne pas les moyens de les recouvrer. L’action du Gouvernement en matière de bifurcation écologique se réduit parce que les moyens humains et financiers manquent. Une politique de coupes budgétaires drastiques et de réduction des effectifs est conduite dans la fonction publique, son intensité s’étant fortement accrue depuis 2017. Malgré la création de quelques postes cette année, les suppressions des années précédentes sont loin d’être compensées.

Cette politique va à rebours de l’urgence et de l’histoire car le dérèglement climatique et l’effondrement du vivant ne cessent de s’accélérer : tous les scientifiques dressent ce constat.

Nous défendons depuis longtemps la nécessité d’une planification de la bifurcation écologique, laquelle requiert un personnel public hautement qualifié. Seuls l’État et ses opérateurs sont en mesure d’assurer le rôle de bureau d’études et d’expertise pour concevoir cette planification. La contractualisation d’un nombre élevé de postes de fonctionnaires, notamment ceux de l’Office national des forêts (ONF), contribue à la fuite de savoirs et de compétences et précarise les travailleurs.

Cette politique nuit à l’efficacité de la politique écologique ; voilà pourquoi nous souhaitons que le rapport étudie également l’impact des suppressions de postes sur l’atteinte de l’objectif européen de diminution de 55 % des émissions de gaz à effet de serre en 2030 par rapport au niveau de 1990.

M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis (Politiques de développement durable). Cette demande est tout à fait respectable, mais le sujet que vous proposez d’étudier est déjà largement documenté. Nous observons une stabilisation et même une légère hausse des moyens humains du ministère.

Je suis sceptique, mais j’espère que l’accroissement des moyens servira à améliorer la disponibilité du service public. Épargnons aux agents du ministère la rédaction d’un rapport fastidieux pour qu’ils se concentrent sur leur mission.

La commission rejette l’amendement.