Compte rendu

Commission
des affaires sociales

  – Examen de la proposition de loi relative au droit de résiliation sans frais de contrats de complémentaire santé (n° 1660) (M. Dominique Da Silva, rapporteur)              2

  – Présences en réunion.................................33

 


Mercredi
20 mars 2019

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 58

session ordinaire de 2018-2019

Présidence de
Mme Brigitte Bourguignon,
Présidente,

 


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COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Mercredi 20 mars 2019

La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.

(Présidence de Mme Brigitte Bourguignon, présidente)

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La commission des affaires sociales examine la proposition de loi relative au droit de résiliation sans frais de contrats de complémentaire santé (n° 1660) (M. Dominique Da Silva, rapporteur).

Mme la présidente Brigitte Bourguignon. Nous allons commencer l’examen de la proposition de loi de M. Gilles Le Gendre et plusieurs de ses collègues relatives au droit de résiliation sans frais de contrats de complémentaire santé. Le rapporteur, M. Dominique Da Silva, va nous livrer son analyse. Compte tenu de nos horaires notamment liés à l’examen en cours du projet de loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé, je vous remercie toutes et tous de votre présence matinale.

M. Dominique Da Silva, rapporteur. Si l’accès aux soins et à une médecine de qualité repose d’abord, en France, sur une assurance maladie obligatoire, cette dernière ne prend en charge que 77 % des frais médicaux des Français. Les organismes complémentaires d’assurance maladie, assurance privée facultative pour la plupart des assurés sociaux, complètent de manière significative ce remboursement. Il s’agit donc bien d’un second étage de notre protection sociale, qui couvre aujourd’hui 95 % des assurés, soit la quasi-totalité de la population française.

Malgré les dispositifs de couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) et d’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé (ACS), la couverture complémentaire pèse de plus en plus sur les ménages qui ne sont pas obligatoirement couverts par leur employeur et qui doivent souscrire eux-mêmes une garantie.

Les organismes complémentaires financent 13,5 % de la consommation de soins. Leur part est notamment significative pour l’optique, à hauteur de 73 % de la dépense, et les soins dentaires, à hauteur de 41 % de la dépense.

Les contrats souscrits auprès des organismes complémentaires sont soit des contrats individuels, conclus directement par un particulier, soit des contrats collectifs, conclus par un employeur pour ses salariés. Depuis 2016, en application de l’accord national interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2013, l’ensemble des salariés doit désormais être couvert par un contrat collectif souscrit par leur employeur, dont les garanties sont déterminées dans le cadre d’un accord collectif. L’employeur participe au financement de cette couverture collective mise en place à hauteur d’au moins 50 %.

Les contrats collectifs profitent surtout aux actifs, tandis que les contrats individuels concernent les non-salariés : étudiants, fonctionnaires, indépendants, inactifs et retraités.

Trois catégories d’acteurs évoluent sur ce marché de l’assurance maladie complémentaire, dont le volume atteint 36 milliards d’euros. La moitié de ce marché est détenue par les mutuelles, sociétés de personnes à but non lucratif appartenant à leurs assurés. Elles sont surtout actives sur le marché de l’assurance individuelle, qui représente 70 % de leurs bénéficiaires. Elles ont la part la plus élevée de bénéficiaires de 60 ans ou plus.

Les institutions de prévoyance gèrent 19 % des contrats. Ce sont des personnes morales de droit privé ayant un but non lucratif. Organismes paritaires, elles opèrent essentiellement sur le secteur de la prévoyance collective des salariés. Du fait de leur spécialisation en collectif, elles couvrent essentiellement des actifs, bien portants.

Les sociétés d’assurance contrôlent 28 % du marché. Ce sont des sociétés anonymes à but lucratif, à l’exception des sociétés d’assurance mutuelles à but non lucratif. La répartition par âge de leurs bénéficiaires est semblable à celle de la population générale.

Depuis 2011, les contrats collectifs sont en moyenne déficitaires, alors que les contrats individuels ont dégagé des excédents. En 2016, les organismes complémentaires ont, dans leur ensemble, dégagé de légers excédents sur leur activité santé, les excédents, supérieurs à 4 %, réalisés sur les contrats individuels faisant plus que compenser les déficits, inférieurs à 4 %, des contrats collectifs.

Globalement, 80 % des cotisations hors taxes sont reversées en prestations et 20 % sont destinées à couvrir les charges de gestion des organismes.

La présente proposition de loi vise donc à fluidifier et à rééquilibrer le marché de l’assurance maladie complémentaire, surtout en faveur des non salariés les plus vulnérables.

Depuis la loi du 28 janvier 2005 tendant à conforter la confiance et la protection du consommateur, dite loi « Chatel », le souscripteur de couverture complémentaire santé, employeur ou particulier, dispose le plus souvent d’un délai limité à deux ou trois semaines, courant octobre, pour résilier son contrat le cas échéant, au vu de la tarification proposée par l’organisme gestionnaire pour l’année suivante, avant que ledit contrat ne soit tacitement reconduit pour une année.

Des exemples obtenus à l’occasion de mes auditions montrent que certains organismes utilisaient des méthodes peu loyales, voire abusives, pour s’opposer à cette résiliation.

La possibilité de résiliation infra-annuelle des contrats et des garanties en matière de complémentaire santé correspond à une véritable attente de nos concitoyens. Selon un sondage réalisé par l’Institut français d’opinion publique (IFOP), 94 % des Français se déclarent favorables au principe défendu par la présente proposition de loi. 75 % trouvent les conditions de résiliation contraignantes et plus de la moitié des Français ne connaît pas les modalités de résiliation.

Les retraités sont encore plus favorables à la résiliation infra-annuelle de leur complémentaire santé, à hauteur de 96 %, bien qu’ils soient davantage au courant – à 68 % contre 54 % – des conditions de résiliation que le reste de la population. Le coût de la complémentaire santé pèse en effet davantage sur les non-salariés, et plus particulièrement sur les personnes âgées.

Malgré les dispositions de l’article 4 de la loi du 31 décembre 1989 renforçant les garanties offertes aux personnes assurées contre certains risques, dite « loi Évin », qui prévoit la portabilité des contrats collectifs à l’occasion du passage à la retraite, ce dernier se traduit mécaniquement par un renchérissement des cotisations. La contribution des seniors est en effet maximisée par plusieurs effets cumulatifs.

En premier lieu, quel que soit le statut de l’organisme complémentaire, les cotisations augmentent fortement passé un certain âge, avec la consommation médicale des seniors. Ensuite, les retraités qui ne bénéficient ni de la CMU-C ni de l’ACS doivent assumer l’intégralité de la cotisation, alors que la moitié était prise en charge par leur employeur lorsqu’ils étaient salariés. En outre, ils sont couverts par des contrats individuels, sur lesquels les organismes complémentaires font des excédents, pour être plus compétitifs et déficitaires sur le marché des contrats collectifs. Enfin, ils sont soumis à la taxe de solidarité additionnelle (TSA) de 13,27 %, assise sur les cotisations versées, ce qui aboutit à des niveaux de taxation inéquitables.

Le sens de la présente proposition de loi est de permettre au souscripteur d’une assurance complémentaire en matière de santé de bénéficier d’une faculté de résiliation de son contrat sans frais et à tout moment, dès lors que la garantie a été souscrite il y a plus d’un an.

Les trois premiers articles étendent aux complémentaires santé le dispositif introduit par la loi du 17 mars 2014 relative à la consommation, dite « loi Hamon ». Il s’agit d’une évolution et non d’une révolution. Aujourd’hui déjà, les organismes complémentaires sont amenés à gérer des résiliations de garanties souscrites, soit à l’échéance annuelle du contrat ou de la garantie souscrite, soit en cours d’année, en cas de changement de situation personnelle.

L’article 4 fixe l’entrée en vigueur du dispositif au 1er décembre 2020, de manière qu’il s’applique aux contrats conclus ou renouvelés tacitement le 1er janvier 2021. Cette entrée en vigueur différée a pour objectif de permettre aux acteurs du secteur d’avancer sur le déploiement de solutions adaptées à la consultation en temps réel des droits des assurés.

Les craintes de déstabilisation du marché, invoquées par certains acteurs de façon dramatique et parfois caricaturale, restent sans fondement. Je rappelle qu’en 2014, avant le vote du projet de loi « Hamon », les mêmes représentants des assureurs et des mutuelles avaient prédit que cette faculté de résiliation conduirait à déstabiliser le marché de l’assurance automobile et de l’assurance habitation : cinq ans plus tard, ils reconnaissent qu’après une augmentation de quelques points du taux annuel de résiliation, celui-ci a retrouvé les niveaux précédents, sans avoir bousculé les équilibres du marché.

De la même manière, des avancées normatives importantes ont contribué à transformer le marché de l’assurance emprunteur, avec l’apparition de nombreux acteurs et des baisses de tarifs pouvant atteindre 30 %, tout en procurant les mêmes garanties à l’organisme de crédit.

La présente proposition de loi ne vise ni à bouleverser le marché ni à renforcer sa segmentation entre des assurés qui seraient de « bons » risques, et d’autres qui seraient de « mauvais » risques. Elle vise avant tout à améliorer l’offre de complémentaire santé, en laissant les assurés libres de changer d’organisme lorsqu’ils estiment que les garanties proposées et le service rendu ne sont pas à la hauteur de leurs attentes. Ce texte sera profitable aux retraités, dont les contrats individuels dégagent, quoi qu’on en dise, des bénéfices, et sont aussi bien couverts par le secteur lucratif que par le secteur non lucratif.

La proposition de loi ne pourra pas susciter de comportements opportunistes, car le respect des engagements du plan « 100 % santé », prévoyant une durée minimale pluriannuelle avant la prise en charge d’un nouvel équipement, seront contrôlés.

La juste concurrence entre acteurs du marché de la complémentaire santé passe également par un renforcement de la lisibilité et de la comparabilité des garanties proposées.

Selon un sondage réalisé par l’IFOP pour l’UFC-Que choisir, 37 % des Français trouvent leurs garanties santé difficiles à comprendre, et 48 % ne connaissent pas à l’avance, pour des soins importants, le montant du remboursement qu’ils percevront. Ce manque de lisibilité conduit à des incompréhensions et des méfiances entre les organismes complémentaires et leurs assurés, qui jugent le service rendu indispensable, mais contraint et opaque.

Le 14 février 2019, l’Union nationale des organismes d’assurance maladie complémentaire (UNOCAM) et les principales fédérations d’organismes complémentaires d’assurance maladie ont signé, en présence de la ministre des solidarités et de la santé, l’engagement d’améliorer la lisibilité des garanties de complémentaire santé. Cet engagement prévoit notamment, pour les documents contractuels émis à compter du 1er janvier 2020, une harmonisation des libellés des principaux postes de garanties, ainsi qu’une liste d’exemples concrets de remboursements en euros.

Mes chers collègues, la présente proposition de loi vise à obtenir : un marché plus concurrentiel et rééquilibré, au moyen de l’ouverture du droit à résiliation ; une concurrence loyale fondée sur une lisibilité accrue des offres, des garanties et des prestations proposées ; une baisse des frais de gestion, grâce à la sécurisation et la généralisation du tiers payant, dans le cadre d’une relation efficace entre assurance maladie obligatoire et organismes de couverture maladie complémentaires.

M. Julien Borowczyk. Notre majorité, et le groupe La République en Marche en particulier, s’est clairement engagée dans la voie de la restitution du pouvoir d’achat aux Français. C’est pourquoi nous présentons aujourd’hui cette proposition de loi, dont le but est de permettre une résiliation simple et sans frais de sa complémentaire santé à tout moment, après un engagement incompressible de douze mois minimum.

Quels en sont les buts ? Défendre les usagers, et en particulier les plus fragiles, en faisant cesser la grande complexité de résiliation, qui nourrit un système voué à la reconduction quasi automatique des engagements sans laisser le temps aux adhérents de comparer. Cette comparaison sera désormais plus aisée grâce à l’accord de place signé par les complémentaires avec Agnès Buzyn, le 14 février dernier, accord qui assure en outre une plus grande rapidité de remboursement, ainsi que des garanties de couverture.

Il ne s’agit pas pour autant de favoriser certaines pratiques critiquables. Ainsi, nous souhaitons limiter le nomadisme médical en imposant un engagement minimal de douze mois avant toute résiliation, stimuler la concurrence et favoriser une baisse des prix des complémentaires, ainsi qu’une plus grande innovation dans les services, une amélioration des garanties et la mise en place de nouveaux outils de dématérialisation plus interactifs et moins coûteux en frais de gestion.

La loi Hamon nous a prouvé que la liberté de choix menait à une concurrence sur les prix saine et bénéfique. Ainsi, un couple de retraités d’Arras, pour les mêmes garanties, peut payer sa mutuelle entre 180 et 250 euros par mois… Cet exemple n’est pas anodin, car il prouve que les retraités sont un « cœur de cible » pour de nombreux organismes.

Il n’est donc pas question d’une quelconque démutualisation, mais plutôt de la nécessaire régulation vertueuse d’un secteur ayant augmenté ses frais de gestion de 38 %, tandis que les frais médicaux remboursés n’augmentaient que de 20 %. Réduire les frais de gestion grâce à une plus grande liberté de choix, c’est rendre un milliard d’euros aux Français.

Notre groupe défend concrètement le pouvoir d’achat. C’est pourquoi cette proposition de loi est très largement soutenue par la population et les associations de consommateurs.

M. Alain Ramadier. Cette proposition de loi vise à donner aux assurés la possibilité de résilier sans frais et à tout moment, après la première année de souscription, les contrats de complémentaire santé. Actuellement, ces contrats peuvent être résiliés lors de leur échéance annuelle et sous certaines conditions fixées par la loi. Conditions que ce texte propose de lever en étendant le champ d’application de la loi Hamon.

Un tel texte, disons-le clairement, est dicté par les circonstances : la crainte de voir les cotisations aux contrats de complémentaires santé augmenter suite à la mise en place du « reste à charge zéro ». Lors du dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) et à l’occasion de diverses auditions, les députés du groupe Les Républicains avaient mis en garde le Gouvernement contre ce risque. Quelques mois plus tard, vous voilà contraints de réagir. Dont acte !

Principal argument avancé : donner plus de liberté aux assurés et ainsi accroître la concurrence sur le marché des complémentaires santé pour faire baisser les prix. Depuis 2010, les tarifs des assurances de complémentaire santé ont en effet augmenté de 21 %, et de plus de 50 % depuis 2006. Vous vous attaquez donc à un vrai sujet.

Reste à juger de la véritable portée de ce texte au regard des objectifs affichés, et notamment celui de parvenir à contenir la hausse des tarifs. De vrais doutes existent à ce sujet. Comment espérer une telle baisse, alors qu’un arrêté, prévu par la loi Hamon, sur la lisibilité des contrats proposés par les assurances, les institutions de prévoyance et les mutuelles n’a toujours pas été pris ?

La bonne information des consommateurs et leur capacité à comparer les différentes offres sont, chacun en conviendra, indispensables à la mise en œuvre d’un cadre concurrentiel potentiellement favorable au pouvoir d’achat des Français. Changer le droit, c’est bien. Veiller à son appropriation et à sa bonne application, c’est mieux !

Ajoutons à cela l’objectif visant à limiter l’augmentation des frais de gestion des mutuelles. Là aussi, des doutes existent. Le secteur des complémentaires santé, mes chers collègues, n’est pas un secteur comme un autre, n’est pas un marché comme un autre. Il concerne des publics fragiles, comme les personnes âgées. Public moins averti et qui pourrait être le grand perdant de la mise en œuvre d’un système toujours plus concurrentiel.

En définitive, bien que la philosophie générale de ce texte semble aller dans le bon sens, les doutes soulevés ne permettront pas de réunir les conditions pour que notre groupe lui soit favorable. Nous resterons cependant sensibles aux éléments que la majorité sera en mesure de livrer pour répondre aux inquiétudes exprimées par les députés républicains.

Mme Nathalie Elimas. Le Président de la République a pris des engagements forts pour répondre aux revendications de nos concitoyens en matière de pouvoir d’achat. Afin de tenir compte de l’urgence économique et sociale et d’y apporter des solutions concrètes, il est nécessaire que tous les acteurs s’engagent. C’est pourquoi Emmanuel Macron a également demandé aux organismes complémentaires de permettre à chacun de résilier son contrat de complémentaire santé à tout moment après un an de contrat effectif.

Cette proposition de loi est la traduction législative de cet engagement. Alors que les Français dépensent chaque année en moyenne 688 euros pour leur complémentaire santé, nous ne pouvons que soutenir l’objectif de ce texte, qui permettra un véritable gain de pouvoir d’achat. Il nous semble toutefois essentiel que cette mesure attendue par tous ne conduise pas à une augmentation des coûts pour les assurés, ce qui s’avérerait totalement contre-productif. Monsieur le rapporteur, pouvez-vous nous apporter des garanties sur ce point ?

En outre, les députés du groupe du Mouvement Démocrate et apparentés considèrent que cette mesure doit aller de pair avec une plus grande lisibilité des garanties proposées dans les contrats de complémentaire santé. Cela permettrait à nos concitoyens de choisir leur mutuelle en toute connaissance de cause, et nous avons déjà appelé de nos vœux cette évolution importante lors de l’examen du PLFSS. Il s’agit là encore d’un engagement du Président de la République, dont Agnès Buzyn avait promis la mise en œuvre au 1er janvier. Qu’en est-il aujourd’hui ?

M. Boris Vallaud. Le texte que nous discutons ce matin, proposé par la majorité, vise à inscrire le principe de la résiliation des contrats d'assurance santé complémentaires sans frais et à tout moment, après un an de contrat. Pour vous dire la vérité, cette proposition n’est pas neuve ; elle dort dans les vieux cartons de Bercy depuis bien longtemps. Or ce n’est pas forcément dans les vieilles marmites qu’on fait les meilleures soupes…

Une nouvelle fois, je veux revenir sur la méthode. Après avoir renoncé à présenter ces dispositions par amendement dans le cadre du projet de loi relatif à la croissance et à la transformation des entreprises (loi Pacte), le Gouvernement a fait déposer une proposition de loi par le groupe majoritaire. Habile méthode, qui l’exonère en particulier de toute étude d’impact sur un texte qui fait l’unanimité contre lui. En effet, les organisations syndicales, les acteurs du secteur et même certaines associations rejettent ce texte. Les nombreuses sollicitations reçues, tant sur le terrain que par messages électroniques, témoignent de ce rejet massif.

Mais, fait inédit, ce texte est aussi rejeté par une partie de la majorité, puisque, pour la première fois, des commissaires du groupe majoritaire de notre commission ont déposé des amendements de suppression des articles, et non moins de dix d’entre eux ont décidé de retirer leur signature de ce texte. Bref, sur la forme, impréparation, absence de concertation et précipitation sont les maîtres-mots.

Sur le fond, nous voterons contre ce texte, pour trois raisons. D’abord, ce texte part d’une logique libérale que nous ne partageons pas, à savoir que la concurrence serait bonne en soi et qu’en matière de santé, elle ferait baisser les prix. Cette concurrence risque au contraire de mettre de côté les plus fragiles et de mettre à mal notre système de solidarité intergénérationnelle. Pour justifier votre choix, vous vous appuyez sur ce qui a été fait dans le cadre de la loi de 2014, mais cette loi était bien une loi relative à la consommation, non à la santé. La santé, elle, ne se consomme pas.

Ce texte renvoie la complémentaire santé à un bien de consommation courante. Nous rejetons formellement cette seule logique du bilan coûts-avantages. Enfin, vous ne répondez pas à une des questions fondamentales, à savoir que ceux qui en ont le plus besoin, les personnes âgées, sont couverts par des contrats de moyenne gamme. En effet, le montant des cotisations augmente lors du passage à la retraite.

Plutôt que de proposer plus de concurrence et plus de libéralisme, vous auriez pu réfléchir à d’autres pistes, comme celle d’une modulation de la taxe sur les contrats complémentaire santé en fonction de l’âge de l'assuré. Mais pour cela, il aurait fallu prendre le temps d’écouter les parties prenantes, de consulter les acteurs, ce que vous n’avez pas fait.

Pour terminer, et puisque notre rapporteur a cité beaucoup de sondages, je voudrais vous faire partager cette inspiration de Rousseau, qui a dit que « la domination même est servile quand elle tient à l’opinion ».

Mme Agnès Firmin Le Bodo. Nous examinons ce matin une proposition de loi visant à autoriser la résiliation des complémentaires santé à tout moment dans l’année, à partir de la deuxième année d’assurance, au lieu de la possibilité de résiliation annuelle qui prévaut aujourd’hui.

Elle a pour ambition, sur le modèle de ce qu’avait prévu la loi Hamon pour les contrats d’assurance habitation ou automobile, de protéger davantage les assurés en leur donnant davantage de liberté dans le choix de leur complémentaire. L’objectif sous-jacent, que partage le groupe UDI, Agir et Indépendants, est d’accroître la concurrence et de faire baisser les prix des complémentaires, favorisant ainsi le pouvoir d’achat de nos concitoyens, notamment les plus modestes d’entre eux.

Mais attention : baisser le prix, soit, mais quid de la couverture assurée ? Choisir en toute connaissance de cause doit être le principe de base. Nous accueillons avec bienveillance cette proposition, mais souhaitons attirer votre attention sur les effets imprévus qu’elle pourrait entraîner.

Il aurait d’abord été sage de réaliser au préalable une étude d’impact de la mesure. Le choix d’en passer par une proposition de loi vous permet d’esquiver cette contrainte, ce qui est regrettable pour la clarté de nos débats. On aurait pu, au moins, demander l’avis du Conseil d’État.

Il serait également pertinent d’introduire des garde-fous, pour éviter que cette ouverture ne se traduise par une guerre intestine entre complémentaires pour capter les assurés, au détriment de la qualité des contrats proposés.

Qu’en pensent par ailleurs les professionnels de santé, à qui les changements fréquents de mutuelles risquent de compliquer la vie ? Il est déjà difficile aujourd’hui de s’assurer que les patients ont bien leurs droits à jour. Alors que l’on ne sait pas gérer en temps réel la situation des droits, il faudra être vigilant pour qu’une telle mesure ne se traduise pas par une perte de confiance dans la solvabilité des patients.

Notre groupe se prononcera en fonction de l’évolution des débats sur cette proposition de loi.

M. Adrien Quatennens. L’idée sous-jacente de ce texte est de fluidifier la concurrence entre les complémentaires et d’améliorer leur compétitivité. Car c’est, une nouvelle fois, sous ce prisme-là qu’est envisagée la question de la santé…

Promesse de campagne, le « reste à charge zéro », au demeurant extrêmement limité et ne concernant qu’un panier de soins circonscrit aux lunettes et aux prothèses, n’en a pas moins pour conséquence que les tarifs des complémentaires sont appelés à évoluer et à augmenter une nouvelle fois. Cette proposition de loi vise donc sans doute à envoyer un signal à celles et ceux qui ont des complémentaires santé. S’il est vrai que leur tarif augmente, ils pourraient demain les résilier sans frais…

On parie une nouvelle fois sur l’organisation d’un marché, en l’occurrence le marché des complémentaires. En diminuant les coûts pour favoriser la prise en charge progressive des frais de santé par les mutuelles, on laisse se poursuivre le mouvement de basculement de la prise en charge par la sécurité sociale vers la prise en charge par les complémentaires.

Les députés du groupe La France insoumise pensent au contraire que la sécurité sociale doit prendre en charge l’intégralité des dépenses de santé. La reprise dans son giron des complémentaires, comme la prise en charge intégrale des soins, est un objectif non seulement impératif, mais accessible. Les économies de gestion réalisées par l’absorption des complémentaires au sein de la sécurité sociale permettraient, à elles seules, de financer plus d’un tiers du fameux reste à charge zéro.

C’est la raison pour laquelle, au cours de l’examen du texte, nous défendrons un amendement en ce sens, en demandant un rapport sur ce que coûterait véritablement le « 100 % Sécu », objectif qui nous paraît non seulement souhaitable, mais à portée de main.

M. Pierre Dharréville. Il faut craindre en effet que cette proposition de loi n’ait pas les effets magiques escomptés et qu’elle soit un nouveau coup porté au mutualisme.

D’abord, elle part d’un mauvais constat, parce que l’« augmentation des frais » est avant tout liée, pour partie, au transfert de ce qui était pris en charge auparavant par la sécurité sociale et, pour partie, à une augmentation des taxes reposant directement sur les mutuelles, à hauteur de 14 %.

Ensuite, nous pensons, au groupe de la Gauche démocrate et républicaine, que l’on ne peut mettre dans le même sac l’ensemble des acteurs de l’assurance complémentaire. Il y a, en particulier, des organismes à but lucratif et des organismes à but non lucratif – je pense évidemment au mouvement mutualiste. Or la concurrence libre et non faussée va porter atteinte au fondement solidariste de ce dernier. Dans un secteur qui est déjà de plus en plus concentré, vous allez accélérer encore la concentration. Cela ne résoudra pas les problèmes que vous soulevez.

Vous allez ensuite accroître la segmentation, en augmentant encore la chasse aux patients rentables, avant d’ouvrir les portes au marketing, qui va s’installer toujours plus, troublant la vision qu’on peut avoir de ce secteur. Ainsi, les inégalités risquent d’augmenter, tandis que les frais liés à la concurrence vont eux aussi se faire sentir, contrairement à ce que vous annoncez.

Aujourd’hui, les frais de gestion des mutuelles s’élèvent déjà à 14,7 %, contre 22 % pour les organismes à but lucratif. Votre logique d’individualisation des risques va à l’encontre de ce dont nous avons besoin. Nous pensons, nous aussi, qu’il faut évoluer vers le « 100 % santé » et que les mutuelles pourraient jouer un tout autre rôle dans notre société : à nos yeux, vous portez précisément atteinte au rôle d’acteur des assurés mutualistes qui se mobilisent autour des enjeux de santé.

Mme Jeanine Dubié. Permettez-moi, madame la présidente, une petite remarque avant de commencer : je sais bien que vous n’êtes pas responsable de l’agenda parlementaire, mais je regrette tout de même la tenue de cette réunion ce matin, alors que nous siégeons cette semaine dans l’hémicycle sur le thème de la santé. En le disant, je pense aussi à nos collaborateurs.

Mais venons-en à notre sujet. L’accès aux soins, dont nous débattons actuellement avec le projet de loi sur l’organisation et la transformation du système de santé, est au cœur des préoccupations des Français. Car il n’est pas uniquement menacé par la répartition inégale des praticiens sur le territoire. Il l’est également par le coût des soins, comme par celui de la couverture santé.

Pourtant, le groupe Libertés et Territoires, même s’il souhaite remédier à cette problématique qui conduit souvent à un renoncement de soins, ne peut pas adhérer à votre proposition. Nous doutons que cette possibilité de résiliation à tout moment et sans frais puisse être une solution adaptée, car elle est contraire à l’esprit mutualiste, qui est assis sur le principe de la mutualisation du risque, ce qui suppose de la stabilité.

La solidarité n’est pas soluble dans une logique de court terme. Il ne s’agit pas d’un bien de consommation. Comme cela a été rappelé, nous avions bien, en adoptant la loi Hamon, assoupli la résiliation de contrat en matière assurantielle, mais en prenant en compte la spécificité des régimes mutualistes. Leur place dans le système de protection sociale est particulière à la France. Nous n’avons donc pas voulu appliquer ce dispositif aux mutuelles.

Nous craignons que la mesure proposée entraîne des effets pervers et contraires à votre objectif, tels que des augmentations de tarifs dues à de nouveaux frais de publicité ou de gestion. Il risque d’y avoir des cotisations en hausse pour les personnes à risque. Quant au reste à charge zéro, y a-t-il eu une étude d’impact, monsieur le rapporteur ? La question se pose d’autant plus que le Gouvernement a renoncé à insérer cette mesure dans le projet de loi relatif à la croissance et à la transformation des entreprises (PACTE).

Mme la présidente Brigitte Bourguignon. Puisque vous venez d’évoquer la question de l’ordre du jour, je tiens à rappeler, avant de donner la parole au rapporteur pour qu’il réponde aux représentants des groupes, que toutes les commissions de cette assemblée se réunissent au moins une fois par semaine, quel que soit l’ordre du jour de la séance publique. Je voudrais saluer, d’ailleurs, les fonctionnaires qui, jour et nuit, travaillent pour nous. Car il ne faudrait pas les oublier au passage.

M. Dominique Da Silva, rapporteur. Monsieur Borowczyk, cette mesure est effectivement un gain de pouvoir d’achat. C’est une mesure utile. À titre d’exemple, la seule stabilisation des cotisations grâce à la concurrence générerait un gain de pouvoir d’achat significatif et permettrait de redistribuer plus d’un milliard d’euros chaque année. Ne serait-ce que de stabiliser ces cotisations, voilà qui n’est pas neutre.

Monsieur Ramadier, vous avez mis l’accent sur la lisibilité des contrats. En effet, c’est un sujet de discussion. Un accord de place a été passé avec les fédérations d’organismes complémentaires, qui garantit un certain nombre d’éléments, notamment un tableau comportant des montants de remboursement en euros et permettant ainsi les comparaisons. Faisons-leur faire confiance. Je proposerai d’aller un peu plus loin sur ce sujet, mais nous y reviendrons à l’occasion de l’examen des amendements.

Madame Elimas, vous avez évoqué le risque d’augmentation les coûts, et insisté sur la lisibilité. Si le marché devient plus concurrentiel, c’est un contresens que d’imaginer que les coûts vont augmenter ! La crainte qu’expriment les organismes est justement due au fait qu’ils pensent devoir faire des efforts, au lieu de pouvoir augmenter leurs prix.

Monsieur Vallaud, vous regrettez l’absence d’étude d’impact. J’ai regardé celle du projet loi Hamon, que vous défendiez, je crois : elle ne comporte aucun chiffre… Et pourtant, vous étiez d’accord, à l’époque, pour mettre en concurrence les mêmes acteurs qui nous resservent aujourd’hui les mêmes arguments. Si la modulation de la TSA n’est pas une mauvaise idée, elle relève plutôt du PLFSS.

Madame Firmin Le Bodo, vous m’interrogez également sur l’étude d’impact. Même si elle n’a pas encore été faite, les Français sont ravis à l’idée de pouvoir résilier leur contrat après un an d’engagement. Je ne crois pas que quiconque ait envie de résilier le sien pour un autre qui serait moins favorable et plus cher : cette liberté de résiliation ne saurait s’appliquer que si l’on trouve mieux.

Par ailleurs, la vérification des droits est un vrai sujet. C’est pourquoi l’entrée en vigueur de cette loi n’est prévue qu’au 1er décembre 2020, c’est-à-dire bien pour les contrats qui seront renouvelés au 1er janvier 2021. Cela laisse du temps, sachant que ces questions ont été mises sur la table et qu’il faut que les acteurs jouent le jeu.

Monsieur Quatennens, la prise en charge par une sécurité sociale universelle constituerait un changement de paradigme total. Vous comprenez que ce n’est effectivement pas l’objet de notre proposition de loi…

Monsieur Dharréville, je vous ferai la même réponse : la prise en charge intégrale relèverait en effet d’un tout autre texte. Cela dit, je ne pense pas qu’il y ait, d’un côté, de « gentilles » mutuelles et, de l’autre, de « méchants » assureurs. Je crois d’ailleurs que, par la force des choses, étant donné que les assureurs doivent dégager des bénéfices tandis que les mutuelles peuvent ne pas le faire, je ne comprends pas pourquoi elles s’inquiètent tant. Il y aura tout simplement de la concurrence, et les bons contrats l’emporteront sur les mauvais.

Madame Dubié, vous nous dites que la mutualisation des risques ne se fait que sur le long terme, mais je rappelle que l’on peut déjà quitter sa mutuelle chaque année, à date. Nous proposons simplement d’assouplir cette règle en offrant la possibilité de résilier à tout moment, pour éviter les réengagements dans l’urgence et donner le temps aux adhérents de comparer différentes offres.

M. Olivier Véran. Des progrès ont été accomplis en matière de complémentaires santé, notamment par les organismes mutualistes qui se sont engagés, d’une part, à appliquer le « reste à charge zéro » avant la date officielle de son entrée en vigueur, et, d’autre part, à ne pas assortir cette mise en place d’une hausse des cotisations.

Sur d’autres plans, le constat est moins positif, mais il porte sur une situation dont nous avons hérité : je rappelle que la hausse des coûts de gestion des complémentaires santé sur les six années écoulées correspond à une hausse mensuelle, par assuré, de 2,50 euros, ce qui est considérable.

Cette hausse s’expliquant par le nombre important d’acteurs, les logiques de sélection des risques, la concurrence et la fiscalité, la proposition de loi que nous examinons me paraît un bon moyen pour inciter les organismes complémentaires à la modérer.

Même si ces organismes sont conscients de la nécessité de mettre un terme à cette hausse, pour la première fois en 2019 les coûts de gestion des complémentaires vont dépasser ceux de l’assurance maladie, laquelle couvre 78 % des dépenses de soins contre sept fois moins pour les complémentaires. Il y a donc un très gros effort à accomplir.

Par ailleurs, afin de permettre aux Français de s’assurer à moindre coût, il serait intéressant, me semble-t-il, de réfléchir à la possibilité, notamment technique, de mettre en place une complémentaire publique portée par l’assurance maladie. Sans aller jusqu’à la prise en charge à 100 % préconisée par M. Quatennens et qui, pour le coup, porterait un coup fatal au secteur des complémentaires santés, il n’y a pour moi aucun tabou à se poser la question d’un portage des garanties complémentaires par l’assurance maladie. C’est un enjeu majeur en termes de pouvoir d’achat, chez les retraités comme chez les actifs.

M. Gilles Lurton. Monsieur le rapporteur, vous partez, dans votre présentation, d’un double constat : un manque de lisibilité des garanties des contrats des complémentaires santé ; des tarifs élevés qui continuent d’augmenter, ce qui engendre une baisse de la couverture de la population.

Nous pouvons tous tomber d’accord sur ces constats, mais je crains pour ma part que votre proposition, si elle peut répondre aux attentes d’un certain nombre de Français en facilitant la résiliation quand ils ont un sujet de mécontentement, ne produise aussi des effets pervers. J’aurais ainsi souhaité avoir votre avis sur le risque de voir augmenter les frais de gestion, suite à des résiliations fréquentes, et d’aboutir donc à l’effet inverse de celui que vous recherchez.

Vous considérez par ailleurs qu’en facilitant le passage d’une complémentaire à l’autre, vous allez accroître la concurrence entre les organismes et les obliger à rendre leur garanties plus lisibles : il me paraît difficile d’affirmer qu’il existe un véritable lien entre ces deux éléments, je pense même, au contraire, que cette mise en concurrence risque d’inciter les organismes à mettre en avant leurs garanties les plus attractives au détriment des actes de santé les plus coûteux. Sur ce point aussi, j’aurais souhaité recueillir votre avis.

Enfin, ces facilités de résiliation s’adressent prioritairement aux contractants individuels. Or vous soulignez que l’une des questions problématiques concerne la prise en compte de l’âge de l’assuré dans les contrats individuels, ce qui est interdit dans un contrat collectif. Certes, il y a là une véritable source d’inégalités, mais je ne vois pas très bien en quoi la proposition de loi y remédie.

Si ce texte a le mérite d’ouvrir le débat sur un sujet qui est source d’inégalités pour les Français, il ne me paraît pas cependant répondre aux questions que vous avez soulevées.

M. Bernard Perrut. Si les objectifs de cette proposition de loi sont louables, en particulier la baisse des tarifs des complémentaires de santé, qui ont augmenté de 21 % depuis 2010, j’aimerais savoir quelles assurances que nous avons que les mesures proposées ne produiront pas d’effets pervers. Nous craignons déjà, depuis l’adoption du « 100 % santé » dans le dernier PLFSS, que les mutuelles augmentent leurs cotisations, d’où notre vigilance.

Quelles seront, concrètement, les avancées en termes de lisibilité et de comparabilité des garanties proposées par les acteurs du marché, sachant que l’augmentation du nombre d’entrées et de sorties enregistrées va complexifier la gestion administrative des comptes des assurés et entraîner des surcoûts de gestion, auxquels il faut ajouter les dépenses que vont engager les organismes pour retenir leurs adhérents et tenter de séduire ceux des concurrents avec des offres alléchantes ?

Avez-vous, monsieur le rapporteur, des statistiques à nous communiquer sur le taux de clients de ces complémentaires qui souhaitent résilier leur contrat et ne le peuvent pas pour l’instant ? Quel serait l’impact réel de l’adoption de cette proposition de loi ?

 Vous évoquez dans votre rapport le cas des retraités : pouvez-vous nous préciser plus spécifiquement en quoi cette réforme leur serait favorable ? Qu’en est-il par ailleurs des contrats de prévoyance ? Avez-vous étudié l’application des dispositions en discussion à ces contrats ?

M. Guillaume Chiche. L’objectif de cette proposition de loi, qui est de redonner du pouvoir d’achat aux Françaises et aux Français, est louable et partagé par tous. Néanmoins, les mesures proposées me semblent contre-productives, surtout pour les plus fragiles.

Elles risquent d’abord d’introduire une segmentation entre les personnes âgées, réputées les plus exposées aux risques de santé, et les jeunes, qui le sont moins. Aujourd’hui, au sein d’une même mutuelle de santé, il y a une solidarité entre ceux qui bénéficient de dépenses de soins supérieures à leurs cotisations – souvent les personnes âgées – et ceux qui en bénéficieront moins – les plus jeunes. Or, si les jeunes ont des facilités pour passer d’une complémentaire santé à une autre, s’ils peuvent individualiser leurs risques en se tournant vers les complémentaires les moins chères – proposées notamment par les banques et les assurances –, qui seront aussi les moins étendues, les personnes de plus de 65 ans, couvertes à 75 % par une mutuelle santé, ne le feront pas, car elles seront toujours tenues d’avoir une bonne couverture, donc une bonne complémentaire. Mécaniquement, cela va se traduire par une disparition de la péréquation solidaire entre les assurés, accompagnée d’une hausse des cotisations pour les plus exposés au risque.

Je m’interroge enfin sur l’aspect opérationnel des mesures que vous proposez, notamment en ce qui concerne le tiers payant. Aujourd’hui, on ne présente à la pharmacie sa carte de mutuelle qu’une fois dans l’année. Après votre réforme, si le pharmacien ne vérifie pas pour chaque demande de tiers payant, que le bénéficiaire dispose d’une mutuelle, il risque de s’exposer à des défauts de paiement.

Mme Isabelle Valentin. Si le système de santé à la française repose sur une assurance maladie obligatoire, qui couvre les trois quarts des frais médicaux des Français, il repose également sur des organismes de complémentaire d’assurance-maladie, couvrant la quasi-totalité de nos concitoyens. Ainsi, bien que facultatives, les complémentaires santé jouent un rôle essentiel dans notre modèle de sécurité sociale.

Plusieurs des revendications inscrites dans les cahiers de doléances portent, vous le savez, sur le pouvoir d’achat et, plus précisément, sur l’accès aux soins. À l’heure où les déserts médicaux se multiplient, ces revendications sont légitimes, tant l’accès aux soins est disparate et inégalement assuré dans notre pays.

C’est pourquoi, nous pouvons, sur ces sujets, nous rassembler autour d’une idée simple : il faut rendre du pouvoir d’achat aux Français dans le cadre d’un accès plus aisé à des soins de santé de qualité. Cette proposition de loi va dans le bon sens, puisqu’elle permet de donner aux assurés la liberté de résilier sans frais leur contrat auprès de leur complémentaire santé.

Pour autant, il convient de rester vigilant sur d’éventuels effets pervers. D’abord, puisque l’idée est de donner aux assurés la liberté de résilier leur complémentaire, à leur entière convenance et sans frais, la concurrence sur le marché de la complémentaire santé va s’accroître de manière inéluctable. On peut donc craindre que l’augmentation des dépenses des complémentaires santé dédiées à leur compétitivité ne se répercute sur leurs prix. Or la santé n’est pas un marché comme les autres, qui puisse être soumis à la loi de l’offre et de la demande. Il doit notamment tenir compte des dépenses liées au vieillissement.

 Comment comptez-vous réguler les prix des mutuelles pour éviter les grosses augmentations ? Ne craignez-vous pas, par ailleurs, de fragiliser le tiers payant ?

M. Jean-Pierre Door. Cette proposition de loi tend à ouvrir la possibilité de résilier sa complémentaire santé sans frais, après un an de cotisation. Elle complète ainsi la loi Hamon qui n’intéressait que les contrats d’assurance habitation ou automobile. Soit.

Les mutuelles s’inquiètent de cette perspective, alors qu’elles doivent déjà s’adapter au « 100 % santé » et au « reste-à-charge zéro ». Ont-elles raison, ont-elles tort ?

 La concurrence ne risque-t-elle pas d’être contreproductive et pénalisante pour les bénéficiaires ?

Enfin, comment un assuré peut-il sortir d’un contrat collectif qui a été signé, après appel d’offres, par un chef d’entreprise ou le responsable qui le salarie ?

M. Cyrille Isaac-Sibille. L’engagement présidentiel était fort et portait sur la lisibilité des contrats complémentaires santé. C’est le vrai problème car, actuellement, personne n’est en mesure de comprendre son contrat.

Votre proposition de loi entend donner aux assurés la possibilité de résilier leur contrat : cette proposition est intéressante pour nos concitoyens, car elle pourrait leur permettre de réaliser certaines économies. Cependant, ne mettons pas la charrue avant les bœufs. Pour pouvoir résilier son contrat en toute connaissance de cause, il faut tout d’abord être capable de comparer la nouvelle proposition à l’ancienne. Notre crainte est par ailleurs que les complémentaires santé se lancent dans une bataille effrénée en démarchant des personnes souvent fragiles et en augmentant leur budget de communication et de publicité : j’en sais quelque chose, puisque je suis élu de la Métropole de Lyon, qui dispose de deux très beaux stades, le Groupama Stadium et le MatMut Stadium !

Lors de l’examen de votre texte, nous serons donc très attentifs aux garanties que vous apporterez concernant la lisibilité des contrats et au fait que cette lisibilité soit effective avant que la possibilité de résiliation soit entérinée.

Mme Corinne Vignon. Avant de commencer l’examen de ce texte, je tenais à préciser que cette proposition de loi soulève certaines interrogations, qui peuvent légitimement engendrer des doutes dans l’esprit des membres de cette commission. Avant son examen dans l’hémicycle, j’espère que des points d’atterrissage seront trouvés pour l’améliorer, car elle pourrait, en l’état, engendrer des effets induits qui iraient à l’encontre du but recherché, celui de donner du pouvoir d’achat aux consommateurs.

J’ai fait personnellement le choix de retirer mes amendements pour l’examen en commission, afin d’offrir davantage de temps à la discussion. Je sais pouvoir compter sur le sérieux et la sagesse du rapporteur pour obtenir des avancées avant la séance.

Les produits de santé ne sont pas des biens de consommation comme les autres, les mutuelles ne sont pas des organismes comme les autres, et il est donc nécessaire de prendre le temps de la réflexion sur les dispositions que comporte cette proposition de loi. Le bon sens et le pragmatisme sont aujourd’hui de rigueur, et les victoires collectives sont toujours les plus belles.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Si cette proposition de loi ne constitue pas une révolution en soi, il me paraît délicat de ne pas disposer d’étude d’impact sur les dispositions prévues. Vous avez fait état des conséquences positives de l’application de la loi Hamon sur les contrats d’assurance automobile, mais on ne peut traiter de la même manière l’assurance automobile obligatoire et la couverture santé complémentaire facultative. C’est pourquoi, si je n’ai pas d’opposition de principe à cette proposition de loi, je souhaiterais néanmoins pouvoir disposer d’une étude d’impact qui me permette de valider sans crainte les dispositions prévues, notamment en ce qui concerne les conséquences qu’elles sont susceptibles d’avoir sur le tiers payant.

M. Stéphane Viry. Force est de constater que cette proposition de loi arrive un peu comme un cheveu sur la soupe, ce qui nous trouble, comme nous trouble le fait que le rapporteur ait eu besoin de déposer, au dernier moment, une trentaine d’amendements pour la corriger.

Elle aborde un sujet qui peut s’entendre, puisque le droit des assurances connaît depuis plusieurs années des évolutions qui tendent à faciliter la résiliation des contrats et à renforcer l’information des consommateurs. Vous proposez d’étendre ce mouvement, qui a d’abord concerné les contrats multirisques habitation, véhicule et responsabilité civile, à la couverture des risques santé.

En dépit de votre exposé liminaire et de vos premiers éléments de réponses, monsieur le rapporteur, je reste néanmoins dubitatif. Concrètement, votre proposition est-elle créatrice de valeur ? Tous les acteurs du secteur ont-ils été sollicités en amont ? J’ai cru comprendre en effet que la concertation avait été assez succincte.

Je ne suis pas certain par ailleurs que l’on puisse accepter que les complémentaires santé soient considérées comme des produits ordinaires soumis à la loi du marché ; en la matière, la plus grande prudence s’impose.

Monsieur le rapporteur, il me semble, avec tout le respect que j’ai pour vous, que vous êtes doucement naïf lorsque vous accordez d’emblée votre confiance aux organismes qui gèrent les complémentaires santé. Je pense tout au contraire que la prudence s’impose et qu’on ne peut tolérer aucune incertitude sur un sujet qui touche à la santé de nos concitoyens.

Comment pouvez-vous nous apporter, avant l’examen dans l’hémicycle, des éléments plus concrets sur les effets de votre proposition de loi ? Vous prétendez vouloir œuvrer en faveur du pouvoir d’achat des Français : après avoir voté la désindexation des pensions de retraite et des allocations familiales, je trouve cela un peu fort de café.

Mme Josiane Corneloup. L’objectif de cette proposition de loi est de redonner du pouvoir d’achat aux Français, ce qui est parfaitement louable. Cependant, l’idée que la concurrence contribue à modérer les prix des complémentaires santé est toute théorique ; dans la réalité, c’est l’inverse qui pourrait se produire, du fait non seulement de l’augmentation des frais de gestion que vont devoir supporter les organismes, mais également de l’augmentation de leurs coûts de communication, puisqu’ils vont devoir être de plus en plus inventifs pour attirer les clients.

Le changement infra-annuel va entraîner la multiplication des actes de gestion, qui sont des opérations complexes, ce qui aura des conséquences importantes en termes de coûts mais également en termes de qualité de service. Le risque est également que les professionnels qui pratiquent le tiers payant subissent de fréquents impayés. Par ailleurs, cette proposition de loi met à mal la solidarité intergénérationnelle, puisque un retraité coûte beaucoup plus cher qu’il ne rapporte. Enfin, que va-t-il advenir des actions de prévention conduites par les mutuelles auprès de leurs adhérents ? Si ceux-ci changent chaque année, ces actions perdront de leur sens puisqu’elles ne pourront s’accompagner d’aucun suivi possible, alors que la prévention doit être un axe majeur de notre politique de santé.

Mme Monique Iborra. Si vous avez, comme moi, participé aux réunions organisées dans le cadre du grand débat national, vous aurez entendu les personnes âgées se plaindre des mutuelles. Nous devons entendre leurs récriminations.

Certes, cette proposition de loi n’est pas forcément parfaite, mais c’est à notre commission de la corriger. C’est d’autant plus nécessaire qu’un sondage a prouvé que les Français adhéraient en nombre à sa philosophie.

M. Dominique Da Silva, rapporteur. Monsieur Véran, en ce qui concerne votre idée d’une complémentaire publique, je n’ai pas de réponse à vous apporter, mais on peut aussi réfléchir à une autre répartition de la charge entre les complémentaires et l’assurance maladie obligatoire, notamment pour les personnes âgées. Des discussions, me semble-t-il, sont en cours, pour rendre plus universelle la couverture de certains soins.

Plusieurs d’entre vous ont évoqué le manque de lisibilité des garanties et l’accord de place, certains souhaitant la remise d’un rapport. Ce sera le sens d’un amendement que je vous proposerai pour que ce rapport soit réalisé avant l’entrée en vigueur de la loi.

M. Lurton s’est inquiété de la discrimination en fonction de l’âge et de la hausse des frais induite par la concurrence : c’est un contresens d’imaginer que l’accroissement de la concurrence va faire augmenter les prix. Une complémentaire santé a plusieurs manières de rester compétitive : elle peut notamment maintenir le niveau des cotisations mais aussi augmenter le taux de redistribution, ce qui se traduit par un gain de pouvoir d’achat, puisqu’on est mieux remboursé.

Cette proposition de loi permettra aux meilleures offres de se détacher du lot et de se développer par rapport aux mauvais contrats, ce qui sera une autre vertu de la mise en concurrence, sachant qu’en matière de complémentaires santés, nous avons affaire à des contrats encadrés pour être fiscalement aidés, dits « contrats responsables », ce qui signifie qu’il n’y a pas de mauvaise complémentaire santé, mais seulement de plus ou moins bonnes. En d’autres termes, à partir du moment où vous disposez d’une complémentaire santé, vous êtes relativement bien couvert. Quant aux tarifs de certains organismes, qui sont prohibitifs, c’est tout l’objectif de cette proposition de loi de les modérer.

En matière de compétitivité toujours, je proposerai également un amendement qui vise à remplacer l’obligation de communiquer sur un taux de gestion – chiffre peu utile qui n’apporte aucune information aux assurés – par celle d’annoncer le taux de redistribution pratiqué. Cette mesure, qui avantagera les mutuelles et les institutions de prévoyance, permettra une meilleure comparaison par les assurés de leur reste à charge selon les organismes.

Monsieur Chiche, la segmentation du marché existe déjà, dès lors que les actifs sont assurés par leur entreprise. On ne peut mutualiser les actifs avec les retraités, détenteurs de contrats individuels, et je ne vois pas comment on pourrait changer la donne. Par ailleurs, la CMU-C permet la protection des publics les plus fragiles. J’ajoute enfin que les contrats individuels souscrits par les personnes âgées sont en général beaucoup plus profitables aux complémentaires santé que les contrats collectifs, et vous commettez là un nouveau contresens sur la mutualisation.

Madame Valentin, la mise en concurrence a bien pour but de rendre du pouvoir d’achat aux Français, dès lors que la lisibilité des contrats est garantie – c’est l’objet de l’un de mes amendements. Notons néanmoins qu’au travers de leur fédération, les organismes de complémentaires se sont engagés à assurer cette lisibilité dès le 1er janvier 2020, donc dans moins d’un an. Faisons-leur confiance, ce qui n’exclut pas la vigilance : un suivi sera donc mis en place, avant l’entrée en vigueur de la loi, pour vérifier qu’ils ont tenu leurs promesses.

Personne ne va renoncer à sa complémentaire santé pour trouver moins bien et plus cher ailleurs, mais reportons nous quand même au sondage qui montre sans équivoque que les Français plébiscitent la levée des contraintes qui entourent la résiliation : ils sont 94 % à la souhaiter – sur un échantillon de 1 008 personnes, qui limite la marge d’erreur. C’est bien la preuve que cette proposition de loi a toute sa raison d’être.

La commission en vient à l’examen des articles de la proposition de loi.

Article 1er : Faculté de résilier sans frais et à tout moment après la première année de souscription les contrats de complémentaire santé proposés par les sociétés d’assurance

La commission est saisie des amendements identiques AS1 de M. Guillaume Chiche, AS16 de M. Pierre Dharréville, AS19 de M. Matthieu Orphelin et AS32 de M. Boris Vallaud.

M. Guillaume Chiche. Notre amendement tend à la suppression de l’article 1er, qui concerne la possibilité de résiliation infra-annuelle pour les contrats souscrits avec des sociétés d’assurance.

Actuellement, les assurés peuvent déjà changer de complémentaire santé, non pas une fois par an, mais deux fois par an. Le risque introduit par cette proposition de loi, et au premier chef par cet article, est d’inciter les complémentaires santé, en particulier celles proposées par les banques et les assureurs, à remettre en cause le principe de non-sélection des risques, en sélectionnant des individus présentant des bons risques, réputés moins onéreux, pour proposer des tarifs différentiels en fonction de l’état de santé de chacun.

Le risque est également d’accentuer le nomadisme des assurés qui, plutôt que de mutualiser leur risque avec l’ensemble de la population, vont être incités à l’individualiser en optant pour la complémentaire la moins chère, afin de préserver leur pouvoir d’achat.

Par ailleurs, dans un contexte de concurrence accrue, les mutuelles, les institutions de prévoyance, les banques et les sociétés d’assurance, qui sont des acteurs économiques, vont être contraints d’augmenter le budget qu’ils consacrent à la publicité et au démarchage de nouveaux clients, puis de répercuter la hausse de ces frais de gestion sur les tarifs qu’ils proposent.

C’est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de cet article, comme des suivants.

M. Pierre Dharréville. Chacun aura compris que je ne crois pas aux vertus du marché. Or, ce que vous nous proposez, c’est un nouvel acte de dérégulation, dans un secteur qui en a déjà subi beaucoup ces dernières années.

Selon moi, nous aurions meilleur compte à renforcer au contraire le modèle mutualiste pour répondre aux besoins, plutôt que de dire, comme vous le faites, « Malheur aux vaincus ! » C’est un vrai problème dans ce secteur qui est celui du droit à la santé, auquel contribue les complémentaires. C’est un secteur qui a besoin de stabilité et de prévisibilité, mais ce que vous proposez va accroître le phénomène de segmentation et porter atteinte à la solidarité et au mutualisme, qui font que l’on s’assure mutuellement les uns les autres, et pas simplement soi-même. C’est aller dans la mauvaise direction et porter un nouveau coup de masse à l’édifice mutualiste.

Vous dites, monsieur le rapporteur, ne pas pouvoir changer la donne, c’est tout le problème de votre proposition de loi, qui va accroître tous les déséquilibres que nous connaissons actuellement. Il y aurait pourtant des mesures à prendre, notamment pour empêcher certains organismes – dans les cas, par exemple, ou la banque et l’assurance se croisent –, de sélectionner de fait les patients au profil le plus rentable. La logique que vous défendez ne peut, au contraire, que renforcer l’agressivité commerciale.

M. Matthieu Orphelin. La santé n’est pas un bien comme les autres. C’est un bien d’exception pour chacun de nos concitoyens, ce qui justifie un encadrement plus important de la concurrence du secteur, afin de garantir une couverture des risques pour tous.

Le principe de mutualisation des risques sur lequel les mutuelles de santé sont construites assure une solidarité intergénérationnelle. Accroître la concurrence entre les acteurs du secteur favorisera l’individualisation des risques, ce qui est susceptible d’exclure les plus fragiles financièrement et socialement, alors même que ce sont ceux qui ont le plus besoin d’une complémentaire santé. Ainsi les seniors pourraient-ils être les grands perdants de cette réforme.

Par ailleurs, il est utile de rappeler que les services non marchands d’intérêt général rendus par les mutuelles – plus de sept mille actions de prévention et d’éducation à la santé par an – pourraient pâtir de l’accroissement de la concurrence entre les acteurs.

Mettre en avant un gain de pouvoir d’un milliard d’euros est une vision à court terme, et la concurrence qui va engendrer la multiplication des offres promotionnelles pour les populations les moins à risque ne peut être que néfaste. Je n’ai pas spécialement envie qu’un jour, en France, Amazon ou d’autres acteurs de ce type deviennent les leaders du marché des complémentaires santé.

C’est parce que je crois davantage dans le modèle mutualiste que dans celui de la concurrence débridée, que je souhaite la suppression de l’article 1er et des articles 2 et 3.

M. Boris Vallaud. Je ne reviendrai pas sur la démonstration qui a été faite lors de la discussion générale ni sur les arguments qui viennent d’être développés. Si l’étude d’impact de la loi Hamon était succincte, c’est qu’elle ne proposait pas à dessein la proposition que vous formulez aujourd’hui qui est finalement plutôt réfléchie que légère. Vous faites le choix du modèle de la banque-assurance et non celui du modèle mutualiste, vous préférez la sélection par le marché, des gains de pouvoir d’achat hypothétiques et une perte de qualité en matière de prise en charge. Voilà pourquoi nous proposons de supprimer l’article 1er.

M. Dominique Da Silva, rapporteur. Vous pointez le risque de démutualisation, c’est-à-dire en fait de perte de solidarité qu’entraînerait l’adoption de l’article 1er. Mais quel serait l’intérêt de sélectionner les « bons » risques alors que, comme l’indique la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), puisque les contrats individuels dégagent globalement des excédents et que les contrats collectifs, dont les risques sont moindres puisqu’ils concernent avant tout une population d’actifs au travail, sont déficitaires ? Je veux bien qu’on loue les vertus du modèle mutualiste, mais la réalité est là : les contrats collectifs des mutuelles ont baissé de 5 % tandis que les contrats individuels ont augmenté de 2,2 %. Il faut qu’on m’explique pourquoi les moins bien assurés paient pour les mieux protégés. Je comprends votre volonté de protéger l’esprit mutualiste, mais, dans les faits, ce marché ne couvre pas si bien que cela les personnes les plus défavorisées.

La crainte de la concurrence s’explique par des comportements abusifs. Demander aux gens d’apporter une réponse dans un délai de vingt jours quand ils jugent trop forte la hausse de cotisation qui leur est infligée est problématique. L’idée est donc de permettre aux bons contrats de s’imposer par rapport aux mauvais contrats – et sans pointer personne du doigt. Il n’y a pas lieu de s’inquiéter par rapport aux banques et aux assurances, puisque les chiffres montrent qu’elles ont un moins bon taux de redistribution. Si les mutuelles protègent bien les gens, je ne vois donc pas pourquoi ils se tourneraient vers un contrat qui leur offrirait de moins bonnes conditions de remboursement.

Je crois sincèrement que cette proposition de loi permettra aux acteurs de regarder plus en détail les offres. C’est pourquoi il est important qu’il y ait de la lisibilité afin que les gens aient une couverture santé qui leur corresponde.

Avis défavorable, donc, sur ces amendements de suppression de l’article.

M. Jean-Pierre Door. Monsieur le rapporteur, j’avoue que vos réponses aux questions de notre groupe nous laissent perplexes et que nous restons sur notre faim. Pour ma part, je n’ai pas eu de réponse sur la sortie des contrats collectifs.

Nous nous abstiendrons sur ces amendements de suppression de l’article 1er.

M. Julien Borowczyk. Actuellement, beaucoup de contrats présents dans le portefeuille des mutuelles concernent des personnes fragiles qui sont retraitées ou qui bénéficient d’une ACS. Or, comme l’a dit M. le rapporteur, en la matière les contrats sont bénéficiaires. Quant aux banques et aux assurances, elles souhaitent récupérer les plus jeunes.

J’ai entendu parler de « nomadisme ». Actuellement, on peut signer un contrat au mois de mars et le résilier en fin d’année. Nous demandons que le contrat soit signé pour un minimum de douze mois avant de pouvoir le résilier, ce qui permettra de limiter ce nomadisme.

S’agissant de la simplification des modes de résiliation, la proposition de loi prévoit que la dénonciation d’adhésion intervient par lettre ou tout autre support durable.

Enfin, on nous parle des coûts de gestion actuels. Je ne sais pas si c’est de la prévention que de sponsoriser des équipes de football, de cyclisme et des stades. En la matière, on pourrait faire des économies.

M. Guillaume Chiche. Monsieur le rapporteur, vous avez formulé une question concernant les contrats individuels qui présenteraient un excédent et seraient donc intéressants pour les organismes, et les contrats collectifs qui le seraient moins. La réponse est toute simple : quand vous bénéficiez d’un contrat collectif, ce n’est pas vous qui menez les négociations. Tout à l’heure, Mme Dubié a rendu hommage à nos collaborateurs et collaboratrices. Comme ils disposent d’un contrat collectif pour leur complémentaire santé, ils peuvent donc bénéficier de négociations menées en leur nom auprès d’assureurs, de mutuelles ou d’institutions de prévoyance. C’est ce qui fait que leurs tarifs seront intéressants et que leur couverture sera bonne. Avec un contrat individuel, M. X ou Mme Y n’auront pas la même capacité de négociation. Ouvrir la concurrence, ce n’est pas tirer vers le bas la tarification, c’est permettre à ceux qui bénéficient d’un contrat collectif de continuer à être bien protégés, et à ceux qui sont couverts par un contrat individuel, de changer de complémentaire santé quand ils le souhaitent – mais sans les accompagner, ce qui n’apporte aucune solution au problème de la lisibilité. Si les contrats collectifs ne sont plus couverts par les mêmes institutions que les contrats individuels, ce principe d’équilibre financier cessera, ce qui créera effectivement une rupture dans la mutualisation du risque.

M. Pierre Dharréville. Dans notre pays, 4 millions de personnes n’ont pas de complémentaire santé. Je ne crois pas que les mesures que nous examinons nous permettront de résoudre ce problème. La première chose à laquelle on renonce quand on est confronté à des difficultés, c’est à sa mutuelle, qui permet d’assurer correctement son droit à la santé. Parfois, il s’agit d’un renoncement progressif, c’est-à-dire que l’on se retrouve avec un contrat dont les garanties sont de plus en plus low cost, et qui finissent par disparaître complètement.

Une complémentaire santé est hélas de moins en moins un engagement, et de plus en plus un produit que l’on essaie de vendre. Ce n’est pourtant pas un bien de consommation. Vous êtes dans une logique de marché ; or, l’un des moyens auxquels on peut recourir pour avoir prise sur la qualité et le montant des contrats, c’est la démocratie. Dans le mouvement mutualiste, des ferments de démocratie existent : ce sont les assurés mutualistes qui décident ensemble de la manière dont ils utilisent l’argent collecté et dont ils remboursent les soins. C’est cela qu’il faut développer si l’on veut réellement s’attaquer au problème, plutôt que de jouer sur un individualisme accru.

Enfin, la publicité et le marketing représentent 0,2 % seulement du budget du mouvement mutualiste, et encore ces dépenses leur ont-elles été imposées par le développement du marché que vous allez encore accroître.

Mme Agnès Firmin Le Bodo. Notre groupe votera contre ces amendements de suppression de l’article 1er.

Monsieur le rapporteur, notre collègue a parlé de naïveté. Pour ma part, je ferai plutôt référence au monde des « Bisounours ». L’augmentation du pouvoir d’achat ne se fera que si vous instituez un garde-fou selon le principe « toutes choses étant égales par ailleurs ». Venez travailler avec moi une journée à la pharmacie : vous verrez que les gens ne savent pas comment ils sont couverts. Si votre cotisation baisse de 50 euros, vous serez content, mais si vous n’êtes pas couvert pour les vignettes bleues ou oranges, à la fin de l’année vous serez perdant. Le véritable enjeu, c’est celui de la lisibilité et de l’explication que l’on donnera aux personnes sur les contrats individuels. Voilà les réponses que l’on attend.

M. Adrien Quatennens. À l’issue de la présentation de ces différents amendements de suppression, on voit que ce qui apparaissait peut-être, au départ, comme une évidence, c’est-à-dire que le droit de résiliation sans frais constituerait de fait un gain de pouvoir d’achat, est en réalité contesté. En effet, cette logique concurrentielle pourrait induire des frais de gestion supplémentaires qui seraient répercutés sur celles et ceux qui bénéficient de complémentaires santé. C’est la raison pour laquelle je voterai ces amendements.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Au-delà de la saine concurrence concernant les contrats collectifs, les déficits sur ces contrats collectifs ne sont-ils pas l’une des premières raisons de l’inflation sur les contrats individuels ? Ne serait-il pas raisonnable de limiter les déficits sur les contrats collectifs si cela a une influence sur les contrats individuels ? Voilà un élément qu’il serait utile de pouvoir mesurer dans notre réflexion.

M. Dominique Da Silva, rapporteur. Monsieur Chiche, c’est bien parce que les bénéficiaires de contrats individuels n’ont pas le même pouvoir de négociation que ceux qui bénéficient de contrats collectifs que cette proposition de loi a du sens. Elle va précisément leur donner du pouvoir de négociation. Tout l’intérêt de cette proposition de loi, c’est d’accepter l’idée qu’on puisse être déficitaire sur des contrats visant à protéger un public plutôt mieux portant que le reste de la population et se « refaire » sur les contrats individuels, alors que l’on supporte déjà des primes non aidées pour les personnes qui ne sont pas dans le champ de la CMU-C ou de l’ACS.

Monsieur Door, il n’est pas possible de sortir individuellement d’un contrat collectif : il faut que ce soit une décision de l’employeur, naturellement dans le cadre d’une négociation collective. Je rappelle que les entreprises vont en moyenne au-delà des 50 % minimum puisqu’elles financent la mutuelle à hauteur de 58 %. Cela veut dire que les entreprises ne cherchent pas à faire des économies. Elles ont compris que le fait que ces cotisations soient défiscalisées représente un gain de pouvoir d’achat qui ne passe pas par une augmentation des salaires.

Madame Firmin Le Bodo, je plaide également en faveur de la lisibilité que vous appelez de vos vœux. C’est d’ailleurs pourquoi je vous proposerai deux amendements en ce sens. Le premier vise à obliger les complémentaires santé à communiquer sur le taux de redistribution, le second prévoit que l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) remet un rapport avant l’entrée en vigueur de cette loi.

La commission rejette les amendements.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS44 du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement AS45 du rapporteur.

M. Dominique Da Silva, rapporteur. Le présent amendement vise à préciser et à rendre certaine et prévisible la date de fin du contrat résilié ou de l’adhésion dénoncée par le consommateur. En effet, en prévoyant que la garantie prend fin un mois après réception de la notification, la rédaction actuelle laisse planer une incertitude pour le consommateur. En outre, pour les organismes complémentaires et pour les entreprises, prévoir une date en fin de mois simplifie à peu près tout, notamment la gestion de la paie. Il s’agit donc d’une bonne mesure pour tous les acteurs.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Cette clarification est utile.

J’en profite pour revenir sur les conséquences sur le tiers payant des résiliations infra-annuelles. Nous n’avons pas obtenu de réponse claire sur ce point.

M. Dominique Da Silva, rapporteur. On se laisse du temps puisque l’entrée en vigueur de la loi est prévue le 1er décembre 2020. Les engagements seront pris puisqu’il y a un suivi. Je pense que Mme la ministre développera ces points en séance publique. Quoi qu’il en soit, on fait confiance aux acteurs, mais avec le « 100 % santé », il est déjà question d’être au rendez-vous avant cette date. Il n’y a donc pas d’inquiétude à avoir.

La commission adopte l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement AS13 de Mme Nicole Le Peih.

Mme Nicole Le Peih. Cet amendement vise à exiger une présentation clairement identifiable de la faculté de résiliation. La complexité des conditions des contrats est souvent un frein à leur compréhension.

Ce texte étant présenté dans son exposé des motifs comme une mesure de simplification, il est nécessaire pour une pleine efficacité de prendre en compte cette régulière méconnaissance des conditions en exigeant une présentation clairement identifiable de cette faculté de résiliation.

L’article L. 221-6 du code de la mutualité précise bien que les nullités ne sont valables que si elles sont mentionnées en caractères très apparents.

M. Dominique Da Silva, rapporteur. L’article L. 113-15-2 du code des assurances, créé par la loi Hamon, prévoit d’ores et déjà que le droit de résiliation est mentionné dans chaque contrat d’assurance et en outre rappelé avec chaque avis d’échéance de prime ou de cotisation.

Si le législateur prévoit que certaines clauses doivent être clairement identifiables, cela signifierait que d’autres ont vocation à demeurer obscures.

Je demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, j’y serais défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS46 et AS47 du rapporteur.

Puis elle en vient à l’amendement AS48 du rapporteur.

M. Dominique Da Silva, rapporteur. Le présent amendement prévoit la possibilité pour le nouvel assureur de procéder aux opérations de résiliation, par mandat donné par l’assuré. La loi Hamon avait ouvert cette même facilité aux garanties obligatoires en matière d’assurance automobile et d’assurance habitation.

Il vise ainsi à simplifier les démarches pour l’assuré et à lui garantir une couverture complémentaire pendant toute la procédure, sans double couverture ni interruption de couverture.

Il vise également à faciliter les transferts d’information nécessaires à la télétransmission et au tiers payant, en modifiant l’organisme payeur dans le cadre de la procédure NOÉMIE – acronyme de « norme ouverte d’échange entre la maladie et les intervenants extérieurs » – qui permet la télétransmission des dossiers de remboursement entre la caisse d’assurance maladie et la complémentaire santé.

Cet amendement est un plus pour l’assuré, puisqu’il n’aura rien à dépenser pour résilier son contrat. De plus, il y aura un échange de communication entre l’ancien et le nouvel organisme complémentaire, ce qui rendra service, là aussi, à tous les acteurs.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 1er modifié.

Article 2 : Faculté de dénoncer sans frais et à tout moment après la première année les garanties proposées par les institutions de prévoyance

La commission est saisie des amendements identiques AS2 de M. Guillaume Chiche, AS17 de M. Pierre Dharréville, AS24 de M. Matthieu Orphelin et AS33 de M. Boris Vallaud.

M. Guillaume Chiche Mon amendement vise à supprimer l’article 2 qui prévoit la possibilité de résiliation infra-annuelle des contrats souscrits avec des institutions de prévoyance.

Comme j’ai pu l’exposer précédemment, on est en train de concourir à la fin de la mutualisation d’un risque qui repose sur une solidarité financière. Avec la mobilité organisée des sociétaires ou des assurés, le risque est grand de voir les bénéficiaires du tiers payant qui se rendent à la pharmacie ne pas pouvoir présenter leur nouvelle carte de complémentaire santé après avoir changé d’organisme, ce qui ne permettra pas aux pharmaciens d’appliquer le tiers payant. J’ai bien noté que l’amendement qui vient d’être adopté, proposé par le rapporteur, vise à faciliter le changement de mutuelle. Mais je ne vois pas comment cela se traduira de manière concrète dans notre vie quotidienne.

Par ailleurs, lorsqu’une personne changera de mutuelle, il y aura de fait un petit temps de latence au niveau de la télétransmission, qui contraindra à recourir à des feuilles de soins papier. Or, vous savez que la numérisation des feuilles de soins demande un certain temps et qu’il faut attendre entre deux et quatre mois un remboursement qui aura été notifié de cette manière. Il y aura donc bien une perte de pouvoir d’achat pour un certain nombre d’assurés ou de sociétaires.

M. Pierre Dharréville. Je ne suis toujours pas convaincu par les vertus de cette proposition de loi.

Le rôle des mutualistes ne se limite pas à assurer un risque. Certains de ces acteurs sont engagés fortement dans des actions de prévention qui sont parfois liées aux lieux dans lesquels ils sont nés, aux singularités de ces territoires et parfois de ces branches. Aussi ces actions méritent-elles d’être soutenues.

Par ailleurs, une action sanitaire et sociale peut aussi être menée pour défendre l’égalité d’accès aux soins. En prenant des mesures d’accélération des logiques de marché, on porte atteinte à cette dimension de l’action mutualiste.

M. Matthieu Orphelin. En entendant les débats, les échanges, les confrontations de points de vue depuis le début de la matinée, je suis encore plus convaincu que cette proposition de loi pose un problème de fond quant à la mutualisation des risques et qu’elle ne va pas dans le bon sens.

M. Boris Vallaud. En effet, les arguments développés ne nous convainquent guère.

Vous faites le choix de la baisse des prix plutôt que celui de l’amélioration de la couverture. Or, prétendre que le tout-marché, la mise en concurrence, n’auraient que des vertus et seraient producteurs de valeur, est démenti par les faits. Si l’arrivée d’un quatrième opérateur de téléphonie a fait baisser les prix, dans le même temps elle a détruit 10 000 emplois et a fait prendre un retard considérable à la France dans le déploiement de la fibre optique. Nous persistons à dire que la santé n’est pas une marchandise comme les autres et que, à la différence des assurances habitation et automobile, ce n’est pas un bien de consommation courante. On ne consomme pas de la santé. C’est pourquoi cette proposition n’a pas de sens ; en tout cas elle est mal fondée.

M. Dominique Da Silva, rapporteur. Les institutions de prévoyance affichent les taux de charges de gestion les plus faibles, puisqu’elles sont de 12 % à 15 %, contre 19 % pour les mutuelles et 22 % pour les sociétés d’assurance. Elles offrent ainsi un meilleur retour sur cotisation qui est l’ordre de 85 % à 88 %, contre 80 % pour les mutuelles et 75 % pour les sociétés d’assurance. Cette concurrence sera donc profitable aux meilleurs : il n’y a pas à craindre une concurrence quand on redistribue davantage que les assureurs.

Monsieur Vallaud, l’intérêt de l’assuré est-il de protéger l’emploi dans les organismes de complémentaires santé ? Je pense que ce n’est pas le sujet. Les gens cotisent pour être couverts d’un risque sur leur santé.

M. Boris Vallaud. Ce n’est pas ce que j’ai dit !

Vous prétendez que la concurrence n’a que des vertus. Or je vous ai donné un exemple qui n’était pas celui de la santé pour vous montrer que c’est faux.

Au début de mon intervention, j’ai indiqué que vous faisiez le choix la baisse des prix plutôt que de l’amélioration de la couverture santé. Voilà le reproche que je formule, parce que la santé n’est pas une marchandise comme les autres, ne vous en déplaise.

M. Guillaume Chiche. Je voudrais insister sur deux éléments d’interrogation, bien ancrés dans la vie réelle, qui concernent d’une part les bénéficiaires du tiers payant et la fragilité dans lesquels ils se retrouvent exposés, d’autre part les retards de paiement de deux à quatre mois qui seront consécutifs à un changement de complémentaire santé parce qu’il faudra avoir recours aux feuilles de soins papier.

Dans la discussion générale, on a évoqué la mobilisation des Gilets jaunes. J’ai entendu parler de pouvoir d’achat, d’accès au système de santé, de couverture maladie et de lisibilité de la couverture santé. Il s’agit d’une approche qui concerne la vie courante, le quotidien, et qui est très importante. Je crains qu’en adoptant cet article, et plus généralement l’ensemble de la proposition de loi, on se retrouve avec un mécanisme complètement inopérant.

M. Pierre Dharréville. Après ces échanges, je ne peux pas m’empêcher de souligner qu’il s’agit, par cette opération, de reporter sur les mutuelles un reproche qui vous est fait, et dont vous êtes comptable en raison des décisions qui ont été prises dans les différents PLFSS depuis deux ans. J’ai dit tout à l’heure dans mon propos liminaire que certaines augmentations étaient aussi dues aux mesures que vous avez adoptées depuis le début de la législature.

Tout à l’heure, j’ai parlé des vertus supposées de la concurrence. Dans les secteurs qui connaissent des phases de concentration accrue, comme c’est le cas des complémentaires santé, les effets que vous annoncez ne sont jamais au rendez-vous. Au final, ce choix risque d’être « perdant-perdant » pour tout le monde, y compris pour la collectivité que nous représentons.

M. Julien Borowczyk. Qui aurait pensé qu’un médecin, fût-il libéral, se préoccupe du tiers payant ? C’est pourtant une question que le rapporteur et moi-même nous sommes posée, tant et si bien que nous avons travaillé avec le cabinet de Mme la ministre de la santé pour pouvoir vous proposer en séance un amendement qui permettra d’avoir une lisibilité en temps réel des droits via une plateforme et une application mobile. On pourra donc, grâce à un numéro d’adhérent, voire un QR code, scanner les informations et ainsi voir en temps réel quels sont les droits en cours. Le problème qui existe pour les patients et surtout pour les professionnels de santé pratiquant le tiers payant, sera donc résolu à l’issue de la séance.

La commission rejette les amendements.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS51 et AS49 du rapporteur.

Elle examine, en discussion commune, les amendements AS50 du rapporteur et AS20 de Mme Valéria Faure-Muntian.

M. Dominique Da Silva, rapporteur. Il s’agit du même principe qu’à l’article 1er, à savoir décaler la prise d’effet de la résiliation du contrat à la fin du mois suivant la réception de sa notification.

Mme Valéria Faure-Muntian. Je propose pour ma part d’allonger le délai de préavis accordé à l’assureur et aux caisses du régime général quant au transfert des informations sur l’assuré et ses soins en cours. Le délai serait ainsi de deux mois au lieu d’un mois, ce qui permettrait une meilleure visibilité pour les acteurs et donc une transparence pour l’assuré.

M. Dominique Da Silva, rapporteur. Vous demandez un délai de deux mois, tandis que je propose, avec l’amendement AS50, que la résiliation prenne effet à la fin du mois suivant la réception de la notification. Si la résiliation intervient en début de mois, il y a bien un délai de deux mois. Par contre, si elle intervient en fin de mois effectivement on sera plus près des trente jours. Pour cela, je suis plutôt favorable à mon amendement qu’au vôtre.

M. Pierre Dharréville. Ces deux amendements relèvent d’une logique proche de celle du trading à haute fréquence, en permettant aux assurés d’ajuster en temps réel leur contrat et leur offre. Je me demande quelles pourraient en être les conséquences en matière d’accès aux droits et aux soins.

Mme Josiane Corneloup. Monsieur le rapporteur, il me semble que vous n’avez pas répondu à ma question sur les activités de prévention des mutuelles pour améliorer l’accès aux soins et limiter le reste à charge, ainsi que sur leurs activités d’éducation à la santé, pour retarder la survenue ou l’aggravation de maladies.

Mme la présidente Brigitte Bourguignon. Madame Corneloup, nous sommes en train d’examiner les amendements et n’allons pas revenir à la discussion générale.

M. Dominique Da Silva, rapporteur. En cohérence avec l’article 1er, j’ai proposé que le contrat prenne fin à la fin du mois suivant la demande de résiliation ou la dénonciation. Je vous suggère de retirer votre amendement, madame Faure-Muntian.

Mme Valéria Faure-Muntian. Je le retire, même si je regrette votre choix.

L’amendement AS20 est retiré.

La commission adopte l’amendement AS50.

Puis elle adopte l’amendement de précision AS52 du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement AS14 de Mme Nicole Le Peih.

Mme Nicole Le Peih. Il s’agit, comme avec l’amendement AS13 que j’ai défendu à l’article 1er, d’exiger une présentation clairement identifiable de la faculté de résiliation.

M. Dominique Da Silva, rapporteur. Même avis que précédemment : demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement de précision AS53 du rapporteur.

En conséquence, l’amendement AS22 de Mme Valéria Faure-Muntian tombe.

La commission examine l’amendement AS54 du rapporteur.

M. Dominique Da Silva, rapporteur. Je propose d’ouvrir au nouvel organisme complémentaire la possibilité de procéder aux opérations de résiliation, sur mandat donné par l’assuré.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements de précision AS55, AS56, AS57 et AS58 du rapporteur.

Elle adopte ensuite l’article 2 modifié.

Article 3 : Faculté de dénoncer sans frais et à tout moment après la première année les garanties proposées par les mutuelles

La commission examine les amendements identiques AS3 de M. Guillaume Chiche, AS18 de M. Pierre Dharréville, AS25 de M. Matthieu Orphelin, AS26 de Mme Michèle de Vaucouleurs et AS34 de M. Boris Vallaud.

M. Guillaume Chiche. L’amendement vise à supprimer l’article 3, lequel concerne la possibilité d’une résiliation infra-annuelle pour les contrats souscrits auprès de mutuelles. Il ne faut pas confondre le modèle économique des structures mutualistes, qui organisent la mutualisation et la solidarité face à un risque de santé, sans dégager de profit pour le redistribuer à des actionnaires, et celui des banques et des assurances, qui va se retrouver favorisé après l’adoption de cette proposition de loi, étant entendu qu’elles offriront des produits commerciaux plus avantageux en matière de coût et de tarif. Considérer que les soins de santé sont un bien de consommation comme les autres nous conduirait sur une pente glissante. Dans les argumentaires, reviennent des comparaisons avec la loi Hamon, des prêts immobiliers, des assurances de voiture ou de logement, alors que nous parlons de la couverture d’un risque de santé et du financement de la couverture de soins pour des sociétaires. Une telle mesure serait, à mon sens, dangereuse.

M. Pierre Dharréville. On marche sur la tête ! La dégradation subie par ce secteur depuis plusieurs années, qui conduit les acteurs à se faire une concurrence les empêchant de répondre réellement aux enjeux de santé, est un vrai problème. Nous devrions nous interroger sur l’effet des contrats collectifs sur l’individualisation des risques et l’organisation du système de remboursement des soins. In fine, le renoncement aux soins va augmenter, parce que tous les risques non couverts tombent dans l’escarcelle de l’autofinancement. J’ai entendu l’appel d’Olivier Véran, pour réfléchir à une amélioration de la couverture. Cela vaudrait mieux que de donner les clés au marché. Si vous faites confiance aux acteurs, comme vous le prétendez, pourquoi prendre une telle disposition ?

L’amendement AS25 est retiré.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Au-delà de la position exprimée par mes collègues du groupe MODEM sur le besoin impératif de lier une éventuelle évolution des modalités de rupture à la nécessité de lisibilité des contrats, j’ai souhaité déposer, à titre personnel, un amendement de suppression de l’article, au motif que le modèle économique des mutuelles est fondé sur le principe de la solidarité entre les adhérents. Cette philosophie particulière de la mutualisation semble incompatible avec l’individualisation des risques induite par la mesure.

De surcroît, l’effet sur le pouvoir d’achat des Français ne serait pas nécessairement positif. Cette mesure risque en effet d’inciter fortement les acteurs du marché à augmenter leurs frais de publicité, la partie promotionnelle devenant, dans un modèle économique concurrentiel, nécessaire pour s’assurer une clientèle. Les frais de gestion administrative pourraient également s’accroître, en raison d’entrées et de sorties plus nombreuses. Les populations les moins au fait de l’actualité – celles, par exemple, n’utilisant pas les outils informatiques ni Internet – seront les grandes perdantes de cette mesure, ce qui risquerait de créer un nouveau facteur d’inégalité sociale.

Par ailleurs, les mutuelles sont des acteurs à part entière du système de santé : avec leurs réseaux de soins et leurs partenariats avec les professionnels de santé, elles participent activement à améliorer la prévention, notamment, en menant près de 7 300 actions de prévention par an, dans l’ensemble du territoire. Elles œuvrent également au développement du tiers payant et des réseaux de soins et, partant, à améliorer l’accès aux soins. Je souhaite donc m’assurer que les effets induits par l’article 3 auront bien été résolus, avant l’application de cette disposition, pour les acteurs de l’économie sociale et solidaire.

M. Dominique Da Silva, rapporteur. Comme je l’ai déjà précisé, les mutuelles « gagnent », si je puis dire, de l’argent sur les contrats individuels et utilisent ces marges pour proposer des prix cassés sur les contrats collectifs. L’argument tendant à défendre des mutuelles qui seraient vertueuses face à des assureurs qui seraient voraces ne tient pas. Si les mutuelles sont des organismes à but non lucratif, elles ont de quoi répondre, dans une concurrence saine, à des assureurs qui doivent dégager du profit. Je ne vois donc pas ce qu’elles ont à craindre d’une résiliation infra-annuelle, après un an d’engagement.

M. Pierre Dharréville. Monsieur le rapporteur, un certain nombre de ces mutuelles résistent et ne s’engagent pas dans le modèle des assurances privées, vers lequel vous les poussez pourtant de plus en plus. Qui plus est, les mutuelles ne gagnent pas d’argent, par définition, dans la mesure où elles sont un organisme à but non lucratif. Elles essaient seulement d’équilibrer leur trésorerie, pour répondre à un système qui a été mal conçu. C’est à ce problème‑là, en vérité, qu’il faut s’attaquer.

M. Guillaume Chiche. Monsieur le rapporteur, vous avez mis le doigt sur le bon sujet : les mutuelles organisent la solidarité entre leurs sociétaires et font l’équilibre entre les contrats collectifs et individuels. Elles organisent la péréquation entre les personnes qui auront besoin d’une couverture de soins et les autres. Tel est le modèle économique mutualiste, dont le principe n’est pas de dégager du profit et de redistribuer des dividendes, mais bien d’assurer une couverture et de se constituer une réserve prudentielle pour répondre à l’exigence législative définie sous le précédent quinquennat.

Vouloir ouvrir les mutuelles à la concurrence pour casser la chaîne de solidarité, au prétexte qu’elles en ont les moyens, est parfaitement inconséquent et traduit un défaut d’analyse du modèle économique du mutualisme.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Les dépenses remboursées par les complémentaires santé sont en forte augmentation – 38 % entre 2006 et 2017, soit 3 % par an –, ce qui entraîne automatiquement une hausse équivalente des cotisations. Entre 2010 et 2017, elles ont ainsi augmenté de 21 %, soit 2,8 % par an. C’est la conséquence du principe selon lequel, comme tout opérateur économique privé, les mutuelles ne peuvent être en déficit, d’autant que, contrairement à l’assurance maladie, elles doivent constituer des réserves prudentielles. Si les excédents des sociétés de prévoyance d’assurances pour les contrats individuels sont passés de 4 % à 6 %, voire 8 %, entre 2011 et 2016, les contrats des mutuelles sont passés de 4 % à 2 %. En 2016, les mutuelles étaient en léger excédent de 18 millions d’euros, soit 1 % des cotisations, ce qui est très proche de l’équilibre, tandis que les sociétés d’assurances étaient excédentaires de 330 millions d’euros, soit 3 % des cotisations. Leurs situations sont donc très différentes.

M. Olivier Véran. En donnant, sous la précédente législature, force de loi à l’ANI, nous avons corrélé l’accès aux contrats collectifs au fait d’avoir un travail, laissant de côté les retraités, les personnes âgées et les étudiants, soit les trois catégories de la population qui ont le plus besoin d’une complémentaire santé. J’ai voté cette mesure, et je le regrette maintenant. Après une négociation avec les syndicats, un blanc-seing avait été donné aux organismes de complémentaires, de façon à généraliser l’accès aux complémentaires.

Parallèlement, nous avions développé des « contrats responsables », dont nous avons cloisonné les rubriques, en faisant peser de plus en plus de contraintes dessus, ce qui a réduit d’autant la capacité des complémentaires à se différencier sur le marché de l’accès aux soins. Avec le « reste à charge zéro », nous allons un peu plus loin dans cette démarche. Même si une concentration est à l’œuvre, du fait notamment de l’augmentation des coûts de gestion, il reste encore plusieurs centaines d’acteurs sur le marché des complémentaires. Par la force des choses, c’est autour des coûts annexes de prestations non prises en charge par l’assurance maladie que la différentiation se produira, un peu à la façon d’une surcomplémentaire.

Je comprends que les complémentaires déplorent la situation actuelle, alors qu’elles ont déjà du mal à se différencier sur le marché de la santé. L’existence de plusieurs centaines d’acteurs – mutualistes, institutions de prévoyance ou assurances privées – sur un marché de la complémentaire santé de plus en plus structuré et sectorisé induit une hausse des coûts de gestion et des frais de concurrence. Nous ne cherchons pas à amplifier ce mouvement, mais à permettre aux assurés de changer de contrat et de choisir. Nous devons également travailler sur la transparence de ces contrats, pour donner des arguments aux usagers et leur permettre de mieux le choisir.

La commission rejette les amendements.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS59 et AS60 du rapporteur.

En conséquence, l’amendement AS15 de Mme Nicole Le Peih tombe.

La commission adopte également l’amendement rédactionnel AS61 du rapporteur.

L’amendement AS21 de Mme Valéria Faure-Muntian est retiré.

La commission à l’examen de l’amendement AS62 du rapporteur.

M. Dominique Da Silva, rapporteur. Comme aux deux premiers articles, mon amendement vise à préciser et à rendre certaine et prévisible la date de fin du contrat résilié ou de l’adhésion dénoncée par le consommateur, en la fixant à la fin du mois suivant la résiliation ou la dénonciation.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS64, AS65 et AS66 du rapporteur.

En conséquence, l’amendement AS23 de Mme Valéria Faure-Muntian tombe.

La commission examine l’amendement AS67 du rapporteur.

M. Dominique Da Silva, rapporteur. Il s’agit d’ouvrir au nouvel organisme complémentaire la possibilité de procéder aux opérations de résiliation, sur mandat donné par l’assuré.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement de coordination AS68 du rapporteur.

Elle adopte ensuite l’article 3 modifié.

Après l’article 3

La commission examine, en discussion commune, les amendements AS43 du rapporteur et AS30 de Mme Cendra Motin.

M. Dominique Da Silva, rapporteur. Chaque année, les complémentaires doivent communiquer à leurs assurés le montant et la composition des frais de gestion et d’acquisition de l’organisme affectés aux garanties, en pourcentage des cotisations ou primes. Cependant, les auditions ont montré que ces chiffres ne constituent pas un indicateur fiable de l’intérêt économique pour le consommateur de la garantie proposée. Par ailleurs, s’agissant d’organismes ayant des activités diversifiées dans le monde de l’assurance, les frais de gestion et d’acquisition consacrés à l’activité de complémentaire santé sont un chiffre largement reconstitué : les coûts des campagnes de publicité ou de l’activité des intermédiaires ne sont pas aisément ventilés entre les différentes branches de l’activité assurantielle.

L’ouverture d’une faculté de résiliation infra-annuelle des complémentaires santé conduira à stimuler la concurrence et les actions de démarchage de la part des organismes complémentaires et de leurs intermédiaires. Dans ce cadre, il apparaît nécessaire de renforcer la lisibilité et la comparabilité des offres, pour que les consommateurs puissent juger de l’intérêt des garanties et des tarifs proposés.

Aussi, dans un objectif de simplification et d’amélioration de la lisibilité des offres, l’amendement propose-t-il de remplacer la communication des chiffres actuels par celle du taux de redistribution des cotisations collectées, par catégorie de contrats. Le pourcentage des prestations versées sur les cotisations et primes perçues sera un meilleur indicateur de la performance de l’organisme complémentaire. Une telle mesure devrait être particulièrement profitable aux organismes à but non lucratif.

M. Julien Borowczyk. Je retire notre amendement au profit de celui du rapporteur.

L’amendement AS30 est retiré.

La commission adopte l’amendement AS43.

Les amendements AS28 et AS29 de Mme Cendra Motin sont retirés.

La commission est saisie de l’amendement AS31 de Mme Justine Benin.

Mme Justine Benin. Mon groupe et moi-même sommes favorables à tout ce qui va dans le sens d’une meilleure prise en charge et d’un meilleur accès aux soins. Mais nous avons quelques interrogations quant à l’application de ce texte, qui ne fait pas l’unanimité parmi les organismes de complémentaires santé, dont on peut en effet redouter une augmentation des frais de gestion, de publicité et de marketing, qu’ils feraient peser sur leurs prix. Ce sont les plus vulnérables et les plus fragiles qui en seraient les premières victimes. C’est pourquoi nous vous proposons que cette loi fasse l’objet d’une évaluation, dont le rapport serait rendu aux parlementaires un an après sa promulgation. Il devrait comporter un état des lieux de l’impact de la loi sur l’évolution des prix et de la qualité des contrats de complémentaires.

M. Dominique Da Silva, rapporteur. Vous proposez que le Gouvernement remette au Parlement un rapport d’évaluation dans un délai de douze mois, à compter de la publication de la loi. Or, le texte entrant en vigueur le 1er décembre 2020, il ne sera pas possible d’en juger les effets avant un an d’application, ce qui nous reporte au début de l’année 2022.

Mme Justine Benin. Je déposerai un autre amendement en séance et retire celui‑ci.

M. Pierre Dharréville. Pour aller encore plus dans le sens du rapporteur, j’aurais plutôt proposé de rendre le rapport sous trente jours… (Sourires.)

L’amendement est retiré.

Puis la commission examine l’amendement AS42 du rapporteur.

M. Dominique Da Silva, rapporteur. Malgré plusieurs initiatives normatives, la question de la lisibilité des contrats et des garanties reste en chantier et continue de reposer sur l’autorégulation et la bonne volonté des acteurs du secteur. Le 14 février 2019, l’Union nationale des organismes d’assurance maladie complémentaires (UNOCAM) et les principales fédérations d’organismes complémentaires ont signé, en présence de la ministre des solidarités et de la santé, un engagement pour améliorer la lisibilité des garanties de complémentaire santé. Ce document prévoit notamment, à compter de 2020, d’harmoniser les libellés des principaux postes de garanties, ainsi qu’une liste d’exemples concrets de remboursements en euros que les organismes complémentaires d’assurance maladie sont invités à diffuser dès 2019.

Cependant, cet engagement des fédérations ne constitue pas une obligation juridique pour les organismes qui en sont membres. Tout en témoignant de notre confiance à l’égard des fédérations et des organismes qu’elles représentent, l’amendement vise à charger l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, dont l’une des missions est de protéger les assurés, d’évaluer le respect par les organismes complémentaires d’assurance maladie de ces engagements applicables à partir du 1er janvier 2020. Le rapport devra être remis avant l’entrée en vigueur du texte, de manière à ce que le Parlement et le Gouvernement puissent juger de l’opportunité de donner ou non une valeur contraignante à l’engagement pris le 14 février 2019, dans le cadre du PLFSS pour 2021.

M. Cyrille Isaac-Sibille. L’idée du rapport est bonne. Mais que se passera‑t‑il si l’on constate que les fédérations n’ont pas tenu leur engagement ?

M. Dominique Da Silva, rapporteur. Nous pourrons déposer un amendement au PLFSS pour 2021. Qui plus est, le Gouvernement pourra également agir, en ayant recours à un arrêté. Si la ministre a fait confiance aux fédérations et à leurs organismes de complémentaires santé, il faudra nous assurer, avant l’entrée en vigueur du texte, que tout le monde est au rendez-vous.

Mme la présidente Brigitte Bourguignon. Par ailleurs, en tant que parlementaires, nous avons la possibilité de demander la réalisation d’un rapport d’application au bout de six mois. N’hésitons pas à utiliser les moyens mis à notre disposition !

La commission adopte l’amendement.

Article 4 : Entrée en vigueur de la faculté de résilier les garanties complémentaires en matière de santé

La commission adopte l’amendement rédactionnel AS69 du rapporteur.

En conséquence, les amendements AS4 de M. Guillaume Chiche et AS8 de M. Francis Vercamer tombent.

La commission adopte l’article 4 modifié.

Elle adopte ensuite l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

 

 

 

 

La séance est levée à onze heures cinquante.

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Présences en réunion

Réunion du mercredi 20 mars 2019 à 9 heures 30

Présents. M. Belkhir Belhaddad, Mme Justine Benin, Mme Gisèle Biémouret, M. Julien Borowczyk, Mme Brigitte Bourguignon, Mme Marine Brenier, Mme Blandine Brocard, M. Sébastien Chenu, M. Gérard Cherpion, M. Guillaume Chiche, M. Paul Christophe, Mme Christine Cloarec, Mme Josiane Corneloup, M. Dominique Da Silva, M. Marc Delatte, M. Pierre Dharréville, M. Jean-Pierre Door, Mme Jeanine Dubié, Mme Audrey Dufeu Schubert, Mme Nathalie Elimas, Mme Catherine Fabre, Mme Caroline Fiat, Mme Agnès Firmin Le Bodo, Mme Emmanuelle Fontaine-Domeizel, Mme Albane Gaillot, Mme Carole Grandjean, M. Jean-Carles Grelier, Mme Claire Guion-Firmin, M. Brahim Hammouche, Mme Monique Iborra, M. Cyrille Isaac-Sibille, Mme Caroline Janvier, Mme Fadila Khattabi, M. Mustapha Laabid, Mme Fiona Lazaar, Mme Charlotte Lecocq, Mme Geneviève Levy, Mme Monique Limon, M. Gilles Lurton, M. Sylvain Maillard, M. Thomas Mesnier, M. Bernard Perrut, Mme Michèle Peyron, M. Laurent Pietraszewski, M. Adrien Quatennens, M. Alain Ramadier, M. Jean-Hugues Ratenon, Mme Stéphanie Rist, Mme Mireille Robert, Mme Laëtitia Romeiro Dias, Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe, M. Jean-Louis Touraine, Mme Élisabeth Toutut-Picard, Mme Isabelle Valentin, M. Boris Vallaud, Mme Laurence Vanceunebrock-Mialon, Mme Michèle de Vaucouleurs, M. Olivier Véran, M. Francis Vercamer, Mme Annie Vidal, Mme Corinne Vignon, M. Stéphane Viry

Excusés.  Mme Delphine Bagarry, Mme Ericka Bareigts, M. Jean-Philippe Nilor, Mme Nadia Ramassamy, Mme Nicole Sanquer, Mme Martine Wonner

Assistaient également à la réunion.  Mme Valéria Faure-Muntian, Mme Nicole Le Peih, M. Matthieu Orphelin