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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 22 octobre 2025
AVIS
PRÉSENTÉ
AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2026 (n° 1906),
TOME V
ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES
PAR Mme Sabrina Sebaihi
Députée
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Voir le numéro : 1906.
SOMMAIRE
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Pages
A. Les orientations générales de la mission Écologie, développement et mobilités durables
a. Les volumes de déchets générés à l’échelle mondiale vont être démultipliés d’ici 2050
Annexe n° 1 : synthèse des recommandations de la rapporteure pour avis
Annexe n° 2 : liste des personnes auditionnées par la rapporteure pour avis
« Rupture » ; maître-mot du premier ministre pour solutionner une crise politique, le terme qualifie surtout et avant tout l’état de notre Terre. Polysémique, si la rupture désigne une nouvelle situation, en opposition avec une donnée antérieure, elle définit en premier lieu le fait de se rompre sous un effort excessif ou prolongé. Cette seconde acception résonne lourdement alors que nous venons de franchir silencieusement la septième des neuf limites planétaires ([1]), contre deux seulement en 2009. Le seuil critique relatif à l’acidification des océans a en effet été atteint en septembre dernier, menaçant encore davantage la stabilité et l’intégrité de notre environnement.
Loin d’être un paramètre théorique, ce dépassement est symptomatique d’une fuite en avant se traduisant par une perte de biodiversité et une intensification des phénomènes climatiques violents. L’année 2025 a ainsi été de nouveau marquée par des catastrophes d’ampleur : méga feux dans la péninsule ibérique ; typhon Bualoi en Asie ; glissement de terrain ravageur dans la région du Darfour au Soudan ; inondations majeures au Mexique. Tous les continents étant touchés, l’exhaustivité n’est plus de mise au vu de la fréquence accrue de ces fléaux. La France n’a pas été épargnée, comme en témoignent les images du village de Saint-Laurent-de-la-Cabrerisse dans l’Aude, ravagé par un des incendies les plus destructeurs de l’été ou encore les orages diluviens dans le Pas-de-Calais, les Côtes d’Armor ou le Vaucluse.
2026 sera donc à bien des égards une année charnière en matière de coopération climatique. Plusieurs grands évènements internationaux auront en effet lieu pour améliorer la gouvernance environnementale. Après une 30e conférence des parties sur le climat (COP30) à Belém au Brésil du 10 au 21 novembre 2025, la communauté internationale se retrouvera pour les échéances des conférences des deux autres conventions de Rio : la conférence sur la diversité biologique (COP 17) à Erevan en Arménie ; celle sur la lutte contre la désertification (COP 17) à Oulan-Bator en Mongolie. Enfin, le cycle de l’eau sera au cœur des débats avec deux rencontres cruciales : la conférence sur l’eau prévue à Abu Dhabi à la fin de l’année et la toute première « COP océan » à New York dans la lignée de la future entrée en vigueur de l’accord sur la haute mer (BBNJ).
Si les effets d’annonce et les rendez-vous internationaux ne manquent pas, la question des moyens consacrés à la réalisation de ces ambitions demeure fondamentale. Dans ce contexte, la commission des affaires étrangères s’est saisie pour avis des crédits de la mission Écologie, développement et mobilité durables du projet de loi de finances pour 2026. Ces crédits sont essentiels pour permettre la mise en œuvre effective de la transition écologique devant conduire à une amélioration, au quotidien, de la qualité de vie de nos concitoyens et à la préservation de la biodiversité. C’est au regard de ces crédits que la véritable ambition de notre pays pourra être évaluée.
Or, la rapporteure pour avis note avec déception que les crédits de la mission demeurent insuffisants pour répondre pleinement aux enjeux environnementaux. Après une année 2025 marquée par une diminution de près de 10 % des moyens financiers consacrées à l’écologie, la copie du gouvernement prévoit une stabilisation des crédits de la mission sans revalorisation nette. Les hausses marginales annoncées fixent un budget de 24,237 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE) et de 21,814 milliards d’euros en crédits de paiement (CP) dans le projet de loi de finances pour 2026. La variation positive affichée masque un manque de vision se traduisant par la diminution significative des sommes allouées à certains programmes liés notamment à la préservation de la biodiversité et au Fonds vert.
Par ailleurs, l’examen du budget offre à la commission des affaires étrangères la possibilité d’analyser les instruments, les objectifs et les modalités de l’action internationale de la France en matière environnementale. Cette année, la rapporteure pour avis a choisi de consacrer la partie thématique de son rapport au colonialisme vert. Phénomène contesté et contrasté, il décrit un état de fait indéniable : les pollutions observées au niveau mondial proviennent principalement des activités des pays développés et affectent plus durement les pays du Sud. La persistance de cette inégalité environnementale a des conséquences sur la planète, la santé des populations et leur capacité à améliorer leur quotidien. Elle maintient ces mêmes populations dans des situations de sous-développement en actant de nouvelles formes de domination.
Se déclinant en différents secteurs, le colonialisme vert trouve un écho particulier au travers de la question des exportations de déchets. Si la réglementation en la matière a évolué et tend vers une plus grande responsabilisation des pays riches, les dérives et abus du passé empoisonnent toujours les écosystèmes locaux. La rapporteure pour avis dresse ainsi un constat alarmant des déséquilibres et préjudices induits par les transferts transfrontaliers de déchets. Elle formule douze propositions pour appeler à une plus grande justice environnementale et revoir nos modes de consommation dans une perspective soutenable.
I. Le financement des politiques publiques de l’environnement : les dispositions du projet de loi de finances pour 2026
A. Les orientations générales de la mission Écologie, développement et mobilités durables
Les dépenses détaillées dans le cadre de cette mission doivent assurer le respect par la France de ses engagements chiffrés en faveur de la neutralité carbone à l’horizon 2050 et de la cible européenne de réduction de 55 % des émissions de gaz à effet de serre en 2030 par rapport à leur niveau de 1990. Tout comme l’an dernier, le gouvernement a décidé de faire de la réduction du déficit public sa priorité politique pour l’année 2026 : ce dernier doit être ramené à 4,7 % du produit intérieur brut (PIB) d’ici un an, ce qui représente un ajustement de l’ordre de 30 milliards d’euros d’économies. Pour ce faire, le premier ministre a annoncé une baisse massive de la dépense publique qui financera aux deux tiers cet effort d’austérité, réduisant de facto toute possibilité d’investissements dans notre économie, précisément au moment où nos concitoyens s’inquiètent de la dégradation des services publics. Sans surprise, les politiques environnementales et climatiques pâtiront de ce manque d’ambition. Ainsi, aucune mesure concrète concernant l’écologie n’a encore été annoncée, l’Exécutif promettant de revenir présenter sa politique au Parlement ultérieurement.
Après une année budgétaire insuffisante, les moyens alloués à la mission Écologie, développement et mobilité durables ne connaissent pas d’évolution notable et ne traduisent donc aucune inflexion positive. Le budget concerné est certes en légère augmentation, fixé hors fonds de concours, à 24,237 milliards d’euros en AE pour 2026, contre 22,928 milliards d’euros en loi de finances initiale pour 2025, soit une revalorisation de 5,71 %. Les CP enregistrent également une très légère augmentation de 0,5 %, passant de 21,704 milliards d’euros en loi de finances initiale pour 2025 à 21,814 milliards d’euros dans le projet de loi de finances pour 2026. Toutefois, si cette variation traduit une stabilisation nominale, elle demeure inférieure à l’inflation. De fait, elle correspond davantage à un effet de consolidation qu’à un véritable renforcement de l’effort budgétaire écologique. Au demeurant, elle résulte avant tout de facteurs structurels, liés à la progression de certains programmes existants et à l’évolution du périmètre de la mission.
Source : dossier de presse du projet de loi de finances pour 2026 publié le 14 octobre 2025.
La rapporteure pour avis ne peut que déplorer cette situation inquiétante pour l’avenir de notre pays. Ce choix est d’autant plus paradoxal que l’ensemble des travaux scientifiques et la communauté internationale ne cessent d’alerter sur les dangers du réchauffement climatique et l’importance cruciale d’adapter, dès à présent, notre économie à ses enjeux pour le bien-être de nos concitoyens et celui des générations futures. Rappelons que la dernière édition du rapport annuel de l’Institut de l’économie pour le climat (I4CE) ([2]) évalue le montant d’investissements annuels nécessaires au financement d’une transition écologique rapide et de ses conséquences à environ 180 milliards d’euros en 2030. Avec un besoin supplémentaire de 87 milliards d’euros par rapport à 2024, nous sommes très loin de cet objectif.
La rapporteure tient également à souligner les conditions problématiques dans lesquelles elle est amenée à présenter ce rapport, lesquelles ne lui permettant nullement de disposer suffisamment en amont des informations nécessaires pour produire le travail d’investigation et d’analyse que réclame pourtant un tel exercice. Ainsi, elle n’a pu avoir accès aux jaunes budgétaires utiles pour apprécier de manière exhaustive les crédits accordés à certains opérateurs. Il est pour le moins regrettable que l’Assemblée nationale soit ainsi empêchée d’exercer ses fonctions les plus élémentaires, qui plus est pour l’examen du budget de notre pays.
B. Les crédits des programmes de la mission Écologie, développement et mobilités durables pour 2026 : une évolution qui n’est pas encore à la hauteur des enjeux
Ce programme voit ses AE s’accroître de 1 123 millions d’euros dans le cadre du projet de loi de finances par rapport à 2025. Cette augmentation porte ainsi l’ensemble des AE du programme à 5 930 millions d’euros. En CP, il enregistre une hausse de 209,56 millions d’euros, pour une valeur totale de 4 635 millions d’euros.
L’effort budgétaire se concentre principalement sur le secteur ferroviaire, dont le budget s’élève à 3,23 milliards d’euros en AE et 3,22 milliards en CP, en hausse d’environ 5 %. Cette augmentation est justifiée par la volonté de renforcer la régénération du réseau et de soutenir le fret ferroviaire, notamment par la revalorisation de l’aide aux services de wagons isolés, portée à 100 millions d’euros. Les redevances d’accès au réseau payées par l’État à SNCF Réseau progressent également, afin d’assurer la viabilité économique du gestionnaire d’infrastructure. Parallèlement, les moyens de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF), alimentés par des taxes affectées, sont maintenus à leur niveau de 2025 afin de garantir la stabilité du financement des grands projets d’infrastructures.
L’action 44 Transports collectifs connaît une forte hausse (+130,75 %) de ses AE, qui atteignent 1 562 millions d’euros dans le projet de loi de finances. Ceux-ci se concentrent sur la sous-action 44-06 Financement du déficit d’exploitation des trains d’équilibre du territoire. Les AE supplémentaires sont dédiées au financement d’un contrat de location de matériel roulant nécessaire à l’exploitation des lignes de nuit et à l’ouverture à la concurrence d’autres lignes de trains d’équilibre du territoire (TET). Ces trains de moyenne et de longue distances assurent des missions d’intérêt national en offrant un service de grande ligne rapide entre les principales villes françaises non reliées par la grande vitesse, ainsi que le désenclavement des territoires en relations transversales à l’intérieur du pays ou via des trains de nuit. Le gouvernement précise qu’un marché d’ouverture à la concurrence des lignes Nantes-Lyon et Nantes‑Bordeaux a été signé le 27 mai 2025 pour un démarrage d’exploitation par l’attributaire en décembre 2026. La contribution à l’exploitation versée par l’État, qui s’élève à 181,3 millions d’euros sur la durée de ce contrat (2025-2036) devrait diminuer à terme d’environ 50 % par rapport à la convention actuellement en vigueur.
Aucun investissement d’ampleur de l’État dans les autres modes de transports dits collectifs n’est toutefois prévu. Ainsi, la participation de l’État aux dépenses d’infrastructures de transports collectifs passe de 200 millions d’euros en AE et 350 millions d’euros en CP en 2025 à, respectivement, 176 millions et 280 millions d’euros. De même, le plan « vélo et marche », qui a pour objectif de former au vélo dès le plus jeune âge, de faire du vélo une alternative aux autres moyens de transport et de développer une filière économique et industrielle du vélo, enregistre une baisse de ses CP : de 100 millions d’euros en 2025, ils sont fixés à 73 millions d’euros pour 2026. Moins de trois ans après son lancement, il semble toujours délaissé par les autorités publiques.
Les AE et CP de l’action 52 Transport aérien connaissent en revanche une augmentation importante, respectivement de + 120,89 % et de + 73,13 % par rapport à l’année précédente. Ces fonds sont notamment destinés au financement des investissements sur les aérodromes d’État et à l’exploitation d’aéroports. Il convient de relever dans ce cadre que le gouvernement annonce 20 millions d’euros d’AE en vue de la construction d’un nouvel aéroport à Mayotte. La rapporteure pour avis rappelle également que les territoires ultramarins font face à des défis climatiques et environnementaux majeurs, à Mayotte comme dans les Antilles – la montée des eaux, la dégradation des littoraux et les tensions sur la ressource en eau en sont autant d’exemples – qui exigent des investissements prioritaires et urgents dans leur adaptation au bouleversement climatique.
Enfin, dans la lignée des réductions de postes amorcées en 2025, le nombre d’emplois au sein de l’État et de ses opérateurs est en diminution, puisque le plafond des autorisations d’emplois prévoit 5 016 équivalents temps plein annuel travaillés (ETP) contre 5 049 en 2025.
Après une baisse importante l’an dernier (- 30 % en AE en - 16 % en CP), ce programme est légèrement revalorisé, sans pour autant atteindre les niveaux des années précédentes. Les AE passent ainsi de 253 millions d’euros en 2025 à 290 millions d’euros (+14,71 %) dans le projet de loi de finances. Les CP augmentent également de 268 millions à 269 millions d’euros (+7,86 %). Cette hausse globale traduit la volonté du gouvernement de soutenir la transition écologique du secteur maritime et de renforcer la durabilité de la pêche, dans le cadre des priorités fixées par la stratégie nationale pour la mer et le littoral. L’Exécutif entend ainsi respecter les engagements pris à Nice lors de la Conférence des Nations unies sur l’océan (UNOC). Les arbitrages rendus entre les différentes actions du programme révèlent cependant des évolutions contrastées.
Le budget alloué à l’emploi et à la formation maritime subit une baisse importante : les AE enregistrent une diminution de 35,4 millions d’euros à 31,99 millions d’euros (- 9,64 %) et les CP de 36,9 millions d’euros à 31,99 millions d’euros (- 13,31 %). Cette réduction intervient alors même que la présentation stratégique du programme met en avant le soutien aux lycées professionnels maritimes et à l’École nationale supérieure maritime (ENSM) comme priorités d’action. Le projet annuel de performances ne fournit aucune justification détaillée à cette contraction, laissant supposer une sous-budgétisation des besoins de formation dans un contexte où la transition écologique du transport maritime exige de nouvelles compétences. Cette baisse fragilise un secteur déjà confronté à une pénurie structurelle de marins et de techniciens qualifiés.
La plus forte diminution concerne les fonds dédiés à l’action 05 Soutien et systèmes d’information. Les AE chutent de 13,12 millions d’euros à 8,53 millions d’euros (- 35 %) et les CP de 13,71 millions d’euros à 9,21 millions d’euros (- 33 %). Cette action regroupe les dépenses de fonctionnement et d’investissement informatique du programme, notamment les systèmes de suivi, de gestion et de cartographie maritime. Cette réduction soulève des inquiétudes sur la pérennité et la sécurité des outils numériques indispensables à la coordination de l’action maritime. Dans un contexte marqué par une recrudescence des cybermenaces et par la nécessité de moderniser la donnée maritime, une telle baisse interroge sur la cohérence de la trajectoire numérique du ministère.
En parallèle, les principales revalorisations budgétaires concernent l’action 07 Pêche et aquaculture. Représentant 42,1 % des crédits du programme, elle voit ses AE passer de 74,54 millions d’euros à 122,28 millions d’euros (+64,04 %) et les CP de 68,15 millions d’euros à 95,60 millions d’euros (+40,28 %). Priorité stratégique, cette évolution s’explique par le renforcement du soutien à la filière pêche et aquaculture durable. Elle traduit un effort budgétaire destiné à accompagner la transition écologique du secteur, confronté à la hausse des coûts énergétiques et à la mise en œuvre de nouvelles réglementations européennes. Au-delà, cette action s’inscrit plus largement dans le cadre de la politique commune de la pêche (PCP) au niveau européen. Les cofinancements, notamment via le Fonds européen des affaires maritimes (FEAMPA), permettent ainsi à la France et l’Union d’améliorer la gestion des pêches ainsi que leur durabilité.
Enfin, les crédits alloués aux opérateurs sont maintenus ou en légère hausse, à l’exception de ceux dévolus à l’École nationale supérieure maritime car une mobilisation à hauteur de 2 millions d’euros est prévue sur sa trésorerie excédentaire.
Source : projet annuel de performances du programme 205 Affaires maritimes, pêche et aquaculture.
Force est de constater que les ambitions tout comme les moyens font défaut. Après une nette diminution l’an dernier, le programme 113 est une nouvelle fois raboté et voit ses AE et CP être réduits de manière significative. Les AE passent ainsi de 411 millions d’euros en 2025 à 378 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2026. Les CP connaissent eux aussi une baisse, à 395 millions d’euros pour l’année à venir contre 415 millions d’euros lors de l’exercice précédent.
Alors que le Gouvernement rappelle l’importance de la SNB 30 dans la planification écologique française, chacune des trois actions du programme enregistre des baisses importantes. L’action 01 Sites, paysages, publicité subit la plus forte diminution (- 16,42 % en AE et - 21,90 % en CP). Elle finance la politique de protection et de mise en valeur des sites et paysages ainsi que la réglementation de la publicité extérieure. Cette réduction de plus de 20 % en CP fragilise la capacité des services à assurer les missions de protection et de restauration paysagère, souvent menées en lien avec les collectivités. Elle signifie surtout et avant tout une marginalisation de la politique du paysage, pourtant constitutive de l’identité du programme.
Au cœur du programme, l’action Gestion des milieux et biodiversité, visant à la conservation et à la gestion du patrimoine naturel encaisse l’essentiel de la baisse en volume, ses AE, passant de 388 à 359 millions d’euros, tandis que ses CP sont réduits de 390 à 374 millions d’euros. Sous couvert de la résorption du déficit public, le budget présenté apparaît en décalage avec les orientations affichées et ne permet pas la montée en charge nécessaire au respect de nos engagements.
Concernant les opérateurs financés par ce programme, aucune évolution notable n’est à souligner. La majorité des crédits demeure stable, à l’exception de ceux de l’Agence de services et de paiement qui augmentent de 10 millions d’euros en AE et en CP afin de financer le nouveau guichet unique prévu par le plan d’accompagnement des circassiens de 2023. En parallèle, les subventions pour charges d’investissement dans les parcs nationaux sont réajustées par rapport à l’an dernier passant de 4,7 à 6,3 millions d’euros en AE et de 3,6 à 7,6 millions d’euros en CP. Cette hausse permet de retrouver des niveaux similaires à ceux de 2024 (9 millions en AE et de 7 millions en CP) sans acter un réengagement concret pour ces zones qui couvrent 8 % du territoire national et représentent le tiers des aires protégées françaises. Les crédits alloués à l’Office français de la biodiversité (OFB) sont stables. S’il est important que ces crédits se maintiennent, la rapporteure pour avis souhaite rappeler un constat établi par la Cour des comptes : l’OFB demeure moins financé que ses homologues européens.
crédits alloués aux agences nationales et régionales de protection
de la biodiversité en europe (en millions d’euros)
Source : « L’office français de la biodiversité, exercices 2019-2022 », rapport de la Cour des comptes, 17 avril 2024.
Par ailleurs, les plafonds d’emplois sont légèrement abaissés, de 5 339 à 5 312, l’OFB perdant notamment 14 ETPT.
Ce programme connaît une augmentation significative de ses AE et de ses CP de 151 millions d’euros environ par rapport à l’année 2025, pour atteindre 670,754 millions d’euros en 2026 (+29,27 %). Si cette évolution semble conséquente, elle ne retranscrit qu’une modification de périmètre résultant de l’ajout d’une action 15 Recherche dans le domaine des transports, de la construction et de l’aménagement financée par 97,9 millions d’euros en AE et en CP.
Le reste de l’augmentation est dû à une priorisation de l’action 13 Météorologie afin de permettre le renouvellement des supercalculateurs de Météo France dans le cadre d’un futur marché. Le coût du prochain supercalculateur est estimé à 415 millions d’euros. Ce gonflement conjoncturel masque en réalité une stagnation, voire une légère diminution, des crédits alloués aux autres actions du programme. Le projet de budget actuel acte ainsi l’érosion structurelle des financements pour le CEREMA et l’IGN, pourtant essentiels à la mise en œuvre territoriale de la transition écologique et à la production de la donnée géographique publique. L’évolution des plafonds d’emplois s’inscrit dans cette grille de lecture. Le total d’ETPT des opérateurs du programme passe ainsi de 6 532 à 6 490. Au détail, si le volume d’emplois est préservé à Météo France, le CEREMA et l’IGN perdent respectivement 25 et 17 ETPT.
Source : projet annuel de performances du programme 159 Expertise, information géographique et météorologie.
Les AE et les CP du programme 181 sont en hausse dans le projet de loi de finances pour atteindre respectivement 2 646 millions (+86,64 % par rapport à 2025) et 1 484 millions d’euros (+10,01 %) en 2026. Cette apparente majoration ne résulte cependant pas d’une revalorisation des moyens dédiés mais d’un changement du mode de financement de l’ADEME à compter de 2026. Jusqu’en 2025, l’État versait à l’agence une subvention pour charges de service public (SCSP) unique, avec un total d’AE égal à celui des CP. Cette SCSP couvrait à la fois les dépenses de fonctionnement de l’agence et ses actions de politique publique (soutiens aux projets, aides, appels à initiatives).
Désormais, ce système est scindé en deux : le budget de moyens (masse salariale, locaux, gestion interne) restera financé par une SCSP classique, tandis que le budget de politique publique, soit les aides et les interventions de l’agence pour soutenir la transition écologique, sera financé par une dotation d’intervention dont le montant d’AE correspondra aux autorisations d’engagement budgétées par l’agence. Les totaux d’AE et de CP seront donc différents. Cette nouvelle présentation crée pour 2026 un décalage entre AE et CP : les AE (2 093 millions d’euros) incluent un rattrapage technique de 856 millions d’euros, destiné à couvrir les paiements qui devront encore être réalisés au regard des engagements passés sous l’ancien système. Le solde des AE (1 237 millions d’euros) correspond aux nouveaux engagements pris en 2026 ; les CP (1 059 millions d’euros) serviront, eux, à payer à la fois les dépenses courantes, le fonctionnement de l’agence et les premiers paiements liés aux nouveaux projets 2026, dont les suites seront étalées sur plusieurs exercices. Le changement de présentation budgétaire ne traduit donc pas une hausse soudaine des moyens, mais une mise en cohérence comptable entre les engagements pluriannuels et les paiements réels. 2026 est par conséquent une année de transition technique pour adapter la gestion budgétaire de l’ADEME à son nouveau mode de financement. S’agissant des autres actions du programme, les crédits sont stables.
Il convient de noter qu’une action 15 est créée pour distinguer le financement du phénomène de retrait-gonflement des argiles, auparavant intégré au fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM). Le retrait-gonflement des argiles (RGA) constitue, depuis ces dernières années, le phénomène le plus coûteux pour le régime d’indemnisation des catastrophes naturelles, dit « régime Cat Nat ». La création d’une action ad hoc permet d’augmenter la lisibilité budgétaire et de mieux appréhender les effets du RGA. Enfin, les plafonds d’emplois des opérateurs de l’État, l’ADEME et l’INERIS se maintiennent.
Après un tronçonnage l’an dernier, le budget du programme 174 est à nouveau amputé. Les crédits du programme 174 diminuent drastiquement, passant de 1 919 millions à 1 244 millions d’euros, s’agissant de ses AE, et de 1 483 millions à 1 232 millions d’euros pour ses CP. Cette forte contraction est principalement imputable à la suppression du bonus écologique et de la prime à la conversion, remplacés, en partie, depuis le 1er juillet 2025, par un nouveau dispositif.
Auparavant, l’achat d’une voiture électrique ou hybride rechargeable sous conditions donnait droit à une subvention directe de l’État, versée sous la forme d’un bonus écologique prévu à l’action 03 Aides à l’acquisition de véhicules propres. À ce bonus est désormais substituée une « fiche CEE bonifiée ». Le dispositif des certificats d’économies d’énergie (CEE), créé par les articles 14 à 17 de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique (loi POPE), repose sur une obligation triennale de réalisation d’économies d’énergie en CEE (1 CEE = 1 kWh cumac d’énergie finale), imposée par les pouvoirs publics aux fournisseurs d’énergie et aux vendeurs de carburant automobile. Les obligés sont tenus d’atteindre certains objectifs d’économies d’énergie sous peine de sanction. Pour ce faire, ils peuvent réaliser des opérations d’économies d’énergie par eux-mêmes, inciter les consommateurs à en faire, financer des programmes concourant à la maîtrise des consommations énergétiques ou acheter directement des CEE sur un marché secondaire.
Schéma simplifié du fonctionnement du dispositif des CEE
Si le gouvernement assure que le montant des aides sera équivalent à celui de l’année en cours, la mutation du mécanisme précédent apparaît problématique à la fois au regard de la forme et du fond. Exfiltrées du programme, ces aides deviennent parafiscales, supportées uniquement par les fournisseurs d’énergie via leurs obligations. L’État réduit artificiellement ses dépenses en perdant la main sur un dispositif jusqu’alors intégré au budget. Par ailleurs, ce changement pourrait ralentir la conversion du parc automobile au regard de sa complexité et de son manque de prévisibilité, la valeur des CEE fluctuant sur le marché. Ces limites ont ainsi été relevées par la Cour des comptes dans une récente communication au titre évocateur ([3]). Enfin, il est établi que les fournisseurs d’énergie répercutent dans leur prix de vente les coûts nécessaires à l’obtention des certificats. In fine, ce sont donc l’ensemble des ménages et les entreprises du secteur tertiaire qui paient ces coûts à travers leurs factures d’énergie ([4]). Cette évolution est injuste et affectera en premier lieu les ménages les moins favorisés. Il s’agit d’une régression budgétaire traduisant une double fracture sociale et écologique. En recentrant les dispositifs d’aide sur des mécanismes de marché, le gouvernement renonce à une approche solidaire de la transition écologique. Or, celle-ci ne peut être un luxe réservé aux ménages aisés mais doit, à l’inverse, être un levier d’égalité et de pouvoir d’achat.
Concernant le chèque énergie, la suppression de la taxe d’habitation sur la résidence principale, le 1er janvier 2023, a perturbé l’établissement d’une nouvelle liste de bénéficiaires du chèque énergie pour 2024. Cette difficulté s’estompe avec la mise en place d’une nouvelle procédure d’identification des bénéficiaires potentiels qui s’appuie sur les paramètres fiscaux des ménages et sur le croisement du numéro de compteur d’électricité ainsi que du numéro fiscal du titulaire du contrat de fourniture d’électricité. L’Exécutif admet toutefois que ce nouveau mode de fonctionnement conduit à une réduction transitoire du nombre des bénéficiaires les premières années de mise en œuvre.
La disparition du bonus écologique et la sous dotation du chèque énergie frappent avant tout les foyers modestes et les classes populaires, déjà confrontées à la hausse des coûts de l’énergie et aux difficultés de mobilité quotidienne. De tels choix politiques creusent les inégalités entre les ménages urbains et ruraux, entre ceux qui disposent d’alternatives de transport et ceux qui en sont privés.
L’action 09 Soutien aux énergies renouvelables électriques en métropole continentale connaît ainsi une hausse notable de ses AE et de ses CP, passant de 4 398 millions d’euros en 2025 à 7 250 millions d’euros en 2026. Cette action permet notamment à l’État d’encourager la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables via des infrastructures éoliennes, solaires, hydrauliques ou de production de biogaz. Pour ce faire, les producteurs d’énergies renouvelables bénéficient de dispositifs de soutien public prenant la forme de contrats d’achat ou de compléments de rémunération attribués à travers un mécanisme de guichet ouvert ou une procédure de mise en concurrence. Le surcoût résultant de la mise en œuvre de ces dispositifs de soutien public, qui correspond à la différence entre le coût d’achat de l’électricité produite et le prix de marché, est compensé aux fournisseurs historiques et organismes agréés pris en charge par le programme 345. Le niveau du soutien public évolue donc avec les volumes de production d’électricité renouvelable, qui bénéficient de ces contrats d’achat et de complément de rémunération, et avec les prix du marché de l’électricité. Il augmente donc quand les prix baissent. La hausse constatée correspond ainsi à des volumes d’installations renouvelables toujours dynamiques et à la baisse des prix de marché de l’électricité, qui renchérit le coût du soutien public. Si de nouveaux crédits ne sont pas dédiés en tant que tel au développement des énergies renouvelables, cette évolution budgétaire traduit la mise en production effective des projets lancés ces dernières années. Le mouvement ainsi amorcé doit se poursuivre et être encouragé afin d’atteindre le premier objectif de ce programme : Contribuer à porter à 40 % la part des énergies renouvelables dans la production d’électricité en 2030.
Le projet de loi de finances prévoit une diminution des AE et une légère augmentation des CP du programme, ceux-ci passant respectivement de 3 182 millions à 3 151 millions d’euros et de 3 186 millions à 3 226 millions d’euros environ entre 2025 et 2026. Après la suppression de 322 ETPT sur le programme 217 en 2025, une nouvelle réduction des effectifs est prévue avec 316 ETPT en moins pour un plafond d’autorisation des emplois s’élevant à 34 559 ETPT. Ces diminutions des totaux d’emplois ne sont pas toutes brutales et résultent également de mutualisations ou de transferts vers d’autres administrations.
Après une baisse drastique de près de 60 % des AE l’an dernier par rapport à 2024, le projet de loi de finances pour 2026 menace une nouvelle fois profondément la pérennité du Fonds vert. Les AE sont ainsi portées à 650 millions d’euros et les CP à 1 085 millions d’euros pour l’exercice à venir, soit une diminution, dans le cas des AE, de l’ordre de 40 % des crédits.
Si le gouvernement prétend pérenniser le Fonds vert, créé en 2022, la forte diminution des crédits qui lui sont octroyés met à mal l’investissement des collectivités en matière de planification écologique. Une telle décision est d’autant plus contestable que les collectivités ont manifesté un véritable intérêt pour le dispositif, notamment pour financer des politiques de rénovation énergétique des bâtiments et de l’éclairage public, de renaturation des villes ou pour la mise en place de la stratégie nationale pour la biodiversité. Cette baisse touche ainsi le cœur même de l’écologie populaire. Les communes rurales, les petites villes et les quartiers prioritaires de la ville, qui dépendent du Fonds vert pour financer leurs rénovations énergétiques ou la renaturation urbaine, se retrouvent une fois encore privés des moyens nécessaires. En fragilisant l’investissement local, le gouvernement tourne le dos à une transition écologique ancrée dans les territoires et accessible à toutes et tous.
La réalisation du bilan de la deuxième année d’exécution du Fonds vert confirme son rôle dans l’accélération de la transition écologique des territoires. L’exercice 2024 a été marqué, comme en 2023, par la mobilisation de nombreux acteurs locaux porteurs de projets dans tous les territoires. Au total, 8 667 projets ont été financés en 2024, pour un montant de subventions s’élevant à 1,6 milliard d’euros d’autorisations d’engagement. Près de 13 434 dossiers ont été soumis à l’instruction des services de l’État en 2024, traduisant l’intérêt des acteurs locaux pour le Fonds vert. Face à ces flux, les 650 millions d’euros d’AE prévues pour 2026 apparaissent bien dérisoires. La diminution des moyens aura des conséquences concrètes dommageables pour l’environnement et les collectivités. Ainsi, tous les indicateurs des objectifs du programme, sans exception, sont minorés : effet de levier ; taux moyen d’économies d’énergie ; surface de friches recyclées. Priver le fonds de tout moyen d’action est un choix incompréhensible au moment où le cycle d’investissements communaux et la conjoncture des finances locales conduisent déjà à une réduction de l’investissement local. La rapporteure pour avis est également affligée par la suppression définitive de la mesure « Soutien au tri à la source et à la valorisation des déchets ». De 2023 à 2025, le Fonds vert a contribué par cette mesure à favoriser une production locale d’énergie et d’autres ressources – production de biogaz à partir des déchets organiques des ménages, de fertilisants ne nécessitant pas de gaz naturel importé pour être produits – tout en limitant les effets nuisibles liés au traitement des déchets. Cette mesure a permis de généraliser le tri à la source des biodéchets, qui constitue par ailleurs un levier majeur pour les collectivités.
Le projet de loi de finances pour 2026 dote ce programme de 345 millions d’euros en AE et 359 millions d’euros en CP, soit une baisse en AE et en CP d’environ 2 %. L’année prochaine, l’ASNR renforcera sa structuration en réorganisant les périmètres métiers ainsi que les processus opérationnels. En parallèle, l’expertise de l’Autorité devrait être grandement sollicitée dans le cadre de la relance du secteur nucléaire et plus particulièrement dans la conduite des grands dossiers nationaux (construction d’une première série de réacteurs EPR2, développement des petits réacteurs modulaires, réexamens de sûreté et la poursuite de fonctionnement des installations nucléaires, ainsi que la gestion des matières et des déchets radioactifs).
Enfin, la mission comporte un nouveau programme 362 Écologie – mise en extinction du plan de relance. Au regard de l’état d’avancement de certains dispositifs d’investissements, pour lesquels les décaissements sont par nature pluriannuels, et compte tenu de la clôture de la mission Plan de relance, le programme 362 est rattaché à la mission Écologie, Développement et mobilités durables à compter de 2026, et ce, jusqu’à son extinction définitive. Le programme poursuivra son objectif de mise en extinction, conformément aux engagements pris par le gouvernement au moment de la crise sanitaire de mettre en place des dispositifs non pérennes, avec la finalisation de nombreuses mesures attendues en 2026. Aucune ouverture de crédit n’est donc proposée, la couverture de ses besoins reposant sur la mobilisation exclusive des crédits déjà ouverts et non consommés qui seraient reportés sur 2026.
Sur le volet strictement budgétaire, la rapporteure pour avis estime que la mobilisation de la France dans le domaine environnemental est loin d’être à la hauteur des enjeux, au regard du montant des crédits dédiés à la mission Écologie, développement et mobilité durables et de leur utilisation. Elle regrette que la transition écologique soit sacrifiée pour des raisons budgétaires et utilisée comme variable d’ajustement. Au-delà, l’analyse du premier ministre dans le cadre de sa déclaration de politique générale est erronée : la crise climatique et écologique n’est pas « la racine » du malaise politique actuel. Elle en est, à l’inverse, le symptôme le plus préoccupant.
II. Les exportations de déchets des pays développés vers les pays en développement ou la manifestation d’un néo-colonialisme
« Les pays riches ont une dette climatique envers les pays du Sud ». ([5]) Dans le cadre de ses travaux sur un mécanisme international de redistribution pour faciliter l’adaptation au changement climatique des pays les plus défavorisés, l’économiste Esther Duflo a souligné l’existence d’inégalités environnementales. Les pays en développement subissent en effet davantage les conséquences de la dégradation de l’environnement que les pays développés alors même qu’ils contribuent sensiblement moins aux différentes pollutions observées.
Si des mesures ont été prises pour tenter de rééquilibrer ces rapports, la persistance d’une asymétrie entre Nord et Sud a conduit certains chercheurs à s’interroger sur l’absence ou, à l’inverse, le poids des structures mises en place pour préserver la planète. Tout en poursuivant un objectif écologique, celles-ci participeraient au maintien de formes de domination au détriment des pays en développement, dans le cadre d’un colonialisme dit « vert » ([6]). Sous couvert d’avancées environnementales, certains projets seraient loin d’être neutres et favoriseraient la persistance d’un système d’exploitation par les économies les plus avancées. La création de certaines zones protégées, la poursuite de plusieurs chantiers extractifs ou encore l’exploitation de la ressource en eau ont pu être analysés sous ce prisme. Ce phénomène prend une dimension particulièrement visible à travers la gestion des déchets.
Entendu comme « toute substance ou tout objet, ou plus généralement tout bien meuble, dont le détenteur se défait ou dont il a l’intention ou l’obligation de se défaire » ([7]), le déchet est par définition mal aimé. Associé à la saleté et à la pauvreté, il est révélateur des dynamiques de société. Marqueur social, rebut ou marchandise, fluctuant entre le temporaire et le permanent, oscillant entre flux et stock, le déchet répond également à une logique de frontière géographique ([8]). Il s’exporte ainsi généralement du Nord vers le Sud.
Au-delà des volumes, c’est la nature même des déchets exportés qui est mise en cause. Parmi les nombreuses distinctions opérées, sont notamment différenciés : les déchets dits banals de ceux qualifiés de dangereux ; les déchets valorisables, dont la réutilisation, le recyclage ou la transformation sont possibles, des déchets ultimes pour lesquels seule une élimination définitive est réalisable. Or, cette nomenclature classique se brouille dans les pays en développement où les déchets banals deviennent dangereux. En outre, l’envoi constant de déchets depuis les pays développés alourdit la charge qui pèse sur des infrastructures congestionnées et confrontées à une hausse de la production locale de déchets. Dès lors, plusieurs tonnes de matières valorisables sont laissées à l’abandon en pleine nature, faute de capacité de recyclage, devenant de facto des déchets ultimes. Les populations se retrouvent exposées à des pollutions engendrées par des matériaux qu’elles n’ont pas produits.
Les exportations de déchets ne relèvent donc pas seulement d’un enjeu technique propre à leur traitement. Elles constituent une manifestation tangible des rapports de pouvoir hérités de l’histoire coloniale et des logiques économiques mondialisées. Loin d’incarner une solidarité internationale, ces transferts prolongent une dynamique d’externalisation des coûts environnementaux vers les territoires les moins équipés pour y faire face. L’évolution de la réglementation en la matière est un premier pas vers une meilleure prise en compte de ces situations. Toutefois, l’accumulation des déchets pendant des décennies a conduit à un déséquilibre difficilement résorbable et dont les effets ne se mesurent que des années plus tard. Si les flux se tarissent, des compensations financières pourraient être nécessaires en parallèle afin de pourvoir à une véritable justice environnementale. Au-delà d’une approche parcellaire par le biais des interrogations sur l’usage du plastique ou des critiques de la fast fashion, une réflexion globale sur la gestion internationale des déchets est désormais nécessaire afin de repenser notre modèle de transition écologique.
A. L’augmentation continue de la production de déchets nourrit une injustice environnementale conflictuelle
1. La production de déchets, en hausse constante sur tous les continents, engendre des flux transfrontaliers importants
a. Les volumes de déchets générés à l’échelle mondiale vont être démultipliés d’ici 2050
En 2015, le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) estimait le volume de l’ensemble des déchets produits sur la planète, par an, entre 7 et 10 milliards de tonnes ([9]). Cette évaluation quantitative est cependant approximative en raison des informations lacunaires provenant de certains pays et de la nature plurielle des déchets. Dans un souci méthodologique et de clarté, il est habituellement convenu de ne retenir que l’évolution de la production de déchets solides municipaux. Ce type de déchets comprend les ordures ménagères, les encombrants, des déchets verts, des déchets agricoles, des déchets de bois et certains déchets industriels banals ([10]). Se limiter à cette catégorie facilite les comparaisons internationales et permet d’observer la majorité des conséquences délétères pour les populations, induites par une mauvaise gestion des déchets. Ne sont donc pas inclus dans les chiffres utilisés les déchets industriels ou de construction. Leurs flux peuvent par ailleurs être supérieurs à ceux des déchets solides municipaux mais le degré d’industrialisation de chaque pays est plus contrasté. Au demeurant, si les déchets municipaux ne représentent qu’une fraction du total des déchets, leur gestion et leur traitement absorbent généralement plus d’un tiers des dépenses publiques de lutte contre la pollution ([11]).
D’après la Banque mondiale ([12]), 2,01 milliards de tonnes de déchets solides municipaux ont été générés en 2016. Il s’agit principalement de déchets alimentaires, auxquels s’ajoutent des déchets plastiques et papier.
Selon des projections à données constantes ([13]), le monde devrait produire 2,59 milliards de tonnes de déchets solides municipaux en 2030 et 3,40 milliards de tonnes à l’horizon 2050. Cette évolution représente une hausse de près de 70 % de la production sur trois décennies.
Des disparités existent en fonction des pays et de leur niveau de revenu. La quantité totale de déchets générés dans les pays à revenu faible triplerait d’ici 2050. La plus forte hausse aurait lieu en Afrique subsaharienne, en Asie du Sud, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, où, d’ici 2050, les volumes de déchets produits devraient respectivement tripler et doubler. Toutes choses égales par ailleurs, les pays développés émettraient toujours plus de déchets en termes de production par habitant.
([14])
b. Le traitement des déchets s’inscrit dans une logique de rationalisation économique impliquant une externalisation des coûts
Autrefois uniquement perçus comme facteurs de désagréments et de maladies, les déchets sont devenus une marchandise à part entière au cours du XXe siècle. La raréfaction des ressources naturelles, l’apport du progrès technique en termes d’innovation de traitement et la généralisation de certains modèles d’économie circulaire ont ainsi contribué à transformer le déchet en une ressource de valeur à laquelle il est possible de lier un prix. Le marché du déchet était évalué, dès 2009 ([15]), à près de 390 milliards de dollars pour l’ensemble des pays de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) et des grandes économies émergentes. Dans le cadre de ce qui a pu être vu comme une transaction gagnant-gagnant, les pays développés ont alors eu tendance à exporter leurs déchets pour profiter de coûts réduits aussi bien en termes de main-d’œuvre que d’infrastructures.
En effet, le financement des systèmes de gestion des déchets solides représente une charge importante à la fois au regard des investissements en capital nécessaires que des coûts de fonctionnement journalier. Ainsi, dans les pays à revenu élevé, les coûts d’exploitation liés à la gestion intégrée des déchets, y compris la collecte, le transport, le traitement et l’élimination, dépassent généralement 100 dollars par tonne. Les pays à faible revenu dépensent moins pour ces opérations, avec un coût moyen d’environ 35 dollars par tonne ([16]). La part importante de capital humain nécessaire aux opérations de tri et de transport explique ces différences tarifaires. L’avantage comparatif induit encourage les pays développés à exporter vers les pays en développement selon une logique de rationalisation des coûts. Pour les pays importateurs, ce commerce est également présenté comme bénéfique en permettant la récupération à moindre frais de ressources et la création d’emplois.
Si le traitement au niveau local demeure la solution privilégiée par les pays, les déchets exportés ne représentant que 9 % des déchets générés sur la planète, le flux d’exportations augmente depuis les années 2000 pour atteindre 182 millions de tonnes échangées en 2018. L’Union européenne a contribué à ces transferts à hauteur de 32,7 millions de tonnes en 2020, dont 13,7 millions de tonnes à destination de la Turquie ([17]). Parmi ces exportations, certaines catégories sont également plus représentées ou ont tendance à l’être. Ainsi, les quantités de textiles usagés exportés depuis l’Union européenne ont notamment triplé au cours des deux dernières décennies, passant d’un peu plus de 550 000 tonnes en 2000 à près de 1,7 million de tonnes en 2019, dont 46 % vers l’Afrique et 41 % vers l’Asie.
Les pays receveurs ont aussi évolué. La Chine était encore récemment la première destination des exportations mondiales de déchets. Réceptionnant la moitié des déchets exportés sur la planète, Pékin décida en 2017, pour des raisons économiques et environnementales, d’interdire les importations de vingt-quatre catégories de déchets solides tout en relevant drastiquement les taux d’impureté acceptables pour les déchets plastiques, à 0,05 % contre 10 % auparavant ([18]). Ce durcissement réglementaire a entraîné un report des exportations vers d’autres pays en développement en Asie et en Afrique. La Malaisie, l’Indonésie, le Vietnam, la Turquie et le Ghana figurent ainsi désormais parmi les premiers importateurs de déchets au monde.
2. Les problèmes environnementaux, économiques et sociaux induits affectent avant tout les pays du Sud, matérialisant un « colonialisme des déchets »
a. Les inégalités mondiales de gestion des déchets ont des conséquences négatives et durables pour les pays en développement
Si les coûts de la gestion des déchets sont, en termes absolus, inférieurs dans les pays en développement, le poids relatif pour les localités y est plus important que dans les pays développés. Ainsi, ces coûts représentent en moyenne 20 % des budgets municipaux des pays à revenu faible contre 10 % dans les pays à revenu intermédiaire et 4 % dans les pays à revenus élevés ([19]). En outre, le recouvrement des coûts des services de gestion des déchets varie considérablement selon les niveaux de revenu des pays. La population doit débourser en moyenne 35 dollars par an pour la gestion de ses déchets dans les pays à revenu faible contre 170 dollars par an dans les pays à revenu élevé ([20]). En raison de ces montants, les systèmes de gestion des déchets sont fortement subventionnés par les gouvernements. Les pays où aucune organisation n’est planifiée via des structures dédiées et où le recours à l’impôt est malaisé ont des difficultés à refinancer ces dépenses. Dans les faits, le recouvrement total ou quasi total des coûts n’est réalisé que dans les pays à revenu élevé.
Cette réalité économique couplée à l’augmentation des flux a conduit, dans les pays en développement, à un traitement souvent partiel voire à une absence de traitement. Les déchets suivent alors un parcours moins vertueux, qui s’achève par l’enfouissement, la mise en décharge ou l’incinération. Au vu de leur simplicité, les deux dernières options sont le plus souvent retenues. Dans les pays à revenu faible, 93 % des déchets se retrouvent ainsi dans des décharges à ciel ouvert, contre 2 % dans les pays à revenu élevé. Cette fin de vie du déchet a des conséquences environnementales, sanitaires, sociales et économiques.
Les déchets solides municipaux ont généré 1,6 milliard de tonnes d’équivalent carbone (CO2) en 2016 ([21]), contribuant grandement aux émissions de gaz à effet de serre (GES) sur la planète. Ce total devrait être porté à 2,6 milliards de tonnes en 2050. Les émissions de GES résultent d’une collecte inadéquate des déchets, de décharges sauvages et de l’incinération des détritus. Les déchets libèrent en effet du méthane lorsqu’ils sont éliminés dans un environnement pauvre en oxygène. Ce gaz est par ailleurs hautement inflammable, augmentant les risques d’incendies dans les lieux d’accumulation ou de traitement. Dans les années 1980, le quartier des chiffonniers du Caire, Manshiyat Nasser, a ainsi été presque intégralement détruit par le feu. Les substances chimiques toxiques provenant des déchets déversés ou de leur décomposition contaminent également les sols et l’eau par un phénomène de lixiviation. Des terres et des cours d’eau se retrouvent alors souillées sur plusieurs kilomètres à la ronde. Lorsque l’incinération est privilégiée, la combustion des déchets, quelle qu’en soit la nature, libère également des produits chimiques nocifs et des microparticules dans l’atmosphère. Portées par les vents, les cendres et effluves sont dispersées et propagées sur de grandes distances.
Ces pollutions diffuses affectent fortement les écosystèmes, en terre et en mer. Plusieurs études scientifiques ont montré que les végétaux ainsi que les espèces animales sauvages et domestiques étaient contaminées à des degrés divers, notamment par des résidus de plastique ([22]). L’emblématique vortex de déchets du Pacifique Nord, aussi appelé « septième continent », cristallise ce phénomène. Les particules de plastique supplantent la masse de planctons et sont ingérées en quantité par les animaux marins. Touchant toute la chaîne alimentaire, cette pollution entraîne la mort de plusieurs milliers d’entre eux chaque année et, par ricochet, affecte également l’homme. Les effets sanitaires sur l’espèce humaine sont manifestes et touchent en premier lieu les populations locales. La proximité des communautés avec les déchets occasionne des pathologies respiratoires, intestinales et neurologiques. Les cas de dysenterie et d’asthme chronique sont ainsi fréquents dans les quartiers concernés. Les déchets jetés peuvent également constituer une source de nourriture et d’abri pour les rats, les moustiques et les charognards, véhiculant des maladies telles que la dengue. Les risques sont plus importants pour les personnes travaillant, souvent de manière informelle, dans le secteur du déchet. Nombre d’entre elles manipulent en effet les détritus sans équipement de protection. Ne disposant pas de couverture médicale professionnelle, elles n’ont pas accès au système de soin en cas de maladie ou d’accident. Au demeurant, ce travail de tri et de traitement échoie généralement à des populations marginalisées, d’ores et déjà fragiles, et, en premier lieu, à des femmes et à des enfants.
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La production de déchets plastiques et ses conséquences La production mondiale de plastique a connu une croissance fulgurante au cours des dernières années : le volume annuel est passé de 2,3 millions de tonnes en 1950 à près de 460 millions de tonnes aujourd’hui. Engendrant chaque année 400 millions de tonnes de déchets plastiques, la consommation est marquée par un fort usage domestique. Ainsi, 75 % de ce total correspond à des déchets solides municipaux. Le secteur des emballages en est le principal responsable, représentant 36 % des plastiques produits, dont 85 % finissent mal gérés ou en décharge. Plus généralement, depuis 1950, moins de 10 % des 6 300 millions de tonnes de déchets plastiques générés ont été recyclés ([23]). En France, 4,5 millions de tonnes de déchets plastiques sont produites par an, représentant 1,4 % du total mondial. Parmi ces déchets français, près de 400 000 tonnes sont exportées vers des pays tiers pour recyclage. Ces exportations, intégrées dans les bilans quantitatifs des pays importateurs, permettent d’alléger artificiellement ceux des pays exportateurs. Les pays en voie de développement sont particulièrement exposés à la pollution plastique car les infrastructures nécessaires au traitement de ce matériau sont encore insuffisantes ou submergées par les flux importés. La pollution plastique est par ailleurs particulièrement insidueuse. Pouvant mettre plus de 400 ans à se dégrader, le plastique suit aussi le cycle de l’eau et échoue dans les mers où il représente 85 % des polluants marins et près de 73 % des déchets retrouvés sur les plages. En France, chaque année environ 80 000 tonnes de plastiques non collectés terminent leur parcours dans la nature, dont 11 200 tonnes directement dans la mer Méditerranée. Sous l’effet de l’eau, du sel et du soleil, ces déchets se fragmentent en microparticules qui pénètrent la chaîne alimentaire. Leur ingestion provoque des intoxications et la mort de nombreuses espèces. Transportés par les courants marins, les plastiques s’accumulent dans les gyres océaniques subtropicaux. Le cas le plus emblématique est le « continent de plastique » du Pacifique Nord, dont la superficie est estimée à six fois celle de la France, et qui présentait, en 2022, des concentrations de microplastiques allant jusqu’à 10 millions de particules par km². Enfin, la pollution plastique représente un risque sanitaire majeur pour l’homme. Les microplastiques contaminent l’eau potable, s’infiltrent dans le corps humain et perturbent à long terme le système immunitaire, l’appareil respiratoire ainsi que le fonctionnement endocrinien. Ils sont associés à une baisse de la fertilité et à une augmentation du risque de cancers. |
b. En perpétuant et en aggravant des modèles de domination, cet état de fait s’inscrit dans une nouvelle forme de colonialisme par les déchets
Représentant environ 16 % de la population mondiale, les pays à revenu élevé produisent près de 34 % des déchets mondiaux. Ils sont également à l’origine d’environ 60 à 80 % des volumes exportés. Au-delà, si aujourd’hui les exportations des pays développés sont majoritairement à destination de leurs voisins, les importations des pays en développement proviennent toujours majoritairement de ces pays. Les flux demeurent donc à sens unique. Cette unilatéralité interpelle dès lors que ses effets reposent essentiellement sur les mêmes populations, dans les pays en développement. Dès 1989, les pays africains parties aux négociations sur les exportations de déchets ([24]) caractérisaient cette situation par une nouvelle expression : le « colonialisme par les déchets ».
La logique économique de marché précitée s’avère prédatrice et reprend, à bien des égards, certains codes du système colonial. Jusqu’au XIXe siècle, les métropoles exploitaient les ressources naturelles des colonies en captant les bénéfices réalisés. Aujourd’hui, la domination se matérialise non plus par une extraction mais par un renvoi des surplus nuisibles et nocifs. Si l’occupation du foncier n’est plus un objectif affiché, l’exportation des externalités négatives participe à une forme d’appropriation des sols, de l’eau et de l’air des territoires concernés, le tout au détriment des populations locales. La dynamique sous-jacente est donc identique : les économies développées s’arrogent les gains liés à la production, la croissance et la consommation, tandis que les périphéries pauvres assument les coûts inhérents à cette organisation.
Outre les effets environnementaux, sanitaires et sociaux mentionnés, cette dynamique a pour effet de maintenir les pays à revenu faible dans une situation de sous-développement. En effet, alors même que la production de déchets au niveau local est amenée à augmenter considérablement (cf. supra), les installations sont saturées. La Malaisie dispose ainsi, par exemple, de capacités de recyclage équivalentes à 515 000 tonnes de plastique mais en importe d’ores et déjà 835 000 tonnes par an ([25]). Le développement économique malaisien est et sera entravé par cet engorgement. L’afflux de déchets extérieurs entraîne également une baisse des prix des matériaux recyclables et contribue, par conséquent, à une plus grande paupérisation des travailleurs du secteur. Au-delà, les systèmes de gestion des pays en développement ont tendance à privilégier le traitement des déchets des pays développés, ceux-ci étant potentiellement de plus grande valeur tout en étant déjà prétraités avant importation. De fait, les ordures produites sur place sont ignorées et laissées en décharge. La difficulté de recycler ces déchets nationaux rend les pays en développement encore davantage dépendants aux flux des exportations pour obtenir des matières premières secondaires. Cette situation a pu motiver des accusations paternalistes de certains pays développés critiquant la mauvaise organisation locale des pays à revenu faible, sans remettre en question les causes mêmes du phénomène. Les pays receveurs demeurent ainsi insérés dans une chaîne économique où ils n’ont qu’une faible maîtrise des conditions d’échange.
Le déséquilibre décrit se double en effet d’une asymétrie juridique et institutionnelle. Les pays exportateurs s’appuient sur des normes environnementales strictes, rendant coûteux le traitement au niveau national, tout en tirant profit de la relative faiblesse des régimes réglementaires des pays à revenu faible. Loin d’être un choix pleinement consenti, l’acceptation des importations s’inscrit dans des rapports de force inégaux marqués notamment par des pressions économiques, une dépendance aux investissements étrangers, ou encore des marges de négociation limitées sur la scène internationale. À cette domination matérielle et institutionnelle s’ajoute une domination symbolique. Considérer certains territoires comme des zones de déversement traduit une hiérarchisation implicite des espaces et des populations. Cette logique d’assignation dévalorisante, dénoncée par plusieurs organisations de la société civile ([26]) reproduit les représentations héritées de l’époque coloniale, où certaines régions du monde étaient reléguées au rang de périphéries fonctionnelles.
Les mots de l’ancien chef économiste de la Banque mondiale, Lawrence Summers, sont à cet égard édifiants. S’interrogeant en 1991 sur la pertinence d’encourager la « migration » des industries polluantes vers les pays en développement, il affirmait que « les pays sous-peuplés d’Afrique sont largement sous-pollués. La qualité de l’air y est d’un niveau inutilement élevé par rapport à Los Angeles ou Mexico. […] La logique économique qui sous-tend le déversement d’une grande quantité de déchets toxiques dans les pays où les salaires sont les plus bas est impeccable et nous devons l’accepter ». Décrié, ce raisonnement issu d’une note interne rendue publique est loin d’être anecdotique. Il s’oppose frontalement aux réflexions élaborées au même moment au cours des négociations relatives au traité international sur les mouvements transfrontières de déchets, la convention de Bâle.
B. L’evolution de la réglementation des pays développés est encourageante mais demeure insuffisante pour rééquilibrer les logiques de domination nord-sud
1. Les réglementations internationales et européennes ont été renforcées afin de protéger les populations et l’environnement
a. Au niveau international, la convention de Bâle et la décision du Conseil de l’OCDE définissent le contrôle des mouvements transfrontières de déchets
La réglementation du transfert transfrontalier de déchets est récente. Marquée par les péripéties du cargo Khian Sea ([27]) en 1986, la communauté internationale s’est accordée pour encadrer, limiter et contrôler les flux de déchets dangereux. Deux instruments principaux structurent le dispositif réglementaire actuel : la convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et de leur élimination et la décision du Conseil de l’OCDE sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets destinés à des opérations de valorisation. Ces textes, complémentaires, fixent les principes et les obligations applicables aux États en matière d’exportation, d’importation et de traitement des déchets.
Adoptée le 22 mars 1989 et entrée en vigueur en 1992, la convention de Bâle constitue le principal cadre international régissant les échanges de déchets dangereux. Ratifiée par cent-quatre-vingt-douze États et l’Union européenne, elle vise à protéger la santé humaine et l’environnement contre les effets nocifs résultant de la production, de la gestion et du transport de ces déchets. À cette fin, la convention précise en premier lieu les contours de la notion de « déchet dangereux ». Sont considérés comme dangereux les déchets définis comme tels par les législations nationales ou ceux correspondant aux substances mentionnées à l’annexe I et répondant aux caractéristiques énumérées ([28]) à l’annexe III. La plupart des déchets relevant de cette classification proviennent d’activités industrielles, minières et pharmaceutiques. D’autres déchets sensibles sont volontairement écartés du champ de la convention et leur statut est régi par des textes spécifiques, à l’instar des déchets nucléaires.
Apport majeur de la convention, est consacrée la souveraineté des États en matière de contrôle de l’entrée sur leur territoire de déchets étrangers. Par principe, les mouvements transfrontières de déchets dangereux sont strictement interdits :
- vers un pays qui en a interdit l’importation sur son territoire ou si ce même pays ne dispose pas des moyens de les gérer « selon des méthodes écologiquement rationnelles » ([29]) ;
- vers un pays qui, bien que n’ayant pas interdit l’importation de déchets, n’a pas donné son autorisation spécifique à l’opération ;
- vers un État non-partie à la convention.
L’exportation n’est autorisée que par exception et à condition de respecter deux principes :
- le principe du consentement préalable en connaissance de cause (prior informed consent – PIC), selon lequel aucun transfert n’est autorisé sans l’accord écrit du pays importateur. Une notification du transfert de déchet dangereux est donc obligatoire avant tout envoi ;
- le principe de gestion écologiquement rationnelle, en application duquel l’exportation de déchets n’est admise que vers un État disposant des capacités techniques pour les traiter sans nuire ni à la santé humaine ni à l’environnement.
Les manquements à ces règles sont caractérisés et constituent une infraction pénale devant être sanctionnée au niveau national.
Ce dispositif a par la suite été modifié et renforcé, notamment par l’adoption du « ban amendment ». En application des dispositions introduites par cet amendement, il est désormais strictement interdit pour les États membres de l’OCDE et le Liechtenstein d’exporter des déchets dangereux vers des États non-membres, quelle que soit la finalité de l’exportation et ce même si le pays de destination l’approuvait. En conséquence, la France ne peut, par exemple, exporter de déchets dangereux vers la Malaisie. Cette évolution a toutefois été laborieuse, l’adoption de l’amendement datant de 1995 et l’entrée en vigueur effective n’ayant eu lieu que fin 2019 en raison d’un manque de signatures ([30]). En 2021, la convention a également été amendée afin d’ajouter certains déchets plastiques à la liste des déchets soumis à notification. De même, en 2022, les déchets électroniques et électriques ont été inclus à la liste des déchets nécessitant un consentement préalable du pays receveur.
Le cadre réglementaire institué a été complété par des accords régionaux. Regroupant la plupart des pays développés, l’OCDE a établi un système de contrôle reprenant les dispositions de la convention tout en les adaptant pour fluidifier les échanges entre ses membres. Adoptée en 1992, la décision du Conseil de l’OCDE prévoit ainsi deux procédures distinctes :
- la procédure de contrôle « verte » qui s’applique aux déchets considérés comme peu dangereux et susceptibles d’être valorisés sans risque majeur pour la santé ou l’environnement. Ces déchets ne sont soumis à aucun autre contrôle que ceux normalement prévus dans le cadre d’échanges commerciaux ;
- la procédure de contrôle « orange » qui est retenue pour les déchets présentant des caractéristiques de dangerosité plus élevées telles que définies par la convention de Bâle. Ces déchets sont alors soumis à une procédure de notification et d’autorisation préalable entre les pays d’expédition, de transit et de destination, conformément au principe du consentement préalable.
En revanche, la décision de l’OCDE ne vaut que pour les transferts de déchets destinés à être valorisés et non pour ceux exportés en vue d’une élimination. Concernant cette dernière catégorie, seules les dispositions de la convention de Bâle s’appliquent.
b. Au niveau européen, la législation s’est étoffée pour mieux réglementer le commerce des déchets au sein de l’Union et avec les pays tiers
L’Union européenne, en tant que membre de l’OCDE et partie à la convention de Bâle, a transposé ces dispositions dans son droit communautaire. Le règlement (CE) n° 1013/2006 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2006 concernant les transferts de déchets reprend ainsi le principe du consentement préalable de la convention de Bâle et le code couleur de la décision du Conseil de l’OCDE.
Le règlement est toutefois plus strict concernant les exportations pour élimination. Celles-ci sont autorisées uniquement sur le territoire de l’Union ([31]). Cette restriction répond aux deux exigences ayant guidé l’élaboration du texte : les déchets doivent être éliminés aussi près que possible de leur lieu de production ; chaque État membre et l’Union dans son ensemble sont tenus de se doter de capacités d’élimination suffisantes.
Afin de vérifier la conformité des transferts aux exigences du règlement, les États membres ont l’obligation de mettre en place des systèmes nationaux d’inspection et de contrôle. En France, ce suivi est assuré par le Pôle national des transferts transfrontaliers de déchets (PNTTD), autorité rattachée au ministère de la transition écologique. Le pôle instruit les demandes de notifications, délivre les décisions de consentement et suit notamment les procédures administratives en cas de transferts illicites.
Au vu des amendements récents à la convention de Bâle et de la prise en compte de nouvelles dérives au regard notamment de la gestion des plastiques, la Commission européenne a présenté, en novembre 2021, une proposition de révision de la réglementation communautaire. Dans le cadre du Pacte vert pour l’Europe et du plan d’action pour l’économie circulaire, le nouveau règlement (UE) 2024/1157, adopté en 2024, entend renforcer la gouvernance des flux de déchets provenant de l’Union. Il durcit ainsi les règles relatives aux transferts de déchets vers l’étranger. En premier lieu, les exportations de déchets plastiques non-dangereux à destination de pays non-membres de l’OCDE seront progressivement interdites. Elles demeurent possibles entre pays membres mais seront soumises à une procédure renforcée de consentement préalable.
De manière générale, les transferts vers des pays non membres de l’OCDE seront désormais proscrits, sauf si le pays destinataire démontre formellement sa capacité à gérer les déchets de manière écologiquement rationnelle. Cette démonstration prend la forme d’un rapport de conformité adressé à la Commission européenne. Le pays tiers y décrit le cadre juridique national applicable à la gestion des déchets, présente ses infrastructures dédiées et précise ses capacités de traitement, ainsi que ses procédures de contrôle. Après évaluation, la Commission européenne décide si le pays peut être inscrit sur la liste des tiers autorisés à réceptionner les déchets de l’Union. Cette phase d’évaluation préalable se double d’un suivi sur le long terme avec des audits environnementaux réalisés sur place par des experts mandatés, en coopération avec les autorités nationales compétentes. En cas de non-conformité, la Commission peut suspendre immédiatement les exportations concernées. Ces dispositions entreront en vigueur en mai 2026.
2. Des voies de contournement atténuent la portée de ces évolutions et appellent plus fondamentalement à repenser nos modes de consommation
a. La terminologie normative est partielle et comprend des zones grises susceptibles d’être exploitées par des acteurs peu scrupuleux dans le cadre de trafics
Les évolutions récentes du cadre juridique permettent une meilleure protection de l’environnement et des populations. Toutefois, certains éléments laissent toujours une grande latitude à des exportateurs motivés uniquement par le profit. L’articulation des normes et des ambitions politiques affichées est en effet complexe. S’ils peuvent paraître complémentaires, les objectifs en matière de gestion écologiquement rationnelle des déchets et le développement de l’économie circulaire entrent parfois en contradiction. Sous couvert de favoriser la seconde, certains acteurs contreviennent aux premiers. Pour ce faire, ils jouent sur la polysémie du mot « déchet » et le vocable assimilé, le tout se traduisant par une nomenclature juridique spécifique : le déchet en tant que tel ; le sous-produit et le produit usagé réemployé qui n’ont pas de lien avec le statut de déchet ; le produit sorti du statut de déchet, qui a fait l’objet d’un traitement en vue d’une réutilisation.
Les deux dernières catégories, correspondant à des matières n’étant plus ou n’ayant jamais été des déchets, ne sont pas soumises aux réglementations sur les déchets et obéissent aux normes douanières internationales relatives aux exportations de produits. La difficulté d’appréciation des matières concernées a permis à certains opérateurs économiques d’envoyer des cargaisons contenant en réalité des déchets sans avoir à respecter les procédures idoines. La décharge d’Agbobloshie et désormais celle d’Old Fadama au Ghana sont symptomatiques des dérives potentielles du système. Se retrouvent en effet sur place des tonnes de déchets électroniques et textiles, alors même que ces matériaux sont désormais régulés.
Proposition n° 1 : Clarifier au niveau européen le statut juridique des produits de réemploi et évaluer plus précisément le caractère valorisable des matières.
Proposition n° 2 : Rendre obligatoire une certification de fonctionnalité pour les exportations de biens de seconde main.
La réglementation est manifestement contournée dans le cadre de trafics d’ampleurs diverses. Le commerce illégal de déchets s’avère très lucratif et moins risqué en cas de condamnation que d’autres formes de transactions illicites. À titre de comparaison, « l’importation ou l’exportation illicites de stupéfiants sont punies de dix ans d’emprisonnement et de 7 500 000 euros d’amende » ([32]), tandis que les infractions liées aux échanges de déchets sont punies de quatre ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende ([33]). Le déchet est par ailleurs un élément utile à d’autres opérations crapuleuses comme en témoignent les activités des mafias à Naples en Italie. La collecte et le traitement permettent de lier des relations légales avec les autorités administratives et d’acquérir une bonne connaissance du terrain en alliant clientélisme et quasi-opérations de renseignement ([34]).
L’Office européen de lutte anti-fraude (OLAF) estime ainsi qu’entre 15 à 30 % des transferts de déchets pourraient être illégaux. Avec les douanes françaises, l’Office a mis en lumière l’existence de deux types d’infractions : celles volontairement frauduleuses et celles dues à une mauvaise application de la réglementation. Concernant les premières, les actions de contrebande peuvent avoir lieu à chaque étape de l’exportation. Dès l’envoi, le recours à des fausses déclarations est presque systématique afin de dissimuler la nature des déchets et contourner les procédures applicables. Certains déchets sont également détournés en cours de route ou transbordés en évitant les contrôles dans le pays destinataire. La chaîne d’exportation est ainsi fragmentée entre plusieurs pays, opérateurs et temporalités, rendant les contrôles et l’identification des contrevenants difficiles. Seule une coopération internationale permet de contrer les réseaux organisés de trafics de déchets. Ainsi, en 2024, sous l’égide de l’OLAF, une opération douanière conjointe regroupant seize États membres, la Turquie et l’Ukraine a conduit à la saisie de milliers de bouteilles de gaz, exportées illégalement, pour une valeur de 4,5 millions d’euros.
Les trafiquants ont également tendance à s’adapter rapidement aux évolutions réglementaires et aux flux. L’OLAF relève à cet égard une récente augmentation des trafics liés aux déchets électroniques et textiles. Au vu des volumes, seuls des contrôles limités sur des échantillons sont toutefois réalisables. Un ciblage en fonction des pays d’origine, des pays d’exportation, du profil de l’exportateur et de la nature de la marchandise est donc nécessaire.
Proposition n° 3 : Renforcer la coopération internationale et européenne en matière de lutte contre les trafics en imbriquant encore davantage les douanes nationales, OLAF et Interpol.
Proposition n° 4 : Assurer un meilleur ciblage des contrôles en l’adaptant aux évolutions des trafics et en priorisant les exportations à destination des pays en développement.
Contrôler implique de pouvoir quantifier les échanges afin de mieux ajuster les dispositifs de suivi. Les données disponibles apparaissent encore lacunaires car ne reposant que sur les volumes de déchets soumis aux procédures décrites de notification. Une réflexion globale sur la mesure de la production de déchets et des masses amenées à être exportées doit être amorcée. En parallèle, la qualification des déchets semble toujours sujette à interprétation en raison des listes parfois discordantes établies par la convention de Bâle, la décision de l’OCDE et le règlement européen. Plus fondamentalement, la traçabilité des déchets est encore insuffisante pour assurer la mise en œuvre des réglementations et des contrôles.
Proposition n° 5 : Repenser les méthodes de mesure des flux exportés au regard des volumes produits, des quantités traitées localement et des données relatives aux importations dans les pays destinataires.
Proposition n° 6 : Assurer une meilleure cohérence des nomenclatures utilisées et des listes de déchets identifiés.
Proposition n° 7 : Améliorer la traçabilité et le suivi des déchets par le développement d’outils numériques communautaires intégrés.
Enfin, concernant les infractions dues à une mauvaise application de la réglementation, les erreurs sont encore nombreuses par méconnaissance des procédures à appliquer. Les entreprises, les transporteurs et de manière générale le grand public ne sont pas assez sensibilisés aux distinctions sur la nature des déchets et leur dangerosité. Des progrès sont toutefois à signaler en France depuis la création en 2015 du PNTTD et la mise en place d’une application dédiée au suivi des transferts transfrontaliers de déchets : GISTRID.
Proposition n° 8 : Sensibiliser les différents acteurs du secteur en organisant des formations spécialisées et des opérations de prévention, en s’appuyant notamment sur les fédérations de professionnels.
Certaines pistes évoquées seront au cœur des dispositifs prévus par le nouveau règlement européen (UE) 2024/1157, notamment concernant la numérisation et le suivi des exportations. La rapporteure pour avis suivra avec attention la mise en œuvre effective de ces mesures, prévue à partir du printemps 2026.
b. Une réflexion globale sur notre approche du déchet et l’implication de chacun sont indispensables pour repenser notre modèle de justice environnementale
La refonte de la réglementation propre aux transferts de déchets ainsi qu’un meilleur suivi des pratiques illégales ne peuvent être la panacée aux dérives mentionnées. Des modifications systémiques sont nécessaires pour affaiblir les logiques de domination précitées et rééquilibrer les rapports entre pays développés et pays en développement. Ce rééquilibrage pourrait être obtenu par l’activation combinée de trois leviers : une meilleure intégration des pays à revenu faible aux processus décisionnels ; le développement de mécanismes de compensation et de réparation ; la réduction de la consommation dans le cadre d’une économie circulaire repensée afin de tendre vers des pratiques plus respectueuses de l’environnement.
Le système de gouvernance internationale des déchets décrit plus haut n’associe que partiellement les pays en développement aux négociations et aux prises de décision. Si la convention de Bâle obéit au régime des traités multilatéraux de l’Organisation des Nations unies (ONU) et respecte le principe d’égalité souveraine des États ([35]), la participation de certains pays est de facto moins aisée en raison de l’absence d’experts techniques ou juridiques nationaux. Concernant la décision de l’OCDE, l’Organisation a certes consulté le secrétariat de la convention de Bâle et certains observateurs internationaux mais aucun pays en développement ([36]) n’a eu de rôle formel dans la négociation ni dans le délibéré final. Enfin, il en va de même s’agissant du règlement européen qui, bien qu’ayant des effets significatifs sur les pays à revenu faible, relève du cadre communautaire et ne nécessite pas de sollicitation des pays tiers.
Proposition n° 9 : Favoriser une participation active des pays en développement aux instances multilatérales en prenant également en compte leurs contraintes socio-économiques dans l’élaboration des normes.
Au-delà, certains pays n’ont pas ratifié les amendements à la convention de Bâle ([37]), voire n’ont pas ratifié cette même convention à l’instar des États-Unis. Ces derniers ne sont, par conséquent, pas juridiquement contraints par la convention. Même s’ils respectent la décision du Conseil de l’OCDE en tant que membre de l’Organisation, l’absence de ratification de la convention de Bâle n’en demeure pas moins regrettable car les États-Unis ne fournissent aux instances internationales aucune donnée sur leurs transferts de déchets. De la part du premier producteur mondial de déchets, cette situation est particulièrement préjudiciable pour l’appréciation du phénomène. Au demeurant, le signal symbolique envoyé au reste du monde est négatif.
Par ailleurs, la solidarité internationale ne peut s’exprimer uniquement par une régulation bienveillante. Les efforts des pays développés ne les dédouanent pas de leurs responsabilités passées. Des mécanismes de réparation et de compensation sont nécessaires pour traduire la reconnaissance pleine et entière d’une dette environnementale. Une hausse des financements, couplée à une meilleure allocation des ressources et à des transferts technologiques, paraît indispensable pour mener à bien la transition écologique au niveau mondial. En renforçant les capacités institutionnelles et de gestion locales, ces dispositifs contribueraient à instaurer une coopération équilibrée fondée sur la réciprocité et la transparence, à rebours des logiques de dépendance actuelles.
Proposition n° 10 : Promouvoir un accès équitable à l’expertise technique et aux financements via des structures dédiées telles que le Fonds vert pour le climat.
Ces mesures ne seront toutefois effectives que si une diminution de la production de déchets est amorcée en parallèle. Les impératifs de recyclage mis en avant depuis plusieurs décennies dans le cadre du développement d’une économie circulaire sont encore trop souvent appréhendés avec une grille de lecture économique et ont tendance à rendre moins urgente l’exigence de réduction à la source des déchets. Le fonctionnement des infrastructures de recyclage nécessite en effet de sécuriser des approvisionnements continus de matières, afin d’assurer une rentabilité constante des aménagements. De plus, les ressources générées sont soumises aux cours boursiers qui leur sont liés : s’agissant des plastiques, lorsque le prix du baril de pétrole baisse, celui du plastique neuf diminue, rendant le prix du plastique recyclé moins concurrentiel ([38]). La réponse à la crise du déchet ne peut donc être envisagée uniquement par le recours à des matériels et des technologies au fonctionnement intrinsèquement coûteux. Afin de remettre les enjeux environnementaux au centre des préoccupations, une responsabilisation de tous, producteurs et consommateurs, est nécessaire. Le rythme de production actuel demeure aujourd’hui plus rapide que l’augmentation des capacités de traitement. La réutilisation effective des produits doit désormais être un préalable à la fabrication, afin de limiter les consommations éphémères.
Proposition n° 11 : Inscrire dans les cahiers des charges des filières de responsabilité élargie des producteurs (REP) des mesures contraignantes en termes d’écoconception et de réparabilité, éventuellement assorties de pénalités.
Proposition n° 12 : Lier les contributions financières versées par les producteurs dans le cadre des REP à l’impact environnemental de leurs productions.
Au cours de sa réunion du mercredi 29 octobre 2025, la commission examine le présent avis budgétaire.
M. Alain David, président. Le dernier des avis budgétaires que nous sommes appelés à examiner ce matin porte sur la mission Écologie, développement et mobilités durables, dont les crédits de paiement (CP) s’élèvent à 21,8 milliards d’euros. Je cède immédiatement la parole à madame la rapporteure pour avis.
Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure pour avis. Nous avons tous entendu le mot « rupture » dans les discours récents du premier ministre mais, pendant que la France cherche sa rupture politique, le monde vit, lui, sa rupture écologique. Notre terre se rompt, les glaciers reculent, les équilibres océaniques se dégradent et les sols meurent. Nous venons de franchir la septième des neuf limites planétaires : celle de l’acidification des océans.
Pendant que la planète bascule, le budget de l’écologie, lui, stagne malheureusement. Le projet de loi de finances (PLF) pour 2026 prévoit ainsi 24,2 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 21,8 milliards d’euros en crédits de paiement pour la mission Écologie, développement et mobilité durables. Ce montant pourrait paraître conséquent mais, en réalité, il correspond une stabilisation inférieure à l’inflation, soit une baisse déguisée. Il ne s’agit pas de coupes abstraites mais de coupes dans la vie quotidienne de chaque Français. Quand le Fonds vert perd près de 40 % de ses crédits, les petites communes rurales et les quartiers populaires en souffrent le plus.
Les maires de villes comme Nanterre, Dunkerque ou Saint-Denis ne peuvent plus financer la rénovation des écoles, la désimperméabilisation des cours d’école, la réhabilitation des logements passoires ou les projets de géothermie locale. Des élus doivent choisir entre réparer un gymnase ou isoler une école.
Le programme 113 Paysages, eau et biodiversité recule également, passant de 411 millions à 378 millions d’euros. Pendant ce temps, le nombre d’inondations dans le Pas-de-Calais, de phénomènes de sécheresse dans le Sud, de cancers environnementaux dans la vallée de l’Arve ou dans les Bouches-du-Rhône explose. On parle de justice climatique mais les actions du gouvernement vont dans le sens inverse.
Il fait payer la crise écologique à ceux qui la subissent déjà. La liste continue avec le plan « vélo et marche », dont le budget passe de 100 millions à 73 millions d’euros, alors que les familles modestes, les jeunes, les travailleurs précaires ont besoin d’alternatives à la voiture dans de nombreux endroits. Il est beaucoup question de planification écologique mais, en vérité, le budget de la mission Écologie est une planification de renoncement. Même les moyens humains sont rognés : diminution de 316 postes pour le ministère de la transition écologique et baisse de 14 postes pour l’Office français de la biodiversité (OFB). À force de coupes, les inspecteurs ne peuvent plus contrôler les pollutions, les agences de l’eau sont asphyxiées, les associations environnementales voient leurs subventions fondre. C’est une écologie sans souffle et sans budget pour cette année.
Ce budget signe ainsi une orientation politique : celle d’un État qui préfère peut-être rassurer les marchés plutôt que protéger la planète. En réalité, on nous propose une écologie à crédit. Or derrière ces chiffres, il y a des vies, des parents qui ne peuvent plus payer leurs factures d’énergie parce que l’État recule sur la rénovation thermique, des habitants de zones industrielles qui respirent des particules fines faute d’investissements dans la dépollution, des enfants qui transpirent dans les cours d’école à 45 degrés en été parce qu’on n’a pas financé des îlots de fraîcheur. Voilà ce que produit cette politique de l’injustice environnementale pure et simple.
Pendant que les plus riches achètent des SUV – Sport utility vehicles – électriques subventionnés, les plus pauvres voient disparaître les aides pour changer leurs vieilles chaudières ou isoler leur logement. Pendant que l’État allège les taxes sur le kérosène, il laisse les ménages seuls face à la hausse du prix du carburant. Ce budget n’est pas seulement insuffisant, il est indécent parce qu’il abandonne les territoires, en particulier les plus populaires, à une double peine : subir à la fois la crise sociale et la crise climatique.
Mais cette insuffisance ne s’arrête pas à nos frontières car, pendant que nous parlons de verdir notre économie, nous exportons ailleurs le coût écologique de notre confort. C’est tout le sens de cette deuxième partie du rapport sur le colonialisme par les déchets. Sous les discours de coopération et de recyclage se joue une réalité brutale, celle d’un néocolonialisme environnemental.
Chaque année, plus de 30 millions de tonnes de déchets européens quittent nos ports de Rotterdam, du Havre ou d’Anvers, pour finir sur les plages du Ghana, dans les rivières du Vietnam ou au bord des bidonvilles de Malaisie. Plastiques, vêtements, batteries, métaux lourds, ce que nous appelons ici recyclage est souvent là-bas déversement. Nos déchets y sont brûlés à ciel ouvert, triés par des enfants, manipulés sans protection. C’est un commerce mondialisé du sale, un commerce de la honte. Cette honte a un nom : le colonialisme vert, c’est-à-dire une nouvelle domination sans drapeau mais avec des conteneurs ; une conquête armée sans armée mais avec des contrats.
La production mondiale de déchets solides municipaux atteindra 3,4 milliards de tonnes d’ici 2050, soit une augmentation de 70 % en trente ans. Dans les pays du Sud, 93 % des déchets finissent dans des décharges à ciel ouvert, quand, dans les pays du Nord, ce chiffre tombe à 2 % et moins de 10 % du plastique mondial est réellement recyclé.
Les conséquences sont terribles. Des vaches au Kenya sont retrouvées avec 35 kilogrammes de plastique dans l’estomac. Près de 11 000 tonnes de plastique français rejoignent chaque année la Méditerranée. Des sols, des nappes et des corps sont empoisonnés durablement, à Accra ou à Dakar, par des substances que nous avons produites. Cette pollution par le plastique a été multipliée par 200 en soixante-dix ans. Elle est passée de 2,3 millions de tonnes en 1950 à près de 460 millions de tonnes aujourd’hui et l’augmentation se poursuit, à hauteur de 4 % par an.
Chaque année, plus de 400 millions de tonnes de déchets plastiques sont générées, dont près de 40 % proviennent du seul secteur des emballages : ces plastiques à usage unique, qui ne vivent que quelques minutes avant de devenir un fardeau pour des siècles. Ces emballages superflus, fruits d’un consumérisme absurde, encombrent nos supermarchés, nos poubelles et nos océans. L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) estime qu’au moins de 10 % des plastiques produits dans le monde sont effectivement recyclés, le reste étant enfoui, brûlé ou exporté.
Notre système actuel perpétue des hiérarchies du passé. Les pays du Nord consomment, les pays du Sud subissent. Nous exportons nos pollutions, comme hier, nous exportions nos empires. Mon rapport indique que les réglementations internationales – convention de Bâle, décision du Conseil de l’OCDE, règlements européens sur les transferts de déchets – ont progressé mais les contournements demeurent.
Au cœur de ces contournements, un angle mort grandit : celui des objets dits de seconde main. Sous couvert de donner une seconde vie à nos biens, l’Europe déverse chaque année des millions de tonnes de vêtements, d’appareils électroniques et de mobilier en Afrique et en Asie. Selon Greenpeace Africa, plus de 15 millions de vêtements d’occasion arrivent chaque semaine au Ghana et près de la moitié sont invendables. Ils finissent brûlés, enfouis ou emportés par les pluies vers la mer.
L’Agence européenne pour l’environnement estime que les exportations européennes de textiles usagés ont triplé en vingt ans, passant de 550 000 tonnes en 2000 à près de 1,7 million de tonnes en 2019. Ce qui est présenté ici comme économie circulaire devient là-bas économie toxique ; nos habits durables deviennent leurs déchets ultimes. Le commerce de la seconde main est ainsi devenu, dans bien des cas, la vitrine propre d’un système sale, une illusion de vertu qui masque un transfert massif de nuisances et de responsabilités.
C’est pourquoi les organisations non gouvernementales (ONG) appellent aujourd’hui à redéfinir strictement la notion de seconde main et à interdire toute exportation d’objets inutilisables sous ce label. Mon rapport formule ainsi douze recommandations, parmi lesquelles : le renforcement des contrôles de suivi de nos déchets lorsqu’ils quittent le territoire national afin de s’assurer qu’ils ne partent pas hors de pays de l’OCDE ; la nécessité d’une redéfinition des produits dits de seconde main ; un renforcement du soutien aux structures multilatérales existantes, telles que le Fonds vert pour le climat, en préalable à la création d’un fonds international de compensation environnementale financé par les pays développés pour réparer les dégâts subis par les pays du Sud ; l’intégration dans le calcul du bilan carbone national des flux de déchets exportés ; une traçabilité obligatoire des matières recyclables sur toute la chaîne logistique et au niveau européen ; une diplomatie écologique offensive conditionnant tout accord commercial à des clauses environnementales et sociales contraignantes. Au fond, il ne s’agit pas seulement de rééquilibrer des flux mais de repenser notre rapport au monde, de passer d’une écologie de façade à une écologie de la dignité, d’une écologie de comptabilité à une écologie de justice.
L’écologie n’est pas une variable d’ajustement budgétaire mais la condition même de la paix et de la prospérité. Refuser d’y investir revient à choisir le chaos climatique et l’injustice sociale. Ce combat doit naturellement être mené sur le terrain des idées et des modèles économiques car, derrière chaque tonne de plastique exportée, chaque hectare de biodiversité sacrifiée, se cache le modèle d’une économie qui confond croissance et destruction, profit et progrès.
Il est impératif d’inventer autre chose : une économie de la sobriété, du soin, du partage, où la valeur ne se mesure plus seulement à ce que l’on produit mais aussi à ce que l’on préserve. La France a un rôle particulier à jouer dans cette bataille, par son histoire et sa voix singulières. Elle peut être une puissance d’équilibre qui relie le Nord et le Sud, la puissance du juste milieu. Cela suppose de faire de la justice environnementale un pilier de notre diplomatie, au même titre que les droits humains.
Le rapport que nous examinons ce matin nous rappelle une idée simple : l’écologie n’est pas un supplément d’âme mais une exigence de justice et de responsabilité. Nous ne pourrons pas construire un avenir commun sur les inégalités environnementales que nous continuons de perpétuer. Il est temps que la France assume pleinement son rôle à travers le monde. Tel est le sens des recommandations du rapport, afin de réinscrire de la cohérence entre nos discours et nos actes, entre nos ambitions climatiques et nos pratiques économiques. C’est seulement à cette condition que notre écologie sera crédible, efficace et juste.
M. Alain David, président. Je cède la parole aux orateurs des groupes politiques.
Mme Laetitia Saint-Paul (HOR). Ma question porte sur les crédits du programme Paysages, eau et biodiversité. En effet, les crédits de la mission prévoient des moyens renforcés mais vous avez dit le contraire. Ainsi, le plafond des recettes des agences de l’eau est notamment relevé de 50 millions d’euros, afin de poursuivre la montée en puissance du plan Eau, qui comprend notamment l’amélioration du partage de la ressource et un meilleur entretien des canalisations. Pourriez-vous apporter des précisions sur ce point ?
Par ailleurs, je partage pleinement votre inquiétude concernant la seconde main. Plusieurs d’entre nous sont mobilisés contre l’ultra fast-fashion. Quelles solutions proposez-vous concrètement pour remédier à cette problématique ?
Mme Laurence Robert-Dehault (RN). Dans ce contexte budgétaire contraint où il faut trouver 40 milliards d’euros d’économies, le gouvernement procède à des choix pour le moins étonnants. D’un côté, il multiplie les économies sur le dos des Français – je pense notamment aux remboursements de certains médicaments – mais, de l’autre, il augmente la dépense publique en matière d’écologie, de développement et de mobilité durables, c’est-à-dire plus de 24 milliards d’euros cette année, soit 1,3 milliard d’euros de plus que l’an dernier. Il aurait sans doute fallu faire l’inverse. Cette incohérence budgétaire est en partie soutenue par certains groupes d’opposition. Madame la rapporteure pour avis, vous avez exprimé votre déception face à cette hausse, estimant qu’il aurait fallu dépenser davantage pour « répondre pleinement aux enjeux environnementaux ».
Quelques chiffres suffisent pourtant à rappeler la réalité. L’Union européenne ne représente que 7 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, tandis que les États-Unis, la Chine et l’Inde en produisent à eux seuls 53 %. Sans surprise, la vision que nous portons au sein de notre contre-budget est radicalement différente. Plutôt que d’alourdir encore la facture pour les Français, nous proposons de réduire les dépenses inefficaces de l’État ainsi que son train de vie. Sur cette seule mission budgétaire, nous proposons 1,8 milliard d’euros d’économies en réinternalisant plusieurs agences publiques, symbole d’une technocratie coûteuse qui dépossède l’administration de ses compétences. À cela s’ajoutent 2,5 milliards d’euros supplémentaires en annulant la hausse de crédits destinés à l’éolien terrestre et maritime, ainsi qu’au photovoltaïque, soit 4,3 milliards d’euros d’économies sans toucher un seul centime du quotidien des Français.
Pour le Rassemblement national, l’écologie ne doit pas être l’alibi d’une dépense publique sans fin mais une écologie concrète, locale et au service de notre souveraineté. Nous voterons donc contre les crédits de cette mission.
Mme Amélia Lakrafi (EPR). Je remercie ma collègue Sabrina Sebaihi pour son intervention et la qualité du rapport. Je comprends pleinement les inquiétudes qu’elle exprime et que partagent de nombreux Français face à ce qui peut parfois ressembler à un recul de nos ambitions climatiques sous contraintes budgétaires. Et c’est peu de le dire, la contrainte budgétaire est réelle. Je la rejoins aussi sur un point essentiel : l’exportation de nos déchets vers des pays en développement. Aucune logique de coûts ne saurait justifier que nous transférions notre empreinte écologique ailleurs.
Cela étant, il convient de souligner que le budget de cette mission progresse, tant en autorisations d’engagement qu’en crédits de paiement. C’est un signe encourageant dans le contexte économique actuel. Sur la scène internationale, la mobilisation reste forte. La 30e conférence des parties sur le climat (COP 30) au Brésil ou encore la conférence sur l’eau à Abu Dhabi traduisent la volonté de nombreux États d’agir concrètement. Je me réjouis particulièrement de voir les États du Golfe, longtemps peu impliqués, s’engager résolument dans les transitions écologiques innovantes.
En tant que déléguée générale de l’Assemblée parlementaire de la francophonie (APF), je peux témoigner du rôle moteur des pays francophones, notamment africains. L’APF a participé cette année notamment à la conférence des Nations unies sur les Océans (UNOC) à Nice et conduit plusieurs travaux législatifs sur le climat et la lutte contre la pollution plastique que vous avez citée. Je tiens également à saluer les initiatives locales de nos compatriotes à l’étranger, ces associations françaises qui mènent des actions concrètes de sensibilisation à l’écologie, souvent avec des moyens modestes mais une détermination exemplaire. Leur rôle mérite d’être davantage soutenu.
Les attentes sont immenses mais la France tient le cap. Elle agit avec lucidité, responsabilité et constance pour concilier transition écologique et soutenabilité budgétaire. Le Groupe EPR votera donc en faveur de l’adoption de ces crédits.
M. Pierre-Yves Cadalen (LFI-NFP). La destruction immense liée au changement climatique est là, sous nos yeux. Une septième limite planétaire a été passée cette année. L’acidification de l’océan menace les espèces qui y vivent et des équilibres planétaires plus largement. Ces effets sont d’ores et déjà prégnants.
Les négateurs du changement climatique ont une responsabilité majeure. Cette négation prend deux formes : d’une part, l’attaque de front à la Trump ou à la Le Pen ; d’autre part, l’inaction dans la communication à la Macron. Ce budget en est une preuve supplémentaire. Les limites planétaires indiquent les dommages irréparables infligés à nos milieux de vie et le déclenchement de processus irréversibles au sein de l’écosystème terrestre : changement climatique, extinction de masse des espèces, perturbation des cycles du phosphore et de l’azote, artificialisation des sols, pollution chimique, qualité et quantité des ressources en eau et, désormais, acidification de l’océan. La situation établie scientifiquement est désastreuse. Les effets concrets sont patents : la multiplication et l’aggravation des intempéries, la dégradation des milieux nécessaires à notre vie et l’épidémie de maladies chroniques.
L’écologie n’est pas une lubie ou un passe-temps ; c’est une crise existentielle majeure. Elle perdurera tant que nous ne parviendrons pas à faire bifurquer un système économique fondé sur l’accumulation illimitée, la production toujours plus grande de biens et, selon une formule juste et toujours plus littérale de Karl Marx, « l’anéantissement de l’espace par le temps ». Il est décisif d’inscrire la discussion budgétaire de la mission écologique dans ce cadre.
La question écologique ne peut être à compartiments et ce budget est déjà un échec complet car il refuse absolument que la puissance publique se dote de moyens réels pour agir. La planification écologique, au contraire, suppose de piloter non seulement des investissements, de se doter des moyens, d’en assurer le suivi et de planifier la bifurcation de nombreux secteurs. Les coûts budgétaires et le refus de considérer que l’État doit assumer un rôle stratégique dans l’économie vont de pair. Ce budget est hostile à l’écologie ; c’est l’une des raisons majeures pour lesquelles ce gouvernement doit être censuré.
En l’occurrence, le budget diminue de nouveau les crédits pour le programme Eau et biodiversité, augmente les subventions à l’aérien, réduit encore drastiquement les crédits alloués au Fonds vert. Nous nous y opposons donc, en toute logique. Ce budget n’est tout simplement pas à la hauteur des enjeux, ni dans sa philosophie générale, ni pour la mission écologique en particulier.
M. Alain David, président. Je vous présente pour ma part l’avis du groupe Socialistes et apparentés. La légère hausse des crédits de cette mission ne rattrape même pas le niveau déployé en 2024, avant le décret relatif à l’annulation des crédits. Or, les besoins en matière de financement de la transition écologique sont croissants. Cela a de quoi inquiéter notre commission, à l’heure où l’adaptation au changement climatique devrait devenir une politique publique maîtresse, compte tenu de la non-atteinte prévue de l’objectif de limitation de la hausse du réchauffement climatique à 1,5 degré d’ici la fin du siècle. Ces premiers éléments d’analyse budgétaire doivent être mis en relief avec les besoins en matière de financement de la transition écologique. En effet, depuis maintenant plusieurs années, le budget de la France ne tient pas compte du besoin d’investissement nécessaire pour atteindre nos objectifs en matière de transition climatique.
En France, le rapport Pisani-Ferry et Mahfouz estime l’effort d’investissement annuel supplémentaire, public et privé, à 66 milliards d’euros à l’horizon 2030, soit environ 2,4 % du produit intérieur brut (PIB) annuel. Cette estimation en valeur nette suppose la réorientation totale des investissements carbonés actuels. Afin de garder le leadership patiemment et opiniâtrement acquis lors de la négociation de la COP21 de Paris en 2015, nous devrions préparer avec ambition la COP30 de Belém au Brésil en novembre, mais également la COP17 d’Erevan sur la diversité biologique et celle d’Oulan-Bator sur la lutte contre la désertification.
En tout état de cause, les députés du groupe Socialistes et apparentés porteront des amendements visant notamment à orienter une partie plus importante des taxes sur les billets d’avion ou de la taxe sur les transactions financières vers les actions environnementales de l’aide au développement et de la transition écologique. L’attention à ces amendements, qui devraient recueillir un large soutien si notre commission reste constante dans ses engagements, déterminera notre vote sur les crédits de la mission.
Mme Dominique Voynet (EcoS). Je salue la qualité de ce rapport, qui place des mots forts et justes sur une réalité trop souvent ignorée : celle du colonialisme vert, où des pays du Nord externalisent leur pollution, leurs émissions de carbone, leurs déchets, vers les pays du Sud. Ce sujet rappelle que la lutte contre le changement climatique passe forcément par la justice et la solidarité internationale.
Le PLF pour 2026 n’est toujours pas à la hauteur des enjeux écologiques. Après une baisse de 10 % des crédits en 2025, on parle aujourd’hui d’une stabilisation pour le prochain exercice. Or, non seulement la hausse en autorisations d’engagement de 5,7 % de la mission ne couvre pas les pertes de l’an dernier, mais la hausse en crédits de paiement de 0,5 % est en réalité inférieure à l’inflation. Il s’agit d’un désengagement déguisé.
Le Fonds vert, essentiel pour accompagner les collectivités dans la transition écologique, subit une nouvelle baisse de 40 % de ses autorisations d’engagement, après déjà une diminution de 60 % l’an dernier. Le programme Paysages, eau et biodiversité est lui aussi amputé, alors que la stratégie nationale Biodiversité 2030 était présentée comme une priorité nationale.
Les effectifs des opérateurs publics, l’OFB, le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CEREMA) et l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) sont à nouveau réduits. Comment prétendre mener une planification écologique quand on affaiblit les services publics qui la portent ? Le budget est supposé permettre à la France d’atteindre la neutralité carbone mais il fait de la transition écologique la variable d’ajustement de la rigueur budgétaire. Les aides aux ménages, notamment, transférées vers des dispositifs parafiscaux opaques, comme les certificats d’économie d’énergie, restent hors de contrôle du Parlement.
Le gouvernement choisit également de dépenser des milliards pour la relance du nucléaire. Ce pari technologique à long terme détourne nos moyens des énergies renouvelables, des économies d’énergie et des solutions locales qui pourraient être déployées pour des sommes bien moins élevées, dès aujourd’hui. La Cour des comptes considère que les six premiers équipements pourraient coûter plus de 100 milliards d’euros. En outre, l’EPR
– European pressurized reactor ou réacteur pressurisé européen – de Flamanville, qui a coûté pour l’instant 23,7 milliards d’euros, ne produit toujours pas d’électricité alors qu’il est raccordé au réseau depuis un an. La Cour des comptes prévoit d’ailleurs une rentabilité médiocre. C’est un fiasco industriel.
Les crédits de la mission Écologie ne suivent absolument pas les ambitions déclarées et les discours ronflants qui accompagnent tout sommet international sur le sujet.
M. Frédéric Petit (Dem). J’ai particulièrement apprécié le thème que vous avez choisi, qui me semble effectivement extrêmement important. Néanmoins, je m’interroge sur un sujet qui ne figure pas dans votre rapport : il s’agit de l’enjeu de la fermeture du cycle des produits. Je suis convaincu qu’il s’agit de la seule démarche législative nationale intéressante sur laquelle nous pourrions travailler. Elle pourrait également engendrer un effet bénéfique sur notre propre industrie.
M. Lionel Vuibert (NI). Je souhaite exprimer mon profond mécontentement concernant le Fonds vert, dont le montant passe d’un peu plus de 1 milliard d’euros à 650 millions d’euros. Ce dispositif représente une ressource précieuse pour nos territoires, dans les domaines de la rénovation des bâtiments publics, de la gestion de l’eau, de l’éclairage public. Dans mon département, il s’agit de 4 millions d’euros, qui ont notamment permis de financer une maison des internes en médecine. Sa diminution impactera directement les collectivités territoriales, particulièrement en milieu rural, mais également nos artisans.
En résumé, bien que je sois globalement favorable à ce texte, je déplore vivement cette décision concernant le Fonds vert.
Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure pour avis. Au niveau global, le programme Paysages, eau et biodiversité subit une baisse de près de 8 % sur les AE et de près de 5 % sur les CP.
La seconde main renvoie fondamentalement à la problématique de la première main et, au-delà, de notre modèle de consommation. Nous faisons face à une surproduction manifeste. Tout ce qui n’est pas ou plus utilisé sur notre territoire est simplement déversé ailleurs. Nous avons proposé de progresser sur la question de la seconde main en instaurant une certification spécifique, qui garantirait que les articles expédiés soient effectivement utilisables et ne finissent pas dans des décharges à ciel ouvert.
Ensuite, le RN a soulevé des questions relatives aux financements. Nous examinerons ce point ultérieurement lors de la discussion de vos amendements, qui ne consistent qu’en des suppressions de crédits. Je tiens à rappeler que la question écologique ne s’arrête pas aux frontières de la France. Si l’Union européenne ne représente que 7 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, l’Afrique n’en émet que 3 %. Pourtant, ce continent est celui qui subit le plus les conséquences du changement climatique. Il est évident que tous les pays doivent contribuer aux efforts nécessaires.
Pour répondre au groupe Socialistes et apparentés concernant les rendez-vous internationaux, la toute première COP Océan à New York aura lieu juste après l’entrée en vigueur de l’accord sur la haute mer, dont la France a été un acteur essentiel pour réunir le plus grand nombre de signatures.
Monsieur Petit, mon rapport ne s’est pas penché sur la fermeture du cycle mais, plus fondamentalement, l’enjeu principal concerne notre modèle de consommation. Comment consommons-nous, comment produisons-nous ? Nous aurons certainement l’occasion d’y revenir. Pour l’heure, nous nous sommes concentrés sur les douze recommandations principales du rapport.
Je ne peux que regretter moi aussi l’affaiblissement du Fonds vert. Ce dispositif correspond à un besoin essentiel pour les collectivités ; il permet de rénover les passoires thermiques, les écoles et les bâtiments publics.
M. Alain David, président. Je donne à présent la parole aux collègues qui souhaitent intervenir à titre individuel.
M. Michel Guiniot (RN). Je souhaite ouvrir une parenthèse pour souligner que les fabricants des produits en Occident ne peuvent être tenus responsables du comportement des utilisateurs.
Ma question concerne la proposition n° 2, que vous avez développée dans la partie thématique de votre rapport. Vous affirmez que le commerce des déchets est une forme de « néocolonialisme », sans considérer qu’il existe un consentement à ce commerce et que nous faisons de notre mieux pour limiter nos déchets, en créant des emplois pour les recycler au mieux.
Pour autant, je vous le concède, tout n’est pas jeté. Il y a encore beaucoup de pratiques qui consistent à racheter ce qui ne fonctionne plus, ce qui est abîmé ou ce qui ne plaît plus. Or, nous avons encore beaucoup de professionnels spécialisés qui peuvent réparer, prolonger la vie d’un certain nombre d’objets.
À la lecture de votre rapport, je me demande si les particuliers qui vendent des biens usagés sur des plateformes auront le courage, le temps ou l’envie de remplir une « certification de fonctionnalité » pour envoyer ailleurs un vêtement pour enfant, un vieux téléphone ou même un ustensile de cuisine en Espagne ou en Belgique. Madame la rapporteure pour avis, ne pensez-vous pas que l’encouragement du réemploi passe avant tout par une procédure simplifiée et non par une nouvelle surenchère normative ?
Mme Christine Engrand (NI). Je souhaite vous interroger sur le Fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM). Dispose-t-il de ressources suffisantes face à la multiplication des épisodes climatiques extrêmes ? Si nous étions confrontés à une situation identique à celle des inondations du Pas-de-Calais en 2023, quels moyens pourraient-ils être attribués ? Enfin, comment la France compte-t-elle concilier la protection des écosystèmes marins avec la compétitivité de sa flotte de pêche et de commerce ?
Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure pour avis. Je ne partage pas votre point de vue, monsieur Guiniot. J’estime au contraire que les producteurs portent des responsabilités indéniables. L’offre est abondante, pour toujours plus inciter à acheter de nouveaux produits au lieu de réparer ceux que nous possédons déjà. Privilégier des durées de vie plus importantes ou la réparation serait bénéfique tant pour la planète que pour le pouvoir d’achat des consommateurs. En réalité, ces questions relèvent de choix de société fondamentaux. Souhaitons-nous privilégier encore une surproduction et une surconsommation permanentes ou véritablement évoluer vers davantage de sobriété ? Pour les vêtements, la problématique est identique.
En revanche, je considère qu’il devient impératif d’instaurer une réglementation car nous rencontrons actuellement des difficultés majeures pour identifier le contenu réel des conteneurs étiquetés « seconde main ». Or très souvent, ces produits ne sont plus réutilisables et finissent dans des décharges ou brûlés en plein air. C’est précisément ce problème que nous souhaitons résoudre par cette certification, afin de garantir que seuls des articles de seconde main en bon état quittent notre territoire.
S’agissant de la prévention des risques majeurs, le groupe RN a présenté un amendement pour réduire le budget de la prévention des risques.
M. Michel Guiniot (RN). Permettez-moi d’ajouter brièvement un point. Les vêtements étaient autrefois réutilisés par nos aînés mais vous n’étiez certainement pas née à cette époque. Par ailleurs, on ne peut pas rendre responsables Renault ou Citroën des accidents de la route.
Mme Nadège Abomangoli (LFI-NFP). Je vous remercie pour la qualité de ce rapport. La question du réemploi appartient à un phénomène systémique. Dans notre conception des choses, il s’agit de reconsidérer l’ensemble des étapes de la fabrication des produits, quels que soient les secteurs d’activité. L’utilisation de la ressource en eau pour la fast-fashion atteint des proportions phénoménales. Il est impératif de repenser nos modèles de production. Par ailleurs, concernant la vision du néocolonialisme dans le domaine de l’écologie, nous affirmons qu’il existe effectivement un rapport de force car certaines régions du globe subissent directement les conséquences néfastes de ces modes de production et de la division du travail.
Quels sont, selon vous, les leviers disponibles au niveau multilatéral pour prendre en charge cette problématique du néocolonialisme environnemental ?
Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure pour avis. Monsieur Guiniot, j’entends votre remarque concernant une époque où l’on réutilisait davantage les vêtements. Cependant, la production mondiale des déchets solides municipaux atteindra 3,4 milliards de tonnes d’ici 2050, soit une augmentation de 70 % en trente ans. C’est la raison pour laquelle nous avons besoin d’un étiquetage précis sur la seconde main.
Je rappelle à nouveau que la pollution par le plastique a été multipliée par 200 en soixante-dix ans. Elle est passée de 2,3 millions de tonnes en 1950 à près de 460 millions de tonnes aujourd’hui. J’entends parfaitement qu’autrefois, les vêtements étaient utilisés plusieurs fois successivement. Force est de constater qu’aujourd’hui, nous en sommes très loin.
Madame Abomangoli, s’agissant de la réglementation, il faut reconnaître qu’une partie significative des conteneurs échappe totalement aux contrôles. Même si la situation s’améliore progressivement grâce à des suivis, nous observons que, dans certaines régions du monde, nos déchets ont provoqué des dommages environnementaux et sanitaires considérables.
Le fonds que nous proposons pourrait permettre d’évaluer l’impact du transfert de nos déchets dans certains pays et, le cas échéant, de réparer les dommages environnementaux et sanitaires qui ont pu être causés. Lorsque nous figurons parmi les responsables de la dégradation de l’environnement, notre devoir moral est d’entreprendre les actions nécessaires pour réparer ces dommages.
*
Article 49 et état B : Crédits du budget général
M. Alain David, président. Notre commission a été saisie de quatorze amendements.
Amendement II-AE77 de Mme Sabrina Sebaihi
Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure pour avis. Cet amendement vise à réinstaurer le Pass Rail pour l’année 2026. En 2024, il avait permis à des centaines de milliers de jeunes de voyager pour 49 euros par mois sur les trains express régionaux (TER) et Intercités. Destiné aux 16-27 ans, il concernerait 300 000 jeunes, pour un coût de 14,7 millions d’euros. Il serait financé à 80 % par l’État et 20 % par les régions. Il s’agit d’une mesure environnementale mais surtout de permettre à cette jeunesse aussi de s’émanciper grâce à une facilité de mobilité.
L’amendement est rejeté.
Amendement II-AE32 de M. Jérôme Buisson
M. Jérôme Buisson (RN). Cet amendement propose la suppression du plan « vélo et marche » pour trois raisons majeures : l’efficacité économique, car les budgets publics doivent prioriser les infrastructures utiles au plus grand nombre et non les équipements souvent sous-exploités ; l’équité territoriale, afin de ne pas pénaliser les zones rurales et périurbaines, où la voiture reste indispensable ; enfin, la liberté de choix, car le vélo ne doit pas être imposé comme une norme mais rester une option parmi d’autres.
Avec près de 70 millions d’euros investis, ce plan est très coûteux pour l’État, alors que les dépenses liées aux infrastructures devraient être prises en charge par les collectivités territoriales.
Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure pour avis. Le plan « vélo et marche » a pour objectif fondamental de former les citoyens à la pratique du vélo dès leur plus jeune âge et, ainsi, de faire du vélo une alternative aux autres moyens de transport tout en développant une filière économique et industrielle du vélo.
Il enregistre déjà une baisse des crédits, passant de 100 millions d’euros en 2025 à 73 millions d’euros en 2026. Et en réalité, vous ne proposez pas une diminution mais purement et simplement la suppression de cette mesure, ce qui est irresponsable.
Je rappelle que 85 % des trajets effectués en voiture en France font moins de cinq kilomètres, dont 60 % pour les déplacements domicile-travail ; 85 % des Français sont situés à moins de cinq kilomètres d’un service public ou d’un mode de transport en commun. Le vélo est le mode de déplacement le plus performant pour les trajets de moins de cinq kilomètres, particulièrement lorsqu’il est à assistance électrique.
Mon avis est donc résolument défavorable, même si j’entends que, dans certains territoires, la voiture reste le seul moyen de transport ou de déplacement, bien évidemment. Néanmoins, je crois qu’il ne faut pas opposer les deux. Le déplacement à vélo a également son utilité.
L’amendement est rejeté.
Amendement II-AE59 de Mme Dominique Voynet
Mme Dominique Voynet (EcoS). Cet amendement vise à rétablir les crédits du CEREMA, en baisse de plus de 5,2 millions d’euros dans le PLF pour 2026. Le CEREMA est le bras technique et scientifique de l’État pour les politiques d’aménagement du territoire, de transition écologique et d’adaptation au changement climatique. Il accompagne les collectivités pour la gestion des risques naturels, la prévention des inondations, la mobilité durable, la rénovation énergétique.
Il fournit les données et modélisations indispensables aux plans locaux d’urbanisme, aux stratégies littorales face à la montée des eaux, aux diagnostics de vulnérabilité des infrastructures routières et ferroviaires. Fragiliser le CEREMA revient à affaiblir la capacité de l’État à piloter ses propres politiques publiques sur des bases scientifiques solides. Rétablir ces moyens est un choix de renforcement et de résilience de l’État pour la transition écologique.
Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure pour avis. Avis favorable.
L’amendement est rejeté.
Amendement II-AE25 de Mme Marine Hamelet
Mme Marine Hamelet (RN). À l’heure où le projet de budget prévoit de créer ou d’augmenter une vingtaine de taxes, d’impôts et de prélèvements divers, mais aussi de diminuer le remboursement de médicaments, ainsi que certaines prises en charge médicales, le gouvernement prévoit d’augmenter le budget de l’Agence de la transition écologique (Ademe) de 135 %, soit une hausse de 1,2 milliard d’euros. Rappelons que l’Ademe, financée par les contribuables, s’est illustrée pendant des années par des études biaisées contre le nucléaire, tout en vantant les mérites des éoliennes et des panneaux solaires, souvent au détriment de la rigueur scientifique et des intérêts stratégiques de la France. Cette agence a ainsi contribué à fragiliser notre filière nucléaire pour servir un agenda purement idéologique. Elle s’est également distinguée par des recommandations absurdes comme le fait de conseiller aux Français de porter un pantalon trente jours avant de le laver.
Avec cet amendement, nous proposons de réduire les crédits alloués à cette agence pour les ramener à leur niveau de 2021, où ils s’élevaient déjà à 541 millions d’euros, montant amplement suffisant pour assurer le fonctionnement de cette structure.
Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure pour avis. Il ne vous aura pas échappé que le mode de financement de l’Ademe évolue à compter de 2026. La nouvelle présentation budgétaire de l’Ademe crée, pour 2026, un décalage entre les autorisations d’engagement et les crédits de paiement, ce qui n’était pas le cas auparavant. Les autorisations d’engagement incluent un rattrapage technique de 856 millions d’euros, destinés à couvrir les paiements qui devront encore être réalisés.
Ce changement de présentation budgétaire ne traduit pas une hausse soudaine des moyens mais une mise en cohérence comptable entre les engagements pluriannuels et les paiements réels. En réalité, 2026 est une année de transition technique pour adapter la gestion budgétaire de l’Agence à ce nouveau mode de fonctionnement.
Enfin, vous avez écrit que l’Ademe serait la courroie de transmission d’une idéologie faussement écologique. Vous avez le droit de le penser mais ce que vous appelez une idéologie est simplement de la science : la mesure des particules fines, la lutte contre les passoires thermiques, le soutien aux communes rurales et aux quartiers populaires pour isoler les écoles, rénover les logements, créer des emplois verts.
Il ne s’agit pas d’un outil farfelu, comme vous l’insinuez, mais il soutient la transition écologique, la lutte contre le réchauffement climatique. Par ailleurs, je rappelle que les agents de l’Ademe réalisent un travail remarquable, qui ne mérite absolument pas le mépris contenu dans l’exposé des motifs. En réalité, il est évident que vous pratiquez une forme de déni climatique. Vous préférez le mensonge au progrès.
Avis défavorable.
Mme Nathalie Oziol (LFI-NFP). J’écoutais les arguments du RN. L’Ademe ne recommande pas de porter trente fois certains vêtements mais indique simplement que certains habits, comme les jeans, peuvent être portés jusqu’à trente fois avant de devoir être lavés. Les habitantes et les habitants de vos circonscriptions souffrent de la hausse des prix de l’électricité et des coûts associés. En conséquence, les recommandations de l’Ademe constituent une bonne nouvelle.
Arrêtez de tout caricaturer au nom de votre idéologie climato-sceptique. Si vous voulez laver vos jeans trois fois par jour, faites-le. Il s’agit simplement d’une recommandation de bon sens qui allège le quotidien de nos concitoyens.
L’amendement est rejeté.
Amendement II-AE 33 de M. Jérôme Buisson
M. Jérôme Buisson (RN). Je propose de réduire de 20 % le budget de l’Ademe. Cette mesure s’impose par un souci de rigueur budgétaire. Dans un contexte de contraintes financières inédites, chaque euro public doit être optimisé. Or l’Ademe est régulièrement pointée du doigt pour son coût élevé et sa sous-utilisation de certaines de ses aides.
Une baisse de 20 % permettrait de réallouer ses fonds vers des priorités plus urgentes. Malgré son rôle dans la transition écologique, l’Ademe est critiquée pour sa rigidité, son manque de transparence et les chevauchements avec d’autres structures. Réduire son budget permet aussi d’inciter l’Agence à se recentrer sur ses missions essentielles et d’éviter les doublons.
Enfin, l’allocation de ces fonds à l’Ademe contrevient à la nécessité d’équité. Les collectivités rurales et périurbaines sont souvent oubliées par les politiques écologiques et subissent de plein fouet les coupes budgétaires. Une baisse ciblée du budget de l’Ademe enverrait un signal fort. L’État doit soutenir tous les territoires, et non seulement ceux qui bénéficient déjà de subventions.
Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure pour avis. Si vous voulez vraiment que tous les territoires soient couverts par l’Ademe, vous devriez au contraire demander une augmentation de l’enveloppe. L’Agence soutient les collectivités. Certains territoires sont beaucoup plus impactés que d’autres par les questions environnementales.
Par ailleurs, l’Ademe ne génère pas de doublons, contrairement à ce qui peut être dit, comme l’a relevé sans équivoque l’Inspection générale des finances (IGF) en 2023. L’Ademe est bien gérée et une hausse des effectifs a même été préconisée par l’IGF.
L’amendement est rejeté.
Amendement II-AE24 de Mme Laurence Robert-Dehault
Mme Laurence Robert-Dehault (RN). Cet amendement vise à supprimer les hausses de crédits alloués à l’éolien et au photovoltaïque, pour une économie de 2,5 milliards d’euros. Ces énergies intermittentes, dépendantes du vent et du soleil, sont imprévisibles, non pilotables et fragilisent notre réseau électrique. Pendant que le gouvernement subventionne ces filières coûteuses, les Français paient toujours plus cher leur électricité. Le nucléaire et l’hydroélectricité sont les seules énergies stables, souveraines et bas carbone sur lesquelles la France s’est bâtie ; il faut les renforcer.
Nous refusons de financer une écologie dogmatique et ruineuse. Nous défendons une écologie du bon sens et de la souveraineté nationale.
Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure pour avis. L’action que vous visez permet en réalité à l’État d’encourager la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables, à travers des infrastructures éoliennes, solaires, hydrauliques ou de production de biogaz.
À cet effet, les producteurs d’énergie renouvelable bénéficient de dispositifs de soutien public prenant la forme de contrats d’achat ou de compléments de rémunération. Le surcoût résultant de la mise en œuvre de ces dispositifs, qui correspond à la différence entre le coût d’achat de l’électricité produite et le prix du marché, est compensé aux fournisseurs. Le niveau du soutien public évolue donc avec les volumes de production d’électricité renouvelable et avec les prix du marché de l’électricité.
Le niveau du soutien public augmente ainsi quand les prix baissent. La hausse constatée correspond donc à des volumes d’installations renouvelables toujours dynamiques et à la baisse des prix de marché de l’électricité, qui renchérit le coût du soutien public. La hausse des crédits, notamment concernant l’éolien, ne traduit pas une augmentation des investissements mais une mise en production effective des projets lancés ces dernières années. Nous produisons ainsi plus d’électricité verte que par le passé : c’est une bonne nouvelle dont nous devrions tous nous réjouir.
Avis défavorable.
L’amendement est rejeté.
Amendements II-AE72 et II-AE71 de M. Guillaume Bigot
M. Guillaume Bigot (RN). L’amendement II-AE72 propose de supprimer 73 millions d’euros en autorisations d’engagement et 79 millions en crédits de paiement d’études consacrées au développement de l’éolien en mer. Il s’agit pour l’essentiel d’études préparatoires à un appel d’offres massif de 8 à 10 gigawatts de production d’éolien maritime, dont la pertinence économique et environnementale est fortement contestée.
D’abord, le projet annuel de performances indique que cette ligne de dépenses a atteint son pic en 2025. Nous sommes maintenant dans la préparation des appels d’offres. Il me semble déraisonnable de dilapider de l’argent public dans des études techniques, des études d’impact, des débats publics autour de ce sujet, pour des projets dont la réalisation elle-même peut être remise en cause.
Deuxièmement, cette suppression pour des projets dont la réalisation peut être remise en cause permettra de préserver les crédits alloués à la sûreté nucléaire et au programme EPR2. Rappelons que les énergies intermittentes produisent de l’électricité qui ne se stocke pas, créent une tension sur le réseau électrique. Les centrales nucléaires n’ont pas vocation à être allumées et éteintes. Nous refusons cette vision énergétique qui se diffuse, au détriment du nucléaire pilotable, la seule énergie capable d’assumer notre souveraineté énergétique et notre décarbonation effective.
L’amendement II-AE71 vise à rationaliser les dépenses du médiateur national de l’énergie en réduisant sa subvention de 5,5 millions à 2,9 millions d’euros, soit une économie de 2,6 millions d’euros qui serait réalisée sur le programme 174. Le médiateur national de l’énergie traite 31 000 demandes chaque année, dont 15 000 concernent des litiges effectivement instruits. Cet amendement, à travers cette économie, propose de réinternaliser une partie de cette activité au sein du ministère pour permettre à cette instance de se recentrer sur le traitement des litiges qui impliquent des entreprises, c’est-à-dire les litiges réellement importants.
Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure pour avis. Je commencerai par aborder la question du médiateur. Il s’agit d’une autorité publique indépendante. La subvention qui est prévue par le projet de loi de finances représente la seule source de financement de cette instance. Au regard du volume de demandes traitées, il n’apparaît nullement souhaitable de réduire son champ d’action. Je rappellerai également son indépendance, son impartialité, gage d’autonomie et de confiance pour les consommateurs. J’émets donc un avis défavorable.
Concernant le parc éolien en mer, vous affirmez que son usage est contesté. Par qui, puis-je vous demander ? Par les climato-sceptiques ? Le vent demeure, jusqu’à preuve du contraire, une ressource gratuite, décarbonée et inépuisable.
Compte tenu de la répartition du parc éolien sur le territoire français, cette source d’énergie participe à la relocalisation de la production d’énergie, apportant ainsi aux diverses collectivités territoriales des bénéfices financiers, des opportunités de projets citoyens et participatifs ou de nouveaux emplois directs et indirects. Selon la commission de régulation de l’énergie, une éolienne génère ainsi entre 10 000 et 12 000 euros de recettes fiscales par an et par mégawatt installé, au bénéfice des collectivités territoriales.
Il ne s’agit pas d’une énergie miracle mais, combinée à d’autres énergies renouvelables, elle doit permettre à la France de respecter sa trajectoire de réduction des émissions de dioxyde de carbone. Je rappelle par ailleurs que l’EPR de Flamanville ne fonctionne pas. Malgré les 20 milliards d’euros dépensés, il s’agit d’un fiasco industriel.
Vous devriez plutôt être fiers que l’éolien devienne justement l’avenir industriel de la France. Collègues du Rassemblement national, vous êtes vraiment les gardiens du Moyen Âge énergétique. C’est très grave.
Avis défavorable.
Les amendements sont successivement rejetés.
Amendement II-AE76 de Mme Sabrina Sebaihi
Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure pour avis. Cet amendement propose de réinstaurer le fonds friche.
Des territoires ayant contribué significativement à la richesse nationale en hébergeant des industries très polluantes (sidérurgie, chimie, métallurgie, mines, énergie) voient aujourd’hui leurs sols souillés. Nous proposons d’apporter un soutien aux collectivités qui sollicitent une assistance pour dépolluer ces terrains et redonner le foncier aux habitants de ces territoires.
L’amendement est rejeté.
Amendement II-AE34 de M. Jérôme Buisson
M. Jérôme Buisson (RN). Cet amendement propose la suppression des 2 milliards d’euros alloués à l’éolien. Malgré des milliards de subventions, l’éolien n’atteint pas ses objectifs, alourdit la facture des Français, crée des distorsions sur le marché de l’électricité par son intermittence. Il contribue au bétonnage des sols, menace la biodiversité, suscite le rejet local massif, défigure les paysages et impose des nuisances aux ruraux. Enfin, nous ne maîtrisons pas la chaîne de valeur. À titre d’exemple, l’approvisionnement en terres rares indispensables à cette industrie est menacé depuis les annonces chinoises du 8 octobre dernier.
Il est donc temps de réallouer ces fonds vers des solutions énergétiques plus stables, efficientes comme le nucléaire, dont nous prônons la relance.
Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure pour avis. Avis défavorable. Vos propos sont toujours particulièrement intéressants à entendre. Si vous trouvez qu’une éolienne est dérangeante, je vous invite à demander leur avis à ceux qui vivent à côté de centrales nucléaires. L’EPR de Flamanville ne fonctionne toujours pas.
Mme Nadège Abomangoli (LFI-NFP). Je constate une incohérence manifeste dans les propositions avancées. D’un côté, vous nous dites que le problème concerne l’artificialisation des terres supposément due aux éoliennes ; de l’autre, vous prônez la prolifération de centrales nucléaires. Il importe de faire preuve de cohérence. La réalité démontre que vous vous engagez dans une véritable croisade idéologique anti-écologiste, en mobilisant les arguments les plus absurdes.
M. Nicolas Dragon (RN). Une centrale nucléaire représente un kilomètre carré d’emprise au sol, contre 1 500 mètres carrés pour une éolienne. Ensuite, en 2024, le nucléaire représentait 67 % du mix énergétique français, contre 8,7 % pour l’éolien L’invasion d’éoliennes ou de panneaux solaires sur le territoire national provoque des dérèglements sur la bonne marche de nos centrales nucléaires, qui sont constamment obligées d’effectuer des stop-and-go pour adapter leur puissance.
Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure pour avis. Il faut utiliser toutes les énergies renouvelables. Contrairement à l’uranium que nous allons chercher au Kazakhstan et au Niger, nous avons à notre disposition l’air, l’eau, le soleil, gratuitement. Votre idéologie est totalement opposée aux énergies renouvelables. Vous défendez le nucléaire à tout prix. Vous ne voulez pas reconnaître que l’EPR de Flamanville constitue un fiasco total, qui a coûté plus de 20 milliards d’euros aux contribuables. C’est votre choix ; ce n’est pas le nôtre.
L’amendement est rejeté.
Amendement II-AE 67 de M. Jorys Bovet
M. Jérôme Buisson (RN). Défendu.
Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure pour avis. Avis défavorable. Il n’est pas envisageable de supprimer la Commission nationale du débat public.
L’amendement est rejeté.
Amendement II-AE 36 de M. Jérôme Buisson
M. Jérôme Buisson (RN). Défendu.
Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure pour avis. Avis défavorable.
L’amendement est rejeté.
Amendement II-AE35 de M. Jérôme Buisson
M. Jérôme Buisson (RN). Cet amendement vise à supprimer les fonds publics alloués au partenariat associatif pour les actions internationales en faveur du développement durable. Ces fonds, à hauteur de 3,3 millions d’euros, sont certes modestes mais font partie de ces maintes enveloppes dont la distribution s’effectue de manière opaque. Les Français n’en peuvent plus de subventionner avec leurs impôts les officines qui développent bien trop souvent des discours totalement politisés, voire moralisateurs.
Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure pour avis : Avis défavorable.
L’amendement est rejeté.
Amendements II-AE 66 de M. Jorys Bovet
M. Jérôme Buisson (RN). Défendu.
Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure pour avis. Avis défavorable.
L’amendement est rejeté.
Puis, la commission émet un avis défavorable à l’adoption des crédits de la mission Écologie, développement et mobilité durables.
Annexe n° 1 : synthèse des recommandations
de la rapporteure pour avis
Annexe n° 2 : liste des personnes auditionnées
par la rapporteure pour avis
(par ordre chronologique)
M. Alain Neveü, président de la section transition énergétique et climat de l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable (IGEDD) inspecteur général ;
M. Vincent Coissard, sous-directeur du pôle national des transferts transfrontaliers de déchets (PNTTD) ;
Mme Émilie Baillet, adjointe au chef du PNTTD ;
M. Pierre Condamine, chargé de campagne surproduction, fédération Les Amis de la Terre France ;
Mme Marie-Pierre Lalaude-Labayle, responsable régionale Asie du Sud-Est, organisation GRET.
([1]) Institut de recherche de Potsdam sur les effets du changement climatique, Planetary Health Check 2025, 25 septembre 2025, 144 pages.
([2]) Institut de l’économie pour le climat, Panorama des financements climat édition 2025, 2025, 84 pages.
([3]) Cour des comptes, Les certificats d’économies d’énergie : un dispositif à réformer car complexe et coûteux pour des résultats incertains, juillet 2024, 159 pages.
([4]) Ibid.
([5]) Nabil Wakim, « Esther Duflo, Prix Nobel d’économie 2019 : Les pays riches ont une dette climatique envers les pays du Sud », Le Monde, 25 juillet 2024.
([6]) Guillaume Blanc, L’invention du colonialisme vert. Pour en finir avec le mythe de l’Eden africain, Flammarion, 2020, 326 pages.
([7]) Article L. 541-1-1 du code de l’environnement.
([8]) Yvon Pesqueux, « Quels sont nos déchets », La gouvernance des déchets, Cahiers français, La documentation française, juillet –août 2021, p. 16.
([9]) Programme des Nations unies pour l’environnement, Global Waste Management outlook, p. 54, 2015.
([10]) Yvon Pesqueux, Op. Cit.
([11]) OCDE, Panorama de l’environnement 2015, 110 pages, 2016.
([12]) Banque mondiale, What a waste 2.0, A global snapshot of solid waste management to 2050, 295 pages, 2018.
([13]) « Business as usual » – L’analyse retenue par la Banque mondiale prend en compte les perspectives de croissance économique et démographique des pays. Le cadre normatif n’est pas modifié. Les modes de production et de consommation sont également supposés inchangés.
([14]) La classification de la Banque mondiale est élaborée à partir du revenu national brut (RNB) par habitant de l’année précédente, exprimé en dollars américains, soit en 2018 : pays à revenu faible : (1 025 $ ou moins) ; pays à revenu intermédiaire inférieur (1 026 $ à 4 035 $) ; pays à revenu intermédiaire supérieur (4 036 $ à 12 475 $) ; Pays à revenu élevé (12 476 $ ou plus).
([15]) Philippe Chalmin, Catherine Gaillochet, Du rare à l’infini – Panorama mondial des déchets 2009. Edition Economica, 450 pages, 2009.
([16]) Banque mondiale, Op. Cit.
([17]) Données de la Commission européenne, 2020.
([18]) Politique « Operation National Sword ».
([19]) Banque mondiale, Op. Cit.
([20]) Ibid.
([21]) Banque mondiale, Op. cit.
([22]) 35 kg de plastique ont ainsi été retrouvés dans l’estomac d’une vache au Kenya lors d’une étude de l’Université de Plymouth et du Flipflopi Project en 2023.
([23]) Marion Mare, « Les inégalités mondiales face aux déchets », La gouvernance des déchets, Cahiers français, La documentation française, juillet –août 2021, p. 73.
([24]) Cf. infra, Première réunion de la Conférence des parties en vue de l’entrée en vigueur de la Convention de Bâle, 3 et 4 décembre 1992.
([25]) Données Zero Waste Europe, 2022.
([26]) Voir notamment les actions du réseau GAIA.
([27]) Ce cargo, chargé de cendres toxiques provenant de Philadelphie, ne trouvant pas d’endroit pour se délester de sa cargaison, erra pendant plusieurs mois avant de déverser ses 14 000 tonnes de déchets à Haïti, au Sénégal, au Maroc, en Yougoslavie, au Sri Lanka, à Singapour et dans l’océan Atlantique.
([28]) Corrosives, inflammables, infectieuses, toxiques notamment.
([29]) Soit « toutes mesures pratiques permettant d’assurer que les déchets dangereux ou d’autres déchets sont gérés d’une manière qui garantisse la protection de la santé humaine et de l’environnement contre les effets nuisibles que peuvent avoir ces déchets » – convention de Bâle, Article 2.
([30]) Un nombre de signatures représentant 75 % des parties à la convention était nécessaire pour permettre l’entrée en vigueur des dispositions modifiées.
([31]) Règlement (CE) n° 1013/2006 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2006 concernant les transferts de déchets, Article 34.
([32]) Code pénal, article 222-36.
([33]) Code de l’environnement, article L. 541-46.
([34]) Yvon PESQUEUX, Op. Cit.
([35]) Charte des Nations unies, article 2.
([36]) Seuls les pays membres ont un pouvoir décisionnel. Les autres pays peuvent être uniquement consultés via des partenariats stratégiques ou des consultations régionales ponctuelles.
([37]) Notamment l’Australie, le Brésil, le Canada, la Corée du Sud, l’Inde, le Japon, la Nouvelle-Zélande et la Russie pour le Ban amendment.
([38]) Pierre Desvaux, « L’économie circulaire : un réel changement de paradigme ? », La gouvernance des déchets, Cahiers français, La documentation française, juillet –août 2021, p. 10.