N° 462

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 16 octobre 2024.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES
sur le projet de loi de finances pour 2025 (n° 324)

TOME X

OUTRE-MER

PAR M. Philippe NAILLET,

Député

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 Voir les numéros : 324 (Tome III, Annexe 32).


SOMMAIRE

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  Pages

INTRODUCTION

PREMIÈRE PARTIE : UNE chute ALARMANTE DES CRÉDITS DE LA MISSION OUTRE-MER

I. Une chute brutale des CRÉDITS DU PROGRAMME 123 « CONDITIONS DE VIE OUTRE-MER » (- 37 % en AE et - 34 % en cp)

II. Une augmentation en trompe-L’œil des CRÉDITS DU PROGRAMME 138 « EMPLOI OUTRE-MER » (+ 3,8 % en AE et + 3,4 % en CP)

SECONDE PARTIE : L’insertion PROFEsSIONNELLE DANS LES OUTRE-MER

I. Des spécificités ultramarines justifiant la mise en place de dispositifs d’aides à l’insertion profesSionnelle en Outremer

A. L’insertion en Outre-mer : des sPÉcificitÉs ultramarines

1. Une insertion professionnelle plus difficile dans les Outre-mer

a. Une coexistence paradoxale entre taux de chômage élevés et difficultés de recrutement dans les Outre-mer

b. Des difficultés d’insertion professionnelle liées aux dynamiques de la demande et de l’offre de travail.

c. Un problème d’appariement entre offre et demande de travail

i. Une inadéquation des qualifications : des difficultés d’insertion qui s’ancrent dès le système éducatif

ii. Des freins périphériques à l’emploi

2. Des publics fragiles surexposés au chômage

a. Les jeunes ultramarins

b. Les séniors ultramarins

c. Les femmes ultramarines

3. Des spécificités territoriales liées à la diversité des Outre-mer

a. Les DROM

i. La Martinique

ii. La Guadeloupe

iii. La Guyane

iv. La Réunion

v. Mayotte

b. Les COM

i. Saint-Pierre-et-Miquelon

ii. Saint-Barthélemy

iii. Saint-Martin

iv. Polynésie française

v. Wallis-et-Futuna

c. La Nouvelle-Calédonie

B. la mise en œuvre de dispositifs d’aides à l’insertion en Outre-mer

1. France Travail

a. Les contrats aidés

b. Le contrat d’engagement jeune (CEJ)

c. Un fonctionnement et une gouvernance tournés vers l’insertion

2. Les régiments du service militaire adapté (RSMA)

a. Un dispositif militaire d’insertion professionnelle aux résultats probants

b. Une revalorisation indemnitaire pour renforcer l’attractivité du RSMA

c. Une entité développant des partenariats au niveau local

3. L’Agence de l’Outre-mer pour la mobilité (Ladom)

a. Des dispositifs facilitant la mobilité professionnelle

b. Un opérateur en lien avec les différents acteurs de l’insertion

4. Le rôle central des missions locales

II. Face aux difficultés persistantes, il convient de développer des Gestions Prévisionnelles des Emplois et des Compétences (GPEC) territoriales prospectiveS, inclusiveS et adaptéeS aux territoires ultramarins

A. Malgré des besoins de recrutement sur certains marchÉs en tension, les difficultÉs d’insertion profesSionnelle persistent en Outre-mer

1. Des difficultés persistantes d’insertion et de recrutement

a. Le manque et l’inadéquation des formations conduisent à valoriser la mobilité professionnelle en dehors des Outre-mer

b. Le difficile retour des forces vives

c. Le défi de rendre le recrutement dans le secteur privé aussi attractif que dans le secteur public

d. Un manque de valorisation des métiers dits « en tension »

e. Un fort halo autour du chômage, non pris en compte par les indicateurs

2. Un manque de suivi, de vision de long-terme et de coordination

a. Un manque de suivi, de vision de long terme et de données

b. Une coordination institutionnelle parfois difficile

c. Un « réflexe Outre-mer » qui fait parfois défaut

i. Lutter contre le délaissement des territoires éloignés de l’Hexagone

ii. Éviter la mise à l’arrêt des dispositifs d’aides à l’insertion

iii. Adapter les conventions collectives aux spécificités ultramarines

B. Soutenir les dispositifs d’aides à l’insertion professionnelle en Outre-mer

1. Assurer un financement pérenne des dispositifs d’aide à l’insertion

i. Des économies réalisées sur les aides à l’apprentissage

ii. Une stabilisation des crédits de France Travail

b. Un budget prévoyant des économies sur les dispositifs ultramarins d’insertion professionnelle

i. Le RSMA

ii. LADOM

iii. Les missions locales ultramarines

2. Mettre en œuvre des GPEC territoriales orientées vers les métiers d’avenir, inclusives et adaptées aux territoires ultramarins

a. Orienter l’insertion professionnelle vers les métiers d’avenir par la mise en œuvre de GPEC territoriales

b. Adapter les GPEC territoriales aux publics les plus éloignés de l’emploi

c. Développer l’offre de formation locale dans les métiers en tension et la mobilité professionnelle, tout en incitant au retour des forces vives

i. Développer au niveau local l’offre de formation relative aux métiers d’avenir

ii. Développer la mobilité tout en incitant au retour des forces vives

d. Poursuivre la coordination des acteurs de l’insertion professionnelle

EXAMEN EN COMMISSION

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

LISTE DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES

 


   INTRODUCTION

Dans un contexte marqué par les évènements dramatiques survenus en Nouvelle-Calédonie et par les conséquences désastreuses de la vie chère supportées par les populations ultramarines, résultant non seulement de coûts exorbitants mais également d’une faiblesse globale des revenus, votre rapporteur a été effaré de découvrir la chute brutale de crédits proposée par le Gouvernement sur la mission « Outre-mer » dans le cadre du projet de loi de finances (PLF) pour 2025.

Pour les deux programmes confondus, le total des mesures d’économies s’élève en effet à plus de 398 millions d’euros en autorisations d’engagement et à près de 250 millions d’euros en crédits de paiement.

Ces coupes budgétaires drastiques concernent quasiment toutes les actions de la mission Outre-mer (logement, aménagement du territoire, collectivités territoriales, aides à la continuité territoriale, jeunesse, appui à l’accès au financement bancaire, etc.). Seules exceptions : les actions relatives à l’insertion économique et au pilotage des politiques des outre-mer, dont les crédits sont stabilisés, et celle relative au soutien aux entreprises, dont les crédits augmenteraient facialement de 6 % – un taux discutable formé à partir d’une prévision incomplète du coût des exonérations de charges sociales pour 2025 et minoré des potentielles économies attendues d’une prochaine déstructuration des dispositifs d’exonérations sociales, dont le rôle est pourtant fondamental pour le tissu économique ultramarin.

Ces chutes de crédits sont particulièrement alarmantes dans un contexte où les entreprises, les collectivités, les acteurs locaux et les populations ultramarines nécessitent, plus que jamais, d’être soutenus. Si le ministère chargé des Outre-mer (MOM) est tenu de participer au redressement des finances publiques dans un contexte budgétaire particulièrement contraint, cet effort ne peut être réalisé dans de telles proportions et sans concertation avec les territoires et les acteurs concernés. Pour ces raisons, précisées dans la première partie du rapport, votre rapporteur émet un avis défavorable à l’adoption des crédits de la mission « Outre-mer ».

Par ailleurs, votre rapporteur a souhaité aborder, dans une seconde partie thématique, la problématique de l’insertion professionnelle au sein des Outre-mer.

Naître en Outre-mer ne devrait jamais être un handicap dans un parcours de vie professionnelle. Comme partout en France, chaque jeune ultramarin devrait pouvoir choisir une orientation qui permette son émancipation en conformité avec ses aspirations personnelles. Pourtant, dans les territoires ultramarins, les durées et les taux de chômage, situés entre 12 % et 34 %, sont considérablement plus élevés qu’en Hexagone et surexposent les populations fragiles, comme les jeunes, les femmes et les séniors, à un éloignement durable du marché de l’emploi.

Force est de constater que des écarts très importants subsistent à ce jour en termes d’égalité des chances, de niveau scolaire, d’accès à la formation ou encore d’insertion professionnelle – cette situation étant aggravée par la situation démographique préoccupante de certains territoires ultramarins.

Or, à l’aune du principe d’égalité républicaine, la France ne peut se satisfaire d’une insertion professionnelle à deux vitesses au sein de ses territoires.

Ainsi, malgré une volonté affichée de s’attaquer à cette problématique, le financement de certains dispositifs favorisant l’insertion professionnelle en Outre-mer, qui sont mis en œuvre notamment par France Travail, l’agence de l’Outre-mer pour la mobilité (Ladom), le service militaire adapté (SMA) ou encore les missions locales, est raboté – certains dispositifs étant même mis à l’arrêt. Le PLF pour 2025 prévoit ainsi une diminution de crédits de l’action 2 « Aide à l’insertion et la qualification professionnelle » (baisse de 6,2 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 14,2 millions d’euros en crédits de paiement), avec des économies portant notamment sur l’extension du dispositif « Cadres d’avenir » et sur la subvention pour charge de service public de Ladom. Serait également prévu un report dans le temps de certaines opérations d’infrastructures du SMA ([1]).

L’insertion professionnelle apparaît pourtant comme la clé pour améliorer l’appariement entre offre et demande de travail et pour résorber un paradoxe persistant, qui voit se conjuguer des taux de chômage importants et des difficultés de recrutement dans certains secteurs d’activité.

Ainsi, il convient non seulement de poursuivre les efforts d’investissement dans l’éducation et la formation, mais également de développer des gestions prévisionnelles des emplois et des compétences (GPEC) territorialisées pour fixer des orientations sur le long-terme, adaptées aux spécificités de chaque territoire.

Il apparaît primordial de développer des formations à l’échelon local qui répondent aux besoins de recrutement des secteurs dit « en tension », tout en facilitant la mobilité, notamment en inter-DROM et au sein des bassins géographiques proches, pour faciliter le retour des forces vives sur des territoires parfois confrontés au déclin démographique et au vieillissement accéléré de leur population active. En donnant des perspectives concrètes et réalistes en termes d’emploi, la mobilité des ultramarins serait ainsi perçue comme un atout, plutôt que comme un choix contraint.

Seule une mobilisation coordonnée et concertée de tous les acteurs (État, entreprises, collectivités, missions locales, France Travail, associations, centres de formations, etc.) permettra de favoriser l’insertion professionnelle et de limiter les décrochages dans les parcours d’insertion, notamment chez les jeunes ultramarins.

Ces différents axes - formation professionnelle, aide à l’emploi, soutien à la création d’entreprise, apprentissage, aides au retour, coordination renforcée – devraient ainsi être vigoureusement soutenus au sein du PLF pour 2025 pour améliorer l’insertion professionnelle en Outre-mer.


   PREMIÈRE PARTIE : UNE chute ALARMANTE DES CRÉDITS
DE LA MISSION OUTRE-MER

À rebours de l’augmentation de crédits consacrée pour la mission Outre-mer en loi de finances initiale pour 2024, le PLF pour 2025 prévoit une baisse de crédits sur la mission « Outre-mer » de 13 % en autorisations d’engagement (AE) par rapport à la loi de finances initiale pour 2024, passant de 3,18 milliards d’euros (Md€) à 2,78 Md€, soit une diminution de plus de 398 millions d’euros (M€). Les crédits de paiement (CP) subiraient quant à eux une baisse de 9 %, passant de plus de 2,80 Md€ à 2,55 Md€, soit une diminution de près de 250 M€.

La structure de la mission demeure, quant à elle, inchangée.

Le programme 123 « Conditions de vie Outre-mer » est structuré en huit actions :

– action n° 1 « Logement » ;

– action n° 2 « Aménagement du territoire » ;

– action n° 3 « Continuité territoriale » ;

– action n° 4 « Sanitaire, social, culture, jeunesse et sports » ;

– action n° 6 « Collectivités territoriales » ;

– action n° 7 « Insertion économique et coopération régionales » ;

– action n° 8 « Fonds exceptionnel d’investissement » ;

– action n° 9 « Appui à l’accès aux financements bancaires ».

Le programme 138 « Emploi Outre-mer » est composé de quatre actions :

– action n° 1 « Soutien aux entreprises » ;

– action n° 2 « Aide à l’insertion et à la qualification professionnelle » ;

– action n° 3 « Pilotage des politiques des Outre-mer » ;

– action n° 4 « Financement de l’économie ».

La mission Outre-mer n’étant toutefois le support que de 14 % en AE et de 11 % des CP des crédits consacrés par l’État aux Outre-mer, une réflexion en 2025 sur la refonte de la maquette budgétaire pourrait être engagée pour éviter un émiettement nuisant à la lisibilité et au pilotage des politiques publiques menées en Outre-mer.

I.   Une chute brutale des CRÉDITS DU PROGRAMME 123 « CONDITIONS DE VIE OUTRE-MER » (- 37 % en AE et - 34 % en cp)

L’essentiel de l’effort budgétaire porte sur les crédits du programme 123 « Conditions de vie Outre-mer » : en autorisations d’engagement, les crédits chutent de 36,74 % pour s’établir à 810 M€, contre 1,281 Md€ en LFI 2024, tandis que les crédits de paiements périclitent de 34,14 % par rapport à la loi de finances initiales (LFI) pour 2024, passant de plus de 919 M€ à près de 605 M€.

Les diminutions demandées sur ce programme dans la maquette initiale présentée par le Gouvernement sont particulièrement drastiques : - 470,8 millions d’euros en AE et - 314 M€ en CP. Elles intègrent en partie les annulations faites en gestion 2024, et les crédits des nombreux amendements votés dans le cadre de l’examen parlementaire du PLF 2024, avec plus de 277 M€ d’AE et 147 M€ de CP supplémentaires pour la mission « Outre-mer », ne sont pas reconduits.

À l’exception de l’action 7 « Insertion économique et coopération régionales », pour laquelle il est proposé une stagnation des AE et CP, l’exécutif propose une chute brutale des crédits des sept autres actions du programme 123.

L’action 1 « Logement » subirait une baisse en AE de près de 32 millions d’euros par rapport à la LFI 2024, passant de 291,8 M€ à moins de 260 M€ (- 11 %) et de 9,7 millions en CP (- 5 %), se traduisant par un recalibrage des objectifs prévus au titre du plan logement Outre-mer.

Le soutien aux collectivités territoriales serait sévèrement dégradé : au total, les mesures d’économies budgétaires porteraient sur près de 250 M€ en AE.

– L’action 2 « Aménagement du territoire » souffrirait d’une baisse de 146,8 M€ (- 63 %) en AE et de 132,8 M€ (-76 %) en CP. Par conséquent, la durée des contrats de convergence et de transformation (CCT) serait étalée sur une durée de six ans (2024-2029) au lieu de quatre ans. En 2025, les projets engagés au titre de ces contrats seront donc en nombre plus réduits, les crédits prévus en dehors de la programmation pluriannuelle d’investissements eau de Mayotte seront très limités. Ainsi la réduction des crédits concernerait le plan séisme Antilles, le volet fonctionnement du contrat de développement de la Nouvelle-Calédonie et le fonds mahorais de développement économique, social et culturel ;

– L’action 6 « Collectivités territoriales » verrait aussi son enveloppe diminuer de plus de 171 M€ (40 %) en AE et de 126 M€ (38 %) en CP, limitant le nombre de collectivités pouvant bénéficier de la signature de nouveaux contrats de redressement Outre-mer (Corom) en 2025 ;

– Les crédits de l’action 8 « Fonds exceptionnel d’investissement » (FEI) retrouvent les niveaux observés entre 2019-2023, mais sont en déclin par rapport à 2024, de 50 M€ en AE (31 %) et de plus de 16 M€ en CP (19 %).

Alors qu’une hausse de 22 M€ (+ 40 %) était proposée dans le précédent budget, le PLF 2025 réduit les crédits alloués à la continuité territoriale (action 3), de 13,4 M€ (18 %) en AE et CP. Cette diminution portera quasi exclusivement sur le fonds de continuité territoriale, piloté par l’agence de l’Outre-mer pour la mobilité (Ladom). Pour financer ces dépenses de guichet, des marges devront être mobilisées sur la trésorerie de Ladom, réduisant sa capacité d’action.

L’action 4 « Sanitaire, social, culture, jeunesse et sports » subit, quant à elle, une baisse de 52 % en AE et CP, passant de 21 M€ en LFI pour 2024 à 10,15 M€ au sein du PLF pour 2025. Cette diminution réduira notamment l’accompagnement en faveur du territoire de Wallis-et-Futuna, qui avait pu bénéficier en 2024 d’aides au titre du filet social et de soutien à l’agence de santé.

Enfin, l’action 9 « Appui à l’accès aux financements bancaires » voit ses crédits chuter de plus de 66 % en AE et de 13 % en CP, se traduisant notamment par une baisse de l’attribution des prêts garantis de la société de gestion de fonds de garantie d’Outre-mer (SOGEFOM) qui facilitent pourtant l’accès des TPE/PME ultramarines aux crédits bancaires.

II.   Une augmentation en trompe-L’œil des CRÉDITS DU PROGRAMME 138 « EMPLOI OUTRE-MER » (+ 3,8 % en AE et + 3,4 % en CP)

Les crédits proposés pour le programme 138 augmentent de 72 M€ en AE et de 64 M€ en CP : ils passent de 1,9 Md€ en loi de finances initiale pour 2024 à 1,97 Md€ en AE (+ 3,81 %) et de 1,88 Md€ à 1,95 Md€ en CP (+ 3,43 %).

Or, les financements des actions 2 « Aide à l’insertion et à la qualification professionnelle » et 4 « Financement de l’économie » sont revus à la baisse, cette dernière perdant 25 M€ en AE et CP par rapport à la LFI 2024, soit une baisse de plus de 70 % de son financement.

Seules l’action 1 « Soutien aux entreprises » voit ses crédits augmenter de 103 M€, soit d’environ 6 %. Cependant, d’après les éléments communiqués par la Direction générale des Outre-mer (DGOM), cette augmentation faciale serait en trompe-l’œil : elle correspond aux prévisions du coût des exonérations de charges sociales faites par l’URSSAF pour l’année 2025 minorées des économies attendues par une refonte des dispositifs d’exonération sociale, dont le rendement est évalué à 180 M€. « La prévision de juin de l’URSSAF fera pour sa part l’objet d’un ajustement prochainement » assure la DGOM.

Une refonte envisagée des dispositifs d’exonération sociale

Le point 27 de l’article 6 du PLFSS pour 2025 prévoit d’habiliter le Gouvernement à adapter, par ordonnance, les règles relatives aux exonérations spécifiques - dont les charges sociales patronales spécifiques aux Outre-mer, dits « exo-LODEOM » - afin de tenir compte de la transformation du dispositif en réduction générale dégressive des cotisations sociales (RGD).

 

Les exonérations de cotisations et contributions patronales (LODEOM)

Participant au développement de l’activité économique dans les Outre-mer, le dispositif « LODEOM » constitue le principal axe financier d’intervention en matière de soutien à l’emploi en faveur des employeurs implantés en Guadeloupe, Guyane, Martinique, à la Réunion, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin. Il concourt à la lutte contre le chômage et à la compétitivité des entreprises grâce à la réduction du coût du travail pour les employeurs ultramarins, jusqu’à un certain niveau de salaire.

Ce dispositif, qui permet un taux d’exonération s’élevant à 40 % au niveau des rémunérations équivalentes au SMIC, est modulé selon trois régimes d’exonérations, auxquels se rapportent des conditions d’éligibilité particulières. Il fait l’objet d’une compensation des crédits du programme 138 auprès des organismes sociaux au titre de la perte de recettes engendrée. En 2024, le montant des crédits alloués à ce dispositif s’élève à 1 539,2 M€.

Une mission IGAS/IGF lancée au printemps 2024 vise à évaluer le dispositif, d’une part en lien avec les objectifs assignés de soutien à l’emploi privé et de contribution au développement économique des territoires ultramarins et, d’autre part, au regard de l’efficience des dépenses mobilisées par l’État du fait de la compensation par l’État du coût des exonérations supporté par les caisses de sécurité sociale.

Dans ce cadre, votre rapporteur appelle à la plus grande vigilance vis-à-vis d’une potentielle refonte des exonérations et allègements de cotisations sociales qui permettent de compenser les difficultés structurelles pesant sur les économies ultramarines (éloignement, insularité, exiguïté des marchés, aléas climatiques, etc.). Elles avaient d’ailleurs été renforcées pour compenser la suppression du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) au 1er janvier 2019 ([2]).

Toutefois, le MOM se dit défavorable à toute modification précipitée et non concertée des dispositifs d’exonérations « LODEOM » dans la mesure où cela préempterait les conclusions de la mission IGAS/IGF, qui n’ont pas été publiées à ce jour, et que cette réforme ne peut être établie sans analyse préalable des impacts pour les entreprises ultramarines et la situation de l’emploi Outre-mer.

Par ailleurs, les crédits proposés au sein du programme 138 conduiraient également à une diminution d’un tiers de la subvention pour charge de services publics consacrée à Ladom, réduisant drastiquement ses moyens de fonctionnement, alors que ses missions ont été élargies dans le cadre du CIOM du 18 juillet 2023.

En somme, votre rapporteur estime que le constat global est alarmant : non seulement le budget présenté a été établi sans concertation avec la DGOM, pourtant spécialisée sur les problématiques ultramarines, mais en plus ce budget prévoit des baisses de financement drastiques sur les programmes 123 et 138 de la mission « Outre-mer », dans un contexte d’exacerbation des crises au sein de ces territoires. C’est pourquoi il émet un avis défavorable à l’adoption de ces crédits.


   SECONDE PARTIE :
L’insertion PROFEsSIONNELLE DANS LES OUTRE-MER

Dans le cadre de cette réflexion thématique, votre rapporteur souhaite aborder les problématiques multiples de l’insertion professionnelle au sein des territoires ultramarins, en s’interrogeant sur son financement dans le cadre du projet de loi de finances pour 2025.

I.   Des spécificités ultramarines justifiant la mise en place de dispositifs d’aides à l’insertion profesSionnelle en Outre‑mer

A.   L’insertion en Outre-mer : des sPÉcificitÉs ultramarines

1.   Une insertion professionnelle plus difficile dans les Outre-mer

a.   Une coexistence paradoxale entre taux de chômage élevés et difficultés de recrutement dans les Outre-mer

Malgré leurs spécificités notables, les territoires ultramarins sont globalement concernés par des taux de chômage plus élevés que la moyenne nationale, compris entre 12 % et 34 % : à savoir 16 % en Guyane, 17 % en Guadeloupe, 12 % en Martinique, 19 % à La Réunion et 34 % à Mayotte. Cette surexposition au chômage concerne particulièrement les jeunes de 16 à 25 ans et les non-diplômés, rendant leur insertion professionnelle difficile.

Pourtant, en parallèle, les entreprises ultramarines font état de difficultés de recrutement. Selon les données de l’enquête « Besoins en Main-d’Œuvre » (BMO) 2024, en moyenne près de 63,8 % des employeurs en Martinique anticipent un recrutement difficile ; cette proportion est de 64,1 % à Mayotte, 50,7 % en Guyane, 47,9 % en Guadeloupe et 41,6 % à La Réunion.

b.   Des difficultés d’insertion professionnelle liées aux dynamiques de la demande et de l’offre de travail.

D’une part, la faiblesse du taux d’emploi en Outre-mer peut résulter d’une offre de travail insuffisante. Dans cette hypothèse, la main d’œuvre disponible pour travailler ne comblerait pas les offres d’emploi proposées sur le marché.

D’autre part, cette faiblesse du taux d’emploi peut s’expliquer par une insuffisance de la demande de travail. Dans cette hypothèse, les problèmes d’insertion seraient directement corrélés aux difficultés économiques des territoires ultramarins : les employeurs ne seraient pas incités à recruter du fait de la fragilité du tissu économique local.

En effet, les territoires ultramarins sont confrontés à plusieurs difficultés structurelles. Du fait de leur positionnement géographique, ces territoires sont à la fois isolés et éloignés de l’Hexagone, ce qui implique des coûts de transport élevés. Ces surcoûts pénalisent les exportations et renchérissent les importations, au détriment de l’activité économique locale.

En outre, de par leur superficie et leur densité, les économies ultramarines se caractérisent par des marchés exigus, limitant ainsi les économies d’échelle permettant d’abaisser les coûts de production.

Outre la rareté prononcée du foncier, ces territoires majoritairement insulaires – à l’exception notable de la Guyane – offrent des débouchés économiques restreints et sont par ailleurs soumis à des aléas climatiques extrêmes, qui déprécient la confiance des acteurs économiques sur ces marchés.

Enfin, les économies ultramarines se concentrent sur des secteurs délimités, comme l’agriculture, le tourisme ou la pêche, qui offrent des emplois peu diversifiés et dépendants de ressources non durables. Ce manque de diversification rend ces économies vulnérables aux crises et aux changements conjoncturels, limitant ainsi les opportunités d’emploi dans certains secteurs économiques.

c.   Un problème d’appariement entre offre et demande de travail

Malgré des niveaux de chômage élevés, des difficultés de recrutement persistent dans certains secteurs en Outre-mer. « Derrière ce paradoxe apparent se cachent des problématiques d’appariement, de formation, de mobilité, d’accès au logement, très spécifiques aux différents contextes sociaux et territoriaux des Outremer », résume la délégation Outre-mer du Conseil économique, social et environnemental (CESE).

i.   Une inadéquation des qualifications : des difficultés d’insertion qui s’ancrent dès le système éducatif

La coexistence de difficultés de recrutement et de taux de chômage élevés en Outre-mer s’explique notamment par l’inadéquation entre les compétences disponibles et les besoins des entreprises.

Le manque de qualification de la main d’œuvre ultramarine s’explique d’abord par les difficultés scolaires éprouvées par les élèves. « Les décrochages scolaires et les sorties du système éducatif sans qualification restent très importants » en Outre-mer, estime le CESE. « Les taux de décrochage s’élèvent à 5,9 % en Guadeloupe, 6,8 % en Martinique, 7,5 % pour La Réunion et la Guyane, et 9,3 % pour Mayotte, contre 5,7 % au niveau national ([3]). Dans l’Académie de Guadeloupe, il y a environ 1 600 élèves qualifiés de « décrocheurs » suivis par la mission contre le décrochage scolaire ([4]) ».

Mais au-delà du décrochage, les sorties précoces du système scolaire des 18-24 ans, avant l’obtention d’un diplôme ou d’une formation qualifiante, restent considérables : « En 2019, celles-ci s’élevaient à 14,5 % en Guadeloupe, à 14,8 % en Martinique et 18,4 % à La Réunion, contre 8,2 % dans l’Hexagone. La stratégie de l’Union européenne fixe pourtant un objectif de moins de 10 % de jeunes qui quittent le système scolaire sans diplôme et sans formation », d’après le CESE.

Or, un faible niveau de formation initiale et de qualification surexpose les personnes concernées à un risque de chômage et accroît ainsi systématiquement les possibilités de se trouver en situation de NEET (Not in Education, Employment or Training ; ni en emploi, ni en études, ni en formation). En Martinique, plus d’un quart des jeunes de 15-29 ans est NEET ([5]).

« Les compétences liées à l’encadrement ou l’ingénierie font souvent défaut en Outre-mer, tant dans le secteur public que privé. […] Dans les DROM, la proportion des jeunes de 25-29 ans ayant un diplôme supérieur à Bac + 2 est seulement de 11 % (contre 24 % en moyenne nationale) », assure ainsi le CESE.

ii.   Des freins périphériques à l’emploi

L’insertion professionnelle est également entravée par plusieurs freins périphériques à l’emploi.

Tout d’abord, les difficultés de mobilité géographique des ultramarins limitent leur insertion. En effet, les emplois étant très concentrés dans les chefs-lieux, les ultramarins vivant dans les localités éloignées se trouvent pénalisés, d’autant que la plupart des demandeurs d’emploi ne possède pas le permis de conduire ou de voiture individuelle et que les infrastructures et réseaux de transport en commun sont peu développés localement.

En outre, les difficultés d’accès au logement constituent un frein important à l’insertion : les lieux de résidence, généralement en périphérie ou dispersés sur le territoire, sont éloignés des zones d’activité, des lieux touristiques et de services, qui sont concentrés en centres-villes ou sur les espaces côtiers.

En outre, les conditions de travail proposées peuvent rendre le recrutement compliqué : « contrats courts, temps partiel, horaires atypiques, niveaux de rémunération, garde d’enfants… ; la saisonnalité est une cause importante de tensions, notamment dans les secteurs du tourisme et de l’hôtellerie/restauration » explique le CESE.

Les difficultés socio-économiques éprouvées par les populations renforcent d’autant plus leurs problèmes d’insertion. En effet, alors que le coût de la vie est structurellement plus élevé dans les Outre-mer par rapport à l’Hexagone ([6]), le niveau des salaires n’est pas systématiquement indexé sur cette hausse.

Ces difficultés de niveau de vie pénalisent les demandeurs d’emploi : du fait d’un manque de pouvoir d’achat, de nombreux demandeurs d’emploi se trouvent également bénéficiaires du revenu de solidarité active (BRSA), comme l’illustre le tableau ci-dessous.

Une part importante de bénéficiaires du rsa également inscrits comme demandeurs d’emploi dans les drom

Fin décembre 2022

Guadeloupe

Guyane

La Réunion

Martinique

Mayotte

National

BRSA (inscrits ou non à FT)

45 055

25 171

108 680

36 377

4 428

2 080 646

Dont BRSA inscrits à FT

(en volume)

19 400

8 590

55 640

13 950

2 115

841 245

Dont BRSA inscrits à FT

(en part)

43,1 %

34,1 %

51,2 %

38,3 %

47,8 %

40,4 %

Source : Données communiquées par France Travail (FT)

Outre l’enclavement et la précarité, l’illettrisme et l’illectronisme limitent le retour à l’emploi. Dans les DROM, entre 26 % et 55 % de la population serait en situation d’illettrisme, contre 7 % au niveau national, tandis que l’illectronisme concernerait 20 % des ultramarins, contre 15 % des hexagonaux. Ainsi, selon les données de l’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme (ANLCI) et du RSMA, 25 % des ultramarins rencontreraient de fortes difficultés avec les compétences de base, contre 10 % pour les personnes résidant en Hexagone.

La multiplicité des langues locales peut également compliquer l’insertion professionnelle des ultramarins. Ainsi la Guyane française est marquée par une diversité linguistique avec plus de neuf langues régionales (créole guyanais-haïtien, wayãpi, wayana, palikur, kali’na, sranan tongo, portugais, espagnol et mandarin), « ce qui peut également compliquer l’intégration professionnelle de certains groupes » explique la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) de Guyane.

Par ailleurs, les natifs des Antilles et de La Réunion subissent une pénalité significative en matière d’opportunités éducatives et professionnelles par rapport aux hexagonaux, même issus des régions à plus faibles opportunités : « à origine sociale comparable, les natifs de ces territoires ont 20 % à 25 % de chances en moins d’obtenir un diplôme du supérieur, environ 12 % de chances en moins d’accéder à l’emploi, et 35 % à 45 % de chances en moins d’occuper un poste de cadre » ([7]).

2.   Des publics fragiles surexposés au chômage

a.   Les jeunes ultramarins

Outre un taux de chômage élevé, les territoires ultramarins doivent faire face à une surexposition des populations jeunes au risque de chômage.

Tandis que le taux de précarité des jeunes ultramarins s’avère de 1,5 à 4 fois plus élevé que dans l’Hexagone, leur taux de chômage est également de deux à quatre fois plus élevé : entre 13 % et 22 % des demandeurs d’emploi ABC sont des jeunes de moins de 26 ans, contre 15 % pour la France entière. Le nombre de jeunes de moins de 25 ans bénéficiaires du RSA est également plus important dans les territoires ultramarins : il est de 1,5 à 2 fois supérieur par rapport à l’Hexagone.

Dans ce contexte, le chômage frappe massivement les jeunes. Un quart des jeunes ne sont ni en études, ni en emploi, ni en formation en Outre-mer. Cette situation concerne, selon l’INSEE, 27,3 % des jeunes en Guadeloupe, 25,6 % en Martinique, 30,2 % à La Réunion et 36,7 % en Guyane. C’est plus de deux fois plus que dans l’Hexagone ([8]). En Martinique, 80 % d’entre eux recherchent un emploi ou souhaitent travailler. La moitié des jeunes sont peu ou pas diplômés et cohabitent avec leurs parents.

Selon la Dares ([9]), l’environnement familial joue ainsi un rôle important dans le rapport des jeunes aux études et à l’emploi : « un jeune dont au moins un parent est chômeur ou inactif a plus de risques d’être NEET qu’un jeune dont au moins un parent est cadre » assure la Confédération de l’Artisanat et des Petites Entreprises du Bâtiment (Capeb) de La Réunion.

À niveau de diplôme comparable, les jeunes en situation de NEET se caractérisent donc par des niveaux moyens de compétences sensiblement plus faibles que les jeunes en emploi, témoignant d’un lien entre déficit de compétences de base et situation de NEET ([10]). Or, alors que près de 18 % des jeunes, tous âges confondus, suivent une formation de niveau supérieur à Bac + 2 à l’échelle de la France entière, cela ne concerne que 9 % des jeunes résidants dans les DROM ([11]).

De plus, leur insertion professionnelle est diverse, notamment marquée par des épisodes d’alternance entre emploi et chômage. « L’INSEE identifie des jeunes diplômés en difficulté d’insertion sur le marché du travail. Cette situation peut s’expliquer par l’inadéquation entre l’offre et la demande sur le marché du travail, avec des jeunes qui se sont orientés vers des métiers ne correspondant pas ou plus aux offres disponibles » explique le CESE.

b.   Les séniors ultramarins

Dans les DROM, le taux de chômage des séniors est un peu plus élevé que sur le territoire hexagonal : 22 % des chômeurs sont des séniors de plus de 50 ans en Guyane, 37 % en Guadeloupe ou en Martinique et 30 % à La Réunion ([12]).

Cette situation est particulièrement alarmante pour les territoires concernés par un vieillissement accru de leur population active, en particulier aux Antilles, mais également à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Wallis-et-Futuna. Ainsi, la Chambre de commerce et d’industrie, des métiers et d’agriculture (CCIMA) de Wallis-et-Futuna estime que « dans son ensemble la population de Wallis et Futuna est vieillissante, la pyramide des âges étant caractérisée par un net creux entre 20 et 45 ans. La dépopulation est constatée depuis 2005. »

Or, sur des marchés du travail marqués par un fort taux de chômage, les séniors éprouvent de fortes difficultés à retrouver un emploi. En concurrence avec les plus jeunes, ils ont pour la plupart un faible niveau de qualification : à La Réunion par exemple 56 % des non-diplômés sont parmi les 55-64 ans, contre 30 % pour les 30-54 ans. En outre, leurs compétences peuvent ne pas correspondre à celles recherchées par les entreprises au vu de l’évolution des métiers. Enfin, ils subissent des discriminations liées à l’âge et des stéréotypes négatifs, étant souvent perçus comme moins adaptables, notamment face aux nouvelles technologies.

En outre, le vieillissement s’accompagne de pathologies chroniques et d’une usure due à des métiers physiquement exigeants. Les séniors font ainsi plus souvent état de difficultés de santé : 14 % des réunionnais âgés entre 50 et 64 ans s’estiment en mauvais état de santé en 2019 ([13]). Ils éprouvent également plus de difficultés à se déplacer ([14]) et sont peu mobiles : entre 2019 et 2020, seuls 3 % des salariés âgés de 55 à 70 ans ont changé de secteur d’activité, contre 9 % des 15‑49 ans. La majorité des demandeurs d’emplois âgés en fin de mois (DEFM) entre 55 et 70 ans inscrits à France Travail recherchent ainsi un emploi depuis au moins trois ans : ils sont, de fait, plus souvent confrontés au chômage de longue durée.

Deux problématiques essentielles se posent pour les séniors ultramarins : d’une part la « soutenabilité » des métiers aux conditions de travail difficiles, et de l’autre, la formation et l’insertion des séniors dans les emplois disponibles.

 

c.   Les femmes ultramarines

Les femmes ultramarines sont également plus exposées au risque de chômage que les femmes vivant en Hexagone : entre 58 % et 66 % des inscrits sont des femmes – à l’exception notable de La Réunion où ce taux est de 52 % – tandis qu’en France hexagonale, elles représentent 51 % des inscrits.

Par ailleurs, les jeunes mères confrontées à l’absence de solution de garde d’enfant sont plus exposées au risque de devenir NEET, selon la DARES ([15]).

3.   Des spécificités territoriales liées à la diversité des Outre-mer

a.   Les DROM

i.   La Martinique

En Martinique, l’un des principaux défis de l’insertion professionnelle réside dans l’inadéquation entre la formation et les besoins du marché, exacerbée par un taux élevé de jeunes sans emploi ni formation (NEET). « Les secteurs en demande, tels que le BTP, l’agriculture et la santé, souffrent d’un manque de valorisation auprès des jeunes, souvent mal orientés et éloignés géographiquement des bassins d’emploi » assure le MEDEF.

13 980 projets de recrutement sont prévus en Martinique pour 2024, dont 63,8 % sont considérés comme des projets difficiles ([16]). Les secteurs qui embauchent le plus sont ceux de l’hébergement et de la restauration, celui de la santé humaine et de l’action sociale, et celui des activités de services administratifs et de soutien ([17]).

Trois raisons principales sont invoquées pour expliquer les difficultés de recrutement : l’inadéquation des profils de candidats, la pénurie des candidatures et la nature des postes proposés. À ces difficultés s’ajoute la grande sélectivité des employeurs portant sur la polyvalence de compétences recherchées, alors que les demandeurs d’emploi sont peu qualifiés, ainsi que le défaut d’attractivité de certains métiers (métiers de bouche, secteur de la banane, etc.).

ii.   La Guadeloupe

« En Guadeloupe, les secteurs de la santé, du BTP, de l’agriculture et des services à la personne souffrent de pénuries dues à l’inadéquation des qualifications et à des conditions de travail peu attractives. Le vieillissement des travailleurs dans certains secteurs clés, comme l’agriculture et le BTP, combiné à un exode des jeunes talents, accentue la problématique » explique le Medef.

16 320 projets de recrutement sont prévus pour 2024, dont 47,9 % sont considérés comme des projets difficiles ([18]). Les secteurs qui embauchent le plus sont ceux de la santé et de l’action sociale, de l’hébergement et de la restauration, et celui des activités de services administratifs et de soutien ([19]). Le métier le plus recherché par les demandeurs d’emploi est celui des services domestiques.

Pour France Travail, le chômage en Guadeloupe est persistant ([20]) et structurel ; il résulte de l’étroitesse du marché du travail insulaire, de l’inadéquation entre l’offre et la demande de main d’œuvre, du manque de qualification et du niveau de formation de la population en recherche d’emploi. 19 % des demandeurs d’emploi ont un niveau de diplôme inférieur au CAP/BEP, alors que 3 % des offres diffusées leur sont destinées. Le taux d’emploi des titulaires d’un baccalauréat atteint 50 %, contre 67 % en Hexagone.

iii.   La Guyane

En Guyane, les secteurs du BTP, de la santé et du médico-social font face à une pénurie chronique de personnel, liée à une forte demande en infrastructures et un manque d’attractivité territoriale. « Le secteur de la construction, essentiel au développement local, est marqué par un fort taux de turn-over à tous les niveaux de qualification, accentuant les tensions sur le marché de l’emploi » assure le Medef.

9 180 projets de recrutement sont prévus en Guyane pour 2024 dont 50,7 % sont considérés comme des projets difficiles ([21]). Les secteurs qui embauchent le plus sont ceux de la santé humaine et de l’action sociale, de la construction, ainsi que celui de l’hébergement et de la restauration ([22]).

En Guyane, le chômage poursuit sa baisse, mais demeure élevé chez les jeunes. Les difficultés de recrutement sont multifactorielles et concernent tant les problèmes de démographie que de diplôme, de pauvreté, de mobilité et d’accès à la formation. De plus, l’offre de logement se situe de plus en plus à la périphérie des villes et des lieux de travail, alors même que la population est peu mobile. Les emplois sont en effet largement concentrés autour de Cayenne, ce qui complique l’accès à l’emploi pour les jeunes des zones éloignées.

Le secteur public, qui représente une part importante des emplois, et l’informalité du marché du travail freinent également les opportunités pour les jeunes dans le secteur privé.

iv.   La Réunion

« À La Réunion, les secteurs du BTP, du tourisme, de la santé et des services à la personne sont confrontés à une demande insuffisamment satisfaite en raison d’une formation inadaptée et de conditions de travail jugées peu attrayantes. Le numérique, bien que prometteur, souffre d’un déficit de talents locaux, les professionnels étant souvent attirés par des opportunités plus intéressantes en métropole ou à l’étranger » soutient le Medef.

37 900 projets de recrutement sont prévus à La Réunion pour 2024, dont 41,6 % sont considérés comme des projets difficiles ([23]). Les tensions de recrutement sont très fortes dans les structures de moins de 10 salariés et, notamment, dans les secteurs de l’hébergement-restauration, de la construction, de la santé et de l’action sociale ([24]). Outre l’inadéquation entre les compétences disponibles et les compétences recherchées, les conditions de travail dans ces secteurs sont des freins à la mobilisation de demandeurs d’emploi.

Ces difficultés de recrutement proviennent notamment d’un niveau élevé d’illettrisme (22 %), trois fois plus important que dans l’Hexagone, et de freins à la mobilité (défaut de moyens de locomotion ou d’infrastructures routières).

v.   Mayotte

« Mayotte fait face à une pénurie de main-d’œuvre dans tous les secteurs, en raison de la structuration insuffisante des filières et de l’absence de cartographie des besoins en compétences. Le manque de visibilité des viviers de talents et l’absence de mise à jour des métiers en tension depuis 2021 aggravent les difficultés de recrutement » déplore le Medef.

6 300 projets de recrutement sont prévus à Mayotte pour 2024, dont 64,1 % sont considérés comme des projets difficiles ([25]). Les secteurs qui embauchent le plus sont ceux de la santé et de l’action sociale, du commerce, de la réparation automobile et de la construction ([26]). Les raisons évoquées sont multiples :

– une inadéquation entre offre et demande : les secteurs en croissance comme le BTP ou le commerce nécessitent des compétences techniques ou administratives que la population locale ne possède pas systématiquement ;

– un faible niveau de qualification : le taux de décrochage scolaire est élevé et le système de formation reste insuffisant pour répondre à la demande d’emploi ;

– des barrières à la mobilité et au transport : les infrastructures de transport à Mayotte sont limitées, voire inexistantes ;

– des conditions de travail et de rémunération peu attractives, le SMIC mahorais n’étant pas aligné sur celui de l’Hexagone ;

– une faiblesse du tissu entrepreneurial local : les petites entreprises locales manquent de moyens pour former et embaucher des travailleurs moins qualifiés ;

– la prégnance du travail informel ou des systèmes d’entraide communautaire peuvent dissuader certains de chercher un emploi ;

– la persistance des crises nuit au développement économique et à l’insertion (pénurie d’eau, insécurité chronique, logements insalubres…).

b.   Les COM

i.   Saint-Pierre-et-Miquelon

L’archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon est atypique par rapport aux autres territoires ultramarins. En effet, il est caractérisé par un taux de chômage très faible avec une situation de quasi-plein emploi, et par une pénurie de main d’œuvre dans de nombreux secteurs d’activité.

Selon les dernières statistiques de France Travail, le nombre de chômeurs de catégorie A était de 73 à fin juin 2024 (- 2,7 % sur un an), et le nombre de chômeurs de catégorie A, B, et C de 157 (+ 1,4 %). Ces chiffres sont à comparer à celui de la population active de 3 176 personnes, avec un taux d’activité qui dépasse aujourd’hui les 80 %.

Les autres caractéristiques notables sont les suivantes :

– une baisse de la démographie, avec 5 873 habitants selon le dernier rapport de l’IEDOM, soit - 0,3 % par an depuis les années 2000 et 60 % de la population qui n’est pas native de l’archipel ;

– un vieillissement de la population (indice passé de 42,6 % en 1999 à 82,7 % en 2020), avec 400 départs en retraite estimés au cours des 5 prochaines années ;

– une part très élevée de la fonction publique et parapublique, avec un recrutement attractif qui incite les ouvriers qualifiés du privé à remplacer des agents publics partis à la retraite ;

– une part importante des jeunes de l’archipel qui part poursuivre ses études dans l’Hexagone ou au Canada, avec peu de retours, créant un manque de main‑d’œuvre pour le tissu économique local.

ii.   Saint-Barthélemy

En 2020, le taux de chômage de Saint-Barthélemy s’établissait à 4,2 %, soit 287 personnes sur une population active de 6 884 individus. Malgré ce faible taux de chômage, les entreprises locales font face à des difficultés de gestion des ressources humaines, principalement en raison de la rareté des logements. « En effet, la taille réduite de l’île, ainsi que la volonté de préserver son cadre naturel, limitent le développement des infrastructures, y compris celles du logement, malgré une augmentation récente de l’activité dans le secteur de la construction » assure la chambre économique multiprofessionnelle (CEM) de Saint-Barthélemy.

L’offre éducative s’arrête généralement à la classe de troisième à Saint‑Barthélemy, bien que la collectivité ait instauré une classe de seconde générale, permettant aux jeunes de poursuivre une année supplémentaire sur l’île. À la fin du collège, plusieurs choix s’offrent aux jeunes : poursuivre en seconde générale à Saint-Barthélemy, s’orienter vers une formation au CFA, partir poursuivre leurs études, principalement dans l’Hexagone ou au Canada, ou entrer directement dans la vie active.

Depuis une dizaine d’années, la Collectivité a mis en place un centre de formation des apprentis (CFA), qui a accueilli en 2024 un total de 61 élèves, un record historique. Ce CFA propose près d’une trentaine de filières de formation, offrant ainsi un éventail de possibilités aux jeunes du territoire.

Le dynamisme économique de Saint-Barthélemy, conjugué à sa petite taille géographique, génère des difficultés de recrutement dans de nombreux secteurs d’activité, notamment en raison de la concurrence pour les ressources humaines limitées et des contraintes liées au logement. Ces tensions se font particulièrement sentir dans les secteurs du tourisme, de la construction et des services à la personne, où les entreprises peinent à attirer et à retenir du personnel qualifié.

iii.   Saint-Martin

L’île de Saint-Martin est touchée par un phénomène de décroissance démographique, avec une population active en baisse et un taux de chômage élevé.

Plusieurs freins à l’insertion professionnelle sont observés à Saint-Martin :

– la coexistence de deux souverainetés sur le même territoire, sans rapprochement de données, qui permet aux habitants de la partie française de travailler en territoire néerlandais tout en percevant des aides financières de l’Hexagone ;

– le manque de structures de formation sur le territoire ;

– un tissu économique concentré sur l’industrie du tourisme et constitué principalement de TPE de moins de 5 salariés qui sont réticentes à embaucher. Seules 8 entreprises comptent plus de 50 salariés, dont quatre complexes hôteliers ;

– les contrats en alternance nécessitent un tuteur qui doit consacrer du temps à la montée en compétences d’un salarié en formation, ce qui représente un coût d’entrée non négligeable pour des petites structures ;

– une pénurie de logements, la partie française de Saint-Martin logeant les travailleurs de la partie néerlandaise, mais également les travailleurs de Saint‑Barthélemy (le coût du logement y étant inférieur) ;

– un manque de statistiques fiables (liste des métiers en tension, suivi de l’insertion de la population locale au sein des marchés publics, etc.).

iv.   Polynésie française

La Polynésie française connaît une légère baisse du nombre de demandeurs d’emploi à 8,5 %. La chambre de commerce, d’industrie, des services et des métiers (CCISM) insiste toutefois sur les freins à l’insertion existants, comme le taux élevé d’illettrisme en Polynésie française : « En 2021, les services des armées en charge de la Journée défense et citoyenneté notaient que plus de 39 % des jeunes polynésiens âgés en moyenne de 17 ans souffrent de difficultés à la lecture et 26 % sont dans une situation d’illettrisme ». Cet état de fait met en exergue des difficultés spécifiques aux îles de Polynésie qui ont été amplifiées par la crise Covid, avec moins d’un enfant sur deux qui accède à un diplôme et un taux d’absentéisme qui frôle les 12 %.

Une unité supplémentaire du régiment du service militaire adapté (RSMA) a été ouverte à Hao à l’été 2022 : « en Polynésie française, on constate toujours cinq fois plus de candidats que de places disponibles » assure le CESE.

v.   Wallis-et-Futuna

Wallis-et-Futuna compte 11 100 habitants au dernier recensement, pour deux tiers à Wallis et un tiers à Futuna, les deux îles s’étendant sur une superficie totale de 124,2 km². Le tissu économique est composé de 1 354 patentés en 2024, étant principalement des TPE et des entreprises unipersonnelles : la plus grande entreprise ne comptant qu’une cinquantaine de salariés. Si les démarches de création d’entreprises sont relativement simples, sans prérequis, « l’obligation de tenue d’une comptabilité insérée dans la loi PACTE n’est pas appliquée. L’absence d’imposition, de comptabilité et de dissociation des comptes personnels et d’entreprises sont des freins importants au développement de l’économie et à l’accès à des dispositifs bancaires et de soutien » assure la CCIMA.

Il n’existe pas de structure de type Pôle Emploi, et la notion de demandeur d’emploi au sens du BIT n’est pas applicable à Wallis-et-Futuna. Au dernier recensement 4 260 personnes se sont déclarées en activité. « Le taux de chômage est estimé dans le rapport de l’IEOM à 8,2 % mais ce chiffre est très probablement erroné » explique la CCIMA. Il était précédemment évalué à 17 %, et à 42 % chez les moins de 25 ans. Une partie de la population sans emploi a une auto-activité ou une activité soutenue par des chantiers de développement. Le SITAS inscrit les demandeurs d’emploi, mais en l’absence d’obligations, d’accompagnement et d’assurance chômage, seules 33 personnes étaient inscrites en 2023.

Le secteur du commerce est celui qui recrute le plus. L’emploi dans le BTP a augmenté en 2023 grâce à de grands chantiers de commande publique. Néanmoins, Wallis et Futuna font face à une pénurie de main d’œuvre qualifiée pour certaines fonctions : architecte, maître d’œuvre, etc. « Certains métiers critiques vont bientôt manquer, comme le pilote qui guide à quai le navire qui ravitaille Wallis et Futuna toutes les trois semaines » déplore la CCIMA.

Malgré un âge de départ en retraite à 60 ans – qui ne concerne qu’une minorité de personnes ayant cotisé – l’activité des séniors est encore forte pour toutes les activités traditionnelles, s’agissant de l’artisanat, de l’agriculture, de la pêche ou encore de l’élevage.

c.   La Nouvelle-Calédonie

Au 1er janvier 2023, la Nouvelle-Calédonie compte 268 510 habitants, dont 68 190 salariés déclarés par les employeurs privés auprès de la Caisse de compensation des prestations familiales, des accidents du travail et de prévoyance des travailleurs (CAFAT). Au 1er trimestre 2024, 66 600 salariés sont déclarés par les employeurs du privé, soit un recul de l’emploi salarié dans le privé de 2,0 %.

La Nouvelle-Calédonie avait connu une décrue du chômage avant les évènements de mai 2024, passant sous la barre symbolique des 10 %. Les graves difficultés du secteur de la mine-métallurgie et la crise économique et sociale que traverse le territoire, notamment marquée par l’arrêt de l’usine Koniambo Nickel SAS (KNS) en province Nord depuis août 2024, risquent d’accentuer fortement le chômage dans les mois à venir.

En effet, suite à la destruction de plus de 700 entreprises, le tissu économique calédonien a été très gravement endommagé. À ce jour, plus de 25 000 personnes, soit près de 40 % des salariés du privé, sont soit au chômage partiel, soit au chômage total.

« Avec plus de 30 % du capital productif de Nouvelle-Calédonie touché par les émeutes, le PIB accuserait un recul de 20 % en 2024 par rapport à celui de 2022, ce qui ramènerait le PIB par habitant à son niveau de 2003, soit un recul de vingt ans. L’ampleur de cette régression est comparable à celle connue par la France pendant la seconde guerre mondiale » assure la CCI de Nouvelle‑Calédonie.

Plusieurs facteurs structurels expliquent la coexistence d’un chômage élevé et les difficultés de recrutement en Nouvelle-Calédonie :

– le tissu économique local, composé à 90 % de TPE/PME et de travailleurs indépendants communément appelés « patentés » (18 % des personnes en emploi) ;

– la loi du pays n° 2010-9 du 27 juillet 2010 relative à la protection, à la promotion et au soutien de l’emploi local, appliquée depuis le 14 février 2012, qui continue de guider la politique d’embauche en Nouvelle-Calédonie. Ainsi, à qualifications et compétences égales, la priorité est donnée à l’embauche de citoyens calédoniens puis, en deuxième recours, aux personnes justifiant d’une durée de résidence minimale (3 à 10 ans selon les secteurs d’activité). Depuis plusieurs années, les entreprises calédoniennes constatent des difficultés majeures de recrutement et le territoire présente un manque de compétences ;

– un développement économique des provinces à double vitesse : 80 % des emplois sont concentrés en province Sud, qui regroupe 75 % de la population, tandis que la province Nord a perdu plus de 1 000 habitants. La province des Îles peine quant à elle à développer l’emploi privé ;

– l’importance de l’économie informelle et de l’autoconsommation solidaire, orientée vers la satisfaction des besoins familiaux, des dons et des échanges. Dans la société Kanak, les productions vivrières participent à l’inscription des individus et des familles dans l’organisation sociale et culturelle des tribus. Le travail informel est intégré au mode de vie coutumier et est orienté vers la satisfaction de besoins ponctuels. Ces activités occupent une partie des nombreux inactifs dits « au foyer » (3 623 personnes selon le recensement 2019), soit une part estimée dans le total d’inactifs autour de 56 % ;

– l’instabilité institutionnelle et un coût de la vie parmi les plus élevés de l’outre-mer, l’inflation s’étant accrue de 4,3 % entre mai et août 2024 ;

– l’existence de freins sociaux et culturels entre le modèle économique moderne et les structures communautaires traditionnelles, avec une défiance accrue de la jeunesse envers les institutions, accentuant leur désengagement du marché du travail.

Cette crise sociale est d’autant plus inquiétante que la Nouvelle-Calédonie est dépourvue de dispositifs visant à garantir un revenu minimal aux personnes en situation de précarité, tel que le RSA.

Un effort particulier doit être mené pour soutenir le financement de la formation professionnelle continue et de l’apprentissage dans ce territoire, l’insertion professionnelle des jeunes étant l’une des clés majeures de la reconstruction économique et sociale, au regard de son rôle d’amortisseur social.

B.   la mise en œuvre de dispositifs d’aides à l’insertion en Outre-mer

L’insertion professionnelle en Outre-mer est accompagnée par plusieurs dispositifs portés par divers acteurs, nationaux comme ultramarins.

1.   France Travail

Dans le cadre de ses missions de service public de l’emploi, France Travail (FT) propose des services d’accueil, d’orientation, de formation et d’insertion professionnelle sur l’ensemble des cinq DROM (Guadeloupe, Guyane, La Réunion, Martinique, Mayotte) ainsi que sur trois COM, à savoir Saint-Martin, Saint‑Barthélemy et Saint-Pierre-et-Miquelon.

En revanche, FT n’intervient ni en Nouvelle-Calédonie, ni dans deux COM (les îles Wallis et Futuna et la Polynésie française).

Toutefois, en Nouvelle-Calédonie, un accord-cadre a été signé en 2023, pour une durée de trois ans, afin que l’opérateur puisse accompagner la direction de la formation professionnelle continue sur ce territoire.

a.   Les contrats aidés

Visant à faciliter l’insertion professionnelle, les contrats aidés s’adressent aux personnes sans emploi rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières d’accès à l’emploi. Ils comprennent :

– le contrat initiative emploi (CIE), le CIE jeune, et l’emploi franc, auxquels sont éligibles les employeurs du secteur marchand ;

– le contrat d’accompagnement dans l’emploi (CAE / PEC), auquel sont éligibles les employeurs du secteur non marchand.

L’État assure le ciblage des publics, le pilotage et le financement des contrats aidés : la prescription des CIE et CAE-PEC en 2024 est à destination des publics séniors et des travailleurs handicapés. De même, les PEC et CIE doivent bénéficier en priorité aux habitants des quartiers prioritaires de la politique (QPV) de la ville et des zones de revitalisation rurale.

Comme pour les PEC et CIE, le pilotage des « emplois francs » s’effectue sur la base d’une enveloppe volumétrique notifiée et répartie par l’État entre les prescripteurs ([27]). « L’emploi franc semblerait être le dispositif le plus efficace puisqu’il s’agit d’une aide financière à l’embauche. Bien qu’elle soit limitée à l’embauche d’un salarié résidant dans un QPV, elle permet à l’employeur d’embaucher un candidat répondant à ses attentes » estime le Medef de Saint‑Martin.

Les volumes nationaux de contrats financés en 2024 s’élèvent à 60 885 PEC et CIE tous publics et à 13 953 CIE Jeunes pour l’ensemble des prescripteurs en 2024. Les résultats montrent une mobilisation inégale des dispositifs selon les territoires. En 2023, les DROM ont dépassé l’Hexagone avec un taux de consommation des contrats aidés supérieur de 17 points. Toutefois, en 2024, une légère baisse est constatée, notamment s’agissant des CIE jeunes.

Pour le Medef de Saint-Martin, les contrats aidés restent peu utilisés, car ils nécessitent un tuteur en entreprise et un accompagnement spécifique du salarié. Or, les entreprises, et particulièrement les TPE majoritaires sur le territoire, ne disposent pas de ressources internes suffisantes pour les former, ce qui expliquerait pourquoi elles y auraient peu recours.

b.   Le contrat d’engagement jeune (CEJ)

Mis en œuvre par FT et les missions locales depuis le 1er mars 2022, le CEJ constitue un accompagnement intensif pour aider les jeunes de moins de 26 ans ([28]) à trouver un emploi durable. Le CEJ propose un parcours personnalisé d’une durée légale de 6 à 12 mois, prolongeable jusqu’à 18 mois, comprenant notamment un programme d’activités de 15 à 20 heures par semaine, un suivi par un référent unique et une allocation pouvant aller jusqu’à 500 euros.

En 2022 et 2023, l’objectif du nombre de jeunes à intégrer en CEJ était de 100 000 par an. Pour 2024, le nombre d’entrées en CEJ a été ajusté par l’État à 85 000, avec un ciblage sur les publics issus des QPV. Avec 59 662 entrées à fin août – dont 2 944 entrées pour les 5 territoires ultramarins – le taux de réalisation de l’objectif national 2024 s’établit à 70,1 % et la part des jeunes QPV augmente significativement par rapport aux entrées 2023 ([29]). En Guyane, la part des jeunes en QPV dans les entrées en CEJ représente 53 %. À Mayotte, ce taux est estimé à 25 %, mais l’absence de référencement de l’adresse de nombreux demandeurs d’emploi ne permet pas un suivi fiable de la part réelle des bénéficiaires résidents en QPV.

c.   Un fonctionnement et une gouvernance tournés vers l’insertion

Le budget d’intervention de FT distingue, d’une part, les dépenses prises en charge sur son budget propre et, d’autre part, les dépenses faisant l’objet d’un financement particulier. Chaque année, la part du budget propre de France Travail dédié aux dépenses d’intervention fait l’objet d’une répartition par direction régionale au poids de leurs demandeurs d’emploi en fin de mois (DEFM).

Les directions régionales de FT peuvent également conclure des conventions régionales, notamment dans le cadre de la mise en œuvre des pactes régionaux d’investissement dans les compétences (PACTE). Pour l’exercice 2024 et à ce stade, seules les directions régionales de France Travail Guadeloupe et Martinique ont signé une convention dans le cadre du PACTE. En revanche, la direction régionale et le Conseil départemental de Mayotte ont signé, le 18 juillet 2024, une convention relative à la mise en œuvre du pacte ultramarin d’investissement dans les compétences (PUIC) au titre de l’année 2024.

Les cinq régions d’outre-mer sont engagées dans la démarche de performance opérationnelle appliquée au niveau national, structurée autour de 12 indicateurs.  « Les résultats obtenus sont à la hauteur des moyens engagés » estiment les directions régionales ultramarines de France Travail : près de 9 offres d’emploi sur 10 sont pourvues par cet opérateur.

La loi n° 2023-1196 du 18 décembre 2023 pour le plein-emploi pose un cadre pluriannuel (2024-2027) pour le déploiement des politiques de l’emploi : 9 mois après son entrée en vigueur, France Travail assure que les « premiers résultats sont visibles et encourageants » : « dans les 18 premiers départements (dont La Réunion) engagés dans les expérimentations de l’accompagnement rénové des bénéficiaires du RSA, 44 000 personnes sont entrées dans des parcours d’accompagnement rénové ».

L’ordonnance n° 2024-534 du 12 juin 2024 apporte des adaptations à la loi pour le plein-emploi dans les DROM, notamment au sujet de la gouvernance territoriale. Si des décrets spécifiques d’application de cette ordonnance sont à ce jour en attente de publication, les comités territoriaux ébauchent déjà leurs modalités de fonctionnement à venir :

– En Martinique et Guyane, devrait être installée une instance de gouvernance territoriale unique intégrée au Crefop, le comité pour l’emploi, assurant les missions dévolues aux comités régional et départemental pour l’emploi ;

– À La Réunion, la gouvernance en cours d’installation serait composée d’un niveau régional, avec un comité régional pour l’emploi, d’un niveau départemental, avec un comité emploi, de quatre comités locaux répartis selon le découpage des arrondissements et des sous-préfectures, et enfin des comités infra-locaux qui restent à définir ;

– À Mayotte, elle serait formée d’un niveau régional et départemental, et de comités locaux.

France Travail Mayotte

À Mayotte, l’existence de l’opérateur France Travail (FT) est récente : avant 2019, Mayotte dépendait de La Réunion. Son directeur régional insiste ainsi sur le défi d’opérer un rattrapage sur plusieurs enjeux.

D’abord, au niveau du retour à l’emploi : alors qu’en 2022, cela concernait 6 000 personnes, FT Mayotte accompagne près de 8 000 personnes en 2023.

Ensuite, sur l’enjeu de la formation, sachant que Mayotte est fortement concernée par les phénomènes d’illétrisme et d’analphabétisme et que trois langues s’y côtoient (le français, le shimaoré et le kibushi), le taux d’accès à l’emploi ne cesse de progresser après une formation qualifiante, passant de 20 % en 2019 à 36 % aujourd’hui.

Enfin, alors qu’il existe peu d’organismes de formations certifiés, le taux de satisfaction des entreprises est en hausse, passant de 75 % en 2022 à 89 % aujourd’hui.

Ce rattrapage s’est également traduit par une augmentation des effectifs de FT : alors qu’ils étaient 67 ETP en 2019, ils sont désormais plus de 150 à travailler au sein de FT au retour à l’emploi des mahorais.

2.   Les régiments du service militaire adapté (RSMA)

Dispositif militaire d’insertion socioprofessionnelle, le service militaire adapté (SMA) est conçu comme une réponse au chômage ; il permet de prendre en charge des jeunes ultramarins de 18 à 25 ans, qui sont éloignés de l’emploi et souvent en difficulté sociale – ce qui correspond au public des NEET.

Sept entités du SMA existent en Outre-mer (Guadeloupe, Martinique, Guyane, La Réunion, Nouvelle-Calédonie, Mayotte et Polynésie française). Plus de 5 700 ultramarins en étaient bénéficiaires en 2023, dont plus de 1 300 à La Réunion.

Différents statuts sont proposés au sein du régiment du SMA :

– le statut de volontaire technicien est proposé à de jeunes diplômés qui souhaitent effectuer une première expérience professionnelle en milieu militaire ;

– les volontaires stagiaires (VS) viennent suivre une formation professionnelle de six à douze mois adaptée à leur niveau scolaire ;

– les volontaires jeunes cadets de 16 à 18 ans en décrochage scolaire sont accueillis en collaboration avec les rectorats. En 2023, 231 jeunes ont suivi ces formations et 90 % sont retournés à l’école et sont passés en classe supérieure.

Ces différents statuts participent à l’amélioration des compétences locales en réduisant les inégalités territoriales et en favorisant l’inclusion.

a.   Un dispositif militaire d’insertion professionnelle aux résultats probants

À l’issue d’une première phase de formation militaire initiale de deux mois, le jeune est orienté vers une filière professionnelle et bénéficie d’un accompagnement médico-psychosocial. La formation est constituée de plusieurs phases : une formation professionnelle, une formation civique et citoyenne, une remise à niveau scolaire en français et en mathématiques, des modules de lutte contre l’illettrisme et l’illectronisme, la présentation au permis de conduire, etc.

La formation au RSMA repose sur trois piliers : le savoir-être, le savoirfaire (geste technique en formation professionnelle et remise à niveau scolaire) et le savoir-devenir (recherche d’emploi).

Chaque filière professionnelle est adaptée au contexte socioéconomique spécifique de chaque territoire : par exemple, le RSMA dispense des formations de pilotes lagunaires à Tubuaï et Hiva Oa en Polynésie français, tandis qu’elle forme des accompagnateurs en forêt pour le parc national guyanais. Par ailleurs, grâce au conseil de perfectionnement présidé par le chef de corps et le préfet, les besoins des territoires sont étudiés pour modifier les formations professionnelles à court terme (12 à 18 mois).

Pour le SMA, la pandémie de Covid s’est accompagnée d’une vaccination obligatoire pour le personnel militaire, dont les volontaires du SMA. La réticence des populations aux Antilles, en Guyane et en Nouvelle Calédonie a engendré des refus d’incorporation : 120 à 156 candidats sur 6 160 ont refusé la vaccination en 2022, soit entre 1,9 et 2,5 % de l’ensemble du SMA.

Toutefois, à l’exception de l’année de la pandémie de Covid, le taux d’insertion des volontaires stagiaires est supérieur à 80 %, conformément aux cibles déterminées par l’état-major du commandant du RSMA. En outre, alors qu’il n’y avait initialement pas de suivi à l’issue de la formation, désormais, le SMA insère directement les jeunes en entreprise.

Le RSMA, un dispositif efficace en Outre-mer : des taux d’insertion élevés

Source : Régiment du service militaire adapté.

Le SMA s’est ainsi étendu en Outre-mer :

– en 2020, une troisième compagnie de formation professionnelle à Bourail, au nord de la Province Sud de Nouvelle-Calédonie, a vu le jour ; 

– en 2022, un centre de recrutement a ouvert à Saint-Laurent-du-Maroni en Guyane et deux nouvelles compagnies ont vu le jour, à Mayotte et en Polynésie française ; on constate en général pour cette dernière « cinq fois plus de candidats que de places disponibles », assure la délégation Outre-mer du CESE.

b.   Une revalorisation indemnitaire pour renforcer l’attractivité du RSMA

Bien que le SMA soit considéré comme un parcours du contrat engagement jeune (CEJ), aux termes de l’arrêté du 9 mars 2022 fixant la liste des parcours ou contrats, l’indemnité moins attrayante et l’engagement personnel que représente un parcours du volontaire stagiaire du SMA ne facilitent pas le recrutement.

En août 2023 et à l’exception de Mayotte, le RSMA a obtenu une allocation d’attractivité ([30]) pour les VS permettant d’aligner leur rémunération sur celle du CEJ. Ainsi, les VS bénéficient d’une allocation mensuelle de 204,05 €, qui s’ajoute à leur solde brute de 360 euros, la différence étant à la charge du SMA.

c.   Une entité développant des partenariats au niveau local

Afin de fluidifier les interactions entre les acteurs de l’insertion, l’état-major définit une ligne directrice spécifiquement déclinée par territoire, pour répondre le plus précisément possible aux contraintes locales.

Au-delà d’échanges avec des entités reconnues nationalement, les régiments disposent de leurs propres réseaux de partenaires, notamment avec France Travail et les missions locales, dans des secteurs variés. Au total, 142 conventions de partenariat ont été signées par les régiments du SMA.

3.   L’Agence de l’Outre-mer pour la mobilité (Ladom)

Opérateur de l’État, l’Agence de l’Outre-mer pour la mobilité (Ladom) met en œuvre une politique de continuité territoriale. Son objectif principal est de rétablir une égalité des chances entre les Français ultramarins et ceux de l’Hexagone, notamment dans deux domaines : les études et la formation.

a.   Des dispositifs facilitant la mobilité professionnelle

Ladom favorise la mobilité des résidents ultramarins par la prise en charge de plusieurs dispositifs concernant notamment :

 les étudiants ultramarins, dont la filière d’étude visée n’existe pas localement ou est saturée sur le territoire, avec le « passeport pour la mobilité des études » (PME). Ce dispositif se caractérise par la prise en charge à 100 % d’un aller-retour de l’étudiant depuis son lieu de résidence jusqu’à son lieu d’études ([31]) ;

– les demandeurs d’emploi ultramarins, avec le « passeport pour la mobilité de la formation professionnelle » (PMFP), dont le projet d’insertion professionnelle passe par une formation en mobilité, à condition qu’elle ne soit pas disponible localement et sous conditions de ressources (quotient familial inférieur ou égal à 26 631 euros) ([32]) ;

– les demandeurs d’emploi ultramarins prenant un poste en CDD de plus de six mois ou en CDI dans l’Hexagone ;

– les familles ultramarines ayant besoin de se déplacer vers l’Hexagone, pour des raisons personnelles, avec l’ « aide à la continuité territoriale » (ACT). Cette aide se caractérise par la délivrance d’un bon de réduction, dit « bon Ladom », aux personnes résidant en Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte, à La Réunion, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin ; il s’agit d’une aide accordée sous conditions de ressources (quotient familial inférieur ou égal à 18 000 euros). Elle vise à préserver les liens familiaux et à promouvoir les relations entre les Outre-mer et l’Hexagone. Le montant du bon venant en déduction du prix du billet d’avion aller-retour varie en fonction des territoires ultramarins.

MontantS et nombres DE « bons LADOM »

Territoire ultramarin

Montant du « bon continuité »

Guadeloupe/Martinique

340 euros

Guyane

390 euros

La Réunion

475 euros

Saint-Barthélemy

495 euros

Mayotte

535 euros

Source : https://LADOM.fr/vie-quotidienne/bon-voyage/

Année

Nombre de « bons continuité » attribués

2023

59 421

2022

48 035

2021

8 589

2020

6 463

2019

20 363

2018

19 994

2017

20 956

2016

17 770

2015

18 189

2014

110 417

2013

126 927

2012

128 214

Total

585 338

Source : réponses au questionnaire de Ladom.

Pour résumer, si la mobilité est contrainte, son financement est pris en charge à 100 % par l’État ; si la mobilité n’est en revanche pas contrainte, il y a un cofinancement du bénéficiaire et de l’État.

– les étudiants effectuant leurs études Outre-mer et devant réaliser un stage en mobilité avec le « Passeport pour la mobilité en stage professionnel » (PMSP) ;

– les talents ultramarins (jeunes espoirs sportifs, doctorants, etc.) dont l’activité requiert une mobilité (ACT spécifiques) ;

– les étudiants ultramarins ([33]) ayant un projet de formation en dehors de leur territoire pour occuper des fonctions de cadres intermédiaires et supérieurs en Outre-mer. Ce dispositif « Cadres d’avenir », mis en œuvre par les préfectures ultramarines et Ladom, est proposé aujourd’hui au départ de Mayotte (depuis 2018), de la Guadeloupe et de Saint-Martin (depuis 2023), de la Martinique et de la Guyane (depuis la rentrée universitaire 2024). Les bénéficiaires s’engagent à revenir exercer leur activité professionnelle dans leur DROM d’origine, en lien avec la formation suivie.  L’accompagnement financier de l’État englobe une aide à l’installation, une allocation mensuelle (80 euros par mois a minima, en plus des bourses) et la prise en charge à 100 % des billets d’avion aller-retour.

La compétence de Ladom s’étend aux cinq DROM, à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy. Ladom accompagne également les résidents des autres COM (Polynésie française, Nouvelle-Calédonie, Wallis-et-Futuna, Saint‑Pierre‑et‑Miquelon), mais uniquement dans le cadre du programme 138 « Emploi Outre-mer » de la mission Outre-mer pour les aides versées aux demandeurs d’emploi en mobilité dans l’Hexagone ou dans l’un des cinq DROM dans le cadre du PMFP.

Concernant les dispositifs de retour, les bénéficiaires des dispositifs PMFP et PME disposent d’un délai de 5 ans pour demander leur billet retour. Par ailleurs, le comité interministériel des Outre-mer (CIOM) de juillet 2023 a validé la mise en place du dispositif « Passeport pour le retour », actuellement en phase de conception avec les services de la DGOM. Ce dispositif a vocation à accompagner le retour d’anciens bénéficiaires de Ladom dans leur collectivité ultramarine d’origine, dans le cadre d’un projet professionnel durable. Ce sera la première fois que l’État financera la mobilité dans le sens allant de l’Hexagone vers les Outre-mer dans le cadre d’un projet professionnel. Pour en bénéficier, deux conditions devront être remplies : respecter les plafonds de ressources pré-fixés et avoir déjà bénéficié d’un dispositif de Ladom. Ce dispositif doit permettre de favoriser le retour de compétences et de talents en Outre-mer, notamment pour contribuer au développement des territoires concernés.

b.   Un opérateur en lien avec les différents acteurs de l’insertion

En ce qui concerne l’accompagnement des demandeurs d’emploi ultramarins, Ladom et France Travail ont signé le 25 avril 2024 un accord cadre visant à renforcer l’articulation de l’action des deux opérateurs. D’une part, France Travail se recentre sur la formation professionnelle des demandeurs d’emploi (prescription, achat de formation, rémunération des demandeurs d’emploi en formation) et, d’autre part, Ladom se concentre sur l’accompagnement des parcours de formation en mobilité (mise en œuvre des aides du PMFP, validation de l’environnement propre à la mobilité, information et conseil des candidats sur les aspects pratiques de la mobilité, etc.).

Les unités territoriales d’Outre-mer de Ladom travaillent également en collaboration avec les missions locales et ont, pour certaines, conclu une convention. De même, les CCAS sont également des interlocuteurs auprès desquels Ladom intervient afin de communiquer sur ses dispositifs.

Ladom travaille également avec différentes collectivités d’Outre-mer :

– Avec la région Guadeloupe, la collectivité de Martinique, la collectivité de Saint-Martin et le conseil départemental de Mayotte, Ladom a conclu une convention par laquelle elle est mandatée par la collectivité pour la mise en œuvre et le cofinancement des formations professionnelles en mobilité des demandeurs d’emploi agréés par la collectivité ;

– Avec le conseil régional de La Réunion, Ladom a conclu une convention pour l’ACT : la région abonde le financement de l’État sur ce dispositif. Des échanges sont en cours pour conclure une convention sur la formation professionnelle en mobilité des demandeurs d’emploi ;

– Avec le Haut-Commissariat et le Gouvernement de Nouvelle-Calédonie, une convention sur la formation professionnelle en mobilité des demandeurs d’emploi calédoniens a été passée.

– En Polynésie française, une convention similaire (reconduction d’une convention précédente) est en cours de validation pour 2025-2027.

4.   Le rôle central des missions locales

En Outre-mer, les douze missions locales – dont quatre à La Réunion, trois en Martinique, deux en Guyane et une respectivement en Guadeloupe, à Mayotte et à Saint-Martin – ont assuré l’accueil et l’accompagnement sur 216 sites d’accueil de près de 80 000 jeunes, dont 14 903 jeunes dans le cadre du CEJ. Ainsi, les missions locales ultramarines, qui représentent 2,7 % de l’ensemble des missions locales, accueillent et accompagnent à elles seules plus de 7 % des jeunes entre 16 et 25 ans.

Les missions locales ultramarines ont un rôle central pour favoriser l’emploi, la formation et l’orientation professionnelle des jeunes ultramarins. Elles se trouvent d’abord en lien direct avec les employeurs et les réseaux économiques locaux pour la construction de « parcours d’insertion » pérenne. En outre, fortes de leur ancrage territorial, les missions locales développent des démarches
« d’aller-vers » et ont une connaissance fine des secteurs en tension, leur permettant de proposer des parcours adaptés aux besoins des jeunes et des entreprises.

II.   Face aux difficultés persistantes, il convient de développer des Gestions Prévisionnelles des Emplois et des Compétences (GPEC) territoriales prospectiveS, inclusiveS et adaptéeS aux territoires ultramarins

A.   Malgré des besoins de recrutement sur certains marchÉs en tension, les difficultÉs d’insertion profesSionnelle persistent en Outre-mer

1.   Des difficultés persistantes d’insertion et de recrutement

a.   Le manque et l’inadéquation des formations conduisent à valoriser la mobilité professionnelle en dehors des Outre-mer

Au regard du caractère exigu de leur superficie, les territoires ultramarins ne peuvent pas proposer l’ensemble des formations nécessaires aux besoins du marché. Lorsqu’elles ne sont pas inexistantes en Outre-mer, les formations professionnelles s’avèrent ainsi souvent onéreuses, peu visibles et parfois peu adaptées aux qualifications disponibles et aux besoins du marché.

Dans ce contexte, des politiques de continuité territoriale – notamment pilotées par Ladom – ont été favorisées pour développer la mobilité et permettre aux ultramarins de suivre des formations qui n’existent pas nécessairement sur leur territoire d’origine. En partenariat avec Ladom et le Comité national d’accueil et d’actions pour les Réunionnais en mobilité (CNARM), les missions locales mènent également des actions d’aide à la mobilité des jeunes vers l’Hexagone pour les formations non disponibles, en les aidant à financer le transport.

Toutefois, la mobilité des ultramarins peut être contrainte par plusieurs freins. Ainsi, l’éloignement par rapport à l’Hexagone complique la mobilité professionnelle, surtout dans un contexte de cherté de la vie où l’augmentation des prix des billets d’avion pèse sur le pouvoir d’achat des ultramarins. De plus, Ladom est parfois confrontée à la problématique de femmes qui voudraient suivre des formations qui ne sont pas proposées sur leur territoire, mais qui ne peuvent partir en mobilité car elles sont mères célibataires. À ce stade, aucun dispositif d’accompagnement spécifique n’existe pour ce type de public.

b.   Le difficile retour des forces vives

Dans la mesure où les formations et les opportunités de carrière apparaissent souvent limitées au niveau local, certains jeunes décident de partir vers l’Hexagone pour poursuivre leurs études ou trouver un emploi.

« On observe un écart important en termes d’opportunités professionnelles entre ceux qui sont partis (un quart des natifs de La Réunion et presque 40 % pour les natifs des Antilles) et ceux qui sont restés en Outre-mer. […] [L]e différentiel entre personnes mobiles et non-mobiles est beaucoup plus marqué pour les Outre-mer. Cela s’explique par une double pénalité des sédentaires : un moindre niveau de diplôme, mais également, pour un même niveau de diplôme, un écart défavorable d’opportunités professionnelles, notamment aux Antilles. Ceux qui ont migré quant à eux bénéficient au contraire en moyenne d’une situation proche de celle des personnes nées dans l’Hexagone » résume la délégation Outre-mer du CESE.

Des jeunes, dont les plus qualifiés, quittent leur territoire et ne reviennent globalement pas : « beaucoup auraient envie de revenir sur leur territoire mais n’y arrivent pas car ils ne trouvent pas de poste équivalent ou ne disposent pas de réseau professionnel » estime le CESE. Ces départs contribuent à un phénomène de « fuite des forces vives », aboutissant à un manque de main-d’œuvre qualifiée sur place, au déclin démographique et au vieillissement de la population active dans certains territoires ultramarins. Ce déséquilibre démographique est problématique, tant il prive les territoires des compétences pourtant nécessaires pour assurer leur développement.

c.   Le défi de rendre le recrutement dans le secteur privé aussi attractif que dans le secteur public

« Dans les DROM, le chômage est structurel en raison d’une économie locale fragile, fortement dépendante du secteur public, avec moins de possibilités d’emploi dans le secteur privé. » ([34])

« Une proportion importante de jeunes vise l’emploi dans la fonction publique, perçu comme plus stable et mieux rémunéré. Cependant, le nombre de postes disponibles dans ce secteur est limité, exacerbant les difficultés d’insertion pour ceux qui ne parviennent pas à intégrer ces structures » ([35]).

La fonction publique joue en effet un rôle prédominant dans l’emploi en Outre-mer, comme l’explique la CCIMA de Wallis-et-Futuna : « Le secteur public représente 64,8 % des emplois déclarés. Le SMIG local est de 97 250 F CFP mensuels (815 euros), malgré un coût de la vie très élevé. La disparité des rémunérations entre le public (indexé jusqu’à 2,05) et le privé explique un plus fort attrait pour l’emploi public ».

Si cela assure une certaine stabilité, cette situation limite aussi la création d’emplois dans le secteur privé, contribuant à une dépendance excessive à l’administration : « Le secteur du commerce est celui qui recrute le plus. L’emploi dans le BTP a augmenté en 2023 grâce à de grands chantiers de commande publique ».

Toutefois, votre rapporteur attire l’attention sur le fait que ce constat ne doit pas amener à remettre en cause l’attractivité de la rémunération du secteur public dans les Outre-mer, mais bien à rendre plus attractif le recrutement dans le secteur privé, par une revalorisation des salaires mais également par une amélioration des conditions périphériques à l’emploi.

d.   Un manque de valorisation des métiers dits « en tension »

Le constat d’une coexistence entre difficultés de recrutement et persistance de taux de chômage élevés en Outre-mer peut notamment s’expliquer par « des formations inadaptées aux secteurs en tension (BTP, santé, numérique) » ([36]), et donc aux besoins réels du marché du travail.

Les métiers en tension

Les métiers dits « en tension » se définissent par des difficultés de recrutement à la fois sur les métiers peu qualifiés ou difficiles, mais non moins essentiels, ainsi que par un manque d’attractivité sur des métiers plus qualifiés, en raison d’un manque de profils adaptés aux attentes des entreprises.

Votre rapporteur insiste sur l’idée que les métiers en tension ne sont pas figés, mais dépendent de la conjoncture économique et du territoire ultramarin afférent. Ainsi, France Travail fait état de « difficultés de recrutement dans certains métiers », plutôt que de véritables « tensions ».

Les besoins de recrutement concernent prioritairement les métiers du tourisme, de la santé, de l’aide à la personne, du bâtiment et travaux publics, ainsi que, dans une moindre mesure, les activités industrielles, de transport et les services aux entreprises. Les professions de santé et paramédicales font partie des métiers fortement en tension, notamment en Guadeloupe, à Saint-Martin, en Guyane et à Mayotte.

Dans les territoires ultramarins, des défis communs persistent, tels que le manque de sensibilisation aux débouchés dans les secteurs en tension et la prédominance des filières tertiaires dans l’orientation des jeunes : « Bien que des programmes d’apprentissage et de formation dédiés aient été lancés dans certains secteurs, leur mise en œuvre est encore trop limitée pour répondre aux besoins croissants des entreprises locales » ([37]).

Au-delà de la capacité du marché du travail à faire coïncider les besoins en main d’œuvre avec la diversité de l’offre de travail des travailleurs, et outre le faible niveau de qualification et les freins périphériques, les difficultés de recrutement peuvent également s’expliquer par une « mauvaise représentation des métiers manuels (salissants, pénibles, sous-payés…) et l’absence de véritables moyens dédiés à leur attractivité auprès des jeunes » estime la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb) de La Réunion.

e.   Un fort halo autour du chômage, non pris en compte par les indicateurs

Les Outre-mer sont également caractérisés par un halo autour du chômage de 2,5 à 5 fois plus présent qu’en Hexagone (10 à 21 % de la population des 15 à 64 ans en Outre-mer, contre 4 % en Hexagone en moyenne en 2021-2022).

Le halo autour du chômage est composé notamment de personnes sans emploi qui, soit recherchent un emploi mais ne sont pas disponibles dans les deux semaines pour travailler, soit n’ont pas effectué de démarche active de recherche d’emploi dans le mois précédent, mais souhaitent travailler, qu’elles soient disponibles ou non. Le halo regroupe donc les personnes inactives au sens du BIT (ni en emploi, ni au chômage), mais proches du marché du travail.

Par exemple en Guyane, où le halo autour du chômage atteint 21 %, une partie des personnes sans emploi se situe en dehors des circuits institutionnels de prise en charge et d’accompagnement pour diverses raisons (absence de titre de séjour et travail, refus des obligations liées à l’inscription à France Travail, etc.).

En outre, si à Mayotte le taux de chômage reste à un niveau élevé, le halo autour du chômage reste l’un des plus importants de France : une grande partie des potentiels bénéficiaires ne sont pas inscrits, notamment pour des raisons administratives.

Ainsi, la délégation Outre-mer du CESE relève que « la tendance baissière du nombre de demandeurs d’emploi s’accompagne néanmoins d’un halo autour du chômage structurellement élevé […] Au-delà des seuls taux de chômage, il faut donc considérer que le sous-emploi et le halo du chômage sont en grande partie liés à un déficit de services publics de garde d’enfant, de soins, de transport, de logement social, d’accès au numérique, à la précarité financière, aux difficultés administratives, à la maîtrise de la langue… sans qu’il soit possible de les quantifier très précisément ».

En outre, « l’existence d’emplois précaires ou informels, liés au travail dissimulé ou à l’économie de subsistance, ne favorise pas non plus l’insertion professionnelle des jeunes » estime France Travail. Le travail non déclaré, parfois répandu dans certains territoires en raison du manque d’opportunités d’emploi formel, freine ainsi l’insertion durable et la reconnaissance de compétences.

Enfin, les modes de calcul du taux de chômage n’incitent paradoxalement pas à insérer sur le marché du travail les populations qui en sont les plus éloignées, comme le souligne la CMPE de La Réunion : « s’il contribue théoriquement à la rejointe de l’objectif de plein-emploi, le rapprochement du marché du travail des publics les plus vulnérables n’est pas exempt de risques ». D’une part en effet, l’augmentation du taux d’emploi par l’insertion sur le marché du travail de publics éloignés, moins productifs, enrichit la croissance en emploi mais réduit la productivité moyenne de l’économie ; d’autre part, les dispositifs en faveur des publics les plus éloignés peuvent susciter l’activation d’une partie de la population inactive, dégradant alors mécaniquement le taux de chômage. Les données statistiques doivent donc être considérées avec la plus grande vigilance dans la mesure où elles peuvent masquer certaines réalités sur le marché du travail.

2.   Un manque de suivi, de vision de long-terme et de coordination

a.   Un manque de suivi, de vision de long terme et de données

Les différentes auditions ont montré que, malgré l’ensemble des efforts consentis et les dispositifs institués, les populations ultramarines restent globalement formées au coup par coup, sans vision de long terme.

Par exemple, s’agissant du passeport mobilité, si un suivi est réalisé à six mois à l’issue de la formation ([38]), Ladom reconnaît manquer d’information pour les personnes qui ne sont pas rentrées dans leur collectivité d’origine, et également pour les personnes rentrées à l’issue de ces six mois. Ladom se dit ainsi favorable à la création d’un outil permettant de connaître les déterminants qui motivent la mobilité des ultramarins, afin d’anticiper sur le long-terme les futurs besoins en mobilité.

En outre, certains territoires souffrent d’un manque d’accès à des données sur l’emploi. Le directeur régional de France Travail Mayotte regrette ainsi la généralisation des données « hors Mayotte » sur les enquêtes de la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares).

b.   Une coordination institutionnelle parfois difficile

La coordination entre les différents acteurs en Outre-mer est essentielle pour faciliter l’insertion professionnelle, créer des synergies et maximiser l’efficacité des dispositifs d’insertion professionnelle existants.

Globalement, la coordination entre les acteurs locaux et les opérateurs (France Travail, centres de formation, missions locales, Ladom, RSMA, missions locales, etc.) apparaît bien établie dans les territoires ultramarins, les partenariats locaux avec les collectivités, les organismes d’accompagnement et les entreprises jouant un rôle crucial dans l’amélioration de l’emploi et de la formation.

Cette coordination pourrait toutefois être améliorée, comme l’indique par exemple la CPME Guyane, qui appelle à rétablir une convention entre la collectivité territoriale de Guyane (CTG) et France Travail, en estimant que « l’absence de coordination efficace entre la CTG, France Travail et les autres acteurs empêche une utilisation optimale des fonds de formation. » 

c.   Un « réflexe Outre-mer » qui fait parfois défaut

Les dispositifs d’insertion professionnelle existants ne sont pas toujours adaptés aux spécificités locales des Outre-mer : « force est de constater que le « réflexe Outre-mer » dans l’élaboration et l’adaptation des normes juridiques a du mal à se concrétiser sur les territoires » déplore l’Union nationale des missions locales (UNML). Il est pourtant nécessaire de renforcer et de mieux adapter les politiques publiques de l’emploi aux particularités de chaque territoire.

i.   Lutter contre le délaissement des territoires éloignés de l’Hexagone

L’égalité républicaine suppose que l’État agisse pour réduire les écarts très importants qui subsistent entre les territoires ultramarins et l’Hexagone en termes d’égalité des chances, de niveau scolaire, d’accès à la formation ou encore d’insertion professionnelle. Pourtant, à ce jour, de nombreux acteurs de l’insertion déplorent une forme de délaissement par l’État.

Ainsi, la CEM de Saint-Barthélemy déclarait lors de son audition que : « Les actions en faveur de l’insertion professionnelle ne sont à ce jour ni suffisantes ni satisfaisantes. Nos tentatives d’établir des réponses communes avec France Travail n’ont pas abouties, et Saint-Barthélemy ne dispose pas de mission locale pour accompagner les jeunes dans leur parcours professionnel. Un partenariat récent (2024) a été établi avec Ladom. Cependant, les spécificités fiscales du territoire ont ralenti la communication autour de cette structure. À ce jour, aucun dossier de financement auprès de Ladom n’a été accepté pour les jeunes de SaintBarthélemy ».

De même, la CCIMA regrette qu’à Wallis-et-Futuna « il n’existe pas de structure de type Pôle Emploi et [que] la notion de demandeur d’emploi au sens du BIT [n’y soit] pas applicable. […] Le taux de chômage est estimé dans le rapport de l’IEOM à 8,2 %, mais ce chiffre est très probablement erroné. Il était précédemment évalué à 17 % et 42 % chez les moins de 25 ans. […] Le chômage réel est bien plus élevé, et trouve son explication dans l’insuffisance des dispositifs d’aide à l’emploi, à l’insertion professionnelle et au développement des entreprises ».

La CCIMA a par ailleurs élaboré en 2019 un projet de création de CFA, inspiré de celui de Saint-Pierre-et-Miquelon, mais le projet n’a pas abouti, tout comme l’étude sur la GPEC, lancée en 2020, visant à définir les métiers d’avenir et un PIC pour Wallis-et-Futuna : « Le Covid a été un facteur, puis un prétexte ».

En outre, malgré l’importante diaspora dans l’Hexagone et en Nouvelle-Calédonie, soit plus de 60 000 personnes wallisiens et futuniens, il n’existe aucun dispositif pour inciter les jeunes formés dans ces territoires à retourner dans les îles Wallis et Futuna. En outre, le SITAS doit devenir un « vrai service d’aide à l’emploi. Un site internet a été créé fin 2023 afin de recueillir les offres et demandes d’emploi local. Il n’est pas encore en activité. C’est le bouche à oreille, ou Facebook qui prévalent ». Enfin, il est apparu que « la prime à l’emploi locale, limitée aux jeunes de moins de 25 ans et sur la base de 20 % du SMIG, n’a aidé que 20 personnes en 2023. Les crédits qui lui sont alloués ne sont pas consommés. » Pour la rendre plus incitative, la CCIMA demande son élargissement à l’âge à 30 ans et son déplafonnement, afin qu’elle puisse être appliquée au salaire réel.

ii.   Éviter la mise à l’arrêt des dispositifs d’aides à l’insertion

L’expérimentation du contrat de professionnalisation « Boussole », déployé à La Réunion sur les communes de Saint-Leu et de Trois-Bassins, avant d’être étendu aux autres DROM où l’OPCO EP qui le pilote est présent ([39]), a pris fin en décembre 2023.

Ce contrat expérimental, d’une durée de 6 mois, s’appuyait sur une possibilité ouverte par l’article 28 de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel. Ce dispositif avait pourtant fait ses preuves : 2 200 allocataires du RSA ont bénéficié d’un accompagnement renforcé pour faciliter leur accès à l’emploi, et La Réunion connaissait un meilleur taux d’accès à l’emploi durable (18,11 %) que la moyenne nationale (15,83 %).

Malgré cette réussite, l’objectif d’accompagner 35 000 nouveaux demandeurs d’emploi sur trois ans sans moyens supplémentaires apparaissait inatteignable pour le directeur régional de FT de La Réunion. En outre, le périmètre des aides de l’État a évolué : « les contrats de professionnalisation n’étant désormais plus éligibles à l’aide de l’État de 6 000 euros, les aides des contrats en apprentissage sont plus intéressantes pour les entreprises. Ainsi, pour des questions financières, ces dernières risqueraient de délaisser le dispositif si celui-ci venait à être relancé », explique France Travail.

Par ailleurs, plusieurs dispositifs d’aides à l’insertion portés par les missions locales n’ont également pas été reconduits dans les territoires ultramarins, illustrant l’inégalité de traitement entre jeunes ultramarins et hexagonaux en matière de décrochage scolaire. Par exemple, à La Réunion, les programmes « Tip Top Challenge » et « Reelife », qui étaient mis en œuvre par les missions locales, ont été arrêtés fin avril 2023 ; à Mayotte, l’action « Parcours personnalisé 16-18 » réalisée pendant l’année 2023 n’a pas été reconduite ; aux Antilles, la non-reconduction porte sur le dispositif « Delanmen » en Martinique et sur l’action « Bosco 16‑18 ans » en Guadeloupe.

En effet, dans le cadre de la mise en œuvre de l’obligation de formation des jeunes de 16 à 18 ans NEETS, l’Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa) a mis en place un dispositif dédié aux jeunes décrocheurs, la « Promo 16-18 ». Or, l’Afpa n’existe ni aux Antilles, ni à La Réunion. Ainsi, pour permettre aux jeunes de ces territoires d’avoir accès à ce dispositif, les élus des missions locales se sont mobilisés auprès des DEETS pour construire une alternative. Avec l’appui de la DGEFP et de DEETS, des appels à projet territorialisés ont été lancés et les missions locales ou leurs partenaires y ont répondu et ont été retenues. Toutefois, alors que le dispositif a été reconduit dans l’Hexagone, les programmes alternatifs d’Outre-mer ont pris fin depuis plus d’un an et demi. En dépit d’alertes réitérées, les missions locales n’ont aucune visibilité sur les suites éventuelles de ces actions : en l’absence de prolongation de ces alternatives, il n’existe plus aucune proposition de ce type sur ces territoires.

iii.   Adapter les conventions collectives aux spécificités ultramarines

Les territoires ultramarins ont connu des évolutions statutaires successives, qui rendent parfois difficile de déterminer si une convention collective leur est applicable ou non. En effet, l’applicabilité d’un accord collectif dépend de la législation en vigueur et du statut dont le territoire jouissait lors de sa signature.

Les évolutions législatives se décomposent en trois périodes :

– jusqu’au 27 juillet 1994, avant l’entrée en vigueur de la loi n° 94-638 du 25 juillet 1994, dite « loi Perben », tendant à favoriser l’emploi, l’insertion et les activités économiques dans les départements d’Outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte, la seule mention de « territoire national » dans le champ d’application d’une convention ou d’un accord collectif national suffisait à en rendre les dispositions applicables à l’Outre-mer ;

– à partir du 28 juillet 1994, partant du constat qu’un nombre croissant d’accords était conclu afin d’exclure les territoires d’Outre-mer du champ d’application territorial des conventions collectives nationales, la loi Perben a posé le principe de la non-application des conventions et accords nationaux aux territoires ultramarins, sauf mention explicite de ces derniers dans le champ d’application territorial des textes conventionnels ;

– enfin, depuis l’entrée en vigueur de l’article 26 de la loi du 8 août 2016, les conventions et accords collectifs de travail conclus à compter du 1er avril 2017, voire du 1er  janvier 2018 pour Mayotte, et dont le champ d’application territorial est « national » s’appliquent directement dans les territoires ultramarins, sauf stipulations contraires (article L. 2222-1 du code du travail). Cette loi s’applique en Guadeloupe, à La Réunion, en Martinique, en Guyane, à Saint-Martin, à Saint‑Barthélemy, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte.

Sur les 230 conventions collectives nationales qui existent actuellement, hors secteur agricole, 203 s’appliquent aux Outre-mer, soit environ 88 % d’entre elles. Ce chiffre varie fortement selon les territoires, entre 203 à La Réunion et 31 à Mayotte. On compte en outre 49 conventions régionales dont le champ territorial est restreint à l’Outre-mer.

Par ailleurs, le code du travail prévoit des possibilités d’adaptation des stipulations d’un accord ou d’une convention de branche applicable dans un ou plusieurs territoires ultramarins, en vertu des dispositions combinées des articles L. 2222-1 et L. 2622-2 du code du travail. Ces dernières prévoient que « les organisations syndicales de salariés et d’employeurs habilités à négocier dans ces collectivités » peuvent « conclure des accords dans le même champ », dans un délai de six mois avant que la convention ou l’accord ne s’applique automatiquement, ou les adapter « à la situation particulière de ces collectivités » à l’issue de ce délai.

Toutefois, le niveau de la négociation locale dans les territoires ultramarins demeure faible : 11 accords locaux conclus en 2020 et 12 accords en 2021. Par ailleurs, depuis les évolutions législatives issues de la loi du 8 août 2016, aucun accord d’adaptation des stipulations conventionnelles nationales n’a été conclu en application des dispositions de l’article L. 2222-1 ou de l’article L. 2622-2 du code du travail.

Votre rapporteur est favorable à une extension des conventions collectives nationales dans les DROM, dans la mesure où elles font l’objet d’une adaptation locale aux conditions de travail spécifiques. Ainsi, les organisations représentatives pourraient se réunir plus régulièrement et proposer des modalités d’accords spécifiques aux Outre-mer. Cet investissement dans le dialogue social est un préalable indispensable pour préparer la mise en application des conventions collectives nationales au plan local.

Si une commission paritaire régionale interprofessionnelle (CPRI), visant à représenter les salariés et employeurs des TPE relevant des branches qui n’ont pas mis en place de commissions conventionnelles équivalentes, a été mise en œuvre à La Réunion, le CESE regrette qu’elle ne se réunisse que très peu et que cette structure n’existe pas dans les autres territoires ultramarins. Ainsi, « malgré les demandes formulées par les représentants syndicaux sur certains territoires, en Guyane, Martinique et Guadeloupe notamment, les discussions concernant les adaptations locales des conventions collectives nationales n’ont pas commencé » déplore le CESE, qui recommande que chaque territoire se dote d’un observatoire d’analyse et d’appui au dialogue social.

Dans ce contexte, votre rapporteur appelle à mieux prendre en compte les territoires ultramarins dans le cadre des conventions collectives nationales, afin de permettre l’application aux différentes branches, dans les Outre-mer, des mesures issues des négociations.

B.   Soutenir les dispositifs d’aides à l’insertion professionnelle en Outre-mer

1.   Assurer un financement pérenne des dispositifs d’aide à l’insertion

En plus d’une baisse de crédits prévue au niveau national pour certains dispositifs d’aide à l’insertion, la chute de crédits concerne également des dispositifs spécifiques aux Outre-mer. Or, il est inconcevable aux yeux de votre rapporteur que les territoires ultramarins subissent cette forme de « double peine » : il convient de donner les moyens aux acteurs de terrain de l’insertion professionnelle d’agir.

a.   Un budget prévoyant une rationalisation des dispositifs nationaux d’aide à l’insertion

i.   Des économies réalisées sur les aides à l’apprentissage

Les crédits dédiés à l’apprentissage, relevant du programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi » de la mission Travail et emploi et du programme 364 « Cohésion », accompagnent :

– les exonérations liées à l’apprentissage (15,4 millions d’euros en 2022, puis 18,3 millions en 2023 et 20,6 millions en 2024 pour les DROM hors Mayotte) ;

– les aides unique et exceptionnelle à l’apprentissage : l’aide unique aux employeurs d’apprentis (AUEA) représentait, pour les DROM, une enveloppe de 6,9 millions d’euros en 2022, portée à 7,2 millions en 2023. L’aide exceptionnelle aux employeurs de contrats en alternance représentait en 2022, pour les DROM, une enveloppe de 97,8 millions d’euros (dont 13,1 millions d’euros sur le programme 103 et 84,7 millions d’euros sur le programme 364) ; en 2023, celle-ci a atteint 109,1 millions d’euros (dont 94,6 millions d’euros sur le programme 103 et 14,5 millions d’euros sur le programme 364) ;

– les dépenses d’apprentissage ([40]).

Au niveau national, le nombre d’apprentis a augmenté de 277 % entre 2019 et 2023, période durant laquelle une aide exceptionnelle à l’apprentissage ([41]) a été déployée, permettant de favoriser l’embauche des apprentis.

Or, les taux d’insertion dans l’emploi en Outre-mer montrent qu’environ la moitié des apprentis sont professionnellement insérés entre six et vingt-quatre mois après la fin de leur formation. L’apprentissage a ainsi un effet vertueux non négligeable sur l’insertion des jeunes, en comparaison avec les taux d’emploi des ultramarins de 15-29 ans, qui se situent sous les 30 %. C’est pourquoi le CCIMA de Wallis-et-Futuna réclame la création d’un CFA avec la mise en place de l’alternance, « Wallis et Futuna étant le dernier territoire à ne pas en disposer, malgré une appétence évidente des Wallisiens et Futuniens pour l’apprentissage par la pratique ».

Or, le Gouvernement prévoit au sein du PLF pour 2025 des économies qui concernent les aides à l’apprentissage à hauteur de 1,2 milliards d’euros. Ces baisses de crédits vont alors se répercuter sur l’embauche des apprentis en entreprise et sur l’insertion professionnelle des jeunes hexagonaux et ultramarins.

Pourtant, l’apprentissage est une solution de remobilisation professionnelle rapprochant des jeunes, diplômés ou non, de l’entreprise. Or, l’accès à l’apprentissage est rendu difficile en Outre-mer « notamment en raison du tissu économique ultramarin principalement constitué de petites ou microentreprises, ce qui rend l’accueil d’apprentis plus difficile. Beaucoup de jeunes qui s’engagent dans une formation en alternance ne trouvent pas d’entreprise et sont contraints d’abandonner leur formation », souligne le CESE.

ii.   Une stabilisation des crédits de France Travail

Le PLF 2025 prévoit que FT bénéficie d’une stabilisation de la subvention pour charge de service public à 1,35 milliard d’euros et d’un accroissement de 160 millions d’euros de la contribution de l’Unédic, pour lui permettre de mettre en œuvre la réforme du plein-emploi. Toutefois, pour que ces évolutions puissent être mises en œuvre concrètement sur chaque territoire, il apparaît indispensable que France Travail (FT) soit doté des moyens supplémentaires associés.

En effet, la formation est un enjeu crucial en Outre-mer : « des améliorations ont été constatées avec une hausse de 125 % des entrées en formation sur 5 ans contre 90 % pour l’ensemble de la France. Tous les domaines de formation sans exception sont concernés par cette hausse », assure FT.

Toutefois, l’expérimentation sur le dispositif des emplois francs ne sera pas reconduite, le ministère du travail estimant que ce dispositif créait un « fort effet d’aubaine ». En outre, si le cadastrage est en progression à Mayotte, beaucoup de demandeurs d’emplois vivent à ce jour dans des logements de fortune sans adresse administrative et ne peuvent prétendre à ce dispositif, posant la question, à l’égard des publics précaires, de l’égal accès aux droits.

b.   Un budget prévoyant des économies sur les dispositifs ultramarins d’insertion professionnelle

Alors même que le Gouvernement énonce comme priorité du programme 138 pour le projet de loi de finances (PLF) pour 2025 la « poursuite d’actions en faveur de la qualification professionnelle des actifs ultramarins » au travers du RSMA et de Ladom, il propose une diminution des crédits de l’action 2 « Aide à l’insertion et à la qualification professionnelle » de 6,2 millions (- 2 %) en autorisations d’engagement et de 14,1 millions en crédits de paiement (- 4,5 %).

Évolution des crédits du SMA, de LADOM et de l’IFCASS ([42])

(en euros)

 

LFI 2024

PLF 2025

Évolution

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

SMA

72 825 100

68 607 030

72 965 396

58 247 326

140 296

-10 359 704

Ladom (subvention pour charges de service public)

9 947 073

9 947 073

6 283 073

6 283 073

-3 664 000

-3 664 000

Ladom (Formation professionnelle en mobilité)

11 134 654

5 910 763

8 034 654

5 410 763

-3 100 000

-500 000

IFCASS

2 500 000

2 500 000

1 500 000

1 500 000

-1 000 000

-1 000 000

i.   Le RSMA

L’année 2017, le « plan SMA 6000 » a été atteint en termes de volume de bénéficiaires. Cependant, si leur nombre a doublé entre 2009 et 2017, passant de 3 000 à 6 000, celui des cadres n’a augmenté que de 30 %. Le taux d’encadrement du SMA est ainsi passé de 22 % en 2010 à 15,03 % en 2018.

Après une augmentation de 140 postes dans le cadre des mesures nouvelles de la planification budgétaire quinquennale 2018-2022 du programme 138, le taux d’encadrement du SMA atteint 17,4 % en 2022. Toutefois, la création d’une compagnie à Mayotte et en Polynésie française en 2022 (deux zones ayant un besoin avéré de formation) a généré la création d’un soutien de proximité supplémentaire : ainsi l’augmentation des cadres présents dans ces régiments n’a pas permis de renforcer significativement le niveau d’encadrement.

En outre, en 2023, par décret n° 2024-124 du 21 février 2024 portant annulation de crédit, le SMA a connu une mesure de réduction budgétaire de 7,8 millions d’euros, se traduisant par une baisse de 425 équivalents temps plein travaillé (ETPT) de volontaire stagiaire et 4 ETPT de volontaire technicien. Cette mesure a abaissé le nombre de bénéficiaire du SMA à 5 648 volontaires (hors volontaires jeunes cadets). Or, si le RSMA estime que « cette réduction n’a pas eu de conséquences immédiates sur le volume de personnel affecté à la gestion ou à l’encadrement », il regrette que le régiment ait été « contraint à renoncer à certaines mesures nouvelles […] afin de faire peser le moins possible les conséquences du renouvellement de cette réduction budgétaire en 2025 ».

Si le PLF pour 2025 porte une légère augmentation des crédits en autorisations d’engagement (AE) par rapport au PLF pour 2024, passant de 71,83 à 72,97 millions d’euros, il est également proposé une baisse des crédits de paiement (CP), passant de 67,71 à 58,25 millions d’euros.

Les dépenses de fonctionnement proposées, en légère augmentation (de 42,81 à 44,71 millions d’euros en autorisations d’engagement), doivent permettre de financer les dépenses de fonctionnement afférentes au rééquilibrage du taux d’encadrement du SMA. Toutefois, alors même que les plans « SMA 2025 + » et « Horizon 2030 » requièrent des financements, le Gouvernement propose une baisse des dépenses d’investissement qui concernent les dépenses d’infrastructure et d’équipement, comme en témoigne le tableau ci-dessous.

un financement des dépenses d’investissement du rsma en baisse POUR 2025

Programme 138

LFI 2023

LFI 2024

PLF 2025

En millions d’euros

AE

CP

AE

CP

AE

CP

30,65

33,09

32,8

28,36

28,26

14,42

Données : RSMA et PAP Outre-mer pour 2025

Alors que les résultats du RSMA en termes d’insertion témoignent de l’efficacité de ce dispositif militaire, il convient pour votre rapporteur de lui donner pleinement les moyens de favoriser l’insertion professionnelle en Outre-mer.

ii.   LADOM

Un financement à géométrie variable

Les financements de Ladom sont principalement composés des subventions du ministère des Outre-mer et du Fonds social européen (FSE+) pour le dispositif PMFP.

Entre 2022 et 2023, les subventions allouées par la DGOM ont augmenté de 10 %, tandis que la subvention pour charge de service public est restée stable. En revanche, le programme 138 a enregistré une baisse de 15 %, principalement en raison de la mise en œuvre de l’accord-cadre avec France Travail. Ce changement structurel a recentré Ladom sur l’accompagnement de la mobilité des formations, un virage significatif par rapport au modèle antérieur fondé sur le marché national d’achat de formation.

Parallèlement, le programme 123 a bénéficié d’une augmentation de 30 % des subventions, soit 7 millions d’euros. Toutefois, cette hausse n’a pas suffi à couvrir les dépenses totales du programme, qui se sont élevées à 40,8 millions d’euros, contre une subvention de 30 millions d’euros, révélant ainsi un sous-financement de 10,8 millions d’euros. Ce déficit avait déjà été constaté en 2022, avec un montant similaire de 10 millions d’euros.

En ce qui concerne le FSE, Ladom reste tributaire des délais de traitement et du calendrier de ses cofinanceurs. Bien que les prévisions de perception des fonds soient établies avec précision, les délais de versement peuvent varier considérablement selon les cofinanceurs. Ainsi, en 2022, aucune subvention FSE n’a été perçue, les fonds ayant été reportés sur 2023, entraînant une hausse apparente des recettes cette année-là. Ainsi, les versements FSE sont souvent décalés de plusieurs années : les recettes perçues en 2023 correspondaient aux subventions de 2020 et 2021.

Entre 2023 et 2024, les subventions de la DGOM ont augmenté de 29 %. Validé par le comité interministériel des Outre-mer (CIOM) de juillet 2023 avec 16 nouvelles mesures, le projet stratégique de Ladom pour 2024 vise à renforcer son rôle en tant qu’acteur de la mobilité. Les dépenses liées à ces nouvelles mesures sont estimées à 20 millions d’euros en année pleine, dont 11 millions financés par le ministère des Outre-mer et 9 millions par le FSE. Ladom a également obtenu une augmentation de 10 millions d’euros pour compenser le sous-financement annuel de 10 millions pour les bons voyages de la continuité territoriale, observé en 2022 et 2023.

Concernant les programmes 123 et 138, bien qu’une augmentation de 21 millions d’euros (11 millions de nouvelles mesures et 10 millions sur l’ACT) ait été prévue, seuls 12 millions d’euros ont été accordés en première année, certains dispositifs ne s’appliquant pas encore sur une année complète. Par ailleurs, le plafond d’emploi de Ladom a augmenté de 127 à 140 ETP (soit une hausse de 13 postes), entraînant une hausse de la subvention pour charge de service public (hausse de 2,5 millions d’euros, soit une progression de 34 %).

En ce qui concerne le FSE, Ladom anticipe des versements des subventions des années 2017 à 2023 en 2024. Toutefois, elle estimait déjà qu’elle ne recevrait pas les subventions de 2022 et 2023 cette année, et que le montant perçu en 2024 ne serait que de 12 millions d’euros.

En plus d’un contexte de financement qui se révèle chaotique, le budget alloué à Ladom a été réduit au sein du PLF pour 2025. Une diminution de 3,5 millions d’euros a en effet été appliquée à la subvention pour charges de service public, qui passe de 9,8 à 6,3 millions d’euros, la subvention d’intervention dédiée au financement du fonds de continuité territoriale étant par ailleurs diminuée de 11,2 millions d’euros.

Pourtant, les missions de Ladom ont été élargies en application des décisions prises dans le cadre du CIOM du 18 juillet 2023 (aides aux mobilités sociales, services aux acteurs politiques et économiques locaux, accompagnement des talents, etc.), et ne sont pas remises en cause : il est ainsi paradoxalement demandé à Ladom d’accomplir plus de missions, mais avec des moyens d’autant plus contraints.

Cette problématique du financement freine le développement des outils d’insertion à destination des ultramarins. Ainsi, malgré un dispositif prometteur, les résultats quantitatifs du programme « Cadres d’avenir » depuis 2018 (94 bénéficiaires originaires de Mayotte, 13 bénéficiaires de Guadeloupe et 5 de Saint-Martin en 2023) témoignent, pour France Travail, d’un « dispositif de niche ne concernant qu’un nombre limité de bénéficiaires et de métiers. En effet, il s’adresse à un nombre restreint de demandeurs d’emploi, limitant ainsi son impact global sur l’insertion professionnelle ». Pour l’améliorer, il conviendrait par exemple de l’orienter vers des parcours en alternance comprenant une période de stage dans une entreprise locale, afin de faciliter le retour des bénéficiaires sur leur territoire d’origine.

iii.   Les missions locales ultramarines

Au-delà du contexte socio-économique dégradé dans les Outre-mer, les missions locales ultramarines voient leur action auprès des jeunes freinée par un calendrier de financement décalé par rapport aux missions locales de l’Hexagone. Les missions locales sont principalement financées par des crédits de l’État, des contributions régionales, locales et des fonds spécifiques alloués en réponse à des appels à projets. Certes, les budgets des missions locales ont augmenté en 2022, mais ils connaissent depuis cette année une diminution, avec des versements tardifs (notamment en Guyane) et une diminution des subventions des collectivités.

Par ailleurs, les missions locales de La Réunion regrettent d’être exclues de la possibilité de candidater aux nouveaux Appels à Manifestation d’Intérêt (AMI), notamment à l’AMI « O2R » publié par la DEETS de La Réunion au début du mois de juillet concernant les organismes en charge du repérage et de l’accompagnement spécifique des publics éloignés de l’emploi pour l’année 2024.

Or, dans certains territoires de l’Hexagone, l’AMI permet exceptionnellement aux missions locales dont les projets ont fait leur preuve de candidater dans une logique d’efficience des politiques publiques. En effet, « le recours à des opérateurs privés pour réaliser des missions de service public dont les résultats ne sont pas forcément avérés, faute de bénéficier de l’approche globale de l’accompagnement ou du réseau partenarial tissé par les missions locales fortes de leurs 40 ans d’existence, est source de dispersions de l’argent public » assure l’UNML.

Cette exclusion des missions locales ultramarines de l’océan Indien, alors même qu’elles ont permis d’accompagner près de 15 000 jeunes en grande difficulté, est d’autant plus difficilement compréhensible qu’elles restent sans nouvelles quant à la reconduction des actions menées à destination des mineurs décrocheurs de décembre 2021 à avril 2023, alors que la même action « Promo 16-18 » continue d’être déployée dans l’Hexagone par l’AFPA.

Pour votre rapporteur, il s’agit non seulement de garantir une égalité de traitement entre les missions locales d’Hexagone et d’Outre-mer, mais également de garantir la capacité d’action des missions locales avec un financement stabilisé, attribué selon le même calendrier de versement que dans l’Hexagone.

En outre, les missions locales ultramarines ne disposent pas de la même diversité de partenaires et de ressources dans les Outre-mer que dans l’Hexagone . En ce sens, l’UNML estime que, dans la mesure où « ces territoires ultramarins sont marqués par des contextes socio-économiques spécifiques et dégradés, avec une demande accrue d’accompagnement des jeunes ultramarins (avec + 4,5 % de jeunes accueillis et accompagnés entre 2022 et 2023), [il y a une] nécessité de maintenir a minima la capacité d’actions existante des missions locales ».

2.   Mettre en œuvre des GPEC territoriales orientées vers les métiers d’avenir, inclusives et adaptées aux territoires ultramarins

a.   Orienter l’insertion professionnelle vers les métiers d’avenir par la mise en œuvre de GPEC territoriales

Pour recruter, les employeurs ont besoin d’anticiper les opportunités économiques. Or, les acteurs auditionnés ont assuré qu’ils manquaient d’orientations claires pour mieux prévoir leurs besoins de recrutement.

Ainsi, afin d’adopter une vision de long terme, une réflexion prospective doit être menée pour anticiper les métiers en tension, les métiers d’avenir, ainsi que les besoins de formation de chaque territoire en fonction de leurs besoins propres. Par exemple, pour les collectivités concernées par un vieillissement accéléré des actifs, les métiers liés à la santé, au soin et à l’assistance à la personne devront être identifiés comme étant particulièrement en tension à moyen terme.

Outre les métiers du soin relatifs à la « silver économie », les Outre-mer doivent porter une attention particulière sur « les métiers de l’environnement, de la mer, du tourisme, de l’agriculture, du bâtiment et des travaux publics, ainsi que dans une moindre mesure, les activités industrielles, le transport et les services aux entreprises » estime la délégation Outre-mer du CESE.

Dans ce cadre, la délégation considère que le lien branche-territoire doit être renforcé : « les OPérateurs de Compétences (OPCO) doivent mieux s’inscrire dans une démarche de Gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) territoriale, par secteur d’activité ». Ainsi, les dispositifs de formation professionnelle et d’insertion doivent être davantage centrés sur les filières, en lien avec les besoins des employeurs locaux.

À Saint-Barthélemy, une GPEC est en cours de mise en place au niveau territorial pour mieux comprendre et anticiper ces problématiques : « cette initiative vise à dresser un état des lieux précis des métiers en tension et à identifier les besoins futurs en main d’œuvre et en compétences. Les résultats de cette analyse, attendus pour octobre 2024, permettront à la Collectivité et aux acteurs économiques d’adapter leurs stratégies de recrutement et de formation, afin de mieux répondre aux défis de développement de l’île » explique la CEM.

Les formations proposées localement ne répondent pas toujours aux besoins du marché. Beaucoup de jeunes sont orientés vers des filières généralistes, tandis que les secteurs en demande de main-d’œuvre qualifiée (BTP, numérique, santé) manquent de personnel. Cela entraîne un décalage entre les aspirations des jeunes et les opportunités économiques disponibles sur le territoire. Les jeunes se retrouvent ainsi souvent dans des filières sans débouchés concrets ou ne répondant pas aux attentes des employeurs.

Les formations proposées doivent donc être adaptées aux besoins des territoires et aux spécificités locales. Par exemple, les îles Wallis et Futuna font face à une pénurie de main d’œuvre qualifiée pour certaines fonctions (architecte, maître d’œuvre, etc.) et certains métiers critiques, « comme le pilote qui guide à quai le navire qui ravitaille Wallis et Futuna toutes les 3 semaines », souligne la CCIMA.

« Les GPEC territoriales doivent donc être élaborées en lien avec les syndicats patronaux et salariés, interprofessionnels et surtout les syndicats métiers (boulangerie, mécanique, etc.) sous la direction des Directions de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (DEETS) locales » estime le CESE.

Par ailleurs, il apparaît nécessaire d’adopter une approche globale de l’insertion des jeunes ultramarins, depuis la scolarisation jusqu’à l’insertion professionnelle et sociale, en s’intéressant à leur accès à l’enseignement, mais aussi à leurs conditions d’insertion sur le marché du travail et dans la société, en tenant compte des facteurs annexes (logement, mobilité, garde d’enfant, etc.).

En ce sens, l’avis de la délégation aux Outre-mer du CESE intitulé « Le défi de l’insertion professionnelle des jeunes ultramarins » ([43]) appelait notamment à améliorer les conditions de scolarisation des enfants ultramarins à partir de deux ans, pour leur faciliter la maîtrise du français et mieux lutter contre l’illettrisme et le décrochage scolaire en Outre-mer.

b.   Adapter les GPEC territoriales aux publics les plus éloignés de l’emploi

Les GPEC territoriales doivent particulièrement tenir compte des publics les plus éloignés de l’emploi.

S’agissant des jeunes, un suivi ciblé et individualisé doit être effectué sur la période allant de la fin de scolarité à l’insertion professionnelle. Les leviers suivants pourraient être activés pour favoriser leur insertion professionnelle :

– consolider l’accès à la formation professionnelle en investissant dans l’action de formation en situation de travail (AFEST), en développant l’accès aux formations 100 % à distance (FOAD), ou en s’appuyant sur des partenariats ;

– renforcer l’entrepreneuriat local, en incitant les demandeurs d’emploi, notamment les jeunes, à créer leur entreprise adaptée aux réalités locales via des aides existantes (financières, techniques, formation en gestion), ou en soutenant des projets d’entrepreneuriat collectif, comme des coopératives ;

– développer des programmes d’accompagnement personnalisés (mentorat, accompagnement psycho-social) par France Travail, les missions locales, les écoles de la deuxième chance (E2C) ;

– faciliter des partenariats avec les entreprises locales et nationales ;

– aider à la mobilité professionnelle et promouvoir des opportunités d’emploi à distance par le développement du numérique.

S’agissant des séniors (+ de 50 ans), catégorie d’âge la moins concernée par le chômage en Outre-mer, le CESE note un manque de disponibilité d’études prospectives et de statistiques publiques (Dares, Insee, Deets) détaillées sur l’emploi et le chômage des séniors en Outre-mer : « ce manque de visibilité nuit à la prise en compte des réalités sociales de ces territoires et conduit à un sous-dimensionnement des dispositifs de prévention, de formation et de lutte contre le chômage de longue durée ».

Dans les territoires concernés par un vieillissement accéléré de la population active, en particulier aux Antilles, mais également à Saint-Pierre-et-Miquelon, les dispositifs de formation et d’aide à l’embauche doivent également converger sur la population des séniors, afin d’éviter leur entrée en chômage de longue durée. Plusieurs leviers peuvent ainsi être activés pour encourager l’activité des séniors et valoriser leur expertise au sein des entreprises :

– développer la formation continue et les programmes de reconversion dans des secteurs en mutation pour accroître leur employabilité ;

 valoriser l’expérience des séniors en entreprise par le développement du mentorat ou de la transmission des savoirs ;

– mettre en place des dispositifs d’accompagnement personnalisés, tels que des bilans de compétences, pour aider les séniors à mieux s’intégrer ou à se reconvertir sur le marché de l’emploi.

S’agissant des mères de familles célibataires, il convient de consolider les dispositifs de soutien à la parentalité. Le RSMA accueille par exemple près de 30 % de femmes, avec des disparités entre les territoires ([44]).

En outre, certains régiments ont mis en place des dispositifs d’aides à l’insertion des mères célibataires. Le RSMA de Guadeloupe a par exemple initié des travaux pour construire une crèche de 60 berceaux afin de faciliter l’accueil de parents isolés. Celle-ci ne devrait toutefois être opérationnelle qu’en 2027. Par ailleurs, les régiments se rapprochent des bailleurs sociaux en vue de mettre en place des partenariats pour aider les volontaires parents à trouver des solutions de garde pour leurs enfants. En septembre 2024, ce programme n’est toutefois pas effectif. Enfin, « les actions de soutien à la parentalité menées notamment par les associations et les Caisses d’allocations familiales, doivent également être mises à disposition pour aider les familles car le support social est essentiel pour limiter les risques de rupture de parcours » assure le CESE.

c.   Développer l’offre de formation locale dans les métiers en tension et la mobilité professionnelle, tout en incitant au retour des forces vives

Une fois la GPEC territoriale déterminée, il s’agit de développer les organismes de formation au niveau local et de prévoir un accompagnement à la mobilité.

i.   Développer au niveau local l’offre de formation relative aux métiers d’avenir

Le recours à des dispositifs d’aides à la mobilité ne doit pas se substituer à la mise à disposition de formations sur les territoires. Il apparaît en effet nécessaire d’élargir l’offre de formations professionnelles localement, pour qu’elle réponde aux besoins de recrutement du territoire et qu’elle permette une poursuite d’étude complète du jeune sur le territoire. En effet, comme le souligne le CESE, « il convient d’éviter l’éloignement anticipé des élèves avant le baccalauréat et de proposer des enseignements professionnels polyvalents adaptés à plusieurs spécialités en poursuite d’études immédiatement après le bac ».

Ainsi, la carte des formations de chaque territoire devrait être revue régulièrement, afin d’orienter les jeunes vers les filières en adéquation avec le tissu économique du territoire, à savoir l’économie-gestion, l’ingénierie, le numérique, la santé et les métiers de la mer.

ii.   Développer la mobilité tout en incitant au retour des forces vives

Les dispositifs de continuité territoriale doivent être conçus comme une aide à la mobilité pour la formation et non comme une incitation à quitter le territoire. Développer l’aide à la mobilité dans le cadre de la formation professionnelle doit être vu comme une chance d’accéder à des opportunités d’emploi plus importantes que sur le territoire d’origine.

Or, la mobilité repose sur le volontariat et ne peut être imposée. Ainsi, certains territoires émettent des réticences à actionner le levier de la mobilité. À Mayotte par exemple, une convention a été conclue entre Ladom et France Travail pour prévoir la mobilité de 120 mahorais, mais les objectifs n’ont pas été atteints. De surcroît, la perception de la mobilité est souvent plus négative lorsqu’il s’agit d’envisager un départ vers l’Hexagone que lorsqu’il s’agit d’une mobilité inter‑DROM. Enfin, lorsqu’ils sont confrontés à une situation de déclin démographique, les territoires ne sont pas incités à favoriser le départ d’actifs, car ils risquent de perdre une main d’œuvre précieuse à leur développement.

Deux axes de solution apparaissent dès lors envisageables :

– Favoriser l’insertion professionnelle inter-DROM, voire au sein d’un même bassin géographique.

Ladom estime en ce sens qu’il manque une réflexion entre les territoires. Par exemple, un centre de formation pourrait profiter aux deux îles de Guadeloupe et de Martinique, étant géographiquement proches. La mobilité en formation possible dans l’Hexagone pourrait être également ouverte aux autres territoires ultramarins, par exemple de Guyane vers la Martinique ou la Guadeloupe notamment.

De même, il pourrait être pertinent de développer l’insertion, voire l’apprentissage transfrontalier, au sein de bassins géographiques proches. En ce sens, à La Réunion, des missions de coopération avec les voisins de l’océan Indien, notamment avec l’Île maurice ou l’Inde, permettrait de mutualiser les plateaux de formation. Toutefois, le directeur régional de La Réunion déplore une complexité administrative qui empêche de faire appel à des formations au sein de l’océan Indien parce qu’elles ne répondent pas à des critères prédéfinis, concernant par exemple le numéro SIRET.

– Favoriser le retour des forces vives.

Comme devrait le prévoit le « Passeport pour le Retour », des dispositifs d’aide au retour doivent être proposés tels que : une aide à la recherche de stage, à l’obtention d’un contrat d’apprentissage en entreprise ou d’un premier emploi ; une prime à l’installation ou au retour pour les étudiants, ou encore une plateforme d’information et d’orientation pour les étudiants qui souhaitent revenir poursuivre leurs études sur leur territoire d’origine.

d.   Poursuivre la coordination des acteurs de l’insertion professionnelle

Une meilleure coordination des acteurs de l’insertion et de la formation (France Travail, RSMA, Ladom, missions locales, associations d’insertion, centres de formation d’apprentis, collectivités territoriales, chambres consulaires, fédérations professionnelles, etc.) est nécessaire pour développer des synergies au profit de l’accompagnement et de l’insertion professionnelle.

Une collaboration renforcée entre ces acteurs est cruciale pour faciliter le retour à l’emploi des populations ultramarines qui en sont éloignées, ainsi que pour les accompagner efficacement vers des opportunités professionnelles adaptées.

Il convient également d’assurer un suivi des parcours et un accompagnement renforcé à la sortie des dispositifs d’insertion, afin d’éviter le passage d’un dispositif à l’autre (SMA, garantie jeune, apprentissage…).

 


   EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du mercredi 30 octobre 2024, la commission a examiné, sur le rapport de M. Philippe Naillet, les crédits de la mission « Outremer ».

M. Pascal Lecamp (Dem). Chers collègues, je me substitue en tant que vice-président, à la présidente, qui accuse un léger retard. Nous entamons l’examen du dernier de nos dix avis sur la seconde partie du projet de loi de finances pour 2025, en nous concentrant sur celui dédié aux outre-mer, pour lequel notre commission a nommé M. Philippe Naillet rapporteur pour avis.

Nos compatriotes ultramarins résident dans des territoires riches en ressources, mais dont l’économie s’avère souvent plus vulnérable, notamment en raison des contraintes liées à l’éloignement ou à l’insularité. Nous nous efforcerons d’être attentifs à leurs attentes, qui sont considérables, et de prendre en compte leurs besoins urgents, particulièrement en ce qui concerne les problématiques du coût de la vie et de l’accès à l’eau ou aux services publics.

Dans ce contexte, la présentation pour cette mission de crédits de paiement en diminution de 9 % en crédits de paiement, passant à plus de 2,80 à 2,55 milliards d’euros, soulève des interrogations. Notre rapporteur pour avis pourra nous apporter des éclaircissements à ce sujet.

Je rappelle que cet avis englobe, au sein de la mission outre-mer, les programmes 138 Emploi outre-mer et 123 Conditions de vie outre-mer. Nous avons accepté, comme pour les autres missions, le dépôt d’amendements traitant de divers sujets ultramarins, à condition qu’ils visent à augmenter ou à diminuer les crédits de l’un de ces programmes.

Notre commission est saisie de 57 amendements dans le cadre de cet avis. Nous procéderons ensuite au vote sur l’ensemble des crédits examinés dans le cadre de la mission outre-mer.

Pour mémoire, cette mission devrait être examinée en séance publique le mercredi 13 novembre prochain, l’après-midi et le soir.

Je donne maintenant la parole à notre rapporteur pour avis afin d’entamer la discussion générale selon les modalités habituelles.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. J’ai l’honneur de vous présenter, au nom de la commission, un rapport pour avis sur les crédits de la mission outre-mer pour 2025. La rédaction de ce rapport revêt une importance particulière dans le contexte actuel, marqué notamment par les manifestations liées à la vie chère en Martinique, un problème persistant vécu comme une injustice par les ultramarins. Je pense également à la Nouvelle-Calédonie, confrontée à une crise sans précédent dont les répercussions affectent principalement ses habitants, avec un PIB par habitant revenu à son niveau de 2003 et d’importantes destructions économiques et d’équipements publics.

Force est de constater que la baisse des crédits de cette mission budgétaire s’avère brutale. Le projet de loi de finances (PLF) 2025 prévoit une diminution de 13 % en autorisations d’engagement (- 398 millions d’euros) et de 9 % en crédits de paiement (- 250 millions d’euros). Cette réduction drastique serait déjà alarmante pour n’importe quelle mission, mais s’agissant des outre-mer, on peut parler de double peine. Rappelons que ces territoires souffrent d’indicateurs socio-économiques nettement dégradés par rapport à l’Hexagone : chômage, notamment des jeunes, pauvreté, défaillances économiques, inflation, illettrisme et illectronisme.

Ces coupes budgétaires affectent la quasi-totalité des actions de la mission, dont la structure demeure inchangée avec deux programmes : le 138, Emploi outre-mer et le 123, Conditions de vie outre-mer. L’essentiel des réductions concerne le programme 123, avec une chute de 34,14 % des crédits de paiement, passant de 919 à 605 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale (LFI) 2024. Cette baisse est inacceptable, car elle touche directement le quotidien des ultramarins : logement, aménagement du territoire, collectivités territoriales, continuité territoriale, secteur sanitaire et social, culture, jeunesse, entre autres.

Quant à l’augmentation des crédits du programme 138, elle s’avère trompeuse. Sur ses quatre actions, seule l’action 1, Soutien aux entreprises, voit ses crédits augmenter de 103 millions d’euros (+ 6 %). Les financements des actions 2, Aide à l’insertion et à la qualification, et 4, Financement de l’économie, sont revus à la baisse, avec une diminution atteignant plus de 71 % en autorisations d’engagement (AE) et crédits de paiement (CP) pour cette dernière. L’augmentation de l’action 1 correspond aux prévisions du coût des exonérations de charges sociales établies par l’Urssaf pour 2025, minorées des économies attendues d’une refonte du dispositif d’exonérations sociales.

Une remarque méthodologique s’impose : la mission outre-mer ne représente que 14 % des autorisations d’engagement et 11 % des crédits de paiement consacrés par l’État aux outre-mer. Une réflexion sur la refonte de la maquette budgétaire pourrait être engagée pour 2025 afin d’éviter un émiettement nuisant à la lisibilité des politiques publiques menées en outre-mer.

En tant que rapporteur, je défendrai des amendements visant à revenir sur ces coupes budgétaires injustifiées pour les outre-mer. Ces économies témoignent d’une vision à court terme. Les conséquences sociales, économiques et humaines nous coûteront bien plus cher que les maigres économies envisagées. C’est pourquoi j’ai émis un avis défavorable à l’adoption des crédits de la mission outre-mer tels qu’ils nous sont présentés.

J’aborde à présent la question de l’insertion professionnelle dans les territoires ultramarins. Force est de constater que naître en outre-mer constitue encore un handicap dans les parcours professionnels. Le taux de chômage y oscille entre 12 et 34 %, c’est-à-dire un niveau nettement supérieur à celui de l’Hexagone. Les populations vulnérables – jeunes, femmes et seniors – sont particulièrement touchées. Le halo autour du chômage y est 2,5 à 5 fois plus présent, complexifiant davantage l’insertion professionnelle.

Des écarts considérables persistent en termes de niveau scolaire, d’accès à la formation et de maîtrise du numérique, facteurs déterminants pour l’insertion. À La Réunion, en 2019, 18 % des 18-24 ans quittaient prématurément le système scolaire, contre 8 % dans l’Hexagone. Plus globalement, un quart des jeunes ultramarins ne sont ni en études, ni en formation, ni en emploi.

L’insertion professionnelle des jeunes représente un enjeu majeur des politiques publiques, d’autant qu’ils constituent près de 30 % de la population ultramarine. Le sous-financement de la continuité territoriale et la réduction des crédits alloués au service militaire adapté envoient des signaux négatifs.

Pour les séniors, le taux de chômage atteint près de 37 % en Guadeloupe et en Martinique. Le vieillissement de la population devient préoccupant dans certaines collectivités, comme à Saint-Pierre-et-Miquelon ou à Wallis-et-Futuna.

Les femmes ultramarines sont également plus exposées aux difficultés d’insertion, représentant entre 58 et 66 % des inscrits à France Travail, contre 51 % dans l’Hexagone.

À ces disparités s’ajoutent des inégalités flagrantes entre l’Hexagone et les outre-mer en termes de mobilité géographique et de logement, aggravant les difficultés socio-économiques. Au nom du pacte républicain et du principe d’égalité, la France ne peut tolérer une insertion professionnelle à deux vitesses.

Nos territoires ultramarins souffrent d’un paradoxe persistant, conjuguant des taux de chômage élevés et des difficultés de recrutement dans certains secteurs d’activité. Plusieurs pistes méritent d’être explorées : poursuivre les investissements dans l’éducation et la formation, développer des gestions prévisionnelles des emplois et des compétences (GPEC) territorialisées, développer des formations locales répondant aux besoins de recrutement, faciliter le retour de forces vives et la mobilité, notamment en inter- départements et régions d’outre-mer (Drom) et au sein des bassins géographiques proches, préserver et renforcer les dispositifs efficaces comme les missions locales et le service militaire adapté, et rétablir certains dispositifs d’aide à l’insertion injustement supprimés en outre-mer alors qu’ils perdurent en Hexagone.

Une mobilisation coordonnée de tous les acteurs – État, entreprises, collectivités territoriales, missions locales, France Travail, associations, centres de formation – favorisera l’insertion professionnelle et limitera les décrochages. Ces axes – formation professionnelle, aide à l’emploi, soutien à la création d’entreprises, apprentissage, aide au retour, coordination renforcée – devraient par conséquent être vigoureusement soutenus dans le PLF 2025.

Une réflexion prospective s’impose. Si aligner la formation professionnelle sur les besoins de recrutement est nécessaire, cela ne peut constituer l’unique ambition du système, qui doit garantir une réelle égalité des chances. Chaque ultramarin doit pouvoir bénéficier des mêmes opportunités qu’un compatriote de l’Hexagone.

Je vous remercie de votre attention et me réjouis de poursuivre nos échanges sur cette mission.

M. Pascal Lecamp (Dem). Nous accueillons notre présidente et passons aux orateurs de groupe

M. Julien Gabarron (RN). Je souhaite associer à mon intervention mon collègue Joseph Rivière, député de La Réunion, retenu dans sa circonscription. Les territoires d’outre-mer se trouvent à un carrefour de leur existence. Paris perçoit ces territoires à travers le prisme des manifestations, des scènes de guérilla urbaine, des coups de machette dans la rue ou encore du vote pour le Rassemblement national. La capitale considère l’outre-mer comme quantité négligeable, sauf lors des Jeux olympiques où ces territoires rapportent des médailles d’or ou pendant la Coupe du monde de football où les jeunes ultramarins ramènent la coupe à la maison.

Pourtant, les territoires d’outre-mer constituent une seule et même entité juridique, administrative et, j’oserais dire, géographique. Les retraités ultramarins sont les plus pauvres de France après ceux de nos banlieues. Les salariés sont les plus démunis après ceux de nos campagnes. Nos entreprises, agriculteurs, professions libérales, artisans et PME n’ont aucun accès au marché européen et se trouvent exsangues. L’Insee a déjà publié ces chiffres, que je vous invite à consulter.

Les outre-mer sont le creuset de la biodiversité française et pourtant, leurs enfants souffrent de la faim. Charles Aznavour pensait que la misère serait moins pénible au soleil, or les outre-mer semblent manquer de tout. Face aux défis économiques, notamment l’impérieuse nécessité de créer des activités génératrices d’emplois, condition sine qua non de l’équilibre du système social et de l’apaisement de la société, nous, au Rassemblement national, affirmons qu’amputer le budget des outre-mer constitue un suicide collectif.

Ce n’est pas parce que l’outre-mer est éloigné que la crise multifactorielle qui s’y déroule n’atteindra pas la métropole. Et lorsque cela se produira, il sera trop tard. La Nouvelle-Calédonie a brûlé, sans que personne ne réagisse. Mayotte brûle tous les jours et personne n’en parle. La Martinique brûle et nous regardons ailleurs. Aujourd’hui, la Réunion fait figure de bon élève, mais l’inquiétude y est grande et nous devons rester attentifs à cette rivière qui dort.

Plus que jamais, nous devons maintenir et développer des mesures fiscales qui permettront de réduire le coût du travail et de l’énergie, relançant ainsi l’activité économique par l’emploi et la consommation. Les outre-mer représentent le meilleur débouché pour nos entreprises nationales et locales. Ils ont déjà contribué au redressement de la nation. Désormais, l’outre-mer ne doit plus être synonyme de restrictions budgétaires.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Je remercie chaleureusement Pascal Lecamp, notre vice-président, qui a assuré avec brio le début de la présidence de cette séance. Je vous prie d’excuser mon retard, dû à une réunion impromptue ce matin avec le ministre de l’industrie, concernant plusieurs dossiers urgents. Notre entretien s’est prolongé au-delà du temps initialement prévu.

Nous reprenons à présent nos discussions sur le sujet primordial des budgets pour les outre-mer.

M. Jean-Luc Fugit (EPR). Les crédits alloués à la mission outre-mer accusent une baisse de 250 millions d’euros en crédits de paiement, après une hausse notable dans la loi de finances initiale de 2024 par rapport à 2023. Cette diminution s’explique principalement par la baisse d’environ un tiers des crédits du programme « conditions de vie en outre-mer », notamment une baisse de 76 % (132 millions d’euros) pour la mission d’aménagement du territoire.

Cette réduction entraînera un allongement de la durée des contrats de convergence et de transformation, passant de quatre à six ans, ce qui réduira mécaniquement leur nombre. L’action « collectivités territoriales » subit également une forte baisse de 126 millions d’euros, limitant le nombre de collectivités pouvant bénéficier des aides dans le cadre des contrats de redressement en outre-mer (Corom).

Ces choix peuvent surprendre au vu de la situation politique et économique dans de nombreux territoires d’outre-mer, d’autant plus que les motifs de ces baisses drastiques ne sont pas explicités dans les documents budgétaires.

Le programme Emploi outre-mer présente une situation plus favorable, avec une augmentation de 64 millions d’euros en crédits de paiement, pour un total de 1,95 milliard d’euros. Ce budget finance essentiellement la compensation aux organismes sociaux des exonérations de cotisations sociales patronales spécifiques à l’outre-mer, renforcées suite à la suppression du crédit d’impôt compétitivité et emploi (CICE). L’assiette des exonérations applicables s’élargit avec l’inclusion de la contribution au fonds national d’aide au logement (Fnal), de la contribution de solidarité pour l’autonomie (CSA) et de la contribution AT/MP. Ainsi, on atteint un niveau de zéro cotisation sociale patronale au niveau du Smic, modulé ensuite selon les trois régimes d’exonération définis pour l’outre-mer.

Concernant les amendements présentés, plusieurs traitent des coûts d’approvisionnement en outre-mer, élevés en raison des frais de transport maritime, de l’octroi de mer et des diverses taxes. J’ai proposé un amendement, adopté sur la mission agriculture, visant à abonder de 8 millions d’euros le régime spécifique d’approvisionnement (RSA) pour prendre en compte les surcoûts de transport de nourriture destinée aux animaux d’élevage. Le RSA présente l’avantage de favoriser le développement de l’agriculture locale et l’autonomie alimentaire des outre-mer.

Je m’interroge cependant sur le risque inflationniste des amendements visant à compenser les frais d’approche, constitués en grande partie de taxes telles que l’octroi de mer. Notre groupe sera en revanche favorable aux amendements traitant de la gestion des sargasses et du plan chlordécone.

Nous regrettons vivement de n’avoir pas eu accès aux amendements du rapporteur avant-hier soir.

En conclusion, en raison du manque d’informations concernant les baisses de crédits décidées dans le document budgétaire sur le programme « conditions de vie en outre-mer », notre groupe s’abstiendra lors du vote des crédits de cette mission.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Je propose que M. le rapporteur intervienne à l’issue de l’ensemble des prises de parole des groupes et avant les questions individuelles, sauf si des interrogations spécifiques nécessitent une réponse immédiate. Bien entendu, le rapporteur conserve toute latitude pour s’exprimer selon ses préférences.

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Nous sommes aujourd’hui au 59e jour de mobilisation en Martinique contre la vie chère, une rébellion générale déclenchée par des décennies de brutalité sociale et revendiquant des conditions de vie dignes. Les prix de l’alimentation en Martinique sont en moyenne 40 % plus élevés que dans l’Hexagone, et à La Réunion, mon île natale, l’écart atteint 37 %. Pourtant, les salaires n’y sont pas supérieurs. Comment peut-on envisager une vie décente dans ces conditions ?

En 2009 déjà, une grève générale d’ampleur contre la vie chère avait secoué la Martinique. Quinze ans plus tard, la situation n’a pas évolué. Les inégalités de traitement et les disparités entre la France hexagonale et les territoires d’outre-mer persistent. L’indifférence et l’oligopole de la grande distribution doivent cesser. Face à ces mobilisations légitimes en Martinique, le gouvernement a choisi la répression : envoi de CRS, instauration d’un couvre-feu. Ces événements démontrent que la promesse républicaine d’égalité entre tous les citoyens se heurte à une gestion coloniale de l’outre-mer par les gouvernements successifs.

Concernant le budget, nous constatons une baisse de près de 250 millions d’euros. Le choix du Gouvernement est limpide, c’est-à-dire maintenir, voire augmenter les dispositifs de défiscalisation pour les entreprises via des mécanismes d’exonération de cotisations sociales, tout en réduisant drastiquement l’ensemble des dispositifs dédiés à l’amélioration de la vie quotidienne de nos concitoyens ultramarins. Cette orientation est adoptée alors même que nos compatriotes d’outre-mer s’élèvent contre une politique destructrice, que la grande pauvreté y est cinq à quinze fois plus élevée que dans l’Hexagone et que la situation n’a jamais été aussi explosive dans tous les territoires ultramarins.

Ce budget traduit le triptyque bien connu en outre-mer : indifférence, relégation, répression. Cette indifférence n’est pas l’apanage de ce gouvernement. Il la partage aujourd’hui avec sa nouvelle caution raciste et sécuritaire du Rassemblement national, qui n’a déposé aucun amendement lors de cette commission.

Notre groupe, LFI-NFP, propose des amendements de justice sociale et d’égalité républicaine. Nous demandons un plan global d’accès à l’eau, une prime contre la vie chère pour les bénéficiaires des minima sociaux, un plan d’urgence pour le logement, le développement de la voie ferrée, des aides à l’association des outre-mer, un plan de reconstruction pour la Nouvelle-Calédonie, entre autres mesures.

Collègues de la minorité présidentielle, la promesse républicaine est synonyme d’égalité. Or, votre budget lui tourne le dos. Nous continuerons de le combattre.

M. Elie Califer (SOC).  Chers collègues, le budget de la mission outre-mer subit une diminution considérable, d’une ampleur sans précédent. Cette réduction s’élève à environ 300 millions d’euros en crédits de paiement et 400 millions d’euros en autorisations d’engagement. Par ces coupes budgétaires sévères, le gouvernement semble vouloir faire peser de façon disproportionnée son équilibre budgétaire et fiscal sur les territoires ultramarins, alors même que ces derniers font face à de nombreuses difficultés, inconnues en métropole. Pourtant, les outre-mer ne sont pas une sous France, ils sont sa grandeur en lui permettant d’être ce pays présent sur l’ensemble des océans.

Il est regrettable de constater qu’aux problèmes majeurs que nous affrontons, l’État répond en réduisant encore nos moyens, bien que ceux alloués jusqu’à présent se soient avérés insuffisants pour résoudre nos difficultés. Dans un contexte où le coût de la vie pèse lourdement sur les citoyens d’outre-mer, qui peinent à vivre dignement, et alors que la Guadeloupe et la Martinique connaissent des tensions sociales depuis plusieurs semaines, les décisions actuelles du gouvernement apparaissent irresponsables et provocatrices, comme l’a souligné M. le rapporteur.

Le groupe Socialistes et apparentés, que je représente, dénonce ces réductions drastiques qui compromettent l’ensemble des politiques publiques sociales spécifiques aux outre-mer. L’action 2 du programme 138 concernant l’aide à l’insertion et à la qualification professionnelle, subit une baisse alarmante de 6 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 15 millions en crédits de paiement. Cela intervient dans un contexte économique marqué par un taux de chômage nettement supérieur à la moyenne nationale, particulièrement chez les jeunes de 15 à 24 ans. En Guadeloupe, par exemple, ce taux atteint 40 %.

De plus, les crédits alloués au programme « conditions de vie » connaissent une réduction démesurée de 470 millions en autorisations d’engagement. Ce programme vise à améliorer les conditions de vie des habitants ultramarins, notamment en développant les infrastructures et les services nécessaires pour atteindre des niveaux comparables à ceux de la France hexagonale. Force est de constater que le gouvernement a délibérément choisi d’accentuer les inégalités entre nos territoires.

Ajoutons que le dernier rapport de la Cour des comptes sur la mission outre-mer révèle que les crédits budgétaires consacrés aux outre-mer ne représentent en 2023 que moins de 4 % du budget national. Ce rapport indique également que l’État n’a pas utilisé l’intégralité du budget alloué aux outre-mer, malgré nos besoins pressants.

Ce budget en régression historique, qui ne saurait répondre aux impératifs des territoires ultramarins s’il demeure en l’état, ne devrait pas recevoir notre soutien. Je vous remercie.

M. Jean-Luc Bourgeaux (DR). Les défis spécifiques des outre-mer nécessitent une amélioration des performances des dispositifs existants. Le rapport souligne des indicateurs de l’emploi alarmants dans ces territoires, où le taux de chômage excède fréquemment 20 %. Les jeunes, les femmes et les seniors sont les plus affectés. Près d’un quart des jeunes ultramarins se trouvent sans emploi, ni études, ni formation, soit une proportion plus que doublée par rapport à l’Hexagone.

Les territoires ultramarins éprouvent des difficultés à satisfaire les besoins de recrutement local dans des secteurs essentiels tels que le bâtiment, la santé et le tourisme. L’inadéquation entre l’offre et la demande s’explique par le manque de formations adaptées et de mobilité. Cette situation, aggravée par un coût de la vie élevé, une offre de logement souvent insuffisante et des problèmes de transport, nuit à l’attractivité du marché du travail ultramarin.

Bien que divers dispositifs aient été instaurés pour résoudre ces défis, la politique de soutien aux entreprises semble se chevaucher entre plusieurs organismes, comme France Active et Initiative Outre-mer, tous impliqués dans le microfinancement et l’accompagnement entrepreneurial. Cette configuration engendre des redondances et un risque de duplication des efforts, limitant ainsi l’efficacité et la portée des aides apportées.

Compte tenu de l’état de nos finances publiques, ne serait-il pas judicieux de mutualiser plusieurs opérateurs dédiés à l’emploi afin de réduire les doublons et d’optimiser les ressources ? Cette démarche permettrait d’allouer les fonds de manière plus efficiente pour mieux les utiliser dans cet objectif.

M. Pascal Lecamp (Dem). Je remercie le rapporteur pour sa présentation éclairante sur la situation préoccupante dans les territoires ultramarins. Les crédits de la mission outre-mer dans le PLF 2025 subissent une réduction inquiétante des moyens alloués à ces territoires, pourtant confrontés à des défis économiques et sociaux majeurs. La diminution des crédits dans les programmes dédiés aux conditions de vie et à l’aménagement du territoire menace d’affaiblir le soutien essentiel aux outre-mer, où les besoins en matière de développement et de service public demeurent particulièrement urgents. Ces ajustements budgétaires soulèvent des inquiétudes quant à leur impact sur les projets vitaux pour le quotidien des ultramarins.

Au-delà de l’aspect financier, cette réalité financière s’oppose à la situation de l’emploi dans ces territoires, minutieusement examinée dans le rapport. Les outre-mer se caractérisent par des taux de chômage nettement supérieurs à ceux de l’Hexagone, avec par exemple 12 % à la Martinique et 34 % à Mayotte. Paradoxalement, les employeurs rencontrent des difficultés de recrutement persistantes, de nombreux postes restant vacants faute de candidats adéquatement qualifiés. Ce constat met en lumière un déséquilibre alarmant entre les compétences disponibles localement et les besoins du marché du travail.

Le rapport préconise un renforcement des programmes de formation spécifiques aux besoins des territoires afin de mieux aligner les qualifications des jeunes avec les opportunités d’emploi disponibles. La récente réforme du lycée professionnel prévoit d’adapter la carte des formations aux besoins territoriaux pour favoriser l’insertion professionnelle des jeunes. Il convient de s’interroger sur la manière dont les collectivités ultramarines pourraient ajuster leur offre de formation pour étendre ce dispositif au-delà des seuls lycées professionnels.

En conclusion, relever les défis économiques et sociaux des outre-mer nécessite un soutien accru et une approche budgétaire leur accordant les moyens de faire face aux réalités locales et d’assurer une insertion professionnelle efficace.

M. Max Mathiasin (LIOT). Au cours de mes sept années de mandat, bientôt huit, j’ai constaté de nombreuses tergiversations concernant les outre-mer. Mes collègues députés ont abordé ce sujet parfois avec sincérité, souvent avec condescendance, mais toujours avec une certaine distance. Cette attitude rappelle l’expression « les danseuses de la République », utilisée par un Président et attribuée à un écrivain.

Je m’étais bercé d’illusions, pensant que dans cette période tumultueuse, les outre-mer ne seraient pas une fois de plus sacrifiés. Nos territoires - la Guadeloupe, la Martinique, la Réunion, la Nouvelle-Calédonie - ont tant contribué à l’histoire de la France, notamment à travers le bagne au XIXe siècle. Les outre-mer, ce sont des déportés, des réprouvés, des esclaves qui ont participé à l’accumulation du capital, non seulement en France, mais dans tout l’Occident.

Aujourd’hui, on nous retire près de 250 millions d’euros, soit plus de 10 % du budget destiné à la formation des jeunes et à la construction de logements. Rappelons que la part de logements indignes atteint 10 % dans les outre-mer, contre 4 % dans l’Hexagone. Ce budget devrait permettre à nos jeunes d’accéder à la formation et à l’emploi, et nous aider à structurer nos économies, une tâche qui n’a pas abouti depuis 1946.

J’ai parfois eu l’impression de quémander, mais aujourd’hui, je ne demande plus rien. J’en appelle à la conscience de nos collègues. Il est temps que nous cessions de répéter les mêmes constats : des salaires plus bas, un taux de chômage trois fois plus élevé, le plan chlordécone. Nous le disons depuis près d’une décennie, voire plus. Ces problématiques étaient peut-être déjà évoquées du temps d’Aimé Césaire et d’autres illustres personnalités comme René-Boisneuf et Légitimus, qui furent parmi les premiers parlementaires ultramarins, notamment guadeloupéens, dans cet hémicycle.

C’est pourquoi je vous demande de faire preuve de bon sens, de justice et de liberté dans votre vote, au nom de l’égalité.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. M. Mathiasin nous a rappelé que notre action doit être guidée non par la condescendance, mais par l’efficacité, la justice et, naturellement, les valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité.

Mme Karine Lebon (GDR). Je remercie le rapporteur pour sa présentation sans concession de ce budget. Nous partageons le constat que le gouvernement ne prend pas la mesure de la détresse de nos compatriotes ultramarins. Pour ce budget, les moyens alloués sont manifestement insuffisants. Au-delà d’une baisse record de 250 millions d’euros consacrée aux outre-mer et de l’absence de prise en compte du taux d’inflation, de nombreuses mesures d’économie aggraveront la situation des ultramarins. La diminution des dotations aux collectivités territoriales, l’augmentation de la taxe sur les billets d’avion et le refus d’investir massivement dans la politique du logement constituent autant de régressions qui entravent de manière brutale le développement économique et social de nos territoires.

Le programme 123 Conditions de vie outre-mer subit la coupe budgétaire la plus violente, allant à l’encontre de la réalité sociale, du développement des territoires et de la vie quotidienne. Le gouvernement semble ignorer la situation actuelle en Martinique. La vie chère est un fléau qui gangrène nos territoires. La grande majorité des Français d’outre-mer souffrent quotidiennement du problème structurel de la cherté de la vie, auquel nous devons apporter des réponses urgentes, qui n’apparaissent pas dans ce budget.

Le logement en est une illustration criante. Il est impératif que la politique du logement social soit prise à bras-le-corps et que des moyens conséquents soient alloués. Je rappelle que sous la précédente législature, ma proposition de commission d’enquête sur la crise du logement social en outre-mer avait été adoptée à l’unanimité, sans être reprise au renouvellement de notre Assemblée. Je le déplore vivement. Avec 46 000 demandes en attente à La Réunion, la situation n’est plus tolérable.

Le plan Logement outre-mer 3, qui sera finalisé à la fin de l’année, doit proposer un cadre pluriannuel et des objectifs ambitieux. Nous serons vigilants quant à la bonne mise en œuvre de ce nouveau plan Logement outre-mer (Plom), les deux précédents ayant été particulièrement décevants et inefficaces.

De nombreux amendements seront examinés ce matin. Tous visent à améliorer la vie de nos compatriotes ultramarins et à octroyer les moyens suffisants pour une politique efficace et adaptée à nos territoires.

J’ai évoqué la Martinique, mais je ne saurais conclure cette intervention sans adresser mes pensées solidaires et fraternelles au peuple de Nouvelle-Calédonie-Kanaky. Prenons en considération celles et ceux qui souffrent, qui sont oubliés, pour qui la promesse républicaine d’égalité semble s’éloigner au vu de la baisse constatée.

Le groupe GDR, déplorant le manque d’ambition de ce budget et l’absence de réponse aux difficultés accrues que posent l’éloignement, l’insularité et les spécificités ultramarines, se prononcera contre ce budget.

M. Alexandre Allegret-Pilot (UDR).  Permettez-moi d’évoquer une expérience personnelle. Lorsque j’étudiais les mathématiques à l’université de Pointe-à-Pitre, des individus armés de Kalachnikov ont fait irruption dans une salle de cours adjacente à la mienne pour dérober les ordinateurs des étudiants, un événement malheureusement banal en Guadeloupe.

Auparavant, n’ayant connu que la métropole, j’ai découvert en m’installant en Guadeloupe une réalité choquante : une partie de la France confrontée à des problèmes dignes du tiers-monde. J’ai été témoin d’une immigration non maîtrisée, d’un pouvoir d’achat dérisoire, de conditions de logement déplorables, d’une insécurité alarmante, d’une omniprésence des narcotrafiquants, d’un chômage généralisé, d’un affaiblissement des modèles républicains et d’une désagrégation des cellules familiales. Pour la première fois, j’ai éprouvé un sentiment de honte envers mon pays.

Ces observations datent de 2010, et force est de constater que la situation n’a guère évolué. La baisse de 250 millions d’euros en crédits de paiement aura un impact considérable sur les conditions de vie de nos concitoyens ultramarins. Il convient de noter que, contrairement à ce qui a été avancé, nos collègues du Rassemblement national proposent une augmentation de 900 millions d’euros des crédits destinés notamment à l’amélioration des conditions de vie en outre-mer.

Certes, reproduire à l’identique le modèle métropolitain en outre-mer n’est peut-être pas la solution idéale, mais remettre en question la dignité des citoyens ultramarins est bien plus préjudiciable. Il ne s’agit pas de réduire la présence de l’État, mais au contraire de la renforcer dans ces territoires.

Ma question est la suivante : que pensez-vous de l’implantation d’agences et d’administrations françaises dans nos territoires d’outre-mer, ainsi que d’établissements scolaires, afin de favoriser la création d’emplois dans ces régions ?

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Avant de céder la parole à M. le rapporteur, je tiens à souligner l’excellence de votre rapport, que j’ai eu l’opportunité d’examiner. Je souhaite également exprimer ma gratitude envers l’ensemble des intervenants qui ont mis en lumière l’urgence de la situation écologique, sociale et économique en outre-mer, ainsi que l’importance capitale du budget qui y est consacré. Je remercie par ailleurs les élus ultramarins présents parmi nous, qui nous interpellent sur cette situation préoccupante.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je remercie Mme la présidente pour ses propos et souhaite saluer le travail remarquable de Mme Alicia Cusan, notre administratrice. Sa contribution à la qualité du rapport mérite d’être soulignée.

Je tiens à aborder brièvement quelques points, que nous approfondirons lors du débat sur les amendements. Premièrement, bien que je soutienne la création d’écoles dans les outre-mer, nous, ultramarins, aspirons avant tout à la considération. La dignité que vous avez évoquée passe par le respect et non par une présentation caricaturale des problèmes.

Deuxièmement, nous partageons tous le constat que la mission outre-mer est actuellement dans une situation catastrophique, comme l’ont souligné plusieurs d’entre vous concernant la Martinique, la Nouvelle-Calédonie, la Guadeloupe, Mayotte et Wallis-et-Futuna. Cette mission n’est pas acceptable en l’état. J’espère que nos discussions sur les amendements permettront de la porter à un niveau satisfaisant. Si tel n’était pas le cas, la logique voudrait que nous ne votions pas cette mission outre-mer, au vu de nos déclarations de ce matin.

Enfin, concernant la vie chère, sujet crucial évoqué par l’un d’entre vous, elle est perçue comme une véritable injustice par les ultramarins en raison de sa persistance. Il ne s’agit pas simplement de supprimer ou de déplacer la TVA, d’exonérer les produits de première nécessité ou de répartir différemment les charges fiscales. L’expérience montre que la suppression ou la diminution des taxes n’a d’effet que si les opérateurs économiques sont contraints de répercuter ces baisses sur le prix final. Il ne suffit pas de se féliciter d’avoir obtenu la suppression de la TVA sur certains produits ; il faut instaurer une obligation de répercussion, assortie de contrôles et de sanctions. C’est là que nous verrons si le gouvernement prend réellement à cœur la question du coût de la vie. Enfin, la transparence des marges sur les produits importés est également essentielle.

Pour résoudre durablement la question du coût de la vie, des solutions ponctuelles s’avèrent insuffisantes. Sans une approche globale, les baisses de TVA ou d’octroi de mer, ainsi que leurs suppressions, ne se répercuteront pas sur les prix et constitueront une perte sèche.

Concernant la formation et l’insertion, une véritable stratégie s’impose. Il convient d’adopter une gestion prévisionnelle et territorialisée des emplois et des compétences, en tenant compte des enjeux actuels et futurs. Les défis d’avenir pour nos territoires ultramarins englobent la préservation de la biodiversité, la production d’énergie propre, la souveraineté alimentaire par la production locale et l’aide à la personne face au vieillissement de la population. Une cohérence entre les différents opérateurs de formation s’avère nécessaire pour mettre en œuvre cette stratégie partagée, axée sur ces métiers d’avenir.

Le lien entre activité économique et emploi s’est révélé crucial lors de la commission d’enquête « vie chère » de 2023. Nous en avons conclu que la vie chère en outre-mer ne résulte pas uniquement des prix élevés, mais aussi de la faiblesse des revenus, liée au manque de revenus du travail. Les entreprises ont besoin de marchés, de trésorerie, mais également de personnel formé et compétent pour se développer.

Enfin, gardons-nous d’un enthousiasme excessif concernant l’augmentation des crédits de l’action 1 du programme 138 sur le soutien aux entreprises. Cette hausse correspond simplement à des prévisions d’augmentation des exonérations de charges.

Je propose maintenant que nous abordions le débat sur les amendements.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Je remercie les intervenants précédents et constate que des questions individuelles ont déjà été soulevées.

Mme Mereana Reid Arbelot (GDR). Mes chers collègues, ma circonscription se situe à 15 000 kilomètres de l’Hexagone et s’étend sur une superficie équivalente à celle de l’Europe continentale, comprenant 118 îles dont 76 sont habitées. Cette configuration engendre une double insularité que nous partageons avec d’autres territoires d’outre-mer. Pour rendre visite à nos proches ou permettre à nos enfants et étudiants de se rendre à l’université, voire même à l’école, nous ne disposons ni de RER, ni de train, ni de routes nationales. L’avion ne constitue donc pas un luxe, mais une nécessité absolue pour assurer la mobilité de chacun et contribuer au développement économique, social et culturel de nos territoires.

Ladom, l’agence étatique chargée de la politique de continuité territoriale, remplit précisément cette mission essentielle. Néanmoins, le gouvernement a pris la décision de réduire ses dotations de 18 millions d’euros dans le PLF. De plus, les taxes et les billets d’avion devraient subir une augmentation à la suite d’un amendement gouvernemental. Cette politique s’avère inacceptable. Elle fragilise et isole les territoires ultramarins.

Je souhaite donc poser la question suivante : quelle est votre évaluation de cette politique gouvernementale qui semble accentuer la marginalisation des territoires ultramarins ?

M. Boris Tavernier (EcoS). Les écarts de prix sur les produits alimentaires entre l’Hexagone et les départements ultramarins s’avèrent considérables : 42 % plus élevés en Guadeloupe, 40 % en Martinique, 39 % en Guyane, 37 % à La Réunion et 30 % à Mayotte. Se nourrir coûte donc nettement plus cher dans ces territoires que dans l’Hexagone.

Prenons l’exemple de la Martinique, où d’importantes manifestations contre la vie chère ont eu lieu. Les causes de cette situation sont identifiées : droits de mer, coûts d’importation, multiplication des intermédiaires, ainsi que la position ultra-dominante du groupe GBH, de la chaîne de transport à la distribution.

Ces différences tarifaires sur l’alimentation traduisent une forte inégalité, d’autant plus inacceptable que d’autres postes de dépenses courantes, comme le logement, sont également plus onéreux dans ces départements. De surcroît, la proportion de la population vivant sous le seuil de pauvreté y est plus importante.

Dans ce contexte, monsieur le rapporteur pour avis, estimez-vous que les moyens annoncés par le gouvernement permettent d’améliorer l’accès à l’alimentation dans les départements d’outre-mer ?

M. Robert Le Bourgeois (RN). La diminution des crédits alloués à l’ensemble de la mission est effectivement très regrettable. Lors de sa visite en Nouvelle-Calédonie en mai 2024, le Président de la République avait annoncé l’instauration de deux dispositifs d’aide d’urgence destinés aux entreprises et salariés, suite aux émeutes dont le coût a été évalué à plus de 2 milliards d’euros par la chambre de commerce locale. Ces aides se déclinent en deux volets : un fonds de solidarité pour les TPE-PME et une prise en charge à hauteur de 50 % du chômage partiel.

Au cours des échanges préparatoires à ce rapport, avez-vous pu vérifier que ces aides ont bien été distribuées et qu’elles ont produit les effets attendus ?

M. Romain Daubié (Dem). Je vous remercie, monsieur le rapporteur, pour votre rapport détaillé. J’aimerais que vous approfondissiez la question des fonds exceptionnels, qui constituent l’une des enveloppes en augmentation selon votre analyse. Pourriez-vous revenir plus précisément sur votre vision de leur répartition territoriale ainsi que sur leurs modalités de financement ? Je souhaiterais également que vous nous éclairiez sur les évolutions potentielles de ce dispositif.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Je cède maintenant la parole à M. le rapporteur, en l’absence d’autres questions ou interventions individuelles.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Concernant la continuité territoriale, je tiens à souligner son importance capitale. En effet, aucun citoyen ne peut rejoindre l’Hexagone à la nage depuis les territoires ultramarins. Un amendement visant à rétablir les crédits alloués à cette continuité territoriale sera soumis au vote, et j’espère sincèrement qu’il sera adopté.

Quant à la répartition des crédits, la situation est préoccupante pour les territoires ultramarins. Les chiffres alarmants laissent voir une diminution de 398 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 250 millions d’euros en crédits de paiement. La mission outre-mer s’articule autour de deux programmes que sont le 138 pour le soutien économique et le 123 pour les conditions de vie, ce dernier subissant la baisse la plus conséquente.

Le programme 123 inclut notamment le logement, un enjeu majeur dans nos territoires. À La Réunion, par exemple, nous recensons 46 000 demandes de logement en attente. Cette situation engendre des répercussions sur le tissu économique, affectant l’activité des entreprises du bâtiment.

Des réductions sont également constatées dans d’autres domaines : la continuité territoriale, l’aménagement du territoire, le fonds exceptionnel d’investissement, les collectivités territoriales, ainsi que les aides à l’accès aux financements bancaires.

Je tiens à attirer votre attention sur l’article 64 du PLF, qui prévoit un prélèvement de 2 % sur les recettes des collectivités. Pour La Réunion, cela représente une perte de 35 millions d’euros, dont 5 millions pour la seule ville de Saint-Denis. Ces collectivités jouent un rôle primordial dans nos territoires, assurant le renouvellement des équipements et représentant 75 % de l’activité dans certains secteurs, notamment le bâtiment et les travaux publics.

Ce budget n’est pas satisfaisant. Il est impératif de l’amender et de poursuivre le débat en séance plénière, conformément aux attentes de nos populations ultramarines.

En conclusion, je tiens à rappeler que nous, ultramarins, ne sommes pas responsables de la situation budgétaire actuelle. Nous n’avons pas choisi de nous priver annuellement de 60 milliards d’euros de recettes fiscales et de 75 milliards d’euros de recettes sociales. Par conséquent, nous attendons un minimum de solidarité, à savoir un retour au niveau budgétaire de 2024.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Je précise que pour ce sujet essentiel du budget des outre-mer, qui concerne le logement, la continuité territoriale, les collectivités locales et l’aménagement du territoire, nous prendrons le temps nécessaire. Ces territoires souffrent actuellement d’un manque criant de logements et d’emplois, ainsi que de la vie chère et de nombreuses autres problématiques.

Comme vous l’avez justement rappelé, nous examinerons les programmes 138 et 123, tout en gardant à l’esprit les répercussions dans le projet de loi de finances, notamment sa première partie concernant les collectivités locales, acteurs essentiels des outre-mer.

Nous allons maintenant procéder à l’examen des amendements. Nous commençons par l’article 42, avec votre amendement numéro 332, monsieur le rapporteur Naillet. Je vous invite à le présenter.

Amendement CE332 de M. Philippe Naillet

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je ne reviendrai pas en détail sur ce sujet déjà abordé. Cet amendement vise simplement à rétablir les crédits de l’action 2, Aide à l’insertion et à la qualification professionnelle, tel qu’ils ont été votés dans la loi de finances initiale de 2024.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Y a-t-il des interventions sur cet amendement ?

Mme Mélanie Thomin (SOC). En juin dernier, j’ai publié un rapport sur la défense nationale dans nos territoires. À cette occasion, j’ai auditionné le général responsable du développement du service militaire adapté (SMA) en France, particulièrement dans les territoires ultramarins. Je peux affirmer que ce dispositif revêt une importance capitale et joue un rôle structurant en offrant des opportunités d’insertion dans ces régions. Le régiment du service militaire adapté (RSMA) permet notamment l’apprentissage du permis de conduire, une mesure concrète qui s’avère particulièrement bénéfique pour l’insertion professionnelle des jeunes ultramarins.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. J’approuve entièrement les propos de Mme Thomin. C’est précisément la raison pour laquelle nous suggérons d’augmenter les crédits alloués à l’action 2, qui concerne la continuité territoriale et le RSMA. En effet, s’il existe un dispositif dont l’efficacité est avérée, c’est bien le SMA. Je partage votre opinion sur ce point.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Merci. Nous allons procéder au vote de l’amendement 332.

La commission adopte l’amendement.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous abordons à présent une discussion commune concernant les amendements 334 et 311. Monsieur le rapporteur, vous avez la parole pour présenter l’amendement 334.

Amendement CE334 de M. Philippe Naillet

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je tiens à souligner la réduction significative des crédits de l’action 4 Financement de l’économie du programme 138 Emploi outre-mer. Cette diminution s’élève à 71 % en autorisations d’engagement et à 75 % en crédits de paiement. Ces fonds apparaissent essentiels pour soutenir les PME ultramarines, qui constituent, avec les TPE, la majeure partie de notre tissu économique local.

De plus, dans le contexte actuel de crise liée au coût élevé de la vie en outre-mer, la réduction des crédits alloués à l’aide au fret suscite de vives inquiétudes. Cette aide joue pourtant un rôle clé dans la réduction des prix pour les consommateurs, comme le souligne le projet annuel de performance.

Au vu de ces éléments, nous demandons une reconduction des crédits ouverts en loi de finances initiale 2024 sur l’action 4 pour le budget 2025.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous abordons l’amendement 311 de Mme Bellay.

M. Elie Califer (SOC).  Défendu.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je partage pleinement l’objectif de cet amendement visant à augmenter les crédits de l’action 4 Financement de l’économie du programme 138, afin d’instaurer un mécanisme de compensation pour réduire les frais d’approche.

Néanmoins, je propose à M. Califer de retirer son amendement au profit de l’amendement CE 334 que j’ai déposé. Ce dernier rétablit l’intégralité des crédits de l’action 4 au niveau des crédits ouverts dans la loi de finances initiale, soit 24,9 millions d’euros, au lieu des 10 millions actuellement prévus.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Souhaitez-vous le maintenir ? Je m’adresse à M. Califer et au groupe Socialistes et apparentés.

M. Elie Califer (SOC).  Je propose de retirer cet amendement. Si notre commission, dans sa composition actuelle, adhère à votre orientation, Monsieur le rapporteur, nous pourrions envisager une démarche inverse. Nous sommes donc disposés à suivre votre recommandation.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous procéderons au vote sur l’amendement 334 déposé par M. Naillet dans le cadre de cette discussion commune. À présent que celle-ci ne concerne plus qu’un seul amendement.

La commission adopte l’amendement.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous abordons désormais une discussion commune portant sur les amendements 331, 227, 270 et 327. L’amendement n° 331 a été déposé par M. le rapporteur.

Amendement CE331 de M. Philippe Naillet

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je propose de rétablir les crédits de l’action 1 du programme 123 à leur niveau voté dans la loi de finances initiale pour 2024. En effet, le projet de loi de finances pour 2025 prévoit une baisse de 32 millions d’euros des crédits alloués au logement.

La question du logement est fondamentale, car nous traversons une véritable crise qui s’apparente à une bombe à retardement. Il est impossible d’envisager un projet de vie sans disposer d’un logement décent. De plus, la notion de parcours résidentiel n’existe plus sur nos territoires, ce qui témoigne de l’ampleur de cette crise.

C’est pourquoi je préconise de maintenir les crédits votés pour la loi de finances initiale 2024, afin de préserver les moyens nécessaires pour faire face à cette situation préoccupante.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. L’amendement présenté concerne un montant d’environ 32 millions d’euros.

Le deuxième amendement dans cette discussion commune porte le numéro 227 et a été déposé par Monsieur Ratenon.

Amendement CE227 de M. Jean-Hugues Ratenon

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Nous proposons de doubler la ligne budgétaire unique (LBU) dédiée aux logements dans les outre-mer. Cette problématique majeure du logement dans nos territoires ultramarins, notamment à La Réunion, a été largement évoquée aujourd’hui. Notre objectif est de mener une politique ambitieuse en termes de moyens, qui devra s’accompagner d’une mise en œuvre concrète par un renforcement de l’ingénierie dans les collectivités ultramarines.

Cet amendement vise à prélever 200 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement sur l’action de soutien aux entreprises du programme 138 Emploi outre-mer pour abonder l’action 1 Logement du programme 123 Conditions de vie outre-mer. Nous invitons le gouvernement à lever le gage.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Cet amendement vise à allouer 200 millions d’euros supplémentaires à la ligne budgétaire unique dédiée aux logements dans les outre-mer.

Nous examinons maintenant deux amendements identiques, le 270 et le 327. L’amendement 270 est proposé par M. Mathiasin.

Amendement CE270 de M. Max Mathiasin

M. Max Mathiasin (LIOT). Cet amendement a pour objet d’abonder de 10 millions d’euros les crédits alloués au logement, en particulier pour trois des six activités principales de la LBU : le logement social, l’amélioration de la sécurité du parc et l’accession sociale à la propriété.

Cependant, mon amendement est peut-être moins ambitieux que celui proposé par M. le rapporteur. Par conséquent, je retire mon amendement en faveur de celui-ci qui me semble plus pertinent. En tout cas, notre proposition était modeste, mais correspondait bien à la réalité et aux besoins actuels. Je retire donc mon amendement.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. L’amendement de M. Mathiasin ayant été retiré, nous examinerons à présent l’amendement 327, qui est identique au précédent. Nous entendrons ensuite l’avis de M. le rapporteur, puis procéderons aux interventions individuelles.

Amendement CE327 de M. Christian Baptiste

M. Elie Califer (SOC).  Je propose cet amendement au nom du groupe Socialistes, en collaboration avec M. Baptiste. La situation du logement ultramarin dépasse le stade de la crise et s’apparente à de l’incurie, voire du mépris. En effet, des baisses de budget sont envisagées en pleine pénurie de logements.

C’est pourquoi M. Baptiste suggère de revoir l’action 1 du programme 123 afin d’allouer davantage de moyens à nos opérateurs pour la construction de logements. Il convient de noter que, bien que l’on évoque souvent la LBU consommée, la réalité est que les opérateurs peinent à finaliser leurs plans de financement. Ainsi, malgré le fléchage de la LBU, les projets de logement ne se concrétisent pas sur le terrain.

Notre amendement vise à remédier à cette situation. Cependant, l’amendement de M. Naillet s’avère plus ambitieux. Dans un souci d’efficacité de notre mission, nous souhaiterions nous y associer. Cela nécessiterait que le gouvernement lève son gage, car il est impératif d’augmenter substantiellement les moyens alloués à cette mission.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Souhaitez-vous le maintenir ou le retirer ?

M. Elie Califer (SOC).  Nous soutenons cet amendement qui se révèle plus ambitieux que le nôtre et reflète avec justesse la gravité de la situation du logement en Guadeloupe. Nous adhérons pleinement à cette ambition et reconnaissons, monsieur le rapporteur, votre position stratégique pour faire progresser ce dossier.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Je vous remercie. Les amendements 270 et 327 ayant été retirés, nous abordons à présent la discussion commune des amendements 331 et 227. Ces derniers portent tous deux sur les crédits alloués au logement dans le cadre du programme relatif aux conditions de vie en outre-mer. Je propose que nous commencions par entendre M. le rapporteur, puis je donnerai la parole aux députés qui souhaitent s’exprimer sur ce sujet.

Amendement CE227 de M. Philippe Naillet

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je comprends les arguments avancés par Mme Nosbé et M. Ratenon. J’adhère pleinement à votre constat, madame Nosbé. Il est inacceptable que les financements alloués au logement dans les outre-mer soient aussi sévèrement réduits. Cette situation s’avère d’autant plus problématique que, comme nous l’avons tous souligné, les territoires ultramarins font face à de multiples défis : vie chère, taux de chômage élevé, et désormais une crise de l’offre de logements. Je fais particulièrement référence au logement social, caractérisé par un allongement des délais d’attente. Néanmoins, considérant l’amendement 331 qui propose de rétablir les crédits ouverts dans la loi de finances initiale pour 2024, je vous invite à retirer votre amendement.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Madame Nosbé, maintenez-vous ou retirez-vous cet amendement 227 ? La proposition s’entend à 200 millions d’euros quand celle de M. le rapporteur s’établit à 32 millions d’euros, mais qui permet par ailleurs de rétablir les crédits présents.

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Nous le maintenons.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Je vous remercie et nous écoutons les interventions individuelles.

Mme Louise Morel (Dem). Je souhaiterais obtenir des éclaircissements auprès de M. le rapporteur concernant les montants proposés dans les amendements. Nous avons bien saisi votre intention de revoir la proposition du gouvernement, mais les chiffres avancés varient : 31 millions d’euros supplémentaires dans les premiers amendements, précédés de 24 millions, puis de 6 millions d’euros. Ces amendements sont parfois en discussion commune avec ceux de nos collègues qui semblent partager vos préoccupations.

Ma question est la suivante : le total des amendements que vous proposez correspond-il exactement aux engagements pris l’année dernière, ou certains vont‑ils au-delà ou en deçà ? Il s’avère complexe de déterminer le montant précis, d’autant plus que des levées de gages interviennent parfois. Dans un souci de transparence des débats, je souhaiterais savoir si l’adoption de l’ensemble de vos amendements aboutirait in fine au même montant que l’an passé.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Je propose que nous terminions les interventions individuelles avant de vous donner la parole pour répondre à l’ensemble des questions, car je pense qu’il y en aura plusieurs.

M. Jean-Luc Fugit (EPR). Je souhaite obtenir des éclaircissements sur votre stratégie, monsieur le rapporteur. Concernant l’amendement 331 que vous proposez, nous regrettons de l’avoir découvert tardivement, ce qui complique la préparation et la clarté de nos débats. Néanmoins, nous estimons que cet amendement va dans la bonne direction, car il permet de rétablir les crédits ouverts dans la loi de finances initiale de 2024. Je tiens à vous informer que nous apporterons notre soutien à cet amendement. Quant aux autres amendements, ils nous semblent quelque peu exagérés compte tenu de la situation budgétaire actuelle.

Mme Karine Lebon (GDR). Je souhaite revenir sur le terme « exagéré ». Il est important de noter que 80 % des ménages ultramarins sont éligibles au logement social et près de 70 % au logement très social. Cependant, seulement 15 % d’entre eux résident effectivement dans le parc social, ce qui est extrêmement faible. Affirmer que 200 millions seraient exagérés me semble inapproprié compte tenu de cette situation.

Les problèmes économiques actuels sont bien réels, mais nous ne pouvons pas accepter une telle misère sociale. Les territoires d’outre-mer souffrent en effet de retards persistants dans la délivrance de logements sociaux : plus de 10 000 demandes sont en attente en Guadeloupe, 12 000 en Guyane et 46 000 à La Réunion.

Les Drom se caractérisent également par un double phénomène préoccupant : d’une part, l’habitat insalubre concerne près de 147 500 logements sur un total approximatif de 900 000 logements (soit environ16 %) ; d’autre part, on observe un développement significatif des habitats illégaux et spontanés notamment en Guyane et à Mayotte.

La problématique liée aux logements non décents englobe tant les enjeux d’insalubrité que ceux liés à la dangerosité du bâti. Cette situation est humainement intolérable. De nombreux ultramarins ne trouvent plus aucune solution durable pour se loger et se voient contraints soit à vivre dans la rue soit à supporter une qualité de vie médiocre voire dangereuse pour leur santé mentale et physique due à cette insalubrité chronique.

Chaque semaine je reçois dans ma permanence des familles vivant des situations dramatiques. Certaines mères perdent même la garde de leurs enfants car elles vivent dans des conditions indécentes qui ne devraient pas être tolérées.

Ainsi donc non, je ne considère pas que demander ces fonds soit exagéré. J’appelle évidemment au soutien minimaliste envers l’amendement proposé par M. Naillet tout comme celui défendu par M. Ratenon.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Je vous remercie pour cette précision. Je tiens à rappeler que vous aviez précédemment sollicité une proposition de résolution, qui a été acceptée avant la dissolution, concernant le logement social en outre-mer.

M. Romain Daubié (Dem). J’insiste sur les propos qui ont été tenus précédemment. La continuité territoriale me tient particulièrement à cœur. Nous savons que certains termes revêtent une importance accrue dans les outre-mer par rapport à la métropole. Je tiens à rappeler que chaque député, bien qu’élu par un territoire spécifique, représente la nation et incarne la souveraineté nationale. Certains parlementaires, dont je fais partie ayant une partie de ma famille à La Réunion, sont particulièrement attentifs aux enjeux ultramarins.

Cependant, dans l’intérêt de la qualité de nos débats, nous souhaitons obtenir des précisions financières pour chaque amendement proposé. Il est essentiel de comprendre l’impact budgétaire de chaque mesure. Nous sommes disposés à consentir des efforts, mais nous devons agir de manière responsable, conscients que les fonds publics et les ressources de l’État ne sont pas inépuisables.

M. Elie Califer (SOC).  L’argent public n’est pas une ressource illimitée, et nous apprécions les interventions de nos collègues. Il est vrai que cela peut choquer ceux qui ne mesurent pas pleinement notre réalité sur ces territoires. Lorsque nous présentons ces amendements, c’est en réponse aux besoins réels de nos régions. Pour comprendre cette situation, il faut y vivre quelques instants, non seulement pour profiter du soleil et des plages, mais aussi pour observer comment vivent ses habitants.

En posant ces amendements, vous pouvez percevoir cela comme ubuesque. Cependant, si nous exprimions tous nos besoins réels, la somme nécessaire serait bien supérieure à 100 millions d’euros. Il existe une urgence que cet État républicain auquel nous appartenons depuis longtemps doit adresser. Nous avons toujours soutenu cet État ; récemment encore lors de crises majeures où nous étions en première ligne pour défendre ce territoire et la République.

Une République qui ne tient pas ses promesses doit corriger son parcours. Les outre-mer sollicitent simplement une réponse à un problème persistant sans quémander indûment des ressources supplémentaires.

Nous apprécions votre présence parmi nous aujourd’hui pour aborder ces questions cruciales afin d’obtenir des réponses aptes à contenir les tensions sociales croissantes dans nos territoires ultramarins.

Lors de la crise de 2009 par exemple – une crise mondiale marquée par des actions violentes –, les élus ont joué un rôle essentiel pour apaiser la situation localement alors qu’ailleurs elle aurait pu dégénérer davantage. Dans les outre-mer cependant, malgré notre capacité à contenir cette colère jusqu’à présent, il est impératif désormais d’y répondre concrètement avant qu’elle n’explose définitivement.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Je vous remercie. Vous l’aurez constaté, j’accorde davantage de temps aux interventions individuelles que d’ordinaire. Néanmoins, il me paraît indispensable, sur un sujet d’une telle importance, de prendre le temps d’examiner ces questions en profondeur.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je vais répondre à votre question concernant les amendements et leur prise en compte de la situation budgétaire. Bien entendu, ces amendements tiennent compte du contexte financier actuel. Ils visent notamment, par le biais de certaines missions du programme 123, à revenir aux niveaux prévus dans la loi de finances 2024 en matière de logement, de continuité territoriale, d’aide à l’insertion et aux collectivités et de financement de l’économie.

Nous avons pleinement conscience des contraintes budgétaires actuelles même si nous ne sommes pas responsables de cette situation. Les calculs ont été réalisés avec rigueur afin d’établir nos priorités clairement définies : rétablir les crédits alloués à diverses missions essentielles du programme 123 telles que l’amélioration des conditions de vie incluant le logement, les aides aux collectivités locales, l’aide à l’insertion professionnelle et économique ainsi que la continuité territoriale.

Ces ajustements sont intégrés au budget proposé pour garantir une gestion financière équilibrée tout en répondant efficacement aux besoins identifiés dans ces domaines prioritaires.

Concernant l’amendement de M. Ratenon, je partage les motifs et le constat. Cependant, ce qui me dérange dans cet amendement est que si le gouvernement ne lève pas le gage, il faudra trouver les 200 millions d’euros sur l’action 1 du programme 138 dédié au soutien aux entreprises. Le risque réside dans le fait de vider cette enveloppe budgétaire, car il s’agit tout de même de 200 millions d’euros. C’est cela qui m’inquiète : devoir puiser dans l’action 1 du programme 138 destiné à soutenir les entreprises.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. L’amendement est-il maintenu ou retiré ?

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Nous le retirons.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Très bien. L’amendement 227 ayant été retiré, nous procédons au vote sur l’unique amendement restant dans cette discussion commune, à savoir l’amendement 331.

La commission adopte l’amendement.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous abordons ensuite une nouvelle discussion commune portant notamment sur l’observatoire des prix, des marges et des revenus (OPMR), avec l’amendement numéro 338 présenté par Monsieur Naillet. La parole est au rapporteur.

Amendement CE338 de M. Philippe Naillet

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Les observatoires des prix, des marges et des revenus jouent un rôle fondamental. Il s’agit ici de revaloriser leur budget d’un million d’euros. Cette augmentation n’est pas fortuite ; elle répond à une recommandation de la commission d’enquête « vie chère ».

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Je vous remercie. Vient ensuite l’amendement identique n° 230 de M. Ratenon.

Amendement CE230 de M. Jean-Hugues Ratenon

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Je souhaite rappeler, avant de défendre cet amendement, que près de 200 milliards d’euros ont été versés aux entreprises du Cac 40 sous forme d’aide publique. Lorsqu’on nous affirme que c’est excessif et qu’il n’existe pas d’argent magique, il convient de noter que cela dépend manifestement des bénéficiaires. Cette réalité mérite d’être soulignée.

Notre amendement propose de consolider le budget des OPMR. Le rapport de la commission d’enquête sur le coût de la vie dans les outre-mer, présenté en juillet 2023, dénonçait déjà une absence quasi-totale de moyens, voire l’inexistence d’un budget dédié pour les OPMR. C’est pourquoi nous proposons d’augmenter d’un million d’euros le budget alloué à ces observatoires.

Pour respecter les règles de recevabilité budgétaire, cet amendement prévoit de prélever un million d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement de l’action 4 « financement de l’économie » du programme 138 « emploi outre-mer ».

Amendement CE330 de Mme Émeline K/Bidi

Mme Emeline K/Bidi (GDR). Cet amendement, à l’instar des autres, vise à renforcer les moyens de l’OPMR. J’indique dans l’exposé des motifs qu’il serait pertinent d’approfondir cette démarche en modifiant le rôle et les missions de l’OPMR afin de lui conférer davantage de pouvoir. Nous avons voté il y a quelques jours la suppression de la TVA en Martinique, en Guadeloupe et à La Réunion dans le cadre du PLR. Il est apparu unanimement que cette mesure ne pourrait être efficace sans un contrôle accru sur les prix et les marges. La vie chère en outre-mer étant multifactorielle, il me semble nécessaire non seulement d’accroître les moyens alloués à l’OPMR mais également d’envisager une modification plus profonde de ses attributions. Cela nécessiterait toutefois une loi distincte.

Amendement CE312 de M. Jiovanny William

Mme Mélanie Thomin (SOC). En tant que députée des îles du Ponant, je tiens à exprimer ma solidarité avec les réflexions menées aujourd’hui sur la lutte contre la vie chère. Cette problématique est une réalité pour les habitants permanents des territoires enclavés et excentrés, qui nécessitent l’intervention de la puissance publique pour rétablir certains équilibres. Résider à l’année sur un territoire insulaire implique des contraintes qu’il convient d’appréhender avec justesse.

L’amendement que je propose vise à renforcer les moyens budgétaires alloués aux observatoires des prix, des marges et des revenus. Ces structures constituent un outil indispensable dans la lutte contre la vie chère, comme l’a démontré la commission d’enquête menée à l’Assemblée nationale sur ce sujet. La revalorisation que nous proposons concerne les neuf observatoires présents dans nos territoires ultramarins. Bien qu’elle ne résolve pas entièrement les problèmes de moyens structurels de ces observatoires, cette augmentation leur permettra néanmoins de gagner en efficacité.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Je tiens à souligner que ces amendements mettent en lumière l’excellence des travaux menés par l’OPMR en outre-mer, ainsi que son importance capitale.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je tiens également à saluer le travail de l’OPMR, auquel plusieurs collègues et moi-même participons dès que possible. Il est nécessaire de renforcer les moyens de l’OPMR, notamment en augmentant ses capacités d’investigation pour lui permettre d’accomplir pleinement sa mission.

Cependant, je demande le retrait des amendements 330 et 312. Je soutiens cependant l’amendement proposé par Jean-Hugues Ratenon ainsi que l’amendement 338. En effet, un financement supplémentaire d’un million d’euros correspond à la recommandation 32 du rapport de la commission d’enquête « vie chère », comme nous y avons fait allusion précédemment.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Madame K/Bidi, maintenez-vous ou retirez-vous votre amendement ? Vous le retirez. Qu’en est-il de celui de M. William ? Retiré. Il reste les deux amendements identiques numérotés 338 et 230. Y a-t-il des interventions ?

Mme Karine Lebon (GDR). L’amendement proposé par ma collègue Émeline K/Bidi visait à attirer l’attention sur l’étendue des missions de l’OPMR. Cet amendement s’inscrit dans la lignée des conclusions de la commission d’enquête sur la vie chère dans les outre-mer, dont l’objectif était de proposer des solutions concrètes pour remédier à ce problème.

La problématique des marges excessives pratiquées par les grandes entreprises en situation de monopole dans les outre-mer est bien réelle. Il apparaît donc essentiel de doter les observatoires des prix, des marges et des revenus des moyens nécessaires pour mener à bien leur mission. Leur rôle s’avère primordial dans la lutte contre la vie chère.

Néanmoins, il convient de souligner que si l’OPMR est en mesure d’identifier les anomalies entraînant une hausse anormale des prix, il ne dispose d’aucune compétence en matière de contrôle ou de sanction. Il sera donc nécessaire d’envisager des mesures supplémentaires pour renforcer leur action.

M. Elie Califer (SOC).  De nombreux observateurs suivent actuellement les événements en Martinique avec des sentiments mêlés d’émotion, d’agacement et souvent d’incompréhension. Cette situation particulière que nous vivons en Martinique fait écho à la crise traversée par la Guadeloupe en 2009 et 2021. Nous semblons condamnés à manifester notre désarroi de manière cyclique.

Le ministre Carenco a rencontré de grandes difficultés pour obtenir un rapport de l’OPMR, en raison de l’absence de réunions et de moyens suffisants. Bien que l’organisation soit systématiquement mise en place après une crise, son fonctionnement reste défaillant.

Il nous incombe donc de réclamer dès à présent des moyens supplémentaires. De surcroît, comme l’a souligné ma collègue précédemment, il conviendrait d’élargir les missions et les compétences de cette organisation afin d’instaurer des contrôles efficaces, car les prix pratiqués sont intenables. J’invite ceux qui souhaiteraient constater la situation par eux-mêmes à effectuer un séjour dans notre région.

Mme Louise Morel (Dem). Je ne viens pas des outre-mer, je suis alsacienne, mais je suis particulièrement attachée à la gestion rigoureuse des dépenses publiques, notamment dans le contexte actuel et pour les générations futures.

J’ai effectué un calcul rapide des amendements du rapporteur. La somme en autorisations d’engagement atteint 516 millions d’euros, si mes calculs sont exacts. Or, vous indiquez que le budget proposé par le gouvernement est en baisse de 298 millions d’euros. Précédemment, je vous ai demandé si l’adoption de tous vos amendements nous ramènerait au budget de l’année dernière, ce à quoi vous sembliez acquiescer. Cependant, en suivant ce raisonnement, nous aboutissons à une hausse budgétaire de 42 %.

Je comprends parfaitement le désarroi exprimé et nous sommes disposés à y répondre. Néanmoins, j’ai deux questions. Quelle est votre position face à ce constat ? Si l’objectif n’est pas de revenir au budget de l’an passé, quels amendements devrions-nous écarter ?

De plus, cette analyse ne prend pas en compte les éventuels avis favorables que vous pourriez émettre sur les amendements des autres collègues.

Il me semble essentiel, en tant que membres de la commission des affaires économiques, de connaître précisément le montant des dépenses engagées, leur finalité et la trajectoire visée lorsque nous quittons cette salle. Je ne remets pas en question la nécessité de répondre aux crises que traversent les différents territoires, mais je plaide pour une meilleure lisibilité de nos actions et de leurs conséquences budgétaires.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Votre question est importante dans le contexte budgétaire actuel. Je tiens à préciser que le rétablissement de la loi de finances initiale de 2024 concerne spécifiquement les amendements du rapporteur, c’est-à-dire mes propres amendements. Concernant les autres propositions d’amendements, elles feront l’objet d’un débat, comme il se doit. J’ai d’ailleurs exprimé ma position à Mme Nosbé au sujet de l’amendement de Jean-Hugues Ratenon. Je lui ai indiqué que si l’on augmentait la ligne budgétaire unique de 200 millions d’euros et que le gouvernement ne levait pas le gage, nous serions contraints de puiser cette somme dans l’action 1, qui concerne les aides aux entreprises, ce qui reviendrait à épuiser cette enveloppe. Je me concentre donc sur mes amendements en tant que rapporteur, tandis que les autres propositions seront examinées lors des discussions parlementaires.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Je remercie le rapporteur pour ces éclaircissements. La trajectoire qu’il propose est désormais claire. Je tiens à rappeler que, comme l’ont montré les débats en commission des finances sur l’agriculture, non seulement les coupes budgétaires de 300 millions d’euros initialement prévues n’ont pas été appliquées, mais une augmentation de plus de 500 millions d’euros a été votée. Sur plusieurs missions, nous constatons non seulement l’annulation des réductions budgétaires, mais également des augmentations lorsque des besoins sont identifiés. Cette remarque s’applique également à l’outre-mer. Votre demande de visibilité sur les choix du rapporteur est tout à fait justifiée.

Nous allons maintenant procéder au vote sur les amendements identiques 338 et 230, qui concernent l’observatoire des prix et des marges. Ces amendements proposent une allocation d’un million d’euros pour répondre aux besoins exprimés.

La commission adopte les amendements.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous passons à présent à l’amendement numéro 242 déposé par M. Ratenon, qui porte, si je ne m’abuse, sur la régulation des prix.

Amendement CE242 de M. Jean-Hugues Ratenon

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Défendu.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Un avis de sagesse sur cet amendement qui concerne à titre expérimental les bornes de comparateurs de prix.

La commission adopte l’amendement.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous abordons à présent l’amendement numéro 239 déposé par M. Ratenon. Madame Nosbé, souhaitez-vous le présenter ? Cet amendement porte sur l’extension de la prime « vie chère » aux bénéficiaires des minima sociaux et du Smic.

Amendement CE239 de M. Jean-Hugues Ratenon

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Par cet amendement, je propose d’étendre la prime de vie chère aux bénéficiaires des minima sociaux et du Smic. Les récentes mobilisations en Martinique et ailleurs témoignent du mécontentement de nos concitoyens ultramarins, confrontés à la fois à des inégalités économiques flagrantes et à des prix très élevés. Il convient de rappeler qu’en incluant les conjoints et les enfants à charge des allocataires, plus de 21 % de la population ultramarine est couverte par le RSA.

La prime de vie chère dans les départements d’outre-mer vise à compenser le coût de la vie plus élevé dans ces territoires par rapport à l’Hexagone. Il importe de souligner que cette prime a été instaurée après la Seconde Guerre mondiale pour inciter les fonctionnaires métropolitains à s’installer dans les colonies et pour pallier les difficultés liées à un niveau de vie plus onéreux. Au fil du temps, elle a évolué en fonction des demandes locales, des négociations syndicales et des décisions politiques.

L’instauration et le maintien de cette prime attestent non seulement d’une reconnaissance par l’État des particularités des départements d’outre-mer, mais surtout du constat incontestable d’une différence notable du coût de la vie entre ces territoires ultramarins et l’Hexagone.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je comprends le raisonnement sous-jacent à cet amendement, qui postule que la vie chère affecte l’ensemble de la population, et pas uniquement les fonctionnaires. Je partage cette analyse. Néanmoins, un aspect de cet amendement me préoccupe. Si j’ai bien saisi, cette prime « vie chère » serait exclusivement destinée aux personnes rémunérées au Smic et aux allocataires des minima sociaux. Ce qui m’inquiète particulièrement, c’est le risque d’un effet de seuil pour les personnes dont le salaire avoisine le Smic. C’est précisément ce point qui suscite mes réserves. Concernant cet amendement, j’émets donc un avis de sagesse.

Mme Karine Lebon (GDR). Vous rappelez peut-être que les fonctionnaires bénéficient d’une sur-rémunération dans les outre-mer. Cependant, le gouvernement contrôle les salaires, mais pas les prix pratiqués dans les grandes surfaces, qui se caractérisent par l’application de marges excessives. Ainsi, tant que les enseignes conserveront leur situation de monopole et que les prix demeureront aussi élevés, la seule solution pour obtenir des résultats significatifs pour la population consiste à augmenter les salaires. Une indexation des minima sociaux s’avère également nécessaire pour soutenir un pouvoir d’achat défaillant.

Dans le dernier rapport sur la vie chère en outre-mer, M. François Hermet, maître de conférences au centre d’économie et de management de l’océan Indien de l’université de La Réunion, appuie cette idée. Il établit un parallèle avec la principauté de Monaco, soulignant que le pouvoir d’achat des Monégasques s’avère nettement supérieur à celui des Réunionnais, alors que les produits vendus en supermarché sont moins onéreux à Monaco qu’à la Réunion. Si un pouvoir d’achat plus élevé entraînait systématiquement une hausse des prix, ce phénomène aurait été observé ailleurs. Ce n’est donc pas le pouvoir d’achat qui fait baisser les prix, mais la concurrence.

Nous demandons une augmentation du pouvoir d’achat, y compris pour les bénéficiaires des minima sociaux. Certes, l’effet de seuil évoqué par M. Naillet peut s’avérer problématique, mais je considère qu’il nous faut commencer par augmenter les minima sociaux et les revaloriser.

Mme Mereana Reid Arbelot (GDR). Je souhaite apporter une précision concernant l’expression employée par ma collègue Lebon à propos des rémunérations en outre-mer. Il est courant d’entendre parler de « sur-rémunérations », au point que même des Ultramarins adoptent ce terme. Cependant, cette appellation est inexacte. Prenons l’exemple de la Polynésie française et des territoires du Pacifique : un décret de 1967 évoque des rémunérations assorties d’un coefficient, notamment pour les fonctionnaires. Il s’agit bel et bien de rémunérations à part entière, et non de « sur-rémunérations ». L’usage de ce dernier terme pourrait laisser penser que nous sommes rétribués de manière excessive, ce qui n’est pas le cas.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. J’ai bien entendu ce qui a été dit, mais je ne reviens pas sur ce que j’ai énoncé. Donc, j’exprime un avis de sagesse.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. L’amendement de M. Ratenon, visant à allouer 20 millions d’euros supplémentaires pour augmenter la prime de vie chère destinée aux bénéficiaires des minima sociaux et du SMIC, est soumis à votre vote.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CE247 de M. Jean-Hugues Ratenon

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Par cet amendement, nous proposons d’apporter un soutien financier additionnel aux étudiants ultramarins afin de répondre aux enjeux de pouvoir d’achat auxquels ils sont confrontés. Ce dispositif vise à couvrir les dépenses alimentaires, de logement, de fournitures scolaires et de déplacement spécifiques aux résidents des territoires d’outre-mer. Nous préconisons l’instauration d’un complément de bourse spécifiquement conçu pour ces étudiants. Cette allocation supplémentaire tiendrait compte des particularités économiques des outre-mer et fournirait une aide financière complémentaire, permettant aux étudiants de faire face au coût de la vie et aux frais inhérents à la poursuite de leurs études.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je suis favorable à l’amendement.

Mme Louise Morel (Dem). Je voterai cet amendement, mais je tiens à souligner que l’augmentation des crédits n’est pas une solution pérenne. Lors de la dernière législature, j’ai mené une mission d’évaluation des politiques publiques en faveur de la mobilité sociale des jeunes. À l’échelle nationale, nous comptons soixante dispositifs différents visant à améliorer cette mobilité, y compris pour les jeunes des outre-mer. Il est impératif de réfléchir sérieusement à leur bonne articulation car chaque année, bien que nous votions régulièrement pour augmenter ces crédits et introduire de nouvelles enveloppes budgétaires, le nombre de jeunes en difficulté ne diminue pas proportionnellement. En situation d’urgence, il est nécessaire d’approuver ces mesures financières même si elles ne constituent pas une solution structurelle sur le long terme.

Mme Karine Lebon (GDR). Si j’ai bien compris l’intervention de notre collègue, il s’agissait d’une aide à la mobilité.

Mme Louise Morel (Dem). Au niveau national, de nombreux dispositifs contribuent, plus ou moins directement, à la mobilité sociale des jeunes. On en dénombre soixante au total, incluant les crédits alloués dans ce cadre général. Je souligne qu’à long terme, pour combattre efficacement les problématiques de la jeunesse, une approche annuelle crédit par crédit ne me semble pas pertinente, étant donné leur multiplicité excessive.

Mme Karine Lebon (GDR). Je souhaite souligner l’importance de revaloriser les bourses étudiantes plutôt que de se concentrer uniquement sur la mobilité. Le parc social ne comprend qu’une infime proportion de logements étudiants, soit 0,9 %. Il est donc primordial d’augmenter le montant des bourses. C’est pourquoi nous appuyons l’amendement proposé par M. Ratenon. Nous devons éviter de diluer les dispositifs spécifiquement conçus pour répondre aux besoins particuliers de notre jeunesse, qui fait face à des défis qui lui sont propres.

La commission adopte l’amendement.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous abordons à présent une discussion commune portant sur la continuité territoriale. Concernant l’amendement 333, la parole est donnée à M. Naillet.

Amendement CE333 de M. Philippe Naillet

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je souhaite rétablir les crédits de l’action 3, relative à la continuité territoriale, au niveau prévu par la loi de finances initiale pour 2024. Cette proposition s’inscrit dans la logique que j’ai exposée au commencement de notre débat sur les amendements. Le montant en question s’élève précisément à 13,4 millions d’euros.

Amendement CE241 de Mme Sandrine Nosbé

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Par cet amendement, nous proposons de renforcer la dotation de continuité territoriale pour l’outre-mer, afin qu’elle atteigne au minimum le niveau de celle attribuée à la Corse. Le dispositif de continuité territoriale, instauré en Corse en 1976 pour répondre aux problèmes de desserte aérienne, se traduit aujourd’hui par une dotation annuelle de l’État s’élevant à 187 millions d’euros pour 2025.

En comparaison, la dotation de continuité territoriale pour l’outre-mer s’élève à 62 millions d’euros pour la même année, soit une baisse de 17 %. Cette réduction s’inscrit dans le cadre de la diminution générale des crédits de la mission outre-mer décidée par le nouveau gouvernement.

Une analyse plus détaillée de ces chiffres, rapportés à la population concernée, révèle une disparité significative. L’État alloue 187 millions d’euros par an pour environ 340 000 Corses, contre 62 millions d’euros pour quelque 2,8 millions d’ultramarins. Cela représente 550 euros par habitant en Corse, contre seulement 22 euros par habitant dans les territoires d’outre-mer.

Amendement CE313 de M. Jiovanny William

M. Elie Califer (SOC).  Cet amendement vise à renforcer le dispositif de continuité territoriale et son financement en outre-mer, afin d’atteindre progressivement le niveau d’aide actuellement en vigueur en Corse. Pour illustrer cette disparité, quelques chiffres s’imposent. L’État français consacre 257 euros par habitant pour assurer la continuité territoriale entre la Corse et le continent. En revanche, il n’alloue que 16 euros par habitant pour l’ensemble des outre-mer. À titre de comparaison, l’Espagne investit 223 euros par habitant pour les îles Baléares, les Canaries et Ceuta.

Cette situation peut sembler purement budgétaire, mais elle reflète des besoins réels qu’il est de notre devoir de député d’exprimer. La continuité territoriale, telle que définie par l’article L.1803-1 du code des transports, s’avère essentielle pour favoriser le développement économique et l’enrichissement des territoires ultramarins. Elle vise à réduire l’exode des forces vives et à maintenir le lien avec l’Hexagone.

Je tiens à souligner que lors de nos discussions d’hier soir, l’Assemblée a démontré qu’elle n’était pas uniquement hexagonale, mais véritablement nationale, en abordant sérieusement les questions relatives aux outre-mer. C’est un fait que je souhaite saluer à cet instant.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous avons deux amendements identiques qui concernent Ladom.

Amendement CE273 de M. Max Mathiasin

M. Max Mathiasin (LIOT). Je propose de rétablir partiellement les crédits alloués à Ladom afin de préserver les dispositifs de continuité territoriale pour les outre-mer. Cette mesure s’inscrit dans une démarche d’égalité républicaine. Le projet de budget actuel prévoit une réduction significative des crédits de cet opérateur, pourtant crucial pour nos territoires, passant de 57 millions d’euros en loi de finances initiales 2024 à 39 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2025.

Pour remédier à cette situation, nous suggérons un mouvement de crédits structuré comme suit : une augmentation de 10 millions d’euros des crédits de l’action 3 Continuité territoriale du programme 123 Conditions de vie outre-mer, compensée par une diminution équivalente de 10 millions d’euros des crédits de l’action 01 Soutien aux entreprises du programme 138 Emploi outre-mer.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous avons un amendement identique, le 314, de Mme Bellay.

Amendement CE314 de Mme Béatrice Bellay.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Cet amendement reprend une proposition du rapport de la commission d’enquête sur le coût de la vie en outre-mer. Il est impératif d’aller au-delà des dispositifs déjà proposés. Ainsi, cet amendement, présenté par ma collègue Bellay et soutenu par le groupe Socialistes, vise à instaurer une aide au retour pour les citoyens ultramarins résidant temporairement dans l’Hexagone et souhaitant revenir dans leur territoire afin de créer une activité ou occuper un emploi.

Concrètement, cette aide pourrait se traduire par le financement partiel du billet de retour pour ces Ultramarins justifiant d’une création d’activité ou disposant d’une promesse d’embauche dans certains secteurs spécifiques.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous passons à présent au dernier amendement, l’amendement 269 déposé par Monsieur Mathiasin.

Cet amendement n’étant pas soutenu, je suggère que nous donnions la parole à M. le rapporteur pour qu’il puisse émettre son avis sur cette discussion commune.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je partage le constat d’injustice concernant la vie chère dans les territoires ultramarins, mais cette notion s’applique également à la continuité territoriale lorsqu’on compare le traitement réservé aux ultramarins à celui accordé à la Corse. Cette disparité est flagrante et inacceptable.

Une autre contradiction apparaît dans la baisse des crédits alloués à la continuité territoriale. Lors du comité interministériel outre-mer (Ciom) de juillet 2023, auquel plusieurs collègues, dont Madame Lebon, ont assisté, il a été décidé de renforcer le rôle et les missions de Ladom. Paradoxalement, les crédits de cette agence ont été réduits. Cette incohérence souligne la nécessité de rétablir a minima les crédits au niveau prévu par la loi de finances initiale de 2024 pour la continuité territoriale.

Concernant les différents amendements proposés, je suggère les dispositions suivantes. Pour l’amendement 314 de Mme Bellay, relatif à l’aide au retour financée par la continuité territoriale, je propose un retrait au profit de l’amendement 333. De même pour l’amendement de M. William, je recommande un retrait en faveur de l’amendement 333. Quant aux amendements 273 de M. Mathiasin et 241 de Mme Nosbé, je demande également leur retrait.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Madame Nosbé, souhaitez-vous maintenir ou retirer cet amendement ?

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Je le maintiens.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. L’amendement de M. William est-il maintenu ou rejeté ?

M. Elie Califer (SOC).  Je propose de le maintenir.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous passons à l’amendement 273 de M. Mathiasin.

M. Max Mathiasin (LIOT).  Je maintiens cet amendement, car bien que le rapporteur nous ait informés de son intention de rétablir les crédits, nous ne disposons d’aucune certitude à ce sujet. Il est donc impératif que nous conservions une garantie. Le rapporteur affirme que les crédits seront rétablis à l’identique, mais j’ignore quelle sera la décision de l’Assemblée.

Par ailleurs, je m’étais absenté pour une urgence familiale lors de l’examen de mes amendements 273 et 269. J’ai reçu un appel de Guadeloupe, ce qui est préoccupant étant donné le décalage horaire. Je viens malheureusement d’apprendre le décès d’un parent, raison pour laquelle je me suis éclipsé quelques instants. Voilà les explications que je souhaitais apporter.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Au nom de l’ensemble des commissaires et députés présents, je tiens à exprimer nos sincères condoléances à M. Mathiasin.

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Nous évoquons l’amendement 314 de Mme Bellay.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Nous souhaitons maintenir cet amendement au sein du groupe Socialistes. La question de la continuité territoriale constitue un véritable enjeu politique. Les comparaisons faites avec la situation en Espagne et le rappel de l’importance de cette continuité pour la Corse sont pertinents. Il est également crucial d’aborder ce sujet pour les îles du Ponant, car la législation actuelle ne répond pas aux besoins spécifiques des territoires insulaires.

Pour les maires des communes insulaires, il est extrêmement difficile de dégager des marges financières suffisantes afin de financer le transport maritime et d’aménager les tarifs des billets vers ces îles. Ce problème revêt une dimension politique majeure dans notre pays. J’espère que nous parviendrons à trouver, à terme, des solutions permettant de déroger aux règles actuelles et prenant en compte les spécificités territoriales propres à nos îles, car cela représente une revendication politique essentielle.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous écoutons M. le rapporteur avant de passer aux interventions.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je souscris pleinement à vos arguments en faveur d’une augmentation des crédits alloués à la continuité territoriale. Néanmoins, je tiens à souligner un risque : si le gouvernement ne lève pas le gage, nous pourrions perdre les crédits relatifs aux autres amendements que nous proposons. L’amendement que je présente vise simplement à revenir au niveau établi dans la loi de finances initiale pour 2024. Cela dit, je soutiens entièrement votre position sur ce sujet.

M. Jean-Luc Fugit (EPR). Compte tenu des éléments que j’ai évoqués précédemment, des explications fournies par le rapporteur, ainsi que des montants proposés et des objectifs visés, nous apporterons notre soutien à l’amendement 333 présenté par le rapporteur.

Mme Karine Lebon (GDR). Je soutiens l’amendement du rapporteur. Cependant, j’aimerais attirer l’attention sur les problématiques de double insularité auxquelles sont confrontés certains territoires d’outre-mer et qui ne sont pas prises en compte partout dans la continuité territoriale. Il est essentiel de souligner que les réductions des dotations allouées à la continuité territoriale sont inacceptables. De surcroît, nous faisons face à une augmentation de la taxe sur les billets d’avion. Il est inconcevable d’accroître les tarifs tout en diminuant les aides.

Nous attendons toujours l’examen de l’amendement du gouvernement sur la première partie du projet de loi de finances à ce sujet. Néanmoins, j’informe mes collègues que j’ai d’ores et déjà déposé un amendement visant à ce qu’une part importante des recettes générées par la taxe sur les billets d’avion soit reversée à Ladom. Je compte sur votre soutien pour cette initiative.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je n’ai rien à ajouter aux propos précédents. J’ai bien pris note du message de Mme Lebon et je tiens à l’assurer de notre soutien. Si j’ai correctement saisi, dans l’éventualité où cette taxe s’appliquerait aux territoires d’outre-mer, l’excédent des recettes serait reversé à Ladom. Toutefois, cela ne nous empêche nullement d’augmenter les crédits au niveau prévu par la loi de finances initiale pour 2024.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Je vous propose de passer au vote, s’agissant d’abord de l’amendement 333 de M. Naillet.

La commission adopte l’amendement.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. L’amendement est adopté et fait donc tomber l’ensemble des autres amendements de la discussion commune.

Amendement CE248 de M. Jean-Hugues Ratenon

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Par cet amendement, nous souhaitons soutenir une aide au retour et à la réinsertion pour les détenus originaires des territoires ultramarins. Dans le cadre de rapprochements familiaux, l’État assurerait le retour des détenus ayant accompli leur séjour carcéral dans un département autre que leur territoire d’outre-mer d’origine. En effet, quelle solution envisager pour ces jeunes laissés sans attache à La Réunion ou dans d’autres départements éloignés de leur région d’origine ? Nous proposons donc le rapprochement familial afin qu’ils puissent revenir sur leurs terres natales et renouer les liens nécessaires à la reconstruction de leur vie. Cela semble être une base logique de cohésion sociale pour ceux qui ont terminé leur séjour carcéral.

Ces jeunes transférés hors de leur département d’origine se retrouvent souvent sans attaches familiales solides, sans domicile fixe et fréquemment sans emploi après avoir quitté la prison.

Cet amendement demande au gouvernement de prendre en charge les billets de retour des jeunes accueillis en prison ou placés en centre éducatif fermé dans des départements autres que celui où ils sont nés, lorsque ces derniers ne disposent pas d’attaches familiales avérées dans le département d’accueil et s’ils en font la demande.

Enfin, afin de respecter les règles budgétaires, cet amendement propose un prélèvement de 300 000 euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement du programme « soutien aux entreprises » du programme 138 « emploi outre-mer », pour abonder un nouveau programme intitulé « aides aux retours et à la réinsertion » destiné aux détenus avec cette même somme.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je soutiens cet amendement, car au-delà de l’aspect financier des 300 000 euros, l’enjeu est considérable. Comme l’a souligné M. Ratenon dans son texte, il s’agit de la réinsertion, un aspect crucial de notre système pénitentiaire. Offrir davantage d’opportunités à un ancien détenu s’avère primordial, car dans les peines de prison, la question de la réinsertion est souvent reléguée au second plan. Certes, la peine demeure essentielle, mais la réinsertion l’est tout autant. Les chances de réussite de cette réinsertion augmentent significativement lorsqu’un individu retourne sur un territoire familier, retrouvant ainsi son environnement et ses repères. Par conséquent, je me prononce en faveur de cet amendement proposé par Jean-Hugues Ratenon.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE315 de M. Elie Califer

M. Elie Califer (SOC).  Je souhaite allouer des crédits supplémentaires au plan chlordécone. Il a fallu un combat acharné des ultramarins l’année dernière pour obtenir une orientation de ce plan, qui manquait même de moyens pour sa communication. Ce plan s’avère insuffisamment doté au regard des impacts sanitaires, économiques et sociaux constatés aux Antilles.

Selon une étude de Santé publique France en 2018, la quasi-totalité de la population antillaise est contaminée au chlordécone : 42 % en Martinique et 45 % en Guadeloupe. Cet amendement vise à renforcer les actions de sensibilisation et de dépistage du cancer de la prostate, dont la prévalence est particulièrement élevée chez les hommes guadeloupéens et martiniquais. Il permettrait également de financer la dépollution des eaux et des sols, ainsi que l’adaptation des activités économiques à cette pollution massive que nous avons évoquée l’an dernier à l’Assemblée.

Pour assurer la recevabilité financière de cet amendement, nous proposons un mouvement entre le programme 133 et le programme 138, dans un souci de gestion rigoureuse. Je tiens à souligner que malgré les contraintes pesant sur nos territoires, nous parvenons à réaliser des prouesses. J’ai moi-même géré une commune pendant des années, la maintenant à l’équilibre et obtenant les félicitations de la Cour des comptes.

Nous sommes pleinement conscients de la nécessité de gérer les finances publiques avec rigueur, mais nous exprimons des besoins impérieux et attendons votre solidarité. Le budget actuel n’est pas à la hauteur des enjeux. Que pouvons‑nous faire ici et maintenant, si ce n’est l’exprimer par nos votes et nos propositions ? Dans le cas contraire, notre présence même serait remise en question.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous abordons ici plusieurs amendements portant sur un enjeu fondamental, celui de la santé de nos concitoyens en outre-mer et la préservation des écosystèmes. Ces sujets méritent une attention particulière et nous aurons l’occasion d’y revenir plus en détail. Monsieur le rapporteur, quel est votre avis ?

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Avis favorable.

Mme Mélanie Thomin (SOC). L’intervention de mon collègue Califer me conduit à souligner les renoncements significatifs dans le budget de l’agriculture, notamment en ce qui concerne la planification écologique. Ce budget est fortement réduit, avec une baisse notable des crédits alloués. Par exemple, les fonds destinés aux mesures agroenvironnementales et climatiques (Maec) sont en forte diminution. Les initiatives pour l’agroécologie sont quasiment absentes du budget agricole actuel.

Il est évident que cette réduction budgétaire aura un impact direct sur la santé des habitants, particulièrement dans les territoires ultramarins. De plus, il convient de signaler une alerte rouge concernant la forêt dans ces mêmes territoires d’outre-mer. Alors que le financement annuel était auparavant fixé à 15 millions d’euros, il n’existe désormais plus aucun crédit dédié à la préservation forestière dans ces régions.

Ces préoccupations sont étroitement liées aux observations formulées par notre collègue Califer.

M. Jean-Luc Fugit (EPR). Je soutiendrai cet amendement car il aborde un sujet primordial qui nous tient particulièrement à cœur. Je tiens à exprimer notre solidarité envers notre collègue à travers notre vote favorable.

Permettez-moi une observation, madame la présidente. Nous évoquons fréquemment des sujets comme étant essentiels, parfois avec un certain enthousiasme qui peut sembler excessif. Néanmoins, je considère que l’ensemble des crédits que nous examinons depuis deux semaines revêtent une importance capitale. Qu’il s’agisse de l’énergie, de l’industrie, de l’agriculture ou de l’outre-mer, comme c’est le cas ce matin, tous ces domaines sont fondamentaux. S’ils ne l’étaient pas, ils ne relèveraient pas du périmètre de notre commission des affaires économiques.

En effet, rien n’est plus fondamental que de bâtir une société et une nation. Par conséquent, tous les sujets que nous traitons sont d’une importance égale, y compris ceux relatifs à l’outre-mer. Je tenais à apporter cette précision afin de ne pas donner l’impression à ceux qui suivent nos débats sur les différentes missions que certaines seraient moins importantes que d’autres. Il s’agit d’un tout indissociable, si vous me permettez cette remarque.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Je vous remercie de cette précision, monsieur Fugit. Il va de soi que l’importance accordée à ces sujets n’amoindrit en rien celle des autres. Au sein de la commission des affaires économiques, nous sommes pleinement conscients de traiter des questions fondamentales pour nos concitoyens.

En l’absence d’autres interventions, nous procédons au vote sur l’amendement 315.

La commission adopte l’amendement.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous abordons à présent l’amendement numéro 325 déposé par M. Baptiste. Je m’interroge sur l’identité de son défenseur, peut-être s’agit-il de M. Califer.

Amendement CE325 de M. Christian Baptiste

M. Elie Califer (SOC).  Madame la présidente, je remercie mes collègues pour leurs interventions. Ils ont saisi notre approche de la question. Nous faisons appel à votre discernement pour comprendre le sens profond de nos propos. Notre expression, parfois vive, traduit une souffrance et une volonté sincère de faire nation. Nous réagissons ainsi car nous ressentons le risque d’être marginalisés au sein de la République.

Notre situation diffère de celle rencontrée dans la lutte contre les algues vertes. Sur nos territoires, le phénomène connaît une croissance logarithmique. Des élus bretons en visite en Guadeloupe ont constaté le contraste saisissant : pour un problème moindre en Bretagne, ils bénéficient d’aides conséquentes. Chez nous, ce sont les collectivités qui doivent gérer le ramassage des algues, au risque de contaminer davantage les sols. Ces algues dégagent de l’hydrogène sulfuré, provoquant des odeurs nauséabondes et des risques sanitaires importants.

Cet amendement vise à obtenir une aide supplémentaire pour permettre à nos collectivités de lutter efficacement contre ce fléau et d’en atténuer les conséquences économiques, sanitaires et sociales. Nous proposons notamment de procéder à la collecte des sargasses en mer, une mission qui devrait incomber à l’État. Sur notre territoire, la gestion des déchets relève de notre compétence, mais vous comprenez bien la stratégie : on laisse les algues arriver sur nos côtes pour que nous ayons à les ramasser.

Voilà ce que nous souhaitons exprimer, avec nos mots et notre sensibilité, porteurs d’une histoire certes douloureuse, mais qui a fait de nous des hommes capables de vous parler avec sincérité.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. J’émets un avis favorable.

M. Jean-Luc Fugit (EPR). Je soutiendrai cet amendement par mon vote. Je souhaite toutefois apporter une précision à notre collègue concernant le terme employé : la révolution évoquée n’est pas logarithmique, mais plutôt exponentielle. En effet, une fonction logarithmique tend à réduire les écarts, tandis qu’une fonction exponentielle les amplifie. Pardonnez cette digression scientifique. Quoi qu’il en soit, notre groupe votera en faveur de cet amendement, qui nous semble empreint de bon sens et, oserais-je dire, d’humanisme.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE328 de Mme Sandrine Rousseau

M. Benoît Biteau (EcoS).  Cet amendement s’inscrit dans la même logique que le précédent, concernant les algues sargasses et le plan sargasses. En Bretagne, nous avons constaté les dommages que peuvent causer les algues vertes. Cette problématique relève à la fois de la santé publique, de l’écologie et de l’économie. Lorsqu’un écosystème est affecté, que la santé des citoyens est menacée et que des activités, notamment touristiques, sont compromises dans ces territoires, il est impératif d’agir pour éliminer ces pollutions dès leur apparition.

Nous proposons également de s’attaquer aux causes profondes du problème, en cherchant à prévenir les conditions favorisant la prolifération annuelle de ces algues, qui constituent un véritable fléau. Une enveloppe de 2 millions d’euros en autorisations d’engagement permettrait de lutter efficacement contre ce phénomène d’échouage d’algues vertes qui affecte nos territoires ultramarins.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je souhaite m’assurer de bien comprendre la situation. Il s’agit effectivement des sargasses, et nous parlons toujours d’un montant de 2 millions d’euros. La distinction avec l’amendement précédent réside dans le fait que celui-ci concernait la collecte des sargasses en mer, tandis que l’amendement de Mme Rousseau, si je ne me trompe pas, porte sur le ramassage à terre. Dans ces conditions, j’émets un avis favorable.

M. Frédéric Weber (RN). La situation des sargasses aux Antilles s’avère catastrophique, bien qu’elle affecte différemment certaines parties des îles. Des zones sont complètement infestées, ce qui nuit considérablement à l’attractivité touristique et peut même entraîner des répercussions sur la santé publique. Il est certes indispensable d’apporter une aide immédiate pour tenter de résoudre ce problème, mais il convient également d’envisager des solutions à long terme. Nous devons réfléchir à des moyens techniques et scientifiques plus efficients, car cette problématique risque de perdurer. Pour les Antilles françaises, cet enjeu revêt une importance capitale, et nous soutenons pleinement les démarches entreprises pour y faire face.

La commission adopte l’amendement.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. L’amendement 245 n’est pas soutenu. Nous passons à l’amendement 271.

Amendement CE271 de M. Max Mathiasin

M. Max Mathiasin (LIOT). L’amendement vise à apporter un soutien accru aux associations du secteur sanitaire et social dans les territoires ultramarins. Les populations de ces régions sont davantage touchées par la pauvreté et la grande précarité que celles de l’Hexagone. Nous avons évoqué les taux de chômage élevés, la prévalence des maladies chroniques et les difficultés d’accès aux soins. La crise sanitaire liée au Covid-19, ainsi que ses répercussions sociales et économiques, n’ont fait qu’exacerber ces problèmes et accentuer l’isolement de nombreux citoyens ultramarins.

Dans ce contexte, les associations jouent un rôle essentiel. Elles représentent souvent l’unique point de contact fiable pour les personnes en situation de grande détresse sociale et familiale. C’est pourquoi il est impératif de renforcer leur budget afin qu’elles puissent agir efficacement sur le terrain.

Nous proposons donc les modifications budgétaires suivantes : une augmentation d’un million d’euros des crédits alloués à l’action 04 « sanitaire, social, culture, jeunesse et sport » du programme 123 et une diminution équivalente des crédits de l’action 02 Aide à l’insertion et à la qualification professionnelle du programme 138.

Cette réduction vise à respecter les exigences de la loi organique relative aux lois de finances, qui impose certaines contraintes lors du dépôt d’amendements.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Mon avis est favorable.

Mme Karine Lebon (GDR). Les associations présentes dans nos territoires, et vraisemblablement aussi sur l’ensemble du territoire métropolitain, compensent les insuffisances de l’État. Il s’agit en réalité d’une délégation de service public implicite. Ces organisations nous signalent une hausse considérable du nombre de bénéficiaires, indiquant qu’elles peinent à répondre à la demande. Un nombre croissant de nos concitoyens se retrouve en situation de précarité, confronté à des difficultés pour se nourrir. La distribution de colis alimentaires connaît une augmentation exponentielle, entraînant fréquemment des ruptures de stock. Les associations se voient contraintes de sélectionner les bénéficiaires et de réduire la fréquence des distributions. Pour formuler les choses de manière plus incisive, si l’État ne souhaite pas prendre en charge directement cette mission, il devrait au minimum allouer aux associations les ressources nécessaires pour l’accomplir en son nom.

M. Elie Califer (SOC).  Mon groupe apporte son soutien à l’amendement présenté par notre collègue Mathiasin. Cet amendement mérite l’approbation de tous les groupes parlementaires, car il dépeint une réalité prégnante sur nos territoires, qui s’est accentuée depuis la crise du Covid-19, comme le souligne l’exposé des motifs. Il me semble par ailleurs naturel que les députés, en tant que représentants du peuple, expriment cette demande en séance. C’est donc avec un vif intérêt que notre groupe soutiendra la proposition du groupe LIOT.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE234 de M. Jean-Hugues Ratenon

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Par cet amendement, nous sollicitons le financement de la formation des agents des centres communaux d’action sociale ultramarine sur les violences familiales. Les violences intrafamiliales, englobant celles exercées dans le cadre familial, constituent une problématique grave et préoccupante au sein de notre société. La situation des femmes victimes de violences sexistes et sexuelles s’avère particulièrement préoccupante dans les outre-mer, où de nombreux obstacles entravent la dénonciation de ces situations, tels que le poids culturel, la pression familiale et la disparité géographique.

En 2022, treize femmes ont été assassinées par leur conjoint ou ex-conjoint dans les outre-mer, représentant 11 % du total des féminicides en France, pour une population équivalant à 4 % de la population française. Le Conseil économique, social et environnemental (Cese) en juin 2024, a jugé la situation toujours préoccupante. La prévention et la prise en charge des violences intrafamiliales nécessitent des actions coordonnées aux niveaux départemental et local, comprenant notamment des numéros d’urgence, des guides d’accompagnement et de prévention, ainsi que des dispositifs d’hébergement d’urgence, temporaires, d’accueil et d’accompagnement.

La formation des professionnels constitue un élément essentiel dans la lutte contre les violences intrafamiliales. Cependant, elle demeure insuffisamment développée et souvent limitée aux professionnels de santé. Afin de respecter les règles de recevabilité budgétaire, cet amendement prélève 1 million d’euros en autorisation d’engagement et en crédit de paiement de l’action « financement de l’économie » du programme 138 « emplois outre-mer », pour abonder le nouveau programme « formation des agents des centres communaux et intercommunaux d’action sociale sur les violences intrafamiliales » d’un million d’euros.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. J’émets un avis favorable.

Mme Karine Lebon (GDR).  Permettez-moi d’adresser mes pensées émues aux familles de Kamla et Chloé, deux femmes tragiquement assassinées par leur conjoint cette année à La Réunion. Nous pensons à elles et nous ne les oublions pas.

Je déplore que l’on n’aborde pas suffisamment l’insécurité dont souffrent les femmes, en particulier celles des territoires ultramarins. Bien que l’insécurité dans les outre-mer soit souvent évoquée, je vous assure que le lieu le plus dangereux pour une femme reste son domicile lorsqu’elle subit les violences de son compagnon.

Les moyens alloués aux associations sont insuffisants. De même, les numéros d’urgence manquent d’adaptations nécessaires. À La Réunion, 80 % de la population parle créole. Lorsqu’une femme réunionnaise appelle un numéro d’urgence national et s’exprime en créole, je doute fortement qu’elle puisse être comprise et orientée correctement au niveau national.

Il est donc crucial que nos spécificités linguistiques soient prises en compte. Enfin, lorsque nous parlons d’insécurité, n’oublions jamais celle qui se manifeste au sein du foyer familial.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je souscris entièrement aux propos tenus par Mme Lebon, exprimés avec force et sincérité, comme à son habitude. Je réitère donc mon avis favorable concernant l’amendement proposé.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE235 de M. Jean-Hugues Ratenon

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Par cet amendement, nous proposons de financer des postes supplémentaires de conseillers référents à l’insertion au sein des centres communaux d’action sociale (CCAS). La direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) observe une plus forte persistance dans le RSA en outre-mer, avec 33,6 % des bénéficiaires ultramarins ayant perçu l’allocation chaque fin d’année sur une période de dix ans, contre 19,5 % dans l’Hexagone.

Les CCAS jouent un rôle essentiel dans l’accompagnement des bénéficiaires du revenu de solidarité active. Environ un quart d’entre eux établissent des conventions avec les conseils départementaux pour assister les allocataires du RSA dans l’élaboration et la signature du contrat d’engagement réciproque, notamment pour les publics les plus éloignés de l’emploi.

La récente loi pour le plan d’emploi a modifié l’accompagnement des demandeurs d’emploi en instaurant un nouveau contrat d’engagement unifié qui définit les obligations et l’intensité de l’accompagnement. La problématique liée à l’accompagnement des bénéficiaires du RSA découle en grande partie du manque de personnel disponible. Les CCAS signalent régulièrement cette réalité, soulignant les risques d’une détérioration significative, voire d’une remise en question de l’efficacité des politiques menées en leur faveur.

Pour respecter les règles de recevabilité budgétaire, cet amendement prélève un million d’euros en AE et en CP de l’action Financement de l’économie du programme 138 pour abonder le nouveau programme Renforcer les effectifs des centres communaux et intercommunaux d’action sociale pour accompagner les bénéficiaires de revenus de solidarité active.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. J’émets un avis favorable à cette proposition. Toutefois, au-delà de l’aspect financier, se pose la question cruciale de la prise en charge et de l’accompagnement des bénéficiaires du RSA. Il convient d’améliorer l’articulation entre les CCAS et d’autres services, notamment ceux des départements et de France Travail, afin d’optimiser le suivi et le soutien apportés à ces personnes.

La commission adopte l’amendement.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous passons maintenant à une discussion commune pour les amendements 335 et 323. Nous écoutons M. le rapporteur pour l’amendement 335.

Amendement CE335 de M. Philippe Naillet.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je propose de rétablir, sur la base de la loi de finances 2024, les crédits alloués aux collectivités locales. Cela concerne plusieurs actions distinctes.

Premièrement, l’aménagement du territoire subit une réduction de 147 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 133 millions d’euros en crédits de paiement sur l’action 2.

Deuxièmement, l’action 6 relative aux collectivités territoriales connaît une diminution de 171 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 126 millions d’euros en crédits de paiement. Comme évoqué précédemment, cette réduction de crédit implique le non-élargissement des contrats de redressement outre-mer à de nouvelles communes en 2025.

Troisièmement, l’action 8 relative au fonds exceptionnel d’investissement subit une perte de 50 millions d’euros en autorisations d’engagement et de plus de 16 millions d’euros en crédits de paiement. Je préconise de rehausser ces crédits au niveau de la loi de finances initiale 2024. Ce fonds apporte un soutien financier conséquent aux collectivités territoriales pour la réalisation d’équipements publics collectifs, qui contribuent au développement économique, social, environnemental ou à la transition énergétique.

Enfin, l’action 9 relative à l’appui au financement bancaire est également concernée. Les crédits diminueraient de 46 millions d’euros en autorisations d’engagement et d’environ 5 millions d’euros en crédits de paiement. J’insiste sur ce point : pour ceux qui connaissent le fonctionnement de nos collectivités, cette réduction budgétaire entraînerait une baisse de l’accompagnement fourni par l’agence française de développement aux collectivités locales du secteur public.

Je propose donc de rétablir l’ensemble de ces crédits au niveau prévu par la loi de finances initiale 2024.

Amendement CE323 de M. Elie Califer

M. Elie Califer (SOC).  L’amendement vise à étendre l’éligibilité des contrats de redressement outre-mer aux établissements publics de coopération intercommunale. Ces contrats d’accompagnement permettent aux collectivités de retrouver leur capacité financière grâce au soutien de l’État, qui fournit une assistance technique et des subventions pour relancer leur capacité d’investissement.

Jusqu’à présent réservé aux communes ultramarines, ce dispositif s’avère indispensable pour assainir les finances locales et réduire les délais de paiement des fournisseurs, soutenant ainsi l’économie locale.

Le projet de loi de finances 2024 prévoit une enveloppe de 40 millions d’euros pour poursuivre ces contrats jusqu’en 2026. Nous constatons une baisse du Corom, ce qui est préoccupant pour les collectivités en difficulté.

Certaines intercommunalités, à l’instar de la communauté d’agglomération du Grand Sud-Caraïbe, se trouvent dans une situation financière précaire avec un encours fournisseur de 32 millions d’euros. En intégrant les intercommunalités dans ce dispositif, nous leur permettrons de bénéficier du soutien de l’État pour consolider leur situation financière, optimiser la gestion des paiements et stimuler le développement économique de nos territoires ultramarins. Cela renforcera la section d’investissement, rendant ces territoires plus à même de mener des politiques publiques efficaces dans les domaines du logement, du sport pour notre jeunesse, et de tout ce qui contribue à l’épanouissement des habitants de ces régions.

L’objectif de cet amendement est de rétablir le montant de la loi de finances précédente. Nous avons déjà échangé à ce sujet avec M. le ministre, qui ne semble pas opposé à cette proposition. Il convient donc de soutenir le ministre dans sa démarche en adoptant cet amendement.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je souhaite rappeler que cet amendement vise à réattribuer 10 millions d’euros au dispositif Corom. Lors de son audition, la direction générale des outre-mer a indiqué que la réduction budgétaire envisagée empêcherait la signature de nouveaux contrats de redressement outre-mer en 2025. Cela ferait obstacle à l’intégration de nouvelles collectivités dans ce dispositif, dont l’efficacité a pourtant été démontrée, comme le souligne le rapport d’information du Sénat intitulé « Les contrats de redressement outre-mer : pour des moyens à la hauteur des enjeux ».

Dans ce contexte, Monsieur Califer, je partage votre volonté de redonner les moyens budgétaires nécessaires à la pérennité du dispositif Corom. Néanmoins, l’amendement 335, présenté juste avant celui-ci, permettrait de rétablir les crédits ouverts en loi de finances initiale 2024 pour l’outre-mer en autorisations d’engagement et propose une augmentation des crédits de paiement pour un total de 414 millions. J’ai donc demandé le retrait de l’amendement CE323 au profit du CE335, qui s’avère plus avantageux.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Monsieur Califer, maintenez-vous votre amendement ?

M. Elie Califer (SOC).  J’apprécie toujours le mieux-disant. M. le rapporteur nous indiquait à l’instant que son amendement serait plus approprié. Néanmoins, Monsieur le rapporteur, nous rencontrons une réelle difficulté avec certains établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). Il serait souhaitable qu’ils puissent également intégrer ce dispositif, car les EPCI disposent d’un périmètre de compétences considérable. Ils peuvent également entraver le développement de certaines collectivités qui en font partie. Si ces EPCI manquent de moyens ou ne parviennent pas à retrouver un second souffle, ces communes pourraient en pâtir. C’est notamment le cas du Grand-Sud-Caraïbe en Guadeloupe, exemple sur lequel nous avons fondé cet amendement. Cependant, votre proposition étant plus pertinente, nous l’acceptons et retirons notre amendement.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je remercie Elie Califer et je partage pleinement son analyse concernant les EPCI. Depuis l’adoption de la loi NOTRe, ces structures ont vu leurs compétences s’élargir considérablement. Je songe en particulier à la gestion de l’eau et à l’administration des zones d’activité économique, auparavant du ressort des communes. Par conséquent, il me semble tout à fait pertinent, et nullement choquant, que les EPCI puissent à l’avenir bénéficier de ces dispositifs.

La commission adopte l’amendement.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Je tiens à préciser qu’il s’agit d’un amendement d’un montant de 414 millions d’euros, conformément à la judicieuse remarque de Mme Morel concernant la nécessité de rappeler les ordres de grandeur au fil des discussions.

Nous abordons à présent une série d’amendements traitant des aléas naturels, des calamités naturelles et du fonds de secours. Le premier amendement en discussion commune est le numéro 321, présenté par M. Califer.

Amendement CE321 de M. Elie Califer

M. Elie Califer (SOC).  Je souhaite attirer l’attention sur la proposition de diminution du fonds de secours aux outre-mer dans le cadre de cette mission, alors même que les risques climatiques sont devenus une réalité tangible. Les territoires ultramarins, particulièrement ceux situés dans l’hémisphère sud, subissent fréquemment les conséquences de ces dérèglements climatiques.

Nous demandons le maintien de l’enveloppe allouée l’année précédente à ce fonds de secours. Celui-ci permet d’indemniser partiellement les biens immobiliers des particuliers non assurés, les dommages causés aux exploitations agricoles et les dégâts subis par les infrastructures et les équipements publics des collectivités territoriales.

Cette question revêt une importance particulière, non seulement pour l’Hexagone qui fait face à des événements climatiques extrêmes, mais aussi pour les Antilles actuellement en période cyclonique. Il faut mesurer l’impact psychologique qu’aurait sur nos concitoyens l’adoption d’un budget intégrant une réduction de ce fonds de secours.

Il convient de rappeler, chers collègues, que nous rencontrons déjà des difficultés majeures pour nous assurer dans nos territoires. L’année dernière, nous avons mené une série de discussions avec le ministre de l’économie, M. Le Maire, et les assureurs locaux. Une commission poursuit actuellement ses travaux sur ce sujet. Je ne m’étendrai pas sur les tarifs prohibitifs des polices d’assurance, mais force est de constater que nous peinons à trouver des assureurs.

Dans ce contexte, notre responsabilité est de veiller au maintien du fonds de secours au même niveau que l’année précédente.

Amendement CE300 de M. Max Mathiasin

 M. Max Mathiasin (LIOT). Je propose d’abonder d’un million d’euros les crédits alloués aux collectivités territoriales, plus spécifiquement au fonds de secours. La situation catastrophique dans certains de nos territoires, notamment à Mayotte et en Guadeloupe, rend nécessaire l’augmentation des crédits d’aide d’urgence pour fournir gratuitement de l’eau potable, sous forme de packs d’eau entre autres.

Bien que les nouveaux crédits, tels que la subvention exceptionnelle accordée aux syndicats mixtes de l’eau en Guadeloupe, soient appréciables, ils demeurent insuffisants et ne répondent pas à l’urgence immédiate. Cette urgence n’est pas ponctuelle, elle ne se manifeste pas uniquement quelques jours exceptionnels par an, mais de manière quasi continue. Le manque d’eau potable est une réalité quotidienne, persistant depuis des années, et les solutions actuellement mises en œuvre ne s’avèrent pas efficaces pour l’instant.

Nous suggérons d’augmenter les crédits du fonds de secours, qui stagnent depuis des années à 10 millions d’euros. Le mouvement proposé consiste en une augmentation d’un million d’euros des crédits de l’action 6 du programme 123, compensée par une diminution équivalente des crédits de l’action 01 Soutien aux entreprises du programme 138.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je suis favorable à l’amendement 321 présenté par M. Elie Califer. En revanche, je demande le retrait de l’amendement 300 proposé par notre collègue Mathiasin. Cette distinction s’explique simplement par le fait que l’amendement précédent prévoit un abondement du fonds de secours à hauteur de 10 millions d’euros, tandis que celui de M. Mathiasin, si j’ai bien saisi son contenu, ne propose qu’un million d’euros.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Je souscris largement aux amendements proposés par mes collègues. Le droit actuel s’avère inadapté aux aléas climatiques que connaissent les territoires ultramarins. Notre pays s’enorgueillit d’être la deuxième puissance maritime mondiale, ce qui implique de s’adapter aux contraintes spécifiques de nos territoires d’outre-mer, liées à leur diversité géographique.

Comme l’a souligné mon collègue, l’urgence n’est pas ponctuelle pour nos collectivités locales. Il est impératif de s’adapter aux spécificités territoriales et aux aléas climatiques auxquels nous sommes confrontés. Force est de constater que le risque assurantiel n’est pas correctement coordonné aujourd’hui. Face aux catastrophes naturelles, les assurances ne répondent plus de manière adéquate.

Le régime de l’état de catastrophe naturelle constitue également un enjeu majeur dans notre pays. Il ne semble pas pleinement adapté aux réalités que nous vivons face à certaines tempêtes. Pour illustrer mon propos, je citerai l’exemple de mon territoire qui a été frappé par la tempête Ciarán il y a tout juste un an. Lorsque les maires et les collectivités ont dû remplir les formulaires pour obtenir la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, nous ne correspondions pas aux critères établis. Il aurait fallu que nous disposions de critères relatifs aux tempêtes tropicales pour être éligibles, ce qui ne correspondait nullement aux critères en vigueur à l’époque.

Il est donc essentiel d’abonder ce fonds d’urgence et, plus globalement, de réfléchir aux moyens dont disposent nos collectivités locales pour faire face à ces risques climatiques.

M. Max Mathiasin (LIOT). Madame la présidente, je souhaite apporter une précision importante à notre assemblée concernant la distribution de packs d’eau. Sur notre territoire, lors de pluies diluviennes charriant des terres alluviales, l’eau devient impropre à la consommation et le système d’épuration s’avère insuffisant. En Guadeloupe, nous sommes confrontés à la problématique de l’acheminement de l’eau depuis la Basse-Terre, où elle est chlorée, vers la Grande-Terre. Cette opération nécessite des filtrages coûteux et du matériel onéreux, sans compter les pannes fréquentes. Conséquemment, la population se retrouve privée d’eau pendant des semaines entières dans certains quartiers et communes, de manière récurrente.

La résolution de cette problématique de l’eau en Guadeloupe prendra du temps. C’est pourquoi je préconise une action spécifique - qui est d’ailleurs l’un des chevaux de bataille du député Serva, absent aujourd’hui - pour mettre en place un secours d’urgence. L’objectif serait simplement d’approvisionner les familles en eau potable. En effet, lorsque l’on ouvre le robinet et que la radio annonce que l’eau est impropre à la consommation, ou qu’il n’y en a pas du tout pendant une semaine, la situation devient critique.

Je peux vous assurer que durant la période récente où nous avons subi des coupures d’électricité en plus des pénuries d’eau, la situation était particulièrement difficile. De nombreuses personnes vivent dans des endroits nécessitant un surpresseur pour acheminer l’eau, ce qui a considérablement compliqué la vie des familles.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Si je comprends bien l’amendement de M. Mathiasin, à hauteur d’un million d’euros, il concerne les problèmes d’eau en Guadeloupe et Mayotte, alors que l’amendement de M. Califer vise à abonder de 10 millions d’euros le fonds de secours pour l’ensemble des territoires ultramarins.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous procédons maintenant au vote sur les deux amendements. Concernant l’amendement numéro 321 de Monsieur Califer, je sollicite l’avis de l’assemblée.

La commission adopte l’amendement.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. L’amendement est adopté et fait tomber l’amendement 300.

Nous abordons à présent à l’examen d’une nouvelle discussion commune, en commençant par l’amendement 228 présenté par M. Ratenon.

Amendement CE228 de M. Jean-Hugues Ratenon

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Par cet amendement, nous tenons à souligner l’urgence d’instaurer un plan d’urgence concret pour garantir l’accès à l’eau dans les outre-mer. Cette problématique persistante pèse au quotidien sur nos concitoyens ultramarins, privés de ce bien commun vital. De la Guadeloupe à Mayotte, les mesures prises demeurent insuffisantes face à l’ampleur des besoins pour éradiquer ce fléau. La France est d’ailleurs régulièrement critiquée pour son manque d’action.

En mars dernier, l’Unicef a exhorté le gouvernement à agir pour assurer l’accès libre à l’eau potable des enfants dans les régions ultramarines. L’organisation a mis en lumière les difficultés majeures d’accès à l’eau et à l’assainissement dans ces territoires, où des milliers d’enfants peinent quotidiennement à s’approvisionner en eau. L’organisation internationale a rappelé que 30 % de la population à Mayotte et entre 15 % et 20 % en Guyane n’ont pas accès à l’eau potable. À La Réunion, la moitié des habitants ne peut consommer l’eau du robinet.

Des investissements considérables s’imposent, notamment pour la rénovation des canalisations vétustes. En Guadeloupe, par exemple, le taux de perte dans le réseau d’eau potable atteint en moyenne 60 %. Il est impératif d’agir sans délai pour remédier à cette situation alarmante.

Amendement CE329 de Mme Sandrine Rousseau

M. Benoît Biteau (EcoS).  Il convient d’aborder la situation des infrastructures dédiées à la distribution de l’eau potable dans les territoires d’outre-mer de Mayotte, Guadeloupe, Martinique, Réunion et Guyane. Ces régions dépendent actuellement de réseaux vétustes qui subissent des coupures fréquentes et offrent un accès limité à l’eau potable.

Je tiens à rappeler ici les priorités établies par le code de l’environnement, qui stipule qu’en matière d’eau, il est impératif de garantir un accès suffisant en quantité et en qualité pour toutes les populations. La situation actuelle contrevient manifestement aux réglementations nationales ainsi qu’au code de l’environnement.

Il est donc indispensable de mettre en œuvre tous les moyens nécessaires pour créer des infrastructures capables d’assurer une distribution adéquate d’eau potable sur ces territoires ultramarins. Nous sollicitons ainsi le financement urgent d’un plan dédié à cette problématique, doté de 100 millions d’euros afin de réaliser les travaux indispensables et remédier à cette situation inacceptable qui ne respecte plus nos normes légales.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je donne un avis favorable à l’amendement 329 de Mme Rousseau concernant un plan d’investissement sur les infrastructures d’eau potable.

Concernant l’amendement 228 de M. Ratenon, je partage son engagement visant à améliorer l’accès à l’eau, ressource rare et vitale, notamment dans nos territoires ultramarins, ainsi que son assainissement. Il est en effet impératif de réduire les fuites et les coupures d’eau, trop fréquentes et inacceptables dans ces régions.

Le document de politique transversale relatif aux outre-mer indique qu’entre 2016 et 2022, l’État a mobilisé 12,5 millions d’euros à cet effet, ce qui s’avère insuffisant. C’est pourquoi j’émets un avis favorable à l’amendement de Mme Rousseau.

Quant à l’amendement de Monsieur Ratenon, bien que je partage entièrement son diagnostic, je m’inquiète des conséquences potentielles d’une diminution de 500 millions d’euros pour le soutien aux entreprises. Dans le contexte économique actuel particulièrement dégradé, cette mesure me semble risquée si le gouvernement ne lève pas le gage.

Je rappelle que hier soir, avec Madame Lebon et de nombreux collègues, nous avons voté pour que l’augmentation de deux points de cotisation, appelée « désmicardisation », n’affecte pas le dispositif d’exonérations prévu par la loi du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer (Lodeom). Il serait donc paradoxal d’approuver maintenant une réduction de 500 millions d’euros d’aide aux entreprises dans la mission entrepreneurs.

Pour ces raisons, je sollicite le retrait de cet amendement.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Madame Nosbé, maintenez-vous ou retirez-vous votre amendement ?

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Je vais maintenir cette position. En effet, je partage l’avis des écologistes, mais nous proposons en réalité cinq fois plus, tout en étant conscients que l’eau est essentielle.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Je soutiens les recommandations du rapporteur au nom du groupe Socialistes. J’attire cependant votre attention sur le fait que mon collègue Baptiste présentera ensuite un amendement que je défendrai. Celui-ci concerne spécifiquement une enveloppe actuellement attribuée aux collectivités locales pour la gestion de l’eau.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous procédons au vote des amendements. L’amendement numéro 228 de Monsieur Ratenon, proposant une allocation de 500 millions d’euros, a reçu un avis défavorable du rapporteur.

La commission rejette l’amendement.

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). L’amendement numéro 329 de Mme Rousseau, prévoyant une dotation de 100 millions d’euros, bénéficie d’un avis favorable du rapporteur.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE3016 de M. Christian Baptiste.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Cet amendement porte sur une question cruciale de santé publique, d’environnement et de dignité dans nos territoires ultramarins : l’accès à l’eau. Nous visons à rétablir et renforcer la subvention exceptionnelle accordée aux syndicats mixtes de gestion de l’eau et de l’assainissement de Guadeloupe. Notre objectif est de pérenniser cette aide sur le long terme afin de faire face à la crise de l’eau dans ce département.

La Cour des comptes a déjà alerté sur la situation alarmante des territoires ultramarins concernant l’accès à l’eau. En Guadeloupe, le réseau de distribution, extrêmement vétuste, entraîne des pertes d’eau considérables. Les conséquences pour la population sont directes : mauvaise qualité de l’eau potable et coupures récurrentes. Cette situation est inacceptable dans notre pays.

La tempête tropicale Philippe, survenue début octobre, a aggravé les problèmes d’accès à l’eau en Guadeloupe. Paradoxalement, l’enveloppe allouée au syndicat mixte diminue de 10 millions d’euros dans le projet de loi de finances que nous examinons actuellement.

Mon groupe demande donc avec insistance que cette enveloppe soit non seulement rétablie, mais aussi renforcée et garantie dans la durée.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. J’exprime un avis favorable.

M. Elie Califer (SOC).  Je tiens à souligner deux points essentiels. D’une part, il convient de rappeler l’analyse de la Cour des comptes, ainsi que les avertissements répétés de l’ONU depuis des années concernant la situation de l’eau. D’autre part, je souhaite aborder la récente campagne médiatique nationale qui a dénigré la gestion de l’eau, évoquant des millions d’euros disparus. Face à ces allégations, j’ai immédiatement contacté le préfet de Guadeloupe. Celui-ci m’a assuré qu’il s’agissait uniquement de difficultés comptables, le comptable en question étant rattaché à la direction régionale des finances publiques, donc à l’État lui-même. La situation a depuis été clarifiée.

Notre requête actuelle s’inscrit dans le cadre d’une problématique globale de l’eau. Nous ne sollicitons pas un soutien exceptionnel, mais un accompagnement durable jusqu’à ce que nous atteignions un niveau satisfaisant de distribution d’eau, tant en quantité qu’en qualité, sur nos territoires.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE324 de M. Elie Califer.

M. Elie Califer (SOC).  Je propose un amendement visant à renforcer le fonds outre-mer afin d’améliorer l’ingénierie des collectivités ultramarines. Nos territoires souffrent d’un manque d’ingénierie, car les compétences techniques sont souvent captées au niveau national. L’Agence française de développement (AFD) pilote ce fonds pour le compte du ministère de l’outre-mer. Ce dispositif d’assistance à maîtrise d’ouvrage a pour objectif de soutenir le développement des capacités des territoires ultramarins dans la réalisation de projets structurants.

Actuellement doté de 10 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 2 millions d’euros en crédits de paiement, le fonds outre-mer connaît une baisse constante de ses crédits. À l’instar de M. le rapporteur, nous demandons que ces crédits soient réévalués pour atteindre le niveau fixé dans la loi de finances de l’année précédente. Nous sommes disposés à participer à l’effort national, comme nous l’avons exprimé à M. le ministre, mais pas au détriment de domaines essentiels. Dans un esprit de solidarité, nous souhaitons que ce fonds soit revalorisé pour mieux soutenir les collectivités ultramarines.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Mon avis est favorable.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE226 de M. Jean-Hugues Ratenon

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Par cet amendement, nous proposons la création d’une agence dédiée au soutien à l’ingénierie des collectivités territoriales ultramarines. Le défaut des moyens d’ingénierie de ces collectivités est régulièrement soulevé et explique en partie la non-consommation de crédits, mais ne justifie en rien les baisses de ces crédits, bien au contraire.

Le fonds outre-mer n’est pas suffisant pour répondre à ce besoin. Le renforcement des capacités d’ingénierie des collectivités ultramarines est essentiel pour accélérer l’investissement.

Dans son rapport de mai 2022 sur les financements de l’État en outre-mer, la Cour des comptes rappelait que les faibles capacités administratives et techniques des collectivités ne permettaient pas l’expertise nécessaire pour les investissements à réaliser. Il y était proposé de généraliser les plateformes d’ingénierie dans les territoires ultramarins en y consacrant les effectifs et les moyens nécessaires.

Cet amendement vise donc à prélever 33,5 millions d’euros d’AE et de CP sur l’action Soutien aux entreprises du programme 138 Emploi outre-mer pour abonder le nouveau programme Agences de soutien et de coordination à l’ingénierie locale des collectivités d’outre-mer.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je partage votre constat concernant l’insuffisance du soutien apporté à l’ingénierie des collectivités territoriales ultramarines. Toutefois, plutôt que de créer une nouvelle structure spécifique, dont la mise en place pourrait s’avérer chronophage, il me paraîtrait plus judicieux de renforcer le volet dédié aux projets ultramarins au sein de l’agence nationale de la cohésion des territoires, qui est déjà opérationnelle. Par conséquent, je demande le retrait de cette proposition.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Madame Nosbé, maintenez-vous ou retirez-vous l’amendement de M. Ratenon ?

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Nous le maintenons.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Puisque vous le maintenez, j’émets un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

 

Amendement CE229 de Mme Sandrine Nosbé.

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Par cet amendement, nous proposons d’envisager la création d’instituts régionaux d’administration (Ira) dans les collectivités ultramarines. Actuellement, aucun Ira n’existe dans ces territoires. Un tel dispositif inciterait l’administration centrale et déconcentrée à mieux prendre en compte les réalités ultramarines et à développer une culture spécifique à l’outre-mer. Cela permettrait d’accroître l’efficacité des politiques publiques et d’améliorer la représentativité des outre-mer.

Cette initiative constituerait également une avancée significative en termes d’insertion professionnelle pour les ultramarins. Trop souvent, ces derniers se voient contraints de quitter leur collectivité pour se former dans l’Hexagone, faute d’offres suffisantes sur place.

Afin de respecter les règles de recevabilité budgétaire, cet amendement prévoit un prélèvement de 25 millions d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement de l’action 1 « soutien aux entreprises » du programme 138.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

 

 

Amendement CE231 de Mme Sandrine Nosbé

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Par cet amendement d’appel, nous souhaitons attirer l’attention sur la situation à Mayotte, qui découle d’un sous-investissement chronique de l’État, perpétuant ainsi les disparités croissantes dans le département le plus défavorisé de France. La pauvreté à Mayotte ne cesse de s’accentuer au fil du temps. L’indice de développement humain y atteint seulement 0,64, bien en deçà de la moyenne mondiale de 0,73, et nettement inférieur à celui de la France métropolitaine qui s’élève à 0,87. Cette situation résulte d’une conjonction de facteurs qui s’amplifient mutuellement avec un accès limité aux soins et à l’éducation, ainsi qu’un PIB par habitant de 9 170 euros, comparé aux 36 897 euros en métropole. Il convient de souligner que les trois quarts des Mahorais vivent sous le seuil de pauvreté, soit une proportion plus de cinq fois supérieure à celle observée en France hexagonale.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je soutiens cet amendement d’appel, dont l’objectif est d’attirer une nouvelle fois l’attention sur la situation préoccupante de Mayotte. Je comprends que cet amendement vise à lancer un signal d’alerte et j’y suis favorable.

M. Elie Califer (SOC).  Je souhaite exprimer notre soutien à cet amendement d’appel. Nous ne pouvons demeurer silencieux face à une proposition qui soulève une problématique bien réelle.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE251 de Mme Sandrine Nosbé

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Nous proposons la mise en œuvre d’un plan de reconstruction pour la Nouvelle-Calédonie afin de remédier à la crise exacerbée par le dernier gouvernement, qui a détérioré une situation socio-économique déjà précaire. L’examen du projet de loi constitutionnel sur le dégel partiel du corps électoral a suscité de vives oppositions en Nouvelle-Calédonie, plongeant le territoire dans une crise aiguë qui perdure malgré la suspension du texte.

L’exécutif porte la responsabilité de cette escalade, résultant d’un abandon progressif de l’esprit de l’accord de Nouméa, qui avait jusqu’alors préservé la paix locale. Il incombe désormais à l’État d’assumer ses responsabilités face à l’effondrement de la situation socio-économique en Nouvelle-Calédonie.

Actuellement, les aides financières se limitent à environ 400 millions d’euros, comprenant des prêts et avances remboursables que la collectivité peinera à rembourser. Nous suggérons d’adopter la proposition du Congrès en instaurant un plan de reconstruction quinquennal de 4,2 milliards d’euros, financé à hauteur de 840 millions d’euros par an dès 2025.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Cet amendement ne vise pas à alerter, mais concerne spécifiquement la situation en Nouvelle-Calédonie que nous partageons tous. Il est important de souligner que ni les habitants de Nouvelle-Calédonie, ni nous-mêmes, ne sommes responsables des événements qui s’y sont produits. Mon avis est donc empreint de sagesse.

M. Elie Califer (SOC).  À l’Assemblée nationale, nous avions alerté le gouvernement il y a longtemps sur la prudence nécessaire dans ses décisions concernant la situation de ce territoire. Bien que nous soyons intellectuellement en accord avec cet amendement, nous estimons que la reconstruction de la Nouvelle-Calédonie ne devrait pas reposer sur cette mission.

Des discussions sont en cours avec l’État central et le ministère pour élaborer un plan de reconstruction. Si nous adoptions cet amendement maintenant, dans le cadre de cette mission, nous anticiperions de manière prématurée. Nous avons déjà procédé à quelques votes pour mettre en lumière la réalité de la situation. Il convient de laisser à l’État la responsabilité de répondre à ce besoin, en poursuivant ses négociations avec le Congrès.

Mme Mereana Reid Arbelot (GDR). Je partage l’avis de mon collègue. La situation en Nouvelle-Calédonie nécessite l’allocation d’un budget spécifique. Il incombe à l’État d’assumer ses responsabilités concernant les événements passés et la conjoncture actuelle dans ce territoire.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Le rapporteur a émis un avis de sagesse sur l’amendement 251.

La commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous abordons à présent la discussion commune relative à la régulation des prix pour lutter contre la vie chère. Deux amendements identiques sont à l’étude, dont l’amendement 336 présenté par Monsieur Naillet.

Amendement CE336 de M. Philippe Naillet.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je propose un amendement visant à allouer 3 millions d’euros dès 2025 à l’autorité de la concurrence. Ces fonds permettraient la création de 80 équivalents temps plein spécifiquement dédiés aux territoires ultramarins au sein de cette institution. Cette mesure s’inscrit dans le prolongement des recommandations formulées par le rapport de la commission d’enquête « vie chère » en 2023.

Amendement CE317 de Mme Béatrice Bellay

M. Elie Califer (SOC).  Je présente cet amendement, élaboré par Madame Bellay, qui vise à renforcer les effectifs de l’autorité de la concurrence pour permettre la création d’une équipe dédiée spécifiquement et exclusivement à l’outre-mer. Dans nos territoires ultramarins, nous constatons la présence d’entreprises en situation d’oligopole ou de monopole, entraînant une absence de concurrence sur des marchés captifs. Il s’avère donc essentiel de doter ces territoires de moyens de contrôle et de régulation adéquats.

Pour respecter les contraintes de l’article 40, nous avons procédé à un ajustement technique en prélevant les fonds nécessaires sur l’action 9 du programme 123. Cette manœuvre vise uniquement à satisfaire aux exigences réglementaires.

Le renforcement des effectifs de l’autorité de la concurrence répond à un besoin réel et pressant. Il permettrait de réguler les prix et d’éviter des situations telles que celle que nous observons actuellement en Martinique, où la population exprime son désespoir depuis plus de 50 jours, voire deux mois, face à des tarifs jugés excessifs.

Amendement CE233 de M. Jean-Hugues Ratenon

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Par cet amendement, nous souhaitons attirer l’attention sur les phénomènes de concentration de marchés dans les outre-mer. Nous proposons la création d’une autorité de la concurrence spécifique à ces territoires. Les mobilisations actuelles contre la vie chère en outre-mer, notamment en Martinique mais également dans d’autres collectivités, mettent en évidence la nécessité de réformer le cadre de l’organisation économique et le contrôle des concentrations dans ces régions.

Le droit de la concurrence doit prendre en compte les particularités ultramarines, où ces phénomènes revêtent une importance singulière et menacent les équilibres économiques et sociaux.

Notre amendement vise à établir une autorité de la concurrence outre-mer, dotée de ressources suffisantes pour coordonner les travaux des OPMR. Cette autorité interviendrait au plus près des situations de concentration afin de les limiter et ainsi lutter contre la vie chère.

Nous suggérons d’allouer à cette autorité un budget de 12,5 millions d’euros, ce qui représente la moitié du budget actuel de l’autorité de la concurrence nationale.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je suis favorable à l’amendement CE317 de Mme Bellay ainsi qu’à mon propre amendement CE336. En revanche, je demande le retrait de l’amendement de Jean-Hugues Ratenon. Il me paraît plus judicieux de privilégier la création d’équivalents temps plein (ETP) dédiés et spécialisés sur les outre-mer au sein d’une structure existante, plutôt que de mettre en place une nouvelle entité ad hoc. Cette dernière option risquerait d’être chronophage dans sa mise en œuvre, alors que nos territoires ne peuvent plus patienter face à une vie chère devenue intolérable. Il est préférable de tirer parti des synergies et des ressources déjà allouées à l’autorité de la concurrence.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Madame Nosbé, retirez-vous ou maintenez-vous cet amendement ?

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Je maintiens ma position. Concernant la décision suivante, je dois préciser que nous proposons 12,5 millions d’euros et non 6 millions comme initialement indiqué.

M. Jean-Luc Fugit (EPR). Nous apporterons sans hésitation notre soutien à l’amendement du rapporteur. Je considère qu’il est à la fois raisonnable et qu’il découle directement des conclusions de la commission d’enquête.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous soumettons au vote les amendements identiques 336 et 317.

La commission adopte les amendements.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Cette adoption entraîne de fait le rejet de l’amendement 233 de M. Ratenon.

Nous abordons l’amendement 243, relatif à l’investissement dans l’autonomie énergétique des outre-mer.

Amendement CE243 de Mme Sandrine Nosbé

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Nous proposons, par cet amendement, la création d’un nouveau programme dédié à l’investissement dans l’autonomie énergétique basée sur 100 % d’énergies renouvelables pour les Outre-mer. L’autonomie énergétique devrait être considérée comme un objectif prioritaire dans les territoires insulaires et éloignés. Selon l’agence de la transition écologique (Ademe), les collectivités d’outre-mer disposent d’un environnement propice à l’atteinte d’une autonomie totale en énergies renouvelables. Néanmoins, ces territoires continuent d’importer massivement une énergie à forte teneur en carbone.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je reconnais la volonté et la nécessité de parvenir à une production d’énergie propre sur nos territoires. Nous disposons déjà de toutes les ressources nécessaires. À La Réunion, la programmation pluriannuelle de l’énergie du conseil régional envisage une production d’énergie propre à l’horizon 2050, bien que notre production électrique actuelle soit en grande partie décarbonée. Cependant, des efforts restent à fournir et je partage cette ambition.

Néanmoins, malgré mon accord sur la nécessité d’investir dans les énergies propres, je vous demande de retirer cet amendement. En effet, vous proposez de prélever 300 millions d’euros dans l’action 1 Soutien aux entreprises, ce qui risquerait de vider le programme 138.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Madame Nosbé, retirez-vous ou maintenez-vous cet amendement ?

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Pas de retrait.

La commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous abordons à présent une discussion commune portant sur l’amendement 341 du rapporteur, relatif à la décarbonation des mobilités dans les territoires ultramarins.

Amendement CE341 de M. Philippe Naillet

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je propose la mise en place d’un fonds spécifiquement dédié au projet de décarbonation des mobilités, doté de 10 millions d’euros de crédits. Il s’agit en réalité d’un fonds d’amorçage, dont l’objectif est clairement défini et dont la portée est bien comprise par tous.

Amendement CE244 de M. Jean-Hugues Ratenon

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Par cet amendement, nous proposons la création d’un fonds destiné à soutenir le financement des projets de transports collectifs portés par les collectivités et la population des outre-mer, notamment les projets ferroviaires. L’investissement dans des transports publics de qualité dans ces territoires doit constituer une priorité pour améliorer les conditions de vie de leurs habitants.

À La Réunion, par exemple, l’automobile occupe une place prépondérante dans les déplacements. Près de 89 % des trajets s’effectuent en véhicules particuliers. Bien que le nombre de voyageurs utilisant les transports en commun augmente chaque année, la part de ces déplacements se maintient autour de 6 % en raison de la forte croissance démographique.

Les collectivités s’efforcent de proposer des solutions alternatives à la voiture : transports en commun en site propre, utilisation de vélos, téléphériques, etc. Cependant, le développement d’un réseau ferroviaire semble mieux adapté à la situation, car plusieurs collectivités ultramarines manquent de transports collectifs et alternatifs.

Pour conclure, je souhaite souligner que lors du bilan des états généraux des mobilités présentés en février 2024, 77 % des Réunionnais ont exprimé leur souhait d’un réseau ferroviaire. Il incombe donc à l’État d’accompagner ce type de projet.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je demande le retrait de cet amendement au profit du CE341, qui inclut également le secteur ferroviaire. Cependant, je tiens à souligner le risque persistant d’épuiser l’enveloppe de l’action 1 dédiée au soutien aux entreprises. Je rappelle que l’amendement proposé par M. Ratenon s’élevait à 200 millions d’euros, ce qui représente une somme considérable.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Je vous propose de passer au vote, s’agissant d’abord de l’amendement 341 du rapporteur.

La commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous passons à l’amendement 244 de M. Ratenon.

La commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous examinons maintenant les deux amendements identiques 337 et 318. La parole est au rapporteur.

Amendement CE337 de M. Philippe Naillet

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je propose d’augmenter de 6 millions d’euros le budget alloué à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) afin de renforcer ses effectifs dans les territoires d’outre-mer.

Amendement CE318 de M. Jiovanny William

M. Elie Califer (SOC).  L’amendement que nous proposons vise à doter la DGCCRF de moyens accrus pour intervenir plus efficacement dans nos territoires. Ces derniers font face à un contexte de concurrence limitée. Il s’avère donc impératif de renforcer les effectifs de la direction générale. Cette mesure permettrait d’envoyer un message clair aux entreprises et d’assurer la réalisation d’enquêtes approfondies sur les marchés présentant des dysfonctionnements, dans l’objectif d’agir sur les prix dans nos territoires.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. J’exprime un avis favorable pour les deux amendements.

La commission rejette les amendements.

 

Amendement CE339 de M. Philippe Naillet.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Cet amendement propose d’allouer un million d’euros à un fonds spécifique, géré par l’office français de la biodiversité, pour la préservation de la biodiversité dans les territoires d’outre-mer. Je suis convaincu que la protection de la biodiversité constitue un enjeu partagé par tous. Il convient de souligner que l’essentiel de notre richesse biologique se concentre dans nos territoires ultramarins. Actuellement, la biodiversité subit de nombreuses pressions. Cette mesure vise donc à doter ce fonds d’un million d’euros pour soutenir les efforts de préservation de notre patrimoine naturel ultramarin.

M. Elie Califer (SOC).  Nous appuyons cet amendement avec conviction, d’autant plus que le fonds vert connaît actuellement une baisse considérable de ses moyens. Il s’avère essentiel de pérenniser nos efforts en faveur de la biodiversité et de la préservation de nos écosystèmes.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE40 de M. Philippe Naillet

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je propose un amendement modeste visant à renforcer les effectifs de l’Office national des forêts (ONF) en outre-mer. Il s’agit d’allouer un million d’euros supplémentaires, ce qui permettrait de créer environ vingt équivalents temps plein additionnels.

La commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous abordons à présent l’après-article 60, qui concerne des demandes de rapports. Nous commencerons par l’amendement numéro 232 de M. Ratenon.

Amendement CE232 de M. Jean-Hugues Ratenon

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Par cet amendement, nous proposons d’évaluer l’efficacité des dépenses fiscales de l’État sur l’emploi dans les outre-mer. Les dépenses fiscales de soutien aux entreprises, prévues par la présente mission, visent à renforcer la compétitivité des sociétés, principalement par des dispositifs d’exonération et de réduction de cotisations sociales patronales. L’objectif est de soutenir l’emploi dans les territoires ultramarins. Ces mesures constituent le premier poste de dépenses du ministère chargé des outre-mer.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. J’émets un avis de sagesse sur cette question, madame la présidente. Ma position s’explique par le fait que l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) et l’Inspection générale des finances (IGF) sont sur le point de remettre leur rapport concernant l’efficacité des dispositifs actuellement en place. Ce document doit être publié dans les prochaines semaines.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CE250 de M. Jean-Hugues Ratenon

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Nous proposons, par cet amendement, d’examiner le principe d’une continuité territoriale économique pour le transport de marchandises dans les territoires d’outre-mer. La vie chère, comme nous l’avons souligné tout au long de la journée, n’est pas un phénomène récent. D’après les données de l’Insee, les différences de prix les plus significatives entre la métropole et les territoires ultramarins se manifestent dans le secteur des produits alimentaires. Ces écarts s’élèvent à près de 40 % en Guadeloupe, Martinique et Guyane, 37 % à La Réunion et 30 % à Mayotte.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Mon avis est favorable.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CE249 de M. Jean-Hugues Ratenon

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Cet amendement vise à obtenir un rapport sur la mobilité professionnelle des ultramarins. En effet, les habitants des territoires d’outre-mer se déplacent fréquemment vers l’Hexagone pour diverses raisons : poursuivre leurs études, trouver un emploi ou bénéficier de soins médicaux spécialisés. Le taux de chômage nettement plus élevé dans les territoires ultramarins que dans l’Hexagone pousse de nombreux jeunes et professionnels à envisager une mobilité géographique afin d’améliorer leurs perspectives professionnelles.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Avis favorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE238 de M. Jean-Hugues Ratenon

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Par cet amendement, nous proposons d’instaurer un Smic ultramarin. Notre formation politique plaide pour une revalorisation du Smic à 1 600 euros sur l’ensemble du territoire national, contre 1 398 euros au 1er janvier 2024. Dans les collectivités d’outre-mer, la vie quotidienne s’avère particulièrement ardue. Le coût élevé de la vie, accentué par l’éloignement géographique et les spécificités économiques inhérentes à nos régions insulaires, pèse considérablement sur chaque habitant. Ainsi, les fins de mois se transforment en une épreuve récurrente pour de nombreux citoyens ultramarins.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Mon avis est favorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE240 de M. Jean-Hugues Ratenon

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). L’amendement est un appel à la réforme du bouclier qualité-prix dans les outre-mer afin de réduire significativement le coût des produits de première nécessité. Cette mesure s’avère indispensable face à l’augmentation continue des prix dans les territoires ultramarins, phénomène exacerbé par leurs spécificités géographiques, économiques et sociales. Il est désormais urgent d’entreprendre des actions concrètes et efficaces au bénéfice des populations locales, notamment en Martinique où la mobilisation est particulièrement intense, mais également dans les autres territoires d’outre-mer.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je rends un avis de sagesse sur cet amendement. Cette position s’explique par le fait que la demande de rapports proposant une réforme du BQP a déjà fait l’objet d’une étude approfondie dans le cadre du rapport d’enquête sur la vie chère.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE246 de M. Jean-Hugues Ratenon.

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Par cet amendement, nous proposons la rédaction d’un rapport exhaustif sur la pénurie de logements étudiants dans les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (Crous) des territoires d’outre-mer.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je demande le retrait de cet amendement en vue d’une réécriture pour l’examen en commission des finances. En effet, si j’ai bien compris, le champ de l’amendement tel qu’il est rédigé se limite aux collectivités d’outre-mer. Il conviendrait donc d’y intégrer également les départements et régions d’outre-mer.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Maintenez-vous ou retirez-vous cet amendement ?

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Nous le maintenons.

La commission rejette l’amendement.

 

 

Amendement CE236 de Mme Sandrine Nosbé

Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Cet amendement vise à évaluer les dispositifs fiscaux relatifs aux locations de courte durée dans les territoires d’outre-mer. Bien que 80 % de la population ultramarine soit éligible au logement social, seuls 15 % en bénéficient effectivement. Force est de constater que les objectifs de construction de logements ne sont pas atteints. En conséquence, les citoyens ultramarins se trouvent confrontés à une pénurie de logements, face à une offre insuffisante au regard de la demande et à un marché privé saturé et onéreux.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Avis favorable.

La commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous avons terminé l’examen des amendements. Je tiens à vous remercier pour votre attention soutenue durant ces discussions. Il était essentiel de consacrer le temps nécessaire à cet avis budgétaire concernant les outre-mer.

Nous allons maintenant procéder au vote sur la mission outre-mer dans le cadre de l’avis rendu par notre commission sur ces crédits pour 2025. Avant cela, j’invite le rapporteur à nous rappeler son avis sur les crédits relevant du périmètre de cet avis budgétaire relatif à l’outre-mer.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Étant donné les arguments que j’ai exposés en ouverture de cette commission, je ne souhaite pas prolonger les débats. J’émets donc un avis défavorable.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Vous émettez donc un avis défavorable sur ces crédits malgré les amendements adoptés ?

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. J’ai été favorable à l’adoption des amendements proposés. Cependant, je m’oppose à la mission outre-mer telle que présentée dans son ensemble. Pour clarifier ma position, je réitère mon soutien aux amendements spécifiques, tout en maintenant mon opposition initiale à la mission outre-mer dans sa globalité.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Avant de passer au vote, il convient d’accorder un temps de parole aux collègues qui souhaitent intervenir. La parole est donc donnée à M. le vice-président Lecamp.

M. Pascal Lecamp (Dem).  Je tiens à souligner que mon intervention, ainsi que celles de certains collègues, visait à proposer des améliorations, notamment en matière de formation. Cependant, après concertation avec mes collègues du centre, nous estimons que les amendements présentés sont excessifs sur le plan budgétaire, compte tenu des contraintes actuelles.

Par conséquent, nous ne voterons pas en faveur de ce nouveau projet de budget. Néanmoins, nous choisirons l’abstention pour signifier notre volonté d’améliorer le budget proposé, dans des limites raisonnables et en adéquation avec le contexte budgétaire actuel.

M. Elie Califer (SOC).  Notre position ferme, que nous transmettrons au ministre, est que notre budget, tout en contribuant à l’effort de solidarité nationale, retrouve son niveau de 2024. Ces territoires présentent des spécificités qui justifient cette demande. Il est en effet impossible de ponctionner ceux qui ne disposent d’aucune ressource.

M. Philippe Naillet, rapporteur pour avis. Je tiens à souligner que notre exercice ce matin a été empreint de responsabilité. Les amendements susceptibles de vider certaines actions de leur substance n’ont pas été adoptés. Ceux qui ont reçu l’approbation de la commission s’inscrivent dans les limites de la loi de finances initiale pour 2024.

Face à cette attitude responsable des commissaires, je ne vous demande pas de vous abstenir, ce que j’aurais compris si nous avions agi de manière irresponsable. Au contraire, nous avons fait preuve de sagesse. Ainsi, le message que nous devons transmettre à nos collègues ultramarins, même si nous ne sommes que la commission des affaires économiques pour avis, est que lorsque nous agissons de façon responsable, il convient de voter favorablement.

Je réitère qu’aucun amendement adopté ce matin ne risque de vider une action de sa substance. Nous avons principalement voté des augmentations de crédits, notamment pour le programme 123 relatif aux conditions de vie en outre-mer. Ce programme, je le rappelle, concerne les aides aux collectivités, le logement, la continuité territoriale et l’aménagement du territoire, notamment.

Par conséquent, j’espère sincèrement que vous reconsidérerez votre position et que vous nous rejoindrez dans un vote favorable compte tenu des amendements adoptés.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Au regard des précédentes interventions et de l’avis favorable de M. le rapporteur, il nous faut nous prononcer sur les crédits examinés dans le cadre de cet avis budgétaire.

La commission émet un avis favorable.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. La commission des affaires économiques émet donc un avis favorable sur les crédits de la mission outre-mer dans le cadre du projet de loi de finances pour 2025.

Nous avons eu des débats fructueux sur un sujet d’importance. Je partage l’avis de Monsieur Fugit : notre commission traite de nombreuses questions primordiales. Je vous remercie pour la qualité de nos


   LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Agence de l’Outre-mer pour la mobilité (LADOM)

M. Saïd Ahamada, directeur général

Mme Sandrine Venera, secrétaire générale

Mme Joëlle Lenormand, directrice des missions, du réseau et des partenariats

Délégation Outre-mer – Conseil économique, social et environnemental (CESE)

Mme Michèle Chay, membre de la délégation Outre-mer et de la commission Travail et emploi, conseillère confédérale de la CGT

M. Alain André, vice-président en charge du suivi et de la promotion des avis de la délégation aux Outre-mer, secrétaire fédéral FO Energie et Mines

M. Guillaume Corbel, administrateur du CESE.

Régiment du service militaire adapté (RSMA)

M. Patrice Bellon, général de brigade, commandant le service militaire adapté

M. Michaël Bongré, chef de bataillon, chef de cabinet du commandant du SMA

Direction régionales de France Travail

 Réunion / Mayotte

M. Olivier Pelvoizin, directeur régional de France Travail à La Réunion

M. Christian Saint-Etienne, directeur régional de France Travail à Mayotte

M. Gilles Biron, chargée de mission à la direction générale de France Travail

M. Laurent Caillaud, correspondant réseau de France Travail, en charge du suivi de l’analyse de la performance des régions

 Martinique / Guadeloupe / Guyane

M. Stéphane Bailly, directeur régional de France Travail Martinique

M. Paul-Eddy Paulin, directeur stratégie et relations extérieures de France Travail Martinique

M. Jean-Marc Vermorel, directeur régional de France Travail Guyane

M. Jean-Luc Loubli, directeur régional adjoint à France Travail Guyane

M. Fabrice Marie-Rose, directeur régional de France Travail Guadeloupe et Îles du Nord

Mme Véronique Bonraisin, directrice régionale adjointe Guadeloupe et Îles du Nord

M. Gilles Plumasseau, directeur territorial Guadeloupe et Îles du Nord

Mme Agnès Dubarry, directrice adjointe stratégie et relations institutionnelles France Travail

M. Fares Ben Attaya, chargé de mission au sein du pôle relations institutionnelles

Mme Elise Dandenabeele, chargée des relations institutionnelles

Union nationale des Missions Locales (UNML)

M. Jacques Lowinsky, président de la commission ultramarine de l’UNML

Mme Nathalie Sliskovic responsable animation réseau à l’UNML

M. Dominique Sery, directeur de la Mission Locale Nord Réunion

Pour les Antilles et la Guyane :

Mme Claudie Vetro, présidente de l’Association régionale des missions locales (ARML) Antilles-Guyane

Mme Keena Léonce, administratrice de la Mission locale Guyane

Mme Lee-Ing Yang-Ting déléguée inter régionale de l’ARML Antilles-Guyane

Pour l’océan Indien :

Mme Marie-Andrée Pota, directrice de l’ARML Océan Indien ;

M. Bernard Von Pine, président de l’ARML Océan Indien.

Chambres consulaires des Outre-mer *

Dans l’océan Atlantique et l’océan Indien

M. Henri Salomon, président de la chambre des métiers et de l’artisanat (CMA) de Martinique

M. Philippe Jock, président de la chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Martinique

Mme Delphine Dagort, présidente de la chambre d’agriculture, de commerce, d’industrie, de métiers et de l’artisanat (CACIMA) de Saint-Pierre & Miquelon

M. Ralph El-Derjani, membre de la CCI de Guyane

Mme Maïté Cohen, chargée d’études, de conseils et de missions à la chambre économique multiprofessionnelle (CEM) de Saint-Barthélemy

M. Grégory Guerot, chargé de développement du centre de formation et contrôleur de gestion à la CEM de Saint-Barthélemy

Dans l’océan Pacifique

CMA de Nouvelle-Calédonie :

Mme Elizabeth Rivière, présidente

M. Baptiste Faure, directeur général

M. Emmanuel Bérart, chargé des instances

M. Laurent Chouilly, directeur du centre de formation des apprentis (CFA)

CCI de Nouvelle-Calédonie :

M. David Guyenne, président

Mme Isabelle Coupey, directrice générale adjointe

Mme Gyslène Dambreville, chargée d’études et de projets

Chambre de commerce et d’industrie, des métiers et d’agriculture (CCIMA) de Wallis-et-Futuna :

M. Otilone Tokotuu, président

M. Denis Ehrsam, directeur

Direction générale des Outre-mer (DGOM)

M. Olivier Jacob, directeur général des Outre-mer

Mme Isabelle Richard, sous-directrice des politiques publiques

M. Baptiste Le Nocher, adjoint au sous-directeur de l’évaluation, de la prospective et de la dépense de l’État

M. Tony Chesneau-Lloyd, chef du bureau des finances et de la performance des Outre-mer

M. Thomas Labrune, adjoint à la cheffe du bureau de la vie économique, de l’emploi et de la formation

Mme Amélie Viguier, chargée de mission

Mme Fanny Miss, chargée de mission.

 

 

 

 

 

*  Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire des représentants d’intérêts de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), qui vise à fournir une information aux citoyens sur les relations entre les représentants d’intérêts et les responsables publics lorsque sont prises des décisions publiques.


   LISTE DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES

 

Confédération de l’Artisanat et des Petites Entreprises du Bâtiment (CAPEB) de La Réunion *

Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) de Guyane et de La Réunion *

Mouvement des entreprises de France (MEDEF) de Martinique, de Guadeloupe, de La Réunion, de Mayotte, de Saint-Martin, de Saint-Pierre et Miquelon et de Nouvelle-Calédonie*

Chambre de Commerce, d’Industrie, des Services et des Métiers (CCISM) de Polynésie Française

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

*  Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.


([1]) Notamment à Mayotte (construction d’une compagnie professionnelle), à La Réunion (construction d’un centre d’instruction) et en Guyane (construction d’un bâtiment d’hébergement au profit des cadres).

([2]) Hormis à Mayotte où le dispositif est maintenu au taux de 9 %.

([3]) Cour des comptes, Le système éducatif dans les académies ultramarines, décembre 2020.

([4]) Pascal Pétrine, « L’Éducation Nationale se donne les moyens de redonner un avenir aux « décrochés scolaires » », Outre-mer la première, 21 mars 2023.

([5]) Anaïs Allan, Zinaïda Salibekyan-Rosain, « En Martinique, un quart des jeunes de 15 à 29 ans ne sont ni en emploi, ni en études, ni en formation », INSEE Analyses Martinique, n°62, mars 2023.

([6]) Maurice Bilionière, Zinaïda Salibekyan-Rosain, « En Martinique, les produits alimentaires sont 40 % plus chers qu’en France métropolitaine », INSEE Analyses Martinique, n°63, juillet 2023.

 

([7]) France stratégie, Naître en outre-mer : de moindres opportunités que dans les autres régions de France, mai 2024, n° 137. https://www.strategie.gouv.fr/sites/strategie.gouv.fr/files/atoms/files/note_danalyse_ndeg137_-_naitre_en_outremer.pdf [En ligne]

([8]) INSEE, 19 janvier 2023.

([9]) DARES ANALYSE « Les jeunes ni en études, ni en emploi, ni en formation (NEET) : quels profils et quels parcours ? » – Fév. 2020.

([10]) BREF N°413|2021, Bulletin de Recherches Emploi Formation du Céreq.

([11]) Données communiquées par France Travail.

([12]) Ibid.

([13]) INSEE « Un Réunionnais sur dix déclare être en mauvaise santé », 2021.

([14]) INSEE « Davantage de séniors en perte d’autonomie à domicile à La Réunion que dans l’Hexagone », 2023.

([15]) DARES ANALYSE « Les jeunes ni en études, ni en emploi, ni en formation (NEET) : quels profils et quels parcours ? », Fév. 2020.

([16]) Enquête BMO France Travail 2024.

([17]) Source Acoss & MSA, 1er trimestre 2024.

([18]) Enquête BMO France Travail 2024.

([19]) Source Acoss & MSA, 1er trimestre 2024.

([20]) Extrait Insee Focus n°303, « Le halo autour du chômage, 2,5 à 5 fois plus présent dans les DOM qu’en France métropolitaine », 2023.

([21]) Enquête BMO France Travail 2024.

([22]) Source Acoss & MSA, 1er trimestre 2024.

([23]) Enquête BMO France Travail 2024

([24]) Source Acoss & MSA, 1er trimestre 2024

([25]) Enquête BMO France Travail 2024

([26]) Source Acoss & MSA, 1er trimestre 2024.

([27]) Pour une embauche en CDI, une aide forfaitaire est versée à l’entreprise et s’élève à 5 000 euros par an pendant trois ans (2 500 euros par an sur deux ans maximum pour une embauche en CDD d’au moins six mois).

([28]) Ou de moins de 30 ans pour les personnes en situation de handicap les plus en difficulté.

([29]) En 2024, 23 % des bénéficiaires du CEJ résident en QPV.

([30]) Décret n° 2023-731 du 8 août 2023 portant création d’une allocation pour le Service militaire adapté et arrêté du 8 août 2023 portant application des dispositions du décret n° 2023-731.

([31]) Les néo-bacheliers bénéficient, la première année, d’un second billet avion aller-retour pour leur permettre de se ressourcer ou de suivre un stage en outre-mer, l’objectif étant de limiter les difficultés d’acculturation entraînant un plus grand taux d’échec des jeunes étudiants ultramarins.

([32]) LADOM propose un accompagnement à 360 C°, avec notamment un financement à 100 % du transport aérien et terrestre aller-retour jusqu’au lieu de formation, un soutien financier (allocation complémentaire de mobilité, allocation d’installation, etc.), un appui à la recherche d’hébergement et un accompagnement personnalisé.

([33]) Voire également les actifs à Mayotte.

([34]) Audition des direction régionales ultramarines de France Travail.

([35]) Contribution écrite du Medef de Nouvelle-Calédonie.

([36]) Contribution du Mouvement des entreprises de France (Medef) de Martinique, de Guadeloupe, de La Réunion, de Mayotte, de Saint-Martin, de Saint-Pierre et Miquelon et de Nouvelle-Calédonie.

([37]) Ibid.

([38]) Ladom vérifie la validation de la formation, l’effectivité du retour dans la collectivité ultramarine et statut du bénéficiaire (en emploi ou en formation). Au total, près de la moitié des personnes sont rentrées dans leur territoire et 67 % sont en emploi ou en formation, tous territoires confondus.

([39]) Soit en Guadeloupe, en Martinique et en Guyane.

([40]) Le programme 103 comporte un budget national intégrant les dépenses d’apprentissage, qui est octroyé à France Compétences ; ce dernier verse ensuite une dotation pour chacun des 11 OPCO, qui procèdent à leur tour au versement aux CFA situés dans l’Hexagone ou en Outre-mer.

([41]) Pour les contrats conclus entre le 1er juillet 2020 et le 31 décembre 2022, la prime était de 5 000 euros maximum pour un apprenti de moins de dix-huit ans et de 8 000  euros maximum pour un apprenti d’au moins dix-huit ans. Pour les contrats conclus entre le 1er janvier 2023 et le 31 décembre 2024, cette prime est de 6 000 euros maximum sans condition d’âge.

([42]) L’institut de formation aux carrières administratives, sanitaires et sociales.

([43]) Délégation aux Outre-mer du CESE, Le défi de l’insertion professionnelle des jeunes ultramarin, février 2015, rapporté par M. Eustase Janky.

([44]) Entre Mayotte (25 %) et le Pacifique (42 %).