Compte rendu

Commission
des affaires culturelles
et de l’éducation

– Audition de M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, sur la rentrée scolaire 2

– Présences en réunion..................................37


Mardi
10 septembre 2019

Séance de 16 heures 30

Compte rendu n° 70

session extraordinaire de 2018-2019

Présidence de
M. Bruno Studer,
Président
 


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COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE LÉDUCATION

Mardi 10 septembre 2019

La séance est ouverte à seize heures trente

(Présidence de M. Bruno Studer, président de la Commission)

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La commission des affaires culturelles et de léducation procède à laudition de M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, sur la rentrée scolaire.

M. le président Bruno Studer. Mes chers collègues, après une interruption estivale bien méritée, je suis très heureux de vous retrouver dans cette nouvelle salle de commission pour accueillir, en votre nom à tous, M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.

Cher Jean-Michel Blanquer, cette nouvelle rentrée scolaire, que vous avez souhaité placer tout le signe de la réussite, va notamment permettre de mettre en œuvre les dispositions de la loi du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance, loi qui nous a beaucoup occupés lors de la précédente session parlementaire. Je me félicite que ce texte important, sur lequel nous nous sommes accordés avec nos collègues sénateurs lors d’une commission mixte paritaire conclusive, consacre notre volonté d’agir pour renforcer l’égalité des chances dans notre pays et offrir à tous les élèves les leviers nécessaires à leur épanouissement et à leur réussite.

Je ne vais pas énumérer ici toutes les mesures que nous avons engagées depuis deux ans maintenant, à tous les niveaux du système éducatif, pour permettre à tous les enfants, à tous nos jeunes, dans leur richesse et leur diversité, d’accéder aux savoirs et de s’approprier les valeurs de notre République.

Monsieur le ministre, vous reviendrez sûrement sur certaines de ces mesures, notamment sur la poursuite du dédoublement des classes de CP et de CE1, ainsi que sur la mise en œuvre de l’instruction obligatoire à 3 ans, qui constituent des avancées majeures de cette législature.

Compte tenu de l’actualité récente, j’aimerais également vous entendre sur la sécurisation des établissements scolaires. Si l’école ne doit pas se transformer en bunker, il n’est pas acceptable que les personnels et les enfants puissent être exposés à des intrusions et à des actes de violence comme celui perpétré à Marseille, la semaine passée.

Je souhaite d’ailleurs, en cette période de rentrée, saluer ici la qualité et l’engagement des personnels éducatifs de notre pays, qui font un métier passionnant mais difficile et méritent notre considération et notre soutien. Nous serons bien évidemment attentifs aux mesures les concernant dans le prochain projet de loi de finances, à l’occasion duquel nous aurons de nouveau l’occasion de vous entendre, Monsieur le ministre.

Mes chers collègues, je sais qu’à l’occasion de l’audition du ministre de l’éducation nationale, nos électeurs attendent de nous que nous posions de nombreuses questions sur les problèmes qu’ils nous ont soumis et il me semble important que nous puissions toutes et tous prendre la parole. C’est pourquoi je vous invite à limiter la durée de votre question à une minute et je serai attentif au respect de ce temps de parole. Merci d’avance à chacune et à chacun.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je suis très heureux de vous retrouver pour cette audition traditionnelle de rentrée devant la commission, la troisième depuis le début du quinquennat.

Je souhaite vous remercier pour votre implication continue sur les sujets éducatifs, qui nous permet de progresser, rentrée après rentrée. Comme vient de le rappeler le président, la précédente session parlementaire a été riche et rythmée par l’examen de la loi pour une école de la confiance, promulguée le 26 juillet 2019, après examen par le Conseil constitutionnel.

Cette loi, dont l’inspiration est profondément sociale, offre au système éducatif de nouveaux leviers qui vont nous permettre d’approfondir ce qui a été fait depuis deux ans :

- lutter contre les inégalités dès le plus jeune âge en abaissant l’âge de l’instruction obligatoire à 3 ans, avec une série de conséquences en chaîne, dont l’instauration d’une visite médicale à l’école dès 3 ans pour un meilleur suivi des enfants ;

- créer un grand service public de l’école inclusive, avec les premières applications à cette rentrée ;

- consacrer le droit des élèves à suivre une scolarité sans harcèlement ;

- éduquer au développement durable, dont j’ai souhaité faire un marqueur de cette rentrée, de la maternelle au lycée ;

- s’ouvrir sur le monde avec les établissements publics locaux d’enseignement international (EPLEI) ;

- renforcer le contrôle de l’instruction dispensée dans la famille ;

- combattre le décrochage des jeunes les plus fragiles avec l’obligation de formation de 16 à 18 ans ;

- mieux former les professeurs dans des instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation (INSPÉ), nouvelle modalité de formation en cours de création ;

- permettre une entrée progressive dans la carrière de professeur ;

- améliorer le système scolaire français avec le conseil d’évaluation de l’école, qui sera aussi une réalité de l’année 2019-2020.

Sans revenir en détail sur la loi, car vous la connaissez bien, je souhaite une nouvelle fois vous remercier car le débat parlementaire a permis d’améliorer et d’enrichir ce texte, notamment en le faisant résonner avec les défis actuels de notre société.

Pour réussir et faire réussir les élèves, l’école doit pleinement assumer les défis de notre époque. Ils sont multiples, mais il y en a trois principaux en ce début d’année autour desquels je souhaite articuler mon intervention : le défi de l’égalité des chances, qui va de pair avec la lutte contre l’injustice sociale, comme je l’ai dit en commençant : le défi du bien-être au travail des personnels, car il n’y a pas d’école qui aille bien sans professeurs et sans personnels heureux ; le défi de l’avenir, c’est-à-dire la question environnementale, pour laquelle l’école peut être en première ligne.

L’égalité des chances, vous le savez, est le marqueur des politiques d’éducation. La mesure la plus forte et la plus emblématique, mais pas la seule, est le dédoublement des classes de CP et des CE1 en réseau d’éducation prioritaire (REP) et REP+. En cette rentrée, cela représente 10 800 classes et 300 000 élèves bénéficiant d’un suivi renforcé pour l’apprentissage des savoirs fondamentaux, soit 20 % d’une classe d’âge. Conformément au souhait du Président de la République, ces dédoublements seront étendus aux grandes sections de maternelle en éducation prioritaire, soit 150 000 élèves de plus, à la rentrée 2020. Des expérimentations sont déjà en cours. Je pense au Val-de-Marne où j’étais récemment, où 60 grandes sections sont dédoublées. C’est vrai dans d’autres territoires que j’ai pu visiter avant et pendant la rentrée, comme l’île de La Réunion. C’est l’approfondissement d’une mesure dont nous attendons beaucoup et dont les premiers fruits nous emplissent d’espoir sur la possibilité d’en finir avec la différence de résultats entre les territoires les plus défavorisés et les autres.

La maîtrise des savoirs fondamentaux, autrement dit la capacité à transmettre à tous les élèves des connaissances et des valeurs – lire, écrire, compter et respecter autrui – par 100 % des élèves, passe aussi par des mesures pédagogiques et en termes de ressources humaines. En cette rentrée scolaire, 2 300 postes ont été créés pour l’école primaire en France, en dépit d’une baisse démographique. Cela nous permet non seulement d’assurer le dédoublement des classes mais aussi de conduire des politiques ciblées, notamment le soutien de l’école primaire en milieu rural.

En outre, les orientations pédagogiques prises depuis deux ans dans l’apprentissage progressif, rigoureux et systématique des savoirs fondamentaux sont approfondies. L’abaissement de l’âge de l’instruction obligatoire à 3 ans permet de renforcer l’école maternelle dans son rôle essentiel pour l’apprentissage du langage et pour développer le goût d’apprendre. Il est important de le dire, car cela se traduira non seulement par l’amélioration des taux d’encadrement au cours des trois prochaines années, mais aussi par de meilleures formations et une insistance pédagogique sur ce qui se joue à l’école maternelle. Je pense notamment aux suites des assises de l’école maternelle conduites par Boris Cyrulnik, qui se traduisent aujourd’hui par des programmes de formation continue sur les enjeux de l’affectivité en école maternelle et sur différentes questions pédagogiques propres à l’école maternelle.

L’égalité des chances passe aussi par la scolarisation des élèves en situation de handicap. C’est une autre dimension sociale importante de la loi pour une école de la confiance et de la rentrée, avec quelque 23 500 élèves de plus en cette rentrée et 7,2 % d’accompagnants supplémentaires en équivalents temps plein, comme je l’indiquais tout à l’heure dans l’hémicycle. Le budget dédié à la scolarisation des élèves en situation de handicap est passé de 2,1 milliards d’euros constatés en 2017 à 2,8 milliards d’euros prévus en 2019, soit une augmentation annuelle de 10 %, c’est-à-dire le domaine qui enregistre la hausse budgétaire la plus forte à l’intérieur du budget du ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse. C’est l’occasion de rappeler que, contrairement à ce que j’entends dire ici ou là, les réorganisations que nous opérons ne sont pas destinées à faire des économies mais à être qualitativement plus efficaces par des moyens supplémentaires très importants.

Cette année, les rectorats et les départements se sont organisés pour mieux prendre en charge les demandes des familles grâce à une cellule d’écoute garantissant une réponse dans les vingt-quatre heures et au déploiement de 3 000 pôles inclusifs d’accompagnement localisés (PIAL) dans l’ensemble du pays. Vendredi dernier, j’ai pu voir que l’ensemble du territoire d’Eure-et-Loir était couvert par des PIAL. Ainsi, tous les écoles et établissements de ce département sont couverts, avec une organisation au plus près du terrain pour affecter et former les accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH).

Pour résumer la différence d’approche, je dirai qu’avant, une fois la demande de la famille exprimée, le ministère cherchait un accompagnant, et aujourd’hui, avec la mise en route des PIAL, l’élève et sa famille trouvent un accompagnant en se rendant à l’école. Comme je le disais dans l’hémicycle, une semaine après la rentrée, moins de 5 % des élèves sont actuellement en situation d’attente. C’est encore un chiffre trop élevé, mais c’est le meilleur des dernières années. Je n’entrerai pas dans le détail des mesures ayant un impact social mais je voulais insister sur celle-ci.

J’insisterai ensuite sur l’amélioration des conditions de travail des personnels.

Je l’ai beaucoup dit lors de la rentrée, je l’avais annoncé les mois précédents, nous devons approfondir le dialogue social afin d’améliorer la situation des personnels, non seulement sous l’angle de la rémunération mais aussi sous celui de l’ensemble des éléments de nature à favoriser le bien-être au travail.

Depuis un an, en particulier, le dialogue social a permis d’avancer sur bien des sujets, comme la formation continue qui fait l’objet d’un schéma directeur opérationnel en cette rentrée, visant à garantir à tout professeur de France au minimum une formation continue au cours des trois prochaines années, et la gestion des ressources humaines de proximité. En cette rentrée déjà, 25 % des professeurs peuvent trouver un interlocuteur à moins de vingt minutes de leur lieu de travail pour évoquer leurs enjeux de carrière. La formation continue s’améliore non seulement sous l’angle quantitatif mais aussi qualitatif.

Ce dialogue social doit s’intensifier, ne serait-ce que parce que nous avons des objets de dialogue particulièrement importants dans le contexte de la réforme des retraites. Comme l’ont dit le Président de la République et le Premier ministre, la réforme des retraites, inspirée par la volonté de justice et d’égalité entre les Français, doit faire l’objet de notre part, notamment de la part de Jean-Paul Delevoye récemment arrivé au Gouvernement, d’un travail précis afin que l’amélioration des rémunérations se traduise par des retraites qui soient bonnes pour l’ensemble des personnels de l’éducation nationale. Cela suppose plusieurs mois de discussions. Je l’ai déjà annoncé aux organisations syndicales.

Les discussions portent aussi sur l’amélioration des conditions de travail, en commençant par la protection des personnels, avec un plan sécurité que j’évoquais également tout à l’heure dans l’hémicycle. Tout fait de violence doit être systématiquement signalé et les victimes doivent être accompagnées. J’avais annoncé ces mesures dès le mois de novembre dernier.

Une circulaire du ministère de la justice sur les violences scolaires, conçue avec le ministère de l’intérieur et avec mon propre ministère, est parue en ce mois de septembre. Un référent « violence en milieu scolaire » est nommé dans chaque département, afin que les directeurs d’école et les chefs d’établissement aient un interlocuteur auprès de chaque inspecteur d’académie. Les procédures disciplinaires sont simplifiées dans les établissements du second degré, conformément à ce que j’avais annoncé en novembre dernier, afin d’améliorer le fonctionnement des conseils de discipline. Les travaux d’intérêt général sont facilités grâce à l’agence du travail d’intérêt général qui fournit des tuteurs. La réparation matérielle sera plus systématique. Contrairement à la pratique actuelle, et je l’ai dit aussi dans l’hémicycle, l’inspecteur d’académie n’aura pas besoin de l’autorisation de la famille pour inscrire un élève en classe relais durant six mois. Bien entendu, nous privilégions le dialogue mais, en cas de nécessité, cette possibilité est offerte à l’inspecteur d’académie. Il pourra être proposé aux familles la prise en charge de leur enfant par un internat tremplin. Les familles sont responsabilisées, avec la mise en place d’un protocole d’accompagnement et de responsabilisation des parents (PAR).

L’aspect matériel est un autre sujet fondamental. Je viens d’évoquer l’enjeu de la rémunération. Dès l’année 2020, nous envoyons de premiers signaux. Vous aurez à discuter et à voter le projet de budget pour l’année 2020. Le projet de loi de finances se traduira par une augmentation du budget de l’éducation nationale, qui dépassera le milliard d’euros, l’essentiel de ces moyens étant naturellement destiné aux dépenses de personnels, donc à l’amélioration du pouvoir d’achat, dont la mise en œuvre des « parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR), pour 300 millions d’euros. Je rappelle, parce qu’il y a eu quelques interprétations médiatiques, que ce n’est pas le seul élément d’augmentation du pouvoir d’achat, les discussions sur les rémunérations dont j’ai parlé ayant vocation à porter des fruits au-delà de l’année 2020.

Je rappelle aussi que nous augmentons le nombre d’heures supplémentaires, lesquelles sont désormais défiscalisées, ce qui se traduira dès cette année par une amélioration du pouvoir d’achat des professeurs, principalement de l’enseignement secondaire. En outre, les professeurs du primaire, du secondaire et les personnels travaillant en REP+, au nombre d’environ 50 000, bénéficieront en cette rentrée d’une augmentation de 1 000 euros de la prime que nous avions déjà portée à 1 000 euros, l’année dernière, soit 2 000 euros. Il devient donc attractif de travailler en REP +, puisque cela s’ajoute aux 2 500 euros déjà existants, soit 4 500 euros d’incitation par an.

Nous aurons ce travail de concertation sur les aspects matériels, mais ils ne se résument pas à ce que je viens de dire. Je pense à l’aide au logement qui peut être un aspect essentiel de l’accompagnement des professeurs des écoles ou des professeurs du second degré débutant dans les régions où se loger est particulièrement cher.

Nous avons de très beaux chantiers devant nous au titre du dialogue social. Je les ai indiqués aux organisations syndicales. Ils ont trait aux enjeux de l’amélioration de la situation des personnels, que je viens de résumer. Le dialogue social concerne également le suivi des réformes en cours, notamment la réforme du baccalauréat général et technologique et la réforme de la voie professionnelle. Dans les deux cas, un comité de suivi a été mis en place qui permettra, au cours des prochains mois, de discuter de ce qui se passe sur le terrain, des ajustements souhaitables, des améliorations possibles, des précisions envisagées.

Le troisième point sur lequel je souhaite insister en introduction concerne le développement durable.

L’année dernière, à l’occasion de la marche internationale que les jeunes du monde entier avaient organisée autour des enjeux de l’environnement, nous avions souhaité voir organisés des débats de lycéens, lesquels s’étaient traduits par les travaux du conseil national de la vie lycéenne. J’en profite pour souligner la vitalité de la démocratie lycéenne qui s’exprime au travers des comités de vie lycéenne. Ces travaux ont abouti à huit recommandations. Je vous avais dit que je les prendrais au sérieux : elles deviennent cette année ma feuille de route, notre feuille de route, pour mettre en action l’ensemble de l’institution éducation nationale.

On insiste parfois sur l’importance de la taille de l’éducation nationale pour s’en plaindre. Je ne le fais jamais. Je considère au contraire que la grande taille de l’éducation nationale permet d’exercer des effets de levier. C’est pourquoi je me suis permis de dire que nous ne devions plus utiliser l’image du fameux animal préhistorique qui nous a fait tant de tort mais parler désormais d’un peuple de colibris. L’éducation nationale représente 12 millions d’élèves, un million de personnels, 60 000 implantations scolaires. L’impact d’un effet de levier exercé par ces 13 millions de colibris, auxquels s’ajoutent les familles et, de proche en proche, toute la société française, est tout sauf marginal. L’ajout de chacune des actions aura un impact direct et indirect considérable.

Nous réaliserons tout d’abord des progrès à travers l’évolution des programmes : c’est ce que l’on attend en premier de l’éducation nationale et qui a été réalisée au travers des changements de programmes du lycée, mais aussi à l’école et au collège, non pour présenter une sorte de catéchisme du développement durable mais pour aller au fond des choses. Il s’agit notamment de proposer, dans le cadre des enseignements scientifiques, de véritables analyses et de véritables formations aux métiers correspondants, mais aussi d’inciter à un état d’esprit d’engagement. Nous ne voulons pas former une génération d’élèves pessimistes et fatalistes mais une génération d’élèves acteurs. Ils ne demandent que cela, comme nous l’avons vu au travers des comités de vie lycéenne qui ont parfaitement exprimé ce désir d’engagement et d’action. C’est donc aussi l’occasion d’un développement de l’engagement des élèves pour des causes d’intérêt général ; les adolescents ont besoin de ce sens de l’engagement, mais c’est vrai aussi des enfants, dès l’école primaire.

Cela se traduira par une série d’actions locales. Les collégiens et lycéens éliront un éco-délégué par classe, soit 250 000 éco-délégués. Ces éco-délégués seront formés pour indiquer à leurs camarades les gestes nécessaires à la protection de l’environnement : éteindre la lumière, recycler les déchets, gérer de manière responsable le papier, limiter l’usage du plastique. Ils réfléchiront aux projets possibles pour favoriser la biodiversité et la lutte contre le réchauffement climatique. En lien avec les collectivités locales, nous encouragerons la présence systématique de potagers, la revégétalisation, des plantations d’arbres, toutes initiatives pour lesquelles nous ne partons pas de zéro, parce que l’ensemble des écoles, des collèges et des lycées se sont déjà impliqués dans ce type d’actions. Nous avons le modèle de ceux qui ont fait mieux et plus en la matière.

D’ici décembre, toutes les écoles et tous les établissements devront avoir conçu un projet de développement durable : création d’un potager, plantations d’arbres, installations de nichoirs à oiseaux ou de ruches. Au passage, les vertus pédagogiques sont considérables. Il s’agit de mettre les élèves en action. Nous avons, avec les classes de sciences de la vie et de la terre, de magnifiques exemples de réalisations en la matière.

En octobre, une nouvelle version du cahier des charges du label E3D, plus ambitieuse, sera publiée. L’objectif est que, dès cette année, toutes les écoles et tous les établissements mettent en œuvre des projets de transition écologique et de développement durable et que, dès 2022, plus de 10 000 écoles et établissements soient labellisés E3D.

Le mot-clé de cette rentrée, c’est : « Réussir ». Réussir, c’est faire réussir les élèves, mais c’est aussi faire réussir notre pays. Les enjeux de l’environnement font partie de cette réussite. C’est aussi être en soutien des personnels pour permettre la réussite de leurs élèves. C’est au cœur de l’action menée pour l’élévation du niveau général et la justice sociale.

M. le président Bruno Studer. Merci, Monsieur le ministre. Nous en arrivons aux questions.

Mme Jacqueline Dubois. Monsieur le ministre, j’indiquerai d’abord qu’en Dordogne, il y a 19 PIAL couvrant le territoire, 46 classes dédoublées de CP/CE1 et même deux classes de grande section dédoublées, soit quatre au total, ce qui est assez intéressant.

À l’issue du grand débat national, au titre des mesures annoncées en faveur du maintien des services publics en milieu rural, le Président Macron avait dit qu’il n’y aurait plus de fermetures d’écoles sans l’accord du maire. En Dordogne, le maire de Tursac s’est immédiatement saisi de cette annonce, alors que son école était sur le point de fermer. Ainsi l’école de Tursac a pu accueillir 17 élèves, le 2 septembre, et conserver sa classe. Monsieur le ministre, pourriez-vous nous dire si cette mesure a eu d’autres incidences sur le maintien d’écoles en milieu rural en cette rentrée ? Plus précisément, l’avis du maire sera-t-il sollicité pour chacune des écoles d’une commune au cas où la baisse démographique concernerait une commune nouvelle ayant une école dans chacun des anciens villages qui la composent ?

Mme Emmanuelle Anthoine. Monsieur le ministre, je reviendrai sur l’école inclusive que vous avez mise au cœur de votre action et que vous avez qualifiée de sujet essentiel pour cette rentrée. Très soucieuse de l’accompagnement du handicap dans notre pays, je soutiens pleinement cette orientation. Pourtant, j’ai été au regret d’apprendre, à la fin du mois d’août, que dans la Drôme, 257 enfants handicapés ne seraient pas pris en charge cette année en institut médico-éducatif ou par les services de soins à domicile. Ces enfants ne bénéficient pas de places dans ces dispositifs en dépit de la validation de leur dossier par la maison départementale de l’autonomie.

Ces cas ne sont pas isolés. Des milliers d’enfants en situation de handicap sont exclus des bancs de l’école partout en France. Je m’inquiète de cette situation qui prive ces jeunes handicapés de scolarité, au mépris de leurs droits. Je pense aussi aux familles confrontées à un véritable parcours du combattant à l’issue duquel il leur est annoncé qu’il n’y a pas de place pour la prise en charge de leur enfant. C’est une injustice inacceptable. Monsieur le ministre, quelles solutions et quels moyens proposez-vous pour permettre à ces enfants d’être scolarisés, conformément à leurs droits ?

Mme Géraldine Bannier. Monsieur le ministre, merci pour votre bilan polydirectionnel. On ne peut que valider les axes rappelés : égalité des chances, inclusion, engagement, sensibilisation au développement durable. Je reviendrai toutefois sur un point que j’avais abordé lors de l’examen du projet de loi, point important malgré son apparence mineure. J’avais proposé que les enseignants puissent bénéficier, comme dans beaucoup d’autres professions, d’une simple visite médicale tous les deux ans. Ma demande s’était transformée en amendement tendant à la présentation d’un rapport gouvernemental. Cet amendement a été étrangement rejeté par le Sénat. Où en est le Gouvernement sur ce sujet qui, je l’ai entendu sur le terrain, concerne également les personnels administratifs ?

Mme Michèle Victory. Monsieur le président, je me permettrai tout d’abord d’observer qu’en présence du ministre et sur un sujet aussi important que l’école, il paraît quasi impossible de s’en tenir au temps imparti.

M. le président Bruno Studer. Posez votre question, Madame Victory.

Mme Michèle Victory. Des classes surchargées en collège avec 100 000 élèves supplémentaires attendus dans le second degré sur la durée du quinquennat, des lycées affectés par deux réformes que vous avez mises en place avec un corps enseignant qui n’y adhérait pas forcément : la rentrée est difficile pour les personnels du second degré. En lycée général, avec la suppression des séries, système contesté depuis longtemps, concilier les vœux des élèves avec les capacités d’accueil de leur établissement a été un casse-tête pour les professeurs. Beaucoup d’élèves ont été contraints de modifier leur vœu, compte tenu du nouvel engorgement de la spécialité maths, de sorte que, comme dans l’ancien système, les matières scientifiques sont trustées par les meilleurs élèves. Avec l’instauration d’un contrôle continue dont les enseignants craignent qu’il mette une grosse pression sur leur travail et le flou sur le contenu des enseignements, puisque les nouveaux programmes sont encore en cours d’élaboration, c’est un bac complexifié que nous découvrons, à quoi s’ajoute une pénurie de professeurs principaux.

En lycée professionnel, la réforme interroge toutes les équipes. Vous avez indiqué que l’enseignement professionnel était l’une de vos priorités. Nous aimerions que les moyens soient à la hauteur des enjeux. Puisque je n’ai plus le temps que d’évoquer un sujet, je m’étonnerai de la réduction des horaires dans les matières générales : français, langues vivantes, histoire-géo ou arts appliqués. Il est incroyable que dans ces sections de CAP et de Bac pro où l’on a besoin de donner beaucoup plus aux élèves, on se retrouve généralement avec moins d’heures.

Mme Béatrice Descamps. Beaucoup de questions se posent pour cette rentrée, mais puisque je dois être brève, je reviendrai sur l’abaissement à 3 ans de l’âge de la scolarité obligatoire. La loi rend possibles des aménagements, ce que nous avions demandé et qui est prévu par le décret du 4 août dernier. Pourtant subsiste une question toute simple qui m’est souvent remontée par des parents et des enseignants : les enfants peuvent-ils faire la sieste à l’école ?

Par ailleurs, les parents d’élèves à besoin éducatif particulier se sentent souvent démunis, malgré le soutien à l’accompagnement des équipes pédagogiques. Serait-il possible, Monsieur le ministre, d’envisager une réflexion sur le sujet, en vue de développer des outils ou des dispositifs pour aider ces familles ? Cela fait aussi partie de l’égalité des chances.

M. le président Bruno Studer. Mes chers collègues, je propose de faire d’abord le tour de tous les députés en leur octroyant une minute de temps de parole. Madame Descamps, Madame Victory, si vous souhaitez poser d’autres questions, vous pourrez ensuite reprendre la parole. J’ai le mauvais rôle mais je le jouerai jusqu’au bout.

Mme Muriel Ressiguier. Monsieur le ministre, encore beaucoup trop d’enfants n’ont pas pu être scolarisés en institut médico-éducatif (IME), faute de place. Qu’entendez-vous faire concrètement pour que chacun ait la chance de pouvoir étudier ? Je note les 4 500 embauches d’AESH, mais des problèmes de statut, de rémunération, de formations demeurent, et c’est malheureusement encore insuffisant pour accueillir tous les enfants qui devraient l’être.

L’objectif est d’avoir une école de la République émancipatrice qui n’exclue personne, mais 100 000 enfants n’entreront pas à l’école cette année, parce qu’ils vivent dans un squat ou dans un bidonville et ont du mal à justifier d’un domicile, ou encore parce qu’ils sont victimes d’expulsions de logement en cours d’année, ce qui les prive en moyenne de six mois d’école. Que comptez-vous mettre en place à ce sujet ?

Mme Elsa Faucillon. Monsieur le ministre, puisqu’il faut aller vite, je m’abstiendrai des formules destinées à arrondir le propos pour aller droit au but. Comme moi, vous avez entendu beaucoup d’enseignants dire que la rentrée s’annonçait rude pour eux, qu’ils attendent du respect et de meilleures conditions de travail pour donner le meilleur à leurs élèves, ainsi qu’un salaire décent. L’année dernière, il y a eu une mobilisation forte, que vous avez parfois jugée « exagérée », et des retenues de salaires. Puis, à cette rentrée, vous vous faites l’avocat des professeurs et actez qu’ils ne sont pas tellement bien rémunérés en annonçant une augmentation de leur revenu. Je constate, comme pour d’autres ministres du Gouvernement, un changement de ton. Depuis le début du quinquennat, vous avez essayé de tourner autour du pot en estimant qu’ils n’étaient pas si mal rémunérés par rapport aux autres, oubliant que le travail demandé aux professeurs des écoles en France est plus lourd que celui de leurs collègues du reste de l’Europe. Vous avez annoncé une augmentation, sans dire qu’elle était annuelle et brute. Beaucoup reste à faire pour répondre aux légitimes aspirations exprimées par les professeurs.

Mes questions sont simples : y a-t-il un changement de ton ? Ou bien un changement dans les actes à l’approche de l’examen du projet de budget ? Par ailleurs, la prime pour les professeurs en REP + ne devrait-elle pas s’appliquer également aux professeurs exerçant dans les établissements pénitentiaires ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Madame la députée Jacqueline Dubois, merci pour ce que vous avez dit. Il est important d’entendre les traductions concrètes de nos actions sur vos territoires, en l’occurrence la Dordogne, qu’il s’agisse du dédoublement ou du soutien à l’école primaire. Un certain nombre d’écoles ont été « sauvées » après la déclaration du Président de la République. Quelque 400 écoles étaient concernées par des projets de fermetures, dont beaucoup sur la base d’un consensus local, en sorte que toutes ces écoles n’ont pas été concernées par les mesures. Mais quand le maire souhaitait que l’on revienne sur la mesure, c’est bien ce qui s’est produit. Environ 80 écoles dont la fermeture était prévue ne l’ont pas été. Bien entendu, cette disposition a vocation à continuer de s’appliquer.

Je profite de l’occasion pour redire avec force ce que j’indiquais à la fin de l’année scolaire, c’est-à-dire que nous sommes aux côtés des maires ruraux pour le renforcement de leur école. Nous sommes dans le même bateau. Il n’y a pas les communes contre l’État, il y a les communes avec l’État pour renforcer l’école rurale dans une véritable stratégie dynamique. J’ai en tête l’exemple d’un maire rural qui, comme je le préconisais, a initié dans son village un projet pédagogique dynamique qui a attiré de nouvelles familles. Là où il y avait deux classes et peut-être bientôt une seule, il y en a désormais au moins quatre. C’est devenu un lieu très attractif, avec des effets sur d’autres domaines que l’école.

C’est ainsi que nous allons nous engager fortement dans un dialogue qualitatif avec les élus. Comme je le dis souvent aux inspecteurs de l’éducation nationale et aux inspecteurs d’académie, il convient d’avoir davantage l’esprit de finesse que l’esprit de géométrie. L’objectif n’est pas d’avoir, comme cela a toujours été le cas jusqu’à présent, des effets de seuil, en fonction desquels, par exemple, si vous avez douze élèves et plus, vous êtes sauvé, mais de prendre en compte les spécificités, comme c’est le cas depuis assez longtemps pour la montagne, les îles, et surtout les dynamiques locales. C’est le sens des contrats de ruralité que nous allons continuer à renforcer et c’est le sens de stratégies spécifiques.

Dans le cas particulier d’une commune nouvelle constituée d’anciens villages, la solution ne doit pas être formaliste mais pragmatique, l’objectif étant de faire en sorte qu’il n’y ait pas de fermeture d’école. Je le répète, le maire est souverain. Un veto du maire nous empêche de fermer. Ensuite, du bon sens partagé doit nous permettre de trouver la solution adéquate.

Madame la députée Anthoine, vous avez fait référence à l’école inclusive qui, dans la Drôme, a été au centre d’une certaine polémique. Vous connaissez mieux ce département que moi, mais je le connais un peu et l’ai étudié beaucoup. Je vais vous livrer un bilan national chiffré complet, car les médias publient parfois des éléments inexacts et j’en profiterai pour les rectifier.

En cette rentrée, la tendance générale est à une forte amélioration. Je le maintiens car c’est démontré dans les faits. Nous avons environ 25 000 élèves en plus et 4 500 ETP d’AESH supplémentaires. Il y a seulement deux ans, l’immense majorité des supports étaient des contrats aidés, de quelques mois, considérés comme très précaires, créant de l’instabilité. Désormais, nous adressons à tous les AESH de France le message qu’ils vont avoir, si ce n’est déjà le cas, un contrat de trois ans. Ces derniers jours, j’en ai croisé sur le terrain qui ont déjà un CDI, ce qui représente une amélioration très nette que les AESH vivent comme telle. La direction générale des ressources humaines de l’éducation nationale a reçu pour message de considérer les AESH comme faisant partie de la maison éducation nationale. On va désormais suivre les carrières d’AESH avec, pour ceux qui restent plus de six ans, de véritables CDI. C’est une claire amélioration. Je vous accorde volontiers que nous avons d’autres améliorations à apporter. En cette rentrée, par exemple, nos ambitions en matière de formation ont été fortement relevées sur l’effectivité des 60 heures prévues, mais aussi sur la qualité de ces 60 heures, afin qu’elles interviennent le plus rapidement possible et sans préjudice du service rendu aux enfants. Toutes ces améliorations de terrain sont ressenties par les AESH concernées.

Bien entendu, on trouvera toujours, comme la députée qui m’a interrogé dans l’hémicycle, une exception. Même sur d’autres sujets que l’école inclusive, on pourra toujours me citer telle classe qui, à tel endroit, n’a pas obtenu son professeur à temps, mais nous avons considérablement réduit le phénomène, en le divisant tout simplement par deux. En cette rentrée, quelque 4 % des élèves sont en attente, contre 8 % à la rentrée précédente. Au moment où je parle, nous nous penchons sur des problèmes difficiles à résoudre, comme un support d’AESH resté sans candidat.

De plus, les parents sont assurés de disposer d’un interlocuteur à la cellule départementale pour trouver une solution. Nous ne sommes encore que dans la première quinzaine de septembre et un certain nombre de cas ont été résolus, comme celui qui m’a été soumis dans l’hémicycle le cas du jeune Gustave, dans l’Orne, a trouvé une solution. Nous avons mis en place un traitement personnalisé et une organisation dédiée. Les PIAL sont faits pour cela.

Je salue le travail de la commission d’enquête menée par M. le député Jumel, à laquelle certains d’entre vous ont participé dans les derniers mois. Elle a rendu des conclusions extrêmement intéressantes qui vont nous inspirer pour apporter les améliorations nécessaires. Je salue à la fois la qualité du travail accompli et la tonalité de votre question. Je forme le vœu qu’en 2019-2020, nous continuions à avancer sur le sujet grâce au travail collectif, par-delà les clivages politiques, car sur ce sujet, les vues et les objectifs sont partagés par tous les groupes de l’Assemblée.

Sur le plan budgétaire, nous en sommes à 2,8 milliards d’euros pour 2019, contre 2,1 milliards en 2017. C’est le plus gros effort en termes d’augmentation budgétaire.

Il y aurait mille choses à dire sur l’école inclusive et beaucoup à dire sur ses enjeux qualitatifs, mais nous aurons largement l’occasion de le faire par écrit et par oral.

Il y a une dizaine de jours, est apparue dans la Drôme une polémique de nature à semer la confusion. Il s’agissait de places en IME et non de places à l’école, ce qui n’est pas exactement la question du service public de l’école inclusive. Je le dis solennellement, les chiffres parus dans la presse étaient totalement faux. Pendant vingt-quatre heures, on a entendu dire sur toutes les ondes qu’environ 250 élèves étaient sans solution. Ce n’était tout simplement pas vrai. Certains acteurs ont tendance à répandre de fausses informations pour faire pression sur nous pour diverses raisons. En l’occurrence, c’était faux. Dans les jours qui ont suivi, Sophie Cluzel a démontré que s’il y avait quelques problèmes, le chiffre n’était certainement pas de 250.

Il est vrai que nous cherchons à faire en sorte que des élèves autrefois scolarisés dans des IME le soient dans des écoles. Nous le voulons pour le bien des élèves. Nous pensons que beaucoup de profils d’élèves qui étaient en IME gagnent à se retrouver à l’école. Nous accompagnons cela d’autres mesures visibles en cette rentrée, dont une bien plus grande implication des équipes socio-médicales dans les établissements scolaires. C’est aussi le sens de la coopération beaucoup plus étroite instaurée désormais entre nous et le ministère des solidarités et de la santé et le secrétariat d’État chargé des personnes handicapées. Ces équipes interviennent beaucoup plus fortement dans les établissements, de sorte que le besoin médical des élèves est naturellement pris en compte, ainsi que leur bonheur d’être en milieu ordinaire. Mais cela ne vaut pas pour tous les profils d’élèves. Nous n’avons pas une vision simpliste de l’école inclusive : nous devons faire en sorte que des profils qui sont en IME et qui peuvent aller en école ordinaire y aillent et que, parfois, des élèves qui n’allaient pas en IME faute de place ou parce qu’ayant des handicaps considérés comme trop lourds puissent y aller. L’objectif n’est pas de fermer des places d’IME, mais de faire en sorte qu’aillent en IME les élèves qui en ont réellement besoin.

Cela étant, cela pose un autre problème souvent évoqué par les professeurs. Est-ce que vous n’envoyez pas à l’école des élèves qui vont devenir hautement perturbateurs ou poser des problèmes pédagogiques ou éducatifs difficiles à résoudre ? La question est légitime et nous voulons la regarder en face. C’est pourquoi le travail accompli permet de répondre au mieux à cette question. Je pense à la visite que j’ai faite il y a quelques jours à l’hôpital de Créteil, où j’ai vu des équipes médicales de l’établissement faire pour les élèves des interventions en milieu scolaire en appui aux professeurs. Je souhaite que les professeurs ne soient jamais en situation isolée sur ces questions, par manque de formation, d’accompagnants ou d’intervention des équipes socio-médicales. Nous travaillons sur ces trois facteurs, sur lesquels nous avons fait cette rentrée des progrès illustrés par les exemples que je viens de donner. Bien entendu, ils doivent donner lieu à de nouvelles améliorations dans les mois et les années qui viennent.

Cette vision complète, systémique se met en place et est à l’œuvre à cette rentrée. J’assume pleinement de dire qu’elle marque une très forte amélioration. J’assume que vous pourrez toujours présenter un contre-exemple, inévitable sur l’ensemble de la population. Mais nous avons vocation à travailler sur chacun de ces contre-exemples pour résoudre le problème, et nous nous en sommes donné les moyens.

Mme la députée Géraldine Bannier m’a interrogé sur les visites médicales des personnels, sujet important et difficile. J’ai eu l’occasion de le dire dans les débats parlementaires, nous sommes confrontés, sur ce point comme sur d’autres, au problème du manque de personnel médical, non faute d’avoir prévu les budgets nécessaires, mais faute de médecins pour exercer dans ce cadre. Nous avons 87 médecins de prévention, 24 psychologues du travail et 21 infirmiers ou infirmières en santé au travail. Ces chiffres sont élevés mais insuffisants pour répondre à tous les besoins. C’est pourquoi, soucieux de renforcer la coopération, nous avons réuni les directeurs des Agences régionales de santé (ARS) avec les recteurs. L’une des mesures de la rentrée qui va permettre de résoudre ce problème, qui sera aussi au cœur des discussions avec les organisations syndicales sur le bien-être au travail, concerne les ressources humaines de proximité. Les personnels souhaitant évoquer des sujets relatifs à la santé pourront, selon l’urgence, s’adresser soit à des médecins du travail, soit à des médecins de ville. Nous fournissons une réponse de premier rideau qui suppose des améliorations structurelles dans les prochains temps.

Madame la députée Michèle Victory, pardonnez-moi, mais certaines questions me rappellent celles des mois précédents. Pour le formuler gentiment, il s’est quand même passé des choses. Vous ne pouvez pas dire que les programmes sont en cours d’élaboration. Ils sont élaborés ! Vous pouviez le dire au mois d’avril, mais nous sommes en septembre et tous les programmes sont maintenant publiés. Vous parliez peut-être des manuels scolaires…

Mme Michèle Victory. Oui !

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. …mais les programmes sont connus.

Quatre-vingts programmes ont changé pour l’ensemble des secteurs du lycée. C’est un travail considérable pour les professeurs, y compris en formation continue, et je leur en rends hommage. J’ai croisé pendant l’été beaucoup de professeurs enthousiastes. Quand vous enseignez la spécialité d’histoire-géographie, géopolitique et sciences politiques, c’est du travail mais vous aimez le faire. Au-delà de l’anecdote, les programmes sont perçus comme présentant des améliorations. Ainsi, le programme physique-chimie est salué par la quasi-totalité des professeurs concernés que je rencontre. Nous pourrons faire des enquêtes de satisfaction, d’ici quelques mois, si vous le souhaitez.

Vous avez fait état de difficultés d’orientation des élèves. Là encore, cela se disait beaucoup il y a quelques mois. Je pourrais reprendre la liste des prophéties négatives sur les emplois du temps, les orientations, la reconstitution des filières par les élèves. Ceux qui les énoncent ne sont jamais découragés d’en formuler des nouvelles, voire de renouveler les anciennes, comme nous le voyons ici. Mais elles ne se vérifient pas en cette rentrée. Par exemple, lors de notre visite de prérentrée dans le Var, avec le Premier ministre, une proviseure a dit devant tout le monde que l’exercice d’emploi du temps lui avait permis de réaliser des améliorations dans son établissement. Ce qui est possible dans certains lycées crée des modèles utiles pour les temps à venir et les rentrées futures.

On disait que les séries allaient être reconstituées. Le dossier de presse qui est à votre disposition reprend les grands chiffres de la rentrée. Vous y trouverez le détail des séries choisies par les élèves. La moitié a choisi des combinaisons qui n’existaient pas auparavant. Si vous allez de bonne foi à la rencontre des élèves de première concernés, ce que j’ai fait la semaine dernière, vous constaterez que ceux qui ont fait des combinaisons originales sont profondément heureux de la nouvelle possibilité qui leur était offerte. Leur adhésion aux apprentissages, leur désir d’apprendre, leur capacité d’approfondissement s’en trouvent, ipso facto, améliorés. Les questions qu’ils se posent sur le parcours qu’ils ont choisi font évoluer positivement notre système. On trouvera toujours le cas d’un élève qui n’a pas pu obtenir tel enseignement, mais cela reste très marginal. Dans l’immense majorité des cas, les enseignements de spécialités désirés ont été attribués et la rentrée s’est passée très convenablement.

Bien plus, même lors de rentrées ordinaires, sans réforme, il y avait plus de cas de lycées en difficulté en raison de difficultés d’emploi du temps ou de blocages de tous ordres. La réforme du lycée a été l’occasion d’une réflexion pédagogique et éducative extrêmement intéressante dont nous ne voyons que le début. Les vertus en chaîne de la réinterrogation de ce qui se passe pour un élève lycéen, au début d’une maturité d’adulte, présentent un grand intérêt pédagogique. Les chiffres globaux sont bons, les illustrations très intéressantes.

Concernant l’enseignement professionnel, vous avez avancé ce que vous appelez la réduction des horaires dans les matières générales, sur laquelle nous avons beaucoup échangé avant les vacances. Je rappellerai qu’il ne s’agit en aucun cas d’une mesure quantitative mais d’une mesure qualitative. Il y a autant d’heures/professeur qu’avant, mais nous avons voulu qu’il y ait moins d’heures/élève. Avec trente-cinq, voire trente-six heures, l’élève en lycée professionnel français était celui qui avait le plus d’heures en Europe, voire dans le monde, là où le bachelier général a trente heures. Si le nombre d’heures pour un élève en lycée professionnel était la solution miracle, cela se saurait. Nous avons souhaité mettre en œuvre la co-intervention, qui ne représente pas une économie puisqu’elle mobilise deux professeurs en même temps dans un cours. Nous avons voulu donner beaucoup plus de sens aux apprentissages, considérant que l’enseignement général prend sens par la co-intervention. Nous sommes au début d’une évolution qui est d’autant plus appréciée par de nombreux professeurs qu’elle se traduit par des demi-groupes et que les conditions d’apprentissage sont améliorées. Je vous invite à regarder ce que cela donne sur le terrain. Un grand nombre de professeurs sont satisfaits de ces conditions nouvelles dont nous pourrons faire le bilan dans un an, avec une année scolaire de recul.

Madame la députée Descamps, merci pour vos constats de terrain, dans l’esprit de ce qu’avait dit Mme la députée Dubois, sur les réouvertures à la suite des décisions annoncées par le Président de la République.

Les élèves peuvent-ils faire la sieste à l’école maternelle ? La réponse est « oui », bien sûr.

Mme Béatrice Descamps. Les informations dont disposent les enseignants sont très variables !

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Ma réponse publique contribuera à la clarification. Nous avons publié une circulaire sur l’aménagement de l’obligation d’assiduité en petite section, autrement dit sur la possibilité d’aménagements au cas par cas, pour tenir compte de l’entrée progressive éventuelle des élèves. Mais en aucun cas, cela ne doit être compris comme l’interdiction de la sieste à l’école, notamment en petite section, où son rôle est important. Si vous nous soumettez des cas particuliers, nous les examinerons.

Les élèves à besoins éducatifs particuliers posent une question considérable à laquelle je ne peux répondre trop longuement. C’est un des chantiers importants à regarder cette année, ne serait-ce que dans le prolongement de ce que nous avons dit sur l’école inclusive et sur notre capacité de discernement qualitative sur les véritables besoins des élèves. Nous devons compléter les logiques quantitatives que nous avons déjà fait évoluer par des logiques qualitatives visant à apporter une réponse adaptée à chaque élève, ce qui se traduit par un panel de solutions. Je le répète, la coopération beaucoup plus étroite entre le médico-social et le ministère de l’éducation nationale représente un pas très important.

Je veux insister sur un point dont j’ai parlé encore hier soir avec des représentants d’ATD Quart Monde, d’associations familiales et d’associations de parents d’élèves. On ne doit pas médicaliser les problèmes sociaux, pédagogiser les problèmes médicaux et médicaliser les problèmes pédagogiques. Il y a des problèmes sociaux, il y a des problèmes médicaux, il y a des problèmes pédagogiques qui sont de différentes natures. Il peut exister des articulations entre eux mais l’on doit éviter les confusions entre ces trois catégories. Nous ferons d’immenses progrès en faisant preuve de discernement sur ces enjeux et en prévoyant des moyens humains adaptés. Il y a là un grand champ de discussion avec pour lequel je suis très ouvert.

Madame la députée Muriel Ressiguier, j’ai répondu par avance à votre première question, relative aux IME.

Quant à ceux que vous avez appelés « les 100 000 élèves non scolarisés », je le dis clairement en commission après l’avoir dit dans l’hémicycle, un enfant de France est un élève de la République. Autrement dit, tout enfant doit être scolarisé. L’instruction obligatoire est d’ailleurs inscrite dans la loi. Nous avons eu de nombreux débats à ce sujet mais nous étions tous d’accord sur les principes et même sur leur formulation. On ne doit pas transiger sur ce point qui concerne désormais l’enfant dès 3 ans. Nous gagnons d’ailleurs tous à rendre étanche ce sujet par rapport aux autres. Cela ne préjuge en rien des points de vue sur les titres de séjour, les problèmes divers et variés. Il peut y avoir de grandes différences politiques sur les autres sujets, mais c’est l’intérêt de l’enfant et de la société qu’il soit scolarisé.

Il y a ensuite les constats concrets. J’ai entendu ce chiffre ces derniers jours. Je veux bien faire réaliser des études à ce sujet, mais je ne pense pas que ce chiffre soit exact. Je crois plutôt qu’il additionne des éléments très différents. Il est probable qu’on y inclue des mineurs non accompagnés, sur lesquels pèse un doute sur la réalité de leur minorité, et certains chiffres de Guyane et de Mayotte pour lesquels certains acteurs affichent le haut des fourchettes. J’ai assez d’expérience en la matière pour savoir que certains les gonflent inutilement. Qu’il y ait un problème d’élèves non scolarisés, je vous l’accorde, qu’ils doivent être scolarisés, oui, mais il ne servit à rien de gonfler les chiffres pour rendre le phénomène plus impressionnant. Je ne crois pas du tout à ce chiffre de 100 000.

Mme Muriel Ressiguier. Tant mieux si ce n’est pas le cas !

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Ne nous focalisons pas sur un chiffre mais donnons-nous les moyens de mieux les décompter de manière consensuelle. Ne lâchons pas des chiffres impressionnants, car cela ne sert pas la cause. En revanche, tout enfant présent sur le territoire doit être instruit. J’y suis très attaché, de même que je suis attaché à la situation des enfants qui ne vont pas à l’école par la volonté de leurs parents. Soyons attentifs à contrôler l’instruction à domicile. J’ai eu l’occasion de m’exprimer sur ce point. Je suis sûr que vous aurez la même vigilance sur les enjeux sociétaux et sur les enjeux sociaux.

Madame la députée Elsa Faucillon, vous avez raison de renoncer à l’arrondissement des angles.

Mme Elsa Faucillon. À l’invitation de M. Studer !

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. On ne peut donc qu’être en partie d’accord. Je ne reviendrai pas sur tout ce que vous avez dit. Peut-être votre ton peut-il aussi évoluer. Il y a des choses que vous dites que je disais déjà. La musique a pu changer, mais pas les paroles. Ce que je dis aujourd’hui était déjà présent auparavant. Par exemple, n’inventons pas rétroactivement que je n’aurais pas reconnu le problème des rémunérations, il y a quelques mois. Peut-être ne vouliez pas m’entendre, mais je l’ai toujours dit. Donc, je le redis. Les circonstances, le calendrier budgétaire, le calendrier de la réforme des retraites se prêtent à faire ce qu’on avait dit qu’on ferait, c’est-à-dire entrer dans un dialogue social approfondi et prendre les premières mesures. On peut toujours les considérer comme insuffisantes mais elles indiquent une direction. Il faut toujours se reporter à ce que j’ai dit réellement et pas à ce qu’on a dit que j’ai dit. Ainsi, le chiffre de 300 euros n’était pas une annonce, j’avais clairement dit auparavant qu’il était annuel. Comme je l’ai dit, un travail approfondi sur les rémunérations sera engagé.

Concernant le milieu pénitentiaire, je ne ferai pas une réponse immédiate. Je suis attentif à ce que fait l’éducation nationale en milieu pénitentiaire. Je suis toujours prêt à ouvrir ce dossier sous différents angles.

Mme Catherine Osson. Monsieur le ministre, dans le cadre des auditions pour mon rapport relatif à l’exécution des crédits budgétaires de la mission Enseignement scolaire, j’ai pu constater que la classe « unité localisée pour l’inclusion scolaire » (ULIS) du collège Madame de Sévigné à Roubaix ne disposait pas de moyens spécifiques pour l’achat de matériel pédagogique adapté à la diversité des besoins et des troubles des élèves en situation de handicap. Aujourd’hui, l’essentiel des aménagements, des adaptations pédagogiques et des mesures de compensation mises en œuvre se traduisent par des moyens humains supplémentaires. Les subventions accordées aux ULIS écoles, collèges ou lycées par les collectivités compétentes sont souvent équivalentes aux crédits accordés aux élèves ordinaires, et les marchés passés pour les commandes ne prennent pas en compte le besoin de matériels spécifiques.

Le ministère de l’éducation nationale entend-il mobiliser cette année des moyens spécifiques pour sensibiliser davantage les collectivités au manque de moyens pédagogiques adaptés aux ULIS ? L’ouverture d’une ligne de crédit spécifique au sein du budget du ministère pour financer l’achat de matériel pédagogique adapté est-elle envisageable pour pallier les carences des collectivités ?

Mme Brigitte Kuster. Monsieur le ministre, vous avez beaucoup parlé des professeurs, je vous parlerai d’élèves. Je voudrais vous faire part d’un courrier que j’ai reçu dans ma circonscription du 17e arrondissement de Paris, écrit par une jeune fille qui a obtenu le bac général au mois de juin et n’a depuis reçu aucune affectation Parcoursup dans une université parisienne. Elle écrit : « Cette semaine, c’est la rentrée universitaire. Mes sœurs, mes amies, mes voisins vont à l’école et ont un but pour l’année, et puis il y a moi, sans école ni emploi du temps, ni professeurs ni notes, bref, sans but ni perspective d’avenir. Je savais que le chemin allait être compliqué mais je ne me doutais pas que l’éducation nationale serait le premier semeur d’embûches ».

Parcoursup, que vous avez beaucoup évoqué, Monsieur le ministre, oriente cette jeune femme vers des universités en province. Pourtant, Paris et la région parisienne comptent le plus grand nombre de facultés en France. Il faudrait donc que sa famille, qui n’en a pas les moyens, finance son installation dans une ville qu’elle ne connaît pas et où elle n’avait jamais envisagé de se rendre. Monsieur le ministre, considérez-vous cette situation comme normale ? Combien d’élèves restent à ce jour sans affectation et quelle part d’étudiants se sont vu proposer des universités qu’ils n’avaient pas inscrites dans leurs choix Parcoursup ? Vous avez dit tout à l’heure que chaque élève doit être instruit. Pouvez-vous faire de cette parole une parole d’or ?

Mme Josette Manin. Monsieur le ministre, cette rentrée scolaire est placée sous le signe de la réussite, avec deux préoccupations majeures, l’élévation générale du niveau des élèves et l’égalité des chances. Aussi, quand je découvre que certains choix de l’éducation nationale se heurtent à ces deux ambitions, je reste dubitative. Par exemple, dans ma circonscription, au lycée de La Trinité, en juin dernier, neuf élèves inscrits en classe de première technologique ont été autorisés à redoubler, leur objectif étant de combler leurs lacunes et d’améliorer leurs notes en vue de leurs futurs vœux d’orientation sur Parcoursup. Trois jours après la rentrée scolaire, faute de place en première, ces neuf redoublants ont été inscrits d’office en classe de terminale STMG. À mon sens, il eût été plus simple de rouvrir la troisième classe de première STMG récemment supprimée, afin de décongestionner les deux classes de première restantes.

Hier encore, les syndicats d’enseignants antillo-guyanais ont fait part de difficultés dans leurs territoires respectifs : emplois du temps déséquilibrés, suppressions de postes dans le second degré et un corps enseignant en surchauffe, manuels scolaires disponibles à partir de janvier pour les lycéens guadeloupéens, intégration arbitraire d’élèves dans des classes spécifiques malgré la suppression des filières.

Monsieur le ministre, l’égalité des chances importe également aux parents d’élèves ultramarins. Pouvez-vous réaffirmer que votre ministère met tout en œuvre pour assurer la réussite éducative des élèves partout dans la République ?

Mme Sophie Mette. Au cours de cette législature, j’ai été rapporteure d’une proposition de loi en faveur de l’engagement associatif visant à intégrer au sein du parcours scolaire et du programme des collégiens et des lycéens une véritable sensibilisation à la vie associative. Monsieur le ministre, nous partageons avec vous la conviction que l’éducation nationale doit toujours soutenir le tissu associatif en s’appuyant sur les connaissances, l’expérience et le savoir-faire des professeurs. Ils sont les plus à même de transmettre à nos jeunes l’intérêt des relations qu’ils entretiennent souvent eux-mêmes avec des associations.

Si nous avons connu cet été des contestations de la part de certains membres du corps enseignant, vous l’avez vous-même déclaré à plusieurs reprises, l’heure est à l’apaisement. Profitons alors de la construction d’un projet qui nous tient tous à cœur, celui du resserrement des liens entre monde associatif et éducation, pour repartir sur des bases saines. L’investissement associatif est à la croisée des grandes luttes de notre temps, contre l’exclusion, contre le déficit de mixité sociale, contre l’ennui et le manque de sens et aussi, vous en avez parlé, pour le développement durable. Les associations proposent une offre de services de proximité chère aux publics les plus fragilisés. De par leur capacité à porter et rendre concrètes les politiques publiques, elles font partie intégrante de la construction de notre société. Faciliter l’information de nos jeunes, ainsi que leur accès au monde des associations, est ainsi capital.

Monsieur le ministre, puisque nous sommes en période de redémarrage de la vie scolaire, comment et selon quel calendrier s’organisera la mise en place de l’inscription de l’engagement associatif au sein des programmes d’éducation civique et de morale ?

M. Pierre-Yves Bournazel. Monsieur le ministre, en février dernier, avec la ministre des sports, vous avez proposé une nouvelle expérimentation consistant à réserver l’après-midi des écoliers à la pratique sportive. On le sait, une activité sportive régulière est bénéfique pour la santé et la concentration des élèves. Elle permet également d’inculquer aux élèves une certaine représentation du sport, une vision qui amène les enfants à se dépasser et surtout à respecter l’autre. Il me paraît donc important que cette expérimentation voie le jour. Paris va accueillir les Jeux olympiques et paralympiques de 2024, l’occasion pour notre capitale d’être une vitrine de la pratique sportive à la française. Nous avons tous les atouts à Paris pour être précurseurs. Monsieur le ministre, quand comptez-vous lancer cette expérimentation ?

Mme Cathy Racon-Bouzon. Monsieur le ministre, vous avez tenu à vous rendre vendredi à Marseille, et je vous en remercie, au côté de la communauté éducative profondément choquée par l’agression de deux agents spécialisés des écoles maternelles (ASEM), le matin même, dans une école primaire. Cette violence inacceptable a ravivé la question de la sécurité de l’espace scolaire et de la protection de l’école dont vous avez fait l’une de vos priorités. Pouvez-vous nous détailler les mesures annoncées lors de cette rentrée concernant la sécurisation des abords des établissements scolaires ?

Par ailleurs, cette agression met tristement en lumière l’état de certaines écoles marseillaises et l’urgence de réparer les portails, les portes, les grillages détériorés, et plus largement l’urgence d’amorcer la rénovation du parc scolaire. Vous avez annoncé que votre ministère allait se doter d’une cellule « bâti scolaire » pour épauler les collectivités locales dans l’exercice de leurs compétences. À quelle échéance cette création sera-telle effective et comment pourra-t-elle accompagner les collectivités ?

M. Pierre Cordier. Monsieur le ministre, vous avez évoqué le dédoublement des classes. Disposez-vous déjà d’un bilan ? On entend ici et là, de la part de certains enseignants, souffler le chaud et le froid au sujet de ce dédoublement dans les quartiers dits difficiles.

Ma seconde question concerne le manque d’expérience d’un certain nombre d’enseignants envoyés dans des zones d’éducation prioritaire. Il me semblerait préférable d’envoyer dans ces zones difficiles des enseignants ayant « un peu de bouteille ». Quel est votre avis sur ce sujet ?

M. Régis Juanico. Monsieur le ministre, je poserai une première série de questions brèves mais précises sur le sport et l’école.

Le nombre de postes ouverts au concours externe de professeur d’éducation physique et sportive (EPS) est passé de 800 à 650, ces deux dernières années. Qu’envisagez-vous pour 2020 ?

Vous aviez annoncé en septembre 2017 la création de 1 000 sections sportives scolaires afin de compléter les 3 000 existantes. Deux ans après, pouvez-vous faire un point d’avancement sur le nombre de sections sportives scolaires supplémentaires créées ?

Si le dossier de presse de la rentrée 2019 évoque 2 000 établissements labellisés « Génération 2024 » dans le cadre des Jeux olympiques et paralympiques, ce qui est un début encourageant traduisant un fort potentiel, en revanche le démarrage de l’appel à projets « cours le matin, sport l’après-midi » est plus poussif, avec seulement 10 000 élèves sur dix millions concernés et zéro lycéen. Quels sont les ambitions et les objectifs de montée en puissance de ce dispositif ?

Mme Céline Calvez. Monsieur le ministre, j’avais l’intention de revenir sur la voie professionnelle, mais puisque vous avez rappelé que c’était la première rentrée depuis la réforme, je reviendrai plutôt sur ce qui marque la rentrée depuis 2017, c’est-à-dire la rentrée en musique. Faire de la rentrée à l’école un moment de joie et susciter un goût pour la musique se fait dans de nombreuses écoles depuis 2017. La semaine dernière, nous l’avons vécu avec le Premier ministre et vous-même au sein d’un établissement de zone d’éducation prioritaire, à Clichy. Quand on les entend et quand on voit la joie des enfants participants, on souhaite que cela puisse durer toute l’année. La musique est un art mais il en existe d’autres. L’année dernière, vous avez présenté le plan d’action « À l’école des arts et de la culture ». Quel est le pouvoir d’impulsion d’une rentrée en musique et d’une rentrée des arts ? Comment se prolonge-t-elle tout au long de l’année, à l’école primaire, au collège ou au lycée ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Mme la députée Osson évoque un sujet commun à dans d’autres questions. Chaque fois qu’il y a compétence des collectivités locales, il peut y avoir des différences d’un territoire à l’autre et il convient de procéder à un examen au cas par cas. Prévoir un programme d’aide aux collectivités locales pour un sujet concernant les compétences et le budget des collectivités ouvrirait la boîte de Pandore. En revanche, il est possible de regarder localement la situation et d’envisager d’accompagner la collectivité, ce que nous faisons pour l’investissement avec l’aide des préfets, voire à partir de crédits de l’éducation nationale, mais c’est toujours une réponse au cas par cas et pas d’ordre général.

L’équipement est un enjeu global qui relève des compétences des collectivités locales, de l’éducation nationale et des administrations de santé. En matière d’investissement dans le bâti scolaire, d’importantes améliorations sont apportées par les collectivités pour tenir compte des équipements nécessaires aux classes ULIS. Le rapprochement avec le monde médico-social se traduira certainement par des améliorations en termes d’équipement.

Madame la députée Kuster, votre question relative à Parcoursup me fera dériver vers des sujets d’enseignement supérieur, compétence partagée avec Frédérique Vidal. Sur la seconde partie de votre question, au demeurant intéressante, je serai donc laconique.

Le fait que la personne que vous avez citée soit titulaire d’un baccalauréat lui ouvre droit à une inscription à l’université. Comme vous l’avez dit, le système est organisé pour lui faire une proposition. Aucun bachelier ne doit se trouver sans proposition. En cette période de l’année, il peut arriver que les tout derniers considèrent recevoir des propositions qui ne leur conviennent pas, mais il y a plus de places que de candidats et il doit être possible de bien répartir tout le monde. Le cas que vous évoquez a vocation à être traité par la commission rectorale dédiée. La personne peut s’adresser à cette commission afin d’insister pour obtenir une proposition en Île-de-France.

Par ailleurs, cette particularité française qu’est la forte concentration des établissements à Paris et en Île-de-France, qui vaut aussi pour les lycées professionnels, doit être regardée de près. Lors de débats au sujet de Parcoursup l’année précédente, on craignait que les élèves de l’académie de Créteil et de l’académie de Versailles accèdent moins aux universités de Paris intra-muros. Quand on fait le bilan de Parcoursup, et nous le ferons dans quelques semaines, on dénombre plus d’élèves de ces deux académies accédant à des établissements dans Paris et en Île-de-France. Peut-être ne faut-il pas se réjouir complètement d’un tel phénomène. Paris n’a pas vocation à universitariser toute la France et on peut souhaiter le développement de pôles sur l’ensemble du territoire. C’est d’ailleurs ce qui se passe pour des pays bien placés dans des classements comme celui de Shanghai. Toutes les universités ne sont pas à New York, Washington ou Los Angeles et les meilleures sont mêmes ailleurs. On peut souhaiter une bonne répartition des étudiants sur le territoire, laquelle doit s’accompagner d’une politique de bourses, comme celle engagée par Frédérique Vidal, et d’une politique de logement pour étudiants.

Cela étant, s’agissant du cas particulier, la commission rectorale peut apporter une réponse satisfaisante.

Mme Brigitte Kuster. Il est incongru d’envoyer une Parisienne en province !

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Vous connaîtrez prochainement les chiffres globaux de Parcoursup montrant que, d’année en année, moins d’élèves sont sans solution. Leur nombre est aujourd’hui de 2 600, inférieur à celui de l’année dernière, à la même époque. Certes, l’objectif est de tomber à zéro, mais même en comparaison du temps d’APB, 2 600 est un chiffre très faible.

Madame la députée Manin, vous m’interrogez sur l’égalité des chances dans les
Outre-mer et me demandez de porter attention aux territoires ultramarins. Nous savons qu’il existe de grandes différences entre la Guadeloupe et la Martinique, d’une part, et la Guyane, d’autre part, mais on dénombre globalement 1 230 élèves de moins dans le premier degré et 872 dans le second degré. Les chiffres sont encore plus négatifs pour les Antilles, tandis que la démographie est forte dans la Guyane. Au total, les taux d’encadrement sont supérieurs en Martinique, Guadeloupe et Guyane qu’en métropole. De plus, l’accès des bacheliers ultramarins à l’enseignement supérieur est en hausse, avec des améliorations de l’offre de formation dans l’enseignement supérieur, comme c’est le cas en Guyane avec le nouveau campus.

Nous conduisons une politique volontariste en faveur de l’égalité des chances outre-mer, avec des territoires qui bénéficient plus que la moyenne nationale du dédoublement des classes. Les statistiques s’améliorent pour cette rentrée, ainsi que les données budgétaires. Mais c’est un point que nous pourrons regarder par la suite de façon plus détaillée.

Madame la députée Sophie Mette, avec Gabriel Attal, nous sommes très attentifs à la vie associative, en lien avec ce que je disais à propos de l’environnement, qui fournit une grande occasion d’engagement associatif de la part des élèves.

La reconnaissance de l’engagement associatif dans le parcours des élèves me rappelle une question posée par M. le député Juanico en commission des finances. Dans le prolongement de ce que j’avais alors répondu, le comité de suivi de la réforme du baccalauréat sera l’instance idéale pour concrétiser des points sur lesquels je m’étais exprimé. La reconnaissance de l’engagement dans le cadre du parcours général de l’élève jusqu’au baccalauréat fait typiquement partie des sujets qui sont sur la table. Il existe un relatif consensus des acteurs pour voir cet engagement reconnu d’une manière adaptée. On peut s’inspirer de l’expérience internationale en la matière. J’abonderai fortement dans votre sens, oui, nous avons de nouveaux pas à faire vers le développement du sens de l’intérêt général et de l’altruisme chez les élèves, y compris au titre de la reconnaissance de l’engagement.

Monsieur le député Bournazel, nous tenons beaucoup au projet « Cours le matin, sport l’après-midi ». Il a donné lieu à un appel à projets dont nous n’avons pas encore les chiffres stabilisés. M. Juanico a parlé de 10 000 élèves. Je n’ai pas moi-même ce chiffre, mais j’en prends acte.

M. Régis Juanico. Il figure dans le dossier de presse.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Ce chiffre n’est pas stabilisé, car nous attendons le retour de certains appels à projets. J’espère qu’il sera supérieur à 10 000 élèves.

Nous avons de premiers très beaux exemples pour aller plus loin à Paris. Dans l’Aveyron, en zone de montagne, une école rurale et un collège ont obtenu ensemble le label « Génération 2024 » et sont en train de s’organiser avec des sections en équitation. Cet exemple a le mérite d’être rural, mais d’autres très beaux projets se mettent en place à l’occasion de cette rentrée. Il est un peu tôt pour faire un bilan complet, mais le projet est enclenché. On peut aller plus loin. Nous atteindrons la maturité sur plusieurs rentrées. Ce projet s’inscrit dans la dynamique Paris 2024 que nous avons souhaité impulser avec les organisateurs des JO et Roxana Maracineanu.

Madame la députée Racon-Bouzon, merci pour ce que vous avez dit à propos de Marseille. Cet événement qui nous a tous choqués a permis de mesurer l’efficacité des réactions et la cohésion de la communauté éducative. C’est l’aspect positif de cet événement négatif, et cela renvoie à vos deux questions.

J’ai brièvement parlé dans l’hémicycle du plan sécurité, que j’ai explicité ces derniers jours à l’occasion de la conférence de rentrée, mais vous souhaitez approfondir le sujet de l’abord des établissements, traité avec le ministère de l’intérieur et avec le ministère de la justice. La volonté d’une présence policière accrue dans les quartiers de reconquête républicaine est souhaitée dans le cadre des mesures générales et va s’accentuer aux abords des établissements. Nous allons mettre un accent tout particulier, dans des conditions qui seront précisées dans les prochains jours, sur le trafic de drogue. Il s’agit de repérer les établissements rencontrant le plus de problèmes dans leurs alentours et de faire en sorte que la lutte générale contre le trafic de drogue et le plan stups du ministre de l’intérieur aient un impact sur les établissements. La drogue fait partie des sujets à traiter de manière volontariste. J’ai en tête l’initiative prise par des parents d’élèves à Saint-Denis, à la fin de la dernière année scolaire. Il revient à la police d’exercer sa présence pour lutter contre le trafic de drogue. C’est ce qui se passe sur le territoire concerné, en cette rentrée.

Le bâti scolaire renvoie à des enjeux de sécurité et à d’autres, comme l’environnement. La cellule « bâti scolaire » que j’avais annoncée a été créée. Le ministère est donc désormais consultable sur les enjeux de bâti scolaire par toute collectivité locale qui le souhaite. Nous avons vocation à accompagner, souvent en partenariat avec la Caisse des dépôts, les collectivités locales rencontrant un problème spécifique. Cela va de pair avec le conseil que chaque rectorat est capable de donner en matière de sécurité, notamment pour le bilan de sécurité du bâti scolaire qui doit désormais être systématique pour toute école ou tout établissement de France.

M. le député Cordier a souhaité connaître le bilan du dédoublement. C’est forcément un bilan intermédiaire, puisque nous avons pu mesurer, vers les mois de janvier et février de l’année dernière, les premiers effets de la première année uniquement sur les CP en REP +. Les bilans que nous ferons d’ici quelques mois seront plus robustes. Cela étant, il y a d’abord ce qui relève du ressenti, et les professeurs et les parents d’élèves concernés se satisfont quasi-unanimement de la mesure. Ensuite, il y a l’évaluation en tant que telle. Nous n’avons que celle de l’année 2017-2018 pour les REP +, donc pour 60 000 élèves. Cette année, notre appréciation portera sur un champ plus large. Ces évaluations ont révélé de premiers progrès importants qui ne sont qu’une moyenne. C’est un début de résultats, lesquels ne sont pas encore à maturité. Au-delà de cette moyenne, dans certains endroits, des réussites exceptionnelles ont été obtenues, dans d’autres, elles étaient en deçà des attentes.

Cela montre que pour être efficace, cette mesure importante doit s’accompagner d’un volontarisme pédagogique et d’une évolution des pratiques pédagogiques. Tel a bien été le cas, y compris en termes de formation continue. Cela apparaît le plus clairement là où ont eu lieu des expérimentations volontaristes. L’exemple type est celui d’Alain Bentolila qui, dans l’académie d’Amiens, a mené, en REP +, des expérimentations qui, dans certains secteurs, ont conduit à voir des élèves obtenir des résultats comparables, voire supérieurs, à ceux d’élèves hors REP, ce qui n’était jamais arrivé nulle part. Comme pour une découverte scientifique, quand on obtient un premier résultat, on ne dit pas « Eurêka ! », on relève un résultat fort dont on attend la vérification. La situation, extrêmement encourageante, est en partie hétérogène, en sorte qu’il faut rechercher une contagion des expériences positives. On assiste à un enclenchement pédagogique. Le site internet classe-a-12.beta.gouv.fr/, auquel tout le monde peut accéder, propose des échanges de bonnes pratiques et une animation pédagogique.

Vous avez évoqué le manque d’expérience de certains enseignants en REP +, nommés dans des secteurs difficiles, problème régulièrement soulevé, à juste titre. Il faut bien nommer le problème. Il ne procède pas de la présence de jeunes enseignants en REP +, car s’il n’y en avait pas, ce serait un problème. Un jeune bien formé, motivé et heureux d’y être peut faire un travail excellentissime en REP +. La question, c’est le respect de la logique d’équipe. La mixité des sexes et des générations est toujours souhaitable dans tout travail d’équipe. Nous devons viser, y compris dans l’évolution des règles de mutation, à la garantir.

Vient se greffer un autre sujet. La classe de CP, notamment dans le cadre du dédoublement des classes de CP et de CE1, est particulière et il est partout souhaitable, a fortiori en REP +, d’avoir un non débutant, quelqu’un disposant d’une expérience d’au moins trois ans. C’est la règle que nous avons fixée dans le dédoublement des classes et que nous avons réussi à respecter à 90 ou 95 %. Nous allons continuer pour aller vers 100 % de professeurs de CP, partout en France, a fortiori en REP et en REP +, ayant de l’expérience. Nous nous donnons les moyens de l’attractivité, aussi bien pour ces professeurs de CP que pour l’ensemble des intervenants, à l’école et au collège, en REP +. La prime joue un rôle très important. Nous sommes désormais beaucoup plus attractifs pour des professeurs expérimentés.

Il est aussi demandé aux rectorats de prévoir plus de postes à profil en REP +, afin d’attirer des personnes expérimentées. Il existe parfois des oppositions théoriques à l’idée du poste à profil. Pour ma part, je suis favorable à ce qu’on puisse le faire en réseau d’éducation prioritaire, parce qu’à la fin, on favorise la justice sociale en améliorant l’enseignement en REP + mais aussi l’épanouissement des personnels, les personnes concernées étant heureuses d’accomplir cette mission. Il faut donc lutter contre certains clichés. Des enseignants sont heureux d’enseigner en REP +. Ce n’est pas le cas de tout le monde. Il faut réaliser une adéquation entre ceux qui le désirent et ceux qui sont affectés. Ces sujets se sont améliorés dans les deux dernières années avec les mesures que je viens d’indiquer mais des progrès restent à réaliser. Cet enjeu figure naturellement parmi les sujets dont nous discuterons dans les prochains mois avec les organisations syndicales, à l’occasion des travaux sur les rémunérations. Cela doit être l’occasion de faire d’une pierre plusieurs coups pour l’amélioration des conditions de travail et du service public rendu pour la réussite des élèves.

Monsieur le député Juanico, je n’ai pas les chiffres sous les yeux, mais nous nous sommes engagés à la création de ces mille sections sportives et nous sommes en chemin. Si vous le souhaitez, nous pourrons faire un bilan spécifique au-delà de cette commission. Nous y travaillons régulièrement avec le ministère des sports et avec le comité national olympique. Bien entendu, l’objectif est d’y parvenir à l’horizon 2024. Plus le temps passera et plus nous animerons fortement Paris 2024. Cela commencera par la journée du sport, à la fin du mois de septembre, qui sera l’occasion d’inciter les établissements et les élèves à entrer dans toutes les dynamiques, aussi bien celle de l’union nationale du sport scolaires (UNSS) que des sections sportives ou de l’éducation physique et sportive.

Madame la députée Calvez, la rentrée en musique est progressivement entrée dans les habitudes, tout au long des dernières années, dans chaque école, chaque collège et chaque lycée. Tous ceux qui ont pratiqué cette rentrée en musique en sont heureux. Des mesures arrivent à maturité, notamment la systématicité des chorales dans les collèges et dans l’enseignement primaire et la constitution d’un chœur de l’éducation nationale. C’est un peu la matrice d’initiatives de ce type à l’échelle régionale et à l’échelle locale pour former des chefs de chœur dans le cadre de notre partenariat avec France Télévisions et avec Radio France. À cela s’ajoute une application dénommée « Vox, ma chorale interactive », pour la formation des chefs de chœur dans l’éducation nationale.

En cette année scolaire 2019-2020, comme nous l’avions programmé dès le début, la coopération se développe avec le ministère de la culture, de sorte que ses différentes ressources, comme les conservatoires, soient davantage au service des établissements dans le cadre scolaire ou périscolaire, donc dans le cadre du Plan mercredi qui lui aussi s’approfondit. J’ai rencontré récemment les représentants de l’association des professeurs d’éducation musicale. Il serait trop long de détailler les sujets que nous avons passés en revue mais j’ai noté leur souhait de dépasser des obstacles au renforcement de la présence de la musique à l’école et leur enthousiasme quant au positionnement de la musique au centre de l’école, ce qui est très nouveau et plein de vertus. Je le redis publiquement et solennellement, si nous réussissons à faire en sorte que la musique donne le ton de l’année scolaire avec la rentrée en musique et le ton de chaque journée scolaire dans chaque école, chaque collège et chaque lycée, ce sera tout sauf anecdotique, cela changera les choses pour ceux qui le feront. Ceux qui le font déjà s’en trouvent très bien. Cela dépend pour beaucoup du projet éducatif de chaque endroit et des initiatives locales, mais l’impulsion des deux ministères est totale.

Mme Fabienne Colboc. Vous le savez, l’accueil des enfants des Gens du voyage est un souci permanent pour les directeurs académiques des services de l’éducation nationale (DASEN) et les enseignants, en particulier les enseignants de familles itinérantes et voyageuses. En Indre-et-Loire, ils font un travail remarquable pour garantir cette scolarisation dans la durée. Il est évident que ces enfants doivent être associés à la vie des écoles pour leur apprentissage et leur réussite, ainsi que pour une meilleure connaissance de soi et des autres. Plus cela se fait tôt, mieux c’est.

Aussi, je voudrais savoir quels moyens d’observation et d’évaluation sont mis en place pour s’assurer que l’obligation à 3 ans s’applique également à ces enfants. On peut se féliciter de l’amélioration de la scolarisation jusqu’en CM2 pour ce public, mais elle est très faible à partie de la sixième. Quelles actions sont mises en place ou pourraient l’être pour s’assurer de leur scolarisation sur la durée ?

Mme Sylvie Tolmont. Monsieur le ministre, je me permettrai d’évoquer ici une situation locale difficile, catastrophique même, qui éclaire sur les retombées de la politique nationale et sur les moyens affectés par votre ministère. Depuis hier matin, dans ma circonscription, au lycée André Malraux d’Allonnes, une ville de la périphérie du Mans, 100 % du personnel enseignant est en grève, les cours ont été annulés et les élèves renvoyés chez eux. Est en cause l’affectation d’un trente-sixième élève dans une classe de terminale SMTG. Les enseignants, qui souhaitent vous alerter et nous alerter sur la dégradation des conditions d’apprentissage pour les élèves comme sur la dégradation de leurs propres conditions de travail, demandent l’ouverture d’une classe ou, du moins, une division. En réponse, la directrice des services de l’éducation nationale, qui semble ne pas disposer d’une grande marge de manœuvre, propose seulement quelques heures d’enseignement supplémentaires pour dédoubler les cours. Selon mes informations, qui restent à vérifier, d’autres élèves seraient en attente d’affectation. Il reste des places dans certains établissements mais ils sont à quarante kilomètres du Mans.

Monsieur le ministre, sur un cas comme celui-ci, êtes-vous prêt à octroyer les moyens nécessaires et suffisants pour répondre aux effectifs ou est-ce que ce sont encore les enseignants qui devront faire plus d’heures supplémentaires ?

Mme Émilie Bonnivard. Monsieur le ministre, ma question est relative à la prise en compte du dédoublement des classes dans les zones prioritaires dans le calcul des effectifs enseignants nécessaires dans les départements. Si nous sommes favorables à ce dédoublement pour certains territoires en difficulté, cela ne doit pas se traduire par une augmentation des effectifs d’élèves dans les autres classes, ailleurs sur le territoire. Or c’est un peu ce qui se produit en Savoie, où le dédoublement des classes représente un besoin de six postes supplémentaires qui ont été pris sur le contingent d’effectif départemental. Le défaut de dotation en effectif enseignant couvrant la totalité du besoin créé par le dédoublement implique mécaniquement des classes plus nombreuses ailleurs et moins de marge de manœuvre pour les directeurs d’académie qui font de leur mieux. On arrive parfois à trente élèves en classe de maternelle, comme c’est le cas à Saint-Jean-de-Maurienne, dans les écoles Aristide Briand et Les Clapeys. Le DASEN, qui a donc peu de marge de manœuvre, a une lecture fine et s’efforce de répondre à tous les besoins. Pouvez-vous nous éclairer sur ce point ?

Par ailleurs, le coût des nouveaux manuels scolaires consécutifs à la réforme du lycée représente une dépense importante pour les familles, près de 250 euros. Certaines régions ont assumé la gratuité en prenant en charge la totalité du coût des manuels scolaires. Ce n’est pas le cas de toutes. Entendez-vous prendre une mesure pour soulager les familles de cette charge supplémentaire ?

Mme Anne-Christine Lang. Ma question porte sur la réforme du lycée. À cet égard, je reviendrai sur la place des mathématiques dans la nouvelle organisation. Si je me réjouis de l’opportunité offerte aux lycéens qui le souhaitent de suivre un enseignement exigeant dans cette matière tout en faisant en sorte que l’ensemble des élèves puissent continuer à faire des maths, je n’ignore pas les difficultés rencontrées par certains lycéens sur le terrain. En effet, plus de la moitié des élèves ont choisi l’enseignement de spécialités, ce qui laisse craindre une certaine hétérogénéité du niveau au sein des classes. Quant à l’enseignement du tronc commun, ce sont à la fois des professeurs de sciences physique, de SVT et de mathématiques qui en ont la charge. À mes yeux, c’est une excellente chose, puisque cela favorise l’interdisciplinarité, mais force est de constater que cela a pu soulever, çà et là, quelques problèmes.

Quels premiers retours avez-vous eus concernant la mise en place de ces nouveaux enseignements ? Je parle de ce qu’on appelle « les maths citoyennes ». Quelles sont les pistes d’amélioration envisageables dans un contexte de pénurie de recrutement des professeurs dans les matières scientifiques ?

Mme Virginie Duby-Muller. Monsieur le ministre, vous avez évoqué dans votre présentation des revalorisations salariales pour tous les enseignants et des mesures spécifiques, notamment des primes en REP +. Si ces annonces vont dans le bon sens, elles ne sont pas suffisantes. Cet été, sur RTL, vous avez reconnu les difficiles conditions des enseignants qui n’arrivent pas à vivre de leur salaire dans certaines zones géographiques, en citant Paris et Annecy. En Haute-Savoie, le coût de la vie est en effet plus élevé qu’ailleurs en raison de la proximité de la Suisse, ce qui pénalise nos administrations qui souffrent d’un important
turn-over. C’est évidemment le cas dans l’éducation nationale, puisque ce turn-over fragilise les équipes pédagogiques. Avez-vous des mesures concrètes à proposer ?

Je voulais également vous interpeller sur un cas précis. Au lycée Charles Poncet, à Cluses, les enseignants ont fait grève à cause de dysfonctionnements dans les emplois du temps des élèves et des enseignants. Comment, en 2019, peut-on connaître encore ce genre de désagrément lors de la rentrée scolaire, obligeant à renvoyer chez eux des élèves livrés à
eux-mêmes, alors que les logiciels et autres outils informatiques devraient permettre à la rentrée de s’effectuer dans de bonnes conditions ?

Mme Céline Rilhac. Monsieur le ministre, avant de vous interroger, je tiens à féliciter les recteurs, les directeurs académiques, les DASEN, les inspecteurs, les chefs d’établissement, les directeurs et directrices d’école et les enseignants qui ont fait de cette rentrée 2019 une réussite, particulièrement dans ma circonscription du Val-d’Oise.

Vous l’avez rappelé, l’école doit pleinement relever les défis de notre époque, ceux de l’école inclusive et de l’attractivité du métier de l’éducation. Pour ma part, je souhaite revenir sur le bien-être au travail des personnels, plus particulièrement des directeurs d’école, sujet qui, vous le savez, me tient à cœur. Ces directeurs, ces directrices sont d’abord des professeurs qui assument des responsabilités de direction en plus de leur fonction d’enseignant, sans réel pouvoir de décision, sans réels moyens d’action. Des tentatives de réforme visant à donner à l’école et à sa direction un statut ont déjà été entreprises. Cependant, cette question se pose avec de plus en plus d’insistance, comme j’ai eu l’occasion encore de le constater cette rentrée, lors de riches échanges avec les équipes éducatives que j’ai rencontrées. Aussi, Monsieur le ministre, il me semble indispensable de poursuivre la réflexion sur les pistes d’amélioration de la situation des directeurs et des directrices d’école afin que cette problématique puisse être enfin résolue de manière pérenne.

M. Stéphane Testé. Monsieur le ministre, après le dédoublement réussi des classes de CP puis de CE1 en REP + et REP, vous avez souhaité expérimenter le dédoublement des classes de grandes sections de maternelle dans les zones prioritaires dès cette rentrée 2019. Pouvez-vous d’abord nous indiquer combien de territoires sont concernés par cette expérimentation et quels critères ont été retenus ? Pouvez-vous ensuite nous préciser si cette mesure sera étendue à l’ensemble des maternelles REP + et REP à la rentrée 2020 ou de manière échelonnée ? Enfin, le dédoublement des classes de CP et CE1 en Seine-Saint-Denis n’a pu être réalisé, contrairement au reste du territoire, qu’à hauteur de 80 %, essentiellement pour des problèmes de locaux. Pouvez-vous nous rassurer à ce sujet pour une complète réalisation de ce dispositif à la prochaine rentrée ?

Mme Valérie Bazin-Malgras. Monsieur le ministre, rentrée scolaire rime avec retour des devoirs à la maison. Il existe actuellement, Dieu merci, le dispositif « Devoirs faits ». Malheureusement, dans ma circonscription, en zone rurale, j’ai pu constater que dans certains collèges, les professeurs ne sont pas suffisamment volontaires, de sorte que le proviseur est obligé d’intégrer des heures de « Devoirs faits » dans l’emploi du temps. Cela pose un problème pour un enfant, qui est en cours, puis fait ses devoirs, puis retourne en cours. Il n’y a pas suffisamment de professeurs volontaires ni de bénévoles pour pallier ce problème. C’est une bonne mesure car, souvent, en arrivant à la maison, les enfants n’ont pas envie de faire les devoirs et les parents ne sont pas disponibles. Quelle disposition entendez-vous prendre afin que le dispositif « Devoirs faits » fonctionne bien ?

Mme Florence Granjus. Monsieur le ministre, la loi pour une école de la confiance prévoit la nomination d’élèves ambassadeurs délégués à la lutte contre le harcèlement à l’école. Comment ont-ils été mis en place pour cette rentrée scolaire ? Combien sont-ils dans la France entière ? Quelles mesures ont été mises en place ou sont envisagées pour les former et en faire des relais efficaces contre le harcèlement ?

Le harcèlement peut se poursuivre via internet et le téléphone portable, au-delà des portes du collège et du lycée. Cela est facilité par le fait que plus de 85 % des collégiens et des lycéens détiennent un téléphone portable et que le temps passé sur le web est également conséquent : plus de quinze heures par semaine. Une loi sur le cyberharcèlement a été votée. Quelles réflexions sont en cours pour que le corps enseignant et les élèves ambassadeurs délégués se l’approprient ?

M. Pierre Henriet. Monsieur le ministre, je souhaiterais revenir sur votre volonté de poursuite des réformes de l’éducation prioritaire. Après la mise en place du dédoublement des classes de CP et de CE1 en REP et REP +, en fin d’année dernière, vous avez souhaité aller plus loin pour combattre les difficultés structurelles liées au zonage territorial. Vous l’avez dit vous-même, les moyens considérables consacrés par la France à son éducation prioritaire doivent être beaucoup plus efficaces dans le futur. Vous avez demandé un rapport sur ce sujet à Pierre Mathiot, qui avait conduit la concertation du baccalauréat, et à l’inspectrice générale Ariane Azéma. Il y a notamment des enjeux pour faire reconnaître certains territoires ruraux dans ces réseaux prioritaires. On peut penser, par exemple, aux territoires en zone de revitalisation rurale portée par le ministère de la cohésion des territoires. Avez-vous des éléments complémentaires sur l’avancée de ce rapport et sur les suites qui y seront données ?

M. Dino Cinieri. Merci, Monsieur le président, de m’accueillir dans votre commission. Je vous prie de bien vouloir excuser mon retard dû à la participation à deux réunions, l’une pour l’examen du projet de loi bioéthique, l’autre dans le cadre de la délégation au droit des femmes. Je crains donc que ma question n’ait déjà été posée.

Monsieur le ministre, l’inclusion scolaire des enfants en situation de handicap est pour vous comme pour nous tous une priorité. Vous vous y êtes engagé. À plusieurs reprises, nous en avons eu la certitude. Vous nous avez donné les chiffres du ministère mais la réalité est moins évidente dans les territoires. Vous nous dites que 25 000 enfants en situation de handicap ont rejoint l’école en cette rentrée, mais dans les établissements scolaires, parents et accompagnants dénoncent des moyens insuffisants. Cette année encore, de nombreuses familles s’inquiètent, car leurs enfants n’ont pas d’AESH pour l’aide à l’école.

À partir de quand les psychologues, kinés ou orthophonistes pourront-ils également exercer au sein des établissements scolaires ? C’est important pour les enfants qui se sentiront soutenus par toute la communauté médicale et éducative. Cela facilitera aussi la vie des parents et des enseignants.

De même, il semblerait que les conditions d’accès des chiens d’assistance dans les écoles fassent prochainement l’objet d’une réunion interministérielle. En effet, les services de l’État et les Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) semblent avoir des difficultés à harmoniser leurs règles, ce qui pénalise les enfants atteints de troubles autistiques, de trisomie 21 ou de polyhandicap. Monsieur le ministre, quelle est votre position sur cette importante question ?

M. Alexandre Freschi. Nous le savons, la justice sociale est l’un des piliers de la loi pour une école de la confiance. Nous savons aussi que toute l’action du ministère est tournée vers la justice territoriale. C’est le cas au travers du dédoublement des classes en REP et REP +, comme l’a rappelé mon collègue Pierre Henriet.

Je m’intéresse à l’aspect ruralité. Vous avez mis en place, en juin 2018, le programme « Écoles numériques innovantes et ruralité », qui a permis à presque 4 000 communes de bénéficier d’un équipement numérique récent. Le fonds était doté de 20 millions d’euros, ce qui représente un véritable engagement du ministère. On sait, par exemple, que cette année, le nombre d’enseignants dans les zones rurales augmente alors que la démographie diminue. Un véritable effort est donc fourni par le ministère pour prendre en compte cette ruralité. Quel bilan faites-vous des conventions de ruralité ? Qu’en attendez-vous précisément ? Dans quelle mesure ce dispositif peut-il être amélioré ?

Mme Sandrine Mörch. En Haute-Garonne, j’ai plutôt vécu une rentrée galvanisante compte tenu de la motivation et l’engagement des enseignants, très mobilisés derrière chaque enfant et incluant de plus en plus les familles, notamment grâce à la rentrée en musique, qui n’a rien d’anecdotique. Les enfants ne pleurent plus en maternelle, les lycéens pros sont bouche bée devant l’Orchestre du Capitole et les parents chantent. C’est une introduction à prolonger toute l’année.

Cela rend d’autant plus poignante cette non-rentrée pour tous les enfants qui ne sont pas scolarisés. En tant que parents, nous n’avons absolument pas conscience que 10 000 enfants vivent en squat ou dans des bidonvilles, que 10 000 enfants ou jeunes vivent dans des hôtels sociaux, ce qui est mortifère, et que 25 000 mineurs ou jeunes majeurs isolés sont privés de scolarité et voient leur potentiel considérable cassé. Ce n’est peut-être pas du ressort de l’éducation nationale mais cela concerne tout de même la jeunesse. À ceux-là s’ajoutent les enfants de familles itinérantes plus difficiles à dénombrer. Nous savons que des conditions d’inscriptions deviennent discriminatoires à cause de l’impact de l’instabilité du lieu de vie. Le harcèlement raciste, notamment auprès des Roms, est une cause de décrochage en classe, sans parler de la grande précarité.

Plutôt que de poser qu’une question, je ferai une proposition. Ne pourrait-on créer une mission d’information pour approfondir la connaissance du sujet à partir de données publiques fiables ? Qu’est-ce qui entrave l’accès à l’éducation de tous ces enfants ? À Toulouse, un réfugié syrien vivant en squat a obtenu le bac et est aujourd’hui en médecine. Tout n’est donc pas perdu.

M. Bertrand Bouyx. Monsieur le ministre, j’avais eu l’occasion, en Normandie, de visiter une « école du socle ». Pourriez-vous faire le point sur ce dispositif expérimental. Entendez-vous la généraliser ? Je souhaite également vous interroger sur la structure de pilotage. Comment peut-on la renforcer et la rendre attractive ? Les professeurs qui s’engagent sur ces dispositifs sont très impliqués et très motivés.

M. Yannick Kerlogot. Je serai bref puisque mon collègue Pierre Henriet vous a déjà interrogé sur la carte d’éducation prioritaire. Sa révision était prévue en 2019 et nous avons acté qu’elle aurait lieu en 2020. Pourriez-vous nous indiquer si des orientations sont déjà prévues pour la réécriture des critères et l’intégration de l’enjeu de l’hyper-ruralité ?

M. le président Bruno Studer. Nous avons ainsi terminé la liste des questions des députés inscrits.

Mme Michèle Victory. Monsieur le ministre, vous m’avez dit poliment et gentiment que je radotais. Je regrette que vous considériez ma position comme dogmatique, car c’est absolument faux. J’étais lundi dernier encore au lycée professionnel de Tain-l’Hermitage et au lycée professionnel industriel de Tournon-sur-Rhône où les enseignants m’ont dit que leur manque de temps pour travailler sur les fondamentaux avec leurs élèves représentait pour eux une difficulté majeure. Je conçois que l’on puisse parfois travailler en co-animation, mais faire ensemble des maths et de l’électricité en classe de CAP n’est pas facile. Si on veut garantir l’égalité des chances, nos jeunes de lycée professionnel méritent toute l’attention que vous dites leur porter. Je vous crois, mais je la leur porte aussi. Ma position n’est absolument pas celle de la critique systématique et il m’ennuierait beaucoup que vous le pensiez.

Enfin, puisque vous souhaitez de faire de la musique le point central de la vie de l’élève, je serais ravie d’être associée à des projets car c’est pour moi essentiel. Je chante depuis toujours et la musique est une richesse capable de résoudre bon nombre de situations conflictuelles dans les apprentissages. Sur de tels sujets, vous nous retrouverez très positivement.

M. Régis Juanico. J’évoquerai deux apprentissages fondamentaux liés aux activités physiques et sportives, savoir nager et savoir rouler.

Le projet de loi d’orientation des mobilités en cours d’examen devrait prévoir un apprentissage à la pratique autonome et sécurisée du vélo dans l’espace public, assorti de la délivrance d’une attestation scolaire de première éducation à la route. Il y a encore des incertitudes quant à son caractère facultatif ou obligatoire et sur le moment de sa délivrance. Aura-t-elle bien lieu à l’entrée en sixième ? Quelle est votre position ? C’est important au regard de l’équivalence au savoir nager.

Quant au savoir-nager, vous avez lancé avec la ministre des sports un plan « aisance aquatique » en direction des 3 à 6 ans. Ce plan s’adressant plutôt aux acteurs hors école, collectivités et associations, pouvez-vous nous rassurer sur le maintien dans le code de l’éducation de l’objectif d’une attestation de savoir-nager pour le plus grand nombre à l’entrée en sixième ?

Mme Béatrice Descamps. Je voulais évoquer les directions d’école, mais cela a été fait par notre collègue que je remercie, car le sujet est essentiel et urgent.

Je reviendrai sur l’instruction obligatoire à 3 ans et plus précisément sur les compensations financières aux communes. Celles-ci doivent intervenir en septembre 2020 au regard de l’augmentation de la dépense sur l’année scolaire 2019-2020. Vos services ont-ils été saisis de problèmes ou de questions à ce sujet ? Disposent-ils déjà d’une évaluation de la dépense pour les finances publiques ?

 M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Madame la députée Colboc, l’éducation nationale n’est pas inerte face au sujet de la scolarisation des Roms, elle est même depuis longtemps organisée pour cela, ce qui me permettra de répondre par avance à d’autres questions.

Le sujet n’est pas la mobilisation de l’éducation nationale ni même l’existence de compétences au sein de l’éducation nationale, mais la capacité à convaincre les familles, à s’assurer de la stabilité de la scolarisation quand la famille bouge, ce qui renvoie à des problèmes complexes et interministériels, impliquant aussi les collectivités locales.

Parmi les éléments qui valent pour les Roms mais aussi pour d’autres catégories d’enfants éloignés de l’école figure ce que nous avons inscrit dans la loi relative à la protection de l’enfance. L’article 12 prévoit l’inscription d’office par l’inspecteur d’académie, et nous allons maintenant l’appliquer, de même que l’article 16, relatif à la liste des pièces nécessaires à l’inscription. Cela nécessitera un travail réglementaire de précision des modalités, qui sera fait.

Madame la députée Mörch, du travail peut être envisagé entre l’Assemblée nationale et le ministère de l’éducation nationale pour engager de nouvelles initiatives. Je pense notamment à ce qui peut être fait dans le cadre du plan « Internat pour le XXIe siècle ». La meilleure des réponses est parfois l’assentiment des familles. Le sujet juridique est en passe de connaître certaines améliorations, le sujet organisationnel nécessite la prise de nouvelles initiatives. Sur un tel sujet, nous devons nous fixer des objectifs. Il est désolant de constater qu’en dépit de l’important travail effectué dans les vingt dernières années, les résultats ne sont toujours pas à la hauteur.

Mme la députée Tolmont m’a interrogé sur le lycée André Malraux du Mans. Je ne m’exprimerai pas sur ce cas particulier, mais je veux bien le regarder par ailleurs, comme je le ferai pour les autres cas particuliers que vous me soumettez. L’arrivée d’un trente-sixième élève paraît naturellement peu souhaitable. Je regarderai comment cela est géré localement. Vous avez dit que d’autres élèves étaient en situation d’attente. Je ferai la même réponse qu’à la précédente question : aucun élève ne saurait se retrouver sans solution. Les solutions les plus tardives sont généralement pour les redoublants de terminale. Il peut aussi y avoir des effets de saturation dus à des mouvements de population récents, ce qui est fréquent lors de certaines rentrées scolaires. Il faut tout de même saluer le travail exceptionnel accompli par l’éducation nationale puis par les enseignants.

J’en profite pour répondre à la question posée par Mme Duby-Muller. Il faut avoir en tête les grands chiffres de l’éducation nationale. Nous affectons 861 000 enseignants par an sur 4 200 lycées. Vous avez raison de parler des progrès du numérique et d’autres capacités techniques, mais l’éducation nationale réussit chaque année un peu mieux cette mission. Je n’en tire aucune fierté personnelle. J’observe depuis au moins quinze ans la capacité, année après année, à mieux anticiper, à mieux utiliser les outils numériques, voire à travailler à la main de manière très pragmatique. Je le dis à la lumière des inspections d’académie et du rectorat que j’ai visités pendant la dernière semaine d’août. Ce travail de fourmis considérable, invisible pour tout un chacun, se solde par très peu d’incidents. Avec 861 000 enseignants, seuls une dizaine de lycées en France ont des problèmes comme celui que vous avez évoqué, se traduisant par des blocages ou des difficultés réelles. N’oublions pas ce qu’il en était dans les années 1980 et même dans les années 1990 ou 2000. L’amélioration est considérable. Sur ce sujet comme sur d’autres, on pourra toujours trouver des incidents. Ils sont toujours regrettables, mais chacun doit avoir en tête que le système n’a cessé de s’améliorer. Certains d’entre vous l’ont dit, on constate sur chaque territoire une rentrée techniquement réussie, où les affectations ont eu réellement lieu.

Nous allons regarder ce qui se passe au lycée de Cluses. Nous avons vocation à apporter une réponse aux élèves en situation d’attente, mais j’appelle votre attention sur les mouvements de population, les phénomènes de dernière minute non prévisibles qui peuvent créer des effets de saturation, dont certains peuvent interroger.

Madame la députée Bonnivard, les effectifs sont en baisse dans l’académie et dans le département de Savoie. Vous dites que le dédoublement s’est fait au détriment des autres classes. Selon les éléments que j’ai sous les yeux, le taux d’encadrement s’est amélioré en Savoie comme dans tous les départements de France. Je n’ai pas les nombres de postes précis mais nous le regarderons avec attention.

J’entends dire fréquemment qu’on déshabille Pierre pour habiller Paul. Je rappelle le double mouvement qui vaut pour tout département et, a fortiori, pour les départements ruraux. Il y a moins d’élèves à l’école primaire en France et nous créons 2 400 postes en cette rentrée, chiffre comparable aux précédentes rentrées. Nous améliorons donc le taux d’encadrement par un double effet. On pourra toujours trouver une classe à 28 une année et l’année suivante à 29 mais en moyenne, ce n’est pas le cas.

Vous avez cité une classe à 30 en maternelle. Vous avez raison de pointer ce genre de cas qui vont progressivement ne plus exister. Au-delà des REP, conformément à l’engagement du Président de la République, d’ici à la fin du quinquennat, il n’y aura pas plus de 24 élèves par classe dans toute grande section de maternelle, tout CP et tout CE1. Nos efforts de création de postes se concentreront sur les premières années pour améliorer le taux d’encadrement en maternelle, soit pour avoir moins d’élèves, soit pour avoir plus d’intervenants, puisqu’on a une variété d’intervenants.

Concernant le coût des manuels scolaires, je voudrais saluer les régions de France. Pratiquement toutes ont fait un effort, d’une manière différente d’un endroit à l’autre, mais toujours de façon volontariste. Certaines ont opté pour le tout numérique, d’autres ont offert une tablette. C’est le cas de la région Sud où je me suis rendu avec le Premier ministre. On trouve le tout numérique dans la région Grand Est. Presque toutes les régions ont fait une dotation, soit aux familles, soit aux établissements pour l’achat des manuels scolaires. Le coût des manuels scolaires existe indépendamment de la réforme. Des renouvellements étaient nécessaires. Je ne note ni grandes inégalités ni grands trous, mais nous le regarderons dans le bilan consolidé de la rentrée.

En ce qui concerne la question de Mme la députée Lang, beaucoup de ce qui a été dit avant la rentrée peut commencer à faire l’objet de constats post-rentrée. Le premier sujet est le nombre d’élèves choisissant les mathématiques. Je rappelle à ceux qui s’inquiéteraient du statut des mathématiques dans notre pays qu’à mes yeux, celles-ci sortent quantitativement et qualitativement renforcée de la réforme. C’est la seule discipline qu’on trouve aux trois étages du système, dans les blocs communs, dans les enseignements spécialisés et dans les options facultatives en maths expertes et en maths complémentaires. Cela signifie qu’un élève qui veut approfondir les mathématiques fait plus de mathématiques que précédemment, puisqu’au lieu de huit heures en terminale S, il a neuf heures, soit six heures, plus trois heures de maths approfondies. Un élève qui veut en faire beaucoup peut avoir six heures et un élève qui veut en faire un peu peut avoir trois heures avec maths complémentaires. On offre un éventail de possibilités qui épouse bien mieux la diversité des élèves.

Par ailleurs, l’élève qui ne veut pas faire de mathématiques – j’en ai rencontré aussi, il faut avoir l’honnêteté de le dire, d’autant que cela existait avant – en fera tout de même un peu mais sur un mode innovant, qui était proposé dans le rapport Villani-Torossian, c’est-à-dire par les enseignements scientifiques ; c’est pour cela que nous ne voyions pas comme un problème que des professeurs de SVT ou de physique-chimie puissent, comme les professeurs de mathématiques, intervenir dans cet enseignement. Ainsi, les mathématiques sont renforcées au travers du contenu des enseignements. Il y a plus de mathématiques dans le programme de physique-chimie, plus de mathématiques dans le programme de sciences de la vie et de la terre et en sciences économiques et sociales, puisqu’il y a plus de microéconomie.

Tout ceci forme un paysage « mathématiques » plus diversifié, permettant plus de personnalisation avec des élèves plus heureux. C’est aussi une manière de mieux utiliser notre ressource enseignante. La répartition du nombre d’heures de professeurs de mathématiques disponibles dans les différentes catégories d’élèves sera améliorée. Un élève qui s’ennuie en fond de classe parce qu’il a choisi « S » par conformisme, c’est de l’heure gaspillée pour l’élève et pour le professeur, alors que cette meilleure répartition permettra de mieux utiliser la ressource rare qui est celle des professeurs de mathématiques. Il n’y a aucune volonté de diminution du nombre total d’heures de mathématiques délivrées en France, au contraire. Cela nous renvoie aux enjeux de moyen et long terme de recrutement de plus de professeurs de mathématiques, notamment au travers du pré-recrutement qui est aussi une des réalités de cette rentrée.

Bien entendu, sur ce sujet comme sur d’autres, nous ferons des bilans intermédiaires. Je ne doute pas qu’avec les associations disciplinaires et qu’au travers de l’inspection générale, nous aurons aussi une vision par discipline.

Je saisis l’occasion pour dire que la fusion annoncée des inspections générales de l’éducation nationale (IGEN), de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche (IGAENR), des bibliothèques (IGB) et de la jeunesse et des sports (IGJS) a été réalisée à cette rentrée. À partir des quatre, nous avons créé l’inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGESR), décision historique puisque ces institutions étaient anciennes. Cette nouvelle inspection générale sera beaucoup plus importante, bien plus pluridisciplinaire et induira des effets de coopération et de transformation de la mission même d’inspection sur le terrain, notamment à l’échelle des académies. Cette évolution est à relier avec ce qui est prévu au titre de l’agence de l’évaluation.

J’ai répondu par avance à l’une des questions posées par Mme la députée Duby-Muller. Concernant le coût de la vie en Haute-Savoie et, de façon générale, les mesures en matière de logement, j’ai souhaité pointer ces problèmes concrets. J’ai cité la Haute-Savoie parce que j’ai eu l’occasion d’y aller, et vous y étiez. Ce n’est pas un exemple unique, ce peut être le cas dans les zones frontalières, même si l’Île-de-France attire le plus l’attention. Oui, il faut avoir la focale que vous indiquez, qui nous renvoie au fait que le travail que nous allons faire avec les organisations syndicales dans le cadre du dialogue social porte non seulement sur la rémunération mais aussi sur le bien-être matériel et immatériel des professeurs et du personnel de l’éducation nationale, de manière ultra-concrète.

Cela fait partie des sujets extrêmement intéressants qui seront sur la table au cours des prochains mois et au traitement desquels la représentation nationale a vocation à être associée. L’objectif est d’avoir une vision personnalisée. Je pense en particulier aux professeurs débutants dans les régions où le logement est cher et où nous devons faire un effort social. Nous en parlons avec Julien Denormandie et avec Olivier Dussopt afin que des quotas de logements pour fonctionnaires puissent bénéficier à de jeunes professeurs des écoles, en vue de prévoir des constructions futures et d’y travailler avec les collectivités locales. L’approche pragmatique de la question du logement est indispensable.

Madame la députée Rilhac, merci d’avoir rendu hommage à ceux qui ont fait de cette rentrée une réussite, c’est-à-dire le million de personnes qui travaillent à l’éducation nationale, non seulement les personnels enseignants mais aussi les personnels dits parfois non-enseignants, terme que j’utilise peu, car on doit définir les personnes par le métier qu’ils exercent. Je voudrais aussi appuyer l’hommage que j’ai rendu tout à l’heure à ceux qui préparent la rentrée dès l’amont.

Vous êtes intervenue sur les directeurs d’école, sujet que vous avez déjà largement étudié au travers d’un rapport. Votre travail, ainsi que celui des autres députés intéressés, va nous aider à avancer sur cette question, là encore dans le cadre du dialogue social. Je ne m’exprimerai pas davantage sur ce point, parce que ce dialogue doit nous permettre d’avancer. Nous avons à l’esprit les grands paramètres : comment mieux reconnaître la fonction de directeur d’école ? Comment créer des conditions de vie quotidienne permettant un exercice réussi de cette fonction, non seulement au service des personnes concernées mais aussi au service des élèves pour que l’école primaire réussisse ? Les débats de tous ordres que nous avons eus au cours des derniers mois à ce sujet doivent maintenant nous servir à avancer. Nous ne serons pas dans l’immobilisme sur cette question.

Monsieur le député Testé, le dédoublement de grandes sections de maternelle vise surtout la rentrée 2020. De premières mesures peuvent intervenir en 2019 mais il conviendra peut-être de compléter ce qui aura été fait en 2020 et 2021. Cette mesure porte donc sur trois rentrées mais surtout sur la rentrée 2020. Néanmoins, en fonction des caractéristiques de différents territoires, nous avons souhaité le faire déjà dans quelques endroits. Plusieurs d’entre vous ont d’ailleurs dit l’avoir constaté dans leurs départements. Nous ferons un bilan consolidé après la rentrée. Un des cas majeurs est celui de l’académie de Créteil avec les 60 classes dédoublées dans le Val-de-Marne, tandis que 30 l’ont été en Seine-Saint-Denis. Nous en observerons les résultats. Nous savons qu’il existe un enjeu de vocabulaire en grande section en vue de la réussite en école élémentaire.

Vous avez insisté sur la Seine-Saint-Denis, où j’étais récemment et pour laquelle nous nous exprimerons prochainement dans une vision systémique des enjeux. Vous avez indiqué que tous les dédoublements n’avaient pas été parachevés en CE1. En cette rentrée 2019, nous réalisons mille dédoublements rien qu’en Seine-Saint-Denis pour les CP et CE1 en REP et REP +. Seuls 50 dédoublements n’ont pas été possibles, comme vous l’avez dit, pour des raisons de locaux indépendantes de notre volonté mais sur lesquelles nous travaillons en appui des collectivités. Nous avons d’ailleurs mis des maîtres supplémentaires, y compris dans les endroits où les locaux n’étaient pas dédoublés, en sorte qu’il y en a tout de même deux pour 24 élèves, et la situation a vocation à être résorbée. J’ai lu sous la plume de personnes qui cherchent à systématiquement critiquer que la mesure ne serait pas complète. Certes, mais pour seulement 5 %, et on ne peut pas dire que la Seine-Saint-Denis soit défavorisée par cette mesure puisque c’est le département de France qui en bénéficie le plus. Nous parachèverons le dispositif à la rentrée prochaine. De telles mesures sont aussi possibles en grandes sections. Les 30 dédoublements de grandes sections en Seine-Saint-Denis montrent bien que ce n’est pas une question de moyens mis en œuvre par l’éducation nationale mais une question de circonstances concrètes locales. Nous serons naturellement très attentifs à ces réussites en Seine-Saint-Denis.

Madame la députée Bazin-Malgras, merci pour ce que vous avez dit en commençant. Vous avez souligné l’importance du dispositif « Devoirs faits ». Comme pour le point précédent, les critiques les plus intéressantes sont celles reprochant de n’être pas allé assez loin dans la mesure décidée. Vous avez raison d’en regretter l’hétérogénéité et 2019-2020 sera une année de nécessaire progrès. Comme vous l’avez dit, c’est plus une question de circonstances locales que de mise en œuvre de moyens. Rien n’est prévu pour forcer qui que ce soit, mais j’ai vu, dans beaucoup de collèges, des professeurs enthousiastes. On peut aussi voir quelques professeurs à la tête d’une équipe qui ne soit pas uniquement composée de professeurs, l’essentiel étant que la responsabilité pédagogique de « Devoirs faits » incombe à un professeur. L’intégration dans l’emploi du temps n’est pas nécessairement un élément négatif. En milieu rural, cela permet de tenir compte des impératifs de transport scolaire. S’agissant des enjeux de personnels, cela peut être dans le service d’un professeur, a fortiori avec les deux heures supplémentaires que peut décider le principal. Il est évidemment souhaitable que cela intervienne dans le cadre d’un dialogue avec chaque professeur. Nous veillerons cette année à une plus grande homogénéité du dispositif qui donne grande satisfaction là où il est bien fait.

Madame la députée Granjus, vous le savez, nous avons fait de la lutte contre le harcèlement une grande priorité nationale. Mme Macron s’est investie personnellement, ce qui est un élément très positif, parce que c’est un sujet pour lequel nous avons besoin d’incarnation, d’effet d’entraînement et d’effet psychologique sur l’ensemble de la population. Nous en avons même fait un sujet international puisque nous l’avons mis au cœur du G7 de l’éducation qui s’est tenu début juillet et auquel Mme Macron a d’ailleurs participé. Le sujet a également été évoqué à l’occasion du G7, fin août. Ce thème a connu une montée en puissance considérable. Le cyberharcèlement est un phénomène international qui nous renvoie aux réseaux sociaux qui ont des bases internationales. Nous avons ainsi fait monter le statut du problème. Dans le premier semestre de l’année 2020, nous organiserons avec l’Unesco un événement pour créer l’alliance internationale contre le harcèlement, notamment pour faire pression sur les GAFA et sur l’ensemble des acteurs cyber.

Au cours de cette année, il devrait y avoir un ambassadeur contre le harcèlement dans chaque établissement. Nous vérifierons que c’est parfaitement le cas. Le harcèlement fera partie des sujets au cœur des critères de vie scolaire réussie pour l’ensemble des établissements de France. Comme je l’ai dit lors de la discussion du projet de loi, le sujet nous renvoie aux effets directs et indirects de la création d’une agence de l’évaluation. Pour le dire clairement, à partir du moment où nous considérons le climat scolaire comme un élément d’évaluation – et, à l’intérieur du climat scolaire, la lutte contre le harcèlement, l’existence d’un ambassadeur, la mise en œuvre effective des différentes mesures que nous avons énoncées lors de la journée nationale de lutte contre le harcèlement à l’école –, nous allons créer des réflexes à l’intérieur de l’établissement. Par la formation continue des professeurs et de l’ensemble des personnels, par des actions de sensibilisation des élèves, par la création des ambassadeurs, par des animations et des outils pédagogiques, le harcèlement sera au cœur des enjeux d’autoévaluation et de sensibilisation des élèves. C’est un sujet grave que nous prenons à bras-le-corps, pour lequel nous avons accru le partenariat associatif et la cohérence des actions, puisqu’en luttant contre l’homophobie, on lutte contre le harcèlement. Les sujets ne doivent pas être juxtaposés mais considérés au titre du bon climat scolaire, des valeurs de la République et du respect d’autrui. Cette vision d’ensemble progresse à cette rentrée au travers de différentes mesures, dont la nomination effective d’un ambassadeur contre le harcèlement.

Monsieur le député Pierre Henriet, l’éducation prioritaire est un sujet important. Le rapport Azéma-Mathiot devrait m’être remis au cours du mois de septembre, ce qui n’est pas une fin mais un début. Là encore, nous discuterons avec les organisations syndicales de ce qu’il conviendra de faire pour la rentrée 2020 à partir de ce rapport. Notre objectif est d’en finir avec certains problèmes que vous avez évoqués, comme les effets de seuil ou les inégalités entre écoles liées au fait qu’une école socialement défavorisée ne figure pas dans le classement. Il n’y a pas de solution miracle mais nous voulons être pragmatiques. Il faut responsabiliser tout le monde et parler longuement avec les organisations syndicales. Nous devons mieux cibler les élèves qui en ont besoin, c’est-à-dire avoir une vision de l’éducation prioritaire qui soit non seulement territorialement fine, mais aussi le plus possible individuelle, parce qu’on peut aussi rencontrer des difficultés de rééquilibrage social dans un territoire non totalement défavorisé. À ce stade, je ne peux en dire plus.

Monsieur le député Cinieri, vous me demandez si l’on s’oriente vers une harmonisation des règles des MDPH. Vous pointez un sujet structurel, puisqu’en cette rentrée, nous avons voulu adopter une nouvelle logique de l’école inclusive de nature à créer plus de cohérence dans l’action de l’éducation nationale et plus de coopération avec et entre les différents acteurs. Je l’ai illustré à plusieurs reprises dans mon propos en évoquant la coopération avec le monde sociomédical, mais c’est vrai aussi pour le département, dans notre capacité à raisonner ensemble sur la nature des prescriptions et la façon dont l’éducation nationale les suit. L’harmonisation des règles procède d’un pragmatisme à l’échelle départementale.

Dans le Val-d’Oise, en présence de certains députés, lors d’une table ronde où le département était représenté, nous avons examiné récemment comment améliorer la fluidité, la rapidité des décisions prises par la MDPH, puis leur mise en œuvre. Je suis persuadé que nous pouvons obtenir d’autres améliorations structurelles. Je le disais tout à l’heure pour résumer la situation à cette rentrée, si, avant, l’élève attendait la décision, un accompagnant l’attend désormais à l’école, dans la logique du PIAL. Cela favorisera une coopération pragmatique entre le département, la MDPH et l’éducation nationale. D’évidence, il faut aller dans le sens de l’harmonisation.

La question de M. le député Freschi sur les conventions de ruralité et, de façon générale, l’impact des politiques d’éducation prioritaire sur la ruralité, complète la question de M. le député Henriet. Nous souhaitons que les conventions de ruralité permettent de regarder en face le sujet de la pauvreté rurale et d’affirmer le volontarisme de notre action pour lutter contre les inégalités sociales en milieu rural. Il y aura très prochainement une mission sur ce sujet au sein de l’éducation nationale, dans une vision englobant le scolaire, le périscolaire, comme le plan mercredi et les internats, et la promotion sociale en milieu rural. J’aurai l’occasion de m’exprimer sur ce sujet, mais il convient de mesurer que l’amélioration des conventions de ruralité, à laquelle vous avez fait référence, doit être qualitative et s’inscrire dans une logique non pas défensive mais offensive de la ruralité, considérant d’un seul tenant la lutte contre les inégalités sociales et l’aménagement du territoire. En redynamisant une école pour attirer plus de familles, on contribue à la mixité sociale et on exerce un impact social direct et indirect. Dans chaque département, la convention de ruralité doit tendre à élaborer une stratégie en ce sens et à articuler les problèmes entre eux. Nous continuons à signer des conventions de ruralité et à les discuter. Je le répète, avec la non-fermeture des classes et cette dynamique, nous sommes avec les maires et avec les populations.

Madame la députée Sandrine Mörch, je vous ai un peu répondu par avance. Sur ce sujet aussi, nous devons avoir une vision pragmatique, parce que les problèmes diffèrent selon les populations. Les mineurs non accompagnés (MNA) sont un sujet spécifique, qui ne porte pas uniquement sur la scolarisation. Il nous renvoie à notre capacité de personnaliser des propositions de formation. Il y a de belles réussites et vous en avez cité une. Dans l’enseignement professionnel, il faut être capable de conduire à une certification et à des métiers qui sont d’ailleurs en tension. Il faut aussi résoudre le problème en lui-même, qui n’est pas l’objet de notre réunion aujourd’hui. Nous devons faire face quantitativement à des problèmes importants et qualitativement au fait que des personnes notoirement majeures essaient d’entrer dans la catégorie « mineurs ». Comme je l’ai dit tout à l’heure, je suis très ouvert, nous pourrons en reparler prochainement et développer le travail entre l’Assemblée nationale et mon ministère afin que le droit à la scolarisation soit pleinement respecté.

Concernant l’école du socle, Monsieur le député Bouyx, des actions importantes, souvent pédagogiques, existent parfois depuis longtemps, pour assurer une plus grande fluidité entre le CM2 et la sixième. Des expérimentations doivent être confortées et des propositions d’expérimentations peuvent être proposées. Nous avons vu dans les derniers mois que c’est un sujet sensible, car derrière l’école du socle, il y a une intention pédagogique et une intention sociale très fortes, mais je souhaite qu’il n’y ait aucun malentendu sur le fait qu’il n’y en a pas d’autre. Le consensus des acteurs localement est nécessaire pour avancer sur ce sujet et je suis persuadé qu’il se produira. Dès qu’on se met autour de la table sur la question, on en voit l’intérêt, mais il n’y aura pas de décision verticale. Il y aura de l’horizontalité au service du socle dans les temps qui viennent.

La question de M. Le député Kerlogot sur les critères de l’éducation prioritaire renvoie au sujet du rapport Azéma-Mathiot. Je peux difficilement m’exprimer davantage. Nous ferons évoluer un certain nombre de critères pour être le plus pragmatique possible et pour qu’il y ait le moins possible de situations de marge.

Un autre sujet relevant de la logique de l’éducation prioritaire est dans l’actualité de cette rentrée. Avec Julien Denormandie, nous avons annoncé la création de 80 cités éducatives dont tout un chacun peut voir la liste : il s’agit de magnifiques champs de progrès dans lesquels vous pouvez vous impliquer localement. Un projet éducatif s’élabore avec l’ensemble des élus et des parties prenantes, avec beaucoup de souplesse et de pragmatisme, pour agir sur les facteurs sociaux ou autres localement pertinents. Des moyens importants sont consacrés à cette politique par le ministère de la cohésion des territoires et le ministère de l’éducation nationale. Sans attendre l’évolution des règles du jeu pour la rentrée 2020, chacun doit se saisir des moyens disponibles.

N’oublions pas que le dédoublement des classes de CP et de CE1 est la mesure majeure de l’éducation prioritaire. Il ne faut pas juxtaposer les actions mais les considérer globalement. À mes yeux, cela vient résoudre un problème qui existait depuis longtemps. En matière d’éducation prioritaire, on était bien moins dynamique pour l’école primaire que pour le collège. Au fil du temps, la coordination s’est améliorée entre l’école et le collège, davantage de travail social est accompli et il y a un nouvel élan. Le dédoublement des grandes sections de maternelle, de CP et de CE1 est l’arrière-plan de cette dynamique porteuse d’espoir. Il doit s’accompagner de notre bonne manière d’utiliser les moyens des cités éducatives, quand elles existent, lesquelles ont un côté inspirant et peuvent exercer des effets de halo. Lorsque j’étais à Clichy avec Julien Denormandie, la semaine dernière, où il y a une cité éducative, le maire de Gagny a déclaré magnifiquement : « Je n’ai pas de cité éducative mais je suis content que Clichy en ait une, parce que c’est inspirant, parce qu’il y a des effets de halo et parce que nous allons travailler pour faire la même chose et mobiliser des moyens divers et variés au service du même genre d’idées ». Cela fait aussi partie de l’élan pour l’éducation prioritaire que nous devons avoir. Le sujet est évidemment budgétaire mais, comme d’habitude, le plus important, ce sont les logiques d’équipe et de coordination des acteurs.

Madame la députée Victory, merci pour vos propos. Concernant la co-intervention, j’ai conscience de ne vous avoir convaincue qu’en partie. Vous avez fait référence aux compétences fondamentales et aux enseignements généraux. Il y a d’abord le rattrapage des compétences de base pour les élèves, qui peut aussi relever de l’accompagnement personnalisé et d’une politique ciblée qui ne relève traditionnellement pas du programme d’enseignement professionnel. Quand un élève rencontre des difficultés pour lire ou pour écrire, même les anciens programmes de l’enseignement professionnel avec beaucoup d’heures ne le prévoyaient pas. Les établissements doivent donc réaliser des actions ad hoc très ciblées. Ils sont aidés pour cela dans le cadre de l’accompagnement personnalisé. Il y a ensuite la culture générale, au sens large. La co-intervention apportera beaucoup mais j’ai clairement indiqué aux recteurs et lors de nos réunions avec les responsables du ministère de la culture que l’enseignement professionnel devait être la cible privilégiée des nouvelles dynamiques de l’éducation artistique et culturelle. En clair, au-delà des heures de cours, il convient de considérer tous les projets à l’intérieur et autour de l’établissement pour la culture, dans l’enseignement professionnel. J’y crois beaucoup. Vous avez cité à juste titre la musique.

Monsieur Juanico, le savoir rouler et le savoir-nager sont des enjeux très importants. Nous sommes attentifs à éviter les juxtapositions d’actions plus légitimes les unes que les autres qui finissent par engorger le travail de l’éducation nationale.

La création d’une attestation permettra de faire d’une pierre plusieurs coups, puisque l’enjeu est à la fois l’apprentissage du vélo et la connaissance du code de la route. Sur le caractère facultatif ou obligatoire du dispositif, la décision n’est pas tranchée, mais j’entends votre argumentaire. On peut souvent faire plus et mieux dans le cadre du périscolaire pour des objectifs qu’on se fixe dans le cadre scolaire. La présence du vélo dans le plan mercredi peut être un point fort. La capacité à donner des attestations dans le cadre périscolaire peut-être intéressante.

Quant au savoir-nager, des éléments ne sont pas tranchés non plus. Nous en parlons avec Roxana Maracineanu, en vue du lancement d’un plan « aisance aquatique » à destination des petites, moyennes et grandes sections de l’école maternelle, peut-être dans le cadre de coopérations avec des associations agréées, en vue d’assurer la fréquentation de piscines sur le temps scolaire à l’école maternelle. Il est trop tôt pour en dire davantage mais c’est une tendance que nous allons suivre.

Enfin, Mme la députée Descamps, vous m’avez interrogé sur le coût de l’instruction obligatoire à 3 ans pour les collectivités. Il n’y a aucun changement par rapport aux principes que nous avons affichés lors de l’examen du projet de loi. Cela fait partie des points examinés par le Conseil constitutionnel au mois de juillet, et ce que nous avions prévu a été considéré comme conforme à la Constitution. C’est un point à souligner au regard des débats qui ont eu lieu. Vous l’avez vous-même rappelé, la compensation financière intervient a posteriori, en comparant les dépenses 2019-2020 aux dépenses 2018-2019. Là aussi, nous serons très pragmatiques, car nous rembourserons à l’euro près les dépenses constatées. Je ne veux vous donner aujourd’hui de chiffres différents de ceux cités lors des débats. L’estimation est d’environ 100 millions d’euros mais nous pourrons répondre pleinement à la question à partir de données consolidées en 2020.

M. le président Bruno Studer. Merci beaucoup, Monsieur le ministre.

 

 

 

 

La séance est levée à dix-neuf heures quinze.


Présences en réunion

Commission des affaires culturelles et de l’éducation

Réunion du mardi 10 septembre 2019 à 16 heures 30

Présents. Mme Emmanuelle Anthoine, Mme Géraldine Bannier, Mme Valérie Bazin-Malgras, M. Bruno Bilde, M. Pascal Bois, M. Ian Boucard, M. Bernard Brochand, Mme Céline Calvez, Mme Fabienne Colboc, Mme Béatrice Descamps, Mme Jacqueline Dubois, Mme Virginie Duby-Muller, Mme Elsa Faucillon, M. Alexandre Freschi, M. Laurent Garcia, M. Jean-Jacques Gaultier, Mme Florence Granjus, M. Pierre Henriet, M. Yannick Kerlogot, Mme Brigitte Kuster, Mme Anne-Christine Lang, Mme Josette Manin, Mme Sophie Mette, Mme Sandrine Mörch, Mme Cécile Muschotti, Mme Cathy Racon-Bouzon, M. Pierre‑Alain Raphan, Mme Muriel Ressiguier, Mme Cécile Rilhac, M. Bruno Studer, M. Stéphane Testé, Mme Sylvie Tolmont, Mme Michèle Victory

Excusés. Mme Marie-George Buffet, Mme Danièle Cazarian, M. Stéphane Claireaux, M. François Cormier-Bouligeon, Mme Frédérique Dumas, Mme Annie Genevard, Mme Valérie Gomez-Bassac, M. Michel Larive, Mme Bénédicte Pételle, M. Frédéric Reiss, M. Bertrand Sorre

Assistaient également à la réunion. Mme Émilie Bonnivard, M. Dino Cinieri, M. Pierre Cordier, Mme Catherine Osson