Compte rendu

Commission
des affaires culturelles
et de l’éducation

– Audition de M. Jean Castex, délégué interministériel aux jeux Olympiques et Paralympiques 2024 2

– Informations relatives à la Commission.....................22

– Présences en réunion.................................23

 


Mercredi
22 novembre 2017

Séance de 10 heures

Compte rendu n° 13

session ordinaire de 2017-2018

Présidence de
M. Bruno Studer,
Président
 


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COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE LÉDUCATION

Mercredi 22 novembre 2017

La séance est ouverte à dix heures cinq.

(Présidence de M. Bruno Studer, président de la Commission)

 

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La commission des Affaires Culturelles et de l’Éducation procède à l’audition de M. Jean Castex, délégué interministériel aux jeux Olympiques et Paralympiques 2024.

M. le président Bruno Studer. Je souhaite la bienvenue à M. Jean Castex, conseiller maître à la Cour des comptes, qui a été nommé délégué interministériel aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 (JOP 2024) le 14 septembre dernier.

Monsieur le conseiller, je vous remercie de votre présence ce matin au sein de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, qui est aussi la commission chargée des sports, de la jeunesse et du monde associatif. Vos missions ont été définies de façon détaillée par le décret n° 2017-1336 du 13 septembre dernier, et je me permettrai de les résumer en disant que vous êtes tout à la fois le moteur et le coordinateur des différents acteurs et actions concourant à la préparation des JOP 2024.

En effet, l’organisation des jeux va reposer sur plusieurs institutions : le Comité d’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques (COJO), le Comité national olympique et sportif français (CNOSF), la société de livraison des ouvrages olympiques et paralympiques (Solideo), mais aussi un comité interministériel ainsi que de nombreuses collectivités territoriales.

Quels vont être les rôles de chacun et comment vont-ils s’articuler et se coordonner ?

Le décret précise également que vous devez vous assurer de « l’élaboration des dispositions législatives et réglementaires qu’implique l’accueil des jeux Olympiques et Paralympiques ». Le projet de loi n° 383, présenté mercredi dernier en conseil des ministres, marque une étape importante dans l’élaboration de ce dispositif.

Nous souhaitons donc vous entendre sur la vocation et le contenu de ce texte qui touche, j’y insiste, à des domaines très différents.

Enfin, ce même décret dispose que vous assurez la conduite du programme interministériel d’héritage des JOP 2024, sujet particulièrement important pour nous puisqu’il s’agit d’intégrer la grande fête des jeux dans un véritable projet de développement durable des populations et des territoires. Nous attendons donc également avec grand intérêt vos considérations sur le sujet.

M. Jean Castex, délégué interministériel aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024. L’examen du projet de loi relatif à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques 2024 sera le premier acte de la mise en œuvre de la décision prise par le Comité international olympique (CIO) à Lima, le 13 septembre dernier, de désigner Paris, en réalité la France, pour organiser les jeux Olympiques d’été, cent ans après l’édition de 1924, et cela après plusieurs candidatures infructueuses dans un passé récent. Nous pouvons considérer ensemble qu’il s’agit d’une excellente nouvelle pour le pays tant les jeux Olympiques représentent un événement de portée considérable. Il n’en faudra pas moins identifier les risques éventuels pour les maîtriser.

Il est raisonnable d’envisager, en fonction des précédentes éditions, que près de 11 millions de personnes assisteront aux épreuves olympiques et paralympiques. Ce chiffre est à rapporter au nombre de spectateurs lors de la coupe du monde de football de 1998 : 2,9 millions – ce qui était déjà considérable.

Nous devrons nous doter d’un outil transparent permettant à tous les acteurs – au premier rang desquels la représentation nationale – de mesurer l’impact de ces jeux sur le tissu économique et social national. Cet impact est pour l’heure estimé à environ 10 milliards d’euros et 150 000 emplois. Cet événement exceptionnel participera de l’image de marque de la France dans le monde, ce qui explique l’implication des plus hautes autorités de l’État, à commencer par le Président de la République, tant pendant la phase de candidature que pour celle, qui commence, de la mise en œuvre.

Ensuite, le CIO, qui désigne à chaque fois le bénéficiaire de l’organisation des Jeux, connaît essentiellement le mouvement sportif français, qu’incarnera le COJO, ainsi que la ville hôte, en l’espèce Paris. Un contrat a été signé entre le président du CIO et, comme pour toutes les éditions précédentes, la ville hôte et le mouvement sportif, ici le CNOSF. L’État, vous l’aurez observé, mais ce n’est pas propre aux JO de Paris, n’est pas partie directement à ce contrat, même s’il est bien entendu très directement intéressé, d’abord parce qu’en France l’État c’est l’État, ensuite parce qu’il dispose du pouvoir régalien de faire la loi ; or, nous allons-y venir, pour réussir les jeux Olympiques et tenir les engagements pris auprès du CIO
– condition d’attribution des Jeux –, il faut prendre des dispositions législatives et réglementaires. Ce mécanisme est celui des JOP en général.

L’originalité du dossier français est qu’il est rattaché à la notion d’héritage. Autrement dit, nous devons à la fois préparer et réussir les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, mais aussi faire en sorte que tout ce que nous prévoyons à ce titre aura, dans toute la mesure du possible, un caractère pérenne. Il s’agit d’éviter ce qui a été constaté à l’occasion d’éditions précédentes : on a construit des équipements importants, calibrés pour les Jeux, mais sans avenir, ce qu’on appelle communément les « éléphants blancs ».

Or le dossier français est original en ce qu’il repose sur quelque 95 % d’équipements déjà existants même si, bien sûr, il faudra les rénover et les adapter à l’exercice olympique. Le plus important et le plus connu est le Stade de France. Pour le reste, ce qui va être construit, avec appel aux deniers publics, par l’entremise de l’établissement public Solideo, devra pouvoir être utilisé après 2024. En outre, je tiens à souligner que l’essentiel des équipements se situent en Seine-Saint-Denis, c’est-à-dire dans un territoire dont je pense que personne ne contestera qu’il a besoin de la solidarité nationale pour se transformer et se développer.

La conception même de la cité olympique et paralympique qui hébergera les athlètes doit permettre sa reconversion, au lendemain des Jeux, en logements – dont une partie en logements sociaux –, en équipements publics, en immeubles de bureaux, donc permettre son insertion dans le paysage urbain. Nous allons par ailleurs construire un « village des médias » à côté du Bourget pour accueillir les milliers de journalistes qui viendront pour l’occasion. Là aussi, le village devra se transformer pour servir la population locale après 2024. Il s’agit d’un point très fort de l’architecture du dispositif, l’établissement public qui va livrer ces ouvrages garantissant que la somme d’un milliard d’euros d’argent public servira certes pour l’organisation des Jeux mais aussi pour la pérennisation des équipements après les Jeux. Cette assurance de satisfaire l’exigence du CIO en la matière a apporté à la candidature française une incontestable plus-value.

Par ailleurs, la volonté de toutes les parties – ce tripode composé du mouvement sportif, des collectivités territoriales, au premier rang desquelles, évidemment, la ville de Paris, et de l’État –, au-delà de l’héritage, est d’organiser des jeux Olympiques exemplaires, tout d’abord en matière de respect des règles d’éthique et de transparence. Nous verrons que le projet de loi soumis à votre assemblée comporte des dispositions importantes à cet égard mais il y en aura d’autres, notamment dans les statuts tant du futur COJO que du futur établissement public Solideo. Nous voulons également des jeux Olympiques exemplaires au plan sociétal et environnemental, par la qualité des constructions, par le recours à des entreprises et à une main-d’œuvre locales – parce qu’il faudra construire de nombreux ouvrages.

Notre entreprise se veut mobilisatrice : je rappelle que le nombre de bénévoles qui pourraient être concernés par l’exercice est évalué à 70 000, ce qui est considérable et supposera un encadrement spécifique.

Autre enjeu que je me contenterai d’évoquer : Paris et la région capitale – je mentionnais tout à l’heure la Seine-Saint-Denis – vont bénéficier fortement des jeux Olympiques et Paralympiques ; or il nous appartient de faire en sorte, comme l’a rappelé le Président de la République, qu’ils soient aussi les jeux de la France et que les retombées et la mobilisation ne concernent pas qu’une partie du territoire. Compte tenu des sommes en jeu, des difficultés qui existent d’ores et déjà entre les régions et les centres urbains les plus dynamiques d’une part, et le reste du pays de l’autre, notre défi, c’est que les jeux Olympiques ne viennent pas aggraver cette fracture mais concourent au contraire à la résorber. C’est évidemment plus simple s’agissant, par exemple, des territoires en difficulté en Seine-Saint-Denis, mais il ne faut pas que nous perdions de vue cet objectif. Nous avons sept ans devant nous mais je pense que c’est un objectif politique essentiel qui conditionne la réussite des Jeux.

Où en sommes-nous aujourd’hui ?

Il faut simplement que nous nous mettions en ordre de marche après la décision prise à Lima d’attribuer les jeux Olympiques et Paralympiques à Paris, à la France. Cela suppose d’abord, nous y reviendrons, ce que j’appellerai un « paquet législatif et réglementaire » : il faut faire évoluer le droit français à la fois pour satisfaire aux engagements qui ont été pris à l’égard du CIO et pour être prêts pour l’échéance de l’été 2024. C’est pourquoi un projet de loi vous est soumis, dont vous avez pu constater qu’il habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnances. Il faudra donc écrire ces textes, ainsi que les décrets d’application ; notre objectif est que, au printemps prochain, cet ensemble soit prêt.

Voilà qui me conduit à évoquer ce qu’on désigne communément par « gouvernance », appellation qui recouvre les institutions qui vont faire vivre la préparation des Jeux. Pendant la phase de candidature, toutes les parties s’étaient réunies autour d’un groupement d’intérêt public, le GIP Paris 2024, qui sera dissous dans quelques semaines puisque, d’une certaine manière, il a atteint son objectif.

Désormais, le COJO, qui sera une association loi de 1901 financée
quasi exclusivement sur fonds privés, s’occupera de l’organisation des Jeux eux-mêmes. L’ensemble des partenaires, au premier rang desquels, j’y insiste, le mouvement sportif, a souhaité que des règles d’éthique, de transparence et de contrôle des plus poussées soient appliquées. Le COJO va s’occuper du contenu, c’est-à-dire des Jeux eux-mêmes et de leur préparation, et l’établissement public Solideo va pour sa part s’occuper de la construction ou des améliorations ou des travaux de tous ordres, pour ce qu’on appelle les ouvrages olympiques qui, vous l’avez vu, peuvent être définitifs ou temporaires. De fait, le seul ouvrage vraiment définitif sera un centre aquatique important. Celui-ci doit être conçu – les discussions sont en cours –, bien entendu, pour servir aux épreuves olympiques, mais ensuite pour être mis au service de la Fédération française de natation et de la population de Seine‑Saint-Denis – dont je rappelle que c’est le département de France où le nombre de piscines rapportés à la population, notamment la population jeune, est le plus faible. Il doit donc s’agir d’un ouvrage sportif évolutif dont la vocation, de strictement olympique, devra se faire plus large.

La Solideo aura recours à des maîtres d’ouvrage variés et c’est ce qui fait la difficulté de l’exercice. Le fait que les ouvrages doivent être reconvertis après les JO au sein des paysages urbains dans lesquels ils doivent s’insérer nous oblige à travailler, en particulier, avec les établissements publics territoriaux de la Métropole du Grand Paris, gestionnaires de l’aménagement et de l’urbanisation de ces espaces. Il faudra donc passer des conventions, créer des filiales… pour à la fois respecter la présence et l’autorité de l’État qui apportera la majorité des financements mais également intégrer la volonté des collectivités territoriales concernées afin de parvenir à un ensemble le plus harmonieux possible.

Le COJO et la Solideo doivent être installés au cours des six mois suivant la décision de Lima. Notre objectif politique, mesdames et messieurs les députés, est d’être opérationnels avant ce délai puisque nous comptons bien installer ces deux structures en janvier 2018.

Un décret en Conseil d’État est nécessaire pour mettre en place la Solideo : le Conseil d’État vient d’être saisi et nous pouvons raisonnablement penser que le décret sera publié avant le 31 décembre 2017. Vous avez peut-être noté que le Gouvernement avait désigné comme préfigurateur de la Solideo Nicolas Ferrand, ancien directeur général d’un gros établissement public d’aménagement, qui connaît donc très bien ce type de procédure et d’opérations et qui est un habitué du dialogue avec les collectivités territoriales.

Les discussions sont en cours pour définir les statuts du COJO, qui sera une association loi de 1901. Nous travaillons dans le cadre consensuel qui a prévalu à la candidature et fait sa force, tout en rappelant bien que le COJO est l’émanation du mouvement sportif qui aura donc la majorité des voix. Il sera présidé par Tony Estanguet, au travail duquel je tiens à rendre hommage devant vous. Les statuts sont donc en cours de rédaction et je puis vous assurer qu’ils ne sont pas loin d’être achevés. Ils doivent être examinés par le CIO et nous espérons qu’ils pourront être déposés et que le COJO sera officiellement créé au début de l’année prochaine.

Enfin, et vous comprenez pourquoi je termine par ce point, Monsieur le président, l’État s’est lui-même mis en ordre de bataille en instituant une délégation interministérielle. Les députés ici présents savent bien que les jeux Olympiques sont certes un événement sportif – j’en profite pour souligner le rôle essentiel de Laura Flessel, ministre des sports, dans ce dossier – mais c’est aussi une question de sécurité, d’aménagement du territoire, de transport, et évidemment une question financière. Aussi de nombreux ministères vont-ils concourir à ce projet ambitieux et, cela a déjà été le cas pour les derniers jeux Olympiques d’hiver organisés en France, il était normal qu’un délégué interministériel soit nommé pour coordonner l’action des ministères, faire en sorte que l’État parle d’une seule voix et pour que ce dernier, surtout, joue tout son rôle qui, encore une fois, est prédominant dans la construction des ouvrages olympiques puisqu’il en est le financeur majoritaire – vous le constaterez à l’occasion de l’examen des projets de loi de finances jusqu’en 2024, avec une montée en charge progressive. L’État a également un rôle de facilitateur dans un écosystème comprenant de nombreux acteurs – je les ai déjà mentionnés : le mouvement sportif, les collectivités territoriales, au premier rang desquelles la ville de Paris – et il doit toujours veiller à ce qu’une certaine harmonie règne de façon que nous puissions arriver à bon port, en temps et en heure.

Mme Aude Amadou. Je souhaite revenir sur l’éthique et la transparence que vous avez évoquées rapidement et j’aimerais avoir davantage de précisions à cet égard sur les statuts du COJO et ceux de la Solideo. Un événement sportif de ce type échappe difficilement, aujourd’hui, au soupçon de malfaçons – cause éventuelle, a posteriori, de scandales. Aussi pouvez-vous d’ores et déjà nous rassurer quant aux modalités de fixation des futures rémunérations des membres du COJO ?

Ensuite, les modalités de liquidation des boni du COJO n’apparaissent pas dans le projet de loi – mais peut-être figurent-elles dans les statuts de cette structure. Pouvez-vous nous éclairer ?

M. Maxime Minot. Je sais que la lutte contre la pollution n’est pas de votre ressort, mais le rapport désastreux rendu public il y a quelques heures sur la fermeture des voies sur berge par la mairie de Paris n’est pas sans soulever de nombreuses interrogations dans le cadre de l’organisation des jeux Olympiques : nette augmentation de la pollution, mais aussi du temps de trajet. L’impact est réel sur la santé des Parisiens mais aussi sur celle des athlètes qui seront amenés à concourir à Paris ou dans sa périphérie. La politique menée actuellement par la municipalité et dont les résultats, à l’évidence, sont décevants, me conduit à vous demander quels sont vos objectifs en la matière et quelles sont les actions que vous serez amenés à entreprendre dans le cadre de la mission qui vous a été confiée.

M. Régis Juanico. Nous partageons tous, ici, au sein de la commission des affaires culturelles et plus particulièrement au sein du groupe de travail consacré aux jeux Olympiques et Paralympiques, coprésidé par Aude Amadou et moi-même, ce que vous avez déclaré, monsieur le délégué interministériel, et qui est qui est fondamental : il faut que ces jeux soient aussi ceux de toute la France. L’héritage sportif et territorial que l’on va construire avant même les jeux Olympiques, avant même la compétition sportive, est une dimension que la délégation interministérielle doit promouvoir dans l’ensemble des territoires pour en faire profiter l’ensemble des Français, des bénévoles du monde sportif, mais aussi l’ensemble de nos collectivités.

Le Conseil d’État, dans son avis du 9 novembre dernier, a estimé que l’étude d’impact jointe à l’avant-projet de loi apparaissait, pour certaines dispositions relatives à l’urbanisme, aux opérations d’aménagement mais aussi à la délivrance au COJO des titres d’occupation du domaine public, lacunaire ou insuffisante. Le Conseil d’État a donc demandé que cette étude d’impact soit complétée avant que le texte ne vienne en discussion en commission. Pouvez-vous nous renseigner sur les compléments qui seront apportés ?

Ensuite, qu’en est-il de l’avenir de la délégation interministérielle aux grands événements sportifs qui a travaillé avant vous, notamment pour l’organisation de l’Euro 2016 ?

Enfin, à l’occasion de la discussion d’un projet de loi de finances rectificative, en 2014, nous avions voté des dispositifs d’exonération fiscale liés aux grands événements sportifs internationaux. Le CIO a-t-il demandé à pouvoir en bénéficier ?

M. Philippe Berta. Le projet de loi relatif à l’organisation des jeux olympiques et paralympiques de 2024 prévoit, en son article 13, que les logements étudiants vacants au 1er juillet 2024 pourront, à titre dérogatoire, et au plus tard jusqu’au 1er octobre 2024, être loués pour accueillir des personnes accréditées par les comités olympiques et paralympiques.

C’est l’universitaire qui s’adresse à vous : la rentrée universitaire se fait au début du mois de septembre, ce qui est contradictoire avec la mise à disposition de ces logements jusqu’au 1er octobre. Comment comptez-vous résoudre cette contradiction ?

Mme Marie-George Buffet. Nous nous félicitons de la tenue des jeux olympiques et paralympiques. Le chantier de l’éthique, de la transparence et pour l’héritage est maintenant devant nous.

Vous avez évoqué l’objectif politique d’associer l’ensemble de la population à cet événement. En 1998, nous avions connu un démarrage extrêmement difficile, il y avait eu comme une bouderie de la population à l’égard de la Coupe du monde de football. Il faudra multiplier les initiatives, partout dans le territoire, pour associer les jeunes et les moins jeunes à ces jeux Olympiques et Paralympiques.

Attention à savoir fixer les limites du bénévolat. À Londres, son utilisation avait fait l’objet d’abus, au détriment de l’emploi salarié, dans différentes facettes de l’organisation des JO. Il faudra être vigilant.

S’agissant de l’impact économique, pouvez-vous nous éclairer sur le processus de choix des entreprises ? Comment pourrons-nous favoriser nos entreprises, un emploi respectueux de notre droit, et penser la formation de nos jeunes – je pense notamment aux jeunes des lycées professionnels de Seine-Saint-Denis – en lien avec les besoins des entreprises pour les JO ?

Pour la gestion des équipements, vous avez raison à propos des piscines : en Seine‑Saint-Denis, 50 % des enfants ne savent pas nager. Quel mode de gestion est prévu pour le bassin olympique après les jeux ? Va-t-on vers un système tel que celui du Stade de France, ou le bassin restera-t-il un équipement géré de manière publique ?

Nous allons traduire les engagements du contrat entre Paris et le CIO dans la loi olympique. Comme notre collègue Juanico, je remarque que le projet de loi contient des imprécisions, telle l’expression « pendant la durée nécessaire au bon déroulement des jeux. » Je pense que la loi devra être précisée.

M. Pierre-Yves Bournazel. Monsieur le délégué interministériel, je vous félicite pour votre nomination. Vous êtes un grand serviteur de l’État, bien enraciné et sachant travailler avec les collectivités territoriales, puisque vous êtes maire vous-même. Nous pouvons unanimement nous réjouir que le Gouvernement vous ait choisi.

Cette candidature a été marquée par l’unité entre la ville de Paris, la région
Île-de-France, l’État, le monde sportif et le monde économique. Nous avons besoin de préserver cette unité, qui a été une force pour gagner, et qui sera une force pour travailler sur l’héritage.

Les JO seront l’occasion de braquer les projecteurs internationaux sur Paris, sur la région capitale et sur la France, de démontrer notre savoir-faire et de mettre en avant nos entreprises et nos territoires.

Nous avons souvent parlé ici de l’héritage immatériel des Jeux : sport et santé, inclusion des personnes à mobilité réduite et de ceux qui n’accèdent pas au sport pour diverses raisons. Vous venez aussi d’évoquer l’héritage matériel, dont l’un des éléments sera la politique des transports. Un projet est né avant cette candidature : le Grand Paris express. Il doit pouvoir bénéficier de l’organisation des Jeux, et ainsi être utile aux déplacements de millions de Franciliennes et de Franciliens. Il y a une inquiétude à son propos, comment allez‑vous traiter la question cruciale de sa bonne livraison ? Comment travaillerez-vous avec les différents ministères concernés ? Le projet qui nous est soumis ne le mentionne pas.

Mme Sabine Rubin. Vous avez dit combien la Seine-Saint-Denis sera un acteur majeur, touché et intéressé par ces Jeux. Paradoxalement, vous avez aussi relevé que c’était le territoire le moins bien doté en équipements de proximité.

J’ai bien entendu que vous prendrez soin que les équipements, notamment la piscine, soient construits afin de bénéficier à tous. Mais en quoi les JO vont-ils contribuer à régler le problème des équipements désuets et insuffisants, de manière à permettre à l’ensemble de la population de s’approprier ces Jeux ?

M. Jean Castex. Deux questions portent sur la transparence des rémunérations, sujet majeur, qui nous rappelle que nous allons être observés, et c’est normal. L’exemplarité de nos comportements est aussi un élément de l’acceptabilité par l’opinion publique, indépendamment des retombées mesurables de cet exercice.

La question de la rémunération de l’ensemble des acteurs doit se régler dans un cadre procédural. Elle concerne essentiellement le COJO, car la Solideo est un établissement public d’État, et la rémunération des dirigeants des établissements publics suit les règles de droit commun, dans la transparence et sous la surveillance du ministère de l’économie et des finances.

Le COJO est une association loi 1901. Vous connaissez tous la loi de 1901, et le principe de la liberté associative, constitutionnellement consacré. Les pouvoirs publics ne verseront pas d’argent au COJO, à l’exception d’une dotation affectée aux jeux Paralympiques dont l’utilisation sera suivie pas à pas. Pour le reste, le mouvement sportif sera très majoritaire au sein de l’association.

Dans beaucoup de pays qui ont organisé des Jeux avant nous, les comités d’organisation étaient constitués de structures commerciales parce qu’il s’agissait de faire entrer beaucoup de recettes publicitaires et de sponsoring. Le choix qui a été fait, avant même que je sois nommé délégué interministériel, est de constituer le COJO sous forme d’association loi 1901. À ce stade, le projet de statuts de cette future association prévoit des dispositifs tels qu’un comité des rémunérations ou un contrôle économique et budgétaire supervisé par le ministère des finances, dérogatoires dans une association loi 1901 non financée par l’argent public. De plus, le projet de loi qui vous sera soumis prévoit que les principaux responsables de cette association seront soumis au contrôle de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. Et, alors qu’il ne bénéficie que de 3 % de fonds publics, le COJO sera soumis au plein contrôle de la Cour des comptes : je ne connais pas beaucoup de précédents…

Cela veut dire que tous les acteurs, au premier rang desquels le mouvement sportif lui-même, ont souhaité que des règles dérogatoires et ambitieuses soient appliquées, précisément parce que tout le monde a conscience qu’il y a eu des précédents difficiles, et que l’opinion publique accepte de moins en moins de tels faits. Pour cet événement emblématique et symbolique, il faut que nous soyons à la hauteur. À ce stade, tant le dispositif législatif soumis à votre appréciation que les projets de statuts devraient apporter un maximum de garanties. En tout cas, je vous invite à faire un peu de parangonnage, les règles n’ont jamais été portées aussi loin sur ce sujet.

La répartition du bonus du COJO est fixée par le contrat de ville hôte. En cas d’excédent, 20 % seraient rendus au CIO. Sachez qu’en règle générale, le CIO ne réclame pas le versement de ces 20 % – je ne devrais pas le dire, car ces sommes lui reviennent en théorie. Une autre part de 20 % reviendrait au représentant français du CIO, c’est-à-dire le CNOSF. Les 60 % restants seraient distribués en faveur de causes en lien avec le sport. Souvent, ils bénéficient au CNOSF, à des fédérations sportives ou des établissements en lien avec le sport. Les statuts du COJO préciseront cela ; je n’ai fait que vous décrire les stipulations du contrat de ville hôte.

Je suis un peu plus gêné pour répondre à la question sur la pollution à Paris. Son auteur a commencé en déclarant ne pas être sûr que cela soit dans mes compétences : il a parfaitement raison ! Le projet de loi dont vous êtes saisis prévoit une habilitation pour que les délégations olympiques disposent de voies réservées pour se rendre aux compétitions, c’est au moins la garantie que les athlètes seront à l’heure. Cette disposition du contrat de ville hôte est toujours prévue dans le cadre des Jeux. Elle suppose d’aménager le droit positif, car il n’est pas possible aujourd’hui de le faire pour des jeux Olympiques. En outre, selon la nature de la voie routière, l’autorité compétente est l’État, le maire ou le président d’EPCI. Le projet de loi prévoit une unification de la compétence au profit de l’État, par ordonnance. Les gens pensent que si l’on réserve des voies, la circulation sera encore pire dans les autres voies. La circulation pendant les jeux Olympiques est un sujet majeur qui sera examiné en lien avec toutes les parties, en particulier le préfet de police.

Effectivement, pour certains articles, le Conseil d’État nous a fait observer que l’étude d’impact n’était pas parfaite. Nous avons eu la chance que le Premier ministre dégage un créneau pour l’examen parlementaire qui n’était pas prévu, ce qui a conduit à accélérer l’écriture de ce projet de loi et de son étude d’impact, d’où son caractère imparfait. Mais nous avons apporté des compléments sur les points sur lesquels le Conseil d’État a appelé notre attention. La version de l’étude d’impact envoyée à l’Assemblée nationale a été amendée et enrichie par rapport à celle transmise au Conseil d’État. En particulier, il nous avait été demandé la liste des installations temporaires, elle figure bien en page 44 de l’étude d’impact. Nous avons également précisé les cas de recours à l’extrême urgence pour les expropriations qui, le cas échéant, pourraient être prononcées pour la préparation des JO en application de l’article 9. Le Conseil d’État a aussi demandé à ce que les voies réservées à la circulation soient mieux précisées dans l’étude d’impact, afin que le législateur habilite le Gouvernement de manière plus éclairée. Sur ces trois points au moins, l’étude d’impact a été complétée.

La délégation interministérielle aux grands événements sportifs (DIGES), placée auprès de la ministre des sports a, par définition, la charge des grands événements sportifs. Elle s’est occupée de l’Euro 2016, pour ne citer qu’un exemple récent et connu. Nous nous interrogeons sur l’articulation avec cette délégation. D’une part, pour un délégué interministériel, s’occuper des jeux Olympiques et Paralympiques, c’est déjà pas mal. À ajouter d’autres événements de grande ampleur, on court le risque de vouloir trop embrasser et mal étreindre. Dans le même temps, il y a des connexions entre ces événements. Tout d’abord, on pourrait considérer certains comme des galops d’essai pour montrer au reste du monde la capacité d’organisation de la France. Au-delà, la France vient d’obtenir l’organisation de la Coupe du monde de rugby à l’automne 2023, tandis que les JO se tiendront à l’été 2024. Cette coupe du monde, plus encore que l’édition précédente de 2007, se tiendra au Stade de France, qui sera aussi beaucoup utilisé pour les jeux Olympiques. Il y a des travaux à faire au Stade de France pour les JO, et il y en a aussi sûrement pour la Coupe du monde de rugby. En termes de planning des travaux, il y a des points d’intersection évidents. Je pense donc que d’ici la fin de l’année, le Gouvernement, en particulier la ministre des sports, aura pris sa décision pour savoir ce que devient la DIGES, et quelle sera son articulation avec la délégation interministérielle aux jeux Olympiques et Paralympiques.

Vous m’avez interrogé sur les exonérations fiscales, en faisant le parallèle avec l’Euro 2016 et les demandes de l’UEFA. Oui, des dispositifs comparables sont prévus, les mêmes que pour tous les jeux Olympiques de la période récente. La représentation nationale en sera saisie le moment venu, puisque vous savez qu’ils ne peuvent pas figurer dans une loi ordinaire du fait de l’exclusivité de la compétence de la loi de finances à ce sujet. Pour ne rien vous cacher, une étude avec la direction de la législation fiscale est en cours pour en préciser le contenu et le périmètre ; mais évidemment, le Parlement en débattra. Pour les sujets relatifs à l’urbanisme, à l’environnement et à l’aménagement, nous vous demandons de modifier la législation dès à présent, pour être prêts en temps et en heure en 2024. Celui des exonérations fiscales ne passe pas par le même vecteur, et ne présente pas le même caractère d’urgence.

Les dispositions relatives au logement étudiant sont prévues dans le projet de loi car lorsque l’on construit des logements étudiants, c’est pour y loger des étudiants ; c’est d’ailleurs ce qui ouvre l’accès à des financements spécifiques. Mais entendons-nous bien, les logements en question seront construits pour l’usage des jeux Olympiques, puis libérés à l’échéance que vous avez donnée, qui peut effectivement paraître un peu tardive pour la rentrée universitaire. Mais ne pas construire de logements sociaux destinés aux étudiants serait tout à fait dommage. Pour pouvoir construire des logements sociaux, et les utiliser à titre temporaire pour loger des journalistes ou des athlètes, il faut une disposition législative. Ensuite, la loi prévoit certaines formules un peu larges, pour donner de la souplesse au gestionnaire. Cette souplesse est d’autant plus nécessaire que nous postulons pour 2024. J’entends donc bien votre question, mais ces dispositions ont surtout été prises par rapport aux règles applicables au logement social.

Madame Buffet a évoqué plusieurs sujets que j’ai partiellement abordés, je serai plus rapide. La mobilisation des jeunes est capitale, nous étions hier avec M. Estanguet et le ministre de l’éducation nationale pour essayer d’arrêter un plan national.

Les bénévoles sont cruciaux, nous devrons essayer de tirer tous les enseignements des expériences passées, y compris de l’Euro 2016.

Pour le processus de choix des entreprises, il faut rester dans le cadre du droit des marchés publics et des règles européennes en la matière. Au-delà, il faut engager un plan de formation pour trouver la main-d’œuvre adaptée et qualifiée. Je signale au passage que nous travaillons en permanence avec les partenaires sociaux : un représentant des syndicats, désigné de façon consensuelle, et un représentant du monde patronal. Nous allons lancer le chantier avec Pôle emploi pour travailler à un plan de formation spécifique sur ces sujets.

Le mode de gestion de la piscine olympique n’est pas arrêté à ce stade, je rappelle simplement que la loi prévoit que cet équipement relève de la compétence de la métropole, qui sera maître d’ouvrage pour la construction et l’exploitation. L’exploitation peut se faire de manière directe ou déléguée, mais je ne sais pas quel choix fera la métropole.

Le Grand Paris express est évidemment un sujet central. Je ne suis pas compétent pour en parler, ma seule priorité est que les sites olympiques majeurs soient le mieux desservis possible par des transports en commun. Cela tombe bien, puisque la planification du Grand Paris express et des gares prévues ont joué un rôle dans la localisation des futurs équipements olympiques. Ce serait un formidable héritage pour les Franciliens si les Jeux permettaient que le calendrier soit stabilisé et que les lignes et stations correspondantes soient réalisées quelques mois avant l’échéance de 2024. J’assiste à toutes les réunions consacrées à la mise en œuvre du Grand Paris express comme personne intéressée.

M. Grégory Galbadon. Je souhaite vous interroger sur l’impact environnemental des jeux Olympiques et Paralympiques. Des mesures sont-elles envisagées pour réduire l’impact écologique de cet événement ? En dehors du simple objectif de ne pas nuire, ne
peut-on élever nos ambitions vers l’exemplarité ? Au-delà des sponsors et partenaires des JO, comment mettre le « made in France » à l’honneur, ce qui semble essentiel pour associer tous les Français à ce grand événement ? Quant à la question environnementale, je pense bien sûr au projet urbanistique dans ses grandes lignes, mais aussi aux petits détails qui portent un message et font la différence, par exemple : zéro plastique, zéro déchets, zéro produits phytosanitaires, zéro émissions de CO2 autres que le souffle des athlètes…

Pouvez-vous nous éclairer quant à l’avancement de la réflexion de la délégation interministérielle concernant le volet environnemental et social de ces jeux ?

M. Frédéric Reiss. Les jeux Olympiques et Paralympiques sont des événements considérables pour Paris et la France. Toutes les régions françaises voudront participer à la fête, et votre ambition est de réussir les Jeux et de donner un caractère pérenne aux infrastructures nécessaires à leur bon déroulement, intention louable.

Ma question porte sur la mobilité des athlètes et des spectateurs. En plus du Grand Paris express, des lignes aériennes et du maillage routier et autoroutier dont on connaît les limites, l’effort serait à porter sur les lignes ferroviaires, dont certains TER et trains intercités ne sont pas dignes d’un tel événement en matière de confort, de sécurité et d’accueil des personnes à mobilité réduite. Quelles sont vos marges de manœuvre avec le ministère des transports ? Comment allez-vous organiser les flux, avec un objectif de sécurité et de développement durable ?

Mme Géraldine Bannier. Il s’agit moins d’une question que d’une proposition. J’ai participé en 1993 aux Jeux de l’avenir. Il s’agissait de « jeux Olympiques » miniatures destinés aux minimes, avec cérémonie d’ouverture et de clôture et village olympique. Tous les jeunes étaient admis à y participer, de l’enseignement privé comme du public – l’Union nationale du sport scolaire (UNSS), l’Union générale sportive de l'enseignement libre (UGSEL), et la Fédération française d'athlétisme (FFA) étaient représentées –, de la métropole et des DOM-TOM. Ces jeux ont évidemment permis de révéler de futurs champions : Jean Galfione s’y était illustré. J’en garde un souvenir inoubliable.

En amont des JO de 2024, pourquoi ne pas réfléchir à des Jeux de l’avenir – y compris paralympiques – en 2020 ? Ils fédéreraient toute la jeunesse française et la prépareraient aux Jeux de 2024.

M. Pierre-Alain Raphan. Monsieur le délégué, vous nous avez annoncé une excellente nouvelle : selon le bon vouloir du CIO, les excédents du COJO pourraient être entièrement reversés au développement du sport en France et au sport pour tous. Comment pourrions-nous nous assurer que ces sommes seront vraiment allouées au développement du sport en France ? Pourrions-nous profiter de la grande volonté d’exemplarité de ces Jeux pour travailler dès maintenant avec les fédérations sportives sur une réforme de leur gouvernance, en leur appliquant les mêmes systèmes de contrôle qu’au COJO ?

Mme Gisèle Biémouret. En tant que Gersoise, je vous félicite doublement pour votre nomination, monsieur le délégué interministériel, et vous adresse mes encouragements sous la forme de cette citation de Pierre de Coubertin : « Chaque difficulté rencontrée doit être l’occasion d’un nouveau progrès ».

L’organisation des jeux Olympiques se veut exemplaire d’un point de vue social et environnemental. En termes économiques, l’étude d’impact confirme la création d’emplois et la stimulation de la formation. Si le nombre d’emplois créés pourrait s’élever à 250 000, qu’en est-il exactement de la qualité de ces emplois, de leur caractère durable et de la prise en compte de clauses sociales spécifiques ou de politiques d’insertion pour remplir les critères d’exemplarité ?

Mme Jacqueline Dubois. En janvier 2017, Thomas Bach, président du CIO, et Antonio Guterres, secrétaire général des Nations unies, ont signé un accord historique de partenariat direct, qui a pris une telle importance que l’ONU a fermé son propre bureau pour le sport au service du développement et de la paix (UNOSDP). L’article 2 des principes fondamentaux de l’olympisme affirme que son but est de « mettre le sport au service du développement harmonieux de l’humanité en vue de promouvoir une société pacifique, soucieuse de préserver la dignité humaine » – et pour cela, le CIO applique, entre autres, le principe d’égalité entre les hommes et les femmes. Entre Paris 1924 et Paris 2024, le mouvement olympique aura influencé l’Histoire pendant un siècle : je pense à l’exclusion de l’Afrique du Sud des JO de 1964 à 1992 en raison de la politique d’apartheid, ou aux délégations coréennes du Nord et du Sud qui ont défilé ensemble lors des cérémonies d’ouverture des jeux de 2000 à Sydney et de 2004 à Athènes, alors que la Corée reste déchirée depuis une situation de guerre vieille d’un demi-siècle.

Pour une jeunesse aujourd’hui en quête de sens, les jeux Olympiques ne sont-ils pas, en dépit de certaines zones d’ombre comme le « sport business » ou le dopage, l’occasion de mettre en lumière, par une rétrospective historique constituant une forme de pédagogie de la paix, toute l’importance qu’a eue l’esprit sportif et olympique depuis cent ans pour conduire les peuples vers une entente cordiale ? Monsieur le délégué interministériel, pouvez-vous nous dire si des moyens spécifiques seront consacrés à cet objectif ?

M. Jean Castex. Pour ce qui est de la dimension environnementale et de l’impact écologique des Jeux, monsieur Galbadon, je vous invite à prendre connaissance du très épais dossier de candidature qui a été constitué avant le vote du CIO à Lima, et qui contient de substantiels développements et précisions sur les engagements que nous prenons dans ce domaine. Certes, il nous revient maintenant de tenir ces engagements – que je ne vais pas reprendre ici dans le détail –, j’en profite pour préciser qu’il appartiendra essentiellement au COJO d’y veiller.

Si M. Bournazel m’avait posé une question portant sur les améliorations à apporter aux infrastructures de transport, M. Reiss m’a interrogé, lui, sur le réseau existant. Les deux questions sont liées, puisque depuis un certain temps, toutes les nouvelles réalisations doivent obéir à des normes strictes en matière d’accessibilité. Cela dit, nous allons nous efforcer de mener, dans le cadre des JO, en étroite concertation avec les associations concernées, notamment le mouvement paralympique, un certain nombre d’opérations de mise en accessibilité des modes de transports existants – des opérations qui, nous l’espérons, revêtiront un caractère exemplaire. Nous avons déjà programmé des réunions de travail dans cet objectif.

L’adaptation des transports existants, notamment des TER, n’est pas perdue de vue, mais je vous rappelle que le délégué interministériel aux jeux Olympiques et Paralympiques n’est pas chargé de la politique des transports en Île-de-France, et que l’amélioration de l’accessibilité de l’existant ne saurait résulter que d’une volonté politique plus large, que nous espérons tous voir stimulée à la faveur des jeux.

M. Raphan m’a demandé comment nous pourrions avoir l’assurance que les excédents résultants de la dissolution du COJO seraient bien reversés à des bénéficiaires éventuels ayant pour objet le développement du sport, et suggéré – ce que je peux concevoir, car les deux sujets sont liés – une éventuelle réforme de la gouvernance dans ce domaine. Il se trouve que Mme Flessel a commencé à évoquer une réforme de la gouvernance du mouvement sportif, qu’elle vous exposera mieux que je ne saurais le faire, mais dont je crois pouvoir affirmer qu’elle aura vocation à être mise en application avant le moment où se posera la question de la répartition d’un éventuel boni résultant de la liquidation du COJO. Cela dit, il me semble que les projets de statuts du COJO – je pense notamment à l’article qui, au-delà de ce qui est prévu par le contrat de ville hôte, prévoit les modalités de répartition du boni – sont de nature à vous rassurer.

Pour ce qui est de la question de Mme Biémouret – que je salue tout spécialement en tant que députée du Gers –, je pense avoir déjà répondu partiellement au sujet des emplois, puisque Mme Buffet m’avait également interrogé à ce sujet. J’insiste sur le fait que l’essentiel en la matière est que les entreprises retenues dans le cadre des marchés passés pour l’organisation des Jeux puissent faire appel à une main-d’œuvre formée. À défaut, il sera vain de vouloir leur appliquer des dispositifs contraignants, et nous devrons craindre qu’elles soient tentées de faire appel à des travailleurs détachés, ce qui nous conduirait à faire face aux problématiques se rattachant à cette pratique. Nous n’avons pas encore abordé la phase des travaux, car c’est un long processus qui nous attend, même si la représentation nationale aura sans doute à cœur de nous permettre d’accélérer certaines procédures. Nous sommes en France, ce qui signifie qu’il va falloir passer par de nombreuses études et concertations avant de pouvoir entamer les travaux. Cela dit, nous devons voir ce délai comme une opportunité et en profiter pour anticiper des plans de formation – ce qui, on le sait, ne se fait pas du jour au lendemain.

J’ignorais l’existence des Jeux de l’avenir destinés aux minimes, mais je vous remercie de m’avoir communiqué cette information, madame Bannier, car il s’agit d’une idée intéressante, tout comme celle consistant à valoriser, comme le suggère Mme Dubois, l’image des JO et les valeurs véhiculées par le sport, en particulier auprès des jeunes. Je ne doute pas, monsieur le président, que vous renouvellerez ce type de recommandations auprès du COJO dès que vous en aurez l’occasion.

M. François Cormier-Bouligeon. Revenant sur une question qui a déjà été posée, je veux insister sur l’importance de voir l’ensemble des territoires de notre pays associés aux JO, notamment en amont. Je sais que le comité départemental olympique du Cher commence à recenser les équipements qui pourraient servir de bases arrière : je pense notamment au centre de ressources, d’expertise et de performance sportive (CREPS) de Bourges, au centre régional jeunesse et sports (CRJS) d’Aubigny-sur-Nère, à la salle qui accueille les compétitions internationales de basket féminin à Bourges, ou encore au pôle du cheval de Lignières. Il est extrêmement important que l’État se mobilise, notamment par le biais de votre action, afin que les JOP 2024 rayonnent par anticipation dans l’ensemble de nos territoires, et que les Français soient véritablement associés à cette grande fête du sport.

Pour ce qui est de l’éventuel boni résultant de la dissolution du COJO, au sujet duquel deux de mes collègues vous ont déjà interrogé, je veux souligner que, nonobstant la nature associative du COJO, l’État va contribuer à hauteur d’un milliard d’euros au financement des JO – qui, nous n’en doutons pas, vont très bien se dérouler grâce aux équipements sportifs publics de grande qualité répartis dans l’ensemble de notre territoire, ainsi qu’aux infrastructures de transport, sans oublier le grand pouvoir d’influence dont dispose l’État. Cela dit, je crains que nous n’ayons à faire face à un problème de concurrence en matière de partenariats avec les entreprises : celles-ci étant amenées à financer les JO, on risque d’assister, par compensation, à une déperdition des partenariats conclus avec le mouvement sportif français. C’est pourquoi je considère que la question du boni du COJO ne se résume pas à celle de sa répartition finale : ne croyez-vous pas que nous pourrions envisager qu’une ponction marginale soit opérée annuellement sur les recettes du COJO, afin d’abonder les ressources du sport amateur par le biais du Centre national pour le développement du sport (CNDS) ?

Mme Emmanuelle Anthoine. Vous avez insisté sur l’importance considérable de ces jeux Olympiques pour la France, qui auront un retentissement phénoménal et contribueront à l’image de marque de notre pays dans le monde entier. Si ces jeux devront être une fête – comme l’ont été les Jeux d’hiver d’Albertville en 1992, dont je garde un excellent souvenir à titre personnel –, ils devront également constituer une nouvelle étape dans l’inclusion de toutes les populations. Lors de chaque édition des jeux Olympiques, on évoque l’idée de les organiser en même temps que les jeux Paralympiques : cette perspective vous paraît-elle souhaitable et, le cas échéant, réalisable ?

Mme Stéphanie Rist. Monsieur le délégué interministériel, vous avez dit que l’organisation des JO devait être mobilisatrice et exemplaire. Elle doit effectivement l’être, notamment en termes d’inclusion, où les jeux auront à se traduire par une prise en compte accrue de la situation, des besoins et des talents des personnes en situation de handicap. L’arrivée de milliers d’athlètes paralympiques, sans compter les nombreux visiteurs handicapés, va donner une visibilité rare aux questions liées au handicap. Cet événement nous place également, et c’est une bonne chose, dans l’obligation de procéder à une adaptation rapide et réelle d’un certain nombre d’équipements, afin de les rendre plus accessibles à tous les publics. Au-delà de cette seule exigence, comment comptez-vous impliquer les associations et les personnes handicapées elles-mêmes dans la préparation et le déroulement de ces Jeux et ainsi valoriser leur apport, et comment comptez-vous renforcer l’offre d’activités sportives proposées aux personnes handicapées ?

Mme Fabienne Colboc. Comment comptez-vous intégrer et mobiliser le monde associatif dans l’organisation de ces Jeux – tout en veillant à ne pas faire un usage excessif du bénévolat, comme l’a rappelé Mme Buffet ? Par ailleurs, j’aimerais savoir si vous avez l’intention de faire appel également aux étudiants, en particulier à ceux engagés dans les filières sportives ? Cela permettrait, à mon sens, de relancer l’engagement citoyen associatif, tout en répondant à la demande des étudiants, qui sont constamment à la recherche d’expérience, sous la forme de stages ou d’emplois professionnels.

Mme Maud Petit. Comme plusieurs de mes collègues l’ont fait avant moi, je veux à nouveau évoquer la question du volontariat, mais en l’abordant sous un nouvel angle, celui des ressources humaines : pouvez-vous nous préciser comment va s’organiser le recrutement des 70 000 bénévoles que l’on estime nécessaires à l’organisation des Jeux, et de quelle manière envisagez-vous de valoriser leur rôle ?

M. Cédric Roussel. En tant qu’élu des Alpes-Maritimes, je veux vous dire que nous sommes ravis d’accueillir cet événement planétaire que sont les jeux Olympiques au sein de notre stade Allianz Riviera de Nice.

Le projet de loi relatif à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques va prévoir plusieurs mesures en faveur d’une meilleure transparence quant aux agissements financiers des dirigeants du COJO et de la Solideo. Si nous ne pouvons que nous réjouir de cette orientation par laquelle notre pays montre, une fois de plus, sa volonté de jouer un rôle précurseur en matière de défense de la transparence et de l’honnêteté, considérée comme un devoir national, pouvez-vous nous préciser les modalités du contrôle qui sera exercé par la Cour des comptes et les sanctions prévues, ainsi que les éventuelles mesures de contrôle plus spécifiques prises en matière d’appels d’offres ?

M. Gabriel Attal. Vous avez déjà répondu aux deux premières questions que j’avais prévu de vous poser, monsieur Castex, mais il m’en reste une troisième, portant sur l’articulation entre la Coupe du monde de rugby à XV 2023 et les JOP 2024. Vous l’avez dit tout à l’heure, le calendrier d’organisation des manifestations relatives à ces deux grands événements va être très serré, et on ne peut exclure le risque de chevauchements de certaines installations. Pouvez-vous nous préciser dans quelle mesure l’organisation de la Coupe du monde de rugby est susceptible de compliquer l’organisation des JO, mais aussi, à l’inverse, si vous pensez que les JO pourraient profiter, à certains titres, de cette compétition qui se tiendra l’année précédente ?

M. Jean Castex. J’ai effectivement qualifié d’essentielle la mobilisation dont doit faire preuve notre pays pour l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques. Des fonds, d’un montant certes limité, sont prévus pour l’organisation de bases arrière, notamment en province. L’attribution des événements qui se tiendront dans ces bases arrière devra se faire selon des critères objectifs – il ne faut pas que ce soit à qui criera le plus fort –, à commencer par celui de la qualité : les bases arrière doivent soutenir au mieux les bases avant ! Au-delà, nous devons veiller à une certaine équité dans la répartition territoriale des bases arrière, et à ce que chaque site retenu soit en mesure de présenter un projet sportif solide, mais aussi de bénéficier d’un large soutien local – provenant de la ville, du département et de la région – en termes d’apports de bénévoles, de parrainages spécifiques, etc. En d’autres termes, les territoires abritant des bases arrière devront se sentir concernés et mobilisés par les jeux Olympiques.

Nous devrons également faire preuve d’imagination. L’un d’entre vous a évoqué le mécénat d’entreprise que le COJO va devoir mobiliser, en dehors des sponsors labellisés par le CIO. Pour cela, nous pensons bien sûr en priorité aux grandes entreprises françaises, ayant souvent leur siège en Île-de-France, dont bon nombre sont déjà mobilisées en phase de préparation ; cependant, il faudra également compter sur les très nombreuses entreprises de taille plus réduite – je pense notamment aux PME et aux TPE – réparties dans tout le pays, que le COJO va devoir convaincre de s’impliquer.

M. Cormier-Bouligeon a évoqué la possibilité de ponctionner annuellement une partie de l’argent destiné au COJO afin d’en faire bénéficier le CNDS. Si je comprends l’intérêt de cette proposition, je crains qu’elle ne puisse être appliquée. Cependant, nous devons faire en sorte que la réussite des JOP s’accompagne d’actions en faveur du sport pour tous, et éviter que ces Jeux ne soient l’occasion d’opposer l’Île-de-France à la province, et le sport d’élite au sport pour tous – selon une logique qui ne serait nullement fondée, car les jeunes Français qui vont décrocher des médailles en 2024 ont aujourd’hui 13 ou 14 ans, et sont répartis dans tout le territoire ! Je partage donc l’objectif de votre proposition, mais je ne pense pas que, pour l’atteindre, il faille passer par une « tuyauterie » budgétaire reliant le COJO au CNDS.

Les thématiques du handicap, de l’inclusion, de l’accessibilité, sont tout à fait essentielles à mes yeux. La délégation interministérielle travaille en étroite concertation avec Sophie Cluzel, secrétaire d’État chargée des personnes handicapées, qui est particulièrement impliquée dans ce dossier : c’est avec elle que nous allons devoir trouver des solutions en matière d’accessibilité des transports. Je veux également rendre hommage à Emmanuelle Assmann, qui préside le Comité paralympique et sportif français (CPSF) de façon dynamique, engagée et pragmatique – c’est important, car il vaut toujours mieux s’attacher à atteindre des objectifs réalistes que de se lancer à la poursuite d’objectifs grandioses, mais inaccessibles.

À ma connaissance, personne ne demande que les jeux Olympiques et Paralympiques aient lieu simultanément. Outre les lourds problèmes qui ne manqueraient pas de se poser en termes d’organisation, je ne suis pas certain que, sur le plan des symboles, cette perspective apparaisse souhaitable, même pour les représentants du mouvement paralympique. Au demeurant, les jeux Paralympiques auront lieu pratiquement dans la continuité des jeux Olympiques.

Pour ce qui est de l’implication des mouvements associatifs, notamment des étudiants, j’ai déjà évoqué la rencontre qui a eu lieu hier entre le ministre de l’éducation,
Jean-Michel Blanquer, et le futur président du COJO, Tony Estanguet. Tous deux sont convenus de mettre en œuvre une action spécifique visant à mobiliser les professeurs d’éducation physique et sportive, dont les modalités pratiques restent à préciser.

Mme Petit a évoqué les 70 000 volontaires qui seront nécessaires à l’organisation des JOP. Si ce chiffre a effectivement été avancé, j’insiste sur le fait qu’il est particulièrement élevé et que rien n’est acquis en la matière : il nous appartient de susciter l’enthousiasme et la mobilisation qui permettront d’atteindre cet objectif. Cette mission reviendra au COJO, tandis qu’il appartiendra à l’État – à moi-même, en l’occurrence, qui vais ainsi assumer une tâche similaire à celle revenant au délégué interministériel aux grands événements sportifs pour des événements organisés précédemment – de sécuriser l’intervention des bénévoles, compte tenu de leur statut particulier qui ne leur permet pas de bénéficier des protections attachées à la qualité de salarié. Il convient de poser des règles, mais aussi de prévoir des formations, afin d’éviter que la méconnaissance de ces règles ne soit à l’origine de comportements indésirables : c’est notamment dans cette optique que nous avons souhaité que les partenaires sociaux siègent au COJO et à la Solideo.

M. Roussel m’a interrogé au sujet des modalités du contrôle qui sera exercé par la Cour des comptes. Sur ce point, l’article 18 du projet de loi qui vous est soumis précise que la Cour des comptes va exercer un contrôle sur les comptes du COJO, alors même qu’il s’agit d’une association privée, ce qui implique que ce contrôle se fasse avec l’accord du comité. Je précise que ce n’est pas le cas pour tous les grands événements sportifs : ainsi la Cour des comptes, qui vient de publier un rapport sur les comptes de l’Euro 2016, a-t-elle souligné le caractère incomplet de son contrôle, qui a pu s’exercer sur les financements publics mobilisés à cette occasion mais pas sur les comptes de l’organisation privée qu’est le comité d’organisation de l’Euro. À l’issue des Jeux, la Cour des comptes exercera un contrôle intégral, dans les limites des pouvoirs dont elle dispose en tant qu’organisme d’audit. Si elle décèle des irrégularités ou des infractions, elle saisira la justice. Mais il est permis de penser que la publicité des travaux de la Cour est, en elle-même, de nature à dissuader les organismes susceptibles de faire l’objet d’un contrôle de commettre des écarts, ce qui constitue une illustration de la devise de la Cour, dat ordinem lucendo – l’ordre procède de la clarté.

Les appels d’offres qui seront passés dans le cadre de l’organisation des Jeux seront soumis aux règles s’appliquant aux financements privés, puisque le COJO sera une association régie par la loi de 1901. Si rien n’oblige à appliquer les dispositions du code des marchés publics, les statuts du COJO prévoiront cependant qu’il va se doter de règles, figurant dans son règlement intérieur et financier approuvé par l’ensemble des parties – dont l’État. Il devra notamment veiller à ce que les principes de libre accès et de respect des règles de concurrence dans l’ensemble des marchés – au-delà d’un certain seuil, comme en matière de marchés publics – soient respectés.

Pour ce qui est de la proximité avec la Coupe du monde de rugby et des problèmes que cela risque de poser en termes de calendrier, je ne peux vous répondre avec précision, puisque la France n’a été choisie que la semaine dernière. C’est un nouveau chantier qui s’ouvre à nous, et dont nous ne pouvons exclure qu’il nous réserve de bonnes surprises, notamment la possibilité de mutualiser des investissements portant sur le Stade de France. Cela dit, ma longue expérience me conduit à considérer que les emmerdements risquent de l’emporter sur les avantages, si vous me permettez l’expression.

Mme Anne Brugnera. Je vous remercie pour vos explications et pour le travail que vous accomplissez pour un projet qui, n’en doutons pas, entraînera toute la France dans une dynamique olympique.

Les JOP sont l’occasion pour le pays hôte de penser l’avenir de ses habitants, en dotant le territoire de constructions, d’aménagements et de nouveaux espaces qui vont le transformer. La France a fait le choix d’une candidature économe et écoresponsable en élaborant un programme ambitieux, notamment pour la Seine-Saint-Denis, où sera implanté le village olympique. Permettre le développement de certains points de notre territoire est l’un des intérêts d’organiser les Jeux.

Il conviendra d’éviter que certaines infrastructures soient abandonnées au lendemain de l’événement, comme cela a hélas été le cas lors de précédentes éditions, mais également de se prémunir contre des travaux exécutés trop rapidement ou avec des matériaux de piètre qualité, qui ne pourraient pas être exploités durablement. Nous savons tous qu’il a existé des contre-modèles : la France doit tirer toutes les leçons des expériences passées.

Pouvez-vous préciser le travail que vous menez en concertation avec les urbanistes afin de réaliser des aménagements qui correspondent à la fois aux besoins des athlètes, du public et des futurs habitants des quartiers concernés, ce qui implique de prévoir suffisamment de logements de qualité et d’espaces verts, dans le cadre d’une offre complète ?

Mme Sophie Mette. Si l’éthique et l’intégrité sont un aspect primordial de la réussite des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, une lutte stricte contre le dopage devra être entreprise afin que l’événement soit un exemple pour l’avenir.

L’Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) doit se réformer pour répondre aux exigences de conformité de l’Agence mondiale antidopage (AMA). Cette évolution concerne notamment les organes disciplinaires ou les délais des décisions. En outre, l’AMA crée actuellement un standard international de conformité des systèmes nationaux de lutte contre le dopage au code mondial antidopage.

Pour respecter les exigences de l’AMA, il est proposé de créer une commission des sanctions au sein de l’AFLD. Si l’étude d’impact prouve que cette disposition n’aura aucune incidence sur la sécurité juridique, sur le budget, ou sur les services administratifs, les risques de sanctions qu’encourt déjà l’AFLD ne permettent pas de nous assurer de la réactivité de cette instance pour se réformer et répondre à des critères mondiaux.

Pouvez-vous nous assurer que cette réforme de l’institution ne posera pas de problème avec l’AMA, et que l’AFLD saura se mettre en conformité rapidement, en cas de modification des procédures disciplinaires ?

Mme Frédérique Dumas. En 2015, le groupe américain Discovery, propriétaire d’Eurosport, a acquis les droits de retransmission des jeux Olympiques de 2024 pour l’ensemble de l’Europe. En conséquence, pour la première fois, les chaînes ne négocieront pas ces droits directement avec le CIO, mais avec le groupe américain qui les a acquis au prix extrêmement élevé de 1,3 milliard d’euros.

Discovery a décidé de faire monter les enchères. M. Julien Bergereaud, directeur général du groupe pour la France, s’est expliqué, au mois d’octobre dernier, dans un entretien accordé au Figaro, sur l’exacerbation des prix. Elle s’explique d’abord, selon lui, par le fait que, pour la première fois depuis cent ans, les JO se dérouleront en France. Si la nouvelle est très valorisante pour notre pays, cela pose d’autres problèmes. Elle s’explique, ensuite, en raison de l’entrée de nouveaux acteurs, comme les opérateurs de télécommunications ou les géants de l’internet, dans la compétition pour l’acquisition des droits.

Dans la mesure où l’obligation de diffusion sur une chaîne gratuite fait partie du contrat conclu entre le CIO et Discovery, cette situation ne risque pas de porter préjudice aux spectateurs ; néanmoins ces droits risquent d’échapper au service public français. Les valeurs universelles dont les Jeux sont porteurs, l’attractivité qu’ils représentent, tous publics et toutes générations confondus, sont pourtant une belle vitrine pour les services publics européens. Au Royaume-Uni et en Allemagne, après des longues négociations, les chaînes publiques ont fini par acquérir les droits de retransmission des Jeux. Mme Delphine Ernotte a récemment affirmé qu’elle désirait que le service public français fasse de même, mais pas à n’importe quel prix.

Pensez-vous que le service public français aura les moyens d’affronter cette concurrence de manière raisonnable ? Le renoncement du CIO à négocier directement les droits n’est-il pas le vrai problème ? Le CIO garantissait la possibilité de préserver un équilibre entre négociations commerciales et citoyenneté. La construction d’un imaginaire commun contribuait à renforcer la légitimité et l’attractivité du service public de la télévision. À votre avis, sera-t-il possible de revenir en arrière pour les prochaines compétitions ?

M. Bertrand Sorre. Vous l’avez fort justement dit, la mobilisation en faveur des Jeux ne doit pas concerner qu’une partie du territoire, et l’organisation retenue doit faire en sorte de ne pas opposer les métropoles de Paris et Marseille à nos territoires et aux zones rurales. Je souhaitais évoquer l’association de l’ensemble des pratiquants et des Français à l’organisation des Jeux mais, afin que la flamme des Français ne s’éteigne pas, à l’image de la flamme olympique, je me contente de vous interroger sur le parcours de cette dernière. Ne peut-il pas constituer un élément fédérateur ? Dans le cadre de vos missions, avez-vous un droit de regard sur le parcours de la flamme à son arrivée en France ?

M. Stéphane Testé. Mes questions ont déjà reçu une réponse. Elles portaient sur les clauses d’insertion dans les marchés publics pour les jeunes de Seine-Saint-Denis, sujet qui me tient particulièrement à cœur, et sur la façon dont vous souhaitez mobiliser les communes d’Île-de-France et au-delà, pour le rayonnement des Jeux – elles pourraient par exemple servir de bases arrière ou de camps d’entraînement.

M. Pascal Bois. Mes questions concernaient les bases arrière, les transports au sein du Grand Paris, et la clause d’insertion, mais mes collègues vous ont déjà interrogé sur ces sujets.

Mme Sylvie Charrière. Monsieur le délégué interministériel, nous vous faisons confiance pour veiller à ce que ces Jeux soient une réussite en tout point.

Vous avez estimé à 150 000 le nombre de créations d’emplois liées aux Jeux. Sachant que le taux de chômage des jeunes de Seine-Saint-Denis est deux fois supérieur à la moyenne française, ne pourrait-on pas, outre une politique volontaire en matière de transport et de logement, mener une politique ambitieuse de formation en faveur de ces derniers ? Il serait par exemple possible de construire un lycée des métiers liés au tourisme pour les secteurs de l’hôtellerie, de la restauration, de l’accueil, et de la sécurité, qui permettrait de propulser l’insertion de nos jeunes dans tous ces secteurs porteurs. Cela sera facilité par la construction de logements pour les étudiants, car je rappelle que, même en Seine-Saint-Denis, la mobilité au sein du département est un problème.

M. Jean Castex. Madame Brugnera, les urbanistes et les aménageurs sont évidemment associés à nos travaux, en particuliers pour ce qui concerne les grands projets. S’ils ne sont pas encore intervenus s’agissant de la piscine olympique, ils travaillent sur les deux autres grands espaces à aménager à Plaine Commune et au Bourget. Pour ces deux sites, des zones d’aménagement concerté (ZAC) ont d’ores et déjà été créées. Leur premier objectif consiste à assurer l’insertion urbaine, et la qualité des ouvrages construits – qui seront reconvertis à terme.

Je rends hommage aux collectivités concernées qui ont commencé à travailler, en lien étroit avec les services déconcentrés de l’État, en créant les ZAC, en faisant appel à des urbanistes, ou en menant des études sur la dépollution, à un moment où il n’y avait qu’un GIP mais ni délégation interministérielle, ni COJO, ni Solideo. Elles ont heureusement pris à
bras-le-corps les sujets d’aménagements, avant que les instances de gouvernance dont je vous ai parlé soient pleinement opérationnelles. Cet engagement a permis de gagner du temps ; et j’insiste sur le fait qu’en cette fin d’année 2017, le temps nous est compté. J’en profite également pour vous dire que nous avons vraiment besoin des dispositions législatives qui vous sont soumises en rapport avec les Jeux.

Madame Mette, la lutte contre le dopage est un sujet essentiel. L’éthique et l’intégrité concernent bien sûr le régulateur et les organisateurs, mais aussi les sportifs et l’ensemble de ceux qui concourent à la réussite des Jeux. Les dispositions proposées correspondent à cet esprit et à une exigence juridique. Nous devons séparer les actes de poursuite et les sanctions. Je ne crois pas que nous aurons des problèmes avec l’AMA puisque, précisément, nous nous conformons à ce qu’elle demande. La réforme s’effectue en plein accord avec elle. L’AFLD est une autorité administrative indépendante présidée par Mme Dominique Laurent, conseillère d’État. Cette dernière, particulièrement impliquée, a été associée à l’écriture des textes. Si vous souhaitez être définitivement rassurée, je vous suggère de prendre contact avec elle.

Madame Dumas, je crois que, pour 2024, la messe est dite : je me vois mal demander au CIO de renégocier les droits audiovisuels pour cette compétition …

Mme Frédérique Dumas. Je m’interrogeais uniquement sur les compétitions suivantes !

M. Jean Castex. Que fera le CIO pour de futurs JO ? J’avoue que je n’en sais rien…

Vous m’avez également demandé si le service public français de la télévision aura les moyens d’affronter la concurrence en 2024. À ma connaissance, les négociations sont loin d’être terminées – vous avez noté qu’au Royaume-Uni et en Allemagne, il avait fallu du temps avant qu’elles aboutissent. J’ai cru comprendre que France Télévisions se mettait en état de répondre. L’essentiel reste la préservation de plages de diffusion en clair, quel que soit l’opérateur concerné. Il est trop tôt pour dire s’il s’agira du service public. Je ne peux pas non plus savoir s’il disposera des moyens nécessaires. Je crois cependant qu’on ne peut pas demander des règles de mise en concurrence et de transparence quand elles nous arrangent et vouloir réserver la diffusion des épreuves à un opérateur – s’agirait-il d’un service public, particulièrement cher au cœur de tous ceux qui se trouvent dans cette salle. Attendons de voir comment se termineront les longues négociations que vous annoncez !

Monsieur Sorre, je n’avais pas pensé au parcours de la flamme olympique. Je ne suis pas certain d’être compétent à ce sujet. Il me semble que ce point relève des prérogatives du COJO auquel vous pourrez présenter votre suggestion. Je la relaierai personnellement auprès d’eux.

Madame Charrière, vous proposez de créer un lycée des métiers de l’hôtellerie, de la restauration, de l’accueil, et de la sécurité, en Seine-Saint-Denis. Ces domaines sont effectivement en rapport avec les Jeux, mais votre idée intéressante doit être soumise au ministère de l’éducation nationale. J’ai déjà cité à plusieurs reprises ce ministère très fortement mobilisé. Ce n’est pas un hasard. Il est au cœur de la dynamique en cours, car il se trouve au carrefour de différents sujets : la formation, l’éducation, les jeunes… De plus, le ministre m’a désigné des interlocuteurs spécifiques pour la Seine-Saint-Denis.

Je comprends les élus de ce département qui voudraient que les jeux Olympiques permettent de valoriser les dispositifs dits de « droit commun » – ou qu’au moins tout cela ne se fasse pas à leur détriment. Dans le cadre du travail interministériel, je m’engage à regarder de près votre idée d’un lycée des métiers du tourisme avec les responsables du ministère de l’éducation.

Mme Sylvie Charrière. La région ne paraît pas hostile et, même si rien n’est prévu en termes de réserve foncière, je pense qu’en ce moment, on peut trouver des terrains disponibles dans le département.

M. Jean Castex. Vous avez raison de rappeler le rôle éminent de la région qui est aussi un partenaire très actif des jeux Olympiques et Paralympiques.

M. le président Bruno Studer. Monsieur Castex, je vous remercie d’avoir bien voulu répondre à nos questions.

 

 

La séance est levée à onze heures cinquante.

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Informations relatives à la Commission

La Commission a désigné :

 Mme Aude Amadou (La République en Marche), rapporteure sur le projet de loi relatif à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques 2024 (n° 383) ;

 M. Gabrial Attal (La République en Marche), rapporteur sur le projet de loi relatif à l’orientation et à la réussite des étudiants (n° 391) ;

 Mme Emmanuelle Anthoine (Les Républicains), M. Philippe Berta (Mouvement Démocrate et apparentés), M. Yannick Kerlogot (La République en Marche), Mme Sandrine Mörch (La République en Marche), membres de la mission d’information commune sur l’utilisation des produits phytopharmaceutiques.


Présences en réunion

Réunion du mercredi 22 novembre 2017 à 10 heures

 

Présents.  Mme Aude Amadou, Mme Emmanuelle Anthoine, M. Gabriel Attal, Mme Géraldine Bannier, Mme Valérie Bazin-Malgras, Mme Aurore Bergé, M. Philippe Berta, Mme Gisèle Biémouret, M. Pascal Bois, M. Pierre-Yves Bournazel, Mme Anne Brugnera, Mme Marie-George Buffet, Mme Céline Calvez, Mme Sylvie Charrière, Mme Fannette Charvier, Mme Fabienne Colboc, M. François Cormier-Bouligeon, Mme Béatrice Descamps, Mme Jacqueline Dubois, Mme Virginie Duby-Muller, Mme Frédérique Dumas, M. Alexandre Freschi, M. Grégory Galbadon, M. Jean-Jacques Gaultier, Mme Annie Genevard, M. Raphaël Gérard, Mme Danièle Hérin, M. Régis Juanico, M. Yannick Kerlogot, Mme Brigitte Kuster, M. Michel Larive, M. Gaël Le Bohec, Mme Constance Le Grip, Mme Brigitte Liso, Mme Josette Manin, Mme Sophie Mette, Mme Frédérique Meunier, M. Maxime Minot, Mme George Pau-Langevin, Mme Maud Petit, Mme Béatrice Piron, Mme Cathy Racon-Bouzon, M. Pierre-Alain Raphan, M. Frédéric Reiss, Mme Stéphanie Rist, Mme Marie-Pierre Rixain, M. Cédric Roussel, Mme Sabine Rubin, M. Bertrand Sorre, M. Bruno Studer, M. Stéphane Testé, Mme Agnès Thill, M. Patrick Vignal

Excusés.  M. Lénaïck Adam, Mme Ramlati Ali, M. Bernard Brochand, M. Stéphane Claireaux, Mme Nadia Essayan, Mme Elsa Faucillon, M. Laurent Garcia, Mme Valérie Gomez –Bassac, Mme Sandrine Mörch, M. Franck Riester, Mme Cécile Rilhac

Assistaient également à la réunion.  M. Patrice Anato, M. Belkhir Belhaddad, M. Dino Cinieri