Compte rendu

Commission
du développement durable et de l’aménagement du territoire

– Audition de Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique 2

 Informations relatives à la commission...................33


Mardi
15 septembre 2020

Séance de 17 heures 15

Compte rendu n° 50

session extraordinaire de 2019-2020

Présidence de
Mme Véronique Riotton,
Présidente


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La Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a entendu Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique.

Mme la présidente Véronique Riotton. Nous sommes heureux de vous retrouver après nos travaux d’été. Nous avons aujourd’hui le plaisir d’entendre Mme Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique, que je tiens à féliciter, en notre nom, pour sa nomination à ces fonctions.

Madame la ministre, je vous remercie d’avoir accepté notre invitation pour cette audition qui se déroulera sous un format mixte associant présence physique et présence en visioconférence des députés. Il s’agit de votre première audition par une commission du Parlement et nous sommes évidemment sensibles à cette marque de considération à l’égard d’une commission que vous connaissez bien.

Cette audition vise à vous entendre sur les grands axes que vous souhaitez donner à votre action à la tête de votre ministère. Elle intervient à un moment particulier, alors que le plan de relance a récemment été présenté par le Gouvernement, qui a décidé de consacrer 30 milliards d’euros à la transition écologique.

Elle intervient également à un moment crucial, peu de temps avant la présentation du projet de loi de finances qui doit permettre de décliner, au niveau du budget de l’État, notre engagement pour cette transition. Il y a bien sûr aussi la mise en œuvre, dans laquelle nous serons fortement impliqués, des propositions de la Convention citoyenne pour le climat, sans oublier de nombreuses échéances internationales en matière de climat et de biodiversité.

Mme Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique. Merci, madame la présidente. Mesdames et messieurs les députés, bonjour à toutes et à tous.

Comme vous le savez, je suis particulièrement attachée aux travaux parlementaires et tout particulièrement à ceux de cette commission. Je suis donc vraiment très heureuse d’être ici devant vous pour que nous puissions échanger sur les multiples dossiers que j’ai à gérer en tant que ministre de la Transition écologique. Je suis effectivement très heureuse de pouvoir intervenir en premier lieu devant la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, une commission que j’aime particulièrement.

Je sais, puisque nous l’avons évoqué pendant des années, que nous partageons tous ici le même sens de l’urgence. Notre pays traverse une crise inédite, une crise à la fois sanitaire, économique, sociale et écologique. Je crois que ces crises se recoupent et que nous pouvons y apporter des réponses conjointes, pour notre planète et pour nos concitoyens.

À la tête de ce grand ministère de la Transition écologique, j’entends bien mener de front toutes ces batailles pour une écologie de progrès, une écologie pragmatique, une écologie de terrain, une écologie qui croit dans les immenses atouts des territoires et de nos concitoyens.

Pour guider ce travail immense, j’ai deux priorités absolues. La première est de baisser nos émissions de gaz à effet de serre pour atténuer le changement climatique. La seconde est de préparer notre pays à faire face aux conséquences de ce changement.

Ces conséquences sont déjà présentes. Nous les voyons dans notre quotidien avec les canicules comme les inondations. Je pense également à nos élus de montagne et à cette neige de plus en plus rare qui remet en cause l’équilibre économique des stations de ski. Fermer les yeux serait une faute, devant les Français et devant l’histoire. Je m’y refuse.

Ces deux priorités, mesdames et messieurs les députés, sont autant de chantiers concrets à faire avancer au quotidien et autant de défis à relever. Je dois dire que l’agenda des mois qui viennent est particulièrement chargé. Plusieurs chantiers majeurs vont nous occuper.

Le premier est évidemment le déploiement du plan de relance. Vous le savez, ce plan de 100 milliards d’euros pour redémarrer notre économie est un grand bond en avant pour la transition écologique. 30 milliards lui sont spécifiquement dédiés, mais je tiens à dire tout de suite que l’écologie ne constitue pas seulement un tiers du plan, comme nous avons pu le lire parfois. Au-delà des actions qui vont être pilotées spécifiquement par mon ministère, l’écologie irrigue l’ensemble du plan de relance avec, par exemple, l’appui à la relocalisation des industries qui baissera forcément leur empreinte écologique et donc leurs émissions de gaz à effet de serre. Le plan apporte également un soutien à la recherche, à l’innovation, au développement des compétences, au développement de nouvelles filières ainsi que, par exemple, à la rénovation des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) et des hôpitaux. Cela ne fait pas partie des 30 milliards, mais aura, forcément, des conséquences très bénéfiques sur les émissions de gaz à effet de serre de ces bâtiments. Toutes ces mesures concourront à la transformation écologique de notre pays.

Avec ces moyens inédits, nous allons donc enfin placer notre pays sur la trajectoire de la neutralité carbone. Concrètement, cela signifie décarboner notre économie. C’est le premier volet de ce plan de relance.

À eux seuls, l’industrie, l’agriculture, les transports et le bâtiment représentent 80 % de nos émissions de gaz à effet de serre. Nous allons donc agir sur chacun de ces secteurs.

Pour l’industrie, dont les émissions ne baissent pas assez vite, nous consacrons 1,2 milliard d’euros sur deux ans pour agir très vite, dès aujourd’hui, en accélérant la décarbonation des industries, en accompagnant le déploiement de solutions qui sont déjà matures et en investissant dans l’innovation pour la maturation d’autres solutions. Bien sûr, il ne s’agit pas de réduire nos émissions en délocalisant ; cela n’aurait strictement aucun sens. C’est pourquoi nous travaillons au niveau européen à un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières pour lutter contre les fuites de carbone.

Ce plan est également un grand coup d’accélérateur pour la rénovation écologique des bâtiments. Emmanuelle Wargon et moi y travaillons ensemble. Près de 7 milliards d’euros y sont consacrés dans le plan de relance en plus des crédits habituels, dont 4 milliards pour les bâtiments publics et 2 milliards pour accélérer la rénovation globale des logements et accompagner bailleurs comme copropriétés. Concrètement, nous allons bonifier Ma Prime Rénov en la rendant plus accessible et ouverte à tous les Français dès le 1er janvier prochain. À ces 6 milliards – soit 4 + 2 – s’ajoutent 500 millions d’euros pour rénover le parc social et 200 millions pour accompagner les très petites entreprises (TPE) et les petites et moyennes entreprises (PME).

Ces 30 milliards d’euros permettent aussi un investissement inédit de près de 11 milliards d’euros dans le secteur des transports, dont près de la moitié pour le ferroviaire – les petites lignes et le fret –, sans oublier les transports en commun. Les mobilités du quotidien en particulier bénéficient de 1,2 milliard d’euros. Je pense bien sûr également à la « petite reine » du déconfinement, le vélo. Avec Jean-Baptiste Djebbari, nous avons présenté hier le renforcement du Plan vélo : 200 millions d’euros de plus pour construire des pistes et des stationnements sécurisés ainsi qu’un renforcement de plus de 20 millions d’euros du Coup de Pouce Vélo qui a déjà permis 620 000 réparations en quelques mois. Bien sûr, nous allons continuer d’aider nos concitoyens à acheter des véhicules moins polluants, multiplier les bornes de recharge, accélérer la recherche et le développement dans les domaines de l’automobile et de l’aérien pour aller vers une mobilité bas carbone.

Le plan de relance est aussi un grand coup d’accélérateur pour faire émerger une filière française de l’hydrogène décarboné. C’est l’une des grandes révolutions de notre siècle. Notre pays a fait depuis 2018 le choix de soutenir la filière, mais, maintenant, nous devons changer d’échelle et faire de la France une nation de l’hydrogène. 7 milliards d’euros sont mobilisés durant la décennie pour accélérer massivement les investissements.

Nous allons également amplifier la transition agricole ; 1,2 milliard d’euros y sont dédiés pour développer une alimentation plus saine et locale, pour accélérer le renouvellement des équipements agricoles, pour réduire l’utilisation des pesticides ainsi que pour aider nos forêts à s’adapter au changement climatique. Nous travaillons à tout cela main dans la main avec Julien Denormandie.

Décarboner pour diminuer nos émissions de gaz à effet de serre en agissant sur tous les leviers est donc au premier rang des priorités.

Avec France Relance, nous allons également accélérer sur d’autres chantiers essentiels, notamment ceux favorables à la biodiversité. Je pense par exemple à la gestion de la ressource en eau, cette ressource précieuse et souvent trop rare. Nous mettons 300 millions d’euros sur la table pour moderniser nos réseaux d’eau, en métropole comme dans les outre-mer.

Un deuxième chantier essentiel que nous accélérons est celui de la lutte contre l’artificialisation, qui engloutit la nature sous le béton, étend les villes et fracture le lien social. Nous avons décidé en juillet d’un moratoire sur les zones commerciales implantées sur des terrains non encore artificialisés. Avec les 300 millions d’euros prévus, nous allons maintenant réhabiliter les friches, reconquérir les espaces perdus et encourager les élus à adopter une véritable sobriété foncière. 350 millions d’euros sont mis sur la table pour les accompagner dans ce sens. Notre objectif à moyen terme est ambitieux : diminuer de 50 % le rythme d’artificialisation d’ici 2030. Je sais que nous pouvons y parvenir.

Le plan de relance est aussi l’occasion d’accélérer pour sortir du modèle linéaire « fabriquer – consommer – jeter ». L’économie circulaire permet de ne pas consommer des ressources rares, d’éviter des émissions de carbone et des déchets. Nous mobilisons donc 570 millions d’euros pour accélérer la transformation de notre économie vers un modèle plus circulaire : développer le tri, l’incorporation de matières recyclées, créer des ressourceries ou valoriser les biodéchets.

La mise en œuvre de la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC) sera également l’occasion de soutenir le développement de l’économie circulaire. Il n’est plus nécessaire de présenter cette belle loi dans cette commission. Nous y avons beaucoup contribué lorsque je siégeais parmi vous. C’est le fer de lance de l’économie de demain et elle nous permettra de sortir du plastique jetable, de lutter contre toutes les formes de gaspillage. Elle interdit de jeter les invendus. Elle permet d’informer les consommateurs sur la réparabilité des produits qu’ils achètent. Elle lutte contre l’obsolescence programmée. Elle place l’écoconception au cœur des entreprises. Vous pouvez compter, vous le savez, sur ma totale détermination à mettre en œuvre toutes ces avancées concrètes que nos concitoyens attendent depuis déjà trop longtemps.

Comme vous le voyez, la relance, ce premier chantier des mois à venir, est donc dense et exigeante, mais le jeu en vaut la chandelle. Les experts de l’Institut de l’économie pour le climat (I4CE) nous disaient qu’il manquait entre 15 et 18 milliards d’euros chaque année d’ici 2023 pour engager notre pays vers la neutralité carbone. C’est exactement ce que nous faisons. Nous tournons le dos à la vieille économie carbonée du XXe siècle et nous entrons résolument dans la trajectoire de l’accord de Paris.

Il ne vous aura pas échappé que de nombreuses mesures de ce plan ambitieux répondent déjà aux propositions des 150 citoyens de la Convention pour le climat : sur le ferroviaire, sur le vélo, sur la rénovation, mais aussi sur l’électrification des ports, le soutien à l’économie circulaire, le développement de l’hydrogène ou encore la transition agricole. La mise en œuvre des propositions de la Convention citoyenne sur le climat est le deuxième grand chantier des mois à venir.

150 citoyens ont travaillé pendant neuf mois, sans compter leurs heures, malgré les grèves et malgré la pandémie. Ils ont produit un travail remarquable. Nous allons le mettre en œuvre comme le Président de la République s’y est engagé. Le Premier ministre et l’ensemble du Gouvernement y travaillent et j’en serai garante.

Les premières mesures ont déjà été adoptées depuis juillet. Je pense à l’interdiction des terrasses chauffées dès la fin de l’hiver 2021 ou à l’interdiction d’installer des chaudières neuves au fuel ou au charbon, que ce soit dans les nouvelles constructions ou les rénovations.

Nous avons maintenant devant nous plusieurs grandes échéances pour continuer. Mon ministère et l’ensemble du Gouvernement travaillent en ce moment sur le projet de loi dédié. À cet exercice démocratique inédit, nous répondons par un dispositif inédit. Pour la première fois, des citoyens et des parlementaires travaillent avec les administrations pour échanger sur ce projet de loi pendant sa phase de construction, et je m’en réjouis. Après les consultations obligatoires, je souhaite présenter le projet de loi en Conseil des ministres d’ici la fin de l’année.

C’est un calendrier serré ; j’en ai conscience, mais j’y tiens, car nous n’avons plus une minute à perdre pour répondre à l’urgence écologique. Je souhaite donc que le Parlement puisse examiner le projet de loi dès le premier trimestre de l’année 2021.

En ce qui concerne la révision constitutionnelle, nous allons établir une feuille de route avec le ministère de la Justice afin qu’elle puisse être étudiée au Parlement au plus vite. Nous allons travailler, comme le Président de la République s’y est engagé, sur la notion d’écocide avec les membres de la Convention citoyenne. Les échanges ont déjà commencé et se poursuivront avec les représentants de la Convention, le ministère de la Justice et les services de mon ministère.

Enfin, au-delà du plan de relance et de la Convention citoyenne, je voudrais évoquer devant vous plusieurs autres chantiers des mois à venir.

Je pense d’abord au déploiement de la transition écologique dans les territoires. Les fameux contrats de transition écologique rencontrent un grand succès. Plus de 250 établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) représentant 10 millions de Françaises et de Français sont couverts par au moins un contrat de ce type. Ce sont des projets de territoire qui rassemblent et transforment en profondeur le quotidien des Français. Nous devons amplifier le mouvement.

Comme vous l’avez entendu lors de son discours de politique générale, le Premier ministre a décidé de généraliser des contrats de relance et de développement écologique (CRDE). Ils offriront un cadre unifié de contractualisation au niveau des EPCI ou groupes d’EPCI. Ces CRDE seront l’incarnation territoriale de la transformation écologique poussée par le Gouvernement.

Poursuivre l’action déjà engagée par le Gouvernement est également mon ambition pour la transition énergétique. Durant le confinement, la Programmation pluriannuelle de l’énergie et la nouvelle stratégie bas carbone ont été publiées. Il faut maintenant les mettre en œuvre.

Nous devons poursuivre le développement des énergies renouvelables pour atteindre les objectifs de diversification du mix que nous nous sommes fixés, en particulier atteindre 27 % d’électricité renouvelable en 2023. Nous devons également préparer les décisions à prendre en 2022-2023 sur l’avenir du parc nucléaire afin de permettre un choix démocratique.

Renforcer la sécurité des sites industriels est aussi une de mes priorités dans les mois qui viennent. Un an après l’accident de Lubrizol, j’annoncerai la semaine prochaine un renforcement des prescriptions réglementaires applicables aux sites Seveso et une augmentation de 50 % des contrôles pour garantir la sécurité des Français.

Par ailleurs, mon ministère est au travail pour élaborer le futur plan national santé environnement qui sera présenté d’ici la fin de l’année. Ce plan a pour vocation d’identifier les perturbateurs endocriniens, de maîtriser notre niveau d’exposition et d’assurer à tous nos concitoyens que l’air qu’ils respirent est un air de qualité. Il est temps en effet de mettre fin au dépassement chronique des normes de qualité de l’air. Nous allons donc déployer d’ici la fin de l’année dix zones à faibles émissions, en lien avec les élus concernés.

La biodiversité est également au cœur de notre combat. L’urgence du vivant et celle du climat étant liées, nous allons travailler avec Bérangère Abba dans les mois qui viennent sur plusieurs leviers très concrets. Nous souhaitons d’abord atteindre d’ici 2022 une part de 30 % d’aires terrestres et marines protégées, dont un tiers en protection forte. C’est un engagement fort qu’a pris le Président de la République, et nous le tiendrons.

Il nous faut aussi réviser notre stratégie nationale biodiversité, anticiper le recul du trait de côte et accompagner les transitions des territoires concernés pour amplifier la lutte contre l’artificialisation. Sur tous ces chantiers majeurs, nous serons au rendez-vous.

Trois derniers chantiers figurent dans ma liste de priorités. Le premier consiste à réduire l’usage des phytosanitaires. Mon objectif est de renforcer la protection des populations en interdisant leur utilisation dans tous les lieux de vie, de mettre fin à l’usage du glyphosate lorsque des alternatives sont identifiées –vous pouvez compter sur moi pour mettre un grand coup d’accélérateur sur la recherche d’alternatives ! – et de mieux protéger les pollinisateurs en encadrant strictement les épandages en période de floraison.

L’avant-dernier chantier dont je souhaitais vous parler aujourd’hui concerne le bien-être animal. Comme pour tous les chantiers que j’ai abordés, notre pays a changé d’état d’esprit. Une véritable prise de conscience a lieu et nous devons y répondre. Le plan de relance prévoit 250 millions d’euros pour encourager l’élevage en plein air et plus largement améliorer le bien-être animal, mais nous devons aussi nous préoccuper de la faune captive sauvage. De plus en plus de maires prennent des arrêtés interdisant certaines pratiques, au sein des cirques notamment. Je crois que l’époque a changé et nous devons travailler activement à un plan de transition en faveur du bien-être de la faune sauvage captive. J’aurai l’occasion d’y revenir dans les prochaines semaines.

Enfin, je souhaite vous dire que l’ambition que nous portons et toutes les actions que nous mettons en place sont autant de gages de crédibilité à l’international. Oui, notre exigence et notre exemplarité nous donnent de la force dans les grands rendez-vous internationaux qui s’annoncent. L’année prochaine, à Marseille, à Glasgow, en Chine, nous aurons l’occasion de briser une forme d’inertie internationale en rehaussant notre ambition climatique, en protégeant la biodiversité sur les cinq continents et toutes les mers, en bref en faisant prendre une autre trajectoire à notre planète.

Comme vous le voyez, mesdames et messieurs les députés, pour le dire simplement, l’agenda est plein à craquer ! Pourtant, chacun de ces chantiers dont je vous ai parlé est une priorité pour moi, car l’écologiste que je suis sait que nous n’arriverons à un résultat qu’en agissant sur tous les leviers en même temps. Nous n’y arriverons évidemment qu’en travaillant ensemble et je vous remercie donc encore pour votre invitation. Je me réjouis de notre échange et je suis maintenant à votre disposition pour répondre à toutes vos questions.

Mme la présidente Véronique Riotton. Merci, madame la ministre, pour l’ensemble des projets présentés. Je passe la parole à nos orateurs de groupe.

Mme Laurianne Rossi. Mes chers collègues, l’engagement pris par le Gouvernement est tenu. La relance sera verte et le montant alloué par le plan de relance à la transition écologique en témoigne. Comme vous l’avez dit, madame la ministre, 30 milliards sur les 100 milliards seront dédiés à la transformation majeure de nos modes de production, de nos modes de consommation et de déplacement au service d’une économie plus durable, plus économe de nos ressources, plus relocalisée.

Ce plan de relance doit également constituer un accélérateur des nombreuses réformes que nous avons adoptées depuis 2017. Je pense aux mobilités, à l’alimentation, à l’économie circulaire, aux énergies renouvelables, à la transition agricole, à la biodiversité, à la rénovation des bâtiments. Ce plan de relance nous permettra évidemment d’aller plus loin et plus fort encore.

J’ai quelques questions à vous poser au nom de mon groupe, madame la ministre. Du point de vue de la méthode d’abord, quelles seront les modalités opérationnelles, contractuelles et concrètes du déploiement de ces aides massives dans nos territoires ? Comment concilier l’indispensable prise en compte des spécificités locales et la nécessaire vision nationale de tous ces enjeux structurants pour notre pays et notre environnement ? Quelle place sera faite aux parlementaires que nous sommes dans ce dispositif et sa mise en œuvre dans nos circonscriptions, en ce qui concerne le volet environnemental ?

Ma deuxième question porte sur les contreparties. Ces aides massives de l’État, que ce soit au titre des trois lois de finances rectificatives ou au titre de ce plan de relance, appellent des engagements environnementaux et sociaux clairs, vérifiables et mesurables. Nous installons d’ailleurs une mission d’information et nous vous remercions pour le rôle que vous avez joué en tant que parlementaire à ce sujet. La confiance n’exclut pas le contrôle, notamment celui des parlementaires. La réussite de notre plan de relance passera par notre capacité à démontrer, chiffres et exemples à l’appui, qu’il aura permis de décarboner et verdir notre économie. Pouvez-vous nous éclairer sur ce point ?

À ce sujet, le dossier de presse de France Relance affiche un objectif de réduction de 57 millions de tonnes de CO2. Pouvez-vous nous détailler cet objectif et nous faire part des indicateurs de suivi qui pourraient être mis en place ?

Enfin, vous connaissez mon engagement sur le sujet de la pollution sonore en qualité de présidente du Conseil national du bruit. Cette pollution est trop souvent oubliée dans les politiques sanitaires et environnementales. Comment la lutte contre le bruit sera-t-elle intégrée à ce plan de relance ? Pourrait-elle faire partie des contreparties que j’évoquais, tant dans le domaine des transports que de la rénovation des logements – rénovation thermique certes, mais aussi acoustique ?

M. Jean-Marie Sermier. Madame la ministre, chers collègues, l’environnement doit pouvoir tous nous réunir, car c’est notre bien commun, notre histoire en même temps que notre avenir. Il n’appartient à aucune chapelle. Depuis les années 1960 et depuis le Président Pompidou, l’environnement est entré dans les différents gouvernements et a été une vraie politique de l’ensemble des politiques.

Lorsque vous étiez présidente de la commission, vous avez su vous dépasser, madame la ministre. Nous n’avions pas tous les mêmes convictions, peut-être finalement tous le même but et, à chaque fois, nous avons trouvé quelques possibilités plutôt positives pour travailler ensemble. Je souhaite que cet état d’esprit puisse perdurer maintenant que vous êtes ministre, pour permettre à chacun de prendre sa place dans les propositions que vous avez faites.

Je ne vais pas reprendre toute la liste. Vous avez cité ce chiffre de 30 milliards qui est effectivement un chiffre important, qui s’inscrit dans une relance à la suite d’une pandémie également très importante. Faisons attention toutefois qu’il ne soit pas un crédit sur les générations futures. Assurons-nous qu’il soit payé par nous-mêmes, notamment par la capacité que nous aurons à créer du développement économique avec l’environnement.

Vous avez évoqué une crise environnementale et l’urgence climatique. Je ne pense pas que nous puissions embrasser la totalité des dossiers à la fois. Pouvez-vous dire que l’urgence climatique est aujourd’hui l’essentiel des problématiques de notre territoire ? Les émissions de gaz à effet de serre sont actuellement constituées pour 0,8 à 0,9 % des émissions françaises. Même si nous sommes le premier élève de la classe, pouvez-vous nous assurer que les autres pays de la planète travailleront également à la réduction des gaz à effet de serre et feront en sorte que nous puissions avoir demain l’assurance d’une planète dont le climat nous permettra de vivre normalement ?

M. Patrick Loiseau. Au nom du Modem, je souhaite saluer les annonces très ambitieuses du Gouvernement mentionnées dans le plan de relance que vous venez de nous décrire. Les moyens sont à la hauteur des objectifs présentés avec l’immense défi de concilier l’activité économique et la transition écologique. Au Modem, vous le savez, nous sommes partisans d’une écologie pragmatique, qui puisse se concilier avec la compétitivité et la croissance.

De nombreux sujets sont pris en compte dans ce plan de relance, tels que la rénovation des bâtiments, la lutte contre l’artificialisation des sols, les mobilités vertes ou la transition agricole. Parmi eux, le sujet de l’investissement et du développement de technologies vertes me semble fondamental pour atteindre nos objectifs. La France dispose de toutes les compétences pour prendre une position de pointe dans ce domaine.

Par exemple, l’hydrogène vert est une solution d’avenir permettant d’atteindre nos objectifs de neutralité carbone avant 2050. C’est également une filière porteuse d’emploi puisque jusqu’à 100 000 postes pourraient être créés d’ici 2030. Mon département de Vendée est d’ailleurs fortement engagé sur ce projet avec la start-up Lhyfe qui développe et opère des sites industriels de production d’hydrogène vert.

En vue d’atteindre nos objectifs en matière de mix énergétique, un soutien similaire est-il prévu pour les filières biogaz et éthanol ? Quels seront les moyens déployés ? Les sept milliards d’euros engagés seront-ils suffisants pour faire de la France la pionnière de l’hydrogène décarboné ?

Plus généralement, je salue l’annonce du quatrième programme d’investissements d’avenir (PIA 4), mentionné dans le plan de relance. Il vise à financer les innovations dans le domaine écologique. Il semble néanmoins recouvrir des problématiques très différentes et vastes. Pourriez-vous nous préciser des exemples de projets innovants qui pourront être financés ? Les collectivités locales pourront-elles bénéficier de ces fonds ?

Mme Chantal Jourdan. Madame la ministre, il y avait au plus fort de la crise sanitaire unanimité pour dire qu’il fallait tirer les leçons de la situation et interroger notre modèle de développement. Il est donc attendu que le plan de relance du Gouvernement traduise cette volonté. Dans le plan présenté le 3 septembre, 30 milliards doivent être consacrés à l’écologie pour assurer la rénovation énergétique des bâtiments, le développement de l’hydrogène vert, l’investissement dans le ferroviaire ou la mobilité du quotidien.

Cependant, certains chapitres de ce plan risquent d’entrer en contradiction du fait des orientations différentes qu’ils poursuivent. J’illustre mon propos avec deux points. Tout d’abord, il est surprenant de trouver des investissements importants en faveur du nucléaire si l’objectif de la France est d’abaisser à 50 % la part du nucléaire dans son mix énergétique d’ici 2035. Il serait attendu que les 470 millions d’euros qui sont investis par le plan dans cette filière servent aussi à préparer l’après-nucléaire, c’est-à-dire le démantèlement et la formation des personnels. En parallèle, bien sûr, un soutien massif aux énergies renouvelables territorialisées serait indispensable et marquerait la volonté de soutenir l’économie locale. Madame la ministre, pouvez-vous donc nous assurer que les choix du Gouvernement permettront bien de respecter l’engagement à 2035 ?

Je reviens en deuxième point sur une récente interview dans laquelle vous indiquiez l’interdiction au début de l’année 2021 de plus de 50 % des produits contenant du glyphosate, car des alternatives seraient trouvées. Or c’est souvent une logique de substitution qui est avancée, logique qui nous éloigne de la démarche agroécologique. Cette dernière nécessite en réalité un changement des pratiques et aurait l’avantage de répondre à la reconfiguration des territoires qui pourraient retrouver biodiversité, qualité de l’air, qualité de l’eau et qualité des sols. Pour cela, des fonds conséquents devraient être alloués à l’accompagnement des agriculteurs qui s’engagent dans des mutations agronomiques. Madame la ministre, le Gouvernement est-il prêt à privilégier l’accompagnement du changement des pratiques agricoles ?

Mme Sophie Auconie. Comme vous, madame la ministre, les membres de l’UDI sont pour une transition énergétique et écologique efficace, pragmatique, d’envergure et d’ambition. Comme vous, en tant qu’héritiers du Grenelle de l’Environnement à travers Jean-Louis Borloo, nous sommes pour une écologie populaire et humaniste.

Dans ce cadre, je vais me permettre de vous saisir d’un vrai sujet : les parcs d’éoliennes terrestres. Je suis élue d’Indre-et-Loire, un département extrêmement pourvu en patrimoine historique. Aujourd’hui, des parcs d’éoliennes terrestres ont fait l’objet d’un certain nombre de démarches. Ils n’ont pas encore été implantés, mais nous risquons l’implantation de parcs d’éoliennes dans notre beau département, contre l’avis du commissaire enquêteur, contre l’avis des Architectes des bâtiments de France, contre l’avis de la population – lors d’un référendum populaire, 98 % des votants se sont prononcés contre –, contre l’avis unanime des conseils municipaux, contre l’avis des communautés de communes.

Madame la ministre, on ne peut pas œuvrer dans le sens de l’écologie en s’opposant à la population des territoires. S’il vous plaît, madame la ministre, lorsqu’un parc d’éoliennes s’implante contre les territoires, c’est une permanence du Rassemblement national qui s’ouvre. Je vous le dis, c’est inquiétant et je vous demande de bien prendre en considération cet état de fait.

Je m’engage à tout mettre en œuvre pour que la ligne Tours-Loches soit à hydrogène. Je m’engage, avec le ministre Djebbari, à ce que nous allions dans le sens de petites unités de méthanisation, d’une géothermie peu profonde, de parcs solaires sur nos toits agricoles et industriels, mais, s’il vous plaît madame la ministre, ne faites pas de parc éolien terrestre contre les territoires. Je vous remercie.

Mme Mathilde Panot. Madame la ministre, qui a dit : « ce que je redoute le plus, c’est de prendre des décisions qui seraient très jolies sur le papier, mais qui ne seraient pas applicables et cela, ce n’est pas possible ; ce serait vraiment mentir à la population ; ce serait se payer de mots et ce ne serait pas responsable » ?

Qui a dit également : « vous vous apprêtez à voter un texte dont nous mesurerons l’importance que dans quelques années » ? Oui, c’est vous !

En 2016, en tant que secrétaire d’État à la biodiversité, vous meniez la bataille pour interdire les pesticides tueurs d’abeilles. Vous arrachiez de haute lutte le vote de cette loi à deux voix près dans l’hémicycle de l’Assemblée. Puis, en 2020, vous devenez ministre. Sur les bons conseils de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), vous faites machine arrière et autorisez les dérogations à votre propre texte, non seulement pour la culture de la betterave, mais pour toutes les cultures sur tout le territoire.

Pour camoufler ce cadeau fait aux lobbies, vous nous inventez des garanties dérisoires qui confinent au mensonge. La récolte se fera avant floraison, la dérogation ne sera octroyée que si l’hiver est doux… Peu importent les recherches qui démontrent les effets néfastes avérés sur notre santé, la biodiversité, la qualité des sols et des eaux, arguments que vous connaissez déjà pour les avoir défendus il y a quatre ans. Peu importent l’opposition des apiculteurs, des associations écologistes, de la confédération paysanne ou la mobilisation citoyenne. On s’étonne de ce revirement.

En 2018 déjà, lors de l’examen du projet de loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (Egalim), vous votiez en première et en seconde lecture contre notre amendement d’interdiction du glyphosate et contre celui tendant à interdire les néonicotinoïdes.

Aujourd’hui, vous signez l’appel des coquelicots pour l’interdiction des pesticides, mais vous défendrez la semaine prochaine le texte qui autorise les néonicotinoïdes. On peine à comprendre ! Je me demande ce que la ministre dirait à la secrétaire d’État Pompili de 2016.

Ma question est donc la suivante. Vous qui êtes tant attachée à la biodiversité, les couleuvres que vous avez avalées depuis 2016 sont-elles de la famille des colubridae ou plutôt des boidae ?

M. Hubert Wulfranc. Madame la ministre, nous allons faire un peu de politique tout de même.

Ma première remarque est que votre ministère, finalement, est privé de 30 milliards d’euros, qui, dans ce plan de relance, vont directement alimenter les grandes entreprises, sans aucune garantie pour l’environnement et l’emploi, sans aucune injonction politique. Par exemple, Renault n’a reçu aucune injonction pour construire un petit véhicule populaire à coût accessible.

Ma deuxième remarque est que la transition écologique, au cœur des politiques publiques, devait être un puissant gisement d’emplois. Or l’objectif annoncé de 160 000 emplois, sans d’ailleurs que la transition écologique soit identifiée dans cette promesse, est sans commune mesure avec le potentiel d’une véritable transition écologique et bien loin, bien évidemment, de l’aggravation de la situation de l’emploi. Par exemple, 2 000 emplois vont être supprimés cette année encore dans la branche « Fret » de la SNCF.

Ma troisième remarque, enfin, est que, outre le fait que les investissements annoncés ne s’inscrivent pas dans une programmation pérenne d’un niveau nécessairement élevé à l’exemple de la rénovation thermique, aucun engagement n’est pris jusqu’à maintenant sur une augmentation sensible des moyens d’expertise, de contrôle et d’intervention de l’État central et territorialisé ainsi que de ses grands opérateurs. Nous avons longuement parlé de ces opérateurs, du Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema) à l’Office national des forêts (ONF). Ils occupent régulièrement nos travaux au titre de l’affaiblissement de leurs capacités d’intervention. Quand on investit, il faut pouvoir fonctionner au niveau de l’État central.

À ce stade, nous considérons donc, madame la ministre, avec tout le respect que je vous porte, que le plan de relance relève d’une écologie et d’une solidarité opportunistes, sans inflexion durable de la politique du Gouvernement, que ce soit dans le domaine de l’écologie ou dans le domaine des solidarités.

Mme Yolaine de Courson. Cette rentrée est marquée par de nombreux sujets qui ont trait à ces choix cruciaux que nous devons faire en société face à l’enjeu de la transition écologique. Nous avons à nous pencher sur des projets de loi qui proposent d’importantes régressions sur le plan du droit et de la démocratie environnementale comme dans le titre III du projet de loi d’accélération et de simplification de l’action publique. Nous sommes sommés d’accepter sans débat suffisant la transformation technique de la 5G.

Dans le plan de relance, poser du double vitrage ou investir dans la filière hydrogène sont d’excellentes choses, mais, vous le savez bien, ce sont à la fois la réponse tardive à une exigence européenne et une ambition de politique industrielle classique. Cela ne constitue pas un engagement novateur vers une économie écologique.

Cette distinction est particulièrement frappante en ce qui concerne le projet de loi de circonstance sur ces pesticides dangereux que sont les néonicotinoïdes. Je vous rappelle à ce sujet trois éléments.

Nous avions tout d'abord dit dans le groupe En Marche que nous ne ferions pas de loi de circonstances. Ensuite, au moment de l’annonce du plan France Relance, le Président de la République a dit : « France Relance n’est pas conçu pour faire face aux difficultés du moment, car cela, nous l’avons déjà fait. » Enfin, l'enjeu de France Relance n'est pas d'octroyer des subventions à des secteurs en difficulté, mais d’investir pour transformer.

Ce projet de rétablir les pesticides les plus toxiques a pour seul but de venir en aide à la filière industrielle du sucre issu de la betterave qui affronte une crise grave, c’est un fait, dans l’amont agricole de la filière. Toutefois, de quelle aide s’agit-il ? Son objet n'est pas d’accompagner réellement une filière pour qu’elle puisse être compétitive à long terme sur le marché mondial ni d’accompagner un écosystème de 46 000 emplois vers une production agroécologique dont nous pourrions être collectivement fiers. Non, il s’agit simplement de s’engager dans un moins-disant écologique et économique qui nous place sur une trajectoire de concurrence avec nos voisins européens les moins avancés.

Il existe d’autres solutions, madame la ministre. La protection de la biodiversité est vitale, et vous le savez mieux que quiconque. Cela ne devrait plus se discuter. Des idées ont été amenées, des lois ont été votées pour qu’il n’y ait plus de retour en arrière.

Dans la rentrée législative qui arrive, je me demande personnellement si, en cas de crise, la transition écologique devient juste une variable d’ajustement.

M. François-Michel Lambert (en visioconférence). Madame la ministre, je vous remercie pour cette présentation et nul ne peut douter de votre volonté.

Des chiffres ont été donnés sur le plan de relance et vous dites aller plus loin que ces chiffres, mais la politique n’est pas faite que de chiffres. Elle est faite également de choix de société : courage politique, respect de la République, confiance dans les élus locaux.

Je commencerai par m’inquiéter de cette majorité qui fait comme si la République n’avait pas existé avant mai 2017 et ne se souvient pas des différentes démarches précédentes. Pourtant, même sous Nicolas Sarkozy, le Grenelle de l’Environnement en 2007 a donné des objectifs et des ambitions. Je ne parlerai que d’une seule, l’écotaxe, qui a été stoppée, mais qui nécessite de repartir. Êtes-vous prête à soutenir une écocontribution telle que je l’ai défendue maintes fois depuis plus d’un an dans l’hémicycle, notamment en loi de finances ?

Sous François Hollande, une avancée très notable a eu lieu dont vous avez d’ailleurs été l’une des initiatrices. Que faisons-nous de l’article 74 de la loi de transition énergétique pour la croissance verte (TECV) de 2015 ? C’est un article fondateur sur la question de l’économie circulaire qui nous remet en lien avec les limites de notre planète. Nous n’avons pas eu le droit d’en débattre dans la loi sur l’économie circulaire cet hiver ; cela a été interdit. Que faisons-nous donc de cet article ? Est-il toujours valide ?

Qu’est devenue la stratégie France Logistique 2025 qui avait été commanditée par le ministre Emmanuel Macron et par Ségolène Royal et présentée en 2016 en Conseil des ministres ? Ses objectifs sont en lien avec ceux que vous avez présentés. Or France Logistique 2025 a disparu.

Quid de la mise en œuvre de la loi Eva Sas sur les nouveaux indicateurs de richesse de 2016 ? Nous n’en entendons plus parler. Pourquoi la trajectoire, très positive, sur la mobilité électrique a-t-elle été freinée depuis 2018 ? Nous pourrions aussi parler du recul sur le nucléaire, des néonicotinoïdes, du glyphosate, etc. ?

Madame la ministre, Altéo est une société qui se trouve dans ma circonscription. Elle est en redressement judiciaire. C’est une usine unique au monde pour la production d’alumine, nécessaire à la transition écologique. Elle a fait disparaître de la pollution par des investissements majeurs. Elle risque de disparaître elle-même. L’État va-t-il prendre ses responsabilités au sujet d’Altéo ?

Mme Barbara Pompili. Je vous remercie pour vos nombreuses interventions et je remercie tous ceux qui m’ont encouragée et m’ont adressé des messages de félicitations. Je peux vous dire que je suis aux manettes et que j’ai bien l’intention de travailler à répondre à tout.

Laurianne Rossi m’a interpellée sur les modalités opérationnelles de la mise en place du plan de relance. Le principe est celui d’une mise en place au niveau territorial. Il s’agit de faire remonter les projets.

Nous avons donc lancé un appel et je compte sur vous, parlementaires, pour relayer cet appel auprès des collectivités de votre circonscription. C’est le moment de leur dire : « Vous avez une école qui a besoin d’être rénovée et cela traînait par manque de moyens. Les moyens sont là, allez-y, transmettez les demandes et vous pourrez obtenir des financements. » Le principe est vraiment celui-là.

Sur qui allons-nous nous appuyer pour mettre en place toutes ces mesures du plan de relance ? Évidemment, nous solliciterons les services de l’État, les services préfectoraux, mais aussi nos opérateurs. Ainsi, pour les questions de rénovation, nous passerons par exemple par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) et, pour les questions d’assainissement, par les agences de l’eau.

Des éléments très précis vous seront transmis. Ils sont en train d’être finalisés pour que vous puissiez orienter tous les interlocuteurs des territoires afin qu’ils nous fassent remonter leurs besoins. Ce n’est pas à nous de les identifier à leur place. La logique est vraiment celle du « bottom-up » – un terme que je n’aime pas.

En ce qui concerne les contreparties, la confiance n’exclut effectivement pas le contrôle, je suis parfaitement d’accord. Certaines choses sont assez faciles. Dans le cas des appels à projets, nous vérifions que les projets sont conformes aux objectifs du plan de relance et, dans le cas contraire, ils ne seront pas suivis d’effets. De la même manière, si des projets sont validés, mais sans être correctement mis en place, nous affecterons leur budget à d’autres projets. Il est important de bien avoir en tête que nous aurons beaucoup d’appels à projets.

J’entends bien que, derrière cette question, se pose le problème de l’écoconditionnalité. Mais cela concerne moins ma partie, qui sera l’opérationnel, que les aides qui peuvent bénéficier à des secteurs, par des baisses d’impôts par exemple. Un travail a été commencé lors du troisième projet de loi de finances rectificative auquel j’avais activement contribué. Une mission parlementaire est en cours et j’en attends avec impatience les résultats. Parallèlement, nous sommes en train de travailler à un certain nombre d’actions que nous pourrons vous proposer. Elles sont en cours d’arbitrage interministériel. Vous imaginez bien que je suis force de proposition et je ne doute pas de convaincre tous mes collègues. Mais il me semble que nous sommes à peu près tous d’accord, au Gouvernement, sur le fait qu’il faut avoir une manière de vérifier que les stratégies proposées par les entreprises correspondent bien à la stratégie nationale bas carbone (SNBC) et qu’il faut faire en sorte que tout le monde s’y tienne. Sinon, effectivement, nous « arrosons le sable » et je pense que nous ne pouvons pas procéder ainsi avec l’argent du contribuable.

Sur la pollution sonore, des mesures pourront être financées par le plan de relance, notamment des murs antibruit. Nous sommes aussi en train de travailler sur la question des radars sonores : ceux-ci sont une manière de faire comprendre aux utilisateurs de certains deux-roues, par exemple, que modifier le pot d’échappement ne sera pas rentable et leur posera des problèmes. Nous sommes actuellement en discussion avec le ministère de l’Intérieur. C’est un sujet qui me mobilise, vous pouvez compter sur moi.

Vous dites, Jean-Marie Sermier, que l’environnement doit nous réunir. J’ai donné des gages sur ce point lorsque j’étais présidente de cette commission et je vous les redonne maintenant, ainsi qu’à Sophie Auconie. Nous devons travailler ensemble, nous avons besoin de tout le monde. Cette cause nous concerne tous. Je serai donc, je m’y engage devant vous, toujours à votre écoute sur les propositions que vous pouvez faire, sur les évolutions que vous pouvez envisager. Ce n’est pas difficile à faire, vous savez que je l’ai déjà fait et je continuerai. Venez me voir, la porte est ouverte et vous aurez toujours une oreille attentive. Nous porterons ensemble toutes les bonnes initiatives que nous pouvons porter ensemble. Je vous le dis à vous, parlementaires, mais aussi à tous les élus locaux. Tous ceux qui veulent mettre en place des politiques écologiques ambitieuses m’auront à leurs côtés, ainsi que le Gouvernement. Nous ne pouvons pas nous permettre de vaines bagarres politiciennes sur des sujets aussi importants.

Au sujet du crédit sur les futures générations, nous souhaitons que le plan de relance permette de préparer l’économie de demain et donc de travailler à créer des emplois vers lesquels pourront se tourner nos jeunes et les générations futures. Nous savons que la transition écologique est une transition économique forte. C’est une révolution économique. Des emplois finiront donc forcément par disparaître parce qu’ils y ont vocation, tandis que d’autres vont naître. L’idée du plan de relance n’est évidemment pas de changer le monde en deux ans, mais d’essayer de stimuler de nouvelles filières qui permettront de créer ces emplois à l’avenir, que ce soit dans l’agriculture durable, l’agroécologie, dans la stratégie hydrogène ou, aussi, dans la rénovation des bâtiments.

Tout le monde parle de « rénovation thermique », mais personnellement je préfère les termes de « rénovation écologique ». Pourquoi ? La rénovation thermique n’a pour but que de changer votre étiquette énergétique, de vous faire passer de E, F ou G à A, B ou C, c’est-à-dire d’avoir une meilleure efficacité énergétique du bâtiment. C’est très bien et il faut le faire, car nous diminuons ainsi nos émissions de gaz à effet de serre et nous luttons contre la précarité énergétique.

Toutefois, je dis « écologique » parce qu’il faut aussi en profiter pour encourager des filières qui commencent actuellement à se développer, mais ne sont pas encore complètement matures. Je pense à des filières de matériaux par exemple : utiliser du lin, du chanvre, du bois, développer la filière bois, qui l'est aujourd’hui trop peu dans notre pays. Tout cela permet de créer localement des emplois, d’utiliser des matières qui sont très intéressantes d’un point de vue énergétique et écologique. De nouvelles filières apparaissent, des formations ont lieu et ce sont pour nos jeunes des perspectives pour trouver des emplois. Ce seront de plus des emplois de circuits courts, également bénéfiques pour l’environnement.

Jean-Marie Sermier m’a interrogée sur la priorité climat. Aujourd’hui, le réchauffement climatique ne peut pas être traité à part de la question de la biodiversité notamment. Nous le voyons bien. Lorsqu’il y a en ville des îlots de chaleur, vous passez à côté d’une partie des solutions en ne remettant pas de la nature en ville. L’agriculture a beaucoup de problèmes actuellement à cause des sécheresses, à cause des inondations, à cause des coulées de boue comme dans mon département de la Somme. Tout cela est dû aussi à la suppression des haies. Si nous remettons des haies, ce qui sera financé dans le plan de relance, si nous remettons de la biodiversité, si nous protégeons les zones humides, nous allons aussi atténuer les effets du changement climatique. Tout est lié, comme je le disais dans mon discours introductif, et je ne peux donc pas faire l’un sans l’autre puisque, lorsque nous tirons un fil, nous nous rendons compte que tout se dénoue.

Enfin, en ce qui concerne les autres pays, nous ne sommes qu’une partie du problème, mais nous ne pouvons pas passer notre temps à donner des leçons au monde entier si nous ne sommes pas capables nous-mêmes de travailler sur nos émissions de gaz à effet de serre. Nous avons un système électrique peu émetteur de gaz à effet de serre, mais, par contre, nous ne sommes pas performants dans les domaines des transports, de l’industrie, de l’agriculture et du bâtiment. Il nous faut travailler sur ces secteurs pour pouvoir tenir la dragée haute à nos interlocuteurs dans les rendez-vous internationaux importants.

Patrick Loiseau, vous avez parlé de la start-up Lhyfe pour l’hydrogène vert. Voir ce qui est en train de se faire m’intéresse et nous pourrons en rediscuter. Invitez-moi !

L’hydrogène ne résoudra pas tous les problèmes du monde. Je suis personnellement persuadée qu’il n’existe pas une seule solution au problème du réchauffement climatique. L’hydrogène peut être un secteur intéressant à développer. Malheureusement, l’hydrogène est trop souvent fabriqué aujourd’hui à partir d’énergies fossiles. Nous avons donc toute une industrie à mettre en place, notamment de gros électrolyseurs, en développant dans les territoires la possibilité d’avoir de l’hydrogène décarboné. « Décarboné » signifie aujourd’hui produit à partir d’énergie nucléaire et d’énergies renouvelables. Plus nous augmenterons la proportion d’énergies renouvelables, plus nous fabriquerons de l’hydrogène renouvelable qui a toute ma préférence, vous l’imaginez bien.

Le PIA 4 soutiendra notamment le développement des biocarburants avancés, issus de déchets par exemple, par l’obligation croissante d’incorporation d’éthanol durable dans les essences…  Nous soutenons donc aussi le bioéthanol.

Sur le biogaz, nous sommes actuellement en avance sur les objectifs de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). Nous avons une régulation à faire ; nous lui portons toute notre attention pour éviter que les petits projets soient impactés, car nous avons vraiment besoin de conserver les petits projets. Nous voulons aussi faire en sorte de garder une très bonne rentabilité de la filière. Ne vous inquiétez pas, nous restons sur des niveaux de rentabilité de l’ordre de 10 %, ce qui est assez important.

Chantal Jourdan, vous avez pointé des contradictions dans le plan de relance et vous parlez des investissements sur le nucléaire. Tout le monde connaît mes positions sur le nucléaire, mais je suis en désaccord avec vous sur le fait qu’il ne faut pas investir dans ce secteur. Lorsque j’étais députée, j’ai été rapporteure d’une commission d’enquête sur la sûreté et la sécurité nucléaires, à laquelle nombre d’entre vous ont participé. Cette commission a rendu un certain nombre de propositions et de constatations, dont une sur la perte de compétences qui est un sujet très grave pour l’industrie nucléaire et pour nous tous.

Nous avons besoin de compétences dans le nucléaire pour la maintenance, pour les soudures – compétences qui peuvent d’ailleurs servir ailleurs que dans les centrales nucléaires –, mais nous avons aussi besoin de compétences pour le démantèlement et finalement dans toute la chaîne des installations nucléaires. Quels que soient les choix qui seront opérés en 2022-2023, nous en avons encore pour longtemps et nous avons donc besoin que les installations soient gérées par des personnels compétents. Nous avons trop longtemps renvoyé à la sous-traitance la question des compétences. Il faut qu’elles reviennent chez les opérateurs du nucléaire. C’est pourquoi nous allons mettre de l’argent sur ce sujet dans le plan de relance.

Nous en mettrons aussi sur la question du démantèlement, justement pour nous améliorer sur ces sujets où nous avons encore une marge d’amélioration. Dans le plan de relance, nous prévoirons aussi de la recherche et du développement, que ce soit sur la sûreté ou sur la gestion des déchets. Un débat public a eu lieu sur le plan national de gestion des matières et déchets radioactifs (PNGMDR). Il a été demandé, lors de ce débat public, que des alternatives pour la gestion des déchets soient recherchées. Il y aura donc des moyens dans le plan de relance pour y travailler.

Enfin – c’est un point un peu différent –, 50 millions seront destinés à la recherche et au développement de petits réacteurs, les small modular reactors (SMR). Je crois que c’est important et je vous le dis avec toutes les convictions qui sont les miennes sur le nucléaire.

Il faudra choisir en 2022-2023 ce que nous ferons après 2025. Ce choix doit être à la fois vrai et démocratique, ce qui suppose qu’il existe des options véritables et bien travaillées. Si nous optons pour le fait de « continuer le nucléaire », il faut choisir aussi si c’est au moyen de réacteurs à eau pressurisée (EPR) ou par d’autres biais. Je trouve normal de regarder quelles sont les possibilités dans ce cas. Tant qu’à faire, si nous continuons le nucléaire, ce serait bien que nous évitions de reproduire les erreurs de l’EPR ! L’autre option sera de baisser jusqu’à l’extinction le nucléaire pour arriver en 2050 à 100 % d’énergies renouvelables. Cette deuxième option est en cours d’étude, notamment par le Réseau de transport d’électricité (RTE) et l’Agence internationale de l’énergie (AIE). Ils essaient justement, en ce moment, de renseigner ces options. Il est très important que nous ayons deux options sur la table et qu’elles soient bien renseignées, scientifiquement et économiquement, pour que le choix se fasse de manière éclairée. Ce n’est pas moi qui déciderai. Ce n’est pas EDF. Ce sont les citoyens, soit par leurs représentants, soit par d’autres voies. Voici la raison pour laquelle toutes ces recherches sont prévues dans le plan de relance.

Sur le glyphosate, je partage complètement avec vous le fait que rechercher comme alternatives uniquement des produits sans réfléchir au modèle agricole est une erreur. Je vous confirme donc que la recherche d’alternatives, aussi bien pour le glyphosate que les néonicotinoïdes, ne doit pas se limiter à rechercher des produits de remplacement sans réfléchir à un changement de modèle. Il peut y avoir des recherches de produits, effectivement, mais il faut aussi faire des recherches sur les changements de méthodes. Ces changements nécessiteront ensuite la formation des agriculteurs, des investissements, etc. Je suis tout à fait d’accord avec vous sur le fait que nous ne pouvons pas rechercher des alternatives d’une façon unilatérale, ce qui n’a aucun sens.

Sophie Auconie a posé des questions sur les éoliennes terrestres. Nous avons besoin de développer les énergies renouvelables (EnR). Nous avons des objectifs dans la PPE et mon rôle est de faire en sorte que ces objectifs soient tenus, quoi qu’on en pense. Développer les EnR signifie développer toutes les EnR donc le photovoltaïque, le biogaz, la géothermie, etc., et également les éoliennes, qu’elles soient en mer ou terrestres.

Il faut d’abord savoir que le coût de l’éolien baisse. Disposer d’une énergie peu coûteuse est intéressant et l’éolien terrestre le permet maintenant, ce qui est important. Les consommateurs ont aussi besoin de ne pas payer cher leur électricité.

Je suis d’accord avec vous, en ce qui concerne les choix d’implantation, sur le fait qu’on ne peut pas implanter des énergies sans essayer d’obtenir un assentiment autour du projet. Toutefois, vous me parliez de biométhane. Vous verrez que nous aurons les mêmes problèmes avec tous les méthaniseurs qui s’installeront et, pourtant, nous en avons besoin.

Plusieurs solutions s’offrent à nous. La première est d’écouter quels sont les problèmes rencontrés, en particulier sur les éoliennes. Par exemple, nous avons eu des retours sur le fait qu’il reste du béton dans le sol après le remplacement des éoliennes et que cela pollue. Ce problème est réglé : j’ai signé l’arrêté qui impose d’enlever l’intégralité des socles en béton lors du remplacement d’éoliennes, ce qui constitue déjà une avancée positive pour tout le monde. Un deuxième problème pour l’acceptabilité des éoliennes est le balisage qui les fait ressembler à des arbres de Noël la nuit. Nous sommes proches d’une solution et j’espère que nous aboutirons très vite ; en tout cas, c’est un problème et il faut prendre ces problèmes les uns après les autres pour les régler.

Ensuite se pose la question du choix du lieu d’implantation. Il existe des contraintes liées à l’aviation civile, aux questions de défense, etc. Je suis très attachée à une forme de planification, c’est-à-dire à des schémas qui ont existé à une époque et qui ont été attaqués. Je pense que c’est une erreur et que la planification dans chaque territoire est importante pour que nous puissions dire : « Nous avons tel objectif de déploiement puisque chaque territoire doit prendre sa part et certains l’ont prise plus que d’autres ; voyons comment les répartir entre les différentes énergies et où les mettre. »

À partir du moment où ce schéma est travaillé, anticipé, soumis au débat, nous pourrons dire que nous en mettons tant à tel endroit et non à tel autre. Je crois que ce sera un moyen de calmer un peu tout le monde, d’y voir plus clair et de rendre l’avenir plus lisible. Beaucoup de gens se plaignent qu’il arrive des éoliennes et qu’il va en arriver partout. Ce sentiment que cela se fait « dans leur dos » leur fait peur. Si cela est anticipé, partagé et transparent, je crois que nous réglerons ainsi de nombreuses difficultés. De plus, nous pouvons travailler à accroître la participation citoyenne dans la construction des éoliennes, que d’autres acteurs y soient associés. Cela fonctionne très bien dans d’autres pays.

Une fois que nous aurons étudié ces solutions, nous pourrons utiliser de manière apaisée la chance que nous avons de disposer de ces énergies renouvelables dans notre pays. Cela ne se fera pas facilement, mais je ne vois pas d’autre solution pour avancer.

Mathilde Panot, je m’attendais à plus d’originalité de votre part, à ce que vous ne parliez pas que des néonicotinoïdes !

Mme Mathilde Panot. Si l’on m’avait donné plus de deux minutes…

Mme Barbara Pompili. La Barbara Pompili de 2016 est totalement en phase avec la Barbara Pompili de 2020. Elle ne retirerait pas un mot de ce qu’elle a dit en 2016.

Je persiste à dire que les néonicotinoïdes sont des produits dangereux. Je persiste à dire qu’ils sont néfastes pour l’environnement, pour la santé, que c’est une catastrophe pour les abeilles… Je ne change donc strictement rien à ce que j’ai dit. Je ne change rien non plus au discours que j’ai tenu à l’époque quand je disais qu’il fallait absolument éviter de partir dans des dérogations ad vitam aeternam parce que, sinon, nous n’interdirions rien. J’ai tenu bon et, à l’époque, je n’étais tout de même pas très suivie. C’est passé « ric-rac », à deux voix près, et je rappelle que nous devons ces deux voix à des chasseurs, preuve que nous pouvons nous retrouver sur certains constats et combats, mais je n’ai jamais eu de doute à ce sujet.

Si je n’avais pas été dure sur cette question des dérogations, je pense que nous en serions aujourd’hui à 20 % des utilisations de néonicotinoïdes qui seraient interdites, pas au niveau actuel. Actuellement, 91 % des utilisations de néonicotinoïdes sont interdites dans ce pays. C’était inenvisageable il y a quatre ans et nous y sommes aujourd’hui. Je rappelle pour mes collègues que la loi Labbé, avec un taux de 70 %, est considérée comme un succès. Dans mon cas, un taux de 90 % est interprété comme un échec. C’est la vie, c’est la rançon de la gloire...

Il existe effectivement un problème que, collectivement, nous n’avions pas vu. Je rappelle que, pour qu’une loi soit appliquée, plusieurs conditions sont requises. Tout d'abord, il fallait que la filière suive. Or la filière n’a pas suivi et elle a sa part de responsabilité, c’est très clair. Il fallait ensuite que la recherche soit mieux conduite. Elle ne l’a pas suffisamment été et c’est une responsabilité collective. Il fallait également que l’État fasse plus son travail dans un but d'accélération. Or il y a clairement eu une inertie. Enfin, il existe un contrôle parlementaire de l’application de la loi, cela fait partie du travail des parlementaires. Je rappelle qu’un rapport d’application sur la loi sur la biodiversité a été rédigé. Toutefois, la loi sur la biodiversité contient plus de 170 articles et les néonicotinoïdes ne représentent qu’un article. Je ne reviendrai pas sur les moyens de contrôle des parlementaires, mais vous pouvez compter sur moi pour toujours souligner que les parlementaires ont besoin de plus de moyens de contrôle. Ce rapport a été rédigé dans cette commission, il a été porté par des députés de cette commission, il a été présenté devant cette commission et personne n’a relevé le problème. La responsabilité du fait que cette loi ne soit pas appliquée est donc collective et j’en prends ma part puisque j’étais présidente de cette commission.

S’agissant du problème de jaunisse, les agriculteurs ne planteront plus de betterave lors de la prochaine saison pour cette raison, considérant qu’ils n’ont plus assez de rendement. Que pouvons-nous faire ? Nous pouvons les indemniser et leur dire de replanter quand même. C’est ce que nous avons essayé de faire, mais ils ont réaffirmé leur position. Or s’ils ne plantent plus, nous ne récoltons plus de betteraves et, si nous ne récoltons plus, ces betteraves ne vont plus dans les dernières sucreries qui existent encore dans notre pays. C’est un choix. Nous pouvons laisser les dernières sucreries fermer faute de betteraves et partir à l’étranger. Nous pouvons faire ce choix. Comme pour toute filière, nous pouvons décider que cette filière n’a plus d’avenir en France et l’abandonner. Toutefois, j’ai toujours pensé – vous pouvez chercher les citations – que de tels choix s’anticipent, qu’on ne ferme pas des filières entières sans aucun débat public, sans aucune préparation pour les personnes concernées, sans aucun travail de reconversion. Or c’est ce qui serait arrivé.

Ce choix peut faire l’objet d’un débat. Considérons-nous que nous ne voulons plus d’industrie sucrière en France et que nous importons tout le sucre que nous consommons en France ? C’est un choix, mais qui a ce côté : « Je suis bien propre chez moi, mais je ne regarde pas ce qu’il se passe ailleurs. » Nous ne maîtrisons en effet rien de la fabrication du sucre que nous importons.

Il fallait choisir. Notre choix, avec Julien Denormandie, est de dire : « D'accord, nous avons tous échoué collectivement. Il faut en terminer avec ces néonicotinoïdes, et définitivement. Pour ce faire, nous mettons en place une petite – petite, j’insiste bien – dérogation, circonscrite uniquement à la betterave et pour le moins longtemps possible. » Je sais que ce n’est pas dans le texte actuellement, je l’ai lu. Je suis certaine que le travail parlementaire saura enrichir considérablement ce texte pour que, justement, ce soit bien circonscrit uniquement à la betterave. Aucune autre dérogation ne sera accordée. Je peux vous l’assurer puisque c’est moi qui signerai les arrêtés avec Julien Denormandie. On ne me fera pas mettre ma signature sur un autre produit que la betterave et ce sera pour le moins longtemps possible.

En parallèle, nous allons mettre en place un groupe de travail sur le suivi des alternatives de façon à ce que ces alternatives puissent être mises en place très rapidement. Nous allons « serrer la vis » à la filière pour que le travail soit fait et sinon, tant pis ! Au moins, nous aurons eu le temps d’en débattre.

Parlons de politique avec Hubert Wulfranc. Je n’ai pas compris pourquoi le ministère était privé de 30 milliards.

M. Hubert Wulfranc. Ce sont 30 milliards que vous filez au grand patronat sans condition.

Mme Barbara Pompili. Non, j’ai parlé auparavant de la conditionnalité.

En ce qui concerne la SNCF, je crois que le plan de relance montre justement que nous voulons soutenir la SNCF qui a subi d’énormes pertes à cause de la crise. Nous mettons en place un plan pour sauver la SNCF et nous serons aux côtés de l’entreprise.

Vous avez parlé de l’affaiblissement des opérateurs. Nous allons nous donner des moyens pour que les opérateurs puissent répondre aux demandes du plan de relance et vous savez que je suis très attachée au fait que les opérateurs puissent travailler dans les meilleures conditions. J’essaie de le porter au niveau interministériel.

J’ai déjà répondu aux questions de Yolaine de Courson, sauf en ce qui concerne la 5G sur laquelle nous reviendrons un peu plus tard.

François-Michel Lambert m’a interrogée sur France Logistique 2025. Il faut que je pose la question à Jean-Baptiste Djebbari, car je ne sais pas où cela en est.

Quant à l’écocontribution, c’est un sujet qui a été débattu lors de la Convention citoyenne pour le climat et nous allons en discuter dans le cadre de ses propositions.

Le site d’Altéo est effectivement en redressement judiciaire. Plusieurs offres de reprise ont été déposées, pour tout ou partie de l’usine. Nous serons vigilants sur l’emploi et la qualité écologique du projet, mais François-Michel Lambert n’en doutait pas, j’en suis sûre.

Mme la présidente Véronique Riotton. Merci, madame la ministre, pour la qualité de vos réponses. Nous avons une petite vingtaine de questions.

M. Lionel Causse. Madame la ministre, dans le plan de relance, 50 millions sont alloués au tourisme durable. Durant l’été 2020, les littoraux ont été l’une des principales destinations de vacances des Français. Dans ce contexte, alors que le mouvement démographique global tend à accentuer la densité de population sur les côtes, quelle place est accordée aux littoraux dans le plan de relance ? Sont-ils compris dans les 5,2 milliards fléchés pour le soutien aux collectivités territoriales ?

En outre, la constitution d’une mission d’évaluation de la loi littoral votée en 1986 ne serait-elle pas l’occasion de cibler précisément les besoins du trait de côte ? Vous avez dit en effet que le trait de côte faisait partie de nos priorités et que l’évaluation de la loi était l'une de nos actions majeures. Depuis 1986, le littoral français a évolué et sa loi également. Il semble nécessaire d’évaluer ces dispositifs législatifs, car de nouveaux enjeux sont à intégrer dans la vision systémique du traitement du littoral.

Mme Sylvie Bouchet Bellecourt. Madame la ministre, je souhaite revenir rapidement sur le soutien à la filière betteravière. Nos agriculteurs, particulièrement ceux de Seine-et-Marne, se souviendront longtemps de l’impact dévastateur qu’ont eu les pucerons et la jaunisse sur leurs betteraves. En 2016, vous avez porté en tant que secrétaire d’État la loi pour la biodiversité interdisant les néonicotinoïdes alors même que l’efficacité des alternatives plus respectueuses de l’environnement n’avait pas été prouvée. Tirerez-vous les leçons de cette position idéologique de l’époque pour accompagner à l’avenir nos agriculteurs plus efficacement dans la transition écologique ?

Pour le plan de relance dont je salue les grandes orientations, une interrogation demeure. 1,2 milliard d’euros seront consacrés au développement des transports collectifs. Tous les Français n’ont pas le luxe de pouvoir choisir entre le métro et le vélo. Madame la ministre, pouvez-vous nous préciser le fléchage des investissements sur les transports du quotidien ?

M. Jean-Luc Fugit. Madame la ministre, à la veille de la Journée nationale de la qualité de l’air, il est inutile de vous rappeler que l’amélioration de la qualité de l’air extérieur et intérieur est un enjeu transversal majeur. Je souhaite donc à travers quatre questions d’actualité connaître la vision que vous portez sur ce sujet.

Comment pensez-vous accompagner les associations agréées de surveillance de la qualité de l’air (AASQA) dans la mise en œuvre au 1er janvier prochain du nouvel indice ATMO que nous avons adopté au Conseil national de l’air (CNA) ? Ce nouvel indice doit donner une information plus complète et mieux territorialisée sur la qualité de l’air.

Comment allez-vous accompagner la mise en œuvre de zones à faibles émissions mobilité (ZFE) dans les territoires qui dépassent de manière régulière les normes de qualité de l’air ?

Les résultats de la campagne nationale exploratoire des résidus de pesticides dans l’air ambiant ont été présentés lors du CNA du 2 juillet 2020. Que pensez-vous faire suite à ces résultats ?

Enfin, je souhaite connaître les ambitions que vous portez en matière de qualité de l’air intérieur. Je pense par exemple à la prise en compte de ce sujet lors des travaux de rénovation thermique des bâtiments.

Enfin, il me reste quelques secondes pour vous remercier de défendre le biogaz. Pour les éoliennes terrestres, je vous invite à lire mon rapport à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) du mois de juillet 2020.

M. Jean-Luc Poudroux. Madame la ministre, dans le cadre du plan de relance du département de La Réunion, je m’attacherai au seul secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) et à ses besoins en matériaux. Le projet de carrière prévu à la Ravine du Trou à Saint-Leu a été invalidé par trois fois par le Conseil d’État. J’ai proposé une alternative sur la rivière des Galets à Saint-Paul. Il s’agit d’intégrer un site déjà présent au schéma départemental des carrières de 2001 et en zone de rocheuse dans le schéma départemental des carrières de 2010 qui prévaut actuellement. Le problème de ce site est que le quartzite, qui a le plus fort potentiel comme roche massive, se trouve au cœur du Parc national de La Réunion, créé en 2007. J’ai d’ailleurs participé à la mise en place de ce parc national dont le cœur recouvre, en l’état, 42 % de l’île. Nous avons vu un peu large à l’époque puisque les scientifiques ont admis que nous ne sommes en présence que de 20 % de biodiversité et d’écosystèmes.

J’ai besoin de vous, madame la ministre, La Réunion a besoin de vous. Nous devons faire triompher la raison. Le schéma départemental des carrières prescrit l’ouverture de carrières proches des zones de besoins. Nous sommes à 10 kilomètres de la nouvelle route du Littoral…

Mme la présidente Véronique Riotton. Merci, cher collègue, la parole est à Stéphanie Kerbarh.

M. Jean-Luc Poudroux. Non, j’interviens très rarement. Nous avons besoin d’une carrière située dans cette partie du parc, avec bien entendu des mesures compensatoires comme le remplacement des espèces invasives par des espèces endémiques.

Mme Stéphanie Kerbarh. La loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (AGEC) a été publiée le 10 février 2020, il y a maintenant six mois. Nous entrons dans ce que nous appelons la première phase de contrôle de l’application de cette loi. De très nombreux décrets restent encore à publier. La crise sanitaire que nous avons traversée a perturbé les concertations prévues et le calendrier initial. Quelle est aujourd’hui votre vision de l’application de cette loi, madame la ministre ?

Par ailleurs, en septembre 2019, le Gouvernement a lancé une concertation sur un éventuel projet de réforme du code minier. Pouvez-vous nous dire si vous souhaitez une réforme d’ici la fin de ce quinquennat ?

M. David Lorion. Je voudrais vous poser une question sur les outre-mer et la biodiversité. Comme vous le savez, les territoires ultramarins accueillent une grande partie de la biodiversité nationale et La Réunion a été inscrite, pour la moitié de ses espaces naturels, au patrimoine mondial de l’Unesco. Ce qui est moins connu, sans doute, est que toute cette belle biodiversité est menacée aujourd’hui par des espèces importées, notamment des espèces exotiques. Le conservatoire de Mascarin a dénombré en 2019 plus de 550 plantes à fleurs qui envahissent les jardins, nombre à comparer avec nos 363 espèces endémiques.

Certes, les services de l’État et du conservatoire sont mobilisés pour la lutte contre les espèces invasives, mais, si nous ne mettons pas en place des règles et même une législation plus forte, garantissant une biosécurité pour nos territoires insulaires comme le font par exemple la Nouvelle-Zélande, l’Australie ou les Seychelles, nous verrons disparaître l’ensemble de cette biodiversité malgré tous les efforts que nous pourrons faire pour lutter contre les pestes végétales. Que comptez-vous faire pour mieux réglementer les importations d’espèces nouvelles ? Ces espèces rentrent soit légalement soit illégalement sur l’ensemble de nos territoires ultramarins.

M. Yannick Haury. Madame la ministre, lors de la tempête Xynthia, j’ai été confronté en tant que maire à l’évacuation en urgence d’un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) situé en bordure de l’estuaire de la Loire. Les études menées depuis pour la prévention des risques ont montré que cet établissement est situé en zone inondable par subversion marine et que la digue, trop fragilisée, n’assure plus une protection suffisante. La délocalisation du site a été décidée par l’agence régionale de santé et le conseil départemental.

Malheureusement, face au réchauffement climatique et à l’élévation du niveau des océans, ces situations vont se multiplier et la question de la responsabilité des élus locaux se posera. Quelles mesures entendez-vous prendre pour favoriser la résilience du littoral face aux évènements climatiques majeurs, afin d’apporter des réponses concrètes pour la protection des populations en zone côtière ? Un audit sur le statut et le financement des digues et des ouvrages de protection est-il envisageable ?

M. Vincent Descoeur. Madame la ministre, la rénovation thermique figure en bonne place dans ce plan de relance et nous nous en réjouissons. Comme vous le savez, les dispositifs actuels ne permettent pas d’atteindre l’objectif affiché de rénovation de 500 000 logements par an. De fait, le plan de relance peut être une opportunité pour accélérer le rythme de ces travaux de rénovation.

Toutefois, si nous voulons atteindre l’objectif d’éradication des passoires thermiques à l’horizon 2040, l’effort doit aller au-delà des années couvertes par ce plan de relance. J’aimerais donc savoir si vous avez obtenu l’assurance que l’effort financier annoncé et le principe de l’extension des dispositifs à un plus grand nombre de bénéficiaires s’inscriront dans un temps long, indispensable pour atteindre l’objectif de rénovation complète à l’horizon 2040.

M. Jean-Marc Zulesi. Madame la ministre, le vélo est le grand gagnant de cette période, vous l’avez dit. En sortie de confinement, l’utilisation du vélo a augmenté de 30 %. Nous pouvons nous en réjouir. Vous avez fêté hier le deuxième anniversaire du Plan vélo. C’est une excellente initiative.

Dans France Relance sont prévus 200 millions d’investissements spécifiquement pour le vélo. Il est premièrement important de pérenniser l’aide à la réparation, le Coup de Pouce Vélo, sur lequel vous avez rajouté 20 millions d’euros. J’en suis heureux, mais pourrait-on imaginer de pérenniser l’aide en 2021 ?

Deuxièmement, je voudrais vraiment insister sur le fait que les parlementaires doivent être associés pour faire vivre ces 200 millions d’euros sur le territoire, en particulier pour le financement de pistes cyclables qui sont essentielles.

M. Martial Saddier. Je vous remercie, madame la ministre, pour cette présentation et pour les 300 millions d’euros consacrés au petit cycle de l’eau, si j’ai bien compris. Pouvez-vous éclairer la représentation nationale sur la répartition de ces 300 millions d’euros entre l’outremer et la métropole ? Je sais pouvoir compter sur votre vigilance pour une répartition équitable entre les grands bassins hydrographiques.

Est-il par ailleurs prévu une enveloppe pour le grand cycle de l’eau ?

M. Jacques Krabal. Madame la ministre, vous pouvez compter sur tout mon soutien dans le cadre du sauvetage de la filière betterave, avec bien évidemment la perspective de sortir des néonicotinoïdes dans les meilleurs délais. Je vous remercie pour votre pragmatisme.

Vous nous avez dit avec beaucoup de force l’écologie qui croît dans les territoires. Je pense que cette réflexion nous fait du bien ici, dans cette commission du développement durable.

Les contrats de transition écologique (CTE) de l’ancienne génération bénéficiaient des crédits traditionnels. Le plan de relance les abondera-t-il ? Comment cela va-t-il s’articuler avec les autres mesures du plan de relance ?

Vous avez parlé des méthaniseurs. La filière biogaz agricole s’inquiète. Comment allez-vous pouvoir soutenir la potentielle baisse des tarifs et un encadrement en baisse des capacités ?

M. Jean-Pierre Vigier. Madame la ministre, un des piliers importants pour renforcer l’attractivité des territoires, notamment des territoires ruraux, est de développer, renforcer et surtout sécuriser nos infrastructures ferroviaires. Le plan de relance prévoit 4,7 milliards d’euros pour le secteur ferroviaire. C’est bien, c’est une bonne chose, c’est nécessaire, mais ce n’est pas suffisant.

Pourquoi ? Je prends un exemple. Je vois aujourd’hui dans mon territoire, la Haute-Loire, que nous avons des petites lignes ferroviaires, notamment le Cévenol, la ligne des Cévennes. Cette ligne est fragilisée. Si la région Auvergne-Rhône-Alpes n’avait pas mis 10,5 millions d’euros il y a deux ans, simplement pour sécuriser la ligne et la maintenir pendant trois ans, cette ligne serait actuellement fermée. L’État a malheureusement été totalement absent. J’espère, madame la ministre, que dans le cadre de ces 4,7 milliards d’euros, les petites lignes ferroviaires bénéficieront de crédits et j’aimerais vous entendre sur le sujet.

M. Loïc Dombreval. Madame la ministre, François de Rugy a lancé en avril 2019 un groupe de travail sur la faune sauvage captive. Ce groupe associait des acteurs socioprofessionnels, des associations, des experts et deux parlementaires. Nous y avons parlé de zoos, de delphinariums, de cirques, d’élevages de visons pour la fourrure. Le bilan et les propositions de ce groupe de travail devaient être présentés en juillet 2019, il y a plus d’un an. Le retard est évidemment important. Les associations et les acteurs socioprofessionnels qui ont participé sont un peu frustrés. Je voudrais savoir quelles mesures vous comptez prendre et dans quel délai.

Mme Nathalie Bassire. Le passage à la 5G est peu ou prou équivalent au passage à la 4G, cette technologie permettant une augmentation du débit et une diminution de la latence. La 5G concerne essentiellement les appareils mobiles. Elle se bornera pour l’immense majorité des Français à réduire les temps de latence de jeux vidéo et à télécharger dix fois plus rapidement des films ou des séries sur téléphone.

Toutefois, outre l’augmentation du coût énergétique et la pollution visuelle qu’implique cette technologie, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) affirme qu’il persiste un manque important, voire une absence, de données relatives aux effets biologiques et sanitaires potentiels dans les bandes de fréquences considérées.

La 5G n’est pas une technologie futuriste. C’est l’amélioration d’un système préexistant. Elle ne transformera pas notre monde du jour au lendemain. Il faudrait pour cela développer des technologies capables d’en tirer profit.

Il ne s’agit pas du tout d’un procès du progrès, madame la ministre, mais nombre de nos concitoyens sont extrêmement inquiets du déploiement de cette technologie. Le Gouvernement assumera-t-il les conséquences d’une technologie potentiellement nocive pour la population et l’environnement en passant un marché au seul bénéfice des acteurs de la téléphonie, sans avoir divulgué d’étude sérieuse préalable ?

M. Philippe Naillet. Madame la ministre, dans le détail des 30 milliards destinés à l’écologie dans le plan de relance, 1,2 milliard sont destinés à développer les mobilités du quotidien et 550 millions, à l’accélération des travaux sur les infrastructures de transport. La semaine dernière, le ministre Bruno Le Maire a indiqué que les outre-mer étaient éligibles à l’enveloppe nationale.

À La Réunion, plus précisément à Saint-Denis, nous avons lancé la construction de l’un des premiers téléphériques urbains de France. Il surplombe un ensemble de quartiers et sera raccordé au réseau de bus et à notre prochain tramway. Qualifié de « vertueux » par le Grenelle de l’Environnement depuis 2009, notre projet de téléphérique ne bénéficie étonnamment pas du soutien direct de l’État. Madame la ministre, le plan de relance peut-il corriger cette anomalie et soutenir le projet de développement des téléphériques urbains ?

M. Alain Perea. Madame la ministre, vous avez parlé de l’artificialisation des sols, un dossier sur lequel nous travaillons. Dans le cadre du plan de relance, des financements sont prévus pour les friches, ce qui est très positif. Toutefois, vous le savez, une circulaire avait été envoyée il y a un peu plus d’un mois pour imposer, de manière assez stricte, l’absence d’artificialisation sur l’ensemble du territoire, sans faire véritablement de différence entre les territoires. Certains ont des réserves en matière de friches, d’autres n’en ont pas, et ce ne sont pas les mêmes enjeux. Cette prime pour rénover les friches est d’ailleurs aussi une prime aux mauvais élèves puisque des gens qui avaient déjà urbanisé vont être aidés pour réurbaniser. Envisagez-vous une approche territoriale afin que les territoires qui n’avaient jusqu’à présent pas urbanisé puissent avoir des politiques d’aménagement ?

M. Guy Bricout. J’aimerais évoquer l’état de notre réseau fluvial. Le plan de relance prévoit d’y attribuer une enveloppe de 175 millions d’euros pour 2021 et 2022. Autant dire qu’il ne s’agit pour le moment que d’un frémissement pour un réseau qui a tant pâti d’être délaissé ces dernières années. Il est aujourd’hui dans un état très préoccupant alors qu’il a tout son rôle à jouer dans une transition énergétique réussie.

J’aimerais m’associer à Sophie Auconie en ce qui concerne les éoliennes et leurs conséquences dommageables pour nos territoires. Vous êtes comme moi dans la région des Hauts-de-France où se trouvent 25 % des éoliennes du territoire national. J’avais fait partie du groupe de travail sur l’acceptabilité des éoliennes, créé par Élisabeth Borne, qui ne s’est malheureusement réuni qu’une seule fois. Madame la ministre, vous avez dit que vous souhaitiez mettre en œuvre un vrai schéma de développement éolien et je vous en remercie. Toutefois, j’aimerais savoir comment vous comptez procéder. Allez-vous reprendre les réunions du groupe de travail que j’évoquais ? Dans quel délai comptez-vous instaurer un vrai dialogue avec les territoires sur cette question ?

Mme Yolaine de Courson (pour Frédérique Tuffnell). Madame la ministre, dans le plan de relance, vous prévoyez de financer la remise en état des stations d’épuration et des réseaux d’eau. C’est une très bonne chose.

Est-il également prévu une politique efficace destinée à valoriser les solutions fondées sur la nature, comme la préservation des écosystèmes, la préservation des zones humides et la continuité des cours d’eau ?

M. Gabriel Serville. Madame la ministre, ma première question concerne le pillage des ressources halieutiques. De nombreuses interpellations avaient motivé l’augmentation des moyens et la mise en place d’actions de coopération conjointes avec les pays voisins. Il semble, hélas, que la crise de la Covid-19 ait entraîné une baisse des moyens déployés et, à ce jour, il ne reste que deux bateaux pour surveiller les 350 kilomètres de côtes de la Guyane. Qu’est-il donc advenu de l’outil de surveillance Spationav V2 qui nous avait été promis depuis 2016 ?

Ma deuxième question concerne les chiffres de l’orpaillage illégal qui est en recrudescence. À ce jour, nous dénombrons 147 sites actifs rien que dans le Parc national amazonien. À mon initiative et bien évidemment avec votre soutien, la commission d’enquête devrait commencer avant le mois d’octobre, mais nous avons tous compris que nous ne pourrons pas faire mieux sans une véritable coopération avec le Suriname et surtout avec le Brésil. Nous avons constaté que c’est le silence radio depuis la dernière opération. Je voudrais savoir si vous pourriez nous donner davantage de précisions sur ces questions.

Mme Barbara Pompili. Lionel Causse a posé des questions sur le volet maritime du plan de relance et le trait de côte. 40 millions seront consacrés au littoral dans le plan de relance, dont 25 millions pour des actions de conservation du littoral et 15 millions pour des projets d’évolution du trait de côte, pour accompagner des recompositions spatiales. Il s’agit d’un terme technique pour désigner les situations dans lesquelles il faudra revoir l’urbanisme et la manière dont on anticipe le recul ou l’avancée du trait de côte, pour essayer aussi de trouver des solutions fondées sur la nature, par exemple utiliser des dunes plutôt que des digues ou planter des oyats sur les dunes. Je réponds ainsi par anticipation à la question de Frédérique Tuffnell.

Le fonds consacré au tourisme durable sera de 50 millions d’euros, dont 10 millions pour l’adaptation des activités de restauration et 40 millions pour la transition durable des activités touristiques. En plus de ces actions ciblées, de nombreuses actions du plan de relance serviront le tourisme durable comme toutes les mesures de rénovation thermique et écologique dont je vous rappelle qu’une partie est fléchée pour les TPE-PME, la contractualisation territoriale dans les contrats de plan État-région (CPER) et toutes les mesures pour l’agroécologie et la transition alimentaire, notamment la restauration écoresponsable.

Sylvie Bouchet Bellecourt a posé des questions sur les néonicotinoïdes auxquelles j’ai déjà répondu, mais je vais revenir sur l’accompagnement des agriculteurs. Des mesures spécifiques sont prévues dans le plan de relance. Nous voulons en effet consacrer à 1,2 milliard d’euros sur la transition agricole, dont 400 millions d’euros sont destinés à accélérer la transformation du secteur agricole, justement pour aider à créer des projets alimentaires territoriaux. Les collectivités ont souvent un problème dans ce domaine, car elles n’ont pas assez d’agriculteurs qui remplissent les critères, notamment les critères haute valeur environnementale (HVE3) et Bio qui sont de plus en plus demandés pour la restauration collective, en particulier dans les cantines. Ces 400 millions d’euros visent donc à aider les agriculteurs à aller vers des HVE 3 ou à passer au bio.

Il existera aussi un fonds pour le renouvellement des agroéquipements. 250 millions d’euros sont prévus, car, lorsque l’on veut changer de méthodes et pas seulement de produits, il faut investir, par exemple dans des griffes pour travailler le sol et éviter de mettre trop de pesticides. Cela coûte cher et les agriculteurs ont besoin de soutien pour investir dans ces machines. Il peut aussi s’agir d’investir dans des pulvérisateurs qui ciblent mieux et sont plus efficaces, en remplacement de pulvérisateurs qui dispersent les produits trop largement. Ainsi, outre la question des néonicotinoïdes, nous voulons aussi aider les agriculteurs à réaliser cette transition. D’autres mesures sont prévues, je vous ai donné les principales.

Jean-Luc Fugit m’a interrogée sur le nouvel indice ATMO qui entrera en vigueur le 1er janvier 2021. ATMO-France et les services du ministère de la Transition écologique (MTE) ont préparé des supports de communication à l’intention du grand public et des élus. Le MTE financera les travaux de l’Alliance des collectivités pour la qualité de l’air à hauteur de 30 000 euros pour accompagner les collectivités dans la mise en œuvre de ce nouvel indice. Il renforcera également le budget des AASQA pour faciliter son déploiement.

Sur la mise en œuvre des ZFE mobilité dans les territoires en dépassement des normes, la loi d’orientation des mobilités (LOM) donne de nouveaux outils aux collectivités pour faciliter le développement des nouvelles mobilités comme le covoiturage domicile-travail. Elle permet également la mutualisation de certaines démarches administratives entre les territoires d’une même ZFE mobilité. L’État poursuit de plus les travaux sur le contrôle automatisé.

En outre, le fonds Air Mobilité de l’ADEME permet d’accompagner les territoires concernés par le dépassement des normes pour les particules fines à hauteur de 3 millions d’euros. Le Gouvernement a également mis en place une surprime à la prime à la conversion, pouvant atteindre 1 000 euros pour les personnes qui habitent ou travaillent dans une ZFE mobilité.

En ce qui concerne les pesticides dans l’air ambiant, les services du MTE et le Laboratoire central de surveillance de la qualité de l’air finaliseront dans les prochaines semaines une proposition de surveillance adéquate des résidus de pesticides dans l’air, en lien avec les associations de surveillance de la qualité de l’air et en s’appuyant sur le retour d’expérience de la campagne nationale exploratoire.

Quant à la qualité de l’air intérieur, le dispositif Ma Prime Rénov qui sera utilisé par les particuliers lors des travaux de rénovation écologique soutient, pour contribuer à la qualité de l’air intérieur, l’installation de ventilations à double flux ainsi que la rénovation globale qui comporte souvent des travaux de ventilation. En outre, les systèmes de chauffage de plus de 70 kW avec ventilation intégrée doivent désormais faire l’objet d’une inspection quinquennale, ce qui contribuera également à l’amélioration de la qualité de l’air dans les bâtiments concernés.

Jean-Luc Poudroux a posé des questions sur le développement de carrières et le Parc national de La Réunion. Je n’ai pas tous les éléments et je reviendrai donc vers vous avec mes équipes pour vous donner plus d’éléments. Schématiquement, c’est un sujet important pour le développement de La Réunion. Ce développement ne peut pas – et je partage ce que vous dites – se faire au détriment du patrimoine naturel exceptionnel de ce parc national inscrit au patrimoine mondial. Nous allons donc regarder ce sujet de plus près. Je ne voudrais pas être imprécise alors que l’enjeu est énorme pour ce magnifique parc de La Réunion.

Stéphanie Kerbarh m’a interrogée sur la mise en œuvre de la loi AGEC. Cette loi prévoit 101 mesures d’application, dont 10 facultatives que le Gouvernement peut mettre en œuvre par décret si besoin, le moment venu. 52 mesures entreront en vigueur de façon différée et 39 mesures sont à appliquer dès que possible. Ce sont les priorités de notre programme de travail. Les deux tiers des textes – 26 sur 39 – sont soit publiés soit en cours de consultations obligatoires – Conseil d’État, avis de la CNIL, Autorité de la concurrence, etc. – avant signature. Un tiers, soit 13 textes, sont moins avancés, mais seront publiés avant la fin de l’automne. Il faut noter, même si je ne me cache pas derrière cela, que la période de confinement et de déconfinement a un peu ralenti le travail d’élaboration des textes, notamment parce que les parties prenantes, en particulier les entreprises, étaient mobilisées sur d’autres sujets. Il était, de plus, impossible de mener les consultations du public sur les projets de texte jusqu’au mois d’août.

Sur le code minier, ce n’est pas parce que j’ai changé de casquette que j’ai changé d’opinion sur ce texte qui me paraît absolument essentiel. Il faut que nous le sortions avant la fin du quinquennat. Nous étudions actuellement quel est le véhicule législatif que nous pouvons utiliser. Nous pensons y arriver, mais ce n’est pas encore complètement arbitré. En tout cas, je suis plutôt optimiste et les consultations prévues, qui étaient déjà organisées avec les parlementaires, seront mises en œuvre. Il faut que ces consultations soient menées d’ici la fin de l’année.

David Lorion a posé une question sur les espèces exotiques envahissantes (EEE). C’est un sujet dont je me suis déjà préoccupée lorsque j’étais secrétaire d’État. Il est essentiel de lutter contre ces espèces exotiques, surtout dans les outre-mer et tout particulièrement dans les milieux insulaires. C’est en effet là qu’elles peuvent mettre en danger tous les écosystèmes tandis que la situation est moins terrible dans des espaces plus larges.

La France s’est dotée d’un arsenal pour lutter contre ces EEE dans le cadre de la loi sur la biodiversité. Une stratégie a été mise en place en 2017. Cette stratégie vise, d’abord, à prévenir l’introduction d’espèces. Il faut sensibiliser la population ; lorsqu’ils achètent certaines plantes et les mettent dans leur jardin ou dans la nature, ils ne se rendent pas compte qu’ils entraînent une diffusion. Je parle des plantes, mais le problème se pose de la même façon avec des animaux. Par ailleurs, il faut gérer les zones infestées, améliorer la connaissance et mobiliser les acteurs locaux.

Pour La Réunion, la liste des espèces exotiques envahissantes sera revue à la hausse pour renforcer la protection du patrimoine exceptionnel de l’île. Les règles d’importation ont été partagées avec les professionnels de l’île pour concilier protection de l’environnement et économie. La date d’entrée en vigueur de la liste ajustée des espèces est décalée de trois mois.

Au-delà des listes, je souhaite que les contrôles soient renforcés, notamment dans les ports, dans les containers.

Enfin, une attention particulière sera portée à l’information concernant ces règles pour sensibiliser les citoyens et les responsabiliser.

Yannick Haury m’a interrogée sur les mesures du volet maritime du plan de relance et sur la résilience du littoral face au changement climatique. J’en ai déjà un peu parlé.

Nous savons que les territoires exposés à la submersion le long du trait de côte sont exposés à des risques aggravés avec le changement climatique. Il faut donc repenser nos politiques du littoral. Un dispositif est en cours d’élaboration avec l’ambition de proposer une solution nouvelle de résilience dans ces territoires. Nous mettons évidemment dans la boucle le Conservatoire du littoral qui est l’acteur clé de la mise en œuvre du plan de relance sur le littoral. Nous consacrons 40 millions d’euros à l’accompagnement des collectivités pionnières sur les projets de recomposition spatiale.

Enfin, la compétence « Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations » (GEMAPI) créée au niveau des intercommunalités par la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (MAPTAM), en œuvre depuis le 1er janvier 2018, a été créée notamment avec l’objectif que toutes les digues aient réellement un gestionnaire. Les collectivités, en s’organisant si besoin dans un syndicat, se sont emparées de ces compétences. Elles identifient les digues existantes et les déclarent progressivement en système d’endiguement si elles souhaitent les confirmer.

Vincent Descoeur a posé une question sur la rénovation. Effectivement, 2 milliards d’euros sont prévus sur deux ans, mais il ne faut pas oublier qu’il existe déjà d’autres dispositifs. Le principe du plan de relance est de dynamiser la filière, de former des artisans, de générer de nouvelles filières sur les matériaux et d’accélérer les rénovations. Nous allons ensuite continuer avec des outils qui existent déjà, par exemple avec les certificats d’économie d’énergie (C2E).

Vous serez également mis à contribution sur cette question de la rénovation lors de la loi pour la Convention citoyenne sur le climat, puisque des mesures concernant ce sujet ont été proposées par les citoyens. Vous aurez à travailler et à vous prononcer sur ces mesures dans les mois qui viennent.

Jean-Marc Zulesi m’a interrogée sur le Coup de Pouce Vélo. Nous continuons jusqu’à la fin de l’année. Son principe était de faire en sorte que les gens se remettent en selle, qu’ils récupèrent leurs vélos, les réparent et les utilisent. Ce Coup de Pouce permet également de développer les magasins et les lieux de réparation ainsi que de former des professionnels. Ensuite, nous pourrons réfléchir au devenir du dispositif, mais je considère que le principe est de lancer la machine, le vélo. Ensuite, lorsque les gens auront un problème de frein ou autre, ils connaîtront les interlocuteurs, les réparateurs près de chez eux. Il faut laisser l’affaire « rouler ».

En ce qui concerne le financement des pistes cyclables, un appel à projets a été lancé par Jean-Baptiste Djebbari et les parlementaires doivent travailler étroitement avec les élus locaux pour identifier avec eux les pistes à améliorer ou à installer. Nous avons actuellement la question des « coronapistes » dont certaines sont pérennisées et d’autres pas. Je considère que vous avez aussi à faire votre travail localement, y compris pour aider des élus qui auraient du mal à pérenniser, du mal à voir comment faire. C’est un travail de collaboration que vous devez faire sur votre territoire.

Martial Saddier a posé une question sur le petit cycle de l’eau pour lequel 300 millions sont prévus. La répartition de ces 300 millions est la suivante : 250 millions pour la métropole et 50 pour les outre-mer. Nous regarderons évidemment projet par projet et il peut y avoir des modifications si de nombreux projets formidables sont proposés en outremer et moins en métropole.

En ce qui concerne le grand cycle, environ 100 millions d’euros sont prévus dans le cadre du plan de relance pour tout ce qui est continuité écologique aquatique, notamment pour le Rhin, mais aussi pour d’autres projets. De manière générale, les mesures prévues en faveur de la biodiversité auront également une incidence sur le grand cycle de l’eau, puisque tout est lié.

Jacques Krabal m’a interrogée sur les contrats de transition écologique et CRDE. Les CRDE seront généralisés d’ici fin 2021 et s’appuieront sur l’expérience réussie des CTE, mais aussi d’autres contrats comme les contrats de ruralité.

L’idée n’est pas de « réinventer la poudre ». Là où des contrats existent déjà, nous nous en servirons comme base pour les étendre aux autres compétences des CRDE. Ce travail sera fait avec le soutien de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), bien connue dans cette commission.

En ce qui concerne le biogaz, en particulier les méthaniseurs agricoles qui n’ont pas décollé pendant des années, le tarif n’a pas été notifié à la Commission et n’a pas évolué depuis 2011. Cela ne pouvait plus durer et nous appelions donc à notifier un mécanisme d’appel d’offres dans les prochains mois. Pour préserver les petits projets, il existait un guichet ouvert, donc un tarif avantageux. Ce tarif baissera certes, de 6 % en moyenne, mais c’est très raisonnable par rapport aux gains de productivité obtenus puisque la filière est en train de parvenir à maturité. Un rapport de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) nous dit d’ailleurs que ces tarifs sont encore trop élevés. Nous essayons de les tenir malgré ce rapport.

Deux points sont crispants aujourd’hui sur le sujet du biogaz. Il faut une autorisation « Installation classée pour la protection de l’environnement » (ICPE) pour déposer un dossier ; nous procédons ainsi pour avoir moins de taux de chute et des dossiers matures. Lorsque nous accordions des autorisations alors que l’autorisation ICPE n’était pas donnée, nous avions des dossiers qui n’étaient pas matures et faisaient défaut par la suite.

Par ailleurs, nous pourrons regarder si nous pouvons assouplir un peu le fait que nous plafonnions le volume additionnel.

Enfin, nous allons tendre une perche vers un mécanisme d’obligation d’incorporation.

En tout cas, je peux vous dire que nous voulons continuer à soutenir le biogaz. Toutefois, une bulle était en train de se former et risquait de poser des problèmes. Nous essayons de la résorber, mais en faisant en sorte que tout le monde puisse s’y retrouver.

Jean-Pierre Vigier posait une question sur le plan de relance ferroviaire. Parmi les 4,7 milliards d’euros, 2,3 milliards sont prévus pour la régénération des voies. Le reste sera destiné aux ponts, aux trains de nuit, au fret et à l’accessibilité des gares.

Le sauvetage des petites lignes est un engagement fort du Gouvernement après des années de sous-investissement chronique. Il vise à définir le devenir de près de 9 000 kilomètres de voies, en proposant un contrat spécifique à chaque région qui le souhaite. Des contrats ont déjà été lancés.

L’État s’engage à reprendre à sa charge les lignes qui ont le plus de trafic. Elles sont intégrées à 100 % dans le budget de SNCF Réseau. Les régions prennent à leur charge les lignes avec le moins de fréquentation et les autres sont cofinancées avec les modalités classiques des contrats de plan État-région (CPER).

Globalement, sur les 6 milliards d’investissements à réaliser dans les dix ans qui viennent, l’État s’engage pour un tiers contre deux tiers pour les régions, sachant que l’État maintient en parallèle le financement à 85 % de la maintenance des lignes, les péages versés par les régions ne couvrant que 15 %. J’insiste donc sur le fait que l’État est, et demeurera, le premier contributeur financier des petites lignes.

Deux régions ont déjà signé : Grand-Est et Centre-Val-de-Loire, pour un montant de 1,1 milliard d’euros. De bons échanges sont engagés avec la majorité des régions restantes et plusieurs signatures d’accords devraient avoir lieu dès cet automne.

Les 300 millions d’euros du plan de relance pour les petites lignes constituent un levier pour accélérer les projets et les investissements des régions, notamment pour traiter dans les trois ans les urgences les plus fortes. Il faut noter qu’une partie des crédits destinés à SNCF Réseau y contribuera également.

Il faudra que je regarde de plus près la question sur la petite ligne cévenole, j’avoue ne pas avoir la réponse.

Loïc Dombreval m’a interrogée sur la faune sauvage captive. Comme je l’ai déjà annoncé en propos liminaire, c’est un sujet sur lequel je veux que nous avancions vite. Ce plan sera annoncé très rapidement. Je n’en dis pas plus pour l’instant.

Nathalie Bassire a posé une question sur la 5G. J’entends les inquiétudes qui sont formulées et je les comprends. C’est pour cette raison que nous avons lancé plusieurs études dont une a été publiée aujourd’hui même. Il s’agit d’une étude conjointe du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD), du Conseil général à l’économie, de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et de l’Inspection générale des finances (IGF). Cette étude cumule toutes les connaissances scientifiques existantes sur le sujet.

En ce qui concerne la sécurité sanitaire, les prochaines enchères prévues à la fin du mois sur la 5G porteront sur la bande des 3,5 GHz. Ce sont des fréquences utilisées depuis très longtemps et sur lesquelles nous avons donc beaucoup de retours scientifiques. Dans cette bande, aucun problème n’est identifié tant que les limites légales d’exposition sont respectées.

Par contre, si la 5G se déploie, nous pourrons utiliser d’autres bandes de fréquences, notamment la fréquence des 26 GHz. C’est sur cette fréquence que l’ANSES et l’étude qui est sortie aujourd’hui préconisent de continuer les études. Nous allons le faire, car, effectivement, nous n’avons pas encore suffisamment de données pour être complètement rassurés. Toutefois, nous avons le temps puisque cette bande n’est pas concernée par les enchères qui vont arriver.

En parallèle, nous tenons à renforcer la transparence sur la 5G et c’est pour cela que le rapport d’aujourd’hui est publié et consultable sur le site de mon ministère, mais également sur les sites d’autres ministères, je pense. Nous travaillerons avec les associations d’élus dans le cadre d’un comité de pilotage, notamment pour la résorption des zones blanches. Le déploiement de la 5G ne doit évidemment pas empêcher de continuer à couvrir le territoire pour généraliser l’accès au numérique et au haut débit.

Sur les questions environnementales que j’ai évidemment regardées de près, des préconisations que je trouve intéressantes sont émises dans le rapport, en particulier sur un plan de sobriété numérique pour que nous commencions à avoir le réflexe de maîtriser notre consommation de données. Cette consommation augmente fortement et cela a des incidences environnementales. Certaines d'entre elles sont dues au fait que nous devrons remplacer les terminaux pour la 5G, mais la consommation de données augmente aussi les émissions de gaz à effet de serre. Il faut donc que nous commencions à avoir des réflexes du même ordre que le réflexe de couper l’eau quand nous nous lavons les dents.

Par exemple, les antennes 5G, à la différence des antennes 4G, sont des antennes qui peuvent s’éteindre. Il faudra voir ce qu’il est possible de faire pour les éteindre la nuit ou lorsque la consommation est faible. Il faut également voir ce que nous pouvons proposer pour aider chacun à consommer de façon responsable. Est-il nécessaire d’avoir de la haute définition 4K pour regarder une vidéo sur un tout petit écran de portable ?

Nous préparons donc un plan de sobriété numérique pour sensibiliser à ces questions et proposer des solutions. Je peux vous dire que je regarderai cela de très près.

Philippe Naillet était intervenu sur le téléphérique urbain. Pourquoi pas ? Nous faisons attention à ce que les outre-mer soient bien intégrés dans toutes les mesures du plan de relance. C’est important ; ils peuvent bénéficier comme tous les territoires de ce que nous faisons, notamment de l’aide aux transports urbains prévue dans le plan de relance.

Il m’est difficile de vous répondre projet par projet, mais, à mon sens, à partir du moment où nous sommes dans une logique d’utilisation des transports en commun, de connexion à d’autres réseaux de transport et de limitation de l’usage de la voiture, je trouve que c’est un projet intéressant.

Alain Perea m’a interrogée sur l’artificialisation des sols. Le principe est vraiment d’établir une trajectoire nationale de zéro artificialisation nette, avec un premier jalon qui consiste à réduire la consommation de 50 % d’ici dix ans.

Il faut évidemment une approche territoriale. Chaque Schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET) déterminera une stratégie et la contribution de chacun sera déclinée au niveau des schémas de cohérence territoriale (SCoT) puis des plans locaux d’urbanisme (PLU et PLUI).

Le principe est de repenser l’aménagement et l’urbanisme à l’aune d’une sobriété à l’échelle territoriale. Nous parlions du recyclage de friches, mais cela concerne également tout le travail de réhabilitation de villes, de quartiers, de centres de bourg. Il faut aussi justifier la consommation des espaces au regard des dynamiques territoriales.

Je ne vous dirai pas que, là où vous avez été vertueux et avez peu artificialisé, c’est « open bar » et que vous pouvez bétonner pour rattraper le retard. C’est ce que nous essayons de dire à l’échelle internationale : ce n’est pas parce que nous avons commis beaucoup d’erreurs que nous pouvons autoriser tous les autres pays à en faire autant, sinon nous ne survivrons pas.

Le rythme d’artificialisation des sols est aujourd’hui énorme : un département tous les huit ou dix ans. De plus, selon les études dont nous avons connaissance, l’artificialisation des sols n’est pas corrélée à l’augmentation de la population. L’artificialisation des sols augmente parfois dans des territoires où la population baisse. Il faut avoir cela en tête et abandonner l’idée qu’il faut loger tout le monde… Bien sûr qu’il faut loger tout le monde, mais en réfléchissant à la façon la plus intelligente de le faire, en adaptant territoire par territoire.

Guy Bricout est intervenu au sujet du fluvial. Je suis une grande défenseuse du fluvial, car je pense vraiment que le fluvial peut être un atout, notamment pour le développement des circuits courts. Je ne vous cacherai pas que le fluvial a souffert d’un fort déficit d’investissements pendant des années, peut-être parce que nous avions tendance à mettre « tous nos œufs dans le même panier », si vous voyez ce que je veux dire. Vous savez, les gros paniers, avec un gros canal… Lorsque nous mettons des milliards quelque part, nous ne les mettons pas ailleurs. Tout bon père ou mère de famille vous dira que, pour gérer, on met l’argent sur ses priorités.

Grâce au plan de relance, nous réinvestissons dans le fluvial et vous pouvez compter sur moi pour faire attention que cet argent soit vraiment présent, car nous en avons besoin.

En ce qui concerne l’éolien, nous préparons une synthèse des travaux du groupe de travail qui s’est réuni plusieurs fois, y compris en sous-groupes et en visioconférence durant le confinement. Nous aurons des propositions concrètes dont l’intégration paysagère.

Il reste la question de Frédérique Tuffnell : les mesures prévues dans le plan de relance pour la biodiversité – 135 millions – sont typiquement destinées à encourager les solutions fondées sur la nature.

Enfin, Gabriel Serville a posé une question sur la pêche illégale en mer en Guyane. Nous lui répondrons, mais il faut s’adresser au ministère de la Mer qui pourra mieux y répondre que moi.

Sur l’orpaillage illégal, nous devons évidemment passer à la vitesse supérieure et j’attends beaucoup des résultats de la commission d’enquête parlementaire pour laquelle j’avais milité. Je suis ravie qu’elle soit mise en œuvre, car l’orpaillage illégal a des conséquences sur l’environnement, sur la santé et sur la sécurité des populations.

Le programme Harpie, mis en place en 2008, a permis d’obtenir des résultats, mais nous constatons aujourd’hui une recrudescence des chantiers illégaux. Le Gouvernement a décidé de renforcer le dispositif Harpie et la mobilisation des forces armées dans la lutte avec le plan Harpie 2. Mon ministère y prend une grande part en appuyant le renforcement de l’état-major Harpie via ses établissements publics, comme l’Office français de la biodiversité (OFB), mais aussi le parc amazonien de Guyane.

Le bilan est encourageant, mais évidemment insuffisant. 519 sites ont été détruits, 9 kilogrammes d’or et 24 millions d’avoirs criminels ont été saisis. Nous devons maintenir la pression et le contrôle, renforcer cette efficacité, notamment sur la question de l’approvisionnement des orpailleurs je pense, mais nous verrons ce que dira la commission d’enquête. Si nous coupons leurs approvisionnements, ils ont du mal à orpailler, et c’est une piste sur laquelle nous allons tous travailler.

Mme la présidente Véronique Riotton. Merci beaucoup, madame la ministre, pour la précision de vos réponses et votre efficacité qui nous permettra de nous mettre au travail pour les semaines à venir. Nous vous retrouverons peut-être lors de nos débats en séance sur le projet de loi relatif aux conditions de mise sur le marché de certains produits phytopharmaceutiques, dit « Betteraves ».

Mme Barbara Pompili. C’est Julien Denormandie qui sera en première ligne.

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Informations relatives à la Commission

La Commission a nommé rapporteurs pour avis pour la mission « Écologie, développement et mobilité durables » sur le projet de loi de finances pour 2021 (sous réserve de son dépôt) :

Transports terrestres et fluviaux

M. Damien Pichereau

Paysages, eau et biodiversité

M. Patrice Perrot

 

Elle a par ailleurs nommé :

– Mme Claire O’Petit, rapporteure pour avis sur le projet de loi relatif aux conditions de mise sur le marché de certains produits phytopharmaceutiques en cas de danger sanitaire (n° 3298) ;

– M. Mathieu Orphelin, rapporteur sur la proposition de loi actant de premières mesures pour faire de la publicité un levier au service de la transition écologique et de la sobriété et pour réduire les incitations à la surconsommation (n° 3289).

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Membres présents ou excusés

 

Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

 

Réunion du mardi 15 septembre 2020 à 17 h 25

 

Présents. - M. Christophe Arend, Mme Sophie Auconie, Mme Nathalie Bassire, Mme Valérie Beauvais, M. Jean-Yves Bony, Mme Sylvie Bouchet Bellecourt, M. Guy Bricout, M. Lionel Causse, Mme Bérangère Couillard, Mme Yolaine de Courson, M. Vincent Descoeur, M. Loïc Dombreval, M. Jean-Luc Fugit, Mme Camille Galliard-Minier, M. Guillaume Garot, M. Yannick Haury, Mme Chantal Jourdan, Mme Stéphanie Kerbarh, M. Jacques Krabal, M. François-Michel Lambert, Mme Florence Lasserre, Mme Célia de Lavergne, M. David Lorion, Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, M. Emmanuel Maquet, Mme Sandra Marsaud, Mme Marjolaine Meynier-Millefert, M. Philippe Naillet, M. Matthieu Orphelin, M. Jimmy Pahun, Mme Mathilde Panot, M. Alain Perea, M. Patrice Perrot, M. Damien Pichereau, M. Jean-Luc Poudroux, M. Loïc Prud'homme, Mme Véronique Riotton, Mme Laurianne Rossi, M. Martial Saddier, Mme Nathalie Sarles, M. Jean-Marie Sermier, M. Gabriel Serville, Mme Marie Silin, M. Hubert Wulfranc, Mme Souad Zitouni, M. Jean-Marc Zulesi

 

Excusé. - M. Ludovic Pajot

 

Assistaient également à la réunion. - M. Thierry Benoit, M. Jean-Luc Bourgeaux, M. Dino Cinieri, M. Jean-Pierre Vigier