Compte rendu

Commission
des affaires sociales

   Audition de M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé, sur la stratégie vaccinale contre la covid-19 2

 

 

 


Mardi
12 janvier 2021

Séance de 12 heures

Compte rendu n° 30

session ordinaire de 2020-2021

Présidence de
Mme Fadila Khattabi,
Présidente
 


  1 

COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Mardi 12 janvier 2021

La séance est ouverte à 12 heures.

————

La commission procède à l’audition de M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé, sur la stratégie vaccinale contre la covid-19.

Mme la présidente Fadila Khattabi. Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, mes chers collègues, je vous souhaite une excellente année 2021 et, surtout, une bonne santé.

J’aborde cette nouvelle année dans le même état d’esprit que la précédente, en souhaitant que nous accomplissions notre mission dans le respect mutuel et que continue de prévaloir la bonne ambiance qui a toujours été de mise au sein de notre belle commission. L’année 2021, je ne vous le cache pas, sera chargée. Outre que nous devrons nous préoccuper de l’emploi, de la sécurité sociale et de la solidarité sous toutes ses formes, la crise sanitaire nous imposera une vigilance de tous les instants. Aussi notre commission a-t-elle décidé de consacrer les travaux de cette première semaine à la stratégie de vaccination contre la covid‑19.

Le mois dernier, j’avais saisi de cette question l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), qui a très rapidement remis un rapport. Aujourd’hui, nous entendons M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé, que je salue, et demain, à 15 heures, nous accueillerons le professeur Alain Fischer, président du Conseil d’orientation de la stratégie vaccinale. Ces auditions ne valent évidemment pas solde de tout compte ; la commission ne s’en tiendra pas là s’agissant des questions de vaccination, dont le processus ne fait que commencer, et du suivi de la crise sanitaire.

Je remercie M. le ministre d’avoir répondu à notre invitation, malgré un agenda extrêmement contraint. Compte tenu de l’horaire de la réunion, le temps de parole des orateurs des groupes sera limité à 2 minutes et les interventions des autres orateurs ne devront pas excéder 1 minute.

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, je nous souhaite une année 2021 chargée de travail – je n’ai aucune peine à imaginer qu’elle le sera, et pour vous, et pour moi et mes équipes –, en espérant que nous pourrons parler d’autre chose que de santé : cela signifierait que nous avons franchi un cap dans la lutte contre le virus.

Depuis bientôt un an, la France, comme tant de pays dans le monde, est confrontée à une épidémie d’une grande brutalité. Les efforts consentis par la nation ont été et demeurent immenses, tout comme ceux consentis par nos soignants, à qui je veux dire, une fois encore, toute ma gratitude. Le nombre moyen des contaminations quotidiennes reste élevé dans notre pays : il était d’environ 10 000 à 11 000 début décembre et il est actuellement d’environ 18 000 ; le plateau est haut et monte légèrement, avec des disparités territoriales. Je tenais à le souligner, même si vous ne m’avez pas convié pour dresser le bilan de l’épidémie.

Nous franchissons une nouvelle étape dans notre combat contre le virus, une étape que nous espérons décisive et qui nous permet d’entrevoir enfin une sortie possible de la crise, à l’échelle du pays et de la planète.

Alors que la recherche a tenu toutes ses promesses et réalisé la prouesse de trouver, en quelques mois seulement, un vaccin contre le virus, il nous revient de déployer ce vaccin dans les meilleures conditions possibles. Nous ne naviguons pas à vue. Une stratégie a été définie par la Haute Autorité de santé (HAS) qui, je le rappelle, est indépendante.

Il y a quelques semaines, l’Assemblée nationale et le Sénat ont débattu de la stratégie vaccinale dans le cadre de l’examen d’une proposition de résolution. Le 7 décembre, les présidents de l’ensemble des groupes parlementaires ont été réunis par le Premier ministre pour évoquer la stratégie vaccinale, alors en construction. Hier, le comité de liaison a de nouveau rassemblé les présidents des groupes des deux assemblées pour faire le point sur l’épidémie et sur la campagne de vaccination ; j’étais moi-même présent à cette réunion qui a duré près de quatre heures. Depuis plusieurs semaines, l’OPECST effectue un travail de grande qualité sur le suivi du déploiement de la vaccination. Cette audition m’offre l’occasion de remercier les différents rapporteurs de ces travaux pour le soutien qu’ils ont apporté et renouvelé à la stratégie de vaccination gouvernementale.

Je me réjouis d’être devant vous pour répondre à vos questions. Je m’efforcerai d’être bref dans mon propos introductif et concis dans les réponses que je vous apporterai, compte tenu de l’heure et du temps dont nous disposons.

Des publics prioritaires ont été identifiés, au premier rang desquels figurent les personnes âgées vulnérables qui vivent dans des établissements collectifs tels que les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), où le virus, lorsqu’il y pénètre, fait de nombreux dégâts. Les résidents de ces établissements représentent 1 % de la population et plus d’un tiers des cas graves conduisant au décès. Leur vaccination est donc la priorité des priorités.

Nous avons par ailleurs accéléré, amplifié et simplifié les procédures de vaccination, en suivant l’avis des scientifiques, grâce au recul dont nous disposons. Je participais, juste avant de vous rejoindre, avec des responsables des autorités sanitaires et scientifiques, à l’une des conférences téléphoniques au cours desquelles nous discutons, au fur et à mesure que les informations nous parviennent du monde entier, des procédures et des normes en vigueur ainsi que des moyens qui peuvent nous permettre de continuer à amplifier et simplifier le dispositif.

Les fédérations d’EHPAD nous avaient demandé un peu de temps, la période des fêtes n’étant pas propice au recueil du consentement des personnes fragiles, en perte d’autonomie et souvent dans l’incapacité de consentir elles-mêmes à la vaccination. Nous le savons, l’adhésion des personnes est l’un des enjeux prioritaires de la campagne de vaccination. Rien ne serait pire, en effet, que d’intervenir dans un EHPAD où, les esprits n’étant pas préparés, on ne pourrait vacciner que 20 % ou 30 % des résidents. Nous souhaitons évidemment protéger le plus grand nombre possible de personnes âgées, pour que la vie puisse reprendre dans les EHPAD et dans le reste du pays.

Notre stratégie n’a donc pas changé, non plus que les priorités. Le calendrier, en revanche, a été accéléré. Notre objectif est clair : nous souhaitons avoir vacciné plus d’un million de Français à la fin du mois de janvier et pouvoir proposer la vaccination en priorité aux 15 millions de personnes qui composent le public le plus fragile au regard du risque viral, c’est-à-dire les personnes âgées, quel que soit leur état de santé, et les personnes plus jeunes souffrant de comorbidités qui les exposent à un risque particulier de développer des formes graves de la maladie.

M. Thomas Mesnier, rapporteur général. Pour commencer, permettez-moi, monsieur le ministre, mes chers collègues, de vous adresser mes meilleurs vœux de bonne santé et de souhaiter, madame la présidente, que nos travaux restent empreints de la sérénité qui ne leur a jamais fait défaut jusqu’à présent, sérénité que devrait garantir aujourd’hui l’absence dans la salle de candidats aux prochaines élections régionales et présidentielle...

Le taux d’incidence du covid-19 observé en France est l’un des plus faibles d’Europe. Quant à notre stratégie de tests, nous pouvons saluer sa réussite puisque nous avons réalisé encore la semaine dernière un peu plus de 2 millions de tests, lesquels sont accessibles gratuitement.

La stratégie de vaccination a été présentée le 16 décembre par le Premier et vous‑même, monsieur le ministre, devant l’Assemblée nationale, sans faire alors l’objet de critiques – mais les gens sont impatients, et c’est normal.

Pouvez-vous nous indiquer le nombre des personnes qui ont été vaccinées à ce jour et revenir sur la publication des données, car la transparence doit rester de mise ? Alors que le public susceptible d’être vacciné va bientôt être élargi, je souhaiterais que vous nous expliquiez la procédure de prise de rendez-vous – je crois savoir que des entreprises françaises ont été sollicitées pour concourir au fonctionnement des centres de vaccination. Par ailleurs – c’est une question récurrente sur le terrain –, quand les professionnels de santé, pharmaciens et infirmiers notamment, pourront-ils participer à la vaccination ? L’arrivée prochaine de nouveaux vaccins devrait, me semble-t-il, faciliter et amplifier leur intervention. Je salue, à ce propos, la stratégie européenne qui a consisté à passer commande auprès de nombreux laboratoires et qui nous permet d’accélérer la campagne de vaccination.

M. Marc Delatte. Monsieur le ministre, je vous présente, au nom du groupe La République en Marche, nos meilleurs vœux.

L’important, disait Jean de La Fontaine – dont nous célébrons, dans l’Aisne, les quatre cents ans de la naissance –, est de partir à point. On ne saurait mieux illustrer votre volonté et vos actions. Il convient en effet de ne pas confondre vitesse et précipitation dès lors que la stratégie vaccinale, qui a fait l’objet d’une vaste concertation sous votre autorité, se caractérise par son efficacité et sa réactivité et qu’elle est motivée par le choix éthique, qui nous honore, de sauver des vies et de protéger les plus fragiles, personnes handicapées et personnes âgées, en EHPAD ou à domicile, ainsi que ceux dont la vocation est de prendre soin des autres : soignants, aides à domicile, pompiers.

Hors le vaccin, point d’alternative ! Il faut donc saluer la prouesse des chercheurs, qui ont travaillé d’arrache-pied pour le bénéfice de l’humanité.

Les vaccins, nous les avons. La confiance de nos concitoyens en la science et en notre stratégie croît de jour en jour. Qui dit stratégie, dit programmation et planification. Pourquoi faut-il se faire vacciner ? Nous le savons. Reste à savoir où et comment : dès jeudi, les personnes âgées de plus de 75 ans prendront rendez-vous. Pouvez-vous donc nous dire comment sera déployé, en pratique, le dispositif des centres de vaccination ?

S’agissant de la nature des vaccins – à acide ribonucléique (ARN) messager ou plus conventionnels, tel celui d’AstraZeneca, en cours de validation –, quels sont les éléments qui guideront le choix vaccinal ?

Quelle place est réservée dans le dispositif aux médecins de famille, infirmières libérales et pharmaciens ? Ces deux dernières catégories pourront-elles administrer la seconde dose vaccinale sans l’intermédiaire d’un médecin ?

À l’heure où les soignants sont tous fortement engagés dans la permanence des soins, quelle place la réserve sanitaire occupera-t-elle dans le dispositif ? À titre personnel, en ma qualité de médecin, je m’y engagerai, comme lors du premier confinement.

Enfin, la santé publique prend actuellement tout son sens ; elle concourt au bien commun, dans le cadre d’une responsabilité collective où chacun est pleinement acteur de santé. Comment la faire évoluer vers une démocratie sanitaire dans une vision hexagonale et européenne ?

M. Jean-Pierre Door. J’adresse, au nom du groupe Les Républicains, tous nos vœux de bonne santé à la France et aux Français.

Décidément, lorsqu’on se compare, on ne se rassure pas. Après les masques et les tests, le lent démarrage de la vaccination a irrité l’opinion publique, les médias et jusqu’au Président de la République !

Monsieur le ministre, je vous poserai des questions claires qui appellent des réponses précises. À ce jour, combien de doses de vaccin, d’aiguilles – dont le stock semble insuffisant dans certaines régions – et de super-congélateurs notre pays possède-t-il ?

S’agissant du partenariat entre les autorités sanitaires et les élus locaux, on a semblé préférer trente‑cinq citoyens tirés au sort aux 35 000 maires. Il est urgent de combler le retard pris en la matière. Je rappelle que lors de la campagne de vaccination contre le virus H1N1, qui n’a pas été une entière réussite, l’accélération de la vaccination avait été permise par l’installation de centres en collaboration avec les élus locaux.

Enfin, quand proposerez-vous de vacciner en priorité les patients atteints d’affections de longue durée (ALD), qui sont au nombre de 10 millions et qui peuvent être très facilement contactés par les caisses primaires d’assurance maladie afin d’être dirigés vers les centres de vaccination ? Ce sont des personnes extrêmement fragiles !

M. Cyrille Isaac-Sibille. Monsieur le ministre, depuis neuf mois, vous devez, nous devons anticiper la prochaine difficulté. C’est pourquoi je souhaite évoquer, au nom du groupe Mouvement Démocrate (MoDem) et Démocrates apparentés, un aspect essentiel de cette campagne de vaccination à grande échelle, inédite dans notre pays. Je veux parler de la gestion des innombrables données qu’elle va générer, celles-ci – dates des injections, type et lot de vaccins, vaccinateurs, effets indésirables immédiats ou effets secondaires... – pouvant être croisées avec d’autres données : âge et sexe du patient, sujet asymptomatique ayant bénéficié de tests Polymerase Chain Reaction (PCR) ou antigéniques, antécédents allergiques ou immunitaires, groupage sanguin. Comment ces données seront-elles stockées, suivies et analysées au niveau individuel et de la population à court, moyen et long terme ? C’est un enjeu majeur en matière non seulement de transparence mais aussi de pharmacovigilance et de pharmaco-épidémiologie.

Par ailleurs, vous avez rapidement créé, pour le vaccin contre la covid-19, un système d’information nouveau et autonome. Pourtant, depuis quatre ans, l’assurance maladie a la responsabilité d’un merveilleux outil, le dossier médical partagé (DMP), qui héberge un carnet de vaccination électronique, déjà fonctionnel dans trois grandes régions. Lors de cette crise, qui impose la réalisation rapide de millions de tests et désormais de millions de vaccinations, le DMP et le carnet de vaccination électronique auraient pu être rapidement déployés sur l’ensemble du territoire, favorisant ainsi un meilleur suivi individuel et une meilleure approche de santé publique. Pouvez-vous nous expliquer les raisons pour lesquelles il a été décidé de créer un nouveau système d’information au détriment d’un outil opérationnel pour lequel de gros investissements ont déjà été réalisés ?

M. Boris Vallaud. Monsieur le ministre, le 13 octobre dernier, je vous interrogeais sur la stratégie vaccinale de la France alors que se profilait l’arrivée, avant la fin de l’année, de deux vaccins aux États-Unis et que le gouvernement britannique avait déjà déterminé sa propre stratégie. Je craignais des retards en France. Vous m’aviez alors répondu : « Rassurez-vous, tout est prêt ! » et aviez considéré ma question comme une vaine polémique. J’y avais vu une marque de l’habituelle suffisance du Gouvernement ; c’était en fait de l’insuffisance.

Une course contre la montre s’est engagée face à la menace du variant anglais et peut-être du variant sud-africain. Le second confinement n’a pas atteint les objectifs qui lui avaient été assignés et le déconfinement demeure incertain dans ses méthodes et ses effets. Vous accélérez donc, en promettant qu’un million de Français seront vaccinés à la fin du mois de janvier – à cette date, 2,3 millions de Britanniques l’auront été – et en prévoyant que 14 millions le seront avant l’été alors que nos voisins d’outre-Manche atteindront ce chiffre le 14 février prochain. La question demeure : comment allons-nous faire ? Ce retard est évidemment un désastre économique et social ; c’est aussi une tragédie humaine.

Bien d’autres questions se posent, du reste. Pourquoi ne vous êtes-vous pas préparés plus tôt ? Pourquoi une logistique si laborieuse et un recours si tardif et si prudent à l’armée, à la différence de ce qu’ont fait d’autres nations ? Pourquoi ne pas avoir anticipé le consentement, notamment pour les résidents des EHPAD ? Pourquoi y a-t-il seulement cinq plateformes interrégionales de répartition du vaccin dans le flux A ? Pourquoi ne pas avoir engagé une communication à destination du grand public, donnant ainsi le sentiment que vous abordiez la vaccination à reculons ? Pourquoi les collectivités locales n’ont-elles pas été associées plus en amont ? Pourquoi les super-congélateurs n’étaient-ils pas tous opérationnels fin décembre ? Pourquoi y a-t-il, dans certains établissements de santé, plus de doses que d’aiguilles pour les administrer ? Pourquoi seulement 10 % à 15 % de doses ont-elles administrées sur le million reçu ? Pourquoi les pharmaciens ne sont-ils pas autorisés à vacciner, alors que l’enjeu est d’opérer une montée en puissance du nombre de vaccinateurs ? Pourquoi la stratégie d’approvisionnement des centres de distribution concernant le vaccin Moderna était-elle encore en cours de définition il y a trois jours ? Pourquoi n’envisage-t-on pas, en France, de super-centres de vaccination ? Pourquoi vous a-t-il fallu recourir à McKinsey ?

Les questions de la représentation nationale, monsieur le ministre, sont précises ; elles ne relèvent pas de la polémique, elles sont une exigence envers les Français que nous représentons.

Mme Agnès Firmin Le Bodo. Tout d’abord, je vous souhaite à tous mes meilleurs vœux pour cette année qui s’annonce si importante.

Monsieur le ministre, je commencerai par vous interroger sur deux points se rapportant à la logistique.

Premièrement, il semble qu’il existe trois fichiers différents pour les vaccins, les aiguilles et les seringues, ce qui crée une difficulté de coordination et pourrait avoir pour conséquence que les aiguilles et les seringues ne soient pas en nombre suffisant par rapport aux vaccins.

Deuxièmement, il apparaît que, parfois, la sixième dose des flacons pourrait être utilisée. Cela permettrait de tordre le cou à l’idée selon laquelle 20 % des doses ne seraient pas utilisées – c’est un chiffre qui circule beaucoup.

Vous avez parlé de l’adhésion à la vaccination. Je vous rejoins sur ce point, mais cela ne concerne pas seulement les résidents des EHPAD : cela vaut pour tous les Français. Or l’adhésion ne sera obtenue que grâce au triptyque confiance, proximité et transparence. Je remercie le Gouvernement de faire preuve de transparence en communiquant en temps réel aussi bien sur les effets indésirables que sur les chiffres de la vaccination ; c’est important. La confiance et la proximité, quant à elles, sont étroitement liées : quand allez-vous ouvrir la vaccination aux professionnels de santé de proximité ? C’est ce que les Français attendent et souhaitent.

Enfin, en ce qui concerne les publics ciblés, Jean-Pierre Door a parlé des personnes en ALD ; j’évoquerai pour ma part les personnes vulnérables de moins de 50 ans – il y en a 2 millions en France. Il s’agit, par exemple, de personnes ayant subi un triple pontage coronarien. Toutes ces personnes ne comprennent pas pourquoi elles ne sont pas considérées comme prioritaires : certes, elles ont moins de 50 ans, mais elles souffrent de pathologies importantes qui nécessiteraient qu’on les vaccine assez rapidement, ou à tout le moins qu’on leur donne une perspective.

M. Pascal Brindeau. Monsieur le ministre, vous avez déclaré en substance, dans votre propos liminaire, que la stratégie du Gouvernement en matière de vaccination n’avait pas changé pas et qu’elle ne faisait pas débat, d’ailleurs, s’agissant des publics cibles identifiés, mais que, sous l’effet du débat public, vous aviez décidé d’accélérer le rythme de la campagne et que vous souhaitiez vous donner les moyens de le faire.

Je vais vous donner quelques chiffres qui m’inquiètent quant à la capacité réelle d’accélérer – je veux parler non pas tant du nombre de doses disponibles que de la vitesse à laquelle elles sont acheminées vers les centres de vaccination. Je participais hier, dans ma circonscription, à une réunion consacrée à l’ouverture, lundi prochain, d’un centre de vaccination, soutenue par la ville de Vendôme et le centre hospitalier. Or celui-ci ne dispose que de 200 doses, quand l’arrondissement de Vendôme compte environ 80 000 habitants. Lors de la réunion, nous avons appris que 4 875 doses seraient désormais acheminées chaque semaine, pour l’ensemble du département – lequel rassemble 340 000 habitants –, vers le centre hospitalier de Blois, qui est le support du groupement hospitalier de territoire (GHT), puis réparties entre les différents centres de vaccination. Ce chiffre vous paraît-il suffisant pour atteindre les nouveaux objectifs fixés par le Gouvernement, notamment dans la perspective d’un élargissement des publics ciblés ?

Une remarque pour finir : les aiguilles utilisées ne sont pas les bonnes. Il faut des aiguilles 23G pour injecter le vaccin Pfizer – nous n’en avons pas.

Mme Jeanine Dubié. Au vu des prévisions concernant la circulation du virus en ce début d’année, la vaccination apparaît comme une des seules perspectives encourageantes pour 2021. Aussi avez-vous annoncé jeudi dernier, monsieur le ministre, vouloir aller plus loin, plus fort et plus vite. Nous partageons cette volonté.

S’agissant de la stratégie d’acheminement des vaccins, il existe apparemment un flux A et un flux B. Pourriez-vous nous expliquer les raisons de cette différenciation ? Peut‑elle créer des disparités territoriales ? L’arrivée du vaccin Moderna modifiera-t-elle cette stratégie ?

Comment le suivi des patients vaccinés est-il organisé ? À court terme, comment l’administration assurera-t-elle le suivi des secondes doses, ainsi que la prise en compte des effets secondaires éventuels ? À plus long terme, comment la protection offerte par chaque vaccin sera-t-elle évaluée ? Prévoyez-vous de renforcer le dispositif de pharmacovigilance en la matière ?

Enfin, la création de nouveaux dispositifs d’information et de communication nous paraît nécessaire. Envisagez-vous de développer une information claire et transparente pour faire en sorte que les Français adhèrent pleinement au projet vaccinal ?

M. Adrien Quatennens. Les deux vaccins actuellement disponibles en France utilisent la méthode vaccinale via ARN messager, qui n’avait jamais été commercialisée auparavant. Elle semble constituer une option efficace dans la lutte contre la covid-19, mais s’accompagne de contraintes techniques et logistiques importantes. Il apparaît que le vaccin par ARN messager réduit l’apparition des formes symptomatiques, notamment les formes graves, mais qu’en est-il des effets sur la transmission du virus ? Les résultats connus ne sont pas définitifs.

Comment expliquez-vous qu’une grande puissance comme la France ne produise pas encore son propre vaccin ? Où en est Sanofi ? Quand la France disposera-t-elle de vaccins de technique classique ? Permettrez-vous alors aux Français désireux de se faire vacciner de choisir entre les différents types de vaccin ?

Le Gouvernement a fait appel au cabinet de conseil McKinsey pour élaborer la stratégie de vaccination : combien cela coûte-t-il ? On a parlé de 2 millions d’euros par mois ; confirmez-vous ce montant ? Pourquoi confier à un prestataire privé des missions qui relèvent des compétences régaliennes de l’État ? Ne dispose-t-on pas, au sein de l’appareil d’État, d’un Haut-Commissariat au Plan, ni de logisticiens compétents ?

Le Gouvernement a décidé de nouer un partenariat officiel avec Doctolib pour la gestion des centres de vaccination. Cette entreprise privée pourra donc ficher toute personne recourant à ses services. Pourquoi encore ce choix du privé et des données de santé privatisées, au mépris du service public ?

Qu’en est-il du respect des phases de vaccination recommandées par la Haute Autorité de santé ?

La chaîne d’approvisionnement des vaccins est-elle bien garantie ?

Afin de permettre une planification de la vaccination et d’accroître la confiance de la population, il nous paraît essentiel que les contrats passés soient transparents : nous devons connaître les prix, les quantités de vaccins et les circuits logistiques.

Il en va de même pour les données scientifiques : nous devrions exiger que l’ensemble des recherches sur le traitement et les vaccins bascule dans le domaine public, comme le demande l’initiative citoyenne européenne « Pas de profit sur la pandémie ». Pourquoi ne pas utiliser les licences d’office pour contourner les brevets ?

La stratégie vaccinale doit être combinée à une stratégie thérapeutique. Nous plaidons, pour notre part, en faveur de la création d’un pôle public du médicament en France. Pourquoi le Gouvernement a-t-il refusé de financer lui-même les essais cliniques de l’Institut Pasteur de Lille en vue de trouver un traitement ?

M. Pierre Dharréville. Ce que nous souhaitons, c’est que la vie reprenne le dessus et que soit garanti un véritable droit au vaccin pour toutes et pour tous. Pour ce faire, les doses disponibles doivent être utilisées au mieux. Cela suppose un travail administratif fin, qui ne soit pas simplement de nature technocratique ou passant par des plateformes. Nous nous interrogeons sur la mobilisation des différents acteurs disponibles afin de rendre le vaccin largement accessible : quelles mesures prévoyez-vous de mettre en œuvre à cet égard ? Nous nous demandons également si vous avez utilisé une logistique parallèle. Comment prévoyez‑vous de réorganiser les choses ?

Pouvez-vous nous indiquer quelle sera la plus-value, dans la gestion de la crise, des cabinets que vous avez sollicités ? Cette question est évidemment ironique.

Je voudrais surtout vous interroger sur la production de vaccins. Depuis le début, on sait qu’un énorme effort devra être fourni à cet égard, partout dans le monde. Une fois de plus, nous avons le sentiment que vous vous en êtes remis plus que de raison au marché. Vous avez passé commande aux détenteurs de brevets. Là encore, peut-être aurait-il fallu prendre la main en organisant la production à partir du moment où les formules ont été trouvées.

La crise est trop grave, à nos yeux, pour que l’on en reste à la situation actuelle. Il ne s’agit pas de ne pas rémunérer le travail de recherche ni d’interrompre les recherches en cours, mais n’est-ce pas le moment ou jamais de mobiliser les capacités de production de notre pays par des formes d’action publique plus vigoureuses, de manière à répondre aux besoins, à l’urgence, à l’enjeu crucial de santé publique auquel nous sommes confrontés ? Pour notre part, nous le croyons. Récemment, quelques propos visant à poser les bases d’une réorientation modeste se sont fait entendre. Nous pensons quant à nous que des efforts bien plus considérables sont nécessaires.

M. le ministre. Les questions étaient nombreuses, ce qui est tout à fait normal ; je vais essayer de structurer ma réponse en quelques points, pour laisser le temps aux autres parlementaires d’intervenir.

En ce qui concerne la transparence, nous avons publié hier un tableau au format PDF contenant la totalité des vaccinations réalisées, la répartition régionale ainsi que le pourcentage de la population vaccinée par région. J’ai demandé que soient publiées tous les jours, à 19 heures 30 au plus tard, les données dont nous disposons, c’est-à-dire le nombre de vaccins injectés par région, la proportion de la population protégée et le nombre de doses dont disposent les régions, ce qui permet aussi d’indiquer le pourcentage de doses consommées dans chaque région. Je veux que ces données soient en accès libre. Cela me semble tout à fait naturel.

S’agissant de la pharmacovigilance, nous avons eu l’occasion d’expliquer le mécanisme en détail lors de la présentation au Parlement de la stratégie vaccinale : elle sera assurée par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, la HAS, Santé publique France et les centres nationaux de référence. Les leviers classiques en matière de pharmacovigilance sont renforcés ; cela permet à tout un chacun de déclarer des effets indésirables.

De manière à vous montrer que la transparence est non pas un handicap mais une valeur que je continue à porter en étendard – comme c’est le cas, du reste, depuis le premier jour de la gestion de crise –, je tiens à vous dire que nous avions enregistré, hier soir, un seul cas d’effet indésirable de nature allergique, correspondant d’ailleurs à ce qui a été constaté à l’étranger. L’issue a été favorable et les suites simples. Comme je l’avais moi-même expliqué jeudi dernier, il faut s’attendre à un cas d’effet indésirable de nature allergique pour 100 000 personnes vaccinées. Or nous en étions hier à 138 000 Français vaccinés.

Le carnet de vaccination électronique est un très bon outil, monsieur Isaac-Sibille, et je remercie les professionnels de santé qui y travaillent. La seule difficulté tenait à la possibilité de le déployer et de le mettre en œuvre dans des délais serrés, ainsi qu’à sa capacité à supporter une charge extrêmement élevée. En l’état, il était donc inexploitable, mais, je le répète, c’est un outil dont je souhaite me servir le plus vite et le plus largement possible.

En ce qui concerne la coopération entre soignants et la question de savoir qui va procéder aux vaccinations, je rappelle que le vaccin est administré sur prescription médicale obligatoire, mais que l’opération en elle-même peut être déléguée à des soignants. Par ailleurs, nous avons fait le choix qu’un médecin soit toujours présent dans les sites où la vaccination a lieu, qu’il s’agisse des centres de vaccination à destination du monde de la ville ou des centres de vaccination hospitaliers.

Pour l’administration d’un vaccin comme celui de Pfizer, dont les conditions de conservation sont extrêmement délicates et les modalités d’utilisation très précises, nous avons fait le choix de petits centres de vaccination, privilégiant la proximité, et non de « vaccinodromes » comme certains pays voisins. Il est évident que, lorsque nous disposerons – le plus vite possible, je l’espère – de vaccins se conservant plusieurs jours au réfrigérateur, entre 2 et 8 degrés, d’usage plus simple et plus classique, nous nous appuierons sur l’ensemble des soignants maillant le territoire. En tout cas, je le souhaite ardemment. La vaccination antigrippale se fait aussi bien chez le médecin que chez l’infirmier ou le pharmacien, ce qui nous permet de vacciner plusieurs millions de Français par semaine. J’attends donc l’avis de la HAS, dans le cadre de l’élaboration d’un protocole de coopération.

Les centres de vaccination ont d’ores et déjà la possibilité de recruter des personnes, sur une liste de soignants – en exercice, en formation ou retraités – habilités à vacciner. Le décret a été publié il y a plusieurs jours et il est utilisé au quotidien. Je remercie d’ailleurs tous les soignants qui s’engagent – personnels médicaux ou autres, qu’ils exercent dans le public ou dans le privé. Je remercie aussi la réserve sanitaire, la réserve civique et l’ensemble des acteurs qui permettent aux centres de vaccination de bien fonctionner.

J’ai expliqué que nous voulions avoir cent centres ouverts la semaine dernière, monter progressivement à trois cents au cours de cette semaine et, à terme, disposer de cinq à sept centres par département. Je ne souhaite pas qu’il y en ait plus car, en les multipliant, nous risquons de multiplier également les déconvenues liées à un défaut d’alimentation en vaccins. En effet, dès lors qu’un département reçoit un contingent de doses, plus il répartit ces dernières entre un nombre de centres élevé, plus rapidement certains d’entre eux risquent de manquer de vaccins.

Nous avons donc opté pour une vision cohérente et fait le choix de la proximité. Nous mettons aussi en place avec les élus des moyens d’aider les personnes âgées vivant à leur domicile à se déplacer lorsqu’elles ne peuvent pas le faire par elles-mêmes. J’y reviendrai.

Je n’ai donc pas fait le choix de gros vaccinodromes, à l’échelle régionale, qui auraient impliqué, pour des personnes âgées de 85 ans et plus, de faire 150 kilomètres et des heures de queue à l’extérieur d’un gymnase, en plein hiver. Je revendique cette décision, qui me semble d’ailleurs très bien acceptée par les élus.

Le dispositif facilite également l’acheminement des vaccins. À cet égard, je le répète, l’acheminement suit la production. Nous avons communiqué de manière transparente sur le nombre de doses des cinq principaux vaccins, validés ou dont nous attendons et espérons la validation, qui nous seront acheminées. Ainsi, chacun est en mesure de saisir les enjeux – j’y reviendrai.

Mercredi dernier, en France, nous disposions de 1,8 million de doses de vaccins Pfizer et nous sommes ravitaillés à raison de 500 000 – et bientôt un million – de doses par semaine. Nous avons reçu hier les cinquante mille premières doses du vaccin Moderna, dont j’ai annoncé le déploiement préférentiel dans les communes des territoires qui font face à une recrudescence épidémique. Ces vaccins viendront renforcer les capacités de vaccination dans ces communes. C’est un choix revendiqué et il sera effectif dès cette semaine.

Sur la question du matériel, comme vous, je lis la presse. Il suffit parfois qu’une équipe, dans un établissement, se fasse l’écho de difficultés à trouver des aiguilles pour qu’on évoque un problème national de logistique ! Nous disposons de 3,3 millions d’aiguilles et nous allons recevoir 2 millions supplémentaires dans les prochains jours. Nous avons un stock de 4,6 millions de seringues et nous allons également en recevoir dans les jours à venir.

En ce début de semaine, 850 000 aiguilles et 600 000 seringues sont déstockées à destination des territoires. Elles s’ajoutent à tout le matériel d’injection dont disposent déjà, par nature, les hôpitaux. La complexité est liée au nombre de références : il en existe quinze pour les aiguilles et pas moins de seize pour les seringues, qui permettent toutes de réaliser une intramusculaire et d’injecter le vaccin. Nous avons donc fait le choix de commander ces seringues et ces aiguilles – toutes compatibles donc –, puis de les répartir dans les hôpitaux. Si un hôpital ne dispose plus d’une des quinze références, cela ne veut pas dire qu’il n’a pas les quatorze autres...

Tous les départements français sont équipés en supercongélateurs activés, sécurisés, autonomisés, permettant de stocker les vaccins. Le dernier sera livré à Mayotte le 20 janvier. Il avait été initialement prévu que Mayotte bénéficie de transferts de vaccins depuis La Réunion, mais elle a souhaité disposer de cet équipement, et nous le mettons en place avec le soutien du service de santé des armées, qui nous a aussi aidés à déployer les congélateurs et à acheminer du matériel dans les territoires ultramarins. Rassurez-vous, nous ne nous privons d’aucune aide. Je remercie d’ailleurs Florence Parly pour son soutien.

Au ministère, la logistique du dispositif est pilotée par une task force, une équipe solide qui travaille depuis des mois, encadrée par un général des armées et à laquelle participent deux lieutenants-colonels. Vous le voyez, nous avons donc mobilisé l’armée.

Il existe deux flux de distribution des vaccins à destination des territoires : le flux A et le flux B. Le flux B est utilisé dans les centres de vaccination, de façon courante ; le flux A est réservé à la campagne de vaccination dans les EHPAD – c’est pourquoi il n’est réparti que sur quelques centrales au niveau national. Les EHPAD disposent de la date à laquelle nous intervenons dans leur établissement pour vacciner et les circuits de distribution privilégient la contiguïté territoriale, considérant que ce petit brin d’ARN messager est bien fragile et qu’il n’aime pas les trajets et les transports. Ainsi, nous avons dû différer l’envoi des vaccins en Corse pendant environ quarante-huit heures, non pas parce que nous aurions échoué d’un point de vue logistique – comme j’ai pu le lire – mais parce que les conditions météorologiques risquaient d’entraîner trop de secousses. La Corse a été livrée, je vous rassure, et nous avons complété par un navire afin d’acheminer les vaccins à l’autre bout de l’île. La logistique est certes complexe, mais nous tenons le choc.

J’entends les critiques : l’administration ne saurait pas faire. Pour ce qui me concerne, je tire mon chapeau à cette administration parce que, le 24 décembre au soir, le 31 décembre au soir, je peux en attester, elle était au boulot ! La grande administration française, ce sont des hommes, des femmes, mobilisés jour et nuit dans les territoires et au niveau national, pour l’intérêt général. Ce sont des personnes que vous ne voyez pas, que vous n’entendez pas, mais qui ont des oreilles, des yeux et qui lisent. Je profite de cette audition pour les remercier car ces milliers de personnes sont engagées depuis des mois et, sans elles, nous n’aurions pas organisé les transports sanitaires entre hôpitaux en plein pic épidémique, nous n’aurions pas été capables d’acheminer des masques et des tests et nous ne serions pas le pays qui teste le plus en Europe, avec l’Angleterre.

Vous m’avez interrogé sur les prestataires privés : il est tout à fait classique et cohérent de s’appuyer sur l’expertise du secteur privé. J’entends régulièrement les deux critiques : l’administration serait toute-puissante mais il serait scandaleux de passer par des prestataires privés ! Nous faisons les deux, mon colonel, si vous me permettez l’expression. Nous travaillons effectivement avec un prestataire sur la logistique vaccinale. Il a été sélectionné dans le cadre d’un marché public avec un système de carrousel et opère dans de très nombreux pays européens.

La France insoumise m’a également interrogé sur nos prestataires internet. Monsieur Quatennens, nous travaillons effectivement avec trois entreprises, capables de fournir des solutions numériques pour la prise de rendez-vous du grand public. Selon vous, nous aurions dû tout construire au sein du secteur public, en partant de zéro. Mais il s’agit d’acteurs français ! Ainsi, pour n’en citer qu’un, Doctolib est non seulement français mais il offre également ses solutions de prise de rendez-vous pour la vaccination en Allemagne. La France dispose donc de très solides entreprises, capables de fournir tous les services et ce serait « sale » parce qu’elles sont privées. Ce n’est pas du tout ma vision de la France, de son esprit d’entreprendre et de notre capacité à nous appuyer sur toutes les compétences ! Nous pouvons nous enorgueillir que des sociétés françaises fonctionnent bien et soient prêtes !

Nous ne disposons pas encore de données suffisamment solides permettant d’établir que le vaccin préserverait de la transmission du virus. Nous savons que les vaccins Pfizer ou Moderna protègent les poumons des formes graves de covid. C’est pourquoi nous ciblons en priorité les personnes âgées, les plus fragiles et les plus vulnérables. Nous ne vaccinons pas les personnes plus jeunes pour l’instant, mais leur tour viendra.

Nous produisons également des vaccins. En parfait franglais, nous réalisons du fill and finish en France. Trois entreprises de biologie pharmaceutique travaillent avec les principaux laboratoires producteurs de vaccins afin d’augmenter nos capacités de production aux niveaux national et européen.

Monsieur Quatennens, j’ai entendu que M. Mélenchon regrette que le vaccin soit américain. Je le cite, il aurait préféré un vaccin russe, cubain ou chinois. Je me réjouis que vous ajoutiez la France à la liste des pays légitimes pour faire de la recherche !

Vous m’avez interrogé sur le rôle des élus. Juste après cette audition, je rejoindrai les présidents de Régions de France, de l’Association des départements de France, de l’association des maires de France et de France urbaine, représentant les grandes collectivités, comme je le fais très régulièrement depuis plusieurs mois, afin de poursuivre la concertation. Elle se déroule, à chaque fois, très bien.

Pour illustrer le rôle des élus dans les territoires, et afin de répondre à Mme Dubié que je remercie pour son intervention, j’étais chez elle samedi, à Tarbes. Qui ai-je vu ? Des soignants de ville, libéraux, des soignants hospitaliers, des directeurs, l’agence régionale de santé (ARS), le préfet, un maire qui n’est pas de la majorité présidentielle, un président de département et une présidente de région, mobilisés, qui ont ouvert des centres de vaccination. Personne ne m’a dit que ces centres fonctionnaient mal et le président du département m’a expliqué qu’il a mis des médecins et des soignants à la disposition des EHPAD de son département afin de compléter leurs équipes lorsqu’ils n’ont pas de médecins coordonnateurs sur place. Un maire m’a expliqué qu’avec le fichier des personnes fragiles qui vivent à domicile dans sa commune, il s’apprête à aller chercher celles qui le souhaitent pour les emmener au centre de vaccination. La présidente de région m’a indiqué participer de façon harmonieuse au dispositif, en y mettant, elle aussi, ses moyens. C’est également cela que les Français attendent de voir : la capacité des élus locaux et nationaux à servir l’intérêt général, au-delà des polémiques. Bien sûr, les questions sont tout à fait légitimes, je ne les critique pas.

Madame Dubié, je vous remercie pour votre engagement au sein de votre territoire. Les élus dont je viens de parler montrent qu’ils sont capables d’agir ensemble pour protéger les Français.

Mme la présidente Fadila Khattabi. Vingt-trois députés se sont inscrits pour vous poser des questions, monsieur le ministre, mais il ne nous reste malheureusement pas beaucoup plus de 23 minutes... Je vous propose d’envoyer au ministre les questions que nous ne pourrons pas entendre afin qu’il puisse vous répondre. M. le ministre a déjà apporté des éléments de réponse ; soyez concis dans vos questions afin que je puisse lui redonner la parole.

M. Thibault Bazin. Je me fais l’écho de l’incompréhension des ambulanciers : les pompiers et les auxiliaires de vie peuvent se faire vacciner contre la covid-19 – et c’est très bien – contrairement à eux, alors qu’ils sont également en contact avec le virus. Monsieur le ministre, pourriez-vous mieux prendre en compte ces oubliés ?

Je me permets d’appeler votre attention sur une application gratuite mise au point par des pharmaciens hospitaliers de ma circonscription qui s’impliquent dans la sécurité sanitaire de nos concitoyens, car le projet me paraît intéressant. Le patient pourra remonter plus facilement un effet indésirable éventuel suite à une vaccination contre la covid, sans être confronté à la lourdeur administrative du signalement. Cela contribuerait à rassurer les patients, qui pourraient utilement être informés de cette technologie. Monsieur le ministre, êtes-vous prêt à étudier avec vos services cette proposition d’application novatrice ?

M. Didier Martin. Le 7 janvier, vous avez décidé d’accélérer la campagne vaccinale et, sur le terrain, les professionnels libéraux entendent s’y associer pleinement. Les médecins généralistes, les infirmiers, les pharmaciens le seront-ils également pour vacciner à, à leur cabinet ou, éventuellement, au domicile des personnes qui ne peuvent pas se déplacer ? Aujourd’hui, sur France info, Mme la professeure Le Guludec, présidente de la HAS a déclaré que la vaccination par son médecin traitant sera possible. Pourriez-vous nous apporter des précisions ?

Mme Geneviève Levy. Monsieur le ministre, soyez assuré que je participe pleinement à inciter chacun des concitoyens de ma circonscription à se faire vacciner. Je tenais à vous faire part d’une expérience légèrement différente de ce que vous venez de décrire. Chaque semaine, le préfet du Var organise une téléconférence avec des élus, dite « point covid ». C’est une excellente chose et nous y tenons beaucoup. La réunion d’hier avait pour objet la stratégie vaccinale, et en particulier la campagne de vaccination des personnes âgées de plus de 75 ans résidant en EHPAD, qui devrait démarrer lundi prochain, le 18 janvier. Dix centres de vaccination sont prévus dans le département, mais leur localisation ne sera définie qu’aujourd’hui avec les établissements publics de coopération intercommunale, alors que les rendez-vous pourront commencer à être pris jeudi. Certes, les maires sont pleinement associés à la démarche, mais ne pensez-vous pas que ces délais courts sont le signe d’une anticipation quelque peu hésitante ?

Mme Stéphanie Rist. On peut vraiment se réjouir que la stratégie mise en place permette de protéger en priorité les personnes les plus fragiles et que le calendrier ait été accéléré. Dans mon département, le Loiret, les hospitaliers ont très rapidement mis en place sept centres pour vacciner les professionnels de santé. Beaucoup d’élus locaux de ma circonscription proposent des salles et, dès lundi, les centres seront opérationnels. En outre, beaucoup de professionnels se portent volontaires pour vacciner. Je tiens, ici, à les remercier pour cet élan collectif.

Monsieur le ministre, nous avons donc des bras à vacciner et des bras pour vacciner. Pouvez-vous nous rassurer ? Pourront-ils recevoir rapidement les doses de vaccin ? Disposeront-ils d’un planning prévisionnel de leurs livraisons ?

M. Bernard Perrut. Monsieur le ministre, nous sommes sollicités chaque jour par les représentants des collectivités territoriales, qui voudraient être les partenaires naturels de la campagne vaccinale. Pourquoi ne pas mieux les associer ? Ils sont réactifs ; ils ont l’expérience de la distribution des masques et de l’organisation des tests. Ils disposent de lieux prêts pour la vaccination et des noms des habitants de leurs collectivités. Ne serait-ce pas plus efficace ?

Quand les professionnels de santé libéraux – médecins, pharmaciens, infirmiers, dentistes – pourront-ils administrer le vaccin ? En effet, la confiance s’incarne dans la proximité, je partage les propos déjà exprimés à ce sujet.

Il ne faut pas négliger la valeur de l’exemple. Quand pourrons-nous – parlementaires, ministres, éventuellement personnalités du monde économique, culturel – donner l’exemple et nous faire vacciner ? Pour le moment, c’est bien normal, cela nous est refusé, mais nos concitoyens nous le demandent. Cela permettrait aussi de leur redonner confiance.

M. Belkhir Belhaddad. Une de mes questions concernait les stocks de seringues et vous y avez parfaitement répondu.

Notre collègue Perrut parlait à l’instant d’exemplarité : seriez-vous d’accord pour que des élus locaux et des députés soient vaccinés ?

Ne pourrait-on envisager que les ARS soient directement rattachées au préfet de région et prévoir la même déclinaison au niveau départemental ?

Certaines plateformes d’appels téléphoniques sont submergées. Ne faudrait-il pas leur accorder davantage de moyens pour mieux anticiper les flux et organiser les prises de rendez-vous de manière plus efficace ?

M. Alain Ramadier. À ce jour, 138 000 personnes ont été vaccinées. Vous avez fixé l’objectif à un million d’ici fin janvier. J’espère que vous l’atteindrez, dans l’intérêt des Français, mais je me pose des questions. Aujourd’hui, 40 % des Français veulent se faire vacciner. Je comprends bien qu’il faille accorder la priorité aux plus vulnérables et poser des critères mais il faudrait tout de même accélérer. Si l’on autorise ceux qui le souhaitent à se faire vacciner, peut-être cela motivera-t-il les plus réticents à leur emboîter le pas.

Enfin, les élus doivent être intégrés dans le dispositif. J’ai l’impression que, pour le moment, ce sont les préfets et les ARS qui décident. C’est le cas en Seine-Saint-Denis. Douze centres de vaccination autour des hôpitaux ! On viendra chercher les élus quand on en aura besoin, à la dernière minute.

Mme Carole Grandjean. Je salue l’ampleur du travail réalisé par vos services mais aussi celui des personnels soignants, en particulier en Meurthe-et-Moselle, qui déploient cette stratégie vaccinale inédite.

Afin d’étendre massivement la couverture vaccinale en France, il a été envisagé d’allonger le délai entre la première et la seconde injection, notamment pour le vaccin développé par Pfizer. Une décision a-t-elle été prise ? Les personnels mobilisés ont besoin de cette information pour mieux organiser la convocation pour la seconde injection.

Concernant l’enjeu de santé au travail, avez-vous prévu de vacciner les soignants les plus exposés, notamment ceux qui travaillent dans les services de réanimation ? Avez-vous prévu d’organiser la vaccination avec les services de la santé au travail lors de l’élargissement de la campagne vaccinale à la population générale ?

M. Joël Aviragnet. En décembre dernier, le Gouvernement présentait sa stratégie vaccinale pour les mois à venir et se disait prêt à l’appliquer dès l’arrivée des vaccins sur le sol français. Nous sommes à la mi-janvier et je déplore que la vaccination n’ait toujours pas commencé dans les territoires les plus reculés de la Haute-Garonne. Elle n’a démarré qu’aujourd’hui à Saint-Gaudens et ne débutera que dans quelques jours à Luchon. Vous souhaitez ouvrir la vaccination à un public plus large et mobiliser le concours du médecin généraliste dans la distribution du vaccin. Vous n’êtes pas sans savoir que nombre de territoires reculés souffrent d’une désertification médicale qui compromet sérieusement la vaccination telle que vous l’envisagez. Quelle solution comptez-vous leur apporter, alors qu’ils souffrent d’une pénurie de médecins ? Comment envisagez-vous de corriger les inéluctables inégalités dans la distribution du vaccin ? Les déserts médicaux sont une réalité que notre groupe dénonce depuis plusieurs années. Comment garantirez-vous le droit pour tous les Français, même les plus isolés, de bénéficier du vaccin ? Développerez-vous des unités mobiles de vaccination destinées aux déserts médicaux ? Nous demandons au Gouvernement d’y réfléchir au plus vite.

M. Julien Borowczyk. Nous avons vacciné 140 000 personnes, ce qui représente une belle progression. Beaucoup de polémiques n’auraient pas eu lieu si nous avions tout de suite disposé de 70 millions de vaccins. Cependant, grâce aux accords que nous avons conclus, les vaccins arrivent progressivement. C’est pour cette raison que nous devons les réserver en priorité aux personnes les plus fragiles. Aucune pénurie n’est à déplorer pour le moment.

Ma question fait suite à celle de Mme Grandjean. L’enjeu, c’est aussi le rappel. Selon quelle stratégie les personnes vaccinées seront-elles convoquées pour la seconde injection ? Il importe qu’elles reçoivent les deux doses en temps et en heure pour être définitivement protégées.

Mme Marine Brenier. Les changements de stratégie nous inquiètent alors que nous partageons le même but : sortir très vite de cette crise. La vaccination est aujourd’hui la seule solution et l’annonce, par Sanofi, que son deuxième vaccin ne serait prêt qu’à la fin de l’année, nous alarme. Bien sûr, il est fondamental de s’assurer de l’efficacité et de l’innocuité du vaccin et nous ne saurions les blâmer de prendre toutes les précautions nécessaires, mais ne pourrions-nous pas signer de nouveaux accords avec d’autres laboratoires, en attendant ? Ne devrions-nous pas inciter Sanofi à travailler avec d’autres laboratoires, dans la limite des droits de la propriété intellectuelle ? De même, le Gouvernement a fait appel à un cabinet de conseil privé pour mener sa campagne de vaccination. Pourquoi pas, mais ne devrions-nous pas nous concentrer sur les problèmes pointés par le Président de la République lui-même, à savoir un excès d’administration ? On ne compte plus les acteurs décisionnaires : la direction générale de l’offre de soins, la direction générale de la santé, la direction générale de la cohésion sociale, le responsable de la vaccination, le responsable de la logistique, et enfin, votre ministère. Que pouvez-vous faire pour accélérer ?

Mme Annie Vidal. Vous avez élargi la vaccination aux soignants, aux pompiers et aux aides à domicile de plus de 50 ans ainsi qu’aux personnes âgées de plus de 75 ans ne résidant pas en EHPAD. Les auxiliaires de vie directement employées par des personnes vulnérables, à leur domicile, sont-elles concernées ? Envisagez-vous, par ailleurs, de vacciner à domicile les personnes de plus de 75 ans qui auraient perdu de leur autonomie ? Enfin, le vaccin AstraZeneca, dont l’autorisation de mise sur le marché a été déposée aujourd’hui, pourrait-il faciliter l’accès à la vaccination de ces publics ?

M. Jean-Hugues Ratenon. La situation sanitaire s’aggrave aux Comores, notamment dans l’île de Mohéli. Selon le ministère de la santé, sept personnes sont décédées le week-end dernier du coronavirus. Il pourrait s’agir du variant sud-africain, ce qui est extrêmement inquiétant pour les pays de la zone de l’océan Indien, en particulier Mayotte et l’île de La Réunion. Avez-vous des précisions ? Le variant sud-africain est-il bien en cause ? A-t-il déjà été détecté à Mayotte ? Il est urgent d’agir pour éviter la propagation de ce virus, en particulier par le trafic aérien, aux autres pays de la zone mais aussi à la métropole. La Commission de l’océan Indien a-t-elle été saisie ? Des actions sont-elles d’ores et déjà engagées ? Sans parler d’ingérence d’humanitaire, qu’avez-vous prévu pour éviter une telle propagation ?

Mme Catherine Fabre. Quand élargirez-vous la vaccination aux professionnels de moins de 50 ans qui travaillent en première ligne et accueillent les malades du coronavirus, pour les protéger en vue de la troisième vague ? La même question vaut pour les patients vulnérables de moins de 50 ans, qu’ils soient transplantés, cardiaques ou atteints d’un cancer.

Je tiens par ailleurs à saluer l’engagement des personnels soignants. Grâce à eux, le lancement de la campagne de vaccination s’est bien passé en Nouvelle-Aquitaine, notamment à Bordeaux. Bravo !

Mme Michèle de Vaucouleurs. Comment comptez-vous vacciner les personnes dépendantes vivant à leur domicile ?

M. le ministre. Je répondrai de manière très brève aux nombreuses questions qui viennent de m’être posées.

Les ambulanciers et les aides à domicile de plus de 50 ans figurent d’ores et déjà dans la liste des publics vaccinables. Cette information a été communiquée à toutes les organisations, dans tout le pays. S’il subsiste le moindre doute, monsieur le député, vous pourrez le lever.

Par ailleurs, l’association de tous les soignants, qu’ils soient libéraux en ville, dans le secteur médical ou paramédical ou celui de la santé au travail, est souhaitée et souhaitable, pour mener la campagne de vaccination au fur et à mesure qu’arrivent des vaccins et que se diversifient les modalités de vaccination. Nous ne refuserons aucune aide et nous voulons nous appuyer sur les réseaux solides et déjà en place, qui font que la France peut s’enorgueillir de son système de santé.

Dans le Var, madame la députée, plusieurs centres de vaccination sont d’ores et déjà opérationnels et d’autres ouvriront bientôt. Renseignez-vous : le Var vaccine depuis plus d’une semaine. Je peux vous communiquer les chiffres, si vous voulez. Plusieurs centres sont déjà ouverts pour les professionnels de santé de ville, comme pour les hospitaliers. Ils seront amenés à recevoir également les personnes de plus de 75 ans. Nous voulions cent centres de vaccination en France la semaine dernière, nous en avons eu deux cents à la fin du week-end. Nous en voulions trois cents cette semaine, je pense que nous aurons dépassé l’objectif dimanche prochain. Nous voulions six cents centres d’ici deux semaines, nous en aurons sans doute bien davantage. Au fur et à mesure qu’ils ouvrent et sont validés en fonction de la cohérence territoriale, nous pourrons renforcer les moyens de vacciner dans les territoires.

Pour ce qui est de l’approvisionnement de ces centres en vaccins, je réunis cet après‑midi les cent hôpitaux pivots de France et les directions générales des ARS pour affiner leurs besoins, ajuster les envois et leur communiquer la quantité de vaccins qu’ils recevront, semaine après semaine.

Je l’ai annoncé mais nous renforcerons la communication autour de cette nouvelle : un système de prise de rendez-vous par internet et par téléphone sera ouvert, dès jeudi, aux personnes de plus de 75 ans qui vivent à leur domicile. Pas moins de cinq millions de Français sont concernés. Nous n’avons pas encore les cinq millions de doses nécessaires – aucun pays européen ne les a, d’ailleurs. Chacun peut aisément comprendre que tout le monde ne sera pas vacciné le lendemain de l’ouverture des centres. Soyons clairs : nous faisons notre possible pour que les vaccins arrivent en France et soient acheminés vers les centres de vaccination, mais la vaccination de ce public, particulièrement vulnérable, qui est une étape essentielle, prendra plusieurs semaines. Rien ne serait pire que d’assister à une ruée vers le vaccin. Cela ne ferait que générer anxiété et désappointement. Je vous le dis tranquillement : nous disposons, aujourd’hui, d’un million de vaccins pour protéger les publics prioritaires. Les doses arrivent, semaine après semaine – 500 000 doses par semaine dans un premier temps, puis 1 million de doses par semaine, et enfin plusieurs millions de doses par semaine en février si, comme je l’espère, d’autres vaccins sont mis sur le marché. Nous arriverons à protéger cette partie importante de notre population, mais cela ne se fera pas du jour au lendemain. Nous allons commencer par inviter les Français qui le souhaitent à prendre rendez-vous. Les soignants de tous les centres feront le maximum pour répondre aux demandes, mais la vaccination s’étalera dans le temps.

Faut-il que les élus se fassent vacciner pour donner l’exemple ? Je vais vous donner mon avis. Je ne dis pas que j’ai raison et peut-être ne serez-vous pas d’accord avec moi mais il me semble, après ce que je viens de vous dire, qu’un élu exemplaire attendra son tour. Je suis médecin, ministre de la santé, âgé de moins de 50 ans : je ne me fais pas vacciner. Mais je peux vous assurer que le jour où la vaccination sera ouverte aux soignants de moins de 50 ans ou aux personnes de moins de 50 ans, je serai ravi d’aller me faire vacciner pour me protéger contre ce virus que je n’ai pas attrapé et que je ne souhaite pas contracter. L’exemplarité, c’est attendre son tour, calmement, avec compréhension, en continuant à se protéger et à protéger les autres.

J’en viens à la ruralité. Parce qu’elle est au cœur de nos préoccupations, monsieur le député, j’ai choisi de ne pas transformer de grands gymnases ou de grands stades de football en centres de vaccination mais d’ouvrir des centres de vaccination en partenariat avec les élus, y compris dans les territoires ruraux. Je me suis rendu dans les Hautes-Pyrénées pour me rendre compte de la manière dont les choses s’organisaient et m’assurer que chacun pourrait se faire vacciner.

Revenons à la question des personnes âgées à la maison. Depuis le début de la crise, nous nous appuyons sur la capacité des soignants à se mobiliser et à innover. On ne va pas arrêter de le faire au moment de la vaccination ! Je citerai l’exemple de Grenoble, que je connais bien. Le conseil départemental de l’Isère de l’ordre des médecins a ouvert des créneaux de vaccination après 18 heures et jusqu’à tard dans la soirée pour permettre aux soignants et aux médecins libéraux d’aller se faire vacciner, une fois leur longue journée de travail achevée. Des binômes ont été imaginés en prévision de la vaccination à domicile. Des élus locaux, qui connaissent bien la population âgée et fragile pour lui avoir régulièrement rendu visite les mois d’été et vérifié qu’elle s’hydratait correctement, ont proposé d’utiliser les moyens de transport dont ils disposent pour aller la chercher et la conduire dans les centres. Ce sont de bonnes initiatives ! Pardonnez-moi d’être taquin mais on n’a pas besoin d’un guide de quarante pages pour expliquer aux élus ou aux médecins comment s’organiser.

Nous mobilisons tous les laboratoires du territoire national et européen pour produire des vaccins développés par d’autres laboratoires. Trois laboratoires en France sont concernés : Delpharm, Recipharm et Fareva pour produire les vaccins conçus par Pfizer, Moderna et CureVac. L’enjeu est crucial.

La HAS n’a pas encore reconnu aux moins de 50 ans de bénéfice individuel direct à se faire vacciner. La vaccination ne leur est donc pas encore ouverte – de toute manière, ils ne seraient pas prioritaires. En revanche, nous allons ouvrir la vaccination aux Français de moins de 75 ans qui souffrent de maladies les exposant à des risques particuliers de forme grave. Le professeur Alain Fischer finalise la liste de ces maladies, selon des indicateurs scientifiques et sanitaires. Ce n’est pas le ministre qui décide.

Enfin, s’agissant du variant sud-africain, nous suivons de près l’évolution de la situation aux Comores. Je ne sais pas si on peut relier l’apparition de ce variant et l’aggravation de l’épidémie, mais on ne peut pas l’exclure. Vous avez souligné, monsieur le député, la proximité entre les Comores et Mayotte, Mayotte et La Réunion, La Réunion et la métropole. De toute manière, dès lors que les Comores ou Mayotte sont touchés, nous devons prendre des dispositions. Les chercheurs et les médecins se sont attaqués au séquençage du génome du coronavirus pour détecter la présence du variant en métropole ou dans les territoires ultramarins. Nous faisons le maximum pour empêcher la diffusion du variant sud‑africain, mais aussi celle du variant anglais. Cela dit, il n’est pas très cohérent d’appeler un variant du nom d’un pays. La grippe espagnole n’avait ainsi rien d’espagnol puisqu’elle venait sans doute de Chine : c’est simplement parce que l’Espagne fut la première à la découvrir qu’elle dut supporter pendant un siècle qu’une maladie porte son nom.

Je ne serai pas plus long. Je vous remercie pour vos questions qui furent utiles. J’espère que mes réponses vous auront rassurés ou confortés et qu’elles auront permis de mieux informer les Français de cette campagne de vaccination.

La réunion s’achève à treize heures dix.

————