N° 486
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIème LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 25 octobre 2024.
AVIS
PRÉSENTÉ
AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2025 (n° 324)
TOME VI
ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES
TRANSPORTS AÉRIENS
PAR M. Romain ESKENAZI
Député
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Voir les numéros : 324 et 468 (Tome III, annexe 15).
SOMMAIRE
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Pages
A. Des recettes en augmentation par rapport à 2024
1. Des prévisions de recettes en augmentation de 10 %
B. DES Dépenses orientées vers la performance et la réduction de l’empreinte écologique
1. Les trois programmes du budget annexe
a. Le programme « Navigation aérienne » (n° 612)
b. Le programme « Soutien aux prestations de l’aviation civile » (n° 613)
c. Le programme « Transports aériens, surveillance et certification » (n° 614)
3. Les dépenses d’investissement
4. Les dépenses de fonctionnement
II. L’aérien : Un secteur économique de taille, aux enjeux multiples
A. Un poids important dans l’économie ET L’emploi
B. Une situation financière encore fragile et des défis à relever
1. Les séquelles de la crise sanitaire commencent tout juste à se résorber
2. De nombreux défis financiers à relever
III. Le secteur aérien doit poursuivre les efforts engagés pour réduire ses émissions
A. Le secteur aérien s’inscrit déjà dans une démarche de décarbonation, qui doit être accentuée
1. Un secteur émetteur de gaz à effets de serre qui a entamé sa décarbonation
2. Le renouvellement des flottes par des aéronefs moins polluants
3. Les descentes continues et l’optimisation des trajectoires de vol
4. Les carburants d’aviation durables
B. Une fiscalité équitable qui doit s’ajuster au profil des voyageurs
1. Le levier de la fiscalité sur les billets d’avion doit être actionné
2. La prise en compte du profil des voyageurs doit être renforcée
A. Au-delà de la nuisance : un enjeu de santé publique
1. Une situation intenable, malgré les efforts déjà réalisés par le secteur
2. Des impacts très graves sur la santé
3. Des mécanismes d’aide à l’insonorisation insuffisants
4. Des exemples étrangers montrent qu’une autre approche est possible
B. La nécessité d’actionner tous les piliers de l’approche équilibrée, y compris le quatrième
1. L’approche équilibrée présente certains dysfonctionnements dans sa mise en œuvre
2. La modernisation du contrôle aérien est l’un des enjeux de la réduction des nuisances sonores
3. Le rôle de l’Acnusa doit être renforcé
liste des personnes auditionnÉes
Le transport aérien est indispensable au commerce, aux déplacements familiaux, au tourisme. Il permet d’assurer une continuité territoriale, notamment avec les départements, régions et collectivités d’outre-mer. Il constitue indéniablement un secteur économique stratégique, tant en termes d’emplois, que de poids dans la balance commerciale française. Le constructeur et le gestionnaire d’aéroport français sont des leaders mondiaux et les compagnies sous pavillon français sont parmi les plus importantes du marché, en nombre de passagers comme en nombre de destinations. Contribuant pour 4,3 % au PIB national, représentant 1,2 million d’emplois et 30,8 milliards d’euros de balance commerciale excédentaire pour la filière aéronautique et spatiale, ce secteur a été fortement touché par la crise sanitaire, dont les séquelles commencent seulement à se résorber. Le transport aérien est soumis à une concurrence européenne et internationale forte et fait face à un contexte économique et à des changements de pratiques qui impactent l’activité (croissance forte de compagnies low-cost, inflation notamment des prix des carburants, développement de la visioconférence, etc.). De nombreux défis d’avenir restent toutefois à relever, tant du point de vue de l’impact du trafic aérien sur l’environnement que sur la santé.
Le projet de budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » (BACEA) s’inscrit dans le contexte d’un retour à un niveau de trafic similaire à celui de 2019, et de poursuite des efforts de désendettement, amorcés dès 2023. En outre, des investissements importants sont prévus pour poursuivre notamment la modernisation de la navigation aérienne et l’amélioration de la qualité de service.
Le secteur aérien a des impacts non négligeables sur l’environnement et la santé. Il est responsable de 5 % des émissions de gaz à effet de serre en France et doit participer, comme tous les autres secteurs, à l’effort collectif de réduction des émissions pour atteindre les objectifs fixés par l’Accord de Paris. Même si des efforts notables ont déjà été réalisés et doivent se poursuivre, cette transition ne pourra se faire sans maîtriser l’évolution du trafic et donc sans le renforcement du signal-prix sur les billets d’avion, ni sans mesure de restriction.
Une fiscalité équitable et adaptée au profil des passagers doit donc être mise en œuvre, afin de taxer davantage les voyageurs les plus émetteurs. Les principaux aéroports européens concurrents de Paris-Charles-de-Gaulle (premier aéroport d’Europe), que sont Amsterdam, Londres et Francfort, sont déjà engagés dans cette démarche avec des niveaux de taxe sur les billets d’avion (TSBA) bien plus importants qu’en France. Il y a donc des marges de manœuvre pour une augmentation de cette taxe sans remettre en cause la compétitivité de Paris. Il convient en effet de veiller à ce que la fiscalité n’ait pas pour effet de nuire aux efforts de décarbonation du secteur ou encore de déplacer les emplois et les recettes fiscales hors de France, sans limiter les émissions de gaz à effet de serre qui ne connaissent pas de frontière.
Une progressivité de cette taxe en fonction des services additionnels, de la nature du vol (vols commerciaux et jets privés) mais aussi de la distance, serait un moyen détourné de taxer le kérosène, ce qui n’est aujourd’hui pas possible pour les vols internationaux ([1]). Par ailleurs, une partie plus importante des recettes de la fiscalité de l’aérien doit permettre de favoriser le report modal à travers des investissements sur le ferroviaire, en particulier pour les trains de nuit. Mais cette taxe doit aussi permettre au secteur de financer sa propre décarbonation, notamment via le soutien au développement d’une filière française de production de carburants d’aviation durables, en particulier de carburants de synthèse, pour répondre à un enjeu écologique mais aussi industriel et d’indépendance énergétique majeur.
En outre, le trafic aérien a également des effets très graves sur la santé des populations riveraines d’aéroport, trop souvent passés sous silence. Outre les effets du dioxyde d’azote et des particules fines qui favorisent les maladies respiratoires ; les impacts du bruit, en particulier la nuit, sont démontrés et sans appel : augmentation du risque de mortalité due à des maladies cardiaques et des infarctus, augmentation de l’hypertension artérielle, du stress chronique, de la détresse psychologique ou encore fortes perturbations du sommeil. Alors que différents mécanismes ont déjà été actionnés pour tenter de réduire les nuisances aéroportuaires, force est de constater que la situation n’est toujours pas satisfaisante.
Les leviers déjà mis en œuvre doivent être maintenus et perfectionnés. Toutefois, les effets constatés de ces leviers au cours des vingt dernières années sont insuffisants pour garantir le droit au sommeil des riverains d’aéroports, qui sont près de trois millions à subir des niveaux de bruit supérieurs aux critères fixés par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Il est ainsi nécessaire d’envisager sérieusement la mise en œuvre de mesures d’interdiction stricte des décollages et atterrissages nocturnes, afin de contenir la progression du trafic, indispensable à la réduction des émissions de gaz à effet de serre et d’assurer le respect du droit à la protection de la santé, constitutionnellement garanti pour tous les citoyens.
I. Un budget annexe dont la situation financière continue de s’améliorer, en raison du retour AU niveau de trafic de 2019
La mission « Contrôle et exploitation aériens » retrace dans le cadre d’un budget annexe les activités de prestation de services de la direction générale de l’aviation civile (DGAC). Comme tous les budgets annexes, le BACEA est présenté à l’équilibre, ses dépenses étant principalement financées par les recettes issues de l’activité des services et, le cas échéant, par le recours à l’emprunt.
Dans la continuité de l’année 2024, le projet de budget pour 2025 s’inscrit, dans une trajectoire de recours modéré à l’emprunt et de poursuite du désendettement, en raison d’une hausse de recettes due au retour du trafic.
A. Des recettes en augmentation par rapport à 2024
1. Des prévisions de recettes en augmentation de 10 %
Les ressources du BACEA sont principalement issues du secteur de l’aviation civile, qu’elles prennent la forme de redevances pour services rendus ou de recettes fiscales. Elles dépendent très fortement du trafic aérien.
Les prévisions de recettes sous-jacentes au projet de loi de finances (PLF) pour 2025 sont réalisées en faisant l’hypothèse d’un niveau de trafic aérien fixé à 105 % du trafic de 2019 (contre 103 % pour l’exercice 2024).
Le montant total des recettes, hors recours à l’emprunt, est estimé à 2 656,4 millions d’euros ([2]), soit une augmentation de 249,3 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2024 (+ 10 %).
Les recettes du BACEA devraient donc poursuivre leur hausse en 2025, après avoir été en constante augmentation depuis 2021 (+ 460 millions d’euros entre 2021 et 2022, + 560 millions d’euros entre 2022 et 2023, + 175 millions d’euros entre 2023 et 2024).
Les principales redevances et taxes se décomposent de la manière suivante :
– Les redevances de navigation aérienne ([3]) couvrent les coûts afférents à la navigation aérienne, dans le cadre de la réglementation européenne.
Au total, ces redevances sont estimées à 2 060,9 millions d’euros en 2025, en hausse de 11 % par rapport à la LFI pour 2023 (+209 millions d’euros).
Plus précisément, les prévisions de recettes issues des redevances de la navigation aérienne en métropole sont estimées à 2 014,1 millions d’euros. Elles sont composées de la redevance de route, à hauteur de 1 741 millions d’euros, et de la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne (RSTCA), pour 273,1 millions d’euros. En outre-mer, les recettes de la navigation aérienne atteindraient 46,7 millions d’euros en 2025.
– Les redevances de surveillance et de certification ([4]) correspondent à la surveillance des acteurs de l’aviation civile et à la délivrance d’autorisations ou de licences nécessaires aux opérateurs. Elles concernent, par exemple, les constructeurs, les compagnies aériennes, les aéroports ou encore les personnels et les organismes de sûreté. Le produit de ces redevances est estimé à 28,9 millions d’euros en 2025 (+ 6 % par rapport à la LFI pour 2024).
– La taxe d’aviation civile ([5]) est assise sur le nombre de passagers ou la masse de fret embarqué pour l’ensemble des vols commerciaux, à l’exception des vols en correspondance. Le produit attendu de cette taxe est estimé à 545,8 millions d’euros en 2025, soit une hausse de 34,5 millions d’euros par rapport à la LFI 2024 (+ 7 %).
Prévisions de recettes du budget annexe, hors emprunt
(en millions d’euros)
|
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Écart PLF 2025/LFI 2024 |
Évolution 2024-2025 |
Redevances de navigation aérienne, dont : |
1 851,8 |
2 060,6 |
209 |
11 % |
- Redevance de route |
1 554,0 |
1 741,0 |
187 |
12 % |
- Redevance océanique et RSTCA outre-mer |
45,0 |
46,7 |
1,7 |
3,78 % |
- RSTCA métropole |
252,8 |
273,1 |
20,3 |
8 % |
Redevances de surveillance et de certification |
27,1 |
28,5 |
1,7 |
6 % |
Taxe de l’aviation civile |
511,3 |
545,8 |
34,5 |
6,76 % |
Contribution Bâle-Mulhouse |
5,7 |
9,1 |
3,4 |
58,8 % |
Recettes diverses (frais de gestion, cessions d’actifs immobiliers…) |
11,2 |
11,9 |
0,7 |
6,3 % |
TOTAL hors emprunt |
2 407,1 |
2 656,6 |
249,5 |
10,4 % |
2. Une trajectoire de désendettement dynamique en lien avec le retour du trafic aérien à un niveau proche de celui de 2019
La pandémie a mis à l’arrêt le transport aérien et a entraîné une chute des recettes concomitante pour le BACEA. La DGAC a donc été contrainte d’avoir recours à l’emprunt, faisant passer l’encours de dette de 667 millions d’euros fin 2019, à 2 710 millions d’euros au 31 décembre 2022.
● Une trajectoire de désendettement amorcée dès 2023
Si le BACEA reste affecté par les conséquences de la crise sanitaire, avec un encours de dette historiquement élevé, la reprise du trafic aérien a permis à la DGAC d’initier un désendettement dynamique dès 2023, qui se poursuivra en 2024. Le retour à un niveau de trafic similaire à celui de 2019, associé à la mise en œuvre des mécanismes européens de régulation économique et l’entrée en vigueur du plan de performance RP4 (2025-2029), permet à la DGAC de dessiner une trajectoire de désendettement dynamique du BACEA.
● En 2025, la trajectoire de désendettement du BACEA va se poursuivre
Au regard du niveau de trafic anticipé, le BACEA nécessitera un recours à l’emprunt modéré, à hauteur de 73,2 millions d’euros, soit une diminution de 161,1 millions d’euros par rapport à la LFI 2024. L’encours prévisionnel de dette devrait s’établir à hauteur de 1 869,7 millions d’euros au 31 décembre 2025, pour une prévision de 2 162 millions d’euros fin 2024, soit un désendettement de 292,3 millions d’euros. Cette trajectoire de désendettement se poursuivra au moins jusqu’en 2027 où un objectif inférieur à 1,5 milliard d’euros de dette est visé.
ÉVOLUTION DE L’ENDETTEMENT DU BACEA AU 31 DÉCEMBRE
(en millions d’euros)
Source : réponse au questionnaire budgétaire.
B. DES Dépenses orientées vers la performance et la réduction de l’empreinte écologique
Les dépenses du BACEA sont estimées à 2 364,12 millions d’euros en crédits de paiement dans le PLF pour 2025, hors remboursement lié à l’emprunt, contre, 2 263 millions d’euros en LFI 2024, soit une augmentation de 101,12 millions d’euros par rapport à la LFI de 2024 (+ 4 %).
Depuis la LFI 2023, le remboursement du capital n’est plus intégré au sein de la norme de dépenses du BACEA. Si l’on ajoute ce montant, les dépenses sont de 2 729,6 millions d’euros.
PRÉVISION DE DÉPENSES DU BACEA
(en millions d’euros)
BACEA |
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution |
|||
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
|
Programme 612 |
836,18 |
652,92 |
629,16 |
675,58 |
-24,76 % |
+3,47 % |
Programme 613 |
1 566,52 |
1 559,78 |
1 715,88 |
1 635,91 |
+9,53 % |
+4,88 % |
Programme 614 |
48,50 |
50,28 |
51,09 |
52,63 |
+ 5,34 % |
+4,66 % |
Total |
2 451,20 |
2 262,98 |
2 396,13 |
2 363,53 |
- 2,25 % |
+4,47 % |
Hors remboursement lié à l’emprunt
Source : programme annuel de performance.
1. Les trois programmes du budget annexe
Les crédits du budget annexe sont répartis en trois programmes budgétaires.
a. Le programme « Navigation aérienne » (n° 612)
Le programme « Navigation aérienne » recouvre les activités de la direction des services de la navigation aérienne (DSNA), qui rend l’ensemble des services de gestion du trafic aérien et de navigation aérienne pour le territoire national. Pour accomplir ces missions, elle s’appuie sur ses 6 678 agents répartis sur le territoire métropolitain et en outre-mer. Ses services regroupent des centres de contrôle en route, ainsi que des services de la navigation aérienne régionaux en métropole et en outre-mer, chargés du contrôle d’approche et du contrôle d’aérodrome.
Le plan stratégique de la DSNA à horizon 2030 fixe l’ambition d’une DSNA moderne, performante et écoresponsable, afin de gagner en performance opérationnelle, en particulier en termes de ponctualité. Un travail est mené pour améliorer la qualité de service offerte aux passagers, en cohérence avec l’impératif de garantir la sécurité des opérations de navigation aérienne. La DSNA renforce également sa protection contre la menace cyber. La modernisation des technologies de la navigation aérienne est toujours un axe majeur de la DSNA, via la poursuite du déploiement du système 4-Flight, prévu à Brest et à Bordeaux à l’hiver 2025-2026. Enfin, la DSNA continue d’œuvrer pour la transition écologique du secteur aérien et la performance environnementale des vols, notamment avec la mise en œuvre du Free Route ([6]) sur l’ensemble du territoire d’ici 2026 et à 85 % dès 2025, pour permettre aux compagnies d’optimiser leurs routes et de gagner en performance écologique.
Dans le PLF 2025, ce programme est doté de 629,16 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 675,58 millions d’euros en crédits de paiement, contre 836,18 millions d’euros en autorisations d’engagement et 652,92 millions d’euros en crédits de paiement en LFI 2024.
b. Le programme « Soutien aux prestations de l’aviation civile » (n° 613)
Le programme « Soutien aux prestations de l’aviation civile » finance les fonctions support de la DGAC (ressources humaines, suivi budgétaire, politique immobilière et systèmes d’information). Ce programme comporte aussi les charges financières liées aux intérêts de la dette et les remboursements d’emprunts, ainsi que la subvention attribuée à l’École nationale de l’aviation civile (ENAC).
En 2025, les crédits du programme 613 progressent de 4,9 % entre la LFI pour 2024 et le PLF 2025, sous l’effet notamment de la conclusion d’un nouveau protocole social et de recrutements en augmentation de contrôleurs aériens pour anticiper une vague massive de départs à la retraite dans les prochaines années. Des investissements immobiliers générant des économies d’énergie et le renouvellement de la flotte d’avions de l’ENAC sont aussi à noter, ainsi que la modernisation des infrastructures informatiques.
Au sein du programme 613, l’ENAC est le seul opérateur de la mission budgétaire. Outre des ressources propres, son budget est assuré par une subvention pour charges de service public de la DGAC, qui finance les dépenses de personnel et une partie des dépenses de fonctionnement. En complément, une dotation en fonds propres est également versée et couvre une partie des opérations d’investissement de l’école. Les dépenses de renouvellement de la flotte d’avions de l’ENAC se traduiront par une hausse de la subvention pour charge d’investissement de l’école à hauteur de + 71,3 millions d’euros en autorisations d’engagement et de + 1,8 million d’euros en crédits de paiements.
Dans le PLF 2025, ce programme est doté de 1 715,88 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 1 635,91 millions d’euros en crédits de paiement, contre respectivement 1 566,52 millions d’euros en autorisations d’engagement et 1 559,78 millions d’euros en crédits de paiement en LFI 2024.
c. Le programme « Transports aériens, surveillance et certification » (n° 614)
Le programme « Transports aériens, surveillance et certification » regroupe les activités de régulation, d’analyse, de certification et de contrôle de la conformité à la réglementation internationale et européenne de la DGAC. Sont ainsi concernées les activités visant à garantir la sûreté et la sécurité du transport aérien (surveillance fondée sur l’analyse des risques, risques cyber, taxis aériens, drones), ainsi que la réduction des nuisances sonores et de la pollution atmosphérique issue des activités aériennes, ou encore la protection des droits des passagers.
Les crédits consacrés à ce programme s’élèvent à 51,09 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 52,63 millions d’euros en crédits de paiement, contre 48,50 millions d’euros en autorisations d’engagement, et 50,28 millions d’euros en crédits de paiement en LFI 2024.
Les crédits de personnel s’élèvent dans le PLF 2025, à 1 398 millions d’euros, soit une augmentation de 57 millions d’euros par rapport à la LFI pour 2024. Ce montant tient compte de l’impact du schéma d’emploi, du financement de la hausse de 4 points du taux de cotisation au compte d’affectation spéciale pensions, et de la conclusion en 2024, d’un nouveau protocole social porteur de réformes structurelles pour la DGAC.
Le schéma d’emploi pour 2025 a été arbitré à + 132 équivalents temps plein. L’objectif est notamment l’augmentation du recrutement et de la formation des ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne (ICNA), afin d’anticiper les départs à la retraite. Ce schéma a également vocation à préserver les ressources expertes nécessaires pour faire face aux enjeux de sécurité, de sûreté, de modernisation technologique et de transition écologique. Enfin, le budget prévoit des crédits dédiés au financement de mesures catégorielles d’accompagnement du protocole social.
3. Les dépenses d’investissement
Les dépenses d’investissement atteignent 275,5 millions d’euros ([7]) en crédits de paiement dans le PLF 2025, soit 13,2 millions d’euros de moins que dans le PLF 2024. Ces dépenses permettent à la DGAC de poursuivre la modernisation technologique de ses équipements, ainsi que de réduire son empreinte carbone et sa consommation énergétique.
4. Les dépenses de fonctionnement
Les dépenses de fonctionnement correspondent aux dépenses des services de la DGAC, essentielles à leur activité et à la continuité de leurs missions. Elles s’élèvent à 665 millions d’euros ([8]) en crédits de paiement dans le PLF pour 2025, soit une évolution de + 9 % (+ 60 millions d’euros) par rapport à la LFI pour 2024. Cette hausse s’explique par l’augmentation du volume de formation des contrôleurs aériens et l’effet sur la masse salariale des mesures protocolaires.
II. L’aérien : Un secteur économique de taille, aux enjeux multiples
A. Un poids important dans l’économie ET L’emploi
Le secteur aérien est un acteur économique de premier plan. À l’échelle française, l’aviation civile, construction aéronautique incluse, contribue pour 4,3 % ([9]) au produit intérieur brut (PIB) national. La filière aéronautique et spatiale française est également le premier contributeur au solde positif du commerce extérieur, avec une balance commerciale excédentaire de + 30,8 milliards d’euros ([10]).
Le secteur concourt en outre à l’accueil des touristes en France et offre aux particuliers comme aux entreprises des liaisons vers le reste du monde, tout en contribuant à la desserte des territoires les plus éloignés comme les départements, régions et collectivités d’outre-mer. La compagnie aérienne Air France KLM contribue à elle seule au PIB national à hauteur de 2 % et à plus de 3 % du PIB de la région Ile-de-France ([11]).
Les activités liées au secteur aérien représentent également un nombre conséquent d’emplois : 100 000 emplois directs et plus de 300 000 emplois ([12]) indirects, dont 46 000 ([13]) pour le seul groupe Air France KLM, premier employeur privé d’Ile-de-France. La compagnie Easy Jet, auditionnée par le rapporteur pour avis, emploie près de 1 800 salariés sous contrat français. Également auditionnée, la compagnie de fret FedEx a indiqué employer environ 5 500 collaborateurs dans la région Ile-de-France.
Le Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (Gifas) a enfin informé le rapporteur pour avis que le secteur avait procédé à 28 000 recrutements en France en 2023, un niveau record, alors qu’environ 25 000 recrutements sont aussi attendus pour 2024.
B. Une situation financière encore fragile et des défis à relever
1. Les séquelles de la crise sanitaire commencent tout juste à se résorber
Après trois années de difficultés liées à la crise de la covid-19, le trafic reste toujours légèrement inférieur à son niveau de 2019. D’après la Fnam, le trafic aérien a, depuis le début de l’année 2024 et jusqu’au mois d’août inclus, atteint 120 millions de passagers, soit environ 98 % du niveau de trafic de 2019. En 2023, le trafic des aéroports français était encore en retrait de 7,3 % par rapport à 2019, selon l’Union des aéroports français (UAF). Pour le premier semestre 2024, les aéroports du Groupe Aéroports de Paris (ADP) font état d’un niveau de trafic de 94,5 % du niveau de 2019.
L’impact de la crise sanitaire a été particulièrement important sur les aéroports, dont environ 80 % des coûts sont fixes, et qui ont continué à devoir supporter ces coûts en l’absence d’activité. Ainsi, la sortie de crise s’est accompagnée d’une baisse des investissements de la plupart des aéroports.
La crise a aussi eu pour effet de faire évoluer les modalités de voyage : on constate une baisse du trafic intérieur (75 % du niveau de 2019) ([14]) et notamment du trafic pour motif d’affaires, en partie grâce à l’essor du report modal vers le ferroviaire et au développement de la visioconférence. A contrario, le trafic entre la métropole et les départements, régions et collectivités d’outre-mer se stabilise à un peu moins de 100 % du niveau de 2019, et le trafic international est supérieur à celui de 2019.
La reprise a donc été assez hétérogène pour les aéroports français : certains ont vu leur trafic augmenter, à l’image de l’aéroport de Paris-Beauvais (+41,6 % de passagers en 2023 par rapport à 2019), et d’autres, plus sensibles au trafic domestique, ont vu leur nombre de passagers diminuer par rapport à 2019 (-14,9 % à Lyon Saint-Exupéry, -18,9 % à Toulouse-Blagnac). De plus, les compagnies aériennes peuvent facilement choisir de quitter un aéroport pour en rejoindre un autre, plus compétitif financièrement.
La concurrence étrangère est également un défi de taille pour la compétitivité du secteur aérien français, puisque le pavillon français perd environ 1 % de part de marché chaque année depuis 20 ans, en nombre de passagers transportés, face à des concurrents notamment extra-européens, qui ne sont pas toujours soumis aux mêmes contraintes sociales, fiscales et environnementales.
La compagnie Air France KLM en particulier, demeure dans une situation financière fragile, notamment du fait d’un écart de charges sociales élevé pour les pilotes, en comparaison avec d’autres compagnies étrangères. Au terme de l’exercice 2023, le groupe portait toujours une dette liée à la covid de plus de 3 milliards d’euros, et une dette nette de 7,2 milliards d’euros.
2. De nombreux défis financiers à relever
Le secteur doit aujourd’hui composer avec plusieurs défis.
D’une part, le secteur de la construction aéronautique a également pâti de la crise, puisque la production industrielle s’est arrêtée pendant plusieurs semaines, créant un retard difficilement rattrapable dans une chaîne de production très intégrée. Cette situation a justifié une forte augmentation des cadences de production depuis la fin de la crise et des investissements importants, alors que la plupart des entreprises ont encore des prêts liés à la crise sanitaire à rembourser. Cela n’a toutefois pas permis d’éviter un certain retard dans les livraisons d’aéronefs de dernière génération. Ainsi, Airbus a révisé à la baisse ses objectifs de livraison d’avions pour 2024, de 800 initialement prévus, à 770 ([15]).
En outre, depuis le PLF pour 2024, une partie du secteur est assujettie à une nouvelle taxe sur l’exploitation des infrastructures de transport de longue distance, qui pèse uniquement sur certains aéroports ([16]), et est partiellement répercutée sur les compagnies aériennes. Le montant de cette taxe est de l’ordre de 150 millions d’euros pour les aéroports ([17]) en 2024, et concerne les aéroports du groupe ADP, de Nice, Marseille et Toulouse. Le secteur contribue également à sa transition écologique via différents mécanismes comme le marché européen du carbone ([18]) ou encore l’obligation de compensation de ses émissions domestiques.
Certaines réglementations, comme l’interdiction des liaisons aériennes régulières lorsqu’il existe une alternative ferroviaire de moins de 2h30 ([19]) ont aussi nécessité un ajustement de la part du secteur, plusieurs lignes (Orly-Nantes, Orly-Bordeaux et Orly-Lyon) étant directement concernées. Ces liaisons, autrefois exploitées par Air France, n’ont pas repris après la suspension des vols en 2020. L’aéroport de Bordeaux aurait perdu environ 8 % du trafic de l’aéroport depuis la mise en œuvre de cette mesure d’après l’UAF.
Le secteur est enfin soumis à de nombreux enjeux sécuritaires qui impliquent des investissements conséquents. Le tarif de sûreté et de sécurité (T2S), en est l’une des composantes. Le produit de cette taxe, de 993 millions d’euros en 2023, est affecté sur chaque aérodrome au financement des services de sécurité, incendie et sauvetage. La T2S varie dans son montant unitaire selon les aéroports, qui sont classés selon leur nombre d’unités de trafic. À ce tarif s’ajoute le dispositif de péréquation aéroportuaire dont l’objectif est de financer les coûts de sûreté et de sécurité des aéroports ne percevant pas de recettes de la T2S. À partir de cette année, les dépenses des aéroports seront également affectées par le remboursement des avances de T2S perçues pendant la crise sanitaire.
De plus, la menace posée par d’éventuelles cyberattaques est en évolution constante, et celles-ci prennent des natures multiformes. La cybersécurité est donc incluse de façon croissante dans les systèmes de sûreté et de sécurité de l’aviation, et représente des dépenses importantes.
Enfin, le secteur aérien doit répondre au défi du recrutement. De la DGAC aux constructeurs en passant par les plateformes aéroportuaires et les compagnies aériennes : tous les acteurs du secteur peinent à pourvoir les postes ouverts – sur des fonctions très qualifiées et spécialisées, comme pour les emplois ne nécessitant pas de diplôme particulier. La puissance publique doit aider le secteur à relever ce défi à travers des dispositifs de formation et des campagnes d’information pour mettre en rapport les demandeurs d’emploi et les recruteurs du secteur.
Le rapporteur pour avis tient à souligner le poids important du secteur aérien dans l’économie française, celui-ci étant pourvoyeur d’emploi, d’innovation, et de connectivité, notamment avec les territoires ultramarins. Les entreprises du secteur ont été fortement touchées par la crise sanitaire et font aujourd’hui face à nombreux défis pour l’avenir, qui nécessiteront des investissements massifs. Comme tous les autres secteurs de l’économie, l’aérien doit se donner les moyens de sa transition écologique, et les acteurs du secteur ont d’ailleurs déjà fourni de réels efforts en ce sens.
III. Le secteur aérien doit poursuivre les efforts engagés pour réduire ses émissions
A. Le secteur aérien s’inscrit déjà dans une démarche de décarbonation, qui doit être accentuée
1. Un secteur émetteur de gaz à effets de serre qui a entamé sa décarbonation
L’aérien représente aujourd’hui 5 % des émissions de gaz à effet de serre en France, et 2 à 3 % au niveau mondial. Le transport aérien français a émis 21,2 millions de tonnes de CO2 en 2023, trafic intérieur et international confondus ([20]). L’atteinte des objectifs fixés par l’Accord de Paris nécessite la réduction de l’ensemble des émissions de CO2 de l’économie, y compris celles de l’aérien.
La plupart des acteurs du secteur se sont d’ores et déjà attelés à réduire leurs émissions, les compagnies aériennes en premier lieu. Ainsi entre 2005 et 2019, le groupe Air France KLM a connu une réduction de ses émissions nettes de 10 %, malgré l’augmentation du trafic concomitante. Le groupe ambitionne de réduire de 30 % ses émissions de CO2 par passager et par kilomètre parcouru d’ici à 2030, par rapport à 2019, avec un objectif final de zéro carbone en 2050. Easy Jet a pour sa part fait état d’une baisse de 30 % des émissions par passager et par kilomètre au cours des 30 dernières années.
Les aéroports sont également impliqués dans cette démarche de décarbonation à tous les niveaux : accès à l’aéroport par les transports en commun, fourniture d’électricité décarbonée, préparation des infrastructures liées aux carburants d’aviation durables, etc.
2. Le renouvellement des flottes par des aéronefs moins polluants
L’un des principaux leviers ayant déjà permis de réduire les émissions du secteur est le renouvellement, par les compagnies aériennes, de leurs flottes.
Les constructeurs produisent des aéronefs toujours plus efficients. Ainsi, le think tank Transports&Environnement estime que les gains d’efficacité énergétiques permis par le renouvellement des flottes à l’horizon 2030 seront de 15 à 25 % par rapport à la génération d’appareils précédente.
À titre d’exemple, le groupe Air France KLM investit environ 1,5 milliard d’euros par an dans le renouvellement de ses flottes, avec des appareils Airbus permettant une réduction des émissions de CO2 de 20 à 25 % et une réduction de 30 à 50 % de l’empreinte sonore. La flotte d’Air France devrait ainsi être composée à 70 % d’avions de nouvelle génération en 2030, alors que ce taux était de seulement 7 % en 2021. Easy Jet a pour sa part, prévu d’atteindre 80 % d’avions de nouvelle génération dans sa flotte en 2034, contre 25 % aujourd’hui. FedEx a aussi annoncé avoir investi plus de 13 milliards de dollars depuis 2018 dans le renouvellement de sa flotte et de ses équipements pour réduire les nuisances sonores et les émissions.
Alors que chaque nouvelle génération d’aéronef procure en général un gain de 15 à 20 % d’émissions par rapport à la génération précédente, l’objectif des constructeurs aéronautiques est même d’atteindre un gain de 30 % pour la génération qui succédera à celle actuellement en service. Cela passera notamment par des investissements au sein du Conseil pour la recherche aéronautique civile (CORAC) qui réunit tous les acteurs de l’aérien et permet d’établir une feuille de route technologique pour l’évolution de la filière.
3. Les descentes continues et l’optimisation des trajectoires de vol
Un autre levier important de réduction des impacts du secteur aérien sur l’environnement est l’optimisation des trajectoires de vol et la mise en place de certains procédés à l’atterrissage et au décollage des aéronefs dites « approches continues », par opposition à l’approche par paliers.
Selon la Fnam, ces améliorations permettraient à elles seules une réduction de 6 à 10 % des émissions du secteur aérien, en plus d’économies de carburant et d’une réduction du bruit. La direction générale de l’aviation civile (DGAC) chiffre à 7 % la diminution des émissions de CO2 permise sur la phase de descente continue, suite à une évaluation menée sur 756 vols en 2021.
La France serait largement en retard par rapport aux autres pays européens sur ce point, d’après les statistiques d’Eurocontrol ([21]). Les résultats d’une étude menée par Easy Jet sur l’ensemble des vols de la compagnie sur les douze derniers mois, font aussi état d’une réduction de plus de 10 % de ses émissions qui serait permise grâce à la modernisation de la gestion de l’espace aérien. La compagnie pratique déjà l’écopilotage et a fait de la procédure d’approche continue sa procédure standard.
La DGAC est mobilisée pour permettre la généralisation de ces procédures, qui nécessitent toutefois des concertations et des analyses en amont. L’ensemble des expérimentations montrent que chaque optimisation permet d’apporter un gain de consommation allant jusqu’à 10 % sur une phase de vol moyen-courrier. À titre d’exemple, les travaux menés avec Air France sur l’aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle (CDG) ont notamment permis d’optimiser le début de descente des arrivées sud‑ouest et ouest de nuit, pour un gain d’environ 200 kilogrammes de carburant par vol ([22]).
D’autres évolutions de pratiques, telle que la circulation mono moteur sur piste pratiquée par certaines compagnies, permettent de réduire la consommation de carburant.
4. Les carburants d’aviation durables
La capacité de décarbonation du secteur aérien réside aujourd’hui principalement dans le développement des carburants d’aviation durables (CAD). Ces carburants peuvent être produits à partir de biomasse, comme de l’huile usagée ou des déchets agricoles, ils sont alors appelés « biocarburants ». Une deuxième famille de CAD est composée des carburants dits « de synthèse » ou « e‑carburants » produits à base d’hydrogène et de CO2.
Le Gifas estime que l’utilisation de ces carburants alternatifs contribuera pour 50 % à l’atteinte par la filière de ses objectifs de décarbonation. Le règlement européen dit « ReFuelEU » ([23]) fixe à cet égard des objectifs d’incorporation obligatoire de CAD dans les réservoirs des avions européens à plusieurs échéances : 2 % d’incorporation en 2025, 6 % en 2030, 20 % en 2035, et jusqu’à 70 % en 2050. Le groupe Air France KLM a déjà incorporé davantage de carburants durables que la quantité obligatoire prévue par le règlement. Selon les informations communiquées par la DGAC, les mandats ont été respectés ces deux dernières années et l’utilisation de CAD a permis d’éviter 0,14 million de tonnes de CO2 en 2023.
Alors que ce levier est aujourd’hui le plus prometteur pour décarboner le secteur aérien, les gisements de matières premières sont restreints et aussi convoités par les autres secteurs pour leur propre décarbonation. D’une part, il n’existe pas de véritable filière de collecte de biomasse à destination des carburants d’aviation durables en France, ce qui conduit à en importer, notamment d’Asie, avec des risques de fraudes ([24]). D’autre part, des projets de production de carburants de synthèse ont été identifiés sur le territoire national, mais pâtissent des risques inhérents au lancement d’une filière, qui freinent encore les investisseurs.
Or, il est urgent de lancer cette filière, au regard des échéances européennes d’incorporation et de la nécessité d’accélérer la transition énergétique du secteur. D’importants investissements sont à prévoir, notamment en raison de la grande quantité d’électricité décarbonée nécessaire à la production de carburants de synthèse. Selon Transports & Environnement, la production française de carburants de synthèse nécessiterait une consommation électrique de l’ordre de 100 TWh en 2050, soit le quart de la production de l’ensemble du parc nucléaire français ([25]) . Le risque, en l’absence de stratégie industrielle ambitieuse, est donc de remplacer progressivement une dépendance énergétique liée aux importations de pétrole par une dépendance énergétique aux importations de CAD, que la France pourrait pourtant produire. Une intervention de l’État est nécessaire pour diriger les ressources du secteur vers la sécurisation de ces premiers projets.
Le deuxième obstacle à l’incorporation des CAD aujourd’hui est leur prix très élevé, comparativement au kérosène. Les biocarburants sont 3 à 5 fois plus chers, et les carburants de synthèse jusqu’à 8 fois plus chers ([26]). De plus, les CAD français sont facturés au prix élevé de 5 000 € la tonne, contre un prix en Europe plutôt situé aux alentours de 3 500 € la tonne, et jusqu’à 2 000 € la tonne aux États‑Unis. Cet écart s’explique en partie par la taxe incitative relative à l’utilisation d’énergie renouvelable dans le transport (TIRUERT). Or, le montant de la TIRUERT est intégré dans le prix des CAD vendus en France, ce qui a pour effet d’augmenter leur prix. Un crédit d’impôt pourrait ainsi être proposé pour les achats de CAD en quantité supérieure aux taux d’intégration imposés par la règlementation ReFuelEU, afin d’inciter les compagnies à intégrer plus de CAD.
La structuration d’une filière de production française et européenne de CAD est indispensable et requiert l’accompagnement financier de l’État. Le rapporteur pour avis est donc favorable à l’affectation d’une partie des recettes fiscales du secteur aérien, au développement d’une filière française de CAD. Une partie du tarif de solidarité sur les billets d’avion pourrait ainsi être orientée vers la recherche et développement et la production de carburants de synthèse. Cette mesure permettrait également une meilleure acceptabilité de cette fiscalité par les acteurs du secteur.
Les efforts notables menés par le secteur aérien pour réduire ses émissions sont à encourager. Toutefois, le nombre total d’émissions nettes continue à croître, à mesure que le trafic augmente. Ainsi, entre 2000 et 2023, les émissions nettes de CO2 du secteur ont augmenté de 4,4 %, même si les émissions unitaires de CO2 par passager et par kilomètre ont diminué de 31,3 % ([27]). Le gain en efficacité énergétique est indiscutable, mais ne résout pas le problème de l’augmentation des émissions nettes.
Pour que le secteur aérien suive une trajectoire compatible avec l’Accord de Paris, les leviers technologiques ne suffiront pas. Le seul levier pour réduire fortement et rapidement les émissions à court terme reste donc la maîtrise de l’évolution du trafic. Celle-ci est indispensable également pour permettre d’avoir, à terme, assez de carburants durables pour l’ensemble du secteur. Le signal-prix, les reports modaux vers le ferroviaire et la sobriété sont les grands axes permettant la maîtrise du trafic. C’est pourquoi le levier fiscal doit être actionné par les pouvoirs publics, en considérant les taux appliqués aujourd’hui dans les principaux hubs européens : Amsterdam, Londres et Francfort.
B. Une fiscalité équitable qui doit s’ajuster au profil des voyageurs
1. Le levier de la fiscalité sur les billets d’avion doit être actionné
Le régime fiscal spécifique dont bénéficie le secteur aérien lui permet notamment d’être exempté de taxe sur le kérosène ([28]) et de se voir appliquer un taux de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) réduit à 10 % sur les vols domestiques, et une exonération sur les vols internationaux.
En outre, le tarif de solidarité sur les billets d’avion se situe à un niveau assez bas comparé à nos voisins abritant les principaux hubs européens. Ainsi, le tarif de solidarité sur un vol hors-UE en classe économique équivaut à 7,5 € pour un billet au départ de la France, contre 29 € pour un billet au départ des Pays-Bas, 70,8 € au départ de l’Allemagne, et 109 € au départ du Royaume-Uni ([29]).
La comparaison des coûts de touchée, c’est-à-dire l’ensemble des coûts liés à l’atterrissage d’un aéronef donné, sur un panel d’aéroports, permet d’apprécier les facteurs de compétitivité économique des acteurs français par rapport à leurs concurrents européens. En 2022, le coût de touchée moyen des aéroports du panel s’établissait à 35,1 €, et celui des aéroports français à 32 € ([30]). La France connaît donc une position intermédiaire. En dépit de la part importante des coûts de touchée liée à la fiscalité, la France n’affiche pas le coût de touchée le plus élevé du panel. La sûreté et la sécurité, financées en France par la T2S, quand elle fait souvent l’objet d’une redevance dans les autres pays européens, joue pour beaucoup dans ce paradoxe apparent.
Source : Observatoire des coûts de touchée, Édition 2023
L’idée selon laquelle le secteur aérien français serait le plus taxé en Europe, toutes taxes et redevances confondues, n’est pas une réalité. Il existe donc une marge de manœuvre fiscale pour poursuivre l’objectif d’incitation à la sobriété, et de renforcement du signal-prix.
L’augmentation du tarif de solidarité, aussi appelé « taxe sur les billets d’avion » (TSBA) semble appropriée pour plusieurs raisons :
– Tout d’abord, la TSBA ne produit pas de distorsion de concurrence, en ce qu’elle prend en compte la destination finale du voyageur et s’applique à tous les vols au départ de France quelle que soit la compagnie. Elle ne s’applique pas aux passagers en correspondance, ne conduisant donc pas à un contournement pour les passagers en transit par le hub français ;
– Le risque d’évitement est quasi nul, car il est peu probable que les passagers se rendent en train ou en voiture, dans des aéroports étrangers concurrents, ce qui reviendrait au total, plus cher ;
– Les pays hébergeant les principaux aéroports européens (Royaume-Uni, Allemagne, Pays-Bas) ont déjà un niveau de TSBA bien supérieur à celui de la France.
Les montants actuels de la TSBA sont très faibles, la taxe est donc aujourd’hui peu dissuasive sur le plan écologique et rapporte peu de recettes fiscales. Le rapporteur pour avis recommande ainsi l’alignement de la TSBA française sur le taux allemand, qui permettrait des recettes fiscales supplémentaires de 2,5 milliards d’euros, y compris avec la baisse de trafic due au relèvement de la taxe ([31]). En comparaison, le produit de la TSBA dans ses modalités actuelles, était en 2023 de 436 millions d’euros ([32]).
2. La prise en compte du profil des voyageurs doit être renforcée
Aujourd’hui le montant de la TSBA dépend de la destination finale du vol, selon deux catégories :
– les destinations européennes et assimilées (territoire métropolitain, États européens et aéroports situés à moins de 1 000 km de l’aéroport de Paris‑Charles-de-Gaulle, territoires d’outre-mer) ;
– les destinations tierces (hors UE et outre-mer).
Deux tarifs distincts permettent aussi de différencier le montant de la taxe en fonction de la catégorie du vol : les vols en classes supérieures (premium, business etc.) sont taxés davantage que les vols en classe économique ([33]).
Le rapporteur pour avis souhaiterait voir la création d’une catégorie de distance supplémentaire, afin de moduler encore davantage le montant de la taxe en fonction de la distance parcourue. Ainsi, une catégorie intermédiaire, englobant les destinations non-européennes mais situées à moins de 5 000 km de l’aéroport de Paris-Charles-De-Gaulle pourrait utilement venir affiner ce barème. Cette mesure serait couplée au relèvement de la taxe pour toutes les catégories, avec un relèvement plus important pour la dernière catégorie (au-delà de 5 000 km). En effet, les vols long-courriers représentent 60 % des émissions du secteur de l’aviation en France ([34]). Par ailleurs, le rapporteur pour avis propose de porter à 2 500 km la catégorie des vols dits « UE et assimilés », notamment pour inclure dans cette tranche, sur laquelle la taxe est la moins élevée, le nord de la Méditerranée.
La prise en compte de la fréquence des voyages dans le montant de la taxe, mesure préconisée par Réseau Action Climat, est un axe qu’il pourrait être intéressant d’étudier, afin de faire peser davantage la fiscalité sur les voyageurs les plus émetteurs, en termes de fréquence. Toutefois, cette proposition pourrait s’avérer complexe à mettre en œuvre d’un point de vue juridique, au regard du respect de la liberté de circulation, et des règles relatives au stockage et à la protection des données personnelles.
Il conviendrait enfin de réformer le régime de taxation actuel de l’aviation dite « d’affaires », c’est-à-dire l’aviation non-régulière ([35]), qu’il s’agisse d’aéronefs loués par des acteurs privés, ou d’appareils appartenant à des particuliers. Il apparaît nécessaire d’assujettir tous ces types de vols à une TSBA dont le montant serait considérablement relevé. En effet, ces vols sont aujourd’hui taxés sur le même régime de TSBA que les vols en classe économique. Cette mesure de bon sens permettrait aussi d’améliorer l’acceptabilité des nouvelles mesures de taxation auprès des passagers des vols réguliers, qui ne comprendraient pas que les voyageurs empruntant des jets privés soient soumis à un régime plus favorable.
Enfin, le rapporteur pour avis souhaite alerter sur la situation spécifique des territoires d’outre-mer, qui doivent faire l’objet d’un diagnostic spécifique tant ces territoires recouvrent des réalités diverses et complexes. Les voyageurs entre la métropole et l’outre-mer ne devraient pas pâtir de la taxation sur l’aérien au même titre que les autres voyageurs de « loisir ». Il semblerait pertinent d’exonérer du tarif de solidarité les vols entre la métropole et l’outre-mer ainsi que les vols entre deux destinations d’outre-mer, pour lesquels le report modal est souvent impossible. Il est essentiel de travailler avec les instances européennes à la reconnaissance de cette situation spécifique. Dans l’attente, le rapporteur pour avis propose d’abonder le fonds d’aide à la continuité territoriale pour les résidents de l’ensemble des territoires d’outre-mer, afin d’appliquer cette mesure d’exonération en assurant le remboursement de la TSBA pour les vols entre les départements, régions et collectivités d’outre-mer (DROM et COM), depuis et vers la métropole.
IV. Une régulation des vols de nuit est nécessaire pour protéger la santé de tous les riverains d’aéroport
A. Au-delà de la nuisance : un enjeu de santé publique
1. Une situation intenable, malgré les efforts déjà réalisés par le secteur
D’après les données de l’Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (Acnusa), 6 millions de personnes subiraient la gêne liée au bruit, et 1 million de personnes seraient victimes de nuisances importantes ([36]). Sur les seuls aéroports parisiens, on peut estimer la population exposée aux nuisances aériennes à 479 000 personnes et 192 000 logements ([37]). D’après Bruitparif, dont les calculs reposent sur les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le nombre de personnes impactées par un bruit lié au trafic aérien supérieur au niveau de bruit maximal recommandé (45 dB (A) Lden) ([38]), est de 2,2 millions rien que pour l’Île‑de‑France. De plus, 1,08 million de personnes subissent des nuisances sonores dont l’intensité est supérieure à la norme nationale recommandée (55 dB (A) Lden). L’exercice 2023 de l’Acnusa a par ailleurs été marqué par un nombre record de sanctions (639), pour un montant également record de 11,7 millions d’euros d’amendes.
Il convient toutefois de noter les tentatives de réduction des nuisances aéroportuaires, qui demeurent insuffisantes. On constate ainsi une diminution de 10,9 % du nombre total de mouvements commerciaux entre l’année 2019 et l’année 2023, en partie en raison de l’essor des vols dits « low-cost », souvent davantage remplis que les vols dits traditionnels ([39]).
Depuis 2003 ([40]) à l’aéroport de Roissy, les mouvements dits de « cœur de nuit », entre 0h00 et 5h pour les créneaux de départ, et 5h30 pour les créneaux d’arrivée, sont plafonnés initialement à 22 500, et aujourd’hui à 17 559 créneaux par an. Cette baisse s’explique par la règle selon laquelle tout créneau non utilisé n’est pas renouvelé l’année suivante.
En outre, l’aéroport de Paris-Orly fait depuis 1968, l’objet d’un « couvre-feu » au sens d’une interdiction stricte des atterrissages et décollages entre 23 heures 30 et 6 heures, sauf dérogation à titre exceptionnel. Par ailleurs, diverses mesures de type plafonnement du nombre de vols de nuit ou interdiction des vols d’avions les plus bruyants sont mises en œuvre sur un certain nombre d’aéroports français.
Comme mentionné supra, les efforts de renouvellement des flottes et de déploiement de l’approche en descente continue réalisés par les compagnies aériennes ont aussi permis de réduire une partie des nuisances sonores. Ainsi, Air France KLM indique avoir réduit de 45 % son empreinte sonore entre 2000 et 2019, alors que le nombre de mouvements augmentait.
Le nombre de vols nocturnes demeure toutefois trop important. Selon l’association de défense contre les nuisances aériennes (ADVOCNAR) ([41]), la France est le pays européen qui réalise le plus de décollages et d’atterrissages la nuit. À titre d’exemple, en 2019, le hub de Paris-Charles-de-Gaulle a connu une moyenne de 172 vols chaque nuit entre 22 heures et 6 heures du matin ([42]). Les compagnies de transport de fret sont particulièrement actives la nuit, car leur modèle commercial implique une livraison la plus rapide possible. Ainsi, FedEx a indiqué au rapporteur pour avis qu’environ 50 % de ses activités avaient lieu la nuit. Selon le groupe ADP, 93 % des mouvements de nuit sont des vols de fret. Or, le rythme de renouvellement de flotte des aéronefs dédiés au fret est bien plus lent que pour les aéronefs destinés au transport de passagers. Les aéronefs dédiés au transport de marchandises qui volent la nuit seraient donc en moyenne plus anciens et plus bruyants.
2. Des impacts très graves sur la santé
Les impacts du trafic aérien sur la santé des populations riveraines d’aéroports sont considérables. L’étude DEBATS ([43]) (Discussion sur les effets du bruit des aéronefs touchant la santé) d’octobre 2020, commandée par le ministère de la santé, pilotée par l’Acnusa et réalisée par l’université Gustave Eiffel de Lyon, en fait l’illustration ([44]). Les conclusions de cette étude confirment qu’une augmentation de l’exposition au bruit des avions est associée à une mortalité plus élevée par maladie cardiovasculaire. Plus précisément, une augmentation de l’exposition au bruit des avions de 10 dB (A) est associée à :
– un risque de mortalité plus élevé de 24 % pour les maladies cardiaques ischémiques et de 28 % pour les infarctus du myocarde ;
– un risque d’hypertension artérielle augmenté de 34 % chez les hommes ;
– un risque de stress chronique, objectivé par une perturbation du rythme circadien du cortisol (diminution de 15 % de la variation absolue horaire du cortisol, augmentation de 16 % du niveau de cortisol au coucher, mais sans variation significative au lever) ;
– un risque de détresse psychologique augmenté de 80 % chez les participants légèrement gênés par le bruit des avions et multiplié par 4 chez ceux qui déclarent être fortement gênés, par rapport à ceux qui ne sont pas du tout gênés ;
– un risque de dormir moins de six heures par nuit augmenté de 60 %, et un risque de sentiment de fatigue le matin au réveil de 20 %.
Plus largement, cette étude confirme que « l’exposition au bruit des avions a des effets délétères sur l’état de santé perçu, la santé psychologique, la gêne, la quantité et la qualité du sommeil et les systèmes endocrinien et cardiovasculaire » ([45]). Or la directive européenne du 4 mars 2020 ([46]) portant sur l’évaluation des effets nuisibles du bruit dans l’environnement, précise justement que les trois types de gênes devant être pris en compte dans l’évaluation de la nuisance sont : la présence de cardiopathies ischémiques, la forte gêne et les fortes perturbations du sommeil.
L’étude menée en février 2019 par BruitParif ([47]), évalue l’impact du bruit des transports sur la santé des 10 millions d’habitants de la zone dense de la région Ile-de-France. Près de 1,6 million de personnes dans la région sont exposées à des niveaux supérieurs à 45 dB (A), considéré comme l’objectif de qualité à atteindre selon l’OMS pour éviter les conséquences sanitaires du bruit aérien. En termes d’impacts sanitaires, le bruit aérien est ainsi responsable en moyenne de la perte de 1,9 année de vie en bonne santé ([48]) du fait du bruit aérien au sein de la zone dense francilienne, ce nombre pouvant atteindre trois ans dans les territoires les plus exposés.
À l’impact sanitaire de la pollution sonore, s’ajoute l’impact de la pollution atmosphérique pour les riverains d’aéroports. L’étude d’Airparif ([49]) publiée en février 2024 a permis de montrer que le trafic aérien engendre une augmentation des niveaux de particules ultrafines à proximité des aéroports. Sur le site de l’aéroport de Roissy, des concentrations moyennes de particules ultrafines identiques à celles mesurées le long du boulevard périphérique ont été mesurées. À 1 km de distance de l’aéroport, le niveau de particules reste deux fois supérieur à celles mesurées au cœur de Paris. Ces polluants font l’objet d’inquiétudes sanitaires croissantes et de recommandations de renforcement de leur surveillance de la part de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) et de l’OMS. En effet : plus les particules sont petites et plus elles pénètrent profondément dans l’organisme.
En plus du coût humain sur la santé, les nuisances sonores aéroportuaires ont aussi un coût financier. Comme l’a montré l’étude de l’Agence de la transition écologique (Ademe) ([50]) le coût social du bruit en France est estimé au total à 147,1 milliards d’euros, dont 6,1 milliards à imputer au transport aérien.
Il est donc temps de se préoccuper réellement de ce problème de santé publique, qui porte atteinte à la santé d’un nombre considérable de riverains. Le terme de « nuisance » n’est pas approprié et se trouve bien en dessous de la réalité. Comme l’indique l’OMS, il est essentiel de réduire l’exposition au bruit nocturne provenant du trafic aérien, afin de garantir aux adultes un minimum de 7 heures de sommeil, recommandation de Santé publique France, pour protéger la santé.
3. Des mécanismes d’aide à l’insonorisation insuffisants
Des mécanismes visant à compenser ces nuisances sont prévus, mais demeurent largement insuffisants face à l’ampleur du problème.
La politique d’aide à l’insonorisation des populations riveraines des principaux aéroports est financée au moyen de la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA) acquittée par les compagnies aériennes et directement affectée au financement des travaux d’insonorisation des habitations et locaux riverains. Le fait générateur de la taxe est constitué par le décollage d’aéronefs de masse maximale au décollage de 2 tonnes ou plus sur les aérodromes concernés. Le tarif est fixé en fonction de plusieurs critères, notamment l’heure de décollage, le type d’aéronef ou encore le groupe de l’aéroport, afin que les riverains des aéroports les plus actifs soient davantage indemnisés. Le plafond de cette taxe est aujourd’hui fixé à 55 millions d’euros.
Cette taxe concerne aujourd’hui les douze principaux aéroports français qui sont dotés d’un plan de gêne sonore (PGS). Dans certains cas le tarif est quasiment nul, lorsqu’il est estimé que l’insonorisation des logements riverains est achevée, c’est le cas par exemple des aéroports de Lyon-Saint-Exupéry et de Nice-Côte d’Azur.
Au total, entre 2004, début du dispositif, et 2023, plus de 58 000 locaux ont bénéficié d’une aide à l’insonorisation, pour les riverains situés près des aéroports de Paris-Orly et Paris-Charles-de-Gaulle ([51]). Cependant, sur la plupart des plateformes, ce dispositif manque d’attractivité, comme en témoigne une baisse des nouvelles demandes. Cela conduit donc à un niveau élevé de trésorerie, en dépit d’un nombre important de locaux encore potentiellement éligibles à l’aide (de l’ordre de 36 000 pour les trois aéroports parisiens) ([52]). Une meilleure information sur les droits à ces aides doit sans doute être portée aux habitants éligibles.
Malgré une revalorisation du montant des plafonds forfaitaires de 25 % début 2024, ce déficit de demandes s’explique par le reste à charge pour les particuliers qui demeure de 20 % ([53]) et par la hausse globale du coût des travaux, notamment avec la forte hausse du prix des matériaux au cours des dernières années. Le reste à charge se situe ainsi entre 2 500 et 3 000 € pour un logement de trois pièces en habitat collectif et de 3 500 à 4 000 € pour un pavillon de quatre ou cinq pièces, des sommes dissuasives, en particulier pour des ménages à revenus modestes.
De plus, un logement qui a déjà bénéficié d’une aide à l’insonorisation, même en faveur d’un ancien propriétaire, ne peut pas en bénéficier de nouveau, y compris si le logement n’avait pas été complètement insonorisé, ou si des nouvelles méthodes d’isolation phonique plus efficaces ont été développées depuis.
Enfin, les différents plans de cartographie du bruit qui structurent la gestion des nuisances aéroportuaires n’ont parfois pas été revus depuis des années et ne sont plus en adéquation avec les trafics réels. L’Acnusa préconise que les critères d’élaboration de ces plans, notamment le plan de gêne sonore (PGS) et le plan d’exposition au bruit (PEB), soient revus tous les cinq ans et avec des règles plus souples permettant d’éviter les effets de bord pour les communes limitrophes.
Le rapporteur pour avis est favorable à la suppression totale du reste à charge en permettant à la TNSA de financer 100 % du coût des travaux d’insonorisation des riverains, et ce d’autant plus qu’il existe aujourd’hui une forte trésorerie non‑utilisée. Il serait également pertinent d’autoriser l’accès à une aide pour une deuxième insonorisation si la première a été réalisée un nombre minimum d’années auparavant, et d’envisager un élargissement des PGS afin d’augmenter le nombre de bénéficiaires potentiels subissant des nuisances liées au trafic aérien.
4. Des exemples étrangers montrent qu’une autre approche est possible
Si l’insonorisation réduit un peu l’exposition au bruit à l’intérieur des habitations, elle ne la supprime pas pour autant. Il est donc nécessaire d’explorer d’autres pistes, comme ont pu le faire certains aéroports français et européens.
● Ainsi, l’aéroport de Francfort-Hahn a couplé une mesure de « couvre-feu » c’est-à-dire une interdiction stricte des décollages et atterrissages entre 23 heures et 5 heures du matin, à une limite du nombre de vols entre 22 heures et 23 heures et entre 5 heures et 6 heures, à 133 vols par nuit en moyenne.
● L’aéroport d’Amsterdam-Schiphol a également entrepris des démarches pour plafonner le nombre de vols annuel, à une cible initialement située aux alentours de 450 000 vols soit 10 % de moins que le trafic de 2019. Toutefois cette mesure est actuellement en suspens en raison d’une notification de la Commission européenne sur ce point ([54]).
● Les aéroports britanniques de Heathrow, Gatwick et Stansted sont soumis à un plafond du nombre de vols et de l’énergie sonore entre 23 heures 30 et 6 heures, avec une distinction entre hiver et été.
● L’aéroport de Bâle-Mulhouse est soumis à une interdiction stricte des atterrissages entre minuit et 5 heures, et des décollages entre minuit et 6 heures.
● L’aéroport de Beauvais-Tillé est soumis à une interdiction stricte des décollages et atterrissages entre minuit et 5 heures, sauf dérogation entre minuit et 1 heure du matin, dans la limite de 25 vols annuels.
B. La nécessité d’actionner tous les piliers de l’approche équilibrée, y compris le quatrième
1. L’approche équilibrée présente certains dysfonctionnements dans sa mise en œuvre
L’approche équilibrée de la gestion du bruit des aéronefs est un concept adopté par l’assemblée de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) en 2001. Cette approche consiste à déterminer les éventuels problèmes de bruit de chaque aéroport puis à analyser les diverses mesures qui peuvent être prises pour réduire les nuisances sonores, en recherchant un équilibre du point de vue coût-efficacité. Elle est reprise par des textes européens et notamment le règlement UE n° 598/2014 ([55]).
Elle s’appuie sur quatre « piliers » d’action, à savoir :
– la réduction du bruit à la source, via par exemple le renouvellement des flottes ;
– la gestion de l’utilisation des terrains proches de l’aéroport, via des cartographies et des outils comme le plan d’exposition au bruit (PEB) qui visent à limiter les constructions dans les zones impactées par les nuisances sonores ;
– les procédures de navigation aérienne à moindre bruit comme les approches en continu ;
– les restrictions d’exploitation des aéronefs, c’est-à-dire toute mesure liée au bruit qui limite ou réduit l’accès d’un aéronef à un aéroport, comme le plafonnement du nombre de vols ou le couvre-feu.
Les plans de prévention du bruit dans l’environnement (PPBE) sont des plans d’action devant être élaborés tous les cinq ans afin de « gérer les problèmes de bruit et les effets du bruit, y compris, si nécessaire, la réduction du bruit », d’après la directive européenne correspondante ([56]). Le PPBE vise à identifier les mesures à prendre sur les différents piliers de l’approche équilibrée. Son élaboration doit associer les parties prenantes de la commission consultative de l’environnement propre à chaque aéroport. C’est à l’occasion de son élaboration qu’est appréciée l’effectivité des actions relevant des trois premiers piliers, sous l’égide du préfet de département. Celui-ci est compétent pour approuver le PPBE et superviser l’étude d’impact selon l’approche équilibrée (EIAE) préalable à toute mesure éventuelle de restriction d’exploitation (quatrième pilier).
L’EIAE a pour objectif d’évaluer les conséquences socio-économiques de nouvelles restrictions d’exploitation. Elle vise à déterminer le scénario de restriction permettant d’atteindre un objectif de bruit défini, en ayant le meilleur rapport coût-efficacité. Actuellement, quatre EIAE (Bordeaux-Mérignac, Lille-Lesquin, Marseille-Provence et Paris-CDG) sont en cours et deux (Paris-Orly et Toulouse-Blagnac) ont rendu leurs conclusions ([57]). Trois autres EIAE avaient été menées auparavant, pour les aéroports de Bâle-Mulhouse, Nantes-Atlantique et Lyon-Saint-Exupéry. Chacune de ces études a abouti à un arrêté de restriction, incluant des mesures de couvre-feu pour les aéroports de Bâle-Mulhouse et Nantes-Atlantique.
L’application de l’approche équilibrée conduit à évaluer, tous les cinq ans, les incidences du bruit sur une plateforme donnée, y compris sur le plan sanitaire. La directive européenne 2020/367/CE mentionnée supra impose en effet l’évaluation des effets nuisibles.
Les associations de riverains se plaignent de la conduite des EIAE, et du manque de transparence et d’information dont elles disposent. Celles-ci sont parfois seulement informées du scénario retenu une fois l’étude terminée et l’arrêté déjà rédigé. En fonction des préfets, de grandes disparités existent dans la compréhension et l’application de la règle. La DGAC reconnaît également que l’application du règlement européen sur l’approche équilibrée ([58]) est compliquée à mettre en œuvre compte tenu de son manque de précision.
En outre, des dérogations aux mesures de restriction d’exploitation peuvent être accordées par la DGAC, ce qui affaiblit l’efficacité de ces mesures de réduction du bruit. Les principales raisons affichées pour accorder une dérogation sont liées à des phénomènes météorologiques violents ou à la congestion du ciel européen pour des raisons indépendantes de l’activité des compagnies aériennes. En 2023, 101 dérogations ont été accordées pour 136 demandes (74 % d’accord). Ces 101 dérogations ont finalement donné lieu à 55 mouvements d’aéronefs hors créneau.
2. La modernisation du contrôle aérien est l’un des enjeux de la réduction des nuisances sonores
De nombreux retards de vols conduisant à des atterrissages ou décollages nocturnes hors créneau, sont liés aux défaillances de la navigation aérienne. Au niveau européen, la part des retards imputables au contrôle aérien était de 15 % en 2022 et en 2023. La Fnam indique que les services de la navigation aérienne sont les premiers contributeurs aux retards en France, à hauteur de 37 %.
La direction des services de la navigation aérienne (DSNA) au sein de la DGAC, a été en 2022, le deuxième prestataire européen le plus générateur de minutes de retard liées au contrôle aérien ([59]). Par ailleurs, le contrôle aérien français est le seul en Europe à recourir encore à des systèmes et matériels obsolètes. Enfin, le contrôle aérien français se caractérise à la fois par l’extrême éparpillement de ses implantations et par la complexité et la disparité de ses systèmes informatiques.
La France se situe très en retard sur la modernisation de la navigation aérienne. Les retards générés par le contrôle aérien peuvent avoir des causes organisationnelles (manque d’effectifs, panne technique, maintenance), sociales (mouvements de grèves) ou non maîtrisables dans le cas d’une surcharge de trafic dans un volume d’espace contraint.
La DGAC a engagé depuis 2018, une démarche de modernisation englobant plusieurs mesures (déploiement de nouveaux systèmes de contrôle, adaptation des outils de ressources humaines en matière de temps de travail et d’organisation, regroupement et rationalisation des centres d’approche, collaboration étroite avec Eurocontrol).
L’un des enjeux est de favoriser la mise en œuvre de l’approche et de la descente en continu, avec guidage par satellite, qui permet des gains de bruit jusqu’à 5 dB d’après les expérimentations menées par la DGAC. D’après le groupe Air France KLM, la France, avec 13 % de descentes continues en 2022, affiche des performances inférieures à la moyenne européenne (33 %), les aéroports parisiens étant les moins avancés sur les sujets (3,1 % pour Orly et 2,4 % pour Roissy).
En termes de bruit pour les populations riveraines, les gains se feraient ressentir entre 25 km et 40 km de l’aéroport. En revanche, à proximité plus directe de l’aéroport, les personnes survolées le sont toujours autant ([60]). En effet, la navigation satellitaire permet un suivi des trajectoires plus précis, permettant de limiter la dispersion des trajectoires à l’arrivée. Ainsi il est possible de diminuer le nombre total de personnes survolées. Selon ADP, l’un des freins à la mise en œuvre des descentes continues est également leur coût important pour les compagnies aériennes, car il convient de former les pilotes et de mettre à niveau les contrôleurs aériens.
Comme l’indique la Fnam, l’optimisation de la programmation des vols permet une réduction importante des vols de nuit, comme l’illustre le bilan de l’Observatoire cœur de nuit – hiver 2023-2024 présenté en août 2024 à l’aéroport de Toulouse-Blagnac. À conditions réglementaires et à trafic équivalents, il a été observé une réduction de 23,9 % des vols en cœur de nuit (entre minuit et 6h) par rapport à la même période de l’hiver 2022-2023.
3. Le rôle de l’Acnusa doit être renforcé
L’Acnusa est compétente pour assurer le respect des différentes mesures de restrictions d’exploitation d’aéronefs dans les principaux aéroports ([61]) et également pour donner son avis sur les documents de gestion du bruit (PGS, PEB etc.). Un travail d’instruction est mené sur tous les manquements présumés. Le collège de l’Acnusa se réunit mensuellement en session plénière afin d’analyser chaque cas et éventuellement de prononcer des sanctions à l’encontre des compagnies aériennes. Divers éléments sont évalués, notamment les dispositions prises en compte par le transporteur pour se prémunir des imprévus, afin de déterminer si le manquement était dû à des raisons indépendantes de sa volonté.
À ce jour, le plafond maximal des amendes est de 20 000 € pour un manquement de jour et de 40 000 € pour un manquement de nuit commis par une personne morale, et de 1 500 euros pour le manquement d’une personne physique. La majorité des amendes attribuées en 2023 l’ont été pour décollage de nuit sans créneau. Les plafonds de ces amendes sont aujourd’hui trop faibles pour être réellement dissuasifs.
L’Acnusa indique que les compagnies aériennes sont parfois amenées à arbitrer entre le montant d’une amende et le coût des mesures à prendre pour l’éviter. Par exemple, le coût d’un report de vol et du relogement des passagers à l’hôtel, peut revenir in fine, plus cher que le paiement de l’amende. Aussi, l’Acnusa recommande de doubler le plafond actuel des amendes afin de renforcer leur caractère dissuasif. Les acteurs du secteur n’ont pas d’opposition de principe à une augmentation du plafond des amendes, comme l’a indiqué à la Fnam lors de son audition, insistant toutefois sur la nécessité de prendre en compte les retards dus au contrôle aérien dans l’instruction des dossiers.
Le rapporteur pour avis est favorable à cette mesure et souhaiterait même aller plus loin en triplant le plafond des amendes, afin de laisser à l’Acnusa une marge de manœuvre importante pour choisir le montant adapté au manquement, notamment en cas de récidive.
D’autres dysfonctionnements ne permettent pas de garantir véritablement le respect des arrêtés de restriction d’exploitation d’aéronefs aujourd’hui. Tout d’abord, un trop grand nombre de dérogations sont accordées par la DGAC aux transporteurs aériens, les exemptant ainsi de toute sanction. L’Acnusa a notamment précisé qu’un nombre important de dérogations au couvre-feu de l’aéroport d’Orly étaient accordées, ce qui semble contradictoire avec le principe même du couvre‑feu.
De plus, sur l’aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle, l’Acnusa n’est actuellement compétente que pour juger des décollages sans créneau, mais pas des atterrissages. Pour les atterrissages, c’est le ministre chargé de l’aviation civile qui prononce une éventuelle décision d’amende après avis d’une commission administrative de l’aviation civile ([62]).
Or cette commission ne se prononce que très rarement en faveur de sanctions pécuniaires. Dans les faits, les atterrissages sans créneau ne sont donc quasiment jamais sanctionnés dans cet aéroport, qui est pourtant particulièrement touché par ce phénomène. Le rapporteur pour avis est donc favorable à ce que l’Acnusa soit également compétente pour sanctionner les atterrissages sans créneau sur l’aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle.
Enfin, le délai moyen entre la réalisation d’un manquement et le prononcé de la sanction était jusqu’à présent d’environ dix mois. Toutefois, ce délai sera fortement prolongé du fait de l’absence de président de plein droit de l’Acnusa depuis avril 2024, qui empêche actuellement l’Acnusa de prononcer des sanctions pécuniaires. À ce jour, plus de 600 dossiers de manquement ont été instruits et ne peuvent être présentés au collège pour une décision de sanction, faute de la présence d’un président de plein droit. Aussi, le rapporteur pour avis souhaite alerter sur la nécessité de procéder au plus vite à la nomination d’un nouveau président de l’Acnusa, selon la procédure prévue à l’article 13 de la Constitution.
4. Un couvre-feu strict à l’échelle nationale semble être la seule option pour garantir la protection de la santé des riverains d’aéroports
Le cadre juridique de l’approche équilibrée prévoit aujourd’hui que les mesures relevant du quatrième pilier (restrictions d’exploitation d’aéronefs) ne doivent être envisagées qu’après la démonstration de l’insuffisance des trois premiers piliers pour régler le problème des nuisances sonores provoquées par le trafic aérien.
Or, force est de constater que les riverains d’aéroports voient aujourd’hui peser une menace grave sur leur santé, directement liée au trafic aérien. Il apparaît donc évident que les mesures déjà mises en œuvre depuis près de 25 ans n’ont pas suffi à supprimer les risques sanitaires pour les riverains. Pire, ils n’ont fait que croître, avec l’augmentation du trafic. Le droit à la protection de la santé a été reconnu par le Conseil constitutionnel comme un objectif à valeur constitutionnelle, qui découle de l’article 11 du Préambule de la Constitution de 1946.
Aussi, il apparaît au rapporteur pour avis que la mise en place à l’échelle nationale de mesures d’interdiction stricte de décollage et d’atterrissage de nuit pour une durée de huit heures, s’inscrit dans la démarche d’approche équilibrée, au regard du constat d’insuffisance des mesures des trois premiers piliers, et de l’objectif supérieur de protection de la santé des citoyens.
L’approche actuelle de mise en œuvre de mesures de restriction d’exploitation est trop longue et trop opaque, la procédure de conduite des études d’impact selon l’approche équilibrée laisse à désirer et même lorsque ces restrictions sont finalement prises, les mesures de dérogation et le niveau trop faible des sanctions ne permettent pas de garantir leur application réelle.
L’instauration d’un couvre-feu strict à l’échelle nationale, ou du moins pour les aéroports sous l’autorité de l’Acnusa ([63]), constitue un point d’équilibre qui préserve l’activité du secteur aérien et la santé des citoyens tout en participant à l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Le rapporteur pour avis déposera ainsi prochainement une proposition de loi pour instaurer un couvre-feu national afin de garantir un droit au sommeil et protéger la santé des riverains, ainsi que pour augmenter le niveau des amendes en cas non-respect de la règlementation.
A minima, il conviendrait de revoir le mode de calcul de la TNSA, afin de faire peser davantage le critère de l’heure de décollage, déjà prévu à l’article L. 422‑55 du code des impositions sur les biens et services, sur le montant total. Le rapporteur pour avis est favorable à la création d’une plage horaire spécifique à la nuit, au cours de laquelle le tarif serait beaucoup plus élevé, afin d’augmenter significativement la contribution des vols de nuit, impactant le plus la santé des riverains, et de créer un effet dissuasif.
Cette augmentation des recettes dédiées à l’insonorisation permettra de porter à 100 % le taux de remboursement des travaux d’isolation phonique des riverains, mais également de réaliser, après une période donnée, de nouveaux travaux dans les logements ayant déjà bénéficié d’une aide à l’insonorisation et enfin d’élargir les PGS pour augmenter le nombre de bénéficiaires potentiels.
Après avoir auditionné Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition écologique, de l’énergie, du climat et de la prévention des risques, le 16 octobre 2024, et M. François Durovray, ministre délégué chargé des transports, le 22 octobre 2024, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a examiné les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et ceux du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » le mardi 22 octobre 2024 après-midi et soir et le mercredi 23 octobre 2024 matin et après-midi (voir le tome X de l’avis n° 486 : https://assnat.fr/XlYRCY).
À l’issue de cet examen, elle a émis un avis défavorable à l’adoption des crédits de la mission, comme à celle des crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».
liste des personnes auditionnÉes
(par ordre chronologique)
Fédération nationale de l’aviation et de ses métiers (Fnam) *
M. Laurent Timsit, délégué général
M. Cyril Beuchet, responsable du pôle technique et développement durable
Union des aéroports français (UAF) *
M. Nicolas Paulissen, délégué général
M. Rafael Costa, responsable développement durable
Mme Clara Henné, économiste
Easy Jet *
M. Bertrand Godinot, directeur pays France et Pays-Bas
Mme Carinne Heinen, responsable des affaires publiques d’EasyJet France
Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (Acnusa)
M. Philippe Gabouleaud, secrétaire général
M. Arnaud Beck, secrétaire général adjoint
Mme Florence Duenas, rapporteur permanent
Mme Tania Chemtob, consultante en affaires publiques
Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (Gifas) *
M. Baptiste Voillequin, directeur « R&D et environnement »
M. Jérôme Jean, directeur « affaires publiques »
Mme Emma Gentil, chargée de mission « affaires publiques »
Table ronde d’associations environnementales
– FNE Val d’Oise
Mme Sophie Duchêne Latreuille, membre du bureau collégial
M. Francis Gabouleaud, administrateur
M. Bernard Loup, ancien président de Val d’Oise environnement
– Réseau Action Climat *
M. Alexis Chailloux, responsable « transports »
– The Shift Project *
M. Clément Caudron, référent aérien
Air France KLM *
M. Sébastien Justum, secrétaire général adjoint
M. Aurélien Gomez, directeur des affaires parlementaires et territoriales
M. Rémy Haddad, chargé d’affaires parlementaires et territoriales
Transports & Environnement *
M. Jérôme du Boucher, chargé du programme aviation
Direction de la législation fiscale (DLF) – Sous-direction « Fiscalité des transactions, fiscalité énergétique et environnementale » – Bureau D2 « Taxes sectorielles sur les biens et services »
M. Vincent Mazeau, chef du bureau D2
M. Damien Giampaoli, chef de section au bureau D2
M. Stanislas Bihan, rédacteur au bureau D2
FedEx *
M. Julien Ducoup, vice-président des opérations du hub FedEx de CDG
M. Philippe Morin, directeur général des affaires gouvernementales et règlementaires pour l’Europe
Direction générale de l’aviation civile (DGAC)
M. Damien Cazé, directeur général
Mme Aline Pillan, secrétaire générale
M. Marc Borel, directeur du transport aérien
M. Edouard Gauci, adjoint à la secrétaire générale
M. Frédéric Guignier, directeur des services de la navigation aérienne par intérim
M. Laurent Chapeau, directeur de cabinet par intérim du directeur général
Groupe Aéroports de Paris (ADP) *
M. Edward Arkwright, directeur général
M. Mathieu Cuip, directeur des affaires publiques
M. Paul Beyou, responsable des affaires publiques nationales
Table ronde d’associations de riverains d’aéroports
– Association de défense contre les nuisances aériennes (ADVOCNAR)
Mme Françoise Brochot, présidente
– DRAPO Orly
M. Gérard Bouthier, président
– Collectif contre les nuisances aériennes de l’agglomération toulousaine (CNAAT)
Mme Chantal Beer-Demander, présidente du CNAAT et de l’Union française contre les nuisances des aéronefs (UFCNA)
Mme Dominique Lazarski, vice-présidente de l’Union française contre les nuisances des aéronefs (UFCNA)
– Association Eysino-Haillanaise de défense contre les nuisances de l’aéroport (AEHDCNA)
M. Xavier Petit, président
M. Alexandre Bordes, secrétaire
– Association OYE 349
M. Luc Offenstein, président, conseiller municipal circulations douces et nuisances aériennes, ville de Sucy-en-Brie
Direction générale de l’énergie et du climat (DGEC)
M. Alexandre Drozières, directeur adjoint du climat et l’efficacité énergétique de l’air
M. Frédéric Branger, chef du bureau des marchés carbone
* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.
Fédération nationale de l’aviation et de ses métiers (Fnam) *
Union des aéroports français (UAF) *
Easy Jet *
Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (Acnusa)
Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (GIFAS) *
Réseau Action Climat *
The Shift Project *
Air France KLM *
Transports & Environnement *
Direction générale de l’aviation civile (DGAC)
Groupe Aéroports de Paris (ADP) *
Union française contre les nuisances des aéronefs (UFCNA)
Association de défense contre les nuisances aériennes (ADVOCNAR)
DRAPO Orly
Collectif contre les nuisances aériennes de l’agglomération toulousaine (CNAAT)
Association Eysino-Haillanaise de défense contre les nuisances de l’aéroport (AEHDCNA)
Association OYE 349
Direction générale de l’énergie et du climat (DGEC)
* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.
([1]) Convention relative à l'aviation civile internationale, signée à Chicago, le 7 décembre 1944.
([2]) Données issues de la réponse écrite de la DGAC au questionnaire budgétaire.
([3]) Art. R. 134-1 et s. du code de l’aviation civile.
([4]) Art. L. 611-5 du code de l’aviation civile.
([5]) Art. 302 bis K du code général des impôts. Elle est complétée par la « contribution Bâle-Mulhouse », qui est son équivalent pour cet aéroport.
([6]) L’espace « Free Route », ou « espace en cheminement libre » est un espace aérien à l’intérieur duquel un pilote peut librement planifier sa route entre un point d’entrée et de sortie, à la différence d’un réseau de routes rigide. Cette méthode permet aux compagnies aériennes de disposer d’un choix plus large de planification et de gestion de leurs opérations afin de limiter leur impact environnemental. L’objectif est de disposer des routes les plus directes possible.
([7]) Données issues du projet annuel de performance 2025.
([8]) Données issues du projet annuel de performance 2025.
([9]) Chiffres de la Fédération nationale de l’aviation et ses métiers (Fnam).
([10]) Chiffres du Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (Gifas).
([11]) Chiffres fournis par Air France KLM d’après l’étude d’impact socio-économique du Groupe Air France‑KLM – Institut Mines Telecom Business School 2024.
([12]) Chiffres de la Fnam.
([13]) Chiffres d’Air France KLM.
([14]) Chiffres de la Fnam.
([15]) Chiffres du Gifas.
([16]) La taxe pèse sur les aéroports dont les revenus dépassent 120 millions d’euros au cours de l’année civile et dont le niveau moyen de rentabilité excède 10 % sur les sept derniers exercices comptables achevés.
([17]) Chiffres de la DGAC.
([18]) Systèmes d’échange de quotas d’émissions (SEQE) ou système de permis d’émissions négociables (Emissions Trading Schemes en anglais – ETS)
([19]) Article 145 de la LOI n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.
([20]) Chiffres de la Direction générale de l’énergie et du climat (DGEC).
([21]) EUROCONTROL Data Snapshot #32 focusing on continuous descent operations at the top 25 airports in Europe.
([22]) Source : DGAC.
([23]) Règlement (UE) 2023/2405 du Parlement européen et du Conseil du 18 octobre 2023 relatif à l’instauration d’une égalité des conditions de concurrence pour un secteur du transport aérien durable (ReFuelEU Aviation).
([24]) L’huile de cuisson usagée, du carburant miracle à la crainte de la fraude, Transports&environnement, 18 juin 2024
([25]) Données fournies par The Shift Project.
([26]) Chiffres de la Fnam.
([27]) Chiffres de la Fnam.
([28]) Le kérosène n’est pas soumis à la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), Arrêté du 17 décembre 2015 fixant les modalités d’application de l’article 265 bis du code des douanes en matière d’exonération de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques utilisés comme carburant ou combustible à bord des aéronefs.
([29]) Transport & environnement, Niches fiscales sur l’aviation : la France s’est privée de 4,7 milliards d’euros en 2022, juillet 2023.
([30]) Source : Observatoire des coûts de touchée, Édition 2023
([31]) Calcul réalisé par Transports & Environnement.
([32]) Chiffres de la Direction de la législation fiscale (DLF).
([33]) Article 422-22 du code des impositions sur les biens et services.
([34]) Chiffres de Transport & Environnement.
([35]) au sens de l’article 2 du règlement (CE) n° 1008/2008 du Parlement européen et du Conseil du 24 septembre 2008 établissant des règles communes pour l’exploitation de services aériens dans la Communauté.
([36]) Données fournies par l’Acnusa.
([37]) Chiffres du groupe Aéroports de Paris, d’après les chiffres des plans de prévention du bruit dans l’environnement (PPBE).
([38]) dB : unité de mesure (logarithmique) d’un niveau sonore ; dB (A) : mesure de ce niveau pondérée pour tenir compte de la sensibilité moyenne des personnes ayant une audition considérée comme normale, pour chaque bande de fréquences. Lden (Day Evening Night) est l’indicateur du niveau sonore moyen pour la journée entière de 24 heures. Il est calculé en moyennant sur l'année les bruits relevés aux différentes périodes de la journée, auquel est appliquée une pondération pour les périodes plus sensibles (+5dB(A) en soirée et +10 dB(A) la nuit).
([39]) 1 754 162 mouvements commerciaux en 2023 contre 1,97 million de mouvements en 2019 (chiffres de l’UAF).
([40]) Arrêté du 6 novembre 2003 relatif à l’attribution de créneaux horaires la nuit sur l’aérodrome de Paris - Charles-de-Gaulle.
([41]) « Roissy la nuit, l’aéroport de tous les débordements ? », Corine Moriou, le 16 octobre 2023.
([42]) Données fournies par l’UFCNA.
([43]) Étude DEBATS, Octobre 2020.
([44]) Ce programme a été mis en place aux abords de trois aéroports (Paris‑Charles-de-Gaulle, Lyon-Saint-Exupéry et Toulouse-Blagnac).
([46]) Directive (UE) 2020/367 de la Commission du 4 mars 2020 modifiant l’annexe III de la directive 2002/49/CE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne l’établissement de méthodes d’évaluation des effets nuisibles du bruit dans l’environnement.
([47]) Impact sanitaire du bruit des transports dans la zone dense de la région Ile-de-France, BruitParif, février 2019.
([48]) Méthodologie de calcul proposée par l’OMS, fondée sur l’utilisation de l’indicateur des années de vie en bonne santé perdue (DALY – Disability Adjusted Life Years).
([51]) Données fournies par la DGAC.
([52]) Chiffres du groupe Aéroports de Paris.
([53]) Sauf dans certains cas où il peut être de 90 ou 100 % sous conditions de revenus, Article R571-87 du code de l’environnement.
([54]) Réduction du nombre de vols à l’aéroport d’Amsterdam-Schiphol : le gouvernement néerlandais fait machine arrière – La Tribune, 15 novembre 2023.
([55]) Règlement (UE) n ° 598/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relatif à l’établissement de règles et de procédures concernant l’introduction de restrictions d’exploitation liées au bruit dans les aéroports de l’Union, dans le cadre d’une approche équilibrée, et abrogeant la directive 2002/30/CE.
([56]) Directive 2002/49/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 juin 2002 relative à l’évaluation et à la gestion du bruit dans l’environnement - Déclaration de la Commission au sein du comité de conciliation concernant la directive relative à l’évaluation et à la gestion du bruit ambiant.
([57]) Source : DGAC.
([58]) Règlement (UE) n ° 598/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relatif à l’établissement de règles et de procédures concernant l’introduction de restrictions d’exploitation liées au bruit dans les aéroports de l’Union, dans le cadre d’une approche équilibrée, et abrogeant la directive 2002/30/CE.
([59]) Rapport de la Cour des Comptes du 9 octobre 2024 - Les investissements de la direction des services de navigations aérienne (DSNA).
([60]) Données fournies par la DGAC.
([61]) Plateformes qui connaissent plus de 20 000 mouvements d’avions de plus de 20 tonnes sur les 5 dernières années ou aéroports qui ont plus de 50 000 mouvements d’avion de plus de 2 tonnes sur la même période.
([63]) Aéroports avec plus de 20 000 mouvements d’aéronefs de plus de 20 tonnes ou avec plus de 50 000 mouvements d’aéronefs de plus de 2 tonnes sur les cinq dernières années.