Compte rendu

Commission
des affaires sociales

  – Suite de l’examen des articles du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 (n° 3397) 2

 

 

 

 


Mercredi
14 octobre 2020

Séance de 15 heures

Compte rendu n° 8

session ordinaire de 2020-2021

Présidence de
Mme Fadila Khattabi,
Présidente,
puis de Mme Audrey Dufeu, vice-présidente
 


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COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Mercredi 14 octobre 2020

La séance est ouverte à quinze heures.

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La commission poursuit l’examen des articles du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 (n° 3397) (M. Thomas Mesnier, rapporteur général, Mmes Caroline Janvier et Monique Limon, MM. Cyrille Isaac-Sibille et Paul Christophe, rapporteurs).

 

Mme la présidente Fadila Khattabi. Nous avons examiné 201 amendements ; 331 restent donc en discussion. Nous avons encore beaucoup à faire !

Article 28 : Poursuivre la réforme du financement des établissements de santé

Suivant l’avis défavorable de M. Thomas Mesnier, rapporteur général, la commission rejette l’amendement AS278 de M. Joël Aviragnet.

Puis elle est saisie de l’amendement AS125 de M. Pierre Dharréville.

M. Pierre Dharréville. L’article 28 tend à instaurer une participation forfaitaire à la charge des patients qui passent aux urgences sans être hospitalisés. Au prétexte de désengorger les hôpitaux, cette mesure de déremboursement sanctionne donc les assurés qui se rendraient aux urgences pour des soins estimés non urgents.

Proposer une telle mesure, c’est nier la situation actuelle en matière d’accès aux soins puisque des patients n’ont d’autre choix que d’aller à l’hôpital, faute de médecins de ville disponibles. Si les urgences sont autant sollicitées, c’est d’abord en raison des défaillances d’organisation de la médecine de ville et de l’extension des déserts médicaux.

Sans résoudre les problèmes d’engorgement des urgences hospitalières, cette mesure contribuera à renforcer les inégalités d’accès aux soins tout en réduisant la part des soins prise en charge par l’assurance maladie obligatoire au profit des complémentaires santé. C’est pourquoi nous vous proposons de supprimer les alinéas 2 à 5 de l’article 28.

M. le rapporteur général. Je suis très heureux que nous abordions la question de la réforme du reste à charge aux urgences, car il s’agit d’un sujet politique très important – j’ai lu avec beaucoup d’attention vos nombreux amendements.

La création du forfait de participation aux urgences est issue de la réflexion menée par le ministère après l’adoption, l’an dernier, de la réforme du financement des urgences, à la faveur d’un amendement qui m’avait été inspiré par les travaux sur le pacte de refondation des urgences. J’observe que cette mesure a suscité de nombreux malentendus dans la presse ; je pense notamment à des articles publiés dans Les Échos ou L’Humanité. Votre amendement me donne donc l’occasion de clarifier les choses.

Le malentendu me semble en partie lié à la situation actuelle. En effet, ces articles de presse sous-entendent qu’actuellement, les patients se rendant aux urgences n’ont pas à s’acquitter d’un reste à charge. Or, ils sont bien redevables d’un ticket modérateur équivalent à 20 % de chacune des prestations dont ils ont bénéficié lors de leur passage aux urgences, soit 20 % du forfait accueil et traitement des urgences, qui est d’environ 25 euros, et 20 % de chaque acte ou consultation réalisé aux urgences. Ainsi, le reste à charge peut être très élevé, surtout pour les patients les plus âgés, qui ont souvent besoin d’un nombre plus important d’examens complémentaires. Toutefois, personne ou presque ne s’en rend compte, car ces tickets modérateurs sont pris en charge par les mutuelles.

Actuellement, les patients invalides ou souffrant d’une affection de longue durée (ALD) ne payent pas ce ticket modérateur uniquement si leur passage aux urgences est en lien avec leur ALD – ce qui correspond à un tiers seulement des passages aux urgences des patients en ALD. Ainsi, si un diabétique se rend aux urgences pour son pied diabétique, il est exonéré ; s’il s’y rend parce qu’il s’est cassé le pied en glissant, il ne l’est pas.

Pourquoi proposons-nous cette réforme ?

La réforme du financement des urgences que nous avons adoptée l’année dernière, sur ma proposition, permet de simplifier la tarification des urgences en abandonnant le comptage de chaque acte – nous partageons tous, me semble-t-il, cet objectif, notamment ceux de nos collègues qui siègent sur les bancs de gauche. Dès lors, continuer à recueillir et à renseigner ces éléments dans le seul but de calculer le ticket modérateur serait chronophage et complexe pour l’hôpital. En effet, les personnes chargées de la facturation devraient courir derrière l’information, afin d’identifier les actes qui ont été pratiqués, d’établir si l’infection du patient avait un rapport ou non avec son diabète ou avec sa maladie cardiaque...

Du reste, cette complexité pèse déjà sur l’hôpital, notamment sur l’hôpital public, au point que seulement 30 % des factures liées à un passage aux urgences sont actuellement recouvrées. Ce manque à gagner, outre qu’il est très chronophage sur le plan administratif, creuse les déficits de nos hôpitaux. Et, ne nous voilons pas la face, ce sont les hôpitaux publics qui en payent le prix fort.

Le système est aussi et surtout illisible pour le patient, qui n’a aucune idée, en arrivant aux urgences, du montant dont il devra s’acquitter, souvent via sa mutuelle, à la sortie.

Le forfait ne concernera que les passages aux urgences non suivis d’une hospitalisation dans l’établissement. Actuellement, le ticket modérateur moyen est de près de 19 euros dans le public et le privé associatif et de 20 euros dans le privé. Désormais, il sera le même partout et tout le temps. Son montant sera de 18 euros, ce qui évitera les restes à charge trop importants, et, pour les personnes en ALD ou en invalidité, qui sont actuellement parfois exonérées, parfois non, il sera de 8 euros tout le temps.

L’article 28 maintient par ailleurs une exonération totale du ticket modérateur en cas de risque sanitaire grave et exceptionnel, lorsque les soins sont prodigués aux personnes victimes d’un acte de terrorisme et aux mineurs victimes de sévices sexuels pour les actes, soins et traitements consécutifs aux sévices dont ils ont été victimes.

Les patients bénéficiant d’une ALD seront-ils pénalisés ? Actuellement, pour ceux d’entre eux qui passent aux urgences sans hospitalisation, le reste à charge est plus élevé que la moyenne car, pour ces patients, souvent plus âgés, le recours à des actes techniques, d’imagerie et de biologie est plus fréquent. Par ailleurs, certains patients sous ALD devront désormais s’acquitter d’une participation alors que ce n’était pas le cas auparavant, mais son montant unitaire sera moindre. Globalement, la masse des restes à charge pour les patients en ALD baisserait de 32 % grâce à cette réforme.

Celle-ci n’est pas une mesure d’économie pour l’assurance maladie : elle se fait à budget constant. Pour preuve, je défendrai ultérieurement un amendement qui vise à maintenir une exonération totale pour les patients qui en bénéficient déjà actuellement et qui ont été oubliés dans cet article, à savoir les femmes enceintes et les nourrissons. Caroline Fiat a par ailleurs soulevé la question des invalides de guerre, et je l’en remercie car j’avais omis de les intégrer dans mon amendement ; ce sera chose faite.

Enfin, ces tickets modérateurs sont actuellement obligatoirement couverts par les contrats responsables. Ce sera également le cas de cette participation, qui sera calculée de façon à éviter tout déport entre assurance maladie et complémentaires. Pour les plus précaires, cette participation sera entièrement couverte par la complémentaire santé solidaire ; elle le sera également pour les patients bénéficiant de l’aide médicale de l’État (AME).

Cette présentation complète du forfait de participation aux urgences me semblait utile tant cette mesure a suscité de malentendus. Je suis donc défavorable à l’amendement AS728.

M. Thibault Bazin. Vous avez évoqué la situation des personnes âgées qui passent par les urgences sans être hospitalisées. Mais qu’en est-il des femmes enceintes, qui sont actuellement exonérées du ticket modérateur à compter du sixième mois de grossesse ?

Mme Delphine Bagarry. Pour moi, qui plaide en faveur d’une rémunération au forfait, l’article 28 est constructif. Mais s’il n’a aucune incidence sur les 95 % d’assurés sociaux qui ont une complémentaire santé – je me réjouis que les femmes enceintes et les nourrissons notamment, qui avaient été oubliés, soient en définitive exonérés du paiement de ce forfait –, je m’interroge sur les 5 % restants. Je pense en particulier aux étudiants qui, pour 40 % d’entre eux, n’ont pas de complémentaire santé. Il ne faudrait pas que cette mesure restreigne leur accès aux soins.

Par ailleurs, celle-ci n’est-elle pas une manière déguisée de faire payer davantage de patients, notamment ceux qui n’auront pas reçu de soins, puisqu’ils acquitteront ce forfait préalablement à toute consultation aux urgences ?

M. le rapporteur général. Monsieur Bazin, les femmes enceintes sont actuellement exonérées du ticket modérateur aux urgences ; elles continueront de l’être, de même que les nourrissons de moins d’un mois, grâce à l’amendement que je défendrai tout à l’heure. Quant aux invalides de guerre, ils seront soumis au même régime que les patients en ALD. Ainsi, la réforme se fera‑t‑elle à budget et à public constants.

Madame Bagarry, vous évoquez la situation des 5 % de patients n’ayant pas de complémentaire santé. Tout d’abord, les plus précaires d’entre eux sont éligibles soit à la complémentaire santé solidaire, soit à l’AME ; leur forfait pourra donc être pris en charge à ce titre. Quant aux autres, dont on peut penser qu’ils sont moins modestes, la mesure leur sera en définitive tout de même favorable. En effet, le montant du ticket modérateur actuel variant selon le nombre d’actes réalisés aux urgences, il peut être beaucoup plus élevé que celui du futur forfait. De fait, celui-ci correspond, certes, à un plancher, mais aussi à un plafond : il sera toujours de 18 euros.

Enfin, votre crainte peut être légitime, mais je ne vois pas en quoi le nouveau dispositif permettrait de demander plus facilement un reste à charge. En tout état de cause, il est plus favorable, plus simple et plus lisible, et il permettra à nos établissements de santé, en priorité aux hôpitaux publics, de recouvrer systématiquement – et non plus, comme c’est le cas actuellement, dans un tiers des cas seulement – les sommes qui leur sont dues après un passage aux urgences.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, l’amendement AS271 de M. Stéphane Viry ainsi que les amendements identiques AS504 de M. Martial Saddier et AS727 de M. Joël Aviragnet.

M. Stéphane Viry. Je crains, monsieur le rapporteur général, qu’en dépit de vos explications, le mécanisme proposé ne soit trop complexe et qu’il n’accroisse, en définitive, le reste à charge pour certains patients. C’est pourquoi je propose, par mon amendement, le maintien des exonérations existantes.

M. le rapporteur général. Votre amendement vise en particulier, me semble-t-il, les patients en ALD. Pour l’ensemble de ces derniers, le montant du ticket modérateur baissera de 32 %. Qui plus est, le dispositif sera plus simple. Prenons l’exemple d’un patient souffrant d’une pathologie respiratoire chronique. S’il se rend aux urgences pour un problème respiratoire lié à sa pathologie, il est exonéré du ticket modérateur. Mais s’il s’avère qu’il ne s’agit que d’une bronchite, il doit s’acquitter d’un ticket modérateur non seulement pour cet acte, mais aussi pour tous les examens complémentaires – radios, prises de sang... – qui auront été réalisés. En définitive, la facture, qui n’est pas prise en charge au titre de son ALD, est beaucoup plus élevée que dans le futur système, puisqu’il n’aura à s’acquitter que d’un forfait de 8 euros qui sera pris en charge par sa complémentaire.

Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Elle examine ensuite, en discussion commune, l’amendement AS1239 du rapporteur général ainsi que les amendements identiques AS60 de Mme Émilie Bonnivard, AS65 de M. Bernard Perrut, AS760 de M. Boris Vallaud et AS898 de Mme Agnès Firmin Le Bodo.

M. le rapporteur général. L’amendement AS1239 vise, d’une part, à maintenir l’exonération totale dont bénéficient actuellement les femmes enceintes à compter du sixième mois de grossesse et les nourrissons de moins d’un mois et, d’autre part, grâce à la vigilance de Mme Fiat, à étendre le régime applicable aux patients en ALD aux invalides de guerre.

M. Bernard Perrut. Nous proposons de maintenir les exonérations dont bénéficient actuellement les patients en ALD, qui ont besoin d’être soutenus car ils supportent déjà, en valeur absolue, les restes à charge les plus élevés du fait de leurs besoins de santé.

M. Joël Aviragnet. La simplification de la tarification des urgences par la création d’un forfait unique remplaçant les différents tickets modérateurs existants est tout à fait louable, mais elle ne peut se traduire par un recul des droits des usagers. Or, cette disposition vient créer un reste à charge jusqu’ici inexistant pour les bénéficiaires du dispositif de l’affection longue durée lorsque leur passage aux urgences est lié à un soin relevant de leur ALD. Cela revient à nier le principe même du régime de l’ALD, dont les bénéficiaires sont déjà soumis, en valeur absolue, aux restes à charge les plus élevés du fait de leurs besoins de santé.

L’amendement AS760 du groupe Socialistes, proposé par APF France handicap, vise donc à maintenir les situations d’exonérations existantes dans le cadre du nouveau forfait unique.

M. Paul Christophe. Nous proposons à notre tour par l’amendement AS898 de revenir sur une partie du dispositif proposé, afin de tenir compte de la particularité du régime des ALD.

M. le rapporteur général. Défavorable aux amendements AS60, AS65, AS760 et AS898.

Mme Delphine Bagarry. Si j’ai bien compris, monsieur le rapporteur général, les femmes enceintes bénéficieront de l’exonération à compter du sixième mois de grossesse, comme c’est également le cas actuellement pour les soins de ville. Or, il me semble que cette exonération devrait être appliquée aux femmes enceintes quel que soit le terme de leur grossesse, car le stress qu’elles peuvent ressentir est tel qu’elles doivent pouvoir consulter en urgence à toute heure du jour et de la nuit. De même, en ce qui concerne les nourrissons, l’exonération prévue devrait être valable jusqu’à trois mois. Je déposerai donc un sous‑amendement en séance publique.

Par ailleurs, il me paraît justifié de maintenir, comme le proposent nos collègues, le maintien de l’exonération dont bénéficient les patients en ALD lorsqu’ils consultent pour un motif en lien avec leur affection. Je pense, par exemple, au cas d’une personne dont l’ALD est liée à une maladie coronarienne et qui se rend aux urgences pour une douleur thoracique : le motif de sa consultation est bien en rapport avec son ALD – il est peut-être victime d’un infarctus. Il devrait donc être entièrement exonéré du paiement du forfait.

La commission adopte l’amendement AS1239.

En conséquence, les amendements AS60, AS65, AS760 et AS898 tombent.

La commission en vient aux amendements AS1189 et AS1190 de Mme Caroline Fiat.

Mme Caroline Fiat. La simplification de la tarification des urgences par la création d’un forfait unique remplaçant les différents tickets modérateurs existants ne peut se traduire par un recul des droits des usagers. Or, cette disposition vient créer un reste à charge jusqu’ici inexistant pour les personnes bénéficiaires du dispositif d’ALD lorsque leur passage aux urgences est lié à un soin relevant de cette ALD. Cela revient à nier le principe même de ce régime, dont les bénéficiaires sont déjà soumis, en valeur absolue, aux restes à charge les plus élevés du fait de leurs besoins de santé. L’amendement AS1189, qui nous a été proposé par APF France Handicap, vise donc à maintenir les situations d’exonération existantes concernant le forfait unique nouvellement créé.

Quant à l’amendement AS1190, il a trait aux anciens militaires victimes d’invalidité et victimes de guerre. Je le retire donc, puisque M. le rapporteur général a pris en compte leur situation dans son propre amendement.

L’amendement AS1190 est retiré.

M. le rapporteur général. L’amendement AS1189 a un objet similaire à celui des amendements identiques que nous venons de rejeter. Avis défavorable, donc.

Par ailleurs, je remercie Mme Fiat d’avoir déposé l’amendement AS1190, car il m’a conduit à compléter utilement mon propre amendement afin de ne laisser personne sur le bas‑côté.

La commission rejette l’amendement AS1189.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS350 de M. Stéphane Viry.

M. Stéphane Viry. Un nouveau mode de financement des établissements du secteur de la santé mentale et de la psychiatrie doit entrer en vigueur à compter du mois de janvier 2021. Afin de conférer à ces établissements une visibilité sur les ressources financières dont ils vont disposer, nous proposons de rendre obligatoire la consultation du comité de l’hospitalisation publique et privée, qui semble actuellement facultative.

M. le rapporteur général. L’article que vous proposez de modifier dispose que le comité de l’hospitalisation publique et privée est consulté lorsqu’il existe un risque sérieux de dépassement de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM). Vous souhaitez que cet avis soit obligatoire, mais il l’est déjà. Votre amendement est donc satisfait. C’est pourquoi je vous suggère de le retirer ; sinon, j’émettrai un avis défavorable.

L’amendement est retiré.

La commission en vient à l’amendement AS595 de Mme Perrine Goulet.

Mme Perrine Goulet. Il s’agit de compléter la disposition visant à confier au directeur de l’agence régionale de santé (ARS) le soin de fixer annuellement le montant, issu de la dotation populationnelle et déterminé en fonction de critères régionaux, alloué à chaque établissement de santé. Il convient en effet de conforter la démocratie sanitaire, en prévoyant que les ARS tiennent compte de l’avis du président du conseil de surveillance des établissements.

M. le rapporteur général. La loi prévoit déjà, depuis l’adoption d’un amendement que vous m’avez fait l’honneur de voter l’an dernier, que le montant des dotations populationnelles est fixé « après avis des représentants en région des établissements de santé et des professionnels exerçant cette activité ». Il me semble compliqué et peu souhaitable que chaque conseil de surveillance d’établissement donne son avis, lequel risque, en outre, d’être fort subjectif.

Avis défavorable.

Mme Perrine Goulet. Je maintiens l’amendement. La loi prévoit, certes, la consultation de représentants en région des établissements, mais il n’est en aucun cas précisé que ceux-ci doivent être des élus. Or, compte tenu de la manière dont les choses se sont passées ces derniers mois, il nous paraît important que les ARS aient, face à elles, des élus, ce que sont les présidents de conseil de surveillance.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS843 de M. Paul Christophe.

M. Paul Christophe. Il s’agit d’insérer dans les contrats d’amélioration de la qualité et de l’efficience des soins (CAQES) un objectif d’externalisation des soins des activités traditionnellement réalisées via l’hospitalisation de jour, particulièrement la chimiothérapie, en les réalisant via l’hospitalisation à domicile.

M. le rapporteur général. Votre proposition me semble beaucoup trop précise ; surtout, elle n’est pas applicable à tous les hôpitaux. Nous avons profondément refondu les CAQES l’année dernière, en les recentrant sur la question de la pertinence et en apportant plus de souplesse aux ARS. Je ne crois pas qu’il faille revenir en arrière en ajoutant de nouveaux volets au CAQES au niveau législatif.

Par ailleurs, votre amendement ne vise pas la bonne version de l’article, mais celle antérieure à 2019 : peut-être serait-il souhaitable de le modifier si vous souhaitez le redéposer en séance publique.

Avis défavorable.

M. Paul Christophe. Je le retire, et je le redéposerai en séance publique.

L’amendement est retiré.

La commission examine ensuite l’amendement AS349 de M. Stéphane Viry.

M. Stéphane Viry. Par cet amendement, nous proposons que, dans le cadre du nouveau mode de financement de la santé mentale et de la psychiatrie entrant en vigueur en janvier 2021, le comité de l’hospitalisation publique et privée soit consulté une fois par trimestre.

M. le rapporteur général. L’alinéa visé dans votre amendement prévoit déjà que le comité est rendu destinataire, à sa demande, des données nécessaires à l’analyse de l’activité des établissements de santé publics et privés. Je ne comprends donc pas l’intérêt de la précision que vous proposez, qui ne fait à mon sens qu’apporter une rigidité supplémentaire.

Demande de retrait, sinon défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS370 de M. Stéphane Viry.

M. Stéphane Viry. La crise épidémique a bouleversé un certain nombre de paramètres, de sorte que l’activité de l’année 2020 n’est pas représentative des évolutions constatées ces dernières années. Afin de tenir compte de cette situation, nous vous proposons de reporter d’un an la date de mise en œuvre des réformes du financement des activités de psychiatrie, de soins de suite et de réadaptation (SSR) et de médecine d’urgence, afin qu’elles entrent en vigueur à compter du 1er janvier 2022.

M. le rapporteur général. Vous proposez de décaler d’un an l’entrée en vigueur des réformes du financement de la psychiatrie et des SSR. Je comprends vos inquiétudes, mais je ne partage pas votre avis.

Nous savons tous que la psychiatrie publique est en grande souffrance et que cette réforme du financement est très attendue. La Fédération hospitalière de France (FHF) a eu l’occasion de nous le redire très clairement lors de son audition. Quant à la réforme des SSR, elle est en germe depuis cinq ans.

Cependant, le ministère de la santé a prévu, pour l’année 2021, un mécanisme de sécurisation des financements visant à limiter les mouvements financiers et ainsi à sécuriser l’ensemble des établissements. L’objectif de ce mécanisme est de neutraliser les impacts négatifs de la réforme du financement. Ainsi, chaque établissement sera assuré de percevoir a minima un niveau de recettes équivalent aux recettes perçues en 2020, à l’exception de celles perçues au titre des molécules onéreuses, des plateaux techniques spécialisés et des missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation (MIGAC). Ces éléments, qui permettront une mise en œuvre très douce du dispositif, sont, me semble-t-il, de nature à vous rassurer.

Avis défavorable.

M. Thibault Bazin. La réforme doit s’appliquer au 1er janvier 2021, c’est-à-dire dans deux mois et demi. Or, ses modalités semblent lourdes et le dispositif prévu ne paraît pas adapté aux SSR des établissements privés, en raison des règles comptables, notamment et des obligations fiscales auxquelles ils sont assujettis. Si ces difficultés sont réelles, ne serait-il pas opportun de reporter d’un an la mise en œuvre de la réforme ? Vous savez, en tant qu’urgentiste, que les SSR privés accomplissent un travail formidable. Nous ne pouvons donc pas les placer devant des difficultés importantes, surtout lorsqu’on sait les services considérables que certains d’entre eux ont rendus durant la crise sanitaire. Je vous alerte très officiellement sur cette problématique.

M. le rapporteur général. Les SRR privés font effectivement un excellent travail, mais les SRR publics aussi ! C’est une boutade, monsieur Bazin, car je sais que vous n’entendiez pas opposer les uns aux autres... Je répète que cette réforme se fera à blanc et que chaque établissement recevra les mêmes recettes qu’en 2020.

M. Thibault Bazin. Ma remarque ne portait pas sur l’équilibre financier de la réforme, mais sur la difficulté technique que pourraient rencontrer les SRR s’ils doivent se conformer dans l’urgence à de nouvelles règles comptables et fiscales.

M. le rapporteur général. Je n’ai pas d’éléments de réponse sur ce point très spécifique : je vous proposer d’interroger le ministre en séance.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS508 de Mme Martine Wonner.

Mme Delphine Bagarry. Cet amendement vise à revenir sur le report de la réforme du ticket modérateur en psychiatrie. Cette réforme a été prévue par l’article 35 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, dans un objectif de simplification et d’unification, au niveau national, des tarifs journaliers de prestations. Si nous comprenons que la crise sanitaire liée au covid-19 ait pu ralentir les travaux techniques et les concertations avec les acteurs, il ne nous paraît pas judicieux de reporter cette réforme attendue de longue date – d’autant plus que la crise risque elle-même d’accroître les problèmes de santé mentale.

M. le rapporteur général. J’imagine qu’il s’agit là d’un amendement d’appel. Je déplore, comme vous, que la réforme du ticket modérateur en psychiatrie ait pris du retard, mais comment pourrait-elle entrer en vigueur, alors que les travaux techniques préparatoires n’ont pas pu avoir lieu ? Du reste, on peut comprendre que cela n’ait pas été une priorité des établissements et du ministère en 2020...

Je vous propose de faire le point avec le Gouvernement au mois de juin sur l’avancée de cette réforme et, plus globalement, sur la réforme du financement de la psychiatrie, qui, je le sais, tient à cœur à Mme Martine Wonner.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite les amendements identiques AS204 de M. Thibault Bazin, AS298 de M. Stéphane Viry et AS783 de Mme Agnès Firmin Le Bodo.

M. Thibault Bazin. La mise en œuvre de la réforme des tarifs nationaux journaliers de prestation a été repoussée d’un an du fait de la crise sanitaire. Ce report a permis d’affiner les simulations des effets revenus induits par la réforme. Au vu de leur impact sur certaines catégories d’établissements, notamment les petits centres hospitaliers, qui sont si précieux pour nos territoires et dont la situation financière, déjà fragile, a tendance à s’aggraver, je vous propose d’allonger la période de lissage des effets revenus de trois à quatre ans.

M. le rapporteur général. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 a supprimé l’objectif de calculer, à terme, le ticket modérateur sur la base des groupes homogènes de séjours. Cette réforme a introduit un nouveau système de calcul du ticket modérateur, en remplaçant les tarifs journaliers de prestation par une nomenclature simplifiée et fixée au niveau national. Les modalités de cette nouvelle tarification seront déterminées par voie réglementaire et seront applicables, non seulement dans le champ médecine, chirurgie, obstétrique, mais également pour les activités de psychiatrie et de SSR de l’ensemble des établissements de santé, publics comme privés.

Ce nouveau modèle doit entrer pleinement en vigueur en 2023. Vous souhaitez le reporter à 2024, tandis que l’amendement précédent demandait que cette réforme entre en vigueur dès demain. Cela me fait penser que nous avons trouvé un juste milieu.

La réforme que nous avons adoptée l’année dernière est nécessaire. La situation actuelle, qui est facteur d’incertitude, n’est satisfaisante pour personne.

Je sais que le ministère fait tout son possible pour que la conduite des travaux techniques permette à cette réforme d’entrer en vigueur à temps. Je crains que le report de la date butoir à 2024 ne nous empêche d’avancer aussi vite que nous le souhaiterions. Nous pourrons refaire le point sur l’avancée de ces travaux l’année prochaine avec le ministère.

Avis défavorable.

La commission rejette les amendements identiques.

Puis, suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette l’amendement AS1236 de M. Stéphane Viry.

 

Elle en vient aux amendements identiques AS246 de M. Thibault Bazin, AS335 de M. Stéphane Viry, AS539 de Mme Agnès Firmin Le Bodo, AS1054 de Mme Emmanuelle Anthoine et AS1154 de Mme Valérie Bazin-Malgras.

M. Thibault Bazin. Nous avons déjà débattu de cette question et j’ai bien compris que le rapporteur allait profiter du couvre-feu législatif pour méditer avec le ministre de la santé, d’ici à l’examen du texte en séance publique, sur les problèmes comptables et fiscaux que risquent de rencontrer les SRR privés.

M. Paul Christophe. Si vous en êtes d’accord, madame la présidente, je défendrai en même temps que l’amendement AS539 l’amendement AS537 qui vient juste après. L’année 2020 devait constituer une période transitoire, mais la crise sanitaire est venue tout bouleverser. C’est pourquoi nous proposons, par prudence, de décaler d’un an la mise en œuvre de cette disposition.

M. le rapporteur général. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements identiques.

Elle examine ensuite l’amendement AS995 de Mme Caroline Fiat.

Mme Caroline Fiat. Cet amendement nous est proposé par le collectif Inter-LGBT. Il vise le maintien de la prise en charge complète, sans avance de frais, des bénéficiaires de l’AME passant aux urgences.

La simplification de la tarification des urgences par la création d’un forfait unique remplaçant les différents tickets modérateurs existants ne peut avoir pour conséquence un recul du droit aux soins des personnes vulnérables. Les bénéficiaires de l’AME sont un public en situation de grande précarité, avec des revenus inférieurs au seuil de pauvreté. Ils ne sont donc pas en mesure de subvenir à leurs besoins de santé, ni de souscrire une complémentaire, et ils ne peuvent bénéficier de la complémentaire santé solidaire (ex-CMU-C). Du fait de leur parcours migratoire et de leurs conditions de vie précaires, ils sont particulièrement exposés aux maladies et aux blessures. Ils sont aussi particulièrement exposés aux refus de soins en médecine de ville. Il importe donc de garantir leur prise en charge pour éviter qu’ils ne renoncent à se soigner.

M. le rapporteur général. Cet amendement est important : il m’a permis de m’assurer que les bénéficiaires de l’AME seraient bien exemptés dans le nouveau système, comme ils l’étaient dans l’ancien, du forfait de participation aux urgences.

Je vous confirme que c’est bien le cas, car l’article du code de l’action sociale et des familles que vous souhaitez modifier prévoit déjà que l’AME couvre les frais de médecine générale et spéciale à 100 %. Votre amendement étant satisfait, je vous invite à le retirer.

Mme Caroline Fiat. Je vais le réécrire en vue de la séance.

L’amendement est retiré.

Puis, suivant l’avis défavorable du rapporteur, la commission rejette successivement les amendements identiques AS245 de M. Thibault Bazin, AS334 de M. Stéphane Viry, AS537 de Mme Agnès Firmin Le Bodo, AS1050 de Mme Emmanuelle Anthoine et AS1152 de Mme Valérie Bazin-Malgras ainsi que les amendements identiques AS299 de M. Stéphane Viry et AS784 de Mme Agnès Firmin Le Bodo.

Enfin, la commission adopte l’article 28 modifié.

Après l’article 28

La commission examine l’amendement AS369 de M. Stéphane Viry.

M. Bernard Perrut. Il est proposé, à travers l’introduction d’un principe de proportionnalité, d’assurer une plus grande transparence et un meilleur équilibre dans l’allocation des dotations MIGAC aux établissements, notamment entre ceux qui exercent le service public hospitalier. Il s’agit ainsi d’assurer un meilleur suivi et une meilleure évaluation des actions financées au titre des missions d’intérêt général, et en matière de soutien aux établissements de santé en aides à la contractualisation.

C’est pourquoi nous proposons, à la deuxième phrase du premier alinéa de l’article L. 162 22 13 du code de la sécurité sociale, après le mot « dotation », d’insérer les mots : « répartie entre les différentes catégories d’établissements de santé selon leur valorisation économique dans chaque champ d’activité ».

M. le rapporteur général. Les MIGAC permettent de financer des activités d’enseignement et de recherche, des services d’aide médicale urgente (SAMU) et des structures mobiles d’urgence et de réanimation, ainsi que certains centres de référence... Mais il est logique que, statistiquement, les établissements publics reçoivent une plus grande part de ces dotations liées aux missions d’intérêt général de l’établissement, puisqu’ils remplissent en général plus de missions d’intérêt général... Je ne peux donc qu’être défavorable à votre amendement.

La commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS572 de M. Cyrille Isaac-Sibille.

M. Cyrille Isaac-Sibille. Le présent amendement concerne également les MIGAC et s’appuie sur une recommandation de la Cour des comptes. Je ne demande pas plus de démocratie, mais plus de transparence. Comme vous l’avez rappelé, monsieur le rapporteur général, les MIGAC englobent des missions d’enseignement, de santé publique, mais aussi d’aide à la contractualisation, c’est-à-dire à l’investissement. Les MIGAC, ce sont près de 9 milliards d’euros par an !

Autrefois, un rapport assez touffu détaillait l’usage que les ARS faisaient du Fonds d’intervention régional (FIR) et des MIGAC, mais il n’existe plus. Je ne demande pas que les députés contrôlent l’action des ARS, car elles sont libres, mais je demande que celles-ci publient un rapport annuel sur l’usage qu’elles font de ces quelque 9 milliards.

M. le rapporteur général. Comme mon prédécesseur, je ne suis pas un grand fanatique de ces rapports. Un rapport annuel sur le FIR est déjà remis au Gouvernement, auquel nous avons accès pour préparer nos débats. Il me semble que cette question pourrait être prise en charge par le Parlement, soit via la Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS), soit dans le cadre du Printemps de l’évaluation.

Je vous invite donc à retirer votre amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. Cyrille Isaac-Sibille. Que les choses soient claires : mon amendement ne porte ni sur les missions d’enseignement, de recherche, de référence et d’innovation (MERRI), ni sur les dotations dont bénéficient les hôpitaux publics au titre de la formation. Il porte précisément sur l’aide à la contractualisation, qui représente plusieurs milliards. Il est important, dans la mesure où nous votons le montant de cette enveloppe, que nous sachions comment les ARS l’utilisent On sait comment sont utilisés le FIR et l’argent qui finance les MERRI mais, sur l’aide à la contractualisation, c’est l’opacité totale. Je ne demande pas que l’on s’immisce dans la gestion des ARS, mais que l’on sache comment ces fonds sont utilisés.

M. Philippe Vigier. C’est un amendement de bon sens : un petit amendement, mais d’une grande portée, puisque ces 9 milliards d’euros représentent une somme considérable. Monsieur le rapporteur général, notre collègue ne demande pas un rapport de plus, mais la communication des décisions qui sont prises. Il est important de savoir comment ces fonds sont attribués et d’en faire le suivi. Cette proposition émane de la Cour des comptes, qui est la référence en matière de dépense budgétaire ; elle permettra d’éclairer la représentation nationale.

M. Thibault Bazin. Cet amendement va effectivement dans le bon sens, mais je crois qu’il ne va pas assez loin. En tant que parlementaires, nous ne sommes pas là uniquement pour enregistrer des données et les observer. Nous sommes là pour contrôler l’action du Gouvernement. Or, concrètement, le Gouvernement, dans nos territoires, ce sont les ARS. Nous devons donc avoir les moyens d’exercer un contrôle parlementaire local.

Il ne faut pas aggraver les fractures démocratiques et territoriales : il faut mettre fin à cette forme de schizophrénie qui oppose les gentils, au niveau local, et les méchants qui votent les moyens, au niveau national. Je pense qu’il faut aller au-delà d’une demande de rapport et responsabiliser les élus nationaux.

M. Cyrille Isaac-Sibille. Notre rôle est de voter la loi et de contrôler son application. Lorsque nous votons un budget, il est normal que nous contrôlions ce qui en est fait. On contrôle le FIR, mais pas les MIGAC. Or le Parlement devrait savoir ce que les ARS font des aides à la contractualisation : cela fait partie de sa mission de contrôle.

M. Paul Christophe. Les ARS ont été un peu décriées et je crois que c’est une bonne chose que de réintroduire un peu de démocratie et de transparence. Notre collègue Francis Vercamer s’est beaucoup battu pour que le mode d’attribution du FIR soit rendu public. Ce serait une bonne chose que l’utilisation des fonds alloués aux MIGAC soit, elle aussi, parfaitement transparente : cela permettrait de révéler d’éventuelles défaillances territoriales. J’ai en tête une carte intéressante, qui montre que les dotations du FIR sont réparties de façon uniforme, alors que certains territoires sont en train de s’enfoncer. L’amendement de notre collègue contribuerait à une meilleure lecture de la démocratie sanitaire : nous le voterons donc.

M. le rapporteur général. J’ai rappelé que le FIR fait l’objet d’un rapport annuel. S’agissant des MIGAC, nous disposons déjà de circulaires financières publiées chaque année. Peut-être faudrait-il les simplifier et les rendre plus lisibles, mais le rapport auquel vous avez fait allusion, monsieur Isaac-Sibille, a disparu en 2017, la Cour des comptes ayant estimé qu’il ne permettait pas d’évaluer les résultats des politiques mises en œuvre dans le cadre des MIGAC. Je ne pense pas qu’il faille réintroduire ce qui a été jugé inopérant par la Cour des comptes.

M. Cyrille Isaac-Sibille. La Cour des comptes a effectivement jugé ce rapport inopérant, mais le Parlement pourrait jouer son rôle de contrôle. Encore une fois, il ne s’agit pas de s’immiscer dans la gestion des ARS, mais d’exercer pleinement nos missions de parlementaires, qui consistent à voter le budget des MIGAC et à contrôler l’usage qui en est fait.

M. Jean-Carles Grelier. Monsieur le rapporteur général, vous nous dites que, la Cour des comptes ayant trouvé les précédents rapports inopérants, nous n’avons pas besoin de rapport. Je trouve ce raisonnement un peu curieux ! Je pense au contraire qu’un rapport est plus que jamais nécessaire, et qu’il doit être précis. La crise de la covid-19 a montré combien l’influence des ARS pouvait varier d’un territoire à l’autre, tout comme les moyens alloués aux hôpitaux. Nous ne pouvons pas signer un chèque en blanc de 9 milliards d’euros aux ARS sans connaître les stratégies et les priorités retenues sur le terrain.

Mme Monique Iborra nous a dit ce matin qu’il importait d’unifier les politiques relatives à la dépendance et à l’autonomie sur le territoire national. Et vous ne voyez aucun inconvénient à ce que chaque ARS puisse accorder des crédits dans son coin sans rendre de comptes à qui que ce soit ? Dans la gouvernance des ARS, les élus de la nation n’ont pas leur place : dont acte. Nous pourrons peut-être faire des propositions dans ce sens dans le prochain rapport de la MECSS sur les ARS, avec Mme Agnès Firmin Le Bodo. Mais, dans l’immédiat, il ne serait pas superflu que les ARS, via un rapport annuel qui pourrait être annexé à celui du FIR, rendent des comptes à la main qui les nourrit sur l’usage qu’elles font des MIGAC.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS398 de M. Stéphane Viry.

M. Bernard Perrut. Je crois effectivement que nous avons besoin de transparence. Depuis un certain nombre d’années, je plaide d’ailleurs pour que le budget des hôpitaux soit rendu public, afin que les Françaises et les Français puissent savoir comment il est employé sur le terrain. De la même manière, les députés et les sénateurs doivent pouvoir être informés des investissements publics qui sont faits pour répondre aux besoins de santé dans les territoires et ainsi contrôler si les actions des ARS sont bien conformes à la volonté de la représentation nationale. On parle beaucoup de la nécessité de renouveler la gouvernance des ARS et je sais que la MECSS va y réfléchir. C’est effectivement une nécessité que d’introduire plus de transparence, pour la représentation nationale et pour tous les Français.

M. le rapporteur général. L’article L. 1435-10 du code de la santé publique relatif au FIR prévoit déjà qu’« en vue d’assurer un suivi de l’utilisation des dotations affectées au fonds d’intervention régional, le ministre chargé de la santé est informé de l’exécution des budgets annexes, dans des conditions fixées par décret ». Il précise encore : « Un bilan de l’exécution des budgets et des comptes de l’année précédente, élaboré sur la base des données transmises par chaque agence régionale de santé, est adressé au Parlement avant le 15 octobre de chaque année. Ce bilan contient notamment une analyse du bien-fondé du périmètre des actions, de l’évolution du montant des dotations régionales annuelles affectées au fonds ainsi qu’une explicitation des critères de répartition régionale. »

Ce rapport annuel du FIR comporte une ventilation par destination qui permet de disposer d’une vision régionale et, par consolidation, nationale, de l’évolution de la part de chaque mission au sein du fonds. Il me semble que cela répond largement à votre demande.

Votre amendement me paraissant satisfait, je vous invite à le retirer.

M. Thibault Bazin. Sous le précédent quinquennat, la majorité socialiste a fabriqué des régions XXL, si bien que j’ai du mal à retrouver la Lorraine dans la région Grand Est ! Les données dont on dispose ne sont pas assez fines. Serait-il possible d’avoir une déclinaison par délégation territoriale ?

La commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite les amendements AS1166 de M. Michel Larive et AS1102 de Mme Caroline Fiat.

Mme Caroline Fiat. En quarante ans, le poids relatif du privé par rapport au public en matière d’hospitalisation en psychiatrie a plus que doublé. Les cliniques psychiatriques privées sont de plus en plus concentrées au sein de quelques grands groupes : Ramsay Générale de santé, qui compte trente cliniques en France, Clinéa, lui-même propriété du groupe ORPEA, l’un des leaders des maisons de retraites privées – avec trente-huit cliniques en France. Pourtant, qu’il s’agisse de l’hôpital ou des structures sociales et médico-sociales, il est nécessaire de rebâtir la psychiatrie publique, car elle est la seule à pouvoir assurer la gratuité des soins, sans dépassements d’honoraires, ni coûts supplémentaires par nuitée, ainsi que la prise en charge des urgences et des cas les plus lourds.

En France, en 2017, plus de 99 % des personnes hospitalisées sous contrainte ont été prises en charge dans les hôpitaux publics, alors que les hospitalisations libres vont en majorité dans le privé. Les conditions de travail sont meilleures dans le public que dans le privé, où la concurrence les tire vers le bas. Notons que le secteur privé est brandi comme une menace face aux soignants du public. On leur dit que s’ils se plaignent trop, les lits seront donnés au privé – c’est ce qu’explique Olivier, infirmier en psychiatrie à Caen. Dans le public, le patient est pris en charge, tout au long de son parcours, par des équipes qui se connaissent et qui assurent ainsi une continuité relationnelle entre l’extra-hospitalier et l’intra-hospitalier. Les hôpitaux publics sont bien répartis sur l’ensemble du territoire, contrairement à l’offre privée qui se concentre dans les régions les plus rentables. Pour toutes ces raisons, nous demandons que le financement des établissements psychiatriques favorise les établissements publics.

Si vous en êtes d’accord, je défendrai en même temps l’amendement AS1102. Les hôpitaux de proximité sont nécessaires à la couverture santé sur le territoire national. Ils représentent un engagement salutaire de l’État à destination des Français, qu’ils se situent en zones rurales, urbaines ou périurbaines.

L’article 33 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 a entériné l’ouverture de nos hôpitaux à l’exercice libéral. Or l’exercice libéral ne répond pas actuellement aux principes d’un véritable service public de santé. Liberté d’installation, liberté tarifaire, possibilité de travailler en solitaire, moins bon remboursement ne sont pas des principes à développer. Face à cette situation en contradiction avec les objectifs fondamentaux des hôpitaux de proximité, nous demandons l’interdiction de la pratique libérale en leur sein. Vous le voyez, je reste sur la même ligne que l’année dernière.

M. le rapporteur général. Votre amendement AS1166 revient sur la très importante réforme de la psychiatrie, dont nous avons déjà parlé : je me contenterai donc d’un avis défavorable.

S’agissant de l’amendement AS1102, il vise à supprimer la possibilité pour les professionnels de santé libéraux d’exercer dans des hôpitaux de proximité. Je sais que vous rejetez l’exercice libéral, mais ce dont il est question dans les alinéas que vous voulez supprimer, c’est d’une pratique dont certains hôpitaux ont besoin, d’un exercice collectif, d’un exercice qui s’effectue dans le cadre du service public hospitalier, donc sans dépassements d’honoraires.

L’exercice mixte ville-hôpital est un engagement de la loi relative à l’organisation et à la transformation du système de santé votée l’an dernier et de la stratégie « Ma santé 2022 ». Les hôpitaux de proximité en ont particulièrement besoin, car ils ont parfois du mal à embaucher des praticiens hospitaliers. J’émettrai donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme Caroline Fiat. Monsieur le rapporteur général, jamais je ne me suis exprimée contre l’exercice libéral. La seule chose que je demande, c’est que l’exercice libéral n’entre pas dans les hôpitaux publics. J’ai défendu à maintes reprises les personnels libéraux, je ne cesse de dire qu’il faut mettre fin aux déserts médicaux et qu’il faut, pour cela, que les médecins aient envie d’aller s’y installer. La République en Marche a fait voter une loi contre les fake news, alors arrêtez d’en proférer.

La commission rejette successivement les amendements.

Elle examine ensuite l’amendement AS787 de Mme Agnès Firmin Le Bodo.

Mme Agnès Firmin Le Bodo. Introduite par l’article 54 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, l’expérimentation de la facturation directe à l’assurance maladie a connu une montée en charge progressive pour l’activité relative aux consultations et aux actes externes sans hospitalisation. Au regard des risques financiers, organisationnels et techniques inhérents au déploiement de la facturation individuelle des établissements de santé (FIDES) aux séjours hospitaliers, la FHF en demande la suppression.

De même, la rénovation annoncée du financement des passages aux urgences sans hospitalisation pose la question de la mise en œuvre de la FIDES aux actes externes avec forfaits et notamment les autorisations temporaires d’utilisation, qui ne semblent plus d’actualité.

Cet amendement vise ainsi à supprimer cette réforme de facturation directe à l’assurance maladie des prestations d’hospitalisation, médicaments, produits et prestations.

M. le rapporteur général. Je ne sais pas précisément quels furent les échanges dans le cadre du Ségur de la santé autour du sujet précis de la facturation au fil de l’eau pour les séjours hospitaliers dans les établissements publics. Je vous propose d’en reparler en séance publique, en présence du ministre.

Je vous invite par conséquent à retirer votre amendement sinon j’y serai défavorable.

L’amendement AS787 est retiré.

La commission étudie ensuite l’amendement AS1222 de M. François Ruffin.

Mme Caroline Fiat. La Cour des comptes rappelait en 2011 que les pathologies relevant de la psychiatrie se situent, en France, au troisième rang des maladies les plus fréquentes, après le cancer et les maladies cardio-vasculaires. D’après les statistiques de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), le nombre de patients aurait augmenté de 29 % entre 2013 et 2016.

L’ancienne ministre de la santé, Agnès Buzyn, avait reconnu que la psychiatrie était le parent pauvre de la médecine – un parent que l’on a appauvri puisque, durant les dernières décennies, les crédits alloués à la psychiatrie étaient réduits, voire gelés, alors que le budget de l’hôpital augmentait en moyenne de 2 % par an.

Nous l’avions déjà regretté au cours de l’examen du précédent projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) : il est quasiment impossible de trouver des données concernant le financement de la psychiatrie. Nous avons cherché à en obtenir une vue d’ensemble pour comprendre comment les dotations avaient évolué depuis dix, quinze, vingt ans et savoir combien il avait été grignoté à ce secteur ces dernières décennies. Nous n’y sommes pas parvenus. La collecte de ces données, parcellaires, est une galère infinie. Cette situation n’est pas acceptable : aussi demandons-nous un rapport.

M. le rapporteur général. Je prends cet amendement comme un appel. Je partage une partie du constat que vous dressez du financement de la psychiatrie. C’est pour cette raison que nous avons adopté, l’année dernière, une réforme très importante de la psychiatrie, qui permettra de donner des marges de manœuvre aux établissements publics et de prendre en compte les caractéristiques de la population qu’ils doivent prendre en charge, en particulier la précarité.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement AS1224 de M. Michel Larive.

Mme Caroline Fiat. Le mouvement de la psychothérapie institutionnelle s’est développé après-guerre pour sortir les malades de l’asile et mettre l’accent sur l’importance de la relation entre le soignant et le soigné. Pour accompagner cette ambition, il faut promouvoir les recherches en sciences humaines. En effet, la relation sociale est au cœur de la guérison tandis que les psychotropes ne doivent être utilisés qu’en cas de nécessité. Cette recherche doit donc être totalement indépendante, financièrement, des laboratoires pharmaceutiques et des cliniques privées. C’est pourquoi nous demandons un rapport.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur général, la commission rejette l’amendement.

 

Elle passe à l’amendement AS1225 de M. François Ruffin.

Mme Caroline Fiat. La psychiatrie souffre d’un sous-financement depuis des dizaines d’années. On ne saurait chiffrer le manque de budget mais selon les statistiques de la DREES, le nombre de patients a augmenté de 29 % entre 2013 et 2016 et les urgences ont accueilli 36 % de patients en plus. En revanche, les hospitalisations à temps plein ont chuté de 37 % mais pas au profit des méthodes alternatives puisque le placement familial thérapeutique a reculé de 8 %, l’accueil en appartement thérapeutique de 33 % tandis que l’accueil en centre post-cure stagne.

Le financement des hôpitaux est fondé sur la tarification à l’activité (T2A), qui consiste à rémunérer les hôpitaux en fonction du nombre d’actes réalisés. Ce système a montré ses limites concernant la prise en charge des patients à l’hôpital. Cette tarification est peut-être défendable concernant les activités techniques et standardisées qui demandent toujours les mêmes gestes, le même temps. Mais très souvent, à l’hôpital, les activités, justement, ne sont pas standardisables. C’est particulièrement le cas en psychiatrie pour laquelle la T2A est totalement inadaptée. Ce dont ont besoin les soignants, avant tout, c’est de temps. Chaque patient est unique et sa guérison nécessite des relations humaines au long cours.

Par cet amendement, nous refusons que les soins psychiatriques fassent l’objet d’une tarification à l’activité.

M. le rapporteur général. Défavorable.

Mme Caroline Fiat. Vous ne pouvez pas vous contenter de me répondre d’un mot ! Je vous ai donné des chiffres, j’ai pris le temps de vous décrire la situation, de vous expliquer pourquoi la tarification à l’activité n’était pas adaptée ! Le sujet est grave, tout de même !

M. le rapporteur général. Nous avons déjà longuement discuté de ce sujet. Tout d’abord, vous le savez, je préfère que le Parlement rédige ses propres rapports plutôt que d’en demander au Gouvernement. Mme Wonner en a établi un l’année dernière, vous aussi, et vous avez réussi à faire le tour de la question.

Par ailleurs, nous avons réformé le financement de la psychiatrie l’année dernière. Seul le secteur privé de la psychiatrie est aujourd’hui soumis à la tarification à l’activité mais la dotation au financement étouffe le secteur public de la psychiatrie. Faisons le point dans quelques temps, peut-être au sein de cette commission.

En attendant, avis défavorable.

Mme Caroline Fiat. Si j’avais pu déposer un amendement pour simplement demander que soit supprimée la T2A dans le secteur de la psychiatrie, sans qu’il soit déclaré irrecevable, je n’aurais pas eu besoin de réclamer un rapport !

M. Jean-Carles Grelier. Mme Buzyn avait nommé un délégué ministériel chargé de la psychiatrie. Je ne sais pas qui il est, ni ce qu’il fait, car il est censé appliquer une feuille de route dont on ne sait rien. Peut-être serait-il souhaitable que la commission des affaires sociales l’auditionne un jour.

M. le rapporteur général. J’avais justement en tête, en vous proposant de faire le point dans quelques mois, d’auditionner M. Frank Bellivier, délégué ministériel à la santé mentale et à la psychiatrie. Pour le reste, madame Fiat, la réforme que vous appelez de vos vœux a été votée et très bientôt, le secteur de la psychiatrie ne relèvera plus de la T2A.

La commission rejette l’amendement.

Article 29 : Expérimentation d’un modèle mixte de financement des activités de médecine

La commission examine l’amendement AS815 de Mme Justine Benin.

Mme Justine Benin. Cet amendement tend à préciser que la dotation socle tient compte des coefficients géographiques appliqués dans certains territoires. Les coefficients géographiques majorent les tarifs des établissements implantés dans certaines zones pour tenir compte de facteurs qui augmentent le coût de certaines prestations. C’est ainsi le cas, en outre-mer, de l’éloignement, de l’insularité, de la démographie ou du climat. Il est important que les coefficients géographiques soient pris en compte dans le calcul des dotations socles pour que celles-ci soient adaptées aux spécificités culturelles de certains territoires, en particulier en outre-mer.

M. le rapporteur général. L’amendement est satisfait. Dans ce mode de financement optionnel, les coefficients géographiques resteront intégrés à ce mode de financement puisqu’une partie des recettes sera calculée de la même manière qu’aujourd’hui.

Par ailleurs, le montant de cette dotation socle sera calculé sur la base d’un pourcentage des recettes issues de l’activité des séjours de médecine réalisés l’année précédente au sein de l’établissement concerné. Là encore, les coefficients géographiques seront pris en compte. Je vous invite à le retirer.

Mme Justine Benin. C’est vrai, nous en avions discuté l’année dernière, mais nous avions demandé que la Guadeloupe ait le même coefficient géographique que La Réunion, sans obtenir de réponse. Je maintiens donc cet amendement.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis favorable du rapporteur général, elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel AS420 de M. Jean-Louis Touraine.

Puis elle étudie les amendements identiques AS637 de M. Stéphane Viry, AS682 de Mme Josiane Corneloup et AS789 de M. Bernard Perrut.

M. Bernard Perrut. L’article 29 prévoit d’expérimenter, durant cinq ans, un nouveau mode de financement de l’activité de médecine à l’échelle territoriale qui associera une part d’activité avec une part dite « populationnelle » et un financement à la qualité. Nous nous demandons si l’objectif sera atteint.

Dans certains territoires, la coordination dans le domaine de la cancérologie était déjà fragile avant l’épidémie. Les structures ambulatoires de soins curatifs et palliatifs étaient inégalement disponibles en fonction des lieux de vie des individus. Durant cette période de crise, des acteurs de terrain ont témoigné de situations très difficiles pour les personnes malades, contraintes d’être soignées à domicile : isolement extrême des personnes malades, interruption de certains soins pendant la période de confinement, gestion des soins palliatifs par les aidants et difficultés de coordination entre les services d’hospitalisation à domicile et les hôpitaux.

Afin de s’assurer que ce besoin de coordination essentiel aux territoires mais aussi aux personnes malades sera pris en compte dans les conditions d’entrée dans le dispositif, cet amendement tend à modifier l’article 29 pour y inclure l’objectif annoncé par le Gouvernement dans son exposé des motifs.

Ce besoin de coordination pourrait s’apprécier, notamment, au regard des moyens alloués par l’établissement concernant la création des postes d’infirmiers de coordination.

M. le rapporteur général. Il est indiqué dans l’étude d’impact de l’article 29 que cette dotation sera soumise à une contractualisation avec l’ARS sur les objectifs prioritaires d’amélioration des prises en charge hospitalières pour le territoire. Cette contractualisation passera par les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens. Je pense avoir répondu à vos préoccupations.

Avis défavorable.

La commission rejette les amendements identiques.

Elle en vient à l’amendement AS818 de Mme Justine Benin.

Mme Justine Benin. Cet amendement tend à préciser que la dotation reposant sur des caractéristiques populationnelles doit prendre en compte les spécificités territoriales de l’établissement concerné. En effet, les contraintes géographiques peuvent peser sur l’organisation de certains établissements.

M. le rapporteur général. Parmi les critères de la dotation populationnelle figurent certains critères qui expliquent les difficultés en outre-mer, notamment le taux de précarité. Cependant, cette dotation populationnelle ne me semble pas devoir répondre aux problèmes plus structurels que rencontrent les territoires d’outre-mer du fait de certains surcoûts ou de l’éloignement géographique. Ces problèmes sont réels mais cette expérimentation ne doit pas se substituer à d’autres mécanismes plus appropriés comme les coefficients géographiques.

Avis défavorable.

L’amendement est retiré.

La commission passe à l’amendement AS621 de Mme Delphine Bagarry.

Mme Delphine Bagarry. Le groupe Écologie Démocratie Solidarité partage l’objectif du Gouvernement : expérimenter un nouveau mode de financement pour accélérer la réduction de la part de T2A dans le financement de l’hôpital. Cependant, le délai proposé semble démesurément long au regard du mal-être des professionnels de santé et des patients, du fait d’un modèle de financement qui n’a pas été décidé sous cette législature. Dès 2023, les premiers effets de l’expérimentation du nouveau modèle de financement des activités de médecine pourront être connus et, à ce titre, le législateur pourrait, dès le PLFSS 2024, en tirer les conséquences. Au regard de l’urgence posée par la nécessité de changer de modèle de financement, cet amendement vise à réduire de deux ans le délai de l’expérimentation.

M. le rapporteur général. Je comprends votre raisonnement mais il arrive souvent que trois ans ne suffisent pas pour conduire pleinement une expérimentation au sein des établissements et il n’est pas rare qu’il faille revenir devant le Parlement pour en demander la prolongation. Je vous propose donc que nous en restions à cinq ans.

Avis défavorable.

Mme Delphine Bagarry. Je maintiens mon amendement car il est probable que des orientations se dégagent au bout de trois ans quitte, si rien n’en ressort, à prolonger l’expérimentation dans le PLFSS 2024.

M. Pierre Dharréville. Je soutiendrai cet amendement car il me semble que l’on peut dresser un premier bilan au bout de trois ans, quitte à affiner l’expérimentation s’il s’avère nécessaire de la prolonger – ce que je ne souhaite pas car il faut finir par avancer. En tout cas, le Parlement a son mot à dire, en l’espèce.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur général, elle rejette ensuite l’amendement AS817 de Mme Justine Benin, puis l’amendement AS609 de Mme Marine Brenier.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements AS959 de M. Brahim Hammouche et AS431 de Mme Agnès Firmin Le Bodo.

Mme Agnès Firmin Le Bodo. Alors que la volonté de développer les prises en charge en ambulatoire n’a cessé d’être annoncée dans les dernières réformes du système de santé et que la coordination entre la médecine de ville et l’hôpital est essentielle pour assurer une bonne prise en charge des patients chroniques, la mesure ne tient pas compte de ces exigences. L’amendement vise, par conséquent, à garantir la coordination entre les établissements hospitaliers volontaires et les organisations territoriales ambulatoires.

M. le rapporteur général. Vous souhaitez que le décret relatif à cette expérimentation précise les modalités de coordination avec les organisations territoriales ambulatoires, ce qui me semble trop restrictif.

Par ailleurs, l’objet de cette mesure n’est pas – du moins pour le moment –, de mettre en place un financement ville-hôpital, ni même de favoriser des synergies, mais bien de repenser le financement des activités de médecine à l’hôpital pour, à terme, envisager de les sortir de la T2A. Favoriser les synergies ville-hôpital, nous le faisons autrement, grâce aux hôpitaux de proximité, aux projets territoriaux de santé, à l’exercice mixte à l’hôpital.

Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Puis elle examine l’amendement AS821 de Mme Justine Benin.

Mme Justine Benin. Cet amendement tend à adapter l’expérimentation à l’outre‑mer. La réforme du financement des établissements ultramarins est un souhait que nous partageons depuis longtemps. Nous avions d’ailleurs voté un amendement en ce sens, lors de l’examen du dernier PLFSS. Hélas, la crise sanitaire a relégué ce sujet au second plan. Pour autant, il est plus que jamais nécessaire de revoir la tarification dans les hôpitaux ultramarins, comme le soulignait déjà Jean-Marc Aubert dans le rapport qu’il remit en 2018 à Agnès Buzyn.

Une telle réforme devrait lier une dotation socle, des missions d’intérêt général pour les activités les plus lourdes, une petite part de T2A, une revalorisation des coefficients géographiques.

M. le rapporteur général. Cette expérimentation sera ouverte à l’ensemble des établissements de santé exerçant des activités de médecine, y compris les hôpitaux de proximité. Ce financement mixte sera composé de trois compartiments : une part de financement fondé sur les besoins de santé des populations et du territoire, une part à l’activité et une part à la qualité. C’est ainsi que nous avons financé les urgences l’année dernière.

Je ne vois pas pourquoi il faudrait proposer une expérimentation différente aux hôpitaux ultramarins, qui rencontrent les mêmes problématiques que ceux de la métropole. Au contraire, ils devraient être intéressés par ce concept de responsabilité populationnelle, notamment par la prise en compte de la précarité de la population du territoire dans ces modèles de financement innovants.

Je vous invite à retirer l’amendement, sinon avis défavorable.

M. Philippe Vigier. Cet amendement me semblait pertinent au regard de la situation dans les territoires ultramarins. Pour y avoir assuré des vacations il y a quelques années, je sais qu’il leur faut du cousu main. Mme Buzyn avait elle-même compris qu’il faudrait différencier l’évolution des financements. Il est dommage que l’on ne tienne plus compte de ses propos maintenant qu’elle n’est plus aux responsabilités.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur général, la commission rejette ensuite l’amendement AS822 de Mme Justine Benin.

Enfin, elle adopte l’article 29 modifié.

Après l’article 29

La commission examine l’amendement AS422 de M. Jean-Louis Touraine.

M. Jean-Louis Touraine. Je ne suis pas favorable à la multiplication des rapports mais je n’avais pas d’autre moyen de vous soumettre cette proposition, pour une raison que vous connaissez tous.

L’article L 162-22-8-1 du code de la sécurité sociale permet un financement ad hoc des activités de soins répondant à des critères d’isolement géographique. Or, un décret limite le bénéfice de ce financement aux seules activités de médecine, de chirurgie, de gynécologie-obstétrique et de médecine d’urgence, ce qui exclut le traitement de l’insuffisance rénale chronique par dialyse. Il est bien évident qu’il s’agit d’un oubli. Pour corriger cette anomalie, nous vous proposons la rédaction d’un rapport qui mettrait en évidence la nécessité d’y remédier.

M. le rapporteur général. Vous soulevez un point très précis dont j’avoue ne pas avoir connaissance. Je vous invite à y revenir en séance publique, en présence du ministre

M. Jean-Louis Touraine. Seul l’objectif compte. S’il est possible de corriger cette anomalie rapidement par voie réglementaire et de permettre ainsi aux associations qui pratiquent l’épuration extra-rénale par dialyse de bénéficier du même traitement que les activités de chirurgie et de médecine obstétrique, je retire l’amendement.

L’amendement est retiré.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur général, la commission rejette les amendements identiques AS1046 de M. Michel Larive et AS1191 de M. Adrien Quatennens.

Article 30 : Pérennisation et développement des maisons de naissance

La commission est saisie de l’amendement de suppression AS1021 de M. Pierre Dharréville.

M. Pierre Dharréville. La France a perdu 40 % de ses maternités ces vingt dernières années, créant dans certains territoires de graves problèmes d’accès aux soins pour les femmes enceintes.

La création des maisons de naissance pourrait désagréger les maternités encore en place, dont nous avons tant besoin pour maintenir le service public hospitalier à un niveau élevé.

M. le rapporteur général. Vous souhaitez supprimer les maisons de naissance alors que le dispositif, expérimenté depuis plusieurs années, a fait ses preuves. Le Gouvernement et la majorité, au contraire, veulent les étendre.

Tout d’abord, une maison de naissance doit être contiguë à une maternité. S’il n’y a pas de maternité, il n’y a pas de maison de naissance.

Vous dites que les maisons de naissance sont un moyen de réaliser des économies. Or, selon le rapport d’évaluation de l’expérimentation, une prise en charge en maison de naissance est probablement moins onéreuse qu’une prise en charge en maternité mais il faudrait, pour en être certain, comparer les accouchements sans complication, ni césarienne, ni péridurale, en maternité, aux accouchements non médicalisés qui se déroulent en maison de naissance.

L’objectif est d’ouvrir douze nouvelles maisons de naissance, par rapport aux huit qui existent déjà. Une maison de naissance connaît environ cent vingt-cinq accouchements par an. Ce n’est pas cela qui déstabilisera l’offre de maternité en France.

L’idée n’est pas d’inciter les femmes enceintes à accoucher en maison de naissance. Tout le monde ne peut pas ou ne veut pas accoucher sans césarienne ni péridurale. Mais certaines femmes militent pour donner naissance différemment, sans médecin, plus naturellement. Nous devons l’entendre.

Les maisons de naissance, aujourd’hui, sont saturées. Certains territoires, en particulier le mien ou votre région, n’en ont pas, ce qui signifie que les femmes qui le souhaiteraient ne peuvent accéder à ces médecines alternatives, ce qui est dommage.

Pour ce qui est de la sécurité, l’étude menée par l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) sur les maisons de naissance expérimentales révèle que les complications maternelles en maison de naissance sont rares et dans la moyenne des résultats observés dans les maisons de naissance européennes. Ainsi, concernant l’hémorragie postpartum, principale cause de morbi-mortalité maternelle, les situations rencontrées pendant l’expérimentation n’ont pas excédé la fréquence répertoriée dans la population générale. Les mêmes constats sont posés pour ce qui concerne les autres complications néonatales.

Avis défavorable.

M. Pierre Dharréville. Loin de me rassurer, vous avez renforcé mes craintes. S’il faut dégager des moyens supplémentaires et créer de nouvelles formes d’accueil, il faut y réfléchir à partir des structures existantes. Qu’entendez-vous par structures contiguës ? Je ne suis pas certain de bien comprendre. Je suis perplexe. Nous savons qu’il est nécessaire de disposer de personnels formés aptes à faire face à toutes les éventualités. Vous ne m’avez pas convaincu.

M. Thibault Bazin. Vous présentez les maisons de naissance sous un jour très favorable mais la pérennisation du dispositif ainsi que son élargissement progressif ne sont pas suffisamment encadrés pour nous assurer qu’elles ne finiront pas par masquer des fermetures de maternités dans des territoires où les ARS ou les centres hospitaliers régionaux universitaires exercent une forte pression pour aller dans ce sens.

Je l’ai moi-même constaté : il a fallu que j’intervienne avec le président du conseil de surveillance et le maire de la commune pour que la maternité ne soit pas fermée pendant le confinement, ce qui aurait encore davantage éloigné les futures mamans du lieu où elles pourraient accoucher ! On ne peut pas ignorer les pressions locales qui s’exercent pour que certaines maternités soient fermées. L’expérimentation ne peut être élargie si, en parallèle, l’engagement n’est pas pris de maintenir les maternités dans des territoires en souffrance où les maires doivent rester attentifs au problème de la distance entre le domicile d’une femme enceinte et la maternité.

Un second sujet de réflexion est celui de la liberté de choix, que l’on doit faire respecter dans tous les domaines, de manière cohérente, et dont nous reparlerons sans doute tout à l’heure, sans oublier la question du congé de paternité.

Mme Monique Limon. Je ne perçois pas l’implantation des maisons de naissance comme une menace pour les maternités puisque, par principe, elles devront être adossées à un centre hospitalier universitaire (CHU) afin d’assurer un accouchement en toute sécurité.

Ces maisons de naissance offriront simplement aux femmes qui le souhaitent la possibilité d’être accompagnées par des sages-femmes durant leur grossesse, l’accouchement et après la naissance.

Mme Monique Iborra. Les maisons de naissance sont adossées aux CHU mais aussi aux maternités. Le danger serait, en effet, de les voir remplacer les maternités à terme mais nous examinerons précisément un amendement visant à garantir le fait que ces maisons de naissance restent adossées aux maternités.

Je répondrai par ailleurs à M. Pierre Dharréville, qui s’inquiétait de la formation des personnels de ces maisons de naissance : si les sages-femmes ne sont pas formées pour accompagner des grossesses et des accouchements, je me demande bien qui peut l’être !

Enfin, les maisons de naissance offrent la possibilité de vivre un accouchement différent, moins médicalisé. Nous devons respecter ce choix. Du reste, il y a bien longtemps que les maisons de naissance existent dans les pays nordiques, souvent cités en exemple, et le taux de mortalité périnatale y est bien plus faible qu’en France.

J’espère vous avoir convaincu que le dispositif des maisons de naissance ne représente pas un danger pour les femmes et leurs enfants.

Mme Perrine Goulet. Le nombre de femmes souhaitant accoucher à domicile pour éviter la médicalisation est en hausse dans notre pays ; or ce n’est pas toujours une bonne idée. Les maisons de naissance sont une solution intermédiaire entre l’accouchement à domicile et la médicalisation des maternités, leur proximité avec les maternités offrant la possibilité, en cas de complication, de bénéficier du plateau technique.

Il faut toutefois rester vigilant sur un point : le nombre de naissances dans les maisons de naissance doit être additionné à celui des naissances dans les maternités, qu’elles complètent, afin d’éviter des pertes de moyens, notamment en ce qui concerne les plateaux techniques.

M. Thibault Bazin. Si l’on peut très facilement adosser des maisons de naissance à des maternités régionales, il faut aussi prendre en compte que les ARS exercent une pression dans certains territoires reculés pour fermer des maternités de proximité. L’ouverture d’une maison de naissance contiguë à une maternité régionale ne doit pas servir de prétexte à la fermeture de la maternité de proximité, qui accomplit 120 accouchements par an.

Je suis favorable à la liberté de choix mais également à un minimum de présence des services publics en proximité. Or l’article 30, tel qu’il est rédigé, ne prévoit aucun verrou pour empêcher la fermeture de maternités de proximité. Celles-ci sont pourtant très importantes pour les femmes qui accouchent, surtout quand il s’agit de leur deuxième ou de leur troisième enfant, qui naît plus vite.

Mme Caroline Fiat. Il est toujours risqué de faire dire aux gens ce qu’ils n’ont pas dit et de répondre à des questions qu’ils n’ont pas posées ! Personne ici n’a prétendu que les maisons de naissance étaient dangereuses. Les maternités « classiques » ont joué le jeu et commencé à améliorer l’accueil des femmes enceintes qui ne souhaitaient pas d’accouchement médicalisé ; on a ainsi vu des baignoires arriver dans les salles d’accouchement. Puis, à force de fermer les vannes du financement, les maternités se sont retrouvées dans l’incapacité de fournir ces services.

Pourquoi créer ces structures qui commençaient à exister ? Si cela répond à une demande, les maternités doivent pouvoir proposer aux femmes qui le souhaitent d’accoucher de manière non médicalisée. Faute de quoi les petites maternités qui ne pourront pas disposer d’une maison de naissance à côté de leur service risquent de fermer. Une maternité peut proposer des accouchements non médicalisés. C’est d’ores et déjà possible. N’inventons pas l’eau tiède !

Mme Delphine Bagarry. Ma collègue vient de dire exactement ce que je voulais dire ! La demande sociétale est là : de plus en plus de femmes souhaitent accoucher à domicile. Pourtant, du point de la sécurité tant de la mère que de l’enfant, il est certainement préférable d’accoucher dans une maison de naissance. Ou alors, il faut doter chaque maternité d’une maison de naissance. Ainsi, le sujet serait clos et l’hôpital redorerait son blason en proposant aux femmes d’accoucher comme elles le décident.

M. le rapporteur général. Il n’est pas question de mettre des maternités en danger. Il ne s’agit du reste que de douze maisons de naissance supplémentaires, qui pratiquent cent vingt à cent vingt-cinq accouchements par an, ce qui ne va certainement pas mettre en péril le tissu de maternités de notre pays.

Je suis très sensible à la question soulevée par certains d’entre vous sur le risque qu’une maison de naissance pratiquant une centaine d’accouchements mette en jeu l’existence de l’autorisation de la maternité à laquelle elle est accolée. Je vous propose donc d’y travailler de façon collective d’ici à la séance pour sécuriser le dispositif.

Madame Fiat, je comprends votre position sur les femmes qui veulent accoucher de façon physiologique dans une maternité, mais ce n’est pas la même chose : dans une maternité, ce sera médicalisé, avec le scope, la péridurale... Je me suis rendu à la seule maison de naissance en Île-de-France, à la maternité des Bluets, il y a quelques semaines : il ne s’agit pas des mêmes pratiques.

Quant à prévoir d’accoler une maison de naissance à chaque maternité, je ne crois pas que cela réponde à la demande générale. Les maisons de naissance sont tenues par des sages-femmes libérales qui n’ont pas spécialement envie d’ailleurs.

Je vous propose donc de sécuriser le dispositif des autorisations d’ici à la séance. Pour le reste, j’espère avoir répondu aux différentes inquiétudes.

La commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement AS1241 du rapporteur général.

M. le rapporteur général. Le présent amendement vise à préciser que la direction médicale des maisons de naissance est confiée aux sages-femmes.

Mme Valérie Six. Tant que la maison de naissance est adossée à un établissement de santé, elle est sous la responsabilité, en cas de problème, d’un médecin. Le fait que la direction médicale ne soit assurée que par les sages-femmes, si cet amendement est adopté, m’interpelle.

M. le rapporteur général. Une maison de naissance est d’ores et déjà une entité juridique distincte de l’établissement de santé auquel elle est accolée, et les sages-femmes en assurent déjà la direction et la responsabilité médicales. Il s’agit tout simplement d’en rester au droit actuel.

Mme Valérie Six. En cas de problème, qui prend la responsabilité du transfert de la patiente vers l’hôpital ?

M. le rapporteur général. Quand la femme qui accouche se trouve dans la maison de naissance, elle est sous la responsabilité de la sage-femme. Si, en cas de problème, elle est transférée à la maternité, elle passe sous la responsabilité médicale du gynécologue-obstétricien et de l’équipe de sages-femmes de la maternité. La responsabilité ne peut se trouver d’un côté quand la patiente est de l’autre : elle est assurée par le professionnel de santé qui s’occupe de la patiente.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements AS823 de Mme Justine Benin et AS1126 de Mme Hélène Vainqueur-Christophe.

Mme Justine Benin. L’amendement a pour objet d’assouplir les conditions d’existence des maisons de naissance. Il faut rappeler que l’expérimentation s’est particulièrement bien passée, avec des conséquences très positives – je pense notamment à la maison de naissance en Guadeloupe, présente au sein d’une clinique privée.

L’objectif n’est pas de remplacer les maternités par de nouvelles structures low cost ou moins qualitatives, mais de proposer une véritable solution alternative à la maternité, avec un accouchement naturel et un suivi spécifique, aussi bien en amont qu’en aval, avec une vraie préparation à la parentalité et à l’accueil de l’enfant.

Mme Hélène Vainqueur-Christophe. L’expérimentation menée en Guadeloupe a été très positive. Il est important pour nous d’améliorer le système en assouplissant le critère de contiguïté des maisons de naissance avec l’établissement partenaire. En effet, les locaux des établissements de santé sont, pour la plupart, exigus : ils ne permettent pas d’accueillir une maison de naissance et la vie associative qui l’accompagne. Le présent amendement vise donc à poser une condition non pas de contiguïté, mais de proximité.

M. le rapporteur général. Je comprends ces amendements mais le critère de la contiguïté me paraît essentiel ; la proximité ne suffit pas. Au cours de l’expérimentation, les transferts pendant le travail ont concerné plus de 20 % des accouchements – c’est la moyenne européenne –, ce qui est loin d’être négligeable.

Pour le moment, dans l’attente de données scientifiques complémentaires, je préfère ne pas jouer avec la sécurité des femmes enceintes et des nourrissons alors que nous sommes en train de progresser. Ma réponse devrait aussi apaiser certaines inquiétudes exprimées par M. Dharréville sur ce dispositif.

Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements AS824 de Mme Justine Benin et AS1131 de Mme Hélène Vainqueur-Christophe.

Mme Justine Benin. Je retire mon amendement.

L’amendement AS824 est retiré.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur général, la commission rejette l’amendement AS1131.

 

Elle se saisit ensuite de l’amendement AS826 de Mme Justine Benin.

Mme Justine Benin. Il s’agit d’un amendement de repli, visant à permettre aux maisons de naissance de contractualiser avec plusieurs établissements de santé.

M. le rapporteur général. Vous voudriez qu’une maison de naissance soit en contiguïté avec deux maternités en même temps, ce qui me paraît compliqué.

Avis défavorable.

L’amendement est retiré.

La commission en vient à l’amendement AS932 de M. Julien Borowczyk.

M. Julien Borowczyk. Je souhaite rappeler tout d’abord que beaucoup de maternités ont fermé par manque de gynécologues et de professionnels.

Il serait intéressant de permettre aux maisons de naissance de contractualiser avec un hôpital de proximité car ce dernier a pour caractéristique de créer un lien entre l’hôpital et la ville en assurant des missions accessoires comme les urgences ou la périnatalité.

M. le rapporteur général. Selon la loi relative à l’organisation et à la transformation du système de santé, que nous avons votée l’année dernière, les hôpitaux de proximité ne sont pas autorisés à accueillir une maternité. Or il est essentiel, pour la sécurité des patientes, d’assurer une contiguïté de la maison de naissance avec une maternité.

Avis défavorable.

Par ailleurs, dans la dernière loi de financement de la sécurité sociale, nous avons adopté un dispositif favorisant la prise en charge du transport et de l’hébergement des patientes vivant loin d’une maternité à l’approche de la date de l’accouchement.

Mme Véronique Hammerer. Dans certaines régions, les femmes doivent parcourir une cinquantaine de kilomètres pour aller accoucher. Lorsque l’hôpital est trop éloigné, il paraît pertinent de créer un dispositif permettant aux sages-femmes d’accompagner les patientes ; en cas de problème, ces dernières peuvent toujours être évacuées par hélicoptère.

L’hôpital de Blaye a déjà une maternité, qui réalise 400 à 500 accouchements par an : il est donc hors de question qu’une maison de naissance s’y installe. Néanmoins, je ne vois pas pourquoi l’on ne pourrait pas soutenir des maisons de naissance privées : cela permettrait de proposer des solutions et un accompagnement encadré à des personnes vivant loin de tout hôpital.

Mme Caroline Fiat. Je remercie notre collègue d’avoir précisé que les maisons de naissance étaient privées : c’est un point important, en effet.

Adosser une maison de naissance à un hôpital de proximité qui, bien souvent, n’a pas d’anesthésiste, c’est mettre la patiente en danger. Quand un accouchement se passe mal, il faut parfois réaliser une césarienne dans les 5 à 10 minutes : je sais que les hélicoptères sont puissants, mais tout de même ! Et qui paiera l’hélicoptère ? Je ne suis pas sûre que ce soit la maison de naissance. Pour sauver une personne dans ces conditions, il faut a minima un anesthésiste et un gynécologue-obstétricien pour accueillir la maman et le nourrisson. Je ne soutiendrai donc pas cet amendement.

M. Thibault Bazin. Monsieur le rapporteur, vous dites qu’un hôpital de proximité ne peut pas avoir de maternité. Ainsi, dès lors qu’un établissement possède une maternité, et même s’il correspond plus ou moins à un hôpital de proximité, l’ARS devra l’enregistrer comme un établissement de niveau supérieur. Cela est pertinent au regard du maillage territorial.

M. Pierre Dharréville. Ce débat souligne le besoin de maternités dans nos territoires. Leur absence crée parfois des situations extrêmement délicates. Il m’est arrivé d’aller défendre des maternités dans certains départements où la situation était préoccupante, des fermetures étant annoncées en raison d’un manque de personnel, notamment de sages‑femmes. Si l’on ouvre des structures qui, sans être des maternités, font appel à des sages-femmes, les difficultés de recrutement seront peut-être plus grandes encore.

De plus, je redoute une mise en concurrence accrue entre les différentes structures. Cette perspective me rend dubitatif et m’étonne un peu quand je la relie à d’autres sujets concernant l’hôpital.

Enfin, la demande d’accompagnement fait naître des initiatives. Dans ma circonscription, une maison a été créée – ce n’est pas une maison de naissance – dans laquelle des professionnels se rassemblent pour proposer un accompagnement avant et après la naissance ; cela marche plutôt bien. En l’occurrence, elle n’est pas adossée à une maternité ni à un hôpital : c’est une autre démarche, qu’il faut encourager.

M. Philippe Vigier. Selon moi, cet amendement va dans le bon sens. Dire qu’une maison de naissance est un établissement privé n’est pas un gros mot. La signature d’une convention avec un hôpital public permettrait de garantir que privé et public marchent ensemble. Si une hémorragie survient pendant l’accouchement en maison de naissance, la convention avec l’hôpital de proximité serait alors un gage de sécurité pour la patiente. Cela montrerait aussi que les hôpitaux de proximité – dont chacun reconnaîtra qu’ils tardent à être labellisés – sont en mesure d’apporter un service public complémentaire. Cet amendement est donc frappé au coin du bon sens car il reflète la réalité du terrain et permettrait d’apporter des solutions complémentaires aux femmes en toute sécurité.

M. Jean-Carles Grelier. Je souhaite rappeler – ce sera sans doute la seule fois dans ce débat que je serai d’accord avec Mme Iborra... – que les sages-femmes sont des personnels médicaux dûment formés à la mission qui leur est confiée. Il était important de le souligner pour ne pas laisser dévaloriser le rôle des sages-femmes.

M. le rapporteur général. Les sages-femmes sont en effet des personnels médicaux très bien formés à leur activité : ce sont de vraies professionnelles de la santé de la femme.

Les maisons de naissance sont des structures privées qui permettent à des sages‑femmes en libéral d’exercer une activité un peu différente. Toutefois, je m’inscris en faux contre les propos de M. Vigier : signer une convention avec un hôpital de proximité n’est pas un gage de sécurité pour une maison de naissance. L’hôpital de proximité n’a pas de maternité, donc pas de gynécologue et probablement pas d’anesthésiste-réanimateur. En cas d’urgence, il n’y aurait aucune assurance de pouvoir prendre en charge la patiente.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS1127 de Mme Hélène Vainqueur-Christophe.

Mme Hélène Vainqueur-Christophe. Je propose que la création et la gestion des maisons de naissance soient exclusivement confiées à des sages-femmes afin de conserver le caractère innovant de ces structures à taille humaine et d’en assurer le bon fonctionnement. L’indépendance dans la décision et dans l’action des sages-femmes gestionnaires de la maison de naissance est une garantie d’adaptation de cette structure, qui doit continuer à innover tout en restant au plus près des besoins des parents et des familles.

M. le rapporteur général. L’objectif de l’article n’est nullement d’empêcher les sages-femmes de gérer les maisons de naissance. Il prévoit clairement qu’elles sont au centre du dispositif mais il ouvre cette possibilité à des associations ou à des groupements d’intérêt public ; c’est d’ailleurs le cas pour certaines maisons de naissance existantes. Cela n’enlève rien aux sages-femmes. Vous avez même voté un amendement que je vous avais proposé pour garantir que les sages-femmes assureront la direction médicale.

La commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS1240 du rapporteur général.

M. le rapporteur général. Cet amendement a pour objet de préciser la forme juridique des maisons de naissance. En l’état, l’article 30 permet à une seule sage-femme de créer une maison de naissance ; or il semble préférable de maintenir le portage par un collectif de sages-femmes associées dans ce but.

La commission adopte l’amendement.

Elle en vient à l’amendement AS827 de Mme Justine Benin.

Mme Justine Benin. En relisant mon amendement, je me rends compte que l’amendement AS1241 que nous avons adopté répond probablement à ma demande. Défendu.

M. le rapporteur général. Je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement car il est en effet satisfait.

L’amendement est retiré.

La commission examine l’amendement AS1125 de Mme Hélène Vainqueur-Christophe.

Mme Hélène Vainqueur-Christophe. Le présent amendement vise à supprimer la seconde phrase de l’alinéa 12 précisant que les sages-femmes doivent exercer leur profession conformément aux recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS). Cette précision nous apparaît superfétatoire dès lors que le code de déontologie de la profession énumère clairement les obligations et les bonnes pratiques professionnelles.

M. le rapporteur général. Je comprends votre remarque mais dans le cas des maisons de naissance, la référence aux recommandations de la HAS au niveau de la loi me semble importante. Il s’agit de recommandations spécifiques sur l’organisation des maisons de naissance, qui vont au-delà des recommandations de bonnes pratiques relatives à la prise en charge des femmes enceintes et de l’accouchement.

Comme le cadre est très nouveau, il me semble important qu’il apporte toutes les garanties de sécurité nécessaires. Je comprends que les sages-femmes trouvent cela superfétatoire mais, en l’occurrence, cela va mieux en le disant.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement AS541 de Mme Marie-Pierre Rixain.

Mme Marie-Pierre Rixain. L’article 30 prévoit la généralisation et la montée en charge progressive des maisons de naissance. Solution alternative aux maternités, elles proposent un accompagnement global, unique et sécurisé aux femmes enceintes. Les premières expérimentations ont donné pleine satisfaction aux parturientes comme aux sages‑femmes. Ces structures peinent d’ailleurs à accepter toutes les demandes, tant l’offre qui y est dispensée répond à des besoins réels. Je vous propose donc, dans cet esprit, que les maisons de naissance pratiquent systématiquement le tiers payant afin de rendre ces structures accessibles à l’ensemble des familles.

M. le rapporteur général. Votre amendement est satisfait car, depuis le 1er janvier 2017, les professionnels de santé libéraux doivent pratiquer le tiers payant pour les soins pris en charge au titre de la maternité. Je vous propose donc de retirer votre amendement.

L’amendement est retiré.

La commission examine l’amendement AS400 de M. Stéphane Viry.

M. Alain Ramadier. Le présent amendement a pour objet la remise d’un rapport au Parlement exposant les perspectives de développement des maisons de naissance avec pour objectif leur généralisation dans l’ensemble des départements.

M. le rapporteur général. Je m’interroge car votre amendement prolonge l’expérimentation des maisons de naissance, alors même que l’article permet de sortir du cadre expérimental pour basculer dans le droit commun.

Votre amendement étant satisfait, je vous propose de le retirer.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’article 30 modifié.

Après l’article 30

La commission examine, en discussion commune, l’amendement AS555 de Mme Marie-Pierre Rixain ainsi que les amendements identiques AS145 de M. Bernard Perrut, AS428 de Mme Annie Vidal, AS518 de M. Guillaume Chiche, AS964 de Mme Marie-Noëlle Battistel et AS1192 de M. Michel Larive.

Mme Marie-Pierre Rixain. L’entretien postnatal obligatoire est essentiel pour les femmes qui viennent d’accoucher. Depuis 2008, deux séances postnatales sont proposées dans les réseaux de périnatalité. Elles sont réalisées par une sage-femme ou un autre professionnel référent. Ces séances sont proposées en priorité aux femmes dont la situation de vulnérabilité a été décelée pendant la grossesse ou après l’accouchement.

La HAS et le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes recommandent de renforcer cet accompagnement en généralisant l’entretien postnatal, de préférence entre le huitième et le quinzième jour suivant l’accouchement, permettant aux femmes d’exprimer leur vécu, leurs besoins, voire leurs difficultés. Le suivi peut ainsi être ajusté.

Cet entretien est, selon les professionnels, un moyen efficace de prévenir la dépression postpartum, qui frapperait 10 à 15 % des mères et constitue probablement la principale complication de la grossesse. Le professeur Boris Cyrulnik explique que cela peut avoir de graves conséquences pour le développement de la relation avec l’enfant. Le présent amendement vise à instaurer un entretien postnatal obligatoire qui permettrait à la mère de relater son expérience et au professionnel de lui proposer un parcours postnatal individualisé.

M. Bernard Perrut. Recommandé depuis 2014 par la HAS et par le rapport de la commission sur les 1 000 premiers jours de la vie, l’entretien postnatal est encore trop méconnu. Nous souhaitons qu’il soit systématiquement proposé après l’accouchement et réalisé par un médecin ou une sage-femme dans les deux mois qui suivent. L’objet de cet entretien est de prévenir la dépression des nouvelles mamans et d’accompagner les parents. Le nombre de femmes rencontrant des difficultés est relativement important, de 15 à 35 % selon les études. Pour améliorer leur prise en charge, l’entretien postnatal précoce devrait être généralisé.

Mme Annie Vidal. Mon amendement vise à généraliser l’entretien postnatal pour diminuer le risque de dépressions postpartum.

Mme Delphine Bagarry. L’amendement identique AS518 est issu d’une préconisation du Conseil national de l’ordre des sages-femmes. Dans les suites immédiates de la naissance, le dispositif Prado de l’assurance maladie fonctionne bien : il permet de rappeler les mères dans les vingt-quatre, quarante-huit ou soixante-douze heures après leur sortie de la maternité. Nous proposons que l’entretien postnatal soit organisé dans les deux mois qui suivent l’accouchement, soit plus longtemps après la sortie de la maternité, dans une stratégie de prévention, tant pour la mère que pour l’enfant.

M. Joël Aviragnet. L’importance de l’entretien postnatal, sujet de notre amendement AS964, a été bien soulignée.

Mme Caroline Fiat. Mes collègues ont bien défendu l’amendement AS1192, qui nous a été soumis par le Conseil national de l’ordre des sages-femmes. Comme quoi, le groupe La France insoumise aime bien les sages-femmes libérales...

Mme la présidente Fadila Khattabi. Une précision effectivement utile au débat !

M. le rapporteur général. Cet amour des sages-femmes est visiblement partagé, puisque la proposition a largement inspiré nos collègues, sur tous les bancs.

S’agissant de l’entretien postnatal, les amendements en précisent toutefois les objectifs de manière trop précise et excluante. Je veux notamment parler de l’amendement AS555, qui vise des sujets différents de ceux qu’évoquent les amendements identiques.

Je vous propose donc de les retravailler ensemble, pour aboutir à un contenu commun d’ici à la séance, ce qui permettrait d’en corriger certaines inexactitudes. Mme Rixain parle ainsi de femmes enceintes alors qu’en postnatal, elles ne le sont plus. Il serait aussi souhaitable de trouver une dénomination plus large des objectifs de cet entretien. J’y serais alors favorable.

Demande de retrait, pour l’instant, en vue d’un travail commun d’ici à la séance.

Mme Marie-Pierre Rixain. Je retire l’amendement AS555, afin de mener un travail collectif en vue de la séance.

M. Joël Aviragnet. Je veux bien retirer l’amendement AS964, mais il faut que tout le monde se retrouve dans ce travail collectif. Ce ne doit pas être seulement M. le rapporteur général qui le récupère, comme par le passé.

M. le rapporteur général. Je ne déposerai pas d’amendement, mais laisserai mes collègues le faire.

M. Joël Aviragnet. Monsieur le rapporteur général, vous me comblez...

M. Bernard Perrut. Nous faisons confiance au rapporteur général, qui mérite toute notre considération. Définir une solution commune, pour un projet auquel nous sommes tous associés, serait un moyen de montrer que nous traitons les mêmes sujets ensemble.

Mme Annie Vidal. Je retire également l’amendement AS428.

Mme Delphine Bagarry. Je fais de même avec l’amendement AS518, comme la majorité.

Mme Caroline Fiat. Je retire aussi l’amendement AS1192.

Tous les amendements sont retirés.

La commission examine, en discussion commune, l’amendement AS542 de Mme Marie-Pierre Rixain ainsi que les amendements identiques AS528 de M. Guillaume Chiche, AS967 de Mme Marie-Noëlle Battistel et AS1197 de Mme Caroline Fiat.

Mme Marie-Pierre Rixain. Depuis l’élaboration de la loi relative à l’organisation et la transformation du système de santé, des travaux sont en cours afin de moderniser le régime d’autorisation des maternités, dans le but de garantir à chaque femme sa sécurité, ainsi que celle de son enfant, comme des soins de qualité, partout sur le territoire.

Dans cet esprit, le PLFSS 2020 prévoit un dispositif spécifique, appelé « engagement maternité », qui propose une offre adaptée de suivi pré- et postnatal, et d’accompagnement aux femmes enceintes résidant à plus de 45 minutes d’une maternité. Pour ces femmes, l’assurance maladie prend en charge des prestations d’hébergement, en amont du terme prévu de la grossesse, ainsi que le transport entre le domicile et la maternité.

Ce dispositif est crucial tant le maintien des petites maternités est devenu un emblème de l’accès aux services publics dans les territoires. Néanmoins, cet « engagement maternité » y prend difficilement corps. C’est pourquoi l’amendement AS542 demande au Gouvernement de dresser un bilan de son application, afin de lancer une réflexion sur les mesures à mettre en œuvre, pour encourager son déploiement.

Mme Delphine Bagarry. L’amendement AS528 vise deux demandes de rapport sur l’extension du dispositif « engagement maternité » à l’ensemble du territoire – Mme Rixain a bien expliqué ce que recouvrait le dispositif. La proposition émane aussi du Conseil national de l’ordre des sages-femmes. Elle traduit un vrai besoin comme une appétence pour un tel dispositif. Il serait donc intéressant que nous votions l’amendement, pour obtenir ces rapports.

M. le rapporteur général. Je comprends bien l’idée derrière ces amendements – je rappelais d’ailleurs que nous avions voté cette disposition l’année dernière. Mais la publication du décret d’application de cette mesure, qui était envisagée au mois de juin, a été retardée en raison de la crise sanitaire. Il paraît donc difficile de rédiger un rapport sur sa mise en œuvre au mois de juin.

Si le décret devait être publié prochainement – j’interrogerai le ministre à ce sujet en séance –, nous pourrions nous pencher sur la question lors du prochain Printemps de l’évaluation. Parce qu’un rapport dès le mois de juin semble trop précoce, je vous suggère de retirer vos amendements, et de revenir sur le sujet avec le ministre en séance.

Mme Marie-Pierre Rixain. Je regrette que le décret d’application n’ait pu encore être publié, alors que la mesure est grandement attendue dans les territoires, notamment par les femmes enceintes, qui connaissent des difficultés dans l’accompagnement de leur grossesse.

Je retire néanmoins l’amendement AS542, en vue d’une discussion avec le ministre et d’une réponse sur la date de publication du décret d’application.

Mme Delphine Bagarry. L’amendement AS528 est retiré au profit d’un rapport sur l’allongement des délais de publication des décrets...

Les amendements AS542, AS528 et AS967 sont retirés.

La commission rejette l’amendement AS1197.

Article 31 : Soutien au développement des hôtels hospitaliers

La commission examine l’amendement de suppression AS1019 de M. Pierre Dharréville.

M. Pierre Dharréville. Le développement des hôtels hospitaliers s’inscrit dans le virage ambulatoire, dont nous n’avons pas forcément tiré tous les enseignements. Il s’agit de remplacer les hospitalisations de jour par des séjours en hôtel non médicalisés, afin d’optimiser la gestion de l’hôpital et de faire des économies.

En outre, ce dispositif permettrait à un hôpital de sous-traiter à un acteur privé la mise en place d’un dispositif d’hébergement non médicalisé pour les soins ambulatoires, ce qui pose la question du recours au soin ambulatoire et de la façon dont nous assumons un service public du soin, notamment hospitalier. Cela ouvre la voie à une forme de privatisation rampante du service public hospitalier. Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de l’article 31.

M. le rapporteur général. Je connais votre opposition aux hôtels hospitaliers, que je ne partage pas nécessairement. Personne n’obligera les hôpitaux à développer ces projets innovants, que l’assurance maladie prendra mieux en charge.

Je vois aussi quelques avantages à ces structures. Pour les patients, d’abord, puisqu’elles évitent des hospitalisations plus précoces ou prolongées, des transports répétés, un environnement possiblement anxiogène et l’exposition inutile à des maladies liées aux soins.

Pour les établissements de santé, elles permettent aussi d’optimiser les prises en charge hospitalières, de recentrer l’activité sur les soins, donc de prendre en charge un plus grand nombre de patients.

Pour l’assurance maladie, enfin, ces structures peuvent permettre de moindres dépenses, eu égard au coût d’un tel hébergement, qui est inférieur à celui d’une hospitalisation complète ou d’un transport sanitaire.

Visiblement, pour les patients, le dispositif fonctionne. Le rapport d’évaluation de l’expérimentation, transmis au Parlement, fait état d’un taux de satisfaction des patients particulièrement élevé, de l’ordre de 90 à 95 %. Cette satisfaction se retrouve au sein de toutes les dimensions de l’expérimentation, qu’il s’agisse de l’accueil, de l’information, de l’accompagnement des patients ou du confort de l’hébergement proposé.

À l’Institut Gustave Roussy, centre régional de lutte contre le cancer, par exemple, lorsqu’un patient doit commencer une séance de chimio- ou de radiothérapie tôt le matin, alors qu’il vient de loin – cela se produit très souvent car l’institut est très spécialisé –, si cela n’est pas nécessaire, il n’est pas hospitalisé la veille, comme on le ferait ailleurs. Une prestation hôtelière, remboursée par l’assurance maladie lui est fournie. C’est sans aucun doute beaucoup plus confortable pour le patient qui reçoit les soins.

Cette expérimentation permettra de s’assurer du bon fonctionnement du dispositif, qui donne de très bons résultats dans d’autres pays, notamment en Europe du Nord. Pourquoi ne pas aller plus loin ?

Avis défavorable.

M. Pierre Dharréville. J’entends le besoin d’un nouveau type de service, mais seulement dans une certaine mesure, car on voit bien que le recours à la chirurgie et au soin ambulatoires a pu conduire à certains excès. Il ne faudrait pas que ce dispositif conduise à alimenter ces excès.

Alors que nous devrions nous demander comment le service public peut honorer ce besoin nouveau, évoluer – l’hôpital le fait ; il se transforme tous les jours –, vous trouvez une solution, toujours la même, celle d’une forme d’externalisation. Je le regrette car certaines activités, comme l’hôtellerie, pourront paraître potentiellement lucratives. Nous devrions au contraire travailler à rendre ce service public. C’est le débat auquel conduit réellement cet amendement.

Mme Delphine Bagarry. Je souscris entièrement au principe qui permet d’éviter les transports à certains patients, obligés de faire des allers-retours dans la journée parce qu’ils habitent loin de l’hôpital. Les hôtels hospitaliers peuvent être un confort pour eux.

Je souscris moins à l’argument financier et j’appelle l’attention sur une éventuelle perte en qualité de soins. En ces temps difficiles, où il faut accorder la priorité à certains financements, le moment est-il bien choisi pour apporter un soutien financier à un tel dispositif ? Ces montants pourraient en effet être fléchés ailleurs, notamment sur les lits d’hôpitaux ou le personnel.

Comment s’assurer qu’il n’y ait ni perte de soins, ni effet de bord et de profit, que nous n’aurions pas envisagés et qui nous obligent, comme nous le ferons pour les prestataires de services, à borner le dispositif et à exiger une charte de qualité ou un engagement ? Je ne les vois pas dans cet article, ce qui m’inquiète.

Je me suis posée toutes ces questions, même si j’estime que les hôtels hospitaliers sont très utiles, notamment dans des territoires éloignés des grands centres, comme ma circonscription, pour éviter des transports itératifs, coûteux pour la santé, plus que pour les finances.

M. Julien Borowczyk. J’entends ces interrogations mais il ne faut pas se tromper de cible : les hôtels hospitaliers sont un confort apporté aux patients et aux praticiens. Nous l’avons vu à propos des périodes pré- et postopératoires, en particulier dans les conclusions du rapport de Marc Delatte, il s’agit vraiment d’une prise en charge confortable, qui évite des réhospitalisations et un risque de pathologies nosocomiales par une réhospitalisation pouvant entraîner des complications. Nous appelons donc de nos vœux sa mise en place assez rapide.

Je comprends qu’il faille border le dispositif et se poser la question de la sécurité de la prise en charge des patients, qui fonde notre réflexion dans cet article. Au-delà, c’est d’abord et avant tout un confort inéluctable, apporté aux patients et aux praticiens, notamment de ville, pour la continuité et le parcours de soins.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS1020 de M. Pierre Dharréville.

M. Pierre Dharréville. Il s’agit de supprimer l’alinéa 3 de l’article, pour les raisons que j’ai exposées.

M. le rapporteur général. Vous souhaitez contractualiser avec les prestataires privés. Trois modèles existent aujourd’hui pour le développement d’hôtels hospitaliers. Certains établissements ont développé des prestations d’hébergement en interne, ce qui va dans votre sens. Une douzaine d’autres ont conclu des partenariats avec des hôtels de type commercial. Enfin, dix établissements ont fait le choix d’un partenariat avec des structures associatives. Pourquoi empêcher ceux qui l’ont déjà fait et qui en sont satisfaits de continuer à développer de tels partenariats ?

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS1030 de M. Marc Delatte, qui fait l’objet du sous-amendement AS1245 du rapporteur général.

M. Marc Delatte. L’amendement, qui va dans le sens du rapport d’ATD Quart Monde de mars 2017, a pour objet de conforter la généralisation de l’expérimentation des hôtels hospitaliers, tout en évaluant son intérêt pour la prise en charge des publics isolés précaires dans le cadre de la chirurgie ambulatoire. Il défend en creux la nécessaire articulation entre le médical et le social.

M. le rapporteur général. Les hôtels hospitaliers ne concerneront pas uniquement les séjours de chirurgie ambulatoire. C’est pourquoi le sous-amendement vise à ajouter le mot « notamment ».

La commission adopte le sous-amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement sous-amendé.

Puis elle adopte l’article 31 modifié.

Après l’article 31

Suivant l’avis défavorable du rapporteur général, la commission rejette l’amendement AS442 de M. Max Mathiasin.

Puis elle examine l’amendement AS1106 de Mme Émilie Cariou.

Mme Delphine Bagarry. Le présent amendement vise à lancer une expérimentation sur trois ans d’un dispositif d’aides financières non pérennes dans plusieurs régions sanitaires, dont les Alpes-de-Haute-Provence, la Meuse, les Deux-Sèvres et le Val-de-Marne. Il s’agit de tester un mécanisme de soutien à l’ensemble des professionnels pouvant intervenir dans la prise en charge sanitaire et médico-sociale des victimes de violences, qu’elles soient mineures ou majeures, conformément à la préconisation du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes dans son avis pour une juste condamnation sociétale et judiciaire du viol et autres agressions sexuelles d’octobre 2016. Jusqu’à présent, seuls les mineurs victimes d’infractions sexuelles bénéficiaient d’une aide spécifique. Souvent mal connu, même des professionnels, ce dispositif de prise en charge intégrale existe depuis près de vingt ans.

Il s’agit d’un amendement de repli de l’amendement en faveur de la prise en charge totale des victimes majeures d’infractions sexuelles, qui a été déclaré irrecevable car constituant une charge au sens de l’article 40 de la Constitution. Il avait déjà été déposé au début de la législature, avec MM. Xavier Paluszkiewicz et Jean-Louis Touraine.

M. le rapporteur général. Il faut améliorer en permanence la formation des professionnels à la prise en charge de ces violences. En revanche, on peut se demander si cette amélioration doit passer par une expérimentation, qui plus est dans les départements et circonscriptions des députés du groupe Écologie Démocratie Solidarité. C’est en effet de cela dont il s’agit dans cet amendement : c’est original !

Pour moi, le sujet des violences sexuelles et de leur prise en charge mérite de recevoir des réponses plus systématiques. J’ai interrogé le Gouvernement à ce sujet, et l’ai invité à se mobiliser sur le sujet de la prise en charge des violences sexuelles dans les établissements de santé, car il semblerait que de nombreuses initiatives parlementaires en ce sens n’aient pas été recevables. C’est la grande cause du quinquennat. Aussi, je m’engage à ce que nous ayons ce débat en séance avec le Gouvernement. Pour l’heure, mon avis ne peut être que défavorable à cet amendement expérimental des députés du groupe Écologie Démocratie Solidarité.

La commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite, en discussion commune, l’amendement AS1038 de M. Thierry Michels ainsi que les amendements identiques AS48 de M. Gérard Cherpion et AS868 de M. Boris Vallaud.

M. Thierry Michels. L’amendement porte sur les négociations en cours entre les transporteurs privés et l’assurance maladie, dont les conclusions doivent venir répondre à une injustice, qui vise aujourd’hui les personnes obèses. En effet, le recours à des ambulances bariatriques, celles nécessitées pour le transport des personnes très obèses, entraîne la plupart du temps pour ces patients un reste à charge très élevé pour des déplacements non urgents. Leur transport nécessite en effet la mobilisation de personnel et de matériels supplémentaires, qui ne sont pas pris en charge dans les barèmes de remboursement.

La réforme de la tarification de ces transports spécifiques a été mise sur la table à plusieurs reprises dans les dernières années, dans l’espoir qu’elle aboutisse enfin au terme des négociations actuelles, dont la conclusion est prévue en décembre. C’est ce que ma collègue Annie Vidal et moi-même avons pu vérifier tout récemment auprès du ministère des solidarités et de la santé.

Le rapport demandé permettra de rendre compte à la représentation nationale de la mise en place effective de la nouvelle tarification des ambulances bariatriques et de l’amélioration concrète de la situation de nos concitoyens sur l’ensemble du territoire. Nous l’avons encore constaté au cours de la crise sanitaire avec la surreprésentation des personnes obèses dans les patients admis en réanimation, l’obésité est un sujet majeur de santé publique dans notre pays. L’amélioration recherchée permettra donc de diminuer le non-recours aux soins, en s’assurant que les transports bariatriques deviennent réellement accessibles pour toute personne concernée, dans l’ensemble des territoires.

M. Gérard Cherpion. D’après les chiffres du ministère des solidarités et de la santé, le taux de personnes en situation d’obésité dans notre pays est de l’ordre de 17 %. L’obésité est par ailleurs un facteur de risque complémentaire pour d’autres problèmes de santé, en particulier le diabète, l’hypertension ou certains cancers. Ces patients ont donc des besoins de soins hospitaliers assez fréquents, qui nécessitent des transports par ambulance.

Une réponse existe déjà, puisque trente-trois centres spécialisés dans l’obésité sont équipés d’ambulances bariatriques. Des difficultés subsistent pourtant dans les secteurs plus éloignés, qui ne disposent pas de tels centres. Une ambulance bariatrique, qui nécessite quatre personnes et un matériel spécialisé, est à l’origine d’un surcoût, qui entraîne un reste à charge élevé pour les personnes transportées. Les discussions conventionnelles entre l’assurance maladie et les ambulanciers n’ont pas encore abouti.

L’amendement, qui vise à faire réaliser un bilan de la situation actuelle, est issu d’une proposition de loi que j’avais déposée et qui a été cosignée par cent cinquante députés. Elle avait pour objet une prise en charge de ce surcoût par l’assurance maladie. La disposition ne pouvant conduire à un amendement recevable au titre de l’article 40 de la Constitution, j’ai déposé cet amendement de repli, qui vise à la rédaction d’un rapport.

M. le rapporteur général. Vous appelez notre attention sur un sujet très important, celui des transports bariatriques, qui mobilise, je le sais, de nombreux collègues, notamment Mme Vidal, Mme Dufeu, M. Michels, M. Cherpion, M. Viry...

M. Thibault Bazin. Tout le monde !

M. le rapporteur général. Monsieur Bazin, je peux également vous citer, si vous le souhaitez. Nous avons été largement sollicités sur ces bancs par certains de nos concitoyens qui sont confrontés à cette problématique.

L’article L. 322-5 du code de la sécurité sociale prévoit que les frais de transport « sont pris en charge sur prescription médicale » établie par un professionnel de santé. Le recours à une ambulance bariatrique privée implique toutefois un surcoût, qui ne fait pas l’objet d’une extension de la part remboursable par l’assurance maladie. Le patient n’est remboursé qu’à hauteur de la prise en charge pour le recours à une ambulance classique.

D’après ce que j’ai compris des remontées que nous avons eues du terrain – j’ai eu les mêmes que vous –, dans le cadre du recours à un transporteur privé, le reste à charge peut parfois atteindre plusieurs centaines d’euros.

Le problème est aussi celui de l’offre : peu de transporteurs sont équipés de brancards adaptés, qui doivent être plus larges que les brancards standards, afin de limiter l’inconfort des patients et supporter des limites de poids supérieures. Les ambulances doivent également être équipées en rampes, treuils, matelas et immobilisateurs élargis, brassards à tension, chaises à assistance électrique, notamment – j’ai pu le constater sur le terrain dans ma vie professionnelle. Enfin, les dimensions mêmes des ambulances doivent parfois être adaptées aux personnes en situation d’obésité.

Cette situation est intolérable, alors que 17 % de la population adulte est obèse dans notre pays, soit plus de 8 millions de personnes, dont 500 000 en situation d’obésité sévère. Le sujet de la prise en charge comme celui de l’offre risquent de créer de graves situations de non-recours aux soins. Les négociations en cours sur le transport sanitaire doivent notamment les traiter. Il serait utile d’interroger le ministre en séance, pour savoir quels sont les objectifs de ces négociations sur ce sujet précis.

Si vous le souhaitez, nous pourrons également saisir ensemble la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) pour lui rappeler l’importance de ces sujets à nos yeux.

Pour ce qui concerne les amendements, j’émettrai un avis de sagesse, mais il serait plus opportun de solliciter l’avis du ministre en séance.

M. Paul Christophe. À l’unisson de mes collègues, je rappelle que cela fait plusieurs années maintenant que nous nous préoccupons de cette situation qui, M. le rapporteur général l’a dit, peut aboutir à des refus de soins ou à un non-accès aux soins – cela n’est pas neutre eu égard aux ambitions qui peuvent être les nôtres concernant la santé de nos concitoyens –, ainsi qu’à un reste à charge élevé, qui est également une forme de discrimination.

Depuis plusieurs années, nous défendons ce sujet et nous nous entendons répondre que des discussions sont en cours. Il nous faudrait maintenant un peu d’audace ! L’adoption de ces amendements demandant un rapport permettrait d’introduire le sujet avec un peu plus de force dans l’hémicycle. Et je ne doute pas que le ministère des solidarités et de la santé sera à notre écoute sur ce sujet.

Cela fait trois ans que j’ai l’impression de répéter la même chose sur cette question. Ce n’est certes pas un sujet anodin, mais il n’entraîne pas non plus une révolution pour le budget de la sécurité sociale. Adopter de tels amendements enverrait un bon message à notre ministre, Olivier Véran, pour traduire le besoin que la discussion s’accélère sur cette question.

Mme Annie Vidal. Ce sujet, nous le savons, est en discussion depuis longtemps : plus de cent cinquante questions écrites ont été adressées au Gouvernement, une proposition de loi a été déposée. Depuis le début de l’année, avec quelques collègues, nous avons pris le sujet à bras-le-corps, si j’ose dire. Les négociations ont enfin commencé. Elles devraient aboutir d’ici à la fin de l’année à des propositions opérationnelles et financières.

Sur le terrain, les enveloppes investies dans ce domaine ont conduit à prendre en charge les transports bariatriques dans le cadre de l’urgence, non des soins programmés.

En toute logique, les conclusions des négociations devraient être intégrées au sous-ONDAM relatif aux soins de ville. L’amendement vise à dresser un bilan de la partie financière de ces conclusions, affectée au transport bariatrique, sachant que les négociations englobent l’ensemble des transports. Il semble donc très pertinent de rédiger une telle étude et d’interroger le ministre à ce sujet.

M. Thibault Bazin. Monsieur le rapporteur général, vous n’arrêtez pas de nous dire que les sujets sont importants, et qu’ils seront abordés en séance. Nous ne pouvons pas procéder ainsi.

Pour des sujets comme les services d’aide et d’accompagnement à domicile ou les répartiteurs pharmaceutiques, on nous dit à chaque fois que des discussions sont en cours. Mais ces amendements ne font qu’adresser une demande de rapport. Il n’y a pas péril en la demeure. Vous n’allez pas vous faire disputer par le ministre de la santé. Émancipez-vous ! Musclez votre jeu, comme disait Aimé Jacquet à Robert Pirès...

Vous avez été excellent sur le diagnostic. On a besoin qu’un urgentiste fasse le nécessaire pour que les transports bariatriques soient enfin pris en compte. Et je ne suis pas sûr qu’une telle évolution mette en péril les finances de l’assurance maladie.

C’est une question d’humanité, en réalité. Bien sûr, il y a la question de la sécurité et du confort des personnes mais, derrière, il y a la nécessité de faciliter le travail des services ambulanciers. Les témoignages que nous recevons montrent le mal-être à la fois des personnes en situation d’obésité et de ceux qui doivent assurer leur transport.

Alors que le Gouvernement avait promis, qu’il a déçu, nous devons, collectivement, au-delà de nos sensibilités politiques, l’interpeller par cette demande de rapport officielle, votée par la commission, sachant que, de toute façon, nous examinerons en séance publique son texte initial. En adoptant l’amendement, nous inscrivons le sujet à nos débats en séance.

Mme la présidente Fadila Khattabi. Monsieur Bazin, sachez que personne n’est inhumain ici.

M. Gérard Cherpion. J’ai bien entendu M. le rapporteur général, mais il faut se rendre compte de ce que cela représente sur le terrain. Dans ma circonscription, j’ai la chance que des ambulanciers aient organisé une ambulance bariatrique : elle leur coûte une fortune, sauf lorsque l’hôpital décide qu’un tel véhicule est nécessaire ou quand l’ARS prend en charge une partie des soins, en fonction de l’indice de masse corporelle, qui ne correspond d’ailleurs pas toujours à la réalité physique des personnes – c’est une pratique limite pour l’ARS. Nous sommes dans un système bancal, alors que ces patients ont véritablement besoin de transports spécifiques. Demander un rapport, ce n’est que prendre en compte la réalité des faits dans tous les territoires.

M. Philippe Vigier. Mes propos sont à l’unisson de ceux de mes collègues. Comme l’a dit Paul Christophe, nous sommes nombreux à avoir été interpellés depuis plusieurs années sur cette question, dont M. le rapporteur général est un fin connaisseur.

Le rapport ne pourra qu’éclairer le ministre, et nous n’attendrons pas de recueillir son avis pour l’obtenir. En demandant le rapport, la commission fait son boulot, de façon transpartisane – c’est notre façon de faire avancer les choses. Nous répondons à un vrai sujet, que vous connaissez parfaitement, monsieur le rapporteur général, je le répète. Ces transports bariatriques posent problème. Or, dans plus de 80 % des cas, les personnes en situation d’obésité ne sont pas responsables de leur obésité. Ayons une pensée pour elles.

C’est au débat parlementaire qu’il revient de prendre de la hauteur et d’examiner un problème de société auquel nous sommes tous confrontés. Un rapport, ce n’est pas une prise en charge immédiate.

Monsieur le rapporteur général, souvenez-vous quand, en 2019, le directeur de l’assurance maladie expliquait qu’il fallait limiter l’accès à la télémédecine. La covid est arrivée : heureusement que la télémédecine a été là, avec 1 million de téléconsultations par jour ! Je l’ai dit et le répète, il est sage que ce PLFSS assure sa prolongation.

Nous faisons aussi œuvre utile avec ces amendements et nous vous aidons, monsieur le rapporteur général. Alors, laissez-nous vous aider !

Mme Michèle de Vaucouleurs. Accepter cette demande de rapport n’engagerait pas outre mesure le Gouvernement, puisqu’il ne s’agit que de dresser un bilan des surcoûts liés au transport en ambulance bariatrique. On ne peut repousser indéfiniment cette question, qui n’est autre que celle de l’égalité d’accès à la santé.

M. le rapporteur général. Chers collègues, je n’ai pas émis d’avis défavorable, je m’en suis remis à votre sagesse. La fièvre des rapports qui vous gagne ne doit pas vous faire perdre de vue qu’il existe d’autres façons, pour un parlementaire, d’interpeller un ministre et que rien ne peut remplacer la force du propos en séance.

La commission adopte l’amendement AS1038.

En conséquence, les amendements AS48 et AS868 tombent.

Article 32 : Prolongation de la prise en charge intégrale par l’assurance maladie obligatoire des téléconsultations

La commission examine, en discussion commune, l’amendement AS79 de M. Bernard Perrut, les amendements identiques AS194 de M. Thibault Bazin, AS388 de M. Jean-Yves Bony, AS567 de Mme Agnès Firmin Le Bodo, AS622 de M. Stéphane Viry et AS681 de Mme Josiane Corneloup ainsi que l’amendement AS803 de Mme Josiane Corneloup.

M. Bernard Perrut. Lors de la première vague épidémique, nous avons constaté combien la téléconsultation était nécessaire. Prise en charge par l’assurance maladie grâce aux dispositions que nous avons votées, elle a pris de l’essor et est de plus en plus appréciée par les patients, comme par les professionnels de santé.

Son développement doit être maîtrisé et cohérent avec les autres types de prises en charge. Or, en prévoyant de prolonger jusqu’au 31 décembre 2021 la prise en charge intégrale de toutes les téléconsultations, cet article fait peser un risque important sur le développement de la téléconsultation et sur la maîtrise des dépenses de santé.

En effet, il crée une distinction entre les consultations physiques hors parcours de soins et les téléconsultations hors parcours de soins, qui ne sont pas remboursées à même hauteur. Au nom du principe de solidarité, la téléconsultation n’a pas de raison d’échapper aux mêmes contraintes que la consultation physique. D’autre part, il entraîne un effet de dérégulation qui risque d’engendrer des comportements non vertueux.

L’amendement AS79 vise à rendre éligibles à un remboursement à 100 % les téléconsultations qui s’inscrivent dans le parcours de soins, conformément à ce qui est en vigueur pour les consultations physiques, et celles en lien avec le covid.

M. le rapporteur général. Les téléconsultations seront prises en charge intégralement en 2021 uniquement lorsque les conditions conventionnelles actuelles de réalisation et de prise en charge, dont le respect du parcours de soins coordonné, seront respectées. Aucune dérogation n’est prévue.

Par ailleurs, les modalités de prise en charge des téléconsultations relèvent davantage des négociations conventionnelles. Des négociations sont d’ailleurs en cours sur ce sujet.

Ces amendements étant satisfaits, je vous suggère de les retirer.

M. Thibault Bazin. L’article 32 ne doit pas opérer une différenciation remboursement par l’assurance maladie.

La commission rejette successivement les amendements.

Elle en vient à l’examen de l’amendement AS804 de Mme Josiane Corneloup.

Mme Isabelle Valentin. La prolongation de la prise en charge intégrale des téléconsultations jusqu’au 31 décembre 2021 va dans le bon sens, mais si cette mesure n’est pas mieux encadrée, elle pourrait avoir des effets contre-productifs.

Les opérateurs responsables de télémédecine, de même que les médecins qui ont pris le virage du numérique en santé, ont besoin d’un cadre réglementaire et législatif stabilisé. La téléconsultation depuis un smartphone ne garantit pas cet encadrement nécessaire ; elle trouverait à s’exercer avec profit au sein d’une maison de santé pluridisciplinaire, d’une officine ou d’une collectivité.

Une fois de plus, il s’agit avec cet article de prolonger un cadre dérogatoire, au détriment de la maîtrise des dépenses de santé, sans saisir l’opportunité d’instaurer un cadre législatif. Pourtant, un meilleur encadrement permettrait d’apporter la stabilité dont la télémédecine a besoin pour répondre aux attentes des patients et des médecins, conformément aux engagements du Ségur de la santé.

M. le rapporteur général. À titre personnel, je partage votre souhait d’encadrer davantage le développement des téléconsultations. J’estime qu’elles doivent s’inscrire dans le cadre d’une organisation plus large de l’accès aux soins et ne pas se substituer aux actes médicaux en présentiel. Je vous propose néanmoins de retirer cet amendement, car il revient aux partenaires conventionnels de décider des modalités d’organisation des téléconsultations ; des négociations ont d’ailleurs commencé.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS899 de M. Cyrille Isaac-Sibille.

M. Cyrille Isaac-Sibille. Les téléconsultations se développent, et c’est tant mieux. Il convient toutefois de rappeler que les professionnels doivent systématiquement déposer dans le dossier médical partagé (DMP) le compte rendu des actes de téléconsultation. Ainsi le médecin traitant aura-t-il connaissance des examens ou des traitements qui auront été prescrits.

M. le rapporteur général. La loi pour l’organisation et la transformation du système de santé prévoit l’ouverture automatique du DMP à l’été 2021 et son alimentation par les professionnels de santé. Votre amendement est donc satisfait.

L’amendement est retiré.

La commission est saisie, en discussion commune, des amendements AS574 de Mme Agnès Firmin Le Bodo, AS389 de M. Stéphane Viry et AS195 de M. Thibault Bazin.

Mme Agnès Firmin Le Bodo. Nous demandons au Gouvernement un rapport sur les conséquences pour les comptes sociaux de la prise en charge intégrale des téléconsultations.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la commission rejette successivement les amendements.

Elle examine ensuite l’amendement AS477 de Mme Delphine Bagarry.

Mme Delphine Bagarry. Nul ne conteste que les téléconsultations, qui ne pourront jamais remplacer le présentiel, servent beaucoup en temps de crise sanitaire. Il y a d’ailleurs fort à parier que nous aurons à examiner la possibilité d’une nouvelle prolongation ou d’une pérennisation de leur prise en charge dans le PLFSS 2022. Nous aurons alors besoin d’un éclairage. C’est le sens de cet amendement, qui demande qu’un rapport soit remis avant le 31 août 2021.

M. le rapporteur général. Je l’ai dit et répété, il ne faut pas multiplier les demandes de rapport. Nous pourrons toujours demander au Gouvernement, dans le cadre de la MECSS ou du Printemps de l’évaluation, des statistiques sur le nombre des téléconsultations et leur coût pour la sécurité sociale. À titre personnel, je ne suis pas favorable à une prolongation au‑delà du 31 décembre 2021, à moins qu’il ne soit démontré que la téléconsultation permet une meilleure prise en charge des patients qu’une consultation en présentiel.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 32 sans modification.

 

Après l’article 32

La commission est saisie des amendements identiques AS602 de Mme Agnès Firmin Le Bodo, AS777 de M. Thibault Bazin et AS1055 de M. Paul Christophe.

Mme Agnès Firmin Le Bodo. L’article 28 tend à encadrer la consultation des urgences par une mesure de maîtrise médicalisée. Cet amendement propose de compléter le dispositif, en autorisant les établissements de santé à développer la téléconsultation au sein d’une salle intégrée, en amont du passage aux services d’urgence. Cette expérimentation contribuerait à désengorger les urgences : selon la Cour des comptes, près de 3,6 millions de passages aux urgences en 2014 auraient pu être réorientés vers une prise en charge en ville.

M. le rapporteur général. Je partage l’idée, mais je ne pense pas que cette expérimentation soit la bonne voie. Depuis la présentation du pacte de refondation des urgences et les annonces du Ségur de la santé, nous avons avancé. Un appel à projets pour le lancement en phase pilote du service d’accès aux soins (SAS) est en cours. Une cinquantaine de départements ont proposé des projets de grande qualité, associant la médecine hospitalière, via les SAMU, et les médecins libéraux. Le numéro unique qui sera mis en place permettra d’accéder au SAS, qui renverra éventuellement à une téléconsultation.

La commission rejette les amendements identiques.

Puis elle en vient à l’examen de l’amendement AS15 de Mme Valérie Six.

Mme Valérie Six. Dans le contexte épidémique actuel, les téléconsultations, qui facilitent le suivi de patients atteints de pathologies chroniques et plus à risque de développer une forme sévère de covid, connaissent un essor important.

Les expérimentations de télémédecine pour l’amélioration des parcours en santé sont encouragées et soutenues financièrement. La loi prévoit qu’un rapport d’évaluation pour l’Institut de recherche et documentation en économie de santé sera remis à la fin du mois de juin 2021, après validation par la HAS. Cet amendement propose qu’à l’appui de ce rapport d’évaluation, un comité scientifique soit chargé de déterminer les conditions appropriées pour anticiper l’éventuelle pérennisation de ces expérimentations.

M. le rapporteur général. Il conviendrait d’attendre l’évaluation qui sera réalisée par la HAS en vue de la généralisation de la télémédecine. Cette évaluation fera l’objet d’un rapport remis au Parlement avant le 30 juin 2021. Je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement.

La commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie, en discussion commune, de l’amendement AS650 de Mme Annie Chapelier ainsi que des amendements identiques AS460 de Mme Agnès Firmin Le Bodo et AS1011 de M. Jean-Carles Grelier.

Mme Annie Chapelier. S’il est vrai que la télémédecine ne pourra jamais remplacer le présentiel, des spécialités se prêtent davantage à cette forme de consultation. C’est le cas des spécialités de la santé visuelle, qui sont fondées sur des mesures établies grâce à des matériels d’exploration non invasifs, à distance.

Il s’agirait d’autoriser, pour une durée de trois ans et à titre expérimental, le financement de protocoles de télémédecine impliquant les opticiens-lunetiers. Cet amendement est inspiré d’un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) de septembre 2020, qui propose d’élargir leur domaine de compétence.

Je rappelle que les délais pour obtenir une consultation d’ophtalmologie sont particulièrement longs. Mettre en place des dispositifs innovants et une formation des professionnels à l’utilisation de matériels d’exploration non invasifs permettrait à de nombreuses personnes d’accéder aux soins en santé visuelle.

M. Jean-Carles Grelier. Dans la Sarthe, le docteur Rottier a mis en œuvre avec l’accord de l’ARS cette expérimentation : des orthoptistes de la région transmettent les résultats des examens de réfraction à l’ophtalmologiste, qui les analyse et établit des prescriptions. Cela rend service à de très nombreux patients. On évalue aujourd’hui que 1 million de consultations d’ophtalmologie pourraient être assurées par ce canal.

M. le rapporteur général. Depuis le début de la législature, nous avons voté plusieurs dispositions, notamment dans la loi pour l’organisation et la transformation du système de santé. Des protocoles de coopération se mettent progressivement en place entre les opthalmologistes et les orthoptistes ; il convient pour l’instant de s’en tenir à ce cadre, qui n’est pas celui des opticiens-lunetiers.

Je vous suggère de retirer vos amendements.

M. Philippe Vigier. Dans l’Eure-et-Loir, il fallait plus de dix-huit mois pour obtenir une consultation d’ophtalmologie. Une convention a été passée avec la communauté professionnelle territorial de santé (CPTS) et ce qui n’est qu’une expérimentation, pour une durée de trois ans, s’avère d’ores et déjà bénéfique : on n’a pas constaté d’allongement des délais avec le confinement.

Mme Annie Chapelier. Ces amendements ne proposent qu’une expérimentation ; elle n’obérera en rien les discussions en cours entre ophtalmologistes, orthoptistes et opticiens-lunetiers. Le rapport de l’IGAS est très éclairant puisqu’il montre le bénéfice qu’apporterait une telle expérimentation, par ailleurs moins risquée qu’un décret.

M. Jean-Carles Grelier. Je maintiens mon amendement car j’estime qu’il faut agir d’urgence pour rétablir la situation en matière de santé visuelle ; je ne vois pas l’intérêt d’attendre que des protocoles se mettent en place, alors que les professionnels sont prêts à les mettre en œuvre dès maintenant !

Mme Agnès Firmin Le Bodo. Je maintiens aussi mon amendement : les orthoptistes ne seront pas de trop pour combler le déficit en ophtalmologues, et autant s’adjoindre le concours des opticiens.

La commission rejette successivement les amendements.

Puis elle examine l’amendement AS933 de Mme Carole Bureau-Bonnard.

Mme Carole Bureau-Bonnard. L’ostéoporose touche près de 4 millions de patients en France et 40 % des femmes de plus de 65 ans. Cette maladie est responsable de fractures de fragilité : le quart des seniors s’étant fracturé le col du fémur décèdent dans les douze mois et 24 % des fracturés sont institutionnalisés en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes. Le coût total de l’ostéoporose est estimé à 5,4 milliards d’euros et pourrait atteindre, si rien n’est fait, plus de 6 milliards en 2025.

Cet amendement demande un rapport sur la possibilité d’adjoindre un bon de prise en charge du dépistage de l’ostéoporose par ostéodensitométrie au courrier d’invitation à réaliser une mammographie de dépistage pour les femmes de plus de 65 ans.

M. le rapporteur général. Il s’agit sans doute là d’un amendement d’appel, que je vous propose de retirer pour le redéposer en séance. Je note que la HAS a rappelé à plusieurs reprises que les indications de l’ostéodensitométrie étaient limitées et que la mesure de la densité minérale osseuse n’est utile que chez les personnes présentant des facteurs de risques.

M. Thibault Bazin. Madame la présidente, pourriez-vous préciser les règles en vigueur depuis deux jours ? Est-ce que nos collègues qui ne sont pas membres de la commission, ont le droit, lorsqu’ils ont déposé un amendement sur le PLFSS, de venir ici le défendre ? Par souci d’équité, il est important que nous connaissions les règles qui devraient s’appliquer à tous. C’est important, car je sens monter un sentiment d’injustice législative !

Mme la présidente Fadila Khattabi. Depuis le début, nous avons accepté que des collègues viennent défendre leurs amendements. C’est une simple tolérance de ma part, à condition de ne pas dépasser le nombre maximum de personnes.

M. Thibault Bazin. Il est important de le préciser car le Bureau de l’Assemblée a émis une interdiction, à laquelle se sont conformés les députés du groupe Les Républicains.

M. Cyrille Isaac-Sibille. Bien que la prévention soit un axe important du quinquennat, le PLFSS contient peu de dispositions en la matière. C’est une demande bien modeste que ce rapport sur la possibilité d’envoyer un bon de prise en charge, quand on sait que cela pourrait concourir à la prévention de l’ostéoporose, et donc des chutes des personnes âgées.

Mme Delphine Bagarry. Comme l’a souligné le rapporteur, l’ostéodensitométrie n’est remboursée que dans certains cas. Je ne vois pas comment cet examen pourrait être un examen de prévention. Toutes les femmes ménopausées sont à risque et il n’existe pas de traitement. La seule prévention qui existe, c’est celle des chutes. Il convient donc d’inviter les personnes à risque à pratiquer des activités physiques régulières pour éviter l’ostéoporose.

Mme Agnès Firmin Le Bodo. Ce n’est pas forcément incompatible. Si l’on se sait à risque grâce à l’ostéodensitométrie, on pratiquera d’autant plus volontiers une activité physique. En termes de prévention, cette possibilité me paraît une bonne chose ; elle pourrait d’ailleurs se limiter à l’envoi d’un courrier d’information sur l’ostéoporose et sur cet examen.

M. Philippe Vigier. L’intérêt de cet amendement est qu’il participe de la politique de prévention. Ce rapport permettra de revenir sur la dégradation, ces dernières années, de la prise en charge de l’ostéoporose et d’apporter des réponses.

Mme Audrey Dufeu. La prévention des chutes chez les personnes âgées est une question transversale, qui dépasse largement la question de l’ostéoporose. Nous devrions en débattre dans le cadre de la loi « Grand âge et autonomie ». Il serait dommage de la réduire à cet amendement, même si l’intention est bonne.

La commission rejette l’amendement.

Article 33 : Prorogation au 31 mars 2023 de la convention médicale entre l’assurance maladie et les médecins libéraux

La commission est saisie des amendements de suppression AS231 de M. Thibault Bazin, AS310 de M. Stéphane Viry, AS587 de Mme Isabelle Valentin et AS888 de M. JeanCarles Grelier.

M. Thibault Bazin. L’article 33 repousse l’échéance de la convention médicale du 24 octobre 2021 au 31 mars 2023. Une telle prolongation ne permettrait pas la mise en place de nouvelles mesures tarifaires tenant compte des stabilisateurs économiques avant septembre 2023 – donc après mai 2022 ! Les mesures nécessaires pour que la médecine libérale se réorganise, se restructure et réponde mieux aux défis actuels seraient repoussées de trois ans.

Depuis le lancement de la réforme « Ma santé 2022 », en septembre 2018, nous nous sommes demandé où étaient les médecins libéraux. Ils n’ont pas pris part au Ségur de la santé, mais ils devaient prendre part à la négociation conventionnelle. Finalement, rien n’aura lieu au cours des trois prochaines années.

Les médecins ont une préoccupation : la revalorisation des actes. Vous la repoussez encore, alors que certains n’ont pas été revalorisés depuis vingt ans et qu’en raison de l’épidémie de covid-19, les médecins doivent assumer l’achat des équipements de protection.

Si nous souhaitons que la médecine libérale dans nos territoires soit attractive, il faut nous en donner les moyens. Le report de la convention médicale ne passe pas du tout auprès des professionnels de santé libéraux. Il s’agit d’une décision unilatérale de l’un des partenaires conventionnels Aucun moyen significatif n’est engagé dans le cadre des négociations conventionnelles actuelles.

Faites preuve de courage, nos professionnels de santé libéraux ont besoin que nous revalorisions leur métier alors qu’ils sont en première ligne dans la crise actuelle.

M. Bernard Perrut. Ce report constitue un casus belli pour l’ensemble des syndicats de la profession, il faut l’entendre. Toutes les négociations tarifaires sont liées à cette convention, la reporter retarderait toute revalorisation pour les trois années à venir. Or le tarif des consultations n’a pas été revu depuis cinq ans, celui de certains actes depuis plus de quinze. Ce n’est plus possible, il faut réagir.

M. Jean-Carles Grelier. Comment expliquer ce report ? Vous pourrez invoquer les élections professionnelles de mars prochain, mais depuis septembre, les syndicats de médecins libéraux attendent un rendez-vous avec l’assurance maladie pour relancer la négociation conventionnelle. Elle pouvait aboutir avant les élections du mois de mars ! Il y a donc une volonté délibérée de repousser la réévaluation de la rémunération des médecins libéraux à un horizon très lointain, en 2023.

Pourquoi, si ce n’est pour attendre que les interlocuteurs changent à la faveur des élections aux unions régionales des professionnels de santé (URPS) de mars prochain ? Il serait scandaleux que, pour des raisons de petite politique, le Gouvernement manifeste une totale absence de reconnaissance aux médecins libéraux.

Le Président de la République a indiqué que l’augmentation de la rémunération des professionnels de santé exprimait la reconnaissance de la nation. Pourquoi la nation manifesterait-elle une reconnaissance sélective ? Les médecins libéraux ont-ils démérité pendant la crise ? N’ont-ils pas rempli la mission de service public de santé qui est aussi la leur, sur l’ensemble des territoires ? Qui peut dire que les médecins auraient fauté, et qu’ils mériteraient d’être sanctionnés ?

Justifiez, par des arguments valables, le report aux calendes grecques de la réévaluation de la rémunération des professionnels libéraux.

M. le rapporteur général. Tout d’abord, afin de garantir la sérénité de nos débats, je précise qu’il n’est pas question de sanctionner qui que ce soit, ni de refuser de reconnaître l’implication des professionnels libéraux.

Si cette convention n’était pas prolongée, les syndicats participant aux prochaines négociations conventionnelles seraient désignés en fonction des dernières élections aux URPS, et non des élections à venir en mars 2021, ce qui poserait un réel problème de représentativité des signataires. Je suis donc défavorable à la suppression de cet article.

Je partage néanmoins votre préoccupation : nous ne pouvons pas attendre des mois. Des négociations conventionnelles ont commencé le 17 septembre dernier ; elles sont particulièrement importantes pour l’exercice coordonné et la mise en œuvre du service d’accès aux soins. Nous en avons parlé avec les syndicats de médecins libéraux ainsi qu’avec la CNAM lors de leurs auditions respectives.

Je suis défavorable à ces amendements de suppression.

M. Thibault Bazin. Il s’agit d’un point dur, et l’attente des professionnels est très forte. Des négociations sont en cours, mais sur la revalorisation des actes, qui constitue la revendication principale de nos professionnels de santé libéraux, il n’y a eu aucun geste.

Vous avez organisé un « Ségur de l’hôpital » en quelques semaines. Vous avez donc le temps de négocier la nouvelle convention médicale avant les élections : il reste six mois. Il est possible de mener les négociations avec les représentants actuels. Vous utilisez ce prétexte pour reporter cette négociation après l’élection présidentielle de 2022.

Pour répondre aux attentes, il faut des moyens. Donnons-nous pour objectif de mener ces négociations à terme d’ici à la fin du mois de mars. À défaut, vous allez envoyer un message très négatif aux professionnels de santé libéraux. Le PLFSS doit être revu sur ce sujet.

M. Jean-Carles Grelier. Nous avons reçu les syndicats de professionnels de santé. Ils ont déclaré avoir été « méprisés », « négligés », et ont évoqué « une situation de guerre entre les syndicats libéraux et le Gouvernement ». Si des syndicats qui n’ont pas pour habitude d’être bellicistes en viennent à employer une telle terminologie, c’est que la situation est plus que grave.

M. Jean-Pierre Vigier. Monsieur le rapporteur général, nous vous aiderions avec l’adoption de ces amendements. Il n’est pas possible de reporter l’échéance à 2023. Le « Ségur » a constitué une réponse très forte, nul ne peut le contester. Dans une heure, le Président de la République va prendre la parole et nous appeler à la responsabilité, puisque le deuxième pic épidémique est là. Le personnel soignant, public ou privé, est en première ligne.

Quel message allons-nous envoyer en repoussant la négociation à dix-huit mois ou deux ans ? Le dialogue social offre une chance de trouver une bonne solution, qui marquerait notre reconnaissance. Nous évoquons sans cesse la désertification médicale, les problèmes d’accès aux soins, l’attractivité de la médecine. Pensez-vous que de jeunes étudiants auront toujours envie d’embrasser les carrières médicales après une telle décision ?

Nous connaissons tous les difficultés du personnel soignant face à la deuxième vague de l’épidémie, et qui sait s’il n’y aura pas d’autres vagues, d’autres virus, d’autres pandémies ? Il faut une réponse forte. Ne vous laissez pas entraîner dans un calendrier aux échéances trop lointaines. Entendez le message de détresse des personnels soignants et des médecins libéraux.

La commission rejette les amendements identiques.

Elle en vient à l’amendement AS226 de M. Thibault Bazin.

M. Thibault Bazin. J’avais anticipé la réponse du rapporteur général, qui dit avoir besoin d’interlocuteurs représentatifs. Ils sont en place : je vous propose donc d’avancer l’échéance de la convention médicale au 31 mars 2021, avant les élections aux URPS. Le problème de la représentativité des interlocuteurs serait réglé ! Nous fixerons ainsi l’objectif ambitieux de mener de vraies négociations qui répondent aux attentes des professionnels libéraux.

M. le rapporteur général. Votre proposition n’est pas applicable. Une convention se discute pendant six mois, et il faut au préalable trois mois d’enquête de représentativité.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Enfin, elle adopte l’article 33 sans modification.

Après l’article 33

La commission examine, en discussion commune, l’amendement AS174 de M. Pierre Dharréville, les amendements identiques AS276 de M. Guillaume Chiche et AS735 de M. Joël Aviragnet ainsi que les amendements AS736, AS739 et AS737 de M. Joël Aviragnet.

M. Pierre Dharréville. La désertification médicale ne cesse de s’accroître sur le territoire, malgré l’existence de nombreuses mesures incitatives telles que les aides à l’installation et le développement de maisons pluriprofessionnelles de santé. Ces dispositifs, que le Gouvernement entend renforcer dans le cadre de son plan d’accès aux soins, ont montré leurs limites.

Afin de lutter efficacement contre les déserts médicaux – contre lesquels les centres de santé nous paraissent utiles – nous proposons d’étendre aux médecins libéraux un dispositif de régulation à l’installation qui existe déjà pour plusieurs autres professionnels de santé : pharmacies, infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, sages-femmes, chirurgiens-dentistes et orthophonistes.

En concertation avec les syndicats médicaux, les ARS définissent des zones dans lesquelles existe un fort excédent en matière d’offre de soins. Un nouveau médecin libéral ne pourrait s’y installer en étant conventionné à l’assurance maladie que lorsqu’un médecin libéral de la même zone cesse son activité. C’est le principe du conventionnement sélectif.

M. Joël Aviragnet. Mes quatre amendements concernent le conventionnement territorialisé, qui implique la régulation de l’installation de médecins. Différentes possibilités existent, telles que les expérimentations ou le conventionnement sélectif quand un médecin part à la retraite.

Cette proposition revient tous les ans. L’idée a fait son chemin dans la population et suscite une adhésion générale, surtout en cette période de crise sanitaire. Des gens qui n’ont plus de médecin référent interpellent la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM), qui donne une liste de médecins... Nous constatons les limites de ce mécanisme. Un député de la majorité présent à une réunion à la CPAM de Toulouse à laquelle je participais également la semaine dernière a trouvé l’idée excellente ! C’est bien la preuve qu’elle fait aussi son chemin au sein de la majorité actuelle.

M. le rapporteur général. Chaque année, nous débattons à plusieurs reprises de cette question. Je reconnais la constance de ceux qui déposent ces amendements, qu’ils conviennent de la mienne.

Comment définir une zone « surdotée » ? Je ne crois pas qu’un seul député considère qu’il y a trop de professionnels de santé dans sa circonscription.

Surtout, cette proposition est une fausse bonne idée. Si nous interdisions en effet aux médecins de s’installer en secteur 1 dans le territoire de leur choix, vu la démographie médicale, ils pourraient toujours s’y installer sans conventionnement. L’accès aux soins en serait rendu plus difficile pour nos concitoyens, car la consultation d’un médecin non conventionné n’étant pas intégralement remboursée, elle susciterait des difficultés financières. Et pour reprendre les arguments de MM. Grelier et Bazin, le conventionnement sélectif nuirait à l’attractivité de la médecine libérale.

Je demande donc le retrait des amendements, à défaut, avis défavorable.

M. Joël Aviragnet. Un excellent article de La Dépêche du Midi indiquait le nombre de médecins généralistes ou spécialistes installés à Toulouse, et dans les zones rurales. Le rapport était de huit à un. Tout le monde a compris que les zones rurales manquaient de médecins, ce qui porte atteinte à l’égalité d’accès aux soins.

La commission rejette successivement les amendements.

Puis elle examine les amendements AS733 et AS732 de M. Joël Aviragnet.

M. Joël Aviragnet. Ces deux amendements proposent d’encadrer la pratique des dépassements d’honoraires.

M. le rapporteur général. Je partage vos inquiétudes quant aux dépassements d’honoraires pratiqués par certains médecins. Nous en avons déjà discuté lors de l’examen de la loi santé.

Limiter les dépassements d’honoraires risquerait d’entraîner le déconventionnement massif de l’assurance maladie de certains praticiens et de créer des inégalités d’accès aux soins pour des raisons financières.

Avis défavorable.

M. Pierre Dharréville. Vos arguments reviennent à dire que nous ne pouvons rien faire. Il y a bien un problème dont nous devons nous occuper. Nous ne pouvons pas nous contenter de constater la désertification médicale et les difficultés d’accès aux soins, de déplorer certaines pratiques, sans essayer de formuler des propositions.

La commission rejette successivement les amendements.

Elle commission est ensuite saisie de l’amendement AS101 de M. Yves Daniel.

M. Yves Daniel. Les dépassements d’honoraires ont atteint un niveau record, s’agissant particulièrement des spécialistes. Une consultation peut parfois être majorée de 60 à 70 % par rapport au tarif conventionnel.

La fixation des honoraires est régie par le code de la santé publique qui dispose : « Les honoraires du médecin doivent être déterminés avec tact et mesure, en tenant compte de la réglementation en vigueur, des actes dispensés ou de circonstances particulières. » Or de nombreuses dérives sont observées. Dans certaines zones du territoire, notamment celles où le coût de la vie est le plus élevé, les différences de dépassement d’honoraires sont très variables.

Alors que la protection de la santé est inscrite dans le Préambule de la Constitution et que le premier droit de la personne malade est de pouvoir accéder aux soins que son état nécessite, quels que soient ses revenus, une médecine à deux vitesses s’installe progressivement, favorisant les personnes qui peuvent assumer les dépassements d’honoraires aux dépens des autres. C’est ainsi que se crée une véritable fracture dans l’accès aux soins, au détriment des Français les plus modestes.

Pour avancer par étapes, il est proposé d’encadrer cette pratique des dépassements à 50 % du tarif opposable, tout en étudiant l’opportunité d’une revalorisation tarifaire des prestations techniques et cliniques pour une plus juste rémunération des actes des professionnels de santé.

Je demande au Gouvernement la remise d’un rapport évaluant l’opportunité d’une revalorisation tarifaire des actes techniques et des actes cliniques. Certains actes sont aujourd’hui sous-payés, d’autres surpayés.

M. le rapporteur général. La revalorisation tarifaire des actes techniques et des actes cliniques relève des négociations conventionnelles.

À défaut d’un retrait, avis défavorable.

M. Yves Daniel. Je mène ce combat depuis plusieurs années, nous ne pouvons pas laisser les choses en l’état. Les dépassements d’honoraires sont une injustice sociale et portent atteinte au droit d’accès aux soins. Je regrette que d’année en année, la situation n’évolue pas. Nous avons plafonné les dépassements d’honoraires, mais le nombre d’actes faisant l’objet d’un dépassement a augmenté, si bien que le montant total des dépassements d’honoraires continue de grimper.

La commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite, en discussion commune, l’amendement AS741 de M. Joël Aviragnet, les amendements identiques AS617 de M. Guillaume Chiche et AS740 de M. Joël Aviragnet ainsi que les amendements AS175 de M. Pierre Dharréville et AS742 et AS745 de M. Joël Aviragnet.

M. Joël Aviragnet. Nous souhaitons rendre obligatoire le tiers payant dans les maisons de santé et les centres de santé.

Mme Delphine Bagarry. Nous proposons par l’amendement AS617 d’instaurer un tiers payant généralisé pour les professionnels de santé qui exercent en maisons de santé. Il est très facile de mettre en place le tiers payant généralisé pour les professionnels paramédicaux, tels que les kinésithérapeutes ou les infirmières, parce que des logiciels leur permettent de le faire. C’est beaucoup plus compliqué pour les médecins car les logiciels métier ne le permettent pas. Mais rien ne leur interdit de le faire.

M. Pierre Dharréville. Il y a quelques années, plutôt que de parler de tiers payant généralisé, il a été décidé de parler de tiers payant généralisable. Je ne suis pas sûr que les choses aient beaucoup avancé depuis. Où en est ce projet de généralisation, monsieur le rapporteur général ? La généralisation du tiers payant devrait figurer à notre ordre du jour.

M. Joël Aviragnet. Cette majorité a supprimé le tiers payant en 2017, alors qu’il était généralisé. Nous y revenons chaque année, et il nous est dit qu’il est techniquement impossible de le réinstaurer. Depuis quatre ans, des solutions ont dû être trouvées. Ce serait intéressant pour la population.

M. le rapporteur général. Pour rappel, le tiers payant bénéficie déjà aux femmes enceintes, aux patients en affection de longue durée et aux bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire. Je suis favorable sur le fond à cette disposition qui améliore l’accès aux soins, mais elle pose encore quelques difficultés.

Même si les freins techniques sont moindres, un certain nombre de professionnels ne sont pas équipés des outils nécessaires au tiers payant généralisé. Obliger l’ensemble des professionnels exerçant en ville, en maison de santé ou en centre de santé à pratiquer le tiers payant n’est pas techniquement possible. Le Gouvernement a fait le choix du tiers payant généralisable, ce qui signifie que nous allons y parvenir progressivement. Ne disposant pas d’informations sur l’équipement des professionnels, je vous propose d’en débattre en séance avec le Gouvernement, qui pourra nous faire connaître les mesures qu’il compte mettre en place pour accélérer le déploiement du tiers payant.

Dans l’attente, je demande le retrait des amendements, sinon avis défavorable.

M. Joël Aviragnet. Je vous invite à vous reporter à l’excellent rapport d’Olivier Véran en 2015 sur le tiers payant généralisé. Des ouvertures sont certainement possibles, nous en discuterons avec lui en séance.

M. Cyrille Isaac-Sibille. Le tiers payant fonctionne avec certaines mutuelles qui fournissent une carte à leurs affiliés.

Nous voulons donner du temps médical aux médecins. Or le tiers payant entraîne une surcharge de travail. Les pharmaciens au tiers payant embauchent une personne à temps plein pour s’en charger, les cabinets médicaux devraient donc faire de même. Des solutions existent, certaines mutuelles le font très bien. La charge du tiers payant ne doit pas toujours revenir aux médecins.

M. Pierre Dharréville. Ne nous payons pas de mots, « généralisable » ne veut pas dire grand-chose. Peut-être aurait-il fallu écrire « généralisable un jour peut-être » pour que les choses soient plus claires ? À quel horizon imaginons-nous généraliser le tiers payant ? Et quels moyens nous donnons-nous pour rendre cette opération possible dans les meilleurs délais ? Je regrette nos difficultés à obtenir des réponses, voter ces amendements nous permettrait d’avancer.

La commission rejette successivement les amendements.

Puis elle est saisie de l’amendement AS552 de Mme Marie-Pierre Rixain.

Mme Marie-Pierre Rixain. Si l’interruption volontaire de grossesse est prise en charge à 100 % par l’assurance maladie obligatoire, la dispense d’avance de frais n’est pas garantie dans tous les cas et pour toutes les assurées, mineures ou majeures. L’absence de pratique systématique du tiers payant intégral ne permet pas de garantir le respect du secret pour les assurées qui souhaiteraient garder leur parcours confidentiel.

Pour cette raison, il est proposé de rendre obligatoire la pratique du tiers payant pour les actes en lien avec une IVG, et d’en garantir la confidentialité. Ainsi, les femmes pourront y avoir recours si elles le souhaitent, sans craindre que le remboursement par l’assurance maladie n’en informe leurs parents ou leur conjoint.

L’amendement précise également que la prise en charge de l’IVG est protégée par le secret. Il reprend les préconisations n° 1 et n° 2 du rapport d’information relatif à l’accès à l’interruption volontaire de grossesse adopté par la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes.

Il est proposé d’accélérer le calendrier de mise en œuvre de ce dispositif, voté lors de l’examen de la proposition de loi visant à renforcer le droit à l’avortement.

M. le rapporteur général. Avis favorable.

Nous avons en effet voté la disposition la semaine dernière dans le cadre de la proposition de loi visant à renforcer le droit à l’avortement.

La commission adopte l’amendement.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur général, elle rejette ensuite successivement les amendements AS746 et AS743 de M. Joël Aviragnet.

Puis elle aborde l’amendement AS84 de M. Bernard Perrut.

M. Bernard Perrut. Pendant la crise, certains cabinets médicaux n’ayant pu fonctionner, les infirmiers ont été les derniers à se déplacer à domicile, parfois sans relais leur permettant d’obtenir des prescriptions. Consultés, ils nous ont d’ailleurs dit combien l’obligation de prescription médicale peut compliquer l’accès aux soins.

Nous proposons donc que soit expérimentée de manière dérogatoire la possibilité, pour les infirmiers diplômés d’État, de procéder à l’évaluation et à la prescription des pansements médicamenteux sans prescription. Il s’agit en réalité d’encadrer par la loi une réalité de terrain : les infirmiers font déjà ces gestes dans le cadre des établissements de santé, et l’on connaît leur expertise pour modifier un protocole. L’efficacité du parcours de soins en serait améliorée, l’infirmier n’ayant plus à demander de prescription à un médecin, et les infirmiers se verraient reconnaître la place centrale qu’ils méritent dans notre système de santé.

Cette proposition de bon sens a déjà dû vous être maintes fois soumise, monsieur le rapporteur général ; à défaut d’une mise en œuvre définitive, une expérimentation serait bienvenue.

M. le rapporteur général. Je défends régulièrement l’idée d’étendre les compétences des médecins à d’autres professionnels de santé. Nous avons déjà progressé sur ce point concernant les pharmaciens, les infirmiers ou les kinésithérapeutes en votant la loi relative à l’organisation et à la transformation du système de santé l’année dernière. Votre amendement devrait être satisfait par les protocoles de coopération adoptés dans le même cadre et par l’article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, qui permettent aux professionnels de développer un protocole et même d’obtenir un financement et d’être évalués.

Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Article 34 : Expérimentation élargissant les missions confiées aux infirmiers de santé au travail du réseau de la mutualité sociale agricole

Suivant l’avis défavorable du rapporteur général, la commission rejette l’amendement de suppression AS119 de M. Pierre Dharréville.

Puis elle examine l’amendement AS82 de M. Bernard Perrut.

M. Bernard Perrut. Il s’agit d’un amendement d’appel. La prévention est centrale pour l’ensemble des professions, dont les travailleurs agricoles. Une expérimentation sur l’évolution des compétences des infirmiers de santé au travail est l’occasion d’améliorer à la fois l’accès de ces travailleurs aux soins et la reconnaissance des infirmiers de santé au travail. Il est important de compléter un tel dispositif par deux mesures : d’une part, diminuer la charge de travail du médecin de santé au travail en organisant un roulement avec l’infirmier de santé au travail ; d’autre part, reconnaître le rôle de coordination de l’infirmier, qui, par son analyse clinique, peut conseiller et orienter sans délai le travailleur agricole, si besoin, vers l’organisme de soins le plus approprié.

Si l’expérimentation aboutit, il faudra l’étendre à l’ensemble des infirmiers de santé au travail exerçant sur le territoire, sans restriction quant au domaine d’intervention.

M. le rapporteur général. Le Gouvernement, en accord avec la Caisse centrale de le mutualité sociale agricole, a fait le choix de ne pas étendre davantage les missions confiées aux infirmiers dans le cadre de l’expérimentation, estimant que les autres actes doivent demeurer la prérogative des médecins du travail. Je vous suggère donc de retirer l’amendement, sans quoi j’émettrai un avis défavorable.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’article 34 sans modification.

Après l’article 34

La commission aborde l’amendement AS62 de Mme Corinne Vignon.

Mme Corinne Vignon. Afin d’éviter la conjonction d’une épidémie de grippe saisonnière et d’une deuxième vague de l’épidémie de covid-19, nous proposons de rendre le vaccin contre la grippe obligatoire pour le personnel soignant. Cela permettrait de limiter l’incertitude quant à l’éventualité d’une double circulation virale. De nombreux médecins craignent en effet qu’une telle conjonction ne sature notre système de santé et les services de réanimation, puisque les formes graves des deux maladies sont similaires et touchent pareillement les voies respiratoires.

L’Académie de médecine a récemment insisté dans un communiqué sur l’importance de la vaccination grippale des soignants et des personnes fragiles en cette période de pandémie. En effet, en l’absence de vaccin disponible contre la covid-19, la vaccination contre la grippe pour les soignants devient une priorité, voire une nécessité pour éviter la pénurie de personnel.

Malheureusement, ces professions n’ont plus pour habitude de se faire vacciner contre la grippe saisonnière. En 2019, seuls 25 % des aides-soignants, 40 % des infirmières et 70 % des médecins ont été vaccinés.

L’obligation de vaccination de ces professionnels de santé, qui ont joué un rôle formidable pendant le confinement, semble donc indispensable. La loi la prévoit déjà, mais le décret du 14 octobre 2006 l’a suspendue sans préciser aucune date d’échéance. Il me semble impératif de la rétablir dans un souci de prévention sanitaire.

M. le rapporteur général. En effet, la disposition proposée figure déjà dans la loi, mais a été suspendue par décret. Je vous propose donc de retirer l’amendement, dès lors dépourvu de portée législative, et d’interroger le Gouvernement en séance sur l’opportunité de revenir sur ce décret. La HAS a souligné l’importance d’améliorer la couverture vaccinale des professionnels de santé, mais n’a pas préconisé de rendre la vaccination obligatoire. Le ministre s’est, je crois, exprimé dans le même sens.

Demande de retrait.

Mme Corinne Vignon. Je le retire, et j’interpellerai le ministre à ce sujet.

L’amendement est retiré.

La commission en vient à l’amendement AS600 de Mme Perrine Goulet.

Mme Perrine Goulet. La semaine dernière, nous étions dans l’hémicycle pour parler de l’interruption volontaire de grossesse (IVG). Conscients des difficultés de la navette parlementaire et de la longueur des délais qui pourraient s’écouler avant que le texte n’aboutisse et ne prenne force de loi, nous avons repris l’un des amendements que nous avions alors défendus, afin d’avancer la mise en œuvre de la disposition.

Il s’agit d’étendre à titre expérimental aux sages-femmes la possibilité de pratiquer des IVG chirurgicales. Dans de nombreux territoires, en effet, les femmes ne peuvent accéder assez rapidement à l’IVG faute de médecins. Mais il ne faut pas procéder n’importe comment ; d’où l’idée d’une expérimentation qui nous permettra d’étudier avec les sages‑femmes la formation, l’expérience, l’environnement dont elles ont besoin ainsi que les modalités de coordination avec les médecins et – il ne faut pas oublier cet aspect – de rémunération.

En adoptant cet amendement, nous permettrions aux sages-femmes de pratiquer dès 2021 des avortements dans nos territoires ruraux, cruellement dépourvus de médecins.

M. le rapporteur général. Puisque nous avons créé cette possibilité, jusqu’à la fin de la dixième semaine de grossesse, dans le cadre de la proposition de loi adoptée la semaine dernière, je demande le retrait de l’amendement ; à défaut, avis défavorable.

Mme Perrine Goulet. Oui, nous avons voté une mise en œuvre générale, ce qui est davantage qu’une expérimentation, mais nous ne savons pas quand elle pourra avoir lieu. Expérimentons donc dans l’intervalle, sans perdre de temps : cela permettra de traiter toutes les questions qui se poseront, de sorte qu’à la promulgation de la loi nous disposerons de tous les éléments permettant de passer de l’expérimentation du dispositif à sa mise en œuvre.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Je soutiens l’amendement. Certes, nous avons voté en faveur d’un dispositif général, mais celui-ci nécessite une expérimentation, car la concertation n’a pas encore été suffisante pour en sécuriser l’application. En outre, l’amendement nous permet de gagner du temps dans l’incertitude où nous sommes des délais de la navette. Nous irons plus vite par l’expérimentation qu’en misant sur celle-ci.

Mme Caroline Fiat. Le temps que la navette suive son cours, j’ai peur, en effet, que la législature ne soit finie ! Favorisons donc l’expérimentation. Et pour ceux qui n’étaient pas convaincus de la capacité des sages-femmes à pratiquer des IVG chirurgicales, il aura suffi d’écouter nos collègues Les Républicains exaltant tout à l’heure, à propos des maisons de naissance, le rôle des sages-femmes et leur compétence !

M. Philippe Vigier. Je soutiens également l’amendement, d’autant qu’il apporte toutes les garanties requises en proposant d’identifier les conditions de formation, d’expérience, d’environnement, de réalisation et de coordination avec les médecins.

Quelle est la situation dans les territoires ruraux ? Dans le sud de mon département, il n’y a qu’un seul gynécologue ! On éviterait les débats sur les délais en proposant aux femmes la prise en charge ad hoc à laquelle elles ont droit.

Ne nous racontons pas d’histoires : au rythme de la navette parlementaire, nous n’y serons pas dans deux ans ! Je préfère prévenir mes collègues : on nous vend du rêve ! D’autant que la majorité sénatoriale ne fera pas de ce sujet une priorité.

L’expérimentation proposée, qui représente un véritable enjeu pour les femmes, devrait donc être mise en œuvre.

Mme Delphine Bagarry. Je suis favorable à la montée en compétence des sages‑femmes, qu’elles demandent elles-mêmes. Je suis beaucoup plus optimiste que M. Vigier au sujet de la proposition de loi : j’espère qu’elle sera définitivement adoptée d’ici à la fin de la législature. Mais si nous votons en faveur de l’amendement, les sages-femmes seront formées et prêtes lors de l’entrée en vigueur de la loi, ce qui économisera beaucoup de temps.

M. Thibault Bazin. Je ne commenterai pas les propos de Mme Fiat, qui voudrait rouvrir un débat entre Les Républicains et La France insoumise ; je dirai simplement qu’accompagner la naissance n’est pas exactement la même chose que pratiquer une interruption volontaire de grossesse.

Madame la présidente, j’ai le sentiment d’une injustice dans le traitement des amendements. Pourriez-vous saisir les services de l’Assemblée à ce sujet ? En étendant les missions des sages-femmes, l’amendement crée une charge future pour la sécurité sociale – il mentionne d’ailleurs les conditions de financement du dispositif. Est-il donc recevable ? C’est à vérifier d’ici à l’examen en séance.

Mme Audrey Dufeu, présidente. Il n’y a là aucune injustice : l’amendement a été déclaré recevable car les expérimentations ne posent pas les mêmes problèmes d’irrecevabilité financière.

M. Thibault Bazin. Et au titre du lien avec le texte ?

Mme Annie Vidal. Je suis favorable à l’amendement, par souci de cohérence avec nos travaux sur la proposition de loi visant à renforcer le droit à l’avortement. En effet, nous avons fait adopter en séance un amendement précisant que les sages-femmes exercent une profession médicale à part entière, quel que soit le lieu d’exercice. Je regrette que l’amendement présenté par Mme Goulet pour expérimenter la pratique de l’IVG chirurgicale par les sages-femmes n’ait pas été adopté alors, car la durée de l’expérimentation nous laisserait le temps d’harmoniser le code de la santé publique et les dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière pour inscrire dans ces dernières que les sages‑femmes exercent bien une profession médicale.

Mme Monique Iborra. Il est vrai que les expérimentations, bien qu’elles représentent une charge financière, sont le seul moyen d’éviter l’irrecevabilité financière d’un amendement. C’est un peu tiré par les cheveux !

Quand on veut procéder à une expérimentation, il faut en définir les conditions ; or, ici, ce n’est pas fait. Dès lors que les sages-femmes ne pourront pratiquer cet acte chirurgical en ambulatoire mais devront le faire au sein d’un établissement – hôpital ou clinique privée –, ira-t-on vraiment plus vite par l’expérimentation que par la loi ?

D’autre part, une expérimentation coûte de l’argent et toutes les expérimentations en France durent un à trois ans, voire cinq ans, sans aucune évaluation en fin de parcours ; elles se poursuivent aussi longtemps qu’elles sont financées, puis s’arrêtent brutalement. Nous devrions vraiment réfléchir de manière globale à ce problème.

Mme Perrine Goulet. La plupart des sages-femmes qui pratiqueront les IVG chirurgicales exercent déjà dans un hôpital. L’acte fera partie de leur charge de travail : il n’entraînera donc aucun surcoût ; la main-d’œuvre – sans aucune connotation péjorative – est déjà là. Elles pratiquent les IVG médicamenteuses ; nous leur offrons la possibilité de pratiquer aussi les IVG chirurgicales, ni plus ni moins : cela n’occasionne aucune charge supplémentaire.

Mme Monique Iborra. Mais les sages-femmes libérales pourront également prétendre à cette possibilité ! Vous ne pouvez pas la réserver aux sages-femmes hospitalières. Il faut réfléchir 2 minutes !

Mme Perrine Goulet. Si vous lisez correctement le dispositif de l’amendement, vous verrez qu’il indique qu’« un arrêté du ministre chargé de la santé précise la liste des établissements de santé retenus pour participer à l’expérimentation », etc. : les sages-femmes libérales ne sont pas concernées.

La commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie des amendements identiques AS83 de M. Bernard Perrut et AS188 de M. Jean-Pierre Door.

M. Bernard Perrut. Mon amendement vise à répondre aux besoins en santé publique en facilitant l’accès à la vaccination des différentes catégories de population grâce à l’extension des compétences propres des infirmiers dans ce domaine. Il permettrait d’améliorer la couverture vaccinale – objectif de santé publique –, particulièrement chez les populations fragiles souffrant d’une ALD et dont le taux de vaccination relevé reste inférieur au seuil requis pour garantir l’efficacité. L’expérimentation améliorerait aussi la reconnaissance du métier d’infirmier, ce que visent plusieurs de mes amendements.

M. Thibault Bazin. L’amendement identique AS188 est un amendement de saison de notre collègue Jean-Pierre Door, visant à améliorer la couverture vaccinale antigrippale grâce aux infirmiers.

M. le rapporteur général. Depuis l’automne 2018, toutes les personnes majeures ciblées par les recommandations de vaccination antigrippale, qu’elles aient ou non déjà reçu le vaccin, peuvent se faire vacciner sans prescription médicale par le professionnel de leur choix : médecin, sage-femme, infirmier, pharmacien volontaire. Par ailleurs, la HAS doit rendre en 2021 un avis sur l’extension des compétences vaccinales des professionnels de santé, notamment des infirmiers. Il ne serait donc pas pertinent de lancer une expérimentation en ce sens en janvier 2021.

Demande de retrait.

Les amendements sont retirés.

La commission en vient à l’amendement AS187 de M. Jean-Pierre Door.

M. Thibault Bazin. Cet amendement propose une expérimentation pour le bon suivi des pathologies chroniques – un bel enjeu.

M. le rapporteur général. Avis défavorable, pour les raisons objectées à M. Perrut au sujet des protocoles de coopération.

La commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS569 de M. Cyrille Isaac-Sibille.

M. Cyrille Isaac-Sibille. Je propose d’expérimenter une consultation de prévention et de coordination effectuée par le médecin traitant une fois par an et destinée aux malades chroniques.

Lorsque vous êtes diabétique, par exemple, vous avez un médecin traitant, un diabétologue ou un endocrinologue qui vous voit une ou deux fois par an, et de nombreuses consultations de spécialistes – neurosensoriels, vasculaires, cardiaques, de podologie, etc. – qui écrivent ensuite à votre médecin traitant. Mais aucune consultation un peu longue, lors de laquelle celui-ci pourrait dresser le bilan des examens de l’année et faire œuvre de prévention, ne vous est proposée. L’amendement vise à combler ce manque.

Les 1,4 milliard d’euros que le PLFSS prévoit de consacrer au numérique incluent la valorisation de la réalisation du volet médical de synthèse. L’amendement est donc financé.

M. le rapporteur général. Je sais combien la question de la prévention vous est chère. Le médecin traitant a en effet un rôle essentiel à jouer en la matière ; l’infirmière en pratique avancée, le cas échéant, également. Toutefois, l’amendement me semble satisfait : une consultation annuelle majorée est déjà prévue par la convention médicale applicable aux patients en ALD.

Demande de retrait.

M. Cyrille Isaac-Sibille. Ce n’est pas suffisant : la consultation dont vous parlez n’est pas une consultation de prévention. Une consultation de coordination et de prévention incluant la mise à jour du volet médical de synthèse permettrait un meilleur suivi du patient et lui éviterait de nombreux examens.

Mme Stéphanie Rist. La consultation peut déjà être effectuée par les infirmières en pratique avancée ou par des infirmières coordinatrices dans le cadre des CPTS. Je doute qu’il soit nécessaire d’ajouter une consultation médicale de ce type.

M. Cyrille Isaac-Sibille. Pensez-vous vraiment que le podologue, l’ophtalmologue, l’oto-rhino-laryngologiste, le médecin vasculaire, le cardiologue écrivent à l’infirmière après la consultation ? Revenons sur le terrain ! Les malades font le tour des praticiens, qui envoient chacun leur lettre au médecin traitant ; celui-ci, inondé de courrier, la lit rapidement. Il faut une coordination annuelle des informations contenues dans l’ensemble des courriers ; c’est le B.A. BA de la prévention ! L’infirmière en pratique avancée lit-elle les lettres ? Et combien y a-t-il de CPTS en activité ? C’est le médecin traitant qui doit jouer un rôle pivot.

Mme Stéphanie Rist. Mais nous n’avons pas assez de médecins !

M. Cyrille Isaac-Sibille. La prévention évitera les consultations inutiles. Les patients font le tour des spécialistes, mais ils n’ont jamais l’occasion de se poser pour faire le point, faire interpréter les résultats de leurs examens, obtenir des conseils de prévention. En outre, c’est le médecin traitant qui est chargé d’établir le volet médical de synthèse ; y procéder dans le cadre d’une consultation globale économisera du temps.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS1002 de M. Belkhir Belhaddad.

M. Belkhir Belhaddad. Toutes les études et tous les rapports, qu’ils émanent de la HAS, de l’INSERM, de l’Académie de médecine ou du Parlement, ont démontré l’efficacité, du point de vue du rapport coût-bénéfices, de l’activité physique adaptée, qui peut même quelquefois remplacer les médicaments. Or la crise sanitaire a gravement affecté les personnes atteintes de maladies chroniques.

L’amendement vise donc à étendre aux diabétiques de type 2 le forfait accordé aux malades du cancer par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020. La population concernée est plus nombreuse : plus de 3 millions de personnes, dont la prise en charge serait ainsi améliorée.

Le dispositif serait mis en œuvre à titre expérimental, pour trois ans. On donnerait ainsi un cadre national à des expérimentations menées depuis dix ans.

M. le rapporteur général. Je vous sais attaché à développer les mesures liées au sport-santé. L’idée qui sous-tend l’amendement est bonne. Nous en avions déjà débattu l’année dernière et, comme l’avait fait mon prédécesseur, j’émets un avis de sagesse afin de laisser nos collègues se prononcer et de pouvoir en reparler avec le ministre en séance.

Mme Agnès Firmin Le Bodo. Je vais voter pour l’amendement, car le dispositif qu’il propose est nécessaire, mais attention : le décret d’application de l’article 40 du PLFSS 2020, créant le forfait équivalent pour les malades du cancer, n’est toujours pas paru !

La commission adopte l’amendement.

 

La réunion s’achève à dix-neuf heures cinquante.

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