Compte rendu

Commission
des affaires culturelles
et de l’éducation

– Examen de la proposition de loi de M. Michel Zumkeller et plusieurs de ses collègues visant à instaurer une taxe sur les transferts de sportifs professionnels (n° 248) (M. Michel Zumkeller, rapporteur)              2

– Présences en réunion.................................15

 


Mercredi
29 novembre 2017

Séance de 16 heures 45

Compte rendu n° 15

session ordinaire de 2017-2018

Présidence de
M. Bruno Studer,
Président
 


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COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE LÉDUCATION

Mercredi 29 novembre 2017

La séance est ouverte à seize heures quarante-cinq.

(Présidence de M. Bruno Studer, président de la Commission)

 

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La commission des Affaires Culturelles et de l’Éducation procède à l’examen de la proposition de loi de M. Michel Zumkeller et plusieurs de ses collègues visant à instaurer une taxe sur les transferts de sportifs professionnels (n° 248) (M. Michel Zumkeller, rapporteur).

M. le président Bruno Studer. Nous examinons cet après-midi la proposition de loi visant à instaurer une taxe sur les transferts de sportifs professionnels. Ce texte sera examiné jeudi 7 décembre en séance, dans le cadre de la journée réservée au groupe Union des démocrates indépendants (UDI), Agir et Indépendants. Nous avons désigné comme rapporteur, le 15 novembre dernier, notre collègue Michel Zumkeller, premier signataire du texte, qui a rejoint notre commission à cette occasion. Je lui souhaite la bienvenue.

M. Michel Zumkeller, rapporteur. Je vous remercie de m’accueillir au sein de cette commission. Le groupe UDI Agir et Indépendants a décidé d’inscrire cette proposition de loi dans le cadre sa séance d’initiative réservée du 7 décembre. L’idée de départ est assez simple : nous avons constaté que la France était maillée de très nombreuses petites associations sportives qui ne vivent plus que grâce au dévouement de leurs bénévoles. Ces associations sont de plus en plus soumises à des contraintes imposées par les fédérations sportives, des contraintes financières, mais aussi en matière de formation des éducateurs, de transformation ou de changement des terrains. En matière d’investissements, elles avaient l’habitude de s’adresser aux collectivités territoriales qui font encore tout ce qu’elles peuvent, bien qu’elles aient beaucoup de mal à assurer les financements nécessaires. Les associations sportives se tournent également vers de petits sponsors locaux qui rencontrent eux-mêmes de nombreuses difficultés. Les bénévoles sont par conséquent de plus en plus désespérés parce qu’ils veulent assurer leurs missions, notamment en direction des plus jeunes, parce qu’ils veulent être présents sur tout le territoire – or, ils ont l’impression de ne plus vraiment en avoir les moyens. Parallèlement, comme nous tous, quand ils allument leur téléviseur, ils voient qu’on dépense dans le secteur sportif des sommes parfois très importantes.

Le présent texte ayant été déposé fin 2016, je tiens d’emblée à réfuter tout « effet Neymar », même si son transfert a fatalement eu un effet amplificateur.

La proposition de loi repose sur la question suivante : dans une logique de taxation des flux, pourquoi, au moment d’un transfert entre deux clubs à même d’y consacrer des sommes très importantes, ne prélèverait-on pas une petite somme, 5 %, qui peut certes se révéler une grosse somme quand il s’agit de gros transferts, étant entendu que le texte prévoit également qu’on peut déterminer un seuil – 2 millions d’euros, 3 millions, 5 millions d’euros… – au-delà duquel on procéderait au prélèvement ? L’argent récolté serait reversé au Centre national pour le développement du sport (CNDS), qui lui-même le répartirait entre les petits clubs pour assurer un suivi local et permettre aux associations de terrain de continuer à se développer et à assurer leur mission.

Pour être le plus objectifs possible, nous avons procédé à l’audition de quelques grands acteurs du monde du sport, comme les représentants de la Ligue professionnelle de football, ceux de la Fédération française de football, mais aussi ceux de l’association nationale de ligues de sport professionnel. Certes, ils ne sont pas véritablement en accord avec notre proposition, craignant que nous ne fragilisions le sport professionnel français – l’un d’entre eux m’a même dit que j’allais le tuer ! –, ce qui n’est pas mon but pour peu du reste que j’en aie le pouvoir. On nous a objecté par ailleurs – nos interlocuteurs au ministère des sports également – que notre dispositif ne pourrait fonctionner qu’au niveau européen. Je ne partage pas cet avis et pense au contraire que l’on a besoin et d’un sport professionnel fort – et le texte n’est en rien dirigé contre lui –, et d’un sport amateur fort. En effet, si l’on a la chance d’avoir des sportifs professionnels de qualité, c’est parce qu’ils sont venus de petits clubs ; or si l’on tarit cette source, on n’aura plus ce vivier.

Je rappelle en outre que des dispositifs existent, et notre collègue Marie‑George Buffet a beaucoup œuvré dans ce domaine. Ils permettent des reversements, d’une manière ou d’une autre – je pense aux droits de retransmission télévisée –, grâce auxquels le sport amateur bénéficie de la manne du sport professionnel. Seulement, si les ligues admettent reverser des sommes importantes aux fédérations, pourquoi les petits clubs, sur le terrain – et nous faisons tous le même constat – ne touchent-ils jamais rien ? J’évoque bien le petit club qui aura besoin de 2 000 ou 3 000 euros supplémentaires en fonctionnement. Dès lors, où va l’argent versé par les ligues ? Je n’accuse personne et je n’ai pas d’a priori, mais la question mérite examen. J’ai auditionné des présidents de petits clubs de ma région comme Philippe Sarda, président d’un petit club de handball, qui nous a expliqué que 3 000 euros supplémentaires suffiraient à couvrir ses besoins. Pouvons-nous trouver un juste équilibre entre nos clubs et leurs bénévoles, d’une part, et le sport professionnel, de l’autre, qui pourrait peut-être faire un petit effort supplémentaire pour les aider financièrement ?

M. Cédric Roussel. Au nom du groupe La République en Marche, je remercie les députés du groupe UDI Agir et Indépendants pour la teneur de leur proposition. Je crois que nous avons tous été choqués par les montants des dernières transactions estivales dans le milieu du football.

Le présent texte vise à instaurer une taxe de 5 % au-delà d’un montant qui, vous l’avez précisé, n’est pas encore défini, sur les transferts de sportifs professionnels. Le produit de cette taxe – qui entrerait en vigueur à partir du 1er août 2018 – serait reversé au CNDS qui le reverserait à son tour aux clubs sportifs amateurs. L’objectif de la proposition de loi est tout à fait louable ; toutefois, passée cette première impression, vient le doute quant à son application en l’état. En effet, en en examinant les aspects économiques, juridiques, financiers et techniques, ce premier élan fait place au principe de réalité.

La proposition de loi, en l’état, pourrait avoir plus d’inconvénients que d’avantages à ne considérer que son seul objectif : réguler les transferts dans le sport. Si nous devons penser la régulation de ce marché – aujourd’hui dans le football, demain dans d’autres sports –, il apparaît très difficile, dangereux même, d’établir une taxe au seul niveau national alors même que l’économie du sport – en l’espèce, j’y insiste, du football – est essentiellement européenne, et même internationale. D’un point de vue économique, cette taxe pénaliserait fortement les clubs français et renforcerait leur déséquilibre concurrentiel vis-à-vis des clubs des principaux pays européens, sans qu’on puisse vraiment espérer l’extension du dispositif au-delà de nos frontières. L’ensemble des acteurs du secteur sportif que j’ai contactés et que nous avons aussi, pour partie, auditionnés, ne demande pas cette mesure. Ils y sont même tous opposés si elle s’applique au seul niveau national.

D’un point de vue juridique, nous pouvons ajouter qu’il s’agit, c’est la moindre des choses, de prendre en compte la législation actuelle, en l’occurrence le droit européen de la concurrence, qui encadre les mécanismes de régulation dans le sport. La rupture d’égalité ici proposée entre les pays, entre les clubs, reviendrait à fausser la concurrence au sein de l’Union européenne à nos dépens. Par ailleurs, je tiens à rappeler qu’un mécanisme de solidarité existe déjà entre les clubs professionnels et les clubs amateurs : lorsqu’un joueur d’un club amateur est appelé à jouer dans un club qui évolue en championnat professionnel, le club ayant formé le joueur entre sa douzième et sa vingt-troisième année touche une indemnité. Dans le football, 5 % du montant du transfert est réparti entre les deux clubs acheteur et vendeur, et cela à chaque transfert du joueur.

Pour la première fois depuis 2013, la France a enregistré un solde positif à l’issue du « mercato » estival de 2017. La taxe envisagée porterait un coup à la compétitivité des clubs français, notamment des moins riches. Elle ne toucherait en outre qu’un nombre très réduit de sportifs : en 2017, sur 139 transferts franco-français, seuls quatre ont dépassé un montant de 10 millions d’euros. Nous sommes donc là dans une toute petite niche.

J’entends bien, à la suite des transferts extraordinaires de joueurs comme Neymar et Mbappé, la volonté de légiférer. Cependant, légiférer au niveau national, établir une sorte de « taxe Neymar » pour quelques-uns, et cela au mépris de la réglementation européenne, ne répondrait pas aux problèmes légitimement soulevés. Nous devons reprendre l’idée initiale et faire preuve de pédagogie au niveau européen. Je préfère donc nous prenions un peu de temps, loin des passions, pour réfléchir sereinement et construire collectivement une réponse adaptée, conformément à ce que doit être le travail parlementaire.

M. Fabien Di Filippo. Votre constat sur les problèmes financiers des clubs amateurs, monsieur Zumkeller, est tout à fait juste. Il est vrai que ces clubs manquent de moyens pour la formation, pour l’accomplissement de leur mission, et l’on peut se demander quelles en sont les causes. Pour le groupe Les Républicains, la responsabilité est plutôt à chercher du côté du désengagement de l’État et, indirectement, des collectivités qui ont été quelque peu asphyxiées.

Or l’économie du sport est importante pour la France : le secteur est en pleine croissance, il crée des emplois, de la richesse nationale, et suscite des activités annexes en particulier dans les secteurs alimentaires, de la sécurité, des travaux publics, ou même dans le commerce de biens. Le sport représente ainsi 1,8 % du produit intérieur brut (PIB), 37 milliards de chiffre d’affaires, 275 000 emplois directs, 400 000 emplois au total.

Il existe déjà différents mécanismes de solidarité entre les clubs, principalement trois types de flux : la taxe sur les retransmissions audiovisuelles des événements sportifs nationaux, dite « taxe Buffet », versée par les ligues professionnelles au CNDS et qui représente à elle seule 45 millions d’euros pour 2017 ; il y a aussi les versements des ligues professionnelles aux fédérations nationales, ces fonds étant reversés aux ligues régionales, aux comités puis aux clubs ; enfin, les solidarités financières internes entre sociétés sportives et associations supports. En complément, les clubs professionnels réalisent toute une série d’actions caritatives, à hauteur de 72 millions d’euros l’année dernière pour les seuls clubs de football. Ils remplissent également des missions importantes de formation des jeunes par le biais de la formation professionnelle, mais aussi via leur partie associative.

On peut reprocher à cette proposition de loi de ne cibler que les clubs de football et qu’un certain nombre de transferts. C’est en effet le seul sport où il y a de réelles indemnités de transfert et le seuil, devant être fixé par décret, ne concernerait que ces clubs-ci. Mais demain, ce dispositif pénalisera toutes les autres disciplines, qui ont tendance à se développer mais qui ont pour l’heure du mal à exister quand elles n’ont pas de gros mécènes, souvent étrangers, évoluant sur la scène européenne. Seront concernés nos petits clubs des villes moyennes, qui ont parfois à leur actif de fort belles réussites.

L’instauration d’une taxe sur les transferts au seul niveau français, dans un monde sportif mondialisé, ne peut se faire qu’au détriment de nos clubs. En effet, non seulement la taxe augmentera mécaniquement le coût des indemnités de mutation pour les clubs français et nuira donc à leur attractivité et à la réalisation de transferts comme celui de Neymar, mais se pose également la question de son recouvrement puisque les autres clubs ne sont pas soumis au droit français. D’autre part, une telle taxe a déjà été instaurée, mais à un niveau mondial ; il s’agit, dans le cadre du football, de la partie des recettes des transferts
– 5 % – qui revient au club formateur et qui, très bonne chose, permet à un certain nombre de nos petits clubs de bénéficier parfois d’une manne importante. C’est donc à l’échelon mondial qu’il faut réfléchir.

Ce n’est en tout cas pas aux clubs professionnels de pallier les carences et les restrictions imposées par l’État et par le ministère des sports, que ce soit directement, via la baisse des crédits affectés au CNDS – qui atteint tout de même 64 millions d’euros dans le PLF 2018 – ou la suppression de la réserve parlementaire – qui aidait largement les associations et les petits clubs –, ou indirectement via la baisse des ressources des collectivités qui financent les équipements dans les petites villes et qui sont aussi les premiers subventionneurs des clubs.

Il nous paraîtrait plus intéressant de réfléchir au renforcement éventuel de la taxe Buffet ou à l’idée de faire évoluer le circuit financier au sein des fédérations pour qu’une plus grande partie des revenus revienne aux clubs.

Mme Sophie Mette. Le groupe du Mouvement Démocrate et apparentés (Modem) tient à saluer le travail de M. Zumkeller sur un sujet important mais qui doit sans doute être défendu dans une configuration plus large au sein de l’Assemblée nationale. Les questions soulevées par ce texte nous semblent en effet importantes et ciblent précisément quelques-uns des besoins du sport amateur en France. L’exposé des motifs le démontre parfaitement : nos clubs amateurs sont les parents pauvres du sport en France avec, d’un côté, une baisse des dotations de la part des collectivités, de l’autre, une augmentation importante des contraintes que leur imposent les diverses fédérations professionnelles, avec des coûts que ces mêmes fédérations ne sont pas toujours décidées à assumer. Peut-être y a-t-il là une réforme à envisager ?

Il va sans dire que l’inquiétude est attisée par la baisse des dotations au CNDS, même si celle-ci cache un redéploiement des crédits vers d’autres missions. C’est pourquoi, dans ce contexte, nous comprenons les motivations des rédacteurs de cette proposition de loi. Néanmoins, nous n’en partageons pas les conséquences. Il nous semble qu’instaurer une contribution dans le seul contexte français risque de rendre nos clubs professionnels moins compétitifs qu’ils ne le sont déjà au niveau européen ; or la compétition entre clubs est très forte et les nôtres ne sont pas toujours les mieux placés pour lutter. Du seul point de vue financier et ne s’agissant que du monde du football, l’État récupère déjà beaucoup d’argent au titre des taxes sur les transferts de joueurs payés par les clubs, ainsi que par les impôts et cotisations sociales dont les joueurs s’acquittent lors de leur venue dans un club français : on estime à 237 millions sur cinq ans le gain lié au fameux transfert de Neymar.

Aussi nous interrogeons-nous sur le signal négatif qu’enverrait l’instauration d’une nouvelle contribution. Nous devrions peut-être davantage nous assurer qu’une part de l’argent soit reversée au sport amateur – au bénéfice en particulier de l’équipement. Des mécanismes existent déjà, instaurés par la Fédération internationale de football association (FIFA), comme l’indemnité de formation qui permet aux clubs d’origine de bénéficier d’une rétribution en cas de transfert international de leurs anciens joueurs.

Le rapporteur s’est inspiré de cette disposition, mais celle-ci ne fonctionne que parce qu’elle a été instituée au niveau international. C’est pourquoi nous estimons que l’idée pertinente de cette proposition de loi ne trouvera son efficacité que si elle est instituée au moins au niveau européen. Cela n’aurait alors aucune incidence sur la compétitivité de nos clubs car l’attractivité du championnat européen de football est telle que même une contribution de 5 % n’aurait guère d’incidence.

J’appelle enfin votre attention sur le fait que ce texte touchera l’ensemble des fédérations sportives nationales et que si, bien sûr, le football – peut-être le rugby dans quelque temps – peut tirer son épingle du jeu, il n’en va pas de même de toutes les fédérations pour lesquelles cette taxe risque d’être un facteur de déstabilisation. Nous comprenons parfaitement l’enjeu que représente le soutien aux clubs amateurs qui forment une part importante de notre tissu associatif, mais il nous semble que cette proposition de loi n’est pas en mesure d’y répondre pour les raisons évoquées. À tout le moins, c’est bien le périmètre national qui ne convient pas, seul un échelon européen étant pertinent en la matière.

Pour ces raisons, les députés du groupe Modem ne soutiennent pas cette proposition de loi.

Mme Béatrice Descamps. Le groupe UDI, Agir et Indépendants salue la proposition de loi présentée par notre collègue Michel Zumkeller, qui participe d’une nécessaire prise de conscience des difficultés auxquelles fait face aujourd’hui le sport amateur. Qu’il s’agisse des disciplines professionnelles pratiquées au niveau amateur ou de disciplines qui restent pratiquées en amateur jusqu’au plus haut niveau, les clubs sportifs amateurs jouent un rôle essentiel dans nos territoires et permettent à tous les Français de se retrouver autour des valeurs de l’effort, de l’émulation et du partage. Ils rendent le sport accessible à tous et ont pour rôle incontournable de recueillir de jeunes sportifs doués auquel ils apprendront leur discipline pour leur permettre d’intégrer les formations élitistes nationales.

Au moment où nos petits clubs de sport amateur rencontrent des difficultés grandissantes en raison de l’accroissement des normes qui leur sont imposées et de la réduction des financements publics, l’adoption de cette proposition de loi permettra de créer un nouveau mécanisme de solidarité à leur attention. La création d’une taxe de 5 % sur les transferts de sportifs professionnels, alors que les coûts des transferts de joueurs professionnels atteignent des sommets, constituerait une mesure de justice.

J’ai déposé un amendement que je soumettrai à la sagesse du rapporteur, qui vise à préciser les modalités d’utilisation de la contribution sur les transferts de sportifs professionnels par le CNDS. Il s’agirait, dans la perspective des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 (JOP 2024), de favoriser la pratique du sport amateur au sein des clubs sportifs amateurs, l’objectif étant de mettre en valeur certaines pratiques sportives et d’inciter les jeunes et les moins jeunes à découvrir les disciplines olympiques, dont certaines sont malheureusement trop méconnues. Or nos futurs athlètes des JOP 2024 ont actuellement entre onze et quinze ans pour les plus jeunes ; ils évoluent encore au sein de clubs sportifs amateurs locaux et c’est maintenant qu’il faut leur donner les moyens de s’entraîner et de réaliser des performances pour faire briller le sport et leur pays dans sept ans.

Le groupe UDI, Agir et Indépendant soutiendra cette proposition de loi.

M. Régis Juanico. Le groupe Nouvelle Gauche est favorable au principe d’une taxe sur les transferts de sportifs professionnels, comme au renforcement et à la création de nouveaux mécanismes de solidarité entre le sport professionnel et le sport amateur. Au demeurant, la proposition de loi qui nous est soumise, même si elle part d’une bonne intention, se trompe de cible dans ses modalités d’application.

Nous croyons à la nécessité de mieux réguler et de mieux redistribuer des sommes devenues colossales, notamment dans le sport professionnel, en particulier dans le football. Il faut savoir qu’à la fin de cette année les indemnités de transfert actuellement versées dans les clubs des cinq grands championnats européens vont sans doute dépasser le record de 2016 de 4,5 milliards d’euros. Depuis dix ans, le nombre de transferts a été multiplié par trois ou quatre et les indemnités liées à ces transferts ont été multipliées par sept ou dix – des sommes considérables, je le répète, sont donc échangées.

Toutefois, autant nous plaidons en faveur de cette régulation, autant nous pensons qu’il faut agir à l’échelle européenne et à l’échelle internationale : nous ne croyons pas à une taxe qui serait instaurée dans un seul pays. En outre, il aurait été utile d’adjoindre à la proposition de loi une étude d’impact – malheureusement, les études d’impact ne sont pas encore obligatoires pour les propositions de loi inscrites à l’ordre du jour de l’Assemblée ; nous y travaillons au sein du groupe de réflexion sur l’évaluation et le contrôle. J’aurais aussi été intéressé d’avoir l’avis du Conseil d’État sur le texte, en particulier sur sa conformité au droit européen et bien évidemment sur sa faisabilité technique et juridique.

L’Union européenne des associations de football (UEFA – Union of European Football Associations) a déjà adopté plusieurs mécanismes, en particulier, en 2010, avec le fair-play financier, que connaît bien notre collègue Marie-George Buffet, qui permet de mieux réguler les budgets des grands clubs européens. La FIFA elle-même, en 2015, a décidé d’interdire la tierce propriété des footballeurs professionnels. Ces décisions vont dans le bon sens. Il existe en France une direction nationale du contrôle de gestion (DNCG), qu’il faudrait d’ailleurs pouvoir transposer à l’échelon européen. Enfin, depuis 2001, au niveau de la FIFA, une indemnité de formation et de solidarité est versée, à l’occasion des transferts internationaux de joueurs, aux clubs formateurs pour les joueurs qui y ont été formés entre leur douzième et leur vingt-troisième anniversaire. Sans doute faut-il améliorer ce dispositif qui ne profite qu’à certains clubs.

Si votre proposition de loi était adoptée, il faut savoir que les deux transferts les plus importants de l’année, celui de Neymar, depuis le FC Barcelone, et celui de Mbappé depuis l’AS Monaco, transferts d’un montant de plus de 100 millions d’euros chacun, n’auraient pas été concernés par le dispositif puisque les deux clubs ne sont pas soumis à notre législation fiscale – ce que je regrette pour l’AS Monaco…

En 2013, avec M. Guenhaël Huet, alors député Les Républicains, nous avons mené une mission d’information commune sur la politique de soutien au sport professionnel et les solidarités avec le sport amateur. Conclusion : il y a moins de 10 % de retour du sport professionnel vers le sport amateur, qu’il s’agisse de ce que donnent les ligues aux fédérations
– 130 millions –, de ce que donnent les clubs professionnels à leurs associations supports
– 70 millions – ou du prélèvement sur les paris sportifs – un peu plus de 30 millions. Il faut donc accroître ces ressources-là. Or, certains cosignataires de la proposition de loi ont par ailleurs décidé de diminuer les ressources du CNDS pour 2018…

Nous ne voterons pas la proposition de loi.

Mme Marie-George Buffet. Le groupe de la gauche démocrate et républicaine comprend tout à fait les motivations de cette proposition de loi : il est vrai que nous sommes confrontés à une bulle financière dans un certain nombre de clubs de football professionnel de Ligue 1, de clubs professionnels européens dont le financement provient de fonds financiers et parfois même quasiment de fonds d’État dont on ne maîtrise pas toujours le flux. Il y a un vrai problème, et vous l’avez posé avec force, de mutualisation entre le sport professionnel et le sport amateur. Nous avons besoin de moyens publics pour le développement du sport amateur comme du sport de haut niveau. Or, hélas, nous n’avons pas eu ce signe, cette année, avec la baisse de 7 % du budget des sports.

Quelles pistes suivre ? Il faudrait d’abord s’adresser au mouvement sportif européen et international lui-même. La FIFA, on l’a dit, et l’UEFA ont pris des mesures comme le fairplay financier – dispositif dont nous nous sommes rendu compte, à l’occasion des travaux de la mission d’information, qu’il fallait certainement le durcir quelque peu pour les clubs de football de la Ligue 1. Le mouvement sportif national et international doit assumer sa responsabilité de mutualisation.

Ensuite, je ne suis pas d’accord avec l’argument selon lequel on ne peut pas prendre cette mesure en France parce qu’il faut la concevoir à l’échelle européenne voire internationale. En effet, lorsque nous avons lancé la lutte contre le dopage, nous étions un peu seuls et j’ai alors entendu les mêmes objections : « Vous allez affaiblir le sport français ! » Quand nous avons instauré la taxe Buffet, le mouvement sportif nous avertissait, de la même manière, que nous allions affaiblir le sport français. Or ce n’est pas cela, le problème. Le problème est de savoir comment la France intervient auprès de l’Union européenne – qui a fait du sport l’une de ses compétences à travers le Traité de Nice – pour qu’elle soit davantage présente sur les questions sportives. Comment l’Union européenne doit-elle faire pression sur l’UEFA ou sur d’autres mouvements européens sportifs ? Voilà une piste importante.

Enfin, l’un des inconvénients de la proposition de loi est qu’elle ne limite pas le niveau des transferts. Il faudrait s’inspirer des préconisations contenues dans le rapport de la mission d’information commune, concernant par exemple la suppression du mercato, la limitation du nombre de transferts par club, la transparence sur les agents des joueurs, l’interdiction pour les agents d’être payés à la fois par le club et par les joueurs… autant de mesures de transparence qui pourraient améliorer cette proposition – c’est d’ailleurs le sens de certains amendements que j’ai déposés.

M. François Ruffin. J’interviens au nom du groupe La France insoumise. J’ai écouté avec beaucoup d’intérêt Mme Buffet ou M. Juanico car il est évident que je ne suis pas un grand spécialiste de la question. J’apprends donc beaucoup sur le plan technique.

Au lendemain du transfert de Neymar, je courais le long de la Somme et je me suis arrêté pour faire des étirements. Se déroulait là la finale de la coupe de France de longue paume – nous sommes directement concernés puisque le Serment du Jeu de Paume est lié à ce sport qui n’existe plus aujourd’hui que dans un petit coin de la Picardie. Or, pendant ma pause, le président de la Fédération française de longue paume, en sueur et avec sa raquette, vient me voir et me dit : « Écoutez, ça tombe bien que vous soyez là parce que je suis dans une situation terrible : j’ai deux salariés grâce auxquels j’arrive à faire venir 2 000 gamins et je vais devoir en licencier un parce que je ne reçois plus que 8 000 euros du ministère des sports ; or c’est un gars qui a été formé, il a trente-cinq ans, il a deux enfants. Je n’en dors plus la nuit ». Voilà la situation dans laquelle se trouve une petite fédération et je pense que nombre de petits clubs pourront se reconnaître dans ce récit. On voit donc bien le contraste entre le transfert de Neymar et des petits clubs qui organisent la paella, le loto, ou le concours de belote. Pratiquant moi-même le football en amateur, c’est une situation que je vis très directement.

Ensuite, quel doit être notre objectif pour 2024 ? Pour moi, la médaille d’or que nous devons gagner, c’est que les gamins de chez moi pratiquent le sport. J’étais à Abbeville, dans un quartier populaire, il n’y a pas longtemps, et que me raconte une maman ? Ses enfants veulent faire du foot, seulement il faut acheter les paires de crampons et les licences coûtent 60 euros. Comme elle n’en a pas les moyens, que va-t-elle leur faire faire ? Du ping-pong parce que, là, la licence est très peu coûteuse. Mon objectif est donc que l’argent ne soit pas un obstacle à la pratique sportive.

Je ne suis pas un spécialiste, je le répète, mais, en lisant le rapport de la mission d’information commune à laquelle il a été fait allusion, je constate que la Ligue professionnelle de football représente 793 millions d’euros, et la Fédération, 215 millions : le rapport est donc de 3,7 entre l’argent disponible pour le très faible nombre de sportifs professionnels et l’argent disponible pour la masse des pratiquants amateurs.

Je considère d’ailleurs que le sport professionnel ne devrait plus être pris en compte dans le budget des collectivités consacré aux sports mais qu’il devrait figurer dans leur budget communication. Le sport professionnel, c’est de l’image ; il s’agit de vendre l’image d’Amiens avec l’ASC, etc.

Vous aurez compris que, sur le plan technique, je ne suis pas terrible (Sourires) – si je reconnais les limites de la proposition de loi de M. Zumkeller, je reconnais aussi les miennes. Reste que je considère que son texte va dans le bon sens et, depuis le début de mon mandat, il y a eu si peu de propositions me paraissant aller dans le bon sens, que je ne vais pas faire la fine bouche (Rires), je m’accroche à ce qu’il y a, je le prends, je le soutiens de tout cœur.

Quant à utiliser l’argument selon lequel la proposition n’est applicable qu’à l’échelle européenne, c’est la meilleure manière de tuer l’Europe, de dégoûter de l’Europe. Non, non, non : si vous aimez vraiment l’Europe, si vous voulez la soutenir, si vous voulez qu’elle aille de l’avant, eh bien, vous devez dire : faisons en matière sportive, faisons en matière de fiscalité, de droit du travail, faisons et entraînons les autres derrière nous !

M. le rapporteur. Je remercie ceux d’entre vous qui se sont exprimés, et qui ont tous en commun avec moi de vouloir défendre le sport amateur.

J’adresse des remerciements particuliers à M. Cédric Roussel, dont la participation aux auditions nous a permis d’échanger. Cependant, je ne suis pas d’accord avec lui quand il affirme que cette proposition de loi a pour objet la régulation du marché des transferts dans le sport : l’objectif de notre texte, c’est le soutien au sport amateur, aux petits clubs, aux bénévoles – et si ce soutien passe par une régulation, c’est une autre question. Quand, le 7 décembre prochain, nous nous retrouverons en séance publique pour défendre tous ensemble le sport amateur, nous aurons fait progresser cette cause.

Je suis évidemment d’accord avec notre collègue Fabien di Filippo quand il évoque un désengagement de l’État, mais il ne faut pas tout mélanger. Si nous n’avons nullement l’intention de tuer le sport professionnel, qui représente une masse considérable d’activité, nous voulons faire reconnaître tout ce que représente également le sport amateur. Comme moi, vous êtes un député de terrain et il doit vous arriver d’assister aux assemblées générales de petites associations sportives : vous connaissez des bénévoles, et vous savez à quel point la situation des clubs amateurs est critique. Or, même si le football français n’a pas vocation à régler tous les problèmes sociaux du pays, les associations sportives jouent un rôle social très important en certains points du territoire.

Notre collègue Sophie Mette a relayé plusieurs idées que nous avions déjà entendues lors des auditions, sur le thème : « C’est une très bonne idée, mais… ». Si je peux entendre ce « mais » – j’y suis habitué, puisque cela fait quinze ans que je suis député –, j’aimerais bien qu’il soit suivi d’une proposition concrète. Vous me dites que le sport professionnel donne déjà pour le sport amateur, soit. Dans ce cas, je vous invite à assister aux assemblées générales des petites associations et à examiner leur budget. Si les sportifs professionnels donnent déjà, je ne sais pas où passe leur argent, car on n’en trouve aucune trace dans le budget des clubs amateurs : je n’y ai jamais vu une ligne correspondant à des fonds provenant de la fédération ou de la ligue – alors même que mon département, le Territoire de Belfort, ne fait pas partie des plus pauvres. Peut-être l’argent provenant du sport professionnel est-il exclusivement affecté à la construction de grands districts régionaux et de bâtiments onéreux ? S’il est permis de se poser la question, une chose est certaine : quand il manque 3 000 euros à un club amateur pour former un éducateur, il est impossible de les trouver !

Béatrice Descamps s’est engagée dès le départ à nos côtés et je l’en remercie. C’est à juste titre qu’elle a évoqué les Jeux Olympiques et Paralympiques que nous allons accueillir à Paris en 2024, et qui constituent une perspective formidable pour le sport amateur. Je rappelle que cette proposition de loi ne concerne pas que le football et le rugby : elle vise à ce que le sport professionnel dans son ensemble soutienne le sport amateur – et si nous pouvons applaudir en 2024 des champions de tennis de table, de tir à l’arc, de tir à la carabine, nous en serons ravis, et ce sera l’occasion de valoriser des champions dont on parle assez peu.

M. Régis Juanico est un grand sportif, avec lequel il m’arrive de prendre part à des assemblées footballistiques. J’entends ce qu’il dit, tout comme j’entends M. François Ruffin, mais s’il faut tout demander à l’Europe, nous n’avons plus qu’à fermer l’Assemblée nationale – et c’est en Européen convaincu que je vous dis cela. Comme l’a dit Mme Marie-George Buffet, de très nombreuses initiatives sont parties de cette assemblée, alors qu’on avait tenté de décourager leurs auteurs en leur disant qu’il fallait agir au niveau européen. À quoi servons-nous si la moindre décision ne peut être prise que par le Parlement européen ? Nous pouvons au moins poser les questions qui nous paraissent importantes, et essayer de leur apporter une réponse, montrant ainsi l’exemple à nos voisins européens. C’est ainsi que je vois l’Europe, et non comme une technostructure qui nous dit : « Nous allons en discuter entre nous – la FIFA, l’UEFA et le Parlement européen – et peut-être aurons-nous une première piste de travail vers 2025… ». La démocratie parlementaire, ce n’est pas ça : on expose les sujets, on en discute et, même si on ne résout pas le problème du premier coup, on fait au moins avancer les choses.

Je salue l’implication de notre collègue Marie-George Buffet et je partage son analyse. Nous ne pouvons que nous féliciter qu’elle ait osé entreprendre quelque chose au sujet des agences antidopage, sans attendre pour cela l’accord des autres pays européens.

L’intervention énergique de M. François Ruffin était à son image, et a eu le mérite de nous ramener à la réalité du terrain, car ce qu’il a dit, c’est ce que nous entendons au sein des clubs amateurs. Si, lors des auditions, certains représentants du sport professionnel nous ont dit qu’ils n’étaient pas choqués par le montant de 222 millions d’euros des indemnités de transfert de Neymar, je peux vous dire que nos concitoyens, eux, le sont, même ceux qui aiment le football.

Comment les clubs professionnels peuvent-ils se prétendre incapables de payer une contribution de 5 % au profit du sport amateur, alors qu’ils versent sans sourciller 15 % à un intermédiaire, qui, parfois, s’empresse d’aller les placer aux Bahamas ? Pour satisfaire notre demande, il suffirait qu’ils ne donnent que 10 % à l’intermédiaire et nous reversent les 5 % de différence : cela ne leur coûtera pas plus cher, et tout le monde ne s’en portera que mieux ! Je suis sidéré d’entendre dire que ma proposition de loi va tout fragiliser car, contrairement à ces intermédiaires, elle rendrait un grand service au sport français.

Mme Marie-George Buffet. C’est eux qu’il faudrait surveiller !

La commission en vient à l’examen de l’article unique.

Article unique : Instauration d’une contribution assise sur les recettes brutes générées par les indemnités de mutation de sportifs professionnels

La commission examine l’amendement AC3 de Mme Marie-George Buffet.

Mme Marie-George Buffet. Cet amendement vise à ce qu’une même base – en l’occurrence, un même transfert – ne puisse pas faire l’objet de deux taxations.

M. le rapporteur. Je comprends la logique de cet amendement et je suis d’accord avec l’idée consistant à s’intéresser à l’activité de tous les intermédiaires, mais je pense que nous sommes ici hors du sujet de la proposition de loi, c’est pourquoi j’émets un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement AC2 de Mme Béatrice Descamps.

Mme Béatrice Descamps. Comme je l’ai dit tout à l’heure, cet amendement vise à compléter le texte en précisant les modalités d’attribution du produit de la contribution sur les transferts de sportifs professionnels par le CNDS.

M. le rapporteur. Nous sommes ici tout à fait dans l’esprit de la proposition de loi, et tout ce qui peut compléter le texte est le bienvenu. Je suis donc favorable à cet amendement.

M. Bertrand Sorre. Au-delà du sport amateur, pour lequel nous devons impérativement trouver des ressources, je trouve que notre discussion nous conduit à réfléchir également à l’accompagnement de la vie associative, elle aussi confrontée à des difficultés de financement. Nombre de clubs sportifs amateurs ont aujourd’hui un statut associatif, régi par la loi de 1901. Peut-être le football pourrait-il disposer d’autres possibilités de financement, mais on sait que nombre d’associations se perdent dans les méandres de financements nationaux, départementaux, locaux, ce qui est source de difficultés et mériterait qu’une réflexion soit engagée à ce sujet.

M. Régis Juanico. Je l’ai dit tout à l’heure, je suis tout à fait favorable à ce qu’on renforce les mécanismes de solidarité financière entre sport professionnel et sport amateur, et à ce qu’on flèche les ressources vers le CNDS. Cela dit, avant de flécher une taxe hypothétique vers le CNDS, il faudrait déjà faire en sorte de préserver les ressources actuelles de cet établissement.

Je rappelle en effet que le Gouvernement a fait voter une économie de 64 millions d’euros sur ses ressources dans le cadre du projet de loi de finances pour 2018. Les taxes affectées qui se trouvent ainsi rabotées ou supprimées sont, d’une part, le prélèvement exceptionnel de 0,3 % voté l’an dernier – à l’unanimité je le rappelle –, qui assurait 25 millions d’euros chaque année jusqu’en 2024 au fonds « Héritage Paris 2024 », destiné aux petits équipements sportifs des collectivités ou à l’accompagnement des projets des clubs en lien avec les Jeux Olympiques et Paralympiques, d’autre part, la taxe Buffet, dont le plafond est abaissé de 40 millions d’euros à 25 millions d’euros. Ce prélèvement sur la cession de droits télévisés d’événements sportifs se déroulant en France était le symbole de la redistribution entre le sport professionnel et le sport amateur – nous avions même essayé d’élargir son assiette en la faisant porter également sur les organisateurs basés à l’étranger, mais avons malheureusement été censurés par le Conseil constitutionnel, ce qui nous a privés de 15 millions d’euros supplémentaires.

Enfin, je souligne que le prélèvement sur les paris sportifs a également été raboté de 10 millions d’euros, alors qu’il avait été augmenté du même montant l’an dernier, qu’il porte sur une ressource en constante augmentation – plus 20 % à 30 % chaque année – et qu’il est normal que le prélèvement effectué sur les paris sportifs revienne au monde du sport.

Bref, il ne suffit pas de parler du CNDS, il faut également abonder ses crédits !

La commission rejette l’amendement.

Elle rejette ensuite l’article unique.

Après l’article unique

La commission examine l’amendement AC5 de Mme Marie-George Buffet.

Mme Marie-George Buffet. Cet amendement vise à interdire la conclusion de contrats de travail en France avec un sportif professionnel dont une partie des droits est détenue par une société tierce. Le syndicat international des footballeurs professionnels dénonce la détention de droits économiques par un tiers.

M. le rapporteur. Il s’agit là d’un sujet très important et je suis d’accord avec le principe qui est ici défendu, mais nous ne sommes pas dans le cadre de la proposition de loi, c’est pourquoi j’émets un avis défavorable.

Mme Marie-George Buffet. Cet amendement entre bien dans le cadre de la proposition de loi, puisqu’il a pour objet de s’attaquer à la bulle financière que représente la pratique que j’ai décrite.

M. le rapporteur. J’entends bien, madame Buffet, mais votre proposition s’inscrit bel et bien en dehors du champ d’application du texte.

M. Fabien di Filippo. Si les fonds de pension qui détiennent des droits de joueurs sont interdits en France, le marché du sport professionnel est aujourd’hui mondialisé et une grande partie des succès de clubs sportifs professionnels en France sont dus à des investisseurs étrangers. Dans le football, c’est le cas de l’AS Monaco, via un investisseur russe…

M. le rapporteur. L’AS Monaco n’est pas un club français…

M. Fabien di Filippo. C’est en tout cas un club qui évolue en France. Le Paris Saint‑Germain constitue un autre exemple, avec des investisseurs qataris.

Si nous adoptons des mesures restrictives, ces investisseurs risquent de ne plus venir en France… il n’y aura alors plus de transferts tel celui de Neymar, et ce sera bien dommage, car de telles opérations produisent toute une série d’activités et de taxes revenant à l’État, dont les montants sont bien supérieurs à ce que les montants des transferts peuvent laisser supposer. Nous devons nous interroger sur ce qu’est la mission d’un club professionnel, qui revêt souvent la forme d’une société anonyme à objet sportif, et être très prudents lorsque nous envisageons de prendre des mesures restrictives en la matière, car nous risquons de nuire à la compétitivité des clubs professionnels.

La commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement AC6 de Mme Marie-George Buffet.

Mme Marie-George Buffet. Cet amendement d’appel s’inspire d’une des recommandations de l’étude de la commission européenne publiée en février 2013, visant à limiter les indemnités de mutation dans le football.

M. le rapporteur. J’émets un avis défavorable à cet amendement dont l’objet s’éloigne un peu du cadre de notre texte.

M. Régis Juanico. On a évoqué tout à l’heure ce que fait la Direction nationale de contrôle de gestion (DNCG), ainsi que le fair-play financier pour les grands clubs européens. Une autre idée est en train de faire son chemin actuellement, celle d’un salary cap, c’est‑à‑dire d’un plafonnement de la masse salariale d’une équipe de football professionnelle, et il existe même, dans un certain pays, un luxury cap, qui permet à un club de verser à titre exceptionnel un salaire supérieur au salary cap, en contrepartie du règlement d’une somme répartie sur l’ensemble des autres clubs, ce qui constitue une forme de solidarité financière. Je trouve que l’idée de notre collègue Marie-George Buffet est très intéressante, car elle s’inscrit parmi ces mécanismes de régulation de la masse salariale.

M. Cédric Roussel. Il ne sert à rien de « jouer perso » en la matière : les sujets dont il est ici question ont vocation à être réglés au niveau international ou du moins européen, pour peu qu’il y ait une volonté politique de le faire.

J’en profite pour souligner l’intervention de la ministre Laura Flessel lors du dernier Conseil européen des ministres des sports, visant à profiter de l’effet loupe qu’offrent à Paris les Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 pour provoquer une concertation et une réflexion globale sur tous les sujets relatifs au sport européen.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AC4 de Mme Marie-George Buffet.

Mme Marie-George Buffet. Cet amendement vise à limiter les rémunérations des agents sportifs à 6 % du montant des indemnités de mutation, contre 10 % actuellement.

M. le rapporteur. Puisque les clubs professionnels français disent ne pas avoir les moyens de payer une contribution de 5 % au profit des amateurs, il leur est fourni, avec cet amendement, une occasion de faire des économies qui pourront être consacrées au règlement de la taxe que nous proposons de créer au profit du sport amateur. Je suis donc très favorable à cet amendement.

M. Cédric Roussel. La « loi Braillard » avait constitué une première avancée en la matière, et il me semble préférable de rester dans le cadre de cette loi plutôt que d’instaurer une nouvelle disposition.

La commission rejette l’amendement.

La commission ayant rejeté l’article unique ainsi que tous les amendements portant articles additionnels, la proposition de loi est rejetée.

En conséquence, en application de l’article 42 de la Constitution, la discussion en séance publique se déroulera sur la base du texte initial de la proposition de loi.

 

La séance est levée à dix-sept heures trente-cinq.

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Présences en réunion

Réunion du mercredi 29 novembre 2017 à 16 heures 45

 

Présents. – M. Gabriel Attal, Mme Géraldine Bannier, M. Philippe Berta, M. Pascal Bois, Mme Anne Brugnera, Mme Marie-George Buffet, Mme Sylvie Charrière, M. François Cormier-Bouligeon, Mme Béatrice Descamps, Mme Jacqueline Dubois, Mme Frédérique Dumas, Mme Nadia Essayan, Mme Elsa Faucillon, M. Grégory Galbadon, M. Laurent Garcia, M. Régis Juanico, M. Yannick Kerlogot, Mme Brigitte Liso, Mme Sophie Mette, Mme Frédérique Meunier, Mme Claire O'Petit, Mme Cathy Racon-Bouzon, M. Frédéric Reiss, Mme Stéphanie Rist, M. Cédric Roussel, M. Bertrand Sorre, M. Bruno Studer, Mme Agnès Thill, M. Patrick Vignal, M. Michel Zumkeller

 

Excusés.  Mme Valérie Bazin-Malgras, Mme Aurore Bergé, Mme Gisèle Biémouret, Mme Constance Le Grip, Mme Maud Petit, Mme Sabine Rubin, M. Stéphane Testé

 

Assistaient également à la réunion. – M. Fabien Di Filippo, M. Jean-Michel Mis, M. François Ruffin