Compte rendu

Commission
des affaires sociales

    Suite de l’examen de la proposition de loi pour renforcer la prévention en santé au travail (n° 3718) (Mmes Charlotte Parmentier-Lecocq et Carole Grandjean, rapporteures)              2

 

 

 


Mercredi
10 février 2021

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 45

session ordinaire de 2020-2021

Présidence de
Mme Fadila Khattabi,
Présidente
 


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COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Mercredi 10 février 2021

La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.

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La commission poursuit l’examen de la proposition de loi pour renforcer la prévention en santé au travail (n° 3718) (Mmes Charlotte Parmentier-Lecocq et Carole Grandjean, rapporteures)

Article 5 : Intégration des services de santé au travail dans les communautés professionnelles territoriales de santé et les dispositifs d’appui à la coordination des parcours de santé complexes

La commission adopte successivement les amendements AS382, rédactionnel, et AS383, de coordination de Mmes Charlotte Parmentier-Lecocq et Carole Grandjean, rapporteures.

Puis elle adopte l’article 5, modifié.

Article 6 : Présentation d’un volet « politique de santé au travail » au sein du rapport annexé au projet de loi de finances relatif à la politique de santé publique

La commission adopte l’article 6 sans modification.

Article 7 : Renforcement des pouvoirs de surveillance du marché des équipements de protection individuelle et des équipements de travail non conformes

La commission est saisie de l’amendement AS204 de Mme Caroline Fiat.

Mme Caroline Fiat. Si nous encourageons les autorités administratives compétentes à s’assurer du respect par les opérateurs économiques de la surveillance du marché et de la conformité des produits au sens de l’article 3 du règlement européen de 2019, il convient que les résultats de leurs contrôles soient rendus publics afin que la santé au travail ne soit plus un espace opaque en dehors de la santé publique. La société civile a le droit d’être informée sur ce sujet comme elle l’est sur la protection des consommateurs ou de l’environnement. Tel est l’objet de cet amendement, qui nous a été soumis par la Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. Il s’agit de transposer une disposition de droit européen en droit français. Cette question recouvrant des aspects techniques, je vous propose d’interroger le Gouvernement en séance. Pour le moment, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 7 sans modification.

Après l’article 7

La commission est saisie de l’amendement AS111 de M. Vincent Thiébaut.

M. Thierry Michels. Compte tenu du caractère très technique des équipements de protection individuelle, le salarié référent en santé et sécurité du travail ou les intervenants extérieurs doivent pouvoir être impliqués dans le processus de sélection et d’achat en cette matière.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. L’amendement me semble trop flou et trop restrictif. Avis défavorable.

L’amendement est retiré.

Titre II
Définir l’offre de services à fournir par les services de prévention et santé au travail aux entreprises et aux salariés, notamment en matière de prévention et d’accompagnement

Article 8 : Mise en place d’une offre socle et d’une offre complémentaire par les services de prévention et de santé au travail interentreprises ainsi que d’une procédure de certification

La commission examine l’amendement de suppression AS129 de M. Pierre Dharréville.

M. Pierre Dharréville. L’article est problématique à deux titres. Premièrement, il crée une médecine du travail à deux vitesses, les services de santé pouvant proposer, d’un côté, une offre socle, et, de l’autre, une offre premium. Je ne comprends pas le sens de cette proposition, car tout professionnel de santé confronté à un problème de santé met en œuvre tous les moyens à sa disposition pour y faire face. Je crains que ne se développe un marché supplémentaire de la santé au travail, créateur d’inégalités entre salariés en fonction de l’entreprise qui les emploie.

Deuxièmement, cet article introduit une logique de certification par des organismes privés extérieurs. Or ce rôle de labellisation des services de santé au travail (SST) doit revenir à la puissance publique ; il n’est pas besoin de créer, là aussi, un marché supplémentaire. Un tel système existe déjà dans le domaine du médicament ou des dispositifs médicaux. Or je ne suis pas tout à fait certain qu’il ait fait ses preuves.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. Avis défavorable.

Il s’agit là d’une vraie avancée, plébiscitée par les partenaires sociaux, en matière d’offre des services de santé au travail. En outre, la certification est au cœur de l’accord national interprofessionnel (ANI), qu’il s’agit de transposer.

M. Pierre Dharréville. Je vous donne acte du fait que la disposition figurait dans l’ANI, mais en quoi est-ce une « vraie avancée » ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. De notre point de vue, c’est l’inverse de vos craintes qui se produira. Dans la suite du débat, nous préciserons mieux la nature de l’offre et le cadre dans lequel s’exerceront ces missions. La certification des services de santé au travail conditionnera l’obtention de l’agrément.

M. Didier Martin. La certification est un processus de mesure de la qualité d’origine industrielle, fonctionnant avec des référentiels établis sur des paramètres précis. Elle s’est progressivement appliquée à tous les types de services. La définition précise, grâce à la méthode avancée dans l’article, de ce que doit être un service de qualité en matière de réduction des risques professionnels et d’amélioration de la prévention, c’est là l’avancée considérable du texte. Elle contribuera à la fois à élever le niveau qualitatif de l’établissement interentreprises et à avoir une vision transversale de l’ensemble des services sur le territoire permettant de promouvoir la protection des salariés et la disparition des facteurs de risques.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS385 des rapporteures.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS386 des rapporteures.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. Il s’agit, de donner suite aux recommandations du Conseil d’État, en clarifiant la notion d’offre socle.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS387 des rapporteures.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. C’est un amendement de précision également recommandé par le Conseil d’État, qui prévoit le cas de carence de décision de la part du comité national de prévention et de santé au travail (CNPST).

La commission adopte l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS388 des rapporteures.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. Il précise que l’offre complémentaire est bien facultative et s’inscrit en tout état de cause dans les missions générales des services de santé au travail définies dans le code du travail.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS27 de Mme Agnès Firmin Le Bodo.

M. Paul Christophe. Il s’agit de préciser le rôle du conseil d’administration et de la commission de contrôle dans le choix des offres complémentaires aux entreprises adhérentes.

Suivant l’avis défavorable de Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure, la commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS110 de M. Vincent Thiébaut.

M. Thierry Michels. Il s’agit de fournir une liste exhaustive des intervenants auxquels les entreprises peuvent faire appel dans leurs actions de prévention en santé, de manière à favoriser l’accession aux différents services proposés sur le territoire.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. L’amendement me semble satisfait. Demande de retrait.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS113 de M. Vincent Thiébaut.

M. Thierry Michels. Il s’agit de diffuser auprès des entreprises les informations relatives aux aides qu’elles peuvent obtenir pour mener leurs actions en matière de prévention en santé. Le facteur financier étant souvent limitant, il y aurait là un levier particulièrement important d’amélioration.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. Les services de santé au travail peuvent déjà dispenser ces informations, qui pourront être apportées de manière plus précise par les caisses d’assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT). Demande de retrait.

La commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS389 des rapporteures.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. Il vise à rehausser au niveau législatif la procédure d’agrément par laquelle les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE) autorisent le fonctionnement des services de santé au travail, en application de l’avis du Conseil d’État.

Il précise également que l’agrément est désormais conditionné à l’obtention de la certification.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS391 des rapporteures.

La commission examine ensuite l’amendement AS286 de Mme Michèle de Vaucouleurs.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Selon les médecins qui ont été auditionnés, il est fondamental qu’un médecin traitant et un service de santé au travail puissent échanger facilement et de manière fiable au travers d’une messagerie sécurisée. Il s’agit, par cet amendement d’appel, d’intégrer l’existence d’une telle messagerie dans les procédures de certification des services de prévention et de santé au travail.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. Il faut effectivement être vigilant sur ce point. Un prochain amendement précisera d’ailleurs toutes les mesures relatives à la protection des données. Nous vous suivrons également s’agissant de l’intégration d’un critère de certification dans ce domaine.

M. Philippe Vigier. Je ne comprends pas bien : on vous propose une messagerie sécurisée qui ne pourra qu’apporter de la qualité. Comment imaginer une quelconque certification sans protection des données ?

Lorsque des données médicales sont transférées via Apicrypt, elles sont réservées aux professionnels de santé : c’est la base en médecine. J’ai l’expérience d’une procédure de certification : c’est la première des demandes qui nous a été faite.

M. Pierre Dharréville. La sécurisation des données sensibles et des messageries des services de santé au travail est effectivement un élément important.

Mme Caroline Fiat. Madame la rapporteure, je n’ai pas compris quel est votre avis sur l’amendement. Pour notre part, nous le soutenons, car une messagerie sécurisée est effectivement très importante en matière de données de santé – nous en parlons assez souvent ici.

M. Cyrille Isaac-Sibille. Il faut distinguer le principe, c’est-à-dire la sécurisation des données qui fera l’objet de l’amendement mentionné, et les outils dont les SST doivent disposer : la messagerie sécurisée en est un, comme le dossier médical partagé (DMP) que nous allons aborder. Les deux sont importants.

M. Bernard Bouley. Tous les SST en France respectent le règlement général sur la protection des données (RGPD). Leurs systèmes d’information assurent donc tous la protection de leurs données personnelles.

Mme Michèle de Vaucouleurs. L’amendement résulte d’échanges avec des médecins traitants qui considèrent que le partage de données à travers le DMP n’est pas un moyen aussi simple et rapide pour communiquer avec le médecin du travail qu’une messagerie sécurisée. Il est certain qu’une telle messagerie doit constituer un élément de certification ; reste à savoir s’il est pertinent de surcharger le texte en le mentionnant.

M. Philippe Vigier. Au quotidien, madame la rapporteure, les données relatives à un patient sont transmises entre un médecin de ville et un médecin d’entreprise à 80 % par du papier : la protection du secret médical ou des données personnelles n’existe pas ! La transmission sécurisée des messages doit être un élément fondateur de la certification.

M. Pierre Dharréville. Si les SST disposent effectivement de procédures assurant la protection des données, il faut réfléchir à la fois sur les services de santé interentreprises mais également sur ceux qui sont intégrés.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. Cet amendement d’appel, selon les propres termes de Mme de Vaucouleurs, attire l’attention sur la protection des données, une notion que nous avons bien prise à bras-le-corps, notamment en écho aux recommandations du Conseil d’État. La rédaction que nous proposerons un peu plus tard s’agissant de la certification couvre non seulement la messagerie mais également tout autre outil de conservation et de diffusion des données.

M. Didier Martin. Tous les personnels des équipes médicales, quel que soit leur statut, ont un devoir de respect de la confidentialité.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Je ne doute pas que des processus assurent la protection des données, mais il s’agit là d’un outil de communication simple qui fait défaut et qui me semble important. Je ne sais pas si un outil doit figurer au cœur de la loi mais je vois qu’il suscite un débat.

Mme Caroline Fiat. Jamais nous ne remettrons en cause le respect par chaque soignant du secret professionnel. Simplement, lors d’une vaccination ou d’un dépistage sur un lieu de travail où le matériel informatique local utilisé ne dispose pas d’une messagerie sécurisée, on ne sait pas où ces données vont aller.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements AS392 des rapporteures et AS273 de M. Cyrille Isaac-Sibille.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. Notre amendement introduit parmi les éléments de certification un critère lié la protection des données personnelles. En cela, il va au-delà des recommandations du Conseil d’État. La Commission nationale de l’informatique et des libertés met au point une démarche d’accompagnement des SST leur permettant de vérifier qu’ils sont bien dans les clous au regard du respect de la réglementation liée au RGPD.

M. Cyrille Isaac-Sibille. Mon amendement va dans le même sens.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. J’en demande le retrait au profit du mien, dont la rédaction me semble un peu plus précise.

M. Cyrille Isaac-Sibille. Comme avec l’amendement précédent, il y a les principes et les moyens. Nous en rediscuterons en séance publique.

L’amendement AS273 est retiré.

La commission adopte l’amendement AS392.

Puis elle est saisie de l’amendement AS393 des rapporteures.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. L’amendement tend à confier au pouvoir réglementaire, après avis du CNPST, l’élaboration du cahier des charges de la certification plutôt que la procédure d’accréditation. Il s’agit de suivre la recommandation du Conseil d’État afin d’assurer la solidité juridique du dispositif.

Cette rédaction couvre tout à fait l’amendement AS348 de notre collègue Didier Martin.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’amendement AS348 de M. Didier Martin tombe.

La commission examine, en discussion commune, les amendements identiques AS28 de Mme Agnès Firmin Le Bodo et AS59 de M. Stéphane Viry ainsi que les amendements AS132 de M. Pierre Dharréville et AS205 de M. Jean-Hugues Ratenon.

M. Paul Christophe. L’amendement AS28 précise la procédure de certification en fixant dans la partie législative du code du travail le principe d’un agrément des SST et en renvoyant à la partie réglementaire les modalités plus détaillées de cette procédure d’agrément. Les critères de cet agrément seraient fixés par le nouveau CNPST, la certification faisant partie de ces critères.

M. Stéphane Viry. Ainsi que l’ont relevé l’Inspection générale des affaires sociales, dans son rapport, et les partenaires sociaux, dans l’ANI, un lien doit être établi entre la procédure d’agrément déjà existante et la certification, qui manque dans la proposition de loi. L’amendement identique vise à sécuriser et à compléter sa rédaction sur ce point, sans la dénaturer.

M. Pierre Dharréville. Dans le même esprit, mon amendement tend à placer l’agrément au-dessus de la certification dans la hiérarchie des normes. Selon moi, la procédure d’agrément qui existe est le levier le plus efficace pour contrôler les SST et pour donner une vision globale sur les territoires à la puissance publique – c’est à elle qu’incombe cette mission, et à personne d’autre.

Une étude d’impact a-t-elle été faite s’agissant des frais qu’engendrera la création de cette certification ? Avec la distinction entre une offre socle et une offre dite supérieure, c’est là également un élément du débat.

Mme Caroline Fiat. Notre amendement AS205 tend également à faire de l’agrément l’élément essentiel de cet article.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. Nous sommes totalement d’accord. C’est bien pourquoi, d’ailleurs, nous avons rehaussé la procédure d’agrément dans la loi et conditionné l’obtention de l’agrément à la certification. Nous aborderons ultérieurement la question des sanctions.

Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Puis elle examine les amendements identiques AS29 de Mme Agnès Firmin Le Bodo et AS61 de M. Stéphane Viry.

M. Paul Christophe. Dans le sens de l’ANI, il s’agit, par l’amendement AS29, de conforter les DIRECCTE dans la mise en œuvre de sanctions graduées.

M. Stéphane Viry. Il s’agit de répondre à des situations de fait : parfois, certains SST ne se montrent pas à la hauteur mais la DIRECCTE n’a pas les moyens de les sanctionner. Afin qu’il ne lui soit plus impossible, pour diverses raisons, de refuser ou de retirer l’agrément, il est nécessaire de renforcer et de sécuriser le dispositif par la voie législative, tant pour celle-ci que pour les SST dont l’obligation de moyen sera renforcée.

M. Philippe Vigier. Ces amendements sont importants. D’abord, ils donnent à ceux qui auront à décider que tel ou tel organisme ne pourra exercer ces compétences en matière de santé au travail une base légale, qui évitera toute possibilité d’interprétation, donc de fragilisation. Ensuite, ils permettent de renforcer l’agrément. Dans le domaine de la biologie médicale, par exemple, c’est très simple : ne pas être agréé pour certains actes fait que ceux-ci ne sont plus remboursés. Il faut donc bien que la qualité soit au rendez-vous. Enfin, ils rétabliraient l’équité entre les citoyens. Comment expliquer que certains bénéficient de SST de qualité et d’autres, dans les territoires où la désertification médicale est extrêmement avancée, de SST en mode dégradé ?

Ces dispositions seraient donc un gage d’efficacité du texte. Sauf si l’on veut accorder une prime à ceux qui font moins bien le travail, elles me paraissent importantes pour les salariés.

M. Cyrille Isaac-Sibille. Les services de santé au travail sont déjà censés définir un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens (CPOM). Or nombre d’entre eux ne le font pas et ne sont pas sanctionnés. Cet amendement me paraît donc important : si l’on donne un rôle plus important aux services de santé au travail, il faut pouvoir prendre des mesures lorsque les choses ne se passent pas bien et pouvoir les contraindre à respecter la loi.

Mme Charlotte Parmentier-Lecoq, rapporteure. Nous partageons totalement l’idée qu’il faut introduire une échelle de sanctions, mais ces amendements ne nous semblent pas présenter les garanties nécessaires. Je vous invite à les retirer, afin que nous puissions continuer à travailler ensemble sur ces questions jusqu’à la séance.

Mme Annie Vidal. Il me semble qu’on fait un lien trop rapide entre démographie médicale, territoires ruraux et mauvaise qualité de la prise en charge. Les territoires ruraux ont, malgré leur déclin démographique, une qualité de prise en charge médicale qui repose sur l’engagement des professionnels de santé.

M. Stéphane Viry. Je maintiens mon amendement, car je ne vois pas très bien ce que l’on peut y ajouter.

M. Philippe Vigier. Qu’est-ce que l’administration pourrait apporter de plus ? C’est nous qui faisons la loi et je trouve que les options proposées – refuser ou retirer l’agrément, proposer un agrément provisoire sous condition ou rattacher le service à un autre service agrémenté – sont tout à fait pertinentes : c’est déjà ce qui s’applique pour d’autres délégations données à des collectivités ou dans la fonction publique hospitalière. Ce texte entend renforcer l’agrément et c’est une très bonne chose : c’est une façon d’assurer l’équité entre les salariés. Ne pas voter cet amendement, renvoyer à une disposition dont on ne connaît pas la teneur, ce serait affaiblir le texte.

Mme Michèle de Vaucouleurs. L’article D. 4622-51 du code du travail prévoit déjà des procédures de refus, de retrait ou de modification de l’agrément. Comment se fait-il que ces dispositions ne s’appliquent pas ? C’est sur ce point qu’il conviendrait peut-être d’agir.

M. Paul Christophe. Je vais maintenir mon amendement, car il a le mérite d’aller au-delà de ce que prévoit la réglementation actuelle, en proposant de rattacher le service qui perdrait son agrément à un autre service agrémenté. Il me semble important de marquer cette avancée dès l’examen en commission.

Mme Charlotte Parmentier-Lecoq, rapporteure. M. Viry a bien souligné le problème que peut poser le retrait de l’agrément : dans certains territoires, il aboutit tout simplement à la fin du suivi en matière de santé au travail. Il faut une échelle de sanctions, c’est certain, mais nous réfléchissons plutôt à des sanctions financières, qui pourraient avoir un effet incitatif. Je vous invite de nouveau à retirer vos amendements, afin que nous puissions travailler ensemble sur ces questions.

M. Bernard Bouley. Les SST qui n’ont plus l’agrément de la DIRECCTE mettent les entreprises dans une situation très difficile, puisque les inaptitudes ne peuvent plus être reconnues légalement. Je ne crois pas que c’est en introduisant des punitions qu’on règlera le problème : rattacher le service qui a perdu son agrément à un service voisin semble être la seule solution.

La commission rejette les amendements.

Elle examine ensuite l’amendement AS278 de M. Cyrille Isaac-Sibille.

M. Cyrille Isaac-Sibille. Il s’agit de préciser que les acteurs et opérateurs de prévention que sont notamment les CARSAT ou les associations régionales pour l’amélioration des conditions de travail travaillent ensemble, de manière coordonnée, dans les actions de prévention qu’ils conduisent. Dans ce cadre, nous proposons un mécanisme de « droit à l’expérimentation », afin de faciliter et de valoriser les initiatives locales. Les services locaux, qui sont chapeautés par les directions centrales, aimeraient pouvoir lancer leurs propres expérimentations, faire leurs propres propositions.

Mme Charlotte Parmentier-Lecoq, rapporteure. La coordination entre les acteurs, que vous appelez de vos vœux, et que nous approuvons, est déjà possible. Par ailleurs, votre rédaction me semble un peu imprécise. Demande de retrait.

M. Cyrille Isaac-Sibille. Permettez-moi d’insister. Les directions centrales ont tendance à bloquer le système. Or il importe de faire respirer les organismes qui interviennent aux niveaux régional, départemental et local. Si tout vient toujours d’en haut, aucune initiative ne peut venir du terrain. J’ajoute que cet amendement ne propose qu’une expérimentation.

M. Philippe Vigier. Cet amendement est intéressant, car il peut favoriser la mutualisation des moyens, qui est essentielle, notamment dans les territoires isolés. La coopération au niveau local est un gage de qualité : c’est cela, l’application de la loi au dernier kilomètre ! Et puis, il s’agit d’une expérimentation, qui aura une dimension plus organisationnelle que financière. On ne prendrait pas un risque considérable en adoptant cet amendement.

M. Bernard Bouley. L’expérimentation que vous proposez est déjà une réalité, puisque les CPOM associent de nombreux partenaires : je peux vous assurer que, sur le terrain, les services de santé au travail collaborent déjà avec tous les acteurs concernés. On est déjà au-delà de l’expérimentation.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Cet amendement traduit le sentiment qu’ont exprimé certains des acteurs auditionnés de ne pas trouver pleinement leur place. Même si ce qu’il propose existe déjà, il a le mérite de réaffirmer la volonté de ceux-ci de collaborer et de concevoir des protocoles de collaboration. C’est en tout cas le sens que je lui donne.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 8, modifié.

Après l’article 8

La commission est saisie de l’amendement AS112 de M. Vincent Thiébaut.

M. Thierry Michels. Nous proposons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport présentant un état des lieux des conditions d’exercice des intervenants en prévention des risques professionnels afin de savoir, notamment, s’il existe des inégalités territoriales.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. Avis défavorable.

L’amendement est retiré.

Article 9 : Modification de la tarification des services de prévention et de santé au travail interentreprises

La commission examine les amendements AS394 et AS395 des rapporteures.

Mme Charlotte Parmentier-Lecoq, rapporteure. L’amendement AS394 est rédactionnel.

L’amendement AS395 a pour objet de confier au conseil d’administration la compétence d’approbation du montant des cotisations et de la grille tarifaire, et d’assurer la bonne information de l’assemblée générale à ce sujet.

La commission adopte successivement les amendements.

Puis elle examine l’amendement AS13 de M. Patrick Hetzel.

M. Thibault Bazin. Nous proposons de légaliser le mode de calcul de la cotisation due par les employeurs lorsqu’ils adhèrent à un service de médecine du travail interentreprises. Il s’agit d’inscrire dans la loi la règle d’une tarification calculée « par tête » en équivalents temps plein, afin de la rendre plus contraignante et incontestable. Cela va dans le sens de la jurisprudence et des circulaires de la direction générale du travail (DGT).

Mme Charlotte Parmentier-Lecoq, rapporteure. Votre amendement me semble satisfait par la réglementation en vigueur. Du reste, cette question n’a pas été abordée dans l’ANI.

Demande de retrait.

M. Thibault Bazin. La DGT avait prévu une période transitoire avant de légiférer sur ce point pour que tout le monde ait le temps de s’adapter. Le moment est venu de reprendre dans la loi ce qui a été confirmé par la Cour de cassation en 2018. Dans le texte actuellement à l’étude dans l’hémicycle, n’inscrivez-vous pas dans la loi des éléments de la jurisprudence ? Il importe de clarifier les questions relatives à la tarification.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 9, modifié.

Article 10 : Renforcement de la transparence des documents produits par les services de prévention et de santé au travail interentreprises

La commission adopte l’amendement rédactionnel AS397 des rapporteures.

Puis elle est saisie de l’amendement AS349 de Mme Catherine Fabre.

Mme Catherine Fabre. Nous proposons que le rapport annuel d’activité, désormais confié au service de prévention et de santé au travail, comporte des données présentées par sexe. Ces données figuraient dans le rapport du médecin du travail et il importe qu’il en soit toujours ainsi, afin que l’on puisse s’assurer de l’égal accès des hommes et des femmes à la santé et, le cas échéant, identifier des facteurs liés au genre dans la santé au travail.

Suivant l’avis favorable de Mme Charlotte Parmentier-Lecoq, rapporteure, la commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS398 des rapporteures.

Elle examine ensuite les amendements identiques AS30 de Mme Agnès Firmin Le Bodo, AS60 de M. Stéphane Viry et AS243 de Mme Gisèle Biémouret.

M. Paul Christophe. Par cet amendement AS30, nous proposons d’ajouter le rapport financier aux documents devant être communiqués et rendus publics.

M. Stéphane Viry. La situation financière des SST suscitant certains fantasmes – ils prélèveraient, par exemple, des cotisations élevées sur les entreprises et thésauriseraient –, il paraît important de disposer d’informations précises à ce sujet.

Mme Charlotte Parmentier-Lecoq, rapporteure. Ces amendements me semblent satisfaits. S’agissant de la transparence financière, l’article 8 prévoit que l’évolution de la tarification fait partie des critères de la certification. En outre, la publication du rapport annuel d’activité comprend déjà des éléments relatifs à la gestion financière du service de santé au travail.

Demande de retrait.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Je m’interroge sur la finalité de la transmission de tous ces éléments au comité régional de prévention et de santé au travail. Est-ce à des fins d’études et de statistiques ? Il me semble problématique de ne pas préciser l’objectif de cette transmission.

La commission rejette les amendements.

Puis elle adopte l’article 10, modifié.

Article 11 : Permettre aux professionnels de santé des services de prévention et de santé au travail d’accéder aux dossiers médicaux partagés

La commission examine l’amendement de suppression AS128 de M. Pierre Dharréville.

M. Pierre Dharréville. L’article 11 permet aux médecins et infirmiers du travail d’accéder au DMP du salarié. Dans notre rapport sur les maladies et pathologies professionnelles, nous avons montré qu’il fallait effectivement créer un lien entre le médecin traitant et le médecin du travail, mais que ce lien devait être à sens unique, en direction du médecin traitant. Or l’article 11 introduit une transmission d’informations dans les deux sens, ce qui nous paraît problématique, car les deux médecins n’ont pas exactement la même mission auprès du salarié. S’il est nécessaire que le médecin traitant ait accès aux données du médecin du travail, notamment pour évaluer les causes professionnelles de certaines pathologies, l’inverse n’est pas évident, surtout en l’état actuel de la structuration des services de santé au travail.

Mme Charlotte Parmentier-Lecoq, rapporteure. Je suis évidemment défavorable à cet amendement de suppression, car l’article 11 introduit l’une des dispositions majeures de cette proposition de loi. L’objectif, je le rappelle, est d’abattre les cloisons entre la santé publique et la santé au travail, et ainsi d’assurer une bonne coordination entre les professionnels de santé, autour du salarié. Pour cela, il importe que le médecin du travail dispose de toutes les informations dont il a besoin. Nous nous sommes habitués à cette séparation entre santé publique et santé au travail, en oubliant que le médecin du travail a pour mission première de préserver la santé du salarié, qu’il agit au service et dans l’intérêt du salarié. Pour qu’il fasse son évaluation de la manière la plus fiable possible, il faut qu’il dispose de toutes les informations nécessaires. Notre préoccupation, c’est que le salarié soit accompagné au mieux dans les démarches d’adaptation du poste, de prévention de la désinsertion professionnelle et de prévention contre l’usure professionnelle.

M. Pierre Dharréville. Il va falloir approfondir cette discussion sur les rôles respectifs du médecin traitant et du médecin du travail, et sur les données dont ils doivent disposer. Le risque – et des médecins du travail me l’ont dit eux-mêmes –, c’est que l’on oriente leur travail vers une sorte de médecine de sélection, ce qui n’est pas leur souhait, ni leur fonction. Le salarié, quand il se présente devant le médecin du travail, est tout à fait capable de lui faire part d’un certain nombre de choses, de questions qui lui sont propres, mais la transmission d’informations entre médecin traitant et médecin du travail relève d’une autre démarche.

M. Didier Martin. Les informations contenues dans le DMP appartiennent avant tout à son titulaire. Il faut certes travailler au décloisonnement de la santé publique et de la santé au travail, mais il faut s’assurer que le médecin du travail ait un échange avec le salarié, qu’il lui fasse comprendre clairement l’objet de l’ouverture du DMP et qu’il s’assure de son consentement libre et éclairé. Notre groupe a déposé un amendement qui prévoit qu’à tout moment le salarié peut revenir sur cet accord et qu’en aucun cas sa décision d’accepter ou de refuser l’ouverture de son DMP n’est divulguée à l’employeur.

L’accès du médecin du travail au DMP constitue un progrès pour la santé du salarié, mais il doit être très strictement encadré.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS399 des rapporteures, qui fait l’objet du sousamendement AS463 de M. Stéphane Viry.

Mme Charlotte Parmentier-Lecoq, rapporteure. Il arrive déjà que des échanges aient lieu entre le médecin généraliste et le médecin du travail, mais ce n’est pas toujours simple. Le salarié, pour sa part, n’est pas toujours capable de transmettre les informations qui seraient utiles au médecin du travail. C’est pourquoi il nous a paru nécessaire d’améliorer la transmission d’informations et de la sécuriser, qu’elle soit ou non liée au DMP.

C’est notamment parce que la question du DMP nous semblait particulièrement délicate que nous avons sollicité l’avis du Conseil d’État. Cet amendement reprend ses recommandations et va même au-delà ; il nous semble satisfaire tous les amendements qui ont été déposés sur ce sujet.

Il prévoit que le médecin du travail accède au DMP par une voie différente de celle des autres professionnels de santé, eu égard à sa position particulière dans ses relations avec le travailleur. L’accès du médecin du travail au DMP sera donc conditionné au consentement exprès du travailleur.

L’amendement rappelle que le médecin du travail est évidemment tenu au secret médical, qu’il travaille exclusivement dans l’intérêt de la personne qu’il suit et qu’il dispose de garanties d’indépendance à l’égard de l’employeur, en tant que salarié protégé.

Nous allons au-delà des préconisations du Conseil d’État en prévoyant que le refus du salarié de laisser le médecin du travail accéder à son DMP n’est pas communiqué à l’employeur. Ce refus ne peut constituer une faute ni un motif justifiant l’émission d’un avis d’inaptitude. Dans le même esprit, l’amendement ouvre l’accès au DMP au seul médecin du travail – lui seul ayant le statut de salarié protégé – et non à l’ensemble de l’équipe soignante.

Enfin, nous avons inscrit la protection des données comme l’un des critères de certification des services de santé au travail : ces derniers devront démontrer qu’ils respectent bien le RGPD. Ces mesures permettent de sécuriser non seulement des données qui pourraient être obtenues dans le cadre de l’accès au DMP mais, d’une façon plus globale, toutes les données de santé dont dispose le médecin du travail.

Je vous invite à adopter cet amendement, qui suit les recommandations du Conseil d’État, qui consolide juridiquement toutes les dispositions de protection des données et de consentement du salarié et qui répond aux préoccupations exprimées dans vos amendements.

M. Stéphane Viry. Je vous rejoins, madame la rapporteure : je considère que favoriser la connaissance de l’état de santé de la personne par le médecin du travail est une bonne chose – le DMP, en soi, est une bonne chose. Dans son rapport sur le DMP, la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale a montré que ce dispositif est calibré et pertinent, mais qu’il est sous-utilisé dans notre organisation des soins et dans la prise en charge des patients.

Qu’à travers cette proposition de loi, on cherche à mettre le DMP au service de l’état de santé des travailleurs me semble être une très bonne chose également, dès lors qu’on respecte les principes inscrits dans le code de la santé publique, notamment le consentement de la personne concernée. Avec le sous-amendement AS463, je propose que le médecin conseil de la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) ait également accès au DMP, car il fait partie de la chaîne responsable de la santé du salarié. Il paraîtrait incohérent de le tenir à l’écart. Il me semble que ce sous-amendement s’inscrit parfaitement dans la logique du texte et complète votre amendement.

M. Thomas Mesnier, rapporteur général. Je remercie les rapporteures pour cet amendement qui réécrit l’article 11. Il témoigne de leur capacité d’écoute et de conciliation, aussi bien vis-à-vis de leurs collègues parlementaires que des diverses personnes auditionnées. Avec cet amendement, qui reprend les recommandations du Conseil d’État, nous allons assurer un accès spécifique du médecin du travail, et de lui seul, au DMP. Le patient devra donner son consentement exprès et son refus ne constituera pas une faute – c’est un ajout auquel je n’avais pas pensé. Tout cela va dans le bon sens et répondra aux appréhensions qui ont pu s’exprimer. Je retire donc, par avance, mon amendement AS341.

Mme Charlotte Parmentier-Lecoq, rapporteure. Le sous-amendement correspond effectivement à l’esprit du texte mais ce qui me gêne, c’est que nous n’avons pas abordé cette question dans le cadre des concertations, et que nous ne l’avons pas soumise au Conseil d’État. Par prudence, j’émettrai donc un avis défavorable.

M. Stéphane Viry. Vous auriez pu vous en tenir à un avis de sagesse, considérant que je ne dénature pas votre réécriture de l’article 11. Si vous voulez faire une vraie réforme des services de santé au travail, il faut faire preuve d’ambition. Or il me semble que ce sous‑amendement maximiserait le DMP.

Par ailleurs, ce n’est pas le Conseil d’État qui décide de la loi française : la loi se fait ici, au Parlement ! Je veux bien que l’on aille prendre des avis consultatifs, mais il faut aussi savoir s’affranchir de la tutelle administrative, qui en vient à dénaturer l’acte législatif de notre assemblée. J’aurais préféré que vous vous en remettiez à la sagesse de notre commission, sans influencer nos collègues.

M. Paul Christophe. J’ai déjà rappelé à maintes reprises mon attachement au DMP. Je suis très satisfait de l’amendement que vous proposez, madame la rapporteure, car il corrige une faiblesse que j’avais pointée dans l’un des miens, en rendant nécessaire le consentement exprès du salarié. Il est très important de sanctuariser l’accord donné par le salarié sur l’accès à son propre DMP. Je retirerai donc mon amendement AS155.

Mme Jeanine Dubié. Je remercie Mmes les rapporteures d’avoir tenu compte de l’avis du Conseil d’État dans cet amendement qui reprend des propositions formulées par le groupe Libertés et Territoires : la possibilité pour le salarié de refuser au médecin du travail l’accès à son DMP, sans que cela ait de conséquence pour lui et sans que son employeur en soit informé ; l’accès au DMP limité au seul médecin du travail.

Je suis totalement opposée au sous-amendement de notre collègue Stéphane Viry, car j’estime que chacun doit rester dans son rôle : le médecin de la sécurité sociale est un médecin contrôleur, alors que nous parlons ici de prévention. Mélanger les deux fonctions ne me semble pas être une bonne chose. Il faut laisser le médecin contrôleur de la sécurité sociale dans son rôle de contrôle ; sa décision peut avoir une vraie incidence sur le montant des indemnités ou la situation du salarié.

Je retire par avance mes amendements AS163 et AS168 qui, de toute façon, tomberont.

M. Cyrille Isaac-Sibille. Depuis le début, on nous dit : « Tout l’ANI, rien que l’ANI », et je me réjouis que l’on en sorte finalement pour procéder à une vraie production législative. Je vous en remercie, mesdames les rapporteures.

Je suis l’auteur du rapport sur le DMP que notre collègue Stéphane Viry a évoqué : c’est effectivement un moyen de coordonner l’intervention des différents médecins et il faut le développer. Dans le DMP peuvent figurer des antécédents ou des traitements reçus par le patient, d’où l’importance que le médecin du travail y ait accès avec l’accord du salarié. J’avais également un amendement AS274 prévoyant que le refus de donner accès au DMP ne puisse pas être sanctionné : je vais donc, moi aussi, le retirer. Nous verrons si nous pouvons encore améliorer le dispositif d’ici à la séance, mais je vous remercie d’ores et déjà pour ce travail parlementaire.

M. Didier Martin. L’amendement AS350 de notre groupe va également être satisfait ; je le retire. Nous avons également voulu poser des garde-fous à l’ouverture du DMP, qui a besoin de beaucoup d’avocats, tant il a du mal à s’implanter. L’ouverture du DMP au médecin du travail va dans le sens de son bon usage. Les barrières sont là, et le DMP reste bien la propriété du salarié. Même si, comme l’a dit Stéphane Viry, c’est bien ici que nous faisons la loi et non pas au Conseil d’État, je remercie les rapporteures qui ont pris soin de border le texte grâce à ses nombreuses recommandations.

Sur le point des libertés individuelles, les garanties sont réunies. Je partage également les propos de Mme Dubié : le médecin de la CPAM a un rôle de contrôle. Il ne faut pas oublier le rapport, quel qu’il soit d’ailleurs, qui existe entre le salarié et ce médecin. De même qu’on ne peut pas autoriser des perquisitions sans mandat, on ne peut pas se servir de l’ouverture du DMP pour autoriser toute investigation dans ce qui reste un bien personnel du salarié.

Mme Caroline Fiat. Je proposerai, pour la séance, un amendement au dispositif introduit par votre amendement, qui répond en partie à nos demandes. Si nul n’est censé ignorer la loi, il n’est pas toujours simple pour les gens de faire entendre raison. C’est pourquoi il vaut mieux que ce soit au médecin de demander au salarié l’autorisation d’accéder à ses données de santé plutôt qu’au salarié de refuser la communication de ses données de santé au médecin. Dans ce sens, on sera sûr que chaque salarié disposera de l’information selon laquelle il n’a pas l’obligation de partager toutes ses données de santé avec le médecin du travail.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Concernant le sous-amendement de M. Viry, je me demandais si cette possibilité n’était pas déjà offerte, puisque le médecin conseil ne fait pas partie des catégories interdites d’accès au DMP, parmi lesquelles on trouve la médecine du travail, les mutuelles et les assurances, les banques ou encore l’employeur. À partir du moment où un patient peut de lui-même demander un rendez-vous à son médecin conseil, il peut aussi souhaiter lui donner l’accès de son DMP.

La commission rejette le sous-amendement puis adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 11 est ainsi rédigé et les amendements AS206 de M. Jean-Hugues Ratenon, AS252 de M. Stéphane Viry et AS207 de Mme Caroline Fiat tombent, les amendements AS341 du rapporteur général, AS163 de Mme Jeanine Dubié, AS350 de M. Didier Martin, AS155 de M. Paul Christophe, AS168 de Mme Martine Wonner et AS274 de M. Cyrille Isaac-Sibille ayant été retirés.

Après l’article 11

La commission examine l’amendement AS276 de M. Cyrille IsaacSibille.

M. Cyrille Isaac-Sibille. Le DMP est une espèce d’armoire fourre-tout où s’empilent les documents et qui commence tout juste à être structuré, le médecin traitant réalisant, une fois par an, une fiche de synthèse comprenant les antécédents du patient, ses traitements ou encore ses allergies. L’amendement vise à créer un espace dédié à la santé au travail, afin de distinguer plus aisément les différents risques auxquels le travailleur a pu être exposé et voir les pathologies liées à son travail.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. Demande de retrait. Votre amendement nous semble satisfait par le dossier médical en santé au travail (DMST).

M. Cyrille Isaac-Sibille. Il me semble malgré tout indispensable de structurer le DMP avec un espace dédié au travail.

La commission rejette l’amendement.

Article 12 : Faciliter et sécuriser l’accès au dossier médical en santé au travail

La commission examine les amendements identiques AS32 de Mme Agnès Firmin Le Bodo et AS62 de M. Stéphane Viry.

M. Paul Christophe. Par respect du principe d’égalité de traitement entre les salariés, notre amendement AS32 vise à permettre au médecin praticien correspondant (MPC) de constituer le DMST.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. Avis défavorable.

Le dispositif n’existant pas encore, il ne semble pas pertinent, à ce stade, d’offrir à un autre praticien que le médecin du travail une telle prérogative.

M. Paul Christophe. Je ne comprends pas très bien votre argument. Cela voudrait dire qu’il faudrait faire une nouvelle loi pour ajuster le dispositif ?

Mme Michèle de Vaucouleurs. Je ne comprends pas très bien non plus la réponse de la rapporteure. L’amendement vise‑t‑il bien à ouvrir l’accès du DMST aux médecins praticiens correspondants ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. Je suis entièrement favorable à l’idée que les MPC puissent consulter le DMST, mais pas à ce qu’ils en soient les auteurs.

La commission rejette les amendements.

Puis elle adopte successivement les amendements AS400, de coordination, AS401, rédactionnel, et AS402, de coordination, des rapporteures.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS403 des rapporteures.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. Il vise à restreindre les informations inscrites au sein du DMST aux seuls éléments nécessaires à la coordination des soins, à l’instar de ce qui se pratique pour le DMP.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS169 de Mme Martine Wonner.

Mme Jeanine Dubié. Il vise à recueillir le consentement explicite du salarié concernant le partage de son DMST.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. Nous partageons votre intention, qui est satisfaite par l’amendement AS407 dont nous préférons la rédaction – la formule « sous réserve du consentement » nous semble plus ferme que « après consentement ».

Demande de retrait.

L’amendement est retiré.

La commission examine l’amendement AS344 du rapporteur général.

M. le rapporteur général. Il vise à instaurer un monopole des professionnels de la médecine du travail dans l’alimentation du dossier médical partagé en santé au travail des patients. En effet, si tous les professionnels de santé y ont accès, il semble pertinent que seuls les professionnels de la médecine du travail puissent alimenter la partie santé au travail du DMP.

Suivant l’avis favorable de Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure, la commission adopte l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS404 des rapporteures.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. Il vise à préciser les professionnels de santé ayant accès au DMST.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS407 des rapporteures.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. Il vise à prévoir le consentement exprès du travailleur pour la consultation de son DMST.

La commission adopte l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS254 de M. Stéphane Viry.

M. Stéphane Viry. Parmi les médecins ayant accès au DMST, qu’en est-il du médecin conseil de la CPAM – celui-là même que j’avais tenté d’introduire avec mon sous‑amendement précédent ? Il me semble important de favoriser la coordination des soins.

Suivant l’avis défavorable de Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure, la commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS49 de M. Stéphane Viry.

M. Stéphane Viry. Il vise à permettre au DMST de suivre le salarié, conformément à l’ANI.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. Avis défavorable. Nous préférons maintenir la nécessité du consentement préalable du travailleur.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement de précision AS406 des rapporteures.

Puis elle adopte l’article 12, modifié.

Après l’article 12

La commission est saisie de l’amendement AS262 de Mme Valérie Beauvais.

M. Stéphane Viry. L’amendement est défendu.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. L’amendement est satisfait. Demande de retrait.

La commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS121 de Mme Aina Kuric.

M. Paul Christophe. L’amendement est défendu.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Article 13 : Intégrer dans le système national de données de santé les données de santé issues du dossier médical en santé au travail

La commission est saisie de l’amendement de suppression AS208 de Mme Caroline Fiat.

Mme Caroline Fiat. Nous ne comprenons pas l’intérêt de cet article dont le but est déjà satisfait par l’article L. 1461-1 du code de la santé publique : « Les données de santé recueillies lors des visites d’information et de prévention, telles que définies à l’article L. 46241 du code du travail ». Cette disposition est suffisante pour bénéficier d’une photographie de l’état de santé de la population au travail et voir les évolutions des pathologies liées au travail, en plus de garantir l’anonymat des personnes.

Suivant l’avis de la rapporteure, la commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement AS408 des rapporteures.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. Il vise à proposer une nouvelle rédaction de l’article, notamment afin d’éviter les doublons avec le droit en vigueur, que soulignait Caroline Fiat, et d’apporter des précisions sur les catégories de données recueillies dans le cadre du DMST qui seront intégrées dans le système national de données de santé.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 13 est ainsi rédigé et les amendements AS209 de M. Jean-Hugues Ratenon et AS210 de Mme Caroline Fiat tombent.

Après l’article 13

La commission examine l’amendement AS256 de M. Stéphane Viry.

M. Stéphane Viry. Il vise à y voir plus clair sur l’avancée législative permise par l’article 13, en sollicitant un rapport.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, rapporteure. Demande de retrait. Nous partageons votre intérêt mais votre demande semble un peu prématurée.

M. Stéphane Viry. Je le retire pour le redéposer en séance… en 2023.

Mme Caroline Fiat. Je veux bien des explications. D’abord, Mme la rapporteure a dit que j’avais raison avec l’amendement AS208, qui a pourtant été rejeté. Ensuite, son amendement AS408 a fait tomber le mien, l’amendement AS210, par lequel je demandais que les données de santé soient stockées sur un support matériel français, ce qui n’a rien à voir avec l’amendement adopté. Comment cela est-il possible ?

Mme la présidente Fadila Khattabi. L’amendement de la rapporteure était un amendement de rédaction globale de l’article 13. L’article ayant été entièrement récrit, les autres amendements tombent automatiquement.

L’amendement est retiré.

Titre III
Mieux accompagner certains publics, notamment vulnérables, et lutter contre la désinsertion professionnelle

Avant l’article 14

La commission examine l’amendement AS351 de M. Thierry Michels.

M. Thierry Michels. Il revêt, à mes yeux, une très grande importance symbolique. Nous devons nous assurer de mentionner explicitement la situation des personnes handicapées, dont le taux d’emploi en entreprise est en deçà de l’objectif de 6 %. Il faut travailler à accompagner ces personnes le mieux possible. Le titre III manifeste notre attachement à la prise en compte du handicap, pour une société inclusive dans le travail. Le monde du handicap a des attentes très fortes à ce sujet, comme je l’ai perçu en échangeant avec des membres du Conseil national consultatif des personnes handicapées, avec des universitaires de l’Université Paris-Est Créteil ou d’autres associations. Une personne peut être vulnérable du fait de son niveau de formation, alors que, inversement, une personne en situation de handicap n’a pas nécessairement de problèmes liés à son handicap dans son entreprise.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. Avis favorable, dans la mesure où nous souscrivons à l’enjeu politique que vous avez souligné et à votre message en faveur des publics en situation de handicap.

Mme Jeanine Dubié. Je tiens à saluer la vigilance de notre collègue. Inscrire le mot « handicap » dans le titre III est très important : c’est aussi une manière de reconnaître la nécessité de travailler à l’insertion des personnes en situation de handicap.

La commission adopte l’amendement.

Article 14 : Création d’une cellule de prévention de la désinsertion professionnelle au sein des services de prévention et de santé au travail interentreprises

La commission examine l’amendement AS98 de M. Bruno Duvergé.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Selon l’exposé des motifs de la proposition de loi, « l’article 14 prévoit qu’au sein des services de prévention et de santé au travail, autonomes et interentreprises, une cellule sera dédiée à la prévention de la désinsertion professionnelle ». Or l’article créant cette cellule est inséré dans la section du code du travail consacrée aux services de santé au travail interentreprises, après l’article L. 4622-8 ; les salariés suivis par les services autonomes de santé au travail des grandes entreprises se retrouvent donc exclus du projet. L’amendement vise à prendre en compte l’ensemble des services de santé au travail, comme l’a souligné le Conseil d’État dans son avis.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. L’intention est légitime ; néanmoins, il semble prématuré de prendre de telles dispositions. Les services de santé au travail autonomes ne sont pas encore multidisciplinaires et leurs indicateurs restent à consolider. À l’instar du secrétaire d’État, M. Laurent Pietraszewski, nous pensons que l’offre des services de santé au travail interentreprises, d’une part, et autonomes, d’autre part, convergera progressivement mais que les conditions ne sont pas remplies pour que cet objectif soit atteint immédiatement.

Avis défavorable.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Il me semble tout de même important de suivre les recommandations du Conseil d’État : « L’article 14 de la proposition de loi crée des cellules pluridisciplinaires de prévention de la désinsertion professionnelle au sein des services de prévention et de santé au travail. Si l’exposé des motifs indique que ces cellules seront créées au sein des services autonomes et des services interentreprises, l’emplacement choisi dans le code du travail pour introduire l’article les concernant conduit à ne le rendre applicable qu’aux services interentreprises. » Cela me paraît fou de priver 10 % des salariés de ces cellules !

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements AS68 de Mme Agnès Firmin Le Bodo et AS245 de Mme Gisèle Biémouret.

M. Paul Christophe. La cellule de prévention de la désinsertion professionnelle créée par la proposition de loi dans les services de prévention et de santé au travail est constituée d’un panel représentatif de leurs différents intervenants. L’amendement AS68 vise à préciser le rôle de la cellule au titre des acteurs externes aux services.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. Demande de retrait.

Votre rédaction présente l’inconvénient de ne pas préciser qui pourrait signaler les situations de désinsertion professionnelle à la cellule. Or il ne faudrait pas laisser entendre qu’elle pourrait être saisie par n’importe quelle autorité et serait dépourvue de toute marge d’appréciation quant à la nécessité de prendre en charge ou non les personnes exposées à un risque de désinsertion professionnelle ou en situation de désinsertion professionnelle.

La commission rejette successivement les amendements.

Puis elle est saisie de l’amendement AS329 de M. Thierry Michels.

M. Thierry Michels. Il vise à mieux mettre en avant l’implication du salarié dans l’élaboration du plan de retour au travail.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. Je ne suis pas convaincue par la nécessité de modifier les termes retenus. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’amendement de cohérence AS409 des rapporteures.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS410 des rapporteures.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. Il vise à reprendre, dans leur intégralité, les termes de l’article L. 4624-3 du code du travail. De cette manière, il sera parfaitement établi que les mesures dont il est question ici sont bien celles prévues à l’article.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS411 des rapporteures.

Elle examine ensuite l’amendement AS352 de M. Thierry Michels, qui fait l’objet du sousamendement AS464 de Mme Caroline Janvier.

M. Thierry Michels. Cet amendement de cohérence prévoit la collaboration des cellules pluridisciplinaires de prévention de la désinsertion professionnelle constituées au sein des services de prévention et de santé au travail avec l’ensemble des services de l’assurance maladie impliqués dans l’accompagnement des assurés, de manière à renforcer également la collaboration avec les acteurs du domaine du handicap.

Mme Caroline Janvier. Le sous-amendement vise à prévoir la collaboration des cellules pluridisciplinaires de prévention de la désinsertion professionnelle constituées au sein des services de prévention et de santé au travail avec les acteurs en charge de l’emploi accompagné.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. Avis favorable à l’amendement modifié par le sous-amendement. Cette précision sur l’organisation de la collaboration entre organismes est bienvenue.

Mme Jeanine Dubié. Je me permets d’intervenir dans la mesure où je pense que l’adoption de cet amendement va faire tomber les nôtres. La nouvelle rédaction permettrait de bien prendre en compte tous les acteurs travaillant à l’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap. Je retire donc les amendements AS79 et AS80.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Je me réjouis de cette nouvelle rédaction. Il est important que les services sociaux de l’assurance maladie puissent être associés. Les difficultés sociales rencontrées par les salariés étant de nature à entraîner de nombreux troubles, il est très important de pouvoir utiliser l’ensemble des ressources proposées par l’assurance maladie. Je retire l’amendement AS283.

Mme Michèle Peyron. Je retire l’amendement AS319, relatif au même sujet.

M. Stéphane Viry. Je souscris également à la nouvelle rédaction, qui intègre clairement les acteurs de la prise en charge du handicap, et retire l’amendement AS50.

La commission adopte successivement le sous-amendement et l’amendement sousamendé.

En conséquence, les amendements AS25 de M. Stéphane Testé et AS182 de M. Guillaume Chiche tombent, les amendements AS283 de Mme Michèle de Vaucouleurs, AS50 de M. Stéphane Viry, AS79 de Mme Jeanine Dubié, AS319 de Mme Sylvie Charrière et AS80 de Mme Jeanine Dubié ayant été retirés.

La commission est saisie de l’amendement AS412 des rapporteures.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. Il vise à faire référence, dans une rédaction plus englobante, aux différents organismes intervenant dans l’insertion professionnelle.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS330 de M. Thierry Michels.

M. Thierry Michels. Il vise à inclure toutes les structures qui contribuent à l’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap dans l’entreprise – Association de gestion du fonds pour l’insertion des personnes handicapées, Cap emploi ou Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique –, de manière à nous assurer que la nouvelle cellule pluridisciplinaire s’appuiera bien sur l’ensemble de l’écosystème existant pour accompagner les personnes en situation de handicap dans l’entreprise.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. Nous considérons que votre amendement a été en partie satisfait par l’adoption de l’amendement AS352.

Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

L’amendement est retiré.

La commission examine l’amendement AS238 de Mme Cécile Delpirou.

Mme Cécile Delpirou. Il vise à confier une mission d’information à la cellule pluridisciplinaire de prévention de la désinsertion professionnelle. De nombreux salariés en situation de handicap ne se déclarent pas travailleurs handicapés, le plus souvent par méconnaissance de leurs droits. La cellule pourrait avoir comme rôle d’informer tous les salariés des possibilités de se déclarer travailleur handicapé. Cela est particulièrement important pour les porteurs de handicaps invisibles et évolutifs.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. Nous partageons votre préoccupation. Toutefois, la cellule pourra informer le travailleur de la possibilité d’être reconnu comme travailleur handicapé, quand bien même cela ne serait pas prévu dans la loi. Il me semble que cette précision ne s’impose pas.

Demande de retrait ou avis défavorable.

Mme Cécile Delpirou. Je le maintiens, parce qu’il me semble important d’apporter cette précision, de sorte que chaque salarié puisse bénéficier de l’information.

M. Thierry Michels. Cela me semble, en effet, très important. On connaît la réticence que certains ont à demander leur reconnaissance comme travailleur handicapé. Cela peut se traduire par un manque de prise en compte par l’employeur des conditions spécifiques dans lesquelles se trouve la personne, ce qui nuit à la prévention que nous appelons tous de nos vœux.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 14, modifié.

Article 14 bis (nouveau) : Amélioration du partage d’informations entre les organismes d’assurance maladie et les services de prévention et de santé au travail

La commission est saisie de l’amendement AS355 de Mme Catherine Fabre.

Mme Catherine Fabre. Il a pour but d’améliorer le partage d’informations entre les organismes d’assurance maladie et les services de prévention de santé au travail, dans le but d’identifier de façon aussi précoce que possible les salariés concernés par un risque de désinsertion professionnelle. L’idée est d’aménager le poste de ces salariés, d’accompagner ces derniers pour éviter la désinsertion professionnelle.

Il s’agit d’instaurer une réciprocité de manière à renforcer la coordination : l’organisme d’assurance maladie informe le service de santé au travail de l’existence du risque, ledit service l’avisant en retour qu’il prend acte du risque et accompagne le salarié. Il est crucial de prendre en charge rapidement les personnes présentant un risque de désinsertion professionnelle si l’on veut les maintenir dans l’emploi.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. Cet amendement s’inscrit pleinement dans l’objectif de notre proposition de loi de lutter contre la désinsertion professionnelle et mieux appréhender la situation des travailleurs exposés à des risques. Dans cette perspective, le renforcement de la coordination entre les organismes intervenant en matière de prévention de la désinsertion professionnelle me paraît tout à fait adapté.

Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Après l’article 14

La commission examine l’amendement AS156 de M. Paul Christophe.

M. Paul Christophe. Conformément à l’objectif de repérer précocement les risques de désinsertion du salarié, cet amendement prévoit le renforcement des liens et des échanges entre médecin traitant, médecin du travail et médecin conseil : la circulation des informations entre eux est essentielle. Le présent amendement a pour objet de donner un support législatif à ces échanges.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. Je comprends parfaitement l’intention. Néanmoins, la formulation de l’amendement me paraît manquer de précision : il faudrait indiquer la nature des éléments que le médecin traitant, le médecin conseil et le médecin du travail peuvent échanger. S’ils sont d’ordre médical, on ne saurait y manquer. La question du traitement des données individuelles est extrêmement sensible.

En conséquence, je ne saurais émettre un avis favorable sur cet amendement, qui me semble d’ailleurs en partie satisfait par l’amendement AS355, que nous venons d’adopter.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Nous en revenons à l’intérêt qu’il y aurait à posséder une messagerie sécurisée pour favoriser ces échanges entre le médecin traitant et le médecin du travail, qui sont tout à fait pertinents et doivent être fluides.

La commission rejette l’amendement.

Article 14 ter (nouveau) : Participation du « référent handicap » à l’accompagnement, par les services de prévention et de santé au travail, des personnes en situation de handicap

La commission est saisie de l’amendement AS353 de Mme Caroline Janvier.

Mme Caroline Janvier. Il a pour objectif d’expliciter le rôle du référent handicap en matière de prévention et de santé au travail. Celui-ci peut venir en appui des services de prévention et de santé au travail, en particulier en ce qui concerne le maintien dans l’emploi des personnes en situation de handicap et la prévention de la désinsertion professionnelle. Afin de garantir la prise en compte des situations de handicap au travail, le référent handicap peut être associé au rendez-vous de préreprise entre le salarié et l’employeur, comme le prévoit l’article 18 de la proposition de loi pour le service de prévention et de santé au travail. Il peut également être sollicité par le médecin du travail dans le cadre des propositions d’adaptation formulées à l’issue de l’entretien de mi-carrière.

Suivant l’avis favorable de Mme Carole Grandjean, rapporteure, la commission adopte l’amendement.

Après l’article 14

La commission examine l’amendement AS211 de Mme Caroline Fiat.

Mme Caroline Fiat. Même s’il serait ubuesque de voir un salarié licencié pour faute au motif que son poste n’a pas pu être aménagé, nous souhaitons rendre impossible ce genre de situation en inscrivant dans la loi le principe suivant : « Nul ne peut être licencié pour faute car son poste ne peut être aménagé, adapté ou transformé de manière à favoriser son retour au travail. » Mieux vaut prévenir que guérir.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. Je ferai un bref rappel de l’état du droit.

L’inaptitude médicale au travail peut être prononcée par le médecin du travail lorsque l’état de santé physique ou mentale du salarié est devenu incompatible avec le poste qu’il occupe. Toutefois, le processus est strictement encadré.

Avant de prendre sa décision, le médecin du travail doit effectuer au moins un examen médical du salarié concerné et procéder ou faire procéder à une étude de son poste de travail. C’est uniquement lorsqu’il constate qu’aucune mesure d’aménagement, d’adaptation ou de transformation n’en est possible, alors que l’état de santé du salarié justifie un changement de poste, que le médecin du travail peut le déclarer inapte.

L’avis d’inaptitude oblige l’employeur à rechercher un reclassement pour le salarié. L’emploi proposé doit être aussi compatible que possible avec l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en œuvre de mesures telles que des mutations, des aménagements, des adaptations ou transformations de postes existants ou des aménagements du temps de travail.

L’employeur peut rompre le contrat de travail du salarié s’il est en mesure de justifier de son impossibilité de lui proposer un emploi compatible avec son état de santé ou que le salarié a refusé l’emploi proposé. Il peut aussi le faire si l’avis d’inaptitude rédigé par le médecin du travail mentionne que le maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que son état de santé fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.

Enfin, les avis d’inaptitude peuvent être contestés devant le conseil de prud’hommes.

Ce cadre juridique me semble de nature à apporter aux salariés la protection à laquelle ils ont droit. Avis défavorable.

Mme Caroline Fiat. Merci pour ce rappel du droit, mais mon amendement propose simplement d’écrire dans la loi qu’il n’est pas possible de licencier pour faute une personne dont le poste ne peut être aménagé ou adapté. Dans la vraie vie, ce genre de situation existe. Or nous sommes tous d’accord pour dire que le fait d’être inapte au travail n’est pas une faute : on ne choisit pas d’avoir un problème de santé empêchant d’occuper son poste.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. Votre demande est déjà satisfaite : on ne peut être licencié pour faute sur ce fondement.

La commission rejette l’amendement.

Avant l’article 15

La commission examine l’amendement AS214 de Mme Caroline Fiat.

Mme Caroline Fiat. Cet amendement vise à mettre fin au processus de fragilisation de la médecine du travail.

Il rétablit la visite médicale d’embauche, transformée par la « loi El Khomri » en une visite d’information et de prévention qui ne permet pas la prise en compte réelle de l’état de santé de la personne. Cette visite visera aussi à s’assurer réellement de l’aptitude physique du salarié à occuper son poste, ce qui avait également été supprimé par la « loi El Khomri », au mépris du bon sens le plus élémentaire.

Il rend au seul médecin du travail le pouvoir de procéder à la visite médicale : celle-ci ne saurait être confiée à un autre professionnel de santé. Si l’on veut que la prévention soit efficace, il semble logique qu’un véritable examen médical soit confié à un médecin.

Le médecin du travail serait choisi par les délégués du personnel pour éviter le choix d’un praticien ayant des affinités ou des liens d’intérêt avec l’employeur.

Enfin, la périodicité des visites régulières serait encadrée : elle deviendrait annuelle pour tous les salariés, et semestrielle pour les travailleurs de nuit.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. Avis défavorable.

Votre amendement propose un retour en arrière s’agissant du suivi individuel de l’état de santé des travailleurs.

Vous proposez que seul le médecin du travail puisse procéder à la visite d’embauche. Or, de l’avis des professionnels que nous avons auditionnés, notamment les représentants de l’Ordre des médecins et de l’Ordre des infirmiers, c’est une bonne chose que les infirmiers puissent réaliser les visites d’information et de prévention, et les visites périodiques. Le dispositif donne satisfaction.

Une visite annuelle serait à la fois irréaliste, compte tenu de l’effet significatif que cela aurait sur la charge de travail des médecins du travail, et inutile pour un très grand nombre de travailleurs. Par ailleurs, si la visite a lieu tous les cinq ans au maximum, ce délai peut être réduit si le médecin l’estime nécessaire.

En outre, le droit prévoit déjà que le suivi de l’état de santé est adapté à la situation des personnes. L’article R. 4624-17 du code du travail dispose : « Tout travailleur dont l’état de santé, l’âge, les conditions de travail ou les risques professionnels auxquels il est exposé le nécessitent, notamment les travailleurs handicapés, les travailleurs qui déclarent être titulaires d’une pension d’invalidité et les travailleurs de nuit [...], bénéficie, à l’issue de la visite d’information et de prévention, de modalités de suivi adaptées ».

Mme Caroline Fiat. Les personnes travaillant la nuit, par exemple, présentent des risques accrus de développer des cancers ou de souffrir d’obésité : elles devraient être suivies plus régulièrement.

La commission rejette l’amendement.

Article 15 : Autorisation du recours aux pratiques médicales à distance relevant de la télémédecine pour le suivi des travailleurs

La commission examine, en discussion commune, les amendements identiques AS69 de Mme Agnès Firmin Le Bodo, AS170 de Mme Martine Wonner et AS216 de Mme Caroline Fiat ainsi que l’amendement AS248 de Mme Gisèle Biémouret.

M. Paul Christophe. L’amendement AS69 tend à encadrer le recours à la téléconsultation, notamment pour garantir la confidentialité, conformément à la volonté exprimée par les partenaires sociaux dans l’ANI.

Mme Jeanine Dubié. L’amendement AS170 vise également à faire de la consultation en présentiel le principe et la téléconsultation l’exception, car celle-ci peut poser des problèmes de confidentialité et de discrétion. Les partenaires sociaux souhaitent donc l’encadrer.

Mme Gisèle Biémouret. Je considère, moi aussi, que la téléconsultation doit être l’exception et la consultation en présentiel, la norme. D’où mon amendement.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. J’entends vos remarques. L’un de mes amendements, que nous examinerons dans quelques instants, répondra en grande partie à vos préoccupations. Il prévoit que les professionnels de santé pourront recourir à des pratiques médicales ou de soins à distance en fonction de l’état de santé physique et mentale du travailleur, et moyennant son accord. Le processus garantira également la confidentialité des échanges.

Il n’est pas question de faire du recours à ces pratiques la règle en toute circonstance. Comme vous, nous sommes attachés au principe selon lequel le suivi médical des travailleurs doit se faire en leur présence dès lors que cela s’avère nécessaire. Toutefois, la rédaction que vous proposez viderait le dispositif d’une partie significative de sa substance et donc de son intérêt. Ne rigidifions pas à l’excès le cadre juridique. Je vous propose de laisser aux professionnels de santé le soin d’apprécier l’opportunité de recourir à la téléconsultation, dont l’utilité est évidente.

Avis défavorable.

M. Pierre Dharréville. Mon amendement AS131 va dans le même sens que ces amendements.

Vous avez dit, madame la rapporteure, que la consultation doit se dérouler en présentiel « dès lors que cela s’avère nécessaire ». Cette formule affaiblit quelque peu l’idée selon laquelle cette pratique serait la règle. Or le cadre numérique ne permet pas toujours la rencontre pleine et entière entre le médecin et le salarié. Si nous voulons que ces consultations, déjà très espacées, aient tout l’effet que nous en attendons pour la santé au travail, il faut veiller à ce qu’elles se déroulent dans le meilleur cadre possible. Il ne faut pas qu’elles se transforment en une formalité numérique supplémentaire. Il se peut que le recours à la téléconsultation soit nécessaire et même profitable, mais nous pensons qu’il faut maintenir le principe du présentiel pour s’assurer que cette consultation, déjà largement dévalorisée, conserve quand même une certaine force.

Mme Jeanine Dubié. Je suppose que Mme la rapporteure faisait allusion à son amendement AS413, qui répond effectivement à un certain nombre de nos préoccupations. J’en prends acte mais je m’assurerai, d’ici à la séance, que la nouvelle rédaction satisfait l’ensemble de nos demandes.

M. Bernard Bouley. La responsabilité du choix revient au médecin du travail : c’est à lui de décider si la consultation doit avoir lieu en présence du salarié ou à distance, voire de considérer qu’il est possible de la déléguer à une infirmière ou à l’un des membres de l’équipe pluridisciplinaire.

La commission rejette successivement les amendements.

Puis elle est saisie de l’amendement AS413 des rapporteures.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. Il supprime la référence à l’article L. 6316-1 du code de la santé publique. Les actes de télémédecine définis à l’article R. 6316-1 du même code n’apparaissent pas intégralement réalisables dans le cadre de la médecine du travail. À la suite de nos échanges avec le Conseil d’État, il nous a semblé préférable de faire uniquement référence aux « pratiques médicales ou de soins à distance utilisant les technologies de l’information et de la communication ».

Par ailleurs, nous souhaitons ouvrir la possibilité aux infirmiers de recourir à des pratiques de soins à distance, dans certaines conditions. Or, en l’état, l’article 15 ne le permet pas.

L’amendement introduit également dans le dispositif le principe du consentement du travailleur préalablement au recours à ces pratiques, ainsi que celui du respect de la confidentialité des échanges.

M. Pierre Dharréville. La question de la confidentialité est importante, mais elle n’est pas la seule que pose la téléconsultation.

Je me réjouis que vous intégriez le consentement préalable du travailleur. C’est effectivement nécessaire, mais sans doute pas suffisant.

Enfin, il conviendrait de préciser que la téléconsultation est l’exception et non pas la règle. Or ce n’est pas ce que je lis dans votre proposition. Nous reviendrons sans doute sur ces différents aspects en séance publique.

M. Cyrille Isaac-Sibille. La télémédecine est un outil extraordinaire, qui se développe, mais la téléconsultation ne doit pas être la règle. Or, dans cet amendement, vous ne rappelez pas que la présence du salarié reste la règle. La téléconsultation peut être utilisée pour régler rapidement certains problèmes, pour faire face à des urgences, mais elle doit rester l’exception. Ce n’est qu’un outil. Nous devrons en rediscuter en séance.

Mme Caroline Fiat. Je cherche en vain les avantages exceptionnels de la téléconsultation. Même en période de pandémie, nous n’arrêtons pas de dire aux gens qu’ils doivent continuer à aller voir leur médecin ! De plus, lors d’une visite médicale, on passe un certain nombre d’examens : analyse d’urine ou encore tests auditifs et visuels. À travers un écran, cela ne va pas être facile…

Qui plus est, pour certains salariés qui ne présentent pas, en apparence, de problème de santé et qui ne vont jamais voir de médecin, la visite médicale est la seule occasion de découvrir une maladie.

Les visites avaient déjà été espacées. Désormais, elles ne permettront même plus d’effectuer des examens médicaux : autant les supprimer, pendant que vous y êtes !

Mme Carole Grandjean, rapporteure. La téléconsultation n’est effectivement qu’un outil : elle permet à la consultation d’avoir lieu, mais à distance. En outre, ce n’est qu’une possibilité offerte au médecin. Enfin, un décret en Conseil d’État permettra de sécuriser la disposition, notamment au regard du respect des libertés individuelles.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, les amendements AS131 de M. Pierre Dharréville, AS275 de M. Cyrille Isaac-Sibille, AS309 de Mme Annie Chapelier, AS217 de Mme Caroline Fiat, AS5 de Mme Emmanuelle Anthoine, AS17 de M. Stéphane Testé, AS81 de Mme Jeanine Dubié, AS174 de M. Guillaume Chiche et AS362 de Mme Caroline Fiat tombent.

La commission en vient à l’amendement AS215 de Mme Caroline Fiat.

Mme Caroline Fiat. Nous demandons la suppression de l’alinéa 6. L’article 15 est censé permettre simplement aux médecins du travail d’utiliser la téléconsultation. Pourquoi donc proposez-vous de supprimer le dernier alinéa de l’article L. 4624-1 du code du travail ? Celui-ci dispose : « En cas de difficulté ou de désaccord, l’employeur ou le salarié peut exercer un recours devant l’inspecteur du travail. Ce dernier prend sa décision après avis du médecin inspecteur du travail. » Les travailleurs, tout comme les employeurs, doivent conserver le droit à un recours devant l’inspection du travail en cas de désaccord.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. Vous prêtez à cette disposition un objet qui n’est pas le sien. Le 3° de l’article 15 supprime effectivement le dernier alinéa de l’article L. 4624-1 du code du travail, qui prévoit que le rapport annuel d’activité établi par le médecin du travail pour les entreprises dont il a la charge comporte des données présentées par sexe. Toutefois, nous n’avons pas l’intention de mettre un terme à l’élaboration de ce rapport, dont il a été question à l’article 10. Si nous supprimons cet alinéa, c’est parce que ce rapport est désormais prévu par un nouvel article du code du travail. En outre, nous avons adopté à l’article 10 un amendement précisant que ce rapport comprendrait des données relatives à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, de façon à éviter tout recul.

Avis défavorable.

M. Pierre Dharréville. Je profite de cet amendement pour souligner le manque de médecins inspecteurs du travail, même si c’est au Gouvernement, et pas à vous, madame la rapporteure, de répondre sur ce point. Vous parlez d’un dispositif en matière d’égalité et de la possibilité de se tourner vers le médecin inspecteur du travail, mais à quoi ce texte sert-il quand il n’y en a pas ? De manière plus générale, le rôle des médecins inspecteurs du travail mérite d’être interrogé au vu de leur faible nombre – quatre ou cinq par région, me semble‑t‑il. Le fait qu’ils ne soient pas assez nombreux pour relayer les politiques conduites en matière de santé au travail pose un sérieux problème.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 15, modifié.

Après l’article 15

La commission est saisie de l’amendement AS310 de Mme Annie Chapelier.

M. Paul Christophe. L’amendement est défendu.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. Je comprends parfaitement la préoccupation de Mme Chapelier, qui fait d’ailleurs l’objet de nombreuses discussions, à l’Assemblée nationale comme dans le cadre du dialogue social. La mesure proposée, à savoir la surveillance de l’état de santé physique et psychique des salariés en télétravail, mériterait néanmoins une expertise approfondie. Les partenaires sociaux ne se sont pas exprimés sur la question dans le cadre de la négociation de l’accord.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements AS160 de M. Paul Christophe et AS22 de Mme Agnès Firmin Le Bodo.

M. Paul Christophe. Ces deux amendements visent à préciser les conditions d’accès à la téléconsultation pour un certain nombre de salariés.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. Vous proposez qu’un salarié atteint d’une maladie grave puisse bénéficier d’une téléconsultation ou de télésoins pendant les heures de travail. Ce sujet nous préoccupe tous, mais n’est pas abordé en tant que tel dans le texte. Je ne suis pas convaincue de l’opportunité d’introduire une telle disposition sans que les partenaires sociaux aient exprimé leur point de vue. Qui plus est, la mise en œuvre de cette mesure pose question : tous les salariés n’ont pas accès à un poste informatique. Il faudrait également organiser le remplacement de la personne concernée.

Par ailleurs, il est expliqué dans les exposés sommaires que la consultation médicale à distance présente pour le salarié l’avantage de la discrétion. Si je puis admettre que ce soit vrai pour certains salariés de grandes entreprises, qui disposent de locaux permettant ces pratiques, je ne suis pas convaincue qu’il en aille de même pour l’ensemble des salariés.

Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Article 16 : Instauration d’une visite médicale de mi-carrière au bénéfice des travailleurs

La commission examine les amendements de suppression AS127 de M. Pierre Dharréville, AS218 de Mme Caroline Fiat et AS234 de Mme Valérie Six.

M. Pierre Dharréville. Cet article instaure une visite de mi-carrière, fixée à l’âge de 45 ans, pour établir « un état des lieux de l’adéquation entre le poste de travail et l’état de santé du salarié ». Or c’est l’objet de toutes les consultations médicales dans le cadre de la santé au travail : la question de cette adéquation doit donc se poser au minimum tous les cinq ans. Si la visite suivante est prévue à 42 ans ou à 47 ans, à quoi bon organiser la visite de mi‑carrière ?

Pourquoi se plaindre d’une visite supplémentaire, me demanderez-vous ? C’est que je crains, en fait, compte tenu de la difficulté à organiser réellement une visite tous les cinq ans, qu’il n’y ait plus qu’une visite à l’embauche, une visite à mi-carrière et une autre en fin de carrière.

Mme Caroline Fiat. Vous savez que j’aime pousser jusqu’à l’absurde les conséquences des mesures que vous prenez, pour vous faire réagir. À la lecture de cet article, je me suis dit qu’une fois encore on traitait les conséquences sans agir sur les causes.

Dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), pour parler de ce que je connais le mieux, lors de cette visite à 45 ans, que va-t-on dire aux soignants ? « Vous souffrez de troubles musculo-squelettiques, vous êtes fracassés. Vous n’êtes plus capables de travailler. Ciao, bonsoir ! » Comment vont faire ces établissements qui manquent déjà de personnel ?

Alors qu’il faudrait faire en sorte que les conditions de travail soient dignes – par exemple, en ce qui concerne les EHPAD, en nous présentant enfin le projet de loi sur l’autonomie et la dépendance –, vous vous contentez de traiter les conséquences du mal-être au travail. C’est du grand n’importe quoi !

Mme Valérie Six. Je rejoins les propos de Pierre Dharréville. Si je comprends l’objectif de l’article, à savoir faire de la prévention pour permettre de maintenir les salariés dans leur poste, je regrette que le dispositif conduise en réalité à les stigmatiser : à l’âge de 45 ans – ou celui qui sera déterminé par l’accord de branche –, les salariés pourraient avoir le sentiment d’être convoqués pour envisager déjà la piste de l’aménagement plutôt que pour faire un simple bilan, comme s’ils n’étaient déjà plus aptes. Les médecins du travail avec qui j’ai discuté me l’ont bien dit : ce qui doit être pris en compte, ce n’est pas tant l’âge que le type de poste occupé. C’est pourquoi je suis opposée à cet article.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. Ce dispositif constitue une innovation intéressante, dans la mesure où il donne au médecin du travail une occasion privilégiée de vérifier notamment l’adéquation entre le poste de travail et l’état de santé de la personne, mais également d’évaluer le risque de désinsertion professionnelle et d’en tirer, le cas échéant, les conclusions en proposant des mesures d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste, ou encore d’aménagement du temps de travail.

Vous l’avez dit, madame Six, d’un métier à l’autre les circonstances ne sont pas forcément les mêmes. Nous avons donc souhaité encourager une discussion de branche pour que, selon le métier, la visite ait lieu à l’âge ou au moment le plus adéquat.

Par souci de pragmatisme, le nouvel article L. 4624-2-2 du code du travail prévoit que cette visite pourra se tenir en même temps qu’une autre visite, dès lors que celle-ci aurait lieu au cours des deux années précédentes.

La mise en place d’une visite de mi-carrière s’inscrit pleinement dans l’objectif poursuivi par la proposition de loi de renforcer la prévention en santé au travail. Il s’agit de fixer des rendez-vous permettant de construire avec l’équipe pluridisciplinaire des actions de prévention autour de la lutte contre la désinsertion professionnelle.

Avis défavorable.

M. Philippe Chalumeau. On peut voir le verre à moitié plein ou à moitié vide. En l’occurrence, nous devrions tous être d’accord avec cette mesure. La visite de mi-carrière se situe à un moment clé. Qui plus est, nous avons du mal, en France, à mettre en place des consultations de prévention ; pour une fois, un outil particulièrement intéressant est proposé. Cela permettra à des gens ne présentant pas de pathologie particulière et qui ne sont pas suivis par un médecin de bénéficier d’une consultation. Cela n’empêchera pas les autres visites d’avoir lieu, bien sûr, mais celle-ci sera particulière. Pourquoi faut-il la prévoir dans le cadre de la médecine du travail ? Parce que, sinon, les gens ne la feront pas.

En outre, cette mesure doit être conçue dans le cadre d’un parcours de prévention tout au long de la vie : de la même manière qu’une consultation est prévue pour les enfants à 9 mois, puis à 2 ans, nous proposons de créer une visite à 45 ans. Sans doute faudrait-il en prévoir une autre à l’adolescence. Nous essayons aussi de mettre en place une visite de prévention à 55 ans.

Mme Catherine Fabre. Je suis étonnée de ces amendements de suppression. C’est d’abord une question de respect pour les partenaires sociaux, qui ont perçu l’intérêt de l’entretien de mi-carrière puisqu’ils l’ont prévu dans l’ANI.

Concernant l’entretien lui-même, je suis d’accord avec Philippe Chalumeau : il permet une approche préventive en fournissant l’occasion de faire le point à mi-carrière – donc à un moment qui ne présente aucun risque de stigmatisation – sur les perspectives qui s’offrent au salarié, ce qui n’est pas le cas des visites prévues toutes les cinq ans, dont l’objet est plus large. Tout cela va dans le sens de ce que nous voulons : prévenir la désinsertion professionnelle et accompagner le salarié en vue de la suite de sa carrière.

M. Pierre Dharréville. Je n’entrerai pas dans le débat sur l’âge auquel on est à mi‑carrière – personnellement, je l’aurais fixé plus tôt.

Le risque est de diviser les salariés en deux catégories : les juniors, ici avant 45 ans, et les seniors ensuite. En réalité, c’est tout au long de la vie professionnelle qu’il faut prêter attention à la situation personnelle du salarié dans son environnement de travail. De ce point de vue, chaque visite – surtout maintenant qu’elle n’a plus lieu que tous les cinq ans – doit avoir la même importance. Or, en affirmant que la visite de mi-carrière doit être particulièrement importante, on sous-entend que les autres le seraient moins.

Le débat touche aussi à la question de la pénibilité, qui mériterait une autre discussion.

Enfin, je l’ai dit en commençant, je tiens compte du débat qui a eu lieu entre les partenaires sociaux, lesquels, au demeurant, n’étaient pas unanimes – il faut toujours le rappeler –, mais je ne m’interdis pas de discuter des propositions qui en sont issues ; sinon, nos échanges n’auraient pas lieu d’être. Puisque je suis là, je me permets de donner mon avis !

Mme la présidente Fadila Khattabi. Bien sûr, et le débat est intéressant.

Mme Michèle de Vaucouleurs. La visite de mi-carrière aurait l’intérêt de permettre de sortir du cadre habituel des visites médicales, notamment par l’exploration du parcours professionnel antérieur d’un salarié qui aurait changé plusieurs fois d’entreprise.

Mais l’alinéa 6 de l’article me pose problème. Il prévoit que l’examen médical vise à « évaluer les risques de désinsertion professionnelle, en prenant en compte l’évolution des capacités du travailleur en fonction de son parcours professionnel passé ». Or le médecin n’a pas nécessairement accès aux informations concernant l’ensemble de la carrière du salarié ; il ne saurait donc être tenu responsable de leur ignorance lorsqu’il procède à son évaluation. De ce point de vue, le dispositif me semble risqué.

Un examen médical supplémentaire est toujours une chance pour le salarié. Mais, en ce qui concerne son contenu, mieux vaudrait suivre l’avis du Conseil d’État en proposant, en vue de la séance, une autre rédaction qui ne le définisse pas aussi précisément et en renvoie le détail à un décret en Conseil d’État.

Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe. Les rendez-vous fixés à l’avance sont importants, surtout en médecine préventive. En effet, la prévention ne faisant pas partie de notre culture, elle risque de passer à l’as si l’on compte sur l’initiative du patient. Il ne me semble donc pas du tout stigmatisant de prévoir des rendez-vous forts, consacrés à un thème particulier et destinés à tout un chacun. Cela ferait prendre conscience du fait que ce n’est pas parce que l’on est malade qu’on consulte, mais pour prendre soin de sa santé – ici, de sa santé au travail. D’autant que la démarche était consensuelle parmi les partenaires sociaux.

Mme Caroline Fiat. C’est vrai, la prévention au travail, c’est important : pour que les salariés ne mettent pas leur santé en péril au travail, donnons-leur donc des conditions de travail dignes.

Cela fait trois ans et demi que je vous soûle avec les conditions de travail des soignants. Elles sont telles que l’entretien de mi-carrière prévu à 45 ans va se conclure ainsi : « Vous souffrez de troubles musculo-squelettiques, ciao ! » Dans les EHPAD, il y a un lève‑malade au bout de chaque couloir ; mais comme vous demandez aux soignants de faire vingt toilettes dans la matinée, il prend la poussière, parce que l’utiliser demande trop de temps. Soit on fait des toilettes un peu plus longues sans utiliser le lève-malade, soit on l’utilise pour prendre soin de notre colonne vertébrale, mais on fait moins de toilettes. Devinez qui prend : notre colonne vertébrale ! Prévoyez des ratios plus corrects entre soignants et résidents, de meilleures conditions d’exercice, et vous pourrez organiser cette visite. Désolée de ne citer que cet exemple, mais je parle de ce que je maîtrise.

De plus, la mesure est stigmatisante – je n’ai encore que 44 ans, mais l’année prochaine, je vais prendre cher… Et quelles sont les perspectives de carrière d’une aidesoignante de 45 ans à qui vous allez annoncer qu’elle ne peut plus faire son travail ? À moins que vous ne m’annonciez que l’an prochain, quand j’aurai 45 ans, le plein emploi régnera en France et que j’aurai l’embarras du choix pour trouver un nouvel emploi… Mais on en est loin ; sans compter que, l’an dernier, vous vouliez me faire travailler jusqu’à 67 ans ! On ne vit pas dans le même monde ! Je le répète, c’est du grand n’importe quoi.

Mme la présidente Fadila Khattabi. Vous ne nous soûlez pas, madame Fiat ; nous ne sommes jamais ivres, à l’Assemblée nationale !

Mme Jeanine Dubié. Systématiser la visite crée un risque de stigmatisation. Comme le disait Pierre Dharréville, cela donne l’impression qu’après 45 ans on rencontre nécessairement des difficultés au travail, qu’on y est moins performant.

Cela dit, si vous me permettez ce trait d’humour, la visite permettrait de diagnostiquer la CMV, la crise du milieu de vie, qui, souvent, ne se manifeste pas seulement au travail…

M. Bernard Bouley. La visite de mi-carrière répond à une demande appuyée des partenaires sociaux. En outre, elle permet d’anticiper la fin de la carrière. Le problème est sa faisabilité : alors que nous manquons de médecins du travail, avec 15 millions de salariés, il faudrait prévoir 400 000 à 500 000 visites par an. Il est dommage, dans ce contexte, de devoir en passer systématiquement par le médecin du travail alors que des surveillances légères peuvent être assurées par des infirmières.

Mme Valérie Six. Je comprends très bien l’importance de la prévention et la nécessité de travailler en amont à l’adaptation du poste en référence au métier, donc l’intérêt de l’accord de branche. Mais je ne peux pas admettre que l’on fixe un âge pour cette démarche. Tel est le sens de mon amendement, que je réécrirai pour le clarifier sur ce point, puisqu’il va certainement être rejeté. Je comprends l’intérêt de l’article, mais c’est sa rédaction qui me perturbe. Car on y retrouve la stigmatisation par l’âge, comme nous le voyons dans le cadre de la mission relative au maintien des seniors dans l’emploi sur laquelle nous travaillons actuellement.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. Aucun des partenaires sociaux n’a souhaité une stigmatisation par l’âge : ils ont voulu construire des solutions pour lutter contre la désinsertion professionnelle et anticiper les effets des risques pouvant être liés à l’activité professionnelle.

Le seuil retenu suscite l’interrogation, comme souvent en matière de seuils. Voilà pourquoi, au-delà de ce que prévoyait l’ANI, nous avons introduit la notion d’accord de branche pour résoudre ce problème par l’adaptation des mesures aux types de métier, aux parcours de carrière, dont certains débutent plus tôt que d’autres, et aux conditions de travail.

Je comprends très bien les remarques formulées à ce sujet, mais il nous faut un repère permettant d’engager les entretiens de mi-carrière et d’en organiser la tenue au sein des services de santé au travail. En effet, comme l’a rappelé M. Bouley, le volume de visites à prévoir – plutôt 350 000 par an selon mes estimations – est très élevé et il faut pouvoir anticiper l’afflux de salariés. D’où la nécessité de fixer un âge, même si des aménagements de branche sembleraient intéressants.

La commission rejette les amendements.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS414 des rapporteures.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS257 de M. Stéphane Viry.

M. Stéphane Viry. Je me réjouis du rejet des amendements de suppression, car la visite de mi-carrière faisait l’objet d’un accord des partenaires sociaux. Se pose maintenant la question, soulevée par M. Bouley, de la capacité médicale à assurer cette prestation supplémentaire alors que l’on manque de médecins du travail et que l’évolution de la démographie médicale ne va pas permettre de résoudre le problème. N’est-ce pas l’occasion de mettre en avant les infirmiers en pratique avancée (IPA) en les autorisant à accomplir l’acte, sous le contrôle, évidemment, d’un médecin du travail ?

Mme Carole Grandjean, rapporteure. Je ne suis pas opposée à ce qu’un IPA réalise la visite de mi-carrière à la place d’un médecin du travail. Mais le dispositif que vous proposez à cette fin n’apporte pas suffisamment de garanties : vous ne précisez pas que les IPA ne pourront pas suggérer des mesures d’aménagement du poste ou des horaires, ce que seul un médecin du travail peut faire aux termes de l’article L. 4624-3 du code du travail ; vous ne prévoyez pas la possibilité pour l’IPA d’orienter le travailleur vers le médecin du travail.

Je vous invite donc à retirer votre amendement pour le retravailler en vue de la séance.

L’amendement est retiré.

La commission est saisie de l’amendement AS331 de M. Thierry Michels.

M. Thierry Michels. Dans le droit-fil des dispositions que nous avons adoptées au sujet du référent handicap, notre amendement vise à lui faire jouer un rôle important dans la visite de mi-carrière, essentielle pour dresser un bilan et permettre à l’intéressé de se projeter dans sa seconde partie de carrière. À cette fin, si le travailleur handicapé l’y autorise, le référent handicap, chargé d’appliquer la politique de l’entreprise en matière de handicap et parfaitement au fait des conditions de travail et de l’évolution des métiers, pourrait communiquer des éléments au médecin du travail dans ce cadre.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. Je salue votre détermination à faire place à l’accompagnement des travailleurs en situation de handicap. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements AS415, de cohérence, ainsi qu’AS416 et AS417, rédactionnels, des rapporteures.

Elle examine ensuite l’amendement AS52 de M. Stéphane Viry.

M. Stéphane Viry. Il tend à mettre le médecin du travail en lien avec la nouvelle cellule de prévention de désinsertion professionnelle en vue des aménagements du poste ou du temps de travail qui peuvent être proposés au salarié.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. L’idée est intéressante, mais la proposition présente une faiblesse : le dispositif ne pourrait s’appliquer que dans les services de santé interentreprises puisque les services autonomes ne comprendront pas nécessairement ce type de cellule. Je ne suis pas favorable à ce que l’on prévoie un mécanisme qui ne serait qu’à moitié opérant.

M. Stéphane Viry. Vous chipotez, c’est dommage !

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS418 et AS419 des rapporteures.

Suivant l’avis défavorable de Mme Carole Grandjean, rapporteure, elle rejette ensuite l’amendement AS51 de M. Stéphane Viry.

Puis elle est saisie de l’amendement AS420 des rapporteures.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. L’article L. 4624‑10 du code du travail dispose que les conditions d’application des mesures du chapitre dans lequel figure la visite de mi-carrière sont précisées par décret en Conseil d’État. Il n’apparaît donc pas nécessaire de conserver l’alinéa 9.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 16, modifié.

Article 17 : Amélioration du suivi de l’état de santé de certains salariés et extension de ce suivi à de nouvelles catégories de travailleurs

La commission est saisie de l’amendement AS219 de Mme Caroline Fiat.

Mme Caroline Fiat. Il vise à permettre aux intérimaires, salariés d’entreprises sous‑traitantes ou prestataires, d’être suivis par le service de prévention et de santé au travail de l’entreprise utilisatrice ou donneuse d’ordre.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. Nous partageons entièrement votre souhait que davantage de travailleurs soient suivis par les services de santé au travail, mais nous ne souhaitons pas nous écarter de l’ANI sur ce point. Or les partenaires sociaux ont voulu ouvrir une possibilité à ces services, non les contraindre à suivre un public qu’ils ne souhaitent pas ou ne peuvent pas encore accompagner.

Par ailleurs, peut-être le dispositif que vous proposez est-il trop rigide. Ainsi, si les travailleurs temporaires étaient nécessairement suivis par l’entreprise utilisatrice disposant de son propre service de santé au travail, cela voudrait dire qu’ils ne peuvent l’être par le service de santé au travail de leur entreprise ; or on ne peut exclure que, dans certains cas, cette solution soit la plus adaptée à leurs besoins.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS289 de Mme Michèle de Vaucouleurs.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Il tend à permettre aux salariés de l’ensemble des structures pouvant mettre du personnel à disposition d’une entreprise utilisatrice de bénéficier d’un suivi par le service de prévention et de santé au travail de cette dernière. Sont particulièrement visés les salariés des structures d’insertion par l’activité économique ou des établissements et services d’aide par le travail.

L’article 17 mentionne certes la possibilité d’une convention entre l’entreprise utilisatrice et l’entreprise de travail temporaire ou le service de prévention et de santé au travail dont les salariés relèvent, mais cette formulation exclut les associations intermédiaires qui mettent du personnel à disposition dans les mêmes conditions que les entreprises de travail temporaire d’insertion. D’où la rédaction que je propose.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. L’article du code du travail que votre amendement tend à modifier ne correspond pas à l’objectif que vous visez, puisqu’il ne concerne lui-même que les entreprises de travail temporaire. Surtout, votre amendement est satisfait par le 3° de l’article 17, aux termes duquel l’ensemble des travailleurs pourront être suivis par le service de santé au travail de l’entreprise sur le site de laquelle ils exercent.

Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Je vais le retirer, mais je vérifierai s’il est bien satisfait par l’alinéa 8 auquel vous faites référence, car je n’en étais pas convaincue au moment où je l’ai rédigé.

L’amendement est retiré.

La commission est saisie de l’amendement AS421 des rapporteures.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. Il tend à supprimer la possibilité pour l’entreprise utilisatrice de conclure directement une convention avec le service de prévention et de santé au travail dont relèvent les salariés de l’entreprise de travail temporaire. Il ne nous paraît pas souhaitable que cette dernière puisse être exclue de la négociation.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS422 des rapporteures.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. En partie inspiré de l’avis du Conseil d’État, il clarifie la rédaction du dispositif relatif à la prise en charge des travailleurs indépendants.

En l’état, la lecture combinée des deux alinéas du futur article L. 4621-2-1 du code du travail pourrait laisser penser que ces travailleurs auraient accès non seulement à une offre spécifique de service en matière de prévention, de suivi individuel et de prévention de la désinsertion professionnelle, mais également à d’autres prestations de la part des services de prévention et de santé au travail interentreprises. Aussi le premier alinéa est-il réécrit pour préciser que les travailleurs indépendants ont la possibilité de s’affilier aux services de prévention et de santé au travail interentreprises de leur choix.

Par ailleurs, l’amendement renvoie à un décret le soin de déterminer les modalités d’application du dispositif.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, les amendements AS179 de M. Pierre Dharréville et AS354 de Mme Catherine Fabre tombent.

La commission est saisie de l’amendement AS423 des rapporteures.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. Lui aussi très inspiré de l’avis du Conseil d’État, il précise le suivi dont il est question au premier alinéa du futur article L. 4622-5-1 du code du travail en spécifiant qu’il concerne l’état de santé des travailleurs. Ce suivi pourra être réalisé par le service de prévention et de santé au travail de l’entreprise sur le site de laquelle les travailleurs exercent leur activité.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS425 et AS426 des rapporteures.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS187 de Mme Valérie Six.

Mme Valérie Six. Conformément à l’ANI, l’article prévoit la signature d’une convention permettant au service de santé et de prévention au travail propre à une entreprise d’assurer le suivi médical des intérimaires, des travailleurs, salariés ou non, qui exercent leur activité dans cette entreprise, des salariés d’entreprises sous‑traitantes ou prestataires d’entreprises extérieures.

L’amendement vise à préciser qu’ils peuvent en bénéficier lorsqu’ils exercent sur le site une activité d’une durée déterminée par accord de branche ou d’une durée minimale d’un mois. Il s’agit de promouvoir la négociation collective au niveau de la branche professionnelle ou, à défaut, de prévoir une relation de travail d’au moins un mois. Il est préférable, en effet, de déterminer les règles qui régissent la relation de travail par le dialogue social chaque fois que c’est possible, car cela contribue à leur légitimité et à leur adaptation au secteur concerné.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. En effet, la négociation permet l’adhésion des acteurs et facilite probablement la mise en œuvre des règles négociées. Ici, toutefois, le renvoi au décret est préférable – dans certaines branches, les négociations sont peu développées et l’accord difficile à obtenir.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS427 des rapporteures.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. Suivant l’avis du Conseil d’État, il a pour objet de préciser que la prévention des risques professionnels auxquels sont exposés les salariés s’inscrit dans le cadre des missions confiées aux services de santé au travail par la loi.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 17, modifié.

Après l’article 17

La commission est saisie des amendements identiques AS7 de M. Thibault Bazin, AS14 de M. Patrick Hetzel et AS222 de Mme Josiane Corneloup.

M. Thibault Bazin. Conformément à la volonté exprimée par les partenaires sociaux dans l’article 3.1.2.2 de l’ANI, nous proposons par les amendements AS7 et AS222 de mutualiser et de simplifier le suivi médical dans les entreprises employant des salariés multi-employeurs. Le fait qu’un salarié occupant des postes identiques au sein de plusieurs entreprises doive être suivi par chacune d’entre elles crée de la complexité, de nombreuses contraintes d’organisation et entraîne parfois des visites inutiles.

M. Bernard Perrut. L’amendement AS14 est défendu.

Mme Carole Grandjean, rapporteure. Le sujet a suscité plusieurs amendements et a été abordé dans nos discussions préparatoires.

Les préoccupations de nos collègues sont tout à fait légitimes, mais je m’interroge sur la pertinence de l’inscription dans la loi d’une disposition de cette nature, plutôt d’ordre réglementaire. Un dispositif équivalent existe d’ailleurs déjà pour les salariés du particulier employeur : un accord-cadre interbranches du 24 novembre 2016, étendu par arrêté du 4 mai 2017, prévoit en son article 5.2.1 que le suivi de l’état de santé de ces salariés est réalisé au bénéfice de tous les particuliers employeurs. Ils effectuent donc une seule visite par type de suivi pratiqué – visite d’information et de prévention, suivi périodique, visite de reprise –, quels que soient le nombre d’employeurs et le nombre d’emplois, dans la limite de trois.

Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

M. Thibault Bazin. Je vous propose que nous en débattions dans l’hémicycle afin de connaître les intentions du Gouvernement à ce sujet et l’éventuel calendrier de l’introduction sous forme réglementaire d’une telle disposition, très attendue dans nos territoires. Pour prendre date et vu l’importance du sujet, je maintiens mon amendement.

La commission rejette les amendements.

 

 

 

 

La séance est levée à treize heures.