Compte rendu

Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire

–  Suite de l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2020 (n° 2272), examen et vote sur les crédits des missions :

–  Outre-mer (M. Olivier Serva, rapporteur spécial).........2

–  Écologie, développement et mobilité durables, et sur l’article 76, rattaché :

  Paysage, eau et biodiversité ; Prévention des risques ; Expertise, information géographique et météorologie ; Conduite et pilotage des politiques de lécologie, du développement et de la mobilité durables (M. Éric Coquerel, rapporteur spécial)              12

 Énergie, climat et après-mines ; Service public de lénergie et comptes spéciaux Financement des aides aux collectivités pour lélectrification rurale et Transition énergétique (M. Julien Aubert, rapporteur spécial)              15

  Infrastructures et services de transports ; Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par lÉtat ; compte spécial Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs et budget annexe Contrôle et exploitation aériens (Mme Anne-Laure Cattelot et M. Benoît Simian, rapporteurs spéciaux)              16

 Affaires maritimes (M. Saïd Ahamada, rapporteur spécial) 18

–  Présences en réunion...........................52


Jeudi
24 octobre 2019

Séance de 15 heures

Compte rendu n° 20

session ordinaire de 2019-2020

 

 

Présidence de

 

 

Mme Nadia Hai,

Secrétaire

 

puis de

 

M. Éric Woerth,

Président

 


  1 

Sous la présidence de Mme Nadia Hai, la commission poursuit lexamen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2020 (n° 2272).

Elle examine tout dabord les crédits de la mission Outre-mer.

M. Olivier Serva, rapporteur spécial. Les crédits de la mission dont je suis le rapporteur spécial témoignent d’une ambition préservée pour les outre-mer. C’est un effort que je salue. Le niveau des autorisations d’engagement – 2,55 milliards d’euros – n’est, pour l’essentiel, affecté que par des mesures de périmètre et de transfert.

Sont ainsi intégrés dans le périmètre de l’action Fonds interministériel pour la transformation de la Guyane du programme 162 Interventions territoriales de l’État de la mission Cohésion des territoires les crédits dédiés au contrat de convergence et de transformation (CCT) inscrits dans le programme 123 Conditions de vie outre-mer, soit un transfert de 7,2 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) et de 2,7 millions d’euros en crédits de paiement (CP).

Par ailleurs, conformément aux engagements pris par le précédent Président de la République lors de sa visite en Polynésie française, le 22 février 2016, la dotation globale d’autonomie, restaurée à compter de 2017 à son niveau d’origine, soit 90,55 millions d’euros en AE et en CP, est financée par prélèvement sur les recettes de l’État à compter de l’exercice 2020. En revanche, le prélèvement sur recettes relatif à la compensation de l’octroi de mer en Guyane, d’un montant de 27 millions d’euros, est re-budgétisé.

Cependant, les autorisations d’engagement baissent en raison de la variation à la baisse de la prévision par l’ACOSS (Agence centrale des organismes de sécurité sociale) du montant des compensations d’exonérations de charges spécifiques à l’outre-mer, inférieure de 34 millions d’euros pour 2020 à celle inscrite en LFI 2019. Certes, il s’agit d’une dépense de guichet dont le montant exact ne peut être connu qu’a posteriori, mais ce n’en est pas moins une dépense à part entière dont bénéficient les outre-mer. J’aurais aimé, si l’on prévoit de dépenser 34 millions d’euros de moins au titre de ces compensations, que l’on envisage d’abonder d’autres lignes de la mission d’un même montant global ou que l’on réévalue les paramètres du dispositif d’exonération de charges pour que le montant compensé ne diminue pas.

Dans cet esprit, et pour donner tout son sens à la clause de revoyure évoquée par le Gouvernement, j’ai déposé des amendements au projet de loi de financement de la sécurité sociale. Ces propositions, que je défendais au nom du monde économique, ont été partiellement adoptées. Je souhaite que ce débat soit poursuivi et approfondi au Sénat. Soit dit en passant, je ne dispose malheureusement pas des chiffres que j’ai demandés à l’ACOSS ; la tutelle semble opposer une certaine inertie à leur transmission.

Je regrette, par ailleurs, la baisse de 100 millions d’euros des crédits de paiement. Ne réduisant en rien la portée de l’engagement du Gouvernement en faveur des outre-mer, elle procède du constat de la réalité du rythme des décaissements et des sous-exécutions. En ce sens, elle témoigne d’un souci de sincérité de la programmation budgétaire dont on peut se féliciter. J’aurais cependant préféré que l’on trouve une autre manière de régler la question des sous-consommations que celle consistant à l’entériner, d’autant qu’en cette période de taux bancaires négatifs, l’argument du coût de l’emprunt convainc peu. Une solution, afin de mieux consommer les fonds, aurait été le renforcement de l’ingénierie à tous les niveaux. Je me félicite des efforts faits en faveur de la Guyane et de Mayotte, mais ils devraient être généralisés.

Je me félicite du rétablissement de l’allocation logement accession, et j’approuve le choix, dans le cadre du plan logement 2019-2022, de consacrer 7 millions d’euros à l’ingénierie au sein de l’action 1 Ligne budgétaire unique du programme 123. Pour ma part, je proposerai d’abonder de 2 millions d’euros les crédits dédiés à cette même ingénierie dans le cadre de l’action 2, consacrée à l’aménagement du territoire, du même programme.

Je me réjouis également du maintien de l’action Financement de léconomie du programme 138 Emploi outre-mer à son niveau de 2019, soit 23 millions d’euros, et du fonds exceptionnel d’investissement (FEI), dont les autorisations d’engagement restent inchangées, à 110 millions d’euros, même si je constate à regret la diminution de 5 millions d’euros de ses crédits de paiement. Je déplore néanmoins vivement une apparente volonté de maintenir une certaine opacité sur la ventilation par territoire des financements accordés dans le cadre du FEI. Malgré des demandes répétées, je n’ai pu l’obtenir.

Au-delà des crédits budgétaires des deux programmes, l’importance des dépenses fiscales pour les outre-mer ne doit pas être négligée. Je citerai les taux spécifiques de TVA applicable dans les départements d’outre-mer (DOM) et l’exclusion des mêmes DOM du champ d’application de la taxe intérieure de consommation applicable aux carburants. Cette année, le projet de loi de finances ne comporte pas de disposition fiscale majeure relative aux outre-mer.

Cela dit, au cours de l’examen en séance publique de la première partie du projet de loi de finances, certains se sont émus de l’amendement gouvernemental visant à instaurer, en Guadeloupe et en Martinique, à titre d’expérimentation, un régime de duty free pour les touristes de croisière. Je regrette, moi aussi, que les conditions de son examen aient conduit au rejet d’une mesure de nature à stimuler l’économie locale, qui répond à une demande forte de la Guadeloupe et de la Martinique. La tâche des parlementaires guadeloupéens et martiniquais, rassemblés, est désormais de faire en sorte que cet amendement soit redéposé tel quel au Sénat et que des conditions d’examen plus sereines permettent son adoption, par-delà les clivages politiques. Les objections formelles et procédurales, pour ne pas dire procédurières, ne doivent pas faire obstacle à ce qui n’est que la mise en œuvre d’une proposition formulée dans le cadre du conseil interministériel de la mer du 17 novembre 2017.

Les règles fiscales générales peuvent affecter les outre-mer. De ce point de vue, je souhaiterais que l’on corrige certains effets pervers de la baisse du taux de l’impôt sur les sociétés, qui menace l’équilibre économique et la réalisation même de certaines opérations menées dans les collectivités d’outre-mer.

Je redoute également que la réduction de la niche en faveur du mécénat, prévue à l’article 50 du projet de loi de finances, ne dissuade des mécènes de financer certaines opérations, notamment de conservation ou de restauration du patrimoine, qui ne sauraient être menées sans leur concours compte tenu de la situation financière dégradée des collectivités ultra-marines.

M. Max Mathiasin, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. La vie chère est une préoccupation majeure dans les territoires ultramarins. Conséquence inéluctable de l’éloignement, de l’insularité et de l’étroitesse des marchés locaux qui ne permettent pas des économies d’échelle, elle ne saurait pour autant être une fatalité. Faire le choix de présenter un budget centré sur un développement économique durable, c’est assumer celui de ne pas céder à la facilité, qui consisterait à se résoudre à une inégalité persistante entre métropole et territoires ultramarins. Transformer en atouts les apparentes faiblesses liées à l’éloignement, à l’insularité et à l’étroitesse des marchés est la gageure à laquelle répond donc le présent budget de la mission Outre-mer.

Les crédits de la mission reflètent cette ambition en affichant un montant équivalent à celui voté en loi de finances pour 2019, à périmètre constant, soit 2,61 milliards d’euros. Les transferts et changements de périmètre rationalisent la lisibilité de l’affectation des crédits sans pour autant entamer la cohérence de la présente mission qui traduit ses priorités dans ses deux programmes Emploi outre-mer et Conditions de vie outre-mer.

C’est pour répondre à la question de la vie chère que j’ai choisi, en tant que rapporteur pour avis, de faire porter mon analyse sur l’un de ses déterminants : les importations agro-alimentaires outre-mer et leur rôle dans le renchérissement du coût de la vie de 20 % à 30 % en raison des coûts d’approche et de l’insuffisance de la production locale.

Pour faire baisser le coût de la vie, je préconise des solutions telles que pérenniser et moderniser les taxes, dont l’octroi de mer, afin d’encourager le développement de la production locale ; mettre en place une TVA à 0 % sur les produits importés de première nécessité ; octroyer des aides spécifiques pour encourager la diversification de la production locale ; créer des aides spécifiques à la création de labels ultramarins portant sur des produits bruts ou transformés sur place afin d’opérer une montée en gamme pour conquérir de nouveaux marchés, en métropole, en Europe et à l’international. Le renforcement du développement de la production agricole ultramarine constitue un moyen efficace pour lutter contre la vie chère.

La commission en vient à lexamen des amendements à la mission Outre-mer.

Article 38 et état B

La commission est saisie de lamendement II-CF991 du rapporteur pour avis.

M. Max Mathiasin, rapporteur pour avis. La part des importations agricoles et les coûts d’approche inhérents jouent un rôle non négligeable dans la vie chère. Le présent amendement vise à augmenter les crédits permettant l’insertion économique des départements et des collectivités d’outre-mer dans leur environnement immédiat en augmentant l’aide au fret des produits importés des pays tiers et des départements et collectivités ultramarines.

M. Olivier Serva, rapporteur spécial. L’aide au fret présentant un intérêt indéniable pour nos territoires ultramarins éloignés, avis de sagesse.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Je soutiens cet amendement, qui a fait l’objet d’un long débat en commission des affaires économiques, et je salue l’avis de sagesse du rapporteur spécial qui nous permettra probablement de l’adopter à l’unanimité, la somme en jeu étant tout à fait modeste. Compte tenu des enjeux pour les outre-mer, il me semble important de nous rassembler autour de cet amendement.

M. Laurent Saint-Martin. Je suis défavorable à cet amendement même si j’en comprends la logique. Dans nos discussions de seconde partie, nous devons prendre garde aux transferts de crédits : lorsque nous retirons des crédits d’une action, nous envoyons un certain nombre de signaux. Ainsi, la suppression de 100 000 euros sur le programme Conditions de vie outre-mer ne me paraît pas opportune. La commission ne devrait pas adopter cet amendement, que son auteur devrait redéposer en séance publique pour avoir l’avis du Gouvernement.

La commission rejette lamendement II-CF991.

Elle examine ensuite lamendement II-CF962 du rapporteur spécial.

M. Olivier Serva, rapporteur spécial. Depuis le début de la législature, nous nous battons pour obtenir des budgets. Nous en obtenons souvent mais ces crédits, finalement, ne sont pas consommés. Avec le ministère des outre-mer, l’Agence nationale de cohésion des territoires, le ministère de l’action et des comptes publics, nous avons donc essayé d’en comprendre la raison.

On demande souvent aux collectivités locales d’abonder très modestement les différents projets ; les euros sont budgétés, mais pourquoi ne sont-ils donc pas consommés ? En raison d’un manque d’ingénierie, c’est-à-dire de la capacité des différents acteurs de se mobiliser sur les diverses opérations à conduire : trouver les ingénieurs, libérer les terrains, trouver le bon financement que ce soit sur le plan étatique, des services déconcentrés de l’État – les préfectures – ou des collectivités locales.

Cette année, un effort intéressant est accompli, en particulier pour Mayotte et la Guyane qui ont connu un certain nombre de blocages, de grèves et de tensions ayant conduit à la libération de fonds. Ceux-ci doivent être mieux mobilisés. Cependant, nous avons besoin d’ingénierie partout dans les outre-mer. C’est pourquoi cet amendement vise à augmenter les fonds d’ingénierie pour l’ensemble des territoires ultramarins, hors Mayotte et la Guyane. D’où le transfert proposé de 2 millions.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Je profite de cet amendement pour réagir à l’intervention de notre collègue à propos de ces amendements gagés : nous n’avons pas d’autres solutions, vous le savez, pour qu’ils passent la barre de l’article 40. Nous ne souhaitons évidemment pas « déshabiller » un certain nombre d’actions ; nous espérons que le Gouvernement ait, à chaque fois, la sagesse de lever le gage. Si nos amendements sont repoussés en raison d’un gage il est vrai artificiel, il n’y a plus lieu de discuter.

M. Laurent Saint-Martin. Vous avez raison. C’est toute la difficulté de l’exercice lors de l’examen de la seconde partie du PLF, je l’ai dit : l’article 40 nous bloque.

Les deux amendements qui viennent d’être discutés illustrent les terribles contradictions entre les lignes et les actions. Je comprends leur philosophie : ce sont des appels à renforcer des actions au sein de ces programmes sans en « déshabiller » d’autres, mais il y a un risque à voter des amendements dont je pense, à titre personnel et au nom du groupe La République en marche, qu’il est préférable de les représenter en séance plutôt que d’en faire ceux de la commission. Le Gouvernement, lui, aura la possibilité de lever le gage.

M. Michel Castellani. Cet amendement va dans le bon sens en soulevant un problème de fond, celui des relations entre l’État central et les territoires à forte personnalité sociale, géographique ou culturelle.

Le groupe Libertés et territoires est favorable à une cogestion. Nous partons de loin. Il est très difficile de saisir les différences entre tel ou tel territoire en raison de la tradition française de l’État-nation, mais il faut évoluer. Nous enfonçons le clou depuis longtemps, que ce soit pour la Corse, les territoires ultramarins ou d’autres encore. Les lois doivent être adaptées, avec évidemment un contrôle central de l’État a posteriori.

 

M. Max Mathiasin, rapporteur pour avis. Je ne vois pas en quoi il y aurait contradiction entre les actions proposées et les amendements présentés.

La faiblesse de l’ingénierie est patente et cette dernière doit être renforcée. Ces 2 millions contribueraient à améliorer cette action en faveur de l’ingénierie dont nous avons besoin. Je pense donc que nous devons d’ores et déjà le voter.

La commission rejette lamendement II-CF962.

Elle examine ensuite lamendement II-CF990 du rapporteur pour avis.

M. Max Mathiasin, rapporteur pour avis. Il s’agit d’augmenter les crédits permettant l’insertion économique des départements et des collectivités d’outre-mer dans leur environnement régional. Ces derniers souffrent d’un déficit commercial structurel, les échanges avec leur environnement économique étant peu développés. Cet amendement propose donc un transfert de crédits de 100 000 euros de l’action 3 Pilotage des politiques des outre-mer du programme 138 Emploi outre-mer pour abonder l’action 7 Insertion économique et coopération régionale du programme 123 Conditions de vie outre-mer.

M. Olivier Serva, rapporteur spécial. C’est un signal positif important donné aux territoires ultramarins qui, souvent, ont une économie de comptoirs tournée vers l’Hexagone. Il importe donc de les inscrire dans leur logique environnementale, régionale et économique. Je suis favorable à ce transfert symbolique de 100 000 euros.

La commission adopte lamendement II-CF990 (II-865).

Elle discute ensuite de lamendement II-CF751 du rapporteur spécial.

M. Olivier Serva, rapporteur spécial. Cet amendement concerne un sujet sensible, sur lequel je vous demande de faire preuve de pragmatisme et de beaucoup d’humanité.

Lorsqu’un défunt ultramarin souhaite être inhumé dans son territoire de naissance, les familles sont en butte à toutes sortes de complications. Deux critères sont particulièrement injustes et restrictifs : le défunt devait vivre en outre-mer – mais auquel cas, il n’y a pas de problème – et disposer au maximum de 6 000 euros de ressources par an pour être éligible à l’aide. L’année dernière, seuls deux permis d’inhumer ont été délivrés sous cette scandaleuse condition. Un élargissement du champ de cette aide est donc nécessaire.

M. Max Mathiasin, rapporteur pour avis. Cet amendement est très important.

Nous avons reçu des représentants d’associations ultramarines à la délégation aux outre-mer et ils nous ont fait part de ce problème majeur. Sans doute vous dites-vous que nous vivons tous en terre de France ; mais la France, précisément, est diverse géographiquement, culturellement, humainement. Certains d’entre nous sont arrivés dans l’Hexagone avec l’espoir de revenir au pays mais ils n’ont pas pu le faire en raison du chômage qui y sévit. Défunts, ils doivent pouvoir retrouver la terre de leurs ancêtres. Je soutiens donc cet amendement en vous priant de bien vouloir l’adopter.

Mme Ericka Bareigts. Cet amendement est en effet très important.

Je précise que ceux qui sont venus dans les années soixante l’ont fait dans le cadre du Bumidom, le Bureau pour le développement des migrations dans les départements d’outre-mer. Ces Français d’outre-mer ne sont plus repartis et ont fait leur vie ici. Par définition, leur résidence n’est plus là-bas. Il est juste, à travers cet amendement, de reconnaître leur droit à bénéficier de cette aide.

Celle-ci, votée à l’unanimité dans la loi relative à l’égalité réelle outre-mer que j’avais défendue lorsque j’étais ministre des outre-mer, visait à pallier cette énorme charge du rapatriement d’un corps, qui s’élève, selon les territoires, entre 15 000 et 20 000 euros. Or, les conditions ensuite fixées par décret sont extrêmement restrictives.

Nous souscrivons donc à la très juste proposition du président Serva.

Mme Christine Pires Beaune. Mes collègues ne siégeant pas à la commission des finances et n’ayant pas le droit de vote, je tiens à dire que cela n’intéresse pas les seuls ultramarins et que je soutiens cet amendement : le plafond de 6 000 euros de revenus annuels pour pouvoir bénéficier de l’aide est vraiment beaucoup trop bas.

La volonté de reposer dans la terre de ses origines est tout à fait légitime et nous pourrions soutenir ce très modeste effort financier.

M. Mohamed Laqhila. Je soutiens cet amendement au nom du principe de continuité territoriale.

M. Laurent Saint-Martin. Au risque de me répéter, ce n’est pas le fond de l’amendement qui risque de soulever des problèmes.

Nous reconnaissons, bien entendu, l’expertise du rapporteur spécial et de tous ceux qui viennent de s’exprimer, mais cette mission Outre-mer dépendant de la politique publique menée par la ministre des outre-mer, c’est elle qu’il faudrait entendre sur l’ensemble des questions.

Même si nous discutons du transfert des crédits d’une action à l’autre, il n’est pas opportun, aujourd’hui, de valider ces propositions. En revanche, nous attendons des explications claires de la part du Gouvernement.

Je vous demande de présenter à nouveau cet amendement, mais pas au nom de la commission des finances.

Mme Émilie Bonnivard. Les Républicains soutiennent également cet amendement au titre de la continuité territoriale et parce que cette question est essentielle pour que les territoires ultramarins aient le sentiment d’une véritable appartenance à la communauté nationale.

M. Jean-Paul Dufrègne. Plusieurs députés ultramarins ont intégré notre groupe et souhaitent que cet amendement de bon sens soit adopté.

Je m’étonne que l’on se retourne toujours vers des règlements qui, finalement, n’ont que peu de sens eu égard à l’importance du sujet que nous évoquons.

M. Michel Castellani. Je soutiens cet amendement pour les raisons que mes collègues viennent d’exposer et sur lesquelles je ne reviens pas.

La commission rejette lamendement II-CF751.

Puis, suivant lavis défavorable du rapporteur spécial, elle rejette lamendement IICF738 de Mme Sabine Rubin.

Elle en vient à lamendement II-CF992 du rapporteur pour avis.

M. Max Mathiasin, rapporteur pour avis. La vie chère est l’une des préoccupations majeures dans les outre-mer. Cet amendement vise à augmenter les crédits des observatoires des prix, des marges et des revenus (OPMR) qui contribuent à donner une information transparente aux consommateurs et à permettre aux pouvoirs publics de prendre des mesures idoines pour lutter contre la vie chère, y compris pour lutter contre la formation de monopoles qui renchérissent les prix.

Si le présent projet de loi prévoit un doublement des crédits alloués au fonctionnement de l’ensemble des OPMR, eu égard à l’importance de leurs missions, une rallonge budgétaire paraît néanmoins nécessaire.

M. Olivier Serva, rapporteur spécial. C’est une demande tout à fait justifiée mais, pour 2020, le ministère des outre-mer prévoit un doublement des crédits alloués au fonctionnement de l’ensemble de ces observatoires, qui passeront de 300 000 à 600 000 euros.

Je vous propose donc de retirer votre amendement.

Mme Cendra Motin. Dans le cadre de la commission d’enquête sur les relations de la grande distribution avec ses fournisseurs, madame Bareigts a appelé notre attention sur les outre-mer où, en raison d’une organisation spécifique de la grande distribution, les prix sont beaucoup plus chers. Nous avons aussi découvert qu’il existe des organisations coopératives, que nous soutiendrons fortement, qui sont en train de changer un peu la donne. Au-delà de la question des observatoires, nous essayons d’agir concrètement sur le terrain.

La commission rejette lamendement II-CF992.

Elle examine ensuite lamendement II-CF739 de M. Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel. Par cet amendement, nous dénonçons que pas un euro ne soit consacré à un fonds d’urgence pour tous les outre-mer de la République pour garantir enfin la construction et l’entretien d’infrastructures sanitaires à la hauteur des besoins des populations concernées.

L’euro symbolique permet d’abonder un nouveau programme Fonds durgence dinvestissement dans les infrastructures sanitaires.

Nombre d’hôpitaux publics manquent de moyens, nous l’avons encore vu récemment : en Martinique, avec la fermeture du service hématologie du CHU ; à La Réunion, avec la situation de l’hôpital de Saint-Pierre qui a connu une grève importante du personnel hospitalier et avec les difficultés que connaissent les dialysés de l’AURAR (Association pour l’utilisation du rein artificiel) ; à Mayotte, avec le manque de moyens immobiliers et humains du centre hospitalier ; en Guadeloupe, avec le manque de moyens pour lutter au mieux contre l’empoisonnement au chlordécone.

 

M. Olivier Serva, rapporteur spécial. Il existe des déserts médicaux dans l’Hexagone mais, dans les outre-mer, c’est pire. Cette symbolique est importante. Je suis moi-même l’auteur d’un rapport sur le CHU de la Guadeloupe, où une grève importante a eu lieu après un incendie. Avis favorable.

La commission rejette lamendement II-CF739.

M. Éric Coquerel. Même à l’euro symbolique, vous n’en voulez pas !

Elle examine ensuite lamendement II-CF740 de Mme Sabine Rubin.

M. Éric Coquerel. Cet amendement coûterait encore un euro au budget de l’État, mais il permettrait d’abonder un nouveau programme Plan global pour le droit daccès à leau des outre-mer.

Chacun en conviendra, la question de l’eau est tout aussi essentielle que celle de la santé. À cet égard, les territoires d’outre-mer rencontrent des problèmes importants, les informations sur la collecte, l’assainissement et la distribution étant parcellaires.

En 2013, le prix moyen du mètre cube d’eau était de 2,03 euros sur le plan national, mais il est beaucoup plus élevé dans les DOM et les TOM : 2,22 euros à Saint-Pierre-et-Miquelon, 5,28 euros en Martinique… Un problème d’égalité se pose, et l’ouverture d’un tel programme est donc urgente.

M. Olivier Serva, rapporteur spécial. La problématique de l’eau en outre-mer, et singulièrement dans certains territoires comme le mien, la Guadeloupe, est cruciale. Nous connaissons des coupures d’eau, des tours d’eau sont instaurés, 15 % de la population n’ont pas d’eau au quotidien. Pourquoi ? En raison d’un enchevêtrement de compétences, souvent au niveau des intercommunalités, qui suscite des réticences à structurer. Or une structure unique de l’eau permettrait de régler le problème.

Je suis d’autant plus favorable à cet amendement concernant l’accès à l’eau que certains, en outre-mer, n’en bénéficient pas.

Mme Ericka Bareigts. Les demandes relatives à la santé et à l’eau sont très structurantes pour le développement de ces territoires. Ce que la France hexagonale a mis des dizaines d’années, voire des siècles, à faire, nous, nous l’avons fait ou tenté de le faire en trente ou quarante ans. Cet amendement, comme ceux défendus par d’autres députés, vise à accélérer le rattrapage sur des actions structurantes qui préservent la santé des Français ultramarins.

Ce ne sont pas des caprices ! Je ne voudrais pas, à chaque fois que les ultramarins prennent la parole ou font des propositions, que cela soit interprété comme un caprice afin d’avoir plus d’argent, plus d’aides que les autres. Nous sommes des départements français depuis soixante-dix ans et la solidarité nationale ne s’y exerce que depuis quarante ans. Nous sommes dans une dynamique de rattrapage et nous accomplissons des choses extraordinaires en très peu de temps.

M. Max Mathiasin, rapporteur pour avis. En 1975, lorsque je suis parti faire mes études en métropole, 10 % seulement de la population de la Guadeloupe accédait à l’eau courante. Il fallait aller à la rivière ou à la source, qui se situait à des kilomètres, pour accéder à l’eau potable. Aujourd’hui encore, comme mes collègues l’ont dit, une grande partie de cette population n’y a pas accès.

À cela s’ajoute le problème du chlordécone, qui a gagné les terres et atteint le château d’eau de la Guadeloupe, Capesterre-Belle-Eau, qui irrigue l’ensemble du territoire. La Grande-Terre n’était pas chlordéconée mais, aujourd’hui, elle l’est.

C’est pourquoi cet amendement, si symbolique soit-il, constitue un élément très important dans le processus que nous devons mener ensemble pour que tous, dans les outre-mer, puissent accéder à l’eau potable.

La commission rejette lamendement II-CF740.

M. Laurent Saint-Martin. Le groupe La République en marche votera, bien évidemment, les crédits de cette mission.

Nous avons besoin d’entendre le Gouvernement sur la globalité des politiques publiques menées. Nous avons bien conscience que votre rôle, monsieur le rapporteur spécial, n’en est pas facilité.

La commission et la délégation aux outre-mer, que vous présidez, jouent un rôle important. Je vous demande donc de comprendre la position du groupe majoritaire quant à ces amendements.

Mme Ericka Bareigts. Le groupe Socialistes et apparentés est très défavorable à l’adoption des crédits de cette mission – les députés ont le droit d’avoir un avis, même en l’absence de représentant du Gouvernement.

La sanctuarisation des crédits nous avait été promise, or les chiffres montrent que ce budget est en baisse de 3,96 % en AE et de 6,45 % en CP. Au moment où je vous parle, le Président de la République est à La Réunion et constate le grand mécontentement qui s’y exprime, comme cela pourrait être le cas dans d’autres territoires.

Les crédits consacrés au logement diminuent, quant à eux, de 13 % en CP et de 27 % pour le logement social, ce qui est gravissime.

La cohésion sociale, qui intéresse la jeunesse, la culture, perd jusqu’à 73 %. Or un tel affaiblissement pour des territoires déjà très tendus est extrêmement explosif.

Pour toutes ces raisons, nous émettons un avis très défavorable à l’adoption des crédits de la mission Outre-mer proposés par le Gouvernement.

M. Michel Castellani. Le groupe Liberté et territoires ne peut que constater et regretter la diminution des crédits de cette mission. Par exemple, le programme 138 Emploi outre-mer enregistre une baisse de près de 2 % en AE et en CP. Les chiffres sont encore plus frappants en ce qui concerne le programme Conditions de vie outre-mer avec une diminution de 16,73 % en CP et de 8,14 % en AE, alors que ce programme vise à répondre aux besoins en logement social.

Nous regrettons un tel recul budgétaire, surtout compte tenu des besoins exprimés par les habitants des départements et régions d’outre-mer. Par exemple, à La Réunion, 40 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, alors que les prix sont plus élevés de 7 % qu’en métropole.

Plus largement, il faut tenir compte de cette situation malgré les difficultés budgétaires que nous connaissons et discuter avec les élus légitimes de ces régions afin d’avancer le plus possible en adaptant la gestion à ces territoires.

M. Jean-Paul Dufrègne. Le groupe GDR constate que, depuis la loi de finances pour 2019, les outre-mer, territoires parmi le plus fragiles, autofinancent leur développement. Avec la réforme de l’abattement fiscal, la suppression de la TVA non-perçue récupérable, ce sont leurs contribuables qui financent une bonne part du budget et se substituent à l’État dans les investissements programmés.

Par ailleurs, le régime des exonérations de charges sociales patronales applicable dans les outre-mer, dite exonération LODEOM, a été modifié en profondeur. Après un an d’application, on constate, avec la refonte de ce régime spécifique, une augmentation des charges globales de certains secteurs, notamment l’agroalimentaire et les nouvelles technologies, ce qui confirme les craintes des socio-professionnels et entrave le développement de ces secteurs créateurs d’emplois et d’activité.

Les crédits affectés au logement diminuent alors que les demandes de logement continuent d’augmenter et les besoins en matière de réhabilitation restent immenses. L’argument avancé par le Gouvernement, que l’outre-mer ne parviendrait pas à consommer les crédits, ignore que cette sous-consommation résulte surtout des obstacles dressés dans la mise en place des programmes. C’est oublier la suppression, par ce gouvernement, de l’allocation logement accession contre l’avis unanime des élus de ces territoires. Des milliers de dossiers ont été bloqués ; le rétablissement pérenne du dispositif est le bienvenu, mais que de temps perdu ! C’est oublier aussi les difficultés à disposer d’un foncier aménagé et les freins administratifs qui retardent également ces programmes.

Je termine avec le rejet de l’amendement relatif à la continuité territoriale funéraire : il témoigne combien, loin d’être humaine, votre politique est surtout technocratique.

Mme Nadia Hai, présidente. Monsieur Dufrègne, l’APL accession a été rétablie cette année, pour deux ans.

M. Éric Coquerel. Comme c’est souvent le cas, on constate un effet d’affichage sur les crédits de l’outre-mer. Premièrement, la prétendue augmentation de ces crédits consiste surtout en un saupoudrage réservé aux entreprises, tandis que rien n’est prévu pour les populations les plus défavorisées. Deuxièmement, si on tient compte de l’inflation et de l’augmentation de la population, on s’aperçoit qu’en réalité les crédits diminuent de 7,92 %.

Par ailleurs, on nous dit que le fonds exceptionnel d’investissement est préservé, avec des crédits s’élevant à 110 millions d’euros en autorisations d’engagement ; or il n’est prévu que 60 millions d’euros en crédits de paiement, ce qui représente une baisse de 5 millions par rapport à l’année dernière. En tout état de cause, nous regrettons qu’on s’en tienne à un fonds exceptionnel, alors qu’il faudrait des investissements pérennes pour rattraper le retard dont souffrent les outre-mer en matière d’infrastructures.

La proposition visant à élargir le champ de l’aide au transfert de corps relevait de la simple humanité, et nous ne comprenons donc pas qu’elle ait été rejetée.

Enfin, peut-être aurions-nous pu avoir un jugement global un peu moins négatif si quelques amendements avaient été acceptés, mais vous avez fait le choix de rejeter même ceux dont le coût était limité à un euro.

Pour l’ensemble de ces raisons, nous voterons contre ces crédits.

La commission adopte les crédits de la mission Outre-mer ainsi modifiés.

Article 76 : Reprise de par l’État de la dette de SNCF Réseau à hauteur à 25 millions d’euros

La commission adopte l’article 76 sans modification.

Après larticle 76

La commission est saisie de lamendement II-CF993 du rapporteur pour avis.

M. Max Mathiasin, rapporteur pour avis. L’amendement II-CF993 vise à ce que le Gouvernement dépose un projet de rapport devant le Parlement d’ici à six mois sur les conditions de la formation des prix et la vie chère, après que la mission conjointe de l’inspection des finances et de l’administration sur l’octroi de mer aura rendu ses conclusions.

L’avis n° 19-A-12 concernant le fonctionnement de la concurrence en outre-mer, rendu par l’Autorité de la concurrence le 4 juillet dernier, a mis en évidence que les coûts d’approche avaient un rôle crucial dans le renchérissement de la vie chère. Par coûts d’approche, on entend le fret, mais également les taxes, dont l’octroi de mer qui représente 12 % de ces coûts.

Si l’octroi de mer permet de protéger le développement de la production locale, et doit, à ce titre, être conservé, il importe d’actualiser la modulation de ses taux en fonction des priorités locales. À ce titre, le Gouvernement devra présenter dans son rapport les conclusions de la mission conjointe IGA-IGF qu’il a mandatée à cette fin.

M. Olivier Serva, rapporteur spécial. La problématique de la vie chère en outre-mer est une question centrale et fondamentale, fréquemment évoquée par le Gouvernement et le Président de la République. La délégation des outre-mer de l’Assemblée nationale s’en est saisie et a désigné pas moins de trois co-rapporteurs, à qui nous faisons confiance pour nous éclairer et nous permettre d’aboutir à des solutions concrètes. Dans l’immédiat, nous souhaitons le retrait de cet amendement.

La commission rejette lamendement II-CF993.

Sous la présidence de M. Éric Woerth, la commission examine les crédits de la mission Écologie, développement et mobilité durables, des comptes d’affectation spéciale Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale, Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs et Transition énergétique ainsi que du budget annexe Contrôle et exploitation aériens.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial (Paysages, eau et biodiversité, Prévention des risques, Expertise, information géographique et météorologie et Conduite et pilotage des politiques). Je commencerai par dire un mot sur la hausse supposée des crédits de l’écologie en 2020. Si l’on se réfère aux documents de présentation qui nous ont été fournis par Bercy, les crédits budgétaires de la mission Écologie hors contribution au CAS Pensions connaissent une faible progression, passant de 11,52 milliards d’euros en LFI 2019 à 11,64 milliards en PLF 2020 : cela représente 1 %, c’est-à-dire moins que l’inflation.

Les principaux vecteurs de hausse des crédits de la mission dans le PLF 2020 sont l’augmentation des prévisions de taxes affectées : plus 730 millions d’euros, dont 504 millions supplémentaires pour l’Agence de financement des infrastructures de France (AFITF), ainsi que deux changements de périmètre. D’une part, il est créé un nouveau programme Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par lÉtat, doté de crédits évaluatifs de 409 millions d’euros ; d’autre part, le CAS Aide à lacquisition de véhicules propres est supprimé, et il est inscrit 395 millions d’euros de crédits budgétaires dans le programme 174 Énergie, climat et après-mines au titre du bonus automobile – ce qui représente un total d’un peu plus de 800 millions d’euros. Me répondant dans le cadre des questions au Gouvernement, madame Borne avait affirmé que le budget de l’écologie augmentait : en réalité, l’augmentation n’est qu’apparente, puisqu’elle correspond essentiellement à des budgets fléchés ne concernant pas la politique globale du ministère de l’environnement.

Pour l’essentiel, les hausses affichées par le Gouvernement tiennent plus du jeu de bonneteau, voire d’un jeu de dupes, que de la volonté d’engager une politique publique de l’écologie digne de ce nom. Je proposerai tout à l’heure des amendements visant à clarifier la maquette budgétaire de la mission et à assurer un minimum de sincérité dans la présentation des crédits.

L’élément le plus marquant de ce PLF en matière d’écologie, c’est la poursuite des coupes claires pratiquées dans les effectifs, à tel point que les quatre syndicats représentatifs du ministère de la transition écologique et solidaire, où le vote est à 80 % au niveau du personnel, ont créé en septembre dernier un « comité de défense du ministère de l’écologie », répondant ainsi à la création d’un conseil de défense écologique sur la proposition du chef de l’État. Ils réclament notamment, à juste titre, un moratoire sur les réductions d’effectifs, sur les suppressions ou transferts de missions ainsi que sur les restructurations des établissements et services.

L’objectif est tout simplement de pouvoir se concentrer sur le seul combat qui vaille : non pas la réduction obsessionnelle des dépenses de l’État, mais la bonne appréhension du changement climatique, la lutte contre ses causes et ses effets, en particulier la chute dramatique de la biodiversité, et la protection des populations contre les risques naturels et technologiques.

Or, pour 2020, le plafond des autorisations d’emploi du ministère de la transition écologique et solidaire, tel qu’il figure à l’article 42 du présent projet de loi de finances, passe de 39 373 ETPT à 37 382, soit une baisse de 5,3 % de l’effectif – cela, je le rappelle, à la suite des 24 000 suppressions d’ETPT qu’a subies ce ministère au cours des dix dernières années.

Pour les opérateurs, la baisse est de 286 ETPT par rapport au plafond 2019 de 19 578 mais, alors qu’elle touche très durement des établissements essentiels comme Météo-France – moins 95 ETPT – ou le CEREMA – moins 101 ETPT –, la Société du Grand Paris, dont le plafond d’emplois était déjà passé de 200 ETPT à 430 ETPT de 2018 à 2019, voit ses effectifs portés à 585 ETPT en 2020. Je vous présenterai des amendements visant à annuler ces suppressions de postes et à établir un véritable moratoire sur les baisses des effectifs.

Pour ce qui est des quatre programmes dont j’assure plus particulièrement le suivi, les crédits, à périmètre constant, sont également en baisse : moins 0,63 % sur le programme 159 Expertise, économie sociale et solidaire, information géographique et météorologie, moins 0,93 % sur le programme 181 Prévention des risques, et moins 2,83 % sur le programme 217 Conduite et pilotage des politiques de lécologie, du développement et de de la mobilité durables, au sein duquel la masse salariale du ministère accuse une baisse sensible.

Quant au programme 113 Paysages, eau et biodiversité, son augmentation de 26 % en CP est la résultante d’une mesure de périmètre, avec l’instauration d’une subvention pour charges de service public (SCSP) de 41,2 millions d’euros au bénéfice de l’Office français de la biodiversité (OFB), nouvel établissement issu de la fusion de l’Agence française pour la biodiversité (AFB) et de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS). Cette subvention est censée compenser la baisse de la redevance cynégétique consécutive à la réforme de la chasse décidée par le Président de la République en août 2018, mais elle ne le fait en réalité que très partiellement. L’OFB va donc voir le jour dans un contexte financier défavorable, et l’on sait que les fédérations de chasseurs, auxquelles ont été transférées des compétences qui auraient dû rester dans la sphère régalienne, reconnaissent déjà leur impuissance à réguler les populations de gros gibier et réclament des moyens supplémentaires.

Je veux également dénoncer la baisse des subventions pour charges de service public de l’IGN et du centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CEREMA). Quant à la légère hausse dont bénéficie Météo-France, elle tient à des financements exceptionnels destinés au renouvellement du supercalculateur – j’y reviendrai dans le cadre d’un amendement.

En ce qui concerne l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (INERIS), les baisses d’effectifs cumulées entre 2016 et 2024 représenteront 20 % du personnel. Quand on connaît le rôle central de cet établissement dans la recherche sur les risques industriels et sur leur prévention, dans l’élaboration de la réglementation, mais aussi son action en appui des services d’urgence lors des accidents industriels – il a été l’un des premiers à être saisis lors de l’incendie de Lubrizol –, on prend la mesure de l’irresponsabilité de ces plans d’austérité. La menace, bien identifiée par les dirigeants de tous les opérateurs concernés, est celle d’une perte de compétence à moyen terme.

Je n’hésite pas à dire qu’en matière de prévision des risques industriels et naturels, nous vivons actuellement ce qui ressemble fort à un scandale d’État – qui n’est certes pas à imputer uniquement à la politique mise en œuvre par ce gouvernement, puisqu’il résulte d’une lente dégradation sur une quinzaine d’années –, le directeur général de la prévision des risques reconnaissant lui-même que le nombre de contrôles a été divisé par deux en quinze ans, qu’un inspecteur couvre en moyenne 420 sites et qu’il manque 200 postes d’inspecteur pour assurer le minimum nécessaire. Dans cette situation, on privilégie le contrôle des sites Seveso, au détriment d’autres sites qui sont tout aussi préoccupants, notamment du fait de l’intervention de sous-traitants.

Non, ce budget n’est vraiment pas au niveau compte tenu de l’urgence écologique à laquelle nous sommes confrontés. Dans l’édition 2019 du « Rapport sur l’environnement en France » que vient de publier le ministère de la transition écologique et solidaire, il apparaît que la France est dans une situation mauvaise ou préoccupante dans plus de la moitié des neuf « limites planétaires » définies au niveau international.

Pour toutes ces raisons, je vous invite donc, mes chers collègues, à rejeter les crédits de la mission Écologie, développement et mobilité durables.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial (Énergie, climat et après-mines, Service public de lénergie et comptes daffectation spéciale Transition énergétique et Financement des aides aux collectivités pour lélectrification rurale). Avant de vous faire part de mon appréciation sur les crédits dont j’ai la charge, j’énoncerai trois éléments factuels.

Le premier élément factuel, c’est que le budget s’établit à 11,7 milliards en crédits de paiement et en autorisations d’engagement, ce qui représente un léger recul de 1,75 % par rapport à la loi de finances pour 2019. Cela peut s’expliquer par le fait que c’était une mission très dynamique, et qu’après une augmentation des crédits, pour la première fois, ceux-ci se stabilisent.

Le deuxième élément factuel, c’est que la maquette budgétaire présentant ces crédits évolue – je suis tenté de m’exclamer « Alléluia ! » pour faire plaisir au rapporteur général. En effet, la relative stabilité des crédits masque plusieurs mouvements. Ainsi, le programme 174 accueille trois nouvelles dépenses, à savoir le chèque énergie – transféré du programme 345 –, le bonus écologique et la prime à la transition énergétique, qui constitue l’un des aspects de la réforme du crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE).

Cette évolution de la maquette était attendue. J’avais d’ailleurs émis le vœu, l’an dernier, tout comme la Cour des comptes, que ce soit le cas, et notre collègue Laurent Saint-Martin en a fait de même récemment dans son rapport sur l’application de la LOLF. Si les propositions formulées diffèrent, notre constat est partagé : la maquette qui nous est présentée manque de pertinence. Au final, et en dépit de quelques aspects positifs, les évolutions apportées sont décevantes et me paraissent devoir être complétées. J’ai déposé un amendement en ce sens.

Troisième élément factuel : la mission comporte une vingtaine de dépenses fiscales, notamment le CITE qui, l’an prochain, pèsera pour plus d’un milliard d’euros au titre des travaux réalisés en 2019.

J’en viens à mon analyse critique des crédits proposés. La première chose qui me frappe, c’est la complexité de certains dispositifs d’accompagnement de la rénovation énergétique. La semaine dernière, nous avons discuté dans l’hémicycle de la réforme du CITE, consistant entre autres à créer une prime au bénéfice des ménages modestes et très modestes, afin de les encourager à effectuer des travaux de rénovation énergétique de leur logement. La grille de présentation des travaux éligibles à cette prime et au CITE est excessivement complexe, pour ne pas dire byzantine. La Fédération française du bâtiment a ainsi relevé que le CITE « nouvelle version » comportait – accrochez-vous bien – 192 cas de figure différents, dépendants des types de ménages concernés et des paramètres énergétiques ! Ce n’est plus une grille c’est un Rubik’s Cube ! Quand on a des dispositifs d’une telle complexité, il ne faut plus se demander pourquoi les Français n’y font pas plus souvent appel…

Je regrette notamment la volonté du Gouvernement de combiner l’aspect social et l’aspect énergétique, car cela n’est pas forcément pertinent, notamment en matière d’émissions de CO2. À vouloir courir plusieurs lièvres à la fois, on risque de n’en attraper aucun. Il aurait mieux valu prévoir un dispositif plus simple, dont l’entrée en vigueur aurait été décalée de quelques mois afin de pouvoir informer nos concitoyens des changements intervenus. Pour être efficace, une politique publique doit être simple, mais c’est là une qualité que je ne retrouve pas dans ce budget.

La seconde chose qui me frappe dans les crédits de la mission écologie, c’est le manque de cohérence. Le Gouvernement nous dit sans cesse qu’il veut soutenir le verdissement du parc automobile et le remplacement des véhicules les plus anciens par des véhicules plus récents et moins polluants. Soit, mais les chiffres disent tout et son contraire : d’un côté, le montant du bonus écologique va augmenter de 50 %, ce qui fait passer les crédits pour acquérir un véhicule électrique neuf de 264 millions d’euros à 395 millions – ce qui est très bien ; de l’autre côté, les crédits soutenant la prime à la conversion diminuent d’un tiers, passant de 596 millions d’euros à 405 millions d’euros. Autrement dit, dans le même budget, on augmente le bonus écologique de moitié et on diminue la prime à la conversion d’un tiers.

On a l’impression de se trouver aux côtés d’un conducteur qui fait n’importe quoi : un coup de volant à gauche, un coup de volant à droite, marche avant, marche arrière… Le message en matière de verdissement du parc automobile manque de cohérence, et ce qui manque de cohérence manque généralement d’efficacité. Pour ces motifs, je vous propose donc de ne pas adopter les crédits qui vous sont soumis.

Mme Anne-Laure Cattelot, rapporteure spéciale (Infrastructures et services de transports et Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par lÉtat, budget annexe Contrôle et exploitation aériens et compte daffectation spéciale Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs). L’année 2019 a été marquée par d’intenses débats sur le projet de loi d’orientation des mobilités, qui a donné lieu à la définition d’une programmation à la fois réaliste et ambitieuse pour notre pays. Dans notre rôle de rapporteurs spéciaux, Benoit Simian et moi-même avons exercé notre mission de contrôle et d’évaluation afin de déterminer si le budget était approprié aux défis que représentent le renouvellement inédit et la revitalisation de nombreux réseaux.

Je me limiterai aux sujets fluviaux, ferroviaires et routiers.

Dans la perspective du financement de la loi d’orientation des mobilités, le budget 2020 accroît les financements d’une manière tout à fait inédite. Sur le programme 203, je suis fière de vous annoncer que les ressources globales allouées à la politique des transports atteindront 5,7 milliards d’euros, soit une hausse de 8,5 % par rapport à 2019. Jamais dans l’histoire de notre pays les infrastructures de transport n’auront bénéficié d’un effort financier d’une telle ampleur. Près de 3 milliards d’euros de recettes fiscales seront affectées à l’AFITF en 2020, ce qui représente une hausse de 500 millions d’euros par rapport à 2019. Ce montant record s’explique par l’affectation d’une éco-contribution sur les billets d’avion qui rapportera 230 millions d’euros pour 2020, ainsi que par l’affectation d’une fraction exceptionnelle de TICPE de 381 millions d’euros à l’agence. Du jamais vu pour nos territoires qui en ont tant besoin !

Pour ce qui est des transports ferroviaires, l’année 2020 marquera la transformation profonde du groupe public SNCF, qui deviendra un ensemble de sociétés anonymes à capitaux publics. Alors que les mouvements sociaux ont considérablement pénalisé les voyageurs le week-end dernier – ainsi que mon co-rapporteur aujourd’hui, ce qui explique qu’il n’ait pu être présent –, cette évolution juridique permettra d’accompagner la SNCF dans la transformation de son organisation pour accueillir l’ouverture à la concurrence.

Par ailleurs, j’ai pris connaissance du rapport de la Cour des comptes publié très récemment, qui dresse un constat alarmant de la gestion des trains express régionaux (TER) par SNCF Mobilités et certaines régions. La Cour estime que « le service aux usagers se dégrade ». En tant que rapporteure spéciale, je resterai très attentive à ce sujet, dans la mesure où l’État verse plus de 2 milliards d’euros aux régions pour financer une partie du montant de la redevance d’accès facturée par SNCF Réseau pour l’utilisation du réseau ferré national.

La première étape de reprise par l’État de la dette de SNCF Réseau, que nous attendions, sera effective en 2020, à hauteur de 25 milliards d’euros, en contrepartie d’efforts de productivité de la part de l’opérateur national. Il s’agit d’une véritable opération vérité, que je salue. Je me félicite du courage politique du Gouvernement d’avoir fait le choix de la sincérité budgétaire, alors que cette dette avait été mise sous le tapis par tous les gouvernements précédents.

La transformation du groupe public ferroviaire s’accompagnera de l’extension des compétences de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (ARAFER), devenue Autorité de régulation des transports (ART) depuis le 1er octobre, et qui sera désormais chargée de la régulation du secteur aéroportuaire et des activités de gestionnaire d’infrastructure de la RATP. Le programme 203 prend acte de la budgétisation du financement de l’autorité, conformément à la volonté du Gouvernement et des parlementaires de supprimer les taxes à faible rendement. L’ART percevra désormais une subvention d’un montant égal au plafond de taxes autorisé pour 2019, soit 11,4 millions d’euros.

Pour ce qui est du secteur fluvial, je constate la qualité du travail fourni par l’établissement Voies navigables de France (VNF). À titre d’exemple, je salue la réouverture du canal de la Sambre pour 2021, un canal historique qui était fermé depuis douze ans. Cette opération inédite fait figure de modèle en matière de coopération entre VNF et les collectivités territoriales, et donnera peut-être des envies à d’autres territoires. Voilà des solutions concrètes pour redynamiser nos territoires ruraux traversés par des canaux !

L’année 2020 constituera une année charnière pour VNF, puisque la redevance hydraulique doit se substituer à l’actuelle taxe hydraulique, ce qui permettra à l’établissement de dégager davantage de marges de manœuvre quant à ses ressources. VNF devrait gagner en flexibilité et en productivité, notamment par le biais de la mutualisation des ressources en interne, conformément au contrat d’objectifs et de performance qui devrait être signé dans les prochains mois. Je suis toutefois inquiète pour cet opérateur, qui perdra 112 ETPT en 2020. Cette baisse brutale des effectifs entraîne mécaniquement une hausse des coûts de fonctionnement, car VNF va devoir externaliser certaines tâches auparavant effectuées en régie, faisant ainsi les frais d’un cercle vicieux.

Un mot également sur le financement des 5 milliards d’euros du canal Seine-Nord Europe : j’ai pris bonne note de l’accord conclu au début du mois par l’État et les collectivités territoriales, chacun s’engageant à verser 1,1 milliard d’euros. C’est une excellente nouvelle en faveur d’un projet structurant pour la France et l’Europe.

Je terminerai en apportant mon soutien à la proposition de mon collègue Laurent Saint-Martin de redéfinir le périmètre de certaines missions, notamment de la nôtre, qui agrège des politiques relevant de différents domaines : les transports, l’énergie et la préservation de l’environnement : même si ces missions relèvent toutes du même ministère, il serait intéressant de les séparer en constituant une mission exclusivement dédiée aux transports, qui paraît actuellement trop diluée.

Ce budget en matière de transports, de régénération et de création de nouveaux réseaux représente quelque chose d’absolument inédit depuis plusieurs dizaines d’années. Je vous invite à en adopter les crédits.

 

M. Saïd Ahamada, rapporteur spécial (Affaires maritimes). En 2020, le budget des affaires maritimes et des ports s’élèvera à 258 millions d’euros, contre 257 millions l’année dernière. C’est donc un budget stable qui nous est proposé, même si on peut regretter qu’il reste modeste eu égard aux enjeux.

Je rappelle que, selon l’OCDE, le poids de l’économie maritime dans l’économie mondiale pourrait doubler dans les dix ans à venir, pour atteindre 3 000 milliards de dollars à l’horizon de 2030. À l’échelle de la France, l’économie maritime pèse déjà 83 milliards d’euros et emploie 340 000 personnes. C’est donc une activité qui n’est pas neutre pour notre économie et qui présente encore un fort potentiel.

Cependant, cela suppose que nous fassions les bons choix dès à présent, notamment en veillant à la compétitivité de nos ports qui passera, j’en suis convaincu, par l’exemplarité environnementale – c’est le sens de l’histoire.

L’année 2020 sera d’ailleurs une année importante pour la transition écologique du monde maritime et portuaire. Au 1er janvier, le taux maximum de soufre autorisé pour les combustibles marins sera divisé par sept, passant de 3,5 % à 0,5 %. Nous devons tout mettre en œuvre pour être en mesure de faire respecter cette nouvelle norme, tant en donnant un coup de pouce aux professionnels du secteur, afin de les aider à démarrer certaines activités, qu’en accentuant les contrôles effectués par l’État : c’est à la fois notre responsabilité et notre intérêt.

De cette évolution découle également un enjeu de compétitivité pour la France : si, demain, nos ports ne sont pas capables d’approvisionner les navires en énergies plus vertes, ceux-ci se tourneront vers d’autres places portuaires. De même, si nous tardons trop à développer l’hydrogène, les navires du futur seront construits hors de nos chantiers navals.

Pour favoriser cette transition, j’avais fait adopter l’année dernière un amendement permettant aux armateurs qui investissent dans des navires écologiquement plus vertueux de suramortir leur achat, ce qui devait les inciter à ces investissements.

Cette année, j’ai fait adopter un amendement étendant aux consommateurs de courant électrique à quai le tarif réduit de taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE). Cette mesure fiscale, issue de mes recommandations du printemps de l’évaluation, devrait les inciter à ne plus utiliser de fuel à quai.

Outre ces dispositifs fiscaux, près de 70 % des crédits de ce budget sont au service de l’économie maritime. Ainsi, 81 millions d’euros permettront la prise en charge intégrale par l’État des charges patronales pour les armateurs de marins français embarqués sur des navires soumis à une forte concurrence internationale. Cette mesure, le net wage ou salaire net, a permis de préserver un grand nombre d’emplois depuis sa mise en place et de stabiliser le nombre des navires sous pavillon français.

Toujours au service de l’économie maritime, on peut citer les 27 millions d’euros destinés au financement des formations maritimes dans le secondaire, ainsi que dans le supérieur – avec l’École nationale supérieure maritime (ENSM), en pleine mutation. Ce montant est identique à celui de 2019. À cet égard, comme je l’ai redit au ministère récemment après en avoir fait la demande lors du printemps de l’évaluation, j’aimerais disposer de chiffres sur l’insertion dans l’emploi des jeunes formés dans nos établissements.

Outre l’économie bleue, ce budget permet aussi à l’État d’assumer ses missions régaliennes de sécurité et de sûreté en mer, ainsi que de police des pêches et de l’environnement marin. Ces missions exercées par les services déconcentrés de la direction des affaires maritimes sont très importantes non seulement pour assurer l’ordre public mais aussi pour garantir un environnement sûr, qui est un facteur d’attractivité.

Les crédits qui leur sont dédiés restent stables en 2020. Il est prévu de poursuivre le plan de modernisation de l’administration des affaires maritimes, avec notamment l’achat d’un nouveau patrouilleur pour le contrôle des pêches et de l’environnement marin et de deux nouveaux navires baliseurs.

Seule la légère baisse des crédits prévus pour le fonctionnement des centres de sécurité des navires – moins 0,1 million d’euros – peut être regrettée au moment où, comme je l’ai dit précédemment, l’entrée en vigueur, au 1er janvier 2020, de la nouvelle norme de 0,5 % de soufre dans les carburants marins, devrait donner lieu à des contrôles accrus des centres de sécurité des navires : comment pourraient-ils accentuer les contrôles avec un budget en baisse ? Je proposerai tout à l’heure un amendement prévoyant de rehausser de 150 000 euros les crédits destinés aux services chargés de ces contrôles.

Enfin, le programme 205 contient la subvention dédiée à la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM) qui, comme vous le savez, intervient dans plus de 50 % des sauvetages en mer, sous l’égide des centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (CROSS). La commission des finances avait adopté, en première partie du PLF, un amendement prévoyant d’affecter à la SNSM une partie du droit de timbre payé par les plaisanciers sur les permis bateau. Cet amendement a été retiré en séance, lundi soir, après l’annonce du Gouvernement d’augmenter de 4,5 millions d’euros la subvention de la SNSM. Je me réjouis de cette annonce, mais je reste néanmoins vigilant : cette hausse de la subvention ne saurait se faire à budget constant. Le Gouvernement s’est clairement engagé sur un abondement du programme à hauteur de 4,5 millions d’euros, et j’y serai très attentif.

L’État va continuer à compenser intégralement les dépenses de dragage engagées par les grands ports maritimes à hauteur de 100 millions d’euros, et entend d’ailleurs accentuer son intervention en prenant en charge d’autres dépenses régaliennes. S’ajouteront ainsi à ces crédits 43,6 millions d’euros de fonds de concours en provenance de l’AFITF. Ces crédits, évalués en hausse par rapport à 2019, financeront les projets de développement des grands ports maritimes.

À cet égard, je souhaite que, là aussi, les investissements aillent en priorité aux projets concourant à la transition énergétique des ports français, l’idée étant de positionner la France à l’avant-garde de la transition écologique dans le domaine maritime. La nouvelle stratégie nationale portuaire, qui sera dévoilée lors du comité interministériel de la mer (CIMER) à la mi-novembre, devrait d’ailleurs faire de cet aspect un axe fort.

Je vous invite à voter les crédits de cette mission.

M. Adrien Morenas, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de laménagement du territoire (Paysages, eau et biodiversité). On constate une hausse de près de 26 % du budget du programme 113 et une diminution de 0,63 %, soit 5 millions d’euros, du programme 159, ce qui représente un budget quasi stable.

Si l’on peut se féliciter de la hausse conséquente des crédits, on peut aussi s’inquiéter de la trajectoire à la baisse des équivalents temps plein, alors même que les agences voient leurs compétences augmenter de façon significative. À ce titre, je présenterai plusieurs amendements visant à maintenir ces ETP : nos territoires ont en effet besoin d’ingénierie afin de mettre en place les politiques ambitieuses définies par le Gouvernement.

Mme Bérangère Abba, rapporteure pour avis de la commission du développement durable et de laménagement du territoire (Transports terrestres et fluviaux et compte d’affectation spéciale Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs). En tant que rapporteure du programme 203 Transports terrestres et fluviaux, je considère, comme l’a dit notre collègue Anne-Laure Cattelot, que les crédits du programme 203 et les fonds de concours principalement apportés par l’AFITF qui lui sont associés traduisent fidèlement la programmation des infrastructures de transport, telle qu’elle a été prévue par la loi d’orientation des mobilités (LOM).

Ces concours de l’AFITF sont en hausse et s’élèvent pour 2020 à plus de 1,6 milliard d’euros. Conformément au rapport annexé à la loi d’orientation des mobilités, les plafonds de recettes affectées à l’AFITF sont en hausse pour 2020. Cela résulte notamment de la réduction de 2 centimes d’euros du remboursement partiel de TICPE dont bénéficient les transporteurs routiers de marchandises – une réduction prévue à l’article 19 du projet de loi de finances –, mais aussi de l’augmentation des tarifs de la taxe de solidarité sur les billets d’avion, plus connue sous le nom d’éco-contribution, et de son affectation à l’AFITF, comme le prévoit l’article 20 du PLF.

Je me félicite de cette augmentation, conforme à nos engagements dans le cadre de la loi d’orientation des mobilités, mais je demeure attentive à ce qu’elle se pérennise dans les années à venir – je pense notamment à l’affectation des 2 centimes de TICPE, dont le rendement sera, à compter de 2021, de 140 millions d’euros et non plus de 70 millions d’euros.

Dans le cadre de cet avis budgétaire sur le programme 203, qui sera examiné la semaine prochaine par la commission du développement durable, j’ai détaillé les crédits consacrés au ferroviaire et notamment à la régénération de notre réseau ferré, un enjeu majeur pour nos infrastructures du quotidien. Je me réjouis d’ailleurs de la concertation engagée par le Gouvernement avec les régions sur les lignes de desserte fine du territoire afin de trouver des solutions pour assurer la pérennité de ces dessertes, ce qui viendra enrichir le très attendu rapport Philizot.

J’ai également présenté les crédits permettant le développement de mobilités plus propres et partagées, en particulier ceux du quatrième programme d’investissements prioritaires (PIP). Le PLF 2020 abonde, par le biais d’appels à projets – notamment en ce qui concerne le vélo, le train, les transports en commun en site propre et les nouvelles mobilités –, le financement des mobilités du quotidien, ce dont je ne peux évidemment que me réjouir en tant que rapporteure de la loi d’orientation des mobilités.

Mme Marie-Noëlle Battistel, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques (Énergie). L’examen du budget Énergie du PLF 2020 s’inscrit dans un contexte particulier, caractérisé à la fois par une mobilisation inédite des citoyens, notamment des jeunes, en faveur du climat, par la publication d’un nouveau rapport du GIEC résonnant comme un cri d’alarme, et par des réunions de haut niveau à l’ONU, centrées sur le développement durable et l’action contre le changement climatique.

En dépit de ce contexte qui aurait pu être porteur, le budget Énergie est très décevant, tout d’abord en ce qui concerne les effectifs du ministère de la transition écologique, qui subissent l’une des baisses les plus importantes parmi tous les services du Gouvernement. La transformation du CITE en prime n’est pas suffisamment ambitieuse, notamment pour ce qui est du reste à charge des ménages les plus modestes. Les crédits relatifs à la prime de conversion sont également en baisse, ainsi que les crédits relatifs au chèque énergie.

Le compte d’affectation spéciale Transition énergétique est en baisse d’un milliard d’euros, ce qui correspond à l’arrêt des échéances de l’ex-contribution au service public de l’électricité (CSPE). Une belle opportunité d’abonder notre budget énergie pour réussir la transition énergétique se trouve ainsi malheureusement perdue.

On trouve également dans ce budget un certain nombre de mesures défavorables à la transition énergétique – un récent rapport de l’inspection générale des finances (IGF) a ainsi récemment recensé plus de 25 milliards de dépenses au moins une fois défavorables à l’environnement. J’avais consacré la partie thématique de mon rapport aux moyens à mettre en œuvre pour enclencher une vraie dynamique de rénovation énergétique, qui faisait apparaître qu’en dépit d’un foisonnement de dispositifs, la dynamique de travaux reste faible. L’objectif de 500 000 logements par an, déterminé par la loi de transition énergétique, n’est évidemment pas atteint, le nombre de passoires thermiques étant encore estimé à sept millions de logements.

Pour mettre en place cette dynamique de rénovation énergétique, il est nécessaire de se fixer à la fois des objectifs ambitieux, de prévoir un financement à la hauteur des enjeux et d’accompagner suffisamment les ménages. C’est pourquoi nous avons proposé plusieurs amendements.

La commission en vient à lexamen des amendements à la mission Écologie, développement et mobilité durables.

Article 38 et état B

La commission examine, en discussion commune, les amendements II-CF585 de M. Matthieu Orphelin et II-CF729 de M. Christophe Bouillon.

M. Matthieu Orphelin. Le Gouvernement a lancé, il y a un peu plus d’un an, un plan Vélo qui constitue une belle réussite dès sa première année de mise en œuvre, et l’appel à projets « Fonds mobilités actives – Continuités cyclables » lancé par le ministère de l’écologie en décembre 2018 a remporté un franc succès – 47 millions d’euros pour 152 projets retenus. Avant même la mise en place de ce plan, on constatait dans toutes les villes de France une nette augmentation de l’utilisation du vélo, qui est aujourd’hui en hausse de 20 % à 50 % par rapport à l’année dernière.

L’amendement II-CF585 propose de doubler pour l’année prochaine le montant du fonds Mobilités actives, en le faisant passer de 50 millions d’euros à 100 millions d’euros. Alors que le Conseil d’orientation des infrastructures, dont je faisais partie, avait proposé 350 millions d’euros sur quatre ans, le Gouvernement a décidé d’une augmentation de 350 millions d’euros sur sept ans, soit 50 millions d’euros par an.

 

Il me semble cependant que, pour répondre à l’engouement des Français pour le vélo et pour permettre la mise en œuvre des nombreux projets existants, il serait intéressant d’anticiper une partie du concours de l’État, c’est-à-dire de passer à 100 millions d’euros au cours des premières années, ce qui permettra de construire des infrastructures dédiées, d’éviter les discontinuités et d’accompagner ainsi le développement du vélo en toute sécurité pour ses usagers.

C’est un petit montant au regard du budget de l’AFITF, mais qui permettrait d’être au grand rendez-vous du développement du vélo.

Mme Christine Pires Beaune. L’amendement II-CF729, similaire à celui que vient de présenter monsieur Orphelin, porte également sur le plan Vélo et consiste à lui donner un coup de pouce supplémentaire en doublant les crédits qui lui sont consacrés.

Le défendre me donne l’occasion de rappeler l’effort important consenti par les collectivités locales, notamment les communes, en faveur de ce mode de déplacement, dont on peut attendre d’importantes retombées dans le domaine économique, mais aussi en matière de santé publique.

Mme Anne-Laure Cattelot, rapporteure spéciale. Monsieur Orphelin, vous connaissez l’engagement du Gouvernement en faveur du plan Vélo – que vous aviez salué au moment de son lancement à Angers, si j’ai bonne mémoire.

Il ne semble pas opportun d’augmenter directement de 50 millions d’euros la part de l’État, car la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) contribue déjà à soutenir tous les projets portés par les communes et les communautés de communes souhaitant développer les infrastructures dédiées au vélo. Sur le total de 500 millions d’euros de l’enveloppe DSIL, 25 millions d’euros ont été exécutés et payés en 2018 au bénéfice des mobilités actives et, durant la même année, ce sont 10 millions d’euros qui ont été consacrés à éliminer certains points noirs sur les infrastructures de transport en créant des aménagements destinés à permettre le passage des vélos, au titre des contrats de plan État-région (CPER).

Les financements européens sont également très sollicités par les régions pour construire des voies vertes et des véloroutes sur nos territoires. Enfin, tenant compte de l’engouement généralisé pour le vélo, que vous évoquez à juste titre, de nombreux départements profitent de la réfection de voies départementales pour y adjoindre une piste cyclable quand celle-ci n’existe pas encore.

Pour toutes ces raisons, je suis défavorable à ces amendements.

Mme Bérangère Abba, rapporteure pour avis. En tant que rapporteure pour avis du programme 203, mais aussi en tant que rapporteure de la loi d’orientation des mobilités pour les investissements, je remercie monsieur Orphelin d’appeler notre attention sur le plan Vélo et l’engouement qu’il suscite. Cependant, je rappelle que nous avons beaucoup travaillé à trouver des équilibres en matière de financements et de budget. Cela nous a occupés de longs mois dans le cadre de la LOM, et il me semble souhaitable de préserver la déclinaison satisfaisante que nous avons mise au point dans le cadre de ce projet de loi de finances.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. Pour ma part, je suis favorable à ces deux amendements prévoyant une hausse des crédits du plan Vélo.

La commission rejette successivement les amendements II-CF585 et II-CF729.

Elle est saisie de lamendement II-CF728 de M. Christophe Bouillon.

Mme Christine Pires Beaune. L’amendement II-CF728 vise à prendre 22 millions d’euros sur le programme 159 afin d’abonder à la même hauteur l’action 41 Ferroviaire du programme 203 – l’objectif est donc simplement de maintenir cette action à son niveau de l’année dernière.

Madame Borne est venue il y a quelques mois dans le Puy-de-Dôme et, lorsque nous l’avons interpellée au sujet de la ligne Clermont-Ferrand-Paris, elle a déclaré être d’accord avec nous et nous a promis à la fois le renouvellement des rames – l’appel d’offres a été lancé, et le choix a même été fait – et la régénération des voies, l’un n’allant pas sans l’autre. La baisse des crédits de l’action 41 est en totale contradiction avec les promesses qui nous ont été faites, c’est pourquoi nous proposons de la supprimer.

Mme Anne-Laure Cattelot, rapporteure spéciale. Je partage l’objectif de la revitalisation du secteur ferroviaire, comme je l’ai dit précédemment.

Les crédits de l’action 41 financent uniquement les redevances d’accès de SNCF Réseau, pour un montant de 2,4 milliards d’euros, soit 76 % des crédits du programme 203. Ces redevances sont versées au titre de l’utilisation des trains express régionaux (TER) et des trains d’équilibre du territoire (TET) ou pour soutenir des opérations de fret. Le financement public des redevances d’accès permet d’alléger la charge des péages ferroviaires acquittés par les opérateurs de transport.

Il ne paraît pas opportun, aujourd’hui, d’augmenter les crédits liés au paiement des redevances d’accès, qui sont établis sur la base du trafic constaté d’année en année. De façon parfaitement légitime, l’État ajuste son concours à SNCF réseau selon les besoins établis. Ces besoins sont mieux évalués par SNCF réseau depuis quelques années. Il s’est engagé dans une démarche de fiabilisation de l’estimation des coûts directement imputables aux circulations, ce qui diminue le coût imputé aux circulations de plus de 500 millions d’euros. La budgétisation de l’action 41 se caractérise donc par une sincérité renforcée. Par ailleurs, pour la première fois cette année, le concours dédié au fret était inscrit annuellement au budget, avant d’être systématiquement mis en réserve en exécution. Celui-ci n’est plus inscrit au budget cette année. Avis défavorable.

Mme Christine Pires Beaune. Le fret ne se développe pas, bien au contraire. On est malheureusement obligés de constater, au vu des chiffres, le désastre que constitue l’abandon de ce réseau.

M. le président Éric Woerth. Voilà des années qu’on l’abandonne.

M. Charles de Courson. Il faut dire la vérité sur le fret : pourquoi, depuis qu’elle est en concurrence, la SNCF perd-elle cinq points de parts de marché par an ? La qualité du service ! Tous les industriels, tous les gens qui utilisent le fer vous diront que, tant qu’il n’y aura pas une réorganisation complète du service, ça ne fonctionnera pas. Si le privé s’est emparé en sept ans de 35 % à 40 % du marché, il y a bien une raison, alors que, dans d’autres pays, des acteurs publics ont réussi à faire remonter la part du fret ferroviaire dans le fret global.

 

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. C’est un débat complexe mais essentiel. Le tout-camion ne peut être une solution d’avenir. J’observe que, depuis l’ouverture à la concurrence, la part du fret ferroviaire a diminué drastiquement en France, ce qui n’est positif pour personne. Ce n’est pas une question de qualité ; cette évolution s’explique par des choix économiques, en particulier des politiques favorisant le tout-camion. On verra ce qui se passera pour le transport de voyageurs.

La commission adopte lamendement II-CF728 (II-.887)

Elle en vient à lamendement II-CF588 de M. Michel Castellani.

M. Michel Castellani. Cet amendement vise à abonder l’action 1 Sécurité et sûreté maritimes du programme 205, par des crédits prélevés sur l’action 5 Politique des ressources humaines du programme 217. L’échouage d’un cargo à Bonifacio survenu il y a quelques jours, la collision maritime en octobre 2018 au large du Cap Corse et la pollution des côtes françaises et italiennes qui s’en est suivie doivent servir d’alerte. Il convient de doter la Corse de moyens de dépollution au plus proche de la ville de Bastia et du parc marin du Cap Corse. En cas d’accident, l’arrivée des secours depuis Toulon est beaucoup trop longue.

Je rappelle que le canal de Corse, où croisent 12 000 navires chaque année, est totalement dépourvu de moyens de protection et de lutte antipollution. Cela doit quand même nous alerter ! Je m’en suis entretenu à bien des reprises avec les ministres successifs de l’environnement. J’ai posé une question écrite au Gouvernement, j’ai demandé au préfet maritime de Toulon de bien vouloir me recevoir, lequel s’est empressé de ne pas me répondre. Il s’agit pourtant d’un sujet essentiel. J’espère qu’on n’attendra pas une catastrophe pour répondre – trop tard – à cette revendication légitime.

M. Saïd Ahamada, rapporteur spécial. Vous proposez d’abonder l’action 1 du programme 205, à hauteur de un million d’euros, pour financer l’acquisition de matériels de dépollution pour la Corse. Vous évoquez à juste titre l’accident survenu le 14 octobre dernier au large des côtes corses.

Votre amendement fait référence aux crédits du plan « pollution maritime » (POLMAR). Or celui-ci comprend deux volets : un volet marin, POLMAR mer, déclenché par le préfet maritime lorsqu’une intervention en mer est nécessaire, et un volet terrestre, POLMAR terre, engagé par le préfet de département lorsque le littoral est touché. Comme vous le savez certainement, seul le volet terrestre est financé par le programme 205 ; les moyens du plan POLMAR mer, relèvent, eux, de la marine nationale, et proviennent du programme 178 de la mission Défense. En outre, les crédits du plan POLMAR terre relèvent de l’action 4 Action interministérielle de la mer et non de l’action 1, laquelle comprend plutôt les crédits destinés à prévenir les accidents maritimes et à assurer le fonctionnement des Centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (CROSS) et du service des phares et balises. Dès lors, il me semble qu’il y a une erreur d’imputation : il aurait fallu abonder l’action 4 du programme 205. Demande de retrait ou avis défavorable.

M. François Pupponi. J’entends bien, mais quel est l’avis du rapporteur spécial sur le fond ? La Corse ne dispose pas de moyens techniques pour lutter contre une pollution ; elle doit les faire venir du continent. Après l’échouage de ce navire à Bonifacio, il leur a fallu plus de vingt-quatre heures pour arriver. Peut-on considérer que vous donnerez par la suite un avis favorable, et que nous sommes tous d’accord pour doter l’île de moyens de lutte contre la pollution ?

M. Michel Castellani. Je prends acte de ce que vous me dites, mais je ne me laisserai pas enfermer dans une logorrhée administrative. J’ai vu ce qu’était la pollution en mer, ce que sont devenues les côtes de Corse et celles de Toscane, en face. Quand on a envie d’avancer, on trouve toujours les dispositions et les financements nécessaires. J’observe que, jusqu’à présent, le Gouvernement refuse obstinément d’entrer dans cette logique, qui est pourtant justifiée : 12 000 navires croisent dans un cadre géographique très étroit, entre le Cap Corse, l’Italie continentale et l’île d’Elbe, qui plus est en plein parc marin, au cœur d’un sanctuaire.

M. Saïd Ahamada, rapporteur spécial. Il ne me paraît pas judicieux de créer un centre POLMAR terre supplémentaire. Il existe déjà un centre en Corse, à Ajaccio, bien doté en matériel de dépollution, ainsi qu’à Marseille à proximité des côtes corses.

M. Michel Castellani. Savez-vous où se trouve Ajaccio par rapport à Bastia ?

M. Saïd Ahamada, rapporteur spécial. L’enjeu n’est pas de multiplier les centres, mais plutôt d’assurer le maintien en condition opérationnelle de ces matériels et une bonne gestion des stocks.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. Je suis un peu éberlué d’entendre cela. J’étais présent, hier, à l’audition de la mission d’information concernant l’affaire Lubrizol. On y a appris que le plan POLMAR a pu être rapidement mis en action, car il reste encore des moyens au Havre, alors que, si j’ai bien compris, il est question qu’ils soient prochainement circonscrits à Brest. Les pompiers ont insisté sur le fait qu’ils ont pu arriver très vite parce que le sinistre était proche du Havre. Je pense qu’il en va de même pour la Corse puisque, comme vous l’expliquez, les centres POLMAR terre sont localisés à Marseille et à Ajaccio.

M. François Pupponi. Mes chers collègues, combien de temps faut-il, selon vous, pour relier Bastia à Ajaccio, notamment quand les cols sont enneigés ?

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. Absolument, c’est parfois une question d’heures. On mégote sur les moyens, jusqu’au jour où survient un accident.

M. Michel Castellani. Regardez une carte de la Corse !

La commission rejette lamendement II-CF588.

Elle est saisie de lamendement II-CF914 du rapporteur spécial Saïd Ahamada.

M. Saïd Ahamada, rapporteur spécial. Cet amendement a pour objet d’abonder l’action 1 Sécurité et sûreté maritimes du programme 205, pour accroître de 150 000 euros le budget des centres de sécurité des navires (CSN). Cela leur permettrait d’accentuer les contrôles sur la teneur en soufre des carburants marins, dans le contexte d’un durcissement de la réglementation.

La commission adopte lamendement II-CF914 (II-892).

Puis elle examine lamendement II-CE1006 du rapporteur général.

 

M. Joël Giraud, rapporteur général. Il s’agit d’un amendement miroir d’un amendement déposé sur les articles non rattachés concernant les parcs nationaux. Madame Bérengère Abba a déposé un amendement similaire. Il a pour objet de financer les huit équivalents temps plein supplémentaires nécessaires à l’ouverture d’un nouveau parc national, dans la mesure où les précédentes ouvertures de parc ont été réalisées à moyens constants, et que nous sommes aujourd’hui à l’os. L’abondement proposé est peu important puisqu’il s’élève à 500 000 euros. Les crédits seraient prélevés sur l’action 52 Transport aérien du programme 203, laquelle est en sous-consommation de 5 millions d’euros en crédits de paiement.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. Avis d’autant plus favorable que j’ai moi-même déposé, à l’article 43, un amendement visant à rehausser de vingt-huit équivalents temps plein le plafond d’emploi des parcs nationaux. L’objectif est de revenir sur la baisse de trois ETPT prévue en 2020 et d’éviter que les vingt-cinq ETPT qui seront nécessaires au onzième parc national qui ouvrira le 1er janvier prochain ne soient prélevés sur cinq autres parcs, comme le Gouvernement le prévoit aujourd’hui.

Je pense que cet amendement recueillera une approbation unanime. J’espère, en tout cas, qu’il connaîtra un sort différent de celui qui concernait le « fonds Barnier » et qui a disparu en pleine nuit, en séance publique, alors que notre commission l’avait adopté à l’unanimité – cela pose tout de même la question des droits du Parlement.

Mme Anne-Laure Cattelot, rapporteure spéciale. On pourrait croire qu’on est possessif à l’égard de ses crédits, mais je suis tout à fait favorable à l’amendement de Joël Giraud visant à prélever des crédits sur le secteur aérien en faveur d’une mission qui me paraît essentielle. La création d’un onzième parc national ne peut être engagée à moyens constants.

Mme Émilie Bonnivard. Je suis totalement en phase avec l’amendement du rapporteur général : la création du nouveau parc national des Forêts ne saurait effet se réaliser aux dépens des autres.

Plusieurs parcs ont connu des difficultés avec les collectivités locales. Si l’on souhaite que les parcs naturels nationaux continuent à être intégrés à leur territoire, il faut leur permettre d’entretenir des liens avec celui-ci, en conduisant des actions de développement avec les élus locaux. Les agents ne doivent pas se cantonner à leurs missions de police de l’écologie, ce qui se révèle souvent négatif à la fois pour les parcs et pour les territoires. Il faut maintenir impérativement les moyens des parcs nationaux aussi pour des raisons d’intégration locale.

M. Charles de Courson. Le parc dont on parle est à cheval sur l’Yonne et la Haute‑Marne et aura pour thème la forêt. Il ne serait, en effet, pas raisonnable de créer un nouveau parc sans ajuster un minimum les crédits. Certains parcs se voient appliquer des clés de répartition : si l’État réduit les moyens, les autres financeurs font de même. Peut-être, dans son immense bonté, la ministre acceptera-t-elle l’initiative de notre rapporteur général ?

Mme Bérangère Abba, rapporteure pour avis. En ma double qualité de présidente du groupe d’études sur les parcs nationaux, parcs naturels régionaux et aires protégées, et de députée de la Haute-Marne, département qui accueillera ce onzième parc, je ne peux que vous remercier de cette solidarité. Je rappelle que l’année 2020 sera celle de la biodiversité, puisque nous hébergerons le sommet mondial de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Nous sommes très volontaristes au sein de la COP15 biodiversité, qui aura lieu en Chine. C’est un engagement fort que je vous demande de soutenir.

Mme Marie-Noëlle Battistel, rapporteure pour avis. Notre groupe soutiendra évidemment cet amendement, car il est extrêmement important de ne pas pénaliser les autres parcs. Nous serions même favorables à un relèvement du montant transféré.

La commission adopte lamendement II-CF1006 (II-893).

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements II-CF756 du rapporteur spécial Éric Coquerel et II-CF909 de la commission du développement durable.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. L’amendement II-CF756 vise à abonder le budget du CEREMA. Cette institution apporte une expertise indépendante et un soutien à l’État et aux collectivités territoriales dans des secteurs essentiels extrêmement divers. Le centre intervient, par exemple, dans des domaines tels que le développement des véhicules autonomes, le Grand Paris, les recherches sur la sécurité maritime et fluviale, les sargasses, les risques de submersion marine ou encore le recul du trait de côte. Le CEREMA avait autrefois une équipe dédiée aux risques technologiques et à l’urbanisme, située à Rouen, composée de sept agents ; il n’en reste qu’un aujourd’hui !

Voilà maintenant des années que les effectifs diminuent de 100 équivalents temps plein par an, chiffre considérable si on le rapporte à l’effectif total de 2 600 salariés. Pour la première fois cette année, la dotation de l’État sera inférieure à la masse salariale. Le CEREMA a accompli énormément d’efforts pour digérer la baisse des ETP, notamment en réduisant ses dépenses de fonctionnement. Cette fois, les agents sont unanimes pour dire que la baisse annoncée de la subvention aura du mal à passer. Dans la situation actuelle, chacun conviendra que c’est problématique. Mon amendement propose un abondement modéré, puisqu’il s’élève à 3 millions d’euros.

M. Adrien Morenas, rapporteur pour avis. Le CEREMA joue un rôle majeur en matière de conseil et d’ingénierie. Nous sommes préoccupés par les difficultés qu’il rencontre, qui s’expliquent par la diminution de son budget et de son personnel : la subvention pour charges de service public (SCSP) a diminué de 20 millions d’euros ces quatre dernières années, et le PLF 2020 prévoit une baisse de 100 ETP. Malgré la baisse drastique des effectifs, la SCSP n’arrivera pas à couvrir l’ensemble des dépenses de personnel cette année. C’est pourquoi, afin de maintenir les missions de cet opérateur, l’amendement II-CF909 tend à limiter la baisse de la subvention par le transfert de 3 millions d’euros de l’action 8 du programme 217 vers l’action 11 du programme 159.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. Je suis très favorable à cet amendement.

M. Laurent Saint-Martin. En tant que rapporteur spécial de la mission Action et transformation publiques, je souligne que le CEREMA a reçu un financement de 12,3 millions d’euros à la suite d’un appel à projets du fonds pour la transformation de l’action publique. Je comprends très bien l’argumentaire du rapporteur spécial et du rapporteur pour avis, mais la somme de ces 12,3 millions et des quelque 196 millions de la subvention pour charges de service public permet d’aboutir à des moyens de financement à la hauteur des besoins. Cet amendement ne me paraît donc pas nécessaire.

 

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. On incite le CEREMA à diversifier ses financements, ce qu’il s’efforce de faire, par exemple auprès des collectivités territoriales. Cependant, du fait de l’enjeu environnemental, il reçoit toujours plus de demandes. Le directeur de l’établissement a plus que joué le jeu en matière de gestion, et tire à présent la sonnette d’alarme. Le financement rappelé par Laurent Saint-Martin ne saurait masquer la gravité de la situation, alors que, je le répète, la dotation de l’État sera inférieure à la masse salariale. À un moment donné, lorsque le CEREMA ne sera plus là pour assurer des tâches indispensables, nous n’aurons que nos yeux pour pleurer.

La commission rejette successivement les amendements II-CF756 et II-CF909.

Elle en vient à lamendement II-CF730 de M. Guillaume Garot.

Mme Marie-Noëlle Battistel, rapporteure pour avis. Cet amendement vise à créer un fonds de compensation des nuisances sonores des lignes ferroviaires à grande vitesse, sur le modèle des fonds existants pour les aéroports d’Orly et de Roissy, dont les ressources seraient affectées aux riverains de ces lignes, notamment pour le financement des travaux d’isolation et de protection phoniques.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. Sur le fond, je ne peux qu’être très favorable à l’initiative proposée, car les nuisances sonores peuvent égaler en intensité celles d’un avion au décollage. En revanche, il ne m’est pas possible d’approuver un amendement ponctionnant 30 millions de crédits sur le budget de l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN), déjà largement touché par les restrictions de crédits et de personnel. Je vous invite donc à retirer votre amendement pour le représenter en séance publique assorti d’une compensation visant, par exemple, l’action 3 du programme 217 Politique et programmation de l’immobilier de l’administration centrale et des moyens de fonctionnement des services.

Mme Marie-Noëlle Battistel, rapporteure pour avis. Nous allons modifier l’amendement en ce sens, mais vous savez bien que les gages sont tout à fait artificiels, et que nous avons peu de latitude en la matière.

Lamendement II-CF730 est retiré.

La commission discute de lamendement II-CF530 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Là aussi, le gage est artificiel, mais il s’agit, par cet amendement, de mettre l’accent sur le respect des engagements pris concernant le plan de déploiement de l’hydrogène. En juin 2018, le Gouvernement avait présenté un plan assez ambitieux annonçant un soutien public de 100 millions d’euros par an. En 2019, les dépenses réalisées étaient comprises entre 50 et 70 millions d’euros ; pour 2020, on n’a pas encore de certitude sur le montant qui sera engagé. Je rappelle que le financement de ce plan passe par deux canaux principaux : les crédits de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME), dont on ne sait pas encore s’ils seront plus proches de 20 millions d’euros ou de 50 millions d’euros, et le Grand plan d’investissement, objet de la même incertitude. Cet amendement d’appel vise à engager la discussion avec le Gouvernement en séance pour s’assurer que les engagements pris seront bien respectés.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. Avis favorable.

 

M. Laurent Saint-Martin. Nous sommes défavorables à cet amendement parce que les financements de l’ADEME, en soi, nous paraissent suffisants. Passer par un abondement des crédits du programme Prévention des risques renvoie à ce que monsieur Coquerel et moi avions défendu en séance publique. Pour ma part, j’avais proposé de rebudgétiser le fonds Barnier et de supprimer le plafond, ce qui aurait rendu cet accroissement tout à fait pertinent. Mais le Gouvernement s’étant montré défavorable à cette proposition, qui a été rejetée, cela n’a plus lieu d’être.

M. Matthieu Orphelin. Monsieur Saint-Martin, peut-être disposez-vous d’éléments complémentaires dont je n’ai pas connaissance : dans le budget préparatoire de l’ADEME, quel est le montant des crédits prévus pour le soutien à l’hydrogène ? Il est possible que vous ayez des nouvelles rassurantes.

M. Laurent Saint-Martin. Je ne dispose pas d’informations précises, mais le discours du président de l’ADEME aurait tendance à me rassurer. Il faudra qu’en séance publique, on nous communique des éléments chiffrés et précis. Je ne voterai pas cet amendement, même s’il peut paraître pertinent.

M. Matthieu Orphelin. Je retire l’amendement pour le redéposer en séance. D’ici là, monsieur Saint-Martin aura peut-être des informations complémentaires sur cette question précise : quel montant l’ADEME prévoit-elle d’affecter en soutien au plan de déploiement de l’hydrogène dans son projet de budget 2020 ? La même interrogation se posera pour le grand plan d’investissement.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. Je signale que le budget de l’ADEME est en baisse de 9 millions d’euros cette année, ce qui n’est pas rien.

Lamendement II-CF530 est retiré.

 

La commission examine les amendements identiques II-CF957 de la commission des affaires économiques et II-CF373 de la rapporteure pour avis Marie-Noëlle Battistel.

Mme Marie-Noëlle Battistel, rapporteure pour avis. Il s’agit d’augmenter de 20 millions d’euros les crédits de l’ADEME pour lui permettre d’aider les territoires à mettre en place le service d’accompagnement pour la rénovation énergétique. Dans le cadre de ce service, l’ADEME se voit confier de nouvelles missions, en particulier en matière d’accompagnement des ménages les plus modestes.

Contre lavis favorable du rapporteur spécial Éric Coquerel, la commission rejette les amendements II-CF957 et II-CF373.

La commission est saisie de lamendement II-CF758 du rapporteur spécial Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. La baisse des ressources des agences de l’eau en 2019 s’est traduite par la réduction de la contribution financière de l’Agence française pour la biodiversité à la surveillance de la qualité des eaux, au réseau piézométrique national et aux recherches sur les pollutions aquatiques. Ces activités permettent, entre autres, le rapportage européen sur l’état des milieux aquatiques, en application de la directive-cadre sur l’eau. Elles sont notamment menées par l’INERIS et le Bureau des recherches géologiques et minières (BRGM), à travers l’action du laboratoire national de référence pour la surveillance des milieux aquatiques (AQUAREF). Le BRGM estime que le manque à gagner au titre de ces financements s’élève à 7 millions d’euros en 2019, et l’INERIS l’évalue à 1,5 million d’euros. Cet amendement vise à compenser la diminution de ressources consécutive à l’obligation qui leur est faite, désormais, d’appliquer la TVA.

Je signale que le rapport qui a été remis aujourd’hui au ministère sur l’état environnemental de la France relève, parmi les points problématiques, la qualité des eaux souterraines. Par cet amendement, je veux souligner une extravagance : l’administration fiscale assimile ces activités, qui sont pourtant d’intérêt général, à des prestations commerciales et exige qu’on leur applique la TVA ; 20 % des financements retournent ainsi au budget de l’État, sans avoir servi de quelque façon que ce soit à la surveillance et à l’évaluation de la qualité des milieux aquatiques. J’invite mes collègues à faire cesser au plus vite cette aberration.

M. Charles de Courson. Quand on assujettit à la TVA un organisme subventionné, on compense la recette supplémentaire perçue par l’État : cela s’est toujours fait ainsi. On ne peut pas dire que de grosses sommes soient en jeu.

La commission rejette lamendement II-CF758.

Elle passe à lamendement II-CF727 de M. Christophe Bouillon.

Mme Marie-Noëlle Battistel, rapporteure pour avis. Cet amendement vise à mobiliser 8 millions d’euros pour renforcer les dispositifs de contrôle des risques technologiques et des pollutions. Ceux-ci pâtissent de crédits en baisse cette année, ce qui nous étonne fortement, car le nombre d’accidents industriels a augmenté de 34 % en deux ans, et dernièrement encore avec celui de Lubrizol. Nous demandons un relèvement des crédits.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. On se heurte au même problème que tout à l’heure. J’en suis désolé, parce que je partage totalement vos préoccupations. On pourrait certes se dire que le Gouvernement lèvera le gage, mais il n’est pas possible de prendre le risque de ponctionner le budget de l’IGN, qui subit déjà des baisses d’effectifs et de crédits importantes. Je vous demande donc de retirer l’amendement, tout en vous proposant de le redéposer en prélevant cette fois les crédits sur l’action 3 du programme 217 Politique et programmation de l’immobilier de l’administration centrale et des moyens de fonctionnement des services.

La commission rejette lamendement II-CF727.

Elle en vient à lamendement II-CF118 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. La nouvelle prime « écorenov » pour les ménages relevant des déciles de revenus 1 à 4 est une bonne mesure, mais il va falloir s’assurer que les crédits qui lui sont affectés sont suffisants. Avec le crédit d’impôt, on peut avoir des écarts assez importants entre le budget initial et la réalisation. Avec la prime, dont le montant est défini, il ne faudrait pas que, victime de son succès – que l’on espère –, le budget en soit épuisé en cours d’année. Cela se produit déjà, cette année, dans plusieurs départements pour les aides de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH). Ainsi, en Maine-et-Loire, l’ensemble des crédits de 2019 a été consommé dès les neuf premiers mois.

L’amendement a plutôt pour objet de susciter la réflexion, en l’absence de loi de finances rectificative et dans l’hypothèse où cette politique recueillerait un grand succès, sur les moyens de réabonder le budget en cours d’année. On pourrait peut-être envisager des bilans trimestriels.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Je suis partiellement d’accord avec monsieur Orphelin. Je souhaite, tout comme lui, le succès de cette prime mais, là est notre divergence, je pense que ce que j’ai appelé un « Rubik’s cube » ne fonctionnera pas parce que la complexité va rebuter les gens. Par conséquent, je préfère qu’on simplifie le dispositif, qu’on renforce son efficacité avant de lui affecter des crédits supplémentaires. J’émettrai donc un avis défavorable. De surcroît, un nouveau dispositif a généralement besoin d’un peu de temps pour démarrer. Si le risque évoqué devait survenir, ce ne serait, à mon avis, pas avant 2021.

La commission rejette lamendement II-CF118.

Elle passe à lamendement II-CF371 de la rapporteure pour avis Marie-Noëlle Battistel.

Mme Marie-Noëlle Battistel, rapporteure pour avis. Cet amendement vise à augmenter de 100 millions les crédits dévolus à la prime à la conversion, qui accusent une baisse de 32 %, en raison du durcissement des conditions d’éligibilité consécutif au succès de ce dispositif. Nous jugeons cette évolution regrettable, étant donné l’importance de l’accompagnement des ménages dans la décarbonation de leurs moyens de transport pour réussir la transition énergétique. La mobilité est, on le sait, un enjeu essentiel, notamment dans les territoires plus éloignés, que ce soit en zone rurale ou en montagne.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Dans la loi de finances initiale pour 2019, le crédit pour la prime à la conversion s’établissait à 596 millions d’euros, mais la dépense au cours de l’année devrait finalement s’élever à 840 millions d’euros ; pour 2020, le projet de loi de finances prévoit un crédit de 405 millions d’euros : telles des montagnes russes, l’évolution budgétaire de ces crédits est pour le moins sinueuse !

La réduction brutale des crédits figurant au PLF s’explique par les effets attendus du décret du 16 juillet 2019, qui a fortement resserré les critères d’éligibilité à cette prime, afin de limiter son coût pour les finances publiques. Toutefois, et je partage en cela l’avis de madame Battistel, cette trajectoire budgétaire n’est pas satisfaisante. Si tous les effets de cette prime ne sont pas encore bien connus, il est vraisemblable que la forte réduction annoncée des crédits soit excessive.

Dans ces conditions, j’émets un avis favorable, en espérant que le Gouvernement accepte de prendre à sa charge cette dépense et de ne pas la financer par une ponction sur le programme 217 Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables.

La commission rejette lamendement II-CF371.

Elle examine ensuite lamendement II-CF374 de la rapporteure pour avis MarieNoëlle Battistel.

Mme Marie-Noëlle Battistel, rapporteure pour avis. Cet amendement vise à augmenter de 60 millions les crédits dévolus au dispositif de la prime forfaitaire, qui succède au crédit d’impôt transition énergétique (CITE).

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Même argument « Rubik’s cube » que tout à l’heure : cette prime est incompréhensible, mieux vaut commencer par la simplifier. Avis défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF371.

Elle passe à lamendement II-CF372 de la rapporteure pour avis Marie-Noëlle Battistel.

Mme Marie-Noëlle Battistel, rapporteure pour avis. Il est essentiel d’accompagner au mieux les territoires pour conduire la transition énergétique. Cela passe notamment par un renforcement des aides à la conversion des territoires concernés par la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim ou des centrales à charbon. Nous avions débattu de manière approfondie de ce sujet dans le cadre de l’examen du projet de loi énergie climat. Il nous semble essentiel de ramener ces crédits à une hauteur plus raisonnable, d’où la proposition d’augmenter de 10 millions les crédits du fonds de revitalisation des territoires.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. L’amendement vise à porter les crédits de ce fonds de 10 millions d’euros à 20 millions en CP et de 40 millions d’euros à 50 millions en AE. J’émets un avis défavorable sur la forme plus que sur le fond. Le fonds de revitalisation des territoires commence à peine à fonctionner. On ne connaît pas encore avec précision les actions à financer, même si les choses commencent à se décanter à Fessenheim, avec la désignation en septembre des lauréats d’un premier appel d’offres solaire. Par ailleurs, la date précise de la fermeture des centrales à charbon n’est pas encore connue. Avant d’envisager d’accroître les montants inscrits, attendons de voir comment les choses évolueront en 2020 pour éventuellement ajuster les montants dans le PLF 2021. Agir en ce sens dès à présent me semble prématuré.

La commission rejette lamendement II-CF372.

Elle examine ensuite lamendement II-CF834 de M. Jean-Charles Colas-Roy.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Cet amendement propose de relever de 0,2 million d’euros les crédits accordés au médiateur national de l’énergie, dans le cadre de l’extension de sa compétence aux litiges de rénovation énergétique. Les crédits du médiateur passeraient donc de 5 à 5,2 millions d’euros. Les 200 000 euros supplémentaires seraient prélevés sur le programme 217 Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables – programme très sollicité.

J’émets un avis défavorable pour une raison de forme. Le médiateur national de l’énergie est une autorité publique indépendante dont les compétences sont définies par l’article L.122-1 du code de l’énergie. Or cet article ne lui confère pas de compétence en matière de litiges nés de travaux de rénovation énergétique. Il lui attribue un pouvoir de médiation uniquement entre les personnes physiques ou morales et les entreprises du secteur de l’énergie, ce qui n’est pas la même chose. Il me semble donc contestable de vouloir financer une compétence non expressément reconnue par la loi. Avis défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF834.

Elle est saisie de lamendement II-CF757 du rapporteur spécial Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. Par cet amendement, je voudrais faire retentir les sirènes sur la question de la prévision des risques. Lorsqu’on diminue les effectifs et les moyens de l’État sans se soucier des conséquences, on est rattrapé par la réalité. À force de « dégraisser le mammouth », selon le mot malheureux d’un ancien ministre de l’éducation nationale, on finit par obérer nos capacités d’intervention. En matière de prévision des risques, ce n’est plus envisageable. On ne peut pas accepter, comme l’explique le directeur général de la prévision des risques, que l’on pratique deux fois moins de contrôles qu’il y a quinze ans, alors même que, du fait de l’enjeu environnemental, la question des risques est de plus en plus importante en France.

Je sais que cette direction s’efforce de s’adapter, en contrôlant un peu moins les sites moins dangereux que les sites Seveso, et plus du tout les stations-service. Mais cela ne peut durer qu’un temps, jusqu’à ce que surviennent des accidents, du type de celui de Lubrizol. Du fait du vieillissement de l’appareil industriel français et des risques climatiques, qui ont, à un moment donné, des incidences sur les risques industriels, la fréquence de ces accidents ne peut qu’augmenter. Aussi demandons-nous, par cet amendement, la création de 200 ETPT, ce qui correspond aux effectifs que le directeur général adjoint de la prévision des risques nous a dit nécessaires pour assurer les missions minimales dans les années à venir, pour un coût estimatif de 50 000 euros par ETPT.

M. Laurent Saint-Martin. J’avais compris que la diminution des effectifs ne porterait que sur les fonctions de support et d’appui, et que l’objectif de la hausse des contrôles de 50 % jusqu’à 2022 ne s’en trouverait pas compromis, parce que la fin d’une mission menée dans le cadre d’un plan de prévention des risques technologiques (PPRT) permettrait d’augmenter les contrôles. Est-ce exact ?

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. Les baisses d’ETPT prévues pour l’année prochaine n’auront pas d’incidence sur les contrôles, en dehors de la décision prise récemment de ne plus contrôler les stations-service pour privilégier les contrôles des sites Seveso et des sites dangereux. Cela étant, je ne veux pas seulement mettre en lumière, par cet amendement, la politique du Gouvernement à l’instant t, mais la situation que l’on connaît depuis quinze ans, caractérisée par une diminution très forte des contrôles.

La commission rejette lamendement II-CF757.

Elle en vient aux amendements II-CF938 de la commission du développement durable et II-CF958 de la commission des affaires économiques.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. Avis favorable à l’amendement II-CF958, qui a pour objet de créer un programme dédié à l’économie sociale et solidaire et d’affecter 1 million d’euros supplémentaire à cette politique. L’amendement II‑CF746, que je présenterai ultérieurement et qui vise à déplacer les crédits de l’économie sociale et solidaire, constituera un amendement de repli.

La commission rejette successivement les amendements II-CF938 et II-CF958.

Elle discute ensuite de lamendement II-CF831 de M. Laurent Saint-Martin.

 

M. Laurent Saint-Martin. Cet amendement fait suite au rapport de la mission d’information de la commission des finances relative à la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances (MILOLF). Le dispositif propose une diminution symbolique de 10 000 euros des AE et des CP du programme 203 Infrastructures et services de transport. Vous aurez compris qu’il ne s’agit pas, en réalité, de réduire les crédits de ce programme ; il s’agit plutôt d’un amendement d’appel qui a vocation à être retiré, en séance ou dès maintenant – la rapporteure spéciale nous fera part de son avis.

La MILOLF considère que le Parlement ne se saisit pas encore assez de la maquette budgétaire, alors qu’elle est essentielle au pilotage des crédits, donc à la lisibilité des politiques publiques et à la responsabilité de ceux qui les conduisent. La mission Écologie, développement et mobilité durables constitue un exemple très parlant de périmètre facteur de confusion. Elle comprend en effet des politiques publiques très différentes, relatives au transport, à l’énergie, à la préservation de l’environnement. Elle se caractérise par une architecture particulièrement complexe, formée de neuf programmes, trois comptes d’affectation spéciale – dont celui relatif à la transition énergétique que nous avons proposé de supprimer pour 2021 – et un budget annexe, que la MILOLF propose également d’abandonner. Tout cela, j’en suis convaincu, nuit au pilotage des crédits, à la lisibilité des politiques publiques. Je propose donc de scinder la mission Écologie, développement et mobilité durables, en séparant la partie relative aux transports, ce qui la rendrait plus cohérente et mieux pilotable, et renforcerait l’efficacité du travail parlementaire.

Mme Anne-Laure Cattelot, rapporteure spéciale. Je suis assez d’accord avec vous, et j’ai cru comprendre que les autres rapporteurs de la mission, dans leur ensemble, ressentent également un besoin de clarification. L’organisation budgétaire ne peut pas systématiquement refléter l’organisation des ministères, qui peut être mouvante et connaître des recompositions entre ministères et secrétariats d’État. En revanche, il faut que la maquette budgétaire soit stable, claire et lisible. C’est une idée qui doit être défendue en séance publique, et je suis donc favorable à l’amendement.

Mme Bérangère Abba, rapporteure pour avis. En tant que rapporteure, je n’ai pas du tout le même sentiment. Ces différentes entrées sont vraiment liées – les transports, par exemple, sont indissociables des questions énergétiques – et les enjeux sont extrêmement imbriqués. Une telle option ne me semble donc pas pertinente. Elle le serait plus, à mon sens, s’agissant des questions agricoles et de la préservation de l’environnement.

M. Laurent Saint-Martin. Le principe de scinder une mission trop volumineuse
– j’avais présenté le même schéma pour la mission Recherche et enseignement supérieur – ne signifie absolument pas qu’il n’existe pas de lien entre les différentes politiques. Il faut précisément renforcer ces liens, de façon générale, car dans de nombreux cas, les politiques publiques dialoguent entre elles d’un point de vue budgétaire.

Il s’agit vraiment d’une question de visibilité des crédits : une mission regroupant neuf programmes, trois comptes d’affectation spéciale et un budget annexe devient vraiment trop lourde pour le travail parlementaire. Isoler la partie transports n’est qu’une proposition, et je ne dis pas que c’est la meilleure. Ce que je dis, c’est qu’il faut réfléchir aux contours de missions qui sont, au fil du temps, devenues trop larges. Leur création remonte à l’application de la LOLF, c’est-à-dire qu’elles ont aujourd’hui quelques années, et il ne faut pas s’interdire de redéfinir certains périmètres.

Mon amendement ne supprime, par ailleurs, aucun crédit.

M. le président Éric Woerth. Plutôt qu’une question de crédits, il s’agit effectivement d’un processus de clarification de la maquette budgétaire, d’organisation des débats qui, comme on le voit, ne sont pas extrêmement clairs.

La commission adopte lamendement II-CF831 (II-894).

Elle examine ensuite lamendement II-CF199 du rapporteur spécial Julien Aubert.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. En tant que rapporteur spécial, je regrette l’insuffisante lisibilité des crédits de la mission Écologie, développement et mobilité durables. Si l’on s’intéresse, par exemple, aux crédits consacrés à la lutte contre la précarité énergétique, on retrouve ceux qui financent le chèque énergie dans le programme 174 et ceux qui soutiennent les autres dépenses de solidarité avec les consommateurs en situation de précarité énergétique dans le programme 345.

Un rapporteur spécial ne peut pas tout, notamment en raison des contraintes de recevabilité. Je pense que les comptes d’affectation spéciale existants devraient également faire l’objet d’un toilettage. Cet amendement II-CF199 a une portée plus limitée ; il tend à organiser les crédits autour de deux programmes : l’un à vocation sociale et territoriale, et l’autre dédié très concrètement à la transition énergétique.

Dans le programme à vocation sociale et territoriale seraient notamment inscrits les crédits finançant la solidarité avec les zones non interconnectées, le chèque énergie, la prime transition énergétique, la prime à la conversion, le bonus écologique et le médiateur national de l’énergie. Dans celui dédié à la transition énergétique, on trouverait ceux correspondant à toutes les dépenses soutenant les énergies y concourant, notamment le soutien à la cogénération ou aux énergies renouvelables. Une telle solution présenterait l’avantage d’aboutir à une architecture budgétaire plus simple. Pour l’instant, Bercy ayant autre chose à faire, on nous propose chaque année exactement la même architecture.

M. Laurent Saint-Martin. Je ne m’exprime pas au nom du groupe majoritaire, car nous n’avons pas pris de décision collective à ce sujet. À titre personnel, je trouve que cet amendement va dans le bon sens.

M. le président Éric Woerth. Avec Laurent Saint-Martin, à l’issue du rapport de la MILOLF, nous avons proposé, puisqu’un tel travail doit être mené avec les ministres concernés, de rencontrer, d’ici au mois de janvier ou de février 2020, la direction du budget, le ministre du budget s’il est intéressé, et tous les décideurs en la matière au sein de l’État, au sujet de la maquette budgétaire.

La commission adopte lamendement II-CF199 (II-895).

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. C’est le premier de mes amendements adopté depuis deux ans et demi ! C’est un petit pas pour l’opposition.

La commission examine lamendement II-CF749 du rapporteur spécial Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. Comme vous aviez tous voté cet amendement l’an dernier, je ne suis pas sûr que l’un d’entre vous se soit aperçu que l’on était revenu dessus à la toute fin de l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances.

Depuis 2017, la masse salariale du ministère de la cohésion des territoires a été transférée des missions Égalité des territoires et logement et Politique des territoires vers le programme 217 Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables de la mission Écologie, développement et mobilité durables.

Dans le projet de loi de finances pour 2020, ce transfert a été évalué à 647 millions d’euros, ce qui correspond à un plafond d’emplois de 9 531 ETPT. Chacun comprendra que l’on ne peut pas, sous prétexte de mutualiser les dépenses de personnel œuvrant pour des politiques publiques différentes conduites par deux ministères, se livrer à ce genre de mélange sans s’y perdre. Cela rend bien difficile de mettre chaque ministère devant ses responsabilités.

Je vous demande donc, chers collègues, comme l’an dernier, puisque vous aviez adopté le même amendement, de procéder à cette rectification de la maquette budgétaire.

La commission rejette lamendement II-CF749.

Elle est ensuite saisie de lamendement II-CF982 du rapporteur spécial Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. Après ce recul par rapport à l’an dernier, il s’agit de soulever le problème des autorisations d’emplois du ministère de la transition écologique et solidaire, telles qu’elles figurent à l’article 42 du projet de loi de finances. Le plafond est fixé à 37 382 ETPT, contre 39 373 ETPT en loi de finances pour 2019, ce qui correspond à une baisse de 1 991 ETPT, soit 5,3 % de l’effectif.

Je suis assez sidéré que le ministère qui agit dans les domaines de l’urgence écologique et environnementale et de la biodiversité subisse une baisse continue d’effectifs. Outre que le rôle de ce ministère est assurément sous-estimé, il me semble qu’il s’agit aussi d’une question culturelle. Parmi les opérateurs du budget dont je suis rapporteur spécial, seul le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) voit ses crédits augmenter parce ses crédits sont abondés aux deux tiers par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Autre point d’étonnement, partagé par les syndicats : au lieu de se battre avec Bercy pour transformer les crédits non consommés en primes pour son personnel, comme le font tous les autres ministères, le ministère de la transition écologique et solidaire les restitue systématiquement en fin d’exercice budgétaire, sans qu’on ne lui demande rien. Se posent donc deux problèmes de fond.

Dans la mesure où l’article 40 de la Constitution interdit que soit examiné tout amendement tendant à relever des autorisations d’emplois des ministères, même en compensant la mesure par une baisse équivalente dans d’autres départements ministériels, l’amendement II-CF982 tend à relever les crédits de titre 2 du programme 217 Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables d’un montant estimatif de 50 000 euros par ETPT supprimé par le projet de loi de finances pour 2020.

La commission rejette lamendement II-CF749.

Elle en vient à lamendement II-CF746 du rapporteur spécial Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. Depuis 2018, le programme 159 Expertise, économie sociale et solidaire, information géographique et météorologie, comprend l’action 14 Économie sociale et solidaire, qui rassemble des crédits issus des missions Économie et Travail et emploi, essentiellement mobilisés en faveur de dépenses d’intervention. Pour 2020, cette action est dotée de 19,9 millions d’euros de crédits.

La gestion et le pilotage de ces crédits sont assurés par le Haut-Commissariat à l’économie sociale et solidaire et à l’innovation sociale. À l’évidence, cette action est sans rapport avec les trois principales actions du programme, qui portent les subventions pour charges de service public de Météo-France, de l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) et du CEREMA. Cette introduction brouille la cohérence de l’ensemble du programme : voilà pourquoi je propose d’en créer un nouveau, intitulé Économie sociale et solidaire.

La commission rejette lamendement II-CF746.

Puis elle passe à lexamen de lamendement II-CF747 du rapporteur spécial Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. Cet amendement n’a pas d’incidence budgétaire ; il vise à améliorer la très mauvaise lisibilité des missions concernées en déplaçant les crédits inscrits au titre du Commissariat général au développement durable (CGDD).

L’action 10 Gouvernance, évaluation, études et prospective en matière de développement durable rassemble les moyens nécessaires au CGDD. Le prévisionnel pour 2019 la dote de 14,4 millions d’euros de crédits. Or cette action n’a que peu à voir avec les trois principales actions du programme, qui portent les subventions pour charges de service public de Météo-France, de l’IGN et du CEREMA.

Le CGDD n’étant pas un établissement d’expertise scientifique et technique, je propose, au travers de cet amendement, de transférer l’action 10 vers le programme 217 Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables. Une telle plus évolution serait plus cohérente.

La commission rejette lamendement II-CF747.

Elle adopte ensuite les crédits de la mission Écologie, développement et mobilité durable ainsi modifiés.

Après larticle 76

La commission est saisie de lamendement II-CF193 du rapporteur spécial Julien Aubert.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Il s’agit également de lisibilité : si un outil sert un seul objectif, il est plus simple à expliquer aux gens. En l’occurrence, le chèque énergie sert à 99,98 % à régler des factures d’énergie et à 0,02 % à financer des travaux. Par cet amendement, je propose de recentrer le chèque énergie uniquement sur le paiement de factures, de façon à simplifier la présentation de cet outil.

La commission rejette lamendement II-CF193.

Article additionnel après l’article 76 : Remise d’un rapport au Parlement sur l’opportunité pour l’État de créer une société anonyme à capitaux publics pour la gestion des autoroutes à la fin des concessions actuelles.

La commission examine, en discussion commune, les amendements II-CF967 de la rapporteure spéciale Anne-Laure Cattelot et II-CF731 de M. Christophe Bouillon.

Mme Anne-Laure Cattelot, rapporteure spéciale. Il s’agit d’une demande de rapport au sujet des concessions autoroutières, qui prendront fin entre 2031 et 2036. Les modèles économiques de ces concessions, ainsi que la perte potentielle de recettes pour l’État au terme de celles-ci, sont en effet des problématiques qui doivent être étudiées. Il serait donc opportun que le ministère en charge des transports puisse remettre à la représentation nationale un rapport d’évaluation pour décider ce qu’il conviendrait de faire concernant ces concessions.

Mme Christine Pires Beaune. L’amendement II-CF731 va dans le même sens, puisqu’il propose que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur les concessions autoroutières. Une littérature importante est d’ores et déjà disponible sur ce sujet, mais cette demande est un peu particulière, et l’adoption de cet amendement serait pertinente.

M. Benoit Simian, rapporteur spécial (Infrastructures et services de transports et Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par lÉtat, budget annexe Contrôle et exploitation aériens et compte daffectation spéciale Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs).  À partir de 2032, les concessions autoroutières parviendront à leur terme. Nous avons abordé le sujet au sein du Conseil d’orientation des infrastructures (COI), et Jean-Baptiste Djebbari, devenu secrétaire d’État chargé des transports, soutenait la pertinence d’un rapport. Il pourrait être question de 2 milliards d’euros de recettes générées dès 2032, et 11,5 milliards d’ici à 2037. On peut les anticiper en lançant dès maintenant des emprunts sur les grands projets, sachant que ces recettes substantielles pourraient, demain, alimenter l’AFITF.

Nous savons depuis quelques jours que s’agissant de la qualité du réseau routier non concédé, la France est passée de la septième à la dix-huitième place. On voit bien à quel point ce type de financement innovant peut constituer une piste sérieuse pour investir notamment dans la régénération de nos réseaux routiers.

M. Christophe Jerretie. Nous devions nous voir remettre, au mois de juillet, au moment de la discussion de la LOM, un rapport portant sur les 10 000 kilomètres de voirie non concédée, c’est-à-dire sur les routes nationales. Ce rapport est-il paru ? Dans la négative, peut-on demander qu’il nous soit communiqué ?

Mme Anne-Laure Cattelot, rapporteure spéciale. Votre mémoire est plus précise que celles des rapporteurs spéciaux ! Je propose que nous en demandions communication afin d’en disposer au moment de l’examen en séance publique.

La commission adopte lamendement II-CF967 (II-896).

En conséquence, lamendement II-CF731 tombe.

 

 

Après l’article 76

La commission examine, en discussion commune, les amendements II-CF119 de la commission du développement durable et II-CF387 de M. Loïc Prudhomme.

M. Matthieu Orphelin. L’amendement II-CF119 vise à demander au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport relatif à la mise en œuvre d’un plan d’investissement pour le climat.

Pour la première fois cette année, grâce à l’adoption d’un amendement de notre collègue Bénédicte Peyrol, un jaune budgétaire a été consacré à la transition écologique. On y constate notamment l’écart de financement existant entre les investissements publics et privés attendus de ce budget 2020 et l’investissement jugé nécessaire pour atteindre les objectifs fixés par la stratégie nationale bas carbone (SNBC). Cet écart est d’au moins 15 milliards d’euros pour les prochaines années, la part relevant des investissements publics représentant en gros la moitié de cet investissement ; cet écart aura même tendance à se creuser à partir de 2024, puisqu’il s’élèvera alors à plus de 30 milliards d’euros d’investissements publics et privés.

Le rapport demandé devra identifier des facteurs de réduction de ces écarts à travers un plan d’investissement, et développer une réflexion globale sur les investissements privés et publics à mobiliser pour atteindre les objectifs fixés par la SNBC.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Je suis réservé mais pas opposé à un tel rapport, dans la mesure où son intérêt est réel. Ma crainte est cependant que son contenu soit redondant avec d’autres travaux parus en 2019. Je pense notamment au rapport d’information sur les outils publics encourageant l’investissement privé dans la transition écologique, remis le 30 janvier, au nom de la mission d’évaluation et de contrôle, par nos collègues Bénédicte Peyrol et Christophe Bouillon, ainsi qu’à l’édition 2019 du Panorama des financements climat de l’Institute for climate economics (I4CE). Vous avez vous-même cité le projet de loi de finances pour 2020 et le nouveau jaune budgétaire portant sur la transition écologique – on peut rappeler que l’an dernier il n’était arrivé à l’Assemblée qu’une heure avant le début de l’examen du PLF en séance publique, ce que j’avais déploré, attribuant un carton jaune au Gouvernement.

Je ne suis donc pas opposé à un nouveau rapport, sous réserve que son périmètre se distingue vraiment des rapports précédents. Je m’en remets donc à la sagesse de la commission pour les deux amendements.

M. Matthieu Orphelin. Le rapport objet de l’amendement est bien complémentaire de tous les travaux qui viennent d’être mentionnés : il porte vraiment sur les solutions permettant de s’engager dans une réduction de l’écart.

M. Jean-Louis Bricout. J’ai envie de soutenir cet amendement, mais je signale également que nous avons des solutions à proposer. Lors de la prochaine niche parlementaire réservée au groupe Socialistes et apparentés, nous allons présenter un dispositif de lutte contre la précarité énergétique consistant en un investissement important sur la base d’un remboursement. La parution d’un tel rapport me paraît donc une bonne chose, surtout s’il est suivi d’effet.

La commission rejette successivement les amendements II-CF119 et II-CF387.

Elle examine ensuite lamendement II-CF580 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Je retire cet amendement, tout en faisant part de mon incompréhension s’agissant du vote de l’amendement II-CF119. Disons plutôt clairement que nous ne ferons pas la transition ! Comment peut-on refuser de prendre cet écart en considération ?

Lamendement II-CF580 est retiré.

La commission est saisie de lamendement II-CF755 de Mme Émilie Cariou.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Je suis défavorable à cet amendement, dans la mesure où le débat public sur le plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs, organisé par la Commission nationale du débat public, vient de prendre fin il y a quelques semaines. Nous sommes dans l’attente du retour sur ses travaux, et l’on ne peut exclure que le rapport réponde aux questions posées par les auteurs de l’amendement.

Par ailleurs, je rappelle que j’ai été l’auteur, en 2013, d’un rapport sur la gestion des matières et déchets radioactifs, qui évoque ces questions. Je ne suis pas certain que le sujet ait profondément changé en six ans.

La commission rejette lamendement II-CF755.

Elle examine ensuite lamendement II-CF792 de Mme Jennifer De Temmerman.

Mme Jennifer De Temmerman. Nous avons fêté, le 24 septembre dernier, les quatre ans de l’Agenda 2030 des Nations unies qui a été adopté par 173 États, dont la France. Quatre jours auparavant, notre pays présentait sa feuille de route pour l’ensemble des ministères en vue de parvenir en 2030 à respecter cet agenda. Ce matin, au Conseil national de la transition écologique, la ministre de la transition écologique et solidaire Élisabeth Borne a été interpellée par plusieurs associations sur l’opportunité d’évaluer le budget de l’État au regard de son impact sur les objectifs de développement durable. L’année dernière, en réaction au mouvement des gilets jaunes, nous avions proposé un budget vert, ce qui constituait certes une avancée mais demeurait insuffisant et revenait surtout à ignorer la réelle demande de nos concitoyens.

Rares sont aujourd’hui les climatosceptiques, mais nombreux sont ceux qui ne veulent pas sacrifier le social et l’économie à l’écologie. Or c’est exactement ce que propose l’Agenda 2030 : s’appuyer sur ces trois piliers et dégager la synergie qui peut les lier afin d’avancer. Il s’agit d’un enjeu de société. Les entreprises, les collectivités locales, les associations sont capables de s’organiser ; serons-nous, nous, politiques, capables de répondre à l’appel de cet agenda ?

L’amendement II-CF792 est cosigné par des membres de différents groupes politiques puisqu’il émane du groupe d’études « Objectifs de développement durable » que je copréside avec Dominique Potier. Il est donc transpartisan et répond à une demande citoyenne. Son examen constitue une belle opportunité de donner une image positive, d’ouverture et d’écoute de notre assemblée, mais également de réconcilier nos concitoyens avec le budget.

 

Laurent Saint-Martin a tout à l’heure plaidé en faveur du renforcement des liens entre missions. L’Agenda 2030 étudie précisément les synergies entre les différents objectifs sociaux, économiques et environnementaux ; il pourrait donner matière à un jaune budgétaire extrêmement intéressant pour l’année prochaine.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Je suis défavorable à la création d’une nouvelle annexe budgétaire « Objectifs de développement durable et mesures budgétaires », car votre demande devrait être en partie satisfaite par deux rapports attendus prochainement : d’une part, en application d’une disposition de la loi relative à l’énergie et au climat, actuellement soumise au contrôle du Conseil constitutionnel, le PLF 2021 devrait être complété par un rapport sur les incidences positives ou négatives du projet de loi de finances sur le réchauffement climatique, d’autre part, les travaux du Haut Conseil pour le climat recoupent une partie de votre demande. Enfin, l’actuel fascicule budgétaire relatif aux évaluations préalables apporte des éléments d’information utiles dans ce domaine.

Je vous invite donc à retirer votre amendement. À défaut, j’y serai défavorable.

Mme Jennifer De Temmerman. Vous venez d’apporter la preuve que cette annexe est nécessaire : le développement durable ne se résume pas à l’écologie et au changement climatique, il inclut aussi le social et l’économie.

M. le président Éric Woerth. En tout cas, un travail important est mené sur cette question, qui conduira à une nouvelle présentation budgétaire dès 2021.

La commission rejette lamendement II-CF792.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements II-CF911 de la commission du développement durable et II-CF386 de Mme Mathilde Panot.

M. Adrien Morenas, rapporteur pour avis. L’amendement II-CF911 vise, d’une part, à geler les réductions d’effectifs de certains opérateurs – le CEREMA, l’OFB, les agences de l’eau, les parcs nationaux et l’ADEME – et, d’autre part, à demander un rapport gouvernemental mettant en regard les missions dévolues à ces opérateurs et les effectifs nécessaires à leur accomplissement.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. L’amendement II-CF386 vise également à demander au Gouvernement un rapport sur les conséquences, en termes de transmission des compétences et des savoir-faire, des baisses d’effectifs du ministère chargé de l’écologie. J’ai suffisamment exprimé, dans mon propos introductif, en dehors de toute logique partisane, mon incompréhension quant à la baisse des effectifs d’opérateurs et d’un ministère agissant dans la sphère écologique et environnementale.

Je conseille à nos collègues de se référer au rapport du ministère publié aujourd’hui même, qui dresse un tableau alarmant de la situation, tant au regard des émissions de gaz à effet de serre que de la qualité des eaux. Dans ce contexte, baisser les effectifs des opérateurs et du ministère me semble aberrant. Je suis bien évidemment favorable à l’amendement de la commission du développement durable, qui propose, en outre, un gel des réductions d’effectifs qui me semble vraiment nécessaire.

Je comprendrais mal que l’on n’adopte pas au moins la demande de rapport introduite par l’amendement II-CF386, en guise de signal de notre préoccupation concernant la situation du ministère.

La commission rejette successivement les amendements II-CF911 et II-CF386.

Elle en vient à lamendement II-CF968 de la rapporteure spéciale Anne-Laure Cattelot.

Mme Anne-Laure Cattelot, rapporteure spéciale. N’ayant pas le pouvoir d’augmenter les effectifs, je demande aussi un rapport sur les besoins en ETPT de l’Autorité de régulation des transports, ex ARAFER (Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières), au regard des deux nouvelles missions qui lui ont été assignées : la régulation du secteur aérien et celle du réseau de la Régie autonome des transports parisiens (RATP).

La commission rejette lamendement II-CF968.

Puis elle passe à lamendement II-CF984 de la rapporteure spéciale Anne-Laure Cattelot.

Mme Anne-Laure Cattelot, rapporteure spéciale. On demande à Voies navigables de France de faire un effort à hauteur de 112 ETPT, alors que cet opérateur commencera prochainement à exécuter un contrat d’objectifs et de performances (COP), qui donnera des résultats assez incroyables. Or une grande partie de ses dépenses de personnel est strictement liée au fonctionnement et à l’exploitation du réseau, c’est-à-dire qu’elles correspondent aux frais structurels. Les fonctions support ne représentent que 25 % de la masse salariale, ce qui est extrêmement vertueux.

Sans préjuger du nombre d’ETPT qui serait nécessaire à Voies navigable de France, je demande un rapport qui permettrait d’évaluer les moyens dont cet opérateur dispose aujourd’hui. La suppression de 112 ETPT va, à mon sens, nuire à sa performance et par conséquent à la trajectoire qui sera prévue par le COP.

La commission rejette lamendement II-CF984.

Elle est ensuite saisie de lamendement II-CF912 de la commission du développement durable.

M. Adrien Morenas, rapporteur pour avis. Il s’agit d’une demande de rapport en vue d’intégrer les investissements hydrauliques dans les contrats de plan État-région, notamment pour ce qui concerne les travaux d’irrigation, en lien avec les investissements réalisés par le Fonds européen agricole pour le développement rural pour ce qui concerne le maillage du territoire.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. Je ne doute pas de l’intérêt de cette proposition sur le fond, mais il me semble qu’elle est plus du ressort de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales. Je vous invite à retirer votre amendement et à le redéposer dans le cadre de l’examen en séance publique des articles rattachés à cette mission.

Lamendement II-CF912 est retiré.

La commission examine lamendement II-CF959 de la commission des affaires économiques.

Mme Marie-Noëlle Battistel, rapporteur pour avis. Il s’agit aussi d’une demande de rapport examinant l’opportunité de renforcer, dans le cadre du futur projet de loi de finances pour 2021, les aides finançant l’assistance à la maîtrise d’ouvrage. On sait, en effet, comme il peut se révéler extrêmement compliqué de réaliser des travaux de rénovation énergétique pour les particuliers, qui ne disposent souvent pas d’expertise technique solide en la matière.

Pour pouvoir déposer des amendements relatifs à la nouvelle prime résultant de la transformation du CITE, il faut que nous disposions d’un rapport dressant un état des lieux, faute de quoi on nous opposera l’absence d’étude d’impact les accompagnant.

Je précise que cet amendement a été adopté par la commission des affaires économiques.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Les auteurs de cet amendement gagneraient à préciser, en vue de la séance publique, en quoi l’assistance à la maîtrise d’ouvrage souhaitée diffèrerait du Service d’accompagnement pour la rénovation énergétique (SARE), dont le Gouvernement a annoncé le lancement prochain. Selon un arrêté publié le 5 septembre 2019, ce service vise à aider et à conseiller les particuliers en matière de travaux de rénovation énergétique. Il bénéficie d’un financement à hauteur de 200 millions d’euros par le recours aux certificats d’économie d’énergie (CEE).

Une première lecture de l’amendement me donne à penser que le rapport demandé recoupe ce programme ; j’invite donc à son retrait. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF959.

Elle examine ensuite lamendement II-CF969 de la rapporteure spéciale Anne-Laure Cattelot.

Mme Anne-Laure Cattelot, rapporteure spéciale. Je trouve étonnant que des amendements proposant des rapports aient été rejetés, alors qu’il s’agissait de demander au Gouvernement de prendre du recul sur un certain nombre de sujets. Notre commission a une solide culture d’évaluation des politiques publiques, et nous en sommes garants. Il est, par conséquent, dommage que nous n’ayons pas retenu ces propositions – les miennes ou d’autres, peu importe. Demander des comptes sur des trajectoires d’ETPT ne signifie pas forcément qu’il faudra augmenter les effectifs des organismes concernés ; nous demandons par ce biais un état des lieux objectif. Nos pouvoirs de rapporteurs spéciaux nous offrent, bien sûr, la possibilité d’établir de tels états des lieux, mais il est parfois opportun de conduire cette démarche de façon collective.

Par ailleurs, monsieur le président, Christophe Jerretie ayant mis en lumière mon défaut de mémoire s’agissant d’un rapport demandé l’an dernier, le secrétariat de la commission pourrait-il mettre à notre disposition un suivi des rapports demandés au Gouvernement ? Au-delà de chacune de nos thématiques, un tel tableau de suivi me paraît tout à fait pertinent.

M. le président Éric Woerth. C’est tout à fait possible, dans la mesure où le secrétariat de la commission assure d’ores et déjà un tel suivi.

 

M. Benoît Simian, rapporteur spécial. J’abonde dans le sens de ma collègue Anne-Laure Cattelot. Il est vrai que ce type de rapport constitue un outil d’aide à la décision pour tout rapporteur spécial. Ainsi, s’agissant de l’élargissement des compétences de l’Autorité de régulation des transports au secteur aéroportuaire – ce qui n’est pas rien –, un tel outil nous aurait été utile. Nous y reviendrons donc en séance publique.

Pour ce qui est de l’amendement II-CF969, il s’agit d’une demande de rapport sur l’avancée du plan de déploiement de l’hydrogène. Nous avons tous en mémoire l’annonce, le 1er juin 2018, par le ministre Nicolas Hulot, du plan de déploiement de l’hydrogène pour la transition énergétique. Nous nous souvenons aussi de l’annonce faite sur le même sujet, en juillet de la même année, par le Président de la République devant le Congrès à Versailles.

J’ai moi-même rédigé un rapport, à la suite d’une mission qu’Édouard Philippe m’avait confiée sur le verdissement du parc ferroviaire dans l’objectif de déployer des trains à hydrogène sur le territoire national d’ici à 2022. À l’heure où je vous parle, quinze de ces trains ont été commandés par des régions, sous l’égide de la SNCF. Pour autant, le rapport demandé à travers l’amendement II-CF969 nous serait utile au-delà de l’aspect ferroviaire. Il faut également s’intéresser à la production, au déploiement des stations ainsi qu’au soutien à la filière. Et celle-ci peut concerner aussi la voiture et le vélo.

Nous avons du mal à obtenir des informations de la part du Gouvernement sur ce sujet, dont nous sentons qu’il se heurte à certaines résistances – je parle sous le contrôle de mes collègues de la commission du développement durable. Ce rapport constituerait donc un formidable moyen de savoir où nous en sommes. Les annonces doivent être suivies d’actes, et le sujet est trop important pour nos concitoyens pour le garder sous couvert.

Mme Nadia Hai. Il me semble effectivement justifié de disposer de l’ensemble de ces informations. Madame la rapporteure spéciale, vous avez rappelé qu’il entre dans vos prérogatives de les obtenir de la part du Gouvernement – même si ce n’est pas chose facile.

Le groupe La République en marche ne pourra pas donner une suite favorable à votre amendement. Mieux vaudrait le retirer pour le redéposer en séance publique afin d’entendre le Gouvernement. Ainsi pourrons-nous prendre une décision. Pour l’heure, à titre personnel, je suis défavorable à cet amendement.

Mme Perrine Goulet. Certes, il ne s’agit que de rapports, mais trop de rapports tuent le rapport. Il faut, après, savoir comment les exploiter.

Entre les bleus, les jaunes, les oranges, les analyses et les Voies et moyens qui nous sont communiqués dans le cadre de l’examen de ce projet de loi de finances, nous disposons largement de moyens d’information. Les rapporteurs spéciaux disposent également de prérogatives. Si le besoin se faisait sentir de creuser, par exemple, la totalité des sujets ayant trait à l’écologie, la mission d’évaluation et de contrôle, qui dépend de notre commission, pourrait être sollicitée en vue de mener un travail plus global et une véritable analyse. Demander des rapports un par un ne me semble pas très utile.

Mme Christine Pires Beaune. L’année dernière, j’avais demandé si nous disposions, à la commission, d’un état des lieux de tous les rapports qui doivent être produits. Vous aviez répondu positivement, monsieur le président. Cet état des lieux est-il accessible sous forme d’un tableau en ligne permettant d’identifier chacun d’entre eux, son auteur, sa périodicité et sa date de remise ? Il serait utile d’y avoir accès, y compris pour en éliminer certains, dans la mesure où les effectifs ne vont pas en augmentant.

M. le président Éric Woerth. Les rapports déchaînent bien des passions ! Je sais, pour signer les courriers, que le secrétariat de la commission envoie systématiquement aux rapporteurs spéciaux les rapports de la Cour des comptes ou d’autres autorités publiques, si une disposition législative l’impose – ils sont nombreux. Peut-être devrions-nous, en début de discussion budgétaire, communiquer la liste de l’ensemble des rapports qui ont été demandés en faisant le point sur ceux qui n’ont pas été remis. Du reste, si vous souhaitez, en cours d’année, des informations concernant lesdits rapports, il vous suffit de le demander secrétariat de la commission.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Nous pourrions peut-être plafonner le nombre de rapports par an, ce qui permettrait de mieux les ventiler.

Par ailleurs, l’hydrogène est un sujet très intéressant, mais dans la mesure où il reste aujourd’hui une énergie chère, il devrait être analysé en complément des énergies électriques intermittentes qui ont leur propre coût et que nous subventionnons. La question des infrastructures doit aussi être analysée. La France n’a pas les moyens d’investir dans trois réseaux, l’un dédié au pétrole, l’autre à l’électricité et un autre encore à l’hydrogène. Il serait vraiment intéressant de comparer ce dernier aux autres solutions et de voir comment un minimum d’investissement pourrait offrir à notre système de transport un maximum de flexibilité.

Mme Anne-Laure Cattelot, rapporteure spéciale. Je vous remercie, monsieur le président, d’avoir accédé à ma demande relative au suivi des rapports.

Ceux qui ont été demandés au travers des amendements avaient un caractère prospectif. Il s’agissait d’avoir des projections sur les répercussions, à plafond d’emplois stable, de nouvelles missions confiées à des opérateurs ou de la mise en œuvre de nouvelles politiques publiques. Typiquement, le cas du plan hydrogène, qui a été lancé mais dont l’exécution reste stable, requiert un rapport. Il me semblait qu’il était bon de demander de tels rapports collectivement plutôt qu’individuellement, dans le cadre de nos rapports spéciaux.

En l’espèce, je suis d’accord pour retirer l’amendement II-CF969, car je comprends votre position, madame Hai. Nous le redéposerons sans doute en séance publique afin de provoquer un débat avec la ministre concernée.

Lamendement II-CF 969 est retiré.

La commission en vient à lexamen des crédits du compte daffectation spéciale Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale.

Article 40 et état D

Elle est saisie de lamendement II-CF470 Mme Josette Manin.

Mme Marie-Noëlle Battistel, rapporteure pour avis. L’amendement II-CF470 vise à porter à 10 millions d’euros les crédits du programme 794 Opérations de maîtrise de la demande d’électricité, de production d’électricité par des énergies renouvelables ou de production de proximité dans les zones non interconnectées, dans le but de moderniser le réseau électrique particulièrement vétuste des zones non-interconnectées (ZNI).

 

Intégrer des énergies renouvelables intermittentes au réseau électrique de petite taille des outre-mer nécessite des solutions adaptées. Dans un contexte insulaire ou faiblement interconnecté où les coûts d’approvisionnement en électricité sont supérieurs à ceux de la métropole et où le plafond de puissance des énergies renouvelables sur le réseau électrique est déjà atteint, les enjeux induits par un développement massif des énergies renouvelables sur l’équilibre offre-demande et la stabilité du réseau sont en effet particulièrement importants.

Les crédits inscrits au titre de la mission Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale sont stables par rapport à l’année dernière, mais souffrent d’une sous-consommation chronique, les actions qu’ils peuvent financer n’étant pas adaptées aux nouveaux défis. Pouvoir les utiliser à bon escient sur les territoires ultramarins serait pertinent.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Si je suis d’accord sur l’objectif d’autonomie énergétique des outre-mer en 2030, je suis cependant défavorable à l’amendement, et pour une raison très simple. Vous avez-vous-même relevé une sous-consommation des crédits de la mission, et c’est bien là le problème. En 2018, les crédits inscrits au titre du programme 794 ont bénéficié d’une dotation de 7,2 millions d’euros en CP ; à peine un million a été consommé.

J’ai déjà appelé l’attention du ministre sur cette sous-consommation : il m’a assuré que des efforts avaient été déployés en matière d’information des collectivités ultramarines, en espérant que ceux-ci se traduiront par une amélioration de la consommation des crédits.

Avant d’augmenter les crédits de ce programme, il me semble donc qu’il faut d’abord augmenter leur consommation.

La commission rejette lamendement II-CF470.

 

Puis elle adopte les crédits du compte daffectation spéciale Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale non modifiés.

La commission en vient à lexamen des crédits du compte daffectation spéciale Transition énergétique.

Article 40 et état D

La commission adopte les crédits du compte daffectation spéciale Transition énergétique, non modifiés.

Après larticle 76

La commission examine lamendement II-CF194 du rapporteur spécial Julien Aubert.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Lors du dernier printemps de l’évaluation, j’ai présenté un rapport sur le sujet de l’éolien. J’y avais intégré une étude de la Commission de régulation de l’énergie chiffrant le coût des dépenses de soutien à l’éolien entre 72,7 milliards d’euros et 90 milliards d’euros.

L’éolien, et surtout l’éolien terrestre, coûte cher ; trop cher, à mon sens. Pour limiter ce coût, je propose que le Parlement décide un moratoire sur les aides à l’éolien terrestre à compter du 1er janvier 2020. Les contrats déjà signés seraient honorés, mais plus aucun nouveau contrat ne pourrait bénéficier d’un soutien public. Les représentants de l’éolien terrestre proclament sans cesse que l’énergie éolienne est compétitive. Très bien. Qu’ils le prouvent et que l’éolien terrestre se passe enfin de subventions !

La commission rejette lamendement II-CF194.

Puis elle examine lamendement II-CF198 du rapporteur spécial Julien Aubert.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Cet amendement propose qu’un exploitant d’éoliennes terrestres ne puisse bénéficier que d’un seul contrat d’achat garanti de l’électricité produite.

À l’heure actuelle, au terme d’un premier contrat de soutien, qui dure de dix à quinze ans, l’exploitant peut postuler à un nouveau contrat de soutien dès lors qu’il a apporté certaines modifications à son installation. Il ne s’agit pas d’un cas d’école, puisque deux sites parvenus au terme de leur premier contrat d’achat ont été sélectionnés pour bénéficier d’un second contrat d’achat.

Cette situation n’est pas satisfaisante au regard de la concurrence puisque les intéressés pourront réutiliser certains aménagements déjà effectués et amortis sur des fonds publics, par exemple des postes électriques ou les routes d’accès aux sites. Surtout, on peut considérer qu’après avoir été soutenu pendant quinze ou vingt ans, un site doit pouvoir se passer de soutien public. En Allemagne, un exploitant éolien ne peut bénéficier que d’un seul contrat d’obligation d’achat.

Je crois raisonnable de s’inspirer de ce qui se fait en Allemagne, pays de l’éolien, en introduisant une règle équivalente dans notre droit.

M. Charles de Courson. L’objectif est-il qu’il n’y ait plus ou quasiment plus d’éolien, c’est-à-dire qu’on se contente de produire 5 % de notre électricité par ce moyen ?

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Non, pas exactement. Ces amendements ne concernent que l’éolien terrestre, à l’exclusion de l’éolien maritime.

M. Charles de Courson. Aujourd’hui, 100 % de la production d’électricité éolienne est terrestre. Il faudra attendre encore un peu avant que l’éolien offshore ne produise de l’électricité.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Premièrement, mon amendement ne concerne pas toute la production éolienne. Deuxièmement, alors que nous ne cessons de chercher à grappiller quelques millions d’euros, que la France engage entre 73 milliards d’euros et 90 milliards pour soutenir une industrie devrait tout de même nous faire réfléchir.

D’autres pays ont limité le soutien qu’ils apportent à cette industrie, en définissant des plafonds budgétaires. J’estime que nous devons aussi limiter notre soutien public si l’on veut avoir des fonds pour financer le logement. La commission d’enquête sur l’impact économique, industriel et environnemental des énergies renouvelables, sur la transparence des financements et sur l’acceptabilité sociale des politiques de transition énergétique ne rendra son rapport que fin novembre, mais on sait déjà que certains acteurs de l’éolien terrestre réalisent d’excellentes marges. Grâce à l’argent public versé, ils ont constitué des réserves importantes.

Il s’agit, à l’avenir, de limiter le coût budgétaire de l’éolien terrestre.

M. Charles de Courson. Vous plaidez donc, de manière implicite, en faveur du maintien de la part nucléaire actuelle dans le mix énergétique. Si vous abaissez le soutien public de 73 % à 50 %, comme certains l’ont voté ici, comment comblera-t-on le différentiel ?

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Il n’y a pas que l’éolien terrestre en France ; il y a aussi l’éolien offshore ou encore l’énergie photovoltaïque. En outre, notre problème de décarbonation ne se pose pas dans le domaine de l’électricité, qui ne représente que 20 % de l’énergie. Si on doit avoir une politique écologique de réduction du dioxyde de carbone, c’est bien en dehors de l’électricité qu’il faudra la chercher.

M. Charles de Courson. Il faut donc maintenir la part du nucléaire. C’est une thèse.

M. Jean-Louis Bricout. Il y a un problème d’implantation des projets éoliens, car on observe une sorte de mitage des territoires. Les implantations viennent parfois, en fin de compte, s’opposer à des projets de développement culturel ou touristique. Il faudrait donc plutôt de la régulation. Les retombées fiscales ont pu naguère séduire des communes, mais l’insatisfaction grandit aujourd’hui sur le territoire.

M. Jean-Paul Dufrègne. Je veux appuyer ce que dit mon collègue Jean-Louis Bricout. Ce qu’il nous faut dans notre pays, c’est un vrai service public de l’énergie. Encore une fois, on a laissé faire le marché au niveau de l’éolien et c’est une véritable catastrophe. Dans le département où je suis élu, il y a des gens qui ne se parlent plus dans les villages, tandis que des pétitions circulent. Des sociétés vont démarcher les élus en leur faisant miroiter la fortune à venir, qui viendra compenser les baisses de dotations. Il faudra penser aussi à la contribution des différents territoires. De la tour Eiffel, je n’ai jamais vu une éolienne. Pourquoi les éoliennes seraient-elles implantées dans des territoires sans qu’ils aient leur mot à dire ? C’est intolérable !

M. le président Éric Woerth. Je vous propose de ne pas rouvrir le débat sur les éoliennes.

La commission rejette lamendement II-CF198.

Puis elle examine lamendement II-CF195 du rapporteur spécial Julien Aubert.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Cet amendement vise à contraindre le Gouvernement à renégocier une deuxième fois, ou à résilier, les six premiers contrats éoliens en mer attribués entre 2011 et 2013 et très mal renégociés en 2018.

Permettez-moi de vous livrer deux chiffres. Après renégociation, le prix de l’électricité produite par ces six premiers parcs coûtera 144 euros par mégawattheure. Par comparaison, sur le septième parc attribué cette année au large de Dunkerque, ce prix s’élèvera à 44 euros par mégawattheure. À six mois d’intervalle, l’État a consenti un écart de 100 euros. C’est excessif et c’est surtout pénalisant pour nos finances publiques.

Sur vingt ans, le soutien public aux six premiers parcs a été estimé à 22 milliards d’euros par la Commission de régulation de l’énergie, alors que, pour le septième parc, cette même commission a estimé que le soutien public devrait coûter au maximum 540 millions d’euros et pourrait même se traduire par un reversement de 266 millions d’euros au budget de l’État.

En juillet 2019, la Commission européenne a considéré que le niveau de coûts des six premiers parcs est « a priori élevé au regard d’autres projets éoliens en mer développés à l’heure actuelle avec des technologies plus récentes ». Soyons économes et raisonnables, renégocions ou résilions ces six premiers contrats ! Quand quelqu’un achète une maison à 200 000 euros et que, six mois plus tard, la même maison se vend 100 000 euros, on peut penser qu’on peut en renégocier le prix.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. Monsieur Aubert évoque un vrai problème. En Allemagne ou aux Pays-Bas, on met à peu près quatre à cinq ans pour faire naître un projet offshore, alors qu’en France, il faut une quinzaine d’années, du fait de la succession des recours possibles et faute de guichet unique. En outre, l’appel d’offres de départ est figé et ne laisse pas à la technique la possibilité d’évoluer.

La solution ne saurait cependant être de résilier les six projets qui ont déjà été lancés, parce que, dans la situation actuelle, cela voudrait dire qu’il faut recommencer à zéro.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Il s’agit non de résilier, mais de renégocier.

La commission rejette lamendement II-CF195.

Puis elle examine lamendement II-CF196 du rapporteur spécial Julien Aubert.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Le code de la voirie routière comporte un article L. 122-4 prévoyant un dispositif de modération des tarifs de péages ou de réduction de la durée de la concession lorsque les revenus des péages ou les résultats financiers excèdent les prévisions initiales. La Cour des comptes regrette que ce mécanisme intéressant ne soit pas appliqué comme il le devrait.

Cependant, le principe de ce mécanisme est séduisant et je propose de l’introduire dans le code de l’énergie pour prévenir la constitution de sur-rentabilité dans les contrats soutenant les énergies renouvelables. Aujourd’hui, un contrat de soutien aux énergies renouvelables est conclu pour une durée de quinze à vingt ans. Si des progrès techniques bouleversent la donne en cours de route, la collectivité n’en profite pas. Le titulaire peut donc bénéficier d’une sur-rentabilité indue, ce qui a été le cas pour certains sites éoliens terrestres, selon la Commission de régulation de l’énergie.

Je propose donc d’introduire une forme de garantie permettant à la collectivité soit de ne pas être lésée par un soutien mal défini à l’origine, soit de bénéficier du produit d’une évolution technologique.

La commission rejette lamendement II-CF196.

Elle examine ensuite lamendement II-CF197 du rapporteur spécial Julien Aubert.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Je ne renonce pas à faire faire des économies au budget de l’État.

Cet amendement concerne les contrats photovoltaïques antérieurs au moratoire de 2010 et demande au Gouvernement d’étudier les possibilités de résiliation des contrats signés avant ce moratoire de 2010.

Concernant le photovoltaïque, il faut distinguer deux périodes différentes : avant le moratoire de 2010 et après. La période après le moratoire de 2010 n’appelle pas de remarque particulière. Le soutien est bien organisé, il fonctionne et je le soutiens. En revanche, avant le moratoire de 2010, les prix accordés étaient déraisonnables. Le prix d’achat s’établissait ainsi en moyenne à 505 euros le mégawattheure, alors qu’aujourd’hui les prix sont très inférieurs à 100 euros le mégawattheure. Le comité de gestion des charges du service public de l’énergie parle de « bulle spéculative ».

Ces contrats, signés pour vingt ans, représentent une charge de 40 milliards d’euros. Sur ces 40 milliards d’euros, nous en avons payé 15 et 25 milliards d’euros restent à payer. Je crois qu’il nous faut envisager sérieusement de résilier ces contrats, en indemnisant leurs titulaires. Il nous reviendrait moins cher de racheter des installations en les nationalisant que de continuer à ce train. Le nombre de contrats concernés est élevé : 225 000. Il serait bon d’y voir plus clair. Pour cela, je crois que le Gouvernement pourrait commander un rapport à un corps de contrôle, pour identifier les possibilités juridiques et l’intérêt financier de cette démarche.

M. Benoît Simian. Que vous demandiez un rapport, après avoir voté contre notre demande tout à l’heure, c’est le comble ! D’ailleurs, quand on demande un rapport, il ne faut pas forcément imaginer un gros pavé. Sur la question de l’hydrogène tout à l’heure, trois pages auraient pu suffire.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Vous ne pourrez pas financer la voiture électrique, l’hydrogène ou toutes les autres technologies dont vous parlez, plus les 500 000 logements, si 90 milliards d’euros sont gelés parce qu’emportés par la vague d’optimisme de l’époque, nous n’avons pas été capables de conclure des contrats raisonnables.

Là, il y a 25 milliards d’euros à récupérer. Imaginez, si l’on arrivait à renégocier et en récupérer 10, ce que cela signifierait ensuite pour financer l’hydrogène. Rappelez-vous que nous en sommes parfois réduits à rechercher quelques dizaines de millions d’euros. Si le Parlement veut jouer son rôle, il ne peut pas regarder ailleurs. Il y a des lobbies qui profitent de cette situation. Maintenant vous êtes au courant ; que chacun assume ses votes !

La commission rejette lamendement II-CF197.

 

Elle adopte enfin les crédits du compte daffectation spéciale Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs non modifiés.

La commission en vient à lexamen des crédits du budget annexe Contrôle et exploitation aérien.

Article 39 et état C

M. Benoît Simian, rapporteur spécial. Il y a deux ou trois nuits, il était proposé de supprimer le compte d’affectation spéciale Contrôle de la circulation et du stationnement routier. Or la vertu des comptes d’affectation spéciale, c’est l’acceptabilité par nos concitoyens. On voit bien, avec les événements que l’on a traversés l’année dernière, que ce type de compte d’affectation spéciale permet de faire de la pédagogie, au même titre que le compte d’affectation spéciale « bonus-malus ». C’est pour cette raison qu’avec ma collègue Anne-Laure Cattelot, nous avions demandé le maintien de ce dernier en séance publique.

La commission adopte les crédits du budget annexe Contrôle et exploitation aérien non modifiés.

M. Jean-Paul Dufrègne. Monsieur le président, je pensais que les groupes politiques étaient sollicités pour prendre la parole à la fin de chaque mission. Or vous ne l’avez pas fait pour les comptes d’affectation spéciale et le budget annexe. Je le regrette profondément, car nous ne sommes déjà que des figurants. Si, en outre, nous ne pouvons même plus nous exprimer, nous n’avons vraiment plus rien à faire ici !

M. le président Éric Woerth.  Vous vous êtes largement exprimé. Au demeurant, sur les comptes d’affectation spéciale comme pour les budgets annexes, lorsqu’ils sont présentés en même temps qu’une mission du budget général, l’usage veut que l’avis des groupes politiques soit sollicité une seule fois, lors de l’examen des crédits de la mission, qui précède celui des crédits du budget annexe ou du compte d’affectation spéciale.

 

 

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Membres présents ou excusés

Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

 

 

Réunion du jeudi 24 octobre 2019 à 15 heures 

 

Présents. - M. Saïd Ahamada, M. Julien Aubert, Mme Émilie Bonnivard, M. Michel Castellani, Mme Anne-Laure Cattelot, M. Jean-René Cazeneuve, M. Éric Coquerel, M. Charles de Courson, M. Jean-Paul Dufrègne, Mme Perrine Goulet, Mme Nadia Hai, M. Christophe Jerretie, M. Daniel Labaronne, M. Mohamed Laqhila, M. Fabrice Le Vigoureux, Mme Marie-Ange Magne, Mme Cendra Motin, M. Xavier Paluszkiewicz, Mme Christine Pires Beaune, M. François Pupponi, M. Laurent Saint-Martin, M. Jacques Savatier, M. Olivier Serva, M. Benoit Simian, M. Éric Woerth

 

Excusés. - M. François André, M. Joël Giraud, M. David Habib, M. Marc Le Fur, Mme Valérie Rabault

 

Assistaient également à la réunion. - Mme Bérangère Abba, Mme Ericka Bareigts, Mme Marie-Noëlle Battistel, Mme Jennifer De Temmerman, M. Max Mathiasin, M. Adrien Morenas, M. Matthieu Orphelin, M. Loïc Prud’homme

 

 

 

 

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