Compte rendu

Commission de la défense nationale
et des forces armées

Audition de Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire d’Etat auprès de la ministre des Armées, sur le projet de loi de finances pour 2020.

 

 


Mercredi
2 octobre 2019

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 03

session ordinaire de 2019-2020

Présidence de
Mme Françoise Dumas,
présidente

 


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La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.

 

Mme la présidente Françoise Dumas. Mes chers collègues, nous accueillons Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire d’État auprès de la ministre des armées, qui vient présenter les crédits de la Mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » du projet de loi de finances pour 2020. Je remercie pour son engagement M. Philippe Michel-Kleisbauer, qui sera notre rapporteur pour avis sur ce budget.

Sans surprise, le budget alloué à cette mission est en baisse par rapport à l’année dernière. Cette baisse structurelle s’explique pour l’essentiel par une baisse du nombre de bénéficiaires des deux dispositifs les plus emblématiques du droit à la reconnaissance et à la réparation : la retraite du combattant et les pensions militaires d’invalidité (PMI). Cela étant, le Gouvernement a, pour la troisième année consécutive, décidé de proposer l’inscription de mesures nouvelles, notamment la revalorisation du montant de la PMI touchée par les conjoints survivants de grands invalides de guerre ayant agi comme une tierce personne apportant des soins constants pendant au moins quinze années de vie commune.

Avant de vous laisser la parole, madame la secrétaire d’État, je veux saluer la concertation que vous avez menée avec le monde combattant afin d’examiner l’ensemble des revendications des associations. Si toutes ces propositions n’ont pu recevoir de suites favorables, ce travail a permis de fixer un cap à la politique de reconnaissance et de réparation et d’en déterminer les priorités pour les années à venir : je tenais à vous en féliciter.

Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire d’État auprès de la ministre des armées. Mesdames et Messieurs les députés, je vous remercie d’être aussi nombreux pour parler du monde combattant, auquel, je le sais, vous êtes très attachés : je le constate chaque année lors de nos échanges sur ces sujets, notamment en période budgétaire.

Ce budget est important car il concerne la reconnaissance et la réparation du monde combattant. La nation doit respect et reconnaissance à ces personnes qui se sont fortement engagées pour elle ; elle doit aussi les accompagner tout au long de leur vie.

Comme vous l’avez dit, Madame la présidente, ce budget est en diminution en raison de la baisse régulière du nombre de bénéficiaires. Nous vivons une période d’évolution du monde combattant : j’ai d’ailleurs rencontré les associations pour les inciter à entamer une réflexion sur ce sujet.

Le budget s’établit globalement à 2,16 milliards d’euros en crédits de paiement, dont 2,07 milliards pour les Programmes 167 « Liens entre la nation et son armée » et 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant ». Le plafond de crédits évolue ainsi à la baisse de 130 millions d’euros, soit une diminution de 5,9 % par rapport à 2019. C’est conforme à la tendance constatée depuis 2015 – entre moins 5 % et moins 7 %.

Ce budget retrace notre volonté d’accompagner le monde combattant. Tous les droits acquis à reconnaissance et à réparation sont intégralement maintenus, 912 millions d’euros étant consacrés aux PMI et 660 millions à la retraite du combattant. Aucun dispositif budgétaire ou fiscal n’est revu ; le coût de la dépense fiscale est estimé pour 2020 à 728 millions d’euros.

J’ai souhaité également soutenir le monde combattant en répondant à ses demandes. Ainsi, les crédits augmentent du fait de l’attribution de la carte du combattant aux anciens combattants présents en Algérie entre le 1er juillet 1962 et le 1er juillet 1964. Cette mesure a été mise en œuvre dès le 1er janvier 2019 ; nous estimons qu’environ 35 000 cartes seront attribuées fin 2019. Le budget 2020 intègre le coût de cette montée en charge avec une dotation d’environ 24 millions d’euros, contre 6,6 millions d’euros en 2019. En rythme de croisière, le dispositif coûtera 30 millions d’euros en crédits budgétaires et 30 millions d’euros en mesures fiscales.

Par ailleurs, ce budget comporte des mesures en faveur des personnes vulnérables. Une mesure nouvelle, très attendue par les associations, consiste à mieux accompagner les conjoints survivants de grands invalides de guerre ayant agi comme tierce personne pendant de nombreuses années. Ces personnes ont droit à une pension militaire d’invalidité majorée ; la majoration varie selon la durée du mariage ou du PACS et des soins donnés de manière constante dans la limite de dix ans. Il s’avère que certaines d’entre elles ont aidé les grands invalides bien plus longtemps : j’ai donc souhaité leur accorder une majoration supplémentaire liée au nombre effectif d’années de soins. Leur pension sera rehaussée pour atteindre un montant moyen de 1 285 euros par an ; cela représente 600 000 euros, qui bénéficieront à environ 460 personnes.

Autre mesure en faveur des personnes les plus vulnérables, j’ai souhaité, malgré la diminution du nombre de ressortissants, que la dotation d’action sociale de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) soit maintenue à 26 millions d’euros. Il y aura donc plus d’aides pour les personnes les plus fragiles : c’est un signe fort de soutien aux anciens combattants et aux veuves.

La subvention à l’Institution nationale des Invalides sera quant à elle portée à 25 millions d’euros : la dotation de fonctionnement est maintenue et 13,7 millions d’euros sont inscrits pour financer les travaux d’infrastructures, qui permettront la création d’un pôle de réhabilitation post-traumatique physique et psychique d’envergure nationale, voire internationale.

Le budget consacré à la mémoire prend en compte la fin de plusieurs cycles mémoriels. Doté de 28 millions d’euros en 2018, il avait été ramené à 16 millions d’euros en 2019 au terme du cycle mémoriel du Centenaire de la Première Guerre mondiale. Le budget poursuit sa diminution et s’établit à 11 millions d’euros en 2020, pour plusieurs raisons : l’arrêt total de la mission du Centenaire, qui avait bénéficié d’un apport de 600 000 euros en 2019 ; la fin des grandes commémorations du soixante-quinzième anniversaire de la libération du territoire, pour lesquelles 2 millions d’euros avaient été prévus en 2019 ; la construction du monument à la mémoire des militaires morts en opération extérieure (OPEX), budgétée à hauteur de 1,2 million. Ce monument, qui sera inauguré dans quelques semaines, est très attendu par les militaires et leurs familles ; ce sera un beau lieu de mémoire et de recueillement.

Sur le budget consacré à la mémoire cette année, 4 millions d’euros assureront le financement des commémorations liées aux thématiques mémorielles de l’année 2020, dont le quatre-vingtième anniversaire de l’appel du 18 Juin. En outre, 1 million d’euros seront consacrés aux actions pédagogiques : 500 000 euros pour les actions habituellement réalisées par la direction des patrimoines de la mémoire et des archives ainsi que par l’ONACVG, et 500 000 euros de mesures nouvelles afin de contribuer à la sensibilisation des jeunes à la lutte contre la haine et les préjugés. Ainsi, le soixante-quinzième anniversaire de la libération des camps donnera lieu à des actions de mémoire et de médiation importantes auprès de la jeunesse.

Par ailleurs, 4 millions d’euros seront consacrés à la réhabilitation des sépultures et des hauts lieux de mémoire. Ils seront complétés par la mobilisation de 4,4 millions d’euros provenant de la trésorerie excédentaire de l’ONACVG – ces crédits avaient été mis en réserve à l’ONACVG pour financer des projets d’investissement qui n’ont finalement pu être exécutés. Enfin, 900 000 euros sont prévus pour le tourisme de mémoire.

Si nous ajoutons aux 11 millions d’euros du budget les 4,4 millions d’euros de trésorerie excédentaire de l’ONACVG, notre politique de mémoire reste dans les mêmes volumes budgétaires que l’an dernier. Le budget est même en augmentation si l’on soustrait la construction et l’inauguration du monument OPEX, la fin des commémorations du soixante-quinzième anniversaire et la fin totale de la mission du Centenaire. Nous avons beaucoup de hauts lieux de mémoire et de sépultures à entretenir : tout cela demande des crédits conséquents.

Le budget du Programme 167 consacré au lien armées-jeunesse progresse de 3,69 %. Près de 16 millions d’euros sont consacrés à la Journée défense citoyenneté (JDC), contre 15,29 millions l’an dernier. L’indemnité de transport des jeunes réalisant une JDC – 8 euros versés sous forme de chèque transport – n’avait jamais été relevée depuis 1998 : elle passera à 20 euros pour les jeunes logeant à plus de vingt kilomètres de leur site de convocation, et à 10 euros pour les autres. Cette mesure de soutien aux familles est en adéquation avec le coût des transports.

Les crédits du service militaire volontaire, dont le format a été pérennisé par la loi de programmation militaire, restent stables avec 2,5 millions d’euros. La formation des volontaires dans ce cadre apporte un soutien précieux aux jeunes en difficulté. Ce système d’insertion dans la vie professionnelle donne des résultats plus que satisfaisants, près de 75 % des jeunes trouvant, au terme du service militaire volontaire, une issue professionnelle positive et durable.

L’état-major du service militaire volontaire est très actif dans la recherche de financements, en particulier auprès des régions, qui sont les collectivités compétentes en matière de formation. Plusieurs régions ont déjà signé des conventions, comme l’Île-de-France ou la région Grand Est. Je me rendrai à Brest lundi prochain pour signer une convention avec la région Bretagne ; d’autres sont en attente.

Je veux faire un point particulier sur l’ONACVG. Je me déplace beaucoup dans les départements, où je rencontre systématiquement les associations d’anciens combattants : je sais donc leur attachement à l’ONACVG. Outre son soutien au monde combattant, l’Office joue un rôle précieux dans les territoires et dans le travail de mémoire auprès des établissements scolaires.

Toutefois, l’ONACVG doit continuer son évolution. Il s’est transformé à plusieurs reprises depuis 2013, quand il a été décidé qu’il se recentrerait sur son cœur de métier, c'est-à-dire l’accompagnement du monde combattant. Cela s’est traduit par le transfert de dix-huit établissements médico-sociaux dont il avait alors la responsabilité, le dernier transfert étant intervenu le 1er janvier 2018. L’Office avait conservé dans ce but une réserve importante, renforcée par une capacité limitée à engager tous les chantiers de rénovation des sépultures de guerre et des hauts lieux de mémoire.

Par ailleurs, l’ONACVG a évolué dans sa structuration. L’architecture départementale, indispensable, doit être conservée : nous ne pouvons pas enlever des services publics dans les territoires alors que nous sommes en train d’en remettre ! L’ONACVG se transforme en se modernisant, comme toutes les administrations. L’idée générale est de l’adapter à l’évolution du monde combattant tout en conservant son maillage territorial. Il a donc été demandé à l’ONACVG de réfléchir à son organisation en tenant compte du nombre d’anciens combattants dans chaque département. L’Office s’est engagé à réaliser 2 millions d’euros d’économies en fonctionnement et prévoit pour l’année 2020 une baisse du plafond d’emplois de 33 ETPT – équivalent temps plein travaillé. Ces décisions de bon sens ont été adoptées par le conseil d’administration de l’ONACVG.

La subvention pour charges de service public de l’Office s’élèvera à 45 millions d’euros en 2020, contre 57 millions l’an dernier. Près de 10 millions d’euros seront prélevés sur sa trésorerie, qui est très largement excédentaire : elle s’élève en effet à 40 millions d’euros, ce qui est anormal pour un établissement public. Ces réserves se sont constituées au fil des années du fait de la non-consommation de certains crédits liés au transfert des établissements médico-sociaux et à des opérations d’investissement. Une saine gestion budgétaire suppose donc de recourir à cette trésorerie, de façon exceptionnelle, pour financer les politiques de façon cohérente.

Sur les 17,45 millions d’euros ainsi prélevés, 4,41 millions d’euros seront consacrés à l’entretien des nécropoles, 3,1 millions à des actions en faveur des rapatriés et 9,94 millions au fonctionnement de l’ONACVG, raison pour laquelle la subvention pour charges de service public sera exceptionnellement de 45 millions d’euros cette année. Un établissement public doit avoir une trésorerie correspondant à trois mois de fonctionnement ; nous répondons ainsi à une remarque de la Cour des comptes, qui trouvait cette situation anormale.

La nouvelle directrice générale de l’ONACVG, Mme Véronique Peaucelle-Delelis – elle a pris ses fonctions après le départ à la retraite de Mme Rose-Marie Antoine, que je remercie pour le travail formidable qu’elle a effectué –, sait qu’elle doit mener à bien le chantier de la modernisation. Celui-ci devra se faire dans la proximité du monde combattant.

Pour l’essentiel, le budget diminue en raison de la baisse démographique du monde combattant. Toutefois, il permet le maintien de tous les droits acquis, la poursuite des mesures de réparation et d’aide aux anciens Harkis, à leurs épouses et à leurs enfants, mises en œuvre l’an dernier, ainsi que de l’aide aux personnes les plus fragiles et aux blessés. Il finance des mesures nouvelles à destination de la jeunesse, ainsi que des veuves et des conjoints survivants de grands invalides de guerre. Enfin, il maintient le réseau départemental de l’ONACVG tout en participant aux efforts de saine gestion. Tels sont les objectifs de ce projet de loi de finances pour 2020 et les actions que je mènerai aux côtés de la ministre de la défense, Florence Parly.

Mme la présidente Françoise Dumas. Je vous remercie, Madame la Ministre, pour cette présentation très exhaustive. Votre domaine d’intervention est à la fois le respect du passé et l’adaptation aux nouveaux besoins. Je donne la parole à M. Philippe Michel-Kleisbauer, qui est notre rapporteur pour avis sur ce budget.

M. Philippe Michel-Kleisbauer. Permettez-moi tout d’abord de saluer la belle revalorisation de la PMI pour le conjoint survivant d’un grand invalide de guerre ayant agi comme une tierce personne pendant plus de quinze ans.

Je souhaite vous poser brièvement quelques questions. Tout d’abord, avez-vous prévu de réunir la commission tripartite souhaitée par les associations depuis plusieurs années et, si oui, sur quels thèmes ?

Ensuite, où en est la parution du décret relatif aux tarifs sociaux sur les réseaux ferroviaires ? Nous avons beaucoup travaillé par ordonnances sur la SNCF mais un vide existe concernant la réduction tarifaire accordée aux anciens combattants : nous attendons un décret.

Enfin, il est vrai que le monde combattant vieillit, mais il intègre de nouvelles générations composées de ceux qui ont servi en tant que Casques bleus ou, dans un autre contexte, en Afghanistan. La question se pose donc de savoir si le droit à réparation tel qu’il a été créé il y a un siècle est encore adapté à ces nouveaux anciens combattants.

Puisque vous avez évoqué l’Institution nationale des invalides (INI), je rappelle que nous avions beaucoup insisté, l’an dernier, sur la qualité du projet de cette institution, qui doit devenir la Maison du post-trauma. Or, l’intervention, sans doute un peu maladroite, d’un architecte des Bâtiments de France a provoqué un certain retard. Peut-être pourrez-vous nous en dire un mot.

Pour conclure, l’ONACVG – j’aurai l’occasion d’y revenir lors de la présentation de mon rapport – est un établissement important : tout le monde l’identifie et connaît son adresse. Je vous remercie donc de maintenir sa répartition territoriale, notamment dans les départements ; ce maintien est salutaire.

M. Christophe Blanchet. Madame la secrétaire d’État, la Journée défense et citoyenneté (JDC) doit être remplacée, à terme, par le Service national universel (SNU), dont je souhaiterais savoir si, selon les retours dont vous disposez, il remplit sa mission.

Au mois de juin dernier, 2 000 jeunes ont été accueillis dans le cadre du SNU. Or, on sait que celui-ci a notamment pour vocation de favoriser le recrutement par les armées, à l’instar de la JDC, qui est actuellement à l’origine de 10 % des recrutements. Il est donc fort probable que, parmi ces 2 000 jeunes volontaires, un grand nombre s’oriente vers le Service militaire volontaire. Trois cents places supplémentaires sont programmées cette année. L’an prochain, le contingent sera de 40 000 jeunes volontaires, proches des métiers de l’armée, qui s’intéresseront peut-être davantage au Service militaire volontaire (SMV). Dès lors, ne conviendrait-il pas d’augmenter dès à présent le budget de ce dispositif, qui a vocation à compléter le SNU dans sa mission d’intégration mais aussi de recrutement pour les armées futures, sachant que, au terme du quinquennat, le contingent devrait atteindre 760 000 jeunes ?

Mme Marianne Dubois. Ma question rejoint celle de M. Blanchet. Au lieu de réfléchir à des scénarios difficiles à mettre en œuvre pour 750 000 jeunes – je pense, bien entendu, au SNU –, pourquoi ne pas mettre davantage l’accent sur le SMV, qui est un véritable succès ? Dans ce dispositif qui s’adresse à des jeunes désocialisés, ceux-ci sont volontaires, bénéficient d’un encadrement resserré, d’une formation de longue durée et leur taux d’insertion est de plus de 70 %. Pourtant, il n’existe que six centres de SMV en métropole. Ne pourrait-on pas imaginer un centre par région ? J’ajoute que, lorsque j’ai vanté, il y a quelques semaines seulement, ce dispositif auprès du président de la région Centre, je me suis aperçue qu’il ne le connaissait pas du tout…

M. Joaquim Pueyo. Madame la secrétaire d’État, je suis inquiet de la réduction des crédits de l’Office national des anciens combattants. En effet, sur le terrain, on entend souvent dire que les crédits de fonctionnement sont insuffisants, par exemple pour soutenir les initiatives destinées à renforcer le lien armée-nation. Je pense notamment aux classes de défense qui, lorsqu’elles recherchent des subventions ou des aides pour permettre à leurs élèves de se rendre à des cérémonies ou dans des lieux de mémoire, s’adressent souvent aux collectivités. Or, ce n’est pas suffisant. L’Office national pourrait, me semble-t-il, jouer un rôle non négligeable en la matière. Je crains donc que cette réduction de crédits ait des conséquences négatives.

Par ailleurs, vous avez indiqué que 500 000 euros seraient consacrés au financement d’actions pédagogiques de sensibilisation à la lutte contre la haine et les préjugés. J’y suis tout à fait favorable, mais je souhaiterais savoir ce que vous entendez par « préjugés ». Avez-vous d’ores et déjà donné des directives dans ce domaine ?

Enfin, s’agissant du SMV, je rejoins Mme Dubois. Il s’agit d’un très bon dispositif, qui donne des résultats et fonctionne très bien, de même que le Service militaire adapté (SMA) outre-mer. Marianne Dubois et moi-même avons rédigé un rapport dans lequel nous préconisons son renforcement. Je crois en effet qu’il pourrait accueillir davantage de jeunes, dans la mesure où les candidats sont assez nombreux. Je souhaiterais donc savoir s’il est envisageable de créer, dans les années à venir, un ou deux régiments supplémentaires.

M. Yannick Favennec Becot. Madame la secrétaire d’État, les titulaires d’une carte du combattant bénéficient, à compter de l’âge de 74 ans, d’une demi-part supplémentaire pour le calcul de l’impôt sur le revenu. Pouvez-vous nous dire à combien s’élève cette dépense fiscale, qui était en diminution l’an passé, puisqu’elle est passée, entre 2018 et 2019, de 530 millions à 515 millions ?

Le cas échéant, le conjoint survivant continue de bénéficier de cette demi-part fiscale. Toutefois, tel n’est pas le cas lorsque l’ancien combattant décède avant 74 ans, donc avant d’avoir pu bénéficier de cette demi-part supplémentaire. Cette situation est parfois ressentie comme une inégalité entre les veuves. Compte tenu de la baisse tendancielle du nombre de bénéficiaires, ne peut-on pas envisager d’abaisser le seuil de 74 ans, qui pourrait, par exemple, être aligné sur l’âge ouvrant droit à la retraite du combattant, c’est-à-dire 60 ans ou 65 ans ?

M. André Chassaigne. Madame la secrétaire d’État, je veux tout d’abord saluer l’augmentation de la pension des conjoints survivants des grands invalides de guerre, qui améliorera les conditions de vie des 800 veuves dont l’époux était bénéficiaire de la majoration pour tierce personne.

Je souhaiterais vous interroger sur un engagement qui aurait été pris lors de la séance plénière du 1er juillet 2019 du « G12 », qui rassemble les associations d’anciens combattants. Au cours de cette réunion, le ministère, reconnaissant un retard de 4,5 % de la valeur du point PMI (Pension militaire d’invalidité), aurait indiqué que celle-ci évoluerait favorablement au cours de la période 2019-2021 et que serait créée une commission tripartite en 2020. Pourriez-vous nous donner davantage de précisions ?

En ce qui concerne l’ONACVG, je ferai trois observations. Premièrement, pourquoi avoir ramené de 40 à 31 le nombre de ses administrateurs, au détriment en particulier des représentants des anciens combattants et victimes de guerre, même si le chef d’état-major des armées a été intégré dans le premier collège, ce qui semble tout à fait légitime ?

Ensuite, 42 emplois ont été supprimés depuis le 1er janvier 2019, et l’on évoque le chiffre de 89 suppressions jusqu’en 2023 alors que l’on comptera encore à cette date 1,8 million de ressortissants. Vous venez d’annoncer 38 équivalents temps plein, mais on nous dit, sur le terrain, que le personnel manque.

Enfin, qu’en est-il de la vacance des postes de directeur des services départementaux ? Il manquerait, en effet, 13 directeurs ou directrices, ce qui nuit au bon fonctionnement de l’ONACVG dans les départements.

Je souhaitais vous interroger également sur l’arrêté relatif aux règles de fonctionnement de la commission de recours de l’invalidité et aux modalités d’examen des recours. En effet, les associations d’anciens combattants souhaiteraient être représentées lors des auditions.

M. Bastien Lachaud. Madame la secrétaire d’État, à l’heure actuelle, le statut de « mort pour le service de la nation » n'est pas automatiquement attribué aux soldats qui ont trouvé la mort dans l'exercice de leur profession mais pas en opération. Cette situation nous paraît profondément injuste. Il nous semble en effet difficile de faire un tri entre les soldats décédés du fait de leur travail selon qu’ils étaient en opération ou non. La mort n’est un fait normal ni pour les uns ni pour les autres.

Qu’entendez-vous faire dans ce domaine ? Nous sommes contactés par de nombreuses familles qui tentent d’obtenir ce statut pour leur enfant. Il me semble qu’une telle mesure n’aurait pas une portée budgétaire considérable.

Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire d’État auprès de la ministre des armées. Monsieur le rapporteur, il est évident – je réponds, ici, également à M. Chassaigne – que les associations sont sensibles à l’évolution du point PMI. Celui-ci, je le rappelle, augmente régulièrement, conformément à son indexation sur l’évolution des traitements de la fonction publique – sur laquelle l’ensemble des acteurs, notamment les associations, étaient accord – prévue par la loi de 2005. Fixé à 14,46 euros au 1er octobre 2017, il sera porté à 14,57 euros au 1er janvier 2019, avec un effet rétroactif. Il a ainsi été réévalué à plus de vingt reprises depuis 2005.

Cela dit, j’ai proposé la réunion d’une commission tripartite rassemblant des parlementaires, les ministères concernés ainsi que les associations du monde combattant, dont je comprends parfaitement les demandes, afin de parvenir à une évaluation partagée. Un groupe de travail consacré à cette question a déjà mené une première réflexion. Il nous faut cependant attendre de connaître – là encore, les associations sont d’accord – l’incidence de l’application, à compter de janvier 2019, du dispositif PPCR (Parcours professionnel, carrières et rémunérations), qui devrait entraîner une augmentation plus importante du point PMI. Je compte donc installer cette commission tripartite dans le courant de l’année 2020, une fois que nous aurons connaissance de l’évaluation portant sur l’année 2019.

Quant aux décrets visant à rétablir les tarifs sociaux ferroviaires en faveur du monde combattant – après la suppression d’une disposition par la Loi d’orientation sur les mobilités (LOM), me semble-t-il –, ils sont en cours d’écriture. M’étant engagée à ce qu’il n’y ait aucune vacance législative en la matière, je veillerai à ce qu’ils soient publiés avant le 3 décembre prochain, date à laquelle expire le texte précédent. Il me semblerait cependant intéressant d’étudier la manière dont nous pourrions réinscrire cette mesure dans la loi, sachant qu’il s’agit, non pas de revenir sur les droits du monde combattant, mais de les améliorer. En effet, la loi disposait que ce mode de soutien au monde combattant était assuré par la SNCF. Or, celle-ci ne sera plus le seul opérateur ferroviaire en France. Il convient donc de prévoir que tous les opérateurs susceptibles de travailler dans notre pays sont concernés. À ce propos, je précise que ces tarifs préférentiels sont compensés par le budget de notre ministère, à hauteur de 2 millions d’euros par an.

Le droit à réparation est-il adapté aux nouveaux anciens combattants ? Je veux que nous réfléchissions à cette question ensemble et avec les associations du monde combattant. Actuellement, celui-ci est majoritairement composé des anciens d’Algérie. Progressivement, leur nombre diminue et celui des nouveaux anciens combattants, ceux qui ont participé aux opérations extérieures, augmente chaque année, sans pour autant compenser cette diminution. Nous assistons donc à une évolution du monde combattant. C’est pourquoi je conseille aux diverses associations de s’unir pour être plus efficaces et, surtout, pour avoir les moyens de continuer à travailler sur ces sujets. C’est également la raison pour laquelle nous nous efforçons d’encourager les jeunes anciens combattants à adhérer à ces associations. En tout état de cause, il nous faudra évaluer l’ensemble de ces droits à réparation. Mais ceux-ci comprennent, pour les jeunes anciens combattants, l’accompagnement des blessés, le droit à la PMI et le dispositif de la rente mutualiste, qui font partie du statut du militaire. Il nous faut penser collectivement, sans en faire un sujet de division, l’avenir des associations et celui de l’ONACVG, qui soutient le monde combattant. Peut-être faudra-t-il l’appeler, par exemple, la Maison du combattant. En tout cas, nous devons mener une réflexion d’ensemble.

Mon objectif est simple : il nous faut entourer le mieux possible ces personnes qui se sont engagées pour la nation. Mais cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas penser à l’avenir et évoluer.

Par ailleurs, j’ai rencontré récemment le médecin-chef de l’INI, qui m’a fait part des problèmes liés aux travaux  notamment les avis émis par les autorités du ministère de la culture: … Tout cela retarde les travaux et augmente parfois les coûts. Quoi qu’il en soit, j’espère que les raisons invoquées étaient bonnes et justifiées par l’histoire de ce bâtiment emblématique – il est normal que les architectes des Bâtiments de France soient consultés dans de telles situations. En définitive, le retard est de trois mois, puisque les travaux doivent démarrer début janvier.

Monsieur Blanchet, s’agissant du service national universel, nous avons des retours sur la participation de notre ministère, qui consiste dans la formation des encadrants, la journée Défense et mémoire et l’encadrement par les anciens militaires et réservistes. Nous attendons bien entendu avec intérêt le rapport complet commandé par Gabriel Attal à l’Institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire (INJEP). Je puis cependant vous dire que les jeunes ont plébiscité non seulement la journée Défense et mémoire mais aussi le cadre du SNU qui, sans être militaire, était tout de même républicain et centré sur les valeurs nationales : levée des couleurs le matin, organisation en maisonnées, apprentissage de la cohésion… Certes, des évolutions sont nécessaires, qu’il s’agisse du contenu des modules ou de l’organisation des journées, trop denses pour des jeunes de cet âge. Mais les valeurs qu’il nous semblait important de promouvoir auprès de la jeunesse l’ont été, et de façon positive.

La JDC – et le SNU lorsqu’il l’aura remplacée – est, pour la plupart des jeunes, la seule occasion d’entendre parler des armées et de la sécurité du pays. Il s’agit donc d’un moment très important puisqu’il permet de leur faire connaître non seulement les armées, la notion d’engagement et les valeurs républicaines, mais aussi tous les métiers qu’il est possible d’y exercer, métiers qui sont très divers et peuvent intéresser la jeunesse. Ainsi, 10 % des 750 000 à 800 000 jeunes qui suivent la JDC se rendent ensuite dans un centre de recrutement pour se renseigner, ce qui ne veut pas dire qu’ils s’engagent tous dans les armées. Peut-être, du reste, les élèves devraient-ils être davantage informés des possibilités que leur offrent les armées dans le cadre de l’orientation scolaire. En tout état de cause, au-delà de cette information, la JDC peut offrir ainsi une base de recrutement et une opportunité pour créer des pools de réservistes dans différents métiers, ce qui est particulièrement important. Nous devons donc continuer à porter tous ces messages. J’ajoute que nos armées offrent des stages de préparation militaire de quinze jours à ceux qui sont intéressés.

Par ailleurs, je tiens à rappeler que le SMV n’a rien à voir avec le SNU, puisqu’il relève des politiques d’égalité des chances et vise à donner une deuxième, une troisième, voire une quatrième chance à des jeunes qui sont en très grande difficulté. Il s’agit d’un dispositif d’insertion dans la vie professionnelle ; il n’est pas destiné au recrutement des armées. Du reste, ces jeunes sont peu nombreux à y rester ensuite : ils s’orientent ensuite vers des métiers civils.

La loi de programmation militaire prévoit que le SMV accueille 1 000 jeunes par an. Cela implique, je le rappelle, la mobilisation de près de 350 militaires, soit un taux d’encadrement d’un pour trois. Cet encadrement est nécessaire, s’agissant de jeunes en difficulté, mais les armées n’ont pas pour rôle de prendre en charge à elles seules l’insertion dans notre pays. Nous pouvons éventuellement étudier la manière dont chaque centre de Service militaire volontaire pourrait accueillir davantage de jeunes sans que cela nuise à la qualité du travail accompli. Mais il me paraît difficile de multiplier de tels centres, sachant que ce dispositif représente, pour le budget de la défense, un investissement de 35 000 euros par jeune et par an.

En revanche, je crois que le mode d’encadrement et de prise en charge de ces jeunes, l’apprentissage du respect de la hiérarchie et de l’autorité sont des éléments que nos militaires pourraient transmettre, dans le cadre de formations, aux encadrants issus d’autres structures. J’ai en effet pu mesurer combien le ministère de l’éducation nationale et l’éducation populaire ont apprécié la formation dispensée par le ministère des armées aux encadrants issus de leurs rangs, formation qui consistait à leur apprendre comment encadrer efficacement, c’est-à-dire sans brutalité mais avec respect et fermeté.

Je crois avoir répondu à votre question, Madame Dubois. J’ajoute que, si un centre de SMV était implanté dans la région Centre, son président en aurait entendu parler.

Monsieur Pueyo, vous avez compris, je crois, ma philosophie concernant l’ONACVG. La réduction des moyens – 2 millions d’euros, cette année – demandée à cet établissement est en cohérence avec une structuration adaptée et efficace de celui-ci. Ces mesures ont été présentées au conseil d’administration ainsi qu’aux organisations syndicales de l’établissement, qui ont voté favorablement. Elles sont donc, me semble-t-il, parfaitement comprises, dans la mesure où elles obéissent à des objectifs : le maintien de la territorialité, qui me paraît essentiel, et l’adaptation au monde combattant existant. S’y ajoutent la dématérialisation et l’amélioration des transmissions. Nous avons en effet complètement dématérialisé certaines demandes. Les relations avec les services des pensions et tous ceux qui travaillent directement avec l’ONACVG sont fluidifiées par le numérique.

J’ajoute que des suppressions de postes porteront aussi sur des doublons en administration centrale.

J'aborde la fin de l’année 2019 et l’année 2020 animée par une réflexion sur la structuration de tous les acteurs traitant de la mémoire, en particulier la direction des patrimoines, de la mémoire et des archives, d’une part, et l’ONACVG, d’autre part. Peut-être de nouvelles missions seront-elles confiées à l’ONACVG, acteur territorial indispensable pour traiter de certains sujets. En tout état de cause, je veux y travailler avec vous.

J’en viens à la haine et aux préjugés. Vous avez évoqué la libération des camps de concentration. Il faut que nous amplifiions tous les messages à destination de la jeunesse pour combattre la haine raciale et communautaire. J’ai trouvé remarquables les supports présentés dans ce magnifique lieu qu’est le camp des Milles, qui montrent comment on peut progressivement transformer des cerveaux et les rendre atones face à des situations inacceptables. Je suis persuadée que nous devons assumer ce type de missions pour lutter contre ce phénomène. C’est un travail qui devra être conduit, notamment, avec les établissements scolaires et prendre appui sur les lieux de mémoire, comme le camp des Milles – qui est, au demeurant, très visité. Je voudrais que les messages qu’il porte soient largement diffusés, partout en France, dans tous les établissements scolaires. C’est dans cette direction que je compte travailler.

Je vous ai répondu sur les centres du service militaire volontaire (SMV).

Monsieur Favennec Becot, l’abaissement de l’âge nécessaire pour bénéficier de la demi-part fiscale supplémentaire n’aurait plus de sens, car ceux qui avaient 18 ans en 1964 auront 74 ans en 2020 et bénéficieront ainsi du dispositif de droit commun – il n’y a donc pas de raison de changer les règles aujourd’hui. Les dépenses fiscales liées à ce dispositif, autrement dit le manque de recettes pour l’État, s’élèvent à 515 millions en 2019. Il a été mis en œuvre pour témoigner notre reconnaissance aux combattants : il leur est destiné, et doit demeurer tel. Je n’ai donc pas proposé de changer quoi que ce soit à cette mesure, puisque les veuves – ce qui n’enlève rien au respect que je leur porte – ne sont pas des combattants – nous ne parlons évidemment pas des veuves de soldats morts pour la France, auxquelles s’appliquent des dispositifs complètement différents. Cela étant, nous accordons la plus grande importance aux veuves, qui font l’objet d’une demande très ancienne du monde combattant. De fait, comme vous l’avez constaté, j’ai maintenu les budgets de l’ONACVG pour soutenir les personnes les plus en difficulté, lesquelles, bien souvent, ne paient pas l’impôt sur le revenu – l’octroi de la demi-part fiscale supplémentaire ne leur est, à cet égard, pas très utile.

Monsieur Chassaigne, je crois avoir répondu à vos questions sur la commission tripartite. Pour compléter mes propos sur l’ONACVG, je dois vous dire que je ne partage pas votre analyse sur le manque de personnel dont souffrirait cet établissement. Il faut procéder, en son sein, à une réorganisation, à une répartition différente, plus adaptée à la réalité du monde combattant. Par cette démarche pragmatique et logique, à laquelle je suis attachée, nous renforcerons l’efficacité de notre action. Vous me parlez de treize vacances de postes de directeur départemental des services de l’Office. Je n’en ai pas connaissance mais je vais vérifier auprès de la directrice générale.

Vous avez également évoqué la gestion des contentieux de l’invalidité devant les tribunaux administratifs. Les plaignants qui ne peuvent se rendre à l’audience choisissent la personne qui les représente – il peut s’agir, par exemple, d’un médecin ou d’un avocat.

Monsieur Lachaud, vous savez que la mention « mort pour la France » désigne les personnes décédées en opération extérieure tué à l’ennemi, tandis que celle de « mort pour le service de la nation » a été instituée à la suite des attentats terroristes. Nous ne pouvons pas dire que notre pays est en guerre, mais des terroristes pourraient tuer des militaires. Vous me parlez de soldats décédés en exercice : il ne s’agit absolument pas du même contexte. Tout cela est très signifiant pour nos militaires, qui attachent une grande importance à ces différentes reconnaissances. Il faut en rester à ces définitions très précises. Cela étant, des accidents peuvent survenir dans des situations très exceptionnelles…

M. Bastien Lachaud. Absolument !

Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire d’État auprès de la ministre des armées. Ces cas sont alors étudiés par la ministre des armées et par moi-même. Il faut que nous conservions des cadres clairs : le sacrifice suprême du militaire, tué par un ennemi sur un territoire extérieur en état de guerre, ou par un terroriste sur le territoire français doit être spécifiquement identifié. Je peux vous assurer que c’est très important pour nos militaires.

Mme Patricia Mirallès. Madame la secrétaire d’État, dans le cadre de la politique mémorielle active que vous menez, 500 000 euros vont être alloués à des actions pédagogiques nouvelles de sensibilisation contre la haine et les préjugés. Pourriez-vous préciser quelles actions seront liées aux quatre thèmes commémoratifs de 2020, et si certaines seront pérennes ?

M. Jean-Michel Jacques. Madame la secrétaire d’État, ma question porte sur le monument aux morts en opération extérieure – OPEX –, dont la construction est issue d’un projet né en 2011. Les travaux n’ont cependant commencé qu’en 2017 car, comme vous nous l’aviez dit, cela « cafouillait sec », entre autres, avec la mairie de Paris, en raison notamment de problèmes de foncier et de financement. S’agissant des noms qui y figureront, apparaîtront-ils par ordre alphabétique ou par théâtre d’opération ? Par ailleurs, l’inauguration du monument pourra-t-elle avoir lieu le 11 Novembre, ce qui serait un très beau symbole ? Je n’ignore pas l’existence d’obstacles de taille, car beaucoup d’imprévus demeurent, hélas, mais le lien entre les différentes générations du feu serait ainsi assuré.

M. Laurent Furst. Madame la secrétaire d’État, j’ai été très sensible à vos propos sur la mémoire et sur ce que nous devons aux générations qui nous ont précédés. Je note toutefois qu’on parle peu des 130 000 Alsaciens-Mosellans incorporés de force dans l’armée allemande et, parmi eux, des 40 000 qui ont perdu la vie. Serez-vous la ministre des Alsaciens-Mosellans incorporés de force et de leur mémoire ?

Par ailleurs, le bâtiment qui abrite l’Institution nationale des Invalides est certes marqué par l’histoire, mais est très peu adapté à l’activité hospitalière, tandis que l’hôpital du Val-de-Grâce est aujourd’hui vide. Avez-vous étudié la possibilité du transfert de cette institution au Val-de-Grâce ?

M. Jean-Pierre Cubertafon. La réserve opérationnelle est une organisation indispensable à la France, autant pour nos armées, qui sont fortifiées par ces volontaires, que pour ces derniers, qui peuvent s’engager dans les territoires. Grâce à la nouvelle LPM, la réserve opérationnelle bénéficie d’un budget spécifique, qui doit être maintenu à environ 200 millions par an sur la période, doublant presque la ressource allouée par rapport à 2015. Madame la secrétaire d’État, pourriez-vous nous communiquer des éléments sur le budget de la réserve pour l’année 2020, nous confirmer que les engagements de la LPM sont tenus et nous faire connaître la dynamique de ce budget spécifique ?

Mme Séverine Gipson. Madame la secrétaire d’État, je sais combien le lien entre l’armée et la nation vous tient à cœur. Dans ma circonscription, sur la base aérienne 105 d’Évreux, le dispositif des « cadets de la défense » remporte un vif succès, qui va croissant, à telle enseigne que les jeunes qui en ont bénéficié s’engagent dans la réserve afin de participer à la mission d’accueil de ceux qui souhaitent emprunter le même chemin. Quelles orientations budgétaires sont prévues pour les cadets de la défense ? Que pensez-vous de ce dispositif qui me paraît important et utile pour notre jeunesse ?

Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire d’État auprès de la ministre des armées. Madame Mirallès, je souhaite que les actions liées à la mémoire qui sont menées auprès de la jeunesse soient pérennes. En 2020, nous mettrons en avant quatre thèmes importants : de Gaulle, le cent-cinquantième anniversaire de la guerre de 1870, la libération des camps et la Corée.

Monsieur Jacques, le feuilleton du monument aux morts en OPEX va connaître une fin heureuse dans quelques semaines. Je me réjouis d’avoir proposé la forme juridique, à défaut de laquelle nous serions encore en discussion, et, surtout, d'avoir décidé que le financement serait essentiellement assumé par notre ministère. En effet, une articulation de financements était prévue entre la mairie de Paris– et notre ministère. C’était très complexe. J’ai proposé qu’on nous octroie une autorisation d’occupation du domaine public, comme cela se fait couramment dans les collectivités – mon expérience de maire m’a servi – et que nous financions le monument. Ces atermoiements m’apparaissaient en effet scandaleux au regard de l’enjeu. Seront inscrits sur le monument tous les noms de la quatrième génération du feu, par théâtre d’opération et, ensuite, par ordre alphabétique. Je suis l’évolution des travaux. Ce sera beau. Prévoir son inauguration le 11 Novembre serait formidable mais, vous l’avez compris, cela ne dépend pas que de moi. Le Président de la République tient absolument à l’inaugurer. Dès que nous aurons des indications sur cette date, nous vous les communiquerons.

Monsieur Furst, les 130 000 Alsaciens-Mosellans, que vous évoquez ne sont pas oubliés : ils bénéficient des droits attachés aux anciens combattants ; le Président de la République leur a rendu hommage et le ministère finance le mémorial de Schirmeck.

M. Laurent Furst. Il n’y a rien eu à leur intention dans les commémorations !

Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire d’État auprès de la ministre des armées. Ils n’ont pas été oubliés : la Nation est auprès d’eux.

Par ailleurs, l’Hôtel des Invalides a été construit par Louis XIV, avec la mission de soutenir ses soldats blessés et malades. Il est important que l’Institution nationale des Invalides – INI – continue à abriter cette structure médicale, dans laquelle se développe en outre un centre de recherche, notamment dans les matériels de reconstruction pour les amputés. Il faut garder ce lien avec notre histoire. Les locaux ne sont pas forcément inadaptés : ils ont surtout besoin d’être rénovés. La rénovation prévue, d’une ampleur considérable, et pour un coût de 110 millions, vise à adapter l’activité au projet, préalablement élaboré. Il y aura, d’une part, la maison de nos anciens, puisque quatre-vingts lits sont affectés à des anciens combattants très dépendants, ce qui constitue, à mes yeux, une belle symbolique, et d’autre part, un pôle dédié à la réparation physique et psychique des blessés de guerre, de ceux qui ont été victimes d’attentats ou d’autres traumatismes encore – cet établissement ouvrant assez largement l’accès à ses compétences. Il y a la place nécessaire : il faut simplement rénover les bâtiments en ce sens.

Monsieur Cubertafon, nous constituons en effet, par la réserve opérationnelle, un véritable vivier dans les armées. Notre objectif est d’atteindre un budget de 153 millions en 2020. Les ressources du titre II allouées à la réserve opérationnelle ont plus que doublé depuis 2015, date à laquelle elles s’élevaient à quelque 70 millions. Bien qu’il ne fasse pas partie des budgets que je défends, je suis de près l’évolution de ce dispositif. Notre objectif est d’atteindre 40 000 réservistes, comme l’indiquait la LPM 2019-2025. À l’heure actuelle, nous en sommes à 38 000, hors gendarmerie. Nous avons besoin de tous ces vecteurs de communication et d’incitation à rejoindre la réserve, que sont les JDC, les SNU et les opérations menées dans les écoles, les facultés, et tous les lieux où on peut toucher la jeunesse. La réserve opérationnelle doit couvrir divers métiers et compétences.

Madame Gipson, oui, le dispositif des cadets de la défense est une belle initiative, qui fait l’objet, dans le Var, d’une forte dynamique, et qui commence à se développer dans d’autres départements. Ce programme, qui s’inscrit dans le cadre du plan Égalité des chances, vise à accueillir, hors temps scolaire, des jeunes de 14 à 16 ans dans un cadre militaire, et à les faire participer à des activités éducatives, culturelles et sportives. On en dénombre aujourd’hui 400.

Mme Séverine Gipson. Ce n’est pas assez !

Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire d’État auprès de la ministre des armées. Certes. Sa mise en œuvre n’est pas obligatoire ; elle repose souvent sur la volonté d’un principal de collège ou d’un enseignant, qui souhaite en faire un projet interdisciplinaire dans l’établissement. Les jeunes s’engagent à participer, hors temps scolaire, le mercredi et le samedi, à certaines activités, souvent encadrées par les armées. Notre rôle est donc important parce que nous mettons à disposition des ressources humaines, mais la mise en œuvre des projets, au sein des établissements scolaires, ne dépend pas de nous. Je suis favorable au développement de ce dispositif, là où c’est possible, où des unités militaires sont susceptibles d'encadrer les jeunes, quelques heures au cours de la semaine, et travailleraient avec tous ceux qui souhaitent aller en ce sens.

Mme Anissa Khedher. Madame la Secrétaire d’État, je tiens à vous remercier pour la considération que vous portez aux personnes en difficulté, aux blessés et à leurs familles. Les moyens mis en avant dans le PLF 2020 participent activement à leur soutien dans la durée, à l’expression de la fraternité d’armes au sein de nos armées.

M. Thomas Gassilloud. Madame la secrétaire d’État, vous avez lancé hier le plan Handicap et inclusion 2019-2021 du ministère des armées, qui est exemplaire en la matière puisqu’il présente un taux de plus de 7 % de bénéficiaires de l’obligation d’emploi, soit plus de 4 000 agents au 1er janvier 2018. Pouvez-vous nous indiquer les grandes lignes de ce plan ? Concerne-t-il uniquement le personnel civil ou inclut-il également le personnel militaire ? J’ai noté qu’il était doté de près de 6 millions d’euros et était cofinancé par le Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique. Quel est son impact sur le budget 2020 ?

M. Thibault Bazin. Madame la secrétaire d’État, on avait augmenté les crédits de la JDC fin 2018. Combien a coûté à la défense, en 2019, le SNU, qui a concerné 2 000 jeunes ? Combien prévoyez-vous, au titre de ce programme, dans le budget 2020 ? La formation et les actions des encadrants ne sont pas gratuites, en effet.

De manière plus anecdotique, connaissant l’attention que vous portez aux jeunes, je souhaitais vous livrer un témoignage. Je me trouvais lundi dernier dans un rallye citoyen organisé au 53e régiment de transmissions de Lunéville avec des collégiens scolarisés à proximité. C’était une très belle expérience pour les jeunes mais, faute de crédits, il n’a pas été possible de leur offrir un souvenir commun, ne serait-ce qu’un tee-shirt, qui aurait contribué à renforcer leur esprit de corps l’espace d’une journée. N’est-il pas envisageable de dégager symboliquement quelques crédits pour ces rallyes citoyens des classes de troisième ? Cela permettrait de marquer les esprits et, peut-être, de faire germer les vocations dont nous aurons tant besoin, demain, pour assurer notre remontée en puissance ?

M. Didier Le Gac. Je souhaitais interroger la ministre sur la restructuration de l’ONAC, mais ses propos parfaitement clairs ont répondu aux questions que je me posais. J’ai   bien noté l’importance donnée à la conservation et la consolidation de l’architecture départementale, ce qui me convient.

M. Jacques Marilossian. Madame la secrétaire d’État, je vous ai interrogée l’an dernier sur le suivi psychologique des soldats revenus d’OPEX ; c’est l’accompagnement des militaires blessés dans l’emploi qui focalise cette année mon attention. Le dernier rapport du Haut comité d’évaluation militaire propose d’ouvrir l’accès aux emplois civils réservés du ministère aux anciens militaires blessés. Le dispositif devrait également être étendu aux officiers, ce qui est à saluer.

Cependant, les anciens militaires blessés ne sont pas reconnus comme des travailleurs handicapés. Le ministère des armées doit poursuivre le plan Handicap et inclusion, et le rapport recommande de comptabiliser les anciens militaires blessés recrutés au titre de l’article L. 4139-3 du code de la défense parmi les 6 % de bénéficiaires des obligations d’emploi au titre du handicap. Approuvez-vous cette recommandation, et le cas échéant, quelles sont les pistes pour l’appliquer ?

Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire d’État auprès de la ministre des armées. J’ai déjà largement répondu concernant l’ONAC, je n’y reviendrai pas.

S’agissant des blessés et de leurs familles, Florence Parly et moi sommes très soucieuses de leur porter toute l’attention requise. Un véritable parcours est prévu pour les blessés, physiques ou psychiques, dans le domaine médical, social, ou en matière de reconversion. Nous essayons également de prévenir les blessures, par des mesures de prévention et de santé publique générale. Cette politique est essentielle pour nous, et nous continuerons à l’améliorer et à la décliner au mieux. L’ONAC participe à ce parcours des blessés, puisque c’est lui qui les soutient s’ils sont complètement sortis de l’institution.

Hier, j’ai lancé le sixième plan Handicap – le premier remonte à 2005. Son impact budgétaire sera de 5,7 millions d’euros pour 2020, dont 50 % seront mis en œuvre par le fonds d’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP). Auparavant, nous menions des politiques de recrutement et d’accompagnement. Nous voulons désormais améliorer la formation professionnelle pour offrir aux personnes en situation de handicap des possibilités d’évolution de carrière, ce qu’elles s’interdisent souvent. Ce plan comprend dix-neuf mesures au total, dans quatre grands domaines. Il démontre la dynamique que nous souhaitons donner.

Bien sûr, les anciens militaires blessés seront comptabilisés au sein des 6 % lorsqu’ils obtiendront des emplois réservés. Tel n’est pas tout à fait le cas à l’heure actuelle. Il faut noter que notre ministère est assez vertueux dans ce domaine, puisque nous comptons plus de 4 100 personnes en situation de handicap au sein du personnel civil, ce qui représente à peu près 7,2 % de l’effectif total.

Si les militaires blessés peuvent concourir aux emplois réservés dans le domaine administratif, il faut avoir à l’esprit que beaucoup d’entre eux souhaitent quitter l’institution. Pour les accompagner, le service de reconversion de la défense met en œuvre la valorisation des acquis de l’expérience, offre des formations adaptées et les aides à trouver des entreprises dans le secteur privé, en fonction de leurs capacités. Tous ces aspects sont essentiels à nos yeux. Plan Famille, plan Mixité, plan Handicap : il s’agit pour nous d’un plan Humain, pour les hommes et les femmes de ce ministère.

Monsieur Bazin, nous n’avons pas tous les retours de l’analyse du SNU. Notre participation au budget a été directe, avec les moyens que nous déployons habituellement avec la direction du service national et de la jeunesse. Nous allons procéder très clairement à son évaluation. Un module de formation a été organisé à Brétigny, dans les locaux du service militaire volontaire, un autre à Saint-Cyr Coëtquidan, dans des locaux inutilisés à cette période. Les coûts sont donc très faibles, ils se limitent à l’occupation temporaire de locaux.

M. Thibault Bazin. Ma question portait sur les moyens humains. Le nombre d’encadrants a-t-il augmenté ?

Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire d’État auprès de la ministre des armées. Non. Les moyens humains du ministère ont essentiellement été affectés à la journée « Défense et mémoire nationales », qui est l’équivalent de la JDC. Cette tâche est effectuée par des militaires d’active, par des réservistes opérationnels, par des gendarmes, des policiers et des pompiers : tous les corps en uniforme. S’agissant des actions relatives à la mémoire, des personnels de l’ONAC et éventuellement  des associations du monde combattant ou les trinômes académiques sont plus spécifiquement intervenues. Bref, tout cela n’a pas entraîné de coûts supplémentaires ou de recrutements particuliers ; cela s’est fait à effectifs constants dans nos établissements. Deux ou trois personnes ont été mises à disposition de la mission SNU au niveau central, et chaque ministère a mis du personnel à disposition pour monter en puissance lors de cette première préfiguration.

Monsieur Bazin, je trouve formidables les rallyes citoyens. J’ai participé à l’un d’entre eux dans le Médoc, pas loin du camp de Souge. Votre idée de prévoir un stock de T-Shirts n’est pas mauvaise, nous allons étudier les moyens de la mettre en œuvre. Les jeunes qui ont fait le SNU gardent d’ailleurs leur tenue, et il leur est demandé de la revêtir lors des cérémonies. Dans certains départements, un carré leur est même réservé lors de ces manifestations, ce qui favorise la présence de la jeunesse.

Concernant l’accompagnement des militaires blessés dans l’emploi civil, je peux ajouter que j’ai visité à deux reprises une unité qui travaille au reclassement des militaires, à Fontenay-le-Comte – elle fait partie des unités mal connues de nos armées que j’ai pour habitude de visiter. Cette structure, formidable, que les militaires ont eux-mêmes mise en place, fait partie de nos armées et entre dans le budget de la défense. C’est une école de reclassement qui propose des formations aux militaires qui vont quitter l’armée, soit parce qu’ils sont en fin de contrat, soit parce qu’ils démissionnent, soit parce qu’ils sont blessés. On les forme à des métiers, puis on les aide à trouver un emploi dans le privé ou dans la fonction publique. L’accompagnement est complet, et je vous encourage à aller constater de vous-même ce qui se fait dans cette unité.

M. Christophe Lejeune. Madame la secrétaire d’État, vous avez pris la décision, et je vous en remercie, d’étendre le bénéfice de la carte du combattant à ceux qui ont servi en Algérie après le 1er juillet 1962. En 2018, vous estimiez à 60 millions d’euros le coût de cette mesure, pour 50 000 bénéficiaires. Ce nombre a-t-il été atteint ? Pourquoi 30 millions d’euros seulement ont-ils été prévus pour 2020 ?

M. Jean-Charles Larsonneur. Madame la secrétaire d’État, je me félicite de votre prochaine venue à Brest. S’agissant des sous-mariniers, les textes en vigueur ne reconnaissent pas la qualité de combattant aux vétérans, ce qui les prive du bénéfice de la carte du combattant et du titre de reconnaissance de la nation. Or ils livrent une guerre sous la mer, une guerre sans bataille, qui ne laisse que peu de monuments et qui fait souvent des victimes. Les récentes commémorations en hommage à l’équipage de La Minerve viennent nous le rappeler.

Je sais qu’une réflexion sur le sujet est en cours au ministère. Il me semble que le moment est venu de leur accorder la reconnaissance de la nation. Pouvez-vous nous en dire davantage ?

Mme Sereine Mauborgne. S’agissant tout d’abord de la stèle du monument sur les OPEX, j’ai le sentiment qu’une présentation par ordre chronologique serait plus simple à gérer pour l’avenir.

Ma question concerne la revalorisation de l’allocation de reconnaissance et viagère des harkis de 400 euros, dont je me félicite, car beaucoup d’entre eux résident dans le Var. La mise en place d’un dispositif de solidarité pour les enfants de supplétifs ayant séjourné dans les hameaux de forestage m’intéresse aussi, puisque sur soixante-quinze camps en France, onze se trouvaient dans le Var, dont quatre dans ma circonscription. Nous avons d’ailleurs inauguré en mai 2018 une stèle à Gonfaron, en hommage au hameau de forestage et aux harkis qui y avaient séjourné, car les pistes de défense contre les incendies du Var leur doivent beaucoup.

Pourriez-vous me donner quelques éléments de l’étude d’impact que vous avez réalisée en amont du cadrage de ce dispositif de solidarité ?

Mme Monica Michel. Plusieurs dispositifs existent afin d’encourager le sentiment d’appartenance citoyenne de nos jeunes, vous les avez cités : SMV, SMA, SNU. L’étude annuelle du Conseil d’État de 2018, consacrée à la citoyenneté, a salué la capacité d’insertion sociale et de construction du sentiment d’appartenance à la communauté nationale de ces trois mécanismes.

Pourriez-vous nous préciser les différences entre ces dispositifs, et surtout leurs complémentarités ?

Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire d’État auprès de la ministre des armées. Monsieur Lejeune, 50 000 personnes sont concernées par l’extension du bénéfice de la carte du combattant. Au 31 juillet 2019, 27 800 cartes ont été attribuées – je tiens à cet égard à saluer l’énorme travail réalisé par l’ONAC, qui, dès le 1er janvier 2019, a commencé à rentrer les dossiers et à aider les associations locales à les remplir. À la fin de l’année, nous devrions en être à 35 000 cartes. Nous allons donc monter en charge : 24 millions d’euros sont prévus pour 2020 et nous inscrirons 30 millions d’euros en 2021. Ce sont les sommes dont nous aurons besoin. Ce budget est sincère.

Monsieur Larsonneur, vous m’interrogez sur les sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) et les vétérans.

L’attribution de la carte de combattant, ou le titre de reconnaissance de la nation, est liée à l’existence d’un conflit ou d’une OPEX. Or par définition, les SNLE ne participent pas aux conflits, ils ont un rôle de prévention, de dissuasion, c’est pourquoi leurs équipages ne peuvent pas bénéficier de la carte du combattant ou de titres de reconnaissance de la nation. C’est la réponse qui a été donnée par Florence Parly et l’état-major des armées lors du dernier conseil supérieur de la fonction militaire. Toutefois, les équipages de SNLE bénéficient d’autres formes de reconnaissance : des décorations et des indemnités spécifiques leur sont réservées au regard des sujétions particulières et de la pénibilité de leur service.

Madame Mauborgne, les noms sur le monument pour les OPEX seront regroupés par grand théâtre d’opération et par date d’opérations à l’intérieur de ces théâtres, dans l’ordre alphabétique. Il a été prévu de laisser de la place pour ajouter des noms par la suite.

S’agissant de la solidarité à l’égard des enfants de harkis, la mise en œuvre du fonds de solidarité a été longue, du fait des délais pour envoyer et étudier les dossiers. Depuis le 1er janvier 2019, près de 3 000 dossiers ont été retirés, ce qui est assez significatif – mais tous n’ont pas été renvoyés. La commission s’est réunie à six reprises et se réunira encore trois fois d’ici à la fin de l’année – 9 réunions sur un an, c’est un bon rythme. Elle a instruit 265 dossiers, et environ 120 autres seront examinés lors des prochaines réunions, soit un peu moins de 400 en 2019. Le montant total des aides allouées après les six premières réunions de la commission s’élève à plus de 1,2 million d’euros, soit une moyenne de 4 600 euros par dossier, certains ayant pu faire l’objet d’une allocation de 10 000 euros. Nous devrions en être à 2 millions d’euros pour l’année complète, ce qui est loin des 7,5 millions que nous avions envisagés. Il était prévu de dépenser 7,5 millions par an pendant quatre ans, soit 30 millions. Si nous ne pouvons pas consommer ces crédits en quatre ans du fait des délais, je proposerai de maintenir la somme, et d’étaler la mise en œuvre de cette mesure dans le temps.

Les informations qui me remontent font apparaître que la constitution des dossiers est assez complexe. Il est difficile, pour ces enfants de harkis, de présenter des pièces justificatives de leur présence dans ces hameaux de forestage parce que les documents sont parfois détenus par d’autres membres de leur famille, et certains ne souhaitent pas les donner. Je ne suis pas opposée non plus à l’idée de revoir les critères d’attribution pour rendre cette aide plus accessible.

Mme Sereine Mauborgne. L’État n’a pas d’archives sur les hameaux de forestage ?

Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire d’État auprès de la ministre des armées. Nous en avons : ces archives nous ont été transmises par le ministère de l’intérieur, mais nous les avons mises à l’abri car elles sont en mauvais état. Elles sont toutefois consultables.

Dès lors que les critères d’éligibilité sont respectés, nous pouvons peut-être simplifier les choses et faire évoluer le règlement d’intervention. Je suis prête à en discuter avec vous.

Voici encore quelques précisions pour finir : 790 dossiers complets sont enregistrés et seront instruits au fur et à mesure ; certains ont été rendus irrecevables parce que le camp évoqué n’était pas répertorié ; un autre a été rejeté parce que les revenus du foyer demandeur étaient trop élevés. Par ailleurs des recours gracieux ont été déposés pour contester les montants attribués, jugés insuffisants. Sept recours contentieux ont également été déposés, pour les mêmes motifs que les recours gracieux. Enfin, un recours porte sur un dossier qui n’a pas encore été examiné : ils se plaignent avant d’avoir mal !

Le sentiment d’appartenance à la nation doit faire l’objet de notre travail au quotidien, avec toute la jeunesse et la participation du monde combattant. Il n’est peut-être pas nécessaire de multiplier les cérémonies. Les symboles républicains sont maintenant partout. Ainsi, la Marseillaise est chantée dans les établissements scolaires, ce qui participe à ce sentiment d’appartenance. Ces pratiques avaient été abandonnées pendant de très nombreuses années, et les résultats n’ont pas été formidables. Il faut continuer à travailler sur ces sujets, notamment les thèmes mémoriels, et nous le faisons main dans la main avec l’éducation nationale – je sais que Jean-Michel Blanquer y est très attaché.

Pour finir, et même si les statues ne sont pas encore fixées, si certains d’entre vous le souhaitent, nous pouvons organiser une visite du monument aux OPEX avant son inauguration. Nous le ferons avec grand plaisir.

Mme la présidente Françoise Dumas. Merci, Madame la secrétaire d’État. Nous avons beaucoup de perspectives : de beaux moments mémoriels à prévoir, la poursuite des plans centrés sur l’humain, auxquels vous êtes particulièrement attachée, et l’adaptation des services aux besoins de la transmission. Sans compter cette proposition de visite que nous allons très vite concrétiser.

 

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La séance est levée à onze heures trente-cinq.

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Membres présents ou excusés

Présents. - M. Jean-Philippe Ardouin, M. Xavier Batut, M. Thibault Bazin, M. Christophe Blanchet, Mme Aude Bono-Vandorme, M. Jean-Jacques Bridey, Mme Carole Bureau-Bonnard, M. Luc Carvounas, M. Philippe Chalumeau, M. André Chassaigne, M. Jean-Pierre Cubertafon, Mme Marianne Dubois, Mme Françoise Dumas, M. Olivier Faure, M. Yannick Favennec Becot, M. Jean-Jacques Ferrara, M. Jean-Marie Fiévet, Mme Pascale Fontenel-Personne, M. Laurent Furst, M. Claude de Ganay, M. Thomas Gassilloud, Mme Séverine Gipson, M. Fabien Gouttefarde, M. Jean-Michel Jacques, Mme Manuéla Kéclard-Mondésir, M. Loïc Kervran, Mme Anissa Khedher, M. Bastien Lachaud, M. Fabien Lainé, M. Jean-Charles Larsonneur, M. Didier Le Gac, M. Christophe Lejeune, M. Jacques Marilossian, Mme Sereine Mauborgne, Mme Monica Michel, M. Philippe Michel-Kleisbauer, Mme Patricia Mirallès, M. Joaquim Pueyo, M. Bernard Reynès, M. Gwendal Rouillard, M. Antoine Savignat, M. Joachim Son-Forget, M. Jean-Louis Thiériot, Mme Sabine Thillaye, M. Stéphane Travert, M. Stéphane Trompille, M. Patrice Verchère, M. Charles de la Verpillière

 

Excusés. - M. Florian Bachelier, M. Olivier Becht, M. Sylvain Brial, M. Alexis Corbière, M. Jean-Baptiste Djebbari, M. Richard Ferrand, M. Benjamin Griveaux, M. Stanislas Guerini, M. Christian Jacob, M. Jean-Christophe Lagarde, M. Gilles Le Gendre, M. Franck Marlin, Mme Josy Poueyto, M. Thierry Solère, Mme Laurence Trastour-Isnart, Mme Alexandra Valetta Ardisson

 

Assistait également à la réunion. - M. Dino Cinieri