N° 2049

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 29 octobre 2025

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE LOI de financement
de la sécurité sociale pour 2026 (nos 1907 et 1999),

 

par M. Jean-Didier BERGER

Député

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SOMMAIRE

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Pages

Introduction

PremiÈre partie : l’Équilibre gÉnÉral et les recettes

I. La situation DÉgradÉe des comptes sociaux : un dÉficit en recul en 2026, le défi de la soutenabilité ensuite

A. L’article liminaire prévoit que le solde des administrations de sécurité sociale serait légèrement excédentaire en 2026

1. Un enrichissement de la LFSS sur le champ des administrations de sécurité sociale dans leur ensemble

2. Le retour du déficit des ASSO en 2025, un excédent modeste en 2026

B. Une aggravation du déficit en 2025, dans un contexte économique marqué par d’importantes incertitudes

1. Une conjoncture économique morose en 2025, dans un contexte international incertain

2. Une dégradation spectaculaire du solde de la sécurité sociale en 2025

C. une réduction ambitieuse du déficit en 2025, fondée sur un scénario macroéconomique volontariste

1. Une prévision de croissance modeste en 2026, par ailleurs fragilisée par l’orientation restrictive des finances publiques

2. Une amélioration du solde prévisionnel des régimes obligatoires de base en 2026, après un déficit alarmant en 2025

D. L’objectif d’amortissement de la dette sociale est fragilisÉ par l’accumulation des dÉficits des rÉgimes de base

1. La gestion différenciée du flux et du stock de dette avant la crise

a. Les déficits accumulés dans le bilan du régime général pèsent sur la trésorerie de l’ACOSS

b. Les passifs transférés à la CADES ont donné lieu à l’amortissement de 274,7 milliards d’euros de dette sociale à la fin de l’année 2025

2. Un horizon d’amortissement de la dette sociale fixé à 2033, compromis par la trajectoire dégradée des comptes sociaux

a. La reprise de 136 milliards d’euros décidée lors de crise sanitaire est arrivée à son terme en septembre 2024

b. La cible d’une extinction en 2033 est fragilisée par l’accumulation des déficits sociaux

II. Les recettes : un nouvel effort demandé aux ménages et aux entreprises

A. Une augmentation des impôts et taxes pesant sur certains ménages et entreprises, au détriment du pouvoir d’achat des français les plus fragiles

1. Le gel des seuils de revenus pris en compte pour le calcul de la CSG sur certains revenus de remplacement : une composante de « l’année blanche » voulue par le Gouvernement

a. La coexistence de plusieurs taux de CSG applicables aux revenus de remplacement

b. Le maintien du barème de CSG mis en œuvre en 2025, au détriment des contribuables les plus modestes

2. La création d’une contribution de 2,25 % pesant sur les organismes complémentaires au titre du seul exercice 2026

a. Un partage perfectible, entre l’assurance maladie et les organismes complémentaires, de la prise en charge des frais de santé

b. L’instauration d’une contribution exceptionnelle de 2,25 % à la charge des organismes complémentaires en 2026

B. la rationalisation de divers dispositifs d’EXEMPTION d’assiette et d’exonération de cotisations sociales

1. Les relations financières entre l’État et la sécurité sociale au titre des exonérations de cotisations sociales

a. Un principe de neutralité des relations financières entre l’État et la sécurité sociale, qui peut faire l’objet de dérogations

b. La compensation quasi-intégrale des pertes de recettes supportées par la sécurité sociale, en dépit du coût croissant des allègements généraux

2. Le rapprochement des prélèvements sociaux applicables aux compléments de salaire avec le droit commun

a. L’assujettissement au forfait social des aides directes versées par l’employeur

b. La réduction des avantages sociaux associés aux indemnités de rupture conventionnelle et de mise à la retraite

3. La rationalisation d’exonérations de cotisations sociales particulièrement coûteuses

a. Le recentrage de l’aide à la création et à la reprise d’entreprise (ACRE) sur les publics vulnérables

b. La refonte du dispositif dit LODEOM

c. La suppression de l’exonération de cotisations salariales pour les apprentis

d. Le renforcement des critères d’éligibilité du statut de JEI

Seconde partie : les dÉpenses

I. Les dÉpenses de la branche maladie

A. En 2024, les dÉpenses ont cru À un rythme particuliÈrement soutenu sous l’effet de l’inflation

B. les dÉpenses sont restÉes dynamiques en 2025 mais le dÉpassement de l’ondam a pu Être contenu

C. uNE augmentation modÉRÉe de l’ONDAM en 2026 rÉsultant d’une maîtrise accrue DES dÉPENSES

1. Un ONDAM pour 2026 fixé à 263,9 milliards d’euros

2. Les mesures nouvelles visant à réaliser des économies en dépenses

a. Responsabiliser et solidariser l’ensemble des acteurs

b. Améliorer l’accès aux soins et favoriser l’efficience de l’activité des établissements de santé

c. Approfondir la politique de prévention

d. Favoriser le soutien à l’innovation

II. Les dÉpenses de la branche vieillesse

A. eN 2024, les dÉpenses ont fortement augmentÉ sous l’effet de la revalorisation des prestations

B. Un ralentissement de la dépense en 2026, mais des risques pour la soutenabilité de la branche Vieillesse du fait de la suspension de la réforme des retraites

1. L’objectif de dépenses et la suppression du FSV en 2026

2. L’évolution des dépenses après 2026

3. Des mesures déterminantes pour l’équilibre de la branche vieillesse sont proposées par le PLFSS pour 2026

III. Les dÉpenses de la branche famille

A. En 2024, un accroissement des DÉpenses de prestations portÉ par l’effet prix

B. En 2025, les revalorisations contribuent à l’augmentation des dÉpenses de prestations

C. En 2026, les dÉpenses demeurent DYNAMIQUES EN l’absence de mesures nouvelles

1. Les déterminants de l’évolution hors mesures nouvelles

2. Des mesures de soutien à la politique familiale prévues par la LFSS pour 2026

IV. Les dÉpenses de la Branche accidents du travail – maladies professionnelles

A. UN moindre accroissement de la dÉpense EN 2024

B. En 2025, Une dÉpense contenue malgrÉ le dynamisme des indemnitÉs journaliÈres

C. En 2026, des dÉpenses qui demeureraient soutenues mais qui pourraient Être limitÉes par une mesure visant À maÎtriser la hausse des indemnitÉs journaliÈres

1. Des dépenses qui poursuivent une croissance plutôt soutenue

2. Des mesures nouvelles ayant des incidences en dépenses

V. Les dÉpenses de la branche autonomie

A. en 2024, UNE AUGMENTATION FRANCHE DES DÉPENSES DE LA BRANCHE du fait de l’augmentation des dÉpenses de prestations sociales

B. Une augmentation soutenue en 2025 dans un contexte de réforme des modalités de financement

C. En 2026, des dÉpenses portÉes par des Évolutions tendancielles et par une mesure nouvelle

1. Une progression des dépenses s’expliquant en partie par le taux de reconduction

2. Les mesures nouvelles ayant un effet en dépenses

Examen en commission

 

 


   Introduction

Ce rapport présente, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, l’avis de M. Jean-Didier Berger sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2026.

 Sur la forme, il s’agit du troisième PLFSS à voir s’appliquer intégralement les dispositions de la loi organique n° 2022-354 du 14 mars 2022, laquelle a révisé en profondeur la loi organique n° 2005-881 du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale (LOLFSS).

Ainsi, les LFSS de l’année comprennent désormais une partie modifiant l’équilibre pour l’exercice en cours – ce à quoi peuvent également procéder les lois de financement rectificatives de la sécurité sociale (LFRSS), catégorie à laquelle il n’a été recouru que trois fois ([1]) – et deux parties respectivement consacrées aux recettes puis aux dépenses de celui à venir. Les dispositions relatives au dernier exercice clos, qui faisaient l’objet de la première partie jusqu’à la LFSS pour 2023, sont désormais comprises dans la loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale (PLACSS).

L’Assemblée nationale a rejeté le PLACSS de l’année 2022 puis le PLACSS de l’année 2023, lequel a été déposé à deux reprises en raison de la dissolution de l’Assemblée nationale le 9 juin 2024 ([2]). Le PLACSS de l’année 2024 a subi le même sort que les textes précédents, l’Assemblée nationale, le 10 juin 2025, puis le Sénat, le 23 juin de la même année, ayant successivement rejeté le projet de loi. Il convient de rappeler que l’examen en séance publique du PLACSS de l’année 2024 était indispensable à la mise en discussion du PLFSS pour 2026, conformément à la logique de « chaînage vertueux » prévue par l’article L.O. 111‑7‑1 du code de la sécurité sociale ([3]).

Surtout, la nomination tardive du Gouvernement, le dimanche 12 octobre 2025, a, pour la deuxième année consécutive, retardé le dépôt du PLFSS pour 2026. Le premier alinéa de l’article L.O. 111-6 du code de la sécurité sociale dispose que le PLFSS de l’année et ses annexes sont déposés « au plus tard le premier mardi d’octobre » sur le bureau de l’Assemblée nationale, soit, cette année, le mardi 7 octobre 2025. Le dépôt du PLFSS pour 2026 le mardi 14 octobre 2025, avec une semaine de retard sur le calendrier organique, entraîne inévitablement des conditions d’examen dégradées.

Le rapporteur pour avis ne peut que regretter cette situation peu propice à une discussion approfondie sur la trajectoire financière de la sécurité sociale et sur les conditions de son nécessaire redressement.

Cette situation est renforcée par la modification du texte initial par la lettre rectificative déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale le jeudi 23 octobre 2025. Le changement principal consiste en l’insertion d’un nouvel article 45 bis tendant à suspendre les mesures d’économies de la réforme des retraites de 2023, c’est‑à‑dire le relèvement de l’âge d’ouverture des droits pour certaines générations et le calendrier accéléré de la durée d’assurance requise pour obtenir une pension à taux plein. Les dispositions favorables aux assurés, telles que l’augmentation de la retraite minimale et la majoration de pension ouverte aux pères et mères de famille bénéficiant d’une pension à taux plein, sont maintenues. La suspension de la réforme des retraites de 2023 engendrerait des dépenses supplémentaires à hauteur de 100 millions d’euros en 2026 et de 1,4 milliard d’euros en 2027, dont le coût serait compensé par le relèvement du taux de la contribution exceptionnelle due par les organismes complémentaires en 2026 (article 7) et l’accentuation de la sous­‑indexation des pensions de retraite en 2027, dans le cadre de « l’année blanche » – en réalité, plusieurs années grises – proposée par le Gouvernement (article 44). Les articles 14, 17 et 52 sont modifiés afin de mettre en cohérence le tableau d’équilibre de l’année 2026, l’annexe pluriannuelle dite « annexe A » et l’objectif de dépenses de la branche vieillesse en 2026 avec la nouvelle trajectoire proposée par le Gouvernement.

En tout état de cause, le dépôt tardif du texte ne semble pas suffire, en luimême, à entacher d’irrégularité la procédure d’adoption du PLFSS pour 2026. Saisi d’un grief en ce sens s’agissant du PLF pour 2025, déposé en méconnaissance des dispositions organiques régissant la date de dépôt du projet de loi de finances ([4]), le Conseil constitutionnel a jugé qu’il n’est pas résulté du dépôt tardif du PLF pour 2025, « compte tenu des circonstances exceptionnelles ayant conduit à la formation tardive du Gouvernement, de la date de dépôt effective du projet de loi de finances et de ses conditions d’examen, d’atteinte substantielle aux exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire » ([5]). Un tel raisonnement est susceptible de s’appliquer à nouveau pour les textes financiers de l’année 2026, s’ils venaient à être adoptés par le Parlement et le Conseil constitutionnel a en être saisi.

● Sur le fond, le texte dont le Gouvernement demande l’approbation pour 2026 est marqué par un effort de redressement des comptes sociaux. Celui‑ci prend la forme d’une hausse de certains prélèvements obligatoires, qui gagnerait à être mieux ciblée, et d’un freinage de la progression des dépenses, qui pourrait être approfondi.

* En recettes (659,5 milliards d’euros attendus en 2026), le rapporteur pour avis a examiné plus particulièrement les mesures tendant à augmenter les prélèvements obligatoires sur les ménages et les entreprises ou à réduire les avantages sociaux dont ils bénéficient :

– le gel des seuils de revenu pris en compte pour le calcul de la contribution sociale généralisée (CSG) sur les pensions de retraite et d’invalidité et sur les allocations de chômage, dans le cadre de « l’année blanche » annoncée par le Gouvernement (article 6) ;

– l’introduction d’une contribution exceptionnelle due par les organismes complémentaires d’assurance maladie en 2026 (article 7) ;

– dans une logique de maîtrise du coût des exonérations sociales, la réduction des exemptions d’assiette bénéficiant aux compléments de salaire prenant la forme d’aides directes versées par l’employeur (article 8) et la rationalisation de certaines exonérations spécifiques (article 9).

* En dépenses (676,9 milliards d’euros attendus en 2026 hors transferts entre branches, dont 267,5 milliards d’euros pour l’assurance maladie) :

– l’extension du champ des participations forfaitaires et franchises ainsi que la visibilité accrue de leur recouvrement (article 18), la régulation renforcée des tarifs de certaines professions de santé dans un objectif d’équité (article 24), la meilleure maîtrise des dépenses dans le secteur des soins dentaires (article 25), le renforcement des incitations au conventionnement des professionnels de santé et à la limitation des dépassements d’honoraires (article 26), la limitation de la durée des prescriptions d’arrêts de travail pour maladie et la suppression de l’obligation de visite médicale après un congé de maternité (article 28), la réduction de la durée d’indemnisation des arrêts de travail pour les assurés ne relevant pas du dispositif d’affection de longue durée (article 29), ainsi que la lutte contre le gaspillage des produits de santé (article 32) ;

– le renforcement de l’accès aux soins (article 21) ainsi que la mise en place de mesures visant à améliorer l’efficience des financements et la pertinence des actes et des soins dans les établissements de santé (articles 22 et 27) ;

– la prévention de l’augmentation des affections de longue durée par la création de prestations d’accompagnement préventif spécifiques (article 19) ainsi que la simplification et le renforcement de l’efficience de la politique vaccinale (article 20) ;

– la promotion du recours aux outils numériques d’aide à la prescription et à la décision médicale de dernière génération (article 30), l’obligation d’alimenter et de consulter le dossier médical partagé dans certaines situations (article 31), le renforcement de la diffusion des médicaments biosimilaires et génériques en ville (article 33), l’adaptation des dispositifs d’accès précoces, compassionnels et directs aux traitements (article 34), ainsi que l’expérimentation du référencement de certains médicaments présentant une équivalence thérapeutique (article 35) ;

– la rationalisation et la simplification du dispositif de cumul emploi-retraite (article 43), ainsi que la stabilisation du montant des prestations sociales, dont les pensions de retraite (article 44), une mesure visant à la réduction des inégalités entre les femmes et les hommes à la retraite (article 45) et la suspension du calendrier d’augmentation de l’âge légal de départ et de la durée d’assurance initialement prévu par la réforme des retraites de 2023 (article 45 bis) ;

– la mise en place de mesures visant à optimiser le recouvrement des pensions alimentaires (article 41), ainsi que la création d’un congé supplémentaire de naissance d’une durée maximale de deux mois, ouvert à chacun des parents et venant compléter les congés de maternité, de paternité et d’adoption (article 42) ;

– une limitation de la durée de versement des indemnités journalières prises en charge par la branche accidents du travail et maladies professionnelles (article 28) ainsi qu’une amélioration des conditions de reconnaissance des maladies professionnelles (article 39) ;

– une réforme du mode de financement des établissements accueillant des enfants et des jeunes en situation de handicap (article 26) ainsi que la mise en place d’un dispositif permettant de déduire de l’allocation personnalisée d’autonomie et de la prestation de compensation du handicap les indemnisations versées par les assurances ou les fonds d’indemnisation (article 38).

 

 

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* *

Nota bene : dans les tableaux et graphiques du présent rapport pour avis, des effets d’arrondis ou de transferts peuvent expliquer que les totaux soient légèrement inférieurs ou supérieurs à l’addition des agrégats qu’ils retracent.

 


   PremiÈre partie :
l’Équilibre gÉnÉral et les recettes

La présente partie porte sur les articles figurant dans la première et la deuxième partie du PLFSS pour 2026. Le rapporteur pour avis a concentré son analyse sur les enjeux relatifs au refinancement et à l’amortissement de la dette sociale, ainsi que sur les dispositions du texte visant à augmenter les prélèvements obligatoires sur une partie des ménages et des entreprises.

Sont successivement examinées les perspectives d’ensemble pour le budget de la sécurité sociale (I), ainsi que les principales dispositions s’agissant des recettes (II).

I.   La situation DÉgradÉe des comptes sociaux : un dÉficit en recul en 2026, le défi de la soutenabilité ensuite

Il convient de rappeler, en introduction, que la révision organique du 14 mars 2022 a mis un terme à la convention suivant laquelle le solde de la sécurité sociale s’entendait comme l’addition de celui des branches du seul régime général et du fonds de solidarité vieillesse (FSV).

● À compter du 1er janvier 2026 et de la suppression du FSV ([6]), le solde de la sécurité sociale correspond à celui des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale (ROBSS). Ces premiers regroupent les régimes couvrant les assurés contre les cinq risques sociaux suivants : la maladie, les accidents du travail et maladies professionnelles (AT‑MP), les coûts engendrés par la famille ou la vieillesse et la perte d’autonomie ([7]). Le régime général des salariés du secteur privé, qui couvre également les indépendants depuis le 1er janvier 2018 ([8]), occupe une place prépondérante parmi l’ensemble des ROBSS. Il représente 518,5 milliards d’euros de dépenses et 504,1 milliards d’euros de recettes en 2024, soit respectivement 80,7 % et 80,5 % du total des ROBSS pour cet exercice ([9]). Toutefois, il existe aux côtés du régime général d’autres régimes de base, correspondant à des activités ou à des statuts d’emplois spécifiques : les deux régimes qui couvrent les exploitants et les salariés agricoles, les deux régimes regroupant les professions libérales et les différents régimes spéciaux ou assimilés, comme celui des fonctionnaires de l’État, des agents de la Société nationale des chemins de fer (SNCF), du personnel des industries électriques et gazières (CNIEG) ou des marins (ENIM). Une partie des régimes spéciaux sont dits fermés, en ce qu’ils ont cessé d’accueillir de nouveaux assurés. Les nouveaux cotisants intégrant les entreprises et institutions en relevant sont ainsi affiliés au régime général ([10]).

L’annexe 1 du PLFSS pour 2026, qui présente de manière exhaustive les ROBSS dont le financement est régi par les LFSS, fait état de trente-deux régimes de base au total ([11]).

● Les derniers résultats excédentaires de la sécurité sociale ont été enregistrés entre 1999 et 2001, période marquée par une « conjoncture salariale extrêmement favorable ». À compter de l’exercice 2002, les comptes sociaux se dégradent fortement et affichent des déficits chroniques. M. François Monier, secrétaire général de la Commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS), alerte dès 2004 sur la « situation de déséquilibre structurel » du régime général, dont il estime qu’elle « ne pourra être corrigée durablement que par des mesures structurelles » ([12]). Il est alors indiqué que le déficit du seul régime général atteindrait le montant record de 14 milliards d’euros en 2004 « au terme de trois années de dégradation vertigineuse », soit près de 4 milliards d’euros supplémentaires par rapport à l’année 1995, présentée comme « l’année la plus sombre de la décennie quatre-vingt-dix » ([13]).

De tels niveaux de déficit sont aujourd’hui récurrents. Vingt ans après cet avertissement, le solde des ROBSS continue de se dégrader sans perspective raisonnable de stabilisation et moins encore de retour à l’équilibre.

Plusieurs périodes peuvent être distinguées depuis le retour au déficit des régimes obligatoires de base en 2002 :

– déficitaire depuis 2002, le résultat avait connu un premier point bas lors de la crise de 2009 et 2010, avec un passif de 24,9 puis de 29,6 milliards d’euros ;

– le solde s’était ensuite amélioré jusqu’en 2019 (– 1,7 milliard d’euros), une fois les difficultés sur les marchés bancaires surmontées et d’importantes réformes engagées ;

– alors que la sécurité sociale devait se rapprocher de l’équilibre à l’horizon 2023, les conséquences de la crise sanitaire ont bouleversé cette trajectoire de rétablissement des comptes sociaux, de sorte que le déficit avait atteint un pic historique de 39,7 milliards d’euros en 2020 ;

 un redressement s’est produit jusqu’à l’exercice 2023 dans un contexte de forte inflation, de reprise de l’activité et de quasiextinction des dépenses exceptionnelles liées à l’épidémie de la covid-19, avec une amélioration du solde par un facteur de 3,7 en trois ans, pour un résultat déficitaire de 10,8 milliards d’euros en 2023, imputable aux branches maladie (– 11,1 milliards d’euros) et vieillesse (– 2,6 milliards d’euros) ;

– le déficit, après être ressorti à la hausse en 2024 ( 15,3 milliards d’euros), devrait atteindre  23 milliards d’euros en 2025 en raison d’un effet ciseau lié, d’une part, au ralentissement de la masse salariale du secteur privé et, d’autre part, à la progression des dépenses du fait de l’inflation passée ;

 si les mesures nouvelles proposées dans le PLFSS pour 2026 contribueraient à l’amélioration du solde des ROBSS en 2026 (– 17,5 milliards d’euros), le déficit se stabiliserait à un niveau élevé dans les années suivantes, pour atteindre 18,3 milliards d’euros en 2029.

Évolution du dÉficit des rÉgimes obligatoires de base
de 2008 À 2029

(en milliards d’euros)

Source : commission des finances, d’après les rapports annexés aux LFSS pour 2010 à 2025 et de l’annexe pluriannuelle dite « annexe A » du PLFSS pour 2026.

Note : le présent graphique retrace l’évolution du déficit agrégé des ROBSS et du FSV entre 2008 et 2025, puis celle du déficit des seuls ROBSS à compter de 2026 et du transfert des missions du FSV à la branche vieillesse du régime général.

● La trajectoire financière de la sécurité sociale retracée supra est moins favorable que les dernières prévisions pluriannuelles connues, inscrites dans la LFSS pour 2025.

En revanche, la différence constatée d’une LFSS à une autre (puis à une LACSS) ne saurait s’assimiler à une surexécution ou une sous-exécution, contrairement au cadre d’analyse applicable à la loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes concernant l’État. En effet, les 1° à 3° de l’article L.O. 111-3-5 du code de la sécurité sociale disposent que la LFSS « fixe les charges prévisionnelles des organismes concourant au financement des ROBSS ; fixe, par branche, les objectifs de dépenses de l’ensemble des ROBSS […] ; fixe l’objectif national de dépenses d’assurance maladie de l’ensemble des régimes obligatoires de base ainsi que ses sous-objectifs ». Dès lors, les agrégats financiers retracés dans la LFSS présentent un caractère indicatif et non limitatif – ce que traduit l’usage du terme « objectifs » plutôt que celui de « plafonds » par le législateur organique ([14]). Une part essentielle des charges des ROBSS et du FSV correspondent à des dépenses dites de guichet, dont les assurés ont le droit de bénéficier même en cas de dépassement des objectifs.

Le PLFSS pour 2026 comprend un article liminaire retraçant la situation de l’ensemble des administrations de sécurité sociale (ASSO) (A). Le déficit des ROBSS et du FSV au titre de l’exercice 2025 atteindrait un niveau inédit hors période de crise (B), avant de connaître une amélioration qui demeure largement insuffisante en 2026 (C). Enfin, l’accumulation des déficits des régimes de base fragilise l’objectif d’amortissement de la dette sociale par la CADES à l’horizon 2033 (D).

A.   L’article liminaire prévoit que le solde des administrations de sécurité sociale serait légèrement excédentaire en 2026

La disposition qui précède les trois parties de la LFSS améliore l’information du Parlement sur un périmètre plus large que les comptes inclus dans le domaine de la LFSS. Il s’agit d’une novation introduite par la révision organique du 14 mars 2022 (1). Le solde serait déficitaire en 2025, à hauteur de 0,3 point de produit intérieur brut (PIB), et en excédent de 0,1 point en 2026 (2).

DÉcomposition du solde effectif et projetÉ des APU de 2020 À 2029

(en points de PIB)

Source : plan budgétaire et structurel à moyen terme (PSMT) 2025‑2029, à partir des comptes nationaux (base 2020) ; rapport d’avancement annuel du PSMT 2025‑2029 au titre de l’année 2025 ; rapport sur la situation et les perspectives économiques, sociales et financières de la Nation annexé au PLF pour 2026.

1.   Un enrichissement de la LFSS sur le champ des administrations de sécurité sociale dans leur ensemble

Créé par la loi organique du 14 mars 2022, l’article L.O. 111-3-2 du code de la sécurité sociale dispose que « dans son article liminaire, la loi de financement de l’année présente, pour l’exercice en cours et pour l’année à venir, l’état des prévisions de dépenses, de recettes et de solde des administrations de sécurité sociale ». Une telle configuration rapproche la LFSS de la LACSS mais la distingue des lois de finances – initiales, rectificatives ou de fin de gestion –, ainsi que des LFRSS ([15]), dont l’article liminaire concerne l’ensemble des administrations publiques (APU), conformément à l’article 1er H de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) ([16]).

Il convient de faire le départ entre l’agrégat européen des ASSO, qui excède le périmètre des lois de financement, et celui des régimes obligatoires de base (ROBSS), chargés de couvrir les assurés contre divers risques sociaux, et leurs satellites. Ce dernier est l’objet principal du présent rapport pour avis.

Les ASSO sont l’un des sous-secteurs d’administration publique du système européen des comptes nationaux (SEC 2010) établi par la direction générale des statistiques de la Commission européenne (EUROSTAT), les deux autres catégories d’administrations définies par la nomenclature européenne étant les administrations publiques centrales (APUC) et les administrations publiques locales (APUL). Aux termes du paragraphe 20.67 du SEC 2010, relèvent du sous-secteur des ASSO « toutes les unités de sécurité sociale, indépendamment du niveau administratif qui gère ou administre les régimes » ainsi que « les hôpitaux publics [qui] fournissent un service non marchand à la communauté dans son ensemble […] s’ils sont contrôlés par des régimes de sécurité sociale ».

Les ASSO regroupent l’ensemble des ROBSS, les régimes de retraite complémentaire obligatoires, comme l’AGIRC-ARRCO pour les salariés du secteur privé et l’Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l’État et des collectivités publiques (IRCANTEC) pour une large partie des agents publics non titulaires, l’assurance chômage (UNÉDIC), les hôpitaux publics et divers satellites tels que la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) et le Fonds de réserve pour les retraites (FRR).

2.   Le retour du déficit des ASSO en 2025, un excédent modeste en 2026

 D’après l’article liminaire du PLFSS pour 2026 et les documents annexés au projet de loi de finances (PLF) pour 2026, le solde des ASSO serait déficitaire à hauteur de 8,4 milliards d’euros en 2025 et excédentaire à hauteur 3,4 milliards d’euros en 2026, le rythme de progression des recettes (+ 2,2 % en 2025, + 2,7 % en 2026) et des dépenses (+ 3,4 % en 2025, + 1,2 % en 2026) s’inversant.

Pour rappel, les comptes des ASSO se sont établis de la manière suivante en 2024 d’après les dernières informations publiées par l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) ([17]) :

– 779,6 milliards d’euros de recettes, soit 26,7 % du PIB, en hausse de 0,5 milliard d’euros par rapport aux précédentes estimations ;

– 778,4 milliards d’euros de dépenses, soit 26,7 % du PIB, en hausse de 1,6 milliard d’euros par rapport aux précédentes estimations ;

– 1,2 milliard d’euros d’excédent, soit 0,04 % du PIB.

dÉpenses, recettes et solde des asso (2024‑2026)

(en milliards d’euros ; en point de PIB)

 

2024

2025 (P)

2026 (P)

 

Valeur

Volume

Valeur

Volume

Valeur

Volume

Recettes

779,6

26,6

796,6

26,7

817,7

26,7

Dépenses

778,4

26,6

805,0

27,0

814,4

26,6

Solde

1,2

0,04

– 8,4

 0,3

3,4

0,1

Source : article liminaire du PLACSS de l’année 2024 ; rapport sur la situation et les perspectives économiques, sociales et financières de la Nation annexé au PLF pour 2026.

La trajectoire inscrite dans la loi de programmation des finances publiques (LPFP) pour les années 2023 à 2027 ([18]), considérée comme définitivement adoptée par l’Assemblée nationale il y a moins de deux ans, est manifestement caduque. À titre indicatif, les objectifs figurant à l’article 3 de la LPFP 2023-2027 visaient un solde des ASSO à hauteur de 0,6 point de PIB en 2024, de 0,7 point de PIB en 2025 et de 0,9 point de PIB en 2026. La précédente estimation disponible du solde des ASSO en 2025, à hauteur de – 0,2 % du PIB, était déjà moins favorable ([19]).

 La prévision de déficit d’apparence modeste des ASSO au titre de l’année 2026 masque d’importantes disparités entre les organismes relevant de cet agrégat. Si les régimes obligatoires de base seraient fortement déficitaires, l’UNÉDIC se maintiendrait à l’équilibre en 2026 (0,6 milliard d’euros) tandis que la CADES demeurerait nettement excédentaire d’après les documents annexés au PLF pour 2026.

Le rapporteur pour avis avait déjà eu l’occasion d’alerter, dès l’examen du PLACSS de l’année 2023, sur « l’amélioration en trompe-l’œil de la situation financière des administrations de sécurité sociale » attachée à la comptabilisation des sommes amorties par la CADES parmi les recettes des ASSO ([20]).

En effet, le solde annuel de la CADES correspond à la dette sociale amortie nette de la charge des intérêts des emprunts qu’elle émet, soit 16,4 milliards d’euros en 2026 d’après le I de l’article 15 du PLFSS pour 2026. Il en résulte que l’amortissement annuel des déficits liés aux besoins de financement des exercices antérieurs est comptabilisé comme une recette de l’exercice n, sans que les montants ainsi amortis puissent être utilisés pour couvrir les charges rattachées à ce même exercice. Interrogé sur le bien‑fondé de cette convention comptable, le président du conseil d’administration de la CADES, M. Pierre Ricordeau, a indiqué qu’elle témoignait avec exactitude de la trajectoire de désendettement financier de la sécurité sociale.

B.   Une aggravation du déficit en 2025, dans un contexte économique marqué par d’importantes incertitudes

Il convient de rappeler que le solde des ROBSS et du FSV de l’année 2024 devait être arrêté par le PLACSS afférent à cet exercice. Rejeté en première lecture par l’Assemblée nationale le 10 juin 2025, le texte faisait état d’un déficit agrégé de 15,3 milliards d’euros en 2024.

Si le contexte économique est dégradé (1), le déficit des régimes obligatoires de base atteint, en 2025, un niveau inédit hors période de crise (2).

1.   Une conjoncture économique morose en 2025, dans un contexte international incertain

Après une hausse modérée de 1,1 % en 2024, la croissance du produit intérieur brut (PIB) serait freinée par la dégradation de l’environnement international et s’établirait à 0,7 % en 2025. Il s’agit du même niveau que la prévision contenue dans le rapport d’avancement annuel (RAA) du plan budgétaire et structurel à moyen terme (PSMT) pour les années 2025 à 2029, présenté par le Gouvernement le 16 avril 2024, concomitamment au dépôt du projet de loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes (PLRG) de l’année 2024. La LFSS pour 2025 se fondait sur une hypothèse de croissance du PIB de 0,9 %.

L’acquis de croissance au deuxième trimestre de l’année 2025 se situe à 0,6 % du PIB, ce qui signifie qu’une progression de seulement 0,2 % du PIB par trimestre jusqu’à la fin de l’année devrait permettre d’atteindre la cible d’une croissance de 0,7 % en rythme annuel. Le fait que l’INSEE annonce une accélération de la croissance, qui s’établirait à 0,5 % au troisième trimestre 2025 du fait d’une augmentation de la production totale et des exportations ([21]), peut finalement laisser espérer que la croissance pour 2025 soit supérieure à 0,7 %.

Soumise à des vents contraires, l’économie française est confrontée à l’incertitude politique intérieure et aux tensions géopolitiques internationales. Dans son avis du 14 octobre dernier, rendu en application du IV de l’article 61 de la LOLF, le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) signale que « le surcroît d’incertitude lié à la situation politique ne semble pas trop remettre en cause [la tendance d’une croissance de l’ordre de 0,2 % par semestre] ». Cette appréciation, si elle témoigne de la résilience de l’économie française, ne peut être accueillie qu’avec prudence tant elle semble fragile. En outre, le tournant protectionniste opéré par certains partenaires de l’Union européenne, en particulier la hausse des droits de douane sur les importations américaines, perturbe le fonctionnement régulier des chaînes de valeur et pèse tant sur la consommation des ménages que sur l’investissement des entreprises. Les mesures tarifaires en vigueur aux États‑Unis à la fin du mois de juillet, dont les droits de douane dits réciproques appliqués aux produits européens à hauteur de 15 % de la valeur déclarée, induiraient pour la France une perte de 0,1 point de PIB en 2025, puis de 0,4 point en 2026 ([22]).

Dans son avis précité, le HCFP a jugé « réaliste » le scénario économique du Gouvernement, qu’il s’agisse de la croissance, de sa composition et de l’inflation. La hausse de l’indice des prix à la consommation (IPC) s’élèverait à 1,1 % en 2025, après 2 % en 2024, et contraste avec les niveaux enregistrés dans les principales économies de la zone euro, notamment en Allemagne (+ 2,1 %) et en Espagne (+ 2,7 %). Cette modération relative est imputable à une inflation énergétique plus limitée, à une progression salariale plus modérée et à un net repli des prix des services de télécommunication.

La masse salariale du secteur privé soumise à cotisation, principale assiette sur laquelle repose le financement de la sécurité sociale, augmenterait de 1,8 % en 2025, après 3,3 % en 2024. La baisse du volume de l’emploi de 0,4 % en 2025, après une hausse de même ampleur en 2024, et le ralentissement de la progression du salaire moyen, qui s’établirait à 2,2 % en 2025 après 2,9 % l’année précédente, expliquent cette évolution, d’après le dernier rapport du Gouvernement à la Commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS) ([23]). L’hypothèse retenue par le Gouvernement est qualifiée de « marginalement haute » par le HCFP, lequel souligne qu’elle est supérieure à la prévision correspondante de l’INSEE (+ 1,6 %) et qu’elle « suppose une légère accélération au second semestre alors que la tendance récente est plutôt un ralentissement, compte tenu du freinage de l’emploi et du ralentissement des salaires dans le sillage de la baisse de l’inflation ».

● Inévitablement, la faiblesse de l’activité économique et celle de la croissance de la masse salariale ont une incidence sur les finances sociales :

– d’un côté, les recettes inscrites dans le PLFSS reposent en grande partie sur l’activité, via les rémunérations soumises aux cotisations et à la contribution sociale généralisée (CSG), ou via la consommation s’agissant de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et des accises sur les tabacs ou l’alcool ;

– de l’autre, de nombreux dispositifs de solidarité sont indexés, pour tout ou partie sur l’inflation, au premier titre desquels les pensions de retraite ([24]).

Le rapport à la CCSS d’octobre 2025 précise ainsi qu’une variation d’un point de PIB augmente la masse salariale du secteur privé de 2,5 milliards d’euros. Par ailleurs, l’effet en année pleine d’une hausse d’un point du taux d’inflation s’élève à 3,4 milliards d’euros de dépenses supplémentaires au titre de la revalorisation légale des prestations, dont 2,5 milliards d’euros pour la seule branche vieillesse.

Sensibilité des produits et des charges des ROBSS
aux principales hypothèses économiques, budgétaires et fiscales

(en millions d’euros)

Source : rapport du Gouvernement à la Commission des comptes de la sécurité sociale (octobre 2025).

2.   Une dégradation spectaculaire du solde de la sécurité sociale en 2025

 Le  de l’article 1er du PLFSS pour 2026 indique que le déficit des ROBBS s’élèverait à 23,5 milliards d’euros à la fin de l’année en cours. Ce résultat serait réduit à – 23 milliards d’euros en y intégrant celui du FSV (0,5 milliard d’euros), en équilibre pour la quatrième année consécutive. L’établissement sera supprimé à compter du 1er janvier 2026, ses missions et ses ressources étant transférées à la CNAV.

La branche maladie aurait à elle seule un déficit de 17,2 milliards d’euros, majoré de 3,4 milliards d’euros par rapport à son niveau de 2023 et de 1,8 milliard d’euros en comparaison avec la prévision initiale de la LFSS pour 2025.

Le déficit de la branche vieillesse s’établirait à 6,3 milliards d’euros, en hausse de 0,7 milliard d’euros par rapport à 2024 et de 0,5 milliard d’euros en comparaison avec la prévision initiale.

Contrairement à la prévision initiale de solde positif, la branche autonomie et la branche ATMP seraient déficitaires en 2025, à hauteur de respectivement 0,3 milliard d’euros et de 0,5 milliard d’euros, soit un écart de 1,6 milliard d’euros et de 1,2 milliard d’euros par rapport à l’année 2024.

À l’inverse, la branche famille serait la seule excédentaire en 2025. Son solde s’établirait à 0,8 milliard d’euros, en recul de 0,3 milliard d’euros par rapport à l’exercice précédent mais en amélioration de 0,4 milliard d’euros par rapport à la prévision initiale.

SOlde des branches des ROBSS et du fSV en 2025

(en milliards d’euros)

 

Prévision
LFSS pour 2025

Prévision rectifiée
PLFSS pour 2026

Maladie

– 15,4

– 17,2

Accidents du travail et maladies pro.

+ 0,2

– 0,5

Vieillesse

– 7,5

– 6,3

Famille

+ 0,4

+ 0,8

Autonomie

– 0,7

– 0,3

Régimes obligatoires de base

 23,0

 23,5

Fonds de solidarité vieillesse

+ 0,9

+ 0,5

ROBSS + FSV

 22,1

 23,0

Source : articles 1ers de la LFSS pour 2025 et du PLFSS pour 2026.

Les données du PLFSS pour 2026 concernant l’exercice 2025 montrent une dégradation du déficit des ROBSS et du FSV de 7,7 milliards d’euros par rapport à la clôture des comptes de 2024, mais aussi une dégradation de 0,9 milliard d’euros par rapport aux estimations initiales pour 2025 soumises au Parlement.

● Le PLFSS pour 2026 indique que les recettes des ROBSS et du FSV représenteraient 643,1 milliards d’euros en 2025, en recul de 1,2 milliard d’euros par rapport à la prévision initiale. Les dépenses s’élèveraient à 666,1 milliards d’euros, soit 0,3 milliard d’euros en‑deçà de la cible initiale. Le dernier rapport à la CCSS signale que « l’écart de dynamique entre les charges et les produits s’accentue : les charges augmenteraient ainsi de 1,0 point de plus que les produits ».

Recettes et dÉpenses des branches des ROBSS et du FSV en 2025

(en milliards d’euros)

 

Rectification PLFSS pour 2026

 

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

245,1

262,3

– 17,2

Accidents du travail et maladies pro.

16,9

17,5

– 0,5

Vieillesse

297,0

303,4

– 6,3

Famille

60,2

59,3

+ 0,8

Autonomie

41,7

42,0

– 0,3

Régimes obligatoires de base

642,3

665,8

 23,5

Fonds de solidarité vieillesse

22,0

21,5

+ 0,5

ROBSS + RSV

643,1

666,1

 23,0

Source : article 1er du PLFSS pour 2026.

● Force est de constater que les dépenses sont à nouveau plus dynamiques que les recettes, le rapporteur pour avis considérant que cet écart persistant témoigne d’une forme de préférence française pour la dépense.

Après une augmentation de 4,6 % en 2024, les produits nets des régimes obligatoires de base et du FSV ralentiraient à 2,4 % en 2025. Si les cotisations sociales brutes demeurent dynamiques (+ 4 % en 2025, après + 4,5 % en 2024), l’évolution du produit des recettes fiscales ralentit fortement pour atteindre 1,5 % en 2025, contre 4,7 % l’année précédente. Le recul en valeur absolue des recettes de TVA est particulièrement important (– 1,2 %), sous l’effet d’un ralentissement spontané dans un contexte économique dégradé et de la réaffectation d’une fraction de son produit à l’État pour compenser les pertes de recettes d’impôt sur les sociétés issues de la réforme des allègements généraux (0,4 milliard d’euros).

dÉterminants de l’Évolution des recettes des ROBSS et du FSV de 2023 À 2026 (P)

(en pourcentage)

Source : rapport du Gouvernement à la Commission des comptes de la sécurité sociale (octobre 2025).

En parallèle, les dépenses s’accroîtraient de 3,6 % en 2025, soit un ralentissement de près de deux points par rapport à l’exercice précédent (+ 5,3 %). Le principal facteur expliquant ce ralentissement tient au reflux de l’inflation, sur laquelle sont indexées les prestations sociales. Ainsi, les pensions de retraite ont été revalorisées de 2,2 % au 1er janvier 2025, après 5,3 % un an auparavant, tandis que les autres prestations sociales ont augmenté de 1,7 % au 1er avril 2025. L’effet prix du retour progressif de l’inflation en‑dessous de la cible de 2 %, après les tensions inflationnistes constatées en 2022 et en 2023, est favorable en 2025 : alors que les recettes ont décru dès 2024, les dépenses ont réagi avec près d’un an de décalage en raison des règles de revalorisation automatique des prestations sociales.

Les prestations légales, qui représentent 93,4 % des charges nettes des ROBSS et du FSV, augmenteraient de 3,7 % en 2025, en net ralentissement de 1,7 point par rapport à 2024. Leur croissance spontanée demeure le principal facteur d’évolution (3,1 points en 2025, après 3 points en 2024), tandis que l’inflation ne contribue qu’à hauteur de 1,3 point à celle‑ci, après 2,8 points en 2024.

dÉterminants de l’Évolution des prestations lÉgales des ROBSS et du FSV
de 2023 À 2026 (P)

 (en pourcentage)

Source : rapport du Gouvernement à la Commission des comptes de la sécurité sociale (octobre 2025).

C.   une réduction ambitieuse du déficit en 2025, fondée sur un scénario macroéconomique volontariste

Alors que le scénario macroéconomique du Gouvernement est jugé « volontariste » par le Haut Conseil des finances publiques (1), les mesures nouvelles proposées dans le projet de loi faisant l’objet du présent rapport permettraient une amélioration notable – mais insuffisante – du solde des ROBSS en 2026 (2).

1.   Une prévision de croissance modeste en 2026, par ailleurs fragilisée par l’orientation restrictive des finances publiques

Selon la saisine du Haut Conseil des finances publiques par le Gouvernement, le PIB français augmenterait de 1 % en 2026, « l’activité [restant] pénalisée par l’effet des mesures commerciales américaines et du climat d’incertitude ». L’inflation poursuivrait son reflux pour s’établir à 1,3 % en moyenne annuelle en 2025, un niveau sensiblement inférieur à la cible d’inflation poursuivie par la Banque centrale européenne (BCE) ([25]).


Principales hypothÈses macroÉconomiques
retenues par le Gouvernement pour 2026

(en pourcentage)

 

2026

Produit intérieur brut (PIB) en volume

+ 1,0 %

Masse salariale ([26])

+ 2,3 %

Indice des prix à la consommation (IPC)

+ 1,3 %

Solde commercial

Importations

Exportations


+ 2,3 %
+ 2,0 %

Demande intérieure

Consommation des ménages

Consommation finale publique

Formation brute de capital fixe


+ 0,9 %

+ 0,2 %
+ 2,2 %

Taux d’épargne des ménages

17,8 %

Taux de marge des entreprises

31 %

Salaire moyen par tête (SMPT)

+ 2,4 %

Pouvoir d’achat du revenu disponible

+ 1,1 %

Source : saisine du Haut Conseil des finances publiques par le Gouvernement (octobre 2025).

Le HCFP conclut que le scénario macroéconomique présenté par le Gouvernement repose sur des hypothèses « optimistes ».

Le rapporteur pour avis se permet de reproduire l’analyse figurant dans l’avis du 14 octobre dernier, lequel ne peut qu’inviter à la prudence quant au réalisme des trajectoires proposées par le Gouvernement. Il est indiqué que les prévisions économiques sousjacentes aux textes financiers associent « une consolidation budgétaire importante à une accélération de l’activité permise par une reprise de la demande privée. La prévision de croissance n’est que juste audessus de celles des organismes auditionnés par le Haut Conseil et du consensus des économistes (0,9 %). Mais par rapport à ces prévisions, le projet dont le HCFP a été saisi retient une orientation plus restrictive des finances publiques, qui pèserait donc davantage à court terme sur l’activité. En compensation, malgré un environnement international peu porteur, cette prévision suppose une reprise de la demande intérieure privée dont l’ampleur paraît volontariste au regard du climat général d’incertitude, en particulier pour l’investissement des entreprises et dans une certaine mesure la demande des ménages ». Si la prévision d’inflation de 1,3 % en 2026 est qualifiée de « plausible », celle de masse salariale est jugée « un peu haute ».

2.   Une amélioration du solde prévisionnel des régimes obligatoires de base en 2026, après un déficit alarmant en 2025

● L’article 14 du PLFSS pour 2026, qui propose d’approuver le tableau d’équilibre pour l’année à venir, envisage que les cinq branches des ROBSS enregistrent un déficit de 17,5 milliards d’euros. Le solde agrégé s’améliorerait ainsi de 5,5 milliards d’euros par rapport à l’année 2025.

Les branches maladie et vieillesse devraient porter l’essentiel du déficit en 2026 (15,5 milliards d’euros en cumulé), les branches ATMP et autonomie connaissant un déficit de respectivement 1 milliard d’euros et 1,7 milliard d’euros. Seule la branche famille serait excédentaire (+ 0,7 milliard d’euros).

Les données issues de la lettre rectificative transmise le 23 octobre 2025 sont pour l’essentiel identiques à la version initiale du PLFSS pour 2026, déposé neuf jours auparavant. La suspension de la réforme des retraites, telle qu’elle résulte de l’article 45 bis du projet de loi, engendrerait des dépenses supplémentaires de 100 millions d’euros en 2026. Celles-ci seraient intégralement compensées en 2026 par des recettes équivalentes provenant du surplus de la taxe sur les organismes complémentaires d’assurance maladie, lié à la hausse de 0,20 point de son taux initial (article 7).

Recettes, dÉpenses et solde des branches des ROBSS en 2026

(en milliards d’euros)

 

Prévision du PLFSS pour 2026

 

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

255,0

267,5

– 12,5

Accidents du travail et maladies pro.

17,1

18,0

– 1,0

Vieillesse

304,5

307,5

– 3,0

Famille

60,1

59,4

+ 0,7

Autonomie

41,8

43,5

– 1,7

ROBSS (toutes branches ; hors transferts)

659,5

676,9

 17,5

Source : article 14 du PLFSS pour 2026.

● La réduction du déficit de 5,5 milliards d’euros par rapport à l’exercice précédent interviendrait sous l’effet de mesures nouvelles ambitieuses. En l’absence d’adoption du PLFSS pour 2026, le scénario tendanciel calculé dans le dernier rapport à la CCSS conduirait le déficit la sécurité sociale à se dégrader spontanément jusqu’à atteindre 28,7 milliards d’euros l’année prochaine.

En excluant les transferts réalisés entre l’État et la sécurité sociale, qui réduiraient de 9,1 milliards d’euros le solde prévisionnel, l’incidence financière des mesures nouvelles serait répartie entre 11,2 milliards d’euros de recettes supplémentaires et 9,1 milliards d’euros de moindres dépenses en 2026 d’après l’annexe 3 du projet de loi de financement.

La principale mesure en recettes concerne la deuxième étape de la réforme des allègements généraux de cotisations patronales prévue par l’article 18 de la LFSS pour 2025. Ce dernier fusionne, à compter du 1er janvier 2026, l’ancien dispositif dit « Fillon » portant sur les salaires jusqu’à 1,6 fois le salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) et les réductions proportionnelles de cotisations maladie et familiales (« bandeaux maladie et famille ») dans une réduction générale dégressive unique (RGDU) dont le point de sortie est fixé à 3 fois le SMIC. Peuvent également être cités le gel des seuils d’assujettissement à la contribution sociale généralisée (CSG) et à divers prélèvements sociaux connexes (0,3 milliard d’euros) prévu à l’article 6, la contribution exceptionnelle de 2,25 % portant sur les complémentaires « santé » (1,1 milliard d’euros) figurant à l’article 7, la réduction des exemptions d’assiette bénéficiant aux compléments de salaire (1,2 milliard d’euros) opérée par l’article 8 et la rationalisation d’une partie des exonérations sociales spécifiques (0,2 milliard d’euros) portée par l’article 9.

Parmi les mesures d’économies en dépense, le freinage de l’évolution de l’ONDAM par rapport au scénario tendanciel représente 6 milliards d’euros. La croissance de l’ONDAM est fixée à 1,6 % en 2026, après 3,6 % en 2025. Par ailleurs, le gel des prestations sociales au titre de « l’année blanche » rapporterait 2,7 milliards d’euros sur le champ des ROBSS, dont 2,2 milliards d’euros au bénéfice de la seule branche vieillesse.

● Les données retenues par le Gouvernement dans le PLFSS pour 2026 montrent que, comme en 2025, la hausse des charges nettes des ROBSS serait moins forte que celle des recettes, avec respectivement 11,1 milliards d’euros (+ 1,6 %) et 17,2 milliards d’euros (+ 2,5 %) de plus en 2026 que l’année précédente.

Compte tenu de l’ampleur de leur contribution au déficit de la sécurité sociale, les comptes de la branche maladie et de la branche vieillesse méritent une attention particulière.

D’après l’annexe 3 du PLFSS pour 2026, le solde de la branche maladie s’améliorerait de 4,7 milliards d’euros par rapport à l’exercice précédent. Les mesures nouvelles contribueraient à améliorer le solde de la branche de 9,7 milliards d’euros. Si les charges nettes progresseraient de 2 %, avec une augmentation de 1,6 % des prestations relevant de l’ONDAM, les produits nets s’accroîtraient de 4 %. La branche maladie bénéficierait de la rétrocession de la totalité des gains résultant de la rationalisation des niches sociales applicables aux compléments de salaire (1,2 milliard d’euros) et de l’affectation d’une partie du produit de la taxe sur les organismes complémentaires d’assurance maladie (1,02 milliard d’euros).

Le solde de la branche vieillesse s’améliorerait de 3,3 milliards d’euros par rapport à l’exercice précédent, principalement du fait de la mesure de gel des pensions de retraite. Les dépenses supplémentaires de l’ordre de 0,1 milliard d’euros générées par le décalage des calendriers de report de l’âge légal et de relèvement de la durée d’assurance requise, prévu par l’article 45 bis issu de la lettre rectificative, sont compensées par le surcroît de recettes attendu de la majoration de 0,2 point du taux de la contribution exceptionnelle due par les organismes complémentaires d’assurance maladie (0,1 milliard d’euros).

● L’évolution des produits et des charges demeurerait défavorable jusqu’en 2029, terme des estimations fournies par le Gouvernement sur la trajectoire des comptes sociaux. Le déficit des ROBSS s’établirait à 17,9 milliards d’euros en 2029. À l’instar de la prévision pour 2026, la branche maladie porterait l’essentiel du déficit (6,1 milliards d’euros). Les branches vieillesse, AT-MP et autonomie seraient également déficitaires, à hauteur respectivement de 1,6 milliard d’euros, de 0,9 milliard d’euros et de 1,7 milliard d’euros. Seule la branche famille (+ 2,4 milliards d’euros) enregistrerait un solde excédentaire.

Le rapporteur pour avis partage évidemment l’appréciation du Gouvernement figurant dans l’annexe pluriannuelle, dont l’article 17 du PLFSS pour 2026 propose l’approbation. S’il convient du fait que « les comptes de la sécurité sociale devront être ramenés à l’équilibre d’ici 2029 afin de garantir sa pérennité » et qu’il est nécessaire « de prévoir le remboursement de la dette supplémentaire constituée dans l’intervalle, à un horizon suffisamment rapproché pour ne pas peser sur les générations suivantes », il regrette que les mesures de redressement des comptes sociaux indispensables à l’atteinte de cet objectif ne soient pas documentées sur la période.

D.   L’objectif d’amortissement de la dette sociale est fragilisÉ par l’accumulation des dÉficits des rÉgimes de base

Répartie entre deux compartiments (1), la dette sociale voit ses perspectives d’amortissement en 2033 fragilisées en raison de l’accumulation de nouveaux déficits à compter de l’année 2024 (2).

1.   La gestion différenciée du flux et du stock de dette avant la crise

La récurrence des soldes négatifs au cours des différents exercices annuels a entraîné, dès avant la survenue de la covid-19, la constitution d’une dette sociale pour l’ensemble des régimes de base. Celle-ci se décompose entre les déficits portés en trésorerie (a) et la dette reprise par la CADES en vue de son amortissement (b).

a.   Les déficits accumulés dans le bilan du régime général pèsent sur la trésorerie de l’ACOSS

  1.   Un besoin de trésorerie croissant, couvert en quasi‑intégralité par les marchés financiers

La première mission de l’ACOSS, également connue sous le nom d’URSSAF Caisse nationale, consiste à assurer la gestion commune de la trésorerie des cinq branches du régime général ([27]) et à porter, le cas échéant, les déficits cumulés desdites branches dès lors qu’ils n’ont pas fait l’objet d’une reprise par la CADES. Par ailleurs, l’ACOSS pilote le réseau des URSSAF et verse à la CADES les ressources qui lui sont affectées (cf. infra).

 Conformément au chapitre 9 ter du titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale, l’ACOSS couvre ses besoins de trésorerie par des emprunts auprès de banques ou de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), par des émissions de court terme sur les marchés monétaires, au moyen soit de Negotiable European Commercial Papers (NeuCP) émis sur la place de Paris depuis 2007, soit de Euro Commercial Papers (ECP) émis sur la place de Londres depuis 2010, ou, en application de l’article L. 225-1-3 du même code, par la rémunération de disponibilités que placeraient auprès d’elle d’autres entités de la sphère sociale depuis 2009.

La politique de couverture des besoins de trésorerie de l’ACOSS a significativement évolué depuis près d’une quinzaine d’années, sous l’effet de la substitution des instruments bancaires traditionnels par des émissions de titres sur les marchés financiers. Le rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale de juin 2025 indique ainsi que « [l]e financement [de l’ACOSS] durant l’année 2024 a de nouveau reposé principalement sur les instruments de marché (97 % du financement total) », répartis entre les titres dits NeuCP pour 74 % et les titres dits ECP pour 23 % ([28]). La rémunération des disponibilités placées auprès d’elle par certains régimes de base et organismes ne relevant pas du régime général représente 3 % de son financement en 2024. L’ACOSS n’a pas eu recours au financement bancaire au cours du dernier exercice écoulé ([29]).

Compte tenu du rôle de centralisation de la trésorerie des cinq branches du régime général dévolu à l’ACOSS, il convient de signaler que ses besoins sont majoritairement couverts par le produit des cotisations sociales et des prélèvements obligatoires collectés par le réseau des URSSAF. Par exemple, l’emprunt moyen brut global de l’ACOSS s’est élevé à 26,6 milliards d’euros en 2024, soit 4,6 % des sommes encaissées la même année (558,4 milliards d’euros) ([30]). Le pic d’emprunt de l’ACOSS au titre de cet exercice, qui correspond au point bas brut de trésorerie présenté infra, a atteint 40,1 milliards d’euros, soit 6,8 % des sommes encaissées.

● Aux fins de couverture des besoins de trésorerie ponctuels du régime général, l’ACOSS compte parmi les ROBSS habilités par la loi de financement de l’année « à recourir à des ressources non permanentes » dans la limite d’un plafond fixé par cette loi ([31]). Le recours par l’ACOSS à des ressources non permanentes est en principe justifié par le décalage temporel entre, d’une part, les encaissements par les régimes de recettes affectées et de cotisations et contributions sociales et, d’autre part, les décaissements réalisés par ceux-ci au titre du paiement des prestations aux assurés et des frais de gestion.

Dans la limite dudit plafond, l’ACOSS peut également consentir, contre rémunération et selon certaines limites de maturité, à des prêts et des avances de trésorerie d’une durée inférieure à douze mois au régime d’assurance vieillesse des non-salariés agricoles et au régime d’assurance vieillesse du régime spécial de sécurité sociale dans les mines. Les ROBSS autre que le régime général peuvent également bénéficier d’avances d’une durée inférieure à un mois pour couvrir leurs besoins de trésorerie ([32]).

Le montant maximal des avances remboursables consenties par l’ACOSS à ses partenaires au titre de l’exercice en cours devrait s’élever à 12,2 milliards, le 12 novembre 2025. La Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL), confrontée à une situation financière dégradée ([33]), est le principal régime de base bénéficiaire de ces avances. Tous ne bénéficieraient pas à la même date du montant maximal de leur avance.

avances consenties par l’acoss À ses partenaires en 2025

 

Moyenne 2025

Minimum 2025

Maximum 2025

CANSSM

237

90

343

SNCF

29

0

220

CNRACL

9 559

7 950

11 977

Source : réponses écrites de l’ACOSS.

● L’accumulation des déficits sociaux pèse sur la trésorerie de l’ACOSS, ceux enregistrés depuis 2024 étant dépourvus de perspectives d’amortissement. En effet, la fin du cycle de reprise des déficits des régimes de base par la CADES, prévu par les lois organique n° 2020-991 et ordinaire n° 2020-991 du 7 août 2020 relatives à la dette sociale et à l’autonomie, conduit indirectement à confier à l’ACOSS la responsabilité de faire « rouler » une dette sociale à la dérive.

Le rapporteur pour avis alerte sur le poids de la dette sociale refinancée à court terme par l’ACOSS, que le dernier rapport à la CCSS résume dans les termes suivants : en l’absence des mesures contenues dans le PLFSS pour 2026, elle atteindrait 88,6 milliards d’euros, dont 54,1 milliards d’euros pour la branche maladie, 20,6 milliards d’euros pour la branche vieillesse et 13,8 milliards d’euros pour la CNRACL.

Ce montant se décompose entre :

– une dette de 34,6 milliards d’euros portée à la fin de l’année 2024, au titre des déficits des branches maladie (14,6 milliards d’euros) et vieillesse (9,9 milliards d’euros) du régime général enregistrés en 2023 et 2024 ainsi que des déficits accumulés par la CNRACL entre 2020 et 2024 (10,1 milliards d’euros) ;

– une dette de 25,1 milliards d’euros supplémentaires en 2025, répartis entre la branche maladie (17,2 milliards d’euros), la branche vieillesse (5,6 milliards d’euros) et la CNRACL (2,3 milliards d’euros) ;

– un alourdissement de la dette de 28,9 milliards d’euros en 2026, correspondant au scénario tendanciel.

● L’absence de perspective de retour à l’équilibre fragilise la pérennité du modèle social français, en créant deux difficultés majeures :

– la récurrence des déficits sociaux est contraire au principe d’équité intergénérationnelle, la tentation de faire « rouler » la dette sociale – à la manière de la dette de l’État – conduisant à ce que les générations futures assument la charge des prestations courantes servies aux assurés d’aujourd’hui ;

 le refinancement des déficits sociaux est réalisé par l’ACOSS au moyen d’instruments de court terme, qui l’exposent à d’importants risques de taux et de liquidité.

En l’absence d’un plan crédible de redressement des comptes sociaux, le législateur financier social a prévu des remèdes conjoncturels : le relèvement du plafond des ressources non permanentes auxquelles l’ACOSS peut recourir, qu’il est proposé de poursuivre en 2026, et l’allongement de sa durée maximale d’emprunt, qui devrait être effectif au cours du même exercice.

Le risque de liquidité lié à la gestion de la trésorerie de l’ACOSS

Dans le cadre de son activité de gestion de la trésorerie du régime général et de ses avances consenties à ses partenaires, l’ACOSS est exposée à un risque de liquidité.

Celui‑ci se matérialiserait dans le cas où l’établissement ne serait pas en mesure de faire face à ses engagements d’un jour donné, tels que le paiement des prestations et le remboursement aux créanciers des titres émis, dans des conditions satisfaisantes.

Le risque de liquidité est induit par la fréquence et l’ampleur des opérations de refinancement à court terme des ROBSS, lesquelles nécessitent d’emprunter des sommes importantes plusieurs fois par an.

À titre d’exemple, en avril 2020, l’ACOSS n’a pas pu obtenir des marchés l’ensemble des financements qu’elle avait sollicités en urgence pour faire face à la hausse des charges des régimes de base, en particulier de la branche maladie, et à la baisse concomitante des encaissements dans le contexte de la crise sanitaire (report de cotisations, exonération de cotisations et de taxe sur les salaires au titre de l’activité partielle, etc.). Cette situation critique a conduit l’ACOSS à recourir à des financements exceptionnels en provenance de la Caisse des dépôts et consignations (19 milliards d’euros) et d’un consortium d’établissements bancaires (31 milliards d’euros, dont 20 milliards d’euros effectivement utilisés).

La Cour des comptes, dans son rapport sur l’application des LFSS de mai 2025, estime qu’audelà d’un seuil d’endettement annuel moyen de 70 milliards d’euros, qui pourrait être atteint dès 2027, l’ACOSS aurait de sérieuses difficultés à obtenir des marchés l’ensemble des financements demandés, fragilisant la continuité des paiements et remboursements des prestations sociales ([34]). Interrogée par le rapporteur pour avis sur cette estimation, l’ACOSS considère que des montants annuels moyens de 60 à 70 milliards d’euros seraient difficiles à financer de manière pérenne via des émissions de marché, la capacité d’emprunt auprès de la Caisse des dépôts et consignations devant demeurer « un dispositif de sécurité » complémentaire des financements de marché ([35]).


  1.   Une autorisation d’emprunt dans la limite de 83 milliards d’euros en 2026, accompagnée d’un nouveau programme d’émissions Neu MTN

● Aux termes de l’article 16 du PLFSS pour 2026, l’habilitation de l’ACOSS à recourir à des ressources non permanentes serait plafonnée à 83 milliards d’euros au titre de l’année 2026 ([36]).

Il s’agit d’un plafond d’emprunt nettement supérieur à celui de l’année en cours, qui s’élève à 65 milliards d’euros, et à ceux de l’année 2024 et de l’année 2023, tous deux fixés à 45 milliards d’euros. Le plafond d’emprunt avait une première fois atteint le montant de 65 milliards d’euros en 2022, après avoir été porté à 95 milliards d’euros au cours des années 2021 et 2020 en raison de la crise de la covid-19 ([37]).

L’exposé des motifs de l’article 16 du PLFSS pour 2026 précise que cette proposition assure « une marge permettant de sécuriser environ un mois de trésorerie afin de faire face, le cas échéant, à une dégradation brutale de la situation de trésorerie de l’ACOSS ou à tout risque opérationnel majeur », tout en indiquant qu’elle n’a pas vocation à être saturée puisque « le recours effectif à des ressources non permanentes [devrait lui être] en moyenne nettement inférieur ». Le besoin de trésorerie maximal « brut » est attendu le 28 décembre 2026, à hauteur de 79,4 milliards d’euros selon l’annexe 3 du PLFSS pour 2026. L’emprunt moyen brut global s’élèverait à 67,02 milliards d’euros au cours du même exercice.

Profil de trÉsorerie prévisionnel de l’acoss en 2026

(en millions d’euros)

Source : annexe 3 du PLFSS pour 2026.

À titre de comparaison, le besoin de trésorerie maximal « brut » devrait s’élever à 64,2 milliards d’euros en décembre 2025 selon les données transmises par l’ACOSS au rapporteur pour avis, contre un emprunt moyen brut global estimé à 45 milliards d’euros. Celui‑ci serait réparti de la manière suivante :

– le point de sortie en trésorerie de l’année n-1, soit – 4,1 milliards d’euros à la fin de l’année 2024 ;

– la variation de trésorerie prévisionnelle à hauteur de – 23,8 milliards d’euros en 2025, dont – 22,1 milliards d’euros correspondant au déficit des ROBSS et du FSV au titre de l’exercice en cours ;

– les avances consenties par l’ACOSS à ses partenaires, dont jusqu’à 12,5 milliards d’euros au bénéfice de la CNARCL et 0,7 milliard d’euros au profit de la Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines (CANSSM) et de la Caisse de prévoyance et de retraite du personnel ferroviaire (CPRPF) ;

– la volatilité du profil de trésorerie de l’ACOSS liée au décalage temporel entre les encaissements et les décaissements, qui génère un besoin de financement supplémentaire susceptible d’atteindre 10 milliards d’euros selon la date du « point bas brut » annuel ;

– la gestion du risque de liquidité aux fins de sécurisation de la trésorerie et des avances aux partenaires pour une période d’un mois, qui implique un « préemprunt » d’environ 15 milliards d’euros.

Pour rappel, les plafonds d’emprunt de l’ACOSS sont fixés en fonction de l’estimation du « point bas brut » des besoins de trésorerie des ROBSS, c’est-à-dire le solde négatif le plus important susceptible d’être atteint par ces organismes au cours de l’exercice à venir en intégrant la politique de gestion des risques financiers de l’ACOSS et les avances aux partenaires. La notion de « point bas brut » correspond au pic d’emprunt annuel lié au besoin de financement maximal des ROBSS. Celuici est en pratique nettement supérieur à l’emprunt moyen brut global de l’ACOSS, qui désigne les encours de dette maintenus durablement pour couvrir les déficits sociaux.

Au cours des dix dernières années, le dernier rapport à la CCSS indique que le « point bas brut » le plus important du seul régime général avait été constaté au cours de l’exercice 2020, à hauteur de 89,7 milliards d’euros.

Principales donnÉes de trÉsorerie du rÉgime GÉNÉral de 2016 À 2025 (P)

(en milliards d’euros)

Source : rapport du Gouvernement à la Commission des comptes de la sécurité sociale (octobre 2025).

Note : l’encours maximum mobilisé ou point bas « brut » comprend tous les financements mobilisés, y compris l’immobilisation de sommes sur des comptes de secours pour pallier d’éventuels incidents, ainsi que les sommes liées aux « surémissions », notamment en amont de l’échéance des pensions.

L’autorisation à recourir à des ressources non permanentes en 2025 : le cas inédit de la loi spéciale du 20 décembre 2024

L’adoption par l’Assemblée nationale, le 4 décembre 2024, d’une motion de censure dans les conditions prévues au troisième alinéa de l’article 49 de la Constitution et le rejet, par voie de conséquence, des conclusions de la commission mixte paritaire sur le PLFSS pour 2025 ont fait peser un risque sur la capacité des régimes et organismes de sécurité sociale à emprunter en 2025.

Dans un contexte politique et institutionnel inédit, le Gouvernement a alors soumis à l’approbation du Parlement un projet de loi spéciale sur le fondement du 2° de l’article 45 de la LOLF, lequel prévoyait notamment d’autoriser certains régimes et organismes de sécurité sociale à emprunter. Cette habilitation, dont la place dans un tel texte a pu être interrogée ([38]), était nécessaire afin d’assurer la continuité de la vie nationale. À défaut, l’ACOSS aurait été privée de la possibilité d’emprunter sur les marchés financiers pour couvrir les besoins de trésorerie du régime général et des autres régimes de base auxquels elle consent des avances ou des prêts.

Une telle carence aurait fragilisé le paiement et le remboursement des prestations de sécurité sociale, en dépit des actions menées par l’ACOSS pour sécuriser leur versement.

À cet effet, l’article 4 de la loi spéciale du 20 décembre 2024 ([39]) dispose que « [j]usqu’à l’entrée en vigueur de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, la caisse de prévoyance et de retraite du personnel ferroviaire, la Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines et la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales sont habilitées, en 2025, à recourir à des ressources non permanentes dans la seule mesure nécessaire à la couverture de leurs besoins de trésorerie. »

Ce régime d’autorisation temporaire, justifiée par des circonstances exceptionnelles, a laissé place à l’habilitation de droit commun prévue au I de l’article 39 de la LFSS pour 2025 ([40]).

Il a été indiqué au rapporteur pour avis que, « face à l’incertitude sur sa capacité d’emprunt », l’ACOSS a toutefois décidé, dès la fin de l’année 2024, de sécuriser sa trésorerie jusqu’au 8 mars 2025 au moyen de :

– l’augmentation des volumes d’émissions, qui ont atteint près de 20 milliards d’euros en décembre 2024 ;

– l’allongement de la maturité des emprunts, en privilégiant des échéances de six à douze mois contre une durée moyenne d’environ un mois et demi en règle générale.

Ces opérations ont permis de porter d’un mois à trois mois calendaires l’horizon de couverture des besoins de trésorerie de l’ACOSS. En l’absence de telles mesures de réassurance et de l’autorisation d’emprunt prévue à titre exceptionnelle par la loi spéciale, l’ACOSS n’aurait pas été mesure d’assurer ses engagements au‑delà du mois de janvier 2025. La stratégie prudente de « suremprunt » conduite à la fin de l’année 2024 explique en partie l’ampleur du « point bas brut » atteint le 24 décembre 2024 (– 40,1 milliards d’euros), soit un niveau proche du plafond d’emprunt de 45 milliards d’euros fixé pour cet exercice.

Source : commission des finances, d’après les réponses écrites de l’ACOSS.

● Outre les relèvements du plafond d’emprunt de l’ACOSS décidé en 2025 et proposé pour 2026, il convient de rappeler que la durée maximale d’emprunt de l’ACOSS a été portée d’un an à deux ans.

L’article L. 139-3 du code de sécurité sociale, modifié par le II de l’article 39 de la LFSS pour 2025, dispose que les ressources permanentes auxquelles peuvent recourir les ROBSS consistent en « des avances de trésorerie ou des emprunts contractés pour une durée inférieure ou égale à deux ans et dont la durée moyenne annuelle pondérée est inférieure ou égale à un an ».

L’impossibilité pour l’ACOSS d’émettre des titres de créances dont la maturité est supérieure à un an, qui prévalait dans le droit antérieur, était justifiée par la volonté du législateur de prévenir la constitution d’une dette sociale pérenne, celle‑ci ayant vocation à être intégralement remboursée.

Or cette règle faisait obstacle à l’intervention de l’ACOSS sur le marché des titres négociables à moyen terme (Neu MTN), dont la maturité est supérieure à un an. Par ailleurs, ses émissions affichent une durée moyenne d’environ un mois et demi, la maturité moyenne des titres offerts par les marchés dits NeuCP et CP – qui représentent l’essentiel de la structure de financement de l’ACOSS – étant d’un mois. La gestion du besoin de trésorerie de l’ACOSS est ainsi fortement contrainte, imposant à l’établissement de réaliser d’importants volumes d’émissions à une fréquence élevée. Selon les informations transmises aux rapporteurs, l’ACOSS est tenue de « renouveler l’intégralité des financements tous les un à deux mois », le montant des émissions hebdomadaires pouvant s’élever à 5 milliards d’euros.

Le relèvement d’un an à deux ans de la durée maximale d’emprunt de l’ACOSS présente un double avantage :

– optimiser les conditions de financement de l’ACOSS et desserrer les contraintes pesant sur la gestion de sa trésorerie, en réduisant son exposition à des mouvements de marché ;

– garantir une base de financement plus pérenne et plus large à l’ACOSS, lui permettant notamment d’augmenter ses encours en accédant à une offre de titres diversifiée et à de nouveaux profils d’investisseurs.

L’ACOSS a indiqué au rapporteur pour avis que le programme d’émission sur le marché des Neu MTN était « en voie de finalisation », une première émission étant envisagée à la fin de l’année 2025 pour un montant d’un à deux milliards d’euros « si les conditions de marché le permettent ». Ce programme d’émission prendrait la forme d’obligations sociales (social bonds([41]), sur le modèle des opérations existantes pour les titres dits Social NeuCP. L’agence vise un encours de près de 10 milliards d’euros pour des émissions de ce type à la fin de l’année 2026.

Il convient toutefois de signaler que la durée moyenne des emprunts souscrits demeure limitée à un an afin de prévenir un report trop important de la dette sociale sur l’ACOSS ([42]). Selon les informations transmises au rapporteur pour avis, l’incidence de cette disposition sur la maturité moyenne des encours de l’ACOSS serait mesurée : si 30 % des émissions étaient réalisées avec une échéance de remboursement de 18 mois, soit la valeur médiane entre un et deux ans, la maturité moyenne globale des encours de l’ACOSS serait portée de 1,5 mois à 6,5 mois.

b.   Les passifs transférés à la CADES ont donné lieu à l’amortissement de 274,7 milliards d’euros de dette sociale à la fin de l’année 2025

Créée en 1996 ([43]) et engagée dans un rapprochement opérationnel avec l’Agence France Trésor (AFT) à compter du 1er janvier 2017, la CADES doit apurer la dette sociale suivant trois principes : elle bénéficie de ressources spécifiques ; la durée d’amortissement est limitée dans le temps ; chaque nouveau transfert de dette doit être accompagné de recettes suffisantes.

● Aux termes de l’article 6 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996, la CADES bénéficie de l’affectation de trois ressources pérennes ([44]), lesquelles représenteraient 18,7 milliards d’euros en 2025 selon le dernier rapport à la CCSS. Sont ainsi distingués :

– l’intégralité du produit de la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS), due au taux de 0,5 % du revenu brut, pour un montant de 9,2 milliards d’euros en 2024 et de 9,3 milliards d’euros en 2025 ([45]) ;

– le produit d’une fraction de la CSG sur les revenus d’activité, de remplacement et du capital (0,45 point) et de la CSG sur les revenus des jeux (0,22 point, porté à 0,26 point en 2026), pour un total de 7,9 milliards d’euros en 2024 et de 8 milliards d’euros en 2025 ;

– un versement annuel du fonds de réserve pour les retraites (FRR), lequel est passé de 2,1 milliards d’euros à 1,45 milliard d’euros à compter de 2025 ([46]).

Évolution des ressources nettes comptables de la CADES de 2022 À 2025

(en milliards d’euros)

Source : commission des finances, d’après les rapports financiers de la CADES pour les années 2022 à 2024 et le rapport du Gouvernement à la Commission des comptes de la sécurité sociale (octobre 2025) pour l’année 2025.

● L’article 1er de l’ordonnance du 24 janvier 1996 dispose que la CADES disparaîtra à la date de l’extinction de ses missions. Initialement instituée pour treize ans et un mois, son existence a été prorogée à plusieurs reprises et ce terme est désormais fixé à 2033 ([47]), la crise sanitaire étant survenue alors que l’année 2024 correspondait à l’horizon prévisionnel d’amortissement de la dette sociale. Le prolongement de la CADES a conduit incidemment au maintien de la CRDS, laquelle était initialement conçue comme un impôt temporaire dû « jusqu‘à l’extinction des missions » de l’établissement aux termes du second alinéa du I de l’article 14 de l’ordonnance de 1996.

La baisse des ressources affectées à la CADES constatée à compter de 2024 est la contrepartie du prolongement de son existence jusqu’en 2033, lequel permet un étalement du remboursement de la dette sociale. À cet égard, la fraction de CSG affectée à la CADES a été réduite de 0,15 point de pourcentage sur l’ensemble de ses assiettes, à l’exception des revenus des jeux, à compter de 2024 afin d’accroître les ressources de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) dans le cadre la création de la branche autonomie.

● Enfin, le législateur organique, afin de ne pas repousser l’horizon de remboursement, avait introduit l’exigence que « [t]out nouveau transfert de dette à la Caisse d’amortissement de la dette sociale [CADES] est accompagné d’une augmentation des recettes de la caisse permettant de ne pas accroître la durée d’amortissement de la dette sociale » ([48]), disposition dont la nature organique a été reconnue par le Conseil constitutionnel ([49]).

Le report du terme de l’amortissement prévisionnel de la dette sociale et, par conséquent, la date d’extinction de la CADES ne peut ainsi relever que de dispositions organiques.

De manière symétrique, le Conseil constitutionnel contrôle que le transfert de nouvelles ressources à la CADES pour assurer le remboursement de la dette sociale soit conforme à l’objectif constitutionnel d’équilibre financier de la sécurité sociale, dégagé dans sa décision n° 97-393 DC du 18 décembre 1997 ([50]). Comme la jurisprudence du Conseil constitutionnel l’exige depuis 2010, les lois de financement de la sécurité sociale ne peuvent attribuer des ressources à la CADES qui conduiraient, « par un transfert sans compensation au profit de ladite caisse d’amortissement de recettes affectées aux régimes de sécurité sociale et aux organismes concourant à leur financement, à une dégradation des conditions générales de l’équilibre financier de la sécurité sociale de l’année à venir » ([51]).

Chronique des transferts effectifs de dette à la CADES de 1996 À 2026 (P)

(en millions d’euros)

Source : rapport du Gouvernement à la Commission des comptes de la sécurité sociale (octobre 2025).

2.   Un horizon d’amortissement de la dette sociale fixé à 2033, compromis par la trajectoire dégradée des comptes sociaux

Indispensable afin de soulager la trésorerie des régimes, la reprise de passifs par la CADES engagée en 2020 dans le contexte de la crise sanitaire est arrivée à son terme en septembre 2024 (a). L’apurement de ces passifs a été reporté de 2024 à 2033, cet horizon d’amortissement étant fragilisé par l’accumulation des déficits sociaux (b).

a.   La reprise de 136 milliards d’euros décidée lors de crise sanitaire est arrivée à son terme en septembre 2024

Dans le contexte de la crise sanitaire et simultanément au report du terme d’amortissement de la dette sociale, le législateur a organisé une nouvelle reprise de dette par la CADES à hauteur de 136 milliards d’euros.

● L’article 1er de la loi n° 2020-992 du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l’autonomie rétablit un II septies à l’article 4 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996, lequel distingue trois échéances de transfert :

– au plus tard le 30 juin 2021 et dans la limite de 31 milliards d’euros, la CADES devra avoir couvert les besoins de l’ACOSS au 31 décembre 2019, correspondant aux déficits cumulés de la branche maladie du régime général et du FSV, de la branche vieillesse du régime des non-salariés agricoles et du régime de retraite des agents des collectivités territoriales et de la fonction publique hospitalière géré par la CNRACL ;

– à compter de 2021 et dans la limite de 92 milliards d’euros, la CADES devra couvrir les déficits cumulés entre 2020 et 2023 par le régime général, le FSV et la branche vieillesse du régime des non-salariés agricoles, soit une composante correspondant à la « dette covid » dans la limite de 92 milliards d’euros ;

– à compter de 2021, la CADES versera à la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) les dotations nécessaires lui permettant d’assurer la couverture des échéances des emprunts contractés par les hôpitaux à hauteur de 13 milliards d’euros, soit près d’un tiers de la dette de ces établissements ([52]).

Enfin, le D du II septies de l’article 4 de la loi du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l’autonomie dispose que le montant total des versements réalisés par la CADES à ces trois titres ne peut excéder 40 milliards d’euros par an.

● La CADES a ainsi procédé à des opérations successives de reprise de passif entre 2021 et 2024. La quatrième et dernière opération, consistant en un transfert de 1,6 milliard d’euros, a été réalisée en septembre 2024 conformément l’échéancier prévu ([53]).

Par conséquent, la reprise de dette sociale, prévue par la loi n° 2020-992 du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l’autonomie à hauteur de 136 milliards d’euros, est achevée et la CADES poursuit l’amortissement de celle‑ci.

RÉpartition par exercice et catÉgories d’opÉrations de la reprise
de passifs par la CADES pour l’application de la loi du 7 aoÛt 2020

(en milliards d’euros)

 

2020

2021

2022

2023

2024

Total

Déficits jusqu’au 31 décembre 2019

20

11,2

s. o.

31,2

Déficits pour 2020 (maladie et FSV)

s. o.

23,8

9,1

0

0

32,9

Déficits pour 2021 (vieillesse)

0

25,9

1,7

0

27,6

Déficits pour 2022 (maladie et vieillesse)

0

0

22,5

0

22,5

Dette hospitalière (dotations de la CNAM)

5

5

3

0

13,0

Déficits pour 2023 (maladie)

0

0

0

8,8

8,8

Total

20

40

40

27,2

8,8

136

Source : rapport de la Cour des comptes sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale (mai 2025).

b.   La cible d’une extinction en 2033 est fragilisée par l’accumulation des déficits sociaux

Le premier alinéa de l’article 4 bis de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale, tel que modifié par l’article 1er de la loi organique n° 2020-991 du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l’autonomie, dispose que la durée d’amortissement de la dette sociale ne peut être prolongée au‑delà du 31 décembre 2033.

● Le programme de financement de l’année en cours vise à refinancer les tombées d’obligations intervenant en 2025 pour un montant de 36,17 milliards d’euros, contre 21,5 milliards d’euros en 2024. Au premier semestre 2025, la CADES a ainsi émis 7,4 milliards d’euros de titres en euros et en dollars.

L’annexe 2 du PLFSS pour 2026 indique que le taux de refinancement de la CADES s’est établi à 1,97 % au 30 juin 2025, contre 2,25 % l’année précédente. Pour les seuls instruments fixes (87,67 % de l’encours), il atteignait 1,79 % au 30 juin 2025, contre 2,25 % pour les bons révisables (12,33 % de l’encours).

Le 4° du I de l’article 1er du PLFSS pour 2026 rectifie à 16,2 milliards d’euros l’objectif d’amortissement en 2025, soit un niveau stable par rapport à la prévision initiale de 16,28 milliards d’euros fixé par le I de l’article 38 de la LFSS pour 2025 et le montant de 16 milliards d’euros constaté pour l’année 2024 ([54]).

Ainsi, à la fin de l’année 2024, auraient été amortis près de 274,8 milliards d’euros depuis la création de la CADES et resteraient à amortir 121,7 milliards d’euros.

Le I de l’article 15 du même projet de loi fixe à 16,4 milliards d’euros l’objectif d’amortissement pour 2026.

Ainsi, à la fin de l’année 2025, auraient été amortis près de 291,2 milliards d’euros depuis la création de la CADES et resteraient à amortir 105,3 milliards d’euros, soit 26,6 % de la dette reprise cumulée.

● Le dernier rapport à la CCSS confirme que « dans un scénario médian, […], la CADES amortirait au cours de l’année 2032 l’intégralité de la dette qui lui aura été transférée. Selon un scénario plus optimiste à 5 % de risque, la CADES pourrait amortir l’intégralité de la dette en 2031, contre 2033 pour un scénario plus pessimiste à 95 % de risque ».

La possibilité d’un amortissement définitif de la dette actuellement portée par la CADES dès 2032, soit un an avant la date de son extinction, est ainsi envisagée. Selon les travaux de M. Hadrien Clouet et Mme Stéphanie Rist, citant une réponse écrite du Haut Conseil du financement de la protection sociale (HCFiPS), cette année de « marge » permettrait une nouvelle reprise de dette par la CADES à hauteur de 27 milliards d’euros, sans que le terme de l’amortissement ne soit repoussé ([55]). Lors de son audition, le président du conseil d’administration de la CADES, M. Philippe Ricordeau, a indiqué que cette « reprise de dette partielle » permettrait certes de soulager la trésorerie de l’ACOSS à court terme, mais qu’elle pourrait également affaiblir la crédibilité du principe historique d’amortissement de la dette sociale auprès des marchés financiers.

Tout transfert de dette sociale à la CADES excédant cette limite de 27 milliards d’euros devra en tout état de cause s’accompagner, soit d’une augmentation des recettes affectées à la CADES, qui peut être effectuée par une loi ordinaire ou dans le cadre d’une LFSS, soit d’une prolongation de la durée de vie de la CADES, ce qui implique l’adoption d’une loi organique.

Compte tenu de l’ampleur des déficits sociaux pesant sur la trésorerie de l’ACOSS et de la difficulté de dégager des ressources supplémentaires affectées à l’amortissement de la dette sociale, une nouvelle reprise de dette par la CADES nécessiterait vraisemblablement de prolonger son existence audelà de 2033. Le Haut Conseil du financement de la protection sociale (HCFiPS) estime, dans une note de janvier 2025, que cette mesure est « inévitable » et « nécessaire » à brève échéance ([56]).

● Le rapporteur pour avis partage l’analyse formulée par la Cour des comptes dans son dernier rapport sur l’application des LFSS, selon laquelle « une nouvelle reprise de dette par la Cades ne résoudrait pas le problème de fond résultant de la dégradation continue des soldes de la sécurité sociale, qui exposerait à la reconstitution rapide d’un nouveau stock de dette. Un préalable indispensable est la définition d’une trajectoire crédible de retour à l’équilibre impliquant des mesures d’économie et de maîtrise des dépenses » ([57]).

La CADES a indiqué, lors de son audition, qu’une nouvelle reprise de dette à court terme placerait la caisse dans une situation inédite en l’absence de hausse significative des ressources affectées : la CADES se verrait transférer de nouveaux déficits sociaux alors qu’elle commence seulement à amortir le stock de dette repris en 2020 à l’occasion de la crise sanitaire. Une telle trajectoire s’écarterait inévitablement de l’horizon d’amortissement traditionnel de la CADES, qui s’élève à une dizaine d’années comme le démontre le graphique cidessous.

Reprises de dette par la cades et durée d’amortissement (1996‑2032)

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Source : annexe 2 au PLFSS pour 2026.

II.   Les recettes : un nouvel effort demandé aux ménages et aux entreprises

S’agissant de la deuxième partie du PLFSS pour 2026, qui comprend les dispositions relatives aux recettes et à l’équilibre général du prochain exercice, le rapporteur pour avis a concentré son analyse sur les mesures visant à augmenter les prélèvements obligatoires sur les ménages et les entreprises ou à réduire les avantages sociaux dont ils bénéficient.

Sont abordées successivement les dispositions portant sur des impositions de toute nature (A), en l’espèce la CSG et la nouvelle contribution exceptionnelle pesant sur les organismes complémentaires, et les dispositions relatives aux exonérations de cotisations sociales et aux exemptions d’assiette (B).

La deuxième partie du projet de loi de financement comporte, en outre, des mesures bienvenues afin d’améliorer la gestion de la trésorerie des régimes obligatoires de base et le recouvrement des cotisations et contributions sociales. Tel est l’objet des dispositions visant à renforcer les pouvoirs des URSSAF et des caisses de la MSA en matière de recouvrement des créances sociales (article 4), à simplifier l’affiliation, la déclaration de revenu, l’action sociale et la gouvernance de la sécurité sociale des artistes-auteurs (article 5), à réformer la clause de sauvegarde du médicament (article 10) et à la gestion de trésorerie du régime général en instaurant un mécanisme d’acompte des remises conventionnelles relatives aux produits de santé, reversées par les entreprises qui exploitent ces derniers à l’assurance maladie (article 11). Pour un commentaire détaillé de ces dispositions, le lecteur est invité à consulter le tome II du rapport fait au nom de la commission des affaires sociales sur le PLFSS pour 2026.

A.   Une augmentation des impôts et taxes pesant sur certains ménages et entreprises, au détriment du pouvoir d’achat des français les plus fragiles

Le gel des seuils de revenus pris en compte pour le calcul de la contribution sociale généralisée (CSG) sur certains revenus de remplacement (1) et la création d’une contribution exceptionnelle pesant sur les organismes complémentaires (2) devraient dégrader, directement ou indirectement, le pouvoir d’achat de tout ou partie des ménages, en particulier des retraités.

1.   Le gel des seuils de revenus pris en compte pour le calcul de la CSG sur certains revenus de remplacement : une composante de « l’année blanche » voulue par le Gouvernement

Une partie des revenus de remplacement est soumise à la CSG selon des taux différenciés, qui tiennent compte des revenus fiscaux du redevable (a).

Dans le cadre de « l’année blanche » annoncée par le Gouvernement au titre de l’exercice 2026, l’article 6 du projet de loi de financement propose de geler les seuils de revenu pris en compte pour le calcul de la CSG sur les pensions de retraite et d’invalidité et sur les allocations de chômage (b).

a.   La coexistence de plusieurs taux de CSG applicables aux revenus de remplacement

● Aux termes du 1° de l’article L. 136-1 du code de la sécurité sociale, les personnes domiciliées en France et affiliées à un régime obligatoire d’assurance maladie sont redevables de la CSG sur leurs revenus de remplacement, entendus comme les sommes destinées à compenser la perte du revenu d’activité, y compris en tant qu’ayant droit versées sous quelque forme que ce soit ([58]).

Compte tenu des revenus expressément exclus par le II de l’article L. 136‑1‑2 du code de la sécurité sociale, relèvent de l’assiette de la CSG sur les revenus de remplacement les pensions de retraite, les pensions d’invalidité, les allocations de préretraite, les allocations de chômage, les indemnités d’activité partielle et les indemnités journalières de sécurité sociale.

Alors que la CSG sur les revenus d’activité, de même que celle pesant sur les revenus du patrimoine et celle pesant sur les revenus de placement, sont dues au taux de 9,2 % ([59]), plusieurs taux dérogatoires sont applicables aux revenus de remplacement. Aux termes du II de l’article L. 136­‑8 du code de la sécurité sociale, les pensions de retraite et les pensions d’invalidité sont assujetties au taux de 8,3 %, tandis que les allocations de chômage et les indemnités journalières de sécurité sociale font l’objet d’un taux de 6,2 %.

Par dérogation, les pensions de retraite et d’invalidité ainsi que les allocations de chômage et les avantages issus de la cessation partielle d’activité, hors préretraite, bénéficient en outre de l’application de taux réduits en fonction du revenu fiscal de référence (RFR). Cet agrégat, défini au IV de l’article 1417 du code général des impôts, renvoie à une assiette large en ce qu’il recouvre différentes catégories de revenus et neutralise certaines dépenses fiscales.

Bénéficiant d’un taux normal avantageux, les pensions de retraite et d’invalidité sont ainsi assujetties aux taux réduit de 3,8 % ou de 6,6 % en année n, dès lors que le RFR de l’année n–2 du bénéficiaire est compris dans une tranche de revenus déterminée (voir tableau infra([60]). Un taux minoré de 3,8 % s’applique également pour les allocations de chômage.

À titre d’exemple, les pensions de retraite perçues en 2025 sont soumises au taux médian de 6,6 % si le RFR du contribuable est compris entre 16 755 euros pour la première part de quotient familial, majoré de 4 474 euros demi‑part supplémentaire, et 26 004 euros pour cette même première part, majoré de 6 941 euros par demi‑part supplémentaire.

Sont enfin exclus du champ de l’assiette de la CSG ces mêmes revenus de remplacement perçus en année n par les contribuables dont le RFR de l’année n–2 est inférieur au seuil d’entrée dans le champ du taux de 3,8 %. Par ailleurs, un dispositif de lissage des effets de seuil a été introduit par la LFSS pour 2019 afin de limiter l’incidence de la perception de revenus non récurrents sur le taux de CSG applicable ([61]) : le taux médian (6,6 %) et le taux normal (8,3 %) ne sont appliqués que si le RFR franchit le seuil d’assujettissement à la CSG au taux réduit (3,8 %) pendant deux années consécutives, c’est‑à‑dire en 2022 et 2023 pour le calcul de la CSG due en 2025.

Aux termes du III ter de l’article L. 136‑8 du code de la sécurité sociale, les seuils de RFR sont revalorisés au 1er janvier de chaque année en fonction de l’évolution annuelle des prix à la consommation hors tabac constatés pour l’année n–2.


TAUX de CSG applicable Pour certaines catégorieS de revenus
de remplacement (RFR 2023)

Revenus de remplacement

Seuil de RFR (année n–2)

Taux (année n)

Assiette de calcul

Pensions de retraite et d’invalidité

0 €

0 %

100 % du revenu brut

12 818 €

+ 3 422 €  par demi‑part

3,8 %

16 756 €

+ 4 474 € par demi‑part

6,6 %

26 004 €

+ 6 941 € par demi‑part

8,3 %

Allocations de chômage et avantages résultant de la cession partielle d’activité

0 €

0 %

98,25 % du revenu brut dans la limite de 4 PASS (1)

16 756 €

+ 4 474 € par demi‑part

3,8 %

26 004 €

+ 6 941 € par demi‑part

6,6 %

Source : commission des finances, d’après l’annexe 9 du PLFSS pour 2026 et la lettre ministérielle D‑24‑019252 du 4 décembre 2024.

(1) En application du 3° du I de l’article L. 136‑2 du code de la sécurité sociale, les allocations de chômage bénéficient d’une réduction représentative de frais professionnels fixée à 1,75 %.

Force est de constater que le taux unique et modéré de la CSG, fixé à 1,1 % des revenus d’activité et de remplacement en 1991 ([62]), a connu une trajectoire à la fois haussière et contrastée. La multiplication des taux dérogatoires a notamment été justifiée par des motifs de justice fiscale, d’acceptabilité de l’impôt et de soutien au pouvoir d’achat des ménages.

● D’autres prélèvements sociaux assis sur les pensions de retraite et d’invalidité dépendent, par renvoi, du RFR :

– en application du I de l’article 14 de l’ordonnance n° 96‑50 du 24 janvier 1996 précitée, les contribuables exonérés de CSG ne sont pas redevables de la CRDS ;

– en application du 1° du II de l’article L. 137‑41 du code de la sécurité sociale, la contribution additionnelle pour l’autonomie (CASA), dont le taux est fixé à 0,3 %, n’est due que par les contribuables soumis au taux médian de 6,6 % ou au taux normal de 8,3 % ;

– de la même manière, la cotisation d’assurance maladie sur les retraites complémentaires, fixée au taux de 1,0 % par l’article D. 242‑8 du code de la sécurité sociale, n’est due que par les contribuables soumis au taux médian de 6,6 % ou au taux normal de 8,3 % ([63]).

De manière symétrique, les bénéficiaires des allocations de chômage dont le RFR de l’année 2023 est inférieur ou égal à 12 817 euros sont exonérés de CSG, mais également de CRDS. Ces revenus de remplacement ne sont pas soumis à la CASA et à la cotisation d’assurance maladie au taux de 1,0 %, quel que soit leur montant.

Cette architecture complexe conduit, s’agissant des pensions de retraite et d’invalidité, à l’application en cascade d’exonérations et de taux réduits. L’annexe 9 du PLFSS pour 2026 en récapitule les principales caractéristiques.

TAUX des prélèvements sociaux applicables aux pensions de retraite
et d’invalidité

 

Exonération

Taux réduit

Taux intermédiaire

Taux normal

CSG

Exonération

3,8 %

6,6 %

8,3 %

CRDS

0,5 %

0,5 %

0,5 %

CASA

Exonération

0,3 %

0,3 %

Cotisation d’assurance maladie

1,0 % sur les retraites complémentaires

1,0 % sur les retraites complémentaires

Taux cumulé des contributions (retraite de base)

0 %

4,3 %

7,4 %

9,1 %

Effectifs

4,1 millions

2,3 millions

5,4 millions

5,6 millions

Part du montant total des pensions en 2023

13 %

10 %

30 %

47 %

Source : annexe 9 du PLFSS pour 2026.

Selon le rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS) d’octobre 2025, le produit de la CSG sur les revenus de remplacement devrait s’établir à 27,95 milliards d’euros en 2025, avant d’atteindre 29,03 milliards d’euros en 2026. La décomposition de son rendement ne recouvre pas exactement les catégories de revenus de remplacement définies supra, mais d’apprécier des ordres de grandeur. La CSG applicable aux pensions de retraite, exclusion faite des pensions d’invalidité, générerait des recettes de 25,31 milliards d’euros en 2025, avant une prévision de 26,34 milliards d’euros en 2026. Celle applicable aux allocations de chômage et aux indemnités de cessation partielle d’activité représenterait 1,89 milliard d’euros en 2025, avant une prévision de 1,92 milliard d’euros en 2026.

b.   Le maintien du barème de CSG mis en œuvre en 2025, au détriment des contribuables les plus modestes

● L’article 6 du projet de loi de financement prévoit de maintenir pour l’année 2026 la valeur du montant des seuils de RFR applicable au calcul des prélèvements sociaux sur les revenus de remplacement en 2025.

À cet effet, il est proposé de modifier les seuils visés au III de l’article L. 136‑8 du code de la sécurité sociale, lesquels conditionnent l’application du taux nul et du taux réduit de CSG, ainsi que l’assujettissement par renvoi aux prélèvements sociaux mentionnés supra (CRDS, CASA, cotisation d’assurance maladie).

Les dispositions du III ter de l’article L. 136‑8 du même code seraient par ailleurs abrogées pour faire obstacle à la revalorisation annuelle des seuils de RFR en fonction de l’évolution de l’indice des prix à la consommation hors tabac. Les seuils en vigueur au titre de l’année 2025 seraient ainsi inscrits dans la loi ([64]).

● Le Gouvernement indique que les règles de revalorisation prévues par le droit en vigueur auraient conduit à relever les seuils à retenir pour l’année 2026 de 1,8 %, compte tenu de l’inflation constatée en 2024 ([65]).

La mesure proposée de gel des seuils d’assujettissement conduirait à accroître, en euros constants, les prélèvements sociaux pesant sur les contribuables dont les revenus de remplacement ont progressé dans la même proportion que l’inflation.

S’agissant des revenus de pension et d’invalidité, cela conduirait, en 2026 :

– près de 1 % des foyers exonérés de CSG à passer aux taux réduit de 3,8 % ;

– près de 1 % des foyers assujettis à la CSG au taux réduit de 3,8 % à passer au taux médian de 6,6 % ;

– près de 1 % des foyers assujettis à la CSG au taux médian de 6,6 % à passer au taux normal de 8,3 %.

À titre d’exemple, un foyer d’une personne retraitée dont la pension, qui serait son unique source de revenu, s’élève à 2 700 euros brut mensuel franchirait le seuil de RFR le plus élevé et verrait le taux cumulé des prélèvements sociaux augmenter de 1,7 point, soit 46 euros par mois d’après le Gouvernement.

Le gel des seuils d’assujettissement est associé à un rendement pérenne de l’ordre de 0,3 milliard d’euros par an.

● Conformément à la clé de répartition du produit de la CSG sur les revenus de remplacement, définie au 3° de l’article L. 131‑8 du code de la sécurité sociale, et des règles d’affectation des autres prélèvements sociaux concernés, le surcroît de recettes attendu en 2026, estimé à 319 millions d’euros, bénéficierait :

– pour 290 millions d’euros au régime général, dont 103 millions d’euros au bénéfice de la branche vieillesse, 55 millions d’euros au bénéfice de la branche maladie, 34 millions d’euros au bénéfice de la branche famille et 98 millions d’euros au bénéfice de la branche autonomie ;

– pour 29 millions d’euros à la CADES.

● Le rapporteur pour avis estime que cette mesure de rendement pèse sur des contribuables fragiles, à savoir les retraités et les bénéficiaires de l’allocation chômage assujettis à des taux réduits de CSG en raison de leurs revenus modestes. Les recettes escomptées en 2026 (0,3 milliard d’euros) sont sans commune mesure avec le déficit prévisionnel des régimes obligatoires de base (– 17,5 milliards d’euros), interrogeant la pertinence d’une telle disposition. Par ailleurs, l’abrogation pérenne du mécanisme de revalorisation annuelle des seuils de RFR contrevient à l’esprit de « l’année blanche » annoncée par le Gouvernement, qui doit conserver un caractère exceptionnel et ne saurait se substituer à des réformes structurelles sources d’économies.

2.   La création d’une contribution de 2,25 % pesant sur les organismes complémentaires au titre du seul exercice 2026

Si la prise en charge des dépenses de santé relève principalement de l’assurance maladie, les organismes complémentaires ont augmenté leurs cotisations en 2025 en prévision du relèvement du ticket modérateur, auquel le Gouvernement a finalement renoncé (a).

Initialement envisagé à 2,05 %, le taux de la contribution exceptionnelle prévue à l’article 7 a été relevé de 0,2 point dans la lettre rectificative afin de financer le surcoût de 0,1 million d’euros que représente la suspension de la réforme des retraites en 2026 (b).

a.   Un partage perfectible, entre l’assurance maladie et les organismes complémentaires, de la prise en charge des frais de santé

● Dans une étude parue en septembre 2025 ([66]), la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) indique que la consommation de soins et de biens médicaux (CSBM) s’élevait à 254,8 milliards d’euros en 2024, soit 8,7 % du PIB ([67]). Il s’agit d’une augmentation de 3,7 % par rapport à l’année précédente et de 35,8 % depuis 2014.

Le financement de la consommation de soins et de biens médicaux est assuré, en 2024 :

– pour 78,7 % par l’assurance maladie obligatoire (AMO), à hauteur de 200,5 milliards d’euros ;

– pour 12,8 % par l’assurance maladie complémentaire (AMC), qui couvre 96 % de la population française et finance la part « complémentaire » des dépenses de santé à hauteur de 32,5 milliards d’euros, par l’intermédiaire des mutuelles, des compagnies d’assurance et des institutions de prévoyance ;

– pour 0,7 % par l’État, à hauteur de 1,8 milliard d’euros, correspondant principalement à l’aide médicale d’État (1,2 milliard d’euros) ;

– pour 7,8 % par les ménages, à hauteur de 20,8 milliards d’euros, correspondant à leur reste à charge après l’intervention des trois financeurs précités.

Prise en charge de la CSBM par financeur en 2024

(en milliards d’euros ; en pourcentage du total)

 

AMO

AMC

État

Ménages

Total

Soins hospitaliers

112,1

4,6

1,3

2,7

120,8

Soins de médecins et sages-femmes

16,5

4,0

0,1

2,1

22,7

Soins dentaires

4,7

6,4

0,0

2,0

13,2

Soins des auxiliaires médicaux

14,9

2,3

0,1

3,7

21,0

Soins en centre de santé

2,3

1,1

0,0

0,4

3,8

Laboratoires, transports et cures

14,0

2,1

0,1

0,9

17,0

Médicaments en ambulatoire

26,2

3,8

0,2

4,3

34,5

Dispositifs médicaux

9,7

8,2

0,0

3,8

21,7

Total en volume

200,5

32,5

1,8

20,0

254,8

Total en valeur

78,7 %

12,8 %

0,7 %

7,8 %

100 %

Source : DREES, Les dépenses de santé en 2024. Résultat des comptes de la santé – édition 2025, septembre 2025.

Les dépenses de santé sont prises en charge à titre principal par les régimes obligatoires de base, cette part progressant depuis une dizaine d’années : les remboursements assurés par l’assurance maladie obligatoire représentaient 76 % de la CSBM en 2014, tandis que les organismes complémentaires, l’État et les ménages assumaient respectivement 12,7 %, 1,8 % et 9,5 % des dépenses.

L’augmentation des dépenses de santé à la charge des régimes obligatoires de base est due à des motifs structurels, tels que le vieillissement de la population et la prévalence croissante des maladies chroniques, mais également conjoncturels, tels que le financement des dépenses exceptionnelles liées à la crise sanitaire. Il n’en demeure pas moins que cette tendance, qui peut être constatée au moment même où le déséquilibre de notre système de protection sociale s’aggrave, est la manifestation préoccupante de notre incapacité collective à admettre qu’un effort supplémentaire devrait être demandé aux ménages pour revenir à l’équilibre.


Évolution de la prise en charge de la CSBM par financeur entre 2010 et 2024

(en pourcentage du total)

Source : DREES, Les dépenses de santé en 2024. Résultat des comptes de la santé – édition 2025, septembre 2025.

Les comparaisons fondées sur le champ élargi de la dépense courante de santé au sens international (DCSi), qui recouvre les soins de longue durée, les dépenses de prévention et les dépenses de gouvernance en sus de la CSBM, démontrent le caractère fortement socialisé du système de santé français. En 2023, la part des dépenses de santé restant à la charge des ménages s’élève à 10,2 % en France, contre 14,8 % en moyenne dans l’Union européenne. Seuls la Croatie (9,4 %) et le Luxembourg (9,7 %) connaissent des taux de reste à charge pour les ménages moins élevés.

comparaison internationale du reste À charge des mÉnages
dans la DSCi en 2023

Source : DREES, Les dépenses de santé en 2024. Résultat des comptes de la santé – édition 2025, septembre 2025.

● En parallèle de la prise en charge croissante de la CSBM par la sécurité sociale, les cotisations en santé récoltées par les organismes complémentaires ont connu une dynamique importante : elles atteignent 43 milliards d’euros hors taxes en 2023, en hausse de 6 % par rapport à l’année précédente, après avoir crû de 2,9 % en 2022 et 3,1 % en 2021 ([68]). Les cotisations ont été reversées aux assurés par les organismes complémentaires à hauteur de 81 % en 2022 et 2023, soit le plus haut niveau atteint depuis 2013. La différence correspond aux charges de gestion supportées par les organismes complémentaires.

Le rapport d’information du Sénat sur les complémentaires « santé » et le pouvoir d’achat des Français ([69]), déposé en septembre 2024, fait état d’estimations plus récentes, selon lesquelles la hausse des cotisations s’élèverait, en 2024, en moyenne à 8,1 % pour les mutuelles et à 8,4 % pour les entreprises d’assurance. Il est relevé que les tarifs des complémentaires « santé » ont connu « une hausse brutale » au cours des deux dernières années, « posant la question de ses conséquences sur le pouvoir d’achat des assurés ».

La trajectoire haussière des cotisations acquittées par les assurés devrait se poursuivre. S’agissant de l’année 2025, les mutuelles ont par exemple annoncé une augmentation des primes d’assurance de 6 % en moyenne sur l’ensemble des contrats mutualistes ([70]). Cette mesure était principalement justifiée par l’annonce de l’augmentation de 30 % à 40 % du taux du ticket modérateur pour les consultations chez les médecins généralistes et les sages-femmes, que le Gouvernement avait intégré dans l’ONDAM figurant dans la version initiale du PLFSS pour 2025 avant de renoncer à maintenir cette mesure ([71]).

● Outre les prélèvements de droit commun auxquels sont assujettis les organismes complémentaires, tels que l’impôt sur les sociétés et les cotisations sociales pour leurs salariés, les contrats de complémentaire « santé » sont soumis à deux prélèvements spécifiques. Leur produit total atteint 5,6 milliards d’euros en 2022, soit 14,1 % des cotisations récoltées hors taxes.

En premier lieu, aux termes du I de l’article L. 862-4 du code de la sécurité sociale, est perçu une taxe de solidarité additionnelle (TSA) aux cotisations d’assurance maladie assise sur le montant des sommes stipulées pour l’année au profit des organismes complémentaires, sous certaines exceptions. Le taux normal de la TSA est fixé à 13,27 %. Il peut être différencié selon que le contrat est dit responsable et solidaire (6,27 %) ([72]) ou non (20,27 %). Cette première catégorie représente 96 % des cotisations de complémentaire « santé » d’après l’étude annuelle de la DREES sur les acteurs, les bénéficiaires et les garanties de la complémentaire santé ([73]). Si la TSA est à la charge des assurés, elle est prélevée par les organismes complémentaires et intégralement reversée à l’URSSAF d’Île-de-France sur une base trimestrielle. Selon le rapport à la CCSS d’octobre 2025, le produit de la TSA s’élèverait à 6,5 milliards d’euros en 2025 et devrait atteindre 6,7 milliards d’euros en 2026. Il est réparti entre le fonds de financement de financement de la complémentaire santé solidaire (C2S) et la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM).

En second lieu, le forfait de patientèle des médecins traitants (FPMT), instituée par la convention nationale médicale du 25 août 2016, est financé par l’assurance maladie obligatoire comme par les complémentaires « santé ». Le FPMT est une forme de rémunération qui valorise le suivi de patients par le médecin traitant, en tenant compte de leurs caractéristiques en termes d’âge, de pathologie et de précarité. Les organismes complémentaires sont soumis à une contribution ([74]) au taux de 0,8 %, dont l’assiette et les modalités de recouvrement sont identiques à celle de la TSA. Son produit est affecté à la CNAM et devrait s’élever en 387 millions d’euros en 2025, contre 385 millions d’euros en 2024, d’après le rapport à la CCSS de juin 2025.

b.   L’instauration d’une contribution exceptionnelle de 2,25 % à la charge des organismes complémentaires en 2026

● L’article 7 du projet de loi de financement instaure, au titre de la seule année 2026, une contribution au taux de 2,25 % assise sur les sommes stipulées en 2026 par les mutuelles, les institutions de prévoyance et les entreprises d’assurance à raison des contrats d’assurance maladie complémentaire.

Le texte initial prévoyait un taux de 2,05 %, lequel est relevé par la lettre rectificative afin de compenser les dépenses supplémentaires attendues de la suspension de la réforme des retraites en 2026.

Le produit de ce prélèvement devrait atteindre 1,12 milliard d’euros en 2026, répartis entre la branche maladie – qui devait en être le seul affectataire à l’origine – à hauteur de 1,02 milliard d’euros et la branche vieillesse du régime général à hauteur de 0,1 milliard d’euros.

En proposant cette mesure, le Gouvernement souhaite notamment compenser la hausse des primes d’assurance constatée en 2025, laquelle est en partie injustifiée en raison de l’abandon de la réforme du ticket modérateur. L’exposé des motifs de l’article 7 avance que celui‑ci poursuit « un objectif de rééquilibrage ». Des annonces ont été faites en ce sens lors de l’examen en nouvelle lecture du PLFSS pour 2025 : M. Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins, a ainsi déclaré devant la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale le 27 janvier 2025 : « La position du Gouvernement est très claire : il n’y aura de hausse du ticket modérateur ni sur les médicaments, ni sur les consultations. Des discussions sont en revanche en cours avec les mutuelles, qui ont augmenté leurs tarifs de 6 % sans améliorer leurs prestations. On peut envisager une ponction de la somme ainsi perçue, ou bien un élargissement de leurs missions – ou bien les deux » ([75]).

Le rapporteur pour avis rappelle que les acteurs du marché de la complémentaire « santé » sont fortement opposés à l’institution d’une contribution ponctuelle. Ils estiment que les hausses de primes d’assurance annoncées au titre de l’année 2025 pourraient même être insuffisantes pour couvrir les nouveaux remboursements mis à leur charge, par exemple au titre de l’annualisation de l’examen bucco‑dentaire de trois à vingt‑quatre ans et de la revalorisation des consultations réalisées auprès des jeunes prévues par la convention dentaire signée le 21 juillet 2023 ([76]).

L’hypothèse selon laquelle l’incidence de la contribution exceptionnelle serait répercutée par les organismes complémentaires sur les primes d’assurances facturées aux ménages ne saurait être écartée. Le rapporteur pour avis accueille défavorablement cette nouvelle taxe en raison du risque sérieux qu’il en résulte une nouvelle augmentation des cotisations acquittées par les assurés.

Il apparaît, en tout état de cause, que la mise en place d’un prélèvement temporaire sur les organismes complémentaires ne présente pas un caractère inédit. De telles contributions ont été introduites dans le contexte de la grippe aviaire H1N1 en 2010 ([77]) puis de la pandémie de la covid‑19 en 2020 et en 2021 ([78]), générant des recettes de respectivement 0,5 milliard d’euros et 1,5 milliard d’euros.

B.   la rationalisation de divers dispositifs d’EXEMPTION d’assiette et d’exonération de cotisations sociales

Si la compensation quasi-intégrale des exonérations de cotisation sociales pèse principalement sur les finances de l’État, la sécurité sociale supporte des surcoûts non négligeables au titre des allègements généraux (1).

Une réforme de plusieurs dispositifs d’exemption d’assiette (2) et d’exonérations ciblées (3) est proposée dans le PLFSS pour 2026.

S’il est nécessaire de mieux encadrer les régimes dérogatoires coûteux et peu efficaces, le rapporteur pour avis alerte sur le risque de fragiliser des avantages sociaux appréciés tant des employeurs que des salariés.

1.   Les relations financières entre l’État et la sécurité sociale au titre des exonérations de cotisations sociales

Le coût des exonérations et réductions de cotisations sociales est en principe compensé par l’État (a). Certaines mesures demeurent toutefois à la charge de la sécurité sociale au regard des limites de la règle de compensation pour « solde de tout compte », notamment s’agissant des allègements généraux de cotisations patronales (b).

a.   Un principe de neutralité des relations financières entre l’État et la sécurité sociale, qui peut faire l’objet de dérogations

● Les grands principes de la neutralité des relations entre l’État et la sécurité sociale sont définis à l’article L. 131‑7 du code de la sécurité sociale, qui prévoit que l’État attribue des recettes fiscales ou des crédits budgétaires à la sécurité sociale afin de compenser :

– toute mesure de réduction ou d’exonération de cotisations instituée à compter de l’entrée en vigueur de la loi du 25 juillet 1994, dite Veil ([79]) ;

– toute mesure soit de réduction ou d’exonération de contributions, soit de réduction ou d’abattement d’assiette de cotisations ou contributions instituée à compter de l’entrée en vigueur de la loi du 13 août 2004, dite Douste-Blazy ([80]) ;

– toute mesure de transferts de charges entre l’État et la sécurité sociale.

L’encadrement des conditions de création ou d’extension des « niches sociales » a été renforcé à l’occasion de la réforme organique du 14 mars 2022 ([81]). Aux termes du 2° de l’article L.O. 111-3-16 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction résultant de la réforme organique de 2022, seules les LFSS et les LFRSS peuvent « créer ou modifier des mesures de réduction ou d’exonération de cotisations ou de contributions de sécurité sociale » affectées aux ROBSS, à la CADES ou à la mise en réserve de recettes à leur profit non-compensées aux ROBSS ou établies pour une durée égale ou supérieure à trois ans. L’incidence de ces dispositions sur le travail législatif ne saurait être sousestimée, tant elles constituent un motif d’irrecevabilité régulièrement opposé aux initiatives parlementaires ([82]).

● Les pertes de recettes occasionnées pour la sécurité sociale peuvent faire l’objet d’une compensation dite intégrale, prenant la forme de crédits du budget de l’État, ou d’une affectation de recettes fiscales pour « solde de tout compte » en cas de disposition expresse de non-compensation ou de dérogation à l’article L. 131‑7 du code de la sécurité sociale.

L’annexe 4 du PLFSS pour 2026 distingue l’absence de compensation « au plan juridique » et « au plan financier », en précisant que « la plupart des exonérations qui font l’objet de dérogations au principe de compensation intégrale par crédits budgétaires sont, en pratique, compensées à la sécurité sociale par l’affectation de recettes fiscales (essentiellement la TVA). Si la modalité de compensation est dérogatoire à celle prévue par l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, le coût est cependant bien compensé à la sécurité sociale ».

En pratique, les allégements généraux de cotisations patronales répondant à un objectif transversal de création d’emplois et d’amélioration de la compétitivité des entreprises sont compensés par l’affectation d’une fraction de TVA. À l’inverse, les exonérations ciblées sur des publics, des secteurs ou des territoires spécifiques font l’objet d’une compensation intégrale via les crédits portés par certaines missions du budget général de l’État.

L’architecture des allègements généraux de cotisations patronales

Compte tenu des développements qui suivent, la présentation des allègements généraux de cotisations patronales figurant dans le précédent rapport pour avis sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale peut utilement être reproduite :

« Les allègements sont dits généraux en ce qu’ils s’appliquent à l’ensemble des employeurs du secteur privé sans autre condition que celle relative au niveau de rémunération. Leur architecture s’est progressivement stabilisée autour de trois dispositifs […] :

 la réduction générale dégressive portant sur les salaires compris entre 0 et 1,6 fois le SMIC, dite allègement Fillon ;

 la réduction forfaitaire de 6 points des cotisations maladie portant sur les salaires compris entre 0 et 2,5 fois le SMIC, dite bandeau maladie ;

 la réduction forfaitaire de 1,8 point des cotisations d’allocations familiales portant sur les salaires compris entre 0 et 3,5 fois le SMIC, dite bandeau famille.

[…] Initialement conçue pour soutenir l’emploi des salariés peu qualifiés, la réduction générale dégressive a été complétée par des réductions proportionnelles sur le haut de la distribution des salaires afin de renforcer la compétitivité des secteurs exposés à la concurrence internationale. »

Comme l’a signalé le rapporteur pour avis lors de l’examen du PLACSS de l’année 2024, le mécanisme de la compensation « pour solde de tout compte » présente un risque de pertes financières pour la sécurité sociale, dans la mesure où le montant de la fraction de TVA affectée à celleci n’est pas ajusté en fonction des moindres recettes constatées en fin d’exercice. Selon l’annexe au projet de loi de finances pour 2026 relative aux relations financières entre l’État et la protection sociale, cela signifie concrètement « qu’il n’existe plus – en principe – de mécanisme de régularisation en N+1 du montant de TVA affectée, de manière à ce que le montant de TVA affecté corresponde strictement au coût effectif de la perte de recettes résultant des allègements généraux de cotisations patronales sur les bas salaires ».

b.   La compensation quasi-intégrale des pertes de recettes supportées par la sécurité sociale, en dépit du coût croissant des allègements généraux

● En ne retenant que les exonérations et réductions, c’est-à-dire les minorations de l’assiette ou du taux des prélèvements sociaux, le coût de ces dispositifs hors covid-19 représenterait, en droits constatés, 71,6 milliards d’euros en 2025. Il reculerait de 6,3 % en 2026, pour s’établir à 67,1 milliards d’euros d’après l’annexe 4 du projet de loi de financement. Ces mesures seraient compensées par l’État à hauteur de 96,4 % en 2025 et de 96,1 % en 2026.

Si l’on ajoute les exemptions d’assiette ([83]), dont l’article 8 du projet de loi de financement propose une refonte d’ampleur, le total des « niches sociales » entrant dans le champ des ROBSS s’élèverait à 88,5 milliards d’euros en 2025.

CoÛt DES ALLÈGEMENTS généraux et des exonérations ciblées (ROBSS)
en 2025 et 2026 (P)

(en millions d’euros)

 

2025 (P)

2026 (P)

Évolution 20252026

Allègements généraux et mesures de modulation des taux (1)

62 184

54 954

 11,6 %

Allègements généraux (2025) ; réduction générale dégressive unique (2026)

26 018

53 094

+ 104,1 %

Cotisations d’allocations familiales (salariés)

9 286

 100 %

Part patronale des cotisations d’assurance maladie (salariés)

24 725

 100 %

Cotisations d’allocations familiales (régimes des indépendants)

808

785

 3,0 %

Cotisations d’assurance maladie (régimes des indépendants)

1 092

1 075

 1,5 %

Cotisations d’assurance maladie (régimes spéciaux)

254

 100 %

Exonérations compensées par des missions du budget de l’État (2)

6 839

6 885

+ 0,8 %

Travail et emploi

4 774

4 774

0 %

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

407

413

+ 1,5 %

Outre-mer

1 315

1 349

+ 2,6 %

Culture

32

33

+ 4,1 %

Médias, livre et industries culturelles

9

9

 2,0 %

Écologie, développement et mobilité durables

63

63

+ 0,1 %

Recherche et enseignement supérieur

236

241

+ 2,2 %

Cohésion des territoires

1

1

 37,3 %

Sport, jeunesse et vie associative

1

1

+ 9,7 %

Total des compensations fiscales et budgétaires (1) + (2)

69 023

64 466

 6,6 %

Exonérations non compensées

2 596

2 626

+ 1,2 %

Part salariale des heures supplémentaires

2 254

2 306

+ 2,3 %

Stages en milieu professionnel

126

128

+ 2,3 %

Contrats uniques d’insertion ou d’accompagnement dans l’emploi (secteur public)

73

48

 34,9 %

Contrats de sécurisation professionnelle

95

97

+ 2,7 %

Exonération en faveur de jeunes chefs d’exploitations agricoles

47

46

 1,6 %

Source : annexe 4 du PLFSS pour 2026.

● Il apparaît toutefois que le coût des allègements généraux de cotisations patronales, qui a crû de 47,4 milliards d’euros à 65,9 milliards d’euros entre 2020 et 2024 sur le seul champ des ROBSS, n’a que partiellement été compensé à la sécurité sociale.

L’écart entre les dynamiques des exonérations et de la base fiscale assurant leur compensation, c’est‑à‑dire la TVA, aurait induit une charge de 18,3 milliards au détriment des ROBSS depuis 2019 ([84]). Selon le dernier rapport sur l’application des LFSS de la Cour des comptes, dont l’un des graphiques est reproduit ci‑dessous, ce déséquilibre est passé de 2,4 milliards d’euros en 2019, année marquée par la transformation du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) en baisse pérenne de cotisation sociale, à 5,5 milliards d’euros en 2024.

Incidence des allÈgements gÉnéraux sur le solde de la sÉcuritÉ sociale (2019‑2024)

(en milliards d’euros)

Source : rapport de la Cour des comptes sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale (mai 2025).

● Prévue par l’article 18 de la LFSS pour 2025 ([85]), une importante réforme des allègements généraux a été engagée en deux temps afin d’en maîtriser le coût en ciblant davantage les bas salaires :

– la première étape, mise en œuvre dès l’année 2025 ([86]), a donné lieu à l’abaissement des points de sortie des bandeaux « maladie » et « famille » à respectivement 2,25 et 3,3 fois SMIC, contre près de 2,4 et 3,4 fois le SMIC en 2024 à la suite du gel des points de sortie au niveau du SMIC en vigueur au 31 décembre 2023 ([87]). En outre, l’intégration de la prime de partage de la valeur (PPV) dans l’assiette des rémunérations prises en compte pour le calcul des exonérations aboutit à la diminution des effectifs de salariés susceptibles de bénéficier des exonérations ;

– la seconde étape implique, à partir de 2026, la fusion de la réduction générale dégressive et des bandeaux au sein d’un dispositif de réduction générale dégressive unique (RGDU) applicable aux salaires allant jusqu’à 3 fois SMIC, dont les paramètres ont été fixés par décret ([88]).

D’après les informations communiquées au rapporteur pour avis en réponse au questionnaire adressé au Gouvernement en application de l’article L.O. 111‑8 du code de la sécurité sociale, le rendement de la réforme des allègements généraux se répartirait de la manière suivante :

– un gain de 2,3 milliards d’euros en 2025, reposant sur la refonte des seuils d’éligibilité à la réduction générale dégressive et aux bandeaux (1,5 milliard d’euros), ainsi que sur l’intégration de la PPV dans l’assiette de la première (0,8 milliard d’euros) ;

– un gain de 1,6 milliard d’euros en 2026. Cette dernière estimation exclut « à ce stade » le surcroît de recettes résultant de l’intégration de la PPV « faute d’évaluation consolidée des masses de primes qui seront versées en 2026 » et sera ajustée ultérieurement. Surtout, elle ne correspond pas au montant de « l’économie globale de 3,1 milliards d’euros » attendue pour l’année 2026 d’après l’annexe 9 du PLFSS pour 2026, dont les modalités seraient précisées par voie réglementaire.

Les recettes supplémentaires associées à la première étape de la réforme des allègements généraux ont été conservées par les administrations de sécurité sociale, nettes de « l’effet retour » de l’impôt sur les sociétés sur le budget général de l’État, estimé à 400 millions d’euros. En revanche, l’article 40 du PLF pour 2026 prévoit une rétrocession de 3,1 milliards d’euros au bénéfice de l’État via la diminution de la fraction de TVA affectée aux administrations de sécurité sociale. S’il n’est pas anormal que les économies associées à la refonte d’une exonération compensée par l’État lui soient restituées, une telle opération intervient après la période de sous‑compensation évoquée supra.

2.   Le rapprochement des prélèvements sociaux applicables aux compléments de salaire avec le droit commun

L’article 8 du projet de loi faisant l’objet du présent rapport prévoit de réduire les avantages sociaux associés à certains compléments de salaire. Sont concernées les aides directes versées par l’employeur aux salariés (a) et les indemnités octroyées dans le cadre d’une rupture conventionnelle ou d’une mise à la retraite (b).

a.   L’assujettissement au forfait social des aides directes versées par l’employeur

  1.   Les compléments de salaire, des dispositifs dérogatoires et dynamiques qui pèsent sur le financement de la sécurité sociale

Aux termes du premier alinéa du I de l’article 136‑1‑1 du code de la sécurité, lequel renvoie à l’article L. 242‑1 du même code, l’assiette des contributions et des cotisations sociales est composée de l’ensemble des éléments de rémunération dus en contrepartie ou à l’occasion d’un travail, y compris les avantages et accessoires en nature ou en argent qui y sont associés.

Par dérogation à ce principe, certains revenus bénéficient d’un régime favorable d’exemption d’assiette. Ces revenus peuvent être qualifiés de « compléments de salaire », en ce qu’ils s’ajoutent à la rémunération monétaire des salariés et sont accordés par l’employeur en contrepartie de leur travail, sous forme d’aides directes ou indirectes.

Les exemptions d’assiette, contrairement aux exonérations de cotisations sociales, ont une incidence sur les droits sociaux contributifs des salariés. En effet, les compléments de salaire minorent l’assiette des cotisations sur lesquelles sont calculées les prestations en espèce versées par la sécurité sociale, notamment en matière d’indemnités journalières et de retraite. Par ailleurs, les exemptions d’assiette ne donnent généralement pas lieu à une compensation par l’État en raison de leur caractère ancien, l’obligation de compensation pour ces dispositifs n’ayant été introduite que par la loi du 13 août 2004, dite Douste-Blazy.

● L’annexe 4 du PLACSS de l’année 2024 regroupe les compléments salariaux faisant l’objet d’une exemption d’assiette en quatre catégories :

– les dispositifs de participation financière et d’actionnariat salarié, tels que la participation, l’intéressement, les plans d’épargne d’entreprise, l’attribution de stockoptions ou la prime de partage de la valeur ;

– les accessoires de salaire, qui prennent la forme de chèques ou de titres de paiement réservés à certaines dépenses précises (restauration, vacances, services à domicile) et sont versés directement par l’employeur ou un tiers, tel que le comité social et économique (CSE) ;

– le financement de la protection sociale complémentaire en entreprise dans les domaines de la santé, de la prévoyance et de la retraite supplémentaire ;

– les indemnités versées dans certains cas de rupture du contrat de travail, qui visent à compenser le préjudice subi par le salarié en cas de rupture conventionnelle, de licenciement ou de mise à la retraite d’office.

● Les compléments de salaire se caractérisent par un dynamisme important. Les montants versés à ce titre représentent 87,5 milliards d’euros en 2022, d’après le rapport sur l’application des LFSS publié par la Cour des comptes en mai 2024 ([89]).

Ce même rapport souligne que l’attention apportée au pouvoir d’achat après la crise des gilets jaunes, la nécessité de lutter contre la forte inflation dans le contexte de la crise sanitaire puis de la guerre en Ukraine et l’importance renouvelée accordée au partage de la valeur au sein des entreprises ont conduit à une « extension sans précédent des dispositifs dérogatoires » depuis 2018. À titre d’exemple, la prime de partage de la valeur (PPV), instituée en 2022 en remplacement de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat (PEPA) ([90]), est exonérée de cotisations sociales jusqu’à 3 000 euros et, sous certaines conditions, jusqu’à 6 000 euros.

Le recours croissant aux compléments de salaire pèse sur les finances sociales, en raison notamment d’un effet de substitution aux salaires qui tend à éroder la base contributive des cotisations sociales. De 2018 à 2023, la hausse des compléments de salaire bénéficiant d’une exemption d’assiette est devenue plus rapide (7,8 % par an) que celle des salaires de base du secteur privé (4,1 % par an). Les employeurs peuvent être incités, dans un contexte de forte incertitude économique, à privilégier des versements ponctuels et facultatifs à des hausses de salaire pérennes. S’il existe des dispositions législatives encadrant l’arbitrage réalisé par les entreprises en matière de partage de la valeur ([91]), l’annexe 2 au PLACSS de l’année 2024 en souligne les limites : « si ces restrictions légales remplissent leur rôle à court terme (on ne peut diminuer le salaire pour augmenter un avantage exempté), elles sont impuissantes à enrayer un effet dynamique sur longue période (l’octroi d’un bénéfice exempté permet de réduire ou de différer une hausse de salaire) ».

Par conséquent, l’évolution des pratiques des entreprises en matière de rémunération conduit à ce que ses composantes les plus dynamiques soient celles qui contribuent le moins au financement de la sécurité sociale. Le coût net des exemptions d’assiette, qui intègre les allègements généraux de droit commun, s’élève à 14,6 milliards d’euros en 2024, pour une assiette exemptée de 73,7 milliards d’euros. Il progresse de près de 92 % par rapport à 2018, exercice pour lequel il s’établissait à 7,6 milliards d’euros, pour une assiette exemptée de 54,8 milliards d’euros.

Des prélèvements sociaux spécifiques ont été instaurés sur les exemptions d’assiette afin de garantir la contribution des sommes versées sous la forme de compléments de salaire au financement de la sécurité sociale. Ils constituent, selon l’annexe 2 du PLACSS de l’année 2024, « une voie médiane entre l’absence totale d’assujettissement et l’application des taux de droit commun, plus élevés ». Ces taxes compensatoires ont elles-mêmes été assorties de dérogations à des fins incitatives, à la manière du forfait social présenté dans l’encadré infra. Il en résulte une perte de recettes nette pour la sécurité sociale d’après la Cour des comptes, qui souligne que le rendement des taxes compensatoires ne représente que 35,6 % du manque‑à‑gagner associé aux exemptions d’assiette en 2023, contre 43,5 % en 2018.

Par ailleurs, les accessoires de salaire accordés par les employeurs et les CSE ne sont pas assujettis aux prélèvements sociaux, à l’exception des chèques‑vacances versés par les entreprises de moins de 50 salariés non dotées d’un comité d’entreprise et qui ne relèvent pas d’un organisme paritaire de gestion des activités sociale. Ces dernières sommes sont incluses dans l’assiette de la CSG et de la CRDS, tout en étant exclues de celle du forfait social ([92]).

Le forfait social

Le forfait social est une contribution à la charge de l’employeur, instituée par l’article 13 de la LFSS pour 2009 ([93]) et défini à l’article L. 137‑15 du code de la sécurité sociale. Il est prélevé sur les rémunérations ou gains exclus de l’assiette des cotisations de sécurité sociale mais assujettis à la contribution sociale généralisée (CSG). Il s’agit d’une imposition de toute nature, et non d’une cotisation créatrice de droits.

Initialement fixé à 2 %, le taux normal du forfait social prévu à l’article L. 137‑16 du même code a été porté à 20 % à compter du 1er août 2012.

Les compléments de salaire intégrés dans l’assiette du forfait social bénéficient de taux réduits sous certaines conditions. Tel est le cas des primes d’intéressement versées par les entreprises qui emploient moins de 250 salariés, qui sont exclues de l’assiette du forfait social, et de la contribution des employeurs privés et publics au financement de la prévoyance complémentaire mise en place au profit de leurs salariés, anciens salariés et de leurs ayants droit, soumise à un taux réduit de 8 %.

À titre d’exemple, le taux cumulé des cotisations et contributions de sécurité sociale appliqué au cas‑type d’un salarié rémunéré au salaire moyen s’élève à 40,27 % en 2024. Par comparaison, les contributions sur la complémentaire prévoyance sont soumises à un taux cumulé de 17,7 %, réparti entre le forfait social (8 %), la CSG sur les revenus d’activité (9,2 %) et la CRDS (0,5 %).

En application de l’article L. 137‑17 du code de la sécurité sociale, le produit du forfait social est affecté à la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV). D’après le dernier rapport à la CCSS, il est estimé à 6,6 milliards d’euros en 2025 et 6,7 milliards d’euros en 2026.

  1.   L’assujettissement proposé au forfait social des aides directes versées par l’employeur

● La progression des compléments de salaire, tant s’agissant du nombre de dispositifs que des moindres recettes affectant le financement de la sécurité sociale, conduisent le Gouvernement à proposer d’assujettir au forfait social les aides directes consenties aux salariés par leur employeur. La Cour des comptes avait préconisé, dans le rapport précité, un tel « rapprochement [avec] le droit commun ».

Les modifications proposées des articles L. 137‑15 et L. 137‑16 du code de la sécurité sociale, résumées dans le tableau infra, tendent à soumettre au taux de 8 % les éléments de rémunération suivants :

– les sommes consacrées par les employeurs pour l’acquisition de titres‑restaurant ;

– les sommes consacrées par les employeurs au financement des activités sociales et culturelles des CSE ;

– l’aide financière de l’entreprise destinée à faciliter l’accès des salariés aux activités de services à la personne (garde d’enfant, entretien de la maison et travaux ménagers, etc.), qui permettent notamment de financer le chèque emploi‑service universel (CESU RH) ;

– dans les entreprises de moins de 50 salariés non dotées d’un comité d’entreprise et qui ne relèvent pas d’un organisme paritaire de gestion des activités sociale, la contribution de l’employeur à l’acquisition de chèques‑vacances ;

– dans les entreprises de plus 50 de salariés, la contribution du CSE ou de l’employeur à l’acquisition de chèques‑vacances.

SynthÈse de l’assujetissement proposÉ des complÉments de salaire
au forfait social

Dispositif

CSGCRDS

Cotisations sociales

Assiette exemptée en 2026 (P)

Taux du forfait social proposé

Contribution aux titres‑restaurant

Non

Non (1)

5,6 milliards d’euros

8 %

Financement des activités sociales et culturelles des CSE

Non

Non 

4,9 milliards d’euros

Financement des activités de service à la personne

Non (2)

Non (2)

0,2 milliard d’euros

Financement des chèques‑vacances par l’employeur (moins de 50 salariés)

Oui

Non (3)

1,1 milliard d’euros

Financement des chèques‑vacances par le CSE ou par l’employeur (plus de 50 salariés)

Non

Non

Source : annexe 9 du PLFSS pour 2026.

(1) Le plafond d’exonération de cotisations sociales est fixé, à compter du 1er janvier 2025, à 7,26 euros par titre lorsque celui‑ci est compris entre 12,10 euros et 14,52 euros.

(2) Le montant maximal de l’aide financière donnant lieu à une exonération est fixé à 2 540 euros à compter du 1er janvier 2025.

(3) Le montant maximal de l’aide financière donnant lieu à une exonération est fixé à 30 % du SMIC brut mensuel.

● La réforme proposée générerait un surcroît de recettes estimé à 950 millions d’euros en 2026 sur le champ des ROBSS. L’évaluation financière de cette mesure repose sur l’application du forfait social au taux de 8 % sur l’assiette exemptée des dispositifs visés (11,8 milliards d’euros en 2026).

L’annexe 9 du PLFSS pour 2026 précise que l’assujettissement au forfait social des aides directes versées par l’employeur pourrait avoir des « effets comportementaux » sur les entreprises. Ceux‑ci seraient toutefois limités en raison de l’avantage différentiel significatif qui perdurerait entre les taux de prélèvement applicables, d’une part, aux compléments de salaire et, d’autre part, aux salaires de base.

b.   La réduction des avantages sociaux associés aux indemnités de rupture conventionnelle et de mise à la retraite

● Les indemnités versées dans certains cas de rupture de contrat de travail bénéficient d’un régime socio‑fiscal favorable pour la part constituant une réparation de préjudice et non un élément de rémunération.

À titre d’exemple, les indemnités légales ou conventionnelles de licenciement versées lors de la rupture du contrat de travail, hors plan de sauvegarde de l’emploi (PSE), sont soumises aux prélèvements sociaux suivants.

D’une part, la part des indemnités de licenciement correspondant aux sommes exonérées d’impôt sur le revenu en application de l’article 80 duodecies du code général des impôts (CGI) est également exonérée de cotisations sociales, dans la limite de deux fois la valeur du plafond annuel de la sécurité sociale (PASS), soit 94 200 euros au 1er janvier 2025 ([94]). Les indemnités de licenciement sont assujetties aux cotisations sociales dès le premier euro lorsque leur montant dépasse dix fois le PASS, soit 471 000 euros au 1er janvier 2025.

D’autre part, les indemnités de licenciement sont exonérées de CSG et de CRDS, dans la limite correspondant au plus faible des deux montants suivants : le montant de l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement ou le montant exclu de l’assiette des cotisations sociales, également dans la limite de deux fois le PASS (94 200 euros) ([95]). Les indemnités de licenciement qui excéderaient dix fois le PASS (471 000 euros) sont également assujetties à la CSG et à la CRDS dès le premier euro.

À l’inverse, les indemnités perçues à l’occasion de la rupture d’un contrat de travail, telles que les indemnités compensatrices de préavis ([96]) et de congés payés ([97]), font partie intégrante de la rémunération du salarié et sont soumises à l’impôt sur le revenu, aux cotisations sociales, à la CSG et à la CRDS dès le premier euro. Or, comme le souligne un rapport particulier du Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), « la ligne de partage entre rémunération et réparation peut ne pas être aussi claire pour certaines sous-catégories d’indemnités faisant l’objet d’exonération » ([98]).

● Tel est le cas des indemnités versées lors d’une rupture conventionnelle. Ce mode de rupture particulier du contrat de travail d’un salarié bénéficiant d’un contrat à durée indéterminée (CDI), prévu aux articles L. 1237‑11 à L. 1237‑16 du code du travail, a été créé par la loi du 25 juin 2008 portant modernisation du marché du travail ([99]). Il est exclusif du licenciement ou de la démission et ne peut être imposé par l’une ou l’autre des parties. La rupture conventionnelle résulte d’une convention signée par les parties au contrat, qui définit notamment le montant de l’indemnité versée au salarié, lequel ne peut être inférieur à celui de l’indemnité de licenciement.

Le régime socio‑fiscal de l’indemnité de rupture conventionnelle diffère selon qu’elle est versée à un salarié pouvant bénéficier d’une pension de retraite d’un régime légalement obligatoire ou non :

– l’indemnité versée à un salarié pouvant bénéficier d’une pension de retraite d’un régime légalement obligatoire est assujettie à l’impôt sur le revenu dès le premier euro, mais elle fait l’objet d’une exonération sous plafond si le salarié n’est pas en droit d’en bénéficier ([100]) ;

– l’indemnité versée à un salarié, quel que soit son statut en matière de droits à la retraite ([101]), est exonérée de cotisations sociales à hauteur du montant le plus élevé des seuils suivants, dans la limite de deux fois le PASS (94 200 euros) ([102]) : soit le double du montant de la rémunération annuelle brute perçue au cours de l’année civile précédant la rupture, soit la moitié de l’indemnité de rupture versée ou le montant de l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement. Les indemnités de licenciement sont assujetties aux cotisations sociales dès le premier euro lorsque leur montant dépasse dix fois le PASS, soit 471 000 euros au 1er janvier 2025 ;

– l’indemnité de rupture conventionnelle est exonérée de CSG et de CRDS dans les mêmes conditions que l’indemnité de licenciement hors PSE, exposées supra ;

– enfin, la part de l’indemnité de rupture conventionnelle exonérée de cotisations sociales est soumise à une contribution patronale spécifique de 30 %, dont le produit est affecté à la CNAV ([103]).

Le forfait social n’est pas dû sur les indemnités de rupture conventionnelle.

L’article 4 de la LFRSS pour 2023 a harmonisé au taux de 30 % les contributions appliquées aux indemnités de rupture conventionnelle et de mise à la retraite du salarié à l’initiative de l’employeur, prévues à l’article L. 1237‑5 du code du travail ([104]). Les premières étaient auparavant assujetties au forfait social au taux de 20 %, tandis que les secondes étaient soumises à une contribution forfaitaire de 50 %. Cette mesure visait à favoriser le maintien en emploi des seniors en limitant le recours aux ruptures conventionnelles, afin qu’elles ne soient pas plus avantageuses que la mise à la retraite du salarié.

● Les ruptures conventionnelles, qui permettent à l’employeur et au salarié de négocier une rupture à l’amiable, connaissent une dynamique importante, en se substituant progressivement aux démissions de CDI ([105]). Leur nombre a ainsi progressé de 65,8 % en dix ans d’après la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES), passant de 310 477 en 2014 à 514 768 en 2024 ([106]).

Cette trajectoire représente un coût non‑négligeable pour les finances publiques. D’une part, les salariés ayant recours à une rupture conventionnelle « sont assimilés à des salariés involontairement privés d’emploi » aux termes du règlement d’assurance chômage ([107]) et bénéficient de l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE) versée par l’UNÉDIC ([108]). À l’inverse, les démissions ne sont, en règle générale, pas analysées comme des situations de privation involontaire d’emploi ouvrant droit à l’ARE. D’autre part, le régime social favorable des indemnités de rupture conventionnelle induit un manque‑à‑gagner pour la sécurité sociale qui n’est pas compensé par l’État, comme pour l’ensemble des exemptions d’assiette. Ces dispositifs représentent une assiette exemptée de 2,2 milliards d’euros en 2024, pour une perte nette de cotisations sociales estimée à 0,1 milliard d’euros.

● Compte tenu de ces éléments, l’article 8 du projet de loi faisant l’objet du présent rapport prévoit de relever de 30 % à 40 % le taux du prélèvement applicable aux indemnités de rupture conventionnelle et de mise à la retraite. Cette hausse de dix points générerait 260 millions d’euros de recettes supplémentaires.

L’annexe 9 du PLFSS pour 2026 précise que ce taux de 40 % « est comparable au taux cumulé de l’ensemble des cotisations patronales, hors prise en compte des allègements généraux, mais demeure inférieur à la somme des taux de l’ensemble des prélèvements sociaux dus sur les éléments de rémunération intégrées dans l’assiette desdites cotisations ». Le rapporteur pour avis relève que cette mesure constitue une voie intermédiaire par rapport à la recommandation du rapport particulier précité, lequel recommandait plus largement de supprimer l’exemption de prélèvements sociaux pour les indemnités issues d’une rupture conventionnelle ([109]).

Dans un souci de lisibilité de la norme, il est proposé d’abroger l’article L. 137‑12 du code de la sécurité sociale relatif à la contribution patronale versée à l’occasion de la rupture conventionnelle et de la mise à la retraite. Les articles L. 137‑15 et L. 137‑16 du même code seraient modifiés en conséquence pour assujettir ces indemnités au forfait social au taux de 40 %.

● Le levier fiscal peut présenter un intérêt pour mieux réguler les stratégies d’optimisation des modes de rupture du contrat de travail et favoriser le maintien en emploi de certains publics, notamment les salariés seniors. En revanche, l’assujettissement au forfait social de compléments salariés plébiscités par les employeurs et les salariés est susceptible de renchérir le coût du travail et d’affecter le pouvoir d’achat des ménages. Dans ces conditions, le rapporteur pour avis a proposé à la commission des finances d’adopter un amendement tendant à maintenir l’exemption d’assiette dont bénéficient les aides directes, tout en prévoyant la possibilité de moduler la contribution de 40 % pesant sur les indemnités de rupture conventionnelle et de mise à la retraite. Ce mécanisme de modulation, dont les conditions seraient déterminées par voie réglementaire, contribuerait à lutter plus efficacement contre les ruptures de contrat abusives de salariés dont la durée d’ancienneté est importante, lesquels sont bien intégrés dans l’entreprise.

3.   La rationalisation d’exonérations de cotisations sociales particulièrement coûteuses

L’article 9 du projet de loi faisant l’objet du présent rapport prévoit de rationaliser le paysage des exonérations dites ciblées et compensées. Ces dispositifs dérogatoires, ciblés sur des publics, des territoires ou des secteurs d’activité spécifiques, répondent à des objectifs de politiques publiques sectoriels. Leur coût pour la sécurité sociale fait l’objet d’une compensation par l’État, imputée sur les crédits budgétaires des différents ministères responsables des politiques publiques concernées.

Le coût des dispositifs d’exonérations ciblées faisant l’objet d’une compensation pèse sur les finances publiques. Il s’établirait à 6,8 milliards d’euros en 2025, soit un niveau stable par rapport à l’année précédente.

Il est proposé de réformer quatre dispositifs d’exonérations ciblées, identifiés par le Gouvernement comme « particulièrement problématiques pour la construction budgétaire 2026 » en raison de leur efficacité limitée et de leur coût significatif :

– l’aide à la création et à la reprise d’entreprise (ACRE) (a) ;

– la réduction de cotisations patronales pour les entreprises implantées en outre‑mer, dite LODEOM (b) ;

– l’exonération de cotisations salariales pour les apprentis (c) ;

– l’exonération de cotisations patronales applicable aux jeunes entreprises innovantes (JEI) (d).

a.   Le recentrage de l’aide à la création et à la reprise d’entreprise (ACRE) sur les publics vulnérables

● L’aide à la création et à la reprise d’entreprise (ACRE), qui trouve son origine dans la loi du 3 janvier 1979 portant diverses mesures en faveur des salariés privés d’emploi qui créent une entreprise ([110]), est un dispositif de soutien à la création et à la reprise d’entreprise.

L’ACRE prend la forme d’une exonération de cotisations d’assurance maladie et maternité, d’assurance invalidité et décès, d’allocations familiales et d’assurance vieillesse, à l’exception de la retraite complémentaire, ouverte aux personnes qui créent ou reprennent une activité professionnelle.

Le champ d’application du dispositif, défini aux 1° et 2° de l’article L. 131‑6‑4 du code de la sécurité sociale, a connu des évolutions récentes. Initialement réservée aux demandeurs d’emplois, l’ACRE a été étendue à l’ensemble des créateurs ou repreneurs d’entreprises au titre de leur début d’activité, quel que soit leur secteur d’activité ou leur statut d’emploi ([111]). Le dispositif a toutefois été recentré, s’agissant des travailleurs indépendants bénéficiant du régime des microentreprises, aux publics les plus vulnérables, tels que les demandeurs d’emploi, les bénéficiaires du RSA ou les jeunes de 18 à 25 ans révolus ([112]).

● Les caractéristiques de l’ACRE varient selon le statut juridique des personnes bénéficiaires.

Les travailleurs indépendants ne relevant pas du régime des microentreprises bénéficient d’une exonération totale des cotisations précitées pour la part de leur revenu inférieure ou égale à 75 % du plafond annuel de la sécurité sociale (PASS), soit 35 325 euros en 2025. Audelà de ce seuil de revenu, le montant de l’exonération décroît linéairement et devient nul lorsque l’assiette est égale au PASS, soit 47 100 euros en 2025. L’exonération est accordée pour une durée d’un an.

Les microentrepreneurs ont vu leur niveau d’exonération abaissé à 50 % du taux de cotisation unique fixé pour chaque catégorie d’activité ([113]). Le bénéfice de l’ACRE court jusqu’à la fin du troisième trimestre civil suivant celui du début de l’activité déclarée.

● Selon l’annexe 2 au PLACSS de l’année 2024, le coût des exonérations de cotisations sociales associées à l’ACRE a progressé de 52,1 % entre 2017 (229 millions d’euros) et 2024 (424,3 millions d’euros), atteignant un pic de 718 millions d’euros en 2020. Les effectifs exonérés s’élevaient à 317 157 personnes au 31 décembre 2024, dont 202 281 micro‑entrepreneurs. La compensation par l’État du coût de l’exonération représente 407,9 millions d’euros en 2024, imputés sur les crédits du programme 103 Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi de la mission Travail, emploi et administration des ministères sociaux.

En dépit de dépenses dynamiques, le dispositif n’a, selon le Gouvernement, pas démontré son effet positif sur l’emploi et les créations d’entreprises. Une revue des dépenses datée de 2015, qui conclut à l’impossibilité d’évaluer l’efficacité de l’ACRE et son effet d’aubaine potentiel pour les bénéficiaires, est citée à l’appui de cette analyse ([114]). Il est regrettable que des évaluations plus récentes n’aient pas pu être fournies par le Gouvernement, d’autant que les caractéristiques du dispositif ont été réformées à de nombreuses reprises au cours des dernières années.

● Compte tenu de ces éléments, le A du I de l’article 9 du projet de loi de financement prévoit de recentrer l’ACRE à deux égards :

– diminution du taux d’exonération maximal pour les travailleurs indépendants ne relevant pas du régime des microentreprises, lequel serait limité à 25 % des cotisations d’assurance maladie et maternité, d’assurance invalidité et décès, d’allocations familiales et d’assurance vieillesse de base pour la part de leur revenu inférieure ou égale à 75 % du PASS ;

– réduction du champ d’application du dispositif, en réduisant le périmètre des personnes éligibles à celui en vigueur pour les microentrepreneurs, lequel exclut notamment l’essentiel des personnes en emploi.

La réforme de l’ACRE s’appliquerait uniquement aux nouveaux entrants dans le dispositif, c’est‑à‑dire aux personnes qui créent ou reprennent une entreprise et satisfont aux conditions d’éligibilité à compter du 1er janvier 2026, et générait des économies à hauteur de 92 millions d’euros en 2026. Un alignement du taux d’exonération réservé aux micro‑entrepreneurs sur la base de 25 % du taux de cotisation unique, auquel le Gouvernement envisage de procéder par voie réglementaire, produirait un gain supplémentaire de 60 millions d’euros.

b.   La refonte du dispositif dit LODEOM

● Les dispositifs d’exonération de cotisations spécifiques aux outremer, introduits par la loi du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer, dite LODEOM, et la loi du 21 juillet 2003 de programme pour l’outre‑mer, dite LOPOM, visent à soutenir l’économie des territoires ultramarins.

  1.   Une stratification de dispositifs dérogatoires complexes, destinés à soutenir le développement des territoires ultramarins

Les territoires ultramarins sont confrontés à d’importants surcoûts structurels, liés notamment à la faiblesse de la productivité, à leur insularité et à leur éloignement géographique, ainsi qu’à leur intégration limitée dans les échanges régionaux et internationaux. À titre d’exemple, l’écart entre la productivité apparente des départements et régions d’outre-mer (DROM), mesurée par le PIB par emploi, et celle de la France hexagonale tend à s’accroître entre 2000 et 2022, excepté pour la Martinique (voir tableau infra).

Écarts de Productivité apparente du travail (PIB par emploi)

(en milliers d’euros)

 

2000

Écart par rapport à la France hexagonale

2022

Écart par rapport à la France hexagonale

Guadeloupe

44,5

 23 %

66,3

 25 %

Martinique

43,1

 26 %

65,1

 26 %

Guyane

45,9

 21 %

58,0

 34 %

La Réunion

46,8

 19 %

63,9

 27 %

France hexagonale hors Île‑de‑France

52,8

s.o.

79,8

s.o.

France hexagonale

58,0

s.o.

87,9

s.o.

Source : mission IGF‑IGAS (novembre 2024).

Dans leur évaluation récente des dispositifs LODEOM ([115]), publiée en mai 2025, l’Inspection générale des finances (IGF) et l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) rappellent les principaux facteurs à l’origine de ces disparités de richesse et de développement. Sont notamment cités la sous‑capitalisation des entreprises ultramarines, la faiblesse du volume d’heures travaillées et le manque de qualification de la main d’œuvre, en particulier des jeunes travailleurs.

● Les dispositifs d’exonération applicables aux outremer se déclinent en trois régimes distincts, respectivement applicables dans les DROM (Martinique, Guadeloupe, Guyane, La Réunion), dans les collectivités d’outre-mer (COM) situées dans les Antilles (Saint‑Martin, Saint-Barthélemy) et à Saint‑Pierre‑et‑Miquelon, qui relève du dispositif spécifique dit LOPOM.

La réforme prévue au B du I de l’article 9 du projet de loi de financement ne portant que sur les régimes LODEOM applicables aux DROM et aux COM des Antilles, le dispositif LOPOM n’est pas analysé dans le présent rapport pour avis.

Les régimes LODEOM applicables aux DROM et aux COM des Antilles comportent chacun trois barèmes d’exonération distincts, en fonction de la taille de l’entreprise, déterminée par le nombre de salariés et le chiffre d’affaires annuel, et de son secteur d’activité. Ils reposent sur une exonération totale de cotisations patronales au niveau du SMIC, complétée par une exonération dégressive jusqu’à un point de sortie fixé en multiples du SMIC (voir graphique infra).

Il convient de rappeler que les entreprises ultramarines sont éligibles, dans les mêmes conditions qu’en France hexagonale, aux allègements généraux de droit commun, lesquels ont été modifiés en profondeur par l’article 18 de la LFSS pour 2025. Si la réduction générale dégressive, dite allègement Fillon, n’est pas cumulable avec les régimes dits LODEOM, tel n’est pas le cas des réductions forfaitaires de cotisations maladie et famille, connues sous le nom de bandeaux « maladie » et « famille ».

Barèmes et seuils d’exonération en vigueur dans les rÉgimes LodEom
(DROM et COM)

Source : mission IGF‑IGAS (novembre 2024).

Note de lecture : pour un salarié rémunéré 1,3 fois le SMIC, le régime « LODEOM compétitivité » prévoit une exonération de cotisations patronales de 40,14 % contre 20,2 % pour la réduction générale dégressive et les bandeaux dits maladie et famille. Le présent graphique compare les caractéristiques des régimes dit LODEOM et des allègements généraux avant la réforme de ces derniers, qui s’effectue en deux temps à compter du 1er janvier 2025.

 Les dispositifs dits LODEOM applicables aux DROM sont régis par l’article L. 75232 du code de la sécurité sociale. Ils permettent d’atteindre un niveau nul de cotisations sociales patronales au niveau du SMIC. Ce niveau d’exonération est ensuite modulé selon trois barèmes de réduction de cotisations, qui ont fait l’objet d’une refonte majeure pour la dernière fois à l’occasion de la suppression du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) le 1er janvier 2019.

En premier lieu, le régime de compétitivité prévoit une exonération totale de cotisations patronales jusqu’à 1,3 fois SMIC, suivie d’une réduction dégressive dont le point de sortie est fixé à 2,2 fois SMIC. Orienté vers les très petites entreprises (TPE), il s’applique aux entreprises de moins de onze salariés, aux employeurs de plus de onze salariés relevant des secteurs du bâtiment et des travaux publics, ainsi qu’à certains transporteurs aériens, maritimes et fluviaux. Sont également éligibles à ce régime les employeurs ayant une activité principale relevant de l’un des secteurs couverts par les régimes de compétitivité renforcée ou d’innovation et de croissance (voir infra), mais qui ne respectent pas les conditions d’effectifs (moins de 250 salariés) ou de chiffre d’affaires annuel (moins de 50 millions d’euros).

En second lieu, le régime de compétitivité renforcée ouvre droit à une exonération totale de cotisations patronales jusqu’à 2 fois le SMIC, suivie d’une réduction dégressive dont le point de sortie est fixé à 2,7 fois SMIC. Il concerne les employeurs occupant moins de 250 salariés et dont le chiffre d’affaires annuel est inférieur à 50 millions d’euros, sous réserve qu’ils exercent leur activité dans un champ sectoriel jugé « assez vaste » par la mission précitée de l’IGF et de l’IGAS ([116]). Sont également éligibles à ce régime certains employeurs situés en Guyane, lesquels bénéficient d’un périmètre sensiblement élargi compte tenu des caractéristiques économiques, géographiques et démographiques de la collectivité ([117]). Le barème du régime de compétitivité renforcée est le plus avantageux pour les rémunérations faibles et moyennes, en raison d’une exonération totale de cotisations sociales applicable jusqu’à 2 fois le SMIC.

En troisième lieu, le régime « innovation et croissance » ouvre droit à une exonération totale de cotisations patronales jusqu’à 1,7 fois le SMIC. Celle‑ci est maintenue jusqu’à 2,5 fois le SMIC, dans la limite de la part correspondant à une rémunération égale à 1,7 fois le SMIC (plateau d’exonération). Au‑delà de ce seuil, s’applique une réduction dégressive dont le point de sortie est fixé à 3,5 fois SMIC, soit le barème le plus favorable pour les rémunérations élevées. Il s’applique aux employeurs occupant moins de 250 salariés et ayant réalisé un chiffre d’affaires annuel inférieur à 50 millions d’euros, au titre de la rémunération des salariés concourant essentiellement à la réalisation de projets innovants dans le domaine des technologies de l’information et de la communication. Sont ainsi exclus du périmètre de l’exonération les salariés exerçant des fonctions dites support ou commerciales.

● L’architecture des dispositifs dits LODEOM applicables aux COM des Antilles, c’est‑à‑dire à Saint‑Martin et à Saint-Barthélemy, est identique à celles des régimes précités. L’article L. 752‑3‑3 du code de la sécurité sociale distingue trois barèmes spécifiques :

– un barème pour les entreprises de moins de onze salariés, dont les modalités d’application sont les suivantes : exonération totale de cotisations patronales jusqu’à 1,4 fois le SMIC ; exonération totale de cotisations patronales maintenue jusqu’à 2 fois le SMIC, dans la limite de la part correspondant à une rémunération égale à 1,4 fois le SMIC ; réduction dégressive au‑delà de 2 fois le SMIC, avec un point de sortie établi à 3 fois le SMIC ;

 un barème d’exonération sectorielle, qui concerne l’essentiel des secteurs couverts par le régime de compétitivité renforcé en vigueur dans les DROM, sous les mêmes conditions de taille d’entreprise. Les employeurs éligibles bénéficient d’une exonération totale de cotisations patronales jusqu’à 1,4 fois le SMIC, laquelle décroit audelà de ce seuil jusqu’à devenir nulle à partir de 3 fois le SMIC ;

– enfin, un barème d’exonération renforcée, qui bénéficie aux entreprises employant moins 250 salariés, ayant réalisé un chiffre d’affaires annuel inférieur à 50 millions d’euros et intervenant dans certains secteurs prioritaires, dont les technologies de l’information et de la communication, le tourisme ou les énergies renouvelables. Les employeurs éligibles bénéficient d’une exonération totale de cotisations patronales jusqu’à 1,7 fois le SMIC, qui est maintenue à ce niveau pour la part des rémunérations ne dépensant pas 2,5 fois le SMIC. Le point de sortie est fixé à 3,5 fois le SMIC.

Synthèse des seuils et barÈmes applicables aux dispositifs LODEOM

LODEOM DROM

Guadeloupe, Guyane, Martinique et la Réunion

LODEOM COM

Saint-Barthélemy et Saint-Martin

Barème compétitivité

Taux d’exonération maximal jusqu’à

1,3 SMIC

Barème moins de

11 salariés

Taux d’exonération maximal jusqu’à

1,4 SMIC

Exonération dégressive à partir de

1,3 SMIC

Exonération dégressive à partir de

2 SMIC

Exonération nulle à partir de

2,2 SMIC

Exonération nulle à partir de

3 SMIC

Barème compétitivité renforcée

Taux d’exonération maximal jusqu’à

2 SMIC

Barème

sectoriel

Taux d’exonération maximal jusqu’à

1,4 SMIC

Exonération dégressive à partir de

2 SMIC

Exonération dégressive à partir de

1,4 SMIC

Exonération nulle à partir de

2,7 SMIC

Exonération nulle à partir de

3 SMIC

Barème innovation et croissance

Taux d’exonération maximal jusqu’à

1,7 SMIC

Barème renforcé

Taux d’exonération maximal jusqu’à

1,7 SMIC

Exonération dégressive à partir de

2,5 SMIC

Exonération dégressive à partir de

2,5 SMIC

Exonération nulle à partir de

3,5 SMIC

Exonération nulle à partir de

4,5 SMIC

Source : mission IGF‑IGAS (novembre 2024).

  1.   Une proposition de réforme paramétrique des exonérations « LODEOM », source d’inquiétude dans les territoires ultramarins

● La refonte des dispositifs dits LODEOM proposée par le Gouvernement vise à simplifier l’architecture des exonérations de cotisations patronales spécifiques aux outre‑mer et à en modérer le coût pour les finances publiques.

La complexité des barèmes et des conditions d’éligibilité est une source de difficulté aussi bien pour les entreprises locales déjà implantées, que pour les investisseurs potentiels et les administrations chargées du contrôle. Interrogée par le rapporteur pour avis, l’ACOSS a relevé dans ses réponses écrites que « les entreprises ont beaucoup de mal à appliquer correctement les exonérations, en leur faveur comme défaveur, avec des interrogations sur l’éligibilité de l’entreprise en lien avec son secteur, le barème à retenir [et] les passages de seuils ».

Les récents travaux du rapporteur spécial des crédits de la mission Outremer, M. Christian Baptiste, aboutissent à la même conclusion ([118]). Ce dernier rappelle que « la majorité des bénéficiaires des régimes LODEOM sont des petites entreprises ne disposant pas des ressources humaines pour appréhender correctement leurs droits ». La répartition des exonérations dites LODEOM dans les DROM est cohérente avec le tissu économique de ces territoires, composé à plus de 90 % de TPE : les entreprises de moins de 11 salariés représentent 88 % des bénéficiaires dans les DROM, percevant 52 % du total des exonérations.

Par ailleurs, le coût de l’ensemble des exonérations dites LODEOM a augmenté de près de 34 % entre 2019 et 2023. Sur cette période, il progresse de 1,1 milliard d’euros à 1,5 milliard d’euros, dont 1,1 milliard d’euros sur le champ des régimes obligatoires de base. Ce dynamisme est dû principalement à l’augmentation de la masse salariale dans les DROM, en particulier des bas salaires. Les régimes dits LODEOM sont en pratique plus intéressants pour les entreprises ultramarines éligibles que les allègements généraux. L’avantage différentiel théorique de ces dispositifs dérogatoires par rapport aux allègements généraux de droit commun ([119]) est évalué à 694 millions d’euros en 2023, soit 45,5 % du coût total des exonérations dites LODEOM la même année ([120]).

Les moindres recettes associées à ces dispositifs dérogatoires sont compensées aux organismes de sécurité sociale – dont le régime général, l’AGIRC‑ARCCO et l’UNÉDIC – par le biais du programme 138 Emploi outremer de la mission Outremer, pour des montants de 1,8 milliard d’euros en 2023 et de 1,6 milliard d’euros en 2024.

La progression du coût des exonérations dites LODEOM depuis 2019 intervient alors que la refonte du barème des régimes applicables aux DROM n’a pas eu d’effet significatif sur l’emploi, la rémunération des salariés et la rentabilité des entreprises d’après la mission précitée de l’IGF et de l’IGAS. Ces analyses sont assorties de réserves méthodologiques, la réforme du CICE conduite en 2019 ayant été réalisée à budget légèrement croissant. Il est ainsi précisé « qu’une évolution des barèmes réduisant le montant des exonérations [ce qui est l’objet de la mesure prévue dans le PLFSS pour 2026] engendrerait des effets d’équilibre général impactant les économies ultramarines et qui n’ont pu être ici modélisés ».

● Compte tenu de ces éléments, le B du I de l’article 9 prévoit une évolution paramétrique des dispositifs dits LODEOM, inspirée des conclusions de la mission précitée de l’IGF et de l’IGAS.

Le régime « innovation et croissance » applicable aux DROM, qui représente moins de 2 % du coût des exonérations (34 millions d’euros en 2023) et concerne un faible nombre de salariés, serait supprimé. Les conditions d’éligibilité sont jugées peu sécurisantes pour les entreprises et difficiles à apprécier pour les organismes de contrôle, notamment s’agissant de l’affectation des salariés à la conduite de projets innovants dans le domaine des technologies de l’information et de la communication.

Par ailleurs, les trois régimes applicables aux COM des Antilles seraient alignés sur ceux en vigueur dans les DROM. La coexistence de deux dispositifs distincts est une source de complexité et ne serait pas justifiée, d’après le Gouvernement, par une différence de situation objective entre, d’une part, Saint‑Barthélemy et Saint-Martin et, d’autre part, les DROM les plus proches aujourd’hui éligibles aux exonérations dites LODEOM.

Enfin, il est proposé de recentrer ces dispositifs sur les bas salaires, qui correspondent aux emplois les plus élastiques au coût du travail. Les points de sortie des régimes « compétitivité » et « compétitivité renforcée », qui seraient les seuls maintenus à l’issue de la réforme, seraient abaissés respectivement de 2,2 fois le SMIC à 1,6 fois le SMIC et de 2,7 fois le SMIC à 1,9 fois le SMIC. Les employeurs qui perdraient le bénéfice des exonérations dites LODEOM en raison de ces évolutions basculeraient vers la réduction générale dégressive unique (RGDU), dont le point de sortie est fixé à 3 fois le SMIC à compter du 1er janvier 2026.

Synthèse des évolutions paramétriques proposées des dispositifs « lodeom »

Avant réforme

LODEOM DROM

Guadeloupe, Guyane, Martinique et la Réunion

Après réforme

LODEOM COM

Guadeloupe, Guyane, Martinique, la Réunion, SaintBarthélemy et Saint-Martin

Barème compétitivité

Taux d’exonération maximal jusqu’à

1,3 SMIC

Barème compétitivité

Taux d’exonération maximal jusqu’à

1,2 SMIC

Exonération dégressive à partir de

1,3 SMIC

Exonération dégressive à partir de

1,2 SMIC

Exonération nulle à partir de

2,2 SMIC

Exonération nulle à partir de

1,6 SMIC

Barème compétitivité renforcée

Taux d’exonération maximal jusqu’à

2 SMIC

Barème compétitivité renforcée

Taux d’exonération maximal jusqu’à

1,5 SMIC

Exonération dégressive à partir de

2 SMIC

Exonération dégressive à partir de

1,5 SMIC

Exonération nulle à partir de

2,7 SMIC

Exonération nulle à partir de

1,9 SMIC

Barème innovation et croissance

Taux d’exonération maximal jusqu’à

1,7 SMIC

Barème innovation et croissance

Suppression proposée

Exonération dégressive à partir de

2,5 SMIC

Exonération nulle à partir de

3,5 SMIC

Source : annexe 9 du PLFSS pour 2025.

  1.   Une économie brute de 350 millions d’euros pour l’État, qui suscite de vives inquiétudes dans les territoires ultra‑marins

● L’incidence financière de la réforme proposée, présentée à l’annexe 9 du PLFSS, diffère entre l’État et la sécurité sociale :

– une économie brute de 350 millions d’euros, soit 22 % du coût actuel des exonérations « LODEOM », serait réalisée au bénéfice de l’État en raison de la baisse de la compensation apportée aux organismes de sécurité sociale, sans intégrer la diminution du rendement de l’impôt sur les sociétés provoquée par la réforme, laquelle pèserait sur les bénéfices des entreprises ;

– un coût net de 10 millions d’euros pour les régimes obligatoires de base, correspondant à la différence entre le surcoût lié au basculement de certains employeurs vers les allègements généraux de droit commun (– 100 millions d’euros) et la réduction du coût des exonérations correspondant aux bandeaux « maladie » et « famille » (+ 90 millions d’euros) ([121]).

● De fortes réserves ont été formulées par les acteurs économiques et les élus ultramarins quant à une refonte paramétrique des exonérations dites LODEOM. Le rapporteur spécial des crédits de la mission Outremer, M. Christian Baptiste, a ainsi alerté, dans son récent rapport d’information consacré à cette politique, contre « la recherche court-termiste d’économies budgétaires par rabot via le recentrage des exonérations sur les plus bas salaires », soulignant que la disparition de ces exonérations serait « une catastrophe, tout particulièrement pour les petites entreprises ».

D’après l’annexe 2 du PLACSS de l’année 2024, les effectifs exonérés au titre de cet exercice s’élevaient à 243 950, pour 61 2023 entreprises déclarantes. L’annexe 9 du PLFSS pour 2026 se borne à indiquer que la baisse de 350 millions d’euros du montant des exonérations « LODEOM » représenterait une hausse de 5 % à 8 % de la masse salariale « selon les territoires et les barèmes concernés », sans préciser le nombre ou le profil des entreprises qui perdraient le bénéfice de ces régimes avantageux.

Le rapporteur pour avis rejoint, en tout état de cause, le rapporteur spécial des crédits de la mission Outremer quant à la nécessité d’assurer le respect de l’obligation légale faite à l’employeur d’être à jour de ses obligations déclaratives et de paiement à l’égard des organismes de recouvrement. En effet, le bénéfice des exonérations dites LODEOM est subordonné « au fait, pour l’entreprise ou le chef d’entreprise, de ne pas avoir fait l’objet d’une condamnation pénale passée en force de chose jugée soit pour fraude fiscale, soit pour travail dissimulé, marchandage ou prêt illicite de maind’œuvre » aux termes du VII de l’article L. 752‑3‑2 du code de la sécurité sociale (DROM) et du VII de l’article L. 752‑3‑3 du même code (Saint‑Barthélemy et Saint-Martin). Il a été indiqué par l’URSSAF Caisse nationale au rapporteur spécial des crédits de la mission Outremer que « 18,5 % des établissements bénéficiaires de la LODEOM en juin 2024 – soit plus de 9 200 établissements – n’étaient pas à jour de leurs cotisations sociales et ne bénéficiaient pas d’un plan d’apurement ». La méconnaissance de ces obligations déclaratives et de paiement créé une concurrence déloyale au détriment des entreprises ultramarines respectueuses de la loi, à laquelle il convient de mettre fin.

c.   La suppression de l’exonération de cotisations salariales pour les apprentis

● Les apprentis sont aujourd’hui exonérés de la totalité des cotisations salariales d’origine légale et conventionnelle, c’est‑à‑dire les cotisations d’assurance vieillesse et les cotisations de retraite complémentaire, pour la part de leur rémunération inférieure ou égale à un plafond fixé par décret, lequel ne peut excéder 50 % du SMIC ([122]).

Le pouvoir réglementaire a fixé ce plafond d’exonération au niveau maximal autorisé par le législateur ([123]), en cohérence avec la mesure tendant à assujettir la rémunération des apprentis à la CSG et à la CRDS au‑delà de 0,5 fois le SMIC ([124]). Ce régime s’applique aux contrats d’apprentissage conclus à partir du 1er mars 2025.

Dans leur revue des dépenses publiques d’apprentissage et de formation professionnelle, l’Inspection générale des finances (IGF) et l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) relèvent que l’exonération de cotisations sociales dont bénéficient les apprentis n’est pas justifiée dès lors que ceuxci disposent des mêmes droits sociaux contributifs que les salariés, sans y contribuer à proportion de leurs rémunérations ([125]). À titre d’exemple, les trimestres passés en apprentissage sont pris en compte pour la constitution de droits à retraite ([126]).

Cet avantage est jugé « difficile à justifier au regard des principes régissant les prélèvements sociaux » d’après le Gouvernement, d’autant que son coût serait élevé dans un contexte d’essor de l’apprentissage ([127]). L’annexe 9 du PLFSS pour 2026 fait état d’une estimation du coût de cette exonération à hauteur de 1,6 milliard d’euros en 2025 sur le champ des ASSO. Il convient de signaler que l’annexe 2 du PLACSS de l’année 2024 avance un même coût de 1,6 milliard d’euros en 2024, dont 1,1 milliard d’euros pour les ROBSS. Or cette estimation porte sur un périmètre élargi intégrant à la fois les cotisations salariales acquittées par les apprentis et les cotisations patronales dues par les employeurs publics ayant recours à l’apprentissage, lesquelles ne sont pas concernées par la présente mesure. Les moindres recettes associées aux exonérations de cotisations sociales en faveur de l’apprentissage, tant salariales que patronales, font l’objet d’une compensation par le biais du programme 103 Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi de la mission Travail, emploi et administration des ministères sociaux, à hauteur de 1,6 milliard d’euros en 2024.

● Le II de l’article 9 du projet de loi prévoit l’abrogation de l’article L. 6243‑2 du code du travail, soit la suppression de l’exonération de cotisations salariales dont bénéficient les apprentis. Cette suppression serait applicable aux contrats d’apprentissage conclus à compter du 1er janvier 2026.

Cette mesure générerait des économies à hauteur de 320 millions d’euros en 2026 puis de 1,2 milliard d’euros en 2027, du fait d’une montée en charge progressive liée au flux de nouveaux entrants.

d.   Le renforcement des critères d’éligibilité du statut de JEI

Dans le cadre de la politique de soutien à l’innovation, les jeunes entreprises intensives en recherche et développement (R&D) bénéficient d’un cadre fiscal et social dérogatoire.

● Depuis le 1er janvier 2004, les petites et moyenne entreprises (PME) créées depuis moins de huit ans et dont les dépenses de recherche et développement représentent au moins 15 % des charges déductibles bénéficient du statut de jeune entreprise innovante (JEI), défini à l’article 44 sexies-0 A du code général des impôts (CGI). Ces dernières sont exonérées de cotisations d’assurance maladie, d’assurance vieillesse et d’allocations familiales pour les rémunérations des salariés et des mandataires sociaux participant aux projets de recherche et de développement. L’exonération de cotisations patronales est applicable sur la part de rémunération inférieure à 4,5 fois le SMIC, dans la limite d’un montant annuel total égal à 5 fois le PASS, soit 235 500 euros en 2025 ([128]). La limite d’éligibilité est portée à 11 ans pour les entreprises créées avant le 31 décembre 2023.

Selon l’annexe 2 du PLACSS pour l’année 2024, les effectifs bénéficiaires du dispositif « JEI » s’élèvent à 17 929 en 2024 pour un coût de 262,4 millions d’euros, compensé par l’État au régime général par l’attribution de crédits budgétaires portés par le programme 150 Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle de la mission interministérielle Recherche et enseignement supérieur (MIRES). Le coût de ces exonérations sociales a presque doublé depuis 2014, année durant laquelle elles s’établissaient à 139,8 millions d’euros.

Outre le dynamisme de la compensation assurée par l’État, il est indiqué que l’exonération au titre du statut de JEI « est largement plus favorable » que les allègements généraux en raison d’un point de sortie à 4,5 fois le SMIC. Pour un salarié rémunéré à hauteur 1,3 fois le SMIC en 2024, l’exonération « JEI » permet une diminution du coût du travail deux fois plus importante qu’en cas d’application des allègements généraux.

Le coût de l’exonération devrait toutefois refluer au cours des prochaines années, pour s’établir à 218 millions d’euros en 2026, 225 millions d’euros en 2027 et 230 millions d’euros en 2028. En effet, le V de l’article 22 de la LFSS pour 2025 a relevé de 15 % à 20 % de la part de leurs charges que ces entreprises doivent consacrer à la recherche et à l’innovation pour bénéficier du statut de JEI. La mesure initialement proposée par le Gouvernement dans le projet de loi consistait à supprimer l’exonération de cotisations patronales dont bénéficient les JEI et les jeunes entreprises de croissance (JEC) ([129]), pour un surcroît de recettes estimé à 300 millions d’euros par an.

● Le III de l’article 9 du projet de loi faisant l’objet du présent rapport poursuit la trajectoire engagée en 2025. Il modifie la première phrase du a du 3° de l’article 44 sexies-0 A du CGI pour relever de 20 % à 25 % la part des dépenses de recherche que les entreprises doivent réaliser pour bénéficier du statut de JEI. Le nouveau taux s’appliquerait aux cotisations et contributions dues pour les périodes d’activité courant à compter du 1er janvier 2026.

La réforme est présentée par le Gouvernement comme visant à recentrer le dispositif « JEI » sur les entreprises qui investissent le plus dans la recherche et l’innovation, pour une économie estimée à environ 25 millions d’euros en 2026.


   Seconde partie : les dÉpenses

rÉpartition des dÉpenses par branche

(en millions d’euros et en pourcentage)

 

2023

2024

2025

2026*

Évolution 2025-2026

Évolution 2022-2026

Maladie

243 967

253 015

262 298

274 341

4,6 %

13,3 %

AT-MP

15 408

16 257

17 465

18 103

3,7 %

25,2 %

Famille

55 734

57 848

59 345

60 326

1,7 %

17,4 %

Vieillesse

275 067

293 788

303 363

310 260

2,3 %

17,8 %

Autonomie

37 579

39 919

42 034

43 398

3,2 %

23,4 %

FSV

19 281

20 457

21 493

0

– 100 %

– 100 %

Consolidation des transferts entre régimes de base et le FSV

 36 216

– 38 190

– 39 890

– 19 066

– 52,2 %

 – 41,1 %

Dépenses consolidées des régimes de base et du FSV

610 821

643 094

666 108

687 361

3,2 %

16,1 %

Source : rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale d’octobre 2025.

Note : les dépenses des années accompagnées d’un astérisque sont prévisionnelles.

Les dépenses des régimes de base et du FSV ont connu une progression historiquement dynamique depuis la crise sanitaire. Après une croissance moyenne contenue de 1,7 % par an entre 2012 et 2019, elles ont fortement accéléré en 2020 (+ 5,3 %) et en 2021 (+ 5,7 %). La tendance est restée vigoureuse en 2022 (+ 4,4 %), avant de ralentir plus nettement en 2023 (+ 3,1 %), signe d’une normalisation progressive des dépenses. Ce ralentissement s’explique principalement du fait d’une circulation du virus devenue endémique et d’une forte baisse des dépenses induites par la crise liée à l’épidémie du covid-19.

Pour autant, les dépenses ont continué de croître à un rythme soutenu sous l’effet de deux facteurs structurels. D’une part, de nombreuses mesures prises durant la crise ont été pérennisées afin de consolider durablement le système de protection sociale. Les revalorisations salariales du « Ségur de la santé » ont renforcé l’attractivité des métiers du soin et du médico-social, entraînant une hausse pérenne des dépenses d’assurance maladie et d’autonomie. D’autre part, l’inflation particulièrement élevée en 2022 et 2023 a fortement rehaussé le coût des prestations, du fait de leur indexation sur les prix. Les dépenses ont ainsi fortement progressé en 2024 (+ 5,3 %) en raison des effets en année pleine de l’indexation des prestations monétaires.

En 2025, la hausse des dépenses se limiterait à 3,6 % du fait de la normalisation de l’inflation (+ 1,8 % en 2024 après + 4,8 % en 2023), conduisant à des revalorisations plus modérées des prestations légales.

Les mesures prévues dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026 s’inscrivent dans un contexte de normalisation progressive de l’inflation et de croissance modérée. Elles traduisent la volonté de préserver et de renforcer notre système de protection sociale, dans un contexte où la sécurité sociale est appelée à prendre sa part dans l’effort de redressement des finances publiques entrepris pour ramener le déficit de 5,4 % en 2025 à 4,7 % en 2026. En 2026, un niveau d’économies sans précédent est attendu, à hauteur de 9,1 milliards d’euros sur les dépenses des régimes de base, dans une logique de renforcement de l’efficience et de la pertinence des dépenses d’assurance maladie.

La programmation des dépenses de sécurité sociale dans la loi
de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027

La loi n° 2023-1195 du 18 décembre 2023 de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 prévoit en son article 18, de la même manière que la précédente loi de programmation, la trajectoire de l’objectif de dépenses des ROBSS pour les années 2023 à 2026. D’après cet article, les dépenses des ROBSS et du FSS devraient atteindre 610,9 milliards d’euros en 2023, 641,8 milliards d’euros en 2024, 665,2 milliards d’euros en 2025, 685,8 milliards d’euros en 2026 et 705,4 milliards d’euros en 2027. Cette augmentation en euros courants se traduit par une stabilisation des dépenses des ROBSS dans le PIB autour de 21,8 %.

I.   Les dÉpenses de la branche maladie

Les dépenses de santé sont appréhendées par le biais de deux indicateurs aux périmètres différents.

● La branche maladie des ROBSS couvre l’ensemble des dépenses de santé réalisées par les différentes caisses de sécurité sociale, en premier lieu la CNAM et son réseau de 102 caisses primaires d’assurance maladie (CPAM). Depuis 2017, la branche maladie du régime général des salariés gère également les dépenses de santé des fonctionnaires. D’autres régimes spéciaux disposent de leur propre caisse d’assurance maladie : c’est le cas par exemple de la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la société nationale des chemins de fer français (CPRP SNCF) pour les assurés du régime spécial de la SNCF ;

● L’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM), instauré par la loi organique du 22 juillet 1996 relative aux lois de financement de la sécurité sociale, est composé de six sous-objectifs. Il se distingue des dépenses de santé des ROBSS par son périmètre. Si l’ensemble des ROBSS sont intégrés dans le calcul de l’ONDAM, le périmètre de ce dernier est interbranches : il excède le périmètre strict de la branche maladie, pour inclure également des dépenses d’indemnités relevant de la branche AT-MP et, depuis 2021, l’ensemble du financement par la nouvelle branche autonomie des établissements médico-sociaux (objectif global de dépenses [OGD]).

A contrario, alors que la branche maladie intègre quatre risques (maladie, maternité, invalidité et décès), l’ONDAM n’inclut pas l’intégralité des dépenses de la branche maladie : il exclut par exemple les indemnités journalières de maternité et les prestations invalidité et décès. Sont également exclues de l’ONDAM les charges de gestion de la branche. Enfin, l’ONDAM tient compte des recettes atténuatives venant minorer la norme de dépenses, comme les remises sur les produits de santé ou les taxes sur les organismes complémentaires (OC) ([130]).

composition de l’ondam et des comptes des branches

Source : annexe V du PLFSS pour 2026.

Note : les dépenses incluses dans le champ de l’ONDAM sont identifiées par la partie grisée.

En 2024, portées par l’inflation, les dépenses ont continué leur évolution à un rythme très soutenu (A). Si les dépenses de santé demeurent dynamiques en 2025 (B), elles devraient connaître un ralentissement sous l’effet des mesures introduites dans le PLFSS pour 2026 (C).

A.   En 2024, les dÉpenses ont cru À un rythme particuliÈrement soutenu sous l’effet de l’inflation

En 2024, les dépenses de la branche maladie se sont élevées à 253 milliards d’euros, en augmentation de 3,7 % par rapport aux dépenses de 2023, pour un objectif fixé en LFSS pour 2024 à 251,9 milliards d’euros.

Cette hausse, plus marquée que celle observée l’année précédente (+ 0,6 %), intervient alors même que les dépenses directement liées à la crise sanitaire ont poursuivi leur repli, passant de 1,1 milliard d’euros en 2023 à seulement 400 millions d’euros en 2024. Ces dernières atteignent ainsi un niveau quasi résiduel, traduisant la fin du financement des dispositifs exceptionnels de dépistage et de vaccination.

L’ONDAM voté en LFSS initiale s’élevait à 254,9 milliards d’euros, soit un niveau supérieur de 27 % à celui de 2019. Les dépenses exceptionnelles engagées durant la crise sanitaire, les revalorisations salariales issues du Ségur de la santé et les compensations versées aux établissements de santé et médico-sociaux pour faire face à la forte inflation ont, en effet, profondément modifié l’ordre de grandeur de l’ONDAM par rapport au niveau qui était le sien en 2019, comme le relève la Cour des comptes dans son dernier rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale ([131]).

Bien que fixé à un niveau historiquement élevé, l’ONDAM a une nouvelle fois été dépassé : exécuté à 256,4 milliards d’euros, il excède de 1,5 milliard l’objectif voté, marquant la quatrième année consécutive de dépassement après une décennie de respect des cibles en exécution.

De 2021 à 2024, le cumul des dépassements de l’ONDAM en exécution par rapport à l’objectif initial fixé en LFSS s’est élevé à 9,3 milliards d’euros, soit l’équivalent de 30 % de la hausse de l’ONDAM sur la période. La reprise de ces dépassements, année après année, dans le socle de dépenses, sans remise en cause ni atténuation des mesures nouvelles, conduit à une augmentation mécanique d’autant plus importante des dépenses de l’ONDAM.

Évolution de l’ondam constaté hors covid (en milliard d’euros)

Source : Cour des comptes, Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, mai 2025, page 100.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 a ainsi procédé à une rectification à la hausse de 2 milliards d’euros de l’ONDAM fixé pour 2024, afin de tenir compte d’une évolution des dépenses plus soutenue que prévu sur certains postes, notamment les soins de ville et l’activité hospitalière.

L’écart observé reste toutefois plus limité que celui des deux dernières années (4,2 milliards d’euros en 2023 et 3,5 milliards d’euros en 2022 entre l’exécution et l’objectif initial) mais, comme le souligne la Cour des comptes, « il est plus préoccupant, tant les conditions étaient réunies pour une exécution conforme à l’objectif initial » ([132]).

Par rapport à l’objectif initial fixé en LFSS 2024, le dépassement de l’ONDAM hors dépenses liées à la crise sanitaire est de 1,5 milliard d’euros et s’explique par :

– des moindres recettes atténuatives liées aux remises conventionnelles et à la clause de sauvegarde (1 milliard d’euros) ;

– un dépassement des dépenses de prestations hors dépenses de crise, dont500 millions d’euros au titre des dépenses de soins de ville et 300 millions d’euros au titre des établissements de santé (1 milliard d’euros) ;

– un dépassement des dépenses résiduelles liées à la crise sanitaire (200 millions d’euros) ;

– une atténuation partielle du dépassement par le gel des mises en réserve (– 700 millions d’euros).

Contrairement aux années précédentes, l’exécution de l’ONDAM n’a pas été affectée par des aléas externes, tels qu’une accélération de l’inflation ou des revalorisations salariales décidées en cours d’année. Comme le relève la Cour des comptes, « l’exécution de l’ONDAM en 2024 a même bénéficié d’un effet favorable lié à une inflation constatée (1,8 %) plus faible que l’hypothèse initiale (2,5 %) » ([133]).

En revanche, l’effort de maîtrise des dépenses a été freiné par la mise en œuvre incomplète de certaines mesures d’économies. Sur un objectif de 4,4 milliards d’euros, la part non réalisée est estimée entre 700 millions et 1,1 milliard d’euros, soit jusqu’à 25 % de l’objectif prévu. Ce résultat tient notamment au report du doublement des franchises et participations à la charge des usagers et à des baisses de prix des produits de santé moindres qu’escompté.

B.   les dÉpenses sont restÉes dynamiques en 2025 mais le dÉpassement de l’ondam a pu Être contenu

En 2025, les dépenses de la branche maladie s’élèveraient à 262,3 milliards d’euros, soit une augmentation de 3,7 % par rapport aux dépenses de la branche en 2024, pour un objectif de dépenses fixé en LFSS pour 2025 à 261,8 milliards d’euros.

Les dépenses de l’ONDAM atteindraient 265,9 milliards d’euros, en hausse de 3,6 % par rapport à l’ONDAM 2024 rectifié par le PLFSS 2025, traduisant ainsi le respect de l’objectif fixé par la LFSS pour 2025.


Évolution des dÉpenses relevant du champ de l’ondam depuis 2004

Source : rapport du Gouvernement à la Commission des comptes de la sécurité sociale d’octobre 2025.

Note de lecture : en abscisses figure le niveau de dépenses constaté en milliards d’euros et en ordonnées le taux d’évolution associé ; la taille de la bulle représente l’ampleur du dépassement (en rouge) ou de la sous-exécution (en vert). Ainsi, en 2024, les dépenses totales dans le champ de l’ONDAM atteindraient 256,1 milliards d’euros, soit une évolution à périmètre constant de 3,3 %. Le dépassement en 2025 n’apparaît pas car il est nul cette année.

Un dépassement de 900 millions d’euros sur les soins de ville et les établissements de santé a été constaté par le comité d’alerte sur l’ONDAM en juin 2025 ([134]). À la suite de cette alerte, le Gouvernement a engagé plusieurs mesures d’économies, comprenant le gel de crédits mis en réserve (– 700 millions d’euros), des ajustements nets de mesures nouvelles en soins de ville (– 500 millions d’euros), ainsi qu’une diminution des dotations de l’assurance maladie au FMIS et au FIR (– 100 millions d’euros).

Les dépenses de soins de ville atteindraient 113,9 milliards d’euros, soit un montant en progression de 3,7 % par rapport à 2024 et qui fait suite à une croissance soutenue de + 4,8 % en moyenne par an entre 2019 et 2024.

La croissance des dépenses de soins de ville est ainsi plus marquée depuis la crise du covid-19 qu’au cours des années qui l’avaient précédée : elles avaient augmenté en moyenne annuelle de 2,9 % entre 2015 et 2019. Cette accélération est principalement portée par le dynamisme des produits de santé et des indemnités journalières, ces deux postes représentant à eux deux un peu plus de la moitié de la dépense totale des soins de ville en 2025.

Les dépenses au titre des indemnités journalières présenteraient un dépassement en volume de 500 millions d’euros par rapport à l’objectif de la LFSS pour 2025, en raison notamment de la forte hausse des indemnités journalières versées au titre des accidents du travail et maladies professionnelles, ainsi que de celles d’une durée supérieure à trois mois.

Les indemnités journalières

Les indemnités journalières compensent la perte de revenus en cas d’incapacité temporaire de travail, qu’elle soit liée à la maladie, aux AT-MP, à la maternité, au congé de paternité ou de naissance. Créé par la loi du 5 avril 1928 puis intégré à la sécurité sociale en 1945, le cadre de leur indemnisation (carence de trois jours, durée maximale de trois ans) reste globalement inchangé, malgré les évolutions du monde du travail et de l’assurance maladie.

Entre 2000 et 2024, la dépense totale liée aux indemnités journalières a presque triplé, passant de 6 à 21,4 milliards d’euros. Elle relève en majorité du régime général (14,3 milliards d’euros en 2023) et se répartit entre les différents risques couverts : environ 57 % pour le risque maladie, 24 % pour les AT-MP et 20 % pour la maternité et les congés de naissance.

La crise sanitaire a fortement contribué à cette dynamique haussière, notamment à travers les dispositifs spécifiques mis en place pour indemniser les arrêts liés au covid-19. Ces seuls dispositifs ont représenté 5,2 milliards d’euros de dépenses entre 2020 et 2023. Mais au-delà de cet effet conjoncturel, la tendance de fond s’est accentuée : entre 2019 et 2023, les dépenses d’indemnités journalières versées au titre de la maladie ont augmenté en moyenne de 6,7 % par an, contre une croissance plus modérée auparavant.

D’après la Cour des comptes ([135]), cette hausse s’explique principalement par une augmentation du nombre d’arrêts, notamment d’arrêts longs, qui sont les plus coûteux. Le nombre d’arrêts indemnisés a progressé de 4,1 % par an sur la période 2019-2023, et le nombre de jours indemnisés de 3,9 % par an. La durée moyenne des arrêts reste stable, autour de 48 jours, ce qui suggère une augmentation simultanée des arrêts de courte et de longue durée. Ce sont toutefois les arrêts longs qui pèsent le plus sur la dépense globale : ceux d’une durée de six mois ou plus représentent seulement 7 % du total des arrêts, mais concentrent à eux seuls 45 % des montants versés.

C.   uNE augmentation modÉRÉe de l’ONDAM en 2026 rÉsultant d’une maîtrise accrue DES dÉPENSES

La progression de l’ONDAM en 2026 resterait contenue (1) grâce à la modération des dépenses instaurée par les mesures du PLFSS pour 2026 (2).

1.   Un ONDAM pour 2026 fixé à 263,9 milliards d’euros

En 2026, le Gouvernement prévoit une progression des dépenses de la branche maladie limitée à 2 %.

Le PLFSS pour 2026 propose de fixer l’ONDAM à 270,4 milliards d’euros, ce qui correspond à une hausse de 1,6 % à champ constant, par rapport à l’ONDAM constaté et rectifié en PLFSS 2026.

La construction de l’ONDAM repose sur l’hypothèse d’une circulation devenue endémique du covid-19, d’un retour à une dynamique d’activité des différents acteurs de l’offre de soins comparable aux années antérieures à la crise sanitaire et de la poursuite du rattrapage de l’activité hospitalière initiée depuis 2023.

Cette évolution s’expliquerait par l’importance des mesures d’économies prévues, évaluées à 7,1 milliards d’euros en 2026, contre 4,3 milliards d’euros en 2025. Celles-ci viendraient compenser une évolution spontanée de l’ONDAM estimée à 3,4 % (après 2,8 % en 2025) ainsi que le coût des mesures nouvelles, chiffré à 2,3 milliards d’euros contre 5,2 milliards d’euros l’année précédente.

Les dépenses de soins de ville, qui constituaient la dépense la plus importante au sein de l’ONDAM en 2024, ralentiraient avec une progression contenue à 0,9 %. Ce résultat tient compte d’une évolution spontanée des dépenses estimées à 4,5 %, de mesures nouvelles entraînant une hausse de 1,1 %, compensées par des mesures de régulation entraînant une baisse de 4,6 %.

Parmi les dépenses du sous-objectif soins de ville, le montant des indemnités journalières progresserait de 6,5 % en 2026, hors maîtrise médicalisée, du fait de l’effet prix induit par la hausse du SMIC. Au regard du montant croissant des dépenses d’indemnités journalières, qui ont représenté un total de 21,4 milliards d’euros en 2024, soit une augmentation de 58 % par rapport à 2014 ([136]), le rapporteur pour avis rappelle la nécessité de contenir ces dépenses En complément des mesures envisagées par le PLFSS pour 2026, il suggère d’examiner l’opportunité d’une modification du délai de carence pour le faire évoluer en fonction du nombre de jours de congé pour maladie pris par l’agent au cours de l’année.

Le financement des établissements de santé progresserait de 2,6 milliards d’euros en 2026, soit une augmentation de 2,4 %.

Évolution de l’ondam et de ses sous-objectifs en 2026

(en milliards d’euros et en pourcentage)

Sous-objectif

Prévision 2026

Évolution par rapport à 2025

Dépenses de soins de ville

114,9

0,9 %

Dépenses relatives aux établissements de santé

111,8

2,4 %

Dépenses relatives aux établissements et services pour personnes âgées

18,2

2,8 %

Dépenses relatives aux établissements et services pour personnes handicapées

16

2,6 %

Dépenses relatives au Fonds d’intervention régional et soutien à l’investissement

6,2

– 6,1 %

Autres prises en charge

3,3

3,1 %

Total

270,4

1,6 %

Source : commission des finances à partir du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026.

La loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 envisageait une progression de l’ONDAM de 3 % en 2025 puis de 2,9 % en 2026 et 2027. Cette évolution assez modérée des dépenses relevant de l’ONDAM serait notamment permise « par la maîtrise de certaines typologies de dépenses de soins de ville et de produits de santé ainsi que par le développement de la politique de prévention » ainsi que par le renforcement de la prévention qui constitue « un levier d’efficience de la dépense et d’amélioration de l’état de santé de la population ».

Évolution prÉvisionnelle des dÉpenses de la branche maladie

(en milliards d’euros et en pourcentage)

2024

2025*

2026*

2027*

2028*

Évolution entre 2025 et 2026

Évolution entre 2026 et 2028

253

262,3

267,5

275,3

283,2

2 %

5,9 %

Source : commission des finances à partir de l’annexe A au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026.

Note : les dépenses des années accompagnées d’un astérisque sont prévisionnelles.

2.   Les mesures nouvelles visant à réaliser des économies en dépenses

Afin de garantir la soutenabilité de notre modèle social, l’année 2026 est marquée par un niveau inédit d’économies à réaliser afin d’améliorer l’efficience et la pertinence des dépenses de l’assurance maladie.

Le PLFSS pour 2026 prévoit un certain nombre de mesures nouvelles ayant un effet sur les dépenses des régimes obligatoires de base de l’assurance maladie. Ces mesures visent à responsabiliser et solidariser l’ensemble des acteurs (a), à améliorer l’accès aux soins et à favoriser l’efficience de l’activité des établissements de santé (b), à approfondir la politique de prévention (c) et à favoriser le soutien à l’innovation (d).

a.   Responsabiliser et solidariser l’ensemble des acteurs

● L’article 18 propose d’étendre le champ des participations forfaitaires et franchises et de rendre visible leur recouvrement

Les participations forfaitaires et les franchises, respectivement créées en 2004 et 2008, ont pour objectif de faire participer de manière forfaitaire les assurés à leurs dépenses de santé, sans que cette participation soit prise en charge par l’assurance maladie complémentaire.

Aujourd’hui, plusieurs secteurs de soins échappent à ces dispositifs sans justification claire. Ainsi, alors qu’une participation forfaitaire s’applique pour chaque acte ou consultation réalisée par un médecin, tel n’est pas le cas pour ceux effectués par les sage-femmes et les chirurgiens-dentistes. De même, les dispositifs médicaux sont hors champ des franchises, contrairement aux médicaments. Enfin, la part des dépenses liées au transport des patients ne cesse de croître (6,8 milliards d’euros en 2023, soit 2,7 % de la consommation de soins et de biens médicaux en France), alors que le plafond annuel des franchises est limité à 50 euros.

La mesure proposée consiste à :

– créer une participation forfaitaire pour les actes et consultations réalisés par les chirurgiens-dentistes et les sage-femmes ;

– instaurer une franchise pour les dispositifs médicaux ainsi que pour les produits et prestations figurant sur la liste correspondante ;

– appliquer un plafond spécifique à la franchise sur les transports de patients.

Les assurés actuellement exonérés – près de 30 % de la population – continueront de l’être. Il s’agit notamment des enfants et jeunes de moins de 18 ans, des bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire, ainsi que des femmes enceintes à partir du premier jour du sixième mois de grossesse et jusqu’au douzième jour après l’accouchement.

Par ailleurs, afin d’améliorer le taux de recouvrement des participations forfaitaires et des franchises, la mesure prévoit que celles-ci soient payées directement par l’assuré au professionnel de santé :

– pour les prestations et produits pris en charge par le tiers-payant, l’assuré continuera de présenter sa carte vitale, mais devra régler systématiquement les participations forfaitaires et franchises dues pour la prestation ou le produit fourni ;

– pour les prestations et produits pris en charge hors tiers-payant, c’est-à-dire réglés directement par l’assuré au professionnel de santé, la récupération des participations et franchises se fera comme actuellement, par déduction des remboursements effectués par l’assurance maladie obligatoire.

 L’article 24 prévoit une meilleure régulation des tarifs de certaines professions dans un souci d’équité

Plusieurs secteurs de l’offre de soins présentent aujourd’hui des niveaux de rentabilité particulièrement élevés, qui ne se justifient ni par leurs coûts réels ni par un niveau particulier de risque économique. Selon le rapport Charges et produits 2026 ([137]) de la Caisse nationale d’assurance maladie, les taux de rentabilité opérationnelle atteignaient en 2022 23,7 % en biologie médicale, 27,2 % en radiothérapie, 15,5 % en dialyse, 16,6 % en médecine nucléaire et 16 % en radiologie.

Ces phénomènes nourrissent des rentes économiques qui aggravent les écarts de rémunération entre spécialités. En outre, les négociations conventionnelles apparaissent insuffisamment réactives : le rythme d’actualisation des tarifs est souvent décalé par rapport aux évolutions technologiques et aux gains de productivité, et la fixation des prix s’écarte parfois du principe d’un lien effectif avec les coûts de production.

Pour répondre à ces dysfonctionnements, le Gouvernement envisage un nouveau dispositif : lorsqu’un secteur présente une rentabilité manifestement excessive, sur la base d’une analyse objective conduite selon des critères réglementaires, les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale pourront exiger l’ouverture d’une négociation tarifaire visant à réduire les tarifs. À défaut d’accord, le directeur général de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (UNCAM) sera habilité à modifier unilatéralement les tarifs des actes concernés. Ce mécanisme s’appuiera sur un observatoire chargé d’analyser les données économiques des professionnels ou des groupes concernés, qui devront communiquer les pièces comptables nécessaires sous peine de sanction.

Cette régulation s’accompagne de mesures ciblées dans trois secteurs particulièrement concernés. En imagerie médicale, il est proposé d’actualiser les modalités de fixation des forfaits techniques afin de mieux refléter les gains de productivité des équipements lourds. En radiothérapie, l’ambition d’une tarification commune entre ville et hôpital sera réalisée progressivement : une première étape de convergence interviendra dès 2026, avant une convergence totale des tarifs au 1er janvier 2027. Enfin, en dialyse, les partenaires conventionnels devront renégocier les tarifs afin d’en réduire le coût pour l’assurance maladie ; à défaut d’accord avant le 15 mars 2026, le directeur général de l’UNCAM procédera aux baisses nécessaires.

Ce dispositif permettra ainsi de mieux aligner les niveaux de rémunération sur les coûts effectifs, de réduire les rentes et de réallouer les marges de manœuvre vers les priorités du système de santé, tout en améliorant l’équité entre spécialités.

 L’article 25 a pour objet de mieux réguler les dépenses dans le secteur des soins dentaires

La prise en charge par l’assurance maladie des soins dentaires constitue un poste croissant des dépenses de soins de ville. En 2024, ces dépenses se sont élevées à 4,5 milliards d’euros, en progression de 3,7 %, hors effet de la hausse du ticket modérateur. Cette dynamique, portée à la fois par l’évolution de l’offre et par des pratiques en pleine mutation, appelle à renforcer les outils de pilotage disponibles afin de garantir une utilisation efficiente des ressources publiques.

Contrairement à d’autres secteurs déjà soumis à des mécanismes de régulation prix-volume ou à des protocoles sectoriels – tels que la biologie médicale, la radiologie ou les produits de santé – les honoraires des chirurgiens-dentistes ne font aujourd’hui l’objet ni de mises en réserve, ni de dispositifs de régulation infra-annuelle. Le cadre conventionnel existant ne permet donc pas d’ajuster suffisamment rapidement la dynamique tarifaire en fonction des besoins de santé publique et de l’évolution des pratiques.

Or la tarification à l’acte crée mécaniquement un effet incitatif sur le volume d’activité, dès lors que le tarif est supérieur au coût marginal de l’acte, en particulier lorsque ce coût est décroissant. Si la pertinence des soins repose sur la diffusion des recommandations de bonnes pratiques, notamment par la Haute Autorité de santé (HAS), elle doit également pouvoir se refléter dans la structure des incitations tarifaires. L’absence de régulation systémique laisse persister des comportements qui ne sont pas toujours cohérents avec une prise en charge économiquement et médicalement optimale.

Les travaux de l’Observatoire national de la démographie des professions de santé ([138]) ont ainsi mis en évidence une polarisation croissante de l’activité de certains chirurgiens-dentistes vers des actes à forte valeur ajoutée (implantologie, parodontologie, orthopédie dento-faciale), au détriment de champs essentiels comme l’odontologie pédiatrique. Ces choix d’activité, guidés par le niveau de rémunération des actes, conduisent à des pratiques contestables du point de vue de l’efficience macroéconomique et du parcours de soins des patients. Ils justifient donc un renforcement de la maîtrise médicalisée sur ce champ.

Afin de répondre à ces enjeux, le Gouvernement propose d’étendre aux soins dentaires le dispositif prévu à l’article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, qui fixe un cadre légal à la conclusion de protocoles sectoriels de maîtrise des dépenses d’assurance maladie. Ces accords, négociés au niveau national avec les représentants des professions concernées, permettront de fixer des objectifs de pilotage de la dépense et de prévoir des mesures correctrices automatiques en cas de dépassement. Ils instaurent ainsi un instrument de régulation comparable à ceux déjà en vigueur dans d’autres secteurs majeurs des soins de ville, tout en préservant le dialogue conventionnel.

 L’article 26 vise à renforcer les incitations au conventionnement des professionnels de santé et la maîtrise des dépassements d’honoraires

Le dispositif français de régulation des soins de ville repose sur un compromis entre la prise en charge collective des dépenses de santé par l’assurance maladie et le respect de tarifs encadrés garantissant l’accès de tous aux soins. Cet équilibre suppose une large adhésion des professionnels de santé au conventionnement, qui fixe les tarifs opposables et leur associe divers avantages.

Ainsi, les professionnels de santé conventionnés exerçant en secteur 1 bénéficient d’un soutien substantiel, avec une prise en charge de leurs cotisations sociales par l’assurance maladie représentant près de trois milliards d’euros en 2024. Les praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés disposent, en outre, d’un régime de prestations favorable lors d’événements familiaux tels qu’un congé maternité ou paternité ou une adoption. Parallèlement, lorsqu’ils réalisent des actes hors nomenclature ou facturés au-delà du tarif conventionnel, une contribution spécifique de 3,25 % est appliquée afin de préserver la cohérence de la régulation tarifaire. Enfin, les médecins du secteur 2 qui s’engagent à modérer leurs dépassements peuvent bénéficier des dispositifs OPTAM et OPTAM-ACO, instruments incitatifs essentiels pour contenir les écarts tarifaires.

Pourtant, ces mécanismes montrent aujourd’hui leurs limites. Les dépassements d’honoraires progressent à un rythme soutenu (+ 5,5 % par an depuis 2021) pour atteindre 4,5 milliards d’euros en 2024. Par ailleurs, la part des médecins s’installant en secteur 2 a augmenté de 10 points entre 2017 et 2024. Certaines spécialités se tournent de plus en plus vers des activités non conventionnées, notamment en dermatologie esthétique, tandis que, malgré un taux d’adhésion majoritaire à l’OPTAM, les dépassements repartent à la hausse depuis 2020. Ces tendances dégradent l’accès financier aux soins, alourdissent le reste à charge et entraînent une dépense croissante pour les organismes complémentaires, qui prennent en charge environ 40 % des dépassements. Le Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie (HCAAM) a récemment mis en évidence ces dérives, concluant au besoin d’un renforcement de la régulation.

Le Gouvernement envisage également, conformément aux recommandations du HCAAM formulées en octobre dernier, d’étendre la mesure aux revenus des professionnels non conventionnés, qui ne sont actuellement pas soumis à la contribution existante. Il indique par ailleurs sa volonté de préserver l’incitation que constitue l’OPTAM dans la dynamique de modération tarifaire. À terme, la réforme procurerait un gain net de 310 millions d’euros pour la branche maladie du régime général, soit 200 millions d’euros nets pour les finances publiques après prise en compte des retours de fiscalité sur le revenu – la cotisation étant déductible de l’assiette de l’impôt sur le revenu.

 L’article 28 prévoit la limitation de la durée des prescriptions d’arrêt de travail pour maladie et la suppression de l’obligation de visite médicale après un congé de maternité.

Le Gouvernement envisage une meilleure maîtrise de la dépense d’indemnités journalières à travers deux mesures complémentaires : la limitation de la durée des prescriptions d’arrêts de travail pour maladie et la suppression de l’obligation de visite de reprise après un congé de maternité.

La première mesure répond à l’accélération marquée des dépenses d’indemnités journalières ces dernières années, liée pour partie à des facteurs économiques et démographiques (hausse du salaire moyen, progression du nombre de salariés, vieillissement de la population active…) mais aussi à une augmentation du recours et de la durée moyenne des arrêts maladie.

Les durées prescrites dépassent fréquemment les recommandations de la Caisse nationale d’assurance maladie et de la HAS. Afin de renforcer le suivi médical et de réguler la dépense, la réforme fixe des plafonds de durée pour les arrêts de travail : 15 jours pour les arrêts prescrits en ville et 30 jours pour ceux prescrits à l’hôpital, avec une limite de deux mois par prolongation, quel que soit le lieu de prescription.

Des dérogations motivées seront possibles lorsque l’état de santé du patient le justifie. La mesure réintroduit par ailleurs des durées maximales de prescription pour les sages-femmes, supprimées en 2021, et rend obligatoire la mention du motif médical dans l’avis d’arrêt, à des fins de contrôle et d’analyse statistique. Prévue pour entrer en vigueur le 1er septembre 2026, cette réforme suppose au préalable une adaptation des téléservices pour intégrer les nouvelles règles et les possibilités de dérogation. Elle devrait générer environ 10 millions d’euros d’économies nettes en année pleine, après prise en compte des dépenses supplémentaires liées à l’augmentation des consultations de suivi.

La seconde mesure supprime l’obligation de visite de reprise après un congé de maternité, actuellement prévue par le code du travail et le code rural.

Aujourd’hui, 30 % de ces visites ne sont pas réalisées dans les délais réglementaires en raison des difficultés rencontrées par les services de santé au travail. Pour éviter toute perte de rémunération, certaines salariées sollicitent alors un arrêt de travail auprès de leur médecin traitant, ce qui accroît les dépenses d’indemnités journalières. En rendant la visite de reprise facultative, la décision sera laissée à l’appréciation du salarié ou de l’employeur selon les besoins de santé ou les conditions de travail.

Cette évolution devrait réduire le nombre de visites et, par conséquent, les arrêts de travail de substitution, permettant ainsi 17,6 millions d’euros d’économies en année pleine.

 L’article 29 limite la durée d’indemnisation des arrêts de travail des assurés ne relevant pas du dispositif de l’affection longue durée.

Selon la Caisse nationale d’assurance maladie, et notamment son rapport Charges et produits 2026 ([139]), une partie de l’augmentation des arrêts de travail longs s’explique par les assurés relevant du régime d’affection longue durée (ALD) « non exonérante ». Les principales pathologies concernées sont la dépression légère (33 %) et les troubles musculosquelettiques (32 %).

Les assurés bénéficiant d’une ALD « non exonérante » bénéficient de règles dérogatoires par rapport au droit commun :

– ils disposent d’un compteur de 1 095 jours d’indemnités journalières sur trois ans, contre 360 jours pour les assurés relevant du droit commun ;

– ils peuvent bénéficier de la levée du délai de carence à partir du deuxième arrêt de travail lié à la pathologie ayant déclenché ce compteur.

En 2023, les dépenses d’indemnités journalières liées à ce régime ont atteint 3,17 milliards d’euros pour 401 000 arrêts, soit trois fois celles des ALD classiques, et le nombre d’arrêts concernés augmente chaque année de 6,4 %, contre 0,9 % pour les ALD classiques.

La mesure proposée consiste à supprimer ces règles dérogatoires. Les assurés atteints d’une affection nécessitant une interruption de travail d’au moins six mois, mais non reconnue comme ALD, se verront désormais appliquer les règles de droit commun en matière d’indemnités journalières. Concrètement, après la réforme, les bénéficiaires d’une ALD « non exonérante » ne pourront percevoir d’indemnités journalières que dans la limite de 260 jours sur trois ans, comme les assurés sans ALD.

La suppression du régime entrera en vigueur le 1er janvier 2026. Les assurés dont les indemnités journalières relèvent encore du régime spécifique au 31 décembre 2025 pourront continuer à en bénéficier jusqu’au terme des trois ans suivant le premier arrêt lié à leur ALD « non exonérante ».

Le rendement de la mesure s’accroîtra progressivement : pour une mise en œuvre au 1er janvier 2026, les premiers effets financiers interviendraient au second semestre 2026 pour environ 100 millions d’euros. La montée en charge s’achèvera avec l’épuisement des droits aux indemnités journalières de trois ans pour les derniers bénéficiaires, et les économies totales sont estimées à 600 millions d’euros en 2026 et 400 millions en 2027.

 L’article 32 vise à lutter contre le gaspillage des produits de santé.

Les produits de santé représentent 16 % de l’objectif de dépenses de l’assurance maladie en 2025 et sont responsables de la moitié des émissions de gaz à effet de serre du secteur. Chaque année, entre 7 500 et 8 500 tonnes de médicaments non utilisés sont collectées en France, auxquels s’ajoutent environ 4 500 tonnes de déchets d’emballages. Cette non-utilisation découle souvent de conditionnements inadaptés, de défauts d’observance ou d’arrêt de traitement, entraînant des pertes financières et un impact environnemental significatif. Les médicaments coûteux, notamment certains traitements anticancéreux oraux, sont particulièrement concernés, avec un gaspillage pouvant atteindre plusieurs milliers de dollars par patient.

Actuellement, la législation impose la destruction des médicaments non utilisés, interdisant leur redistribution. Il est proposé d’expérimenter la re-dispensation de ces médicaments dans des établissements autorisés pendant trois ans. L’expérimentation sera strictement encadrée pour garantir la sécurité, la traçabilité et la qualité des produits, et permettra de mesurer l’acceptabilité par les patients. Les économies attendues pour l’assurance maladie sont estimées à 150 000 euros par an, basées sur l’inclusion de 1 500 patients et un taux de réattribution d’un patient sur huit. L’expérimentation fournira également des indicateurs sur la charge administrative et le rapport coût-bénéfice de la re-dispensation.

Parallèlement, la gestion du stock sanitaire de l’État peut être optimisée pour éviter la destruction de produits approchant de leur date de péremption. Il est ainsi proposé d’autoriser des cessions gratuites à des entités publiques, notamment des établissements de santé et médico-sociaux, pour un usage de routine hors situation de crise.

Cette mesure permettrait d’économiser sur les achats et de réduire les coûts de destruction. Pour les masques, la première part budgétaire du stock, l’économie annuelle stable pourrait atteindre 40 millions d’euros à partir de 2030.

b.   Améliorer l’accès aux soins et favoriser l’efficience de l’activité des établissements de santé

 L’article 21 établit plusieurs mesures pour renforcer l’accès aux soins.

L’accès aux soins en France connaît des difficultés croissantes, notamment dans les zones rurales ou sous-dotées, où l’offre de médecins est insuffisante et le nombre de patients sans médecin traitant augmente.

Pour remédier à ces difficultés, plusieurs mesures sont envisagées. La création du statut de praticien territorial de médecine ambulatoire (PTMA) incitera les jeunes médecins à s’installer dans les zones prioritaires, avec une garantie de revenu et une indemnité couvrant les déplacements. Cette mesure coûterait 634 000 euros en année pleine, mais son impact budgétaire en 2026 sera limité à 106 000 euros en raison d’un démarrage en novembre. Par ailleurs, la révision des conditions d’ouverture d’officine permettra la création de pharmacies dans les communes de moins de 2 500 habitants, améliorant l’accès aux médicaments et aux actes de premiers recours, pour un coût annuel estimé à 1,44 million d’euros, principalement financé par l’assurance maladie obligatoire. La structuration des soins non programmés, avec un cahier des charges et un financement forfaitaire, vise à rationaliser la prise en charge, réduire le recours aux urgences et éviter les soins non pertinents, générant ainsi des économies à moyen terme pour l’assurance maladie. Enfin, la quatrième année de médecine générale permettra aux internes de pratiquer en autonomie supervisée, avec facturation directe des consultations au patient, sans versement d’honoraires aux docteurs juniors, compensant le coût des rémunérations des internes et des praticiens maîtres de stage et rendant cette mesure neutre pour l’ONDAM.

 Les articles 22 et 27 prévoient des mesures pour assurer l’efficience des financements et la pertinence des actes et des soins des établissements de santé.

Le PLFSS prévoit différentes dispositions visant à la fois à améliorer la cohérence et la lisibilité du financement des établissements de santé, actuellement complexe et fragile, et à renforcer l’efficience et la pertinence des soins prodigués.

Le financement des établissements de santé combine tarification à l’activité et dotations globales sans articulation claire, alourdissant les démarches administratives, retardant les paiements et fragilisant la trésorerie, notamment pour les structures de taille moyenne ou modeste. Pour y remédier, la dématérialisation des échanges avec l’assurance maladie et les complémentaires permettra de sécuriser les recettes et d’informer les patients sur leur reste à charge. La facturation individuelle (FIDES) sera révisée pour mieux cibler les activités concernées, et le coefficient honoraire, appliqué depuis 2017 sur le champ des soins médicaux et de réadaptation pour minorer les tarifs de certains établissements de santé privés sur la base d’objectifs quantifiés nationaux, sera maintenu pour protéger la flexibilité des établissements privés face à la pénurie de praticiens. Les délais de modification des données d’activité seront alignés sur les facturations intermédiaires afin d’améliorer la fiabilité des comptes et paiements.

Par ailleurs, des ajustements réglementaires, tels que la clarification des financements des spécialités pharmaceutiques, la rationalisation des dotations MIGAC SMR et populationnelles en psychiatrie, ainsi que la définition plus stricte des conditions dans lesquelles un groupement de coopération sanitaire peut facturer pour le compte de ses membres, afin d’éviter les effets d’aubaine ou les variations artificielles de tarifs, visent à simplifier la gestion, accélérer les notifications de financement et limiter les besoins de trésorerie.

Le PLFSS prévoit également des mesures pour responsabiliser les établissements sur la pertinence de leurs actes et prescriptions, en particulier concernant les prescriptions hospitalières exécutées en ville (PHEV), dont la dépense a atteint 21,5 milliards d’euros en 2023 et croît rapidement. Le dispositif des contrats d’amélioration de la qualité et de l’efficience des soins (CAQES), jusqu’ici limité dans son impact, sera remplacé par un mécanisme rénové reposant sur des indicateurs nationaux et régionaux, combinant un intéressement financier en cas d’amélioration et une minoration des financements en cas de dérive. Les PHEV inadaptées ou redondantes seront un axe prioritaire, et un dispositif autonome de mise sous surveillance ciblera les établissements présentant les écarts les plus importants sur certains actes, comme les césariennes ou la chirurgie bariatrique. La normalisation des pratiques sur quelques actes pourrait générer 33 millions d’euros d’économies sur trois ans, et une réduction de 0,5 % des PHEV permettrait déjà environ 100 millions d’euros d’économies annuelles, hors hépatite C et transports.

c.   Approfondir la politique de prévention

 L’article 19 vise à prévenir l’augmentation des affections de longue durée par la mise en place de prestations d’accompagnement préventif dédiées.

Aujourd’hui, environ 25 millions de personnes sont atteintes de pathologies chroniques, dont près de 14 millions prises en charge au titre du dispositif des affections de longue durée. Ce nombre devrait fortement augmenter dans les prochaines années en raison du vieillissement de la population et de la hausse de la prévalence des maladies chroniques. Si le dispositif actuel permet une prise en charge intégrale des soins pour les pathologies reconnues comme affections de longue durée, il reste insuffisant pour accompagner les formes précoces ou peu sévères de ces maladies. Celles-ci nécessitent avant tout une prise en charge préventive et un suivi renforcé, susceptibles de retarder leur aggravation et l’entrée dans le dispositif ALD.

La mesure prévoit la création d’un parcours spécifique pour les patients présentant une pathologie à risque d’évolution vers une affection de longue durée mais ne nécessitant pas de traitement particulièrement coûteux. Ce parcours, prescrit par un médecin, inclura des prestations déjà remboursées par l’assurance maladie ainsi qu’un panier de soins orienté vers la prévention, comme des bilans diététiques, des séances d’éducation thérapeutique, de suivi psychologique ou d’activité physique adaptée. Ces prestations, actuellement non remboursées, feraient l’objet d’une prise en charge spécifique cofinancée par l’assurance maladie et les organismes complémentaires. La HAS sera saisie pour définir les critères médicaux d’éligibilité des assurés et encadrer le contenu de ce parcours.

Les premières pathologies susceptibles d’entrer dans ce dispositif seraient le diabète sans complication, l’hypertension artérielle et l’obésité. Le cadre réglementaire précisera les situations concernées, les intervenants habilités et les montants de prise en charge. Ce dispositif permettra de renforcer l’accompagnement des patients à un stade précoce de leur maladie et d’éviter une aggravation conduisant à des traitements plus lourds et plus coûteux.

Parallèlement, la mesure s’accompagne d’une gestion plus dynamique des sorties du dispositif ALD. Le service du contrôle médical identifiera les patients guéris pouvant bénéficier d’un suivi post-ALD de cinq ans, afin de maintenir une surveillance médicale adaptée tout en allégeant la charge du dispositif. Cette réforme, fondée sur une logique de prévention et de responsabilisation, permettrait de dégager une économie estimée à 473 millions d’euros en année pleine.

 L’article 20 entend simplifier et rendre plus efficiente la politique vaccinale.

Aujourd’hui, certaines obligations vaccinales sont partiellement appliquées, exposant les patients à un risque élevé de transmission, notamment pour la rougeole, pour laquelle les professionnels de santé sont impliqués dans 75 à 83 % des cas nosocomiaux. Par ailleurs, la gestion et le financement des centres de vaccination restent fragmentés entre l’État et les collectivités territoriales, limitant la coordination et l’efficacité des campagnes. L’obligation vaccinale contre les méningocoques ACWY et B, décidée en loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 et appliquée à tous les nourrissons jusqu’à 5 ans, engendre des contraintes opérationnelles et des coûts élevés par rapport aux bénéfices sanitaires attendus.

Pour y remédier, plusieurs mesures sont envisagées : rendre obligatoire la vaccination contre la rougeole, les oreillons et la rubéole (ROR) pour les professionnels et étudiants des secteurs sanitaire et médico-social et de la petite enfance, et la vaccination contre la grippe saisonnière pour les professionnels de santé libéraux et les résidents d’EHPAD, sous réserve de l’avis de la HAS. La limitation de l’obligation vaccinale contre les méningocoques ACWY et B aux enfants nés à partir de 2023 permettra de réduire les coûts et de concentrer les ressources sur les cohortes à risque.

Les mesures devraient générer des économies, avec un coût annuel de 395 000 euros pour la vaccination ROR et de 19,4 millions d’euros pour la vaccination contre la grippe, compensé par la réduction des consultations, hospitalisations et arrêts de travail.

d.   Favoriser le soutien à l’innovation

 L’article 30 favorise le recours aux outils numériques d’aide à la prescription et à la décision médicale de dernière génération.

Le Gouvernement souhaite favoriser le recours aux outils numériques d’aide à la prescription et à la décision médicale de dernière génération, afin d’améliorer la pertinence des prescriptions, des actes et des parcours de soins. Dans la continuité des objectifs fixés par la convention médicale 2024‑2029 ([140]), est proposée une mesure qui repose sur la mise en place d’un conventionnement entre l’assurance maladie et les exploitants de systèmes d’aide à la décision médicale (SADM) répondant à des critères stricts de qualité, de performance et d’interopérabilité. Ces systèmes devront notamment bénéficier du marquage CE, être intégrés à un logiciel d’aide à la prescription certifié, se conformer aux exigences européennes relatives à l’intelligence artificielle et s’appuyer sur les recommandations actualisées de la HAS.

Le financement des SADM conventionnés sera fondé sur une logique de retour sur résultats : leur rémunération dépendra des économies nettes constatées pour l’assurance maladie, résultant d’une amélioration de la pertinence des prescriptions et de la réduction des actes inutiles. Cette approche incitative permettra de soutenir le développement d’outils efficaces et réellement utilisés par les professionnels de santé, tout en renforçant la régulation et la transparence du marché des solutions numériques médicales.

Les dispositifs déjà pris en charge au titre de la liste des produits et prestations, de la télésurveillance médicale ou de la prise en charge anticipée numérique sont exclus du champ de la mesure. En revanche, les logiciels d’aide à la prescription existants continueront d’assurer la sécurisation des ordonnances, sans évolution de leur mode de financement.

Selon les prévisions du Gouvernement, le déploiement progressif de cette mesure devrait générer des économies nettes croissantes : environ 5 millions d’euros en 2026, près de 100 millions d’euros en 2027, puis près de 300 millions d’euros en 2028. À terme, cette réforme contribuera à une meilleure adéquation entre les pratiques médicales et les recommandations scientifiques, à une réduction des prescriptions inappropriées et à une amélioration de l’efficience globale du système de santé.

 L’article 31 rend obligatoire l’alimentation du dossier médical partagé et sa consultation dans certains cas.

L’alimentation systématique du dossier médical partagé (DMP) permet aux patients de retrouver toutes leurs données de santé dans Mon espace santé, ouvert à tous les assurés depuis janvier 2022. Elle facilite le travail des professionnels, améliore la coordination des soins entre ville et hôpital et contribue à limiter les actes inutiles ou redondants.

Malgré les progrès réalisés, seule la moitié des documents de santé est réellement adressée aux patients. L’obligation prévue par l’article L. 1111-15 du code de la santé publique reste insuffisamment appliquée, faute de contrôle et de sanctions. Pour rendre le DMP pleinement efficace, il est essentiel d’accélérer et de pérenniser son alimentation, en accompagnant les changements logiciels, organisationnels et culturels nécessaires.

Un régime de sanctions financières est proposé pour les professionnels de santé ne respectant pas leurs obligations, adapté à la spécialité, au mode et au lieu d’exercice, et calculé sur la base de leur volume d’activité. Les établissements et organismes de santé seront également tenus de mettre en place les conditions matérielles et organisationnelles pour permettre cette alimentation. Les vérifications seraient réalisées trimestriellement et des procédures contradictoires permettront aux professionnels et aux structures de justifier d’éventuelles difficultés techniques ou organisationnelles.

La consultation systématique du DMP pour la prescription d’actes coûteux sera encadrée par un mécanisme combinant incitation via les logiciels métiers et contrôle a posteriori. Les logiciels devront signaler la présence de documents pertinents avant la prescription, et un arrêté précisera la liste des actes concernés, avec un déploiement prévu au plus tard en 2027.

Selon les estimations, l’application de ces mesures permettrait de générer des économies à hauteur de 5,18 millions d’euros en 2026, de 99,6 millions d’euros en 2027, auxquels s’ajouteraient 15,4 millions d’euros de recettes tirées des sanctions, et de 298,1 millions d’euros d’économies et 3,2 millions d’euros de recettes en 2028.

 L’article 33 améliore la pénétration des biosimilaires et des génériques en ville.

Les médicaments biologiques, fabriqués à partir de cellules ou d’organismes vivants, occupent une place croissante dans l’arsenal thérapeutique. Avec l’arrivée des biosimilaires, en raison de l’échéance des brevets des biologiques de référence, un potentiel significatif d’économies est identifié : en 2024, les remboursements de médicaments biosimilaires en ville représentaient 780 millions d’euros sur un total de 1,9 milliard pour ces classes thérapeutiques.

Pourtant, malgré leur efficacité thérapeutique équivalente et un écart de prix moyen de 25 % avec le médicament de référence, la pénétration des biosimilaires en ville reste limitée (34 % en 2024, 52 % sur août 2024-juillet 2025), bien en dessous de l’objectif de 80 % fixé, similaire à l’objectif pour les génériques.

Plusieurs leviers ont déjà été mis en place pour favoriser la prescription et la substitution : incitations financières pour les médecins libéraux, substitution par le pharmacien, égalisation des marges de distribution, et fixation de taux maximaux de remises commerciales. Cependant, ces dispositifs n’ont pas permis d’atteindre un taux de pénétration optimal, limitant les économies potentielles pour l’assurance maladie.

Les enjeux sont donc doubles : augmenter significativement la pénétration des biosimilaires pour améliorer l’efficience des dépenses de santé, et faciliter la substitution par les pharmaciens, tout en renforçant la lisibilité et la prévisibilité pour les patients et les professionnels de santé.

Pour atteindre ces objectifs, les mesures proposées sont les suivantes :

– renforcer le mécanisme de tiers-payant pour les biosimilaires et hybrides substituables, à l’instar des génériques. Le patient qui accepte la substitution ne fait pas l’avance de frais, tandis que le patient qui refuse le biosimilaire avance le paiement et se fait rembourser ;

– introduire le tarif de remboursement ajusté (TRA) pour les biosimilaires, deux ans après la commercialisation du premier biosimilaire au sein d’un groupe donné, aligné sur le biosimilaire le plus cher. Les prescripteurs devront justifier la non-substitution par la mention « NS » sur l’ordonnance ;

– faciliter la prescription par molécule, supprimant l’obligation de nom de marque pour les biosimilaires, afin de favoriser la substitution par le pharmacien et la confiance des patients ;

– accélérer le TRA pour les génériques et hybrides, en réduisant le délai de deux à un an, optimisant ainsi les économies liées aux pertes de brevet et au reste à charge pour les patients.

Ces mesures devraient permettre d’augmenter d’environ dix points le taux de pénétration des biosimilaires pour les groupes encore en dessous de l’objectif de 80 %, et d’induire une économie estimée à 27,7 millions d’euros pour 2026 sur les principaux groupes biologiques concernés.

 L’article 34 adapte les dispositifs d’accès précoce, d’accès compassionnel et d’accès direct.

Les dispositifs d’accès dérogatoire aux médicaments – accès précoce (AP), accès compassionnel (AC) et accès direct – ont été instaurés pour permettre aux patients atteints de maladies graves, rares ou invalidantes d’accéder rapidement à des traitements innovants ou à des médicaments non encore commercialisés. Trois enjeux majeurs se dégagent aujourd’hui : sécuriser l’accès des patients, accélérer l’évaluation et la prise en charge des médicaments innovants, et clarifier et harmoniser les dispositifs existants pour éviter les redondances et la complexification inutile du système.

Le dispositif d’accès précoce, mis en place en 2021, permet l’accès anticipé à des médicaments présumés innovants avant leur autorisation de mise sur le marché (AMM). Toutefois, près de 60 % des demandes sont post-AMM, ce qui réduit l’intérêt du dispositif, allonge les délais de négociation et crée une redondance avec l’accès direct, destiné aux médicaments innovants disposant de données cliniques matures. Les critères d’éligibilité sont également trop nombreux et interdépendants, et les mécanismes financiers comme les majorations de remise annuelle complexifient la régulation sans accélérer les négociations.

Le dispositif d’accès direct, expérimenté entre 2023 et 2025, a permis une prise en charge rapide, mais certaines règles limitent encore le nombre de spécialités éligibles et peuvent décourager les laboratoires, notamment lorsque les négociations tarifaires débutent tardivement ou que des délais stricts s’imposent sans flexibilité.

L’accès compassionnel, destiné aux médicaments non commercialisés ou non engagés dans une AMM, souffre d’une définition imprécise qui complique l’application et le suivi, notamment pour les médicaments dont l’AMM est retirée ou non renouvelée, ainsi que la continuité des traitements.

Pour répondre à ces enjeux, la réforme proposée vise à simplifier, harmoniser et sécuriser les dispositifs d’accès précoce, d’accès compassionnel et d’accès direct aux médicaments, tout en garantissant un accès rapide aux traitements innovants et en maîtrisant les risques financiers pour les laboratoires comme pour l’assurance maladie.

L’accès précoce serait recentré sur les spécialités disposant de données cliniques encore immatures, avec des critères réduits à trois éléments essentiels – absence de traitement approprié, présomption d’efficacité et de sécurité, et caractère innovant du médicament – et une régulation financière simplifiée. Sa durée de prise en charge pourrait être prolongée jusqu’à trois ans afin de permettre la collecte de données complémentaires, la continuité des traitements étant assurée gratuitement pendant douze mois si le médicament n’est pas ensuite inscrit au droit commun. Parallèlement, l’accès direct serait pérennisé et élargi, notamment pour les extensions d’indication, tout en conservant un rythme de négociation rapide et une indemnité libre pendant douze mois. L’accès compassionnel serait quant à lui clarifié, en excluant les produits en développement commercial, en encadrant les retraits d’autorisation de mise sur le marché et en fixant les durées maximales de continuité de traitement à douze ou vingt-quatre mois selon la situation. Enfin, la liste des pays de référence pour la tarification serait élargie à certains pays non européens comparables, tels que le Japon.

 L’article 35 introduit l’expérimentation du référencement de certains médicaments thérapeutiquement équivalents.

Le marché des médicaments génériques, hybrides et biosimilaires substituables fait face à plusieurs enjeux : tensions d’approvisionnement, rentabilité limitée pour les laboratoires, réduction du nombre de sites de production et nécessité de sécuriser la souveraineté sanitaire. Par ailleurs, le système de tarification actuel ne favorise pas l’orientation du marché vers des spécialités ayant un impact environnemental moindre, malgré la mise en place en 2024 d’une méthodologie harmonisée pour mesurer l’empreinte carbone des médicaments.

Pour répondre à ces enjeux, une expérimentation nationale sur cinq ans sera conduite via le comité économique des produits de santé (CEPS), qui procédera au référencement de certains groupes de médicaments substituables pour une période d’un à deux ans. Ce référencement prendra en compte plusieurs critères : proposition tarifaire, sécurité d’approvisionnement, présence de plusieurs laboratoires pour assurer la résilience, et impact environnemental des médicaments. Les laboratoires sélectionnés bénéficieront d’une prévisibilité forte et d’un accès garanti au marché, avec des sanctions prévues en cas de manquement à leurs obligations, notamment financières, ou une exclusion du dispositif.

L’expérimentation concernera prioritairement les médicaments substituables utilisés en ville, mais pourra être étendue à d’autres classes thérapeutiques jugées équivalentes sur avis de la HAS et en concertation avec l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et l’assurance maladie. Elle vise à valoriser des critères de sécurité d’approvisionnement et environnementaux, tout en permettant de maintenir une compétition efficace entre laboratoires et de générer des économies sur les prix des médicaments concernés. Des dispositifs similaires existent déjà dans plusieurs pays d’Europe du Nord, ce qui fournit un cadre de référence pour l’évaluation de l’impact de ce mécanisme en France.

Sur le plan financier, l’expérimentation pourrait concerner 2 à 3 % du marché des génériques et biosimilaires en ville, et permettre une réduction moyenne des prix de 10 %, générant ainsi au moins 13 millions d’euros d’économies annuelles. La montée en charge sera progressive, avec les premières économies dès le quatrième trimestre 2026, une augmentation en 2027, et un impact total attendu à partir de 2028, tout en garantissant la sécurité d’approvisionnement et la valorisation de l’empreinte environnementale des médicaments.

II.   Les dÉpenses de la branche vieillesse

L’année 2024 a connu une forte hausse des dépenses, portée par la revalorisation des prestations (A). En 2025, un ralentissement modéré de cette progression est attendu (B). En 2026, le gel des pensions de retraite contribuerait à freiner la croissance des dépenses, mais la suspension de la réforme des retraites prévue par le PLFSS pour 2026 pourrait à terme raviver leur dynamisme (C).

  1.   eN 2024, les dÉpenses ont fortement augmentÉ sous l’effet de la revalorisation des prestations

Les dépenses de la branche vieillesse atteignent en 2024 293,8 milliards d’euros, en augmentation de 6,8 % par rapport à 2023 mais proche de l’objectif prévu en LFSS pour 2024 fixé à 293,7 milliards d’euros.

En 2024, le montant des pensions de retraite versées par les régimes de base s’est élevé à 288 milliards d’euros, soit une hausse de 6,8 % par rapport à l’année précédente, sous l’effet de la dynamique des pensions de droit propre (+ 6,9 %, après 4,8 %), qui représentent 91 % des prestations versées, principalement sous l’effet de leur revalorisation (+ 5,3 % en moyenne annuelle). La croissance des effectifs de pensionnés ralentirait (+ 1 % après + 1,4 %) dans un contexte marqué par des flux de départs en retraite moindres qu’en 2023 compte tenu des premiers effets de la réforme de septembre 2023 en année pleine.

Les dépenses de la branche vieillesse incluent également celle du fonds de solidarité vieillesse (FSV), dont la mission est de financer au moyen de recettes qui lui sont affectées des avantages vieillesse non-contributifs, le minimum vieillesse (l’allocation de solidarité aux personnes âgées et les anciennes allocations pour lesquelles il n’y a pas de nouveaux bénéficiaires) et les cotisations afférentes aux périodes non travaillées. Cette prise en charge relève de la solidarité nationale : elle ne repose pas sur la logique contributive qui caractérise le fonctionnement de droit commun des régimes de sécurité sociale.

Les dépenses du FSV connaîtraient encore une croissance soutenue (+ 6,1 % après + 7 %) et s’élèveraient à 20,5 milliards d’euros en 2024, dans un contexte marqué par une légère hausse des effectifs des chômeurs décomptés dans les prises en charge du FSV (+ 1,1 % qui représente une augmentation de 41 700 chômeurs, après 0,7 % en 2023) mais aussi par une moindre inflation (+ 2 % après + 4,8 %).

La contribution de l’évolution des effectifs serait également modérée, avec une croissance du nombre de pensionnés limitée à 1 %, traduisant un ralentissement par rapport à 2024. Ce moindre dynamisme résulte de flux de départs en retraite inférieurs à ceux observés en 2024, en lien avec la montée en charge de la réforme de septembre 2023.

Le recul progressif de l’âge d’ouverture des droits limitera, de même qu’en 2024, à 9 mois le nombre de nouveaux mois de départ en 2025, générant 800 millions euros d’économies en 2025.

La pension moyenne progresserait de 0,4 % en 2025, en recul de 0,4 point par rapport à 2024 (+ 0,8 %), année dont la progression avait été portée par l’effet en année pleine de la revalorisation de 100 euros du barème du minimum contributif appliquée le 1er septembre 2023 à l’ensemble du stock de retraités. Ce ralentissement est également lié aux effets de la réforme des retraites de septembre 2023 : les assurés qui sont amenés à décaler la liquidation de leurs droits en raison de l’augmentation de la durée d’assurance requise et de celle de l’âge d’ouverture des droits ont des pensions plus élevées en moyenne que les autres. La pension moyenne du régime général se hisserait à 8 655 euros par an en 2025, après 8 590 euros en 2024.

contribution des diffÉrents facteurs À l’Évolution des droits propres

Source : rapport du Gouvernement à la Commission des comptes de la sécurité sociale d’octobre 2025.


En 2025, les dépenses du FSV augmenteraient de 5,1 % pour atteindre 21,5 milliards d’euros, dans un contexte marqué par une légère hausse du nombre de demandeurs d’emploi pris en charge et une progression modérée des dépenses liées au minimum vieillesse. Cette évolution serait principalement portée par la hausse des prises en charge de cotisations, dont la progression resterait proche de celle observée l’année précédente (+ 4,9 % après + 5,1 %). Les prises en charge de cotisations maladie, invalidité et AT-MP verraient toutefois leur croissance légèrement ralentir, avec une hausse de 5,6 % après 5,8 %. Enfin, la dynamique des dépenses de minimum vieillesse serait moins soutenue en 2025 qu’en 2024, avec une progression de 5,8 % contre 10,5 %, sous l’effet d’une revalorisation plus modérée du minimum vieillesse – alignée sur celle des pensions de base (2,2 % en moyenne annuelle après 5,3 %) – et d’une hausse plus contenue du nombre de bénéficiaires dans l’ensemble des régimes de base, évaluée à 3,9 % après 4,8 %.

Évolution des charges et produits nets du fsv

(en millions d’euros)

 

2025

Taux d’évolution entre 2024 et 2025

Prises en charge des cotisations

15 997

4,9 %

Au titre du chômage

13 188

4,8 %

Au titre de la maladie

2 464

5,6 %

Au titre de la formation professionnelle

245

1,6 %

Au titre du service national

47

1,6 %

Au titre des périodes d’activité partielle

0

0 %

Prises en charge de prestation au titre du minimum vieillesse

5 153

5,8 %

Transferts avec les régimes complémentaires

228

3,2 %

Autres charges nettes

114

0,8 %

Total des charges nettes

21 493

5,1 %

Source : rapport du Gouvernement à la Commission des comptes de la sécurité sociale d’octobre 2025.

  1.   Un ralentissement de la dépense en 2026, mais des risques pour la soutenabilité de la branche Vieillesse du fait de la suspension de la réforme des retraites

Si l’atténuation des effets des revalorisations contribue au ralentissement de la progression des dépenses en 2026 (1), le PLFSS pour 2026 introduit par ailleurs plusieurs mesures structurantes susceptibles d’affecter l’équilibre de la branche vieillesse (2).

1.   L’objectif de dépenses et la suppression du FSV en 2026

L’objectif de dépenses est fixé à 307,5 milliards d’euros en 2026, en hausse de 1,3 % par rapport à 2025.

Évolution prÉvisionnelle des dÉpenses de la branche vieillesse
des rÉgimes obligatoires de base

(en milliards d’euros et en pourcentage)

2024

2025*

2026*

2027*

2028*

Évolution entre 2025 et 2026

Évolution entre 2026 et 2028

293,8

303,4

307,5

313,1

320,7

1,3 %

4,3 %

Source : commission des finances à partir de l’annexe A au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026.

Note : les dépenses des années accompagnées d’un astérisque sont prévisionnelles.

En 2026, la croissance des prestations ralentirait, augmentant de 2,2 % après 3,4 % en 2025, sous l’effet de la moindre revalorisation attendue (+ 1 % après 2,2 %), en lien avec le reflux continu de l’inflation.

Sous l’effet de la montée en charge de la réforme des retraites, le flux de nouveaux départs progresserait (690 000 nouveaux départs soit une augmentation de 1 %) avec 10 mois de nouveaux départs possibles en 2026. Les dépenses du minimum vieillesse resteraient dynamiques, en hausse de 6,1 %, sous l’effet de la revalorisation et de la hausse des effectifs.

En 2026, la réforme des retraites devait engendrer une économie nette de 700 millions d’euros en raison de la nouvelle hausse de l’âge d’ouverture des droits de 3 mois supplémentaires. Toutefois, le choix de suspendre cette réforme, concrétisé par l’article 45 bis introduit dans le PLFSS par lettre rectificative, devrait se traduire à la fois par la perte de cette économie nette et par un coût net supplémentaire évalué à 100 millions d’euros.

Aux termes de l’article 24 de la LFSS pour 2025, les missions et le financement du FSV seront transférées à la CNAV à compter du 1er janvier 2026. Cette évolution affectera le niveau et la composition des charges de la CNAV avec environ 1,5 milliard d’euros de charges supplémentaires attendues à ce titre.

2.   L’évolution des dépenses après 2026

À partir de l’année 2026, les effets du vieillissement démographique se feront sentir nettement sur la branche vieillesse du fait de l’augmentation de la taille des générations partant à la retraite.

À cet égard, le Conseil d’orientation des retraites (COR) anticipe un changement démographique significatif. Le nombre de retraités de droit direct passerait de 17 millions de personnes à 20,9 millions en 2070. Cette progression serait particulièrement rapide autour des années 2035 à 2040 avec l’arrivée à la retraite des dernières générations nombreuses, en dépit des mesures de relèvement de l’âge de la retraite. Par conséquent, le « rapport entre le nombre de cotisants et le nombre de retraités […] diminuerait sensiblement, passant de 1,8 cotisant par retraité de droit direct en 2022 à environ 1,4 à l’horizon de la projection [l’année 2070] » ([141]).

La croissance des cohortes partant en retraite au cours des années à venir devrait entraîner des conséquences majeures sur la branche vieillesse.

Selon les projections de la Cour des comptes présentées dans son rapport sur la situation financière et les perspectives du système de retraite ([142]), le déficit de l’ensemble des régimes devait se stabiliser autour de 6,6 milliards d’euros par an jusqu’en 2030, en raison des effets positifs attendus de la réforme des retraites issue de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023. Ce déficit devait ensuite se creuser progressivement pour atteindre environ 15 milliards d’euros hors inflation en 2035, puis près de 30 milliards d’euros en 2045. Bien qu’aucune nouvelle projection n’ait été faite par la Cour, à ce stade, la suspension de la réforme de 2023, envisagée dans le cadre du PLFSS pour 2026, devrait vraisemblablement accentuer la dégradation du solde.

3.   Des mesures déterminantes pour l’équilibre de la branche vieillesse sont proposées par le PLFSS pour 2026

● L’article 43 a pour objet de rationaliser et de simplifier le cumul emploi-retraite.

Le cumul emploi-retraite (CER), défini aux articles L. 61-22 et suivants du code de la sécurité sociale, permet aux retraités exerçant une activité professionnelle de cumuler leur pension avec un revenu d’activité. Il se décline aujourd’hui en deux régimes : le CER intégral, accessible aux assurés remplissant les conditions du taux plein et ayant atteint l’âge d’ouverture des droits, et le CER plafonné, ouvert à ceux qui ne remplissent pas ces conditions, lequel est soumis à un plafond de cumul et à un délai de non-reprise d’activité. Depuis la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, les assurés en CER intégral peuvent acquérir de nouveaux droits à retraite, dans la limite de 5 % du plafond annuel de la sécurité sociale.

Toutefois, le dispositif demeure complexe et hétérogène entre régimes, en particulier pour le CER plafonné, générant des situations d’écrêtement cumulatif défavorables pour les assurés. Dans son rapport de mai 2025 ([143]), la Cour des comptes a souligné l’incohérence du dispositif avec l’objectif de report de l’âge effectif de départ à la retraite, ainsi que sa concurrence avec la surcote et la retraite progressive. Elle constate que le CER, de plus en plus mobilisé par des bénéficiaires de départs anticipés, tend à abaisser l’âge moyen de départ à la retraite et à complexifier la compréhension des droits pour les assurés. La réforme proposée dans le cadre du PLFSS pour 2026 vise ainsi à simplifier le dispositif et à mieux l’articuler avec l’âge d’ouverture des droits et l’âge d’annulation de la décote, afin de limiter les incitations à des départs précoces tout en renforçant la lisibilité du système.

Le nouveau dispositif instaure une harmonisation des règles d’écrêtement entre régimes de base et régimes complémentaires et un mécanisme de cumul en trois étages. Avant l’âge légal, la pension sera écrêtée à 100 % des revenus en cas de reprise d’activité, afin de favoriser la retraite progressive. Entre l’âge légal et 67 ans, le cumul sera libre dans la limite d’un plafond annuel de revenus, fixé par décret (envisagé à 7 000 euros), au-delà duquel la pension sera réduite de 50 % des revenus supplémentaires. Au-delà de 67 ans, le cumul sera intégral et créateur de droits, sans délai de carence ni plafond. Parallèlement, les obligations de rupture du lien avec l’employeur et de cessation d’activité agricole sont maintenues, et le suivi des revenus sera automatisé via le dispositif de ressources mensuelles.

Enfin, la réforme maintient certaines dérogations propres à des professions spécifiques (mineurs, marins, militaires, artistes du ballet de l’Opéra de Paris, policiers et professionnels de santé exerçant dans des zones sous-denses). Elle s’appliquera aux assurés dont la première pension prendra effet à compter du 1er janvier 2027, les retraités antérieurs étant exclus du dispositif. Cette réforme devrait contribuer à retarder certains départs à la retraite, tout en réduisant à moyen terme les masses de pensions versées. Son impact financier est estimé à une économie de 400 millions d’euros en 2027 et de 1,9 milliard d’euros en 2030, avec des effets positifs additionnels sur les autres branches de la sécurité sociale.

● L’article 44 stabilise le montant des prestations sociales, dont les pensions de retraite.

En 2024, les dépenses de retraite représentent 13,9 % du produit intérieur brut et près d’un quart des dépenses publiques. Le déficit de la branche vieillesse et du fonds de solidarité vieillesse, après un léger redressement en 2023, s’est de nouveau creusé pour atteindre 4,5 milliards d’euros en 2024 et devrait s’établir à 5,8 milliards d’euros en 2025. Cette évolution s’explique principalement par la forte dynamique des pensions, indexées sur l’inflation.

Le montant moyen des pensions de retraite a progressé plus rapidement que les salaires au cours des dernières années, renforçant le pouvoir d’achat relatif des retraités. Leur niveau de vie demeure proche de celui de l’ensemble de la population (97 % en 2022) et leur taux d’épargne est supérieur à la moyenne, les personnes de plus de 65 ans contribuant pour près des deux tiers à la hausse globale de l’épargne observée entre 2023 et 2024. Dans ce contexte, il apparaît légitime de demander aux retraités une participation mesurée à l’effort de redressement des comptes sociaux.

La mesure proposée consiste à stabiliser en 2026 le montant des pensions de retraite, en suspendant leur revalorisation annuelle prévue au titre de l’inflation.

Pour les quatre années suivantes, le coefficient annuel de revalorisation des pensions de retraite de base serait réduit de 0,4 point par rapport à l’évolution des prix. Cette mesure concernerait uniquement les régimes de base obligatoires de sécurité sociale. Les pensions versées par les régimes complémentaires continueraient, quant à elles, d’être revalorisées selon leurs propres règles, et la revalorisation des cotisations ou des salaires portés au compte ne serait pas affectée. En 2027, le coefficient de revalorisation annuelle serait réduit de 0,5 point supplémentaire, portant la sous-indexation totale au titre de 2027 à 0,9 point. Cette disposition additionnelle, introduite par la lettre rectificative, vise à compenser le coût budgétaire lié à la suspension de la réforme des retraites à compter de 2026.

L’absence de revalorisation des pensions permettrait un gain estimé à 3,6 milliards d’euros en 2026, puis 5,1 milliards en 2027, 6,3 milliards en 2028 et 7,5 milliards en 2029. À partir de 2027, une sous-indexation de 0,4 point par rapport à l’inflation générerait des économies supplémentaires, sans dégrader significativement le niveau de vie des retraités.

Le Premier ministre a toutefois annoncé en séance publique, vendredi 31 octobre 2025, que le refus de mettre en œuvre de telles mesures limitant la revalorisation des pensions de retraite pourrait être envisagé dès lors que cela correspondrait au souhait du Parlement. Il s’agirait là de l’abandon d’une mesure d’économie substantielle, qui pourrait se traduire par une dégradation accentuée des comptes des régimes de retraite dès 2026.

Le rapporteur pour avis soutient le gel des pensions pour l’année 2026, qu’il juge justifié par la nécessité de contenir la progression des dépenses dans un contexte de ralentissement de l’inflation. En revanche, il s’oppose à la mise en place du mécanisme automatique de sous-indexation pluriannuelle prévu à compter de 2027, estimant qu’il est essentiel de préserver la capacité du législateur à se prononcer chaque année sur la revalorisation des pensions, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

● L’article 45 vise à réduire les inégalités entre les femmes et les hommes à la retraite

Malgré les progrès réalisés sur le marché du travail, les pensions des femmes restent en moyenne inférieures de 38 % à celles des hommes, un écart qui se réduit à 25 % après prise en compte des pensions de réversion. Ces inégalités reflètent les différences de parcours professionnels, les interruptions de carrière liées à la maternité, le recours plus fréquent au temps partiel et des salaires encore moindres. Les femmes cotisent également moins longtemps que les hommes, ce qui limite leur accès à la retraite anticipée pour carrière longue. Ce constat justifie une intervention législative afin de mieux prendre en compte les périodes liées à la maternité et à l’éducation des enfants dans le calcul des droits à la retraite.

La mesure proposée prévoit d’inclure dans la durée d’assurance réputée cotisée ouvrant droit à la retraite anticipée pour carrière longue jusqu’à deux trimestres de majoration de durée d’assurance (MDA) au titre de la maternité, de l’adoption, de l’éducation ou du congé parental. Cette évolution permettra à davantage de femmes de satisfaire les conditions nécessaires à un départ anticipé et de réduire les écarts d’accès au dispositif entre les sexes. Cette disposition complète les aménagements déjà introduits par la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, qui avait ouvert la possibilité de comptabiliser certains trimestres validés au titre de l’assurance vieillesse des parents au foyer et de l’assurance vieillesse des aidants.

En complément, le mode de calcul du revenu annuel moyen dans les régimes de retraite alignés et le régime des non-salariés agricoles sera ajusté en faveur des mères. Alors qu’il est actuellement fondé sur les vingt-cinq meilleures années de revenus, il serait calculé sur les vingt-quatre meilleures années pour les mères d’un enfant et sur les vingt-trois meilleures années pour celles ayant deux enfants ou plus. Cette mesure, de nature réglementaire, vise à corriger partiellement l’impact des interruptions de carrière et des périodes d’activité réduite sur le montant de la pension.

La prise en compte de deux trimestres de MDA dans le calcul des périodes réputées cotisées représenterait un coût estimé à 100 millions d’euros en 2026, atteignant 400 millions d’euros en 2029. L’effet serait maximal en 2028, avec environ 12 000 départs anticipés supplémentaires. À plus long terme, le surcoût se stabiliserait autour de 200 millions d’euros au début des années 2040, avant de remonter progressivement pour atteindre 400 millions d’euros vers 2045.

● L’article 45 bis insère au sein du PLFSS une mesure de suspension pendant deux ans du calendrier d’augmentation de l’âge légal de départ et de la durée d’assurance prévu par la réforme des retraites de 2023.

À la suite de la déclaration de politique générale du Premier ministre annonçant la suspension de la réforme des retraites d’ici à l’élection présidentielle, le Gouvernement a introduit par une lettre rectificative en date du 23 octobre 2025 une mesure de suspension de la réforme mise en œuvre par la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023. Cette suspension conduit à ajuster à la baisse l’âge d’ouverture des droits (AOD) et la durée d’assurance requise pour le taux plein (DAR) à compter de la génération née en 1964.

Pour cette génération, l’âge d’ouverture des droits serait ramené à 62 ans et 9 mois, comme pour la génération 1963, au lieu de 63 ans comme prévu par la réforme. Ce décalage d’un trimestre serait reproduit pour les générations 1965 à 1968, de sorte que l’âge de 64 ans ne s’appliquerait qu’à la génération née en 1969. De même, la durée d’assurance requise serait réduite d’un trimestre pour les générations 1964 et 1965, et le seuil de 172 trimestres prévu par la réforme de 2023 ne serait atteint qu’à partir de la génération 1966. Ces ajustements concerneraient l’ensemble des régimes de base, alignés et spéciaux, à l’exception de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon, dont les calendriers spécifiques demeureraient inchangés.

La mesure aurait également des effets indirects sur certains dispositifs de départ anticipé avant l’AOD. Si les régimes bénéficiant d’âges de départ plus favorables ne seraient pas concernés, les conditions de départ anticipé pour incapacité permanente seraient en revanche affectées : le relèvement suspendu de l’AOD entraînerait mécaniquement une baisse de l’âge de départ anticipé pour les assurés dont le taux d’incapacité est compris entre 10 % et 19 %.

Au total, cinq générations bénéficieraient d’un départ à la retraite anticipé d’un trimestre par rapport au calendrier initial.

Selon le Gouvernement, cette mesure se traduirait à court terme par une hausse des dépenses de pension, évaluée à 100 millions d’euros en 2026 et 1,4 milliard d’euros en 2027, avant un effet plus modéré à moyen terme (1,2 milliard d’euros en 2030). À long terme, l’impact budgétaire s’atténuerait progressivement, jusqu’à devenir légèrement positif à partir de 2033, avec 100 millions d’euros supplémentaires par an, du fait de pensions moyennes plus faibles.

Le rapporteur pour avis exprime toutefois des réserves quant à la robustesse des hypothèses avancées par le Gouvernement, qu’il estime fragiles. Il réaffirme son attachement à une indexation de la durée d’assurance sur l’espérance de vie, qu’il considère comme une voie juste et responsable pour garantir la pérennité du système de retraite par répartition.

III.   Les dÉpenses de la branche famille

La progression du montant des prestations familiales versées explique le dynamisme des dépenses de la branche famille en 2024 (A) et, dans une moindre mesure, en 2025 (B). L’année 2026 sera marquée par la poursuite du déploiement du service public de la petite enfance (C).

A.   En 2024, un accroissement des DÉpenses de prestations portÉ par l’effet prix

En 2024, les dépenses de la branche famille atteignent 57,8 milliards d’euros – pour une prévision initiale de 58 milliards d’euros –, soit un montant en progression de 3,8 % par rapport à 2023.

Les prestations familiales connaîtraient une hausse de 4 % par rapport à l’année précédente pour s’établir à 49,3 milliards d’euros.

Cette hausse tiendrait d’abord à l’augmentation des prestations légales nettes à hauteur de 1,1 milliard d’euros (+ 3,9 %), en raison de la revalorisation de ces prestations à hauteur de 4,6 % au 1er avril 2024, avec l’effet différé d’un an environ de l’inflation constatée en 2023. Cette progression du montant des prestations familiales est néanmoins en partie freinée par la dynamique constatée en volume, en raison de la baisse de la natalité constatée en 2023, qui se diffuse progressivement à l’ensemble des prestations familiales.

Les prestations extralégales nettes progresseraient également de 8,4 % en 2024, soit 549 millions d’euros, principalement sous l’effet de la montée en charge des investissements en faveur du service public de la petite enfance.

Au total, l’effet prix expliquerait à nouveau à hauteur de 3,7 points la hausse des prestations. Il découlerait essentiellement de la forte croissance de la seule revalorisation légale du 1er avril 2024 de 4,6 %, conséquence du pic d’inflation observé en 2023. En 2024, les prestations progresseraient légèrement (+ 0,1 point) en raison de la revalorisation des plafonds de ressources, qui a été un peu plus rapide que la hausse des revenus perçus en 2023. Cette différence, à l’origine de l’effet plafond, permet à un plus grand nombre de ménages de rester éligibles aux prestations ou de percevoir des montants légèrement plus élevés.

Les transferts à la charge de la CNAF connaîtraient, en 2024, une augmentation de l’ordre de 301 millions d’euros (+ 2,2 %), en raison de la majoration des pensions de retraite pour enfants (+ 6 %).

B.   En 2025, les revalorisations contribuent à l’augmentation des dÉpenses de prestations

En 2025, les dépenses de la branche famille devraient atteindre 59,3 milliards d’euros –, soit une progression de 1,5 milliard d’euros par rapport à 2024 – pour un objectif de dépense fixé à 59,7 milliards d’euros.

Les prestations familiales connaîtraient une hausse de 2,7 % par rapport à l’année précédente pour s’établir à 50,7 milliards d’euros.

L’année 2025 serait marquée par un ralentissement des dépenses des prestations légales (1,4 % en net après 3,7 % en 2024) qui découlerait principalement d’une revalorisation en net repli (+ 2,4 % en moyenne annuelle, contre + 3,9 % en 2024). Cet effet prix, légèrement atténué par celui de la hausse de SMIC sur les dépenses de complément de libre choix du mode de garde (CMG), expliquerait à lui seul 2,3 points de croissance. Ces effets haussiers seraient toutefois plus que neutralisés par un effet volume en baisse, lié à la poursuite de la diffusion du recul de la natalité – dont les effets s’étendent progressivement à l’ensemble des prestations versées – et qui se poursuivrait en 2025 (– 2,8 %).

Les prestations extralégales nettes progresseraient de 7,3 % en 2025, portées par les mêmes déterminants qu’en 2024.

Les transferts à la charge de la CNAF progresseraient à un rythme stable (+ 2,7 % après + 2,2 %), leur évolution restant principalement portée par le transfert à la CNAV au titre des majorations pour enfants (+ 3,2 %), soutenu par une revalorisation annuelle moyenne de 2,2 %, ainsi que par la hausse de la charge liée à la sous-compensation des allègements généraux versée à l’Unédic, qui doublerait.

C.   En 2026, les dÉpenses demeurent DYNAMIQUES EN l’absence de mesures nouvelles

La croissance des dépenses de la branche en 2026 s’explique essentiellement par l’évolution naturelle des dépenses (1), les mesures nouvelles participant de leur augmentation (2).

1.   Les déterminants de l’évolution hors mesures nouvelles

Pour l’année 2026, l’objectif de dépenses de la branche famille est fixé à 59,4 milliards d’euros.

Évolution prÉvisionnelle des dÉpenses de la branche famille
des rÉgimes obligatoires de base

(en milliards d’euros et en pourcentage)

2024

2025*

2026*

2027*

2028*

Évolution entre 2026 et 2026

Évolution entre 2026 et 2027

57,8

59,3

59,4

59,9

60,7

2,53 %

0,83 %

Source : commission des finances à partir de l’annexe A au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026.

Note : les dépenses des années accompagnées d’un astérisque sont prévisionnelles.

Les prestations sociales continueraient de croître (+ 2 %), tirées par les prestations extralégales (+ 5,6 %), reflet de la poursuite de l’investissement dans le service de la petite enfance. Les prestations légales connaîtraient une augmentation modérée (+ 1,2 %), les revalorisations légales se tassant à 1,1 % en moyenne annuelle après 2,4 % en 2025. Les autres composantes – mesures nouvelles, effet plafond et démographie – se compenseraient globalement et auraient une contribution nette de 0,1 point.

La poursuite de la diffusion à l’ensemble des prestations des effets de la baisse des naissances observées depuis 2022, malgré une légère reprise de la natalité en 2026 suivant le scénario central de l’INSEE (+ 0,4 %), portant le nombre de naissance à 647 000 en 2026 après 644 400 en 2025, se traduirait par un effet volume jouant à la baisse (– 0,9 point) ; la contribution des plafonds de ressources serait également négative (– 0,3 point). Ces effets baissiers seraient toutefois neutralisés par les effets en année pleine de la réforme du CMG qui engendrerait 400 millions d’euros de dépenses supplémentaires (+ 1,3 point).

Les transferts nets, impulsés par la dynamique des prises en charges des indemnités journalières maternité, adoption et accueil de l’enfant (+ 3,7 %), n’augmenteraient que de 1,7 %.

ÉVolution des dÉpenses de la branche famille entre 2023 et 2024
avant mesures nouvelles

(en millions d’euros)

 

2025

2026

Évolution entre 2025 et 2026

Prestations sociales nettes

41 857

42 680

2 %

Dont prestations légales nettes

34 267

34 664

1,2 %

Dont prestations extralégales nettes

7 590

8 016

5,6 %

Transferts versés nets

14 156

14 391

1,7 %

Charges de gestion courante

3 286

3 209

 2,4 %

Autres charges nettes

46

46

0 %

Charges nettes

59 435

60 326

1,7 %

Source : rapport d’octobre 2025 de la Commission des comptes de la sécurité sociale.

2.   Des mesures de soutien à la politique familiale prévues par la LFSS pour 2026

 L’article 41 vise à optimiser le recouvrement des pensions alimentaires.

L’Agence de recouvrement et d’intermédiation des pensions alimentaires (ARIPA) assure le versement et le recouvrement des avances sur pensions alimentaires impayées (allocation de soutien familiale recouvrable, dite ASFR) versées au parent créancier. Elle procède d’abord à un recouvrement amiable avant d’engager, si nécessaire, une procédure de recouvrement forcé. Parmi ces dernières, le paiement direct, qui permet d’obtenir les sommes dues auprès d’un tiers débiteur du parent débiteur (employeur, banque, etc.), constitue le principal outil de recouvrement de l’Agence.

Aujourd’hui, la procédure de paiement direct ne permet de recouvrer que deux années d’arriérés à compter de sa notification au tiers, alors même que le délai de prescription de droit commun des créances alimentaires est de cinq ans. Ce décalage conduit à des pertes de créances, notamment lorsque le recouvrement intervient avec un décalage de plusieurs mois après le versement de l’ASFR, ou encore en cas d’interruption de procédure (insolvabilité, changement de tiers, etc.). Dans ces situations, l’ARIPA doit transférer le dossier au recouvrement public, dont la mise en œuvre par les comptables publics (DGFIP, préfectures) est plus complexe et moins performante, avec un taux de recouvrement d’environ 15 %, contre 80 % pour le paiement direct.

La mesure proposée vise à aligner la durée maximale du paiement direct sur le délai légal de prescription de cinq ans prévu par l’article 2224 du code civil. Elle poursuit un double objectif : d’une part, permettre à l’ARIPA de recouvrer les créances aujourd’hui abandonnées du fait de la limitation actuelle à deux ans ; d’autre part, harmoniser les procédures de recouvrement en évitant les bascules inutiles vers le recouvrement public, source de charge administrative et financière.

L’extension du délai applicable à la procédure de paiement direct permettrait de sécuriser environ 15 millions d’euros de créances recouvrables supplémentaires par an, représentant une économie pérenne pour les finances sociales. En parallèle, près de 40 millions d’euros de créances anciennes actuellement considérées comme irrécouvrables pourraient être récupérées progressivement grâce à la mise en œuvre de la réforme. Cette mesure contribuerait ainsi à améliorer le taux global de recouvrement des pensions alimentaires et à renforcer l’efficacité du service rendu aux familles.

 L’article 42 prévoit la création d’un congé supplémentaire de naissance.

La durée du congé maternité en France demeure inférieure à celle pratiquée dans de nombreux pays européens. Partant de ce constat, un rapport d’information parlementaire de la délégation aux droits des femmes de l’Assemblée nationale ([144]) , a recommandé un nouvel allongement du congé de paternité afin de renforcer le partage des responsabilités parentales et de soutenir une évolution des normes sociales.

Dans cette perspective, le Gouvernement propose la création d’un congé supplémentaire de naissance d’une durée maximale de deux mois, accessible à chacun des deux parents, s’ajoutant aux congés de maternité, de paternité et d’accueil de l’enfant ou d’adoption. Ce congé serait ouvert à l’ensemble des assurés actifs répondant aux conditions d’affiliation existantes : salariés, indépendants, non-salariés agricoles, fonctionnaires, militaires, agents contractuels et bénéficiaires de régimes spéciaux.

Pour les salariés et agents publics, l’indemnisation serait dégressive : 70 % du salaire net le premier mois et 60 % le second. Pour les fonctionnaires, ce taux s’appliquerait à la rémunération et aux primes, avec maintien du supplément familial de traitement et de l’indemnité de résidence. Les indépendants percevraient une indemnité journalière forfaitaire soumise aux mêmes abattements, tandis que les non-salariés agricoles bénéficieraient d’une allocation de remplacement équivalente à celle des congés existants, ou, à défaut, d’une indemnité forfaitaire dégressive similaire. L’indemnisation serait soumise aux prélèvements sociaux et à l’impôt sur le revenu selon les règles en vigueur pour les indemnités journalières maladie.

Le congé supplémentaire de naissance serait pris en une seule période, d’un ou deux mois, et pourrait s’ajouter immédiatement après le congé principal ou être différé dans la limite de neuf mois suivant la naissance ou l’accueil de l’enfant. Il ne serait pas fractionnable et ne pourrait être cumulable avec d’autres indemnités telles que l’allocation journalière de présence parentale, les indemnités journalières maladie, maternité, paternité, adoption ou AT-MP ou les allocations chômage. En revanche, il pourrait être suivi d’un congé parental indemnisé via la PREPARE, sans chevauchement des prestations.

Selon les hypothèses retenues, le coût de la mesure serait estimé à environ 300 millions d’euros en année 2027, 400 millions d’euros en 2028, 500 millions d’euros en 2029 et 600 millions d’euros en 2030. La tentation d’instaurer des nouvelles mesures coûteuses à la charge de la branche famille se comprend aisément dans un contexte de baisse de la natalité. Toutefois, le rapporteur, tout en reconnaissant l’importance des enjeux liés à la natalité, estime que le contexte budgétaire actuel ne permet pas, en l’état, de retenir une mesure d’un tel coût.

IV.   Les dÉpenses de la Branche accidents du travail – maladies professionnelles

Après avoir été marquée par une hausse notable des dépenses de la branche accidents du travail – maladies professionnelles (AT-MP) en lien avec la revalorisation des prestations, les dépenses ont connu un rythme plus modéré en 2024 (A) et en 2025 (B). Les mesures portées par la LFSS pour 2026 pourraient contribuer à modérer le niveau des dépenses (C).

A.   UN moindre accroissement de la dÉpense EN 2024

Les dépenses de la branche atteignent 14,6 milliards d’euros en 2024, pour une prévision initiale de 16 milliards d’euros.

Les prestations relevant du champ de l’ONDAM ont augmenté de 9,6 %, portées par des indemnités journalières toujours très dynamiques bien qu’en léger ralentissement, dans le contexte d’une normalisation des prix. Les prestations hors ONDAM ont également augmenté de 5,8 %, en lien avec le dynamisme des rentes pour incapacité permanente et le doublement des dépenses du compte professionnel de prévention. La baisse tendancielle des dépenses relatives à l’amiante depuis 2011 a également connu un coup d’arrêt du fait de l’élargissement du dispositif. Au total, les prestations sociales nettes s’élèvent à 11,2 milliards d’euros en 2024.

Les transferts vers les régimes de base ou les fonds – dont le fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA) – se replieraient (– 4 %) et atteindraient 2,4 milliards d’euros, en raison principalement de la baisse de la contribution de la branche au financement de la sous-compensation à l’Unédic des allègements généraux, conséquence de la stagnation de ces derniers et de la baisse de l’excédent de la branche anticipé en LFSS pour 2024. La LFSS pour 2024 avait néanmoins augmenté le montant de la contribution de la branche AT-MP au FIVA de 133 millions d’euros afin de maintenir le fonds de roulement du fonds à un niveau prudentiel correspondant à un mois de dépenses d’indemnisation.

B.   En 2025, Une dÉpense contenue malgrÉ le dynamisme des indemnitÉs journaliÈres

En 2025, les dépenses de la branche atteindraient 15,8 milliards d’euros, pour une prévision initiale de 17 milliards d’euros.

Les prestations du champ de l’ONDAM seraient en hausse de 8,2 % et constitueraient le principal contributeur à la croissance des dépenses : elles seraient portées par le dynamisme des indemnités journalières (+ 10,3 %). Les prestations hors ONDAM progresseraient dans une moindre mesure (+ 3,2 %), sous l’effet de la revalorisation des rentes en moyenne annuelle (+ 2,4 %) et de la poursuite de la montée en charge du compte professionnel de formation et du fonds d’investissement pour la prévention de l’usure professionnelle. Les prestations du fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (FCAATA) seraient également dynamiques (+ 4,4 %), bien qu’en ralentissement.

Les transferts repartiraient à la hausse (+ 21,1 %), sous l’effet du transfert à la branche maladie au titre de la sous-déclaration des AT-MP, dont la dernière réévaluation datait de 2023 et qui augmenterait de 400 millions d’euros pour atteindre 1,6 milliard d’euros en application de la LFSS pour 2025. En outre, le transfert au FIVA atteindrait 500 millions d’euros, soit une hausse de 100 millions d’euros liée aux mesures votées en LFSS pour 2025.

La sous-déclaration des AT-MP

Chaque année, une partie des accidents de travail, accidents de trajet et maladies professionnelles n’est pas déclarée. Les victimes bénéficient alors des prestations de l’assurance maladie dans les conditions de droit commun.

Ce phénomène de sous-déclaration s’explique par plusieurs facteurs : les professionnels de santé ne reconnaissent pas toujours l’origine professionnelle de certaines pathologies, notamment celles à longue période de latence ou plurifactorielles, et la formation initiale et continue sur les AT-MP reste insuffisante. Par ailleurs, les victimes peuvent ignorer leurs droits ou la procédure de reconnaissance en raison de la complexité administrative, de la méconnaissance des dispositifs de réparation ou de la crainte de ne pas obtenir gain de cause. Les entreprises, pour leur part, peuvent décourager les déclarations afin de limiter l’impact sur leur sinistralité et le taux de cotisations, tandis que la traçabilité des risques professionnels reste imparfaite, le document unique d’évaluation n’étant pas pleinement généralisé.

Sur le plan financier, la commission chargée d’évaluer la sous-déclaration estime que le coût des sinistres non déclarés s’établit entre 2 et 3,8 milliards d’euros en 2024, en intégrant les principales pathologies reconnues, dont les troubles musculo-squelettiques, les cancers professionnels, les maladies respiratoires ou dermatologiques liées au travail, et désormais la souffrance psychique liée au travail, dont le coût est évalué entre 100 et 700 millions d’euros en 2024.

Depuis la création du dispositif en 1997, le montant du transfert à la branche maladie a fortement augmenté, passant de 140 millions d’euros en 1997 à 1,2 milliard d’euros en 2023 et 2024, soit 8,4 % des dépenses nettes de la branche, reflétant la montée en charge des pathologies non déclarées et l’amélioration des données épidémiologiques utilisées pour estimer le coût de la sous-déclaration.

La contribution de la branche AT-MP de la CNAM au financement de la sous-compensation versée à l’Unédic au titre des allègements généraux reculerait nettement en 2025, sous l’effet de la dégradation marquée de son solde prévisionnel, laquelle entraînerait mécaniquement une baisse de sa participation.

C.   En 2026, des dÉpenses qui demeureraient soutenues mais qui pourraient Être limitÉes par une mesure visant À maÎtriser la hausse des indemnitÉs journaliÈres

1.   Des dépenses qui poursuivent une croissance plutôt soutenue

Pour l’année 2026, l’objectif de dépenses de la branche AT-MP est fixé à 18 milliards d’euros pour l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, soit une augmentation de 500 millions d’euros par rapport à 2025 (+ 2,8 %).

Évolution prÉvisionnelle des dÉpenses de la branche AT-MP

(en milliards d’euros et en pourcentage)

2024

2025*

2026*

2027*

2028*

Évolution entre 2024 et 2025

Évolution entre 2025 et 2027

16,3

17,5

18

19

19,3

2,8 %

7,9 %

Source : commission des finances à partir de l’annexe A au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026.

Note : les dépenses des années accompagnées d’un astérisque sont prévisionnelles.

Entre 2024 et 2026, les pensions d’invalidité, qui représentent près de la moitié de la masse financière des prestations hors ONDAM, ont connu une évolution marquée par un fort dynamisme en 2024 (+ 6,1 %), sous l’effet conjugué de la revalorisation et de la réforme élargissant le plafond de cumul avec les revenus d’activité, avant de ralentir en 2025 (+ 2,9 %) et en 2026 (+ 3 %).

En 2026, les prestations sociales nettes relevant de la branche AT-MP atteindraient un montant de 12,6 milliards d’euros, soit une hausse de 5,6 % par rapport à 2025. Cette dépense est décomposée :

– de 6,9 milliards d’euros pour financer les prestations d’incapacité temporaire entrant dans le champ de l’ONDAM, soit une hausse de 7 % par rapport à 2025 ;

– de 4,9 milliards d’euros pour financer les prestations d’incapacité permanente (hors ONDAM), soit une progression de 2,1 % par rapport à 2025 ;

– de 800 millions pour financer les autres prestations, prévisions et pertes sur créances nettes.

Il convient également de mentionner :

– des transferts nets pour un montant de 2,8 milliards d’euros, dont 2,2 milliards d’euros vers d’autres régimes de base ;

– 1 milliard d’euros de charges de gestion courante.

En 2026, le montant de la contribution de la branche au financement du fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante est fixé à 387 millions d’euros, soit un montant en forte diminution par rapport à 2024 (– 17 %). Ce montant, inférieur à l’estimation prévisionnelle de la Commission des comptes de la sécurité sociale (472 millions d’euros), découle d’une actualisation des besoins de financement du fonds fondée sur une hausse plus modérée des dépenses d’indemnisation (– 4 %) et sur la mobilisation partielle du fonds de roulement existant, permettant de limiter le montant de la contribution tout en maintenant un niveau prudentiel équivalent à un mois de dépenses.

2.   Des mesures nouvelles ayant des incidences en dépenses

 L’article 28 du PLFSS vise à limiter la durée de versement des indemnités journalières par la branche AT-MP.

Dans la législation actuelle applicable aux AT-MP, contrairement au régime maladie, aucune durée maximale d’indemnisation n’est prévue pour les arrêts indemnisés au titre de l’incapacité temporaire. Les indemnités journalières AT-MP, versées pendant toute la durée de l’incapacité jusqu’à la guérison ou la consolidation, peuvent donc s’étendre sur plusieurs années. Or, la caisse nationale d’assurance maladie constate que, si les arrêts très longs sont rares, ils pèsent fortement sur la dépense : en 2024, les arrêts de plus de trois ans ne représentent que 2,8 % des sinistres, mais près de 10 % du montant total des indemnités journalières versées.

Parallèlement, le recours au certificat médical final, qui marque la fin de l’incapacité temporaire et le passage à la consolidation, s’est fortement réduit au cours des dernières années : de 528 000 en 2017 à seulement 143 000 en 2024. Cette évolution des pratiques médicales contribue à l’allongement de la durée moyenne des arrêts AT-MP, faute de clôture formelle des dossiers.

Les campagnes de contrôle menées par le service médical ont montré que la majorité des situations vérifiées auraient dû être consolidées, les assurés présentant une stabilisation médicale justifiant une indemnisation au titre de l’incapacité permanente, et non plus de l’incapacité temporaire. Toutefois, ces opérations de contrôle, lourdes et coûteuses, ne peuvent constituer une réponse pérenne.

Face à ce constat, le Gouvernement propose d’encadrer juridiquement la durée maximale d’indemnisation au titre de l’incapacité temporaire. Une durée limite de quatre ans est envisagée : au-delà, l’état de santé de l’assuré serait réputé consolidé, ouvrant droit, le cas échéant, à une rente ou une indemnité en capital au titre de l’incapacité permanente. Cette mesure vise à rationaliser la gestion des arrêts longs, favoriser un accompagnement plus précoce du retour à l’emploi et garantir une meilleure cohérence entre l’état de santé réel et le mode d’indemnisation. Elle ne remet pas en cause les droits des assurés : en cas de rechute ou d’aggravation de leur état de santé, les intéressés conserveraient la possibilité de rouvrir leurs droits aux indemnités journalières ou de demander une révision de leur taux d’incapacité permanente. Enfin, la limitation de la durée d’indemnisation permettrait d’anticiper la fin des arrêts de longue durée, de mieux préparer la reprise d’activité et de réduire les coûts pour la branche AT-MP.

Selon les estimations de la CNAM, cette réforme générerait 30,8 millions d’euros d’économies en année pleine, dont 28 millions pour le régime général et 2,8 millions pour le régime agricole, sur la base d’une anticipation moyenne de deux années de fin de versement des indemnités journalières.

 L’article 39 du PLFSS prévoit une amélioration de la reconnaissance des maladies professionnelles.

La reconnaissance des maladies professionnelles repose aujourd’hui sur deux dispositifs : un système principal fondé sur les tableaux de maladies professionnelles (TMP), qui bénéficie d’une présomption d’origine professionnelle, et un système complémentaire fondé sur l’examen individuel des comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP). Ce double mécanisme présente des faiblesses structurelles, régulièrement soulignées par la commission d’évaluation de la sous-déclaration des AT-MP. Celle-ci estime le coût de la sous-déclaration entre 2 et 3,8 milliards d’euros, dont les maladies professionnelles représentent plus de 90 %. En réponse, la LFSS pour 2025 a prévu une montée progressive du transfert de la branche AT-MP vers la branche maladie jusqu’à 2 milliards d’euros en 2027.

Le système principal, régi par l’article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, repose sur la conformité stricte aux conditions fixées dans les tableaux (désignation de la maladie, délai de prise en charge, travaux exposant au risque). Toutefois, certains tableaux intègrent des modalités diagnostiques devenues obsolètes ou inaccessibles, générant des difficultés de reconnaissance et des contentieux. Cette rigidité prive certains assurés de la possibilité de saisir un CRRMP et contribue à l’inégalité d’accès aux droits. Pour remédier à cette situation, la réforme propose de moderniser les conditions de diagnostic en renvoyant leur définition à un décret en Conseil d’État. Celui-ci précisera que les maladies doivent être diagnostiquées selon les recommandations actualisées de la HAS ou des sociétés savantes, afin d’assurer une meilleure effectivité du droit des victimes et une adaptation aux progrès scientifiques.

Le système complémentaire, assuré par les CRRMP, est aujourd’hui confronté à une forte hausse des dossiers à instruire – près de 30 000 en 2024 contre 13 000 en 2010 – et à des difficultés de recrutement médical, ce qui allonge les délais de traitement. Pour rationaliser le dispositif, il est proposé de recentrer l’intervention des CRRMP sur les dossiers les plus complexes, relevant de l’alinéa 7 de l’article L. 461-1 du CSS (maladies « hors tableaux »), tandis que les dossiers de l’alinéa 6 seraient désormais instruits par les médecins-conseils de l’assurance maladie, avec possibilité de solliciter un avis technique. Cette réorganisation vise à réduire les délais et à recentrer les CRRMP sur leur cœur d’expertise.

Enfin, la réforme prévoit d’améliorer les phases précontentieuse et contentieuse de la reconnaissance des maladies professionnelles. Un comité national de reconnaissance des maladies professionnelles (CNRMP) sera créé pour apporter une expertise médicale centralisée en amont des contentieux et harmoniser les décisions. En phase contentieuse, la saisine d’un CRRMP par le juge deviendrait facultative, celui-ci pouvant s’appuyer sur les avis rendus en amont. Ces ajustements permettront à la fois de renforcer la sécurité juridique, de fluidifier les procédures et de désengorger les tribunaux, tout en améliorant la reconnaissance effective des pathologies liées au travail.

L’impact financier global de la réforme est estimé à une dépense nette d’environ 17 millions d’euros, résultant d’une hausse de 18,7 millions d’euros liée à l’amélioration de la reconnaissance des maladies professionnelles, compensée partiellement par un gain de gestion de 1,7 million d’euros attendu de la simplification du système complémentaire.

V.   Les dÉpenses de la branche autonomie

En application de la loi n° 2020-992 du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l’autonomie, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), établissement public créé en 2004, gère désormais la branche « autonomie », cinquième branche de la sécurité sociale. La LFSS pour 2021 ([145]) a conféré à la CNSA le statut de caisse nationale de sécurité sociale, alors qu’elle était auparavant financée en grande partie par la branche maladie. Les dépenses financées par la CNSA ainsi que l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH), jusqu’alors financée par la branche famille, sont désormais retracées au sein de la branche autonomie.

Trois ans après la mise en place opérationnelle de cette branche, la Cour des comptes dresse, dans son rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale de 2025 ([146]), un bilan contrasté. Si l’intégration du risque autonomie au sein de la sécurité sociale constitue une avancée majeure, la Cour souligne que cette évolution se traduit avant tout par une forte progression des dépenses, tandis que les résultats demeurent limités : la gouvernance reste complexe, les leviers de pilotage sont insuffisants et de fortes disparités territoriales persistent. Les dépenses de la branche ont en effet augmenté de manière soutenue ces dernières années – tirée par la montée en charge des financements des établissements médico-sociaux et des prestations individuelles – sans que son efficacité soit pleinement assurée.

Le rapporteur voit là la manifestation significative d’un mal chronique qui pèse sur nos finances sociales : le fait de déployer de nouveaux financements ou de nouvelles mesures sans dimensionner ces actions nouvelles à l’aune de nos capacités financières réelles et sans non plus subordonner leur déploiement à une exigence d’efficience.

En 2024, les dépenses de la branche ont enregistré une hausse significative sous l’effet de l’augmentation des dépenses de prestations sociales (A). Cette progression se poursuivrait en 2025 (B). En 2026, la progression des dépenses sera assurée par des tendances structurelles, auxquelles s’ajoutera le coût budgétaire de deux nouvelles mesures (C).

A.   en 2024, UNE AUGMENTATION FRANCHE DES DÉPENSES DE LA BRANCHE du fait de l’augmentation des dÉpenses de prestations sociales

En 2024, les dépenses de la branche autonomie atteignent 39,9 milliards d’euros, soit une hausse de 6,1 % par rapport au montant des dépenses constatées en 2023.

Un montant de 31,6 milliards d’euros, représentant la majeure partie des dépenses de la branche, est alloué au financement des établissements et services médico-sociaux (ESMS) accompagnant les personnes âgées en perte d’autonomie ainsi que celles en situation de handicap. Cette hausse de 5,7 % par rapport à 2023 découle notamment du renforcement du virage domiciliaire, de l’amélioration du taux d’encadrement dans les EHPAD et de la création de nouvelles places pour les personnes handicapées. Elle intègre également les revalorisations mises en œuvre dans le cadre du Ségur de la santé et de ses extensions, ainsi que les revalorisations transversales intervenues dans la fonction publique pour compenser le choc inflationniste.

Ces dépenses sont traduites par l’objectif global de dépenses (OGD) de l’ONDAM, lequel se divise en deux volets : 16,1 milliards d’euros dédiés à l’OGD pour les personnes âgées, et 15,1 milliards d’euros pour l’OGD visant les personnes handicapées.

Par rapport à 2023, l’OGD pour les établissements accueillant les personnes âgées en perte d’autonomie augmente de 6 % tandis que celui des personnes handicapées croît de 2,7 %, cette dynamique étant portée par le développement du plan de création de 50 000 solutions d’accompagnement en soins, et à la perte d’autonomie pour les personnes en situation en de handicap et de leurs aidants.

En 2024, le taux de reconduction des moyens des ESMS relevant de l’OGD ([147]) s’élève à 1,57 %, avec une progression de 2,1 % pour les structures dédiées aux personnes âgées et de 1 % pour ceux accompagnant les personnes en situation de handicap. Ce taux, moins élevé que celui de 2023 (+ 2,29 %) tient compte de l’inflation et de l’évolution naturelle de la masse salariale. Plus marginalement, le taux de reconduction de l’OGD traduit :

– l’augmentation des dotations soins, à la suite de l’actualisation des « coupes PATHOS ([148]) », pour 100 millions d’euros ;

– la hausse du taux d’encadrement en EHPAD pour 200 millions d’euros ;

– la compensation des mesures salariales du secteur public qui se traduit par 200 millions d’euros aux ESMS pour les personnes âgées et 200 millions d’euros aux ESMS pour les personnes handicapées.

La branche autonomie finance également des prestations en espèce, dont le montant a augmenté en 2024 de 31 %, passant de 1,6 milliard d’euros en 2023 à 2,1 milliards d’euros. Parmi ces prestations, l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH) connaît une progression dynamique et augmente de 6,7 % pour atteindre un montant total de 1,6 milliard d’euros, traduisant une meilleure détection et une reconnaissance élargie du handicap. L’assurance vieillesse du parent au foyer (AVPF) et l’assurance vieillesse des aidants (AVA), introduite par la loi de financement rectificative de la sécurité sociale de 2023, représentent un montant total de 400 millions d’euros en 2024, quatre fois supérieur à celui recensé en 2023.

Les transferts vers les départements sont également dynamiques, en hausse de 10,5 % par rapport au montant versé en 2023. Parmi ces concours, le cofinancement de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) et de la prestation de compensation du handicap (PCH) représente 4 milliards d’euros, en hausse de 300 millions d’euros par rapport à 2023.

Outre ces dépenses, la CNSA contribue au fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) en finançant des investissements visant à améliorer la qualité de la prise en charge des personnes en situation de perte d’autonomie. La branche contribue également au déploiement d’expérimentations et d’initiatives locales modernisant les services apportés aux personnes en perte d’autonomie. L’ensemble de ces mesures représentent une dépense de 900 millions d’euros en 2024.

rÉparTition des dÉpenses de la branche autonomie en 2024

(en milliards d’euros)

Source : commission des finances, d’après l’annexe 7 du PLFSS pour 2026.

B.   Une augmentation soutenue en 2025 dans un contexte de réforme des modalités de financement

En 2025, les dépenses de la branche autonomie s’élèveraient à 42 milliards d’euros, soit une hausse de 5,3 % par rapport au montant des dépenses constatées en 2024. Cette dynamique s’explique par l’évolution des différentes catégories de dépenses.

D’une part, le financement des établissements et services médico-sociaux progresse de 5 % par rapport à 2024 pour s’établir à 33,3 milliards d’euros. Cette hausse découle pour partie des revalorisations salariales mises en œuvre dans le cadre du Ségur de la santé et de ses extensions, ainsi que des revalorisations transversales de la fonction publique opérées en réponse au choc d’inflation. Elle s’explique également par plusieurs mesures structurelles, notamment la réforme du financement de la dépendance dans les EHPAD, le transfert de charges aujourd’hui assumées par les départements vers la sécurité sociale, ainsi que les créations de places et le développement de solutions d’accompagnement pour les personnes âgées et les personnes en situation de handicap.

Une pression démographique et sociale croissante sur la branche autonomie

La Cour des comptes souligne, dans son rapport de 2025 ([149]), plusieurs évolutions structurelles qui renforcent les besoins de financement de la branche autonomie :

 le vieillissement accéléré de la population : la génération née en 1945 atteindra 85 ans à partir de 2030. Entre 2020 et 2025, la population des 75-85 ans a augmenté de deux millions pour atteindre 6,1 millions de personnes. Celles encore en vie entre 2030 et 2040 auront entre 85 et 95 ans, âges où la dépendance devient majoritaire ;

 la forte hausse attendue de la dépendance : en 2024, 1,37 million de personnes sont bénéficiaires de l’allocation personnalisée d’autonomie, dont plus d’un tiers en établissement, et plus de 400 000 perçoivent la prestation de compensation du handicap. Le nombre de personnes dépendantes pourrait atteindre 1,55 million en 2030 et 1,8 million en 2040, les estimations fondées sur les limitations déclarées d’autonomie portant ces chiffres autour de 3 millions en 2030 et 3,5 millions en 2040 ;

– le « virage domiciliaire » qui implique une croissance soutenue des bénéficiaires de l’APA à domicile : une hausse de 34 % par rapport à 2023 est anticipée d’ici 2040, pour un coût dont la progression est estimée entre 80 % et 100 % ;

– une augmentation des cas de dépendance lourde en établissement : pour maintenir un taux d’entrée en Ehpad de 37 % entre 2030 et 2040, environ 90 000 places nouvelles devront être créées. Les établissements accueilleront de plus en plus des personnes en dépendance sévère, impliquant un renforcement des effectifs et un surcroît de dépenses.

Les dépenses relevant de l’OGD pour les personnes âgées progresseraient de 8 % en 2025, principalement du fait de la réforme de la tarification des EHPAD et des unités de soins de longue durée, qui transfère à la sécurité sociale les dépenses d’accompagnement de la perte d’autonomie auparavant prises en charge par les départements. Cette évolution représente 600 millions d’euros de mesure de périmètre, auxquels s’ajoutent 200 millions d’euros de surcoûts liés aux revalorisations. Pour les personnes en situation de handicap, la dynamique demeure soutenue, avec une progression du volet dédié de l’OGD de 3 % en 2025, portée par les créations de places et le renforcement de l’accompagnement.

D’autre part, les dépenses de prestations sociales augmenteraient de 4 % en 2025 pour s’établir à 2,1 milliards d’euros. Les dépenses d’AEEH, dont la hausse sur la période est portée par l’augmentation du nombre de bénéficiaires, s’établiraient à 1,7 milliard d’euros en 2025. En outre, les dépenses de l’AVPF et de l’APA devraient continuer de croître pour atteindre 500 millions d’euros en 2025.

Les transferts de la branche vers les départements progresseraient de 600 millions d’euros en 2025 (+ 11,3 %), sous l’effet notamment de la montée en charge des financements aux services d’aide et d’accompagnement à domicile issus des précédentes LFSS, ainsi que de l’entrée en vigueur de la réforme des concours. Afin de simplifier les dispositifs de financement, la LFSS pour 2025 a, en effet, prévu la fusion des concours en deux catégories : personnes âgées et personnes en situation de handicap. Les montants sont désormais calculés en appliquant le taux de compensation 2024 à l’assiette des dépenses fusionnées, ce qui conduirait à une hausse nette des concours de 200 millions d’euros en 2025. À l’inverse, la fusion des sections « soins » et « dépendance », qui transfère à l’OGD l’intégralité du financement des ESMS, réduirait les concours versés aux départements de 125 millions d’euros en 2025, limitant ainsi l’augmentation globale.

C.   En 2026, des dÉpenses portÉes par des Évolutions tendancielles et par une mesure nouvelle

En 2026, les dépenses de la branche seraient en progression de 3,3 % par rapport à 2025, une évolution qui s’explique par leur dynamisme naturel (1) et par des mesures nouvelles (2).

1.   Une progression des dépenses s’expliquant en partie par le taux de reconduction

Selon les prévisions établies en octobre 2025, les dépenses de la branche autonomie s’élèveraient au total à 43,5 milliards d’euros en 2026.

Les dépenses prévisionnelles au titre du financement des ESMS s’élèveraient à 34,1 milliards d’euros, ce qui correspond à une hausse de 4 % par rapport à l’année précédente.

Parmi les facteurs de cette augmentation, on retrouve :

– la progression des dépenses de l’OGD, pour 1,1 milliard d’euros (+ 3,3 %) ;

– le dynamisme des dépenses d’AEEH, pour 1,1 milliard d’euros (+ 3,3 %) ;

– la croissance des dépenses de transferts aux départements, pour près de 203 millions d’euros (+ 2,8 %).

Évolution des dÉpenses de la branche autonomie entre 2024 et 2026

 

2024

2025

2026

 

Montant

Montant

Évolution 2025/2024

Évolution 2025/2024

Montant

Évolution 2025/2024

Évolution 2025/2024

(M€)

(M€)

(M€)

(%)

(M€)

(M€)

(%)

Dépenses

39 919

42 034

2 455

5,8 %

43 398

1 364

3,1 %

Prestations sociales

32 865

34 693

1 828

5,3 %

35 851

1 158

3,2 %

dont prestations OGD

31 244

33 007

1 763

5,3 %

34 104

1 094

3,2 %

dont OGD PA

16 133

17 423

1 290

7,4 %

18 105

682

3,8 %

dont OGD PH

15 112

15 584

472

3 %

15 999

415

2,6 %

dont AEEH

1 603

1 664

61

3,7 %

1 724

60

3,5 %

Transferts

6 790

7 077

287

4,1 %

7 280

203

2,8 %

dont AVPF / AVA

438

445

7

1,6 %

459

14

3,1 %

dont subventions aux fonds, organismes et départements

6 352

6 632

280

4,2 %

6 821

189

2,8 %

dont concours versés aux départements

5 409

5 965

556

9,3 %

6 245

280

4,5 %

Charges de gestion courante

228

191

 37

 19,4 %

228

37

16,2 %

Autres charges nettes

28

30

2

6,7 %

39

9

23,1 %

TOTAL

39 919

42 034

2 115

5,3 %

43 398

1 364

3,2 %

Source : commission des finances d’après le rapport du Gouvernement à la Commission des comptes de la sécurité sociale, octobre 2025.

* Fonds d’intervention régional.

2.   Les mesures nouvelles ayant un effet en dépenses

 L’article 36 adapte le financement des établissements accompagnant des enfants et des jeunes en situation de handicap dans le cadre de la réforme SERAFIN.

Le financement actuel des établissements et services sociaux et médico-sociaux accueillant des personnes en situation de handicap repose sur des dotations historiques, dont la structure de coûts n’est pas précisément identifiée. Cette situation entraîne des disparités entre structures et un manque de lisibilité dans l’allocation des ressources. La réforme SERAFIN-PH vise à rationaliser le financement en l’adaptant aux besoins réels des personnes accompagnées et aux caractéristiques des établissements. L’objectif est de rendre la répartition des ressources plus équitable, plus transparente et mieux alignée sur les charges effectives, tout en favorisant la transformation de l’offre médico-sociale vers une approche centrée sur les parcours de vie et l’inclusion.

Le déploiement du nouveau modèle tarifaire s’échelonnera en trois étapes : l’année 2025 sera consacrée à la collecte et à l’analyse des données nécessaires aux simulations, l’année 2026 constituera une année de mise en œuvre à blanc pour tester le modèle et l’année 2027 marquera son entrée en vigueur effective. Cette progressivité répond aux inquiétudes exprimées par les acteurs du secteur et permet la construction de systèmes de collecte robustes et fiables.

Le nouvel article L. 314-2-4 du code de l’action sociale et des familles définit les composantes de la tarification pour les établissements et services accompagnant des mineurs et jeunes adultes handicapés orientés par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées. Le financement prendra la forme d’une dotation globale comprenant une part principale forfaitaire par place, modulée par des critères d’activité, de qualité de service et de coordination, ainsi que, le cas échéant, des financements complémentaires prévus dans les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM). Les établissements devront transmettre à la CNSA et aux ARS les données nécessaires au calcul de ces dotations, selon des modalités précisées par décret en Conseil d’État.

Enfin, une période transitoire de convergence des financements sera organisée de 2027 à 2034 afin d’assurer une montée en charge progressive et de mettre fin à la procédure de tarification de droit commun. À compter du 1er janvier 2027, les structures concernées bénéficieront d’une tarification à la ressource, intégrant le nouveau cadre budgétaire de l’état des prévisions de recettes et de dépenses. Le coût total de cette mesure est estimé à 360 millions d’euros sur la période 2027-2030, soit 90 millions d’euros par an, afin de soutenir la montée en charge du nouveau modèle et l’ajustement progressif des structures aux objectifs de la réforme.

 L’article 37 clarifie la contribution de la CNSA à la prise en charge du coût de l’accord du 4 juin 2024 pour les départements.

La prime Ségur, instaurée à la suite du Ségur de la santé en 2020, correspond à une revalorisation mensuelle nette de 183 euros destinée à reconnaître l’engagement des professionnels du secteur de la santé et du médico-social. Initialement réservée aux personnels exerçant dans les hôpitaux et les EHPAD, elle a été progressivement étendue aux soignants puis aux personnels éducatifs des établissements et services sociaux et médico-sociaux relevant des secteurs public et privé à but non lucratif.

L’accord du 4 juin 2024, conclu entre l’État et les partenaires sociaux de la branche sanitaire, sociale et médico-sociale privée à but non lucratif (BASS), a prévu d’élargir à nouveau le bénéfice de la prime Ségur à l’ensemble des professionnels de la branche, y compris les personnels administratifs et techniques. Cette extension vise à reconnaître l’implication de tous les acteurs de terrain, mais elle entraîne un surcoût important pour les départements, qui financent notamment les établissements accueillant des personnes âgées ou handicapées.

Or le cadre juridique actuel n’impose aucune obligation de compensation par l’État ou par la CNSA pour ces dépenses nouvelles, alors même que la situation financière des départements est dégradée. Afin d’éviter que cette charge ne repose intégralement sur eux, le Gouvernement a proposé que la CNSA prenne en charge environ la moitié du coût supplémentaire, soit 85 millions d’euros par an.

La mesure législative proposée vise donc à modifier le II et le III de l’article 43 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022, afin d’autoriser la CNSA à verser aux départements une aide financière annuelle et pérenne, dont les modalités seront fixées par décret, avec une entrée en vigueur au 1er janvier 2025. Cette aide serait répartie en fonction du nombre de places installées dans les structures de la BASS accueillant des personnes âgées ou handicapées sur le territoire de chaque département.

Cette évolution permet de sécuriser juridiquement et financièrement la compensation attendue, tout en assurant une application équitable et homogène sur l’ensemble du territoire. Elle s’inscrit dans le cadre d’un accord global entre l’État et les départements, fondé sur une évaluation du coût total de l’extension de la prime estimé à 170 millions d’euros par an, dont la moitié sera couverte par la branche autonomie via la CNSA.

 L’article 38 prévoit la déduction des indemnisations versées par les assurances et le fonds d’indemnisation de l’allocation personnalisée d’autonomie et de la prestation de compensation du handicap.

L’article 38 du PLFSS pour 2026 vise à affirmer la subsidiarité de l’allocation personnalisée d’autonomie à domicile et de la prestation de compensation du handicap vis-à-vis des indemnisations versées par des tiers responsables. Cette mesure répond à la nécessité de mieux articuler la solidarité nationale et la responsabilité civile, en évitant les situations de double financement d’un même besoin. En l’état actuel du droit, lorsqu’un dommage corporel à l’origine d’une perte d’autonomie ou d’un handicap résulte d’un tiers, les prestations versées par les départements au titre de l’APA ou de la PCH peuvent se cumuler avec les indemnités versées par un assureur ou un fonds d’indemnisation. Cette situation conduit à une double prise en charge, alors même que les départements ne disposent d’aucun mécanisme juridique leur permettant de déduire les montants indemnisés ou d’exercer un recours contre le responsable du dommage.

La mesure proposée vise à corriger cette asymétrie en autorisant les départements à déduire du montant de l’APA ou de la PCH les indemnités versées à la personne au titre de la réparation d’un même préjudice. La déduction ne concernera que les postes indemnisés qui recouvrent les mêmes besoins que ceux financés par l’APA et la PCH, principalement l’assistance par une tierce personne, l’adaptation du logement ou du véhicule, et uniquement pour les prestations servies à domicile. La personne concernée conservera dans tous les cas la garantie d’une réparation intégrale de son préjudice lorsque le montant de l’indemnisation sera supérieur à celui de la prestation.

Sur le plan opérationnel, la mesure s’appliquerait aux nouvelles demandes d’APA et de PCH déposées à compter de son entrée en vigueur, qu’il s’agisse d’une première demande ou d’une demande de révision faisant suite à un dommage corporel donnant lieu à réparation. Les bénéficiaires auront l’obligation de déclarer au département les indemnités reçues au titre de la compensation de leur perte d’autonomie, ainsi que tout changement de situation. Les assureurs et fonds d’indemnisation devront, à la demande du département, communiquer les informations nécessaires à la mise en œuvre de cette déduction. Un décret précisera les modalités de transmission des données et les conditions pratiques de calcul, notamment en cas d’indemnisation partielle ou provisionnelle.

Cette réforme, qui s’appuie sur les conclusions d’un rapport conjoint de l’Inspection générale des affaires sociales et de l’Inspection générale des finances ([150]), permettra d’éviter les situations de double financement tout en garantissant une meilleure articulation entre solidarité publique et responsabilité privée. Elle est susceptible de générer des économies estimées à 3,4 millions d’euros en 2027, 6,7 millions l’année suivante et 10,1 millions à l’horizon 2029, sous réserve d’un taux constant de participation de la branche autonomie au financement des dépenses départementales.


   Examen en commission

Au cours de sa réunion du mercredi 29 octobre 2025 à 9 heures 30, la commission a examiné, pour avis, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026 (n° 1907).

M. le président Éric Coquerel. Comme d’habitude, la commission des finances est saisie pour avis de l’ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2026.

Une lettre rectificative au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026, présentée en Conseil des ministres jeudi 23 octobre, a complété le texte initial par l’ajout de l’article 45 bis, relatif à la suspension de la réforme des retraites, et modifié les articles 7 et 44, pour dégager de nouveaux financements, ainsi que les articles 14, 17 et 52, pour mettre en cohérence les montants retenus dans ces articles.

C’est du projet de loi ainsi modifié que nous sommes saisis pour avis.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. C’est dans un contexte particulier que nous examinons le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026 : avec un retard sur le calendrier prévu par les dispositions organiques et après une lettre rectificative ajoutant une mesure prévoyant la suspension et ledécalage de la réforme des retraites – pour un coût de 100 millions d’euros en 2026 et de 1,4 milliard d’euros en 2027. Nous y reviendrons en examinant l’article 45 bis.

Le sort de la réforme des retraites ne doit pas nous faire oublier la dérive continue des comptes sociaux. Tous ceux qui se disent attachés à notre système de protection sociale doivent en effet s’interroger sur sa soutenabilité. Si nous ne sommes pas toujours d’accord sur l’ampleur de la dérive et les solutions à apporter, nous nous accordons tous pour considérer que notre mission est de protéger la protection.

Concernant l’équilibre général, le déficit était de 23 milliards d’euros en 2025. Nous passerions, en 2026, à un déficit de 17,5 milliards, soit une légère amélioration. Celle-ci s’obtient au prix d’économies importantes, sans lesquelles le déficit s’établirait à 28,7 milliards d’euros.

En dépit de ces efforts, le plafond d’endettement de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) devrait être relevé de 65 milliards à 83 milliards d’euros : un niveau très haut, inédit depuis la crise sanitaire et dangereux pour son financement. L’endettement de l’Acoss correspond à une dette à court terme sur laquelle des emprunts sont contractés presque toutes les semaines, et son roulement est mis en péril par ce niveau ultra-élevé. Tous les spécialistes savent que nous atteignons la limite de la soutenabilité.

La question centrale est celle du travail. Il existe deux types de solidarité : une solidarité horizontale entre tous les Français – les travailleurs et ceux qui bénéficient de l’assistance – et une solidarité intergénérationnelle. Ne pas être capable de les assumer crée en fin de compte une antisolidarité intergénérationnelle, car nous reportons notre incapacité à régler nos problèmes actuels sur les générations futures.

Du côté des recettes, l’année blanche et le gel des pensions demandent un effort considérable aux retraités. Cet effort est voué à être reconduit : ce PLFSS prévoit déjà de limiter l’indexation des retraites sur l’inflation dans les années à venir sans que nous connaissions les évolutions de la situation sociale et de l’inflation. Cet effort pose donc question, d’autant qu’il s’ajoute au gel du barème de l’impôt sur le revenu (IR) prévu dans le projet de loi de finances.

Les mutuelles fournissent, elles aussi, un effort, par la hausse de leurs contributions et certaines contributions exceptionnelles. Or elles ne font pas de philanthropie : ces contributions conduiront à l’augmentation des cotisations des adhérents ou à la diminution du niveau des remboursements.

Un effort est également demandé aux salariés, et à l’ensemble du monde du travail, sous la forme de la suppression des exonérations de cotisations sociales sur les compléments de salaire. J’y suis défavorable : nous passons à côté des enjeux centraux qui sont le temps de travail et le temps de travail tout au long de la vie.

Je défendrai plusieurs amendements pour revenir sur une partie de ces efforts ; je proposerai notamment la suppression des articles 6 et 7 et le réexamen des réductions d’exonérations de cotisations sociales sur les compléments de salaire proposées à l’article 8.

La Cour des comptes constate que les dépenses sociales ne cessent d’augmenter et que le financement de la sécurité sociale ne sera pas assuré sans des mesures de redressement vigoureuses. Or les dépenses continueraient de progresser de 3,6 % en 2026, malgré la normalisation de l’inflation et la dynamique de la masse salariale. Ce rythme est le même qu’en 2025, mais il est presque deux fois plus rapide qu’avant la crise sanitaire, alors qu’il n’y a aucune raison pour que ce dérapage persiste.

L’année 2025 serait la première où l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) est respecté, mais celui-ci avait été évalué plus généreusement que les années précédentes. Nous ne pouvons être satisfaits du seul respect des prévisions, surtout dans ces conditions.

Au vu de la situation, il est évidemment nécessaire de prendre des mesures sur les participations forfaitaires et les franchises en les élargissant à des secteurs de soin qui, jusqu’à présent, y échappaient sans que cela soit justifié.

Je salue aussi les mesures qui encadrent la prescription et l’indemnisation des arrêts de travail. Depuis 2001, les dépenses liées à ces derniers sont passées de 6 milliards à 17 milliards d’euros – soit le déficit global de la sécurité sociale prévu pour 2026. S’il n’y avait pas d’arrêts de travail, il n’y aurait donc pas de déficit (Exclamations) ; et si leur nombre était resté équivalent à celui du début du siècle, le déficit global, même augmenté par l’inflation, serait deux fois moins important !

Le gel des prestations sociales fait aussi partie des efforts demandés. J’imagine que certains ici auront à cœur d’y revenir.

Je propose de prolonger et renforcer ces mesures en créant des journées de carence dynamiques, qui permettent de tenir compte des situations des uns et des autres, et de rendre collégiales les décisions de renouvellement d’arrêts maladie.

La perspective d’une suspension ou d’un décalage de la réforme des retraites aggrave notre situation. Je propose donc également une mesure d’indexation de la durée de cotisation sur l’espérance de vie. Nous ne pouvons faire abstraction de l’évolution démographique : nous vivons de plus en plus longtemps, et de plus en plus longtemps en bonne santé, et nous n’avons jamais profité de nos retraites aussi longtemps. S’il y avait quatre cotisants pour un retraité en 1970, il y a désormais 1,5 cotisant pour un retraité, demain, 1,3, puis 1. Quand nous aurons moins d’un cotisant par retraité, comment paierons-nous ?

Chers collègues, si nous n’adoptons pas ce PLFSS, le gouvernement proposera une loi spéciale qui nous obligera à renoncer à toute réforme structurelle. Nous devrons également renoncer à notre modèle, puisque l’Acoss, faute d’autorisation d’emprunt, ne disposera en 2026 que d’une marge d’un mois pour verser les prestations et les remboursements de soins. Protégeons donc la protection et améliorons ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour pouvoir l’adopter.

M. le président Éric Coquerel. Avant tout, une précision : cet emprunt serait intégré à la loi spéciale, comme l’année dernière. Il n’y a pas d’autre loi spéciale sur le PLFSS.

Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est pour moi un musée des horreurs sociales : il propose des économies sur les malades et réduit les droits des assurés sociaux.

Le PLFSS prévoit en effet un effort de 20 milliards d’euros, dont 15 milliards reposent sur des réductions de dépenses, et 5 milliards seulement sur l’augmentation des ressources. Sur ces 15 milliards d’euros, 7 milliards d’économies sont prévues sur les dépenses de santé.

Concernant le déficit, l’état des comptes sociaux n’est pas si affolant. Les déficits du régime général de la sécurité sociale et du fonds de solidarité vieillesse (FSV) devraient atteindre 23 milliards d’euros en 2025. Afficher un tel résultat est un choix politique. En 2025, sans augmenter les recettes, nous pourrions déjà réduire le déficit à 4 milliards d’euros en transférant 19 milliards d’euros de la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades) vers la dette de l’État.

La dette sociale a en effet été creusée par des dépenses que l’État a fait reposer sur la sécurité sociale. Sur les 122 milliards d’euros devant être remboursés, 92 milliards viennent des charges que l’État aurait dû assumer pendant la crise du covid. Les mesures qui ont alors été prises et que je ne conteste pas, comme le chômage partiel, sont loin des mesures d’un régime de sécurité sociale normal. Ensuite, puisqu’il fait rouler sa dette, il est avantageux que l’État finance la dette sociale. Depuis la création de la Cades en 1996, 100 milliards de recettes sociales ont servi à payer des intérêts. Pendant la crise du covid, l’économiste Michaël Zemmour avait expliqué que, si le transfert de dette avait eu lieu, nous aurions pu économiser une dizaine de milliards d’euros – qui ont reposé sur la Cades – puisque l’État n’aurait eu à s’acquitter que de 1 milliard d’euros d’intérêts.

Les déficits successifs de la sécurité sociale s’expliquent enfin par une politique d’appauvrissement reposant sur les exonérations de cotisations sociales – plus de 100 milliards d’euros, dont 35 ne sont pas compensés ; les cadeaux aux laboratoires pharmaceutiques ; l’encouragement de métiers ou de régimes sans cotisations ou avec des cotisations moindres, comme l’autoentrepreneuriat ou le microentrepreneuriat ; la désocialisation des primes ou des heures supplémentaires.

Enfin, certaines dépenses nécessaires n’ont pas été compensées, comme celles du Ségur de la santé.

C’est en particulier sur le PLFSS que repose l’année blanche. Selon l’Institut des politiques publiques (IPP), ce sont les 10 % des ménages les plus modestes qui seraient les plus touchés : 3,2 % des ménages perdraient ainsi plus de 1 % de leur niveau de vie.

Pour l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), les premiers perdants seraient les retraités, qui pâtiraient de la non-indexation des pensions sur l’inflation et du gel du barème de l’IR – sur lequel nous sommes heureusement revenus. Sur les 10 millions de foyers comptant au moins une personne retraitée, la perte serait de l’ordre de 350 euros par unité de consommation sur l’année. La consommation en pâtirait, d’où la baisse de 0,8 point de PIB prévue par l’OFCE.

Certaines dispositions de ce PLFSS sont ensuite tout bonnement incroyables, comme la taxe sur les malades atteints d’affections de longue durée (ALD), la création et l’augmentation des franchises médicales ou la réduction de la durée des arrêts de travail.

Effectivement, monsieur le rapporteur pour avis, s’il n’y avait pas de maladies, il n’y aurait pas de dépenses de la sécurité sociale. Il faudrait plutôt s’interroger sur les raisons de l’augmentation des arrêts de travail qui pourrait être liée à la disparition du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) en 2017, aux problèmes de la médecine du travail ou aux conditions de travail en général.

À cette liste s’ajoutent la diminution, en euros constants, des budgets des hôpitaux et des Ehpad ; la fin de l’exonération de cotisations sociales sur les apprentis ; la réforme des titres-restaurants, etc.

Pour finir, les nouveaux articles du PLFSS sont une ruse : ils doivent nous amener à l’adopter en nous faisant oublier son caractère scandaleux.

Comme le président Macron l’a dit, il ne s’agit pas d’une suspension de la réforme des retraites mais d’un décalage, qui fera, certes, gagner trois mois de retraite aux personnes nées entre 1964 et 1968, mais ne bénéficiera pas aux carrières longues. Les mesures prévues s’appliqueront ensuite à la génération née à partir de 1969.

Avec ce PLFSS, ce sont en réalité 1,5 milliard d’euros supplémentaires qui sont pris en contrepartie sur les pensions de retraite et s’ajoutent aux 4 milliards déjà prévus. L’augmentation de 0,5 point de la sous-indexation des pensions en 2027 et l’augmentation supplémentaire de 0,20 point de la taxe sur les complémentaires santé font peser le poids de ce simple décalage sur l’ensemble des retraités, y compris ceux à qui il est favorable. Autrement dit, les gens partiront plus tôt, mais plus pauvres.

Le progrès annoncé par ces mesures n’est donc pas suffisant pour adopter ce PLFSS antisocial.

M. Philippe Juvin, rapporteur général. Quatre points posent question. Premièrement, la diminution des dépenses des administrations de sécurité sociale de 0,3 % en volume est en décalage avec les années précédentes. Le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) a prudemment estimé qu’« un dépassement limité des dépenses prévues sur la sphère de la dépense sociale [était] assez plausible ». Pour lui, la cible est « très ambitieuse » et l’atteindre nécessiterait que « l’intégralité [des] mesures, ou d’autres économies équivalentes, soient mises en œuvre, ce qui paraît très incertain ». L’évolution prévue de l’Ondam, ainsi que les économies envisagées, sont-elles crédibles ? Où sont les mesures supplémentaires de maîtrise des dépenses que le HCFP recommande ?

Deuxièmement, quelles mesures sont prévues par le gouvernement pour compenser la suspension de la réforme des retraites ? Les mesures publiées sont-elles correctement chiffrées ? Serait-il possible de détailler les propositions des partenaires sociaux transposées dans le PLFSS pour en évaluer la crédibilité ?

D’autre part, la dernière étape de la réforme des allégements généraux des cotisations sociales entre en vigueur le 1er janvier 2026. Quel surcroît de recettes pourrait-elle apporter à la sécurité sociale ? Concernant la sous-compensation évidente des allégements généraux évoquée par la Cour des comptes, des mesures de rééquilibrage doivent-elles être prises dans le PLFSS, avec des effets sur les budgets de la sécurité sociale et de l’État ?

Je terminerai sur la prévention – une politique de santé que tout le monde souhaite renforcer –, sur laquelle je déposerai un amendement pour la séance.

Vous connaissez sûrement le film américain Minority Report, qui montre une société organisée autour d’un logiciel capable de prévoir les crimes. Le film montre bien sûr que le logiciel est défaillant et que les gens jetés en prison sur la base de ces prévisions sont en réalité innocents, mais l’idée de prévoir l’avenir grâce à une base de données me paraît intéressante.

Dans mon hôpital, en analysant les données non anonymisées de l’assurance maladie sur les deux dernières années, nous avons prouvé qu’il était possible de prévoir un risque de mort subite avec un taux de 25 % de concordance positive. Nous sommes donc désormais capables de prévoir dans les six mois qui fera un arrêt cardiaque.

Or, si nous identifions les personnes à risque, nous pouvons les soumettre à une politique de prévention plus efficace en les orientant vers des dépistages ou des médecins spécialisés. Il est tout à fait probable que l’amélioration de ces techniques nous permette d’appliquer cette politique à d’autres maladies comme les cancers, nous évitant par exemple de réaliser 2,5 millions de mammographies par an pour ne dépister que 20 000 cancers du sein.

La data va ainsi bouleverser les politiques de prévention, en remplaçant les carnets à spirale et les recommandations des médecins traitants. Nous pourrions passer à quelque chose de très puissant ! Mon amendement de consultation numérique permettra aux individus de demander une consultation sur la base des données de l’assurance maladie.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Monsieur le président, vous dites que l’État devrait reprendre les dépenses générées pendant la crise sanitaire. Mais l’État, c’est nous ! Ces dépenses, et les mesures prises depuis – qui auraient d’ailleurs pu être plus énergiques – ont été décidées par des Françaises et des Français eux-mêmes choisis par l’ensemble des Françaises et des Français.

Par ailleurs, les mesures adoptées pour régler la dette de l’État consistent à faire peser l’effort sur les entreprises, au risque que cela se répercute sur l’emploi et les recettes sociales. Il me semble donc que si l’État devait reprendre la dette de la Cades, on finirait par aggraver le problème.

D’autre part, il faut raison garder en ce qui concerne les CHSCT. Les dispositifs installés pour leur succéder continuent à protéger les salariés et les agents de la fonction publique : nous n’avons d’ailleurs jamais fait autant pour améliorer les conditions de travail. L’espérance de vie, notamment en bonne santé, progresse. Face à la dérive des arrêts maladie, il faut s’interroger sur les règles, les incitations et les sanctions. Penser qu’il n’y a rien à dire alors que les arrêts maladie ont été multipliés par trois, c’est se voiler la face.

Ceux qui ont demandé la suspension de la réforme des retraites, et a fortiori son abrogation, en font effectivement payer le prix aux retraités. La question de savoir s’il vaut mieux faire payer les retraités ou les actifs me laisse sceptique : si les actifs font payer les retraités, ils paieront eux-mêmes le prix de leurs réformes quand ils seront à la retraite. Seules des mesures systémiques qui font grossir le gâteau permettront d’éviter des coupes sombres.

Monsieur le rapporteur général, oui, il faut que toutes les mesures concernant la baisse des dépenses – ou du moins leur ralentissement – soient crédibles et s’appliquent. Je rappelle que seules 75 % des mesures prévues pour 2024 ont été réellement mises en œuvre. Si des mesures préconisées – dont le chiffrage est déjà fragile et qui dépendent de l’inflation et de l’évolution de la masse salariale – ne sont pas appliquées, on ne peut pas s’attendre à de bons résultats.

Le gouvernement prévoit 9,1 milliards d’économies pour 2026, après 4,3 milliards pour 2025 : la marche est deux fois plus haute.

Parmi les principales mesures figurent le doublement des participations forfaitaires et des franchises, pour un montant de 2,3 milliards d’euros, et les effets de la baisse du plafond des indemnités journalières de l’assurance maladie adoptée en 2025, évalués – pour la première fois en année pleine – à 600 millions d’euros. Les établissements sanitaires contribueront à hauteur de 700 millions d’euros.

S’agissant des allégements généraux, l’État récupère la totalité des économies liées aux exonérations qui étaient auparavant compensées par le transfert d’une fraction de la taxe sur la  valeur ajoutée (TVA).

Enfin, du côté de la santé, j’invite monsieur le rapporteur général du budget à nous faire suivre la liste de tous les membres de la commission qui pourraient faire un arrêt cardiaque dans les six mois !

M. le président Éric Coquerel. Je n’ai pas été assez précis sur la dette de la Cades. Vous avez dit vous-même, monsieur Berger, que les mesures prises pendant le covid avaient été décidées par l’État – par nous, représentants des Français. Rien que cela interroge sur le fait de les faire peser sur la sécurité sociale.

Que la dette sociale reste à la Cades est ensuite une très mauvaise affaire pour la collectivité : il faut en effet rembourser le stock de cette dette, ce qui n’est pas le cas de celle de l’État, et cela coûte plus cher.

Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Matthias Renault (RN). Sur la méthode, nous imaginons que, comme pour le projet de loi de finances (PLF), les dispositions du PLFSS passeront par ordonnance en vertu de l’article 47-1 de la Constitution, et que c’est donc la copie déposée par le gouvernement qui sera appliquée en 2026.

Monsieur le président, vous oubliez à propos du déficit les transferts de l’État vers la sécurité sociale et sa fiscalisation rampante. Dire qu’il n’existerait pas de déficit si on jouait sur la comptabilité de la Cades me semble illusoire.

La copie présentée par le gouvernement est effectivement un musée des horreurs. D’abord, une année blanche – prévue dès 2023, quand la première ministre Élisabeth Borne a saisi l’Inspection générale des finances (Igf) et l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) pour étudier ses conséquences sur les retraites et les prestations sociales pour le budget 2025.

Ensuite, des mesures de fonds de tiroir, comme la fiscalisation des ALD et le doublement des franchises, et qui tapent sur le travail, comme la taxe de 8 % sur les compléments salariaux – dont les titres-restaurant – et la fin des exonérations de cotisations salariales en faveur des apprentis. Le ministre du travail a d’ailleurs déclaré que tout travail méritait cotisation – vision quasi communiste selon le principe du « travailler plus pour taxer plus ».

Ce sont donc encore les vieilles recettes qui empêchent de prendre à bras-le-corps les véritables enjeux : la débureaucratisation de la sécurité sociale et de la santé, la relance de l’activité économique et l’installation de la préférence nationale.

M. Guillaume Kasbarian (EPR). Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026 est avant tout un effort de redressement – des comptes, des habitudes et du courage politique.

La sécurité sociale n’est plus un rempart mais une digue fissurée. Elle dépense plus qu’elle ne protège, promet plus qu’elle ne peut tenir, et s’endette sur le dos de ceux qui travaillent.

Le déficit atteindra encore 23 milliards d’euros cette année, un gouffre creusé par des décennies de laisser-aller budgétaire. Le ramener à 17,4 milliards d’euros en 2026 et viser l’équilibre en 2029 n’est pas un exploit, mais le minimum vital. Le groupe Ensemble pour la République soutient cette trajectoire de responsabilité.

Nous approuverons les mesures de redressement proposées par le gouvernement : le doublement des franchises médicales, car rien n’est jamais gratuit ; la limitation des arrêts de travail, car les abus de quelques-uns ruinent la solidarité collective ; la réduction des abus dans certains secteurs médicaux, car les contribuables, les assurés, les usagers ne sont pas là pour amplifier des rentes ; la conditionnalité des financements hospitaliers à l’efficacité, car chaque euro public doit servir le patient et non la bureaucratie ; enfin, la simplification des allégements de cotisations, car le travail doit payer plus.

Ces mesures demandent des efforts, mais le confort du statu quo est un poison lent. Notre système hypertrophié menace désormais de s’effondrer sous son propre poids.

Quant aux prestations et pensions, le gel temporaire n’est pas une injustice mais un acte de lucidité : nous refusons d’hypothéquer l’avenir des jeunes au nom du confort.

À l’inverse, nous rejetterons tous les amendements visant à augmenter les cotisations et à inventer des recettes magiques : la France détient déjà le record des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en matière de prélèvements obligatoires ; chaque ponction supplémentaire asphyxie un peu plus la croissance économique et retire un peu plus de liberté aux Français.

M. Damien Maudet (LFI-NFP). C’est de son manque de recettes que souffre la sécurité sociale. Alors que les cotisations sociales représentaient 90 % de ses recettes dans les années 1990, elles n’en représentent plus que 50 %. Les entreprises ont bénéficié d’exonérations de cotisations sociales qui, en proportion, ont surtout profité aux plus grandes. Ce sont les Français qui compensent ces exonérations, par l’intermédiaire de la TVA : leurs impôts comblent donc le trou de la sécu.

Ce PLFSS leur demande de payer encore davantage : taxe sur les apprentis – qui touchent moins de 1 000 euros par mois et seront taxés de plus de 100 euros –,axe sur les titres‑restaurants, gel du barème de la contribution sociale généralisée (CSG), qui revient à une hausse, en particulier pour les retraités, hausse des restes à charge, etc.

Selon la Fédération hospitalière de France, il manque aussi 1 milliard d’euros pour l’hôpital public. Et même le budget visant à augmenter les capacités des services de néonatalité pour réduire la mortalité infantile est rogné, alors que 23 % des bébés concernés ne peuvent y être acceptés faute de place !

Puisque vous rechignez à demander des efforts à ceux qui ont des moyens, ces efforts seront reportés sur les services publics, les prestations sociales et les taxes de tous les Français. Vous nous accusez d’avoir la maladie de la taxe, mais quand il s’agit de taxer les apprentis, vous le faites sans difficulté !

Nous rejetterons donc ce PLFSS et les horreurs voulues par le gouvernement.

Mme Estelle Mercier (SOC). Ce PLFSS est un plan d’ajustement social dont les Français les plus fragiles seront les premières victimes.

Le gouvernement avoue lui-même un déficit de 23 milliards d’euros en 2025, un niveau inédit hors crise sanitaire, et propose de le combler non par une réforme du financement, mais en faisant payer les plus fragiles.

Plus de 10 milliards d’euros d’économies sont ainsi faites sur les malades, les retraités, les personnes en situation de handicap, les familles et, de façon générale, les plus modestes. Ce sont eux que l’année blanche, avec le gel des pensions de retraite et des prestations sociales, touchera en particulier, et cela pour plusieurs années, puisque la sous-indexation est prévue jusqu’en 2030.

Le PLFSS propose aussi, pour 2,3 milliards d’euros, de doubler le montant des franchises médicales et des participations forfaitaires, ce qui aggravera les difficultés de ceux qui peinent déjà à se faire soigner correctement. Un Ondam particulièrement bas plongera le service public de l’hôpital dans une austérité sans précédent, avec une tarification négative.

S’y ajoutent la fiscalisation des salaires des apprentis, des titres-restaurants, des chèques pour les loisirs – qui réduira, elle aussi, le pouvoir d’achat des familles.

L’enjeu du déficit de la sécurité sociale ne concerne pas uniquement le PLFSS, mais relève plus largement de la justice fiscale, comme la première partie du PLF.

Ce PLFSS demande beaucoup à ceux qui ont peu et peu à ceux qui ont beaucoup. Les 80 ans de la sécurité sociale sont un bien triste anniversaire quand on voit combien le principe de solidarité nationale est attaqué et qu’on préfère faire porter les efforts sur les classes populaires pour protéger les milliardaires.

M. Nicolas Ray (DR). Comme cela vient d’être rappelé, nous célébrons les 80 ans de la sécurité sociale, issue du Conseil national de la Résistance. Nous sommes tous très attachés à ce modèle, dans lequel chacun bénéficie selon ses besoins et contribue selon ses moyens. Il est financé par le travail, et le problème que nous rencontrons découle d’un taux d’emploi insuffisant. Si ce taux était plus élevé, nous aurions plus de recettes pour financer le système.

En effet, les déficits dérapent, avec 23 milliards d’euros en 2025 et 17 milliards d’euros l’année prochaine. Cette situation ne permet pas de garantir la soutenabilité de notre modèle. Il faut donc faire des efforts justes mais partagés.

On ne peut pas dire que ce budget de la sécurité sociale soit un budget d’austérité, puisque les dépenses de santé vont continuer à augmenter de 5 milliards d’euros – sûrement à juste titre, notamment s’agissant des établissements pour personnes âgées.

Il faut faire preuve de responsabilité pour garantir la pérennité de notre modèle. Nous nous opposerons bien sûr à certaines dispositions, comme la suppression des exonérations de charges sur les titres-restaurant et les compléments de salaire, car c’est une mesure contre la France qui travaille. Nous nous interrogeons beaucoup sur le financement de la suspension de la réforme des retraites. Cette mesure va conduire à une baisse du pouvoir d’achat, puisque son coût est compensé par la désindexation des retraites et par une surtaxe sur les mutuelles qui se traduira par la hausse de leurs tarifs.

Nous faisons quelques propositions pour freiner la détérioration des comptes. Le coût des arrêts maladie dérape, puisqu’il s’élève à 17 milliards d’euros. Comme l’a relevé le rapporteur pour avis, cela n’est pas du tout lié à une dégradation des conditions de travail, mais bien à un certain nombre d’abus auxquels il faudra remédier.

Nous combattons pour assurer la pérennité de notre modèle social et nous ferons pour cela des propositions justes d’efforts partagés.

M. Tristan Lahais (EcoS). Je fais mienne l’expression d’Estelle Mercier : il s’agit d’un budget d’ajustement social. Au fond, ce texte participe d’une vaste réforme, en cours depuis des années, qui consiste à ajuster le coût du travail et notre modèle social aux standards exigés par la compétition internationale. On l’a vu à l’occasion des réformes des retraites et de l’assurance chômage, mais aussi dans l’évolution année après année des budgets de la sécurité sociale, qui ne tiennent pas compte de la croissance des besoins – en particulier du vieillissement de la population. Celui-ci devrait pourtant conduire à mettre davantage l’accent sur les politiques sociales, ne serait-ce que pour maintenir la qualité des prestations du service public.

Tel n’est pas le cas, car vous adhérez à une orthodoxie qui consiste à limiter, voire à réduire, la part dans le PIB des moyens publics et socialisés consacrés à l’ensemble des missions de la sécurité sociale. C’était d’ailleurs tout le problème du conclave sur les retraites, dont les conclusions devaient impérativement respecter la ligne rouge consistant à ne pas dépasser un niveau donné de dépenses par rapport au PIB.

Les difficultés auxquelles nous sommes confrontés du fait de l’évolution de la démographie et du vieillissement devraient conduire à dégager des moyens croissants en faveur des dépenses d’assurance maladie ou de pensions.

Nous considérons qu’un autre chemin est possible. Les déficits rapportés au budget sont somme toute modestes et il faut plutôt s’interroger sur le fondement de vos politiques économiques. Je pense en particulier au montant exorbitant des exonérations de cotisations sociales. Il y a du ménage à faire, ce qui permettrait de financer bien davantage la sécurité sociale.

Mme Perrine Goulet (Dem). Pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale, on compte plus de décès que de naissances dans notre pays, ce qui va avoir des conséquences sur la sécurité sociale et ses cinq branches.

S’agissant de la branche maladie, le vieillissement de la population a un effet sur le nombre des personnes en ALD et sur leurs pathologies, qui représentent actuellement 82 % des dépenses. Il n’est pas déplacé d’examiner comment prévenir, comment éviter que les Français développent ces pathologies dont on sait qu’ils guérissent trop rarement.

Certaines autres dépenses peuvent être révisées ou améliorées. Mais il faut prendre garde à ne pas toujours faire reposer l’effort sur le prix des médicaments et sur les pharmaciens, qui sont souvent le seul rempart face à la désertification médicale. Chacun doit être mis à contribution à hauteur de ses possibilités et de ses responsabilités – les Français, les établissements de santé, les professionnels médicaux et paramédicaux, les mutuelles et les professionnels liés à la technique médicale dans le domaine de la santé.

En ce qui concerne la branche retraite, nous consentirons à suspendre la réforme des retraites au nom de la stabilité du pays. Nous avions proposé et voté cette réforme non pas pour ennuyer les Français, mais par esprit de responsabilité, afin d’assurer le financement d’un système qui va arriver à bout de souffle du fait du déséquilibre croissant entre actifs et retraités. C’est la raison pour laquelle il faudra trouver les moyens de financer cette suspension. Nous souhaitons qu’elle ne remette pas en cause les avancées que nous avions votées s’agissant des carrières et des pensions des femmes, des carrières longues et des retraites progressives. Nous souhaitons que l’on avance sur la simplification du cumul emploi-retraite.

J’en viens à la branche famille. Nous devons accompagner les couples qui veulent avoir des enfants. L’instauration d’un congé de naissance supplémentaire, plus long, partagé entre les parents et mieux rémunéré, est une belle avancée de ce PLFSS. Mais nous devons aussi maintenir les possibilités d’intervention de la politique familiale, afin notamment de mettre en place le service public de la petite enfance, qui est tant attendu.

Comme pour tous les textes budgétaires, Les Démocrates agiront pour que notre modèle social – dont les dépenses ne font qu’augmenter – soit préservé, tout en mettant en œuvre les mesures nécessaires à son amélioration mais également à la pérennité de son financement.

M. François Jolivet (HOR). Monsieur le président, je suis heureux de vous avoir entendu expliquer que les comptes de la sécurité sociale n’étaient pas vraiment en mauvaise santé. Nous prenons acte de vos propos, qui surprendront sans doute ceux qui nous regardent.

Le groupe Horizons & indépendants considère que nous ne pouvons pas emprunter notre niveau de vie et financer nos turpitudes individuelles par l’emprunt en laissant la dette à nos enfants.

Nous sommes donc assez sceptiques à propos de la suspension de la réforme des retraites. Nous constatons que la spécificité française consiste en fait peut-être à s’exonérer du principe de réalité, que tous nos voisins respectent pourtant. C’est la raison pour laquelle nous serons très vigilants sur la suspension de cette réforme. En revanche, nous proposerons de revaloriser les petites retraites inférieures au smic.

Concernant la branche maladie, nous soutiendrons les réformes structurelles. Nous nous interrogeons toutefois au sujet du ratio entre personnels soignants et fonction support dans l’ensemble des établissements de santé. Nous devrions revoir l’organisation de ces derniers grâce à des réformes plus massives, surtout avec l’arrivée de l’intelligence artificielle.

Nous exprimons des doutes sur la trajectoire de l’Ondam, puisque les inquiétudes dont nous avions fait part l’an dernier se vérifient cette année. Sans remettre en cause la sincérité du budget présenté ni le travail mené par l’ensemble de ceux qui l’ont construit, nous pouvons vraisemblablement nous attendre à un nouveau dérapage l’an prochain.

Comme d’autres, nous serons contre la taxation du travail.

On a tendance à parler toujours du régime général, et jamais des retraites complémentaires – sans doute parce que nous sommes amenés à prendre des positions en fonction des retraités, qui votent. Mais nous ne nous interrogeons jamais sur la stratégie de l’Agirc-Arrco qui, elles, n’augmenteront pas les pensions complémentaires cette année. Sans doute faut-il s’inspirer de cette autre manière de gérer les retraites.

M. Charles de Courson (LIOT). Le PLFSS pour 2026 affiche encore un déficit élevé de 17,5 milliards, après 23 milliards en 2025. En première analyse, cela représente une réduction de 5,5 milliards. Mais, comme l’a expliqué le rapporteur pour avis, le déficit tendanciel atteignait 28,7 milliards d’euros et l’effort qui nous est proposé représente de ce fait 11 milliards d’euros.

Cet effort porte surtout sur la branche santé, avec 7 milliards d’euros, ainsi que sur les retraites, pour environ 4 milliards d’euros.

Cette amélioration apparente repose davantage sur des mesures conjoncturelles de freinage que sur de vraies réformes structurelles.

En matière de retraites, la grande réforme structurelle consisterait à établir un régime unique sur la base du régime général – rêve du Conseil national de la Résistance –, au moins pour tous les salariés du public et du privé, en mettant en extinction tous les autres régimes. Il conviendrait aussi de transformer le régime général en régime à points, ce qui est tout à fait possible, et d’en confier la gestion aux partenaires sociaux. Ces derniers gèrent en effet les retraites complémentaires bien mieux que l’État ne l’a fait pour les régimes de retraite de base.

Pour notre groupe, deux principes doivent guider toute politique relative au financement de la protection sociale : la solidarité sociale et la responsabilisation des acteurs.

S’agissant de la solidarité, nous sommes d’accord sur la nécessité de redresser les comptes, mais pas en fragilisant les plus modestes. Le gel des prestations et des retraites représente 3,6 milliards d’euros d’économies, au prix d’une érosion du pouvoir d’achat. Nous souhaitons que les petites retraites continuent à être indexées. On peut demander de faire un effort, mais pas à des personnes qui perçoivent moins de 1 800 euros par mois. C’est la raison pour laquelle nous sommes contre la mesure de gel général – de même que nous nous sommes opposés au gel du barème de l’impôt sur le revenu lors de la discussion du PLF. Nous étions favorables à une indexation de sa première tranche. Il a été décidé d’indexer l’ensemble de ce barème, ce qui ne me paraît pas à la hauteur de l’enjeu. Il en est de même pour l’indexation des trois tranches du barème de la CSG sur les revenus de remplacement.

L’Ondam augmente de seulement 1 %, ce qui impose 7 milliards d’euros d’économies aux hôpitaux et aux Ehpad, qui connaissent de graves difficultés. De toute manière, l’Ondam est purement indicatif. La Fédération hospitalière de France estime qu’en 2025 le déficit de fonctionnement des seuls hôpitaux publics s’élèvera à 3 milliards d’euros. Accepter cela revient à ne pas respecter celles et ceux qui sont aux côtés des malades.

M. Gérault Verny (UDR). Ce PLFSS est présenté comme un texte de responsabilité budgétaire, mais la réalité est tout autre.

Le gouvernement nous propose un budget toujours déficitaire, sans retour à l’équilibre pour la sécurité sociale. En 2026, le déficit atteindra encore 17,5 milliards d’euros et il restera supérieur à 16 milliards par an jusqu’en 2029. Ce décrochage est d’autant plus alarmant qu’il repose sur des choix faits contre les Français : hausse des franchises médicales et sous‑indexation durable des pensions, qui seront même gelées en 2026 – soit 3,6 milliards d’euros d’économies sur le dos des retraités. Le montant du reste à charge est doublé pour de nombreux soins et le gouvernement s’attaque aux arrêts maladie sachant que plus de 70 % du déficit provient de la branche maladie.

Les réponses ne sont pas apportées par des réformes structurelles, mais par de nouvelles taxes.

Les complémentaires santé seront mises à contribution par le biais d’une surtaxe portée à 2,25 %, qui sera fatalement répercutée sur les assurés. Les employeurs et les salariés seront touchés par l’extension du forfait social aux titres-restaurant et aux autres avantages sociaux. La branche famille est ponctionnée pour financer les dérives d’autres branches, alors que notre démographie s’effondre et que cette branche est la seule excédentaire. Comment prétendre améliorer le système de retraite si l’on affaiblit encore notre politique familiale ?

Quelques mesures vont dans le bon sens – je pense notamment à l’extension du congé parental et à la lutte contre les arrêts de travail de complaisance –, mais c’est malheureusement l’arbre qui cache la forêt. Au fond, ce texte manque de vision, de courage et, surtout, de cohérence. Il demande toujours plus aux Français qui cotisent, sans améliorer la qualité du service qui reçoivent.

Pour toutes ces raisons, notre groupe est très opposé à ce PLFSS.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Monsieur Renault a évoqué un éventuel recours aux ordonnances. Il est dommage qu’alors que le premier ministre a accepté de renoncer à l’utilisation du 49.3, nous ne soyons pas tous optimistes sur notre capacité à prendre nos responsabilités pour arriver à un vote final satisfaisant.

Beaucoup d’entre vous ont dit à quel point ils n’étaient pas d’accord avec un certain nombre des solutions proposées. Il ne tient qu’à nous de les corriger pour améliorer ce projet de budget et pouvoir l’adopter. À défaut, nous devrons nous en remettre à une loi spéciale pour autoriser le plafond d’emprunt de l’Acoss.

Je reviens sur le sujet du solde de l’Acoss. Les remboursements permettent d’éteindre progressivement la dette sociale par l’intermédiaire de la Cades. Mais l’augmentation de la dette de l’Acoss est chaque année supérieure à ces remboursements. Si nous n’arrivons pas à inverser cette tendance, on finira par tuer le système.

On peut être d’accord avec l’analyse de monsieur Renault selon laquelle le travail est trop taxé. Mais pourquoi faudrait-il dispenser certains travailleurs plutôt que les autres ? Pourquoi ne pas traiter tout le monde à égalité ? C’est la – bonne – question qui est posée par ce texte.

Monsieur Kasbarian a eu recours à l’image de la digue fissurée. Les efforts sont demandés à ceux qui travaillent, mais aussi à ceux qui ont travaillé et à ceux qui travailleront et qui ne sont pas encore en âge de le faire, car si l’on ne règle pas le problème maintenant, on le transfère aux générations futures.

Il y a certainement des abus et il faut y mettre fin. Il n’y a rien de choquant à cela, parce que rien n’est gratuit et qu’il y a toujours quelqu’un qui paye – en l’occurrence les Français.

Admettons que le gel des retraites soit adopté – pourquoi pas ? –, mais à ce moment‑là, ne demandons pas par avance aux retraités de subir de futures années blanc cassé, caractérisées par une sous-indexation de leurs pensions qui ne se justifie en rien. Donc non à l’année blanche comme aux années blanc cassé qui suivraient.

Les orateurs de La France insoumise et du groupe socialiste ont dit leur désaccord avec un certain nombre des solutions proposées. À la place, ils souhaitent que l’on revienne sur les exonérations de cotisations patronales. Ces cotisations représentent 330 milliards d’euros et les exonérations 80 milliards d’euros, soit 410 milliards d’euros en tout. Notre système de protection sociale est financé dans une proportion considérable par les entreprises. Laisser penser qu’il y aurait 80 milliards d’euros de « cadeaux » aux entreprises masque la réalité. Comme nous devons faire face à la concurrence internationale, si nous étouffons les entreprises, les créations d’emplois auront lieu ailleurs. Vous tuez le système que vous entendez défendre.

J’ajoute que ces 80 milliards d’euros d’exonérations sont compensés à hauteur de 97 % par l’État. Ce dernier participe donc très fortement au financement de la sécurité sociale.

Madame Mercier a appelé de ses vœux une réforme juste. Il va falloir trouver des solutions pour la faire, car on voit bien que, si l’État récupère cette année 9 milliards d’euros de compensations en réduisant certaines exonérations, on ne règle pas le problème du déficit de 17,5 milliards d’euros de la sécurité sociale – qui s’élèverait à 28,7 milliards si l’on ne prenait aucune mesure de redressement.

Je ne suis pas d’accord lorsque vous dites que l’Ondam est particulièrement bas. En effet, il continue de progresser plus vite que l’inflation. Quand une famille, une collectivité ou une entreprise fait face à de grandes difficultés financières, la première chose que l’on fait avant de dépenser moins est d’arrêter de dépenser plus. Pourtant, malgré les mesures de freinage, en matière de sécurité sociale, nous continuons à dépenser plus. Pire encore, vous faites partie de ceux qui proposent des mesures qui aggravent la situation – en particulier la suspension-décalage de la réforme des retraites.

Vous ne pouvez pas dire qu’il y a un problème, proposer une solution qui ne le règle pas et ajouter des mesures qui aggravent les choses.

Comme l’a dit Nicolas Ray, si le taux d’emploi était plus élevé et le gâteau à partager plus gros, nous n’aurions pas le problème que nous connaissons. On compare souvent le taux d’emploi de la France avec celui de l’Allemagne. On voit que des solutions sont à portée de main. Nous sommes les seuls à avoir adopté les 35 heures. Si l’idée était tellement bonne, pourquoi n’avons-nous été imités par personne depuis les lois Aubry ? Notre pays n’a pas choisi la bonne durée de cotisation pour la retraite et l’on parle de faire le chemin inverse de celui emprunté par les autres pays européens, qui prévoient un âge de la retraite à 65 ou 67 ans – voire 70 ans en 2040 pour certains d’entre eux –, parce que l’évolution de l’espérance de vie est implacable.

Nous sommes bien entendu dans une compétition internationale, monsieur Lahais, dans laquelle le coût du travail est une donnée centrale pour espérer avoir un système de protection sociale qui fonctionne. Le besoin croissant de dépenses sociales est certes lié à l’allongement de l’espérance de vie, mais vous ne voulez pas tenir compte de celle-ci pour déterminer la durée de cotisation. Quand on avait quatre cotisants pour un retraité, comme en 1970, cela permettait de partager la charge de la solidarité. Mais quand ce ratio passe à 1,5 cotisant pour un retraité, voire à 1, cela signifie que vous demandez à chacun des travailleurs que vous entendez défendre de financer tout seul la charge de la solidarité pour un retraité. C’est exactement ce que vous proposez.

Je suis d’accord avec Madame Goulet : il n’y a pas, d’un côté, les gentils généreux qui veulent suspendre la suspendre la réforme des retraites pour permettre aux Français de travailler et d’affronter cette épreuve le moins longtemps possible et, de l’autre, les méchants réformateurs qui voudraient faire travailler les Français plus longtemps à grands coups de fouet. Ceux qui sauvent notre modèle de protection sociale sont les personnes responsables à qui les générations futures pourront dire merci.

Monsieur Jolivet a rappelé à juste titre le principe de réalité. J’y ai renvoyé en mettant en avant des données concernant le temps de travail hebdomadaire, la durée de cotisation et la part des cotisations que l’on demande aux uns et aux autres de supporter. Pour arriver à des solutions moins pénalisantes, il faut proposer des réformes plus courageuses – notamment en s’inspirant des systèmes de gestion qui fonctionnent.

Monsieur de Courson, il faut en effet procéder à des réformes structurelles. Le problème est d’arriver à les mener tout en prenant des mesures conjoncturelles. On a bien vu que la tentative d’instauration de la retraite à points avait échoué parce que l’on disait aux Français qu’il s’agissait d’une mesure de justice alors qu’en réalité, on cherchait à combler les trous dans la caisse en déplaçant des curseurs.

Je suis défavorable au fait de rétablir l’indexation sur l’inflation seulement pour les petites retraites, car si l’on continue dans cette voie pendant de nombreuses années, on aboutira à une uniformisation des pensions. C’est très injuste pour ceux qui auront cotisé davantage. Mais c’est aussi un très mauvais signal envoyé aux générations actuelles et à ceux qui travaillent. Pourquoi travailler plus et cotiser plus si l’on sait que l’on aura exactement la même pension que ceux qui ne le font pas ?

Je me félicite que Monsieur Verny soit favorable aux mesures de lutte contre les arrêts de travail de complaisance.

En revanche, je suis très réservé sur l’extension du congé parental. Je ne vois pas comment on peut se permettre ce type de largesse dans la situation actuelle. Nous sommes bien sûr tous favorables au principe, mais nous n’avons pas un sou vaillant et ce n’est absolument pas le bon moment d’ajouter plusieurs centaines de millions de dépenses.

J’observe que Monsieur Verny ne propose aucune solution. J’imagine qu’il n’est pas favorable à la baisse des exonérations proposées par la gauche, mais je ne vois pas dans son propos comment on règle le problème de la sécurité sociale.

M. le président Éric Coquerel. Il est bon de s’appuyer sur des données objectives.

Selon Eurostat, le nombre d’heures travaillées par semaine pour les personnes qui ont un emploi à plein temps s’élève à 39,9 heures en France, alors que la moyenne est de 40,2 heures dans la zone euro. Nous sommes très proches de l’Allemagne et de douze autres pays européens. Depuis 2017, la durée hebdomadaire de travail a baissé de 30 minutes en France, alors que cette baisse est de 1 heure dans la zone euro. Telles sont les données objectives.

J’ajoute que nous avons pratiquement le même niveau de dépenses sociales par habitant qu’en Allemagne.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Je rappelle quelques ordres de grandeur. Les retraites représentent 14 % du PIB en France, contre 10 % pour les autres pays européens en moyenne, dont l’Allemagne. L’OCDE estime pour sa part que l’on travaille 100 heures de moins par an en France qu’en Allemagne, soit trois semaines complètes.

M. le président Éric Coquerel.  L’indicateur retenu par l’OCDE est différent, car il consiste à diviser le nombre total d’heures travaillées par l’ensemble de la population, et pas seulement par les personnes en emploi.

Article liminaire : Prévisions de dépenses, de recettes et de solde des administrations de sécurité sociale pour 2025 et 2026

Amendement de suppression CF26 de Mme Ségolène Amiot

Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). C’est la première fois qu’un article liminaire – il n’existe que depuis 2023 – fait état d’un déficit.

Pourtant, l’Agirc-Arcco est excédentaire de 4,6 milliards d’euros et garde en réserve plus de 85 milliards d’euros. On aurait donc pu prévoir une augmentation des retraites complémentaires, mais le Medef s’y est opposé.

De son côté, l’Unedic est légèrement déficitaire, de 100 millions d’euros. Mais ce déficit est artificiel, puisqu’il résulte d’une politique du gouvernement. En effet, 5 milliards d’euros de recettes de l’Unedic sont versées à France Travail alors qu’elles devraient normalement servir à l’indemnisation du chômage.

Sans cette ponction, le solde des administrations de sécurité sociale aurait été excédentaire. Si l’État arrêtait de piquer dans la caisse, nous pourrions avancer.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Avis défavorable.

Ce type d’amendement de suppression devient une mauvaise habitude. Il va à l’encontre de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale. On ne peut pas se payer ce luxe. Cela n’est pas sérieux, ni sur le fond ni sur la forme.

Vous prétendez que nous subissons une cure d’austérité sociale au nom d’une forme d’ultralibéralisme à la française. Je rappelle que notre taux de prélèvements obligatoires est ultra-élevé et qu’il continuera à progresser en 2026 – et je ne parle même pas des augmentations d’impôts qui ont été votées hier en séance.

Il en est de même pour les dépenses des administrations publiques, qui continuent à augmenter. Comme je l’ai déjà dit, la première chose à faire en période de crise est d’arrêter de dépenser plus, mais nous en sommes loin. Ce constat vaut également pour le champ social, car les dépenses des administrations de sécurité sociale progressent.

M. Damien Maudet (LFI-NFP). Cet article a été rejeté par la commission des affaires sociales.

Le rapporteur pour avis a estimé tout à l’heure qu’au fond les exonérations de cotisations étaient une paille dans l’ensemble des cotisations versées, puisqu’elles sont largement compensées.

Pourtant, sur les 4,8 milliards d’euros supplémentaires de déficit en 2024, 70 % étaient dus au manque de recettes. Et sur le déficit total de 15 milliards d’euros cette même année, 5 milliards résultaient de l’absence de compensation par l’État des exonérations de cotisations sociales. Ce ne sont pas les dépenses qui aggravent le déficit, mais bien le manque de recettes.

La commission adopte l’amendement, exprimant ainsi un avis favorable à la suppression de l’article liminaire.

PREMIÈRE PARTIE :

Dispositions relatives aux recettes et à l’équilibre général de la sécurité sociale pour l’exercice 2025

Article 1er : Rectification des prévisions de recettes, des tableaux d’équilibre et des objectifs de dépenses pour 2025

Contre l’avis du rapporteur pour avis, la commission adopte l’amendement de suppression CF27 de M. Hadrien Clouet, exprimant ainsi un avis favorable à la suppression de l’article 1er.

Article 2 : Rectification de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie
et de ses sous-objectifs pour 2025

Amendement de suppression CF28 de Mme Élise Leboucher

M. Damien Maudet (LFI-NFP). Cet article rectifie l’Ondam et ses sous-objectifs pour 2025, c’est-à-dire notamment les budgets alloués à la santé. Nous considérons qu’ils ne correspondent pas aux besoins ; c’est pourquoi nous proposons de supprimer cet article.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Supprimer l’article qui propose de rectifier l’Ondam pour 2025 est une très mauvaise idée. Penser que cela va régler le problème relève d’une illusion d’optique.

La commission adopte l’amendement, exprimant ainsi un avis favorable à la suppression de l’article 2.

En conséquence, l’amendement CF52 de M. Henri Alfandari tombe.

Article 3 : Rectification de la contribution des régimes d’assurance maladie
au fonds pour la modernisation et l’investissement en santé pour 2025

La commission émet un avis défavorable à l’adoption de l’article 3.

La commission ayant émis un avis défavorable aux articles 1er à 3, elle exprime ainsi un avis défavorable à l’adoption de la première partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

DEUXIÈME PARTIE :

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE GÉNÉRAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2026

TITRE Ier : dispositions relatives aux recettes, au recouvrement et à la trésorerie

Article 4 : Amélioration des capacités juridiques du recouvrement

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 4 non modifié.

Article 5 : Simplifier l’affiliation, la déclaration de revenu, l’action sociale et la gouvernance de la sécurité sociale des artistes-auteurs

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 5 non modifié.

Article 6 : Gel des seuils de revenus pris en compte pour le calcul de la contribution sociale généralisée portant sur certains revenus de remplacement

Amendements de suppression CF58 de M. Jean-Didier Berger et CF30 de Mme Ségolène Amiot

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Je propose de supprimer cet article parce que je considère que l’effort qui est demandé aux retraités n’est pas adapté à la situation.

M. Aurélien Le Coq (LFI-NFP). Par cet amendement, nous proposons de supprimer le gel du seuil des taux réduits de la CSG, afin de rétablir l’indexation sur l’inflation de l’ensemble de son barème.

Les débats qui ont lieu actuellement dans l’hémicycle montrent que le gouvernement refuse d’augmenter les impôts des plus riches, mais qu’il n’hésite pas à taxer les retraités par cet article. Une personne dont la pension s’élève à 1 070 euros – qui est donc loin d’être riche – deviendrait redevable de la CSG, ce qui lui coûterait 550 euros par an. De même, une personne dont la pension est de 1 400 euros par an devrait payer 500 euros d’impôt sur le revenu par an.

On est très loin de la justice.

Mme Perrine Goulet (Dem). Cet article n’est pas optimal. Nous aurions préféré que la mesure concerne davantage certaines tranches.

Mais, en supprimant cet article, vous faites des cadeaux aux riches, puisque cela revient à indexer l’ensemble du barème de la CSG, y compris pour les revenus du capital.

M. le président Éric Coquerel. J’ai une vision universelle des impôts : la même chose doit être appliquée à tout le monde – évidemment de manière progressive – et si on rétablit une mesure qui peut paraître favoriser les plus aisés, il faut, pour qu’on y consente à tous les bouts de l’échelle, qu’elle soit globale. En l’occurrence, il est injuste pour la plupart des Français que la CSG ne soit pas indexée. Il faut donc supprimer cet article.

La commission adopte les amendements CF58 et CF30, émettant ainsi un avis défavorable à l’adoption de l’article 6.

En conséquence, les amendements CF23 de Mme Estelle Mercier, CF57 de M. JeanDidier Berger et CF4 de M. Fabrice Brun tombent.

Après l’article 6

Amendement CF31 de M. Hadrien Clouet

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Avis défavorable. L’augmentation proposée de la part de la rémunération des apprentis exemptée de CSG et de CRDS n’est pas du tout notre optique.

M. Damien Maudet (LFI-NFP). Nous sommes opposés à ce que des apprentis qui touchent moins de 1 000 euros par mois soient taxés pour payer des aides à l’apprentissage.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CF18 de Mme Estelle Mercier

Mme Estelle Mercier (SOC). Il vise à faire baisser de manière ciblée la CSG sur les revenus du travail situés entre 1 et 1,4 fois le Smic et à redonner du pouvoir d’achat aux ménages et aux revenus modestes. Concrètement, cela représente presque 1 500 euros par an de revenus supplémentaires pour un couple de smicards, et 900 euros pour une personne au Smic.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Avis défavorable à cet amendement qui vise à instaurer une forme de progressivité, donc un nouvel étage de redistribution à l’intérieur des cotisations. Ce n’est pas du tout adapté à la situation.

La commission adopte l’amendement.

Article 7 : Créer une contribution des organismes complémentaires
au titre de l’année 2026

Amendement de suppression CF32 de Mme Élise Leboucher

M. Damien Maudet (LFI-NFP). Il s’agit de supprimer la taxe additionnelle sur les mutuelles, qui retombera sur les assurés. Il faut augmenter les cotisations, et non pas prélever indirectement sur les assurés.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. J’avais le projet de déposer un amendement identique, qui a disparu au moment du dépôt. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, elle émet un avis défavorable à l’adoption de l’article 7.

Article 8 : Réduction des niches sociales applicables à certains compléments salariaux

Amendement de suppression CF20 de Mme Estelle Mercier

Mme Estelle Mercier (SOC). En fiscalisant les titres-restaurant, les chèques vacances et les indemnités de rupture conventionnelle, l’article 8 risque d’avoir un effet négatif sur le pouvoir d’achat des travailleurs aux revenus modestes qui bénéficient de ces compléments de salaire.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Je suis, comme vous, défavorable à la suppression des exemptions de cotisations sur les chèques restaurant et les chèques vacances ; j’ai d’ailleurs proposé un amendement visant à supprimer cette partie de l’article 8.

En revanche, ce même article traite aussi de la question importante des abus de ruptures conventionnelles, en particulier pour les seniors. De fait, certaines entreprises peu regardantes préfèrent, plutôt que d’accompagner leurs salariés jusqu’à la retraite ou de prendre des mesures de départ anticipé, recourir à l’outil de la rupture conventionnelle pour se séparer d’un salarié qui peut avoir quinze, vingt ou vingt-cinq ans d’ancienneté, comme si elles s’apercevaient au bout de toutes ces années de carrière qu’il n’est pas à la hauteur. Il ne faut pas exagérer ! Il serait plus juste de moduler, comme je le propose, la participation de l’entreprise en fonction de l’ancienneté.

Avis défavorable, donc, à cet amendement, au profit de mon amendement CF62, qui suit immédiatement : il règle en effet le problème des chèques vacances et des titres restaurants tout en améliorant le dispositif du gouvernement en matière de limitation des abus de rupture conventionnelle.

L’amendement CF20 est retiré.

La commission adopte l’amendement CF62 de M. Jean-Didier Berger.

En conséquence, l’amendement CF1 de Mme Julie Delpech tombe.

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 8 modifié.

Après l’article 8

Amendement CF35 de M. Hadrien Clouet

M. Aurélien Le Coq (LFI-NFP). Madame Perrine Goulet s’inquiétait tout à l’heure de ce que l’absence d’indexation de l’ensemble du barème sur l’inflation allait aussi profiter à de hauts revenus. Notre amendement permet un peu de justice sociale en soumettant les dividendes aux prélèvements sociaux et aux cotisations sociales. Il n’y a en effet aucune raison que les revenus du capital soient moins imposés que ceux du travail. Le même amendement avait été adopté l’année dernière dans l’hémicycle. La mesure doit pouvoir rapporter autour de 12 milliards d’euros aux caisses de la sécurité sociale.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Cet amendement va à l’encontre de ce que vous voulez défendre.

Il vise à intégrer aux cotisations salariales les dividendes, ainsi que les revenus tirés de l’intéressement, de la participation et des plus-values de levée-vente d’actions, qu’il s’agisse de stock-options ou d’actions gratuites. Mais en modifiant l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, il ne s’applique qu’aux dividendes versés aux salariés du régime général et du régime agricole. Alors que vous pensiez augmenter les prélèvements obligatoires sur le grand capital, vous ne toucherez que l’actionnariat salarié et les dividendes versés aux actionnaires non salariés resteront exonérés de cotisations sociales. En outre, les dividendes sont déjà intégrés à l’assiette des cotisations des travailleurs indépendants non agricoles exerçant sous forme de société, sur la part excédant 10 % du capital social.

En outre, vous allez plus loin que l’article 8 du PLFSS pour 2026, qui propose de réduire les exemptions d’assiette associées aux compléments de salaire. Il ne faut pas casser ce qui fonctionne, et je pense que vous vous trompez de cible.

Je propose donc le retrait de l’amendement, qui pourrait être retravaillé en vue de la séance – même si je ne serai pas favorable à votre objectif initial.

L’amendement est retiré.

Article 9 : Rationalisation d’exonérations spécifiques

Amendement CF17 de Mme Estelle Mercier

Mme Estelle Mercier (SOC). Il vise à supprimer les alinéas 13 et 14 de cet article, qui rabotent l’exonération de cotisations sociales dont bénéficient les ultramarins en vertu de la loi pour le développement économique des outre-mer (Lodeom), notamment pour les barèmes de compétitivité et de compétitivité renforcée.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Je salue la présence de notre collègue Christian Baptiste, dont les travaux sur cette question ont été très appréciés.

Tout en étant conscient de la vive inquiétude que suscite cette réforme dans les territoires ultramarins, je suis réservé quant à l’amendement proposé. La réduction des seuils d’exonération maximale et de sortie doit permettre de concentrer les exonérations de cotisations sur les bas salaires, soit les emplois les plus élastiques au coût du travail. Selon le rapport de l’Igf et de l’Igas remis au gouvernement en novembre dernier, les dispositifs Lodeom ont des effets relativement faibles sur l’emploi, les rémunérations et les indicateurs de rentabilité financière des entreprises. Par ailleurs, avec 340 millions, le surcroît des recettes attendu d’une telle mesure n’est pas négligeable. Sagesse.

M. Christian Baptiste (SOC). Au-delà du rapport de l’Igas et de l’IGF, j’ai tenu à me rendre dans les territoires pour me rendre compte de la situation. Au terme de cette contre‑expertise, nous demandons que ces 343 millions d’euros ne soient pas rabotés dans le budget des outre-mer. Nous avons constaté sur place que, contrairement à ce que disent l’Igas et l’Igf, ces deux dispositifs, non contents de maintenir l’emploi, créent aussi de nouveaux emplois, notamment pour les jeunes, en particulier grâce au barème d’innovation et de croissance. Les chefs d’entreprise que j’ai rencontrés demandent que l’on laisse les choses en l’état.

Nous allons nous rencontrer au début de l’année prochaine pour travailler à un dispositif vertueux en vue du budget pour 2027, car il est vrai qu’il existe des dysfonctionnements.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CF33 de M. Damien Maudet

Mme Claire Lejeune (LFI-NFP). Cet amendement vise à supprimer la mesure soumettant à cotisations sociales l’intégralité des revenus des apprentis. Nous sommes opposés à l’exonération de cotisations sociales, qui coûte cette année 72 milliards d’euros à la sécurité sociale, mais nous trouvons inacceptable que vous vous en preniez systématiquement – c’est la marque de fabrique de ce budget – aux plus fragiles et aux plus précaires, comme ici aux travailleurs pauvres que sont les apprentis. Vous avez fait exploser leur nombre pour maquiller les chiffres du chômage et les faire baisser artificiellement, mais c’est bien une forme de travail précaire et mal payé, la plupart des apprentis étant rémunérés bien en dessous du Smic. Soumettre l’ensemble de leurs revenus à cotisations sociales se traduira par une baisse de revenus de 55 à 100 euros par mois. Pour des jeunes qui ne touchent pas même le Smic, l’impact est inacceptable. Nous nous battons pour une revalorisation des salaires des apprentis et des alternants.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Chère collègue, je rappelle que je ne suis pas à l’origine de ce projet de loi, dont je ne suis que le rapporteur pour avis : le « vous » que vous employez pour le dénoncer n’est donc pas approprié.

On peut considérer que les apprentis ne gagnent pas assez, mais savoir si on doit ou non soumettre leur rémunération à cotisations est une autre question. D’ordinaire, lorsque nous vous disons qu’il y a trop de cotisations et d’écart entre le net et le brut, vous nous répondez que les cotisations sont des revenus futurs et une participation à la protection sociale ; ici, vous nous dites que les apprentis ne devraient pas être soumis à cotisations. Or c’est une question d’égalité entre les travailleurs. Avis défavorable.

Mme Marie-Christine Dalloz (DR). Le temps d’apprentissage donne lieu à des cotisations sociales qui ouvrent droit à la retraite. S’ils ne cotisent pas, les apprentis devront travailler deux ans de plus au terme de leur carrière, ce qui est incohérent avec votre idée selon laquelle il faut partir plus tôt. Soyez donc logiques !

M. Damien Maudet (LFI-NFP). On voit là l’injustice et le double standard de votre projet. Quand il s’agit d’exonérer de cotisations sociales les entreprises qui creusent le déficit, il n’y a pas de problème, mais vous voudriez que ce soit compensé par de nouvelles cotisations sociales sur les apprentis. Pour ce gouvernement, l’apprentissage n’est qu’une variable d’ajustement pour réduire les chiffres du chômage.

En outre, quand on parle d’apprentissage, on pense au boulanger du coin ou aux entreprises du bâtiment mais, en réalité, ce sont les écoles de commerce qui profitent le plus des aides : vous voulez que tous les apprentis de France cotisent pour aider les établissements privés d’enseignement supérieur !

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Je peux souscrire partiellement à ce que vous dites sur le recours à l’apprentissage plutôt qu’à l’emploi pour réduire le chômage, mais c’est un autre débat. La question n’est pas de savoir s’il faut plus d’apprentis ou s’ils sont bien payés, mais si, toutes choses égales par ailleurs, nous devons les faire participer à notre système et si cela doit leur ouvrir des droits. Ne mélangeons pas tout ! Le fait que l’apprentissage soit utilisé, comme vous le dénoncez, par certaines entreprises comme substitut à l’emploi ne doit pas pénaliser l’égalité entre les différents travailleurs.

M. Jocelyn Dessigny (RN). Il est hilarant de voir l’extrême gauche défendre l’apprentissage, qu’elle écrase depuis cinquante ans et qu’elle dénigre par les filières dont elle dispose au sein de l’éducation nationale. On envoie en apprentissage les jeunes qui ont de mauvaises notes, alors qu’on aurait pu en faire une voie d’excellence, comme chez certains de nos voisins. En Allemagne, par exemple, les apprentis ont d’excellents résultats, tandis que, dans nos écoles, de pseudo-conseillers d’orientation autoproclamés professeurs nous disent que seuls les élèves qui n’ont pas la moyenne vont en apprentissage et que, pour aller en voie générale, il faut avoir la moyenne et le brevet avec mention. C’est déplorable.

M. Guillaume Kasbarian (EPR). Je tiens à dénoncer une double hypocrisie de La France insoumise à propos de l’apprentissage.

Premièrement, vous prétendez aujourd’hui défendre les apprentis alors que vous n’avez voté aucune des réformes engagées entre 2017 et 2022 pour encourager et libérer l’apprentissage, et qui ont eu des résultats, puisque le nombre d’apprentis est beaucoup plus élevé aujourd’hui qu’en 2017. Vous vous drapez dans le soutien aux apprentis alors qu’à l’époque, vous n’en aviez strictement rien à faire.

Deuxièmement, malgré l’importance des cotisations pour le système des retraites, qu’a rappelée Mme Dalloz, vous persistez à dire qu’on peut résoudre l’équation en travaillant moins longtemps sans avoir besoin d’augmenter les cotisations ni de toucher au montant des retraites. Or ça ne fonctionne pas.

M. le président Éric Coquerel. Vous avez mal lu notre programme : nous proposons en effet d’augmenter les cotisations, mais pas en les faisant peser sur les apprentis.

Madame Dalloz, une exonération ne vaut pas absence de cotisations. Vous pouvez être exonéré tout en comptabilisant des cotisations qui entrent dans le calcul des annuités pour la retraite.

Mme Marie-Christine Dalloz (DR). Avec ça, on augmente le déficit des retraites !

M. le président Éric Coquerel. C’est autre chose. Toujours est-il que l’argument selon lequel l’exonération supprimerait des années de cotisation prises en compte pour les retraites n’est légalement pas exact.

La commission adopte l’amendement.

Elle émet un avis défavorable à l’adoption de l’article 9 modifié.

Après l’article 9

Amendements CF19 de Mme Estelle Mercier et CF34 de Mme Ségolène Amiot (discussion commune)

Mme Estelle Mercier (SOC). Mon amendement CF19 vise à remettre en cause des exonérations qui coûtent près de 80 milliards d’euros à l’État. En nous inspirant du rapport Bozio‑Wasmer, nous proposons de fixer un point de sortie des exonérations sociales à 2,4 fois Smic au lieu de 3 fois Smic comme en 2025, étant par ailleurs entendu que, selon la plupart des rapports, ce point de sortie n’aurait quasiment aucun impact sur la croissance ni sur l’emploi ni, d’une façon générale, sur les entreprises, mais apporterait 2,25 milliards d’euros de cotisations supplémentaires, ce qui est important au moment où l’on parle de gel des pensions de retraite ou de fiscalisation des apprentis et où l’on cherche le moindre euro pour financer la sécurité sociale.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Il faut remettre les choses en perspective. Sur une somme globale de 410 milliards d’euros, les allégements généraux ne représentent en 2026 ni 80 ni 72 milliards d’euros, mais 55. L’amendement CF19 vise à réduire ce montant de 2,4 milliards d’euros et l’amendement CF34 de 6,3 milliards d’euros. Or, de toute façon, l’État récupérerait cet argent comme il le fait déjà en 2025 du fait de la baisse des exonérations et des allégements, de telle sorte que cette mesure n’aurait aucun impact sur la réduction du déficit de 17,5 milliards d’euros de cette année.

Ce qui justifie ces exonérations et ces allégements est l’effet négatif qu’ont sur l’emploi les contributions pesant sur les entreprises. Elles finissent par tuer la poule aux œufs d’or. On a percé des trous pour faire entrer de l’air dans le sac qu’on a mis autour de la tête des entreprises, mais réduire les exonérations et les allégements généraux revient à reboucher ces trous et à étouffer à nouveau les entreprises. Cela les empêchera de créer autant d’emplois et, du coup, de générer autant de cotisations que vous en attendez pour financer notre système de protection sociale. Il serait déraisonnable d’aller trop vite.

Avis défavorable à ces deux amendements.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement CF6 de M. Fabrice Brun

M. Fabrice Brun (DR). Cet amendement, travaillé avec les Jeunes Agriculteurs, a été adopté en commission des affaires sociales et est indolore pour nos finances publiques. Il vise à adapter le mode de calcul des cotisations sociales à la réalité du revenu agricole. Alors que les cotisations des exploitants agricoles affiliés à la Mutualité sociale agricole (MSA) sont calculées sur la base des revenus des années précédentes, soit n–1 soit une moyenne triennale, l’amendement tend à les ajuster sur l’année en cours pour ceux qui choisiraient cette option. Il s’agit de coller au plus près aux réalités économiques de l’année et d’éviter les fluctuations annuelles importantes liées à des aléas économiques, sanitaires ou climatiques qui n’épargnent pas nos agriculteurs.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Cet amendement permettrait aux agriculteurs d’ajuster plus rapidement leurs contributions sociales à leur situation économique. Cependant, la MSA est en train d’absorber deux réformes très importantes : la simplification de l’assiette de calcul pour les non-salariés agricoles et la réforme des retraites des agriculteurs, qui prévoit notamment l’alignement de la pension des non-salariés agricoles sur le régime général. Je vous propose donc de retirer l’amendement pour le redéposer en séance avec une autre date d’entrée en application.

M. Fabrice Brun (DR). L’amendement prévoit déjà une entrée en vigueur au 1er janvier 2027, ce qui laisse une année complète pour adapter l’outil. Cette mesure, qui répond à une demande importante des agriculteurs, et en particulier des Jeunes Agriculteurs, est, je le répète, indolore pour les finances publiques et a été adoptée en commission des affaires sociales.

M. Charles de Courson (LIOT). Cet amendement Brun, c’est le retour de l’amendement de Courson que j’avais fait voter voilà une quinzaine d’années et qui est resté en vigueur durant sept ans, jusqu’à ce que la Caisse centrale de la Mutualité sociale agricole en obtienne l’abrogation – elle trouvait que le dispositif était compliqué, alors qu’il s’applique depuis cinquante ans pour les commerçants et artisans.

J’ai le plaisir de vous annoncer qu’hier, en commission des affaires sociales, j’ai fait voter à l’unanimité le retour de l’amendement de Courson. Quelques minutes avant la présentation de l’amendement, nous avons reçu une note de la Caisse centrale de la Mutualité sociale agricole nous informant de son accord sur cet amendement, qu’elle souhaitait toutefois voir présenter comme expérimental – ce que nous avons précisé par un sous-amendement. Nous pourrions donc adopter l’amendement Brun pour montrer que nous sommes d’accord avec l’orientation adoptée par la commission des affaires sociales.

Mme Perrine Goulet (Dem). Nous soutiendrons cet amendement, dont la mise en œuvre nous semble possible dans les délais indiqués par monsieur Brun. D’abord, comme la Caisse nationale d’allocations familiales (CNAF), la MSA dispense des prestations sociales et, comme elle, elle bénéficie de la DSN, la déclaration sociale nominative, qui permet de calculer les prestations en fonction des revenus. Dans un an, cet outil sera donc complètement opérationnel. De fait, il existe déjà, puisque nous avons été capables de fonder le prélèvement à la source sur l’année n.

M. Daniel Labaronne (EPR). Cette disposition est très attendue par les agriculteurs, qui sont confrontés à de gros problèmes de trésorerie. Leur situation comptable n’est pas bonne, ils ont des ressources en moins et le coût des intrants augmente, tandis qu’ils doivent, dans le même temps, payer des cotisations et des impôts calculés sur des revenus perçus il y a deux ans et qui pouvaient être très élevés. En outre, ils ont pu faire, dans l’intervalle, des achats trop importants de matériel agricole, favorisés par les dispositions exonérant les plus-values sur le matériel d’occasion – sur lesquelles nous devrions peut-être nous interroger, car elles peuvent pousser à la surcapitalisation dans les exploitations agricoles ; mais c’est un autre sujet. Toujours est-il que nous adopterons cet amendement, qui va dans le bon sens en assurant une nécessaire contemporanéisation.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Compte tenu des arguments avancés, avis favorable.

M. Fabrice Brun (DR). Merci pour ce bon sens paysan !

La commission adopte l’amendement.

Article 10 : Simplifier la régulation du secteur des médicaments

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 10 non modifié.

Article 11 : Améliorer la gestion de la trésorerie du régime général en instaurant
un mécanisme d’acompte des remises relatives aux produits de santé

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 11 non modifié.

Article 12 : Transferts financiers au sein des administrations de sécurité sociale

Amendement de suppression CF36 de Mme Élise Leboucher

M. Jean-Didier Berger, rapporteur. Je ne vois pas l’utilité de cet amendement, qui vise à supprimer un article de tuyauterie consacré à différents transferts financiers au sein des administrations de la sécurité sociale. Avis défavorable.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, elle émet un avis défavorable à l’adoption de l’article 12.

Après l’article 12

Amendement CF7 de M. Éric Bothorel

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Je suis plutôt favorable aux échanges d’informations dans l’objectif de lutter contre la fraude, mais l’amendement n’est pas tout à fait abouti – l’efficacité du système de précompte, notamment, mériterait d’être évaluée. J’invite donc à le retirer et à le déposer à nouveau en séance publique, en ne conservant que la partie qui ne pose pas problème ou en procédant à l’évaluation de la mesure proposée.

L’amendement est retiré.

Amendement CF59 de M. Jean-Didier Berger

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Dans le cadre de la lutte contre la fraude, cet amendement vise à porter de cinq à dix ans le délai de prescription des créances en cas d’indu frauduleux. Il n’y a pas de raison, en effet, que cette fraude s’éteigne d’elle-même au bout de cinq ans. Les services disent certes qu’en règle générale, ils remontent rarement au‑delà, mais si on ne le leur permet pas, ils ne risquent pas de le faire.

La commission adopte l’amendement.

TITRE II : CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Article 13 : Compensation par l’État des pertes de recettes pour la sécurité sociale

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement de suppression CF37 de M. Damien Maudet.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 13 non modifié.

Article 14 : Approbation, pour l’année 2026, des tableaux d’équilibre de l’ensemble des régimes obligatoires de base et du fonds de solidarité vieillesse

Amendement de suppression CF38 de Mme Ségolène Amiot

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Je ne vois aucune utilité à la suppression du tableau d’équilibre des branches en 2026. Avis défavorable.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, elle émet un avis défavorable à l’adoption de l’article 14.

Article 15 : Objectif d’amortissement de la dette sociale et prévisions sur les recettes du fonds de réserve pour les retraites pour 2026

Amendement CF39 de M. Hadrien Clouet

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. L’article 15 fixe l’objectif d’amortissement de la Cades. Je ne vois pas l’utilité de supprimer le thermomètre.

La commission rejette l’amendement.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 15.

Article 16 : Liste et plafonds de trésorerie des organismes habilités à recourir à des ressources non permanentes

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 16.

Article 17 : Approbation de l’annexe pluriannuelle

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 17.

Elle émet un avis défavorable à l’adoption de la deuxième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale.


TROISIÈME PARTIE :

DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES POUR L’EXERCICE 2026

TITRE Ier : DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES

Article 18 : Étendre le champ des participations forfaitaires et franchises
et rendre visible leur recouvrement

Amendement de suppression CF40 de Mme Élise Leboucher

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Vous faites valoir que l’élargissement du champ des franchises médicales fragiliserait l’accès aux soins et introduirait une logique marchande.

Depuis la création des participations forfaitaires en 2004 et des franchises en 2008, plusieurs actes et produits y échappent sans justification : actes des chirurgiens-dentistes et des sages-femmes, dispositifs médicaux, transports de patients. On peut être pour ou contre les franchises ou les forfaits, mais il semble légitime de placer tous les actes sur un pied d’égalité.

Par ailleurs, la mesure est encadrée : un plafond de 50 euros est fixé et les publics fragiles restent protégés ; près de 30 % des assurés demeurent exonérés.

La commission rejette l’amendement.

Elle émet un avis défavorable à l’adoption de l’article 18.

Article 19 : Prévenir l’augmentation des affections de longue durée par la mise en place de prestations d’accompagnement dédiées

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 19.

Article 20 : Simplifier et rendre plus efficiente la politique vaccinale

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 20.

Article 21 : Renforcer l’accès aux soins

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 21.

Après l’article 21

Amendement CF56 de M. Jean-Didier Berger

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Il s’agit de supprimer le titre de séjour pour soins, qui a été dévoyé.

Alors qu’il devait s’appliquer à des situations exceptionnelles, il est massivement utilisé – plus de 180 000 demandes en cinq ans – du fait de critères sujets à interprétation. Nous n’avons aucune idée des coûts qu’il engendre alors que les soins éligibles sont sans limitation. Il n’en existe aucun instrument de pilotage. Les bénéficiaires du titre peuvent, en outre, bénéficier d’un accompagnement social, pourtant financé par d’autres fonds publics.

Enfin, ce dispositif fait parfois doublon avec d’autres voies d’accès aux soins telles que l’aide médicale de l’État (AME).

M. Charles de Courson (LIOT). Le coût du dispositif a-t-il été évalué ? Les dépenses sont-elles prises en charge en vertu des conventions bilatérales en matière de protection sociale, qui ne sont malheureusement pas soumises au Parlement, à la différence des conventions fiscales ?

Mme Christine Arrighi (EcoS). Monsieur Lecornu s’est engagé à créer 2 500 maisons France Santé, venant s’ajouter aux 2 500 existantes. Certes, ces structures pourraient opportunément soulager les urgences. Mais je ne vois pas comment, avec ce texte, l’engagement pourrait être tenu, sauf de manière très timide. C’est le sort qu’ont connu tous les engagements pris jusqu’à présent, qu’il s’agisse des 100 milliards d’euros pour le ferroviaire ou des 100 milliards d’euros pour l’intelligence artificielle. Comment le gouvernement a-t-il l’intention de financer ses promesses en matière de santé ?

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Mon amendement ne concerne pas l’AME. Il ne vise pas les étrangers vivant sur le territoire français, qui bénéficient de la solidarité médicale, notamment parce que leur bonne santé est aussi dans l’intérêt de notre pays.

Le titre de séjour pour soins concerne des gens qui viennent bénéficier de soins gratuitement dans notre pays. Il n’y a pas de remboursement par les pays d’origine des dépenses engagées. La France en supporte seule la charge.

L’Office français de l’immigration et de l’intégration est incapable de chiffrer le coût du dispositif, car celui-ci ne fait l’objet d’aucun contrôle. On ne sait absolument pas de quelle somme on parle – certaines estimations sont en centaines de millions d’euros. On sait seulement que le nombre de demandes ne cesse d’augmenter.

Il est temps de mettre un terme à cette pratique, qui ne relève ni de la solidarité nationale, ni de la sécurité sanitaire sur notre territoire.

La commission adopte l’amendement.

Article 22 : Simplifier et sécuriser le financement des établissements de santé

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 22.

Article 23 : Reporter le financement de la protection sociale complémentaire pour les agents de la fonction publique hospitalière

La commission émet un avis défavorable à l’adoption de l’article 23.

Article 24 : Lutter contre les rentes dans le système de santé

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 24.

Article 25 : Mieux réguler les dépenses dans le secteur des soins dentaires

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 25.

Article 26 : Renforcer les incitations au conventionnement des professionnels de santé et la maîtrise des dépassements d’honoraires

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 26.

Article 27 : Renforcer l’incitation des établissements de santé à l’efficience, la pertinence et la qualité des soins

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 27.

Article 28 : Limiter la durée de prescription des arrêts de travail pour maladie et la durée d’indemnisation des arrêts de travail pour accident du travail ou maladie professionnelle et supprimer l’obligation de visite de reprise pour un retour de congé de maternité

Amendements de suppression CF21 de Mme Estelle Mercier et CF41 de M. Damien Maudet

Mme Estelle Mercier (SOC). Nous sommes opposés à la limitation de la durée des arrêts de travail à quinze jours en ville et un mois à l’hôpital, durée inférieure aux recommandations de l’assurance maladie. Ce serait un recul majeur pour les personnes malades.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Je vous invite à retirer les amendements de suppression, car une partie de l’article – la suppression de l’obligation de visite de reprise pour un retour de congé de maternité – pourrait recueillir votre approbation. En effet, pourquoi pénaliser les femmes qui peinent à trouver un rendez-vous ?

Je vous suggère de déposer pour la séance des amendements qui portent uniquement sur la limitation de la durée des arrêts de travail pour maladie et de la durée d’indemnisation des arrêts de travail pour accident du travail ou maladie professionnelle.

La commission rejette les amendements.

Amendement CF64 de M. Jean-Didier Berger

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. L’objectif du gouvernement est qu’un médecin se prononce plus rapidement sur une éventuelle prolongation de l’arrêt maladie.

En vertu du principe de collégialité médicale, il serait bon que ce ne soit pas l’un des deux médecins ayant prescrit l’arrêt – le médecin primo-prescripteur ou le médecin traitant – qui décide de sa prolongation éventuelle.

Dans le souci d’éviter les abus, j’avais déposé un amendement en vertu duquel l’assurance maladie établissait une liste de médecins habilités à se prononcer sur l’opportunité d’une prolongation. Il a été déclaré irrecevable au motif qu’il créait une nouvelle dépense, ce que je conteste puisque, dans tous les cas, une visite médicale doit avoir lieu.

Mon amendement de repli propose de confier à celui des deux médecins qui n’a pas prescrit l’arrêt le soin de se prononcer sur l’opportunité de le prolonger.

La commission adopte l’amendement.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 28 modifié.

Article 29 : Limiter la durée d’indemnisation des arrêts de travail des assurés ne relevant pas du dispositif de l’affection de longue durée

Amendements de suppression CF15 de Mme Estelle Mercier et CF42 de Mme Ségolène Amiot

Mme Estelle Mercier (SOC). Nous sommes opposés à la bascule du régime d’indemnisation des arrêts de travail des assurés présentant une ALD dite non exonérante dans le régime de droit commun.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. On peut être favorable ou pas à la fiscalisation des revenus de remplacement des personnes en arrêt de travail. Mais dès lors que l’on fiscalise, pourquoi le faire pour certains et pas pour d’autres ? Avis défavorable.

La commission adopte les amendements, exprimant ainsi un avis favorable à la suppression de l’article 29.

En conséquence, l’amendement CF54 de M. Jean-Didier Berger tombe.

Article 30 : Mise en place d’un cadre de certification et de prise en charge des systèmes d’aide à la décision médicale

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 30.

Article 31 : Systématiser l’utilisation de Mon espace santé par les professionnels de santé

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 31.

Article 32 : Lutter contre le gaspillage des produits de santé

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 32.

Article 33 : Améliorer la pénétration des biosimilaires et des génériques en ville

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 33.

Article 34 : Adapter les dispositifs d’accès précoce, d’accès compassionnel et d’accès direct

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 34.

Article 35 : Expérimenter le référencement de médicaments thérapeutiquement équivalents

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 35.

Article 36 : Réforme de la tarification des établissements et services qui accompagnent des enfants et des jeunes handicapés (Serafin-PH)

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 36.

Article 37 : Contribution à la prise en charge du coût de l’accord du 4 juin 2024 par les départements

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 37.

Article 38 : Déduire des indemnisations versées par les assurances et les fonds d’indemnisation l’allocation personnalisée d’autonomie et la prestation de compensation du handicap

Amendement CF44 de M. Damien Maudet

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. L’article 38, que vous voulez supprimer, cherche à mettre un terme à une situation un peu étrange : une personne indemnisée par un tiers responsable bénéficie en parallèle de la solidarité nationale. En l’absence de tiers identifié, il est normal que la collectivité supporte la charge de l’indemnisation. Dans le cas contraire, pourquoi y aurait-il une double indemnisation ?

Avis défavorable.

Mme Claire Marais-Beuil (RN). Il s’agit de deux choses différentes – l’indemnisation répare le préjudice subi du fait de l’accident tandis que l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) compense les conséquences du dommage – qui peuvent se cumuler.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Il n’est pas question ici du préjudice civil mais de la prise en charge au quotidien. Autrement dit, les deux formes d’indemnisation ont exactement le même objet.

La commission rejette l’amendement.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 38.

Article 39 : Améliorer la reconnaissance des maladies professionnelles

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 39.

Article 40 : Étendre le bénéfice du capital décès aux ayants droit des non-salariés agricoles décédés à compter du 1er janvier 2026 à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 40.

Article 41 : Optimiser le recouvrement des pensions alimentaires

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 41.

Article 42 : Créer un congé supplémentaire de naissance

Amendement de suppression CF55 de M. Jean-Didier Berger

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Le congé supplémentaire de naissance est une mesure très généreuse, sûrement formidable mais qui coûterait 300 millions d’euros en 2027 et jusqu’à 600 millions d’euros en 2030. Nous n’en avons pas les moyens. Résorbons le déficit avant de renforcer la politique familiale, à laquelle je suis par ailleurs très favorable.

M. le président Éric Coquerel. Votre amendement me paraît contradictoire avec la politique nataliste que vous défendez. Comment équilibrer les comptes sociaux si vous compliquez la vie de ceux qui veulent faire des enfants ? Les pays nordiques, qui ont pris des mesures de ce genre, obtiennent des résultats.

La commission rejette l’amendement.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 42.

Après l’article 42

Amendement CF60 de M. Jean-Didier Berger

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Il est proposé d’expérimenter, dans cinq départements volontaires, l’allocation sociale unique, plafonnée à 70 % du Smic, chère à la Droite républicaine. De nombreux obstacles restent à franchir, parmi lesquels l’harmonisation entre les organismes qui distribuent les allocations et la transmission des données entre eux.

La commission rejette l’amendement.

Article 43 : Rationaliser et simplifier le cumul emploiretraite

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 43.

Article 44 : Stabiliser le montant des prestations sociales, dont les pensions

Amendement de suppression CF45 de M. Hadrien Clouet et amendement CF61 de M. Jean-Didier Berger

M. Damien Maudet (LFI-NFP). Nous demandons la suppression de l’article 44, qui instaure l’année blanche, autrement dit le gel de l’ensemble des prestations sociales.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. Mon amendement de repli vise à supprimer uniquement le mécanisme de freinage de l’évolution des pensions. L’année blanche est déjà discutable, mais rien ne justifie la sous-indexation pour les années suivantes.

Sagesse sur l’amendement de monsieur Clouet.

La commission adopte l’amendement CF45, exprimant ainsi un avis favorable à la suppression de l’article 44.

En conséquence, l’amendement CF61 de M. JeanDidier Berger tombe.

Article 45 : Réduction des inégalités entre les femmes et les hommes à la retraite

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 45.

Article 45 bis : Suspension du report de l’âge légal de départ à la retraite et du relèvement de la durée d’assurance requise pour le bénéfice d’une retraite au taux plein

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 45 bis.

Après l’article 45 bis

Amendement CF53 de M. Jean-Didier Berger

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. L’espérance de vie, y compris en bonne santé, ne cesse de progresser dans notre pays.

Tous les quatre ou cinq ans, nous sommes amenés à nous prononcer sur une réforme des retraites. Outre de l’instabilité, cela déclenche des querelles et des troubles, qui sont inutiles et évitables.

C’est la raison pour laquelle je propose une mesure de bon sens : l’indexation de la durée de cotisation sur l’espérance de vie.

La commission rejette l’amendement.

TITRE II : DOTATIONS ET OBJECTIFS DE DÉPENSES DES BRANCHES ET DES ORGANISMES CONCOURANT AU FINANCEMENT DES RÉGIMES OBLIGATOIRES

Article 46 : Dotations de l’assurance maladie au fonds pour la modernisation et l’investissement en santé et de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie aux agences régionales de santé

La commission émet un avis défavorable à l’adoption de l’article 46.

Article 47 : Dotations aux opérateurs financés par le sixième sous-objectif

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 47.

Article 48 : Objectif de dépenses de la branche maladie, maternité, invalidité et décès

La commission émet un avis défavorable à l’adoption de l’article 48.

Article 49 : Fixation de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie de l’ensemble des régimes obligatoires de base ainsi que de ses sous‑objectifs pour 2026

Amendements de suppression CF16 de Mme Estelle Mercier et CF46 de M. Hadrien Clouet

Mme Estelle Mercier (SOC). Le taux de l’évolution de l’Ondam ne correspond pas aux besoins et risque de pénaliser le service public hospitalier.

M. Damien Maudet (LFI-NFP). Je défends l’ensemble de nos amendements de suppression des articles restant à examiner.

S’agissant de l’article 49, lorsque toutes les fédérations hospitalières, y compris les plus modérées, disent qu’il manquera 1 milliard d’euros à l’hôpital cette année et que 20 000 postes d’infirmières ne seront pas pourvus, il est impossible de voter l’Ondam en l’état. Selon eux, 2026 sera l’année la plus austéritaire que l’hôpital ait connu.

L’article 51, relatif à la branche AT-MP (accidents du travail et maladies professionnelles), ne donne pas les moyens d’atteindre les objectifs – en particulier celui de ne plus être le premier pays d’Europe pour le nombre de décès sur le lieu de travail.

L’article 52, relatif à la branche vieillesse, ouvre la voie au gel des pensions.

L’article 53, relatif à la branche famille, entérine le gel des prestations familiales.

Quant à l’article 54, relatif à la branche autonomie, il n’y a pas de raison que nos aînés financent les cadeaux faits par Emmanuel Macron depuis 2017.

M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis. J’ai du mal à comprendre le sens de votre démarche. Que vous soyez en désaccord sur les objectifs, soit, mais dans ce cas, rehaussez-les plutôt que de les supprimer.

M. le président Éric Coquerel. Vous savez très bien que l’article 40 de la Constitution nous en empêche. La demande de suppression est la seule manière de manifester son opposition.

Je ne doute pas que, le moment venu, vous voterez ma proposition de loi visant à supprimer l’article 40.

La commission adopte les amendements, exprimant ainsi un avis favorable à la suppression de l’article 49.

Article 50 : Dotations au fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante et au fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, transfert de la compensation de sousdéclaration des accidents du travail et maladies professionnelles et dépenses liées aux dispositifs de prise en compte de la pénibilité

La commission émet un avis défavorable à l’adoption de l’article 50.

Article 51 : Objectif de dépenses de la branche accidents du travail et maladies professionnelles

Contre l’avis du rapporteur pour avis, la commission adopte l’amendement CF47 de Mme Élise Leboucher, exprimant ainsi un avis favorable à la suppression de l’article 51.

Article 52 : Objectif de dépenses de la branche vieillesse pour 2026

Contre l’avis du rapporteur pour avis, la commission adopte l’amendement CF48 de M. Damien Maudet, exprimant ainsi un avis favorable à la suppression de l’article 52.

Article 53 : Objectif de dépenses de la branche famille

Contre l’avis du rapporteur pour avis, la commission adopte l’amendement CF49 de M. Hadrien Clouet, exprimant ainsi un avis favorable à la suppression de l’article 53.

Article 54 : Objectif de dépenses de la branche autonomie

Contre l’avis du rapporteur pour avis, la commission adopte l’amendement CF50 de Mme Ségolène Amiot, exprimant ainsi un avis favorable à la suppression de l’article 54.

Elle émet un avis défavorable à l’adoption de la troisième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale.


([1]) Loi n° 2011-894 du 28 juillet 2011 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2011, loi n° 2014‑892 du 8 août 2014 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 et loi n° 2023‑270 du 14 avril 2023 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023.

([2]) La première version du PLACSS de l’année 2023, déposée par le Gouvernement le 31 mai 2024, a fait l’objet de l’avis n° 2728 de M. Michel Lauzzana et du rapport n° 2724 de Mme Stéphanie Rist, rapporteure générale, enregistrés  à la présidence de l’Assemblée  nationale le 5 juin 2024. La seconde version du PLACSS de l’année 2023, en tout point identique au premier texte, a fait l’objet de l’avis n° 317 de M. Jean-Didier Berger et du rapport n° 292 de M. Yannick Neuder, rapporteur général, enregistrés à la présidence de l’Assemblée nationale respectivement le 9 octobre 2024 et le 25 septembre 2024.

([3]) Le premier alinéa du I de l’article L.O. 111‑7‑1 du code de la sécurité sociale subordonne la mise en discussion du PLFSS de l’année à venir à « l’adoption » préalable de la LACSS afférente à l’année qui précède. Dans sa décision n° 2022‑836 DC du 10 mars 2022 portant sur la LOLFSS, le Conseil constitutionnel a jugé, par une réserve d’interprétation, que cette disposition ne saurait « faire obstacle à la mise en discussion du projet de loi de financement de l’année dès lors que le projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale a été examiné » (considérant 18).

([4]) Premier alinéa de l’article 39 de la loi organique n° 2001‑692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

([5]) Conseil constitutionnel, décision n° 2025-874 DC du 13 février 2025 – Loi de finances pour 2025 (paragraphes 5 à 7).

([6]) L’article 24 de la loi n° 2025‑199 du 28 février 2025 de financement de la sécurité sociale pour 2025 prévoit la suppression du FSV et son intégration dans la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV). Le FSV est, à la date de présentation du présent rapport, un établissement public administratif chargé de financer les avantages d’assurance vieillesse à caractère non contributif relevant de la solidarité nationale, dont les missions et les règles de fonctionnement sont déterminées par les articles L. 135‑1 à L. 135‑5 du code de la sécurité sociale.

([7]) Le risque de perte d’autonomie, dont le financement était assuré en grande partie par la branche maladie jusqu’en 2020, a été isolé et une branche propre créée par les lois organique et ordinaire n° 2020-991 du 7 août 2020 et n° 2020-992 du même jour relatives à la dette sociale et à l‘autonomie, ainsi que par la loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021.

([8]) Article 15 de la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018.

([9]) Annexe 1 du PLFSS pour 2026, Présentation des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale, p. 20.

([10]) À titre d’exemple, l’article 1er de la loi n° 2023-270 du 14 avril 2023 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 a organisé la fermeture, à compter du 1er septembre 2023, des régimes spéciaux de retraite des industries électriques et gazières (CNIEG), de la RATP, des clercs et employés de notaires (CRPCEN), de la Banque de France et du Conseil économique, social et environnemental (CESE).

([11]) Le régime général couvre ses affiliés pour les cinq risques sociaux, ainsi que l’ensemble des assurés pour les risques relatifs à la famille et à la perte d’autonomie en raison de l’universalité des branches correspondantes. Les branches vieillesse, maladie et AT‑MP sont davantage éclatées. Selon l’annexe 1 du PLFSS pour 2025, vingt-six régimes assurent la couverture du risque vieillesse, douze régimes assurent la couverture du risque maladie, dix régimes assurent la couverture du risque AT‑MP (p. 20).

([12]) Rapport du Gouvernement à la Commission des comptes de la sécurité sociale. Résultats 2003. Prévisions 2004, juin 2004, p. 7.

([13]) Rapport du Gouvernement à la Commission des comptes de la sécurité sociale. Résultats 2003. Prévisions 2004, septembre 2004, p. 8.

([14]) À titre d’exemple, la loi de finances fixe, dans sa première partie, « les plafonds des dépenses du budget général et de chaque budget annexe, les plafonds des charges de chaque catégorie de comptes spéciaux ainsi que le plafond d’autorisation des emplois rémunérés par l’État » en application du 6° du I de l’article 34 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

([15]) Premier alinéa de l’article L.O. 111-3-10 du code de la sécurité sociale.

([16]) Loi organique n° 2001‑692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

([17]) Les comptes nationaux au titre de l’année 2024 publiés par l’INSEE le 28 mai 2025 ont été actualisés pour la dernière fois, s’agissant des administrations publiques, le 29 août 2025 à l’occasion de la publication du compte dit semi-définitif avancé des administrations publiques.

([18]) Article 3 de la loi n° 2023-1195 du 18 décembre 2023 de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027.

([19]) Rapport d’avancement annuel du plan budgétaire et structurel à moyen terme 2025-2029 au titre de l’année 2025, avril 2025, p. 25.

([20]) Avis n° 317 de M. Jean-Didier Berger sur le PLACSS de l’année 2023, enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 9 octobre 2024, XVIIème législature.

([21]) INSEE, Le PIB accélère au troisième trimestre 2025 (+ 0,5 % après 0,3 %), Comptes nationaux trimestriels – première estimation – troisième trimestre 2025, Informations rapides, 30 octobre 2025, n° 269.

([22]) Rapport économique, social et financier (RESF) de la Nation, annexé au projet de loi de finances pour 2026, p. 8.

([23]) Rapport du Gouvernement à la Commission des comptes de la sécurité sociale. Résultats 2024. Prévisions 2025 et 2026, octobre 2025, p. 6.

([24]) L’article L. 161‑25 du code de la sécurité sociale prévoit un principe de revalorisation annuelle des prestations sociales, laquelle intervient le 1er janvier de chaque année pour les pensions de retraite et certaines prestations sociales assimilées, telles que l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) et l’allocation de veuvage, et le 1er avril de chaque année pour la plupart des autres prestations, telles que les allocations familiales et les minimas sociaux.

([25]) La cible d’inflation de 2 % de la BCE est dite symétrique, assurant une marge de manœuvre au Conseil des gouverneurs autour de ce point d’ancrage. Cette évolution a été formalisée par la déclaration relative à la stratégie de politique monétaire de la BCE adoptée le 8 juillet 2021, selon laquelle « Le Conseil des gouverneurs estime que viser une inflation de 2 % à moyen terme est le meilleur moyen de maintenir la stabilité des prix, son engagement autour de cet objectif étant symétrique. Autrement dit, le Conseil des gouverneurs considère que les écarts positifs ou négatifs par rapport à l’objectif sont également indésirables ».

([26]) Il s’agit de la masse salariale des branches marchandes non-agricoles (BMNA).

([27]) Article L. 225-1 du code de la sécurité sociale.

([28]) Rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale, Résultats 2024. Prévisions 2025, juin 2025, p. 202.

([29]) À titre de comparaison, les besoins de financement de l’ACOSS étaient, en 2009, couverts à 70 % par la Caisse des dépôts et consignations selon le rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) sur la gestion de trésorerie de l’ACOSS (janvier 2018, p. 16). L’encours des billets de trésorerie (BT, ex‑NeuCP) représentait environ 10 % des financements de l’ACOSS.

([30]) Selon les réponses écrites de l’ACOSS, l’emprunt moyen brut global est destiné à couvrir les besoins de trésorerie du régime général, les avances aux partenaires et un « pré-emprunt » permettant de sécuriser le paiement des prestations sociales sur une période d’un mois environ.

([31]) e du 2° de l’article L.O. 111-3-4 du code de la sécurité sociale.

([32]) Article L. 225-1-4 du code de la sécurité sociale.

([33]) La situation financière dégradée de la CNRACL a fait l’objet de développements spécifiques dans l’avis n° 1523 de M. Jean-Didier Berger sur le PLACSS de l’année 2024 (pp. 27‑28).

([34]) Cour des comptes, Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, mai 2025, p. 60.

([35]) Les relations entre l’ACOSS et la CDC sont formalisées dans une convention bancaire quinquennale couvrant la période 2024‑2028, laquelle prévoit que l’ACOSS peut recourir à des emprunts auprès de la CDC dans la limite d’un montant annuel de 13 milliards d’euros en cas de liquidité insuffisamment disponibles sur les marchés financiers.

([36]) Le même article propose d’autoriser, outre l’ACOSS, la Caisse de prévoyance et de retraite du personnel ferroviaire (CPRPF), la Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines (CANSSM) et la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) à recourir à des ressources non permanentes, comme en 2024 et en 2025. Leurs plafonds d’emprunt sont respectivement fixés à 360 millions d’euros, 450 millions d’euros et 13,4 milliards d’euros en 2026, soit une hausse de 60 millions pour la CPRPF, un niveau stable pour la CANSSM et une baisse de 200 millions pour la CNRACL.

([37]) Les plafonds de trésorerie de l’ACOSS peuvent être relevés pour répondre à des besoins de trésorerie exceptionnels. Aux termes de l’article L.O. 111-9-2 du code de la sécurité sociale, « en cas d’urgence et de nécessité impérieuse d’intérêt national, des décrets en Conseil des ministres pris après avis du Conseil d’État peuvent relever les limites prévues au e du 2° de l’article L.O. 111-3-4, après information des commissions de l’Assemblée nationale et du Sénat saisies au fond des projets de loi de financement de la sécurité sociale ». La ratification de ces décrets de relèvement est demandée au Parlement dans le prochain PLFSS. À titre d’exemple, le plafond de trésorerie de l’ACOSS a été relevé à des niveaux inédits en 2020 pour faire face à la crise sanitaire, de 39 milliards d’euros à 70 milliards d’euros par le décret n° 2020-327 du 25 mars 2020, puis de 70 milliards d’euros à 95 milliards par le décret n° 2020-603 du 20 mai 2020. L’article 6 de la LFSS pour 2021 a ratifié les deux décrets précités.

([38]) Voir en ce sens le commentaire de l’article 3 dans le rapport n° 719 de M. Charles de Courson, rapporteur général, sur le projet de loi spéciale prévue par l’article 45 de la LOLF, enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale 12 décembre 2024, et l’article du professeur Rémi Pellet dans le numéro de la Revue de droit sanitaire et social de janvier et février 2025 (« Les leçons à tirer de la « loi spéciale » sur les finances de l’État et de la sécurité sociale », RDSS, 2025, n° 1, pp. 165‑169).

([39]) Article 4 de la loi n° 2024‑1188 du 20 décembre 2024 spéciale prévue par l’article 45 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

([40]) I de l’article 39 de la loi n° 2025‑199 du 28 février 2025 de financement de la sécurité sociale pour 2025.

([41]) D’après l’International Capital Market Association (ICMA), les social bonds désignent tout type d’instrument obligataire dont le produit, ou un montant équivalent, est exclusivement utilisé pour financer ou refinancer, en tout ou en partie, des « projets sociaux éligibles », qu’ils soient nouveaux ou existants. Le rapport publié par l’ICMA sur les principes applicables aux obligations sociales (2021) constitue le cadre de référence pour de telles émissions. L’ACOSS rend compte de ses émissions d’obligations sociales dans un rapport annuel ; le dernier rapport porte à ce jour sur l’exercice 2024.

([42]) L’annexe 9 du PLFSS pour 2025 précisait que l’indicateur de la « durée moyenne annuelle pondérée » serait calculé de la manière suivante (p. 77) : (montant initial de l’emprunt 1 x durée initiale de l’emprunt 1) + (montant initial de l’emprunt 2 x durée initiale de l’emprunt 2) + (montant initial de l’emprunt n x durée initiale de l’emprunt n) / somme des montants initiaux des emprunts de l’ACOSS observée chaque jour.

([43]) Article 1er de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale.

([44]) Le taux de la fraction de CSG affectée à la CADES était de 0,2 point aux termes de la LFSS pour 2009 puis de 0,48 point aux termes de la LFSS pour 2010. Par ailleurs, la CADES a bénéficié, entre 2011 et 2016, d’une quote-part du produit du prélèvement social sur les revenus du capital, pour 1,3 point et du même prélèvement sur les revenus du patrimoine et de placement aux taux successifs de 2,2 points, 3,4 points, 5,4 points et 4,5 points. Elle a bénéficié du produit de prélèvements sociaux sur les plus-values immobilières entre 1999 et 2003 (467,2 millions d’euros).

([45]) Article 19 de l’ordonnance n° 96-50 précitée.

([46]) Troisième alinéa du I de l’article L. 135-6 du code de la sécurité sociale.

([47]) Premier alinéa de l’article 4 bis de l’ordonnance n° 96-50 précitée.

([48]) Premier alinéa de l’article 4 bis de l’ordonnance n° 96-50 précitée.

([49]) Conseil constitutionnel, décision n° 2005-519 DC du 29 juillet 2005 – Loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale (considérants 39 et 40).

([50]) Conseil constitutionnel, décision n° 97-393 DC du 18 décembre 1997 – Loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 (considérant 25).

([51]) Conseil constitutionnel, décision n° 2010-620 DC du 16 décembre 2010 – Loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 (considérant 6).

([52]) En application du I de l’article 50 de la LFSS pour 2021, le versement des dotations aux établissements bénéficiaires est soumis à la conclusion par chaque établissement concerné d’un contrat avec l’agence régionale de santé (ARS) compétente avant le 31 décembre 2021.

([53]) Décret n° 2024-176 du 6 mars 2024 relatif au transfert à la Caisse d’amortissement de la dette sociale des déficits du régime général en 2023 et au transfert à la Caisse d’amortissement de la dette sociale des déficits du régime général à effectuer en 2024.

([54]) Article 2 du projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale de l’année 2024.

([55]) Rapport d’information n° 302 de M. Hadrien Clouet et Mme Stéphanie Rist sur la gestion de la dette sociale, enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 2 octobre 2024, XVIIème législature, p. 130.

([56]) Haut Conseil du financement de la protection sociale, La sécurité sociale fragilisée, Note sur l’état des lieux du financement de la protection sociale, janvier 2025.

([57]) Cour des comptes, Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, mai 2025, p. 60.

([58]) I de l’article L. 136-1-2 du code de la sécurité sociale.

([59]) 1° du I de l’article L. 136‑8 du code de la sécurité sociale.

([60]) Pour la Guadeloupe, la Martinique, la Réunion, la Guyane et Mayotte, ces seuils sont majorés dans les conditions prévues au III de l’article L. 136‑8 du code de la sécurité sociale.

([61]) Article 14 de la loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019 et article 3 de la loi n° 2018‑1213 du 24 décembre 2018 portant mesures d’urgence économiques et sociales.

([62]) Article 134 de la loi n° 90‑1168 du 29 décembre 1990 de finances pour 1991.

([63]) 1° de l’article D. 242‑9 du code de la sécurité sociale.

([64]) Les seuils de RFR visés au III de l’article L. 136‑8 du code de la sécurité sociale ont été actualisés expressément pour la dernière fois par l’article 3 de la loi n° 2018‑1213 du 24 décembre 2018 portant mesures d’urgence économiques et sociales. Les revalorisations annuelles font l’objet de lettres ministérielles prises par la direction de la sécurité sociale. Les règles d’assujettissement aux prélèvements sociaux sur les revenus de remplacement ont été actualisées pour la dernière fois, au titre de l’année 2025, par la lettre ministérielle D‑24‑019252 du 4 décembre 2024.

([65]) D’après l’INSEE (Informations rapides, 15 janvier 2025, n° 6, l’indice des prix à la consommation hors tabac (IPC HT) a progressé de 1,8 % en 2024, après 4,8 % en 2023.

([66]) DREES, Les dépenses de santé en 2024. Résultat des comptes de la santé – édition 2025, Panoramas de la DREES. Santé, septembre 2025, p. 8.

([67]) La CSBM est un agrégat économique comprenant les soins hospitaliers, les soins ambulatoires, tels que les soins courants des médecins généralistes en ville, et les biens et dispositifs médicaux. En revanche, n’en relèvent pas les soins de longue durée, les dépenses de prévention et les dépenses de gouvernance, qui sont comprises – avec la CSBM – dans le champ de la dépense courante de santé au sens international (DCSi).

([68]) DREES, Rapport sur la situation financière des organismes complémentaires assurant une couverture santé en 2023, décembre 2024, p. 27.

([69]) Rapport d’information n° 770 de M. Xavier Iacovelli sur le thème « Complémentaires santé, mutuelles, l’impact sur le pouvoir d’achat des Français », enregistré à la présidence du Sénat le 24 septembre 2024.

([70]) Mutualité Française, « Enquête cotisations 2025 : une hausse qui suit les dépenses de santé assumées par les mutuelles », communiqué de presse du 18 décembre 2024.

([71]) L’annexe 5 du PLFSS pour 2025 estimait à 1 milliard d’euros en année pleine l’économie liée à la hausse du ticket modérateur, présentée comme une mesure de transfert de dépenses vers les organismes complémentaires.

([72]) Un contrat de santé est dit « solidaire » lorsqu’il encourage le respect du parcours de soins coordonnés, qu’il ne prend pas en charge les différentes franchises et participations forfaitaires mises en place par l’assurance maladie obligatoire afin de responsabiliser l’assuré et lorsqu’il respecte des planchers et des plafonds de prise en charge de certains frais. Un contrat santé est dit « solidaire » si la complémentaire ne fixe pas les cotisations en fonction de l’état de santé des individus couverts et si, pour les adhésions ou souscriptions individuelles, elle ne recueille aucune information médicale sur l’assuré.

([73]) DREES, La complémentaire santé. Acteurs, bénéficiaires, garanties – édition 2024, Panoramas de la DREES. Santé, juillet 2025, p. 219.

([74]) Cette contribution est prévue à l’article L. 862-4-1 du code de la sécurité sociale.

([75]) Compte‑rendu de la réunion de la commission des affaires sociales du 27 janvier 2025, compte‑rendu n° 35.

([76]) L’article 63 de la loi n° 2025‑199 du 28 février 2025 de financement de la sécurité sociale pour 2025 dispose que les examens de prévention bucco-dentaire annuels font l’objet d’un ticket modérateur de 40 %, lequel est pris en charge par les organismes complémentaires dans le cadre des contrats solidaires et responsables.

([77]) Article 10 de la loi n° 2009-1646 du 24 décembre 2009 de financement de la sécurité sociale pour 2010.

([78]) Articles 3 et 13 de la loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021.

([79]) Loi n° 94-637 du 25 juillet 1994 relative à la sécurité sociale.

([80]) Loi n° 2004‑810 du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie.

([81]) Loi organique n° 2022-354 du 14 mars 2022 relative aux lois de financement de la sécurité sociale.

([82]) Rapport d’information n° 1891 de M. Éric Coquerel sur la recevabilité financière des initiatives parlementaires et la recevabilité organique des amendements à l’Assemblée nationale, enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 30 septembre 2025, XVIIème législature, p. 24.

([83]) Selon l’annexe 4 du PLFSS pour 2026, les exemptions d’assiette se distinguent des exonérations de cotisations sociales en ce qu’elles consistent à exclure certains revenus de l’assiette soumise aux cotisations et contributions sociales. Sont notamment concernés les dispositifs de participation financière, tels que l’intéressement et la participation, et les accessoires de salaire, tels que les titres‑restaurant et les chèques‑vacances.

([84]) Cour des comptes, Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, mai 2025, p. 138.

([85]) Article 18 de la loi n° 2025-199 du 28 février 2025 de financement de la sécurité sociale pour 2025.

([86]) Décret n° 2025-318 du 4 avril 2025 relatif aux modalités d’application de divers dispositifs de réduction de cotisations patronales.

([87]) Article 20 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024.

([88]) Décret n° 2025-887 du 4 septembre 2025 relatif aux modalités d’applications de différents dispositifs de réduction et d’exonération de cotisations patronales de sécurité sociale.

([89]) L’estimation de la Cour des comptes porte sur l’ensemble des compléments de salaire, qu’ils relèvent d’un régime d’exemption d’assiette ou d’un régime d’exonération de cotisations sociales, telles que les heures supplémentaires.

([90]) Article 1er de la loi n° 2022‑1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat.

([91]) À titre d’exemple, le 3° du III de l’article 1er de la loi n° 2022‑1158 du 16 août 2022 précitée dispose que la prime de partage de la valeur « ne peut se substituer à aucun des éléments de rémunération, au sens de l’article L. 2421 du code de la sécurité sociale, qui sont versés par l’employeur ou qui deviennent obligatoires en application de règles légales, contractuelles ou d’usage » ni « à des augmentations de rémunération [et] à des primes prévues par un accord salarial, par le contrat de travail ou par les usages en vigueur dans l’entreprise ».

([92]) 4° de l’article L. 137‑15 du code de la sécurité sociale.

([93]) Article 13 de la loi n° 2008‑1330 du 17 décembre 2008 de financement de la sécurité sociale pour 2009.

([94]) 7° du II de l’article L. 242‑1 du code de la sécurité sociale.

([95]) a du 5° du III de l’article L. 136‑1‑1 du code de la sécurité sociale.

([96]) Article L. 1234‑5 du code du travail.

([97]) Article L. 3141‑28 du code du travail.

([98]) Rapport particulier n° 1, Les différences de traitement entre catégories de revenus, in Conseil des prélèvements obligatoires, Conforter l’égalité des citoyens devant l’imposition des revenus, octobre 2024, p. 95.

([99]) Article 5 de la loi n° 2008-596 du 25 juin 2008 portant modernisation du marché du travail.

([100]) 6° du 1 de l’article 80 duodecies du code général des impôts.

([101]) L’harmonisation du régime social applicable à l’indemnité de rupture conventionnelle, qui distinguait auparavant la situation du salarié en droit ou non de bénéficier d’une pension de retraite d’un régime légalement obligatoire, a été introduite par l’article 4 de la loi n° 2023‑270 du 14 avril 2023 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, pour les indemnités versées à l’occasion des ruptures de contrat de travail intervenant à compter du 1er septembre 2023.

([102]) 7° du II de l’article L. 242‑1 du code de la sécurité sociale.

([103]) Article L. 137‑12 du code de la sécurité sociale.

([104]) En application de l’article L. 1237‑5 du code du travail, la mise à la retraite s’entend de la possibilité donnée à l’employeur de rompre le contrat de travail d’un salarié ayant atteint l’âge de 67 ans.

([105]) DARES, CDD, CDI : comment évoluent les embauches et les ruptures depuis 25 ans ?, Analyses, n° 26, juin 2018, p. 8.

([106]) DARES, données annuelles sur les mouvements de main‑d’œuvre, disponibles en ligne.

([107]) k) du paragraphe 2 de l’article 2 du règlement général annexé à la convention du 15 novembre 2024 relative à l’assurance chômage.

([108]) 2° du I de l’article L. 5422‑1 du code du travail.

([109]) Rapport particulier n° 1, Les différences de traitement entre catégories de revenus, opt. cit.

([110]) Articles 2 et 4 de loi n° 79‑10 du 3 janvier 1979 portant diverses mesures en faveur des salariés privés d’emploi qui créent une entreprise.

([111]) Article 13 de la loi n° 2017‑1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018.

([112]) Article 274 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.

([113]) Décret n° 2019‑1215 du 20 novembre 2019 modifiant les modalités d’application de l’aide à la création et à la reprise d’entreprise prévue à l’article L. 131‑6‑4 du code de la sécurité sociale.

([114]) Inspections générales des finances et des affaires sociales, Revue de dépenses sur les exonérations et exemptions de charges sociales spécifiques, juin 2015, p. 253.

([115]) Inspections générales des finances et des affaires sociales, Évaluation des mesures d’exonération de cotisations sociales spécifiques en outremer, novembre 2024.

([116]) Les secteurs éligibles, visés au 1° du B du III de l’article L. 752‑3‑2 du code de la sécurité sociale, comprennent notamment l’industrie, la restauration, le tourisme, l’hôtellerie, l’agriculture, la pêche et l’aquaculture.

([117]) Prévue au 5° du II de l’article L. 752‑3‑2 du code de la sécurité sociale, cet élargissement propre à la Guyane bénéficie aux employeurs ayant une activité principale relevant de l’un des secteurs d’activité éligibles à la réduction d’impôt pour l’investissement productif en outre-mer, prévue à l’article 199 undecies B du code général des impôts, ou se rattachant à la comptabilité, au conseil aux entreprises, à l’ingénierie ou aux études techniques.

([118]) Rapport d’information n° 1861 de M. Christian Baptiste sur l’évaluation des exonérations de cotisations sociales spécifiques aux Outre-mer, enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 24 septembre 2025, XVIIème législature.

([119]) L’avantage différentiel d’un dispositif « LODEOM » correspond à l’écart entre l’avantage procuré par ce dernier aux entreprises bénéficiaires et celui qui résulterait de l’application des allégements de droit commun.

([120]) Inspections générales des finances et des affaires sociales, Évaluation des mesures d’exonération de cotisations sociales spécifiques en outremer, novembre 2024, annexe III, p. 4.

([121]) Le IX de l’article 18 de la LFSS pour 2025 dispose que les bandeaux « maladie » et « famille » s’appliquent aux réductions dégressives spécifiques de cotisations patronales, dont les exonérations dites LODEOM, sous leur forme antérieure à la réforme des allégements généraux prévue par le même article.

([122]) Article L. 6243‑2 du code de la sécurité sociale.

([123]) Article D. 6243‑5 du code de la sécurité sociale, modifié par l’article 1er du décret n° 2025‑290 du 28 mars 2025 relatif à l’abaissement du seuil d’exonération des cotisations salariales des apprentis, qui a abaissé de 79 % à 50 % du SMIC le seuil d’exonération applicable à la rémunération des apprentis.

([124]) 7° du II de l’article L. 136‑1‑1 du code de la sécurité sociale, introduit par le I de l’article 22 de la loi n° 2025‑199 du 28 février 2025 de financement de la sécurité sociale pour 2025.

([125]) Inspections générales des finances et des affaires sociales, Revue des dépenses publiques d’apprentissage et de formation professionnelle, mars 2024, p. 17.

([126]) Article D. 373-3 du code de la sécurité sociale.

([127]) D’après les données de la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) disponibles en ligne, le nombre de contrats d’apprentissage en cours au 31 décembre de l’année a progressé de près de 145 % entre 2017 et 2024, de 425 900 à plus d’un million.  

([128]) Article 131 de la loi n° 2003-1311 du 30 décembre 2003 de finances pour 2004.

([129]) La sous‑catégorie des JEC, établie au sein du statut de JEI, a été introduite par l’article 44 de la loi n° 2023‑1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024. Sont éligibles au statut de JEC certaines PME dont les dépenses de recherche et de développement représentent entre 5 % et 20 % des charges déductibles, dès lors qu’elles respectent des critères de performance économique définis par le décret n° 2024‑464 du 24 mai 2024.

([130]) Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie (HCAAM), Rapport sur la régulation du système de santé, 27 mai 2021.

([131]) Cour des comptes, Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, mai 2025, page 99.

([132]) Cour des comptes, rapport précité, mai 2025, p. 93.

([133]) Ibid.

([134]) Comité d’alerte sur l’évolution des dépenses d’assurance maladie, Avis n° 2025-2 sur le respect de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, juin 2025.

([135]) Cour des comptes, Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, mai 2024, p. 190 à 216.

([136]) DRESS, Les indemnités journalières, 2025, disponible en ligne.

([137]) Assurance Maladie, Charges et produits pour 2026, juin 2025.

([138]) Observatoire national de la démographie des professions de santé, Démographie des chirurgiens-dentistes : état des lieux et perspectives, novembre 2021, disponible en ligne.

([139]) Assurance Maladie, Rapport précité, juin 2025.

([140]) Voir l’arrêté du 20 juin 2024 portant approbation de la convention médicale organisant les rapports entre l’Assurance maladie et les médecins libéraux conventionnés, Journal officiel du 21 juin 2024.

([141]) Conseil d’orientation des retraites (COR), Rapport annuel, juin 2025, page 66.

([142]) Cour des comptes Situation financière et perspectives du système de retraites, février 2025, page 57.

([143]) Cour des comptes, rapport précité, mai 2025, p. 231 à 253.

([144]) Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, Rapport d’information sur les politiques d’accompagnement à la parentalité, présenté par Mme Sarah Legrain et Mme Delphine Lingemann, juin 2025.

([145]) Loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021.

([146]) Cour des comptes, rapport précité, mai 2025.

([147]) Le taux de reconduction de l’OGD désigne l’augmentation tendancielle des dépenses attendues appliquée à la base de référence et hors mesures nouvelles.

([148]) Il s’agit de l’outil utilisé par les établissements pour évaluer les niveaux de soins nécessaires, à partir des situations cliniques observées.

([149]) Cour des comptes, rapport précité, mai 2025.

([150]) Inspection générale des finances et inspection générale des affaires sociales, Rapport n° 2024-058R relatif au recours contre tiers des organismes de sécurité sociale et des employeurs publics, janvier 2025.