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N° 472

______

 

ASSEMBLÉE NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 23 octobre 2024.

 

 

AVIS

 

 

PRÉSENTÉ

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION SUR LE PROJET DE LOI de finances pour 2025,

 

 

TOME II

 

 

CULTURE

Création, transmission des savoirs et démocratisation de la culture

 

 

Par M. Erwan BALANANT,

 

Député.

 

 

——

 

 

 

Voir les numéros : 324, 468 (annexe n° 10).

 


—  1  —

SOMMAIRE

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Pages

Avant propos

I. Analyse des crédits

A. Les crédits du programme création

1. Le soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant est pérennisé pour 2025

2. Le soutien à la création, à la production et à la diffusion des arts visuels est maintenu, et s’accompagne de la création d’un nouvel établissement public consacré aux métiers d’arts

3. Le soutien à l’emploi et à la structuration des professions est reconduit à l’identique

B. Les crédits du programme transmission des savoirs et démocratisation de la culture

1. Les efforts en faveur de l’enseignement supérieur de la culture se poursuivent

2. Le ministère maintient son soutien à la démocratisation et à l’éducation artistiques et culturelles

3. La stratégie en faveur de la langue française est préservée en 2025

4. Les crédits consacrés à la recherche subissent une baisse regrettable

C. Les crédits du programme soutien aux politiques du ministère de la culture

1. L’action culturelle internationale du ministère est renforcée

2. Les crédits alloués aux fonctions de soutien du ministère bénéficient d’une légère augmentation

II. Les difficultés rencontrées par le spectacle vivant

A. État des lieux des difficultés rencontrées par le secteur

1. Les Jeux olympiques et paralympiques de Paris : une mise en lumière de l’écosystème de création français au prix de perturbations contenues

a. Une bonne adaptation du secteur malgré quelques difficultés d’organisation

b. Les JOP, une vitrine du spectacle vivant français

2. Un secteur qui demeure toutefois fragilisé par un contexte économique peu propice à la reprise

B. Particulièrement fragilisés, les festivals doivent mener une réflexion sur l’avenir de leur modèle

1. Le soutien de l’État en faveur des festivals est continu

2. Un modèle économique en grande difficulté

a. Des festivals rencontrant de grandes difficultés financières

b. Un changement de comportement des consommateurs

c. Une concentration du secteur grandissante

3. Un secteur devant tenir compte du changement climatique

C. Plusieurs solutions existent pour améliorer le financement du spectacle vivant

1. Une évolution des taxes sur la billetterie des spectacles musicaux et d’art dramatique, lyrique ou chorégraphique est aujourd’hui nécessaire

2. Le recouvrement de la « taxe streaming » est décevant mais celle-ci demeure une perspective de financement essentielle pour le spectacle vivant

3. Un élargissement du crédit d’impôt en faveur des représentations théâtrales d’œuvres dramatiques ou de cirque est souhaitable

Travaux de la commission

I. Audition de la ministre

II. Examen des crédits

1. Réunion du mardi 22 octobre 2024 à 21 heures 30

2. Réunion du mercredi 23 octobre 2024 à 9 heures 30

Annexe liste des personnes entendues par le rapporteur pour avis

 


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Avant propos

Le présent avis porte sur les deux programmes thématiques Création (131), Transmission des savoirs et démocratisation culturelle (361) et le programme support Soutien aux politiques du ministère de la Culture (224) de la mission Culture.

Le budget de ces trois programmes bénéficie d’une légère hausse, ce dont le rapporteur pour avis se réjouit, en particulier dans un contexte de tension sur les finances publiques. Toutefois, cette dynamique ne compense pas totalement l’inflation persistante et qui a lourdement pesé sur le secteur en 2024. De plus, les annulations de crédits décrétées en février 2024 sur les programmes 131 et 224 ont réduit les capacités d’investissement de plusieurs opérateurs, principalement affectés par ces mesures.

En complément de son analyse des crédits, le rapporteur pour avis a souhaité approfondir les enjeux relatifs à la situation du spectacle vivant à l’aune des contraintes économiques auxquelles le secteur a dû faire face depuis la fin de la crise sanitaire. Célébré lors des cérémonies d’ouverture et de clôture des Jeux olympiques et paralympiques (JOP) de Paris 2024, le spectacle vivant, privé comme public, traverse pourtant une période délicate. En particulier, les festivals connaissent une véritable crise de leur modèle économique, qui devra probablement être repensé afin de garantir la soutenabilité de la filière.

 

 

              L’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances fixe au 10 octobre la date butoir pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires. À cette date, 98 % des réponses étaient parvenues au rapporteur pour avis. 100 % des réponses sont parvenues le 11 octobre au rapporteur pour avis, qui remercie vivement les services du ministère de la Culture pour leur diligence.


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I.   Analyse des crédits

Les trois programmes sur lesquels porte le présent avis témoignent d’une légère croissance des crédits par rapport à la loi de finances pour 2024, avec une augmentation de 3,2 % des autorisations d’engagement (AE) et de 0,25 % des crédits de paiement (CP). La hausse des AE reflète la poursuite d’une politique d’investissement dynamique, les dépenses d’investissement des programmes 131 et 361 bénéficiant d’une majoration respective de 50,2 % et 59,4 %. La faible progression des CP traduit une baisse de crédits tant pour le programme Création que pour le programme Transmission des savoirs et démocratisation culturelle, compensée par une légère augmentation des CP du programme de soutien.

Ces montants, quasi constants par rapport à 2024, permettent de consolider les actions du ministère, de mettre en œuvre les mesures introduites l’an dernier et de poursuivre les investissements auprès des opérateurs de l’État. Ce coup d’arrêt, après une période d’augmentation tendancielle du budget de la culture observée depuis la fin de la crise sanitaire, est la conséquence de la situation délicate que connaissent les finances publiques. Le rapporteur pour avis tient à ce titre à exprimer sa satisfaction quant au maintien des crédits de ces trois programmes, dans un contexte économique peu favorable.

Seul le programme 224 Soutien aux politiques du ministère de la Culture connaîtra un transfert entrant extérieur à la mission Culture, avec des crédits de titre 2 (dépenses de personnel) en provenance du programme 172 Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaire de la mission Recherche et enseignement supérieur, au titre des mesures reconventionnelles 2024-2025 prévues par la loi de programmation de la recherche (LPR), pour un montant de 150 000 euros en AE et CP.

Trois transferts sortants du périmètre de la mission Culture sont prévus :

– à destination du programme 180 Presse de la mission Médias, livre et industries culturelles, depuis le programme 361 Transmission des savoirs et démocratisation de la culture, au titre des frais de sécurisation du site Charlie Hebdo (500 000 euros en AE et en CP, hors titre II) ;

– à destination du programme 129 Coordination du travail gouvernemental de la mission Direction de l’action du Gouvernement, depuis le programme 224 Soutien aux politiques du ministère de la Culture, au titre du réseau interministériel de l’État (RIE) piloté par la direction du numérique (135 458 euros en AE et en CP, hors titre 2) ;

– à destination du programme 148 Fonction publique de la mission Transformation et fonction publiques, depuis le programme 224 Soutien aux politiques du ministère de la Culture, au titre de la participation du ministère à l’action sociale interministérielle à destination des agents de l’État (4 988 euros en AE et en CP, hors titre 2).

récapitulation des crédits par programme

(en millions d’euros)

Numéro et intitulé du programme

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

LFI 2024

PLF 2025

LFI 2024

PLF 2025

131  Création

1 032,88

1 066,31

1 042,65

1 041,18

361  Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

829,58

857,67

824,4

807,48

224   Soutien aux politiques du ministère de la culture

846,18

871,27

844,25

869,34

Totaux

2 708,64

2 795,24

2 711,31

2 718,01

Source : projet annuel de performances de la mission Culture pour 2025.

Bien que le rapporteur pour avis se réjouisse du maintien des crédits de la mission dans un contexte de dégradation des finances publiques, il souligne la grande vulnérabilité du secteur, doublement affecté par les effets de l’inflation et l’annulation de 104,8 millions d’euros de crédits (84,2 millions d’euros après réception du virement de solidarité, voir encadré ci-après) en février 2024. Par ailleurs, le contexte macro-économique pour 2025 demeure incertain en raison d’un climat international très tendu, de la persistance des conséquences de l’inflation et des économies budgétaires à venir des collectivités territoriales.

La prévision d’inflation retenue par le Gouvernement pour 2025 telle qu’elle figure dans le projet de loi de finances (PLF) s’établit à 1,8 %, pour une prévision de croissance à 1,1 %. L’augmentation contenue des crédits a donc vocation à être largement neutralisée par les effets de l’inflation, et ce malgré la dynamique de désinflation constatée depuis le second trimestre 2023.

La majorité des acteurs soulignent les difficultés auxquelles fait face le secteur de la culture, bien qu’ils reconnaissent l’efficacité du soutien apporté par l’État. Les hausses des coûts de l’énergie et de production mettent aujourd’hui en péril de nombreuses structures, publiques ou privées, notamment dans le secteur du spectacle vivant. Alors que la discussion budgétaire s’inscrit dans une dynamique de réduction des dépenses, le budget de la mission Culture est globalement épargné. Dans ce contexte, le rapporteur pour avis se félicite de cette stabilité des crédits, qui intervient après plusieurs années d’accroissement du budget de la culture, notamment à l’issue de la crise sanitaire. Cette hausse continuelle depuis 2017 permettant une augmentation cumulée de 1 milliard d’euros n’a cependant pas permis de combler tous les retards accumulés face au désengagement budgétaire des périodes précédentes. Il souligne néanmoins l’effet cliquet qu’ont produit ces hausses successives des crédits, un éventuel reflux de ceux-ci à l’avenir pouvant s’avérer difficilement gérable pour les acteurs du secteur.


Les effectifs du ministère demeurent très stables, son plafond d’emploi s’établissant à 9 159 équivalents temps plein travaillé (ETPT), en baisse de 2 ETPT par rapport à 2024.

Enfin, le rapporteur pour avis souhaite insister sur les inquiétudes d’une filière sous pression : alors que le modèle culturel français a été célébré lors des cérémonies d’ouverture et de clôture des JOP, il convient de le sécuriser et de le valoriser. La situation économique du spectacle vivant est particulièrement fragile et une réflexion globale sur ses modalités de fonctionnement et de financement doit s’engager pour assurer la pérennité du secteur.

Annulation de crédits concernant le périmètre de la mission Culture, résultant du décret n° 2024-124 du 21 février 2024 portant annulation de crédits

Les 10 milliards d’annulation de crédits décidés en février 2024 par le Premier ministre ont concerné, parmi les programmes sur lesquels porte cet avis, le programme 131 Création et le programme 224 Soutien aux politiques du ministère de la Culture :

                            – 95, 96 millions d’euros en AE et en CP ont été annulés au sein du programme 131 ;

– 8, 84 millions d’euros en AE et en CP, dont 3,26 millions en titre II ont été annulés au sein du programme 224.

 Annulation de crédits portant sur le programme 131

À la suite de cette annulation, le programme 131 a toutefois reçu un virement de solidarité ministérielle à hauteur de 20,62 millions d’euros en AE et 20,82 millions d’euros en CP, soit une annulation nette de 75,34 millions d’euros en AE et 75,17 millions d’euros en CP pour ce programme. La réserve de précaution du programme a été intégralement annulée, à hauteur de 46,63 millions d’euros en AE et 47,16 millions d’euros en CP.

Les annulations de crédits du programme 131 ont porté sur l’action 01 Soutien à la création, la production et la diffusion du spectacle vivant à hauteur de 17,26 millions d’euros en AE et de 16,53 millions d’euros en CP. Les crédits de fonctionnement de six opérateurs ont été ponctionnés (AE = CP) :

– Opéra national de Paris et école de danse de Nanterre : 6 millions d’euros ;

– Comédie française : 5 millions d’euros ;

– Théâtre national de la Colline : 500 000 euros ;

– Théâtre national de Chaillot : 500 000 euros ;

– Cité de la musique – Philarmonie de Paris : 250 000 euros ;

– Établissement public du parc et de la grande halle de la Villette : 250 000 euros.

Les annulations de crédits ont également concerné les investissements immobiliers des lieux de spectacle vivant (1,26 million d’euros en AE et 527 696 euros en CP) et le fonds de soutien au théâtre privé (3,5 millions d’euros en AE et CP).


L’action 02 a supporté 11,45 millions d’euros d’annulation de crédits, en AE comme en CP. Cette annulation a concerné les aides aux projets (9,45 millions d’euros en AE et CP), l’Académie de France à Rome (1 million d’euros en AE et CP, sur les crédits de fonctionnement) et la Cité de la céramique Sèvres-Limoges (également 1 million d’euros en AE et CP, sur les crédits de fonctionnement).

 Annulation de crédits portant sur le programme 224

L’annulation de crédits sur le programme 224 hors titre 2 s’est élevée à 5,58 millions d’euros en AE et en CP. La réserve de précaution du programme a été intégralement annulée, à hauteur de 5,69 millions d’euros en AE et 5,59 millions d’euros en CP. Sur le titre 2, l’annulation de crédits s’est élevée à 3,36 millions d’euros en AE et en CP. Les annulations ont porté sur les crédits consacrés à la réforme du cadre de gestion des contractuels du ministère de la Culture.

 Impact sur les crédits du programme 361 Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

Si le programme 361 n’a pas été concerné par le décret d’annulation, un virement de solidarité en faveur des autres programmes a été effectué, à hauteur de 15,79 millions d’euros en AE et 16,10 millions d’euros en CP. Ces transferts de crédits ont été effectués depuis les crédits de fonctionnement de l’opérateur Universciences (13 millions d’euros en AE et en CP) et depuis les crédits dédiés aux contrats plan État-région (2,79 millions d’euros en AE et 3,1 millions d’euros en CP).

A.   Les crédits du programme création

Le programme 131 Création regroupe les crédits relatifs au spectacle vivant, aux arts visuels et au soutien à l’emploi et à la structuration des professions du ministère de la Culture. Pour 2025, il constitue le support d’investissements en faveur des opérateurs de l’État, de la poursuite de la mise en œuvre de mesures instituées lors de l’exercice précédent et de la consolidation du soutien aux professions artistiques.

Les crédits inscrits au PLF pour 2025 s’élèvent à 1 066 millions d’euros en AE et 1 041 millions d’euros en CP, soit une hausse de 3,24 % en AE et une baisse de 0,14 % en CP par rapport aux crédits votés en loi de finances initiale pour 2024. La hausse des AE s’explique par une augmentation significative de plus 50,16 % des dépenses d’investissement, afin de financer les projets de rénovation de plusieurs établissements publics.


les crédits du programme 131 création en 2024 et 2025

(en millions d’euros)

 

Autorisation d’engagement

Crédits de paiement

Action

LFI 2024

PLF 2025

Variation des AE

(en %)

LFI 2024

PLF 2025

Variation des CP

(en %)

01 – Soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant

816,02

844,44

+ 3,48

820,04

817,94

– 0,26

02 – Soutien à la création, à la production et à la diffusion des arts visuels

145,14

150,14

+ 3,44

150,89

151,52

+ 0,42

06 – Soutien à l’emploi et structuration des professions

71,72

71,72

 

71,72

71,72

 

Total

1 032,88

1 066,31

+ 3,24

1 042,65

1 041,2

 0,14

Source : projet annuel de performances de la mission Culture pour 2025.

Les orientations stratégiques de l’État se concentrent principalement autour de la poursuite des mesures engagées lors des exercices précédents et du déploiement du plan « Culture et ruralité ».

Le plan « Culture et ruralité », présenté le 11 juillet 2024 par la ministre de la Culture a pour objectif de renforcer la place de la culture dans les territoires ruraux. Le plan comporte 23 mesures, dont trois font partie du périmètre du programme Création. 4,6 millions d’euros de crédits devraient ainsi être déployés au sein du programme 131 pour financer les mesures suivantes :

– faciliter l’embauche d’artistes de manière occasionnelle par des communes de moins de 3 500 habitants, des associations ou des commerces afin d’accueillir concerts et spectacles. La mise en œuvre de cette mesure sera effectuée par le groupement d’intérêt public Café–cultures ;

– aider les festivals à déployer une action territoriale en dehors de la saison estivale, afin de soutenir la programmation d’artistes en zone rurale et de conseiller les collectivités territoriales dans la mise en œuvre de projets artistiques ;

– renforcer la mise à disposition d’un service d’emprunt d’œuvres d’art au sein d’artothèques aux habitants des zones rurales par un enrichissement des collections proposées et la commande d’une trentaine de structures itinérantes.

Si le rapporteur pour avis apprécie cet engagement en faveur de la ruralité, il regrette un certain manque d’ambition en ce qui concerne les mesures déployées au titre du programme 131. L’accès à la culture en zone rurale ne peut être renforcé sans la mise en œuvre d’un plan de soutien à la création, afin d’accompagner les compagnies et les auteurs vers cette transformation de leurs métiers. La mutation des attentes des publics doit conduire à engager une réflexion concernant le développement de dispositifs « d’aller-vers », de rencontre des publics et de médiation adaptés.

Après avoir subi de conséquentes annulations de crédits en février 2024, les moyens des opérateurs nationaux seraient confortés en 2025. Les crédits mobilisés permettront la poursuite de grands projets d’investissement ainsi que la création, au 1er janvier 2025 d’un nouvel établissement public administratif réunissant le Mobilier national et la Cité de la céramique Sèvres-Limoges. 8 millions d’euros sont par ailleurs déployés afin de renforcer les moyens des opérateurs et des structures de la création dans un contexte d’érosion des marges artistiques.

Seize dépenses fiscales sont répertoriées, dont douze contribuent au programme de manière principale. Le coût de ces dernières est estimé à 716 millions d’euros, en augmentation de 3,5 %. Le secteur culturel est particulièrement attaché au maintien du taux de TVA réduit à 5,5 % applicable aux billets de spectacle et a alerté le rapporteur pour avis à plusieurs reprises à ce sujet. Le crédit d’impôt en faveur des représentations théâtrales d’œuvres dramatiques ou de cirque, prorogé l’an dernier jusqu’en 2027 et étendu aux spectacles de cirque a été accueilli très positivement par le secteur, qui regrette néanmoins la limitation du périmètre, qui échoue à prendre en compte l’ensemble du spectacle vivant, notamment les spectacles chorégraphiques.

1.   Le soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant est pérennisé pour 2025

L’action 01 Soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant a pour objet d’accroître le soutien à la création, de faciliter l’accès du public, notamment jeune, et de favoriser la structuration des professions. L’action comprend ainsi plusieurs dispositifs, notamment :

– le plan « Mieux produire, mieux diffuser » (MPMD), instauré en loi de finances pour 2024 et doté de 9 millions d’euros pour 2025, qui vise à réformer le système actuel de production et de diffusion et à apporter une meilleure lisibilité et une plus grande cohérence à l’action du ministère. Selon les éléments fournis par le ministère de la Culture, 8,75 millions d’euros ont été affectés au plan en 2024, dont 255 000 euros au bénéfice des festivals. À cette action de l’État s’ajoute celle des collectivités territoriales, qui ont apporté un soutien complémentaire à hauteur de 13,6 millions d’euros en 2024. Au total, 253 structures ont bénéficié du plan, pour un montant moyen de 34 194 euros versé par l’État sur l’exercice 2024 ;

– différentes aides et mesures de soutien à la création artistique, aux institutions et lieux de création et de diffusion et à la recherche. À ce titre, les 447 structures labellisées percevront 259,57 millions d’euros en AE et en CP, une dotation en augmentation de 9,87 % par rapport à l’exercice 2024 (à mettre en perspective avec l’augmentation de plus 43 % du nombre de structures labellisées). Au cours des auditions organisées par le rapporteur pour avis, différentes structures labellisées l’ont alerté sur la fragilité de leur situation économique : 65 % des centres dramatiques nationaux prévoient un résultat déficitaire pour 2024, en raison d’une hausse des coûts de fonctionnement qui n’a que très partiellement été reportée sur le prix du billet. Les structures dénoncent par ailleurs le manque de prévisibilité des financements des collectivités territoriales, conditionnées à des décisions politiques. De plus, de nombreux acteurs du secteur du spectacle vivant pâtissent d’un manque de projection, en raison de l’annualité des appels à projets. Le rapporteur pour avis souscrit à cette observation : une réflexion sur cette politique de l’appel à projets serait salutaire pour tendre vers un cycle triennal qui permettrait de donner une plus grande visibilité aux structures ;

– les mesures de soutien aux festivals, reconduites pour 2025 à hauteur de 32,7 millions d’euros. Ces mesures sont déclinées en trois volets : une aide annuelle au projet, une aide triennale contractualisée et des aides transversales. Le rapporteur se réjouit d’une telle sanctuarisation des mesures de soutien, dans un contexte particulièrement incertain pour les festivals. Si ceux-ci ont retrouvé des taux de fréquentation élevés, leur modèle économique est en péril et leur soutenabilité se trouve menacée en raison de la hausse des coûts de production et des changements de comportement des consommateurs ;

– enfin, 12,36 millions d’euros en AE et 10,23 millions d’euros en CP permettront de financer des projets d’investissement structurant en région au titre des contrats de plan État-région (CPER).

Après avoir été ponctionnées dans le cadre de l’annulation des crédits intervenue en février 2024, les dotations des opérateurs de l’action sont en hausse de 3 millions d’euros en AE et en CP par rapport à 2024, atteignant 278,13 millions d’euros. Ces augmentations bénéficieront à l’Opéra national de Paris (à hauteur de 1 million d’euros) et à la Cité de la musique – Philharmonie de Paris (à hauteur de 2 millions d’euros). Les grands projets d’investissements mobiliseront 54,65 millions d’euros en AE et 30,15 millions d’euros en CP, pour financer la réfection des façades du Centre national de la danse (CND), la poursuite de la rénovation de la salle Jean Vilar au Théâtre national de danse de Chaillot, et divers travaux d’entretien et de rénovation de la Comédie française, du Théâtre de la Colline ou de l’Opéra-comique.

2.   Le soutien à la création, à la production et à la diffusion des arts visuels est maintenu, et s’accompagne de la création d’un nouvel établissement public consacré aux métiers d’arts

L’action 02 Soutien à la création, à la production et à la diffusion des arts visuels retrace notamment les crédits finançant les aides à la diffusion et le soutien aux lieux de création et aux métiers d’art.

À ce titre, le plan de soutien aux métiers d’art, présenté en 2023, bénéficiera, comme pour 2024, d’une enveloppe de 3 millions d’euros. Ce plan prévoit la poursuite des actions engagées par le Mobilier national et l’Institut des savoir-faire français ainsi que la reconduction, à hauteur de 400 000 euros, de l’aide à l’installation et à la modernisation des ateliers d’arts introduite en 2024. Aux crédits déployés en faveur du plan dans le cadre du programme 131 s’ajoutent 340 000 euros de crédits au sein du programme 224 Soutien aux politiques du ministère de la Culture. Les manufactures nationales ont joué un rôle clef dans la mise en œuvre de la stratégie, qui devrait se poursuivre avec la réunion du Mobilier national et de la Cité de la céramique Sèvres-Limoges.

Les labels de création et de diffusion en matière d’arts visuels bénéficieront de 19,47 millions d’euros de crédits, dont 10,5 millions à destination des fonds régionaux d’art contemporain (Frac). Ces derniers se verront également affecter 10,13 millions d’euros en AE et 8,23 millions d’euros en CP afin de renouveler leurs équipements.

Les dotations des opérateurs sont en hausse de 4 millions d’euros en AE et en CP. Ces crédits supplémentaires seront intégralement affectés au Mobilier national afin d’accompagner la création du nouvel établissement public consacré aux métiers d’art. Les grands projets d’investissement mobiliseront 24,55 millions d’euros en AE et 27,83 millions d’euros en CP afin de financer la construction d’un nouveau bâtiment de stockage des collections de la manufacture de Sèvres, la relocalisation du Conservatoire national des arts plastiques sur le site de Pantin et l’entretien des bâtiments des opérateurs. 1 million d’euros sera également investi afin d’accompagner la création du nouvel établissement public consacré aux métiers d’art.

Le projet d’établissement public consacré aux métiers d’arts

Afin de renforcer les politiques publiques culturelles en faveur des métiers d’art, du design et des arts décoratifs, le Mobilier national et la Cité de la céramique Sèvres-Limoges seront réunis à partir du 1er janvier 2025 au sein d’un nouvel établissement public consacré aux métiers d’arts.

Préconisé dès 2019 dans le rapport « France, métiers d’excellence » confié par le Premier ministre aux députés Raphaël Gérard, Philippe Huppé et Gilles Le Gendre, le rapprochement des deux opérateurs entend donner une nouvelle impulsion aux métiers d’art. Par lettre de mission du 12 octobre 2022, la ministre de la Culture a ainsi confié à M. Hervé Lemoine, président du Mobilier national, le soin de réexaminer l’opportunité du projet et de formuler, le cas échéant, « des propositions destinées à favoriser les synergies » entre les deux institutions. Le rapport de M. Hervé Lemoine, rendu en mai 2023, a confirmé l’intérêt de créer un nouveau pôle public réunissant les manufactures d’État et leurs musées et proposé six axes de travail : la formation, la recherche appliquée, la création contemporaine, le soutien aux petites et moyennes entreprises, la valorisation des cultures matérielles, et le rayonnement international et national.

S’agissant plus particulièrement de la formation, le Mobilier national et la Cité de la céramique Sèvres-Limoges proposent tous deux des parcours d’apprentissage en formation initiale aux métiers d’art : l’École de Sèvres compte six apprentis formés aux métiers de la création de pièces en céramique et l’École des arts textiles du Mobilier national accueille 52 apprentis formés aux métiers de la création et restauration textile, en tapis et tapisserie. Enfin, le futur pôle public vise à compléter l’offre privée de formation, en particulier à travers la création d’un centre de formation des apprentis consacré aux métiers présentant un risque d’extinction en raison de l’absence de formation initiale comme la dorure sur tranche, la restauration de globes ou l’orfèvrerie de table.

Afin de mener à bien ce rapprochement, le Mobilier national bénéficiera de 4 millions d’euros de crédits de fonctionnement et de 1 million d’euros de subvention pour charges d’investissement supplémentaires par rapport à 2024, portant son financement alloué par l’État à 37,16 millions d’euros. Les dotations de la Cité de la céramique Sèvres-Limoges sont en reconduction par rapport à 2024, pour un montant global de 6,5 millions d’euros. À l’occasion de l’annulation de crédits décrétés en février 2024, l’opérateur avait toutefois été ponctionné à hauteur de 1 million d’euros.

Les plafonds d’emplois du Mobilier national et de la Cité de la céramique Sèvres-Limoges demeurent constants par rapport à 2024. Le rapporteur pour avis regrette ce statu quo à la veille de la réunion des deux établissements, qui implique une charge administrative supplémentaire pour les équipes.

3.   Le soutien à l’emploi et à la structuration des professions est reconduit à l’identique

Les crédits de l’action 06 Soutien à l’emploi et à la structuration des professions sont renouvelés pour 2025 à hauteur de 71,72 millions d’euros.

Les faits les plus notables sont les suivants :

– le Fonds pour l’emploi pérenne dans le spectacle (Fonpeps) est reconduit à hauteur de 39 millions d’euros en AE et en CP. Celui-ci s’articule autour de trois axes : un p              anel d’aides financières en vigueur jusqu’en 2025, une aide à la garde d’enfant à destination des intermittents (Agedati) et un dispositif de soutien des Cafés-cultures ;

– une montée en charge du plan artistes-auteurs mis en place en 2021 est envisagée : 3,7 millions d’euros en AE et en CP sont prévus afin d’améliorer la situation économique, les droits sociaux et la représentation syndicale des artistes-auteurs ;

– le ministère de la Culture compense la hausse des contributions sociales à hauteur de 26 millions d’euros en AE et en CP, dont 21 millions d’euros au titre de l’augmentation de la contribution sociale généralisée (CSG) et 5 millions d’euros au titre de la contribution diffuseurs.

Artistes-auteurs et intelligence artificielle

Alors que l’intelligence artificielle (IA), notamment générative (IAG), se développe, les artistes-auteurs ont attiré l’attention du rapporteur pour avis sur les dangers qu’entraînent la diffusion et le manque de régulation de cette nouvelle technologie sur leurs professions.

Les artistes-auteurs exigent, en tant que détenteurs de droits de propriété intellectuelle, de pouvoir s’opposer à l’utilisation de leurs œuvres dans les bases d’apprentissage des IA. Si un droit de refus exprès, l’« opt-out », est prévu par la directive européenne 2019/790 du 17 avril 2019 sur le droit d’auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique (1), il n’est en pratique pas effectif pour les IA génératives de textes et d’images. Ces technologies « fouillent » en effet les œuvres, les conservent et les utilisent pour leur production. Si l’opt-out reste possible en principe sur déclaration de la personne concernée, la multiplication des occurrences d’un même contenu en ligne réduit l’effectivité du dispositif en l’absence de base de données recensant les refus. Se pose par ailleurs la question de l’utilisation de données produites sur la base de contenus qui n’ont pas immédiatement été l’objet d’opt-out, alors que les données initiales qui ont permis de les réaliser sont désormais hors du champ des fouilles.

Dans leurs contributions transmises au rapporteur pour avis, la Ligue des auteurs professionnels et le Syndicat national des auteurs-compositeurs soulignent la nécessité de renforcer la transparence sur l’ensemble de la chaîne de valeur. Cette question du partage de la valeur est sensible et les auteurs réclament une contrepartie financière à l’usage de leurs œuvres dans l’entraînement des machines et les productions finales de l’IAG, lesquelles portent atteinte à leur droit de reproduction et à leur droit moral.

Enfin, les IA ont pour conséquence de faire disparaître une partie des métiers appartenant à l’écosystème de la création (traduction, sous-titrage, doublage, etc.), d’accentuer la précarité en raison d’une concurrence accrue et de provoquer une dégradation de la qualité de la création artistique et de la diversité linguistique et culturelle.

 

(1) Transposée en droit français par l’ordonnance n° 2021-1518 du 24 novembre 2021.


B.   Les crédits du programme transmission des savoirs et démocratisation de la culture

Le projet de loi de finances pour 2025 prévoit, au titre du programme 361, 857,67 millions d’euros en AE et 807,48 millions d’euros en CP, soit respectivement une hausse de 3,39 % et une baisse de 2,05 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2024. Les crédits retracés au sein de ce programme sont liés à des priorités essentielles de la politique culturelle de l’État : l’enseignement supérieur de la culture (ESC), la démocratisation et l’éducation artistique et culturelle (EAC), le soutien à la langue française et aux langues de France et la recherche culturelle.

Les crédits du programme 361 transmission des savoirs et démocratisation culturelle en 2024 et 2025

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Action

LFI 2024

PLF 2025

Variation des AE

(en %)

LFI 2024

PLF 2025

Variation des CP

(en %)

01– Soutien aux établissements d’enseignement supérieur et insertion professionnelle

318,47

345,79

+ 8,58

315,68

308,86

– 2,16

02– Soutien à la démocratisation et à l’éducation artistique et culturelle

387,39

388,62

+ 0,32

385,57

375,92

– 2,16

03– Langue française et langues de France

4,22

4,22

 

4,22

4,22

 

04– Recherche culturelle et culture scientifique

119,49

119,04

– 0,38

118,93

118,48

– 0,38

Total

829,58

857,67

+ 3,39

824,4

807,48

 2,05

Source : Projet annuel de performances de la mission Culture pour 2025.

1.   Les efforts en faveur de l’enseignement supérieur de la culture se poursuivent

Le financement des 99 établissements d’ESC – 40 établissements nationaux et 49 établissements territoriaux – est renforcé en 2025, afin de mettre en œuvre la stratégie ministérielle de l’enseignement supérieur culture 2024-2029 validé en juin 2024.

À ce titre, 345,79 millions d’euros en AE (+ 8,5 %) et 308,86 millions d’euros en CP (– 2,16 %) seraient ouverts en faveur l’ESC afin d’améliorer la vie étudiante, de renforcer la capacité d’adaptation des écoles d’art et d’architecture, de mettre en œuvre les projets d’investissement des établissements et de soutenir le réseau des établissements territoriaux. Ces derniers bénéficieront à ce titre de 70,22 millions d’euros en AE et de 64,38 millions d’euros en CP. L’Association nationale des écoles supérieures d’art et de design (Andéa) alerte cependant sur les fortes disparités dans les financements apportés par l’État aux 33 établissements territoriaux qu’elle représente, la participation financière de l’État pouvant représenter de 3,8 % à 40 % des budgets des écoles. Les établissements territoriaux souffrent également de grandes disparités concernant les financements régionaux et d’une inégalité de statut entre les enseignants des écoles nationales et territoriales, qui ont des conséquences sur leur rémunération mais également leur capacité à conduire des travaux de recherche. Enfin, contrairement à ceux des établissements nationaux, les étudiants boursiers ne bénéficient pas d’une exonération totale des frais de scolarité.

Le rapporteur pour avis invite à poursuivre les travaux et la concertation qui avaient débuté et à prendre en compte les préconisations du rapport établi en 2023 par M. Pierre Oudart, directeur général de l’Institut national d’enseignement artistique Marseille Méditerranée, sur ces écoles supérieures d’art territoriales.

2.   Le ministère maintient son soutien à la démocratisation et à l’éducation artistiques et culturelles

Dotée de 388,62 millions d’euros en AE et 375,92 millions d’euros en CP, l’action 02 participe à hauteur de 18 millions d’euros à l’effort de réduction des dépenses publiques pour le programme 361, soit une baisse de 3,4 % en CP par rapport à 2024.

L’éducation artistique et culturelle (EAC) bénéficiera de 102,7 millions d’euros en AE et en CP afin de poursuivre la mise en œuvre de la réforme 100 % EAC et de proposer des actions d’EAC hors temps scolaire (éveil, périscolaire, conservatoires, bibliothèques, etc.). Le plan d’éducation aux médias et à l’information (EMI) sera également poursuivi en 2025, grâce à une dotation de 3,77 millions d’euros. La formation des acteurs de l’EAC bénéficie de 2,08 millions d’euros en 2025, la réduction des crédits étant principalement due à un redéploiement vers d’autres sous-actions du programme 361. L’Institut national supérieur de l’éducation artistique et culturelle (l’INSEAC) renforce son implantation à Guingamp afin d’assurer la formation initiale et continue des acteurs de l’EAC.

La politique de démocratisation culturelle est dotée de 75,44 millions d’euros en AE et 62,74 millions d’euros en CP afin de poursuivre les actions menées en faveur des territoires prioritaires et des publics en situation spécifique, éloignés de l’offre culturelle. 7 millions d’euros devraient ainsi être engagés au titre du Plan « Culture et ruralité » pour financer plusieurs mesures d’accès à la culture en milieu rural. Les pratiques amateurs sont par ailleurs soutenues à hauteur de 4,96 millions d’euros, dont 1,7 million d’euros à destination du Plan fanfares.

Le troisième volet de cette action est relatif à la part individuelle du pass culture : 210,5 millions d’euros seront consacrés au financement de ce dispositif, soit un financement constant par rapport à 2024. Le pass culture est une réussite : 4,3 millions de jeunes en ont bénéficié depuis son lancement et 84 % des plus de 18 ans s’en sont emparés au titre de la part individuelle. S’agissant de la part collective, 72 % des élèves en ont bénéficié pendant l’année scolaire 2023-2024. Afin d’augmenter le recours des enseignants au pass culture, des synergies doivent être trouvées avec les collectivités territoriales pour faciliter et prendre en charge le transport des jeunes vers les lieux de création, notamment en zone rurale. La société par actions simplifiées (SAS) pass culture – structure chargée de gérer le dispositif – fait déjà état d’expériences réussies, à l’image du projet « Caravelle » en Haute-Marne.

Si les bénéficiaires utilisent toujours majoritairement leur crédit individuel en librairie (45 % des dépenses des jeunes), la SAS pass culture constate un rééquilibrage en faveur du cinéma, des instruments de musique et de la musique live, un phénomène particulièrement flagrant chez les plus de 18 ans. Le spectacle vivant, plébiscité dans la part collective, peine cependant à se faire une place dans les choix individuels des jeunes. À ce titre, le rapporteur pour avis considère pertinent de sanctuariser un certain montant de la part individuelle à destination du spectacle vivant, ainsi que l’a annoncé la ministre de la Culture.

Concomitamment aux annonces de réforme prochaine du pass culture, le rapporteur pour avis souhaite souligner la nécessité de ne pas remettre en cause l’universalité du dispositif, qui participe amplement à sa réussite. Conditionner le bénéfice du dispositif aux ressources des familles des intéressés aurait pour effet de créer des disparités entre jeunes, les stigmatisant. Outre un impact certain sur la gestion du dispositif, une telle évolution fait craindre une forme de désengagement et une augmentation du taux de non-recours de la part des jeunes. L’universalité garantit en effet une indépendance et une autonomie pour le jeune, dont les choix ne sont pas conditionnés à son origine sociale ou territoriale.

3.   La stratégie en faveur de la langue française est préservée en 2025

L’action Langue française et langues de France est menée sous la tutelle de la délégation générale à la langue française et aux langues de France. Cinq axes de travail sont avancés par la délégation, qui s’inscrivent dans la dynamique du dix‑neuvième sommet de la francophonie organisé à Villers-Cotterêts les 4 et 5 octobre 2024. L’action bénéficie exclusivement de crédits d’intervention à hauteur de 4,22 millions d’euros en AE et en CP afin de renforcer la présence du français, lutter contre l’illettrisme, développer une stratégie du numérique et de l’intelligence artificielle pour la langue française et le plurilinguisme, valoriser les langues de France et renforcer le sentiment d’appartenance à la francophonie.

4.   Les crédits consacrés à la recherche subissent une baisse regrettable

L’action Recherche culturelle et culture scientifique enregistrerait en 2025 une légère baisse de crédit par rapport à l’exercice 2024. 119,04 millions en AE et 118,48 millions en CP sont affectés à cette action, dont 91 % financent l’opérateur de l’État Universciences.

L’établissement public Universciences, qui regroupe le Palais de la découverte et la Cité des sciences et de l’industrie, bénéficie de 109,71 millions d’euros de crédits. Plus grand établissement national en matière de culture scientifique, technique et industrielle, Universciences fait preuve d’un fort dynamisme, dont témoigne son niveau de fréquentation : 2,4 millions de visiteurs ont été accueillis en 2023, soit 12 % de plus qu’en 2022. L’opérateur poursuit la transformation de ses espaces, avec l’ouverture de la Cité des bébés, un espace pensé pour les 0-2 ans, la rénovation prévue en 2025 et 2026 de la Cité des enfants et l’approfondissement de ses ressources en lignes via la plateforme leblob.fr. Universciences s’engage également dans le domaine de l’éducation avec la mise en œuvre d’un projet d’itinérance et du dispositif Fab Lab à l’école, présent dans toutes les régions. Enfin, la rénovation du Palais de la découverte est presque achevée, et sa réouverture est prévue au deuxième trimestre 2025. Malgré une hausse des crédits, le plafond d’emploi d’Universciences est réduit de 40 ETPT pour l’exercice 2025, une décision vivement regrettée par le rapporteur pour avis.

La recherche culturelle, encadrée par la stratégie ministérielle de recherche 2022-2027, est dotée de 9,33 millions d’euros en AE et 8,76 millions d’euros en CP. La majeure partie des crédits pour la recherche culturelle concerne la recherche patrimoniale, notamment en matière d’architecture, de conservation ou de restauration. Le rapporteur pour avis regrette cette diminution de 10 % des crédits en faveur de la recherche culturelle par rapport à 2024. Ce manque d’engagement envoie un signal négatif envers le secteur de la recherche, pendant essentiel de la création, de la production et de la diffusion d’œuvres artistiques. Les créations d’aujourd’hui font le patrimoine de demain, et il est fondamental de s’engager en faveur du développement de nouvelles techniques.

La création d’un fonds de soutien aux nouvelles créations et formes créatives permettrait d’accompagner les mutations artistiques et de renforcer la recherche culturelle.

C.   Les crédits du programme soutien aux politiques du ministère de la culture

Le programme 224 regroupe les crédits dévolus à l’action culturelle internationale et aux fonctions de soutien du ministère, dont sa masse salariale. Ces crédits sont en augmentation par rapport à la loi de finances initiale pour 2024, ainsi qu’en témoigne le tableau ci-dessous.

les crédits du programme 224 soutien aux politiques du ministère de la culture en 2024 et 2025

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Action

LFI 2024

PLF 2025

Variation des AE

(en  %)

LFI 2024

PLF 2025

Variation des CP

(en %)

06– Action culturelle internationale

9,97

11,47

+ 15,04

9,97

11,5

+ 15,04

07– Fonctions de soutien du ministère

836,21

859,79

+ 2,82

834,28

857,86

+ 2,83

Total

846,18

871,27

+ 2,96 

844,25

869, 34

+ 2,97

Source : projet annuel de performances de la mission Culture pour 2025.

1.   L’action culturelle internationale du ministère est renforcée

Les crédits de l’action culturelle internationale bénéficient d’une hausse de 1,5 million d’euros, soit une augmentation de 15 % par rapport aux crédits accordés en loi de finances pour 2024. Cette hausse des crédits permet notamment de poursuivre la mise en place de la Maison des mondes africains (MansA), centre culturel et de documentation consacré à la création et aux cultures africaines. Ce projet, lancé en 2021 par le chef de l’État à la suite d’une recommandation de M. Achille Mbembé, historien et politologue, est doté de 2,15 millions d’euros pour l’exercice 2025. Constituée en groupement d’intérêt public en 2023, la MansA est également sous la tutelle du ministère de l’Europe et des affaires étrangères. L’action comprend également des crédits à destination de projets à vocation mémorielle et de réparation, la promotion de la diversité culturelle et linguistique ainsi qu’à l’accompagnement de mobilités artistiques et de la coopération des acteurs culturels.

2.   Les crédits alloués aux fonctions de soutien du ministère bénéficient d’une légère augmentation

L’action Fonctions de soutien du ministère comprend l’ensemble des crédits consacrés aux fonctions de soutien du ministère ainsi que la masse salariale : 859,79 millions d’euros en AE et 857,86 millions d’euros en CP y sont dédiés.

Les priorités du ministère ont trait à la politique de transition et de développement durable ainsi qu’à la politique d’égalité et de diversité, avec notamment un objectif d’augmentation de son index égalité et du taux de féminisation dans les nominations. Par ailleurs, le ministère poursuivra ses efforts afin d’accélérer sa modernisation numérique et d’améliorer la sécurité de ses systèmes d’information.

L’ensemble des dépenses de personnel sont également regroupées au sein du programme 224. En 2025, les crédits de rémunération sont en augmentation de 22,7 millions d’euros (+ 3 %°), la masse salariale atteignant 562 millions d’euros (756,5 millions d’euros en ajoutant la contribution au compte d’affectation spéciale Pensions). Cette progression permet notamment au ministère de mettre en œuvre la refonte du cadre de gestion des contractuels et de déployer la protection sociale complémentaire. Le plafond d’emplois du ministère est stable : il n’enregistre qu’une baisse de deux ETP par rapport au plafond autorisé en loi de finances pour 2024, ces deux ETP ayant été créés au titre de l’organisation des JOP de Paris de 2024.

Alors que les crédits de la mission Culture ont été adoptés le 23 octobre par la commission des affaires culturelles et de l’éducation, saisie pour avis, le Gouvernement a déposé le 4 novembre un amendement au projet de loi de finances pour 2025 visant à minorer les crédits de la mission. 89,339 millions d’euros d’économies sont ainsi proposés sur l’ensemble de la mission Culture. Ils se répartissent sur le périmètre du présent avis comme suit :

– 28,59 millions d’euros en AE et 28,05 millions d’euros en CP sur le programme 131 Création ;

– 22,62 millions d’euros en AE et 21,36 millions d’euros en CP sur le programme 361 Transmission des savoirs et démocratisation de la culture ;

– 5,53 millions d’euros en AE et 5,49 millions d’euros en CP sur le programme 224 Soutien aux politiques du ministère de la culture, dont 2,43 millions d’euros en AE et en CP en titre II.

Les annulations de crédits pour ces trois programmes s’élèveraient donc à 56,74 millions d’euros en AE et 54,91 millions d’euros en CP, soit une baisse de 2 % par rapport aux crédits inscrits dans le projet de loi de finances. Cette diminution de crédits ramène les crédits des autorisations d’engagement des programmes 131 et 361 à un niveau proche de celui voté en loi de finances initiale pour 2024 (+ 0,47 % en AE pour le programme 131 et + 0,66 % en AE pour le programme 361 par rapport aux crédits votés en 2024). La dynamique, déjà négative des CP, sera aggravée par cette baisse, avec une diminution de respectivement 2,83 % et 4,64 % sur ces deux programmes par rapport à 2024. Conjuguée aux effets de l’inflation, cette réduction de crédits se traduit par une baisse des ressources publiques disponibles pour la culture.

Le rapporteur pour avis, qui a exprimé un avis favorable à l’adoption des crédits des programmes 131, 361 et 224 lors de leur examen par la commission des affaires culturelles et de l’éducation en raison de leur stabilité initiale, déplore cette méthode. La commission saisie pour avis n’a ainsi pas pu se prononcer sur cette baisse conséquente des crédits.

Par ailleurs, le rapporteur regrette le peu de précision de l’exposé sommaire de l’amendement, qui ne mentionne pas les actions visées par ces baisses de crédits. La seule précision énoncée est une baisse de 5 millions d’euros des crédits de l’action 02 Soutien à la démocratisation et à l’éducation artistique et culturelle du programme 361 au titre de la réforme du dispositif du pass culture.

 

II.   Les difficultés rencontrées par le spectacle vivant

A.    État des lieux des difficultés rencontrées par le secteur

1.   Les Jeux olympiques et paralympiques de Paris : une mise en lumière de l’écosystème de création français au prix de perturbations contenues

a.   Une bonne adaptation du secteur malgré quelques difficultés d’organisation

Alors que de grandes craintes pesaient sur le secteur du spectacle vivant à l’annonce des JOP, les acteurs de la filière se sont relativement bien adaptés pendant cette période. Peu de fermetures ou d’annulations ont été recensées dans les lieux de création, la saison artistique s’étant achevée pour l’essentiel avant l’été. Comme précisé au rapporteur pour avis lors de l’audition de leurs représentants, les lieux labellisés comme les centres dramatiques nationaux (CDN), les scènes nationales ou les centres chorégraphiques nationaux (CCN) n’ont pas vu leur activité altérée par les manifestations sportives. Seules quelques structures parisiennes privées, situées dans le périmètre de sécurité, ont dû fermer leurs portes en raison des JOP. La mise à disposition des grandes salles et espaces pour organiser les Jeux olympiques, comme les arénas de Bercy et de la Défense, le Stade de France, le Stade Vélodrome de Marseille et d’autres stades ont néanmoins contraint au report de certaines manifestations culturelles, notamment des concerts. Le syndicat des musiques actuelles (SMA) estime la perte de recettes liée à l’indisponibilité de ces structures à 150 millions d’euros, soit 12 % des recettes enregistrées en 2022.

L’organisation des JOP a été une plus grande cause de perturbation pour les festivals : ceux-ci étant principalement organisés pendant la période estivale, leurs dates d’organisation ont pu rentrer en conflit avec celles des cérémonies et des épreuves des jeux. Les organisateurs de festivals et les organisations syndicales ont déployé de remarquables mesures d’adaptation, après avoir craint un report ou une annulation presque totale de la saison 2024 des festivals sur le territoire métropolitain ([1]). La mobilisation des acteurs du secteur a permis d’anticiper ces perturbations en décalant certains festivals, ce qui a rendu possible la tenue de la quasi-totalité des manifestations prévues. Une seule annulation directement liée aux Jeux est à recenser, celle du festival Lollapalooza, dont l’organisation, sur l’Hippodrome de Longchamp n’était pas compatible avec les JOP. Le Centre national de la musique (CNM), dans son bilan des festivals établi en partenariat avec les services statistiques du ministère de la Culture ([2]), indique que 95 % des festivals pris en compte dans l’enquête ont pu se dérouler comme prévu. Parmi ces festivals, 10 % ont toutefois signalé des perturbations indirectement causées par l’organisation des JOP, qui ont induit une modification de date ou de lieux, une indisponibilité de certains prestataires et équipements ou des désagréments liés à la sécurisation des sites. Un quart de ces festivals se sont tenus en région parisienne, et près de la moitié avaient lieu en juillet.

En particulier, le Festival d’Avignon a été très perturbé par le report de ses dates (voir encadré). Selon le SMA, dans le bilan 2024 de ses festivals adhérents ([3]), c’est un festival sur quatre qui a subi des perturbations en raison de l’organisation des JOP. Mme Marie Sabot, directrice du festival We love green, qui a lieu à Paris, a également indiqué au rapporteur pour avis que la tenue des JOP a déstabilisé l’organisation du festival du 31 mai au 2 juin, en raison d’une moindre disponibilité des équipements et fournitures techniques mais également des personnels techniques, embauchés pour les cérémonies.

Enfin, il est encore trop tôt pour mesurer l’intégralité des effets des JOP sur l’organisation des évènements de spectacle vivant. Le CNM précise que les effets indirects de l’organisation des JOP, comme l’augmentation des coûts techniques et de sécurité, demeurent difficiles à quantifier dans un secteur déjà touché par l’inflation.

À la déstabilisation provoquée par les JOP, mais bien anticipée par le secteur et les pouvoirs publics, s’est ajoutée la perturbation induite par la dissolution de l’Assemblée nationale et l’organisation des élections législatives. Lors des auditions, les différentes organisations rencontrées ont fait part au rapporteur d’une baisse des ventes de billets dès le 9 juin, et ce jusqu’au 7 juillet. Le SMA ajoute qu’à cette baisse de recettes se sont ajoutées des difficultés organisationnelles comme l’indisponibilité de certains lieux et un affichage public plus complexe.

Le festival d’Avignon, fortement perturbé par l’organisation des JOP

Le Festival d’Avignon a été contraint de décaler ses dates afin de ne pas empiéter sur l’organisation des JOP. Le festival a ainsi été avancé d’une semaine et raccourci de quelques jours. Alors qu’il se déroule habituellement les quatre premières semaines de juillet, le festival a débuté le 29 juin pour s’achever le 21 juillet 2024. Cette modification des dates a eu un fort impact pour le festival et le festival off, doublement touchés par les JOP et la dissolution :

– la fréquentation de la première semaine du festival, hors période de vacances scolaires, a été décevante pour les organisateurs. M. Laurent Domingos, coprésident de Avignon Festival & Cie (organisateur du festival off) a déploré lors de son audition le maintien des dates des vacances scolaires pour la ville d’Avignon, alors qu’un report avait été initialement promis (1). Ceci a perturbé l’organisation du festival, certains lieux n’ayant pas été libérés à temps. Outre un impact sur la participation du public qui se traduit par une baisse des recettes, la tenue du festival en temps scolaire a limité la période disponible de venue des diffuseurs. Le festival est en effet une opportunité pour de nombreux artistes et compagnies de rencontrer des diffuseurs et d’organiser les tournées de leurs spectacles. Enfin, le raccourcissement de la période a provoqué une baisse des recettes des compagnies, tandis que les coûts, notamment de location de lieux, sont restés constants par rapport à la saison 2023 ;

– la dissolution et l’organisation des élections législatives ont provoqué un arrêt net des réservations en ligne. Les journées d’élections, les dimanches 30 juin et 7 juillet, ont logiquement eu pour conséquence une baisse de fréquentation des festivals.

 

(1) La ministre de la culture avait annoncé, dans une interview publiée le 9 janvier 2023 dans le journal La Provence, que les vacances scolaires seraient avancées de 3 jours afin de libérer les lieux.

b.   Les JOP, une vitrine du spectacle vivant français

Les JOP ont constitué une formidable vitrine pour le spectacle vivant français, lors des quatre cérémonies d’ouverture et de clôture des Jeux, mais aussi à travers l’Olympiade culturelle.

Les cérémonies ont mis en lumière un modèle français de création artistique unique. Suivie par près de 23 millions de personnes selon Médiamétrie, la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques a mis à l’honneur la création française : trois centres chorégraphiques nationaux (CCN) et 780 danseurs issus de différents ballets ont participé à cette cérémonie, dont la directrice de la danse, Mme Maud Le Pladec, est elle-même issue du secteur public et directrice du CCN d’Orléans. De très nombreux danseurs intermittents ont également participé aux festivités le long de la Seine. L’Association des centres chorégraphiques nationaux (ACCN) et l’Association des centres de développement chorégraphique nationaux (A-CDCN) soulignent dans leurs contributions qu’il « convient de voir dans cette mise en lumière de la danse, la réussite du service public des arts et de la culture, et plus particulièrement des politiques publiques pour la danse ». La cérémonie d’ouverture des Jeux paralympiques a accueilli 140 danseurs, dont 16 en situation de handicap. Le cirque et les arts de la rue ont également bénéficié d’une certaine visibilité, notamment lors de la cérémonie du 26 juillet. Enfin, les cérémonies de clôture ont fait la part belle aux musiques actuelles françaises grâce à une mise en avant de la création musicale française : DJ set, scène électro, figures de la French touch, artistes pop multi récompensés ont réuni spectateurs et athlètes pour célébrer la fin des Jeux.

Depuis 2021 et en parallèle des JOP, l’Olympiade culturelle, pilotée par la direction de la culture du comité d’organisation des JOP de Paris 2024, a également mobilisé la filière. La majorité des structures labellisées ont participé en accueillant ou en organisant des évènements artistiques en lien avec les manifestations sportives, aux côtés de nombreux acteurs privés, avec le soutien du ministère de la culture et des Drac. L’ensemble des disciplines artistiques ont été concernées, et les opérateurs de l’État ont joué un rôle crucial dans l’organisation de ces manifestations.

Il n’est pour l’instant pas possible d’estimer l’impact des Jeux olympiques sur la filière du spectacle vivant. Le rapporteur pour avis espère que la vitrine qu’ont constituée les cérémonies d’ouverture et de clôture des JOP sera source de retombées positives sur la fréquentation des sites, les pratiques amateurs et professionnelles et le soutien des collectivités territoriales aux structures artistiques.

2.   Un secteur qui demeure toutefois fragilisé par un contexte économique peu propice à la reprise

Les acteurs du spectacle vivant sont unanimes : le secteur a été durement touché par l’inflation, et continue de subir les conséquences des hausses de prix. Les prix de l’énergie, les coûts des décors, les charges de fonctionnement ont continué d’augmenter. Les salaires ont également progressé, en conséquence de revalorisations salariales très attendues par le secteur. Les CCN ont ainsi mené, en 2022 et en 2023 deux revalorisations salariales de respectivement 5,2 % et 4,9 %. Enfin, les coûts d’hébergement et de transport des artistes ont également augmenté, faisant peser une charge supplémentaire pour les organisateurs de spectacles.

La hausse des prix de contrats de cession a été plusieurs fois mentionnée au rapporteur pour avis lors des auditions. Ces contrats, couramment appelés cachets artistiques, connaissent une forte inflation. Si le rapporteur se réjouit de la meilleure rémunération des artistes, il souligne qu’il est nécessaire de mener une investigation sur la réelle répartition des bénéfices de ces contrats de cession, et notamment de la part revenant directement aux artistes.

Non reportées sur le prix des billets dans de nombreux cas, ces hausses ont provoqué un effet « ciseaux », conjugué à une stagnation de la fréquentation et des ressources. En effet, les structures labellisées ont indiqué ne pas avoir augmenté le prix de leur billet afin de continuer d’assurer leur mission de service public de la culture, dans un contexte inflationniste touchant l’ensemble de la population. Les acteurs privés ont augmenté le prix des places, mais cette augmentation est souvent inférieure à l’inflation et moindre que les hausses enregistrées dans les pays voisins. Une étude réalisée par le syndicat Ekhoscène ([4]) souligne que sur la période 2019-2023 les tarifs les plus accessibles des concerts en salle n’ont pas subi une augmentation supérieure à l’inflation cumulée de la période (augmentation inférieure à 13 %). Seuls les tarifs les plus élevés des salles avec une large jauge ont supporté une augmentation de près de 23 %, dépassant l’inflation. Les prix des billets sont par ailleurs largement inférieurs à ceux pratiqués dans les autres pays : l’écart entre les prix est d’environ 50 % entre la France et les États-Unis, par exemple. Si les tarifs des spectacles français sont fixes, il existe aujourd’hui un risque d’ouverture du marché français à la tarification dynamique : les tarifs des concerts fluctuent en fonction de l’offre et de la demande. Un tel système renchérit mécaniquement le prix des billets, au risque de transformer le spectacle vivant musical en un service de luxe, réservé aux plus fortunés (voir encadré ci-après).

Enfin, si les subventions publiques accordées aux lieux de création ont progressé, elles sont chaque année largement amputées par les effets de l’inflation. Les crédits déconcentrés consacrés aux structures labellisées sont en augmentation de 9,7 % dans le projet de loi de finances pour 2025 ([5]), et ceux consacrés aux structures et lieux de création non labellisés de 30 % par rapport à 2024. Ces augmentations sont toutefois à relativiser, étant donné la hausse du nombre de structures subventionnées par rapport à l’exercice précédent. Le secteur souffre également de l’arrêt des mesures exceptionnelles déployées pendant et à la sortie de la crise sanitaire.

Enfin, les acteurs du spectacle vivant pâtissent d’une baisse de financement de la part des collectivités territoriales qui déploient parfois une politique culturelle influencée par des choix politiques.

De très nombreuses structures sont ainsi en déficit, tant dans le secteur public que dans le secteur privé. En 2023, 42 % des scènes nationales constatent un déficit, un nombre qui a doublé par rapport à 2019. 37 % du réseau des centres chorégraphiques nationaux et 23 % des centres de développement chorégraphique nationaux ont terminé l’exercice budgétaire en déficit. Les perspectives pour 2024 sont peu favorables pour les CCN, 21 % du réseau prévoyant un déficit. S’agissant des centres dramatiques nationaux (CDN), plus de 65 % des structures prévoient un résultat déficitaire pour l’exercice 2024. Les structures font également face à la baisse des spectacles programmés : 20 % en moins pour les CDN, 11 % pour les scènes nationales.

S’agissant du secteur privé, les modèles économiques sont également fragiles. À titre d’exemple, malgré une très bonne fréquentation qui semble se confirmer en 2024 et une part de recettes propres particulièrement élevée (40 % en moyenne), les scènes de musique actuelles (Smac) sont aujourd’hui en grande difficulté financière et 65 % d’entre-elles présentaient un déficit en fin d'exercice 2023.

Quelle place pour la tarification dynamique en France ?

La tarification dynamique induit une variation en direct des prix des billets en fonction de l’offre et de la demande. Elle est notamment utilisée dans les secteurs de l’hôtellerie et des transports.

L’objectif avancé par les plateformes de vente de billets proposant de pratiquer une tarification dynamique est de contrer les plateformes de revente illégales, qui ont tendance à fortement majorer leurs prix pour faire des bénéfices. Déjà utilisée aux États-Unis et au Royaume-Uni par certaines plateformes comme Ticketmaster, la tarification dynamique n’est pas imposée, mais peut être choisie par l’artiste.

En fonction de la demande, les prix des billets peuvent alors atteindre des montants très élevés : en 2024, le prix des billets vendus au Royaume-Uni pour la tournée du groupe Oasis a connu une augmentation de 360 %, et les places peuvent atteindre plusieurs milliers d’euros.

La tarification dynamique est fortement décriée par les consommateurs, et certains artistes font le choix de ne pas y recourir, même si elle permet d’augmenter leur rémunération. L’autorité de la concurrence britannique à ouvert une enquête face aux fortes variations des prix, alors même que les billets ont déjà été selectionnés par les consommateurs et placés dans un panier virtuel. Aux États-Unis, plusieurs plaintes ont été déposées contre la plateforme Ticketmaster. Il a par ailleurs été constaté que certains spectateurs américains préféraient assister à des concerts dans des pays où la tarification dynamique n’est pas d’usage, le prix des billets aux États-Unis étant supérieur à celui cumulé d’un voyage, d’un séjour et de places de spectacle en Europe.

Le risque de la tarification dynamique est de faire du spectacle vivant un bien de luxe pour le consommateur, la hausse des tarifs réservant ces évènements aux plus fortunés, à rebours de la politique de démocratisation culturelle menée en France. Si la tarification dynamique n’est actuellement pas observée dans notre pays, certains acteurs et représentants de la filière musicale ne sont pas défavorables à son développement, afin d’augmenter la rémunération des artistes.

Le rapporteur pour avis recommande la plus grande prudence face à cette nouvelle politique tarifaire. S’il est en faveur d’une meilleure rémunération des artistes, il estime que celle-ci ne doit pas s’effectuer au détriment des consommateurs, afin que la culture demeure accessible à toutes et tous.

B.   Particulièrement fragilisés, les festivals doivent mener une réflexion sur l’avenir de leur modèle

1.   Le soutien de l’État en faveur des festivals est continu

Selon la cartographie réalisée en 2022 par le ministère de la culture, la France comptait en 2019 7 282 festivals, tous secteurs artistiques confondus, dont 3 229 de musique et 1 634 de spectacle vivant ([6]) Six régions concentrent 65 % des manifestations répertoriées : Auvergne-Rhône-Alpes, Provence-Alpes-Côte-d’Azur, Nouvelle-Aquitaine, Occitanie, Île-de-France et Bretagne. Dans une récente étude, le CNM et le département des études, de la prospective, des statistiques et de la documentation (Deps) du ministère de la culture ont constaté que les festivals de musiques actuelles représentaient 50 % de l’ensemble des festivals d’humour et de musique ([7]).

Selon l’Inspection générale des affaires culturelles (Igac) ([8]), les trois quarts des festivals se déroulent de mai à octobre, principalement les festivals de spectacle vivant, et près de 45 % ont lieu sur une seule journée. Les festivals de musiques actuelles et des arts de rue se concentrent sur une durée de deux à trois jours tandis que les festivals de cinéma ou de musique classique sont organisés sur des durées plus longues.

En octobre 2020, au lendemain du premier confinement et des mesures sanitaires qui avaient provoqué l’annulation des festivals (les pertes de recettes de billetteries sont alors estimées à 98 % en 2020 par rapport à 2019 ([9])), le ministère de la culture a organisé des État généraux des festivals pour répondre aux besoins d’accompagnement et engager un soutien renouvelé aux festivals, en collaboration avec les collectivités territoriales. Trois éditions se sont tenues et ont conduit à l’adoption de deux textes cadre : les « Principes d’engagements de l’État en faveur des festivals » et la « Charte de développement durable à destination des festivals », destinée à valoriser la prise en compte du changement climatique dans la leur gestion.

L’État s’est financièrement engagé auprès de la filière : 10 millions d’euros de mesures nouvelles ont été déployés en 2022, pérennisées en 2023. En 2024, un amendement parlementaire a complété de 2 millions d’euros les crédits en faveur des festivals. Pour l’exercice 2025, 32,7 millions d’euros de crédits centraux et déconcentrés seraient dévolus au soutien de la filière. S’agissant des crédits décentralisés, la répartition des montants entre les Drac a été réalisée à l’appui de la cartographie nationale des festivals réalisée en 2022, au prorata de la volumétrie des festivals dans chaque région.

L’intervention de l’État en faveur des festivals se décline selon trois modalités :

– une aide annuelle au projet, qui peut être renouvelée jusqu’à deux fois ;

– une aide triennale contractualisée, attribuée aux festivals considérés comme structurants et pouvant être reconduite au terme du contrat ;

– des aides transversales favorisant la circulation des œuvres, la transition écologique, l’achat d’équipements et leur modernisation ; des fonds d’amorçage pour les festivals en cours de structuration, des fonds de transition numérique ou de modernisation des systèmes d’information.

En 2023 ([10]), 796 festivals ont été soutenus, pour un montant total de 32,05 millions d’euros. 772 festivals ont été soutenus par les Drac (20,23 millions d’euros de crédits déconcentrés) et 24 festivals par l’administration centrale (11,82 millions d’euros de crédits centraux). La direction générale de la création artistique du ministère de la culture souligne l’élargissement et la diversification des festivals soutenus grâce à ces crédits : entre 2019 et 2023, le nombre de festivals soutenus a augmenté de 356 % et les crédits déconcentrés ont cru de 90 %. Les services du ministère estiment donc que 13,4 % des festivals de la création recensés dans leur cartographie ont été soutenus. En 2023, 207 nouveaux festivals ont été aidés par les Drac. Les services régionaux constatent un afflux important des demandes d’aide, générant une tension sur les crédits disponibles : en 2023, seule un peu plus de la moitié des demandes d’aides ont pu recevoir une réponse positive. Si les crédits ont connu une conséquente augmentation et ont été pérennisés, le ministère de la culture reconnait que le montant global des crédits déconcentrés soutenant les festivals demeure insuffisant face à l’ampleur des sollicitations. Une évaluation pluriannuelle sur la mise en œuvre de la politique de soutien aux festivals, en vue de potentielles évolutions, est actuellement menée par les services du ministère.

Au soutien de l’État s’ajoute une aide financière du CNM. En 2023, 250 festivals de musique ont été soutenus, pour un montant de 8 millions d’euros. Parmi ces festivals, 204 ont été aidés au titre des subventions consacrées aux festivals, pour un montant de 5,8 millions d’euros.

2.   Un modèle économique en grande difficulté

a.   Des festivals rencontrant de grandes difficultés financières

Si l’ensemble du secteur du spectacle vivant traverse une période difficile, les festivals sont particulièrement affectés en raison de leur modèle, concentré sur quelques jours.

Selon le bilan CNM-Deps, treize festivals ont été annulés en 2024 pour une raison autre que les JOP, dont huit pour des raisons financières. 80 % des festivals du panel ont connu des difficultés pendant la saison estivale 2024 : 59 % des répondants ont déclaré avoir rencontré des problèmes financiers, 42 % ont été perturbés par les aléas naturels, 26 % ont souffert de l’indisponibilité des artistes, 14 % du manque de prestataires et de pénuries de matériel et 10 % ont rencontré des problèmes liés à la sécurisation des sites ([11]).

Pourtant, le taux de remplissage des festivals a atteint un niveau moyen satisfaisant de 78 % pour l’ensemble des organisations interrogées. Ce taux a augmenté pour 44 % des festivals ; seuls 30 % ont subi une baisse de fréquentation. Un peu plus d’un quart des festivals a atteint un taux de remplissage supérieur à 90 %. Toutefois, le CNM et le Deps indiquent que parmi ces 77 festivals au fort taux de remplissage, 44 % sont déficitaires et 23 % atteignent simplement l’équilibre. Alors que les taux de fréquentation sont en augmentation, les situations financières des festivals se dégradent : le SMA signale par exemple que le festival belfortain les Eurokéennes peine à atteindre l’équilibre malgré un taux de remplissage de 87 % en 2024, alors que sa situation financière était satisfaisante il y a une quinzaine d’années, avec un taux de fréquentation bien inférieur, à 65 % environ.

Les festivals font face à une augmentation de leurs coûts, non couverte par l’augmentation des ressources propres et des subventions de l’État et des collectivités territoriales. Pendant la saison 2024, les festivals ont notamment fait face à :

– une augmentation des coûts liés à la sécurisation des sites. L’alourdissement de ces coûts est double : il est lié aux coûts de sécurité intérieure (surveillance, anticipation des comportements à risque, dispositifs de secours) en raison d’une professionnalisation du secteur et aux coûts de sécurité extérieure (risques d’attentat), en augmentation depuis les attentats de novembre 2015. 44 % des festivals interrogés par le CNM ont indiqué avoir constaté une augmentation des coûts liés à la sécurisation ;

– une augmentation des cachets artistiques en raison d’une concentration du secteur (voir infra) et de la concurrence des grandes salles, mais aussi du fait de la baisse des revenus phonographiques, conséquence du développement des services de streaming musical. Les artistes ont ainsi cherché à compenser la baisse de ces revenus par l’augmentation des prix de cession. Sur la période 2019-2022 le CNM a estimé à 23 % la hausse moyenne des prix des contrats de cession par groupe. Pour la saison 2024, plus de la moitié des festivals du panel CNM-Deps ont témoigné avoir subi une hausse des dépenses artistiques ;

– des pénuries de prestataires techniques et de matériel, qui entraînent mécaniquement une augmentation des prix en réponse au déséquilibre entre l’offre et la demande. Selon le CNM, 58 % des répondants ont constaté une hausse des dépenses techniques en 2024.

Les recettes des festivals ne permettent pas de compenser ces hausses de coûts. Les recettes de billetterie stagnent en raison de la baisse de pouvoir d’achat des Français, des changements de comportement des consommateurs et d’une dynamique de prix des billets ne compensant pas les effets de l’inflation. En moyenne, le tarif des places a augmenté de 10 % pour les festivals de musiques actuelles par rapport à 2019, soit environ quatre euros. Comme pour les prix des places de concerts, cette hausse est inférieure à l’inflation cumulée sur la période 2019-2022 et est moins importante que chez nos voisins européens ([12]). La France demeure en effet en dessous de la moyenne : par exemple, en 2023 le prix du pass journalier des festivals intermédiaires (entre 5 000 et 15 000 places, les plus représentés) était de 48 euros, contre 68 euros en Belgique, 87 euros au Royaume-Uni et 132 euros aux États-Unis.

D’autre part, si le soutien de l’État a été pérennisé et que de plus en plus de festivals sont aidés chaque année, les organisateurs pâtissent d’une baisse des financements publics locaux. Les festivals adhérents du SMA ont subi une réduction de 29 % des financements publics municipaux et de 28 % des subventions départementales entre 2015 et 2022.

Les festivals continuent pourtant d’investir afin de satisfaire leur public : les budgets sont en hausse de 19 % par rapport à 2019, tout comme le nombre de groupes invités, en augmentation de 8 % pour les festivals de musique actuelle selon le CNM ([13]).

Si certains festivals disparaissent, des festivals de petite envergure, revendiquant une approche familiale, de proximité et financièrement accessibles, semble se développer. Au regard des difficultés économiques que rencontrent les festivals, la réduction de leur envergure parait inévitable, et devrait être combinée à un développement des activités pendant le reste de l’année afin de varier les ressources. Un financement renforcé pour les festivals indépendants et associatifs est également nécessaire, afin de soutenir l’émergence de nouveaux talents et la diversité.

b.   Un changement de comportement des consommateurs

Les directeurs de festivals et les organisations rencontrés ont tous témoigné d’un phénomène préoccupant de changement de comportement des consommateurs. Tout d’abord, les spectateurs n’anticipent plus leurs participations aux festivals, et préfèrent reporter leurs achats à la dernière minute. L’ensemble des festivals de spectacles vivants semblent concernés. Pour les festivals de musiques actuelles, le SMA souligne que 52 % de ses adhérents ont constaté des comportements de ce type, qui obèrent la visibilité des organisateurs – ces derniers ne connaissant leur taux de remplissage que très tardivement – et provoquent des tensions sur la trésorerie des entités. Ce changement des pratiques de consommation est source d’une grande préoccupation pour le secteur.

Lors des auditions, les représentants de festivals rencontrés par le rapporteur pour avis ([14]) ont également précisé que les consommateurs réduisaient leurs achats et se tournaient davantage vers des billets pour un seul spectacle ou une seule journée, au détriment des offres sur plusieurs jours (ou pass). Cela s’explique par la baisse de pouvoir d’achat des consommateurs, les billets journée étant moins onéreux que les pass sur plusieurs jours, et le changement de comportement des spectateurs, dont l’objectif est d’assister au concert d’un seul artiste, et non de profiter de l’expérience globale du festival. En parallèle de ces modifications des habitudes de consommation, le SMA constate que les spectateurs deviennent plus exigeants, souhaitent un plus grand nombre de concerts à tarif constant, des horaires étendus et une mise en scène de plus en plus audacieuse, ce qui a pour conséquence d’augmenter les coûts des festivals.

Une mutation des pratiques culturelles est aussi à l’œuvre. Les festivals de musiques actuelles font particulièrement face à la concurrence des grandes salles (zéniths et arénas), attirant un public jeune et friand d’expériences immersives, autour d’un seul artiste sur scène, souvent d’envergure internationale. Ce comportement concerne surtout les plus jeunes spectateurs de la tranche d’âge 1835 ans, qui désertent les festivals au profit de ces spectacles fédérant de larges communautés de fans, notamment sur les réseaux sociaux. Les phénomènes médiatiques constatés lors des concerts d’artistes telles que Taylor Swift, Billie Eilish ou Mylène Farmer en sont un exemple. La programmation 2023 des stades, très internationale (70 % de la programmation) a par ailleurs tiré les prix des billets à la hausse.

Les festivals sont pourtant des lieux favorisant l’émergence de nouveaux talents, la découverte de nouveaux artistes et genres musicaux, le brassage des populations : l’éloignement des jeunes pose un problème à la fois pour l’avenir des festivals mais également pour le futur de la scène musicale française et des artistes émergents.

Quel est le public des festivals ?

La dernière étude sur la sociologie des spectateurs de festivals, réalisée en 2020 ([15]), montre une féminisation des festivals, les femmes représentant plus de 60 % du public. L’origine du public est souvent locale : plus de la moitié des spectateurs proviennent du département où se déroule l’évènement et 74 % sont originaires de la région. L’âge moyen des spectateurs, de 48 ans, est en baisse par rapport à l’étude précédente publiée en 2009 (51 ans). L’étude constate que le public est majoritairement diplômé et actif, avec une surreprésentation des classes socio-professionnelles supérieures (61 % des spectateurs), au détriment des classes populaires qui ne représentent que 13 % du public. Les festivals bénéficient d’un fort renouvellement du public puisque deux cinquièmes des personnes interrogées ont déclaré assiter au festival concerné pour la première fois. Le nombre de propositions artistiques vues est de deux en moyenne, et plus d’un tiers des festivaliers n’assistent qu’à un seul spectacle. Au total, 72 % des publics ne participent qu’à 15 % de la programmation.

NB : Le rajeunissement du public est à considérer avec précaution, le panel 2019 intégrant plus de festivals de musiques actuelles que celui de 2009, attirant un public plus jeune.

c.   Une concentration du secteur grandissante

Dans un rapport remis à la suite des états généraux des festivals, l’Igac décrit un phénomène de concentration dans le domaine des festivals, qui concerne une quarantaine de festivals en France ([16]). Cette concentration constitue une concurrence directe aux festivals indépendants et fonctionnant sur un modèle associatif.

L’Igac identifie plusieurs causes de cette tendance :

– l’installation sur le marché français de trois groupes internationaux du divertissement : Live Nation et AEG (groupes américains) et ID&T (groupe néerlandais), qui importent en France des formules de festivals existant à l’étranger (comme Lollapalooza, Afropunk ou encore Tomorrowland) ou reprennent des festivals français existants ;

– l’implication croissante de quatre groupes français, investissant dans le secteur des festivals : Fimalac, Vivendi–Olympia production (une dizaine de festivals en France et au Royaume-Uni, dont Garorock), Combat (cinq festivals dont Rock en Seine) et Sony ;

– le développement de deux groupes français de production : Morgane (Francopholies et le Printemps de Bourges) et Jean-Marc Dumontet Production (Paroles citoyennes et Festival d’humour de Paris).

L’effet sur la filière doit alerter, dans la mesure où ce phénomène entraîne une hausse des coûts des contrats de cession. Les capacités financières de ces groupes leur permettent de produire des affiches très prestigieuses, en captant les plus grands artistes. Certaines franchises mondiales attirent une part croissante du public, alors même qu’elles ne proposent un évènement ni original ni ancré dans le territoire d’accueil du festival. Une homogénéisation des productions est constatée, avec des têtes d’affiches très similaires programmées dans les festivals d’un même groupe. Cette standardisation du modèle conduit à un appauvrissement des programmations, une moindre diversité de profils des artistes et une plus faible place laissée à l’émergence de nouveaux talents.

En parallèle, les festivals éprouvent des difficultés croissantes à accéder aux artistes dont la carrière est gérée par ces groupes, qui se réservent pour les festivals produits par lesdits groupes. Cette concurrence provoque une envolée des prix de contrats de cession (+ 13 % selon le CNM entre 2019 et 2022) pour ces artistes, hausse répercutée en cascade sur les cachets des artistes ayant une visibilité inférieure.

Face à ces constats, le rapporteur pour avis souligne le fait que l’État doit renforcer son rôle dans le soutien à l’émergence et à la diversité de l’offre culturelle, en accordant un subventionnement en priorité aux festivals indépendants liés à un territoire, qui favorisent la découverte de nouveaux talents et qui proposent une offre diversifiée.

3.   Un secteur devant tenir compte du changement climatique

Les festivals, évènements se tenant majoritairement en extérieur, sont particulièrement touchés par les aléas climatiques. Dans leur bilan, le CNM et le Deps constatent que 34 % des festivals du panel ont été confrontés à des perturbations climatiques. 77 % de ceux-ci ont par conséquent mis en place des mesures d’adaptation. Les aléas en cause sont les précipitations (50 % des cas), les orages (28 %) et les fortes chaleurs (13 %). L’augmentation de l’intensité des phénomènes météorologiques peut par ailleurs participer à la prise de décision tardive des consommateurs, qui attendent de disposer d’une meilleure visibilité sur les conditions météorologiques. Ces perturbations peuvent aussi entraîner l’annulation partielle de certains festivals, des changements d’organisation de dernière minute ou des aléas techniques.

Mme Marie Sabot, présidente du festival We love green, a précisé, lors de son audition, que les festivals faisaient par conséquent face à une augmentation des coûts d’assurance, ce qui peut mettre en péril l’organisation de certains d’entre eux.

Au regard de ces perturbations, les festivals s’engagent à faire évoluer leur modèle, notamment dans le secteur des musiques actuelles : 59 % des adhérents du SMA ont réalisé un diagnostic de développement durable et 86 % incluent la mise en œuvre d’actions en faveur de la transition écologique. Certains projets collectifs visent à proposer des solutions d’accompagnement de la filière, tel que le projet « Déclic-Décarbonons le live », collectivement porté depuis 2023 par le SMA et la Fédération des lieux de musiques actuelles (Fedelima). Ce projet réunit 18 acteurs dont cinq festivals (Les nuits secrètes, le Festival de la paille, les Z’Éclectiques, les Suds et le Festival de Thau) afin de collecter des données sur l’impact environnemental de la filière de la musique en direct et de définir une stratégie d’accompagnement à sa transition.

C.   Plusieurs solutions existent pour améliorer le financement du spectacle vivant

Le rapporteur pour avis a conscience de la situation dégradée des finances publiques. Si le soutien au spectacle vivant pourrait bien sûr être amélioré afin de tenir compte des effets de l’inflation et des besoins du secteur, il souligne avec satisfaction la légère augmentation des crédits inscrits dans le programme 131 Création ([17]).

Le rapporteur pour avis préconise ainsi d’engager une réflexion sur la taxe sur les spectacles de variétés ([18]), la taxe sur les spectacles d’art dramatique, lyrique ou chorégraphique ainsi que sur le crédit d’impôt en faveur des représentations théâtrales d’œuvres dramatiques ou de cirque.

1.   Une évolution des taxes sur la billetterie des spectacles musicaux et d’art dramatique, lyrique ou chorégraphique est aujourd’hui nécessaire

La taxe sur les spectacles de variétés et la taxe sur les spectacles vivants d’art dramatique ([19]) sont perçues par, respectivement, le CNM et l’Association pour le soutien du théâtre privé (ASTP). Le taux des deux taxes est fixé à 3,5 %. Celles-ci sont perçues pour les spectacles payants, sur les recettes de billetterie (hors taxes) et pour les représentations gratuites, sur le montant des contrats de cession (hors taxes) générés par le spectacle. La taxe est due par les responsables de billetterie ou les distributeurs du spectacle, qu’ils soient des intervenants privés ou subventionnés.

Les deux taxes disposent d’un fonctionnement similaire :

– 65 % des montants de la taxe versée alimentent un compte nominatif de chaque déclarant, qui dispose alors d’un droit de reversement, total ou partiel.

– 35 % des montants sont conservés par l’ASTP et le CNM afin de financer leurs actions, notamment par l’alimentation des dispositifs d’aides.

Le produit de ces taxes permet donc de soutenir le secteur du spectacle vivant grâce aux programmes de redistribution mis en place par les deux organismes.

Les recettes de ces taxes sont plafonnées, à hauteur de 8 millions d’euros pour la taxe sur les spectacles d’arts dramatique, lyrique ou chorégraphique ([20]), et à hauteur 50 millions d’euros pour la taxe sur les spectacles de variétés. Si les recettes perçues dépassent ce plafond, elles sont écrêtées et versées au budget général de l’État. Le dynamisme de ces recettes doit conduire à un dépassement des plafonds dès l’exercice 2025 : le projet de loi de finances pour 2025 prévoit, à son article 33, un rendement prévisionnel de 8,5 millions d’euros pour la taxe sur les spectacles d’art dramatique et de 53,15 millions d’euros pour la taxe sur les spectacles de variétés.

L’ASTP comme le CNM, ainsi que de nombreux acteurs de la filière, ont alerté le rapporteur pour avis à ce sujet : selon eux, l’écrêtement des recettes de la taxe va diminuer l’acceptabilité de la taxe par le secteur, compte tenu de son fonctionnement. Le CNM et l’ASTP se retrouveraient dans l’impossibilité d’alimenter les comptes individuels à hauteur de 65 % des sommes correspondantes, alors même que la disponibilité de ce droit de tirage est nécessaire pour les professionnels. Selon les représentants de l’ASTP entendus par le rapporteur pour avis, une telle situation altèrerait gravement le consentement à l’impôt des professionnels concernés et romprait l’égalité entre les entrepreneurs. Une solution serait alors de compenser les sommes écrêtées en alimentant les comptes individuels au moyen d’autres ressources, initialement prévues pour les aides sélectives, forcément au détriment des bénéficiaires de ces aides. Le président du CNM, M. Jean-Philippe Thiellay, a par ailleurs indiqué que le maintien de ce plafond, alors que l’opérateur effectue une réforme et une modernisation de ses aides, priverait la filière de ressources indispensables au soutien de son développement.

Le rapporteur pour avis se positionne donc en faveur d’un rehaussement des plafonds des deux taxes, à 10 millions d’euros pour la taxe perçue par l’ASTP et à 80 millions d’euros pour celle perçue par le CNM.

Une évolution de la partition des taxes entre droit de reversement et aides financière est également à l’étude. Si le droit de reversement, sorte d’épargne forcée, est défendu par les plus grands acteurs du secteur, les organismes indépendants réclament une diminution de ces droits de tirage au profit d’une augmentation du financement des aides déployées par l’ASTP et le CNM, afin d’augmenter la redistribution au sein du secteur.

Les systèmes d’aides du CNM et de l’ASTP vont connaître des évolutions dans les mois à venir ([21]). La réforme des aides du CNM doit entrer en vigueur début 2025 selon les informations transmises au rapporteur pour avis par les représentants de l’opérateur. S’agissant de l’ASTP, l’association doit encore prendre en compte les recommandations du récent rapport de l’Igac à son sujet ([22]).

Les inspecteurs ont ainsi constaté des dysfonctionnements tant dans la gouvernance que dans le système d’aide de l’association, trop peu transparents. La mission a donc proposé plusieurs évolutions. Tout d’abord, une transformation de la gouvernance de l’association est souhaitée, afin de permettre à davantage de professionnels d’intervenir dans la gestion du dispositif. Deuxièmement, l’Igac préconise une évolution des bénéficiaires des aides, dont la liste ne doit plus être limitée aux seuls membres de l’association. Enfin, la mission conseille une amélioration du fonctionnement de l’ASTP, dans le but de garantir la transparence des procédures d’attribution des aides et l’égalité de traitement entre les bénéficiaires des subventions, ainsi qu’une modernisation du dispositif d’aide.

Le rapporteur pour avis suivra avec vigilance la mutation de ces systèmes d’aide, tant ils sont cruciaux pour la filière.

2.   Le recouvrement de la « taxe streaming » est décevant mais celle-ci demeure une perspective de financement essentielle pour le spectacle vivant

La taxe sur les locations en France de phonogrammes et de vidéomusiques destinés à l’usage privé du public dans le cadre d’une mise à disposition (payante ou gratuite) à la demande sur les réseaux en ligne (dite « taxe streaming ») a été instaurée par l’article 53 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024. La taxe est assise sur le montant du prix payé par le public pour le service d’écoute à la demande ou des revenus publicitaires perçus par les plateformes dans le cadre d’une mise à disposition gratuite du service. Le taux de la taxe est fixé à 1,2 %. Les plateformes bénéficient d’une exonération en dessous de 20 millions d’euros de chiffre d’affaires.

Pour l’exercice 2024, le CNM anticipe un rendement de 9,3 millions d’euros, inférieur aux prévisions inscrites en loi de finances pour 2024 (15 millions d’euros). Les premiers versements de la taxe ont eu lieu à compter du deuxième trimestre 2024 en raison de la mise en place de la procédure de déclaration et se sont stabilisés à hauteur d’un million d’euros mensuels. Toutefois, le CNM déplore le fait que certaines plateformes ne se soient pas encore acquittées du montant de la taxe ([23]) et craint que certaines refusent de respecter leurs obligations.

Le produit de la taxe est affecté au CNM dans la limite d’un plafond de 18 millions d’euros. Selon le CNM, ce niveau n’est aujourd’hui plus adapté au regard du développement de l’industrie phonographique et du marché de la diffusion de musique à la demande. Le rendement prévisionnel total inscrit à l’article 33 du projet de loi de finances pour 2025 est de 18 millions d’euros, ce qui implique un dépassement du plafond à compter de l’exercice 2026. Le CNM estime en effet le rendement de la taxe à 21,2 millions d’euros en 2026, 24,6 millions d’euros en 2027 et 28,4 millions d’euros en 2028 dans son contrat d’objectifs et de performance. L’opérateur demande donc un rehaussement du plafond de cette taxe à hauteur de 30 millions d’euros.

Cette nouvelle ressource est également un élément crucial et fondamental de la réforme et de la modernisation des aides du CNM à la filière musicale.

3.   Un élargissement du crédit d’impôt en faveur des représentations théâtrales d’œuvres dramatiques ou de cirque est souhaitable

Le crédit d’impôt en faveur des représentations théâtrales d’œuvres dramatiques ou de cirque ([24]) soutient les entreprises du spectacle vivant. Le crédit d’impôt a été prorogé à 2027 et étendu au secteur du cirque par les articles 60 et 61 de la loi de finances pour 2024. Le coût de cette dépense fiscale est estimé à 2 millions d’euros pour 2025 ([25]). Si le rapporteur pour avis se réjouit de cette prise en compte du cirque, il regrette l’absence de considération du secteur chorégraphique, qui ne bénéficie pas de cette mesure.

L’extension de ce dispositif aux spectacles de danse, souhaitée par le rapporteur pour avis, nécessite une adaptation des conditions d’obtention de ce crédit d’impôt aux caractéristiques du secteur. Actuellement, l’article 220 sexdecies du code général des impôts conditionne l’obtention de ce crédit d’impôt au respect de six critères cumulatifs. En l’état actuel, si ces critères sont conservés, une extension aux spectacles chorégraphiques n’aurait pas d’effet sur la filière. En effet, les spectacles chorégraphiques sont programmés pour des durées plus courtes que les spectacles dramatiques : les membres du syndicat la Scène indépendante rencontrés par le rapporteur pour avis précisent que 90 % des spectacles de danse sont présentés douze fois ou moins par an. Le maintien d’un critère de nombre de représentations à vingt dates neutraliserait l’extension du dispositif au champ chorégraphique en limitant ses bénéficiaires à un très faible nombre. Selon le syndicat, 230 spectacles par an pourraient toucher ce crédit d’impôt si un tel aménagement est garanti.

Le rapporteur pour avis se positionne aussi en faveur de la diminution du nombre d’artistes au plateau exigé – actuellement au nombre de six – pour l’obtention de ce crédit d’impôt, et ce pour l’ensemble des spectacles concernés : le nombre d’artistes au plateau ne présage plus ni de la qualité artistique ni de l’ampleur du spectacle, compte tenu notamment des exigences techniques de certaines mises en scènes.

Enfin, le rapporteur pour avis souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur la nécessité de corriger une erreur matérielle à l’article 60 de la loi de finances pour 2024 : l’extension du crédit d’impôt aux spectacles de cirque, gagée afin de se conformer aux exigences de l’article 40 de la Constitution du 4 octobre 1958, a pour effet de transformer ce crédit d’impôt en une simple réduction d’impôt. Il invite le gouvernement à supprimer ce gage.

 

 


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   Travaux de la commission

I.   Audition de la ministre

Lors de sa réunion du mardi 22 octobre 2024 à 16 heures 45 ([26]), la commission auditionne, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2025 (n° 324  seconde partie), Mme Rachida Dati, ministre de la Culture.

Mme la présidente Fatiha Keloua-Hachi. Nous commençons l’examen du projet de loi de finances pour 2025 par l’audition de Mme Rachida Dati, ministre de la culture, et l’examen des missions Culture, Médias, livre et industries culturelles et Audiovisuel public.

Avant de vous céder la parole, Madame la ministre, je souhaite vous interroger sur deux points. Concernant le pass culture, pouvez-vous nous éclairer sur la nature et le calendrier des évolutions annoncées ? Une partie de la fraction individuelle sera-t-elle consacrée aux spectacles vivants ? Envisagez-vous une modulation des montants alloués en fonction des revenus familiaux des jeunes bénéficiaires ? Une augmentation de la part collective est-elle également à l’étude ?

Ma seconde question porte sur la réduction de 10,3 millions d’euros de la dotation du fonds de soutien à l’expression radiophonique (FSER) locale. Comment justifiez-vous cette diminution, qui représente 84 % de la baisse des crédits de la mission Médias, livre et industries culturelles en 2025 ? Quelles seront les répercussions sur les radios associatives ?

Je vous invite maintenant à nous présenter votre projet de budget pour 2025.

Mme Rachida Dati, ministre de la culture. Je suis ravie de poursuivre ma mission à la tête du ministère de la culture, que je considère comme un ministère régalien et essentiel pour la cohésion de notre société fracturée. Ces derniers mois m’ont confortée dans cette conviction. Le ministère de la culture porte des enjeux fondamentaux pour la réduction des inégalités et la construction citoyenne.

Dans le contexte actuel de difficultés pour nos finances publiques, l’État se doit d’être exemplaire. Le ministère de la culture prendra sa part dans les efforts à fournir, comme il l’a déjà fait lors de la précédente réduction des dépenses. Néanmoins, en tant que ministre de la culture, je veillerai à garantir les moyens nécessaires à nos politiques culturelles, en maintenant un équilibre.

Nous avons une première bonne nouvelle, la stabilité du budget du ministère de la culture, reconduit à 4,045 milliards d’euros pour 2024. Cela témoigne de l’engagement du gouvernement et du soutien des parlementaires envers notre mission d’accessibilité de la culture pour tous. Malgré le contexte difficile, le budget demeure à son plus haut niveau historique. Je rappelle que depuis l’élection du président de la République, le budget de la culture a augmenté de plus de 1 milliard d’euros.

La deuxième bonne nouvelle concerne l’annulation des 204 millions d’euros prévus en début d’année, qui ne figurent plus dans ce projet de loi de finances (PLF). Ce texte prévoit donc une hausse des moyens du ministère de 206 millions d’euros par rapport à cette année, nous permettant de préserver l’action du ministère dans tous les secteurs.

Concernant la mission Culture, dans le secteur de la création artistique, les crédits sont intégralement préservés à hauteur de 1,04 milliard d’euros, dont 550 millions d’euros consacrés aux secteurs subventionnés en région. Comme je m’y étais engagée lors des annulations de crédits en février dernier, aucun euro n’a manqué en région. Je m’en assure personnellement lors de mes déplacements hebdomadaires dans les territoires.

L’État a tenu ses engagements et soutenu ces structures. Les crédits consacrés aux spectacles vivants, hors opérateurs nationaux, sont en hausse de 45 millions d’euros entre 2022 et 2024, dont près de 9 millions d’euros en 2024 dans le cadre du plan Mieux produire, mieux diffuser.

La philosophie de ce plan vise à répondre aux enjeux majeurs du secteur : améliorer la circulation des œuvres et inciter les collectivités à accroître leur participation financière. Le bilan de la première année s’avère très positif, avec 9 millions d’euros du ministère de la culture ayant entraîné une participation des collectivités territoriales de 12,5 millions d’euros, permettant la concrétisation de nombreux projets vertueux.

Nous poursuivrons cet effort collectif en optimisant la production par des mutualisations et en améliorant la diffusion, notamment via des séries plus longues pour consolider certains modèles économiques du spectacle vivant. Nous renforçons notre collaboration avec les élus locaux et les parlementaires, notamment à travers les contrats de territoire pour la création artistique. J’ambitionne d’étendre ce dispositif au-delà du spectacle vivant, comme l’illustre l’accord signé en Charente-Maritime.

Ces dernières années, l’État a assumé seul l’augmentation continue des soutiens. Dans un contexte difficile, je préserve le budget dédié à la création artistique, mais cela ne suffira pas. Il est impératif de convaincre les collectivités de maintenir leur engagement et d’inciter le secteur à explorer de nouveaux leviers, tels que la politique tarifaire. Bien que je sois attachée à des tarifs très bas pour certains publics, cela étant un pilier de la démocratie culturelle, nous devons mener une réflexion globale sur le modèle économique du spectacle vivant pour assurer sa pérennité.

Les moyens alloués aux festivals sont reconduits en 2025, avec un total de 32 millions d’euros. Je suis disposée à aborder ce sujet plus en détail, notamment avec Monsieur Balanant, pour qui je sais que c’est une préoccupation majeure.

Concernant la démocratisation culturelle et l’accès aux métiers de la culture, ces priorités restent au cœur de mon action. Je reconnais une baisse de 17 millions d’euros du budget dédié à la démocratisation culturelle, principalement sur le soutien à l’éducation artistique et culturelle. Cependant, il convient d’analyser cette baisse en tenant compte du pass culture et de sa part collective, dont la mise en œuvre rencontre des obstacles, notamment de mobilité. Malgré les contraintes budgétaires, je reste déterminée à préserver ce dispositif essentiel.

Quant à la réforme du pass culture, j’avais pressenti que sa part individuelle favorisait la reproduction sociale. En effet, son utilisation nécessitait une certaine familiarité avec les structures culturelles. L’objectif du pass culture doit être de faciliter l’accès à la culture pour les personnes les plus éloignées, que ce soit en milieu rural ou dans les quartiers prioritaires de la ville. Les chiffres sont éloquents : en zone rurale, la mobilité constitue un obstacle majeur, tandis que dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, notamment en région PACA et en Île-de-France, la part individuelle reste faiblement mobilisée malgré une offre culturelle dense, suggérant que la mobilité n’est pas le seul facteur en jeu. Je m’engage à réformer en profondeur la part individuelle du pass culture, qui ne doit plus être un simple instrument de consommation culturelle ou de reproduction sociale. Dès ma prise de fonction en janvier dernier, j’ai lancé un plan ruralité financé à hauteur de 34 millions d’euros, répartis entre cette fin d’année et l’année prochaine, dont une grande partie provient du plan France 2030. La ruralité a trop longtemps été négligée dans nos politiques culturelles. Lorsqu’on évoquait l’accès à la culture ou la démocratie culturelle, on se concentrait sur les quartiers populaires, oubliant les 22 millions de nos compatriotes vivant en zone rurale. Le plan que j’ai élaboré suite à une large consultation répond à plusieurs problématiques : la diffusion du spectacle vivant dans les zones sous-équipées, l’accompagnement des élus pour la préservation et l’utilisation du patrimoine, le renforcement de l’action nationale de nos établissements publics et l’adaptation des horaires d’ouverture, notamment des petites médiathèques. Ce plan se traduit par un budget de 14 millions d’euros pour 2025, s’ajoutant aux 20 millions mobilisables dès cette année.

Le patrimoine demeure une priorité claire de ce budget, avec une légère augmentation de 7 millions d’euros, portant l’enveloppe à plus de 1,2 milliard d’euros. Nous poursuivons ainsi les grands chantiers engagés, notamment pour des raisons de sécurité et de mise aux normes. Je citerai la cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul à Nantes (6 millions d’euros), l’extension du site des Archives nationales à Pierrefitte-sur-Seine (17,7 millions d’euros) et la restauration du Centre Pompidou (29 millions d’euros dès l’an prochain). Nous lançons également des projets importants pour la revitalisation de nos territoires, tels que la reconversion de l’ancienne abbaye-prison de Clairvaux (14,3 millions d’euros) et la valorisation du château de Gaillon en Normandie (4,3 millions d’euros). Le projet de Clairvaux est particulièrement urgent, car l’inaction nous coûte 3 millions d’euros par an en frais de sécurisation.

Néanmoins, le budget alloué à la restauration des monuments historiques connaît une légère baisse. Les besoins de notre patrimoine dépassent notre dotation budgétaire, malgré sa stabilisation à un niveau historique. Nous faisons face à un mur d’investissement, aggravé par l’inflation. Les besoins dans les territoires sont insuffisamment couverts, comme j’ai pu le constater lors du lancement du plan ruralité et de mes déplacements.

En résumé, le point noir que j’identifie dans la mission Culture concerne le patrimoine. Malgré un budget à son plus haut niveau historique, nous ne sommes pas en mesure de répondre à une situation exceptionnelle qui nécessiterait une mesure véritablement exceptionnelle. Le patrimoine reste un élément fort de cohésion pour tous, transcendant les jugements individuels.

J’ai fait du patrimoine une priorité, tant dans les projets à réaliser que dans les investissements et le fonctionnement. Car si investir est important, le fonctionnement l’est davantage. La question du patrimoine en France concerne principalement les usages. Trop longtemps, nous avons restauré et protégé sans considérer l’utilisation, ce qui nous contraignait à refinancer lors de dégradations ou de catastrophes. Je souhaite donc que nous élaborions ensemble une nouvelle politique patrimoniale.

Concernant la mission Média, livre et industries culturelles, je poursuivrai l’accompagnement des acteurs de ce secteur en pleine mutation. Les industries culturelles affrontent en première ligne les grandes mutations numériques, et nos politiques soutiennent la diversité et le renouvellement de la création.

Pour le cinéma, l’efficacité de nos modalités de soutien est reconnue, comme en témoigne l’absence de plafonnement des taxes du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), qui conservera l’intégralité de ses moyens opérationnels, soit 780 millions d’euros en 2025. En janvier, la pérennité de ce modèle de financement n’était pas assurée. Ce budget, entièrement alimenté par une surfiscalité prélevée sur les entreprises du secteur, a bénéficié ces dernières années des contributions des plateformes américaines. Cela permettra de financer les mesures en faveur de la diffusion, comme je l’ai annoncé récemment à Lyon. Le CNC ne se limitera plus à la production, mais s’engagera désormais dans la diffusion, une mission que j’ai évoquée lors du festival de Cannes et qui a déjà débuté.

Je me réjouis que ce texte préserve les différents crédits d’impôt pour le cinéma, l’audiovisuel, les tournages internationaux et les jeux vidéo. Malgré les débats sur les crédits d’impôt et les niches fiscales, ce secteur génère plus de revenus qu’il n’en coûte : 6 à 7 euros d’activité en France pour 1 euro de dépenses fiscales. C’est un secteur d’attractivité, un vivier d’emplois, un pilier culturel important pour la France, mais aussi une véritable industrie.

Nous recherchons également une plus grande cohérence dans nos politiques. Nous ne pouvons pas investir 300 millions d’euros de France 2030 dans nos studios, comme à Coulommiers, sans soutenir la production locale. Je vous rappelle que le film d’Audiard, Emilia Pérez, qui semble tourné en Amérique du Sud, a été intégralement réalisé dans les studios à Bry-sur-Marne. Nous investissons également dans nos écoles, comme la CinéFabrique à Marseille et à Lyon, pour éviter la délocalisation des tournages.

Concernant la presse et les médias, l’État maintient son soutien de 365,7 millions d’euros et préserve les crédits de 26 millions d’euros alloués au pluralisme, ainsi que le fonds de soutien aux médias d’information sociale de proximité. Le fonds de soutien à l’expression radiophonique locale subit une baisse de 10 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale de 2024. J’ai rencontré les représentants du secteur et je me suis engagée à trouver des solutions. Ces radios locales associatives sont essentielles car, dans certaines régions, elles constituent presque le seul accès à la culture. Nous y sommes tous très attachés et je pense que nous trouverons une solution ensemble.

Quant à l’audiovisuel public, je regrette l’interruption de la réforme de sa gouvernance, car les raisons qui la motivaient demeurent. Je vous le dis clairement, le statu quo n’est pas envisageable pour l’audiovisuel public, indépendamment de nos différences politiques ou idéologiques.

Je suis profondément attaché à l’audiovisuel public. J’ai toujours affirmé, même avant d’être ministre de la culture, que pour une partie de nos compatriotes, il représente le premier accès à la formation, à la culture, à la liberté, à l’émancipation, voire à la cohésion. Cependant, ce secteur ne se réforme pas. Je dois vous avertir qu’il risque de s’affaiblir, voire de disparaître. Je pense que nous pourrions avancer sur cette réforme de la gouvernance de manière concertée.

Dans le projet de loi de finances 2025, le financement de l’audiovisuel public est prévu par le biais du budget général. Une proposition de loi organique sera examinée demain au Sénat pour sanctuariser l’affectation d’un montant de TVA au financement de l’audiovisuel public. L’enjeu consiste à garantir la pérennité et la prévisibilité du financement du secteur, tout en encourageant sa réforme.

Concernant le budget de l’audiovisuel public, il est maintenu au niveau de 2024, malgré certaines affirmations contraires. Il apparaîtra en retrait par rapport à la trajectoire des contrats d’objectifs et de moyens, avec un écart d’environ 80 millions d’euros. Cette différence s’explique notamment par les 50 millions de crédits de transformation, destinés à favoriser les coopérations et à amorcer la réforme de la gouvernance. Le report de la réforme entraîne logiquement un décalage des crédits associés. Il convient de remettre tout cela en cohérence.

Abordons maintenant la question du patrimoine, qui suscite de réelles préoccupations. Nous préservons l’essentiel dans ce projet de budget, atteignant même un niveau historiquement élevé. La lettre-plafond que j’avais reçue cet été était difficilement défendable, mais nous avons démontré la nécessité de sauvegarder cette mission culturelle.

Nous sommes conscients que la légère augmentation de 7 millions d’euros des crédits patrimoine ne permet pas de répondre pleinement à nos ambitions et aux attentes des Français. Le patrimoine n’a jamais été autant plébiscité, comme en témoigne l’affluence croissante aux journées du patrimoine. Pourtant, nous le laissons se dégrader en partie, agissant souvent dans l’urgence, comme l’illustrent les fonds débloqués par le président de la République pour le plan incendie ou le plan de mise aux normes, dont Notre-Dame est l’exemple le plus emblématique.

L’année prochaine concentre de nombreux enjeux. La concertation sur la ruralité a révélé que le patrimoine de proximité constituait souvent le seul équipement culturel local, insuffisamment entretenu ou exploité. Ce constat rejoint les conclusions de la mission Bern, qui a mis en lumière la dégradation de certains joyaux de notre patrimoine faute de financements dans les schémas classiques.

Nous souhaitons que 2025 soit l’année d’une prise de conscience et d’une mobilisation exceptionnelle autour du patrimoine, avec une attention particulière portée à la ruralité. Je tiens à ce que nos actions bénéficient aux 22 millions de nos compatriotes vivant dans ces territoires. Le Premier ministre partage ce constat et, avec son accord, j’ai convaincu le ministre du budget de faire un geste exceptionnel pour le patrimoine l’an prochain. Cette mesure sera annoncée dans le cadre du débat parlementaire par un amendement du Gouvernement, pour lequel je solliciterai votre soutien.

*

Mme la présidente Fatiha Keloua-Hachi. Madame la ministre vient d’éveiller notre curiosité. Nous en venons à la discussion générale sur les crédits de la mission Culture. Je vais à présent donner la parole aux rapporteurs pour avis, en commençant par celui qui est en charge des programmes Création, transmission des savoirs et démocratisation de la culture.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis de la mission Culture (Création, transmission des savoirs et démocratisation de la culture). Les crédits consacrés à la création artistique, à la transmission des savoirs et à la démocratisation culturelle ainsi qu’aux fonctions de soutien du ministère de la culture connaissent une hausse, ce dont je me félicite dans le contexte budgétaire actuel. Les trois programmes concernés par mon avis bénéficient d’une légère augmentation par rapport à la loi de finances pour 2024, avec une progression de 3,2 % des autorisations d’engagement et de 0,25 % des crédits de paiement. Ces montants répondent aux défis auxquels font face les différents secteurs culturels depuis 2017. L’État tient ses engagements, avec une augmentation de plus de 1 milliard d’euros pour le ministère de la culture depuis 2017, tant pour soutenir le spectacle vivant et les artistes que pour assurer sa mission de démocratisation culturelle.

Cette hausse s’inscrit néanmoins dans un contexte d’inflation persistante, particulièrement marquée dans le domaine du spectacle vivant. Les augmentations de crédits prévues pour cet exercice budgétaire seront partiellement absorbées par la hausse des prix.

Le programme Création s’élève à plus de 1 milliard d’euros, soit une progression de 3,24 % par rapport à 2024. Il vise à soutenir le spectacle vivant, les arts visuels et les professions artistiques. Cette augmentation est bienvenue face à la crise que traverse le milieu culturel. Le programme financera notamment trois mesures du nouveau plan Culture et ruralité à hauteur de 4,6 millions d’euros. Cependant, l’accès à la culture en zone rurale nécessite également un plan de soutien à la création pour accompagner les compagnies et les auteurs dans cette transformation. L’évolution des attentes du public appelle à réfléchir au développement de dispositifs de médiation adaptés.

Les mesures engagées l’an dernier sont reconduites le plan Mieux produire, mieux diffuser (9 millions d’euros) et le plan de soutien aux métiers d’art (3 millions d’euros). Les festivals bénéficieront de plus de 32 millions d’euros, un soutien attendu alors que la filière traverse une crise profonde de son modèle économique.

Concernant le soutien à l’emploi et aux artistes-auteurs, 72 millions d’euros seront déployés, dont 39 millions pour le fonds national pour l’emploi pérenne dans le spectacle (Fonpeps). Les grands projets d’investissement mobiliseront 79 millions d’euros pour poursuivre les travaux de rénovation et créer un établissement public consacré aux métiers d’art au 1er janvier 2025.

Le programme Transmission des savoirs et démocratisation de la culture verra ses crédits s’élever à 857 millions d’euros en autorisations d’engagement, soit une hausse de 3,4 % par rapport à 2024. Les efforts envers l’enseignement supérieur culturel sont maintenus, ce qui est essentiel au vu des difficultés rencontrées par les écoles nationales supérieures d’architecture et les écoles supérieures d’art territoriales. Il convient de poursuivre les concertations et de mettre en œuvre les préconisations du rapport Oudart de 2023 pour pérenniser ces établissements.

L’engagement en faveur de l’objectif 100 % éducation artistique et culturelle (EAC) est maintenu, avec une augmentation des crédits en faveur de l’éducation artistique et culturelle à l’école et hors temps scolaires. Le plan d’éducation aux médias et à l’information est reconduit, tout comme les actions en faveur de la formation.

La majeure partie des crédits du programme Transmission des savoirs et démocratisation de la culture finance le volet individuel du pass culture, renouvelé à hauteur de 210 millions d’euros pour 2025. Ce dispositif connaît une appropriation croissante par les jeunes. Une réforme prochaine du pass culture a été annoncée, visant à encourager davantage la fréquentation du spectacle vivant. Je soutiens l’idée de réserver une partie des crédits à ce secteur, tout en insistant sur l’importance de maintenir l’universalité du dispositif, clé de sa réussite.

Enfin, je déplore la baisse des crédits alloués à la recherche, qui envoie un signal négatif. La recherche contribue à la vitalité de la création en développant de nouveaux procédés et matières. Le patrimoine revêt une importance capitale, comme vous l’avez souligné, Madame la ministre. La création actuelle constituera le patrimoine de demain, et nous devons la préserver avec soin.

Les crédits du programme de soutien à la politique du ministère s’élèveraient à 871 millions d’euros en autorisations d’engagement et 869 millions d’euros en crédits de paiement, soit une augmentation de 3 % par rapport à 2024. Ces crédits couvrent l’action internationale du ministère et ses fonctions support. Le plafond d’emploi du ministère demeurerait stable pour 2025, avec une légère baisse de deux équivalents temps plein.

Pour le volet thématique de cet avis budgétaire, j’ai choisi d’analyser les enjeux liés à la situation du spectacle vivant face aux contraintes économiques post-crise sanitaire. Bien que célébré lors des cérémonies d’ouverture et de clôture des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, le secteur du spectacle vivant, tant privé que public, traverse une période délicate. Les festivals, en particulier, connaissent une véritable crise de leur modèle économique, qui devra probablement être repensé pour garantir la pérennité de la filière.

Les Jeux olympiques et paralympiques ont offert une vitrine exceptionnelle au modèle français de création artistique. J’ose affirmer que la France peut être considérée comme l’une des premières puissances culturelles mondiales, voire la première. Ce succès repose sur l’existence d’une filière structurée qui a produit de véritables prodiges, à l’instar de Thomas Jolly. Par exemple, trois compagnies de danse étaient présentes lors de la cérémonie d’ouverture, et de nombreux intermittents du spectacle ont participé aux festivités. L’Olympiade culturelle a également mis en lumière la création française, avec de nombreux projets fleurissant sur tout le territoire, jusque sur la colonnade de notre Assemblée.

L’année 2024, et plus particulièrement les deux années précédentes, a été éprouvante pour le secteur. Si l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques, anticipée par les acteurs de la filière, a eu moins de répercussions que prévu — à l’exception notable du Festival d’Avignon qui a rencontré de réels problèmes dus aux changements de dates —, la dissolution de l’Assemblée nationale et l’organisation des élections législatives ont constitué un facteur de perturbation majeur pour le spectacle vivant. Une grande partie des organisations auditionnées ont signalé une baisse importante de fréquentation pendant cette période, se répercutant naturellement sur leurs recettes.

À ces difficultés temporaires s’ajoutent des problèmes structurels qui méritent notre attention. Les acteurs du spectacle vivant souffrent toujours de l’augmentation des coûts de l’énergie, des matières premières, des contrats de cession et des charges salariales, consécutive à des revalorisations de salaires nécessaires et attendues. Bien que ces revalorisations soient positives, ces coûts ne peuvent pas toujours être répercutés sur le prix des billets. Les festivals pâtissent davantage de cette inflation en raison de la structure de leur modèle, leur activité étant concentrée sur quelques jours.

Les directeurs de festivals rencontrés font état d’un changement préoccupant dans les comportements des consommateurs. Les jeunes délaissent progressivement les festivals au profit d’expériences immersives proposées dans de grandes salles autour d’un seul artiste. La concurrence de ces espaces fait craindre une concentration de la création artistique et un déclin des festivals. Une telle évolution limiterait l’émergence de nouveaux talents et le brassage des populations, pourtant essentiels à la vitalité de l’écosystème culturel français.

Une mutation du modèle des festivals pourrait être envisagée. Une moindre concentration sur la période estivale permettrait de proposer une offre culturelle tout au long de l’année. De plus, développer une politique d’aller-vers serait l’occasion de se rapprocher des publics les plus éloignés ou les plus sensibles à la concurrence des arenas.

Le spectacle vivant doit également faire face au défi du changement climatique. Les événements en plein air sont directement affectés par l’intensification des aléas météorologiques qui dissuadent parfois le public. La filière doit aussi participer à la réduction de son empreinte carbone et amorcer une mutation de ses pratiques.

Une réflexion peut être engagée concernant certains dispositifs fiscaux et de financement relatifs au spectacle vivant, notamment l’allongement à trois ans de la temporalité des campagnes d’appels à projets, l’extension au champ chorégraphique du crédit d’impôt pour le spectacle vivant, l’évolution des taxes sur la billetterie perçues par l’Association pour le soutien du théâtre privé (ASTP) et le Centre national de la musique (CNM). Ces avancées, réclamées par le secteur, garantiraient une meilleure visibilité pour les structures et une plus grande acceptabilité de ces dispositifs.

En conclusion, ce budget répond aux enjeux auxquels le monde de la culture a été confronté dans un contexte de tensions budgétaires accrues. Sous réserve des amendements qui pourraient être adoptés, je donne un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Culture.

Mme Rachida Dati, ministre. Concernant votre rapport, Monsieur Balanant, j’ai bien conscience des enjeux que vous avez soulevés, notamment sur les spectacles vivants et les festivals. C’est pourquoi le budget du programme Création est entièrement préservé. Il est même supérieur à celui de l’année précédente, les annulations n’étant pas reconduites, ce qui permet de compenser l’effet de l’inflation.

Lors des annulations de crédits de février dernier, nous avons utilisé tous les leviers à notre disposition, notamment les réserves de précaution, pour atténuer fortement leur impact. L’effort résiduel sur le programme Création s’est finalement limité à une vingtaine de millions d’euros au lieu des 95 millions initialement prévus.

Concernant le financement des festivals, je confirme que l’aide de l’État est maintenue. Nous sommes aux côtés des festivals dans tous les cas de figure, comme le confirme le plan ruralité. J’avais d’ailleurs affirmé qu’il ne manquerait pas 1 euro en territoire pour les festivals.

Vous avez évoqué à juste titre que certains festivals, notamment ceux de taille intermédiaire, souffrent beaucoup. Leur modèle économique est fragilisé. Il ne suffit plus de remplir les salles pour être rentable. J’ai rencontré les organisateurs de festivals, qu’ils soient célèbres ou moins connus, et nous avons abordé les problématiques liées aux tourneurs et aux cachets. Certains festivals ont atteint un plafond de verre, remettant en question leur modèle même de fonctionnement.

L’État répond présent, mais le soutien public ne peut pas être illimité. Nous pouvons être un catalyseur, impulser des initiatives, mais cela ne peut se faire indéfiniment. La contrainte budgétaire nous rappelle à cette réalité et à notre responsabilité.

Durant la crise sanitaire, l’État a soutenu les festivals avec un fonds exceptionnel initialement doté de 10 millions d’euros, rapidement porté à 30 millions, incluant le soutien du Centre national de la musique aux festivals de musique. Nous avons mis en place une nouvelle politique en faveur des festivals avec des moyens supplémentaires pérennisés. Le nombre de festivals du champ de la création soutenus par les Drac est passé de 169 à 772 entre 2019 et 2023, soit une augmentation de 362 %. Les crédits alloués sont passés de 10,6 millions à plus de 20,2 millions d’euros. Le Centre national de la musique a également soutenu 250 festivals en 2023 pour un montant d’environ 8 millions d’euros.

L’État est prêt à accompagner les professionnels dans la réflexion sur leur modèle économique. J’annoncerai prochainement une réflexion sur la pérennité du spectacle vivant en France, élément essentiel de notre identité culturelle. Des grands festivals aux petits événements en milieu rural, il est crucial de réfléchir à leur viabilité à long terme.

J’ai entendu vos remarques sur la baisse des dotations aux collectivités territoriales. Cependant, les contrats que j’ai pu établir avec les élus locaux, qu’ils soient régionaux, départementaux, communaux ou de communauté de communes témoignent d’un engagement fort pour la culture. Nous poursuivrons ce travail partenarial.

Monsieur le rapporteur Patrier-Leitus, je suis d’accord avec vous sur l’importance des points d’amélioration que vous avez soulevés dans les différents programmes. Je suis prêt à apporter des précisions si vous le souhaitez, mais je partage globalement l’ensemble de vos observations.

Dans le cadre du plan pour le patrimoine, un amendement gouvernemental sera proposé, couvrant les différentes demandes formulées. Je compte sur votre soutien, comme vous l’avez fait jusqu’à présent.

Concernant le fonds incitatif et partenarial, je reconnais que son efficacité varie selon les régions, principalement en raison d’une méconnaissance du dispositif. Je veillerai à le rappeler aux Drac, notamment pour l’outre-mer, qui ne sera pas oublié ni dans mon programme ni dans mon plan d’action, comme je l’ai systématiquement annoncé. Le plan ruralité intègre également l’outre-mer.

Quant au périmètre de ce fonds, j’approuve l’idée de l’élargir pour inclure le mobilier religieux, souvent négligé lors de la restauration des édifices. Je suis favorable à l’étude d’une augmentation de ce fonds, compte tenu de son efficacité avérée. Je soutiendrai l’amendement que vous proposerez à ce sujet.

Pour le musée Notre-Dame, bien qu’un arbitrage soit encore en cours, je suis personnellement favorable à sa création. Il me semble cohérent de compléter la renaissance de cette magnifique cathédrale, pari audacieux mais réussi du président de la République, par l’établissement de ce musée.

Concernant les radios associatives, je m’engage à trouver une solution, comme je l’ai mentionné dans mon propos liminaire. Le débat parlementaire nous aidera à y parvenir.

Sur la privatisation de France Télévisions et de Radio France, nous convenons que le statu quo n’est pas envisageable. Je penche pour une réforme de la gouvernance, sujet que nous pourrons approfondir ultérieurement.

Je ne partage pas votre opinion selon laquelle il faudrait réduire drastiquement les budgets culturels. La culture ne contribue-t-elle pas à notre cohésion sociale ? Le patrimoine, la liberté de création, le spectacle vivant sont autant de domaines essentiels. Le ministère de la culture œuvre à réduire les fractures au sein de notre société. L’expérience montre que là où la culture recule, le niveau d’éducation diminue, entraînant un recul de l’humanité et de la civilisation.

J’ai pris mes responsabilités en réduisant certaines dépenses, tout en préservant les missions fondamentales du ministère. Je ne pense pas que nous soyons en désaccord sur les priorités à maintenir.

Enfin, je tiens à souligner que, en février 2024, j’ai signé un contrat de territoire dans votre circonscription, lié à la lecture, pour un montant de 30 000 euros sur trois ans. Je présume que cette initiative rencontre votre approbation.

Je souhaite préserver les crédits alloués au soutien du patrimoine des monuments historiques, car j’estime que c’est primordial. Particulièrement dans votre territoire, Madame Parmentier, l’accès à la culture se révèle être un enjeu majeur, notamment dans les zones rurales ou défavorisées. C’est pourquoi j’insistais précédemment sur l’importance de ne pas toujours favoriser les mêmes bénéficiaires.

Le plan ruralité, que vous avez souligné comme prioritaire, bénéficie d’un financement sanctuarisé pour les trois prochaines années. Cela nous permettra d’en dresser un bilan et d’évaluer sa pérennité, comme pour les festivals évoqués avec Monsieur Balanant.

Ce plan ruralité financera plus de 200 événements et résidences d’artistes en territoires ruraux. Concernant la mission patrimoine, nous abordons la question des unités départementales de l’architecture et du patrimoine (Udap) dans les régions, où les architectes des bâtiments de France interviennent. Le plan ruralité offrira une assistance aux communes rurales pour la protection et la valorisation de leur patrimoine, ainsi que pour la conception d’équipements culturels pérennes.

Vous avez mentionné l’importance des artothèques. Je souhaite généraliser cette expérimentation qui rencontre un vif succès auprès des habitants.

Quant aux radios associatives, nous trouverons une solution. J’ai rencontré leurs représentants et je m’engage à collaborer avec les parlementaires pour résoudre la question de leur financement.

Dans le Finistère, région pilote pour le pass culture, 84 % des jeunes y ont recours. Cependant, ce chiffre masque des disparités : en région Paca et en Île-de-France, moins de 60 % des jeunes utilisent la part individuelle. En janvier, j’ai été applaudie pour avoir souligné que le pass culture favorisait la reproduction sociale. Aujourd’hui, je propose des mesures pour corriger ces inégalités.

Concernant la part collective du pass culture, qui représente près de 60 millions d’euros, je m’adresse aux parlementaires de gauche qui m’ont interpellée. Remettre en cause cette part collective signifierait priver de nombreux enfants de leur seul accès à la culture. Je vous invite à considérer cette réalité au-delà du prisme parisien.

Lorsque vous interrogez les enfants, en leur demandant si c’est la première fois qu’ils vont au musée, au cinéma ou au théâtre, 90 % d’entre eux lèvent la main pour indiquer que c’est effectivement une première. Lorsqu’on leur demande si leurs parents les y emmènent, ils répondent systématiquement non, car leurs parents n’y pensent pas ou ne peuvent pas le faire. Je tiens à souligner l’importance de cette dimension collective et je m’engage à la renforcer. Certains pourraient dire que ces crédits sont gaspillés puisqu’ils ne sont pas entièrement utilisés ; cependant, ce n’est pas un gaspillage mais plutôt un problème de mobilité.

Je me suis penchée sur cette question avec des élus concernés par ce sujet. Madame Hervieu et Madame Legrain, j’aimerais vous rencontrer pour discuter de propositions visant à améliorer la mobilité afin de faciliter l’accès culturel collectif. Les enseignants se plaignent souvent du temps nécessaire pour organiser des sorties culturelles, soit deux mois pour trouver un spectacle et six mois pour organiser le transport. Cette situation est inacceptable car elle prive les enfants d’une avancée démocratique majeure dans l’accès à la culture.

En ce qui concerne le pass culture individuel évoqué par Madame Melchior, il est essentiel que nous comprenions son fonctionnement actuel. En janvier dernier encore, cet outil ressemblait davantage à un guide parisien nécessitant déjà une connaissance préalable des lieux comme la Comédie Française.

Madame Legrain a critiqué le pass culture en affirmant qu’il était inefficace ; pourtant en janvier dernier il manquait même une fonctionnalité basique telle que la géolocalisation. De plus, concernant l’éducation populaire et les médiateurs, cela faisait quarante ans que leurs représentants n’avaient pas été reçus au ministère. Récemment, j’ai signé avec eux une charte intégrant désormais ces structures dans le pass culture et incluant 100 postes dédiés financés par 3 millions d’euros.

Enfin, concernant le supposé rabot budgétaire, 96 millions d’euros était le chiffre annoncé initialement Bercy qui n’a jamais été appliqué. Aucun euro n’a manqué sur les territoires.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Concernant la médiation, je maintiens qu’il n’est nullement nécessaire de recourir au pass culture, dispositif que je juge défaillant dès sa conception et inadapté pour défendre les médiateurs et l’éducation populaire. Si votre objectif est de les soutenir, vous pouvez le faire sans pérenniser le pass culture, sur lequel vous avez vous-même émis des réserves.

Quant aux réductions budgétaires, j’insiste sur le fait que lorsque vous touchez aux structures nationales, cela impacte l’ensemble des équipes. Les syndicats, tant ceux des employés que ceux des employeurs de théâtre public et du spectacle vivant, soulignent les répercussions de ces coupes sur les équipes et sur l’intégralité du secteur. Cette crise préexistait aux restrictions budgétaires.

Vous tentez de nous convaincre qu’en réinjectant des fonds, vous annulez l’effet des coupes. Pourtant, le secteur demeure en crise, comme en témoignent ses représentants, et exprime la nécessité d’une augmentation des crédits alloués à la création.

Mme Rachida Dati, ministre. J’ai reçu les syndicats du spectacle vivant et des théâtres nationaux suite à leurs revendications. Concernant la médiation, j’ai intégré cette dimension au pass culture à la demande des acteurs de l’éducation populaire. Leur objectif est de favoriser l’accompagnement des enfants vers les théâtres, l’opéra et les spectacles vivants, particulièrement dans certains territoires. Je souhaite renforcer la place du spectacle vivant dans le pass culture, car elle est actuellement insuffisante.

Je soutiens les acteurs de l’éducation populaire car ils contribuent à la construction civique et à l’émancipation. C’est un vecteur de réduction des inégalités. Sauf si vous me présentez des exemples précis, Madame Legrain, j’affirme avoir corrigé les problèmes que vous évoquez. Je m’y suis engagée et je poursuivrai dans cette voie. Je suis prête à me rendre partout en France pour constater la situation sur le terrain. Mon rôle de ministre est de changer concrètement la vie des gens, notamment en matière d’accès à la culture. Je suis déterminée à y parvenir.

Concernant le prétendu coup de rabot, il n’a pas eu lieu. J’ai au contraire mobilisé et préservé les crédits. Ce secteur est essentiel pour éviter les fractures sociales évoquées précédemment.

S’agissant des écoles d’art, l’État apporte son soutien. Si certaines écoles connaissent encore des difficultés, précisez-moi lesquelles. Certains établissements relèvent des collectivités territoriales. L’État ne peut pas tout assumer seul. Là où il intervient, toutes les écoles sont soutenues. Je n’ai jamais parlé de supprimer quoi que ce soit. Cependant, lorsque des millions d’euros sont investis dans des écoles n’offrant pas de débouchés et inaccessibles aux étudiants boursiers, cela pose question. L’entre-soi n’est pas ma conception de l’éducation.

L’accès aux métiers de la culture doit être ouvert au plus grand nombre. Certaines formations contraignent les étudiants à s’endetter ou à travailler, compromettant ainsi leur scolarité. Ce n’est pas ma vision de l’accès à la culture ni aux professions culturelles.

Un autre enjeu concerne l’accès aux responsabilités au sein du ministère de la culture. J’ai réformé le programme La Relève pour constituer un vivier permettant de diversifier les profils à la tête d’institutions comme l’Opéra de Paris, la Comédie-Française ou le musée d’Orsay. C’est ma feuille de route pour favoriser l’accès aux métiers de la culture, aux postes à responsabilité et à la culture dans son ensemble.

En réponse à Madame Hervieu, je vous mets au défi de citer un seul établissement parisien dont les crédits ont diminué. Pour Beaubourg, ce sont plus de 200 millions d’euros qui seront alloués. Les budgets du Louvre, d’Orsay et du Quai Branly n’ont pas baissé. L’amendement gouvernemental sur le patrimoine permettra de financer d’importantes restaurations. J’annoncerai prochainement un projet ambitieux pour le Grand Musée du Louvre, qui doit devenir le plus prestigieux au monde. Les conditions d’exposition de ses chefs-d’œuvre – La Joconde, la Victoire de Samothrace et la Vénus de Milo – méritent d’être améliorées. Ma politique pour les musées parisiens, notamment en faveur du mécénat, vise à les renforcer, ce dont nous devrions nous réjouir ensemble.

Je rejoins Monsieur Patrier-Leitus sur les défiscalisations pour les propriétaires privés de patrimoine historique ouvert au public. Nous devons simplifier les contraintes administratives ou favoriser un dispositif fiscal avantageux. Comme pour le crédit d’impôt, chaque euro investi rapporte entre 6 et 7 euros.

Concernant le patrimoine religieux, je m’engage pleinement en sa faveur car il est constitutif de l’identité française. Je souhaite restaurer largement le petit patrimoine religieux et j’ai une idée de financement innovant à développer, sous réserve de certains arbitrages. Le président de la République avait lancé une souscription pour ce patrimoine, mais son succès a été mitigé. Les Français préfèrent connaître la destination précise de leurs contributions, comme le prouve le succès du Loto du patrimoine. Nous devons donc repenser cette souscription et trouver de nouveaux dispositifs de financement.

Mme la présidente Fatiha Keloua-Hachi. Nous allons maintenant procéder aux questions d’une minute, auxquelles Madame la ministre apportera ses réponses.

Mme Rachida Dati, ministre. Monsieur Balanant, vous m’aviez interrogé sur les crédits alloués à la recherche. Ils n’ont absolument pas diminué. J’ai fait vérifier et le budget du projet de loi de finances pour 2025 reste supérieur à 9 millions d’euros.

M. Bertrand Sorre (EPR). Je souhaite attirer votre attention, Madame la ministre, sur les fragilités qui pèsent sur l’établissement public national du Mont-Saint-Michel, une structure appelée de leurs vœux par l’État et les collectivités depuis plusieurs années. La question préoccupante du plafond d’emplois mérite, à mon sens, d’être portée à votre connaissance.

Connaissant votre sensibilité aux actions déconcentrées de l’État dans le domaine culturel, notamment dans le secteur rural comme c’est le cas dans le département de la Manche et au Mont-Saint-Michel, je me permets de vous solliciter. Selon mes informations, environ dix emplois supplémentaires seraient nécessaires pour soutenir cet établissement public encore très récent.

Cette problématique s’inscrit pleinement dans les orientations et l’impulsion bénéfique que vous avez données au ministère de la culture, à savoir le soutien aux structures présentes dans les territoires ruraux pour garantir un accès à la culture pour tous.

Ainsi, Madame la ministre, pouvez-vous nous indiquer si ce budget vous permettra d’augmenter le nombre d’emplois au sein de l’établissement public national du Mont-Saint-Michel ?

M. Aly Diouara (LFI-NFP). Madame la ministre, lors de votre intervention dans l’émission du DVM Show le 12 février dernier, vous avez affirmé, à juste titre, être la ministre de toutes les cultures, incluant notamment les cultures urbaines et populaires. Je souhaite donc vous interroger sur la pluralité et la pertinence de l’offre culturelle dans les quartiers populaires, élément essentiel à la cohésion sociale.

Vous vous étiez alors engagée à soutenir les cultures populaires et à les rendre plus accessibles. Cependant, en examinant le projet de budget de votre gouvernement, force est de constater l’absence de mesures spécifiques, notamment concernant les maisons des jeunes et de la culture, pourtant primordiales pour la vitalité culturelle des quartiers populaires.

Le sentiment qui prédomine est celui d’un sacrifice de la pluralité culturelle, de la démocratisation et de l’accès à la culture pour tous, particulièrement dans les quartiers populaires où les aspirations des habitants sont fréquemment négligées.

Je m’interroge donc sur votre méthode et sur vos intentions pour promouvoir cette offre culturelle plurielle. Comment envisagez-vous de permettre aux habitants des zones prioritaires et rurales d’en bénéficier ?

Mme Virginie Duby-Muller (DR). L’annonce en juillet d’un plan sans précédent de 98 millions d’euros vise à renforcer l’offre culturelle pour 22 millions de Français. J’ai eu l’opportunité de vous remettre un rapport sur l’ingénierie des collectivités en milieu rural, et je constate avec satisfaction que ce plan culture et ruralité s’inscrit dans la durée à travers ce budget.

Connaissant votre détermination à démocratiser l’accès à la culture, je souhaite attirer votre attention sur l’avenir de l’Orchestre des Pays de Savoie. Cet ensemble remplit pleinement sa mission de diffusion culturelle en zone rurale, tout en bénéficiant d’un rayonnement qui dépasse les frontières régionales. La sénatrice Catherine Morin-Desailly, en sa qualité de présidente de l’Association française des orchestres, est intervenue cet été auprès des présidents des deux départements concernés.

Je vous sollicite donc, dans le cadre des moyens alloués par le budget du ministère de la culture, pour obtenir un soutien à cet orchestre. Je vous invite également, par votre intermédiaire ou celui des directions régionales des affaires culturelles, à rassembler les acteurs susceptibles de trouver une solution pérenne pour l’Orchestre des Pays de Savoie.

Mme Violette Spillebout (EPR). Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention sur la situation financière préoccupante des centres sociaux et maisons de quartier, ainsi que de l’ensemble du secteur de l’éducation populaire, qui ont lancé une alerte fin mars 2024. Dans ma circonscription à Lille, une vingtaine de ces structures, qui jouent un rôle essentiel dans la médiation culturelle et artistique, sont concernées.

Vous avez récemment exposé dans une tribune publiée dans Le Monde votre volonté de développer la diversification et l’accompagnement de la part individuelle du pass culture. Cette orientation découle de votre constat d’une consommation culturelle trop passive et d’une reproduction sociale persistante.

À cet égard, je souhaiterais obtenir des précisions sur deux points. Premièrement, envisagez-vous, dans la proposition budgétaire, d’augmenter les fonds alloués collectivement aux centres sociaux et maisons de quartier, comme vous l’avez évoqué pour les Maisons des Jeunes et de la Culture ? Deuxièmement, prévoyez-vous d’intégrer les frais de transport et de mobilité dans les dispositifs du pass culture ?

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Aujourd’hui, dans notre pays, la liberté de création et la programmation sont menacées. Nous assistons au retour de la censure et de l’autocensure. La censure émane principalement de groupuscules d’extrême droite qui vont jusqu’à empêcher physiquement la tenue de certaines représentations qui les dérangent. L’autocensure, quant à elle, se manifeste par une baisse d’un quart du nombre de représentations prévues pour 2024-2025.

Cette réduction du nombre de spectacles incite les programmateurs à privilégier des œuvres plus consensuelles. Bien que cette logique soit compréhensible, elle engendre un repli. Or, le service public a pour vocation de présenter des œuvres qui peuvent bousculer, susciter des émotions et faire évoluer les consensus ou les débats dans notre société.

Comment pouvons-nous enrayer cette diminution alarmante de la diversité et de la pluralité de la création du spectacle vivant, soumise à cette double pression ? Vous avez exhorté les collectivités territoriales à assumer leurs responsabilités. Je considère que cette approche est quelque peu simpliste, surtout lorsque le gouvernement s’apprête à leur retirer plusieurs milliards d’euros, alors qu’elles ont déjà subi une inflation considérable. Nous avons constaté que de nombreux établissements culturels se trouvent dans une situation financière très précaire.

Mme Géraldine Bannier (Dem). Je souhaite vous interroger sur les bâches publicitaires apposées sur les monuments nationaux lors de travaux de rénovation. La loi de finances de 2007 a instauré une dérogation à l’interdiction d’affichage publicitaire sur les monuments historiques, permettant l’installation de bâches publicitaires sur les échafaudages durant les travaux extérieurs. Cette dérogation, soumise à autorisation, génère des recettes affectées au financement des travaux, pouvant constituer une ressource financière substantielle pour certains monuments. Quelle est votre position quant à la mise en œuvre de cette dérogation ?

Par ailleurs, je tiens à souligner l’importance de mettre en place des mesures de protection provisoire, notamment pour le petit patrimoine rural, telles que le bâchage et la mise hors d’eau. Ces dispositions préventives permettent d’éviter ultérieurement des coûts de réparation excessifs. On constate trop fréquemment, en particulier dans les zones rurales, une dégradation des bâtiments sur plusieurs décennies avant qu’une intervention ne soit entreprise.

Mme Delphine Lingemann (Dem). Situé dans ma circonscription du Puy‑de‑Dôme, le site de Gergovie a marqué l’histoire de notre nation. Cette terre volcanique fut le théâtre d’un épisode majeur de la guerre des Gaules, avec la victoire de Vercingétorix sur Jules César. Nous avons récemment célébré le cinquième anniversaire de l’ouverture du musée archéologique de la bataille de Gergovie, inaugurant une nouvelle phase de valorisation de ce site exceptionnel appartenant à l’État.

Le projet Gergovie, la cité des Gaulois, porté conjointement par la région, le département, les EPCI et les communes du territoire, s’inscrit dans cette dynamique. Les échanges avec les services de l’État s’avèrent très fructueux. Néanmoins, deux points demeurent en suspens, sur lesquels je souhaite attirer votre attention.

Premièrement, pouvons-nous espérer une confirmation du partenariat du ministère de la culture via la signature de la convention entre le musée d’archéologie nationale de Saint-Germain-en-Laye et le groupement d’intérêt public (GIP) Gergovie ?

Deuxièmement, est-il envisageable de finaliser le partenariat entre le ministère de la culture et le GIP Gergovie afin d’optimiser la gestion du site ?

Mme Pascale Bay (DR). L’objectif numéro 4 de la mission culture du PLF 2025 vise à promouvoir un accès équitable à la culture, notamment par le biais du développement de l’éducation artistique et culturelle. La politique 100 % EAC à l’école bénéficie d’un financement de 31,96 millions d’euros. Le budget 2025 fixe comme objectif que 80 % des enfants scolarisés en école primaire ou au collège se voient proposer une action d’éducation artistique et culturelle pendant le temps scolaire.

Néanmoins, malgré les financements alloués et la diversité des actions envisagées, force est de constater que 20 % des élèves demeurent privés d’accès à l’EAC. De plus, l’objectif initialement fixé pour 2024 a été revu à la baisse pour 2025, passant de 85 % à 80 %.

Face à ce constat, j’aimerais vous interroger sur les obstacles que vous avez identifiés dans le déploiement de l’EAC. Quelles mesures envisagez-vous pour accompagner les enseignants dans la mise en œuvre de tels projets ?

Mme Prisca Thevenot (EPR). Je souhaite souligner l’importance du jeu de société comme alternative aux écrans, favorisant la création de liens intergénérationnels et entre les jeunes. Sa pratique se développe dans les écoles et les tiers-lieux, et les jeux sont disponibles à la vente dans les librairies et grandes surfaces. La France, reconnue pour ses créateurs de jeux, pourrait considérer le jeu de société comme un objet culturel et l’intégrer à l’offre du pass culture.

Le pass culture, outil remarquable d’accès à notre culture et notre patrimoine, connaît un succès croissant chaque année. Il pourrait ainsi contribuer à faire connaître cette nouvelle forme de culture et de création artistique. Je propose donc d’élargir le pass culture aux jeux de société, sans coût supplémentaire pour l’État. Cette solution simple et efficace pourrait être mise en œuvre rapidement.

La réunion, suspendue à dix-neuf heures cinq, est reprise à dix-neuf heures dix.

M. Philippe Fait (EPR). Les fanfares, danses et jeux traditionnels qui composent notre patrimoine immatériel incarnent toute la diversité de la richesse culturelle de la France et renforcent les liens sociaux, particulièrement dans nos territoires ruraux. Malheureusement, les moyens actuels ne suffisent pas à assurer la transmission de ce patrimoine aux générations futures car, bien souvent, ces pratiques sont portées par des associations aux faibles moyens. Dans le cadre du PLF pour 2024, mes collègues et moi-même avions proposé que le plan Fanfares du ministère de la culture soit renforcé et élargi aux autres expressions artistiques traditionnelles. Le nouveau plan Fanfares évoluerait ainsi vers un vaste programme « arts et traditions » qui inclurait fanfares, harmonies, danses et jeux traditionnels.

Malgré une adoption unanime par notre commission l’an dernier, cette proposition ne s’est finalement pas concrétisée. Je reviens à la charge cette année, en soulignant l’urgence d’une mobilisation pour préserver notre patrimoine et nos traditions.

En janvier dernier, madame la ministre, lors de vos vœux aux acteurs culturels, vous disiez que vous vouliez faire de la ruralité la priorité du début de votre mission. Vous avez réaffirmé ce soir que vous y teniez. J’ai donc l’intime conviction que nous pourrons compter sur votre soutien pour cette proposition, fortement soutenue dans nos territoires ruraux. Quelle est votre position ?

Mme Rachida Dati, ministre. Monsieur Sorre, le ministère de la culture a consacré seize équivalents temps plein à l’établissement public du Mont-Saint-Michel. Il s’agit des seuls effectifs qui ont été ajoutés. Lorsque je me trouvais sur place pour le passage de la flamme olympique, on m’a saisie de la question du modèle économique, qui s’essouffle un peu, certaines collectivités souhaitant se désengager. Le ministère de la culture reste très engagé sur ce dossier, tandis que le conseil régional de Bretagne a confirmé sa décision de sortir de la gouvernance du projet en 2025, en supprimant le financement correspondant. Il nous faut donc revoir cette gouvernance. Toujours est-il que le ministère de la culture tient ses engagements. Je souhaiterais que les collectivités tiennent les leurs, sachant que, comme nous nous le sommes déjà dit, le Mont-Saint-Michel est fortement fragilisé.

Monsieur Diouara, pour ce qui concerne les cultures urbaines, j’ai reconduit 2,6 millions d’euros de crédits pour les MJC (maisons des jeunes et de la culture) et nous avons augmenté les crédits consacrés aux cultures urbaines et populaires. À Paris, Blanca Li relance à la Grande halle de la Villette un grand plan dans ce domaine.

L’orchestre dont a parlé Mme Duby-Muller n’est pas labellisé car il ne remplit pas tous les critères requis, notamment s’agissant de ses emplois permanents. Le ministère de la culture ajoute néanmoins 50 000 euros aux 600 000 euros qu’il lui apportait déjà.

Je remercie par ailleurs Mme Duby-Muller pour avoir mené dès février, avec la sénatrice Frédérique Espagnac, la mission consacrée à l’ingénierie culturelle des collectivités territoriales en milieu rural. Le plan Culture et ruralité repose sur les vingt-trois recommandations qu’elles avaient formulées.

Madame Spillebout, la part collective du pass culture relève de l’éducation nationale. Quant à augmenter cette part collective, il se trouve que les crédits qui lui sont consacrés ne sont pas entièrement utilisés : il faudrait donc commencer par cela. Cette question est liée à celle de la mobilité. Lorsque nous nous étions rencontrées à propos du plan Culture et ruralité, nous avions évoqué la possibilité d’intégrer le montant des transports dans la part collective. Je n’y étais alors pas favorable, car cela réduisait d’autant la part consacrée à l’action culturelle proprement dite. Depuis lors, des partenariats avec des collectivités nous ont permis de trouver des dispositifs permettant de faciliter cette mobilité. Ainsi, le transport scolaire assuré par la collectivité en milieu rural – voire parfois dans des zones urbaines – pour déposer les enfants le matin et les ramener le soir peut être utilisé en journée pour les conduire à des activités culturelles. Des expérimentations en ce sens seront généralisées, à l’instar du dispositif Caravelle, dans l’est de la France, que nous voudrions étendre dans le Nord.

Madame Taillé-Polian, vous dites que l’extrême droite empêche la liberté de la création. J’ajouterai, sans vouloir polémiquer, que l’extrême gauche le fait aussi, selon les informations qui remontent jusqu’à moi depuis certaines Drac (directions régionales des affaires culturelles) et certains préfets. Une conjonction des deux peut advenir dans le cas de manifestations liées à l’écologie, se traduisant par des entraves dont pâtissent certains spectacles ou animations culturelles.

M. Aymeric Caron (LFI-NFP). Donnez des exemples !

Mme Rachida Dati, ministre. Cela a été le cas dans la Creuse, à Lille, dans le Nord, ou à la Sorbonne. (Protestations parmi les députés du groupe LFI-NFP.) Vous voulez qu’on dise que tout va bien, que seule l’extrême droite empêche des manifestations ? Mais il faut que nous puissions parler de cela entre nous ! En tant que ministre, je ne peux pas nier les informations qui remontent jusqu’à moi.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Arrêtons là cet échange, mes chers collègues. Vous pourrez le reprendre après notre réunion. Seule Mme la ministre a la parole.

Mme Rachida Dati, ministre. Il n’y a aucune volonté de polémique de ma part. Bien sûr que la ministre de la culture est informée quand une activité, un festival, un spectacle ont été empêchés. Quelle qu’en soit l’origine, je suis pour la liberté de création et vous me trouverez à vos côtés pour la défendre. C’est ce que j’ai fait y compris pour la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques, qui a suscité quelques polémiques. Avec nos différences, nous pouvons, sans nous affronter, avoir des échanges et des débats. Mais vous pouvez être assurés que je défends la liberté et la diversité de la création, qui ne subit du reste aucune réduction budgétaire, en particulier pour le spectacle vivant.

Quant aux collectivités, partout où je me suis rendue, les élus que je rencontre, quelle que soit leur couleur politique – car je reçois tout le monde – donnent la priorité à la culture. L’engagement culturel est très fort.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Il y a un quart de représentations en moins, madame la ministre !

Mme Rachida Dati, ministre. Cela ne s’explique pas uniquement par la censure, mais par la fragilisation des structures. J’annoncerai prochainement que j’ai chargé Christopher Miles, directeur général de la création artistique, d’une mission sur le spectacle vivant et sur la création, afin de voir comment les soutenir. Sur cette question, je suis très au clair.

Madame Bannier, je suis d’accord sur les bâches publicitaires. Mais une fois qu’on les enlève, à la fin des travaux, on se dit que cela valait le coup ! L’École militaire et les Invalides sont absolument magnifiques. L’hôtel de la Marine a, lui aussi, bénéficié d’un financement publicitaire. Pourquoi s’en priver ? J’admets que les bâches ne sont pas bien belles, mais certaines commencent tout de même à avoir un caractère artistique assez réussi.

Pour ce qui est du patrimoine rural, je suis d’accord avec vous.

Madame Lingemann, le nouveau projet du musée de Gergovie n’est pas encore totalement circonscrit. Je vous confirme néanmoins que le partenariat avec l’Institut national de recherches archéologiques préventives et le Musée d’archéologie nationale est validé et que la convention va être signée. Il n’y a pas de problème quant à l’engagement du ministère sur ce projet.

Madame Bay, les objectifs de l’éducation artistique et culturelle ont en effet été revus à la baisse, en raison du temps de formation nécessaire. De fait, l’éducation artistique et culturelle obligatoire à l’école, annoncée par le Président de la République, suppose que les enseignants soient formés en conséquence – lorsqu’ils ne le sont pas, certains établissements recourent à des animateurs. En tout cas, partout où je vais, tout le monde est favorable à l’éducation artistique et culturelle obligatoire dans les établissements. Il faut maintenant que le nombre d’enseignants et de formations suive.

Madame Thevenot, votre proposition d’intégrer les jeux de société au pass culture est intéressante. En milieu hospitalier, en pédopsychiatrie ou en psychiatrie, le recours à ces jeux s’est beaucoup développé – il ne s’agit plus seulement du jeu de l’Oie ou du Monopoly ! Ils ont des effets très bénéfiques, notamment en termes d’éveil et de socialisation ou face à certaines pathologies touchant les adolescents. Je ne suis donc pas opposée par principe à cette démarche. La question est de savoir comment la concrétiser. Je saisis cette occasion d’annoncer que les lycées agricoles, qui n’avaient jusqu’ici pas accès au pass culture, seront désormais intégrés au dispositif, auquel je souhaite également intégrer les instituts médico éducatifs. Il serait bon d’y relier votre idée.

Quant au plan Fanfares, monsieur Fait, lorsque j’ai pris mes fonctions, j’ai adoré cette idée proposée par un membre de mon ministère, fou de fanfares. Il a élaboré un plan doté maintenant de 1,7 million d’euros, qui s’inscrit pour partie dans le plan Culture et ruralité, à travers les projets Villages en fête. Cet été déjà, cette activité s’est fortement développée – comme les majorettes, elle revient à la mode. Le plan Fanfares continuera à s’amplifier en 2025. Nous y avons affecté des crédits.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Merci, madame la ministre. On voit l’étendue de la culture en France !

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II.   Examen des crédits

1.   Réunion du mardi 22 octobre 2024 à 21 heures 30

Lors de sa réunion du mardi 22 octobre 2024 à 21 heures 30 ([27]), la commission examine, pour avis, les crédits de la mission Culture du projet de loi de finances pour 2025 (n° 324  seconde partie) (M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis sur les crédits de Création, transmission des savoirs et démocratisation de la culture ; M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur pour avis sur les crédits de Patrimoines).

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à l’examen des amendements, en commençant par ceux qui portent sur la mission Culture.

Article 42 et État B

Amendement II-AC81 de Mme Sarah Legrain

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Cet amendement symbolique, qui tend à doubler les crédits du programme 131 Création, a pour objet d’alerter sur la crise structurelle du secteur, qui fait en outre l’objet de coupes budgétaires.

Nous nous étonnons de voir les crédits du pass culture être épargnés par la saignée budgétaire alors qu’il reste de l’argent dans les caisses. Le pass culture n’a que peu d’effets sur la création, notamment sur le spectacle vivant, et il n’est pas le meilleur outil pour favoriser la transmission artistique et culturelle. Celle-ci dépend d’abord de la diversité des genres et des lieux de la création.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis (Création, transmission des savoirs et démocratisation de la culture). Depuis 2017, le budget de la culture a augmenté de 1 milliard d’euros, même si cette augmentation n’est peut-être pas suffisante pour rattraper les déficits d’investissement antérieurs.

L’annulation de crédits sur le programme 131 a été de 75 millions d’euros après réception du virement de solidarité. Ce sont les opérateurs disposant de fonds de roulement qui ont supporté la majeure partie de ces annulations, à hauteur de 14,5 millions, après l’annulation des réserves de précaution.

La situation du spectacle vivant est certes difficile, mais l’État a été présent.

Le doublement des crédits proposés me semble déraisonnable dans le contexte budgétaire actuel. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC68 de M. Raphaël Arnault

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Nous proposons la création d’un fonds de soutien à la bifurcation écologique pour le secteur des arts et de la culture. Le plan Mieux produire, mieux diffuser devait notamment répondre à ces enjeux, mais son efficacité suscite des interrogations au regard des coûts écologiques et énergétiques élevés du secteur.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. L’État est fortement engagé aux côtés des opérateurs – théâtre de Chaillot, Centre national de la danse, écoles d’art – pour financer d’importants chantiers de rénovation thermique. Les collectivités le sont également, mais la transition pose un vrai problème de coût. Cela dit, le montant que vous proposez n’est pas raisonnable. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique sur la politique culturelle des collectivités.

Amendement II-AC66 de M. Raphaël Arnault

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). On a beaucoup entendu dire qu’il faudrait se réjouir du budget de la culture, qui aurait été sauvé, mais l’effort de 5 milliards d’euros demandés aux collectivités aura un impact faramineux sur la vie culturelle. Nous proposons donc la création d’un fonds de soutien aux collectivités territoriales.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Cet amendement est cocasse de la part de votre groupe : vous proposez de prélever 500 millions d’euros sur le budget de l’État pour financer les missions territoriales des collectivités. Il ne peut pas se substituer aux collectivités, auxquelles il revient de faire des choix de politique locale, ce qui peut, il est vrai, poser problème quand certaines choisissent de se désengager de certains projets culturels pour des raisons idéologiques. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC235 de M. Steevy Gustave

M. Steevy Gustave (EcoS). Face à la hausse du prix de l’énergie, qui affecte les dépenses de fonctionnement des collectivités, et aux baisses drastiques de leur dotation de fonctionnement depuis des années, le risque de voir les collectivités réduire leurs budgets dédiés à la culture est réel. Cet amendement propose donc de créer un fonds d’aide, qui devra être territorialisé afin que les budgets soient équitablement répartis sur l’ensemble du territoire national.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Votre amendement est financièrement plus raisonnable que le précédent, mais mes arguments, et donc mon avis, restent les mêmes.

La commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique sur la médiation culturelle dans les établissements publics.

Amendement II-AC76 de Mme Sarah Legrain

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Pour démocratiser la culture, ainsi que le souhaite la ministre, il faut recruter davantage de médiateurs culturels. Cette médiation humaine, qui ne peut être remplacée par des algorithmes, est la seule à même d’emmener ses bénéficiaires vers des œuvres dont ils n’avaient pas connaissance, alors que le pass culture ne fait que reproduire des pratiques culturelles.

Mme Graziella Melchior (EPR). Cet amendement, comme la plupart de ceux que vous proposez, n’est pas sérieux dans le contexte actuel : vous prenez des centaines de millions d’euros d’un programme, sans même un début de réflexion sur les conséquences, pour les attribuer à un autre dans le seul but de plaire à votre électorat. Au total, ce sont 3 milliards de transferts ou de crédits supplémentaires alors que le budget du ministère de la culture est de 4,5 milliards d’euros !

Je m’exprime au nom de mon groupe pour dire que nous ne soutiendrons aucun des amendements de La France insoumise.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Nous n’avons aucune leçon à recevoir : nous avons trouvé 60 milliards d’euros de recettes en commission des finances en taxant les plus riches et les profits des grandes entreprises. Votre gouvernement préfère faire les poches des classes populaires et casser les services publics, notamment de la culture, de l’hôpital ou de l’école. Vous avez perdu le débat budgétaire en commission des finances et nous l’avons gagné !

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Je suis d’accord, il faut développer la médiation. Cela tombe bien, le programme 361 affecte des crédits à la formation des acteurs de l’éducation artistique et culturelle (EAC). Je ne sais pas s’ils sont suffisants, mais ils existent. Nul besoin donc d’un nouveau programme. Je note en outre que les crédits à destination de l’EAC pendant le temps scolaire sont en hausse.

La médiation et le pass culture sont complémentaires. Les bénéficiaires du pass culture, dont l’appétence pour la culture a été développée à l’école, sont autonomes dans leur consommation de culture, notamment des livres et du spectacle vivant.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC78 de Mme Sarah Legrain

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Quand on voit les sommes qui partent dans le pass culture de façon obscure – des articles de presse font état du train de vie des dirigeants de la société privée chargée de le gérer –, il ne me semble pas déraisonnable de proposer un amendement chiffrant précisément le recrutement de postes de médiateurs.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique sur les crédits alloués au pass culture.

Amendements II-AC158 de Mme Soumya Bourouaha, II-AC9 de M. Philippe Fait, II-AC219 de Mme Violette Spillebout et II-AC17 de M. Emmanuel Grégoire

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Le pass culture ne permet pas de réduire les inégalités sociales et territoriales d’accès à la culture – l’application de géolocalisation de l’offre culturelle conçue pour les 15-18 ans a majoritairement été téléchargée par ceux dont les parents sont diplômés. Nous proposons donc de maintenir la partie collective du pass, mais de réaffecter les crédits de la partie individuelle au programme de création.

Mme Violette Spillebout (EPR). La part individuelle du pass culture ne répond pas à son objectif. Cet amendement d’appel invite le Gouvernement à la revoir, voire à la supprimer, pour redistribuer les 210 millions d’euros qui lui sont affectés vers l’éducation populaire, l’Éducation nationale et les mairies.

M. Emmanuel Grégoire (SOC). La part collective souffre d’une insuffisance structurelle majeure. Elle ne permet pas, par exemple, de prendre en charge le transport. Nous souhaitons, par cet amendement, appeler l’attention sur un rééquilibrage entre la part collective et la part individuelle.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Nous voterons en faveur de ces quatre amendements. Deux sont issus du Nouveau Front populaire, mais les deux autres ont été déposés par la prétendue majorité et celui de M. Fait – je regrette qu’il ne l’ait pas défendu – propose de retirer 100 millions d’euros du pass culture pour les affecter la création. C’est exactement ce que nous proposons, car la part individuelle ne fait que nourrir les mêmes acteurs de l’industrie culturelle. Le groupe EPR votera-t-il pour ses propres amendements ?

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Nous ne devons avoir ni totem ni tabou sur le pass culture. Je n’y étais d’ailleurs moi-même pas le plus favorable à l’origine. J’y vois aujourd’hui plusieurs avantages, mais je pense aussi qu’il doit être amélioré.

Il favorise les enfants des familles, non pas forcément les plus riches, mais qui ont une appétence pour la culture.

Concernant le transport, c’est une compétence des collectivités locales.

Je note que le taux de pénétration du pass culture n’est pas uniforme : il est beaucoup plus important dans les départements et les régions pilotes. Je pense que les autres départements combleront leur retard.

La ministre a proposé de sanctuariser une partie de la part individuelle vers le spectacle vivant, c’est une bonne chose. Il faut maintenir l’universalité du pass culture, qui attribue la même somme à tous les enfants de notre pays. Il ne stigmatise personne et favorise leur autonomie.

Avis défavorable à tous ces amendements.

La commission rejette successivement les amendements.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique sur la transformation de la société privée chargée de la gestion du pass culture en opérateur de l’État.

Amendements II-AC30 de Mme Soumya Bourouaha et II-AC231 de M. Steevy Gustave.

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Le modèle de gestion actuelle – une société privée réalisant une mission d’intérêt général – n’est pas efficace, d’autant que son financement est entièrement public. La Cour des comptes l’a d’ailleurs souligné dans un rapport publié en 2023, pointant un recours excessif à des consultants extérieurs. Le pass culture doit être géré par un opérateur de l’État.

M. Steevy Gustave (EcoS). Je reprends à mon compte les arguments de Mme Bourouaha pour défendre l’amendement.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Le pass culture souffre d’un péché originel, dont il ne se remettra pas : sa gestion a été confiée à l’entreprise créée par Éric Garandeau, ancien président du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC). L’État s’est ainsi retrouvé dépouillé de ses compétences et de ses moyens au profit d’une sorte de start-up. On en voit aujourd’hui les résultats : doutes sur le financement des postes affectés à cette entreprise et scandale, révélé par un article de presse, sur le train de vie des gestionnaires.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Question candide : quelle est la justification de cet abondement de 10 000 euros ? Est-il destiné à accompagner la transformation de la société par actions simplifiée (SAS) en opérateur d’État, évolution dont on pourrait discuter dans un autre cadre que cet avis budgétaire ?

Quant au recours à des consultants extérieurs, la Cour des comptes a bien souligné dans son rapport qu’il est intervenu dans la phase préliminaire à la création de la SAS.

Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement II-AC185 de Mme Caroline Parmentier

Mme Caroline Parmentier (RN). En cette période de désastre budgétaire, les Français ne comprendraient pas que chaque ministère ne fasse pas d’économies. Ce doit être aussi le cas pour celui de la culture. Nous appelons à rationaliser les dépenses, notamment en réduisant de 137 millions d’euros l’action 01 Soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant.

M. Paul Vannier (LFI-NFP). Nous n’avions pas encore entendu les députés frontistes. Voici donc leurs propositions : moins de théâtre, moins d’opéra, moins de culture. J’espère que vous assumerez devant les Français ce choix d’accompagner le gouvernement Barnier dans son budget d’austérité. Vous êtes le parti de la désertification, de la réduction des services publics. Cet amendement nous rappelle qui vous êtes : les plus grands ennemis de la culture, cet instrument d’émancipation et de lien social. Vous représentez un véritable danger pour la société !

Mme Graziella Melchior (EPR). Cette coupe dans les dépenses de fonctionnement ravira sans doute les opéras et théâtres, tout comme les agents du musée du Louvre et du musée des Arts décoratifs, auxquels vous voulez retirer 27 millions d’euros de budget, et ceux du Palais de la découverte et de la Cité des sciences et de l’industrie, avec la baisse de 10 millions des dépenses consacrées à la recherche culturelle et scientifique que vous envisagez. Au total, vous prévoyez une réduction de 300 millions d’euros pour les agents et opérateurs de l’État et pour des établissements représentant notre pays à l’étranger, comme la Villa Médicis.

Nos musées, nos théâtres, nos instituts font rayonner la France à travers le monde. Ils mettent en valeur l’extraordinaire richesse de notre patrimoine, la formidable diversité de nos pratiques artistiques et contribuent à faire de notre pays la première destination au monde.

La culture comme variable d’ajustement budgétaire : voici la vision du Rassemblement national. Mon groupe votera contre tous les amendements de ce groupe et soutiendra le budget proposé par la ministre, qui s’est battue pour qu’il soit préservé.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Avis défavorable. N’oublions pas que la culture d’aujourd’hui, c’est le patrimoine de demain et rappelons que le répertoire classique français, dont je pensais que vous étiez des grands défenseurs, vit dans les théâtres et les opéras dont vous voulez couper les budgets !

La commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique sur le soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant.

Amendements identiques II-AC20 de Mme Fatiha Keloua Hachi, II-AC55 de M. Raphaël Arnault et II-AC227 de M. Steevy Gustave

Mme Céline Hervieu (SOC). Il s’agit d’attribuer 100 millions d’euros supplémentaires au spectacle public vivant. La coupe de 96 millions dans le programme 131 affecte directement les théâtres nationaux à Paris et en province et affaiblit des réseaux entiers faisant vivre troupes et intermittents.

M. Raphaël Arnault (LFI-NFP). Nous souhaitons soutenir le spectacle vivant qui traverse une crise sans précédent. Les collectivités territoriales remettent en cause leurs engagements en faveur de la culture alors que l’inflation et la crise énergétique font exploser les coûts de fonctionnement. Cette paupérisation a des conséquences sur leur attractivité et provoque de grandes difficultés de recrutement. Ces dernières années, ce secteur non lucratif a connu des déficits inédits et les budgets consacrés à la programmation et à la production ont baissé dans des proportions allant de 25 % à 50 %. D’après le syndicat Les forces musicales, à l’issue de cette saison fantôme, 150 000 spectateurs auraient été perdus et 2 000 emplois artistiques auraient été supprimés.

Dans le même temps, les crédits du pass culture ne font qu’augmenter. Nous ne pouvons pas nous contenter de cette offre consumériste de biens et services culturels déclinée à travers un catalogue algorithmique. Nous voulons redonner des moyens au secteur de la création et aux politiques d’éducation artistique et culturelle.

M. Steevy Gustave (EcoS). Nous proposons de prélever 100 millions d’euros sur la part individuelle du pass culture, dispositif que des rapports de l’Inspection générale des affaires culturelles (Igac) ou de la Cour des comptes ont épinglé, pour les redéployer au profit du spectacle vivant, insuffisamment soutenu alors qu’il a subi les effets de crises successives.

M. Bertrand Sorre (EPR). Je tiens à rappeler l’attachement de notre groupe au spectacle vivant. Nous l’avons aidé à traverser la crise du covid, notamment en soutenant les intermittents du spectacle. Toutefois, nous ne voterons pas en faveur de ces amendements identiques, car nous nous refusons à voir diminués les crédits du pass culture, utile à tous les jeunes partout sur le territoire, y compris dans les zones rurales, je peux en témoigner.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Les représentants du syndicat national des entreprises artistiques et culturelles (Syndeac), que nous avons auditionnés à de multiples reprises, sont conscients du fait que l’État n’a pas failli et que les problèmes budgétaires sont aussi parfois le résultat du désengagement des collectivités.

Il ne faut toutefois pas se voiler la face, le spectacle vivant, spécialement dans les théâtres nationaux, est confronté à des mutations qu’il nous faut accompagner au-delà du strict cadre financier. Je vous invite à y réfléchir.

Enfin, je souligne que sur l’application du pass culture, le spectacle vivant est bien mis en avant, non par l’algorithme mais par les équipes éditoriales qui l’animent. C’est une erreur d’opposer les deux. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Amendement II-AC42 de Mme Sarah Legrain

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). La ministre a insisté sur son action en faveur de l’accès à la culture, que ce soit dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville ou les zones rurales. Cette action doit, pour ce faire, s’appuyer aussi sur le maillage des lieux intermédiaires et indépendants, qui sont les parents pauvres de la politique culturelle, du fait de la logique de concentration des financements publics.

Prenons l’exemple du plan Mieux produire, mieux diffuser. Censé favoriser une diffusion sur l’ensemble du territoire, il a principalement bénéficié aux scènes nationales et labellisées. Il faut défendre l’infusion sur les territoires, chère au syndicat national des arts vivants (Synavi).

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Rappelons que 31,7 millions d’euros, soit 30 % de plus que l’année dernière, ont été consacrés au soutien aux établissements non labellisés. On ne peut donc pas dire qu’ils sont abandonnés.

Une solution les aiderait beaucoup, qui ne coûterait pas un centime : faire passer le rythme des appels à projets d’un an à trois ans, afin qu’ils puissent avoir une plus grande visibilité sur leur production de spectacles.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC214 de Mme Caroline Parmentier

Mme Caroline Parmentier (RN). Sept ans de macronisme ont mis la France à genoux avec 1 000 milliards d’euros de dette. Les Français ne comprendraient pas que les ministères ne se serrent pas la ceinture et qu’ils soient les seuls à qui l’on fait les poches.

Par cet amendement, nous entendons réduire de 42 millions les crédits de soutien au spectacle vivant.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Nous avons examiné attentivement les divers amendements du Rassemblement national. Nous voyons bien qu’ils correspondent à ce que Barnier a rêvé de faire, puisqu’ils vont plus loin encore que le Gouvernement dans les coupes budgétaires. Alors même que vous êtes membres de la commission des affaires culturelles, vous vous montrez incapables de défendre la culture : tous vos amendements suppriment des crédits dans le budget du service public de la culture comme si cet argent était destiné à des privilégiés.

Dans cet amendement même, vous ciblez le spectacle vivant alors que nous savons qu’il traverse une crise profonde, perceptible dans chacun de vos territoires. Honte à vous !

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC38 de M. Frédéric Maillot

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Il vise à abonder de 1 million d’euros les crédits destinés à la création artistique à La Réunion, territoire dont l’insularité expose ses artistes à des difficultés particulières. Ils font face, par exemple, à des coûts exorbitants pour organiser des tournées. Il importe donc de favoriser la diffusion des œuvres réunionnaises.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement, qui est limité à La Réunion, alors qu’il nous faudrait avoir une réflexion globale sur la place spécifique à faire dans le programme 131 au soutien à la création dans les outre-mer. Peut-être pourrions-nous en discuter avec les services du ministère de la culture.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC228 de M. Steevy Gustave

M. Steevy Gustave (EcoS). Les cultures urbaines comme le DJing, le street art ou la breakdance ont acquis une place importante au sein de la scène artistique et jouent un rôle clé dans l’expression culturelle des jeunes et des moins jeunes. Cependant, ces pratiques restent sous-financées et, malgré leur impact social et culturel, ne bénéficient pas du soutien nécessaire pour renforcer leur développement et leur diffusion.

Nous proposons de dégager 10 millions d’euros de crédits pour créer un fonds qui leur serait dédié.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Les cultures urbaines peuvent bénéficier de financements existants. Leur dédier un fonds reviendrait à les stigmatiser par rapport à d’autres expressions culturelles. Nous devons soutenir la culture française dans sa pluralité et sa diversité. Évitons toute logique de silos.

M. Steevy Gustave (EcoS). Je ne suis pas d’accord avec vous. Il importe de reconnaître les cultures urbaines en leur dédiant un financement spécifique. Elles couvrent un champ large et ne se réduisent pas aux quartiers. Nous les voyons présentes dans de multiples domaines. La breakdance, devenue discipline olympique, est enseignée avec la hipe et le lock dans les écoles de danse, des graffiteurs sont exposés dans des musées, le rap est le premier genre musical en France devant le rock, la mode s’empare de ces cultures et pourtant, elles ne sont toujours pas reconnues. Je sais de quoi je parle, je viens de cet univers.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC75 de Mme Fatiha Keloua Hachi

Mme Céline Hervieu (SOC). Il s’agit d’accroître le soutien de l’État aux quatre-vingt-treize structures labellisées Scène de musiques actuelles (Smac) en augmentant les crédits qui leur sont consacrés de 3,4 millions d’euros. Nous comblerions ainsi la part qui manque dans leur financement, évalué l’année dernière à 6,8 millions. Ces scènes qui s’autofinancent ont fait face à des crises successives et il importe de les préserver, elles qui contribuent à la diversité de l’offre artistique et jouent un rôle essentiel, à travers le maillage territorial, en matière de création, de diffusion et d’éducation artistique et culturelle.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Il convient en effet de soutenir les Smac, structures d’une grande fragilité remplissant des missions essentielles sur les territoires. L’année dernière, une majorité s’était d’ailleurs dégagée au sein de la commission pour augmenter leurs crédits.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Les Smac restent fragiles, malgré une bonne fréquentation du public et des recettes propres élevées : la majorité d’entre elles étaient en déficit fin 2023. Le soutien supplémentaire qui leur a été apporté en 2024 est pérennisé pour 2025, ce dont on peut se féliciter dans un contexte budgétaire tendu. Leurs crédits augmentent même de 14 à 18 millions.

Ajoutons que les musiques actuelles peuvent bénéficier d’autres aides, notamment de la part du Centre national de la musique (CNM). Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC35 de M. Frédéric Maillot

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Les musiques actuelles n’ont que très peu profité du plan Mieux produire, mieux diffuser lancé en 2024, car les directions régionales des affaires culturelles (Drac) ont considéré qu’elles n’étaient pas prioritaires, compte tenu du coup de pouce donné aux Smac. Elles n’ont reçu que 400 000 euros sur les 10 millions dont est doté ce plan. Nous entendons flécher 600 000 euros vers elles.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Je n’ai pas eu d’information au sujet du choix fait par les Drac. Les musiques actuelles bénéficient de plusieurs aides mais je veux bien examiner votre demande d’ici à la séance. Pour l’heure, ce sera une demande de retrait.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC63 de M. Idir Boumertit

M. Idir Boumertit (LFI-NFP). La politique de gratuité des musées lancée depuis plus de vingt ans remporte succès sur succès, depuis 1996 et l’institution de la gratuité un dimanche par mois au musée du Louvre. À chaque étape de l’élargissement de celle-ci aux musées et monuments nationaux ainsi que de la Ville de Paris, la fréquentation des musées a augmenté, montrant l’engouement du public pour la culture.

L’accessibilité de la culture s’inscrit dans un mouvement historique, né d’une volonté de partage, d’apprentissage et d’émancipation sociale. Dans un esprit d’universalité et d’égalité, notre groupe propose d’étendre la gratuité à tous les visiteurs venant d’un pays de l’Union européenne un dimanche par mois dans les musées et monuments publics.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. De multiples initiatives existent déjà. Est-il pertinent de rendre toutes les entrées gratuites ? N’oublions pas que les entrées payantes de visiteurs étrangers constituent des ressources pour financer la médiation et améliorer la présentation des œuvres. Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC83 de M. Idir Boumertit

M. Idir Boumertit (LFI-NFP). Par cet amendement de repli, nous proposons d’instaurer des tarifs progressifs pour permettre aux familles des classes populaires et moyennes d’accéder aux musées et lieux culturels publics. La culture est un outil d’émancipation, vital pour la formation de chaque citoyen. Les politiques culturelles successives ont facilité dans notre pays la démocratisation de l’accès à la culture dans son ensemble. Toutefois, elles n’ont pas permis de réduire les inégalités sociales. L’accès à la culture mobilise une part importante du budget de nombre de nos concitoyens. En période d’inflation, ce poste de dépenses est sacrifié et la pratique culturelle n’est maintenue qu’au sein des classes plutôt aisées. Une étude de l’Observatoire des inégalités révèle que 62 % des cadres supérieurs se rendent au musée au moins une fois par an contre 18 % des ouvriers et employés.

Cette mesure d’équité s’inscrit dans la politique de démocratisation menée par le ministère de la culture.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC64 de M. Raphaël Arnault

M. Paul Vannier (LFI-NFP). Il vise à instaurer la gratuité des prêts de livres dans les bibliothèques et médiathèques municipales et intercommunales. En effet, 12,5 % seulement de la population ayant accès à une bibliothèque a effectué au moins un emprunt dans l’année précédente, or l’expérience d’autres pays, comme les États-Unis, montre que la gratuité donne un plus grand accès aux livres. L’amendement tend également à créer un fonds de soutien destiné aux collectivités qui auraient des difficultés financières pour assumer cette gratuité.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Le choix de la gratuité du prêt des livres appartient aux collectivités territoriales ; il faut le leur laisser – du reste, le sujet devrait plutôt être abordé dans le programme dédié au livre et aux bibliothèques. Le maire d’une commune ayant un projet de médiathèque a longtemps pu obtenir près de 80 % de subvention – c’est un peu moins aujourd’hui. Les collectivités ont créé des plans lecture et des politiques publiques assez importantes, de telle sorte que le projet de fonds de soutien aux bibliothèques est déjà satisfait par l’effort consenti par l’État pour soutenir la création des médiathèques. Avis défavorable.

M. Paul Vannier (LFI-NFP). Le budget prévoit 5 milliards d’euros de coupes pour les collectivités territoriales : il est étonnant que vous jugiez superflu un fonds de soutien à ces mêmes collectivités. En période d’austérité et de coupes drastiques dans les budgets des collectivités, les maires ont moins de choix. L’amendement vise donc à permettre aux collectivités d’assumer la gratuité.

Les objections que vous souleviez à propos des musées ne tiennent pas pour ce qui concerne les bibliothèques municipales et intercommunales. Les touristes, que vous vouliez faire contribuer, les fréquentent peu. Il est dommage que vous ne laissiez pas les collectivités aller dans le sens de l’accès au livre, a fortiori en sachant que mon amendement ne coûte que 25 millions d’euros, soit rien ou presque, au budget de l’État.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC82 de M. Idir Boumertit

M. Idir Boumertit (LFI-NFP). Trop souvent, la logique d’appel à projets nuit à la production et à la diffusion de l’art par gaspillage de temps et de moyens. Artistes, institutions, musées et associations mobilisent leurs ressources pour cocher les cases donnant droit à financements. Il est temps de changer de paradigme en octroyant des moyens supplémentaires stables au soutien de la production culturelle et artistique française : les enveloppes budgétaires doivent assurer un financement pérenne, à l’inverse des appels à projets fluctuant chaque année. Cela favorisera la créativité et la diversité culturelle par l’affranchissement des artistes et des équipes indépendantes des contraintes liées à la recherche de budget.

Un fonds de soutien aux expressions culturelles non académiques permettrait aux acteurs du monde culturel de se rapprocher des citoyens les plus éloignés de la culture et de développer un style, une vision de la culture pleinement émancipatrice et populaire.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Il ne vous aura pas échappé que je ne suis pas le ministre de la culture et ce n’est pas moi qui fais le budget. La difficulté de l’exercice, c’est qu’on prend à Paul pour habiller Jacques. Je souscris à votre idée de mener une réflexion avec les services du ministère de la culture pour adopter, sur certains projets, une logique pluriannuelle. Pour autant, cela justifierait-il 52 millions d’euros supplémentaires ? Je ne le crois pas. Depuis 2017, nous avons augmenté de 1 milliard le budget de la culture. L’augmentation est certes moins forte cette année que les précédentes, mais il s’agit d’une année particulière, après la crise du covid et la guerre en Ukraine. Et je rappelle aux collègues du Rassemblement national, que sur tous les derniers budgets, ils réclamaient 100 milliards d’euros de dépenses supplémentaires. Nous pouvons travailler collectivement pour avancer sur le sujet.

La commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique sur les artistes-auteurs.

Amendement II-AC65 de Mme Sarah Legrain

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Les artistes-auteurs sont parmi les grands perdants des sept années de pouvoir d’Emmanuel Macron ; ils n’ont jamais vu leurs revendications, qui figuraient notamment dans le rapport Racine, suivies d’effet. Ils nous alertent sur l’état de précarisation qui caractérise leur situation et sur les dangers que fait peser l’intelligence artificielle sur leurs revenus. Leur revendication est finalement assez simple : voir reconnaître leur travail d’artistes-auteurs et bénéficier d’une protection sociale, d’élections professionnelles qui leur permettent d’être représentés ainsi que d’une continuité de revenus. Je vous renvoie à cet égard à la proposition de loi transpartisane pour une continuité de revenus des artistes-auteurs, qui a reçu de nombreux soutiens dans le secteur, mais qui n’a obtenu aucune réponse et sur laquelle on n’a vu aucune tentative d’avancer. Il faut absolument mettre en place ce plan pour les artistes-auteurs et reconnaître qu’il existe bien un travail de l’art et qu’il doit être rémunéré à sa juste valeur.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. J’ai du mal à comprendre pourquoi Emmanuel Macron se serait acharné sur le sort des artistes-auteurs. Le Président de la République a eu plusieurs gouvernements, qui ont augmenté de 1 milliard d’euros le budget de la culture, ce qui soutient directement ou indirectement les artistes-auteurs en élargissant la capacité de commande des acteurs de la filière.

Les syndicats d’artistes-auteurs que nous avons auditionnés ne sont pas tous pleinement en phase avec la proposition de loi de M. Dharréville, que j’avais d’ailleurs cosignée. Peut-être faut-il que nous nous remettions collectivement autour de la table pour y travailler.

Un chantier est en cours et la protection des artistes-auteurs face à des menaces technologiques nouvelles comme l’intelligence artificielle doit nous interroger. Nous devons nous questionner aussi à propos de la chaîne de la valeur afin que les auteurs soient bien rémunérés quand leurs œuvres rapportent de l’argent. Nous devons, enfin, nous poser la question très importante du respect des règles, en matière par exemple de délais de paiement, car les auteurs d’une prestation artistique sont parfois payés avec six mois ou un an de retard. Ce sont là de vraies questions.

La situation des artistes-auteurs pourrait, du reste, mériter une mission flash ou une mission d’information de notre commission.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Je vous ai entendu, monsieur le rapporteur.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Vous dites que les syndicats ne sont pas tous d’accord entre eux et trouvez qu’ils devraient se mettre autour de la table.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Vous aussi avec eux !

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Avec 50 millions d’euros, le coût de cet amendement n’est pas si important – même si, je le sais bien, le Rassemblement national veut supprimer tout le budget de la culture et vote contre la moindre recette dès qu’il s’agit de toucher les poches des plus riches. Des élections professionnelles sont indispensables pour la protection des artistes-auteurs, qui doivent pouvoir être représentés et entendus. Ce n’est pas contradictoire avec ce que vous dites, bien au contraire.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC154 de Mme Soumya Bourouaha

Mme Soumya Bourouaha (GDR). J’ai récemment redéposé sur ces questions une proposition de loi précédemment déposée par mon collègue Pierre Dharréville. Cet amendement d’appel vise à préfigurer la création d’un revenu de remplacement pour les artistes-auteurs. Les artistes sont en effet des travailleurs, car la création d’une œuvre artistique est un véritable travail. Cependant ces artistes ne gagnent de l’argent que lorsque leurs œuvres sont diffusées et les droits d’auteur qui constituent leur rémunération ne reflètent que le succès ou la diffusion de celles-ci. En revanche, le travail créatif qui précède la diffusion n’est le plus souvent pas rémunéré. Ainsi, quand un artiste auteur n’a pas d’activité rémunérée, il ne perçoit aucun revenu en dehors des aides sociales minimales, ce qui le place dans une situation encore plus précaire que de nombreux autres travailleurs, car il doit continuer à créer tout en faisant face à ses besoins de base et aux coûts liés à son activité professionnelle, comme l’achat de matériel et de fournitures, la recherche de diffuseurs ou la location d’ateliers.

Le groupe GDR défend depuis plusieurs années l’idée d’une loi qui créerait un revenu de remplacement pour ces artistes. Le dispositif proposé est technique, mais ce serait un formidable tsunami que nous votions tous cet amendement.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. J’ai déjà dit ce que j’en pensais. Nous devons avoir cette réflexion importante. Des pistes d’amélioration existent pour les auteurs et il serait bon que notre commission se penche sur le sujet, avec l’aide du Gouvernement. Avis défavorable, mais je soutiens l’examen de cette question.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC189 de Mme Caroline Parmentier

Mme Caroline Parmentier (RN). Pendant que vous jonglez avec les centaines de millions et que vous vous faites plaisir avec l’argent des Français, nous nous efforçons de réparer le désastre budgétaire, dans lequel nous ne portons aucune responsabilité. Cet amendement propose de réduire de 50 millions d’euros les crédits accordés à l’action Soutien à la création, à la production et à la diffusion des arts visuels du programme Création.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). En réalité, vous portez une responsabilité. Voilà encore dix minutes ou un quart d’heure, dans l’hémicycle, vous avez rejeté, avec le socle du gouvernement Barnier, l’augmentation de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus qui aurait permis au budget de l’État d’engranger des sommes nécessaires pour les services publics et les politiques de service public. J’ai l’impression d’assister à un sketch, malheureusement devenu réalité, du président argentin Javier Milei, qui s’affichait tronçonneuse à la main : Afuera ! Dehors, les ministères et les services publics ! Vous n’avez pas la tronçonneuse, mais la même ambition de jeter aux orties l’ensemble des politiques culturelles.

M. Laurent Croizier (Dem). Je suis étonné, surpris, abasourdi par cet amendement. La culture, c’est ce qui forge la citoyenneté, l’appartenance à une nation, nos traditions, nos savoir-faire et notre art de vivre à la française, et vous voulez baisser les crédits qui lui sont alloués ? C’est irresponsable et totalement contraire à ce que vous racontez depuis toujours. Cet amendement d’opportunité est très malvenu et manque complètement sa cible.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Je suis surpris que vous ne vous cachiez pas de vouloir faire ce qui est le réflexe de tous les régimes illibéraux : commencer par tailler à la tronçonneuse les budgets de la culture. D’ailleurs, qu’est-ce qui vous déplaît au palais de Tokyo, et pourquoi les métiers d’art, qui sont les métiers de la culture et des traditions millénaires de la France ? Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique sur les enseignements artistiques.

Amendement II-AC72 de M. Raphaël Arnault

M. Raphaël Arnault (LFI-NFP). Il tend à renforcer la place des enseignements artistiques dans les lycées où, marginalisés par le nouveau baccalauréat, ils sont en train de disparaître. Les dernières réformes ont institué une école dans laquelle les contenus, options et spécialités proposés varient d’un établissement à l’autre, et les enseignements artistiques en font les frais. Les réformes successives du lycée professionnel ont, par exemple, réduit les enseignements permettant aux élèves de disposer d’une culture commune. Derrière l’illusion de liberté que confèrent aux lycées les réformes de l’enseignement, le résultat est la marginalisation des matières jugées moins essentielles ou moins utiles. Dans le cas des options artistiques, il revient au lycée de décider s’il en proposera parmi les parcours d’enseignement : l’option artistique devient alors un simple bonus. La disparition progressive de ces enseignements au lycée a pour conséquence directe le renforcement des inégalités d’accès à la culture. Cet amendement propose donc d’augmenter de 50 millions d’euros le soutien à la démocratisation et à l’éducation artistique et culturelle.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. C’est là une préoccupation que nous partageons tous. Toutefois, les crédits alloués à l’enseignement artistique et culturel dans le temps scolaire sont déjà en augmentation de 8 millions d’euros cette année, ce qui permet la réalisation de politiques nouvelles. Dans cette période de tensions budgétaires, on pourrait s’en féliciter. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC18 de Mme Céline Hervieu

Mme Céline Hervieu (SOC). Il vise à corriger la baisse de 10 millions d’euros des crédits en faveur de l’éducation artistique et culturelle. S’il existe des dispositifs politiques qui permettent la démocratisation de la culture et la transmission des savoirs, ce sont bien ceux de l’EAC. Nous ne comprenons pas comment on peut, d’un côté, défendre le 100 % EAC et la garantie que tous les enfants pourront en bénéficier et, de l’autre côté, constater une baisse de 5 % des élèves de primaire et de collège qui en bénéficient par rapport à 2024. Pourquoi la part de ces crédits censée être dirigée vers les territoires prioritaires est-elle en baisse de 2 % par rapport à 2024 ? Nous proposons donc de rétablir ces 10 millions d’euros pour l’éducation artistique et culturelle.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Nous n’avons pas tout à fait les mêmes chiffres : le mien est d’un peu moins de 5 millions d’euros, et non pas 10. Je répète que, pour les temps scolaires, les crédits de l’EAC augmentent de 8 millions et, pour le temps hors scolaire, de 9 millions, avec 2 millions supplémentaires pour une action menée dans les conservatoires : cela témoigne d’un soutien à l’EAC. Je ne suis personnellement pas opposé à l’idée de lui allouer plus de moyens mais, dans une période de budget contraint, je demande le retrait de cet amendement. À défaut, avis défavorable.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Il est assez pénible de vous entendre invoquer les contraintes budgétaires alors que, dans le même temps, vous rejetez dans l’hémicycle tout le budget que nous pourrions récupérer. Cela ne coûterait pas grand-chose d’aller récupérer quelques sous en taxant les superprofits et les superdividendes. Personne n’a jamais dit que l’éducation artistique et culturelle devait diminuer et on voit bien qu’il faut augmenter ces budgets : il en est d’autant plus regrettable, monsieur Balanant, alors même que votre groupe vote parfois en faveur d’augmentations de recettes, que vous adhériez au logiciel austéritaire selon lequel, même quand une idée est bonne, on n’a pas les sous pour la payer.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. D’abord, je ne suis pas dans l’hémicycle, mais ici. Vous avez eu l’honnêteté de relever que mon groupe, le Mouvement démocrate, réclame depuis sept ans quelques ajustements fiscaux, même s’ils ne vont pas dans le sens de ce que vous préconisez, qui est parfois caricaturalement fort. Ne nous faites pas de procès d’intention, car je note avec satisfaction que, globalement, le budget de la culture augmente encore cette année de 3,8 %, après une augmentation de 30 % depuis 2017. Dire que je soutiens une politique austéritaire est donc un peu caricatural. Je le dis d’autant plus que je connais votre attachement pour ces questions et que nous partageons parfois certaines convictions –  comme, je l’espère, la plupart des membres de cette commission – quant au développement de la culture. Si nous voulons progresser, il faut être juste et reconnaître ce qui a été fait.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC32 de Mme Sarah Legrain

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Il vise à affecter la modique somme de 2 millions d’euros à l’éducation à l’image, qui est un enjeu fondamental pour la jeunesse. Cette éducation repose aujourd’hui sur des dispositifs auxquels je suis personnellement très attachée, en tant qu’ancienne professeure, pour y avoir eu recours. J’ai vu, en effet, les résultats produits en emmenant des classes d’élèves au cinéma voir, selon une programmation choisie, des films qu’ils ne seraient pas allés voir spontanément, et en dispensant aux enseignants des formations leur permettant d’accompagner ce rapport au cinéma.

Le département du Nord a récemment annoncé qu’il renonçait au programme Collège au cinéma en raison des coupes budgétaires qui l’obligeaient à choisir entre cette activité et la protection de l’enfance. Ce renoncement, dramatique en termes d’égalité entre les élèves sur l’ensemble du territoire, montre aussi l’impact des baisses des budgets des collectivités territoriales sur la politique culturelle. Nous devons soutenir ces dispositifs, qui ne doivent pas en faire les frais. J’ajoute que les réformes en cours dans l’éducation nationale, avec le pacte enseignant, ne favorisent pas le recours à ce dispositif.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Le débat est le même que pour l’amendement précédent. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique sur l’éducation critique aux médias et à l’information.

Amendements identiques II-AC26 de Mme Sophie Taillé-Polian et II-AC73 de M. Raphaël Arnault

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). L’amendement II-AC26, travaillé avec l’association Jets d’encre, propose un plan d’investissement de 3 millions d’euros dans l’éducation aux médias, à l’image et à l’information. Il est essentiel pour notre démocratie d’aider les jeunes à y voir plus clair dans la masse d’informations ou de désinformations qui circulent sur l’ensemble des moyens de communication, que ce soit sur certaines chaînes de télévision du secteur privé ou sur les réseaux sociaux. Il est très important d’instaurer ce parcours citoyen. En outre, avec des crédits qui ne sont pas à la hauteur, les entreprises du service public de l’audiovisuel risquent d’avoir plus de difficultés à participer à ces actions.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Comme pour l’éducation artistique et culturelle, il y a consensus sur le fait que la jeunesse est exposée à des images, et à des contenus médiatiques qu’elle doit être capable d’analyser. L’adoption de cet amendement à 3 millions serait, pour l’Assemblée nationale, une façon de montrer qu’il faut renforcer les moyens en ce sens. Vous avez déjà refusé de soutenir les programmes permettant d’emmener lycéens et collégiens au cinéma, alors que nous savons à quel point le secteur, que nous avons auditionné, demande le renforcement de ce dispositif qui fonctionne bien, mais auquel certaines collectivités renoncent, faute de budget. On voit en tout cas que l’argument selon lequel nous serions déraisonnables et demanderions des sommes hallucinantes est un argument bidon, car il ne s’agit ici que de sommes très raisonnables pour des sujets qui font consensus.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Ce que vous réclamez existe déjà : il s’agit de la sous-action 01 de l’action 02 du programme 361, dotée de 3,77 millions d’euros. Votre amendement étant satisfait, j’en demande le retrait.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Nous n’allons pas retirer des amendements dont vous n’assumez pas le rejet. Vous ne voulez même pas lâcher 3 millions d’euros pour l’éducation aux médias !

La commission rejette les amendements.

Amendement II-AC221 de Mme Violette Spillebout

Mme Violette Spillebout (EPR). Comme mes collègues, je soulignerai l’importance de l’éducation aux médias et à l’image, à l’école et dans d’autres structures, comme les bibliothèques, les médiathèques, les centres sociaux et les maisons de quartier, dont certaines ont conclu des conventions avec les caisses d’allocations familiales ou peuvent avoir des budgets à cette fin, même si cela reste insuffisant. Il existe aujourd’hui un budget de 3,77 millions d’euros, qui est maintenu pour 2025.

Cet amendement vise toutefois à ajouter 500 000 euros pour l’éducation critique aux médias, afin de lutter contre la désinformation et d’accompagner les jeunes et les moins jeunes pour leur permettre d’exercer leur esprit critique dans tous les domaines, en particulier dans les espaces numériques, en partenariat avec les associations d’éducation aux médias et de journalisme, dont Mme Taillé-Polian a souligné le rôle et dont une grande partie intervient bénévolement dans les classes.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Lorsque j’ai dit que 3,77 millions d’euros y étaient déjà consacrés, je n’ai pas eu le temps de dire que ce chiffre pourrait légèrement augmenter. Avis favorable, donc.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC69 de Mme Sarah Legrain

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Il vise au financement d’un plan de lutte contre les violences et le harcèlement sexistes et sexuels, et de défense de l’égalité entre les femmes et les hommes dans les arts et la culture. J’espère, monsieur Balanant, qu’en tant que rapporteur fraîchement élu de la commission d’enquête sur les violences sexistes et sexuelles (VSS), vous n’oserez pas, cette fois, émettre un avis défavorable à un amendement dont chacun comprendra l’importance. Quasiment tous les jours, nous recevons des alertes concernant des agresseurs circulant dans les milieux des arts et de la culture, milieux encore très masculins et cultivant le huis clos, propices aux violences et à l’emprise. Il nous faut donc absolument renforcer ce combat, ce qui ne passe pas seulement par des mots et des lois, mais aussi par du budget. Cet amendement répond, pour la part du budget de la culture, aux demandes des associations d’une somme de 2,6 milliards d’euros à l’échelle de tout le budget pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles.

M. Jérémie Patrier-Leitus (HOR). Dans de nombreux domaines, ce n’est pas seulement avec plus d’argent qu’on traite les problèmes. Pour ce qui est, par exemple, de l’éducation aux médias, les acteurs de l’audiovisuel public pourraient fort bien mener des actions plus substantielles. Il ne s’agit pas seulement ici d’évoquer en termes budgétaires des questions qui nous paraissent collectivement importantes, car tout ne se résout pas avec de l’argent supplémentaire. Nous devons aussi être responsables collectivement.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Vous irez expliquer cela aux associations féministes, qui disent précisément que, dans le combat contre la culture du viol et les violences faites aux femmes, la dimension budgétaire est essentielle pour la formation. Pour écouter les femmes – car ce sont essentiellement les femmes qui sont victimes –, qui parlent de plus en plus, pour les entendre et les accompagner, il faut des budgets.

Il est hallucinant, alors que vous êtes rapporteur pour avis sur le budget du patrimoine, que vous nous expliquiez que ce n’est pas parce qu’on examine le budget qu’il faudrait faire des dépenses, et qu’on peut s’arranger. Votre réponse me choque, car une importante documentation atteste de l’importance de la part budgétaire. Vous avez mal choisi votre moment pour intervenir.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. M. Patrier-Leitus est membre de la commission et, à ce titre, il a droit à la parole.

Mme Graziella Melchior (EPR). Notre groupe partage la cause de la lutte contre les violences et le harcèlement sexistes et sexuels et j’y suis moi-même très engagée, comme vous. Cependant, nous avons repris aujourd’hui même les travaux de la commission d’enquête consacrée à ce sujet et pensons qu’il conviendrait que cette commission d’enquête mène ses travaux à terme avant de faire de telles recommandations. Nous nous abstiendrons donc sur votre amendement.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Je suis, moi aussi, choquée par certains propos. Des pays comme l’Espagne, que l’on cite souvent en exemple, montrent qu’il faut des moyens pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles et contre les discriminations liées au genre. On ne peut pas lutter contre ces violences uniquement avec de bons sentiments. Il faut des moyens d’accompagnement et les victimes doivent pouvoir être écoutées. Il faut aussi des mesures de prévention permettant que tout se passe bien sur les tournages.

Dans le cadre de la discussion budgétaire, nous considérons qu’il faut consacrer des moyens à ce problème. Les réactions que nous entendons m’étonnent d’autant plus que nous avons voté à l’unanimité la création de cette commission d’enquête, ce qui montre que nous considérons qu’il s’agit d’un sujet majeur et qu’il faut agir. Peut-être faudra-t-il affiner ce plan sur la base des résultats de la commission d’enquête, mais nous savons dès aujourd’hui qu’il faut débloquer des moyens.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Il est évident qu’il faudra que nous consacrions des moyens à cette cause. Même s’ils sont insuffisants, il en existe déjà pour des plans de prévention et des accompagnements. Une commission d’enquête a été créée parce que des faits graves nous ont été révélés, qui ne remontent du reste pas seulement au mois de mai 2024 mais, en réalité, à une vingtaine d’années. À l’issue de cette commission d’enquête présidée par Mme Sandrine Rousseau, dont vous avez rappelé que je viens d’être nommé rapporteur, et où siégeront bon nombre des membres de notre commission, nous procéderons à des évaluations et à des constats. J’espère aussi que nous établirons une stratégie, un plan de lutte, que nous chiffrerons ensemble. À un moment donné, nous demanderons des moyens supplémentaires.

Ne nous donnez pas de leçons dans ce domaine ; je m’y suis impliqué et je continue à le faire. Du reste, peut-être constaterons-nous qu’il faut plus que les 30 millions d’euros que vous demandez – peut-être 50 millions d’euros, je n’en sais rien. À ce stade, faisons travailler la commission d’enquête que nous avons installée et qui a fait l’objet d’un consensus. Allons jusqu’au bout de ce travail, après quoi nous pourrons réfléchir à l’argent qu’il faudra mettre, autant que nécessaire, pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles dans l’intégralité du monde de la culture – et nous savons qu’elles existent aussi dans toute notre société. Je ne peux pas donner un avis défavorable, mais je demande le retrait de cet amendement, car nous ne savons pas combien coûteront ces mesures et il faut travailler pour le savoir.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). J’ai bien compris le sens de vos propos : il est urgent d’attendre. Je suis membre de cette commission d’enquête, et je pense en effet qu’elle émettra des préconisations, y compris sur le plan législatif. Cependant, depuis le début de ses travaux – j’y inclus ceux qui ont été réalisés avant qu’elle soit relancée –, toutes les personnes auditionnées faisaient état de besoins en termes de formation. Les victimes étant de plus en plus nombreuses à parler, il est, mathématiquement, de plus en plus nécessaire de disposer de budgets pour les accueillir les écouter et les entendre. Quelles que soient les décisions que nous pourrions prendre en termes de normes et de droit, tout le monde souligne le besoin de budgets.

Jamais je ne retirerai un amendement qui propose du budget contre les VSS. Il n’est pas audible qu’il faudrait attendre la fin de la commission d’enquête, c’est-à-dire avril prochain, pour ajouter du budget alors que nous apprenons tous les jours qu’un rappeur par-ci, un réalisateur par-là, y compris dans l’audiovisuel public, commettent des violences. Il n’est pas audible qu’il serait urgent d’attendre pour mieux évaluer des besoins qui pourraient se révéler supérieurs à ce qui est demandé aujourd’hui.

La commission adopte l’amendement.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique sur le fonds national pour l’emploi pérenne dans le spectacle (Fonpeps).

Amendement II-AC230 de M. Steevy Gustave

M. Steevy Gustave (EcoS). Cet amendement vise à augmenter de 19 millions d’euros le financement affecté au Fonpeps, qui a fait ses preuves dans la résorption de la précarité de l’emploi dans le secteur culturel. Le fonds retrouverait ainsi sa dotation initiale de 90 millions.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Pour 2025, les crédits du Fonpeps, dispositif efficace et apprécié par les acteurs du secteur, sont renouvelés à l’identique, soit 39 millions d’euros. En pratique, le ministère de la culture a toujours pourvu aux besoins de financement du fonds lorsque son budget était épuisé. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC238 de M. Steevy Gustave

M. Steevy Gustave (EcoS). Il s’agit d’un amendement de repli, élaboré avec le Synavi : il tend à affecter au Fonpeps un financement de 6,5 millionsd’euros afin de financer les évolutions de celui-ci.

Il a également pour but de revenir à la condition initiale d’éligibilité, à partir de deux artistes en plateau, et d’ajouter une clause pour les salles de petite jauge et les lieux non dédiés. Cette proposition permettrait de couvrir environ 40 % des coûts artistiques et techniques directement supportés par une compagnie, autorisant des petites communes à accueillir pour quelques centaines d’euros des spectacles qui seraient, sinon, inaccessibles.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Jusqu’ici, le ministère de la culture a en effet pourvu aux besoins de financement du Fonpeps autant que de besoin, mais le rapporteur pour avis ne cesse de nous dire que 2025 est une année particulière, qui demanderait d’être particulièrement raisonnable. Quelle assurance avons-nous que cette pratique sera maintenue en 2025 ? Avant le prochain coup de tronçonneuse contre le Fonpeps suggéré par le Rassemblement national, nous devons affirmer notre volonté de réduire la précarité dans le monde du spectacle.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Je n’ai pas dit qu’il fallait être raisonnable : en matière de culture, il ne faut jamais l’être ! Pour autant, les augmentations que vous appelez de vos vœux me semblent trop fortes, et quel qu’en soit le montant, mon avis reste le même : demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC186 de Mme Caroline Parmentier

Mme Caroline Parmentier (RN). Cet amendement vise à réduire de 20 millions d’euros les crédits accordés à l’action 06 Soutien à l’emploi et structuration des professions du programme 131 Création. Nous continuons de faire en sorte de ne pas creuser le déficit, de réduire l’imposition des Français et d’accentuer la baisse de la dépense publique.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Massacre à la tronçonneuse, épisode 4 ! Voilà encore un amendement du Rassemblement national qui ne propose aucune politique culturelle. On a bien compris qu’il n’aime pas la culture et sa puissance émancipatrice. Il en a même un peu peur puisqu’il veut bien la soutenir, mais seulement si elle est neutre – c’est-à-dire s’il peut la contrôler. En commission, vous cherchez à raboter les budgets et, parallèlement, dans l’hémicycle, vous votez contre les recettes qu’on pourrait piocher dans les superprofits des entreprises et les poches des plus riches. Nous avons bien compris que tout ce que vous voulez faire, ce sont des coupes, des coupes, des coupes, comme Emmanuel Macron.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Madame Parmentier, je viens de vous entendre dire « vous allez mettre la France à genoux ». En l’occurrence, ce sont les artistes que vous voulez mettre à genoux ! Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique sur les écoles d’art territoriales.

Amendements identiques II-AC19 de Mme Fatiha Keloua Hachi et II-AC237 de M. Steevy Gustave et amendement II-AC53 de Mme Sarah Legrain (discussion commune)

Mme Céline Hervieu (SOC). L’amendement II-AC19 vise à réévaluer la dotation de trente-trois écoles territoriales d’art à hauteur de 16 millions d’euros. Avec l’Association nationale des écoles supérieures d’art, nous donnons l’alerte depuis deux ans sur la situation dramatique de ces établissements, dont nous souhaitons réévaluer les dotations pour établir une équité de traitement avec les écoles nationales. Cela permettrait de financer notamment l’accroissement des missions de fonctionnement, les conséquences de l’inflation et de l’évolution du point d’indice, ainsi que l’exonération des frais d’inscription des étudiants boursiers.

L’État n’a pas fait évoluer la dotation structurelle de ces écoles territoriales depuis près de douze ans. En euros constants et en tenant compte de l’inflation, cela correspond à une diminution réelle de plus de 14 %. Ces établissements, en grande difficulté, sont en train d’épuiser leurs fonds de roulement. Ils ont besoin de soutien de toute urgence.

M. Steevy Gustave (EcoS). Cet amendement identique a pour but de débloquer 16 millions d’euros pour les écoles d’art territoriales, dont la situation est dramatique ; certaines d’entre elles sont menacées de fermeture. Constituées en établissements publics de coopération culturelle (EPCC), ces trente-trois écoles délivrent des diplômes nationaux du ministère de la culture – licences et masters. Le financement de l’État ne représente que 10 % de leur budget, en moyenne, l’essentiel provenant des collectivités territoriales déjà lourdement affectées par la crise.

Cette aide de 16 millions avait été approuvée par nos collègues du Sénat dans le cadre du PLF pour 2024, mais elle a été victime du 49.3. Elle vise à rétablir une équité de traitement entre les EPCC et les écoles nationales, qui délivrent les mêmes diplômes.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Nous avons reçu le groupement des écoles d’art territoriales et nous avons identifié plusieurs sujets à traiter. Le financement de l’État présente des asymétries, allant de 3,8 % à 40 %. Toutefois, le rééquilibrage ne devrait pas pénaliser les écoles qui sont les mieux financées.

Les écoles territoriales, comme leur nom l’indique, relèvent de la responsabilité des collectivités dans lesquelles elles sont implantées, notamment en matière de financement. Celles-ci doivent s’engager auprès des écoles, qui participent à l’attractivité des territoires ; certaines subventions sont insuffisantes.

Par ailleurs, je souhaite appeler l’attention du ministère de la culture sur la nécessaire poursuite de l’application des recommandations du rapport très complet de M. Pierre Oudart.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement II-AC156 de Mme Soumya Bourouaha

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Nous souhaitons donner l’alerte sur la situation difficile des écoles d’art territoriales, qui font face à de graves problèmes financiers. En 2023, la précédente ministre de la culture avait débloqué une aide de 2 millions d’euros ; plus récemment, l’actuelle ministre leur a octroyé une aide de 3 millions. Cet amendement vise à les compléter par une nouvelle aide de 3,6 millions.

En effet, ces aides n’ont pas suffi à compenser le retrait progressif de l’État. Ces écoles sont majoritairement financées par les collectivités locales, à hauteur de 75 %, tandis que l’État ne contribue qu’à hauteur de 11 % en moyenne. Cette situation risque d’empirer en 2025 puisque le Gouvernement demande aux collectivités de réduire leurs dépenses de 5 milliards d’euros, ce qui risque de diminuer le budget en faveur de la culture, et donc, des écoles d’art territoriales. D’après l’Association nationale des écoles d’art, les subventions de l’État ont déjà diminué de 14 % si l’on tient compte de l’inflation.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC234 de M. Steevy Gustave

M. Steevy Gustave (EcoS). Les enseignants des trente-trois écoles d’art territoriales ont le statut de professeur d’enseignement artistique de la fonction publique territoriale, c’est-à-dire le même que les enseignants des pratiques amateurs et conservatoires. Or ils délivrent des diplômes de licence ou de master, et leur statut doit être réformé en conséquence. Toutefois, cette réforme indispensable ne peut être prise en charge par les seules collectivités territoriales. Cet amendement a pour but de dégager 2 millions d’euros pour contribuer à sa concrétisation.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Cette réforme est légitime, mais mérite de faire l’objet d’une discussion entre le ministère de la culture, les collectivités territoriales, les instances représentatives du personnel et la direction des écoles, afin de trouver la bonne clé de répartition. Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques II-AC291 de M. Erwan Balanant et II-AC233 de M. Steevy Gustave

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. L’amendement vise à octroyer 1,6 million d’euros aux écoles territoriales d’art et de design pour exonérer les étudiants boursiers des frais d’inscription. J’ai appris récemment qu’il existait une différence de traitement entre les étudiants boursiers des écoles nationales d’art et ceux des écoles territoriales d’art, alors qu’ils obtiennent les mêmes diplômes après avoir suivi des enseignements similaires : les premiers bénéficient d’une exonération complète de leurs frais de scolarité, contrairement aux seconds.

Lorsque nous avons reçu en audition les représentants de ces écoles, j’ai considéré que cette revendication était justifiée : la différence de traitement n’est ni juste, ni valorisante pour ces établissements d’excellence.

La commission adopte les amendements.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique sur les écoles nationales supérieures d’architecture (Ensa).

Amendement II-AC59 de Mme Sarah Legrain

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). L’amendement est défendu.

Amendement II-AC36 de M. Frédéric Maillot

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Cet amendement a été élaboré en collaboration avec le collectif pour les conditions dignes et égalitaires des enseignants contractuels en écoles d’architecture. Il vise à aligner les rémunérations des professeurs contractuels sur celles des titulaires, parce qu’il n’est pas acceptable de ne pas percevoir le même salaire pour le même travail. Un amendement similaire au PLF pour 2023 avait été adopté, mais il a été victime du recours au 49.3.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. L’année dernière, les crédits destinés aux charges de fonctionnement des Ensa ont fortement augmenté, afin de les aider à surmonter la crise qui les touchait. D’un montant de 56 millions d’euros, ils ont été reconduits dans le PLF pour 2025. Avis défavorable sur l’amendement II-AC59.

L’évolution visée par l’amendement II-AC36 serait louable, mais elle doit faire l’objet d’une concertation entre l’État, les Ensa et les instances représentatives du personnel. Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement II-AC52 de Mme Céline Hervieu

Mme Céline Hervieu (SOC). Cet amendement vise à corriger la baisse des subventions allouées aux Ensa. Ces vingt écoles ont des missions cruciales en matière de formation initiale et continue des professionnels de l’architecture, de recherche en architecture, de diffusion de la culture architecturale et de rayonnement international. Leur situation financière s’est fortement dégradée et nous contestons la baisse des subventions, qui représente 700 000 euros.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. En tant qu’amoureux de l’architecture, je devrais être favorable à votre amendement, sauf qu’un effort notable a été réalisé l’année dernière, comme je l’ai rappelé. La nette hausse des crédits pour 2024 ayant été reconduite dans le PLF pour 2025, il ne s’agit donc pas d’une simple réaction pour éteindre un incendie, mais d’un véritable engagement.

Nous devons cependant rester vigilants quant à la situation des Ensa, dont l’importance est cruciale, en témoignent les nombreux architectes français qu’elles ont formés et qui sont mondialement reconnus pour leurs qualités et leur expertise. Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission adopte l’amendement.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique sur l’accessibilité de la culture aux personnes en situation de handicap.

Amendements II-AC34 de M. Frédéric Maillot et II-AC165 de Mme Sophie Taillé-Polian

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Le financement de l’accessibilité de la culture aux personnes en situation de handicap est déjà pris en charge dans la sous-action Participation à la vie culturelle de l’action 02 du programme 361. En outre, les crédits dédiés au handicap ont augmenté de 8 % en 2024 ; ce n’est peut-être pas suffisant pour un enjeu de cette importance, mais il ne me semble pas pertinent de créer un nouveau programme. Demande de retrait.

La commission rejette successivement les amendements.

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement II-AC126 de Mme Sophie-Laurence Roy.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique sur les maisons des jeunes et de la culture (MJC).

Amendement II-AC232 de M. Steevy Gustave

M. Steevy Gustave (EcoS). Cet amendement a pour objet l’augmentation du financement dédié aux MJC. Parce qu’elles agissent pour l’éducation populaire, l’accès à la culture et l’émancipation de la jeunesse, elles sont essentielles à la vie des quartiers populaires et à la démocratisation culturelle. Nous souhaitons soutenir le développement d’un fonds de soutien aux MJC et aux associations culturelles dans les quartiers populaires et dans les zones rurales, projet que la ministre affectionne particulièrement.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. La ministre de la culture a en effet lancé une réflexion à ce sujet, reconnaissant que les MJC ne sont sans doute pas suffisamment soutenues. En attendant l’examen de ce sujet en séance, où elle pourra nous en dire davantage, je vous invite à retirer votre amendement.

L’amendement est retiré.

Amendement II-AC220 de Mme Violette Spillebout

Mme Violette Spillebout (EPR). Le présent amendement vise à affecter 1 million d’euros supplémentaire à l’éducation artistique et culturelle dispensée par les structures de l’éducation populaire. Le budget prévu dans le PLF pour 2025 s’élève à 1,74 million, ce qui semble bien peu au regard du nombre de structures concernées. Cet ajout nous semble conforme aux déclarations de la ministre, qui a exprimé à plusieurs reprises le souhait de renforcer les moyens des MJC. Celles-ci rencontrent en effet d’importantes difficultés financières, comme elles l’ont exprimé lors des manifestations du mois de mars.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Avis favorable. Non seulement le montant proposé est raisonnable, mais cet amendement ne peut qu’encourager la réflexion nécessaire sur les MJC et leur avenir.

La commission adopte l’amendement.

 


2.   Réunion du mercredi 23 octobre 2024 à 9 heures 30

Lors de sa réunion du mercredi 23 octobre 2024 à 9 heures 30 ([28]), la commission poursuit l’examen, pour avis, des crédits de la mission Culture.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Mes chers collègues, nous poursuivons l’examen des crédits de la mission Culture.

Article 42 et état B (suite) : Crédits du budget général

Amendement II-AC188 de Mme Caroline Parmentier

Mme Caroline Parmentier (RN). Votre gouvernement, qui a mis la France à genoux et devra en répondre devant une commission d’enquête, contraint les ministères à des économies que nous refusons de faire supporter aux Français. Nous proposons de réduire de 10 millions les crédits accordés à l’action 04 Recherche culturelle et culture scientifique et technique du programme 361 Transmission des savoirs et démocratisation de la culture.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis (Création, transmission des savoirs et démocratisation de la culture). Sur cet amendement comme sur les autres amendements de rabot des crédits du ministère de la culture, j’émets un avis défavorable. La recherche en culture est essentielle. La création d’aujourd’hui est le patrimoine de demain.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques II-AC292 de M. Erwan Balanant et II-AC77 de Mme Céline Hervieu

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Lors de l’audition de Mme la ministre, j’ai fait observer que le budget de la recherche culturelle diminue de 1 million d’euros, ce qui me semble regrettable, tant celle-ci est fondamentale. Les services de Mme la ministre m’ont indiqué hier qu’il s’agissait d’une erreur d’imputation au sein du projet annuel de performances (PAP). Par prudence, je propose d’adopter ces amendements, et nous demanderons des précisions en séance publique.

Mme Céline Hervieu (SOC). Une fois n’est pas coutume, j’approuve – et le groupe Socialistes et apparentés avec moi – les propos de M. le rapporteur pour avis. Il faut soutenir la recherche culturelle.

La commission adopte les amendements.

Amendement II-AC229 M. Steevy Gustave

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Il vise à créer une commission nationale d’indemnisation des acteurs culturels impactés par les Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, dotée de 10 millions d’euros.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Les Jeux ont certes eu un impact, mais pas celui redouté il y a deux ans, lorsque l’on annonçait la suppression de presque tous les festivals. Tout a été très bien organisé. La ministre Rima Abdul-Malak et ses équipes, celles du ministère de l’intérieur et la filière ont réussi à se coordonner pour éviter les annulations. Très peu de festivals ont été annulés.

L’impact des Jeux est en cours de chiffrage ; un fonds de compensation est prévu. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC43 Mme Sarah Legrain

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Avis défavorable. Le fonds « festivals » a été largement abondé. Son montant demeure inchangé pour l’année 2025, à 32 millions d’euros, ce qui pérennise la hausse de 12 millions d’euros décidée pour 2024. Nous n’en devons pas moins surveiller ce sujet, qui fait l’objet de la partie thématique de mon rapport, comme le lait sur le feu.

La commission rejette l’amendement.

Amendements II-AC191 et II-AC190 de Mme Caroline Parmentier (discussion commune)

Mme Caroline Parmentier (RN). La France a été mise à genoux par ce gouvernement, qui devra en répondre devant une commission d’enquête, je le disais. Nous ne pouvons pas laisser supporter aux seuls Français le poids de cette dette. Les ministères doivent continuer à faire des efforts, au moins ponctuels. Nous proposons de réduire les autorisations d’engagement (AE) et les crédits de paiement (CP) prévus à l’action 06 Action culturelle internationale du programme 224 Soutien aux politiques du ministère de la culture.

L’amendement II-AC191 vise à lui allouer un budget identique à celui du projet de loi de finances pour 2023, soit 8 millions d’euros ; l’amendement de repli II-AC190 vise à lui allouer un budget identique à celui du projet de loi de finances pour 2024, ce qui représente une économie de 1,5 million d’euros. Il ne s’agit pas de s’opposer à l’action culturelle internationale mais de faire preuve d’une exigence accrue dans l’octroi des crédits.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Que le Rassemblement national souhaite freiner l’action culturelle internationale et le rayonnement de la France me surprend ! Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Suivant l’avis de M. le rapporteur pour avis, elle rejette l’amendement IIAC74 de Mme Sarah Legrain.

Amendement II-AC79 de Mme Sarah Legrain

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Défendre la liberté d’expression, c’est ce que nous faisons depuis 2017, notamment en augmentant de 1 milliard d’euros le budget du ministère de la culture. S’agissant de la concentration des médias, évoquée dans l’exposé sommaire, elle relève d’une autre mission. Avis défavorable.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Je soutiens l’amendement. Les attaques à la liberté de création et à la liberté de programmation se multiplient, quand bien même le budget du ministère de la culture a augmenté. Il importe que le ministère puisse approfondir sa réflexion à ce sujet avec les acteurs de terrain et se doter d’outils pour que la liberté de création, qui est au fondement de notre politique culturelle, soit sauvegardée, ainsi que la liberté de programmation.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC166 Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Cet amendement inspiré des travaux de Michèle Victory vise à créer un fonds pour le financement de la programmation d’œuvres écrites par des femmes doté de 1 million d’euros, ce qui reste modeste à l’aune du budget du ministère de la culture. En dépit d’une forte et notable prise en compte de cette question, dont nous nous réjouissons, grâce à laquelle la situation des autrices s’améliore, le chemin encore à parcourir reste long. La proportion des femmes parmi les artistes programmés et aidés est de deux sur dix. Il convient de mettre en œuvre une politique volontariste.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Je souscris à l’esprit de l’amendement. La somme de 1 million d’euros est raisonnable. Elle permettra d’amorcer une réflexion. Être auteur est difficile, être autrice l’est plus encore. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC1 de M. Philippe Fait

M. Philippe Fait (EPR). Le plan « fanfare » est une réussite. L’amendement vise à y inclure les jeux traditionnels et les danses folkloriques, dont la pratique irrigue nos territoires, notamment nos territoires ruraux, grâce à des associations aux moyens très limités. Il s’agit de leur venir en aide, à hauteur de 500 000 euros, pour préserver notre patrimoine.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Le plan « fanfare » est soutenu par le ministère de la culture à hauteur de 1,5 million d’euros par an. Il a été pérennisé en 2025. L’amendement est intéressant, mais il me semble satisfait, sans préjudice de ce que la ministre pourrait en dire dans l’hémicycle. Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC164 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Cet amendement vise à créer un fonds dédié à la production des auteurs et autrices de textes francophones dans le spectacle vivant. La francophonie permet le dialogue, l’échange et le mélange des cultures, grâce à cet outil commun qu’est la magnifique langue française. Nous souhaitons promouvoir l’usage de notre langue dans le plus grand nombre de pays possible, donc les auteurs et autrices francophones, avec la participation du ministère de la culture.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Le budget de l’action 03 du programme 361, placé sous la tutelle de la délégation générale à la langue française et aux langues de France (DGLFLF), est pérennisé pour 2025. Dans le contexte actuel, il faut s’en féliciter. L’amendement me semble satisfait. Avis défavorable.

La commission adopte l’amendement.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à la discussion des crédits relatifs au patrimoine, en commençant par une discussion thématique des crédits alloués aux monuments historiques.

Amendement II-AC104 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). En février 2024, le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, publiait un décret d’annulation de crédits qui a fait perdre 99 millions d’euros au programme 175 Patrimoines. Cette année, l’action 01 Monuments historiques et patrimoine monumental perd 15 millions d’euros en crédits de paiement.

Cette baisse a de quoi inquiéter, à l’heure où nous sommes confrontés à un mur d’investissement pour restaurer les 23 % de monuments historiques considérés comme en mauvais état ou en péril. Ils doivent être sauvegardés, d’autant qu’ils sont essentiels pour nos territoires et qu’ils permettent de développer l’emploi non délocalisable.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur pour avis (Patrimoines). Je rappelle que, lors de l’examen du programme 131 Création, nous avons ponctionné de 3,7 millions d’euros les crédits du programme Patrimoines. Il ne faut pas oublier que les diminutions et les augmentations de crédits que nous votons ont des conséquences.

Le présent amendement vise à augmenter les crédits du programme Patrimoines. Tout en y étant favorable en principe, je rappelle que Mme la ministre a indiqué qu’elle défendrait dans l’hémicycle un amendement visant à les augmenter de façon substantielle. Je propose, plutôt que ponctionner de près de 37 millions d’euros d’autres crédits du ministère, d’attendre la présentation de cet amendement. Nous pouvons faire confiance à Mme la ministre pour faire ce qu’elle a annoncé devant nous.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). J’ai pris note des propos de Mme la ministre, mais un tiens vaut mieux que deux tu l’auras. Voter mon amendement et demander à la ministre de lever le gage me semble être la meilleure façon de procéder.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC85 de M. Christophe Proença

M. Christophe Proença (SOC). Nous proposons de rétablir les crédits de l’action 01 Monuments historiques et patrimoine monumental. Notre rapporteur pour avis a évoqué un héritage commun et une unité de destin, rappelant que le patrimoine fait lien et fait nation. Il a raison. Nous sommes soumis à une obligation morale de transmission.

Toutefois, le budget prévoit une baisse des crédits de 3,5 %. L’amendement vise à rétablir les crédits votés l’an dernier en effaçant la baisse prévue de 18 millions d’euros. Quant aux autorisations d’engagement, elles sont en baisse de près de 40 millions d’euros, ce qui inquiète pour les prochaines années : tous les crédits du programme Patrimoines stagnent ou sont appelés à diminuer dans les années à venir.

Par ailleurs, la baisse des crédits des départements aura des conséquences sur le patrimoine, notamment sur le petit patrimoine de proximité, essentiel aux Français. Dans le département du Lot, le budget que nous examinons induira une baisse de 8 millions d’euros. La mise en difficulté des métiers de la restauration qui découlera de la réduction du nombre de chantiers aura un impact économique non négligeable. Le patrimoine est un bien commun. Nous devons agir.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur pour avis. L’amendement II-AC104, que nous venons d’adopter, prévoit d’augmenter de plus de 36 millions d’euros les crédits du programme Patrimoines. Tout amendement dont l’objet est d’augmenter ces crédits me semble satisfait. Demande de retrait ou avis défavorable.

L’amendement est retiré.

Amendement II-AC160 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Aucun des 12 000 musées que compte la France sur son territoire n’aborde de façon exclusive l’histoire de la colonisation, pourtant partie intégrante de l’histoire de notre pays. Cette part de notre histoire reste un sujet tabou au cœur de notre République. Nous avons besoin de faire face à notre passé, de le connaître, de le comprendre, pour mieux construire l’avenir par des actes forts.

La création d’un musée national de l’histoire de la colonisation améliorerait la connaissance et la compréhension de notre passé. Il permettrait de donner du sens à cette part de notre histoire. Cet exercice mémoriel est capital pour comprendre comment la France s’est construite, jusques et y compris lors des épisodes récents de la décolonisation, et d’analyser la relation entre ce contexte historique et le racisme si présent dans notre société.

Un tel musée répondrait à l’appel de nombreuses voix d’universitaires qui se sont élevées au cours des dernières années pour demander la création d’un tel lieu de savoir et de culture comme il en existe chez nos voisins qui furent des puissances coloniales. Sa création est également défendue par des femmes et des hommes politiques de tous bords. Elle fait notamment partie des recommandations du rapport d’information sur l’émergence et l’évolution des différentes formes de racisme.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Nous avons pérennisé les crédits de la mission dont je suis chargé. Je ne souhaite pas que l’on dépouille une mission pour habiller une autre. Je connais les contraintes de l’exercice ; je sais que rien n’exclut que Mme la ministre lève des gages. Les transferts de crédits en faveur du programme Patrimoines avoisinent les 80 millions d’euros. J’appelle l’attention sur ce point. Il serait regrettable que nous déplumions un budget que nous avons réussi à pérenniser.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur pour avis. Avis défavorable.

Le montant est inadapté. La création d’une institution culturelle est normalement précédée d’une mission de préfiguration, chargée de mener des études et de rédiger un rapport. Tel a récemment été le cas en vue de la création du musée de l’Œuvre de Notre-Dame de Paris. Ces 50 millions d’euros de crédits ne seraient pas consommés en 2025. À l’heure où les finances publiques sont très contraintes, nous devons collectivement veiller à bien calibrer les budgets.

Sur le fond, j’ai des réserves, à titre personnel, sur la création d’un musée national de l’histoire des colonisations. C’est à tous les musées de France, me semble-t-il, qu’il incombe de traiter ce sujet dans le cadre de leurs collections et de leurs expositions. Au demeurant, le musée du quai Branly, qui n’a pas à proprement parler été conçu à cette fin, offre souvent des éclairages en la matière par le biais de ses expositions et devient un lieu ressource. Tout récemment, le musée d’Art moderne de Paris a proposé une exposition intitulée « Art moderne et décolonisation. Paris 1908-1988 ». Je recommande de confier cette mission à toutes les institutions muséales de France.

Mme Violette Spillebout (EPR). Que le groupe écologiste propose de créer un nouvel équipement culturel m’étonne. Sur le fond, il va de soi que toutes les questions d’histoire doivent être traitées, mais elles peuvent l’être dans les musées de nos territoires.

La culture durable suppose de prendre en compte les frais d’investissement et les coûts non seulement budgétaires mais aussi en émissions carbone. Compte tenu, de surcroît, des besoins de médiation culturelle et d’accompagnement humain, il est plutôt nécessaire de renforcer les structures qui se trouvent dans les territoires, dans les quartiers, dans la ruralité, plutôt que créer de nouveaux équipements, dans les métropoles le plus souvent, ce qui suscite des mobilités et ne va pas dans le sens de ce que nous devrons faire demain pour la culture en France.

De nombreuses structures de nos territoires sont fragiles financièrement. Mieux vaut les accompagner. Je voterai contre l’amendement.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). S’il y a des lacunes comme celle-là, il faut créer de nouveaux équipements. Bien sûr, ils doivent s’intégrer à un maillage des initiatives qui visent à faire exister l’histoire de la colonisation et de ses retentissements toujours d’actualité dans notre société.

Mais il nous manque un musée consacré à ce sujet. La communauté universitaire en convient ; le rapport d’information sur l’émergence et l’évolution des différentes formes de racisme, cosigné par l’ancien député de la majorité Robin Reda, proposait d’en créer un. Par ailleurs, notre vision profondément écologiste de la culture ne nous amène pas à refuser la création des équipements qui s’avèrent nécessaires, ce qui est le cas.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC213 de Mme Caroline Parmentier

Mme Caroline Parmentier (RN). Cet amendement vise à appeler l’attention de Mme la ministre de la culture sur les dotations allouées à plusieurs musées français. Depuis plusieurs années, des communications insistent sur la valorisation économique dont ils peuvent faire l’objet – la ministre de la culture en a parlé lors de son audition – et qui permettrait de réduire leur dépendance financière envers l’État. Nous suggérons que la ministre présente son plan pour accentuer l’autonomie financière de plusieurs musées et fixer des objectifs précis et chiffrés.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur pour avis. Avis défavorable. N’étant pas ministre de la culture, je vous suggère, chère collègue, de poser à Mme la ministre une question orale ou écrite. Plus sérieusement, je propose dans mon rapport des pistes de développement des ressources propres des opérateurs en vue d’augmenter leur autonomie financière.

Par ailleurs, j’appelle votre attention – je ne vous prends pas en traître, car nous en avons parlé hier en commission – sur le fait que notre collègue Tanguy, qui est membre de votre groupe, a présenté en commission des finances un amendement, qui a été adopté, visant à interdire les bâches publicitaires recouvrant les monuments historiques pendant leur restauration. Or celles-ci sont une manne financière pour les opérateurs culturels. Si l’on veut accroître leur autonomie et développer leurs ressources propres, il ne faut pas, alors même que les budgets publics diminuent, empêcher la mobilisation de fonds privés. Je ne méconnais pas, cependant, les enjeux de pollution visuelle et de type d’affichage. J’aimerais que nous traitions cette question par une mission de la commission, madame la présidente.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Monsieur le rapporteur pour avis, je vous remercie de mettre en lumière les incohérences du Rassemblement national, en rappelant qu’il ne faut pas, si l’on veut assurer l’autonomie des établissements, s’en prendre aux bâches publicitaires. Vous n’en faites pas moins preuve d’une convergence de vues sur le dogme selon lequel les établissements, dans un cadre où le budget serait forcément contraint, doivent aller chercher des ressources propres en s’inscrivant dans des logiques de mécénat et de financement privé sur lesquelles nous devrions pourtant nous interroger s’agissant du service public de la culture.

Cette logique – également appliquée aux universités, entre autres – consistant à demander aux établissements, au nom d’une soi-disant autonomie, de trouver eux-mêmes leurs ressources, va-t-elle dans le sens de l’intérêt général ? Si ces établissements exercent une mission de service public relevant de l’intérêt général, s’ils nous appartiennent à toutes et tous, alors on ne doit pas leur dire en même temps qu’on ne leur donne pas les budgets nécessaires et qu’ils doivent se débrouiller pour trouver de la publicité et se financer. Je suis absolument opposée à cet amendement, qui est une nouvelle démonstration des convergences de vue idéologiques et économiques entre les macronistes et le Rassemblement national.

M. Jérémie Patrier-Leitus (HOR). Sans vouloir polémiquer, je pense avoir démontré, dans mon parcours politique et professionnel, mon attachement aux opérateurs publics. Il n’en reste pas moins que le mécénat permet, vous le savez très bien, d’élargir le périmètre des missions qui leur sont confiées. Le dispositif d’éducation musicale et orchestrale à vocation sociale (Démos), intégralement financé par des mécènes privés, permet ainsi de financer des orchestres à l’école. Si les groupes scolaires franciliens peuvent accéder au château de Versailles le lundi, c’est grâce au mécénat.

Les ressources des opérateurs publics sont composées à hauteur de 85 % de subventions pour charges de service public. Si les 15 % restants, obtenus grâce au mécénat, à la location d’espaces et aux ressources propres, permettent d’augmenter le périmètre de leurs missions, notamment d’élargir leurs publics, cela me semble de bonne politique. Il ne faut pas opposer ces deux modes de financement.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC44 de Mme Céline Hervieu

Mme Céline Hervieu (SOC). Il vise à corriger la baisse des subventions d’investissement. Contrairement à ce qu’a affirmé hier Mme la ministre, certaines diminuent significativement, notamment celles de la Cité de l’architecture et du patrimoine, du musée du quai Branly – contrairement à ce qui a été dit hier – et du château de Fontainebleau, ainsi que celle du musée et domaine du château de Versailles, à hauteur de près de 16 millions d’euros.

Ces établissements sont des lieux incontournables de notre patrimoine commun. Chacun, dans son domaine et à sa manière, concourt à l’émancipation grâce à un accès offert à tous à la connaissance des arts et de l’histoire. Nous proposons de maintenir les subventions d’investissement votées pour 2024.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur pour avis. Vous avez raison : nos opérateurs culturels, nos grands monuments, ont besoin d’investissements.

Toutefois, sur la forme, vous visez l’action 03 Patrimoine des musées de France alors que le château de Versailles relève de l’action 01 Monuments Historiques et patrimoine monumental.

Sur le fond, le programme Patrimoines inclut quatorze autres opérateurs que ceux que vous mentionnez, dont le besoin d’investissement n’est pas moindre. Pourquoi soutenir les uns et pas les autres ? Mme la ministre de la culture a dit hier devant nous qu’elle présentera une grande ambition pour le patrimoine lors de l’examen du budget de la culture dans l’hémicycle, en présentant un amendement abondant de façon substantielle les crédits de nos opérateurs afin de les aider à affronter le mur d’investissement qui les attend.

Demande de retrait ou avis défavorable.

L’amendement est retiré.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique sur le soutien aux collectivités pour l’entretien et la rénovation de leur patrimoine.

Amendement II-AC103 Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Je le disais, 23 % de nos monuments historiques sont en mauvais état, voire en péril. Ce sont les collectivités locales qui sont en première ligne pour les restaurer, et il faut leur apporter le soutien de l’État, compte tenu de la baisse drastique de leur capacité d’action – 5 milliards d’euros – proposée par le Gouvernement. Il y a fort à parier que le patrimoine en subira les conséquences. Cela doit nous appeler à la raison.

Le présent amendement vise donc à soutenir les collectivités locales. Étant donné que nous venons de voter un budget significatif pour le patrimoine et que je ne souhaite pas, comme M. Balanant, vider les enveloppes consacrées aux autres actions du ministère de la culture, je suis prête à le retirer. Mais nous devons être clairs : nous ne pouvons pas laisser les collectivités sur le bord du chemin. L’État doit être à leurs côtés s’agissant du patrimoine comme de tout autre service public local.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur pour avis. Vous avez raison. J’appelle votre attention et celle de nos collègues sur le fonds incitatif pour le patrimoine (FIP), auquel j’ai consacré la partie thématique de mon rapport. Ce fonds important est méconnu des élus locaux. Soyons-en des ambassadeurs auprès d’eux ! Il permet de financer l’entretien et la restauration des monuments historiques classés et inscrits des petites communes rurales de moins de 2 000 habitants sur le territoire métropolitain et de moins de 20 000 habitants dans les outre-mer. Il marche très bien.

Toutefois, le doublement du FIP, actuellement doté de 20 millions d’euros, ne pourrait pas être absorbé par les directions régionales des affaires culturelles (Drac), pour des raisons d’ingénierie et de ressources humaines. Je proposerai de l’augmenter par amendement de 10 %, soit 2 millions, ce qui en augmentera la capacité. Demande de retrait ou avis défavorable.

L’amendement est retiré.

Amendement II-AC60 de M. Raphaël Arnault

M. Raphaël Arnault (LFI-NFP). Nous proposons la création d’un fonds de 6 millions d’euros afin de soutenir les collectivités territoriales dans l’entretien et la valorisation du patrimoine local. Les communes sont les premières propriétaires de biens immobiliers culturels. En 2019, elles détenaient 41 % des monuments historiques protégés. Il s’agit en grande majorité de petites communes, souvent confrontées à des manques de moyens financiers pour entretenir leur patrimoine historique.

De plus, les Drac manquent de moyens humains pour accompagner les collectivités, notamment en matière d’ingénierie. Elles ont pourtant une mission de conseil et d’expertise scientifique et technique ainsi que d’assistance à maîtrise d’ouvrage. Ne laissons pas nos élus locaux observer la lente dégradation du patrimoine local, et agissons pour répondre en urgence aux difficultés rencontrées par les collectivités territoriales pour le sauvegarder.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur pour avis. Comme je l’ai rappelé, le FIP fonctionne très bien. Je proposerai de l’abonder par amendement de 2 millions d’euros supplémentaires. En créer un autre – nous aimons, en France, réinventer ce qui fonctionne – me semble inutile, voire contre-productif.

Par ailleurs, le financement et l’entretien du patrimoine non protégé ne figurent plus depuis 2004 dans le périmètre des responsabilités confiées à l’État par la loi. Ils incombent aux collectivités locales, qui en sont propriétaires. Les dispositifs d’aide dont elles peuvent bénéficier pour ce faire ne relèvent pas du programme Patrimoines.

Demande de retrait ou avis défavorable.

Mme Claudia Rouaux (SOC). Il y a six mois, j’ai demandé à chaque commune de ma circonscription de me transmettre des informations concernant les travaux entrepris dans les églises. L’argent manque partout. Quand le budget de la commune est de 300 000 euros et que la restauration de l’église et de ses vitraux du XIVe siècle est estimée à 1,4 million d’euros, comment fait-on ? Il serait bon que ces communes aient accès à des financements.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur pour avis. Je n’ai pas dit que les budgets prévus étaient suffisants ! Mais le fonds incitatif existe, et j’ai un amendement pour l’abonder davantage que ce qui est prévu. Concentrons nos efforts sur ce dispositif, qui mérite d’être élargi.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC167 de M. Jérémie Patrier-Leitus

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur pour avis. C’est l’amendement dont je parlais : il vise à augmenter de 2 millions d’euros le budget du FIP pour le porter à 22 millions d’euros, hausse qui, elle, peut être absorbée par les Drac.

Mme Claudia Rouaux (SOC). Dans ma seule circonscription, les besoins s’élèvent à 30 millions d’euros pour cinquante-huit communes.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC41 de M. Raphaël Arnault.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). L’archéologie préventive, sur laquelle Mme Dati a ironisé, est essentielle pour le patrimoine et la culture. Nous souhaitons soutenir les 62 collectivités habilitées à réaliser des diagnostics archéologiques, dont les coûts peuvent être élevés.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur pour avis. C’est là un enjeu important. L’augmentation que vous proposez, de 70 %, est toutefois excessive. En 2023, les montants ont déjà été revalorisés, à la suite notamment de demandes présentées par Départements de France.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC67 de M. Raphaël Arnault.

M. Raphaël Arnault (LFI-NFP). En l’absence de hausse de son budget, il sera impossible à l’Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap) de remplir correctement ses missions alors même que la ministre semble avoir placé la préservation du patrimoine au cœur des priorités du Gouvernement. La majorité de ses archéologues, embauchés au moment de sa création, il y a vingt ans, vont partir à la retraite. Pour lui permettre de procéder à de nouveaux recrutements, nous proposons d’augmenter de 5 millions d’euros sa subvention pour charges de service public.

Cet amendement avait été adopté l’an dernier, avant d’être balayé par le 49.3.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur pour avis. Je vous rejoins sur l’importance du rôle de l’Inrap, dont j’ai pu constater le remarquable travail sur le chantier de Notre-Dame de Paris. Toutefois, votre argument relatif au renouvellement des générations ne tient pas : l’établissement a engagé 300 archéologues en trois ans précisément pour cette raison et envisage même d’organiser de prochains recrutements. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons à une discussion thématique consacrée à la recherche de provenance.

Amendements II-AC163 de Mme Sophie Taillé-Polian, amendement II-AC224 de M. Christophe Marion, amendement II-AC161 et II-AC162 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Ces amendements visent à développer les missions d’identification au sein des collections publiques, d’une part, des biens culturels ayant fait l’objet d’une appropriation illicite avant 1970 et, d’autre part, des restes humains en vue d’une restitution aux États étrangers – amendements II-AC163 et II-AC161 – ou aux territoires ultramarins – amendement II-AC162 – en ayant fait la demande.

À la suite de la loi relative à la restitution des biens culturels ayant fait l’objet de spoliations dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945 et de celle relative à la restitution de restes humains appartenant aux collections publiques, et dans l’attente de la future loi relative à la restitution des biens spoliés pendant la période de la colonisation, notre groupe souhaite accompagner la dynamique des restitutions. Il convient notamment de renforcer les moyens pour l’identification, en particulier des restes humains présents en grand nombre dans nos collections.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur pour avis. Il importe de distinguer les recherches concernant les biens culturels de celles portant sur les restes humains.

Deux types de crédits soutiennent les premières : les crédits du fonds franco-allemand, doté de 300 000 euros ; les crédits généraux des opérateurs. Le musée du quai Branly a ainsi financé sur ses crédits les recherches ayant accompagné la restitution de vingt-six œuvres au Bénin. Le musée d’Orsay a annoncé récemment le déploiement sur quatre ans d’un plan de réparation des spoliations. Quant au ministère de la culture, il a recruté sur ses crédits une conservatrice qui se consacrera à ces questions. L’augmentation que vous demandez ne paraît donc pas fondée.

S’agissant des restes humains, une mission a été confiée par le Premier ministre à notre collègue Christophe Marion et je souhaiterais connaître ses conclusions avant de me prononcer sur les implications financières des restitutions.

Avis défavorable.

M. Christophe Marion (EPR). Mon amendement est similaire à ceux de Mme Taillé-Polian. Je ne manquerai pas de formuler des préconisations dans mon rapport que je remettrai le 15 décembre prochain.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur pour avis. Avis défavorable également.

La commission rejette l’amendement II-AC163.

Elle adopte l’amendement II-AC224 et rejette successivement les amendements II-AC161 et II-AC162.

Amendement II-AC215 de Mme Mereana Reid Arbelot

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Une proposition de loi a été déposée au Sénat au début du mois d’octobre 2024 afin que soient déclassés les restes humains kali’na et qu’ils soient restitués à la collectivité de Guyane à des fins funéraires. Cet amendement vise à créer un fonds destiné à la prise en charge des frais qui en découleront : frais de douane, transports, construction d’un monument funéraire et frais annexes.

Rappelons que ces dépouilles, aujourd’hui conservées au musée de l’Homme, sont celles de personnes appartenant au peuple kali’na, mortes en France hexagonale alors qu’elles étaient exhibées dans des zoos humains.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur pour avis. Je vous remercie de mettre en lumière ces opérations de restitution. Néanmoins, le musée de l’Homme relève non de la mission Culture mais de la mission Recherche et enseignement supérieur. Je suis donc contraint de donner un avis défavorable.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Cet amendement ayant été déclaré recevable, et notre rapporteur n’y semblant pas hostile, il me semble plus sûr de le voter dans le cadre de l’examen des crédits de cette mission, quitte à l’examiner à nouveau quand nous aborderons ceux de la mission Recherche et enseignement supérieur.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur pour avis. Sagesse.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC134 de M. Bruno Clavet.

M. Bruno Clavet (RN). Dans un contexte où chaque euro compte, il est de notre responsabilité de donner la priorité aux actions qui bénéficient directement à nos concitoyens. Cet amendement propose donc de réduire les crédits alloués aux actions culturelles internationales. Elles ont mobilisé plus de 10 millions d’euros en 2023, or leurs résultats en termes de rayonnement et d’influence de notre pays sont malheureusement invisibles pour les Français. Nos musées régionaux, comme le Louvre-Lens, sont insuffisamment soutenus alors qu’ils jouent un rôle central dans la valorisation de notre patrimoine et le développement économique local. Ils permettent à des milliers de Français, notamment en milieu rural, d’accéder à la culture. Le Louvre-Lens comme tant d’autres offre ainsi des expositions gratuites pour les jeunes, des ateliers pour les scolaires et des programmes pour des publics éloignés de la culture. Soutenons une culture de proximité qui profite directement à nos concitoyens les plus fragilisés.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur pour avis. Il ne faut pas opposer l’ambition de rayonnement international de notre politique culturelle à l’accès des habitants des territoires ruraux à la culture : ce sont deux dimensions que nos opérateurs culturels peuvent parfaitement allier. Ainsi le Centre Pompidou, dont j’ai été administrateur, a-t-il développé des antennes partout dans le monde mais aussi un musée mobile, le MuMo, camion qui circule dans tous les territoires.

En outre, l’exemple que vous avez choisi ne me paraît pas pertinent. Le Louvre-Lens est un établissement public de coopération culturelle dont le financement est entièrement assuré par la région, le département et la communauté d’agglomération.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Je salue, ironiquement, le premier amendement du Rassemblement national qui propose d’allouer des crédits au lieu d’en supprimer. Mais si on l’examine bien, on s’aperçoit qu’il vise à transférer des crédits destinés au rayonnement culturel de la France. Votre racisme et votre xénophobie vous poussent à penser que ces actions internationales nuisent aux Français car pour vous, c’est : « Les Français d’abord ! » Vous êtes ridicules !

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur pour avis. Pendant la rédaction de mon rapport, j’ai été attentif à la consommation des crédits : les musées territoriaux sont loin de les utiliser en totalité. J’aurais été prêt à soutenir votre amendement si un besoin financier existait mais comme ce n’est pas le cas, j’émettrai un avis de sagesse.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC37 de M. Frédéric Maillot.

Mme Soumya Bourouaha (GDR). L’amélioration de l’accès des personnes en situation de handicap à la culture est un objectif qui devrait tous nous réunir. En 2022, 52 % d’entre elles déclaraient éprouver des difficultés, ce qui est un véritable signal d’alarme.

Nous proposons d’abonder de 500 000 euros l’action Patrimoine des musées de France afin de développer la traduction en français facile à lire et à comprendre (Falc) des documents de présentation. Les plus petits établissements n’ont pas toujours les moyens de le faire.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur pour avis. Si le Louvre a pu créer dès 1995 une galerie tactile pour le public malvoyant et non-voyant, les établissements plus petits peinent à assurer cette accessibilité, qui constitue pourtant un enjeu majeur. Mon avis sera favorable mais je suggère que les sommes ainsi dégagées alimentent le fonds d’accessibilité des œuvres mis en place par le ministère de la culture en 2018. Sa dotation de 1 million d’euros lui permet de financer des achats de matériels et de signalétiques spécifiques.

Mme Graziella Melchior (EPR). L’enquête de 2022 que vous avez citée, madame Bourouaha, a montré que la perception de l’accès à la culture par les personnes en situation de handicap s’était nettement améliorée par rapport à l’enquête précédente, en 2017. Parmi les pistes d’amélioration, 40 % des personnes interrogées évoquaient en premier lieu l’accessibilité.

Les ministres de la culture successifs ont pris ce sujet à bras-le-corps et le nouveau plan Culture et ruralité allouera des fonds à la réhabilitation des musées ruraux. Nous faisons confiance à la ministre, raison pour laquelle nous nous abstiendrons même si nous sommes nous aussi déterminés à faire avancer les choses.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC193 de Mme Caroline Parmentier

Mme Caroline Parmentier (RN). Cet amendement d’appel invite la ministre de la culture à reconstituer la Maison de l’histoire de France, dissoute en 2012, en reprenant l’ambition de « rendre accessible à tous la connaissance de l’histoire de France en constituant dans ce domaine un pôle national de référence ».

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur pour avis. Je vous invite à interroger Mme la ministre à travers une question orale ou écrite. Précisons que cet établissement n’a jamais été créé car il y a été renoncé en raison de son coût de 80 millions d’euros. Avis défavorable.

M. Paul Vannier (LFI-NFP). Je suis choqué de lire dans l’exposé sommaire de votre amendement une citation du général de Gaulle, quand on sait le passé collaborationniste de l’extrême droite française et le plan élaboré par Jean-Marie Le Pen pour faire évader Bastien-Thiry après sa tentative d’assassinat du président de Gaulle.

Cet amendement est l’occasion de rappeler la tradition de violence dans laquelle s’ancre l’extrême droite et le danger qu’elle représente pour notre pays. Si une Maison de l’histoire de France voyait le jour, nul doute qu’elle consacrerait certaines de ses salles à la collaboration, aux origines politiques de l’extrême droite actuelle et aux menaces qu’elle a toujours fait peser sur la République et la démocratie.

La commission rejette l’amendement.

La commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Culture modifiés.

Avant l’article 60

Amendement II-AC40 de Mme Sarah Legrain.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Il s’agit de demander un rapport sur le plan Mieux produire, mieux diffuser. Il a été vanté comme permettant de faire face à la crise de la diffusion, laquelle renvoie en réalité à une crise plus large de la création. Ses effets sont peu connus mais d’après le peu d’éléments dont je dispose, une grande partie des fonds seraient allés à l’opéra – je n’ai évidemment rien contre l’opéra, mais il n’était pas la cible première. Il semblerait même qu’il tendrait à conforter des phénomènes de concentration, notamment dans le financement par les collectivités territoriales, alors que l’un de ses objectifs est la diversification et l’accompagnement des mutations dans les systèmes de production et de diffusion.

Il convient donc de l’évaluer en vue de déterminer ses dotations dans le budget de l’année prochaine.

M. Erwan Balanant, rapporteur pour avis. Cette évaluation est certes nécessaire mais n’oublions pas que ce plan a été lancé en 2024, année particulière marquée par les Jeux olympiques. Laissons-lui le temps de s’épanouir afin d’estimer quels bénéfices il apporte à toute la filière. Il importe de voir comment les acteurs vont se saisir de ces 9 millions d’euros supplémentaires pour s’organiser, créer et imaginer de nouvelles méthodes de production. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

 


Annexe
liste des personnes entendues par le rapporteur pour avis

(par ordre chronologique)

 

Ministère de la culture  Direction générale de la création artistique  M. Christopher Miles, directeur général, et Mme Carole Robin, adjointe à la sous-directrice des affaires financières et générales

Association pour le soutien du théâtre privé (ASTP)*  M. Pascal Guillaume, président, et Mme Anne-Claire Gourbier, déléguée générale

Centre national de la musique  M. Jean-Philippe Thiellay, président-directeur général, et M. Romain Laleix, directeur général délégué

Audition commune :

 Ekhoscènes*  Mme Malika Séguineau, directrice générale

 Fédération des compagnies, lieux intermédiaires et structures indépendantes du spectacle (FSICPA)  M. Yannis Jean, co-animateur, délégué général du syndicat des cirques et compagnies de création (SCC)

Table ronde des organismes de gestion collective :

 Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (Sacem)*  M. Blaise Mistler, directeur des relations institutionnelles

 Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD)*  M. Guillaume Prieur, directeur des affaires institutionnelles et européennes

 Société civile des auteurs multimédias (Scam)*  M. Vianney Baudeu, conseiller affaires institutionnelles et européennes

 Société civile pour l’administration des droits des artistes et musiciens interprètes (Adami)*  Mme Elizabeth Le Hot, directrice générale gérante

 Société de perception et de distribution des droits des artistes-interprètes (Spedidam)*  M. Jean-Paul Bazin, président, M. Guillaume Damerval, directeur général gérant, et M. Benoît Galopin, directeur des affaires juridiques et internationales

Syndicat des musiques actuelles (SMA)*  M. Stéphane Krasniewski, président du SMA et directeur du festival les Suds, M. Yann Rivoal, vice-président, directeur de la Smac la Vapeur, et Mme Aurélie Hannedouche, directrice

Syndicat national des auteurs-compositeurs (Snac)  Mme Maïa Bensimon, déléguée générale, M. Marc-Antoine Boidin, scénariste, dessinateur, coloriste de bande-dessinée, responsable du groupement Bande-dessinée, M. Joshua Darche, compositeur de musique, et Mme Tatiana Taburno, interprète de conférence et traductrice indépendante

Audition commune :

 Mobilier national  M. Hervé Lemoine, président, et M. Matéo Bouvier d’Yvoire, chef de cabinet du président

 Cité de la céramique Sèvres-Limoges  M. Hervé Lemoine, président du conseil d’administration, et Mme Valérie Tarrisse, directrice administrative et financière

Union syndicale des employeurs publics du spectacle vivant*  Mme Aurélie Foucher, déléguée générale du syndicat professionnel des producteurs, festivals, ensembles, diffuseurs indépendants de musique (Profedim), M. Sébastien Justine, directeur des Forces Musicales, et M. Vincent Moisselin, directeur du syndicat national des entreprises artistiques et culturelles (Syndeac)

Société Pass Culture  M. Sébastien Cavalier, président, et M. Maxence Daniel, responsable de la prospective et des relations avec les pouvoirs publics

La Scène Indépendante*  M. Fabrice Roux, président, président de HappyProd et directeur-gérant de L’Archipel Paris, M. Philippe Chapelon, délégué général, et Mme Chrystèle Jongenelen, responsable communication et relations extérieures

Ministère de la culture  Délégation générale à la transmission, aux territoires et à la démocratie culturelle  M. Noël Corbin, délégué général, M. Bertrand Munin, adjoint au délégué général et sous-directeur de la participation à la vie culturelle, Mme Caroline Lecourtois, sous-directrice des formations et de la recherche, et Mme Pascale Petit-Jean, cheffe du département des affaires générales

Table ronde des festivals :

 Avignon, festival et compagnies (AF&C)  M. Laurent Domingos, coprésident

 Les Filets bleus  Mme Marylène Colin et M. Bernard Piers, coprésidents, et Mme Christelle Clérembaux, assistante

 Les Vieilles Charrues  M. Jérôme Tréhorel, directeur

 We love green  Mme Marie Sabot, directrice

Table ronde du spectacle vivant public :

 Association des scènes nationales  Mme Fabienne Loir, secrétaire générale, et Mme Catherine Rossi-Batôt, directrice de LUX scène nationale de Valence

 Association des centres dramatiques nationaux (ACDN) – Mme Émilie Capliez, présidente, co-directrice de la Comédie de Colmar, M. Benoit Lambert, vice-président, directeur de la Comédie de Saint Etienne, et Mme Emmanuelle Queyroy, secrétaire générale

 Association des centres chorégraphiques nationaux (ACCN) –Mme Emmanuelle Boisanfray, coprésidente, administratrice du CCN – Ballet de l’Opéra national du Rhin, M. Lucien Ammar-Arino, coprésident, directeur délégué du CCN de Belfort, et M. Thomas Da Silva Antunes, secrétaire général

 Association des centres de développement chorégraphiques nationaux (A-CDCN)  Mme Sandra Neuveut, présidente, directrice de La Briqueterie – CDCN du Val-de-Marne, et M. Thomas Da Silva Antunes, secrétaire général

Association nationale des écoles supérieures d'art (Andéa)  Mme Ulrika Byttner, directrice de l’École supérieure d’art et design Le Havre-Rouen, coprésidente, et M. Cédric Loire, professeur à l’École supérieure d’art de Clermont Métropole, coprésident

       Contribution écrite :

 Ligue des auteurs professionnels – Mme Stéphanie Le Cam, directrice générale

 

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.

 

 

 

 

 

 

 


([1]) Le ministre de l’intérieur avait en effet annoncé fin 2022 qu’il serait nécessaire de reporter les festivals afin de mobiliser forces de l’ordre et équipes de sécurité pour l’organisation des Jeux.

([2]) Centre national de la musique et Département des études, de la prospective, des statistiques et de la documentation du ministère de culture, Bilan des festivals en 2024, octobre 2024.

([3]) Syndicat des musiques actuelles, Bilan de la saison 2024 des festivals du SMA, octobre 2024.

([4]) Prodiss et PMP Strategy, Analyse de l’évolution du prix des billets de concerts et de festivals, juin 2023.

([5]) Crédits inscrits dans le programme annuel de performances de la mission Culture pour 2025.

([6]) Cette cartographie est la dernière étude d’ampleur disponible recensant les festivals français. Les données collectées sont celles de 2019.

([7]) Les méthodologies employées sont différentes, le panel retenu pour le bilan réalisé par le CNM étant bien plus restreint, cumulant seulement 877 répondants et concentré uniquement sur les secteurs de la musique et de l’humour.

([8]) Igac, Mission référents festivals : quelques enseignements sur la situation des festivals, octobre 2020.

([9]) Ibid.

([10]) Le ministère de la culture ne dispose pas encore d’un bilan consolidé du soutien aux festivals en 2024.

([11]) Les festivals interrogés ont pu rencontrer plusieurs types de perturbation, les pourcentages ne sont donc pas cumulatifs.

([12]) Prodiss et PMP Strategy, op. cit.

([13]) CNM, Les festivals de musiques actuelles en France en 2022, 2023.

([14]) À l’occasion d’une table ronde, le rapporteur pour avis a pu rencontrer les organisateurs des festivals suivants : Festival off d’Avignon, Les filets bleus (Concarneau), les Vieilles charrues (Carhaix) et We love green (Paris).

([15]) Aurélien Djakouane et Emmanuel Négrier, Publics : sociologie, fréquentation, motivations, 2020.

([16]) Igac, op. cit.

([17]) Ce rapport a été rédigé avant le dépôt d’un amendement gouvernemental réduisant de 28 millions d’euros les crédits du programme 131 Création.

([18]) Les spectacles de variétés sont définis comme les tours de chant, concerts et spectacles de jazz, de rock, de musique électronique et de musique du monde, à l’exception de ceux relevant des musiques traditionnelles.

([19]) Articles L. 452-14 à L.452-27 du code des impositions sur les biens et les services.

([20]) Le plafond de la taxe perçue par l’ASTP a par ailleurs été abaissé de 9 millions à 8 millions d’euros par la loi de finances pour 2014.

([21]) Les évolutions des systèmes d’aides seront actées par décision des conseils d’administration des opérateurs.

([22]) Igac, Le système d’aide de l’Association pour le soutien du théâtre privé, janvier 2024.

([23]) Certaines plateformes attendraient la publication de la doctrine fiscale stabilisée au Bulletin officiel des finances publiques.

([24]) Article 220 sexdecies du code général des impôts.

([25]) Projet annuel de performances de la mission Culture pour 2025.

([26])  https://assnat.fr/uHB0UF

([27]) https://assnat.fr/7kKGTE

([28]) https://assnat.fr/JlYlrV