N° 462

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIEME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 16 octobre 2024.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES
SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2025 (n° 324)

TOME VII

ÉCONOMIE

COMMUNICATIONS ÉLECTRONIQUES ET ÉCONOMIE NUMÉRIQUE

PAR M. JÉRÔME NURY

Député

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 Voir le numéro : 324 (Tome III, Annexe 20).


  SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION

PremiÈre partie : Analyse budgÉtaire

I. PrÉsentation gÉnÉrale

A. Le programme 134 « DÉveloppement des entreprises et rÉgulations »

1. Description du programme 134

2. Analyse de l’évolution des crédits du programme 134

3. Détail des actions

a. L’action n° 4 « Développement des postes, des télécommunications et du numérique »

b. L’action n° 13 « Régulations des communications électroniques et des postes »

B. Le programme 343 « Plan France trÈs haut dÉbit »

II. Le budget des autorités publiques

A. l’AutoritÉ de rÉgulation des communications Électroniques, des postes et de la distribution de la presse

1. Une autorité administrative indépendante au service de la régulation des réseaux de communications électroniques

2. De nouvelles missions résultant de la loi visant à sécuriser et à réguler l’espace numérique

3. Un budget prévisionnel en hausse, mais une stagnation problématique des effectifs de l’Arcep en 2025

a. Un budget prévisionnel de l’Arcep en légère hausse pour l’année 2025

b. Des effectifs stables après une légère croissance en 2024

B. L’Agence nationale des frÉquences

1. Des missions en extension

2. Un « retour à la normale » pour le budget de l’agence

SECONDE PARTIE : ANALYSE THÉMATIQUE

I. Les dÉploiements fixes et mobiles : un État des lieux

A. LE plan France trÈs haut dÉbit

1. Le plan « France Très haut débit » : une initiative visant à doter la France d’un réseau fixe de haut niveau permettant d’accéder au très haut débit

2. Les jalons du bon haut débit (2020) et du très haut débit (2022) ont été tenus

3. L’objectif d’une généralisation complète de la fibre fin 2025 paraît en revanche hors d’atteinte

4. Des ralentissements inquiétants dans le déploiement de la fibre dans certaines zones de notre territoire, qui appellent la vigilance des pouvoirs publics

a. Au sein des zones très denses (ZTD)

b. Au sein des zones moins denses d’initiative privée

c. Des progrès en zones Amel

d. Une dynamique désormais presque exclusivement portée par les réseaux d’initiative publique

e. Des déploiements en zone publique qui pourraient être entravés faute de crédits disponibles

5. Maintenir une ambition forte pour assurer la qualité des déploiements

6. Traiter efficacement la question des raccordements complexes

a. Les raccordements complexes au sein du domaine public

b. Les raccordements complexes en domaine privé

B. le New Deal mobile

1. Un objectif atteint de généralisation et de montée en qualité de la couverture mobile

2. Un dispositif de couverture ciblée qui est efficace et permet de déployer des sites mobiles en zone rurale

3. Des progrès plus incertains sur la couverture mobile des axes routiers et ferroviaires

II. QUATRE PRIORITÉS pour 2025 en matiÈre de communications Électroniques

A. REPRENDRE les initiatives législatives DE SIMPLIFICATION DU DÉPLOIEMENT DES Réseaux de communication électronique engagées sous la précédente législature

B. FAIRE UN BILAN EXHAUSTIF DU NEW DEAL MOBILE ET ÉTUDIER L’OPPORTUNITÉ D’UNE PROLONGATION DU DISPOSITIF

C. RESTER VIGILANT SUR LA FERMETURE PROGRESSIVE ET « EN BON ORDRE » DU RÉSEAU en CUIVRE

D. Poursuivre les efforts visant à réduire l’Asymétrie entre les grands acteurs du numérique et les opérateurs

RECOMMANDAtiONS

EXAMEN EN COMMISSION

LISTE DES PERSONNES auditionnÉes

 


 

   INTRODUCTION

En matière de communications électroniques, 2025 sera une année de bilan. Lancé en 2013, le plan France Très Haut Débit doit s’achever à la fin de l’année prochaine, avec la généralisation de la fibre optique pour tous les français. Pour ce qui concerne la couverture mobile, les derniers arrêtés dotant certains territoires de sites mobiles de couverture ciblée doivent également intervenir en 2025. Comme le plan France Très Haut Débit, le New Deal mobile est donc en phase d’achèvement, même si certains déploiements vont se prolonger après 2025 ([1]).

À l’heure du bilan, donc, votre rapporteur observe que la politique publique de déploiement des réseaux fixes et mobiles est un succès incontestable. La 4G s’est en effet généralisée dans notre pays, de même que l’accès fixe au très haut débit. Ce succès est évidemment encore incomplet à la date de rédaction du présent avis. Il reste en effet des locaux à rendre éligibles à la fibre, notamment en zone rurale, et des efforts à fournir sur la couverture mobile. Il n’en demeure pas moins qu’en quelques années, la France est parvenue à se doter de réseaux efficaces et robustes grâce à la mobilisation des acteurs publics, État, collectivités, régulateur, et des opérateurs, ce qui doit être salué.

Votre rapporteur estime qu’il est important désormais de ne pas « s’endormir sur ses lauriers », en particulier dans un contexte budgétaire national difficile. L’achèvement en bonne et due forme du plan France Très Haut Débit et du New Deal mobile est en effet indispensable et doit faire l’objet d’une vigilance de tous les instants.

Cet achèvement implique, d’abord, que les autorités compétentes disposent d’un budget suffisant pour mener à bien leurs missions. Votre rapporteur estime que tel est le cas au sein du présent projet de loi de finances pour l’Autorité de régulation des postes, des communications électroniques et de la presse (Arcep) et de l’Agence nationale des fréquences radio (Anfr), dont il a examiné les crédits.

Cet achèvement implique, ensuite, de disposer de crédits budgétaires suffisants. Pour mémoire, seuls les réseaux fixes sont financés par voie budgétaire au sein du projet de loi de finances. Sur ce sujet, votre rapporteur observe que les crédits budgétaires relatifs au déploiement des réseaux fixes ont en effet été mis à contribution pour réduire le déficit public dès le début de cette année. Le décret d’annulation du 21 février 2024 ([2]) a en effet amputé le financement prévu des réseaux d’initiative publique de 38 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 117 millions d’euros en crédits de paiement. Cette coupe, dont votre rapporteur a pu établir qu’elle n’avait pas eu d’impact significatif sur le rythme des déploiements, n’est néanmoins pas complètement neutre lorsqu’elle vient se cumuler avec une nouvelle réduction des crédits affectés au plan France Très haut Débit sur le programme 343 telle que prévue au sein du présent projet de loi de finances. Face à un besoin de financement des réseaux d’initiative publique pour 2025 qui doit encore être consolidé, mais que l’on peut estimer autour de 295 millions d’euros en crédits de paiement, votre rapporteur estime que le niveau de crédits du programme 343 doit pleinement refléter ces besoins afin d’éviter toute forme de retard dispensable vis-à-vis des objectifs fixés. C’est la raison pour laquelle il déposera un amendement en ce sens afin de renforcer de 50 millions d’euros les crédits affectés au programme 343 Plan France Très Haut Débit.

Pour garder un niveau d’ambition maximum sur le déploiement du très haut débit et de la fibre, il est également nécessaire de rester ferme vis-à-vis du ralentissement observé de certains déploiements fixes en zone très dense et en zone moyennement dense AMII, ainsi que sur l’enjeu de la qualité des raccordements. Le réseau fibre constituera en effet le réseau technologique fixe français dans les années à venir, alors que le réseau cuivre va être progressivement démonté. Dans ces conditions, une exigence forte doit s’imposer tant en matière de qualité que de complétude. Votre rapporteur a approfondi à cette fin la question des raccordements complexes, alors que le présent projet de loi finances comprend un dispositif expérimental visant à financer certains d’entre eux en domaine privé.

Pour ce qui concerne la couverture mobile, votre rapporteur considère que si le New Deal mobile est un succès, puisqu’il a permis de densifier la couverture mobile et de réduire par dix la part du territoire en zone blanche dans notre pays, des besoins continuent de se manifester au sein des territoires. La question d’un prolongement du New Deal mobile ou de la mise en place d’un dispositif similaire se pose avec acuité et fera l’objet d’une mission d’information. En outre, la qualité de la couverture mobile doit encore s’améliorer le long des axes routiers et ferroviaires pour que les progrès réalisés deviennent tangibles pour les citoyens.

 


   PremiÈre partie :
Analyse budgÉtaire

Après une présentation générale des crédits des deux programmes de la mission « Économie » concernant spécifiquement les communications électroniques (I), le budget de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse et celui de l’Agence nationale des fréquences seront étudiés plus en détail (II).

I.   PrÉsentation gÉnÉrale

Au sein de la mission « Économie », deux programmes comprennent des crédits intéressant les communications électroniques : le programme 134 « Développement des entreprises et régulations » (A) et le programme 343 « Plan France Très haut débit » (B). Bien entendu, de nombreux autres programmes, appartenant à d’autres missions budgétaires, contribuent au développement et à la régulation de la filière numérique sous ses différents aspects.

A.   Le programme 134 « DÉveloppement des entreprises et rÉgulations »

1.   Description du programme 134

Le programme 134 porte l’ensemble des politiques publiques visant, d’une part, à développer la compétitivité des entreprises afin de créer un environnement favorable à la croissance économique, et, d’autre part, à garantir la régulation et la sécurisation des marchés, ainsi que la protection des consommateurs.

Ce programme concerne directement l’action de trois directions générales du ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, à savoir la direction générale des entreprises (DGE), la direction générale du Trésor (DG Trésor) et la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et leurs services déconcentrés, ainsi que le Conseil général de l’économie (CGE).

Les crédits afférents à l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) et à l’Autorité de la concurrence (ADLC) y sont également compris, de même que la subvention pour charges de service public qui finance l’Agence nationale des fréquences (ANFR).

2.   Analyse de l’évolution des crédits du programme 134

Au niveau global, le programme 134 est doté, au sein du projet de loi de finances pour 2025, de 2,4 milliards d’euros (Md€) en autorisations d’engagement (AE) et de 2,4 Md€ en crédits de paiement (CP), ce qui correspond à des baisses significatives de 17 % en autorisations d’engagement et 7 % en crédits de paiement par rapport à la loi de finances pour 2024. Les prévisions fournies au sein de l’annexe budgétaire indiquent que cette baisse tendancielle devrait se poursuivre en 2026 avec une trajectoire de - 12% en AE et - 9% en crédits de paiement, avant que les crédits ne soient stabilisés en 2027 (+ 10% en 2027) à un niveau légèrement inférieur aux crédits actuellement prévus en 2025.

Il convient néanmoins de distinguer, en la matière, les crédits dits « titre 2 », relatifs aux dépenses de personnel, des crédits « hors titre 2 », qui intègrent l’ensemble des crédits relatifs aux dépenses de fonctionnement (titre 3), d’investissement (titre 5), d’intervention (titre 6) ainsi que les dépenses d’opérations financières (titre 7).

Au sein de ce programme, les crédits « titre 2 » connaissent une quasi‑stabilité, à hauteur de 414 millions d’euros (M€) en autorisations d’engagement et crédits de paiement (contre 413 M€ l’année dernière), avec une trajectoire de légère hausse en 2026 et 2027 (augmentation inférieure à 2 % par an).

Ce sont donc les crédits « hors titre 2 » qui subissent la baisse significative précédemment évoquée : ces crédits s’élèvent à 2 013,5 M€ en autorisations d’engagement et 2 043,6 M€ en crédits de paiement, soit une diminution de 20,5 % en AE et 9 % en CP par rapport aux crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2024.

Au niveau du programme dans son ensemble, la diminution des crédits observée procède, pour les autorisations d’engagement, presque exclusivement de la baisse des crédits affectés à l’action 07 « Industrie et services » ([3]), puisque ceux‑ci atteignent 94 M€ dans le projet de loi de finances pour 2025 contre 429 M€ l’année dernière (- 78 %). Les crédits de paiement du programme 134 apparaissent, par comparaison, relativement épargnés, avec une baisse de 5 % : cette diminution est portée essentiellement par la réduction de 12 % des crédits de paiement de l’action n° 23 « Industrie et services » (- 175 M€ par rapport à la loi de finances initiale pour 2024).

Le plafond d’emploi pour le programme 134 s’élève à 4 587 équivalents temps plein travaillé (ETPT). Il atteste d’une réduction de 15 ETPT par rapport à la loi de finances initiale pour 2024.

3.   Détail des actions

Les crédits portant sur les communications électroniques sont regroupés au sein de deux actions parmi les huit que compte le programme 134 : il s’agit de l’action n° 4 « Développement des postes, des télécommunications et du numérique » et de l’action n° 13 « Régulation des communications électroniques et des postes ».

a.   L’action n° 4 « Développement des postes, des télécommunications et du numérique »

L’action n° 4 porte sur le développement des postes, des télécommunications et du numérique.

Elle est dotée de 765,5 M€ en autorisations d’engagement et de 763,2 M€ en crédits de paiement pour 2025, ce qui correspond à une baisse de 30 M€ en autorisations d’engagement et de 26 M€ en crédits de paiement par rapport à l’année dernière.

Pour les autorisations d’engagement, cette baisse porte sur les dépenses de fonctionnement de l’action (- 10 M€) et sur les dépenses d’intervention (- 17 M€). La fin du versement à l’Agence nationale des fréquences d’une subvention d’investissement en lien avec l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 (3,2 M€) contribue également à ce mouvement de réduction, l’action n° 4 ne contenant pas de dépenses de titre 2.

La dynamique est identique et dans des proportions très comparables pour les crédits de paiement de cette action.

La répartition des crédits budgétaires relevant de cette action par catégorie de dépenses est la suivante :

 Dépenses de fonctionnement : 44,3 M€ en autorisations d’engagement et 46,4 M€ en crédits de paiement (contre 54,10 M€ en autorisations d’engagement et crédits de paiement en 2024). Ces dépenses de fonctionnement intègrent la subvention pour charges de service public (42,5 M€ en autorisations d’engagement et crédits de paiement) destinée à financer de l’Agence nationale des fréquences (ANFR), ainsi que, pour des montants moindres, les marchés de prestation de la mission French Tech (1,5 M€ en autorisations d’engagement et crédits de paiement), le fonctionnement du filtre « anti-arnaque » prévu par la loi n° 2024-449 du 21 mai 2024 visant à sécuriser et à réguler l’espace numérique (2,1 M€ en crédits de paiement) et le financement de l’initiative France Num (0,3 M€ en autorisations d’engagement et crédits de paiement) ;

 Dépenses d’intervention : 691 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement (contre 708,21 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement en 2023) ;

Ces dépenses constituent l’essentiel de la dotation budgétaire de l’action n° 4 du programme 134 et sont réparties de la façon suivante :

– Mission d’aménagement du territoire effectuée par La Poste : 105 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement ;

– Aides au transport de presse : 38,5 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement ;

– Service universel postal : 500 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement ;

– Financement du commissariat aux communications électroniques de défense : 28,2 M€ en autorisations d’engagement et 27,9 M€ en crédits de paiement ;

– Actions en faveur des organismes internationaux dans les secteurs des postes et des télécommunications : 9,6 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement ;

– Actions en faveur du numérique et des télécoms : 4,5 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement ;

– Financement du « filtre anti arnaque » prévu par la loi du 21 mai 2024 précitée : 2,1 M€ en crédits de paiement ;

– Transferts aux autres collectivités : 15,2 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement.

b.   L’action n° 13 « Régulations des communications électroniques et des postes »

L’action n° 13 porte, pour sa part, sur le budget de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse. Elle est dotée de 22,9 M€ en autorisations d’engagement et de 25,3 M€ en crédits de paiement pour l’année 2025.

Les crédits de cette action sont présentés plus en détail ci-après, dans la partie consacrée au budget de cette autorité.

B.   Le programme 343 « Plan France trÈs haut dÉbit »

Le programme 343 « Plan France Très haut débit » (PFTHD) est placé sous la responsabilité de la direction générale des entreprises (DGE). Il constitue le support budgétaire du plan du même nom, qui avait été lancé en 2013 et qui visait une couverture complète du territoire :

– en « bon haut débit » d’ici 2020 (pic débit descendant supérieur ou égal à 8 Mbit/s) ;

– en « très haut débit » d’ici 2022 (pic débit descendant supérieur ou égal à 30 Mbit/s).

Ce programme a fait l’objet de plusieurs abondements, résultant notamment de la reprise de crédits non utilisés lors d’exercices précédents.

Une enveloppe de 280 M€, financée sur les économies réalisées jusqu’en 2022, est ainsi venue à l’appui du lancement d’un nouvel appel à projets publié le 20 février 2020 et visant à accompagner les départements qui n’étaient pas encore engagés dans cette démarche.

Face à la crise sanitaire et pour accélérer le déploiement du très haut débit sur l’ensemble du territoire, le plan « France relance » a mobilisé, au total, 570 M€, sous forme d’un redéploiement de 300 M€ de crédits non consommés, de 240 M€ portés par le programme 364 « Cohésion » de la mission « Plan de relance » du projet de loi de finances pour 2021 ainsi que d’une enveloppe de 30 M€ ajoutée à l’occasion de l’adoption d’une troisième loi de finances rectificative au mois de juillet 2020.

Au sein de ces 570 M€ complémentaires, le Gouvernement a indiqué que 420 M€ seront « fléchés » sur les départements qui ne disposent pas encore d’un projet financé pour la généralisation de la fibre à l’horizon 2025 et 150 M€ seront consacrés à la question des raccordements complexes ([4]).

Au total, le soutien de l’État dans le cadre du plan France Très haut débit s’élevait, à la date du 31 décembre 2022, à 3,57 Md€ et mobilisait les vecteurs suivants :

 le fonds pour la société numérique (FSN), à hauteur de 900 M€ ;

 le présent programme 343, à hauteur de 2,4 Md€ engagés à date, auxquels viennent s’ajouter les 30 M€ prévus dans le cadre de la loi de finances rectificative évoquée ci-dessus ;

 le programme 364 « Cohésion », qui comprend 240 M€ supplémentaires dans son action n° 7.

Un nouvel appel à projet « Création d’infrastructures de génie civil nécessaires aux raccordements finals », en date du 19 avril 2022, est venu compléter l’appel à projet « RIP » en ouvrant une enveloppe de 150 M€ destinés à financer en deux temps – une première tranche en 2022 et une seconde en 2023 – les raccordements les plus complexes à réaliser.

Le présent projet de loi de finances prévoit, pour 2025, de doter le programme 343 de 47,6 M€ en autorisations d’engagement et de 247,8 M€ en crédits de paiement, répartis entre les actions n° 1 « Réseaux d’initiative publique », n° 2 « Autres projets concourant à la mise en œuvre du plan France Très haut débit » et n° 3 « Inclusion numérique ».

Concernant l’action n° 1 « Réseaux d’initiative publique », les seuls crédits ouverts sont des crédits de paiement à hauteur de 200,1 M€, soit une baisse de - 52 % par rapport à la loi de finances pour 2024. Aucun engagement de crédit n’est prévu en 2025, en raison de l’engagement des crédits réalisés à hauteur de 88,7 M€ en 2022 et de 61,3 M€ en 2023, la somme de ces deux montants correspondant à l’enveloppe cible prévue par le Gouvernement pour les raccordements complexes (150 millions d’euros). Le présent projet de loi de finances prévoit au sein de cette enveloppe des crédits de paiement à hauteur de 5 M€, dans la continuité des quatorze dossiers validés par le comité d’engagement des subventions et avances remboursables du PFTHD (Cesar).

Concernant l’action n° 2 « Autres projets concourant à la mise en œuvre du plan France Très haut débit », les crédits ouverts sont de 19,8 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. La très forte hausse des crédits au sein de cette action (+ 327 %) s’explique par l’insertion d’un dispositif expérimental de financement des raccordements privés à hauteur de 16,1 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement.

Pour mémoire, l’action n° 2 du programme 343 a été créée par la loi de finances initiale pour 2022 à la suite d’une mesure de re-budgétisation de crédits PIA (hors RIP) attribués au PFTHD sur le programme 343. Il s’agissait alors d’éteindre le portage de dispositifs par des fonds sans personnalité juridique, pour faire notamment suite à des remarques de la Cour des comptes sur ce point.

L’action n° 2 regroupe donc trois dispositifs précédemment portés par l’ancien programme 323 via des crédits PIA :

 l’appel à projets « Cohésion numérique des territoires » (CNT), dont le but est de permettre l’équipement en solutions d’accès Internet sans fil (satellite, 4G fixe, BLR, etc.) des foyers qui pourraient ne pas bénéficier de bon haut débit filaire. Cet appel à projets doit conduire à l’engagement et au paiement de 2,7 M€ en 2025 ;

 l’appel à projets « Continuité territoriale numérique » (CTN), qui vise, au bénéfice des territoires ultramarins, à apporter une aide à l’achat de capacités sur les systèmes de communications pour les fournisseurs d’accès à internet (135 000 € devraient être engagés et payés en 2025) ;

 le lancement d’un dispositif expérimental de soutien au financement des raccordements complexes en domaine privé (16,1 M€ en autorisations d’engagement et crédits de paiement) ;

 le financement des frais de fonctionnement du plan, qui correspondent aux frais d’évaluation et aux frais de gestion de l’ANCT (0,8 M€ provisionnés pour 2025).

Enfin, l’action n°3 « Inclusion numérique », créée l’année dernière, dispose de crédits en retrait par rapport à la loi de finances initiale pour 2024, avec 27,8 M€ en autorisations d’engagement et crédits de paiement dans le cadre du projet de loi de finances pour 2025 (contre 41, 8 M€ en autorisations d’engagement et crédits de paiement l’année dernière). Cette action finance la mise en place de conseillers numériques France Services. Ce dispositif s’inscrit dans le cadre de la stratégie nationale pour un numérique inclusif lancée en 2018, avec comme objectif la création de quatre mille postes de conseillers numériques.

II.   Le budget des autorités publiques

Dans le cadre des crédits précédemment étudiés, deux entités principales interviennent en matière de communications électroniques et d’économie numérique. Elles ont un statut différent, mais sont toutes les deux dotées de l’autonomie financière : il s’agit de l’Arcep, autorité administrative indépendante chargée de la régulation du secteur des télécoms (A), et de l’ANFR, établissement public administratif ayant pour objet de gérer les fréquences radioélectriques (B).

A.   l’AutoritÉ de rÉgulation des communications Électroniques, des postes et de la distribution de la presse

1.   Une autorité administrative indépendante au service de la régulation des réseaux de communications électroniques

L’Arcep est le régulateur du secteur des télécoms et des postes. Il s’agit d’une autorité administrative indépendante, qui dispose à ce titre de garanties statutaires importantes destinées à la préserver de toute interférence ([5]). Elle dispose en particulier d’une autonomie de gestion dans le cadre du budget qui lui est alloué chaque année par le Parlement.

Les compétences propres de l’Arcep sont définies par le code des postes et des communications électroniques (CPCE). L’Autorité intervient en conséquence dans les domaines suivants :

– elle assure le suivi des déploiements fixe et mobile, détermine les opérateurs dits « puissants » sur les marchés pertinents ainsi que leurs obligations spécifiques et sanctionne leurs manquements, le cas échéant ;

– elle attribue aux opérateurs les ressources en fréquences et numérotation et règle les différends éventuels entre ces opérateurs ;

– elle assure également des missions de régulation dans le secteur postal, qui lui ont été confiées par le législateur en 2005. Elle est notamment chargée, dans ce cadre, d’évaluer le coût du service universel postal et de missions de régulation vis-à-vis des opérateurs de colis ;

– elle veille, depuis 2015, au respect de la neutralité de l’internet ;

– elle mène, en coopération avec d’autres acteurs, des travaux de prospective sur l’avenir des réseaux et sur l’empreinte environnementale du numérique.

L’Arcep assure, par ailleurs et depuis 2019, une mission de régulation du secteur de la presse et une mission de contrôle de l’action de l’Agence nationale de sécurité des systèmes d’information (Anssi).

2.   De nouvelles missions résultant de la loi visant à sécuriser et à réguler l’espace numérique

Au-delà des missions précitées, l’Arcep s’est vu confier de nouvelles missions de régulation des prestataires d’intermédiation de données et des fournisseurs de cloud dans le cadre de la loi n° 2024-449 du 21 mai 2024 visant à sécuriser et à réguler l’espace numérique, dite loi « Sren ».

Ce texte a en effet prévu de la reconnaître comme autorité compétente en matière de services d’intermédiation de données, en application de l’article 13 du règlement sur la gouvernance des données ([6]).

L’Autorité exerce, en conséquence, les nouvelles missions suivantes :

– recevoir les notifications des prestataires d’intermédiation de données, leur attribuer le label européen prévu par le règlement sur la gouvernance des données et veiller au respect de leurs obligations par ces prestataires ;

– préciser les règles et les modalités de mise en œuvre des règles relatives à l’interopérabilité des services de cloud, notamment par l’édiction de spécifications d’interopérabilité et de portabilité et veiller à leur respect par les fournisseurs de services de cloud ;

– assurer le règlement des différends concernant l’évaluation des frais facturés par les fournisseurs de services d’informatique en nuage dans le cadre de transferts de données vers d’autres services ou vers les infrastructures en propre des utilisateurs, d’une part, et l’évaluation des frais liés à la migration vers un nouveau fournisseur, d’autre part.

3.   Un budget prévisionnel en hausse, mais une stagnation problématique des effectifs de l’Arcep en 2025

a.   Un budget prévisionnel de l’Arcep en légère hausse pour l’année 2025

Le budget prévisionnel de l’Arcep est en légère hausse par rapport à 2024, avec des crédits prévisionnels attribués à hauteur de 22,9 M€ en autorisations d’engagement et 25,3 M € en crédits de paiement, ce qui correspond à des hausses de 0,7 % en autorisations d’engagement et 2,3 % en crédits de paiement, respectivement.

Budget prévisionnel de l’Arcep pour l’année 2025

(En millions d’euros)

 

PLF 2025

 

Titre 2

 

Hors titre 2

 

Total

Autorisations d’engagement

17

 

5,9

 

22,9

Crédits de paiement

17

8,3

 

25,3

 

(*) Source : documents budgétaires

Ces crédits sont répartis de la façon suivante :

– dépenses de personnel : 17 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement ;

– dépenses de fonctionnement : 5,9 M€ en autorisations d’engagement et 8,3 M€ en crédits de paiement ;

– dépenses d’investissement : 0,2 M€ en autorisations d’engagement et crédits de paiement ;

– dépenses d’opérations financières : 0,02 M€ en autorisations d’engagement et crédits de paiement.

Ainsi que l’indique l’Arcep dans une contribution écrite adressée à votre rapporteur, les crédits prévus en 2025 repartent du montant en loi de finances initiale pour 2024 et intègrent deux demandes portées par l’Arcep du fait d’obligations contractuelles à caractère immobilier, à savoir la prise en charge de la fin de la franchise à partir de 2025 (0,39 M€ par an) et la révision annuelle de l’indice des loyers des activités tertiaires (0,18 M€).

Aucun crédit supplémentaire n’est, en revanche, accordé pour la mise en œuvre des missions nouvelles issues de la loi Sren ou au titre du renforcement du contrôle de l’Anssi par l’Arcep. Votre rapporteur regrette cette situation, mais comprend que le présent projet de loi de finances intègre une forte dimension de réduction du déficit public.

b.   Des effectifs stables après une légère croissance en 2024

Le plafond d’emploi autorisé en loi de finances initiale a été fixé à 183 équivalents temps plein travaillé (ETPT) et porté à 186 ETPT en application de l’article 12 de la loi n° 2023-1195 du 18 décembre 2023 de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027.

Après échanges avec le responsable de programme, l’Arcep a obtenu, en outre, le transfert de trois emplois en gestion en cours d’année (soit deux emplois pour les missions Sren et un pour le contrôle de l’Anssi), couvrant une partie du besoin estimé par l’Autorité. Le plafond d’emploi de l’Arcep serait en effet de 190 ETP pour 2024, après une hausse logique et progressive des effectifs depuis 2020 en lien avec l’extension des missions attribuées.

Le schéma d’emploi de l’Arcep ne prévoit aucune création de poste en 2025. Lors de son audition, l’Arcep a néanmoins rappelé que les nouvelles missions qui lui sont confiées par la loi Sren nécessiteraient l’octroi de plusieurs postes supplémentaires. L’Autorité évalue ses besoins à quatre ETP, répartis de la façon suivante :

– 1 ETP supplémentaire permettrait de couvrir les besoins relatifs à l’exercice des nouvelles compétences issues de la loi Sren. Le besoin global sur ce sujet n’est satisfait, à l’heure actuelle, qu’à hauteur de 75 % au moyen du transfert des deux emplois précités et du redéploiement d’un ETP en interne ;

– 3 ETP supplémentaires pour les besoins relatifs à sa mission de contrôle de l’Anssi. L’Autorité a indiqué à votre rapporteur s’être, à ce stade, organisée pour bénéficier d’un transfert d’emploi de l’Anssi en 2024. L’Autorité redéploiera, par ailleurs, en 2025 un emploi en interne à cette fin.

B. L’Agence nationale des frÉquences

L’Agence nationale des fréquences (ANFR) a été créée par la loi n° 96‑659 du 26 juillet 1996 de réglementation des télécommunications. Sur le fondement de l’article L. 97-1 du code des postes et des communications électroniques, elle a pour mission « d’assurer la planification, la gestion et le contrôle de l’utilisation, y compris privative, du domaine public des fréquences radioélectriques ».

Elle exerce son activité en concertation avec les onze administrations et autorités affectataires de fréquences radioélectriques, qui sont représentées à son conseil d’administration. Elle est organisée en six directions, avec onze implantations en métropole et quatre outre-mer.

Depuis 2007, l’agence est opérateur principal au sein du programme 134 « Développement des entreprises et régulations ». Ses activités s’inscrivent ainsi dans l’action « Développement des télécommunications, des postes et de la société de l’information », gérée par la direction générale des entreprises (DGE).

  1.   Des missions en extension

Les responsabilités de l’agence se sont progressivement étendues, au fil des lois successives ([7]). À titre principal, elle exerce aujourd’hui les missions suivantes :

 la planification du spectre. Il appartient à l’agence de répartir, après accord du Premier ministre, les bandes de fréquences. Elle coordonne également la position française en la matière, dans le cadre des négociations internationales ;

– la gestion des fréquences. L’agence assigne les fréquences et elle gère l’implantation des stations radioélectriques, afin d’assurer une utilisation optimale des sites disponibles ;

– le contrôle des fréquences. L’agence contrôle l’utilisation des fréquences et dispose à ce titre de pouvoirs d’inspection des sites. Elle est destinataire des réclamations portant sur les cas de brouillage et instruit ces dernières. Par ailleurs, elle s’assure du respect, par les terminaux, des normes européennes en matière radioélectrique. Il s’agit ainsi de l’une des seules agences publiques européennes à effectuer des tests aléatoires portant sur le débit d’absorption spécifique des téléphones portables.

L’Agence nationale des fréquences s’est également vu confier des missions dans les domaines suivants :

– la continuité de la réception des services de télévision. À ce titre, l’ANFR a repris une partie des activités du groupement d’intérêt public France Télé Numérique, après le passage à la télévision numérique terrestre (TNT), notamment le centre d’appels et le traitement des plaintes en brouillage des téléspectateurs. Elle a géré le plan d’accompagnement du transfert de la bande des 700 MHz (2015‑2019), qui comprenait des actions de communication et la distribution d’aides financières (aides aux téléspectateurs et professionnels du spectacle). Elle gère également le fonds d’accompagnement de la réception télévisuelle (FARTV), qui aide les téléspectateurs à s’adapter au passage à la TNT, par l’acquisition d’équipements ou par l’adaptation de leur antenne, individuelle ou collective ([8]) ;

– l’exposition du public aux ondes électromagnétiques. Il s’agit d’une mission nouvellement confiée en 2014 et renforcée par la loi du 9 février 2015 ([9]). L’agence gère ainsi le dispositif national de surveillance et de mesure des ondes, qui, adossé à un fonds, permet à toute personne de faire mesurer son exposition aux ondes électromagnétiques. L’ANFR est notamment chargée de publier des lignes directrices pour harmoniser la présentation des résultats des simulations de l’exposition générée par l’implantation d’une installation radioélectrique soumise à accord ou avis de l’ANFR, de mettre à la disposition des communes une carte des antennes-relais, de définir, recenser puis traiter les points atypiques et d’animer le comité national de dialogue pour assurer l’information de toutes les parties prenantes ;

 la diffusion par voie hertzienne terrestre, en France métropolitaine, de données horaires du temps légal français, mission confiée en 2019 à l’ANFR à la suite de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite loi « Élan ».

2.   Un « retour à la normale » pour le budget de l’agence

Le budget de l’ANFR, dont la subvention pour charges de service public (SCSP) constitue la ressource principale, couvre les dépenses liées à ses activités, y compris la gestion de trois dispositifs comptablement individualisés :

– la surveillance et mesure des ondes (SMO) ;

– le plan d’accompagnement de la bande des 700 MHz (B700) ;

– l’accompagnement de la réception télévisuelle (FARTV).

Depuis 2019, la subvention pour charges de service public de l’ANFR a été revue à la hausse (39,9 M€ en loi de finances initiale pour 2019, 41,5 M€ en loi de finances initiale pour 2023) pour tenir compte :

– de la nouvelle mission de diffusion du signal horaire au 1er janvier 2019 ;

– de la budgétisation (2,5 M€ en base PLF 2019) dans la SCSP du financement du dispositif national de surveillance et de mesure des ondes.

L’année 2024 a été exceptionnelle, d’un point de vue budgétaire, pour l’ANFR, avec une hausse de 8,1 M€ de sa dotation (afin de préparer les Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024) et une augmentation de son plafond d’emploi de 49 ETPT par rapport à la loi de finances initiale de l’année précédente (pour la même raison). L’ANFR avait perçu, en outre, une subvention d’investissement de plus de 3 M€ dans la perspective de cet événement.

En 2024, la subvention pour charges de service public a connu une très forte hausse, puisqu’elle atteint 51,5 M€ en autorisations d’engagement et crédits de paiement, soit une augmentation d’environ 10 M€.

Le projet de loi de finances pour 2025 traduit un « retour à la normale » concernant le budget de l’agence.

Ce budget prévoit en effet une dotation pour charges de service public de 42,5 M€ en autorisations d’engagement et crédits de paiement, ce qui correspond au retrait de la subvention supplémentaire de 8,1 M€ allouée pour les Jeux olympiques et paralympiques (JOP) et à un moindre abondement du fonds de service et de mesure des ondes (- 0,8 M€). La subvention d’investissement de 3,2 M€ pour compléter l’équipement technique pour le contrôle du spectre pour les JOP n’est pas reconduite.

Le plafond d’emploi de l’ANFR diminue également de 59 ETPT, pour revenir au niveau pré-JO, la hausse des ETPT liée aux Jeux olympiques et paralympiques étant intervenue sur les exercices 2023 et 2024). Il atteint donc 295 ETP pour 2025. Comme pour l’Arcep, le schéma d’emploi de l’agence ne prévoit aucune création de poste en 2025.

L’Agence a indiqué, en outre, à votre rapporteur, qu’elle allait procéder, compte tenu de l’inflation, à un prélèvement un peu plus important que l’année dernière sur ses réserves afin de compenser l’augmentation de ses charges de personnel et de ses coûts de fonctionnement.

 


SECONDE PARTIE :
ANALYSE THÉMATIQUE

  1.   Les dÉploiements fixes et mobiles : un État des lieux

A.   LE plan France trÈs haut dÉbit

1.   Le plan « France Très haut débit » : une initiative visant à doter la France d’un réseau fixe de haut niveau permettant d’accéder au très haut débit

Lancé en 2013, le plan « France Très haut débit » (PFTHD) vise à garantir une connectivité de haut niveau sur l’ensemble du territoire, reposant sur le déploiement de réseaux à haut et très haut débits, avec plusieurs objectifs étalés dans le temps :

– pour fin 2020, fournir à tous les Français un accès à un « bon haut débit » (BHD), soit un débit descendant d’au moins 8 Mbit/s ;

– pour fin 2022 : fournir à tous les Français un accès à un « très haut débit » (THD), soit un débit descendant d’au moins 30 Mbit/s ;

– pour fin 2025 : généraliser la fibre optique ([10]).

Dans le cadre de ce plan d’investissement, les opérateurs privés déploient le réseau dans les zones les plus densément peuplées du territoire, alors que les collectivités territoriales, soutenues par l’État, interviennent dans les zones rurales. Tous les acteurs s’inscrivent dans l’objectif d’une généralisation de la fibre optique jusqu’à l’abonné d’ici fin 2025.

2.   Les jalons du bon haut débit (2020) et du très haut débit (2022) ont été tenus

Les deux premiers objectifs du PFTHD, concernant l’accès des Français au bon haut débit fin 2020, puis au très haut débit fin 2022, ont été atteints.

En décembre 2020, 100 % des locaux étaient en effet éligibles au bon haut débit, dont 98,6 % par le biais d’une technologie filaire.

Au 31 mars 2023, 100 % des locaux étaient considérés éligibles au très haut débit, dont 86 % par le biais d’une technologie filaire (soit 36,9 millions de locaux). Il demeure toutefois des exceptions à la disponibilité du très haut débit sur le territoire national, comme l’a relevé à raison l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) dans sa contribution écrite : ces exceptions concernent notamment les territoires ultramarins que sont la Guyane (42 000 locaux non couverts en THD) et la Réunion (33 000 locaux non couverts en THD).

Le tableau ci-dessous détaille les modalités d’éligibilité au très haut débit fixe en fonction de la technologie utilisée.

Éligibilité aux services internet fixes à très haut débit
sur le territoire national

 

T2 2021

T1 2022

T1 2023

T1 2024

Fibre optique

25 570 000

30 815 000

35 291 000

38 645 000

Câble

9 467 000

8 345 000

8 384 000

8 014 000

Cuivre

6 719 000

6 858 000

7 229 740

7 594 000

Satellite

 

 

43 771 220

44 353 000

THD radio

1 508 000

1 679 000

1 808 070

1 677 000

4G fixe (BHD et THD confondus)

24 242 000

42 132 000

43 249 370

43 963 000

Source : Arcep, Couverture territoriale en très haut débit et en bon haut débit, derniers chiffres : T1 2024, mis à jour le 24 juin 2024

Le nombre de locaux concernés par zone du plan France Très haut débit, ainsi que le taux de locaux éligibles à la technologie Fiber to the Home (FttH) au premier trimestre de cette année sont indiqués ci-dessous.

Nombre de locaux et taux de locaux éligibles au FttH
au premier trimestre 2024

Source : questionnaire budgétaire

3.   L’objectif d’une généralisation complète de la fibre fin 2025 paraît en revanche hors d’atteinte

Alors que les deux premiers jalons du plan ont été atteints, l’objectif d’une généralisation complète de la fibre optique fin 2025 paraît en revanche hors d’atteinte.

En 2024, les données fournies par l’Arcep, indiquent qu’à la fin du second semestre, près de 39,3 millions de locaux (sur les 44 millions de locaux référencés) avaient été rendus raccordables à la fibre, soit un taux de couverture en fibre FttH de 89 % du territoire national. Ce sont donc actuellement près de cinq millions de locaux qui restent encore à raccorder à la fibre, compte tenu de l’objectif d’une généralisation fin 2025.

Le relevé géographique ([11]) réalisé par l’Arcep en 2024, qui s’appuie sur les projections des opérateurs, montre que le taux de déploiement devrait être de 95 % fin 2025 pour la France entière et de 96 % fin 2026 sur le même périmètre. Le tableau ci-dessous en synthétise le contenu, en fonction des zones de déploiement concernées.

Synthèse des résultats du relevé géographique de l’Arcep
sur le taux de locaux éligibles à la fibre optique d’ici 2026

 

Taux de déploiement à fin 2023

Taux de déploiement à fin 2025

Taux de déploiement à fin 2026

France entière

86 %

95 %

96 %

Zones très denses

93 %

95 %

96 %

Zones moins denses d’initiative privée

88 %

95 %

96 %

Zones moins denses d’initiative publique

78 %

96 %

98 %

Source : réponse au questionnaire budgétaire du rapporteur

Au deuxième trimestre 2024, le rythme de déploiement des réseaux FttH s’est établi à 655 000 locaux supplémentaires rendus raccordables. La hausse du nombre total de locaux raccordables à la fibre optique est de + 9 % entre le deuxième trimestre 2023 et le deuxième trimestre 2024. Cette dynamique de déploiement est principalement portée, comme l’année dernière, par les réseaux d’initiative publique et les zones d’appel à manifestation d’engagements locaux, dites « Amel » ([12]).

déploiements en fibre optique dans les zones d’initiative publique (2015-2024)

Source : ANCT

Ces premiers éléments permettent d’observer que l’objectif d’une généralisation de la fibre à l’horizon 2025 ne sera, de toute évidence, pas atteint, mais également que les déploiements se poursuivent à un rythme relativement soutenu, bien que très inégal en fonction des zones concernées.

État des déploiements des réseaux fixe en 2024, par zone de déploiement

France entière

Nombre de locaux à couvrir

Nombre de lignes FttH déployées

% de couverture

Zones très denses

7 858 000

7 313 000

92 %

Zone AMII

Dont zone AMII SFR

3 056 000

2 939 000

96 %

Dont zone AMII Orange

13 881 000

12 636 000

91 %

Total zone AMII

16 937 000

15 575 000

92 %

Total zone d’initiative privée

24 734 000

22 720 000

92 %

Zones Amel et fonds propres

Dont zones Amel

1 397 000

1 145 000

82 %

Dont fonds propres

879 000

683 000

78 %

Total zones Amel et fonds propres

2 275 000

1 828 000

80 %

Zone d’initiative publique

Dont RIP soutenus par le plan France THD

16 074 000

13 505 000

84 %

Dont RIP non soutenus par le PFTHD

1 219 000

1 088 000

88 %

Total zone d’initiative publique

17 293 000

14 592 000

84 %

Source : ANCT

Votre rapporteur relève, à cette occasion, que c’est au sein des réseaux d’initiative publique que l’objectif de généralisation de la fibre sera, à terme, le plus proche d’être atteint, ce qui traduit l’engagement fort des collectivités au service de leurs concitoyens. Ce constat appelle également une exigence renforcée vis-à-vis des opérateurs, en particulier dans les zones où des risques significatifs ont été identifiés par les pouvoirs publics (infra).

Votre rapporteur estime, en conséquence, que les pouvoirs publics doivent faire preuve d’une vigilance particulière et de fermeté face aux ralentissements qui interviennent en zone privée actuellement.

Recommandation n° 1 : Maintenir une vigilance accrue face au ralentissement des déploiements et aux retards constatés dans certaines zones pour garantir la réalisation des objectifs fixés, qui constituent des obligations pour les opérateurs concernés.

4.   Des ralentissements inquiétants dans le déploiement de la fibre dans certaines zones de notre territoire, qui appellent la vigilance des pouvoirs publics

Ces ralentissements concernent essentiellement la zone « Fonds propres » et portent à la fois sur les zones « très denses » et les zones « moyennes denses » d’initiative privée (zone AMII).

a.   Au sein des zones très denses (ZTD)

Au sein de la zone « très dense », qui comprend 106 communes et où les opérateurs déploient leurs réseaux respectifs, les déploiements sont à nouveau presque à l’arrêt cette année. L’Arcep observe ainsi, dans son dernier observatoire des réseaux, que « le rythme insuffisant constaté […] ces dernières années chute encore de près de 10% par rapport au second trimestre 2023, avec environ 40 000 locaux rendus raccordables ce trimestre » ([13]).

L’Autorité de régulation relève, en outre, que cette zone continue d’être marquée par de fortes disparités. Comme le montre le tableau ci-dessous, certaines zones très denses de certains départements se trouvent en dessous de la couverture moyenne nationale, qui s’établit à 93%.

Rythme de progression du taux de couverture des zones de très denses de départements où le taux de couverture est inférieur
à la moyenne nationale au second trimestre 2024

Source : Arcep

Si le fort ralentissement des déploiements est imputé, par les opérateurs, à l’existence de raccordements complexes, votre rapporteur ne peut que regretter que certaines zones des communes concernées demeurent non raccordées, ce qui crée logiquement des incompréhensions pour leurs habitants. Il prend acte, toutefois, de l’engagement pris par l’un des opérateurs, Orange, d’accélérer ses déploiements en zone très dense ([14]). Il estime, enfin, que le règlement de la question du financement des raccordements complexes (infra) pourrait régler une partie des difficultés observées.

b.   Au sein des zones moins denses d’initiative privée

Au sein des zones moins denses d’initiative privée (zones AMII), les opérateurs se sont engagés, en 2018, devant le Gouvernement à déployer la fibre optique jusqu’à l’abonné dans près de 3 600 communes au niveau national. À la fin de l’année 2020, 92 % des locaux devaient être rendus raccordables à la fibre optique. En outre, l’opérateur Orange s’était engagé à rendre raccordable 100 % des locaux d’ici fin 2022.

Ces engagements sont juridiquement contraignants, sur le fondement de l’article L. 33-13 du code des postes et des communications électroniques, et font donc l’objet d’un suivi attentif de la part de l’Arcep, qui peut sanctionner tout manquement.

Au sein de ces zones, l’essentiel de l’effort de déploiement de la fibre est par ailleurs porté par l’opérateur historique : Orange s’est en effet engagé, en 2018, sur un périmètre de 2 978 communes contre 641 communes pour SFR (ratio de l’ordre de 80 % - 20 % en volume de prises).

À la fin du 1er trimestre 2024, environ 90 % des locaux des communes sur lesquelles Orange s’est engagé et 96 % de ceux des communes sur lesquelles SFR s’est engagé ont été rendus raccordables.

Les déploiements en zone AMII sont néanmoins marqués par des retards qui doivent être résorbés et ont conduit les pouvoirs publics à agir afin de garantir le respect des engagements souscrits.

Fin 2020, constatant qu’Orange risquait ne pas tenir ses engagements, le Gouvernement a en effet saisi l’Arcep en vue de l’ouverture d’une procédure prévue à l’article L. 36-11 du code des postes et des communications électroniques (CPCE), visant à contrôler le respect des objectifs de déploiement fixés à fin 2020 et à sanctionner les manquements, le cas échéant.

L’Arcep a constaté, par la décision n° 2022-0573-RDPI, que l’opérateur Orange avait manqué la première échéance prévue par ses engagements (31 décembre 2020) et l’a mis en demeure « d’assurer, au plus tard le 30 septembre 2022, que 100 % des logements ou locaux à usage professionnel des communes ou parties de communes concernées par ses engagements […] sont rendus raccordables ou raccordables sur demande (dans la limite des 8 %) ».

Orange a contesté cette décision devant le Conseil d’État (CE), puis introduit une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) concernant le pouvoir de sanction de l’Arcep et l’article L. 33-13 du code des postes et des communications électroniques rendant juridiquement opposables les engagements pris par Orange en zone AMII.

Dans une décision n° 464349 du 21 avril 2023, le Conseil d’État a confirmé le pouvoir de sanction de l’Arcep et l’opposabilité des engagements pris sur le fondement de l’article L. 33-13 précité et décidé de ne pas transmettre la QPC au Conseil constitutionnel. Constatant le non-respect de la première échéance des engagements de déploiement en fibre optique en zone AMII, l’Arcep a, dans sa formation restreinte (dite « de sanction »), prononcé le 7 novembre 2023 une sanction financière de 26 millions d’euros à l’encontre d’Orange.

En 2024, Orange a proposé de nouveaux engagements visant à remplacer ceux initialement prévus pour la deuxième échéance. Au titre de ces nouveaux engagements, acceptés par le Gouvernement en mars 2024 après avis de l’Arcep, Orange doit :

– entre le 1er juillet 2023 et le 31 décembre 2025, rendre raccordables au moins 1,12 million de locaux (i.e. logements et locaux professionnels) sur l’ensemble de la zone AMII ;

– entre le 1er juillet 2023 et le 31 décembre 2024, rendre raccordables au moins 140 000 locaux sur un périmètre constitué des cinquante-cinq établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) les moins couverts en FttH à date de l’engagement ;

– au plus tard en juin 2024, déclarer raccordables à la demande (« RAD ») tous les immeubles non encore raccordables et rendre raccordable tout local suite à une commande d’un opérateur commercial (OC) portant sur un immeuble déclaré RAD dans un délai de six mois (sauf exceptions dûment justifiées).

La vigilance de l’Arcep a également conduit sa formation de règlement des différends, de poursuite et d’instruction à prononcer des mises en demeure, le 28 mai 2024, à l’encontre d’Orange et de XpFibre de respecter l’obligation de complétude des déploiements FttH d’ici au 31 décembre 2025. Ces deux mises en demeure concernent, pour Orange, 7 983 points de mutualisation, où sont constatés environ 560 000 locaux non raccordables sur un total d’environ 2,97 millions de locaux recensés, et, pour XpFibre (SFR), 750 points de mutualisation, où sont constatés environ 53 000 locaux non raccordables sur un total d’environ 340 000 locaux recensés.

Votre rapporteur considère que ces engagements sont de nature à permettre de rattraper le retard pris par l’opérateur historique. Il souhaite que le Gouvernement et l’Arcep soient vigilants et fermes vis-à-vis du bon respect par Orange et SFR de leurs obligations de déploiement en zone AMII.

c.   Des progrès en zones Amel

Lancées en 2017, les zones d’appel à manifestation d’engagement local, dites zones « Amel », visaient à identifier les projets d’investissement d’opérateurs privés pour couvrir des zones prévues initialement dans le cadre des projets de réseau d’initiative publique (RIP). Les engagements pris sont opposables aux opérateurs sur le même fondement juridique que pour la zone AMII, à savoir l’article L. 33-13 du CPCE. On dénombre à ce jour dix engagements en zones Amel et qui ont été acceptés par le Gouvernement.

Les données disponibles indiquent que les déploiements dans les territoires concernés par des « Amel » connaissent un rythme satisfaisant. Au premier trimestre 2024, 1,1 million de locaux en zone Amel étaient éligibles à la fibre optique, soit 400 000 nouveaux locaux éligibles par rapport au 1er trimestre 2023. Le taux de locaux éligibles au FttH au sein des Amel a donc progressé de 26 points de pourcentage sur un an, ce qui est très significatif.

Progrès des déploiements au sein des zones Amel (T1 2023 – T1 2024)

 

T1 2023

T1 2024

Nombre de nouvelles prises construites entre le T1 2023 et le T1 2024

Nombre de locaux raccordables (en millions)

0,7

1,1

+0,4

Taux de locaux éligibles au FttH

53%

79%

+26 points

Source : questionnaire budgétaire.

Ce rythme est aussi le fruit de la vigilance du régulateur, qui a su procéder à des mises en demeure lorsque cela était nécessaire. Dans sa contribution écrite, l’Arcep indique, par exemple, avoir mis en demeure Savoie Connectée et Nièvre Numérique de respecter les engagements pris en application de l’article L. 33-13 du code des postes et des communications électroniques.

Un tableau annexé au présent rapport détaille le niveau d’avancement de toutes les Amel concernées.

d.   Une dynamique désormais presque exclusivement portée par les réseaux d’initiative publique 

Quatre-vingts réseaux sont en cours de déploiement au sein de zones de réseau d’initiative publique (RIP), c’est-à-dire des zones identifiées comme non rentables par les opérateurs.

Au sein des zones d’initiative publique (ZIP), la dynamique est favorable, avec une progression sur un an de + 2,5 millions de locaux rendus raccordables à la fibre FttH, pour un total actuel de 14,18 millions de locaux éligibles.

Évolution du nombre de locaux rendus éligibles au FttH
en zone RIP en 2023-2024

 

2023 T1

2023 T2

2023 T3

2023 T4

2024 T1

Nombre de locaux (en millions)

11,88

12,50

13,06

13,71

14,18

Taux de locaux éligibles au FttH %

71%

74%

77%

80%

82%

Source : Arcep

Les situations varient fortement en fonction des réseaux d’initiative publique concernés : un tableau annexé au présent rapport détaille le niveau d’avancement de tous les RIP engagés.

De façon générale, on observe que certains projets sont en voie d’achèvement (Oise, Loire, Val d’Oise, par exemple), quand d’autres ont une échéance plus lointaine. Au niveau régional, la Bretagne, la Bourgogne‑Franche-Comté et certains territoires ultramarins (en particulier, dans la zone atlantique) présentent ainsi un taux de couverture en fibre optique plus faible que la moyenne nationale observée sur la zone moins dense d’initiative publique, tandis que les régions Hauts-de-France et Île-de-France sont les plus avancées en matière de déploiement en FttH.

L’avancement inégal des déploiements selon les projets – et donc entre régions – s’explique par de multiples facteurs :

– les caractéristiques géographiques des territoires ont une forte influence sur la capacité des projets à progresser rapidement : la dispersion de l’habitat, la présence d’obstacles naturels (montagnes, littoral, etc.) ou les éventuels aléas climatiques (neige, tempêtes, incendies, glissements de terrain, etc.) sont autant de contraintes susceptibles de ralentir le rythme de déploiement d’un réseau en fibre optique ;

– la capacité de mobilisation des acteurs institutionnels locaux est déterminante (délai d’octroi des permissions de voirie ou d’occupation du domaine public, par exemple), tout comme l’existence d’un tissu de PME ou de main-d’œuvre locale qualifiées et mobilisables dans le cadre du chantier de la fibre.

– la proportion d’infrastructures existantes et la capacité à les réutiliser (réseaux cuivre ou d’électricité, notamment) peuvent impacter les déploiements.

Afin de pallier les difficultés à raccorder certains logements et locaux professionnels, un soutien supplémentaire de l’État au financement de la création des infrastructures nécessaires aux raccordements finals, à hauteur de 150 M€, est prévu au bénéfice de la fibre optique (ou de débits équivalents). L’arrêté du 19 avril 2022, publié au Journal officiel du 23 avril 2022, a approuvé le cahier des charges de l’appel à projets « Création d’infrastructures de génie civil nécessaires aux raccordements finals ».

Aux caractéristiques locales préexistant aux déploiements s’ajoutent les choix stratégiques effectués par les collectivités territoriales (ou leurs groupements) qui portent des projets de RIP : certaines ont fixé très tôt un objectif de généralisation du FttH sur leur territoire, lançant des marchés publics pour atteindre cet objectif, tandis que d’autres ont préféré procéder en plusieurs phases distinctes, afin de s’adapter aux évolutions du marché de la fibre optique et mobiliser progressivement les financements nécessaires aux investissements. Le montage opérationnel retenu influence également le calendrier de déploiement : les collectivités qui choisissent de mobiliser plusieurs partenaires privés doivent ainsi assurer leur coordination tout au long du projet.

La crise sanitaire liée à l’épidémie de covid-19 a eu des effets hétérogènes sur les territoires, ce qui a pu accroître les disparités préexistantes. Certains projets ont dû s’interrompre totalement, tandis que d’autres ont réussi à préserver une partie de leur activité. Certains territoires ultramarins ont ainsi été particulièrement pénalisés par la crise.

Si la gouvernance des projets de RIP relève de la compétence exclusive des collectivités territoriales au titre de l’article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales, celles-ci bénéficient néanmoins d’un suivi attentif et d’un accompagnement du Gouvernement, qui a fait de la couverture numérique du territoire une de ses réformes prioritaires.

Pour faciliter l’atteinte de l’objectif, des travaux menés par la direction générale des entreprises et l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) visent à lever les freins au déploiement au travers de travaux de normalisation et d’harmonisation et la diffusion de bonnes pratiques, en lien avec l’Arcep. Les équipes du programme « France Très haut débit » de l’ANCT assurent ainsi un suivi individualisé de chacun des projets de RIP, permettant, le cas échéant, de mettre en place des ateliers spécifiques pour répondre aux porteurs de projets et traiter les problématiques opérationnelles rencontrées. Les services déconcentrés de l’État sont associés, en tant que de besoin, à la recherche de solutions et à la mise en place d’instances locales de dialogue et de suivi.

e.   Des déploiements en zone publique qui pourraient être entravés faute de crédits disponibles

En zone RIP, les déploiements pourraient être freinés, à terme, faute de crédits disponibles.

Les crédits du programme 343 ont fait l’objet d’une annulation partielle, au début de cette année, après la publication du décret du 21 février 2024 portant annulation de crédits. Ce décret avait en effet retranché 38 M€ en autorisations d’engagement et 117 M€ en crédits de paiement affectés au financement des réseaux d’initiative publique. La commission supérieure du numérique et des postes (CSNP) a regretté cette décision dans son avis de juin dernier et préconisé de « réintégrer dans le projet de loi de finances pour 2025 les autorisations d’engagement et les crédits de paiement annulés en février 2024 pour mener à terme le PFTHD » ([15]).

Votre rapporteur a souhaité interroger l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) sur les effets de ce premier « coup de rabot ».

Il apparaît, après consultation des acteurs, que le besoin agrégé en 2024 était, en valeur initiale, de 518,9 M€, dont 443,5 M€ portés par le programme 343 (le reste étant financé par le programme 364). Ce besoin a ensuite été affiné et précisé, à l’aide d’une méthodologie d’analyse des coûts élaborée par l’inspection générale des finances et mise en œuvre par l’ANCT, pour une estimation finale de 359,4 millions d’euros.

Ce montant est couvert, en l’état, par les crédits de paiement disponibles au sein du programme 343.

Dans sa contribution écrite adressée à votre rapporteur, l’ANCT relève toutefois que si l’annulation de crédits de février n’a pas eu d’effet sur les déploiements, ce n’est que dans la mesure où « les bénéficiaires du PFTHD, et notamment les collectivités porteuses de RIP – représentant 98 % du besoin financier –, ont vu pour certaines leurs déploiements prendre du retard ou ont exprimé des demandes de versement un peu trop ambitieuses d’un point de vue calendaire » ([16]). En conséquence, ces besoins se reporteront de 2024 à 2025, ce qui implique « que les crédits de paiement concernés par la coupe budgétaire en 2024 soient ré-abondés in fine au bénéfice du PFTHD, afin que celui-ci puisse honorer l’ensemble des demandes de ses bénéficiaires ».

L’Agence rappelle que les engagements de l’État, matérialisés au sein des conventions signées par l’ANCT pour le compte de l’État, exigent le versement in fine des subventions prévues : « Il apparaît donc essentiel que des garanties soient apportées par le ministère du budget quant à la disponibilité lors des prochaines années des crédits prévus jusqu’à présent, sous peine de faire courir un risque juridique à l’État. » ([17]).

Au sein du projet de loi pour 2025, environ 220 M€ sont prévus pour le financement des RIP, raccordements complexes compris. On peut s’interroger sur la capacité d’un tel montant à satisfaire aux engagements déjà contractés pour continuer de déployer les RIP.

Votre rapporteur est donc inquiet devant le décalage du versement de ces financements, indispensables pour achever le plan France Très haut débit, dans un contexte où le programme 343 a déjà été fortement mis à contribution en 2024. Il constate, en outre, que la France est très avance, en Europe, sur le déploiement de la fibre grâce à ce plan, dont le coût est finalement assez faible au regard de l’actif que constituent, pour notre pays, des réseaux de communications fixes de qualité (3,5 milliards d’euros sur l’ensemble du plan pour la part État).

5.   Maintenir une ambition forte pour assurer la qualité des déploiements

Votre rapporteur souhaite à nouveau insister, dans le cadre du présent avis, sur les enjeux relatifs à la qualité des déploiements.

L’exploitation des réseaux de fibre optique souffre actuellement de dysfonctionnements particulièrement forts sur certaines zones du territoire et qui peuvent susciter un mécontentement de la part des collectivités et des citoyens (échecs de raccordement, coupures, dégradation d’infrastructures, etc.). Ces difficultés, qui pénalisent le consommateur et compromettent l’image de réussite du PFTHD, sont le fruit de plusieurs facteurs :

– la conception de certains réseaux historiquement mal dimensionnés ou atypiques ;

– un rythme de raccordements annuels extrêmement élevé (20 000 locaux par jour depuis 2018) ;

– des processus insuffisamment définis : contrôle insuffisant des raccordements par les opérateurs d’infrastructures FttH, manque de formation des intervenants, etc. ;

– une sous-traitance en cascade menant à une valorisation faible des intervenants de terrain.

Votre rapporteur a conscience que cette question fait l’objet d’une prise en compte depuis plusieurs années. Dès 2019, l’Arcep a en effet réuni les opérateurs d’infrastructures et les opérateurs commerciaux de façon régulière en vue d’améliorer la qualité des raccordements et de l’exploitation des réseaux et de résoudre les difficultés observées. Une feuille de route avait d’ailleurs été publiée en 2020, avant qu’un plan d’action vienne la décliner en novembre 2021.

Lors des auditions réalisées par votre rapporteur, les opérateurs ont indiqué avoir fait des efforts pour améliorer la qualité et le suivi des interventions. Ces efforts se concentrent autour des trois axes définis avec le Gouvernement et l’Arcep pour mettre fin aux problématiques de dégradation de qualité et de service trop souvent observées, à savoir :

– un renforcement de la formation des intervenants et de la qualité des interventions sur le terrain, avec la mise en place d’une certification au niveau des intervenants et des entreprises ;

– une amélioration des flux d’échange entre opérateurs commerciaux et opérateurs d’infrastructure, qui s’est notamment traduite par la mise en place d’un outil de suivi en temps réel des interventions (e-intervention), la transmission par les opérateurs commerciaux de leurs plannings d’intervention aux opérateurs d’infrastructure en faisant la demande, et, enfin, la réalisation de comptes rendus d’intervention (CRI) ;

– la mise en œuvre de plans de reprise des infrastructures dégradées, que ce soit au niveau des points de mutualisation ou des réseaux vieillissants ou mal dimensionnés qui nécessitent une reprise globale de l’infrastructure (pour les opérateurs Altice, Altitude Infra et Iliad).

Les éléments transmis à votre rapporteur permettent de mesurer le respect de ces différents engagements et de constater que des progrès significatifs ont été réalisés.

Sur le premier axe (formation), il apparaît que de réels efforts de formation ont été engagés par les opérateurs. D’après les chiffres transmis par la Fédération française des télécoms, 100 % des sous-traitants de rangs 1 et 2 étaient labellisés début 2024. Les opérateurs réalisent des audits de terrain (environ 4 500 audits par mois) pour vérifier que les techniciens respectent bien le référentiel de compétence précité. Les audits réalisés en 2023 ont conduit à plus de 150 arrêts de chantiers en raison de manquements critiques à la sécurité.

Sur le deuxième axe, votre rapporteur observe que l’outil e-intervention est mis en œuvre sur l’ensemble des réseaux par les quatre opérateurs d’envergure nationale. Les premiers retours d’expérience montrent toutefois que des réglages sont encore nécessaires pour fiabiliser les données. En outre, les plannings sont désormais partagés trois fois par semaine depuis février 2024 entre opérateurs. Il apparaît néanmoins que seuls Altitude et Axione semblent réaliser des audits sur des volumes substantiels en s’appuyant sur ces plannings.

Enfin, sur le troisième axe, plusieurs plans de reprise ont effectivement été engagés par les opérateurs concernés. Altitude Infra a ainsi procédé à la reprise de 70 points de mutualisation (PM) entre mi-2022 et fin 2023 ; l’opérateur a en outre souhaité prolonger son plan de reprise, avec la reprise de 350 nouveaux PM d’ici fin 2025. L’opérateur Free est en train de procéder à la transformation de points de mutualisation de « grande capacité » en points standards (2024-2025). Enfin, XpFibre s’est engagé, pour sa part, à reprendre 900 points d’ici fin 2024 : début mars 2024, 92 % des PM étaient repris ou les travaux étaient engagés.

Votre rapporteur relève également, que, lors des auditions, les opérateurs d’infrastructures (OI) ont indiqué mener des contrôles de qualité « à chaud » et « à froid » afin de s’assurer notamment du respect des règles de sécurité et de qualité des interventions menées. Il considère aussi que le suivi de ces questions est grandement facilité par la publication, par l’Arcep, depuis l’année dernière, de données issues d’un observatoire dédié.

L’ensemble de ces éléments conduit votre rapporteur à faire preuve d’un optimisme raisonnable sur la question de la qualité des déploiements. Néanmoins, si la situation actuelle s’améliore incontestablement, de très nombreux retours persistent autour de cette question au niveau local, ce qui démontre que les efforts des opérateurs doivent s’amplifier. De ce point de vue et dans la perspective de la fermeture du réseau historique (cuivre), votre rapporteur invite à nouveau le régulateur à faire preuve de vigilance et de fermeté vis-à-vis des opérateurs sur cette question.

Recommandation n° 2 : Maintenir une vigilance accrue sur les efforts engagés par les opérateurs en faveur d’un renforcement de la qualité des déploiements.

Votre rapporteur soutient en outre la recommandation, formulée par l’Arcep, de permettre au régulateur de réaliser des audits en cas de problème de qualité sur les réseaux, à la charge des opérateurs concernés.

Recommandation n° 3 : Faire évoluer le droit pour permettre à l’Arcep de réaliser des audits en cas de problème de qualité sur les réseaux, à la charge des opérateurs concernés.

6.   Traiter efficacement la question des raccordements complexes

La complétude du déploiement des réseaux de communications électroniques fixes est indispensable pour assurer un égal accès des citoyens à la fibre. Sa mise en œuvre, qui soulève des enjeux différents en fonction des zones du plan, implique nécessairement de traiter la question des raccordements complexes.

Le raccordement à la fibre nécessite en effet la mobilisation d’infrastructures d’accueil adaptées (fourreaux, poteaux). Des travaux sont parfois nécessaires en parties publiques et/ou privatives pour finaliser les raccordements, ce qui constitue un enjeu de financement.

a.   Les raccordements complexes au sein du domaine public

Sur le domaine public, jusqu’en limite de domaine privé et en dehors des zones très denses, la réalisation des travaux de génie civil nécessaires aux raccordements finals incombe à l’opérateur d’infrastructure de la zone, conformément à la réglementation de l’Arcep sur les conditions d’accès à un réseau FttH et à l’obligation de complétude, précisées dans sa recommandation du 28 juillet 2023. Cette responsabilité ne s’applique pas pour les constructions neuves, régies par le code de l’urbanisme (notamment, l’article L. 332-15).

Pour agir sur les raccordements complexes, il convient, tout d’abord, d’en évaluer le nombre. Cette évaluation est difficile et ne fait pas consensus à la date de rédaction du présent avis.

Interrogée par votre rapporteur, l’Arcep indique ainsi dans sa contribution écrite ne pas avoir connaissance « à ce stade d’un chiffrage fiable du nombre de raccordements nécessitant la recréation de génie-civil ou sa réparation en domaine public ».L’autorité souligne toutefois que « les estimations avancées varient entre 0,1 % et 4 % selon les sources et les territoires, pour un coût unitaire variant entre 3000 € et 5000  » ([18]).

La direction générale des entreprises indique, quant à elle, avoir demandé « à chaque opérateur d’infrastructure, de lui transmettre fin 2023, le taux d’échec de raccordements complexes en partie publique constaté en 2022, et le stock de raccordements complexes déjà constatés en 2023 sur chacun des réseaux ». Les résultats obtenus sont les suivants : « le taux d’échec de raccordement en partie publique est estimé autour de 0,66 %, avec un coût de travaux de l’ordre de 440 M€. Il est toutefois probable que ce taux augmente à mesure que les déploiements avancent, et que la typologie des zones nouvellement couvertes soient plus propices aux raccordements complexes (zones moins denses et plus rurales) » ([19]).

Deux situations peuvent alors se présenter :

– si le raccordement complexe se situe en zone d’initiative publique, sa prise en charge sera possible dans certaines conditions dans le cadre de l’appel à projets « Création d’infrastructures de génie civil nécessaires aux raccordements finals » ouvert d’avril 2022 à avril 2023 et géré par l’Agence nationale de la cohésion des territoires ;

– si le raccordement complexe en situe en zone moins dense d’initiative privée, sa prise en charge incombe à l’opérateur d’infrastructures au regard de ses obligations de complétude. Ce dernier peut en revanche, comme l’a rappelé l’Arcep dans sa contribution écrite, intégrer cet enjeu « pour la construction des tarifs d’accès au réseau FttH, dans le respect des principes de non-discrimination, d’objectivité, de pertinence et d’efficacité des investissements » ([20]).

Dans ce second cas, la direction générale des entreprises relève que le coût ne pourra vraisemblablement pas être absorbé par les opérateurs d’infrastructure seuls. Cela a conduit les opérateurs à entamer des discussions avec l’Arcep pour répercuter sur les opérateurs commerciaux la partie de ces coûts non financée, avec la création d’une nouvelle composante tarifaire sur le segment « point de mutualisation-point de branchement optique » (PM-PBO).

Des discussions sont également intervenues afin d’envisager une péréquation tarifaire sur le marché de détail et la visibilité des différents acteurs sur les tarifs. La direction générale des entreprises a indiqué à votre rapporteur avoir d’ailleurs encouragé l’initiative de la Banque des territoires pour la constitution d’un montage financier permettant de solvabiliser la construction de génie civil ([21]). L’objectif de cette structure aurait été de prendre en charge les coûts de construction de génie civil, de les mutualiser et de les répartir entre les opérateurs d’infrastructures participants. Cette initiative n’a finalement pas abouti, en raison notamment :

– de l’exigence des opérateurs d’infrastructure d’une répercussion intégrale des surcoûts, dont le montant serait déterminé à l’avance, dans les tarifs d’accès au réseau payés par les opérateurs commerciaux, exigence à laquelle les opérateurs commerciaux se sont opposés ;

– des synergies permises par la mutualisation des travaux, jugées insuffisamment significatives par certains opérateurs d’infrastructure.

Dans ce contexte, votre rapporteur est favorable à une reprise des échanges sur cette question, en lien avec les pouvoirs publics, afin qu’une solution se dégage. La mise en place d’un véhicule de financement ad hoc est souhaitable, à condition que ce dernier ne mobilise pas de financements publics.

Recommandation n° 4 : Soutenir l’initiative de création d’un montage financier permettant de sécuriser le financement des raccordements complexes situés sur le domaine public sans mobiliser toutefois directement de financement public.

Au sein des zones d’initiative publique, force est par ailleurs de constater que les 150 M€ disponibles dans le cadre de l’appel à projets précité ne suffiront pas à financer les raccordements complexes concernés.

Dans sa contribution écrite, l’ANCT indique que 39 collectivités ont sollicité cet outil de financement. À la date de rédaction du présent avis, les données partielles qu’il est possible d’extraire font état de 160 000 cas de raccordements complexes pour un coût total de 532 millions d’euros.

Votre rapporteur soutient en conséquence l’abondement à terme du financement de ces raccordements à la hauteur des besoins des réseaux d’initiative publique, afin de garantir un égal accès de nos concitoyens à la fibre.

Recommandation n° 5 : Accroître à terme le financement attribué aux raccordements complexes en zone publique pour assurer la complétude des déploiements, dans un contexte marqué par la fermeture du réseau cuivre.

b.   Les raccordements complexes en domaine privé

La question des raccordements complexes sur un domaine privé a fait l’objet d’un rapport spécifique du Conseil général de l’économie, de l’industrie, de l’énergie et des technologies (CGE), qui estime que leur proportion est comprise entre 6 % et 8 % des locaux, soit 1,1 à 1,4 million de propriétaires concernés. Le CGE évalue le besoin de financement de ces raccordements complexes dans une fourchette comprise entre 640 M€ et 1,05 Md€.

Le financement de raccordements complexes sur des domaines privés diffère évidemment du financement sur le domaine public, puisque la réalisation de travaux en parties privées sont, par défaut, à la charge des particuliers.

Dans son rapport, le CGE considère que l’État ne doit pas s’abstenir d’agir et recommande la mise en place « d’un dispositif de soutien aux raccordements les plus complexes en domaine privé ». Il propose que soit élaboré un dispositif prenant en compte la capacité des personnes concernées à payer les travaux (enjeu des foyers à faibles revenus), à travers des conditions de ressources, et un système de plafonnement du soutien complet à un référentiel de prestation à soutenir.

Le CGE estime, en revanche, que l’aide à la résolution des raccordements complexes en domaine privé ne doit pas reposer entièrement sur l’État. La prise en charge partielle du dispositif par les opérateurs de communications électroniques apparaît en effet envisageable, compte tenu de l’effet d’aubaine lié à l’augmentation du nombre de d’usagers de la fibre optique. Le CGE propose en conséquence de demander aux opérateurs commerciaux des engagements sur « la prise en charge des travaux légers (coût inférieur à 200 €) (...) [et] l’accompagnement de leurs clients tout au long du processus de fermeture du cuivre ». Le rapport conseille également de solliciter les co-financements éventuels des collectivités qui ont déployé des réseaux de fibre optique dits « d’initiative publique ».

Votre rapporteur soutient l’initiative du Gouvernement, qui a prévu une enveloppe de 16 millions d’euros afin d’expérimenter un financement public des raccordements au sein du domaine privé conformément à l’avis du CGE.

B.   le New Deal mobile

Le New Deal mobile, annoncé en janvier 2018, a pour objectif de généraliser une couverture mobile de qualité pour tous les Français. En priorisant l’objectif d’aménagement des territoires plutôt qu’un critère financier pour l’attribution des fréquences, l’État a ainsi décidé d’orienter l’effort des opérateurs vers la couverture du territoire, au moyen d’obligations de couverture inédites.

En juillet 2018, de nouvelles obligations ont été inscrites dans les autorisations en vigueur d’utilisation de fréquences, ainsi que dans les autorisations d’utilisation de fréquences (qui ont pris ou prendront effet à compter de 2021 ou 2024, selon les opérateurs) délivrées en novembre 2018.

Ces nouvelles obligations sont les suivantes :

– passer en très haut débit mobile (4G) d’ici fin 2020 la quasi-totalité des sites mobiles existants ([22]) ;

– améliorer progressivement la qualité des réseaux mobiles, en posant des obligations de couverture en « bonne couverture » ;

– proposer des offres de couverture mobile à l’intérieur des bâtiments ;

– apporter le très haut débit mobile d’ici fin 2020 sur les axes routiers prioritaires et, à terme, sur les principaux axes ferroviaires ;

– améliorer localement la couverture des territoires, via un dispositif de couverture ciblée répondant aux besoins des collectivités.

1.   Un objectif atteint de généralisation et de montée en qualité de la couverture mobile

Le New Deal mobile est un succès au regard de son objectif principal, à savoir la généralisation de la couverture mobile sur le territoire national.

Dans son point d’étape en date du mois de février dernier, l’Arcep relève, s’agissant du très haut débit mobile entre fin 2017 et fin 2022, que « le nombre de sites équipés en 4G a plus que doublé et [que] les opérateurs mobiles ont déployé la 4G sur 9 600 à 15 500 sites environ selon les opérateurs » ([23]).

L’Autorité souligne, à cet égard, que le New Deal mobile a permis de faire passer « la part du territoire bénéficiant de la couverture 4G des quatre opérateurs (…) de 45 % début 2018 à 88 % au troisième trimestre 2023 » et de réduire, sur la même période, la part du territoire située en zone blanche de la 4G de 11 % à 1,9 %. Au 30 juin 2024, plus de 99 % des sites mobiles étaient équipés en 4G selon les opérateurs.

Dans sa contribution écrite, l’Arcep présente une comparaison éclairante pour mesurer comment la couverture mobile s’est renforcée en quelques années en France : alors qu’en 2015, « seuls six départements, tous situés en Île-de-France étaient couverts à plus de 90 % de leur surface », fin 2022, « seuls six départements métropolitains disposent d’une couverture de leur territoire inférieure à 90 % ».

Du point de vue du service « voix et SMS », plus de 99 % de la population bénéficie désormais d’une couverture de qualité a minima en « bonne couverture » (voir encadré ci-dessous). Le taux de la population bénéficiant d’une « très bonne couverture » qui se situait entre 91,2 % et 93,6 % selon l’opérateur fin 2020, oscille entre 92,3 % et 96,1 % fin 2022.

La qualité de service des réseaux mobiles a également fortement progressé grâce au New Deal mobile. Les données fournies par l’Arcep à votre rapporteur indiquent que les indicateurs de qualité vocale sur les services voix et SMS (2G et 3G) ont progressé de 8 % à 10 % selon les zones, entre 2019 et 2023. La qualité du service d’internet mobile a également progressé pendant cette période, dans des proportions similaires pour ce qui concerne le débit descendant à au moins 3 Mbit/s (de 77% à 88% entre 2018 et 2023). Sur cette même période, la proportion de débits mesurés supérieurs à 8 Mbit/s progresse encore plus fortement, passant de 64 % à 82 %.

2.   Un dispositif de couverture ciblée qui est efficace et permet de déployer des sites mobiles en zone rurale

Les progrès de la couverture mobile ont fortement concerné les zones rurales, grâce à la mise en place du « dispositif de couverture ciblée » (DCC). Au sein de ces zones, moins rentables, il était en effet nécessaire que la puissance publique impose aux opérateurs des exigences de déploiement adaptées aux besoins des territoires.

Au 30 juin 2024, les opérateurs ont été désignés sur 4 733 zones identifiées par arrêté ministériel pour apporter, dans un délai maximal de 24 mois, de la couverture mobile en voix et SMS (3G) et un accès mobile à très haut débit (4G). Il ne restera, en 2025, qu’une centaine de sites à identifier par arrêté avant l’achèvement du dispositif en 2027.

Dans le cadre du DCC, plus de trois mille sites ont été mis en service – avec une moyenne de deux pylônes par jour mis en service.

Avancement du dispositif de couverture ciblÉe – 30 juin 2024

Source : Arcep

Le rythme de déploiement des sites mobiles au sein du DCC est satisfaisant, même si certains problèmes persistent encore.

Sollicitée par votre rapporteur, l’ANCT a recensé plusieurs types de difficultés expliquant les retards pris sur le déploiement de certains sites mobiles.  Ces difficultés trouvent leur origine dans des procédures administratives, dans l’acceptabilité des déploiements par les riverains ou certaines mairies ou encore dans le raccordement des sites à une alimentation en énergie.

Difficultés recensées sur le DCC par catégorie – mars 2021

 

Source : ANCT, Plateforme de remontée des difficultés : statistiques.

La levée de ces difficultés nécessite de recourir à des mesures législatives de simplification, dont certaines étaient en cours de discussion au moment de la dissolution de l’Assemblée nationale par le Président de la République le 9 juin dernier. C’est la raison pour laquelle votre rapporteur soutient la reprise rapide de l’examen des textes concernés et en fait une priorité pour l’année qui vient (infra).

Par ailleurs et comme le relève l’Arcep dans sa contribution écrite, le dispositif de couverture ciblée n’est pas le seul levier permettant d’améliorer la qualité de la couverture mobile en zone rurale, puisque « sur les près de 35 000 sites mobiles ouverts commercialement, plus de 23 500 (soit 67 % des sites) sont situés en zones rurales » ([24]).

En outre, bien que les performances mesurées en zones rurales restent en-deçà des performances en zones urbaines, le rattrapage de celles-ci par celles-là devrait se poursuivre du fait du dispositif de couverture ciblée (jusqu’en 2027), mais aussi de l’obligation de « bonne couverture » voix et SMS fixée à 99,8 % de la population, pour laquelle les échéances s’échelonnent entre 2028 et 2031 selon les opérateurs.

L’Autorité relève enfin que « les obligations fixées dans le cadre des autorisations de fréquences de la bande 3,5 GHz (bande cœur de la 5G) contribueront également à cette amélioration avec le déploiement d’au moins 25 % des nouveaux sites dans les communes des zones peu denses et celles des territoires d’industrie, les obligations de montée en débit des sites existants ou encore de couverture des axes routiers selon un référentiel élargi » ([25]).

3.   Des progrès plus incertains sur la couverture mobile des axes routiers et ferroviaires

Les opérateurs ([26]) étaient tenus de couvrir les axes routiers prioritaires ([27]) en 4G, à l’extérieur des véhicules d’ici fin 2020 et à l’intérieur des véhicules d’ici 2022 ou 2025. Les opérateurs devront aussi couvrir 90 % des lignes du réseau ferré régional d’ici fin 2025.

D’après les dernières données disponibles au 30 juin 2024 (publiées le 24 septembre 2024), s’agissant des axes routiers prioritaires du New Deal mobile, la couverture 4G à l’extérieur des véhicules oscille entre 99,4 % et 99,9 % selon l’opérateur. Pour les réseaux ferrés régionaux, la couverture 4G le long des voies se situait sur la même période entre 97,9 % et 99,3 %.

La qualité de service semble également progresser au regard des indicateurs mis en place :

– sur les axes routiers, l’Arcep a indiqué à votre rapporteur que « les tests de navigation web (chargement de pages web en moins de 10 secondes) ont progressé de 13 points » entre 2018 et 2023. L’Autorité souligne, en outre, que « le taux de succès moyen de ces tests atteignait, sur l’ensemble des routes mesurées par la campagne Arcep de 2023 (soit 20 000 km environ), les 92 % » ;

– sur les axes ferroviaires, l’Arcep indique que les tests de navigation web (i.e. chargement de pages web en moins de 10 secondes) ont progressé de 15,5 points et que le taux de succès moyen sur l’ensemble de la campagne 2023 est de l’ordre de 75 %. Les résultats restent néanmoins inférieurs aux résultats constatés sur les axes routiers.

En dépit de ces progrès, force est de constater que les retours de terrain traduisent une préoccupation sur la qualité insuffisante de la connexion sur certains axes routiers ou ferroviaires. Votre rapporteur invite le régulateur, en conséquence, à surveiller étroitement les progrès réalisés dans ce domaine, tout en ayant conscience que la connectivité en mouvement comporte des caractéristiques spécifiques qui peuvent expliquer l’expérience des utilisateurs.

Recommandation  6: Renforcer le suivi du bon respect par les opérateurs de leurs obligations de couverture mobile de qualité sur les axes routiers et ferroviaires.

II.   QUATRE PRIORITÉS pour 2025 en matiÈre de communications Électroniques

  1.   REPRENDRE les initiatives législatives DE SIMPLIFICATION DU DÉPLOIEMENT DES Réseaux de communication électronique engagées sous la précédente législature

Les auditions menées font apparaître une forte demande de reprise de plusieurs initiatives législatives engagées sous la précédente législature et dont l’examen a été interrompu du fait de la dissolution de l’Assemblée nationale, décidée par le Président de la République le 9 juin dernier.

En premier lieu, votre rapporteur souscrit à la demande des acteurs privés entendus, qui souhaitent que l’examen de la proposition de loi n° 2597 visant à simplifier et à moderniser la couverture mobile du territoire reprenne.

Ainsi que l’a rappelé l’Agence nationale de la cohésion des territoires dans sa contribution écrite, « le sujet des zones littorales est un cas de figure récurrent ayant mené, au vu de la législation actuelle, à déplacer des projets, dans le meilleur des cas, annuler un site défini dans un arrêté et plus largement pour les territoires concernés, à ne pas sélectionner ce type de zone malgré des besoins avérés ».

Auditionnés par votre rapporteur, les opérateurs estiment qu’une intervention législative est indispensable sur cette question. La Fédération française des télécommunications (FFT) relève en effet que, sur 1 848 sites mobiles pouvant bénéficier de l’installation d’antennes dans les zones littorales (dont une partie issue du New Deal Mobile), 200 sites sont bloqués pour cause de refus de déclaration préalable en raison des dispositions de la loi « Littoral » et 584 sites n’ont pas fait l’objet d’une demande de déclaration préalable (car cette demande aurait été contraire aux dispositions de la même loi).

Un nouvel examen de la proposition de loi précitée pourrait permettre d’avancer utilement sur la question : l’article 1er de cette proposition, qui prévoit dans sa rédaction actuelle de créer une dérogation à l’application du principe d’extension en continuité de l’urbanisation pour l’installation de sites mobiles, est en effet très largement soutenu et attendu par l’ensemble des acteurs concernés.

Au-delà de cette question, d’autres mesures de simplification concernant les infrastructures étaient en cours d’examen dans le cadre du projet de loi de simplification de la vie économique. Son article 17 permettait en effet de sécuriser le dépôt des déclarations préalables relatives aux antennes relais, en pérennisant l’exception, créée par l’article 222 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite loi « Élan », relative à la faculté de retrait des décisions d’urbanisme portant sur les infrastructures de téléphonie mobile.

Ce même article introduisait, en outre, un mécanisme d’encadrement de l’acquisition de terrains par les opérateurs d’infrastructures mobiles passives. Sa rédaction prévoyait en effet que toute personne, autre qu’un opérateur de téléphonie mobile, qui se porte acquéreur ou loueur d’un emplacement destiné à accueillir un site de téléphonie mobile, doit informer le maire avant la conclusion du contrat et joindre à cette information une attestation par laquelle un opérateur de téléphonie mobile s’engage à exploiter cette infrastructure d’accueil.

Dans ces conditions, la reprise rapide de l’examen de ce projet de loi, qui vient d’être adopté par le Sénat, apparaît indispensable pour faciliter les déploiements mobiles.

Recommandation n° 7 : Reprendre l’examen des initiatives législatives de simplification du déploiement des réseaux de communication électronique engagées sous la précédente législature.

B.   FAIRE UN BILAN EXHAUSTIF DU NEW DEAL MOBILE ET ÉTUDIER L’OPPORTUNITÉ D’UNE PROLONGATION DU DISPOSITIF

Si certaines obligations courent encore jusqu’en 2030, notamment pour la couverture des axes routiers, le New Deal mobile est néanmoins en phase d’achèvement, en particulier pour le dispositif de couverture ciblée.

Le bilan de ce dispositif est largement positif. Le New Deal mobile a en effet permis de diviser par dix en quelques années le nombre de zones blanches en France, pour un coût total qui semble rester, au regard de l’évaluation réalisée par l’Arcep au début de cette année, conforme aux ambitions initiales de cette démarche ([28]).

Le New Deal mobile est également une réussite d’un point de vue territorial. Les équipes-projets ont fourni un travail efficace. Elles ont permis une implication forte des collectivités dans les choix effectués. De ce point de vue, le New Deal mobile est un modèle de co-pilotage d’une politique publique au service de l’intérêt général. Votre rapporteur considère donc qu’il serait dommage de perdre le savoir-faire acquis au fil des années par les équipes-projets et de devoir recommencer « à zéro » cette organisation en cas d’arrêt, alors que besoins existent encore.

En effet et en dépit de ces éléments de satisfaction, certains besoins de couverture persistent au niveau des territoires.

Consciente de cet enjeu, l’ANCT a mobilisé, au cours du printemps 2023, l’ensemble des équipes-projets pour la réalisation d’un bilan du dispositif de couverture ciblée du New Deal Mobile, de manière à qualifier les éventuels besoins qui pourraient ne pas être satisfaits à son issue. Les éléments transmis par cette agence à votre rapporteur font état d’un besoin d’environ deux mille sites supplémentaires a minima, la demande initiale « brute » des collectivités étant de 4 200 sites.

Afin de recenser, matérialiser et cartographier l’ensemble des besoins persistants en matière de couverture mobile sur le territoire, l’ANCT a mis à la disposition des élus la plateforme « Toutes et Tous Connectés » ([29]). Depuis son ouverture en juin 2023, ce sont près de 4 300 signalements qui ont été réalisés sur la plateforme, représentant plus d’un millier de communes. Les trois-quarts de ces signalements ont, par ailleurs, été réalisés entre juillet et octobre 2024 et ce chiffre continue à connaître une progression forte, signe de l’appropriation de l’outil par les territoires.

Ces éléments traduisent une forte demande du côté des citoyens et des collectivités, qui ne semble pas, pour l’instant, rencontrer un écho identique du côté des opérateurs. Les auditions menées font apparaître que seul l’un des opérateurs, Free, a formulé à ce stade des propositions de contreparties opposables à d’éventuels nouveaux engagements des opérateurs dans le cadre d’un prolongement du dispositif de couverture ciblée.

À la date de rédaction du présent rapport, l’Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l’audiovisuel (Avicca) a indiqué être favorable à l’octroi de nouveaux sites de DCC, mais dans le cadre de l’enveloppe financière initiale – au regard de l’avantage financier important qu’auraient retiré, selon elle, les opérateurs du New Deal mobile.

Sans préjuger les conclusions de la mission d’information relative à l’avenir du New Deal mobile, que votre rapporteur aura l’occasion de mener au côté de son collègue Eric Bothorel, il apparaît évident qu’un bilan complet et objectif du déploiement du New Deal mobile – et surtout des besoins des territoires en termes de couverture mobile supplémentaire – sera indispensable pour étudier les meilleures modalités de mise en œuvre, le cas échéant, d’un nouveau dispositif.

Recommandation n° 8 : Engager, dans le cadre de la mission d’information relative à l’avenir du New Deal mobile, un bilan exhaustif de ce dispositif et des besoins de couverture des territoires, afin de retenir la meilleure option pour assurer une réduction complète des zones blanches.

C.   RESTER VIGILANT SUR LA FERMETURE PROGRESSIVE ET « EN BON ORDRE » DU RÉSEAU en CUIVRE

La fermeture du réseau en cuivre par l’opérateur historique est l’un des principaux enjeux en termes d’évolution technologique de nos réseaux.

La fermeture de ce réseau doit avoir lieu progressivement, par zone et en deux temps :

– la fermeture commerciale du réseau, d’abord, qui correspond à l’arrêt de vente par Orange de nouveaux abonnements utilisant le cuivre (mais le maintien des abonnements souscrits). Cette fermeture est déjà engagée (20 millions de lignes ont déjà été fermées) et devrait s’achever d’ici 2026 ;

– la fermeture technique du réseau, ensuite, c’est-à-dire l’extinction du réseau en tant que tel. Cette extinction se fera progressivement et devra être achevée d’ici 2030.

Pour mémoire, l’Arcep a fixé dès 2020, dans sa décision n° 2020-1446 du 15 décembre 2020, les conditions encadrant la fermeture du réseau cuivre d’Orange. Ces conditions portent en particulier sur la disponibilité préalable de réseaux FttH, sur l’existence d’offres adaptées sur ces réseaux et sur la présence des opérateurs commerciaux sur la fibre.

À l’issue de ses auditions, votre rapporteur souhaite formuler quelques remarques sur la fermeture du réseau en cuivre :

– un réel effort de communication doit être mené par les pouvoirs publics au sujet de cette fermeture. Si Orange a indiqué, lors de son audition, avoir engagé des efforts en ce sens, force est néanmoins de constater que les expérimentations menées sous l’égide de l’Arcep ont mis en évidence un déficit d’information et/ou de prise de conscience des particuliers par rapport à cette fermeture. Dès lors, il apparaît essentiel de susciter cette prise de conscience de la transition technologique à venir, en organisant de façon efficace une campagne de communication en ce sens ;

– le maintien de la qualité de service sur le réseau en cuivre doit demeurer une priorité pour l’Arcep, au regard de l’enjeu concurrentiel évident qu’il représente – en plus de la qualité de service due aux particuliers. La hausse du tarif du dégroupage, qui doit financer la fermeture progressive du réseau, doit avoir pour contrepartie le maintien d’une qualité de service satisfaisante et de temps d’intervention rapide de la part de l’opérateur gestionnaire du réseau ;

Recommandation n° 9 : Engager une campagne de communication sur la fermeture à venir du réseau cuivre pour faciliter la transition des particuliers et des entreprises vers la fibre.

Recommandation n° 10 : Maintenir une forte vigilance vis-à-vis de la qualité de service sur la boucle locale.

D.   Poursuivre les efforts visant à réduire l’Asymétrie entre les grands acteurs du numérique et les opérateurs

L’asymétrie fiscale entre les acteurs français, en particulier les opérateurs qui déploient les infrastructures, et les grands acteurs internationaux qui injectent les flux, est une question plus que jamais d’actualité, dans un contexte de hausse continue de la consommation de contenus.

Dans le contexte budgétaire actuel, votre rapporteur estime, d’abord, qu’il apparaît difficile de baisser les recettes de l’État ou des collectivités. La réforme des Ifer fixe et mobile, impôts de production « mités », ne peut, de toute évidence, avoir lieu dans le cadre du présent projet de loi de finances, même si elle est souhaitable.

Recommandation n° 11 : Faire évoluer, à terme, la fiscalité des communications électroniques et du numérique pour mettre fin à l’asymétrie opposant les acteurs nationaux et les géants du numérique.

Votre rapporteur s’est donc concentré, dans le cadre de cet avis, sur la question de la taxation de la bande passante et de la contribution « juste » (fair share) des grandes plateformes au financement de nos réseaux.

Lors de leur audition, les opérateurs ont décrit une situation que chacun connaît : face à la forte croissance des usages, les grandes plateformes, qui injectent le contenu, ne contribuent pas à leur juste valeur aux investissements nécessaires dans les infrastructures par lesquelles transitent ces flux.

La perspective d’une taxation de la bande passante, abordée en audition, n’est pas nouvelle. Dès 2015, l’Arcep s’était en effet penchée sur cette question. Sans être impossible, cette idée présente des difficultés techniques, comme l’avait relevé l’Autorité à cette date. Il n’existe en effet pas de méthode « univoque, infaillible ou exhaustive » pour mesurer les flux concernés.

En outre, cette mesure présente une double limite dans la mesure où elle doit être mise en œuvre au niveau des points d’interconnexion. Une telle localisation de la mesure, optimale techniquement, ne permet cependant pas de capter tout le trafic (les flux peer-to-peer, par exemple). Elle reste également soumise au risque de délocalisation des réseaux de diffusion de contenus (CDN) en dehors du territoire national.

Ces limites impliquent d’engager la réforme au niveau européen. De ce point de vue, votre rapporteur ne peut que regretter que cette perspective, un temps évoquée, ait finalement été abandonnée en 2023 par la Commission européenne. La configuration politique actuelle rend, par ailleurs, peu probable le retour de telles discussions à court terme.

Au-delà de la taxation de la bande passante, d’autres leviers ont été mentionnés lors des auditions pour renforcer la participation des grandes plateformes à la bonne gestion des réseaux. L’écoconception des services numériques et la mise en œuvre d’obligations renforcées pour les plateformes, sur le modèle de ce que prévoit le DSA, constituent deux pistes intéressantes qui mériteraient d’être approfondies.

Recommandation n° 12 : Poursuivre le portage, au niveau européen, d’une réforme permettant de faire contribuer plus justement les grandes plateformes au financement des infrastructures de communications électroniques.

 


   RECOMMANDAtiONS

Recommandation n° 1 : Maintenir une vigilance accrue face au ralentissement des déploiements et aux retards constatés dans certaines zones pour garantir la réalisation des objectifs fixés, qui constituent des obligations pour les opérateurs concernés.

Recommandation n° 2 : Maintenir une vigilance accrue sur les efforts engagés par les opérateurs en faveur d’un renforcement de la qualité des déploiements.

Recommandation n° 3 : Faire évoluer le droit pour permettre à l’Arcep de réaliser des audits en cas de problème de qualité sur les réseaux, à la charge des opérateurs concernés.

Recommandation n° 4 : Soutenir l’initiative de création d’un montage financier permettant de sécuriser le financement des raccordements complexes situés sur le domaine public sans mobiliser toutefois directement de financement public.

Recommandation n° 5 : Accroître à terme le financement attribué aux raccordements complexes en zone publique pour assurer la complétude des déploiements, dans un contexte marqué par la fermeture du réseau cuivre.

Recommandation  6: Renforcer le suivi du bon respect par les opérateurs de leurs obligations de couverture mobile de qualité sur les axes routiers et ferroviaires.

Recommandation n° 7 : Reprendre l’examen des initiatives législatives de simplification du déploiement des réseaux de communication électronique engagées sous la précédente législature.

Recommandation n° 8 : Engager, dans le cadre de la mission d’information relative à l’avenir du New Deal mobile, un bilan exhaustif de ce dispositif et des besoins de couverture des territoires, afin de retenir la meilleure option pour assurer une réduction complète des zones blanches.

Recommandation n° 9 : Engager une campagne de communication sur la fermeture à venir du réseau cuivre pour faciliter la transition des particuliers et des entreprises vers la fibre.

Recommandation n° 10 : Maintenir une forte vigilance vis-à-vis de la qualité de service sur la boucle locale.

Recommandation n° 11 : Faire évoluer, à terme, la fiscalité des communications électroniques et du numérique pour mettre fin à l’asymétrie opposant les acteurs nationaux et les géants du numérique.

Recommandation n° 12 : Poursuivre le portage, au niveau européen, d’une réforme permettant de faire contribuer plus justement les grandes plateformes au financement des infrastructures de communications électroniques.


   EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du mercredi 16 octobre 2024, la commission a examiné pour avis, sur le rapport de M. Jérôme Nury, les crédits du programme « Communications électroniques et économie numérique » de la mission « Économie ».

M. Jérôme Nury, rapporteur pour avis. Les crédits relatifs aux communications électroniques et à l’économie numérique, au sein de la mission Économie, recouvrent les dépenses publiques en faveur du déploiement des réseaux numériques et de l’inclusion numérique, ainsi que les budgets de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) et de l’Agence nationale des fréquences (ANFR).

Nous avons tous conscience du caractère particulier de ce projet de loi de finances, dans le contexte actuel de dégradation des finances publiques : l’objectif fixé par le Gouvernement est de ramener le déficit à 5 % du PIB en 2025. Les crédits sur lesquels porte mon avis budgétaire ont été mis à contribution pour atteindre cet objectif, mais dans une mesure qui me semble raisonnable, c’est-à-dire sans mettre en cause l’avenir de nos réseaux.

Je me propose de vous détailler rapidement, dans une première partie, les principales évolutions des crédits destinés aux communications électroniques, avant de faire un point d’étape sur le plan France Très Haut débit et le New Deal mobile. Je reviendrai enfin, en conclusion, sur quelques priorités numériques pour l’année 2025, en lien avec ces constats.

Venons-en, pour commencer, aux crédits « Numérique » de la mission Économie du projet de loi de finances pour 2025.

Ces crédits sont ceux du programme 134 « Développement des entreprises et régulations » et du programme 343 « Plan France Très Haut Débit ».

Un premier constat s’impose : ces crédits participent à l’effort global de réduction des dépenses publiques engagé dans le présent projet de loi de finances.

Le programme 134 connaît en effet une baisse de 20 % de ses autorisations d’engagement (hors titre 2) et de 9 % de ses crédits de paiement (sur le même périmètre). Sont ainsi prévus 2,5 milliards d’euros (Md€) d’autorisations d’engagement et de crédits de paiement pour la totalité du programme. Un peu plus de 730 millions d’euros (M€) en autorisations d’engagement et en crédits de paiement sont consacrés à l’action Développement des postes, des télécommunications et du numérique, pilotée par la direction générale des entreprises (DGE).

L’action 13, qui correspond au budget de l’Arcep, est dotée de 22 M€ d’autorisations d’engagement et de 25 M€ de crédits de paiement.

Ces chiffres appellent plusieurs remarques.

Pour ce qui concerne le programme 134, la baisse des crédits ne concerne que marginalement les crédits affectés au numérique : elle touche essentiellement des actions en lien avec l’industrie, les services et Business France.

Par ailleurs, le budget de l’Arcep est en très légère hausse avec 22 M€ en autorisations d’engagement et 25 M€ en crédits de paiement. L’Autorité m’a indiqué avoir fait un effort de gestion interne pour créer un équivalent temps plein (ETP) et bénéficier de transferts d’ETP afin d’assurer ses nouvelles missions, telles que la régulation de la donnée et le contrôle de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi).

Enfin, l’ANFR voit son budget baisser fortement par rapport à l’année dernière, ce qui paraît logique compte tenu de la fin des Jeux olympiques. En 2024, l’Agence avait bénéficié de crédits très importants, de 59 nouveaux ETP accordés en deux fois pour mener à bien l’ensemble de ses missions, ainsi que d’une dotation budgétaire supplémentaire de 11 M€ sous forme d’une subvention d’investissement et de fonctionnement. Ces crédits ne sont logiquement pas reconduits ; le financement de l’ANFR consiste désormais exclusivement en une subvention pour charges de service public à hauteur de 42,5 M€ – un montant raisonnable.

Les crédits du programme 343 « Plan France Très Haut Débit » apparaissent en forte baisse. Sont actuellement prévues, pour 2025, des enveloppes de 47 M€ en autorisations d’engagement, soit une baisse de 50 %, et de 247 M€ en crédits de paiement, soit une baisse de 46 %.

L’ouverture de nouvelles autorisations d’engagement concerne principalement l’action n° 03 « Inclusion numérique », qui finance les conseillers numériques des maisons France Services, à hauteur de 27 M€. Les autres nouvelles autorisations d’engagement sont inscrites au sein de l’action n° 02 « Autres projets concourant à la mise en œuvre du plan France Très Haut Débit », dont les crédits sont multipliés par trois pour atteindre 19 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. Cette forte hausse s’explique par la création d’un dispositif visant à soutenir le financement des raccordements complexes en domaine privé. S’agissant du financement des réseaux d’initiative publique (RIP) et après une première annulation de crédits à hauteur de 117 M€ en crédits de paiement et de 38 M€ en autorisations d’engagement au mois de février dernier, les crédits proposés au sein du projet de loi de finances sont en retrait par rapport à l’année dernière, avec seulement 220 M€ (raccordements complexes compris) – contre 422 M€ inscrits dans la loi de finances initiale pour 2024.

En tant que rapporteur, j’ai interrogé les pouvoirs publics – notamment l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) – afin de savoir si ces montants seraient suffisants. On m’a répondu, au sujet de l’annulation opérée en février 2024, qu’une réévaluation des besoins des collectivités et les retards parfois pris par les bénéficiaires de ces fonds permettaient de décaler le décaissement des crédits sans le ralentir. Très concrètement, cela signifie que cette coupe budgétaire n’a pas eu d’effet sur le rythme de déploiement des réseaux, mais que les crédits doivent être bien calibrés dans le projet de loi de finances pour 2025. C’est le sens de mon amendement II-CE36, qui vise à abonder cette ligne de 50 M€.

Malgré cette incertitude, je considère que les baisses demeurent mesurées et que les budgets accordés à l’Arcep et à l’ANFR sont satisfaisants. Je donnerai donc un avis favorable à l’adoption de ces crédits, sous réserve des ajustements que je proposerai pour La Poste et les réseaux d’initiative publique (RIP).

J’en viens à l’état d’avancement du plan « France Très Haut Débit » et du New Deal mobile. Les deux premiers jalons du plan « France Très Haut Débit » semblent avoir été respectés : une grande partie des Français peuvent accéder au « bon haut débit » depuis la fin de l’année 2020 et au « très haut débit » depuis 2023, grâce à la fibre ou à une autre technologie. Il reste néanmoins des cas particuliers, dont les pouvoirs publics sont tout à fait conscients. Je pense notamment aux territoires ultramarins, en particulier la Guyane et La Réunion.

S’agissant du rythme de déploiement, les choses avancent bien, mais des inquiétudes légitimes s’expriment quant à la finalisation du plan. Si le taux de locaux raccordables à la fibre optique jusqu’au domicile (FTTH) était de 89 % fin juin, les déploiements en zone très dense sont à l’arrêt. Nombre de ces raccordements ne sont pas achevés. Dans les zones moins denses d’initiative privée que sont les zones Amii (Appel à manifestation d’intention d’investissement) et Amel (Appel à manifestation d’engagements locaux), le régulateur a mis, à raison, la pression sur les opérateurs qui étaient en train de renoncer à leurs engagements de complétude. Les nouveaux engagements signés par les opérateurs doivent permettre d’améliorer encore la couverture et de limiter les retards constatés. Nous devons évidemment être vigilants quant à la bonne volonté des uns et des autres. L’inquiétude est moindre dans les zones RIP, où le rythme est satisfaisant et devrait permettre, dans la plupart des cas, la généralisation de la fibre autour de l’objectif fixé – sauf exceptions. Cela montre la qualité de l’engagement des acteurs de terrain, des opérateurs ainsi que des collectivités, qui sont souvent maîtres d’ouvrage dans ce domaine.

En définitive, s’agissant du plan « France Très Haut Débit », la principale difficulté tient au respect de l’objectif de généralisation de la fibre optique. Rappelons que cet objectif n’était pas inscrit dans la phase initiale du plan : il a été ajouté en 2020, eu égard au succès des premiers déploiements. Une chose est sûre : si l’écrasante majorité des Français pourront, comme promis, être raccordés à la fibre d’ici à la fin de l’année 2025, le taux de raccordement ne sera pas de 100 % des locaux – les projections issues du relevé géographique de l’Arcep donnent plutôt des taux compris entre 95 % et 98 % selon les zones concernées.

Ce constat appelle, à mon sens, deux remarques.

En premier lieu, il pose la question de la faisabilité technique et financière de l’objectif du « 100 % fibre ». S’il semble techniquement possible de s’approcher de cet objectif, sa rationalité financière est plus discutable : les raccordements les plus complexes peuvent en effet coûter plusieurs dizaines de milliers d’euros, alors que d’autres solutions existent et s’avèrent même de plus en plus performantes.

En second lieu, nous devons nous pencher sur le problème spécifique des raccordements complexes, dont l’évaluation n’est pas aisée. Le chiffre de quatre cent mille à cinq cent mille raccordements, qui circule beaucoup, ne concerne que les raccordements complexes au sein du domaine public, où les ressources en génie civil sont insuffisantes. Mais il existe également des raccordements complexes dans le domaine privé ; ils sont alors à la charge du propriétaire ou du promoteur, ce qui pose une difficulté supplémentaire. Le Conseil général de l’économie, qui relève du ministère de l’économie et des finances, estime que cette situation concerne de 6 % à 8 % des locaux privés, soit 1,1 à 1,4 million de propriétaires, pour un coût total compris entre 640 M€ et 1 Md€. Le dispositif prévu dans le présent projet de loi de finances pourrait paraître insuffisant, le montant budgété n’étant que de 16 M€ ; il me semble au contraire adapté, dans la mesure où il est expérimental et où il ne revient sans doute pas à l’État d’absorber la totalité du surcoût dans le domaine privé.

Sur le New Deal mobile, je serai assez bref pour ne pas empiéter sur les travaux que notre collègue Éric Bothorel et moi-même conduirons dans le cadre d’une mission d’information. Le New Deal mobile est, globalement, un succès. Cet accord a permis de généraliser la couverture mobile en 4G, de la densifier et de réduire les « zones blanches ». Dans son point d’étape de février dernier, l’Arcep le dit clairement : la part du territoire située en zone blanche, qui est aujourd’hui de 1,9 %, a été divisée par dix entre 2018 et 2022. Le dispositif de couverture ciblée, dont l’efficacité est unanimement saluée, a grandement contribué à atteindre ce résultat. Ce taux de 1,9 % peut paraître très faible, mais il est encore beaucoup trop élevé pour les habitants des zones concernées. Dès lors, que faire ? Les besoins sur le terrain sont évidents – les équipes-projets les ont d’ailleurs fait remonter à l’ANCT, qui évalue à près de deux mille le nombre de sites supplémentaires qui pourraient être nécessaires. Il nous faudra donc trouver, avec Éric Bothorel, le meilleur équilibre, afin de répondre à ces demandes tout en gardant à l’esprit le contexte budgétaire dans lequel nous nous trouvons.

Seuls les résultats relatifs à la couverture des axes routiers et ferroviaires ne sont pas encore complètement convaincants. Les indicateurs de l’Arcep s’améliorent, mais la réalité semble parfois différente sur le terrain. Du reste, la connectivité en mobilité présente des difficultés particulières. Nous devons néanmoins veiller au juste développement de cette couverture mobile, particulièrement nécessaire pour nos concitoyens.

En conclusion, j’aimerais fixer quatre priorités pour l’année à venir en matière de numérique.

La première priorité est de reprendre la discussion des projets et propositions de loi ayant pour but de simplifier le déploiement des réseaux. Je pense notamment à la proposition de loi de notre collègue Bothorel visant à simplifier et accélérer la couverture mobile du territoire, ainsi qu’au projet de loi de simplification de la vie économique, en cours d’examen au Sénat. Les mesures contenues dans ces textes correspondent à des demandes que les acteurs du secteur ont réitérées lors des nombreux échanges que j’ai eus avec eux.

La deuxième priorité concerne la fermeture du réseau cuivre : il convient de mieux faire connaître cette perspective et de s’assurer du maintien de la qualité de service, ainsi que de la disponibilité de la fibre, lorsqu’arrivera l’échéance, comme le prévoit la réglementation.

La troisième priorité tient à l’avenir du New Deal mobile : je n’y reviens pas, car ce sera l’objet de notre mission d’information.

La dernière priorité est d’ordre fiscal : il faut continuer de soutenir une action forte au niveau européen pour mettre fin à l’asymétrie fiscale entre les grandes plateformes, qui injectent beaucoup de contenus, et les opérateurs, qui financent le bon dimensionnement des réseaux. À ce sujet, j’ai formulé quelques pistes qui pourraient être utilement approfondies.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Je vous remercie d’avoir souligné les gros efforts restant à accomplir dans les outre-mer dans le domaine du numérique.

Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Julien Gabarron (RN). La data est l’or du XXIe siècle. Pour maîtriser cette ressource stratégique, il est indispensable de disposer d’un réseau performant et d’infrastructures de cloud souveraines et sécurisées.

Bien qu’il accompagne le développement des infrastructures et le soutien à l’économie numérique, le projet de loi de finances pour 2025 n’est pas à la hauteur des enjeux. Le budget alloué au déploiement de la fibre optique et à la réduction de la fracture numérique est insuffisant, notamment dans les zones rurales. L’objectif initial de généralisation de la fibre d’ici 2025 semble hors de portée et le manque de fermeté envers les opérateurs privés contribue à cet échec. Malgré les nouvelles prérogatives confiées à l’Arcep par la loi visant à sécuriser et à réguler l’espace numérique, dite loi « Sren », notamment en matière d’attribution et de contrôle des infrastructures de cloud, l’Autorité manque de moyens pour relever ces défis. Nous comprenons qu’élaborer un budget implique de faire des choix, mais toute tergiversation quant au renforcement de notre souveraineté numérique entraînera un retard et une vulnérabilité irrattrapables par rapport à nos concurrents.

Parlons justement de nos concurrents : notre dépendance aux technologies étrangères est dangereuse et compromet notre souveraineté numérique. Pire encore : au lieu de démanteler les antennes Huawei, comme le prévoyait la loi de 2019 visant à préserver les intérêts de la défense et de la sécurité nationale de la France dans le cadre de l’exploitation des réseaux radioélectriques mobiles, les gouvernements successifs ont prolongé leur utilisation jusqu’en 2031, alors même qu’apparaissent les prémices d’une guerre économique avec la Chine. Demain, la guerre numérique sera une réalité, mais nous restons désarmés et ne serons pas prêts.

Parlons maintenant de la fracture numérique, un sujet à peine effleuré dans ce projet de loi. Il est inadmissible qu’en 2025, des millions de Français, notamment en zone rurale, soient encore privés d’accès aux services numériques de base. Une révision complète de la gouvernance et des priorités du plan « France Très Haut Débit » est indispensable ; elle passera par un renforcement des pouvoirs de l’Arcep, qui doit pouvoir adopter des mesures contraignantes au lieu de se contenter d’audits. La couverture du territoire stagne, aux alentours de 90 %, alors que le plan de sortie du cuivre suit sa feuille de route. Pour parvenir à une couverture de 100 % du territoire – un objectif non négociable – et connecter les derniers kilomètres, qui sont les plus coûteux et les moins rentables, nous avons besoin de mécanismes incitatifs et de moyens de contrôle rigoureux des prestataires et des opérateurs. Le plan « France Très Haut Débit » et le New Deal mobile ne seront un succès que lorsque le dernier usager sera connecté.

En matière de cybersécurité, favorisons l’émergence de champions nationaux et européens en adoptant des mesures fiscales ambitieuses, en instaurant la préférence nationale dans les marchés publics concernant la sécurité et les infrastructures critiques, et en exerçant un contrôle strict sur les acquisitions étrangères dans les secteurs stratégiques. La sécurité numérique n’est pas une simple ligne budgétaire, c’est une question de survie économique et nationale.

Ce projet de loi ne va pas assez loin. Le numérique n’est clairement pas une priorité pour le Gouvernement, qui apprécie mal les enjeux et n’accorde pas aux acteurs du secteur des moyens suffisants. Défendons une vision ambitieuse pour la France, celle d’une nation souveraine dans le domaine du numérique, capable de protéger ses citoyens et de garantir l’accès de tous aux technologies de demain. La France mérite mieux que d’être une simple consommatrice des technologies des autres. Nous avons les talents, les compétences et le souhait de devenir un leader dans le domaine du numérique, mais cela nécessite des choix stratégiques audacieux, des investissements significatifs et, surtout, une volonté politique forte que ce projet de loi ne traduit pas.

M. Jérôme Nury, rapporteur pour avis. Je souscris à vos propos sur la réalisation de l’objectif « 100 % fibre » en 2025. Je suis d’ailleurs allé dans ce sens dans mon rapport. On voit cependant que la fibre ne sera pas suffisante et qu’il faudra se tourner vers d’autres technologies.

S’agissant du renforcement de la souveraineté numérique, je ne peux là encore qu’être d’accord avec vous, mais il sera difficile de rattraper le train que nous avons raté il y a dix ou quinze ans. Nous voulons surtout que les grandes plateformes soient soumises à l’impôt national, auquel elles échappent aujourd’hui – ce qui leur évite de participer au renforcement de nos infrastructures.

En ce qui concerne la fracture numérique, vous avez également raison, mais permettez‑moi de vous rappeler que le budget prévoit 27 M€ pour financer les fameux « conseillers numériques » très utiles dans les territoires ruraux.

M. Éric Bothorel (EPR). Alors que le contexte actuel exige des économies, force est de constater que ce budget sécurise globalement des dispositifs en faveur de l’économie numérique qui ont fait leurs preuves, à quelques exceptions près.

Au sein du programme 134, je salue les 2,1 M€ consacrés au déploiement du filtre antiarnaques, même si je regrette vivement que le groupement d’intérêt public « Action contre la cybermalveillance » (GIP Acyma) ne soit pas chargé de la mise en œuvre de ce dispositif. Je salue aussi l’intention du Gouvernement de revenir sur la baisse de 50 M€ des crédits alloués au groupe La Poste, dans le cadre du contrat de présence postale territoriale indispensable pour nos concitoyens.

S’agissant du programme 343, votre rapport souligne le succès du plan « France Très Haut Débit ». Malgré des délais légèrement supérieurs aux objectifs, l’État a été au rendez-vous et poursuit son engagement. Le lancement d’une expérimentation de financement des raccordements privés, à hauteur de 16,1 M€, est une excellente chose.

En revanche, le projet de loi de finances divise quasiment par deux les crédits alloués au dispositif des conseillers numériques France Services, qui passent de 41,8 M€ à 27,8 M€ : pouvez-vous nous éclairer à ce sujet ?

Vous souscrivez aux réformes des impositions forfaitaires sur les entreprises de réseau (Ifer) fixe et mobile, en précisant toutefois qu’il n’est pas opportun de les mener cette année. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi ?

Enfin, vous appelez à la reprise de la discussion du projet de loi de simplification de la vie économique et de ma proposition de loi visant à simplifier et accélérer la couverture mobile du territoire, dont l’examen a été interrompu par la dissolution de l’Assemblée nationale. Ces textes comportent des mesures de simplification attendues par les acteurs du secteur et nos concitoyens. Je souhaite, comme vous, qu’ils soient examinés rapidement par notre assemblée.

M. Jérôme Nury, rapporteur pour avis. Nous n’avons pas la certitude que le Gouvernement ait réellement décidé de revenir sur la baisse des crédits alloués à La Poste. Voilà pourquoi je défendrai tout à l’heure un amendement visant à abonder cette ligne des 50 M€ qui me paraissent indispensables pour que La Poste puisse assurer ses missions au titre de l’aménagement du territoire.

S’agissant des raccordements complexes, qui peuvent concerner des zones publiques comme privées, nous abordons le nœud du problème, notamment dans les territoires ruraux où il est parfois nécessaire de tirer plusieurs kilomètres de câbles, ce qui coûte très cher tant à nos concitoyens qu’aux gestionnaires de réseaux et d’infrastructures. L’expérimentation qui pourrait être tentée en 2025 méritera d’être suivie avec la plus grande attention, avant une éventuelle généralisation en 2026.

Si l’État continue d’accompagner le déploiement des conseillers numériques, conformément à ses engagements, il n’est pas prévu qu’il finance ce dispositif de manière pérenne. Certes, il prendra encore en charge la rémunération d’une partie de ces personnels en 2025, mais cette dépense reviendra progressivement aux collectivités locales, qui sont les employeurs des conseillers numériques.

Enfin, j’entends votre remarque sur l’Ifer mobile. Il est encore possible de travailler sur ce sujet, mais il ressort des auditions que nous avons menées que les opérateurs formulent beaucoup moins de demandes qu’ils ne le faisaient il y a quelques années à propos de l’Ifer fixe, qui a été plafonnée.

M. Manuel Bompard (LFI-NFP). La saignée concoctée par le gouvernement de Michel Barnier sous le regard bienveillant du Rassemblement national n’épargne pas le développement du réseau internet. Nous en avions déjà eu un avant-goût quand Bruno Le Maire avait annulé, en février, 117 M€ du plan « France Très Haut Débit » – ce n’est pas une paille, c’est un quart du budget qui s’envole d’un trait de plume en cours d’année ! Le budget 2025 aggrave encore la situation : les crédits de « France Très Haut Débit » sont inférieurs de 45 M€ à ce qui était annoncé pour 2025 dans le projet de loi de finances de l’année précédente.

L’avancement du plan ou les besoins en matière de réseaux numériques justifient-ils une telle baisse ? Évidemment non : la couverture numérique du pays stagne et le rythme des déploiements a fortement ralenti en 2024. C’est le cas dans des zones rurales, bien sûr, mais aussi dans des villes. Marseille, la deuxième ville de France, dont je suis le député, fait ainsi partie des métropoles les moins bien loties, avec un taux de couverture de seulement 75 % mi-2022. Il reste cinq millions de locaux à rendre raccordables à la fibre, et la « coupe » de Bruno Le Maire a mis un coup d’arrêt au traitement des raccordements complexes. L’objectif de généralisation de la fibre fin 2025 est donc hors d’atteinte, comme le souligne le rapport.

L’accès au très haut débit doit être possible à un prix abordable. Nous constatons à ce sujet une hausse inquiétante des tarifs depuis 2020. Selon l’Arcep, la facture moyenne d’un abonnement internet à haut débit a augmenté de plus de trois euros par mois depuis 2022, soit une hausse tarifaire de 10 %, les box les moins chères étant les plus touchées. Alors qu’ils captent les bénéfices des politiques publiques, les opérateurs privés n’assument pas leurs engagements relatifs au développement du réseau : les raccordements dans les zones d’initiative privée ont chuté, alors que les revenus dégagés par les abonnements internet ont augmenté de près de 7 % en un an.

Enfin, de l’aveu même de monsieur le rapporteur pour avis, le budget de l’Arcep est en deçà des besoins. Après déduction de l’inflation, il apparaît en stagnation et si l’on tient compte des nouvelles missions confiées à l’Autorité, on s’aperçoit que ce sont des économies qui lui sont demandées. Or ces économies de « bouts de chandelle » entravent sa capacité à mener ses missions d’intérêt général.

Nous voulons garantir le droit d’accès à internet, car il s’agit d’un réseau essentiel. Pour ce faire, nous devons nous donner les moyens de couvrir tout le pays. Non seulement ce budget ne concourt pas à la réalisation de cet objectif, mais il nous en éloigne. Vous l’aurez compris, le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire ne votera pas les crédits de cette mission.

M. Jérôme Nury, rapporteur pour avis. J’entends vos inquiétudes quant à l’annulation de 117 M€ en février 2024. Nous avons cependant interrogé l’ANCT, ainsi qu’un certain nombre de partenaires de l’État, à commencer par les opérateurs des RIP et les collectivités locales, qui nous ont assuré que cette annulation de crédits n’avait pas eu de conséquence sur le déploiement des réseaux accompagnés.

Le budget prévu pour 2025 a été ajusté en fonction des reports de crédits non consommés les années précédentes. Je rappelle que les RIP sont déployés à des vitesses différentes sur le territoire et que le décaissement des crédits par l’État intervient au fur et à mesure. Par ailleurs, l’ANCT dispose de réserves qui pourront être mobilisées en 2025. Je conviens cependant que le budget prévu est un peu juste ; c’est pourquoi je défendrai tout à l’heure un amendement visant à abonder de 50 M€ les crédits du programme, afin que l’État puisse honorer ses engagements l’année prochaine.

Vous évoquez un ralentissement du plan, mais il faut bien préciser les choses : ce ralentissement concerne surtout les zones denses, c’est-à-dire les zones Amii et Amel, où aucun cofinancement n’est prévu par les pouvoirs publics, qu’il s’agisse des collectivités locales ou de l’État. Je vous ai indiqué tout à l’heure que l’Arcep avait mis la pression sur les opérateurs dans ces zones, ce qui pourrait accélérer le déploiement des réseaux.

Vous avez enfin parlé d’une hausse des prix. Je conviens que nous devons être vigilants sur ce point et nous assurer que nos concitoyens ont accès à internet et à la téléphonie mobile à des tarifs corrects. L’augmentation que vous évoquez concerne cependant des forfaits proposant un peu plus de services, de data et de vidéo à la demande (VOD). Il faut aussi en tenir compte.

M. Karim Benbrahim (SOC). Permettre l’accès au haut et au très haut débit est un enjeu d’égalité entre les territoires et entre les citoyens : en effet, il s’agit là d’une condition à la réussite des projets tant collectifs qu’individuels. La réussite du déploiement du haut et du très haut débit constitue donc, pour le groupe Socialistes et apparentés, un point de vigilance tout particulier. Les objectifs en la matière sont globalement tenus ; cependant, comme le souligne votre rapport, pas moins de 4,7 millions de locaux restent non raccordables à la fibre à un an de l’objectif calendaire fixé. Permettez-moi de regretter qu’Orange, encore détenu à 25 % par l’État et ses opérateurs, ait choisi la voie contentieuse pour contester les mises en demeure de l’Arcep concernant les déploiements en zone Amii. L’opérateur historique a pourtant une responsabilité, notamment sociétale, qui devrait l’inciter à mobiliser ses moyens pour investir dans le réseau.

Vous soulignez dans votre rapport que seuls les réseaux d’initiative publique stimulent encore la dynamique de déploiement du réseau au-delà de sa trajectoire naturelle ; vous indiquez dans le même temps que des interrogations demeurent quant au besoin de crédits budgétaires. Pensez-vous qu’il soit nécessaire de rouvrir des autorisations d’engagement pour accompagner le développement de ces RIP et pensez-vous qu’il faille élargir le dispositif aux raccordements les plus complexes, afin d’achever plus vite le déploiement dans ces zones ?

Que préconisez-vous pour accompagner au mieux nos concitoyens face à la fin du réseau cuivre, à la lumière notamment de ce qui a été fait lors de la bascule vers la télévision numérique terrestre (TNT) ?

À ce stade des débats, nous constatons que les objectifs définis sont globalement tenus, mais que la trajectoire budgétaire retenue ne permet pas une couverture territoriale pleinement conforme à ces objectifs. Nous nous abstiendrons donc lors du vote sur les crédits de cette mission.

M. Jérôme Nury, rapporteur pour avis. Nous partageons tous votre volonté d’assurer l’égalité d’accès des territoires au haut et au très haut débit. C’est le sens de l’engagement de l’État au côté des collectivités locales et des opérateurs. On dénombre encore un peu moins de cinq millions de locaux non raccordables. Il faudra déterminer, dans les mois qui viennent, s’il est opportun que la totalité des locaux soient raccordables à la fibre, étant donné le contexte budgétaire et l’ampleur du financement que devraient apporter les opérateurs. On peut se demander s’il ne conviendrait pas de recourir à des technologies alternatives qui fonctionnent de mieux en mieux, telles la 5G ou le satellite.

Orange a certes choisi le contentieux, mais doit s’en mordre les doigts car son recours a été rejeté et l’entreprise a dû s’acquitter d’une amende de 26 M€.

Il ne me paraît pas nécessaire d’avoir des autorisations d’engagement additionnelles en faveur des RIP, car leur déploiement touche à sa fin : il n’y a pas lieu d’accélérer les opérations, ni de lancer de nouveaux réseaux. Les RIP couvrent à présent l’ensemble du territoire, en complément de l’action des opérateurs dans les zones Amii et Amel.

Enfin, les crédits pour 2025 permettront d’adopter des mesures en faveur des raccordements complexes.

M. Vincent Rolland (DR). L’évaluation que vous avez faite du déploiement du réseau de la fibre sur le territoire national dans le cadre du plan « France Très Haut Débit » et du New Deal mobile montre que si les choses avancent, des motifs d’inquiétude subsistent : je pense, notamment, au recours à la sous-traitance. Il faut se féliciter des efforts réalisés, tout en ayant conscience que l’on peut encore améliorer le déploiement de la fibre. Nous avons été trop longtemps habitués à la cascade des sous-traitants et aux problèmes liés à des raccordements défectueux.

Sur la partie budgétaire à proprement parler, notre groupe ne peut que se satisfaire de la relative stabilité des crédits, eu égard au contexte. Alors que l’objectif du Gouvernement est de ramener le déficit à 5 % du PIB en 2025, le maintien des crédits du numérique à un tel niveau révèle la volonté de préserver l’investissement dans nos zones rurales, ce qui est essentiel pour leur attractivité. La couverture 4G ne doit pas être l’apanage des zones métropolitaines. En outre, nous ne pouvons qu’approuver les propos du rapporteur sur les réflexions relatives à un éventuel deuxième New Deal.

L’Arcep doit, plus que jamais, soutenir les collectivités. En Savoie, XpFibre ne donne pas entièrement satisfaction – à cet égard, je ne peux que souscrire à votre recommandation relative à la conduite d’audits par l’Arcep. On nous signale l’installation de poteaux sur le domaine privé, même lorsque l’enfouissement est demandé. Dans les territoires de montagne, le cadre naturel – en particulier, la neige et les intempéries – exige la prise en compte de ce type de demandes. La qualité n’est pas au rendez-vous.

Enfin, je voudrais insister sur l’importance des crédits affectés aux agences postales accueillies par les communes et les points-relais commerçants. En effet, ces agences sont indispensables au monde rural. Une diminution des financements devrait être compensée par nos communes pour garantir un service qui ne relève pourtant pas de leur compétence. Le contrat de présence postale territoriale doit être défendu. Nous ne pourrons que souscrire à l’amendement que vous avez déposé en ce sens, qui vise à réaffecter 50 M€ de crédits.

M. Jérôme Nury, rapporteur pour avis. Vous avez raison, il y a encore quelques mois, nous étions très inquiets face à la cascade de sous-traitants. Nous avions souligné, lors de l’audition des quatre opérateurs, combien cela créait de problèmes. Depuis lors, la filière a amélioré son organisation. La sous-traitance en cascade a pris fin : désormais, il ne peut plus y avoir que deux sous-traitants derrière un opérateur. Ensuite, des procédures ont été instituées pour garantir une plus grande qualité, notamment en matière de raccordement – il s’agit d’éviter, en particulier, qu’un fournisseur d’accès assure la connexion d’un client en débranchant un autre client. Les changements apportés semblent aller dans le bon sens.

Dans les zones de montagne et, plus généralement, dans les zones Amel et Amii, l’État doit être très vigilant sur l’activité des opérateurs d’infrastructures. L’Arcep, quant à elle, doit faire appliquer l’article L. 33-13 du code des postes et des communications électroniques, qui l’autorise à demander à ces opérateurs d’assurer – conformément aux engagements qu’ils ont pris vis-à-vis des collectivités – les raccordements dans les délais prévus. Je suis certain, d’ailleurs, que l’Autorité y veille.

Il me paraît indispensable de renforcer l’accompagnement de La Poste par l’État dans le cadre des missions d’aménagement du territoire, qui sont essentielles pour le maintien des agences postales communales et intercommunales, ainsi que des points-relais de La Poste, qui nous sont très chers.

M. Benoît Biteau (EcoS). Élu d’une zone rurale, je suis très attaché à ce que l’accès au haut et au très haut débit ne soit pas l’occasion, une fois de plus, de tenir à l’écart les territoires ruraux. La dématérialisation, qui avance de façon galopante, peut être une réponse adaptée au monde rural, qui est éloigné des centres de décision, mais il faut veiller à ce qu’elle n’aille pas plus vite que le déploiement des réseaux du haut et du très haut débit.

Les zones rurales ne sont pas seulement résidentielles : elles accueillent aussi des activités économiques et professionnelles. Alors qu’on demande aux agriculteurs d’être toujours plus performants et plus proches des outils numériques, il faut rappeler que la connexion au haut et au très haut débit leur est indispensable pour l’emploi d’outils modernes. Des technologies telles que le satellite et la 5G pourraient, comme vous l’avez suggéré, être mises à la disposition du monde rural.

Je m’interroge sur un phénomène récurrent dans les zones rurales, à savoir la multiplication de pylônes qui pourraient être mutualisés. Un opérateur en particulier – Free, pour ne pas le citer – les installe d’une manière un peu sauvage, alors qu’il pourrait utiliser les structures existantes. Il me paraît incroyable qu’on ne puisse pas mutualiser les équipements en place.

M. Jérôme Nury, rapporteur pour avis. Pour être également élu dans une circonscription rurale, je suis tout aussi attaché que vous à ce que les habitants de ces territoires aient accès aux mêmes infrastructures que les citadins. Sans la puissance publique, on le sait, les investisseurs privés ne viendraient pas chez nous. C’est le sens du plan « France Très Haut Débit » et du New Deal mobile. Les opérateurs, qui cherchent logiquement la rentabilité, avaient dans un premier temps mis les campagnes de côté.

Les territoires ruraux abritent en effet des activités économiques. Dans le cadre des RIP, d’ailleurs, on vise en premier lieu le fibrage des zones d’activité pour accompagner les très petites, petites et moyennes entreprises (TPE et PME).

La question des pylônes est récurrente : on voit bien, en effet, qu’on en installe plus qu’avant dans les territoires ruraux. Toutefois, les procédures prévoient bien leur mutualisation entre la distribution d’électricité, assurée par Enedis, et le déploiement de la fibre. Cela étant, des calculs de charge sont effectués pour vérifier qu’un pylône est en mesure d’accueillir un réseau supplémentaire. Par ailleurs, on ne dispose pas de fourreaux partout, ce qui impose parfois l’ajout de poteaux – il y a trente ou quarante ans, le cuivre avait été mis en pleine terre.

Mme Louise Morel (Dem). L’objectif qui apparaît en filigrane du New Deal mobile est la généralisation de la couverture en fibre optique sur l’ensemble du territoire national. À cet égard, on peut se réjouir du fait que, dès 2020, 100 % des locaux étaient éligibles au bon haut débit et qu’au 31 mars 2023, la totalité des locaux étaient considérés comme éligibles au très haut débit, dont 86 % par le biais d’une technologie filaire.

Pourtant, les perspectives pour 2025 inquiètent. Le budget des communications électroniques et numériques est marqué par une réduction préoccupante des crédits, notamment concernant le déploiement du très haut débit sur l’ensemble du territoire. Les financements dédiés aux réseaux d’initiative publique accusent ainsi une baisse de 52 %. Les habitants de nos circonscriptions nous font part régulièrement de leurs inquiétudes.

Comment pouvons-nous garantir que les zones rurales et isolées – en particulier, les territoires de montagne – ne soient pas les laissées-pour-compte dans un contexte de réduction des financements ? Quelles mesures peut-on envisager pour inciter les opérateurs à respecter leurs obligations dans ces zones où l’accès au numérique est essentiel ?

Ensuite, s’agissant des raccordements complexes, vous évoquez la possibilité de créer une structure financière pour sécuriser le financement des raccordements situés sur le domaine public, sans recourir directement aux deniers publics. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Enfin, vous traitez de la question cruciale de la taxation des géants du numérique et de leur contribution au financement des infrastructures numériques. À l’échelle européenne, des discussions sont en cours dans le cadre du projet Befit (Business in Europe : Framework for Income Taxation). Dans votre rapport, vous évoquez des pistes pour assurer une « contribution juste » (fair share) des plateformes numériques. Pouvez-vous nous apporter des précisions, notamment au sujet des difficultés techniques soulevées par l’Arcep ?

Vos réponses et le sort réservé aux amendements conditionneront le vote de notre groupe.

M. Jérôme Nury, rapporteur pour avis. Il faut en effet se réjouir que la généralisation de la fibre optique, pilotée par l’État depuis plusieurs années, porte ses fruits. Elle n’a pu se faire que grâce à l’engagement massif de l’État, des collectivités locales – en premier lieu, des conseils départementaux et régionaux – et des opérateurs. Nous devons veiller à ce que cette dynamique, qui est proche de son aboutissement, parvienne effectivement à son terme.

Pour ce qui est des crédits, quelques ajustements me paraissent nécessaires. La réaffectation de 50 M€ que je vous propose par amendement garantirait, selon les différents acteurs et l’ANCT, qui gère ces financements, que le déploiement des RIP soit mené à son terme. Nous nous trouvons, rappelons-le, dans la phase finale – beaucoup de RIP sont réalisés à 90 ou 95 % –, ce qui explique la diminution des crédits.

En ce qui concerne les zones rurales, il faut partir du principe que nous n’aurons pas la fibre optique partout fin 2025. Il faut absolument que nous nous tournions vers d’autres technologies et que nous obligions les opérateurs, en zone Amii ou Amel, à respecter leurs engagements ; la loi permet à l’Arcep de le faire.

S’agissant des raccordements complexes, qui seront très coûteux, il nous appartient de mettre tout le monde autour de la table – opérateurs d’infrastructures, fournisseurs d’accès à internet et acteurs des RIP – pour trouver des solutions de financement.

M. Max Mathiasin (LIOT). Grâce aux efforts des collectivités territoriales, de l’État et des opérateurs, nous devrions parvenir à un taux de couverture moyen de 95 % d’ici à la fin 2025. Mais ce n’est qu’une moyenne. Au-delà de ces chiffres, en apparence positifs, il reste des territoires – et donc un certain nombre de nos concitoyens – privés de connexion, ce à quoi nous ne pouvons pas nous résoudre. Il faut maintenir les efforts, dans la dernière ligne droite, pour que soit tenue la promesse d’apporter la fibre sur tout le territoire – dans l’Hexagone comme outre-mer, en ville comme en zone périurbaine, en zone rurale comme en montagne.

Toutefois, telle n’est pas l’orientation prise par ce budget, qui s’inscrit plutôt dans le prolongement de la décision prise par Bruno Le Maire en février 2024 de rogner de 155 M€ les crédits dédiés aux RIP dans le plan « France Très Haut Débit ». Dans ces conditions, les zones complexes ne pourront pas être raccordées. En outre, l’accélération du raccordement à la fibre s’est traduite par une dégradation de la qualité : il arrive que l’opérateur branche un client en débranchant son voisin et que des armoires soient vandalisées. Tout cela entraîne des déconnexions fréquentes des usagers du réseau de la fibre. Ne crions donc pas victoire trop vite s’agissant du plan « France Très Haut Débit ».

La présence territoriale de La Poste suscite également des inquiétudes. Nous appelons le Gouvernement à tenir ses engagements et à revenir sur la décision, inscrite dans le projet de loi de finances, de diminuer de 50 M€ le budget dédié à l’aménagement du territoire.

Sur ces deux sujets, nous présenterons des amendements. Nous entendons défendre la cohésion des territoires et garantir à chacun, quel que soit son lieu de résidence, l’accès à des services essentiels.

M. Jérôme Nury, rapporteur pour avis. En février dernier, le ministre Bruno Le Maire avait rogné de 117 M€ les crédits du plan « France Très Haut Débit », mais cela n’a aucunement affecté la vitesse de déploiement des RIP. Il faut toutefois veiller à ce que nous disposions des crédits nécessaires, en 2025, pour mener à son terme le fibrage du pays comme il était prévu.

Je partage votre inquiétude concernant la sous-traitance, mais la qualité de cette dernière semble s’être véritablement améliorée d’après les éléments probants en notre possession. Il nous appartient d’être vigilants dans les territoires. Nous avons beaucoup de remontées à ce sujet. Les opérateurs ont, me semble-t-il, revu leurs procédures, ce qui a permis de retrouver une certaine qualité dans les raccordements – je pense aux branchements dans les armoires.

Je partage également votre inquiétude quant à l’outre-mer, où beaucoup reste à faire pour assurer le raccordement à la fibre. À Mayotte, le projet de RIP n’est pas encore lancé, ce qui appelle la mobilisation des élus nationaux et locaux.

Je suis, comme vous, attaché à la mission d’aménagement du territoire de La Poste. C’est pourquoi je vous proposerai, par amendement, de rétablir les 50 M€ que le Gouvernement a essayé discrètement de faire disparaître.

M. André Chassaigne (GDR). Dans votre rapport pour avis, vous mettez l’accent sur le plan « France Très Haut Débit », dont l’objectif est de permettre à tous les Français d’avoir accès, d’ici à la fin 2025, à une connexion par fibre optique. De ce fait, il a été décidé de fermer le réseau cuivre, ce qui a pour conséquence de laisser à l’abandon des personnes fragiles et isolées qui bénéficient parfois d’une téléassistance.

Actuellement, plus de quatre Français sur cinq peuvent théoriquement être raccordés à la fibre optique, ce qui ne veut pas forcément dire qu’ils le sont effectivement. Ainsi, l’UFC-Que choisir a révélé, dans une étude de 2023, la situation déplorable dans laquelle se trouvent des dizaines de milliers de particuliers en raison de malfaçons techniques, de débranchements sauvages, de rendez-vous non honorés ou de réparations effectuées plusieurs semaines après le signalement.

Le gouvernement précédent n’a pris aucune mesure pour remédier à cette situation. Êtes-vous favorable à la création d’un véritable « droit opposable » au très haut débit, resté jusqu’à présent lettre morte ? De fait, les opérateurs ne tiennent pas leurs engagements, notamment en matière de déploiement, lequel stagne dans de nombreux territoires dont la couverture demeure incomplète.

Nous prenons acte de la mise en œuvre dans le présent budget d’un dispositif expérimental de financement des raccordements privés à hauteur de 16,1 M€, mais nous regrettons l’amputation de 52 % des moyens alloués aux RIP et la diminution tout aussi spectaculaire des crédits relatifs à l’inclusion numérique. Destinés au recrutement de quatre mille « conseillers numériques » auprès de France Services, ces crédits visaient pourtant à lutter contre l’illectronisme. Ce phénomène, qui touche encore 15 % de la population française, suscite beaucoup d’angoisse et alimente le sentiment d’abandon de ceux qui vivent dans ce qu’il faut bien appeler des « territoires oubliés de la République ».

M. Jérôme Nury, rapporteur pour avis. En effet, nous avons grandement besoin des conseillers numériques, notamment dans les territoires ruraux, où la disparition des services publics de proximité oblige nos concitoyens, dont beaucoup ne maîtrisent pas les nouvelles technologies, à faire certaines démarches sur internet. Toutefois, ce dispositif a vocation à être pris en charge, à terme, par les collectivités, puisqu’il était prévu que l’État ne le finance que pendant trois ans. On peut espérer, au demeurant, que nos concitoyens acquièrent progressivement une meilleure maîtrise de ces technologies.

S’agissant de l’abandon du réseau cuivre, je suis, là encore, d’accord avec vous : nous devons être très vigilants. En effet, le décommissionnement peut avoir des conséquences dramatiques pour des personnes âgées qui bénéficient d’une téléassistance ou d’une téléalarme. Il faut donc, en liaison avec les opérateurs et les maires, préparer, plusieurs mois à l’avance, les personnes concernées au basculement vers la fibre.

Quant à l’entretien de ce réseau, il est vrai que l’opérateur historique, dont c’est la responsabilité, ne l’assure pas toujours correctement. Il arrive ainsi que des câbles de cuivre traînent dans des fossés et ne soient pas réparés avant plusieurs mois ; c’est intolérable. L’opérateur prétend consacrer cinq cents millions d’euros à cet entretien : j’ai du mal à le croire. En tout état de cause, il doit réviser ses procédures – à nous de faire pression sur lui en ce sens – pour être plus réactif, à l’instar d’Enedis, par exemple, qui intervient très efficacement sur le réseau électrique.

M. Benoît Biteau (EcoS). Je reviens à mes fameux pylônes. Leur capacité à accueillir des émetteurs a été vérifiée, les gaines existent, mais le fait est qu’un opérateur – toujours le même, Free – refuse de coopérer. Même les maires ne parviennent pas à lui imposer d’utiliser les pylônes existants !

 

Article 42 et état B : Crédits du budget général

 

Amendement II-CE22 de Mme Claire Lejeune et amendements identiques II-CE37 de M. Jérôme Nury et II-CE23 de M. Christophe Naegelen (discussion commune).

M. Matthias Tavel (LFI-NFP). L’amendement II-CE22 vise à défendre les crédits alloués à La Poste pour financer ses missions de service public.

Alors qu’on nous présente les agences postales communales et les relais commerçants comme une solution de rechange aux bureaux de poste, dont un nombre croissant est menacé de fermeture – cinq dans ma seule
circonscription ! –, on constate que cette prétendue mesure alternative est elle-même fragilisée par une baisse de crédits de 50 M€. Nous nous opposons à cette logique de dégradation continue.

Des amendements ont été déposés afin de revenir sur cette baisse – et nous les soutiendrons si le nôtre n’est pas adopté –, mais les 50 M€ proposés ne nous paraissent pas suffisants. Nous proposons, quant à nous, d’abonder le programme « Développement des entreprises et régulations » de 130 M€, soit l’équivalent du montant du plan d’économies engagé par La Poste, plan qui aurait pour conséquence la suppression de plusieurs milliers d’emplois dont nous avons besoin pour assurer la présence du service public postal sur l’ensemble du territoire.

Ne nous contentons pas d’empêcher la diminution des moyens du service public postal ; au contraire, renforçons-les !

M. Jérôme Nury, rapporteur pour avis. Monsieur Tavel, j’entends votre volonté de soutenir La Poste : nous sommes tous attachés à nos facteurs – qui, dans les territoires ruraux, offrent un véritable service de proximité et contribuent à maintenir le lien entre les habitants –, comme à nos bureaux de poste, qu’ils soient gérés directement par l’entreprise nationale ou par les communes et les intercommunalités, voire aux points-Poste. Toutefois, outre que l’argumentation de votre exposé sommaire s’égare quelque peu, le montant des crédits proposé, soit 130 M€, est très éloigné de l’évaluation par l’Arcep des moyens nécessaires à l’exécution de la mission de service public universel que La Poste assume pour l’État.

Votre amendement me paraît donc déraisonnable. C’est pourquoi je vous invite à le retirer et à soutenir mon amendement II-CE37, qui vise à rétablir les 50 M€ de crédits que le Gouvernement propose de supprimer. Ainsi l’État ne pourra pas prendre prétexte de la diminution de cette ligne budgétaire pour changer la donne, en remettant en cause le maintien de bureaux de poste dans le cadre des relations contractuelles entre les collectivités territoriales et La Poste, ou en modifiant la manière dont celle-ci rémunère les commerces de proximité, dont la survie serait menacée si le forfait était remplacé par un pourcentage.

M. Max Mathiasin (LIOT). L’amendement II-CE23 est identique à celui du rapporteur pour avis. La diminution des ressources de La Poste aurait en effet pour conséquence de priver du service postal ceux de nos concitoyens qui vivent dans des zones reculées ou oubliées de notre territoire, où les services publics manquent déjà cruellement. Ce serait, sinon une faute, du moins une erreur fondamentale.

M. Matthias Tavel (LFI-NFP). Qui peut le plus peut le moins : les 50 M€ proposés par nos collègues sont nécessairement compris dans notre amendement. Par ailleurs, le contrat de présence postale territoriale doit être renégocié dans les mois qui viennent et nous serons peut-être amenés à examiner un texte législatif relatif à La Poste. En adoptant notre amendement, notre commission montrerait qu’elle est, s’agissant de cette question, très attentive et exigeante.

La commission adopte l’amendement II-CE22.

En conséquence, les amendements II-CE37 et II-CE23 tombent.

 

Amendement II-CE25 de M. Christophe Naegelen.

M. Max Mathiasin (LIOT). Il s’agit de rétablir les crédits affectés au plan « France Très Haut Débit » que le Gouvernement a annulés en février 2024, à savoir 155 M€, répartis comme suit : 38 M€ en autorisations d’engagement et 117 M€ en crédits de paiement.

M. Jérôme Nury, rapporteur pour avis. Le contexte économique et budgétaire nous incite à être précis concernant les engagements de l’État en 2025. Lors de nos auditions, l’ANCT, comme les différents RIP ou l’Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l’audiovisuel (Avicca), nous ont indiqué que la vitesse de déploiement est telle que nous n’aurons besoin que de 50 M€ supplémentaires en 2025. Or je rappelle, d’une part, que le plan « France Très Haut Débit » bénéficiera de reports de crédits de ces dernières années et, d’autre part, qu’environ 100 M€ ont été mis de côté à l’ANCT pour les RIP.

Je comprends vos inquiétudes, mais il me paraît inutile d’allouer au plan « France Très Haut Débit » une somme qui, de toute façon, ne sera pas dépensée en 2025. Je vous invite donc à retirer votre amendement au bénéfice de mon amendement II-CE36 à suivre, qui vise à abonder ce plan à hauteur de 50 M€.

L’amendement est retiré.

 

Amendement II-CE36 de M. Jérôme Nury.

M. Jérôme Nury, rapporteur pour avis. Je l’ai défendu.

Mme Louise Morel (Dem). Je souhaiterais savoir si les 50 M€ dont il est question dans cet amendement sont, d’une manière ou d’une autre, liés aux 130 M€ de l’amendement II-CE22. Car, si nous l’adoptons, nous aurons, en l’espace de trois minutes, augmenté les dépenses de l’État de 180 M€…

M. Jérôme Nury, rapporteur pour avis. Je comprends votre remarque. N’oublions pas cependant qu’il faudrait, pour cela, que le gage soit levé. Je ne suis pas certain que nos bonnes intentions aillent jusqu’au bout, chers collègues. Nous verrons…

Mme la présidente Aurélie Trouvé. En outre, nous ne savons pas si le Gouvernement aura ou non recours à l’article 49.3 de la Constitution pour l’adoption du budget…

La commission adopte l’amendement II-CE36.

 

Après avoir examiné les cinq avis budgétaires se rattachant à la mission Économie, la commission a émis un avis favorable à l’adoption des crédits modifiés de cette mission lors de sa réunion du jeudi 24 octobre 2024.

 


   LISTE DES PERSONNES auditionnÉes

Par ordre chronologique

Free/Iliad *

M. Maxime Lombardini, vice-président du groupe Iliad

Mme Ombeline Bartin, directrice des affaires publiques

Mme Naphsica Papanicolaou, chargée d’affaires publiques

SFR *

Mme Marie Lhermelin, secrétaire générale adjointe

M. Franck Coudrieau, délégué régional

M. Loïc Natchoo, consultant en politiques publiques

Orange *

M. Laurentino Lavezzi, directeur des affaires publiques groupe

M. Lucas Cherfils, chargé des Affaires parlementaires

Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP)

Mme Laure de La Raudière, présidente

Mme Virginie Mathot-de Raincourt, conseillère de la présidente

M. Olivier Corolleur, directeur général

Fédération française des télécoms (FFT) *

M. Lucas Cherfils, chargé de mission à la direction des affaires publiques Orange

M. Olivier Riffard, directeur général adjoint

M. Corentin Durand, responsable des affaires publiques Bouygues Telecom

M. Loïc Natchoo, responsable affaires publiques Altice-SFR

Manche numérique

Mme Valérie Nouvel, présidente et vice-présidente du conseil départemental de la Manche

M. Antoine Delaunay, conseiller départemental de la Manche, président

M. Rachid Mammeri, directeur


Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et audiovisuelles (AVICCA)

M. Ariel Turpin, délégué général

M. Guilhem Denizot, chargé de mission numérique

Agence nationale des fréquences radio (ANFR)

M. Gilles Brégant, directeur général

M. Christophe Digne, directeur général adjoint

Bouygues Telecom *

Mme Liza Bellulo, secrétaire générale

M. Corentin Durand, directeur des affaires publiques

Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT)

M. Laurent Rojey, directeur général délégué au numérique

M. Zacharia Alahyane, directeur de la mission France mobile

Direction générale des entreprises (DGE)

M. Antoine Jourdan, sous-directeur « communications électroniques

M. Lucas Hassan, chargé de mission industries de cybersécurité au service de l’économie numérique

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

*  Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire des représentants d’intérêts de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), qui vise à fournir une information aux citoyens sur les relations entre les représentants d’intérêts et les responsables publics lorsque sont prises des décisions publiques.


([1]) Les déploiements s’échelonneront jusqu’en 2027 pour ces sites, et même jusqu’en 2030 pour la couverture mobile des axes ferroviaires.

([2]) Décret n° 2024-124 du 21 février 2024 portant annulation de crédits.

([3]) Il s’agit de dépenses d’intervention (titre 6).

([4]) Ces 150 M€ se décomposent de la façon suivante : 110 M€ figurant sur le programme 343 prévus en 2021 et dont le report est demandé pour 2022 et 40 M€ de reprises d’engagement sur les projets.

([5]) Loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes.

([6]) Règlement (UE) 2022/868 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2022 portant sur la gouvernance européenne des données et modifiant le règlement (UE) 2018/1724.

([7]) Articles L. 43 et R. 20-44-10 du code des postes et des communications électroniques.

([8]) Décret n° 2017-1048 du 10 mai 2017 relatif au fonds d’accompagnement de la réception télévisuelle.

([9]) Loi n° 2015-136 du 9 février 2015 relative à la sobriété, à la transparence, à l’information et à la concertation en matière d’exposition aux ondes électromagnétiques.

([10]) Dès le début de 2020, le Gouvernement a souhaité aller plus loin que le très haut débit auprès des collectivités et a fixé un nouvel objectif afin de répondre aux enjeux de la Gigabit Society, visant à généraliser les déploiements de fibre optique pour garantir sur l’ensemble du territoire l’adressage des enjeux européens.

([11]) Ce relevé géographique, prévu à l’article L. 33-12-1 du code des postes et des communications électroniques doit être établi tous les trois ans au moins par l’Arcep afin de disposer de prévisions fiables sur les déploiements à venir. Pour ce faire, l’Arcep a interrogé les opérateurs d’infrastructures sur les volumes prévisionnels de locaux raccordés à la fibre optique par année entre 2024 et 2026 et compiler les dates envisagées de fin de déploiement sur l’ensemble du territoire.

([12]) On appelle Amel les zones sur lesquelles le département ou une collectivité locale lance un appel d’offres à destination des opérateurs privés afin de prendre en charge la couverture en fibre optique FttH dans les communes écartées de l’AMII en 2011.

([13]) Observatoire des marchés des communications électroniques, services fixes haut et très haut débit : abonnements et déploiements, 2e trimestre 2024..

([14]) Dans une lettre adressée au ministre compétent à la fin de l’année 2023, l’opérateur Orange a pris l’engagement d’atteindre fin 2025 un objectif de 96 % de locaux raccordables (sauf en cas de refus de tiers), sur la base d’une projection de 7,7 millions de locaux, et de lancer une expérimentation sur deux communes d’un processus de raccordabilité à la demande des usagers, avant d’envisager son extension voire sa généralisation.

([15]) Commission supérieure du numérique et des postes,  « Les conséquences des coupes budgétaires sur le plan France très haut débit, au regard des enjeux de déploiement, de résilience et de la fermeture du réseau cuivre », avis n° 2024-04, 6 juin 2024.

([16]) Contribution écrite de l’agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT).

([17]) Ibidem.

([18]) Contribution écrite de l’Arcep.

([19]) Contribution écrite de la Direction générale des entreprises.

([20]) Contribution écrite de l’Arcep.

([21]) Les documents afférents sont disponibles dans le dossier « 3- Fonds de dossier ; 3.2 – Raccordement complexe en domaine public ».

([22]) Le passage en très haut débit mobile concerne la totalité des sites mobiles existant en métropole, à l’exception des sites relevant du programme historique « zones blanches – centres bourgs », pour lesquels l’échéance de fin 2020 concerne 75 % d’entre eux, les 25 % restants devant passer en très haut débit mobile postérieurement.

([23]) Point d’étape de l’Arcep sur le New Deal mobile, février 2024.

([24]) Contribution écrite de l’Arcep.

([25]) Contribution écrite de l’Arcep.

([26]) Bouygues Telecom, Orange et SFR

([27]) Les axes routiers prioritaires sont définis dans les autorisations d’utilisation des fréquences délivrées aux opérateurs de réseaux mobiles métropolitains comme étant « les autoroutes, les axes routiers principaux reliant, au sein de chaque département, le chef-lieu de département (préfecture) aux chefs-lieux d’arrondissement (sous-préfectures) et les tronçons de routes sur lesquels circulent en moyenne annuelle au moins cinq mille véhicules par jour, tels qu’ils existent au 1er janvier 2018. Si plusieurs axes routiers relient un chef-lieu de département (préfecture) à un chef-lieu d’arrondissement (sous-préfecture), le titulaire est tenu d’en couvrir au moins un ».

([28]) Il est estimé autour de 2 milliards d’euros.

([29]) https://tous-connectes.anct.gouv.fr/