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N° 472

______

 

ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 23 octobre 2024.

 

 

AVIS

 

 

PRÉSENTÉ

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION SUR LE PROJET DE LOI de finances pour 2025,

 

 

TOME VIII

 

 

SPORT, JEUNESSE ET VIE ASSOCIATIVE

jeunesse et vie associative

 

 

Par Mme Florence HEROUIN-LÉAUTEY,

 

Députée.

 

 

——

 

 

 

Voir les numéros : 324, 468 (annexe n° 44).


 

 


SOMMAIRE

___

Pages

Introduction

Première partie  analyse des crédits du programme

I. Une diminution des crédits en faveur de la jeunesse qui traduit un manque d’ambition et une absence de cap

A. L’atonie des dispositifs de l’action 02

1. Un soutien insuffisant aux projets associatifs « Jeunesse et éducation populaire »

2. Une stagnation des crédits alloués aux « colos apprenantes »

3. La politique de développement du mentorat, poursuivie d’année en année, mériterait d’être mise en question

4. L’information jeunesse doit être repensée et renforcée

5. Les échanges internationaux : un levier qui devrait être davantage activé

B. Le service civique : une augmentation des crédits en trompe-l’œil

1. Un dispositif de jeunesse efficace

2. Le dispositif doit une grande partie de son succès à son ancrage local et à une co-construction avec le mouvement de l’éducation populaire

3. Le développement du service civique doit être privilégié par rapport à celui du service national universel

C. Le service national universel : coup d’arrêt conjoncturel ou virage décisif ?

1. Un dispositif ruineux, aux contours flous et aux objectifs incertains

2. Le SNU : engagement volontaire ou participation obligatoire ?

3. Un dispositif en perte de vitesse, confronté à des difficultés de conception et d’exécution qui paraissent insurmontables

D. Un renouveau et une réorganisation de la politique en faveur de la jeunesse sont nécessaires

1. Une politique par nature interministérielle, mais qui apparaît très éclatée et insuffisamment pilotée

2. L’évolution des périmètres ministériels est symptomatique du manque de continuité de l’action des pouvoirs publics

3. Un empilement de dispositifs imposés par le haut traduisant une approche erronée de la jeunesse et des mouvements d’éducation populaire

II. Un repli du soutien aux associations qui intervient au pire moment

A. Un tissu associatif actif et divers, confronté à des difficultés croissantes

1. Panorama du monde associatif

2. Les difficultés du monde associatif

B. Le soutien financier et logistique de l’État est réel mais insuffisant

1. Le financement du monde associatif et la formation des bénévoles à travers le FDVA

2. Une politique d’accompagnement des associations et de simplification qui monte en puissance mais reste perfectible

3. La loi du 15 avril 2024 : un petit pas pour le monde associatif qui devrait être suivi d’un plan beaucoup plus ambitieux

C. Les enjeux d’un nouvel élan donné au partenariat entre l’État, les collectivités territoriales et les associations

1. La suppression du contrat d’engagement républicain : un préalable au rétablissement de la confiance

2. Garantir le financement des associations pour leur donner les moyens d’agir et de s’épanouir

Seconde partie  Les séjours collectifs pour jeunes : défense et illustration de l’éducation populaire

I. L’éducation populaire : un puissant levier d’émancipation qui souffre d’une perte d’attractivité…

A. Un mouvement historiquement lié à la naissance de la République et à la lutte pour la démocratisation du savoir

1. Principes, champ d’action et histoire des mouvements d’éducation populaire

2. Un lien historique fort avec le ministère de l’Éducation nationale et les pouvoirs publics

B. Une perte de vitesse liée aux évolutions sociétales, à un manque de reconnaissance des pouvoirs publics et à la crise du secteur de l’animation

1. Un secteur particulièrement exposé aux difficultés du monde associatif

2. La crise du secteur de l’animation, un facteur aggravant

II. … mais qui est toujours porteur de sens et peut connaître un renouveau : l’exemple des séjours collectifs pour jeunes

A. L’émergence progressive de la culture du temps libre, des loisirs et des vacances

B. Face à la consommation touristique, les séjours collectifs de mineurs dans le cadre de l’éducation populaire offrent un modèle riche de sens mais sont confrontés à des difficultés majeures

1. Un projet humaniste et émancipateur

2. Une activité en crise en raison d’une multiplicité de facteurs

C. Les voies d’un renouveau des séjours collectifs de jeunes et des mouvements d’éducation populaire

1. Stimuler la culture du départ en se concentrant sur les premiers départs et en relançant les classes de découverte en partenariat avec les associations d’éducation populaire

2. Repenser et simplifier les dispositifs favorisant les départs en vacances

3. Engager une stratégie nationale fondée à la fois sur le soutien aux organismes sans but lucratif ayant un patrimoine et l’encouragement d’initiatives locales souples

Travaux de la commission

I. Audition du ministre

II. Examen des crédits

Annexe : liste des personnes entendues par la rapporteure pour avis

 


 —  1  —

 

   Introduction

En 2025, comme les années précédentes, la mission Sport, jeunesse et vie associative comprendra trois programmes budgétaires : le programme 219 Sport, le programme 163 Jeunesse et vie associative et le programme 350 Jeux olympiques et paralympiques 2024. Les crédits attribués à l’ensemble de la mission devraient diminuer, passant de 1,7 milliard d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 1,8 milliard d’euros en crédits de paiement (CP) dans le cadre de la loi de finances initiale (LFI) de 2024 à 1,63 milliard d’euros en AE et 1,58 milliard d’euros en CP selon le projet de loi de finances (PLF) pour 2025.

Le bureau de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, lors de sa réunion du 22 juillet 2024, a décidé de consacrer deux avis distincts à cette mission : l’un rassemblant les deux programmes liés au sport, l’autre se concentrant sur le programme Jeunesse et vie associative. Le présent rapport est ainsi consacré aux crédits et aux politiques relevant du programme 163.

Celui-ci finance, d’une part, le soutien de l’État aux associations à travers le fonds de développement de la vie associative (FDVA), le fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire (Fonjep) ainsi que le compte d’engagement citoyen (CEC), et, d’autre part, les politiques en faveur de la jeunesse, notamment le service civique, le service national universel (SNU), les « colos apprenantes », ou encore le dispositif « 1 jeune, 1 mentor ».

Les crédits d’ensemble du programme 163 devraient connaître une augmentation modeste en 2025, pour s’établir à 937 millions d’euros (AE=CP), soit une progression de 4 %. Il convient, toutefois, de mettre ce chiffre en regard du niveau de l’inflation, estimée à 1,8 % en 2025 ([1]). Par ailleurs, le montant global ne rend pas compte des dynamiques contrastées qui sont à l’œuvre entre les différentes actions composant le programme. Ainsi, la progression de l’enveloppe budgétaire, qui est de l’ordre de 36 millions d’euros en valeur absolue, est tirée pour l’essentiel par une hausse de 81 millions d’euros de la dotation du service civique, tandis que les crédits des trois autres actions diminuent. En outre, la revalorisation des crédits consacrés au service civique est en trompe-l’œil car elle vise seulement à reconstituer la trésorerie de l’Agence du service civique et maintenir l’objectif des années précédentes, à savoir permettre à 150 000 jeunes de mener une mission.

Par ailleurs, il est permis de s’interroger sur la sincérité du budget présenté par le Gouvernement. En effet, la réalité de l’exécution budgétaire compte tout autant, si ce n’est davantage, que les crédits inscrits en loi de finances initiale. Or le décret d’annulation de crédits du 21 février 2024 ([2]) a fortement affecté le budget de la jeunesse et de la vie associative : le programme 163 a vu ses crédits annulés à hauteur de 130 millions d’euros en AE et en CP. Cette diminution de fait de la dotation budgétaire équivaut presque à la totalité des actions en faveur de la jeunesse et de l’éducation populaire.

Pire encore, les prévisions pour les années 2026 et 2027 figurant dans le projet annuel de performances (PAP) laissent entrevoir une diminution des dotations : 910,5 millions d’euros (AE=CP) en 2026 et 911,8 millions d’euros en 2027. À cet égard, il importe de rappeler que le PAP annexé au projet de loi de finances pour 2024 retraçait une évolution tout autre : le programme 163 devait être abondé à hauteur de 955,7 millions d’euros (AE=CP) en 2025, et il était prévu qu’il franchisse la barre symbolique du milliard d’euros en 2026. De ce point de vue, le PLF pour 2025, dont les grandes lignes ont été dessinées par le précédent gouvernement, est bien plus qu’un budget relevant de la gestion des affaires courantes : il démontre clairement que, dans un contexte de rigueur budgétaire, la jeunesse n’est pas une priorité, et que le nouveau gouvernement a fait sienne cette orientation.

Pourtant, les défis auxquels est confrontée la jeunesse de notre pays sont nombreux : manque de formation, difficultés d’insertion sociale et professionnelle, mal-logement, précarité, santé mentale de plus en plus fragile, incapacité à se projeter dans un projet collectif, etc. Ce constat, largement partagé par les acteurs du secteur, que la rapporteure pour avis a souhaité entendre dans le cadre de ses travaux, appellerait une politique tout à la fois plus claire et plus ambitieuse. Que ce soit en matière d’éducation, d’accompagnement vers l’autonomie ou de construction de la citoyenneté, la jeunesse devrait primer toute autre considération et constituer la ligne directrice de toutes les politiques conduites. L’action en faveur de la jeunesse est par nature interministérielle, comme l’atteste le document de politique transversale (DPT) Politique en faveur de la jeunesse, opportunément rétabli cette année à la demande de M. Jean-Claude Raux ([3]). Toutefois, il manque un fil conducteur et une continuité dans la politique menée. Trop souvent, au cours des dernières années, la politique en direction de la jeunesse a consisté en un empilement de dispositifs insuffisamment coordonnés et sans vision d’ensemble. Or une somme de dispositifs ne constitue pas une politique publique.

L’atonie des crédits alloués aux dispositifs de l’action 02 Actions en faveur de la jeunesse et de l’éducation populaire dans le PLF 2025 est le signe d’un manque de cap et d’ambition dans ce domaine. Le service national universel (SNU), seul grand projet du Président de la République pour la jeunesse, a englouti des sommes considérables pour des effets très limités. Qui plus est, il repose sur une conception erronée de l’engagement et des attentes de la jeunesse. En 2025, pour la première fois depuis le début de l’expérimentation, les crédits qui lui sont consacrés devraient diminuer ; la rapporteure pour avis souhaite y voir le début d’un retour à la raison. Toutefois, les crédits ainsi économisés devraient être réinvestis dans d’autres dispositifs en faveur de la jeunesse, ce qui n’est pas le cas.

Le PLF pour 2025 marque également un recul de l’ambition en matière de soutien aux associations. En effet, compte tenu du niveau de l’inflation, la diminution de près de 4 % des crédits de l’action 01 constitue un signal clair : il ne faudra pas compter sur un soutien supplémentaire de l’État. Les besoins des associations sont pourtant nombreux. Il importe, en particulier, d’inverser la tendance consistant à recourir toujours plus à des appels à projets, au détriment des subventions finançant le fonctionnement des structures. Il faut, par ailleurs, renforcer les têtes de réseau, trop souvent perçues par les pouvoirs publics comme des structures superfétatoires, alors qu’elles sont porteuses de formation et de transmission.

Parmi les associations, celles qui relèvent du domaine de l’éducation populaire méritent une attention particulière. Elles apparaissent, à bien des égards, comme le parent pauvre des politiques de jeunesse. Au-delà des évolutions sociétales qui peuvent expliquer leur déclin, elles souffrent d’un manque de considération des pouvoirs publics, y compris de nombreuses collectivités territoriales, alors même qu’elles occupent toujours une place éminente dans la société, en particulier s’agissant de l’organisation des activités péri- et extrascolaires. Considérer les mouvements d’éducation populaire comme de simples prestataires, au service des projets dont la conception n’a fait l’objet d’aucune concertation, c’est appauvrir leur champ d’action et renoncer à la promesse républicaine pour chaque individu de s’élever, de s’extraire de l’assignation sociale, de développer un esprit critique et d’embrasser un champ de possibles.

La rapporteure pour avis affirme qu’aux côtés de l’école et des familles, ces associations historiquement complémentaires de l’enseignement public tiennent une place fondamentale dans la matérialisation de la nécessaire complémentarité éducative. L’éducation populaire, par la diversité de ses acteurs (associations, maisons des jeunes et de la culture, centres sociaux, etc.), contribue directement à l’émancipation individuelle et collective, ainsi qu’à la construction de la capacité de notre société à faire confiance aux jeunesses.

 

Convaincue que le mouvement de l’éducation populaire a encore un avenir et qu’il faut lui redonner du souffle, la rapporteure pour avis a souhaité consacrer à cette question la partie thématique de son rapport, en insistant particulièrement sur l’enjeu fondamental pour l’accès à l’autonomie des jeunes que constituent les séjours collectifs de mineurs : c’est l’un des domaines où l’apport des associations d’éducation populaire est le plus évident et crucial.

Compte tenu du fait que la répartition des crédits au sein du programme 163 n’est pas satisfaisante, sans oublier le gâchis financier qui se poursuit avec le SNU et les perspectives budgétaires défavorables pour les années à venir, la rapporteure pour avis émettra un avis défavorable à l’adoption des crédits du programme 163.

 

L’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances fixe au 10 octobre la date butoir pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires. À cette date, 100 % des réponses concernant le programme 163 étaient parvenues.

 

 

 


   Première partie – analyse des crédits du programme

Les crédits prévus en 2025 au titre du programme 163 Jeunesse et vie associative atteindraient 937 millions d’euros (AE=CP), soit une progression de 4 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2024. L’évolution depuis 2020 des crédits du programme et des actions qui le composent est retracée dans le tableau ci-dessous.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DU PROGRAMME 163
jEUnesse et vie associative depuis 2020

(en millions d’euros)

 

 

LFI

2020

LFI

2021

LFI

2022

LFI

2023

LFI

2024

PLF 2025

Action 01  Développement de la vie associative

AE

53,78

55,08

58,99

52,68

57,88

55,59

CP

53,78

55,08

58,99

52,68

57,88

55,59

Action 02  Actions en faveur de la jeunesse et de l’éducation populaire

AE

71,30

77,10

104,24

125,54

164,34

153,47

CP

71,30

77,10

104,24

125,54

164,34

153,47

Action 04  Développement du service civique

AE

505,30

498,80

498,80

518,8

518,8

599,96

CP

505,30

498,80

498,80

518,8

518,8

599,96

Action 06  service national universel

AE

29,83

62,26

110,05

140,05

160,05

128,29

CP

29,83

62,26

110,05

140,05

160,05

128,29

TOTAL

AE

660,21

693,23

772,08

837,07

901,07

937,30

CP

660,21

692,23

772,08

837,07

901,07

937,30

Sources : lois de finances initiales 2020 à 2024 et projet annuel de performances annexé au PLF pour 2025

En valeur absolue, l’enveloppe progresse de 36 millions d’euros. Il convient, pour analyser convenablement les dynamiques internes du programme, de tenir compte du fait que la hausse est due, pour l’essentiel, à une augmentation de la dotation du service civique : 81 millions d’euros, d’ailleurs destinés à reconstituer une trésorerie mise à mal au cours des dernières années – et cette année encore – du fait de l’annulation de crédits intervenue le 21 février 2024. Les crédits des trois autres actions diminuent, à commencer par l’enveloppe du SNU (– 32 millions d’euros).

Compte tenu de la nécessité de renforcer aussi bien le soutien aux associations que la politique menée en faveur de la jeunesse, la rapporteure pour avis ne saurait se satisfaire de la dotation proposée. Les perspectives pour les années 2026 et 2027 sont même très préoccupantes, puisque le PAP indique clairement une diminution : 910,5 millions d’euros en AE et CP en 2026 et 911,8 millions d’euros en 2027. Comme indiqué précédemment, le « bleu budgétaire » de l’année précédente prévoyait de dépasser le milliard d’euros en 2027.

En dépit de l’augmentation globale qui est affichée, ce projet de budget traduit un manque d’ambition, ce que confirme l’analyse détaillée des actions. Dans la mesure où la politique de jeunesse devrait constituer l’axe essentiel du programme 163, la rapporteure pour avis a décidé tout naturellement de commencer l’analyse de détail par les dispositifs de l’action 02.

I.   Une diminution des crédits en faveur de la jeunesse qui traduit un manque d’ambition et une absence de cap

A.   L’atonie des dispositifs de l’action 02

1.   Un soutien insuffisant aux projets associatifs « Jeunesse et éducation populaire »

Le fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire (Fonjep) constitue le moteur essentiel du soutien aux projets associatif labellisés « Jeunesse et éducation populaire ». Le Fonjep est un instrument partenarial assurant le versement de subventions d’appui au secteur associatif, dites « postes Fonjep ». Ces subventions sont destinées à la rémunération d’un personnel qualifié chargé prioritairement de la mise en œuvre de l’action associative ou de l’animation du projet associatif.

Le montant de la subvention annuelle pour un « poste » s’élève à 7 164 euros ; elle est attribuée pour une durée de trois ans. Seules les associations agréées « jeunesse et éducation populaire » (JEP) peuvent en bénéficier. Il convient toutefois de préciser que la direction de la jeunesse et de la vie associative (Djepva) n’est pas la seule à participer au mécanisme du Fonjep : la direction générale de la cohésion sociale (DGCS), la direction générale des collectivités locales (DGCL) et l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), le ministère de la culture et l’Agence française de développement (AFD) sont également parties prenantes au mécanisme. Au total, en 2023, 9 078 postes ont été subventionnés, pour 5 562 associations bénéficiaires ([4]).

Le Fonjep est né en 1964 d’une volonté commune des associations et des services de l’État d’accompagner la professionnalisation du secteur de la jeunesse et de l’éducation populaire. Il se situe à l’interface entre les associations et l’État : c’est lui qui verse les subventions, pour le compte de la Djepva – en ce qui concerne les postes labellisés JEP –, aux associations bénéficiaires. Afin de cerner au plus près les besoins locaux, la gestion du Fonjep est délocalisée : les services déconcentrés pilotent 85 % des postes, tandis que l’administration centrale gère les 15 % restants.

 

La loi de finances initiale pour 2024 consacrait 54,52 millions d’euros aux projets associatifs labellisés JEP. Ce chiffre incluait 7,2 millions au titre des 2 000 postes dits « Fonjep jeunes », créés en 2021 dans le cadre du plan de relance. Initialement financés sur le programme 364 Cohésion de la mission Plan de relance, ils ont été inscrits au programme 163 à partir de 2023. La diminution de cette ligne budgétaire prévue pour l’année 2025 correspond exactement à la fin des 2 000 postes « Fonjep jeunes ».

Comme l’a souligné M. Patrick Chenu, président du Fonjep, lors de son audition, les emplois financés à travers cette subvention représentent une véritable valeur ajoutée pour les associations, en particulier les plus petites. Ainsi, en 2022, 72 % des associations bénéficiaires étaient strictement locales et 68 % comptaient moins de 10 salariés. Le profil des titulaires des postes traduit également la montée en compétences que permettent ces subventions pour les associations employeuses : selon le baromètre des postes Fonjep établi en 2023, les salariés étaient à 65 % des femmes, dont 53 % étaient titulaires d’un diplôme du 2e ou du 3e cycles universitaires et en poste depuis trois ans. Ces salariés exerçaient à plus de 60 % des fonctions d’encadrement ([5]).

Compte tenu de l’importance de ces postes pour les associations, la rapporteure pour avis recommande :

– de poursuivre le programme de « Fonjep jeunes » en finançant 6 000 nouveaux postes pour prendre le relais des contrats qui se sont achevés en 2024 ;

– de porter à 10 000 euros par an la subvention annuelle versée pour chaque poste, comme le demandent de manière unanime les acteurs du secteur.

La rapporteure pour avis défendra des amendements dans ce sens lors du débat en commission puis, le cas échéant, en séance publique.

Outre les crédits du Fonjep, le soutien aux associations d’éducation populaire passe par une série de subventions accordées dans le cadre de politiques partenariales locales : 9,944 millions d’euros seraient inscrits sur cette ligne en 2025, soit un montant identique à celui de la loi de finances initiale pour 2024. Compte tenu du niveau de l’inflation, l’absence de toute revalorisation se traduira nécessairement par une fragilisation des associations d’éducation populaire, lesquelles sont déjà très mal loties.

2.   Une stagnation des crédits alloués aux « colos apprenantes »

Institué en 2020 dans le contexte de la crise du covid-19, le dispositif des « colos apprenantes » était financé jusqu’en 2023 par redéploiement de crédits non employés du programme 163. Le PLF 2024 a consacré le dispositif en prévoyant clairement une ligne destinée à le financer. En 2025, la dotation devrait être reconduite à l’identique : 40 millions d’euros (AE=CP).

Lors des auditions qu’elle a conduites, la rapporteure pour avis a pu mesurer à quel point l’intitulé lui-même du dispositif était irritant pour les associations d’éducation populaire. De fait, toute colonie de vacances est occasion d’apprentissage, que ce soit à travers les activités proposées ou les compétences psychosociales qu’elle permet d’acquérir. La rapporteure pour avis ne saurait donc trop recommander de modifier à terme le nom du dispositif (qui ne pouvait avoir de sens qu’au sortir des épisodes de confinement) pour éviter de braquer les acteurs d’un secteur déjà fragilisé et souffrant d’un manque de reconnaissance. Surtout, il convient de ne pas donner l’impression, a contrario, que les colonies de vacances ne bénéficiant pas du label sont dépourvues de toute valeur éducative.

Le dispositif, élaboré dans l’urgence en pleine crise sanitaire, avait surtout pour objet, la première année, de compenser durant les vacances la perte de substance éducative intervenue au cours de l’année scolaire du fait du covid-19. Les « colos apprenantes » s’inscrivaient d’ailleurs dans le cadre du programme des « vacances apprenantes », financées pour l’essentiel par la mission Enseignement scolaire – programme 230 Vie de l’élève – et qui comprennent aussi le dispositif « école ouverte », consistant dans des activités culturelles ou sportives proposées notamment pendant les vacances, et les « stages de réussite », dont l’objectif est de consolider les savoirs fondamentaux ([6]). Depuis lors, cette dimension scolaire des « colos apprenantes » a disparu, mais le cahier des charges que les organisateurs doivent respecter insiste sur le fait que les séjours « s’inscrivent dans un projet et un contenu pédagogique précis » ([7]).

 

En 2024, la labellisation a été conditionnée à des critères plus précis, notamment liés au développement de compétences psychosociales, de la culture générale et de la construction du jeune citoyen. Elles doivent être fondées, en rapport avec le socle commun de connaissances, de compétences et de culture, sur des séances de renforcement des apprentissages parmi les domaines suivants : le développement durable et la transition écologique ; les activités physiques et sportives, notamment les sports de nature ; la science, l’innovation, le numérique ; la découverte ou l’approfondissement de langues étrangères ; la citoyenneté et la vie civique ; l’alimentation et la santé ; les arts de la musique ; les arts du livre et de la lecture ; les arts plastiques ; les arts de la scène ; les arts audiovisuels ; les médias, l’information et la communication. Un domaine parmi ces différentes thématiques est choisi comme dominante pédagogique du séjour, étant entendu que, cette année, une priorité était donnée aux séjours prévoyant des activités en rapport avec les Jeux olympiques et paralympiques. Une attention particulière est également apportée aux enjeux de lutte contre les discriminations et de citoyenneté. De même, la recherche de mixité de genre est renforcée.

Les associations organisatrices de séjours et détentrices du label – ou les collectivités, car certaines se chargent de présenter le dossier – avancent les frais d’inscription et se font rembourser ensuite par l’État, sur la base d’un montant maximal de 100 euros par nuitée, à raison de quatre à huit nuitées. Chaque enfant peut bénéficier de l’aide une fois par an.

Sont éligibles à cette aide les mineurs en situation de handicap, ou relevant de l’aide sociale à l’enfance (ASE), ou domiciliés soit dans un quartier prioritaire de la politique de la ville (QPV) soit dans une zone de revitalisation rurale (ZRR). Les mineurs n’appartenant à aucune de ces catégories mais dont le quotient familial, au sens de la Caisse nationale d’allocations familiales (Cnaf), est inférieur ou égal à 1 500 euros – contre 1 200 euros jusqu’en 2023 – en bénéficient également : ce faisant, les enfants issus de foyers au niveau de vie modeste sont inclus dans le dispositif, ce qui permet, au moins en théorie, de favoriser la mixité sociale. À cet égard, il est possible pour les personnes ne remplissant pas les critères d’inscrire librement leur enfant dans une « colo apprenante » et de procéder au paiement directement auprès de l’organisateur. Enfin, les familles n’ayant pas la possibilité de faire inscrire leurs enfants localement peuvent recourir à une plateforme gérée par la confédération de la Jeunesse au plein air (JPA), partenaire depuis 2020 du ministère chargé de la jeunesse.

Les publics cibles du dispositif sont identiques aux années précédentes, à l’exception des décrocheurs scolaires, qui ne sont plus visés explicitement. Si la rapporteure pour avis partage l’objectif consistant à décorréler les colonies de vacances de toute visée scolaire, il n’en demeure pas moins qu’il importe de favoriser l’entrée des élèves décrocheurs dans le champ de l’éducation populaire, et que les colonies de vacances peuvent être un point d’accroche.

En quatre ans, le dispositif a déjà bénéficié à environ 300 000 jeunes, dont 80 000 en 2023. La rapporteure pour avis se réjouit que ce mécanisme contribue à réhabiliter les colonies de vacances. Cela témoigne du fait qu’il existe toujours un public pour de telles initiatives et qu’il est possible, pour peu que la volonté politique existe, de redonner du souffle aux séjours collectifs de mineurs. Pour autant – et ce sera l’un des objets de la partie thématique du rapport –, elle tient à souligner que les relations entre l’État, les collectivités territoriales et les associations d’éducation populaire doivent être repensées en profondeur, afin de sortir de la logique par dispositif qu’illustrent les colos apprenantes, qui transforme les associations en prestataires de services et les force à s’adapter à des projets qui ne correspondent pas forcément à leur vocation propre.

Par ailleurs, la rapporteure pour avis ne peut que regretter le manque de lisibilité induit par la création, dans le cadre de la loi de finances pour 2024, du pass’colo. Ce nouveau dispositif, destiné exclusivement aux enfants de 11 ans, relève de l’action 23 du programme 304 Inclusion sociale et protection des personnes de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances, et est géré par les caisses d’allocations familiales. Doté de 10 millions d’euros en 2024, il devrait se voir attribuer 11,5 millions d’euros en 2025. Si l’intention n’est pas mauvaise, bien entendu, car tout ce qui permet de renforcer les colonies de vacances va dans le bon sens, ce mécanisme est source de confusion pour les familles et de complexité pour les associations et les collectivités – car la subvention des « colos apprenantes » peut compléter l’aide du pass’colo pour réduire le reste à charge. En outre, la publication très tardive du décret permettant de mettre en œuvre le dispositif et la communication insuffisante autour de celui-ci n’ont pas permis d’en tirer le meilleur parti. Plutôt que d’empiler sans cesse les dispositifs, la politique menée dans ce domaine gagnerait à être simplifiée et rendue plus cohérente. La rapporteure pour avis recommande donc de modifier les dispositifs de manière à les regrouper et à concentrer la politique des colonies de vacances sur le programme 163.

3.   La politique de développement du mentorat, poursuivie d’année en année, mériterait d’être mise en question

Le plan « 1 jeune, 1 solution », créé en 2020 dans le contexte de la crise sanitaire, prend la forme de diverses mesures d’accompagnement, d’aides à l’embauche, de formations ou d’aides financières directes pour les plus précaires. L’une des composantes importantes de ce plan est le dispositif « 1 jeune, 1 mentor », qui permet à 160 000 jeunes environ de bénéficier d’un accompagnement. L’objectif pour les années 2024 et 2025 est d’élargir le mentorat aux élèves des lycées professionnels. En 2025, la ligne consacrée au mentorat devrait être maintenue au même niveau que cette année, soit 32 millions d’euros. Ces crédits permettent de couvrir environ 40 % des ressources nécessaires aux programmes de mentorat, selon l’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire (Injep) ([8]). Les cofinancements proviennent du financement des entreprises ou des fonds propres des associations.

Selon les objectifs qui lui ont été assignés, le mentorat vise à accompagner les jeunes vers l’autonomie en leur proposant des programmes adaptés à leurs besoins : aide à l’insertion sociale et professionnelle, à l’orientation scolaire et universitaire, à la création d’entreprise, soutien scolaire, etc. Les jeunes en situation de fragilité sont principalement visés par ce plan : jeunes de l’ASE, jeunes réfugiés, jeunes en situation de handicap, jeunes aux origines économiques ou sociales modestes et jeunes issus de QPV ou de ZRR.

Une évaluation du dispositif est conduite par l’Injep. Un premier rapport, publié en avril 2024 ([9]), tout en faisant état des résultats globalement positifs du mentorat, souligne plusieurs points de vigilance. En particulier, le dispositif n’est pas encore assez connu et utilisé. Par ailleurs, le taux de ruptures anticipées de la relation de mentorat semble important du fait d’un mauvais appariement ainsi que d’une identification erronée des besoins et des attentes. L’Injep insiste également sur la nécessité de mieux former les mentors et de vérifier les antécédents de ces derniers pour éviter d’exposer les jeunes à des risques de violences sexistes et sexuelles. Le rapport final de l’Injep devrait être présenté au début de l’année 2025. La rapporteure pour avis espère que les résultats de cette évaluation permettront de mesurer précisément la plus-value apportée par le mentorat. Pour sa part, elle considère que la valeur sociale ajoutée de plan est très faible et que les crédits qu’il absorbe devraient être affectés à de véritables actions d’insertion et d’information des jeunes, en particulier à travers le réseau Info Jeunes.

4.   L’information jeunesse doit être repensée et renforcée

L’accès aux droits, aux formations et aux loisirs est un élément déterminant dans le parcours des jeunes, particulièrement pour ceux dont les parents n’ont pu leur fournir les clés et les codes nécessaires pour s’intégrer car ils n’en disposaient pas eux-mêmes. Selon le PAP pour 2025, plus de 5 millions de jeunes âgés de 11 à 30 ans demandent chaque année de l’information auprès des structures labellisées « information jeunesse » et 10 millions se connectent sur leurs sites. En 2025, les moyens consacrés à cette politique devraient s’élever à 7 millions d’euros. La rapporteure pour avis considère qu’une mission aussi essentielle devrait bénéficier de dotations supplémentaires, en particulier pour assurer la couverture de l’ensemble du territoire. Une redistribution des ressources très importantes consacrées au mentorat permettrait d’y parvenir.

Le ministère de la jeunesse et de la vie associative s’appuie principalement, au niveau national, sur le Centre d’information et de documentation jeunesse (CIDJ), qui élabore l’information de niveau national diffusée dans l’ensemble du réseau et constitue une base de données documentaire. En 2025, le CIDJ devrait bénéficier d’une subvention de 2,9 millions d’euros. Info Jeunes France, tête de réseau œuvrant dans le domaine, est également un acteur clé du système.

Le réseau Information Jeunesse (IJ) compte environ 1 000 structures régionales et infrarégionales, principalement financées par les collectivités territoriales, qui assurent une couverture presque complète du territoire.

Chaque région compte un centre régional d’information jeunesse (Crij), cofinancé par l’État et les régions, ainsi que certains partenaires privés. Les Crij accueillent les jeunes, produisent des documents à caractère régional et assurent l’animation du réseau IJ dans l’ensemble de la région.

Les relais Info Jeunes, développés sous forme d’expérimentation depuis l’année 2022, ont pour objectif de désenclaver les territoires les plus isolés. Installés au sein de structures préexistantes (bibliothèques, espaces France services), les permanents des relais ont pour rôle de fournir aux jeunes une toute première information, de les orienter vers la documentation mise à disposition par le Crij ou de faciliter un rendez-vous avec la structure labélisée la plus proche. En 2024, l’expérimentation a été étendue à trois nouvelles régions, pour un coût de 800 000 euros. En 2025, 300 000 euros seront consacrés à cette expérimentation. Plutôt que de développer ce palliatif, l’État devrait développer une politique plus ambitieuse, plus simple et cohérente. L’architecture des structures d’information jeunesse gagnerait sans doute à être simplifiée : il convient d’aller au bout de la logique du label « information jeunesse », de manière à proposer partout et à tous les jeunes un interlocuteur facilement identifiable. Cela suppose de coordonner davantage l’action des différents acteurs et niveaux de collectivité.

5.   Les échanges internationaux : un levier qui devrait être davantage activé

Les mécanismes favorisant la mobilité des jeunes sont extrêmement vertueux. La découverte d’autres cultures permet d’aider les jeunes à gagner leur autonomie tout en donnant corps à l’idée de solidarité. Au demeurant, comme l’écrivit Jean Jaurès, « un peu d’internationalisme éloigne de la patrie ; beaucoup d’internationalisme y ramène ».

Au titre de l’année 2025, 18,8 millions d’euros devraient être inscrits pour ces programmes d’échange au sein de l’action 02, en baisse par rapport à la loi de finances pour 2024, qui prévoyait 19,4 millions d’euros.

L’essentiel de cette enveloppe est destiné à l’Office franco-allemand pour la jeunesse (Ofaj), à hauteur de 16,13 millions d’euros. Créé en 1963, l’Ofaj, organisation internationale autonome, a permis à près de 9,5 millions de jeunes de participer à plus de 382 000 programmes d’échanges. Chaque année, l’office soutient environ 8 000 échanges auxquels participent 190 000 jeunes. En 2020, à la suite du traité d’Aix-la-Chapelle du 22 janvier 2019 entre la France et l’Allemagne, l’Ofaj s’est vu confier la gestion du Fonds citoyen franco-allemand, pour une durée de trois ans, renouvelée en 2023 pour une durée identique. La contribution française, qui s’élève à 2,5 millions d’euros, est incluse dans le montant versé à l’Ofaj. Ce fonds vise à soutenir les initiatives citoyennes bénévoles, les associations ou encore les jumelages.

La contribution de la France aux actions de l’Office franco-québécois pour la jeunesse représente le deuxième poste budgétaire de cette ligne, soit 2,2 millions d’euros.

Bien qu’elle ne soit financée que de façon marginale par le programme 163, du fait de l’origine externe des fonds, la coopération européenne est la composante principale du programme d’échanges internationaux de la France en matière de jeunesse. Cette coopération repose sur le programme européen Erasmus +, dont les objectifs sont de permettre aux citoyens d’acquérir les compétences et la créativité dont ils ont besoin et de s’adapter aux nouvelles méthodes d’enseignement et d’apprentissage. Les projets insistent également sur l’inclusion sociale, les transitions écologique et numérique et la promotion de la participation des jeunes à la vie démocratique. Pour la période 2021-2027, et pour l’ensemble des pays participants, le programme est doté de 26,2 milliards d’euros.

La France est le pays qui envoie le plus de jeunes à l’étranger dans le cadre de ce programme : 136 000 mobilités ont été financées par ce moyen en 2022.

La gestion et l’animation du programme sont confiées à deux agences :

– l’Agence Erasmus + France Éducation & Formation, spécialisée dans les domaines scolaire, universitaire, de l’apprentissage et de la formation professionnelle ;

– l’Agence Erasmus + Jeunesse & Sport, qui est intégrée à l’Agence du service civique, spécialisée dans l’éducation non formelle. Elle permet aux jeunes et aux acteurs des domaines du sport et de la jeunesse de faire l’expérience d’une mobilité, tout en développant des compétences personnelles et professionnelles.

Tout en soulignant la pertinence de ces politiques, la rapporteure pour avis appelle à leur développement et à leur renforcement, ce que ne permet pas la reconduction à l’identique de la dotation budgétaire.

B.   Le service civique : une augmentation des crédits en trompe-l’œil

Contrairement à ceux des autres dispositifs du programme 163, les crédits alloués au service civique, inscrits à l’action 04, devraient connaître une forte augmentation en 2025 : 81 millions d’euros supplémentaires, soit une hausse de 15,64 % (AE=CP). L’Agence du service civique recevra ainsi 599,96 millions d’euros (AE=CP). La rapporteure pour avis tient toutefois à alerter quant au fait que ce surcroît de dotations ne permettra pas de développer l’activité de l’Agence du service civique : comme l’a expliqué la présidente de l’Agence lors de son audition, cette somme a simplement pour objectif de reconstituer une trésorerie mise à mal durant les précédents exercices et récemment encore, puisque, dans le champ du programme 163, l’Agence du service civique a été la principale victime du décret d’annulation de crédits de février 2024 – à hauteur de 71,8 millions d’euros au-delà de la réserve de précaution initiale ([10]). Comme l’explique la Djepva dans l’une de ses réponses au questionnaire budgétaire, « jusqu’en 2024, une partie importante des indemnités des engagés était […] financée par un reliquat de trésorerie, désormais apuré ». En termes plus directs, la caisse de l’Agence a été utilisée progressivement ces dernières années pour maintenir l’activité en dépit de dotations insuffisantes.

1.   Un dispositif de jeunesse efficace

Le service civique est une politique publique dont l’intérêt est largement reconnu par les acteurs du secteur de la jeunesse et par les volontaires qui en ont bénéficié. Créé par la loi n° 2010-241 du 10 mars 2010, il « a pour objet de renforcer la cohésion nationale et la mixité sociale et offre à toute personne volontaire l’opportunité de servir les valeurs de la République et de s’engager en faveur d’un projet collectif en effectuant une mission d’intérêt général auprès d’une personne morale agréée » ([11]). En d’autres termes, il favorise l’insertion des jeunes à travers leur engagement, tout en leur permettant de développer leurs compétences. Il a vocation à faire émerger une génération de citoyens engagés souhaitant consacrer du temps au service de la collectivité à travers une expérience reconnue et valorisée dans leur parcours.

Les missions sont ouvertes aux jeunes âgés de 16 à 25 ans, et même 30 ans pour ceux qui sont en situation de handicap. Elles sont menées pendant six à douze mois auprès d’organismes à but non lucratif ou d’une personne morale de droit public agréés par l’Agence du service civique ou ses délégués territoriaux. La durée moyenne des missions est de huit mois. Les volontaires perçoivent une indemnité prise en charge par l’État dont le montant est fixé par décret. Cette indemnité nette mensuelle est fixée à 504,98 euros. Elle peut être majorée sur critères sociaux, à hauteur de 114,95 euros. Les volontaires perçoivent également une prestation de subsistance, d’équipement et de transport, versée en nature ou en espèces par l’organisme d’accueil, qui s’élève à 114,85 euros. La rapporteure pour avis considère que l’indemnité devrait être revalorisée, compte tenu de son niveau relativement faible.

En 2025, comme les deux années précédentes, l’objectif fixé est d’accueillir 150 000 jeunes. Le nombre de jeunes concernés était de 145 077 en 2021 et un peu plus de 130 000 en 2020. Après des débuts modestes, le service civique a connu une forte montée en puissance durant le quinquennat de François Hollande, comme le montre l’évolution retracée ci-dessous.

évolution du nombre de volontaires en service civique
entre 2012 et 2023

Source : Agence du service civique, rapport d’activité 2023

L’âge moyen des volontaires est de 21 ans. Près des deux tiers n’étaient pas étudiants au moment de leur entrée en service civique : 35 % étaient demandeurs d’emploi et 29 % inactifs. En outre, 22 % sont en situation de décrochage scolaire. À cet égard, les résultats d’un passage par le service civique sont extrêmement positifs : 70 % des volontaires qui étaient en difficulté dans leur parcours d’études « raccrochent » à l’issue de leur mission. Plus de 80 % des jeunes sortant du service civique sont insérés ([12]).

La satisfaction des participants témoigne de l’intérêt que les jeunes trouvent dans les missions effectuées : 87 % des volontaires sont satisfaits de l’expérience à l’issue de leur mission, dont 58 % sont très satisfaits, et cette proportion ne faiblit pas dans le temps : douze mois après, le taux de satisfaction est toujours de 85 %. Les jeunes au contact quotidien du public se montrent davantage satisfaits : 63 % sont très satisfaits.

Les effets positifs du service civique sur le parcours des jeunes, leur engagement et leur implication dans la vie démocratique sont également spectaculaires : à l’issue de leur mission, 55 % déclarent souhaiter poursuivre une forme d’engagement. Au bout d’un an, 60 % des volontaires considèrent que le service civique a contribué à leur orientation. Près des trois quarts déclarent utiliser au quotidien les compétences acquises au cours de leur mission. Par ailleurs, 44 % des volontaires ayant un niveau inférieur au bac et 38 % de ceux ayant le niveau bac déclarent que le service civique a eu un impact positif sur leur intention de voter.

2.   Le dispositif doit une grande partie de son succès à son ancrage local et à une co-construction avec le mouvement de l’éducation populaire

L’Agence du service civique possède de nombreux relais locaux : les préfets de région sont les délégués territoriaux de l’agence et, au sein des délégations régionales académiques à la jeunesse, à l’engagement et aux sports (Drajes) et des services départementaux à la jeunesse, à l’engagement et aux sports (SDJES), des référents sont chargés du développement et du suivi du service civique. Le rôle de ces référents est de faire converger offre et demande de missions sur leur territoire. Premiers interlocuteurs des structures souhaitant accueillir des jeunes en service civique au niveau local, ils accompagnent les porteurs de projet dans la définition des missions et dans la demande d’agrément. Ils instruisent les demandes d’agrément correspondant à leur échelle géographique et mènent des contrôles dans les organismes agréés afin de vérifier que les obligations sont bien respectées et que les missions s’effectuent dans les meilleures conditions.

Par ailleurs, dès le départ, le dispositif a été conçu en partenariat avec le mouvement de l’éducation populaire. Comme l’a souligné Nadia Bellaoui, présidente de l’Agence, lors de son audition, les associations d’éducation populaire constituaient même une sorte d’« administration du service civique » avant que ne soit créée l’Agence, et ce sans pour autant que ces associations soient instrumentalisées par les pouvoirs publics et traitées comme de simples sous-traitants. Parmi ces associations, il convient de mentionner tout particulièrement Unis-Cité, qui joue un rôle considérable dans l’animation du service civique. Les formations civiques et citoyennes, qui durent deux jours et sont obligatoires avant le début de la mission, sont en grande partie dispensées par des associations d’éducation populaire ([13]).

Parmi les 9 500 organismes agréés, 60 % sont des associations, fédérations ou unions et 4 % des fondations, mutuelles ou syndicats. Les services de l’État représentent 23,6 % des structures d’accueil labellisées. À ce chiffre, il convient d’ajouter les établissements publics, qui pèsent pour 6,8 % de l’ensemble.

3.   Le développement du service civique doit être privilégié par rapport à celui du service national universel

En dépit de l’intérêt et du succès du dispositif, la montée en puissance continue du service civique a été interrompue par la crise du covid-19. Si le nombre de volontaires a depuis lors dépassé légèrement son niveau d’avant la crise sanitaire, il ne progresse plus. Lors de leur audition, les responsables de l’Agence du service civique ont souligné qu’il était préférable de stabiliser le dispositif plutôt que d’essayer de le développer à toute force. Il n’en reste pas moins que l’on est loin, désormais, de l’objectif d’une généralisation longtemps affiché par les gouvernements successifs. Au cours des dernières années, la communication gouvernementale s’est concentrée sur le SNU. Les financements de plus en plus importants accordés à celui-ci ont même laissé craindre de voir s’établir une concurrence budgétaire entre ces deux politiques, la seconde étant même appelée à supplanter la première, compte tenu du coût estimé d’une généralisation du SNU (entre 3 et 5 milliards d’euros selon le récent rapport de la Cour des comptes ([14])). Cette perspective semble s’éloigner compte tenu des équilibres du PLF pour 2025, lequel est marqué par une décrue de la dotation du SNU.

Toutefois, la rapporteure pour avis ne saurait approuver la tentation d’une instrumentalisation du service civique au profit du SNU. Tel était bien, en effet, l’objectif sous-jacent des précédents gouvernements lorsque ceux-ci développaient l’idée selon laquelle le service civique serait par nature appelé à constituer la troisième et dernière phase du SNU. Devant les difficultés de mise en œuvre du SNU, le plus simple pour eux était effectivement d’essayer de capitaliser sur le succès du service civique pour justifier le SNU et atténuer la mauvaise image de ce nouveau dispositif. Les deux projets sont pourtant distincts et doivent le demeurer.

En outre, c’est bien le service civique qu’il convient de privilégier et même de développer : non seulement il répond à son objectif, à savoir stimuler le sentiment d’appartenance à la communauté nationale par l’accomplissement d’une mission d’intérêt général, mais il favorise aussi l’insertion sociale. Il faudrait toutefois s’assurer qu’il reste un dispositif d’engagement, et non un pis-aller pour des jeunes ne réussissant pas à intégrer le marché du travail. De plus, les stagiaires ne doivent pas constituer une sorte de main-d’œuvre à bon marché. Si ce dernier risque n’est pas nul, il apparaît toutefois limité. Un grand nombre de jeunes se saisit de cette possibilité pour opérer une année de césure, qui leur permet de mûrir leur choix d’orientation tout en se rendant utile et en développant de nouvelles compétences. La pluralité des objectifs poursuivis par ce dispositif permet d’atteindre une diversité de profils de jeunes engagés.

L’accroissement du nombre de missions de service civique est éminemment souhaitable, mais, comme l’a souligné la présidente de l’Agence durant son audition, cela suppose de s’assurer que l’écosystème est en mesure de les accueillir ([15]). Le développement du service civique passera donc inévitablement par le renforcement des structures de l’éducation populaire. Celles-ci accueillent en effet plus de 20 % des volontaires, et 35 % des missions sollicitées portent sur le thème « éducation pour tous ».

Dans les années à venir, il conviendra d’orienter davantage le dispositif vers les jeunes en difficulté. L’indicateur 3.1 – « Part des jeunes considérés comme éloignés parmi les jeunes engagés dans une mission de service civique » – montre que leur nombre n’a pas progressé de manière significative entre 2022 et 2023 ([16]). Si la part des jeunes de 18 à 24 ans en mission de service civique au cours d’une année n étant sortis du système scolaire sans aucun diplôme (sous-indicateur 3.1.1) a augmenté entre 2022 et 2023, puisqu’elle est passée de 13,7 % à 17,8 %, la cible fixée pour 2025 est en-deçà – 15 % –, et aucune évolution n’est envisagée pour les années suivantes, si l’on en croit le PAP. Le constat est identique pour les deux autres sous-indicateurs. La part des volontaires percevant l’indemnité complémentaire a diminué entre 2022 et 2023 – elle était de 6,1 % l’an dernier, contre 7,2 % en 2022 – et, en l’absence de toute mobilisation supplémentaire dans cette direction, il semble difficile d’atteindre la cible prévue aussi bien pour 2024 que pour les années ultérieures, à savoir 9 %. La part des jeunes résidant en QPV, quant à elle, stagne : 12,7 % en 2023, quand elle était de 12,8 % en 2022. Dans ces conditions, là encore, il paraît utopique de viser 15 % pour les années 2024 à 2027. Ce constat très décevant, pour ne pas dire préoccupant, mérite une vigilance accrue des pouvoirs publics, car il traduit en réalité le fait que le développement du dispositif en direction des jeunes des QPV ne fait pas partie des objectifs à moyen terme, alors même que ce public a particulièrement besoin d’être accompagné vers des dispositifs efficaces, comme l’est par ailleurs le service civique.

Parmi les axes d’amélioration du dispositif, il importera aussi de travailler à une répartition territoriale plus équitable. En effet, il existe des disparités importantes entre les départements, comme le montre la carte reproduite ci-après. Dans l’ensemble, en 2022, 27,4 % des jeunes résidant dans les départements et régions d’outre-mer avaient effectué un service civique, contre 9 % de ceux vivant dans l’Hexagone. La répartition départementale fait apparaître des disparités considérables : en Haute-Savoie, 3 % seulement des jeunes effectuent une mission, et ce chiffre s’élève à 5 % dans l’Ain, en Savoie et dans les Hauts-de-France, contre 18 % dans l’Aisne et 17 % dans l’Indre ainsi que dans le Pas-de-Calais. C’est en Guadeloupe que la proportion est la plus forte : 36 % ([17]).

Probabilité de réalisation du service civique en 2022
par département

Source : Injep.

Réussir à opérer ce rééquilibrage territorial suppose, dans le même temps, d’insister sur la dimension d’engagement du service civique, pour éviter que celui-ci ne serve principalement à échapper au chômage. En effet, comme l’a souligné l’Injep, une corrélation forte existe entre le taux de chômage des jeunes et la probabilité de s’engager dans une mission de service civique.

En ce qui concerne le contenu même des missions, l’année 2025 sera marquée par la création de missions de service civique écologique. La rapporteure pour avis approuve cette évolution et appelle de ses vœux, pour les années à venir, le renouveau de l’ambition pour le service civique.

C.   Le service national universel : coup d’arrêt conjoncturel ou virage décisif ?

En 2025, pour la première fois depuis le début de l’expérimentation du SNU, les crédits qui lui sont consacrés devraient être en baisse : 128,29 millions d’euros (AE=CP) sont inscrits à cette fin dans l’action 06, soit une diminution de près de 20 %. Cette évolution fait suite à une annulation de crédits en gestion lors de l’exercice 2024, à hauteur de 19 millions d’euros ([18]), qui a eu pour effet de neutraliser l’augmentation de la dotation prévue en loi de finances initiale pour 2024. La rapporteure pour avis se réjouit de ce coup d’arrêt et espère qu’il marque le début d’une prise de conscience de l’exécutif quant au caractère tout à la fois inopérant et ruineux du SNU. Les crédits qui lui sont affectés permettraient de mener d’autres politiques de jeunesse beaucoup plus efficaces.

1.   Un dispositif ruineux, aux contours flous et aux objectifs incertains

Il y a un an, dans le cadre de son avis budgétaire sur les crédits de la mission Sport, jeunesse et vie associative, M. Jean-Claude Raux a consacré des développements éclairants à la création du SNU et aux dérives auxquelles donne lieu ce dispositif relevant d’un « caprice du Président de la République » Emmanuel Macron ([19]). Il y pointait également les nombreuses difficultés budgétaires et opérationnelles qui rendaient chimérique la perspective d’une généralisation.

Contre vents et marées, faisant volontairement abstraction de la réalité, minimisant la résistance de la quasi-totalité des organisations de jeunesse et d’éducation populaire ainsi que des syndicats, l’ancienne majorité avait pourtant prétendu maintenir le cap. Encore le 30 janvier dernier, lors de sa déclaration de politique générale à l’Assemblée nationale, Gabriel Attal, alors Premier ministre, avait annoncé des travaux « en vue de sa généralisation à la rentrée scolaire 2026 ». Dès le 8 juillet 2024, la directive nationale d’orientation relative au pilotage et à la mise en œuvre au niveau territorial des politiques de jeunesse, d’engagement civique et de sport indiquait clairement : « La trajectoire vers la généralisation tracée par la politique prioritaire du Gouvernement nous oblige collectivement. L’objectif de l’accueil de 120 000 jeunes dans des séjours de cohésion en 2025, puis de 365 000 en 2026, s’inscrit dans la trajectoire de généralisation du SNU à une classe d’âge d’ici la rentrée 2026-2027 » ([20]).

Entre-temps, la Cour des comptes a versé à son tour de nouvelles pièces au dossier, dressant un véritable réquisitoire contre le SNU. Les magistrats financiers y évoquent en effet des « objectifs incertains », « une ambition difficile à saisir », des objectifs quantitatifs et qualitatifs non atteints, « un dispositif sans pilotage budgétaire et dont le coût est sous-estimé », sans oublier « une dégradation sensible des conditions de travail des personnels ». Le coût d’une généralisation serait de l’ordre de 3 à 5 milliards d’euros ([21]).

La rapporteure pour avis ne peut que souscrire à ces analyses qui recoupent les témoignages qu’elle a recueillis lors des auditions. Devant un constat aussi largement partagé, elle estime qu’une seule solution s’impose : mettre un terme à cette gabegie. Or, lors de son audition, la déléguée générale au SNU a affirmé que la généralisation restait dans sa feuille de route. Interrogée sur ce point dans le cadre du questionnaire budgétaire annuel, la réponse de la Djepva va dans le même sens : « La généralisation du SNU à une classe d’âge est toujours l’objectif poursuivi par le Gouvernement ».

Le SNU, dans sa forme actuelle, concerne les jeunes âgés de 15 à 17 ans et est censé comporter trois phases : un « séjour de cohésion » de douze jours qui se déroule en hébergement collectif, en dehors du département de résidence ; une mission d’intérêt général (MIG), accomplie auprès d’une association, d’une structure publique ou d’un corps en uniforme, censée durer douze jours ou représenter l’équivalent de 84 heures ; enfin, le projet peut se terminer par une période d’engagement de plus long terme – trois mois minimum.

La nouvelle modalité d’organisation des séjours de cohésion expérimentée cette année, c’est-à-dire dans le cadre du temps scolaire pour les classes de seconde et de première année de CAP, sur le fondement d’un appel à projets dit « classes engagées » et « lycées engagés », ajoute encore à la confusion du dispositif. Elle risque d’accroître les difficultés en matière de personnel et de lieux d’hébergement. En outre, l’organisation de séjours de cohésion sur le temps scolaire diminuera de fait le temps réservé à l’enseignement. La volonté d’imposer à toute force le SNU en le faisant entrer à l’école explique également la décision d’intégrer la présentation du dispositif dans les nouveaux programmes de l’enseignement moral et civique (EMC) qui sont entrés en vigueur à la rentrée 2024. De même, selon la directive nationale d’orientation du 8 juillet 2024, « les contenus revisités des séjours sur les valeurs de la République s’inscrivent […] désormais pleinement dans l’EMC » ([22]).

En pratique, le SNU se limite aux séjours de cohésion. En effet, les résultats de la deuxième phase sont très décevants : la part de jeunes ayant effectué la MIG six mois après le séjour de cohésion est très faible et n’évolue que lentement : 21,9 % en 2021 et 22,6 % en 2022, selon le PAP annexé au PLF 2024. À cet égard, Il convient de noter que l’indicateur 1.3, qui mesurait cette donnée jusqu’à présent, a été remplacé cette année par la proportion de jeunes issus de QPV ayant participé aux séjours de SNU. La rapporteure pour avis voit dans cette évolution de la maquette des objectifs et indicateurs un aveu d’échec de la deuxième phase et donc, par la même occasion, celui de la première, car il faut y voir le signe que les séjours de cohésion peinent à stimuler l’engagement citoyen, et ce alors même que les jeunes concernés par le dispositif étaient volontaires… Le constat est implacable : sur dix jeunes effectuant un séjour de cohésion, un peu plus de deux seulement réalisent dans les six mois la deuxième phase du SNU.

Quant à la troisième phase, conçue comme facultative, elle est de plus en plus assimilée au service civique, comme indiqué précédemment, entretenant la confusion entre les deux dispositifs. Au demeurant, comme l’ont révélé les auditions menées par la rapporteure pour avis, il n’existe pour l’instant aucun moyen de savoir si des jeunes passés par le SNU s’orientent effectivement vers le service civique.

L’un des signes évidents d’un défaut de conception du SNU est l’échec du projet du point de vue de la mixité sociale. La part d’inscrits résidant dans un QPV était de 4,2 % en 2021. La proportion avait ensuite augmenté – 7,4 % pour les séjours de 2022 ([23]) –, mais les éléments les plus récents communiqués à la rapporteure pour avis font état de mauvais résultats cette année, en dépit du public censément plus large amené par les classes et lycées engagés : 4,6 % au premier semestre 2024, et même 4 % pour les séjours hors temps scolaire ([24]). Rappelons que, selon l’Insee, en 2018, la moyenne nationale des jeunes âgés de 15 à 24 ans vivant en QPV était de 9,2 % ([25]).

L’indicateur 1.3, correspondant à l’objectif 1 – à savoir « Favoriser l’engagement et la mobilité de tous les jeunes » –, du PAP pour 2025 rend compte lui aussi de cette réalité : il mesure désormais la « représentativité des jeunes en QPV ». Cette formulation, qui manque d’ailleurs de clarté, renvoie en réalité à la représentativité sociale du public des séjours de cohésion, en se concentrant sur les jeunes vivant dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.

Représentativité sociale des participants aux séjours de cohésion

Source : projet annuel de performances 2025

Un taux de 100 % signifierait que la proportion de jeunes issus de QPV parmi les participants aux séjours de cohésion correspond à leur part au niveau national dans la population des jeunes âgés de 15 à 17 ans. Compte tenu des résultats partiels pour l’année 2024, il y a tout lieu de craindre que la cible ne soit pas atteinte. Au regard des performances des années passées et de la régression attendue cette année, l’objectif d’une représentativité parfaite à l’horizon de 2027 relève du vœu pieu. En effet, atteindre la cible supposerait en réalité d’avoir généralisé d’ici là le SNU à l’ensemble d’une classe d’âge – soit 800 000 jeunes –, à moins de penser que le nombre de jeunes ou de classes des QPV connaisse une croissance spontanée extrêmement forte, ce qui est peu probable.

Ces résultats s’expliquent par le profil des participants : l’Injep notait, à propos des séjours de 2022, une sous-représentation des enfants d’ouvriers (20 % des participants, contre 30 % dans la population générale) et une surreprésentation des enfants de cadres, d’artisans, de commerçants et de chefs d’entreprise (43 % des pères des participants appartenaient à ces catégories, alors qu’ils ne représentent que 33 % des hommes en emploi) ([26]). Par ailleurs, plus d’un tiers des participants de l’année 2021 déclaraient que l’un de leurs parents avait travaillé par le passé dans un corps en uniforme.

Parmi les nombreux défauts que les acteurs de l’éducation populaire entendus par la rapporteure pour avis trouvent au SNU, trois sont revenus régulièrement.

D’abord, confrontés à des difficultés de recrutement des encadrants – liée à la pénurie d’animateurs qui frappe de façon générale le pays –, les organisateurs des séjours de cohésion proposent des contrats beaucoup mieux rémunérés que ne peuvent le faire les organisateurs de colonies ou d’activités extrascolaires, créant ainsi une concurrence déloyale qui rétrécit le vivier des animateurs. Le niveau de la rémunération des encadrants du SNU varie selon la fonction exercée, mais, en tout état de cause, elle est bien supérieure à celle d’un animateur recruté par une structure associative ou à but lucratif : 68,90 euros brut par jour pour un tuteur de maisonnée et 91,90 euros pour un cadre spécialisé employés en contrat d’engagement éducatif (CEE), alors que la rémunération plancher pour un animateur est de 25,63 euros ([27]). Qui plus est, le PAP annexé au PLF 2025 prévoit un recours à des contrats à durée déterminée plutôt qu’à des CEE, ce qui risque de renforcer le rapport de force défavorable avec l’État.

Ensuite, le foncier permettant d’accueillir des groupes importants de mineurs fait défaut et, là encore, l’État crée une situation de concurrence avec les associations organisant des séjours et/ou des activités en période de vacances. Ainsi, selon la Cour des comptes, entre 2021 et 2023, près du tiers des séjours de cohésion du SNU ont été hébergés par des centres de vacances ([28]). Ce sont autant de structures qui manquent potentiellement pour les séjours collectifs de mineurs organisés par les mouvements d’éducation populaire.

Enfin, si la plupart des organisations d’éducation populaire sont réticentes à l’idée de contribuer sous une forme ou une autre aux séjours de cohésion, celles qui ont accepté de le faire, notamment l’Union française des centres de vacances et de loisirs (UFCV), ont franchi le pas pour essayer d’influer sur le contenu des séjours et les orienter vers les valeurs et méthodes de l’éducation populaire, mais elles se plaignent d’être traitées comme des prestataires de services plutôt que comme des partenaires et d’être utilisées plutôt qu’associées.

2.   Le SNU : engagement volontaire ou participation obligatoire ?

Un engagement, par nature, ne saurait être que volontaire. Or, depuis le début de l’expérimentation, les responsables publics qui ont promu le SNU entretiennent une ambiguïté quant à la nature du dispositif, hésitant entre volontariat et obligation. Dès l’origine, le ver était dans le fruit : dans son discours sur la défense du 18 mars 2017, Emmanuel Macron, alors candidat à l’élection présidentielle, avait promis la création d’un « service national de durée courte, obligatoire et universel […] encadré par les armées et la gendarmerie nationale ». Le caractère obligatoire du dispositif figurait bien dans l’idée de son concepteur, de même que la connotation fortement militaire qui, même si elle s’est fortement atténuée, reste attachée à la perception que de nombreux Français ont du SNU. Comme l’écrivait M. Jean-Claude Raux l’an dernier, le SNU « visait en grande partie à rassurer la frange la plus conservatrice de l’opinion publique et à jouer sur sa nostalgie supposée de l’ancien service militaire » ([29]).

À cet égard, la terminologie retenue n’est pas neutre, puisqu’elle acte l’assimilation entre ce dispositif particulier et le principe du « service national universel », qui découle de la loi no 97-1019 du 28 octobre 1997 portant réforme du service national, dans le cadre de la suspension du service national décidée par le président Jacques Chirac. L’article L. 111-1 du code du service national dispose : « Les citoyens concourent à la défense de la Nation. Ce devoir s’exerce notamment par l’accomplissement du service national universel. » L’article L. 111-2, qui vient le préciser, est quant à lui ainsi libellé : « Le service national universel comprend des obligations : le recensement, l’appel de préparation à la défense et l’appel sous les drapeaux. Il comporte aussi des volontariats. » Les gouvernements qui se sont succédé depuis 2017 ont reculé devant une modification législative qui aurait seule permis de généraliser le service national universel dans sa version conçue par Emmanuel Macron.

Le décret no 2020-922 du 29 juillet 2020 ([30]) a créé un chapitre III dans la partie réglementaire du code du service national consacré aux « autres formes de volontariat », mais qui en réalité vise exclusivement le SNU. L’article R. 113-1 du code du service national, qui résulte de l’article 1er de ce décret, dispose : « Les Français recensés, âgés de moins de dix-huit ans, peuvent, dans la limite des places disponibles, participer à un séjour de cohésion organisé par l’État. Ce séjour consiste en une période de vie collective avec hébergement. Les participants à ce séjour de cohésion s’engagent à participer à une mission d’intérêt général validée par l’autorité administrative compétente. » Passons sur l’incohérence entre cette rédaction, qui n’est pas censée permettre aux jeunes de moins de 16 ans de participer aux séjours de cohésion, dès lors que le recensement n’a lieu qu’à partir de cet âge, et la pratique, qui a consisté à ouvrir l’accès au SNU dès l’âge de 15 ans. Il est bien précisé que les jeunes ayant participé à un séjour de cohésion « s’engagent à participer à une mission d’intérêt général ». Certes, comme le relève la Cour des comptes dans son rapport publié en septembre 2024, « aucune sanction n’est prévue en cas de non-participation à cette deuxième phase » ([31]), ce qui est heureux, mais la rédaction n’en implique pas moins que la réalisation de la deuxième phase est obligatoire. Le PAP annexé au PLF pour 2025 maintient l’ambiguïté : « Le SNU comporte un séjour de cohésion d’une douzaine de jours, en hébergement collectif et hors de son département de résidence, ainsi qu’une mission d’intérêt général de deux semaines auprès d’une association, d’une collectivité, d’une structure publique ou d’un corps en uniforme. Chaque jeune peut ensuite poursuivre une période d’engagement de trois mois minimum, par exemple dans le cadre d’une mission de service civique ou d’une réserve. » Le texte laisse entendre que les deux premières phases sont liées. Autrement dit, la participation à la première suppose aussi de souscrire à la deuxième, sans pour autant que l’obligation soit réellement affirmée. Quant à la troisième phase, mentionnée comme une possibilité, on comprend de plus en plus qu’elle est considérée comme accessoire.

Lors de son audition, la déléguée générale au service national universel, Mme Corinne Orzechowski, a entièrement récusé l’idée d’une obligation s’agissant de la deuxième phase. Dont acte. Il n’en demeure pas moins que l’ambiguïté est réelle et qu’il convient de la mettre en relation avec les craintes concernant un SNU qui revêtirait un caractère obligatoire, alimentées pendant longtemps par les gouvernements successifs d’Emmanuel Macron. Comme le rappelait M. Jean-Claude Raux dans son rapport, il y a à peine plus d’un an, le gouvernement de l’époque entretenait le doute sur le caractère obligatoire qu’aurait un SNU « généralisé ». Mme Prisca Thevenot, alors secrétaire d’État chargée de la jeunesse et du service national universel, évoquait ainsi, le 4 août 2023, « une obligation qui sera une généralisation », avant d’être contredite par M. Olivier Véran, porte-parole du Gouvernement.

La totalité des associations et syndicats auditionnés par la rapporteure pour avis se sont eux aussi prononcés contre une obligation. Dès son premier avis relatif au SNU, rendu public en janvier 2018, le Conseil d’orientation des politiques de jeunesse (COJ) s’était quant à lui déclaré « favorable à un service national universel non obligatoire, au sens de "ouvert à tous les jeunes de manière volontaire" » ([32]), compte tenu de la difficulté qu’il y aurait à imposer à la jeunesse un séjour collectif de deux semaines. C’était le bon sens même.

Rappelons que la seule séquence qui s’impose à l’ensemble d’une classe d’âge est celle qui se compose du recensement suivi de l’accomplissement de la journée défense et citoyenneté (JDC). Or, de l’aveu même de la direction du service national et de la jeunesse, il ne lui sera plus possible de continuer à intervenir dans le cadre des séjours de cohésion du SNU car la JDC va être remaniée en profondeur. Dans ces conditions, une participation du ministère des armées au SNU se ferait au détriment de la JDC, ce qui n’est pas envisageable.

3.   Un dispositif en perte de vitesse, confronté à des difficultés de conception et d’exécution qui paraissent insurmontables

La loi de finances initiale pour 2024 prévoyait 80 000 participants cette année, contre 40 000 en 2023 (pour une cible fixée en LFI 2023 à 64 000). Selon les prévisions de la délégation générale au service national universel (DGSNU), le nombre de jeunes ayant effectué un séjour de cohésion devrait être de 61 000 en 2024 ([33]). Autrement dit, cette année encore, l’objectif ne sera pas atteint ([34]). La DGSNU explique cette différence par l’annulation de crédits intervenue en février. Il est vrai que celle-ci a en partie compromis la réalisation du résultat attendu : selon les chiffres communiqués à la rapporteure pour avis, à l’issue du premier semestre de l’année, 49 721 jeunes avaient effectué un séjour de cohésion. Conformément à l’objectif poursuivi à travers la création de séjours de cohésion sur le temps scolaire, dans le cadre des « classes et lycées engagés » (CLE), cette nouvelle modalité du SNU a permis d’accroître le nombre de participants : 12 128 élèves étaient concernés à la fin du premier semestre, pour 37 593 ayant suivi des séjours « classiques » hors temps scolaire ([35]). La marche n’en demeurait pas moins très haute, car l’objectif fixé fin 2023 était de faire entrer 1 240 classes dans le dispositif dès 2024. En tenant compte du fait que la moyenne nationale du nombre d’élèves par classe en lycée général s’établit à 30, cela supposait de faire participer 37 000 lycéens environ aux séjours de cohésion.

Compte tenu des restrictions budgétaires, la cible pour 2025 a été ajustée. Selon le projet annuel de performances, 66 000 jeunes devraient participer au SNU l’an prochain. La diminution des crédits tient compte de ce nouvel objectif : les dépenses de fonctionnement s’élèveraient à 100 millions d’euros (contre 119 millions en LFI 2024), liées à hauteur de 96 millions d’euros à l’organisation des séjours de cohésion (110 millions en LFI 2024). Les dépenses de personnel devraient elles aussi décroître : 27,3 millions d’euros, contre 40,9 millions en LFI 2024. Ce montant correspond en totalité à la rémunération des encadrants des centres.

Les prévisions supposent donc, pour la DGSNU et les services déconcentrés de l’État, de faire plus avec moins. Dans ses réponses écrites, la DGSNU estime que « les optimisations fonctionnelles et structurelles (hébergement, transport, ressources humaines) ont permis de diminuer sensiblement le coût moyen du séjour de 2 475 euros en 2023 à 2 172 euros en 2024 (prévision), avec l’objectif de le réduire à 1 944 euros en 2025 ». La Cour des comptes, pour sa part, estime que « la méthodologie d’évaluation et de suivi des coûts du SNU pour le programme 163 présente des faiblesses conduisant à mettre en doute la fiabilité des coûts par jeune et leur ventilation par postes de dépense (hébergement, restauration, tenues, transports, etc.) calculés a posteriori jusqu’en 2023 » ([36]). Qui plus est, les magistrats financiers relèvent que « le coût du dispositif dépasse largement les coûts induits pour le programme 163 […]. La Cour estime qu’ajouter les coûts d’administration par le ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse, portés par un autre programme budgétaire, ainsi que ceux induits par l’organisation de la journée défense et mémoire et de la journée sécurité intérieure, au sein des séjours de cohésion, conduit à une estimation proche de 2 900 euros par jeune pour l’année 2022 ». Parmi les pistes d’économie explorées par la DGSNU, il convient également de mentionner la réduction de la durée des séjours : ces derniers pourraient être organisés sur dix jours au lieu de douze. Quelle que soit la nature des économies attendues, il importera de faire toute la lumière sur le coût réel du SNU dans les années à venir.

Par ailleurs, il importe de noter que le PAP annexé au PLF pour 2025 évalue à 25 % pour l’année prochaine le taux de délégation globale de la gestion des centres SNU, c’est-à-dire la part des jeunes pris en charge dans des séjours entièrement confiés à des prestataires privés et incluant la part d’encadrement. Autrement dit, l’État envisage de sous-traiter pour une large part à des tiers la fonction éminemment régalienne qui consiste à « renforcer la cohésion nationale, […] favoriser la mixité sociale et territoriale, […] développer une culture de l’engagement et […] contribuer à l’orientation et à l’accompagnement des jeunes », aux termes du décret du 29 juillet 2020. Comment ne pas voir dans cette évolution une nouvelle démonstration des incohérences du dispositif ? Au-delà de cet aspect, la rapporteure pour avis souhaite alerter la représentation nationale sur la dérive qui consisterait à s’orienter vers une « labellisation SNU » de séjours de cohésion confiés à des prestataires. Du reste, cette situation peut être mise en regard de l’absence totale de contribution financière de l’État aux classes de découverte, voyages scolaires et voyages mémoriels, qui ont pourtant démontré leur intérêt pédagogique et sont des vecteurs d’ouverture et de cohésion de groupe, pour un coût journalier par enfant bien inférieur à celui des séjours du SNU.

S’agissant du nombre de participants, la trajectoire élaborée l’an dernier consistait en un quasi-doublement annuel des effectifs, avec une cible à 125 000 jeunes en 2025 et 365 000 en 2026, avant une généralisation envisagée à l’horizon de l’année scolaire 2027-2028. Compte tenu du mur des contraintes logistiques et des moyens humains nécessaires pour atteindre de tels objectifs, la plupart des observateurs – y compris la rapporteure pour avis – étaient pour le moins sceptiques quant à la réalisation de cette trajectoire. De fait, la DGSNU l’a revue : « Les prochains paliers de déploiement vers la généralisation pourraient s’établir à 80 000 jeunes en 2026, 120 000 jeunes en 2027 et 200 000 jeunes en 2028 ». En tout état de cause, l’horizon de la généralisation recule d’année en année. Si l’on ajoute à cela le fait que les dépenses de personnel prévisionnelles du programme devraient non pas augmenter en 2026 et 2027 mais diminuer – 21,8 millions en AE et CP pour ces deux années –, il est permis de considérer que le SNU est en sursis.

Les déclarations récentes du ministre Gil Avérous ont conforté cette analyse : le 28 octobre, sur Sud Radio, il a indiqué que le SNU était « en panne » et que le modèle devait « être réinterrogé ». Ses propos ne laissaient aucune place au doute : « je n’ai pas les moyens pour une généralisation du SNU ». Le lendemain, invité à préciser sa pensée lors de son audition devant la commission des affaires culturelles et de l’éducation, il a indiqué que le dispositif était « en panne d’essence » car les crédits qu’il pouvait lui consacrer devraient même être encore plus limités que ceux retracés dans le projet annuel de performances : sur les 55 millions de restrictions supplémentaires envisagées par le Gouvernement, 49 millions concerneraient le SNU, ce qui supposerait de réduire drastiquement le nombre de participants. Selon les chiffres communiqués par le ministre lors de son audition, 35 700 jeunes devraient ainsi participer à un séjour de cohésion en 2025 : 22 400 dans le cadre des classes et lycées engagés et 13 300 pendant les vacances scolaires. Non seulement le dispositif est en perte de vitesse, mais les nouvelles prévisions montrent une inversion complète des proportions entre les deux modalités de séjour : désormais, ceux qui ont lieu sur le temps scolaire devraient représenter la plus grande part, ce qui est une manière supplémentaire d’acter l’échec du projet.

Enfin, et en dépit du rapprochement que les promoteurs du SNU essaient d’opérer entre ce dispositif et le service civique, l’un et l’autre sont diamétralement opposés. Le SNU constitue même, à bien des égards, le parfait exemple de ce qu’il ne faut pas faire en matière de politiques de jeunesse : conçu dans la précipitation puis sans cesse ajusté, sans consultation du Parlement, des collectivités locales et des associations d’éducation populaire, il ne poursuit aucun objectif clair et n’est pas assorti des moyens nécessaires à sa mise en œuvre. Il n’est pas de nature à susciter l’engagement. Ses promoteurs entretiennent l’ambiguïté quant au caractère obligatoire qui découlerait de la généralisation. Ce faisant, il alimente la méfiance des jeunes, voire leur rejet de cette politique publique. Enfin, par la concurrence qu’il organise avec les organisations d’éducation populaire pour les emplois d’animateurs et l’occupation de centres, il contribue à fragiliser un secteur qui connaît déjà de nombreuses difficultés.

La manière dont le SNU a été pensé et mis en œuvre est symptomatique à la fois du pilotage erratique de la politique en faveur de la jeunesse en France et de la conception erronée de la jeunesse et de ses attentes qui la sous-tend.

D.   Un renouveau et une réorganisation de la politique en faveur de la jeunesse sont nécessaires

1.   Une politique par nature interministérielle, mais qui apparaît très éclatée et insuffisamment pilotée

Les actions engagées en faveur de la jeunesse revêtent inévitablement une dimension interministérielle car elles concernent des domaines très divers allant de l’éducation à l’insertion professionnelle, en passant par les loisirs, l’engagement ou encore la sécurité et l’éducation routières. Comme le souligne le DPT consacré à la politique en faveur de la jeunesse pour 2025, les dispositifs visant la jeunesse « sont pluriels dans leur contenu et leur mode d’exécution, centralisés ou déconcentrés, purement étatiques ou inscrits dans un cadre conventionnel impliquant des organismes publics, parapublics, des collectivités territoriales ou des associations ».

Le ministère de l’éducation nationale est considéré comme le chef de file de cette politique, mais le programme 163, censé regrouper l’essentiel des dispositifs destinés spécifiquement aux jeunes, est sous la responsabilité du ministère des sports, de la jeunesse et de la vie associative. Sur le plan budgétaire, la politique en faveur de la jeunesse concerne 19 missions et 41 programmes. L’ensemble est évalué à 117,4 milliards d’euros en AE et 116,8 milliards d’euros en CP dans le PLF 2025. À cela s’ajoute un ensemble de dépenses fiscales évaluées à 1,1 milliard d’euros en 2025. Dans ces conditions, pour mener une politique forte et cohérente, un pilotage interministériel affirmé est nécessaire. Or un tel pilotage est précisément ce qui fait défaut. Comme le soulignait en 2021 la sénatrice Monique Lubin, « il n’existe guère une politique de la jeunesse, mais plutôt des politiques s’adressant aux jeunes » ([37]). Le constat est largement partagé et déjà ancien. En 2001, un rapport du Commissariat général du Plan relevait ainsi que l’action des pouvoirs publics en direction de la jeunesse avait donné lieu, au cours des vingt années précédentes, à « une prolifération d’actions, de programmes, de dispositifs s’accumulant et se succédant dans le temps et l’espace » tout en suscitant « de nombreuses critiques qui portent sur la pertinence comme sur l’efficacité des interventions réalisées » ([38]).

Le comité interministériel à la jeunesse, créé en 1982 ([39]), est censé se réunir « au moins deux fois par an », mais son existence est assez largement virtuelle : s’il a effectivement été convoqué à plusieurs reprises entre 1982 et 1984, il ne l’a plus été jusqu’en octobre 1990, et la réunion suivante n’eut lieu que dix-huit ans après, en 2009. Il fut réuni de nouveau en février 2013, puis en mars 2014 et juillet 2015 ; depuis lors, il n’a plus été convoqué ([40]).

En 2014, pour pallier ce défaut de coordination, a été institué un délégué interministériel à la jeunesse. La fonction a été confiée au directeur de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative ([41]). Toutefois, cette décision « ne s’est accompagnée ni de la mise en place d’un service voué à la coordination interministérielle, ni de la recherche active d’une coordination entre les administrations », estimait la Cour des comptes en 2020 ([42]). Le décret n° 2022-1493 du 30 novembre 2022 est venu aggraver encore la confusion, puisque, désormais, le délégué interministériel n’est plus obligatoirement le Djepva ([43]).

Consciente du problème que pose l’absence de pilotage d’ensemble, la Djepva déclare avoir « engagé au printemps 2024 une démarche de coordination interministérielle de la politique d’engagement tout au long de la vie, visant à favoriser l’interconnaissance et les synergies entre les dispositifs. Elle entend encourager le développement des parcours d’engagement » ([44]). Il conviendra d’analyser précisément les effets concrets de cette démarche. La rapporteure pour avis regrette toutefois que ce travail de coordination se limite à la dimension de l’engagement.

Ce manque de coordination au niveau central est aggravé par la multiplication des acteurs intervenant au niveau local. En effet, les collectivités territoriales développent des politiques propres en la matière. Si la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté a conféré à la région le rôle de chef de file dans le domaine des politiques de jeunesse ([45]), chaque niveau de collectivité conserve la possibilité de développer des actions, en particulier pour soutenir les associations d’éducation populaire et favoriser l’accès des jeunes à la culture, aux loisirs et aux vacances. À cet égard, il ne semble pas, pour l’instant, que le « dialogue structuré » ([46]) instauré par la loi précitée se soit traduit par un accroissement de l’efficacité de la politique publique menée dans ce domaine.

2.   L’évolution des périmètres ministériels est symptomatique du manque de continuité de l’action des pouvoirs publics

L’évolution incessante des périmètres ministériels est un autre signe de l’incapacité des pouvoirs publics à structurer leur action et à lui assurer la continuité nécessaire. Le manque de continuité dans le pilotage explique en partie le manque de cohérence de la politique de jeunesse. Les dix dernières années sont particulièrement significatives de ce point de vue.

En 2012, Mme Valérie Fourneyron a été nommée ministre des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative. Il convient d’ailleurs de noter que c’est la dernière fois que la mention de l’éducation populaire a figuré dans l’intitulé d’un ministère.

En 2014, dans le premier gouvernement de M. Manuel Valls, Mme Najat Vallaud-Belkacem est devenue ministre des droits des femmes, de la ville, de la jeunesse et des sports. En août de la même année, M. Patrick Kanner a été nommé ministre de la ville, de la jeunesse et des sports. Il conserva ces fonctions dans le gouvernement de M. Bernard Cazeneuve.

La mention de la jeunesse a purement et simplement disparu dans le premier gouvernement de M. Édouard Philippe, avant de réapparaître quelques semaines plus tard : M. Jean-Michel Blanquer en était chargé, au même titre que de l’éducation nationale et des sports.

Dans le gouvernement de M. Jean Castex, Mme Sarah El Haïry est devenue secrétaire d’État chargée de la jeunesse et de l’engagement sous l’autorité de M. Jean-Michel Blanquer.

Mme Élisabeth Borne a, pour sa part, scindé l’éducation nationale et la jeunesse, d’un côté, et les sports et les Jeux olympiques et paralympiques, de l’autre ; Mme Prisca Thevenot, secrétaire d’État chargée de la jeunesse et du service national universel, était placée sous la double tutelle du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse et du ministre des armées.

M. Gabriel Attal, alors Premier ministre, a confié brièvement à Mme Amélie Oudéa-Castéra un grand ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse, des sports et des Jeux olympiques et paralympiques, avant que celui-ci soit de nouveau scindé, Mme Sarah El Haïry étant ministre déléguée chargée de l’enfance, de la jeunesse et des familles sous la tutelle de Mme Nicole Belloubet, tandis que Mme Prisca Thevenot était ministre déléguée chargée du renouveau démocratique – ce qui incluait la vie associative –, porte-parole du Gouvernement.

M. Gil Avérous exerce désormais les fonctions de ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative au sein du gouvernement dirigé par M. Michel Barnier.

Sur le plan administratif, les évolutions ont été moins nombreuses, mais elles n’en ont pas moins eu des conséquences profondes, auxquelles s’est ajoutée la diminution progressive du nombre d’agents affectés à la conduite des politiques menées en ce domaine. Jusqu’en 2009, la politique jeunesse et sports disposait d’une administration autonome, déployée dans des directions régionales et départementales spécifiques. En 2010, les agents ont rejoint le secrétariat général des ministères sociaux, sous la tutelle conjointe des ministres chargés respectivement du travail, des affaires sociales, de la jeunesse et des sports. En 2021, les services de l’éducation nationale et ceux de la jeunesse et des sports ont été fusionnés.

Durant la même période, entre 2010 et 2021, le nombre d’agents affectés aux politiques de la jeunesse et des sports a diminué de 45 %. Il en reste désormais environ 5 000. Parallèlement, leurs missions n’ont cessé d’être élargies, avec en point d’orgue la création du SNU. Une mission de l’inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGESR) menée en 2022 concluait à ce propos : « Le poids de ce nouveau dispositif au sein des services déconcentrés du ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports […] est insurmontable en l’état au regard des moyens humains disponibles et de son organisation » ([47]). La rapporteure pour avis regrette que cette alerte n’ait pas été prise en compte : cela aurait permis d’éviter beaucoup de souffrances aux personnels de la jeunesse et des sports.

3.   Un empilement de dispositifs imposés par le haut traduisant une approche erronée de la jeunesse et des mouvements d’éducation populaire

Le manque de continuité et de coordination de l’action en faveur de la jeunesse explique sans doute pour partie la propension à créer sans cesse de nouveaux dispositifs, sans prendre la peine d’évaluer réellement l’impact de ceux qui existaient déjà, et surtout en négligeant de les construire avec les acteurs de terrain. À cet égard, la politique de jeunesse souffre d’un excès de verticalité. Cette tendance s’est fortement accentuée depuis 2017 : les plans, « pass » et dispositifs en tout genre se sont multipliés, donnant l’impression d’un emballement incontrôlé.

Dans la revue de dépenses portant sur les dispositifs en faveur de la jeunesse qu’elles ont conduite récemment, l’inspection générale des finances (IGF) et l’IGESR ont observé que les moyens en faveur de la jeunesse avaient été renforcés depuis 2017, tout en insistant sur l’absence de vision d’ensemble : « la cohérence et l’articulation de ces dispositifs entre eux ne paraissent pas évidentes pour la mission », écrivaient les auteurs ([48]). De fait, le tableau paraît singulièrement disparate : « boussole des jeunes » (programme 163), plan « 1 jeune, 1 solution » (programme 103) décliné dans le programme 163 à travers le dispositif « 1 jeune, 1 mentor », pass culture (programmes 361 et 230), SNU (programme 163), « colos apprenantes » (programme 163), pass’colo (programme 304), vacances apprenantes (programme 230), mesures en faveur du permis de conduire (programme 207), plan d’éducation aux médias et à l’information (programme 361), pass’sport (programme 219)… Au cours des dernières années, les gouvernements successifs d’Emmanuel Macron ont donné l’impression que leur action devait passer nécessairement par la création d’un nouveau dispositif aux airs de slogan, le plus souvent accompagnée d’une annonce médiatique. Dans bien des cas, l’efficacité aurait voulu que l’on essaie plutôt d’améliorer l’existant, de capitaliser sur les réussites et de construire une politique cohérente en partenariat avec les collectivités territoriales et les acteurs associatifs. Par ailleurs, la rapporteure pour avis insiste une fois encore sur le fait qu’une somme de dispositifs ne fait pas une politique publique.

Les « colos apprenantes », par exemple, ont été conçues dans la précipitation, en réponse à la crise sanitaire. Le pass’colo est venu s’ajouter l’an dernier, ciblant une classe d’âge plus restreinte, et son déploiement a été conduit dans la précipitation. Ces deux dispositifs n’auraient sans doute pas été nécessaires si le gouvernement de l’époque avait développé en amont une véritable politique partenariale avec les acteurs du secteur pour identifier leurs difficultés et co-construire des solutions avec eux pour revitaliser les colonies de vacances. Il en va de même pour l’articulation entre le SNU et le service civique : la rapporteure pour avis considère que le continuum de l’engagement a été conçu a posteriori, comme une façon de justifier la décision de créer le SNU. Un changement de perspective s’impose : trop souvent, les pouvoirs publics ont tendance à prendre le problème à l’envers.

Ce problème d’approche fondamental est sous-tendu par une vision erronée de la jeunesse, fondée sur l’idée qu’il faudrait la contrôler, la mettre au pas, voire l’enrôler. On observe ainsi la résurgence épisodique de ces « préjugés négatifs sur les jeunes [qui] ont explosé à la fin du xixe siècle », avec l’apparition de la presse de masse, comme l’analysait récemment l’historienne Ludivine Bantigny, qui soulignait la continuité entre la peur des « Apaches » à la Belle-Époque, les « blousons noirs » dans les années 1950 et, désormais, les « jeunes des cités », considérant que le projet sous-tendant le SNU était symptomatique de la volonté d’encadrement de la jeunesse ([49]). Comme le soulignait le sociologue Camille Peugny en 2022, « depuis plusieurs décennies, l’absence d’une réflexion de fond sur ce que doit être cet âge de la vie a abouti à ne pas accorder à la jeunesse, en tant que telle, l’attention politique prioritaire qu’elle nécessite, d’autant plus dans une société vieillissante. Lorsqu’on ne se sert pas simplement de l’argument de “l’avenir des jeunes” » pour mener des réformes d’austérité (réforme des retraites, réduction de la dette, etc.), les “politiques jeunesse” consistent souvent en des réformes au coup par coup en fonction des problématiques du moment (logement, emploi, santé, etc.) et des alternances politiques. Il en résulte un millefeuille de dispositifs d’aides devenus illisibles, sans cohérence ni réflexion d’ensemble. » ([50])

Le 29 octobre, lors de son audition devant la commission, le ministre Gil Avérous a conforté les analyses de la rapporteure pour avis en annonçant l’élaboration d’une « feuille de route interministérielle » pour la jeunesse. Il a également fait part de sa volonté de voir affirmé le rôle de chef de file du ministère des sports, de la jeunesse et de la vie associative en matière de politique en faveur de la jeunesse. La rapporteure pour avis soutient cette démarche mais sera vigilante aux suites qui lui seront réservées, car trop souvent, dans le passé, de telles annonces sont restées lettre morte. Elle tient également à souligner la nécessité d’abroger le décret en vertu duquel le Djepva n’occupe pas nécessairement les fonctions de délégué interministériel à la jeunesse : seul le directeur de la jeunesse est réellement en mesure de conduire une action coordonnée, en raison de la vision transversale qui est la sienne. Encore faut-il, cependant, qu’il dispose de compétences élargies et de pouvoirs renforcés.


II.   Un repli du soutien aux associations qui intervient au pire moment

La politique de soutien aux associations relève de l’action 01 du programme 163.

En 2025, les crédits de l’action devraient connaître une diminution de près de 4 % (AE=CP) : s’ils sont approuvés par le Parlement, ils s’élèveront à 55,59 millions d’euros. La diminution des crédits s’explique par un ajustement de la dotation du compte d’engagement citoyen (CEC) :  3,1 millions d’euros, alors que la décrue d’ensemble de l’action est de 2,3 millions d’euros en valeur absolue. Il n’en demeure pas moins que, compte tenu du niveau de l’inflation, la politique de soutien aux associations marque le pas.

  1.   Un tissu associatif actif et divers, confronté à des difficultés croissantes

1.   Panorama du monde associatif

Les quelque 1,5 million d’associations que compte la France, dans toute leur diversité, sont des acteurs majeurs de la vie du pays et l’un des piliers de la cohésion sociale. Selon des données de l’Insee, 25 % des associations relèvent du domaine du sport, 20 % de la culture, 19 % des loisirs, 15 % de la défense de causes, de droits ou d’intérêts, 10 % de l’action sociale, 8 % de l’enseignement, de la formation et de la recherche et 3 % de la gestion des services économiques et du développement local ([51]).

Les associations sont le lieu premier de l’engagement des Français. En fonction des enquêtes, le nombre de bénévoles oscille entre 15 et 20 millions. La Djepva, quant à elle, retient une estimation un peu plus basse : 12,4 millions de Français sont engagés, dont 5,5 millions le sont chaque semaine.

Chaque année, en moyenne, entre 2010 et 2012, 69 000 associations ont été créées, pour un nombre de cessations d’activité équivalent, même si celui-ci est plus difficile à évaluer ([52]). On estime donc que le nombre d’associations est stable. La crise sanitaire a entraîné une chute importante des créations, mais l’activité a repris depuis lors. L’année 2023 a même été marquée par un fort rebond, avec 73 120 nouvelles créations, un niveau parmi les plus élevés depuis 2010.

En outre, un nombre très important de Français y travaillent : 1,8 million de salariés, pour un budget cumulé de 125 milliards d’euros environ ([53]), ce qui fait des associations des acteurs économiques fondamentaux dans les territoires.

Les associations constituent un pilier fondamental de la démocratie en favorisant la participation citoyenne et l’action collective. Elles mobilisent nombre de nos concitoyens désireux d’agir ensemble, au travers d’un maillage exceptionnel irriguant l’ensemble des territoires, pour permettre au plus grand nombre d’accéder à des connaissances et des activités ou pour défendre des causes, au service du bien commun. Les associations contribuent, par leurs actions, à l’émancipation de toutes et de tous. Elles constituent des structures au sein desquelles les citoyens apprennent à s’engager, à débattre, à prendre des responsabilités, et à agir pour l’intérêt général.

2.   Les difficultés du monde associatif

En dépit de ce tableau en apparence rassurant, le monde associatif est confronté à de nombreuses difficultés.

Les associations ont subi une baisse des financements publics, notamment du fait de la suppression de la « réserve parlementaire », partiellement compensée par le Fonds de développement de la vie associative (FDVA). Par ailleurs, les acteurs du monde associatif auditionnés par la rapporteure pour avis ont souligné une modification de la structure de financement des associations : si la part du financement public reste globalement élevée (45 % en moyenne), la part des subventions destinées à financer le fonctionnement des associations est passée de 40 % à 17 % au cours des vingt dernières années.

Cette évolution s’explique par un recours croissant à des appels à projets, qui plus est pour de courtes durées, de la part des collectivités comme de l’État : plutôt que d’aider les associations à vivre en les laissant développer leurs projets, on les oblige à entrer dans des dispositifs qui ne répondent pas toujours à leur raison d’être mais sont nécessaires à leur survie financière. C’est ainsi que certaines associations, en dépit de leur opposition au principe du SNU, sont allées chercher des subsides en s’associant à l’organisation des séjours de cohésion. La rapporteure pour avis tient à mettre en garde contre cette tendance qui conduit à dénaturer l’activité des associations, lesquelles ne sont plus maîtresses du projet qu’elles développent. Elle détourne également de nombreux salariés et bénévoles de ce qui constitue le cœur des missions motivant leur engagement.

En outre, la trésorerie de nombreuses associations est fragile. Les crises successives que le pays a traversées au cours des dernières années – covid-19, augmentation du coût de l’énergie et inflation – ont aggravé la situation. Compte tenu du rôle clé que joue le tissu associatif de notre pays, la question d’un renforcement du soutien financier de la puissance publique mérite donc d’être posée.

De nombreux observateurs soulignent, par ailleurs, une crise de l’engagement des bénévoles. À cet égard, l’analyse mérite d’être nuancée, car les formes d’engagement ont évolué.

Contrairement à une idée largement répandue, les jeunes s’engagent beaucoup. Ainsi, selon le dernier baromètre de la jeunesse publié par la Djepva, 49 % des jeunes âgés de 15 à 30 ans déclaraient, au début de l’année 2024, avoir donné bénévolement du temps au sein d’une association au cours des douze derniers mois, au moins ponctuellement ([54]). Mais leur participation prend d’autres formes que celles de leurs aînés. Certes, le numérique a bouleversé les habitudes, dans ce domaine comme dans d’autres, mais les thématiques intéressant les jeunes ont elles aussi évolué, avec la montée en puissance des enjeux liés au changement climatique, à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles (VSS) ou encore aux discriminations. De moins en moins de jeunes souhaitent s’engager sur de longues périodes. Leurs attentes vis-à-vis des associations et de l’engagement sont différentes. Enfin, les jeunes bénévoles préfèrent désormais des modes de gouvernance partagée.

Le niveau d’engagement de la catégorie des 50-65 ans, en revanche, est une source d’inquiétude pour le secteur associatif. La crise du covid a marqué une rupture de ce point de vue : de nombreux bénévoles retraités ont interrompu leur engagement en 2020 et ne l’ont pas repris. Le phénomène pose d’autant plus de difficultés que cette classe d’âge fournit traditionnellement une part importante des dirigeants associatifs.

De fait, il est de plus en plus difficile de trouver des volontaires pour exercer des fonctions exécutives – président, secrétaire, trésorier – au sein des associations. Parmi les causes de cette situation, les acteurs du secteur pointent le manque de reconnaissance de l’engagement et la complexité des procédures.

Les bénévoles amenés à exercer des fonctions exécutives soulignent les carences des dispositifs de formation. En effet, assumer des responsabilités au sein d’une association ne s’improvise pas : il faut être formé et accompagné. À cet égard, les dispositifs proposés par les pouvoirs publics comme par les têtes de réseau ont été longtemps insuffisants, et doivent encore être renforcés.

Le milieu associatif pâtit également de la difficulté à accéder aux informations permettant de faire fonctionner au quotidien une structure, quelle que soit sa taille. De ce point de vue, il convient de souligner la complexité des procédures auxquelles doivent se soumettre les associations, qu’il s’agisse des dossiers de demande de subvention ou des démarches administratives diverses qu’elles doivent effectuer (demandes d’agrément, formalités pour embaucher, etc.). De nombreux responsables soulignent une fatigue du monde associatif, notamment face aux démarches toujours plus nombreuses et à la complexité des procédures pour les demandes de financement ou les appels à projets. Ces difficultés expliquent pour une part la crise du bénévolat, en particulier dans la catégorie des personnes âgées de 50 à 65 ans.

Au-delà d’une certaine masse critique, les bénévoles ne peuvent plus assurer seuls le fonctionnement d’une structure associative. La question de l’emploi associatif est donc cruciale. Or embaucher des salariés n’est pas seulement complexe : cela représente une charge financière importante. C’est ce qui explique que seules 150 000 associations ‒ soit 10 % ‒ emploient un ou plusieurs salariés. L’emploi associatif doit donc être soutenu et conforté.

B.   Le soutien financier et logistique de l’État est réel mais insuffisant

1.   Le financement du monde associatif et la formation des bénévoles à travers le FDVA

Pour faire face aux nombreux défis auxquels les associations sont confrontées, la mobilisation de l’État prend plusieurs formes qui ne se limitent pas, d’ailleurs, aux crédits du programme 163. Les pouvoirs publics ont ainsi pour habitude d’inclure dans l’effort financier de l’État en faveur des associations un certain nombre de dépenses fiscales qui sont retracées dans un « jaune » budgétaire. Les prévisions pour 2025 font ainsi état d’un montant total de 4,6 milliards d’euros, dont 3,7 milliards correspondent aux réductions d’impôt accordées au titre des dons faits par les particuliers ou les entreprises ([55]). Ce document permet ainsi de constater qu’en 2023, 5,5 millions de ménages ont effectué un don ouvrant droit à une réduction d’impôt. Sur ce point, la rapporteure pour avis souhaite rappeler que faire un don d’une association n’est pas une manière d’éviter de payer l’impôt : c’est simplement une façon de le payer autrement, car cela bénéficie à la collectivité.

Le « bras armé » du financement de l’État aux associations est le FDVA, dont les crédits représentent une part importante de la dotation globale de l’action 01 : 33 millions d’euros (AE=CP) en 2025, soit une somme identique aux années précédentes. Il faudrait pourtant développer cet instrument qui permet de distribuer chaque année 12 000 subventions aux petites associations locales ([56]). La rapporteure pour avis, comme l’ensemble du groupe Socialistes et apparentés, défendra une augmentation des financements consacrés au FDVA.

Le fonds comporte deux volets. Le premier concerne la formation des bénévoles. Consacré au financement des plans de formation conçus par les associations à destination de leurs bénévoles, il serait doté de 8,1 millions d’euros. Les subventions attribuées dans ce cadre sont accordées au niveau national ou au niveau régional par les agents des Drajes. Pour mémoire, les associations sportives ne peuvent pas en bénéficier, au motif qu’elles sont soutenues par l’Agence nationale du sport (ANS). Compte tenu de la diminution attendue des crédits alloués au sport, il serait opportun de trouver une solution juridique à la question. La rapporteure pour avis appelle le Gouvernement à travailler sur la question.

Le second volet, parfois appelé « FDVA 2 », vise à financer le fonctionnement global de certaines associations et les innovations – en l’occurrence, les nouveaux projets. Il a été institué en 2018 ([57]) afin d’attribuer aux associations une part des fonds anciennement versés au titre de la réserve parlementaire. En 2025, il bénéficierait de 25 millions d’euros ([58]).

Outre l’action 01, la quote-part sur les sommes acquises à l’État au titre des comptes bancaires inactifs et des contrats d’assurance vie en déshérence ([59]) alimente ce mécanisme, dont le niveau a été relevé l’an dernier de 20 % à 40 % ([60]), ce qui a procuré un surcroît de recettes : 20 millions d’euros supplémentaires, s’ajoutant aux 17,5 millions d’euros attendus initialement et aux 33 millions d’euros inscrits au programme 163, soit 70 millions d’euros au total. Toutefois, les prévisions de recettes issues de cette source de financement pour l’année 2025 sont à la baisse : la ressource complémentaire devrait être de 35 millions d’euros.

Compte tenu des règles de recevabilité financière des amendements, les parlementaires ne sont pas en mesure de proposer de relever le niveau de la quote-part. Pour abonder davantage le FDVA, la rapporteure pour avis proposera donc de compléter directement la « dotation socle », de façon à porter les crédits à 100 millions d’euros. S’il n’était pas adopté, elle appellerait le Gouvernement à relever le niveau de la quote-part. Les acteurs du monde associatif s’accordent assez largement sur l’ordre de grandeur proposé, à savoir 100 millions d’euros. Ces crédits sont nécessaires pour permettre aux associations de jouer leur rôle d’intérêt général.

À l’action 01 sont également inscrites deux autres mesures de soutien aux associations : l’une, consacrée spécifiquement aux associations agréées jeunesse et éducation populaire, l’autre destinée à l’animation de la vie associative locale. Chacune serait dotée de 7 millions d’euros en 2025. Ces montants sont stables par rapport à 2024.

2.   Une politique d’accompagnement des associations et de simplification qui monte en puissance mais reste perfectible

Parmi les besoins les plus pressants des associations figure la formation des bénévoles. Si le premier objet du FDVA est de concourir aux plans de formation des associations, la Djepva estime que, chaque année, seuls 170 000 bénévoles bénéficient d’actions de formation à travers ce mécanisme. La dotation envisagée pour l’année 2025, à savoir 8,1 millions d’euros, apparaît manifestement insuffisante. Les pouvoirs publics ont trop souvent tendance à considérer que les militants associatifs ayant reçu une formation dissémineront ensuite leurs compétences dans leur structure, et il est vrai que c’est le cas : les bénévoles se caractérisent, précisément, par leur capacité à s’engager, mais on ne saurait compter éternellement sur leur bonne volonté. L’État devrait prendre davantage conscience des bénéfices que la collectivité tire de l’engagement associatif sous toutes ses formes, et consentir à y consacrer davantage de moyens.

L’accompagnement des associations passe aussi par l’information des bénévoles. Des dispositifs existent, mais ils sont insuffisants. Les centres de ressources et d’information des bénévoles (Crib) devraient se voir attribuer 1,17 million d’euros (AE=CP) en 2025 – montant stable par rapport à 2024. Afin de répondre aux besoins d’information des dirigeants et bénévoles associatifs, les pouvoirs publics ont labellisé ces centres ayant un rôle d’orientation, de conseil et de soutien aux bénévoles. Tous les départements sont dotés d’un ou plusieurs Crib. L’intervention de l’État se traduit par l’octroi de subventions, participant à la rémunération d’un salarié associatif, versées par l’intermédiaire du Fonjep. Mais le nombre de Crib est beaucoup trop limité : on en comptait un pour près de 6 500 associations en 2022 ([61])

Au-delà des actions visant à simplifier les procédures, le rapporteure pour avis insiste sur la nécessité de renforcer les têtes de réseau, c’est-à-dire les unions, coordinations, fédérations, etc. En 2015, le Mouvement associatif avait commandé une étude ayant pour objet d’analyser l’action des têtes de réseau. Sa première observation était la suivante : « Une association sur deux en France fait partie d’un réseau associatif organisé en tête de réseau » ([62]). Cette étude identifie deux types de têtes de réseau. D’une part, celles de premier niveau, à savoir les têtes de réseau d’associations, « qui opèrent généralement dans une logique sectorielle. Elles accompagnent des structures locales, coordonnent leurs actions et leur donnent une visibilité à l’échelle nationale. » D’autre part, les têtes de réseau de second niveau « opèrent généralement dans une logique intersectorielle. Leurs membres sont des têtes de réseau de premier niveau. Elles coordonnent plusieurs secteurs associatifs pour développer une vue globale et politique sur des sujets communs. Elles cherchent à susciter des partenariats entre têtes de réseau, ou entre acteurs associatifs. » Les trois finalités des têtes de réseau sont de se renforcer, d’influencer et d’innover.

Ces structures devraient être les mieux à même d’apporter aux associations un soutien logistique, juridique et humain : leur rôle est de mettre en réseau les associations et d’animer ces réseaux, de proposer un accompagnement personnalisé, de piloter des projets et de fournir une expertise. Or elles sont elles aussi en difficulté, du fait notamment d’un manque de financement, mais aussi en raison de l’accroissement des besoins d’accompagnement de leurs membres, auquel elles n’arrivent pas à faire face : problèmes de gouvernance, demande d’accompagnement à la recherche de financements, etc.

Les difficultés précédentes sont liées à un autre problème, déjà évoqué : les associations souffrent de la complexité des procédures, en particulier pour les demandes de subvention. Si le problème a été identifié de longue date, la puissance publique peine à trouver des solutions. Le Gouvernement a élaboré un plan destiné à « simplifier la vie des associations ». Il l’a même érigé au rang de politique prioritaire. L’un des axes principaux consiste à développer « Guid’Asso ». Il s’agit d’un réseau de service de proximité pour les associations loi de 1901. Il est composé de structures locales diverses – mairies, institutions, associations – qui accueillent, renseignent et accompagnent les personnes désireuses de s’informer sur la vie associative ou de s’y investir, quels que soient le domaine d’intervention et le territoire d’implantation. Comme dans le cas des Crib, le soutien passe par l’attribution de postes Fonjep. Le dispositif devrait être doté de 6,26 millions d’euros l’an prochain, soit une hausse de 800 000 euros. Cette somme devrait permettre d’achever le déploiement du réseau dans l’ensemble du pays en 2025.

Par ailleurs, 1,66 million d’euros est consacré au perfectionnement des systèmes d’information de la vie associative (Siva). Leur objet est de simplifier les démarches aussi bien pour l’administration que pour les associations. Ils ont permis de créer, notamment, le service « Le Compte Asso ». Cette plateforme, créée en 2018, a vocation à devenir une sorte de guichet unique permettant de fluidifier les procédures. Cette politique doit être amplifiée et dotée de moyens supplémentaires, sans pour autant négliger la présence sur le terrain pour aider les associations.

3.   La loi du 15 avril 2024 : un petit pas pour le monde associatif qui devrait être suivi d’un plan beaucoup plus ambitieux

Le Parlement a adopté le 8 avril 2024, à l’unanimité, une proposition de loi, ayant pour objet de « soutenir l’engagement bénévole et simplifier la vie associative » ([63]). Le texte a élargi les possibilités de recours au compte d’engagement citoyen (CEC) et au mécénat de compétences, autorisé les dons de jours de congé non pris à une association, assoupli les conditions de recours au congé associatif, simplifié les conditions de prêts entre associations, sécurisé l’établissement de conventions de trésorerie entre associations d’un même groupement, harmonisé les causes de recours aux tombolas, loteries et lotos, autorisé les communes à délivrer une autorisation d’occupation temporaire de l’espace public à titre gratuit aux associations et pérennisé Guid’Asso en l’inscrivant dans la loi.

Ces dispositions vont dans la bonne direction, incontestablement, mais elles restent modestes. Par ailleurs, aucun des cinq décrets permettant l’application de certains de ses articles n’a été publié. Interrogée sur ce point, la Djepva a toutefois déclaré travailler à leur rédaction, en liaison avec les autres ministères concernés. D’ici à la fin de l’année, les textes devraient être prêts. Le rapport prévu à l’article 12 de la loi, qui permettra d’accroître la connaissance des besoins du monde associatif, est en cours de rédaction.

Il n’en demeure pas moins que certaines de ses dispositions n’auront sans doute pas la portée espérée. C’est le cas, par exemple, de celle concernant le compte d’engagement citoyen (CEC). Ce dispositif part d’une bonne intention, mais il s’avère difficile à mobiliser – en dépit de la mise en place d’un système d’information censé faciliter l’opération –, ce qui explique sans doute la sous-utilisation chronique du dispositif et sa sous-exécution ([64]). Le CEC « s’inscrit dans le compte personnel d’activité (CPA) et vise à reconnaître et valoriser l’engagement à travers l’octroi d’heures de formation citoyenne ou professionnelle adossées au compte personnel de formation (CPF) » ([65]). Dans la limite d’un plafond de 60 heures cumulables au titre du compte d’engagement citoyen, 20 heures de formation peuvent être allouées aux personnes accomplissant un engagement. La loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a permis de monétiser les heures attribuées sur le CEC : un forfait de 240 euros a été créé dans ce cadre. En sus de sa complexité, le dispositif est mal ciblé : il est possible de financer des formations n’ayant rien à voir avec l’engagement bénévole qu’il est censé valoriser.

Dans ces conditions, il n’est pas étonnant que le montant prévu pour l’année 2025, à savoir 2,9 millions d’euros, soit en baisse par rapport à cette année (5,97 millions d’euros en LFI 2024). Compte tenu de ses résultats, le dispositif devrait faire l’objet d’une évaluation complète. Il importe d’identifier les moyens de le simplifier et de développer le nombre de bénéficiaires, au-delà de l’ouverture aux bénévoles engagés dans des associations déclarées ou inscrites depuis au moins un an, contre trois ans auparavant.

 

De toute évidence, des mesures beaucoup plus ambitieuses doivent être prises. Une grande loi d’orientation en faveur de la jeunesse, de l’éducation populaire et du monde associatif serait peut-être l’occasion de passer en revue et d’harmoniser l’ensemble des politiques conduites au sein du programme 163 et au-delà. Dans l’attente d’un tel texte, plusieurs mesures pourraient être mises en œuvre rapidement.

C.   Les enjeux d’un nouvel élan donné au partenariat entre l’État, les collectivités territoriales et les associations

1.   La suppression du contrat d’engagement républicain : un préalable au rétablissement de la confiance

Il importe avant toute chose de rétablir la confiance entre l’État et le monde associatif. Celui-ci se veut par nature libre, c’est-à-dire nécessairement critique. À cet égard, une mesure en particulier s’est attiré l’hostilité de la quasi-totalité de l’écosystème associatif : le contrat d’engagement républicain.

Créé par l’article 12 de la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, le contrat d’engagement républicain a été vécu comme un acte de défiance par les associations. Ce qui est en cause, ce n’est pas tant la complexité de la procédure, car elle consiste dans une simple case à cocher sur un formulaire ([66]), ni même le contenu des engagements, car les militants associatifs ne sont ni des délinquants ni des ennemis de la République, mais le symbole qu’il représente. Les associations ne sont pas autre chose que la République en acte, au quotidien, partout sur le territoire. Dès lors, les soumettre à une telle formalité a quelque chose de profondément vexatoire. Les auteurs de cette mesure, bien loin de renforcer les principes de la République, se sont aliénés certains de ses défenseurs les plus actifs. La rapporteure pour avis appelle donc à abroger le contrat d’engagement républicain.

Au-delà de cette mesure symbolique, il importe de rétablir le dialogue avec les acteurs de terrain et de construire les dispositifs avec eux plutôt que de les leur imposer. Il faut en finir avec la verticalité, la brutalité et le mépris envers les corps intermédiaires et la société civile qui ont caractérisé les politiques conduites ces dernières années. Adopter une démarche partenariale est l’une des conditions de l’amélioration du climat démocratique de notre pays. Au cours des auditions menées par la rapporteure, les représentants du monde associatif ont appelé à une actualisation de la charte des engagements réciproques, signée en 2014. La rapporteure pour avis soutient cette proposition.

S’agissant des relations concrètes entre l’État, les collectivités et les associations, le rétablissement de la confiance suppose aussi de privilégier les conventions pluriannuelles.

2.   Garantir le financement des associations pour leur donner les moyens d’agir et de s’épanouir

Établir des relations suivies avec les partenaires associatifs permet aussi à ces derniers d’avoir de la visibilité sur le plan financier, condition sine qua non de la pérennité de leur action. L’établissement de conventions pluriannuelles paraît incontournable. Pour autant, ce n’est pas le remède à toutes les difficultés financières des associations. Or celles-ci sont pressantes : ce n’est pas un hasard si le Conseil économique, social et environnemental (Cese) a récemment donné l’alarme à travers l’un de ses avis, la question du financement de la vie associative étant, selon lui, « une urgence démocratique » ([67]).

Plusieurs pistes ont été identifiées par le Cese. La première consiste à accroître le soutien public aux associations en fixant à 2,5 % la part du budget de l’État consacrée aux associations. Il convient également de faire de la subvention le mode de financement principal des associations. Une autre piste pourrait être de créer un fonds national de mobilisation pour la vie associative, cogéré par des représentants des collectivités territoriales, de l’État et du monde associatif, abondé par plusieurs mécanismes combinés, par exemple la rétrocession volontaire de tout ou partie des intérêts des livrets bancaires d’épargne ; un relèvement des plafonds du régime du mécénat d’entreprise sous condition de reversement au fonds ; une partie des fonds saisis et confisqués par l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (Agrasc) et les intérêts que ceux-ci génèrent. Parmi les demandes récurrentes formulées auprès de la rapporteure pour avis figure également la transformation de la déductibilité des dons aux associations d’intérêt général en crédit d’impôt, sur la base des conditions actuelles du régime des dons et du mécénat. La rapporteure pour avis soutient tout particulièrement cette idée.


   Seconde partie – Les séjours collectifs pour jeunes : défense et illustration de l’éducation populaire

I.   L’éducation populaire : un puissant levier d’émancipation qui souffre d’une perte d’attractivité…

A.   Un mouvement historiquement lié à la naissance de la République et à la lutte pour la démocratisation du savoir

1.   Principes, champ d’action et histoire des mouvements d’éducation populaire

Au fil du temps, de nombreuses définitions de l’éducation populaire ont été proposées. Dans le cadre du présent rapport, dont l’un des objectifs principaux est de rendre compte des « actions en faveur de la jeunesse et de l’éducation populaire », selon l’intitulé de l’action 02 du programme 163, il peut être utile de partir de la définition qu’en donne le projet annuel de performances : « L’éducation populaire est une démarche qui vise à assurer à chacun une formation initiale ou continue, en dehors des institutions de formation classique, en complément de l’enseignement formel. Elle ouvre l’accès à l’autonomie, développe la citoyenneté et repose sur un enseignement par les pairs. » Le même document, pour présenter et justifier les crédits accordés au titre du soutien national aux associations agréées « jeunesse et éducation populaire », donne également une idée des domaines d’intervention de ces organismes : « Leur champ d’intervention est très large (loisirs, insertion, handicap, environnement, citoyenneté, etc.) et leur action d’éducation populaire concerne toutes les classes d’âge. Elles constituent un secteur déterminant au sein de la société civile, notamment pour répondre aux exigences de cohésion et d’insertion sociale, d’engagement des jeunes et de valorisation des actions de volontariat. »

L’éducation populaire se définit avant tout par ses méthodes et par ses objectifs, les premières et les seconds étant étroitement liés : elle consiste à impliquer l’individu dans le processus d’apprentissage afin de lui permettre de s’émanciper. L’enjeu, selon les mots de Johann Heinrich Pestalozzi, est « que chacun se fasse une œuvre de soimême » ([68]). Les associations d’éducation populaire sont donc des lieux où s’opère l’émancipation individuelle par l’action collective. Selon l’expression éclairante de Philippe Meirieu ([69]), l’apport essentiel de l’éducation populaire repose sur « l’affirmation que le "faire ensemble" fonde le "vivre ensemble". » ([70]) À cet égard, l’éducation populaire est un projet puissamment politique, au sens fort du terme, car elle participe à la construction de citoyens responsables et, par voie de conséquence, à la cohésion de la nation. C’est ce qui explique l’analyse suivante du Groupe des organisations étudiantes et mouvements de jeunesse du Conseil économique, social et environnemental (Cese) dans la contribution écrite qu’il a adressée à la rapporteure pour avis : « L’éducation populaire est avant tout une philosophie qui vise à permettre aux enfants et aux jeunes de s’éveiller politiquement et d’affirmer leur place dans la société ».

Les promoteurs de l’éducation populaire ont souvent cherché les prémices de ce mouvement dans la philosophie des Lumières et la Révolution française, citant notamment le fameux rapport de Condorcet sur l’instruction publique, où est promue l’idée d’une « instruction pendant toute la durée de la vie ». Pour la concrétiser, Condorcet pose l’objectif de montrer au peuple « l’art de s’instruire par soi-même ». En effet, selon l’auteur, « tant qu’il y aura des hommes qui n’obéiront pas à leur raison seule, qui recevront leurs opinions d’une opinion étrangère, en vain toutes les chaînes auront été brisées, en vain ces opinions de commande seraient d’utiles vérités ; le genre humain n’en resterait pas moins partagé en deux classes, celle des hommes qui raisonnent et celle des hommes qui croient, celle des maîtres et celle des esclaves » ([71]).

Toutefois, le premier véritable mouvement d’éducation populaire fut fondé en 1866 par Jean Macé, journalise républicain et professeur en Alsace. Il s’agit de la « Ligue française de l’enseignement », qui avait pour objectif de rassembler et éduquer les citoyens, alors que Napoléon III avait aboli les institutions démocratiques et les libertés publiques. La lutte pour la laïcité de l’enseignement fut l’un des premiers combats de la Ligue. Avant même que la loi de 1901 ne consacre la liberté d’association, l’organisation créa des comités conçus comme des lieux d’éducation civique et de coordination entre l’État et le citoyen.

L’affaire Dreyfus (1894-1906) fut un autre moment important dans l’avènement de l’éducation populaire car elle fut l’occasion d’une structuration de mouvements groupant universitaires et ouvriers au sein des « universités populaires », dont l’objet était de lutter contre la propagande antisémite qui sévissait dans les milieux populaires. Elles se définissaient comme des « associations pour l’étude destinée à affranchir l’individu de ses préjugés moraux et de ses servitudes intellectuelles » ([72]).

Si le mouvement des universités populaires fit long feu – elles subirent une éclipse rapide, mais connurent une résurgence après 1968 puis s’enracinèrent dans le pays à compter des années 1980 –, de nombreuses organisations d’éducation populaire naquirent durant la première moitié du xxe siècle, souvent en lien avec les soubresauts de l’histoire.

Le scoutisme vit le jour en Grande-Bretagne en 1907, sur l’initiative de Robert Baden-Powell, mais se développa rapidement en France : dès 1911, furent créés les Éclaireurs de France (non confessionnels) et les Éclaireurs unionistes (protestants). La plupart des mouvements de scouts actuels naquirent ainsi avant la seconde guerre mondiale.

L’année 1907 fut également marquée par la naissance de l’Union parisienne des colonies de vacances, reconnue d’utilité publique en 1934 et qui se transforma en Union française des colonies de vacances (UFCV) – désormais Union française des centres de vacances et de loisirs –, qui reste un acteur majeur du secteur.

En 1915, des universitaires et des enseignants de l’école publique décidèrent de créer l’Œuvre des pupilles de l’enseignement public (PEP) pour aider les orphelins et victimes de guerre.

Les Centres d’entraînement aux méthodes d’éducation active (Ceméa) furent mis en place pour leur part en 1937, dans le contexte des premiers congés payés instaurés par le Front populaire, sur l’initiative d’André Lefèvre, alors commissaire national des Éclaireurs de France, et de Gisèle de Failly, militante de l’« éducation nouvelle », mouvement pédagogique consistant à créer des situations où chacun – enfant, adolescent, adulte –, en prenant conscience de son milieu de vie, pouvait se l’approprier et le faire évoluer, dans une perspective de progrès individuel et social. Gisèle de Failly était ainsi persuadée que la réussite d’un séjour en colonie de vacances dépendait avant tout de la compétence de son personnel. Elle considérait ainsi qu’il fallait substituer à la simple surveillance l’action d’éducateurs préparés à leur tâche et soutenus dans leur travail par une conception pédagogique forte.

À la même époque (en 1938) fut créée la Fédération nationale des œuvres laïques de vacances d’enfants et d’adolescents (Fnolvea), dont la mission était de faciliter l’accès aux vacances et aux loisirs des enfants et des adolescents. Dissoute pendant l’Occupation, elle fut recréée en 1945 et adopta en 1949 le nom de Jeunesse au plein air, qu’elle porte toujours.

La Fédération des Francs et Franches camarades apparut quant à elle après la Libération, en 1944. Il s’agit d’un mouvement laïc, créé par des membres des Éclaireurs de France et des Ceméa. Pierre François, son premier président, décrivit le projet en ces termes : « Au lieu d’être spectateurs immobiles ou simples auditeurs, garçons et filles, de tout leur être, participent à leur propre éducation » ([73]). « Le seul moyen d’offrir à ces enfants des loisirs à la fois attirants et éducatifs, est la création d’un vaste mouvement de jeunesse où se trouvent pratiquées les diverses activités susceptibles de capter leur intérêt ».

De fait, la période qui suivit la Libération fut propice à l’essor des mouvements d’éducation populaire. Elle marqua d’abord une certaine reconnaissance institutionnelle avec la création, dès l’ordonnance du 2 octobre 1943, de l’agrément jeunesse et éducation populaire, puis par l’organisation, au sein du ministère chargé de l’Éducation nationale, d’une direction des mouvements de jeunesse et d’éducation populaire. Jean Guéhenno, écrivain, enseignant et résistant, grand partisan de l’éducation populaire, s’en vit confier la responsabilité.

Il convient également de mentionner le rôle éminent joué alors par André Philip, ancien député du Front populaire, résistant, commissaire à l’intérieur au sein du Comité français de libération nationale (CFLN) : il fonda, en septembre 1944, la République des jeunes, organisation rassemblant des syndicats de salariés et des mouvements éducatifs et de jeunesse, qui donna naissance, en 1948, à la Fédération française des maisons des jeunes et de la culture, qu’André Philip présida jusqu’en 1968. Une circulaire du 13 novembre 1944 émanant de la direction des mouvements de jeunesse et d’éducation populaire, nouvellement créée, définissait d’ores et déjà le projet dans les termes suivants : « Nous voudrions qu’après quelques années, une maison d’école au moins dans chaque ville ou village soit devenue une maison de la culture, une maison de la jeune France, un foyer de la nation, de quelque nom qu’on désire la nommer, où les hommes ne cesseront plus d’aller, sûrs d’y trouver un cinéma, des spectacles, une bibliothèque, des journaux, des revues, des livres, de la joie et de la lumière. » ([74])

Après les années de guerre, la situation physique, psychologique et sociale de nombreux enfants était préoccupante. Ainsi, la période se caractérisa également par l’essor des colonies de vacances. Il en sera question plus en détail dans la dernière partie du rapport.

Dans tous ces domaines, l’éducation populaire a contribué à forger des générations de Français. Toutes les personnes qui sont passées par ces structures savent combien elles leur doivent. Tout récemment encore, l’artiste, réalisateur, dramaturge et metteur en scène Mohamed El Khatib racontait ce qu’il devait à l’éducation populaire : c’est grâce à eux, notamment aux Ceméa, qu’il est venu au théâtre. Il explique : « Mon Bafa en poche, j’ai animé des colonies de vacances théâtre, et me suis retrouvé au festival d’Avignon en 2004 […] Avec les Ceméa, après un spectacle, on travaille d’abord sur le ressenti, l’émotion. Il n’y a donc pas d’avis légitime ou illégitime. C’est une démarche rassurante, à mille lieues de la croyance destructrice qui voudrait que la rencontre entre l’œuvre et son public s’opère comme par magie » ([75]).

En 2024, environ 4 000 associations sont détentrices de l’agrément national et 17 000 de l’agrément départemental, contribuant à assurer un maillage étroit du territoire ([76]). Selon une évaluation du Comité pour les relations nationales et internationales des associations de jeunesse et d’éducation populaire (Cnajep), ce domaine d’activité compte 630 000 associations, soit près de la moitié du nombre total d’associations en France, regroupées dans 75 organisations nationales ([77]). Plus de 6 millions de bénévoles sont engagés dans ces mouvements et 680 000 personnes y exercent un emploi. L’éducation populaire reste donc un acteur majeur de l’action culturelle et sociale du pays. Comme l’a souligné Hexopée, l’organisation professionnelle de l’éducation populaire dans les réponses écrites qu’elle a fournies à la rapporteure pour avis, « les associations d’éducation populaire sont "au premier kilomètre" de l’exercice de la citoyenneté, avec la particularité qu’elles agissent au plus près des citoyens dans tous les territoires ».

2.   Un lien historique fort avec le ministère de l’Éducation nationale et les pouvoirs publics

La plupart des mouvements d’éducation populaire ont été créés et animés par des enseignants ayant compris l’importance de prolonger et de compléter leur activité d’enseignement en dehors du cadre scolaire, posant ainsi les bases de la « continuité éducative ».

Cette complémentarité entre Éducation nationale et éducation populaire a été reconnue par la loi d’orientation sur l’école du 10 juillet 1989 ([78]), dont l’article 1er a défini pour la première fois la communauté éducative – laquelle « rassemble les élèves et tous ceux qui, dans l’établissement scolaire ou en relation avec lui, participent à la formation des élèves » – et affirmé le rôle des associations qui contribuent à l’organisation des activités périscolaires ainsi qu’à l’orientation des élèves. À ce titre, ces structures sont représentées au sein du Conseil supérieur de l’éducation, créé par la même loi ([79]). L’article 1er consacrait également l’une des idées phares de l’éducation populaire, à savoir la possibilité pour tous et à n’importe quel âge de continuer à s’instruire et à s’élever par la connaissance : « L’éducation permanente fait partie des missions des établissements d’enseignement ; elle offre à chacun la possibilité d’élever son niveau de formation, de s’adapter aux changements économiques et sociaux et de valider les connaissances acquises. »

Le décret du 6 novembre 1992 relatif aux relations du ministère chargé de l’Éducation nationale avec les associations qui prolongent l’action de l’enseignement public ([80]) vint compléter la loi de 1989 en créant le Conseil national des associations éducatives complémentaires de l’enseignement public (Cnaecep), présidé par le ministre de l’Éducation nationale et où siègent, notamment, « huit représentants des associations agréées ». Son but est de « favoriser la concertation entre l’administration de l’éducation nationale et ses partenaires » ([81]). Ces huit organisations reconnues complémentaires de l’enseignement public sont les suivantes : les Centres d’entraînement aux méthodes d’éducation active (Ceméa) ; les Francs et Franches Camarades (Francas), la Fédération des œuvres éducatives et de vacances de l’éducation nationale (Foeven) ; la Confédération des œuvres laïques de vacances d’enfants et d’adolescents-Jeunesse au plein air ; la Ligue française de l’enseignement et de l’éducation permanente ; l’Office central de la coopération à l’école (OCCE) ; la Fédération générale des associations départementales des pupilles de l’enseignement public (PEP) et le Comité national olympique et sportif français (Cnosf) ([82]).

Un décret du 15 mai 2009, abrogeant celui de 1992, a introduit dans la partie réglementaire du livre V du code de l’éducation les dispositions relatives aux associations éducatives complémentaires de l’enseignement public ([83]). Aux termes du code de l’éducation, les associations qui apportent leur concours à l’enseignement public peuvent faire l’objet d’un agrément lorsque ce concours prend l’une des formes suivantes :

«  Interventions pendant le temps scolaire, en appui aux activités d’enseignement conduites par les établissements ;

«  Organisation d’activités éducatives complémentaires en dehors du temps scolaire ;

«  Contribution au développement de la recherche pédagogique, à la formation des équipes pédagogiques et des autres membres de la communauté éducative. »

L’agrément est accordé après vérification du caractère d’intérêt général, du caractère non lucratif et de la qualité des services proposés par ces associations, de leur compatibilité avec les activités du service public de l’éducation, de leur complémentarité avec les instructions et programmes d’enseignement ainsi que de leur respect des principes de laïcité et d’ouverture à tous sans discrimination. L’agrément est accordé pour une durée de cinq ans. Il est renouvelable pour la même durée suivant la même procédure. L’agrément accordé à une association nationale ou à une fédération d’associations peut être étendu, sur sa demande, à ses structures régionales, départementales et locales qui remplissent les conditions précédemment énumérées.

Les demandes d’agrément présentées par les associations dont l’action revêt une dimension nationale sont adressées au ministre chargé de l’éducation. Les demandes d’agrément des associations dont les activités s’exercent au niveau local, départemental ou académique sont adressées au recteur d’académie. Le dossier de demande d’agrément est soumis pour avis, soit au Conseil national des associations éducatives complémentaires de l’enseignement public, soit au conseil académique des associations éducatives complémentaires de l’enseignement public. La décision accordant l’agrément est prise, selon le niveau d’intervention de l’association, par arrêté du ministre chargé de l’éducation ou du recteur d’académie.

Des subventions sont accordées aux associations assurant la mise en œuvre de politiques éducatives, à hauteur de 61,3 millions d’euros dans le PLF pour 2025, dont 54,3 millions d’euros dans le cadre de conventions pluriannuelles d’objectifs (CPO) ([84]). Les actions de ces associations « s’inscrivent dans les objectifs des politiques publiques conduites par le ministère et portent principalement sur les domaines suivants : apprentissage de la citoyenneté, accompagnement éducatif ; actions en faveur de publics à besoin éducatif particulier ; actions de formation notamment en faveur des enseignants » ([85]). Ces associations sont considérées comme des partenaires directs de plusieurs priorités ministérielles, dont la scolarisation des élèves handicapés, la lutte contre le décrochage et la réforme des rythmes scolaires.

Au niveau local, les mouvements d’éducation populaire entretiennent des relations étroites avec les collectivités territoriales, en particulier les communes et intercommunalités, car ils contribuent très largement à l’organisation et à l’animation des activités périscolaires. Ces activités ont connu un développement considérable dans le cadre de la réforme des rythmes scolaires conduite en 2013 ([86]) parallèlement à l’élaboration de la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, dite « loi Peillon » ([87]). Tout en entérinant le retour à quatre jours et demi de classe, la réforme prévoyait en effet l’organisation d’activités périscolaires sur le temps dégagé en fin de journée. La mise en place de ces activités supposait naturellement le secours des associations d’éducation populaire. Cette réforme a été difficilement acceptée par de nombreuses collectivités en raison de son coût et de la complexité qu’elle entraînait. Le décret du 27 juin 2017, signé par Jean-Michel Blanquer, en a quasiment sonné le glas en autorisant un retour à la semaine de quatre jours ([88]).

La loi « Peillon » avait également consacré au niveau législatif les projets éducatifs territoriaux (PEDT). Ces derniers visent à formaliser « une démarche permettant aux collectivités territoriales volontaires de proposer à chaque enfant un parcours éducatif cohérent et de qualité avant, pendant et après l’école, organisant ainsi, dans le respect des compétences de chacun, la complémentarité des temps éducatifs ». Le PEDT « relève, à l’initiative de la collectivité territoriale compétente, d’une démarche partenariale avec les services de l’État concernés et l’ensemble des acteurs éducatifs locaux » ([89]). La réforme des rythmes scolaires a surtout pâti de la manière dont elle a été conduite et mise en œuvre. Son intention était fondamentalement vertueuse car elle visait à tenir compte des besoins des élèves et à démocratiser leur accès aux activités culturelles et sportives. Par ailleurs, les PEDT ont constitué, dans nombre de territoires, de véritables réussites. La rapporteure pour avis considère qu’indépendamment de la question du financement des activités périscolaires, il importe d’encourager les collectivités à se saisir de cet instrument.

En dépit de leur maillage territorial très développé et du rôle important qu’elles occupent au quotidien dans les collectivités, les associations appartenant au secteur de l’éducation populaire sont confrontées à de nombreux défis qui altèrent leurs capacités d’action.

B.   Une perte de vitesse liée aux évolutions sociétales, à un manque de reconnaissance des pouvoirs publics et à la crise du secteur de l’animation

1.   Un secteur particulièrement exposé aux difficultés du monde associatif

L’éducation populaire « vit encore aujourd’hui, malgré les hésitations et les abandons successifs de la plupart des politiques », souligne Philippe Meirieu ([90]).

Non seulement les mouvements d’éducation populaire n’échappent pas aux difficultés que rencontrent la plupart des associations, mais ils semblent même, à bien des égards, y être particulièrement exposés. L’évolution des mentalités, caractérisée tout à la fois par le développement de l’individualisme, le repli sur la cellule familiale et la consommation de loisirs pose problème à ces structures.

La diminution des financements publics émanant à la fois de l’État et des collectivités territoriales porte atteinte à leur capacité d’action. Les premiers résultats du baromètre 2024 d’Hexopée, organisation professionnelle de l’éducation populaire, font apparaître une diminution des soutiens publics : 29 % des financeurs ont réduit leur apport, après des diminutions de 20 % en 2022 et 25 % en 2021. Pour 30 % des structures, l’exécution du budget s’est révélée nettement plus dégradée que ne le laissaient penser leurs prévisions. Cette situation est liée notamment à l’inflation pour 28 % des organismes et à la hausse des rémunérations des salariés (pour 35 % d’entre eux). En conséquence, 29 % des répondants à l’enquête déclaraient disposer de moins de trois mois de couverture d’activité dans leur trésorerie, et seulement 27 % disposaient d’une visibilité à plus de six mois. Tous les répondants notaient une dégradation de l’état de leur trésorerie comparativement à l’année 2022, et ce alors même que 70 % d’entre eux ne disposaient pas d’emprunts en cours, et que ces derniers ne représentaient plus de 30 % du budget annuel que pour 3 % des structures. Ainsi, 39 % des employeurs de l’éducation populaire ont été contraints de renoncer à des investissements, pour certains jugés essentiels, en 2023, grevant d’autant la capacité du secteur à innover et à développer l’activité et l’emploi.

Il convient en particulier d’incriminer la baisse drastique de la part des subventions de fonctionnement dans le budget de ces associations, par opposition aux subventions liées aux appels à projets. De ce point de vue, ce qui constitue l’une des spécificités de l’éducation populaire rend particulièrement difficile, pour ces associations, d’entrer dans cette logique : les structures qui se revendiquent de la philosophie de l’éducation populaire sont volontiers indépendantes et frondeuses. Elles sont réticentes, à tout le moins, lorsqu’il s’agit d’accomplir des démarches que certains de leurs militants assimilent à un abandon de leur liberté. On pense, en particulier, au respect des cahiers des charges souvent complexes qu’il faut respecter pour pouvoir répondre à un appel à projets ou entrer dans un dispositif. Ces organisations récusent par principe toute instrumentalisation des individus comme des mouvements collectifs. Ils sont ainsi confrontés à une crise existentielle.

À cet égard, la professionnalisation qu’impliquent de telles démarches, et qui constitue un mouvement de fond depuis plusieurs décennies, est radicalement étrangère à un grand nombre d’entre elles, alors que le projet dont elles sont porteuses repose sur l’engagement et l’encadrement des jeunes par les jeunes. Cette évolution entre frontalement en contradiction avec les aspirations profondes des fondateurs de ces mouvements et des plus anciens de leurs militants. Certains d’entre eux déplorent un éloignement par rapport aux valeurs initiales, ce dont témoigne, par exemple, l’obligation dans laquelle se trouvent des structures organisatrices de séjours collectifs pour mineurs d’entrer en concurrence avec des structures relevant clairement du secteur marchand.

Cette crise existentielle se double d’une crise de confiance liée au sentiment d’être méprisé ou déconsidéré par les pouvoirs publics. En témoigne notamment le fait que pas un seul ministre, au cours des dix dernières années, n’a défendu dans l’intitulé de son ministère les valeurs de l’éducation populaire. Au-delà du symbole, force est de constater que, s’agissant d’une politique publique, ne pas être visible, c’est compter pour quantité négligeable. Les résultats de l’enquête menée par Hexopée auprès de ses adhérents sont significatifs : 75 % des dirigeants de ces structures estiment que leurs financeurs publics sont assez ou totalement indifférents à leur situation ([91]).

En outre, les mouvements d’éducation populaire souffrent d’un certain mépris d’une « intelligentsia » politique et culturelle d’ailleurs autoproclamée comme telle. C’est ce que soulignait récemment l’artiste Mohamed El Khatib lorsqu’il regrettait que l’idée d’une scission entre éducation populaire et culture « légitime » ait prévalu pendant longtemps : ce préjugé « a fait beaucoup de dégâts et a contribué à disqualifier ces mouvements d’éducation populaire » ([92]), selon lui. La rapporteure pour avis partage ce point de vue.

Au mépris est venu s’ajouter la défiance avec la création du contrat d’engagement républicain. Si le monde associatif a dénoncé avec vigueur cette disposition jugée bien souvent « scélérate », les mouvements d’éducation populaire se sont sentis particulièrement visés. Or l’éducation populaire, c’est la République mise en application au quotidien : soumettre les organisations qui participent de son esprit à la signature de ce document est tout à la fois vexant, inutile et absurde. Il faut abroger le contrat d’engagement républicain.

Une autre évolution préjudiciable aux mouvements d’éducation populaire tient à l’évolution du bénévolat. En raison des principes qui les sous-tendent, les associations d’éducation populaire attendent de leurs membres un engagement fort et dans la durée. Les modifications profondes que connaît le bénévolat les affectent donc au premier chef : vieillissement de la base militante, difficultés à renouveler les instances dirigeantes, ou encore évolution du mode d’engagement des jeunes, qui passent plus volontiers d’une cause à l’autre et privilégient des modes d’action différents. La structure et le mode de fonctionnement de fédérations parfois centenaires semblent peiner à s’adapter aux souhaits des jeunes générations. Une autre évolution, liée à la précédente, et qui paraît tout aussi préoccupante pour la pérennité des mouvements d’éducation populaire, tient au manque d’engagement des jeunes enseignants dans ces structures, alors que, traditionnellement, ils constituaient l’essentiel des bataillons de ces organisations. Là encore, le changement des mentalités et la perte du sens de l’engagement sont certainement en cause.

Le modèle traditionnel sur lequel reposent les associations d’éducation populaire est confronté à des défis inédits qu’il peine à relever pour l’instant. Pour cet ensemble de raisons, dont les effets se cumulent, les mouvements d’éducation populaire sont en perte de vitesse. À cela s’ajoute un élément déterminant : la crise du secteur de l’animation. En effet, par essence, l’éducation populaire repose sur le recours à des animateurs, dont la plupart, traditionnellement, sont bénévoles.

2.   La crise du secteur de l’animation, un facteur aggravant

Depuis plusieurs années, le secteur de l’animation souffre d’un manque de vocations. Or la fonction d’animateur est étroitement liée aux mouvements d’éducation populaire, comme vient opportunément le rappeler la définition qu’en donne le Trésor de la langue française : l’animateur est « celui qui est chargé du travail éducatif dans des groupements d’éducation populaire » ([93]).

Durant les auditions menées par la rapporteure pour avis, les acteurs de l’éducation populaire ont été nombreux à souligner les difficultés persistantes à recruter un nombre suffisant d’animateurs. Durant l’été 2023, environ 30 000 postes dans les colonies de vacances et les centres de loisirs étaient vacants selon l’organisation Hexopée. Ces difficultés sont désormais enracinées, comme le montrent les résultats des enquêtes menées auprès des membres du réseau d’Hexopée : 80 % des répondants faisaient état de difficultés de recrutement en 2021, encore 76 % en 2022 et 72 % en 2023. Si les structures sont contraintes de s’adapter, les conséquences sur leurs activités sont inévitables : surcharge de travail pour les animateurs, capacités d’accueil réduites, annulation d’activités et de séjours, ou encore sentiment que le travail est moins bien réalisé, ce qui est démotivant pour le personnel.

À ces difficultés de recrutement s’est ajouté, depuis 2021, la concurrence déloyale exercée par les séjours de cohésion du SNU, mentionnée précédemment : les milliers d’animateurs embauchés dans ce cadre font défaut aux structures de l’éducation populaire.

Le constat est donc sans équivoque : la France manque d’animateurs formés. À cet égard, il convient de rappeler qu’il existe deux parcours distincts permettant d’exercer les fonctions d’animateur : celui de l’animation volontaire et celui de l’animation professionnelle. Dans la première catégorie, il convient de mentionner le brevet d’aptitude aux fonctions d’animateur (Bafa) et le brevet d’aptitude aux fonctions de directeur (BAFD), qui permettent d’encadrer à titre non professionnel des enfants et des adolescents en accueil collectif de mineurs (colonie de vacances, accueil de loisirs, accueil périscolaire) ; il s’agit d’un engagement volontaire. Dans la seconde, on trouve notamment le brevet professionnel de la jeunesse, de l’éducation populaire et du sport (BPJES), qui est un diplôme d’État délivré au titre de la spécialité animateur, et le diplôme d’État de la jeunesse, de l’éducation populaire et du sport (Dejeps) dans la spécialité animation socio-éducative cultuelle.

S’agissant de l’éducation populaire et de l’exemple d’illustration qui constituera la dernière partie de ce rapport, à savoir les séjours de vacances collectifs pour mineurs, la rapporteure pour avis se concentrera pour l’essentiel sur le Bafa et le BAFD, tout en insistant sur le fait que l’ensemble des titres et métiers de la filière doit bénéficier de l’attention de la puissance publique. C’est tout l’objet du comité de filière animation, dont les travaux doivent impérativement aboutir.

À la suite des assises de l’animation, qui se sont déroulées de novembre 2021 à février 2022, le gouvernement de l’époque avait annoncé la création de ce comité de filière qui rassemble collectivités locales, associations de jeunesse et d’éducation populaire, financeurs, organisations patronales et organisations syndicales. Son objectif était de proposer des déclinaisons opérationnelles pour chaque mesure du plan « Pour un renouveau de l’animation en accueils collectifs de mineurs » lancé par Sarah El Haïry, alors chargée de la jeunesse et du service national universel, en vue de soutenir les collectivités dans leur gestion des accueils collectifs de mineurs et enrichir le dialogue entre l’école et le périscolaire ; renforcer l’accès à la formation, améliorer la qualité de l’emploi et créer des passerelles entre les secteurs proches ; attirer davantage de jeunes vers l’animation volontaire en redonnant du sens à cette forme d’engagement et en améliorant concrètement les conditions de formation et d’emploi.

Un certain nombre des participants à ses travaux considère que, pour l’instant, les résultats ne sont pas à la hauteur des attentes. Parmi les propositions concrètes figure tout de même celle qui consiste à revaloriser la rémunération plancher pour les animateurs engagés sur la base d’un contrat d’engagement éducatif (CEE) : alors qu’elle est de 25,63 euros brut par jour, elle devrait passer à 50 euros ([94]). La rapporteure pour avis soutient cette demande. Le ministre Gil Avérous lui a indiqué avoir signé un décret revalorisant le CEE, ce dont elle se félicite. Une indemnité de 25 euros par jour n’est pas à la hauteur des responsabilités assumées par les jeunes qui s’engagent à travers le CEE. En portant le montant plancher à 50 euros par jour, non seulement on ne dévoie pas la notion d’engagement, mais ce montant correspond à une pratique déjà largement partagée dans les mouvements historiques de l’éducation populaire. Pour rappel, « le CEE est un dispositif contractuel particulièrement adapté au secteur car il permet à des animateurs ou directeurs engagés de s’investir sur de courtes périodes à titre occasionnel et non professionnel avec une amplitude horaire correspondant à la réalité du fonctionnement des périodes de vacances » ([95]).

Outre l’enjeu de la rémunération, la crise des vocations est due à l’insuffisance de l’esprit d’engagement. Il convient donc de stimuler celui-ci dès le plus jeune âge. Le service civique pourrait également être une porte d’entrée vers l’animation volontaire. C’est la raison pour laquelle la rapporteure pour avis a proposé, à travers un amendement au PLF pour 2025, d’encourager les jeunes en service civique à passer le Bafa ou le BAFD ([96]). En effet, le nombre de jeunes passant le Bafa est insuffisant, même s’il est reparti à la hausse : en 2023, 49 800 Bafa ont été délivrés, contre 31 000 en 2020.

À la crise des vocations répond également une crise des formations que la plupart des personnalités et organismes reçus par la rapporteure pour avis ont soulignée. Cette crise revêt deux dimensions : d’une part, la formation est de plus en plus hétérogène, malgré l’existence d’un arrêté définissant le contenu de la formation ([97]) ; d’autre part, un problème structurel existe, lié au fait que ces formations sont de plus en plus dispensées en externat.

En ce qui concerne le premier aspect, le groupe des organisations de jeunesse du CESE, par exemple, a souligné le fait que « le secteur de l’animation souffre de trop fortes disparités territoriales concernant la formation ». Au-delà de la disparité entre les territoires, nombre de témoins ont manifesté leur inquiétude face à la diminution de la qualité globale de la formation et des exigences du jury.

S’agissant de la formation en externat, celle-ci est d’abord liée à des raisons de coût, car accueillir des jeunes en internat est évidemment plus cher, et il est dans l’intérêt des organismes de formation d’optimiser les coûts, d’autant que ces formations constituent des ressources non négligeables pour eux ; nombre d’entre eux ne peuvent s’en passer, compte tenu par ailleurs des difficultés financières qu’ils rencontrent. Cette évolution est également liée à une forte demande des candidats eux-mêmes, notamment les plus jeunes, qui n’ont plus l’habitude de vivre en dehors du foyer familial. Les centres de formation proposent donc désormais presque exclusivement les deux stages théoriques en externat, permettant aux futurs animateurs de rentrer chez eux le soir. La qualité de la formation elle-même s’en ressent nécessairement. Cette modalité est pourtant un préalable indispensable pour que les futurs animateurs soient réellement aptes à encadrer des groupes de jeunes, en particulier dans le cadre de colonies de vacances, dans tous les temps de la vie quotidienne. Or un stagiaire qui rentre chez lui tous les soirs n’est pas suffisamment préparé à encadrer les enfants en séjour, a fortiori quand bien souvent les futurs animateurs n’ont eux-mêmes pas vécu cette expérience dans leur enfance.

Il convient donc d’encourager les organismes de formation au Bafa à faire machine arrière. Cela suppose de compenser le surcoût induit par une formation en internat en le versant directement aux organismes à travers un fonds dédié. C’était l’objet de l’amendement II-AC524 défendu en commission par la rapporteure pour avis.

L’âge requis pour passer le Bafa, fixé à l’origine à 17 ans, a été abaissé à 16 ans en octobre 2022, dans l’espoir de grossir les bataillons de candidats. Si l’idée n’était pas mauvaise sur le principe, dans la mesure où passer le Bafa peut faciliter l’accès des jeunes à l’autonomie en leur confiant des responsabilités, elle se heurte en pratique à un obstacle principal : la difficulté pour les candidats de trouver une structure d’accueil pour l’accomplissement d’un stage pratique. Au cours des auditions menées par la rapporteure pour avis, ce constat a été posé de manière répétée : les organisateurs d’activités péri- ou extrascolaires et de séjours collectifs sont réticents à l’idée de confier l’encadrement d’un groupe à des recrues aussi jeunes et inexpérimentées. En 2023, selon les données fournies par l’Injep, 1 913 jeunes âgés de 16 ans ont passé le Bafa. Le nombre de détenteurs âgés de 17 ans a quant à lui fortement augmenté, passant de 5 228 en 2022 à 9 017 en 2023 ([98]).

L’effet de l’abaissement de l’âge se fait certainement sentir dans cette évolution dont la rapporteure pour avis se réjouit, bien entendu. Il est malgré tout permis de se demander dans quelle mesure ces jeunes ont réellement l’occasion d’exercer les fonctions d’animateurs une fois leur brevet en poche. En effet, les acteurs du secteur ont été nombreux à déplorer le fait que la valorisation de la détention du Bafa dans Parcoursup conduisait un nombre non négligeable de jeunes à le passer dans le seul but de présenter un meilleur dossier en vue du passage dans l’enseignement supérieur. Il importe de couper court à cette dérive qui conduit à gonfler artificiellement le nombre de détenteurs du Bafa, sans pour autant que cela se traduise par une augmentation du nombre d’animateurs dans les structures où ils font cruellement défaut.

Le développement du Bafa passe certainement par la résolution d’un problème majeur : le nombre d’abandons en cours de formation. Selon l’Injep, le taux d’abandon était de 43 % en 2023, contre 33 % en 2013 ([99]). Cette évolution est très préoccupante car elle ne peut avoir que deux explications : le manque de motivation des jeunes qui entament cette formation ou le caractère inadapté de celle-ci. Dans un cas comme dans l’autre, il convient de mener un examen précis et sans concession de la situation.

Pour résoudre les difficultés que rencontre la filière de l’animation, il ne suffira pas d’accroître le nombre de titulaires du Bafa. Par ailleurs, il serait contre-productif de brouiller la distinction entre animation volontaire et animation professionnelle : ces deux pans distincts de l’activité sont nécessaires et doivent être préservés. L’animation volontaire compte parmi les premières étapes d’un parcours d’engagement : il importe de l’encourager et de la valoriser. L’animation professionnelle, gage de qualité et de ressources humaines pérennes pour les organismes proposant des activités culturelles, sportives et de loisirs, doit quant à elle être confortée par l’amélioration des conditions de travail et de rémunération. Durant les auditions, de nombreux professionnels de la filière ont souligné l’importance de limiter la concurrence entre animation volontaire et animation professionnelle en évitant, autant que faire se peut, d’employer des animateurs volontaires pour encadrer des activités pérennes. La rapporteure pour avis fait sienne cette position, tout en soulignant que la situation financière des collectivités locales rend cet objectif inatteignable à court terme.

II.   … mais qui est toujours porteur de sens et peut connaître un renouveau : l’exemple des séjours collectifs pour jeunes

Parmi les domaines où l’apport des mouvements d’éducation populaire est le plus évident et crucial, les séjours collectifs de jeunes occupent une place éminente. Alors que leurs vertus émancipatrices ne sont plus à démontrer, les « colos » sont en recul. À ce titre, elles constituent l’illustration de la richesse dont l’éducation populaire est porteuse et des difficultés que celle-ci rencontre. Elles permettent également de dessiner le chemin d’un renouveau.

A.   L’émergence progressive de la culture du temps libre, des loisirs et des vacances

« Les Anciens sont les anciens et nous sommes les gens de maintenant », selon la formule célèbre de Molière ([100]). Il ne sera donc pas question ici de retracer l’histoire du temps libre, des loisirs et des voyages, car il faudrait pour cela partir au moins de l’otium cher aux Romains et rappeler les vertus que les plus grands philosophes, depuis Montaigne – au moins – ont prêtées aux voyages. L’essentiel, dans la perspective de la rapporteure pour avis, est de rappeler quelques étapes de la démocratisation des loisirs culturels et des départs en vacances.

La conception moderne de la séparation entre travail et temps libre est le résultat d’une construction historique qui trouve son origine dans la révolution industrielle. Comme l’a montré l’historien Alain Corbin, toute une « gamme de temps disponibles » s’est peu à peu insérée « au cœur de la charpente temporelle des sociétés occidentales, entre 1850 et 1960 » ([101]).

Dans la première partie du xixe siècle, le temps du paysan, de l’artisan et de l’ouvrier étaient encore « poreux, pénétrés d’imprévu, ouverts à la spontanéité, soumis à l’interruption fortuite ou récréative. Ce temps de relative lenteur, souple, malléable, occupé par des activités souvent mal déterminées a été peu à peu remplacé par le temps calculé, prévu, ordonné, précipité de l’efficacité et de la productivité ». La révolution industrielle a en effet imposé « une nouvelle distribution des temps sociaux ». « La semaine se partage, de plus en plus consciemment, entre le temps pour soi et le temps destiné au patron ». Le temps compté et consacré à la production de biens « a suscité la revendication de l’autonomie d’un temps pour soi ». Or ce temps qui, à l’origine, était vide, caractérisé par l’absence de travail, « a paradoxalement suscité un autre temps de loisir et de distraction, à son tour prévu, organisé, rempli, agité », celui de la consommation culturelle et sportive. La révolution des transports, qui intervient à la même époque, détermine quant à elle « une nouvelle pratique de l’espace » qui reste malgré tout pendant plusieurs décennies l’apanage des classes privilégiées.

L’introduction des congés payés par le Front populaire marqua une véritable rupture dont l’importance a été largement documentée par les sociologues et les historiens ([102]). Toutefois, au lendemain de la seconde guerre mondiale, triompha « un loisir-marchandise perçu, avant tout, comme un temps disponible pour la consommation ». Les « professionnels américains du loisir » imposèrent alors leur modèle à l’ensemble de l’Europe occidentale, caractérisé par le désir de distraction. Facilitée par une nouvelle révolution des transports, cette évolution a façonné la vision du monde et du tourisme que de nombreux Français ont adoptée, à l’image de la plupart des peuples occidentaux.

Or, loin de se limiter à la frivolité que suppose le projet consistant à se « dépayser » et à « passer le temps », les vacances peuvent être un élément – parmi d’autres – d’un projet collectif, c’est-à-dire politique. En effet, elles facilitent l’accès à l’autonomie et contribuent à la socialisation, pour peu qu’elles se déroulent dans un cadre propice. C’est là qu’interviennent les séjours collectifs pour mineurs, dans l’organisation desquels l’éducation populaire joue un rôle essentiel.

B.   Face à la consommation touristique, les séjours collectifs de mineurs dans le cadre de l’éducation populaire offrent un modèle riche de sens mais sont confrontés à des difficultés majeures

1.   Un projet humaniste et émancipateur

« Il n’y a qu’une espèce valide de voyages, qui est la marche vers les hommes », écrivit le romancier et critique Paul Nizan ([103]). C’est tout le sens des colonies de vacances et autres « camps » – scouts ou autres ; c’est à ce titre que la question des vacances est profondément politique.

« La colonie de vacances se caractérise par une vie en collectivité constante, entre pairs et sans les parents. Elle permet aux enfants d’apprendre à vivre ensemble, 24h sur 24. Il s’agit d’un apport essentiel qui n’est finalement peut-être pas assez valorisé. » ([104]) Cette définition, ainsi que le constat – que la rapporteure pour avis partage entièrement –, permettent de comprendre l’objectif et l’intérêt des « colos » et, plus largement, des séjours collectifs de mineurs, y compris les camps scouts.

Les premières colonies de vacances sont apparues dans le dernier tiers du xixe siècle. La plupart des historiens en font remonter l’origine à l’initiative d’un pasteur suisse, Wilhelm Brion, qui, en 1876, emmena sur le plateau d’Appenzell un premier groupe d’enfants vivant dans la banlieue industrielle de Zurich pour les soustraire à l’atmosphère viciée de la ville, leur procurer une nourriture abondante et les faire bénéficier de l’air pur de la montagne. L’idée fut reprise en France dès 1881 par le pasteur Théophile Lorriaux, qui fonda l’Œuvre des Trois semaines afin d’envoyer des enfants parisiens à la campagne. L’objectif de ces premières colonies était à la fois social et hygiéniste.

Le mouvement, en prenant de l’ampleur, quitta rapidement l’orbite des institutions de bienfaisance d’inspiration religieuse. Les organisations d’éducation populaire contribuèrent activement au développement des colonies de vacances, comme l’attestent les jalons historiques rappelés précédemment : apparition du scoutisme, de l’UFCV, des Ceméa ou encore de Jeunesse au plein air (voir supra).

Loin de la spontanéité des débuts, les séjours de vacances collectifs pour mineurs avec hébergement se déroulent désormais dans un cadre juridique très précis, défini par les articles L. 227-1 à L. 227-12 du code de l’action sociale et des familles, précisés par des dispositions réglementaires.

Aux termes de l’article R. 227-1 du même code, cette catégorie comprend :

«  Le séjour de vacances d’au moins sept mineurs, dès lors que la durée de leur hébergement est supérieure à trois nuits consécutives ;

«  Le séjour court d’au moins sept mineurs, en dehors d’une famille, pour une durée d’hébergement d’une à trois nuits ;

«  Le séjour spécifique avec hébergement d’au moins sept mineurs, âgés de six ans ou plus, dès lors qu’il est organisé par des personnes morales dont l’objet essentiel est le développement d’activités particulières. ([105]) […]

« 4° Le séjour de vacances dans une famille de deux à six mineurs, pendant leurs vacances, se déroulant en France, dans une famille, dès lors que la durée de leur hébergement est au moins égale à quatre nuits consécutives. Lorsque ce type de séjour est organisé par une personne morale dans plusieurs familles, les conditions d’effectif minimal ne sont pas prises en compte. »

Les séjours de cohésion du SNU relèvent du même régime.

Les camps scouts, quant à eux, sont couverts par les dispositions visant à protéger les mineurs qui y participent, mais sont placés dans une catégorie distincte.

Enfin, les accueils de mineurs avec hébergement englobent ce que l’article R. 227-17 du même code définit comme l’« activité accessoire » à un accueil de loisirs et de jeunes, pour une durée de une à quatre nuits. Il s’agit de ce que l’on appelle les « mini-camps ».

Les organisateurs de ces accueils, de même que les structures qui hébergent les mineurs, doivent effectuer une déclaration en préfecture (article R. 227-2 du même code). Le respect de règles précises en matière d’hygiène et de sécurité s’impose (articles R. 227-5 à R. 227-11). Un nombre minimal d’animateurs est requis : un pour huit mineurs âgés de moins de six ans ; un pour douze mineurs âgés de six ans ou plus (article R. 227-15). Ces animateurs doivent posséder des qualifications précises, à savoir au minimum le Bafa – étant précisé que les jeunes passant l’épreuve pratique du brevet d’aptitude peuvent faire partie de l’encadrement des séjours (article R. 227-12).

En 2022-2023, la Djepva a enregistré 1,33 million de départs d’enfants ou d’adolescents dans le cadre de 47 300 séjours. Selon des chiffres un peu plus anciens – mais la structure de l’offre n’a pas été entièrement bouleversée depuis lors, malgré la crise sanitaire –, rappelés par le COJ dans son rapport de 2021, en 2018-2019, 10 348 organisateurs de séjours étaient identifiés, dont 6 459 étaient des associations loi de 1901, soit 62 %, et 3 420 collectivités territoriales (33 %) ([106]) . Pour le reste, il pouvait s’agir de comités sociaux et économiques (CSE) d’entreprises, de sociétés commerciales ou de personnes physiques. Seules 500 associations environ pouvaient être définies comme « spécialistes » de l’organisation de colos. Parmi les dix structures ayant organisé le plus de séjours en 2018-2019, se trouvaient sept associations, les autres étant des CSE d’entreprises ou des sociétés commerciales. L’organisation de séjours collectifs de mineurs relève donc toujours, pour l’essentiel, « de petites structures associatives, comportant peu de salariés permanents et fortement soutenues par le bénévolat et l’engagement dans l’animation » ([107]).

La distinction entre l’organisation d’un séjour et l’accueil s’impose car, comme le relevait le COJ, « de nombreux organisateurs ne possèdent pas les bâtiments où se déroulent les colonies de vacances et, à l’inverse, de nombreuses structures possédant des lieux d’accueil n’organisent pas de séjours mais proposent une prestation d’accueil à des organisateurs. Aujourd’hui, il semble que le modèle de l’organisateur-gestionnaire de lieu de séjour ayant eu cours jusque vers la fin du xxe siècle soit fortement interrogé » ([108]).

La localisation des structures d’accueil fait apparaître une géographie très contrastée : en 2018-2019, 4 250 communes environ avaient abrité des séjours collectifs de mineurs avec hébergement, hors mini-camps et hors scoutisme, et les lieux d’accueil se concentrent en majorité dans les régions voisines de l’arc atlantique et dans les chaînes montagneuses des Alpes et des Pyrénées. À l’inverse, du Nord-Est au Sud-Ouest, en superposition de la « diagonale du vide », on compte peu de lieux de séjour.

Nombre d’accueils collectifs de mineurs avec hébergement
organisés au cours de l’année scolaire 2018-2019

Source : COJ, Les Colos, un enjeu éducatif pour tous !, 2021

2.   Une activité en crise en raison d’une multiplicité de facteurs

Dans le même rapport, le COJ faisait le constat d’un modèle en crise : « Les indicateurs témoignent d’une baisse structurelle du nombre de séjours organisés ainsi que d’enfants et de jeunes accueillis, depuis plusieurs années » ([109]). La crise sanitaire de 2020 n’aurait donc fait qu’accentuer une tendance préexistante. De fait, en quelques années, le nombre de jeunes partant en séjours collectifs a fortement diminué.

Durant les auditions menées par la rapporteure pour avis, certains acteurs du secteur ont évoqué le chiffre de 5 millions de départs. L’analyse des statistiques rassemblées depuis 1954 conduit à revoir cette estimation : il paraît plus juste d’évoquer un pic à plus de 1,8million de départs au total – pour toutes les catégories de séjours avec hébergement et pour l’ensemble des vacances scolaires d’une année –, enregistré entre 2008-2009 et 2011-2012 ([110]). Dans l’imaginaire collectif, l’âge d’or des colonies de vacances se situe dans les années 1960. En réalité, et en se référant à la part de jeunes participant à de tels séjours rapportée à l’ensemble du public potentiel, le point culminant se situerait plutôt dans les années 1990 : en 1994, 14 % des enfants et des jeunes âgés de 5 à 19 ans seraient partis en séjours collectifs, contre 12 % environ dans les années 1960 ([111]). À l’inverse, les années 2019-2020 et 2020-2021, marquées par la crise sanitaire, ont enregistré un nombre de départs historiquement bas depuis la fin de la seconde guerre mondiale : respectivement 670 000 et 900 000. La décrue était toutefois quasi continue depuis 2012 : 1,76 million en 2012-2013, 1,6 million en 2014-2015 et 1,5 million en 2016-2017 et 1,43 million en 2017-2018.

L’évolution du nombre de séjours proposés reflète cette évolution, avec un sommet atteint en 2010-2011, suivi d’un effondrement spectaculaire.

Évolution du nombre de séjours avec hébergement

Source : Injep, « Accueils collectifs de mineurs (colonies et centres de vacances, centres aérés et de loisirs, scoutisme…) en 2018/2019 »

Les données les plus récentes confirment la reprise après l’effondrement de la crise sanitaire, sans pour autant que le niveau d’avant la crise soit retrouvé, alors même qu’il était largement inférieur à celui du début de la décennie.

Nombre de séjours avec hébergement par type
et effectifs de mineurs correspondants
pour les années scolaires 2018-2019 à 2022-2023

Source : Injep, « Fréquentation des accueils collectifs de mineurs (accueils de loisirs, colonies de vacances, scoutisme…) en 2022-2023 »

Plusieurs phénomènes se conjuguent pour constituer ce qu’il faut bien appeler une crise du secteur des séjours collectifs : de moins en moins de séjours, un nombre d’enfants et de jeunes en baisse (en particulier dans la tranche d’âge des collégiens), des séjours de plus en plus courts et une mixité sociale de moins en moins au rendez-vous.

En ce qui concerne la diminution de la durée des séjours, la règle est désormais de proposer des séjours durant une à deux semaines, « loin des trois ou quatre semaines proposées trente ans en arrière, alors même que les études montrent que les séjours longs sont ceux qui présentent le plus fort potentiel de bénéfices pour les enfants car ils permettent de répondre aux enjeux éducatifs », soulignait le COJ. La durée des séjours dans le champ de l’ensemble des accueils collectifs de mineurs avec hébergement, hors scoutisme et séjours dans une famille « a baissé en vingt ans, passant d’une moyenne de 14 jours à 7 jours en 2018-2019 » ([112]).

Interrogée sur les causes du déclin de la fréquentation des colonies de vacances et des autres catégories de séjours, la Djepva a déclaré : « Cette baisse de la fréquentation s’explique principalement par le coût des séjours ». La hausse du prix des séjours est en partie conjoncturelle, liée à l’inflation. L’Union nationale des organisations de séjours éducatifs, linguistiques et formation en langues (Unosel) a ainsi fait observer : « L’inflation a en effet beaucoup pesé sur les organisateurs : hausse des frais d’hébergements (avec une diminution manifeste des marges de négociations), d’alimentation, frais de transport et énergie. En moyenne, nous avons observé une hausse de 5 % par an des coûts des séjours depuis 2022 » ([113]).

Toutes les familles ne sont pas affectées de la même façon par la hausse des prix des séjours, dans la mesure où les dispositifs de soutien au départ pour les enfants issus des milieux les plus défavorisés jouent leur rôle. Parmi eux, il convient de mentionner les aides de la caisses d’allocations familiales (CAF), les « colos apprenantes » et diverses mesures prises par les collectivités locales et/ou des associations. Il apparaît, en revanche, que les enfants dont les parents appartiennent aux classes dites « moyennes » fréquentent de moins en moins les colos : comme le relevait le COJ, « depuis plus de 20 ans, différentes études montrent que les enfants des classes moyennes partent de moins en moins en séjours de vacances » ([114]). Cela explique l’accentuation de la dichotomie entre des « colos de pauvres » – l’expression est revenue plusieurs fois durant les auditions conduites par la rapporteure pour avis – et des « colos de riches ». À cet égard, la montée en gamme des séjours proposés par certains comités sociaux et économiques (CSE) d’entreprises semblent surtout profiter aux enfants de cadres. En ce qui concerne l’origine des participants aux colos, l’Unosel relève également : « Géographiquement, les citadins sont majoritaires. Les jeunes issus de zones rurales sont moins représentés. »

En dépit des dispositifs d’aide au départ, la situation des classes les plus modestes reste très difficile : « Les enfants partent deux à trois fois moins lorsque leurs parents gagnent moins de 4 000 euros que lorsqu’ils gagnent 6 000 euros et plus », relevait le COJ en 2021. Les enfants d’ouvriers et d’employés partent moins fréquemment en colonies de vacances que les enfants de cadres : en moyenne, 42 % des enfants d’ouvriers et 44 % des enfants d’employés sont ainsi partis en colonie de vacances durant leur enfance ou leur adolescence, contre 47 % pour les enfants de cadres et 59 % pour les enfants de personnes exerçant une profession indépendante.

Or, comme le montrent à la fois les statistiques et l’expérience, la culture du départ n’est pas innée : partir en vacances s’apprend, et lorsque des parents n’ont jamais fait eux-mêmes l’expérience de la colonie de vacances, les chances qu’ils y envoient leurs enfants sont plus réduites.

D’autres causes expliquent également la tendance observée.

La diminution du nombre de séjours trouve une partie de son origine dans les difficultés financières des associations, déjà mentionnées à plusieurs reprises dans le rapport, qui conduisent certains organisateurs de séjours à ne plus proposer certains formats intéressants mais ne trouvant pas preneur (séjours trop longs, trop lointains, proposant des activités trop onéreuses). La raréfaction du soutien des collectivités territoriales, due aux difficultés que celles-ci rencontrent elles-mêmes, entre aussi en ligne de compte. S’agissant en particulier des départements, l’Unosel a ainsi noté leur « désengagement croissant » et déploré le caractère disparate des programmes selon les territoires.

Parmi les difficultés financières, il importe de relever celles qui sont liées à l’entretien et à la rénovation du bâti. Tous les organismes entendus par la rapporteure pour avis ont insisté sur la déperdition du patrimoine immobilier consacré aux séjours de vacances. En l’absence de données précises de la Djepva concernant l’état de ce patrimoine, il est difficile d’objectiver le phénomène, mais il est certain que de nombreuses communes se sont défaites de centres devenus trop chers à entretenir et à mettre aux normes. L’époque où certaines communes disposaient d’un centre à la mer et d’un autre à la montagne pour y héberger les enfants pendant les vacances n’est plus qu’un lointain souvenir. Il en va de même pour les caisses d’allocations familiales qui possédaient elles aussi des centres de vacances mais ont abandonné ce pan de leurs activités pour des raisons de coût.

Selon les estimations de l’Union nationale des associations de tourisme et de plein air (Unat), la part du bâti dans le prix d’une colonie de vacances est de l’ordre de 8 % à 10 %. Cela comprend le loyer, l’entretien, ou encore l’amortissement pour les propriétaires. « Pour faire face aux défis de la rénovation, ce taux devrait presque doubler. Outre que les organisateurs n’ont pas nécessairement accès aux financements, l’impact sur le prix public participerait d’une inexorable gentrification des colos, au détriment des classes moyennes. Une politique jeunesse ambitieuse ne peut se faire l’économie d’une réflexion sur le sujet. » ([115])

La situation, déjà complexe, risque encore de se détériorer : il ressort des auditions que, pour parvenir ne serait-ce qu’à maintenir le nombre de séjours actuel, il faudrait rénover 50 000 lits dans les centres de séjours collectifs. À raison de 10 000 à 12 000 euros par lit, il conviendra de mobiliser entre 500 et 600 millions d’euros dans les toutes prochaines années.

Certaines évolutions sociétales sont également en cause : l’individualisme, le repli sur la cellule familiale et les réticences de nombreux parents à envoyer leurs enfants en vacances en dehors du foyer rendent les départs collectifs moins désirables. L’Observatoire des vacances et des loisirs des enfants et des jeunes (Ovlej) fait ainsi observer que les départs des jeunes se font « majoritairement avec les parents », cette modalité étant devenue « la norme ». Entre 2019 et 2023, la proportion de jeunes qui sont partis uniquement avec leurs parents a même augmenté de 9 points, s’établissant désormais à 49 % des jeunes partant en vacances ([116]). L’Unosel relève pour sa part que « la colonie de vacances est toujours vue comme "dangereuse" par un certain nombre de familles ».

Enfin, la rapporteure pour avis tient à souligner les difficultés particulières que rencontrent les enfants et les jeunes en situation de handicap. L’UFCV observe ainsi que « les mineurs en situation de handicap suivis par un établissement médico-social partent de moins en moins en séjours collectifs. Certains rentrent en famille, mais une majorité n’accède tout simplement plus à des vacances. Pour causes : la méconnaissance des solutions de vacances et de cofinancements. » Il s’agit d’un réel enjeu de société, dont les pouvoirs publics n’ont pas encore pris la mesure. En réponse, l’UFCV a créé en 2020 le programme « évasion handicap famille », né d’un partenariat avec les VVF Villes – anciennement Villages vacances familles – pour permettre aux jeunes de partir en famille et de bénéficier sur place de l’aide d’animateurs de l’UFCV. Toutefois, un ensemble d’initiatives isolées ne suffiront pas à répondre aux besoins de cette catégorie de jeunes qui ont tout autant que les autres le droit de recueillir les bénéfices des colos.

À l’opposé des difficultés rencontrées par la plupart des organisateurs traditionnels de colonies de vacances, il convient de noter la remarquable résistance du scoutisme. Non seulement les accueils de scouts ne connaissent pas de déclin mais ils poursuivent leur développement. À cet égard, la crise sanitaire elle-même n’a pas entamé leur progression, comme le montre le graphique suivant.

Nombre de places en accueil de scoutisme
au cours des années 2011-2012 à 2021-2022

Source : Injep, Accueils collectifs de mineurs (colonies et centres de vacances, centres aérés et de loisirs, scoutisme…) – 2009/2010 à 2021/2022

Si le modèle scout est très spécifique et se caractérise, comme les principales organisations le reconnaissent elles-mêmes, par une mixité sociale moindre, il n’en demeure pas moins que les modalités de structuration et de reproduction du mouvement ainsi que la manière d’organiser les camps de vacances peuvent ouvrir des perspectives.

Face à l’ensemble de ces constats, certaines tendances incitent tout de même à l’optimisme. D’une part, le succès des « colos apprenantes » tend à démontrer qu’il est possible de relancer le secteur des colos, pour peu que la volonté politique existe. D’autre part, de nombreuses initiatives locales constituent de réelles réussites. Dans le cadre des auditions qu’elle a conduites, la rapporteure pour avis a ainsi rencontré les associations Des camps sur la comète, installée à Rouen, Wakanga, active en Ille-et-Vilaine, et la Fédération partir, qui œuvre en particulier à Figeac. Chacune illustre à sa manière les méthodes et les valeurs de l’éducation populaire, et témoigne du fait qu’un public existe pour les colos, dont le projet est plus que jamais actuel.

C.   Les voies d’un renouveau des séjours collectifs de jeunes et des mouvements d’éducation populaire

Au-delà de l’enjeu des séjours collectifs de mineurs avec hébergement, la politique de soutien aux départs en vacances paraît tout à la fois trop complexe et insuffisante. L’enjeu est pourtant majeur, car la question de l’accès aux vacances est profondément politique, nous l’avons vu. L’objectif devrait être de tendre vers la consécration d’un véritable droit aux vacances. C’était d’ailleurs l’objet d’une proposition de loi déposée l’an dernier par plusieurs députés de la Nouvelle union populaire, écologique et sociale (Nupes) ([117]). Il convient, à cet égard, de rappeler qu’en 2019, 4,4 millions de jeunes âgés de 5 à 19 ans n’étaient pas partis en vacances ([118]). Depuis lors, la situation s’est encore aggravée : on estime désormais qu’ils étaient 4,7 millions en 2023.

1.   Stimuler la culture du départ en se concentrant sur les premiers départs et en relançant les classes de découverte en partenariat avec les associations d’éducation populaire

Lors des auditions de la rapporteure pour avis, l’importance du premier départ en vacances a été souvent rappelée, car cette expérience inaugurale est inoubliable et détermine largement la suite du parcours d’un jeune. Il est essentiel que le premier départ intervienne aussi tôt que possible. Pour surmonter l’appréhension des parents, souvent réelle et bien compréhensible quand il s’agit d’un très jeune enfant, mais aussi, tout simplement, pour réussir à toucher autant d’enfants que possible, l’école apparaît comme le lieu le plus adapté. À cette fin, l’organisation de classes de découverte doit être encouragée. Or, depuis de nombreuses années, l’Éducation nationale ne semble plus en faire une priorité. Alors que tout le monde s’accorde à reconnaître les vertus des voyages scolaires, on ne compte plus les enseignants qui abandonnent des projets, découragés par les difficultés pratiques et le manque de soutien de l’institution. La direction générale de l’enseignement scolaire (Dgesco) ne centralise même plus les informations relatives aux voyages scolaires, comme l’ont révélé l’année dernière les débats à l’occasion de l’examen de la proposition de loi d’Émilie Bonnivard visant à relancer l’organisation des classes de découverte ([119]).

Comme le relevait l’autrice de la proposition de loi dans son rapport, « depuis une vingtaine d’années, le ministère chargé de l’Éducation nationale ne dispose manifestement d’aucune donnée chiffrée consolidée au niveau national sur les voyages scolaires, qu’il s’agisse du nombre de voyages organisés, de nuitées, d’élèves et d’enseignants concernés, ni a fortiori sur les dispositifs de financement croisé (subventions publiques, autofinancement par l’école) et sur les restes à charge pour les familles ». Dans ces conditions, il est juste de parler comme elle d’un « aveuglement persistant » ([120]) et préjudiciable à la conduite d’une politique publique en la matière. La situation est d’autant moins compréhensible que, jusqu’à la rentrée 2023, le directeur académique des services départementaux de l’Éducation nationale (Dasen) était amené à se prononcer sur tous les voyages scolaires envisagés par les écoles du département. Autrement dit, ces données sont facilement disponibles.

Une circulaire du 13 juin 2023 a réaffirmé l’ambition de donner la possibilité à tout élève, quels que soient son milieu social d’origine et donc les ressources familiales, de « bénéficier d’au moins un voyage scolaire au cours de sa scolarité obligatoire » ([121]), sans toutefois que le gouvernement de l’époque ne se donne les moyens d’atteindre cet objectif. En effet, comme le notait Émilie Bonnivard dans son rapport, les effets d’une telle déclaration restent nécessairement limités « faute d’agir sur deux leviers essentiels : le financement et la motivation des enseignants » ([122]). Afin de relancer les classes de découverte, il convient, en première intention, de permettre à la proposition de loi précédemment mentionnée, qui avait été adoptée par l’Assemblée nationale sous la précédente législature, mais pas encore inscrite à l’ordre du jour du Sénat, de poursuivre son parcours législatif. Ce texte permettrait, notamment, de créer un fonds destiné à financer les classes de découverte et d’indemniser les enseignants organisant de telles activités.

Il faut, par ailleurs, encourager la conclusion de partenariats locaux avec les associations d’éducation populaire pour l’organisation de classes de découverte : depuis leur origine, elles ont œuvré en faveur de telles initiatives. Elles disposent du savoir-faire nécessaire pour mener à bien de tels projets. Qui plus est, cela contribuerait à faire entrer dans l’école ces associations, ce qui leur permettrait de présenter leurs autres projets et, ce faisant, de donner envie aux enfants d’y participer, pour le bénéfice mutuel des jeunes comme de l’institution. Nouer des relations entre l’école et l’éducation populaire précocement dans le parcours de l’enfant permettrait de donner davantage corps à la continuité éducative.

Intervenir dès le primaire aurait également pour intérêt de créer l’habitude du départ avant l’entrée au collège, période laissée de côté par la plupart des dispositifs d’aide au départ et qu’il conviendrait de prendre plus en compte dans la réflexion.

L’ancrage local est sans aucun doute la clé d’une relance des classes de découverte et, par la suite, d’un nouvel essor des colos. En effet, la proximité crée la confiance : une association qui intervient également sur le temps périscolaire, par exemple, est en mesure de créer des relations suivies avec les enfants et les parents, ce qui facilite le départ en séjour collectif au moment des vacances. C’est l’une des raisons du succès des Camps sur la comète, association créée en 2020 à Rouen, qui organise chaque année, entre les mois de mai et de septembre, des séjours sous tente en milieu naturel pour 400 jeunes. Les séjours affichent complet quelques jours après le début des inscriptions, ce qui témoigne d’une attente forte de la part de la population. L’association fonctionne toute l’année, organisant des clubs nature les mercredis après-midi, des actions sur le temps scolaire et des terrains d’aventure.

La Fédération partir, qui opère à Figeac depuis 1983, est « fortement implantée sur le territoire au quotidien auprès des enfants et de leurs familles. L’association a créé une vraie relation de confiance avec ses 1 000 adhérents, ce qui favorise le départ des enfants et des ados en séjours au niveau local. » ([123]) L’association trouve son origine même dans la fédération des énergies locales : la CAF, le centre social, le centre culturel, des élus de Figeac, le CSE de l’usine locale se sont rassemblés « pour faire partir en colo les adolescents "en errance" » ([124]) . L’association œuvre toute l’année auprès des enfants et des familles : dans le cadre de l’extrascolaire, elle gère et anime un centre de loisirs pour les enfants de 2 à 14 ans les mercredis après-midi, pendant les petites vacances et l’été ; sur le temps périscolaire, elle gère l’accueil et l’animation dans les écoles publiques de Figeac. Elle s’occupe également des préadolescents dans le cadre d’un centre de loisirs ouvert tous les jours et pendant les vacances. Elle dispose aussi d’un accueil de loisirs associé au collège public de Figeac qui lui permet d’assurer l’animation des pauses méridiennes. Les intervenants de l’association connaissent bien les parents et les enfants, ce qui leur a permis de faire partir 384 enfants en séjours en 2024 – il y en avait 600 avant la pandémie –, sous tente et en autonomie.

2.   Repenser et simplifier les dispositifs favorisant les départs en vacances

Comme les autres versants de la politique en faveur de la jeunesse, celui qui concerne les aides au départ en vacances souffre d’un excès de complexité et d’une imbrication des niveaux d’intervention. Cela n’empêche pas chaque dispositif, considéré isolément, d’avoir ses vertus.

Parmi les dispositifs nationaux d’aide au départ en vacances, il convient de citer :

– les chèques-vacances, qui demeurent un outil efficace et pertinent. Ils sont émis et gérés par l’Agence nationale pour les chèques-vacances (ANCV), établissement public de l’État chargé d’une mission de service public, à savoir favoriser l’accès du plus grand nombre aux vacances ([125]). En 2023, 4,88 millions de salariés, agents publics et travailleurs indépendants ont bénéficié du chèque-vacances. Le nombre de bénéficiaires directs et indirects est évalué à 11 millions. Les chèques-vacances sont acceptés dans 133 000 points d’accueil. Le total des émissions s’élève chaque année à 1,82 milliard d’euros. Les chèques-vacances sont acquis par des structures qui les cèdent à des bénéficiaires. Dans plus de la moitié des cas, ces derniers les paient en épargnant, étant entendu que l’employeur abonde lui aussi le dispositif. Les CSE sont de très loin les premiers acquéreurs de chèques-vacances, dans le cadre de leur rôle en matière sociale et culturelle. Or, selon les témoignages recueillis par la rapporteure pour avis, les CSE se détournent de plus en plus des colonies de vacances. Il importe donc de les encourager à réinvestir ce champ. Un système d’abondement supplémentaire pris en charge par l’État en cas d’utilisation auprès d’un organisateur de séjours collectifs de mineurs à but non lucratif pourrait également favoriser la mobilisation des chèques-vacances au bénéfice des colos ;

– les aides des caisses d’allocations familiales, qui sont gérées par le système « Vacaf », auquel participent 96 des 101 caisses d’allocations familiales de France. Lors des auditions menées par la rapporteure pour avis, il est apparu que l’hétérogénéité des politiques menées dans ce domaine était préjudiciable aux familles. La Fédération partir, par exemple, a souligné que l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) sur le territoire duquel elle est active est à cheval sur les deux départements du Lot et de l’Aveyron, et que le Cantal est également limitrophe. Or aucune de ces trois CAF n’a la même politique d’aide aux vacances, ce qui complique la vie des familles qui souhaitent inscrire leurs enfants dans un séjour organisé par l’association, et rend également complexe la gestion des dossiers pour celle-ci. L’Unosel juge ainsi les dispositifs départementaux des CAF « très opaques et difficiles d’utilisation pour les familles et les organisateurs » ([126]). Une priorité absolue doit être d’œuvrer pour harmoniser les dispositifs des différentes caisses d’allocations familiales. Les aides aux vacances relèvent de la catégorie des prestations extralégales d’action sociale, l’autre grande catégorie de prestations versées étant celle des « prestations légales », c’est-à-dire faisant l’objet d’un dispositif défini précisément par la loi. Une piste d’amélioration pourrait consister à faire entrer l’aide aux vacances dans la catégorie des prestations légales afin d’obliger les CAF à pratiquer une politique homogène sur l’ensemble du territoire ;

– les « colos apprenantes », dont il a déjà été question précédemment et le pass’colo. Leur moindre mérite n’est pas d’avoir marqué le réinvestissement de l’État dans la promotion des colonies de vacances, après des décennies d’abandon plus ou moins marqué. L’objectif premier du dispositif, selon les propos tenus par Gabriel Attal, alors secrétaire d’État auprès de Jean-Michel Blanquer, en mai 2020, était d’éviter que « le tourisme social, qui permet aux familles modestes de partir, ne soit pas balayé par la crise » ([127]). La subvention est versée directement à l’organisateur du séjour, ce qui est un choix efficace. La complexité de la procédure pour entrer dans le dispositif, en revanche, de même que son caractère très vertical, appellent des réserves. Quoi qu’il en soit, entre 2020 et 2023, les « colos apprenantes » ont permis à 300 000 mineurs environ de partir en colos gratuitement. Qui plus est, selon les données fournies par la Djepva, pour 72 % des jeunes utilisant le dispositif pour la première fois, cette expérience marquait leur premier séjour collectif. Autrement dit, le dispositif est utile pour provoquer le premier départ en vacances. À ce titre, il importe de l’inscrire dans la durée : chaque année, depuis sa création, les organismes se demandent s’il sera reconduit l’année suivante. Surtout, il paraît essentiel de modifier l’articulation avec le « pass’colo », créé cette année, et qui, pour sa part, est géré à travers Vacaf et versé directement aux familles. Plus généralement, la coexistence entre les « vacances apprenantes », relevant du ministère de l’Éducation nationale, les « colos apprenantes » et le pass’colo est trop complexe et source de confusion. Il faut tendre vers un mécanisme simple d’aide au départ en séjours collectifs : un seul dispositif, accessible par un guichet unique et modulé en fonction du quotient familial au sens de la CAF, la somme étant versée directement aux organismes responsables des séjours, ces derniers affichant directement le reste à charge pour les familles.

Cette démarche de simplification et de rationalisation est d’autant plus souhaitable qu’il existe par ailleurs de nombreux dispositifs locaux. À cet égard, il serait utile de recenser les initiatives les plus intéressantes et de les diffuser tout en veillant à leur articulation avec les dispositifs nationaux. La plupart du temps, ces mécanismes locaux résultent de la coopération entre plusieurs acteurs. La démarche consistant à construire des mécanismes avec l’ensemble des parties prenantes doit inspirer les pouvoirs publics : il n’est plus ni possible ni souhaitable d’imposer aux acteurs de terrain, en particulier les associations d’éducation populaire, des dispositifs conçus sans avoir recueilli leurs souhaits et leur analyse de la situation locale. Parmi les dispositifs intéressants, il convient de mentionner celui qui est soutenu conjointement par la région Occitanie et l’Unat – qui en est à l’origine –, aux côtés des CAF et de la Mutualité sociale agricole (MSA). Il s’intitule « premiers départs en vacances ». Par son intermédiaire, depuis 26 ans, près de 50 000 jeunes ont bénéficié de séjours en pleine nature dans toute l’Occitanie. L’opération permet aux jeunes de 6 à 17 ans issus de milieux modestes de bénéficier de séjours dans 50 centres et lieux de vacances. D’une durée de 6 à 21 jours, chaque voyage coûte 70 euros par enfant, activités et transport compris. De nombreuses disciplines et thématiques sont proposées : équitation, VTT, séjours artistiques ou culturels, séjours aventures, randonnée, etc.

3.   Engager une stratégie nationale fondée à la fois sur le soutien aux organismes sans but lucratif ayant un patrimoine et l’encouragement d’initiatives locales souples

Dans son rapport de juillet 2021, le COJ appelait au lancement d’une stratégie nationale en faveur des colonies de vacances. La rapporteure pour avis soutient cette demande et souhaite préciser quels pourraient en être les contours.

Il faut, en premier lieu, réaliser un inventaire complet des structures de loisirs et d’accueil pour séjours collectifs, sur le modèle de ce qui a été accompli pour les infrastructures sportives, les espaces et les sites de pratique avec le recensement des équipements sportifs ([128]). En effet, pour être en mesure d’agir, il faut d’abord poser un diagnostic précis. Or, à ce jour, un inventaire précis des lieux permettant d’accueillir les séjours collectifs fait défaut. Le gouvernement d’Élisabeth Borne avait annoncé, en octobre 2023, vouloir procéder à un recensement des structures d’accueil permettant d’accueillir des séjours de cohésion dans le cadre du SNU : nous appelons à élargir cet effort de recensement à l’ensemble de structures de loisirs et de vacances collectives.

Sur la base de cet inventaire précis, un fonds de soutien à la rénovation et à la mise aux normes de ces structures d’accueil devra être créé. Ce fonds, doté de 130 millions d’euros par an au moins pendant quatre ans, bénéficierait en priorité aux collectivités locales et aux associations à but non lucratif propriétaires de structures de loisirs et de centres pouvant accueillir des séjours collectifs de mineurs.

Parallèlement à la rénovation des centres d’accueil, il importe de favoriser le développement des séjours ayant une structure « légère », sur le modèle des camps de scouts, qui ont fait la preuve de leur efficacité. Il n’est pas nécessaire, pour tirer pleinement profit d’un séjour en colo, de partir très loin de son domicile, de séjourner dans un centre luxueux et d’y pratiquer des activités onéreuses. L’association Des camps sur la comète propose ainsi des séjours dont le coût journalier est de 55 euros en moyenne. L’association Wakanga propose elle aussi des séjours à des prix très raisonnables : 69 euros en moyenne, et même 52 euros quand il s’agit de camps. La Fédération partir propose des tarifs journaliers un peu plus élevés : entre 80 et 120 euros, ce qui reste deux fois moins élevé que le coût d’un séjour de cohésion du SNU… Toutes les associations que la rapporteure pour avis a rencontrées affichent ainsi des prix très raisonnables tout en offrant un taux d’encadrement bien supérieur à celui qui est imposé par la réglementation et en rémunérant correctement leurs animateurs. Des camps sur la comète, par exemple, s’est fixé pour règle un ratio d’un animateur pour quatre participants – contre un pour huit s’agissant des enfants de moins de 6 ans et un pour douze en ce qui concerne les mineurs de plus de 6 ans selon la réglementation – et proposent un salaire journalier de 55 euros nets aux animateurs, quand la rémunération minimale est de 25,63 euros bruts.

Enfin, et dans la mesure où les colos peuvent être non seulement un outil éducatif pour tous les enfants et les adolescents, mais aussi un levier de développement pour les territoires, il convient de relancer les PEDT et d’y intégrer la question des séjours collectifs de mineurs.

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Précisément parce que la démarche qui fonde l’éducation populaire est profondément en phase avec les valeurs démocratiques, il importe de préserver les structures qui la mettent en application. L’exemple des organismes proposant des séjours de vacances collectifs de mineurs est significatif à la fois des difficultés auxquelles le secteur est confronté et des possibilités dont il est porteur. Plus que jamais, à l’issue du travail qu’elle a mené dans le cadre de cet avis budgétaire, la rapporteure pour avis est convaincue que les mouvements d’éducation populaire méritent d’être soutenus. Ce combat ne fait que commencer.

 


   Travaux de la commission

I.   Audition du ministre

Lors de sa réunion du mardi 29 octobre 2024 à 17 heures 30 ([129]), la commission auditionne, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2025 (n° 324  seconde partie), M. Gil Avérous, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous poursuivons l’examen des missions budgétaires relevant de la compétence de notre commission en recevant pour la première fois M. Gil Avérous, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative. Notre commission a désigné Mme Florence Herouin-Léautey et M. Joël Bruneau rapporteurs pour avis de cette mission, respectivement sur le programme Jeunesse et vie associative et sur les programmes Sport et Jeux olympiques et paralympiques 2024. La partie budgétaire de leurs projets de rapport pour avis a été adressée hier aux commissaires. Les rapporteurs présenteront aussi la partie thématique de leurs travaux.

Monsieur le ministre, vous avez déclaré que la diminution des dotations du programme 219 consacré au sport ne vous empêcherait pas de conduire votre politique ; comment comptez-vous faire davantage avec moins ? Aucune politique publique nouvelle visant à construire l’héritage des Jeux olympiques et paralympiques (JOP) n’est inscrite dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2025. Avez-vous pour objectif de construire « la nation sportive » promise par le président de la République ? La fin des actions menées dans le cadre de la grande cause nationale 2024 étant annoncée, comment encouragerez-vous la pratique sportive et physique des Français ? Pour répondre à la crise démocratique, l’éducation populaire doit redevenir une priorité. Comment lui redonnerez-vous toute sa place dans votre politique et donc dans la société ? Votre ministère ne doit-il pas devenir, enfin, le ministère des sports, de la jeunesse, de la vie associative et de l’éducation populaire ?

M. Gil Avérous, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative. C’est un plaisir et un honneur pour moi d’être auditionné pour la première fois par votre commission pour traiter de l’évolution des crédits du ministère et de ma feuille de route. Je me réjouis de la constitution d’un grand ministère réunissant sous ma responsabilité les sports, la jeunesse et la vie associative, mais pas encore l’éducation populaire et je suis déterminé à mettre à profit ce beau portefeuille en liant ses diverses composantes. Les avoir rassemblées au sein d’un ministère de plein exercice démontre la volonté du Premier ministre de mettre ces trois volets en valeur et d’afficher leur complémentarité et leur utilité dans une politique nationale au plus près des territoires et des publics visés, notamment la jeunesse.

La diminution des crédits alloués aux deux programmes est largement faciale. Je maintiens que j’ai tout à fait les moyens de préserver les politiques du ministère et de viser les ambitieux objectifs existants – vous avez vu le budget du ministère des sports augmenter d’année en année.

Les moyens du programme Jeunesse et vie associative progressent de 36 millions d’euros par rapport à 2024 ; cela permet notamment de maintenir la cible de 150 000 volontaires par an pour le service civique. La réduction de 268 millions d’euros du budget du programme Sport a trois causes. C’est d’abord l’extinction des dépenses liées à l’organisation des JOP. Elles étaient de 151 millions en 2024, dont 86 millions étaient inscrits au programme 350, Jeux olympiques et paralympiques 2024, et 65 millions au programme 219, Sport. Que les dépenses liées à l’organisation des Jeux inscrites dans le programme 219 – primes aux médaillés, organisation d’animations ponctuelles, billets offerts aux enfants, etc. – ne soient pas reconduites ne fragilise en rien la défense de l’héritage des Jeux.

La diminution des crédits tient aussi à l’ajustement des prévisions de décaissement pour le plan Génération 2024 qui finance les équipements sportifs. Sur les 100 millions d’euros attribués aux collectivités et pour une petite partie aux clubs en 2024 pour soutenir ce type de projets d’investissement, 4 millions ont été dépensés à ce jour, car le calendrier des appels à projet de ces investissements pluriannuels induit des décaissements sur plusieurs exercices. En reportant sur 2025 les 96 millions d’euros non utilisés en 2024, nous pourrons faire face aux besoins sans nouveaux crédits de paiement (CP), les autorisations d’engagement (AE) étant toujours fixées à 100 millions. Le soutien aux projets présentés par les collectivités et les clubs demeurera donc en 2025 ce qu’il était en 2024, et la trésorerie de l’Agence nationale du sport (ANS) est suffisante pour faire face au paiement des demandes d’acompte et au versement des soldes de subventions.

Enfin, les dépenses pour 2025 ont été ajustées en tenant compte des données d’exécution dont nous disposons pour le pass’sport. En 2024, 10 millions d’euros des crédits alloués à ce dispositif n’ont pas été consommés, et les crédits prévisionnels seront adaptés à la réalité des crédits consommés. Il en sera de même pour le dispositif « 2 heures de sport au collège », avec une réduction de crédits de 4 millions d’euros.

Le budget lui-même reflète trois priorités : faire vivre l’héritage des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 ; soutenir l’engagement et l’autonomie des jeunes citoyens ; maintenir la dynamique de soutien à la vie associative et au bénévolat.

Chacun en convient, les Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 ont été un formidable succès populaire et sportif. Il nous appartient de le faire vivre pour faire de la France une véritable nation sportive tout en engageant la préparation des Jeux d’hiver de 2030, pour lesquels des investissements doivent être prévus dès maintenant.

Pour le soutien à la performance, le financement de l’ANS, hors mesures exceptionnelles liées aux JOP, sera stabilisé à 108 millions d’euros comme en 2024 afin d’ancrer la France dans le « top 5 » des nations olympiques et le « top 8 » des nations paralympiques. De plus, les moyens des établissements publics d’excellence du ministère – centres de ressources d’expertise et de performance sportive, Institut national du sport, de l’expertise et de la performance, et écoles nationales – passeront de 142 millions d’euros en 2024 à 146 millions, hors mesures exceptionnelles liées aux JOP.

Faire de la France une nation sportive, c’est aussi encourager la pratique sportive du plus grand nombre. Je veux donc poursuivre le marqueur « Bouge 30 minutes chaque jour » amplifié dans le cadre de la grande cause nationale et poursuivre au-delà du 31 décembre 2024 un effort particulier pour toucher les publics les plus éloignés du sport. Nos cibles prioritaires sont les jeunes gens, et le pass’sport, qui a permis de soutenir 3,5 millions de personnes depuis sa création, est préservé en 2025 avec 75 millions d’euros de crédit, ce qui correspond à 1,5 million de bénéficiaires pour l’année. C’est aussi le sport féminin, en nous appuyant sur le succès des Jeux olympiques qui ont été les premiers jeux paritaires de l’histoire. Ce sont encore les personnes en situation de handicap avec la poursuite du programme « 30 minutes d’activité physique quotidienne en établissements sociaux et médico-sociaux ».

La stratégie nationale Sport-santé portée avec le ministère de la santé sera poursuivie, avec un budget préservé stabilisé à 7,5 millions d’euros. Nous élaborerons un nouveau plan Sport santé pour les années 2025-2030 ; il déclinera en particulier la grande cause nationale pour l’année 2025, la santé mentale.

Nous devons aussi poursuivre les efforts importants réalisés en matière d’équipements sportifs ; les collectivités locales y comptent bien. C’est le sens du Plan 5 000 équipements sportifs – Génération 2024, dans la continuité du Plan 5 000 terrains de sport, arrivé à échéance. Les niveaux d’engagement sont préservés, je l’ai dit : 100 millions d’euros en 2024 et en 2025, et la suite logique sera 100 millions d’euros en 2026. Grâce à ce dispositif, 5 000 équipements ont déjà été financés, et nous prévoyons d’en financer 5 000 de plus pendant la période 20242026.

Avec les associations d’élus, dont l’Association nationale des élus du sport, je veux lancer une réforme du modèle de subventions en faveur des équipements sportifs. Je souhaite simplifier les procédures pour les porteurs de projets en instituant une plus grande cohérence avec les projets territoriaux et fédéraux et une meilleure articulation avec les autres crédits d’État que sont le fonds vert, la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) et la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL). Ensemble, nous devrons, dans le cadre de l’évaluation du fonctionnement de l’ANS, examiner s’il ne serait pas judicieux de déconcentrer à l’échelle départementale les crédits destinés aux collectivités et aux clubs. En laissant préfets et sous-préfets choisir des montages financiers opération par opération, on obtiendrait une plus grande complémentarité de la DETR et de la DSIL. Et en déchargeant l’ANS du volet « financement » de ses missions – notablement décrié par les associations et les collectivités locales –, on lui permettrait de se concentrer sur la performance, le développement du sport et des clubs et l’accompagnement des clubs à l’encadrement.

L’urgence commande de revoir les conditions d’utilisation des équipements sportifs pour trouver de nouveaux créneaux afin de répondre à l’afflux de licenciés dans de nombreuses disciplines. Je travaillerai donc avec l’Association des départements de France et Régions de France pour tenter d’ouvrir les gymnases des collèges et des lycées. Souvent, les équipements sportifs des collèges sont des équipements que les collectivités territoriales mettent à leur disposition, et ils sont généralement déjà mutualisés. Les lycées ont plutôt des équipements propres, et il se pose une difficulté particulière due aux internats. On est déjà parvenu à ce que le quart des gymnases des lycées soient mutualisés avec la collectivité ; cela signifie que 75 % de ces équipements sont encore inutilisés en dehors des horaires d’ouverture des établissements, au moment même où les clubs en ont besoin pour la vie de la cité. L’ANS peut financer le contrôle d’accès ou les autres aménagements sécuritaires nécessaires.

La qualité de notre politique sportive passe aussi par la préservation de ses moyens humains ; il faut des hommes et des femmes au plus près des fédérations et des clubs. Le ministère conservera donc ses 1 442 conseillers techniques sportifs, le même nombre qu’en 2024. De plus, nous renforcerons les synergies en mobilisant davantage de jeunes gens du service civique auprès des clubs en fonction de l’afflux des nouveaux licenciés.

La deuxième priorité que traduit le budget est le soutien à l’engagement et à l’autonomie des jeunes citoyens. J’ai demandé au Premier ministre que le ministère des sports, de la jeunesse et de la vie associative pilote une politique interministérielle de la jeunesse regroupant les ministères de l’Éducation nationale, du travail, de la santé, et aussi du logement pour la partie « politique de la ville ». Ainsi notre pays aurait-il désormais une vraie politique de la jeunesse incarnée par notre ministère.

La jeunesse est plurielle : les jeunes gens sont différents, ils ont des attentes et des besoins différents et nous devons avoir des politiques différentes en fonction des jeunesses auxquelles nous nous adressons. Il nous faut améliorer l’insertion professionnelle des jeunes et leur santé – en particulier leur santé mentale dans le cadre de la grande cause nationale 2025 –, lutter contre la sédentarité et la précarité et les accompagner dans leur engagement.

Vous l’avez constaté, les moyens de mon ministère pour accompagner les jeunes sont préservés. D’abord, l’Agence du service civique bénéficiera de 600 millions d’euros. La hausse de 81 millions prévue permettra de maintenir l’objectif des 150 000 volontaires l’année prochaine. Le service civique écologique lancé en 2024 avec 6 000 volontaires sera amplifié en 2025 et sa part dans l’ensemble des services civiques sera accrue. Ensuite, la majoration de 5 millions d’euros des crédits du mentorat obtenue en 2024 est pérennisée. En 2022, 150 000 jeunes ont ainsi été accompagnés, et 160 000 en 2023. Enfin, les 40 millions d’euros alloués au dispositif « Colos apprenantes » seront reconduits en 2025.

Le service national universel (SNU) préoccupe beaucoup d’entre vous et me préoccupe tout autant. Je l’ai dit hier, les finalités poursuivies sont indiscutablement louables, puisqu’il s’agit de promouvoir l’engagement, la cohésion autour des valeurs de la République et la mixité sociale. Toutefois, le rapport de la Cour des comptes publié en septembre dernier le relève, il convient de s’interroger sur le format de ce dispositif, son contour et son coût.

Le ministère a pour troisième priorité de maintenir la dynamique de soutien à la vie associative et au bénévolat. Pour faire gagner du temps aux bénévoles, la simplification est indispensable. Les moyens alloués aux associations seront préservés : la dotation du Fonds de coopération de la jeunesse et d’éducation populaire est stabilisée à 37 millions d’euros, ceux du Fonds de développement de la vie associative sont reconduits à hauteur de 33 millions et complétés par 35 millions issus d’une quote-part du produit des comptes bancaires inactifs récupérés par l’État. Cette quote-part avait été portée de 20 % à 40 % en 2024 ; cette évolution était notamment le fruit des travaux que vous aviez menés.

Pour simplifier la vie des associations, nous nous appuyons sur le réseau Guide asso. Salué pour son efficacité, ce dispositif offre un service de proximité, d’accueil et de conseil aux associations. Ses moyens seront portés à 7,4 millions d’euros, en hausse de 800 000 euros, pour en généraliser le déploiement dans toutes les régions, notamment outre-mer. Nous nous appuyons aussi sur les outils numériques : le Compte Asso pour centraliser et simplifier les démarches, et la plateforme jeveuxaider.gouv.fr qui met en relation les personnes âgées de plus de 16 ans avec les structures qui ont besoin de bénévoles.

Je vais tenter de convaincre les associations d’élus de transformer le Compte Asso en plateforme unique pour toutes les collectivités. Ainsi évitera-t-on aux associations de devoir saisir des demandes de subventions sur la plateforme nationale puis sur celle de la région, du département, de la commune. Ensemble, on doit assez facilement parvenir à rendre toutes les collectivités partenaires destinataires des demandes de subventions à partir d’un Compte Asso au lieu de décourager des bénévoles de s’investir dans nos associations en raison de procédures répétitives.

Je veux évidemment m’appuyer sur le formidable élan qu’ont provoqué les Jeux en matière de volontariat et accompagner cette dynamique vers nos dispositifs visant à l’engagement. Je vous assure à nouveau de ma détermination à faire avancer tous les sujets de la compétence de mon ministère, en lien avec les élus locaux dont je suis issu, et aussi et surtout avec la représentation nationale dont le rôle est essentiel dans l’évolution de nos textes et de nos règlements et dans l’application de nos politiques.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis (Jeunesse et vie associative). Au moment de présenter l’avis de notre commission sur les crédits du programme 163, Jeunesse et vie associative, je remercie toutes les personnes que j’ai auditionnées ainsi que les administrateurs de l’Assemblée nationale pour leur aide précieuse. Ce programme revêt une importance particulière, car la jeunesse doit être en ligne de mire des politiques publiques ; la négliger, c’est compromettre l’avenir du pays. Quant aux associations, elles emploient 1 800 000 salariés et regroupent près de 15 millions de bénévoles qui font vivre les valeurs d’engagement, de citoyenneté et de solidarité et qui donnent du sens à la démocratie.

Étant donné ces enjeux, les 937 millions d’euros dont sera doté le programme 163 en 2025 n’ont rien d’excessif, tant s’en faut. Ces crédits augmenteront de 4 %, mais cette évolution d’ensemble recouvre de profondes disparités.

La hausse des crédits, qui serait de quelque 36 millions d’euros en valeur absolue, résulte pour l’essentiel d’un surcroît de dotation de 81 millions d’euros alloué à l’Agence du service civique, pour un total de 600 millions d’euros. Mais cette revalorisation est en trompe-l’œil : elle vise seulement à reconstituer la trésorerie de l’Agence et permet tout juste de maintenir l’objectif des années précédentes, qui est de proposer 150 000 missions à de jeunes volontaires. Le service civique, dispositif plébiscité pendant les auditions, devrait être développé. En 2023, l’Agence du service civique a enregistré 240 000 candidatures. Ce nombre devrait croître en 2024 mais le budget prévu ne permet pas de satisfaire l’envie d’engagement des jeunes gens.

Les crédits des trois autres actions diminuent. Que cette baisse affecte prioritairement le SNU n’est pas pour me déplaire. En 2025, après six ans de balbutiements expérimentaux non concluants, les crédits du SNU devraient être fixés à 128 millions d’euros, en diminution de près de 20 %. L’objectif pour 2025 est donc revu à la baisse : 66 000 jeunes gens devraient participer à un séjour de cohésion. On s’éloigne nettement de la trajectoire censée conduire à la généralisation du SNU. À dire vrai, l’horizon recule tant que l’extension du dispositif à toute une classe d’âge paraît désormais inatteignable sur les plans politique, humain et logistique. Si le SNU ne disparaît pas – c’est pourtant ce que mon groupe souhaiterait –, il demeurera ce qu’il est, un dispositif mal conçu, mal exécuté et inadapté car reposant sur une conception erronée de l’engagement et des attentes des jeunes gens. Depuis l’origine, les promoteurs du dispositif entretiennent le flou : une fois généralisé, deviendrait-il obligatoire ? Or, qu’est-ce qu’un engagement obligatoire, monsieur le ministre, sinon un oxymore ? Le SNU n’a pas suscité l’engagement, n’a pas permis la mixité sociale, n’a pas renforcé la cohésion de la nation ; en clair, c’est un zéro pointé pour l’intérêt général et l’émancipation. En revanche, la Cour des comptes l’a souligné, il a englouti chaque année des sommes considérables et le généraliser supposerait d’y consacrer entre 3 à 5 milliards d’euros chaque année. Une solution s’impose : mettre un terme à cette gabegie.

Cela ne signifie pas que les 128 millions d’euros de crédits alloués au SNU doivent s’évaporer. Il faut au contraire les réinvestir dans des politiques véritablement conçues en faveur de la jeunesse. Si les jeunes Français sont beaucoup plus dynamiques, créatifs et engagés que ne le laissent supposer des antiennes déclinistes et rétrogrades, nombre d’entre eux sont confrontés à des défis complexes : manque de formation, difficultés d’insertion sociale et professionnelle, mal-logement, précarité, santé mentale fragilisée, incapacité à s’imaginer dans un projet collectif. Ce constat, largement partagé par les acteurs du secteur que j’ai reçus, appellerait une politique plus claire et plus ambitieuse. L’action actuellement menée en faveur de la jeunesse pâtit de la multiplication de dispositifs qui se recoupent parfois et relèvent souvent de ministères différents, rendant l’ensemble illisible pour les jeunes, leurs familles et les associations d’éducation populaire.

Un empilement de dispositifs ne fait pas une politique publique ! Je pense notamment à la coexistence des Vacances apprenantes, qui relèvent du ministère de l’Éducation nationale, et des Colos apprenantes, initialement conçues comme une partie du premier dispositif mais alimenté par le programme 163, et désormais du Pass colo géré par les caisses d’allocations familiales. Toute colonie de vacances est l’occasion d’un apprentissage. Ce qui pouvait avoir du sens à la sortie des confinements n’en a plus, et il serait salutaire de biffer définitivement cette appellation irritante pour tous ceux qui organisent les séjours.

La dotation des Colos apprenantes devrait être stable, à 40 millions d’euros. L’ensemble devrait être repensé pour éviter non seulement la confusion et les doublons mais aussi le non-recours aux droits. Nous devons proposer aux jeunes Français une possibilité simple d’aide au départ en colonie de vacances, un dispositif unique modulé en fonction du quotient familial, la somme attendue étant versée directement aux structures organisatrices. Elles en retireraient lisibilité et financements pérennes et afficheraient le reste à charge réel pour les familles.

L’année 2024 a vu la fin du dispositif Fonjep jeunes, ce qui explique la diminution des crédits de l’action 02 consacrés à la jeunesse et à l’éducation populaire. Mon groupe proposera de lancer un nouveau plan Fonjep jeunes. Le mécanisme, qui consiste au versement de subventions aux associations de jeunesse et d’éducation populaire par le Fonjep est vertueux car il est fondé sur le principe même de l’éducation populaire : l’éducation des jeunes par les jeunes. La politique de mentorat se poursuit, dotée de 32 millions d’euros. Mais une politique d’insertion et d’orientation véritable rendrait ce mécanisme inutile. Je proposerai donc de réorienter ces crédits vers le réseau Info Jeunes pour renforcer son maillage territorial.

Le Conseil d’orientation des politiques de jeunesse mène un travail admirable, mais son existence n’est pas pérenne. Créé en 2016 pour cinq ans, il a été renouvelé en 2021. Seule son inscription dans la loi lui permettra d’œuvrer dans la durée. Lorsqu’un véhicule législatif adapté se présentera, serez-vous favorable à une mesure en ce sens, monsieur le ministre ?

Les crédits alloués au développement de la vie associative devraient connaître un léger recul en raison de la diminution des sommes consacrées au compte d’engagement citoyen, quand les crédits de l’action 01 diminuent globalement de 2,3 millions d’euros. La dotation « socle » du Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA), resterait fixée à 33 millions d’euros. Nous proposerons de l’augmenter, car cet instrument indispensable permet la formation des bénévoles et le financement des projets émanant des associations locales. À défaut de revaloriser cette dotation, il conviendrait de relever la quote-part attribuée au FDVA du produit acquis à l’État des comptes bancaires inactifs et des contrats d’assurance vie en déshérence. En 2025, elle sera portée à 40 % de ce produit, vous l’avez dit ; je vous engage à aller jusqu’à 50 %, voire 60 %.

Le réseau Guide asso, doté de 800 000 euros supplémentaires, devrait finir de se déployer sur tout le territoire, outre-mer compris. Je me réjouis que ce dispositif soit inscrit dans la loi, mais l’accompagnement des associations doit monter en puissance. Le développement des outils numériques est certes utile, mais ils ne sauraient remplacer la présence dans les territoires : les associations vous l’ont rappelé lors de votre visite dans ma circonscription.

Une loi d’orientation en faveur de la jeunesse, de l’éducation populaire et du monde associatif serait peut-être l’occasion de passer en revue et d’harmoniser les politiques conduites dans le cadre du programme 163, de rétablir la confiance entre les pouvoirs publics et le monde associatif et de sécuriser le financement de la vie associative.

Dans la partie thématique de mon rapport, je traite des mouvements d’éducation populaire, des valeurs qui les animent et de leur intérêt par l’exemple des séjours de vacances collectifs de mineurs. Face à une dynamique de repli sur soi, les associations qui relèvent de l’éducation populaire méritent une attention particulière. Elles permettent d’affirmer, comme le souligne Philippe Meirieu, que le « faire ensemble » fonde le « vivre ensemble ». Considérer ces mouvements comme de simples prestataires au service de projets dont la conception n’a fait l’objet d’aucune concertation, c’est appauvrir leur champ d’action et renoncer à la promesse républicaine faite à chaque individu de pouvoir s’extraire des déterminismes sociaux et développer son esprit critique.

Enfin, il apparaît qu’une baisse supplémentaire de crédits de 55 millions d’euros devrait frapper la mission. Quelles actions, monsieur le ministre, feront les frais du naufrage budgétaire ?

Compte tenu des réserves et des critiques que j’ai exposées, vous aurez compris que je ne voterai pas les crédits du programme 163.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis (Sport). C’est un plaisir et un honneur pour l’ancien athlète, ancien dirigeant de club et président de ligue sportive régionale que je suis, de vous présenter les crédits qui seront consacrés à la politique sportive en 2025 et, après tant d’années passées sur les stades, de passer ainsi de la pratique à la théorie. Néanmoins, j’aurais préféré devoir commenter les chiffres d’un budget en progression. Cela dit, je salue votre nomination, monsieur le ministre, celle d’un homme de dialogue, d’un élu de terrain comme tous les maires de France. Vous connaissez les enjeux du sport, que vous avez si bien mis en avant en accueillant à Châteauroux les épreuves de tir des Jeux olympiques et paralympiques.

Les JOP ont été une réussite éclatante. Tout l’été, les yeux du monde ont été rivés sur la France et les spectateurs ont été éblouis, y compris par les performances de nos athlètes. Le sport, source puissante d’accomplissement personnel et collectif, est aussi une occasion privilégiée pour une nation fracturée de partager les mêmes émotions.

La déception n’est donc que plus forte de la diminution des crédits du programme 219. Certes, le contexte budgétaire est éminemment difficile et la décrue budgétaire était annoncée. Il n’en demeure pas moins que d’autres budgets ont été davantage préservés, preuve, peut-être, que nous ne sommes pas encore une vraie nation sportive. Nous donnons-nous les moyens de le devenir ?

Les crédits qui nous sont proposés sont, a minima, limités puisqu’en 2025 la dotation globale du programme 219 devrait diminuer d’un peu plus de 10 % en AE et de plus de 23 % en CP pour s’établir respectivement à 694,6 et à 593,1 millions d’euros. C’est une perte de 81 millions en AE et de 182 millions en CP par rapport à la loi de finances initiale pour 2024. Qui plus est, ces chiffres sont provisoires, un document récemment diffusé faisant état de nouvelles coupes dans le budget de la mission ; on parle de 55 millions d’euros. Nous entendrons avec intérêt vos commentaires à ce sujet.

Les crédits de l’ANS devraient être de 259 millions d’euros en AE, en diminution de 11 millions, et de 159 millions en CP, en diminution de 111 millions. D’autre part, le système des taxes affectées à l’Agence évoluera en 2025 et 160,1 millions d’euros lui seront affectés à ce titre, contre 166,1 millions en 2024. Comme de nombreux parlementaires, je vous invite, monsieur le ministre, à relever le plafond de la taxe sur les paris sportifs en ligne. Le système de financement de l’ANS doit être simplifié ; seule une dotation budgétaire globale et stabilisée à un haut niveau permettra de mener une politique continue en faveur du sport dans notre pays.

L’évolution des crédits budgétaires s’explique, c’est vrai, par la suppression du financement des mesures liées aux Jeux Olympiques et à la grande cause nationale 2024, l’activité physique et sportive. Quelques économies sont aussi réalisées sur le pass’sport, qui devrait évoluer : en 2023, il n’a été utilisé que par 1 380 000 jeunes gens sur 6 millions de bénéficiaires potentiels, et les disparités sont très fortes selon les territoires. Si le taux de recours n’augmente pas en 2025, il conviendra de s’interroger sur la pérennité de ce dispositif. Il me paraîtrait opportun de privilégier des moyens d’action au plus près du terrain, c’est-à-dire des clubs sportifs. La pratique sportive n’est pas spontanée, elle ne tient pas à un pass’sport mais surtout à la rencontre avec un médiateur, avant même une aide financière.

Les premiers projets d’équipements sportifs élaborés dans le cadre du plan « 5 000 terrains de sport - Génération 2024 » n’ont pas encore donné lieu à décaissements. Ce décalage dans le temps explique une partie de la diminution des crédits, vous l’avez indiqué.

Pour la haute performance, l’économie de 30 millions d’euros que vous proposez ne me paraît pas opportune. L’héritage des Jeux doit être avant tout sportif ; cette réussite ne peut être sans lendemain. Parmi les mesures essentielles, je citerai l’accompagnement social personnalisé des meilleurs athlètes français, puisqu’il était acté de leur garantir une ressource annuelle minimale de 40 000 euros par an pour leur permettre une préparation sereine.

Pour rendre plus efficaces les moyens humains consacrés au sport par l’État, il me semble indispensable de relancer la réflexion sur le cadre d’emploi des conseillers techniques sportifs grâce auxquels le mouvement sportif bénéficie d’un appui technique spécifique. La situation de ces agents devrait être clarifiée. Si les règles de recevabilité des amendements me l’avaient permis, j’aurai demandé que le Gouvernement remette un rapport au Parlement à ce sujet. Rouvrirez-vous une réflexion sur ces emplois ?

L’Agence française de lutte contre le dopage exerce des missions régaliennes élargies en 2021 ; ses pouvoirs d’enquête, notamment, ont été renforcés. Or, elle devrait voir sa dotation diminuer légèrement – de 500 000 euros – en 2025 et son plafond d’emplois sera abaissé de 2 équivalents temps plein. La perte de deux enquêteurs est préjudiciable à une mission de contrôle efficace. Je sollicite donc le maintien de ces emplois et, en conséquence, le réajustement de la dotation accordée à cette Agence.

Le programme 350 n’appelle pas de remarques particulières. L’année 2025 sera celle de la sortie du programme d’organisation des JOP et de construction des infrastructures nécessaires, si bien que ce programme disparaîtra de la maquette budgétaire. Toutefois, ne serait-il pas opportun de le voir réapparaître dans le projet de loi de finances 2026 en vue de la préparation des Jeux d’hiver de 2030 ? Le Premier ministre a convoqué il y a quelques jours une réunion consacrée à l’organisation de ces Jeux, en appelant à la sobriété sur le plan environnemental et sur le plan financier. Que pouvez-vous nous dire à ce stade ?

Mais avant de basculer dans la préparation des Jeux de 2030, il convient de faire fructifier l’héritage des Jeux de Paris. Quelles sont vos intentions, monsieur le ministre, au sujet de la loi relative à l’héritage des Jeux 2024 annoncée par votre prédécesseure et qui devait porter sur l’éthique du sport et la gouvernance des fédérations sportives ?

J’en viens à la partie thématique de ce rapport. Après la création en 2019 de l’ANS, chargée de développer l’accès à la pratique sportive et de favoriser le sport de haut niveau et la haute performance, des conférences régionales ont été installées. Des conférences de financeurs leur sont adossées pour gérer les crédits territoriaux de l’Agence relatifs aux projets sportifs territoriaux et aux projets sportifs fédéraux. Les difficultés de pilotage de ces organes territoriaux sont manifestes, cela ressort des auditions et des observations de terrain. Je m’interroge sur l’efficacité de l’organisation actuelle, complexe, et je constate avec plaisir que notre point de vue est le même. Il serait plus clair et plus économe en moyens d’acter une fois pour toutes que le sport, dans sa dimension quotidienne, est d’abord porté par l’échelon communal. La déconcentration des crédits alloués au développement du sport au niveau des préfets de département serait plus compréhensible et plus simple pour les collectivités et pour le monde sportif. Le même souci de rationalisation et de simplification devrait conduire à ce que le ministère finance les projets sportifs fédéraux en contractualisant avec chaque fédération. Bien entendu, une telle organisation suppose que l’État fasse confiance aux collectivités et au monde sportif. Avec un tel système, l’ANS pourrait se recentrer sur la mission pour laquelle elle avait été initialement conçue, le soutien au sport de haut niveau et à la haute performance sportive. Il convient de maintenir l’autonomie de l’ANS, qui a fait la preuve de son efficacité. Le Premier ministre a évoqué l’idée d’un rapprochement entre l’Agence et votre ministère à des fins d’économies ; pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet ?

Enfin, les premiers partenaires du monde du sport sont les collectivités locales. En 2002, les communes à elles seules ont investi 7,5 milliards d’euros en faveur du sport, un montant sans commune mesure avec les crédits d’État. Vous comprendrez, monsieur le ministre, que les mesures concernant les finances locales annoncées pour 2025 nous inquiètent. Elles peuvent entraîner des conséquences en cascade sur tout l’écosystème du sport.

Compte tenu de cet ensemble d’éléments positifs et négatifs, j’émettrai un avis de sagesse sur l’adoption des crédits consacrés au sport de la mission Sport, jeunesse et vie associative.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Julien Odoul (RN). Le projet de loi de finances pour 2025 trahit un manque d’ambition et de responsabilité pour répondre aux défis qui concernent le sport français. En réduisant drastiquement le budget alloué à la mission Sport, jeunesse et vie associative de 174 millions d’euros, une baisse de près de 20 % par rapport à 2024, vous démontrez une forme d’abandon et même de désertion. L’enjeu n’est pas seulement sportif ou post-olympique, il est aussi sanitaire, sociétal et même républicain – dans le terme « nation sportive », il y a aussi « nation ». Le sport, pilier de la cohésion nationale, est de plus en plus la cible de revendications religieuses, communautaristes et islamistes. Comme le confirmait le Conseil des sages de la laïcité dans une note de 2022, le sport est l’objet d’entrisme religieux. Les attaques islamistes sont réelles et récurrentes.

Par exemple, les sports de combat, qualifiés de disciplines à risque par les services de renseignement, sont devenus des lieux privilégiés pour les radicalisés. Boxe, lutte et arts martiaux mixtes servent de terrain d’entraînement et de recrutement. En 2022, au nombre des 550 signalements de radicalisation relatifs à des pratiquants sportifs, 200 concernaient des licenciés dans les sports de combat. Dans certains cas, des entraîneurs eux-mêmes « fichés S » encadrent de jeunes athlètes, transformant les clubs en cellules du Hamas ou du Hezbollah. C’est ainsi que, début octobre, lors des championnats du monde de lutte au Kazakhstan, une athlète française de 17 ans a arboré un hijab, défiant la décision du Conseil d’État de juin 2023 selon laquelle l’obligation de neutralité s’applique à tous les sélectionnés d’une équipe de France lors des manifestations et compétitions auxquelles elles ou ils participent.

De plus, les responsables de plusieurs clubs de lutte témoignent des pressions auxquelles ils sont soumis pour interrompre les compétitions aux heures de prière, et d’exigences de séparation des sexes. Face à cette menace croissante, votre réponse est inexistante car, sur le terrain ou dans les vestiaires, des clubs entiers échappent au contrôle des autorités en raison du manque de ressources et de personnel formé pour surveiller efficacement ces comportements déviants. Dans ce contexte, monsieur le ministre, comment comptez-vous faire, avec ce budget insuffisant, pour donner les moyens nécessaires à la lutte contre l’entrisme islamiste dans le sport et pour défendre concrètement les valeurs républicaines ?

Mme Violette Spillebout (EPR). Dans un contexte budgétaire contraint, je suis heureuse de constater que le budget de 2025 consacré à la jeunesse et à la vie associative progresse de 36 millions d’euros pour atteindre 937 millions. Ce budget permettra de maintenir les dispositifs de volontaires de service civique et de mentorat ainsi que les Colos apprenantes. Nous tenons au SNU qu’ont promu Gabriel Attal, Sarah El Haïry puis Prisca Thévenot mais nous sommes ouverts à un dialogue avec vous sur les réussites obtenues et les évolutions possibles.

Avec 593 millions d’euros pour le programme Sport, le budget de 2025, en légère baisse, préserve nos politiques publiques et demeure deux fois supérieur à celui de 2017.

Le budget 2025 s’inscrit dans l’héritage des JOP de Paris. Il vise à faire du sport un outil de rayonnement pour la France, à encourager la pratique sportive pour tous et à structurer l’offre sportive par des investissements en tous lieux. Nous partageons vos objectifs, mais je souhaite appeler votre attention sur le développement du sport dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Vecteur social, le sport doit être accessible à tous. Je défendrai donc un amendement visant à renforcer les moyens sportifs alloués à l’éducation populaire et à démocratiser l’accès à la pratique sportive.

Il nous faut aussi accompagner des sports trop peu valorisés dans nos quartiers, le futsal par exemple. Vous étiez maire, vous connaissez l’importance du programme « 5 000 équipements - Génération 2024 », dont les 100 millions d’euros de crédits sont reconduits, l’objectif étant d’équiper un tiers des quartiers en politique de la ville. Je pense spécifiquement au plan « 1 000 dojos » lancé par la Fédération française de judo et l’ANS dans de nombreuses villes françaises.

Le sport-santé nous tient à cœur et nous serons nombreux à soutenir le dispositif pass’sport, le sport en milieu scolaire et le sport étudiant. Notre collègue Belkhir Belhaddad présentera un amendement visant à augmenter le soutien aux maisons Sport santé pour que leur déploiement se poursuive dans la continuité de ce qui a été réalisé dans le cadre de la stratégie nationale sport-santé 2019-2024. Poursuivre cette politique ambitieuse permet d’éduquer les citoyens aux bienfaits du sport et de favoriser l’accès à des infrastructures adaptées pour tous, dans une dynamique inclusive et saine.

Le groupe des députés Ensemble pour la République votera en faveur des crédits alloués à la mission Sport jeunesse vie associative.

M. Aly Diaouara (LFI-NFP). En dépit des promesses des Jeux olympiques, le budget qui nous est présenté reflète une politique en recul. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : la baisse est de 13 % et de quelque 230 millions d’euros. Loin de constituer un héritage olympique, votre budget traduit une politique d’austérité sans vision durable alors que l’organisation des JOP devait être une occasion historique de renforcer les secteurs du sport, de la jeunesse et de la vie associative. Pour le sport, les coupes sont vertigineuses : 188 millions d’euros en moins pour la promotion et le développement du sport, une réduction d’un quart. Ce qui devait être un élan de démocratisation sportive se réduit à des investissements élitistes au service d’une petite minorité, au détriment des clubs locaux, des associations et des infrastructures de proximité.

La promesse de 5 000 équipements sportifs a été enterrée, et même les financements restants pour le programme Génération 2024 sont amputés. Il en résultera qu’il n’y aura ni rénovation ni nouveaux équipements mais un désengagement flagrant de l’État dans les territoires populaires et ruraux. Le même constat vaut pour le handisport et l’accessibilité. Avec une allocation de 1,5 million d’euros seulement depuis 2020, la stratégie nationale sport handicap reste totalement insuffisante pour permettre à des personnes en situation de handicap la pratique du sport. Cette absence de moyens reflète une politique d’exclusion inacceptable qui perpétue les inégalités.

La situation est tout aussi préoccupante pour la jeunesse. Dans un contexte de précarité étudiante grandissante et de chômage élevé chez les jeunes, votre budget ne prévoit aucune stratégie visant à leur garantir des perspectives dignes. Au contraire, les maigres moyens alloués à la jeunesse ou à l’éducation populaire perdent 16 %, soit 111 millions d’euros, cependant que les associations qui soutiennent ces jeunes peinent à survivre aux coupes budgétaires. Plutôt que de créer des emplois de long terme, vous continuez à vous reposer sur un service civique précaire qui n’est qu’un substitut à l’embauche. Je ne parle même pas du SNU, dont vous avez-vous-même reconnu hier qu’il est agonisant.

Des associations essentielles pour la cohésion sociale se trouvent asphyxiées par votre budget, et le pire est à venir puisque vous allez soustraire 5 milliards d’euros aux collectivités territoriales, le principal soutien des associations. Avec les faiblesses cumulées de votre budget, on assiste à l’agonie du monde associatif local. Loin de redonner vie à des quartiers en crise, vous diminuez le soutien à la vie associative. Le fonds d’initiatives associatives, si important pour les jeunes, notamment les jeunes des quartiers prioritaires de la politique de la ville, a disparu. Les associations qui pallient déjà les défaillances de très nombreux services publics sont à bout de souffle, sans perspectives d’amélioration.

Monsieur le ministre, votre budget renie les promesses d’inclusion, d’insertion et de progrès qui devaient être incarnées durant les JOP pour la population et notre jeunesse. Grâce aux nouvelles recettes obtenues en séance plénière, nous défendrons des amendements visant à l’allocation de moyens renforcés pour ne pas laisser sombrer notre jeunesse, le tissu associatif et de nombreux quartiers et territoires ruraux oubliés de votre politique.

M. Christophe Proença (SOC). Les JOP ont été une grande réussite mais le temps de l’euphorie n’est plus. J’ajoute que pour les territoires ruraux comme ceux de ma circonscription du Lot, cet événement a souvent été perçu comme une fête un peu lointaine. Pour que l’esprit des Jeux perdure et touche toute la France, bien des solutions existent, la première étant de tenter d’endiguer l’inégalité d’accès aux équipements sportifs structurants. Il n’est pas possible que les enfants du Lot, de la Seine-Saint-Denis ou d’outre-mer ne disposent pas du même accès aux stades de sport, aux gymnases et aux piscines.

Mes collègues socialistes et moi-même ne comprenons pas que la seule augmentation de votre budget concerne le service civique. La baisse des moyens alloués au pass’sport, au sport scolaire et au monde associatif n’est pas un bon signal. Le sport scolaire, notamment dans l’enseignement primaire, est en grande difficulté – voyez l’Union sportive de l’enseignement du premier degré. Dans un contexte de rigueur budgétaire imposée par des erreurs de gestion qui ont provoqué un déficit inédit, le sport et la jeunesse ne doivent pas être la variable d’ajustement de la politique gouvernementale. La politique sportive doit être collective mais, avec la baisse de 5 milliards d’euros des moyens accordés aux collectivités, la réalisation d’infrastructures indispensables au développement du sport sera très difficile.

Vous avez parlé de 5 000 équipements sportifs, mais il ne s’agit que d’équipements de taille modeste, non d’équipements structurants. Ces projets doivent être portés à une échelle dépassant la commune et la communauté de communes. L’État doit y jouer tout son rôle ; c’est son devoir au regard de l’aménagement du territoire. Comme vous, je pense qu’il serait bon d’étudier l’hypothèse de la gestion départementale des financements opérés par l’ANS.

Attentif aux propos que vous avez tenus dans la presse au lendemain de votre nomination, j’ai été surpris de la résignation avec laquelle vous avez accepté la baisse de 268 millions d’euros de votre budget. Nombre de rencontres sportives auraient été perdues sans la volonté d’aller au bout de l’épreuve ou du match. C’est l’ADN du sport et du sportif, et peut‑être aussi celle du ministre des sports… Monsieur le ministre, mes collègues socialistes et moi‑même sommes d’accord avec vous pour construire l’héritage des Jeux, mais pour cela il faut un budget reflétant ces valeurs et accompagnant notre ambition. Nous ne pourrons relever ce défi ni avec le budget actuel ni par le recours à l’article 49.3 de la Constitution pour faire passer des réductions de crédits. Faisons en sorte que l’héritage des Jeux soit à la hauteur de l’esprit olympique, celui d’un sport pour toutes et tous, sans distinctions.

Mme Virginie Duby-Muller (DR). Les JOP ont été une grande réussite. Cet événement avait conduit les précédents gouvernements à augmenter significativement le budget du ministère des sports. La baisse importante des crédits du ministère en 2025 s’explique en grande partie par la fin des Jeux. Cette trajectoire budgétaire, qui trouve aussi sa source dans l’effort demandé par le Premier ministre face à la situation difficile de nos finances publiques, ne remet pas en cause les principales actions de votre ministère. Il est compréhensible que le budget revienne à un niveau préalable à la préparation des Jeux, et si vos crédits budgétaires diminuent de près de 30 % en un an, ils restent bien supérieurs à ce qu’ils étaient en 2020.

Vous avez affiché l’ambition que le sport soit un outil de rayonnement pour la France et avez dit vouloir encourager la pratique du sport pour tous ainsi qu’une politique d’investissement dans les équipements sportifs. Vous pouvez compter sur le soutien des députés du groupe la Droite républicaine pour accompagner votre action.

J’avais déposé des amendements visant à appliquer un taux réduit de TVA de 10 % au secteur des loisirs sportifs marchands regroupant les salles de sport – fitness, yoga – et les activités marchandes de sport indoor et outdoor. Ce secteur compte 17 millions de pratiquants en France, 7 000 établissements et 70 000 salariés ; 80 % des employés sont âgés de moins de 30 ans. Un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 22 septembre 2022 a jugé que les salles de sport peuvent être soumises à un taux réduit de TVA. Quelle est la position du ministère sur cette proposition ?

La France continuera d’accueillir de grands événements sportifs mondiaux, tels les Mondiaux de cyclisme en 2027 et les Jeux olympiques d’hiver en 2030 dans les Alpes ; des épreuves auront lieu en Haute-Savoie. Je vous demande, monsieur le ministre, de veiller à la bonne intégration des parlementaires dans la concertation concernant ces grands projets. Il me semble crucial que la représentation nationale soit associée à leur gouvernance.

Pour la première fois en 2025, les crédits du SNU baisseront de 20 %. La Cour des comptes a récemment publié un rapport très critique sur ce dispositif dont elle évalue le coût à près de 10 milliards d’euros et les sénateurs ont annoncé qu’ils en souhaitent la suppression. Quel avenir envisagez-vous pour le SNU ?

M. Jean-Claude Raux (EcoS). J’ai été l’année dernière rapporteur pour avis des crédits de la mission Sport, jeunesse et vie associative. C’est un honneur quand on mesure l’importance des politiques publiques ici financées, dont l’importance primordiale est hélas déjà insuffisamment reflétée dans le budget national et qui vont encore subir une forte baisse – 231 millions d’euros – en 2025. Cela s’explique pour partie, vous l’avez rappelé, par l’extinction progressive du programme 350 consacré aux JOP, mais la fin des Jeux ne devait pas annoncer l’extinction de nos ambitions pour le sport. Tout au contraire, l’exaltation de cet été devait conduire à ce que notre pays devienne, selon les mots du président Macron, une grande nation sportive. Mais, un mois à peine après la cérémonie de clôture des Jeux paralympiques, que reste-t-il de la « grande nation sportive » ? Comptons : 150 millions d’euros en moins pour la promotion du sport pour le plus grand nombre, 100 millions du plan de 5 000 équipements sportifs destiné aux collectivités gelés, 10 millions en moins pour le pass’sport.

Que reste-t-il de la diversification du monde sportif, de la féminisation des fédérations, de l’inclusion des personnes en situation de handicap et de l’accès à la pratique sportive dans tous les territoires ruraux et populaires ? Cet héritage semble avoir été vite enterré. Qui aurait pu le prédire ? Nous, qui sommes nombreux et nombreuses à avoir alerté et redouté un immense coup de communication plutôt qu’une ambition sincère. Le groupe Écologiste et social formulera des propositions visant à ce que les JOP ne restent pas qu’un lointain souvenir.

Que reste-t-il des promesses de Michel Barnier qui appelait de ses vœux la reconnaissance des bénévoles et des associations, alors que les crédits consacrés au développement de la vie associative connaissent une baisse de 4 %, et l’emploi des jeunes dans les associations une coupe majeure ?

Je reconnais néanmoins la continuité de l’engagement sur le Guide asso que nous avons inscrit dans la loi au printemps dernier. Vous avez insisté, monsieur le ministre, sur son utilité. L’effort devra être poursuivi, Mme la corapporteure l’a dit.

Je ne conclurai pas sans dire un mot du SNU. Cela ne surprendra pas grand monde mais, pour la première fois depuis que le dispositif a été créé, mon propos aura une note positive, puisque je salue la prise de conscience tardive de son échec qui permet une économie de 31,7 millions d’euros. Il est dommage qu’elle ne se fasse pas au bénéfice du monde associatif. Voilà en tout cas un gaspillage d’argent public que l’on peut encore réduire, et j’appelle la commission à supprimer les crédits du SNU au profit de notre jeunesse, de notre tissu associatif et de l’éducation populaire.

Sans une modification profonde des crédits de la mission Sport, jeunesse et vie associative, le groupe écologiste et social votera contre ce budget.

M. Frantz Gumbs (Dem). Dans un cadre budgétaire particulièrement contraint, les crédits de la mission Sport, jeunesse et vie associative sont en recul de 12,5 % par rapport à l’année dernière, recul pour partie dû à la fin des financements consacrés aux JOP. À travers cette mission, tout un projet de société doit être défendu ; c’est ce que soutient le groupe Les Démocrates. Nos terres de champions doivent aussi devenir terres de pratiquants. En investissant dans le sport, nous contribuons à renforcer notre cohésion sociale, faciliter l’insertion professionnelle et promouvoir la santé publique. Dans ce contexte, les JOP ont été un moment de réussite et de joie nationale partagée ; ils ont conforté l’idée qu’une place centrale doit être accordée au sport dans la vie de nos concitoyens et qu’il faut garantir une pratique sportive accessible partout, à toutes et à tous. En 2025, les crédits du programme 350 serviront à assurer durablement l’héritage des Jeux par le développement de la pratique sportive et le soutien du sport de haut niveau.

L’État entend poursuivre les efforts en faveur du plan d’équipements sportifs de proximité en reconduisant l’enveloppe de 100 millions d’euros prévue pour l’ANS en 2024. Un effort particulier est notamment attendu dans les territoires ultramarins où le nombre et la qualité des infrastructures sportives sont souvent inférieurs à ce qu’ils sont en métropole ; comment pouvons-nous corriger cette différence ?

En faveur de l’engagement de la jeunesse et de l’action associative, les crédits du programme 163 sont en hausse de 4 %, ce que nous saluons. Le FDVA cher au groupe démocrate sera pérennisé et consacrera 25 millions d’euros au soutien au fonctionnement et à l’innovation des associations locales, priorité étant donnée aux plus petites d’entre elles.

Notre groupe se félicite de l’attention portée au service civique. Avec la création du service civique écologique, il répondra davantage encore aux besoins des jeunes gens. L’enveloppe allouée à l’Agence du service civique sera ainsi augmentée de 81 millions d’euros. Les modalités de la gouvernance du SNU et son périmètre doivent être mieux paramétrés mais le projet de société qu’il porte garde toute son acuité. Les 66 000 séjours de cohésion nouvellement financés favoriseront la mixité sociale et l’engagement citoyen et écologique.

Toutes les actions menées en faveur de l’engagement de la jeunesse sont saluées, mais quelles mesures sont prises, monsieur le ministre, pour qu’elles atteignent avec la même efficacité les territoires les plus isolés et les plus éloignés ?

Mme Béatrice Bellamy (HOR). L’année 2024 restera une année phare pour le sport français, l’esprit olympique et paralympique, l’admiration des sportifs, la promotion de l’activité et du dépassement. Cette liesse populaire ne peut rester sans lendemain. Nous observons un engouement pour la pratique sportive dans nos communes. Il se traduit par l’augmentation du nombre de licenciés dans les clubs sportifs et les associations, l’extension du dispositif « 30 minutes d’activité physique quotidienne » à toutes les écoles et la poursuite du déploiement des 2 heures de sport supplémentaires au collège.

En 2025, le budget du ministère décroît. Nous entendons que les JOP sont finis mais nous invitons à modérer cette baisse pour ne pas effacer les progrès obtenus après des années d’investissement en faveur du sport et des sportifs. Une dynamique sportive doit être accompagnée sur le terrain ; aussi, le budget du sport doit être celui de la proximité et de la dynamique associative, afin que la parenthèse ouverte cet été ne se referme jamais et que le sport continue d’être au cœur de nos villes et villages.

J’attache une attention particulière à l’application du plan « 5 000 équipements sportifs ». De nombreux élus locaux nous sollicitent à ce sujet. Ce plan a pour objectif la création, la rénovation et l’aménagement de 3 000 équipements sportifs de proximité, 1 500 cours d’écoles actives et sportives et 500 équipements structurants jusqu’en 2026. J’appelle votre attention sur la répartition de ces équipements sur le territoire. Un tiers des équipements de proximité et un tiers des cours d’école aménagées sont destinés aux quartiers prioritaires de la politique de la ville. Je vous demande de ne pas délaisser la ruralité. Toutes les communes, même les plus petites, doivent pouvoir bénéficier du concours de l’ANS pour rendre le sport accessible à tous. Mais, pour les communes rurales, le reste à charge représente parfois un coût important ; ne peut-on envisager d’étendre le dispositif pour soulager la pression financière qui pèse sur les plus petites collectivités ? Enfin, pouvez-vous nous assurer du soutien de l’ANS jusqu’en 2026, y compris dans les zones rurales ?

Considérant les priorités que j’ai évoquées et en souhaitant un travail au service du sport dans la ruralité, les députés du groupe Horizons et indépendants souscrivent à l’objectif de cohésion autour du sport, de l’engagement et de la vie associative de votre budget.

M. Salvatore Castiglione (LIOT). La baisse du budget du programme Sport après les JOP était attendue, mais notre groupe s’étonne qu’elle ne soit pas limitée aux dépenses exceptionnelles liées à cet événement. Deux mois après le succès des Jeux, le sport, pourtant érigé grande cause nationale 2024, est l’un des secteurs qui subit le plus fortement les coupes budgétaires. C’est regrettable, tant la pratique du sport est utile pour lutter contre de nombreuses pathologies chroniques et limiter le développement d’affections de longue durée.

Plutôt que de diminuer les crédits alloués au pass’sport, nous plaidons en faveur de l’élargissement du dispositif pour toucher plus de jeunes, notamment les étudiants n’ayant pas accès à une infrastructure sportive universitaire. Nous déplorons aussi que le dispositif 2 heures de sport supplémentaire au collège soit limité aux collèges en réseaux d’éducation prioritaire (REP) et en REP+, alors que de très nombreux collégiens ne pratiquent pas une activité sportive régulière. Notre groupe s’inquiète aussi des conséquences de la suppression d’une ressource historique de l’ANS, le produit de la taxe sur les jeux exploités par la Française des jeux, sans que cette suppression soit totalement compensée, entraînant la diminution de 6 millions d’euros des moyens de l’Agence. Nous réitérons donc notre demande de relèvement du plafond de la taxe sur les paris sportifs en ligne, conformément au principe simple selon lequel le sport doit financer le sport. Enfin, notre groupe s’inquiète du décalage d’un an du plan Génération 2024 ; les élus locaux craignent que ce report se traduise finalement par une réduction des crédits. Monsieur le ministre, comment envisagez-vous de continuer d’aider les collectivités pour faire vivre l’héritage des Jeux et favoriser le développement du sport pour tous ?

Les moyens consacrés au SNU ne sont pas proportionnés au faible engouement qu’il suscite. Pour donner suite au rapport critique de la Cour des comptes, il conviendrait soit de renforcer la communication pour attirer plus de jeunes provenant de tous les quartiers de la République, soit de réorienter les crédits alloués au SNU vers le financement de la lutte contre la précarité des jeunes, le soutien aux associations ou le développement des accueils collectifs de mineurs. Notre groupe regrette également la diminution des moyens consacrés au soutien des métiers de l’animation, notamment la non-reconduction de la dotation allouée au financement de formations certifiantes pour les animateurs.

Enfin, la situation des associations est préoccupante en raison des effets de la crise sanitaire et de l’inflation. Le montant du FDVA devrait augmenter grâce à la réaffectation du produit des comptes bancaires inactifs mais il serait judicieux de confier la gestion de ces sommes aux collectivités, qui connaissent mieux que les préfectures les besoins des associations sur leur territoire. Pour conclure, la diminution de 3 millions d’euros des crédits octroyés au compte engagement citoyen étonne quand le Parlement a adopté une loi en faveur de l’engagement bénévole afin qu’il s’étende. Comment expliquez-vous cette décision et quelles mesures prendrez-vous en faveur des associations ?

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Les JOP 2024 ont connu un succès populaire et sportif exceptionnel et offert une occasion unique de faire de la France une grande nation sportive. Cet événement a aussi permis de faire rayonner la France sur la scène internationale et rappelé que le sport peut jouer un rôle fondamental dans nos vies. Malheureusement, la lecture des moyens alloués au sport par le PLF 2025 montre que, d’évidence, l’État ne se donne pas les moyens de cette ambition. La suppression des fonds fléchés vers les Jeux sans réaffectation vers nos clubs sportifs est un mauvais signal. Les crédits de la mission Sport diminuent de presque 25 % ; cette chute drastique compromet le pass’sport, les 2 heures de sport supplémentaires au collège et le fonctionnement de l’ANS.

Ce budget aura des conséquences importantes pour les départements qui tels que le mien, la Seine-Saint-Denis, manquent cruellement d’équipements sportifs. Le gel du plan national de construction de terrains sportifs associé à la réduction des budgets des collectivités territoriales retardera encore la création des infrastructures nécessaires. Cela est tout à fait regrettable et entravera la réussite de l’objectif que nous nous sommes donné, faire de la France une grande nation sportive.

Le programme Jeunesse et vie associative connaît également des coupes. La hausse apparente du budget de ce programme est uniquement due à la mise en valeur du service civique dont les crédits augmentent de plus de 15 %. En réalité, les moyens consacrés au développement de la vie associative et à l’éducation populaire sont réduits respectivement de 3,9 % et de 6 %.

Il est urgent de revoir nos priorités. Plutôt que de maintenir un SNU très décrié qui ne répond pas aux besoins réels des jeunes, nous devrions nous concentrer sur la démocratisation du sport et le soutien aux associations, pour promouvoir l’accès au sport pour tous afin de créer une société inclusive et solidaire. Il faudrait aussi mettre tout en œuvre pour lever les obstacles, encore nombreux, que rencontrent les femmes et les personnes en situation précaire et de handicap. Ces actions construiront l’avenir de notre jeunesse et de notre société.

M. Gil Avérous, ministre. Madame Florence Herouin-Léautey, les crédits réaffectés à l’Agence du service civique lui sont effectivement nécessaires pour honorer les contrats déjà signés. L’Agence disposait d’une trésorerie relativement abondante que l’État a utilisée et qui sera donc reconstituée en 2025 sans que ces crédits correspondent à des contrats d’emplois civiques supplémentaires puisqu’ils permettent seulement de maintenir les ressources au même niveau qu’en 2024. Depuis la création du service civique, en 2010, 800 000 jeunes ont été mobilisés, dont 148 600 en 2023. Sachez que 86 % des jeunes qui font un service civique ont une bonne image de ce dispositif, comme 87 % de leurs parents, que 91 % des anciens engagés considèrent que l’expérience leur a permis d’être utiles socialement, et que 56 % d’entre eux déclarent avoir poursuivi un engagement après leur service civique.

Les SNU a été largement évoqué. En 2025, les crédits nous permettront d’accepter 35 700 jeunes, dont 22 400 dans le cadre des classes et lycées engagés et 13 300 inscrits individuellement. Je ne reviendrai pas sur le rapport de la Cour des comptes sinon pour redire qu’il conviendra peut-être de réviser le dispositif, dont la généralisation n’est pas supportable financièrement aujourd’hui. Le choix est d’ordre politique : si les crédits nous sont donnés, on y va. Mais, je l’ai dit hier, nous sommes en panne. En panne d’essence car le véhicule n’est pas cassé et que s’il y a des crédits supplémentaires, on pourra aller plus loin, mais aussi, diraient certains, en panne de sens, la structuration actuelle du dispositif ne permettant pas d’envisager l’augmentation du nombre de séjours faute de structures fixes d’accueil et de formation. Les contours actuels du SNU ne nous permettent pas de le généraliser, les finances publiques non plus ; il faudra donc réduire l’ambition initiale. Le principal reproche fait au SNU est qu’il n’atteint pas son public cible et que pour cela il devrait être généralisé et rendu obligatoire ; mais cela suppose des centaines de millions, sinon des milliards d’euros supplémentaires.

Ma collègue ministre de l’Éducation nationale et moi-même devons travailler ensemble à simplifier les dispositifs Colos apprenantes et Vacances apprenantes. Les Vacances apprenantes ont démontré la capacité des personnels de l’Éducation nationale à travailler en parfaite synergie avec les agents des collectivités territoriales, l’été principalement mais aussi pendant les autres vacances scolaires, à des moments où l’on n’attendait pas forcément qu’ils se mobilisent. La démonstration a été faite que cette conjugaison est efficace. Il ne s’agit pas de supprimer ces deux dispositifs qui, très majoritairement, fonctionnent bien, mais de les rendre un peu plus lisibles.

Les 7 millions d’euros du budget Info Jeunes sont stabilisés. Il faudra effectivement s’attacher à augmenter le nombre de ces points d’information jeunesse, dont l’utilité est déterminante. Les plus anciens d’entre nous se rappellent les points d’information de leur jeune temps ; ils avaient pignon sur rue et l’on y trouvait renseignements et accompagnement. Aujourd’hui, l’offre, disparate, doit être améliorée.

Je perçois votre inquiétude au sujet de la pérennité institutionnelle du Conseil d’orientation des politiques de jeunesse. Sachez qu’il n’y a pas de volonté politique de la remettre en cause, au contraire. Je viens de désigner son nouveau président en la personne d’Hugo Huet, chargé de moderniser notre action à destination de la jeunesse en renforçant la communication avec les jeunes gens pour les toucher directement et satisfaire leurs attentes.

L’effort supplémentaire qui nous est demandé est de 55 millions d’euros ; 49 millions viendront en diminution des crédits du SNU et 6 millions seront répartis sur les autres politiques.

Monsieur le rapporteur Joël Bruneau, je partage votre opinion, la taxe sur les paris sportifs devrait être augmentée. Le sujet est consensuel, mon ministère y travaille avec Bercy mais l’arbitrage n’est pas encore rendu.

Le pass’sport est considéré comme simple et utile pour les jeunes, les familles et les clubs. Il répond à un besoin social et de santé publique. Que la moitié des garçons et un tiers des filles de 6 à 17 ans ne suivent pas la recommandation des 60 minutes d’activité physique par jour nous oblige à investir dans ce dispositif, un peu plus plébiscité chaque année : on comptait un million de pass’sport en 2021, on dénombre presque 1,6 million de bénéficiaires en 2024. Le dispositif concerne 83 000 structures et 3 400 renouvellements de partenaires depuis le mois de juin. C’est une assez grande réussite. Les crédits inscrits dans le PLF pour 2025 nous permettent de reconduire la consommation de 2024. Si les demandes étaient supérieures, il faudrait réduire la cible et comprimer le nombre de bénéficiaires potentiels, la variable d’ajustement étant le niveau de revenu de leurs parents.

La consigne donnée à l’ANS est de ne pas réduire les crédits affectés à la haute performance. Si des arbitrages ont lieu, ils porteront sur d’autres politiques. Nous n’envisageons pas de rouvrir la réflexion sur le statut des conseillers techniques du sport (CTS) et des directeurs techniques nationaux (DTN). Les nouvelles conventions avec les fédérations pour les quatre ans à venir se feront à nombre de CTS et de DTN constant, avec une répartition différente, puisque quand les fédérations sont renouvelées quelque 30 % des CTS et des DTN bougent. Il n’y aura ni modification du statut ni mises à disposition.

L’Agence française de lutte contre le dopage retrouve ses moyens d’avant les Jeux olympiques ; seuls sont supprimés les postes qui étaient affectés aux quelque 1 000 contrôles supplémentaires nécessités par les Jeux.

Je reconnais par ailleurs qu’il faut prévoir des crédits pour Alpes 2030 – je vous invite à y veiller lors de l’examen du PLF.

Pour ce qui est de la loi « héritage des Jeux olympiques », le ministère entend recueillir les réflexions de tous les acteurs du sport – fédérations, élus locaux et nationaux, structures sportives – avant Noël. Nous les réunirons mi-janvier 2025, une fois les instances fédérales renouvelées, pour élaborer un projet de loi nourri par des propositions de terrain, répondant aux besoins impérieux des clubs et des jeunes de tous horizons, qu’ils souhaitent s’engager professionnellement ou bénévolement. Nous espérons aboutir en juin 2025.

Je souscris à vos propos, monsieur le rapporteur pour avis, en ce qui concerne l’Agence nationale du sport et la réforme des conférences régionales. Nous en discuterons à l’occasion des missions d’évaluation. Si, à ce stade, il fallait retenir une proposition, ce serait la vôtre.

Je partage également votre inquiétude concernant l’évolution des finances locales. Autant le ministère aura les moyens de cofinancer les projets présentés par les collectivités par l’intermédiaire de l’ANS – 100 millions d’euros d’autorisations d’engagement sont prévus –, autant le contexte financier devrait contraindre les collectivités à opérer des arbitrages dans leurs investissements. J’espère que le sport ne sera pas délaissé au profit d’autres priorités.

La lutte contre la radicalisation de certains clubs et certaines fédérations est l’une de nos priorités. J’ai transmis des consignes à l’ensemble des délégations régionales académiques à la jeunesse, à l’engagement et aux sports (Drajes) afin qu’elles repèrent et signalent toute situation anormale au ministère de l’intérieur. Nous serons intransigeants en la matière. Nous continuerons d’appliquer la position du Conseil d’État – qui est la plus stricte – s’agissant du port des signes religieux et le respect de la laïcité. Pour la résumer en quelques mots, les fédérations sportives délégataires sont chargées d’une mission de service public ; à ce titre, les équipes de France et les agents des fédérations participent à l’exécution d’un service public et sont soumis au principe de neutralité. Pour ce qui est de la pratique hors équipe de France, il revient à chaque fédération de déterminer dans son règlement les spécificités de sa discipline et les règles qui régissent ses compétitions et ses manifestations, sous le contrôle du ministère. Certaines fédérations ont choisi, dans des conditions limitées et pour certaines compétitions, de prendre des règlements limitant le port de signes politiques et religieux.

Une proposition de loi visant à assurer le respect du principe de laïcité dans le sport a été examinée par la commission de la culture, de l’éducation, de la communication et du sport du Sénat en mars 2024 mais n’a pas pu être discutée en séance du fait de la dissolution. Elle prévoit, dans son article 1er, l’interdiction du port de signes religieux dans les compétitions sportives organisées par les fédérations sportives et les associations affiliées. Elle impose également que le règlement intérieur des piscines et des espaces de baignade publics interdise le port de tenues à caractère religieux. Je souhaite qu’un travail soit engagé avec les acteurs institutionnels et le mouvement sportif afin de clarifier les divergences d’application de ce principe dans le sport. Cette proposition de loi pourrait recueillir notre assentiment.

J’ajoute que 56 équivalents temps plein (ETP) ont été créés dans les services départementaux de la jeunesse et des sports entre 2023 et 2024 pour renforcer les contrôles dans les structures sportives ; il s’agit ici notamment des contrôles demandés par les préfets dans le cadre des cellules départementales de lutte contre l’islamisme et le repli communautaire. L’État fera donc preuve de la plus grande fermeté. Les conventions signées avec les fédérations – en particulier à l’occasion du renouvellement des délégations pour les quatre ans à venir – doivent prévoir des actions de prévention et de formation en la matière, ainsi qu’en matière de lutte contre les violences sexuelles et sexistes.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons aux questions des autres députés.

M. Bruno Bilde (RN). À peine les Jeux olympiques de Paris 2024 terminés, le PLF pour 2025 prévoit de réduire de 19,3 % le budget des sports, soit 174 millions d’euros en moins. Comment justifier un tel désengagement, alors que le Gouvernement proclamait vouloir faire de la France une nation sportive ? Ces chiffres sont accablants. Les crédits de paiement indispensables pour financer les actions baissent de 23,5 %, soit près de 182 millions en moins. Cette coupe menace directement les clubs, les infrastructures de proximité et le programme de deux heures de sport hebdomadaires en plus pour les jeunes. Où sont passées l’ambition de Génération 2024 et la promesse d’un accès au sport pour tous ? L’organisation des Jeux ne doit pas être un exploit ponctuel, mais la base d’un engagement durable. Que comptez-vous faire pour que ces engagements ne restent pas de simples slogans mais se traduisent dans des actes à la hauteur de nos ambitions ?

M. Philippe Fait (EPR). L’activité physique adaptée (APA) doit être renforcée dans le cadre du sport-santé, en particulier pour les personnes atteintes de maladies chroniques. Ces programmes menés par des professionnels qualifiés permettent non seulement d’améliorer la condition physique des patients, mais également de réduire les effets secondaires des traitements lourds. Les actions exemplaires de l’association Accolade illustrent combien l’APA, lorsqu’elle est bien encadrée, peut transformer le parcours de soins des patients – en l’occurrence, des enfants atteints de cancer. Malheureusement, hormis quelques initiatives locales, le financement de l’APA repose encore majoritairement sur les dons privés et le soutien associatif. En cette année post-Jeux olympiques, alors que la promotion de la santé par le sport est plus que jamais valorisée, envisagez-vous de soutenir financièrement l’accès des patients à l’APA sur l’ensemble du territoire, afin d’assurer une prise en charge équitable et renforcée ?

Mme Farida Amrani (LFI-NFP). « Un dispositif aux objectifs peu clairs » : c’est ainsi que la Cour des comptes qualifiait le SNU le mois dernier. Pourtant, le PLF pour 2025 lui accorde encore 128 millions d’euros. La Cour pointe les nombreux risques encourus par les jeunes volontaires : harcèlement sexuel, punitions collectives nocturnes, malaises en période de canicule… Bref, le SNU est un réel fiasco.

Il y a environ neuf mois, Mme Thevenot, alors porte-parole du gouvernement, disait vouloir généraliser le SNU ; matin, midi et soir, elle nous le vendait comme la révolution du XXIe siècle pour la jeunesse. Patatras, vous annonciez hier ne pas vouloir le généraliser, faute de moyens, les faits démontrant que le SNU ne sert strictement à rien – rappelons qu’il ne concerne que 66 000 volontaires. Supprimez plutôt ce dispositif inutile et reversez ses crédits au FDVA, dont le budget baisse de 54 % !

M. Pierrick Courbon (SOC). « Le sport comme la culture sont des investissements légitimes, ce ne sont pas des budgets sur lesquels on doit faire des économies » : voilà ce qu’affirmait le Président de la République dans L’Équipe le 12 août dernier. Malheureusement, le compte n’y est pas. Que pensez-vous de la proposition des députés socialistes de créer un fonds d’héritage sportif et territorial des Jeux olympiques, dans l’attente ou à défaut d’une loi « héritage », abondé grâce au déplafonnement des taxes affectées sur les paris sportifs ?

S’agissant du FDVA, le compte n’y est pas non plus. Dans la Loire par exemple, 246 projets ont été retenus sur 502 déposés ; les subventions appelées dépassent 3 millions d’euros, pour 461 000 euros disponibles. Nous défendrons des amendements visant à abonder le FDVA. Qu’en pensez-vous ?

Mme Pascale Bay (DR). Je me réjouis de la visibilité donnée par les Jeux paralympiques de Paris 2024 au handisport. Toutefois, je souhaite vous alerter sur la situation catastrophique du sport adapté, qui s’adresse aux personnes porteuses d’un handicap mental : absence de clubs, d’éducateurs spécialisés, de créneaux réservés au sein des structures sportives… Très rares sont les associations qui font l’effort d’accueillir ce public. Dans la plus grande agglomération de ma circonscription, qui compte plus de 60 000 habitants, un seul créneau de deux heures par semaine lui est réservé à la piscine municipale. Faut-il comprendre que ces enfants n’ont pas le même besoin de sport que les autres ? La pratique sportive est au contraire fondamentale pour améliorer la santé, le développement et surtout l’estime de ces jeunes si souvent traités différemment. Comptez-vous lancer une campagne de sensibilisation et prendre des mesures en faveur de ces enfants privés des bénéfices du sport ?

Mme Graziella Melchior (EPR). Je salue votre volonté de développer la pratique sportive des publics dits prioritaires, notamment des jeunes et des personnes en situation de handicap, mais un autre public est tout aussi prioritaire, les aînés. En effet, l’activité physique et sportive est essentielle pour lutter contre la perte d’autonomie et la prévenir. Je pense au programme Vélogym + autonomie financé par votre ministère, dont le département du Finistère a été pilote. Il permet d’organiser deux séances de sport par semaine dans les établissments d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) et les résidences seniors, afin de maintenir et d’améliorer les capacités physiques et cognitives des résidents. Plusieurs Ehpad de mon département l’ont déployé, comme à Landerneau et Lesneven, avec des résultats remarquables. Envisagez-vous de pérenniser ce dispositif ? Quelles actions comptez-vous mener en faveur de la pratique sportive des aînés ?

M. Idir Boumertit (LFI-NFP). Hier, vous affirmiez à la radio : « Le SNU est en panne, le modèle doit être réinterrogé. » Nous sommes d’accord : depuis 2019, il n’a jamais fonctionné et il faut l’arrêter. Le SNU est l’exemple même du fétichisme macroniste où l’argent coule à flots, un dispositif militaire qui met la jeunesse au pas, une gabegie financière dénoncée par la Cour des comptes ayant déjà coûté plus d’un demi-milliard d’euros en cinq ans, un trou noir qui siphonne les moyens alloués au monde associatif et à l’éducation populaire, une usine à gaz de séjours scolaires entachés de multiples scandales. Malgré ce constat et malgré la baisse des crédits dans le PLF, vous voulez maintenir le SNU. Quand arrêtera-t-on les frais ? Les 128 millions d’euros du SNU permettraient de rétablir plus de 2 000 postes d’enseignants sur les 4 000 que votre gouvernement compte supprimer, ou encore de financer le sport, la jeunesse et la vie associative qui sont amputés de 80 millions d’euros dans votre budget

Mme Géraldine Bannier (Dem). Vous avez affirmé que la hausse de la fiscalité sur les paris sportifs et les jeux d’argent et de hasard faisait consensus, mais permettez-moi de vous alerter sur la situation spécifique des paris hippiques. Il est envisagé de porter les cotisations sociales sur le produit brut des jeux de 6,9 % à 7,5 % pour le pari mutuel hippique, et surtout de 6,9 % à 15 % pour les paris en ligne, qui représentent 99 % des enjeux. Si 75 % des enjeux reviennent aux parieurs, 16 % font vivre une filière de propriétaires et d’éleveurs, qui animent la ruralité et proposent des spectacles de plein air ouverts aux enfants. Elle doit être soutenue.

Mme Véronique Riotton (EPR). Les Jeux olympiques et paralympiques de Paris furent les premiers à respecter une stricte parité entre hommes et femmes, ce qui fait de la France un fer de lance de la promotion du sport féminin. Pour autant, ce dernier rencontre de multiples obstacles, qu’il soit pratiqué par des amateurs ou des professionnels. Le rapport que Stéphane Viry et moi-même lui avons consacré identifie plusieurs leviers : l’éducation, la place des femmes dans la gouvernance des instances, ou encore le développement des contributions financières publiques et privées. Comment comptez-vous promouvoir le sport féminin ?

M. Raphaël Arnault (LFI-NFP). Avant que votre collègue M. Retailleau ne colle un policier en civil derrière chaque supporter de football, il s’agirait de les respecter. Vous n’avez toujours pas répondu aux associations de supporters qui vous ont interpellé, soutenues par les députés du NFP, à propos des matchs de Ligue 2 qui ne se jouent plus le week-end. Début août, deux semaines avant la reprise de la saison, la Ligue de football professionnel (LFP) et beIN Sports annonçaient que huit matchs sur neuf seraient programmés en semaine. Impossible alors pour les amoureux du football de suivre leur équipe, car oui, – cela vous surprendra peut-être, monsieur le ministre, ou surprendra votre collègue M. Kasbarian –, les gens travaillent pendant la semaine. Cette décision porte atteinte au droit aux loisirs des travailleurs.

Les profits engendrés par les droits de diffusion exclusive ne doivent pas empêcher les supporters d’assister aux matchs de leur équipe et de profiter des joies du stade. Vous engagerez-vous enfin à défendre l’esprit populaire du football en empêchant certaines grosses chaînes privées de transformer ce sport en une véritable machine à profit qui en oublie son âme, les supporters ?

Mme Julie Delpech (EPR). Le dispositif des trente minutes d’activité physique quotidienne a été instauré à la rentrée 2020 dans les écoles primaires pour compléter les trois heures d’activité physique et sportive existantes. Cette initiative particulièrement bénéfique vise à développer les capacités motrices et les aptitudes physiques des enfants, tout en les rapprochant des recommandations en matière de pratique physique. Toutefois un rapport du Sénat indique que seules 42 % des écoles primaires l’appliquent, à plus de la moitié de leurs élèves. Il est essentiel de soutenir le sport scolaire pour faire de la France une nation sportive. Quelles actions envisagez-vous, en coordination avec votre homologue de l’Éducation nationale, pour généraliser ce dispositif ? Comment garantirez-vous que chaque élève du primaire puisse bénéficier de ces trente minutes d’activité physique quotidiennes, essentielles à leur épanouissement et au développement d’une France plus sportive ?

M. Sacha Houlié (NI). Je vous félicite de vous inspirer du rapport de la Cour des comptes sur le SNU. Après une panne d’essence, parlons d’une panne de sens : le dispositif n’a pas produit les effets recherchés. Je vous conseille aussi de vous inspirer du rapport de la Cour des comptes sur l’ANS, dont la cohabitation avec le ministère des sports est problématique ; je vous invite à recouvrer vos pouvoirs et, à terme, à envisager de supprimer l’Agence.

En revanche, il n’y a pas lieu de se féliciter de la forte baisse de votre budget, particulièrement des crédits de l’action Promotion du sport pour le plus grand nombre. Les dispositifs que nous venons de saluer – 1 000 éducateurs, 1 000 dojos… – en seront les premières victimes.

Enfin, je déplore vos récentes annonces concernant le football. La billetterie nominative a peu d’intérêt pour les clubs qui ont de nombreux abonnés, et les sanctions collectives ne sont jamais une solution, qui plus est quand les fauteurs de troubles sont identifiés et sanctionnés – c’était le cas pour le match PSG-Strasbourg.

Mme Prisca Thevenot (EPR). Vous avez multiplié les arguments pour donner raison à nos collègues de gauche qui veulent mettre fin au SNU. J’aimerais maintenant que vous évoquiez les axes d’amélioration grâce auquel ce dispositif pourrait répondre aux besoins de la nation. Les enjeux sont multiples, la mixité au premier chef. Sarah El Haïry et moi-même y avons travaillé et avons créé le dispositif « classes et lycées engagés ». Pourrions-nous en avoir un retour quantitatif et qualitatif ?

Dans le cadre de l’opération « 1 jeune, 1 mentor » lancée par Emmanuel Macron, une convention était en cours entre le collectif Les entreprises s’engagent et le collectif Mentorat. Qu’en est-il, et comment comptez-vous développer cette politique essentielle ?

Enfin, pourriez-vous faire le point sur la filière de l’animation ?

M. Belkhir Belhaddad (EPR). Après la réussite des Jeux olympiques et paralympiques, nous devons plus que jamais réfléchir à la place du sport dans notre société et dans la vie quotidienne des Français. BPCE L’Observatoire estime que la filière du sport représente 2,6 % du PIB, soit 64 milliards d’euros.

Le sport apporte des solutions à notre société en matière d’aménagement du territoire, d’éducation et de santé. J’ai d’ailleurs déposé plusieurs propositions visant à développer les maisons sport-santé. L’essor des pratiques sportives passe par les clubs, mais aussi par les équipements ; dans le rapport que j’ai remis à Jean Castex, j’ai proposé de consacrer une loi-cadre à ces derniers. Partagez-vous cette ambition ?

M. Laurent Croizier (Dem). Ceux qui parlent le mieux du SNU sont ceux qui l’ont expérimenté, qui ont passé deux semaines avec d’autres jeunes issus de tous les départements, de tous les milieux sociaux et ayant divers niveaux d’études : 96 % expriment satisfaction et fierté. Le SNU est un projet de cohésion nationale, de promotion de la culture de l’engagement ; c’est un projet de citoyenneté, de rapprochement des jeunes générations avec la République et la vie démocratique. On comprend aisément pourquoi l’extrême gauche y est si frontalement opposée ! Il faut maintenir l’esprit du SNU. Dans le contexte budgétaire actuel, comment envisagez-vous de le faire évoluer ?

M. Bertrand Sorre (EPR). La vie associative est le cœur battant de notre démocratie : nous le constatons chaque jour dans nos circonscriptions. Il est essentiel de continuer à soutenir financièrement un tissu associatif qui représente 22 millions de bénévoles pour plus de 1,5 million d’associations actives.

En 2018, notre majorité a élargi le FDVA pour y inclure le soutien au fonctionnement global des associations et à l’innovation – je salue le travail des ministres Sarah El Haïry et Prisca Thevenot en la matière. Vous avez évoqué un montant de 68 millions d’euros pour 2025 ; c’est malheureusement un peu moins qu’en 2024, et je m’en inquiète. Si nous souhaitons avoir une politique volontariste qui incite à l’engagement, les ressources du FDVA doivent être revues à la hausse. Quelles mesures entendez-vous prendre pour soutenir les associations en général, le FDVA en particulier ?

M. Fabien Di Filippo (DR). Après plusieurs années consacrées aux Jeux olympiques, les clubs expriment une forte attente de changement en matière de politique sportive. Dans le contexte budgétaire actuel, il faut effectuer des choix tranchés ; à cet égard, il faut reconnaître, comme la Cour des comptes, que le SNU n’atteindra jamais sa cible. Son budget pourrait se chiffrer en milliards en rythme de croisière. Ses crédits mériteraient d’être réaffectés, conformément à votre ambition de placer le sport au cœur de votre projet pour la jeunesse.

Il est essentiel de renforcer la base de la pyramide sportive, dans une perspective de long terme. Cela implique de subventionner la formation des encadrants partout sur le territoire, dans tous les clubs, et d’accorder des financements aux équipements. De plus en plus, la pratique s’effectue dans les clubs et sur les terrains de quartier. Or l’ANS a financé énormément de petits équipements non affectés à des clubs dans des petites communes. Ils sont sous-utilisés, alors que les clubs ont des besoins criants.

Mme Justine Gruet (DR). Je tiens tout d’abord à remercier l’ensemble des bénévoles qui font vivre le tissu associatif dans les territoires, créent du lien social, insufflent du dynamisme, donnent du temps et de l’énergie pour contribuer à l’intérêt général. Or l’engouement pour le bénévolat s’essouffle. Pourrions-nous tirer parti de la valorisation des acquis de l’expérience (VAE) pour offrir une reconnaissance aux bénévoles et les faire monter en compétence ? Comment, sans augmenter les coûts, offrir plus de considération et de valorisation aux jeunes qui prennent le temps de s’engager dans la vie associative locale ?

M. Gil Avérous, ministre. Je tiens à ce que mes services travaillent activement avec le ministère de la santé et de l’accès aux soins pour soutenir l’activité physique adaptée prescrite par les médecins. L’année dernière, il avait été envisagé de financer, sur le droit commun, la prise en charge de l’APA pour les patients atteints de cancer et de diabète de type 2. Cela ne s’est malheureusement pas concrétisé, mais je suis favorable à ce que cette question soit réexaminée en lien avec le ministère de la santé, l’assurance maladie et les acteurs de la prévoyance.

Plus largement, le sujet des financements est évidemment clé dans ce domaine. Les fonds sont collectés selon des modèles variés, au gré des expérimentations départementales, et les financements sur le droit commun sont insuffisants. Les travaux progressent afin d’élaborer une stratégie nationale du sport-santé 2025-2030. Ses grandes lignes seront présentées au premier trimestre 2025 et le texte devrait être stabilisé en juin 2025. Nous devrons inscrire votre proposition dans ce texte, monsieur Fait.

Je ne peux pas vous laisser dire que le SNU ne sert à rien, madame Amrani. Ceux qui en ont bénéficié en font un retour très positif. Nous n’avons malheureusement pas les moyens de le généraliser – c’est en cela qu’il est en panne.

Nous ne sommes pas favorables à une augmentation des taxes, monsieur Courbon, à l’exception de la taxe sur les partis sportifs dont j’accepterais qu’elle soit réévaluée et affectée à l’Agence nationale du sport. La priorité est d’élaborer une politique consensuelle pour la jeunesse qui accorde une place centrale au sport ; la question des financements se posera dans un second temps. Ce n’est pas l’argent qui fait le projet ; c’est le projet qui conduit à chercher des financements.

Madame Bay, vous avez déploré le très faible nombre d’associations faisant l’effort d’accueillir des jeunes sportifs handicapés. Je n’aurais pas dit les choses ainsi, car les associations ont souvent cette envie sans avoir les moyens d’adapter leurs locaux ni d’investir dans du matériel spécifique. Se pose aussi la question de l’encadrement particulier dont ont besoin les jeunes souffrant d’un handicap physique ou mental : cela nécessite de faire appel soit à des bénévoles, soit à des éducateurs, qu’il faut alors former et rémunérer. Dans le prolongement des Jeux de Paris 2024, nous devons travailler à lever ces obstacles, inciter les associations à relever ce défi et offrir à celles qui sont prêtes à le faire les outils qui leur permettront d’accueillir dans de bonnes conditions les personnes en situation de handicap, jeunes ou moins jeunes, souhaitant pratiquer le sport en club.

Madame Melchior, je partage votre opinion au sujet du programme Vélogym + autonomie. Vous pouvez compter sur moi pour diffuser largement les résultats très positifs de l’expérimentation menée dans le Finistère et encourager la mise en œuvre d’un tel dispositif dans d’autres départements. Dans cette perspective, je suis prêt à organiser un déplacement dans votre circonscription.

Madame Bannier, vous vous êtes inquiétée de voir appliquer aux courses hippiques la hausse de la taxe sur les paris sportifs. Il est évident pour moi que ces compétitions, dont le financement est très spécifique, ne sont pas concernées. Ayant la chance d’avoir un hippodrome dans ma ville, je sais que les paris hippiques financent toute la filière, y compris l’élevage, et je connais leur caractère stratégique en matière d’aménagement du territoire et de vitalisation des collectivités concernées.

M. Fabien Di Filippo (DR). Cela ne relève peut-être pas de votre champ de compétence, mais le Gouvernement a déposé, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale, un amendement qui s’appliquerait aux paris hippiques.

M. Gil Avérous, ministre. Mon conseiller m’avait rassuré en m’expliquant que les paris hippiques n’étaient pas concernés, mais soyez sûrs que je resterai vigilant et que je défendrai ma position auprès de mes collègues du Gouvernement.

Madame Riotton, le développement de la pratique du sport féminin est l’une des priorités de mon ministère. Nous travaillons en particulier à la réduction des inégalités d’accès au sport entre les femmes et les hommes. La convention conclue avec l’ANS fixe un objectif de 16 % de crédits destinés au développement de la pratique des femmes et des jeunes filles. Nous devons vraiment augmenter nos efforts en la matière, car de nombreux freins existent – je pense notamment à l’adaptation des locaux, des vestiaires, des équipements, et je ne parle même pas de la mise à disposition de créneaux… Malgré les difficultés exposées tout à l’heure par Mme Herouin-Léautey, nous avons beaucoup progressé en matière de féminisation des instances dirigeantes des fédérations sportives – le renouvellement des instances en cours permettra de le démontrer. Nous encourageons la féminisation de l’encadrement technique et de la fonction d’arbitre. Nous favorisons la visibilité du sport féminin et l’accompagnement des sportives professionnelles de haut niveau ; nous avons notamment donné aux para-athlètes la possibilité de venir en formation avec leurs enfants. Nous soutenons le déploiement du label Terrain d’égalité. Je suis personnellement très attaché à l’égalité entre les femmes et les hommes. Je suis d’ailleurs l’un des rares ministres à avoir nommé une directrice de cabinet : si elle n’est pas avec nous, c’est qu’elle travaille au ministère.

Monsieur Arnault, j’ai pris connaissance de votre alerte concernant la programmation des matchs de Ligue 2, par beIN Sports, en dehors des week-ends. Mes services ont rencontré individuellement l’Association nationale des supporters, le diffuseur beIN Sports, la Ligue de football professionnel et la Fédération française de football. Nous sommes convenus de mettre en place, dans les prochains jours, une instance de dialogue conduite par Michel Denisot et chargée de trouver un compromis. L’objectif est de reprogrammer les matchs le week-end, c’est-à-dire le vendredi soir et le samedi, et non le reste de la semaine. Tous les acteurs autour de la table sont disposés à y travailler : personne ne nous a fait part d’un quelconque refus de changer le système.

Madame Delpech, les trente minutes d’activité physique quotidienne ont des effets très positifs dans les établissements scolaires. En effet, 94 % des enseignants appliquant ce dispositif constatent une amélioration du bien-être des enfants, 91 % considèrent qu’il permet de réduire la sédentarité, et 82 % estiment qu’il encourage la pratique d’activités physiques et sportives en dehors de l’école. On constate également des résultats très positifs pour le climat de la classe et le bien-être des professeurs. Cependant, ce programme doit sans doute être encore amélioré : je souhaite donc que le ministère des sports prenne part aux réflexions sur son évolution, aux côtés du ministère de l’Éducation nationale, dont il relève principalement. Lorsqu’un dispositif visant à lutter contre un phénomène grave, ayant fait ses preuves à l’étranger, est jugé probant en France, on a la responsabilité de continuer le travail engagé.

Monsieur Houlié, la billetterie nominative vient s’ajouter aux outils qui existent déjà, notamment à la vidéoprotection. Cette mesure est acceptée et même souhaitée par les instances du sport, puisque c’est la Fédération française de football qui a insisté pour qu’elle soit étendue, dès la saison prochaine, à l’ensemble des matchs de Ligue 1 et de Ligue 2. Notre objectif commun, que nous revendiquons, est de substituer des sanctions individuelles aux sanctions collectives. La suspension ou l’arrêt définitif d’un match signent toujours un échec. Nous devons réussir à identifier tous les fauteurs de troubles et les interdire de matchs. Jusqu’à présent, nous n’avons pas été assez stricts : 200 individus font actuellement l’objet d’une telle sanction en France, contre 1 500 en Allemagne et 3 000 en Angleterre.

J’ai entamé un tour des stades et des grands clubs qui concentrent les problèmes afin de discuter avec les supporters et de voir avec eux comment améliorer les choses. Ces supporters sont pris dans un engrenage, dans une course à l’échalote en matière d’insultes. J’ai encore pu constater, la semaine dernière, l’imitation de ces comportements par les plus jeunes : lors des matchs auxquels j’ai assisté, les plus virulents étaient des enfants de 10 à 14 ans, qui insultaient les joueurs de l’équipe adverse quand ils rentraient au vestiaire. Ce n’est pas acceptable. On peut soutenir une équipe et chambrer ses adversaires, mais pas les insulter. Les violences verbales, qui conduisent souvent à des violences physiques, ne peuvent être tolérées.

On dit qu’il faut appliquer la règle de la Fifa. Nous devons évidemment envoyer un message de fermeté mais, en pratique, il n’est pas facile de faire évacuer un stade. Mettre hors d’état de nuire les fauteurs de troubles, en suivant le principe « identifier, interpeller, interdire », prendra certes un peu de temps – nous n’allons pas y arriver le week-end prochain ! Nous devons cependant avancer, et je demande à être jugé sur mes résultats dans ce domaine.

Madame Thevenot, vous avez pu comprendre que j’étais clairement défavorable au SNU. Tel n’est pas le cas : je suis favorable à ce dispositif, car le séjour de cohésion semble profitable à ceux qui le suivent. Cependant, nous n’arrivons pas à atteindre le public cible, et il est malheureusement difficile de faire davantage dans le contexte budgétaire actuel. Lorsque j’ai évoqué un dispositif en panne, je voulais parler d’une panne d’essence car nous n’avons plus les crédits nécessaires pour aller plus avant. Il convient donc de modifier l’organisation du SNU, mais surtout pas de le supprimer.

Vous m’avez demandé un retour quantitatif et qualitatif sur des dispositifs visant à favoriser la mixité, et m’avez interrogé sur des conventions relatives au mentorat. Ce sont des sujets que je ne maîtrise pas complètement : je vous répondrai par écrit.

Effectivement, monsieur Belhaddad, nous ne parlons pas assez du poids du sport dans le PIB. Nous n’avons pas conscience des retombées des événements sportifs, et même de la pratique du sport au quotidien, en termes financiers et d’aménagement du territoire. Je disais tout à l’heure devant le Parlement du sport, que vous réunissiez à l’Assemblée nationale, que c’est autour d’un stade, d’un gymnase ou d’une piste de danse que nos villes et villages s’animent chaque week-end, que la population se rassemble et que l’on crée du vivre-ensemble. Quand vous êtes maire, votre côte de popularité est généralement élevée, mais dès que vous devenez élu national ou ministre, elle s’effondre, parce que les citoyens ont l’impression que l’État les abandonne. Nous devons donc réincarner la politique, dans les territoires, et le sport est un moyen d’y arriver. Il faut cependant que l’argent investi dans les clubs apparaisse clairement comme un soutien de l’État, et que les intermédiaires tels que l’ANS s’effacent un peu.

Je ne préparerai peut-être pas une loi-cadre, mais vous me trouverez à vos côtés pour accompagner la réalisation d’équipements, notamment la construction ou la rénovation de piscines. En 1970, on avait conçu quelques modèles de piscines qui ont été dupliqués dans tout le territoire. Il ne serait peut-être pas idiot de réexaminer tout cela, de mettre plusieurs entreprises en concurrence au niveau national et de constituer un catalogue d’équipements à prix raisonnable pour les collectivités, qui peinent aujourd’hui à construire des piscines dont le coût est devenu insupportable.

Monsieur Croizier, vous avez souligné que 96 % des jeunes ayant bénéficié du SNU en étaient satisfaits. Cela doit effectivement nous réjouir, même si nous n’avons pour le moment affaire qu’à des volontaires, ce qui explique un tel niveau de satisfaction. Je partage votre avis : il faut maintenir l’esprit du SNU et ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain.

Monsieur Sorre, nous n’avons pas l’intention de diminuer le soutien de l’État aux associations. L’an dernier, la quote-part des encours des comptes inactifs des associations allouée au financement du FDVA est passée de 20 % à 40 %. Il n’empêche que la récupération de ces crédits initialement destinés au monde associatif sert encore majoritairement à combler le déficit de l’État. Dans les mois ou les années à venir, il conviendra peut-être d’inverser ce rapport et de porter à 60 % le taux de reversement au FDVA. Je serai à vos côtés si vous souhaitez défendre cette proposition.

Monsieur Di Filippo, vous avez mis le doigt sur le sujet important de la formation des encadrants. Pour répondre à de nouvelles demandes d’inscriptions, les clubs ont en effet besoin non seulement de créneaux supplémentaires, mais également d’encadrants. Il faudra mettre le paquet en 2025, car on sait que les demandes connaissent toujours un pic l’année suivant les Jeux olympiques, avant de décroître légèrement. Les crédits alloués à la formation dans le budget pour 2025 sont stables ; nous verrons en cours d’exercice s’il est nécessaire de les renforcer un peu, au détriment d’autres politiques dont les besoins seraient inférieurs aux prévisions.

Enfin, madame Gruet, je suis totalement favorable à une valorisation des activités bénévoles dans le cadre de la VAE. Je souhaite même que l’on aille plus loin et que la valorisation du bénévolat des salariés devienne l’un des axes de la responsabilité sociale des entreprises (RSE). L’évolution de la société et de l’organisation du travail en entreprise pourrait en effet être utile aux associations. Certains employeurs offrent désormais à leurs salariés la possibilité de faire leurs 35 heures en quatre jours : il en résulte une journée libérée, qui pourrait être consacrée au volontariat – nous aimerions tous que ce soit le mercredi, parce que c’est là que se concentrent les besoins des clubs, mais ce ne sera évidemment pas aussi simple… Ayant une fibre libérale, j’ai recruté dans mon cabinet un conseiller venant du Medef, chargé des relations avec les entreprises, ce qui choquera peut-être certains d’entre vous. Cela montre en tout cas ma volonté de créer un lien fort avec le monde économique.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Je vous remercie. Nous procéderons demain matin à l’examen pour avis des amendements sur les crédits de la mission Sport, jeunesse et vie associative.

 


II.   Examen des crédits

Lors de sa réunion du mercredi 30 octobre 2024 à 9 heures 30 ([130]), la commission examine, pour avis, les crédits de la mission Sport, jeunesse et vie associative du projet de loi de finances pour 2025 (n° 324  seconde partie) (Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis sur les crédits de Jeunesse et vie associative ; M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis sur les crédits de Sport).

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous reprenons nos travaux avec l’examen des amendements de la mission Sport, jeunesse et vie associative.

Article 42 et État B : Crédits du budget général

Amendement II-AC422 de M. Pierrick Courbon

M. Pierrick Courbon (SOC). Il vise à accroître le budget alloué au service civique afin de permettre une extension du nombre de missions et une revalorisation substantielle de l’indemnité des volontaires : pour une plus grande attractivité du dispositif, nous proposons de l’augmenter à 900 euros par mois, soit la moyenne de rémunération des apprentis ; à terme, elle serait indexée sur l’inflation. L’objectif est de faire passer, dès 2025, le nombre de volontaires de 150 000 à 225 000.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis (Jeunesse et vie associative). Le service civique est plébiscité par les différents acteurs, notamment les jeunes. Il encourage l’engagement de la jeunesse, que nous appelons de nos vœux. À cet égard, le niveau des indemnités mérite d’être augmenté. Avis favorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC430 de Mme Fatiha Keloua Hachi

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Son objectif est d’encourager la mixité sociale parmi les 150 000 jeunes concernés par le service civique en favorisant l’accès des jeunes des quartiers populaires ou des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). Les crédits alloués au service civique seraient abondés de 50 millions d’euros supplémentaires.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. Il faut encourager la mixité sociale des jeunes qui s’engagent dans le service civique. Avis favorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques II-AC513 de Mme Florence Herouin-Léautey et II-AC530 de M. Pierrick Courbon

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. L’amendement II‑AC513 vise à renforcer le soutien aux mouvements d’éducation populaire en leur attribuant 130 millions d’euros supplémentaires, grâce à une réallocation des crédits du service national universel (SNU). Le Conseil économique, social et environnemental (Cese) a souligné que la précarisation des associations menace leur mission d’intérêt général et la vitalité démocratique. L’éducation populaire favorise l’émancipation citoyenne et la cohésion sociale, par des actions de proximité et d’inclusion. Il est donc essentiel de soutenir ces associations de manière pérenne afin qu’elles remplissent leur mission hors des logiques de concurrence. Il faut aussi préserver l’agrément Jeunesse et éducation populaire. En favorisant l’émancipation de la jeunesse, nous contribuons au renforcement de la démocratie.

M. Julien Odoul (RN). L’Éducation nationale est la seule structure qui garantisse l’émancipation des jeunes dans notre pays. Tout autre mouvement dit d’éducation populaire n’est qu’une pompe à fric servant à aspirer l’argent public sans produire aucun résultat. Nous aimerions avoir un bilan des actions dites d’éducation populaire sur la cohésion sociale, sur la sécurité, sur ce que vous appelez l’inclusion et l’émancipation. Quelques officines captent l’argent public et se goinfrent allègrement, sans obtenir de résultats probants, si ce n’est en matière d’idéologie, de clientélisme, de communautarisme et d’autres valeurs qui n’ont pas leur place dans notre République.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. Un proverbe africain dit, avec beaucoup de justesse, qu’« il faut tout un village pour élever un enfant » : l’Éducation nationale et l’école ne peuvent pas tout. Il y a l’école et la famille, bien sûr, mais aussi tout un écosystème qui gravite autour des centres sociaux et des maisons des jeunes et de la culture (MJC), et qui permet d’offrir des espaces d’émancipation et de culture du projet : il faut faire ensemble pour vivre ensemble. Je suis surprise de votre méconnaissance de notre organisation : historiquement, il existe huit associations d’éducation populaire. Elles sont complémentaires de l’Éducation nationale, en ce qu’elles participent de cet écosystème et sont indispensables pour élever la jeunesse, l’éduquer et en faire des citoyens éclairés.

Mme Ayda Hadizadeh (SOC). Je suis surprise – mais faut-il vraiment l’être – que les députés du Rassemblement national insultent les parents. Les associations d’éducation populaire permettent à des milliers de jeunes de partir en vacances. Or la décision relève de leurs parents, qui veulent ainsi favoriser leur émancipation, leur éducation, l’apprentissage de la vie en pleine nature et la pratique sportive. Les clubs de sport – à l’école ou en dehors – sont également une composante de l’éducation populaire : ce sont les parents qui décident d’y inscrire leurs enfants. En insultant les associations d’éducation populaire, vous insultez aussi les choix éducatifs des parents.

La commission rejette les amendements.

Amendement II-AC401 de M. Aly Diouara

M. Aly Diouara (LFI-NFP). Il propose un fonds de soutien aux structures d’éducation populaire destinées aux jeunes – les associations agréées Jeunesse et éducation populaire (JEP) et les MJC. Leur mission est essentielle. Elles offrent des alternatives éducatives hors des cadres classiques : elles favorisent l’autonomie, la citoyenneté, l’éducation civique et l’accès au savoir de la jeunesse. Le projet de loi de finances ampute l’action Jeunesse et éducation populaire de près de 11 millions d’euros, contredisant ainsi les objectifs affichés par l’État de faciliter l’accès des jeunes à des loisirs éducatifs et à la culture. Le fonds proposé permettrait non seulement de compenser ces coupes, mais aussi de financer les rénovations énergétiques indispensables pour garantir un avenir durable à ces structures.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. Assez proche du précédent, cet amendement vise plus particulièrement la jeunesse – même si, je le rappelle, l’éducation populaire s’adresse à tous les âges de la vie. Avis favorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC437 de Mme Fatiha Keloua Hachi

M. Pierrick Courbon (SOC). Il vise à abonder le financement d’associations que certains qualifient de « pompes à fric », de manière scandaleuse et en toute méconnaissance du travail réalisé partout en France par les structures de l’éducation populaire. Lorsque vous assisterez aux assemblées générales des structures d’éducation populaire dans votre circonscription, j’espère, monsieur Odoul, que vous les traiterez de la même manière et avec les mêmes mots. Cet amendement propose de majorer les crédits du programme 163, s’agissant en particulier du soutien national aux associations agréées JEP.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. Avis favorable. Maintenons notre soutien à toutes ces structures qui font vivre les quartiers et leurs habitants, dont beaucoup fêtent leurs soixante ans d’existence cette année.

M. Julien Odoul (RN). Dans ma circonscription dans le nord de l’Yonne, un centre social était très attendu par les habitants d’un quartier prioritaire de la politique de la ville (QPV) – les Champs-Plaisants à Sens. En construction, alors qu’il avait coûté près de 4 millions d’euros d’argent public, il a été réduit en cendres lors des émeutes de l’été 2023. Toutes ces structures ont bénéficié d’investissements au détriment de nos concitoyens ruraux, qui n’en ont jamais profité. Un rééquilibrage est nécessaire, de façon à ouvrir ces accès privilégiés à d’autres jeunes.

M. Christophe Proença (SOC). J’admire votre capacité à ramener tous les sujets à la question de l’étranger. Je suis élu dans un département très rural – le Lot, qui compte 173 000 habitants. Venant d’un milieu modeste, si j’ai pu pratiquer un sport et voyager, c’est grâce à la Fédération des œuvres laïques du Lot : ces structures ne s’adressent pas qu’à des jeunes de milieux urbains. Vous devriez faire preuve de davantage d’objectivité : les généralisations que vous faites ne vous grandissent pas.

M. Rodrigo Arenas (LFI-NFP). Je suis certain qu’aucun des députés de cette commission ne veut opposer la ruralité aux zones urbaines et aux quartiers sensibles. Nous sommes une seule et même République, unie et indivisible, construite sur la Bastille, elle-même réduite en cendres : personne ne songerait à faire du révisionnisme, ni à mettre un terme aux bals populaires ruraux, même s’ils se terminent parfois par un décès. Telle est l’histoire de notre pays. Il faut intervenir dans tous les territoires, ruraux comme urbains, car les jeunes qui en sont issus sont tous des enfants de la République. Plutôt que s’opposer à l’amendement, le Rassemblement national gagnerait peut-être à le sous-amender en faveur de la ruralité.

M. Pierrick Courbon (SOC). Il ne faut pas faire d’un cas particulier une généralité. Je ne comprends pas le raisonnement selon lequel l’incendie d’un centre social conduirait à bannir tous les autres. Si une école est attaquée, coupera-t-on dans le budget de l’Éducation nationale ? Si un commissariat est attaqué, faudra-t-il moins de police ?

En ce moment même, des centaines de milliers d’enfants passent les vacances d’automne dans des structures de l’éducation populaire où ils participent à des activités culturelles émancipatrices. Si vous souhaitez que tous les enfants aient accès à la même possibilité de découvrir autre chose que leur environnement immédiat, il faut au contraire plus de MJC, de centres sociaux et de structures d’éducation populaire partout en France. C’est ce que vous refusez, mais c’est précisément l’objet de cet amendement.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC492 de Mme Violette Spillebout

Mme Violette Spillebout (EPR). Il vise à renforcer les moyens accordés à l’éducation populaire – MJC et centres sociaux, dans les quartiers comme dans les territoires ruraux – en lui transférant 1 million d’euros – un montant faible mais symbolique – des crédits du programme Sport. Les crédits en faveur de la jeunesse et de l’éducation populaire diminuent en effet de 10,9 millions d’euros. Il est donc important de les soutenir dans la mesure des moyens budgétaires disponibles.

De quel type de structures parlons-nous ? De centres sociaux et de maisons de quartier qui organisent en ce moment même, pendant les vacances scolaires, des cours de boxe dynamique, de gymnastique douce ou d’escalade, et des sorties autour du sport et du bien-être, souvent en famille. Tout cela favorise la cohésion des quartiers. En visite dans ma circonscription la semaine dernière, le ministre des solidarités a d’ailleurs fait le choix symbolique de commencer par se rendre dans un centre social, le centre Albert-Jacquard à Lille.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. J’approuve toute démarche visant à renforcer les structures de l’éducation populaire, même si la somme que vous proposez est un peu chiche. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC406 de M. Carlos Martens Bilongo

M. Carlos Martens Bilongo (LFI-NFP). Nous proposons un grand plan national de soutien à l’initiative locale des jeunes des QPV en faveur de l’engagement civique et de la participation sociale. Les QPV sont identifiés comme tels car ils sont sous-dotés en services publics et affichent une surreprésentation de précaires et de privés d’emploi. Ces territoires se voient certes attribuer des enveloppes pour financer de petits projets. Pourtant, des miracles de solidarité et d’initiative des jeunes s’y observent chaque jour. La jeunesse y est magnifique : elle s’insère dans les réseaux d’éducation populaire et participe à des projets associatifs divers et variés. Elle est pleine d’ingéniosité : on y organise des formations de cinéma, caméra à la main en bas des immeubles, ou des ateliers de photographie argentique. Or ces projets présentent un intérêt public, direct ou indirect. Souvent non financés, ils sont portés par des bénévoles – je rends à cet égard hommage à Hind Ayadi, de l’association Espoir et Création à Garges-lès-Gonesse. Alors que l’éducation populaire doit faire face à une coupe budgétaire de 10,9 millions d’euros, il est important de soutenir les QPV.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. Avis favorable.

M. Julien Odoul (RN). Notre collègue a raison de dire que la jeunesse française est magnifique, quel que soit son lieu de vie. Il relaie en revanche la propagande, propre à la gauche et à l’extrême gauche, de quartiers sous-dotés. C’est faux : la Cour des comptes elle-même indique que les quartiers dits prioritaires ont bénéficié, depuis trente ans, d’un soutien financier massif ; près de 10 milliards d’euros y ont été injectés tous les ans. Il y a donc une surreprésentation d’infrastructures dans tous les domaines – éducation, culture, médiation, soutien scolaire. Bref, ces quartiers ont tout eu. Je ne nie pas les difficultés sociales qu’ils connaissent, mais prétendre qu’ils sont sous-dotés est un mensonge.

M. Erwan Balanant (Dem). Votre posture inquiétante – et insupportable – consiste à opposer systématiquement les Français les aux autres. Si ces quartiers ont été aidés, c’est parce qu’ils ont été construits n’importe comment dans les années 1960, sans infrastructures, sans que soit pensée la vie sur place. La politique de la ville consiste précisément à recréer des conditions de vie favorables – c’est du rattrapage. Je vis à Concarneau, qui n’est pas une ville de banlieue mais qui comporte un QPV qui commence à justement à s’en sortir – les gens veulent même venir y habiter.

M. Aly Diouara (LFI-NFP). M. Odoul vit manifestement dans des fantasmes. En réalité, les QPV bénéficient de dotations très inférieures à celles qui ont cours au niveau national. Ainsi, la Seine-Saint-Denis reçoit 32 euros par habitant, pour une moyenne de 72 euros en Île-de-France. M. Odoul utilise des chiffres de la Cour des comptes qui ne sont pas authentiques. Si les QPV ne sont pas systématiquement sous-dotés, ils ne sont pas financés à la hauteur de leurs besoins.

Mme Ayda Hadizadeh (SOC). L’intervention du député Odoul témoigne de son besoin d’exalter une bonne France – la vraie France, selon lui – pour désigner la mauvaise France. En quoi les habitants des quartiers sont-ils de mauvais Français ? Une grande majorité d’entre eux se lèvent et travaillent ; pourtant, ils ne bénéficient pas de services publics à la hauteur de l’effort qu’ils fournissent pour construire la bonne France. Cessez d’opposer les uns aux autres.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC355 de M. Jean-Claude Raux, amendements identiques II-AC511 de Mme Florence Herouin-Léautey et II-AC435 de Mme Fatiha Keloua Hachi (discussion commune)

M. Jean-Claude Raux (EcoS). Il est temps d’abandonner le service national universel (SNU). Depuis plus de deux ans, je n’ai cessé de dénoncer cette fausse bonne idée : derrière ce rideau bleu-blanc-rouge, l’unique promesse présidentielle pour les jeunes masque l’absence de vision, voire l’inaction sur les politiques de jeunesse. Le SNU ne fonctionne pas, comme le montre la baisse du budget pour 2025 prévue par le Gouvernement. Les objectifs n’ont jamais été atteints, même à grand renfort de communication et après son entrée forcée dans les lycées. Il en va de même pour la mixité. Quant à la généralisation, elle n’a toujours été qu’une chimère. La Cour des comptes a confirmé ce que nous répétions sans relâche : les coûts démesurés et irresponsables d’une promesse politique intenable. Car le SNU coûte cher – 128 millions d’euros cette année. Je me réjouis qu’un consensus large semble enfin se dessiner pour supprimer ce gadget présidentiel.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. S’agissant du SNU, les cibles ne sont pas atteintes et la mixité sociale n’est pas au rendez-vous. Certes, les jeunes qui participent à ce séjour de cohésion en sont satisfaits – la belle affaire ! Ce dispositif n’a pas réussi à mobiliser toutes les jeunesses autour d’un engagement – volontaire ou obligatoire, ce n’est pas très clair. Dans ma circonscription, le responsable de la gendarmerie m’a lui-même confié que ce sont les « enfants d’uniformes » qui y participent, soit des jeunes déjà parfaitement insérés, dont les parents travaillent et qui sont déjà familiers des professions en uniforme.

Il faut recréer des lieux et des espaces qui brassent les populations : telle est la mission des associations d’éducation populaire – historiquement complémentaires de l’enseignement public.

L’amendement II-AC511 vise à renforcer les lignes budgétaires qui les concernent et à stabiliser le parc immobilier qui permet d’accueillir les séjours de mineurs, sans créer de concurrence avec le dispositif du SNU, qui permet de louer les mêmes bâtiments à des tarifs bien plus élevés qu’aucune association ou collectivité ne peut se permettre. Il est proposé d’utiliser les crédits dégagés pour mener d’authentiques politiques de jeunesse.

M. Pierrick Courbon (SOC). Nous proposons en effet de transférer l’ensemble des crédits dévolus au SNU au profit de structures d’éducation populaire, et plus largement au développement de la vie associative et du service civique. Un certain nombre de nos amendements ont été rejetés au motif de leur coût pour les finances publiques : nous vous proposons de récupérer plus de 128 millions d’euros d’un seul coup. Dans le contexte des difficultés que nous traversons, l’hérésie budgétaire que constitue le SNU devient une évidence. La Cour des comptes elle-même a reconnu que ce dispositif était inefficace et coûteux.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. De plus, le SNU est en chute d’un point de vue budgétaire : le nombre de jeunes qui pourront partir en séjour de cohésion a déjà été réduit et devrait l’être encore, à hauteur de 35 000, puisque la mission devrait être minorée de 55 millions d’euros supplémentaires. Je rappelle qu’une classe d’âge d’une génération représente 800 000 jeunes.

M. Roger Chudeau (RN). Je réprouve la phobie dont la gauche et l’extrême gauche font preuve envers le SNU. « Rideau bleu-blanc-rouge » et « processions en uniforme » : je ne peux que m’élever contre des propos si dépréciatifs et méprisants. Comme beaucoup de députés, j’ai assisté au séjour de cohésion : j’y ai vu des jeunes enthousiastes, engagés et décidés à servir leur pays et leurs concitoyens. Je ne comprends donc pas que vous vouliez supprimer un dispositif qui fonctionne très bien, même s’il ne concerne qu’une petite quantité de jeunes. Il faut au contraire le sauvegarder. Au fond, votre phobie à l’égard du SNU s’explique par une phobie plus générale à l’égard de la cohésion nationale et de l’engagement patriotique. Voilà ce que vous n’aimez pas, en déconstructionnistes assumés.

Mme Ayda Hadizadeh (SOC). Le SNU vise à trouver une forme de cohésion nationale. Il fonctionne pour des jeunes déjà bien insérés et en phase avec les valeurs de la société, comme l’a montré le rapport de la Cour des comptes. L’objectif est d’obtenir un effet sur tous les jeunes, notamment ceux qui sont plus éloignés de ces valeurs : il ne s’agit pas de leur faire faire un stage en uniforme et sous les drapeaux, mais de leur donner une place dans la société. Cela peut passer par l’armée ou par des institutions comme la police, mais aussi par les associations. Or, le SNU serait très coûteux à généraliser. Il serait préférable d’instaurer un service civique – mettre les jeunes au service de la nation –, pour que chacun puisse trouver sa place et faire société.

Mme Frédérique Meunier (DR). Pourquoi voulez-vous faire un tri entre les centres sociaux et l’éducation populaire – que vous soutenez – et le SNU – que vous n’aimez pas ? Les jeunes qui sortent du SNU sont contents : pourquoi leur enlever cette possibilité ? Dans mon département, en Corrèze, les jeunes viennent de partout, même de la ruralité.

M. Rodrigo Arenas (LFI-NFP). Je ne rappellerai pas les dérives auxquelles le SNU a donné lieu : violences sexuelles, intimidation, enfants obligés de faire des pompes les mains dans des cailloux… Même au-delà de la gauche, des voix s’élèvent pour dénoncer l’inefficacité du dispositif. Ses crédits seraient plus utiles ailleurs. Les colonies de vacances sont bien plus efficaces pour renforcer la cohésion.

Ne nous trompons pas de débat : certains, ici, sont nostalgiques du service militaire ; d’autres, comme nous, l’ont combattu et y ont mis fin parce qu’il était inefficace. Nous pensons que la République se construit autrement que par la militarisation de la jeunesse.

Mme Prisca Thevenot (EPR). Je vous remercie pour vos propos nuancés. Plutôt que de vous enfermer dans une opposition de principe au seul motif que le SNU a été lancé par le Président de la République, pensez à la jeunesse, et faisons de nos nuances une force. Je reconnais que le SNU présente un défi de mixité et de cohésion sociales. C’est pourquoi cette expérimentation a été ajustée – nous y avons travaillé avec M. Raux.

Quand j’ai été chargée du SNU au sein du Gouvernement, les séjours de cohésion accueillaient essentiellement des enfants ayant des parents dans les corps en uniforme. C’est la raison pour laquelle nous avons créé le dispositif « Classes et lycées engagés ». Je m’étonne que vous ne l’évoquiez pas et que nous n’en fassions pas un état des lieux.

M. Pierrick Courbon (SOC). En dépit de nos divergences philosophiques et idéologiques, faisons chacun un pas vers l’autre. J’ai beaucoup de respect pour les organisateurs du SNU. La question n’est pas de savoir si les enfants sont contents de leur séjour, mais comment le dispositif est financé. Malheureusement, il est monté en puissance au détriment des crédits affectés à la vie associative. Des centaines de milliers de jeunes sont heureux dans les centres sociaux ou aimeraient faire un service civique non pas pendant quelques jours, mais plusieurs mois. Dès lors, le budget ne doit pas donner la priorité au SNU.

M. Julien Odoul (RN). Après les énormités proférées par M. Arenas, je rappellerai que ce n’est pas son camp qui a mis fin au service militaire, mais que le président Jacques Chirac en avait pris la décision avant Lionel Jospin. Rappelons aussi les vertus du service militaire, creuset national qui assurait une réelle mixité. La délinquance a d’ailleurs explosé après sa suspension en 1997.

Mme Géraldine Bannier (Dem). Je suis choquée par les propos généralistes et caricaturaux qui sont tenus sur le SNU, en particulier sur son caractère militaire. Au contraire, nous avons écho d’expériences très positives – je pense à ces jeunes filles issues des quartiers qui ont pleuré d’émotion en découvrant la campagne pour la première fois, ou à cet enfant d’ouvrier qui, après deux apprentissages ratés, a pu rebondir grâce au SNU. Il est vrai, aussi, que certains jeunes ne tiennent pas et fuguent. Considérons le SNU comme un dispositif de mixité sociale qui prône la cohésion, qui comporte des aspects positifs et négatifs.

M. Alexis Corbière (EcoS). Le vrai creuset républicain auquel participe l’ensemble d’une classe d’âge, c’est l’école. Or elle est fracturée par un séparatisme scolaire dans lequel le privé concentre les enfants des familles les plus fortunées. Dans le service public, les établissements où se concentrent les jeunes en difficulté se disloquent. Voilà sur quoi nous devons travailler ; le baratin sur le SNU est une diversion. On voudrait nous faire croire qu’une parodie de service militaire serait un creuset républicain !

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. Je n’ai pas tenu les propos que vous me prêtez sur de prétendues processions en uniforme, monsieur Chudeau ; vous vérifierez le compte rendu.

J’aimerais ouvrir le débat sur le contenu du séjour du SNU et sur la journée défense et citoyenneté qui, de l’aveu même des services du ministère des armées, est à la peine. Cette année, elle n’a duré que deux heures et demie. J’appelle à ce que chaque acteur se recentre sur ses missions et ses savoir-faire, et à ce que les crédits soit répartis en conséquence. Je précise pour finir que je n’ai rien contre les corps en uniforme, bien au contraire.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement II-AC396 de M. Idir Boumertit

M. Idir Boumertit (LFI-NFP). À l’heure où le Gouvernement cherche désespérément à faire des économies pour rattraper les sept ans de dégâts du macronisme, comment ne pas parler du SNU ? Il est l’exemple même du fétichisme macroniste où l’argent coule à flots, un dispositif militaire de mise au pas de la jeunesse, une gabegie financière dénoncée par la Cour des comptes, mal pilotée et ayant coûté plus de 570 millions d’euros en cinq ans, un trou noir qui siphonne les moyens du monde associatif et de l’éducation populaire pour en faire de simples prestataires, une usine à gaz qui transforme les séjours scolaires en cauchemar d’organisation pour les enseignants, et dont l’encadrement est entaché de multiples scandales. Malgré tout cela, M. Macron souhaite généraliser le SNU pour une modique somme dépassant 5 milliards d’euros. Il est temps d’arrêter les frais et d’offrir à la jeunesse un véritable avenir en investissant pour de bon dans la vie associative.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. Cet amendement m’a laissée perplexe tant le service citoyen obligatoire que vous proposez de créer semble contraignant et difficilement réalisable. De plus, la somme qui lui serait affectée ne permettrait de toucher qu’un nombre très restreint de jeunes ; il ne s’agirait donc aucunement d’un service universel. Avis défavorable.

Mme Prisca Thevenot (EPR). Avec le NFP, à chaque jour sa peine ! Vous n’avez cessé d’expliquer qu’il fallait supprimer le SNU, notamment parce qu’il n’y aurait pas de raison de se réunir sous le drapeau bleu-blanc-rouge qui, selon vous, cacherait une « absence de vision ». Or le SNU a pour mission de rappeler aux jeunes les symboles de la République qui nous unissent, de développer l’éducation populaire et l’éducation par le sport – c’est l’objet du dispositif « Classes et lycées engagés ». Et voilà que vous voulez créer un service citoyen obligatoire ! En résumé, vous souhaitez supprimer le SNU pour en créer un autre, dans la droite ligne de Jean-Luc Mélenchon qui, lors de la campagne présidentielle de 2022, disait vouloir réinstaurer le service militaire obligatoire. Entre l’incompétence et l’incohérence, je ne sais plus que choisir.

M. Pierrick Courbon (SOC). Nous comprenons l’objectif de l’amendement, mais n’allons pas réinventer des dispositifs à tout bout de champ. Pour nous, la priorité doit être donnée à la montée en puissance du service civique.

M. Julien Odoul (RN). Ce qui gêne les députés de La France insoumise, ce n’est pas l’embrigadement de la jeunesse, bien au contraire, mais ils souhaitent que le drapeau tricolore soit remplacé par une autre bannière, que La Marseillaise soit remplacée par d’autres chants, que les valeurs de la République soient remplacées par d’autres dogmes qui n’ont rien à voir avec les nôtres, inspirés du Venezuela, du Hamas, du Hezbollah, de l’Iran. Pour notre part, nous souhaitons que ce service soit national et conforme aux valeurs de la République.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC467 de M. Frédéric Maillot

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Nous réaffirmons notre opposition au SNU. Bien qu’il soit présenté comme un projet de société, il rencontre de réelles difficultés dans son organisation et son contenu : inefficacité, durée limitée, manque de continuité, imprécision des objectifs, pilotage et accompagnement insuffisants, faible mixité, coût excessif… Son copilotage par le ministère des armées et le ministère de l’Éducation nationale nous conduit à nous interroger quant à l’objectif recherché. Il nous paraîtrait plus pertinent de renforcer les financements destinés à la pratique du sport, aux associations et à l’éducation populaire.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. Il est dommage que cet amendement n’indique pas comment seront réaffectés les 20 millions d’euros. Je suggère donc son retrait.

Nous devons soutenir des lieux propices à la mixité sociale, ce que n’ont réussi à faire ni le SNU ni le programme « Classes et lycées engagés » – sans compter la disproportion entre les moyens alloués et le nombre de jeunes concernés.

Mme Violette Spillebout (EPR). Ne nous trompons pas de débat : sur le fond, nous sommes tous d’accord pour sensibiliser les jeunes à la citoyenneté et aux valeurs de la République, pour leur apprendre le vivre-ensemble grâce aux sports, à la culture, à l’ouverture aux autres et au dépassement de soi. Derrière l’opposition dogmatique de nos collègues à l’égard de cette expérimentation, c’est l’efficacité de l’action publique qui est interrogée. Faisons évoluer le SNU mais ne le supprimons pas, car il contribue à la cohésion nationale. Dans ma circonscription des Hauts-de-France, des jeunes de l’Aisne viennent dans la métropole lilloise, peuvent être élus maires par leurs pairs, apprennent à s’exprimer en public et à connaître leurs différences.

M. Alexis Corbière (EcoS). Vous nous vantez l’éducation populaire et l’accès au sport permis par le SNU, mais le mouvement associatif et sportif remplit déjà ces missions – or vous ne l’aidez pas. Le creuset républicain pour toute la jeunesse existe déjà, c’est l’école – mais vous ne l’aidez pas. Ces acteurs, au contraire, vous les affaiblissez, et vous fabriquez un gadget pour nous amuser.

Je suis favorable à ce qu’une classe d’âge soit sensibilisée à des sujets d’intérêt général : la crise écologique, la lutte contre les inégalités… Mais n’allons pas singer le service militaire ni invoquer une nostalgie qui n’a pas lieu d’être, car le service militaire n’a jamais eu les vertus que lui prête le Rassemblement national. Ce même Rassemblement national se targue d’être le défenseur de la nation alors que son programme est l’exact inverse de la devise Liberté, Égalité, Fraternité, et alors qu’il a été fondé par des gens qui ont lutté contre la République les armes à la main !

Mme Ayda Hadizadeh (SOC). Les valeurs de l’armée de terre que sont l’équité, le mérite, la cohésion, l’altruisme, le dépassement de soi et l’exigence peuvent être dispensées ailleurs que dans un cadre militaire : dans des associations, des bibliothèques, des structures locales… Il faut permettre un engagement plus large. C’est pourquoi nous proposons de soutenir davantage le service civique et le mouvement d’éducation populaire. Le SNU est fondé sur l’idée selon laquelle la jeunesse est en manque d’autorité ; nous pensons plutôt qu’elle souffre de ne pas trouver suffisamment sa place dans la société.

M. Rodrigo Arenas (LFI-NFP). Le SNU a dépassé le stade de l’expérimentation et a démontré son inefficacité. Puisque nous sommes tous soucieux de l’argent public, il est temps d’y mettre fin ; perseverare diabolicum. De nombreux autres lieux de socialisation auraient grand besoin de ses milliards d’euros : la cantine gratuite, les classes de découverte avec les enseignants, etc. Plutôt que maintenir un dispositif inefficace et coûteux, finançons l’école de la République, en particulier les écoles publiques qui œuvrent pour l’intérêt général et ne font pas de tri social.

Mme Prisca Thevenot (EPR). En 2022, Jean-Luc Mélenchon – que vous souteniez, monsieur Corbière –, plaidait pour le rétablissement du service militaire obligatoire. Quelles sont donc vos propositions pour renforcer la cohésion nationale à l’égard de la jeunesse ? Le SNU ne va pas au détriment d’autres politiques puisque l’année dernière, nous avons ici-même augmenté de 24 millions d’euros les crédits du service civique et du fonds pour le développement de la vie associative (FDVA).

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis (Sport). La vivacité de nos échanges montre que nous butons collectivement sur une question majeure : de quels outils nous dotons-nous pour faire nation ? Pour trouver ne serait-ce qu’un début de solution, quittons nos postures et regardons la réalité en face. Ayant fait mon service militaire, je peux témoigner qu’il n’était pas un parfait creuset social ni un gage absolu de mixité, même s’il présentait certaines vertus. De même, il est utopique de croire que l’école est un creuset qui rassemble des enfants d’origines sociales très différentes, alors que la carte scolaire correspond parfaitement à celle du prix de l’immobilier. Acceptons ce constat de vérité, et admettons que c’est en assemblant différentes solutions que nous relèverons le défi de la mixité et de la cohésion.

L’amendement est retiré.

Amendement II-AC356 de M. Jean-Claude Raux

M. Jean-Claude Raux (EcoS). La cohésion nationale est notre boussole, contrairement à d’autres, et critiquer le SNU est notre droit – ce qui ne signifie pas que nous critiquons les valeurs, la devise et le drapeau de la République. Le SNU est principalement un outil de communication, et le service qu’il rend est impossible à mesurer. Il n’est certainement pas la meilleure manière d’exprimer notre confiance en les jeunes – demandez-leur, vous verrez ce qu’ils répondront.

Puisque vous voulez conserver le SNU contre vents et marées, il convient de lui consacrer un programme dans la mission Sport, jeunesse et vie associative pour le rendre plus visible et lisible, et surtout pour renforcer le contrôle des deniers publics qui lui sont accordés.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. Cette disposition me semble aller à l’encontre des positions que j’ai défendues jusqu’à présent. Avis défavorable.

Mme Violette Spillebout (EPR). J’aimerais insister sur le rôle que joue le SNU dans l’insertion sociale et professionnelle des jeunes. C’est au lycée professionnel Le Corbusier de Tourcoing, spécialisé dans les métiers d’art, qu’a été créé son logo, par des jeunes qui ont fait un SNU et dont la plupart ont poursuivi leurs études grâce à cette expérience. Pour mieux évaluer son efficacité, il serait pertinent de lui consacrer un programme spécifique. Nous voterons donc pour cet amendement.

M. Roger Chudeau (RN). Je ne saisis pas le sens de l’amendement. Il y a quelques minutes, M. Raux voulait faire table rase du SNU, et il demande maintenant de lui consacrer un programme spécifique. C’est incohérent.

Il faut donner à l’Assemblée nationale les moyens d’évaluer le SNU. Je suggère que nous y procédions dans le cadre de l’évaluation des politiques publiques.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Une mission d’information sera lancée prochainement à ce sujet.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC395 de M. Carlos Martens Bilongo

M. Carlos Martens Bilongo (LFI-NFP). Les millions d’euros consacrés au SNU font débat sur tous les bancs, jusqu’à des sénateurs centristes. Nous souhaitons transformer une partie de ses crédits en garantie d’autonomie pour les jeunes en formation de 18 à 25 ans. Nous qui nous soucions de la cohésion sociale et de l’unité nationale devrions être alarmés que des jeunes fassent la queue devant les banques alimentaires. Aidons-les au moins à subvenir à leurs besoins primaires : s’alimenter et se loger.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. Je crains que cet amendement ne soit un cavalier budgétaire et qu’il ne relève de la mission Travail et emploi. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC537 de Mme Florence Herouin-Léautey

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. Il s’agit de porter de 25 à 50 euros brut la rémunération minimale journalière du contrat d’engagement éducatif (CEE), comme le comité de filière le demande de longue date. Je propose de doter de 120 millions supplémentaires un fonds de compensation pour accompagner les structures qui peineraient à rehausser la rémunération de leurs animateurs.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques II-AC512 de Mme Florence Herouin-Léautey et II-AC531 de Mme Fatiha Keloua Hachi

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. Mon amendement vise à créer un fonds pour la rénovation et la mise aux normes des centres accueillant des séjours collectifs de mineurs – efficacité énergétique, accessibilité, sécurité… Il serait doté de 130 millions d’euros par an pendant quatre ans. L’objectif est de stopper l’hémorragie de lits qui se produit depuis quelques décennies ; on estime que 50 000 places doivent être rénovées. Pour que les jeunes continuent à bénéficier de séjours de cohésion, de mixité sociale, de découverte d’expériences et d’apprentissage, comme nous le voulons tous, il faut mettre fin à la déshérence des centres de séjour.

M. Alexis Corbière (EcoS). Si vraiment nous cherchons des outils pour contribuer à l’émancipation de la jeunesse, en particulier des milieux populaires, nous devons en effet réactiver les séjours en colonies de vacances. Ils souffrent d’une désaffection liée en partie à certains faits divers, et 50 000 lits risquent de disparaître. Pourtant, les colonies ont ô combien permis à la jeunesse populaire de découvrir de nouveaux lieux, d’expérimenter la vie en collectivité, d’accéder au sport et à culture. Voilà une solution sérieuse, préférable à un gadget qui ne concerne que 40 000 jeunes, coûte fort cher et ne sert strictement à rien.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Je précise que les séjours en colonies de vacances repartent doucement, après avoir énormément baissé pendant une dizaine d’années. Nous sentons un frémissement.

La commission rejette les amendements.

Amendements II-AC519 de Mme Florence Herouin-Léautey, II-AC357 de M. Jean-Claude Raux et II-AC524 de Mme Florence Herouin-Léautey

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. Je propose de pérenniser l’aide financière accordée à ceux des 90 000 volontaires en service civique qui souhaitent passer le brevet d’aptitude aux fonctions d’animateur (Bafa) ou le brevet d’aptitude aux fonctions de directeur (BAFD), et de la porter à 500 euros. Cela représenterait une dotation de 30 millions d’euros. Pour rappel, nous manquons de 40 000 animateurs.

M. Jean-Claude Raux (EcoS). La crise de recrutement dans le secteur de l’animation est préoccupante, bien que le nombre de candidats qui réussissent le Bafa augmente. Le coût du passage de ce brevet, à 500 euros, peut constituer un obstacle, et le panel d’aides est peu lisible. Pour soutenir davantage de candidats, nous proposons d’instaurer la gratuité du Bafa sous conditions de ressources. Il serait ainsi gratuitement accessible à 50 000 jeunes chaque année.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. Il y a vingt ans, la formation du Bafa se faisait presque toujours en internat ; pour des raisons de coût, elle se fait désormais quasi exclusivement en externat. Cela aboutit à confier des responsabilités importantes à de jeunes encadrants qui, bien souvent, n’ont jamais connu la vie collective car ils ne sont pas eux-mêmes partis en colonie de vacances. L’amendement II-AC524 propose que le premier stage théorique du Bafa ait lieu en internat afin que les jeunes aient l’occasion de se projeter au moment des veillées ou du coucher pour mieux prendre en charge les enfants par la suite. C’est une demande des associations et des structures organisatrices de séjour.

Mme Violette Spillebout (EPR). Le chiffrage des amendements est compris entre 10 et 36 millions d’euros. Nous voterons pour l’amendement II-AC524, qui est le plus raisonnable. La totale gratuité du Bafa ne semble pas une bonne solution ; en revanche, il serait intéressant de valoriser les acquis professionnels des jeunes ayant effectué un service civique en leur permettant de passer gratuitement le Bafa quand leur expérience a démontré un sens de l’implication et de l’engagement.

Mme Ayda Hadizadeh (SOC). Ayant été animatrice dès l’âge de 17 ans, j’ai coutume de dire aux jeunes que j’ai tout appris pendant la formation au Bafa : gérer un groupe, la vie en collectivité, l’engagement, mener un projet… Le Bafa et le BAFD, c’est l’école de la vie. Et, puisque l’école est gratuite, nous souhaitons que le Bafa le soit aussi pour mettre le pied à l’étrier à des jeunes qui n’ont pas les moyens de le passer seuls et favoriser une forme d’insertion professionnelle qui répond à tous nos objectifs : se mettre au service des autres, trouver sa place dans la société, être utile à plus petit que soi. Nous avons besoin de jeunes qui s’engagent et qui deviendront des professionnels responsables.

M. Rodrigo Arenas (LFI-NFP). Nous venons de voter contre la rénovation des centres de vacances. Or, faute de moyens, beaucoup de collectivités territoriales se séparent de ces lieux dans lesquels les jeunes passaient le Bafa en internat et où ils apprenaient la vie en collectivité en même temps qu’un ensemble de valeurs et de méthodes pédagogiques et éducatives complémentaires à celles de l’école. La gratuité du Bafa serait un signe de soutien de la République aux collectivités territoriales, qui sont en grande difficulté, et aiderait la formation des jeunes qui participent à la cohésion intergénérationnelle.

Mme Soumya Bourouaha (GDR). J’ai contribué à la proposition de loi portant mesures d’urgence pour les vacances, dite « vacances pour tous ». Elle prévoyait la gratuité du Bafa et même d’en rémunérer la partie pratique, qui se déroule pendant les vacances scolaires ; elle est le plus souvent non rémunérée, ce qui détourne du Bafa de nombreux jeunes qui préfèrent travailler.

La commission rejette l’amendement II-AC519 puis adopte successivement les amendements IIAC357 et II-AC524.

Amendement II-AC403 de M. Carlos Martens Bilongo

M. Carlos Martens Bilongo (LFI-NFP). Il vise à créer un fonds d’urgence destiné à soutenir les collectivités territoriales dans l’accueil collectif estival des mineurs pour des activités sportives et de loisir. La diminution de la dotation globale de fonctionnement a contraint les collectivités à fermer des structures d’accueil. Notre pays en souffre : 40 % des jeunes ne peuvent pas partir en vacances l’été.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. Il faut accompagner le frémissement de la culture du départ en colonies de vacances, qui permet de sortir les jeunes du quartier dans lequel ils passent toute l’année, à l’école, à la MJC, au centre social ou au centre de loisirs. Cela appelle plusieurs mesures, de l’entretien et la mise aux normes du bâti jusqu’à la création d’un fonds de soutien aux collectivités. Avis favorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques II-AC521 de Mme Florence Herouin-Léautey et II-AC532 de M. Pierrick Courbon

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. La multiplicité des dispositifs créés ces dernières années est une source de confusion qui peut décourager les familles et complique la tâche des associations organisatrices de séjours, qui doivent déterminer qui a droit aux aides Vacaf, aux vacances apprenantes, au pass colo, etc. La confirmation tardive du pass colo, début juillet, a fragilisé de nombreux départs. Nous souhaitons regrouper toutes ces aides en un fonds unique destiné en priorité aux structures organisatrices de séjours afin de leur donner une visibilité budgétaire et de leur permettre d’afficher uniquement le reste à charge réel pour les familles. Ce fonds serait doté de 20 millions d’euros.

Mme Violette Spillebout (EPR). La multiplicité des dispositifs rend leur évaluation et leur ciblage plus difficile. L’amendement coûte 20 millions d’euros ; il faudra s’assurer qu’il ne reviendra pas plus cher que le total des aides individuelles, mais nous le soutiendrons. Il permet d’identifier clairement la politique publique des vacances collectives. C’est un gage de lisibilité pour les citoyens et de transparence pour les associations.

La commission adopte les amendements.

Amendement II-AC364 de M. Jean-Claude Raux

M. Jean-Claude Raux (EcoS). La loi de finances pour 2024 a créé une ligne budgétaire de 40 millions d’euros en faveur des colos apprenantes. C’était une avancée ; cependant, par manque de moyens, le budget stagne cette année. Les associations de terrain considèrent que ce n’est pas suffisant pour répondre à la demande et se disent contraintes de refuser des enfants : l’association Jeunesse au plein air, par exemple, a épuisé son enveloppe en seulement quelques jours. Pour ne pas laisser des enfants et des familles sur le carreau et pour concrétiser le droit aux vacances, l’amendement propose d’augmenter de 10 millions d’euros le budget des colos apprenantes.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. Tout ce qui peut accompagner la relance des colonies de vacances est une priorité. Avis favorable.

Mme Violette Spillebout (EPR). Nous voterons pour l’amendement. Les colos apprenantes sont un dispositif bien connu qui fonctionne. À Lille, chaque année, 250 enfants partent pour apprendre l’anglais ou un sport, et de nombreuses demandes doivent être refusées. Le dispositif est principalement utilisé par les collectivités territoriales, mais d’autres structures s’en sont également saisies : le Losc, le club de football de Lille, accueille chaque année 30 jeunes de l’aide sociale à l’enfance (ASE) en internat pour leur faire découvrir le sport de haut niveau.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC517 de M. Pierrick Courbon

M. Pierrick Courbon (SOC). Il vise à augmenter les crédits du fonds pour le développement de la vie associative, créé en 2017 en remplacement de la réserve parlementaire. Le FDVA est l’un des principaux fonds publics dont les associations peuvent bénéficier et il est indispensable de l’augmenter pour développer la vie associative dans les territoires. Malgré une forte revalorisation l’année dernière, le compte n’y est pas. Je disais hier au ministre Avérous que, dans mon département de la Loire, seuls 246 dossiers ont été retenus sur 502 déposés ; le financement total disponible était de 461 000 euros, soit 60 000 euros de plus qu’en 2023, pour une demande totale de 3 millions d’euros.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. Avis favorable. Les crédits du FDVA n’ont pas été réévalués depuis longtemps alors qu’ils permettent la formation des bénévoles et le financement de nombreux projets.

M. Fabien Di Filippo (DR). Le FDVA, à l’origine, c’est la réserve parlementaire. Lors de sa recentralisation, seulement un sixième de l’enveloppe a été affecté au FDVA par souci d’économie. Les subventions sont désormais délivrées sous le contrôle des services de l’État. Au lieu de recréer une machine étatique tentaculaire dont les moyens augmentent après année, il fallait conserver la réserve parlementaire, qui fonctionnait mieux avec des coûts de gestion moindres et qui profitait à davantage de petites associations et de petites collectivités.

Mme Prisca Thevenot (EPR). Je précise que le FDVA n’a pas baissé, au contraire : il a été rehaussé l’année dernière de 24 millions d’euros par un vote unanime de la commission. Je suis cependant favorable à l’augmentation des crédits et à la révision du mode d’attribution des subventions pour permettre aux députés, aux sénateurs et aux élus locaux d’y prendre leur part. Nous devons en faire un réel plus pour les petites et moyennes associations qui créent de la cohésion dans les territoires.

M. Pierrick Courbon (SOC). Je suis d’accord avec M. Di Filippo : le FDVA est un piètre substitut – une réserve préfectorale, en quelque sorte – de la réserve parlementaire dont les coûts de gestion, néanmoins, n’étaient pas optimaux puisque tous les dossiers étaient traités au niveau ministériel. Quoi qu’il en soit, le FDVA existe désormais et il est apprécié des associations ; si nous voulons soutenir la vie associative dans les territoires, il faut en revaloriser les crédits. Les associations ont besoin de cet argent.

Mme Virginie Duby-Muller (DR). La réserve parlementaire était un système bénéfique. Elle a été partagée entre la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR), la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) et le FDVA, dans lequel les parlementaires n’ont désormais plus qu’une influence de façade car les décisions sont généralement prises en amont, au point qu’il ne leur reste parfois que quelques centaines d’euros à répartir ; c’est frustrant. Nous avions une connaissance fine de la vie associative dans nos circonscriptions et nous pouvions apporter une plus-value dans le choix des bénéficiaires. Depuis que la réserve parlementaire a été réformée avec une obligation de transparence, les choses se faisaient en bonne intelligence et nos concitoyens pouvaient prendre connaissance de la manière dont l’argent public était utilisé.

M. Xavier Breton (DR). Le coût de l’instruction des dossiers de la réserve parlementaire était bien moindre. Les services des ministères ne procédaient à aucun contrôle d’opportunité ; ils vérifiaient simplement que les associations étaient dans les clous du point de vue légal. Les refus étaient exceptionnels, de l’ordre de moins d’un dossier sur mille.

M. Sacha Houlié (NI). La suppression de la réserve parlementaire a été décidée dans une logique de transparence de la vie politique pour mettre fin aux abus qui avaient cours avant 2017 et fixer des objectifs clairs à l’attribution des subventions publiques. Personnellement, je suis rassuré de savoir que tout cela est désormais contrôlé. Sur les 80 millions d’euros de la réserve parlementaire, 75 millions ont été ventilés entre le FDVA et la DETR afin de bénéficier à la fois aux collectivités territoriales et aux associations. Les parlementaires ne sont pas exclus de l’attribution des fonds puisqu’ils siègent au comité consultatif – il leur appartient d’y participer – et leurs décisions emportent le plus souvent l’avis du préfet.

Une chose me gêne dans les amendements que nous adoptons : ils sont tous financés par des crédits prélevés sur le programme Sport, dont le budget est déjà en forte baisse de 260 millions d’euros. Cela va finir par faire beaucoup.

M. Julien Odoul (RN). Le transfert de la réserve parlementaire aux services préfectoraux nous a fait perdre beaucoup d’argent public qui était utile et contrôlé, contrairement à la légende urbaine qui évoquait une « cagnotte des députés ». Les collectivités territoriales et les acteurs associatifs sont nostalgiques de cette enveloppe qui rendait des services d’intérêt général pour le développement des territoires. Ce sont désormais des fonctionnaires dans des bureaux qui déterminent les subventions, et non plus les parlementaires qui connaissaient la réalité du terrain, les acteurs associatifs et les besoins des collectivités. C’est autant de perdu en lisibilité et en efficacité.

Mme Violette Spillebout (EPR). Je tiens à vous alerter sur deux points concernant le FDVA. Premièrement, de nombreuses associations nouvellement créées ou à l’écart des réseaux institutionnels ne connaissent pas son existence ; le supplément budgétaire devra être utilisé pour aller vers elles, plutôt que subventionner des structures qui bénéficient déjà d’autres aides. Deuxièmement, nous devons faire attention à ce que le FDVA ne serve pas à combler l’insécurité budgétaire d’associations qui ne bénéficient pas de conventions pluriannuelles avec les collectivités territoriales – comme c’est par exemple le cas d’opéras ou de clubs sportifs – alors qu’elles existent parfois depuis longtemps.

Mme Ayda Hadizadeh (SOC). Un mot n’a pas encore été prononcé : le clientélisme. Je ne suis députée que depuis juillet, mais il ne m’a pas fallu longtemps pour comprendre à quel point il aurait été facile d’y céder avec la réserve parlementaire ; ceux qui disent l’inverse se mentent à eux-mêmes ou mentent tout court. Toutefois, nous devons entendre les associations qui disent être découragées par la complexité des dossiers à remplir ou ne pas savoir à quel guichet s’adresser et réfléchir à une simplification du FDVA.

Mme Géraldine Bannier (Dem). Il ne faut pas idéaliser la réserve parlementaire, qui allait souvent de pair avec des techniques discrétionnaires et des affiliations d’élus. Je l’ai vécu en tant que maire. Ma commune recevait une aide assez importante pour un projet ; en parlant avec d’autres maires, j’ai appris qu’ils ne recevaient pas du tout le même montant pour le même projet. Le FDVA fonctionne bien et tous les élus sont présents pour définir les critères d’attribution des subventions. Il peut encore être amélioré dans tous les territoires.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Une mission d’information sera lancée en novembre sur le FDVA. Nous pourrons en débattre à ce moment-là.

M. Aly Diouara (LFI-NFP). En tant qu’élu de Seine-Saint-Denis, où la réserve parlementaire a été utilisée abondamment et de manière clientéliste, je suis fermement opposé à son rétablissement. Je préférerais que l’on simplifie les démarches administratives des associations, par exemple à travers le compte asso, qui pourrait servir de guichet unique. Je suis scandalisé par ces propos qui visent à rétablir un dispositif discrétionnaire qui opposait les associations des quartiers entre elles.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-C413 de M. Idir Boumertit

M. Idir Boumertit (LFI-NFP). Il semble y avoir un consensus pour abonder le FDVA, même si la Macronie n’a pas adopté les amendements précédents. Le rapport sénatorial portant avis sur la mission Sport, jeunesse et vie associative du projet de loi de finances pour 2024 préconisait déjà de conforter cette ligne budgétaire pour aider le tissu associatif et les jeunes.

Contre l’avis de la rapporteure pour avis, la commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis de la rapporteure pour avis, la commission adopte les amendements identiques II-AC523 et II-AC518, visant à abonder le FDVA de 32 millions d’euros.

Les amendements II-AC409 de M. Aly Diouara et II-AC468 de Mme Soumya Bourouaha sont retirés.

Amendement II-AC410 de M. Aly Diouara

M. Aly Diouara (LFI-NFP). Il vise à rétablir le principe démocratique dans l’attribution des subventions aux associations. Les subventions sont décidées par les autorités publiques, sans justification ; le contrat d’engagement républicain soumet davantage les associations aux exigences et à l’arbitraire des exécutifs et du pouvoir central. Cette pratique recentralisée limite la liberté associative et l’indépendance d’action des associations, comme l’a montré l’Observatoire des libertés associatives. Des exemples récents, comme celui du préfet de la Vienne, illustrent l’utilisation des subventions comme moyen de pression politique remettant en question l’autonomie associative et la liberté associative. Nous appelons à un modèle dans lequel l’attribution des subventions se déciderait en concertation avec des citoyens et des représentants associatifs en s’inspirant des dispositifs comme les budgets participatifs ou les conseils de la vie associative, qui montrent que cette gestion démocratique est possible et efficace. Nous proposons de consacrer 50 millions d’euros à la mise en place de processus participatifs dans toutes les collectivités. Cette mesure garantirait que le soutien public aux associations ne se résume pas à un instrument de contrôle du pouvoir.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. L’amendement met en question le processus décisionnel de l’octroi des subventions. Je suis d’avis de surseoir à la décision en attendant les conclusions de la mission d’information sur le FDVA.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques II-AC516 de Mme Florence Herouin-Léautey et II-AC520 et M. Pierrick Courbon

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. Le réseau Info Jeunes, qui intervient gratuitement dans les territoires, permet aux jeunes de devenir acteurs de leur parcours. Pourtant, l’information jeunesse ne bénéficie que de 7 millions d’euros, tandis que 32 millions sont alloués au mentorat, dont l’efficacité demeure incertaine. L’amendement propose de porter le budget dédié à l’information jeunesse à 50 millions d’euros en l’augmentant de 43 millions d’euros. Ce financement accru permettrait de soutenir davantage les 1 200 structures locales, centres départementaux et régionaux d’information jeunesse et de revaloriser le budget du Centre d’information et de documentation jeunesse (CIDJ).

La commission rejette les amendements.

Amendement II-AC404 de M. Idir Boumertit

M. Idir Boumertit (LFI-NFP). Tous les acteurs de l’éducation populaire soulignent l’importance du fonds d’expérimentation pour la jeunesse (FEJ) pour le financement de leurs actions innovantes. Créé en 2008, ce fonds finançait des expérimentations favorisant la réussite scolaire, l’égalité réelle pour tous ou encore l’insertion professionnelle, économique et sociale ; il permettait aux bénéficiaires de tester nombre de leurs idées éducatives et aux porteurs de projet d’exprimer leur créativité pour améliorer les dispositifs existant en faveur de la jeunesse. Comme à chaque fois, c’est la baisse de financements qui a fait disparaître ce fonds. Aurions-nous trouvé la seule chose positive à garder de la droite et de la Macronie ? Ce fonds, lancé sous Nicolas Sarkozy et dont le bilan a été salué par Jean-Michel Blanquer, a un réel intérêt, comme le confirme le Comité pour les relations nationales et internationales des associations de jeunesse et d’éducation populaire (Cnajep). Nous proposons donc de le relancer avec une dotation de 30 millions d’euros.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. Je suis favorable à donner plus de visibilité et de moyens au fonds d’expérimentation pour la jeunesse.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC400 de M. Idir Boumertit

M. Idir Boumertit (LFI-NFP). À eux seuls, les jeunes de moins de 30 ans représentent près de 40 % des chômeurs ; lorsqu’ils ont un emploi, il est précaire dans plus d’un cas sur deux, avec des contrats d’autoentrepreneur, en CDD ou en intérim.

Le fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire (Fonjep jeunes), lancé en 2021, a permis aux associations d’utilité sociale de recruter des jeunes entre 18 et 30 ans. Bien qu’imparfait, il a eu le mérite de faciliter un premier emploi pour les jeunes tournés vers l’éducation populaire, la cohésion sociale ou la politique de la ville – sachant qu’il s’agit d’emplois à forte valeur humaine, à un moment inédit de crise de sens au travail. Le gouvernement voulait supprimer le Fonjep jeunes dès 2022 ; s’il existe encore, c’est que sa valeur est avérée. Afin de continuer à orienter les jeunes vers ces métiers, nous proposons de flécher 25 millions d’euros supplémentaires vers les dispositifs Fonjep et Fonjep jeunes.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. J’y suis favorable sur le fond, mais vous souhaiterez peut-être retirer cet amendement au profit des deux suivants dans lesquels je propose une meilleure dotation pour le Fonjep.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques II-AC515 de Mme Florence Herouin-Léautey et II-AC522 de Mme Fatiha Keloua Hachi

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. Nous proposons de pérenniser le dispositif des postes Fonjep jeunes – qui a été créé à la faveur du plan de relance et dont l’extinction est prévue dans le projet de loi de finances pour 2025 – et de le doter chaque année de 6 000 postes.

La commission rejette les amendements.

Amendements identiques II-AC514 de Mme Florence Herouin-Léautey et II-AC525 de M. Pierrick Courbon

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. Il s’agit de porter la valeur de l’unité Fonjep, qui n’a pas été revalorisée depuis une vingtaine d’années, de 7 164 euros à 10 000 euros par an. Une telle revalorisation est essentielle pour rémunérer le personnel qualifié chargé de mettre en œuvre l’action associative ou d’animer le projet associatif.

M. Pierrick Courbon (SOC). La revalorisation de l’unité Fonjep permettrait de répondre à un besoin de professionnalisation accru dans un certain nombre d’associations. Par ailleurs, il nous paraît très important de conforter ce dispositif qui permet aux associations d’employer des personnes qualifiées pour mettre en œuvre leur projet et, accessoirement, de mettre le pied à l’étrier à certains jeunes en leur offrant un premier emploi.

La commission rejette les amendements.

Amendement II-AC359 de M. Jean-Claude Raux

M. Jean-Claude Raux (EcoS). Nous proposons d’augmenter de 7,2 millions d’euros les crédits de l’action 02 Actions en faveur de la jeunesse et de l’éducation populaire afin de maintenir le financement des 2 000 postes Fonjep créés entre 2021 et 2023 à la faveur du plan de relance.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. Quoique moins ambitieux, cet amendement est similaire aux deux précédents. Avis favorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC411 de M. Idir Boumertit

M. Idir Boumertit (LFI-NFP). Il s’agit de créer un fonds de soutien aux associations de solidarité. Ce fonds permettrait, premièrement, de centraliser les subventions versées aux associations œuvrant dans les domaines de la lutte contre l’exclusion et la pauvreté, de l’enfance, de la santé ou de l’insertion ; deuxièmement, de renforcer le tissu associatif en augmentant les financements disponibles, lesquels pourraient être pluriannuels afin d’offrir une meilleure visibilité aux associations ; troisièmement, de réduire la complexité administrative liée à la diversité des sources de financement. Ainsi, les acteurs associatifs pourraient se concentrer sur leur mission principale et l’État aurait une meilleure vision des besoins identifiés sur le terrain.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. Le champ de l’amendement est potentiellement très vaste, mais l’idée me paraît judicieuse. Avis favorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC434 de M. Pierrick Courbon

M. Pierrick Courbon (SOC). Il s’agit de compenser la baisse de 3,1 millions d’euros des crédits affectés au compte d’engagement citoyen (CEC), qui a été créé par la loi « égalité et citoyenneté » de 2017 et qui est censé conforter l’engagement bénévole des actifs en leur permettant de convertir une partie de leur temps de bénévolat en temps de formation. Cette baisse de crédits est d’autant plus étonnante qu’il a été décidé, l’an dernier, d’assouplir le dispositif afin de favoriser son développement.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. Le faible taux de recours au compte d’engagement citoyen doit nous inciter à améliorer ses modalités de fonctionnement, car il présente un intérêt certain. Avis favorable.

Mme Violette Spillebout (EPR). Nous sommes favorables à cet amendement, qui nous permet de mettre en lumière la proposition de loi de Quentin Bataillon visant à soutenir l’engagement bénévole et à simplifier la vie associative, que nous avons adoptée l’an dernier. Cette loi a en effet étendu l’accès au compte d’engagement citoyen, qui permet à des bénévoles, actifs ou retraités, d’abonder leur compte personnel de formation (CPF) à hauteur d’environ 250 euros par an. Des initiatives locales sont prises, notamment par des universités, pour mettre en valeur l’engagement bénévole et le compte d’engagement citoyen. Il faut les y encourager.

M. Pierrick Courbon (SOC). S’il convient de conforter le CEC, force est de constater qu’il ne fonctionne pas de manière optimale. Du reste, il fera l’objet des travaux du Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques. Nous aurons donc l’occasion d’y revenir.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC415 de M. Aly Diouara

M. Aly Diouara (LFI-NFP). Il s’agit de refinancer les conventions pluriannuelles d’objectifs (CPO) afin de redonner aux associations les moyens de mener à bien leurs missions de terrain en les soustrayant à la logique de financement par projet, qui les asphyxie.

Depuis la crise sanitaire et la hausse de l’inflation, près de 60 % des associations rencontrent des difficultés financières préoccupantes. La revalorisation des CPO permettrait de garantir la pérennité de leur action tout en respectant leur liberté d’organisation, comme le prévoit la loi de 1901. Contrairement aux appels à projets, qui imposent une vision descendante et rigide, le financement par CPO offre aux associations une liberté d’action et un soutien durable. Or il est important de renforcer leur stabilité financière, compte tenu de leur rôle central dans la mise en œuvre des politiques publiques.

Dotons mieux les CPO pour permettre aux associations de recruter du personnel en contrat à durée indéterminée et d’en finir avec l’incertitude qui pèse trop souvent sur leur avenir. Il s’agit de soutenir un modèle économique associatif plus juste, plus stable et en phase avec les besoins du terrain.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. C’est une question majeure qui a été soulevée lors des auditions. En dix ans, la part des subventions de fonctionnement dans le budget des associations est passée de 40 % à 17 % : c’est dire combien le recours massif aux appels à projets fragilise leur fonctionnement et ne leur offre pas suffisamment de lisibilité. Avis évidemment favorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC412 de M. Carlos Martens Bilongo

M. Carlos Martens Bilongo (LFI-NFP). Nous proposons de créer un fonds de compensation à destination des structures associatives d’utilité publique qui comptent moins de 200 adhérents et qui, de ce fait, ne peuvent pas bénéficier du statut d’association reconnue d’utilité publique, lequel permet de recevoir legs et donations. Parmi les critères retenus par le Conseil d’État pour se voir attribuer ce statut, ceux qui sont liés à la situation géographique et au nombre d’adhérents nous paraissent arbitraires. Aussi, puisqu’il ne nous est pas possible de les modifier, proposons-nous de créer un fonds spécifique en faveur des associations qui ont peu d’adhérents mais dont l’intérêt public est évident.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. Avis évidemment favorable, moyennant l’instauration de certains garde-fous.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC416 de M. Aly Diouara

M. Aly Diouara (LFI-NFP). Il s’agit de créer un fonds public de soutien à l’emploi associatif afin de financer la moitié des salaires dans les associations à vocation sociale, culturelle, environnementale et sportive situées dans les QPV, où le taux d’emploi est de 47 % quand la moyenne nationale s’établit à 65 %. Les associations jouent un rôle essentiel dans ces territoires. Pourtant, elles peinent de plus en plus à maintenir leurs emplois à cause des charges salariales et des coupes budgétaires.

Le dispositif proposé leur apporterait un soutien durable et leur permettrait de se concentrer sur leurs missions. Il contribuerait à favoriser les métiers associatifs, à soutenir l’emploi local et à garantir l’existence d’un secteur associatif dynamique et stable dans les territoires les plus fragiles et, disons-le, les plus discriminés. Cette mesure de justice et de solidarité est essentielle pour préserver le rôle de ceux qui agissent quotidiennement au cœur de nos sociétés.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. Il s’agit d’un amendement d’appel en faveur du développement des postes Fonjep. Dans le prolongement de nos échanges précédents, mon avis est favorable.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. En ce qui concerne l’emploi associatif, le système des appels à projets est très pervers, car sa complexité administrative oblige presque les associations, qui étaient auparavant animées par des bénévoles, à se professionnaliser. Ce faisant, elle les fragilise car, lorsque la subvention prend fin, elles ne peuvent plus faire face au coût que représente l’emploi associatif. Le système est en quelque sorte ubuesque, puisqu’on est contraint de remettre de l’argent qui ne contribue pas à produire de nouvelles actions. Et, en définitive, il n’est pas plus efficace que lorsqu’on recourait essentiellement au bénévolat. Au lieu de financer le traitement de la complexité administrative, simplifions !

La commission adopte l’amendement.

Amendements II-AC362 de M. Jean-Claude Raux et II-AC491 de Mme Violette Spillebout

M. Jean-Claude Raux (EcoS). Le dispositif Guid’Asso, consacré par la loi du 15 avril 2024 visant à soutenir l’engagement bénévole et à simplifier la vie associative, doit à présent être déployé sur l’ensemble du territoire. Or le budget qui lui est consacré ne financerait qu’un fonctionnement minimal, en deçà des ambitions affichées. Nous proposons donc d’augmenter les crédits alloués à ce dispositif de 2,5 millions d’euros.

Mme Violette Spillebout (EPR). Il importe en effet d’assurer la continuité et la cohérence de nos politiques publiques. Le fait est que la loi visant à soutenir l’engagement bénévole et à simplifier la vie associative a été défendue par deux membres de notre commission, Quentin Bataillon et Fabienne Colboc, dans le cadre d’une politique menée par Prisca Thévenot, et qu’elle a pour objectif de favoriser la structuration des associations à leurs débuts, notamment lorsqu’elles passent le cap du premier emploi. Nous proposons donc également, par cohérence, d’abonder de 2,5 millions les crédits affectés à Guid’Asso.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. Monsieur Raux, je salue votre engagement, car c’est sur votre initiative et celle de notre ancien collègue Quentin Bataillon que Guid’Asso a été inscrit dans la loi. Vous proposez d’augmenter la dotation prévue pour accélérer son développement. Avis favorable sur les deux amendements.

La commission adopte l’amendement II-AC362.

L’amendement II-AC491 est retiré.

 

La séance, suspendue à onze heures quarante, est reprise à onze heures quarante-cinq.

 

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous en venons aux amendements se rapportant aux crédits alloués au sport.

Amendement II-AC374 de M. Carlos Martens Bilongo

M. Carlos Martens Bilongo (LFI-NFP). Nous proposons de créer un plan de 50 000 équipements sportifs sur le modèle du plan de 5 000 équipements sportifs. Cinq mille, c’est le nombre d’équipements qui manquent dans le département de la Seine-Saint-Denis pour atteindre la moyenne nationale de 46 équipements sportifs pour 10 000 habitants. À l’échelle du pays, les besoins sont dix fois plus élevés. Or, dans les documents annexés au projet de budget 2025, le Gouvernement acte une saignée de 188 millions d’euros. Il est pourtant essentiel d’investir dans ces équipements, où se forment les futurs champions et où nos concitoyens peuvent pratiquer une activité physique pendant leurs loisirs.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis (Sport). Si l’on veut développer sérieusement la pratique sportive, il faut, certes, créer des équipements, mais n’oublions pas qu’il faut des personnes pour accueillir, encadrer, voire motiver ceux qui pratiquent un sport ou une activité physique. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC423 de Mme Fatiha Keloua Hachi

M. Pierrick Courbon (SOC). Il est vrai que les équipements sportifs ne font pas tout, mais ils doivent être en nombre suffisant. Or certains territoires sont notoirement sous-équipés. Nous proposons donc de lancer, sur le modèle du plan de 5 000 équipements sportifs de l’Agence nationale du sport (ANS) – même si celui-ci suscite quelques réserves, puisqu’il a permis de financer principalement des terrains de basket 3x3 et des city stades – un plan de 50 000 équipements sportifs de proximité.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. L’objectif est louable, mais où trouver les 400 millions d’euros nécessaires ? Défavorable.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Le plan de 5 000 équipements sportifs a impulsé un véritable élan, même si l’on peut critiquer la qualité des équipements réalisés – je pense notamment aux city stades et aux skate parks. Nous demandons, quant à nous, davantage d’équipements, de meilleure qualité.

À titre d’exemple, mon département, la Seine-Saint-Denis, est chroniquement sous-équipé dans ce domaine. Certes, il a accueilli les Jeux olympiques et a hérité d’une très belle piscine, mais c’est le seul équipement structurant. On dénombre en Seine-Saint-Denis 46 équipements sportifs pour 10 000 habitants, soit dix fois moins qu’au niveau national. Je sais que le montant des crédits demandé – 400 millions d’euros – est considérable, en particulier en ce moment. Mais, de manière générale, nous manquons d’équipements sportifs dans tous les territoires, même ruraux. Certains sont très bien dotés, d’autres le sont très insuffisamment.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC433 de M. Christophe Proença

M. Christophe Proença (SOC). Le plan de 5 000 équipements a eu des effets positifs : nous inaugurons presque chaque semaine des city stades, des plateaux multisports, des terrains de basket 3x3, des pump tracks, des skate parks. Mais ce qui manque, ce sont les projets structurants, qui permettent à des jeunes de pratiquer un sport en étant encadrés par un club, une fédération sportive. Il ne s’agit pas d’opposer deux catégories d’équipements, mais les communes et les communautés de communes n’ont pas les moyens de financer seules ce type de projets structurants. La fermeture de piscines met à mal le savoir nager, et beaucoup de gymnases ont 50 à 60 ans d’âge.

Le plan de 5 000 équipements permettait de verser une aide moyenne de 40 000 euros alors que les projets dont je parle coûtent 4 à 5 millions. Le montant que je propose peut paraître important, mais il correspond à un projet par département.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. Je suis d’accord avec vous sur la nécessité de se doter d’équipements structurants. Le plan de 5 000 équipements devait avoir un effet d’entraînement et diffuser l’idée olympique sur l’ensemble du territoire, mais je doute qu’il ait agi comme un véritable levier sur le développement sportif : il a plutôt procédé, comme je l’ai écrit dans le rapport, à un saupoudrage.

Au lieu d’accroître les financements ou de les diluer en multipliant les installations, concentrons-nous, en nous appuyant sur le bloc communal, sur les équipements qui favorisent véritablement le développement du sport, car à vouloir faire plaisir à tout le monde, on finit par ne rendre service à personne. Avis défavorable.

M. Pierrick Courbon (SOC). Il ressort de ces différents amendements que nous nous accordons sur la nécessité de construire des équipements sportifs de proximité ou plus structurants. La question qui se pose est celle de leur financement. Or il ne vous aura pas échappé, monsieur le rapporteur pour avis, que nous sommes un certain nombre, de divers groupes, à avoir déposé, sur la première partie du projet de loi de finances, des amendements visant notamment à déplafonner les taxes affectées au sport prélevées sur les paris sportifs ou à créer un prélèvement additionnel pour financer un fonds d’héritage sportif et territorial des Jeux olympiques. Si l’on en croit certaines fuites, ces amendements feraient partie de ceux sur lesquels le Gouvernement n’a pas encore rendu un arbitrage défavorable. Nous serons donc, je l’espère, plusieurs à plaider pour que le sport récupère un peu d’argent par ce canal.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC375 de M. Carlos Martens Bilongo

M. Carlos Martens Bilongo (LFI-NFP). Nous proposons de mettre en œuvre, en partenariat avec les collectivités territoriales, un plan national d’urgence pour la construction et la rénovation des équipements sportifs : stades, piscines et gymnases. En Seine-Saint-Denis, par exemple, les équipements ont plus de 40 ans et un enfant sur deux ne sait pas nager. Le mouvement associatif est prêt à y remédier ; pour cela, il faut des moyens.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. Vous avez raison : dans certains territoires, non seulement les équipements structurants manquent mais ceux qui existent ont été construits il y a quarante ou cinquante ans et sont désormais, pour beaucoup, vétustes. Sans doute faudra-t-il trouver des moyens complémentaires. À cet égard, la piste du prélèvement sur les paris sportifs est réaliste. Toutefois, il me paraît un peu utopique d’espérer débloquer 500 millions d’euros d’un coup.

D’autres pistes peuvent être explorées, en particulier pour le financement de la construction d’équipements neufs. Ainsi, certaines de ces installations, qui peuvent accueillir aussi bien des activités marchandes que des activités d’utilité publique, pourraient faire l’objet d’un financement partagé avec le privé, lequel n’est, actuellement, pas possible – je ne parle pas des partenariats public-privé. Une collectivité pourrait, par exemple, participer à un investissement dans un projet privé d’ordre marchand moyennant la réservation de certains créneaux pour les clubs. Au lieu de payer, comme c’est le cas actuellement, un loyer qui entre dans ses dépenses de fonctionnement, il serait plus sain qu’elle puisse investir dès l’origine du projet.

Quant au savoir nager, il est hélas très lié au milieu social. L’ouverture de créneaux ne suffira donc pas pour que les enfants issus de milieux défavorisés apprennent à nager ; il faut trouver d’autres formules. Certes, la médiation peut se faire à l’école. Mais on sait que de plus en plus d’enfants produisent des certificats médicaux qui les dispensent des cours de natation.

M. Alexis Corbière (EcoS). En Seine-Saint-Denis, qui a la population la plus jeune de France, le sous-équipement notoire en bassins de natation est l’une des principales raisons pour lesquelles les enfants de ce département n’ont pas accès à la piscine. Il est vrai que les enfants des milieux populaires sont plus nombreux à ne pas savoir nager, mais le fait de vivre dans un territoire sous-équipé ou de ne plus participer à des séjours de vacances n’arrange rien ; n’invoquons donc pas je ne sais quelle recrudescence des certificats médicaux.

Bien sûr, la somme de 400 millions d’euros est significative. Mais le montant du financement mobilisé pour les Jeux olympiques – dont tout le monde s’accorde à dire qu’ils furent un succès – s’élève à 11 milliards d’euros, dont près de la moitié d’argent public. Comment peut-on mobiliser autant d’argent pour un tel événement et juger trop coûteux le financement d’installations qui permettraient à nos concitoyens de pratiquer un sport tout au long de l’année ?

M. Christophe Proença (SOC). Le partenariat public privé peut être pertinent pour certains équipements, comme un terrain de padel. En revanche, nous le savons tous, les piscines sont presque toutes déficitaires. Quant au savoir nager, nous l’avons favorisé dans les campagnes pour les personnes de plus de 60 ans : nous avons été débordés de demandes ! Encore faut-il, pour les accueillir, des piscines ouvertes toute l’année.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC377 de M. Carlos Martens Bilongo

M. Carlos Martens Bilongo (LFI-NFP). Marie-José Pérec, Teddy Riner, Laura Flessel, Dimitri Payet, Wendie Renard, Thierry Henry, Nicolas Anelka, Jean-Marc Mormeck, Lilian Thuram, Marius Trésor, Christian Karembeu, Antoine Kombouaré, Bernard Lama : tous ces sportifs ont commencé à pratiquer leur sport dans les territoires ultramarins où ils sont nés. Nous tirons fierté des médailles qu’ils ont fait gagner à la France mais nous devrions avoir honte de l’état des équipements sportifs en outre-mer – comme celui que j’ai visité récemment aux Abymes, en Guadeloupe. Par cet amendement, nous vous invitons à voter les crédits nécessaires au lancement d’un plan d’urgence destiné à les reconstruire et les rénover. Il faut respecter la continuité territoriale.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. La liste des champions ultramarins est longue en effet mais je ne sais si l’état des équipements sportifs outre-mer relève de cette mission – auquel cas pourquoi ne pas prévoir un tel plan pour les départements très carencés comme la Seine-Saint-Denis – ou bien de la mission Outre-mer.

J’ajoute que la construction des ouvrages olympiques, dont certains resteront, a entraîné 1,5 milliard d’euros et non 5 milliards de dépenses publiques.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC535 de M. Bruno Bilde

M. Bruno Bilde (RN). Le succès des Jeux olympiques ne saurait masquer les réalités plus sombres auxquelles est confronté le monde du sport. En raison de restrictions budgétaires toujours plus fortes, les équipements sportifs locaux manquent d’entretien, certains étant même vétustes. C’est ainsi que 70 % de ceux dont les collectivités locales sont propriétaires n’ont jamais fait l’objet de gros travaux et qu’un tiers des infrastructures sportives construites avant 1982 n’ont jamais été réhabilitées – nous parlons là de 1 800 piscines, 12 00 gymnases et 5 000 salles polyvalentes.

Les collectivités locales ont consenti des efforts considérables – le sport constitue leur deuxième poste de dépenses après l’enseignement – mais cela ne suffit pas. Nous proposons donc par cet amendement d’appel de créer un nouveau programme budgétaire intitulé « Fonds de soutien aux collectivités territoriales pour réhabiliter les infrastructures sportives ».

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. Votre amendement renvoie aux relations financières que l’on souhaiterait empreintes de davantage de confiance entre l’État et les collectivités locales. De quelle marge de manœuvre disposent-elles pour assumer les responsabilités qui leur incombent en matière d’équipements sportifs ? D’autre part, n’oublions pas les crédits qui sont à la main des préfets, notamment ceux issus de la DETR ou du fonds Vert. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC424 de M. Christophe Proença

M. Christophe Proença (SOC). Pour amplifier le soutien au financement d’équipements structurants, nous prévoyons d’augmenter les crédits de l’Agence nationale du sport, sur le fonctionnement de laquelle je vous rejoins, monsieur le rapporteur pour avis. Une plus grande proximité avec le terrain, au niveau départemental, devrait prévaloir.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. Je ne peux que convenir de la nécessité de créer et d’améliorer les équipements structurants, mais avant de songer à des augmentations de crédits pour l’ANS, il faudrait relever le plafond du prélèvement sur la taxe sur les paris sportifs qui alimente une partie de ses ressources. Un principe budgétaire de base veut, selon moi, que l’on sache de combien on dispose avant de dépenser. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC361 de M. Jean-Claude Raux

M. Arnaud Bonnet (EcoS). Le programme Sport de la mission Sport, jeunesse et vie associative a subi une coupe budgétaire de près de 182 millions d’euros, l’action Promotion du sport pour le plus grand nombre a vu ses crédits réduits de 151 millions et les crédits alloués aux équipements sportifs de proximité diminueront de 100 millions. Voici l’héritage des Jeux olympiques et paralympiques que nous propose le Gouvernement, loin des promesses et des beaux discours.

Ces coupes à la hache affecteront d’abord les pratiques sportives populaires et du quotidien. Elles se solderont par moins d’équipements sportifs, moins d’actions en faveur de l’inclusion des personnes en situation de handicap et du sport féminin et mixte, moins d’accès au sport dans les territoires ruraux et les quartiers populaires. Le groupe EcoS s’oppose fermement à ces réductions et entend les annuler.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. Avis défavorable pour les mêmes raisons qu’à l’amendement précédent.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC438 de M. Christophe Proença

M. Christophe Proença (SOC). Nous entendons donner une dimension universelle au pass’sport, notamment en facilitant l’acquisition de licences auprès de l’Union nationale du sport scolaire (UNSS) et de l’Union sportive de l’enseignement du premier degré (Usep), et en élargissant son bénéfice aux enfants de moins de 6 ans. C’est cette logique que nous avions suivie dans le Lot avec le ticket sport, précurseur de ce dispositif.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. Devant le pass’sport, j’éprouve la même circonspection que devant le pass culture, contrairement à certains d’entre vous qui soutiennent le premier et critiquent le second.

Le ministre des sports affirmait hier qu’il était très utilisé. Or, un rapport récent montre qu’il n’est pas si répandu et qu’il est concentré autour de certains types de sports et d’activités. On aurait pu pourtant imaginer qu’il serve d’incitation pour découvrir de nouvelles pratiques puisque son ambition initiale était, à l’issue de la crise du covid, de ramener les jeunes vers le sport. À titre personnel, il me semblerait plus pertinent de le recentrer sur quelques activités. Nous pourrions ainsi redéployer des crédits pour soutenir les personnes qui accompagnent les jeunes vers la pratique sportive. Je suis donc opposé à son universalisation. Le tout-gratuit a ses limites.

M. Pierrick Courbon (SOC). Je suis en profond désaccord avec le rapporteur pour avis : le pass’sport n’est pas comparable au pass culture, dont la part individuelle permet aux jeunes d’acquérir des biens de consommation, notamment dans les centres commerciaux ou en ligne, tandis que le pass’sport finance leur accès à une pratique sportive, enjeu de santé publique. Il apporte une aide réelle alors que la crise du pouvoir d’achat constitue un frein pour beaucoup, les licences pouvant atteindre plusieurs centaines d’euros dans certaines disciplines.

Mme Violette Spillebout (EPR). Nous ne pouvons soutenir cet amendement qui vise à transférer les crédits alloués au SNU mais nous partageons l’objectif de renforcer le pass’sport. Je ne suis pas d’accord avec le diagnostic du rapporteur pour avis : ce dispositif est utilisé et utile, notamment dans les quartiers de la politique de la ville, comme j’ai pu le constater à Lille. Nous pourrions en redéfinir les contours en imaginant un contrat commun qui lierait les clubs sportifs d’une même commune et en systématisant son articulation avec les aides des collectivités territoriales.

M. Christophe Proença (SOC). Cette articulation a été fructueuse pour le ticket sport dans le Lot, où les financements couplés de l’État et du département ont permis de financer une aide de 90 euros.

Le nombre de licenciés dans le sport scolaire a chuté. Pour le primaire, avec l’Usep, il a été divisé par trois en quatre ans. Le coût des licences constitue indéniablement un frein.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. Pour encourager l’accès au sport des jeunes des quartiers de la politique de la ville, il y a une solution plus simple et moins administrative : inciter les communes à aider les clubs qui y sont implantés. Rares sont ceux qui refusent un gamin ayant envie de faire du sport, en tout cas, d’après mon expérience.

Mme Béatrice Bellamy (HOR). Pour aller dans le sens du rapporteur pour avis, je soulignerai que les clubs peuvent compter sur les collectivités locales, qui ont un budget dédié aux associations sportives. Ainsi la ville de La Roche-sur-Yon, qui compte 57 000 habitants, octroie-t-elle 2,2 millions d’euros de subventions aux associations sportives.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC368 de M. François Ruffin

M. Arnaud Bonnet (EcoS). Monsieur le rapporteur pour avis, reconnaissez que pour certaines familles, offrir à leur enfant l’adhésion à un club est un luxe. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. La pratique d’une activité sportive en club varie selon les catégories socioprofessionnelles : parmi les 6‑14 ans, les non-pratiquants sont environ deux fois plus nombreux chez les enfants d’ouvriers non qualifiés que chez les cadres et professions intellectuelles supérieures.

Pour mettre fin à ces inégalités sociales et garantir l’accès au sport à tous les enfants, nous proposons de relever de 50 euros à 75 euros le montant pris en charge par le pass’sport.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. Pour favoriser l’inclusion des enfants les plus défavorisés, il y a d’autres méthodes plus efficaces mais sans doute moins visibles. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC576 de M. Joël Bruneau

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à réallouer les crédits dédiés au pass’sport à un fonds Sport qui subventionnerait les clubs ou les associations d’éducation populaire accompagnant les jeunes vers une pratique physique encadrée. La médiation joue un rôle décisif dans le domaine du sport comme de la culture.

La commission rejette l’amendement.

L’amendement II-AC363 de M. Jean-Claude Raux est retiré.

Amendement II-AC425 de Mme Claudia Rouaux

M. Christophe Proença (SOC). Il s’agit d’élargir le pass’sport au sport scolaire. Encore une fois, l’UNSS et l’Usep sont en perte de vitesse. Le coût des trajets et des transports est certes en cause dans cette évolution mais il ne faut pas oublier le poids du coût de la licence.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. Si nous maintenons le pass’sport, créons comme pour le pass culture une part collective. Les obstacles à la pratique du sport scolaire me paraissent davantage tenir aux problèmes des déplacements qu’au simple prix de la licence. Il serait plus efficace d’encourager les établissements scolaires eux-mêmes que de soutenir l’adhésion individuelle. Avis défavorable.

M. Belkhir Belhaddad (EPR). Cette extension, monsieur Proença, est une piste intéressante, évoquée par diverses personnes auditionnées.

De manière plus générale, j’insisterai à mon tour sur l’engagement fort des communes et des départements dont les aides, cumulées à celles de l’État, permettent à de nombreux jeunes de n’avoir aucun reste à charge. Il ne paraît pas forcément judicieux d’augmenter le montant financé par le pass’sport.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC493 de Mme Violette Spillebout

Mme Violette Spillebout (EPR). Il s’agit de porter les crédits alloués au pass’sport à un niveau légèrement supérieur à ce qu’il était l’année dernière, soit un coût de 15 millions d’euros, bien loin donc des dizaines voire des centaines de millions d’euros proposées dans les amendements précédents.

Depuis sa création, cette aide forfaitaire versée par l’État a bénéficié à 3,5 millions de jeunes. Deux licences annuelles sur cinq sont détenues par des enfants de moins de 14 ans, tranche d’âge qui a connu la plus forte progression, ce qui répond à l’objectif de favoriser la pratique sportive dès le plus jeune âge. Dans la dynamique post-JO, beaucoup de clubs refusent de nouvelles inscriptions et l’accès est encore plus difficile pour les jeunes qui n’ont pas les moyens de payer des licences. Il faut voir les aides du pass’sport comme complémentaires des subventions aux clubs.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. L’enveloppe de l’année précédente n’ayant pas été entièrement consommée, votre amendement ne me paraît pas justifié.

Pour s’assurer du bien-fondé du pass’sport, il faudrait pouvoir déterminer si sa mise en place a contribué à une hausse du nombre de pratiquants.

M. Belkhir Belhaddad (EPR). La ville de Metz, dont j’ai été adjoint aux sports, a été l’une des premières villes de France, en 2010, à expérimenter ces aides qui ont rencontré un grand succès, notamment auprès des personnes de plus de 60 ans. Il serait bon d’étendre le pass’sport à cette tranche d’âge pour laquelle la mobilité est décisive, compte tenu des risques de dépendance. Je suis donc favorable à l’augmentation que propose ma collègue.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC431 de M. Pierrick Courbon

M. Pierrick Courbon (SOC). Je suis favorable à l’extension du pass’sport aux seniors, dont la pratique sportive constitue un enjeu de santé publique d’importance croissante, mais c’est à l’autre extrémité de la chaîne générationnelle que s’intéresse cet amendement. Nous proposons de l’élargir aux enfants à partir de 3 ans pour accompagner les pratiques d’éveil telles que la baby gym ou le baby basket qui améliorent la psychomotricité. Cela renvoie également à un enjeu de santé publique : la lutte contre la sédentarité dès le plus jeune âge.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. La licence pour les moins de 6 ans est très souvent moins chère puisqu’il n’y a pas de compétitions pour cette tranche d’âge. Par ailleurs, les clubs ménagent la plupart du temps des facilités de paiement. Je doute que la France devienne une nation sportive simplement parce qu’on aura donné 50 euros aux Français de tout âge. Avis défavorable.

Mme Prisca Thevenot (EPR). Le groupe EPR soutiendra cet amendement, notre ambition collective étant de faire de la France une nation sportive. Il ne s’agit pas d’un simple slogan. Santé publique, cohésion nationale, fierté de porter des valeurs communes, acculturation à la capacité à vivre ensemble sont en jeu. Tout ce qui contribue à développer l’esprit sportif doit être encouragé. Le pass’sport a permis à des familles d’accéder pour la première fois à des clubs et nous sommes favorables à son extension aux plus jeunes comme aux plus âgés.

M. Carlos Martens Bilongo (LFI-NFP). Nous soutenons nous aussi cet amendement. Chacun doit pouvoir s’épanouir à travers la pratique d’un sport, or le coût de l’inscription à un club constitue un frein pour certains foyers.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC432 de M. Christophe Proença

M. Christophe Proença (SOC). Nous proposons de couvrir l’intégralité des frais liés à la première inscription en licence, décisive pour l’entrée dans la pratique sportive.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. Permettez-moi d’exprimer mon scepticisme à l’heure où les clubs sont mis en difficulté par une sorte de zapping. Certains jeunes, souvent mêmes encouragés par leurs parents, changent chaque année d’activité jusqu’à n’en pratiquer aucune. C’est ainsi qu’on constate un effondrement de la pratique sportive vers 14 ans, puis à l’entrée au lycée et encore à l’entrée à l’université. Votre ambition est louable mais l’argent ne changera rien à cette évolution.

M. Pierrick Courbon (SOC). Nous ne visons pas la même chose. Vous avez en vue les difficultés qu’éprouvent les fédérations à fidéliser leurs adhérents, nous ciblons une massification de la pratique sportive. De notre perspective, ces changements d’activités n’ont pas d’incidence puisque les jeunes continuent de faire du sport. Si nous proposons de telles mesures financières, c’est que nous considérons que l’un des freins majeurs à cette massification est le pouvoir d’achat, particulièrement pour les familles monoparentales comptant plusieurs enfants.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC384 de M. Aly Diouara

M. Aly Diouara (LFI-NFP). Nous proposons de créer d’un fonds national destiné à financer la gratuité des activités sportives pour les jeunes de moins de 18 ans issus de familles bénéficiaires de minima sociaux. Ce dispositif répond à un double enjeu : lutter contre les inégalités sociales et territoriales en garantissant un accès égal au sport à tous ; prévenir les problèmes de santé comme l’obésité et les maladies cardiovasculaires chez les jeunes défavorisés.

Quand la précarité fait du sport un luxe, les jeunes sont exclus de ses bénéfices : bien-être physique et mental, socialisation, acquisition de valeurs fondamentales. Le fonds, en partenariat avec les collectivités territoriales et les structures sportives locales, contribuerait à couvrir les différents frais liés à la pratique sportive.

Par ailleurs, il s’inscrit dans une volonté d’assurer un héritage social aux Jeux olympiques de 2024 en faisant du sport un vecteur d’inclusion.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. Votre dispositif me semble faire double emploi avec le pass’sport. Une solution consisterait à promouvoir ce dernier auprès des familles défavorisées. Avis défavorable.

M. Aly Diouara (LFI-NFP). Les montants financés par le pass’sport varient d’un département à l’autre. Avec ce fonds national, nous uniformiserions sur tout le territoire les aides en faveur des familles les plus en difficulté.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC427 de Mme Claudia Rouaux

M. Christophe Proença (SOC). Il s’agit de doubler l’enveloppe consacrée à la promotion du sport étudiant en l’abondant de 1 million d’euros. Nous savons que l’entrée à l’université constitue l’un des paliers où la pratique sportive chute.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. Je dirai que la meilleure des promotions a été les Jeux olympiques, à l’issue desquels nous constatons un nouvel engouement pour le sport. Si nous devions consacrer davantage de moyens au sport universitaire, mieux vaudrait les allouer aux équipements afin notamment d’augmenter le nombre de créneaux disponibles. Avis défavorable.

Quant au zapping, c’est moins ses effets sur les fédérations que je visais que sur la pratique sportive elle-même car la dispersion d’une activité sportive à l’autre se solde souvent, en fin de compte, par l’abandon de toute pratique.

Mme Prisca Thevenot (EPR). Notre groupe soutiendra cet amendement. La promotion du sport auprès des étudiants s’impose pour des raisons financières mais aussi de santé mentale, compte tenu des difficultés psychiques qu’ils connaissent depuis la crise du covid.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. J’ai avec le rapporteur pour avis un désaccord profond. Les étudiants sont soumis à une pression terrifiante, entre leurs longues heures de cours chaque jour et les examens de fin de semestre. Leur bien-être est en jeu, d’autant qu’avec la massification de l’enseignement supérieur, le personnel enseignant a perdu en proximité avec eux.

Il n’est pas question de zapping pour eux. D’après un sondage de l’Observatoire national de l’activité physique et de la sédentarité (Onaps) et l’Anestaps, organisation représentative des jeunes dans le champ du sport et de l’animation, ils sont 73 % à ne pas pratiquer de sport, qui leur apparaît comme un loisir luxueux alors qu’ils doivent souvent mener de front études et job d’appoint. Ces actions de promotion seraient essentielles : il importe de favoriser leur envie de pratiquer et de faciliter leur accès au sport, même s’il ne s’agit d’en faire que quinze minutes entre deux cours.

M. Belkhir Belhaddad (EPR). Cet amendement fournit une piste intéressante à laquelle ajouter la possibilité de consacrer une part de la contribution de vie étudiante et de campus (CVEC) au soutien à la pratique sportive.

Le sport à l’université fait partie, avec le sport en entreprise, des angles morts de notre politique sportive. L’un des freins principaux réside dans les équipements et je vous invite à lire le rapport de Stéphane Braconnier, vice-président de France Universités et président de l’université Paris-Panthéon-Assas, qui a fait un travail extraordinaire pour définir une stratégie de développement de la pratique du sport dans les universités françaises.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC367 de M. François Ruffin

M. Alexis Corbière (EcoS). Si les Jeux olympiques ont indéniablement constitué la meilleure promotion possible pour la pratique sportive, il faut se demander quel est leur héritage réel. Par cet amendement, nous souhaitons créer un fonds héritage des Jeux olympiques et paralympiques doté de 100 millions d’euros qui soutiendrait entre autres la mise en place d’équipements sportifs de proximité et l’accompagnement des bénévoles.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. Je partage votre ambition mais 100 millions pour un amendement d’appel, cela me paraît excessif.

Mme Prisca Thevenot (EPR). Notre groupe s’opposera à cet amendement. Outre le fait que son coût est considérable, les objectifs du fonds qu’il se propose de créer restent flous. Rappelons qu’après les Jeux olympiques, nous pouvons compter sur nombre de nouveaux bâtiments et infrastructures.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC420 de M. Julien Odoul

M. Thierry Perez (RN). Les résultats des 623 athlètes et 239 parathlètes français aux Jeux olympiques et paralympiques de 2024 ont permis à la France de figurer parmi les meilleures nations sportives au monde. Néanmoins, le Gouvernement semble être aveugle à ces performances sportives puisqu’il compte réduire de 30 millions d’euros les crédits de l’action 02 Développement du sport de haut niveau. Notre amendement vise à annuler cette coupe afin d’apporter un soutien financier renforcé aux sportifs de haut niveau qui participent au rayonnement de la France dans les compétitions internationales et à l’attractivité des collectivités territoriales. L’esprit sportif qu’ils promeuvent en fait des ambassadeurs des valeurs civiques et participe in fine à la cohésion sociale.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. La baisse des crédits est légitime puisqu’il n’y a plus lieu, comme l’année dernière, de financer les primes versées aux athlètes olympiques et paralympiques médaillés.

Je suis toutefois loin de me désintéresser du sport de haut niveau comme vous le verrez lorsque je défendrai l’amendement suivant.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC574 de M. Joël Bruneau

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à maintenir le dispositif destiné à garantir un niveau de ressources minimal de 40 000 euros aux sportifs susceptibles d’être sélectionnés aux Jeux olympiques et paralympiques. Cela leur éviterait de connaître la précarité à laquelle sont confrontés certains sportifs de haut niveau appartenant à des disciplines ne comptant pas de professionnels.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC426 de Mme Claudia Rouaux

M. Christophe Proença (SOC). Nous souhaitons rétablir les crédits du dispositif « Deux heures de sport en plus au collège », mis en œuvre dans 2 700 collèges en 2024. Il s’agit d’une tranche d’âge décisive pour encourager la pratique sportive.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. Le déploiement de ce dispositif, dont l’objectif est d’inciter les jeunes à pratiquer un sport, s’est heurté à plusieurs obstacles insuffisamment pris en compte : difficultés à trouver des créneaux et des clubs acceptant de participer, notamment en milieu rural, et réticences de l’Éducation nationale, au sens large, à laisser pénétrer dans l’enceinte des établissements scolaires des éducateurs sportifs. Il faut résoudre ces problèmes avant d’augmenter les moyens. Avis défavorable.

M. Belkhir Belhaddad (EPR). Je partage l’avis du rapporteur pour avis. Le dispositif, qui a déjà été expérimenté par 700 établissements l’an passé, sera généralisé cette année : attendons son évaluation – les premiers retours ne sont pas très positifs – afin de déterminer si des moyens supplémentaires sont nécessaires. Nous voterons donc contre l’amendement.

La commission rejette l’amendement.

Amendements II-AC360 de M. Jean-Claude Raux et II-AC500 de M. Belkhir Belhaddad

M. Arnaud Bonnet (EcoS). Le projet de loi de finances pour 2025 affecte 7 millions d’euros aux près de 500 maisons sport-santé. Leurs missions consistent, d’une part, à accueillir, informer et orienter le public concernant les activités physiques et sportives à des fins de santé et l’activité physique adaptée (APA) et, d’autre part, à mettre en réseau et former les professionnels de santé, du social, du sport et de l’APA. Si le budget qui leur est dédié est en hausse, il n’est pas suffisant pour assurer leur pérennité. Le niveau médian d’accompagnement public d’élève à 12 000 euros, pour des besoins avoisinant les 50 000 euros. Cet amendement vise donc à augmenter de 9 millions d’euros les crédits en faveur des maisons sport-santé.

M. Belkhir Belhaddad (EPR). Les maisons sport-santé participent de la stratégie nationale sport santé (SNSS) 2019-2024. Il faut soutenir ces structures locales qui permettent d’agréger l’ensemble des initiatives et les différents acteurs, dont les médecins traitants. L’amendement II-AC500 vise donc à augmenter le soutien financier qui leur est accordé à hauteur de 7 millions d’euros : les 3,5 millions d’euros qui leur étaient alloués dans le précédent budget sont insuffisants, puisqu’ils se traduisent par une enveloppe de seulement 8 000 euros pour chacune des 574 maisons sport-santé.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. Avis favorable. La prévention par l’activité physique est un sujet majeur, de façon à préserver au maximum la durée de vie en bonne santé. Il faut soutenir ces initiatives locales, encore trop peu accompagnées par l’assurance maladie.

La commission adopte l’amendement II-AC360. L’amendement II-AC500 est retiré.

Amendements II-AC538 de M. Julien Odoul, II-AC378 de M. Carlos Martens Bilongo et II-AC380 de M. Aly Diouara

M. Arnaud Sanvert (RN). Les fédérations françaises du sport adapté et du handisport recensent un nombre croissant de licenciés. En dépit des performances remarquables des parathlètes français lors des Jeux paralympiques, les ressources et infrastructures consacrées au handisport restent limitées. Autre frein : le manque d’équipements spécialisés et de personnel formé. Les clubs font face à des coûts élevés pour l’achat de matériel spécifique, comme les fauteuils de sport ; de nombreux éducateurs sportifs ne sont ni sensibilisés ni formés pour encadrer les athlètes en situation de handicap.

L’amendement II-AC538 a donc pour objectif d’abonder de 5 millions d’euros supplémentaires l’action Promotion du sport pour le plus grand nombre afin de faciliter le développement de la pratique du handisport, en fléchant l’essentiel de ces crédits vers l’ANS qui pourra les utiliser pour financer des équipements adaptés, moderniser les infrastructures sportives et mettre en place des programmes de formation destinés aux encadrants, de sorte que toutes les infrastructures et activités sportives soient accessibles aux personnes en situation de handicap.

M. Carlos Martens Bilongo (LFI-NFP). Nous demandons que l’engagement de rendre accessibles à 100 % les équipements sportifs aux personnes en situation de handicap soit enfin tenu. Parent pauvre de notre patrimoine sportif, le handisport ne propose que peu de structures adaptées, dues à des exigences d’un autre temps en matière d’inclusion. Pourtant, la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées rendait cette accessibilité obligatoire à compter de 2015.

Le baromètre national des pratiques sportives de l’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire (Injep) de 2022 soulignait que 53 % des personnes en situation de handicap ne pratiquent pas d’activité physique et sportive régulière, contre 41 % de la population générale. Le manque d’accessibilité des équipements sportifs en est l’une des causes. Il est essentiel d’investir dans de nombreux aménagements afin d’accroître l’autonomie des personnes en situation de handicap dans les gymnases et les stades.

M. Aly Diouara (LFI-NFP). Afin de faire vivre les engagements et l’héritage des Jeux olympiques et paralympiques, l’amendement II-AC380 vise à favoriser l’accès au sport des personnes en situation de handicap intellectuel et cognitif, en créant un nouveau programme doté de 1 million d’euros. Selon une étude de 2023, 65 % des parents d’enfants handicapés estiment que leur accompagnement se détériore, avec moins de professionnels formés et une réduction des activités sportives disponibles. Or, le sport est essentiel pour leur bien-être, leur autonomie et leur inclusion. Il est urgent d’augmenter les aides pour garantir un accès au sport réellement adapté pour tous. Cette revendication est notamment portée par l’Union nationale des associations de parents de personnes handicapées mentales et de leurs amis (Unapei).

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. Avis favorable sur les trois amendements. Ils mettent l’accent sur le défi que constitue l’héritage des Jeux paralympiques en matière d’accessibilité, d’encadrement et d’équipements. Les sommes proposées demeurent raisonnables. L’ensemble des acteurs concernés doivent se saisir de cette question.

M. Pierrick Courbon (SOC). Nous souscrivons à la philosophie de l’amendement II-AC538, mais nous nous opposons à ce qu’il ponctionne les crédits des actions en faveur de la jeunesse et de l’éducation populaire ; ces crédits doivent au contraire être augmentés et sanctuarisés.

La commission adopte successivement les amendements.

Amendement II-AC382 de M. Aly Diouara

M. Aly Diouara (LFI-NFP). Nous proposons de transférer des crédits initialement destinés aux Jeux olympiques vers un fonds de soutien aux associations sportives. La politique sportive ne doit pas se limiter à une quête de médailles ou à l’accueil d’événements internationaux. Les associations de proximité sont essentielles pour garantir l’accès de tous à la pratique sportive. Or la légère hausse des crédits accordés à la vie associative l’année dernière ne compense pas les baisses cumulées les années précédentes, qui mettent en péril les associations. Le Gouvernement a décidé de ponctionner 5 milliards d’euros supplémentaires, obligeant des collectivités déjà en difficulté à réduire leurs aides aux associations. Des millions de nouveaux licenciés sont attendus. Comment les fédérations pourront-elles gérer cette demande sans soutien financier ?

De plus, sous l’effet de la réforme des retraites, le secteur associatif peine à recruter des bénévoles, souvent des retraités. Nous devons réorienter le budget pour valoriser l’engagement bénévole et soutenir les associations sportives, qui jouent un rôle éducatif et social incontournable.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. Votre constat est juste, mais votre proposition ferait double emploi avec les projets sportifs fédéraux, dotés de 80 millions d’euros par an, qui font l’objet d’une contractualisation entre l’État et les fédérations pour accompagner le développement de la pratique sportive par le biais des associations de proximité. Avis défavorable.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC503 de M. Belkhir Belhaddad

M. Belkhir Belhaddad (EPR). Je reprends ici un amendement qui avait été voté à l’unanimité l’an passé, visant à financer le recrutement de 1 000 éducateurs socio-sportifs. Le bon fonctionnement et le développement des activités sportives reposent sur un triptyque formé par les clubs, les équipements et les éducateurs.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. La ligne initialement destinée à recruter 1 000 éducateurs socio-sportifs a effectivement été revue à la baisse ; 750 postes seraient désormais concernés. Le sujet est essentiel, mais j’ignore si l’enveloppe prévue l’année dernière a été entièrement consommée. Je m’en remets donc à la sagesse de la commission.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC421 de M. Julien Odoul

Mme Florence Joubert (RN). Selon l’Observatoire de la jeunesse, du sport, de la vie associative et de l’éducation populaire, 65 000 pratiquants s’entraîneraient au sein d’associations sportives communautarisées. Pour l’unité de coordination de la lutte antiterroriste, 11 000 sportifs s’entraîneraient dans 122 clubs en lien avec la mouvance séparatiste, et 1 057 personnes, soit 13 % des inscrits au fichier de traitement des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT), seraient suivis dans le cadre du sport. Ajoutons que 127 associations sportives sont identifiées par le ministère des sports ainsi que par le Comité national olympique et sportif français comme ayant une relation avec une mouvance séparatiste.

Si de nombreux clubs sportifs sont des lieux d’islamisation, le risque qu’ils soient ou qu’ils deviennent des camps d’entraînement pour le djihad est avéré. Cet amendement vise à renforcer la lutte contre l’entrisme islamiste dans le monde sportif, en prélevant des crédits sur le développement de la vie associative pour augmenter les moyens alloués aux actions de prévention et de sensibilisation à la radicalisation dans le sport.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. Je ne pense pas que cette lutte relève de la mission que nous examinons. Le sujet que vous soulevez dépasse le cadre sportif et touche au respect des lois et des principes de la République. Le premier levier d’action, ce sont les fédérations, qui doivent garantir le respect de ces principes dans le cadre de leur contractualisation avec l’État. En cas de dérive manifeste, le second levier est celui des forces de sécurité.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AC381 de Mme Sarah Legrain

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. Là encore, les fédérations soutenues par l’État doivent déjà s’engager à lutter contre les violences sexistes et sexuelles. Les faits doivent être révélés, signalés et donner lieu à une plainte puis, le cas échéant, à une enquête judiciaire.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC502 de M. Belkhir Belhaddad

M. Belkhir Belhaddad (EPR). Il s’agit de soutenir davantage le dispositif Sesame.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. Cet objectif me semble plutôt relever des projets sportifs fédéraux contractualisés avec l’État – mais peut-être le ministère doit-il être plus prescriptif à l’égard des fédérations, sur ce sujet comme sur ceux que nous venons d’évoquer. Avis défavorable.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC573 et II-AC572 de M. Joël Bruneau

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. Ces amendements visent à maintenir les moyens financiers et humains alloués à l’Agence française de lutte contre le dopage (AFLD), un des principaux garants de l’éthique sportive. Le critère du nombre de contrôles effectués ne fait pas tout ; l’Agence doit disposer de suffisamment d’enquêteurs pour mieux cibler les contrôles, sur la base d’enquêtes préalables.

La commission adopte l’amendement II-AC573.

L’amendement II-AC572 est retiré.

Amendement II-AC428 de Mme Claudia Rouaux

Mme Céline Hervieu (SOC). Cet amendement d’appel vise à créer un fonds dédié à l’aménagement des espaces urbains pour faciliter l’activité physique et sportive dans les villes qui ont accueilli les Jeux olympiques, dans une logique de design actif.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. Je ne suis pas certain que le design y suffise, même s’il peut y participer. Toutefois, puisqu’il s’agit d’un amendement d’appel, j’émets un avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Elle émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Sport, jeunesse et vie associative, modifiés.

Article 45 et état G : Objectifs et indicateurs de performance

Amendements identiques II-AC383 de M. Aly Diouara et II-AC429 de M. Christophe Proença

M. Aly Diouara (LFI-NFP). Nous proposons d’ajouter deux indicateurs évaluant les disparités en équipements sportifs publics et privés. L’accès à des infrastructures publiques locales est crucial pour soutenir la pratique sportive, mais l’inégale répartition des équipements sportifs sur le territoire est flagrante. Certains départements sont gravement sous-dotés : la Seine-Saint-Denis compte 16 équipements pour 10 000 habitants contre une moyenne nationale de 50 équipements, et les territoires ultramarins restent largement sous-équipés, comme l’ont indiqué plusieurs rapports de l’Injep. Pour renforcer l’inclusion et éviter qu’une activité aussi essentielle que le sport ne devienne un privilège, il faut évaluer et corriger les inégalités d’accès.

M. Christophe Proença (SOC). Pour savoir sur quoi travailler, il faut connaître l’état de l’équipement sportif collectif comme privé, y compris dans les territoires ruraux.

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. Avis favorable, à condition de prendre en compte l’ensemble des équipements et d’établir des critères opérationnels ; en milieu rural, il est moins important de compter le nombre d’équipements par habitant que de mesurer le temps de déplacement vers chaque structure.

La commission adopte les amendements.

Après l’article 64

Amendement II-AC575 de M. Joël Bruneau

M. Joël Bruneau, rapporteur pour avis. Il propose un rapport sur le mode de financement de l’Agence nationale du sport qui évaluerait, entre autres, l’opportunité de relever le plafond de la taxe sur les paris sportifs.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC405 de M. Idir Boumertit

Mme Marie Mesmeur (LFI-NFP). Il demande un rapport sur les moyens humains affectés aux questions de jeunesse dans les services déconcentrés de l’État et évaluant leur coût pour les finances publiques.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. La question des moyens humains des services déconcentrés dédiés à la jeunesse et l’éducation populaire se pose. Je citerai une phrase d’un rapport de l’inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGESR) consacré au service national universel (SNU) en 2022 : « Le poids de ce nouveau dispositif au sein des services déconcentrés du ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports est insurmontable en l’état au regard des moyens humains disponibles et de son organisation. » Tout est dit ; avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Amendement II-AC414 de M. Pouria Amirshahi

M. Pouria Amirshahi (EcoS). Il demande un rapport sur un sujet grave sur lequel le précédent gouvernement s’est montré très déraisonnable : le contrat d’engagement républicain. Créé il y a trois ans dans un contexte hystérisé par des crispations identitaires permanentes montrant du doigt nos compatriotes musulmans, il se fonde sur un argumentaire qui a rendu suspecte toute activité associative et culturelle au titre de l’appartenance supposée de certains de nos compatriotes, de leur culture ou de leur langue. Nos mises en garde n’ont pas été écoutées. Je ne sais pas ce qu’a produit de positif le contrat d’engagement républicain. En revanche, on connaît la situation d’Alternatiba à Poitiers, de L. 214 et du Planning familial, et la Ligue des droits de l’homme a été mise en cause par le ministre de l’intérieur lui-même. Le rapport demande une évaluation des avancées et des limites, pour ne pas dire des dangers de ce dispositif.

Mme Florence Herouin-Léautey, rapporteure pour avis. J’y ai consacré un développement dans mon rapport. Il est vrai que ce dispositif a quelque chose d’absurde, de vexatoire et d’inutile ; il serait bon d’en évaluer la portée. Les associations sont au quotidien la République en acte. Avis favorable.

M. Alexis Corbière (EcoS). Il y a trois ans, lors de la discussion de cette loi, je n’ai eu de cesse que de la dénoncer, en particulier le contrat d’engagement républicain, dont je disais qu’il n’était qu’un effet d’annonce. De fait, on le constate à présent, cette mesure vexatoire n’a pas d’autre réalité que celle de l’arbitraire.

Je suis donc très sensible à cet amendement : il importe que nous disposions d’un rapport qui objective la situation et démontre, à la veille de la présentation d’une nouvelle loi sur l’immigration, les effets délétères de postures qui jettent le soupçon contre des millions de nos concitoyens. C’est insupportable.

Mme Violette Spillebout (EPR). J’aurais pu être d’accord sur le principe d’un rapport d’évaluation, mais l’exposé sommaire de l’amendement est partisan puisqu’il y est indiqué que le contrat d’engagement républicain serait « une dérive dangereuse menaçant les libertés fondamentales ». Pourtant, ce contrat est fondé sur le respect des lois de la République, la liberté de conscience, la liberté d’association, la non-discrimination, la fraternité, la prévention de la violence et le respect de la dignité des personnes.

Je m’inquiète que l’on puisse être contre une telle mesure, comme le conseil municipal de Lille, qui a décidé récemment que la charte des associations n’imposerait pas la signature d’un contrat d’engagement républicain. Force est donc de constater que certains ont un problème avec les valeurs de la République. Il y aura certainement d’autres moyens d’évaluer la loi dite séparatisme qu’un rapport qui procède de l’idée selon laquelle le respect de ces valeurs marque une dérive dangereuse pour les libertés.

M. Pierrick Courbon (SOC). L’exposé sommaire est forcément subjectif ; le rapport, quant à lui, sera objectif. De multiples exemples montrent que le contrat d’engagement républicain manque sa cible – le fait est qu’il y a des problèmes dans une infime minorité d’associations, mais ce n’est pas une raison pour tenir en suspicion l’ensemble du secteur associatif – et produit des effets pervers en plaçant certaines structures dans une situation impossible. Je pense notamment au Secours catholique qui, parce qu’il est une association cultuelle, ne peut pas signer le contrat d’engagement républicain, ou à des associations contre lesquelles ce contrat est utilisé par certains maires pour faire du chantage à la subvention. Voilà la réalité ; le rapport permettra de l’établir.

M. Pouria Amirshahi (EcoS). L’application du contrat d’engagement républicain a d’abord conduit à mettre en cause des associations écologistes qui, pour beaucoup d’entre elles, ne se sont engagées dans aucune action illégale ou violente. Dans ce cas comme dans celui de la mise en cause d’associations qui luttent contre la faim dans nos quartiers, c’est un problème. Respecter la République, ce n’est certainement pas instrumentaliser ses principes à des fins coercitives et liberticides.

Mme Marie Mesmeur (LFI-NFP). Il a été démontré que le contrat d’engagement républicain était un outil à usage idéologique. À titre d’exemple, des radios qui ont couvert la fermeture d’un lieu occupé dans le Finistère, l’Avenir, ont perdu leurs subventions parce que leur action n’a pas plu au préfet alors qu’elles ne faisaient qu’un travail de journalisme. Une autre association, à Rennes, a perdu ses subventions parce qu’une de ses bénévoles a participé à une manifestation contre l’extrême droite pendant les élections législatives anticipées de juillet dernier. On ne peut pas à la fois soutenir, ici, les bénévoles et les associations et instrumentaliser, ailleurs, le contrat d’engagement républicain pour s’en prendre aux luttes sociales, écologiques et d’émancipation.

Le rapport demandé est donc le bienvenu ; cet amendement est soutenu par l’ensemble du Nouveau Front populaire.

La commission adopte l’amendement.

 


Annexe :
liste des personnes entendues par la rapporteure pour avis

(par ordre chronologique)

     Table ronde d’experts des politiques de jeunesse :

– M. Jean-Baptiste Clerico, directeur général des Centres d’entraînement aux méthodes d’éducation active (Ceméa France)

 M. François Dubet, sociologue

     Table ronde des centres de vacances et de loisirs :

– Union nationale des centres sportifs de plein air (UCPA)* – MM. Yves Blein, président, et Guillaume Legaut, directeur général

– Jeunesse au plein air*  Mme Anne Carayon, directrice générale

 Union nationale des organisations de séjours éducatifs, linguistiques et formation en langues (Unosel) – Mme Isabelle Favrot, présidente, et M. Olivier Ducelier, administrateur

 Union nationale des associations de tourisme et de plein air (Unat) – M. Lilian Nobilet, délégué général, et Mme Louise Fenelon, responsable de la commission vacances enfants-ados

– Union française des centres de vacances et de loisirs (UFCV) – M. Philippe Chapron, président, et M. Antoine Piollat, chargé de veille de politiques publiques

– Observatoire des vacances et des loisirs des enfants et des jeunes (Ovlej) – Mme Stéphanie Rubi-Boillot, co-présidente et enseignante-chercheure

        Fédération des œuvres éducatives et de vacances de l’éducation nationale (Foeven) – MM. René Bouillon, président, et Rodrigue Carbonnel, délégué général

        Agence nationale pour les chèques-vacances (ANCV)*  M. Alain Schmitt, directeur général, et M. Ghislain Brocart, secrétaire général

       Audition commune :

– ATD-Quart Monde*  Mme Marie-Aleth Grard, présidente

 Secours catholique*  M. Didier Duriez, président national, et M. Damien Delpech, chargé de projets et de plaidoyer, département solidarités familiales

       Audition commune :

– Scouts et Guides de France*  M. Tanguy Claquin, président, Mmes Anne-Claire Bellay, déléguée générale, et Ariane Jourdan, responsable relations extérieures et recherche de fonds

 Éclaireuses Éclaireurs de France (EEDF) – Mme Louise Pillet, présidente, MM. Pascal Péron, directeur pédagogie et formation, et Damien Pollet, délégué général

       Table ronde d’associations locales :

 Des Camps sur la comète  M. Guillaume Viger, coordinateur de l’association

 Wakanga  Mmes Laure Medard, présidente, Mélissa Peron, administratrice, M. Sem Mohamed, administrateur, Mme Méghane Salomon, coordinatrice

 Fédération Partir  Mmes Mathilde Jérôme, directrice, et Amandine Ayral, directrice adjointe

       Audition commune :

– Association nationale des directeurs et des cadres de l’éducation des villes et des collectivités territoriales (Andev)  Mme Rozenn Merrien, présidente, directrice générale adjointe éducation, jeunesse, sports, culture, associations et action sociale de Colombes, M. Gabriel Fraga, vice-président, directeur général adjoint des affaires civiles-institutionnelles, de l’action éducative et des services à la population de Juvisy-sur-Orge, Mme  Florine Le Guellec, secrétaire nationale, responsable du service jeunesse de Saint-Sébastien-sur-Loire

– Réseau français des villes éducatrices (RFVE)  M. Benjamin Vételé, vice-président, et Mme Charlotte Denis, chargée de mission

       Audition commune :

 Association des maires de France (AMF)  Mme Delphine Labails, maire de Périgueux

 France urbaine – M. Étienne Chaufour, directeur chargé de l’éducation-petite enfance et jeunesse, et Mme Sarah Bou Sader, conseillère relations parlementaires

 

       Audition commune :

 Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire (INJEP)  M. Augustin Vicard, directeur

 Conseil d’orientation des politiques de jeunesse (COJ)  Mmes Marie Caillaud, présidente, Anne Carayon, vice-présidente, présidente de la commission de l’éducation populaire, M. Pierre Montaudon, secrétaire général, chef du bureau des politiques de jeunesse

       Audition commune :

 Conseil économique, social et environnemental (CESE), groupe des organisations étudiantes et mouvements de jeunesse  MM. Helno Eyriey, président, Evanne Jeanne-Rose, conseiller, représentant du Comité pour les relations nationales et internationales des associations de jeunesse et d’éducation populaire (Cnajep), et Mme Caroline Mabit, collaboratrice du groupe des Organisations étudiantes et mouvements de jeunesse

– Fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire (Fonjep) – M. Patrick Chenu, président, et Mme Nouria Duthoit-Messaoudi, déléguée générale

        Comité pour les relations nationales et internationales des associations de jeunesse et d’éducation populaire (Cnajep)*  M. Arnaud Tiercelin, co-président, et Mme Alexandra Thieyre, déléguée générale

       Table ronde sur l’éducation populaire et l’animation :

 La Ligue de l’enseignement  M. Franck Présumey, délégué général, et Mme Sandrine Pellenz, secrétaire générale en charge de l’éducation et du numérique

 Les Pupilles de l’enseignement public (PEP)  MM. Fernand Vanobberghen, président, Yves Durand, vice-président, et Mme Agnès Bathiany, directrice générale

– Hexopée – Mme Anne-Claire Devoge, directrice de l’attractivité des métiers et de l’évolution professionnelle, et M. Antoine Trédez, conseiller en charge du plaidoyer et des relations institutionnelles

 Fédération nationale des Francas  M. Fabrice Boisbouvier et Mme Irène Pequerul, délégués généraux adjoints

 

       Table ronde sur le rôle des centres sociaux, des socio-culturels et des maisons des jeunes et de la culture (MJC) dans l’éducation populaire :

 Fédération des centres sociaux et socio-culturels de France  MM. Tarik Touahria, président, et Denis Tricoire, délégué général

 MJC de France – MM. Jean-Yves Macé, président, Patrick Chenu, directeur général, et Antoine Petitmangin, responsable communication et plaidoyer

       Table ronde sur la situation du monde associatif :

 Le Mouvement associatif*  MM. Mickaël Huet, délégué général, et David Ratinaud, responsable plaidoyer

 France Bénévolat – M. François Bouchon, président, et Mme Aude Bourden, administratrice, responsable du développement associatif d’APF France handicap

 France Générosités* Mmes Laurence Lepetit, déléguée générale, Sarah Bertail, directrice juridique et affaires publiques, et Pauline Hery, chargée d’affaires publiques

       Haut Conseil à la vie associative (HCVA) – Mme Chantal Bruneau, vice-présidente, Mme Delphine Morel, secrétaire générale, et M. Jean-Pierre Duport, membre du bureau

       Agence du service civique  Mme Nadia Bellaoui, présidente, et M. Grégory Cazalet, directeur général

       Délégation générale au service national universel  Mmes Corinne Orzechowski, déléguée générale, Émilie Guerel, cheffe de cabinet, et M. Thierry Jourdan, adjoint au sous-directeur de la logistique et des moyens

       Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) – Mme Gaëlle Choquer-Marchand, directrice générale déléguée chargée des politiques familiales et sociales

       Ministère des armées – Direction du service national et de la jeunesse (DSNJ) – M. le général de corps d’armée Pierre-Joseph Givre, directeur, et M. le capitaine Alexandre Bridoux, assistant militaire


       Table ronde des organisations syndicales siégeant au sein du comité social d’administration ministériel de la jeunesse et des sports (CSAMJS)

 SGEN-CFDT  Mme Fousia Essediri et M. Frédéric Cuignet Royer

– FSU – Mmes Catherine De Nadai, affectée à la DRAJES Nouvelle Aquitaine, et Gwénaëlle Natter, affectée à la DRAJES Grand Est

 SNPJS-CGT  M. Xavier Lefeuvre, membre du bureau national, conseiller d’éducation populaire et de jeunesse à la SDJES de la Sarthe

– UNSA  MM. David Durand pour le SEP UNSA, et Yves Paploray pour A&I UNSA et l’UNSA Éducation

       Ministère des Sports, de la jeunesse et de la vie associative – Direction de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative (DJEPVA) – MM. Thibaut de Saint Pol, directeur, Yves Boero, chef de service, et Olivier Blanchard, chef de la mission des ressources humaines et des finances

       Audition commune :

 Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGESR)  MM. Patrick Lavaure, inspecteur général, responsable du Pôle Jeunesse, Sports et Vie associative (JSVA), Guy Waiss, inspecteur général, responsable du Pôle Expertise administrative et éducative (EAE), et Henri Ribieras, inspecteur général

 Inspection générale des finances (IGF) – Mme Alexandra Besly, inspectrice des finances, MM. Charles-Henry Glaise, inspecteur des finances, Axel Gillot, inspecteur des finances adjoint, et M. Mouad El Issami, data scientist

 

Journée d’étude à Rouen (7 octobre 2024)

       Audition commune :

– Des Camps sur la comète  M. Guillaume Viger, coordinateur, et Mme Emma Bazire, animatrice

– Jeunesse et technique  M. Bruno Renou, président

 

       Table ronde avec les services départementaux et régionaux de l’Éducation nationale, de la jeunesse et des sports

 Délégation régionale académique à la jeunesse, à l’engagement et aux sports (Drajes)  M. Luc Colas, adjoint au délégué régional académique de Normandie

 Service départemental à la jeunesse, à l’engagement et aux sports (SDJES)  M. Sylvain Rémy, chef du service départemental, Mmes Inès Assaoui, adjointe au chef du service départemental, et Hawa Hamidou, conseillère d’éducation populaire et de jeunesse

       Table ronde à la maison des jeunes et de la culture Rive gauche

– Maison des jeunes et de la culture Rive gauche  Mmes Élisabeth Menestrier, présidente, et Anaïs Preaux, directrice

– Maison des jeunes et de la culture Grieu  M. Jean-Jacques Bernigaud, directeur

 Centre régional Information Jeunesse (Crij) de Normandie  M. Djoudé Merabet, président, vice-président d’Info Jeunes France et maire d’Elbeuf

 

Contributions écrites reçues

 

– Départements de France

– Secours populaire

 

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale

 


(1) Selon l’évaluation du Gouvernement, après une hausse de 2,1 % en 2024 et de 4,9 % en 2023 (exposé général des motifs du projet de loi de finances pour 2025, n° 324 (XVIIe législature), p. 10).

([2]) Décret n° 2024-124 du 21 février 2024 portant annulation de crédits : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000049180270

([3]) L’article 128 de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005 a institué plusieurs documents de politique transversale, dits « oranges » budgétaires, dont la liste a évolué au fil du temps. Ces annexes sont relatives « à des politiques publiques interministérielles dont la finalité concerne des programmes n’appartenant pas à une même mission ». L’article 171 de la loi de finances de 2022, résultant d’un amendement de Laurent Saint-Martin, alors rapporteur général de la commission des finances, avait eu pour effet de supprimer, entre autres, celui qui était consacré aux politiques en faveur de la jeunesse. Jugeant cette suppression « inopportune », M. Jean-Claude Raux, alors rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation pour l’ensemble de la mission Sport, jeunesse et vie associative, avait demandé son rétablissement à travers l’amendement n° II-2410 au projet de loi de finances pour 2024 (n° 1680, XVIe législature). Le gouvernement de l’époque avait retenu cette proposition dans le texte définitif de la loi de finances (article 257 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024).

([4]) Fonjep, Rapport d’activité 2023.

([5]) Baromètre des postes Fonjep, 2e édition, décembre 2023.

([6]) Le projet annuel de performances 2024 de la mission Enseignement scolaire exposait en détail le mécanisme : « L’opération "École ouverte" permet d’accueillir les élèves à l’école pendant les vacances scolaires ainsi que les mercredis et samedis au cours de l’année scolaire. Des activités éducatives, scolaires, culturelles, sportives et de loisirs sont ainsi proposées aux élèves. La démarche vise à favoriser l’intégration sociale et scolaire des élèves et à contribuer à la réussite scolaire et éducative de tous. Dans le cadre du programme "Vacances apprenantes", le dispositif est étendu depuis 2020 à tous les élèves scolarisés du CP à la terminale et à tous les territoires. […] "Vacances apprenantes" est développé en priorité dans les réseaux de l’éducation prioritaire (REP et REP+) et dans ceux des quartiers prioritaires de la politique de la ville. Une attention particulière est également portée aux territoires ruraux. » En 2025, comme en 2024, 19,9 millions d’euros seront consacrés au dispositif. En ce qui concerne les stages de réussite, ils sont proposés « pendant les vacances scolaires aux élèves éprouvant des difficulté d’apprentissage en français et/ou en mathématiques. Des sessions sont organisées en automne et au printemps, au début et à la fin des vacances d’été. Les stages d’une durée de 15 heures réparties sur la semaine ont lieu dans les écoles avec des groupes de cinq ou six élèves. Ils sont animés par des enseignants volontaires du premier ou du second degré qui en définissent le contenu en fonction des besoins de chaque élève. Ces stages, qui bénéficiaient principalement aux élèves de CM1 et CM2, ont été élargis à d’autres niveaux de classes en 2020 ; depuis le printemps 2023, ces stages sont proposés aux élèves de CP afin de réduire l’impact négatif des congés scolaires dans la réduction des écarts entre l’Éducation prioritaire et la Hors Éducation prioritaire. »

([7]) Réponse au questionnaire budgétaire annuel.

([8]) Injep, Évaluation du plan « 1 jeune, 1 mentor », rapport d’étape, avril 2024.

([9]) Ibid.

([10]) Réponse au questionnaire budgétaire.

([11]) Article 8 de la loi n° 2010-241 du 10 mars 2010 relative au service civique.

([12]) Agence du service civique, Rapport d’activité 2023.

([13]) La formation civique et citoyenne comprend un volet théorique et un volet pratique. Le premier permet d’aider le volontaire à faire un choix parmi les 34 thématiques possibles pour les missions puis de préparer le jeune à l’exercice de sa mission. Le volet pratique vise à démocratiser la formation « premiers secours citoyen » (PSC).

([14]) Cour des comptes, Le service national universel : un premier bilan, cinq années après son lancement, rapport public thématique, septembre 2024.

([15]) Un développement du dispositif paraît d’autant plus envisageable que les candidats ne manquent pas : il y en avait 240 087 en 2023, et le chiffre devrait être encore plus élevé en 2024, selon les informations communiquées par l’Agence du service civique à la rapporteure pour avis.

([16]) Projet annuel de performances.

([17]) Injep, Service civique : des variations départementales liées au chômage des jeunes, février 2024.

([18]) Réponse au questionnaire budgétaire. Un surgel initial de 20 millions d’euros (y compris dépenses de titre 2) avait été appliqué. En cours d’exercice, 6,6 millions ont été restitués, mais un surgel additionnel est intervenu, à raison de 5,7 millions d’euros.

([19]) Rapport pour avis présenté au nom de la commission des affaires culturelles et de l’éducation sur le projet de loi de finances pour 2024, n° 1781, tome VII (XVIe législature).

([20]) Directive nationale d’orientation du 8 juillet 2024 relative au pilotage et à la mise en œuvre au niveau territorial des politiques de jeunesse, d’engagement civique et de sport cosignée par la ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, la ministre des sports et des Jeux olympiques et paralympiques, la ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement, et la ministre déléguée chargée de l’enfance, de la jeunesse et des familles : https://www.education.gouv.fr/bo/2024/Hebdo28/MENV2418724J

([21]) Cour des comptes, Le service national universel : un premier bilan, cinq années après son lancement, rapport public thématique, septembre 2024.

([22]) Directive nationale d’orientation du 8 juillet 2024 précitée.

([23]) Injep, Service national universel. Séjours de cohésion 2022 : des motivations et expériences vécues plurielles, octobre 2022.

([24]) Réponse au questionnaire budgétaire.

([25]) Injep, Service national universel. Séjours de cohésion 2022 : des motivations et expériences vécues plurielles, octobre 2022.

([26]) Ibid.

([27])  https://www.ac-rennes.fr/snu-recrutement-de-l-encadrement-appel-a-candidature-123418

([28]) Cour des comptes, Le service national universel : un premier bilan, cinq années après son lancement, rapport public thématique, septembre 2024.

([29]) Rapport pour avis présenté au nom de la commission des affaires culturelles et de l’éducation sur le projet de loi de finances pour 2024, n° 1781, tome VII (XVIe législature).

([30]) Décret no 2020-922 du 29 juillet 2020 portant diverses dispositions relatives au service national universel.

([31]) Cour des comptes, Le service national universel : un premier bilan, cinq années après son lancement, rapport public thématique, septembre 2024.

([32]) Avis du Conseil d’orientation des politiques de jeunesse (COJ) relatif au service national universel (SNU), rendu le 30 janvier 2018.

([33]) Réponse au questionnaire budgétaire.

([34]) En 2021 et en 2022, on avait compté respectivement 14 653 et 32 416 participants, selon le projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2024.

([35]) Réponse au questionnaire budgétaire.

([36]) Cour des comptes, rapport précité.

([37]) Sénat, L’égalité des chances, jalon des politiques de jeunesse, rapport d’information n° 848 (2020-2021).

([38]) Commissariat général du Plan, Jeunesse, le devoir d’avenir, rapport de la commission présidée par Dominique Charvet, mars 2001.

([39]) Décret n° 82-367 du 30 avril 1982.

([40]) Sénat, L’égalité des chances, jalon des politiques de jeunesse, rapport d’information n° 848 (2020-2021).

([41]) Décret n° 2014-18 du 9 janvier 2014.

([42]) Cour des comptes, Référé sur l’action en faveur de la jeunesse conduite par la direction de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative, 24 janvier 2020.

([43]) Par décret du Président de la République en date du 11 janvier 2023, M. Mathieu Maucort a été nommé délégué interministériel à la jeunesse. Ancien chef de projet au sein du cabinet de conseil McKinsey, il a exercé à plusieurs reprises des fonctions dans des cabinets ministériels.

([44]) Projet annuel de performances 2025.

([45]) Selon la rédaction de l’article L. 1111-9 du code général des collectivités territoriales issue de ce texte, « la région est chargée d’organiser, en qualité de chef de file, les modalités de l’action commune des collectivités territoriales et de leurs établissements publics pour l’exercice des compétences relatives […] à la politique de la jeunesse ». La loi relative à l’égalité et à la citoyenneté a, par ailleurs, conféré à la collectivité régionale la mission de coordonner « de manière complémentaire avec le service public régional de l’orientation et sous réserve des missions de l’État, les initiatives des collectivités territoriales, des établissements publics de coopération intercommunale et des personnes morales, dont une ou plusieurs structures d’information des jeunes sont labellisées par l’État dans les conditions et selon les modalités prévues par décret. Ces structures visent à garantir à tous les jeunes l’accès à une information généraliste, objective, fiable et de qualité touchant tous les domaines de leur vie quotidienne ».

([46]) En vertu du III de l’article 54 de la loi précitée, « les politiques publiques en faveur de la jeunesse menées par l’État, les régions, les départements, les communes et les collectivités territoriales à statut particulier font l’objet d’un processus annuel de dialogue structuré entre les jeunes, les représentants de la société civile et les pouvoirs publics. Ce débat porte notamment sur l’établissement d’orientations stratégiques et sur l’articulation et la coordination de ces stratégies entre les différents niveaux de collectivités territoriales et l’État. »

([47]) IGESR, Identification, mobilisation et gestion du bâti nécessaire à l’organisation des séjours de cohésion du service national universel, janvier 2022. Ce document, destiné à M. Jean-Michel Blanquer, alors ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, ainsi qu’à Mme Sarah El Haïry, secrétaire d’État chargée de la jeunesse et de l’engagement, n’a pas été rendu public.

([48]) IGF et IGESR, Revue de dépenses : dispositifs en faveur de la jeunesse, avril 2024.

([49]) « Les discours stigmatisants sur les jeunes en disent moins sur la jeunesse que sur les peurs et fantasmes de la société », entretien avec Séverin Graveleau, Le Monde, 19 août 2024.

([50]) « La jeunesse est face à une marée montante de la précarité », entretien avec Séverin Graveleau, Le Monde, 2 mars 2022.

([51]) https://www.associations.gouv.fr/IMG/pdf/chiffres-cles-vie-associative-2023.pdf

([52]) Alors qu’une nouvelle association doit être enregistrée au greffe des associations, aucune disposition légale ou réglementaire n’impose à une association de déclarer sa dissolution.

([53]) https://www.associations.gouv.fr/IMG/pdf/chiffres-cles-vie-associative-2023.pdf

([54]) Injep, « État d’esprit et engagement des jeunes en 2024. Résultats du baromètre Djepva sur la jeunesse », septembre 2024.

([55]) Effort financier de l’État en faveur des associations, annexe au projet de loi de finances pour 2025.

([56]) Projet annuel de performances.

([57]) Décret n° 2018-460 du 8 juin 2018 relatif au fonds pour le développement de la vie associative.

([58]) La dotation de chacune des deux parties du FDVA serait stable par rapport à l’année 2024 : la répartition entre elles n’évoluerait pas.

([59]) Article 272 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.

([60]) Article 258 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour l’année 2024.

([61]) Projet annuel de performances 2025.

([62]) « Mieux comprendre l’action des têtes de réseau » : LMA_LIVRET-Guide-tetes-de-reseau-associatives.pdf (lemouvementassociatif.org).

([63]) Loi n° 2024-344 du 15 avril 2024 visant à soutenir l’engagement bénévole et à simplifier la vie associative.

([64]) Réponse au questionnaire budgétaire : en 2022, par exemple, seules 3,3 % des personnes éligibles au titre d’activités exercées entre 2017 et 2021 avaient mobilisé le CEC. Depuis le lancement du dispositif en 2017, 26 160 dossiers ont été validés.

([65]) Projet annuel de performances.

([66]) Voir le guide pratique sur cette page : https://www.associations.gouv.fr/IMG/pdf/faq_cer_fevrier_2023_vf.pdf

([67]) Conseil économique, social et environnemental, Renforcer le financement des associations : une urgence démocratique, mai 2024.

([68]) Johann Heinrich Pestalozzi (1746-1827), pédagogue suisse, cité par Philippe Meirieu : https://meirieu.com/PATRIMOINE/lettredestans.pdf

([69]) Chercheur et essayiste, spécialiste des sciences de l’éducation et de la pédagogie.

([70]) https://www.meirieu.com/DICTIONNAIRE/educationpopulaire.htm

([71]) Nicolas de Caritat, marquis de Condorcet, « Rapport et projet de décret sur l’organisation générale de l’instruction publique », présentés à l’Assemblée nationale, au nom du comité d’instruction publique, les 10 et 11 avril 1792.

([72]) Définition donnée lors du congrès ces associations réuni en 1904, citée par Jean-Claude Richez (Injep, Les universités populaires en France. Un état des lieux à la lumière de trois expériences européennes : Allemagne, Italie et Suède, 2018).

([73]) https://www.francas.asso.fr/les-francas/notre-histoire/

([74]) https://cefedem-aura.org/recherche/publications/blog/leducation-populaire

([75]) « Mohamed El Khatib : "Je suis dangereux pour l’institution" », entretien avec Kilian Orain et Sophie Rahal, Télérama, 16 octobre 2024.

([76]) https://www.associations.gouv.fr/l-agrement-de-jeunesse-et-d-education-populaire.html

([77]) Le Cnajep lui-même fédère 72 mouvements nationaux. Cette évaluation date de 2017, mais les ordres de grandeur n’ont pas fondamentalement évolué : https://injep.fr/wp-content/uploads/2019/05/FR44_educ_pop.pdf et https://www.cnajep.asso.fr/

([78]) Loi n° 89-486 du 10 juillet 1989 d’orientation sur l’éducation.

([79]) En son article 22.

([80]) Voir notamment le décret n° 92-1200 du 6 novembre 1992 relatif aux relations du ministère chargé de l’éducation nationale avec les associations qui prolongent l’action de l’enseignement public.

([81]) Ibid.

([82]) Décret n° 95-104 du 27 janvier 1995 portant désignation d’associations représentées au Conseil national des associations éducatives complémentaires de l’enseignement public.

([83])  Décret n° 2009-553 du 15 mai 2009 relatif aux dispositions réglementaires du livre V du code de l’éducation. Les dispositions en question relèvent des articles D551-1 et suivants.

([84]) Ces crédits sont ouverts sur le programme 230 Vie de l’élève de la mission Enseignement scolaire.

([85]) Projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2024, mission Enseignement scolaire.

([86])  Décret n° 2013-77 du 24 janvier 2013 relatif à l’organisation du temps scolaire dans les écoles maternelles et élémentaires.

([87]) Loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République.

([88]) Décret n° 2017-1108 du 27 juin 2017 relatif aux dérogations à l’organisation de la semaine scolaire dans les écoles maternelles et élémentaires publiques.

([89]) Circulaire n° 2013-036 du 20 mars 2013 des ministres chargés respectivement de l’éducation nationale – Vincent Peillon – et des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative – Valérie Fourneyron. Le décret du 24 janvier 2013 avait d’ores et déjà inscrit à l’article D. 521-12 la notion de « projet éducatif territorial », inscrite quelques mois plus tard dans la loi.

([90]) https://www.meirieu.com/DICTIONNAIRE/educationpopulaire.htm

([91]) Hexopée, Baromètre 2023.

([92]) « Mohamed El Khatib : “Je suis dangereux pour l’institution” », art. cit.

([93]) Robert Lafon, Vocabulaire de psychopédagogie et de psychiatrie de l’enfant, Presses universitaires de France, 1963, cité par le Trésor de la langue française.

([94]) Selon l’avis rendu par le comité de filière le 27 février 2024.

([95]) Ibid.

([96]) Amendement II-AC-519. Il s’agissait d’accroître l’aide versée aux associations au titre des formations civiques et citoyennes (FCC) afin d’encourager les structures à accompagner les jeunes qu’elles accueillent à passer le Bafa ou le BAFD et de créer ainsi une vraie continuité de l’engagement. Dans cette perspective, l’aide devrait être relevée de 100 à 500 euros.

([97]) Arrêté du 15 juillet 2015 relatif aux brevets d’aptitude aux fonctions d’animateur et de directeur en accueils collectifs de mineurs, modifié par l’arrêté du 30 novembre 2023. La formation se déroule en trois étapes qui doivent être effectuées dans un délai de 30 mois au plus : session de formation générale (8 jours), stage pratique (14 jours minimum) et enfin session d’approfondissement ou de qualification (6 à 8 jours).

([98]) https://injep.fr/wp-content/uploads/2024/05/FR-2024-04_BAFA.pdf

([99]) Ibid.

([100]) Molière, Le Malade imaginaire, acte II, scène 6.

([101]) Alain Corbin, L’Avènement des loisirs. 1850-1960, Aubier, Laterza, 1995, rééd. Flammarion, 2001. Les citations suivantes sont elles aussi issues de cet ouvrage.

([102]) Voir notamment : Jean Vigreux, Histoire du Front populaire. 1936, l’échappée belle, Tallandier, 2022.

([103]) Paul Nizan, Aden Arabie (1931).

([104]) Conseil d’orientation des politiques de jeunesse (commission de l’éducation populaire), Les Colos, un enjeu éducatif pour tous !, juillet 2021.

([105]) Cette sous-catégorie inclut les séjours sportifs organisés pour des licenciés d’une fédération sportive agréée ou un club affilié (hors compétition) ; les séjours linguistiques ; les séjours artistiques et culturels organisés par une école de musique, de danse ou de théâtre d’État, d’une collectivité territoriale ou d’une association, en continuité du projet annuel ; les rencontres européennes de jeunes ; les chantiers de bénévoles organisés pour des mineurs âgés de 14 ans ou plus par des associations ayant attesté de leur engagement à respecter les dispositions prévues par la charte nationale des chantiers de bénévoles ; les rencontres de jeunes organisées dans le cadre des échanges soutenus par l’Office franco-allemand pour la jeunesse par des personnes morales ayant attesté de leur engagement à respecter les directives de cette organisation.

([106]) Conseil d’orientation des politiques de jeunesse (commission de l’éducation populaire), Les Colos, un enjeu éducatif pour tous !, juillet 2021.

([107]) Ibid.

([108]) Ibid.

([109])  Ibid.

([110]) https://injep.fr/donnee/accueils-collectifs-de-mineurs-2007-2008-a-2016-2017/. Ce chiffre, fourni par l’Injep, est fondé sur les données collectées par le Djepva à sa travers sa base de données SIAM.

([111]) Isabelle Monforte, « La fréquentation des centres de vacances depuis 1954 : contre quelques idées reçues », Recherches et Prévisions, n° 86, 2006.

([112]) Conseil d’orientation des politiques de jeunesse (commission de l’éducation populaire), Les Colos, un enjeu éducatif pour tous !, juillet 2021.

([113]) Réponses écrites adressées à la rapporteure pour avis.

([114]) Conseil d’orientation des politiques de jeunesse (commission de l’éducation populaire), Les Colos, un enjeu éducatif pour tous !, juillet 2021.

([115]) Réponses écrites adressées à la rapporteure pour avis.

([116]) Ibid.

([117]) Proposition de loi pour le droit aux vacances, n° 1501 (xvie législature), 4 juillet 2023. Ce texte avait été déposé conjointement avec une proposition de loi portant mesures d’urgence pour les vacances, n° 1480 (xvie législature), 4 juillet 2023. La rapporteure pour avis souscrit à l’ensemble des propositions qu’elle rassemble et dont elle reprend ici une partie.

([118]) Conseil d’orientation des politiques de jeunesse (commission de l’éducation populaire), Les Colos, un enjeu éducatif pour tous !, juillet 2021.

([119]) Proposition de loi visant à relancer l’organisation des classes de découverte, n° 1794 (xvie législature).

([120]) Rapport fait au nom de la commission des affaires culturelles et de l’éducation sur la proposition de loi visant à relancer l’organisation des classes de découverte, n° 1931 (xvie législature).

([121]) Circulaire n° MENE2310475C du 13 juin 2023 relative à l’organisation des sorties et voyages scolaires dans les écoles, les collèges et les lycées publics.

([122]) Rapport fait au nom de la commission des affaires culturelles et de l’éducation sur la proposition de loi visant à relancer l’organisation des classes de découverte, n° 1931 (xvie législature).

([123]) Réponses écrites adressées à la rapporteure pour avis.

([124]) Ibid.

([125]) À cet égard, l’ANCV ne se contente pas de diffuser les chèques-vacances : à partir des ressources dégagées par la commission prélevée sur chaque chèque (3,5 %) et par les « perdus-périmés », à savoir les titres non utilisés, qui représentent environ 1,5 % du volume total, elle a développé des programmes d’aide aux vacances. Parmi eux, « Départs 18-25 » qui a permis en 2023 à près de 38 000 jeunes à faibles revenus ou en insertion de réserver un séjour de vacances pour un coût modéré.

([126]) Réponses écrites adressées à la rapporteure pour avis.

([127]) Le Monde, 14 mai 2020.

([128]) Celui-ci repose sur une obligation légale posée à l’article L. 312-2 du code du sport. Créée en 2006, cette obligation a été précisée, dans la perspective de l’héritage des Jeux olympiques, par la loi n° 2022-296 du 2 mars 2022 visant à démocratiser le sport en France. Dans la rédaction issue de ce texte, la disposition est ainsi libellée : « Tout propriétaire d’un équipement sportif est tenu d’en faire la déclaration à l’administration en vue de l’établissement d’un recensement des équipements. Sous la responsabilité des ministres chargés de l’éducation et des sports, il est établi un recensement par académie des lieux publics, des locaux et des équipements susceptibles de répondre aux besoins de l’enseignement de l’éducation physique et sportive ainsi que de la pratique des activités physiques et sportives volontaires des élèves ». Le résultat de ce recensement « est transmis aux collectivités territoriales et aux établissements publics de coopération intercommunale pour l’établissement du plan local sportif […] et aux conférences régionales du sport ». Ce texte a permis d’établir une cartographie des 330 000 équipements sportifs et lieux de pratique situés sur le territoire national. L’inventaire est accessible à tous, selon le principe de l’open data : https://www.sports.gouv.fr/le-recensement-des-equipements-sportifs-data-es-671

([129])  https://assnat.fr/2hGqeD

([130])  https://assnat.fr/fOKOkY