Compte rendu

Commission
du développement durable et de l’aménagement du territoire

 Audition de M. Pierre Dubreuil, directeur général du Muséum national d’histoire naturelle, directeur général en charge de la préfiguration du nouvel établissement AFB-ONCFS              2


Mercredi 28 novembre 2018

Séance de 9 heures

Compte rendu n° 16

session ordinaire de 2018-2019

Présidence de Mme Barbara Pompili,

Présidente


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La Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a entendu M. Pierre Dubreuil, directeur général du Muséum national d’histoire naturelle, directeur général en charge de la préfiguration du nouvel établissement AFB-ONCFS.

Mme la présidente Barbara Pompili. En préalable à nos travaux, je souhaite vous indiquer qu’une délégation de collègues députés du Liban, membres du groupe d’amitié Liban-France, devrait assister à nos travaux à partir de neuf heures trente.

Nous poursuivons ce matin nos travaux préparatoires sur le projet de loi portant création de l’AFB-ONCFS, modifiant les missions des fédérations des chasseurs et renforçant la police de l’environnement, en entendant M. Pierre Dubreuil, directeur général délégué du Muséum national d’histoire naturelle et, depuis le 14 novembre dernier, nommé directeur général chargé de la préfiguration de l’AFB-ONCFS.

Monsieur le directeur général, je vous remercie d’avoir accepté notre invitation.

Je rappelle en préalable que suite à l’adoption de la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, l’Agence française pour la biodiversité (AFB) a été créée le 1er janvier 2017. Elle a intégré en son sein l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques (ONEMA), l’Agence des aires marines protégées (AAMP), le groupement d’intérêt public (GIP) Atelier technique des espaces naturels (ATEN) et l’établissement Parcs nationaux de France. L’AFB comporte également l’unité mixte de service constituée de l’AFB, du Muséum national d’histoire naturelle et du CNRS.

L’AFB est donc un établissement jeune, qui a pu dès sa première année d’existence, non seulement mener les actions des quatre établissements intégrés, mais également engager la prise en charge de missions bien plus vastes, telles qu’elles avaient été définies par la loi.

Dès l’origine, l’objectif était bien d’intégrer l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) au sein d’une agence commune avec l’AFB. Cela n’a pas été possible à l’époque et les députés l’avaient profondément regretté. L’analyse de l’activité de l’ONCFS, qui a profondément évolué, montre pourtant la place majeure des activités non cynégétiques et des activités que l’on peut qualifier de mixtes, comportant à la fois un volet cynégétique et un volet non cynégétique.

La loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages prévoyait que l’AFB pourrait exercer des missions de police administrative et judiciaire dans le cadre d’unités de travail communes avec d’autres établissements publics. Ces unités, voulues par le législateur, à défaut de l’intégration de l’ONCFS au sein de l’AFB, n’ont pas été mises en œuvre.

Le présent projet de loi propose aujourd’hui la fusion de l’AFB et de l’ONCFS au sein d’un nouvel établissement public de l’État, et il convient de s’en féliciter.

L’AFB réunit, en 2019, 1 221 ETP sous plafond et 54 hors plafond ; l’ONCFS compte, pour sa part, 1 443 ETP sous plafond et 80 hors plafond. Ces personnels devront évidemment être accompagnés dans cette nouvelle transformation.

Monsieur le préfigurateur, j’en viens à vous poser quelques questions, que mes collègues enrichiront.

Pouvez-vous nous présenter votre mission et vos travaux ainsi que leur organisation ?

Quelle est votre analyse du projet de loi déposé par le Gouvernement et de son calendrier ?

Quelles sont les consultations menées sur le nom du futur opérateur ?

En matière de gouvernance, quelle est votre analyse du fonctionnement des conseils d’administration des deux opérateurs actuels et de celui qu’il est proposé de créer, qui serait resserré autour d’une vingtaine de membres ?

L’absence de mention de la place particulière des outre-mer, ou encore des agences régionales de la biodiversité (ARB), suscite des interrogations parmi les membres de notre commission. Quelle est votre analyse à cet égard ?

La définition des missions du nouvel établissement est beaucoup moins précise et exhaustive que ce que la loi de 2016 avait prévu pour l’AFB. Certaines notions avaient bénéficié d’un portage politique important, mais sont passées sous silence. Peuvent être citées, par exemple, la lutte contre la biopiraterie, le dispositif d’accès aux ressources génétiques et de partage des avantages (APA), la compensation écologique, les espèces exotiques envahissantes, ou encore la stratégie nationale pour la biodiversité. Quelle est votre analyse sur cette question ?

S’agissant des statuts des personnels des deux opérateurs, quelles sont les difficultés concrètes qui demeurent à lever afin de permettre la fusion ? Quelles seront les actions menées pour accompagner les personnels ?

Quel sera l’impact, pour le futur établissement, du renforcement des pouvoirs de police judiciaire des inspecteurs de l’environnement ?

Le projet de loi prévoit, à l’article 3, de transférer au nouvel établissement la gestion du fichier central à caractère national des permis de chasser délivrés, des validations et des autorisations de chasser accompagné. Comment s’effectuera, en pratique, le transfert de la gestion de ce fichier ?

L’article 3 édicte en outre une obligation de transmission aux fédérations départementales des chasseurs des données de prélèvements des espèces soumises à la gestion adaptative. Ces données seront ensuite transmises à l’AFB-ONCFS. Comment le futur établissement utilisera-t-il ces données, à la fois pour sa mission d’expertise et d’assistance en matière de gestion adaptative, mais aussi pour sa mission de police de la chasse ?

Enfin, quelles sont, plus largement, les observations que vous souhaitez porter à notre connaissance ?

M. Pierre Dubreuil, directeur général délégué du Muséum national d’histoire naturelle, directeur général en charge de la préfiguration du nouvel établissement AFB-ONCFS. Comme vous l’avez dit, madame la présidente, j’ai été nommé il y a maintenant deux semaines directeur général de la préfiguration. Ma mission est donc récente et je suis en phase d’appropriation du sujet. D’ailleurs, je n’ai reçu ma lettre de mission, signée par le ministre et par la secrétaire d’État, que vendredi dernier ; l’encre en est à peine sèche encore.

D’abord, permettez-moi de me présenter. Je suis directeur général délégué du Muséum national d’histoire naturelle. Le Muséum a des missions communes avec les établissements qui sont appelés à fusionner, l’AFB et l’ONCFS, par exemple des missions d’expertise et d’appui aux politiques publiques, de sensibilisation et de mobilisation de la société civile et des citoyens sur la question de la biodiversité et, plus spécialement avec l’ONCFS, des missions de lutte contre le trafic et le commerce illégal des espèces sauvages de faune et flore.

Comme vous l’avez dit, madame la présidente, le Muséum a également une unité mixte avec l’AFB et le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) : l’unité mixte de service « Patrimoine naturel », dite « PatriNat ». Ces sujets ne me sont donc pas étrangers.

J’ajoute que le plan « Biodiversité » a été signé par le Gouvernement le 4 juillet dernier au Muséum. C’était naturellement un grand moment. D’ailleurs, le projet de loi qui nous réunit aujourd’hui s’inscrit dans la suite de ce plan biodiversité.

J’aborde la fusion de ces deux établissements avec un double état d’esprit, fait à la fois d’humilité et de conviction.

Esprit d’humilité, parce que j’ai la volonté de rencontrer et d’écouter les acteurs et parties prenantes des deux établissements, ce que j’ai commencé à faire en rencontrant lundi dernier, c’est-à-dire dès le début de ma mission, les cadres des deux établissements, puis les organisations syndicales représentatives du comité technique. J’ai participé hier au conseil administration de l’AFB et participerai tout à l’heure à celui de l’ONCFS. Ainsi, je commence à écouter et à prendre contact avec les agents et les représentants de ces établissements.

Esprit de conviction aussi puisque, dans le contexte d’érosion caractérisée de la biodiversité, de menace avérée sur la gestion des milieux naturels et sur l’équilibre des écosystèmes, problèmes dont les conséquences pèsent sur la survie de l’espèce humaine, j’ai la conviction que le regroupement des forces et des missions des deux établissements ne peut être qu’un atout pour faire face aux menaces. D’ailleurs, je pense que ce regroupement des deux établissements au sein d’un seul constitue une création et non une simple fusion. J’insisterai sur cet aspect, parce qu’il est fondamental. Ce n’est pas un établissement qui en intègre un autre. Au moment d’entamer la fusion, il faut plutôt garder à l’esprit sa finalité, à savoir la lutte contre les menaces qui pèsent sur la biodiversité.

Quel sera mon rôle ? Comme préfigurateur, j’ai reçu une lettre de mission qui le définit. Je me bornerai à préparer la fusion avec les équipes des deux établissements, ce que j’ai commencé à faire, de concert avec le ministère de la transition écologique et solidaire, notamment la direction de l’eau et de la biodiversité, que vous avez sans doute auditionnée, et le secrétariat général. Car, comme vous l’avez dit, il y a des aspects de la fusion qui sont liés au personnel, aux carrières et au statut. Les traiter sera une partie de ma mission, bien évidemment.

Le facteur humain est essentiel. Rappelons que cette fusion intervient deux ans après la création de l’Agence française pour la biodiversité. C’est une réalité que je ne peux méconnaître : les équipes ont déjà vécu une fusion de plusieurs établissements au sein d’un seul. Cela doit être apprécié dans le rythme de création du futur établissement. Mais je constate que les équipes travaillent d’ores et déjà ensemble, au sein des établissements et sur le terrain. Ces regroupements qui se sont opérés faciliteront le travail de création du nouvel établissement, humainement et techniquement.

Par ailleurs, ma mission consiste à écouter, c’est-à-dire à organiser des auditions de toutes les parties prenantes. J’ai commencé à prendre des contacts avec beaucoup d’entre elles. J’analyserai ce que j’entendrai pour proposer au Gouvernement et au ministre des pistes sur les sujets que nous allons évoquer ce matin. Mais je vais vous donner mon premier sentiment.

La préparation opérationnelle de la fusion et la création du nouvel établissement en un an ? C’est très court. Tout ne pourra pas être fait en un an. Mais, dès lors que le cadre fixé par le Gouvernement et le projet de loi prévoient la création au 1er janvier 2020, je vais m’atteler à distinguer les choses qui doivent être faites immédiatement, comme la mise en place du logiciel des paies. Parce qu’il est évident que les agents doivent être tous payés au mois de janvier 2020, si l’établissement est créé à cette date – ce qu’on espère tous. Ainsi, il y a des choses qui sont absolument impératives dans le délai d’un an, tandis qu’il faudra en construire d’autres avec les équipes, dans le cadre d’un plan pluriannuel d’installation de l’établissement. En tout état de cause, la création en janvier 2020 va relever en quelque sorte de l’opération « commando ».

Il y a beaucoup d’aspects, liés au budget des ressources humaines, au système d’information et à l’organisation interne et territoriale, qu’il va falloir aborder dans le contexte budgétaire tendu que vous connaissez. Mais je m’appuierai sur les réflexions et travaux des établissements existants, parce qu’il ne s’agit pas de procéder à une création ex nihilo ; actuellement, des réflexions sont déjà engagées, au sein des établissements, à propos du contrat d’objectifs et de moyens 2019-2020. Je ne vais donc pas arriver avec des idées toutes faites, mais plutôt m’appuyer sur ce qui existe déjà au sein des établissements.

C’est le sens de ma lettre de mission et j’y serai très attentif. D’ailleurs, c’est ce que j’ai toujours fait dans les différentes missions qu’on m’a confiées : du dialogue social avec les représentants du personnel. En l’occurrence, s’agissant de cet établissement, il y a beaucoup de représentants d’agents exerçant la police de l’environnement. Je les ai réunis lundi après-midi et je les réunirai régulièrement pour les écouter et les informer des étapes du processus.

Mais vous me demandez comment s’organisera la mission. Sans entrer dans le détail, je puis dire qu’il y aura un pilotage du projet par un comité, présidé par le ministre et réuni à échéances régulières. Des réunions de coordination hebdomadaires auront lieu – j’en ai d’ailleurs déjà organisé – avec les services du ministère de la transition écologique et solidaire et ses directeurs généraux, que je connais et apprécie. Nous travaillons très bien ensemble et continuerons de le faire, sachant qu’ils gardent la responsabilité, pendant cette année, des deux établissements concernés.

S’agissant du nom de l’établissement, une consultation a été lancée très rapidement par le ministre. Des propositions de nom circulent auprès des agents. Je ne peux pas vous en dire plus aujourd’hui. J’attends moi-même le résultat de ce sondage interne auprès des deux établissements. Les agents peuvent formuler leur opinion jusqu’à aujourd’hui. Pour votre part, vous pouvez, je crois, déposer des amendements, notamment des amendements relatifs au nom, jusqu’au 30 novembre.

Mme la présidente Barbara Pompili. C’est exact. J’ajoute seulement que le Gouvernement n’est lui-même pas lié par ce délai de dépôt, de sorte qu’il pourra également déposer des amendements à une date ultérieure.

M. Pierre Dubreuil. Le nom est une affaire qui n’est pas seulement symbolique. Ce que je souhaite, comme je l’ai dit au ministre, c’est qu’il accroisse la lisibilité de l’établissement. Le nom est important pour les agents, mais aussi pour le grand public, sachant qu’on veut créer un opérateur national de la protection et de la valorisation de la biodiversité. Il faut que cela apparaisse comme tel aux yeux du grand public et des citoyens.

S’agissant du calendrier, il est évident que je vais devoir assez rapidement en proposer un. On m’a demandé, d’ici fin janvier, un calendrier de déploiement du projet de création. Fin janvier, je proposerai donc aux ministres des étapes de déploiement, comportant un organigramme-cible et toutes les étapes du processus qui doit conduire à la création d’un seul établissement.

Mais je veux aussi laisser le temps de la concertation interne. Le projet de loi a en effet réaffirmé que l’établissement reprendra intégralement les missions et les agents des établissements existants. Il faut donc étudier comment organiser des synergies territoriales, par exemple dans l’établissement qui compte 300 implantations sur le terrain. Voilà un sujet que je ne saurais traiter tout seul dans mon bureau ; il va au contraire falloir que je consulte beaucoup les agents, et notamment les cadres de l’établissement.

S’agissant de la gouvernance, l’exposé des motifs du projet de loi évoque une gouvernance « resserrée et équilibrée ». Des conseils d’administration actuels, l’un comporte 46 membres, l’autre 23, me semble-t-il, soit 69 membres au total. Il n’est pas envisageable que, dans un établissement comptant 3 000 agents environ, le conseil d’administration soit aussi pléthorique. Il s’agit en effet d’assurer l’efficacité opérationnelle de la gestion et de la direction de cet établissement.

J’ai bien compris que toutes les parties prenantes seront très attentives à la gouvernance et à leur participation à cette gouvernance. Il me semble qu’il faut trouver un équilibre, une juste représentation des parties prenantes des établissements. Mais on ne peut pas diriger un établissement et définir une stratégie d’établissement avec un conseil d’administration de 70 personnes. Nous procéderons donc à des auditions, puis attendrons l’arbitrage du Gouvernement, avant que vous, représentation nationale, tranchiez. Je vais néanmoins vous donner mon point de vue.

À ce stade, je veux ajouter que la gouvernance ne se réduit pas au conseil d’administration, mais inclut le comité d’orientation et le conseil scientifique – car je pense que le futur établissement devra être doté d’un conseil scientifique. La composition du comité d’orientation sera donc un élément auquel il faudra veiller, comme c’est le cas à la Fondation de recherche pour la biodiversité (FRB), dans la gouvernance duquel le comité d’orientation stratégique joue un rôle important.

S’agissant des outre-mer et des ARB, je pense que l’exercice des missions de l’établissement outre-mer est un élément très important. La représentation des outre-mer qui existe déjà au sein des deux établissements actuels devra être réaffirmée, notamment dans sa gouvernance. La France est une puissance ultramarine, pour laquelle la question de la biodiversité ultramarine est fondamentale.

S’agissant des ARB, je constate que certaines sont créées et d’autres non. Elles constituent un élément d’organisation territoriale de l’établissement. Elles ont vocation à rassembler des élus et des acteurs économiques et sociaux. Or c’est l’une des missions d’établissement que de rassembler les acteurs de la biodiversité. C’est pourquoi je crois aux ARB. Ce n’est cependant pas le futur établissement qui assurera tout seul leur déploiement. Il faudra travailler avec l’ensemble des acteurs et s’appuyer sur ce qui se fait déjà, notamment en Île-de-France, où les choses fonctionnent plutôt bien.

S’agissant des statuts des personnels, même si cela constitue un aspect important de ma mission, je ne peux pas me substituer aux services du ministère. Il y a des sujets de requalification des personnes, notamment dans la catégorie des inspecteurs de l’environnement. C’est un aspect social auquel j’attacherai de l’importance.

Je terminerai en disant que les fonctions de police judiciaire me semblent très importantes. Leur extension est une bonne chose, qui supposera, en amont et en aval, un renforcement du partenariat déjà existant avec les procureurs au niveau départemental. Il faudra rédiger des protocoles pour mettre en œuvre les fonctions de police judiciaire que ces agents détiennent déjà, mais qui seront élargies, comme il est prévu dans le projet de loi.

J’en termine par la gestion adaptative. Venant du Muséum, je considère que la gestion adaptative doit permettre de clarifier les rôles. J’attache une grande importance à la composition des comités d’experts qui auront à donner un avis scientifique, en toute indépendance, sur les espèces. Mais les praticiens, les partenaires associatifs et les fédérations pourront aussi dire ce qu’ils en pensent, car, in fine, la gestion adaptative relève à la fois de la régulation au quotidien et d’une approche plus complexe, de plus long terme. Ces deux approches doivent s’articuler dans un dialogue entre scientifiques et praticiens, la décision politique revenant au ministère en cas de désaccord.

La composition de ces comités d’experts de gestion adaptative est donc un point qui me paraît très important.

M. Alain Perea. Créer ex nihilo un nouvel organisme est une aventure passionnante, mais assurer la fusion de deux organismes aussi importants que l’AFB et l’ONCFS est une mission tout aussi passionnante, mais de surcroît périlleuse, car il faut prévoir l’avenir en tenant compte du passé.

Certains voudraient voir dans cette fusion le simple rassemblement administratif de deux agences, mais notre majorité porte une ambition beaucoup plus importante. Nous voulons faire de cet établissement un outil de la reconquête de la biodiversité dans notre pays. C’est pourquoi votre mission est passionnante, périlleuse et suivie de très près.

Mon propos n’est pas de vous soumettre à une quelconque pression : c’est inutile et vous êtes un professionnel, mais je souhaite vous dire que nous sommes très attentifs à la création de ce nouvel établissement, que nous ne prenons pas comme une simple mesure administrative. Cette attention va prendre toute sa dimension d’ici quelques jours, lorsque nous allons rentrer dans les débats. Dans ce contexte, je souhaite recueillir votre avis sur cinq points qui nous paraissent majeurs.

En premier lieu, je voudrais vous parler de culture. Les deux établissements ont des cultures différentes sur de nombreux domaines d’intervention, qui sont pourtant proches. Ma première question est donc d’avoir votre avis sur les points de vigilance que nous devons avoir afin que, loin de s’opposer, ces deux cultures deviennent une richesse, et ce dès le départ.

En second lieu, il me semble important de parler d’équilibre. Le nouvel établissement ne pourra bien sûr fonctionner que s’il y a un réel équilibre entre les deux anciennes structures. Cet équilibre ne doit pas être synonyme d’immobilisme, mais être le meilleur moyen d’engager une nouvelle façon de percevoir, de protéger et de valoriser notre biodiversité. Je souhaite savoir, sur ce point aussi, quels sont les sujets sur lesquels nous devons être, selon vous, particulièrement vigilants ?

Troisièmement, l’avenir de la chasse dans notre pays sera particulièrement concerné par la création de cet établissement. Dans votre propos liminaire, vous avez peu abordé ce point. Cet établissement sera un élément incontournable de la chasse en France. Je souhaite connaître votre avis sur la manière dont cet établissement pourra assurer la pérennité de l’activité de chasse.

Quatrième point, alors que l’ONCFS, institution plus ancienne, a des compétences très englobantes, l’AFB, plus récente, a des compétences plus détaillées. Le texte qui nous est proposé fait le choix d’être sur un modèle de compétences énoncées de manière plutôt générale. Cette approche est séduisante par la capacité donnée au nouvel établissement de se saisir de tous les sujets et donc de mener des politiques globales. Pour autant, certains s’inquiètent et craignent que ce manque de détail ne conduise, au contraire, le futur établissement à voir son champ d’action restreint. Quel est votre avis sur le sujet ?

Enfin, nous serons très vigilants sur les questions de personnel. Vous en avez déjà un peu parlé. Je souhaiterais que vous puissiez y revenir, de sorte que nous sachions quelles sont pour vous les pistes de travail permettant d’avancer sur cette question.

M. Martial Saddier. Si l’ONCFS n’a pas été inclus dès le départ, c’est parce que les chasseurs n’y étaient pas favorables : nous en avons débattu longuement, la représentation nationale a écouté – et entendu – les chasseurs à cette époque. Il semble qu’il y ait eu une évolution, et je tenais donc à repréciser ce point.

L’ADN de la nouvelle structure consistera à anticiper plutôt qu’à réparer – tout n’a pas été réparé dans notre pays après les erreurs commises au siècle dernier en ce qui concerne les cours d’eau et les zones humides qui ont besoin d’une renaturation. Nous souhaitons que l’on garde à l’esprit la nécessité d’avoir un outil opérationnel : ne fabriquons pas un grand bureau national d’études… Veillons à ce qu’il y ait un volet opérationnel, afin d’agir aux côtés des collectivités territoriales et des acteurs socioprofessionnels de la biodiversité dans les territoires.

Une question va se poser très clairement : le futur établissement public aura notamment pour mission « l’appui à la mise en œuvre des politiques de l’eau et de la biodiversité », que la loi confie, en grande partie, aux comités de bassin et sur laquelle nous travaillons chaque année. Comment voyez-vous l’équilibre avec les comités de bassin ?

Pouvez-vous faire un point rapide sur la situation budgétaire des deux structures actuelles ? Quelle est la photographie de départ et quel serait, à vos yeux, le budget nécessaire pour faire tourner le nouvel établissement public ? Par ailleurs, comment voyez-vous la montée en puissance de la redevance sur les éoliennes, dont la loi prévoit qu’elle servira à la biodiversité ? À ce stade, 342 millions d’euros, soit la totalité des ressources de l’AFB et une bonne partie de celles de l’ONCFS, résultent de prélèvements sur les ressources des agences de l’eau. J’aimerais également savoir comment vous envisagez l’utilisation des cinq euros prélevés sur le permis de chasser, étant entendu qu’il faudra une comptabilité analytique, fédération par fédération, avec un fléchage vers des actions pour la biodiversité.

Je voudrais revenir sur l’article 9 du projet de loi, qui prévoit des ordonnances et nous cause donc de l’urticaire – cela ne vous surprendra pas… Que pouvez-vous nous dire sur ce sujet dont nous reparlerons en commission puis en séance ?

Nous attachons une importance toute particulière, au sein du groupe Les Républicains, aux 2 640 agents concernés. Quels sont les points sensibles selon vous ?

Je vous remercie d’avoir souligné, comme nous allions le faire, que la date du 1er janvier 2020 n’est pas crédible. Nous déposerons des amendements sur ce point : pour nous, une telle échéance n’est tout simplement pas possible.

Vous avez parlé d’un conseil d’administration équilibré et resserré, et M. Alain Perea a évoqué une grande ambition. Or comment pourrait-on avoir un conseil d’administration comptant 20 membres, dont la moitié sera désignée par l’État ? Nous pensons que ce n’est pas acceptable. Quel est votre point de vue ? Nous aurons aussi l’occasion de rediscuter de ce sujet en commission et en séance.

Mme Florence Lasserre-David. Permettez-moi tout d’abord de saluer le formidable travail de vos équipes, qui assurent la conservation des connaissances relatives à l’interdépendance entre les êtres humains et l’environnement, ainsi que leur diffusion auprès du grand public.

L’urgence environnementale n’est plus à démontrer. Le groupe du Mouvement Démocrate et apparentés soutient pleinement la décision du Gouvernement d’en faire une priorité du quinquennat.

La place privilégiée qu’occupe le Muséum national d’histoire naturelle dans le cœur des petits comme dans celui des plus grands en fait un acteur clé dans le travail de pédagogie et de sensibilisation de notre société aux problématiques écologiques.

Votre institution, en sa qualité de partenaire privilégié de l’AFB depuis sa création, mais aussi par son ambition de développer l’expertise environnementale avec l’AFB et l’ONCFS, était incontournable dans les réflexions sur la future structure. Vos fonctions au sein du Muséum et votre contribution personnelle à sa réorganisation en 2016, font de vous une personne neutre et qualifiée pour mener à bien votre tâche qui consiste à déterminer la forme du nouvel établissement public. Le travail qui vous attend s’annonce passionnant.

Avant d’en venir à la préfiguration proprement dite, j’aimerais que vous nous fassiez part des premiers éléments de votre « diagnostic » sur chacune des structures appelées à fusionner. J’imagine que vous avez déjà eu le temps de noter leurs points forts. Quels sont-ils ? Par ailleurs, avez-vous cerné quels obstacles l’organisation actuelle de l’AFB et de l’ONCFS pourrait constituer dans la perspective de leur rapprochement ?

Quelle sera votre méthode pour faire accepter par les équipes la fusion envisagée ? Lors de leur audition conjointe, la semaine dernière, les directeurs généraux des deux structures concernées ont fortement insisté sur le fait que la réussite du projet résidera dans l’adhésion du personnel au nouveau modèle. Or on sait que la conduite du changement est toujours une étape délicate. Quelles mesures envisagez-vous pour garantir le soutien des équipes et des agents au nouvel établissement ?

Enfin, quelles sont vos premières préconisations sur la forme et le mode de fonctionnement de la future structure, afin de conserver, voire de renforcer, la synergie entre les différents acteurs de la biodiversité ? Celle-ci ne doit plus souffrir des oppositions classiques, notamment entre les associations de protection de la nature et les chasseurs.

M. Guillaume Garot. Merci, monsieur le directeur général, pour votre présence ce matin et pour votre exposé lucide et pragmatique sur la fusion attendue au 1er janvier 2020.

Vous avez compris, en écoutant les précédentes interventions, la vigilance, l’attention et l’attente des parlementaires que nous sommes : il faut être au rendez-vous de l’ambition fixée par la loi sur la biodiversité.

La loi prévoit que l’AFB pilote la stratégie nationale. Comment le futur établissement public continuera-t-il à le faire ? Je rejoins, sur ce point, les questions de la présidente.

La régionalisation est une des avancées de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite « loi NOTRe » : dans le contexte financier que nous connaissons aujourd’hui – les agences de l’eau financent une partie du budget de l’AFB et la réduction du prix du permis de chasser affectera nécessairement les recettes de l’ONCFS –, comment envisagez-vous l’articulation entre la future structure et les agences régionales ? Qui fera quoi, et avec quels moyens ?

J’aimerais aussi revenir sur la question de la gouvernance. J’entends bien votre argument, selon lequel il faut être peu nombreux dans un conseil d’administration pour être efficace, ou en tout cas ne pas être trop nombreux, mais convenez tout de même que la porte est étroite : le nombre des membres du conseil d’administration va passer de 43 à l’AFB et de 26 à l’ONCFS à une vingtaine pour la nouvelle agence, dans cinq collèges différents. Certains vont se sentir mis à la porte, et pas écoutés. Sur ces sujets si sensibles dans nos territoires, il faut que les représentants de la société française soient associés si l’on veut les mobiliser, comme vous l’avez dit vous-même. Ils doivent participer en ce qui concerne le pilotage de l’agence, la définition de la stratégie et l’utilisation des moyens. La question de la gouvernance est donc centrale.

Mme Sophie Auconie. Je tiens à vous souhaiter bonne chance et bon courage pour la création de cette nouvelle agence, monsieur le directeur général, et pour l’exercice des missions qui lui seront confiées. L’objectif, je dirais même le « challenge », est de haut niveau compte tenu des délais dont vous disposez – ils me semblent en effet un peu courts.

Comme beaucoup de choses ont déjà été dites, je vais éviter les répétitions mais je voudrais malgré tout vous poser plusieurs questions, même si c’est un peu à la Prévert.

Il est évident que la fédération de deux organismes tels que l’AFB et l’ONCFS va permettre des économies d’échelle à court terme. Au-delà des aspects économiques et financiers, quels avantages identifiez-vous ? Quels sont les services que cela permettra de rendre et quelle sera la valeur ajoutée pour chacun des acteurs concernés ?

Combien d’années faudra-t-il pour mener à bien la fusion et, surtout, pour que la nouvelle agence soit pleinement opérationnelle ? Nous avons tous noté que le délai de mise en œuvre est un peu court – je l’ai dit.

L’AFB représente environ 1 300 agents et un budget de 225 millions d’euros, contre à peu près 1 700 agents et 120 millions d’euros du côté de l’ONCFS. Pourquoi fusionner ces structures aujourd’hui alors qu’on ne l’a pas fait en 2016 ? Par ailleurs, l’Office national des forêts (ONF) a-t-il vocation à rejoindre, à terme, la nouvelle agence ? Si ce n’est pas le cas, quelle sera l’articulation entre l’AFB-ONCFS, l’ONF et les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) ?

Je n’insiste pas sur la gouvernance, car elle a déjà été largement évoquée, mais le conseil d’administration est quand même une vraie question. Il est très inquiétant que le nombre de membres passe de presque 70 à 20. S’il y a cinq collèges, cela veut dire que chacun comptera quatre membres : cela permet-il vraiment d’assurer une pluralité ? Je n’en suis pas sûre.

Au nom de mes collègues ultramarins, qui ne sont pas là aujourd’hui…

M. David Lorion. Mais si !

Mme Sophie Auconie. Pardonnez-moi : je ne vous avais pas vu… La participation des députés ultramarins – ils sont quatre dans mon groupe – au conseil d’administration n’est plus explicitement prévue. Il faudra que nous reparlions de ce sujet.

Mme la présidente Barbara Pompili. Je voudrais simplement préciser que tous les collèges du conseil d’administration n’ont pas nécessairement vocation à avoir le même nombre de membres. Ce n’est d’ailleurs pas le cas aujourd’hui au sein de l’AFB et de l’ONCFS, me semble-t-il.

M. Loïc Prud’homme. Merci pour votre intervention liminaire, monsieur le directeur général.

Je ne vais pas revenir sur l’épisode antérieur, même s’il est assez récent, qui est la création de l’AFB et l’occasion ratée de réaliser un rapprochement avec l’ONCFS à ce moment-là.

L’agence en cours de préfiguration aura cinq piliers particulièrement importants, notamment la police de l’environnement, l’appui aux politiques de l’eau et de la biodiversité, la gestion d’espaces naturels et l’appui à leur gestion. On ne peut pas dire que ce soit des préoccupations annexes, notamment après le rapport qui a été publié ce matin par les Nations unies – afin de suivre une trajectoire permettant de sauvegarder notre planète, notamment la biodiversité, il faudrait multiplier les efforts et les moyens par deux ou trois.

Je ne vais pas revenir sur la question de la gouvernance, car M. Martial Saddier l’a très bien évoquée, et je souscris à ses propos : je vais plutôt me concentrer sur les moyens qu’il faudrait déployer. L’ONCFS se trouve dans une impasse : son schéma d’emplois est de moins 39 équivalents temps plein (ETP) en 2019, et le Gouvernement a profité du projet de loi de finances pour escamoter 21 millions d’euros de recettes qui allaient à l’office, en réduisant les redevances cynégétiques. Une telle baisse des effectifs et des moyens, après celle qui a déjà eu lieu lors de la création de l’AFB, vous paraît-elle en adéquation avec les prérogatives et les missions accrues qui doivent être confiées au nouvel établissement public ? Dans ce contexte, ne doit-on pas s’interroger sur cette nouvelle fusion, alors que l’AFB n’existe que depuis quelques années ? L’objectif, plus ou moins avoué, n’est-il pas de couper encore davantage dans les effectifs et les moyens budgétaires en réalisant des mutualisations ? C’est une préoccupation forte pour le groupe La France insoumise.

Je voudrais aussi évoquer les moyens consacrés à la police de la chasse et à la préservation de la faune, dont on a peu parlé jusqu’à présent, alors que ces moyens sont en constante diminution depuis plus de dix ans. Avec la fusion, le projet de loi entend transférer aux fédérations des chasseurs la délivrance des autorisations de chasser accompagné, qui relèvent actuellement de l’ONCFS. Ne pensez-vous pas qu’il serait primordial de conserver un contrôle de l’État et une police sur les activités cynégétiques ?

M. Pierre Dubreuil. Merci pour toutes ces questions, auxquelles je vais essayer de répondre, étant entendu qu’elles se recoupent parfois et que le caractère récent de ma mission m’amènera à être beaucoup plus succinct sur certains points.

Merci également de m’avoir souhaité bon courage pour ce « challenge ». Si je l’ai accepté, c’est parce que j’ai déjà mené des réorganisations difficiles et que la finalité de cette mission me paraît absolument essentielle : je crois, comme je l’ai dit en introduction, que la taille critique de l’opérateur issu de la fusion permettra de mieux exercer les missions attribuées séparément aux deux établissements actuels, au service de la biodiversité. J’en ai la conviction, même si le chemin sera parsemé d’obstacles.

En ce qui concerne la culture d’établissement, mais aussi la question qui m’a été posée sur la chasse, l’un des points essentiels de ce projet est de ne surtout pas opposer les associations et les organisations non gouvernementales (ONG) qui s’occupent de la préservation de l’environnement et les chasseurs qui, selon moi, sont des acteurs de la préservation de la biodiversité.

Vous savez que la COP 14 sur la biodiversité se déroule en ce moment en Égypte : l'Union internationale pour la conservation de la nature (IUCN) vient de publier une « liste verte » des aires protégées, et il se trouve que la France est le pays en comptant le plus – dix sont reconnues sur notre territoire, pour la qualité de la gestion des sites, dont la réserve nationale de chasse et de faune sauvage d’Orlu, dans l’Ariège. Je ne la connais pas, mais c’est la preuve que des espaces gérés par les chasseurs peuvent être reconnus étant comme de grande qualité au titre des services rendus à la biodiversité.

Je pense qu’il est absolument fondamental de ne pas opposer les deux bouts de la chaîne, et je suis convaincu que c’est tout à fait possible car cela correspond à la réalité. Les polices de l’environnement s’exercent toutes au service du même objectif de biodiversité. Le nouvel établissement pourra avoir une culture commune dès lors que les différentes communautés concernées reconnaîtront qu’elles sont au service des mêmes objectifs.

Mes premiers contacts avec les agents des établissements me laissent penser que c’est tout à fait possible : c’est déjà le cas dans certains territoires où les équipes de l’ONCFS et l’AFB travaillent ensemble, bien que leurs cultures soient d’origines différentes – il ne faut pas le nier. La fonction de police est beaucoup plus affirmée à l’ONCFS qu’à l’AFB, dont les objectifs sont a priori différents, bien sûr. Je crois aussi au temps : la culture d’un établissement public se construit dans le temps.

L’AFB est récente, en effet, et si la fusion ne se fait qu’aujourd’hui, je n’en suis pas responsable. Je ne peux pas répondre à la question de savoir pourquoi elle n’a pas été réalisée plus tôt, car j’entrerais dans un champ qui n’est pas le mien. Vous avez une opinion, comme je peux en avoir une, mais ce n’est pas la question. Ma mission est de créer les conditions d’une culture d’établissement commune, sur le terreau d’un établissement qui a été créé il y a deux ans et qui n’est pas achevé. Je dis les choses comme je le sens : le processus de création de l’AFB n’est pas terminé et la culture d’établissement, comme je l’ai vu dans d’autres établissements que j’ai dirigés, ne se décrète pas. Elle se construit dans le temps avec les agents.

Je tiens à insister sur le fait que l’on ne pourra pas construire le futur établissement public sans s’appuyer sur les agents, grâce à des groupes de travail qui permettront de « mixer » l’AFB et l’ONCFS, de travailler sur les grands sujets que nous sommes en train d’évoquer, en sollicitant des propositions, et de porter une grande attention au mixage territorial des implantations. Ce sera un gros travail – il existe environ 300 implantations au total. On fera du « 1+1 » : ma lettre de mission me demande de créer une structure qui soit un établissement plus un autre, et non de faire une restructuration en supprimant des missions, des agents et des moyens. Il y a un vrai défi : comment réaménager les implantations territoriales en mixant les agents afin de mieux assurer les missions sur le plan opérationnel ? Ce sera une priorité pour la construction du nouvel établissement, et ça ne se fera pas en un an.

Tout ne peut pas être réalisé dans ce délai, comme je l’ai dit d’emblée. Certaines choses doivent être faites en un an, mais d’autres ont des échéances de deux ou trois ans : il faut construire le projet d’établissement avec les agents. Ce qui doit être absolument réglé au 1er janvier 2020, ce sont les structures de l’établissement, la gouvernance, ainsi que les questions relatives au budget et aux ressources humaines (RH), étant entendu que les regroupements territoriaux ne pourront avoir lieu que dans un temps plus long.

En ce qui concerne le budget et les moyens, le contexte actuel est difficile. Je vais me rendre au conseil d’administration de l’ONCFS tout à l’heure, juste après cette réunion : la réduction de la redevance cynégétique conduit à une moins-value de 20 millions d’euros de recettes pour l’établissement, qui n’est pas compensée et doit être prélevée sur les fonds de roulement. Vous avez entendu les directeurs généraux des deux établissements : c’est un sujet de gestion sur lequel je n’ai pas à intervenir.

En revanche, je dois faire en sorte que le modèle économique du futur établissement ne soit pas grevé. Il s’agit de faire, je l’ai dit, du « 1+1 » en regroupant et en consolidant les budgets des établissements. J’ai reçu un cadrage clair. On me l’a dit, et j’ai insisté pour le savoir : c’est un regroupement d’établissements, de budgets et d’agents, et non une réduction de moyens. Je serai très vigilant et je construirai, avec les équipes, les directions budgétaires et les agences comptables, les outils financiers nécessaires.

Vous savez, en effet, qu’il y a beaucoup d’aspects un peu techniques derrière ces sujets. Les systèmes d’information des deux établissements, par exemple, ne sont pas les mêmes : sans entrer dans les détails, ce sont des obstacles à lever. Derrière la question des moyens et des budgets, il y a plusieurs points à traiter. Je ferai des propositions, avec les deux directeurs généraux, pour la préfiguration du futur établissement en matière de gestion, mais aussi pour la création des outils financiers qui lui permettront de fonctionner. Nous devrons aller assez vite, car nous serons confrontés à la question dès 2020.

Je ne vais pas contourner le sujet de la gouvernance. Je vous l’ai dit, mon point de vue est que l’on ne peut pas avoir une gouvernance resserrée, comme le demande le projet de loi, et avoir au conseil d’administration tous les membres actuels : ce n’est pas possible. Comme l’a dit madame la présidente, il n’y aura pas forcément le même nombre de membres dans chaque collège. Vous savez que la concertation est au cœur de ma mission : je dois rencontrer les parties prenantes pour les écouter, faire la part des choses et voir quelles sont les possibilités, notamment en ce qui concerne la répartition entre les différentes instances. Je ferai ensuite des propositions, mais ce sera au Gouvernement de décider. Pour moi, il est évident que l’efficacité opérationnelle d’un établissement ne peut pas s’accommoder d’un conseil d’administration de 70 personnes. C’est un vrai enjeu, mais la phase de concertation ne fait que commencer, et je ne peux donc pas vous en dire davantage sur ce sujet. Ma feuille de route consiste à proposer une répartition juste dans le contexte d’un conseil d’administration resserré, et j’insisterai sur la nécessité d’une représentation équilibrée.

L’outre-mer est un aspect fondamental pour moi, comme je vous l’ai déjà dit. Il faudra veiller à cette question.

Vous m’avez interrogé sur ce qui a vocation à figurer dans la loi ou au contraire dans le décret. J’entends qu’il y a une vigilance à exercer sur ce point, qui est très important. Je pense que la loi doit fixer le cadre général et que l’organisation de l’établissement, au-delà d’un certain degré de précision, n’a pas à figurer dans la loi mais plutôt dans le décret : sinon, cela peut compliquer la gestion et la vie de l’établissement. Je l’ai vu à d’autres étapes de ma carrière. Il faut une répartition bien équilibrée entre la loi et le décret. Voilà mon point de vue, mais c’est vous qui prendrez les décisions dans le cadre du débat parlementaire à venir. Il faudra être vigilant et penser à l’avenir de l’établissement, qui devra fonctionner. Certains éléments, notamment la composition des comités d’experts en charge de la gestion adaptative, relèvent du pouvoir réglementaire : il faut laisser une certaine souplesse.

La question de l’articulation territoriale, notamment avec les DREAL, pour l’exercice de la police de l’environnement, est très importante. Je veillerai – pour répondre notamment à la question de M. Loïc Prud’homme – à ce qu’il y ait adéquation entre les missions et les moyens. En effet, on ne peut à la fois se fixer pour objectif d’exercer une véritable police de l’environnement – ce que la taille critique du futur établissement devrait permettre, comme je l’ai dit – et réduire les moyens alloués à cette mission.

En ce qui concerne l’appui fourni par les services départementaux et régionaux aux ressources existantes en matière de police environnementale, notamment sous l’égide des préfets, des scénarios sont à l’étude, à la suite des rapports de l’inspection générale. Il appartiendra au Gouvernement de décider de l’articulation entre les services départementaux et ceux du futur établissement. Mon opinion est que cet établissement, qui sera l’opérateur de référence en matière de police de l’environnement, doit absolument avoir des moyens suffisants pour exercer ses missions et bénéficier d’un appui fort des services qui sont sous l’égide des préfets. Je pense que ce sera le cas. D’ailleurs, les services départementaux et ceux de l’ONCFS et de l’AFB travaillent déjà ensemble.

J’ai été interrogé sur le rapprochement entre le futur établissement et l’Office national des forêts (ONF). Dès lors que l’office exerce lui aussi des missions de police, il est parfaitement légitime de se demander si le rapprochement est possible. Mon point de vue – que j’ai déjà exprimé au ministre – est que ce serait prématuré : on ne peut à la fois considérer qu’il est déjà très compliqué de fusionner deux établissements, dont l’un est encore en phase de stabilisation après sa création récente, et vouloir intégrer une partie ou la totalité d’un troisième, à savoir l’ONF, qui emploie 8 000 agents. Je considère que cette démarche déstabiliserait l’AFB-ONCFS, nouvellement créé. À l’avenir, en revanche, pourquoi pas ? Il ne m’appartient pas d’en décider. Un tel rapprochement peut avoir du sens.

S’agissant du pilotage de la stratégie nationale pour la biodiversité (SNB), celui-ci est effectivement assuré par l’AFB. À l’avenir, il semble absolument évident que le nouvel établissement devra être au cœur de l’élaboration et du suivi de la SNB, sachant que le rôle de la tutelle est également très important en la matière, aux côtés de nombreux autres acteurs.

En ce qui concerne la contribution de 5 euros par chasseur due par les fédérations, je vous avoue que, pour l’instant, j’ai tout juste commencé à en parler. Je vais rencontrer pour la première fois tout à l’heure le conseil d’administration de l’ONCFS. Je rencontrerai aussi, évidemment, les fédérations de chasseurs. Cela représente un volume de 5 millions d’euros environ, ce qui n’est pas neutre dans un budget. Pour l’instant, je ne suis pas en mesure de répondre à votre question : je me garde le temps d’y réfléchir. Toutefois, il est évident que c’est l’un des éléments de ma mission que j’ai bien présent à l’esprit.

Je vais également rencontrer des présidents de comités de bassin – car les ressources de l’AFB sont abondées, comme cela a été rappelé, par les agences de l’eau, de même que celles de l’ONCFS le sont par les chasseurs. Il faut savoir ce que l’on veut : si l’on crée un établissement, il faut lui donner des moyens et les garantir dans la durée. Cela dit, que ceux qui sont au cœur du financement des établissements actuels puissent avoir leur mot à dire à propos de l’avenir est une évidence. Le rôle des comités de bassin est connu, comme celui des agences de l’eau, comme celui des fédérations de chasseurs. Mais ce sujet participe lui aussi de la question de la gouvernance. Or, une fois encore, je ne peux pas vous dire qui doit faire partie du conseil d’administration : je risquerais d’aller trop loin si j’en parlais à ce stade.

Mme la présidente Barbara Pompili. De nombreuses questions se posent en effet quant au financement de l’agence. Cela fera partie du débat que nous aurons sur le projet de loi.

Mme Frédérique Tuffnell. Monsieur le directeur général, je me félicite de la prochaine fusion de l’AFB et de l’ONCFS. Ma question porte sur le nom du nouvel établissement : le sujet me semble fondamental pour en garantir la lisibilité. À mon sens, il faudrait conserver la référence à la biodiversité – à la fois aquatique et terrestre – tout en introduisant des références à la police de l’environnement et à la chasse. L’exercice est donc compliqué. En revanche, je suis convaincue que le terme « biodiversité » doit être préféré à celui de « nature », dont l’inconvénient majeur est d’exclure l’humanité de son champ. Partagez-vous cette approche ?

M. David Lorion. Le mariage quelque peu forcé de l’AFB et de l’ONCFS s’est fait par ordonnance et sera effectif le 1er janvier 2020. Vous nous avez dit que vous iriez outre-mer. C’est bien, mais vous savez que l’outre-mer est constitué d’un archipel de territoires, continentaux ou insulaires. C’est précisément ce qui lui confère sa très grande biodiversité – sans parler des espaces maritimes, notamment les aires marines protégées des Terres australes et antarctiques, dans lesquelles, comme vous le savez en votre qualité de directeur du Muséum national d’histoire naturelle, on trouve de très nombreuses espèces, comme la légine, ou encore des langoustes. Comment pouvons-nous être rassurés quant à la bonne représentation des outre-mer dans les instances décisionnelles du futur établissement ? Êtes-vous sûr qu’il faille gérer directement à Paris ces espaces aussi éloignés de la métropole ?

M. Guy Bricout. Je souhaite vous interroger, monsieur le directeur général, sur la gouvernance de la nouvelle agence, sur les relations avec les chasseurs et sur les relations sociales au sein de l’établissement.

En ce qui concerne la gouvernance, le futur conseil d’administration de l’agence ne comportera plus de parlementaires, contrairement à celui de l’AFB. On ne peut que le regretter. Êtes-vous d’accord avec cette position ? De même, il n’est pas question d’un conseil scientifique dans le projet de loi. On peut se demander pourquoi. Si un tel conseil est prévu, pourriez-vous nous indiquer votre vision quant à sa composition ?

Par ailleurs, la fusion-création de l’AFB-ONCFS entraînera une profonde modification des relations sociales et du travail des agents – lesquels seront au nombre de 3 000 environ après la fusion. Pourriez-vous nous éclairer sur les discussions avec les partenaires sociaux à ce sujet ? Quelle est leur position et quelles sont leurs attentes ?

Enfin, les fédérations de chasseurs bénéficient actuellement d’un interlocuteur dédié, l’ONCFS. Après la réforme, ils seront en lien avec l’AFB-ONCFS. Auditionnés hier, ils ont fait part de leurs inquiétudes sur ce point – ainsi qu’à propos de la dénomination de l’établissement, mais l’un de mes collègues vient de vous poser une question à ce propos.

M. Vincent Descoeur. Je souhaite vous interroger sur l’organisation territoriale de l’établissement, dont vous avez déjà dit un mot. Les choses méritent d’être précisées car il n’en sera peut-être pas question lors de l’examen du projet de loi : il n’est pas impossible que la question soit traitée par voie de décret. Je souhaiterais donc savoir comment, de votre point de vue, la fusion se déclinera sur le terrain, dans les territoires, s’agissant de l’implantation du futur établissement, de la distribution des moyens humains jusque dans les départements, mais aussi de l’organisation des missions de police de l’environnement, que vous avez évoquées tout à l’heure.

M. Pierre Dubreuil. S’agissant du nom de l’établissement, il y a un débat au sujet des mots « biodiversité » et « nature ». In fine, c’est le ministre qui décidera. La consultation est en cours. Vous avez dit, madame Tuffnell, qu’il fallait que le mot « biodiversité » figure dans le nom et qu’il soit fait référence également à la police de l’environnement et à la chasse. En ce qui me concerne, je ne crois pas qu’un consensus mou, qui se traduirait par un nom à rallonge, témoignant de la volonté de faire plaisir à tout le monde, soit souhaitable. La priorité doit être la lisibilité. Cela dit, il y a effectivement un débat autour du mot « biodiversité », lequel désigne la partie vivante de la nature, ce qui ne couvre pas la totalité du champ de l’établissement. Quoi qu’il en soit, les mots « biodiversité » et « nature » me semblent des éléments très importants du nom, mais je me bornerai à cette remarque, car c’est au ministre que revient la décision.

En ce qui concerne les outre-mer, monsieur Lorion, je ne pourrai pas me rendre partout, à moins de délocaliser la mission outre-mer – ce qui serait très agréable, je vous l’accorde… (Sourires.) Il se trouve que le Muséum national d’histoire naturelle réalise l’inventaire de la biodiversité en Martinique – c’est le projet Madibenthos –, que je dois restituer avant que mes fonctions au Muséum ne prennent fin. J’en profiterai pour rencontrer les équipes aux Antilles, et ce, assez rapidement. Selon moi, il convient effectivement d’associer les acteurs locaux des outre-mer. Quand je me rendrai sur place, je rencontrerai évidemment les élus locaux, les différents collectifs et les services de l’État. Il est évident qu’on ne peut pas piloter de Paris la biodiversité outre-mer. Cela dit, il s’agit là, une fois encore, de la question de l’articulation territoriale.

Je crois à une organisation nationale, mais aussi régionale – les délégations interrégionales sont très importantes dans chacun des deux établissements et ont d’ailleurs tendance à se rapprocher ; il ne devrait donc pas être très difficile d’opérer des regroupements – et départementale. Je vous rejoins sur ce point : l’ONCFS est très territorialisé – j’en prends conscience chaque jour – dans la mesure où les quelque 1 500 agents qui exercent des fonctions de police de l’environnement sont sur le terrain. Il faut donc garder cette présence opérationnelle sur le terrain, et non pas la diluer. À propos du pilotage national, se pose d’ailleurs la question de l’emplacement du siège, qui n’a pas été évoquée. Or, comme vous le savez, les deux établissements actuels ont cinq localisations différentes.

Quoi qu’il en soit, l’articulation entre le niveau national, le niveau régional et les outre-mer est absolument fondamentale. Je l’ai dit : je ferai des propositions au cours de ma mission, mais je veux d’abord rencontrer les parties prenantes.

En ce qui concerne l’absence de parlementaires dans le futur conseil d’administration, …

M. Martial Saddier. C’est impensable !

Mme Sophie Auconie. Comment pourriez-vous vous passer de nous ?

M. Pierre Dubreuil. … ce n’est pas à vous que je vais dire que c’est une bonne chose… De toute façon, c’est à vous d’en décider.

Mme la présidente Barbara Pompili. Monsieur Dubreuil, vous avez le droit de ne pas répondre à ce genre de questions ! (Sourires.)

M. Pierre Dubreuil. Je ne veux pas éluder la question mais, comme en ce qui concerne la composition du conseil d’administration, je ne peux pas répondre précisément.

S’agissant des fédérations de chasseurs, je vais les rencontrer pour la première fois tout à l’heure – j’ai hâte de le faire – et ne peux donc non plus vous répondre pour l’instant.

Mme Bérangère Abba. Le nouvel établissement public regroupant l’AFB et l’ONCFS doit permettre de rapprocher les expertises complémentaires des établissements, au service de la reconquête de la biodiversité. Cette fusion doit aussi renforcer l’exercice de la police de l’environnement, mieux la répartir dans l’espace et dans le temps, tout en articulant prévention et contrôle. Pouvez-vous nous préciser comment sera renforcé le pouvoir de police des inspecteurs de l’environnement, quels moyens humains seront accordés à ces missions, sous quelle autorité les agents seront amenés à travailler, et quelles perspectives sont données au personnel afin de faciliter la fusion ?

M. Emmanuel Maquet. Les tensions sociales que nous connaissons depuis quelques semaines dans tout le pays ont eu pour origine des revendications contre une fiscalité excessive. Or, pour baisser la fiscalité, on doit d’abord faire des économies. À ce titre, la fusion de deux établissements publics dont le budget s’élève à plusieurs dizaines de millions d’euros peut permettre de mieux maîtriser certaines charges de fonctionnement. En effet, la fusion implique des mutualisations de services, une optimisation des ressources et, globalement, des économies d’échelle. En tant que député attaché à la maîtrise de la dépense publique, je ne peux qu’accueillir favorablement le projet de loi. Cela dit, le texte – que nous avons étudié – ne présente pas tous les détails avec précision. Ma question est donc la suivante : comment préfigurez-vous l’optimisation d’argent public permise par la fusion des deux établissements ?

M. Jean-Pierre Vigier. La création de ce nouvel établissement public est une bonne chose, et nous en sommes tous d’accord : il faut avancer ensemble pour protéger et préserver notre biodiversité, notamment dans les territoires ruraux. Toutefois, il va y avoir, dans cet établissement, des personnes visant peut-être le même objectif – préserver la biodiversité – mais n’empruntant pas forcément le même chemin pour y arriver. Je tiens aussi à préciser – comme vous l’avez fait, du reste, ce que j’ai apprécié – que les chasseurs participent à l’aménagement du territoire et à la protection de la biodiversité, et qu’ils régulent le gibier. Ma question est simple : quels équilibres allez-vous trouver pour faire avancer toutes ces personnes ensemble, dans le but commun de préserver notre biodiversité et, surtout, comment allez-vous accompagner les chasseurs dans cette nouvelle aventure ?

Mme Bérangère Couillard. Dans le projet de fusion des deux établissements, il est prévu que la Fédération nationale des chasseurs de France et les fédérations départementales instaurent, à compter de la campagne cynégétique 2019-2020, qui débute le 1er juillet 2019, une obligation de dépense de 5 euros minimum par chasseur ayant validé un permis de chasser au profit d’actions contribuant directement à la protection de la biodiversité. Cela permettra la création d’un fonds de 16 millions d’euros destiné à mettre en œuvre des actions concrètes en faveur de la biodiversité. Pouvez-vous nous éclairer sur ces actions et nous expliquer comment, concrètement, seront gérés les crédits ?

M. Gérard Menuel. Je voudrais évoquer le rôle qui sera celui de l’ONF après la mise en place de la nouvelle structure. L’ONF, vous l’avez dit, rassemble 8 000 personnes. Il exerce deux missions bien distinctes : l’une est d’ordre économique, l’autre est liée à la biodiversité – notamment à travers sa fonction de police. N’aurait-on pas pu imaginer de scinder l’ONF, la partie relative à la biodiversité revenant à la nouvelle structure, et la partie économique demeurant telle qu’elle fonctionne actuellement, notamment pour la gestion du bois des forêts, qu’elles soient communales ou d’autre sorte ?

M. Pierre Dubreuil. S’agissant des pouvoirs de police de l’environnement, leur renforcement est au cœur du projet de loi et il est évident que la tutelle revient au futur opérateur. L’extension des pouvoirs de police judiciaire des agents est d’ailleurs prévue. Je considère que les moyens dévolus à la police de l’environnement doivent absolument être sanctuarisés. En effet, on ne peut pas renforcer les missions sans que soient garantis les moyens afférents sur le terrain. Une réflexion est en cours sur l’articulation avec l’action des agents exerçant ces pouvoirs de police dans les services départementaux, sous l’égide des préfets. Je ne peux pas vous répondre pour l’instant sur ce sujet, mais je serai très vigilant, dans le cadre de ma mission, à ce que l’ensemble du dispositif soit opérationnel, pour que les agents de l’établissement puissent effectivement exercer leurs pouvoirs de police, ce qui suppose, une fois encore, que les moyens soient maintenus.

Pour répondre à votre question relative à l’optimisation, monsieur Maquet, j’entends votre propos, mais l’objectif poursuivi à travers la création de l’établissement n’est pas de faire des économies. Je le dis très clairement : on ne peut pas à la fois vouloir créer un tel établissement, dont les missions sont si importantes, notamment au regard de la préservation de la biodiversité – qui est une cause concernant l’humanité tout entière, et non simplement une cause nationale –, et chercher dès le départ à faire des économies. Néanmoins, il est évident que si, dans le fonctionnement de l’établissement, des économies peuvent être réalisées, notamment par des regroupements, nous les ferons, car la gestion des deniers publics me tient à cœur, tout comme à vous. Nous sommes au début de la phase de préfiguration : vous comprendrez qu’à ce stade je ne sois pas en mesure de vous donner une réponse précise. Cela dit, cette perspective doit guider à la fois le préfigurateur et les personnes qui dirigeront l’établissement.

Comment faire fonctionner l’établissement en unissant les différentes communautés, qui exercent leurs missions de manière différente, notamment en matière de police – il y a à la fois celle de l’eau et celle de la chasse ? Comme je vous l’ai dit, je crois à la complémentarité des compétences au sein de ces établissements. C’est là une conviction profonde pour moi, et j’ai pu constater lundi, en rencontrant les équipes, qu’elle était juste : elles ne se vivent pas en opposition les unes par rapport aux autres, même si, sur le terrain, les cultures peuvent être différentes. Il existe une complémentarité, au service de la police de l’environnement et de la biodiversité, de ces métiers et compétences, qui sont très importants pour l’établissement. Mon rôle sera aussi de valoriser ces compétences et de convaincre les agents, quelle que soit leur position dans la chaîne, qu’ils ont vocation à travailler ensemble, au service du même objectif. Non seulement c’est possible, mais le mouvement a d’ores et déjà été engagé.

En ce qui concerne les 5 euros, je vais engager des discussions avec les fédérations de chasseurs pour savoir comment le produit sera utilisé. Là encore, je crois à la concertation, qui est au cœur du projet de loi. Cette nouvelle disposition revient en fait à confier aux fédérations de chasseurs le pouvoir de proposer des actions en faveur de la biodiversité. Nous allons les écouter, discuter avec elles. Comme cela représente un volume budgétaire non négligeable – je l’ai dit –, l’établissement aura son mot à dire sur les actions qui seront proposées par les fédérations de chasseurs. En tout cas, c’est ainsi que je vois les choses.

S’agissant du rôle de l’ONF, monsieur Menuel, on pourrait effectivement séparer la partie économique et la partie biodiversité. Cela peut avoir du sens, même si ce n’est pas à moi d’en décider. Le problème tient à la temporalité : il n’est pas envisageable, dans le contexte de la création de l’établissement public, d’intégrer à celui-ci ne serait-ce que la partie relative à la biodiversité – à savoir la police rurale de l’ONF. C’est une possibilité pour l’avenir, mais pas à l’heure actuelle.

Mme la présidente Barbara Pompili. Nous vous remercions, monsieur Dubreuil, pour vos réponses, et vous souhaitons bon courage dans votre travail. La tâche qui vous attend est grande et vous allez être observé, car la création de cette grande agence est très importante pour nous, dans une période où les atteintes à la biodiversité sont malheureusement de plus en plus graves : nous avons vraiment besoin de cet établissement.

Chers collègues, nous allons marquer une pause. Nous nous retrouverons dans un quart d’heure pour la dernière audition sur la fusion de l’AFB et de l’ONCFS, au cours de laquelle nous recevrons des représentants d’associations environnementales.

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Membres présents ou excusés

 

Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

 

Réunion du mercredi 28 novembre 2018 à 9 h 10

 

Présents. - Mme Bérangère Abba, M. Christophe Arend, Mme Sophie Auconie, Mme Valérie Beauvais, M. Jean-Yves Bony, M. Christophe Bouillon, Mme Pascale Boyer, M. Guy Bricout, M. Fabrice Brun, M. Lionel Causse, M. Jean-François Cesarini, M. Jean-Charles Colas-Roy, Mme Bérangère Couillard, Mme Yolaine de Courson, Mme Marguerite Deprez-Audebert, M. Vincent Descoeur, Mme Jennifer De Temmerman, M. Jean-Baptiste Djebbari, M. Loïc Dombreval, M. Bruno Duvergé, M. Olivier Falorni, M. Jean-Luc Fugit, Mme Patricia Gallerneau, M. Guillaume Garot, Mme Laurence Gayte, Mme Stéphanie Kerbarh, M. Jacques Krabal, M. François-Michel Lambert, Mme Florence Lasserre-David, M. Jean-Claude Leclabart, Mme Sandrine Le Feur, M. David Lorion, Mme Aude Luquet, M. Emmanuel Maquet, M. Gérard Menuel, Mme Marjolaine Meynier-Millefert, M. Bruno Millienne, M. Adrien Morenas, M. Matthieu Orphelin, M. Bertrand Pancher, Mme Zivka Park, M. Alain Perea, M. Patrice Perrot, M. Damien Pichereau, Mme Barbara Pompili, M. Loïc Prud'homme, Mme Véronique Riotton, M. Martial Saddier, M. Vincent Thiébaut, Mme Frédérique Tuffnell, Mme Hélène Vainqueur-Christophe, M. Pierre Vatin, M. Hubert Wulfranc, M. Jean-Marc Zulesi

 

Excusés. - Mme Nathalie Bassire, Mme Danielle Brulebois, M. Stéphane Buchou, M. Stéphane Demilly, M. Christian Jacob, Mme Sandra Marsaud, Mme Mathilde Panot, M. Jean-Luc Poudroux, Mme Laurianne Rossi, Mme Nathalie Sarles, M. Jean-Marie Sermier, M. Gabriel Serville

 

Assistaient également à la réunion. - M. Jean-Pierre Vigier, M. Jean-Luc Warsmann